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Version finale

40e législature, 1re session
(30 octobre 2012 au 5 mars 2014)

Le mercredi 14 novembre 2012 - Vol. 43 N° 5

Consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 1, Loi sur l’intégrité en matière de contrats publics


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Table des matières

Journal des débats

(Onze heures quarante-huit minutes)

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des finances publiques ouverte.

Je demanderais à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.

La commission est réunie afin de procéder à des consultations particulières et des auditions publiques sur le projet de loi n° 1, Loi sur l'intégrité en matière de contrats publics.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Bachand (Outremont) est remplacé par M. Hamad (Louis-Hébert); M. Dubourg (Viau), par M. Ouellette (Chomedey); M. Drolet (Jean-Lesage), par M. Poëti (Marguerite-Bourgeoys); et M. Dubé (Lévis), par M. Duchesneau (Saint-Jérôme).

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): Merci, Mme la secrétaire. Aujourd'hui, nous entendrons M. Gilles Thibault et ses accompagnants. Nous entendrons aussi des représentants de la corporation des entrepreneurs généraux en construction du Québec, du Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec et du Syndicat des professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec.

Alors, M. Thibault, on s'excuse un peu de vous avoir fait attendre, parce que les travaux, disons, aux affaires courantes, ont peut-être été ce matin un peu plus longs que prévu. Mais nous allons commencer tout de suite. M. Thibault, vous avez 10 minutes pour vous identifier, et présenter les gens qui vous accompagnent, et faire votre exposé. Et puis, par la suite, suivra une période d'échange d'environ une cinquantaine de minutes.

Alors, M. Thibault, vous avez la parole.

Auditions (suite)

M. Gilles Thibault

M. Thibault (Gilles): Alors, merci, M. le Président. Alors, M. le Président, M. le ministre, membres de la commission, j'aimerais d'abord, en mon nom personnel et en celui des autres membres de notre famille ici présents, remercier la commission de l'opportunité de vous livrer ce bref exposé sur un sujet qui nous intéresse depuis plus de 30 ans.

Comme vous pourrez le constater en consultant mon C.V., dans le pochette que vous avez, je suis avocat de formation, auteur de plusieurs ouvrages en droit des contrats et chef de direction d'Édilex. Au début de ma carrière de juriste, en 1976, j'ai eu le choc de découvrir qu'il n'existait pas de meilleure pratique établie ou de normes reconnues quant à la façon de concevoir et rédiger un contrat. Suite à ce constat, j'ai alors décidé de relever le défi de corriger cette anomalie qui complique inutilement l'univers des contrats.

**(11 h 50)**

Le dernier né de cet effort est un ouvrage intitulé Guide de rédaction et d'analyse de contrats, qui traite de l'art et de la science des contrats. Tout au long de ce parcours, j'ai eu à mes côtés mon épouse et associée, Denise Trottier, qui a relevé l'énorme défi de matérialiser mes idées, donnant ainsi naissance à Édilex, une entreprise que nous avons fondée en 1992. Le plus jeune de nos trois fils, Alexandre, un jeune avocat ayant oeuvré dans un grand cabinet national, qui a récemment complété son MBA en Californie, s'est joint à nous l'année dernière pour assurer la pérennité de notre entreprise.

Cela dit, le projet de loi n° 1, au sujet duquel nous voulons vous entretenir, nous interpelle à deux niveaux: d'une part, parce que nous souscrivons à votre objectif de promouvoir l'intégrité des contrats publics -- et nous vous félicitons de cette initiative; d'autre part, parce que nous souhaitons contribuer à la réalisation de cet objectif en vous livrant succinctement le fruit d'une expertise contractuelle unique. Nous espérons que cet exposé servira à enrichir vos délibérations à venir. Nous espérons surtout qu'il vous fera découvrir une solution pratique et efficiente quant à la meilleure façon de protéger cette intégrité au quotidien dans des circonstances qui s'annoncent difficiles.

En effet, lors d'une conférence sur les marchés publics tenue la semaine dernière à Vancouver, j'ai appris de la bouche d'un conférencier expert en ressources humaines du secteur public qu'il y aura 87 000 postes à combler dans les années à venir dans la fonction approvisionnement à travers le Canada. Il s'agit, au dire de cet expert, d'un véritable tsunami dans les rangs de la fonction publique. Si nous ajoutons à l'ampleur de la tâche confiée aux personnes responsables de l'approvisionnement public, nous approchons de la tempête parfaite.

En effet, comme vous pouvez le constater à l'aide du graphique d'évolution qui apparaît à l'écran et dont vous avez un exemplaire tiré à part dans la pochette, la navigation de chaque contrat public au sein de ce processus implique tout un parcours. Nous sommes loin d'une promenade dans un jardin. L'insertion d'une veille d'intégrité au sein de ce même processus constitue donc un défi de taille qu'il ne faut pas sous-estimer.

En voyant cette tempête qui se pointe, il faut s'inquiéter de la faisabilité de votre projet dans de telles conditions. Il faut notamment se questionner sur la suffisance du coffre d'outils actuel des préposés à la chaîne d'approvisionnement: Est-il apte à soutenir une veille d'intégrité de haut niveau?

Pour répondre à cette question, il faut d'abord s'interroger sur ce qu'est un appel d'offres. L'appel d'offres est un ensemble documentaire qui se déploie sur deux grands axes contractuels: sur l'axe horizontal, il y a d'abord le contrat A, qui intervient entre le donneur d'ordres et tous les soumissionnaires, il porte sur la régie du processus; vient ensuite sur l'axe vertical le contrat B, qui documente la relation d'affaires intervenant entre le donneur d'ordres et l'adjudicataire.

Ayant cette perspective en tête, qu'en est-il maintenant du mode de présentation de ces deux contrats? Voici, au tableau, à quelques variations près, l'architecture traditionnelle de la documentation d'appel d'offres. Cette architecture impose d'importantes contraintes à tous les intervenants au processus du fait qu'il faut naviguer à travers tous ces documents pour en extraire deux contrats. La première contrainte en est une de confusion quant à l'emplacement des clauses traitant des droits et obligations issus de chacun de ces contrats. La seconde contrainte est la quasi-impossibilité de voir les trous dans ces contrats.

Comment assurer l'intégrité des contrats dans un environnement contractuel aussi éclaté? Pour résoudre cette problématique structurelle, il faut, selon nous, rendre le contenant d'un contrat plus intelligent, comme ont choisi de le faire de nombreux organismes et établissements de la santé et des sociétés de transport en commun du Québec.

Pour illustrer la différence entre un contenant traditionnel et un contenant intelligent, nous proposons les trois images suivantes. Cette première image représente le contenant traditionnel des contrats. Le rectangle représente le contenant et les figures représentent des clauses au sein de ce contrat. Impossible d'y voir rapidement et simplement ce qu'il contient et surtout ce qu'il ne contient pas.

Voyons maintenant ce qui arrive avec un contenant intelligent. Ce contenant se distingue du contenant traditionnel en ce qu'il fait appel à des compartiments pour trier et repérer les clauses d'un contrat. Grâce à un tel contenant, la tâche de voir ce qu'il contient et ce qu'il ne contient pas se fait d'un coup d'oeil. Il ne faut pas s'arrêter là, cependant, il faut maintenant identifier ces compartiments pour rendre le contenant encore plus performant.

Si nous transformons chacun des compartiments en un poste contractuel, nous obtenons le résultat qui apparaît à l'écran. Les postes contractuels que nous avons mis en place n'ont pas été choisis au hasard, ils représentent les organes vitaux d'un contrat. Chacun de ces postes a un rôle important à jouer dans l'équilibre d'un contrat. Grâce à un tel contenant, la tâche de qualifier ce qu'il contient et ce qu'il ne contient pas s'exécute facilement. L'exercice de veille d'intégrité vient de se simplifier considérablement de même qu'une foule d'autres tâches.

Soit dit en passant, l'idée des postes contractuels nous est venue du monde de la comptabilité qui impose un mode de présentation uniforme de postes comptables préétablis pour présenter le bilan et les états financiers d'une entreprise.

Si l'on adapte cette approche à la documentation d'appel d'offres, on obtient le résultat qui apparaît sur ce tableau. Vous avez d'ailleurs un tiré à part dans votre pochette. Placés côte à côte, les postes contractuels du contrat A, du formulaire de soumission et du contrat B forment un tableau de bord très performant. À titre d'exemple, si l'on veut connaître tous les éléments qui traitent du prix au sein de ces documents, il suffit de se rendre au poste contractuel 2 dans chacun de ceux-ci. Autrement dit, avant même de regarder le contrat, vous savez exactement où se trouve l'information que vous recherchez.

Au cours de mes 35 années d'expérience, j'ai créé et mis en place une architecture de rédaction contractuelle qui repose sur cinq principes: intégrité, uniformité, sécurité, flexibilité et simplicité. De nombreux joueurs de la chaîne d'approvisionnement en quête d'intégrité mais aussi d'efficacité se sont prononcés en faveur de celle-ci. En effet, cette architecture a franchi avec succès l'étape du banc d'essai dans deux secteurs d'activité fort différents, la santé et le transport en commun. De plus, elle continue de se répandre par le biais d'un nouvel outil d'assemblage de documents d'appel d'offres très performant que nous venons tout juste de mettre au point. Cet outil permettra à la méthode de réaliser tout son potentiel.

Cela dit, dans le cadre de vos délibérations quant à l'opportunité ou la façon de modifier les articles 23, 25, 26 et 27 de la Loi sur les contrats des organismes publics, nous vous invitons à considérer comme alternative la mise en place de pratiques contractuelles facilitant une veille d'intégrité plutôt que de priver les ministères visés des pouvoirs nécessaires ou utiles à la gestion efficiente de la fonction d'approvisionnement qui relève de leurs compétences. Nous croyons avoir fait la démonstration qu'il est possible d'y arriver.

Si je peux terminer cette présentation avec un souhait, nous avons l'opportunité de faire du Québec un modèle à suivre quant à la façon de faire des appels d'offres. Il y a déjà des signes avant-coureurs de cette reconnaissance du savoir-faire québécois en la matière. En effet, lors d'une formation à Toronto en début d'année, les préposés d'une grande multinationale américaine nous ont fait le commentaire que les documents d'appel d'offres issus du réseau de la santé au Québec faisant appel à la nouvelle architecture sont, à leurs yeux, les meilleurs au Canada.

Je vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): Merci, M. Thibault. Pour procéder à une période d'échange, maintenant d'abord je me permets de saluer les parlementaires qui sont ici présents ainsi que les gens qui les accompagnent, les membres de la commission et de vous souhaiter une bonne journée en commission.

Et je cède la parole maintenant à M. le ministre pour une période d'échange de 22 minutes.

M. Bédard: Ma première question... Mon premier commentaire va être de vous remercier, de vous remercier, vous... votre fils Alexandre, c'est ça?

M. Thibault (Gilles): Alexandre et mon épouse Denise.

M. Bédard: Et votre épouse, bien oui. Je vous remercie beaucoup d'être venus ici et de nous dire un peu ce que vous faites, j'imagine, comme service que vous offrez à différents ministères et organismes, organisations, compagnies, j'imagine, aussi. Donc, vous avez des clients qui sont variés. Ils ne sont pas seulement dans la fonction publique?

M. Thibault (Gilles): Écoutez, essentiellement en ce qui concerne le monde de l'approvisionnement, nous ne travaillons qu'avec le réseau public. Nous ne travaillons qu'avec les organismes publics, surtout de la santé, du transport en commun, de l'éducation, et on a commencé maintenant avec des cités et villes, toujours pour répondre aux mêmes besoins.

M. Bédard: O.K. Et vous oeuvrez depuis combien de temps?

M. Thibault (Gilles): Pardon?

M. Bédard: Vous oeuvrez depuis combien de temps?

**(12 heures)**

M. Thibault (Gilles): Édilex existe... Écoutez, j'ai été reçu au Barreau ça va faire exactement 36 ans vendredi. On a créé Édilex en 1992. Nous avons la plus grosse collection de contrats à l'échelle nationale au Canada et nous avons transféré un peu ce savoir-faire-là dans le monde de l'approvisionnement depuis 2003. Ça fait 10 ans que nous travaillons avec le réseau public.

M. Bédard: Parfait. Je vais revenir concernant vos compétences. Peut-être, au départ, sur des éléments qui portent sur le projet de loi, vous avez vu, nous avons choisi l'habilitation. Parce que, là, nous sommes dans une matière qu'on va couvrir mais autrement, et ça, vous aurez à en parler un peu plus tard, mais il y a une voie qui a été choisie, c'est celle de l'habilitation, donc, préventive, au départ. Donc, les gens doivent avoir cette autorisation avant de commencer le processus. Est-ce que vous pensez que c'est une bonne façon de faire?

M. Thibault (Gilles): Écoutez, pour protéger l'intégrité, il faut réaliser qu'il y a plus qu'un rempart qui est requis. Le premier rempart que vous avez décidé de mettre en place avec le registre des autorisations, quant à moi, est excellent parce qu'il y a un contrôle au point d'entrée, ce qui est très important.

Le deuxième rempart maintenant est sur le terrain de jeu, c'est-à-dire le terrain de jeu qui est l'univers des contrats, parce que c'est là que ces joueurs-là arrivent lorsqu'ils sont admis. Et ce qui est très important pour que les joueurs qui sont du côté du réseau public opèrent confortablement à l'intérieur de ce terrain de jeu, il est important de simplifier l'univers dans lequel ils travaillent.

Ma crainte qu'on peut vivre ici, là, c'est que, si vous créez une structure très rigide... Et j'éprouve une certaine crainte par rapport à vos objectifs de centralisation des pouvoirs contractuels pour la simple et bonne raison qu'une fois sur le terrain de jeu les cocontractants que vous allez avoir devant vous vont être en souliers de course. Et ma crainte, c'est que les personnes que vous allez mettre face à eux, c'est-à-dire qui vont être les gardiens, finalement, de l'intégrité et les préposés de la chaîne d'approvisionnement, ma crainte, c'est qu'ils se retrouvent dans des bottines en ciment. Ils vont manquer d'efficacité, ils vont manquer de souplesse parce qu'ils ont deux préoccupations: ils doivent veiller à l'intégrité, mais aussi ils doivent veiller à l'efficacité de l'approvisionnement. C'est deux vecteurs qui peuvent de temps en temps aller dans des directions opposées. Il est très important que le coffre d'outils que vous mettez à leur disposition leur permette d'avoir de la sécurité, de la simplicité, de l'uniformité, de la flexibilité et aussi de l'intégrité, bien entendu.

Alors, ma crainte... Quand je regardais votre projet de loi, j'ai dit: Oui, c'est très bien, ce que vous voulez faire, mais ne perdez pas de vue qu'il y a deux terrains de jeu, il y a deux remparts: il y a celui de l'autorisation et après ça il y a celui du contrat. Et, si vous créez un univers... Et c'est la raison pour laquelle on vous a parlé de l'architecture traditionnelle versus la nouvelle architecture.

La nouvelle architecture... On a été sollicités, nous, par le réseau. On n'a jamais sollicité le réseau public, c'est le réseau public qui est venu nous voir suite à des écritures, des conférences qu'on avait données. Ils sont venus nous dire: Pouvez-vous nous aider à créer un environnement dans lequel on va pouvoir veiller à cette intégrité-là? Mais jamais au détriment de l'efficacité parce qu'ils ont un grand besoin d'efficacité.

Vous avez vu le tableau sur le graphique d'évolution du processus d'approvisionnement. C'est un labyrinthe, c'est lourd. Je côtoie les gens du réseau de la santé depuis 10 ans. Je partage avec eux leurs préoccupations. Ces gens-là ont besoin d'un niveau de souplesse parce que ce sont eux qui sont sur le terrain de jeu. Et il est très important qu'ils aient la capacité de réagir à ce qu'ils voient, à ce qu'ils entendent, rapidement.

Un contexte de centralisation des pouvoirs contractuels m'inquiète. Et je fais abstraction des joueurs, je vous parle strictement de principe. La personne qui est sur le terrain a un besoin d'un rayon d'autonomie pour réagir aux besoins, d'un côté, de son service, de sa clientèle, et aussi aux revendications des gens qui vont contracter avec elle pour fournir l'État.

Alors, il y a ce problème d'équilibre là. Je m'inquiète qu'il manque un équilibre dans votre façon d'aborder ça, surtout quand je vois la centralisation, le déplacement de pouvoirs. Les personnes qui sont sur la ligne de feu vont perdre le pouvoir au profit de gens qui sont loin de la ligne de feu. Ça, je trouve ça inquiétant. Et, si vous combinez ça à un environnement contractuel qui peut être lourd -- et vous avez un processus qui est déjà très lourd -- vous avez ici une tempête parfaite avec un gros problème de ressources humaines qui s'en vient.

Vous avez à faire une recherche de méthodes pour simplifier votre univers et préserver aussi un niveau de flexibilité et d'autonomie, selon moi. Si vous ne faites pas ça, vous risquez de manquer une partie de votre cible; peut-être une grosse partie, peut-être une petite partie, là, je n'ai pas de boule de cristal. Mais je peux juste vous dire, par mon expérience, j'ai accompagné des gens dans des processus contractuels pendant toute ma carrière et je peux vous dire que, cette dualité-là, là, de flexibilité, et de sécurité, et d'intégrité, il faut trouver le juste équilibre. Je pense que vous avez déplacé, en faisant un travail de centralisation, cet équilibre-là.

La conférence à laquelle j'assistais la semaine dernière a été très intéressante parce qu'il y avait un des plus grands experts dans le monde des appels d'offres au Canada qui était là, qui disait: Il y a un problème qui se produit ici, à l'échelle du Canada. C'est qu'à chaque fois qu'il y a un scandale la réaction de la classe politique est d'aller à un extrême d'intégrité qui met en péril la flexibilité et la capacité des gens d'opérer. Et ça, c'est un dilemme. Alors, on a un problème de dosage ici, devant nous, quant à la meilleure façon de réagir à ça.

Ce que je vous dis, c'est qu'une solution qui va venir d'en haut seulement n'est pas la solution gagnante. Il faut qu'il y ait une solution mixte de la base -- et vous l'avez déjà, quant à moi, à l'intérieur de la loi telle qu'elle se lit -- avec peut-être une meilleure coordination quant aux exigences minimales à respecter pour protéger l'intégrité mais de ne pas éliminer complètement et vider la base de son autonomie et de sa flexibilité. Je vois en cela un grand danger.

M. Bédard: Au-delà de la théorie, ce qu'on a devant nous, c'est un projet de loi qui vise la période précontractuelle. C'est pour ça que, là-dessus, là, j'ai un peu de misère à vous suivre par rapport à ce que vous abordiez en termes d'extrême, là. Parce qu'on est... 95 % du projet de loi, il porte sur la période précontractuelle. Et là je dis 95 %, ça peut être 90 %, là. Mais donc c'est comment on habilite avant de contracter. Parce que le problème qu'on a: quand on a contracté, il est trop tard.

Et là je veux bien comprendre ce que vous me dites. Vous ne me dites pas qu'on laisse à chacun des organismes de vérifier la probité des personnes ou des entreprises avec qui on traite.

M. Thibault (Gilles): Non, ce n'est pas ça que je suis en train de dire.

M. Bédard: C'est beau.

M. Thibault (Gilles): Votre registre d'autorisation, qui est centralisé, qui est une excellente initiative, j'ai une réserve quant à la lourdeur administrative que ça peut créer, là, mais...

M. Bédard: Dans quel sens?

M. Thibault (Gilles): Bien, écoutez, je peux juste vous donner un exemple. Vous devez penser que ce registre-là, ça va devenir une barrière à l'entrée. Pensez aux petits fournisseurs qui approvisionnent le réseau public. Vous en avez beaucoup, de petits fournisseurs. Je peux vous dire que le seul fait, là, que vous avez des frais sur SEAO pour aller chercher les documents d'appel d'offres, ça élimine des fournisseurs qui ne veulent même pas payer ces frais-là. Alors, imaginez, à chaque fois que vous allez augmenter au nom de l'intégrité, qui est tout à fait un bel objectif... Mais il y a une réalité en dessous de ça, qui est le fait qu'il y a plusieurs joueurs qui vont dire: Moi, ça ne me tente pas de sauter à travers tous ces cerceaux-là pour approvisionner l'État, je vais préférer m'abstenir. Ce que ça va avoir comme effet pour vous, c'est que ça va peut-être baisser le niveau de concurrence. Et on a déjà des signes avant-coureurs juste avec des échos qu'on a sur les montants qui sont demandés par SEAO.

Alors, si j'extrapole à partir de ce que j'ai entendu et j'ajoute à ça le registre des autorisations, il y a peut-être un danger, je ne peux pas vous le confirmer, mais il y a peut-être un danger qu'à l'entrée vous allez peut-être avoir moins de joueurs. Et, s'il y a une baisse de concurrence à cause de ça, pas parce que les gens ne sont pas intègres, parce que les gens ne veulent tout simplement pas, à ce moment-là vous avez peut-être un effet mitigé par rapport à votre objectif.

M. Bédard: On peut regarder un problème de différentes façons, effectivement, puis il n'y a pas une seule vérité. Je vous dirais, si moi, je le vois à l'inverse, actuellement, le problème qu'on a, c'est qu'il y a des entreprises qui peuvent être associées à des activités mafieuses qui vont gagner les appels d'offres. Ils gagnent l'appel d'offres. C'est ce qu'on a vu dans certains cas de maires qui se plaignaient qu'ils ne souhaitaient pas donner des contrats à des entreprises où ils trouvaient qu'il y avait eu apparence, je vous dirais, selon eux, de collusion. Il n'y a pas de moyens légaux. Ce n'est que de refaire l'appel d'offres qui va donner le même résultat, O.K.? Donc, vous ne pensez pas, au contraire, que cette façon de faire là va améliorer la véritable concurrence dans les entreprises?

M. Thibault (Gilles): Écoutez, ça fait 10 ans maintenant que je côtoie les réseaux. Je ne partage pas cette opinion-là, malheureusement. C'est triste à dire. C'est que votre projet...

M. Bédard: ...pour ça qu'on est là.

**(12 h 10)**

M. Thibault (Gilles): ...il est excellent, d'accord. Mon seul souci, moi, c'est que je lève un petit drapeau sur ses effets secondaires, qu'il faut prendre la peine de mesurer. Je ne sais pas comment on peut prendre cette mesure-là ou avoir cette lecture-là, mais, basé sur le fait que j'ai côtoyé ces gens-là pendant 10 ans et j'ai entendu leurs préoccupations, j'ai une préoccupation, effectivement.

M. Bédard: Parfait. Est-ce qu'il y a une bonne raison, selon vous, de faire affaire avec le crime organisé?

M. Thibault (Gilles): Absolument pas. Absolument pas.

M. Bédard: Alors, est-ce qu'actuellement on a les moyens législatifs pour ne pas faire affaire avec ces entreprises qui pourraient être associées à des organisations mafieuses de blanchiment d'argent ou qui ont élevé en système...

M. Thibault (Gilles): Il n'y a aucune bonne raison. Mon seul souci, M. le ministre...

M. Bédard: Mais où je vous amène, c'est là. C'est que...

M. Thibault (Gilles): Je vous en prie.

M. Bédard: L'autre question était la suivante: Est-ce qu'en termes législatifs on a les moyens de le faire, actuellement, de ne pas contracter avec ces gens-là, selon vous?

M. Thibault (Gilles): Vous ne devez pas contracter avec ces gens-là.

M. Bédard: Et là je vous repose la question: En termes législatifs, est-ce qu'on a actuellement les outils pour ne pas le faire?

M. Thibault (Gilles): Non, vous ne les avez pas. Vous êtes sur une voie qui, quant à moi, est incontournable si vous voulez assurer la totale intégrité. Mon seul souci, c'est que, dans votre chasse pour éliminer les mauvaises pommes, vous allez peut-être perdre des bonnes pommes puis vous allez peut-être même perdre des arbres qui génèrent des bonnes pommes.

Alors, c'est ça ici, là. Il y a une problématique. Et peut-être que, dans la façon que vous allez opérationnaliser votre registre, vous allez pouvoir trouver des solutions à ça, mais je fais juste vous lever un drapeau jaune, pour ainsi dire, pour vous dire: Faites attention, dans la façon que vous allez opérationnaliser le tout, pour ne pas perdre les bonnes pommes.

M. Bédard: À terme, oui, mais je ne peux pas sacrifier un peu d'intégrité. Vous voyez, il y avait une belle phrase qui disait, là: On ne peut pas sacrifier un peu de liberté pour plus de sécurité parce qu'on va perdre l'un et l'autre. En matière d'intégrité, je pense qu'il se pose la même chose, le même constat. Si on sacrifie de l'intégrité au profit d'une apparence de concurrence, on va perdre l'un et l'autre.

Et là où on peut différer d'opinion, c'est que... Ça pourrait être, pour moi, je vous dirais, une phrase ou un postulat que je ferais, que je pourrais faire à ce moment-ci -- je vous avouerais que c'est plus de l'ordre d'un constat. À Montréal, c'est une grande ville. Beaucoup de contrats. Est-ce que vous pensez qu'il existe une saine concurrence actuellement dans les différentes entreprises qui ont eu, pendant les différentes années, là, à appliquer sur les contrats?

M. Thibault (Gilles): Écoutez, j'ai effectivement des réserves. La seule chose, mon seul propos, M. le ministre, c'est qu'il faut faire attention au niveau de la dose du remède. C'est ça, mon commentaire. Je ne peux pas vous dire c'est quoi, la bonne dose...

M. Bédard: Oui.

M. Thibault (Gilles): ...mais il faut faire attention pour ne pas que vous ayez un effet secondaire inattendu. Dans un contexte où le Québec a des contraintes budgétaires importantes, ses coûts d'approvisionnement sont... vous devez avoir ce réel souci là aussi. Vous devez avoir, donc, une approche balancée dans tout ça.

M. Bédard: Quel est, selon vous, M. Thibault, le prix à payer pour être intègre comme société?

M. Thibault (Gilles): Écoutez, je pense qu'on ne peut pas mettre de prix sur l'intégrité, M. le ministre. Ça serait très maladroit.

M. Bédard: Vous voyez, moi, ma peur, c'est toujours de ne pas être assez intègre...

M. Thibault (Gilles): Oui.

M. Bédard: ...que ce qu'on fait ne va pas assez loin pour assurer aux entreprises qui ont des bonnes pratiques, elles, d'avoir plus de contrats, de pouvoir entrer sur des chantiers normalement, de ne pas être pris dans un système qui, lui, encourage autre chose que la saine concurrence.

Et le prix à payer, moi, je ne le vois pas à moyen terme. Ce que je vois plutôt, c'est un encouragement des bonnes pratiques, des bonnes compagnies. Oui, il y a peut-être des entreprises -- puis je le souhaite et je le pense aussi -- qui sont rarissimes, mais qui ont utilisé des moyens pour se détourner de la loi. Alors, ce qu'il faut maintenant, c'est adopter un remède à la hauteur du malade, là. Si on lui donne encore une petite aspirine, alors qu'on voit qu'il est pris d'une pneumonie grave, là, je ne suis pas convaincu, en souhaitant, par l'effet du temps, arriver au même résultat.

Mais en même temps on peut différer d'opinion. Puis là-dessus moi, ce que je veux vous assurer, c'est qu'on est toujours préoccupés, au niveau économique, de conserver notre vigueur économique. Moi, je pense qu'à terme, pour tout le monde, d'avoir des entreprises qui respectent la loi, c'est une bonne chose et, dans un système capitaliste, ça devrait être la base.

Alors, c'est pour ça qu'aux États-Unis, entre autres, vous savez, les peines pour collusion, entre vous puis moi, sont pas mal plus sévères, hein? Les gens, ils sont condamnés des fois à des dizaines d'années de... Pourquoi? Parce qu'ils protègent leur système. Le système capitaliste encourage la concurrence. Ceux qui font de la collusion, je peux vous dire qu'ils ne reçoivent pas des amendes, aux États-Unis, là, ils finissent en prison, là. Les bandits à cravate, on ne dit pas: Ne recommencez plus, là, on dit: Bonne chance, puis on ne se reverra plus dans le monde des vivants, là.

