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Version finale

42e législature, 1re session
(27 novembre 2018 au 13 octobre 2021)

Le mardi 19 février 2019 - Vol. 45 N° 5

Étude détaillée du projet de loi n° 3, Loi visant l’instauration d’un taux unique de taxation scolaire


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Table des matières

Journal des débats

(Dix-neuf heures trente-deux minutes)

Le Président (M. Simard) : En autant qu'il me soit permis de bien compter, je constate que nous avons quorum. Je vous souhaite la bienvenue. Et, comme d'habitude, je vous invite à pouvoir fermer vos appareils cellulaires de toutes sortes, vos téléphones intelligents, afin que nous puissions procéder calmement à cette étude détaillée.

Donc, vous savez que nous sommes réunis afin de procéder à l'étude du projet de loi n° 3, Loi visant l'instauration d'un taux unique de taxation scolaire.

Avant de m'enquérir pour savoir s'il y a des remplacements qui sont prévus ce soir, peut-être un petit mot pour vous dire d'abord bienvenue. Normalement, nous devrions terminer nos travaux à 21 h 30 ce soir, à moins qu'il y ait un consentement pour qu'on poursuive plus tard. Mais ce sera à vous de me le dire à 21 h 30. Mais, quoi qu'il en soit, j'ai amené avec moi, chers collègues, La procédure parlementaire du Québec, publiée à la dernière législature sous l'égide du président Chagnon. Je m'y suis remis dedans, puis là je me suis plongé dans l'aventure, donc, d'une lecture fort intéressante. Je me suis replongé dans la lecture de la jurisprudence, bien sûr dans la lecture de nos règlements, qui favorisent constamment la liberté d'expression, qui favorisent le débat. Et je vous dis ça parce qu'avant de commencer l'étude détaillée du projet de loi je vous invite à profiter pleinement de cette liberté d'expression qui est la nôtre dans cette enceinte démocratique.

Donc, n'ayez pas peur de vous exprimer, en autant qu'on reste, bien sûr, dans le cadre de l'article 211, bien sûr, qui focalise notre attention sur l'objet à l'étude. Mais n'ayez pas peur de débattre, n'ayez pas peur d'amener des amendements, des sous-amendements, potentiellement des questions de règlement. Plus ça devient croustillant, puis plus je me sens heureux. Donc, n'ayez pas peur.

Alors, Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Barrette (La Pinière) est remplacé par Mme Maccarone (Westmount—Saint-Louis); M. Fortin (Pontiac) est remplacé par Mme Rizqy (Saint-Laurent); et M. Ouellet (René-Lévesque) est remplacé par Mme Hivon (Joliette).

Remarques préliminaires

Le Président (M. Simard) : Très bien. Merci beaucoup. Alors, comme vous le savez, la première étape, hein, d'une étude détaillée, c'est celle des remarques préliminaires. La tradition veut qu'on commence par le ministre qui porte le dossier, pour une période maximale de 20 minutes. Ensuite, je céderai la parole au porte-parole de l'opposition officielle, le député de Robert-Baldwin. M. le ministre, à vous la parole.

M. Eric Girard

M. Girard (Groulx) : Alors là, ce n'est pas comme en Chambre, hein? Il n'y a pas avantage à ce que j'utilise tout mon 20 minutes.

Des voix : Ha, ha, ha!

M. Girard (Groulx) : Je suis de bonne foi, là. Je suis nouveau. Et je tiens à vous dire qu'on n'est pas télévisés ce soir, mais les gens nous regardent. On a un auditeur fidèle. Mon père écoute toutes les présentations de cette commission et a des commentaires à faire sur chacune des interventions. Alors, j'y vais avec les vraies remarques préliminaires.

Je vous salue, je salue les députés de mon équipe, notamment Émilie, qui est mon adjointe parlementaire, les membres de la première, deuxième et troisième opposition. Alors, bonjour à tous.

Les discussions, lors des consultations particulières, ont soulevé des enjeux. Il me fera plaisir d'adresser certains de ces enjeux lors de l'étude détaillée, mais, d'entrée de jeu, j'aimerais commencer cette étape importante de nos travaux en insistant sur quelques points du projet de loi n° 3.

Dans un premier temps, j'aimerais rappeler à mes collègues que ce projet de loi vise l'uniformisation du taux de taxe scolaire, que nous voulons éliminer les iniquités. Nous avons pris l'engagement de réduire les taxes scolaires au taux plus bas, soit celui des Laurentides, à 0,1054 $ du 100 $ d'évaluation, pour mettre fin aux iniquités entre les régions. La partie où... Par exemple, je vous donne un exemple, la partie ouest de la ville de Terrebonne se trouve dans la région des Laurentides, avec la commission scolaire de Seigneurie-des-Mille-Îles, qui a un taux de 0,1054, tandis que la partie est de la ville de Terrebonne se trouve dans la région de Lanaudière, avec la commission scolaire des Affluents, qui a un taux de 0,27 $ par 100 $ d'évaluation. L'uniformisation du taux permettra de fixer les iniquités comme celle de la ville de Terrebonne.

Nous voulons également réduire le fardeau fiscal. Le projet de loi permettra de remettre de l'argent dans le portefeuille des Québécois. Le taux de... Je rappelle que le taux de pression fiscale du Québec, à 37,3 % du PIB, est de plus de 4 % supérieur à celui du reste du Canada. Et, bien sûr, le Québec est le champion de l'impôt foncier au Canada. Lorsqu'on combine l'impôt foncier municipal et l'impôt foncier scolaire, nous sommes numéro un dans la ponction fiscale.

Je rappelle notre priorité à l'éducation. Je veux réitérer qu'il n'est pas question que cette uniformisation de la taxe scolaire entraîne une baisse de services dans nos commissions scolaires ou une diminution de la qualité de l'enseignement. L'éducation est une priorité, et nous y consacrerons les ressources nécessaires afin de donner à tous nos enfants les moyens d'aller au bout de leur plein potentiel.

Notre gouvernement s'est engagé à maintenir une croissance annuelle minimum de 3,5 %. Le 3,5 % est évidemment un vrai 3,5 %, il n'inclut pas le coût de la baisse de taxe scolaire. Les budgets de... 3,5 % de croissance des budgets de la mission de l'éducation, et nous allons livrer la marchandise. Alors, il y aura un minimum de 3,5 % de croissance des budgets de l'éducation au cours des quatre prochaines années. C'est un enjeu crucial pour l'avenir du Québec, et nous ferons ce qu'il faut pour y arriver.

La subvention d'équilibre. Lors du briefing technique, nous avons eu l'occasion de préciser comment la subvention d'équilibre est cristallisée dans le projet de loi. J'aimerais rassurer mes collègues, encore une fois, sur la volonté de notre gouvernement d'assurer le financement approprié à l'éducation à long terme. Nous aurons l'occasion de rentrer dans le détail de ce mécanisme, notamment aux articles 24 et 34 du projet de loi.

En conclusion, j'ai bien hâte de commencer l'étude détaillée de ce projet de loi avec vous. Comme nous l'avons déjà mentionné, nous sommes ouverts à apporter des ajustements. J'espère que nous aurons des travaux efficaces, productifs et que nous pourrons collaborer pour réduire le fardeau fiscal des Québécois, et ils en ont bien besoin. J'aimerais que cette commission et ce projet de loi donnent l'exemple d'une saine collaboration pour le bénéfice de tous les Québécois et l'exemple d'une collaboration exemplaire au sein de la 42e législature. Ça termine mon intervention.

• (19 h 40) •

Le Président (M. Simard) : Merci beaucoup, M. le ministre. Alors, M. le député de Robert-Baldwin, je vous cède la parole pour une période maximale de 20 minutes.

M. Carlos J. Leitão

M. Leitão : Très bien. Merci beaucoup, M. le Président. Alors, à mon tour de souhaiter la bienvenue à tout le monde. M. le ministre, votre équipe du ministère des Finances et du ministère de l'Éducation, bienvenue. Et nous connaissons tous vos talents. Donc, on vous posera des questions si c'est nécessaire, mais vous êtes là aussi pour nous aider à progresser dans ce dossier. Mes collègues du parti gouvernemental membres de la commission, bienvenue aussi, et mes collègues de notre formation politique, ainsi que de la troisième et quatrième groupe d'opposition... deuxième et troisième. Excusez-moi, je suis déjà rendu... C'est 19 h 30. 19 h 30, et puis on vient d'avoir un cocktail, et tout. Alors, c'est un peu comme ça, mais, bon. Donc, bienvenue à tout le monde. Voilà.

Alors, mes remarques préliminaires. M. le Président, j'aimerais aborder trois enjeux, trois sujets. Bon, le premier, c'est que ça a été mentionné par divers membres du gouvernement qu'en fin de compte le projet de loi n° 3, ce n'est que la continuation du projet de loi n° 166, hein, qui avait été présenté par notre formation politique en 2017‑2018. Ça, c'est un enjeu.

Deuxièmement, je vais aussi parler un peu d'allègement fiscal, puisque M. le ministre l'avait mentionné, maintenant et aussi avant, que cet exercice est, en fin de compte, un allègement fiscal.

Et puis, troisièmement, le projet de loi lui-même, certaines questions que nous avons sur les dispositions du projet de loi. Et puis, bon, après ça, quand on passera à l'étude détaillée, on pourra adresser ces questions.

Alors, pour ce qui est, donc, d'une comparaison avec le projet de loi n° 166 de notre collègue le député de Jean-Talon, ce n'est pas tout à fait la même chose, ni le contenu ni surtout la forme. Vous me permettrez de citer un peu ce que nous avions dit lors de notre mise à jour de novembre 2017. C'était à cette mise à jour, en novembre 2017, que nous avions pour la première fois détaillé un peu ce que nous pensions faire. À ce moment-là, nous avons dit, bon, que c'était nécessaire de modifier le régime de taxation scolaire, il y avait plusieurs raisons pour cela. Mais ce que je trouve important, c'est qu'on disait, dans ce document de novembre de 2017, que «le ministre des Finances et le ministre de l'Éducation, du Loisir et du Sport consulteront les commissions scolaires dans le but de leur proposer la mise en place d'un taux unique régional de taxation scolaire sur la base du taux de taxation effectif le plus bas pour chaque région ainsi qu'une exemption de base de la taxe».

Donc, on a proposé de faire un changement important dans le régime de taxe scolaire, mais, avant d'entrer dans les détails de ce changement-là, nous avions indiqué que nous allions consulter les commissions scolaires pour arriver à une entente avec eux avant de déposer un projet de loi. C'est ce que nous avons fait. Et il y avait cinq objectifs à notre exercice, et ces cinq objectifs étaient tout d'abord principalement de mettre fin aux transferts des contribuables sans enfants admis aux services éducatifs entre les commissions scolaires linguistiques dans une même région, donc de régler une question d'équité intrarégionale, deuxièmement, de faire disparaître l'iniquité liée aux écarts de taux applicables aux contribuables d'une même région, troisièmement, eh oui, eh oui, d'alléger le fardeau fiscal des contribuables, quatrièmement, de maintenir le niveau de financement des commissions scolaires et, finalement, de respecter le pouvoir de taxation des commissions scolaires. Donc, nous jugeons que c'était important que les commissions scolaires puissent maintenir leur autonomie et de maintenir leur pouvoir de taxation.

En même temps qu'on avait fait cette annonce dans la mise à jour de novembre 2017, nous avions aussi annoncé des investissements quand même importants et majeurs dans la réussite scolaire. Donc, il y avait tout un plan qui avait été détaillé à ce moment-là pour favoriser la réussite scolaire. Et aussi, dans ce même document, nous avions aussi annoncé une réduction du fardeau fiscal additionnelle assez importante, surtout l'impôt sur le revenu, qui était et qui demeure très élevé, mais au moins on avait procédé à une réduction du premier taux d'imposition de 16 % à 15 %.

Donc, on avait fait ça en novembre 2017 parce qu'on avait les moyens de le faire. À ce moment-là, on constatait déjà un surplus budgétaire important. Alors, c'est pour ça qu'on avait procédé de cette façon-là en annonçant un allègement fiscal pour les contribuables et modifications importantes de la taxe scolaire suite à des consultations avec les principaux intéressés, qui étaient les commissions scolaires. Et par la suite le ministre de l'Éducation, lui, présenterait un projet de loi, le p.l. n° 166, qui adressait ces questions-là après consultation.

Donc, c'est un processus qui est différent de celui qui a eu lieu ici, puisqu'ici c'est le ministre des Finances qui dépose un projet de loi, et le ministre de l'Éducation n'est pas présent, et il n'y a pas eu de consultations au préalable avec les commissions scolaires. Et donc c'est tout un processus, donc, complètement différent. Donc, ce n'est pas la même chose que le projet de loi n° 166.

Maintenant, le deuxième enjeu. Est-ce vraiment un allègement fiscal? Bien, bien sûr que oui, c'est un allègement fiscal, puisque les personnes qui paient les taxes scolaires vont payer moins. Donc, à cet égard-là, oui, c'est un allègement fiscal. Mais est-ce que c'est équitable? Et est-ce qu'on pourrait peut-être faire mieux? Une expression que nos amis aiment bien, faire plus, faire mieux. Est-ce qu'on aurait pu faire mieux avec les 900 millions de dollars qu'on semble avoir? Et, oui, il y a des marges de manoeuvre suffisantes. Donc, avec 900 millions, et, si on décide que 900 millions, c'est un montant intéressant pour alléger le fardeau fiscal, est-ce qu'on pourrait faire ça d'une autre façon que les taxes scolaires?

