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Version finale

37e législature, 2e session
(14 mars 2006 au 21 février 2007)

Le mardi 31 octobre 2006 - Vol. 39 N° 25

Consultations particulières sur l'énoncé de politique intitulé Moderniser la gouvernance des sociétés d'État


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Table des matières

Journal des débats

(Neuf heures trente-sept minutes)

Le Président (M. Hamad): S'il vous plaît! Je déclare la séance de la Commission des finances publiques ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir fermer leurs téléphones cellulaires.

Le mandat de la commission est de procéder à des auditions publiques dans le cadre de consultations particulières sur l'énoncé de politique intitulé Moderniser la gouvernance des sociétés d'État.

Alors, M. le secrétaire, y a-t-il des remplaçants?

Le Secrétaire: Il n'y a aucun remplacement.

Remarques préliminaires

Le Président (M. Hamad): Aucun remplaçant. Merci. Donc, nous passons aux remarques préliminaires. C'est 15 minutes pour le parti ministériel et 15 minutes pour l'opposition. Évidemment, vous pouvez bien partager aussi quelques minutes avec le parti de l'ADQ. Alors, M. le ministre, vous avez 15 minutes.

M. Michel Audet

M. Audet: M. le Président, chers collègues membres de la commission, je suis donc très heureux ce matin qu'on soit assis à cette commission pour aborder et discuter de ce projet très important de modernisation de la gouvernance des sociétés d'État et d'énoncé de politique auquel il a donné lieu à l'occasion du discours du budget. Et donc, maintenant, nous voulons discuter des suites à donner à cet... et évidemment de préparer donc le dépôt d'un projet de loi qui va en quelque sorte rendre possibles légalement ces dispositions qui sont à être énoncées dans la politique de gouvernance. Donc, je souhaite la bienvenue à tous à cette consultation sur le projet de modernisation de la gouvernance des sociétés d'État.

Cette consultation est le prolongement logique donc du dépôt de l'énoncé de politique sur cette question, au mois d'avril dernier. Comme cet énoncé a suscité un grand intérêt, j'ai cru bon de vous donner la possibilité de venir exprimer devant cette commission les réactions et les idées qu'il vous a inspirées.

Les sociétés d'État jouent un rôle majeur dans la réalisation des diverses missions de l'État québécois. Certaines d'entre elles sont d'ailleurs parmi les principaux héritages de la Révolution tranquille et elles ont accompagné le Québec dans son développement depuis lors. L'ensemble des sociétés d'État fait d'ailleurs du gouvernement du Québec l'actionnaire d'un portefeuille important et diversifié. Ainsi, les 24 sociétés d'État visées par l'énoncé de politique possèdent un actif total de plus de 70 milliards de dollars, en excluant bien sûr les actifs de la Caisse de dépôt et placement, et comptent plus de 40 000 employés. Bien que les sociétés d'État fassent partie du secteur public, elles bénéficient d'une autonomie importante justifiée par leur mission et par le contexte de leurs activités.

n (9 h 40) n

Le processus que nous entreprenons vise à accroître cette autonomie tout en s'assurant qu'elle s'exerce dans un cadre de transparence. Ainsi, le gouvernement et le public pourront s'assurer que la gestion des sociétés d'État satisfait à des normes élevées de responsabilité et d'éthique. Dans l'ensemble, les sociétés d'État du Québec sont d'ores et déjà bien gérées et veillent avec soin sur l'actif que les Québécois leur ont confié. C'est important de le dire: on ne fait pas ça parce qu'il y a des problèmes bien précis d'identifiés, c'est un problème général de gouvernance dont on parle. Pourquoi alors est-il souhaitable d'entreprendre un effort de modernisation de l'ampleur de celui que nous proposons de mettre en oeuvre?

Trois raisons motivent notre action. D'abord, évidemment, au cours des dernières années, on le sait, il y a eu des scandales financiers importants, particulièrement aux États-Unis, qui ont concentré donc l'attention du public et de la communauté financière sur la manière dont sont gérées les grandes entreprises privées et les organismes qui leur sont comparables. L'opportunité de procéder à une refonte de leurs règles de fonctionnement a donné naissance à plusieurs initiatives, dont la Loi Sarbanes-Oxley, aux États-Unis. De ce côté-ci de la frontière, les gouvernements du Canada, de l'Ontario et de la Colombie-Britannique ont également, comme le Québec, fait état de leur volonté de mieux encadrer leurs sociétés d'État. Les recommandations des organisations internationales qui se préoccupent de gouvernance ? au premier chef donc l'OCDE ? ont été mises à jour et ont fait l'objet d'un intérêt renouvelé. C'est dans cette tendance que s'inscrit l'action du Québec.

De plus, si les sociétés d'État québécoises n'ont pas connu de dysfonctionnement majeur, elles n'ont pas échappé aux difficultés pour autant. Dans certaines sociétés d'État, de mauvaises décisions n'ont pu être rapidement corrigées du fait d'une définition ambiguë des rôles respectifs de la direction et du conseil d'administration ou à cause de lacunes dans les mécanismes de surveillance et de contrôle.

Dès son entrée en fonction, notre gouvernement a remis d'ailleurs les pendules à l'heure là où une action rapide s'imposait. Et on sait que, dans ce contexte, nous avons modifié, à l'automne 2004, la Loi sur la Caisse de dépôt et placement du Québec pour y asseoir de nouvelles normes de bonne gestion que le gouvernement préconise. C'est pourquoi d'ailleurs la Caisse de dépôt, dont la loi a déjà été modifiée, ne fait pas partie de la liste des sociétés touchées par ces changements.

Nous entreprenons maintenant un exercice plus complet en ce qu'il s'adresse à l'ensemble des 24 sociétés d'État qui figurent en annexe de l'énoncé de politique. Nous croyons qu'il est important de procéder ainsi pour assurer la cohérence de notre intervention. Les sociétés d'État du Québec ont été mises sur pied graduellement, sur quatre décennies, sans nécessairement qu'une vision d'ensemble ne guide l'élaboration de règles de fonctionnement.

La politique que nous entendons mettre en place permettra d'harmoniser les façons de faire dans l'ensemble donc de nos sociétés d'État. Bien sûr, certaines règles seront modulées pour mieux correspondre à la spécificité de la mission d'une ou de l'autre des sociétés. Mais elles seront toutes rassemblées sous le parapluie d'une philosophie commune. Ces changements s'intègrent à la vision du gouvernement quant à la modernisation de l'État, que nous avons entreprise dès 2003. Nous favorisons une gestion transparente et responsable. Notre action en ce domaine n'aurait pas été complète sans une modernisation des règles de gouvernance régissant les sociétés d'État.

La détermination du gouvernement du Québec se manifeste d'ailleurs en ce que nous serons les premiers au Canada à agir de façon concrète pour améliorer la gouvernance de nos sociétés d'État, malgré toute la bonne volonté que certains autres gouvernements ont professée à cet égard. Et les améliorations que nous entendons introduire aux règles de gouvernance de ces sociétés sont de trois ordres.

En premier lieu, nous souhaitons distinguer clairement les responsabilités respectives des conseils d'administration et de la direction générale. Ensuite, nous voulons renforcer le rôle du conseil d'administration par le biais de meilleures règles quant à leur composition et leur fonctionnement. Et enfin nous désirons accroître les moyens de surveillance et de contrôle des sociétés d'État par le gouvernement sans toutefois porter atteinte à leur autonomie.

Pour le moment, la loi constitutive de certaines sociétés d'État permet le cumul de la fonction de président-directeur général et celle de président du conseil d'administration. Nous voulons mettre fin à cette situation. Nous suivons d'ailleurs en cela les recommandations que font les bourses de New York et de Toronto envers les entreprises qui y sont inscrites. En effet, une telle séparation permet d'accroître la supervision de la direction générale et assure davantage d'indépendance au conseil d'administration. La composition de ces conseils d'administration sera revue. Les conseils d'administration établiront dorénavant eux-mêmes des profils de savoir-faire afin de s'assurer de la complémentarité de l'expertise de leurs membres et les utiliseront pour faire des recommandations au gouvernement quant aux nominations des nouveaux membres.

La durée du mandat des membres sera fixée, de même que la possibilité de le renouveler. Afin d'assurer une certaine continuité, jamais plus du tiers des membres du conseil d'administration ne verront leur mandat échoir au cours de la même année, ce qui malheureusement a été le cas dans le passé.

C'est également au chapitre de la composition des conseils d'administration que nous proposons le changement qui a sans doute suscité le plus de réactions, essentiellement positives. Nous souhaitons, d'ici cinq ans, que les conseils d'administration des sociétés d'État soient globalement composés à part égales d'hommes et de femmes. Sur ce point, le Québec se place à l'avant-garde de ce qui se fait ailleurs dans le monde. Nous croyons fermement à l'importance de poser des gestes concrets pour assurer que les femmes occupent la place qui leur revient dans les conseils d'administration des affaires de l'État. Faut-il rappeler que la majorité des jeunes gradués universitaires sont désormais des femmes. Oui, pour le gouvernement, il s'agit d'un changement majeur et ambitieux, mais tout indique que les femmes n'attendent que l'occasion de pouvoir mieux faire valoir leurs compétences au service de grandes organisations comme les sociétés d'État. En même temps, et c'est important de le noter, il s'agit d'un signal clair à l'intention des entreprises privées de prendre ce virage et de profiter d'un bassin de talents dont elles se privent depuis trop longtemps.

La proposition gouvernementale de modernisation de la gouvernance des sociétés d'État comprend aussi la création de comités stratégiques au sein des conseils d'administration. L'expérience de gestion nous apprend que les fonctions dont ces comités sont chargés, soit la gouvernance, la vérification, les ressources humaines, sont cruciales pour le succès à long terme d'une organisation. Or, ces fonctions sont pour le moment négligées dans les lois constitutives des sociétés d'État. L'énoncé politique présente une réforme fondamentale de la manière dont opère un grand pan du secteur public québécois.

Par cette réforme, nous sommes soucieux de préserver les acquis du passé autant que d'améliorer les perspectives pour l'avenir. C'est pourquoi nous procédons à pas mesurés.

La consultation qui s'ouvre aujourd'hui permettra à plusieurs groupes et individus de s'exprimer sur le projet que nous avons déposé au printemps. Chacun d'eux dispose d'une expertise précieuse dont nous souhaitons profiter pour bonifier notre projet et ainsi élargir le consensus qui doit entourer son adoption. Je suis donc reconnaissant à tous les participants de venir échanger avec nous. J'écouterai vos suggestions avec la plus grande attention, les suggestions autant, d'ailleurs, des invités que des parlementaires, il va sans dire, et on en tiendra compte bien sûr dans la rédaction des modifications législatives. Merci de votre attention.

Le Président (M. Hamad): Merci, M. le ministre. M. le député de Rousseau.

M. François Legault

M. Legault: Oui, merci, M. le Président. Ça me fait plaisir aujourd'hui de venir entreprendre une commission parlementaire sur un rapport qui a été déposé, qui s'appelle Moderniser la gouvernance des sociétés d'État. On sait que le gouvernement a promis, s'est engagé à déposer un projet de loi dès cet automne sur cette modernisation des règles de gouvernance des sociétés d'État.

M. le Président, je dois dire d'abord, ne serait-ce qu'au niveau de la forme, que je trouve ce document est très court, très mince. On parle d'un document d'une trentaine de pages, et ça, ça inclut toutes les pages blanches et toutes les répétitions qui ont été incluses dans le document.

Et, M. le Président, je pense qu'actuellement il y a beaucoup de Québécois qui se posent des questions sur l'efficacité de nos sociétés d'État. D'ailleurs, le ministre des Finances, lorsqu'il a déposé son projet du Fonds des générations, nous a dit au printemps dernier, vous vous en rappellerez sûrement, que les redevances hydrauliques versées par Hydro-Québec seraient financées par des gains d'efficacité chez Hydro-Québec. Or, la première question qu'on s'est posée, c'est de se dire: D'abord, comment se fait-il que la haute direction d'Hydro-Québec a eu des bonis, étant donné qu'on espère encore des gains d'efficacité importants chez Hydro-Québec, et qu'en est-il de l'efficacité d'Hydro-Québec? On a eu, de notre côté, en fin de semaine, beaucoup l'occasion de discuter du rôle d'Hydro-Québec, entre autres dans le développement de l'éolien. Je vois sourire mes collègues, mes collègues d'en face, mais ce que je peux vous dire, c'est qu'évidemment il y a des questions sans réponse actuellement, à savoir: Quelle est l'efficacité actuelle d'Hydro-Québec? Est-ce que Hydro-Québec... avant qu'on leur confie un mandat additionnel, je pense qu'il faut se demander quelle est son efficacité actuelle.

Et, M. le Président, je pense qu'il faut rappeler aussi ce qui s'est produit à la Société des alcools du Québec au printemps dernier. Rappelons-nous, M. le Président, qu'à la Société des alcools du Québec on a confirmé que des employés ? c'est incroyable quand on pense à ça, là ? des acheteurs avaient demandé à des fournisseurs de la SAQ d'augmenter leurs prix pour être capables d'avoir une meilleure marge et donc d'augmenter la profitabilité de la Société des alcools du Québec. C'est quand même incroyable! Je pense que ça doit être une première dans l'histoire d'une entreprise où on a des employés qui demandent à leurs fournisseurs d'augmenter leurs prix de vente.

n (9 h 50) n

D'ailleurs, je profite de l'occasion parce que c'est un des sujets qui est traité dans le document, puis on pourrait demander au Vérificateur général de faire des rapports spéciaux. Actuellement, le ministre des Finances a demandé, au printemps, au Vérificateur général deux rapports: un rapport sur ce qui s'est passé à la Société des alcools du Québec et un rapport de ce qui s'est passé avec les hippodromes, entre autres à la SONACC, et on n'a toujours pas de réponse, on n'a toujours pas de nouvelles. Donc, une des premières recommandations que je ferais au ministre, et au-delà d'avoir la possibilité de demander des rapports spéciaux au Vérificateur général, de fixer des délais quand on donne des mandats comme ceux-ci au Vérificateur général.

Mais, M. le Président, ce qu'on touche un peu dans ce document, c'est d'abord, bon, toute la question de la nomination des administrateurs et de la haute direction. Je pense que, de ce côté-là, quand on voit comment ce gouvernement, entre autres à la Société des alcools, a pris le contrôle, là, dans tous les sens du mot, contrôle du conseil d'administration en ajoutant tous ou presque, là, des administrateurs qui ont un lien avec le Parti libéral du Québec, incluant le président du conseil d'administration, qui a démissionné, qui était le responsable de la campagne du Parti libéral du Québec.

Or, M. le Président, quand on se pose des questions sur l'efficacité des sociétés d'État, je n'ai pas trouvé beaucoup de réponses. Je pense qu'il faudrait être un petit peu plus créatifs pour s'assurer, entre autres, que les administrateurs de nos sociétés d'État aient toute l'information pour savoir si la société où ils travaillent, où ils siègent est efficace. Et je pense qu'il faut être capables de développer, entre autres, des mesures de comparaison de coûts, ce qu'on appelle, en anglais, du «benchmarking», être capables d'avoir quelqu'un de l'extérieur qui vienne évaluer si les coûts à Hydro-Québec, les coûts à la Société des alcools, les coûts à Loto-Québec sont comparables avec des sociétés comparables. Et, de ce côté-là, je n'ai pas rien vu, M. le Président, qui va nous permettre d'améliorer la gouvernance des sociétés d'État dans le sens d'améliorer l'efficacité de nos sociétés d'État.

Évidemment, M. le Président, il y a des mesures qui sont proposées qui sont intéressantes. Entre autres, on propose d'avoir une parité hommes-femmes sur les conseils d'administration, je pense que c'est une proposition intéressante. On dit, par contre, qu'on a d'autres objectifs, mais on ne mentionne pas lesquels. Donc, on aimerait savoir quels sont les autres objectifs du gouvernement.

Donc, M. le Président, je pense que ce document, où on n'a pas beaucoup de réponses, pose beaucoup plus de questions que nous donne des réponses sur la gouvernance des sociétés d'État. Et je pense que le gouvernement libéral aurait dû profiter de l'occasion pour se donner des moyens, des moyens additionnels, des moyens modernes pour évaluer l'efficacité de nos sociétés d'État et améliorer l'efficacité de nos sociétés d'État. Donc, j'ai bien hâte, M. le Président, de discuter avec les personnes qui vont venir présenter des rapports au cours des prochains jours sur ce document, pour essayer ensemble de trouver vraiment des améliorations pour améliorer la gouvernance des sociétés d'État. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Hamad): Merci. M. le député de Chutes-de-la-Chaudière.

M. Marc Picard

M. Picard: Merci, M. le Président. Je suis heureux d'intervenir aujourd'hui sur l'énoncé de politique du gouvernement concernant la gouvernance des sociétés d'État. Plusieurs événements, autant au Québec qu'ailleurs, nous incitent fortement à nous pencher sur la gestion et la transparence des entreprises, autant privées que publiques, ce qui inclut les sociétés d'État. Le gouvernement a saisi le message lancé par la société, et j'espère que cet énoncé ne sera pas qu'un exercice pour masquer les problèmes. Au contraire, je compte sur le ministre pour aller au fond des choses et s'attaquer aux vrais problèmes qui compromettent la bonne gouvernance de nos sociétés d'État.

À ce sujet, ma formation politique s'est positionnée résolument en faveur d'un meilleur contrôle et d'une plus grande indépendance des sociétés d'État. L'indépendance ne doit pas être qu'un voeu pieux, et le gouvernement doit avoir le courage de se délester de certains pouvoirs pour atteindre cet objectif.

Ce que je comprends de l'énoncé de politique, c'est que les administrateurs seront choisis par le gouvernement afin qu'il n'y ait aucun lien d'intérêts entre eux et la direction de la société d'État. C'est bien, mais c'est trop peu. S'il est bon que l'indépendance soit entière entre les membres du conseil d'administration et la direction, cette même indépendance doit exister entre ces mêmes membres de conseil d'administration et le gouvernement. Pour atteindre les objectifs de bonne gouvernance, il me paraît essentiel que les administrateurs soient indépendants et qu'ils n'aient aucun lien d'intérêts avec quiconque. Il faut que leur allégeance aille à la société québécoise avant tout et qu'ils voient à ce que l'intérêt des Québécois soit respecté en tous points dans la gestion de ces sociétés. Pour ça, l'indépendance la plus complète est essentielle.

Ce que je constate, M. le Président, dans cet énoncé, c'est que le gouvernement conserve totalement son pouvoir de nomination des administrateurs. Pour moi, ce pouvoir est un obstacle à l'indépendance complète. Ne soyons pas dupes, M. le Président, celui qui est placé à un poste par le gouvernement est officieusement redevable à ce même gouvernement. Conséquemment, pour atteindre une indépendance complète, les membres de ces conseils d'administration devraient être nommés par l'Assemblée nationale. C'est l'esprit du projet de loi n° 190 que j'ai déposé en avril 2006. J'aurais apprécié que le ministre étudie sérieusement cette avenue qui aurait pu rétablir le lien de confiance entre les sociétés d'État et les citoyens. Toutefois, je constate que le ministre s'est inspiré du projet de loi n° 195 que j'ai déposé en cette Chambre. Le projet de loi vise à étendre les pouvoirs de vérification d'optimisation du Vérificateur général à l'ensemble des organismes publics et des sociétés d'État.

En terminant, j'aimerais reprendre les trois grands thèmes qui semblent avoir guidé cette politique: transparence, performance et indépendance. Je vous ai fait part de mes inquiétudes relatives à l'indépendance et je compte sur le ministre pour en prendre bonne note. Pour ce qui est de la performance, je n'ai aucun doute que le ministre et les administrateurs des sociétés d'État l'ont à coeur. Nous n'avons qu'à nous souvenir du scandale des prix gonflés de la SAQ pour comprendre que la performance est au coeur des préoccupations du gouvernement et des administrateurs. Mais cette soi-disant performance s'est faite aux dépens des consommateurs et au profit des coffres de l'État. C'est pourquoi je considère primordial que soit instituée une indépendance complète entre le gouvernement et les conseils d'administration des sociétés d'État.