Et nous, on préfère dire, pour l'État: Bien, il y a des entreprises avec qui on ne contractera pas. Les autres, bien, on ne les empêche pas de gagner leur vie, mais, ces entreprises-là, nous, on considère que l'État ne doit pas le faire. Mais en même temps on peut, ensemble, différer d'opinion sur la façon de faire.

Ce que je veux vous dire par rapport à votre document, que j'ai pris la peine de regarder puis d'analyser... Sur la centralisation, ce que je veux vous assurer, c'est qu'il y a toujours de la souplesse. Ça prend de la souplesse. De remanier les pratiques pour s'assurer d'une forme d'harmonisation, c'est une chose, mais de s'assurer que chaque soumission, chaque contrat corresponde à la réalité concrète de chacun des services, ça en est une autre, là.

Donc, le fait de dire que nous souhaitons une forme d'harmonisation, je pense que, dans le contexte actuel, c'est légitime. Est-ce que ça peut être amélioré en termes de souplesse? Sûrement. Et je tiens à vous dire que nous aurons, dans les prochains mois, à revoir ces processus-là. C'est pour ça qu'on est comme peut-être un pas... on est un petit peu trop tôt, dans notre discussion, par rapport à ce qui s'en vient.

Mais, je l'ai déjà annoncé, nous sommes en train de revoir et nous allons arriver avec, je vous dirais, une réflexion beaucoup plus profonde sur la façon de donner les contrats, sur la façon aussi de traiter ceux et celles qui n'ont rien à voir avec la collusion ou la corruption. On est dans une autre sphère. Les compagnies, par exemple, qui peuvent avoir de mauvaises pratiques en termes d'exécution de contrat, par exemple, ou en... Donc, vous voyez? Et là on est dans une autre sphère, qui n'est pas celle qu'on touche actuellement, parce que sinon je n'aurais pas pu prendre un mois, là, ça aurait pris peut-être... il aurait fallu que j'arrive après Noël.

Aujourd'hui, ce que nous visons, c'est la collusion, la corruption et les pratiques malhonnêtes, la mauvaise foi. Donc, c'est ces comportements-là qu'on traite à la base, avant le contrat. Vous, votre travail, il est après. Quand ces gens-là ont été habilités, maintenant comment on traite bien avec eux pour s'assurer qu'ils comprennent bien nos attentes, que les contrats vont être bien exécutés -- c'est ce que je comprends -- que l'ensemble des clauses reflètent l'intention des différents organismes qui ont donné les contrats? C'est là où vous intervenez, vous.

M. Thibault (Gilles): Avec respect, M. le ministre...

M. Bédard: Allez-y.

M. Thibault (Gilles): ...votre article 27 implique, là, une forme de mainmise sur le coffre d'outils, alors on n'est plus dans la phase précontractuelle, on est vraiment dans la phase contractuelle.

M. Bédard: C'est le 5 %.

M. Thibault (Gilles): Et votre loi...

M. Bédard: C'est le 5 %, ça.

M. Thibault (Gilles): Pardon?

Une voix: C'est pour ça qu'on est ici.

M. Bédard: On s'entend.

M. Thibault (Gilles): C'est ça. C'est la partie, nous, qui attire notre regard, bien entendu, à cause de notre vécu et de notre expertise. Et, quand on a vu ça, on a pensé qu'il y avait une préoccupation importante ici à avoir parce que le coffre d'outils s'élabore toujours dans la phase précontractuelle. Et, si on enlève aux personnes qui ont... Parce que gardez à l'esprit que les deux tiers de ce qui va dans un contrat, c'est des informations de nature opérationnelle, ce n'est pas de la nature purement juridique. Alors, les personnes qui ont ce savoir-faire-là, qui ont ces connaissances-là sont dans les ministères, sont à la base du réseau.

Et ma préoccupation, lorsque je lis votre texte, c'est que, là, on va avoir une approche qui va partir du haut puis qui va s'en aller vers le bas, alors que ma recommandation, moi, c'est que ça devrait partir du bas et s'en aller vers le haut pour que vous soyez en mesure d'équilibrer le coffre d'outils, pour faire en sorte que ce soit un scénario qui est gagnant-gagnant entre les préoccupations de votre ministère et les préoccupations d'autres ministères qui viennent à mes oreilles et que moi, je me permets d'être le porte-parole officieux.

M. Bédard: Merci. Il y a mon collègue. Je ne voulais pas prendre tout le temps.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): M. le député de Dubuc, pour un deux minutes.

M. Claveau: Oui. M. Thibault, j'aurais aimé connaître votre architecture que vous avez développée, que certains ministères ont appliquée. Comment cette architecture... Est-ce que vous avez fait des suivis par rapport aux dépassements, aux extras, aux ajouts qui sont faits aux contrats qui sont donnés? Comment ça a permis de le limiter par votre... Est-ce que vous avez fait un suivi là-dessus?

M. Thibault (Gilles): Il est impossible pour nous... Vous devez garder à l'esprit que nous sommes une petite entreprise, une PME...

M. Claveau: Parce que les ministères, entre autres...

**(12 h 20)**

M. Thibault (Gilles): ...alors cette information-là ne nous est pas accessible vraiment, on n'a pas les ressources pour faire ce genre de suivi là.

La seule chose que je peux vous dire, c'est la réaction des utilisateurs. Notre approche contractuelle, depuis 2003, s'est multipliée de façon importante. On a gagné des adeptes, on en gagne à toutes les semaines parce qu'ils sentent que ça répond à un besoin d'intégrité, de sécurité et aussi de flexibilité pour eux.

On a commencé très timidement dans le réseau de la santé et très timidement dans le réseau des sociétés de transport en commun. On vous mentionnait ça comme étant des bancs d'essai. Et le plus beau témoignage que je peux vous donner, c'est qu'on s'est multipliés. Si vous regardez la liste, un peu, des utilisateurs, elle est loin d'être exhaustive, mais ce sont eux qui sont les vrais juges de notre performance et de la valeur de ce qu'on a mis entre leurs mains.

M. Thibault (Alexandre): Si je peux me permettre un complément de réponse.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): Oui, M. Thibault... Alexandre.

M. Thibault (Alexandre): Oui, absolument. Il y a des économies qui sont réalisées à plusieurs niveaux. Et je pense que c'est ça, votre question. Oui, il y a les extras, bien entendu, là, mais il y a plusieurs autres économies qui sont réalisées. Puis on a fait une étude interne avec un de nos clients, qui nous a gracieusement fourni l'information dont on avait besoin. Puis ça, c'est une étude qui a été faite conjointement avec un de mes professeurs à UCLA pendant que j'étais là-bas. Et cette étude-là a démontré des économies importantes au niveau du budget de contingence, oui.

Mais est-ce que c'est difficile de déterminer quel pourcentage des économies qui ont été réalisées suite à l'adoption de la méthode? Est-ce que c'est difficile de le déterminer? Bien entendu, mais je peux vous confirmer que, selon cette étude-là, il y a eu des économies relativement importantes, puis ce n'est pas dans les quatre chiffres, là, c'est pas mal plus élevé que ça, là.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): Merci. Et nous allons passer maintenant à l'échange avec des représentants de l'opposition officielle. M. le député de Louis-Hébert.

M. Hamad: Alors, je vais souhaiter la bienvenue à M. Thibault, Mme Trottier et M. Thibault.

J'ai eu l'occasion d'enseigner, pendant 15 ans, la gestion des contrats à quelques universités, et un des thèmes dont on parlait, c'est les contrats. Mais peut-être répondre à M. Dubuc un petit peu, le député de Dubuc: En fait, un contrat ne sauve pas d'argent, mais ça vous protège de ne pas dépenser plus d'argent. C'est plutôt ça, là, dans le concept. Et donc ce n'est pas une économie, mais c'est plus de ne pas passer les dépenses. Et souvent on n'a pas nécessairement les bons contrats.

Maintenant, j'ai un point à vous demander, une question. Vous avez parlé d'embourber, là, c'est votre crainte majeure, là, c'est la paperasse, puis tout ça. Mettons si on a 35 000 entreprises qui soumissionnent au Québec dans l'ensemble des contrats en santé, les sociétés de transport. Parce que tous vos clients -- j'ai regardé la liste de vos clients -- vont être assujettis un jour ou l'autre à cette loi-là. Alors, pensez-vous que, si on prend tous vos clients, incluant les autres clients, la machine, elle va être capable de donner des autorisations rapidement pour voir ces gens-là soumissionner?

M. Thibault (Gilles): Écoutez, j'ai une crainte que la machine ait de la difficulté à répondre à tout ça parce que, quand je regarde un peu la liste d'épicerie des critères, et ainsi de suite, ça m'apparaît lourd. Ça m'apparaît lourd. Alors, est-ce qu'on va avoir, au Québec, la capacité de mettre en place toutes les ressources pour bien exécuter cette tâche-là? Pensons juste aux compagnies étrangères. Qu'est-ce que ça va prendre pour être capable de faire un contrôle des compagnies étrangères versus les compagnies qui sont ici, au Québec?

Alors, il y a différents défis à relever. Et, pour l'instant, je n'ai pas la réponse à ces questions-là. Je fais tout simplement dire: Il faut commencer par poser le problème, voir qu'il y a ici une marche qui est assez haute à franchir, et on va espérer, collectivement, pour le bien de la province, qu'on va être capables de la franchir.

M. Hamad: On a les mêmes interrogations. Et l'objectif n'est pas baisser les critères, mais donner des chances à nos entreprises québécoises, comme on l'a fait avec le métro de Montréal, comme vous le savez.

Maintenant, est-ce que votre procédure ou votre architecture que vous avez proposée... Parce que vous avez passé rapidement, et je comprends, c'est un manque de temps. Vous savez, maintenant, au ministère des Transports, il y a un format de devis généraux. C'est un format standard qu'on utilise dans tous les contrats au ministère des Transports. Puis, au ministère de la Santé, le système de santé a des systèmes de devis, aussi, généraux et particuliers, etc.

Est-ce que vous, vous amenez... Quelle est votre valeur ajoutée là-dedans, là? Juste en très peu de mots.

M. Thibault (Gilles): Écoutez, le message que j'essayais de passer, c'est que ce qui coûte cher à l'État, c'est tout ce qu'on va appeler erreurs et omissions. Parce que ce qui coûte cher à l'État, ce sont les coûts cachés à l'intérieur d'un contrat, qui sont attribuables, la plupart du temps, à des erreurs et omissions.

Mon propos était que, lorsqu'on est arrivés en 2003 puis on a examiné l'architecture traditionnelle, notre commentaire a été... objectivement, là, sans parti pris, on leur a dit: Écoutez, vous avez le décor parfait pour des erreurs et omissions. C'est l'environnement idéal parce qu'il est presque impossible de voir des erreurs et omissions dans ce genre d'environnement là. C'est un problème structurel.

Et, à partir du moment où il y a erreurs et omissions, vous devez comprendre que la facture qui va avec ces erreurs et omissions là, c'est vous qui la recevez. C'est l'État québécois qui doit l'acquitter, cette facture-là, et elle peut être impressionnante. On regarde tout simplement, dans les... On écoute les nouvelles puis on entend parler des dépassements de coûts, des ci, des ça. Il faut peut-être remonter la filière puis voir quelles sont les erreurs et omissions dans les contrats qui ont ouvert la porte à ça. Et ça, on veut fermer cette porte-là.

Et c'est un peu la raison qui a amené cette méthodologie-là. C'est que ça nous donne l'équivalent d'un rayon X quand on travaille un contrat, et on a un niveau de visibilité qui fait en sorte que les petites failles que quelqu'un pourrait exploiter ne sont plus là... ou elles disparaissent de façon importante.

M. Thibault (Alexandre): Si je peux ajouter, la méthodologie en soi, elle est universelle. Ce qu'il faut comprendre, donc: d'un ministère à l'autre, quand on va regarder les documents, bien, le poste 2 va toujours être le prix. Quand vous allez avoir un contrat qui va passer en avant de vous autres, le poste 2, vous allez regarder au poste 2, vous allez avoir toute l'information que vous avez besoin pour le prix, qu'on parle du document d'appel d'offres, du formulaire de soumission ou du contrat en tant que tel.

Donc, pour vous, là, trouver les failles, puis trouver les problèmes, puis trouver les problèmes qu'il pourrait y avoir dans la collusion, vous allez simplement avoir un endroit où aller regarder parce que c'est là que le prix va être exprimé dans tous les contrats. Ça ne sera pas séparé en huit endroits différents. C'est vraiment facile de voir, quand toute l'information est au même endroit, d'avoir une idée de A à Z c'est quoi, le problème.

M. Thibault (Gilles): Je pourrais ajouter. C'est qu'il y a une différence entre normaliser un contrat et l'optimiser. C'est très important de faire cette distinction-là. On peut normaliser quelque chose qui n'est pas optimisé.

Je vous donne un exemple. Dans des contrats de construction, on peut retrouver des clauses d'ajustement de prix à plusieurs endroits à l'intérieur de ces contrats-là. C'est illogique d'avoir cette information-là éclatée à différents endroits quand elle devrait être concentrée, exemple au poste contractuel 2, pour faire en sorte qu'on voie le prix de base et tout ce qui déclenche les ajustements.

Automatiquement, on a amélioré la visibilité de l'information, et donc les risques d'erreur et omissions ou qu'on ait échappé quelque chose diminuent de façon importante.

M. Thibault (Alexandre): Et on réduit, par le fait même, les risques d'extras parce qu'on peut voir toute l'information directement. Donc, on n'a pas de surprise.

Mme Trottier (Denise): Si je peux ajouter quelque chose.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): Mme Trottier, oui.

Mme Trottier (Denise): Merci. Si je peux ajouter quelque chose, en 2003, au début, tout ce qu'on a fait, on a pris exactement le contenu qui était déjà là et on l'a recompilé dans notre contenant à nous. C'est tout ce qu'on a fait en 2003. Et déjà là il y avait une amélioration très nette dans la compréhension et le repérage des clauses et des informations qu'elle contenait. On a pu voir les trous, on a pu, justement, pallier aux manques et ensuite, déjà... Puis on était papier dans le temps, là, on était vraiment sur Word, simplement, et les gens ont trouvé une nette amélioration dans l'efficacité avec laquelle ils travaillaient.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): M. le député de Chomedey.

M. Ouellette: Merci, M. le Président. Messieurs dame de la famille Thibault, bonjour. Merci pour votre présentation. J'ai quelques questions. Je vais en avoir une pour Alexandre en particulier, là, parce que je regardais son C.V., puis ça m'a amené une question.

Mais, en rapport aux commentaires que vous avez faits, M. Thibault, vous avez été interpellé, en regardant le projet de loi, par... Vous avez mentionné les articles 23, 25, 26 et 27, qui parlent des politiques et qui parlent des choses qui peuvent être mises en place par la Conseil du trésor.

On a une autre perspective dans l'objectif du ministre aussi. C'est qu'on peut s'occuper des entreprises, mais il y a des humains qui touchent à des choses. Et, si je comprends bien, dans l'acétate... pas l'acétate mais le... justement, les adeptes de votre nouvelle architecture, à l'intérieur de chacun de ces adeptes-là, si on voulait savoir tous ceux qui ont été impliqués, à quelque stade du contrat, c'est possible de le savoir, je veux dire, toute l'information est là, là?

**(12 h 30)**

M. Thibault (Gilles): En fait, vous faites référence à l'outil que nous sommes en train de déployer en ce moment. Parce que nous avons créé un comité pour écouter les gens avec qui nous travaillons, qui nous ont manifesté des recommandations sur comment faire évoluer. Et, au moment où on se parle, on vient tout juste de déployer un outil qui permet justement de faire ces suivis-là: qui intervient dans le contrat, qu'est-ce qu'il a fait sur le contrat, et ainsi de suite, là.

M. Thibault (Alexandre): Si je peux encore ajouter à ce que mon père vient de dire -- on a une complicité assez naturelle -- cet outil-là, c'est vraiment à chaque fois que quelqu'un enlève une clause ou quelqu'un fait une modification dans une clause, ça laisse une trace. Donc, on n'est pas dans un document Word où la seule chose qu'on sait, c'est ce qui a été sauvegardé puis quand ça a été sauvegardé; on sait chaque interaction qu'il y a eu. Donc, s'il y a un sabotage, si je peux me permettre l'expression, avec un document, on le sait c'est qui qui l'a fait.

M. Thibault (Gilles): Ça laisse une trace.

M. Thibault (Alexandre): Ça laisse un trace. Donc, tout ça, c'est centralisé, puis on peut avoir accès à cette information-là à n'importe quel moment.

M. Ouellette: Vous allez faire plaisir à mon collègue de Verdun, là, si vous commencez à être capables de retracer tous ceux qui sabotent les documents puis les contrats. Vous avez mentionné tantôt que les frais du système d'appels d'offres gouvernementaux, ça pourrait décourager des entreprises, mais vous n'êtes pas allé plus loin, là. Je veux juste vous entendre 30 secondes parce que j'ai une question pour M. Alexandre.

M. Thibault (Gilles): Écoutez, je ne donnerai pas des noms, là, mais je vais quand même vous mentionner qu'on fait du travail, nous, avec les établissements de santé et on s'est fait dire, dans un appel d'offres, qu'ils ont reçu des soumissions et ils ont été étonnés du peu de soumissionnaires qu'ils ont eu pour cet appel d'offres là. Et le prix qu'ils regardaient était supérieur à ce qu'ils avaient prévu dans leur budget. Et, étonnés de voir le peu de soumissionnaires, ils ont fait quelques appels à leurs soumissionnaires traditionnels pour se faire dire que SEAO, pour avoir les documents d'appel d'offres, les plans, etc., il y avait une facture qui pouvait se chiffrer à 1 500 $ -- je vous donne le chiffre, mais sous toutes réserves -- et que certains de ces soumissionnaires-là ont dit: Écoutez, nous, là, pour savoir si on veut soumissionner, ça ne nous tente pas de payer 1 500 $. Donc, ça fait baisser, bien entendu, la concurrence. Quand il y a une réduction de la concurrence, automatiquement vous avez un effet à la hausse sur les prix qui peuvent être soumis, là.

M. Ouellette: La dernière question, je regardais le C.V. d'Alexandre Thibault, là. Vous étiez promu à une très belle carrière en Californie. Un avocat de Sherbrooke -- qui est la meilleure université, d'ailleurs, n'en déplaise à M. le ministre, Sherbrooke, c'est une très bonne université -- qu'est-ce qui vous ramène au Québec dans l'entreprise familiale? D'après ce que je peux voir, vous étiez sur une très bonne lancée en Californie.

M. Thibault (Alexandre): Oui, c'est gentil, merci. Bien, c'est fou comment, quand on est ailleurs, on réalise comment on aime chez soi. Quand j'étais en Californie, j'ai réalisé vraiment à quel point, à quel point j'aimais le Québec puis à quel point je m'ennuyais de tout ce que le Québec pouvait avoir à m'offrir. Puis on était sollicités à ce moment-là par de plus en plus d'organismes publics pour venir aider ces gens-là à avoir des outils, des outils supérieurs, des outils plus performants. Puis très rapidement, c'est ça qui m'a ramené ici. Parce que les gros salaires qui pouvaient m'être offerts là-bas, ça n'avait rien comparativement à venir aider d'où je venais puis aider ma famille aussi, c'est sûr, très important.

M. Ouellette: O.K.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): Ça a fait l'affaire aussi de papa et maman, j'imagine. M. le député? C'est complet pour... Alors, M. le député de Saint-Jérôme.

M. Duchesneau: Merci, M. le Président. J'ai six minutes, ça inclut vos réponses, ça fait que j'ai beaucoup de questions parce que mes collègues ne veulent pas me donner plus de temps. Alors, dites-moi, en fait, quand on parle collusion et corruption, collusion, ça reste dans l'esprit, les gens s'entendent, mais on a de la corruption uniquement quand le contrat est signé.

M. Thibault (Gilles): En fait, écoutez, je pense que les parties avec qui on transige peuvent être des personnes corrompues, donc, d'entrée de jeu on peut les avoir.

M. Duchesneau: Mais la corruption, ça ne se matérialise pas tant et aussi longtemps que le contrat n'est pas signé, donc.

M. Thibault (Gilles): Vous avez raison. Vous avez raison.

M. Duchesneau: C'est donc la porte d'entrée à la corruption.

M. Thibault (Gilles): Tout à fait.

M. Duchesneau: On peut faire des vérifications avant, ce que le registre nous propose, mais on ne concrétise rien tant que le contrat n'est pas signé.

M. Thibault (Gilles): En fait, ce que vous dites, c'est que le contrat peut être un véhicule par lequel cette corruption-là se manifeste, oui.

M. Duchesneau: Oui, mais, s'il n'y a pas de contrat, il ne peut pas y avoir de corruption.

M. Thibault (Gilles): Vous avez raison.

M. Duchesneau: En fait, donc, ce que vous dites, c'est un outil. Et le commentaire que je ferais au ministre, c'est qu'un peu comme dans une enquête policière votre registre est un peu comme le centre des renseignements policiers du Québec. Alors, c'est une banque de renseignements où je peux aller chercher de l'information, mais j'ai de l'enquête à faire, j'ai de l'interrogatoire à faire, j'ai de l'observation à faire. Donc, ça ne peut pas être monocorde, la lutte à la corruption, d'une certaine façon. Ce qu'on a besoin, c'est une harpe avec beaucoup de cordes. Ce que vous proposez, c'est une de ces cordes.

M. Thibault (Gilles): Exact.

M. Duchesneau: Parce que, si le seul outil qu'on a dans notre coffre, c'est un marteau, on vient à voir tous les problèmes comme des clous. Et là, si on veut juste régler des problèmes en amont, c'est-à-dire empêcher des gens corrompus de venir, bien, je peux vous dire qu'il y a des bonnes personnes qui commettent des mauvaises actions si on les laisse faire. Alors, oui pour le registre, l'autorisation, mais mettons un oeil plus particulier sur le contrat, sinon...

M. Thibault (Gilles): Oui, parce qu'écoutez le contrat peut faire partie de la solution ou il peut faire partie du problème.

M. Duchesneau: S'il est mal fait.

M. Thibault (Gilles): Alors, notre propos à nous et notre objectif, c'était de vous proposer une architecture qui faisait partie de la solution et non du problème.

M. Duchesneau: C'est ça. Mais donc, c'est un outil. C'est comme un oignon: si notre corruption est au début, c'est des pelures d'oignon qu'on met, une de plus, mais ça ne peut pas être uniquement l'autorisation ou le registre. C'était le commentaire que je voulais faire.

Vous avez parlé de normalisation et d'optimisation des contrats, encore là, parce que ça tient plus à votre outil dont vous parlez aujourd'hui. Qu'est-ce que vous...

M. Thibault (Gilles): En fait, ça tient à l'outil, mais ça tient à une observation que j'ai faite tout au long de ma carrière d'avocat, c'est qu'il se perd énormément de temps. Vous savez, il y a une étude de Price Waterhouse qui dit qu'on passe deux fois plus de temps à chercher de l'information qu'à la traiter.

M. Duchesneau: Oui.

M. Thibault (Gilles): Alors, quand on arrive dans un environnement contractuel, si on passe plus de temps à chercher qu'à traiter, c'est deux heures de zéro valeur ajoutée pour une heure de valeur ajoutée, ce n'est pas ce que vous souhaitez, ce n'est pas votre environnement idéal.

Quand on parle d'optimisation, je vous donne juste une illustration extrêmement simple: les obligations d'une partie dans un contrat. Dans la plupart des contrats qui n'utilisent pas cette architecture-là, les obligations d'une partie -- prenons l'exemple d'un bail -- peuvent se retrouver un peu partout dans le bail, et, si on veut avoir une vue d'ensemble rapide, on doit lire la totalité du bail. Ce niveau d'efficacité là, c'est zéro puis une barre. Excusez l'expression.

Alors, dans l'approche des postes contractuels, où je mentionnais que ce sont des organes vitaux, un organe vital, c'est: quelles sont les obligations d'une partie, mais on les concentre toutes à cet endroit-là. Non seulement, on les concentre à cet endroit-là, mais on essaie de dérouler ces obligations-là pour refléter un processus d'affaires. Et cette information-là, elle nous vient des gens qui sont sur le terrain. Sans eux, on n'est pas capables de dérouler cette information-là de façon optimale, et ça fait en sorte qu'on parle le même langage. Ces gens-là se retrouvent dans un environnement où ils peuvent intercepter des problèmes. Alors, ça, c'est l'optimisation versus la normalisation.

M. Duchesneau: On parle d'autorisation, on parle de registre, est-ce que votre expérience est à l'effet que toutes les institutions publiques au gouvernement du Québec ou aux municipalités ont le même type de contrat? Est-ce que c'est uniforme?

M. Thibault (Gilles): Pas du tout. Pas du tout. Nous, on a vu plusieurs types de contrats de différents ministères, il n'y a pas beaucoup d'uniformité. Il y en a un peu, mais il y a encore beaucoup de place pour de l'amélioration.

M. Duchesneau: ...si on se donne une protection au niveau de l'autorisation, du registre, il faudrait continuer la démarche et se trouver une autre police d'assurance, la dernière bouée de sauvetage avant de faire un contact un fournisseur. Donc, il faut vérifier, selon ce que vous nous proposez, là, avec les trous qu'on peut trouver dans les contrats parce que ce n'est pas uniforme.

M. Thibault (Gilles): Bien, c'est que vous avez, selon moi, deux remparts à l'intégrité: c'est, un, l'admission...

M. Duchesneau: Oui.

M. Thibault (Gilles): ...et, deux, le contrat lui-même. Si vous affaiblissez l'un ou l'autre de ces remparts-là, vous pouvez vous retrouver avec des problèmes et des surprises, des coûts cachés et des frais additionnels que vous n'avez pas prévus dans vos budgets.

M. Duchesneau: Une fois que c'est signé, il est trop tard.

M. Thibault (Gilles): Il est un peu trop tard.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): Ça va?

M. Duchesneau: ...monsieur, je pense, 6 minutes?

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): Si vous avez d'autres questions, il y aurait encore un petit peu de temps, oui.

M. Duchesneau: Correct? C'est parce qu'on n'a pas le même chronomètre, alors je manque...

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): Là, on est à 5 min 29 s.

M. Duchesneau: Ah! O.K. À part de ça, M. Thibault, ça va bien?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Duchesneau: Les enfants, oui?

M. Thibault (Gilles): Très bien, merci.

M. Duchesneau: Non, je n'ai pas d'autre question.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): Merci, M. le député. MM. Thibault, Mme Trottier, merci beaucoup d'avoir participé à notre commission. Ce fut très agréable et très enrichissant.

Je ne dirai pas: Compte tenu de l'heure, parce qu'il n'est pas 13 heures, mais disons que je suspends quand même les travaux de la commission jusqu'à 15 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 40)

 

(Reprise à 15 h 11)

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des finances publiques ouverte. Je demanderais à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.

La commission est réunie afin de procéder à des consultations particulières et des auditions publiques sur le projet de loi n° 1, Loi sur l'intégrité en matière de contrats publics.

Alors, bonjour à tout le monde, bon après-midi et bienvenue aux représentants de la corporation des entrepreneurs généraux en construction du Québec, bienvenue à notre commission.

M. Martin, Luc Martin, ou M. Beaudoin, président, vice-président, en tout cas celui qui interviendra, vous avez 10 minutes pour vous présenter, et présenter les gens qui vous accompagnent, et faire votre présentation. À vous la parole.

Corporation des entrepreneurs
généraux du Québec (CEGQ)

M. Martin (Luc): Merci bien. Alors, je vais vous présenter les gens qui m'accompagnent: M. Joseph Beaudoin, le président du conseil d'administration, à ma droite; à ma gauche, M. Benoît Lussier, vice-président du conseil d'administration; et, à mon extrême droite, Me Pierre-Stéphane Poitras, le secrétaire de la corporation, qui va vous introduire nos propos.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): À vous la parole.