Moi, je vous soumets qu'au Québec le problème, en termes de taxation, et, M. le ministre, vous avez mentionné encore une fois, donc, la pression fiscale qui existe au Québec, les travaux, bon, au ministère des Finances, bien sûr, mais aussi les travaux de la Chaire de fiscalité de l'Université de Sherbrooke, mais aussi de la Commission des finances publiques, qui a... pardon, la commission de révision du système fiscal, la commission Godbout, qui a été créée en 2015, qui a bien analysé la problématique du fardeau fiscal des Québécois, est arrivée à la conclusion qu'au Québec le vrai problème en termes de pression fiscale, c'est l'impôt sur le revenu. Nous sommes vraiment les champions en Amérique du Nord sur les taux d'imposition de l'impôt sur le revenu. Et, comme nous le savons tous, l'impôt sur le revenu, c'est probablement le moyen le plus dommageable économiquement de taxer.

Nous devons taxer, et pas de problème avec ça. Si on veut des services publics, il faut avoir les moyens de le faire. Mais l'impôt sur le revenu est problématique parce qu'il décourage le travail, décourage l'investissement, décourage l'épargne. Donc, si on peut faire un changement dans le mixte, ça serait peut-être une bonne chose. Donc, moi, si j'avais 900 millions comme allègement fiscal, je l'aurais mis ailleurs que dans le soulagement des taxes scolaires.

De plus, il y a des moyens qu'on peut très bien utiliser pour rendre cette baisse d'impôt de revenu... la cibler aux personnes et aux familles qui ont des revenus moins élevés, et pas nécessairement d'avantager les plus fortunés. Donc, il y a façon de faire cela, comme nous avions fait en novembre 2017 en baissant le premier taux d'imposition de 16 % à 15 %.

Donc, à cet égard, je pense qu'on aurait pu faire autre chose que baisser les taxes scolaires, surtout que M. Godbout, de la Chaire de fiscalité de l'Université de Sherbrooke, en commission parlementaire, nous a démontré très clairement qu'en termes de taxe scolaire il n'y a pas vraiment de problème au Québec. Au Québec, notre pression fiscale, en termes de taxe scolaire, est moins élevée que dans les autres grandes provinces canadiennes. En termes de taxation foncière en général, les taxes municipales, c'est une autre histoire. Mais, si on parle seulement des taxes scolaires, on est déjà plus bas que nos voisins, on est déjà plus bas que les grandes provinces canadiennes. Donc, ce n'est pas là qu'il y a une très grande différence.

• (19 h 50) •

Puis, par la suite aussi, ma collègue la députée de Saint-Laurent a soulevé une question que, je pense, elle va peut-être soulever à nouveau, mais je pense que c'est très important aussi. Il y a de plus en plus, avec le développement immobilier qu'on constate surtout à Montréal, beaucoup de propriétaires de condominium surtout, mais aussi de maison qui ne sont pas résidents, qui ne résident pas au Québec. Et donc une des seules façons qu'on a pour que ces personnes-là puissent participer à financer les services publics au Québec, c'est à travers l'impôt foncier. Et donc de leur donner une réduction de taxe scolaire, je ne pense pas qu'ils ont tellement besoin de cela. Alors, ça serait peut-être intéressant de trouver un moyen si on pouvait exclure les non-résidents. Mais on y arrivera.

Donc, à notre avis, c'est une décision qui... Nous, on l'aurait fait différemment. Et puis aussi la taxe foncière, donc, dans ce cas-ci, la taxe scolaire, c'est aussi un moyen utile de lutter contre l'évasion fiscale. Alors, on ne peut pas... Quand on est propriétaire d'une propriété, bien, c'est pas mal difficile d'évader les taxes foncières. Alors, voilà pour l'aspect équité et pour l'aspect efficacité de l'allègement fiscal à travers la taxe scolaire.

Finalement, la troisième partie de ce que je voulais mentionner en termes d'ouverture, c'est le projet de loi lui-même, donc, plusieurs composantes de ce projet de loi qui, à mon avis, je pense qu'on aura des explications à demander avant d'y arriver, comme, par exemple : Pourquoi un taux unique? On nous dit : Oui, au nom de l'équité, il faut avoir un taux unique à travers toute la province, sachant très bien que les taxes scolaires, c'est pour surtout financer les besoins locaux, particulièrement en transport, besoins locaux en transport qui sont différents de région en région. Donc, la pertinence d'un taux unique, on pourrait en discuter aussi.

Et, si on décide qu'un taux unique c'est souhaitable, l'autre question, c'est : Pourquoi celui des Laurentides? Pourquoi ne pas trouver un autre taux moyen? Il y a par exemple l'IRIS qui a fait une étude aussi, qui l'a fait parvenir, je pense, aux membres de la commission, où ils suggéraient d'avoir un taux unique plutôt aux alentours de 0,22 $ par 100 $ d'évaluation, fixeraient un taux un peu plus équitable pour tous les contribuables, sachant très bien que le taux des Laurentides, lui, il est le plus bas pour des raisons très particulières, parce que, dans cette région-là, il y a eu, au cours des 10, 15 dernières années, un fort développement immobilier, donc ce qui a donné une assiette fiscale qui a augmenté rapidement, et donc ce qui leur permet d'avoir un taux qui est plus bas que partout ailleurs en province. Et, si on veut avoir un taux unique, il me semble que ce n'est pas nécessairement le cas... ça ne serait pas tellement pertinent que ce soit le taux des Laurentides.

Un autre enjeu qu'on pourra en discuter quand on va y arriver, c'est la période transitoire, la période de transition. Mettons, on suggère une période de quatre ans, les commissions scolaires sont venues nous dire à plusieurs reprises que ça crée beaucoup d'incertitude. Donc, c'est une période qui est relativement longue, une période de transition de quatre ans. Et ça, donc, maintient cette incertitude pendant une longue période. Est-ce qu'il y aurait moyen de la faire plus courte?

Encore une fois, puisque nous avons, il me semble, et on pourra en discuter plus tard... mais il me semble que l'enjeu derrière cette... d'échelonner ça sur quatre ans, c'est plutôt un enjeu budgétaire, parce qu'on ne veut pas y aller d'un coup. Mais, étant donné que les marges de manoeuvre sont importantes, s'il faut avoir un taux unique plus bas, pourquoi ne pas le faire beaucoup plus rapidement pour diminuer cette période d'incertitude?

Mais, plus fondamentalement, notre enjeu principal avec le projet de loi, et ça, ça ne se règle pas par amendement, ça ne peut pas se régler comme ça, c'est qu'au moment où le système d'éducation, le réseau d'éducation a toutes sortes d'enjeux à régler, que ce soit un taux de décrochage élevé, un manque de professionnels, manque de lieux en bon état, etc., baisse d'inscriptions dans les facultés d'éducation, par exemple, quand on a tous ces enjeux-là à adresser, la première pièce législative qui a un impact sur le réseau d'éducation, c'est une réduction de taxe scolaire. Je ne pense pas que ce soit ça... Je comprends que c'était un engagement électoral, mais ça ne veut pas nécessairement dire que c'est de la bonne politique publique. Je pense qu'il y aurait d'autres choses à faire avant d'aller dans cette direction. Mais ça, ça ne se règle pas par amendement. C'est notre enjeu principal.

Nous sommes donc ouverts à procéder avec l'analyse du projet de loi, à y aller article par article, proposer certains amendements pour essayer de bonifier ce projet de loi. Ce n'est pas notre intention de retarder sans raison ce projet de loi, mais il y a des questions et des enjeux que nous voulons adresser et discuter avec les collègues. Donc, voilà, je m'arrête ici, M. le Président. Merci.

Le Président (M. Simard) : Merci beaucoup à vous, M. le président, hein? J'aimerais souhaiter maintenant... adresser, plutôt, la parole à la députée de Joliette...

Mme Véronique Hivon

Mme Hivon : Oui, bonjour.

Le Président (M. Simard) : ...pour une période de 20 minutes.

Mme Hivon : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, à mon tour de vous saluer, de saluer le ministre et toute son équipe de conseillers. Alors, je sais bien tout le travail qu'il y a derrière une pièce législative et tout le travail qu'il y a devant quand on commence une étude détaillée. Je pense, M. le Président, que c'est la première étude détaillée de cette nouvelle législature. Donc, c'est à vous, M. le ministre, d'avoir cet honneur, et à nous tous et toutes. On va essayer de bien faire ça dans un esprit, évidemment, d'amélioration continue des choses, mais je pense qu'il y a beaucoup de questions qui se posent. Et, avant d'y aller, bien sûr, je veux saluer aussi tous les collègues, les collègues de la partie ministérielle, mes collègues de l'opposition officielle et du troisième groupe d'opposition, hein? C'est toujours compliqué. Et donc je pense qu'on va certainement bien travailler, dans un esprit constructif, mais en posant les questions qui doivent être posées.

Donc, d'entrée de jeu, le ministre ne sera pas surpris de m'entendre dire que nous ne pensons pas que, sur le fond des choses, cette réforme soit la bonne réforme à apporter dans la mesure où on veut faire de l'éducation la réelle priorité, un objectif que nous poursuivons et pour lequel nous espérons que le plus grand nombre de moyens ambitieux, mais aussi collés aux réels besoins qui se font sentir en éducation, vont être adoptés et mis de l'avant, là, par le gouvernement au cours des prochains mois.

Évidemment, on trouve pour le moins regrettable que le premier geste qui soit posé soit donc celui de baisser, en fait, les revenus autonomes du réseau, donc des élus scolaires, des commissions scolaires, de l'ordre de 900 millions. D'ailleurs, on va être très intéressés à savoir si les choses se sont précisées depuis le dépôt du projet de loi, là, en ce qui concerne l'ordre de grandeur que l'on pense être celui, là, qui va être accolé à la baisse de taxe.

• (20 heures) •

Donc, évidemment, 900 millions de moins, le ministre dit qu'il va compenser. On en a déjà discuté, je pense qu'on va continuer à en discuter. C'est une chose de compenser, on va vouloir s'assurer que la parole du ministre va être maintenue, pas parce qu'on doute de lui aujourd'hui, mais on sait que, la vie économique étant ce qu'elle est, et les aléas budgétaires et financiers et des crédits étant ce qu'ils sont, on a appris par le passé, par les dernières années notamment, donc, qu'on ne sait pas toujours ce que l'avenir nous réserve. Or, quand on décide d'enlever un 900 millions d'un coup de revenus autonomes pour les commissions scolaires, je pense qu'on peut comprendre les inquiétudes qui nous ont été communiquées lors des consultations publiques, inquiétudes que nous devons entendre et auxquelles nous devons répondre, parce qu'il n'y a pas de garantie, en ce qui les concerne, que beau temps, mauvais temps, cet argent-là, qui est pourtant crucial si on veut que notre réseau de l'éducation fonctionne bien, va continuer d'être au rendez-vous. C'est pour ça que nous estimons de notre côté qu'il va falloir s'assurer que cet argent-là, que ces sommes-là soient assurées, qu'elles soient maintenues. Et le ministre sait très bien que nous, on a une démarche, un projet de loi, donc, qu'on a déposé, bouclier de protection budgétaire qui, je pense, devrait être examiné par le gouvernement au-delà du projet de loi, là, qui nous occupe en ce moment sur la taxe scolaire, qui serait un signal fort à envoyer en ce qui concerne l'ensemble des budgets qui vont toucher l'éducation et la petite enfance, à savoir que, pour un gouvernement qui en fait une priorité, et nous, on appuie complètement cette priorité-là, d'envoyer le signal que les budgets non seulement relatifs aux 900 millions ou plus, si c'est le cas, de la taxe scolaire, mais l'ensemble des budgets en éducation vont être protégés pour l'avenir parce que c'est une priorité, parce qu'on ne peut pas jouer au yoyo avec les besoins des élèves, avec les besoins des enfants dans le réseau scolaire, dans le réseau de la petite enfance, parce qu'une année, deux années, trois années où les moyens ne sont pas là, où il y a de l'austérité et que c'est le milieu de l'éducation qui en paie le prix, ce sont des années où on fait mal à l'avenir du Québec, où on fait mal à nos enfants, où on fait mal aux élèves qui n'ont pas les services pour répondre à leurs besoins.         Alors, ça, c'est grave. On entend le premier ministre répéter à quel point l'éducation, c'est une telle priorité qu'il faut lui donner les moyens financiers. On est bien d'accord avec ça. Il faut donner les bons moyens, mais il faut s'assurer aussi de la constance de ces moyens-là dans l'avenir. Et ça, c'est une grande inquiétude qui commence évidemment avec le projet de loi. Mais je pense qu'on serait de nature à être rassuré, comme les gens qui sont venus, comme les gens qui viendront dans le cadre de d'autres projets de loi, dont un de votre collègue de l'Éducation, que de dire qu'il va y avoir une loi de protection budgétaire pour l'ensemble des budgets en éducation, ce qui fait en sorte que, bon an mal an, qu'importe le contexte économique, des moments plus difficiles, que l'argent en éducation va être au rendez-vous.

Alors, c'est certain que c'est une grande inquiétude, mais, au-delà de ça, la question vient : Pourquoi cette réforme-là comme premier geste législatif en matière d'éducation? Pourquoi donc décider maintenant de se priver de ce 900 millions là? Donc, on va vouloir avoir des éclaircissements, bien entendu, puis d'autant plus qu'on a entendu des experts, comme M. Godbout, venir nous dire qu'en termes d'équité et d'efficacité, si on le regarde juste d'un point de vue de réforme fiscale, que ce n'était pas le bon geste à poser si on veut faire une réforme qui va atteindre des objectifs à la fois d'équité et d'efficacité.

Alors, c'est certain que ces questionnements-là demeurent. Le ministre nous a dit tout à l'heure qu'il y avait une réalité de l'impôt foncier au Québec comparativement aux provinces canadiennes. Je le conçois bien. Mais là on parle de l'impôt scolaire. Et, comme M. Godbout nous l'a rappelé, le Québec est l'endroit où l'impôt scolaire est le plus bas.

