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Version finale

37e législature, 1re session
(4 juin 2003 au 10 mars 2006)

Le lundi 6 décembre 2004 - Vol. 38 N° 69

Étude détaillée du projet de loi n° 61 - Loi sur l'Agence des partenariats public-privé du Québec


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Table des matières

Journal des débats

(Douze heures une minute)

Le Président (M. Paquin): À l'ordre, s'il vous plaît! Je déclare la séance de la Commission des finances publiques ouverte. Avant de commencer, je demanderais à ceux et celles qui ont des cellulaires et même le président, bien entendu, de bien vouloir les éteindre ou mettre la sonnerie au minimum.

La commission est réunie afin d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 61, Loi sur l'Agence des partenariats public-privé du Québec.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Bertrand (Charlevoix) est remplacé par M. Turp (Mercier) et M. Legault (Rousseau) est remplacé par M. Simard (Richelieu) pour la durée du mandat.

Le Président (M. Paquin): Merci, Mme la secrétaire.

Motion proposant d'entendre
la Commission d'accès à l'information (suite)

Lors de l'ajournement de nos travaux de la dernière séance, on était à l'étude d'une motion préliminaire présentée par le député de Gaspé. La motion se lisait comme suit:

«Que la Commission des finances publiques tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 61, Loi sur l'Agence des partenariats public-privé du Québec, des consultations particulières quant à tous les articles dudit projet de loi ainsi qu'à tous les amendements déposés par la ministre et qu'à cette fin elle entende la Commission d'accès à l'information.»

M. le député de Richelieu.

M. Sylvain Simard

M. Simard: Merci, M. le Président. Alors, à mon tour d'intervenir sur cette motion de mon collègue le député de Gaspé. Vous avez rappelé, n'est-ce pas, le libellé de cette motion qui vise à appeler devant nous la Commission d'accès à l'information de façon à ce qu'elle nous explique ses réactions à l'égard des projets, du projet d'amendement déposé par la présidente du Conseil du trésor. Ces projets d'amendements, nous les avons lus. Pour notre part, ils ne nous semblent en aucune façon, je dis bien «en aucune façon», répondre adéquatement aux interrogations posées par la Commission d'accès à l'information. À peu près sinon tous les doutes qu'avait soulevés la Commission d'accès à l'information se maintiennent, sont toujours d'actualité, puisque le projet de loi prend pour acquis que la loi ne peut pas changer, n'est pas changée, donc les partenariats public-privé eux-mêmes échapperont à l'autorité de la Commission d'accès à l'information.

Alors, je vais essayer, au cours des prochaines minutes, M. le Président, d'expliquer pourquoi selon nous la Commission d'accès à l'information devrait être entendue. Si certains collègues qui étaient avec nous vendredi soir peuvent trouver que l'argumentation que je déploierai devant vous ressemble, en partie du moins, à ce que j'ai déployé lorsque j'essayais d'expliquer lors d'un autre projet de loi... qu'ils ne s'en étonnent pas: il s'agit en effet d'ouvrir la commission à l'une des commissions les plus importantes de l'Assemblée nationale, la Commission d'accès à l'information.

Je vous rappelle, M. le Président, vous le savez, mais que la Commission d'accès à l'information fait partie de ces grandes institutions créées par la loi dont la loi elle-même, mais de nature quasi constitutionnelle, c'est-à-dire elle a préséance sur les autres lois. Un peu comme une charte, la loi d'accès à l'information est une loi très, très importante, tellement importante que, cette commission, son président est nommé par l'Assemblée nationale, dépend de l'Assemblée nationale, c'est aux deux tiers des membres de l'Assemblée nationale que le président de la Commission d'accès à l'information est nommé.

Pourquoi avoir donné une telle place à cette commission et à cette loi d'accès à l'information? La commission nous le rappelait dans son témoignage, et vous me permettrez, M. le Président, de m'y référer. La loi d'accès à l'information, elle a été adoptée en 1982, ça fait 22 ans maintenant, et ça s'appelle la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels. Donc, double aspect à cette loi: protection des renseignements personnels, protéger les citoyens et leurs renseignements des intrusions qui pourraient être faites par l'État ou par tout autre groupe, mais aussi, et c'est l'autre aspect de la même loi, permettre aux citoyens, aux citoyens directement, par une demande, soit aux journalistes qui sont là pour aussi informer les citoyens, donc demander accès à l'information, soit les députés...

À propos des journalistes, je souligne que ce dernier week-end, cette dernière fin de semaine, les journalistes étaient réunis. En fait, leur fédération professionnelle tenait un congrès dont le thème était justement l'accès à l'information, et ils ont eu le dépôt d'un rapport qu'ils avaient commandé à certains de leurs membres, et ils en ont discuté, sur l'accès à l'information. Et la conclusion qu'ils en ont tirée... on ne doit pas d'ailleurs s'étonner, quand on voit le type, le genre de projet de loi que nous sommes appelés à étudier ici, quand on se rend compte nous-mêmes, comme députés de l'opposition, de l'extrême difficulté sinon de l'impossibilité dans beaucoup de cas d'avoir accès à l'information, qu'il y a actuellement une situation devenue dangereuse pour l'accès à l'information.

Une voix: Inquiétante.

M. Simard: Et inquiétante, en tout cas. Dans certains cas, on a passé le stade de l'inquiétude, puisque déjà il y a des effets déplorables à ce manque d'accès à l'information.

Je vous rappelle un petit peu le contenu de cette loi à nouveau. Les ministères, les organismes gouvernementaux, les municipalités et tous les organismes qui en relèvent, les institutions d'enseignement, les établissements du réseau de la santé, les services sociaux, tout le monde normalement est assujetti à l'application de la Loi sur l'accès.

Comment ça fonctionne? L'article 9 énonce la règle générale. La règle générale est très importante et doit d'ailleurs... nous devons toujours l'avoir en mémoire lorsque nous évaluons ce projet de loi. L'article 9: «Toute personne qui en fait la demande a droit [...] aux documents d'un organisme public.» Toute personne. La règle, c'est: toute personne. Donc, dès qu'un organisme est soumis à l'accès à l'information, normalement, et c'est ça qui serait l'idéal, normalement tous les citoyens peuvent avoir accès à l'information. Vous comprendrez bien que cette loi comprend des restrictions. Hein, la règle générale est là, mais les exceptions viennent ensuite. On peut comprendre que certaines restrictions existent, on peut comprendre, par exemple, que le gouvernement qui fait faire des études, qui évalue des hypothèses, des options, puisse retenir pendant un certain temps l'information, le temps qu'il ait pris ses propres décisions de façon à ce qu'il puisse le faire avec le minimum de liberté. On comprend ces choses-là. On comprend que certains secrets, certaines réalités liées au monde de la compétition rendent parfois plus complexe l'accès à l'information et qu'il faut baliser certaines choses.

Seule une exception énoncée expressément dans la Loi sur l'accès permet de passer outre donc à cette règle générale de l'article 9. S'inspirant du fameux rapport Paré, à la fin des années soixante-dix... le rapport Paré, c'est en 1981 qu'il avait été déposé, la Commission d'étude sur l'accès du citoyen à l'information gouvernementale et sur la protection des renseignements personnels. Alors, s'inspirant de ce rapport et de nombreuses consultations menées auprès des intéressés au début des années quatre-vingt, le législateur a inscrit à la loi des restrictions qui permettent de protéger certains renseignements ayant des incidences sur les relations intergouvernementales ? c'est bien normal, il ne faut pas saboter des négociations en rendant, nous, publics des documents que l'autre partie ne rendrait pas publics, on peut très bien comprendre ça ? les négociations entre organismes publics, l'économie, l'administration de la justice, la sécurité publique, les décisions administratives ou politiques et la vérification.

n(12 h 10)n

Tout comme plusieurs autres dispositions de la Loi sur l'accès, l'article 9, donc l'article général, a un caractère prépondérant sur toutes les lois, c'est ce que je disais tout à l'heure, c'est une loi de nature quasi constitutionnelle. Pour restreindre l'accès à un document autrement que de la manière qui est autorisée par la Loi sur l'accès, une loi particulière doit donc introduire une disposition qui mentionnera expressément que la restriction à l'accès à un document s'applique malgré la loi sur l'accès à l'information.

Alors, même si le projet de loi n° 61 n'introduit aucune disposition de ce type, donc disposition dérogatoire, même si, en apparence, nous pourrions croire que l'article 9 s'applique, bien, la Commission de l'information est venue nous apprendre que ce n'était pas le cas ? hein, ce n'est pas le cas ? parce qu'il est difficile de conclure qu'il y aura statu quo au chapitre de l'accès à l'information. En effet, un transfert de responsabilités ? parce que c'est ça, la loi n° 61 ? un transfert de responsabilités d'un organisme public clairement assujetti à la loi vers une entreprise privée sur qui reposent des obligations de transparence aux contours incertains risque de soulever de nombreuses interrogations reliées à l'application ou à l'interprétation des règles d'accès à l'information.

En d'autres mots, aujourd'hui, lorsque nous demandons, dans des dizaines de dossiers, l'accès à certains documents, la réponse que nous recevons des ministères est invariablement la même lorsqu'il y a un tiers privé lié à cette communication. Lorsqu'il y a un tiers privé, c'est-à-dire lorsque l'information que nous demandons est considérée comme ne devant pas être divulguée par le tiers, à ce moment-là l'information est retenue, n'est pas divulguée. Donc, les organismes gouvernementaux peuvent bien avoir l'obligation de divulguer l'information, mais les tiers impliqués ? on parle ici des tiers, normalement ce sont des entreprises privées signataires des partenariats public-privé, puisqu'il s'agit bien de cela ici ? ces entreprises privées ne seraient pas soumises à l'accès à l'information. Mais plus que ça, tous les renseignements qui contiennent des éléments qui pourraient être considérés par ladite entreprise privée comme pouvant inférer sur son droit à maintenir le secret industriel pourraient être un élément qui puisse affecter sa compétitivité par rapport à d'autres entreprises, et des dizaines d'autres raisons liées à la nature même de l'entreprise privée feraient en sorte que la Commission d'accès à l'information, malgré le droit du public, malgré l'article 9, n'aurait pas accès à ces documents. C'est cela, la base essentielle du mémoire de la Commission d'accès à l'information, tel qu'elle est venue nous le communiquer ici, à cette commission.

La question qui se pose, et c'est pour cela que nous demandons à réentendre la commission: Puisque la ministre a déposé des amendements, est-ce que ces amendements permettent de répondre à ces questions? Est-ce que, à partir des amendements de la ministre, nous, parlementaires, pouvons être rassurés: il n'y aura pas de possibilité d'échapper à la loi d'information, le public aura accès à l'information ou ? malheureusement, c'est ce qu'il nous faut conclure à la lecture des amendements... En tout cas, on aurait aimé, nous aimerions, et j'espère encore que la commission, les membres de la commission, je pense notamment au député de Hull, je pense qu'il nous écoute attentivement, je pense qu'il comprendra tellement cette nécessité que, lui-même, il interviendra bientôt pour appuyer notre demande et s'assurer que ses électeurs de la région de l'Outaouais comme les électeurs, comme les citoyens de tout le Québec auront la certitude, grâce à la comparution de la Commission d'accès à l'information, que ce projet de loi répond aux interrogations fondamentales d'une société démocratique, c'est-à-dire là où l'information est libre, là où l'information est disponible, là où l'information peut être toujours à la portée des citoyens.

Vous savez, jamais peut-être dans l'histoire l'accès à l'information n'a-t-elle été autant compromise et en même temps aussi nécessaire au développement harmonieux d'une société démocratique. Ce n'est pas une chose légère que j'affirme ici. Le député de Verdun, qui a préparé un long document sur le gouvernement en ligne, sur les questions touchant notamment la sécurité informatique, sait à quel point l'information, l'accès à l'information et son corollaire presque, son pendant nécessaire, la protection des renseignements personnels, le député de Verdun comme nous tous ici savons très bien que c'est peut-être plus que jamais l'un des enjeux les plus importants de nos sociétés.

Or, l'État et ses composantes, je vous le rappelle, l'État est celui qui est le plus important dépositaire d'informations. L'information n'est pas... Il n'y a pas que l'État, hein? Si vous ouvrez votre portefeuille ou votre porte-documents, vous allez découvrir que, par l'intermédiaire de vos cartes de crédit, par l'intermédiaire de vos activités informatiques et électroniques dans le domaine financier, vous savez tous que des foules, des milliers d'informations circulent sur les citoyens et sont accessibles à certains. Il y a évidemment un encadrement extrêmement rigoureux quant à l'accès à ces informations, mais nous vivons dans un monde d'information. Mais celui qui en détient plus que tout le monde, celui qui est la banque d'informations la plus complexe, la plus générale, la plus complète dans notre société, c'est le gouvernement. L'accès donc à ces informations est indispensable pour assurer une pleine participation aux activités de la société et maintenir le caractère démocratique de nos institutions.

Plusieurs manifestations de la démocratie d'ailleurs sont largement tributaires de l'information détenue par l'État. L'exercice du droit de vote, évidemment, dans le choix de nos dirigeants ? nous qui sommes des élus en savons quelque chose ? la reddition de comptes de l'Administration publique ? toute la Loi de l'administration publique que nous avons fait voter en 2000 est fondée sur la reddition de comptes, il n'y a pas de reddition de comptes sans capacité d'avoir accès à toute l'information nécessaire ? voire même la liberté d'expression, la liberté d'opinion, la liberté de presse, tout cela ne serait que des coquilles vides si les citoyens ne pouvaient s'appuyer sur une information de qualité. Transparence et démocratie, M. le Président, vous le savez, vont de pair.

La transparence a souvent d'ailleurs été décrite comme comprenant des élections libres, des tribunaux libres, des lois claires et une presse libre. Le droit à l'information, et c'est là-dessus que les membres de la Fédération professionnelle des journalistes, en fin de semaine, ont beaucoup appuyé, et c'est sur la base de cette réalité qu'ils ont dénoncé la situation actuelle, dénoncé le fait que l'accès à l'information est maintenant réduite par un contrôle politique de moins en moins acceptable dans notre société. Ils ont dénoncé très fermement depuis 18 mois l'action du gouvernement visant à encadrer l'information, visant à rendre moins accessible l'information. Et ce n'est pas un parti d'opposition, ce sont les journalistes qui l'ont dit. Ils ont d'ailleurs indiqué que c'était illégal et que, dans l'appareil d'État, certains ministères étaient particulièrement opaques, particulièrement difficiles à la détente lorsqu'il s'agissait de céder, de rendre accessibles des informations.

Je pourrais ici vous mentionner que ce droit à l'information a été, par la Cour suprême, déclaré... à la base de notre système démocratique. C'est tout le jugement de Dagg versus Canada, qui, en 1997, concernant le ministère des Finances, a ouvert encore davantage le droit à l'accès à l'information en le présentant comme étant fondamental à l'exercice de la démocratie. «Ni le Parlement ni le public ? disait la Cour suprême ? ne sauraient espérer demander au gouvernement de rendre [des comptes] s'ils n'ont pas une connaissance suffisante de ce qui se passe; ils ne peuvent pas non plus espérer prendre part au processus décisionnel ni contribuer à l'établissement des politiques générales et des lois si ce processus est tenu secret.» La santé de la démocratie est donc largement tributaire du droit d'accès à l'information.

n(12 h 20)n

Ainsi, la Charte des droits et libertés, par exemple, reconnaît que toute personne est titulaire d'un certain nombre de droits, mais, parmi ces droits, il y a celui du droit à l'information. Pour exercer ces droits, il faut l'information. Vous pouvez avoir toutes les lois, les meilleures lois du monde concernant l'environnement, concernant la santé; si les citoyens ne peuvent pas avoir accès à cette information, ce droit ne peut pas être exercé. Donc, les droits fondamentaux tels que décrits par la Charte des droits et libertés sont des droits qui exigent, qui nécessitent l'accès à l'information.

Le problème avec la loi qui nous est présentée, avec la loi n° 61, c'est qu'elle ne permet pas cet accès. À plusieurs étapes essentielles de ce qui devrait être une transparence complète, il y a des éléments qui font en sorte que la Commission d'accès à l'information s'est déclarée extrêmement inquiète par ce projet de loi, comme la Protectrice du citoyen s'est déclarée inquiète, comme le Commissaire au lobbyisme s'est déclaré inquiet, comme des dizaines de groupes dans notre société se sont déclarés inquiets.

Est-ce que la Loi d'accès ? hein, c'est la question qui nous est posée ? est-ce que la Loi d'accès permet d'assurer la transparence des partenariats public-privé? La Loi d'accès trace les contours, je le rappelle, du droit à l'information en ayant comme point de repère le fait que les obligations de transparence reposent sur les organismes publics. Mais, si la prestation d'un service ou le renouvellement d'une infrastructure... Prestation de services, la Commission d'information a bien vu, elle le met d'ailleurs en premier, a bien vu, à la lecture de la loi n° 61, qu'il s'agit d'instaurer des partenariats privé-public dans le domaine des services. Alors, même si la prestation d'un service ou le renouvellement des infrastructures impliquent une étroite collaboration entre le secteur privé et le secteur public, ne serait-il pas approprié, s'interrogeait la commission devant nous, de réfléchir aux règles de transparence et d'accès à l'information qui devraient prévaloir?

Et la Commission d'accès à l'information partageait l'opinion émise par trois éthiciens de l'École nationale d'administration publique, Mme Allison Marchildon, M. Yves Boisvert, que j'ai eu l'occasion de citer à quelques reprises, M. Serge Lafontaine, dans un article, Les défis éthiques et juridiques des partenariats public-privé, publié par l'Observatoire de l'administration publique. Alors, ces auteurs disaient:

«Les contrôles de la transparence dans l'élaboration de la norme, comme la consultation et la supervision politique et administrative, ou ceux visant l'imputabilité, ont été conçus ? ont été conçus ? pour un processus décisionnel principalement interne à l'organisation étatique.

«Lorsque l'élaboration de la norme et son application sont contractées ou déléguées, en tout ou en partie, à des personnes ou à des organisations privées, les formes traditionnelles des contrôles parlementaire, administratif ou même judiciaire doivent être réévaluées.»

Je pense que nous avons là, dans la citation de Mme Marchildon, M. Boisvert et M. Lafontaine, l'essentiel, la moelle, la substantifique moelle de cette réalité, de ce doute qu'émettait la Commission d'accès à l'information sur la capacité des citoyens, dans le cadre des partenariats public-privé, d'avoir accès à l'information. C'est très grave, hein, c'est...

Je le dis ce matin, là, évidemment nous sommes dans le cadre d'une motion que j'essaie de défendre, mais je voudrais rendre mes collègues sensibles à cette réalité, ces partenariats public-privé qui vont affecter les services, les infrastructures, qui vont sans doute au cours des années, si nous n'y mettons pas un frein, déterminer comment des milliards de dollars sont dépensés, comment des services publics atteignant des millions... concernant des millions de personnes sont rendus, ces services, ces informations concernant ces services et ces contrats ne seront pas accessibles au public en suivant la loi actuelle de l'information, ne seront pas accessibles au public. Rien dans les amendements de la ministre ne vient d'ailleurs corriger cela. Les organismes internes, oui, les organismes, l'agence, les ministères. Mais tous les contrats qui impliquent des rapports... Je vous rappelle: «Lorsque l'élaboration de la norme et son application sont contractées ou déléguées, en tout ou en partie, à des personnes ou à des organisations privées, les formes traditionnelles des contrôles parlementaire, administratif ou même judiciaire doivent être réévaluées.» La loi actuelle ne permet pas, dans son état, de faire face à ce nouveau défi. C'est cela qu'on nous dit.

Le projet de loi n° 61 crée peu de limites en ce qui concerne les responsabilités ou pouvoirs qui pourront faire l'objet d'un partenariat. L'article 13 ? nous rappelait la commission ? de ce projet de loi précise qu'un organisme public partie à un contrat de partenariat peut déléguer à un partenaire l'exercice de toute fonction ou de tout pouvoir autre que réglementaire requis pour l'exécution du contrat. Cet organisme public peut même, conformément à l'article 15 du projet de loi, autoriser le partenaire à déléguer, lui aussi, toute fonction ou tout pouvoir. C'est tout ce pouvoir de délégation, que nous avons soulevé à plusieurs reprises lors des auditions, qui présente cet aspect extrêmement inquiétant. Vous déléguez à un organisme un pouvoir, qui lui-même le délègue à un organisme. Comment voulez-vous que l'imputabilité puisse se jouer? Mon collègue professeur de droit, à ma gauche, le député de Mercier, se rappellera ce vieux principe du droit qui veut que delegatus non potest delegare. Ici, nous le voyons bafoué, ce principe fondamental, tout au long du projet de loi, puisque l'on crée constamment des organismes qui recevront la délégation.

Mais, au-delà même de cette délégation par filiales, par... justement, l'extension par le principe de délégation, il y a cette réalité encore plus fondamentale et... Il me reste combien de temps, M. le Président?

Le Président (M. Paquin): Quatre minutes et demie environ.

M. Simard: Quatre minutes. Je voudrais tout de suite arriver à cette réalité plus fondamentale et, vous l'aurez compris, aux articles 23 et 24... à l'article 22, 23 et 24 de l'actuelle loi d'accès à l'information, qui, elle, est celle qui est la plus mise à mal, qui est la plus impuissante plutôt à régler la question de l'accès à l'information dans le cas des partenariats public-privé.

Ce que la commission est venue nous dire. Dans un contexte où les activités de partenariat public-privé prendront de l'ampleur, nul doute que les... ? nul doute, hein; ce n'est pas un élément secondaire, ce n'est pas une opinion, là ? nul doute que les restrictions à l'accès qui seront le plus souvent invoquées seront celles énoncées aux articles 22 à 24 de la Loi sur l'accès. Le législateur a regroupé ces restrictions dans une section de la loi dont l'objet est de protéger, dans des circonstances bien précises, les renseignements ayant des incidences sur l'économie. L'article 22, par exemple, énonce les règles applicables aux renseignements qui appartiennent aux organismes publics, alors que les articles 23 et 24 prévoient le traitement qui doit être réservé aux renseignements détenus par des organismes publics mais qui ont été fournis par des tiers.

Ainsi, conformément à l'article 22, un organisme public peut, à sa discrétion, refuser de communiquer un secret industriel qui lui appartient. Ce même article permet également de garder confidentiel un renseignement industriel, un renseignement financier, commercial, scientifique ou technique lui appartenant. Mais, pour soulever avec succès cette restriction, l'organisme public devra démontrer que le fardeau de la preuve appartient à l'organisme public qui devra démontrer que la divulgation de ce renseignement risque vraisemblablement d'avoir l'un ou l'autre des quatre effets suivants. Je vous donne les effets qui peuvent être invoqués lorsqu'il y a refus: entraver une négociation en vue de la conclusion d'un contrat; causer une perte à l'organisme; procurer un avantage appréciable à une autre personne; nuire à la compétitivité de l'organisme. Dans ce dernier cas, l'organisme qui refuse l'accès doit être constitué à des fins industrielles, commerciales ou de gestion financière.

À titre d'exemple, un organisme public pourrait décider qu'il refuse de donner accès à un renseignement financier relatif à ses activités de partenariat s'il estime que cette communication pourrait lui causer une perte.

n(12 h 30)n

La Loi sur l'accès protège également de façon particulière les renseignements détenus par des organismes publics mais fournis par des tiers. Dans le cadre de l'exercice de leurs fonctions ou parce que la loi ou un règlement les y obligent, les organismes publics sont souvent appelés à colliger des renseignements que des tiers leur fournissent à toutes sortes de fins: obtention de permis, etc.

L'article 23 de la loi prévoit qu'un organisme public doit refuser ? doit refuser ? de communiquer le secret industriel d'un tiers ou un renseignement industriel, financier, commercial, scientifique, technique, à moins que ce tiers n'y consente. C'est là tout le problème. Je termine là-dessus, M. le Président. Je vais consacrer ma conclusion à cette question.

Dans les partenariats public-privé tels que mis en place par la loi n° 61, qui n'est pas, vous l'aurez bien compris, un simple petit organisme de quelques fonctionnaires chargés de conseiller le gouvernement, auquel cas il n'y aurait pas eu besoin de projet de loi, le Secrétariat au Conseil du trésor aurait très bien pu faire ça sans problème, vous le savez bien. Si nous sommes ici, c'est pour mettre en place des partenariats public-privé et les encadrer. Eh bien, tous ces contrats de partenariat, puisqu'ils impliquent des tiers dans tous les cas, dans tous les cas sans exception, l'accès à l'information pourrait être refusé. Et n'oublions pas que cela touche les services publics sans restriction. Les services publics ici, là, la loi en aucun moment ne restreint l'application de la loi sur... à tel ou tel type de service. Tous les services publics sont possiblement, seront possiblement l'objet d'un partenariat public-privé.

M. le Président, les infrastructures, les constructions, les contrats de gestion qui vont durer pour des hôpitaux, pour des écoles, pour toutes sortes de secteurs, on entre dans un domaine nouveau extrêmement important de la société, tout cela échappera au regard du citoyen, tout ça échappera au regard du parlementaire, parce qu'il s'agit de renseignements possédés par des tiers, des renseignements liant des tiers, des renseignements où les tiers auront la possibilité d'accepter ou de refuser de donner l'information, où l'organisme public sera...

Le Président (M. Paquin): M. le député de Richelieu, je vous invite à conclure, s'il vous plaît.

M. Simard: Alors, je termine en vous remerciant, M. le Président, de votre attention, et je suis sûr que mes collègues les députés de Mirabel ou de Mercier sauront être encore plus convaincants que moi.

Le Président (M. Paquin): Merci, M. le député de Richelieu. Y a-t-il d'autres interventions sur la motion?

M. Lelièvre: Il me reste une minute...

Le Président (M. Paquin): M. le député de Gaspé, vous avez la parole. Il vous reste 1 min 5 s à peine.

M. Lelièvre: Oui, M. le Président. Alors, je vais les prendre pour tout simplement rappeler que le projet de loi...

M. Cholette: Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Paquin): Oui, M. le député de Hull.

Une voix: ...revenir.

M. Cholette: C'est ça. Est-ce que le député peut revenir après une intervention de quelqu'un d'autre, même s'il lui reste du temps? «En une seule intervention»...

Une voix: ...

Le Président (M. Paquin): Ah! c'est ça, malheureusement.

M. Simard: Par consentement, je citerai le député de Hull...

M. Lelièvre: M. le Président, je voudrais savoir une chose.

Le Président (M. Paquin): M. le député de Gaspé, oui.

M. Lelièvre: Au niveau de notre règlement, n'est-ce pas moi qui ai été interrompu le dernier, donc je n'ai pas pu reprendre?

M. Cholette: Vous n'étiez pas là au début des travaux.

M. Lelièvre: Ah! bien, écoutez, on aura tellement l'occasion de se revoir pour parler du projet de loi n° 61 que nous allons encore avoir l'occasion de redire tout ce que nous avons à dire concernant ce projet de loi, M. le Président.

Le Président (M. Paquin): Parfait, M. le député de Gaspé. Je pense que vous avez très bien compris. Donc, la parole... Est-ce qu'il y a d'autres personnes qui veulent intervenir sur la motion? Mme la députée de Mirabel? Allez-y, Mme la députée de Mirabel. Vous avez 10 minutes pour faire votre intervention.

Mme Denise Beaudoin

Mme Beaudoin: Merci, M. le Président. Alors, la motion présentée par mon collègue de Gaspé est très, très importante. Elle se lit comme suit:

«Il est proposé qu'en vertu de l'article 244 de nos règles de procédure la Commission des finances publiques tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 61, Loi sur l'Agence des partenariats public-privé du Québec, des consultations particulières quant à tous les articles dudit projet de loi et qu'à cette fin elle entende la Commission d'accès à l'information.»

La Commission d'accès à l'information, c'est un organisme qui est là pour assurer la démocratie. Alors, c'est très important que nous puissions l'entendre de nouveau.

Alors, M. le Président, j'ai le plaisir d'être membre de cette commission et j'ai entendu, pendant une dizaine de jours, une quarantaine de mémoires. Et, comme je l'ai dit auparavant, les gens qui sont venus ici, ils étaient très, très inquiets. Ils ont manifesté cette inquiétude-là en se déplaçant parfois de très, très loin. Et, dans chaque mémoire, comme je le disais... la plupart des mémoires disaient qu'ils étaient contre ce projet de loi ou ils suggéraient des amendements parce qu'ils considéraient qu'en fin de compte le Québec n'est pas à vendre. Évidemment, il y a certains mémoires qui étaient pour ce projet-là, mais c'est concernant des gens comme le Conseil du patronat, les ingénieurs, les gens qui avaient des intérêts financiers; eux, évidemment, ils étaient pour.

Et, dans tous les cas, comme je l'ai mentionné la dernière fois, la présidente du Conseil du trésor minimisait la portée du projet de loi. Elle tentait de les convaincre sans succès quand ils n'étaient pas d'accord avec ses propos. Elle leur disait qu'ils avaient mal compris le projet de loi. Elle leur disait que seuls quelques grands projets d'infrastructures seraient envisagés en mode PPP. Elle leur disait que l'agence ne serait pas là... disons qu'elle leur disait que l'agence ne serait pas la structure obligée et omniprésente qui est décrite dans le projet de loi. Malheureusement, elle n'a jamais réussi à convaincre ces gens-là.

Alors, si on revient au rôle de la Commission d'accès à l'information, ce mémoire-là est très, très important parce que, comme je le disais, c'est pour assurer la démocratie. Évidemment, ces organismes-là, ils sont indépendants, ils sont là pour protéger nos institutions. Et, dans ce mémoire-là, je vais vous citer quand même certains passages qui sont importants.

La commission propose, dans son mémoire, diverses mesures qui pourraient favoriser la transparence des activités de partenariat. Il s'agit essentiellement de quatre: de l'assujettissement des filiales de l'Agence des partenariats public-privé à la Loi sur l'accès, de la détermination d'obligations de transparence ? et je dis bien «de transparence», c'est très important ? pour les entreprises privées, de la modification des règles de confidentialité des renseignements fournis par des tiers et de la reconnaissance du caractère public de certains documents.

Et ceci m'amène à l'article 23, M. le Président, article qui est très, très important. L'article 23 de la Loi sur l'accès prévoit qu'un organisme public doit ? il n'a pas le choix ? refuser de communiquer le secret professionnel et industriel d'un tiers ou un renseignement industriel, financier, commercial, scientifique, technique ou syndical de nature confidentielle à moins que ce tiers n'y consente. La commission s'interroge sur l'impact que pourrait avoir cette restriction à l'accès sur la transparence des activités PPP.

Et la commission estime que le législateur devrait étudier la possibilité de conférer un caractère public à certains documents qui seront au coeur même des PPP. Pour ces documents, aucune restriction à l'accès ne pourrait être soulevée pour en refuser l'accès. On donne un exemple, M. le Président: les contrats de partenariat et des plans d'affaires pourraient avoir un caractère public. Conférer un caractère public à ces documents éviterait tout litige lié à leur accessibilité.

Alors, la commission qui a présenté un excellent mémoire, très documenté, alors elle dit, elle concluait que «des ajustements législatifs nous apparaissent nécessaires ? et je dis bien "nécessaires" ? pour tenir compte de ce contexte particulier des PPP».

Et je voudrais mentionner que la loi d'accès à l'information nous amène un sujet très important pour tous les Québécois et les Québécoises et c'est la question de protection de notre eau, ce qu'on appelle «l'or bleu du Québec». Nous savons très bien que les PPP et la privatisation de l'eau touchent beaucoup les Québécois et les Québécoises. Ils ne veulent pas que l'on touche à l'eau, à notre eau. C'est notre richesse ici, au Québec. Ils l'ont manifesté. Et j'aimerais vous mentionner que récemment il y a eu une émission à la télé, hier justement, le ministre de l'Environnement était là, et on a posé quand même de bonnes questions. On a dit: Nous, on est inquiets concernant l'eau du Québec. L'émission, c'était Tout le monde en parle, c'est une émission qui est très, très, très écoutée par les Québécois. Et on voyait que les gens manifestaient leurs inquiétudes, même s'ils n'étaient pas trop politisés.

n(12 h 40)n

Ceci m'amène à parler également d'un groupement qui a une crédibilité qui est très, très forte ici, au Québec, qui s'appelle le comité Eau Secours!, et le président, M. André Bouthillier, a manifesté également ses inquiétudes concernant le projet de loi n° 61. On a un article qui a passé... qui s'intitulait, dans La Presse... c'était un article, au mois de septembre, dans La Presse? évidemment, c'était récemment: Les eaux troubles de Mme Forget. Le titre: La ministre est-elle obnubilée par sa quête de services publics à privatiser? J'aimerais vous lire certains extraits qui reflètent bien les inquiétudes des Québécois et des Québécoises. Cet article est signé par Yves Bellavance et André Bouthillier, et les auteurs sont respectueusement porte-parole de la Table régionale des organismes volontaires d'éducation populaire de Montréal et de la Coalition québécoise pour une gestion responsable de l'eau, et, comme je le mentionnais, Eau Secours!. Je vous lis ces passages parce qu'aujourd'hui cette motion-là est importante, on veut écouter, on veut entendre de nouveau la Commission d'accès à l'information. Et la Commission d'accès à l'information a soulevé des inquiétudes parce que, quand on parle de l'eau, cette commission-là dit simplement qu'on ne pourrait pas utiliser la Commission d'accès à l'information.

Alors, dans cet article qui est fort intéressant, on dit: «La ministre [...] est tellement obnubilée par sa quête de services publics à privatiser qu'elle agite de bien drôles d'épouvantails pour justifier cette décision. Ou bien [elle] est complètement ignorante du débat qui a sévi au Québec ces dernières années ou bien elle a volontairement tronqué les faits, ce qui est particulièrement inquiétant.» Or, c'est toujours les mêmes adjectifs qui reviennent: inquiétude, inquiétude, inquiétude. Et, dans ce même article, ils disent: «Prenons donc quelques instants pour rectifier certains des propos de la ministre.

«Premièrement, veuillez noter [...] que l'eau de Montréal est une des meilleures et une des moins chères à produire. Le réseau de gestion, de production et de distribution de l'eau potable est géré avec compétence, M. le Président. Bref, la privatisation de l'eau est une mauvaise solution à des problèmes qui n'existent pas.»

Ces gens-là sont très documentés. Vous savez, je reviendrai plus tard, mais je dis simplement: Cette partie-là, je veux que les gens écoutent bien, ce sont des gens qui sont renseignés, qui représentent plusieurs personnes au Québec et qui disent, et je répète: «La privatisation de l'eau est une mauvaise solution à des problèmes qui n'existent pas.»

Et: «Deuxièmement ? ils disent ? nous lui conseillons de se mettre à jour dans la littérature consacrée à la privatisation de l'eau en Angleterre. Le seul avantage connu de cette privatisation a été une augmentation pharamineuse des profits des entreprises privées dorénavant chargées de ce service public.»

Le Président (M. Paquin): Merci, Mme la députée de Mirabel. M. le député de Mercier, vous avez la parole.

M. Daniel Turp

M. Turp: Merci beaucoup, M. le Président. D'abord, ça me fait plaisir de me joindre aux travaux de votre commission, M. le Président, et de me joindre au député de Richelieu, à mes collègues, pour parler au sujet de ce projet de loi n° 61 et de la motion qui a été déposée par le député de Richelieu.

D'abord, sur le projet de loi n° 61. Je suis heureux de pouvoir m'exprimer à nouveau sur un projet de loi qui suscite l'inquiétude des citoyens et des citoyennes de la circonscription de Mercier. Je peux informer mes collègues que j'ai reçu plusieurs lettres et des courriels me demandant d'être très vigilant, au nom de mes citoyens, parce qu'ils s'inquiètent beaucoup de la portée de ce projet de loi et de la possibilité qu'il pourrait donner au gouvernement du Québec et à cette agence que l'on veut créer de déléguer, comme on l'a évoqué tout à l'heure, à l'entreprise privée la gestion des services publics. Parce que j'ai constaté, comme vous avez pu le faire, que le projet de loi n° 61 permettrait même de confier la gestion de services publics, comme l'éducation, comme la santé et les services sociaux, à des partenaires privés, alors que, dans notre société, et je pense au Québec, en général, comme ailleurs dans le monde, on ne souhaite pas que des services publics comme ceux-là soient gérés par des entreprises privées. Et, s'il est un domaine dans lequel l'État doit conserver la gestion des services, c'est bien celui de services comme la santé, l'éducation, certains services, carcéraux, par exemple. Et encore là j'ai eu des représentations, dans ma circonscription, de personnes qui animent l'association de réhabilitation sociale qui sont tout à fait opposées avec l'idée que le gouvernement confie à une agence la possibilité de sous-contracter à des entreprises privées le soin non seulement de construire des prisons, mais de confier à une entreprise privée la gestion des autorités carcérales.

Donc, si je m'exprime ainsi, je le fais au nom de citoyens qui sont inquiets et qui ont raison aussi d'être inquiets d'un projet de loi qui pourrait faire échapper des documents importants à l'examen tant des parlementaires que des journalistes, eux qui, comme l'a rappelé le député de Richelieu, multiplient les plaintes à l'égard du gouvernement actuel et sa façon dont il gère l'accès aux documents personnels.

J'étais intéressé aussi d'entendre mon collègue le député de Richelieu rappeler le caractère fondamental, quasi constitutionnel, de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et des renseignements personnels. Et juste pour rappeler aux collègues, il s'agit effectivement d'une loi fondamentale. L'Assemblée nationale n'a pas adopté beaucoup de lois qu'on peut considérer comme fondamentales qui ont une nature constitutionnelle. Le député de Richelieu rappelait que la Charte des droits et libertés de la personne du Québec, adoptée en 1975, est l'une de ces lois fondamentales. Et ce qui d'ailleurs permet de qualifier une loi fondamentale, c'est le fait qu'elle l'emporte sur les autres lois et qu'elle donc a un statut dans la législation, un statut de prépondérance ou de primauté.

C'est d'ailleurs l'article 52 de la Charte des droits et libertés de la personne qui confère à la Charte québécoise des droits et libertés un caractère fondamental, puisque cet article stipule qu'«aucune disposition d'une loi, même postérieure à la charte...» C'est une disposition qui a été ajoutée ultérieurement parce que, dans sa formule originale, l'article 52 ne s'appliquait pas à toutes les lois postérieures à la charte, elle s'appliquait aux lois antérieures, mais elle a été modifiée en 1984, si ma mémoire est fidèle, 1983 ou 1984, pour avoir une prépondérance sur les lois postérieures. Donc: «Aucune disposition d'une loi [...] ne peut déroger aux articles 1 à 38» de cette Charte des droits et libertés du Québec.

Alors, ça me permet de souligner que l'article que le ministre de l'Environnement veut introduire dans notre législation québécoise et qui vise à protéger ou reconnaître le droit à un environnement sain, l'article 46.1 que l'avant-projet de loi sur le développement durable vise à intégrer dans la charte ne serait pas un article de nature quasi constitutionnelle parce qu'il ne se situerait pas dans les articles 1 à 38, il se trouverait à l'article 46.1 de la charte et donc n'aurait pas un caractère prépondérant, comme les autres articles qui se trouvent dans le chapitre IV relatif aux droits économiques et sociaux dans lequel on intégrerait ce nouvel article 46.1.

n(12 h 50)n

Mais, pour revenir à l'article 52 de la charte québécoise qui donne une prépondérance à la charte et aux droits qui sont contenus aux articles 1 à 38, elle indique donc qu'aucune disposition d'une loi ne peut déroger à ces articles, «sauf dans la mesure prévue par ces articles, à moins que cette loi n'énonce expressément que cette disposition s'applique malgré la charte». C'est ce qui lui confère, à cette charte, un caractère prépondérant et lui donne une valeur quasi constitutionnelle. D'ailleurs, elle n'a de valeur que quasi constitutionnelle parce qu'il lui manque l'autre élément qui la rendrait constitutionnelle, le fait que cette loi ne puisse être modifiée qu'avec une majorité qualifiée et qu'elle échappe donc à la majorité absolue des députés du Parlement. Si tel était le cas, si on avait ajouté une disposition de cette nature, on pourrait parler d'une loi constitutionnelle, mais elle n'est que quasi constitutionnelle.

Mais ce qui est intéressant, c'est de voir que l'article 168 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et de protection des renseignements personnels... est une loi quasi constitutionnelle parce qu'elle comporte une disposition, cet article 168, qui est libellée dans des termes tout à fait analogues à ceux de l'article 52 de la charte québécoise. L'article 168 dit: «Les dispositions de la présente loi prévalent sur celles d'une loi générale ou spéciale postérieure qui leur seraient contraires, à moins que cette dernière loi n'énonce expressément s'appliquer malgré la présente loi.» Donc, l'article 168 donne un caractère fondamental à cette Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et la protection des renseignements personnels et lui confère cette qualité quasi constitutionnelle que nous retrouvons également dans la Charte des droits et libertés.

M. le Président, je mentionne cela parce que je constate que le projet de loi n° 61 n'a pas voulu présenter une dérogation expresse à la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et de protection des renseignements personnels. Il aurait été possible de faire une dérogation expresse, comme le permet l'article 168 de cette loi. Non, la dérogation que l'on semble vouloir permettre, et l'accès plus limité aux renseignements, est plus subtile. Elle passe par la création justement de partenariats public-privé qui vont faire échapper à la compétence de la commission des renseignements qui seront obtenus et existeront dans le cadre de contrats de partenariat public-privé ou de dispositions visant à la mise en oeuvre et à l'exécution de ces contrats. Et la commission, qui s'est présentée devant notre commission, a bien signalé les dangers que représentait le projet de loi s'agissant d'accès aux renseignements qui pourraient être obtenus dans le cadre de contrats et d'exécution de contrats de partenariat public.

Alors, vous me permettrez, M. le Président, en conclusion, d'indiquer que, au nom de mes citoyennes et citoyens de Mercier et au nom de ma formation politique, des inquiétudes à cet égard demeurent, et je crois comprendre que les amendements qui ont été présentés ne règlent aucunement cette question et ce différend entre notre formation et la formation gouvernementale. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Paquin): Merci, M. le député de Mercier. Y a-t-il d'autres interventions? M. le député de Chicoutimi. Vous avez 10 minutes, M. le député.

M. Stéphane Bédard

M. Bédard: Merci, M. le Président. Alors, la motion qui a été présentée me semble très simple. J'aurais souhaité que mon collègue de Mercier... qu'elle reçoive l'aval du parti ministériel pour la raison suivante, c'est que, pour les raisons qu'il a explicitées un peu plus longuement...

M. Gautrin: M. le Président...

Le Président (M. Paquin): Oui, question de règlement, M. le député de Verdun.

M. Bédard: Ils n'ont pas voté encore. C'est vrai, c'est vrai.

M. Gautrin: M. le Président, mon collègue dit: J'aurais souhaité que la motion reçoive l'aval. Je ne peux pas... qu'il ne peut pas préciser ou présumer de mon vote à l'heure actuelle.

M. Bédard: On ne peut pas présumer de...

M. Gautrin: Et j'écoute au contraire avec beaucoup d'intérêt les interventions de mon collègue pour savoir de quelle manière je vais pouvoir m'exprimer sur la proposition qui est proposée par le député de Richelieu.

M. Cholette: M. le Président, question de directive.

Le Président (M. Paquin): Oui, M. le député de Hull.

M. Cholette: Bien, simplement parce que... Est-ce que vous avez sollicité aussi de ce côté-ci pour intervenir par règle de l'alternance?

Le Président (M. Paquin): Oui. J'ai regardé tout le monde, personne n'a fait signe, M. le député.