M. Poitras (Pierre-Stéphane): Alors, bonjour à tous. Bonjour à tous, merci. Alors, premièrement, nous désirons vous remercier de l'opportunité qui nous est offerte aujourd'hui de vous exprimer la vision des entrepreneurs généraux qui oeuvrent dans les bâtiments institutionnels, commerciaux et industriels sur le projet de loi n° 1.

Comme vous le savez, les entrepreneurs généraux occupent une place importante et stratégique dans l'exécution des contrats de construction des bâtiments, particulièrement auprès des organismes publics. En plus de s'engager à livrer des ouvrages aux prix et aux délais d'exécution convenus, ils sont également assujettis à toutes les contraintes et obligations imposées par le législateur à l'industrie de la construction ainsi qu'au marché public, et c'est peu dire.

Depuis les derniers mois, l'ensemble des entrepreneurs est victime de la mauvaise réputation faite à l'industrie de la construction, causée principalement par la faiblesse et l'incapacité de nos règles de marché public à identifier et à contrer la corruption et la collusion. Force est de constater que nos marchés publics sont perméables aux influences, aux infiltrations et exposés à des malversations de toutes sortes.

Les autorités publiques ont souvent tendance à ne pas saisir l'importance des mises en garde qu'on leur signale. La tendance est également de confier des pouvoirs et des responsabilités à des personnes qui ne sont pas préparées à les assumer et, en plus, sans exercer de contrôle, ce qui expose nos marchés publics à des dérapages importants qui entachent la réputation de l'ensemble de ceux qui gagnent leur vie honnêtement en plus d'occasionner des coûts importants aux contribuables et de faire perdre confiance aux fournisseurs envers les processus suggérés.

Nos règles qui régissent nos marchés publics doivent être modernisées. La CEGQ fera d'ailleurs bientôt des recommandations inspirées des meilleures pratiques, de ce qui se fait de meilleur dans le monde. Le présent mémoire en contient quelques-unes. Premièrement, nous souscrivons à la volonté gouvernementale de réserver les contrats publics aux entreprises qui font preuve d'intégrité et de probité. Toutefois, ce permis est loin de nous assurer du respect des règles par les différents acteurs et de placer les marchés publics à l'abri de la collusion et de la corruption.

À titre d'exemple, le permis de conduire, qui est également un privilège et qui peut être retiré à tout conducteur, n'empêche pas les nombreuses dérogations au Code de la route -- les excès de vitesse et même la conduite en état d'ébriété -- et ce, par toute personne de toute couche de la société. Et pourtant nous avons des policiers avec les pouvoirs nécessaires pour les intercepter sur le fait, les contrevenants, leur retirer leurs permis de conduire et les référer à la justice.

Ici, en matière de marchés publics, au Québec, il n'y a ni policier ni mécanisme de contrôle qui peuvent, sur-le-champ, questionner des pratiques qui visent à avantager indûment certains fournisseurs ou encore suspendre ou arrêter un processus alors qu'il ne répond pas aux règles établies. Le projet de loi n° 1 ne vient malheureusement pas corriger cette importante lacune.

Plutôt que de se concentrer uniquement sur le passé des entreprises, de leurs actionnaires, de leurs dirigeants, de leurs connaissances, nous croyons également que le législateur devrait mettre en place des contrôles pour dissuader la chaîne des fournisseurs, entrepreneurs généraux, sous-entrepreneurs, mais également les professionnels fonctionnaires et les élus de contrevenir aux règles, et de céder aux règles, et de céder à la collusion et à la corruption. D'ailleurs, la tendance dans plusieurs pays est de mettre en place de tels contrôles indépendants des organismes qui octroient les contrats.

Au niveau du champ d'application, nous saluons le fait que ce projet de loi s'applique aux municipalités, aux ministères et aux organismes, ainsi qu'aux sociétés d'État. Nous sommes d'ailleurs très heureux de supporter le législateur d'assujettir Hydro-Québec à la Loi sur les contrats des organismes publics. Mais, selon nous, on doit aller plus loin. Nous aurions souhaité également que ce projet de loi assujettisse également à la Loi sur les contrats des organismes publics les municipalités, les sociétés de transports ainsi que les OBNL, tels que les offices municipaux d'habitation qui octroient d'importants contrats de construction subventionnés par l'État. Les mêmes dispositions devraient également s'appliquer pour tous les projets de construction financés par des fonds publics.

Les entrepreneurs généraux souhaitent également que la réalisation d'importants projets de construction, tels les cégeps et universités, soient regroupés vers une seule et même entité. Nous avons d'ailleurs présenté en ce sens, en 2004, à la présidente du Conseil du trésor, des recommandations où nous suggérions la création d'une agence spécialement dédiée à la réalisation de tels projets.

Au niveau de la gouvernance, la CEGQ réclame depuis longtemps davantage de pouvoirs à l'organisme responsable de l'application des règles qui gouvernent nos marchés publics. Nous trouvons des plus constructifs de permettre au Conseil du trésor d'établir des politiques de gestion contractuelles et de lui confier la gestion de tels organismes. Nous accueillons également favorablement la possibilité qu'aura le Conseil du trésor d'édicter des contrats et des documents standards qui devront être appliqués par tous les organismes publics. Nous souhaitons donc que ces conditions soient également appliquées aux municipalités, sociétés d'État et autres organismes.

La CEGQ appuie l'adoption des dispositions qui permettront au Conseil du trésor d'exiger et de recevoir directement les redditions de comptes des dirigeants des organismes publics. Cet élément est très important, puisque le respect des règles actuelles repose essentiellement sur la reddition de comptes fondée sur l'imputabilité des dirigeants.

Or, ce processus d'imputabilité ne fonctionne pas actuellement. Imputable envers qui? Quand sommes-nous imputables? Les organismes sont-ils imputables? La CEGQ, personnellement, intervient régulièrement en cours de période de soumission pour faire corriger des conditions contractuelles qui sont en dérogation avec la loi. Puisque les dirigeants des organismes publics ne retournent pas nos appels, nous comprenons qu'ils ne sont pas imputables. Nous devons donc nous référer au Conseil du trésor, qui, à son tour, se doit de se référer au ministre, qui, à son tour, se réfère au sous-ministre, pour finalement intervenir auprès de l'organisme public. Bien, dans ce cas-là, il arrive très souvent que les délais de soumission sont maintenant passés, les soumissions sont déposées et, par le fait même, le dirigeant de l'organisme public qui ne respecte pas la loi n'a pu être interpellé au bon moment.

Il en est de même pour les municipalités dont l'imputabilité repose sur le fait que ce sont les élus qui auront à rendre des comptes à la population, alors que la majorité des municipalités n'ont pas d'opposition ni l'expertise pour gérer et octroyer d'importants projets de construction.

Pour réguler les agents responsables des marchés publics, des ministères, des organismes et sociétés d'État, il faut, selon nous, octroyer davantage de pouvoirs au Conseil du trésor pour qu'il puisse y jouer un rôle dissuasif et de policier envers ceux qui auraient tendance à s'égarer et à ne pas se conformer à la réglementation.

Nous recommandons d'octroyer au Conseil du trésor le pouvoir de suspendre sur-le-champ un document d'appel d'offres lorsqu'il a des raisons de croire qu'il contient des éléments contraires à la réglementation ou à ses politiques de gestion. Il en est de même s'il a de bonnes raisons de croire qu'il pourrait y avoir conflit d'intérêts, collusion ou corruption. De plus, le Conseil du trésor devrait également pouvoir initier une enquête ou des vérifications s'il a des motifs raisonnables de croire qu'un marché public contrevient à sa réglementation.

**(15 h 20)**

Nous comprenons que la réglementation des marchés publics est de plus en plus complexe pour les agents publics. Ainsi, une personne mieux formée pourra aider ses collègues à produire des documents d'appel d'offres conformes. Contrairement aux intentions de ce projet de loi, nous ne croyons pas que cette personne responsable pourra intervenir efficacement auprès d'un collègue ou d'un supérieur si elle soupçonne une présence de conflit d'intérêts, de collusion ou corruption. Comment peut-on penser que la personne responsable de l'observation de ces règles, à l'emploi d'une municipalité, puisse contrecarrer les projets de son supérieur, ou du maire, ou d'un élu, ou bien d'un professionnel mandaté à cet effet sans risquer de perdre son emploi? Former davantage d'agents de l'État aux règles des marchés publics est une bonne chose, toutefois, pour être dissuasifs et efficaces, selon nous, ces contrôles doivent être externes à l'organisme visé.

Nous comprenons la volonté gouvernementale d'exclure des marchés publics les fournisseurs reconnus coupables de fraude, de corruption, qui ne méritent pas la confiance du public. Vous aurez pu constater que notre mémoire contient plusieurs éléments dont nous vous invitons à prendre connaissance.

Mais voici les trois principales recommandations. Premièrement, que ce projet de loi assujettisse à la Loi sur les contrats des organismes publics les municipalités, les sociétés de transport, les OBNL tels que les offices municipaux qui octroient d'importants contrats de construction subventionnés par des fonds publics.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): M. Poitras?

M. Poitras (Pierre-Stéphane): Oui?

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): Je vais vous laisser compléter. Peut-être juste lister vos trois items, et après on passera à une période d'échange.

M. Poitras (Pierre-Stéphane): Et j'ai terminé avec les trois items. Parfait, M. le Président, c'est ce qui était prévu.

Deuxièmement, que le législateur mette l'accent sur des mesures dissuasives et de contrôle qui s'appliqueront à l'ensemble des acteurs du marché public et non pas seulement aux fournisseurs.

Et la troisième... Et, à cet égard, je vais tout de suite mentionner à tous les membres du comité qu'il y a une coquille dans notre mémoire. C'est que, pour éviter de mettre les entrepreneurs généraux dans l'embarras et de leur imposer un risque qu'ils ne peuvent prévoir, nous recommandons que la deuxième phrase de l'article 21.18 du projet de loi soit supprimée afin de plutôt inclure les sous-contractants dans le premier alinéa de cet article, donc que tous doivent détenir une attestation lors du dépôt de la soumission et non pas seulement lors de la signature du contrat. Tous devraient être égaux devant la loi, et c'est pourquoi on suggère que l'article 21.18 s'applique autant à l'entrepreneur qu'aux sous-traitants qui vont devoir faire affaire avec l'entrepreneur. Je vous remercie.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): Merci, M. Poitras. Nous allons maintenant passer à une période d'échange de 22 minutes avec les représentants de la partie gouvernementale. Alors, M. le ministre, vous avez la parole.

M. Bédard: Merci, M. le Président. Donc, je vous remercie, effectivement, de votre mémoire puis de l'appui que vous accordez à la loi dans son ensemble, dans ses principes, dans ses objectifs. C'est une bonne chose pour vos membres, je pense, pour ceux qui, dans la vaste majorité des cas, ont adopté des bonnes pratiques et sont toujours frustrés de voir des comportements qui ne sont pas compris dans le cadre législatif, je vous dirais, là, et jusqu'à purement illégal ou même d'autres types de comportement. Donc, c'est un bon appui que nous avons, j'en suis fort heureux.

Vous dire que... ne vous méprenez pas sur nos intentions: nous agissons sur ceux et celles qui vont contracter avec l'État. Ça ne veut pas dire que nous n'agirons pas sur la suite des choses, sur le reste des choses. Déjà, il y a des lois sévères en matière de collusion, de fraude, pour toute personne qui se trouve en situation d'illégalité, tel qu'on a mentionné, par exemple la collusion, la fraude. On en voit de ces temps-ci, malheureusement, là. Mais nous en sommes à réfléchir sur comment les détecter, comment se donner des processus pour être capables de ne pas attendre l'inévitable, là. Ça fait plusieurs fois que je me répète, il y a eu plusieurs groupes, mais c'est vraiment notre volonté.

Donc, c'est une première étape -- je parlais de trilogie, une belle trilogie: au départ, ceux qui contractent... On a une situation urgente, il faut ramener la confiance, probité, alors on commence. Puis, de toute façon, c'est un processus qui va s'étendre. Autrement dit, à partir du moment où on commence, on ne peut pas certifier tout le monde. Donc, il y aura un crescendo, il y aura une mise en application qui va permettre à terme, effectivement, d'avoir un processus qui va être tout à fait rodé.

Le deuxième, ça va être d'agir au niveau, effectivement, de ceux et celles qui prennent les décisions. Et nous en sommes là, donc. Dans certains cas, malheureusement, même face à -- comment je pourrais dire sans cibler personne, c'est assez difficile, là -- face à des situations d'illégalité plus que présumées, disons, quasi avouées, il y a des gens qui ne comprennent pas. Donc, on devra agir sur tous les plans. Ça, je suis entièrement d'accord.

Et ultimement, après ça, sur aussi la révision de l'ensemble de la façon qu'on donne les contrats publics, quand on voit les mauvaises pratiques, comment on peut uniformiser. On est là, c'est pour ça. D'ailleurs, une des dispositions du projet de loi ramène à rapatrier -- je vois que vous êtes en accord avec ça -- au Conseil du trésor, qui a déjà des bonnes compétences, pour assurer une plus grande harmonisation, pour faire en sorte que vous qui soumissionnez ne soyez pas pris dans des règles, des fois, un peu disparates qui font en sorte que ça peut donner l'impression parfois -- sans parler de collusion, ou corruption, ou quoi que ce soit -- que les appels d'offres ne suivent pas des règles qui devraient normalement être suivies pour assurer une saine concurrence. Tout ça.

Et ce que j'ai compris... Mme Blackburn me disait: Parfois, ce n'est même pas par mauvaise foi. C'est des gens qui ont développé d'autres façons de faire, mais qui conduisent à un mauvais résultat. Et ça, je peux vous le dire, nous avons la même préoccupation que vous.

Je veux comprendre. Vous avez, dans vos trois propositions principales... La dernière, pourriez-vous me l'expliquer un peu mieux, là? J'ai eu de la misère à la saisir quand je l'ai lue puis quand vous l'avez mentionnée.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): M. Poitras.

M. Poitras (Pierre-Stéphane): Oui, O.K. Je vais commencer et, au besoin, je laisserai un des membres, également, compléter.

La situation est fort simple, et je vais vous l'expliquer par un exemple, là. Présentement, la façon dont est fait le projet de loi, c'est qu'on demande à l'entrepreneur général, celui qui contracte directement avec le gouvernement ou l'organisme public, d'avoir son attestation au moment où il dépose son prix auprès du gouvernement. Naturellement, à titre d'entrepreneur général, on doit coordonner un nombre de sous-traitants. Et ici, le deuxième alinéa nous dit... un article dit que le sous-traitant doit être conforme au moment où il signe le contrat avec ce sous-traitant. Mais, entre le moment où l'entrepreneur général est appelé à signer un contrat avec un sous-traitant, il peut se passer plusieurs mois entre le moment de sa date de dépôt de soumission et la date d'octroi de contrat.

Imaginez le cas où l'entrepreneur général, qui -- naturellement, on est le plus bas soumissionnaire conforme -- prend le prix d'un soumissionnaire pour un montant de 1 million, mais il ne sait pas que, six mois plus tard, ce même soumissionnaire à 1 million n'aura pas son attestation, il va se retrouver avec le deuxième soumissionnaire à 1,5 million. Qui va assumer le 500 000 $ supplémentaire? Par le fait même, l'entrepreneur va se faire dire: Bien, écoutez, c'était dans votre soumission.

Alors, c'est pourquoi on se dit: Pourquoi tous les gens ne devraient pas être égaux vis-à-vis la loi et être en probité envers la loi au moment de la date du dépôt de la soumission, étant donné que l'entrepreneur général, jusqu'à un certain point, et pour certaines spécialités, transporte le prix de son soumissionnaire? Le sous-traitant lui-même devrait être conforme à la date du dépôt de la soumission, ce qui va éviter de mauvaises surprises et des pertes financières qui peuvent s'avérer très lourdes et mettre en péril un entrepreneur général.

M. Bédard: Même dans le cadre des travaux, ce n'est pas parce que tu as une habilitation que tu vas nécessairement maintenir cette habilitation. Il n'y a pas d'engagement du gouvernement de maintenir l'habilitation. Donc, ce que je veux vous dire, c'est que ce n'est pas une garantie. Il peut arriver, dans le cadre de l'exécution des travaux, qu'il y ait une suspension de l'habilitation. Par exemple, prise de contrôle par des gens qu'on considère... ou peu importe, modification de la situation de l'entreprise. Et ça, je ne peux pas, tu sais, vous garantir, dans le cadre de l'exécution, qu'il n'y a personne qui va perdre les habilitations. C'est pour ça que je veux voir où est, pour vous, le problème.

Parce qu'à terme... C'est sûr qu'on est au début. Ce que je veux voir avec vous, là, à terme, j'ai l'impression que les entreprises avec qui vous travaillez vont être habilitées. C'est elles-mêmes qui soumissionnent. Vous risquez même, à un moment donné, de le demander. Mais, au début, il faut que j'applique la loi, moi. Tu sais, c'est pour ça que je me dis: Je ne veux pas me créer un problème de goulot d'étranglement, là.

M. Poitras (Pierre-Stéphane): Selon moi, M. le ministre...

M. Bédard: Allez-y.

**(15 h 30)**

M. Poitras (Pierre-Stéphane): ...je ne pense pas que vous allez créer un tel goulot d'étranglement, là. Au contraire, vous allez éviter beaucoup de problèmes, étant donné que le gouvernement va s'assurer qu'au moment où il reçoit un prix d'un entrepreneur général l'ensemble des acteurs qui vont conclure un contrat, donc l'ensemble de ses sous-traitants, vont également être conformes envers la loi.

Et le problème que vous soulevez peut arriver à n'importe quel moment. Et il y a même des dispositions du projet de loi qui le disent, que, dans l'éventualité où un contrat -- même un entrepreneur général -- a été octroyé, est en cours d'exécution, on peut demander une dérogation ou d'avoir un suivi. Les articles suivants de votre projet de loi le prévoient.

Alors, on peut très bien assigner ces mêmes articles là aux sous-traitants, que, dans l'éventualité où un sous-traitant, du jour au lendemain, perd son attestation, on peut très bien demander une dérogation ou des mesures de contrôle. C'est ce que prévoit votre projet de loi lorsqu'on regarde les différents articles.

Regardez 21.19, vous traitez de cocontractant, mais le cocontractant pourrait également être le sous-traitant. L'article 21.19 de votre projet de loi pourrait également s'appliquer aux sous-traitants. Et, dans les faits, c'est ce qui se passe actuellement avec les autres projets de loi: lorsqu'un sous-traitant perd son attestation, automatiquement, on doit demander une dérogation à cet égard. C'est bien ça.

M. Bédard: Non, non, c'est clair, effectivement. Il y a des avantages à maintenir la formule actuelle, mais vous n'êtes pas le premier à venir représenter effectivement que ça peut causer un problème. On peut retourner, pour vous... Au départ, vous allez demander des soumissions, parce que... Bon, les plus gros, ça fonctionne, mais pour les plus petits, les plus petits sous-contractants, vous allez procéder comment? C'est ça qui fait comme m'inquiéter un petit peu, là.

M. Poitras (Pierre-Stéphane): Eh bien, eût égard aux plus petits sous-traitants, je pense que la loi doit s'appliquer de façon uniforme à tous. Et, à partir du moment... J'ai compris que votre projet de loi, premièrement, de toute façon, il va y avoir une évolution. Dans son application, on parle, premièrement, avec les projets de plus de 50 millions. Et, au fur et à mesure, j'imagine que, par biais de décret, le gouvernement va dire: Maintenant, le palier des contrats est rendu à 20 millions, à 10 millions, peu importe. Mais, par le fait même, les sous-traitants vont devoir s'adapter à la loi. En bout de ligne, on va se retrouver certainement au plafond de 25 000 $ de la loi sur les contrats de construction. J'imagine que votre objectif, c'est de descendre ça à 25 000 $. Bien, pourquoi ne pas demander ça à tout citoyen corporatif qui désire faire affaire avec le gouvernement d'être simplement conforme à la loi? Les plus petits...

Et je pense que la seule façon de pouvoir éviter des problèmes avec les petits sous-traitants, M. le ministre, c'est dans la simplicité du formulaire. Plus la demande d'attestation va être simple, plus vous allez pouvoir permettre aux petits sous-traitants de faire et d'obtenir également leur attestation. Ça sera tout le mécanisme.

Si vous mettez un mécanisme très lourd pour obtenir l'attestation, vous allez décourager, peu importe le montant du contrat, les petits sous-traitants à travailler avec le public. Simplifiez le mécanisme pour obtenir l'attestation, et, par le fait même, vous dites que ce projet de loi prévoit qu'elle est bonne pour trois ans, alors ce n'est pas quelque chose qu'on doit revenir aux six mois non plus, là.

M. Bédard: Écoutez, je vais réfléchir. Il y a, comme je disais tantôt, des avantages, des inconvénients, surtout au début. En même temps, je me dis... C'est ce que je présentais, je pense que c'est hier ou avant-hier, là, je ne me souviens plus, il reste qu'on gère l'exception. En tout cas, on le souhaite, là. Tu sais, des entreprises qui ne se qualifieront pas, ce n'est quand même pas, là... j'espère ne pas arriver avec la moitié des entreprises, là, dans le sens, j'espère, qu'on prend pour acquis que les gens dans le domaine, les sous-traitants, c'est du bon monde, là, comme vous et moi, puis ce n'est pas parce que tu es dans ces matières-là que tu ne corresponds pas à des hauts standards éthiques.

Donc, ma peur c'est de le faire à partir de l'exception, comme dans nos lois criminelles, les gens les suivent. À la limite, on n'aurait pas de Code criminel, puis les gens continueraient à se saluer, puis on ne tuerait pas plus notre voisin pour ça, là. Donc, dans le cas de la construction, les gens en général ne font de collusion, ils ne sont pas accusés de machins, ils ont une vie correcte, ils ne sont pas associés au crime organisé, tu sais, ce n'est pas...

Mais je comprends votre préoccupation puis je vais continuer ma réflexion. Je vous dirais, on l'a pensé d'une façon, elle est bonne, mais les arguments que vous donnez sont bons aussi. donc je vais continuer à y réfléchir, je vous dirais.

Une voix: ...

M. Bédard: Non, puis ça va faire plaisir au député de Louis-Hébert, parce qu'à chaque fois que vous parlez, il dit: Oui, oui, oui. J'ai l'impression qu'il fait de l'écho.

Au niveau de l'assujettissement des villes au niveau des contrats, donnez-nous les avantages d'aller plus loin sur l'assujettissement.

M. Lussier (Benoît): Si je peux me permettre, M. le Président, alors, au niveau de l'assujettissement des villes, mais non seulement des villes, des OBNL, des sociétés de transport et les offices municipales d'habitation, ces organismes-là vont donner pour plusieurs milliards de contrats par année, en fin de compte, au niveau des rénovations et des constructions.

Ce qu'on aimerait, nous, en fin de compte, c'est que tout ça soit harmonisé au niveau de l'industrie. Alors, ce qu'on retrouverait, c'est une façon de faire unique pour l'ensemble de la gestion du projet, qui fait référence, en fin de compte, à la Loi sur les contrats des organismes publics. Alors, on traite de tout, à cet effet-là, dans cette loi-là, autant l'appel d'offres que la gestion du projet, la gestion des changements, la gestion des différends. Alors, ça devient une façon d'harmoniser l'ensemble du fonctionnement qui va être beaucoup plus facile.

M. Bédard: ...des villes hier, l'UMQ, qui appuie aussi le principe du projet de loi. J'ai testé un peu avec eux: Bon, seriez-vous prêts à harmoniser? Eux disent: Bien, écoutez, disons qu'il y aurait... Pour résumer, ils ont répondu «noui», alors «oui mais», puis «peut-être»... Mais, je comprends, en même temps, les gens aiment bien, ils ont des pratiques, puis c'est correct aussi. Est-ce qu'on doit l'appliquer à tout le monde, tout le monde? Il y a une réflexion.

Mais ils nous disaient, par exemple -- je le teste avec vous: Nous, nos standards sont plus élevés, donc tout ça est plus serré. Ça fait que je leur ai dit: Bon, bien, si vous êtes meilleurs, on va vous suivre, on va avoir tendance à s'élever.

C'est quoi, puis sans faire un jugement de valeur, c'est quoi, les principales différences que vous voyez, en général, quand vous appliquez sur les contrats au niveau municipal versus le gouvernement?

M. Lussier (Benoît): Bien, entre autres...

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): M. Lussier? D'accord.

M. Lussier (Benoît): Oui, merci. Entre autres, au niveau des différences... Bon, au niveau de l'appel d'offres, c'est sensiblement similaire, en fin de compte: on procède par le SEAO puis on va en appel d'offres publics. Au niveau de la gestion des contrats en tant que telle, ne serait-ce que le traitement des changements à l'intérieur d'un contrat, les villes n'appliqueront pas la même façon de procéder que le règlement avec les organismes publics. Au niveau aussi du règlement et des différends, si c'est le cas, ce n'est pas le même cheminement, ce n'est pas la même façon de procéder.

Est-ce que c'est plus sévère ou mieux avec les municipalités? Personnellement, je pense que non. Je pense que le règlement est très bien à ce niveau-là. Les entrepreneurs vont se diriger en fonction de cette façon de procéder là. Éventuellement, on parle d'une espèce de référent qui pourrait aider à dénouer certaines impasses. Alors, ça devient facile parce que la façon de procéder est connue. Alors, ça viendrait harmoniser, en fin de compte, la façon de procéder.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): M. Martin, oui?

M. Martin (Luc): Pour compléter, n'oublions pas, peu importe, là, que ce soit une municipalité, un hôpital ou un édifice de l'éducation, ce sont les mêmes professionnels, ce sont les mêmes entrepreneurs, ce sont les mêmes sous-traitants, c'est le même béton, finalement, O.K.? Donc, c'est la même chose. Et ça permettrait, à ce moment-là, d'harmoniser, de se donner des règles, des règles harmonieuses... D'autant plus que le Conseil du Trésor pourra, là, établir des contrats standards.

Donc, imaginez, là, qu'il y a quelque chose qui ne va pas dans l'application du contrat de construction, on va l'amender, mais on va l'amender partout. Donc, tout le monde va bénéficier, justement, de cette harmonisation-là et des interprétations, aussi.

M. Bédard: Ce que je comprends, au-delà de la méthode, bonne ou mauvaise, c'est l'harmonisation pour vous, autrement dit une façon de faire, puis là tout le monde sait comment diriger. Il y a une préoccupation pour les entrepreneurs de dire: Tu sais, plusieurs façons de faire, ça complique la vie à tout le monde. Donc, prenez le meilleur cas, appliquez-le, puis déjà on serait plus heureux, là. Oui?

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): M. Lussier?

M. Lussier (Benoît): Oui, merci, M. le Président. Absolument. En fin de compte, c'est facile d'harmoniser ça. Puis je pense qu'il y a un bon travail qui a été fait pour la mise en force de ce règlement-là, des organismes publics. On a reconnu plusieurs choses à l'intérieur de ce document-là qui ont été revendiquées, en fin de compte, depuis longtemps, ne serait-ce que pour la reconnaissance de ce qui est attribuable à un changement. Comment évaluer ce changement-là?

Dans le bâtiment, c'est un prototype qu'on fait à toutes les fois. Il n'y a pas deux bâtiments de pareil, c'est normal qu'il y ait des modifications. Alors c'est adressé d'une bonne façon, puis je pense que ça éviterait beaucoup de litiges par rapport à ça.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): M. Beaudoin, est-ce que vous vouliez rajouter, oui?

**(15 h 40)**

M. Beaudoin (Joseph): Oui. C'est pour aller dans le même sens que mes confrères. Je pense que vous voulez édicter la loi n° 1... puis c'est une question d'intégrité que vous voulez faire, puis vous voulez, je pense, rétablir la confiance des citoyens envers nos organismes puis de la façon dont on gère nos contrats publics. Et je pense que, si vous passez à côté du municipal, c'est ce que les gens, nos concitoyens et nos contribuables voient de plus près, O.K.? C'est là que les gens sont les plus collés, sur le... Et je vous dirais que, dans le municipal, même si les gens du municipal disent qu'ils gèrent peut-être mieux que d'autres leurs contrats puis tout ça -- on ne fera pas leur procès aujourd'hui -- mais je pense qu'ils ont beaucoup à apprendre en gestion de contrats. Ce n'est pas par méchanceté, c'est par manque de compétence et d'expérience.

