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Version finale

34e législature, 2e session
(19 mars 1992 au 10 mars 1994)

Le mardi 9 novembre 1993 - Vol. 32 N° 60

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Consultations particulières et étude détaillée du projet n° 106 - Loi sur l'aide et l'indemnisation des victimes d'actes criminels


Journal des débats

 

(Seize heures onze minutes)

Le Président (M. Dauphin): Le quorum constaté, je déclare donc la séance de la commission des institutions ouverte, qui a pour mandat de poursuivre l'étude détaillée du projet de loi 106, Loi sur l'aide et l'indemnisation des victimes d'actes criminels.

Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire: Non, M. le Président, pas de remplacement.

Le Président (M. Dauphin): Merci beaucoup.

Étude détaillée

Alors, nous étions rendus à l'article, M. le ministre de la Justice...

Décision, révision et appel Révision et appel (suite)

M. Rémillard: M. le Président, nous aimerions apporter un amendement à l'article 132. Je crois qu'on l'avait suspendu, 132?

Le Président (M. Dauphin): Oui.

M. Rémillard: Alors, j'aimerais proposer un amendement à 132 et, ensuite, j'aurais un amendement à l'article 133.

Le Président (M. Dauphin): D'accord.

M. Rémillard: Deux articles qui ont été suspendus, M. le Président, et je vous propose donc de commencer par ces deux articles.

Le Président (M. Dauphin): Très bien. Alors, j'appelle l'article 132, qui avait été suspendu.

M. Rémillard: Alors, il y a un amendement à l'article 132, M. le Président, qui se lit comme suit: Supprimer le deuxième alinéa.

M. le Président, cet amendement a pour but d'uniformiser le délai et les modalités d'appel à la Commission des affaires sociales, tel qu'énoncé à l'article 135 du projet de loi.

M. Bélanger: M. le Président.

Le Président (M. Dauphin): M. le député d'Anjou.

M. Bélanger: Je pense que c'est suite à l'échange qu'on avait eu relativement au fait qu'on se posait des questions quant à la pertinence de faire apparaître des délais différents. C'est ça?

M. Rémillard: C'est ça, exactement.

M. Bélanger: Un délai de 15 jours, on trouvait que c'était un délai qui était trop court et que ça pouvait prêter à confusion. Donc, finalement, en annulant ce deuxième alinéa, en l'abrogeant, en le supprimant, ça reviendrait à dire que c'est le même délai qui s'applique à toutes les contestations de décisions, c'est-à-dire 60 jours. C'est ça?

Des voix: 90 jours.

M. Bélanger: 90 jours.

M. Rémillard: 90 jours. Un seul délai.

M. Bélanger: Un seul délai de 90 jours, uniforme.

M. Rémillard: C'est ça. C'est ce qu'on avait convenu, je pense, les membres de cette commission...

M. Bélanger: Je pense aussi que ça rejoint, là... je vois» on m'a envoyé des commentaires des avocats et avocates du réseau de l'aide juridique sur le projet de loi 106 et, à l'article 132, d'ailleurs, je pense que c'est une des recommandations...

M. Rémillard: C'est ça, oui.

M. Bélanger: ...de ces avocats. Est-ce que le ministre a pris connaissance de...

M. Rémillard: Pas moi, mais mes gens l'ont reçu ce midi, je crois, hein?

Une voix: Oui.

M. Rémillard: Alors, ce midi. C'est arrivé ce midi. On va le regarder attentivement. Mes gens sont en train de le regarder. Ils m'ont fait part de certains commentaires, dont sur l'article 132 en particulier.

M. Bélanger: D'accord. Et le Protecteur du citoyen, d'ailleurs, je pense que ses remarques étaient au

même effet que les avocats de l'aide juridique. M. Rémillard: Oui, oui.

Le Président (M. Dauphin): Ça va pour l'amendement?

M. Bélanger: Oui, ça va.

Le Président (M. Dauphin): Alors, l'amendement est adopté. Est-ce que l'article 132, tel qu'amendé, est adopté?

M. Bélanger: À l'article 132, «l'impossibilité en fait d'agir plus tôt», est-ce qu'on avait réglé ce problème-là ou est-ce que c'était... Est-ce qu'on avait complètement réglé ce qui constituait une impossibilité d'agir plus tôt ou est-ce que c'était encore... Il me semble qu'il y avait encore des questions là-dessus.