Alors, pourquoi viser d'abord ça, alors que ça crée énormément d'incertitude pour l'avenir, pour la prévisibilité, pour la sécurité, donc, du réseau scolaire par rapport à son financement? Donc, je pense que ce sont des questions importantes à se poser à l'amorce, là, de ce débat-là. Évidemment, le ministre sait très bien que les groupes qui sont venus nous voir à l'occasion des... deux qui représentaient les propriétaires, mais qui n'étaient, en toute déférence, pas exactement sur le sujet de la réforme de la taxe scolaire, mais qui plaidaient plutôt pour l'accès à la propriété, la révision de la Régie du logement, donc des débats fort importants ou intéressants que nous pourrons faire aussi dans d'autres cadres. Mais l'ensemble des groupes qui sont venus nous voir nous ont dit que ce n'était pas leur priorité, que ce projet de loi là n'allait pas aider à la réussite éducative, qui est pourtant l'objectif premier que nous poursuivons tous. Et ça, je pense que ça devrait allumer un voyant lumineux sur notre tableau de bord, de se demander si c'est vraiment le premier geste que l'on doit poser législativement quand ça crée autant d'inquiétude et d'incertitude et qu'on n'a pas le pendant pour pouvoir rassurer les intervenants du milieu de l'éducation, qui sont quand même les premiers responsables aux dernières nouvelles, qui sont des gens qui sont élus, qui sont des gens qui gèrent 11 milliards de dollars en impôt et qui devraient avoir notre oreille.

Par ailleurs, évidemment, à travers l'étude du projet de loi, on va avoir des questions beaucoup plus techniques sur différentes modalités, là, pour le projet de loi. Donc, je vais m'arrêter ici en disant que je suis certaine que nos travaux vont être constructifs. Et j'espère que nous allons avoir l'oreille du ministre pour les demandes de modification que nous pourrions avoir.

Le Président (M. Simard) : Merci beaucoup, Mme la députée de Joliette. M. le député de Rosemont, vous êtes loin de moi, mais je vous reconnais.

M. Vincent Marissal

M. Marissal : Merci. Merci, M. le Président. Bienvenue. Bonsoir à tout le monde. C'est vrai que c'est une première. C'est la première fois qu'un projet de loi de cette nouvelle législature atteint cette première étape ou deuxième étape d'étude détaillée. C'est évidemment une première pour pas mal de monde ici, dont moi. Quoique ma nouvelle vie professionnelle est une longue succession de premières ces temps-ci. Alors, je vous demanderais d'être indulgent si jamais je déborde un peu ou que je ne suis pas tout à fait sur la coche tout le temps avec toutes les procédures. Mais c'est le métier qui rentre. Je vais finir par y arriver, ne vous en faites pas. Alors, bonsoir, M. le ministre, et bonsoir aux collègues d'être ici, de même qu'au personnel qui l'accompagne.

Je suis heureux puis à la fois pas heureux d'être ici parce que, bien franchement, j'aurais préféré qu'on n'ait pas à débattre de ce projet de loi là parce que je ne suis pas persuadé, de un, que c'est la priorité des priorités. Et je pense, comme on nous l'a beaucoup dit en commission parlementaire, qu'à la fin ça ne favorise pas nécessairement ce qui aurait dû être le but premier de ce projet de loi, c'est-à-dire la réussite scolaire. On peut en débattre. Moi, je présume et j'ai entendu des gens qui nous ont dit que ce n'était pas le cas. Par ailleurs, j'y vois aussi, puis ça, on en a parlé beaucoup... et puis le gouvernement a été élu majoritairement, puis je respecte ça, là, et ce n'est pas de ça dont il est question. Le gouvernement a un mandat, tout ça, mais ça ne m'oblige pas à être d'accord sur tout, évidemment. Et puis j'y vois un premier geste, un premier jalon, d'ailleurs, qui est posé très, très rapidement, pour, en fait, mettre la table à ce qu'est l'objectif non pas ultime, mais l'objectif, le deuxième objectif dans le domaine de l'éducation, c'est-à-dire vraisemblablement d'abolir les commissions scolaires ou de les rendre à ce point impotentes qu'elles deviendront de facto inopérantes et inutiles.

Et on le sent d'ailleurs dans le réseau, parce que ça commence à s'agiter un peu, on sent que le milieu est sur les nerfs à cause de ça. Et ça se sent. Ça se sent comme ça se sentait quand il y a eu des réformes, par exemple, dans le milieu de la santé, où on a fait beaucoup de brassage de structures et qu'on sentait... on n'est pas encore dans l'indignation, mais l'inquiétude. Et puis on le sait parce que les gens nous parlent, parce qu'on est des êtres de chair et de pensée. Puis, quand les gens appellent au bureau de comté, les gens nous envoient des courriels, on commence à sentir une certaine agitation, pour ne pas dire, même, une certaine panique dans certains coins, où on perçoit le projet de loi n° 3 comme le cheval de Troie qui va finalement permettre l'invasion pour mettre fin aux commissions scolaires.

Et de ça non plus mon groupe parlementaire n'est... Avec ça non plus nous ne sommes pas d'accord. On présume que c'est une mauvaise avenue, que les commissions scolaires, aussi imparfaites soient-elles, remplissent un rôle, gèrent beaucoup d'argent, gèrent l'argent sur le terrain avec les enfants tous les jours. Et, même si on transformait les commissions scolaires en centres de services, parce qu'ultimement c'est ce qui va arriver, les enfants ne disparaîtront pas, les bus jaunes ne disparaîtront pas, ça va quand même prendre des concierges pour nettoyer les écoles, ça va quand même prendre du monde pour appeler les suppléantes, quoiqu'on n'a plus de suppléantes. Alors, peut-être qu'on n'a plus besoin de monde pour appeler les suppléantes. Mais il y aura toujours les mêmes services à gérer au jour le jour. Puis on peut bien appeler ça un centre de services à la fin, il reste qu'au plan démocratique — et là je vois un problème avec le projet de loi n° 3 — il était préférable, nous semble-t-il, en tout cas, pour mon parti politique, que cette gestion soit faite par des élus, par des gens qui sont proches du milieu et qui ont une certaine autonomie.

Alors, évidemment, le fait de priver les commissions scolaires d'un gros, gros, gros morceau de 900 millions, c'est peut-être même un peu plus, c'est peut-être même un peu moins, mais, de toute façon, l'idée générale, c'est que de priver, de fermer le robinet, en quelque sorte, d'argents autonomes, de revenus autonomes vers les commissions scolaires me semble être une mauvaise idée qui va mener évidemment à tout un rebrassage de structures.

• (20 h 10) •

Il n'y a personne, en fait, pendant les commissions, pendant le début de la commission parlementaire, qui a déchiré sa chemise ou qui a mené une opération frontale contre le projet de loi n° 3. Moi, j'ai senti plutôt, du côté du monde de l'éducation, une grande inquiétude, une perplexité et peut-être même plus que ça, un désabusement. Ils ne comprennent pas trop pourquoi on s'en va là. Et je rappelle que personne n'est venu nous dire que le projet de loi n° 3, une fois devenu loi n° 3, améliorera quoi que ce soit dans la réussite scolaire au Québec, qui est pourtant pas mal la priorité des priorités. Quand on voit, par exemple, le taux de décrochage, en particulier chez les garçons, quand on voit la surconsommation de médicaments chez de très jeunes enfants, quand on voit que les classes débordent, qu'il manque d'enseignantes, qu'on est en train de parquer des enfants dans des roulottes peut-être pour des années, peut-être pour tout leur primaire, personne n'est venu nous dire que le projet de loi n° 3 allait avoir un impact positif à l'encontre de ces affres qui affligent le monde de l'éducation en ce moment. Pourtant, ça a été dit et redit dans son discours inaugural, le premier ministre a fait de l'éducation la priorité des priorités. Il parlait même de l'heure du redressement national en éducation. Bien, ça, au moins, là-dessus, on était tout à fait d'accord et nous sommes toujours d'accord. Je ne crois pas malgré tout que c'est ce que fait le projet de loi n° 3.

Il y aura un effet certain sur le financement du réseau. Ça, ça va de soi, puisqu'il y aura perte de revenus autonomes. J'y vois aussi un certain nombre de problèmes d'équité. Le ministre nous dit, et je pense qu'il est de bonne foi, que le projet de loi, au départ, c'était pour corriger certaines iniquités. Mais on parle ici beaucoup plus d'iniquités entre certaines régions et même dans la même ville, selon l'exemple que le ministre nous a donné tout à l'heure. Mais évidemment tout le monde sait que les commissions scolaires n'ont pas toutes les mêmes besoins, n'ont pas toutes la même clientèle. Et, encore une fois, pourquoi avoir choisi le taux le plus bas, privant ainsi les commissions scolaires d'un gros, gros morceau de financement? Bien, c'est probablement, comme je le disais tout à l'heure, puis je ne veux pas prêter d'intention, mais le fait est qu'à la fin ça prive les commissions scolaires et, à force de les priver de revenus, ça les rend impotentes. On affame la bête, et puis elle ne sert plus à rien après un certain moment.

J'y vois un problème de démocratie, de représentation. Les anglophones en particulier sont venus le dire ici parce que, pour eux, c'est profondément inscrit dans leur ADN, c'est profondément inscrit dans la Constitution aussi, puis ça, ça va causer un autre problème, mais il y a un problème de représentation, aussi de démocratie pour la majorité francophone au Québec, qui reçoit le message que, finalement, la démocratie scolaire et la représentation scolaire, bien, ce n'est pas important, ce n'est pas grave. Peu importe qui gère l'argent, ça ne sera plus les commissions scolaires, ça sera des centres de services. Ça envoie l'idée ou la philosophie que, finalement, l'implication citoyenne par une taxe scolaire dans ton milieu, pour tes enfants et pour les enfants des voisins une fois que les tiens sont partis ou même si tu n'en as jamais eu, que c'est une implication par la voie de la taxation pour ce qui est le plus important, apparemment, dans notre société. Donc, moi, j'y vois un problème certain de démocratie et de participation.

J'y vois aussi un problème d'iniquité, notamment avec les non-résidents qui font de l'argent en spéculant ici. J'en ai chez moi, dans des petites rues résidentielles, à Rosemont, des maisons qui ont été rachetées par des gens qui n'habitent pas ici, puis on ne voit presque jamais personne, sinon quelqu'un qui vient nettoyer la façade puis s'assurer qu'il n'y a pas eu de vandalisme et que tout va bien, mais il n'y a personne qui habite là-dedans. Ce qu'on voit de plus en plus aussi, y compris dans les rues de Rosemont, c'est du monde, des touristes se promener avec des valises. Il n'y a pas d'hôtel dans Rosemont. Je pense qu'il n'y a pas un seul hôtel dans mon comté. Ces gens-là sont dans des bed and breakfast achetés par du monde pour ne faire que ça. Alors, ces gens-là font de l'argent avec le locatif. Au moins, on s'assurait qu'ils payaient un minimum avec la taxe scolaire, et puis là, bien, ce ne sera plus le cas. Du moins, ils vont payer réellement le minimum avec la taxe scolaire.

J'en ai parlé souvent aussi, mais je ne suis pas le seul, il y a une iniquité aussi envers les locataires qui ne verront pas les fruits de cette baisse de taxe scolaire, enfin, une infime minorité peut-être qui auront la chance d'avoir des propriétaires peut-être plus ouverts envers leurs locataires, mais l'immense majorité des locataires ne verront pas le fruit de cette baisse. Dans une société où il y a 40 % de gens qui vivent à loyer... puis évidemment vous aurez compris que ce n'est pas 40 % des plus riches, c'est même souvent la classe moyenne et les gens à très faibles revenus qui vivent à logement et qui auraient pris la petite baisse venant de la baisse de taxe scolaire. Et on n'a même pas, quoique je suis tout à fait ouvert à en discuter avec le ministre et avec les collègues dans cette étude... on n'a pas de mécanisme qui peut permettre ça. Et qu'on ne vienne pas me dire que c'est la Régie du logement. Ce n'est pas... pas en ce moment, pas dans l'état actuel de la régie, pas avec les pouvoirs de la régie, pas avec l'arrérage de cas qui traînent à la régie depuis si longtemps. Alors, il y a beaucoup de locataires qui ne verront pas, finalement, l'avantage à ce qu'on baisse les taxes scolaires.

D'ailleurs, en ce sens, je déposerai, à la fin de mes remarques, une motion préliminaire justement à cet effet, parce qu'on aimerait entendre certaines corporations qui sont propriétaires soit de logements, soit d'immeubles industriels, qui vont se mettre beaucoup, beaucoup d'argent dans les poches grâce à cette taxe-là... à cette baisse de taxe là, j'entends, et qui en plus, cette baisse de taxe, ne fera rien pour la réussite scolaire.

Alors, j'y reviens rapidement, mais, sur le sort des commissions scolaires, je mets en garde le gouvernement contre une autre réforme de structure basée sur un empressement et une certaine idéologie. Le réseau, en ce moment, est réellement en émoi. Ces gens-là sont déjà, pour la plupart, à bout de souffle. Ils ont connu des années extrêmement difficiles. Le ministre de la Famille, aujourd'hui, disait que, dans le réseau services de garde, il y avait un certain vent de panique. Bien, c'est certainement le cas en ce moment dans le réseau de l'éducation, et chez les commissaires scolaires, et chez les gens qui sont impliqués dans le milieu scolaire aussi. Je dirais même qu'ils ne sont pas juste en panique, ils sont sur les gros nerfs à cause de ce qui s'en vient vraisemblablement.