M. Bédard: Et malheureusement j'ai commencé...

M. Cholette: Oui, c'est très malheureux d'ailleurs, mais...

Une voix: Pourquoi c'est malheureux?

Le Président (M. Paquin): Je n'ai peut-être pas... J'ai très bien demandé s'il y avait d'autres interventions et j'ai regardé de tous les côtés...

M. Cholette: Parce que j'aurais quelque chose à... par consentement...

Une voix: ...

M. Cholette: Par consentement, je pourrais peut-être prendre le cinq minutes...

Une voix: Non.

M. Cholette: ...puis pas prendre plus en revenant.

Une voix: On a très hâte de vous entendre en revenant.

Le Président (M. Paquin): Il n'y a pas de consentement, M. le député.

Une voix: On en a encore pour...

Le Président (M. Paquin): Donc, M. le député de Chicoutimi, vous avez la parole. Allez-y.

M. Bédard: Merci, M. le Président. Alors, je retire effectivement les propos. Je ne veux pas présumer du vote de mes collègues, mais j'aurais souhaité plutôt ne pas être obligé de plaider aussi longuement le mérite d'une telle motion qui se veut simplement celle d'entendre la Commission d'accès à l'information. Mais heureux de voir que mon collègue de Verdun est ébranlé par nos plaidoiries que nous faisons. Alors, peut-être aurons-nous l'occasion, lors du vote, d'avoir une surprise. Et, sans présumer de son vote, je souhaite qu'il se range de ce côté-ci, ce serait même un peu naturel, je vous dirais, M. le Président.

Alors, oui, pour entendre la Commission d'accès à l'information qui, vous le savez, est un organisme que je connais très, très bien, qui est au-dessus des partis, au-dessus de toute vélléité partisane, et qui n'a comme objectif que de s'assurer de l'application de lois fort importantes que vous connaissez, soit l'accès aux documents des organismes publics mais aussi la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé. Donc, cet organisme se veut un peu le garde-fou et en même temps le grand vérificateur en matière d'information entre le public, je vous dirais, et l'État du Québec. Donc, un organisme qui, vous le savez, est fort important, qui répond à une mission qui, je pense, touche au coeur de la confiance qui doit exister entre l'État et ses concitoyens et concitoyennes.

Lorsqu'on souhaite, en commission, obtenir un avis aussi impartial, permettez-nous d'espérer, ou de souhaiter, ou de s'attendre à ce que le gouvernement donne son accord, d'autant plus qu'on est dans des questions, comme le disait mon collègue encore un peu plus tôt, éminemment gouvernementales, éminemment étatiques. Ce n'est pas à la marge, on ne traite pas de ces questions... ce n'est pas plutôt une fonction que s'est attribuée de façon frivole un gouvernement, mais c'est carrément au coeur de l'action gouvernementale et au coeur des priorités que doit avoir un gouvernement, soit, comme on le disait un peu plus tôt, la livraison de services auprès de nos différents concitoyens et concitoyennes.

Donc, pourquoi maintenir une telle opacité dans un domaine aussi public? Et je me questionne encore, et je me serais attendu, M. le Président, comme d'autres membres de ce côté-ci, d'avoir un avis positif de la Commission d'accès à l'information nous informant que les différentes mesures ne vont pas à l'encontre, pas de la lettre de la loi, mais de l'esprit de cette loi qui veut que le public ait accès à ces informations. Et bénéficier en plus de son témoignage lors de la commission nous aurait permis, à tous les membres de cette commission, pas seulement de ce côté-ci, mais de l'autre côté, de questionner des spécialistes en cette matière qui ont eu à appliquer la loi depuis plus de 20 ans, depuis plus de 25 ans, M. le Président, qui connaissent... et près de 30 ans même, je vous dirais, c'est au début des années quatre-vingt, la loi d'accès à l'information...

Une voix: 1982 ou 1983, je pense.

M. Bédard: 1982, oui. Donc, près de 25 ans, qui, eux, sont au coeur de ces décisions et qui ont cette préoccupation en même temps qui est... vous savez, qui sont balancées, celle de la protection des renseignements personnels donc, mais en même temps de faire en sorte que le public soit informé des actions de leur gouvernement.

n(13 heures)n

Malheureusement, je crois qu'à cette étape, sans présumer de rien, M. le Président, mais on peut entrevoir du moins beaucoup de réserve de la part de la présidente du Conseil du trésor à donner son accord pour que nous puissions vérifier les différentes applications et si ces applications n'ont pas les effets pervers qu'on peut... qu'on veut éviter, soit ceux finalement de priver le public de cette information vitale et à laquelle il a droit. On ne prêche pas par... on ne demande pas la charité, M. le Président, quand on parle de droits protégés par la Charte des droits et libertés et protégés par une loi, comme le disait mon collègue, quasi constitutionnelle par son statut de prépondérance et de primauté par rapport aux autres lois. Donc, ce n'est pas de la charité. Ce qu'on demande, c'est le bon sens. Ce qu'on demande, comme vous le voyez même, c'est de plaider pour faire en sorte que ces lois, dont le législateur a voulu, dans sa sagesse, être au-dessus des autres lois sur certaines matières, voient leur application et finalement l'intention du législateur pleinement rencontrées, dans son application mais aussi en interrelation avec d'autres lois, dont celle dont nous sommes actuellement à l'étude article par article.

Le Président (M. Paquin): M. le député de Chicoutimi, malheureusement, je suis obligé de vous arrêter, dû à l'heure tardive, mais vous allez pouvoir poursuivre cet après-midi...

M. Bédard: À 3 heures, M. le Président, je me ferai un devoir d'être ici et de compléter mon laïus.

Le Président (M. Paquin): D'accord. Donc, je suspends la Commission des finances publiques jusqu'à 15 heures, cet après-midi.

(Suspension de la séance à 13 h 1)

 

(Reprise à 15 h 6)

Le Président (M. Paquin): À l'ordre, s'il vous plaît! Je déclare la séance de la Commission des finances publiques ouverte. Avant de commencer, je demanderais à tous ceux et celles qui ont des téléphones cellulaires de bien vouloir éteindre la sonnerie afin de ne pas déranger les travaux de la commission.

Le mandat: la commission est réunie afin de poursuivre l'étude détaillée du projet de loi n° 61, Loi sur l'Agence des partenariats public-privé du Québec. Lorsque nous avons terminé ce matin, c'est le député de Chicoutimi qui avait la parole. Donc, M. le député, il vous reste environ cinq minutes à votre temps. Je vous cède la parole.

M. Lelièvre: M. le Président, pourquoi vous dites «environ cinq minutes»?

Le Président (M. Paquin): Vous voulez l'avoir précisément, M. le député de Gaspé?

M. Lelièvre: Oui.

Le Président (M. Paquin): On va vous le préciser.

M. Lelièvre: C'est parce que... Non, mais c'est parce que...

Le Président (M. Paquin): Cinq minutes juste.

M. Lelièvre: C'est... quand vous dites «environ», j'ai perdu 1 min 5 s parce que... malheureusement...

M. Simard: Il l'a toujours sur le coeur.

Le Président (M. Paquin): Mais vous savez très bien, M. le député de Gaspé, que c'est fait avec beaucoup de professionnel...

M. Lelièvre: Non, non, je ne mets pas en doute la bonne foi, c'est mon erreur, je l'assume totalement, malgré que j'aurais bien aimé résumer le projet de loi. Mais quand même...

Le Président (M. Paquin): D'accord. Donc, monsieur...

Des voix: ...

M. Lelièvre: Mais j'espère que vous allez voter cette fois-ci en faveur.

Le Président (M. Paquin): À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Chicoutimi a des choses importantes à nous dire; on va l'écouter, si vous voulez bien.

M. Bédard: Vous présumez de mes propos, M. le Président, mais effectivement les choses que je vais dire sont importantes, malgré que répétitives, je pense. Vous dire aussi que, la dernière fois que j'ai pris la parole, ce n'était pas le matin mais bien sur l'heure du midi, il était près d'une heure. Alors, ça me fait plaisir de reprendre un peu les propos que j'ai tenus. Je vais tenter de les... souvent, sur l'heure du midi, on oublie, et vous le savez. Qui dort dîne, parfois même certains préfèrent carrément dormir sur l'heure du midi, donc d'oublier tous les propos qui ont été tenus. Donc, je vais les répéter, M. le Président, avec la même force que je l'ai fait sur l'heure du midi. Et j'avais terminé mes propos sur un thème qui m'est cher parce que, vous le savez, je suis aussi porte-parole en matière d'accès à l'information, mais... Est-ce qu'on peut suspendre quelques minutes, M. le Président?

Le Président (M. Paquin): Si on peut suspendre quelques minutes?

M. Bédard: Quelques minutes, oui?

Le Président (M. Paquin): On va suspendre pour quelques minutes, M. le député.

(Suspension de la séance à 15 h 9)

 

(Reprise à 15 h 11)

Le Président (M. Paquin): On poursuit. M. le député de Chicoutimi.

Une voix: ...

M. Bédard: Non, je souhaitais effectivement la présence de tous à cette commission. Vous savez, exceptionnellement les ministres sont membres des commissions, donc j'ai tendance à souhaiter effectivement leur présence, puisque c'est un droit qui leur est accordé de façon exceptionnelle par l'Assemblée. Donc, je souhaite aussi, personnellement, bénéficier de cette présence.

Vous dire donc que j'en étais sur le thème de l'opacité lorsque j'ai quitté, parce que, vous le savez, je suis critique en matière d'accès à l'information, donc c'est un thème qui m'est très cher. J'ai eu l'occasion d'ailleurs, l'an passé, lors de l'étude du rapport de la Commission d'accès à l'information, d'entendre au moins près d'une cinquantaine d'organisations, organismes, et aussi le témoignage individuel de gens de la presse, mais de tous les milieux, de tous horizons, nous faire part de leurs commentaires et leurs attentes par rapport à cet accès qu'ils doivent... qu'ils méritent d'avoir et qu'ils méritent d'avoir auprès de... au niveau de l'ensemble de l'information qui doit être communiquée par les agences et autres organisations de l'État.

Et vous avez vu d'ailleurs, ce week-end, la fédération du Québec, la fédération des professionnels en journalisme faire état de leurs commentaires mais aussi leur dénonciation surtout de la conduite actuelle du gouvernement, mais de l'ensemble de l'appareil étatique concernant leur accès, dans leur travail, au niveau de l'information. Et ils ont... si vous avez bien pris les débats de la fédération, et c'est rare d'ailleurs que, je vous dirais, l'ensemble de la fédération va commenter aussi durement cet aspect de notre démocratie, qui est importante, soit l'accès à l'information, donc ils dénonçaient, de vive voix et avec beaucoup de force, le peu d'informations qu'ils ont ou les difficultés qu'ils ont à mettre la main sur l'information à laquelle ils ont droit.

Je vous dirais que la même chose s'est passée du côté de l'opposition ? d'ailleurs, ça a même fait l'objet d'une question ce matin ? où nous dénoncions le tournant politique qu'avait pris un peu cet accès à l'information en dénonçant que de telles demandes se retrouvent finalement sur le bureau d'une ou d'un ministre, alors que normalement elles devraient faire l'objet d'une décision totalement indépendante... «totalement», je vous dirais, en grande partie indépendante de la part des fonctionnaires responsables de l'application de la loi.

Et d'ailleurs je suis bien placé pour le dire parce que, lors des témoignages de fonctionnaires qui sont responsables de l'application des lois, j'avais regardé avec eux les possibilités peut-être de... pas «peut-être», mais «assurément» de leur accorder une meilleure protection pour faire en sorte que, lorsqu'ils ont à prendre des décisions qui touchent les ministères et qui vont toucher le ministre souvent qui est responsable de l'application de la loi en question, ils se trouvent finalement à être indépendants, sans jouir de l'indépendance des juges, mais du moins avoir l'indépendance requise pour prendre leurs décisions en toute sérénité, sans les pressions indues de l'appareil public, du sous-ministre ou des autres fonctionnaires, ou encore moins, je vous dirais ? où là ce serait carrément de l'intrusion politique ? de la part des ministres et membres de cabinet.

Pourquoi? Parce qu'évidemment l'application de la loi ne relève pas de l'autorité politique, elle relève avant tout de ceux et celles qui sont appelés à juger de la pertinence, pas en matière de l'information elle-même, mais bien de la pertinence quant au droit qu'ils ont de la requérir en vertu de la loi d'accès à l'information. Et on a eu des cas bien malheureux en cette matière, d'où notre refus de donner notre appui au projet de loi, pour les raisons invoquées. Et c'est pourquoi d'ailleurs nous demandons la présence de la Commission d'accès à l'information, pour qu'elle puisse nous faire part de leur opinion, vous le savez, fort documentée, sur cette question, et j'espère, M. le Président, que nous aurons l'accord de la ministre pour bénéficier de l'avantage d'avoir cette opinion précise de la Commission d'accès à l'information. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Paquin): Merci beaucoup, M. le député de Chicoutimi. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants sur la motion? Il n'y en a pas d'autre de l'autre côté, c'est du côté du gouvernement. Du côté de l'opposition, tous les gens ont intervenu, tous les députés ont intervenu.

M. Cholette: Moi, je vais y aller pour deux minutes, M. le Président.

Le Président (M. Paquin): On vous donne la parole, M. le député de Hull.

M. Roch Cholette

M. Cholette: Tenez-moi pas rigueur. M. le Président, on est ici... J'aurais le goût, chers collègues, de parler un peu de procédure, pourquoi on en est ici, aujourd'hui, avec le projet de loi. On est à l'étape de l'étude article par article, ça, c'est l'étape législative où on doit analyser puis étudier en commission parlementaire chacun des articles d'un projet de loi. Je veux faire un retour en arrière rapide, là, M. le Président. On a déposé ce projet de loi, le projet de loi n° 61, à l'automne 2004, à l'Assemblée nationale. Du côté de l'opposition, on a décidé, de ce côté-là, de s'opposer avec beaucoup, beaucoup de ferveur à un projet de loi qui somme toute crée une agence de 15 personnes pour conseiller le gouvernement en matière de PPP, M. le Président. Parce que c'est de ça qu'il s'agit, le projet de loi n° 61, le projet de loi sur les partenariats public-privé qui crée une agence pour justement aider les ministères à réaliser des PPP.

Alors, M. le Président, est-ce que ce projet de loi est quelque chose de nouveau? Non. L'ancien gouvernement a créé le bureau des partenariats public-privé, c'est l'ancien gouvernement qui a créé ça. L'ancien gouvernement a fait adopter à l'unanimité la loi n° 164 qui permettait des PPP en transport, incluant les postes de péage. Alors, sous le Parti québécois, on a vu la réintroduction des postes de péage, en matière législative, là, on a vu donc les péages sur les routes de façon législative, hein? Le projet de loi n° 164, collègues, a été adopté par l'ancien gouvernement, unanimement à l'Assemblée nationale.

Et ce qu'on voit aujourd'hui, c'est qu'on a un projet de loi qui somme toute crée une agence de 15 personnes pour offrir des conseils pour ne pas se tromper en matière de PPP, ce qui se fait partout dans le monde, sauf en Corée du Nord... Corée du Sud, Mme la présidente?

Mme Jérôme-Forget: Corée du Nord.

M. Cholette: Corée du Nord. Et ça, c'est Joseph Facal qui disait ça ? un bon ami au parti... bien, je ne sais pas s'il est encore ami, mais en tout cas il était ami avec le Parti québécois ? qui disait que partout ailleurs dans le monde, sauf en Corée du Nord, il se fait des PPP.

Moi, je vis dans une région frontalière. De l'autre côté de la rivière, à Ottawa, il y a des PPP, en Ontario, il y a des PPP. Et pourtant ce gouvernement utilise l'Ontario quand ça fait leur affaire en termes de comparaison. Je me souviens, dans un débat que j'ai bien connu, dans le domaine municipal, de l'autre côté, on citait Ottawa comme exemple: Mon Dieu, le député de Hull, comment pouvez-vous vous opposer à des fusions forcées, alors qu'Ottawa l'ont fait? Bon, bien, c'est drôle que ce qui est bon pour minou n'est pas bon pour pitou, hein, parce que, quand on a des exemples qui ne sont pas à la saveur du mois, bien là on ne les prend pas, ces exemples-là, puis de l'autre côté on oublie d'utiliser plusieurs exemples de l'Ontario qui ont forcé... pas qui ont forcé, mais qui ont implanté des partenariats public-privé. Alors, en somme, le projet de loi n° 61 crée une agence, 15 personnes, pour offrir des conseils. Point, point à la ligne.

M. le Président, on va faire questions et réponses ensemble. Est-ce que, si on adopte le projet de loi, il y aura, demain matin, un PPP? Non. Est-ce qu'on va augmenter la fonction publique de 2 000 personnes? Non. Est-ce qu'on va changer la face du Québec, demain matin, avec le n° 61, le projet de loi n° 61? Non. Est-ce que toutes les villes seront obligées de faire affaire avec l'Agence des partenariats public-privé? Non. Est-ce que l'Agence des PPP sera exclue de la vérification du Vérificateur général? Non. Est-ce que l'Agence des PPP pourra prendre des décisions à l'extérieur du gouvernement? Non. De quoi ont-ils peur? De quoi ont-ils peur?

n(15 h 20)n

Alors, cet ancien gouvernement avait fait adopter la loi n° 164 qui créait des PPP, qui créait des péages, qui créait des partenariats avec le secteur privé pour réaliser des routes. Alors, moi, je qualifie ça de larmes de crocodile, M. le Président, parce que, quand on est dans l'opposition... bien ils ont décidé de s'opposer, mais ça leur a joué des mauvais tours, parce que j'écoute des fois le porte-parole notamment en matière d'énergie qui s'oppose, hein, aux augmentations tarifaires d'Hydro-Québec, eh bien, hein, le chef de l'opposition actuel a dit en fin de semaine: On s'est trompés, on ne peut pas geler ça à vie. Bon, ça arrive, des erreurs. Peut-être vont-ils reconnaître une erreur dans le projet de loi n° 61.

Mais je voudrais revenir dans le contexte de la commission. M. le Président, dans l'étude du principe, simplement le principe, là, hein, le principe du projet de loi qui crée une agence pour aider les ministères ou simplement dans le principe, il y a 44 députés péquistes qui ont pris la parole à l'Assemblée nationale. Ça a duré des heures et des heures. Ils ont tous repris le même discours, fait des photocopies puis ils ont relu ça. Pourquoi? Pour gagner du temps. On est en commission parlementaire maintenant, étude article par article, hein, c'est comme ça, le libellé de notre commission, M. le Président, puis on doit bonifier le projet de loi. Parce que le rôle du législateur, tant de notre côté que de l'autre côté, c'est de bonifier le projet de loi, «bonifier». Combien, pensez-vous, M. le Président, d'articles avons-nous étudiés à ce jour? Ça fait, quoi, 10, 15 heures qu'on étudie ça, ce projet de loi là, là, combien d'articles pensez-vous qu'on a étudiés, M. le Président? 50? Non, non, non, ce n'est pas ça. Pensez-vous qu'on en a étudié 10? Non. M. le Président, après 15 heures de débat, on n'en a pas étudié un seul, article.

Les gens qui nous écoutent doivent trouver ça drôle: Voyons, ça fait 15 heures que vous étudiez un projet de loi, vous devez étudier l'article 1, ça fait 15 heures, vous n'avez pas commencé? Non. Pourquoi? Bien, l'exemple est beau, parce que l'opposition officielle, aujourd'hui, décide de nous demander de rencontrer un groupe, d'écouter un groupe qui est déjà venu nous parler en commission parlementaire. Ils sont déjà venus, la Commission d'accès à l'information. Parce que, contrairement à l'ancienne administration, nous, là, on a fait des audiences publiques pendant 10 jours pour écouter les groupes. Pour le projet de loi où vous mettiez des péages, M. le Président, où le PQ mettait des péages sur les routes puis il mettait des PPP sur les routes, savez-vous combien de jours d'audiences publiques ils ont faits, savez-vous combien? Zéro, zéro, comme dans blanchissage, pas une seule. Est-ce qu'ils ont écouté la Commission d'accès à l'information à ce moment-là? Non, pas une fois. Là, ils ne souhaitent pas qu'on l'écoute une fois mais deux fois. Puis là vous pouvez dire quelque chose d'autre, ce ne sera pas fini, là, ils vont déposer une autre motion pour étudier un autre groupe qu'on a déjà entendu. Pourquoi? Pour gagner du temps parce qu'ils sont contre.

Moi, il y a des gens qui me demandent, M. le Président: Écoute, Roch, quand tu regardes un projet de loi, là, combien que ça prend de temps pour faire adopter un projet de loi? Là, j'ai écouté ça attentivement, ces questions-là, puis je me suis dit: on va regarder le règlement. Là, j'ai pris le règlement, puis j'ai regardé ça, puis là je suis tombé en bas de ma chaise. Savez-vous, M. le Président, qu'il n'y a pas de temps limite? Ça peut prendre 25 ans adopter un projet de loi ? puis, au rythme où ça va là, c'est à peu près ça qu'ils souhaitent, là, M. le Président ? parce qu'il y a tellement de mesures... je n'ai pas le droit de dire «des mesures dilatoires», je n'ai pas le droit de dire ça, donc je ne peux pas le dire, mais des mesures qui font en sorte qu'on utilise le règlement ? à juste titre, là, le règlement, il est là ? mais pour dépôt de motion par-dessus motion, puis les remarques préliminaires, puis des...

M. Simard: ...

Le Président (M. Paquin): Oui, M. le député de Richelieu.

M. Simard: Juste... Vous allez certainement m'éclairer, là: Est-ce qu'on peut intervenir pour remettre en question l'application du règlement? Ce que semble faire le député de Hull ici, c'est de regretter qu'il y ait un règlement et que ce règlement soit utilisé et appliqué. Est-ce que vous pouvez le rappeler à l'ordre, s'il vous plaît?

Le Président (M. Paquin): M. le député de Hull, je vais vous demander d'être prudent pour essayer de ne pas attiser de feu, pour ne pas rallonger plus que... vous souhaitez le contraire, s'il vous plaît.

M. Cholette: Non, je suis bien des choses, sauf pyromane, M. le Président. Je ne remets pas en question le règlement, je l'explique. Le règlement, là, fait en sorte qu'il n'y a pas de délai à l'adoption d'un projet de loi. C'est comme: ça n'existe pas. Tu peux prendre 25 ans en utilisant des mesures tout à fait conformes au règlement, puis c'est ça que je suis en train de décrire. Moi, j'ai un grand respect pour le règlement, à un point tel que j'en parle.

Et donc, motion après motion, ça fait en sorte qu'on n'est pas capables de passer à l'étude de l'article 1. Mais, pour le bien-être des gens qui nous écoutent puis des citoyens du Québec, vous ne trouvez pas qu'au lieu de demander d'écouter des groupes deux fois, puis trois fois, puis quatre fois on devrait peut-être essayer d'améliorer le projet de loi en passant à l'article 1. Et, moi, c'est mon grand souhait, M. le Président, et, sur ce, je termine en vous demandant de mettre aux voix la motion déposée par l'opposition officielle.

M. Lelièvre: Vote nominal.

Le Président (M. Paquin): ...M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: Vote nominal.

Le Président (M. Paquin): Oui, vote nominal, parfait.

Une voix: ...

Le Président (M. Paquin): Mais, oui, oui, permettez que j'appelle au vote. Donc, appel nominal, j'appelle au vote, appel nominal de votre proposition.

Mise aux voix

Je vais vous lire la motion avant de passer au vote:

«Que la Commission des finances publiques tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 61, Loi sur l'Agence des partenariats public-privé du Québec, des consultations particulières quant à tous les articles dudit projet de loi ainsi qu'à tous les amendements déposés par la ministre et qu'à cet effet elle entende la Commission d'accès à l'information.»

Vote nominal, Mme la secrétaire.

La Secrétaire: M. Lelièvre (Gaspé)?

M. Lelièvre: Pour.

La Secrétaire: M. Simard (Richelieu)?

M. Simard: Pour.

La Secrétaire: Mme Beaudoin (Mirabel)?

Mme Beaudoin: Pour.

La Secrétaire: Mme Jérôme-Forget (Marguerite-Bourgeoys)?

Mme Jérôme-Forget: Contre.

La Secrétaire: M. Cholette (Hull)?

M. Cholette: Contre.

La Secrétaire: M. Rioux (Iberville)?

M. Rioux: Contre.

La Secrétaire: M. Gautrin (Verdun)?

M. Gautrin: Contre.

La Secrétaire: M. Bernier (Montmorency)?

M. Bernier: Contre.

La Secrétaire: M. Paquin (Saint-Jean)?

Le Président (M. Paquin): Abstention, Mme la secrétaire.

La Secrétaire: Alors, pour, 3; contre, 5; 1 abstention.

Le Président (M. Paquin): D'accord. Donc, la motion est rejetée. M. le député de Gaspé.

Motion proposant d'entendre
la Protectrice du citoyen

M. Lelièvre: Oui, merci, M. le Président. J'aurais une motion à vous présenter en vertu de nos règles de procédure, en vertu de l'article 244. Alors:

«Il est proposé qu'en vertu de l'article 244 de nos règles de procédure la Commission des finances publiques tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 61, Loi sur l'Agence des partenariats public-privé du Québec, des consultations particulières quant à tous les articles dudit projet de loi et de ses amendements et qu'à cette fin elle entende la Protectrice du citoyen», M. le Président.

(Consultation)

Le Président (M. Paquin): Donc, votre motion est recevable, M. le député de Gaspé. On vous laisse la parole pour donner votre point de vue sur cette motion.

M. Lelièvre: Alors, merci, M. le Président.

Une voix: Question de directive: Combien de temps?

Le Président (M. Paquin): Oui, pardon, M. le député?

M. Gautrin: Le partage du temps, s'il vous plaît, pour nous qui sommes un peu néophytes.

M. Bernier: Pouvez-vous nous donner le partage du temps, expliquer comment, de quelle façon ça va fonctionner.

Le Président (M. Paquin): Oui, le partage du temps, certainement.

M. Gautrin: Pour des néophytes comme nous, on aurait besoin de connaître le partage du temps.

Le Président (M. Paquin): ...dans deux secondes. L'auteur de la motion, donc le député de Gaspé, 30 minutes, et le représentant du chef de l'opposition aura 30 minutes aussi... les autres députés... le représentant du PM, dans le cas qui nous intéresse la présidente du Conseil du trésor, 30 minutes, et les autres députés de part et d'autre, 10 minutes. Ça répond à votre question, M. le député?

M. Gautrin: Oui, ça répond à ma question, M. le Président.

Le Président (M. Paquin): Formidable. M. le député de Gaspé.

M. Guy Lelièvre

M. Lelièvre: Merci, M. le Président. Alors, M. le Président, nous avons eu l'occasion d'entendre la Protectrice du citoyen effectivement, qui s'est présentée à cette commission parlementaire le 29 octobre, si je ne me trompe pas, et elle est venue donner son point de vue sur le projet de loi n° 61.

n(15 h 30)n

Tout d'abord, rappeler que le projet de loi n° 61 fait en sorte que le gouvernement pourra instituer une agence qui s'appelle l'Agence des partenariats public-privé du Québec, et cette agence sera habilitée, par ses pouvoirs, à créer des filiales. Cette agence, M. le Président, pourra couvrir à peu près tous les champs d'expertise que nous retrouvons au Québec. Les partenariats se feront effectivement avec des entreprises privées. La ministre nous a déposé des modifications, que j'ai regardées, une en particulier au niveau de l'article 4, au niveau du projet de loi qui nous est soumis: «L'agence a pour mission de contribuer au renouvellement des infrastructures publiques et à l'amélioration de la qualité des services aux citoyens par la mise en oeuvre de projets de partenariats public-privé.»

La ministre remplace totalement l'article 4 pour nous dire que dorénavant... il y a quatre éléments, mais celui qui est intéressant, c'est: «...le recours à des mécanismes de reddition de comptes fondés sur l'imputabilité des organismes publics et sur le fait que ceux-ci doivent assurer la maîtrise des projets d'infrastructures, d'équipements ou de prestation de services...» Que nous dit la Protectrice du citoyen? Elle s'est présentée ici, en commission parlementaire, et, dès le départ, elle dit: Non seulement le mandat de l'agence sera un rôle-conseil auprès du gouvernement sur toute question relative à ce mode de réalisation des projets, mais aussi à en faire la promotion, à standardiser les processus et encadrer les ministères et organismes dans la réalisation de leurs projets de partenariats public-privé.

Au moment où on se parle, l'agence n'existe pas. Au moment où on se parle, les ministères existent et ils existent depuis longtemps. Les ministères ont tous une expertise, tous développé une expertise professionnelle avec l'aide des gens de la fonction publique. Ce n'est pas vrai que tout se passe au cabinet du ministre. Tout peut monter au cabinet du ministre, mais ceux qui sont les artisans de la préparation des projets, c'est qui? Ce sont les hommes et les femmes qui travaillent dans la fonction publique du Québec.

Alors là, on change totalement la philosophie d'approche, parce qu'à partir du moment que les projets de partenariat se mettront en place qu'est-ce qui va se produire? Il y aura dorénavant un couple, c'est-à-dire le ministère et le partenaire privé, les négociations vont se dérouler en fonction d'une part de la rentabilité du projet. Le ministère, lui, devra assumer une partie des coûts. L'entreprise privée voudra recevoir le maximum de profits, le maximum de retombées économiques pour son investissement. Et qui devra payer en plus? Est-ce que, par exemple, le gouvernement s'engage à payer la marge bénéficiaire de l'entreprise privée? On dit que le gouvernement conserve la maîtrise, assurera la maîtrise des projets d'infrastructures, d'équipements ou de prestation de services publics. Moi, j'aimerais bien que la ministre éventuellement nous donne des explications sur le troisième alinéa de l'article 4 pour qu'on puisse comprendre son changement de cap.

La Protectrice du citoyen, lorsqu'elle est venue à la commission parlementaire, j'imagine que vous avez eu également l'occasion de l'entendre, elle dit que les impacts directs sur les citoyens seront importants. Elle s'interroge sur la nature, elle s'interroge sur la portée de d'autres aspects, notamment l'étude des pouvoirs conférés à l'agence et la mécanique de surveillance à laquelle elle sera assujettie. Et je crois qu'il est important, à cette commission, de convaincre une partie, ceux qui sont en mesure d'être convaincus, une partie de l'aile parlementaire gouvernementale, d'appuyer l'opposition pour faire en sorte que nous entendions la Protectrice du citoyen.

Elle est déjà venue, elle a donné son point de vue, et je vais, M. le Président, vous rappeler un certain nombre de points. D'abord, son mémoire, le mémoire de la Protectrice du citoyen est divisé en plusieurs parties dont l'une traite des valeurs et des principes fondamentaux. Est-ce que, par exemple, dans sa rédaction actuelle qui définit la mission et les pouvoirs de l'agence, son champ d'application, la nature des contrats, des partenariats public-privé sont acceptables? Est-ce que ces dispositions-là font en sorte que les critères de sélection qui seront retenus seront accessibles? On parle aussi, M. le Président, qu'il y a 10 principes directeurs qui devront guider les ministères, les organismes dans la réalisation des ententes qu'ils vont conclure avec l'entreprise privée.

En passant, je dois mettre un élément très clair. Déjà, l'entreprise privée est très active dans la réalisation de contrats. Exemple, les infrastructures municipales, on parle d'infrastructures, ils veulent mettre les partenariats pour faire, pour bâtir des infrastructures. Actuellement, nous avons des programmes à frais partagés. Les municipalités sont en mesure d'assumer une partie des coûts, et ils veulent continuer. L'Union des municipalités était venue en commission parlementaire nous dire qu'eux n'étaient pas intéressés à participer aux projets de partenariat public. Les maires, dont le président est un ancien député de l'Assemblée nationale, député de Rimouski, qui très poliment est venu dire à la ministre, en commission parlementaire, lors de la consultation initiale, que, son projet de partenariat public-privé, il n'en voulait pas parce que tout doit être concentré entre les mains de l'agence.

L'agence, c'est le réceptacle, pour utiliser l'expression du ministre des Finances, qui va recevoir tous les projets, qui va en susciter, qui va les coordonner, qui va conseiller. Alors, l'agence, c'est plus que ce que la ministre croit être, ce sera une entreprise qui devra être super performante. Parce que, lorsqu'elle nous dit: L'agence, ce sera une petite boutique d'une quinzaine de personnes, 12, 14, 15, permettez-nous d'avoir des interrogations qui sont soulevées, puisqu'en ayant cette approche de minimiser l'importance de l'agence on est convaincus que les filiales seront les déesses du royaume que veut créer la présidente du Conseil du trésor, et elle est souveraine. Parce que la ministre tente bien de rassurer la population.

Le député de Hull également nous dit que ça fait de nombreuses heures que nous sommes en commission parlementaire. Oui, nous sommes en commission parlementaire, oui, ça fait de nombreuses heures, et le gouvernement s'obstine à maintenir son projet de loi tel qu'il est, avec la même philosophie. Même s'il y a des amendements cosmétiques qui sont apportés au projet de loi, ça ne change pas l'orientation gouvernementale, ça ne change pas les principes du projet de loi ou le principe du projet de loi et les valeurs qu'il sous-tend. Alors, si nous sommes ici depuis nombre d'heures et que nous espérons, nous, pouvoir procéder le plus rapidement à l'étude article par article avec des amendements qui sont acceptables, bien je pense que nous allons réfléchir sérieusement à la collaboration très, très, très soutenue sur l'enrichissement du projet de loi, sur les articles en question.

n(15 h 40)n

Mais là, maintenant, nous devons convaincre le gouvernement, hein, dans cette étape préliminaire, de permettre aux parlementaires de cette Assemblée, de l'Assemblée nationale, d'entendre des organismes qui sont les chiens de garde de l'État, donc on a le Protecteur du citoyen, on a la Commission d'accès à l'information, M. le Président, il serait important qu'ils viennent ici. Et la ministre, elle peut toujours changer d'idée. Même si sa formation politique, au moment où on se parle, refuse systématiquement, à la suite du débat, nos propositions, la ministre a le pouvoir et a la capacité de convaincre quand même ses collègues du bien-fondé de notre demande.

Lorsque je regarde, tout ça est basé sur une question idéologique, hein, et il faut retourner au document présenté par la présidente du Conseil du trésor, le discours du premier ministre, et ce qu'ils disent dans le fond, c'est basé sur l'individualisme. On reproche à notre formation politique d'en avoir trop fait, quoi, pour le Québec ? c'est ça, à peu près, là ? parce qu'un État interventionniste, ce n'est pas bon. Alors, la première valeur qui anime le gouvernement actuel, le gouvernement libéral, qui anime le gouvernement est donc cette confiance en l'individu d'abord, hein, en son esprit d'entreprise, qui s'oppose à la vision d'un État envahissant, qui veut décider à sa place. M. le Président, je préfère avoir un État qui décide que l'entreprise privée qui, elle, ne sera soumise à aucune règle.

Et la Protectrice du citoyen, lorsqu'elle est venue la première fois ici, à cette Assemblée nationale, présenter son opinion sur ce projet de loi, elle l'a dit clairement, puis elle l'a répété: «[Il y a cinq principes qui m'apparaissent primordiaux]. Ce sont les valeurs de transparence, d'équité, de qualité de services, d'imputabilité et de protection de l'intérêt public, à propos desquels le projet de loi me paraît silencieux.» C'est important, ce qu'elle est venue dire. Et ces valeurs, où les retrouve-t-on dans le projet de loi? Où les retrouve-t-on dans les affirmations néolibérales, M. le Président? Où les retrouve-t-on? On les retrouve dans les engagements du premier ministre, on les retrouve dans la politique présentée par la présidente du Conseil du trésor.

Alors, c'est sûr que le gouvernement a une majorité de députés qui est nécessaire pour appuyer le Conseil des ministres, pour appuyer le gouvernement. Mais les députés, eux, individuellement peuvent s'opposer ou, à tout le moins, s'ils ne le font pas publiquement, à l'intérieur de leur caucus, c'est de tenter de convaincre la présidente du Conseil du trésor de retirer ou de modifier substantiellement son projet de loi pour répondre aux attentes des organismes de l'État, qui sont nos chiens de garde. Alors, pourquoi refuser obstinément de nous permettre, à tout le moins, d'entendre la Protectrice du citoyen? Je pense que c'est un organisme qui est accepté de tous, qui est impartial, qui n'a jamais fait preuve de partisanerie.

Et je me souviens qu'elle est venue en commission parlementaire, lorsque nous étudiions un projet de loi présenté par le ministre du Revenu, et puis le ministre du Revenu voulait se donner des pouvoirs exorbitants du droit commun, au niveau de ses enquêtes, et le commentaire de la Protectrice du citoyen, ça a été de dire: Sommes-nous en train d'assister à la création d'une police parallèle? Et le ministre du Revenu a certainement pris en considération les remarques de la Protectrice du citoyen, puisqu'il y a eu des amendements substantiels au projet de loi. Et là, présentement, nous sommes devant une ministre, une ministre du gouvernement qui a dit non deux fois à des propositions de l'opposition. Alors, qu'est-ce qu'on doit conclure, que les cinq principes qui apparaissent primordiaux à la Protectrice du citoyen n'ont aucune valeur? Parce qu'elle en fait fi, elle ne veut pas que ces éléments-là soient remis à l'avant-scène.

Et elle dit aussi: La politique-cadre reconnaît l'importance de ces principes. Par ailleurs, elle pose la question, elle pose la question. Une politique-cadre, ce sont des voeux pieux ici, il n'y a aucune contrainte réglementaire, il n'y a aucune contrainte législative. Alors, qu'est-ce qu'on fait? Même... Et je vais vous lire un extrait, elle dit: «Même s'il ne s'agit pas d'une loi à portée générale, les citoyens auraient une garantie que l'agence, les ministères et les organismes parties à des partenariats avec le privé ont l'obligation de se conformer à ces valeurs.»

Alors, pourquoi la ministre ne les rappelle pas dans son projet de loi, en préambule ou dans une déclaration de principe? Pourquoi refuse-t-elle? Ça va rassurer tout le monde, ça va rassurer ceux qui se sont présentés devant la commission parlementaire ? on pourra vous faire l'énumération des 45 organismes qui sont venus ici. Puis on pourra vous rappeler, au cours des quelques heures qui nous permettent de faire ces démarches, là, pour convaincre le gouvernement, qu'il est nécessaire, qu'il est indispensable d'aller de l'avant avec nos propositions. Parce que la ministre, elle le sait que dans le fond il y a des inquiétudes.

Bon. On dit que la ministre a une certaine rigidité. J'en conviens. Mais pourquoi elle ne ferait pas un geste qui permettrait à l'ensemble de la population du Québec de bien comprendre la portée générale des partenariats public-privé? Elle a déposé des amendements, et les amendements sont à mon avis insuffisants, mais j'aimerais ça que la Protectrice du citoyen vienne nous voir, et particulièrement concernant l'article 4, la mission de l'agence. Et ce qui doit vous inquiéter, M. le Président, c'est surtout l'absence de contraintes liées au processus législatif. Ça, ces principes-là, on va les balayer du revers de la main, et, lorsque le privé prendra le contrôle des filiales ou des entreprises qui seront créées, le danger, il est là. Le danger, il est là, et je vais vous en évoquer quelques-uns, dangers mis en exergue par la Protectrice du citoyen, mais en même temps par beaucoup d'autres organismes.

Alors, qu'est-ce qu'elle dit, la Protectrice, concernant la politique-cadre? Elle dit: «Une politique-cadre est un outil de gestion qui permet une grande flexibilité de par l'absence de contraintes liées aux processus législatif et réglementaire, mais la commodité administrative ? et c'est ça que la ministre veut, dans le fond elle veut une commodité administrative, faisons ça le plus rapidement possible, le plus simple possible, puis l'agence va s'organiser, puis on va tout organiser ça, les projets vont tous passer par l'agence; donc ce qu'elle dit, la commodité administrative ? ne devrait pas avoir préséance sur [les droits] des citoyens d'obtenir des garanties que ces principes fondamentaux seront respectés en tout temps.»

C'est quand même important comme recommandation. Est-ce qu'on la retrouve dans les modifications proposées par la présidente du Conseil du trésor? Il faudrait qu'elle nous explique à quel article, quel article, quel paragraphe, quel alinéa, pour qu'on puisse bien analyser l'endroit où elle a cristallisé la recommandation de la Protectrice du citoyen.

Elle parle également, M. le Président: «Les mécanismes permettant d'en assurer le respect [pourraient être eux-mêmes précisés] dans le projet de loi.» Alors, encore une autre recommandation rejetée, parce que je ne le retrouve nulle part, et on me corrigera si je me trompe puis si je ne fais pas la bonne lecture du projet de loi et des amendements. Encore une fois, est-ce que la Protectrice du citoyen se déclarerait satisfaite des amendements ou encore de ce que nous avons entre les mains?

n(15 h 50)n

Elle continue, elle dit: «...au chapitre de la transparence ? ça, c'est une valeur très chère au gouvernement ? pourquoi ne pas prévoir que tout projet de partenariat public-privé devra faire l'objet d'une période d'accès pour le public, que ce soit par l'inscription des projets dans un registre ou par leur dépôt à l'Assemblée nationale?»

Alors, le gouvernement peut avoir un discours de transparence, mais, dans la pratique, comment se fait-il que nous ne pourrions pas avoir accès à cette information? Comment se fait-il que des citoyens du Québec ne pourraient pas être informés, en toute transparence, des projets qui seront inscrits dans un registre? Pourquoi? Pourquoi veut-on empêcher les gens d'avoir de l'information? Alors, c'est une autre question à laquelle il faut répondre.

Alors, la ministre nous dit que les règles d'imputabilité, etc., seront appliquées. Mais la Protectrice du citoyen nous rappelle qu'il serait nécessaire que, dans le texte de loi, les organismes publics parties à des ententes de partenariat resteront responsables de la reddition de comptes. Qui va rendre des comptes aux parlementaires? Parlementaires dont vous êtes, vous présidez cette commission. Et les parlementaires, ce ne sont pas ceux qui composent l'exécutif, ce sont ceux qui composent le législatif, qui sont à l'Assemblée nationale ? et le député de Montmorency est bien placé pour le savoir, hein, il est adjoint parlementaire au ministre du Revenu, il sait pertinemment, au niveau de la reddition de comptes, comment ça se passe. Il nous a fait part de sa grande expérience au ministère du Revenu, dans d'autres organismes, à la CSST dans le passé, lorsque nous avons eu l'occasion de l'entendre vendredi soir, vers 22 heures, si je ne me trompe pas, dans les environs, donc. Et on veut s'assurer, on veut s'assurer, M. le Président, que, la reddition de comptes pour l'agence, le projet de loi prévoit qu'elle sera assujettie au contrôle du Vérificateur général. Et nous partageons cette orientation avec la Protectrice du citoyen. Est-ce que la ministre a prévu, dans son projet de loi, que la filiale, que l'agence, que la reddition de comptes restera de la responsabilité des organismes publics et des ministères? C'est tout ça, M. le Président, qu'il faut regarder attentivement.

Parce que... ? vous me faites signe que mon temps s'écoule très rapidement, je comprends qu'avec l'autorisation de nos collègues on peut toujours prolonger, mais... Par contre... Je vais accélérer, mais je ne veux pas trop accélérer, je veux que les gens comprennent bien que l'agence, comme elle le dit, ne constituera pas un ministère, donc aucune obligation de l'agence, que ses employés ne seront pas nommés en vertu de la Loi sur la fonction publique, qu'elle ne sera pas un organisme public au sens de l'article 14 de la Loi sur le Protecteur du citoyen, à l'égard duquel il peut intervenir en vertu de l'article 13. Donc, on prive les citoyens et les citoyennes du Québec d'un recours auprès du Protecteur du citoyen. C'est ça, la réalité, là, il y a une privation de recours.