M. Rémillard: Je crois qu'on avait discuté de cette question, M. le Président, et qu'on en était à une compréhension que Me Gauvin... Je crois que c'est Me Gauvin qui nous avait fait une explication à ce niveau-là. Me Gauvin, est-ce que c'est vous qui nous aviez expliqué...

Une voix: ...

M. Bélanger: Je pense que c'est un autre article qui est suspendu relativement à ça, c'est relativement au... On avait parlé de la prescription dans le cas d'un recours civil. Je pense que c'est cet article-là qui est suspendu. C'est ça?

M. Rémillard: C'est dans le même contexte. Vous pouvez peut-être nous faire la remarque sur cet article-ci.

Le Président (M. Dauphin): Me Gauvin.

Mme Gauvin (Francine): En fait, c'est ça. La discussion qu'on avait eue, c'était en relation avec la suspension de la prescription dans les cas où la personne est dans l'impossibilité en fait d'agir. Donc, c'est la même notion de l'impossibilité en fait d'agir qu'on retrouve ici à l'article 132. Mais c'est aussi une notion qui pourrait être plus large dans le sens où une personne, pour des raisons de santé, une raison médicale, une personne qui aurait été dans le coma... Donc, c'est l'interprétation jurisprudentielle de la notion de l'impossibilité en fait d'agir, telle qu'interprétée par les tribunaux administratifs ou par les tribunaux civils.

M. Bélanger: J'aimerais avoir, justement, des éclaircissements sur cette notion de l'impossibilité d'agir. Est-ce qu'on se réfère à l'impossibilité d'agir absolue ou à une impossibilité d'agir qui est reliée à la personne, dans le sens que, si la victime est une personne qui est mineure, évidemment, la personne, le mineur ne peut pas par soi-même prendre des recours juridiques... Le fait que son parent ou responsable de l'autorité parentale n'ait pas pris de recours en temps utile, est-ce que ça va être considéré comme une impossibilité d'agir pour le mineur?

M. Rémillard: Oui. Ma compréhension, M. le Président — et on me corrigera chez les légistes — c'est toujours une interprétation qui doit favoriser la victime. Donc, par conséquent, ce que ça signifie, c'est de ne pas pouvoir agir plus tôt. Dans le cas du mineur, si le mineur n'a pas fait d'intervention parce qu'il ne pouvait pas le faire de par son jeune âge ou de par différentes situations, c'est évident pour moi que c'est un cas qui nous amène à conclure qu'il ne pouvait pas agir plus tôt parce qu'il est mineur. Maintenant, en ce qui regarde le parent, tout à coup, qui l'apprend parce qu'il est tuteur, et qui l'apprend après, bien, le majeur ne pouvait pas agir tant que le mineur ne l'a pas informé. Alors, là, il y a la relation qui doit s'établir aussi. Alors, c'est dans un contexte, évidemment, de comprendre la situation, cas par cas, en fonction donc d'une situation d'une victime.

M. Bélanger: Je comprends, M. le Président, sauf que, dans le cas où le parent est au courant de la situation de l'acte criminel, que le mineur, évidemment, ne peut pas prendre de recours lui-même, je pense, il n'y a pas impossibilité d'agir parce que, automatiquement, le parent a l'autorité parentale, il peut agir là. Donc, c'est ça, le problème. Est-ce qu'on se réfère à une impossibilité d'agir vraiment — ce serait peut-être bon de le préciser — qui est reliée à la personne même ou aussi à une tierce personne qui est la personne majeure? Parce que c'est la responsabilité de la personne majeure, évidemment, de prendre les recours nécessaires pour le mineur dont elle détient les droits?

M. Rémillard: Oui. Alors, il faut voir, M. le Président, si on peut faire ces distinctions, s'il y a des précédents, et peut-être que Me Gauvin peut nous informer. Évidemment, le cas qu'on peut imaginer... D'abord, c'est que les parents sont les tuteurs, et on sait, de par le nouveau Code civil, que c'est automatique, c'est-à-dire qu'on n'a pas besoin de conseil de famille ou de quoi que ce soit, les parents sont reconnus comme les tuteurs des enfants. Alors, si le parent est au courant, mais ne veut pas agir ou n'a pas agi, est-ce que, par le fait même, le mineur est pénalisé? Si je comprends bien l'interrogation du député d'Anjou, c'est ça, l'interrogation.