Cela dit, et je termine là-dessus, on a un projet de loi, on va l'étudier. J'ai senti, dans mes échanges privés... Je ne suis pas en train de vous donner un scoop, là, je n'ai pas de relation particulière avec le ministre des Finances, il a eu la gentillesse de rencontrer les gens de l'opposition, moi comme les autres. Alors, j'ai senti de sa part une certaine ouverture. J'ai senti... C'est peut-être à la marge, là. On ne va pas réécrire le projet de loi au complet, là. Je n'ai pas cette ambition, mais j'ai senti quand même une certaine ouverture, notamment pour combler le manque à gagner des commissions scolaires, qui tiraient des revenus de placements, notamment auprès des gens qui ne payaient pas à temps leur taxe scolaire. Bon, on peut débattre du taux de pénalité qui était imposé. Je sais que ça a fait tiquer beaucoup, beaucoup le ministre et ses collègues. Mais, au-delà de ça, il y aura un manque à gagner, et ce n'est pas des centaines de millions de dollars, ici. C'est souvent même, à première vue, des montants modestes en comparaison au montant global du dossier de l'éducation et du ministère de l'Éducation. Mais, au-delà des chiffres, ce sont des montants que les commissions scolaires allaient chercher pour des petites, petites affaires tellement importantes, comme des berlingots à des enfants qui en ont vraiment besoin, des berlingots de lait, des collations. Ça n'a l'air de rien, ça a l'air tout bête comme ça, mais, pour la vie de ces enfants-là, ça faisait une différence. Et, pour la vie des gens qui s'en occupent, des enseignantes qui s'en occupent, ça faisait aussi une différence.

Alors, si le ministre, effectivement, est sincère dans sa main tendue à ça, je serais bien, bien heureux et ouvert à en discuter et je pense qu'on serait tous, ici, ouverts à en discuter, parce que les montants sont peut-être petits, mais les besoins sont énormes. Et on a appris, dans ces réseaux publics au fil des années puis au fil des compressions, à faire beaucoup avec pas beaucoup, justement.

J'ai senti aussi... je ne sais pas si c'est une ouverture ou une interrogation de la part du ministre et de certains de ses collègues quant au montant d'exonération, là, les premiers 25 000 $. De ça aussi, je serai heureux et ouvert de discuter. Mais, pour le moment, je m'arrête là. Vous comprendrez que nous considérons que le projet de loi n° 3 a besoin de sérieux ajustements. Probablement que les ajustements auxquels je pense sont peut-être trop ambitieux pour ce à quoi pense le gouvernement en ce moment, mais je m'arrête là pour le moment. Merci.

• (20 h 20) •

Le Président (M. Simard) : Merci beaucoup, M. le député de Rosemont. Alors, avant de laisser la parole à la députée de Saint-Laurent et deuxième porte-parole de l'opposition officielle, je vous rappelle que chaque membre de cette commission a le droit d'intervenir, dans le cadre des remarques préliminaires, pour une durée maximale de 20 minutes. Alors, Mme la députée de Saint-Laurent, à vous la parole.

Mme Marwah Rizqy

Mme Rizqy : Merci, M. le Président. C'est pour moi aussi une première, c'est mon premier projet de loi détaillé. J'ai eu l'occasion d'étudier aux États-Unis, et, dans les grandes universités américaines souvent, les autres étudiants nous parlent du rêve américain. Puis moi, à chaque fois, je leur parlais du rêve québécois, celui où est-ce qu'une petite fille, dans un quartier de l'est de Montréal, qui passe son temps à épeler son nom, Marwah, pas comme Pauline, mais M-a-r-w-a-h, Rizqy, puis qui explique ses origines... Une fille qui avait grandi dans l'est, d'une mère complètement illettrée, sans aucun diplôme. Une fille qui a sa grande soeur déficiente intellectuelle, d'une mère qui est arrivée ici, ne parlait aucunement en français, a pu se scolariser, d'une mère qui s'est installée au Québec dans le seul but de dire : Un jour, j'aimerais ça avoir des enfants puis leur donner toutes les chances de réussir.

Bien, dans ce beau Québec là, dans l'est, en milieu défavorisé, on a mis des prématernelles quatre ans. Moi, j'en ai bénéficié. Ma grande soeur déficiente intellectuelle, elle a pu bénéficier d'un transport scolaire qui venait la chercher tous les jours pour l'amener à l'école pour qu'un jour cette enfant, que plusieurs médecins disaient qu'elle n'allait jamais parler, puisse un jour parler, parce qu'il y avait d'autres médecins qui disaient : On va travailler, on va mettre des ressources, on va mettre des orthophonistes sur elle, puis un jour elle peut parler. Bien, ça a pris une douzaine d'années, puis les deux premiers mots qu'elle a dits, ce n'est ni «maman» ni «papa», c'était : «Du lait.» Elle voulait boire du lait. Nous, on était contents.

Mais, dans ce rêve québécois, ça fait qu'il y a des enfants qui peuvent être issus de milieux défavorisés, peuvent fréquenter, oui, des prématernelles quatre ans en milieu défavorisé, peuvent faire des études secondaires, peuvent aspirer aller au cégep, peuvent aspirer d'aller en droit, puis de n'avoir aucun réseau, puis d'aboutir dans un grand bureau d'avocats, puis de dire : Moi, j'aimerais ça aller faire un doctorat puis revenir au Québec. Pas rester aux États-Unis, même si ça coûte pas mal plus cher puis que le taux d'imposition est vraiment moins cher, mais de revenir au Québec parce que les égalités des chances, on y croit pour de vrai.

Quand j'entends le ministre puis ses collègues dire que l'OCDE, le Québec, on est un des endroits les plus taxés au monde, il a raison, mais on a fait des choix de société au Québec. On a choisi d'avoir un régime fiscal qui donne des paniers de services pour que, justement, il n'y ait pas de laissés-pour-compte, que, peu importe notre code postal au Québec, on a une chance de réussir. Mais, pour réussir, il faut maintenir nos ressources. Il faut continuer d'investir en quoi? Dans l'être humain, il faut continuer d'investir dans le système d'éducation. Moi, j'y crois ardemment parce qu'aujourd'hui je ne serais pas assise à cette table, n'eût été notre magnifique système québécois. Puis le rêve québécois, il faut lui faire attention. Ma génération doit s'assurer que la génération qui va me suivre aura les mêmes chances, les mêmes chances de pouvoir réussir.

Aujourd'hui, je ne suis pas capable, moi, avec ce projet-là, n° 3, d'assurer que le transport scolaire va être encore là. Je ne suis pas capable de dire qu'on va avoir assez de directeurs d'école pour nos autres écoles, parce que, oui, les taxes scolaires, ça sert aussi au transport scolaire. Ça sert également d'avoir des directeurs d'école. On veut les attirer, les enseignants, puis souvent les enseignants vont devenir directeurs d'école. Quand on retire 900 millions sans aucune garantie de réinjecter ce montant, on n'aide pas à l'égalité des chances. Au contraire, on envoie un mauvais signal.

Je suis aussi fiscaliste. Mon combat pour la lutte contre les paradis fiscaux s'inscrit dans une démarche très claire de justice fiscale, sociale et économique pour tous. Quand je lis que ce projet de loi veut mettre de l'équité fiscale, je ne peux pas adhérer à cela. Toute ma démarche scientifique se bloque à cela. Puis je vous explique pourquoi. Pour moi, c'est inconcevable qu'une famille multimillionnaire va recevoir un plus grand congé fiscal qu'une famille d'Hochelaga ou de Saint-Laurent. C'est pour moi inacceptable de voir que j'ai des non-résidents qui ont assez d'argent pour être en mesure d'investir à Montréal, à Québec ou même à Tremblant, acheter des condos de luxe...

(Interruption)

Mme Rizqy : Honnêtement, ça peut paraître... moi, personnellement, ça me perturbe beaucoup que quelqu'un rie puis parle. Ça me perturbe pour de vrai. C'est vraiment sérieux.

Le Président (M. Simard) : Désolé, madame. C'est très sérieux, madame, mais je recevais la motion préliminaire. Alors, voilà. Vous pouvez continuer, on va faire...

Mme Rizqy : D'accord. Parce que je ne viens pas, moi, ici, à 20 h 25, pour entendre des sourires, tout ça. L'heure est assez... C'est vraiment important, ce qui se passe en ce moment dans le Québec. Ça craque de partout dans le système d'éducation.

Le Président (M. Simard) : Vous avez remarqué l'attention particulière que j'avais pour vos propos depuis que vous m'avez parlé. Ma secrétaire s'est adressée à moi...

Mme Rizqy : D'accord.

Le Président (M. Simard) : ...pour une raison qui concerne l'intendance de la commission. Je ne peux pas faire comme si elle n'était pas là.

Mme Rizqy : Je comprends, mais, dans ce cas-là, on peut suspendre.

Le Président (M. Simard) : Alors, je fais mon devoir de président.

Mme Rizqy : Parce que, pour moi, c'est vraiment important qu'on concentre nos efforts pour notre réseau d'éducation.

Le Président (M. Simard) : Madame, nous pourrions entendre ici une mouche voler. Nous vous écoutons. Je vous cède à nouveau la parole.

Mme Rizqy : Merci. En ce moment, c'est sûr que, si on enlève le 900 millions, qu'on donne et qu'on... sous prétexte qu'on veut être plus équitable, je n'arrive pas à adhérer à cela, parce que des mieux nantis vont avoir une plus grande baisse de taxe scolaire, alors que d'autres ne l'auront pas. Les propriétaires, oui, ils vont en avoir, des baisses de taxe scolaire, mais des propriétaires plus importants vont en avoir encore davantage dans leurs poches. Je disais à propos des non-résidents : Souvent, les non-résidents sont déjà très riches, ils ont un surplus d'argent qu'ils ne sont même pas capables d'investir dans leur propre pays et ils viennent ici, achètent des condos, majoritairement des condos, investissent, et eux aussi vont obtenir une baisse de taxe scolaire. Ils sont gagnants sur toute la ligne.

Le professeur Stiglitz, qui est un éminent économiste qui a gagné un prix Nobel en économie, le dit, une des façons de blanchir de l'argent, ça passe par l'immobilier. Puis, heureusement, quand il y a des taxes foncières, c'est une façon, en quelque sorte, d'aller rechercher cet argent. Alors, j'espère qu'on aura une façon, nous, de s'assurer que cette baisse de taxe ne sera pas accordée aux non-résidents, parce que, sinon, on est un petit peu complices de ceux qui blanchissent de l'argent puis on leur donne en plus de ça un petit congé fiscal.

C'est sûr que, quand je regarde les grandes entreprises qui, elles, vont pouvoir aussi en bénéficier, ça me chicote. La CSDM... Tantôt, je parlais, tu sais, du fait qu'on aide les enfants en milieu défavorisé. C'est important. On a entendu le Comité de la gestion de la taxe, on a aussi entendu la présidente de la commission scolaire, de la CSDM, qui l'a dit : Nous, quand on met tout l'argent ensemble, ça nous permet de générer de l'intérêt. Puis cet intérêt-là, bien, ça nous fait des millions de dollars. Qui sont investis où? En milieu défavorisé. On a besoin de cet argent pour être en mesure de pallier à d'autres endroits, pour mettre encore plus de services pour ceux qui en ont réellement besoin. Comment on va faire pour aider? Est-ce qu'on est en mesure... Est-ce que le ministre va pouvoir s'assurer que ces sommes additionnelles vont être encore là, toujours garanties? Pas dans nos promesses ou dans nos commentaires, mais de l'inscrire dans la loi, de s'assurer qu'on n'aura pas de laissés-pour-compte là-dedans.

Quand on parle d'équité, je n'arrive pas à voir l'équité pour les locataires. La CORPIQ l'a dit elle-même : Bien, grosso modo, c'est environ 2 $ de baisse pour les locataires, puis on a envoyé comme message à nos membres propriétaires de ne pas refiler la baisse aux locataires. Donc, clairement, il n'y a pas de message qui est envoyé de la CORPIQ, ni de nulle part, que la baisse de taxe scolaire va être reflétée chez les locataires. On peut toujours espérer, mais la réalité, c'est qu'ils vont sûrement, les propriétaires, oui, encaisser cette baisse de taxe scolaire.

Si on a réellement 900 millions de dollars à remettre dans la poche des Québécois, ce n'est pas le meilleur moyen de le faire. Mais même le spécialiste que tout le monde ici fait tout le temps référence, mon ancien collègue Luc Godbout, il est venu nous le dire : Ce n'est pas la façon la plus optimale de remettre de l'argent dans les poches des contribuables, c'est plus en matière d'impôt sur le revenu si on veut vraiment que ça soit progressiste et non pas régressif. Et là, en ce moment, c'est sûr que ça ne répond pas à toutes, toutes les mesures d'équité fiscale.

• (20 h 30) •

Pour ce qui est des montants qui sont remis, j'ai de la misère à comprendre pourquoi on a un empressement à immédiatement, rapidement, premier projet de loi en matière d'éducation... bien, j'avoue que ce n'est pas vraiment éducation, parce que le ministre ne fait pas partie des discussions, de toute évidence. Mais l'impact est là pareil, c'est en milieu d'éducation, on soustrait 900 millions du réseau. Et, en ce moment, il manque des classes presque partout au Québec. On a eu, oui, des demandes supplémentaires pour avoir des élèves. Juste à la commission scolaire Marguerite-Bourgeoys, là, il y a 50 nouvelles inscriptions par semaine. Je comprends qu'en ce moment le nouveau gouvernement veut en prendre moins pour en prendre soin, mais la réalité, c'est qu'on a quand même beaucoup de nouveaux arrivants, ils ont des enfants, puis ils sont ici, au Québec, puis ces enfants-là grandissent ici puis ils sont présents. Ça ne va pas juste nous prendre des maternelles quatre ans, ça va nous prendre des quatrièmes années puis des écoles secondaires.