Enfin, la transparence. Si le gouvernement a vraiment à coeur la transparence et la bonne gouvernance, je terminerai avec un petit conseil, M. le Président. Pour inciter les sociétés d'État à adopter de saines habitudes de gestion, il faut prêcher par l'exemple. Le dépôt des états financiers du gouvernement, la semaine dernière, n'est pas un exemple à suivre. Au contraire. Le Vérificateur général a vertement critiqué la comptabilité créative du gouvernement libéral. M. le Président, au-delà des énoncés de politique, le gouvernement devrait tout d'abord donner l'exemple. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Hamad): Merci. M. le député de Laval-des-Rapides.

M. Alain Paquet

M. Paquet: Merci beaucoup, M. le Président. Je pense que, ce matin, nous sommes donc réunis pour discuter de moderniser la gouvernance des sociétés d'État, et nous aurons l'occasion au cours des prochains jours d'entendre différents intervenants sur cet énoncé de politique et sur des orientations et les moyens qu'on pourra transformer ça en mode législatif, ce qui aura un impact certain. Il est intéressant ce matin d'entendre les collègues de l'opposition, et on voit que, je ne sais pas, il y a eu beaucoup de vent en fin de semaine, il y a certainement... je reconnais au député de Rousseau et à son parti... la force des vents, ça, ils en ont, ils brassent beaucoup de vent. On pourrait peut-être nationaliser ce vent-là, en tout cas; ce serait un autre débat qu'on pourra faire.

Mais on voit, ce matin, un ton qui m'étonne un petit peu des gens de l'opposition. Parce qu'on discute de quelque chose, je crois, qui transcende très clairement les divisions qu'on peut avoir, légitimes, sur différents éléments. Mais je m'attendais ce matin que tout le monde s'entendrait au moins sur les objectifs, l'importance de moderniser la gouvernance des sociétés d'État, de voir comment est-ce qu'on peut améliorer. Il y a peut-être des moyens qu'eux-mêmes ont pensés. On n'a pas eu certaines réponses, et, jusqu'à maintenant, je n'ai pas entendu grande réponse, grande suggestion du côté de l'opposition officielle. Peut-être que ça viendra au cours des prochains jours, mais, à part d'une charge un peu éparpillée, on ne voit pas terriblement, là, en quoi leur commentaire vient nécessairement améliorer ou bonifier les éléments qu'on a devant nous.

Lorsqu'on parle de moderniser la gouvernance des sociétés d'État, il est important de rappeler d'ailleurs qu'il y a eu un colloque en mai dernier, le 30 mai 2006, qui s'est tenu à Montréal, sur la gouvernance des sociétés d'État, et c'était organisé par l'Institut sur la gouvernance d'organisations privées et publiques, différents centres de recherche et d'intervention; c'était organisé conjointement avec des gens des HEC Concordia. Et, lors de ce colloque, notamment, les réactions qu'il y a eu, Yvan Allaire, le président du conseil de l'Institut sur la gouvernance d'organisations privées et publiques, l'a qualifié, le document, de «pas de géant dans la bonne direction». On peut bien dire qu'il y a encore des choses à faire, peut-être qu'il y a des choses qui n'ont pas été considérées, mais on a eu des réactions comme celle-là.

n (10 heures) n

Une autre réaction intéressante, celle notamment d'un ancien haut fonctionnaire, qui a occupé des fonctions importantes à l'intérieur des gouvernements, M. Louis Bernard, quelqu'un dont le député de Rousseau devrait se rappeler, là, qui était candidat, je crois, à la chefferie du Parti québécois l'année dernière, qui abondait dans le même sens que M. Allaire. Alors donc, il y a des réactions, qui sont publiques, qui ont été faites qui disaient: Écoutez, il y a des pas importants qui sont faits. Alors, on peut bien, là, dire qu'il y a des choses qui manquent. Je pense qu'on là ici effectivement pour pouvoir travailler à améliorer une politique, mais je pense que ce qu'on s'attend de l'opposition, c'est qu'elle ait des remarques constructives, qu'elle doit tenir... que l'imputabilité du gouvernement, c'est quelque chose d'important, elle va le faire, mais elle doit aussi présenter des alternatives ou des choses qui peuvent manquer. Je crois que c'est ce à quoi nos citoyens s'attendent.

Le député de Rousseau, tout à l'heure, aussi s'objecte, il dit qu'il y a des choses qu'il ne retrouve pas là-dedans, mais je rappellerai pour mémoire que le même député de Rousseau, de l'opposition officielle, s'est opposé aux changements de gouvernance que nous avons faits, nous avons apportés à la Caisse de dépôt. Ça aussi, c'est inscrit dans l'historique des débats parlementaires que nous avons eus. Alors, c'est facile de parler qu'on ne va pas assez loin, mais lui-même s'est opposé et sa formation politique s'est opposée aux changements importants qui ont été apportés et qui ont donné des résultats d'ailleurs en termes de... pour les contribuables et pour les épargnants québécois.

Lorsqu'on parle, aussi, du rapport du Vérificateur général, qui devrait, il devrait... on devrait lui donner des délais pour remettre des rapports, je suis encore étonné ce matin. Ça fait peut-être un... On essaie de faire un titre avec ça, un clip, mais la réalité, c'est que, le jour où un ministère dirait, ou un ministre ou le gouvernement dirait au VG: Voici, vous avez tant de temps pour faire un rapport, quelle va être la conséquence? Ou bien ils n'auront pas assez de temps ou bien il va y avoir trop temps, mais, là, on se met dans une position où on vient menacer l'indépendance du Vérificateur général. Je rappelle que le Vérificateur général relève de l'Assemblée nationale, de l'ensemble des parlementaires. Donc, jamais au grand jamais faut-il remettre en cause l'indépendance du VG. Qu'on soit d'accord ou pas parfois avec certaines conclusions ou des choses, c'est correct, ça fait partie du débat des parlementaires, et c'est tout à fait normal, mais, chose importante, c'est: il ne faut pas remettre en cause son indépendance. C'est un principe de base et qui est important à cet égard-là.

Lorsqu'on parle donc de moyens de contrôle accrus des sociétés d'État par le gouvernement, il y a une série de mesures, dans la politique, qui sont là. J'en rappelle quelques-unes: l'approbation du plan stratégique ou plan d'entreprise par le gouvernement, incluant la politique de rémunération variable ? voici un élément de contrôle additionnel dont on parle dans le document; un pouvoir au ministre responsable de donner des directives à la société d'État, c'est aussi prévu; un pouvoir au ministre responsable de demander des renseignements à la société d'État; une section portant sur la gouvernance au rapport annuel; il y a une section qui porte sur l'éthique et la déontologie au rapport annuel; le Vérificateur général qui non seulement est responsable des vérifications financières pour l'ensemble des sociétés d'État, mais aussi une covérification, vérification conjointe par une firme privée, et on parle d'impartition et de vérification en tout ou en partie par une firme privée, alors que le VG demeure responsable de formuler l'opinion sur les états financiers.

Voici une série de mesures. Et là on peut qualifier puis dire: Peut-être qu'il manque des choses, peut-être que ça ne va pas assez loin dans certains cas, peut-être que ça va trop loin dans d'autres. Et c'est l'objet pour lequel nous aurons l'occasion, au cours des trois prochains jours, d'entendre des gens en audition sur ces points-là. Et je crois que c'est un élément qui est extrêmement important, mais je pense que c'est quelque chose qui trop important pour essayer d'en faire du vent ou essayer de faire des clips de presse à cet égard-là. Merci.

Le Président (M. Hamad): Alors, M. le député de Gaspé.

M. Guy Lelièvre

M. Lelièvre: Oui, merci, M. le Président. Bien, c'est une commission quand même qui est très importante. La Commission des finances publiques se penche sur la transparence, la diffusion de l'information. Si on regarde tous les objectifs qui sont prévus dans le document, je pense qu'on veut verser dans un monde meilleur.

Et je voudrais centrer davantage mon propos, M. le Président, concernant les parlementaires, le rôle que nous avons à jouer à l'Assemblée nationale comme parlementaires. Et on remarque que, lorsqu'on assiste à des commissions, à des séances de travail ou que nous présentons des mandats d'initiative, il faudrait qu'on puisse un jour réformer également cet aspect-là. Parce que le parti au pouvoir, qui assure la direction des affaires de l'État, s'organise toujours pour avoir une majorité lorsque ça ne fait pas son affaire, M. le Président, et des mandats d'initiative ne peuvent pas s'exécuter parce que nous n'avons pas une majorité. Est-ce qu'il y aurait lieu aussi de réfléchir sur ce sujet? Je dis bien, là, sans prêter de mauvaises intentions à qui que ce soit autour... dans cette assemblée, aujourd'hui, mais je pense que c'est vraiment important, c'est vraiment important que nous nous penchions sur ce sujet. Parce qu'on nous demande par la suite, hein, de voter sur des propositions qui viennent du gouvernement, et, lorsque ? et je le dis bien candidement ? ...l'opposition est toujours dans assemblées-là ou dans ces réunions. Alors, je comprends qu'on ne le réglera pas ici, maintenant, mais je veux le soumettre à mes collègues pour qu'on puisse regarder dorénavant comment nous pourrons fonctionner. Si l'Assemblée nationale, par exemple, vote le projet de loi du ministre des Finances concernant la nouvelle gouvernance, bien il y aurait lieu qu'on puisse ajuster également nos pratiques pour pouvoir effectivement discuter et faire des mandats d'initiative en parité. À ce moment-là, on ne se retrouvera pas à passer quelques heures à travailler puis, au bout de la ligne... en connaissant l'issue prévisible de la décision. Et peu importe le parti politique qui sera au pouvoir.

Alors, je pense que ce serait déjà une amélioration très sensible pour reconnaître le rôle des parlementaires. Dans le document, le ministre des Finances n'en traite pas, hein, n'en traite pas, du rôle des parlementaires, et je pense qu'il y aurait eu lieu de pousser la réflexion un peu plus loin, M. le Président. Alors, je vais m'arrêter ici.

Auditions

Le Président (M. Hamad): Merci. Je vais demander à notre premier invité, M. Daniel Paillé, professeur invité, finances corporatives, HEC de Montréal... de Montréal, oui, effectivement. Alors, M. Paillé, je vous demande de s'identifier, et vous avez 15 minutes pour faire votre présentation. Après ça, il y aura 15 minutes au parti ministériel et 15 minutes pour le parti de l'opposition. M. Paillé.

M. Daniel Paillé

M. Paillé (Daniel): Merci. Alors, je m'identifie: Daniel Paillé. J'aimerais remercier donc les membres de la commission de me permettre de revenir encore une fois à cette Assemblée, mais, une ou deux fois, ce ne sera pas la coutume. On m'a invité pour vous présenter mes remarques et suggestions face à l'énoncé de politique déposé par le ministre en avril dernier. J'ai passé près de la moitié de mes 30 ans de vie professionnelle autour et alentour de sociétés d'État, et je crois bien pouvoir avancer et discuter quelques idées.

Je les ai vues de l'extérieur, soit comme gestionnaire du portefeuille de sociétés d'État au ministère des Finances ou soit comme vendeur de sociétés d'État dans le cadre du premier programme de privatisation que M. Bourassa avait mis en place. J'en ai forgé quelques-unes de l'intérieur, que ce soit à la Caisse ou à SGF, et, bien sûr, je fus aussi un utilisateur privé de leur financement, chez Quebecor ou chez Canam. Un vieil adage nous enseigne que l'on ne peut exiger des autres ce que l'on ne peut accepter pour soi-même. C'est bien tourné, c'est très sérieux; ma grand-mère vous dirait: Ce qui est bon pour minou est bon pour pitou.

Bref, si, par souci de renforcer la confiance des investisseurs canadiens ou québécois, les gouvernements imposent une kyrielle de normes comptables généralement reconnues, de nouvelles règles d'information financière, des normes strictes de gouvernance d'entreprise pour les entreprises, alors il devrait commencer par lui-même et se les imposer ainsi qu'à ses créatures et ses filiales, les sociétés d'État. Les entreprises privées, soit celles détenues par des actionnaires non gouvernementaux, que j'appellerai tout au long de ce témoignage «des compagnies», sont soumises de plus en plus à des pressions de divulgation, à une diminution du délai de divulgation, à une intransigeance quant à l'exactitude de ces divulgations et surtout, surtout à des exigences pour que ces divulgations soient fidèles et complètes.

Par exemple, mon dernier rapport trimestriel, écrit il y a à peine 18 mois, qui expliquait seulement des résultats intermédiaires, avait plus de pages, de renseignements et de détails de toute nature que le même rapport sur une base annuelle pour la même compagnie, rédigé trois ans plus tôt. C'était et c'est toujours une obligation, sinon c'est la décote à la Bourse et une très mauvaise réputation sur les marchés. On le sait, il y a, du côté des compagnies, un menu de divulgation qui frise l'indigestion.

Voilà pour le privé, mais qu'en est-il pour le public, pour nos sociétés d'État? Le gouvernement, par le dépôt de son énoncé, fait un bon pas. D'entrée de jeu, je salue ce geste et je souscris à cet effort. L'objectif a l'avantage d'être clair: transparence, intégrité, responsabilité, mais encore faut-il que les moyens proposés soient suffisants et d'avant-garde.

n (10 h 10) n

Je ne veux pas traiter aujourd'hui des 24 sociétés d'État ou organismes visés par cette politique. D'ailleurs, il est toujours très malaisé de mettre dans un même paquet la Caisse de dépôt et la Société des traversiers. Concentrons-nous donc sur six sociétés d'État ayant une réelle vocation commerciale ou industrielle ou celles que l'on trouve des comparables dans la vraie vie capitaliste nord-américaine: la Caisse, Hydro, Investissement Québec, SAQ, Loto-Québec et la SGF. C'est ainsi que je crois que l'on peut et l'on doit aller beaucoup plus loin en exigeant au moins autant des sociétés d'État que ce qu'on demande aux compagnies cotées à la Bourse. Je vais toucher donc les éléments suivants: le conseil, l'imputabilité, l'indépendance et la compétence, les présidents, la responsabilité des dirigeants, les renseignements divulgués et finalement la rémunération.

Parlons donc des conseils d'administration. Qui les nomme et de qui devraient-ils être formés? Ce sont parfois des questions qui viennent vite à l'avant-scène, surtout quand il y a un changement de gouvernement. Chaque élu et particulièrement les nouveaux députés sont très convaincus de la valeur supérieure de leur propre «slate». Là-dessus, pas de faux-fuyant: Qui nomme les administrateurs d'une vraie compagnie? C'est le propriétaire, point. S'il en est ainsi dans la vraie vie, il devrait en être ainsi dans les sociétés d'État. Donc, qui est le propriétaire? C'est le ministre des Finances. C'est à ce dernier qu'incomberait le droit de nommer les administrateurs. A-t-il à partager ce droit avec ses collègues autour de la salle du Conseil des ministres? Bien évidemment, surtout s'il ne veut pas trop se faire d'ennemis en partant. Donc, c'est au gouvernement à nommer les administrateurs des sociétés d'État.

Or, un des pouvoirs d'actionnaire, en plus de nommer ses administrateurs, c'est de les rendre imputables devant lui. Présentement, comment cela se fait-il? Bien, ça dépend. Chaque société répond au ministre, pas toutes de la même façon. Certaines, c'est une chasse gardée du président et chef de la direction. Pour d'autres, c'est le président du conseil. Parfois, c'est l'informel, via des administrateurs que le ministre connaît particulièrement mieux. Et, lorsque les ponts sont rompus, on s'envoie des directives.

Supposons que ça va bien et que le canal de communication est au beau fixe, alors que fait le ministre actionnaire? Quand il le veut, quand il le peut et en fonction de sa propre compétence, il répond aux interrogations des autres. Et, dans notre système, qui sont les autres? Bien, c'est vous, les députés, plus souvent les députés de l'opposition, ce qui, on en conviendra, teinte un peu la nature des questions. Tout ceci se passe ici, à l'Assemblée nationale, lors de la période de questions ou en commission parlementaire. Or, nous n'avons pas tous la chance de suivre vos travaux assidûment. Il y a bien sûr les journalistes de la Tribune, que je salue, qui rapportent les échanges, mais généralement c'est l'aspect politique qui est rapporté, beaucoup plus que l'aspect financier.

De plus, on doit constater avec le temps que l'actionnaire d'un jour devient souvent le questionneur du lendemain. Que voulez-vous, ça arrive même dans les meilleures familles et pour tous les gouvernements. Par exemple, lorsque je suis devenu ministre de l'Industrie et Commerce responsable de la SDI à l'époque, à la fin de 1994, le nouveau questionneur d'en face avait été successivement président de la SDI pendant cinq ans et ministre responsable de la même société pendant quatre ans. Disons qu'il ne m'a pas posé beaucoup de questions sur son administration, pas par manque de compétence, bien au contraire, mais tout simplement dans la nature des choses. Et, aujourd'hui, il est maire de Montréal. On peut donc conclure que la transparence ou le «reporting» des sociétés d'État se fait plutôt en vase clos.

Du côté des compagnies, la formule générale réside tout simplement dans la convocation d'une assemblée annuelle des actionnaires où ces derniers peuvent poser des questions face à face aux véritables dirigeants et administrateurs.

Alors, comment en arriver à une bonne formule pour les sociétés d'État? Simplement en convoquant annuellement une assemblée des actionnaires, des actionnaires ultimes, vous et moi à titre privé, pas seulement les fondés de pouvoir. Il me semble que ce serait intéressant si, par exemple, dans un cadre bien défini, le président de la SAQ, par exemple, viendrait quelque part en 2007 rendre compte de son année 2006. On serait alors à même de poser des questions, de juger sa performance et sa transparence comme gestionnaire. Ainsi, on n'aurait pas à compter seulement que l'opposition se lève en Chambre pour poser les bonnes questions. Parfois, l'agenda politique n'est pas idéal, surtout, comme je l'indiquais plus haut, quand le critique en la matière jouait antérieurement le rôle de l'actionnaire. Il y a des gênes comme ça que ma solution permettrait d'éviter. Voici donc des sociétés d'État dont les administrateurs sont nommés par le gouvernement mais avec une convocation annuelle de l'assemblée des actionnaires ouverte à tous.

Les nouvelles normes d'indépendance et de transparence exigent maintenant que les compagnies... d'avoir un certain nombre d'administrateurs dits indépendants au conseil et aux comités, principalement au comité de vérification. Ici, dans le cadre des sociétés d'État, comment appliquer la notion d'indépendance? Chez plusieurs compagnies, c'est assez facile. Parfois, le patronyme fait foi, surtout quand vous êtes le Jean Coutu. Mais, pour une société d'État, doit-on aller jusqu'à la notion de famille politique? Avec ou sans appartenance officielle? Avec ou sans contribution officielle? Il y a ici un flou artistique assez discutable. Je ne crois pas qu'il faille aller jusque là. Quand on est élu, il y a un sens commun qui prime et inspire tout naturellement les dirigeants. Mais, la compétence, ça, ça se vérifie. Si, par exemple, on exige des membres d'un comité de vérification d'une compagnie qu'ils aient, et je cite: «Une expérience pertinente à l'exécution de leurs responsabilités», fin de la citation, on devrait en faire autant des administrateurs d'un comité de vérification d'une société d'État. On a donc des administrateurs compétents et, souhaitons-le, indépendants.