Et, si vous voulez vraiment, votre projet, qu'il fonctionne, bien, allez à la base. Je comprends que les gros projets publics, des projets de 200, 300 millions, puis tout ça, tout le monde regarde ça. Mais, je vais vous dire, les citoyens, c'est dans chaque petit village qu'ils voient les contrats puis qu'ils voient des règles qui sont édictées. Parce que, dans ce cas-là, ils ont demandé que l'entrepreneur, il ait un gros camion -- on va aller dans le ridicule, là -- il ait un gros camion, un dix-roues, mais l'autre, il ne l'a pas, le dix-roues, là, c'est lui qui va l'avoir, le contrat. Puis je pense que la base des citoyens, ça part de là.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): M. le ministre.

M. Bédard: ...M. Beaudoin et tout le monde, c'est que le projet de loi, il s'applique aux villes, dans le sens que les villes sont couvertes par l'habilitation, ceux et celles qui vont contracter. Ce que vous me dites, puis je l'entends bien, c'est que les pratiques contractuelles doivent aussi évoluer, et on doit viser l'harmonisation, et, en même temps, il n'y a pas un seul acteur, vous savez, là-dedans. Tout le monde est un peu, hein, jaloux de son indépendance, je dirais, de ses façons de faire. Donc, on va travailler avec vous là-dessus. Si on était seulement tous les deux, ça serait simple, là, mais ce n'est pas si simple. D'ailleurs, quand ça paraît trop simple, en général, c'est parce qu'on n'a pas compris. C'est ce qu'on dit souvent. En tout cas, là, j'ai compris rapidement.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): M. Martin.

M. Martin (Luc): Oui. On sait que ce n'est pas facile, effectivement, mais il y a les règlements aussi qui découlent de la loi. Les règlements, ils ne s'appliquent pas aux municipalités. Et souvent, ce sont dans les détails qu'on retrouve, vous savez, là, donc, l'importance, donc.

M. Bédard: Je vais avoir une oreille très, très, très attentive, puis quant à votre recommandation, dans les trois, vous aviez celle au niveau des mesures dissuasives, mais ça, évidemment, on est en dehors du champ de la collusion, de la corruption. On est encore dans des contrats normaux qui sont donnés avec une procédure, à la base, qui, selon vous, est suspecte -- c'est ce que vous regardez -- donnés par un organisme public?

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): M. Poitras.

M. Poitras (Pierre-Stéphane): Pas nécessairement. O.K., M. Martin va y aller par la suite ou... comme vous voulez.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): M. Martin.

M. Martin (Luc): Ce qu'on fait valoir, c'est que, bon, les projets sont préparés, bon, par des personnes, des êtres humains qui, bon, la plupart sont très, très biens, et tout. Mais, à un moment donné, il peut y avoir des influences. Et ce qu'on vous recommande, c'est de donner le pouvoir à une instance -- donc, on parle du Conseil du trésor -- de pouvoir suspendre un appel d'offres quand, à sa face même, il voit qu'il y a une problématique. On ne dit pas d'annuler l'appel d'offres. Il peut le suspendre pour quelques jours, dire: On va le regarder un peu. On a porté à notre attention qu'il y a une problématique, bon...

M. Bédard: ...contrats -- je pousse plus loin -- à tous niveaux de contrats, c'est ce que vous dites? Autrement dit, peu importe le montant, dès qu'il y a des irrégularités qui apparaissent, de dire...

M. Martin (Luc): Bien, qui sont portées à son attention, on se...

M. Bédard: Oui, de ne pas rien que faire des recommandations, de dire: Je me saisis maintenant de la possibilité du processus d'adjudication.

M. Martin (Luc): Mais ça peut être fait d'une façon discrétionnaire aussi, là, parce que, j'imagine, ils doivent avoir peur d'être débordés, mais...

M. Bédard: Bien, c'est administratif. Ça, c'est purement administratif, là. On est dans...

M. Martin (Luc): Oui. Mais, écoutez, il y a quelque chose qui ne va pas, puis c'est l'intégrité des marchés publics, c'est la confiance. Les fournisseurs, il faut qu'ils aient confiance. Moi, là, avant de préparer une soumission que je vais investir plusieurs milliers de dollars, il faut que j'aie confiance au processus. Il ne faut pas qu'à sa face même je me dise: Bon, à qui la job est promise? Ça vaut-u la peine d'investir de l'argent pour soumissionner ça? Si je n'ai pas confiance, bien, je risque de ne pas soumissionner. Et là ce sont les marchés publics qui perdent de la confiance. C'est simplement ça qu'on vous dit.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): M. Poitras.

M. Poitras (Pierre-Stéphane): Et, à cet égard, on parle au niveau de la soumission, mais nous aurions tendance à étendre cela à tous les niveaux de l'exécution du contrat pour une simple et bonne raison. Il y a plusieurs membres qui vivent, de façon journalière, cette situation-là où il y a quand même la loi sur les contrats de construction entre les organismes publics qui est là. Il y a le Conseil du trésor qui fait des directives d'interprétation, qui émet des directives sur comment devrait-on interpréter la loi. Et pourtant, les organismes publics disent à nos membres: Moi, je ne suis pas lié par les directives d'interprétation du Conseil du trésor, j'interprète la loi à ma façon. Le règlement, je ne suis pas d'accord avec et je l'applique d'une autre façon. Et ceci amène plusieurs conflits. Alors que, si le Conseil du trésor avait un pouvoir d'intervention contre cet organisme-là, il pourrait très bien dire: Un instant, ce n'est pas une bonne façon d'appliquer.

M. Bédard: Je sais que le temps est limité. J'en prends bonne note, et ça m'intéresse.

M. Poitras (Pierre-Stéphane): Parfait. Avec plaisir.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): Ça va?

M. Bédard: Oui.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): Effectivement, votre temps est presque terminé. Alors, je vais vous laisser 30 secondes à gauche, et j'entends M. le député de Louis-Hébert.

M. Hamad: Merci, M. le Président. Je veux vous saluer, messieurs, MM. Martin, Beaudoin, Poitras et M. Lussier. Excellent mémoire, bravo! Félicitations. Beaucoup de bons points. Je vois que vous avez travaillé très fort. Et, si je disais: Oui, tantôt, c'est parce que c'est une autre voix qui dit la même chose que nous. On est contents de vous entendre. Ça donne une autre voix additionnelle à ce qu'on disait depuis quelques jours.

En fait, pour la sous-traitance, là, le dernier point, on va revenir là-dessus. Moi, je pense que vous avez tout à fait raison. Il ne faut pas attendre que l'entrepreneur reçoive le contrat puis, après ça, négocie avec ses sous-traitants. S'il n'est pas habilité à soumissionner, là, l'entrepreneur va réclamer la différence en deux. On en a discuté hier, vous avez tout à fait raison. Nous, ce qu'on suggère, c'est que tout le monde avant la soumission, tout le monde est sur le même pied d'égalité. Puis, en passant, les sous-traitants peuvent avoir l'autorisation avant tout le monde, et l'entrepreneur choisira après n'importe qui, mais qu'il soit habilité avant.

Puis, ça, ça simplifie tout ce processus-là, et tout ce qui est dans la loi devrait être modifié pour aller là. C'est plus simple, plus... Et, en passant, pour le gouvernement aussi, le prix va être meilleur parce que c'est réglé avant, puis l'entrepreneur doit soumettre le meilleur prix pour le citoyen. Et, dans la loi, bien, ce n'est pas comme ça, mais je pense que ça devrait être corrigé. Je le souhaite. Venant de vous, c'est plus crédible que nous, mais bon.

Alors, l'autre élément, j'ai...

M. Bédard: ...

M. Hamad: Oui, je vois ça, là. Au moins, ça commence à monter, là. Premier point, à la page 4, ce que vous dites, à la page 4: «Toutefois, ce "permis" est loin de nous assurer du respect des règles par les différents acteurs et placer les marchés publics à l'abri de la collusion et de la corruption.» À la fin, là, vous dites que la loi n° 1 «ne vient malheureusement pas corriger cette importante lacune». Autrement dit, vous avez des doutes. Vous trouvez que l'intention est bonne, de la loi, nous aussi, sauf que vous trouvez qu'il y a des lacunes importantes dans ce projet-là, où on devrait les améliorer, les bonifier et les faire. Et, encore là-dessus, on s'entend. Vous êtes d'accord avec ça, hein? Oui, O.K.

Quand vous dites qu'il est appliqué aux municipalités, il faut faire attention, puis vous le savez: on parle des contrats aux municipalités de 50 millions et plus. Votre exemple de camion, tantôt, là, il n'est pas dedans, là. Donc, 50 millions, hier, l'Union des municipalités est venue nous dire qu'il y a un contrat seulement qu'ils ont en haut de 50 millions, un contrat depuis 12 mois sur l'ensemble des municipalités. Donc, ce projet de loi là, tel qu'il est écrit, ne peut pas toucher les municipalités actuellement, à part des contrats de 50 millions. Et je suis convaincu que la majorité des municipalités ne donnent pas des contrats de 50 millions à tous les jours, là. Donc, il y a lieu de revoir le 50 millions puis aller de l'avant.

25 000 $, là, c'est l'autre extrême, là. Et des contrats à 25 000 $, peut-être qu'il faut trouver quelque chose de plus raisonnable, mais on doit travailler là-dessus. Donc, juste vous souligner que nos municipalités ne sont pas là, pour le moment, comme telles. Elles sont là, mais à 50 millions et plus.

L'autre élément que vous parlez, je trouve ça intéressant. Vous dites, à la page 5, dans le titre, là «Champ d'application», deuxième paragraphe, que cette loi-là doit «s'appliquer [à] tous les projets de construction financés par des subventions de l'État». Moi, je trouve ça intéressant. Je trouve ça intéressant. Je ne suis pas sûr que la loi le dit, mais je pense que c'est très intéressant, une fois que l'État ou l'argent de nos citoyens... quelque part, on devrait appliquer les mêmes règles que tout le monde. Je trouve ça une bonne idée.

**(15 h 50)**

Je continue dans vos éléments. Là, je suis à «Responsable de l'observation des règles contractuelles». Et, ici, là, vous dites: «Peut-on penser que la personne...» Là, c'est la nomination d'un responsable, là, l'observation des règles, là. Alors, là, vous, vous dites: «...peut-on penser que la personne responsable de l'observation des règles à l'emploi d'une municipalité puisse contrecarrer les projets d'un supérieur, d'un maire, d'un élu ou d'un professionnel sans [risque pour] son emploi?». Je trouve ça une bonne remarque. Je pense qu'il faut qu'on regarde comment on peut donner au moins un pouvoir à cette personne-là, au-delà d'avoir des patrons en haut, peut-être, qui sont corrompus. puis ils sont en train de le pousser, puis il n'a pas le choix de le dire. On le voit un petit peu à la Ville de Montréal. Donc, ça, je pense que c'est important de le regarder, quel pouvoir et comment on positionne cette personne-là qui fait l'observation.

Et là un autre que vous dites -- encore, on dit la même chose -- à la page 8, «Autorisation de l'Autorité des marchés financiers», «c'est une bonne chose puisque cette multitude de permis était incohérente et difficilement gérable». Là, ce que vous dites après, puis on en a discuté hier, en passant, c'est que, si l'Autorité des marchés ne donne pas l'autorisation et permis à une entreprise, vous dites, vous, pour vous, avec vos mots: «...signifie pour la plupart d'entre eux la peine de mort.» En fait, parce que, si une entreprise qui fait juste affaire avec l'État, et mettons, hier, on avait un exemple d'une entreprise qui installe des lumières de rue et finalement, avec une erreur d'un fonctionnaire quelque part, on arrive puis on enlève le permis, on ferme l'entreprise, c'est là qu'il faut donner la chance au moins à l'entreprise d'avoir un droit de réviser, au moins de défendre. Mais, s'il est corrompu, il est corrompu, il est out. Mais, au moins, donner la chance. Sinon, c'est fermé. Et on vous rejoint là-dessus.

Page 10, vous dites, la confiance du public: «Qui est le public?» Et vous avez un questionnement sur la notion de confiance du public. Nous aussi. Il y a une définition à 21.26, mais je pense que vous avez raison, on devrait le travailler davantage.

Et un autre élément encore qu'on a dit depuis quelques jours, vous avez dit: L'autorité... plusieurs sont discrétionnaires, un pouvoir discrétionnaire. Et vous posez la question sur le pouvoir discrétionnaire. On se rejoint là-dessus aussi. Nous aussi, on se demande: Peut-être y a-t-il lieu de baliser? Parce qu'un pouvoir discrétionnaire, lorsqu'on dit «peut», «peut», est-ce qu'il a pris une décision dans un cas puis, dans l'autre cas, il ne l'a pas pris? Pourquoi? Ça donne une injustice à certains égards. Puis on est là pour être clairs au départ.

Donc, je trouve, vos recommandations sont très bonnes. Je pense, la preuve, c'est qu'on se rejoint sur plusieurs points. Et donc vous êtes conscients qu'il faut amener pas mal de modifications puis bonifier pour être encore plus précis et plus efficaces. Le seul élément que je ne suis pas d'accord avec vous, c'est quand vous dites que vous voulez tout concentrer au Conseil du trésor. Évidement, ils sont heureux, les gens du Conseil du trésor, d'avoir ce pouvoir-là, et le ministre aussi, je comprends. Mais il faut trouver la meilleure façon de donner le pouvoir, donner un meilleur service aux citoyens, être plus efficace.

D'abord, c'est une question d'expertise, ramasser tout ce monde-là dans la même place. Deuxièmement, dans la loi elle-même, on demande à l'Autorité des marchés financiers, qui relève du ministre des Finances, on demande à l'UPAC, qui relève du ministre de la Sécurité publique et la Régie du bâtiment. Donc, l'importance, c'est de travailler tout le monde ensemble d'une façon très efficace.

Évidemment, par contre, par contre, vous avez raison, c'est qu'il faut que tous ces ministères-là aient le même standard, la même directive, la même application, et ça, le Conseil du trésor peut, par exemple, faire en sorte que les autres ministères appliquent les mêmes règles. Mais, en général, le Conseil du trésor, quand il donne ces directives-là, les autres doivent suivre. S'ils ne le suivent pas, ils devraient se présenter au Conseil du trésor.

Mais c'est élément important, je pense, mais pas tout rassembler parce qu'il y a des expertises ailleurs, il y a des structures ailleurs. Voilà. Je pense que le député de Chomedey veut ajouter quelque chose.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): Est-ce qu'il y a des commentaires sur... M. Martin.

M. Martin (Luc): Oui, effectivement, mais notre point principal quand on parle du Conseil du trésor, c'est de centraliser la gouvernance à très haut niveau, là. O.K.? Bon. Donc, à très haut niveau, établir les règles, bon, les former, les gens, aussi donc. Et, à ce moment-là, également être capable d'intervenir, capable, là, de prendre le téléphone, appeler un organisme public, dire: Sais-tu, émets donc un addenda, là, puis on va remettre un appel d'offres de quelques jours. On aimerait ça le regarder. Mais, ça, ça, il faut une autorité loin de l'exécution. Si on est trop près de l'exécution des contrats, bien là, O.K., il y a toutes les relations personnelles, et tout. Oui.

M. Hamad: ...ça. Ils sont capables de faire ça. Donc, on s'entend sur ce qu'on vient de dire là?

M. Martin (Luc): Oui

M. Hamad: O.K.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): M. le député de Chomedey.

M. Ouellette: C'est bon qu'on s'entende, M. le Président, pour les fois qu'on ne s'entend pas. On va continuer à alimenter la réflexion du président du Conseil du trésor. Et, effectivement, je vous suggère, vous nous avez mentionné, à la page 4, que vous étiez en train de préparer des recommandations. J'espère que ce document-là sera prêt très bientôt parce qu'on va être en étude article par article dans les -- j'espère -- prochains jours et on aimerait bien ça que ça puisse continuer d'alimenter la discussion ou la réflexion de M. le ministre. Vous l'avez mentionné à la page 4, là, que vous feriez des recommandations inspirées des meilleures pratiques, vous nous en avez partagé quelques-unes. J'aimerais bien ça connaître les autres parce que je pense que vous êtes sur la cible, effectivement, qu'on regarde.

La deuxième remarque que...

M. Beaudoin (Joseph): Je veux donner une réponse.

M. Ouellette: Oui. Vous avez une réponse là-dessus?

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): M. Beaudoin, oui?

M. Beaudoin (Joseph): C'était pour le clarifier. Oui, effectivement on travaille, puis ça fait peut-être deux ans qu'on travaille sur les bonnes pratiques de l'industrie. On n'a pas attendu la commission Charbonneau, nous, on a été plus proactifs que ça. Mais je ne pense pas qu'on va l'avoir dans les deux, trois prochains jours parce que notre étude se fait quand même au niveau...

Mon D.G., M. Martin, s'est rendu même en France, il y a quelques semaines, rencontrer l'OCDE. On essaie de regrouper puis de regarder ailleurs ce qui se fait dans monde. Je croirais que ça va être plutôt au mois de janvier, février, mars. Mais on veut vraiment pondre un document des bonnes pratiques de l'industrie de la construction, mais on ne se base pas juste sur le Québec; on regarde le Canada, puis on regarde les Américains, puis on regarde en Europe. On va vous en faire part, mais je ne pense pas que vous allez l'avoir dans les deux prochains jours, malheureusement.

M. Ouellette: M. le Président.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): M. le député de Chomedey, oui.

M. Ouellette: Je vous dirais que, quand il sera prêt, parce que M. le ministre nous a annoncé qu'il y aurait une trilogie -- il y en a qu'on a lu dans le journal, il y a d'autre chose qu'on n'a pas lu dans le journal -- j'ai l'impression que votre document sera toujours à point quand il sera prêt et qu'il sera d'une pertinence pour contribuer à la réflexion du ministre.

Pour compléter un peu ce que mon collègue de Louis-Hébert disait, que ça devrait s'appliquer aux projets de construction financés par les subventions de l'État, et je pense que vous en avez parlé, les OBNL, là, puis les offices municipaux d'habitation...

M. Beaudoin (Joseph): Oui.

M. Ouellette: On peut vous dire qu'effectivement on en a tous dans nos comtés, là, puis on peut vous dire que peut-être que ça devrait faire partie du projet de loi.

Je voyais, à la réaction, quand vous avez mentionné que le Conseil du trésor devrait pouvoir initier des enquêtes, là, oh! j'ai eu quelques sourires de l'autre côté, mes collègues du gouvernement. Et probablement qu'effectivement il faut garder à un très haut niveau les standards au niveau du Conseil du trésor. Mais je ne suis pas certain que c'est leur pouvoir, c'est leur devoir ou que c'est dans leurs attributions de commencer à faire des enquêtes. Ce n'est pas dans leur mandat. Et je pense qu'on pourra suggérer au ministre qu'il y a d'autres personnes qui pourraient faire ça pour pouvoir les aider.

M. Hamad: La police.

M. Bédard: Les policiers à la retraite.

M. Hamad: La police.

M. Ouellette: Non. Les policiers à la retraite, là, de ce temps-ci, s'en viennent pas mal tous à l'Assemblée nationale.

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: Il y en a trois.

Une voix: Deux.

M. Ouellette: Cinq. Il y en a cinq.

M. Bédard: Je pense qu'on a atteint notre quota, là.

M. Ouellette: Non, non, non.

M. Duchesneau: On commence.

M. Ouellette: On se multiplie. Vous savez, M. le ministre, on a commencé par un, on est rendus à cinq. On fait des bonds de 500 % à chaque élection. Là, il nous reste à atteindre la parité, maintenant.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): On revient dans le dossier, M. le député de Chomedey.

M. Ouellette: Nous revenons effectivement dans le dossier. On vous entend aussi que... Je pense que le pouvoir de révision, à un moment donné, des décisions... parce que vous avez parlé qu'écarter les entreprises des marchés publics, souvent ça va être pour eux autres comme la peine de mort, et il faudra, à un moment donné, dans la réflexion que le ministre fait présentement, regarder un comité de révision pour pouvoir permettre à ces gens-là de se faire entendre et pouvoir aussi, peut-être pas contester, mais pouvoir juste avoir une deuxième opinion sur l'avis qui sera émis par l'UPAQ et sur lequel l'Autorité des marchés financiers va baser sa décision.

Une autre chose que vous avez mentionnée à la page 10, quand on parle de manque d'intégrité, vous avez... Effectivement, comme on l'a souligné, il est toujours facile de succomber aux moeurs puis aux perceptions. À juste titre, vous l'avez souligné dans votre document, et je ne peux qu'être d'accord avec cette affirmation de votre part.

Et je vous dirais même que, toujours à la page 10, quand vous avez mentionné qu'un fournisseur pourrait piéger un concurrent, ça se fait, ça se fait dans d'autres domaines pour l'écarter, pour le faire accuser compte tenu du fait qu'il y a des dispositions dans la loi qui disent que, si tu es mis en accusation, pas nécessairement reconnu coupable... Ça se fait, hein? Où est-ce qu'il y a de l'homme, il y a de l'hommerie, et ça s'est fait par le passé dans d'autres domaines, et effectivement c'est un piège qui nous guette, et merci de l'avoir souligné.

Ah! je pense que j'ai fait pas mal le tour de ce que j'avais. J'ai l'impression qu'il ne me reste plus grand temps, M. le Président, hein?

**(16 heures)**

M. Duchesneau: Je vais le prendre.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Ouellette: Serais-je assez...

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): Il vous reste 7 minutes.

M. Ouellette: Ah! 7 minutes. Bon, M. le ministre... M. le député de Louis-Hébert, si vous aviez des commentaires par rapport à mes commentaires...

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): Est-ce que vous avez des commentaires suite à l'exposé de notre ami le député de Chomedey?

M. Martin (Luc): Non. Effectivement, appelons ça un appel ou, en tout cas, une instance où l'entreprise va pouvoir s'exprimer et faire valoir son point de vue. Je pense, c'est un incontournable, là, parce que qu'est-ce qu'on recherche comme but, finalement? On recherche de maintenir la concurrence, O.K.? On ne recherche pas de sortir des entreprises du marché public pour rien, là. L'entreprise qu'on vient de sortir, là, peut-être c'est elle qui va nous faire sauver 1 million, là, puis on l'a sortie puis on n'aurait pas dû, bon. O.K.?

Donc, si on veut garder l'intégrité, la première règle partout, là... On a beau regarder, partout sur la planète, là, ce qui revient partout, c'est favoriser la concurrence. Si vous faites ça, là, vous venez, en tout cas, de vous mettre à l'abri de pas mal de risques de collusion, et tout, et tout. En tout cas, il faut y penser, là. Donc, on met des règles plus sévères. C'est tentant, des fois. Ah! Mais on va mettre une règle là, on va mettre une règle là, on va mettre une règle là. Finalement, on se retrouve, en bout de piste, avec un paquet de règles, puis là la concurrence n'est pas là. On se retrouve avec deux concurrents. Ça fait que, donc, il faut faire attention à ça.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): M. le député de Louis-Hébert. M. Beaudoin, vous voulez rajouter quelque chose?

M. Beaudoin (Joseph): Oui. C'est parce que c'est revenu à quelques reprises, là, sur le cas du Conseil du trésor. C'est vrai que nous autres, on leur en met sur le dos, là. Peut-être qu'on trouve qu'ils ont du temps, ces gens-là, mais ce n'est pas vraiment l'idée.

Des voix: ...

M. Beaudoin (Joseph): La réponse, O.K. Non, mais nous, en fait, c'est vraiment un organisme... C'est de sortir... Prenez, dans la situation qu'on a actuellement, je peux avoir un entrepreneur, au moment présent où est-ce qu'il va transiger avec une municipalité ou avec un organisme du gouvernement, où, à un moment donné, on va avoir... C'est des hommes, là. On s'entend qu'on parle de compagnies ou on parle de gouvernement, mais c'est des hommes qu'on parle, là. C'est que tu as un fonctionnaire puis tu as un entrepreneur, et là il y a un litige qui éclate entre les deux.

J'ai des entrepreneurs qui sont pris, des fois, avec des montants de 2, 3 millions qui ne sont pas payés parce que, là, il y a un conflit de personnalité entre le donneur d'ouvrage, le responsable. Et je ne sais pas si vous le savez, mais, quand tu as 2, 3 millions qui ne rentrent pas dans ton compte de banque pendant deux, trois mois, je vais vous dire quelque chose... Bon. Et, à ce moment-là, qu'est-ce que...

M. Ouellette: Ça ne m'est jamais arrivé...

M. Beaudoin (Joseph): Ça ne vous est pas arrivé, bon. Non, je ne vous le conseille pas parce que le téléphone sonne en arrière, là, des sous-traitants puis des fournisseurs. Ça, là, quand ces situations-là se produisent, c'est que ça rouvre la porte, à ce moment-là, à un entrepreneur qui va aller voir le fonctionnaire, puis il va lui dire: Écoute bien, là, il faut que tu me sortes mon 3 millions, là. Moi, je suis pogné avec ma gang de sous-traitants, puis ils veulent me faire mettre en faillite. Et je ne sais pas si vous le savez... puis là c'est un conflit d'intérêts entre deux personnes. Vous avez une situation assez explosive, là. Je veux dire, il faut que le dossier se règle, puis le gars va s'organiser pour que le dossier se règle.

Ça fait que, si tu as un organisme à part -- on dit toujours le Conseil du trésor, mais appelez-le comme vous voulez -- que, lui, il va trancher la question, vous n'aurez pas à vivre ces situations-là. Là, vous créez vraiment une situation explosive, tu sais. Vous tentez le diable, là.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): M. Beaudoin parlait de téléphone qui sonne. Il y a une cloche qui sonne actuellement, puis c'est à peu près le seul événement qui peut nous faire arrêter une commission parlementaire, c'est d'aller exercer notre droit de vote au salon bleu. Puis, de toute façon, on n'aurait pas le temps de terminer avec vous parce qu'il reste cinq minutes, plus un autre six minutes. Alors, si vous voulez nous attendre, nous allons aller exercer notre droit de vote et revenir compléter cette rencontre.

Et nous suspendons les travaux quelques minutes.

(Suspension de la séance à 16 h 4)

 

(Reprise à 16 h 32)

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): Alors, nous recommençons nos travaux. Nous recommençons nos travaux et nous en étions aux échanges entre les représentants de l'opposition officielle et nos invités. Alors, je laisse la parole à M. le député de Louis-Hébert.

M. Hamad: Juste pour compléter, une petite question sur les sous-traitants. Vous savez, on demande à l'entrepreneur, les sous-traitants ou les contractants, d'avoir le permis. Vous allez où avec les sous-traitants? C'est-à-dire mettons jusqu'à un fournisseur... Alors, à quel niveau vous pensez qu'on devrait aller?

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): M. Lussier.

M. Lussier (Benoît): M. le Président, pour répondre à la question qui est posée, on pense, en fin de compte, que ça devrait être applicable à tous, c'est-à-dire les sous-traitants et les fournisseurs qui sont dans la chaîne. Ce qu'il s'agira éventuellement d'établir, c'est possiblement un montant. On peut comprendre qu'on ne veut pas s'en aller dans les petits mandats, mais ça devrait, en fin de compte, s'appliquer à tous, puis, on le répète, vraiment au niveau de la présentation de la soumission.

Alors, ça deviendra relativement simple. On pourra, nous, comme entrepreneur général, aller voir le «listing» des gens qui ont leur permis de l'AMF et s'assurer que, si le fournisseur ou le sous-traitant est présent sur cette liste-là, on pourra utiliser ses services sans problématique.