Alors, moi, je veux bien comprendre que, par une conviction ou des convictions idéologiques, tout ce qui s'est fait par la fonction publique du Québec, c'est moins bon. Mais, à partir du moment que la fonction publique va mettre son expertise au service du privé, ça va être bon. M. le Président, le privé a de l'expertise, la fonction publique du Québec a de l'expertise, et les deux ne devraient pas être mis en opposition. Parce que c'est ça que la présidente... c'est ça, le résultat du projet de loi, là. Quand on veut faire des partenariats public-privé, on fait en sorte que: les gens ne sont pas d'accord, parfait, on va les opposer à l'entreprise privée, puis là ils vont tenter de prétendre que l'entreprise privée ne réussit pas bien. Ce n'est pas vrai, l'entreprise réussit à construire des infrastructures municipales de qualité, à des coûts qui sont respectés, alors... Mais, lorsqu'on tombe dans le domaine des services...

La question que se pose la Protectrice du citoyen, c'est quand même assez important, là. La délégation de fonction et de pouvoir ? dans les quelques minutes qui me restent ? ce qu'elle dit, c'est que la nature même des partenariats consiste à transférer des responsabilités publiques à un partenaire privé. C'est le premier élément. Deuxième élément, ce qu'elle nous dit: «Doit-on comprendre que ce sont presque toutes les fonctions de l'État qui pourraient à la limite être déléguées?» C'est une question quand même très importante que la Protectrice du citoyen pose. Et vous-même, M. le Président, je sens monter en vous une certaine inquiétude et beaucoup d'interrogations.

«Le recouvrement des créances fiscales de l'État ou des dettes des prestataires de l'aide sociale pourrait-il, par exemple, [faire l'objet ou être délégué] à une agence privée de recouvrement?» C'est quand même une autre question importante. Et, si on parle de recouvrement, bien tous les organismes de l'État, ça veut dire que ça peut être la CSST, ça peut être la Société d'assurance automobile. On peut utiliser à peu près... Prenons la liste, là ? puis on va vous la déposer ? faisons le tour.

Et je comprends qu'il y a des choses alléchantes au niveau des revenus, pour une entreprise. On leur propose. Ce n'est pas l'entreprise privée qui a cogné à la porte du gouvernement pour dire: Aie! Vous êtes élus, le Parti libéral, vous êtes au pouvoir, venez avec nous, venez nous voir puis donnez-nous des contrats. Ce n'est pas eux qui ont fait ça. C'est le gouvernement, avec une obsession idéologique, qui s'est orienté vers la fabrication de partenariats public-privé. Le gouvernement court après l'entreprise privée pour brader l'État, pour se délester, délester ses responsabilités. Alors, M. le Président, je pense qu'il y a des éléments que l'on retrouve dans ce projet de loi qui sont inacceptables.

D'autres questions qu'elle pose, la Protectrice du citoyen, c'est: «La délégation sera-t-elle étendue à des fonctions juridictionnelles comme celles exercées par un bureau de révision ou un tribunal administratif?» On est rendus loin, là. Est-ce que la présidente du Conseil du trésor veut privatiser la justice administrative? Bon. C'est ça, la question, là. Et je vous réfère à la page 4, quatrième alinéa, du mémoire déposé par la Protectrice du citoyen, c'est très clair: «La délégation sera-t-elle étendue à des fonctions juridictionnelles comme celles exercées par un bureau de révision ou un tribunal administratif?» On a ça au niveau de l'assurance automobile, au niveau de la CSST, au niveau de la sécurité du revenu, des accidents du travail. Alors, M. le Président, il y en a, on peut les nommer: la Régie des loteries et courses... Mon temps est terminé?

Le Président (M. Paquin): Oui, s'il vous plaît.

M. Lelièvre: Mais, avec le consentement de mes collègues, je solliciterais la possibilité, la permission de continuer peut-être une quinzaine de minutes; je pense que j'en aurais suffisamment pour terminer. On a eu consentement?

Le Président (M. Paquin): Je ne suis pas certain qu'il y a consentement, M. le député.

M. Lelièvre: Pourriez-vous vérifier, M. le Président?

Le Président (M. Paquin): On va vérifier. On va vérifier.

M. Bernier: S'il le prend sur le temps de ses collègues, moi, je n'ai pas de problème, en autant que...

Une voix: Bien non, on a des choses à dire, on veut ajouter.

M. Lelièvre: Mais non, mais non, mais non.

M. Bernier: Ah! bien là, là je ne suis pas d'accord.

Une voix: Bon. Le temps que vous ne prenez pas.

Le Président (M. Paquin): D'accord, à l'ordre! Y a-t-il d'autres intervenants sur la motion? Mme la présidente du Conseil du trésor, à vous la parole.

Mme Monique Jérôme-Forget

Mme Jérôme-Forget: Oui, M. le Président. Je voulais peut-être apporter un éclairage, M. le Président, parce que les gens qui nous écoutent ne doivent pas comprendre ce qui arrive actuellement. Voyons: d'une part, il y a eu un dépôt de projet de loi pour créer une agence, une agence qui va permettre de développer une expertise à l'intérieur du gouvernement, pas à l'extérieur, à l'intérieur du gouvernement, une agence qui va donner des conseils aux ministres et aux organismes. Donc, plutôt que d'aller souvent solliciter des avis de firmes externes, nous pourrons avoir, à l'intérieur du gouvernement, développé une telle expertise. Parce que très souvent, M. le Président, à l'intérieur du gouvernement, dès qu'il arrive quelque chose d'un peu compliqué, ah! on fait appel à l'extérieur. Et j'épargnerai l'opposition du nombre de conseils qu'ils ont sollicités de l'extérieur auprès d'entreprises privées, mais ils l'ont fait amplement, M. le Président, amplement.

n(16 heures)n

Or, cette agence sera une agence-conseil et elle va conseiller chacun des ministres, que ce soient le ministre de la Santé, le ministre de la Sécurité publique, ministre des Transports, et la décision et finalement la mise en vigueur d'un tel partenariat public-privé sera faite par le ministère en question. D'accord? C'est bien important. Ça a toujours été l'intention, certainement mon intention, et je l'ai répété nombre de fois, de faire de cette agence une agence très pointue d'expertise, 12 à 15 personnes très qualifiées, très expertes, pour venir en aide aux différents ministères sur des dossiers de partenariat public-privé. Par conséquent, on est bien loin de l'endroit où l'agence prendrait des décisions. D'accord? C'est une agence-conseil.

De plus, M. le Président, non seulement c'est une agence-conseil, mais il est clair que le Vérificateur général aura accès à l'agence, aux contrats et aux filiales de l'agence. Donc, le Vérificateur général va probablement d'ailleurs exprimer justement son approbation à l'endroit de la proposition que nous faisons en termes de partenariat public-privé. Et il est très content. Je lui ai parlé, au Vérificateur général, il est tout à fait en accord avec la position, puisque... ce dont j'ignorais, M. le Président, et je m'en excuse, c'est que, dans la Loi du Vérificateur général, quand il y a un conseil d'administration dans un organisme du gouvernement, le conseil d'administration peut interdire le Vérificateur général.

Parce que, si vous vous rappelez, dans le projet de loi que j'avais déposé, le Vérificateur général avait accès à l'Agence des partenariats public-privé. Voyant ce qui arrivait, j'ai manifestement demandé qu'on exclue cet article, l'article 28, alinéa deux, de la Loi du Vérificateur général, qui aurait pu dans le fond permettre à un conseil d'administration de soustraire l'agence, n'est-ce pas, de l'évaluation par le Vérificateur général. Par conséquent, nous avons répondu au voeu du Vérificateur général en totalité. Il est tout à fait heureux, content de la proposition qui a été faite.

Quant à la Protectrice du citoyen, M. le Président, la Protectrice du citoyen, elle est encore complètement impliquée au niveau des ministères, à savoir ceux qui s'occupent des citoyens. L'agence, c'est un organisme qui donne des conseils à des fonctionnaires, des organismes ou des ministères et par conséquent ne donne aucun service elle-même aux citoyens. Vous comprendrez que la Protectrice du citoyen, elle, aura le devoir d'examiner justement les services qui sont offerts par un partenariat public-privé ou en mode conventionnel, traditionnel, comme on le fait habituellement. Et la Protectrice du citoyen peut justement, tout à coup, faire une évaluation extrêmement négative, et elle le fait d'ailleurs, de tous les organismes gouvernementaux qui sont offerts par l'État... tous les services qui sont offerts par l'État. Si bien qu'il est clair que le rôle que la Protectrice du citoyen jouait, elle le joue encore et elle va le jouer demain.

Par conséquent, M. le Président, cette agence, je le répète, est une agence-conseil. Et, contrairement à ce qui existait antérieurement, nous avons voulu développer cette expertise. Parce qu'un des drames, M. le Président, de la fonction publique ? et je le vois souvent dans plusieurs ministères ? c'est que, dès que quelque chose devient compliqué, on fait développer la stratégie à l'externe ? je l'ai vu nombre de fois, dans des dossiers qui m'ont été présentés, par des décisions qui avaient été prises antérieurement ? et ensuite on fait faire ce que j'appellerais le quotidien par nos fonctionnaires. Mais, moi, M. le Président, j'estime qu'au contraire il faut développer l'expertise à l'intérieur du gouvernement et peut-être, si on est pour faire des choses, on va le faire justement à l'extérieur, si on veut, mais on va se garder le développement stratégique à l'intérieur du gouvernement.

Alors, je sens mes collègues qui sont étonnés que je prenne ce temps de motion, mais, comme on discute de motions et que nous avons plusieurs jours pour le faire, j'invite tous mes collègues justement à corriger le tir pour être sûrs, M. le Président, que, s'il y a des gens qui nous écoutent encore, ce dont je doute, bien au moins qu'ils aient une version, je dirais, plus cohérente de la démarche qui est entreprise avec cette Agence des partenariats public-privé. Je pense qu'il y a lieu, à l'occasion, de nous assurer que les gens entendent bien ce qui se passe véritablement ici, aujourd'hui. Les notions de transparence, d'équité, de qualité de service, M. le Président, c'est à la base de la démarche qui se produit actuellement.

Vous savez, M. le Président, il y a dans le moment un débat, au Québec, sur le modèle québécois et il y a toutes sortes de gens qui se penchent sur cet aspect de voir comment est-ce qu'on doit aller de l'avant pour nous assurer de maintenir notre patrimoine, nos valeurs, le respect de nos institutions mais par ailleurs nous assurer que nous profitons, nous profitons des façons de faire qui se développent partout dans le monde. Et, comme le disait le chef de l'opposition actuellement alors qu'il était premier ministre: Bien, les partenariats public-privé, ça se passe dans les pays les plus socialistes. Comme capitalistes effectivement, vous avez eu des pays où il y en a eu beaucoup, la Suède notamment, vous avez un pays qui en a eu beaucoup, les Pays-Bas, vous avez l'Irlande, n'est-ce pas? Vous avez donc nombre de pays où il y a des partenariats public-privé, à part d'autres pays dont on pourrait estimer que c'est trop capitaliste, comme le Parti travailliste de Tony Blair, qui bien sûr, selon les gens d'en face, est devenu un parti, un gouvernement de droite, n'est-ce pas? Alors, M. le Président, il est financé, ce parti, principalement par les centrales syndicales, n'est-ce pas, en Grande-Bretagne. Et par conséquent il est étonnant de voir qu'on ait aussi peu, je dirais, le goût de regarder de nouvelles façons de faire.

Par conséquent, M. le Président, quant à nous, nous voulons absolument, nous voulons absolument nous assurer que les Québécois en ont pour leur argent. Les partenariats d'affaires, M. le Président, à bien des égards, ils existaient antérieurement, avant que j'arrive.

D'ailleurs, je trouve les positions de l'opposition plutôt étonnantes. Mon collègue le député de Hull y a fait mention plus tôt, bien c'est faire des virages à 180 degrés. On est pour, on est pour, on dépense, n'est-ce pas, des sommes importantes auprès d'une firme privée pour créer le plan d'affaires des partenariats public-privé, ensuite on développe le plan stratégique du Conseil du trésor avec 12 pages de partenariats public-privé, on signe une entente avec la France, on crée le bureau des partenariats public-privé, on fait tout ça, on passe une loi qui permet les partenariats public-privé dans le transport, le premier ministre, alors qu'il était premier ministre, qui est maintenant le chef de l'opposition, vante les vertus des partenariats public-privé, et tout à coup, soudainement, une espèce de virage pour le moins étonnant qui tout à coup, je pense, au lieu d'avoir l'air de représenter des convictions profondes, laisse soupçonner, M. le Président, des doutes quant aux intentions des gens que nous avons en face de nous.

n(16 h 10)n

Je vais donc, M. le Président, réitérer, pour ceux qui nous écoutent, pour qu'ils sachent ce dont on parle... c'est de justement améliorer nos infrastructures, maintenir le patrimoine de nos infrastructures, nous assurer, M. le Président, que nous faisons appel non pas au privé simplement pour construire, comme on l'a fait, avec des dépassements de coûts comme on a vu à Laval notamment, où ces gens avaient estimé des coûts à 179 millions de dollars, et le coût du métro de Laval s'élève maintenant à plus de 800 millions de dollars. Voilà un exemple notamment. Voyant également mon collègue d'en face, je lui parlerai de GIRES, qui devait coûter, n'est-ce pas, 80 millions de dollars, et donc on était rendus, M. le Président, quand on l'appliquait à tous les ministères, à 1 milliard de dollars.

Voilà le type d'environnement dans lequel nous étions. Or, j'estime, M. le Président, que les citoyens, ils ont le droit qu'on s'assure qu'on fasse les choses correctement, dans leur intérêt, puisque nous utilisons leurs impôts jour après jour et par conséquent, comme ces gens-là travaillent très fort pour gagner l'argent qu'ils gagnent, nous avons l'obligation de bien le dépenser pour être sûrs que les citoyens en ont pour leur argent.

Par conséquent, M. le Président, vous comprendrez que, pour moi, développer et surtout garder en état le patrimoine de nos infrastructures, qu'on a délaissé pendant 40 ans... 40 ans, on ne s'est pas occupé de maintenir nos infrastructures. Et par conséquent, M. le Président, je vous dis que quant à nous nous allons maintenir cette ligne parce que nous estimons qu'il est nécessaire, pour la modernisation de l'État, pour nous assurer justement que nous faisons les choses correctement, convenablement et de façon moderne dans l'intérêt des citoyens et des citoyennes... que nous allons poser des gestes et nous allons maintenir cette ligne, non pas... M. le Président, nous le faisons par conviction. Je le fais par conviction. Je vais vous le dire, je suis allée en politique tard, ce n'est pas par intérêt personnel. Je le fais par conviction. J'estime qu'il est important, au Québec, de développer les infrastructures, de les maintenir en état et d'arrêter justement de soustraire nos infrastructures de l'argent dont nos infrastructures ont besoin pour être gardées en bon état.

M. le Président, cette forme de partenariat public-privé, c'est reconnu partout. Il y a eu plein d'études à cet égard. Ça se fait à l'intérieur des coûts et à l'intérieur des délais. Quant à moi, c'est important, avant d'entreprendre un projet, de savoir combien il va coûter, parce que des histoires, au métro de Laval, des histoires de ce type, M. le Président, où les coûts quintuplent, n'est-ce pas, dans l'espace de peu de temps, je pense que les Québécois en ont soupé, de ces approches-là, ils en ont marre, ils veulent du changement et ils veulent qu'on procède différemment. Et voilà pourquoi, M. le Président, j'estime que cette Agence des partenariats public-privé va développer une expertise à l'intérieur du gouvernement pour nous éviter les écueils que nous avons connus avec la méthode traditionnelle, jusqu'à maintenant, dans bien des cas, pour nous permettre justement de mieux gérer les finances publiques, M. le Président.

M. Simard: M. le Président, en vertu de 213, est-ce que la présidente du Conseil du trésor accepterait de répondre à une question que je lui poserais à ce moment-ci?

Le Président (M. Paquin): Mme la présidente.

Mme Jérôme-Forget: M. le Président, je vais montrer la même ouverture qu'ils montrent, eux, à notre égard, et c'est non.

Le Président (M. Paquin): Donc, Mme la présidente du Conseil du trésor, merci pour votre intervention.

M. Lelièvre: M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Paquin): Oui, M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: Est-ce que la présidente du Conseil du trésor accepterait de répondre à une question, une brève question concernant son intervention qu'elle vient de faire sur...

Des voix: M. le Président, ce n'est pas une question de règlement.

M. Lelièvre: Oui, en vertu de 213.

Des voix: Non, ce n'est pas une question de règlement.

M. Lelièvre: Bien oui, bien oui. On fait appel au règlement. On demande... Il a à demander à la présidente du Conseil du trésor si elle veut répondre à une question.

Le Président (M. Paquin): Bon, bon, bon. S'il vous plaît! S'il vous plaît! J'ai compris votre question, M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: C'est inscrit dans le règlement, donc...

M. Paquin: Mme la présidente, voulez-vous répondre à la question en fonction de 213?

M. Cholette: Oui, mais ce n'est pas une question de règlement. La ministre a répondu, M. le Président. C'est déjà fait.

M. Lelièvre: Elle a répondu au député de Richelieu. Le député de Gaspé demande, en vertu de 213... Bon, quand on fait appel au règlement, c'est toujours une question de règlement. D'ailleurs, vous êtes assez expérimenté pour le savoir. Vous l'avez utilisé abondamment et vous l'utilisez encore.

Le Président (M. Paquin): Parfait. M. le député de Gaspé, j'ai très bien compris. Mme la présidente, voulez-vous répondre à la question du député de Gaspé en vertu de 213? Vous avez le choix entre oui et non.

Mme Jérôme-Forget: M. le Président, j'ai répondu tantôt, j'ai donné ma réponse.

Le Président (M. Paquin): Parfait. Très bien. Donc, il n'est pas question de répondre à aucune intervention en vertu de 213. Y a-t-il d'autres intervenants? Mme la députée de Mirabel.

Mme Denise Beaudoin

Mme Beaudoin: Merci, M. le Président. Alors, mon collègue de Gaspé a déposé une motion qui est très importante, qui se lit comme suit:

«Il est proposé qu'en vertu de l'article 244 de nos règles de procédure la Commission des finances publiques tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 61, Loi sur l'Agence des partenariats public-privé du Québec, des consultations particulières quant à tous les articles dudit projet de loi et qu'à cette fin elle entende la Protectrice du citoyen.»

À ce moment-là, on voit toute l'importance... Parce qu'on aurait des questions à poser à la Protectrice. On avait des questions à poser aux gens qui sont venus. Je sais qu'ils sont déjà venus, mais on a encore des questions additionnelles à poser à ces gens-là. La Commission d'accès à l'information, on a demandé tantôt une motion, et puis ils ont voté contre. On voulait les entendre, ils n'étaient pas d'accord. Aujourd'hui, on veut également entendre la Protectrice du citoyen, puis je pense que, s'ils sont de bonne foi, ils vont permettre qu'on puisse questionner la Protectrice du citoyen.

D'ailleurs, M. le Président, j'ai devant moi une lettre adressée à la présidente du Conseil du trésor, signée par justement la Protectrice du citoyen, et elle soulève de nombreuses interrogations, des interrogations que je suis certaine que les Québécois et les Québécoises se posent également. Je vous réfère à la page 4 de cette lettre. Voici les interrogations de la Protectrice du citoyen. Il y en a d'autres avant, mais mon collègue de Gaspé a soulevé plusieurs interrogations. Pour ma part, ce serait concernant les articles 14, 15 et 55, concernant les filiales de l'agence et leur contrôle.

Voici ce que cette lettre très importante dit, comme je l'ai mentionné, signée par la Protectrice du citoyen: «Conformément aux articles 14 et 15 du projet de loi, l'agence pourra acquérir ou constituer des filiales qui seront, comme l'agence, considérées comme des mandataires de l'État. Or ? voici la question qu'elle se pose ? si l'article 55 du projet de loi assujettit l'agence au contrôle du Vérificateur général, il est silencieux à l'égard de ses filiales.» Voilà une autre question qu'elle se pose: «Ne devraient-elles pas, au même titre que l'agence et que tout autre organisme public, être assujetties tant au contrôle du Vérificateur général que du Protecteur du citoyen?» Et elle termine: «Il me semble que l'article 55 devrait être plus clair à ce sujet», M. le Président.

Comme je l'avais déjà mentionné, vous savez, le projet de loi, là, donne des pouvoirs excessifs à cette agence. Le projet de loi n° 61 instaure l'agence et lui confère des pouvoirs très étendus. Je les répète pour les fins de l'enregistrement. Cette agence-là conseille le gouvernement sur toute question relative aux PPP; met à la portée des personnes intéressées un centre de connaissances et d'expertise; informe les organismes publics, le milieu des affaires et le public en général sur le concept de gestion publique en mode de PPP; élabore et met en oeuvre des stratégies de promotion en vue de favoriser les PPP; suscite, accueille, évalue et propose des projets de PPP; et fournit aux organismes publics tout service d'expertise. Évidemment, on a proposé certains amendements, mais il reste quand même que le pouvoir de cette agence est énorme.

n(16 h 20)n

Et je reviens à cette lettre qui a été signée par la Protectrice du citoyen, qui est très inquiète concernant d'autres articles, M. le Président. Elle s'inquiète de l'article 19, les autres fonctions de l'agence, et voici ce que la Protectrice du citoyen relate: «Comme dans plusieurs lois instituant des organismes publics, celle-ci contient une clause prévoyant que l'agence pourrait être appelée à exercer "toute autre fonction que lui attribue le gouvernement".» Et c'est toujours la Protectrice qui parle: «Je comprends qu'il s'agit là d'une clause usuelle, visant à laisser à l'agence une marge de manoeuvre lui permettant de s'adapter à l'évolution des dossiers.» Mais, M. le Président, «tel que formulé [...] l'article 19 ? elle dit ? me semble trop général. Ne devrait-on pas s'inspirer d'autres lois plus explicites à ce sujet, comme la Loi sur la Corporation d'hébergement du Québec, et préciser qu'il s'agit des fonctions nécessaires à l'exécution de la mission de l'agence?»

Quand c'est rendu que la Protectrice s'interroge sur ces articles-là, c'est que ce n'est pas tellement clair. Il y a une chose qui est claire, c'est que ce n'est pas clair. On continue avec l'article 20. On dit également qu'elle s'interroge sur l'article 20. Si c'était un article de temps en temps... Mais là on continue, puis c'est un article après l'autre. L'article 20 l'inquiète également, comme il inquiète tous les Québécois et les Québécoises. La nomination des membres du conseil d'administration de l'agence. On l'avait déjà soulevé auparavant parce qu'on avait changé de nombre, on est passé de 12 à 15, puis... Bon. Ça aussi, ce n'est pas clair.

Alors, elle-même, elle s'interroge. Elle dit: «Au chapitre de l'organisation et du fonctionnement, le projet de loi édicte que l'agence sera administrée par un conseil d'administration dont les membres seront nommés par le gouvernement. Il s'agit là d'une prérogative légitime ? évidemment ? et qui est prévue par de nombreux organismes publics.» Jusque-là, ça va. «Toutefois, compte tenu de la volonté de l'État de s'engager davantage dans la voie des PPP...» Parce que, même si la ministre nous dit que finalement ce sera simplement des grands projets, on s'aperçoit que ce n'est pas exactement ça. Alors, je continue. La Protectrice nous dit: «Toutefois, compte tenu de la volonté de l'État de s'engager davantage dans la voie des PPP, ne serait-il pas envisageable de prévoir dans la loi des mécanismes de consultation auprès des groupes intéressés, telles les associations patronales et syndicales, avant de procéder à la nomination des membres du conseil d'administration?» Ça, je pense que ça va de soi.

Et elle donne un exemple. «À titre d'exemple ? encore là, on continue avec les articles qui soulèvent toujours de l'inquiétude, autant pour la Protectrice que pour les Québécois et les Québécoises ? l'article 21 de la Loi sur le ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale et instituant la Commission des [PPP] ? on parle des partenariats du marché du travail ? de même que l'article 6 du projet de loi n° 55, Loi modifiant la Loi sur la Société de l'assurance automobile du Québec et autres dispositions législatives, comportent des mécanismes de consultation. Une telle procédure assurerait une représentation équitable...» Pourquoi on le fait là puis on ne le fait pas ici? Ça, c'est une question également que les Québécois et les Québécoises se posent?

Et la Protectrice du citoyen est encore inquiète et elle continue avec les articles 37 et 44. Et là je pense que c'est un sujet qui intéresse tout le monde. On parle de l'éthique et de la déontologie. «L'article 37 du projet de loi édicte des normes pour empêcher les conflits d'intérêts chez les membres du personnel de l'agence.» Bon. Là, ça va, mais «l'article 44, par ailleurs, oblige l'agence à déterminer dans son règlement interne des règles en matière d'éthique et de déontologie auxquelles seront assujettis les membres des divers comités créés en vertu de l'article 39 du projet de loi».

Voilà ses inquiétudes. Elle dit: «Compte tenu de l'importance accrue des questions d'éthique et de déontologie, et sans préjuger du contenu d'un tel règlement que pourra adopter la future agence, la loi ne devrait-elle pas prévoir explicitement que les normes édictées au Règlement sur l'éthique et la déontologie des administrateurs publics s'appliquent aussi au personnel et aux membres des comités, en y apportant les adaptations nécessaires?» C'est quand même des interrogations sérieuses. Là, on est rendus, là, ce n'est pas simplement un questionnement, on en a deux, on en a trois, on en a quatre, et je n'ai pas eu le temps de terminer, mais c'est simplement pour vous dire qu'à partir du moment que la Protectrice du citoyen a toutes ces interrogations-là, c'est très important qu'elle vienne ici et qu'on puisse la questionner parce qu'elle-même, elle se questionne et, nous, nous avons des questions à nous poser. Et les Québécois et Québécoises ont le droit de savoir ce qui se passe. Merci.

Le Président (M. Paquin): Merci, Mme la députée de Mirabel. Oui. M. le député de Montmorency. Vous avez 10 minutes.

M. Raymond Bernier

M. Bernier: Merci, M. le Président. Donc, ça me fait plaisir d'intervenir aujourd'hui sur cette proposition d'entendre à nouveau ? je dis bien «à nouveau» ? la Protectrice du citoyen. Parce que celle-ci, comme on a vu tout à l'heure, a déposé un mémoire. Elle s'est présentée ici, en commission; mes collègues du gouvernement, mes collègues de l'opposition étaient présents. On a reçu des commentaires, on a pu l'interroger, connaître ses points de discussion, ses interrogations. Et, suite à cela, bien ça a permis à la présidente du Conseil du trésor d'examiner ces éléments-là et d'apporter des corrections sous forme d'amendements.

Parce que, du côté du gouvernement, on a écouté. On a écouté les gens qui sont venus ici se prononcer pour être capables d'apporter toutes les corrections voulues et d'être capables de fournir un projet de loi qui répond aux attentes de ces organismes. Bien sûr, ce sont des organismes importants, et c'est des organismes que, peu importent les gouvernements, on se doit de consulter. Et, moi, ce qui me surprend actuellement, c'est... lorsque le précédent gouvernement a adopté la loi n° 64, je n'ai pas trouvé de documents me permettant de conclure que ces organismes ont été consultés. Et ça, ça m'attriste. Ça m'attriste parce qu'aujourd'hui on veut réentendre une deuxième fois ces organismes-là, alors qu'on ne les a pas entendus une première fois, il semblerait, lors de l'adoption de la loi n° 164.

Bien sûr, M. le Président, je n'étais pas ici, à ce moment-là, au Parlement. Sauf qu'à ce moment-là il faut quand même que je me pose des questions. Ce qu'on demande aujourd'hui, est-ce qu'on l'a fait dans le passé? Et je suis obligé de conclure que je n'ai aucune information me permettant de vérifier cette possibilité-là et aussi que ces gens-là, que ce soient la Protectrice du citoyen, le Vérificateur général, la Commission d'accès à l'information, ces gens-là sont quand même des gens fort occupés. Donc, au moment où on leur demande de nous présenter un mémoire, de se présenter en commission, de faire des recommandations, bien il faut être sûrs, là, qu'on ne vient pas les déranger pour rien et qu'on va procéder pour répondre à leurs attentes.

Et c'est ce qu'on a fait du côté de la présidente du Conseil du trésor. Celle-ci, avec toute son équipe, s'est appliquée pour répondre aux interrogations déposées. D'ailleurs, je regarde la députée de Mirabel qui, tout à l'heure, est allée, article par article, en fonction des demandes de la Protectrice du citoyen. Bien, sur ça, considérant qu'elle se donne la peine d'analyser chacun des articles, il serait peut-être intéressant qu'on débute, qu'on débute, Mme la députée, l'analyse du projet de loi article par article et qu'on puisse valider le travail que vous avez fait tout à l'heure, que vous avez mentionné.

Vous vous interrogez et vous vous posez des questions, mais, écoutez, nous, on est tout ouverts, du côté du gouvernement, à vous fournir réponse à vos questions et s'assurer que ces amendements-là et ces corrections-là ont été apportés. Mais, pour procéder, pour faire ça, il faut qu'on débute l'analyse article par article, et ça, ça fait déjà une quinzaine d'heures qu'on vous le mentionne. On est prêts à répondre à toutes vos questions. La présidente du Conseil du trésor, tout à l'heure, dans son énoncé, vous a mentionné tout le travail qui avait été fait et elle est prête à tout présenter les amendements qui sont apportés ou qui devront être apportés.

n(16 h 30)n

Parce que, moi, je suis persuadé que des parlementaires, des parlementaires qui travaillent en commission parlementaire... Parce que j'ai l'occasion de travailler pas seulement ici, au niveau de la Commission des finances publiques, mais également à la Commission de l'administration publique et, lorsque je travaille à la Commission de l'administration publique, M. le Président, j'ai l'occasion de voir des gens, des parlementaires des deux côtés de la Chambre travailler ensemble. Eh oui, M. le Président, on peut travailler ensemble à l'amélioration de la qualité d'un projet de loi ou à l'amélioration d'un organisme gouvernemental, O.K.? C'est ce qu'on fait en Commission de l'administration publique.

Alors, l'interrogation que j'ai, pourquoi ne pas débuter le projet de loi? Pourquoi ne pas débuter article par article celui-ci et apporter les amendements nécessaires? S'il y a des articles qu'ils ne sont pas d'accord, l'opposition n'a qu'à voter contre, mais au moins nous allons pouvoir avancer. Et je suis persuadé que les gens qui nous regardent, c'est à ça qu'ils s'attendent, qu'on puisse commencer à travailler article par article et apporter les corrections. Parce qu'il faut encore revenir à l'élément principal, hein? Le projet de loi, c'est la création d'une agence. Pas la création d'une agence avec 200 personnes. Non, non. Création d'une agence de 15 à 19 personnes, O.K., maximum, avec un conseil d'administration de neuf personnes: quatre personnes du public, quatre personnes du privé, un P.D.G... Partenariat public-privé, donc 4-4.

Aujourd'hui, si on travaillait à créer une organisation où on s'attend d'avoir 2 000 à 3 000 personnes qui vont travailler partout à travers le Québec, je vous dirais: Bien, écoutez, c'est normal qu'on creuse, qu'on creuse, et tout ça. Mais ce n'est pas ça qu'on fait. On a donné toute l'information. C'est un petit organisme, un organisme-conseil, dont l'objet est de permettre au gouvernement d'avoir, à l'intérieur de son coffre d'outils, O.K., un nouveau moyen pour améliorer ses infrastructures. Parce qu'on a le devoir, M. le Président, on a le devoir d'assurer et de léguer aux générations futures des infrastructures en bon état, et ça, ça devient un outil supplémentaire qu'on peut analyser dans les modalités de réfection de nos infrastructures, et c'est tout.

Parce qu'actuellement on n'a pas à se poser la question et on ne se pose pas la question est-ce qu'on va faire des PPP ou on n'en fera pas. La question, au niveau du projet de loi, c'est d'avoir une agence qui va analyser l'opportunité d'en faire, en fonction de nos infrastructures, pour en faire les réparations et en faire également l'entretien et la construction. C'est tout, M. le Président. Un organisme de 15 à 19 personnes, conseil d'administration, neuf, c'est tout ce qu'on à faire. Et toutes les appréhensions en regard des quatre... et ce qu'on peut dire des quatre chiens de garde du gouvernement, on y a répondu et on est prêts à y répondre encore, mais, pour faire ça, il faut débuter l'analyse article par article du projet de loi.

Donc, moi, M. le Président, en terminant, je fais le voeu, je fais le voeu que nous puissions débuter dans les plus brefs délais l'analyse du projet de loi, et que l'ensemble des Québécois et Québécoises qui nous regardent vont pouvoir s'assurer que le travail des parlementaires est constructif, et que nous aurons un nouvel outil nous permettant d'assurer le bien-être de notre collectivité. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Paquin): Merci, M. le député de Montmorency. Je vais reconnaître maintenant le député de Richelieu. M. le député, vous avez 30 minutes pour faire valoir vos idées.

M. Sylvain Simard

M. Simard: Merci, M. le Président. Il me fait grand plaisir, à ce moment-ci, d'intervenir sur la motion de mon collègue de Gaspé, une motion, selon l'article 244 de nos règlements, qui demande que nous consultions, sur les amendements et le projet de loi ? c'est très important de le dire, sur les amendements ? après le dépôt des amendements donc, la Protectrice du citoyen.

La raison est très simple. Je vais la résumer en deux mots, tout le monde le comprendra très bien: contrairement à ce que vient de dire le député de Montmorency, c'est vrai que tout le monde a écouté, mais je pense qu'on n'a pas beaucoup entendu. Aucune des interrogations de la Protectrice du citoyen, aucune des mises en garde ne se retrouve... dans aucun cas il n'y a de réponse dans les amendements de la présidente du Conseil du trésor. Donc, il est très pertinent, à ce moment-ci, de nous assurer que la Protectrice du citoyen puisse venir nous informer sur le projet de loi tel qu'il est devenu après le dépôt des amendements.

Je reviendrai plus tard sur l'importance de la Protectrice du citoyen, l'importance des remarques qu'elle nous a faites, notamment concernant les dispositions de l'article 13 sur la portée de la loi. J'y reviendrai plus tard, mais je voudrais quand même répondre ici aux propos de la présidente du Conseil du trésor et de certains députés concernant l'importance de ce projet de loi. M. le Président, s'il ne s'agissait que d'un petit projet de loi ? c'est ce qu'on essaie de nous dire, un tout petit projet de loi de rien du tout, qui crée une petite agence, avec quelques fonctionnaires, dont le but sera uniquement de conseiller le gouvernement ? si c'était le cas, j'ai l'impression qu'on mettrait un peu moins d'efforts. C'est un projet de loi qui a 75 articles, c'est un projet de loi qui actuellement est débattu dans toutes les couches de la société québécoise et c'est un projet de loi qui vient directement, j'allais dire, des convictions de la présidente du Conseil du trésor. Tout à l'heure, elle nous disait elle-même qu'elle y engageait toutes ses convictions, et je suis, moi, pour ma part convaincu qu'elle a raison. C'est un projet de loi issu directement des principes que le premier ministre Charest, le premier ministre du Québec avait énoncés dès son arrivée au pouvoir, qui répond très directement à la critique de l'État québécois que fait depuis très longtemps, et encore davantage, de façon intensive, depuis la dernière élection, la présidente du Conseil du trésor.

M. le Président, il ne s'agit pas d'un projet de loi banal, il ne s'agit pas d'un petit projet de loi secondaire. C'est un projet de loi qui va impliquer des milliards de dollars en infrastructures, qui va impliquer, possiblement, parce que c'est dans la loi... Moi, je vous dis tout de suite, nous ne sommes pas ici pour discuter des discours sur la loi de la présidente du Conseil du trésor, nous sommes ici pour discuter de la loi telle que libellée. Nous, de l'opposition, nous avons, devant nous, une loi en 75 articles avec une quinzaine d'amendements, et c'est ça que nous sommes appelés à débattre, c'est de cela dont il faut discuter ici.

Un peu pour répondre à la présidente du Conseil du trésor, qui tente de minimiser l'impact de ce projet de loi ? d'ailleurs, elle l'a fait systématiquement tout au long... les conseillers en communication du Conseil du trésor et du gouvernement ont sans doute trouvé que c'était la meilleure façon de faire avaler la pilule, d'essayer d'éviter le grand débat public en sous-estimant, tout au long des auditions et dans le débat public, sous-estimant la portée réelle de ce projet de loi ? je vous rappelle que ce projet de loi concerne tous les ministères et organismes, qu'il va permettre le recours aux partenariats public-privé pour toutes les infrastructures et tous les services publics, potentiellement, puisque la loi est très claire là-dessus, elle autorise à le faire.

D'ailleurs, il y a des gens qui ont compris ça. Il y a beaucoup de gens, d'ailleurs ceux qui sont venus en général ici, y compris les défenseurs des partenariats public-privé, qui ont vu, et qui nous l'ont dit, que cette loi permettait tout au gouvernement, permettait à la ministre de mettre en place ces partenariats privé-public dans tous les domaines. Mais, il y a quelques semaines, il y a la Revue Commerce qui publiait un supplément sur le droit, sur les avocats et les PPP. C'est intéressant, j'en ai une photocopie ici, je ne vais pas tout vous lire, mais il y a des passages qui sont absolument succulents. C'est des passages qui nous disent bien que, pour certaines personnes en tout cas, le discours de la présidente du Conseil du trésor n'a pas été entendu. Pour eux, c'est une loi très importante. Le titre, d'ailleurs, c'est: PPP prêt, le lancement des partenariats public-privé au Québec ouvre la porte à un marché très lucratif pour les avocats. Comment en profiter? Ça, c'est le titre de ce numéro, hein? «Très lucratif pour les avocats, comment en profiter?»

n(16 h 40)n

«On a gagné!» Le début de l'article, l'accrochage de l'article, c'est sur un premier cas de PPP qui... Pendant que nous discutons, nous, de la création de l'agence, les PPP commencent. D'ailleurs, elle nous a présenté... l'autre jour, la présidente du Conseil du trésor nous a présenté l'actuel secrétaire associé au Conseil du trésor sur ces questions comme étant déjà à l'oeuvre, étant déjà le P.D.G. de cette agence. Enfin, elle a rectifié par la suite, mais le fait est que tout cela est en marche, ne nous racontons pas d'histoire.

«"On a gagné!" John Lemieux n'a pu retenir sa joie en mai dernier, lorsqu'il a reçu un courriel de la Société immobilière du Québec. Le message confirmait que le cabinet Fraser Milner Casgrain venait d'être retenu pour représenter la société d'État dans le cadre du projet de construction de l'Orchestre symphonique de Montréal. "Pour nous, c'est un mandat stratégique", dit-il ? alors, il est très content, là; alors ? c'est le premier partenariat public-privé donné à un cabinet par une administration publique québécoise depuis que le gouvernement Charest a annoncé son intention d'aller de l'avant avec le programme. "Une dizaine de bureaux d'avocats avaient répondu à l'appel d'offres" ? sûrement quelques-uns ont été un peu déçus ? nous dit Lemieux, "mais nous, nous sommes contents". On parle d'investissements potentiels de plusieurs milliards, au cours des prochaines années, de retombées de dizaines de millions de dollars pour les cabinets de droit. C'est un marché énorme, car les compétences juridiques seront mises à contribution.»

On va plus loin que ça: «Dans les bureaux d'avocats, les téléphones sonnent d'ailleurs plus fréquemment, ces temps-ci. À l'autre bout du fil, les clients cherchent à s'informer sur ces fameux partenariats. Investisseurs, constructeurs, opérateurs, on dirait qu'ils n'ont plus que ce sigle à la bouche. Même les avocats ressentent la fièvre. "Il n'y a pas si longtemps, personne ne s'intéressait à ce que je faisais. Désormais, mes collègues me consultent régulièrement", dit M. Lindonsky, spécialiste des partenariats public-privé pour Heenan Blaikie à Montréal.»

Et ça continue comme ça. «Dès 2005, les PPP pourraient prendre une autre ampleur ? alors ça, c'est l'article qui se poursuit, là, alors ce sont les gens du milieu, là, c'est la perception des gens du milieu ? écoles, hôpitaux, prisons, infrastructures sportives et culturelles, autoroutes, transport en commun, sur le papier, tous les secteurs sont susceptibles d'être concernés ? vous voyez, c'est la petite agence dont on parlait tout à l'heure, qui n'avait à peu près aucune importance, juste une petite agence-conseil de rien du tout, là. "Il ne s'agira pas pour autant d'un raz-de-marée ? on le signale ? mais le secteur est tellement rentable ? nous dit l'avocat de chez Fasken Martineau; le secteur est tellement rentable ? que certains ont même recentré leur travail uniquement sur ces activités."»

Alors, l'article poursuit tout au long sur cette fièvre qui s'empare... D'ailleurs, on indique, à quelques endroits, à quel point c'est très rentable. Parce que les partenariats public-privé, pour le avocats, ça représente souvent des centaines et des milliers de pages de contrat, ça dure pendant des années, c'est extrêmement lucratif. Sur un contrat en PPP, la partie qui va aux avocats pour la rédaction des contrats est souvent extrêmement élevée. On parle souvent de plusieurs dizaines de millions de dollars pour simplement établir les contrats, pour toute la partie juridique de ces contrats.

Vous voyez, cette petite agence de rien du tout qu'on essaie de nous présenter comme: Vraiment, on ne comprend pas pourquoi l'opposition parle de ça, pose des questions, essaie d'amener un véritable débat... Parce qu'en fait, si nous faisons le débat autour de l'agence, c'est que le gouvernement a bien tout fait pour éviter que le débat ait lieu autour de la formule des partenariats public-privé. Et c'est à l'occasion de la création de cette agence que sont venus ici, en commission parlementaire, des dizaines de groupes faire le débat sur les partenariats public-privé.

Vous savez, la façon dont nous présentent ces partenariats la présidente du Conseil du trésor et le gouvernement est toujours un petit peu... Ça me rappelle d'ailleurs un groupe qui était venu ici, puis ça avait été charmant, des gens qui, dans leur présentation, avaient décidé de mettre des lunettes roses. Je pense que c'était très symbolique comme présentation. C'est toujours avec des lunettes roses. On ne voit que les avantages, on ne voit aucun inconvénient. C'était... Vraiment, c'est... La présidente du Conseil du trésor, tout à l'heure, a été très, très honnête. Et elle a raison, hein, elle n'a aucun intérêt personnel, elle, là-dedans. Ses convictions, hein? Ce sont des gens qui ont une idéologie, hein, le privé, la supériorité du privé dans tous les secteurs, et, cette idéologie, il faut l'appliquer. Et les partenariats public-privé, c'est la façon la plus acceptable de faire passer ce remplacement graduel du public par le privé. Vous avez, dans le projet de loi, tout ce qu'il faut, dans tous les secteurs d'activité, pour permettre ce changement radical dans la façon de gouverner le Québec.