Posons-nous la question de la nomination des présidents, maintenant, des sociétés. L'énoncé de politique propose que le président du conseil ainsi que le président et chef de la direction soient nommés par le gouvernement et, dans ce dernier cas, sur recommandation du conseil. Que l'actionnaire nomme le président du conseil, cela va de soi. J'ai trop oeuvré dans des compagnies privées ayant comme principal dirigeant l'actionnaire pour ne pas savoir qui est le boss. Chez Quebecor, personne se demandait qui était le patron, Pierre Péladeau non plus. Cependant, je crois que c'est le conseil des sociétés d'État qui devrait nommer le président et chef de la direction. C'est la prérogative d'un conseil de choisir son leader opérationnel. Donner à l'actionnaire un droit de veto exceptionnel m'apparaîtrait acceptable dans les circonstances, mais il devrait être prévu que ce veto doit s'exercer à l'intérieur d'un très court délai, évidemment afin de minimiser les périodes d'incertitude. Donc, un conseil d'administration qui nomme son président et chef de la direction sans autre intervention.

C'est bien connu, un ministre aime faire des conférences de presse pour annoncer des bonnes nouvelles. Pour les moins bonnes, un communiqué de presse, si nécessaire, suffit. On annonce une plus grande transparence dans la divulgation des résultats. L'intention est là, mais le détail est mince. Faisons un pas de plus et exigeons des publications trimestrielles complètes, ce qui sont deux choses différentes. Les états financiers intermédiaires ou trimestriels devraient être accompagnés d'un rapport écrit détaillé, d'une attestation du vérificateur via un mandat d'examen. De plus, les signatures obligatoires et conjointes du président et chef de la direction ainsi que du vice-président et chef des opérations financières devraient être exigées. Accroître la responsabilité des dirigeants, ça vient avec la signature et tout ce que cela implique. D'où cela sort-il? Bien, simplement, selon les règles actuelles imposées aux compagnies.

J'étais personnellement responsable des états financiers du Groupe Canam jusqu'à temps que je m'en aille. Bon nombre de sociétés ne déposent aucun rapport trimestriel. D'autres donnent, après un certain délai, quelques renseignements via un sombre communiqué de presse. Je souligne cependant qu'Hydro-Québec fait une bonne publication trimestrielle. Quand je parle de renseignements trimestriels, je ne veux pas dire seulement les ventes, le bénéfice et les charges, comme cela se fait encore par l'une des plus grandes sociétés d'État de distribution au Québec. Le rapport trimestriel de la SAQ du 16 octobre dernier tient sur une demi-page. Celui de Métro, compagnie comparable, a 20 pages. Un bon rapport trimestriel inclut un texte explicatif complet, les trois états financiers complets, bilan, résultats et flux financier, et le rapport d'examen du vérificateur. Tout cela, bien sûr, signé par le président et chef des opérations financières.

n (10 h 20) n

La publication de ces renseignements devrait aussi se faire selon des délais imposés aux compagnies. Si 45 jours sont suffisants pour les renseignements trimestriels d'un entrepreneur, pourquoi ça ne devrait pas l'être pour un gestionnaire de société d'État? Si, pour les renseignements annuels, c'est 90 jours, idem. L'assemblée annuelle des actionnaires, tel que proposé plus haut, devrait être tenue à l'intérieur des 120 jours, comme pour une compagnie privée. Ce sont les règles usuelles de la Bourse, je n'invente rien, alors pourquoi pas les sociétés d'État? J'ai été navré, il y a environ un an, d'entendre le ministre des Finances annoncer tout simplement le report du dépôt de la synthèse des opérations financières trimestrielles du gouvernement. Sans doute, ses raisons étaient bonnes. Mais, dans le privé, dans la vraie vie, une telle annonce, la Bourse aurait immédiatement ordonné un arrêt des transactions, la Commission de valeurs mobilières... pardon, l'Autorité des marchés financiers aurait déclenché une enquête, au moins, je l'espère, la presse financière aurait été unanime à vous décrier puis les agences de cotation seraient parties après vous avec des perspectives négatives à la cote de solvabilité.

Ici, n'attendons plus donc l'ouverture ou la clôture d'une session à l'Assemblée nationale pour que soit déposée une avalanche de documents. Faisons cela avec les règles de l'art et publions via le SEDAR, c'est-à-dire le Système électronique de données et d'analyse de recherche.

Finalement, la rémunération des administrateurs et dirigeants devraient calquée sur celle des compagnies comparables. Pourquoi toujours faire ses choux gras quand on découvre que le vice-président machin truc d'une société d'État a obtenu 10 000 $ de boni parce qu'il a fait bénéficier sa société d'État d'un rendement exceptionnel? Devant un tel déchirage de chemise, je me pose toujours deux questions: Comment ça se fait qu'il a eu juste 10 000 $, puis, deuxièmement, s'il se contente de seulement 10 000 $, est-ce qu'il est bon? Il ne faut pas avoir peur de créer la richesse personnelle chez ceux qui créent la richesse collective. Après tout, si un sombre gardien de but peut gagner des millions de dollars, combien valent un bon dirigeant et gestionnaire de nos sociétés d'État?

Je suggère de développer une formule fondée sur des repères propres aux secteurs d'activités. Par exemple, les administrateurs et dirigeants de la SAQ, qui devraient être des spécialistes dans le commerce de distribution au détail, devraient avoir une rémunération comparable à celle des administrateurs et dirigeants de Couche-Tard, Metro, RONA et Jean Coutu. C'est ainsi que l'on formerait des conseils renforcés et des dirigeants de haut calibre. Même chose pour la Caisse de dépôt, qui, avouons-le, est bien plus comparable à la Banque Nationale, au Mouvement Desjardins qu'à la Société des traversiers.

Avant de conclure, j'ai une dernière remarque: Ne le faites pas pour la SAQ, privatisez-la, tout simplement, et, du jour au lendemain, toutes ces règles-là vont s'appliquer.

Conclusion: Poser des bonnes questions, c'est bien, mais surtout élaborons des solutions faciles d'application. Si le gouvernement est actionnaire, il nomme les administrateurs et le président du conseil. Le conseil nomme le président et chef de la direction. Les administrateurs doivent être compétents et indépendants. Chaque société d'État à caractère commercial et industriel devrait convoquer les actionnaires à une assemblée annuelle. Les résultats devraient être publiés rapidement et trimestriellement. Un rapport complet et exhaustif n'est pas un simple communiqué de presse. Et, au sujet de la rémunération, mon grand-père, le mari de ma grand-mère du début, vous dirait: Avec des pinottes, on attire des singes. Inspirez-vous de mes aïeux. Merci.

Le Président (M. Hamad): Merci, M. Paillé. Maintenant, nous avons 15 minutes pour la partie ministérielle. M. le ministre, si vous avez des questions.

M. Audet: Oui. D'abord, vous me permettrez à la fois de saluer Daniel Paillé, que je connais depuis déjà une bonne trentaine d'années, pour ne pas dire un peu plus. Et donc, fidèle à son habitude, il nous a livré, je pense, un papier assez clair, percutant à certains égards, mais je dois dire que j'ai plusieurs éléments sur lesquels je suis totalement en accord, d'autres sur lesquels j'aurais peut-être des questions et des clarifications. Alors, c'est peut-être à ça qu'on va s'attarder.

Le premier point, je veux juste faire un peu l'état, les trois points qui me préoccupent, puis, après, peut-être lui permettre de répondre pour lui permettre de répondre globalement, pour laisser la parole à d'autres. Quand vous dites effectivement, en regard des rapports que... lorsque l'on convoque annuellement l'assemblée des actionnaires, vous faites des propositions évidemment sur la participation, la divulgation de beaucoup plus d'information à l'Assemblée nationale, comme le font les sociétés privées. Vous faites un parallèle, et je pense que c'est intéressant.

On a déjà évidemment, à l'occasion de la discussion des crédits, ça se fait dans ce contexte-là, les heures qui sont allouées à ça servent souvent à discuter des sociétés d'État, c'est une hypothèse qu'on pourra regarder: Est-ce qu'il n'y aurait pas la possibilité de donner plus de temps, ou formellement d'inviter des présidents de société d'État à faire une présentation au début? Parce que souvent on les fait venir puis on leur pose des questions. Peut-être que ça, ça sera avec l'accord de l'opposition. C'est très possible de structurer une présentation semblable, comme vous le faites, et où il y aurait de l'information, de la divulgation et des questionnements qui seraient faits à ce moment-là sur la base de cette présentation-là.

Alors, moi, je suis ouvert à une suggestion comme ça, à l'occasion, des... lorsque les présidents de sociétés viennent comparaître, à l'occasion des crédits, et qu'ils sont tous, ils sont... l'année passée, tous ont été convoqués à la commission parlementaire. Certains n'ont même pas été... même pas eu l'occasion de venir s'asseoir à table pour répondre aux questions. Alors, peut-être leur donner l'occasion. Moi, je suis ouvert à ça, je le dis clairement à l'opposition. Je pense que c'est une bonne suggestion, en ce qui me concerne.

L'autre sujet qui évidemment... sur lequel je voudrais revenir, c'est les rapports trimestriels. Évidemment, c'est une proposition, là aussi, intéressante. Je prends note de la recommandation. Maintenant, évidemment, dans certains cas, c'est peut-être plus facile que d'autres. Je ne sais pas si la Caisse de dépôt, par exemple, a la capacité de faire toute cette information-là, peut-être que oui, peut-être que non, ça fait que je vais faire cette vérification-là évidemment pour donner plus de détails. Là aussi, c'est une bonne suggestion, je pense, qui mérite d'être mieux articulée. Il y a déjà... Hydro-Québec fait un rapport trimestriel très détaillé, d'autres le font un petit peu moins, alors ça aussi, c'est quelque chose dont on prendra certainement compte.

La question sur laquelle je vais peut-être revenir un petit peu, c'est évidemment, là, je permets de le mentionner à notre invité effectivement, l'année dernière, effectivement, juste rappeler le contexte évidemment dans lequel on n'a pas pu publier dans les délais prévus les résultats, c'est qu'il y avait une grève au ministère du Revenu, et le ministère du Revenu ne pouvait pas donner nos informations. Donc, on l'a dit clairement, on n'a pas dit... on ne pouvait pas... le problème, c'est que je n'avais pas l'information, parce qu'il y avait une grève de trois mois au ministère du Revenu, et on n'avait pas l'information sur les données réelles du ministère du Revenu, et il ne pouvait pas faire d'états financiers sur la base d'estimés qui sont du ministère des Finances. Donc, je pense... je veux juste noter ça au passage pour remarquer. Et, depuis ce temps, je veux le dire à notre invité aussi, depuis le mois d'avril, nous publions mensuellement les états financiers, maintenant, donc c'est quelque chose qui est corrigé depuis ce temps-là, je tiens à le mentionner donc pour que ce soit très clair pour tous nos collègues.

La question sur laquelle je voudrais peut-être revenir, et je pense que c'est important compte tenu de l'expérience de M. Paillé, c'est là-dessus que je voudrais peut-être qu'il nous entretienne un petit peu. Lorsqu'on parle... vous le dites un peu, sur la composition des conseils d'administration, les nominations, etc., vous faites un peu... vous êtes assez clair, vous dites: C'est normal que le gouvernement nomme le président du conseil, mais, le PDG, ça devrait être carrément donc le conseil d'administration.

Est-ce que... mais là vous avez essayé de dire: Oui, il pourrait y avoir un droit de veto, dans un temps donné, par le gouvernement. J'avoue que, là-dessus, évidemment, c'est une question qui est... on a des propositions qui sont faites, on dit que ça doit être évidemment sur recommandation, et le gouvernement entérine; c'est un peu ce que ça veut dire dans la proposition. Mais j'aimerais avoir votre avis un peu pour savoir, en regard de... est-ce que, dans le cas du secteur privé, puisque vous faites beaucoup de parallèles, est-ce que l'actionnaire n'avalise pas aussi la nomination ultimement du PDG, qui évidemment est très important dans les circonstances? Parce que, oui, c'est normal que le gouvernement nomme le président du conseil; quant au PDG, il devrait être nommé par le... d'une autre façon, et strictement se garder le pouvoir de veto. J'apprécierais que vous me donniez un peu plus de détails dans les parallèles que vous faites: le secteur privé et le secteur public.

Le Président (M. Hamad): M. Paillé.

M. Paillé (Daniel): Oui, merci. Oui, j'avais noté, «by the way», la publication mensuelle du gouvernement, mais ce que je vous suggère, c'est de le faire trimestriellement pour l'ensemble des sociétés d'État. S'ils n'ont pas la capacité, bien vous leur dites qu'à partir de maintenant il faut qu'ils l'aient, point.

Concernant les conseils, c'est sûr que dans l'entreprise privée, dans une société où la famille est encore très présente, bon, le président du conseil, ça va de soi, et les administrateurs, de leur statut d'administrateur, vont choisir le président et chef des opérations. Parfois aussi, la filiation génétique suit, ce qui n'est pas nécessairement toujours une bonne idée. Et de plus en plus ce qu'on voit, c'est que le comité des ressources humaines, qui est aussi un comité fort important, établit des critères pour la sélection du président-directeur général, mais l'input vient d'en bas, c'est-à-dire que c'est vraiment la société qui fait son travail et qui fait ce choix-là.

n (10 h 30) n

Dans le cadre, par exemple, du vice-président ou chef de la direction financière, ça aussi, c'est la même chose, ça vient de la machine ou ça vient de l'intérieur et ça doit passer au comité de vérification, par exemple, et c'est présenté au conseil, ces postes là sont acceptés par le conseil d'administration de la société. Les actionnaires s'y prononcent à l'assemblée annuelle, mais ils constatent, dans le cas du président et chef de la direction, dans le cas du président, vice-président et chef des opérations financières, les actionnaires constatent lors de l'avis de convocation, lors de l'assemblée des actionnaires, que monsieur ou Mme Unetelle est devenu président de la compagnie, donc l'opérateur. Parce que l'opérateur, lui, il est là à tous les jours et il se rapporte, surtout s'il y a un comité exécutif, régulièrement au président du conseil d'administration, qui, lui, est nommé par les actionnaires.

Donc, ça peut paraître la même chose, votre solution, mais ce n'est pas la même chose. Si vous êtes un conseil d'administration puis que vous recevez trois noms, ou que vous dites: Il faut donner trois noms au gouvernement, ou vice et versa, l'atteinte des trois noms, elle est là. Alors que, si c'est l'inverse, si on dit: Nous, on recommande M. ou Mme Unetelle comme président et chef des opérations de cette société-là, bien vous avez le veto de dire non. Mais là, à ce moment-là, c'est plus délicat, disons.

Le Président (M. Hamad): M. le ministre.

M. Audet: Juste pour, vous permettez, sur ce sujet-là, il est bien dit dans l'énoncé que le président du conseil sera nommé par le gouvernement sur recommandation du conseil d'administration. Le comité des ressources humaines recommandera au conseil d'administration les critères de sélection proposés également. Donc, il y aura des recommandations du comité de ressources humaines. Ça rejoint un peu ce que vous dites.

La question, c'est de savoir est-ce que, évidemment, il doit y avoir quand même un certain accord minimal. Sans ça, vous savez très bien qu'on entre dans une période de turbulence, si le P.D.G. qui est nommé n'a pas la confiance de l'actionnaire. Ça, on s'entend là-dessus, je pense, il n'y aura pas de...

M. Paillé (Daniel): Oui. Même dans les compagnies privées ou publiques à la Bourse, même les compagnies aériennes, on n'aime pas ça, la turbulence.

Le Président (M. Hamad): M. le député de Laval-des-Rapides.

M. Paquet: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, bonjour, M. Paillé, merci de votre présentation. Vous avez évoqué l'idée de convoquer annuellement une assemblée des actionnaires ultime. Et vous dites: Pas seulement les fondés de pouvoir. Dans le système actuel, les parlementaires peuvent, en vertu de mandat de surveillance... dans chaque commission, il y a des sociétés d'État qui relèvent des différentes commissions. Comme, par exemple, la Commission des finances publiques, la Caisse de dépôt et la SAQ relèvent, eux autres aussi relèvent de la Commission des finances publiques. Et évidemment un des problèmes souvent qu'on a, c'est le temps dont on dispose, dans le menu parlementaire, pour pouvoir convoquer plus qu'une, des fois deux par année, société d'état. Et je comprends qu'il y aurait peut-être lieu d'avoir des améliorations à cet égard-là.

Vous évoquiez, si je ne m'abuse, qu'au niveau des commissions parlementaires parfois aussi on tombe trop rapidement dans des questions... je ne dis pas qui sont inintéressantes, ce n'est pas le cas, mais dans des débats peut-être qui font dévier un peu de l'aspect plus administratif de vérification des grands objectifs... d'atteinte des objectifs des sociétés d'État. En parallèle, vous connaissez, la Commission de l'administration publique a un rôle qu'elle tient vis-à-vis les hauts dirigeants des ministères, les hauts fonctionnaires qui viennent témoigner sur les rapports du Vérificateur général, sur les rapports, aussi leurs plans de gestion... et leurs rapports de gestion.

Et j'aimerais en savoir un peu plus comment vous envisagez cette forme d'assemblée générale? Parce que, si je ne me trompe pas, vous ne voulez pas dire qu'on irait... c'est-à-dire, on fait une annonce dans le journal, et tout le monde qui veut se présenter, un samedi matin ou un vendredi soir ou un jeudi, viennent. Est-ce que c'est ça? Quelle formule, là, vous auriez un peu en tête à cet égard?

Le Président (M. Hamad): M. Paillé.

M. Paillé (Daniel): Ce que je propose, c'est, oui, c'est que, oui, c'est que, bon... Votre collègue de gauche connaît très bien les assemblées annuelles de la Banque Nationale, mais il y avait du monde, là. O.K.? Et, au début, quand ça a commencé à être populaire, c'était un peu clownesque. Puis, à un moment donné, ça s'est, bon, ça s'est tassé, mais c'est des événements importants, ça dure une demi-journée, et c'est très important pour... Puis il y a du monde, là, il y a 2 000, 3 000 personnes qui posent, qui peuvent poser des questions ou qui doivent s'enligner et qui sont orientées, sur deux trois heures, sur une société et la gestion d'une société.

Je peux imaginer que la première assemblée de ce genre de la SAQ serait manifestement un événement. Il y aurait du monde, mais, au bout de la quatrième ou de la cinquième, il y aurait comme une espèce d'habitude, et les gens qui connaissent ou qui veulent connaître la distribution de produits alimentaires ? parce qu'une bouteille de bière, une bouteille de vin, là, en termes de distribution ? donc iraient là.

Le désavantage de la commission parlementaire, et pour l'avoir vécu, c'est que vous avez neuf heures ? je ne sais pas si c'est encore neuf heures, mais en tout cas, à l'époque, c'était neuf heures ? puis on choisissait l'ordre dans lequel ça devait passer, puis, les plus croustillants, on les mettait à la fin. Et puis, au lieu de dire: La SDI, bien on disait: La Société de développement industriel du Québec. Ça prend juste plus de temps. Bon.

Alors que là... Et on ne peut pas aussi orienter tout le monde en disant: Vous allez poser des questions sur la Caisse de dépôt, la SDI, la SGF, l'Autorité des marchés financiers ? je ne sais pas s'ils viennent là ? c'est tous azimuts. Ce que je vous propose, c'est de dire: Je pense qu'on est assez grands, au Québec, pour avoir des assemblées, oui, publiques annuelles, une fois par année, où le président de la SGF, où le président de la SAQ vient témoigner de son administration, comme le président du Fonds de solidarité du Québec le fait une fois par année, un samedi matin, comme le président de Métro-Richelieu, comme le président de Rona, comme Alain Bouchard, de Couche-Tard. Ils y vont, ils les affrontent, et puis ça donne les résultats que ça donne. Et à ce moment-là on a une couverture journalistique financière qui pourrait être plus spécialisée que la couverture politique que vous avez ici.

Le Président (M. Hamad): C'est le député de Montmorency.

M. Bernier: Bonjour, M. Paillé.

M. Paillé (Daniel): Bonjour.

M. Bernier: Si je suis votre proposition, O.K., dans le cadre de Rona, dans le cadre de ces entreprises-là, on convoque les actionnaires, les banques, on reçoit nos avis de convocation, et les gens se présentent là-bas. Dans le cas des sociétés d'État, à ce moment-là, il y a également tous les groupes de pression qui existent dans la société québécoise, syndicats ou tout autre groupe de pression, qui à ce moment-là se présenteraient là-bas avec pas nécessairement les objectifs que vous mentionnez, mais avec leurs objectifs précis.