À cet effet-là, on a compris aussi de notre côté que le fait d'avoir ce nouveau permis de travail là de l'AMF, ça va nous disposer, nous, comme entrepreneur général, de gérer l'attestation de Revenu Québec. Alors, je ne sais pas si c'est comme ça que ça a été pensé au niveau de M. le ministre, mais on comprend, en fin de compte, que le fait d'aller vérifier si l'entrepreneur est présent sur la liste de l'AMF, bien, on n'aura pu à gérer la fameuse attestation de Revenu Québec, puisque ça aura été vérifié par les autorités compétentes, à ce moment-là.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): M. le député de Louis-Hébert.

M. Hamad: Je ne pense pas que l'autorisation de l'AMF vous enlève l'obligation de trouver une attestation au ministère du Revenu, là. Je ne pense pas que, dans la loi, on soustrait un par rapport à l'autre, là. Vous allez maintenir le Revenu plus l'AMF, je pense. Je n'ai pas d'indication contraire. Comme le ministre connaît sa loi par coeur, peut-être il peut me corriger.

Mais je reviens aux fournisseurs en attendant. Mettons, vous achetez du bois, vous achetez des clous à Rimouski, dans un des beaux comtés au Québec. Et donc le fournisseur des clous, le fournisseur du bois aussi doit être autorisé?

M. Lussier (Benoît): Écoutez, je pense qu'il ne faut pas aller non plus nécessairement dans ce petit détail là. Mais je vous donne un exemple, un fournisseur d'une unité mécanique, unité mécanique qui vaut, mettons, 150 000 $, bien, on pense que ce fournisseur-là devrait se retrouver sur la fameuse... avoir son permis de fourniture puisqu'il doit fournir un bien important à l'État. Je ne pense pas que le clou ou le bois ou le fournisseur de clous doit nécessairement se retrouver là, mais, honnêtement, on n'y verrait pas nécessairement de problématique associée à ça.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): Vous voulez compléter, M. Poitras? 30 secondes.

M. Poitras (Pierre-Stéphane): Oui. Et, concernant cela, je pense que le but premier de la loi, c'est, comme on disait, de simplifier le formulaire. Et, à partir du moment où le fournisseur n'aura qu'une seule attestation à fournir, ça va être facile de pouvoir contracter avec le gouvernement. Et là j'ai compris, de votre intervention, qu'on va devoir encore fournir l'attestation de Revenu Québec. Je pense que, selon moi, c'est un fardeau, c'est un lourd fardeau qu'on va imposer. On devrait enlever toutes les attestations et n'en fournir qu'une seule, celle qui va être délivrée par le marché des autorités financier.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): Merci, M. Poitras. Puis il ne faut pas oublier aussi que, les clous, on les achète à Rimouski. Je laisse la parole maintenant à M. le député de Saint-Jérôme.

M. Duchesneau: Merci, M. le Président. D'abord, félicitations pour cette présentation-là qui, d'après moi, est la plus pratico-pratique, la plus terre à terre qu'on a eue jusqu'à maintenant. C'est beau de faire de la haute voltige philosophique, mais je pense qu'on doit savoir comment ça fonctionne dans le vrai monde.

M. Martin, vous allez être content. Je vais vous organiser deux voyages. Votre président pourra peut-être vous envoyer en Italie et en Australie. D'abord, en Italie, ils ont un système comme celui-là, celui dont vous parliez tantôt, que, quand un appel d'offres entre... une soumission plutôt, entre, il y a un logiciel qui évalue la possibilité qu'il y ait corruption dans ce dossier-là. Et donc, 0 % ou 94 %, donc là on peut s'orienter vers une soumission plutôt qu'une autre.

En Australie, même chose. Au lieu d'attendre que la fraude soit commise puis qu'on dise: Oh! on s'est fait voler, c'est que, pendant que le contrat est en train d'être exécuté, il y a un commissaire qui entend les parties, s'il y a litige, et on règle ça immédiatement. Je pense que cette proposition-là, elle est excellente. Et c'est aussi, ce que vous disiez tantôt, un bel exemple de mesure dissuasive. Il n'y a pas personne qui veut passer devant une instance s'il y a quelque chose de pas correct. Donc, on serait en mesure de faire de meilleures soumissions.

21.18, 2° paragraphe, ce que vous suggérez, ça aussi, je souscris entièrement à ce que vous dites, parce que c'est toujours un point d'interrogation quand on ne sait pas qui va faire les travaux. Alors, j'imagine -- je vous pose la question -- que, si on a ce point d'interrogation, l'entrepreneur, pour éviter que son sous-traitant quitte et qu'on soit obligés d'en prendre un autre qui coûte plus cher, il va se mettre une provision dans la soumission qu'il va faire au cas où, sinon c'est lui qui assume la perte.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): M. Martin.

M. Martin (Luc): Oui, effectivement, c'est un fait. Mais on comprend aussi ou, en tout cas, c'est une demande qu'on fait, si on ne l'a pas bien compris, qu'un sous-traitant qui est conforme, là, au moment où il rentre sa soumission, non seulement on va l'inclure, on va écrire son prix dans notre propre soumission, mais on va pouvoir finir les travaux avec lui, là, même si, en cours de route, il les perd.

Donc, il ne pourra pas resoumissionner, on se comprend bien, mais, au moins, l'entrepreneur général ne sera pas pénalisé puis ne sera pas à risque, là, de...

M. Duchesneau: Mais le point que je faisais, c'est que votre proposition de changer 21.18 fait en sorte que c'est bon pour le gouvernement parce que le prix de l'entrepreneur va être plus bas, parce qu'il n'y a pas de point d'interrogation, mais, en même temps, on connaît aussi qui est le sous-traitant qui a été un problème au ministère des Transports, parce qu'on ne savait pas qui ferait le travail, en bout de ligne, éventuellement. Alors, là-dessus, je suis aussi d'accord.

Maintenant, j'aimerais vous entendre sur 21.25, notamment, pouvoir discrétionnaire de juger, l'article 21.25, de juger de l'intégrité de quelqu'un. Bon, c'est une décision administrative, on ne veut pas y aller avec un processus judiciaire, mais est-ce que ça ne vous pose pas de problème qu'on n'ait pas de tribunal d'appel de la décision du fonctionnaire qui aura pris la décision?

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): M. Martin.

M. Martin (Luc): O.K. J'ai compris, tantôt, qu'il y aurait un tribunal d'appel. En tout cas, j'ai compris qu'on en parlait, à tout le moins, d'avoir un endroit où l'entreprise pourrait en appeler. Mais, effectivement, c'est discrétionnaire, donc on ne peut pas... ça dépend des valeurs, ça dépend des préjugés, ça dépend de beaucoup de points humains.

M. Duchesneau: Mais il y a des gens qui vous ont précédés, on a eu ce débat-là où, vu que c'est une décision administrative, il n'y aurait pas de révision de la décision...

M. Martin (Luc): Bien, on vous ne le recommande pas, là. Je pense qu'il faut qu'il y ait une révision. C'est bien, bien sûr.

M. Duchesneau: En fait, c'est ce que je voulais entendre. Et je suis...

Des voix: ...

M. Duchesneau: Ce n'est pas subtil, hein?

Des voix: ...

M. Duchesneau: Non, ce n'est pas subtil, mais... En fait, j'ai mal compris votre réponse. Pouvez-vous la répéter, s'il vous plaît?

Une voix: Ce n'est pas subtil, mais ça fonctionne. C'est correct.

**(16 h 40)**

M. Duchesneau: Favoriser la concurrence. Justement, il ne faut pas que ce projet de loi là, puis je suis d'accord avec vous que ça part d'une très bonne intention, il ne faudrait pas qu'on exclut des gens du processus de concurrence si on les exclut de façon légale. Je pense que ça serait bon ni pour vous ni non plus pour le gouvernement. Donc, il faut avoir le plus d'entrepreneurs possible qui vont soumettre une offre là-dessus.

M. Martin (Luc): Entrepreneurs de sous-traitants de fournisseurs. Vous savez, un entrepreneur général... nous, en bâtiment, il y a tellement de sous-traitance, souvent on prend les prix, bon, de nos sous-traitants, des fournisseurs. C'est beau qualifier des entrepreneurs généraux, il faut s'assurer de toute la chaîne aussi, là, il faut s'assurer qu'on a des fournisseurs partout. Si on se retrouve avec un fournisseur de fenêtres, tu as beau avoir 10 entrepreneurs généraux, mais on devra tous avoir le même prix de fenêtre. Donc, c'est important de voir l'ensemble de la chaîne, là, de la chaîne d'entreprises impliquées dans un projet.

M. Duchesneau: Mais ce que vous proposez au gouvernement, d'avoir plusieurs personnes qui vont soumettre une offre au gouvernement, c'est aussi bon pour l'entrepreneur. Si l'entrepreneur se retrouve avec juste un sous-traitant, c'est sûr que le prix va être gonflé. Donc, vous voulez avoir cette possibilité-là aussi.

M. Beaudoin (Joseph): M. Duchesneau, j'ai justement un cas, un avocat qui m'appelait en m'en venant ici aujourd'hui. Il me disait: Dans un cas de dossier public où est-ce qu'il y a un ascenseur, un modèle d'ascenseur de spécifié, l'ascenseur coûte 200 000 $, l'entrepreneur a trouvé une équivalence à 100 000 $. Ils n'ont jamais voulu le modifier pour prendre un crédit, mais c'est un 100 000 $. Mais nous, quand ces situations-là se posent, on se demande qui profite de l'ascenseur à 200 000 $.

M. Duchesneau: Effectivement. Mais c'est le principe de l'homologation des produits par certains ministères qui fait en sorte que tu sais que tu vas avoir ce produit-là, mais tu sais aussi qu'il y a peut-être des gens qui peuvent profiter et te le vendre plus cher. Là-dessus, on se rejoint. Combien me reste-t-il, M. le...

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): M. Beaudoin, M. Martin, M. Lussier, M. Poitras, merci énormément de votre présentation à cette commission.

Et je suspends quelques minutes pour permettre aux représentants et représentantes du Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec de prendre place.

(Suspension de la séance à 16 h 42)

 

(Reprise à 16 h 44)

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): Alors, je souhaite la bienvenue à Mme Martineau et son groupe. Et puis je lui dis qu'elle a 10 minutes pour se présenter, et présenter les gens qui l'accompagnent, et puis faire son exposé. Vous avez la parole.

Syndicat de la fonction publique et
parapublique du Québec inc. (SFPQ)

Mme Martineau (Lucie): Merci, M. le Président. Alors, je vous présente Mme Nadia Lévesque, conseillère à la recherche au Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec, ainsi que Mme Bianca Cordero, qui est coordonnatrice du Service de la défense des services publics.

Alors, nous sommes heureuses de prendre part au débat. Concernant la question de la sous-traitance dans l'appareil gouvernemental, vous n'êtes pas sans savoir que ça fait au moins 15 ans que cette utilisation de la sous-traitance nous préoccupe au plus haut point. Nous savons que sous cette solution se cachent plusieurs problèmes et phénomènes qui ont été soulevés tout particulièrement dans les dernières années.

Nous saluons d'abord le projet de loi n° 1. Nous nous sommes levés souvent sans jamais avoir eu beaucoup d'écoute. Probablement, nous n'avions pas de preuve en béton, sans faire de jeu de mots. Mais, avec ce qui s'est passé dernièrement, nous sentons quand même avoir un peu plus d'écoute. Par contre, encore aujourd'hui, quand nous discutons des enjeux de la sous-traitance, plusieurs représentants du gouvernement nous répètent que les emplois occupés par les membres que nous représentons ne sont pas des emplois stratégiques, que nous sommes dans l'opérationnel. Et vous avez, dans notre mémoire, d'où vient ce courant de pensée où l'État devrait être stratégique et non pas opérationnel.

Je vous donnerais un exemple d'une entrevue que j'ai faite, la semaine dernière, avec M. Robert Gagné des Hautes Études commerciales de Montréal, où il me disait qu'au ministère des Transports ils n'avaient plus besoin de conducteurs de camions, que ça prenait juste des ingénieurs et des comptables pour en faire des gestionnaires de contrats. Alors, vous comprendrez que, pour nous, la capacité stratégique d'une organisation, d'un organisme public pour évaluer le prix de ses soumissions doit inclure un minimum de connaissance de la fine réalité du terrain et du secteur d'activité.

Alors, nous avons trois sujets dont on veut attirer l'attention des parlementaires. Le premier, un élément qui est absent dans le projet de loi comme solution pour lutter contre la collusion ou la corruption, c'est bien une donnée de base qui n'a jamais été remise en question, à savoir: Pourquoi le gouvernement est obligé de sous-traiter autant d'activités dans autant de secteurs?

Le deuxième sujet dont on veut vous sensibiliser, les parlementaires, c'est sur le besoin d'une mise en place de mécanismes de délation pour l'ensemble des fonctionnaires, qu'ils soient au niveau provincial ou municipal. Alors, dénoncer sans représailles, pas tout à fait comme le fait le fédéral, mais quand même.

Le troisième où on veut vous sensibiliser, c'est la mise en place d'un entrepôt de données publiques accessibles aux fonctionnaires pour évaluer les offres de service qu'ils reçoivent. Avec une valeur de 30 millions... 30 milliards, c'est-à-dire, il importe que l'État s'assure que chaque dollar dépensé le soit dans un esprit de saine gestion.

Quand nous sommes dans la fonction publique, nous ne sommes pas dans les circonstances habituelles de faire appel à la sous-traitance, qui devrait, à notre avis, être un surcroît temporaire, des urgences, des événements spontanés, des catastrophes, des accidents, des épidémies. Mais, non, avec les différentes politiques de réduction d'effectifs qu'on a eues depuis les années 1980, 80 % des contrats qui sont donnés le sont en raison de manque de personnel. On est bien loin des raisons habituelles d'aller en sous-traitance.

Et, si on parlait des coûts et de la dépendance de l'État envers la sous-traitance? Alors, pour nous, il y a une nécessité de reprendre le contrôle. On vous donne quelques exemples dans notre mémoire. Juste les logiciels de bureautique, selon nos informations, certains consultants de Microsoft coûtent environ 2 000 $ par jour à l'État québécois. Cette dépendance est tellement répandue dans l'informatique qu'on vous annexe des organismes gouvernementaux où il y a 50 % de contractuels pour 50 % d'employés dans le même ministère ou organisme.

Donc, on a trois propositions: premièrement, Interdire la signature d'un contrat par un organisme public lorsqu'il y a un seul soumissionnaire; interdire aux organismes de franchir le cap de 30 % d'employés contractants; et, si une activité est récurrente, qu'on a des raisons de croire qu'elle le sera, il faut évaluer l'embauche de personnel dans la fonction publique.

Évidemment, on va vous parler de coûts de la sous-traitance. Alors, toute entreprise performante ou gestionnaire avisé vous dirait que la sous-traitance, c'est avant tout une technique -- d'ailleurs, ceux qui nous précèdent vous l'auraient sûrement dit -- de gestion visant à sauver de l'argent. Or, dans la fonction publique, c'est le contraire. On a évalué plusieurs documents de plusieurs ministères et organismes. Il y en a un en particulier qu'on vous met comme exemple, au ministère des Ressources naturelles et de la Faune, pour un contrat qui demande l'installation d'un poste de travail d'un consultant. Alors, c'est pas mal de contrats. Alors, pour la quinzaine de contrats qu'il y avait pour ça, pas un, pas deux, mais tous étaient plus chers que si on l'avait fait à l'interne. Et, si on l'avait fait à l'interne, il y aurait eu des économies de 871 000 $.

**(16 h 50)**

D'ailleurs, le Vérificateur général indique, juste à la ressource informatique dans la fonction publique, qu'à l'interne ça varie entre 215 $ et 475 $ par jour, tandis qu'à l'externe c'est 400 $ à 950 $. Les contribuables québécois paient deux fois plus cher quand ils font affaire avec la sous-traitance en informatique. Ce sont des deniers publics.

D'ailleurs, il y a un an, au ministère des Transports, Mme Courchesne, qui était alors présidente du Conseil du trésor, indiquait que la reprise d'activités, qui coûtait 119 millions, allait coûter, à l'interne, 61 millions, ce qui fait une économie récurrente de 58 millions. Alors, c'est un deuxième exemple.

Vous savez, juste l'activité de marquage des routes, si on va à l'externe, on paie 23 % plus cher. Et le remplacement de ponceaux au Québec, on paie deux fois plus cher si on va à l'externe, et nous avons tous les chiffres et les preuves à l'appui.

Je veux attirer également votre attention sur les coûts indirects de la sous-traitance. Il y a eu des fiascos en informatique, il y a eu des annulations de contrat. Il y a eu des dédommagements parce qu'on a arrêté des contrats et il y a quand même des clauses à faire respecter dans ces contrats-là pour dédommager les entrepreneurs pour un bris de contrat. Alors, au ministère des Transports, il arrive souvent que les employés internes réparent les erreurs des sous-traitants, parce que juste les frais juridiques, les coûts juridiques pour poursuivre l'entrepreneur seraient plus élevés que si on les répare soi-même.

Le gouvernement du Québec est probablement, je dirais, le plus important donneur d'ouvrage au Québec, et nous croyons qu'il peut réellement forcer des économies d'échelle, à condition d'être prêt lui-même à faire ce que le marché ne peut pas lui offrir. Alors, pour ces raisons, nous avons deux autres propositions dans notre mémoire, que nous proposons à toutes les périodes de négociation de la convention collective. Alors là, là, ça fait longtemps qu'on propose ça. On vous le dit, le Conseil du trésor devrait obliger les organismes publics à comparer les coûts internes, externes et avec une analyse de coûts basée sur des coûts pertinents. Et, quand l'analyse de coûts démontre que c'est moins cher, il devrait y avoir une obligation de procéder à l'interne.

Il est inconcevable aujourd'hui que des gestionnaires ne veulent plus faire la gestion de personnel, mais fassent de la gestion de contrats. Alors, quand on est embauché comme gestionnaire, on doit faire de la gestion.

Observer et dénoncer, on en a parlé un peu. Il y a une chose différente et probablement qui rejoindrait les intervenants qui nous ont précédés. Nous, nous nous questionnons à savoir pourquoi on confie à l'Autorité des marchés financiers le mandat de certifier plutôt que de le confier à Revenu Québec qui fait déjà la certification des entreprises. Alors, je pense que ça rejoindrait les entrepreneurs. Revenu Québec a des enquêteurs en matière frauduleuse, qui ont déjà l'expertise pour mener à bien ce type d'enquête, et ça permettrait aussi d'augmenter sa cohérence dans son action en matière de lutte à l'évasion fiscale.

Retrouver une expertise publique, on en a parlé également. En 2010, donc il y a deux ans -- et même plus de deux ans parce que c'était en mars 2010 -- Mme Monique Gagnon-Tremblay, alors la présidente du Conseil du trésor, indiquait, dans les documents du budget, que la politique de réduction des effectifs -- on appelle ça le un sur deux, hein, communément appelée -- il devenait de plus en plus difficile de l'appliquer sur le plan de l'effectif et qu'elle avait, depuis six ans, probablement atteint sa limite. Donc, ça fait encore deux ans qu'elle s'applique.

Il serait temps qu'on arrête d'appliquer la politique de un sur deux de manière tous azimuts, c'est-à-dire de manière mathématique. Il y a des endroits où elle ne s'applique pas, notamment dans les opérationnels du ministère des Transports, mais encore la majorité des ministères et organismes sont soumis à cette politique. D'ailleurs, dernièrement, même à la ville de Montréal, on a indiqué que la diminution de personnel avait favorisé la corruption. Alors, il faut garder un noyau dur dans la fonction publique pour être en mesure d'évaluer qu'est-ce qu'on sous-traite. Alors, la question n'est pas suffisante... comme les coûts, on nous apprend également, dans le rapport de M. Duchesneau, que la perte d'expertise a rendu l'État complètement captif de ses fournisseurs.

Donc, nous comprenons qu'il y a des secteurs qui sont émergents, qu'il y a des secteurs où on a des expertises plus pointues. Par contre, quand on voit que cette sous-traitance devient récurrente, on devrait vraiment évaluer de la faire faire à l'interne.

Et je termine, M. le Président, avec un passage du rapport de mon collègue, les ingénieurs du gouvernement du Québec, qui l'a dit hier: «La meilleure façon de diminuer les situations prêtant flanc à la corruption lors de l'octroi de contrats est d'en limiter le nombre.» Merci.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): Merci, madame. Pour une période d'échange maintenant, je laisse la parole à M. le ministre.

M. Bédard: Merci, M. le Président. Alors, bonjour. Bonjour. Il me semble qu'on s'est vus il n'y a pas très longtemps. Donc, dans ces circonstances, ça me fait d'autant plus plaisir de vous parler que ce projet de loi a une importance qui est, évidemment, névralgique pour le gouvernement, mais, je pense aussi, pour le rétablissement de la confiance des citoyens envers leurs institutions.

Je pense qu'on a tous bien compris le message sur la sous-traitance. Il est assez clair, bien encadré. Ce que je veux simplement vous dire: On n'est pas dans le coeur du projet de loi, on est dans la recherche, effectivement, je vous dirais, de solutions pour s'assurer de la meilleure compétence possible, pour éviter d'ailleurs les dérapages qu'on a vus et qui ont été établis, là, dans différents rapports, comme étant une des causes, parfois, de la collusion, c'était le manque d'expertise, effectivement, de certains ministères et organismes. Et je vous ai déjà confirmé que nous travaillons là-dessus, dans certains secteurs, pour s'assurer que ceux et celles qui sont appelés à donner des contrats ou, dans d'autres cas, là, de suivre des contrats, qu'ils puissent réacquérir cette expertise.

Sur les éléments de sous-traitance, par contre, il y a peut-être une remarque que je vous dirais. L'important pour nous... Il y aura toujours de la sous-traitance, et ça en prend, et je pense que vous l'avouez aussi. Le but du projet de loi, c'est assurer cette saine concurrence là. Donc, c'est bien beau que ce soit le plus bas soumissionnaire, et je pense que c'est une règle qui est correcte, qui n'est pas parfaite, mais, en soi, qui a tous ses avantages. L'important, c'est que l'entreprise qui va gagner cet appel d'offres, elle, soit conforme à des normes éthiques et surtout à des normes de probité qui correspondent à nos attentes en termes de population, donc. Et malheureusement on a constaté que ce n'était pas le cas actuellement. Donc, c'est le but du projet de loi, assainir cette concurrence pour éviter la collusion, la corruption et, en même temps, contribuer, par nos contrats publics, à l'enrichissement du crime organisé, ce qui n'est pas une bonne chose en soi, vous en conviendrez.

J'ai vu, dans votre mémoire, vous faites référence à l'Agence du revenu. Fort bonne idée. Fort bonne idée parce que nous l'avons évaluée. Je vais être très transparent avec vous. Nous sommes partis, au départ, sur une autre, je vous dirais, façon de voir et nous nous sommes dit: Pour être opérationnel, ça prend des organisations qui existent déjà, parce que sinon, si on avait eu à créer un autre organisme, bien là, il y a le temps d'implantation, si ce n'est que trouver les locaux, trouver le personnel, l'engagement, les ressources, la compétence, et là on se retrouvait à décaler.

Donc, on a ciblé des organismes... L'UPAC, au départ, a fait consensus, évidemment, en termes d'enquête. Là, on s'est dit: Qui va émettre l'habilitation, pour garder une distance? Puis ça, je suis très transparent avec vous, alors on s'est donné une liste d'organisations qui avaient des caractéristiques d'indépendance, des mandats qui étaient cohérents avec ce qu'on voulait donner, une structure qui était adaptée et des compétences existantes.

Et rapidement -- c'est la motion du mercredi, en passant, là, donc ça ne sera pas long -- et rapidement on est arrivés au constat... L'Agence du revenu faisait partie de cette analyse, je tiens à vous le dire, donc votre idée n'est pas mauvaise, et on aurait pu basculer de ce côté-là, mais on a préféré l'AMF pour des raisons pratiques et aussi de distance par rapport au pouvoir politique. Tu sais, c'est une agence... L'autorité fonctionne à part, elle a déjà de la certification. Vous avez vu, elle est en lien avec les services policiers actuellement pour, dans certains cas... au niveau des machins monétaires... excusez-moi, là, il s'en vient tard, là, mais les guichets d'argent, là, les...

Une voix: Les entreprises de services monétaires.

**(17 heures)**

M. Bédard: Les entreprises de services monétaires, voilà. Je ne sais pas pourquoi que j'ai autant de problèmes avec cette expression-là. Donc, elle travaille déjà sur cette certification. Elle a un contentieux très développé. Vous me direz: Le ministère du Revenu aussi, là, évidemment. Ce n'était pas le meilleur... Là, là-dessus on était dans les mêmes bases. Mais l'autorité, par sa nature même, émettait des certifications et pas simplement dans ces matières-là.

Et moi, ce qui m'a le plus rapproché... parce qu'au départ on était sur des organisations très indépendantes -- et quand je vous dis «très», vous pouvez imaginer lesquelles, là -- qui ont un caractère d'indépendance au départ, donc qui font même partie des organismes à qui on donne ce caractère-là. Le problème, c'est l'opérationnalité, la compétence de base, donc l'efficience à court terme, les équipes réduites. Alors, c'est pour ça qu'on s'est dit: Bon, gardons l'indépendance, mais en même temps assurons-nous qu'ils peuvent fonctionner dès le lendemain de l'adoption de la loi.

Donc, j'ai eu à discuter avec différents responsables, et l'autorité, elle, nous a assuré qu'elle était prête à fonctionner dès le lendemain de l'adoption de la loi, avec quelques ETC de plus, là, évidemment, vous me direz.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): Merci, M. le ministre. Mme Martineau, vous reconnaissez le son de notre cloche. C'est le seul événement qui peut nous faire arrêter une commission. Alors, nous devons exercer notre devoir d'aller voter au salon bleu.

Alors, nous suspendons la commission quelques minutes et, Mme Martineau, nous vous revenons.

(Suspension de la séance à 17 h 1)

 

(Reprise à 17 h 22)

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): Alors, nous reprenons nos travaux. Nous reprenons nos travaux et nous en étions à un échange entre nos invités et les représentants gouvernementaux. Et il y a 5 min 19 s de fait sur ce temps-là, et, lorsqu'on nous avions terminé, je crois que c'était Mme Martineau qui devait venir en réplique aux commentaires de M. le ministre. Alors, à vous la parole, Mme Martineau.

Mme Martineau (Lucie): Merci, M. le Président. Alors, bon, effectivement, nous avons proposé que cette certification-là soit faite par l'Agence du revenu. Quant à nous, bien, il y a plusieurs raisons.

Quand on a transformé l'Inspecteur général des institutions financières, on a envoyé le registre des entreprises à l'Agence du revenu. Le ministère du Revenu est devenu l'Agence du revenu. Il est étendu sur l'ensemble du territoire du Québec. Nous, on croit que ce serait une meilleure porte d'entrée pour les entrepreneurs. Les gens qui nous ont précédés avaient... Bien souvent, on entend, et puis ce n'est pas d'hier, là, même quand j'étais dans le réseau, où les entreprises disent: Il faut cogner à je ne sais pas combien de portes dans l'appareil gouvernemental avant de pouvoir faire des affaires au Québec. Alors, j'imagine que, si on cognait à une seule porte pour avoir les certificats requis, ça ferait leur affaire.

Alors, moi, je pense que l'Agence du revenu a toutes les compétences de le faire. Je pense également que plusieurs... Je ne veux pas dire que tout le monde c'est comme ça, mais on sait que, depuis que l'agence a, je dirais, augmenté sa préoccupation envers l'évasion fiscale, bien, ça fonctionne. C'est sûr que ça a pris des effectifs de plus, mais ça fonctionne. Et je pense que, si tout le monde va au même guichet, ils pourront faire également d'autres validations qui font en sorte d'amener de l'argent à l'appareil de l'État.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): M. le ministre.

Mme Martineau (Lucie): Alors, on vous demande humblement de revoir cette position avec vos collègues parlementaires.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): M. le ministre.