M. Bélanger: ...

M. Rémillard: Alors, pour une personne qui serait représentée, le terme aurait une autre signification. Je pense que, là, on va dans des directions qui nous demandent de consulter nos légistes, M. le Président, pour voir les marges de manoeuvre qu'on pourrait avoir.

Le Président (M. Dauphin): Me Gauvin.

Mme Gauvin (Francine): Effectivement, quand on parle de la notion de l'impossibilité en fait d'agir, c'est que, dans le cas du mineur qui est représenté par son tuteur pour l'exercice de ses droits civils, on pourrait conclure que, dans les cas où la personne qui est chargée d'exercer les droits du mineur à sa place, c'est-à-dire son tuteur, dans la majorité des cas les parents étant les tuteurs de plein droit, ce sont eux qui devront présenter la demande au nom de leur enfant mineur, donc ce sont eux également qui devraient, dans le contexte de 132, déposer une demande de révision. À cet égard-là, l'impossibilité en fait d'agir devrait, à mon avis, s'apprécier à l'égard des parents, puisque eux étaient aussi dans l'impossibilité en fait d'agir efficacement pour représenter leur enfant mineur.

Dans le même contexte, si on transpose la question sous l'angle d'un recours en responsabilité civile, on ne pourrait conclure qu'un mineur est dans l'impossibilité en fait d'agir si son tuteur peut exercer ses... puisque le tuteur peut exercer des droits civils à la place du mineur. C'est d'ailleurs pour ces raisons-là qu'on a prévu des dispositions au Code civil du Québec, pour prévoir qu'il y ait toujours un tuteur, soit les parents, soit, dans les cas où les parents sont déchus, un autre tuteur qui serait désigné par le tribunal. (16 h 20)

M. Rémillard: Si le tuteur représente mal la personne protégée, il y a un recours.

Mme Gauvin (Francine): II y a un recours, effectivement.

M. Bélanger: Oui, un recours de droit commun, on poursuit ses parents devant les tribunaux...

M. Rémillard: Ou son tuteur, oui.

M. Bélanger: ...c'est ça? en responsabilité...

Mme Gauvin (Francine): C'est ce qui est prévu au Code civil.

M. Rémillard: Oui, c'est ce qui est prévu.

M. Bélanger: Je ne pense pas que ce serait souhaitable...

M. Rémillard: Non, c'est...

M. Bélanger: ...dans une loi comme celle-là.

M. Rémillard: Mais il faut voir jusqu'où on peut aller. Parce qu'on pourrait se retrouver aussi dans un cas où vous avez un parent qui est parfaitement conscient de la situation et qui décide simplement qu'il laisse tomber, au nom de l'enfant. Le principe du tuteur qui prend une décision pour l'enfant, comme Me Gauvin vient de nous le dire, s'applique en droit civil, s'applique un peu partout lorsque vous avez un cas d'une personne qui est protégée, un majeur inapte ou le mineur. Est-ce qu'on peut en arriver à la conclusion de dire: Oui, mais, dans un cas où ce droit est perdu par la faute d'un majeur qui, lui, a la responsabilité du mineur ou du majeur inapte... Est-ce que ça voudrait dire qu'on doit considérer l'impossibilité d'agir plus tôt dans ce cas-là? Je pense que ça pose un problème sérieux d'interprétation. Je ne sais pas comment on peut voir ça, comment nos légistes peuvent voir ça. Mais j'aurais de la difficulté à voir ça.

M. Bélanger: M. le Président.

Le Président (M. Dauphin): M. le député d'Anjou.

M. Bélanger: C'est parce que je vois la proposition qui est faite par les avocats de l'aide juridique et qui recommandent de prévoir que, dans le cas où la victime de l'acte criminel est une personne mineure, la minorité constitue une impossibilité d'agir plus tôt. Alors, c'est la proposition telle que faite par... Je voudrais savoir, du côté des légistes, s'ils considèrent que c'est quelque chose de possible.