De quelle façon est-ce qu'on peut apporter, si on veut, votre vision, qu'on pourrait amener votre vision sans avoir une certaine perturbation ou que ça devienne un spectacle?

Le Président (M. Hamad): M. Paillé.

M. Paillé (Daniel): C'est pour ça que, dans mon mémoire, vous avez les trois ou quatre mots qui disent: «dans un cadre bien défini». Parce qu'effectivement ça pourrait être un son et lumières pas nécessairement agréable pour les trois, quatre qui sont en avant puis qui répondent aux questions.

Et je pense qu'on peut faire ça dans l'ordre, en disant: Bon, bien, il y a des exposés, comme ça se fait dans une assemblée annuelle où vous avez l'exposé du président du conseil d'administration, suivi de l'exposé du président et chef de la direction, période de questions où quelqu'un ne peut pas manger le micro pendant trois quarts d'heure, où vous avez un certain temps pour poser la question, un certain temps pour obtenir la réponse, puis après, bien, si tu en veux une deuxième, tu t'en vas en arrière de la file.

Bon. Ça, c'est de la tuyauterie. Et je ne pense pas que l'on doive, disons, dire qu'au Québec on n'est pas assez mature pour avoir ce genre de rencontres. Et, oui, au début, il y aurait des groupes de pression, ça m'apparaît évident, mais, s'il y a groupe de pression, c'est que peut-être qu'ils ont un droit d'expression et que l'on doit aussi répondre à leurs questions. Je ne pense pas que, parce qu'on présume qu'il pourrait y avoir du brassage, qu'on clôt ou on empêche ce genre de débat là. En tout cas, je propose que le risque là-dessus vaudrait le rendement, vaudrait le rendement.

Le Président (M. Hamad): Alors, c'est terminé, partie ministérielle. Maintenant, M. le député de Rousseau.

M. Legault: Oui. D'abord, à mon tour, je voudrais saluer et remercier Daniel Paillé d'être venu discuter avec nous d'un sujet important. Moi aussi, je le connais depuis un certain temps et puis j'ai profité de ses conseils judicieux lorsque j'ai été ministre de l'Industrie et Commerce après lui.

Quelques remarques sur ce qui s'est discuté entre le ministre et M. Paillé et ensuite quelques questions. Bon. D'abord, je suis d'accord avec M. Paillé à l'effet que c'était assez navrant effectivement, il y a un an, de voir le ministre des Finances déposer sa synthèse d'opérations très en retard. Et peut-être une remarque sur ce que dit le ministre des Finances.

Rappelons-nous que la grève des employés au ministère des Finances s'est terminée le 11 juillet l'année dernière et qu'on a eu les premiers états financiers intérimaires le 13 décembre, cinq mois après la fin de la grève. Il me semble qu'on devrait être capable de faire ça dans des délais plus courts que cinq mois après la fin d'une grève. Je pense que c'est important, les délais dans lesquels on donne l'information.

Deuxième sujet où je voulais apporter un commentaire, et ça rejoint une des propositions de M. Paillé, de dire: Bon, on devrait peut-être avoir des forums additionnels pour poser des questions aux dirigeants de sociétés, entre autres une assemblée des actionnaires annuelle. Je suis content de voir l'ouverture du ministre des Finances de ce côté-là. Parce qu'il faut se rappeler ce qui est arrivé cette année avec le scandale de la Société des alcools. On avait demandé une commission parlementaire spéciale pour poser des questions. Ça a été refusé par le Parti libéral, et on a dû concentrer... c'était le seul endroit où on pouvait poser des questions, au moment où on recevait toutes les sociétés d'État.

n (10 h 40) n

Donc, ce qui est arrivé, c'est que toute la période a été utilisée pour la Société des alcools, puis on n'a eu de temps pour les autres sociétés d'État. Moi, j'ai trouvé ça malheureux, personnellement, mais je pense que...

Je reviens à la Société des alcools parce que ça m'amène à poser ma question à M. Paillé. Je pense que la plus grande différence qu'on a entre ce qui se passe dans le privé, avec des rapports trimestriels et annuels, une assemblée des actionnaires, et ce qui se passe ici, au niveau de la société d'État, c'est qu'on a plusieurs des sociétés d'État, même, je dirais, la plupart, qui représentent un monopole. Et, quand on a un monopole, je pense que ça prend de l'information additionnelle. Parce que, dans une société privée, la compétition avec les autres entreprises privées fait que, si on n'est pas compétitif au niveau des coûts, on va tout de suite le voir dans les résultats, alors que, dans une société d'État, bien on peut se retrouver, à l'extrême, avec ce qu'on a vécu à la Société des alcools, c'est-à-dire qu'il y a des employés de la direction ? en tout cas, on le saura avec le rapport du Vérificateur général ? qui ont choisi de demander à leurs fournisseurs d'augmenter leurs prix pour pouvoir augmenter les profits de la Société des alcools, sans tenir compte de la partie, justement, efficacité.

Et, moi, la grande préoccupation que j'ai au niveau des sociétés d'État, c'est justement au niveau de l'efficacité de ces sociétés d'État. Et on peut revoir de toutes les façons qu'on voudra les règles pour nommer les administrateurs et pour rendre imputables les administrateurs, mais il reste que les administrateurs sont... ils ont besoin d'avoir l'information, ils sont dépendants de l'information qu'ils reçoivent pour pouvoir poser de bonnes questions. Et ce serait la même chose s'il y avait une assemblée des actionnaires: la population pourrait bien poser des questions à la direction de la Société des alcools, mais, s'ils n'ont pas l'information pour être capables de juger si la société gère d'une façon efficace ou non, ça va être un petit peu un dialogue de sourds.

Donc, ma question à M. Paillé, c'est de savoir... vous n'avez pas touché directement ce sujet-là, mais: Comment pensez-vous qu'on pourrait ajouter des mécanismes pour qu'on puisse évaluer l'efficacité, qu'on puisse se demander: Hydro-Québec, est-ce que c'est géré de façon efficace actuellement? Est-ce qu'il y aurait moyen de réduire les coûts à Hydro-Québec? Même chose à la Société des alcools. Comment pourrait-on mettre en place des mécanismes pour que les administrateurs fassent leur travail, que les députés fassent leur travail, pour qu'on puisse avoir assez d'information pour être capables de vraiment évaluer l'efficacité de ceux qui dirigent nos sociétés d'État?

Le Président (M. Hamad): M. Paillé.

M. Paillé (Daniel): Je suis d'accord avec vous sur un certain point, c'est que c'est vrai que, comme vice-président et chef des opérations financières d'une société, une des jobs intéressantes, c'est d'écouter les téléphones conférences que tes concurrents font avec les analystes financiers, pour savoir qu'est-ce qui se passe dans leur compagnie et les concurrents. Et, quand on publie des résultats, bien on sait que l'on donne à nos concurrents beaucoup d'informations. Encore faut-il savoir lire les états financiers.

Dans le sens de vos monopoles, un monopole, c'est virtuel. Parce que la SAQ, je m'excuse, mais ce n'est pas un monopole. C'est un monopole de distribution du vin au Québec, mais un SAQ, puis un Réno-Dépot, puis un RONA, puis un Metro Richelieu, puis un Couche-Tard, c'est la même business, et un Jean Coutu. Vous parlez d'Hydro-Québec, bien comparez-le avec Gaz Métro, comparez-le avec des pétrolières, c'est de l'énergie que l'on vend. Ça fait que tout monopole apparent, si on fait un exercice un peu plus large, on peut aller chercher du «benchmarking», comme vous le disiez tantôt, pour la comparer. Et donc, à ce moment-là, je pense qu'il y a au niveau privé, au niveau des compagnies, assez d'information. On en a parfois trop, il faut donc savoir l'utiliser et savoir où la chercher et savoir la travailler pour amener ces sociétés à les comparer.

C'est sûr que, par exemple, quand vous avez des états financiers... j'ai fait, dans mon mémoire, quand je compare les états financiers trimestriels de Metro et ceux de la SAQ, c'est deux sociétés très comparables. Mais, dans le cas de la SAQ, ce n'est pas parce que c'est un monopole qu'on n'a pas l'information, c'est parce qu'ils ne veulent pas.

Le Président (M. Hamad): M. le député de Rousseau.

M. Legault: Oui. M. le Président, bien, à ce moment-là, bon, vous dites oui, vous semblez d'accord avec le fait qu'on fasse du «benchmarking» comparé, parce qu'il reste que, quand même, la SAQ a plus de marge que RONA pour augmenter ses prix parce qu'elle a un certain monopole effectivement sur la distribution du vin, donc il y a peut-être moins de pression pour négocier serré avec les fournisseurs à la SAQ que chez RONA.

Mais je veux quand même revenir sur l'aspect de qui devrait avoir la responsabilité de présenter ces informations-là de «benchmarking», de comparaison. Et je veux vous amener peut-être sur un sujet que vous n'avez pas touché, le rôle du Vérificateur général. Le Vérificateur général a la possibilité, là, de faire ce qu'on appelle la vérification d'optimisation. Pour l'instant, c'est assez flou, dans le document du ministre, quel rôle il veut faire jouer au Vérificateur général dans les sociétés d'État et surtout concernant la vérification d'optimisation. Moi, je voudrais voir, je voudrais reposer ma question, là, sur le «benchmarking», là, de savoir: Pour être capables de s'assurer qu'une société comme Hydro-Québec ou la SAQ ait des coûts compétitifs, ait fait le maximum pour aller réduire leurs coûts d'opération, donc je pense qu'une des bonnes façons c'est de comparer ces coûts-là avec des sociétés comparables, donc de faire du «benchmarking», qui devrait être responsable de fournir cette information? Est-ce que ça devrait faire partie du rôle du Vérificateur général? Et, sinon, qui devrait être responsable de donner cette information-là, entre autres, aux administrateurs mais aussi à l'Assemblée nationale?

Le Président (M. Hamad): M. Paillé.

M. Paillé (Daniel): Du côté des administrateurs, je pense que toutes les sources d'information doivent être de l'interne. Un administrateur d'une entreprise doit avoir accès à à peu près tout, dans l'ordre, avec des conditions, mais ne devrait pas être dans l'ignorance. Bon, il existe un métier dans le monde qui est l'analyste financier, là, et je pense qu'il y a des gens qui pourraient être expressément... s'il y a des gens qui sont capables de nous faire la différence entre Shoppers Drug Mart puis Jean Coutu, bien il y en a qui peuvent faire la différence entre une SAQ puis la distribution d'un autre style de commerce. Ou, si vous n'aimez pas les comparaisons avec Métro, bien prenez les sociétés de distribution d'alcool aux États-Unis, ou en Ontario, ou ailleurs à travers le monde. Il y a toujours moyen de trouver un comparable et de l'analyser comme il faut, pas bêtement des chiffres de...

Concernant le Vérificateur général, j'ai des craintes. Généralement, au niveau de l'optimisation, pour avoir été dans le privé, notre vérificateur externe, tout intelligent qu'il était, c'était un comptable, puis, dans le fond, toi, tu lui dis: O.K., l'optimisation, la chose était là, mais quand même on avait à gérer la compagnie. Je sais très bien, monsieur, à qui je m'adresse. Donc, quand vous posez la question: Qui? Bien, des gens compétents, et il faut avoir les organisations pour le faire. Mais, chez les administrateurs, ils doivent obtenir, demander et exiger de leurs dirigeants de leur produire des tableaux de bord, des façons d'évaluer la compétence de leurs propres dirigeants. Ça, je pense que ça doit venir de l'intérieur. Nous, comme actionnaires, bien on se développera des analystes financiers qui vont nous faire un certain nombre de comparables, comme on a actuellement des analystes qui font le comparable entre la Banque Royale, puis la Banque de Montréal, puis la Banque Nationale.

Le Président (M. Hamad): Si j'ai bien compris, vous n'êtes pas comptable, M. Paillé, c'est ça? M. le député de Rousseau.

n (10 h 50) n

M. Legault: Oui. Puis d'ailleurs je vois le ministre qui s'amuse, mais je l'inviterais à relire son propre document, à la page 20, et il nous dit que, dans son exposé, que le comité de vérification devra compter parmi ses membres des personnes ayant une expertise en matière comptable. J'étais très content de voir cette phrase-là, parce que, parfois sur les comités de vérification, on a des personnes qui n'ont pas d'expertise comptable.

Mais je veux revenir sur ma question, parce que, M. Paillé, vous nous dites, bon, que l'information pour comparer les coûts pourrait être donnée par l'interne. Est-ce qu'il n'y a pas un conflit d'intérêts d'une certaine façon, parce que, disons, là, disons que, demain matin, on pense que la SAQ pourrait réduire ses coûts, O.K., puis, pour reprendre les paroles mêmes du ministre des Finances, on pourrait faire des gains d'efficacité importants à Hydro-Québec pour pouvoir payer des redevances ? c'est ce qu'il a dit dans le Fonds des générations ? pensez-vous que, si, demain matin, on demandait à la direction de ces deux sociétés d'État de nous faire une analyse pour voir s'ils sont efficaces, qu'il n'y a pas un petit conflit d'intérêts et puis qu'on ne risquerait pas d'avoir un rapport qui démontre que c'est très efficace à Hydro-Québec, à la SAQ? Est-ce qu'on n'a pas besoin de quelqu'un de l'externe? Puis je veux bien qu'on se pose la question: Est ce que le Vérificateur général a l'expertise, puis est-ce que ça ne devrait pas être quelqu'un d'autre? Mais je pense que, à l'importance des sociétés d'État qu'on a au Québec, il faudrait quelqu'un avec un oeil indépendant, de l'extérieur, qui puisse venir porter un jugement sur l'efficacité de nos sociétés d'État.

Le Président (M. Hamad): M. Paillé, il reste à peu près 2 min 30 s, alors il faut prévoir du temps pour le député de Chutes-de-la-Chaudière. Si vous pouvez être...

M. Paillé (Daniel): C'est correct. Quand je parlais de l'information interne, elle devait s'adresser... moi, je parlais, là, au service des administrateurs. L'administrateur devrait être en droit d'obtenir, à l'intérieur de sa société, l'ensemble des informations qu'il doit avoir pour gérer cette société-là, premièrement.

Dans un cadre bien défini, bon... Ça fait quatre fois que vous parlez des coûts de la SAQ, là, je n'irai pas là-dessus. Et, par exemple, au ministère des Finances, il y avait, ou il existe toujours, la Direction des sociétés d'État, qui fait une évaluation financière du «rating» de chacune des sociétés qui sont au service de l'actionnaire, du ministre des Finances, là-dessus. Je ne lui suggérerai jamais de publier les rapports de la Direction des sociétés d'État, il y a trop de matière là-dedans, mais il pourrait y avoir quelque chose. Je pense qu'il faut développer par des analyses financières une certaine compétence au Québec. Je sais que, peut-être plus tard dans votre étude, il y a des gens qui vont vous proposer de faire une autre société qui va checker les autres sociétés, ça, méfions-nous, là, méfions-nous de ce genre de parapluie, ce n'est pas nécessairement en créant un monstre que l'on... enfin c'est l'Halloween!

Le Président (M. Hamad): Alors, M. le député des Chutes-de-la-Chaudière, c'était ça, votre proposition de société? Non? O.K.

M. Picard: Merci, M. le Président. Merci, M. Paillé. Je vais reprendre la même phrase que le député de Rousseau a prise tout à l'heure, quand on indique dans le document: «Le comité de vérification devra compter parmi ses membres des personnes ayant une expertise en matière comptable ou financière.» Donc, je comprends que le ministre, dans ses vues, à ce comité, il peut y avoir des touristes, parce que ce sont des gens qui n'ont pas de formation pour valider le travail qui doit être fait. Et, dans votre document, vous nous parlez qu'on doit avoir des administrateurs compétents et, souhaitons-le, indépendants. Au niveau de la compétence, qui doit évaluer la compétence? Parce que vous dites qu'ils doivent être nommés par le gouvernement, qui doit évaluer la compétence de ces administrateurs-là?

Le Président (M. Hamad): M. Paillé.

M. Paillé (Daniel): Je vais prendre le parallèle dans le privé: les membres d'un comité de vérification d'une compagnie qui est cotée à la Bourse, tous les membres doivent avoir une certaine connaissance, de par leur C.V., de par leur historique, de par leur expérience. Donc, il n'y a pas de touristes dans les comités de vérification, et le président du comité de vérification, ou à l'intérieur d'un des membres, il doit y avoir ce que l'on appelle un spécialiste identifié, et que là ça prend un comptable agréé. Bon, là, il en faut au moins un, mais les autres n'ont pas besoin de l'être, le président n'a pas nécessairement besoin d'être, lui, le comptable agréé, mais, à l'intérieur d'un groupe de quatre personnes, il en faut au moins un, et les trois autres doivent avoir un historique, une expérience ou une formation d'ordre financière. Parce qu'il faut faire la différence entre une compétence comptable et une compétence financière. De plus en plus, les CFO, ou les chefs de direction financière, peuvent ne pas être comptables agréés. Ça enlève des ornières.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Hamad): Alors, là-dessus, M. Paillé, vous allez avoir une discussion avec...

Des voix: ...

Le Président (M. Hamad): M. Paillé, merci pour votre présentation, merci pour vous être déplacé. Merci.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Hamad): ...inviter Mme Beaudoin et Mme Lacoste. Je suspends pour permettre aux invitées de s'installer.

(Suspension de la séance à 10 h 55)

 

(Reprise à 10 h 58)

Le Président (M. Hamad): Mme Beaudoin, je vous demande de se présenter. On va commencer. Vous avez 15 minutes.

Réseau des femmes d'affaires du Québec inc.

Mme Beaudoin (Nicole): Je vais être accompagnée de Mme Justine Lacoste, qui est juste sortie une petite minute, mais je vais me présenter moi-même. M. le Président, MM. les ministres, MM. les commissaires, je suis Nicole Beaudoin. Je suis comptable agréée et fière de l'être. J'ai aussi un M.B.A. en finances, ça fait que ça abrie un peu les affaires! Je suis présidente-directrice générale et propriétaire du Réseau des femmes d'affaires du Québec, et, depuis un an, nous avons démarré le Centre d'entrepreneuriat féminin du Québec. Ça fait que, nous autres, on va vous parler surtout des femmes sur les conseils d'administration d'État.

Le Réseau des femmes d'affaires du Québec célèbre ses 25 ans d'existence cette année. En 1981, le réseau a commencé ses activités par la publication d'un bottin regroupant les coordonnées d'une centaine de femmes d'affaires de Montréal et des environs. Aujourd'hui, c'est 2 500 femmes qui sont regroupées autour de la mission du Réseau des femmes d'affaires du Québec. Cette mission est de contribuer à la réussite des femmes dans le monde des affaires ainsi qu'au développement de leur rôle et de leur influence dans toutes les sphères de l'activité économique.

n (11 heures) n

La force vitale du Réseau des femmes d'affaires du Québec tient à sa maîtrise du réseautage et de son ingénierie. À titre de présidente et directrice générale du Réseau des femmes d'affaires du Québec et présidente fondatrice du comité Femmes au conseil, j'entends poursuivre ces objectifs en faisant la promotion des femmes en affaires et en faisant la promotion également des femmes au sein de conseils d'administration des sociétés d'État. Notre réseau est le point de rencontre privilégié des femmes d'affaires qui veulent participer à la construction de l'avenir. Il favorise la participation des femmes à faire preuve d'engagement envers la société.

Au nom de toutes les membres du Réseau des femmes d'affaires du Québec et en mon nom personnel, nous tenons à féliciter d'entrée de jeu M. le ministre Michel Audet pour cette initiative qui vise à instaurer des règles assurant la parité de la représentativité des hommes et des femmes au sein des conseils d'administration des sociétés d'État.