M. Bédard: Effectivement, avec mes collègues, nous aurons effectivement à discuter de cette importante question. Mais ce que je veux vous dire... Puis je continue à réfléchir, mais en même temps il n'y a pas une seule vérité. Et je vous dis ça pour moi, pas pour vous, là. Donc, votre questionnement, il est légitime, on y a réfléchi, on va continuer à réfléchir, mais ces choix-là ont été, je vous dirais, développés, là, en termes de...

Parce qu'en même temps il y a, comme je vous disais, le caractère d'indépendance. On s'est parlé un peu rapidement tantôt. Il y a le ministère du Revenu aussi, qui a un rôle qui est particulier, hein, et qui a quand même un ascendant assez fort sur tous nos bons contribuables.

Donc, ce que nous souhaitions, c'était de faire en sorte que ça ne soit pas tout le ministère du Revenu, effectivement, qui traite ça, parce qu'eux ils ont tout le domaine de l'évasion fiscale, qui est quand même importante, et de montrer aux gens que c'est autre chose, le problème de... Et là je ne suis pas dans l'évasion fiscale mais plutôt dans la contestation légitime de cotisations ou de demandes au ministère du Revenu et celle d'une habilitation qui est basée sur la probité. Donc, on ne voulait pas mélanger ces deux aspects-là par rapport à l'autorité qui va émettre pour garder cette confiance-là des gens envers l'institution qui va l'attribuer.

Donc, je prends vos arguments, vous dire qu'on a eu les mêmes réflexions, de toute façon, par rapport à qui est le mieux habilité à le faire rapidement dès que le projet de loi va être adopté. Alors, je continue puis je prends vos commentaires.

Ce que je veux voir avec vous, très rapidement... Il ne doit pas me rester beaucoup de temps, mais, sur les principes du projet de loi, je comprends que vous êtes en faveur, l'habilitation aussi, le fait de travailler avec l'UPAC. Évidemment, je pense que, pour vous, c'est la bonne voie. C'est ça?

Mme Martineau (Lucie): Il y a une recommandation que je ne vous ai pas fait part, mais, quand on indique qu'il y aura un responsable à la gestion contractuelle par ministère ou organisme qui utilise... évidemment, il ne faudra pas que ça soit une seule personne à des endroits parce qu'elle ne suffira pas à la tâche.

M. Bédard: Ah non, non, non.

Mme Martineau (Lucie): Ça va. Nous, on veut être sûrs de ça.

M. Bédard: Rassurez-vous. Effectivement, vous avez entièrement raison.

Mme Martineau (Lucie): O.K. Et que les municipalités en aient aussi, là, on est d'accord avec ça.

M. Bédard: Parfait. Et aussi de regarder, de votre côté... On annonce qu'il y aura d'autres mesures qu'on va faire pour s'assurer que les processus sont conformes, donc qu'on touche les entreprises. À l'interne, on a déjà des processus, des codes d'éthique forts, des façons de détecter, mais en même temps on veut s'améliorer là-dedans, je vous dirais, pour éviter ce qui se passe actuellement: que les situations durent pendant de très longues périodes.

Vous me direz: Bon, c'est d'autres administrations qui sont en cause, là, mais n'attendons pas que ça nous arrive. Donc, il y a peut-être là une réflexion que votre organisation, en termes d'apport, là, peut servir, là. Comment améliorer, détecter, faire en sorte qu'on puisse trouver, quand ça arrive -- et c'est rarissime, mais... -- les pommes pourries, finalement?

Mme Martineau (Lucie): Bien, en fait, il faut finir par permettre la dénonciation par les employés de l'État. Pas en fait que ce soit un moyen de pression, des choses comme ça, il faut vraiment que... Vous savez, nous, on fournit des rapports, hein? On fait des plaintes à la Commission de la fonction publique, on a envoyé un rapport également quand ils ont commencé la commission au ministère des Transports.

C'est des gens qui nous relatent des choses. On s'entend que ce n'est pas moi, dans mon bureau, qui voit qu'est-ce qu'il se passe sur les ponts au Québec, là, O.K.? Mais ces gens-là sont toujours soumis, bon, au devoir de loyauté mais qui empêche de dénoncer des choses qui seraient questionnables. Sans en venir à un État où tout le monde se... Je ne voudrais même pas dire des gros mots comme ça en Chambre, là, mais quand même il faut permettre que les gens puissent dénoncer sans avoir peur de perdre leur emploi. Ça, c'est évident.

Et, bon, il y a une loi au fédéral, là, où on donne de l'argent pour ça, là. Ça ne fonctionne pas, mais pas du tout. On a des contacts, nous, avec les syndicats canadiens, qui nous indiquent que ça ne fonctionne pas parce qu'ils ne sont même pas certains d'avoir des réprimandes, même s'il y aurait de l'argent. Alors, ça ne fonctionne pas.

Nous, on est prêts à travailler avec vous là-dessus. Ça fait depuis des années qu'on a des orientations prises dans nos instances pour permettre ça, et on va être ouverts à partager avec vous ce qu'on a déjà réfléchi sur cette question-là.

M. Bédard: Merci beaucoup.

**(17 h 30)**

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): Ça va? Je cède la parole maintenant à M. le député de Louis-Hébert.

M. Hamad: Merci à Mme Martineau, Mme Cordero et -- le troisième nom -- Mme Lévesque. C'est ça? Mme Lévesque? Ça fait plaisir. Merci. C'est écrit monsieur, c'est pour ça.

D'abord, première question, j'aimerais ça... Votre proposition de l'Agence du revenu. Parce que c'est une agence indépendante de la politique aussi, l'Agence du revenu. Pour ça, on l'a sortie comme ministère et mis plutôt une agence. Peut-être, humblement, là, si le ministre peut le regarder... Parce que les deux ont le même mandat, hein? En passant, le ministère du Revenu émet un certificat aussi pour l'entreprise sur... Alors, peut-être le regarder.

Parce que l'inquiétude que nous avons vers l'autorité est la suivante. C'est que, l'établissement des services monétaires, la loi n° 122, ça a pris deux ans pour le mettre en application et installer... Peut-être que le ministre peut vérifier. Puis ce n'est pas parce qu'on a un manque de confiance, c'est juste pour la vitesse de l'applicabilité. Et l'Agence de revenu, ils sont plus rapide à ce niveau-là. Je ne sais pas pour quelle raison. Peut-être qu'ils sont plus grands, ils ont plus de moyens, puis ils ont des enquêteurs à ce niveau-là. Alors, peut-être qu'on peut le regarder.

Humblement et sincèrement, on n'a pas d'idée faite, mais nous autres, on a une préférence pour le ministère du Revenu... ou l'Agence du revenu à cause de l'échange d'information. Et il ne faut pas oublier que l'Agence du revenu fait partie du groupe avec l'UPAC, avec la Commission de la construction pour vérifier le travail au noir, et il y a des échanges d'information avec l'UPAC, etc. Moi, je pense que peut-être ça peut être intéressant. Ça n'enlève pas le rôle de l'UPAC là-dedans. Mais je pense que c'est à regarder et je soumets ça très humblement au ministre.

Quand vous parlez de «whistleblower», là, pour permettre aux gens de dénoncer... La loi sur l'UPAC, la Loi concernant la lutte contre la corruption, qui a été adoptée à l'Assemblée nationale, il y a un chapitre III, «Dénonciation d'actes répréhensibles», et je vous invite à le regarder. Peut-être, s'il n'est pas assez fort, on peut le renforcer. Et je le soumets aussi pour mes collègues ici parce que la CAQ en parlait, qu'il faut ajouter... Il est déjà prévu des articles très clairs à ce niveau-là. N'importe qui, n'importe quelle personne... Il y a évidemment une personne de la fonction publique, mais aussi un citoyen qui peut dénoncer.

Et même il y a un article, l'article 33, on me dit que l'article 33, il dit: «Sont présumés être des mesures de représailles la rétrogradation, la suspension, le congédiement ou le déplacement d'une personne visée à l'article 32 ainsi que toute sanction disciplinaire ou autre mesure portant atteinte à son emploi ou à ses conditions de travail.»

Alors, l'article 32, ce qu'il dit: «Il est interdit d'exercer des mesures de représailles contre une personne qui fait une dénonciation ou contre celle qui collabore à une vérification ou à une enquête concernant un acte répréhensible, ou encore de menacer une personne de mesures...» Alors, il y a déjà, dans la loi de l'UPAC... on a prévu un genre de «whistleblower» qui protège les dénonciateurs. Et je pense que ça vaut la peine aussi pour que le gouvernement regarde. Parce qu'on a compris que vous avez, dans votre carton, un projet de loi, mais peut-être regarder ce qui existe déjà et de voir, si c'est déjà existant, pourquoi en faire un autre. Mais, s'il faut renforcer, bien, peut-être que c'est une autre chose.

Mme Martineau...

Mme Martineau (Lucie): ...

M. Hamad: Oui, allez-y.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): Mme Martineau.

Mme Martineau (Lucie): J'aimerais que vous le regardiez comme il faut parce que, quand on a vu cette loi-là de l'UPAC et, justement, l'article 33, j'ai personnellement écrit une lettre, à l'époque, au ministre des Transports et je n'ai jamais eu de réponse. Et je voulais savoir justement jusqu'où pouvait aller cet article 33 là en regard des membres que je représente. Mais c'est correct, moi, je vais le regarder avec nos recommandations. Mais nous avions demandé, à l'époque: Est-ce que ça va jusque-là? Est-ce que je peux dire à mes membres que ça... pas contourne mais ça écrase qu'est-ce qu'ils ont déjà dans la Loi de la fonction publique? Alors, je n'ai pas eu de réponse encore à ça, moi.

M. Hamad: Mais ça vaut la peine de regarder. S'il y a lieu de renforcer, pourquoi pas?

L'autre élément...

M. Bédard: ...

M. Ouellette: Ah! C'est chien, ça.

M. Hamad: Qu'est-ce qu'il a dit?

M. Ouellette: Il dit: Vous pouvez réécrire.

M. Hamad: Elle ne parlait pas de moi, en passant, elle vient de le dire.

M. Bédard: Non, on suggérait de...

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): M. le député de Louis-Hébert.

M. Hamad: Vous pouvez commenter si vous voulez, là.

Mme Martineau (Lucie): Je vais le faire, là. Moi, là, ce n'est pas long, vous allez voir.

M. Ouellette: Ah oui! Mais là... Bien oui.

Une voix: N'attendez pas une invitation.

M. Ouellette: Et on va s'assurer que vous ayez une réponse.

M. Bédard: Vous allez avoir une réponse juste et objective.

M. Hamad: Et rapide.

Je reviens à un autre sujet. On parle des agences, vous avez parlé pas mal du ministère des Transports. L'intention du gouvernement, c'est mettre en place une agence du transport. Alors, vous êtes directement touchés et concernés. Qu'est-ce que vous en pensez?

Mme Martineau (Lucie): On a l'expérience de l'Agence du revenu, dont vous avez parlé, et actuellement nous ne croyons pas que c'est la bonne solution, de séparer la conception, surtout si cette agence-là n'est pas soumise aux mêmes règles que la Loi de la fonction publique. Alors là, on n'est pas à ce projet de loi là, mais je sais, en tout cas, de ce que j'ai comme écho, qu'il serait déposé au printemps prochain.

Alors, j'ai déjà rencontré le ministre du Conseil du trésor, je m'attends de rencontrer également le ministre des Transports pour leur faire valoir qu'à notre avis ce n'est pas une bonne solution et qu'on est prêts à travailler à trouver des solutions. Parce que l'objectif de dépolitiser, peut-être, ou de... bon, c'est louable, sauf qu'il ne faut pas non plus...

Bien, je vais être claire, là. On est en train de briser l'État québécois, alors, à séparer... Et je ne sais pas, là, mais tous les parlementaires que j'ai connus depuis les 20 ou 30 dernières années -- ça fait que c'est correct, là, je couvre pas mal tout le monde, O.K.? -- tout le monde dit qu'il faut arrêter de créer des structures, puis créer des structures, puis tout le monde en crée. Là, je ne sais pas, là, mais ça ne marche pas.

Alors, on est prêts à trouver des solutions, et ce n'est pas en scindant le ministère en deux, je crois, que ça serait la solution pour nous. Quoiqu'on n'est pas à ce projet de loi là. Mais nous demandons également d'être entendus sur le prochain projet de loi.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): M. le député. Oui. M. le député.

M. Hamad: Bien, je pense qu'on est tous d'accord, les trois partis ici, sur le renforcement de l'expertise du ministère des Transports, il est clair. Et je pense qu'évidemment, là, il faut trouver la main-d'oeuvre aussi en même temps. Le grand défi, c'est bien beau vouloir avoir un ingénieur de 10 ans d'expérience, il faut le trouver et il faut le payer, et ça, c'est un grand défi pour le gouvernement dans tous les gouvernements qu'on a eus avant, après et pendant.

Maintenant, dans le projet de loi qui est déposé ici, qui fait l'objet de cette commission, avez-vous, à part la sous-traitance... Je comprends votre champ de bataille de la sous-traitance, c'est un discours qu'on connaît de vous. On n'est pas surpris que vous en parliez, de ce discours-là. Mais est-ce qu'il y a des choses davantage particulières dans le projet de loi que vous voulez ou vous suggérez de les modifier ou...

Mme Martineau (Lucie): Bien, actuellement, ce qu'on a...

Bon. Je veux revenir, je veux revenir pour les histoires de trouver des ingénieurs, trouver du personnel et le payer. Et là, là, je vais le dire carrément: Parce qu'on doit payer du monde et qu'on a voté, à l'Assemblée nationale, unanimement, le 21 novembre 1996, une loi sur l'équité salariale, nous allons scinder l'État? Je vous laisse là-dessus. C'est...

Une voix: ...

Mme Martineau (Lucie): Oui, on sort de la fonction publique parce qu'on veut payer du monde plus cher. Bien, il n'y a pas un syndicat ici qui va vous dire: Ne payez pas le monde, là. Je n'en connais pas. C'est sûr, sûr, sûr. Alors, pourquoi vous voulez le sortir de la fonction publique? C'est pour payer le monde plus cher. C'est clair, là, on le voit dans toutes les lectures.

Pourquoi on ne les laisse pas dans la fonction publique puis on ne les paie pas plus cher? C'est parce qu'en les payant plus cher on va devoir payer les femmes plus cher dans la fonction publique à cause de la Loi sur l'équité salariale. Alors, vous ne nous ferez pas dire ce qu'il ne faut pas dire. Ce n'est pas la solution. Trouvons des solutions puis payons le monde pour qu'ils travaillent puis qu'ils fassent de la bonne job.

Puis je pense que les gens dans l'État, puis là les ministres qui sont partis, puis les premiers ministres qui sont partis, puis ceux qui sont arrivés disent que toute la fonction publique travaille bien, donc payons-la.

M. Hamad: Là, vous parlez au président du Conseil du trésor, si je comprends bien.

Mme Martineau (Lucie): À tout le monde, là. À tout le monde.

M. Hamad: O.K., bien. O.K.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): M. le député de Louis-Hébert.

M. Hamad: Alors...

Mme Martineau (Lucie): Vous m'avez ouvert une porte, là...

M. Hamad: Oui, oui.

Mme Martineau (Lucie): ...je vous le dis.

M. Ouellette: Henri?

M. Hamad: Henri? M. le député de Verdun.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Je vous remercie. Je vais aborder avec vous ce qui est mineur dans votre intervention mais qui était quand même important puisque vous l'avez signalé dans une de vos trois recommandations, qui était l'entrepôt des données publiques. C'est à la page 21 de votre mémoire et ça revient aussi dans vos recommandations.

Si je comprends bien, vous demandez, à l'heure actuelle, que soient entreposés l'ensemble des contrats gouvernementaux au même endroit. Est-ce que je comprends que c'est ça, l'idée que vous avez, là?

Mme Martineau (Lucie): Oui, ces données. Mais évidemment ce n'est pas pour que tout le public ait accès, là, parce qu'il y a quand même les histoires de... des entreprises qui ne veulent pas avoir accès à ça, mais que les gens de la fonction publique, les fonctionnaires, aient accès à ça.

**(17 h 40)**

M. Gautrin: C'est-à-dire une meilleure collaboration entre les fonctionnaires, briser les silos, être en mesure... Vous savez, à l'heure actuelle, que le principe du gouvernement ouvert est centré autour de trois grands principes: la transparence, la participation des citoyens et la meilleure collaboration entre les fonctionnaires.

Donc, à l'heure actuelle, un des éléments d'une meilleure collaboration serait, d'après vous, cet entrepôt de données gouvernementales?

Mme Martineau (Lucie): Dans le cas des gens qui donnent des contrats, oui, comme il existe des collaborations entre différents ministères et organismes, des échanges de renseignements pour faciliter le travail des uns et des autres.

Bon, évidemment, ce n'est pas un Big Brother, là, si je peux... l'expression, là. C'est de dire: Ça, là, ce n'est pas accessible à mon voisin, ma voisine, là, c'est accessible aux gens...

M. Gautrin: Vous savez que chaque organisme est censé de publier l'ensemble des contrats.

Mme Martineau (Lucie): Oui.

M. Gautrin: C'est du domaine public, et ça, c'est l'article 22, actuellement, de la Loi sur les contrats. Sauf que le fait de les publier sans utiliser les ressources informatiques, ça équivaut à avoir une telle masse d'information que ça ne sert à rien. Donc, moi, ce qu'il faut... Et je plaide et je vais continuer à plaider à la fois de publier, mais d'être en mesure de pouvoir utiliser.

Mme Martineau (Lucie): Vous avez justement les deux personnes, là, qui regardent ça, puis elles ont des cheveux, là, mais, je vais vous dire, là, c'est vraiment assez spécial, donc je vais les laisser vous parler de ça.

M. Gautrin: C'est bien. Alors, je vais discuter avec elles.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): Mme Lévesque.

Mme Lévesque (Nadia): On a des cheveux blancs qui sont cachés par la teinture parce que justement d'étudier la sous-traitance...

M. Gautrin: Moi aussi, j'ai les cheveux blancs...

Une voix: Ce n'est pas de la teinture, madame.

M. Gautrin: ...mais ce n'est pas une teinture.

Mme Lévesque (Nadia): ...avec la façon dont les données sont rendues accessibles en ce moment, que ça soit les listes PDF des engagements de plus de 25 000 $, mensuelles, ça devient intraitable. Et rapidement...

M. Gautrin: C'est de la musique à mes oreilles, chère madame.

Mme Lévesque (Nadia): Oui, je sais que je vous fais plaisir.

M. Gautrin: Je suis un opposant du PDF et je plaide toujours pour un minimum, cette année, en XML ou HTML de manière qu'on puisse travailler avec ça.

Mme Lévesque (Nadia): Et l'autre élément, c'est que l'esprit de la loi est de redonner confiance et de lutter contre des manques d'intégrité. Et la façon la plus simple, c'est encore de rendre l'information accessible. Et l'information accessible, elle peut être, entre guillemets, dépersonnalisée dans l'entrepôt de données sans permettre de faire que ça deviendrait une espèce de base de données qui vaudrait énormément sur un marché, disons, d'espionnage industriel.

L'esprit, ce n'est pas ça, c'est vraiment de permettre aux fonctionnaires, qu'ils soient municipaux ou qu'ils soient provinciaux, d'avoir accès à une base de données qui leur permet de faire de l'étalonnage, de la comparaison des chiffres qu'ils viennent de recevoir, des quantités qui sont soumises pour avoir justement la fine pointe du terrain à la fois pour les gens en approvisionnement mais aussi les gens qui sont quotidiennement sur...

M. Gautrin: Je vous remercie. Moi, j'ai publié un rapport sur le Web 2.0. Je pense qu'on aurait à échanger aussi sur la manière dont... Vous l'avez lu?

Mme Lévesque (Nadia): Oui.

M. Gautrin: Bien, je vais vous faire cadeau d'une copie papier, tiens.

Une voix: Il va vous l'autographier.

Mme Lévesque (Nadia): C'est parfait.

Mme Martineau (Lucie): Je pense que Bianca va en ajouter.

Mme Cordero (Bianca): En fait, moi, je vois deux niveaux de détail qui peuvent s'appliquer. Donc, au niveau du grand public, disons, comme moi, là, en tant qu'ancienne technicienne en informatique, il y a le volet où il y a une recommandation qui dit: On ne devrait pas attribuer un contrat lorsqu'il n'y a seulement qu'un seul soumissionnaire. Or, si les données étaient accessibles dans un format qui est travaillable, on pourrait déterminer beaucoup plus rapidement cette tendance-là qu'on voit, surtout dans le domaine informatique, où il y a souvent moins de trois soumissionnaires qui se qualifient. Donc, ça, je pense que c'est problématique.

M. Gautrin: ...des remarques qu'on a faites à la Commission de l'administration publique dans ce sens-là.

Mme Cordero (Bianca): Voilà. Maintenant, au niveau de la construction, on comprend qu'il y a beaucoup d'éléments qui sont évalués dans un contrat de construction. Et à ce moment-là je considère que l'étude de bordereaux que proposait M. Duchesneau est très intéressante. On tombe dans un volet plus détaillé, qui est beaucoup plus technique, et je pense que ce domaine-là devrait être accessible entre les municipalités et l'État pour pouvoir faire des comparaisons, parce qu'on peut voir qu'il y a des meilleures pratiques dans certaines municipalités, et s'inspirer aussi. Donc, comment on arrive à obtenir un bon prix dans un tel secteur? Bien, en arrière, il y a une méthode de travail.

Donc, c'est pour ça que je pense qu'il y a deux niveaux qui pourraient être établis, donc un niveau plus expert puis un niveau grand public.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): Merci, Mme Cordero. On va passer maintenant à M. le député de Saint-Jérôme.

M. Duchesneau: Bonjour. Tout d'abord, j'aimerais dire, Mme la présidente, que, n'eût été de la collaboration des membres de votre syndicat, on ne serait pas assis ici aujourd'hui.

Ceci étant dit, je vais vous parler des «whistleblowers». Je pense que le point que vous avez mentionné tantôt recoupe ce qu'on a entendu tantôt de la Corporation des entrepreneurs généraux du Québec: Une loi ne suffit pas, il faut aller au-delà de ça. Donc, quand vous avez parlé tantôt qu'on doit protéger les dénonciateurs... Même si c'est dans la loi, le téléphone ne sonne pas plus. Je pense qu'il faut aller au-devant des coups et trouver des moyens d'aller chercher l'information.

Parce que les gens ont souvent une réticence à parler, mais, quand on leur pave la voie, c'est drôle, on obtient toute l'information dont on a besoin. Ce n'est pas un acte, comment dire, normal, mais ce n'est pas un acte automatique que d'aller au-devant des coups parce que justement, actuellement, ils n'ont aucune protection. Même si la loi dit qu'on les protège, en réalité, avant de... C'est bien évident qu'il n'y a pas un gestionnaire qui va les congédier immédiatement après, mais on peut lui faire la vie dure, et ça, ce n'est pas documenté nulle part. Et donc oublions la loi. Je pense qu'il faut aller au-delà de ce qui est écrit et tenter de comprendre l'esprit de la loi.

L'esprit de la loi, c'est que des employés qui voient des actes collusoires ou même des actes de corruption puissent s'avancer sans jamais, justement, penser qu'il pourrait leur arriver quelque chose. Parce que j'ai vu des employés au MTQ qui ont pris ça difficilement. Il y en a même qui ont développé des maladies, et ça, je ne pense pas que l'article 33, 38 ou 162 va régler quoi que ce soit là-dedans. Et on ne peut pas penser mettre les bases d'une lutte anticorruption si on ne protège pas ceux qui dénoncent les actes. Alors, j'espère que vous allez continuer à pousser là-dessus. Peut-être vous entendre.

Mme Martineau (Lucie): Ah! moi, je vous dis, ça fait des années que je répète les mêmes choses.

M. Duchesneau: Ah! moi aussi. Moi, je radote. Mais ce n'est pas grave, je continue.

Mme Martineau (Lucie): Ça ne me dérange pas non plus. Je comprends.

Oui, c'est vrai, il y a de la réticence assez... Je vous dirais, nous, on a un réseau, hein, on a l'observatoire des services publics. Et on a mis un réseau à la grandeur du Québec pour que les gens nous dénoncent, à nous, le syndicat, donc pas à l'employeur, qu'est-ce qu'ils voient qui va à l'encontre des services publics, ou la sous-traitance, bon. N'eût été de ça, on n'aurait peut-être pas eu autant de choses à vous donner. Sauf qu'ils ont même de la réticence à dénoncer à leur propre syndicat, parce qu'écoutez il y a de l'historique là-dessus, là.

Et c'est pour ça que j'ai écrit, à l'époque, au ministère des Transports. Vous parliez de la vie dure. Alors, moi, j'ai une personne qui a pris sa retraite et qui a eu peur pas mal, oui, puis même quand l'unité était là, là, O.K.? Alors, c'est sûr que... Alors, c'est pourquoi j'ai écrit pour dire: Écoutez, s'il arrive quelque chose à cette personne-là, bien, au moins j'aurai écrit à quelqu'un de responsable pour soulever l'article 33.

Et, oui, nous allons continuer puis nous sommes disponibles, avec le gouvernement, à partager ce que nous avons déjà d'élaboré. Parce que, notre organisation, ça doit faire au moins 20 ans qu'on réclame que les fonctionnaires puissent avoir une possibilité de dénoncer, donc on a cheminé là-dedans et on est prêts à collaborer avec le gouvernement pour ça.

M. Duchesneau: La protection dont je parlais tantôt n'est pas uniquement la protection de l'employeur mais la protection de ceux qu'on a dénoncés... ou se protéger contre ceux qu'on a dénoncés. Et on l'a entendu à la commission Charbonneau, des employés avaient eu des menaces. Et ça, encore là, ce n'est peut-être pas couvert par l'article 33 de la façon dont on l'aimerait, parce que... Je donnais l'exemple d'une employée du MTQ qui a été confrontée à ça: menaces, menaces à l'intérieur du ministère, mais aussi menaces de l'extérieur du ministère parce qu'elle avait dénoncé des gens. Alors, ça, vous aussi, vous avez entendu parler de ça de la part... Oui?

Mme Martineau (Lucie): Mais, si tout le monde est d'accord, là, ça va être le fun. On va travailler ensemble, puis ça va être correct.

**(17 h 50)**

M. Duchesneau: Bien, en fait, c'est pour convaincre mes collègues, hein, que la réalité est tout autre que celle qu'on veut bien dépeindre dans le cadre d'une loi. Mon collègue de Louis-Hébert, de toute façon, est d'accord. Merci beaucoup. Non, c'est tout, M. le Président.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): Ça va? Merci beaucoup, Mme Martineau, Mme Lévesque, Mme Cordero. Merci beaucoup de votre participation à notre commission.

Et je suspends quelques minutes pour permettre aux représentants, représentantes du Syndicat des professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec de prendre place.

(Suspension de la séance à 17 h 51)

 

(Reprise à 17 h 53)

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): Alors, nous reprenons nos travaux, et je souhaite la bienvenue aux représentants du Syndicat des professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec, dont M. Richard Perron est le président. Alors, M. Perron, je vous dis: Vous avez 10 minutes, à partir de maintenant, pour vous présenter, présenter les gens qui vous accompagnent et présenter votre exposé. Vous avez la parole.

Syndicat de professionnelles et professionnels
du gouvernement du Québec (SPGQ)

M. Perron (Richard): Bonjour, M. le Président, mesdames messieurs les députés membres de la commission. Je suis ici accompagné de M. Yves Vachon, à titre de responsable du haut comité sur la sous-traitance patronale-syndicale au gouvernement du Québec; Manon Therrien, troisième vice-présidente du SPGQ; et M. Pierre Riopel, qui a été coordonnateur de la rédaction du mémoire et qui est conseiller à la recherche au SPGQ.