Vous avez été conscient, M. le Président, puisque vous avez suivi nos débats, je pense, tout au long, que les gens qui sont venus ici n'ont pas tous partagé l'enthousiasme de la présidente du Conseil du trésor. À part les groupes qui avaient visiblement tout à fait intérêt à ce que ça se fasse... Je vous ai donné tout à l'heure la réaction de certains groupes d'avocats, par exemple, des avocats d'affaires. Je ne dis pas tous les avocats. Vous savez, ça ne concernera que quelques ? et l'article est très clair là-dessus, que quelques ? gros bureaux qui pourront se permettre des avocats spécialisés, des équipes multidisciplinaires d'avocats spécialisés. Ce n'est pas votre avocat du coin qui pourra se faire de l'argent avec ça, là. Je veux tout de suite les prévenir, il n'y a pas d'illusion à se faire. Mais, pour les gros bureaux d'avocats qui salivent déjà de façon ouverte à la venue de ces contrats, il est bien certain que les partenariats public-privé, c'est intéressant. De la même façon, ceux qui feront les montages financiers de ces projets, il y a beaucoup d'argent à faire.

La revue L'actualité, il y a 15 jours, mentionnait l'apparition d'un phénomène, en Angleterre, qui est assez récent. Il fallait arriver à la réalisation et à la maturité d'une première génération de PPP pour prendre conscience de ce phénomène. C'est qu'il y a maintenant un second marché des PPP, pratiquement d'ailleurs un marché noir, un deuxième marché. C'est-à-dire, vous avez des gens qui négocient avec l'État, là, et qui réalisent des partenariats avec l'État, qui prennent un certain nombre de risques avec l'État, mais, une fois que c'est réalisé, ils revendent leurs contrats, et là c'est payant parce que, les risques étant pris, ayant été choisis, ayant défini eux-mêmes avec l'État les conditions des contrats, les risques étant terminés, là, ça devient drôlement intéressant. Et le phénomène semble prendre de l'ampleur. L'État qui pense faire affaire avec le groupe X pour s'entendre pour réaliser un partenariat pendant 25, 30, 35 ans pourrait se retrouver, peut se retrouver avec un groupe Y qui a racheté simplement la partie privée du contrat. Personne ne peut empêcher le propriétaire d'un contrat de vendre sa part, hein, ça fait partie, là, des normalités de la vie. Mais il faut savoir qu'il y a effectivement beaucoup d'argent à faire pour le privé dans ces contrats de partenariats public-privé.

Pour l'État, c'est moins évident. J'ai déjà eu l'occasion de démontrer, à plusieurs reprises, que les coûts, dans ces projets qui durent souvent 25, 30 ans, qui impliquent des centaines de millions de dollars dans certains cas, des dizaines de millions dans d'autres, les coûts de financement sont l'un des éléments, sinon l'élément le plus important. Et nous avons pu démontrer très facilement que ces coûts de financement sont plus élevés dans le privé qu'au public. C'est normal. D'ailleurs, quand ils ne sont pas plus élevés, c'est, comme pour le pont de la Confédération, qu'il y a une loi du Nouveau-Brunswick qui garantit aux investisseurs un certain taux de rendement. Alors, il n'y a aucun risque de la part du privé, c'est le gouvernement qui prend tout le risque, qui garantit un taux. Mais, lorsqu'il y a véritable partage de risques, ce n'est pas du tout ça qui se passe, vous vous en doutez bien.

Alors, nous avons des partenariats public-privé qui vont se faire non seulement avec des coûts d'emprunt plus élevés que dans le public, mais également avec ? ce qui est tout à fait normal et ce n'est pas un reproche, ce n'est pas un point de vue moral, c'est une réalité; avec ? une marge de profit, on le sait très bien. Et, pour peu que vous suiviez un petit peu, M. le Président, le marché financier des dernières années et l'exigence présentée par les marchés boursiers, notamment de rendement accéléré, de rendement rapide, il faut que ça rapporte, les PPP, et, si ça rapporte, quelqu'un paie, hein? Si ça rapporte et quelqu'un paie, c'est donc que c'est à l'avantage évidemment du partenaire privé.

C'est donc dire que le citoyen, soit comme contribuable... Et, comme contribuable, évidemment, très souvent il sera lié, hein? L'obligation sera faite à l'État, l'obligation sera faite au gouvernement, pendant la durée de ce contrat, de verser, chaque année, chaque mois, chaque semaine, un certain montant pour assurer la participation de l'État à ce partenariat public-privé. Donc, l'État devra... Sinon, c'est le contribuable. Cette fois-ci, c'est le consommateur qui devra payer par une tarification. Ça, c'est une autre façon d'agir. Le citoyen non seulement paie-t-il des impôts, mais, lorsqu'il utilise ces infrastructures, en plus il doit payer, on doit faire appel à son paiement, hein, à des péages, à des tarifs. Il doit payer l'eau qu'il reçoit, il doit payer le service qu'on lui donne et il doit payer.

n(16 h 50)n

Alors, évidemment, ça n'apparaît pas, à ce moment-là, à l'endettement de l'État, c'est merveilleux. Pendant quelques années d'ailleurs, au début des partenariats public-privé, comme la comptabilité de ces partenariats, contrairement à la comptabilisation des emprunts gouvernementaux, qui doit se faire dans l'année de réalisation des contrats, là, ça va simplement se charger petit à petit, comme la carte de crédit, hein? C'est toujours moins impressionnant, une carte de crédit, qu'un emprunt hypothécaire qui représente 60 000, 70 000, 100 000 $ sur 25 ans et qui, à la fin de sa réalisation, représente parfois deux, trois fois ce montant. Mais, dans le cas des partenariats public-privé, c'est beaucoup plus simple: vous payez chaque année. Comme votre carte de crédit, vous payez chaque mois ce que l'on vous demande. L'ennui, c'est qu'on n'y voit pas très clair dans l'endettement de l'État, c'est le moins qu'on puisse dire, et que les coûts risquent d'être très élevés, et surtout que les surprises risquent d'être très longues.

Il y a beaucoup d'organismes qui se sont penchés, au cours des dernières années, sur cette comptabilisation des partenariats public-privé. Nous n'avons jamais eu d'information, de la part de la présidente du Conseil du trésor, sur le mode de comptabilisation qu'elle entendait utiliser. Les Européens... Eurostat, notamment, un organisme statistique européen, a fait une proposition assez intéressante où en fait, à toutes fins pratiques, dès que le risque n'était pas assumé à 100 % par le privé ou de façon très dominante par le privé, cela apparaît au compte de l'État, dès le début du partenariat. Il y a d'autres formules qui ont été analysées et présentées par certains groupes. On ne sait pas ce qu'il en adviendra ici.

Ce que l'on sait, c'est que visiblement l'un des premiers objectifs des partenariats public-privé, c'est de faire croire, pendant un certain nombre d'années, que l'on est moins endettés que l'on ne l'est. On a réalisé des grands projets, on s'est servi du financement du privé, et maintenant payez, maintenant. Il faut maintenant payer, pendant 10, 15, 20, 25, 30 ans, tout le long que ça dure. Ça n'apparaît pas comme dette publique. Alors, on se dit: C'est bien, on n'augmente plus la dette, maintenant. Mais ça augmente l'endettement réel de chacun des ministères de façon souvent beaucoup plus élevée que la dette refinancée, la dette publique, la dette qu'on appelle la dette subventionnée, où l'État peut, par les moyens de ses hauts fonctionnaires, le ministère, les ministres...

Au ministère des Finances, ils ont une équipe absolument remarquable, M. le Président, de fonctionnaires qui s'occupent du refinancement de la dette pour s'assurer que l'État bénéficie toujours du meilleur taux possible. Et c'est assez phénoménal de voir à quel point il réussissent cette opération, de voir à quel point ils gèrent très correctement. Vous savez, au ministère des Finances, il semble peut-être que ce soit une orientation qui ne soit plus celle du gouvernement, mais jusqu'à maintenant ça a toujours été de grands professionnels qui ont géré le ministère des Finances. Et cela nous a permis de gérer de façon très adéquate, notamment, la dette de l'État.

Alors, M. le Président...

Une voix: ...

M. Simard: Il me reste 10 minutes? Je voudrais vous parler de la Protectrice du citoyen, puisqu'elle est venue nous voir et s'est interrogée sur ces partenariats public-privé. La Protectrice du citoyen, je vous le rappelle, pour ceux qui ne la connaîtraient pas... Mais c'est une institution en général assez bien connue, une institution qui a pris naissance, on se le rappellera, dans les années soixante en Suède, dans les pays nordiques. C'étaient les fameux ombudsmans. Et cette idée d'avoir dans l'État une personne qui prend le parti du citoyen dans ses démêlés avec l'État, un recours ultime du citoyen, s'est répandue dans plusieurs pays occidentaux. Et nous avons, nous, créé, il y a une vingtaine d'années, ce poste de Protecteur du citoyen, ce poste de Protecteur du citoyen qui est tellement important dans nos institutions qu'il est... qu'elle est nommée... C'est une femme, c'est Mme Pauline Champoux-Lesage qui l'occupe actuellement. Me Jacoby l'a occupé pendant un assez grand nombre d'années. Nous avons eu des gens, je pense, en général de grande valeur à ce poste.

Cette loi, elle est tellement importante que la personne qui est nommée Protectrice du citoyen n'est pas nommée par le gouvernement mais est nommée par l'Assemblée nationale, au-dessus des partis. Les partis doivent s'entendre. Les députés doivent voter, et c'est à la majorité des deux tiers... En fait, dans tous les cas que j'ai connus, c'est à l'unanimité de la Chambre que ces personnes ont été nommées. C'est vous dire l'importance... où la barre est mise. Ce ne sont pas des rôles secondaires dans l'État.

La Protectrice du citoyen est venue ici, et que nous a-t-elle dit, en résumé? Beaucoup de choses. Mais elle nous a dit surtout que ce projet de loi, tel qu'il est, ne lui permettra pas de jouer son rôle dans un secteur qui risque d'être de plus en plus important. Je vous ai dit tout à l'heure que le secteur des partenariats public-privé, dans quelques années, risque de jouer un rôle majeur, autant dans les services que dans les infrastructures. On parle de réduire de 20 % la fonction publique québécoise. Une bonne partie de ce qu'est la fonction publique québécoise, semble-t-il, pourrait être, comme cela, remplacée au profit de ces partenariats public-privé.

Et, ce que nous dit la Protectrice du citoyen: Tout ce nouveau secteur risque d'échapper à ce contrôle, cet ultime contrôle de la Protectrice du citoyen. Il y a, dans la loi actuelle créant cette agence, toutes les possibilités pour que la réalité des contrats en partenariat public-privé échappe au pouvoir de la Protectrice du citoyen. C'est très grave, ça. C'est très grave. Et je me serais attendu que, dans les amendements, la ministre en tienne compte et se dise: Bien, écoutez, j'ai été mise en garde, il faut donc en tenir compte. Mais malheureusement ce n'est pas possible. On ne peut pas à la fois déléguer vers le privé et retenir à l'État. C'est ça qui fait qu'il faut se dire: Le grand problème de ce gouvernement, dans le cas de cette agence, de ce projet de loi n° 61, c'est qu'on se déleste vers le privé non seulement du financement, non seulement de la construction, de la réalisation, mais également des moyens que les citoyens, que la société, que l'Assemblée nationale s'est donnés pour protéger les citoyens.

Parce que les rapports des citoyens avec l'État sont souvent difficiles. Il y a des mécanismes d'appel, nous avons des tribunaux administratifs, il y a... Petit à petit, nous avons raffiné, dans la pratique quotidienne de la gestion publique, un certain nombre de mécanismes. Mais, nous qui sommes des députés, nous le savons puisqu'il n'y a pas de mois où nous n'avons pas des cas difficiles qui viennent nous voir, des cas de gens qui sont aux prises, depuis des années, avec une administration, un ministère, un organisme qui, ont-ils le sentiment, ne leur rend pas justice. Et, dans certains cas et dans plusieurs cas, puisque nous avons le rapport annuel qui est déposé à l'Assemblée nationale par la Protectrice du citoyen, dans plusieurs cas, c'est réel: ces gens ont subi une injustice. La machine un peu anonyme de la fonction publique, les lois, la réglementation... Souvent, ce ne sont pas les personnes, vous savez, on ne cherche pas de coupable. Mais le fait est que des gens sont broyés par ce mécanisme souvent anonyme où des citoyens ordinaires, des femmes, des hommes, ont perdu tout espoir d'être entendus et d'avoir justice. Et ultimement, sans avoir à payer d'avocat ? c'est disponible pour tous les citoyens, quelles que soient leurs ressources ? il y a ce possible recours à la Protectrice du citoyen.

Les gens lui écrivent, et c'est souvent émouvant de lire les témoignages des gens qui écrivent au Bureau du Protecteur du citoyen. Ce sont souvent des gens qui sont démunis, qui ont essayé mais qui n'ont pas pu faire entendre leurs voix, et ces gens demandent la correction d'une injustice, demandent au Protecteur du citoyen de rappeler à l'ordre un ministère, d'intervenir en leurs noms. Dans la plupart des cas, cela se résout de façon informelle: le Protecteur du citoyen ou le Bureau du Protecteur du citoyen rejoint un fonctionnaire ou une administration et fait entendre la voix du citoyen, et tente, et réussit souvent à corriger l'injustice qui s'est produite.

n(17 heures)n

Ce que l'on apprend par le projet de loi n° 61, dans les 75 articles du projet de loi n° 61, c'est que dorénavant une grande partie de l'État, en tout cas des fonds dépensés par l'État, vont servir à des contrats où le Protecteur du citoyen ne pourra plus jouer son rôle. Ça, c'est très grave. Et elle est claire, la Protectrice du citoyen, qui a constaté, hein, comme nous, que le projet de loi avait une portée extrêmement large. Contrairement à la ministre, elle pense que c'est une portée extrêmement large. Il faut peut-être l'écouter. Elle n'a pas un intérêt politique là-dedans, la Protectrice du citoyen. Elle dit que c'est une loi à portée extrêmement large, une portée qui va effectivement bien au-delà des paroles de la ministre.

Mme Champoux-Lesage nous a dit: «On pourrait comprendre que ce sont presque...» J'insiste là-dessus: «On pourrait comprendre que ce sont presque toutes les fonctions de l'État qui potentiellement pourraient être à la limite déléguées. [...]compte tenu de la portée très large des dispositions de l'article 13 ? elle dit ? je crois nécessaire d'en revoir la formulation afin [d'en] limiter [l'application].» Très grave, ça. «On pourrait comprendre que ce sont presque toutes les fonctions...» Et il n'y a pas d'amendement à l'article 13, dans les amendements proposés par la ministre. «On pourrait comprendre ? dit la Protectrice du citoyen ? que ce sont presque toutes les fonctions de l'État qui pourraient être à la limite déléguées. [...]compte tenu de la portée très large de l'article 13...»

C'est donc dire qu'à la limite, là, ce projet de loi de rien du tout, dont le député de Hull insiste à toutes ses interventions pour nous dire que ce n'est qu'une petite agence-conseil, eh bien, la Protectrice du citoyen, elle nous dit que la portée est tellement large qu'à la limite elle pourrait... ce sont presque toutes les fonctions de l'État qui pourraient être à la limite déléguées. Alors, vous voyez tout de suite que ce n'est pas un projet de loi banal, c'est un projet de loi très important, et il serait important pour nous, à la lumière des amendements déposés par la présidente du Conseil du trésor, que nous puissions nous assurer si celle-ci, si la Protectrice du citoyen trouve maintenant, dans les différents amendements présentés par la ministre, réponse à ses inquiétudes, des inquiétudes majeures, des inquiétudes importantes, des inquiétudes déterminantes.

M. le Président, je le fais, là, et je sais que nous sommes... Je réponds aussi en ce sens à certains collègues de la partie ministérielle qui semblaient trouver que nous prenions du temps à discuter de ce projet de loi. Si le règlement nous l'autorise, M. le Président, ce n'est pas par hasard, c'est parce que les projets de loi... les parlementaires ont le devoir de s'assurer, dans l'organisation de leurs travaux, que tous les moyens sont mis en oeuvre pour éclairer le jugement des parlementaires afin que, lorsque viendra le moment ultime, si jamais le gouvernement décidait d'aller de l'avant et de déposer en Chambre ce projet de loi, nous pourrons dire que nous avons tout mis en oeuvre pour éclairer le gouvernement, pour éclairer les parlementaires de façon à ce que les erreurs majeures, dramatiques, j'oserais dire, qui risquent de se retrouver dans la loi, nous aurons fait, nous, notre devoir et tenté d'empêcher que cela se produise, tenté d'amener le gouvernement à corriger ces aspects de la loi.

La Protectrice du citoyen ? je conclus là-dessus, M. le Président; la Protectrice du citoyen ? joue un rôle majeur. La Loi du Protecteur du citoyen est une loi essentielle dans notre société, et en faire fi comme le gouvernement en fait fi actuellement, dans ce projet de loi, me semble un très mauvais début pour ces partenariats public-privé. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Paquin): Merci, M. le député de Richelieu. Y a-t-il d'autres intervenants? Est-ce que... Oui, M. le député de Chicoutimi.

M. Stéphane Bédard

M. Bédard: Merci, M. le Président. Alors, je vais prendre les 10 prochaines minutes, M. le Président, pour tenter de vous convaincre et convaincre les membres de cette commission de l'importance d'entendre, je vous dirais, une experte ? parce qu'on parle ici évidemment de Protectrice du citoyen ? donc une organisation aussi importante quant à l'application d'une loi.

D'autant plus, M. le Président, qu'à la lecture même de l'avis qui a été transmis par la Protectrice du citoyen ? qui encore une fois, vous le savez, M. le Président, qui ne cherche pas à être élue, n'a pas de mandat politique, n'est pas quelqu'un qui... c'est quelqu'un plutôt qui est au-dessus des partis, au-dessus des lignes partisanes mais qui représente plutôt la stabilité et qui constitue par le fait même un des piliers de notre système démocratique, avec la Commission d'accès à l'information, le Commissaire au lobbyisme et le Vérificateur général, qui ont un rôle prépondérant en matière démocratique; eh bien, à la seule lecture de l'avis ? à la page 2, M. le Président, je suis étonné qu'on ne puisse réentendre, à la lumière des amendements qui ont été déposés... ou du moins bénéficier d'un avis de la Protectrice du citoyen après l'avis qu'elle a rendu.

Et je vous cite seulement le premier extrait, qui parle par lui-même, M. le Président. Donc, à la page 2, en parlant du projet de loi n° 61, dans le contexte que je vous dis, donc sans aucune ligne partisane, libre, de façon totalement libre, je vous dirais, donc, elle parle pour les citoyens de cinq principes qui lui apparaissent primordiaux: «Ce sont les valeurs de ? et je vais vous les citer, M. le Président ? transparence, d'équité, de qualité de services, d'imputabilité et de protection de l'intérêt public ? et là elle termine sa phrase en disant, M. le Président, et vous allez sursauter tout comme moi ? à propos desquels le projet de loi me paraît silencieux.»

Alors, si je comprends, M. le Président, c'est que le projet de loi est silencieux en matière de protection de l'intérêt public ? on est dans une loi qui touche l'intérêt public ? d'imputabilité, au coeur même, je vous dirais, de notre travail. Nous, si quelqu'un devrait être sensible à cette réalité, c'est bien la présidente du Conseil du trésor; maintenant qu'elle est présidente du Conseil du trésor, elle semble avoir oublié ces notions si importantes.

La troisième notion... ou la troisième valeur, plutôt: la qualité, des valeurs de qualité de services. Alors, qualité de services, vous savez, qui n'est pas préoccupé par la qualité de services, et encore là dans le privé comme dans le public, M. le Président? Donc, si on peut rejoindre certains de nos collègues avec ça, tant mieux. Valeurs d'équité, c'est quand même assez, je dirais même fondamentaux, les valeurs d'équité, les règles de justice naturelles. Quand on parle d'équité, on parle de règles de justice naturelles. Donc, ce que les gens s'attendent, c'est être traités avec équité, c'est la base des attentes de nos concitoyens et concitoyennes. Donc, l'équité est au coeur de notre vie démocratique. Et même, je vous dirais, encore là, c'est une valeur d'équité qui transcende même les valeurs sociétales et se retrouve même dans le droit privé. Entre concurrents, il y a des valeurs d'équité qui doivent exister. C'est pour ça qu'existent beaucoup de recours qui ont été créés au fur et à mesure des années, les recours, je veux dire, en concurrence déloyale, qui s'appuient... dans le secteur privé, qui s'appuient sur cette notion aussi importante que la valeur d'équité entre les citoyens, mais équité entre les concurrents, entre eux-mêmes.

Et la dernière des valeurs, la valeur de transparence, qui était au coeur du discours du premier ministre, si je me souviens bien, lors de son discours inaugural, mais qui a disparu, je vous dirais, dans chacune de ses actions depuis le 14 avril.

Alors, il faut que les gens comprennent bien, là, le projet de loi actuel... Il faut qu'ils comprennent bien notre opposition à l'adoption, tel qu'il est rédigé, du projet de loi. Bien, c'est simple: la Protectrice du citoyen nous dit que le projet de loi est silencieux sur des valeurs aussi importantes et fondamentales que sont la transparence, les valeurs d'équité, de qualité de services, d'imputabilité et de protection de l'intérêt public, M. le Président. Donc, je pense que cette commission aurait avantage, et la population en général aurait avantage à entendre à nouveau la Protectrice du citoyen pour savoir si les amendements qui ont été déposés correspondent aux voeux qui ont été exprimés par cette Protectrice, et, je vous dirais, sans présumer de son avis. Parce qu'il peut arriver effectivement que la grâce frappe et que nous ayons la chance de bénéficier des conseils de la Protectrice du citoyen. Mais à la lumière des articles dont elle fait mention, et mon collègue de Richelieu l'a mentionné il y a quelques minutes, les articles et les principes auxquels elle faisait référence n'ont pas été amendés, n'ont pas été touchés.

Donc, il faut en conclure... Mais encore là je ne veux pas me priver de l'avis de la Protectrice, M. le Président. On doit en conclure malheureusement que ces valeurs de transparence, d'équité, de qualité de services, d'imputabilité et de protection de l'intérêt public sont violées par le projet de loi. Et ce n'est pas des petites choses, M. le Président, là. On est en plein coeur, je vous dirais, de ce qui doit guider les actions d'un gouvernement au coeur de la vie démocratique, malheureusement.

M. Cholette: ...

M. Bédard: Le député de Hull aura l'occasion de...

Le Président (M. Paquin): Question de règlement de la part du député de Hull.

M. Bédard: Oui, j'ai hâte de l'entendre, M. le Président.

n(17 h 10)n

M. Cholette: Premièrement, je vais m'adresser à la présidence et non au député de Chicoutimi. Le député de Chicoutimi vient d'utiliser des mots très durs en disant que le projet de loi a violé des valeurs, et je vous demanderais, M. le Président, de rappeler le député à l'ordre. C'est des mots non parlementaires, c'est des termes non parlementaires, on ne peut pas imputer des motifs, M. le Président. Vous avez suivi comme moi les débats, et le député de Chicoutimi s'est permis des largesses qu'il ne devrait pas. Je vous demande, M. le Président, de le remettre à l'ordre.

M. Bédard: ...vous conviendrez avec moi effectivement qu'employer le terme «violer», tout ça est une question de contexte. Je n'ai pas accusé... je n'ai pas imputé de motifs à personne. Ce que je dis, c'est que le projet de loi viole les règles. Et ça, j'ai tout à fait... comme je pourrais dire...

M. Cholette: M. le Président, il vient de le refaire, là, alors je vous invite...

M. Bédard: Aïe! Est-ce qu'il peut terminer? Encore! Je peux terminer?

M. Cholette: Question de règlement.

M. Bédard: Non. Mais, j'aimerais terminer simplement mes représentations.

Le Président (M. Paquin): Oui. On va laisser terminer le député, si vous voulez.

M. Bédard: Alors, je peux dire qu'un projet de loi viole des règles comme... et c'est tout à fait mon droit. Je ne peux pas dire, par exemple, qu'un ministre, par exemple, a trompé la population ou a... et là je ne veux pas employer le terme évidemment. Mais je n'impute pas de motifs à quelqu'un. Alors, de dire que le projet de loi viole... comme le dit la Protectrice du citoyen, eh bien, c'est tout à fait dans mon droit. Et je serais surpris, très surpris, M. le Président, que notre lexique parlementaire m'empêche, dans le contexte où je l'ai dit, de tenir de tels propos.

Une voix: Le terme générique, là...

Le Président (M. Paquin): D'accord. M. le député de Chicoutimi, je voudrais simplement vous inviter à la prudence, s'il vous plaît.

M. Bédard: Je vous remercie, M. le Président. Et vous le savez, je suis prudent...

M. Cholette: Question de règlement.

M. Bédard: ...je suis prudent de nature. Alors...

Le Président (M. Paquin): Oui. Question de règlement, M. le député de Chicoutimi. M. le député de Hull.

M. Bédard: Mais je suis bâillonné, M. le Président, là.

M. Cholette: Comme je veux bien comprendre la décision que vous venez de rendre, en invitant...

M. Bédard: M. le Président...

M. Cholette: Non, ça va faire, là.

M. Bédard: M. le Président...

M. Cholette: Je peux finir?

Le Président (M. Paquin): On va juste... Permettez, on va laisser terminer le député de Hull, et je vais vous donner la parole après, M. le député de Chicoutimi.

M. Cholette: Bon. Je veux simplement comprendre. En invitant le député à la prudence, ça veut dire, M. le Président, que vous permettez d'utiliser le terme que le député de Chicoutimi a utilisé? C'est ce que vous venez de faire.

Le Président (M. Paquin): M. le député de Chicoutimi.

M. Bédard: ...comme vous avez rendu une décision...

Le Président (M. Paquin): C'est ça.

M. Bédard: ...alors, je souhaite qu'il la respecte, M. le Président.

M. Gautrin: ...

M. Bédard: Mon collègue de Verdun semble avoir la même...

Le Président (M. Paquin): M. le député de Verdun, est-ce que c'est sur la même chose?

Des voix: ...

Le Président (M. Paquin): Un instant! Un instant! Un instant! Est-ce que c'est sur la même chose, M. le député de Verdun?

M. Gautrin: Sur un autre point de vue, c'est sur la remarque qui a été faite par mon éminent collègue le député de Chicoutimi, M. le Président. Et j'ai cru comprendre, à tort ou à raison, qu'il parlait, à ce moment-là, de violer la... et je comprends qu'il voulait dire «la pensée de», mais je crois que sa langue a fourchu, il a parlé de violer la Protectrice du citoyen, ce qui, je pense, était réellement dépasser considérablement la pensée de mon collègue...

Des voix: ...

Le Président (M. Paquin): D'accord. D'accord. À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît!

Des voix: ...

Le Président (M. Paquin): À l'ordre! À l'ordre! S'il vous plaît! M. le député de Chicoutimi, vous avez la parole. C'est M. le député de Chicoutimi qui a la parole, et il continue. M. le député de Chicoutimi.

Des voix: ...

Le Président (M. Paquin): S'il vous plaît! S'il vous plaît!

Des voix: ...

Le Président (M. Paquin): S'il vous plaît! S'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît!

Une voix: ...

Le Président (M. Paquin): Oui. On va se calmer, s'il vous plaît, là! Question de décorum.

Des voix: ...

Le Président (M. Paquin): Bon. Je vous invite...

Des voix: ...

Le Président (M. Paquin): On va suspendre pour quelques minutes.

(Suspension de la séance à 17 h 13)

 

(Reprise à 17 h 15)

Le Président (M. Paquin): Donc, nous reprenons nos travaux. Et c'est le député de Chicoutimi qui a la parole.

Des voix: ...

Le Président (M. Paquin): S'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! C'est le député de Chicoutimi qui a la parole.

M. Bédard: Alors, M. le Président, vous savez, effectivement, j'ai beaucoup de respect pour notre fonction et le travail qu'on fait ici. Et quand j'entends des choses comme je viens d'entendre, M. le Président, je suis dans un état second. Parce que l'événement effectivement auquel on... je pense qu'on ne peut faire référence qu'avec beaucoup de dignité et beaucoup de respect. Et je ne pense pas que le débat qu'on mène ici actuellement mérite même, je vous dirais, un soupçon de référence par rapport aux événements qui se sont produits il y a plusieurs années.

Alors, M. le Président, j'en reviens au texte du projet de loi qui, oui, touche au coeur des valeurs démocratiques qui doivent inspirer tout gouvernement responsable lorsqu'il a la gestion du bien public et surtout l'intérêt public. Et dans ce cas-ci, malheureusement, on semble faire fi de cet intérêt public. Et, si j'étais le seul à le dire, M. le Président, je ne serais pas ici, ou plutôt le projet de loi serait adopté. Ceux qui le disent, c'est des gens qui ont toute l'impartialité requise, reconnue par cette Assemblée, par notre Assemblée nationale, et, vous le savez, à plusieurs occasions, viennent en commission nous témoigner de leurs commentaires par rapport à des projets de loi. Et dans ce cas-ci, ce n'est pas la moindre, c'est la Protectrice du citoyen, qui vient avec des valeurs et qui nous dit très clairement que le projet de loi est silencieux sur des valeurs aussi importantes que la transparence ? j'ai hâte d'entendre le député de Hull, M. le Président ? l'équité, la qualité des services, l'imputabilité et la protection de l'intérêt public.

Alors, quand un gouvernement ne veille pas à cet intérêt public, quand un gouvernement ne veille pas à l'imputabilité, à la qualité de service, à l'équité, à la transparence, qui doit le faire? Bien, regardez, c'est ce qu'on fait actuellement. Et ça aurait été la moindre des choses, M. le Président, de faire entendre la Protectrice du citoyen pour s'assurer effectivement que les valeurs qu'elle nous mentionne, qui ne se retrouvent pas dans le projet de loi, soient rencontrées, en tout ou en partie, mais au moins d'avoir un éclairage dont nous avons besoin et, nous, comme parlementaires, pour donner notre accord et notre aval à un tel projet de loi.

Sans ces avis... Et c'est notre devoir le plus entier, c'est de s'opposer à un type de projet de loi qui irait à l'encontre de ces valeurs. Et, si notre rôle ne servirait qu'à ne pas permettre l'adoption, tel que rédigé, d'un projet de loi, eh bien, je peux vous dire que je serais fier de retourner chez nous pour dire: Oui, l'opposition, c'est important en démocratie, parce qu'il empêche justement que ces valeurs, qui sont au coeur de notre vie démocratique, ne soient pas tenues en compte dans la rédaction d'un tel projet de loi aussi important et qui s'adresse à l'ensemble des ministères, soit la livraison des services gouvernementaux.

Alors, je souhaitais lire certains extraits du rapport de la Protectrice; malheureusement, mon temps imparti ne pourra me permettre d'en faire état. Peut-être que d'autres, que mes collègues le pourront. Ce que je souhaite sincèrement, M. le Président, c'est que, d'ici la fin de nos travaux, et j'espère d'ici Noël, effectivement nous ayons la chance de bénéficier de l'éclairage de la Protectrice mais aussi de la Commission d'accès à l'information, comme nous l'avons demandé, et des autres intervenants qui ont été sollicités, pour nous permettre de vraiment s'assurer que les Québécois et les Québécoises soient protégés par la mise en vigueur de ce projet de loi, lors de la mise en vigueur éventuelle de ce projet de loi. Et, vous le savez, on n'a pas dit qu'on était fermés, au contraire, on est ouverts, si on retrouve tous les amendements qui ont été sollicités par les groupes qui sont, vous le savez, au coeur de notre vie démocratique.

Alors, j'aurai à réintervenir ? j'espère que non, M. le Président ? sur ce projet de loi. Mais, si je reviens, je souhaite sincèrement que nous soyons à une étape qui soit beaucoup plus intéressante, soit celle où les groupes viennent témoigner, et que nous puissions lui poser les questions appropriées sur ce projet de loi. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Paquin): Merci, M. le député de Chicoutimi. M. le député de Verdun, vous voulez intervenir? Allez-y.

M. Gautrin: Oui, M. le Président, je voudrais prendre le temps qui m'est imparti...

Une voix: 10 minutes.

Le Président (M. Paquin): 10 minutes.

M. Gautrin: Bon, bien, je m'excuse. Le député devrait intervenir avant moi ou...

n(17 h 20)n

Une voix: ...

M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Bon, je vais prendre le temps qui m'est imparti pour répondre en particulier aux interventions de notre collègue le député de Chicoutimi. Et je pense qu'il y a, dans tout le débat que nous avons devant nous, M. le Président, une confusion. La confusion est la suivante. Le projet de loi a pour objet essentiellement la création d'une agence sur les partenariats public-privé, et je connais à quel point nos collègues de l'opposition comprennent ces choses-là. Vous parlez, à chaque fois, vos interventions sont des interventions sur les PPP ou les partenariats public-privé. L'objet du projet de loi, je crois que c'est très important, l'objet du projet de loi n'est pas de débattre, à l'heure actuelle, des partenariats public-privé. L'objet du projet de loi est de créer une agence qui pourra conseiller le gouvernement et les différents organismes et ministères du gouvernement lorsqu'ils auront à négocier des partenariats public-privé.

Vous n'êtes pas... Parce que lorsque vous aviez été au gouvernement, vous, qui siégez aujourd'hui dans l'opposition, vous ne vous êtes pas opposés aux partenariats public-privé, vous l'avez déjà proposé dans certaines lois. Et, lorsque vous étiez au gouvernement, je pourrais vous faire citer au moins quatre à cinq exemples de réalisations qui se sont réalisées en partenariats public-privé dans certains secteurs, dans certains organismes.

Le Président (M. Paquin): M. le député de Verdun, voulez-vous, s'il vous plaît, vous adresser à la présidence? Ce serait très apprécié.

M. Gautrin: Oui, M. le Président, je dis... et je m'adresse, à travers la présidence, M. le Président, aux collègues qui sont les collègues de l'opposition, aujourd'hui, pour leur rappeler, à travers vous, M. le Président, que, lorsqu'ils étaient au pouvoir, ils ont déjà, dans certains cas, et on pourrait, si vous voulez, en faire une certaine liste, initié des partenariats public-privé, qui d'ailleurs ont été des succès. Il y en a quelques-uns qui ont été des succès.

Et je suis sûr que le député de Richelieu, qui à l'époque était au Conseil du trésor, peut facilement se rappeler de certains partenariats public-privé, particulièrement dans les secteurs de la justice et dans le registre des droits personnels mobiliers, qui s'avèrent être un modèle et un succès, à l'heure actuelle, et qui a d'ailleurs été initié par votre gouvernement, même s'il s'est terminé lorsque vous avez quitté les responsabilités gouvernementales, il a été initié par vous.

Donc, on n'est pas en train de débattre du bien-fondé ou du principe même des partenariats entre le public et le privé. Vous l'avez déjà... M. le Président, ils l'ont, à l'époque où ils étaient déjà au gouvernement, utilisée, cette possibilité.

Qu'est-ce qu'il y a, aujourd'hui, de différent dans le projet de loi? Il y a de différent qu'on veut mettre sur pied un moyen de conseiller les structures gouvernementales lorsqu'elles veulent recourir à ce moyen pour développer ou favoriser les infrastructures, qui est un moyen reconnu par les collègues de l'opposition lorsqu'ils étaient au gouvernement, puisqu'ils l'ont déjà utilisé. Donc, on débat non pas à savoir est-ce qu'il est pertinent ou non pertinent d'avoir des partenariats public-privé, on débat, à l'heure actuelle, est-ce que, d'avoir un conseil, une structure-conseil, une agence-conseil formée d'experts, à l'heure actuelle, pour conseiller les ministères et les organismes lorsqu'ils auront recours à un partenariat public-privé, est-ce que ceci est pertinent ou non pertinent.

Alors, M. le Président, vous comprenez bien pourquoi nous, les parlementaires ministériels, nous ne voterons pas dans chacune des propositions qui sont devant nous. Non pas parce que nous ne pensons pas ici qu'il est non pertinent d'avoir, sur le principe des partenariats public-privé, l'avis de personnes éclairées que peuvent être bien sûr le Protecteur du citoyen, que pourrait être le Vérificateur général, que pourrait être aussi ? j'imagine, je subodore une prochaine motion ? le président de la fonction publique ou un certain nombre de personnes qui ont ce statut-là. Nous avons toujours voté contre, M. le Président, parce que c'est deux niveaux de débat qui sont différents.

Nous débattons, à l'heure actuelle, est-ce que ce projet de loi... est-il utile, est-il pertinent de mettre de l'avant une structure-conseil pour permettre le développement des partenariats public-privé. Nous pensons que oui. Et j'ai l'impression, à écouter mes collègues de l'opposition, qu'ils pensent que non. Mais le fait de débattre, à l'heure actuelle, et de vouloir nous faire entendre, pour un débat qui n'est pas le débat qui est propre au projet de loi, les différents officiers...

Et je comprends qu'il y en a d'autres, parce que je connais assez la subtilité de mon collègue de Richelieu pour savoir que, si jamais nous rejetons, à l'heure actuelle, la proposition qui est devant nous en ce qui touche le Protecteur ou la Protectrice du citoyen, il sera en mesure probablement de suggérer que nous rencontrions d'autres personnes. Mais, à chaque fois, M. le Président, je vais vous dire, notre position à nous, les ministériels, sera la même. Et nous avons actuellement un dialogue qui est un véritable dialogue de sourds.

Nous voulons, nous, étudier le projet de loi, nous voulons débattre du projet de loi, nous voulons débattre d'un projet de loi qui a pour effet principal de vouloir créer une agence. Parce que d'ailleurs, je rappellerai à mon collègue de Richelieu, M. le Président, la loi, c'est la Loi sur l'Agence des partenariats public-privé du Québec. Le débat à savoir si, pour faciliter l'investissement, il est utile ou non utile, ou suivant... de quelle manière il faut utiliser les partenariats public-privé, c'est un débat important. C'est un débat de société, je pense que c'est un débat qu'il ne faut pas contourner, et que je pense qu'on doit avoir, et qu'on commence à avoir dans notre société. Et je me permettrai, M. le Président, de rappeler à mes collègues de l'opposition: c'est un débat que vous avez initié ? que vous avez initié ? et vous en avez réalisé un certain nombre.

Maintenant, si on pouvait, M. le Président, étudier... et on serait beaucoup plus fonctionnels si, au lieu de vouloir débattre de ce qui n'est pas l'objet du projet de loi, on commençait réellement à étudier le projet de loi. Autrement dit, est-ce que la structure d'une agence est quelque chose qu'on trouve optimal? Est-ce que cette agence... et la présidente du Conseil du trésor a déposé un certain nombre d'amendements, est-ce que cette agence doit être soumise au Vérificateur général? Est-ce qu'à l'heure actuelle la composition de l'agence, la manière dont elle doit fonctionner... Ce sont tous des éléments sur lesquels, je suis sûr, on pourrait, de part et d'autre, bonifier ou peut-être améliorer ce projet de loi, M. le Président.

Mais le débat dans lequel... nous avons, et avec tout le respect que je dois à mes collègues le député de Richelieu, ou le député de Gaspé, ou le député de Mercier, ou la députée de...

Une voix: Mirabel.

M. Gautrin: ...de Mirabel, merci ? je voulais dire Blainville, mais j'allais me tromper... Voyez-vous, je pense qu'on a des débats à deux niveaux différents et qui dans le fond sont des débats de sourds, à l'heure actuelle.

Je préviens bien amicalement... Merci, M. le Président. Je préviens bien amicalement mes collègues de l'opposition: tant est qu'ils veulent débattre ou ils interviennent pour pouvoir faire participer des personnes sur la grande question ou le débat de société des partenariats public-privé, nous allons voter contre. Parce que nous sommes ici réunis, et c'était l'ordre de la Chambre, M. le Président, pour étudier quelque chose de totalement différent, qui est la Loi sur l'Agence des partenariats public-privé, et, nous, nous voulons étudier, et nous cherchons à entendre ? et nous pensons peut-être uniquement ? des gens qui pourraient apporter un éclairage optimal sur l'agence simplement. Alors, malheureusement, ce n'est pas les propositions qui sont devant nous.

Aussi, les personnages que l'on veut convoquer, aussi éminents soient-ils, d'après nous n'ont pas un rapport direct avec l'objet du projet de loi qui est celui de l'agence. Alors, c'est pour ça, M. le Président, avec tout le respect que je dois aux personnages que l'on veut convoquer, que ce soit la Protectrice du citoyen, que ce soit le Vérificateur général, que ce soit la personne qui va probablement arriver tout à l'heure, j'aurai tendance, M. le Président, à toujours voter contre la proposition qui sera faite par les députés ministériels en l'occurrence.

Le Président (M. Paquin): Merci, M. le député de Verdun. M. le député de Mercier, c'est à votre tour.

M. Daniel Turp

M. Turp: Merci, M. le Président. On peut être surpris par cette position, mais on en prend acte. Et, M. le Président, ce personnage ou ces personnages dont on parle, ces grands officiers de l'État québécois que nous voulons convoquer à nouveau, que nous voulons convier à nos travaux, ce sont des personnages qui ont pris la peine d'écrire des mémoires, qui se sont présentés devant cette commission et ont fait part de leurs vues et de leurs objections au projet de loi n° 61, dans l'état où il se trouve, où il se trouvait à l'époque et où il se trouve encore, et la demande de l'opposition officielle me semble tout à fait légitime.

n(17 h 30)n

Si ces grands commis, grands officiers de l'État québécois ont quelque chose à dire sur ce projet de loi, peut-être auraient-ils quelque chose à dire également sur les projets d'amendement qui ont été apportés ou qui ont été, à tout le moins, rendus publics par la présidente du Conseil du trésor et qui semblent, dans certains cas, tenir compte des vues et des objections faites par ces officiers, qui, dans certains cas, n'en tiennent point compte. Alors donc, la demande que nous formulons, me semble-t-il, est légitime et c'est une demande qui permettrait à cette commission d'être mieux informée, d'être saisie d'opinions de personnes qui pourraient éclairer la commission sur la portée du projet de loi telle qu'elle serait si les amendements, par exemple, proposés par la présidente du Conseil du trésor étaient apportés au projet de loi dans son texte original.

Et je crois qu'une commission devrait vouloir poursuivre de telles consultations justement pour atteindre l'objectif recherché par le député de Verdun, pour que l'examen du projet de loi, lorsqu'il s'agira de l'examiner article par article pour le bonifier, pour l'améliorer... Et c'est le devoir du législateur et de la législatrice d'adopter les projets de loi les meilleurs et de les bonifier, de les améliorer. Je crois que nous nous priverions d'opinions utiles si nous nous privions de l'opinion de la Protectrice du citoyen, qui a signalé dans son mémoire quelques faiblesses du projet de loi et qui a très bien compris, elle, la portée de ce projet de loi.

Et la ministre nous suggérait, tout à l'heure, de corriger le tir, d'admettre qu'il ne s'agit que d'un projet de loi sur une agence, sur un organisme qui ne visera qu'à conseiller le gouvernement lorsqu'il s'agira d'associer l'entreprise privée à des projets, et à des services, et à la prestation de services, comme on le sait bien. Mais la Protectrice du citoyen elle-même, dans sa lettre du 3 septembre qu'elle adressait à la ministre, cette Protectrice du citoyen nous disait que le projet de loi «confirme l'intention du gouvernement de s'engager davantage dans la voie des partenariats public», «confirme l'intention [...] de s'engager davantage dans la voie des partenariats public-privé», alors qu'on laisse entendre ici que l'engagement dans la voie des partenariats public et privé n'est pas pris parce que cette agence conseillera: j'imagine, tantôt conseillera de ne pas conclure de tels partenariats, tantôt de les conclure.

Alors, il me semble assez évident que le débat auquel nous sommes conviés dans l'examen de ce projet de loi est non pas seulement un débat sur la forme et sur la création d'une agence, mais un débat sur les partenariats public-privé eux-mêmes. Et c'est là vraiment que nos formations politiques ont une approche très différente.