Des règles de formation des conseils d'administration. Le Réseau des femmes d'affaires du Québec, fort de sa diversité, est constitué de femmes d'affaires impliquées dans divers secteurs économiques et provenant de toutes les régions du Québec. Nous avons acquis une expertise pour évaluer les qualités de chef et de gestionnaire qui permettent aux femmes d'avoir du succès en affaires. Entre autres, nous honorons, depuis six ans, à travers le Gala Prix femmes d'affaires du Québec, des femmes entrepreneures, cadres et professionnelles à travers le Québec. Et, depuis six ans, nous avons honoré en fait 150 femmes dans toutes les régions et dans toutes les professions et types d'entreprises.

Le réseau offre à ses membres des programmes de services et d'activités innovateurs et de qualité supérieure afin de créer une dynamique d'affaires capable d'influencer les milieux économique, social et politique. Le Réseau des femmes d'affaires du Québec peut attester que de nombreuses femmes au Québec possèdent actuellement les qualifications professionnelles, l'expérience et les habilités pour siéger au sein de conseils d'administration de sociétés d'État. Les compétences des femmes d'affaires du Québec contribueront à favoriser une gestion des sociétés d'État qui répondra à des critères exigeants de transparence, d'intégrité et de responsabilité. D'ailleurs, l'intégrité fait partie des valeurs que nous promouvons à l'intérieur du réseau depuis 25 ans.

Des études ont établi que les entreprises les plus performantes étaient celles qui comptaient le plus de femmes parmi leurs équipes de direction. C'est une preuve additionnelle que la présence du génie féminin en action améliore la rentabilité des organisations. J'aimerais vous dire que Le génie féminin en action, c'est le slogan que nous avons adopté à l'intérieur de notre 25e anniversaire, au Réseau des femmes d'affaires du Québec. On est rendues là.

Les nouvelles règles de gouvernance qui seront établies obligeront les conseils d'administration des sociétés d'État à décrire le profil des candidates recherchées. Ces règles visent également à ce que les conseils d'administration soient constitués à parts égales d'hommes et de femmes.

Le Réseau des femmes d'affaires du Québec est constamment sollicité par des organisations. Le comité Femmes au conseil suggère, depuis sa fondation, en 1991, des candidates pour la nomination de femmes à des conseils d'administration. La façon dont on fonctionne avec le comité Femmes au conseil, on travaille avec l'offre et la demande. L'offre, c'est une base de données des femmes membres du réseau ? actuellement, il y a à peu près 300 femmes qui sont intéressées à participer à conseils d'administration ? et, du côté de l'offre, nous avons un conseil des gouverneurs, ce sont des gens qui peuvent amener des demandes pour les conseils d'administration. Et nous faisons ces jumelages-là. En fait, nous proposons au moins trois candidatures suite à une demande.

Le Réseau des femmes d'affaires du Québec collaborera et facilitera la sélection de femmes possédant l'expérience et les connaissances pour contribuer à l'autorité du conseil d'administration. Ces femmes ayant acquis par la pratique des affaires les habilités requises pourront voir à l'évaluation d'un comité, d'un conseil d'administration et d'une haute direction. Elles seront également en mesure de travailler au meilleur intérêt d'une organisation pour implanter et faire le monitorage de la vérification d'optimisation, du respect des règles d'éthique et du code de déontologie, de même que de l'évaluation de la performance du chef de la direction en respectant les paramètres fixés par le gouvernement.

Prévoir une application graduelle et adaptée. Nous soutenons que les femmes d'affaires répondant au profil de savoir-faire et d'expérience pour accéder à un conseil d'administration de société d'État sont disposées à accéder aux postes d'administratrices maintenant. Nous sommes convaincues que les dispositions des nouvelles règles devraient être mises en place le plus rapidement possible. Nous souhaitons voir progresser la parité d'hommes et de femmes au fur et à mesure des nouvelles nominations. Nous avons constaté des postes vacants au sein des conseils d'administration des sociétés d'État et espérons les voir comblés par des femmes qualifiées et compétentes.

J'aimerais maintenant vous présenter Mme Justine Lacoste, qui m'accompagne aujourd'hui; elle va se présenter elle-même. Justine.

Mme Lacoste (Justine): Bonjour, ça me fait plaisir de vous rencontrer. Je suis une espèce de bibite rare au Québec: ma grande-tante a fondé l'Hôpital Sainte-Justine en 1907, et c'est grâce à une loi du gouvernement du Québec que les femmes... un conseil d'administration uniquement féminin a pu fonder l'hôpital et que les maris, par la même loi, ont été dégagés de toute responsabilité. Vous êtes donc, 100 ans plus tard... À ma grande-tante a succédé ma mère, qui était dans le premier groupe d'avocates reçues, en 1942, et elle a dû attendre six ans avant d'être admise au Barreau. Et sa question a été, puisque le Barreau était un examen oral: Est-ce qu'une femme peut être accusée de viol? Ce n'était pas sexiste du tout! Je suis avocate et j'ai présidé, comme ma mère et ma grande-tante, le conseil d'administration de l'Hôpital Sainte-Justine.

Quand vous avez parlé d'assemblée publique, j'aimerais peut-être, après avoir fait la lecture du texte, pouvoir vous parler des assemblées publiques qui sont tenues dans nos institutions hospitalières.

Une répartition claire des responsabilités. Des études menées tant au Canada qu'aux États-Unis et ailleurs dans le monde ? vous avez d'ailleurs une belle liste de références ? conclut que le nombre de femmes présidentes de comités du conseil et de femmes présidentes de conseils d'administration de sociétés commerciales publiques est inférieur au nombre de femmes siégeant à des conseils d'administration de ces mêmes sociétés, ce qui veut dire qu'on n'accède pas aux postes de direction.

En vue de cette parité tellement souhaitée, le réseau des femmes d'affaires du Québec prépare les femmes d'affaires à assumer avec compétence et professionnalisme les fonctions de présidentes de comités et de présidentes de conseils d'administration des sociétés d'État. Nous souhaitons voir, pour l'ensemble des sociétés d'État, la parité entre hommes et femmes, autant de présidentes que de présidents.

Le Réseau des femmes d'affaires du Québec vise à soutenir les femmes d'affaires qui possèdent les qualités de présider les conseils et les comités afin de leur permettre d'accéder à ces fonctions. Nous prétendons que la meilleure approche pour favoriser l'accession des femmes est celle de l'accompagnement personnalisé: coaching. Nous proposons des accompagnements personnalisés pour assurer une participation pleine et efficace dans la saine gestion des comités et des conseils des sociétés d'État. Cette approche est privilégiée, car de nombreuses façons de faire, certains savoir-faire et certains savoir-être ne s'enseignent dans aucun manuel de procédure ni dans aucune école. On sait qu'il y a plusieurs, actuellement, programmes offerts sur la gouvernance. L'apprentissage des principes et des règles de la vérification d'optimisation ainsi que de leur mise en application augmentera rapidement la contribution efficace et efficiente des femmes au sein des sociétés d'État.

Nos membres qui siègent déjà sur des conseils d'administration seront sollicitées pour transmettre leur savoir à des membres plus juniors. Le réseau ajoute comme valeur, à la fin de ces 25 ans: solidarité féminine.

n (11 h 10) n

Mme Beaudoin (Nicole): En conclusion, nous demandons, au nom des femmes d'affaires du Québec, que les mesures pour assurer la représentativité égalitaire d'hommes et de femmes au sein de conseils d'administration des sociétés d'État prennent effet le plus rapidement possible pour permettre aux femmes possédant le savoir-faire et l'expérience de siéger dès maintenant au sein des conseils d'administration des sociétés d'État. Le Réseau des femmes d'affaires du Québec souhaite collaborer avec le gouvernement pour assurer l'accès des femmes d'affaires de tous les milieux économiques et de toutes les régions du Québec à des postes de membres de conseils d'administration et de membres de la direction au sein de conseils d'administration des sociétés d'État. Nous offrons donc notre expertise dans la recherche et dans la sélection de femmes compétentes et qualifiées dont les profils correspondent aux choix et aux besoins des conseils d'administration des sociétés d'État. Nous proposons de mettre sur pied, avec le soutien du ministère des Finances, un service de formation reliée à la gouvernance dédié aux femmes d'affaires afin de leur permettre d'acquérir ou de perfectionner les connaissances des procédures d'assemblée, les principes et les règles de gouvernance concernant l'éthique, la déontologie des administrateurs publics.

Nous entendons soutenir les femmes d'affaires dans leur accession à la présidence des comités des conseils d'administration des sociétés d'État et des conseils eux-mêmes afin de retrouver, dans l'ensemble des sociétés d'État, la parité d'hommes et de femmes dans ces fonctions d'importance. Dans cet esprit, nous solliciterons la collaboration de différents réseaux proches du Réseau des femmes d'affaires du Québec pour offrir un accompagnement personnalisé, que nous avons mentionné tantôt comme coaching. Au nom des femmes d'affaires du Québec, nous vous réitérons nos félicitations et croyons honnêtement que cette décision aura un effet d'entraînement sur toutes les sociétés parrainées et financées par le gouvernement ainsi que sur les fournisseurs de l'État. C'est un pas dans la bonne direction. Merci de m'avoir écoutée.

Le Président (M. Hamad): Merci, Mme Beaudoin. Merci, Mme Lacoste. M. le ministre.

M. Audet: Alors, merci. À mon tour donc de vous remercier, Mme Beaudoin, Mme Lacoste, de votre présentation que j'ai trouvée fort intéressante. J'avais peut-être un court commentaire puis, après ça, une question. D'abord, évidemment, je remarque que, comme C.A., vous avez une présentation qui est à la hauteur des qualifications de cette profession, quoi qu'on en a dit tout à l'heure! Donc, je veux être clair. Vous avez démontré que les C.A., n'est-ce pas, étaient capables de grandes choses, dans votre présentation. Donc, je le dis avant que mon collègue, mon collègue le député de Rousseau le note lui-même.

Vous soulevez deux, trois questions sur lesquelles je voudrais quand même donner quelques informations et quelques précisions. Vous mentionnez évidemment que l'application soit la plus rapide possible. Il va de soi que, depuis la publication de l'énoncé, c'est déjà un exercice auquel se livre le gouvernement. Juste certaines données pour vous dire que, par exemple, en avril dernier, au moment de l'application du rapport, il y avait, sur les 235 postes des 24 conseils dont on parle, conseils d'administration, il y avait 60 femmes. Il y en a maintenant 68, donc au mois d'octobre. Il y a donc eu une augmentation importante du nombre de femmes sur ces conseils d'administration. Il y a donc un peu moins d'hommes, et donc on a utilisé une partie des postes vacants, mais donc il y a déjà un déplacement, donc on est passé de 28 % à 31 % de la proportion des femmes, un peu plus de 31 %, en quelques mois.

C'est évident, cependant, il faut le dire, que l'application, elle va se faire sur cinq ans, parce que vous comprendrez qu'on ne peut pas... changer une dynamique semblable, c'est très important, donc elle va s'appliquer graduellement, bien sûr.

Et ça m'amène aussi à élargir un peu le débat que vous avez soulevé. Vous faites de la formation pour, je pense, un réseau que je connais bien, parce qu'on a eu l'occasion, je dois dire, là, de travailler, dans une vie antérieure, beaucoup avec Mme Beaudoin, dans le monde des affaires, donc je la connais de longue date puis je connais le travail qu'elle a fait dans ce domaine-là. Et il y a un travail à la fois bien sûr de formation et de sensibilisation pour beaucoup d'autres organismes publics. Parce qu'ici on ne parle que des sociétés d'État, mais le gouvernement nomme des participants sur des conseils d'administration, j'ai mentionné tout à l'heure la question des hôpitaux, la question... Et, dans les nominations qu'on fait une très grande partie des nominations que fait le Conseil des ministres sont des ratifications, des ratifications de propositions qui viennent d'organismes paritaires. Ce sont souvent les représentants patronaux qui sont des organismes, des représentants syndicaux qui sont des organismes, des représentants communautaires, qui sont soumis au Conseil des ministres et que le gouvernement ratifie.

Et j'ai déjà noté d'ailleurs ça à nos collègues des centrales syndicales, également du monde patronal, et j'en profite pour le dire encore aujourd'hui. C'est important que cette sensibilisation-là se reflète là aussi, parce que beaucoup de conseils, beaucoup de gens ne portent pas nécessairement attention, quand ils font ces rencontres où ils désignent quelqu'un, nécessairement à cet équilibre-là dans leurs groupes eux-mêmes. Et ça, je pense... je vous engage donc... là on parle évidemment d'un univers bien précis, particulièrement la société à caractère industriel et commercial, des sociétés qu'on peut qualifier de sociétés d'État, sociétés à capital-actions, mais c'est beaucoup plus large que ça, l'univers dont on parle.

Et encore une fois, parfois, quand on fait nos statistiques, on se dit: Quelle est la part qui revient au gouvernement lui-même, dans ces nominations? Quelle est la part qui revient aux autres? Et je le vois souvent au Conseil des ministres, mes collègues, particulièrement certains collègues féminins qui disent: Comment ça se fait qu'on ne nomme pas plus de... cette fois-ci, on ne nomme pas une femme à ça? Et là, le ministre responsable dit: Écoutez, je n'ai pas le choix, c'est la recommandation qui vient du groupe en question, patronal ou du groupe syndical. Donc, d'où la démarche doit être une démarche qui déborde le cadre purement gouvernemental; c'est une démarche de société en général, parce qu'au Québec on fonctionne beaucoup par ce type de proposition. Mon collègue, justement, le député de Rousseau, qui a siégé au Conseil des ministres, qui a vu de ces nominations, on fait beaucoup de ratifications. Une grande partie des nominations qu'on fait sont des ratifications qui nous sont proposées et sur lesquelles on n'a pas beaucoup de marge de manoeuvre.

Alors, j'en profite pour dire que c'est très important, et ça rejoint, à ce moment-là, la question qui est soulevée par Mme Lacoste sur le milieu hospitalier, donc c'est très important, quand elle dit effectivement... qu'elle fait état de son expérience dans le milieu hospitalier.

Et, là-dessus, peut-être que je lui poserais la question: Est-ce que les dispositions qui touchent les sociétés d'État ? je vous demanderais de faire le parallèle ? est-ce que justement elle pense qu'il pourrait y avoir un travail à faire? Parce que c'est un sujet qui n'est pas formellement touché. On le sait, il y a des dispositions particulières pour les nominations pour les conseils d'administration des hôpitaux, des commissions scolaires, aussi, qui ne sont pas directement touchés par ça, qu'on a délibérément exclus puisqu'il s'agit d'une dynamique différente, prévue dans d'autres dispositions législatives. Comment vous réagissez à cette possibilité justement d'élargir ces dispositions ou d'élargir le débat pour couvrir éventuellement d'autres réseaux, non pas seulement dans cette parité, mais dans d'autres dispositions sur les nominations et sur les règles de gouvernance des sociétés d'État? Et particulièrement pour ce qui a trait à l'assemblée annuelle, notamment, à laquelle vous faisiez référence?

Le Président (M. Hamad): Mme Lacoste.

Mme Lacoste (Justine): Je voulais justement parler d'assemblée publique. On a laissé ce point-là un peu de côté. On va commencer par...

Alors, comme j'ai tout l'historique de Sainte-Justine, on avait, au temps de tante Justine, les bonnes dames qui se choisissaient entre elles. C'était le club. Alors, on est passé de Sainte-Justine, de 1907 à 1967, vers... de club privé à organisme gouvernemental. Quand ma mère a été nommée présidente, c'était le temps de l'assurance hospitalisation, il y a eu une mainmise du gouvernement sur les hôpitaux. Donc, elle a vécu la période où on a changé les conseils d'administration, où on lui a imposé des conseils d'administration avec des représentants nommés, représentants des médecins, représentants de toute la gamme.

Ma période a été une période qui était beaucoup, je dirais, plus rodée du point de vue gouvernemental, puisqu'on nous proposait beaucoup plus: Voici votre résolution, pouvez-vous nous la renvoyer?

Je pense qu'il y a beaucoup de similitudes entre une société d'État et les hôpitaux du point de vue gestion. M. Paillé a parlé de critères de gestion, de comparaison. Je comprends que le Montréal Children's ne veut jamais se comparer à Sainte-Justine, mais il existe effectivement un nombre de patients, un nombre de séjours. Je pense que... Dans votre politique, vous parlez de critères d'optimisation, je pense qu'il est possible partout d'avoir des critères d'optimisation. Ces critères-là peuvent être très généraux. Ce n'est pas nécessairement la rentabilité, on va beaucoup plus parler d'efficacité. Dans les hôpitaux, c'est, quant à moi, ultragéré. On contrôle, on veut contrôler le nombre de greffes, on veut contrôler le nombre de patients qui subissent telle chose, on vérifie les morts. Je pense que, partout, dans la société, on est capable de mesurer. Vive le monde des comptables! Ha, ha, ha!

Quant aux assemblées publiques, toutes les assemblées des hôpitaux sont publiques. Vous pouvez vous présenter et vous pouvez écouter; vous avez une période de questions à la fin. Je ne dirai pas que c'est le rêve de la démocratie, puisque tout est encadré, et les gens qui s'y présentent n'ont souvent pas les outils pour poser les bonnes questions, n'ont pas fait les travaux nécessaires à poser les bonnes questions. Donc, quand vous parlez d'ouvrir au public une assemblée, comme la Société des alcools, vous allez probablement avoir des questions au début, comme on en a eu dans les hôpitaux, sur: Mon enfant est mort, puis ce n'est pas juste, puis ce n'est pas... puis là la crise... Alors, vous allez avoir ce genre de réactions: Ce n'est pas correct, tout est tout croche. Mais, avec l'expérience au cours de plusieurs années, ça réussit à s'encadrer, et les gens qui se présentent ont vraiment des questions pertinentes et intéressantes.

n (11 h 20) n

Le Président (M. Hamad): M. le ministre, vous avez d'autres points? Ou d'autres collègues?

M. Audet: Bien, je peux peut-être laisser la parole à mon collègue, oui.

Le Président (M. Hamad): Oui. M. le député de Laval-des-Rapides.

M. Paquet: Merci beaucoup, M. le Président. Merci, Mme Beaudoin, Mme Lacoste. D'ailleurs, je n'ai pas la référence avec moi, mais il y a des études qui ont été faites en Angleterre, et les HEC ont fait une mise à jour ou une étude, enfin, un peu similaire au Québec, au Canada, ou en Amérique du Nord sur le fait que les entreprises où il y a un pourcentage plus important de femmes dans les conseils d'administration ont même un meilleur rendement économique. Donc, je n'ai pas la citation ou la référence avec moi ? ça m'est venu à l'esprit tout à l'heure en vous écoutant ? mais je pense que c'est important de le mentionner, là, pour les gens qui nous écoutent, parce que parfois les gens vont dire: Bien, pourquoi ça changerait quelque chose? Ça peut changer quelque chose de ne pas laisser de côté justement personne qui... des gens qui ont une expérience, l'expertise et parfois un angle différent pour regarder les problématiques de gestion d'une entreprise. Et je pense que, là-dessus, ça démontre l'importance comme société. Il y a des progrès importants de faits, il y en a à faire, puis je pense que la démarche qui est amorcée dans le cadre de l'énoncé de politique et dans les faits depuis quelques mois est une étape importante, là, qui mérite de continuer à être propagée et être réalisée.

Une des questions par rapport... Je reviens à la question de l'assemblée générale. Parce qu'effectivement je pense que, sur l'idée de dire... avoir une tribune où les gens peuvent poser des questions en tant qu'actionnaires, dans le fond, de sociétés d'État, je vois l'intérêt d'y aller... de faire quelque chose de ce type-là. La problématique que je peux voir... Enfin, je pose la question, là, je n'ai pas d'idée ferme là-dessus, là... Dans le cas d'un hôpital, par exemple, effectivement il y a des cas, parfois des cas d'une personne, d'une famille, d'un individu qui vont arriver là, qui vont être mentionnés, puis c'est des situations qui sont dramatiques, puis c'est important que ces gens-là puissent s'exprimer, mais à la différence, si je ne m'abuse, c'est qu'on ne voit pas généralement, au niveau des centres hospitaliers ou des CSSS, maintenant, des enjeux nationaux qui reviennent, par exemple, ou de négociations, négociations, par exemple, avec les employés de la fonction publique ou des employés du réseau de la santé... Parfois, ça va venir teinter un peu les questions, mais généralement il y a d'autres forums où ça se produit.