Puis notre parc immobilier au Québec, bien, il vieillit. C'est une réalité. Il va falloir qu'on s'en occupe, de notre parc immobilier. Alors, je vois difficilement comment qu'on peut soustraire 900 millions et... en réinjectant de l'argent. Le ministre parle de mettre 3,5 %. Le réseau dit que ça prend 4 % pour répondre aux besoins actuels si on veut vraiment bien financer notre réseau d'éducation. Et on parle des services qui sont offerts, mais aussi du parc immobilier, rénover, agrandir.

En ce moment, il y a un problème de direction. On dirait qu'on s'éparpille. On joue dans les structures des commissions scolaires, on veut les abolir, mais, en même temps, on a besoin de leur collaboration pour instaurer et implanter des maternelles quatre ans. On dit qu'on veut réinjecter de l'argent, mais on soustrait 900 millions. On va mettre 3,5 %, mais le réseau de la Fédération des commissions scolaires ainsi que d'autres acteurs du milieu disent : Ça prend au moins 4 % pour être en mesure, là, de répondre aux besoins urgents et réels qui sont maintenant. 4 %. On est loin. Alors, c'est pour ça que j'ai encore de la difficulté avec le projet de loi, de retirer 900 millions de dollars dans le réseau.

Puis je sais qu'il me reste encore un peu de temps, alors j'aimerais lire la chronique suivante, qui était dans Le Soleil, écrite par Brigitte Breton : Ça craque en éducation.

«À part répondre à une promesse et à une surenchère électorales, le projet de loi n° 3 est loin d'être une si bonne affaire pour les Québécois.

«Du moins, pour ceux qui regardent plus loin que le compte de taxe. Du moins, pour ceux qui ne font pas de l'abolition des commissions scolaires une obsession.

«C'est alléchant, une réduction de taxes de près de 1 milliard de dollars lorsqu'on fait fi des conséquences qu'une telle décision entraîne.

«Les mémoires présentés depuis mardi en commission parlementaire témoignent que le gouvernement Legault a uniformisé le taux de taxe scolaire au plus bas existant au Québec sans tenir compte [du] tout.

«Ainsi, le Québec, qui souffre déjà d'un manque d'enseignants, risque d'avoir aussi du mal à combler les postes de directeurs, car les commissions scolaires disposeront de moins de revenus pour les payer.

«Le gouvernement veut augmenter les salaires des enseignants. Qui voudra prendre un poste de directeur — entre 10 % et 15 % du personnel de direction quittera sous peu pour la retraite — si la rémunération n'est pas à la hauteur de leurs responsabilités?» Qui prendra leurs postes?

«Le ministre de l'Éducation risque aussi de manquer de fonds pour combler les besoins que des commissions scolaires réussissent à remplir, notamment en milieux défavorisés, avec les revenus d'intérêts tirés des taxes scolaires.

«Bien sûr, le gouvernement soutient qu'il compensera les commissions scolaires.

«Pour combien de temps et à quelle hauteur»? Ça, c'est la véritable question; j'ajoute ça.

«La croissance des dépenses doit être de plus de 4 % par an pour couvrir les coûts de système, selon la Fédération des commissions scolaires. Le ministre Girard peut tenir parole pour le prochain budget, mais rien ne garantit qu'il [...] sera de même dans deux ou quatre ans.

«Pour un gouvernement qui dit faire de l'éducation une priorité, le financement de cette mission est soumis à l'humeur politique ou aux soubresauts économiques.

«Pourquoi soumettre le réseau à l'incertitude?

«Pour que les propriétaires d'un bungalow [...] d'un immense domaine, les Québécois et les non-résidents, les commerçants, les industriels voient baisser leurs comptes de taxe scolaire?

«Les Péladeau, les Desmarais, les étrangers qui investissent dans un condo à Montréal, à Québec ou dans les Laurentides, le Centre Bell, la Banque Nationale vont profiter d'une réduction de taxes, illustre la députée libérale Marwah Rizqy.

«Les locataires, quant à eux, risquent de ne pas en profiter du tout. La CORPIQ ne le nie pas. Mardi, elle a donné l'exemple [du] Québec où la baisse de 2 $ de taxes scolaires par logement est noyée dans la hausse de taxe municipale de 5,7 %.

«L'argument de la compétitivité fiscale ne tient pas non plus la route lorsqu'il s'agit des taxes scolaires.

«Luc Godbout, professeur de fiscalité et titulaire de la Chaire de recherche en fiscalité et en finances publiques, a indiqué mercredi aux parlementaires que le taux de taxation scolaire du Québec était déjà beaucoup plus bas que celui de l'Ontario et d'autres provinces canadiennes.

«Au Québec en 2017, l'impôt foncier scolaire représentait 17,8 % du budget des commissions scolaires. La proportion baissera à 8,5 % si le projet de loi est adopté». Donc, on passe de 17,8 % à 8,5 %.

«Les commissions scolaires deviendront donc plus dépendantes des subventions de l'État, donc moins [d'autonomie]. C'est du déjà-vu. Les politiciens jouent au yoyo avec elles.

«Référant à des travaux de l'OCDE et du FMI, Luc Godbout relève aussi que "le champ de l'impôt foncier apparaît comme étant l'un des modes d'imposition moins dommageables pour l'économie que ne le sont l'impôt sur les revenus des particuliers et l'impôt sur les bénéfices des sociétés".

«C'est de plus un mode de financement stable et prévisible pour l'administration publique qui [...] de surcroît l'avantage de ne pas laisser prise [par] l'évasion fiscale.

«Le projet de loi du ministre Girard est manifestement perfectible. Évitons de casser d'autres pots.» Fin de l'article.

Sincèrement, il y a beaucoup de points d'interrogation dans cet article qui sont soulevés. Puis je nous invite à les prendre pour arriver au fond, parce qu'évidemment je ne suis pas d'accord avec le projet de loi n° 3, mais, si on peut améliorer certains aspects à tout le moins, on aura peut-être essayé de casser le moins de pots dans notre système de l'éducation.

Avec le 900 millions, si on y pense, est-ce qu'on est en mesure de faire autre chose? Sommes-nous en mesure de remettre de l'argent réellement dans les poches des familles? Sommes-nous en mesure à la place peut-être de nourrir tous les enfants du Québec qui vont à l'école avec le ventre vide? Sommes-nous en mesure d'avoir plus d'orthophonistes et d'orthopédagogues? Sommes-nous en mesure de rénover notre parc immobilier dans le réseau de l'éducation?

On veut ajouter des maternelles quatre ans au Québec. Je me suis entretenue avec le réseau des transports d'autobus, des autobus jaunes, puis ils m'ont fait remarquer la chose suivante. Ils me disaient : Marwah, la marche d'autobus jaune est trop élevée pour un enfant de quatre ans. Ça va prendre de l'argent supplémentaire pour assurer le transport des enfants de quatre ans vers l'école parce qu'on ne pourra pas les mettre nécessairement dans un autobus jaune. Ça va probablement prendre des minivans avec des sièges de sécurité pour eux, adaptés à leurs besoins.

Donc, on ne vient pas ici diminuer les services. On a augmenté l'offre de services, ce qui est correct, d'augmenter l'offre de services, mais l'argent doit suivre, parce que, sinon, on n'atteindra pas notre objectif de s'assurer qu'il n'y a pas de laissés-pour-compte. Puis je comprends qu'on se compare toujours avec les autres pays, mais les autres pays n'ont pas fait nos choix de société à nous. Puis on peut être fiers de ce que nous, on a fait au Québec.

Quand j'entends les différents députés de la CAQ me citer Jean Lesage, Paul Gérin-Lajoie, de grands libéraux, moi, ça me fait un petit peu sourciller parce qu'en aucun temps ils n'auraient déposé un projet de loi qui manque totalement de cohérence avec la véritable priorité du gouvernement. La priorité, c'est réellement l'éducation. La première étape qu'un ministre des Finances devrait faire avec son ministre de l'Éducation, c'est de décaisser de l'argent pour le réinjecter dans le réseau de l'éducation et non pas faire exactement le contraire et soustraire 900 millions de dollars, parce que ça, ça manque de cohérence.

Et au final, à terme, qui seront les gagnants? Est-ce que les enfants y gagnent quelque chose? Est-ce que les enseignantes et les enseignants gagnent quelque chose avec ce projet de loi? Est-ce qu'on valorise les intervenants et tout le personnel de soutien? Parce qu'on oublie souvent qu'il y a énormément de gens dans le réseau de l'éducation qui sont en soutien, qui donnent des services, que ce soient nos psychologues, les orthophonistes, les orthopédagogues, les sexologues, eux autres aussi sont là. Les directions d'école, les soutiens administratifs, tout ça, ce sont nos partenaires. Et je comprends que, pour le ministre de l'Éducation, les commissions scolaires, c'est un caillou dans son soulier. Mais la réalité, c'est qu'en ce moment c'est eux qui sont sur le terrain, qui s'assurent qu'il y a une coordination des services.

Le projet de loi n° 3 mentionne qu'on peut mettre une équité au niveau de la fiscalité partout au Québec pour répondre aux besoins locaux. Comment qu'on peut parler d'équité, uniformisation pour répondre aux besoins locaux lorsqu'on fait fi des besoins locaux? C'est important à ce moment-là de peut-être reconsidérer que les besoins de Montréal, ceux d'Abitibi puis Chicoutimi ne sont pas les mêmes. Et c'est pour cela que, lorsque mon collègue le député de Jean-Talon avait décidé d'uniformiser, il l'avait fait uniquement dans les régions administratives pour répondre à une véritable situation problématique, soit le fait que les gens pouvaient magasiner leur taux d'imposition dans la même rue. Un voisin pouvait dire : Ah! bien, moi, je n'ai pas d'enfant dans le réseau d'éducation, bien, je vais magasiner mon taux d'imposition. Ça, ce n'était pas correct. Ça, c'était une véritable injustice fiscale. Là, aujourd'hui, on crée une nouvelle injustice fiscale, puis, sincèrement, je vois difficilement comment on va pouvoir répondre aux besoins actuels de tout notre réseau.

Alors, j'espère qu'on sera en mesure de corriger certaines lacunes du projet de loi, et de faire en sorte qu'on va s'assurer qu'on va minimiser l'impact dans notre réseau de l'éducation, puis que le 3,5 % va être malléable vers le 4 % pour le réseau de l'éducation. Merci.

Le Président (M. Simard) : Merci à vous, Mme la députée. Y aurait-il d'autres députés qui souhaiteraient prendre la parole? Mme la députée de Westmount?

Mme Jennifer Maccarone

Mme Maccarone : Westmount—Saint-Louis.

Le Président (M. Simard) : Westmount—Saint-Louis.

Mme Maccarone : Tout le monde oublie Saint-Louis.

Le Président (M. Simard) : C'est important.

Mme Maccarone : Oui, c'est très important.

• (20 h 40) •

Le Président (M. Simard) : Mes salutations particulières aux gens de Saint-Louis.

Mme Maccarone : Les concitoyennes et concitoyens qui habitent à Saint-Louis sont déçus de savoir qu'ils sont souvent oubliés.

Bien, merci du chaleureux accueil ce soir. Je suis contente d'être avec vous tous, nos collègues. C'est sûr, je ne suis pas fiscaliste, alors je vous parle comme une ancienne présidente d'une commission scolaire, comme l'ancienne présidente de l'Association des commissions scolaires anglophones du Québec, un réseau qui me tient vraiment à coeur, un réseau que j'aime beaucoup. C'est profond pour moi, c'est ma communauté. Et c'est quelque chose... dans le fond, c'est une représentation que je faisais auparavant, pendant quatre ans, que j'ai quittée pour être au sein de cette table avec vous. Puis ça me manque énormément. Pas que je n'aime pas être avec vous, c'est sûr, c'est un privilège, mais c'était quelque chose que j'adorais. Alors, c'est tout un changement. Puis encore une fois je suis peut-être, je ne sais pas, la cinquième personne à dire que c'est une première pour moi ce soir. J'ai l'habitude d'être la présentatrice et non la personne qui reçoit de l'information à des commissions parlementaires.

Alors, pour débuter, M. le Président, il n'y a personne qui est contre la vertu, il n'y a personne qui est contre mettre plus d'argent dans la poche des contribuables, mais je vous soumets que... pas avec ce projet de loi, qui met les services aux élèves et notre réseau en éducation en péril.

Alors, j'aimerais souligner quelques inquiétudes par rapport à ce projet de loi, en espérant que le ministre et ses collègues prendront le temps de discuter franchement et ouvertement avec nous des amendements et de prendre notre réseau d'éducation en conséquence et surtout nos élèves, que je crois et je sais que nous prenons tous à coeur.

Le projet de loi n° 3, pour moi, à mon estime, n'explique pas comment on va chercher le 900 millions de dollars qui sera privé de notre réseau d'éducation, ce qui est une inquiétude, je crois, que tout le monde a soulignée ce soir et que tous les intervenants en commission parlementaire a partagée avec nous.

J'ai fait un peu de recherche, alors je cite l'alinéa 23 du projet de loi n° 3, où l'article 455.1 de la Loi sur l'instruction publique sera remplacé par un texte qui n'est pas concret, qui n'est pas clair pour le réseau des commissions scolaires et surtout qui aura un impact sur leurs élèves et fait peur au réseau. Je cite : «Les modalités [...] de financement de base peuvent varier en fonction de catégories...» Alors, je mets en gras «peuvent varier». Je continue : «Les modalités de calcul du financement de base peuvent varier — encore en gras — en fonction [des] catégories de commission scolaire et de type d'activité — etc.

«Ce règlement peut prévoir l'indexation des montants...»

Je suis désolée, mais je ne me sens pas rassurée par ces mots-là. Il n'y a aucune garantie, aucune directive claire, et, en fait, le gouvernement s'est certainement laissé des possibilités de faire sa propre évaluation, de déterminer les besoins et de définir ses propres règles, ce qui enlève vraiment la capacité d'une commission scolaire de fonctionner réellement à répondre aux besoins de nos élèves, de diriger comme il faut leur financement public et d'avoir un sain fonctionnement au sein de tous leurs besoins.