Et les députés du parti ministériel auront beau citer les exemples de ce qu'a voulu initier et faire le gouvernement précédent, l'idée de partenariats public-privé a toujours eu une portée nettement plus limitée lorsqu'ils étaient envisagés par le gouvernement précédent. Et il s'agissait pour l'essentiel d'envisager de tels partenariats lorsqu'il s'agissait d'infrastructures, de routes et non pas, comme le prévoit le projet de loi n° 61, de partenariats qui pourraient aller... et c'est l'article 6 qui l'indique très clairement, qui pourraient avoir même pour objet la prestation d'un service public, la prestation d'un service public, M. le Président, pas seulement la construction d'une autoroute, la prestation d'un service public, la prestation d'un service de santé, la prestation d'un service d'éducation, ces services dont la prestation devrait échapper à l'entreprise privée.

C'est ça qui nous distingue du Parti libéral du Québec: nous ne souhaitons pas que des entreprises privées puissent agir lorsqu'il s'agit de la prestation de services publics dans ces domaines fondamentaux, dans ces domaines où l'État a encore sa raison d'être, où les employés de l'État ont encore leur raison d'être et devraient être ceux qui assument, au nom de l'État, la mission de services publics qui est celle de l'éducation, des services de santé et des services sociaux et de plusieurs autres missions de l'État.

D'ailleurs, ce débat, M. le Président, me fait beaucoup penser au débat qui a cours maintenant au niveau international, lorsqu'il s'agit de savoir si les services publics devraient faire l'objet d'une libéralisation. Ces débats ont eu cours à l'Organisation mondiale du commerce et continuent d'avoir cours dans le cadre du cycle de Doha, qui est un cycle de négociations où la question est posée. Et il y a des États qui, comme les États-Unis par exemple, favorisent l'idée d'une libéralisation des services de façon à permettre que des services publics puissent être rendus par l'entreprise privée et de façon à ce que les monopoles d'État en la matière n'existent plus, de façon à ce que justement, puisque les entreprises privées pourront exercer et rendre des services publics, il y ait une concurrence possible de la part d'entreprises privées ayant la nationalité d'un autre État.

Et cette question fait l'objet, vous le savez bien, M. le Président, de débats vifs au sein de l'Organisation mondiale du commerce et font l'objet de débats qui divisent beaucoup les États dans la communauté internationale, et notamment dans la communauté américaine. Puisque, dans la ZLEA, il est aussi question de libéraliser les services jusqu'au point où on pourrait autoriser que des services publics soient assumés ou fassent l'objet de prestations par des entreprises privées qui seraient assujetties à des normes internationales permettant la libre concurrence et l'accès des entreprises étrangères à des services publics.

Et le troisième avant-projet, par exemple, d'accords instituant une zone de libre-échange pour les Amériques met entre crochets ces dispositions qui permettraient la prestation de services publics par des entreprises privées. Et les négociations en cours révèlent qu'il y a des divergences fondamentales. Et j'aimerais bien savoir d'ailleurs quelle position a le gouvernement dans cette négociation, parce qu'on ne sait guère ce qu'il pense sur ces questions, comme on ne sait guère ce que pense le gouvernement fédéral, qui a adopté des positions pour le moins floues lorsqu'il s'agit de la prestation de services publics par des entreprises privées.

Alors, M. le Président, pour toutes ces raisons, notre formation politique est inquiète, et je crois que notre commission serait tout à fait intéressée à entendre à nouveau la voix de la Protectrice du citoyen, qui, je pense, éclairerait cette commission comme elle doit l'être, avant de faire l'étude article par article de ce projet de loi. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Paquin): M. le député de Mercier, merci. Oui, M. le député d'Iberville.

M. Jean Rioux

M. Rioux: Merci, M. le Président. Donc, c'est toujours un sujet qui est passionnant de parler des partenariats privé-public. Et la notion la plus importante, c'est évidemment le quatrième P: on le fait pour la population. C'est un principe qui a été reconnu par l'ancien gouvernement: que l'on pense principalement à la loi qui avait été passée sur les infrastructures, avec l'ex-ministre M. Chevrette. Et je vous rappelle que cette loi-là avait été passée sans consultation, donc contrairement à ce qu'on vient de vivre. Nous avons rencontré plus de 41 groupes qui nous ont parlé finalement de leurs perceptions de cette loi-là, cette loi qui est, on le rappelle, pour l'ensemble des citoyens, de s'assurer de pouvoir contrôler les coûts, les échéanciers et s'assurer d'avoir une qualité.

On parle principalement des routes. Moi, je pense toujours au projet au niveau de l'autoroute 35 en Montérégie. Quand on compare nos routes par rapport à ce qu'il y a au Vermont, qui est la continuité de la 35, qui est la 89, que connaît bien notre président, et aussi qu'on compare les routes en Ontario, pourquoi les citoyens du Québec n'ont-ils pas la même qualité? Ce n'est pas parce qu'on n'a pas eu des gens ou des entrepreneurs consciencieux, des gens de la fonction publique consciencieux. Ils ont eu des mandats qui ont été donnés par les gouvernements précédents, autant du Parti libéral que du Parti québécois.

n(17 h 40)n

C'est un outil nouveau qu'on se donne, qu'on se donne pour assurer la modernisation de l'État du Québec. On voit que le modèle québécois est mis en doute, on se dit qu'il faut le changer. Les résultats, on les regarde, du modèle québécois: les citoyens les plus endettés en Amérique du Nord, les citoyens qui sont les plus imposés et aussi un des plus bas niveaux de vie en Amérique du Nord, selon les études, on est 57e sur 60 ou 52e. Il y a des choses que l'on doit faire différemment. Et je suis heureux de participer, avec la présidente du Trésor, à la modernisation de l'État: des méthodes nouvelles pour finalement améliorer la richesse de l'ensemble des Québécois et des Québécoises. Donc, c'est dans cette veine qu'est le projet de partenariat privé.

On se rappelle que le concept, l'opposition en a parlé régulièrement, en a même passé une loi, a créé le Bureau des partenariats d'affaires. Nous sommes dans un processus de continuité. Déjà, le gouvernement précédent en avait mis les bases, sauf que souvent, ce parti-là est un parti de théorie, tandis que vous avez de ce côté-ci un gouvernement qui passe à l'action. Et c'est ce qu'on est en train de faire en créant l'agence: une structure légère, comme on a vu, où on retrouvera un conseil d'administration de neuf personnes et de 12 à 15 employés, et, on se le rappelle, pour juger des projets et de comparer est-ce que c'est avantageux par rapport à la méthode traditionnelle. C'est un outil parmi les autres, ce n'est pas un crédo de dire que tout doit se faire maintenant, au Québec, en fonction des partenariats privé-public.

Donc, on a hâte de passer à l'action, c'est-à-dire d'analyser chacun des articles, un après les autres. Rappelons-nous que nous avons rencontré 41 groupes, et là ce que l'on a, c'est des motions pour... Est-ce qu'on va en avoir 41, motions, pour rencontrer les 41 groupes qu'on a vus, comme on le connaît aussi au niveau de Services Québec, la même chose, où est-ce qu'on connaît plusieurs motions? Est-ce qu'on va passer à l'action? Je pense que c'est quand on prend article par article, c'est là qu'on a la chance de donner des commentaires.

Les différents groupes vous les ont donnés. Ils pourraient argumenter. Sauf que je pense que la présidente du Conseil du trésor a bien pris connaissance des suggestions qui lui ont été faites par les nombreux amendements qui sont proposés. Principalement, à l'égard de la transparence, donc l'article 4 a été modifié pour intégrer les principes de transparence, d'équité, de qualité de services, d'imputabilité et de protection de l'intérêt public. Ça ressemble passablement à ce que... les demandes qui ont été faites par le Vérificateur général. Donc, c'est ce qu'on retrouve...

Une voix: ...

M. Rioux: La Protectrice, qui a demandé finalement ces éléments-là.

On voit aussi, l'article 15 a été modifié dans le but de soumettre l'agence et ses filiales à la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels.

L'article 55 a été modifié dans le but de soumettre sans condition l'agence et ses filiales à la vérification de gestion du Vérificateur général du Québec. Donc, on voit que les principes de transparence sont bien respectés avec ces modifications-là.

Autre chose qui a été demandée, c'est: Qui doit recourir aux services de l'agence? Donc, on retrouvait principalement les municipalités, dans le premier projet de loi. La ministre amende, et les municipalités n'auront pas à recourir aux services de l'agence. Mais ce qu'on a compris, c'est que les municipalités ont un intérêt à la consulter, mais ce sera facultatif. Donc, c'est un élément qui est important, donc dans les modifications que l'on connaît.

Donc, à partir, moi, je pense, de ces amendements-là et qu'on peut revoir article par article, bien je vais demander le vote, en souhaitant que nous allons passer le plus rapidement possible à l'étude du projet de loi.

Le Président (M. Paquin): Est-ce qu'il y a d'autres intervenants?

Une voix: ...

Le Président (M. Paquin): Bon. D'accord. Donc, on va mettre aux voix la motion. Je vais vous lire la motion.

Une voix: ...vote nominal.

Le Président (M. Paquin): Oui, M. le député.

Mise aux voix

«Que la Commission des finances publiques tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 61, Loi sur l'Agence des partenariats public-privé du Québec, des consultations particulières quant à tous les articles dudit projet et aux amendements et qu'à cette fin elle entende la Protectrice du citoyen.»

Mme la secrétaire, vote nominal?

La Secrétaire: Oui. M. Lelièvre (Gaspé)?

M. Lelièvre: Pour.

La Secrétaire: Mme Beaudoin (Mirabel)?

Mme Beaudoin: Pour.

La Secrétaire: M. Turp (Mercier)?

M. Turp: Pour

La Secrétaire: Mme Jérôme-Forget (Marguerite-Bourgeoys)?

Mme Jérôme-Forget: Contre.

La Secrétaire: M. Cholette (Hull)?

M. Cholette: Contre.

La Secrétaire: M. Rioux (Iberville)?

M. Rioux: Contre.

La Secrétaire: Mme Charest (Matane)?

Mme Charest (Matane): Contre.

La Secrétaire: M. Gautrin (Verdun)?

M. Gautrin: Contre.

La Secrétaire: M. Bernier (Montmorency)?

M. Bernier: Contre.

La Secrétaire: M. Paquin (Saint-Jean)?

Le Président (M. Paquin): Abstention, Mme la secrétaire.

Le Secrétaire: 3 pour, 6 contre, 1 abstention.

Le Président (M. Paquin): Donc, la motion est rejetée. M. le député de Gaspé.

Motion proposant d'entendre
le Commissaire au lobbyisme

M. Lelièvre: J'ai une motion à présenter en vertu de nos règles. Donc, il est proposé:

«Qu'en vertu de l'article 244 de nos règles de procédure la Commission des finances publiques tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 61, Loi sur l'Agence des partenariats public-privé du Québec, des consultations particulières quant à tous les articles dudit projet de loi ainsi qu'à tous les amendements déposés par le ministre et qu'à cette fin elle entende le Commissaire au lobbyisme.»

Une voix: ...

M. Lelièvre: Au lobbyisme.

Le Président (M. Paquin): Donc, la motion est recevable. M. le député, vous avez la parole.

Des voix: ...

M. Lelièvre: Alors, merci, M. le Président. Est-ce qu'on pourrait avoir un certain décorum? Vous m'indiquez que j'ai la parole, donc est-ce que je peux commencer?

Le Président (M. Paquin): Oui. S'il vous plaît, à l'ordre! M. le député de Gaspé, on va vous écouter avec beaucoup d'attention.

M. Guy Lelièvre

M. Lelièvre: Alors, merci, M. le Président. Comme vous le savez, on vient de déposer une motion qui a été rejetée, on a déposé ça cet après-midi, pour entendre le Protecteur du citoyen, pour entendre la Commission d'accès à l'information. Maintenant, M. le Président, on est rendus au lobbyisme.

Le Commissaire au lobbyisme a étudié attentivement le projet de loi n° 61 et il a fait des remarques très pertinentes à la présidente du Conseil du trésor lors de sa présentation, ici, à cette Assemblée. Il a fait part de ses préoccupations, dans un premier temps, concernant le mandat de surveillance et de contrôle des activités de lobbyisme qu'on peut retrouver au Québec.

Ce qu'il dit, le Commissaire, M. le Président, c'est important, parce qu'il dit: «...le gouvernement élargit la zone des activités de lobbyisme, les relations public-privé étant les conditions initiales à l'émergence du phénomène. [...] Mais nous sommes tous à même de constater la fragilité du lien de confiance des citoyens envers leurs institutions publiques.»

M. le Président, à la lecture du projet de loi, à la remarque du Commissaire, il importe que la population du Québec prenne connaissance de ce projet de loi. La présidente du Conseil du trésor nous présente ce projet de loi comme une panacée. Mais, en réalité, ce n'est pas une panacée. C'est que l'État du Québec sera soumis à l'entreprise privée.

n(17 h 50)n

Quand elle nous parle de son agence, quand elle nous dit que l'agence sera dotée d'un minimum de personnes, environ 12, 14 personnes, 15 personnes, et que cette agence viendra en aide aux ministères, alors que dans la réalité c'est le ministère qui va venir en aide aux agences... Tous les ministères du gouvernement du Québec seront mis à contribution. Ce sont eux qui vont préparer les projets, ce sont eux qui vont les analyser, ce sont eux qui vont regarder qu'est-ce que proposent éventuellement les municipalités. Et par la suite on va prendre le texte du projet de loi et on va dire: Un organisme public doit recourir aux services de l'agence pour l'évaluation de la faisabilité en mode de partenariat public-privé de ses projets d'infrastructures, d'équipements ou de prestations de services publics, pour le choix de ses partenaires ainsi que pour la négociation et la conclusion de ces contrats de partenariats public-privé, sauf dans les cas et aux conditions que détermine le gouvernement.

Ce que nous dit le Commissaire au lobbyisme, c'est que «les attentes des citoyens se font pressantes et explicites quant à la transparence et à l'intégrité des décisions qui doivent être prises dans l'intérêt public». M. le Président, avons-nous ces assurances? Nous n'avons pas ces assurances. On sait que la ministre tente de minimiser continuellement la présence de ces filiales qui seront rattachées à l'agence. Mais, l'agence, elle va créer autant de tentacules qu'il y aura de dossiers à régler ou de problèmes à régler. Est-ce que, M. le Président, les citoyens sont en mesure d'être rassurés par ce que l'on entend du côté gouvernemental et particulièrement de la ministre?

J'ai eu l'occasion de les entendre, cet après-midi, nous parler, bon, du projet de loi n° 164, et j'ai l'intention d'y revenir ce soir, et également de faire état des déclarations ou des prises de position de différents députés à l'Assemblée nationale ? le député de Shefford, la députée de Sauvé, le député de Marguerite-Bourgeoys aussi, à l'époque ? et on verra que ce n'est pas une histoire nouvelle. Ce n'est pas une histoire nouvelle que de dire qu'il y aura des partenariats public-privé. Parce que le Parti libéral, en 1998, aurait mis ça dans son programme puis, dès 1994, c'était en gestation. Alors, il y a lieu de s'interroger sérieusement sur les avantages et les inconvénients de ce que propose ce projet de loi.

Et le Commissaire au lobbyisme nous dit: «Faisant preuve de bon sens, le législateur a fait le pari qu'un citoyen mieux informé pourra prendre la pleine mesure des choix auxquels l'État se trouve confronté et aussi demander une reddition de comptes pour savoir ce qui détermine l'orientation des politiques publiques et comment les fonds publics sont dépensés. Toute velléité de changement dans les modes de gouvernance de la chose publique doit respecter ces acquis fondamentaux.» C'est la position du Commissaire au lobbyisme. Alors, on est à l'introduction, là, de l'analyse de ce projet de loi.

Les mandats. Le mandat du Commissaire, c'est quoi? Il fait référence à ce qu'on a mentionné tout à l'heure, à la transparence, c'est fondamental. Mon collègue de Richelieu a demandé des documents; il a été obligé d'utiliser la Loi sur l'accès à l'information et aux documents. La réponse, c'est: il n'a pas accès aux documents.

Et je pourrais être en mesure de démontrer ce soir, à la lecture des galées, hein, qu'à l'époque du dépôt du projet de loi n° 164, les députés formant l'opposition libérale à l'époque exigeaient d'avoir le dépôt de documents. Alors, comment se fait-il que, si, eux, le demandaient... Puis il n'y en avait pas, de documents, là. Le ministre avait déposé un projet de loi, semble-t-il qu'il n'y avait pas d'études, etc., puis ça concernait les autoroutes. Alors, eux voulaient avoir les études, etc., mais il n'y en avait pas, d'études. Ce qu'on avait, c'est qu'on était sur le principe d'un projet de loi.

Mais, beaucoup de députés qui sont ici aujourd'hui, au moins trois, hein, que je vois, n'étaient pas à cette législature. C'est des députés nouvellement élus. Alors, je pourrais, ce soir, pour le bénéfice de mes collègues, leur en faire part, faire part de cette recherche qui leur permettra d'avoir une lecture appropriée de la réalité des interventions qui ont été faites à l'époque, et de bien comprendre que, lorsqu'on affirme qu'il y a eu des études, qu'il y a eu différentes choses de préparées par le ministre des Transports à l'époque, l'ancien député de Joliette, puis, à ce moment-là, ils pourront voir, consulter tous les documents nécessaires. On va leur donner la référence sur le site de l'Assemblée nationale, nos débats. C'est le projet de loi n° 164, à l'adoption de principe.

Mais je dois dire, à ce moment-ci, sur ce projet de loi qu'il n'y a pas eu de demande de consultation de la part des députés qui étaient à l'opposition. Ils n'ont pas demandé d'entendre aucun groupe. Ils n'ont pas demandé que les personnes, le Protecteur du citoyen, viennent ici. Et ça apparaît, M. le Président, dans la transcription, et ça me fera plaisir de leur donner les références pertinentes.

Alors, M. le Président, qu'est-ce qu'il nous dit, là, le Commissaire? «Même si la Politique-cadre sur les partenariats public-privé fait expressément référence à la transparence des processus, le Commissaire au lobbyisme doit rappeler d'entrée de jeu que son propos repose sur l'orientation fondamentale du mandat qui lui a été confié: la transparence et le sain exercice des activités de lobbyisme.» Et, un petit peu plus loin, il nous explique sa compréhension du projet de partenariats public-privé: «Le projet de loi n° 61, dont la vocation première ? la vocation première ? est l'institution d'une agence spécialisée dans les questions relatives aux partenariats public-privé, pose quelques éléments qui, sans constituer un véritable cadre relatif à ces partenariats, en esquisse néanmoins certains contours.»

Donc, à ce moment-là, il y a la place, hein, il y a place à toutes sortes d'interprétations: on est dans le domaine de l'esquisse. Qui, par la suite, va définir de façon particulière les contours de ce projet? Naturellement, c'est la présidente du Conseil du trésor. C'est elle qui est responsable de ce projet de loi, c'est elle qui sera responsable de l'agence, c'est elle qui dans le fond amène... qui fait en sorte qu'on soit ici, encore aujourd'hui. Parce qu'elle veut absolument que ce projet de loi soit adopté pour des raisons naturellement idéologiques, des engagements électoraux.

Elle prétend, la présidente du Conseil du trésor, que le public est en mesure d'amener des sommes à titre d'investissement. Mais encore là où elle est, cette démonstration? Si elle pouvait nous donner quelques exemples. Et aussi, en référant à ce qu'elle a mentionné un petit peu plus tôt aujourd'hui ? venir en aide aux ministères: mais dans quel genre de projets une agence composée de 14 personnes ou de 15 personnes viendra en aide aux ministères, alors que justement l'expertise, dans les ministères, elle est là? Alors donc, est-ce que la présidente du Conseil du trésor est en train de nous dire par sa réaction qu'elle ne croit pas qu'il y a de l'expertise dans les ministères?

Bien, Mme la présidente du Conseil du trésor nous dit qu'il n'y a pas d'expertise, dans les ministères, pour les PPP. Bon. Alors, qui seront les experts qu'elle embauchera? Alors, on a vu, par exemple, qu'il y a eu au-delà de 550 000 $ de dépensés pour toutes sortes de recherches et... Mme la présidente, je l'ai lu dans les articles de journaux, il y a eu au-delà de 550 000 $ de dépensés pour esquisser les contours ? esquisser les contours. C'est quand même de l'argent. Et mon collègue de Richelieu vous a demandé des explications, vous a demandé de produire des documents, M. le Président, et on attend toujours ces documents. Alors, moi, comme membre de cette Assemblée nationale, comme mes collègues, je trouve ça important que nous ayons l'information, M. le Président.

Donc, si la ministre nous dit que cette information-là est accessible, qu'elle est en mesure de nous démontrer que les ministères n'ont pas l'expertise, mais qu'elle a des documents qui pourraient nous éclairer concernant la capacité du privé justement d'esquisser, et de déterminer, et de définir adéquatement les contours, on pourrait toujours demander au Syndicat de la fonction publique de venir donner une opinion sur ces études, sur ces recherches que nous avons payées. Chaque contribuable du Québec a payé les études de la présidente du Conseil du trésor pour qu'elle les conserve dans son bureau à l'abri des regards indiscrets. Mais ce serait très important, M. le Président, après l'ajournement de nos travaux, que la présidente du Conseil du trésor au moins informe les parlementaires des deux formations politiques, même des trois formations politiques, qu'on ait accès à cette source d'information.

C'est inadmissible. On ne peut pas travailler dans le néant. Alors, elle affirme toutes sortes de choses. Moi, je suis prêt à la croire, mais jusqu'à un certain point...

Le Président (M. Paquin): M. le député de Gaspé, je dois... Il est 18 heures, je dois vous arrêter.

Des voix: ...

Le Président (M. Paquin): Oui. Bien, je pense que ça ne fonctionnera pas, malheureusement. Je suspends donc les travaux de la Commission des finances publiques jusqu'à 20 heures ce soir.

(Suspension de la séance à 18 heures)

 

(Reprise à 20 h 10)

Le Président (M. Paquin): Bon. À l'ordre! À l'ordre, s'il vous plaît! Je déclare la séance de la Commission des finances publiques ouverte. Avant de commencer, je demande à tous ceux et celles qui ont un téléphone cellulaire de bien vouloir éteindre la sonnerie, pour éviter des problèmes sur les travaux.

Le mandat de la commission...

Des voix: ...

Le Président (M. Paquin): C'est moi qui parle, là, vous êtes d'accord, tout le monde? Le mandat de la commission est de... elle est réunie afin de poursuivre le projet de loi n° 61, Loi sur l'Agence des partenariats public-privé. Lorsque nous avons quitté vers 18 heures, c'est le député de Gaspé qui avait la parole. Et il vous reste, M. le député, 16 min 50 s, pour faire valoir vos idées. Allez-y.

M. Lelièvre: Oui. Merci, M. le Président. Alors, nous sommes à nouveau réunis pour discuter du projet concernant l'Agence des partenariats public-privé du Québec.

M. le Président, cet après-midi, nous avons entamé nos représentations à l'effet qu'il était nécessaire d'entendre le Commissaire au lobbyisme, qui s'est présenté ici, devant cette commission, la Commission des finances publiques, pour faire part de ses attentes et également de ses remarques concernant le projet de loi n° 61. Alors, tout au long de sa présentation, le Commissaire au lobbyisme parle du lien de confiance ? et il n'est pas le seul, il n'est pas le seul, la Protectrice du citoyen aussi en parle, du lien de confiance ? pour que le gouvernement, qui a l'intention d'aller de l'avant avec son projet de partenariats public-privé, mette en place les mécanismes nécessaires pour rassurer d'une part la population sur la sécurité de ce qui se passera. On parle d'un régime de transparence et on va voir que les lobbyistes seront très actifs.

Maintenant, ce qui est inquiétant, concernant ce projet de loi, c'est que la ministre peut créer des filiales. Et, dans la présentation du Commissaire au lobbyisme, il nous mentionnait qu'on peut faire de la subdélégation, c'est-à-dire, une personne qui aura reçu un mandat ou qui aura reçu un contrat pourra par la suite redéléguer ses responsabilités et son mandat à une autre personne. Ça commence à être inquiétant. Mais cette personne-là ne sera pas assujettie aux organismes que sont le Protecteur du citoyen, la Commission d'accès à l'information, le Commissaire au lobbyisme. Est-ce que lui pourra éventuellement faire en sorte que les tiers ou les subdélégués, tous ceux qui graviteront autour du ministère et particulièrement autour de l'agence... Parce que, l'agence, c'est elle qui sera la maîtresse d'oeuvre de tous ces partenariats public-privé puisqu'elle a le pouvoir d'initier les discussions, elle a le pouvoir de proposer des projets, elle va susciter également des projets.

Alors, je pense que mes collègues qui appuient le projet de loi de la ministre doivent réfléchir sérieusement à l'avenir. Parce que, si on regarde la définition des activités de lobbyisme, «toutes les communications orales ou écrites avec un titulaire d'une charge publique en vue d'influencer ou pouvant raisonnablement être considérées, par la personne qui les initie, comme étant susceptibles d'influencer la prise de décisions...» Alors, on est exactement dans le cas qui va se produire.

Dès que le projet de loi sera adopté, parce que le gouvernement va imposer sa majorité, à ce moment-là, est-ce que nous aurions eu ici des débats transparents? Mon collègue de Richelieu a demandé des informations somme toute normales, accessibles, que détient la présidente du Conseil du trésor, et déjà c'est un refus. Alors, imaginez-vous lorsque nous aurons plus tard des organismes qui ne sont pas assujettis à la loi sur l'accès à l'information, qui ne sont pas assujettis aux règles de déontologie du Commissaire au lobbyisme, aux règles du Protecteur du citoyen, M. le Président, est-ce qu'il y a matière à s'inquiéter? Oui. Et, tout au long de sa présentation, le Commissaire nous dit, bon: «Il y a trois catégories de lobbyistes: les lobbyistes-conseils[...], les lobbyistes d'entreprise [...] et les lobbyistes d'organisation», qui habituellement agissent pour les organisations sans but lucratif.

Mais il revient constamment, constamment sur la question de la transparence. Il dit: «Pour mener à bien sa mission de surveillance et de contrôle des activités de lobbyisme, le Commissaire dispose de pouvoirs d'inspection [...] d'enquête [afin] d'obtenir d'un lobbyiste ou d'un titulaire de charge publique tout renseignement relatif aux activités ou aux fonctions exercées par ceux-ci.»

Il continue: «Cette loi constitue un régime voué à la transparence.» Alors, où est-elle, la transparence, si nous ne pouvons pas avoir accès dès maintenant à des documents qui somme toute, éventuellement, pourraient être ordonnés par la Commission d'accès à l'information? Il a eu une demande qui a été adressée à la présidente du Conseil du trésor. Elle a refusé. Ou encore on a vu en fin de semaine que la Fédération professionnelle des journalistes du Québec dénonçait le gouvernement pour son manque de transparence, puisqu'ils demandaient des informations au gouvernement, aux ministères, et ils se sont fait répondre, se sont fait répondre qu'il y avait une directive à l'effet que tout devait passer par les cabinets. Quand on dit 40 jours pour avoir une réponse, trois mois dans d'autres cas, et le dossier... Puis des informations somme toute relativement simples sur la qualité de l'eau, au ministère de l'Environnement...

Est-ce que déjà les signaux que ce gouvernement nous envoie ne nous permettent pas de comprendre que nous allons vivre dans un régime d'ombre et même de noirceur parce que nous n'aurons pas accès à l'information? Et, le Commissaire, c'est la même chose lorsqu'il parle des contrats. Quand il parle des contrats, il est catégorique, il fait des mises en garde. Ainsi, «penser que les partenariats publics sont appelés à connaître un essor sans précédent au Québec», et là il souligne «l'importance [de] bien évaluer les implications [...] en regard du respect du droit des citoyens à la transparence des processus décisionnels, politiques et administratifs». Ça s'adresse directement à la présidente du Conseil du trésor. C'est ça qu'il dit, parce qu'éventuellement elle devra l'appliquer, sa loi.

Est-ce que, par exemple, la subdélégation ne fera pas en sorte qu'on va tenter d'éloigner tellement l'accessibilité à l'information puis aux données, aux données économiques... Parce que ces partenariats se feront avec des gens qui sont intéressés à faire des affaires, à faire de l'argent. Et est-ce qu'on va pouvoir connaître les montants investis? Non, parce qu'il ne feront pas partie de ceux qui seront soumis à la loi sur l'accès à l'information. Si les services ne sont pas de bonne qualité, on va se défendre, on va dire: Écoutez, nous, on a confié le mandat à un tiers, nous allons enquêter. Le gouvernement, ça va être sa réponse classique: Nous allons enquêter. Mais il n'aura pas plus le droit d'aller demander aux tiers... Comme citoyen, moi, je veux savoir combien, quel genre de services vous allez mettre en place. C'est ça la réalité.

n(20 h 20)n

Et le problème que nous avons actuellement... Et le Commissaire en parle. Il invite au respect de certaines garanties dont bénéficient les citoyens. Puis la transparence, c'est le leitmotiv de son mémoire, et il est, tout au long de sa présentation, catégorique. Il cite, par exemple, l'étude des auteurs Benoit, Aubert, et de Michel Patry, qui «indiquent que le citoyen est au nombre des trois acteurs principaux concernés par les partenariats public-privé, les deux autres étant évidemment l'État et l'entreprise privée».

Alors, chaque partie doit trouver son compte: le citoyen, avoir une qualité de service, et les investisseurs, des revenus, des bénéfices. C'est ça, la réalité. L'État recherche-t-il des bénéfices par son investissement? Le seul bénéfice qu'il doit rechercher, c'est la meilleure qualité de service pour la population. Est-ce qu'il aurait pu donner les mêmes services de très haute qualité sans passer par ce projet de partenariat? Oui. Et imaginez-vous, dans les projets d'infrastructures, comment ça va se passer. Comment ça va se passer dans les projets d'infrastructures? Tous les lobbyistes vont se ruer pour savoir qui sont les têtes dirigeantes, qui sont les personnes qui sont susceptibles d'accorder des contrats, quelles sont les personnes qui seront en autorité, quelles sont les personnes qui sont susceptibles d'avoir une oreille plus attentive. C'est ça, la réalité qui va se passer.

Dans les dossiers d'infrastructures, quelle municipalité sera la mieux organisée pour pouvoir faire ces démarches pour aller chercher quelqu'un qui est dans le partenariat? Et qui il va aller convaincre? Il va aller convaincre le privé. Il n'ira pas convaincre la présidente du Conseil du trésor. Ce n'est pas elle qui va gérer les projets. Et, si on prend... On nous dit, par exemple... on nous parle des investissements qui s'en viennent du fédéral, on a créé un réceptacle. Le ministre des Finances a créé un réceptacle. Bon. Il y a de l'argent qui va aller là. On parle de 10 milliards à terme. 10 milliards, c'est beaucoup d'argent, quand même. Alors, est-ce que les organisations de toutes sortes ne seront pas intéressées à cette manne? Bien sûr qu'elles seront intéressées, et je les comprends. Les municipalités seront intéressées. Si on parle de réfection de routes, les constructeurs de routes seront intéressés. Alors, ceux qui construisent les aqueducs et les égouts seront très intéressés. On peut faire à peu près n'importe quoi avec le projet du ministre des Finances.

La ministre responsable du Conseil du trésor nous présente aussi un autre projet. Partenariats public-privé, encore la même chose: ça va être ouvert à qui? Est-ce que, par exemple, ce sont les personnes les plus influentes qui auront accès au bureau des décideurs? L'agence, ils sont 14. Ils vont certainement rencontrer des gens. Mais, lorsque l'agenda est plein, il est plein. Et, à partir du moment que ceux qui vont solliciter des rendez-vous... Ceux qui vont solliciter des rendez-vous ? puis le député de Montmorency comprend très bien ce que je veux dire ? lorsque ce sera le temps de décider combien ira à telle municipalité plutôt qu'à une autre, bien, M. le Président, ce sera le privé, ceux à qui la ministre aura confié la responsabilité, qui va décider. Comment peut-on accepter un projet de cette nature? Il faut que les gens comprennent que les partenariats public-privé à mon avis, bien que le discours qu'on nous présente soit pour améliorer la qualité des services, ce sera pour améliorer la qualité des rendements, des rendements de ceux qui vont investir. C'est ça, la réalité.

Le citoyen va peut-être bénéficier d'un service ou de quelques services, mais, lorsqu'on va tomber dans des projets d'infrastructures, je peux vous dire que ce sera vraiment le rendement des firmes. Ce sont elles qui vont rechercher le bénéfice, et pas n'importe comment. Les meilleurs projets, à qui l'agence va les proposer? Parce que l'agence peut proposer des projets. C'est marqué dans la loi, c'est clair, c'est limpide. Alors, qu'est-ce qu'il dit, lui, le Commissaire au lobbyisme? «L'intérêt public, car c'est ce dont il s'agit, exige que les gouvernants donnent au citoyen les garanties que le processus d'introduction et de gestion des partenariats public-privé place l'intérêt public au-dessus des intérêts particuliers. La transparence et la crédibilité du processus détermineront le degré d'adhésion de la population aux partenariats public-privé.» C'est ça, la réalité.

Et l'exigence... Et il s'adresse à l'entreprise privée: «En acceptant de jouer le jeu du partenariat, l'entreprise privée doit cependant accepter d'opérer dans un contexte particulier: elle acceptera ainsi de se plier à de nouvelles exigences de transparence, de reddition de comptes et d'écoute des citoyens consommateurs. Les opérations faites par l'entreprise privée et utilisant les deniers publics sont sujettes à des contraintes particulières qu'on ne retrouve pas dans le cadre de transactions entre deux entreprises privées.»

Alors, M. le Président, il faut que l'on réfléchisse à ça. Et j'espère que les gens à la maison écoutent. Je sais que ce soir il y a d'autres émissions peut-être plus intéressantes que de parler des PPP, mais je peux vous dire que les citoyens, de plus en plus, s'intéressent aux personnes qui sont en autorité, qui ont le pouvoir de dépenser leurs taxes et leurs impôts, et ils en veulent pour leur argent. «Les citoyens doivent avoir la capacité de faire valoir leur point de vue de façon éclairée.» Ça, c'est une autre recommandation, M. le Président, que le Commissaire au lobbyisme fait. Est-ce qu'on retrouve les mécanismes à l'intérieur de ce projet de loi? Non. Non, on ne les retrouve pas. «Ils doivent disposer des moyens leur permettant d'être associés à part entière tout au cours du processus.» Avons-nous entendu parler la présidente du Conseil du trésor sur quelque moyen que ce soit? Non. En tout cas, pas encore. Espérons que mon intervention va susciter chez elle un désir sincère de répondre aux questions, puisqu'elle est en autorité, elle est en responsabilité. Elle doit, elle doit, à tout le moins, nous donner les indications qui nous permettront aussi d'informer la population comme députés. Alors...

Et d'autre part il affirme que «le succès des partenariats se mesurera à l'aune du respect des droits des citoyens, incluant au premier plan le droit à l'information, à chacune des étapes du processus», et «l'implication des citoyens ne peut être acquise sans le maintien des mécanismes». Alors, moi, j'attends, de la part de la présidente du Conseil du trésor, une série de réponses. Et je crois qu'elle prend des notes, elle écoute, mais elle ne nous parle pas. Elle ne nous parle pas, elle ne nous répond pas, elle ne nous donne pas d'indication.

Alors, M. le Président, je l'invite...

M. Bernier: M. le Président. M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Paquin): Oui, M. le député de Montmorency?

M. Bernier: Je pense que la ministre et présidente du Conseil du trésor, ça fait quand même environ 17 heures qu'elle est ici et qu'elle répond à toutes les questions, hein? Il ne faudrait quand même pas soulever le fait qu'elle ne répond pas.

M. Simard: Ce n'est pas un point d'ordre, M. le Président, c'est seulement un commentaire, là, du député.

Le Président (M. Paquin): Ce n'est pas un point d'ordre, M. le député de Montmorency. Et j'invite le député de Gaspé à conclure. Il reste quelques secondes. S'il vous plaît.

M. Lelièvre: Oui. Alors, M. le Président, ce que dit le Commissaire: «...en catimini, les citoyens risquent fort d'être méfiants et de manifester leur désapprobation: maintenir les citoyens dans l'ignorance engendre la méfiance.» Merci, M. le Président.

Le Président (M. Paquin): Merci, M. le député de Gaspé. Il y a d'autres intervenants sur la motion? Mme la députée de Mirabel.

Mme Denise Beaudoin

Mme Beaudoin: Merci, M. le Président. Alors, mon collègue de Gaspé a présenté cette motion qui se lit comme suit. C'est la troisième, et malheureusement les deux premières n'ont pas été acceptées par les gens d'en face. Et la motion se lit comme suit:

«Il est proposé qu'en vertu de l'article 244 de nos règles de procédure la Commission des finances publiques tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 61, Loi sur l'Agence des partenariats public-privé du Québec, des consultations particulières quant à tous les articles dudit projet de loi ainsi qu'à tous les amendements déposés par le ministre et qu'elle entende à cette fin...» Alors, comme je l'ai dit, la première motion, c'était pour la Commission d'accès à l'information, la deuxième, la Protectrice du citoyen, et celle-ci, c'est: «le Commissaire au lobbyisme».

n(20 h 30)n

Pourquoi on veut entendre ces organismes? D'abord, ils ont des choses en commun, M. le Président, et par le fait même ils n'ont pas d'intérêt particulier. Le seul intérêt qu'ils ont, c'est de protéger nos institutions. Ils ont quelque chose en commun également, les trois demandent la transformation totale, et je dis bien totale, du projet de loi ou bien ils demandent son retrait, tout simplement.

Alors, je vais vous parler concernant le Commissaire au lobbyisme, que nous voulons entendre parce que les Québécois et les Québécoises ont le droit de savoir qu'est-ce qu'on veut faire avec le projet de loi n° 61. Et, «dans son mémoire, le Commissaire au lobbyisme rappelle dans un premier temps que l'encadrement des activités de lobbyisme assure aux citoyens que ces activités s'exerceront correctement et en toute transparence», M. le Président. Ça, c'est très important quand je dis: Les Québécois et les Québécoises ont le droit de savoir, quand on parle de transparence, c'est ce qui fait en sorte que nous voulons avoir une réponse aux questions. «En effet, à la faveur de l'adoption unanime par l'Assemblée nationale de la Loi sur la transparence et l'éthique en matière de lobbyisme, il est non seulement possible de savoir qui tente d'influencer une décision de l'Administration publique, mais aussi de connaître l'objet des activités de lobbyisme.» Alors, «cette loi a pour objectif avoué de renforcer la confiance des citoyens envers les institutions et les titulaires de charges publiques élus ou nommés pour prendre des décisions dans l'intérêt public».

Ils ont présenté un mémoire, et nous voulons les entendre parce que nous avons des questions à leur poser, et, s'ils sont là, on va pouvoir avoir des réponses, justement. Et je vous réfère à la page 10 de leur mémoire, parce qu'eux, ils sont inquiets. Ils sont inquiets comme les gens ici. Les gens veulent savoir, les Québécois et les Québécoises veulent savoir. Et, à la page 10 de leur mémoire, qu'ils ont déjà présenté, ils disent: «À cet égard, tout lobbyiste intervenant au stade de la création d'un partenariat devrait fournir aux autorités auprès desquelles il agit une preuve de son inscription au registre des lobbyistes.» Et c'est là qu'ils sont inquiets, ils disent: «Cette obligation garantirait à la source le respect du principe de transparence des activités de lobbyisme en matière de PPP, contribuant ainsi ? M. le Président ? de façon significative à faire accepter ces partenariats par les citoyens. Qu'elle se traduise par une disposition législative ou par une mesure administrative, une telle obligation ne pourra être que bénéfique en regard de la crédibilité du processus menant à ? ce qu'on appelle ? un PPP.»

Alors, quand ces gens-là se posent des questions, imaginez donc la population en général. Et, dans ce mémoire-là, ce qui est intéressant également, c'est à la page 12 de leur mémoire. Là, ils parlent du public, comment le public devrait être informé. Ils disent que «le recours aux PPP fait ainsi craindre ? et c'est ça le verbe qui est important, "craindre"; on a les adjectifs "inquiétude", mais là on dit: craindre, les gens ont peur; alors, on dit: fait ainsi craindre ? à juste titre la perte de garanties importantes de transparence dans des processus décisionnels qui devront néanmoins continuer d'être guidés par l'intérêt public». Je pense que ça ne peut pas être plus clair.

Et on parle du public, ils disent: «Le public n'est pas moins intéressé à savoir qui cherche à exercer une influence sur les décisions qui le concernent du simple fait que celles-ci sont prises en application d'un PPP. Ce serait plutôt le contraire ? M. le Président ? considérant que la motivation première des entreprises partenaires demeurera toujours la recherche de profits et non l'intérêt public.» On voit, là, que ce n'est pas le même but que l'on recherche: d'un côté, ce sont les profits, puis, de l'autre côté, c'est l'intérêt public. Et c'est ça, ce qui nous concerne aujourd'hui. Nous, on veut, pour l'intérêt public, que, ces organismes-là, on puisse les interroger parce qu'ils ne veulent pas que ce projet de loi n° 61 soit adopté tel quel. Comme je le disais tantôt, ils veulent tout simplement une transformation totale ou le retrait. Et, quand on pense que ces organismes-là représentent le public, c'est très inquiétant, parce qu'eux n'ont pas d'intérêts. S'ils avaient des intérêts, ce serait autre chose, là. On ne parle pas du Conseil du patronat, là, on parle des organismes en qui on a confiance.

Si on parle de la Commission d'accès à l'information, on veut que ça s'applique à tout le monde, que ce soit le privé ou le public. La Protectrice du citoyen, on veut une protection. Puis, le Commissaire au lobbyisme, on n'a pas fait une loi pour rien, on veut que ça s'applique également.

Et, dans leur mémoire aussi, si on continue, parce qu'ils soulèvent des craintes continuellement, à la page 13, M. le Président, on dit: «Bref, par la délégation de fonctions ou pouvoirs publics à des personnes qui ne sont pas des titulaires de charges publiques au sens de la loi, on peut prévoir que les PPP ramèneront progressivement dans l'ombre des activités que le législateur a pourtant voulu rendre transparentes.» Alors ça, c'est sérieux. Et on dit: «De plus, les règles déontologiques destinées à encadrer ces activités deviendront lettre morte.» Alors, «on conviendra sans difficulté que ces effets ne peuvent qu'entraîner dans le public une perception négative ? et je dis bien négative; je dis bien que ce n'est pas moi qui l'ai écrit, là, ça, ça se trouve être la commission comme telle, le Commissaire au lobbyisme; ils disent: ça ne fait qu'entraîner dans le public une perception négative ? qui nuira à la crédibilité des institutions et à la viabilité de ces partenariats». Alors, je pense que de les entendre et de les questionner afin de rassurer la population, c'est très, très important.

Et ils terminent leur mémoire en disant: «Pour ces raisons, le maintien et le renforcement des garanties offertes par le régime de transparence et d'éthique en matière de lobbyisme dans la mise en oeuvre des PPP apparaissent hautement souhaitables, d'autant plus que cela ne représenterait aucun coût additionnel.» Alors, pourquoi, à ce moment-là... Parce que souvent, quand on parle de coût, on est inquiet. Ça ne coûte rien. C'est bien eux qui le disent: «D'autant plus que cela ne représenterait aucun coût additionnel pour l'État et les partenaires privés.» Eux, ils trouvent une solution. Ils disent: «Une solution envisageable à cet égard pourrait être d'assimiler les représentants des entreprises privées qui oeuvrent dans le cadre de ces partenariats à des titulaires de charges publiques aux fins de la Loi sur la transparence et l'éthique en matière de lobbyisme, s'inspirant en cela de la Loi sur la Protecteur du citoyen qui prévoit à son article 16 ? et je cite: "L'organisme ou la personne qui exerce par délégation les fonctions d'un organisme public ou d'une personne visée à l'article 13 est, dans l'exercice de ces fonctions, assimilée à ces derniers aux fins de la présente loi."»