L'inquiétude qu'on pourrait avoir ? et j'aimerais ça avoir un peu votre opinion là-dessus ? c'est que, dans le cadre d'une assemblée générale, par exemple, d'un organisme, une situation donnée, il pourrait arriver qu'effectivement ça devienne un peu une occasion justement du spectacle sons et lumières qui pourrait se produire, d'un groupe, d'un groupe ou l'autre, d'utiliser ce forum-là pour monopoliser le débat, la discussion... non pas que ces questions-là ne soient pas pertinentes, et parfois elles ont un impact bien sûr sur la gérance, la gestion des sociétés d'État, mais les questions plus, à proprement parler, de gestion elle-même, d'objectifs, de résultats qui sont attendus, ça pourrait être un peu minimisé par rapport à des enjeux nationaux. C'est un peu la crainte que je vois. Est-ce que vous avez des idées sur comment on pourrait pallier ce risque? On ne peut pas couvrir tous les risques, hein, on ne peut pas s'assurer complètement, mais comment est-ce qu'on pourrait encadrer ou faire en sorte, là, d'éviter qu'on tombe dans des répétitions de spectacles sons et lumières d'un groupe ou de l'autre?

Le Président (M. Hamad): Mme Lacoste.

Mme Lacoste (Justine): Je dirais qu'il y a une tradition, si on le compare aux assemblées publiques des compagnies, qui existe. On a vu que M. Michaud a dérangé carrément les traditions de la belle assemblée: On est tous d'accord puis on est tous beaux. Dans une assemblée publique, il faut bâtir une tradition, il faut encadrer les interventions, il faut dire aux gens qu'il y a une procédure, qu'il y a du temps pour parler, qu'ils ont tant de... Il faut vraiment les encadrer. Actuellement, je suis impliquée dans la survie de mon centre de tri, à Rivière-Rouge: on veut fermer le centre de tri. C'est une régie intermunicipale, et je me présente à toutes les assemblées mensuelles, et il y a une période de questions de la population à la fin de l'assemblée. Ces questions-là ne sont pas mises au procès-verbal, elles ne sont pas notées, alors on revient, d'assemblée en assemblée, en disant: Nous avons un problème, on vous en a parlé, qu'est-ce que vous avez fait? Puis on nous répond: On va s'en occuper. Donc, il y a vraiment une réflexion à faire sur ce que vous voulez avoir comme information. Parce qu'il faut que ce soit bénéfique, cette information-là, ce n'est pas une espèce d'affaire sons et lumières, relations publiques, puis tout le monde s'en va chez eux. Faut donc savoir si vous avez des points sur lesquels vous pouvez gagner de l'information, si ça va améliorer la gestion.

Vous allez parler, si on parle de la Société des alcools, dont on parle tout le temps, vous allez parler aux clients possiblement, aux distributeurs, aux restaurateurs, peut-être que, dans cette réflexion-là, la gestion, les gens de la direction vont apprendre quelque chose, mais il y a une belle réflexion à faire sur ce qu'on veut tirer de ces assemblées et l'encadrement.

Le Président (M. Hamad): Il reste 30 secondes, question et réponse incluses.

M. Paquet: Bien, merci beaucoup. Et effectivement le point de la question n'est pas non plus d'éviter qu'il y ait du dérangement à l'occasion, là, puis, je veux dire... puis, s'il y a des questions pertinentes ? parfois des bonnes questions peuvent déranger, puis les moins bonnes aussi ? mais je pense que... en tout cas je vois dans quelle optique vous nous encouragez à réfléchir. Merci.

Le Président (M. Hamad): Ce n'est pas une question? O.K. Vous avez 15 secondes, question et réponse incluses.

M. Bernier: M. le Président, c'est peut-être aussi bien de passer la parole à quelqu'un d'autre, là!

Le Président (M. Hamad): Oui. Alors, on va passer la parole au député de l'opposition, M. le député de Rousseau.

M. Legault: Oui. D'abord, bonjour, Mme Lacoste. Encore une fois, bravo pour ce que vous et votre famille avez fait pour Sainte-Justine, hein, ceux qui ont des enfants...

Mme Lacoste (Justine): Nous avons été tous les deux dans l'aviation.

M. Legault: Aussi, oui, c'est ça, donc on s'est déjà rencontrés ailleurs. Et puis, même chose aussi, Nicole Beaudoin, bonjour. Non seulement collègue C.A., mais aussi collègue d'études, donc on a étudié ensemble. Donc, il me fait plaisir de vous revoir toutes les deux.

Écoutez, d'abord peut-être pour commencer, revenir sur un peu l'objet principal de votre mémoire qui est le fait de dire que, bon, vous êtes d'accord avec l'objectif qui est fixé, d'ici cinq ans, d'avoir une parité hommes-femmes sur les conseils d'administration des société d'État. Vous avez sûrement pris connaissance que certaines personnes, incluant le groupe qui va vous suivre, pensent que ça va être difficile de le faire. Bon, ce n'est pas mon cas; moi, je pense qu'il y a assez de femmes compétentes au Québec pour y arriver, mais je me disais: Quels sont les moyens qui pourraient être ? et puis peut-être ça pourrait peut-être même d'utiliser les services du réseau ? quels sont les moyens que vous pourriez mettre à la disposition du ministre et des sociétés d'État pour s'assurer justement qu'il va y avoir suffisamment de candidatures pour prendre les postes, là, qui devront être pris pour atteindre la parité de 50 %, là? Je veux essayer d'entendre vos réponses à ceux qui ont dit que ça serait difficile de le faire.

Le Président (M. Hamad): Mme Beaudoin.

Mme Beaudoin (Nicole): Bon, bien je peux peut-être répondre à ça. Je pense que ce qui est très important quand on veut faire un changement quelconque, peu importe dans une société ou dans une compagnie, ça commence par une volonté de vouloir le réussir. Ça fait des années qu'au réseau on a un comité pour faire nommer des femmes, on a 2 500 membres, il y a des femmes là-dedans qui ont des années d'expérience, et on a beaucoup de jeunes, on fait beaucoup de mentorat, coaching entre nous pour essayer d'évoluer, les femmes sont prêtes, elles dirigent des entreprises ? moi, je parle plus des femmes d'affaires ? elles ont des postes importants. Ce qui manquait, c'est du côté de la demande. Parce qu'il y en a énormément... Moi, j'ai une base de données de 300 femmes, parmi mes 2 500, qui sont prêtes à aller sur des conseils d'administration de différentes entreprises.

Souvent, on a des demandes, beaucoup de demandes pour des organismes sans but lucratif. À ce moment-là, on va dans la base, c'est selon les intérêts, si c'est un théâtre ou si c'est quelque chose de plus économique, on va les chercher dans la base de données selon les critères demandés. L'offre, elle est là depuis longtemps, et tout ce que les femmes attendent, c'est qu'on aille les chercher, qu'on leur demande. Elles sont prêtes. Vous savez, il y a des femmes, au réseau, qui ont 50, 60 ans, elles ont des années d'expérience, il y a des femmes extraordinaires qu'on met en évidence avec notre concours et elles n'attendent que d'être demandées.

n (11 h 30) n

On peut vous aider si vous voulez aller les identifier ? on ne donne pas notre base de données parce que c'est confidentiel ? on a les C.V. de ces femmes-là, on a les C.V., on les connaît. Étant donné que le réseau a 25 ans, il y en a que ça fait 25 ans qui sont dedans puis il y en a d'autres, ça fait 10 ans et 15 ans. On fait plein d'activités de formation, de coaching, on a des mini-réseaux, qu'on appelle des cellules d'entraide, on connaît notre monde. Et, si on réfère quelqu'un pour un conseil d'administration quelconque, vous pouvez être certain qu'on a une certaine validation, parce qu'il y a une caution morale qu'on va mettre en arrière. On ne donnera pas le nom de quelqu'un qui n'est pas prêt et qui n'a pas les qualifications.

Et les femmes sont souvent reconnues pour essayer d'être trop compétentes avant de vouloir faire quelque chose. Mais ce qu'on a réussi avec les 25 ans du réseau, je pense que les femmes ont beaucoup plus confiance en elles. Elles étaient capables, là, mais on dirait que... Elles n'étaient pas nécessairement sûres que tout était pour bien aller. On a assez d'expérience, on le sait, qui est prêt. Et on va faire du coaching et du mentorat à ces femmes-là pour les aider si elles ont moins d'expérience. Mais, pour demain matin, si vous demandez 50 noms, je vais vous les donner.

M. Legault: O.K.

Mme Beaudoin (Nicole): Sur mes 300, là.

M. Legault: Donc, j'espère que le ministre des Finances a pris bonne note de la suggestion puis de l'offre de services. Donc, Mme Beaudoin, vous nous dites que vous auriez une liste donc de noms, pour s'assurer qu'il n'y ait pas de problème à recruter des femmes compétentes pour occuper des postes.

Mme Beaudoin (Nicole): Exact. Dans les différentes régions et dans différentes professions. Il y a des comptables, des avocates, des gens en ressources humaines, des gens en marketing, petite entreprise, grande entreprise. On a de tout, nous autres. Il y a 400 types d'entreprises dans le réseau.

M. Legault: O.K. Je voudrais revenir sur... Vous étiez peut-être là, je pense vous étiez là quand on a eu la discussion avec Daniel Paillé sur toute la question d'évaluation de l'efficacité des sociétés d'État, qui sont, entre autres, des monopoles. Donc, une situation où il n'y a pas de compétition, là.

Je voudrais vous entendre. Tantôt... Une des deux ou les deux. Mme Lacoste, vous disiez tantôt que, bon, on peut bien faire une assemblée des actionnaires, mais d'abord il faut savoir poser les bonnes questions. Puis c'est un peu comme au conseil d'administration à Sainte-Justine ou ailleurs: à un moment donné, on est limité pas juste par notre compétence, notre formation, mais par l'information qu'on a, pour poser les bonnes questions à ceux qui dirigent les établissements ou les sociétés d'État. Donc, je voudrais savoir un petit peu, là... Bon, on a parlé tantôt un peu du rôle qu'on pourrait donner au Vérificateur général avec de la vérification d'optimisation, mais ça peut être aussi quelqu'un de l'extérieur. Comment peut-on mettre en place un mécanisme pour s'assurer que les administrateurs et aussi l'Assemblée nationale reçoivent assez d'information pour pouvoir poser les bonnes questions, à savoir si nos sociétés d'État, qui sont importantes ? on a juste à penser à Hydro-Québec, là, c'est l'État dans l'État ? comment s'assurer que justement c'est géré d'une façon efficace et puis que les gains d'efficacité qu'on pourrait faire, bien, qu'on va les chercher le plus rapidement possible?

Le Président (M. Hamad): Mme Lacoste.

Mme Lacoste (Justine): J'ai donné des cours aux dirigeants, dans le cadre des HEC, avant la formation de l'institut de la gouvernance, et vraiment la pierre sur laquelle repose l'édifice, c'est la planification stratégique.

À partir de la planification stratégique, on peut développer des indicateurs de gestion et, à partir de là... qui ne sont pas nécessairement tous comptables, malheureusement, mais qui peuvent donner, là où les dépenses sont faites: est-ce pertinent avec la mission et l'objectif de l'entreprise?

Je vous donne un exemple farfelu. Si Hydro-Québec décide de venir installer chez nous une centrale électrique, c'est peut-être une dépense qui, dans les livres comptables, a l'air tout à fait régulière par rapport aux autres dépenses d'Hydro-Québec, c'est dans le même sens, mais, la raison d'être d'une centrale électrique chez moi, il n'y en a pas. Donc, à partir de la planification stratégique, d'essayer de se demander: Est-ce que les dépenses qui sont faites, est-ce que nos investissements qui sont faits vont vraiment dans la ligne de pensée qu'on veut pour la mission?

Là où il y a le plus de dérapages, quant à moi, dans les entreprises, c'est dans recherche et développement. On va rechercher et développer. Il y a des petits fiefs qui se développent à l'intérieur des entreprises, puis on va développer toutes sortes d'affaires parce qu'on s'amuse beaucoup puis il y a un beau budget.

Mais, si on reprend l'orientation de l'entreprise, qu'on y fait des critères de gestion, on arrive à développer une connaissance qui peut être montrée publiquement, qui peut être expliquée publiquement, puisqu'on n'est pas dans des chiffres comptables sophistiqués mais bien dans des réalités d'entreprise. Donc, je le vois... Et le Vérificateur général pourrait, à ce moment-là, beaucoup plus regarder ce qui vient en dessous de l'objectif qu'on a fixé dans notre planification stratégique.

Le Président (M. Hamad): M. le député de Rousseau.

M. Legault: Oui. Si je vous donnais un exemple concret, là, qui est un exemple, qui n'est pas factuel, quelque chose, comme vous dites, de farfelu: Disons que, pour faire une réparation, les gens d'Hydro-Québec, au lieu d'envoyer deux techniciens, en envoient trois à chaque fois. O.K.? Donc, ils ne sont pas efficaces, ils pourraient le faire avec deux puis ils le font avec trois. O.K.? Comment on fait, comme administrateur, pour s'assurer si la société d'État est gérée d'une façon efficace? C'est dans ce sens-là que je vous pose ma question.

Mme Lacoste (Justine): O.K. Si vous prenez les règles de Sarbanes-Oxley, la façon de justifier sa comptabilité, par rapport à Sarbanes-Oxley, on peut de la même façon avoir des indicateurs de gestion qu'on va justifier d'échelon en échelon, c'est-à-dire qu'on va développer des critères de mesure pour trois par rapport à deux dans les coûts, puis, après ça, ça va être contrôlé par le niveau supérieur, et il faut remonter dans l'organisation. Les critères, il peut y avoir des critères... Les critères qui sont adoptés du plan stratégique doivent être descendus à l'intérieur de l'organisation jusqu'à la dernière personne qui y travaille. Tout le monde devrait avoir un critère d'efficacité.

M. Legault: Peut-être une dernière question, je vais laisser la parole à mon collègue, là. Mme Beaudoin, vous qui êtes comptable agréée, donc qui avez été vérificateure, qu'est-ce que vous pensez que devrait être le rôle du Vérificateur général ? entre autres, je parle toujours, là, d'efficacité puis d'optimisation ? dans les sociétés d'État comme Hydro-Québec ou la SAQ?

Mme Beaudoin (Nicole): Je pense qu'il devrait regarder la situation de façon globale et non pas juste les chiffres. On a appris, comme comptables, de ne pas seulement regarder les chiffres, il faut parères à les lire, les chiffres, à savoir qu'est-ce qu'il y a dedans. mais regarder la vérification de l'ensemble. Je ne me souviens pas comment on appelait ça, une vérification globale?

M. Legault: Optimisation.

Mme Beaudoin (Nicole): D'optimisation. Parce que, juste regarder des chiffres, ce n'est pas assez. Il faut regarder l'ensemble, comment ça s'intègre dans les autres autour, comment ça se compare. Il ne faut pas regarder ça de façon étroite, là, parce que, si c'était juste ça, être comptable agréé, je ne voudrais pas l'être. Il faut regarder de façon large la situation, l'historique, où on s'en va, comparer avec d'autres, faire du «benchmarking», un peu de tout, là. C'est un ensemble qu'il faut regarder.

Le Président (M. Hamad): Oui, M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: Bonjour.

Mme Beaudoin (Nicole): Bonjour.

M. Lelièvre: Mme Lacoste et Mme Beaudoin, je regardais la progression que vous avez effectuée par rapport à il y a 25 ans. Est-ce que vous avez des antennes dans toutes les régions du Québec, au niveau du Réseau des femmes d'affaires?

Mme Beaudoin (Nicole): Nous ne sommes plus dans les régions ressources. Par contre, nous travaillons avec les femmes qui ont des fonds régionaux dans les régions ressources. Mais nous sommes dans 12 régions sur les 17 régions du Québec, autour des grandes villes en fait, autour des grands centres.

M. Lelièvre: Et qu'est-ce qui a amené votre départ des régions ressources? Vous dites que vous n'êtes plus dans les...

Mme Beaudoin (Nicole): Elles ne sentaient pas... Il n'y avait pas le sentiment d'appartenance par rapport à la centrale, à Montréal. Mais là, je pense qu'elles sont en train de revenir, parce qu'une chose qui aide beaucoup, c'est les nouvelles technologies de la communication. Ça fait que la personne qui était à Sept-Îles, là, c'était peut-être un peu difficile de voir tout ce qui se passe, mais maintenant on a un site Internet, on fait de la... on va éventuellement faire de la formation à distance, du coaching à distance. Et, avec les fonds régionaux et le centre, toutes ces femmes-là, on se rencontre maintenant, parce qu'on est complémentaires pour donner les services en région. On se déplace pour aller en région. On aimerait bien, là, d'ici un an ou deux, refaire en fait ce grand réseau à travers toutes les régions du Québec.

n (11 h 40) n

M. Lelièvre: C'est parce qu'en région il y a des femmes d'affaires, je pense à Mme Verreault, en Gaspésie; d'autres qui sont situées sur le territoire qui... d'autres qui gèrent des hôpitaux également. Donc, il y a des gens qui ont la capacité de siéger sur des conseils d'administration.

Mais, si vous aviez la possibilité... Par exemple, tout à l'heure, le ministre nous disait: Les recommandations arrivent au bureau, à mon bureau, on n'a pas le choix. Alors, je pense qu'il y a des solutions à trouver de ce côté-là. Il n'a presque pas le choix de refuser la candidature qui est présentée. Et, par rapport à la parité qu'on souhaiterait obtenir entre les hommes et les femmes, moi, je dis que ce n'est un secret d'État, je pense que le gouvernement, et tous les gouvernements l'ont fait antérieurement, nomme des personnes à l'égard desquelles ils ont une confiance absolue, alors donc... mais ils peuvent aussi avoir confiance envers les femmes et de faire en sorte que, si on exclut la partisanerie politique, là il peut y avoir des comités de sélection. Quand les réseaux disent: Bon, bien, nous, on vous recommande telle personne, on a déjà vu des sociétés d'État... des personnes qui n'avaient aucune qualification... pas des femmes, je parle, là, des hommes qui étaient là qui n'avaient pas les qualifications, mais ça a été des nominations politiques dans le passé, dans les années quatre-vingt, dans les années soixante-dix. On ne remontera pas à 1960, ce serait encore plus dramatique. Mais on voit que de plus en plus les femmes prennent leur place, siègent sur des conseils d'administration et apprennent à gérer, apprennent avec d'autres femmes comment ça se passe, ça.

Et ma deuxième question, c'est: Quand vous dites que vous faites du coaching en ville, ou dans les grands centres, ou dans les régions autres que les régions ressources, avez-vous des forums où les femmes peuvent se rencontrer, discuter régulièrement?

Mme Beaudoin (Nicole): À l'intérieur du réseau ? nous avons 12 régions actives ? il y a au moins une activité par région par mois. À Montréal, il y a une activité au moins par semaine. En plus, on a une quarantaine de clubs, un peu comme des clubs de cercles d'entraide, qui se rencontrent une fois par mois. Ça fait qu'en fait, au niveau du réseau, il y a peut-être 150 activités par année. Et, quand on prend un thème comme celui-là, c'est certain qu'on va aller faire le tour des régions pour leur dire: Bien, écoutez, on est allés faire une présentation à la commission, on veut continuer à ramasser les C.V., puis on va s'organiser avec un plan de communication pour que vous ayez l'information sur toutes ces femmes extraordinaires qui sont à travers le Québec, et on va être bien contents de voir quand elles vont être nommées.