Notre ministre des Finances dit vouloir réduire le fardeau fiscal des contribuables, et je le remercie pour ce commentaire-là, mais, en uniformisant la taxe scolaire, ce n'est pas le fardeau fiscal qu'il va réduire, c'est vraiment la qualité de l'éducation qui est offerte à nos enfants. Alors, on coupe dans la taxe scolaire pour rajouter de la lourdeur dans les impôts, les impôts des contribuables ailleurs. On dit souvent que «nothing is free», puis ça, c'est quelque chose que j'y crois. Alors, je questionne : Si on coupe ici puis si on dit qu'on va trouver de l'argent ailleurs pour subventionner le manque d'argent que les commissions scolaires vont subir, ça vient d'où, cet argent-là? Est-ce que les impôts vont augmenter quelque part? Parce que, c'est sûr, nous avons quand même un surplus budgétaire présentement qui n'a pas un fond infini. Alors, l'argent ne pousse pas sur des arbres. Alors, je questionne où on va chercher cet argent-là.

(Interruption)

Merci. Dans la commission parlementaire au début de février, j'ai senti l'incertitude du réseau de l'éducation. J'ai entendu et j'ai lu avec grand intérêt les mémoires et les présentations des intervenants, tels que l'Association des commissions scolaires anglophones du Québec, la Fédération des commissions scolaires du Québec, the English Parents' Committee Association, l'Association des cadres scolaires, le conseil de gestion de taxe de l'île de Montréal et aussi le chercheur M. Godbout, où ils ont tous interrogé : Qu'allons-nous faire? Ils ont partagé l'impact du manque de financement relatif à la taxe scolaire.

Et je partage avec vous qu'il n'y avait eu aucune consultation avec le réseau avant le dépôt de ce projet de loi, des individus qui auraient pu partager des suggestions... guidance, improvements, support in advance of what feels to me as an improvised position based on a campaign promise, individuals who presented at the recent parliamentary commission to deplore the lack of planning in a bill that could really cause irreparable harm to the essential services that our children receive. And I feel worried. My children are part of that system. My children attend public school and my children receive essential services. And it is a concern for me that there will be a significant impact not just on them, but on the other children that frequent the same schools, your children, if they happen to attend public school.

Donc, on a conclu que le projet n° 3 n'amène vraiment, selon mon avis, aucune assurance, aucun plan, et des promesses qui vont surtout nous coûter cher, et qu'il n'y a absolument rien là-dedans qui va améliorer les services aux élèves, ni améliorer les besoins pour les enseignants, ni améliorer nos écoles. Puis plusieurs d'entre nous ont cité qu'il y a quand même de grands besoins dans le réseau de l'éducation, ce qui m'étonne, car notre ministre de l'Éducation ainsi que notre premier ministre nous ont dit que l'éducation serait la priorité numéro un.

Mais je peux vous dire, si vous me permettez, chers collègues, de parler un peu des besoins de Westmount—Saint-Louis, que nous avons quand même des grands besoins, des besoins criants pour des écoles. On peut imaginer que... C'est le centre-ville de l'île de Montréal puis c'est en pleine croissance non seulement économiquement, mais aussi on a beaucoup de familles qui sont en train de s'installer au centre-ville de Montréal, où il n'y a aucune école, aucune école publique, à part de FACE, FACE qui, récemment, ne pourra plus recevoir les élèves parce qu'il a besoin vraiment d'être réévalué, rebâti, rénové. Alors, il faut déplacer ces élèves-là. Alors, je sens vraiment le besoin de mentionner que c'est ça, les besoins en éducation, pas d'avoir des coupures dans la taxe scolaire, mais de répondre aux besoins du réseau.

C'est sûr, on parle d'accroître la diplomation et aussi de combattre le décrochage. Voilà les grands besoins en éducation. Le besoin de personnel, nous sommes en manque d'enseignants, le besoin de professionnels, le besoin d'infrastructures, le besoin de soutien et support et aussi la diversification. Quand on parle de professionnels, nous n'avons pas assez de professionnels dans le réseau de l'éducation, que ça soit des orthophonistes, que ça soit des psychologues, que ça soit des gens qui travaillent autrement avec nos élèves pour les soutenir.

Et, si vous me permettez aussi de mentionner, quand on parle du réseau anglophone, nous avons un grand manque, des besoins... c'est rare, c'est peut-être difficile de comprendre, mais des professeurs en français. Puis c'est un réseau qui est en pleine adaptation parce que c'est un réseau qui, vraiment, enseigne bilingue. Alors, en grande partie, nos écoles sont 50-50 pour l'allocation des sujets qui sont enseignés à nos enfants. Alors, au lieu d'enlever leurs capacités d'agir pour répondre aux besoins du secteur, puis du réseau, puis de nos enfants, je vous prie de penser vraiment, au lieu d'enlever de l'argent, mais de réinvestir dans ce réseau-là.

Alors, j'aimerais parler un peu de l'idée de l'iniquité, parce que j'essaie de comprendre d'où vous venez pour mieux... mais pour peut-être vous épauler et peut-être de mieux comprendre, car je sais que j'aurai besoin de partager pourquoi nous sommes rendus ici à mes concitoyennes et concitoyens de Westmount—Saint-Louis, et autres. Encore, comme plusieurs de mes collègues autour de la table, je reçois beaucoup d'appels d'inquiétude des gens qui craignent pour le réseau, car, pour moi, à ce jour ici, je trouve que le projet de loi n° 3 n'est pas équitable dans son propos d'égalité.

L'actuel projet de loi qui est déposé aujourd'hui sur la taxe scolaire à un taux unique du gouvernement est à l'avantage des entreprises, des neutres, des industries et des grands propriétaires, au détriment des Montréalais, dont une forte proportion sont des locataires. Il représente une perte de revenus évaluée à environ 83 millions de dollars pour uniquement la commission scolaire de Montréal, la plus grande commission scolaire au Québec. Il représente une perte de revenus, juste pour avoir une base de comparaison, évaluée à 4 millions de dollars pour la commission scolaire de Laval. Alors, selon mon avis, le projet de loi n° 3 n'est pas équitable.

• (20 h 50) •

Les revenus de taxe scolaire, comme nous avons déjà entendu, servent notamment à payer l'entretien des bâtiments, une partie du transport scolaire, le service aux élèves et du salaire des directeurs et secrétaires d'école, par exemple, des frais incontournables que les commissions scolaires devront assumer, quoiqu'il arrive, à même son budget de fonctionnement, qu'elle dédiait jusqu'ici à ses élèves. Les taxes scolaires génèrent actuellement des millions de dollars rien qu'en revenus d'intérêt qui sont ensuite redistribués dans les écoles des milieux les plus pauvres et subventionnent les services pour nos enfants à risque.

Si vous me permettez encore une fois, personnellement, je suis fière — alors, pour cette raison-là, je le partage souvent — d'être la maman de deux enfants sous le spectre de l'autisme, puis ils font partie de ces enfants à risque qui en bénéficient, de ces services-là. Alors, vous pouvez comprendre mon inquiétude personnelle ainsi que le réseau que je représente. Je représente non seulement Westmount—Saint-Louis, mais je sais que je suis souvent la porte-parole pour les enfants désavantagés, les enfants à risque. Alors, si vous me permettez, j'ai peur. I have a concern. Puis je sais que cet argent-là aussi, il aide pour l'accès aux bibliothèques.

Je ne vous cacherai pas, je suis nouvellement élue, je ne faisais pas partie de l'ancien gouvernement. Comme une ancienne présidente de commission scolaire, ma position, dans ce temps-là, ça a été de... j'avais subi des coupures, et ces coupures-là ont eu un impact, vraiment, sur les services offerts dans les commissions scolaires, dans nos écoles, tels que les bibliothèques, l'accès au transport scolaire. Puis ça, ça fait des années, des années et des années, plus que le 15 ans, où on ne subventionne plus le transport scolaire après les heures d'école. Il y a un impact sur la diplomation, surtout pour nos garçons, il y a un impact sur le décrochage. On ne subventionne plus cet élément-là. Alors, on dit que, surtout dans les plus petites communautés... puis ça, ça a rapport. Je sais que je suis étiquetée anglophone, mais, quand on parle des petites communautés francophones aussi, que ce soit dans la Gaspé ou ailleurs, le besoin d'offrir des services et des activités, encore une fois, surtout pour nos garçons pour les garder en école, pour qu'ils soient intéressés à rester en école, c'est vraiment important, mais on n'est plus subventionnés pour ça maintenant dans les réseaux scolaires.

Alors, d'enlever plus d'argent dans ce réseau-là, encore une fois, j'ai peur. Qu'est-ce qu'on va faire pour se diversifier? Qu'est-ce qu'on va faire pour essayer de rejoindre ces attentes-là puis pour engager nos élèves à accroître le taux de diplomation, mais pour que nos élèves se sentent inspirés de rester à l'école quand ils ne peuvent pas rester après les heures d'école pour jouer au basketball, pour faire du réseautage avec leurs amis? Et je ne vous cache pas, dans mon ancienne vie, j'en ai vu, des élèves qui restaient après les heures d'école parce qu'ils ne voulaient pas retourner à la maison, parce que leur vie familiale n'était pas heureuse. Alors, c'était leur famille à l'école. Mais, quand ils n'ont pas accès à de tels services, il y aura vraiment un impact sur ces familles et ces enfants-là.

Et je rajouterais aussi que la réalité, c'est que nous avons des besoins et des services totalement différents dans nos milieux ruraux et urbains. Je parle souvent de Montréal, mais j'étais anciennement la présidente de la commission scolaire Sir-Wilfrid-Laurier, alors je comprends très bien les besoins ruraux, car j'étais la porte-parole pour les communautés de Laurentides, Lanaudière et Laval. Alors, quand on parle des besoins de transport scolaire, nous avons des élèves qui sont sur les autobus pour plus que 1 h 30 min aller et 1 h 30 min retour. Et vous m'avez déjà entendu parler là-dessus, mais je pense que ça mérite d'être répété, c'est des bouts de chou de, des fois, quatre ans, parce qu'ils sont... ils peuvent être quatre ans, quatre ans et demi, qui se lèvent à 4 heures le matin pour prendre l'autobus pour se rendre à l'école pour peut-être 7 heures. Ils font dodo sur l'autobus. Quand ils quittent l'école, ils font dodo sur l'autobus, ils sont épuisés rendus à la maison. Voilà l'iniquité que nous avons dans notre réseau puis les besoins que nous avons de région... une municipalité, une commission scolaire envers l'autre.

Alors, de parler de l'argument de voir une taxe scolaire qui est égale à travers les régions, j'ai de la misère à comprendre ce propos-là parce qu'à mon avis... Il y avait 154 municipalités au sein de cette commission scolaire, 18 MRC. C'était très intéressant de voir tous les taux de taxe qui étaient vraiment différents et maintenant qui sont normalisés sur les trois ou quatre régions administratives où laquelle cette commission scolaire siège. Même les différences entre les taxes par région comblaient les besoins des contribuables de ces régions-là parce qu'eux-mêmes reconnaissaient que soit que ce soit leur résidence qui n'avait pas la même valeur d'une ville à l'autre... et les services qu'ils recevaient étaient vraiment différents.

Et je vous soumets que nous venons tout juste de faire une réforme de taxe scolaire. Alors, comme ma collègue de Saint-Laurent vient de partager avec vous, l'injustice de la taxe scolaire entre commissions scolaires de nos régions vient d'être réglée. Puis cela a été un parcours puis une discussion que j'ai eus pendant quatre ans, jusqu'à tant que ça a été réglé, ou trois ans et demi. Et je donnais souvent l'exemple de ma mère, qui est veuve, puis elle est sur un budget restreint. Mais elle, elle choisissait quand même de payer son compte de taxe à la commission scolaire Riverside, malgré que c'était presque deux fois plus cher que la commission scolaire des Patriotes dans sa région. Alors, pourquoi? Parce que ça lui tenait à coeur de supporter sa communauté. Alors, elle se réjouissait d'avoir la normalisation de cette taxe-là. Mais elle-même, elle était inquiète de savoir qu'est-ce qu'on va faire si on enlève cet argent-là de nos écoles. Puis il y a plusieurs personnes de la communauté qui disent que je serais prête à continuer à payer un taux plus élevé si ça veut dire que je soutiens des élèves.

Alors, je pense que vous... On peut tous constater que payer nos impôts, payer nos taxes municipales, c'est totalement différent que de payer les taxes scolaires. On dit souvent... Education is a priority, It's not just everyone's right, but it's everyone's responsibility to support. And I have never heard one person in my community ever say that I don't want to pay my school taxes because I don't understand what it's for. And, if they did, I was the first person to educate them about why education belongs to everybody, even if you don't have children, because you will inherit the children that graduate from the system.

Puis je pense que The English Parents' Committee Association, quand ils sont venus présenter leur mémoire, nous a clairement dit, en commission parlementaire, qu'ils étaient contents avec les solutions qui étaient proposées par l'ancien gouvernement. Puis je vous soumets ça pas pour faire de la partisanerie, mais juste pour vous dire que la communauté est heureuse, peu importe c'était qui, le gouvernement en pouvoir, avec la normalisation de la taxe scolaire en région.

On a parlé de la démocratie scolaire. Alors, si vous me permettez, encore une fois, on sait fort bien que tout le monde supporte la démocratie, même le gouvernement en pouvoir, mais on prend un taux de taxe uniforme sans prendre en considération les besoins de chacun, sans prendre en conséquence la gouvernance qui vote pour leur taux de taxe, les commissaires des commissions scolaires. Alors, c'est clair pour moi que le projet de loi n° 3 est un pas vers l'abolition de la démocratie locale, qui me tient vraiment à coeur. Alors, on dit, en anglais : «There's no taxation without representation.»