Alors, comme je le disais tantôt, ils veulent tout simplement que le projet de loi n° 61 soit retiré. Et ils terminent aussi en disant: «En conséquence, le Commissaire au lobbyisme recommande que soit modifiée la Loi sur la transparence et l'éthique en matière de lobbyisme afin d'assimiler les représentants des entreprises privées qui oeuvrent dans le cadre des partenariats public-privé à des titulaires de charges publiques aux fins de cette loi.» Ça ne peut pas être plus clair.

On a semblé dire tantôt que ce n'était pas nécessaire de les questionner, ce n'était pas nécessaire de les entendre, nous, on pense le contraire. Alors, à ce moment-là, M. le Président, la motion présentée par mon collègue de Gaspé est une motion qui est très importante. Et j'ose espérer cette fois-ci que les gens d'en face vont comprendre qu'il faut les questionner et qu'il faut les entendre. Merci.

Le Président (M. Paquin): Merci, Mme la députée de Mirabel. M. le député de Mercier.

M. Daniel Turp

M. Turp: Merci, M. le Président. À mon tour de prendre la parole et d'ajouter ma voix à celle de mes collègues, en cette soirée qui commence à peine et que nous voulons tous agréable et vivante. Et j'essaierai de contribuer à ce que nos travaux soient vivants et que les gens qui s'occupent à faire des choses très, très importantes ce soir puissent avoir l'occasion d'entendre l'argumentation de l'opposition officielle qui souhaite, souhaite véritablement associer à nouveau aux travaux de cette commission l'un des autres grands officiers de l'État québécois, cet officier de l'État québécois qui, je le rappelle pour ceux qui ne le sauraient pas, est élu par l'Assemblée nationale, en l'occurrence le Commissaire au lobbyisme. C'est quand même un personnage important dans notre système politique, puisque nous avons considéré qu'il devait être élu par les députés de l'Assemblée nationale. Cela rend d'autant plus important ce geste que devrait poser notre commission voulant qu'il puisse intervenir à nouveau sur le projet de loi n° 61 à l'égard duquel il a démontré un intérêt en présentant devant la commission un mémoire qui faisait état, comme mes collègues l'ont dit, de certaines réserves, de certaines préoccupations qu'on doit considérer légitimes et certaines demandes de modification qui, à ma connaissance ? et j'ai lu les projets d'amendement qui ont été déposés par la présidente du Conseil du trésor...

n(20 h 40)n

D'ailleurs, il y a beaucoup de ces projets d'amendement qui portent sur le titre de la personne qui va présider les destinées de cette agence. Je ne sais pas si mes collègues l'ont remarqué, un très grand nombre d'amendements visent à modifier le nom de «directeur général» par le nom de «président-directeur général». Il y a au moins une douzaine d'amendements qui vont dans ce sens-là. On ne peut pas dire qu'il s'agit d'amendements de fond, d'importance, qui tiennent compte des préoccupations exprimées à la fois par le Commissaire au lobbyisme, que nous souhaiterions faire entendre par cette commission à nouveau, ou par les autres grands officiers de l'État québécois, que nous avons voulu faire entendre, qu'il s'agisse de la Protectrice du citoyen ou en premier lieu ? de quel officier s'agissait-il, rappelez-moi?, ah oui, le commissaire ? le président de la Commission de l'accès à l'information.

Et malheureusement les membres de la majorité libérale n'ont pas donné suite à la demande de l'opposition officielle, ce qui nous désole. Mais peut-être serons-nous consolés bientôt, parce que nous leur donnons une autre occasion de faire appel à cette personne qui, dans le système politique québécois, devrait être entendue à nouveau pour évaluer le projet de loi et les amendements qu'on propose de lui apporter. Et peut-être Me Côté... À ma connaissance, d'ailleurs, il s'agit de Me Côté, qui est le Commissaire au lobbyisme, un éminent professeur à l'Université Laval qui a été choisi pour être notre Commissaire au lobbyisme, qui pourrait présenter ses vues sur le projet de loi tel qu'on propose de l'amender. Mais sans doute serait-il déçu parce qu'il ne retrouverait pas, dans les amendements qui ont été déposés par la ministre chargée de l'Administration publique et présidente du Conseil du trésor, les changements qu'il demandait, changements qu'il pensait important d'apporter à ce projet de loi.

Et je vous les rappelle, je vous les rappelle puisque ma collègue les a soulignés, mais il vaut la peine de signaler à nouveau quels sont les deux changements fondamentaux que Me Côté veut voir apporter à ce projet de loi ou en tout cas à d'autres lois ou des mesures qui à son avis régleraient des problèmes qui résulteraient de l'adoption du projet de loi dans l'état actuel de ce projet. Alors, il propose «que soit adoptée une mesure législative, ou à défaut une règle administrative». Je pense que nous préférerions que ce soit une mesure législative qu'on puisse débattre ici, parce que, s'il devait s'agir d'une règle administrative, l'adoption d'une telle règle échapperait au processus parlementaire tel que nous le connaissons. Alors donc, le Commissaire au lobbyisme propose «que soit adoptée une mesure législative, ou à défaut une règle administrative, obligeant tout lobbyiste intervenant au stade de la création d'un partenariat public-privé à fournir aux autorités auprès desquelles il agit une preuve de son inscription au registre des lobbyistes».

M. le Président, dans l'état actuel des choses ? et cela est suggéré par le Commissaire puisqu'il demande qu'une autre mesure soit adoptée ? les lobbyistes pourraient faire des démarches auprès des personnes qui sont associées à un partenariat public-privé sans être inscrites au registre des lobbyistes. M. le Président, cela irait à l'encontre de la lettre sinon de l'esprit de la loi en vertu de laquelle nous avons nous-mêmes créé cette fonction, cette Loi sur la transparence et l'éthique en matière de lobbyisme dont je vous rappelle qu'elle a été adoptée à l'unanimité dans cette Assemblée. Et je crois qu'il serait utile de savoir quelle est la réaction du Commissaire à la lumière de l'évolution des travaux de cette commission, et c'est la raison pour laquelle l'opposition officielle se fait un devoir de présenter cette motion pour contribuer de façon constructive aux travaux de cette commission et nous assurer que, lorsque nous ferons l'étude du projet de loi article par article, lorsque nous examinerons attentivement chacun des articles de ce projet de loi, comme nous avons bien l'intention de le faire ? n'est-ce pas, chers collègues? ? avec la minutie qui nous est reconnue, je l'espère, bien qu'on pourrait examiner l'opinion que nous ferait le Commissaire au lobbyisme sur l'omission des dispositions qu'il souhaite voir incluses dans cette loi qui crée sa fonction d'ailleurs et qui lui donne les compétences qui sont considérées si importantes.

Parce que, M. le Président, le phénomène du lobbyisme ou du démarchage... N'aurait-on pas dû utiliser le terme «démarchage»? On a trouvé un terme français pour la notion de lobbying ou de lobbyisme, mais j'imagine que, dans sa sagesse, le législateur de l'époque a voulu utiliser ce terme «lobbyisme». Mais, si j'avais été législateur à l'époque, j'aurais insisté pour qu'on utilise le terme «démarcheur». Alors, nous aurions eu un commissaire au démarchage. Ce n'est pas très joli en fait, je l'admets, mais Commissaire au lobbyisme, ce n'est pas très beau non plus. Et on aurait pu inventer un néologisme. N'aurions-nous pas dû trouver un néologisme?

Mais la réalité des choses, c'est que le Commissaire au lobbyisme demande une deuxième modification, une modification que nous aurions et nous pourrions encore faire, si la majorité gouvernementale et le parti ministériel écoutaient, comme ils devraient le faire, le Commissaire au lobbyisme. Parce que nous pourrions, dans une disposition transitoire, modifier, comme il le souhaite, la Loi sur la transparence et l'éthique en matière de lobbyisme «afin d'assimiler les représentants des entreprises privées qui oeuvrent dans le cadre des partenariats public-privé à des titulaires de charges publiques aux fins de cette loi». N'est-ce pas là une demande raisonnable de la part du Commissaire au lobbyisme, qui a pris un grand soin à étudier ce projet de loi et qui arrive à cette conclusion qui vise tout simplement à assurer une plus grande transparence dans ce démarchage des personnes qui voudront avoir un impact sur ces partenariats public et privé et voudront obtenir, pour les firmes qu'ils représenteront, ces contrats?

Alors, M. le Président, j'invite les collègues de la majorité à inviter à nouveau le Commissaire au lobbyisme. Je crois qu'il pourrait être d'un secours précieux pour cette commission.

Merci, M. le Président.

Le Président (M. Paquin): Merci, M. le député de Mercier. Il y a d'autres intervenants?

M. Gautrin: Non, non, mais...

M. Simard: Ah, il y a un autre intervenant.

Une voix: Un autre intervenant.

M. Simard: C'est bien.

Une voix: 10 minutes.

M. Gautrin: ...M. le Président.

M. Simard: Peut-être qu'il fléchit.

Le Président (M. Paquin): Vous voulez intervenir, M. le député de Verdun?

M. Gautrin: Non, non, non. Je réfléchis.

Le Président (M. Paquin): Réfléchissez. Bon, le temps que vous réfléchissez...

M. Simard: Je pensais qu'il fléchissait, puis il réfléchissait.

Le Président (M. Paquin): M. le député de Richelieu, vous avez la parole.

M. Sylvain Simard

M. Simard: Merci, M. le Président. Moi, je suis aussi optimiste que le député de Mercier et j'ai l'impression qu'avec des arguments aussi clairs ? d'ailleurs qui sont ceux qui avaient été développés devant nous par le Commissaire au lobbyisme; avec des arguments aussi clairs ? la partie ministérielle va consentir évidemment à ce que nous puissions aller plus loin et recevoir ici le Commissaire au lobbyisme. Les députés me font signe qu'il y a effectivement une réflexion qui a cours dans la partie ministérielle, et il faut faire confiance. La bonne foi se présume, et nous devons faire confiance.

n(20 h 50)n

D'ailleurs, avant de parler directement du Commissaire au lobbyisme, rappeler qu'ici, en commission parlementaire, nous avons reçu des dizaines de groupes, et leurs propos en général sur le projet de loi n'ont pas tous été très amènes. Je vais en citer quelques-uns, M. le Président, ça nous rappellera cette période où les gens sont venus, souvent les uns après les autres, des groupes très importants dans notre société, signifier leur opposition à ce projet de loi. Si on se souvient bien, dans l'ensemble des représentants du réseau de la santé, ils ont tous demandé que l'obligation soit retirée de recourir aux services de l'agence.

L'Association des hôpitaux du Québec, par exemple, disait: «Devant l'étendue des pouvoirs ? vous savez, cette petite agence dont nous parlent toujours la ministre et le député de Hull, cette petite agence-conseil, là; devant l'étendue des pouvoirs ? consentis à l'agence dans le projet de loi et l'imprécision des objets sur lesquels s'exercent ces pouvoirs, l'Association des hôpitaux du Québec ne peut que recommander le retrait de ce projet de loi dans sa forme actuelle.» Ce sont eux qui sont concernés au premier chef par les infrastructures dans le domaine hospitalier, dans le réseau de la santé. Et que nous disent-ils, les représentants de l'Association des hôpitaux du Québec? Il faut retirer ce projet de loi.

La Fédération des infirmières et des infirmiers, dans le réseau de la santé, y a-t-il personnes de plus près de nous, le public, plus préoccupées de la santé des gens que les infirmières et les infirmiers? Et que sont venus dire les infirmières et les infirmiers? Le projet de loi n° 61 sur l'Agence des partenariats public-privé vise à «mettre ? disent-ils ? les institutions publiques au service du secteur privé pour leur seul profit». Ce sont les infirmières. Il faut écouter ces gens qui, lorsque, nous, députés... Et ça vaut autant pour vous, M. le député de Verdun. Vous serez un jour, c'est tout à fait possible... Je ne le souhaite pas, vous me comprenez, nous sommes trop amis pour que je le souhaite, mais, si vous aviez malheureusement besoin de leurs services, vous verriez bien, M. le député... Je vous dis ça, M. le Président, pour que vous lui acheminiez cette idée...

Le Président (M. Paquin): M. le député de Verdun, vous avez une question de règlement, quoi?

M. Gautrin: M. le Président, je lève ma main pour pouvoir être inscrit sur le rôle des intervenants.

Le Président (M. Paquin): Oui. Bon, merci beaucoup. M. le député de Richelieu, s'il vous plaît.

M. Simard: Bon. Il voudra nous parler des infirmières qui le traiteront un jour, sans doute. La Fédération des infirmières et infirmiers du Québec a fait plusieurs recommandations mais qui se résument en une seule: que l'on retire le projet de loi le plus vite possible.

La Coalition des médecins pour la justice sociale est venue nous dire que les P3 ne représentent donc aucun avantage pour les services de santé publique, tout en faisant en sorte d'augmenter les coûts pour les services autrement diminués. Ce sont des médecins, ça, préoccupés par l'avenir de la santé et de la médecine.

La Fédération des médecins spécialistes du Québec... C'est rare que ces organismes se prononcent hors du champ de leurs intérêts ou de la santé publique, mais ils ont conclu à l'étude du projet de loi sur les partenariats public-privé... les spécialistes, hein, ceux, M. le Président, auxquels vous avez eu souvent recours dans votre vie, comme nous tous, ces médecins qui soignent, qui sont ou bien des chirurgiens ou des spécialistes de l'oeil, toutes les spécialités sont réunies dans une fédération... Et ils sont venus nous dire que le partenariat public-privé ne présente aucun avantage pour le service de santé, puisque, tout en faisant en sorte d'augmenter les coûts pour des services, autrement diminués... Non, pardon, j'ai confondu. Je donne la bonne citation: «Le secteur privé base ses actions ? disent les spécialistes ? sur la notion de profit, ce qui peut être contraire à une approche qui favorise le bien commun. C'est le cas de la gestion et de la prestation des services médicaux qui ne peuvent faire l'objet d'un PPP.» Les spécialistes, ceux qui vous soignent, M. le député, ceux qui nous soignent tous, dont on a besoin tellement de la compétence, ils sont venus nous dire ici, la Fédération des médecins spécialistes... Ils se sont fait accompagner d'ailleurs, et c'est un double mémoire, avec la Fédération des résidents... Tout l'avenir de la médecine au Québec était là pour nous dire: N'allez pas dans cette direction.

Il y en a d'autres qui demandaient le retrait. D'ailleurs ils l'ont obtenu. C'est quand même assez extraordinaire que la ministre se flatte d'avoir reçu, comme seul appui à ses amendements, les municipalités, qui se voient retirées du projet de loi. Vous imaginez l'extraordinaire fierté d'avoir une loi dont les gens sont contents d'être enfin... de ne pas être soumis à une loi. Une loi qui est bonne, une loi où les gens voient leur intérêt, ils demandent à être soumis à la loi, à être protégés, à être défendus par la loi, pouvoir profiter des avantages d'une loi. Ici, les municipalités sont venues nous dire que c'est formidable, les amendements, parce qu'enfin leur souhait est réalisé: ils ne seront pas soumis à cette agence et à cette loi, en tout cas ne le seront pas pour l'essentiel des dossiers. Vous avez raison, il faut se méfier. Lorsque nous passerons un jour à l'étude article par article, je ferai valoir que peut-être ont-elles crié trop vite victoire parce qu'il reste encore des attaches solides.

Mais de nombreuses autres citations. Celle du professeur Lauzon, de l'UQAM, qui me plaît particulièrement: «Commander des études sur l'à-propos des PPP, comme l'a fait [la présidente du Conseil du trésor], à des consultants comme SECOR, Ernst & Young et CIRANO, c'est aussi objectif ? nous dit Léo-Paul Lauzon ? que de confier une étude sur les libérations conditionnelles à Maurice "Mom" Boucher.» Ce sont des citations comme ça qui montrent bien l'extraordinaire acceptation de ce projet de loi dans différentes couches de la société.

Mais je reviens au Commissaire au lobbyisme, ce Commissaire qui a présenté vraiment un mémoire tout à fait remarquable. C'était son premier mémoire en commission parlementaire, donc ce sont des juristes qui ont travaillé ce mémoire, qui en ont fait un document tout à fait remarquable. Et je veux vous signaler quelques aspects de son mémoire sur les partenariats public-privé. Vous avez tout intérêt d'ailleurs à être attentifs au Commissaire au lobbyisme parce que celui-ci touche du doigt des aspects essentiels et qui devraient ? je le dis pour ceux qui nous écoutent; et qui devraient ? être pris en considération. C'est très important, ce qui est en train de se passer quant au lobbyisme. Nous avons fait voter une loi, nous nous sommes dotés de hauts standards éthiques quant au rapport entre l'État et les lobbyistes, qui sont des gens qui ont tout à fait le droit d'exister et d'exercer leurs métiers, mais l'État s'est assuré de la transparence, de l'enregistrement, que l'on sache toujours quel est le mandat d'un lobbyiste, de façon à ce que le public sache toujours qui fait quoi, au nom de qui, au nom de quoi.

Alors, «au stade de la mise en oeuvre ? dit le Commissaire au lobbyisme ? on suppose que le contrat de partenariat public-privé a été conclu et qu'une entreprise du secteur privé est investie d'une mission de service public». Donc, c'est ça, la réalité qui se produira si cette loi est adoptée. «Il peut s'agir soit de la conception, de la réalisation ou de l'exploitation d'un ouvrage public, soit ? c'est toujours la même chose, je le rappelle, ce n'est pas une loi banale ? de la prestation [des services publics].» Tous ceux et celles qui sont venus ici ont reconnu que cette loi ouvrait à la prestation de services publics par des partenariats public-privé parce que c'est dans la loi. Les gens ne sont pas particulièrement intelligents et futés parce qu'ils ont trouvé ça, c'est écrit en toutes lettres à plusieurs endroits dans la loi, c'est d'une simplicité absolue, là. À part les ministériels, qui ne veulent pas s'en vanter, là, c'est... La moitié de cette loi concerne des services publics qui seront transférés au secteur privé.

«Dans l'un ou l'autre cas ? infrastructures, prestation de services publics, nous dit le Commissaire ? toute communication intervenant auprès des représentants de l'entreprise partenaire et visant à influencer des prises de décision échappera à la loi ? échappera à la loi du lobbyisme ? du simple fait que ces représentants ne sont pas des titulaires de charges publiques au sens de cette loi. Non seulement ces communications ne pourront-elles constituer des activités de lobbyisme, mais leurs auteurs ne seront pas eux-mêmes considérés comme des lobbyistes, et cela même si leurs services ont été retenus ? c'est le Commissaire qui le dit; même si leurs services ont été retenus ? spécifiquement pour influencer des décisions qui sont visées par le régime de transparence et d'éthique en matière de lobbyisme.

n(21 heures)n

«Le projet de loi n° 61 prévoit la possibilité ? hein, prévoit la possibilité ? pour un organisme public de déléguer l'exercice de fonctions et de pouvoirs à un partenaire», hein? C'est au coeur du projet de loi. «On peut imaginer que plusieurs responsabilités assumées par des titulaires ? actuels ? de charges publiques dans divers domaines [vont être] transférées vers des entreprises privées.» On peut imaginer. Le projet de loi soit adopté... sera voté, donc on peut imaginer ça. À cet égard, outre le pouvoir réglementaire, il semble n'y avoir aucune limite quant au type de pouvoirs pouvant faire l'objet d'une délégation ou d'une subdélégation à un organisme public, par un organisme public. Il n'y a pas de limite, à l'article 13. Par exemple, les partenaires privés pourront se voir confier des pouvoirs en matière d'autorisation administrative, d'attribution de contrats, peut-être même d'octroi de subventions ou d'avantages pécuniaires. En fait, chaque partenariat est susceptible de comporter son lot de pouvoirs délégués, soustrayant au champ d'application du régime de transparence et d'éthique en matière de lobbyisme des secteurs d'activité où les activités de lobbyisme continueront pourtant bien d'être présentes, à la seule différence qu'elles s'orienteront désormais vers des acteurs du secteur privé investis d'une mission de service public.

Jusqu'à maintenant, vous aviez des lobbyistes qui agissaient vers des serviteurs publics, hein; là, maintenant, vous allez avoir des lobbyistes qui vont agir auprès de gens du privé qui auront été investis par le secteur public de ces partenariats. Ce n'est pas moi qui l'invente, qui le dis, là, c'est, après un travail d'analyse profond par l'équipe du Commissaire, après avoir lu la loi, hein, sans les lunettes roses de la partie ministérielle, non pas les discours, mais la loi telle quelle, à cause de ces délégations et subdélégations... c'est la conclusion à laquelle on en arrive. Le lobbyisme ne s'exercera plus tellement à l'égard des serviteurs publics, que ce soient les administrateurs publics ou même les députés et ministres. Le lobbyisme va s'exercer à l'égard d'autres entreprises privées qui se seront vu déléguer ou subdéléguer des pouvoirs dans la prestation des services publics.

Et le Commissaire continue. C'est très important. C'est agaçant à entendre, je le sais, c'est difficile, mais il faut admettre que c'est là. «Le recours aux partenariats public-privé fait [aussi] craindre à juste titre la perte de garanties importantes de transparence...» Il ne suffit pas de dire: Je suis en faveur de la transparence, j'en fais une priorité. Tout le monde est pour la vertu, là. Mais le projet de loi, c'est ce que des analystes, qu'il faut respecter... On peut ne pas être d'accord avec eux, mais, à ce moment-là, il faut non pas affirmer des choses, mais le démontrer, que ce n'est pas présent dans la loi. «Le recours aux partenariats public-privé fait ainsi craindre à juste titre la perte de garanties importantes de transparence dans des processus décisionnels qui devront néanmoins continuer d'être guidés par l'intérêt public. Un tel revirement ? le Commissaire parle d'un revirement, ce n'est pas une petite loi pour une agence-conseil, c'est un revirement ? apparaîtrait difficilement justifiable alors [...] que le législateur a reconnu expressément qu'il est dans l'intérêt du public que ce dernier puisse savoir qui cherche à exercer une influence sur les décisions qui le concernent. L'effet de cette reconnaissance, qui justifie à elle seule la nécessité d'une transparence accrue des processus décisionnels, devrait être le même à l'égard des décisions qui seront prises par les entreprises du secteur privé en vertu ? je le rappelais tout à l'heure ? de pouvoirs délégués ou subdélégués.»

Alors, dans son mémoire, et c'est souligné, c'est écrit en caractères gras, ce n'est pas moi qui ai cette insistance, le Commissaire disait: «Le public n'est pas moins intéressé à savoir qui cherche à exercer une influence sur les décisions qui le concernent du simple fait que celles-ci sont prises en application d'un partenariat public-privé. Ce serait plutôt le contraire, considérant que la motivation première des entreprises partenaires demeurera toujours la recherche de profits et non l'intérêt public.»

Alors, vous voyez que c'est très, très dur, les propos du Commissaire, ici. C'est très, très dur, hein? À partir d'une étude approfondie du projet de loi, le Commissaire est arrivé à cette conclusion. Le député de Verdun n'est pas arrivé à cette conclusion encore. Peut-être le sera-t-il d'ici la fin de cette soirée? Mais, s'il regardait à nouveau le projet de loi article par article, comme il a su le faire pendant des années lorsqu'il était de l'autre côté de cette Chambre, il verrait que des sujets d'inquiétude majeure apparaissent à plusieurs détours, dans plusieurs articles de ce projet de loi.

Plus loin, le Commissaire... M. le Président, il me reste un petit peu de temps, j'espère?

Le Président (M. Paquin): 15 minutes.

M. Simard: Bon.

Des voix: ...

M. Simard: Alors, je veux rassurer, je voulais rassurer le député de Verdun.

Le Président (M. Paquin): ...je vous ai faussé un peu, 12 minutes.

M. Simard: 12. Ces trois minutes seront...

Une voix: Consentement.

M. Simard: Consentement pour 20?

Une voix: Consentement pour 15?

Des voix: Non.

M. Simard: Malheureusement, il faut que ce soit unanime.

M. le Président, le Commissaire au lobbyisme poursuivait sa pensée, enfin la pensée de son organisme. Lorsque le Commissaire vient nous voir, ce n'est pas lui seul qui nous présente, c'est son organisme.

Une voix: ...

M. Simard: L'enthousiasme de mon voisin de Gaspé est tout à fait exceptionnel dans les circonstances.

M. Lelièvre: Ah! oui, oui, j'ai hâte de parler.

M. Simard: Il est très tôt.

Il est aussi important de souligner ? disait-il ? que le projet actuel... dans le projet actuel plutôt... suivant le projet actuel, le Code de déontologie des lobbyistes ne pourra pas trouver application dans le contexte des partenariats public-privé. Oubliez ça, là. Ça ne peut pas s'appliquer. Lui, c'est le spécialiste du lobbyisme, il nous dit: Ça ne peut pas s'appliquer. «On peut ainsi prévoir que l'encadrement déontologique mis en place pour assurer le sain exercice des activités de lobbyisme verra son champ d'application s'effriter au fil des délégations de fonctions et de pouvoirs qu'impliqueront les partenariats ? s'effriter au fil des délégations de pouvoirs qu'impliqueront les partenariats. Ceci signifie qu'un représentant qui tentera au bénéfice de son client d'influencer une décision d'un partenaire du secteur privé, concernant, par exemple, l'attribution d'un contrat ou d'une autorisation, pourra faire fi des normes de conduite qui auraient été applicables avant la délégation de pouvoirs. Étonnamment, on constate ainsi que les mêmes activités pourront être sujettes ou non ? c'est intéressant, les mêmes activités, sujettes ou non au Code de déontologie ? [...] selon qu'elles interviennent avant la délégation de pouvoirs [ou après la délégation de pouvoirs].» Donc, le code va s'appliquer avant la délégation de pouvoirs et, après la délégation, cesser de s'appliquer pour les mêmes activités. Et je rappelle que c'est lui qui souligne ? c'est en caractères gras dans son mémoire: «Il serait malsain d'accorder ? il serait malsain d'accorder ? moins d'importance, d'un point de vue déontologique, aux démarches visant à infléchir des décisions d'intérêt public, du [...] fait qu'elles ont été confiées aux entreprises privées en exécution d'un partenariat public-privé. Le besoin d'assurer un encadrement déontologique pour ces démarches est aussi sinon plus criant dans le contexte de ces partenariats que dans celui où ces démarches sont effectuées directement auprès de titulaires de charges publiques.» C'est très, très sérieux, là. La mise en garde est plus que forte, là, ici; elle est d'une insistance très grande.

«Le fait que les entreprises parties à un partenariat ne soient pas des titulaires de charges publiques entraînera [...] des conséquences fâcheuses dans l'application des règles dites d'"après-mandat" prévues à la Loi sur la transparence[...]. Ainsi...» Vous voyez, vous avez vu, là, la Commission d'accès à l'information, la Protectrice du citoyen, le Commissaire au lobbyisme, tout à fait dans la même ligne. À partir des mêmes articles de loi, tous et toutes viennent nous dire que c'est très grave, que les lois qui les régissent ne s'appliqueront pas, que nous sommes en train de partir dans une direction extrêmement dangereuse. Et je ne fais pas de la rhétorique ici, là, je ne fais que lire attentivement ce que des experts sont venus nous dire, les mises en garde qu'ils sont venus nous faire. Et je me serais attendu à ce que, dans le projet de loi de la ministre, on ait tenu compte de ces mises en garde. À part l'exclusion potentielle du Vérificateur général qui a été corrigée par les amendements, rien, rien des mises en garde des trois groupes majeurs dont je viens de parler, rien de cela n'a été pris en compte par les amendements de la ministre. «Ainsi, ne pourront s'appliquer ? hein, pour qu'on comprenne bien ? aux ex-dirigeants ou aux ex-employés de ces entreprises, qui auraient été impliqués personnellement dans un partenariat, les règles prévoyant que nul ne peut, dans l'exercice de ses activités de lobbyisme, tirer un avantage indu d'une charge publique dont il a antérieurement été titulaire ou divulguer des renseignements confidentiels dont il a pris connaissance dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice d'une charge publique.» Vous voyez, toutes ces règles qui empêchent quelqu'un de passer d'un secteur à l'autre, du public au privé, actuellement, vont disparaître, du simple fait de la nouvelle loi.

n(21 h 10)n

«Bref, par la délégation de fonctions ou pouvoirs publics à des personnes qui ne sont pas des titulaires de charges publiques au sens de la loi, on peut prévoir», nous dit le Commissaire, et qu'on aimerait bien revoir, de façon à lui demander si les modifications lui permettent de clarifier, lui permettent d'être satisfait et lui permettent d'avoir moins de craintes à l'égard du projet de loi, et il nous dit: «...on peut prévoir que les partenariats public-privé ramèneront progressivement dans l'ombre des activités que le législateur a pourtant voulu rendre transparentes. De plus, les règles déontologiques destinées à encadrer ces activités deviendront lettre morte.» Vous savez, ces activités, l'encadrement de ces activités, le législateur l'a voulu depuis longtemps. Je me souviens d'avoir présidé un mandat d'initiative, à la Commission des institutions, sur la création justement d'un poste de responsable... de Commissaire au lobbyisme, parce que les parlementaires, depuis de nombreuses années, considéraient qu'il était de plus en plus urgent de nous doter de ces balises de transparence. Le projet de loi renvoie dans l'ombre des activités que le législateur a voulu rendre transparentes. Ce n'est pas rien, ce n'est pas léger, ce ne sont pas des choses qui peuvent être considérées comme secondaires à ce moment-ci.

En fait, ce qu'il faut conclure à ce moment-ci, c'est que la ministre elle-même est parfaitement consciente de la faiblesse de ses amendements, parce que, si elle n'avait pas cette conscience-là, que ferait-elle? Bien, elle dirait: Mais c'est très bien; d'ailleurs, ça va aller beaucoup plus vite, on va sauver des journées, ça va nous permettre d'avancer; nous allons entendre ces organismes qui vont nous dire que les amendements répondent en très grande partie, totalement, en majorité, aux critiques et aux attentes de ces organismes. Pourquoi pensez-vous que la ministre, et suivie en cela par la députation ministérielle à cette commission, refuse systématiquement, depuis le début, d'entendre les organismes que nous proposons? Pour une raison très simple, c'est que la ministre sait très, très bien, très bien, comme nous le savons tous, que les amendements qu'elle a proposés ne répondent absolument pas aux interrogations, aux doutes émis par ces organismes. C'est très grave, M. le Président. Je le rappelle, ce ne sont pas des organismes ordinaires, ce ne sont pas des groupes de pression.

Parmi tous les groupes, tout à l'heure, que je citais, on peut toujours dire: C'est la société civile, ce sont des groupes de pression; à un groupe de pression, je peux en trouver un autre qui vient annuler le premier. Non, non. Nous sommes là devant des gens dont la compétence est reconnue, nommés par l'Assemblée nationale aux deux tiers des votes, en fait à l'unanimité dans presque tous les cas, qui dépendent directement de l'Assemblée nationale, dont les lois sont dans certains cas même quasi constitutionnelles. Elles outrepassent les autres lois. Les autres lois doivent s'y fondre, les respecter, doivent... On ne parle pas de lois banales, là, de lois sur la fermeture des heures de commerce. Elles sont importantes. On ne parle pas de lois sur des subventions à tel type d'entreprises ou sur telle zone portuaire. On parle de lois qui déterminent toutes nos institutions démocratiques, notre vie en société, qui sont, à l'intérieur de ce Parlement, de cet endroit remarquable qu'est le Parlement, l'Assemblée nationale, où nous avons été élus pour représenter la population, qui sont les institutions... ce qu'on appelle les chiens de garde de la démocratie, les chiens de garde de l'Assemblée nationale, qui sont là pour dire à la ministre: Ce n'est pas bien, ce que vous faites; pendant des années, la population va vivre avec votre loi si vous allez jusqu'au bout, et ce n'est pas la bonne direction. C'est très grave d'être pointé du doigt de façon majeure.

Il est arrivé dans le passé... J'ai vu parfois des organismes, parmi ceux que j'ai mentionnés, venir faire des remarques. Les ministres se sentaient tous obligés d'ailleurs d'en tenir compte de façon déterminante, un peu comme lorsque le Barreau, par exemple, vient s'interroger profondément sur le respect, par exemple, d'un projet de loi de la Charte des droits et libertés ou... À ce moment-là, le législateur est très attentif à ce genre de remarques. C'est la même chose pour le Commissaire au lobbyisme, la Commission d'accès à l'information et la protection des renseignements personnels. C'est la même chose pour la Protectrice du citoyen. Ce sont des institutions qui sont au-dessus de nous. Nous les avons créées justement pour nous surveiller, nous assurer que ce que nous faisons dans cette Chambre...

Le législateur, on avait l'habitude de dire cela dans les premiers cours de droit, hein, que le législateur pouvait faire à peu près tout, sauf rendre un homme enceinte. Aujourd'hui, avec les développements de la chirurgie et de différentes autres techniques, on ne sait plus. Mais c'est vrai que le législateur peut faire à peu près tout, mais heureusement le législateur est encadré par des règles. Il est encadré par d'abord des lois fondamentales, la Charte des droits et libertés du Québec, qui a été adoptée en 1974, à l'instigation du ministre de la Justice d'alors, M. Jérôme Choquette. C'est assez intéressant que c'est le même qui avait présidé aux événements d'Octobre. Vous voyez comme il a su bien faire avancer malgré tout la démocratie au Québec, puisqu'il a fait voter cette loi fondamentale dont nous nous inspirons tous les jours dans cette Chambre.

Eh bien, c'est la même chose pour la loi d'accès à l'information, le Protecteur du citoyen, le Commissaire au lobbyisme, ce sont des avancées démocratiques considérables. Eh bien, là, nous assistons à un recul non moins considérable. Le refus par une ministre du gouvernement, le refus par une majorité ministérielle de prendre en compte des très graves mises en demeure, des très graves commentaires, les commentaires extrêmement sérieux d'organismes qui sont pourtant là pour protéger non pas les députés, mais les citoyens des députés, protéger la population contre des gestes inconsidérés des lois qui brimeraient les droits des citoyens. C'est ce que fera cette loi si elle est adoptée telle qu'elle est, sans des modifications profondes, M. le Président.

Alors, en terminant, je veux vous dire que j'espère que j'ai convaincu nos amis d'en face de recevoir le Commissaire au lobbyisme, comme la Commission d'accès à l'information et la Protectrice du citoyen, afin de nous assurer que ce projet de loi respecte les droits fondamentaux des Québécois. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Paquin): Merci, M. le député de Richelieu. M. le député de Hull.

M. Cholette: Merci, M. le Président. Alors, si j'ai bien compris, vous m'allouez 10 minutes pour mon intervention. C'est bien ça. Alors...

Une voix: ...

M. Roch Cholette

M. Cholette: Oui. Bien, je veux respecter nos règles, n'est-ce pas?

Alors, chers collègues, en ce lundi soir de session intensive, heureux de vous retrouver assis autour de cette table pour parler encore une fois du projet de loi. Ça fait quand même plusieurs jours que l'on fait cela et ça fait plusieurs jours que l'on souhaite être capables d'étudier le premier article. Et, par une stratégie, j'imagine, orchestrée, évidemment les dépôts des différentes motions, ça nous empêche d'étudier chacun des articles du projet de loi qui pourtant... c'est la commission... qui a pour titre l'étude article par article du projet de loi. Mais, par une décision de l'opposition officielle, on...

M. Simard: M. le Président, question d'ordre, à ce moment-ci.

Le Président (M. Paquin): M. le député de Richelieu.

M. Simard: Vous ne laisserez pas, j'imagine, le député de Hull nous imputer des motifs, il parle d'une concertation. Nous ne faisons ici qu'exercer nos droits démocratiques et nous n'avons pas à être jugés en exerçant ces droits, selon le règlement, par le député de Hull. Vous allez me faire le plaisir de le rappeler à l'ordre.

M. Cholette: Effectivement. Non, effectivement, je...

Le Président (M. Paquin): Je vous appelle à la prudence, M. le député de Hull.

M. Cholette: Oui, oui. Écoutez, c'est tout à fait conforme au règlement. Non, non, je suis le premier à le dire. Il n'en demeure pas moins que je suis capable de juger des tactiques utilisées, alors de la stratégie utilisée. L'opposition... Non, je comprends que ça fait mal, là, mais essayez...

M. Simard: Ça ne fait pas mal.

M. Cholette: Écoutez, là, on reprend...

M. Lelièvre: Question de règlement.

M. Cholette: On reprend le Flex-O-Flex là où ça fait mal.

n(21 h 20)n

M. Lelièvre: Question de règlement. Question de règlement. Il n'y a pas de tactique qui est utilisée. Moi, je n'ai pas l'impression d'avoir utilisé une tactique. Je présente des arguments à la présidente du Conseil du trésor. Si, le député de Hull, ça ne fait pas son affaire, M. le Président, il a juste de ne pas être là. Mais les arguments que nous présentons, ce sont des arguments basés sur le projet de loi. Et je voudrais aussi que vous le rappeliez à l'ordre sur le fait qu'il a mentionné que ça faisait plusieurs jours que nous sommes ici, c'est la deuxième journée.

Le Président (M. Paquin): Bon. Donc, M. le député de Hull, la prudence, s'il vous plaît...

M. Cholette: Oui, oui, mais question de directive.

Le Président (M. Paquin): ...qu'on peut fonctionner de façon normale pour faire avancer les choses.

M. Cholette: Question de directive. Évidemment, le temps occupé par l'opposition n'est pas imputé à mon temps?

Le Président (M. Paquin): Du tout.

M. Cholette: Très bien. Alors, pour revenir, je comprends que l'opposition peut être en désaccord avec mon interprétation des faits, c'est libre à eux. Moi, comme député parlementaire, j'estime que le dépôt successif de motions qui souhaitent réentendre des gens qu'on a déjà entendus fait partie d'une stratégie. C'est mon avis. Je n'impute aucun motif. C'est conforme au règlement, mais c'est quand même une stratégie que l'opposition utilise afin, je pense, de réentendre, de réentendre des gens que l'on a déjà entendus. Venant d'un ancien gouvernement qui a fait tout, sauf écouter la population, ça prend du culot. Ça prend aussi du culot surtout lorsqu'on regarde le projet de loi n° 164 sur les PPP que vous avez fait adopter sans aucune consultation. Ce n'était pas une question d'entendre deux fois des groupes, ce n'était même pas une fois, M. le Président.

Alors, les larmes de crocodile de l'ensemble de la députation de l'autre côté ne m'émeut guère. D'ailleurs, M. le Président, je trouve ça assez...

Une voix: Ne m'émeuvent guère, ne m'émeuvent guère.

M. Cholette: Ne m'émeuvent guère? Ah! c'est bien, ça. Alors, M. le Président, je trouve ça aussi paradoxal d'entendre un plaidoyer aussi vibrant venant du député de Richelieu pour ce qui est de la Loi sur la transparence et l'éthique en matière de lobbyisme considérant qu'est-ce qui nous a amené cette loi. Et je ne veux pas rappeler l'histoire récente du Parti québécois en matière de... Mon Dieu! quel mot utiliser pour ne pas utiliser des mots non parlementaires, mais des sollicitations inappropriées chez certains lobbyistes nous ont valu la loi que nous avons devant nous, aujourd'hui. Et je trouve ça assez particulier que le parti qui a été victime, avec une démission de ministre, qui a été victime de toute une histoire soit celui qui réclame maintenant d'entendre non pas une fois, mais deux fois le Commissaire au lobbyisme.

Mais, vous savez, M. le Président, je ne peux pas beaucoup blâmer l'opposition que de revenir avec des choses en arrière. Ce parti de la nostalgie, les yeux braqués dans le rétroviseur, nous a habitués à cette rengaine. D'ailleurs, le fait qu'il refuse obstinément de lire chacun des articles et de les analyser me pousse, M. le Président, à être obligé de vous lire un article, un article qui a été amendé, l'article 4 du projet de loi, que la présidente du Conseil du trésor a décidé d'amender justement en réponse aux gens qui sont venus en commission parlementaire. Et vous trouverez, dans la lecture de l'article 4, réponse à bon nombre d'interrogations, M. le Président, que les membres de l'opposition font état aujourd'hui.

Alors, l'article 4 du projet de loi est modifié... est remplacé par celui que je vais vous lire. Alors:

«L'Agence a pour mission de contribuer, par ses conseils et son expertise, au renouvellement des infrastructures publiques et à l'amélioration de la qualité des services aux citoyens dans le cadre de la mise en oeuvre de projets de partenariats public-privé.

«Elle favorise, dans l'exercice de ses fonctions, l'application des principes suivants.» C'est dans la loi, M. le Président, à l'article 4: «Elle favorise, dans l'exercice de ses fonctions, l'application des principes suivants.» Il y en a quatre.

Premier principe: «un processus de sélection de partenaires et de conclusion de contrats qui est à la fois transparent et équitable, de façon à assurer une saine concurrence entre les entreprises intéressées ? il me semble que c'est clair;

«2° la mise en oeuvre de moyens permettant aux citoyens de connaître le processus de partenariat public-privé et la valeur ajoutée des fonds publics investis;

«3° le recours à des mécanismes de reddition de comptes fondés sur l'imputabilité des organismes publics et sur le fait que ceux-ci doivent assurer la maîtrise des projets d'infrastructures, d'équipements ou de prestation de services publics;

«4° le recours, dans l'intérêt du public, à des processus de consultation et de communication impliquant les personnes concernées par les projets.»

D'ailleurs, M. le Président, j'entendais l'opposition nous reprocher d'inclure, dans le projet de loi n° 61, la possibilité de livrer des services en mode de PPP. L'histoire nous rappelle par contre que l'ancien gouvernement, où le député de Richelieu était membre du Conseil des ministres d'ailleurs, a minimalement quatre endroits où des services sont rendus par des entreprises dans le cadre d'une entente public-privé. Je vous les nomme: service électronique d'appel d'offres, décembre 2002; Placements Québec; bonjourquebec; et les résidences d'étudiants au cégep Marie-Victorin. Ce sont quatre endroits où des partenariats ont eu cours, où il y a eu des partenariats public-privé de signés par l'ancien gouvernement et où on livre des services. Alors, M. le Président, que de faire les gorges chaudes en parlant du nouveau droit parce que ce sera des services, c'est...

Le Président (M. Paquin): ...M. le député de Hull. S'il vous plaît, j'apprécierais, lorsqu'un député parle, et ça, des deux côtés, d'être capable de bien entendre puis ne pas entendre des voix. D'accord? M. le député de Hull, allez-y.

M. Cholette: Merci. Alors, comme je disais, déjà dans l'histoire, le Parti québécois a signé des ententes de partenariat public-privé où il y avait livraison de services par le privé. Alors, il ne faut pas quand même se mettre la tête dans le sable.

D'ailleurs, M. le Président, je vais vous lire, pour revenir au projet de loi n° 164 que l'ancienne administration a fait adopter à l'unanimité, je vous lirai ceci, et c'est Guy Chevrette qui dit cela: «Par l'adoption de cette loi, nous démontrons tout le sérieux et toute l'importance que le gouvernement accorde à la mise en oeuvre de projets majeurs d'aménagement d'infrastructures de transport. Je suis particulièrement fier d'avoir réalisé aussi rapidement cet engagement qui permettra au Québec de développer un nouveau mode de gestion et de développement de nos infrastructures que l'on trouve notamment dans le plan de gestion des placements de la région.»