M. Lelièvre: Ah, j'espère qu'on...

Le Président (M. Hamad): M. le député de Gaspé, c'est complété. M. le député de Gaspé, c'est terminé, on a fini le bloc.

M. Lelièvre: Le temps est déjà terminé?

Le Président (M. Hamad): Oui, malheureusement.

M. Lelièvre: Alors, au plaisir de vous rencontrer en Gaspésie.

Le Président (M. Hamad): Alors, Mme Beaudoin, Mme Lacoste, merci beaucoup. Merci de votre présentation. On va suspendre quelques secondes.

(Suspension de la séance à 11 h 42)

 

(Reprise à 11 h 45)

Le Président (M. Hamad): On va reprendre pour pouvoir terminer à 12 h 30. Alors, M. Durand, bienvenue. Je vous invite à s'identifier et à présenter votre mémoire. Vous avez 15 minutes pour votre présentation, et après ça il y a une période de questions, côté ministériel, 15 minutes, et côté opposition, 15 minutes.

Jarislowsky Fraser ltée

M. Durand (Denis): M. le secrétaire de la Commission parlementaire des finances publiques, alors mon nom est Denis Durand, je suis associé principal de la firme Jarislowsky Fraser ltée. La commission a déjà entendu au préalable le président du conseil d'administration de Jarislowsky Fraser ltée, M. Stephen Jarislowsky. Je remercie la commission de nous donner cette occasion en fait de nous exprimer sur certains points du document intitulé Moderniser la gouvernance des sociétés d'État, et on applaudit évidemment l'initiative qui a été prise en fait d'adapter la direction des sociétés d'État et la direction des conseils d'administration, les conseils eux-mêmes, aux nouvelles exigences en fait qui ont déjà été demandées au secteur privé.

Cependant, dans le mémoire, puisqu'on a simplement une quinzaine de minutes, on a souligné certains points qui suscitent chez nous un peu d'inquiétude. Étant donné que favoriser une gestion qui réponde à des critères exigeants de transparence, d'intégrité et de responsabilité, et ce, afin d'assurer la performance attendue des entreprises du secteur public, va nécessiter en fait la nomination ou en fait la promotion d'individus qui... ? et on parle plutôt en particulier des sociétés... des six premières sociétés à caractère financier et commercial ? donc de nommer des administrateurs qui vont détenir la compétence et l'expérience nécessaires pour les sociétés de cet ordre.

Cependant, lorsqu'on poursuit dans le document, on réalise qu'il est mentionné que le gouvernement édictera des règles publiques visant à assurer une représentativité des différentes composantes de la société québécoise au sein des conseils d'administration des sociétés d'État et s'assurera que, d'ici cinq ans, les conseils d'administration des sociétés d'État soient constitués à parts égales d'hommes et de femmes. En fait, dans cette affirmation, ce qui nous inquiète un peu, c'est que cette affirmation vient avant d'édicter en fait les critères qu'on va attribuer pour qu'on puisse nommer des administrateurs indépendants. Ces critères-là en fait sont mentionnés à la page 18. On veut avoir des gens qui n'ont pas en fait été à la tête de soit de sociétés... c'est-à-dire n'ont pas travaillé pour le gouvernement au cours des trois dernières années, des gens qui n'ont pas de contrat, de conflit d'intérêts avec le gouvernement, donc n'agissent pas comme fournisseurs pour le gouvernement. Alors, inutile de vous dire qu'étant donné la place de l'État au Québec on vient d'éliminer une grande partie d'administrateurs compétents qui pourraient accéder en fait à des postes d'administrateurs de ces sociétés d'État.

Alors, comme on veut nommer également, à la rigueur, à l'extrême, en fait disons les deux tiers de chacune des sociétés, que ces deux tiers-là soient des membres indépendants, alors... et que chacune des sociétés d'État va comprendre entre neuf et 15 membres, alors, si on prend une moyenne, ça veut dire qu'il faut trouver 72 membres indépendants des sociétés d'État, si on admet qu'un membre ne pourra être, par exemple, membre du conseil d'administration de deux sociétés d'État.

n (11 h 50) n

Alors, là où ça nous inquiète un peu, c'est que le premier critère donc de représentativité des différentes composantes de la société québécoise, si on ajoute à ce suivi-là la part égale d'hommes et de femmes, en fait est-ce que le gouvernement veut mentionner que les premiers critères importants, c'est ceux-là, et que ceux de la compétence et de l'expérience vont être subordonnés à ces critères-là, ou si vraiment, pour moderniser la gouvernance des sociétés d'État, le premier critère devrait être la compétence et l'expérience absolues des candidats, leur indépendance, pour qu'on ait au sein des sociétés d'État finalement des membres vraiment indépendants, vraiment compétents, et qu'on ne devrait peut-être plus mentionner que ces critères-là de représentativité, lorsqu'on parle de finances, de commercialisation, en fait d'ingénierie, si on veut dire... que ces critères-là soient plutôt représentés comme des objectifs à atteindre et non pas, dans l'énoncé de politique, comme il est mentionné, qu'on doit s'assurer absolument que, d'ici cinq ans, entre autres, il y ait une représentativité absolue des composantes de la société québécoise et qu'on soit rendu à parts égales, hommes et femmes, que ces deux critères-là soient plutôt des objectifs visés, en fait qu'on aimerait réaliser, et que ce soit plutôt le premier objectif d'avoir des membres indépendants, expérimentés et compétents, c'est ce qui devrait en fait orienter l'action du gouvernement?

Pourquoi on mentionne ça? C'est parce que c'est déjà difficile, à l'intérieur des sociétés publiques, transiger sur les marchés publics. Il y a une progression, on doit admettre qu'il y a une progression. Que ce soit en fait la répartition entre hommes et femmes, que ce soit au niveau de la représentativité des groupes à l'intérieur d'une même société, il y a eu, au cours des dernières années, une progression énorme. Et, lorsqu'on cite, par exemple, qu'à l'heure actuelle le président, par exemple, de la société Coca-Cola, une des plus grandes entreprises aux États-Unis, est une femme, on a vu que Hewlett-Packard également a eu à sa tête non seulement une femme, mais deux femmes, on réalise que les plus grandes sociétés en fait publiques dans le monde maintenant sont accessibles, et leurs conseils d'administration également sont accessibles aux femmes et même aux membres de communautés en fait plus minoritaires dans l'ensemble d'une société.

Donc, je ne pense pas que ce soit en fait quelque chose qu'on doive légiférer absolument pour obtenir une représentativité, et que ce qui est important, c'est donc l'expérience, la compétence. Et ce serait vraiment dommage en fait qu'on minimise en fait l'apport de groupes sociaux, de groupes géographiques ou de groupes d'hommes et de femmes en voulant absolument réaliser ces objectifs-là, et que finalement on place des gens qui ne sont pas prêts, encore prêts à assumer des postes comme ça, qu'on les place dans des situations difficiles parce qu'il faut absolument réaliser ces deux objectifs-là.

Dernièrement, aussi il va falloir se rendre compte aussi, également, que l'objectif même de moderniser la gouvernance des sociétés d'État, pourquoi on mentionne ces choses-là?, bien il ne faudrait pas non plus que ce soit tellement ouvert qu'on retombe dans les vieilles habitudes et que, sous le couvert de la représentativité et de la séparation hommes-femmes, que finalement on assiste encore à des nominations politiques.

Alors, je vous remercie de votre attention.

Le Président (M. Hamad): Merci. M. le ministre.

M. Audet: Alors, merci beaucoup, M. Durand, que je salue, et quelqu'un que je connais de longue date effectivement et avec qui on a déjà eu l'occasion de parler de plusieurs sujets reliés justement à la gouvernance.

J'avoue cependant être un petit peu surpris des propos tenus par M. Durand, dans le sens qu'on n'a jamais mentionné, d'aucune façon, et je pense que ce ne serait pas conforme aux intentions d'un gouvernement... de dire que les critères de compétence passeront en second. Les critères de compétence vont toujours être là, et c'est fondamental, sauf qu'on dit: Parallèlement, il faut qu'il y ait des critères de représentativité. Donc, les deux doivent être gérés simultanément. Donc, je pense que c'est important de le dire, parce que ce n'est pas... il ne s'agit pas de dire que l'un va avoir nécessairement préséance sur l'autre, puisqu'effectivement l'objectif, c'est de rendre nos sociétés d'État... avoir donc des sociétés d'État qui ont des gestionnaires et des conseils d'administration justement plus compétents. Donc ça, on n'a pas d'hésitation là-dessus. Mais je pense que l'idée de dire: L'un passe avant l'autre, je pense que ce n'est pas l'intention. Je pense que l'intention, c'est de dire: À l'intérieur, donc, oui, nous regarderons la compétence, mais nous fixons comme objectif effectivement, globalement, et ça, c'est très important, je pense qu'il faut le dire parce que c'est peut-être un peu... il y a peut-être un peu de confusion là-dessus, l'objectif n'est pas de faire en sorte, si vous avez un conseil d'administration, comme, dans certains cas, c'est neuf membres, ça va varier de neuf à 15, c'est l'objectif qu'on vise, donc dans certains cas on ajoutera des membres, parce qu'il manque actuellement, dans certaines sociétés d'État, il n'y a pas suffisamment de membres, même pour les comités.

Donc ça, ça fait partie des choses qui vont être corrigées, mais supposons... Habituellement, c'est un nombre impair. Donc, je comprends que, par la nature même des choses, il va y avoir un problème à avoir la parité ? pairs ? au sein des conseils, puisque par définition ils sont presque toujours de nombre impair.

C'est pourquoi l'objectif, c'est de dire «globalement». J'ai donné tantôt des chiffres globaux, justement, d'hommes et de femmes, et l'augmentation qu'on a connue, dans les prochains mois, c'est l'objectif de faire en sorte que globalement on atteigne cet objectif-là dans cinq ans. Je pense que c'est important de préciser les choses et non pas de dire «chacun des conseils», puisqu'il se peut que, pour des raisons que vous avez mentionnées, de concentration, de compétences dans certains domaines, de la durée des mandats, de toutes sortes de situations, que, dans certains cas, ils ne puissent pas l'atteindre formellement, dans d'autres cas, on va le dépasser. Donc, l'objectif, c'est un objectif global, touchant donc l'ensemble des sociétés d'État visées.

Donc, je pense que c'est une précision qui est importante à apporter, comme celle d'ailleurs de la compétence. Et je pense que, là-dessus, je suis sûr que vous ne vouliez pas inférer que les femmes pouvaient être moins compétentes que les hommes, ce n'est certainement pas votre intention, mais il ne faudrait pas donner cette image-là, puisque ce n'est pas notre perception en tout cas. Il y a effectivement des femmes davantage qui sont disponibles pour le faire, on l'a entendu tout à l'heure.

La question qui se pose ? et peut-être que c'est là que je voulais vous amener ? c'est que vous travaillez beaucoup dans le secteur privé. Tantôt, M. Paillé a donné... a fait beaucoup de parallèles avec le secteur privé. Je vous pose la question: Est-ce que ce n'est pas quand même... Puis, nous, on peut le faire dans ce secteur-là, puisque le gouvernement a un certain rôle à jouer là-dedans. C'est évident que, dans le secteur privé, c'est plus difficile, mais est-ce qu'une politique semblable ? puis c'est notre, finalement, souhait dans le fond qu'on exprime là ? pourrait avoir des incidences sur le secteur privé?

Vous dites... tantôt, effectivement, vous donniez l'exemple de Coca-Cola, l'exemple donc de certaines compagnies qui ont déjà fait ça, mais est-ce que finalement le signal qu'on veut donner par ça peut quand même avoir une incidence sur les entreprises du secteur privé? Et est-ce qu'il n'y a pas lieu de travailler justement, un peu comme l'a proposé tantôt le Réseau des femmes d'affaires ou d'autres réseaux qui viendront s'exprimer, Mentorat Québec notamment, pour développer... ou encore les Women in the Lead, le groupe qui va également... que Mme Corriveau représente, qui va venir demain, donc va nous expliquer justement qu'il y a des compétences, il faut mieux les connaître, il faut mieux les évaluer... Est-ce qu'il n'y a pas un travail à faire, plutôt que de dire en partant: C'est quelque chose d'inatteignable et qui va créer des conflits? En fait, c'est un petit peu... ce qui m'agace un petit peu dans la présentation.

Le Président (M. Hamad): M. Durand.

M. Durand (Denis): Merci. Je pense qu'effectivement il va falloir qu'il y ait en fait un travail commun entre le secteur privé et le secteur public. On exige, suite en fait à l'apparition des lois Sarbanes-Oxley et 195, en Ontario... en fait les critères sont beaucoup plus sévères. Ça demande beaucoup plus d'efforts, de travail de la part des administrateurs. Autrefois, on disait qu'un retraité, par exemple, qui avait oeuvré dans le secteur privé pouvait facilement occuper 11 ou 12 postes différents de conseils d'administration. On juge maintenant que, étant donné le travail, la participation à des comités, la préparation, un retraité à temps plein peut s'occuper peut-être de cinq conseils d'administration. Alors, vous pouvez vous imaginer qu'on vient en fait de réduire le nombre de personnes disponibles en fait pour occuper des conseils d'administration.

Si on ajoute à ça, maintenant, les sociétés de la couronne ou les sociétés d'État, bien là on réalise qu'on va devoir frapper aux mêmes portes assez souvent, et que donc il faudrait que, du côté du secteur privé, il n'y ait pas une espèce de laisser-faire en fait, de dire: Bien, des postes de conseil d'administration dans les sociétés d'État, c'est moins prestigieux que dans des sociétés à caractère privé, ou c'est moins payant, et qui est le seul critère finalement de la rémunération. Je pense que, du côté du secteur privé, il y a des gens qui sont prêts, même s'il n'y a pas de programmes dits d'options ou de choses comme ça, ce qui a tendance à disparaître du côté des sociétés privées, bien, qu'il n'y ait pas en fait de personnes rébarbatives du côté du secteur privé à occuper des postes sur des conseils d'administration du secteur public.

n (12 heures) n

Bien entendu, c'est plus limité lorsqu'il n'y a absolument aucune rémunération, parce qu'étant donné la préparation ? on va exiger en fait la même préparation de ces administrateurs-là ? bien il faut ajouter aux heures où on siège, il faut ajouter la préparation. Donc, quelqu'un qui se présente, ça va être très coûteux, ou ça demande en fait un effort certain. Donc, la rémunération doit être faite en fonction de ce qu'on demande à ces administrateurs-là, ces administrateurs-là sachant très bien qu'il y aura peut-être des bénéfices qui sont des fois disponibles dans le secteur privé qui ne seront pas disponibles dans le secteur public. Mais il faudrait qu'il y ait un travail commun qui soit fait entre les deux pour que ce soit valorisé, au niveau du secteur privé, d'avoir occupé des postes sur des conseils d'administration dans le secteur public. Et c'est seulement quand on va pouvoir défendre ça, valoriser ça finalement qu'on va avoir des administrateurs très qualifiés qui vont passer d'un à l'autre, soit occuper un poste dans le secteur public, occuper un poste dans le secteur privé.

Le Président (M. Hamad): M. le ministre.

M. Audet: Oui. Je voudrais peut-être aborder un autre aspect, puisque vous l'avez mentionné. M. Jarislowsky notamment a été très, très présent dans toute la question de la gouvernance, donc, au-delà de la question que vous avez soulevée dans vos notes relativement à la représentation féminine, il y a quand même, dans la proposition gouvernementale, beaucoup de propositions concernant l'amélioration de la gouvernance. Est-ce que... vous n'évoquez pas ça dans votre présentation. Est-ce que vous pourriez faire des... Est-ce que vous considérez, là-dessus, que c'est des... qu'il y a des choses, des améliorations à faire? Est-ce que c'est suffisant? Parce que je sais que Stephen Jarislowsky, je dois dire, est un ténor sur la place publique en cette matière. Parfois, il y va même avec des propos assez forts, même.

Alors donc, vous avez travaillé beaucoup avec lui dans ce sujet-là. Est-ce que la démarche qui est proposée, même en tenant compte que c'est dans des sociétés d'État, est-ce qu'elles vont dans la bonne direction?

M. Durand (Denis): M. le ministre, je pense que le document le démontre. Ça va exactement dans la bonne direction. Là où en fait ça va être difficile, c'est quand on va commencer à mettre en application tout ce programme-là.

On dit d'ailleurs dans le document que les administrateurs nommés vont participer, lorsqu'il y a élection d'un nouvel administrateur, vont participer finalement au choix ou donner leur accord au choix des nouveaux candidats qui sont proposés au conseil d'administration. Donc, il va y avoir un apport et des membres du conseil d'administration et du gouvernement.

Il se peut qu'au départ en fait on se trouve à nommer beaucoup plus d'administrateurs, que le gouvernement soit beaucoup plus impliqué à nommer les premiers administrateurs au départ. À ce moment-là, il va y avoir moins d'apport, beaucoup moins d'apport de la part des membres des conseils d'administration. Là où il y a un danger, c'est que, un conseil d'administration, aussi c'est une équipe, c'est une équipe qui a un but commun en même temps. Alors, on risque peut-être, au départ, si les membres ne sont pas assez impliqués, on risque peut-être d'avoir des querelles au départ en fait, parce que c'était la première année, donc le gouvernement s'est occupé de nommer des gens qui ont plus ou moins d'affinités ou qui ont déjà été en conflit auparavant, ce qui ne serait pas idéal finalement pour les sociétés d'État, de commencer avec une atmosphère où les gens se sentent guerriers un peu. Donc, ça va être la difficulté, elle va être là au départ.

M. Audet: L'autre collègue...

Le Président (M. Hamad): Oui. Les collègues... O.K. Il n'y a pas de... M. le député de Montmorency.

M. Bernier: Merci. Plus que 15 secondes?

Le Président (M. Hamad): Bien sûr. Il y a quelques minutes, même.

M. Bernier: Dans le cadre... Moi, je reviens à votre document. Vous parlez justement, au niveau de l'indépendance et également le profil «expérimenté»...

Une voix: ...

M. Bernier: Je ne parle pas d'indépendance dans votre sens, M. le député de Rousseau; je vous laisse tout ça; vous avez l'occasion d'en discuter largement et de nous le faire savoir à de multiples ressources, à de multiples occasions.

En ce qui regarde le processus de nomination pour nommer les actionnaires, on l'a vu tout à l'heure, M. Paillé nous a parlé que ça revenait à l'actionnaire de nommer ces administrateurs d'État là. Vous, votre vision par rapport à ça, dans le but... toujours en ayant comme toile de fond, là, les critères que vous avez fait ressortir, quelle est votre position?

M. Durand (Denis): Je pense que, là-dessus, oui, il y a une intention de la part du gouvernement de consulter les administrateurs dans le processus de nomination. Mais il va de soi que l'actionnaire principal et qui détient 100 % en fait des sociétés d'État, c'est le gouvernement. Donc, le gouvernement va devoir ? et ça va être compris, je pense, aussi des autres administrateurs; va devoir ? imprimer en fait la direction en fait en termes de nominations, types de nominations. Mais c'est le gouvernement aussi qui, je pense, va en souffrir sur la place publique s'il y a évidence que ça laisse à désirer au niveau de la qualité des gens qui ont été nommés et leur expérience, de la compétence, et ainsi de suite. Donc, le gouvernement peut très bien dire: C'est nous qui choisissons tous les candidats, mais il y a une épée de Damoclès avec ça, parce que, si les gens qui seraient qualifiés, du côté du secteur privé, et qui seraient intéressés à faire partie de ces conseils d'administration là, voient que finalement on a un conseil très, très faible, ça n'attire pas les bonnes nominations non plus. Alors, le gouvernement se trouve à avoir toujours un petit peu une épée de Damoclès. Dans ce sens-là, nous, on a quand même confiance que, dans le processus, finalement le gouvernement va agir dans le meilleur intérêt, comme actionnaire, dans le meilleur intérêt des entreprises, des sociétés d'État.