Our community, if I can speak on behalf of the anglophone community in Québec, is deeply attached to its schools and its right to manage and control its institutions. Citizens often choose to support their school boards by choosing to pay their taxes to them because they want to receive bilingual services and because they believe that education is part of their family and their existence. I don't say that my kids go to their school, they go to my school. It's my school. That's very much how I feel about the local school in my region. And there is a direct link between our elected representatives and our tax payers, our families, our parents, our grandparents, our aunts or uncles, our stakeholders, but most especially our students, because they're our future. So, what rights are we really leaving them when we're talking about removing democracy from our system before they even get a chance to exercise it?

My son is 17, and I would like for him to vote in every single election that he has an opportunity to vote in because it is his right, and I don't feel that I am leaving him a future that he should... is worthy to inherit if what we're doing is removing his democratic rights. I'm worried about that. And... was mentioned earlier about the Constitution, absolutely, the minority community has the right to manage and control their institutions as identified by article 23 in the Constitution. But nobody wants to have a constitutional battle. The community will, but they don't want to.

Le Président (M. Simard) : En conclusion, Mme la députée.

• (21 heures) •

Mme Maccarone : En conclusion, je peux vous dire que j'ai aussi, si je peux parler pour le réseau francophone, j'ai peur pour eux, parce que je trouve que ce n'est pas équitable d'avoir un système de deux réseaux, un qui est élu démocratiquement puis un qui ne l'est pas. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Simard) : Merci, Mme la députée. M. le député de Nelligan, à vous la parole, cher collègue.

M. Monsef Derraji

M. Derraji : Merci, M. le Président. Juste pour rassurer M. le ministre, moi aussi, je suis nouveau.

Une voix : Vous aimez ça?

M. Derraji : Ah! j'aime beaucoup. J'aime beaucoup, j'aime beaucoup et j'ai essayé de faire mes devoirs avant de venir, parce que j'avais la chance, hier, de rencontrer plusieurs intervenants dans le cadre d'une rencontre de mon comté, Nelligan. Et, à ma grande surprise, la plupart, c'est des gens qui travaillent dans le réseau de l'éducation, dont notamment commissions scolaires à l'ouest de l'île. Et, grâce à eux, parce que je les ai bien écoutés hier, j'ai essayé de repositionner ce que je voulais dire et je le résume en trois blocs.

Le premier bloc, c'est l'équité. Deuxième bloc, c'est tout ce qui touche la démocratie participative. Et je vais finir par l'éducation, même si, pour moi, c'est très important. Ayant moi-même un fils de... Mon père était directeur d'école, et, pour moi, j'ai grandi dans un environnement où l'éducation, elle est très, très, très importante. Et j'ai besoin vraiment d'avoir plus d'assurance quand on va arriver à l'étape des amendements et à la lecture des articles, à la fin du projet de loi n° 3, une assurance de votre part par rapport à cet aspect.

Donc, le projet de loi, pas besoin de revenir sur les tenants et aboutissants. Je pense que tout le monde l'a bien compris, en tout cas, les grandes lignes de ce que vous voulez mettre en place : le souci d'introduire davantage d'équité, donc c'est ce que vous semblez dire, entre les contribuables des différentes régions, la volonté de simplifier la complexité des structures régionales. Vous parlez beaucoup de fardeau fiscal des Québécois en diminuant la pression fiscale qui pèse sur leurs épaules. Et je pense que mes deux collègues, ce soir, le député de Robert-Baldwin et ma collègue de Saint-Laurent, ils ont bien expliqué en quoi, selon eux, ce n'est pas vraiment une diminution du fardeau fiscal très avantageuse.

Et, à la lumière de l'analyse première du projet de loi, et je l'ai dit à la première intervention, mais je vais me permettre de la répéter aujourd'hui, pour moi, ce projet de loi, le gouvernement ne fait que déshabiller Saint-Jean pour habiller Saint-Jacques. Je m'explique. C'est que...

Des voix : ...

M. Derraji : Et ne me demandez pas il est où, Saint-Jean, et il est où, Saint-Jacques, est-ce que... un homme ou une femme ou... mais...

Des voix : ...

M. Derraji : Qu'est-ce qu'on dit? Ah! O.K. C'est bon. C'était compris? Je peux me permettre? C'est ça, la première expérience.

Donc, pour combler l'écart de financement, ce n'est pas d'ailleurs que dans les poches des Québécois qu'il ira le chercher. Donc, libre à vous de nommer ça «subvention d'équilibre fiscal». Mais, pour revenir aux dispositions du projet de loi, il reviendrait donc au ministre de l'Éducation de fixer, et donc, on comprend, de déterminer seul les besoins, le coût des commissions scolaires.

Vous avez aussi évoqué le taux de croissance économique à 3,5 %, donc ce qui va garantir un peu la capacité de financement pour financer la subvention d'équilibre. Et enfin, pour finir, le projet de loi guide la volonté du gouvernement de répondre à un engagement pris à l'endroit des Québécois que l'éducation est une richesse pour le Québec.

Par rapport à la question de l'équité, celle-ci, selon ce qui a été énoncé, c'est que le projet de loi et, a priori, celui qui toucherait directement, indirectement au système éducatif québécois doivent se préoccuper de l'impératif d'équité. Donc, ce que j'aimerais dire, c'est que cela veut dire le droit pour tous et toutes d'avoir accès à une éducation qui leur permet d'aspirer à un meilleur avenir, et ce, sans distinction pour leur origine socioéconomique et culturelle. C'est cela, l'égalité des chances, c'est cela qui a permis à bon nombre de Québécoises et Québécois de prendre l'ascenseur social et, ce faisant, d'échapper à la fatalité d'un sort réservé lorsqu'on appartient à une classe sociale moins aisée. Et ma collègue, tout à l'heure, de Saint-Laurent l'a très bien expliqué par rapport à une cartographie un peu complexe sur l'île de Montréal. Et on l'a entendu pendant la commission. La présidente de la commission scolaire de Montréal nous a très bien démontré à quel point c'est très important, ce qu'ils font et d'où ils viennent, surtout pour garder cette équité et cet équilibre au niveau d'une métropole qui a ses besoins.

Or, dans le cas qui nous occupe, la notion d'équité tout bonnement et simplement dévouée, elle impose, en tout temps et en tout lieu, d'atteindre une égalité de traitement. Or, dans ce projet de loi, seule la figure du contribuable semble bénéficier des effets de l'équité. Alors, de manière très superficielle, ce projet de loi devrait atteindre l'équité. Et, lorsqu'on parle du système de l'éducation, c'est l'ensemble de l'écosystème scolaire dont il faudrait tenir compte lorsqu'on prétend agir sous couvert d'équité. Donc, les contribuables ne sont pas seuls touchés par les dispositions du projet de loi n° 3, les commissions scolaires, les enfants et les parents en seront éclaboussés.

Encore une fois, je reviens à la dernière intervention de ma collègue de Westmount—Saint-Louis — j'ai gagné?

Mme Maccarone : C'est parfait. Merci.

M. Derraji : ... — qui parlait de l'inclusion — on va au moins retenir Saint-Louis aujourd'hui avec Westmount — l'importance d'inclure tout l'écosystème dans l'équation. Ce n'est pas uniquement une affaire des commissions scolaires. Et, si on veut être humaniste, et d'ailleurs c'est quelque chose qu'on entend depuis le début de la 42e législature, bien, ça serait bien de commencer à l'appliquer avec ce projet de loi, donc ne pas voir uniquement un aspect fiscal de réduction de taxe, mais plutôt voir l'impact sur l'écosystème de l'éducation en entier.

Alors, oui, je dis bien que c'est superficiel, car l'équité n'a pas pour essence d'imposer de manière égale et aveugle la même mesure à tous. Et c'est là l'essence même de mon intervention par rapport à l'équité. Si on analyse l'aspect même de ce projet de loi n° 3, qui veut uniformiser un peu partout au Québec et appliquer la même chose, c'est là où on fait un virage complet par rapport à l'équité et on s'éloigne même vraiment de la notion de l'équité.

Donc, l'introduction d'un taux de taxation unique résoudrait peut-être, comme le gouvernement le prétend, les disparités de traitement entre les contribuables des différentes régions, mais il suffit d'écouter les organismes consultés, et, je pense, là on peut être d'accord, surtout les organismes que nous avons eu la chance de rencontrer la semaine dernière, pour comprendre que ce mode de raisonnement aura pour effet pervers d'introduire une autre disparité de traitement qui est beaucoup plus grave, celle de l'égalité des chances d'élèves moins privilégiés et, par ricochet, de leur avenir. Et c'est là où j'ai... je pense, nous tous, nous avons besoin d'un signal très fort, comment vous allez envoyer un message positif à l'ensemble des intervenants en milieu scolaire. Et je ne peux pas passer toute la soirée, parce qu'il reste quand même une vingtaine de minutes ou 20 minutes...

Le Président (M. Simard) : Il vous reste 10 min 37 s.

M. Derraji : Non. J'ai 20 minutes à moi?

• (21 h 10) •

Le Président (M. Simard) : En tout et partout, vous avez 20 minutes, mais, sur ce 20 minutes, il vous reste 10 minutes, maintenant 31 secondes.

M. Derraji : O.K., c'est bon. J'ai oublié mon... c'est bon. Je vais utiliser mon temps. Je vais utiliser mon temps, c'est bon. Et je veux juste revenir à l'essence même, c'est qu'on l'a entendu, on l'a entendu, on l'a entendu tout au long des discussions, que l'argent utilisé par les commissions scolaires aide à financer certains programmes, surtout pour des élèves démunis.

Donc, comme l'ont si bien rappelé les représentants de la commission scolaire de Montréal, les revenus de placement de la taxe constituent la source de financement de plusieurs programmes visant à combattre l'échec ou le décrochage scolaire en supportant le coût de projets tant dans les écoles primaires que secondaires. En outre, et il ne faut pas l'oublier, ces revenus servent également à venir en renfort aux enseignantes et enseignants grâce au recrutement de psychoéducateurs, d'orthophonistes et autres spécialistes précieux au développement et à l'accompagnement de nos enfants. Or, c'est vers l‘incertitude que les commissions scolaires seront jetées non seulement quant à la garantie de leur financement, mais également quant au devenir des enseignants et enseignantes du Québec, sans oublier celui des membres de direction d'école.

Lorsque je parle de faire attention à appliquer l'équité de manière stricto sensu sur les contribuables sans en prévenir les effets sur l'ensemble des acteurs du système scolaire, c'est parce que, dans d'autres domaines, il a été démontré que ce n'était pas la bonne façon de faire. La mise en place d'une valeur unique applicable de manière à égale, et donc supposément équitable, peut créer des inégalités qui lèsent les plus faibles. En effet, la règle générale dans l'adjudication des marchés publics repose, elle, sur le critère objectif du prix du plus bas soumissionnaire pas seulement au Québec. Si cette idée semblait lumineuse au départ au regard de l'équité, des voix se sont élevées depuis un certain temps pour demander que l'on recule sur ce principe qui a lésé bon nombre d'entrepreneurs et de petits entrepreneurs. Or, sur le fond, c'est vers le même chemin que nous nous acheminons avec l'instauration de ce taux unique qui aura un effet pervers sur le moyen et le long terme. Donc, ce n'est pas une question de temps avant de voir s'élever des voix qui demanderont à reconsidérer ce taux de taxation unique qui empêchera certaines commissions scolaires de combler les écarts entre les élèves et de venir en renfort aux enseignants et enseignantes.

Donc, pour vouloir être un peu plus sérieux dans notre démarche, en supposant tous les risques liés à ce projet de loi avant de le prévaloir d'une sacro-sainte équité, qui n'a d'équité que le nom... Et l'équité pour les élèves et les enseignants, qui sont au coeur même du système scolaire, pouvons-nous en parler? Je vous le demande. Si ce projet de loi n'a pour ambition que de répondre à une promesse stricto sensu de baisser les taxes des contribuables, il le fait sans égard pour les répercussions que cela aura sur l'ensemble de l'écosystème éducatif à court et à moyen terme. C'est encore dans la poche des Québécoises et Québécois que le gouvernement va aller chercher le manque à gagner, je le dis et je le répète, combler le manque à gagner des commissions scolaires par une subvention d'équilibre fiscal. Et qu'avons-nous à mettre en péril pour ce fonctionnement? À croire que ce projet de loi a été conçu pour dédire le chef du gouvernement et surtout en donnant l'impression de répondre à un engagement de campagne, manoeuvre extraordinaire, dénotant d'un manque de cohérence flagrant.

Le doute non exprimé, et là par déférence ou par respect, en ce qui concerne la capacité du gouvernement à répondre adéquatement aux besoins du milieu éducatif étant criant, et on l'a entendu tout au long des consultations, le manque d'informations claires de la part du gouvernement sur le financement du manque à gagner, notamment dans un contexte d'éventuelle récession, pousse au désarroi puisqu'il met sérieusement en danger toute possibilité de planification des commissions scolaires.

Le gouvernement actuel a hérité d'un surplus budgétaire, et ça se confirme jour après jour. Donc, pourquoi nous ne parlons pas des politiques et programmes économiques avant de discuter de la manière dont on affectera des sommes dont nous ne percevons pas encore l'existence? Comment se fait-il qu'un gouvernement de gestionnaires ne soit pas en mesure de tenir compte du facteur risque, qui existe bel et bien, advenant une baisse de croissance économique ou d'une récession?

Que les Québécoises et Québécois ne s'y trompent pas, il est évident que les besoins d'un système éducatif demanderont au gouvernement de recourir à l'octroi de subventions toujours plus soutenues d'année en année. De quelle manière? Voilà encore une question incertaine. Alors, je le répète encore une fois, je pense que c'est dans nos poches que le gouvernement ira chercher ce revenu.