M. Rémillard: D'abord, on m'informe, M. le Président, que ce n'est pas la Commission des services juridiques qui a fait cette recommandation-là.

M. Bélanger: Non, ce n'est pas la Commission. J'ai dit: Les avocats de l'aide juridique.

M. Rémillard: Non, ce n'est pas les avocats. Il faut dire: Deux...

M. Bélanger: Des avocats... M. Rémillard: ...deux...

M. Bélanger: Des avocats et avocates du réseau de l'aide juridique.

M. Rémillard: On me dit qu'il y a deux signataires. Il y a Mme Claudine Roy et Me Pierre Yves Bour-deau. Alors, ils ont utilisé le Service d'expertise, d'éducation et de recherche de la Commission des services juridiques, et ces deux avocats ont donc signé une lettre qu'ils nous envoient. Mais, à ma connaissance, il s'agit de deux avocats qui ont donc décidé de faire une intervention auprès de cette Commission, mais ce n'est pas la Commission et ce ne sont pas non plus les avocats de la Commission.

M. Bélanger: Ce sont des avocats du réseau de l'aide juridique.

M. Rémillard: Ha, ha, ha! Ce sont deux avocats.

M. Bélanger: Est-ce qu'on s'entend? M. Rémillard: Ce sont deux avocats. M. Bélanger: Bon. Parfait. M. Rémillard: Oui.

M. Bélanger: Ce sont des, ou, en tout cas, à partir du moment où ils sont plus d'un, je pense que le pluriel peut s'appliquer.

M. Rémillard: Ce sont deux avocats.

M. Bélanger: Ce sont des avocats, disons deux, du réseau de l'aide juridique. Je ne pense pas que j'avais mentionné que c'était la Commission des services juridiques, en tout cas.

M. Rémillard: Non, mais c'était simplement... pour vous répondre...

M. Bélanger: Non, juste pour peut-être... pour que ce soit clair dans nos débats.

M. Rémillard: C'était simplement pour les débats, parce qu'on va lire ça après, pour qu'on sache...

M. Bélanger: Parfait. Alors, c'est ça. J'ai lu, donc, la proposition de deux avocats du réseau de l'aide juridique et je me demandais si cette proposition était raisonnable et applicable. Est-ce qu'elle existe... Je comprends, là, je comprends très bien le principe que vous m'avez expliqué au niveau du droit civil général. Ça, je concours tout à fait avec ça. Cependant, dans une loi comme la loi des victimes d'actes criminels qui doit, je pense, voir à la protection des droits de la victime dans la mesure du possible, est-ce que ce ne serait pas possible de faire cet accommodement?

M. Rémillard: Dans le Code civil, évidemment, on dit exactement le contraire; on dit que le mineur ou la personne majeure inapte qui est représentée par un représentant, donc, entre autres, un tuteur, a donc ses droits exercés par un tuteur. Et ce tuteur demeure celui ou celle qui est habilité à exercer ses droits et, s'il ne les exerce pas correctement, il y a des poursuites qui peuvent être entamées. Moi, je ne vois pas comment on peut passer à côté de ce principe-là dans ce cas-ci. C'est la même chose dans la Loi sur l'assurance automobile, le principe est exactement le même, et, ce qu'ils ont, c'est exactement la même situation. Remarquez qu'il faut toujours faire les nuances avec la Loi sur l'assurance automobile. On va s'harmoniser. Dans la mesure où on peut améliorer pour protéger les victimes, moi, je veux bien, mais, dans ce cas-ci — et je laisserais Me Gauvin faire plus de commentaires — je pense que ce serait difficile d'aller plus loin que ça.

Le Président (M. Dauphin): Me Gauvin.

Mme Gauvin (Francine): En fait, oui, dans le même sens, c'est que, si on reconnaissait à l'article 132 le fait que d'être mineur constitue une impossibilité en fait d'agir, ça vient prétendre exactement le contraire de ce que dit le Code civil du Québec. Ce que dit le Code civil du Québec, c'est que le mineur et le majeur protégé ne sont pas dans l'impossibilité d'agir puisque d'autres personnes sont désignées pour agir à leur place. C'est d'ailleurs aussi — vous me permettrez, M. le ministre — une des préoccupations du Code civil du Québec de responsabiliser davantage les parents à l'égard des droits qu'ils doivent exercer vis-à-vis leurs enfants, et c'est la raison pour laquelle on les a reconnus tuteurs de plein droit dans le Code, ce qui n'était pas le cas auparavant.