Il y a des processus qui existent pour aider en fait le gouvernement à choisir des candidats, aussi, Alors, on peut faire appel à des sociétés indépendantes privées qui font une étude du caractère en fait des administrateurs qu'on veut nommer, et ce, en fait en conservant le secret auprès des gens qui ont été en fait approchés. Et, à ce moment-là, on a une assurance supplémentaire qui vient aider au choix en fait des administrateurs. Les gens vont dire: Oui, mais c'est peut-être un peu de dépenses, c'est compliqué, et ainsi de suite. Écoutez, Hydro-Québec, c'est des milliards de ventes, la Société des loteries, c'est milliards de ventes, toutes les grandes sociétés, qu'on pense également à Investissement Québec... Alors, je vais être un peu méchant, mais, pour éviter de faire un investissement de 300 millions qui fait patate dans l'industrie forestière, j'ai l'impression que ça vaut la peine d'avoir des très bons administrateurs et qui ont des antennes très, très, très bien placées dans ces secteurs-là où on veut investir. Alors donc, je ne vois pas tellement le problème au niveau du choix des administrateurs, il y a des moyens d'avoir des gens qualifiés.

Le Président (M. Tomassi): Merci à M. Durand. Il reste une minute, M. le député de Montmorency.

M. Bernier: Oui. Au niveau de la rémunération, M. Durand, en ce qui regarde la rémunération, on sait qu'au niveau des administrateurs publics, à ce moment-là, il y a un focus qui se fait très, très rapidement auprès de la population pour démontrer, bon, que le salaire est convenable ou ne l'est pas, bon, ou on s'en sert effectivement pour vendre du papier ou s'en servir pour grossir le tout. Qu'est-ce que c'est, votre position en ce qui regarde la rémunération? De quelle façon on doit rémunérer nos administrateurs publics?

Le Président (M. Tomassi): M. Durand.

M. Durand (Denis): Alors, très rapidement, je pense que la façon qui serait utilisée, c'est d'utiliser, excusez l'expression anglaise, un «retainer», donc un montant pour s'assurer que cet administrateur-là n'ira pas rechercher un autre poste plus payant ce temps-là, pendant une année, pendant deux ans, la durée d'un mandat finalement, donc n'ira pas chercher un autre mandat, si on lui dit déjà que, pour retenir finalement sa loyauté, sa fidélité, vous avez un montant forfaitaire pour une année, et à cela s'ajoute en fait, pour inciter à la présence aux réunions du conseil d'administration et des comités, bien il y a un montant également qui est attribué pour chacune des réunions. Avec un ensemble qui est relativement compétitif avec des entreprises, disons, de classe moyenne au Québec, entre moyen et grand, bien vous allez attirer suffisamment, je pense, de candidats.

Le Président (M. Hamad): Merci. Maintenant, c'est le tour du député de Rousseau.

n(12 h 10)n

M. Legault: Oui. Merci, M. le Président. Bien, je voudrais saluer M. Durand. Ça me fait plaisir de le revoir dans un autre contexte que la dernière fois. Je me sens moins évalué que la dernière fois que je le voyais. Écoutez, je vous avoue que, quand j'ai lu le document, ma première réaction, ça a été de me dire, un peu comme le ministre des Finances: Est-ce qu'on est en train de nous dire qu'il n'y a pas assez de femmes compétentes au Québec pour occuper les postes? Mais, en relisant votre document, puis je ne veux pas vous mettre des mots dans la bouche, mais je veux essayer peut-être de préciser un petit peu votre pensée, parce que, moi aussi, quand on parle des différentes composantes de la société qui devront être représentées, ça me pose beaucoup de questions auxquelles je n'ai pas de réponses, là.

Moi, je me dis, là, il y a deux choses qui sont dites dans le document: un, parité hommes-femmes et qu'elles soient compétentes, les femmes et les hommes, toutes les personnes. Mais il y a une deuxième chose aussi qu'on dit, c'est: Le gouvernement édictera des règles publiques visant à assurer une représentativité des différentes composantes de la société, puis, un peu plus loin, on veut que les administrateurs soient compétents. Ça, évidemment, ça peut être flou, ce peut être très large, «représenter les différentes composantes de la société». Moi, je suis de ceux qui pensent que la priorité doit effectivement être mise sur la compétence, entre autres l'expertise en gestion. Je voudrais vous demander, là: Est-ce que vous seriez d'accord pour dire: Effectivement, hommes-femmes, c'est une chose, mais, «les différentes composantes de la société», c'est peut-être la partie la plus floue puis la plus inquiétante du texte, là, qui est déposé?

Le Président (M. Hamad): M. Durand.

M. Durand (Denis): Exactement, je pense que vous avez mis le doigt dessus. Je ne pense pas que, un, l'un des critères, c'est-à-dire la représentation hommes-femmes, en fait ce soit exclusif de l'autre, et vice-versa également. Alors ça, pour moi, ça ne cause pas de problème. Disons que c'est plus facile du côté représentation hommes-femmes, on sait qu'il y a juste deux sexes, au moins; s'il y en avait cinq, ce serait plus compliqué! Mais, là où... au niveau des composantes, c'est: Est-ce que ce sont les composantes géographiques de la province de Québec? Est-ce que ce sont les composantes au niveau professionnel? Est-ce que ce sont les composantes au niveau communautaire? Quel type de communautaire? Est-ce qu'il faut absolument que les groupes d'aide sociale soient représentés sur le conseil d'administration, par exemple, de la société des loteries, d'Investissement Québec, et ainsi de suite? Vous avez parfaitement raison, c'est là que c'est un peu flou, et ça peut laisser en fait place à beaucoup d'interprétations, c'est très, très large.

Alors, soit qu'on mette des critères très, très, très précis pour chacune des choses et de dire, par exemple, que la représentation hommes-femmes, c'est exclusif de l'autre, et que la représentativité des composantes, c'est exclusif sur une base géographique, professionnelle, et ainsi de suite, mais là on va tomber finalement dans une administration ou une gestion de tout ça qui va être très, très difficile, virtuellement impossible aussi compte tenu du caractère d'indépendance qu'on demande aux administrateurs. Alors, il est peut-être préférable de laisser ça sur une base très, très générale et de dire que ce n'est pas exclusif l'un de l'autre, mais c'est dans les politiques, en fait c'est dans ses projets que le gouvernement va exprimer vers où il veut exactement s'en aller avec ça. Mais, à l'heure actuelle, il ne faudrait pas que l'un soit exclusif par rapport à l'autre.

Et ce que je mentionne également dans le dernier paragraphe, il ne faut pas que, parce qu'on veut absolument rencontrer les objectifs de représentativité et de nomination hommes-femmes, qu'on se retrouve au bout de cinq ans et qu'on est absolument pressé de nommer quelqu'un d'un territoire éloigné, femme sans éducation, et ainsi de suite, parce qu'on a finalement les derniers critères à rencontrer. Ce serait une très mauvaise chose à faire pour cette personne-là. Alors donc il ne faut pas que les objectifs en fait immobilisent en fait ce qu'on veut faire au niveau compétence et expérience.

Le Président (M. Hamad): M. le député de Rousseau.

M. Legault: Donc, juste pour être clair, là, vous seriez d'accord si on disait: Bon, la parité hommes-femmes, on la vise d'ici cinq ans, mais, la représentativité de la société, c'est plus des objectifs généraux.

M. Durand (Denis): Oui.

M. Legault: Est-ce que c'est bien ça?

M. Durand (Denis): Oui, définitivement.

M. Legault: O.K. Je veux revenir, bon, sur toute la question du rôle des administrateurs, là, puis j'ai souvent entendu votre grand patron actionnaire en parler même dans l'entreprise privée. Puis c'est vrai qu'effectivement ça pose des questions. Pour avoir été moi-même, là, sur des conseils d'administration, à un moment donné, on a une réunion par mois puis on est quand même très dépendants de l'information qui nous est donnée. Sauf que, comme je l'expliquais tantôt, dans une entreprise privée, bien on a le bénéfice par action du dernier trimestre qui est un très bon indicateur de la performance de l'entreprise, ce qu'on n'a pas dans une société d'État, ou, si on l'a, on n'est pas capable vraiment de le comparer et puis de savoir si vraiment ça a été réalisé sur une base efficace, puisqu'il s'agit de monopole. Et puis c'est important, là, dans tout le débat qui a lieu actuellement entre le public, le privé, de savoir: comment fait-on pour s'assurer que le secteur public, qui n'a peut-être pas besoin de faire de profits, donc qui aurait théoriquement un avantage sur le privé, mais qu'il garde cet avantage-là parce qu'il est aussi efficace que le privé, même s'il n'a pas de compétition. Donc, toute cette question-là que... En tout cas, moi, là-dessus, là, j'ai des petites idées, là, mais j'aimerais ça vous entendre un peu, à savoir: Comment... puis, bon, tantôt on parlait du rôle du Vérificateur général dans l'optimisation, puis tout ça, là-dedans... Mais comment peut-on mieux informer les administrateurs de grandes sociétés d'État? Puis vous le disiez vous-même tantôt, une société comme Hydro-Québec est quand même très importante à cause de sa taille, là, pour le Québec, et, si on est capable, demain matin, de faire des gains d'efficacité de 500 millions ou de 1 milliard, bien c'est 500 millions ou 1 milliard qu'on a pour faire d'autre chose.

Donc, est-ce que vous pourriez essayer de me dire ce que vous en pensez, là: comment on pourrait avoir un peu plus d'information pour les administrateurs?

M. Durand (Denis): C'est qu'effectivement ça va être le rôle des administrateurs, même indépendants, donc de bien s'approprier les informations qu'on va leur donner, de la part en fait de la direction des sociétés d'État. Et ça va être aussi le rôle des administrateurs de dire: Vous devriez produire telle information, telle information et telle information. On s'entend pour dire que, même si c'est des sociétés d'État, on ne parle pas de profit, mais il faut certainement qu'il y ait des surplus à quelque part. Il faut maintenir la vitalité de ces sociétés d'État là, et ça demande du réinvestissement. Dans un certain sens, les sociétés d'État devraient être capables en fait de réinvestir elles-mêmes en capital pour maintenir que ce soient leurs équipements, leurs édifices, et ainsi de suite, et tout ça. Ça peut varier d'une société d'État à l'autre.

Mais, comme... et pour ? vous voyez que je ne suis pas contre; pour ? mentionner en fait les propos de Mme Beaudoin, il existe aussi le «benchmarking». Alors, lorsqu'on compare, par exemple, la Société des alcools à la LCBO, à d'autres sociétés similaires en fait en Amérique, on peut comparer en fait les ventes au pied carré, il y a beaucoup, beaucoup de statistiques en fait qui sont produites pour indiquer quelle est la performance au niveau des revenus, quelle est la performance au niveau des dépenses. Et c'est la même chose également pour Hydro-Québec. Alors, si on se met à faire des études en disant: Combien on a d'employés par ligne de distribution, en fait par kilomètre de ligne de distribution?, bien on va s'apercevoir peut-être qu'au Québec on en a beaucoup plus qu'ailleurs. Cependant, est-ce que ça veut dire que notre société d'État est moins efficace? Pas nécessairement. On a un territoire qui est tellement grand qu'il est évident que vous ne pouvez pas, comme dans le Rhode Island, avoir peu d'employés par kilomètre de ligne de distribution.

Alors, ça va prendre beaucoup, beaucoup de publications, en fait de cibles au niveau et des ventes et des dépenses, et qu'on n'utilise pas simplement, comme dans notre secteur privé, finalement le profit, le profit par action, le cash-flow par action. Ça veut dire qu'il faut développer en fait des outils. Les outils sont déjà là. Avec l'information, l'informatique, c'est beaucoup plus facile qu'on le pense.

M. Legault: Pensez-vous qu'actuellement, là, bon, vous êtes sûrement un observateur averti, là: les administrateurs qui sont sur nos sociétés d'État, sur les conseils d'administration de nos sociétés d'État, est-ce que vous pensez qu'ils ont aujourd'hui, là, la compétence pour analyser une étude de «benchmarking» ou pour être capables vraiment de se faire une bonne idée de l'efficacité de la société d'État là où ils siègent?

M. Durand (Denis): À l'heure actuelle, je dirais qu'en général il y en a, mais, en général, non. Et il n'y a aucune connotation politique à ce que je dis là-dedans. Ça date depuis 40 ans, 50 ans, et ainsi de suite, parce que le processus était différent, tout simplement. Mais, à l'heure actuelle, si on prenait l'ensemble des administrateurs des sociétés d'État et qu'on comparait en fait la compétence, l'expérience des administrateurs des sociétés d'État par rapport à un ensemble du côté du secteur privé, avec des sociétés de la même taille, de la même importance, donc on s'apercevrait que ça laisse à désirer à beaucoup d'endroits. Et il manque certainement de compétences financières et comptables au niveau de ces sociétés-là.

M. Legault: Donc, je veux être bien clair, là, selon votre évaluation, la majorité des administrateurs des grandes sociétés d'État actuellement n'ont pas les compétences au niveau comptable ou financier, là, pour évaluer la qualité de la gestion dans ces sociétés d'État. C'est ce que vous nous dites?

n(12 h 20)n

M. Durand (Denis): Le pourcentage à l'intérieur de ces conseils d'administration là n'est pas assez élevé pour s'assurer d'une... Il n'y a pas assez d'administrateurs avec une formation financière et comptable, à l'intérieur de ces sociétés-là.

M. Legault: Puis vous diriez... Mais tantôt vous disiez «la majorité», là, en général, donc vous disiez «la majorité des administrateurs», donc plus que la moitié des administrateurs des sociétés d'État n'ont pas la compétence.

M. Durand (Denis): Compte tenu de l'importance en fait des dossiers ? on parle de milliards de dollars en fait, on parle également aussi de profits de centaines de millions de dollars... Vous devriez voir ce qu'on demande à des sociétés qui ont une centaine... des centaines de millions de dollars de profits, ce qu'on demande aux administrateurs comme qualifications, vous avez parmi les meilleurs. Alors, ici, ça manque.

M. Legault: Et est-ce que vous pensez que les mesures qui sont présentées dans le document du gouvernement vont être suffisantes pour s'assurer qu'à l'avenir la majorité des administrateurs vont être assez compétents pour évaluer l'efficacité dans la gestion des sociétés d'État?

M. Durand (Denis): Je pense que, dans le document ? c'est un énoncé de politique, ce n'est pas un plan d'action, c'est un énoncé de politique ? je pense qu'il y a toutes les intentions là-dedans, il y a la volonté, il semble y avoir une volonté de procéder et d'établir en fait... les conseils d'administration des sociétés d'État, les amener sur un même niveau que celui des sociétés... des grandes sociétés privées et publiques transigées sur les marchés financiers. Je pense que, là-dedans, ça apparaît, c'est clair. Cependant, c'est dans le plan d'action, comment on met vraiment tout ça, là, dans le plan d'action, comment on met tout ça en oeuvre vraiment, là, que ça va traduire l'image du document.

M. Legault: Mais, si je veux revenir, là, à ce que vous disiez au début de notre échange, là, entre autres, là, dans le document, quand on dit qu'il va avoir des règles pour une représentativité des différentes composantes de la société québécoise, vous pensez que cette partie-là, ça va nous empêcher d'atteindre l'objectif de compétence qui est recherché, là, chez les administrateurs de nos sociétés d'État?

M. Durand (Denis): Si en fait on ne prend pas cette chose-là d'une façon vague et qu'on veut absolument la répartir maintenant, ces composantes-là, de façon précise, précise, précise, que ce soit sur une base géographique, une base professionnelle, une base de représentativité des groupes communautaires, des choses comme ça, bien ça va retarder d'autant plus l'atteinte des objectifs.

Mais, si on le prend dans un sens général, comme semblait le dire M. le ministre précédemment, général, et que, dans l'ensemble des sociétés d'État, on ait une certaine représentativité, et tout ça, oui, à ce moment-là, je ne pense pas que cet objectif-là, là, nuise à l'atteinte des objectifs. Mais, s'il fallait être très, très précis à l'intérieur de chacune des sociétés d'État, là on va avoir un problème.

M. Legault: Et, si on regarde de façon précise les mesures qui sont proposées par le ministre des Finances, quelles sont les mesures selon vous qui vont permettre à l'avenir que les administrateurs de sociétés d'État soient compétents, des mesures qui n'existaient pas jusqu'à aujourd'hui, quelles sont ces mesures-là, qui sont nouvelles, qui vont nous permettre qu'à l'avenir les administrateurs des sociétés d'État soient compétents?

Le Président (M. Hamad): En 30 secondes, M. le...

M. Durand (Denis): En 30 secondes. Bien, je pense qu'on a mentionné l'expérience, on a mentionné, à l'intérieur du document, l'expérience; ça, c'est très, très, très important. On peut avoir quelqu'un qui a une maîtrise en finances, s'il n'a jamais eu d'expérience dans la gestion des entreprises, ça ne vaudra pas grand-chose pour les sociétés d'État. Donc, l'expérience a été mentionnée là-dedans. Et ensuite de ça, c'est qu'on détermine déjà des critères d'indépendance. Alors, comme les administrateurs choisis vont savoir qu'ils ont été choisis en vertu de ces critères d'indépendance là, ils vont se sentir beaucoup plus libres d'intervenir en fait de façon indépendante sur les conseils d'administration. Alors, déjà, on a mentionné certains critères d'indépendance, c'est ce qui fait que les administrateurs choisis vont se sentir peut-être plus libres, vraiment indépendants.

Le Président (M. Hamad): Merci, M. Durand. Est-ce qu'il y a un consentement? Le ministre aimerait poser une question. Est-ce qu'il y a un consentement? Oui. M. le ministre.

M. Audet: Je pense que c'est très important, juste pour bien qu'on s'entende, qu'on comprenne bien votre propos, parce que je voudrais être très clair là-dessus. Si j'ai bien compris... En matière... quand on dit «représentant les composantes de la société», je pense que, là-dessus, il y a peut-être eu un malentendu ou... Le but, ce n'est pas de faire en sorte que tous les groupes sociaux soient représentés ? je vous entendais dire ça. Quand on parle des composantes, on parle des composantes notamment... des immigrants, par exemple, des représentants d'immigrants. Le Québec est une société qui accueille de plus en plus d'immigrants. Est-ce qu'il y a une représentation, indépendamment du sexe, de ces groupes-là? C'est à ça qu'on fait référence.

Donc, je veux être très clair là-dessus, parce qu'il n'y a pas... Je vous entendais dire: D'avoir des représentants géographiques, des représentants de chacun des groupes sociaux. Ce n'est pas la nature du sens de... Alors, dans ce contexte-là, je demanderais peut-être de voir un peu: Est-ce que, vu dans cette perspective, est-ce que ce n'est pas normal que tous les conseils d'administration, privés comme publics, le font, que la société, disons, et les gens qu'on nomme reflètent les composantes de la société québécoise? Par exemple, il y a quand même une représentation de plus en plus importante des immigrants au Québec. Alors, est-ce que... Ces gens-là sont rarement nommés sur les conseils. Est-ce qu'il ne devrait pas y en avoir un peu plus? C'est à ça qu'on fait référence principalement. Voilà.

M. Durand (Denis): Je vous remercie de la précision, étant donné que des fois on pense souvent électronique, puis, dans l'électronique, des composantes, il y en a 1,2 million. Alors, c'est utile de le dire.

Le Président (M. Hamad): Alors, M. le député de Rousseau.

M. Audet: Vous avez d'ailleurs un président qui est un très bel exemple.

M. Legault: Oui. Mais, bon, je pense que vous allez convenir, M. Durand, là, que le texte actuel du document, en tout cas pour moi, n'est pas clair quand on dit «les différentes composantes de la société québécoise», n'est pas clair pour vous non plus. Donc, je pense qu'on vient de s'entendre sur le fait qu'il faudra préciser cette partie-là. Merci.

Le Président (M. Hamad): Merci, M. Durand. Et, suite à la présentation de M. Durand, j'ajourne les travaux jusqu'à mercredi 1er novembre, à 10 heures. Merci.

(Fin de la séance à 12 h 27)


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