C'est un plaisir pour moi de m'adresser à vous au nom du Syndicat des professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec pour un sujet aussi important et brûlant d'actualité. Le SPGQ représente plus de 23 000 professionnels, dont environ 16 300 dans la fonction publique et 336 à l'Autorité des marchés financiers. Nous avons également des membres dans divers organismes parapublics -- commissions scolaires, collèges d'enseignement -- en plus de 14 organismes gouvernementaux. Nous sommes donc le plus grand syndicat de professionnels au Québec.

D'abord, je tiens à remercier le président du Conseil du trésor pour son initiative. Selon nous, le projet de loi n° 1 est pertinent et nécessaire pour rétablir la confiance du public et des contribuables envers le bon fonctionnement des marchés public et parapublic québécois.

Confier à l'Autorité des marchés financiers le mandat de vérifier si une entreprise mérite la confiance du public lorsqu'elle souhaite obtenir un contrat est une avenue intéressante. Comme je vous le disais, nous avons 336 de nos membres à l'AMF. Nous leur avons posé la question. Ils sont confiants d'être tout à fait en mesure de remplir le mandat qui leur sera confié, mais cela ne doit pas se faire au détriment des autres mandats de l'AMF.

Le projet de loi est pertinent, mais sa portée devrait, selon nous, être élargie pour faire en sorte que l'évaluation porte sur d'autres éléments. On devrait minimalement vérifier si l'entreprise est en règle envers, par exemple, la CSST, la CCQ, en plus bien sûr de ce que prévoit déjà le projet de loi: d'être en règle envers l'impôt. En passant, nous avons aussi près de 4 000 membres à l'Agence du revenu du Québec.

D'autres aspects, peut-être moins liés à l'intégrité mais néanmoins importants, doivent être considérés. Par exemple, dans ses contrats précédents, l'entreprise en question a-t-elle livré un produit ou un service de qualité répondant aux besoins du client ou de l'utilisateur, et dans les délais prévus? Est-elle abonnée à la surfacturation?

Présentement, aussi incroyable que cela puisse paraître, les entreprises dans le domaine de l'informatique n'ayant pas livré un produit de qualité ou ayant abusé de la surfacturation dans un ministère peuvent néanmoins obtenir des contrats dans d'autres ministères ou organismes parce que l'information n'est pas partagée. Il faudrait voir à ce qu'elle le soit.

Revenons à l'intégrité. Bien qu'il soit souhaitable, voire même nécessaire, le projet de loi ne nous semble pas couvrir l'ensemble de la problématique de l'intégrité des entreprises en matière de contrats publics. Il faudrait, selon nous, s'inspirer de ce qui se fait ailleurs, notamment en Ontario, mais aussi dans les ministères et organismes du gouvernement. D'ailleurs, ce test d'intégrité devrait aussi être étendu aux entreprises qui bénéficient d'importantes subventions pouvant être reliées, par exemple, à l'aide à l'exportation ou à la politique industrielle.

Par ailleurs, le nombre et la valeur des contrats octroyés à une même entreprise au cours des dernières années ainsi que la structure oligopolistique de certains secteurs, qui engendrent la collusion, voire la corruption, devraient également être examinés. Dans le secteur des technologies de l'information, quelques entreprises se partagent à elles seules l'essentiel des contrats gouvernementaux.

Nous en venons à la question essentielle que pose même le dépôt d'un tel projet de loi: Comment en sommes-nous venus à devoir légiférer afin de mieux encadrer les marchés publics québécois et assurer l'intégrité des entreprises et de leurs dirigeants ou propriétaires qui obtiennent des contrats sur ces marchés?

La réponse se trouve dans la croissance fulgurante, au cours des dernières années, du recours à des ressources externes pour la réalisation des mandats dans les secteurs public et parapublic. Ma prédécesseure y faisait allusion longuement. La valeur totale des contrats donnés en sous-traitance s'élève à près de 24 milliards annuellement, soit presque l'équivalent des dépenses de l'État en santé. En ce qui concerne plus particulièrement les services professionnels et auxiliaires dans la fonction publique québécoise, la valeur des contrats a plus que doublé entre 2003-2004 et 2010-2011, dépassant maintenant les 2 milliards de dollars annuellement.

Est-ce que le Québec est un cas à part? Les chiffres nous indiquent que le pourcentage des dépenses en technologies de l'information liées à des ressources externes s'est maintenu de 8 % à 24 % pour les gouvernements dans les provinces canadiennes et dans le monde en général. En comparaison, ce pourcentage était de 52 % en 2008-2009 dans la fonction publique québécoise et de 57 % l'année précédente. C'est énorme. La modernisation de l'État a engendré un accroissement des coûts, une diminution de l'accessibilité et de la qualité des services, une baisse de la transparence, une diminution du niveau de sécurité et surtout une importante perte d'expertise, expertise que tout le monde réclame maintenant à ce jour. Et il n'y avait pas grand monde pour dénoncer sa dégradation au cours des dernières années, par contre, sauf nous.

Les conséquences de ces orientations apparaissent maintenant de façon quotidienne dans l'actualité, allant des problèmes plus spectaculaires dans les infrastructures de transport aux difficultés d'accès à des services publics, en passant par les problèmes de corruption, de collusion vécus dans le secteur de la construction et probablement dans d'autres secteurs, comme l'ont mis en lumière le rapport Duchesneau et la commission Charbonneau.

**(18 heures)**

Le projet de loi ne s'attaque pas à un élément fondamental du processus d'octroi d'un contrat public: tout ce qui précède l'octroi d'un contrat. Lors des consultations particulières sur le projet de loi n° 133 intitulé Loi sur la gouvernance et la gestion des ressources informationnelles des organismes publics et des entreprises du gouvernement, nous avions proposé d'instaurer un mécanisme obligeant les ministères et organismes à estimer les coûts de réalisation des travaux à l'interne dont le gouvernement devrait tenir compte. Ce mécanisme, un comparateur public, permettrait au gouvernement de disposer d'un étalonnage pour mieux évaluer les soumission reçues et éviter ainsi d'accepter des offres déraisonnables.

En somme, il ne faut pas oublier l'évaluation préalable des coûts et des impacts sur les finances publiques. Si le gouvernement ne prévoit pas d'orientation à ces niveaux, le projet de loi actuel risque de n'avoir qu'un impact marginal sur la problématique actuelle, soit la perte de contrôle des coûts due à l'abus de la sous-traitance.

Encore récemment, exemple révélateur, le Service de la vérification du ministère des Affaires municipales, qui scrute l'utilisation des subventions versées aux municipalités pour la réalisation des projets d'infrastructure, avait été aboli au lendemain des élections dans le cadre de cette politique. Heureusement, le 22 octobre dernier, après l'annonce de l'abolition de ce service dans le quotidien Le Devoir, cette décision a été renversée. Nous avions, pour notre part, alerté le ministre à cet effet dès la fin du mois de septembre.

Il s'agit là d'un exemple de situation menaçant l'intégrité des services publics qui pourrait être porté à l'attention des autorités par nos membres. Toutefois, ceux-ci craignent que des représailles soient exercées à leur égard s'ils en informent les autorités. Il faudrait par conséquent prévoir un mécanisme garantissant qu'ils ne seront pas pénalisés. Le SPGQ souhaite que le président du Conseil du trésor s'attaque rapidement à cette culture de la crainte dans nos ministères et organismes qui empêche les dénonciations et les situations abusives.

Le gouvernement du Québec a confié une part exagérée de ses activités au secteur privé au cours de la dernière décennie. Résultat: une fonction publique parallèle privatisée s'est mise en place dans les locaux mêmes de nos ministères et organismes. Nous constatons à cet effet une présence accrue de consultants dans les bureaux gouvernementaux.

Cette présence soulève des questions d'ordre éthique. Ces consultants qui sont dans nos ministères et organismes ont accès à des informations de nature sensible qui peuvent leur procurer des avantages dans l'obtention des contrats à venir. Par exemple, au ministère des Transports, puisqu'on en parle beaucoup, la direction responsable de la gestion documentaire compte plusieurs consultants. Encore pire, les consultants participent à la définition même des besoins de certains projets.

Nous ne sommes pas les seuls à constater qu'il y a de plus en plus de consultants dans les bureaux gouvernementaux. La Commission de la fonction publique a aussi fait ce constat dans un récent rapport portant sur deux ministères et un organisme. Pour la commission, et je cite un passage de leur rapport, «la présence significative de contrats de services qui sont, dans les faits, des contrats de travail, conjuguée aux motifs énoncés par les gestionnaires pour justifier leur octroi, laisse entendre qu'il existait, au moment de l'octroi de ces contrats, un réel besoin de personnel dans les deux ministères et l'organisme vérifiés».

Pour ce type de contrat de services assimilables à des contrats de travail, selon un relevé partiel -- et j'insiste sur le mot «partiel» -- effectués par la SPGQ en 2010, on dénombrait plus de 2 600, 2 600 consultants installés dans les bureaux de la fonction publique québécoise. 2 600 consultants.

Le projet de loi prévoit la désignation d'un responsable des règles contractuelles. Celui-ci devrait en conséquence se voir confier la recommandation que fait la Commission de la fonction publique de mettre en place des mécanismes permettant de prévenir l'octroi de contrats de services qui s'avèrent dans les faits être des contrats de travail.

Nous sommes d'avis qu'un registre public et accessible à la population des contrats accordés par le gouvernement devrait également être créé. La récente initiative «Hackons la corruption», à laquelle le député Henri-François Gautrin sera certainement sensible, donne une idée du potentiel d'une telle initiative. J'ai bien écouté ce que vous avez dit hier à l'Assemblée nationale dans votre discours, et, moi aussi, c'était de la musique à mes oreilles.

Enfin, nous sommes loin de croire que les amendes prévues à l'article 22 du projet de loi sont assez élevées pour être dissuasives compte tenu de l'envergure financière de nombreux contrats dépassant les millions de dollars.

Conclusion et recommandations. L'intégrité des entreprises en matière de contrats publics gouvernementaux passe inévitablement par une reprise du contrôle de la qualité et des coûts des services ainsi que de l'expertise reliée aux activités gouvernementales. Il faut en ce sens mettre fin au manque d'effectifs et au développement trop rapide d'une fonction publique parallèle privatisée...

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): M. Perron, je pense qu'on n'aura pas le temps de passer tout le texte que vous avez, là, sur conclusions et recommandations. De toute façon, je pense que les parlementaires l'ont. Peut-être aller brièvement sur les dernières, dernières recommandations, puis, après ça, on passera à une période d'échange.

M. Perron (Richard): Parfait. Je voulais simplement relever le fait que le Vérificateur général avait bien mis en évidence qu'une ressource privée, là, au sein du gouvernement, les consultants, ça coûte deux fois plus cher qu'une ressource interne. Je voulais aussi rappeler que le Parti québécois s'était engagé à prendre les mesures nécessaires pour que la fonction publique québécoise retrouve son expertise et son niveau de compétence.

En conséquence, nos recommandations. On veut que les critères qui mènent à la délivrance d'autorisation par l'AMF soient élargis, que des suivis soient faits au hasard, pas seulement qui peuvent être faits comme le prévoit la loi, mais qu'ils soient faits au hasard des choses, sporadiquement.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): Rapidement, M. Perron.

M. Perron (Richard): Qu'il soit ajouté aux responsables, et je l'ai dit tout à l'heure, de l'observation de s'assurer qu'il s'agit bien de contrats de services; qu'on crée un registre public, accessible à la population, des contrats comme le souhaite M. Gautrin; que le gouvernement mette fin au non-remplacement d'un poste sur deux; que le gouvernement se dote d'un plan de réduction de la sous-traitance; qu'il priorise les travaux réalisés en régie interne dans les secteurs stratégiques; qu'il établisse une cible au-delà de laquelle on ne peut pas aller, comme les 52 % des contrats en informatique; qu'il y ait un comparateur public qui s'installe dans les ministères et organismes; et qu'il y ait une commission qui soit chargée d'examiner la structure oligopolistique de certains secteurs qui peut engendrer des situations de collusion.

Je vous remercie.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): Merci, M. Perron. On s'excuse de bousculer, le temps nous manque un petit peu. D'ailleurs, il me faudrait un consentement des représentants des partis pour continuer nos travaux après 18 heures. Est-ce qu'il y a un consentement? Consentement de chaque côté? Consentement. Alors, je laisse maintenant la parole à M. le ministre.

M. Bédard: Merci. Merci, M. le Président, et merci, M. Perron et ainsi que ceux et celles qui vous accompagnent. Merci de votre... de votre appui -- excusez-moi, on est tard effectivement -- au projet de loi et à l'orientation qui a été prise.

Je comprends vos préoccupations par rapport à la sous-traitance, ce que ça a engendré par rapport aux pertes d'expertise. Vous semblez cibler effectivement particulièrement le domaine de l'informatique dans lequel domaine, ce que je comprends, il n'y a pas simplement eu une perte de contrôle en termes, je vous dirais, des budgets qui y sont alloués ou même de certains projets, il y a une perte de contrôle, je vous dirais, de la façon dont on traite avec les entreprises, de la façon dont on établit nos priorités.

Donc, ce que vous souhaitez, ce que je comprends bien, c'est, à ce niveau-là, qu'il est urgent d'agir pour récupérer de l'expertise à travers les différents ministères. C'est ce que je comprends. Parce que vous semblez cibler particulièrement le domaine de l'informatique, évidemment.

M. Perron (Richard): Entre autres, entre autres parce qu'évidemment les sommes investies sont tellement colossales et il est tellement évident qu'il y a eu de l'abus, qu'il y a une dépendance, que l'expertise a quitté le gouvernement.

Vous savez, quand je me suis promené au ministère des Transports, déjà il y a quelques années de ça, pour recruter des délégués et que je m'apercevais que, sur certains étages, il y avait plus d'un bureau sur deux qui était occupé par quelqu'un de CGI, qui profitait donc des espaces de bureau du gouvernement, des services de secrétariat, d'informatique, de la formation, et que ces gens-là discutent avec nous et qu'ils sont gênés... Un conseiller senior, là, ça peut coûter jusqu'à 2 000 $ par jour en sous-traitance, les mêmes personnes qui savent que ça coûte deux fois moins cher et que ça pourrait être fait à partir de l'interne. Donc, ça nous paraît particulièrement évident. Allez vous promener, là, dans un ministère comme celui du Transport puis vous le verrez de vos propres yeux.

M. Bédard: Vous indiquez dans une vos recommandations, et c'est revenu à quelques reprises: le registre public sur les contrats, bon, qui sont accordés par le gouvernement. Est-ce qu'il y a déjà un registre sur les contrats actuellement?

**(18 h 10)**

M. Perron (Richard): Il y a un registre qui existe sur les contrats, mais il ne permet pas... Puis, on a eu une discussion intéressante entre M. Gautrin et des représentants du SFPQ tout à l'heure à ce sujet. C'est que son utilisation ou la tâche d'aller découvrir les failles est tellement colossale que ce n'est pas amical à l'utilisateur, «friendly user», comme on dirait chez nos amis anglophones. Et il faudrait donc créer un système qui permettrait la démocratisation de la lutte contre la corruption par un accès aux données plus facile et une capacité, avec des moteurs de recherche, à faire des recherches croisées et d'aller découvrir là où il y a collusion et corruption.

M. Bédard: Vous avez aussi, à votre recommandation 2, l'élément... vous mentionnez: «Que des suivis soient faits au hasard tout les ans par l'Autorité des marchés financiers pour s'assurer que les entreprises [dirigeantes] maintiennent les conditions nécessaires à la conservation de l'autorisation.» Ce mandat risque...

Vous savez, il y a l'Autorité des marchés financiers, mais il y a aussi l'UPAC. L'UPAC va donner des avis, et donc les entreprises vont avoir l'obligation d'informer l'AMF de toute modification, de ses dirigeants, de sa forme corporative, achats, acquisitions, principaux dirigeants. Donc, ils auront l'obligation de maintenir à jour l'information détenue par l'AMF. Ce qu'on dit aux gens aussi c'est qu'une habilitation qui est donnée pour trois ans n'est pas une habilitation qui est inconditionnelle. Autrement dit, à tout moment, elle peut être révoquée pour motifs.

Ce que vous souhaitez finalement c'est que l'UPAC continue à faire des vérifications, évidemment l'AMF aussi... Mais je tiens à vous assurer, là-dessus, que c'est notre volonté, là. Autrement dit, ce n'est pas parce qu'on émet une autorisation, une habilitation que les autorités habilitantes perdent leur pouvoir de la retirer. Est-ce que ça vous convainc ou vous souhaitez en... Je veux dire, est-ce que vous souhaitez plus?

Parce qu'évidemment, au départ, il faut se le dire, il y aura une mise en application de la loi. Donc, cette loi-là, quand elle va arriver à maturité, ça va être beaucoup plus facile de continuer à renouveler ces habilitations-là et en même temps de procéder à des vérifications sur celles qui ont été déjà accordées, je tiens à vous rassurer là-dessus. Est-ce qu'on doit faire plus encore à l'intérieur ou on doit plutôt aller ailleurs, là, là-dessus, pour la vérification?

M. Perron (Richard): Bien, il est prévu dans la loi -- j'ai lu la loi, là -- que l'AMF peut retirer, au cours des trois années, l'autorisation. Nous, ce qu'on aimerait, c'est que... Il n'y a pas de mécanismes qui sont précisément prévus pour que, de façon aléatoire, l'AMF et l'UPAC, au hasard, de façon aléatoire, aillent vérifier si les entreprises qui ont déjà reçu leur certification sont toujours en conformité. Autrement dit, qu'une entreprise qui a eu son autorisation ne se dise pas: Ah! Je suis correcte pour trois ans, tout est beau. Qu'ils sachent qu'il puisse y avoir des vérifications ponctuelles aléatoires...

M. Bédard: On est à la même place, tous les deux. Et je lisais, à 21.29... Pas obligé de me répondre tout de suite, mais, si vous avez des suggestions, je peux les prendre, là. On aura l'article par article un peu plus tard, mais pas aujourd'hui, là, un peu plus tard dans le courant de la session. Vous comprendrez, je pense qu'on a assez donné, là. Puis il y a des gens qui m'attendent, d'ailleurs de la fonction publique, vous savez, dans l'édifice tout près, pour remettre un prix. Malheureusement, comme président d'honneur, je vais faire mauvais président d'honneur, je vais arriver en retard. Ils ne le prendront pas personnel, j'espère. On va peut-être se recroiser là d'ailleurs.

M. Perron (Richard): Vous leur direz que c'est de ma faute.

M. Bédard: Oui, exactement. Je vais effectivement leur dire, je risque de commencer avec ça.

Alors, je vous lis l'article: «21.29. En tout temps pendant la durée de la validité d'une autorisation, le commissaire associé -- ça, c'est le commissaire associé à l'UPAC -- peut effectuer des vérifications à l'égard des entreprises autorisées. Si le commissaire associé constate, dans le cours de ses vérifications, que la validité d'une autorisation est susceptible d'être affectée, il donne un avis à cet effet à l'autorité.»

Autrement dit, on a essayé de cristalliser dans la loi le pouvoir de l'UPAC à partir d'informations -- et je vous dirais même de dénonciations, de révélations -- de contrevérifier l'habilitation qu'ils ont déjà faite. Est-ce que vous pensez que c'est suffisant ou on devrait aller un peu plus loin?

M. Perron (Richard): Non, c'est pour ça, là... Je vous ai dit que je l'ai lu, puis c'est le terme «peut», puis je l'ai encerclé, je l'ai mis de côté...

M. Bédard: O.K., oui.

M. Perron (Richard): ...et je l'ai enlevé. J'ai mis «effectue» ou «effectuera». On pourrait dire, même, «de façon aléatoire». Comme un peu nos 4 000 membres dans l'Agence du revenu, comme ça, font des vérifications. Ils ne peuvent pas vérifier tout le monde à toutes les années, mais quelqu'un qui fraude au niveau de ses impôts peut savoir qu'à un moment ou à un autre, si les inspecteurs se mettent sur son dos, il va y passer. Et cette crainte-là est une dissuasion. Donc, il faudrait que, dans la loi, on prévoie ce mécanisme-là qui laisse entendre à ceux qui ont obtenu leur autorisation qu'il ne s'agit pas d'un passeport pour trois ans.

M. Bédard: Et je tiens à vous rassurer. Ça, c'est plus dans mon... J'ai développé une compétence en matière de législation et d'interprétation des lois, je vous dirais, comme avocat puis après ça comme... pas comme légiste, évidemment, mais comme législateur. Il y a des «peut» qui sont comme des «doit», hein? Donc, dans ce cas-ci, un «peut», c'est une indication d'attentes claires à l'effet que l'autorité... pas l'autorité, à ce moment-là, le commissaire doit agir à sa propre initiative. Mais, si on peut trouver des termes plus forts, on va regarder. Mais le «peut», moi, je le lis comme un «doit» à ce moment-là. C'est un pouvoir habilitant qui est plus fort encore. Ce qu'on s'attend, c'est à ce qu'il le fasse.

Et je vous dirais, entre vous et moi, que j'ai l'impression que l'UPAC va être fort heureuse de le faire. À la limite, on ne l'aurait pas mis puis ils auraient eu tendance à nous le demander. Donc, ce n'est sûrement pas par hasard que cet article s'y trouve. C'est des gens qui, j'en suis convaincu, dans le cadre de leurs fonctions, un peu comme les services policiers, ont vu des comportements qu'ils souhaitent maintenant réprimer. Pour eux, c'est une occasion de faire triompher la loi, le bon ordre, les principes de probité à travers un projet de loi qui, lui, ne relève pas du droit criminel mais bien du droit civil, qui est celui de la situation contractuelle, donc de permettre à l'État de choisir qui peut faire affaire avec lui.

Donc, je tiens à vous rassurer. Mais je vais garder votre préoccupation pour voir si on doit faire encore plus en collaboration avec les autorités.

M. Perron (Richard): Je peux vous dire que, moi aussi, j'ai fait de l'interprétation des lois, puis il n'y a rien qui vaut une loi claire. On ne peut pas douter de la bonne volonté des gens, des gens de l'UPAC, là, mais à un moment donné il peut s'agir d'une question de moyens aussi. Et une clarification dans la loi pourrait permettre aux gens de l'UPAC d'aller chercher les moyens nécessaires pour effectuer ce qu'on veut, vous et moi, qu'ils fassent.

M. Bédard: Vous, comme dernière question, et on s'en est parlé auparavant dans d'autres rencontre, mais... Les gens reviennent beaucoup sur l'idée: Voici, on touche à l'extérieur, donc ceux qui font affaire avec l'État. Il faut aussi regarder -- et vous l'avez mentionné dans votre mémoire -- comment donner plus de moyens pour s'assurer des bonnes pratiques à l'interne aussi, donc resserrer les règles contractuelles. Parce qu'il y a les erreurs de bonne foi aussi qu'il faut couvrir, là. Quelqu'un peut, en toute bonne foi, décider, je vous dirais, de procéder par un processus particulier mais qui arrive avec un mauvais résultat ou on peut constater que le résultat ne sera pas à la hauteur de ce que le fonctionnaire souhaitait.

Vous avez mentionné l'idée qu'on a reprise... On a même eu un projet de loi, à l'époque où on était dans l'opposition, concernant la dénonciation, et ce qu'on retrouve dans la loi qui a été adoptée était un peu plus limitatif. Donc, ce qu'on souhaite, c'est l'élargir. Et qu'est-ce qu'on peut faire de plus, finalement, là -- où je veux aboutir avec vous -- pour repérer les comportements déviants, finalement, là, dans le cadre des contrats publics mais à l'interne? Qu'est-ce qu'on peut faire de plus, selon vous? Parce que, j'ai beau adopter 14 codes d'éthique -- comme je disais précédemment, je l'ai dit antérieurement -- un cas de fraude est récompensé par un congédiement, évidemment. Mais, au-delà de ça, qu'est-ce qu'on peut faire de plus, vous pensez?

**(18 h 20)**

M. Perron (Richard): Bien, on a déjà quelques pistes de réflexion qui se retrouvent dans nos recommandations. Maintenant, on comprend que ce dont vous parlez, ça va être la phase II de votre trilogie. On s'y prépare.

J'étais devant près de 600 délégués syndicaux en fin de semaine et j'ai fait un appel à tous à la réflexion pour les meilleures pratiques au nom des contribuables québécois. Et c'est avec beaucoup d'enthousiasme, de plaisir et de rigueur que nous procéderons à un exercice pour vous aider à adopter, au Québec, la meilleure loi qui soit possible en la matière.

Mais déjà, quand on vous dit à la recommandation 10: «Qu'une commission soit chargée d'examiner la structure oligopolistique de certains secteurs», qu'un comparateur public puisse évaluer les contrats, ça évite de se mettre dans des situations ou ça pourrait éviter de se mettre dans des situations où des gens auraient à dénoncer ce qui se passe. Parce que, comme je vous disais, là, l'anecdote du ministère des Affaires municipales est assez révélatrice. Ce sont des gens qui, parce qu'une décision a été prise après l'élection et qu'un nouveau gouvernement s'en venait, ont osé nous parler à nous d'une situation qui était inacceptable, ce qui n'aurait peut-être pas été le cas.

Et j'en ai d'autres, des histoires comme ça. J'en ai beaucoup d'autres à vous raconter qui me sont confiées et qu'on doit vérifier. Et on doit réfléchir comment faire pour dire ça aux dirigeants puis aux contribuables québécois pour permettre d'adopter des meilleures politiques publiques, des meilleures décisions de gestion sans mettre en péril la carrière, la santé, la santé psychologique de nos membres qui, même si on était dans l'attente d'un nouveau gouvernement, nous ont quand même rappelé deux jours plus tard parce qu'un journaliste s'intéressait à la question, pour dire: Nos têtes sont mises à prix, faites attention.

Donc, c'est avec beaucoup d'ardeur et d'enthousiasme, comme je vous disais, qu'on va réfléchir à tout ça et qu'on va vous proposer, au cours des prochaines semaines, des prochains mois, des solutions qui pourront faire du Québec un État à l'avant-garde de ces situations.

M. Bédard: Merci beaucoup et merci de votre collaboration.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): Merci. Et maintenant... Oui?

M. Vachon (Yves): En fait, juste une petite chose par rapport à ça. On se demande aussi qu'est-ce qu'on pourrait faire, mais peut-être qu'au lieu d'envisager de la dénonciation on pourrait envisager d'évaluer, hein, la qualité des travaux qui sont faits, je parle en particulier dans les technologies de l'information.

Ce qu'on disait, oui, il y a un registre des contrats qui est public, mais est-ce qu'on y retrouve là une évaluation qualitative des travaux? Est-ce qu'on est en mesure de dire: Est-ce qu'il y a eu respect des coûts et des délais? Est-ce qu'on a livré ce qu'on s'était engagés à livrer?

Puis ça, on voit, dans les contrats en technologies de l'information, des situations qui sont comme ça, hein? On n'a pas livré ce que le ministère ou l'organisme attendait, on se ramasse avec des contrats d'entretien qui servent à finaliser ce qui n'avait pas été livré. Puis est-ce que ça fait ce que c'était supposé de faire? Est-ce qu'on se ramasse avec des dérapages incroyables puis qu'on met aux vidanges des développements qui ne servent pas, en bout de ligne, parce que ça ne correspond pas à ce qu'on avait besoin? Ça, ça n'a aucun sens.

Mais, si on était capables d'évaluer, hein, correctement, est-ce qu'on nous a livré quelque chose de bien, qui répond aux besoins, est-ce qu'on a respecté les délais et les coûts, puis qu'on rendait ça public... Parce que moi, j'étais un consultant il y a 26 ans, mais après ça j'ai été mandataire de plusieurs contrats. Je suis un spécialiste en architecture de données, ça fait que je connais ça un petit peu aussi.

M. Bédard: ...vous allez me permettre de vous dire que, d'abord, on a parlé beaucoup de la deuxième partie de la trilogie. Là, vous êtes dans la troisième, là, O.K.? Donc, c'est le dernier aspect qu'on va aborder. Et c'est vaste, c'est tout un chantier. C'est pour ça qu'il faut se donner le temps. Mais ce n'est pas parce que c'est compliqué qu'on ne le fera pas dans la vie, hein? Moi, la complexité ne m'a jamais fait peur. Et, là-dessus, on va y arriver, là.