M. Bélanger: D'accord.

Le Président (M. Dauphin): Ça va?

M. Bélanger: Adopté.

Le Président (M. Dauphin): L'article 132, tel qu'amendé, adopté. J'appelle l'article 133, qui avait toujours été suspendu, auquel cas il y a un amendement. M. le ministre.

M. Rémillard: Oui, M. le Président. Nous avons un amendement à 133 qui se lirait comme suit: Remplacer, dans la quatrième ligne, les mots «présenter ses observations» par les mots «faire valoir son point de vue».

Alors, M. le Président, cet amendement est de concordance avec l'article 76 de la Loi sur la sécurité du revenu. M. le Président, ça fait suite aussi à une autre discussion que nous avons eue en commission parlementaire la semaine dernière où nous en sommes arrivés à la conclusion que «faire valoir son point de vue» pourrait être plus significatif de l'intention du législateur de permettre à la victime de faire valoir tous les arguments qu'elle peut faire valoir.

Le Président (M. Dauphin): M. le député d'Anjou.

M. Bélanger: Oui, M. le Président, effectivement, ça rejoint la préoccupation que nous avions et la teneur des échanges que nous avions eus relativement à cet article-là. Cependant, j'aimerais avoir une confirmation, tel qu'on l'avait mentionné, une confirmation que, sur les formulaires, il va être fait mention de la possibilité pour les victimes de pouvoir être entendues. Moi, j'aimerais avoir la confirmation que ça va être fait, que, sur le formulaire qui va être envoyé aux...

M. Rémillard: Ah oui!

M. Bélanger: Comme un peu il y a à l'assurance automobile...

M. Rémillard: Oui, oui.

M. Bélanger: ...c'est-à-dire, on n'a rien qu'à cocher à ce moment-là et...

M. Rémillard: Oui, oui, sans aucun doute. M. Bélanger: Oui? Il n'y aura pas de problème?

M. Rémillard: Sans aucun doute. C'est un droit qui va faire partie du formulaire.

M. Bélanger: Parfait.

M. Rémillard: Sans aucune hésitation.

M. Bélanger: Alors, ça répond tout à fait à nos préoccupations.

Le Président (M. Dauphin): Ça va. Donc, l'amendement est adopté...

M. Bélanger: Adopté.

Le Président (M. Dauphin): ...ainsi que l'article tel qu'amendé.

M. Bélanger: Adopté.

Le Président (M. Dauphin): Adopté. J'appelle l'article 134.

M. Rémillard: M. le Président, l'article 134 se lit comme suit: «La décision en révision doit être motivée et être communiquée par écrit au réclamant. Elle comporte la mention de son droit d'interjeter appel de cette décision à la Commission des affaires sociales et du délai pour en appeler.»

M. le Président, cet article de droit nouveau prévoit l'obligation de motiver par écrit une décision rendue en révision et d'aviser le réclamant de son droit d'interjeter appel à la Commission des affaires sociales. Cet article est conforme à la Loi sur l'assurance automobile.

M. Bélanger: Adopté.

Le Président (M. Dauphin): Adopté. J'appelle l'article 135.

M. Rémillard: Qui se lit comme suit: «Le réclamant qui se croit lésé par une décision en révision peut en appeler à la Commission des affaires sociales dans le délai et selon les .modalités prévues par la Loi sur la Commission des affaires sociales (L.R.Q., chapitre C-34).»

M. le Président, cet article énonce le droit du réclamant d'en appeler d'une décision rendue en révision lorsqu'il se croit lésé dans ses droits. L'appel doit être logé devant la Commission des affaires sociales. Cet article est conforme à la Loi sur l'assurance automobile.

M. Bélanger: Adopté.

Le Président (M. Dauphin): Adopté. J'appelle l'article suivant, c'est-à-dire 136.

Versement et recouvrement des prestations Versement des prestations

M. Rémillard: Nous allons avoir un amendement à 136, M. le Président, si vous me permettez de le suspendre.

M. Bélanger: Oui, pas de problème.

Le Président (M. Dauphin): Alors, nous suspendons l'article 136...