Aussi, M. le Président, c'était quand même en février 2003, et il était chef du Parti québécois, je crois qu'il l'est encore, en tout cas sur le titre, ça dit ceci, et c'est le député de Verchères qui disait ça: «Je suis tout à fait ouvert aux partenariats public-privé.» Peut-être faudrait-il le dire aux députés ministériels, peut-être le député de Richelieu pourrait lui parler demain. Et le député de Verchères continue en disant: «On trouve ça autant dans les pays très capitalistes que dans les pays socialistes. Je n'ai rien contre ça.»

M. le Président, pour revenir maintenant à la question du Commissaire au lobbyisme, je veux vous rappeler que, premièrement, il a témoigné en commission parlementaire. Nous l'avons entendu, nous avons réagi. Deuxièmement, je veux aussi dire que, dans le mémoire qu'il a déposé, en page 8, il disait également: «L'agence et la plupart des organismes publics sont visés par la définition de "titulaires de charges publiques" prévue à la Loi sur la transparence et l'éthique en matière de lobbyisme, de sorte que celle-ci trouvera application dès lors que les lobbyistes agiront auprès d'eux.» Alors, il reconnaissait le fait que la loi prévoyait déjà des mécanismes.

Je poursuis, M. le Président, en vous lisant ceci: «La Loi sur la transparence et l'éthique en matière de lobbyisme s'appliquera intégralement, puisque, d'une part, l'agence qui sera créée n'aura aucune fonction transactionnelle. Ce n'est qu'une agence-conseil.» Si on procédait à l'analyse article par article, on verrait très bien les amendements qui ont été proposés par la présidente du Conseil du trésor. «Cette agence, de conseil donc, n'offrira que des conseils aux ministères qui seront des agents transactionnels, comme ils le sont maintenant et comme ils sont assujettis à la loi sur le lobbying. Et c'est exactement la même chose qui va se produire le lendemain de l'adoption de la loi n° 61.»

M. le Président, je continue en disant que: «aucune offre non sollicitée ne sera acceptée dans le cadre de PPP. Il y aura toujours recours à des appels concurrentiels. Toujours.» Et, à cet effet, je vais me permettre de vous lire, M. le Président, l'article 2 de la Loi sur la transparence et l'éthique en matière de lobbying, dans le chapitre I, c'est la première page du projet de loi, M. le Président, ça va me permettre d'éclairer peut-être les membres de l'opposition. Activités de lobbying. En fait, c'est «Activités de lobbyisme».

«Constituent des activités de lobbyisme au sens de la présente loi toutes les communications orales ou écrites avec un titulaire d'une charge publique en vue d'influencer ou pouvant raisonnablement être considérées, par la personne qui les initie, comme étant susceptibles d'influencer la prise de décisions relativement ? à quatre choses:

«1° à l'élaboration, à la présentation, à la modification ou au rejet d'une proposition législative ou réglementaire, d'une résolution, d'une orientation, d'un programme ou d'un plan d'action ? il ne s'agit pas de cela, je me dépêche;

«2° à l'attribution d'un permis, d'une licence, d'un certificat ? ce n'est pas de ça qu'il s'agit[...];

«? écoutez bien ? à l'attribution d'un contrat, autrement que dans le cadre d'un appel d'offres public, d'une subvention ou d'un autre avantage pécuniaire, ou à l'attribution d'une autre forme de prestation déterminée par règlement ? 3°, c'est exactement de ça qu'il s'agit[...];

«4° à la nomination d'un administrateur public au sens de la Loi du ministère du Conseil exécutif...»

Puisque 3° traite justement d'adjudication de contrat, la loi aura son effet auprès du ministère qui adjugera les contrats, suite à une décision du Conseil des ministres.

L'ensemble de la législation sera donc respectée. On n'a pas besoin d'entendre une deuxième fois le Commissaire au lobbyisme. De toute façon, sa loi sera appliquée de façon intégrale. Moi, M. le Président, ce que je souhaite, c'est qu'on puisse passer à l'étude de l'article 1. Merci, M. le Président.

n(21 h 30)n

Le Président (M. Paquin): Merci, M. le député de Hull. Est-ce qu'il y a d'autres...

M. Lelièvre: Vote par appel nominal, M. le Président, s'il n'y a pas d'autre intervenant.

Le Président (M. Paquin): Oui, s'il n'y a pas d'autre intervention. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Je crois comprendre que le député de Verdun avait des intentions d'intervenir, tantôt.

M. Gautrin: J'ai des remarques, M. le Président, à faire, si vous me permettez, sur le projet de loi actuellement et sur la remarque qui a été présentée par actuellement mes collègues. Est-ce que je peux les faire actuellement, si vous me permettez?

Le Président (M. Paquin): Les remarques?

M. Gautrin: Oui. Je voudrais intervenir sur la proposition actuellement...

Le Président (M. Paquin): Sur la motion. Allez-y.

M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Absolument, M. le Président. Je vous remercie, M. le Président. Alors, je suis toujours dans le même embarras, lorsque j'ai écouté, avec l'éloquence habituelle du député de Richelieu et du député de Mercier, lorsqu'ils plaident pour que nous entendions le protecteur actuellement... le Commissaire au lobbyisme... L'embarras, je vais vous expliquer tout de suite, M. le Président. C'est que d'après moi le Commissaire au lobbyisme, avec tout le respect que je lui porte, et je suis probablement parmi les députés ministériels... nous sommes tous ici des gens qui lui portons énormément de respect. Nous avons énormément de difficultés de voir l'interaction, la possibilité d'interaction qu'il peut y avoir entre le projet de loi que nous avons devant nous et le débat qui est devant nous.

Alors, j'ai écouté avec beaucoup d'intérêt les interventions de mon collègue le député de Richelieu et de mon collègue le député de Mercier, et l'impression qu'il m'en est resté, peut-être ai-je tort, M. le Président, l'impression qu'il m'en est resté est à l'effet qu'ils plaidaient à quel point le Commissaire au lobbyisme aurait une intervention pertinente à faire si tant est que nous débattions ici du bien-fondé des partenariats privé-public. Mais ma lecture du projet de loi que nous avons là est totalement différente. Nous n'avons pas d'après moi à débattre actuellement du bien-fondé d'un principe, qui a d'ailleurs été mis de l'avant et supporté par les collègues ministériels à l'époque où ils étaient au gouvernement, mais il s'agit maintenant strictement d'une modalité d'application de ce principe dans l'administration publique. Nous sommes réellement au niveau des modalités. Et ils reviennent au niveau du débat général, débat général sur lequel ils ont adhéré d'ailleurs, puisqu'ils ont été les premiers protagonistes. Si je ne m'abuse, M. le Président, vous pouvez certainement vous rappeler, et j'aimerais le remémorer aussi bien au député de Richelieu, à l'époque où il était président du Conseil du trésor, à quel point, je pense, l'initiative, le principe, l'élément qui nous a permis d'aller de l'avant avec les partenariats public-privé ont germé dans l'esprit, brillant au demeurant, de mon collègue le député de Richelieu.

Alors, qu'est-ce que nous avons devant nous, M. le Président? Et je voudrais bien vous expliquer pourquoi nous allons voter contre la proposition, du moins, moi, je vais voter contre la proposition qui est devant nous. Il ne s'agit pas, M. le Président, actuellement de dire: Est-il opportun ou non d'avoir l'opinion du Commissaire au lobbyisme dans le débat sur les partenariats public-privé? Si tel était le cas, j'aurais peut-être pu me laisser convaincre par l'argumentation, au demeurant brillante, de mon collègue de Richelieu, voire celle de mon collègue de Mercier.

Mais là n'est pas le propos que nous avons devant nous. Le propos, c'est réellement la Loi sur l'Agence, c'est l'agence qui est devant nous, l'Agence des partenariats public.... C'est une manière de mettre en place... Comment pensons-nous que nous devons mettre en place réellement les partenariats public-privé, M. le Président? Et je m'excuse, avec tout le respect que je dois à mes collègues de l'opposition, M. le Président, et à travers vous, de leur dire que la mise en place d'une telle agence, la constitution d'une telle agence ne relève pas du débat général, qui est présent, j'imagine, actuellement dans notre société, quant aux partenariats public-privé.

Je me permets... J'ai entendu la présidente du Conseil du trésor faire référence à l'article 5. L'article 5 est un article qui réellement donne la mission de l'agence, et M. le député de Richelieu, je suis sûr, sera heureux d'apprendre que cet article...

Une voix: ...

M. Gautrin: Pardon? Non, mais attention, l'article 5 d'ailleurs, et je suis sûr qu'il a lu les documents qui ont été déposés par la présidente du Conseil du trésor, à l'effet que même certains articles de l'article 5 ont été abrogés, enfin sont susceptibles d'être abrogés si tant est que nous ayons la chance de pouvoir atteindre l'étude article par article de l'article 5.... Donc, les articles 4 et 5 sont abrogés. Et de plus l'article 5 concerne essentiellement la mission de l'agence.

Et je voudrais, M. le Président, qu'on comprenne bien. Nous sommes ici dans un débat qui quasiment n'a ni queue ni tête. Nos collègues d'en face, M. le Président, plaident à quel point il peut être utile d'entendre quel ou quel quidam pour pouvoir venir... Non, non, mais «quidam» avec beaucoup de respect, je respecte beaucoup... mais c'est un terme générique à mon sens, pouvoir inclure là-dedans... Non, mais quidam... La présidente, le Commissaire au lobbyisme, la Protectrice du citoyen dont vous avez souhaité avoir la présence ici, voire le Vérificateur général. Et je me rappelle actuellement le brio avec lequel le député de Gaspé a plaidé pour que nous entendions le Vérificateur général.

Mais je me permets de vous rappeler, M. le Président, et à travers vous, que nous ne sommes pas dans ce débat-là. Le débat actuellement est le débat de la création de l'agence. Nous plaidons, nous débattons actuellement sur l'opportunité de créer une agence. Il s'agit de quoi, M. le Président? Et je suis sûr que vous allez convaincre avec moi à quel point nous devrions, dès maintenant, commencer à étudier l'article 1 de ce projet de loi. Le projet de loi que nous avons devant nous ne débat pas de la pertinence en soi des partenariats public-privé. Nos collègues qui siègent actuellement dans l'opposition, déjà, lorsqu'ils étaient ministériels, ont accepté ce principe-là, ont accepté ceci comme étant quelque chose qui était un élément important pour permettre d'augmenter les infrastructures publiques dans les réseaux municipaux, voire scolaires, etc. C'est un principe qui a été accepté, M. le Président.

Ce que nous proposons actuellement, ce que nous mettons de l'avant, ce qui est le propre du projet de loi, et vous le savez parfaitement, M. le Président, puisque vous avez lu la loi, ce qui est le propre du projet de loi, c'est de dire quoi? Nous pensons que, pour aller de l'avant dans les partenariats public-privé, il est important d'avoir un organisme-conseil, un organisme qui va en quelque sorte guider ministères ou organismes gouvernementaux lorsqu'ils choisiront, parce qu'ils pensent que c'est opportun en termes de leur stratégie d'investissement, lorsqu'ils choisiront d'opter pour un partenariat public-privé. Et, lorsqu'ils choisiront d'opter pour un partenariat public-privé, nous leur disons: Vous ne pourrez pas, vous ne pourrez pas opter, comme vous pensez le faire, banalement... Déjà? Seulement deux minutes déjà, M. le Président?

Le Président (M. Paquin): Deux minutes, M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Je viens à peine de commencer mon intervention.

M. Simard: Par consentement, vous pouvez doubler son temps, il écoute avec...

M. Gautrin: Mais, M. le Président, il est bien conscient, n'eût été de cette loi, comprenez bien, moi, M. le Président, et je pense... n'eût été de la loi que nous proposons, nous serions totalement dans une espèce de jungle dans laquelle tout le monde pourrait se décider d'aller à vau-l'eau dans un partenariat public-privé. Nous voulons actuellement réglementer une idée qui a été mise de l'avant par nos collègues ministériels, qui vient de vous, chers amis. Et je respecte actuellement... Je vous redonne actuellement la paternité de cette idée en ce qui touche les partenariats public-privé, et nous voulons les réglementer, M. le Président. Nous voulons faire en sorte que nous ne soyons pas dans une situation aberrante où tout le monde pourrait concocter, dans son coin, son petit partenariat public-privé. Nous pensons actuellement qu'il est important, M. le Président, de les réglementer et de les baliser. Et, pour les baliser, nous mettons de l'avant actuellement, M. le Président, et c'est important de bien comprendre ça, une agence qui va être un conseil, un conseil obligatoire. Il faudra passer par l'agence pour pouvoir négocier en quelque sorte un partenariat public-privé.

n(21 h 40)n

Je m'étonne, M. le Président, je m'étonne que des esprits aussi clairvoyants, aussi clairvoyants que le député de Richelieu, le député de Mercier, la députée de Mirabel, le député de Gaspé s'en vont actuellement pour contester actuellement ce projet de loi. J'aurais espéré qu'ils souscrivent d'emblée à ce projet de loi qui vient baliser une idée qui est la leur, qui est la leur, à savoir l'opportunité d'aller de l'avant avec les partenariats public-privé qui, dès qu'ils ont... à laquelle ils ont adhéré, qu'ils ont même générée et sur laquelle nous suivons, nous adhérons à votre idée. Et nous vous disons: Pour mieux baliser ce que vous mettez de l'avant, nous proposons une agence.

M. le Président, est-il...

Le Président (M. Paquin): Il ne reste plus de temps, M. le député.

M. Gautrin: Oui, M. le Président, avec un consentement.

Une voix: ...avec consentement.

M. Gautrin: Merci. Alors, je remercie. Merci. Avec le consentement, je voudrais simplement terminer en disant: Une fois que nous allons de l'avant... Est-il opportun, à l'heure actuelle, de vouloir entendre une foule de personnes qui viendraient nous dire, à l'heure actuelle, ce qui est un débat auquel ils ont déjà adhéré? Nous pensons, ici, de notre côté, que leur idée de partenariat public-privé doit être mieux balisée et nous essayons actuellement de la baliser correctement pour procurer aux citoyens et au public une meilleure, une meilleure protection que celle qu'ils avaient mise de l'avant, ce qu'ils avaient mis de l'avant, les partenariats public-privé.

M. le Président, j'aimerais que nous défassions aujourd'hui la proposition qui est devant nous et que, très rapidement, nous puissions commencer l'étude article par article de cet excellent projet de loi auquel, lorsqu'ils prendront... ils adhéreront sans aucune difficulté. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Paquin): Merci, M. le député de Verdun.

M. Simard: M. le Président...

Le Président (M. Paquin): Oui, M. le député de Richelieu.

M. Simard: ...j'ai une question de directive, là. Est-ce qu'on peut faire un procès en refus de paternité, ici, à la commission?

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: Un test d'ADN.

M. Simard: Un test d'ADN. On demande un test d'ADN, M. le Président.

Le Président (M. Paquin): Je vais vous revenir avec ça demain, M. le député de Richelieu.

Mise aux voix

Donc, je vais mettre aux voix la motion, et par vote nominal, à la demande du député de Gaspé. Je vous relis la motion:

«Que la Commission des finances publiques tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 61, Loi de l'Agence des partenariats public-privé du Québec, des consultations particulières quant à tous les articles dudit projet de loi et ainsi qu'à tous les amendements déposés par la ministre et qu'à cette fin elle entende la Commission au lobbyisme.»

Mme la secrétaire, vote nominal.

La Secrétaire: M. Lelièvre (Gaspé)?

M. Lelièvre: Pour.

La Secrétaire: Mme Beaudoin (Mirabel)?

Mme Beaudoin: Pour.

La Secrétaire: M. Turp (Mercier)?

M. Turp: Pour, bien entendu.

La Secrétaire: M. Simard (Richelieu)?

M. Simard: Pour, avec enthousiasme.

La Secrétaire: Mme Jérôme-Forget (Marguerite-Bourgeoys)?

Mme Jérôme-Forget: Contre, madame.

La Secrétaire: M. Cholette (Hull)?

M. Cholette: Contre.

La Secrétaire: Mme Charest (Matane)?

Mme Charest (Matane): Contre.

La Secrétaire: M. Gautrin (Verdun)?

M. Gautrin: Contre, avec conviction.

La Secrétaire: M. Bernier (Montmorency)?

M. Bernier: Contre.

La Secrétaire: M. Paquin (Saint-Jean)?

Le Président (M. Paquin): Abstention, Mme la secrétaire.

La Secrétaire: Alors, 4 pour, 5 contre et 1 abstention.

Le Président (M. Paquin): D'accord. Donc, la motion est rejetée.

M. Turp: Je voudrais proposer une autre motion, M. le Président.

Le Président (M. Paquin): M. le député de Mercier, allez-y.

Motion proposant d'entendre
la Coalition Eau Secours!

M. Daniel Turp

M. Turp: Et je vois le plaisir déjà qui est anticipé par nos collègues d'en face.

«Il est proposé qu'en vertu de l'article 244 de nos règles de procédure la Commission des finances publiques tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 61, Loi sur l'Agence des partenariats public-privé du Québec, des consultations particulières quant à tous les articles ? tous les articles ? dudit projet de loi ainsi qu'à tous les amendements déposés par la ministre et qu'à cette fin elle entende la Coalition Eau Secours!.»

M. le Président, voilà le libellé de la motion.

Le Président (M. Paquin): ...

M. Turp: Oui, avec plaisir.

Le Président (M. Paquin): Donc, M. le député, je conclus que la motion est recevable et je vous donne la parole pour intervenir.

M. Turp: Alors, merci, M. le Président.

M. Simard: Une question d'organisation.

Le Président (M. Paquin): Oui.

M. Simard: Il est 9 h 45. Est-ce que vous consentirez bientôt à une pause santé minimale pour la commission, d'une dizaine de minutes?

Le Président (M. Paquin): Oui, absolument. Est-ce que...

M. Gautrin: Il y a des gens qui ont des problèmes de prostate, n'est-ce pas?

Le Président (M. Paquin): J'aimerais qu'on entende le député... Non, on va la faire tout de suite parce qu'il est 9 h 50 . Je pense, en cas que certains députés manquent de santé, ce serait défavorable.

M. Cholette: Peut-être une suggestion.

Le Président (M. Paquin): Oui, allez-y, M. le député de Hull.

M. Cholette: D'une oreille lointaine, je suis attentivement les travaux en Chambre, au salon bleu, et on m'indique que l'opposition officielle a déposé une motion de report sur un projet de loi.

M. Simard: Oui, intéressante d'ailleurs.

M. Cholette: Nous serons donc appelés à voter sur cette motion de report vers 10 h 35. Peut-être pouvons-nous prendre la pause santé à ce moment-là.

Des voix: Bien. Bien.

M. Simard: ...le député de Hull désire rester ici, il peut attendre aussi seul dans la salle.

M. Gautrin: Mais, M. le Président, peut-être certains d'entre nous... pourrions-nous être appelés à devoir intervenir sur cette motion de report, éminemment pertinente.

M. Turp: ...qu'on en prenne acte...

M. Gautrin: Nous en prenons acte.

M. Turp: ...de sa grande pertinence.

M. Gautrin: Non, non, de l'intervention...

Le Président (M. Paquin): S'il vous plaît! On va quand même prendre une pause santé de quelques minutes, là, cinq minutes, disons, vu qu'on retourne en Chambre possiblement tantôt.

M. Simard: Oh! 10 minutes.

M. Lelièvre: M. le Président, un petit peu de... encore jusqu'à minuit, peut-être un 10 minutes pour se dégourdir les jambes.

Une voix: Peut-être 10 minutes.

Le Président (M. Paquin): Je vais être très gentil avec vous, vu que vous l'êtes aussi, on va aller à 10 minutes.

(Suspension de la séance à 21 h 46)

 

(Reprise à 22 h 10)

Le Président (M. Paquin): À l'ordre, s'il vous plaît! Donc, on poursuit nos travaux, et il y a eu un dépôt de motion de la part du député de Mercier, et vous avez la parole, M. le député, pour 30 minutes.

M. Turp: Merci, M. le Président. Alors, à cette heure, je voudrais rappeler aux gens qui nous écoutent que la motion sur laquelle nous sommes invités à prendre la parole... et j'invite en fait tous mes collègues à prendre la parole, tous mes collègues y compris ceux du parti gouvernemental, parce qu'ils auraient intérêt à défendre l'idée que l'opposition officielle met de l'avant, celle d'entendre à nouveau le groupe Eau Secours!, l'organisation non gouvernementale, l'ONG Eau Secours! ? et, pour ceux qui ne sauraient pas quel est le nom officiel d'Eau Secours!, bien il s'agit de la Coalition québécoise pour une gestion responsable de l'eau. C'est une coalition qui fait parler d'elle et c'est une coalition qui d'ailleurs, ce soir même, se réunit à Montréal et a cherché, j'imagine avec succès, à réunir et à rassembler des gens pour justement parler de ce projet de loi n° 61 ainsi que d'autres projets de loi qui inquiètent beaucoup ceux qui s'intéressent au sort de l'eau. Et Eau Secours! organisera ici même, dans notre capitale nationale, demain, un autre rassemblement et à l'occasion duquel il invitera les citoyens et les citoyennes de notre capitale nationale à débattre des questions relatives à l'eau et notamment de l'impact que pourrait avoir le projet de loi n° 61 sur la gestion de l'eau au Québec.

Et c'est la raison pour laquelle nous souhaiterions qu'ils soient réinvités devant cette commission. Ne serait-il pas normal qu'après avoir tenu deux grandes auditions publiques dans la métropole et la capitale, après avoir entendu tous ces citoyens et toutes ces citoyennes qui leur donneront le pouls de la population, nous les entendions à nouveau pour qu'ils puissent non seulement nous donner leur opinion sur le projet de loi... alors, je crois comprendre que nous ne les avons même pas entendus. Alors, le député de Verdun ne pourra pas nous dire comme les autres députés de la majorité: On les a déjà entendus. Et vous ne pourrez pas dire que vous ne les avez pas entendus, tout à l'heure, comme vous l'avez fait pour ces grands officiers de l'État québécois que nous souhaitions associer à nouveau à nos travaux, parce que des amendements ont été présentés à ce projet de loi.

Le Président (M. Paquin): M. le député de Verdun, vous avez une question de règlement?

M. Gautrin: M. le Président, oui, j'ai une question de règlement. M. le Président, avec tout le respect que je dois à mon collègue de Mercier, que j'estime au plus haut point, je ne pense pas avoir jamais utilisé, dans aucune de mes interventions, le fait qu'on n'a pas entendu telle ou telle personne dans les arguments que j'ai mis de l'avant. Alors, ne m'associez pas, s'il vous plaît, à votre discours dans ce sens-là.

M. Turp: Écoutez, il faudrait revoir les galées, mais je fais confiance au député de Verdun. Mais je crois comprendre que certains... non, de mémoire, je dois vous avouer que... je ne me rappelle plus, là. Mais je poursuis. Je poursuis. Je poursuis. Et je crois, M. le Président, qu'à défaut d'avoir entendu les gens d'Eau Secours! et juste au cas où la majorité, ici, déciderait de ne pas les entendre, je vais vous lire une lettre qu'ils adressaient au premier ministre du Québec, un courriel en définitive, là, qui était envoyé, et je remarque que cela, c'est quand même assez intéressant, qui a été envoyé dans un courriel conforme aux normes environnementales et composé donc d'électrons recyclés.

M. Gautrin: ...de règlement. Je poserais la question: Quel est le concept...

Le Président (M. Paquin): Est-ce que c'est une question de règlement, M. le député de Verdun, là?

M. Gautrin: M. le Président, écoutez, avec tout le respect que je dois à mon collègue de Mercier, le concept d'électrons recyclés est un concept nouveau, et je comprends qu'il est en train d'introduire un concept nouveau sur le plan de la physique, mais permettez-moi de vous dire qu'en tant que physicien le concept d'électrons recyclés est un concept qui n'est pas, disons, couramment admis par la communauté scientifique actuelle.

Le Président (M. Paquin): Je vous remercie...

M. Gautrin: Bien, je ne sais pas ce que... Et je voudrais... j'attends avec beaucoup d'intérêt ce que mon collègue va m'expliquer, ce que c'est qu'un électron recyclé par rapport à l'électron non recyclé.

Le Président (M. Paquin): Merci, M. le député de Verdun, de vos explications, mais on va laisser, si vous permettez, notre collègue de Mercier poursuivre.

M. Gautrin: M. le Président, c'est ma question de règlement, il ne s'agit pas d'une explication, il s'agit d'une interrogation.

Le Président (M. Paquin): Oui, c'est ça.

M. Gautrin: Je m'interroge sur... et j'attends avec beaucoup d'intérêt ce que mon collègue de Mercier va nous expliquer quant au concept nouveau, mais probablement propre à lui-même, de savoir ce que c'est qu'un électron recyclé.

M. Turp: M. le Président, je m'interrogeais moi-même sur le sens à donner à cette notion d'électron recyclé. C'est la première fois que je voyais cette notion, mais elle est bel et bien indiquée, bel et bien mentionnée dans ce document qui était envoyé. Mais, M. le Président, ce qui importe ici, c'est le contenu de cette lettre, et je vous la lis, et j'aurai l'occasion de commenter son contenu pour le bénéfice des collègues, parce que c'est une question sérieuse, une question qui préoccupe les gens.

Et, pour ceux qui ont eu comme moi le plaisir de syntoniser les ondes de la télévision publique canadienne, hier, à Tout le monde en parle...

M. Simard: Un rendez-vous hebdomadaire.

M. Turp: ...un rendez-vous hebdomadaire de plusieurs millions de Québécois, ce qui est quand même intéressant, à cette émission, hier, le ministre de l'Environnement était...

M. Simard: ...humoriste.

M. Turp: ...était l'un des invités avec non pas un, mais deux humoristes.

M. Simard: Trois, avec le ministre.

M. Turp: Alors là, je ne reprendrai pas ces propos à mon compte. Le ministre de l'Environnement a dû et a été interrogé par l'un des invités, M. Patrick Huard, sur l'eau et le sort que le gouvernement voulait réserver à l'eau. Et M. Huard, qui est quelqu'un de populaire, de bien connu, de bien aimé, a dit: Ce combat pour l'eau et sa gestion publique, c'est un combat qui va m'amener, moi, homme qui n'est pas nécessairement mû par la politique, à faire beaucoup de choses pour empêcher que la gestion de l'eau soit confiée à l'entreprise privée. Et, quand il a dit cela, il a été chaudement applaudi par la foule. Et le ministre de l'Environnement, et la présidente du Conseil du trésor, et ses collègues devraient prendre acte de cet état d'esprit parmi les gens qui, au Québec, ne souhaitent pas que l'eau soit privatisée, que sa gestion ne soit pas prise en compte...

Mme Jérôme-Forget: M. le Président, le député m'interpelle...

Le Président (M. Paquin): Oui. M. le député, un instant. Mme la ministre.

Mme Jérôme-Forget: Le député m'interpelle, me disant que je devrais prendre acte. M. le Président, pour tout le respect que je vous dois, je n'ai pas à prendre acte parce que je n'ai pas l'intention d'intervenir au niveau de l'eau. Alors, je ne sais pas pourquoi le député mentionne ça.

M. Turp: M. le Président, je ne faisais qu'indiquer à la ministre et à ses collègues...

M. Simard: Pardon, question de directive, M. le Président.

Le Président (M. Paquin): ...M. le député de Richelieu. Allez-y.

M. Simard: Je pense qu'il est important que vous interveniez à ce moment-ci, là. Si, dans cette commission, on ne peut plus interpeller la ministre qui présente un projet de loi, je pense qu'on devrait... on va tous rentrer se coucher...

Mme Jérôme-Forget: Prêter des intentions, c'est autre chose.

M. Simard: ...alors, s'il vous plaît...

Mme Jérôme-Forget: M. le Président, on m'a prêté des intentions. Alors, je veux juste apporter une clarification. C'est tout.

Le Président (M. Paquin): M. le député de Mercier, je vais vous demander d'être très prudent dans vos propos, s'il vous plaît, comme je disais tantôt, pour permettre le bon fonctionnement de cette commission, qui va très bien à date et qui doit continuer dans ce sens.

M. Turp: J'en conviens tout à fait, M. le Président. Je ne souhaitais pas prêter d'intentions à la ministre, je voulais tout simplement faire constater à la ministre comme à ses collègues qu'il y a des gens qui sont très préoccupés par l'avenir et le sort de l'eau et qui souhaitent que l'eau ne soit pas gérée par l'entreprise privée. Et leur préoccupation naît de la présence, dans ce projet de loi n° 61, de dispositions qui laissent entendre que, s'agissant d'un service, et un service qui pourrait être donné par des organismes municipaux, la gestion de ce service, et notamment du service de la distribution de l'eau, pourrait être assujettie à un contrat de partenariat public-privé. Et je disais donc que l'invité à cette émission de Tout le monde en parle était très préoccupé et disait qu'il allait mener un combat personnel. Et certains de toute évidence le suivront dans ce combat personnel, et bien des Québécois vont dire non à l'idée que l'eau, au Québec, soit assujettie à des contrats de partenariat public-privé.

n(22 h 20)n

Et, comme je le signalais au début de mon intervention, je veux prendre le temps de lire ce que le président d'Eau Secours!, André Bouthillier, écrivait au premier ministre. Donc, je cite cette lettre: «L'intérêt du plus grand nombre doit prévaloir sur l'intérêt de quelques-uns. Après avoir pris connaissance des projets de loi nos 61 et 62, la Coalition québécoise pour une gestion responsable de l'eau Eau Secours! considère qu'il est temps de vous le rappeler ? et je rappelle que la lettre est adressée au premier ministre du Québec ? nous faisons appel aux valeurs qui vous animent. N'est-il pas vrai que l'eau qui circule dans le corps constitue le sang qui nous fait vivre? N'est-il pas vrai que cet organisme qui supporte notre intellect et nos valeurs ne peut survivre sans de l'eau en qualité et en quantité suffisantes? N'est-il pas vrai que de garantir l'accès à une eau de qualité pour tous les Québécois et [toutes les] Québécoises contribue à long terme à minimiser la pression sur le système de santé, ce dernier vous tenant tant à coeur? ? et il continue ? c'est avec cette vision en tête que j'interviens au nom de la coalition et que je vous demande, M. le premier ministre, de retirer ? de retirer ? la gestion de l'eau des projets de loi nos 61 et 62 débattus lors de la présente session parlementaire.»

Le Président (M. Paquin): M. le député, je dois malheureusement vous arrêter. Je vais être obligé de suspendre parce qu'on est appelés pour un vote au salon bleu. On va se reprendre, monsieur...

M. Turp: On va continuer, M. le Président?

Le Président (M. Paquin): Donc, on suspend, on va au vote puis vous allez revenir.

(Suspension de la séance à 22 h 22)

 

(Reprise à 22 h 40)

Le Président (M. Paquin): S'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Nous poursuivons nos travaux. La parole était au député de Mercier. Donc, M. le député de Mercier, vous pouvez continuer votre intervention.

M. Turp: Est-ce que vous pourriez me rappeler combien de minutes ont déjà été utilisées?

Le Président (M. Paquin): On va vous dire ça dans quelques secondes.

M. Turp: Merci.

Le Président (M. Paquin): Vous pouvez débuter, puis on va vous revenir avec ça.

M. Turp: Pour le bénéfice du député de Hull, je crois, M. le Président, je lui rappellerai que la motion dont nous reprenons l'étude est une motion qui vise à inviter l'organisation non gouvernementale, l'ONG Eau Secours!, connue également comme la Coalition québécoise pour une gestion responsable de l'eau, aux travaux de notre commission de façon à ce qu'elle puisse présenter ses vues, des vues qu'elle n'a pas encore eu l'occasion de présenter, sur le projet de loi n° 61.

Et j'en étais à faire la lecture, je crois, très instructive, d'une lettre que le président de cette coalition, M. André Bouthillier, faisait parvenir au premier ministre en lui faisant part de ses inquiétudes sur le projet de loi n° 61 en particulier et son impact sur la question de la gestion de l'eau. Et j'en étais rendu au troisième paragraphe, qui se lisait comme suit, M. le Président: C'est avec cette vision en tête, cette vision qu'il fallait minimiser la pression sur le système de santé, que la coalition intervenait au nom de la coalition et qu'elle demandait que soit retirée des projets de loi nos 61, 62 la gestion de l'eau. Donc, voilà une requête assez claire: assurer que le projet de loi n° 61, en ce qui le concerne, ne soit pas applicable à la gestion de l'eau.

Et il ajoutait: «La communauté scientifique demande que l'eau soit gérée de façon écosystémique ? dans l'intérêt donc des humains, de la faune et de la flore ? et [que] la privatisation de sa gestion ? selon la coalition ? ne rencontre d'aucune façon les préceptes de ce mode de gestion durable de notre environnement. Il n'y a que l'État ? selon Eau Secours! ? par le biais de ses institutions, qui puisse assurer la protection de ce bien commun.»

Et, M. le Président, on entend bien parler de cette notion de bien commun lorsqu'il s'agit de l'eau, mais aussi d'autres ressources qui devraient constituer le bien commun ou le patrimoine commun. Et vous savez que certaines personnes, certaines associations, je pense notamment à cette association qui s'appelle Contrat mondial de l'eau qui est présidée par Riccardo Petrella... et il y a d'ailleurs, au Québec, une association québécoise pour le Contrat mondial de l'eau, et à ma connaissance cette association est présidée par Mme Sylvie Paquerot, qui est d'ailleurs l'auteure d'une magistrale thèse de doctorat sur l'eau comme élément du patrimoine commun de l'humanité. Alors, M. le Président, que l'eau soit un bien commun au niveau national ou qu'il fasse partie du patrimoine commun de l'humanité, ce que nous demande Eau Secours!, ce qu'Eau Secours! demande au premier ministre, c'est que l'État assure la protection du bien commun qu'est l'eau et qu'il n'en confie pas, jamais, la gestion à l'entreprise privée dans le cadre de partenariats public-privé.

Le président Bouthillier ajoute ceci: «Nous comprenons que le lobby est fort de la part des chambres de commerce et qu'il souhaite s'immiscer dans la gestion de l'eau, une activité ne représentant aucun risque à l'investissement, puisque l'État, en dernier recours, sera toujours responsable, peu importent la gouverne, les erreurs [...] et les faillites des gestionnaires de l'eau. Toutefois, nos membres soutiennent avec justesse que l'eau est un bien commun beaucoup trop précieux pour être confié à la libre entreprise, qui, depuis plusieurs années, s'efforce à nous démontrer ses excès de cupidité au détriment des droits fondamentaux [des citoyennes et des citoyens].»

Parce que, M. le Président, l'eau, et l'accès à l'eau, peut devenir, devrait devenir un droit fondamental. Vous savez, ici, au Québec, nous sommes riches en eau, mais il y a des pays et des peuples qui n'ont pas accès à l'eau. Et l'eau est devenue déjà un objet de différend, que l'on pense, par exemple, à la situation en Israël et en Palestine où l'accès à l'eau est une question primordiale, mais qui suscite des différends et des problèmes sociaux sérieux, et qui est appelé à grever les budgets des États, de ces États, je pense notamment à la Palestine en développement, qui vont devoir payer cher pour l'accès à l'eau, cette ressource pourtant si nécessaire et si essentielle à la vie. Et donc, lorsqu'il s'agit d'une ressource qui est si fondamentale à l'existence de l'individu comme des peuples, M. le Président, je crois qu'Eau Secours! a raison de prétendre que cette ressource doit être gérée par l'État, l'État qui doit assumer les responsabilités et les risques qui résultent de la gestion de cette ressource naturelle si importante.

M. le Président, l'animateur de cette coalition poursuit: «M. le premier ministre, au nom [des citoyennes et des citoyens] qui risquent de devenir les otages des multinationales de l'eau et des traités commerciaux sur les services publiques ? je remarque qu'il y a une faute d'orthographe dans cette lettre, et ça, ce n'est pas très bien, les fautes d'orthographe à une lettre au premier ministre, j'espère que le premier ministre a remarqué qu'il y avait une faute d'orthographe dans la lettre qui lui était adressée, alors, publics, c'est p-u-b-l-i-c-s, services publics, et pas q-u-e-s, alors c'est important de toujours soigner notre langue, qu'on la parle ou qu'on l'écrive, donc je voulais signaler ça; mais ceci étant dit ? nous réclamons ? disent-ils ? que vous posiez un geste dans le sens du respect de l'éthique de la gestion publique, du bien commun et du principe de précaution...»

Et vous savez que le principe de précaution devient un principe fondamental, un principe tellement important qu'il devient la pierre angulaire du développement du droit international de l'environnement et même du principe du développement durable dont on souhaite la mise en oeuvre et qui a été évoqué dans l'avant-projet de loi sur le développement durable déposé il y a quelques jours par le ministre de l'Environnement.

n(22 h 50)n

D'ailleurs, je vous ferai remarquer, M. le Président, que, ce matin, dans les pages du journal La Presse, je crois, ou est-ce Le Devoir, une personne responsable de l'Union québécoise pour la conservation de la nature, l'UQCN, s'inquiétait de la véritable volonté du gouvernement, même s'il avait déposé un avant-projet de loi sur le développement durable, de véritablement mettre en oeuvre ce principe parce qu'il constatait que, dans certains documents qui annoncent des politiques gouvernementales, et notamment en matière d'environnement, le principe n'était pas respecté dans ses prémisses essentielles, qu'il fallait, par exemple, lorsqu'on réfléchit à une politique de développement des ressources naturelles s'agissant notamment de l'hydroélectricité, vouloir d'abord faire des économies d'énergie et prendre des mesures pour assurer les économies d'énergie plutôt que de mettre l'accent sur la production additionnelle d'énergie, et que faire l'inverse était contraire à l'idée même du développement durable et à la mise en oeuvre du principe du développement durable, et probablement au principe de précaution qui est devenu si important et qui est considéré par certains comme un principe de droit international coutumier, mais qu'on retrouve d'ailleurs introduit dans un certain nombre de grandes conventions internationales en matière d'environnement.

Et l'on poursuit en réclamant donc des gestes dans le sens du respect de l'éthique de la gestion publique, du bien commun et du principe de précaution. Pourquoi? «Pour que les générations futures [de citoyennes et de citoyens] reconnaissent que nous avons contribué à assurer la pérennité de leur droit fondamental ? lit-on ? par une eau potable de qualité.» M. le Président, je vous fais remarquer donc que les gens d'Eau Secours! érigent en droit fondamental l'accès à une eau potable de qualité.

Et je cite cette lettre pour sensibiliser le gouvernement et les députés du parti formant le gouvernement à cette requête d'Eau Secours!, pour leur rappeler que la motion que nous débattons maintenant et que j'ai introduite au nom de l'opposition officielle en est une qui vise à faire entendre les gens d'Eau Secours! Je vous rappelle que c'est le sens de cette motion et qu'il serait intéressant tout de même, pour nous, d'entendre des représentants de cette organisation non gouvernementale, parce que, pour ces gens, le débat ne fait que commencer sur la gestion de l'eau, et ce débat doit se poursuivre dans les meilleures conditions possible, et je crois que les législateurs que nous sommes devraient pouvoir faire appel aux connaissances, aux vues et aux besoins qu'exprime, au nom de milliers de Québécoises et de Québécois, j'en suis certain, Eau Secours!.

Et d'ailleurs, M. le Président, je pense qu'il est utile de rappeler l'importance de l'eau dans nos vies, dans nos vies quotidiennes, et je suis certain qu'en présentant ces statistiques j'attirerai l'attention notamment du député de Verdun, notamment du député de Verdun qui, je le crois, est très intéressé par les statistiques et par des données qui vont démontrer l'importance de donner la parole à Eau Secours! pour qu'ils nous indiquent en quoi ces données devraient nous guider comme législateurs dans l'examen d'un projet de loi dont on peut craindre qu'il puisse permettre, par des contrats de partenariats public et privé, une privatisation de l'eau, en quelque sorte.

Alors, quelques informations qui proviennent du site d'Eau Secours! Dans les villes du Québec, les industries, commerces et institutions consomment environ 60 % de l'eau potable traitée par les usines, et, dans la métropole ? dont je suis un des députés ? 75 % de l'eau potable traitée par les usines est consommée par les industries, les commerces et les institutions. Qu'en est-il de la consommation d'eau des citoyens et des citoyennes? Des statistiques qui nous informent sur nos pratiques individuelles et quotidiennes: à l'intérieur de la maison, nous utilisons 26 % de l'eau pour les toilettes, 22 % pour la machine à laver, 17 % pour les douches, 16 % pour les robinets, 2 % pour le bain, 1 % pour le lave-vaisselle et 2 % pour les autres utilisations.

C'est quand même intéressant de voir la répartition de l'utilisation de l'eau d'une façon individuelle, et je pense que ces données démontrent que, dans des État développés, l'eau est utilisée à des fins où elle n'est certainement pas utilisée ailleurs, et notamment dans les États en développement. Et on doit, je pense, M. le Président, s'interroger parfois, aussi, sur nos pratiques, se compter bien chanceux de pouvoir utiliser, avoir accès à de l'eau pour toutes ces fonctions, mais se rappeler que nous sommes souvent privilégiés, parce qu'il y a plusieurs peuples et citoyens du monde qui ne peuvent pas avoir ce qui pourrait paraître des privilèges.

Au Québec, le coût de la filtration pour obtenir de l'eau potable se situe, selon les villes, entre 0,22 $ et 0,52 $ le litre d'eau, donc entre 0,22 $ et 0,52 $ le mètre cube. La consommation d'eau à usage ménager par habitant, au Canada, est de 326 litres par jour en 1996 ? il s'agit de statistiques provenant de l'OCDE ? et il en coûte donc, selon les villes, de 26 $ à 62 $ en eau par personne, par année. Et une statistique que vous devriez garder à l'esprit, chers collègues: un robinet qui fuit peut gaspiller entre 140 et 680 litres d'eau par jour, selon la vitesse d'écoulement.

Mais je pense que c'est sérieux, là. Les gens d'Eau Secours!, en nous présentant ces statistiques, nous invitent à changer nos pratiques. Quand on se brosse les dents, là, il faut arrêter le robinet. Et je ne sais pas si vos pratiques et celles de nos collègues ici, à l'Assemblée, comme ceux des citoyens et des citoyennes vont dans le sens d'une économie d'eau qui résulte de l'action des pratiques de gaspillage, là. C'est quand même entre 140 et 680 litres d'eau par jour. Vous imaginez, cette quantité d'eau, comment elle pourrait être mieux partagée entre les citoyens.

Et, pour les amateurs de bière ? il y en a certainement autour de cette table ? pour obtenir un litre de bière, il faut 25 litres d'eau. Pour 1 kg de papier, il faut de 250 à 500 litres d'eau. Et, pour fabriquer une voiture, il en faut 35 000 litres.