L'idée est de trouver les mauvais joueurs. Parce que l'idée d'un consultant, effectivement... Moi, j'ai des bons consultants, et, des mauvais consultants, ça peut arriver. Mais un consultant qui est toujours heureux que les problèmes s'accumulent, c'est toujours inquiétant, tu sais. Donc, quand lui, il est payé à l'heure... C'est ce qu'on expliquait souvent. C'est que, rajoute-lui des problèmes, il va rien que facturer plus, donc il est heureux. Mais, si, en bout de ligne, le résultat n'est pas à la hauteur, on n'a pas de moyen actuellement.

Donc, une meilleure définition des besoins, ça, c'est notre effort à nous qu'on doit faire. Quand je dis «à nous», c'est vous, c'est la fonction publique. Comment mieux définir ces besoins, parfois il y a ça qui a manqué. Mais, à l'inverse, il y a des gens qui, je vous dirais, en termes de pratique, n'ont pas correspondu à un idéal, là, je vous dirais, de professionnalisme qu'on doit avoir en pareille matière. Donc, ça, là-dessus aussi, je vais demander votre soutien et...

M. Vachon (Yves): ...notre collaboration.

M. Bédard: Merci. Et on est au même point. C'est pour ça, ce que vous dites, j'aurais pu le répéter à peu près dans le même ordre, là.

Et, quand vous avez dit: Souvent, par l'entretien, on met des étages, on enterre finalement une erreur, là, on est en train de regarder ça actuellement. Je peux vous dire que, moi, ce n'est pas vrai qu'on va me mettre sur le dos des problèmes, à la base, qu'on a eus, puis là maintenant on fait passer sous forme d'entretien ce qui, par contre, était plutôt lié à un problème de conception au départ du système. Donc, on est en train de regarder ça. Si vous pouvez nous aider, tant mieux. On va les détecter.

Moi, j'aime mieux radier puis dire: Bien, regardez, on s'est trompés, on va le dire, on va recommencer, mais sur des meilleures bases, puis ce n'est pas vrai qu'on va continuer dans la même erreur pour éviter qu'il y ait de l'imputabilité puis de la responsabilité. Je crois à ça, ça.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): M. le député de Louis-Hébert.

M. Hamad: Merci, M. le Président. M. Perron, M. Therrien, M. Riopel, alors merci d'être là, et Mme Monette. Vous avez dit, au début, que vous avez consulté... vous avez 336 membres à l'AMF. C'est ça que vous avez dit, hein?

Une voix: Oui.

M. Hamad: Et vous avez consulté ces gens-là, vos membres, pour voir si on donne la responsabilité à l'AMF et vous avez dit... Alors, pourriez-vous élaborer là-dessus? Je vais vous donner le temps d'expliquer c'est quoi que vous avez demandé, et c'était quoi, leur réponse.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): M. Perron.

M. Perron (Richard): Bien, écoutez, c'est très simple. Bon, vous savez, nous, on a été convoqués il y a à peine six jours pour la commission ici. On a été en instance toute la fin de semaine. Ça nous a permis de voir, d'évaluer le nombre. Parce qu'on a des professionnels, nous, dans tous les ministères et organismes, hein, puis c'est difficile de connaître la réalité de tous les ministères et organismes -- vous le savez, vous avez été au gouvernement. Mais on a fait une vérification rapide en quelques jours seulement.

Et on s'est adressé au délégué qui représente nos membres au sein de l'AMF et on lui a demandé: Comment ça vous a été annoncé de l'interne? Comment ça se passe? Quel est le sentiment de nos membres qui sont là-bas? Et on nous a dit qu'il s'agissait d'un défi intéressant, qu'ils se sentaient en mesure de le relever, qu'ils avaient l'expertise nécessaire. Les seules craintes qu'ils avaient, c'était qu'on leur rajoute ça sans leur donner les moyens.

Il serait quand même paradoxal que l'AMF, qu'on met en place pour s'assurer qu'il y a un niveau d'expertise qui revient dans les ministères, n'ait pas l'expertise à terme parce qu'on lui ajoute des tâches sans prendre en compte l'impact que ça a sur le travail, la gestion du travail et de leurs effectifs. Mais nous avons, là, parmi nos 336 membres, des analystes, des inspecteurs, des gens qui se sentent tout à fait aptes à faire le travail demandé, et nous on considère que c'est une avenue intéressante.

Et le premier son de cloche qu'on a eu... Mais on a n'a pas eu de temps, vous savez, d'aller s'asseoir formellement avec eux, qu'ils arrêtent leur travail et qu'on les consulte -- ça sera fait au cours des prochaines semaines -- mais, je vous dis, le premier son de cloche, le premier son de cloche, il est positif.

M. Hamad: ...les discussions que vous avez eues avec le Trésor, vos membres, vous pensez combien que vous avez besoin de personnes de plus à l'AMF pour exécuter le mandat de la loi?

M. Perron (Richard): À ce moment-là, il est trop tôt pour faire une évaluation. C'est un exercice qui doit être fait de façon plus rigoureuse et formelle.

M. Hamad: Il y a eu des discussions avec le Trésor, probablement? Vos membres ont discuté?

M. Perron (Richard): Non. Pas à ma connaissance. Il n'y a pas eu de discussions à ce sujet-là.

M. Hamad: O.K. Il n'y en a pas eu.

M. Perron (Richard): Pas à ma connaissance.

M. Hamad: Ils n'étaient pas consultés, vos membres, là-dessus.

Une voix: ...

M. Hamad: Ah, O.K. Non, juste, les membres n'étaient pas consultés. O.K.

M. Perron (Richard): Pas mes membres, mais je présume que le...

M. Hamad: Vos membres sont des professionnels? Vos membres, là, à l'AMF, c'est des gens, des postes clés à l'AMF?

M. Perron (Richard): Oui, c'est ça, là, ceux qui vont faire le travail.

M. Hamad: O.K., O.K.

M. Perron (Richard): Hein, les professionnels, dans tous les ministères et organismes, sont ceux qui permettent au ministère ou à l'organisme de livrer la mission essentielle.

M. Hamad: O.K. Puis ils n'étaient pas consultés?

M. Perron (Richard): De l'interne, ils ont été consultés, mais pas formellement par un processus patronal-syndical.

M. Hamad: Ah! O.K., O.K.

M. Perron (Richard): Mais je présume que le président du Conseil du trésor n'a quand même pas décidé de confier ces tâches-là à l'AMF sans aller vérifier avant avec les dirigeants s'ils étaient capables.

M. Bédard: ...présomption.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): C'est une perception, ça.

M. Perron (Richard): Une présomption.

Une voix: Ce n'est pas factuel.

M. Hamad: Mais, si on donne le mandat à l'AMF, vous pensez qu'il va en avoir combien, vos collègues additionnels, pour faire ce mandat-là? L'AMF, je ne sais pas combien d'entreprises qu'ils inspectent par année. Si on fait l'équivalent de ce qu'ils font par année, ça veut dire qu'il faut ajouter 700 personnes, 800 personnes à l'AMF?

M. Perron (Richard): Écoutez, non. Moi, je ne pense pas, hein?

M. Hamad: Non?

**(18 h 30)**

M. Perron (Richard): Et je ne voudrais pas me compromettre à donner des chiffres sans avoir consulté les gens qui sont sur place, sur le terrain et qui pourront, à partir du moment où on leur aura confié l'ampleur de la tâche, évaluer quels sont les effectifs supplémentaires dont ils auraient besoin pour livrer la marchandise.

M. Hamad: Combien de membres à l'Agence du revenu?

M. Perron (Richard): Près de 4 000.

M. Hamad: 4 000. Pensez-vous que l'Agence du revenu est mieux placée, compte tenu de son mandat, ses moyens?

M. Perron (Richard): Écoutez, moi, je n'ai pas de raison de croire que l'AMF ne soit pas, en ce moment, l'institution la mieux placée pour faire ce genre de travail.

M. Hamad: Vous ne pensez pas? Vous le pensez ou vous ne le pensez pas?

M. Perron (Richard): Je n'ai pas de raison de croire, hein, que l'AMF ne soit pas la meilleure institution à choisir.

M. Hamad: Ah, O.K. Et je vous pose la question: Est-ce que vos membres, à l'Agence du revenu, ils peuvent vous dire... Vous ne l'avez pas rencontré? Est-ce que d'autres vous disent, mettons, qu'ils sont mieux placés pour le faire? Parce que, là, vous m'avez dit que les gens de l'AMF, ils disent: Ça nous fait plaisir. Puis ça, c'est tout à fait à l'honneur de vos membres, de faire le mandat. Cependant, c'est au détriment d'autre chose. Autrement dit, on ne peut pas le faire comme il est parce qu'on est occupés, puis c'est normal, j'espère. Et donc, là, ils ne sont pas là pour rien. Ça veut dire qu'ils travaillent fort, c'est normal.

Mais est-ce que, donc, il faut ajouter du monde? Pensez-vous que, demain matin, on va trouver, je ne sais pas, 250, 300 personnes qu'on engage demain matin, à Québec, dans un taux de chômage de 5 %, puis on engage ce monde-là demain à l'AMF, puis ils vont exécuter le mandat? Pensez-vous que la...

Une voix: ...

M. Hamad: Pardon?

Une voix: ...

M. Hamad: Hein?

Une voix: ...

M. Hamad: À Dubuc? O.K., c'est bon. On va l'envoyer à Dubuc. Et donc est-ce que l'Agence du revenu, eux autres, ne sont pas, selon vous... Vous avez 4 000 membres là-bas, là. Dans 4 000 membres, on est capables de trouver la place pour faire l'ouvrage, je ne sais pas, là. Vous êtes en contact avec vos membres, là.

M. Perron (Richard): Oui, oui. Bien, je peux vous dire, en partant, que les conditions de travail, comme ils ne sont pas dans la fonction publique puis qu'on a pu régler la problématique salariale, qui, malheureusement, limite les capacités de tous les ministères et organismes, donc on l'avait réglée, les conditions de travail sont meilleures à l'AMF. Donc, si on parle de recruter puis d'ajouter du monde, c'est mieux que ce soit à l'AMF parce que ça va être plus facile d'aller chercher les gens.

Je vous rappellerais d'ailleurs aussi que l'AMF a des bureaux à Montréal, hein, pas seulement à Québec.

M. Hamad: L'Agence du revenu aussi. Donc, je comprends votre point. Vous préférez l'AMF parce qu'ils sont mieux payés.

M. Perron (Richard): Non, je n'ai jamais dit que je préférais l'AMF. Vous savez, là, moi, là, je viens d'apprendre qu'il avait été envisagé de confier ça à l'Agence du revenu du Québec, O.K.? Moi, je ne le savais pas. Les membres du Revenu ne le savaient pas non plus. J'en ai rencontré plein en fin de semaine, là, les délégués, personne n'était au courant qu'on avait envisagé de leur confier ce mandat-là.

M. Hamad: Ils n'étaient pas consultés.

M. Perron (Richard): Puis moi, je me suis tourné vers les gens de l'AMF, je leur ai dit: Qu'en pensez-vous? Ils n'ont pas dit: Ça nous fait plaisir, comme vous avez dit. Ils ont dit: On est capables, on a l'expertise nécessaire, on va livrer la marchandise. Maintenant, il faudrait tenir compte de la tâche qu'on nous donne dans la réorganisation, et c'est tout.

M. Hamad: Si je comprends, les membres de l'AMF vous ont dit qu'ils ont entendu parler de ce projet de loi là. Cependant, les gens du Revenu, les mêmes membres, vous ont dit qu'ils n'avaient rien entendu parler.

M. Perron (Richard): Ils ne m'ont rien dit. Vous savez, que ce soit le Revenu ou que ce soit d'autres organismes, on ne savait pas, nous, qu'il avait été envisagé ou qu'il pouvait être envisagé que l'Agence du revenu soit celle qui donne les certificats. On n'y avait pas pensé. On a appris que c'était l'AMF. On a donc regardé, pratiquement, ce que ça valait à l'AMF et on a trouvé que c'était une avenue intéressante. Et nos membres, sur le terrain, nous disent: On est capables.

M. Hamad: La même tâche, ils sont mieux payés à l'AMF qu'à l'Agence du revenu?

M. Perron (Richard): Les conditions de travail. C'est d'ailleurs une des raisons...

M. Hamad: Elles sont meilleures.

M. Perron (Richard): Je pense que c'est la raison pour laquelle vous, votre gouvernement, vous avez sorti l'Agence du revenu du Québec de la fonction publique pour la mettre hors fonction publique, pour permettre de redonner des ajustements salariaux qu'ils méritaient. Ma prédécesseure y faisait allusion, d'ailleurs. Et donc l'AMF, elle, bénéficie de cette marge de manoeuvre là depuis plus longtemps, donc les conditions de travail sont plus acceptables, donc normalement ils devraient être capables de recruter plus facilement.

M. Hamad: Si je comprends, comme président du syndicat, vous préférez envoyer le monde où ils sont mieux payés, tout à fait une réaction normale de votre part.

M. Perron (Richard): Ce n'est pas ce que je dis.

M. Hamad: Non?

M. Perron (Richard): Ce n'est pas ce que je dis. Vous me demandez... vous me dites: Comment ils vont faire pour engager? Puis là vous proposez l'avenue alternative du Revenu. Bien, je dis: Si vous avez une problématique de recrutement puis de rétention, il vaut mieux diriger l'AMF que diriger l'ARQ, de ce temps-là.

M. Hamad: O.K. On va laisser le député de Verdun, M. le Président.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): Oui, d'autres questions?

M. Gautrin: Mais j'en ai, bien sûr.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Je vous remercie, M. le Président. Je vais laisser... rapidement avec vous parce que je comprends que c'est une situation où vous êtes relativement en accord avec moi.

Vous demandez, dans vos recommandations, recommandation 4, que soit créé un registre public accessible à la population des contrats accordés par le gouvernement. Donc, essentiellement, ce qui est l'article 22 de la Loi sur les contrats qui permet et qui oblige la publication des contrats, mais d'une manière qui se fait en PDF, c'est-à-dire totalement inutilisable et sans aucun intérêt.

Vous souhaitez, j'imagine, que ce registre soit traitable, qu'on puisse faire les corrélations entre les différents contrats, retirer les éléments, comparer des bases de données les unes avec les autres. Je crois qu'on est d'accord de ce point de vue là. Est-ce que je comprends bien votre point de vue?

M. Perron (Richard): Oui. Tout à fait.

M. Gautrin: Merci. Là j'ai une autre question que je voudrais aborder avec vous, qui m'a toujours préoccupé, et je fais référence à vos recommandations 9 et 10. Dans les contrats, particulièrement les contrats d'informatique, là, et j'ai beaucoup de respect pour les professionnels du gouvernement, mais le fait d'aller souvent en sous-traitance, ça s'avère souvent que les solutions proposées aux problèmes sont relativement très conservatrices, et que ce soit CGI, DMR, etc., ils ont tendance de recycler la dernière solution.

Et est-ce que vous iriez jusqu'à avoir un comparateur qui puisse comparer, en quelque sorte... Parce qu'il y a des solutions très innovantes qui ne sont pas nécessairement à l'intérieur du secteur privé qu'on engage comme à la fois celui qui définit l'appel d'offres et puis qui va avoir son ami qui va réaliser l'appel d'offres. Je connais parfaitement la question sur 10 et je pourrais vous en parler à satiété.

Mais moi, j'ai remarqué aussi que la manière dont le gouvernement donne souvent même ses contrats ne va pas susciter l'innovation et les solutions les plus innovantes. Est-ce que le comparateur public pourrait aller dans ce sens-là, c'est-à-dire comparer les solutions, pas seulement les prix dans les contrats, etc., mais les solutions qui sont amenées aux problèmes que vous avez? Je ne sais pas si vous comprenez ma question à l'heure actuelle ou pas.

M. Perron (Richard): Oui. Tout à fait. D'ailleurs, c'est l'idée du comparateur public de pouvoir mieux répondre aux objectifs puis aux capacités qu'offre un ministère ou un organisme de pouvoir s'avancer. On a un exemple... je laisserai...

M. Gautrin: Vous comprenez bien, il s'agit, si je veux répondre à la question, de construire... Vous témoignez devant une table. On peut avoir une table en bois comme ça, une table qui soit en pierre, on pourrait avoir, etc., différentes manières de le faire. Et, à l'heure actuelle, vous êtes en mesure de pouvoir apprécier le type de solutions qui sont amenées devant l'objectif du gouvernement, c'est-à-dire de se trouver un objet dans lequel vous pouvez vous asseoir pour pouvoir témoigner, en toutes proportions gardées, par rapport aux situations.

Est-ce que vous diriez jusqu'à avoir le comparateur public pour pouvoir évaluer justement les solutions et les comparer d'un ministère à un autre, ou un truc comme ça? C'est ce que, moi, je voudrais aussi mettre de l'avant, voyez-vous.

M. Perron (Richard): Je vais laisser mon collègue...

M. Gautrin: Mais je comprends que c'est la troisième solution, hein?

M. Perron (Richard): Oui, c'est ça, mais je vais... Mon collègue, qui a déjà sauvé des sommes importantes en agissant comme comparateur public et en menant un projet pilote en informatique dans son ministère, sera mieux à même de vous répondre.

M. Vachon (Yves): Moi, je suis rattaché à la Société de l'assurance automobile du Québec, la SAAQ -- deux A. Écoutez, il n'y a pas juste le volet novateur des projets, c'est vraiment s'assurer de la prise en charge dans le milieu des solutions, hein, c'est de dire: Qu'est-ce qui vient s'intégrer le mieux? Ça fait que, quand on vient évaluer la solution, ce n'est pas que sur le caractère novateur qu'il faut s'arrêter, c'est de voir, est-ce que la solution, elle s'attache bien à ce qui est là. Est-ce que ça nous permet... Parce que d'innover, d'innover parfois ça fait juste en sorte qu'on n'a pas nécessairement les budgets de formation qui sont toujours disponibles dans les ministères et organismes, ça fait qu'on n'est pas toujours à la fine pointe.

Ça fait que, si on y va avec une solution plus novatrice, on se ramasse qu'on n'a pas le choix de faire affaire des fois avec un seul fournisseur qui, lui, s'est spécialisé dans ce domaine-là. Ça fait que, si on veut innover, parfois, il faut avoir une vision puis investir en fonction de la vision qu'on a.

M. Gautrin: ...comparateur, je ne dis pas qu'il faut toujours innover tout le temps, mais être en mesure de pouvoir, éventuellement, évoluer et avoir cette évolution. Mais je ne suis pas bête non plus pour dire: Il faut toujours trouver tout en innovation.

**(18 h 40)**

M. Vachon (Yves): Mais, effectivement, c'est d'être en mesure d'arriver avec une solution qui correspond aux besoins des ministères et des organismes, puis qui correspond, puis qui est en mesure de livrer ce qu'on s'attend au meilleur coût. C'est ça qu'il faut arriver. Puis, quand on dit de prendre, mettons, le plus bas soumissionnaire, bien, le registre, là, si on amenait une notion où on vient évaluer puis qu'on dit: C'est bien beau, il est souvent le plus bas soumissionnaire, mais, quand on finit puis qu'on regarde en bout de ligne, ils sont très, très bons, là, pour venir générer des demandes de changement puis arriver qu'à la fin, quand on regarde ce qu'on a déboursé pour le produit qu'on a reçu, le ratio qualité-prix a changé, hein?

M. Gautrin: Et le secteur de la santé, parce que ça serait...

M. Vachon (Yves): Bien c'est sûr qui si on s'en va... Si on voulait discuter du dossier santé, on pourrait en parler. Ça coûte cher, ça aussi puis...

M. Gautrin: ...soirée. Bien moi, j'ai terminé parce que je comprends ce qu'ils disent. Mais j'aurai l'occasion d'échanger encore avec vous.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): Merci, merci. Pas d'autres questions? Merci beaucoup. M. le député de Saint-Jérôme.

M. Duchesneau: D'abord, un commentaire au ministre. M. le ministre, je trouve paradoxal qu'on soit obligés de s'adresser aux syndicats pour savoir combien de personnes vont être à l'AMF. On aurait aimé entendre les dirigeants de l'AMF. Mais je suis prêt à troquer ce malaise et je suis prêt à accepter à Saint-Jérôme tous les nouveaux employés de l'AMF et le registre. On parle de 300, selon ce que vous m'avez dit tantôt, 300 nouveaux employés minimum? On est prêts à les accepter.

Une voix: ...

M. Duchesneau: L'autre chose... Saint-Jérôme, l'air est plus pur et on va les attendre...

M. Vachon (Yves): On a déjà de nos membres à Saint-Jérôme, d'ailleurs.

M. Duchesneau: Bravo, merci de m'appuyer dans ma démarche. Et l'autre aussi... La trilogie, là, on connaît le premier, le projet de loi n° 1. On peut-u avoir au moins les titres du deuxième tome et du troisième tome?

M. Bédard: ...

M. Duchesneau: O.K.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): Il va avoir un moment pour ça.

M. Duchesneau: Étant donné que vous avez dit à nos témoins qu'ils avaient répondu, qu'ils avaient trouvé la clé de l'énigme, M. Perron, pouvez-vous me donner le titre du tome 2 et du tome 3, que le ministre ne veut pas me donner? Ça fait qu'il semble que vous ayez trouvé la réponse tantôt.

M. Perron (Richard): Bien, vous savez, moi, on m'a parlé de trilogie. Donc, je ne peux pas... Trilogie, je n'ai pas le titre des tomes, mais ce que je sais, c'est qu'il y avait une première phase, c'était de traiter de l'intégrité des entreprises qui font affaire avec le gouvernement.

La deuxième phase vers laquelle on tente de vous amener, une phase d'organisation, de réorganisation de l'octroi des contrats publics à l'interne, qui pose la question de la sous-traitance.

M. Duchesneau: ...regarder le ministre, parce qu'il donne la réponse en même temps. Continuez pour le numéro 3, s'il vous plaît.

M. Bédard: ...

M. Vachon (Yves): La troisième sera l'évaluation des firmes et une évaluation qui nous permettra d'évaluer la qualité de ces firmes-là, des travaux qui sont réalisés, puis...

M. Duchesneau: Oh! On n'a pas eu un vrai oui...

M. Bédard: ...traditionnels, c'est un des éléments, effectivement.

M. Duchesneau: Je suis correct là-dessus. Non, mais...

Des voix: ...

M. Duchesneau: Non, non, je suis passionné. Écoutez, j'ai pris tellement de notes. Mais je trouve intéressant l'aspect que vous apportez parce que c'est vrai que ce qu'on fait, avec le projet de loi n° 1, on fait une analyse qualitative des dirigeants de l'entreprise. Mais ce que vous apportez de nouveau, je pense, qui est très intéressant, c'est de faire l'analyse qualitative du produit. Et, si on a juste l'analyse qualitative des dirigeants, c'est une partie du casse-tête, mais pas la seule parce que les gens qui veulent mal faire sauront comment contourner ça pour donner l'actionnariat à quelqu'un d'autre. Alors, il faut aller plus loin que ça, vraiment, là.

Donc, vous avez parlé tantôt d'une analyse précontractuelle, mais il faut parler aussi d'une analyse postcontractuelle, et ça, ça implique justement vos membres, qui doivent analyser la qualité du travail effectué. Est-ce que ces analyses-là se font présentement par vos membres? Une fin de contrat... Au ministère des Transports, il y a une partie que se fait, mais ailleurs.

M. Perron (Richard): Bien, écoutez, j'ai donné l'exemple du ministre des Affaires municipales. L'unité de vérification de l'octroi des contrats municipaux à partir des fonds d'infrastructures Canada-Québec se faisait à l'intérieur du ministère. Ce sont nos membres, justement, qui étaient chargés d'analyser, d'aller sur le terrain, de vérifier la qualité, la qualité du produit.

M. Duchesneau: Il y a un rapport qui est donné, qui est préparé.

M. Perron (Richard): Il y a un rapport qui est donné, et cette petite unité de quatre de nos professionnels réussissait, bon an mal an, à aller chercher près de 9 millions en surfacturation. Et on avait aboli cette direction-là pour appliquer la fameuse politique d'attrition du gouvernement précédent, en ne remplaçant pas un départ à la retraite sur deux...

M. Duchesneau: J'aime ça.

M. Perron (Richard): ...et c'était la raison officielle. Et on donnait donc cette activité de vérification de l'exécution de la sous-traitance à d'autres firmes de sous-traitance en justifiant ça par une économie de coûts. Mais on voyait tout de suite qu'en donnant en sous-traitance la vérification interne, ça coûtait 2 millions de dollars, alors que la direction comme telle coûtait 1 million de dollars. Donc, déjà, en donnant la job à l'externe, ça coûtait 1 million de plus. Mais, en plus de ça, on n'était pas sûrs qu'on irait chercher le 9 millions par année.

M. Duchesneau: Puis on n'était pas sûrs que la qualité ou l'indépendance de la personne qui faisait le rapport était là non plus?

M. Perron (Richard): Non, pas du tout.

M. Duchesneau: Alors donc, votre proposition, je la comprends bien, c'est: faisons une analyse qualitative du produit et ajoutons ça à l'évaluation qu'on fera de 21.25, là, pour connaître l'intégrité. Mais, en même temps, intégrité parce que c'est de l'intégrité si on ne donne pas le produit pour lequel on a payé, ce n'est pas juste la qualité des dirigeants qu'on doit regarder.

M. Perron (Richard): Exactement. Puis un viaduc qui tombe, là, c'est peut-être plus spectaculaire, mais un réseau informatique qui flanche, là, ça ne fait pas de bruit...

M. Duchesneau: Pas aussi pire.

M. Perron (Richard): ...mais ça peut coûter pas mal plus cher.

M. Duchesneau: Entièrement raison. Et il y a toute la dimension détection. On parle de dénonciateurs, mais c'est en même temps une partie de détection. Est-ce que vos membres se sentent protégés actuellement?

M. Perron (Richard): Pas dans l'état actuel de la situation. Moi, j'ai vécu, là, ma carrière dans un ministère ou un organisme, puis on appelle ça la machine, hein? Quand la machine se met sur ton dos, là, puis décide d'avoir ta peau, tu y passes, c'est un rouleau compresseur. Il n'y a pas personne qui peut résister à ça.

M. Duchesneau: Ce n'est pas uniquement... on ne le cerne pas uniquement par un congédiement mais, des fois, par l'état physique ou psychique de la personne qui subit la pression.

M. Perron (Richard): Oui, le harcèlement psychologique. Ils lui ont enlevé ses mandats, des évaluations défavorables, du dénigrement, faire comprendre à l'ensemble des collègues qu'il n'est pas en période d'ascension, bien au contraire. Bref, tout cet arsenal du non-dit, de la façon dont on peut se comporter dans un ministère ou un organisme où les hauts fonctionnaires sont nommés politiquement, hein, et où les professionnels sont engagés par concours, mais où les hauts fonctionnaires ont la mainmise sur la destinée professionnelle de leurs professionnels.

Et ce qu'il faut faire, on parlait de l'agence du transport... du ministère du Transport, là, ce n'est pas un coup de baguette magique, transformer un ministère en agence. Ce qu'on cherche à faire, c'est de mettre un rempart entre le politique et l'administratif de façon à ce que l'administratif puisse faire son travail de façon intègre. Et ça, c'est la Loi sur la fonction publique qui a été mise en place pour ça. On se désole en se regardant, là, mais il faut se rappeler qu'avant qu'elle soit mise en place les bouts de route arrêtaient dépendant du bord où on avait voté.

M. Duchesneau: C'est la preuve, votre seigneurie.

Le Président (M. Pelletier, Rimouski): Ça termine votre temps, M. le député de Saint-Jérôme. Alors, M. Perron, M. Vachon, M. Riopel, Mme Therrien, merci énormément de votre participation à cette commission.

Et, compte tenu de l'heure, je lève maintenant la séance, et la commission ajourne ses travaux au jeudi 15 novembre 2012, après les affaires courantes.

(Fin de la séance à 18 h 48)

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