M. Bélanger: Pas de problème.

Le Président (M. Dauphin): ...momentanément, et nous appelons le suivant, M. le ministre.

M. Rémillard: Oui, à 136, c'est simplement pour informer cette commission que ça va être en fonction, donc, du délai de carence, qu'on veut revoir. On va proposer quelque chose d'autre.

Le Président (M. Dauphin): Très bien. M. Rémillard: L'article 137.

Le Président (M. Dauphin): Donc, j'appelle l'article 137.

M. Rémillard: Oui, M. le Président, qui se lit comme suit: «Le ministre peut, lorsqu'il considère qu'une réclamation paraît fondée, faire une avance au réclamant. «Malgré l'article 150, le ministre ne peut, après avoir pris sa décision, recouvrer l'avance qu'il a faite, à moins qu'elle n'ait été obtenue par fraude.»

M. le Président, cet article prévoit le pouvoir du ministre, lorsqu'il ne peut rendre sa décision immédiatement, d'effectuer une avance au réclamant si la réclamation paraît fondée. Cet article est conforme à la Loi sur l'assurance automobile.

M. Bélanger: M. le Président, j'aimerais... (16 h 30)

Le Président (M. Dauphin): M. le député d'Anjou.

M. Bélanger: J'ai un petit peu de difficulté à imaginer dans quel cas ça va s'appliquer, cet article-là. Est-ce que je pourrais avoir un exemple?

M. Rémillard: Alors, Mme Viens peut nous donner des cas bien pratiques où ça peut se produire.

Le Président (M. Dauphin): Me Viens.

Mme Viens (Christine): Alors, je vais faire état ici de la pratique à la Société de l'assurance automobile. Il s'agit des cas où, à sa face même, la réclamation paraît fondée, qu'une demande a été dûment produite et qu'elle est en voie de traitement. Il peut s'agir de cas où la relation entre l'événement et le préjudice apparaît fondée, mais qu'on attend confirmation de certains éléments ou rapports, de certaines pièces manquantes au dossier. Mais il faut, bien sûr, que le tout apparaisse fondé à sa face même. Quel type d'avance pourrait être faite? Il pourrait s'agir d'une indemnité de remplacement du revenu, par exemple, d'une personne qui travaillait à temps plein et qui, en raison du préjudice, est incapable de travailler, mais pour une incapacité qui semble se prolonger, donc pas seulement quelques jours, mais qui pourrait se prolonger. Alors, il pourrait y avoir une indemnité de remplacement de revenu qui serait versée, mais pour une période limitée, la période qui est anticipée pour finaliser le traitement du dossier. Il pourrait s'agir également, en cas de décès, d'une avance sur la somme forfaitaire qui serait à verser lorsqu'il apparaît, à sa face même, évidemment, que la réclamation est fondée et qu'il y a un conjoint ou des personnes à charge. Il pourrait y avoir un certain montant, pas l'ensemble du forfaitaire, évidemment, mais un certain montant qui pourrait être versé, de même que des remboursements de frais de garde. On pourrait imaginer, dans le contexte des victimes d'actes criminels — ce sera à examiner lorsque le ministre fera ses directives — que, dans certains cas, peut-être certains remboursements de frais de psychothérapie pourraient être faits. Ce serait des choses qui pourraient être examinées. Il s'agit évidemment d'avances qui ne seront pas recouvrables, donc qui doivent être faites avec beaucoup de circonspection.

Le Président (M. Dauphin): Merci, Me Viens.

M. Bélanger: Est-ce que... M. le Président, je ne sais pas si j'ai bien compris. On a parlé de réglementation. Il va y avoir une réglementation relativement à ça, les avances?

Mme Viens (Christine): C'est-à-dire qu'ici il s'agit de politiques que la Société de l'assurance automobile a adoptées de façon à préciser les cas pour lesquels cela peut se faire. Le ministre adoptera également des politiques à cet égard.

M. Bélanger: Pour bien comprendre un des exemples que vous nous avez donnés, c'est le fait de la personne qui fait une demande d'indemnisation. Donc, on pourrait, à la face même de la réclamation, pour certains motifs, accorder une avance. Normalement, le délai normal... Bon. On va dire: Je suis une victime d'acte criminel. Je me présente pour remplir un formulaire. Je dépose mon formulaire. Le délai, c'est quoi, normalement, avant qu'on donne suite à ma demande, le délai administratif régulier?