Donc, on voit jusqu'à quel point l'eau, cette denrée qui pourrait devenir rare, doit être protégée et que nous devons absolument nous préoccuper de son avenir, et, pour nous comme pour les gens d'Eau Secours!, l'avenir de l'eau passe par une gestion publique de l'eau. Et nous épousons les revendications d'Eau Secours! et de tous ceux qui, comme Patrick Huard, hier, à Tout le monde en parle, nous rappelaient que cette question de la gestion de l'eau est susceptible de mobiliser les citoyens et les citoyennes du Québec. Et j'espère que les citoyens et les citoyennes du Québec vont se mobiliser si l'on veut confier la gestion de l'eau à l'entreprise privée, parce que, s'agissant d'un bien commun, elle doit être gérée par ce qui nous est commun et ce qui permet de mieux distribuer la ressource, à savoir l'État. Et une des raisons pour laquelle la gestion publique s'impose, c'est que l'État ne voudra pas faire de profit en gérant l'eau, alors que les entreprises privées voudront faire du profit. Et je crois qu'on ne doit pas laisser l'eau devenir un objet de profit. Cette ressource si importante, cette ressource publique, ce bien commun doit être géré par l'État au profit de tous, et les bénéfices résultant de son utilisation et de sa mise en valeur doivent être partagés par tous. Et c'est l'État qui doit être l'arbitre et c'est l'État qui doit, par ses propres institutions... et il est capable de se doter d'institutions pouvant gérer convenablement et efficacement l'eau.

n(23 heures)n

Et, M. le Président, en définitive la gestion privée de l'eau pourrait entraîner des augmentations importantes des coûts que les citoyens devraient être appelés à débourser pour avoir accès à l'eau. Vous savez qu'au Royaume-Uni, où on a voulu confier l'eau à la gestion privée, des augmentations importantes ont été vues dans ce domaine et qu'on prévoit des augmentations de 30 % d'ici 2009 et qui feraient passer la facture annuelle, pour les citoyens britanniques, à 680 $ par année. Puis, en France, où on a eu aussi la tentation de la privatisation de l'eau, où d'ailleurs des grandes multinationales françaises ont été invitées à gérer l'eau, les augmentations pourraient être de 15 % à 20 % pour les mêmes années. Et, M. le Président, à notre avis, au Québec, la privatisation des réseaux de distribution nous serait aussi néfaste qu'il l'a été et le deviendra davantage dans ces deux autres États dont un gouvernement pourrait vouloir s'inspirer. Et, selon nous, toute forme de privatisation ou de partenariat public-privé pourrait engendrer des effets pervers pour les finances des ménages québécois, sans parler des finances publiques du Québec.

Alors, M. le Président, en terminant, je veux rappeler que l'opposition officielle souhaite, comme elle le souhaitait pour les grands officiers de l'État, que nous donnions la chance à Eau Secours! d'être entendue par cette commission, elle qui ne l'a pas été encore, et c'est le voeu le plus cher des membres de l'opposition officielle que nous donnions la parole à Eau Secours!. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Paquin): Merci, M. le député de Mercier. Il y a d'autres intervenants? Mme la députée de Mirabel.

Mme Denise Beaudoin

Mme Beaudoin: Merci, M. le Président. Alors, cette motion présentée par mon collègue de Mercier est très importante parce que d'une part on n'a jamais entendu la Coalition Eau Secours!, et j'ose espérer cette fois-ci que les gens d'en face vont répondre d'une façon positive à cette motion.

Avant de continuer, j'aimerais souligner le fait que la présidente du Conseil du trésor semblait dire qu'il n'y avait pas de problème avec les PPP versus l'eau, et je ne pense pas que la population réagit de la même façon. On est très, très inquiets, tout le monde est inquiet concernant la privatisation de l'eau. Il y a un article qui a paru...

Mme Jérôme-Forget: Qu'est-ce que j'ai dit, monsieur... Est-ce qu'elle peut citer ce que j'ai dit, M. le Président?

Le Président (M. Paquin): Mme la ministre.

Mme Jérôme-Forget: Est-ce qu'elle peut le citer? Elle dit que j'ai dit quelque chose...

Mme Beaudoin: Non. J'ai dit qu'elle «semblait», qu'elle «semblait».

Mme Jérôme-Forget: M. le Président, qu'elle cite ce que j'ai dit. Elle affirme quelque chose, qu'elle le cite.

M. Simard: M. le Président, point d'ordre.

Le Président (M. Paquin): M. le député de Richelieu.

M. Simard: Est-ce que la présidente du Conseil du trésor pourrait écouter sans interrompre celle qui est...

Mme Jérôme-Forget: Non, on ne peut pas imputer, dire des faussetés.

Une voix: Ce n'est pas une question de règlement.

M. Simard: Non, non, on est là, ici, pour s'écouter mutuellement, là, c'est la règle, c'est le règlement...

Mme Jérôme-Forget: La présidente du Conseil du trésor a dit quelque chose, M. le Président.

M. Simard: ...et, lorsque la députée aura terminé, si la présidente du Conseil du trésor veut rectifier, elle a tout le temps qu'il faut, nous l'écouterons religieusement.

Mme Jérôme-Forget: Vous tolérez les mensonges?

M. Simard: Nous l'écouterons religieusement. Voulez-vous rappeler, M. le Président, la présidente du Conseil du trésor à l'ordre?

M. Turp: Langage antiparlementaire.

Le Président (M. Paquin): Bon...

M. Cholette: M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Paquin): M. le député de Hull.

M. Cholette: Oui. Simplement, la présidente du Conseil du trésor, tout ce qu'elle voulait dire, c'est simplement le fait qu'on ne peut pas imputer des motifs. C'est ce que la députée faisait. Soyons prudents, hein, il ne faut pas imputer des motifs. Si on veut citer au texte, sans problème, mais on ne peut pas dire n'importe quoi. On ne peut pas imputer des paroles à un parlementaire, qu'elle n'a pas prononcées.

Le Président (M. Paquin): Très bien.

M. Turp: M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Paquin): M. le député de Mercier.

M. Turp: J'ai entendu une membre de cette commission utiliser un terme qui n'est pas acceptable dans le langage parlementaire. Pourriez-vous lui demander de retirer ce terme?

Mme Jérôme-Forget: M. le Président, ce que j'ai dit: «Est-ce qu'on va tolérer les mensonges?» C'est ça que j'ai mentionné.

Le Président (M. Paquin): Très bien. Bon, écoutez...

M. Simard: M. le Président, est-ce qu'elle va retirer le mot, s'il vous plaît?

Le Président (M. Paquin): Bon, très bien, très bien. Très bien. On a discuté pas mal, là, c'était très bien, j'ai tout écouté ça. Je vais vous inviter, Mme la députée de Mirabel, à être très, très, très prudente, comme je l'ai suggéré à d'autres collègues il y a quelques instants tantôt, les travaux vont très bien, soyons prudents pour éviter les tiraillages, pour qu'on puisse poursuivre nos travaux dans le respect et le plus rapidement possible. D'accord?

M. Simard: Point d'ordre, M. le Président.

Le Président (M. Paquin): Oui, M. le député de Richelieu. Est-ce que c'est sur le même point?

M. Simard: C'est sur le même point, M. le Président. La présidente du Conseil du trésor a utilisé un mot, un mot non parlementaire, inexcusable, et je vous prierais de la prier de retirer ce mot. Si nous l'avions prononcé, nous le ferions. Alors, priez-là, je vous prie, de retirer ce mot.

Le Président (M. Paquin): Voulez-vous me rappeler le mot, M. le député de Richelieu?

M. Simard: Le mot «mensonge», M. le Président.

Mme Jérôme-Forget: M. le Président, ce que j'ai dit: «Est-ce que nous allons tolérer les mensonges?» Je n'ai pas dit que cette femme... J'ai dit: Est-ce qu'on va les tolérer, les mensonges? C'est toute une autre histoire. J'ai demandé d'ailleurs, au départ... Vous auriez pu demander à la députée de Mirabel de répéter les paroles que j'avais dites, parce qu'elle a dit que j'avais dit quelque chose, ce que je n'ai pas fait, M. le Président. Alors, je demande juste qu'elle répète les paroles que j'avais dites.

Le Président (M. Paquin): Mme la ministre, je vais...

M. Simard: J'insiste, M. le Président, pour que...

Le Président (M. Paquin): D'accord, d'accord. Mme la ministre, je vais vous inviter aussi, vous aussi, à beaucoup de prudence, s'il vous plaît. Je pense que c'est important de continuer dans le sens qu'on a débuté ce matin et qu'on poursuive dans l'harmonie. D'accord? Mme la députée de Mirabel.

Mme Beaudoin: Merci, M. le Président. Alors, j'aimerais citer un article du Devoir qui date de septembre 2004, c'est quand même récent, et le titre, c'est Eau: vers un partenariat public-privé, et ça s'intitule Compte tenu de l'ampleur des investissements nécessaires à une réfection des aqueducs, des égouts et des usines de filtration, Québec emprunte la voie des PPP. Et je voudrais citer simplement les deux premiers paragraphes:

«Le credo du gouvernement [...] en matière de [PPP] prend forme dans le délicat domaine de l'eau. Québec vient de confier à la firme d'ingénierie BPR le soin d'élaborer un plan d'action pour l'entretien et la rénovation des infrastructures liées à l'eau.

«Dans le cadre de la réingénierie de l'État, dont les [PPP] apparaissent comme étant le pivot, le Conseil du trésor a commandé trois études au cours des derniers mois pour éclairer ses décisions à venir dans le dossier de l'eau. Dès février 2004, les consultants de PricewaterhouseCoopers ont reçu un contrat de 10 000 $ pour réfléchir à la gestion des eaux. En mai dernier, on a demandé aux ingénieurs de BPR d'établir le plan d'action gouvernemental pour la réfection et l'entretien des infrastructures d'eau. Ce fut ensuite au tour du Centre interuniversitaire de recherche en analyse des organisations de signer un contrat de 24 500 $, en juillet, dans le but de produire une synthèse des expériences sur les PPP en matière de distribution et de traitement de l'eau.» Alors, on parle de l'eau, on parle des PPP.

Et, moi, j'aimerais citer un exemple. Dans ma circonscription de Mirabel, il y a chez nous une régie intermunicipale Argenteuil?Deux-Montagnes, et cette régie gère un mégasite d'enfouissement, et ce mégasite d'enfouissement, disons, soulève beaucoup d'inquiétudes parce que vous avez quatre capteurs d'eau autour de ce site d'enfouissement, et non les moindres. Actuellement, on s'apprête à faire des appels d'offres, M. le Président, à des entreprises privées. Alors, on s'apprête à soit louer pour une période de 30 ans ou simplement à vendre cette régie.

Cette régie-là est la propriété de quatre municipalités: Saint-Placide, qui est dans la circonscription de Mirabel, Lachute, Brownsburg-Chatham et Saint-André-d'Argenteuil. Cette régie appartient aux citoyens payeurs de taxes. Ils ont le contrôle, c'est comme s'ils étaient propriétaires, et le gouvernement d'en face a permis l'agrandissement de ce site d'enfouissement là, où vous avez quatre capteurs d'eau à proximité de ce mégasite d'enfouissement, c'est normal que les gens soient inquiets.

Et, quand on parle de PPP et de la gestion de l'eau, c'est encore plus inquiétant ? et c'est pour ça que mon collègue, tantôt, de Mercier parlait de l'émission Tout le monde en parle, c'est quand même une émission très populaire ? et l'on voit que, quand on parle de PPP puis qu'on parle d'eau, c'est encore pire. Les gens disent: On n'est pas politisés, mais ne touchez pas à notre eau. C'est notre or ou l'or bleu du Québec, et ces gens-là disent qu'ils vont tout faire, tout faire pour empêcher que le projet de loi n° 61 s'applique en ce qui regarde l'eau.

n(23 h 10)n

Alors, l'exemple que je vous donne est un bel exemple qu'à partir du moment qu'une régie intermunicipale s'apprête à se départir de sa gestion pour rendre ça dans le privé, bien tous les organismes qui ont été mentionnés tantôt, et on a proposé de les entendre à nouveau, la Commission d'accès à l'information, la Protectrice du citoyen, le Commissaire au lobbyisme, toutes ces organisations-là qui sont là pour protéger le public ne pourront pas intervenir. Et là on parle de santé, on parle d'environnement. Le gouvernement d'en face parle de développement durable, il y a certes une contradiction parce que, quand on parle de développement durable et de protection de l'eau, il faut quand même que ces organismes-là, qui sont les chiens de garde du gouvernement, puissent intervenir comme ils le font dans le public. Alors ça, c'est très, très important.

Et je voudrais vous citer aussi des statistiques, au fond. Au Québec, on dit que la privatisation des réseaux serait aussi néfaste pour la population, toute forme de privatisation ou de PPP engendrerait des effets pervers pour les finances des ménages québécois. Alors, on dit: En faisant entrer la notion de profit dans l'approvisionnement en eau, on ferait augmenter de façon significative le prix de l'eau, comme ce fut le cas en Angleterre et en France, M. le Président. La perception des factures et l'administration du recouvrement de celles-ci feraient également monter le prix de l'eau. On n'a pas assez du pétrole, là, il me semble que l'eau, c'est notre or bleu, on devrait le protéger. Les Montréalais paient environ 0,39 $... Bon, je pense que mon confrère a mentionné tantôt tous ces prix-là, je vais tenter d'accélérer sur un autre point de vue, puisque ça a déjà été mentionné par mon collègue de Mercier.

On parle également de la privatisation des réseaux, que le transfert des employés municipaux vers les compagnies privées signifierait, avec l'abolition de l'article 45 du Code du travail, que ces employés verraient leurs conditions de travail diminuer drastiquement. Cette baisse de salaire des employés se traduirait par une diminution des recettes fiscales de l'État ? je ne sais pas si c'est vraiment ce qu'ils veulent ? sans que cela se traduise par une économie pour les consommateurs d'eau. Et, en privatisant l'eau, l'État perd une partie du contrôle qu'il pouvait exercer sur l'industrie et l'écosystème ? très important, M. le Président. Les compagnies privées pourraient également être vendues à des compagnies étrangères ? et c'est là que c'est inquiétant.

L'exemple que je vous ai donné dans ma circonscription, là, c'est le plus bel exemple: on a une régie, on a un certain contrôle, les municipalités sont propriétaires, et là on décide d'aller en appel d'offres pour que le privé contrôle. Alors ça, ça fait toute l'ouverture aux déchets provenant de partout. Puis je pense qu'on n'a pas besoin des déchets, disons, de notre pays voisin, on a de la difficulté à gérer nos propres déchets.

On dit ici: Les compagnies privées pourraient également être vendues, bon, à des compagnies étrangères, consacrant ici la perte de contrôle des populations sur une ressource essentielle. En effet, les compagnies françaises ? et on parle ici Suez et la Générale des Eaux ? sont particulièrement intéressées à s'approprier les réseaux de distribution d'eau du Québec. Est-ce qu'on veut vendre le Québec? Est-ce qu'on veut vendre notre eau? Est-ce que c'est ça, là, vraiment? Et c'est sûr que les PPP sont une ouverture.

On dit également: La nécessité de subventionner les compagnies et de couvrir les pertes de certaines afin qu'elles puissent... qu'elles continuent d'offrir un service adéquat aux citoyens engendrerait des coûts importants pour l'État. Ce n'est pas une économie, là. Alors, c'est la raison pour laquelle cette motion est très importante.

La Coalition québécoise pour une gestion responsable de l'eau ? et j'en profite pour les féliciter parce qu'ils font un travail exceptionnel, une chance qu'ils sont là, Eau Secours!, avec son président André Bouthillier, avec la lettre que mon collègue a lue ? nous démontre l'inquiétude des Québécois et des Québécoises et leur fierté de cette eau, l'or bleu du Québec. Alors, on n'est pas intéressés à ce que quelqu'un d'autre ait le contrôle sur cette richesse en soi. Merci.

Le Président (M. Paquin): Merci, Mme la députée de Mirabel. M. le député de Richelieu.

M. Sylvain Simard

M. Simard: Merci, M. le Président. C'est toujours agréable de prendre la parole à une heure somme toute relativement tardive, mais, comme nous sommes tous en forme, bien éveillés, je suis convaincu que nous allons pouvoir poursuivre ce dialogue avec beaucoup d'intérêt.

D'ailleurs, je vais souligner, comme mes collègues, que le hasard a voulu que, ce soir, il y ait une assemblée publique à Montréal organisée par Eau Secours!: Eau Secours! démasque la privatisation! Partenariat public-privé? une supercherie? ? avec points d'interrogation ? en présence de Raôul Duguay, d'une vingtaine de comédiens, d'écrivains, de chroniqueurs, d'universitaires, de spécialistes. Tout cela avait lieu ce soir, à 19 heures, à la salle Marie-Gérin-Lajoie de l'Université du Québec à Montréal.

Et les trois orateurs ? c'est simplement pour vous dire que vous avez manqué quelque chose d'intéressant ? il y avait la vice-présidente d'Eau Secours!, Martine Ouellet, que je connais bien, qui est une femme très intelligente et qui a présenté un exposé sur: L'eau, c'est politique; le vice-président, Gaétan Breton, son sujet, lui, c'était: L'imposture des partenariats public-privé; et, quant à André Bouthillier, le président, son sujet, c'était: Reconquérir la place du citoyen et de la citoyenne dans la gestion de l'eau. Alors, la Coalition Eau Secours!, ce soir ? nous en aurons sûrement des échos dans la presse demain; mais ? a présenté une soirée pour manifester son inquiétude à l'égard... «Venez vous informer ? disent-ils ? sur les impacts des projets nos 61 et 62.» Alors, ils sont très inquiets par ces projets, par les actions du gouvernement libéral.

Tout à l'heure, j'ai entendu très distinctement la présidente du Conseil du trésor nous dire qu'il n'y avait pas de lien entre l'eau et les partenariats public-privé. Moi, je suis un peu étonné. Alors, je suis retourné à mes notes, notamment à la revue de presse de la dernière année et demie sur cette question-là, et j'ai découvert, M. le Président, des choses assez étonnantes, une certaine continuité. Je vais aborder ça dans l'ordre chronologique, mais vraiment c'est une continuité dans les interventions, au cours des dernières années, de la présidente du Conseil du trésor.

Je prends, par exemple, dès le 15 septembre 2003, ça ne faisait pas très longtemps que vous étiez... le gouvernement était au pouvoir, depuis quelques mois à peine, et c'est à ce moment-là que la présidente du Conseil du trésor a déjà, sur cette question de l'eau, mis le gouvernement Charest ? je cite un article de La Presse ? a mis le gouvernement Charest dans l'embarras, hier, en soutenant que la qualité de l'eau, dans la région métropolitaine, ne correspondait pas aux normes internationales. Vous vous souvenez de... Vous rigolez, là, mais c'est vrai, ça a été dit. Forcé de rectifier le tir, le premier ministre Charest a fortement nuancé les propos...

Le Président (M. Paquin): ...s'il vous plaît, à ne pas... Je vous invite à ne pas prononcer le nom du...

M. Simard: ...le premier ministre a fortement nuancé...

Le Président (M. Paquin): Le député de Sherbrooke ou le premier ministre, s'il vous plaît.

M. Simard: ...le député de Sherbrooke a fortement nuancé les propos alarmants de sa ministre, et là le premier ministre a dit: «"L'eau de Montréal est correcte, elle correspond aux standards", a assuré le premier ministre à l'issue du Conseil général de son parti, qui se déroulait jusqu'alors sans controverse. La présidente du Conseil du trésor a pourtant été catégorique ? à ce moment-là, elle était très décidée: "Il y a plusieurs endroits au Québec où l'eau n'est pas adéquate ? c'est une citation. Actuellement, l'eau de Montréal, notamment, n'est pas de qualité aussi élevée qu'ailleurs, y compris aux États-Unis ? c'est toujours une citation. C'est donc dire que des milliards de dollars d'investissement seront nécessaires pour que l'eau soit de qualité acceptable" ? elle affirmait que le Québec n'avait pas pris de décision: "On ne peut pas qu'écrire des rapports, des chapitres sur une politique de l'eau, il faut s'assurer que la qualité de l'eau soit acceptable".» Beaucoup insisté. Je vous passe les détails, les colères du ministre de l'Environnement, les rectifications du premier ministre, mais enfin.

«[La présidente du Conseil du trésor] ? on est en septembre 2003 ? a [...] soulevé des doutes quant aux intentions du gouvernement du Québec en vantant [même] les mérites du système britannique de distribution d'eau potable, entièrement privé. [Le premier ministre a encore senti] le besoin de remettre les pendules à l'heure. "Il n'est pas question de privatiser la distribution de l'eau au Québec" ? a dit le premier ministre. Toutefois, l'établissement de partenariats public-privé dans le secteur de l'eau potable n'est pas exclu. Le financement de réseaux de distribution pourrait venir en partie du privé, contre des redevances à long terme ? ça, c'est le premier ministre.

n(23 h 20)n

«Au Royaume-Uni, plusieurs modes de gestion de l'eau cohabitent. Ainsi, la gestion de l'eau est publique en Écosse, relève d'une agence en Irlande et est privée en Angleterre ? et citation toujours de la présidente du Conseil du trésor: "On s'est aperçus que ce qui est important, c'est que l'eau potable soit de la meilleure qualité possible. Or, c'est en Angleterre, où la gestion est privée, que l'eau est de meilleure qualité", a soutenu la présidente du Conseil du trésor.» Je ne vais pas plus loin, je ne vais pas vous citer, là, des pages et des pages de textes, notamment en provenance des sites Ofwat et WaterVoice, sur la qualité de l'eau et le coût de l'eau en Angleterre, mais je pense qu'on va être plus sérieux que ça. Tout ça pour vous dire que parler de l'eau et de PPP, là, ce n'est pas par hasard, ce n'est pas moi qui ai lancé le sujet au Québec. L'inquiétude qui est présente partout dans la population, elle a été alimentée, et avec, je pense, beaucoup de transparence, par le gouvernement, notamment par la présidente du Conseil du trésor.

Mais revenons plutôt cette année, pas en 2003, mais rapprochons-nous de maintenant. Lors du congrès des constructeurs de routes et des grands travaux du Québec, la présidente du Conseil du trésor a pris la parole et, s'il faut en croire Laurier Cloutier, de La Presse, à propos de tous les partenariats public-privé que s'apprête à signer le gouvernement...

Une voix: On va aller voter?

Le Président (M. Paquin): M. le député, je suis dans l'obligation d'arrêter les travaux...

M. Simard: Je suis désolé aussi. Mais nous reprendrons cela avec précision après.

Le Président (M. Paquin): ...parce que nous sommes appelés au vote au salon bleu. Donc, on suspend pour quelques minutes, le temps d'aller voter. Merci.

(Suspension de la séance à 23 h 22)

 

(Reprise à 23 h 37)

Le Président (M. Paquin): À l'ordre, s'il vous plaît! Nous reprenons nos travaux. La parole, lorsque nous avons quitté, était au député de Richelieu. M. le député, il vous reste 23 min 40 s.

Des voix: ...

Le Président (M. Paquin): S'il vous plaît! S'il vous plaît! La parole est au député de Richelieu.

M. Simard: Oui, M. le Président. Alors, je veux vous rappeler où nous en étions lorsque nous nous sommes quittés. Je vous disais tout à l'heure qu'à la suite de deux interventions de la présidente du Conseil du trésor indiquant qu'il n'y avait pas de rapport entre l'eau et les PPP j'essaie de faire la démonstration qu'au contraire, depuis l'élection du Parti libéral, la présidente du Conseil du trésor a été extrêmement constante, et, à chaque fois qu'elle l'a pu, elle a bien montré qu'il y avait un lien très étroit entre les partenariats public-privé, les privatisations et l'eau.

Je vous ai cité l'embarras de cette première déclaration fracassante en septembre 2003, je ne vais pas vous reprendre tous les termes, mais nous nous souvenons donc que la présidente du Conseil du trésor voulait absolument qu'on fasse du privé ou des partenariats parce que c'était l'eau potable qui était de mauvaise qualité, évidemment ce qui a été démenti évidemment par tout le monde. Mais, quand on veut des PPP, on qualifie l'eau comme on peut.

J'en étais à une autre intervention, plus récente, du 16 février 2004, il y a une dizaine de mois. La présidente, lors d'un congrès de l'Association des constructeurs de routes et de grands travaux, a ouvert la porte, dit un article de La Presse canadienne, aux partenariats: «Ce n'est pas réservé qu'aux seuls travaux routiers ? évidemment, si ce n'était réservé qu'aux seuls travaux routiers, on n'aurait pas besoin de la loi ? les partenariats ? dit la ministre ? vont se multiplier dans toutes les sphères d'activité: hôpitaux, réseaux d'eau ? oh! réseaux d'eau ? écoles, pénitenciers, immeubles administratifs et culturels, selon elle.»

Bon, je ne vais pas plus loin là-dessus, sur cet exemple-là. Je vous rappelle simplement que nos amis de la Coalition Eau Secours!, la Coalition québécoise pour une gestion responsable de l'eau, vous l'admettrez avec moi, ont quelques raisons de s'inquiéter. On ne peut pas prétendre qu'il n'y a pas de rapport entre l'eau et les partenariats public-privé; au contraire, il semble que ce soit l'eau qui a été au point de départ de cet engouement de la présidente du Conseil du trésor pour les partenariats public-privé.

n(23 h 40)n

D'ailleurs, ma collègue de Mirabel, tout à l'heure, avait commencé à vous citer un article du Devoir, cette fois-ci du 10 septembre ? ce n'est pas très loin, ça, c'est Kathleen Lévesque qui écrivait ça il y a à peine deux mois ? dans lequel on indiquait bien que «Québec vient de confier à la [firme d'ingénieurs BPR] le soin d'élaborer un plan d'action pour l'entretien et la rénovation des infrastructures liées à l'eau». D'ailleurs, ma collègue, tout à l'heure, rappelait que certains contrats avaient été donnés en mai, dès février à PricewaterhouseCoopers pour réfléchir sur l'eau. Quelle belle formule: «réfléchir sur l'eau»! On pense à Narcisse, n'est-ce pas, qui se contemple dans l'eau comme un miroir et qui devient amoureux de lui-même. Alors, PricewaterhouseCoopers a réfléchi sur l'eau. En mai dernier, on a demandé aux ingénieurs de BPR d'établir un plan d'action gouvernemental pour la réfection et l'entretien des infrastructures d'eau. Tiens, tiens, tiens! Il me semblait qu'il n'y avait pas de rapport entre l'eau et les partenariats public-privé.

Et ensuite c'est CIRANO, vous savez, ce groupe universitaire qui a été créé par celui qui est maintenant recteur de l'Université de Montréal, M. Robert Lacroix. C'est un contrat qui leur a été donné, de 24 500 $, dans le but de produire une synthèse des expériences sur les PPP en matière de distribution et de traitement de l'eau. Ils auraient pu d'ailleurs nous donner une subvention du même niveau parce que je pense qu'on a synthétisé, nous, à peu près toutes les expériences qui ont été faites au cours des 20 dernières années dans la distribution et la gestion privée de l'eau. Mais on n'a pas demandé de subvention à la présidente du Conseil du trésor, mais je peux vous dire qu'on a la documentation, je vais vous en faire part un petit peu tout à l'heure.

Ça ne s'est pas arrêté là. Mme la députée de Mirabel a interrompu son énumération tout à l'heure, à ce moment-là, mais ça ne s'est pas arrêté là. Un mandat a été confié à SECOR, 20 000 $, pour analyser les facteurs clés de la mise en place de PPP ? tiens, tiens ? ainsi que celui, 47 000 $, cette fois... 47 500 $, à l'ENAP, à l'École nationale d'administration publique, pour la synthèse de relations de travail dans le contexte des PPP parmi les administrations de l'OCDE.

Ça, c'est au niveau de la présidente. Mais elle n'est pas la seule au Conseil des ministres à avoir confirmé que l'eau serait l'objet d'une privatisation ou en tout cas de partenariats public-privé. Si je me fie à ce même article, le ministre des Affaires municipales a confirmé au Devoir que «le gouvernement emprunte la voie des partenariats public-privé compte tenu de l'ampleur des investissements nécessaires à une réfection des aqueducs, égouts et autres usines de filtration ou de traitement à travers la province». Non seulement le traitement de l'eau, la distribution de l'eau, mais le traitement des eaux usées. C'est quand même beaucoup là, ici. Mais on ne vise pas la privatisation de l'eau.

C'est deux choses, avoir des infrastructures... Ça, c'est une subtilité que même un casuiste jésuite aurait de la difficulté à analyser. On va faire la distinction, ici, entre l'eau et les tuyaux qui conduisent l'eau. Alors, écoutez bien le raisonnement du ministre: «On ne vise pas la privatisation de l'eau. C'est deux choses, avoir des infrastructures dont la réfection fait suite à un montage public-privé et le liquide qui passe dans les tuyaux.» Donc, le liquide ne serait pas affecté au passage par la propriété des tuyaux, ce qui est très intéressant comme théorie.

Une voix: Comme les électrons.

M. Simard: Comme son... aussi comme les électrons recyclés de tout à l'heure.

«Le ministre n'écarte pas, tout comme son collègue de l'Environnement [...] l'a fait au cours des derniers mois, la possibilité ? ah! tiens, tiens, comment on finance tout ça; la possibilité ? d'imposer une tarification aux consommateurs comme contrepartie aux investissements privés. "C'est l'une des mécaniques possibles. Il y a différentes approches qui sont étudiées actuellement ? il me semblait qu'il n'y avait pas de lien entre les deux ? mais cette partie-là ne relève pas de moi. Ma responsabilité ? c'est le ministre des Affaires municipales qui parle ? c'est de m'assurer qu'on ait une portion publique de financement qui soit disponible", a ajouté le ministre.» Et il faisait part de négociations qui ont lieu, avec Ottawa notamment, pour un soutien financier dans le cadre des programmes d'infrastructures Canada-Québec.

«On n'a pas de portrait global ? je cite ? on réagit à des crises à gauche et à droite, mais on ne gère pas. Il faut se donner des moyens à long terme pour planifier nos interventions et juguler la situation. [...] On fait des études pour se préparer...» Alors, évidemment, tout cela confirme les intentions du gouvernement d'aller de l'avant.

Lorsqu'Eau Secours! réunit, ce soir, des dizaines et des dizaines de personnes dans une salle, pour étudier la privatisation de l'eau, les partenariats public-privé dans le domaine de l'eau, Eau Secours! ne se trompe pas; effectivement, il existe une réalité, il existe une telle réalité que l'intérêt très clair du gouvernement à créer des PPP dans le domaine de la distribution de l'eau ? avec évidemment la subtile distinction que vous n'aurez pas manqué de saisir, M. le Président, entre les tuyaux qui transportent l'eau et l'eau qui passe dans les tuyaux ? ça me fait penser à certaines catégories sur le péché, n'est-ce pas, que certains théologiens autrefois arrivaient à nous expliquer. L'article d'ailleurs se terminait en rappelant que la présidente du Conseil du trésor avait mis en doute la qualité de l'eau à Montréal, en septembre 2003, nous savons tout ça.

Tout ça pour vous dire qu'il y a un intérêt certain de la part du gouvernement pour créer des partenariats public-privé pour l'eau, la distribution de l'eau. Est-ce que c'est pour la privatisation de l'eau qu'on crée les partenariats public-privé ou est-ce qu'on veut tellement les partenariats public-privé qu'on veut y assujettir les tuyaux et non l'eau qui circule dans les tuyaux? Je vous invite vous-mêmes à tirer vos propres conclusions.

Mais on a pris des exemples ailleurs. Ce n'est pas original, je ne prétends pas ici que la privatisation de l'eau soit une invention québécoise et soit sortie du chapeau de la ministre comme ça, sans expérience à l'extérieur. Il y a dans certains cas plusieurs siècles que la distribution de l'eau appartient au privé dans certains pays. En Angleterre, qui est toujours la référence ultime de la présidente du Conseil du trésor, en Angleterre, ils ont eu cette expérience de privatisation au cours des 20, 25 dernières années, soit par privatisation complète soit par partenariat public-privé. Et, si on étudie un petit peu le résultat de l'expérience, on se rend compte que l'expérience des partenariats privé-public et de privatisation de l'eau en Angleterre, le moins que l'on puisse dire, n'a pas eu que des résultats positifs, n'a pas qu'entraîné des résultats qui permettent de tirer des conclusions positives pour l'avenir. Même de ça, je pense qu'au contraire certaines de ces expériences sont de nature à beaucoup inquiéter nos compatriotes lorsqu'ils voient que la présidente du Conseil du trésor a l'intention d'aller dans la même direction.

Parlons non pas de la qualité de l'eau, j'en parlerai tout à l'heure, parlons simplement du coût de l'eau, de la facturation. Vous me direz: Question matérielle que tout cela. Mais, l'eau que nous sommes habitués à boire presque gratuitement parce que les coûts sont relativement faibles et en tout cas distribués à l'ensemble des citoyens, jamais liés à la consommation, eh bien, ces coûts, dans les pays qui ont privatisé l'eau, sont extrêmement sérieux. Tous ceux, par exemple, qui ont eu à payer des factures d'eau dans ces pays, je pense notamment à la France, savent que la consommation d'eau y est relativement très coûteuse. À Paris par exemple, selon que vous habitez rive gauche ou rive droite, ce sont deux compagnies différentes qui, depuis le milieu du XIXe siècle, se partagent la distribution de l'eau, les coûts au mètre cube sont extrêmement élevés. Je ne suis pas là pour me plaindre, mais je pourrais vous apporter des factures assez impressionnantes.

M. Gautrin: Le vin est moins cher.

M. Simard: Pardon?

M. Gautrin: Le vin est moins cher.

M. Simard: Je sais que vous préférez le vin, M. le député de Verdun, mais vraiment, là, et ce serait sympathique et peut-être que ça entraînerait mon adhésion, si la présidente du Conseil du trésor avait parlé d'un partenariat public-privé sur le vin, nous aurions pu être tentés. Mais nous sommes dans l'eau, nous sommes dans l'eau.

Mme Jérôme-Forget: Ça va venir, ça va venir, M. le Président.

M. Simard: Alors, la privatisation de la SAQ, que plusieurs craignaient, va être annoncée, est maintenant annoncée ce soir.

M. Bernier: Est-ce que c'étaient vos intentions, monsieur...

M. Simard: Pardon?

n(23 h 50)n

M. Bernier: Est-ce que c'étaient vos intentions?

M. Simard: Ah! non, non. Nous avons réussi... et c'est blague à part, il était beaucoup question, en 1994, lorsque nous sommes arrivés au pouvoir, depuis quelques années, de privatisation. Les gens se plaignaient de la SAQ. Nous avons transformé ce réseau, fait en sorte que ce réseau soit un objet de fierté des Québécois. Il y a eu un sondage d'ailleurs qui demandait le taux de satisfaction des Québécois à l'égard de la SAQ, et c'est une des institutions les plus populaires auprès des Québécois, pas uniquement pour les produits qu'elle vend, mais également la façon dont elle le fait, de façon tout à fait extraordinaire. Donc, nous avons au contraire fait le pari du succès du monopole d'État et nous avons réussi.

La facture moyenne pour l'eau et le traitement des eaux usées pour un ménage en Angleterre ? alors nos téléspectateurs, ceux qui nous écoutent en très grand nombre ce soir, pourront faire la conversion chez eux. En Angleterre et au pays de Galles, c'est évalué à 236 £, c'est-à-dire à 520 $, en 2003-2004; en fait, pour être plus précis, 111 £ pour l'eau potable et 125 £ pour l'évacuation et le traitement des eaux usées ? c'est quand même des coûts importants. Les compagnies proposent actuellement des plans d'augmentation qui devraient faire augmenter de 72 £, 158 $, en plus de l'inflation, la facture moyenne des ménages anglais et gallois d'ici 2009. Ce serait une augmentation de 30,5 % en cinq ans. Ce sont les compagnies privées, là, les compagnies qui gèrent l'eau, là, qui ont ces augmentations actuellement en Angleterre, 30,5 % en cinq ans. Ceci dit, ça ne devrait pas nous étonner parce que, la rapidité avec laquelle nos amis d'en face sont en train d'augmenter les tarifs d'électricité, ils feront sans doute plus en cinq ans que les 30,5 %, que les 30 % des compagnies privées d'eau en Angleterre. Ce qui portera, hein, si cela se réalise, à 680 $ le coût de l'eau, sans compter les augmentations automatiques liées à l'inflation. Les consommateurs recevant de l'eau d'United Utilities se verraient imposer une augmentation, eux ? les chanceux ? de 70 %. La facture moyenne passerait donc de 243 £ à 416 £, ou 912 $, d'ici 2009.

Évidemment, je vous rappelle ici, pour ceux qui pensent qu'il y a une compétition possible, que malheureusement il n'y a qu'un seul tuyau qui relie les maisons à la compagnie distributrice, donc il n'y a pas le choix. Lorsqu'on est pris avec un distributeur, c'est fini, il faut payer, sinon il n'y a plus d'eau. Ce sont en fait des concessions monopolistiques, ce sont des monopoles, le client n'a aucun choix, ne peut pas mettre en concurrence deux compagnies, contrairement au téléphone. Par exemple, au téléphone, on sait qu'on peut, dans nos systèmes ? et vous pouvez tous le faire ? changer de compagnie de téléphone avec les mêmes fils. Eh bien, on ne peut pas faire passer ? et c'est là que la distinction du ministre des Affaires municipales devient intéressante ? on ne peut pas faire passer de l'eau d'une autre compagnie dans les tuyaux d'une compagnie, c'est... Malheureusement, ça n'a pas encore été utilisé.

Entre 1994-1995 ? ça ne fait pas si longtemps ? et 1998-1999, la facture moyenne d'eau d'un ménage britannique ? tu sais, ce pays, l'Angleterre, la Grande-Bretagne, qui est la référence ultime, à peu près dans toutes ses interventions, de la présidente du Conseil du trésor, d'ailleurs qui y est allée cet automne, qui a ramené des conclusions ? alors ça a augmenté, la facture moyenne d'eau, de 17,8 % en trois ans, et celle du traitement des eaux usées, de près de 25 %, 24,6 %.

En 1999, le gouvernement britannique, le gouvernement anglais a promulgué une nouvelle loi, le Water Industry Act, sur l'eau qui force les entreprises à offrir des tarifs privilégiés aux personnes vulnérables ? parce que, là, ça devenait tellement difficile pour certaines personnes ? et empêche les interruptions de services. Parce que, là, il y avait une multiplication des interruptions de services. Ce n'est pas très agréable, hein, de se voir couper: tu ne paies pas? Pas d'eau. Alors, les règles sont également plus strictes quant aux services à offrir aux clients, et on dicte des règles quant aux augmentations de prix. Les services se sont améliorés avec cette loi, il faut l'admettre.

Ça ne fait que confirmer que, même si les services sont privatisés, l'État est obligé d'intervenir massivement et que les principes de taux régulation et de taux surveillance s'avèrent, dans presque tous les cas, des échecs. En 2003, les compagnies d'eau anglaises ont reçu 139 400 plaintes écrites et, entre 2001 et 2003, le dividende versé aux actionnaires a augmenté ? combien pensez-vous ? 64 %. Oui. L'action d'United Utilities se vend présentement...

Des voix: ...

M. Simard: ...l'action se... il faudrait en acheter, l'action d'United Utilities se vend présentement 4,83 £ et verse 0,41 £, par année, de dividendes, 8,5 %, par année, de dividendes. Alors, vous voyez que les expériences britanniques semblent montrer que les seuls à profiter de cette situation, les seuls à vraiment profiter de ces privatisations, de cette illusion que le privé fait mieux, bien c'est le privé, comme par hasard. Il fait mieux et il fait mieux dans la collecte des tarifs, et il fait mieux dans l'accumulation des bénéfices, il fait mieux dans le versement des dividendes, mais pas dans la distribution de l'eau.

Je peux vous faire aussi... Si on m'accordait 10 ou 15 minutes de plus, je pourrais vous faire le bilan des problèmes de santé qu'ont connus un certain nombre de réseaux anglais au cours des 10 dernières années, notamment l'augmentation des cas de diphtérie dans certaines régions anglaises, à la suite du mauvais entretien des réseaux par les compagnies privées qui ont repris des réseaux publics. C'est toujours extrêmement... C'est toujours extrêmement...

Une voix: ...

M. Simard: On voit que les obsessions du député de Verdun sont en des directions toujours assez prévisibles.

M. le Président, je veux terminer cette intervention à ce moment-ci, quelques minutes avant... je pensais me rendre jusqu'à minuit, je veux tout de suite vous rassurer...

Des voix: ...

M. Simard: Oui, oui, ça a été calculé assez justement...

Le Président (M. Paquin): Quatre minutes.

M. Simard: Je veux terminer en vous disant que, lorsque l'on vous dit que les partenariats public-privé, ça n'a rien à voir avec l'eau, j'ai essayé de vous faire la démonstration, au cours des dernières minutes, que, dans l'historique même de la tentative d'implantation par le gouvernement libéral, et notamment par la présidente du Conseil du trésor, des partenariats public-privé, au coeur de cette démarche, il y a l'eau.

Oh! je pourrais vous faire l'historique du lobbying, des grandes entreprises multinationales liées à l'eau, des liens entre certains hommes politiques très connus et ces compagnies. Je pourrais vous dire à quel point ces gens sont actifs; je ne connais à peu près personne qui a exercé quelque responsabilité politique que ce soit, au cours des 10 dernières années, qui n'ait pas subi sinon leurs assauts ou du moins leur tentative de charme.

Je pourrais vous dire aussi que cette constance, tout à fait facile à constater, que j'ai essayé de démontrer, inquiète la population. S'il y a une chose au Québec à laquelle les Québécois et Québécoises sont très fermement attachés, c'est l'eau. Ils sont attachés à ce concept d'une eau abondante, gratuite, facile d'accès. Il ont, à tort ou à raison, l'impression que cette eau leur appartient, qu'il ne faut pas la vendre, qu'il faut surtout qu'elle demeure un bien collectif, non pas une marchandise, mais un bien qui appartient à tous les citoyens.

Je suis convaincu qu'à Matane l'immense majorité de vos concitoyens pensent que l'eau est un bien public. Je suis convaincu que, dans Verdun, c'est la même chose, dans Montmorency, dans Iberville comme dans Gatineau, je suis convaincu que nos concitoyens dans tous nos comtés... et Mirabel, vous m'assurez que c'est le cas, dans Mercier, vous m'assurez que c'est le cas. M. le député de Gaspé, vous qui êtes devant la mer, vous tenez à l'eau douce aussi, un pays d'eau...

Mme Jérôme-Forget: ...compteur à ville LaSalle.

M. Cholette: Mais, à Anjou, ils font bouillir, par exemple.

Mme Jérôme-Forget: Oui, à Anjou, ils font bouillir.

M. Simard: ...alors, M. le Président, si l'idéal de la présidente du Conseil du trésor, ce n'est pas de voir des arbres partout, mais des compteurs s'élever partout au Québec, il reste que l'immense majorité des Québécois considèrent que l'eau est un bien qui ne doit pas être transformé en marchandise, qu'on ne doit pas vendre cette eau et qu'on ne doit pas d'aucune façon livrer ce bien public à des entreprises privées.

n(minuit)n

M. le Président, je suis forcé de mettre fin à cette démonstration, puisque l'heure avance. Je vous remercie de votre attention, et nous poursuivrons notre démonstration visant à inviter, à ce que soit entendue ici la Coalition Eau Secours! de façon à éclairer, bien

mieux que je n'ai su le faire ou tenté de le faire, la commission sur cette question de l'eau.

Le Président (M. Paquin): Bon, merci, M. le député de Richelieu. Merci à tous les... Oui, M. le député de Hull.

M. Cholette: Si les interventions sont terminées, peut-être qu'on pourrait régler la situation puis passer au vote ce soir... Ce n'est pas fini?

Une voix: ...

Le Président (M. Paquin): Il y en a encore.

M. Cholette: Bien, on a été convaincus...

M. Simard: Belle tentative, belle tentative.

M. Cholette: Non, mais on est prêts à voter, nous. On est prêts à voter, on est prêts à voter.

Une voix: Oh! Demain.

M. Simard: On veut vous donner la chance de vous renforcer dans vos convictions.

Une voix: Après-demain, là, on verra.

Le Président (M. Paquin): Donc... donc...

Des voix: ...

Le Président (M. Paquin): S'il vous plaît! J'ajourne les travaux de la Commission des finances publiques sine die.

(Fin de la séance à 0 h 1)


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