Maintenant, abordons notre valeur que nous devrions tous chérir, celle de la concertation avec les partenaires du milieu, et parlons de démocratie participative. À une époque où tous les gouvernements de la planète cherchent les moyens de décentraliser les décisions pour les rapprocher de la base en raison d'une meilleure connaissance des réalités vécues, et donc en quête des meilleures solutions possible, le projet de loi, le moins que l'on puisse dire, fait l'effet inverse. Donc, le nouveau gouvernement entend centraliser et décider seul, car, bien entendu, il sait mieux que quiconque ce qui sied aux Québécoises et Québécois. On serait presque heureux d'avoir pu assister aux auditions qui ont eu lieu la semaine passée. Voulez-vous un autre indice? La dernière semaine, nous sommes encore à l'étape où le ministère de l'Éducation a imposé une fermeture d'une école et l'a transférée à la commission Marguerite-Bourgeoys sans consultation ni avec les parents ni avec les élèves.

Se concerter avec les associations et les regroupements d'intérêt privé, public, n'est pas un luxe. Cela a pour objectif de rechercher à sauvegarder une cohérence des politiques, car, en définitive, un gouvernement, quel qu'il soit, ne peut se targuer de connaître toutes les implications des réalités vécues par nos concitoyens. Et la seule motivation qui sous-tend le projet de loi est celle de cocher la case d'une promesse électorale sans tenir compte des répercussions qu'il aura non seulement sur le fonctionnement des écoles, mais aussi sur la fragilisation du tissu social que doit supporter l'école et surtout notre école publique.

Redorer le blason de l'école. Là, je pense que ça a été pas mal de fois cité, c'est un ministre de l'Éducation qui brille par son absence. Le réseau de l'éducation avait engagé quelque 1 700 enseignants et spécialistes pour venir en secours au corps éducatif, qui s'essoufflait. Le ministre de l'Éducation avait également souligné, lors de la campagne électorale, que la vraie problématique du corps des enseignants est son essoufflement. Pour solutionner le problème, il a proposé d'ajouter des services et d'augmenter le nombre de classes spécialisées afin d'éviter que les classes ordinaires, où les enfants en difficulté sont intégrés, ne mènent à l'épuisement.

Eh bien, M. le Président, il est bien dommage qu'il n'ait pas assisté aux auditions des différents groupes qui se sont produits devant la Commission des finances publiques, car il aurait vite compris que sa vision des choses ne concordait en aucune façon avec l'impact que ce projet de loi ne manquerait d'avoir. En réalité, il ne faut pas se demander pourquoi le ministre de l'Éducation brillait par son absence. C'est évident, M. le Président, il s'agit d'un projet de loi qui n'était pas... les impératifs d'équité, comme je l'ai mentionné au début. Il ne tient pas compte de l'effet sur le système éducatif québécois.

Comment pourrait-il cautionner un tel projet de loi, sachant les répercussions désastreuses qu'il aura? Le projet de loi ne permet pas d'atteindre un objectif qui a séduit bon nombre de Québécoises et Québécois. Alors, s'il ne s'agit que de répondre à des promesses électorales, voici encore une qu'ils ne pourront réaliser : redorer le blason du métier d'enseignant en réduisant notamment la détresse financière dans laquelle celle-ci a été jetée. Et, sérieusement, étant un fils d'un directeur d'école, quand j'ai entendu les responsables parler de la charge des directeurs d'école, j'ai eu mal pour mon école publique au Québec, parce qu'on leur demande trop, et là on veut leur implication, surtout pour un système qui a besoin d'amour, d'un système qui a besoin d'énormément d'amour.

L'association québécoise du personnel de direction des études a signifié, avec raison, que la diminution des taxes scolaires pourrait entraîner des coupures et que cela aurait comme effet probable de faire peser un fardeau supplémentaire sur les enseignants. Donc, un projet de loi que, d'emblée, plusieurs intervenants nous ont... ils ont levé le drapeau rouge que ça risque d'avoir des coupures sur leur... avoir un impact sur leur quotidien.

Alors, nous avons fait... le ministre de l'Éducation, qui non seulement souhaitait décharger les enseignants de leur fardeau, mais, mieux que cela, qui voulaient transformer des conseillers pédagogiques en enseignants experts ou émérites. Qu'en est-il également de son intention d'ouvrir davantage de classes spécialisées, en plus d'ajouter des ressources professionnelles supplémentaires dans le réseau, alors que les professionnels nous disent que c'est l'effet inverse qui se fera sentir avec la baisse du taux de taxe?

Le gouvernement a répété à maintes reprises qu'il voulait redonner de l'argent dans le portefeuille des Québécois. Avec ce projet de...

• (21 h 20) •

Le Président (M. Simard) : En conclusion, M. le député.

M. Derraji : Oh! ça arrive. Très bien. Avec ce projet de loi, il le fait pour 60 % de la population, mais oublie 40 % des familles locataires qui ne verront aucun effet de cette mesure.

Alors, le premier ministre avait annoncé, dans son discours d'investiture, que ce nouveau gouvernement ne serait pas celui d'un groupe ou d'une idéologie. Il aurait dû préciser que son gouvernement ne devrait pas être celui de l'exécution précipitée et aveugle de promesses de campagne. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Simard) : Merci beaucoup, M. le député de Nelligan. Et je tiens à vous dire que vous avez piqué ma curiosité. Et je suis allé voir sur Wiki et je crois comprendre qu'on dit : Déshabiller Pierre pour habiller Paul, mais il semble y avoir d'autres versions aussi, mais ça ferait place à toutes sortes de débats. Bien.

M. Derraji : C'est 9 heures le soir, donc...

Des voix : Ha, ha, ha!

M. Derraji : ...vous pouvez m'excuser...

Le Président (M. Simard) : Ah! vous êtes pardonné.

M. Derraji : ...et trouver que mon chemin d'intégration... Je vais la corriger la prochaine fois.

Le Président (M. Simard) : Alors, chers collègues, y aurait-il d'autres remarques préliminaires? Il n'y a pas... Je crois comprendre qu'il n'y a pas d'autre demande en ce sens.

Donc, ces remarques étant maintenant derrière nous, nous entamons une autre étape, qui est celle des motions préliminaires. Et le député de Rosemont nous a déjà prévenus, dans son allocution, qu'il entendait déposer une motion préliminaire. Est-ce toujours le cas, M. le député?

M. Marissal : Oui.

Le Président (M. Simard) : Auriez-vous l'obligeance de nous en faire la lecture?

M. Marissal : Oui. C'est bon?

Le Président (M. Simard) : Je vous en prie.

Motion proposant d'entendre les sociétés Canadian Apartment
Properties Real Estate Investment Trust, Boardwalk et Cogir

M. Marissal : O.K. «Qu'en vertu de l'article 244 de nos règles de procédure, la Commission des finances publiques tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 3, Loi visant l'instauration d'un taux unique de taxation scolaire, des consultations particulières et qu'à cette fin, elle entende les sociétés CAPREIT, Boardwalk et Cogir.»

Le Président (M. Simard) : Très bien. Alors, lorsqu'on reçoit une telle motion, le président doit juger de sa... recevabilité, dis-je. Il est tard, je m'excuse. Votre motion étant recevable, je vais suspendre momentanément nos travaux pour qu'on puisse procéder à la photocopie de cette dernière et pouvoir la distribuer à tous les membres.

Et d'ailleurs je m'excuse pour tantôt auprès de la députée de Saint-Laurent, parce que c'est justement ce qu'on essayait de régler, un petit dossier d'intendance, parce qu'on n'a pas un photocopieur qui est très performant puis on ne voulait pas justement le partir pour ne pas vous déranger.

Mme Rizqy : Alors, merci, mais, moi, le bruit m'affectait plus. C'est correct.

Le Président (M. Simard) : Je vous comprends très bien, surtout que nous sommes dans une toute petite salle.

Mme Rizqy : Ça fait écho.

Le Président (M. Simard) : Très bien. Merci beaucoup.

Alors, on suspend quelques instants.

(Suspension de la séance à 21 h 23)

(Reprise à 21 h 24)

Le Président (M. Simard) : Chers collègues, nous allons donc reprendre nos travaux. Je crois comprendre que tout le monde dispose de la copie de la motion préliminaire. Alors, un petit rappel au règlement. En vertu de nos règlements, maintenant comme pour toujours, lorsqu'il y aura, même plus tard, des amendements ou des sous-amendements, nous nous attendons à ce que ceux-ci soient, bien sûr, présentés sous une forme écrite. Nous suspendrons, le cas échéant, nos travaux, pour que ceux-ci puissent se faire photocopier.

Mais donc, pour l'instant, le député qui propose cette motion a 30 minutes maximum de temps de parole pour défendre sa proposition. Il en sera de même éventuellement pour le ministre et les représentants des différentes formations politiques qui siègent autour de cette table. Par la suite, les députés qui voudront intervenir, quant à eux, disposeront de 10 minutes pour ce faire.

Alors, M. le député de Rosemont, à vous la parole pour une période maximale de 30 minutes. Je vous rappelle qu'il est 21 h 24, que nous allons donc peut-être, théoriquement, suspendre avant la fin de votre intervention. À vous la parole.

M. Vincent Marissal

M. Marissal : Oui. Alors, merci, M. le Président. Nous déposons cette motion préliminaire parce que la première étape en comité de l'étude de ce projet de loi a été quand même assez rapide, peut-être trop rapide, vu son importance, vu l'ampleur des effets qu'elle pourrait avoir. Et on a parlé beaucoup d'iniquité par rapport au projet de loi n° 3, des iniquités qu'elle crée tout en disant vouloir en réduire certaines autres. Je n'ai pas de doute, M. le Président, qu'elle peut effectivement, de facto, aplanir certaines iniquités entre des régions, mais elle crée par ailleurs, et c'est probablement son principal effet pervers, des iniquités beaucoup plus grandes.

Et il y a beaucoup de perdants dans ce projet de loi. Je parle notamment des 40 % de gens qui vivent à logement, 60 % à Montréal. Je pense qu'on ne le dira jamais trop, parce que c'est une réalité. Au Québec, on est beaucoup, beaucoup locataires. Et, je le répète, les locataires ne sont pas généralement les gens les plus fortunés, et ce ne sont pas ceux qui bénéficient de plus de revenus non plus.

Alors, il y a aussi, et on en a parlé, évidemment les non-résidents. On a parlé aussi des commerces. On a parlé aussi... On a reçu notamment la CORPIQ, les propriétaires. Mais tous les propriétaires ne sont pas des magnats de l'immobilier, et je conviens, je conçois que certains propriétaires de duplex, de triplex, de quintuplex ont aussi investi dans ce genre de moyen financier pour se faire un fonds de retraite. Et il ne s'agit pas, évidemment, de pénaliser ces gens.

Mais, parmi les très, très grands gagnants du projet de loi n° 10 ou, je devrais dire, de l'effet pervers principal du projet de loi n° 10, il y a évidemment les très, très grandes corporations, qui ont fait de l'immobilier leur «core business», mais à des niveaux et des ampleurs immenses. On ne parle pas ici évidemment d'un couple propriétaire de cinq ou six portes à Montréal ou ailleurs au Québec. On parle d'entreprises, et je les ai nommées, mais on ne vise pas personne là-dedans, puis ce n'est pas personnel, il n'y a pas de... On a fait des recherches pour essayer de trouver des entreprises qui sont représentatives de ce que je suis en train de vous dire, donc CAPREIT, Boardwalk, Cogir.

Pour fins de discussion, vous le savez peut-être, CAPREIT, par exemple, qui est une entreprise ontarienne et qui se définit comme un des plus grands gestionnaires, propriétaires d'unités de logement à travers le Canada, qui en compte presque 51 000, d'ailleurs, est aussi propriétaire, puis ça, c'est tout juste l'autre bord de la rue de mon comté, du Village olympique, qu'on appelle aussi à l'occasion les pyramides olympiques, qui est un immense complexe de plus de 900 portes. Et je corrige ce que je viens de dire. C'est définitivement dans mon comté, parce que j'ai fait quelques-unes des 900 portes en porte-à-porte pendant la dernière campagne. C'est l'autre partie qui n'est pas dans mon comté. Alors, je me corrige, c'est bel et bien dans mon comté. C'est peut-être pour ça qu'on l'a choisi aussi.

L'exemple des pyramides olympiques, avec CAPREIT, est quand même assez spectaculaire parce que ça représentera au bas mot une économie de plus de 145 000 $ pour les propriétaires, qui, j'en doute, ne refileront probablement pas la baisse de taxe à leurs locataires, sachant en plus que ces logements sont généralement assez coûteux, assez dispendieux pour les tours du Village olympique.

Alors, c'est pour ça qu'il nous apparaît pertinent que le public qui nous écoute ou qui va suivre nos travaux sache, là, au-delà de ce que rapportent les médias, parce que les médias ont fait leur boulot, ils sont allés chercher des cas très spectaculaires d'individus, notamment, qui vont évidemment bénéficier du projet de loi n° 3, mais que les gens qui nous suivent, les Québécois et Québécoises qui nous suivent, puissent aussi avoir une assez bonne idée de l'ampleur des baisses d'impôt dont bénéficieront ces géants de l'immobilier, qui, par ailleurs, auparavant payaient les taxes scolaires comme tout le monde, au taux de la région dans laquelle ils se trouvaient.

Alors, ce sont, de toute évidence, les grands gagnants du projet de loi n° 3. Il serait intéressant de les entendre, de savoir ce qu'ils comptent faire avec leurs baisses. Est-ce que c'est uniquement pour accroître leurs profits? Est-ce qu'on pourrait penser...

Le Président (M. Simard) : À l'ordre, M. le député!

Puisqu'il est maintenant 21 h 30, j'ajourne nos travaux sine die. Au plaisir.

(Fin de la séance à 21 h 30)

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