M. Rémillard: Pour la révision?

M. Bélanger: Non, non. Je fais une demande tout de suite. La première demande, le traitement de la demande, pour que je sache qu'est-ce qui se passe.

Mme Viens (Christine): Lorsque le dossier ne présente pas de difficulté particulière, à la Direction de l'indemnisation des victimes d'actes criminels, actuellement, les délais sont de deux à trois mois.

M. Bélanger: De deux à trois mois. Mme Viens (Christine): Oui.

M. Bélanger: Et même pour une indemnité de remplacement de revenu?

Mme Viens (Christine): Ce qu'on m'indique, c'est que le délai moyen est de deux à trois mois. Évidemment, l'indemnité est payable à partir du moment...

M. Bélanger: Oui, oui, je comprends. Donc, je suis victime d'un acte criminel et je ne peux plus travailler; ça va prendre deux à trois mois avant que je commence à recevoir quoi que ce soit, même si c'est rétroactif, là. Je comprends qu'il va avoir...

M. Rémillard: C'est rétroactif.

M. Bélanger: Oui, oui, mais... Je comprends. Deux à trois mois. Vous n'avez pas de plaintes relativement à ça? Deux à trois mois, quand même, avant que quelqu'un ait quoi que ce soit au niveau d'une indemnité, on parle de remplacement de revenu, là, quelqu'un qui n'a plus de revenu pour travailler., parce que, pendant cette période-là, on n'a droit à rien, je pense. On n'a pas droit à...

Mme Viens (Christine): La personne peut toujours, si elle est dans le besoin, faire appel à la sécurité du revenu.

M. Bélanger: Oui, dépendamment... Évidemment, si c'est quelqu'un qui fait un salaire raisonnable, je veux dire, la sécurité du revenu, ce n'est pas évident.

Mme Viens (Christine): À ce moment-là, peut-être qu'elle n'est pas dans un besoin très immédiat non plus.

M. Rémillard: Deux à trois mois, vous savez, dans un cas comme celui-là, si la personne n'est pas vraiment dans le besoin et est privée de revenu, je comprends, mais c'est rétroactif ensuite, comme tel. Alors, je ne crois pas qu'elle en souffre vraiment, et cet article 137 vient ajouter que le ministre a une discrétion pour rendre... le temps de prendre une décision pour lui fournir quand même d'autres moyens en attendant qu'il ait sa décision finale de prise sur la révision.

M. Bélanger: Est-ce que Me Viens, quant à elle, deux à trois mois de révision, est-ce qu'elle considère que ce sont des délais raisonnables ou elle veut améliorer la situation, ou elle considère que c'est tout à fait normal, puis que c'est ce qu'elle vise présentement, de conserver à peu près ces délais-là?

Mme Viens (Christine): Ce que... Je peux assurer la commission que, dans la réorganisation, toutes les mesures seront prises pour améliorer, dans la mesure du possible, les délais.

M. Bélanger: Oui.

Mme Viens (Christine): Cependant, ces délais, on ne peut pas dire qu'ils soient déraisonnables.

M. Rémillard: Oui. Mais on peut dire aussi, peut-être qu'il y a un élément, M. le Président, qu'il est important de retenir, c'est que n'oublions pas — et on n'en parle pas, ça — que le projet de loi donne un guichet unique. Donc, avant, il y avait quand même deux guichets, des délais encore supplémentaires. On parlait d'indemnisation et on parlait d'aide. C'étaient deux guichets différents, ça. Là, maintenant, on a le même guichet. Donc, dans les deux, si on prend les deux, on va sauver du délai. On va certainement sauver les délais parce que tout va être fait dans un même temps, c'est évident.

Alors, le travail que nous faisons aujourd'hui va rendre plus efficace le travail administratif, les délais vont être raccourcis, mais on parle toujours de deux à trois mois de délai, mais pour les deux aspects: l'aide et la compensation.

M. Bélanger: Donc, je dois comprendre... Le Président (M. Dauphin): M. le député.

M. Bélanger: .. .de la réponse de Me Viens que, pour elle, deux à trois mois, c'est un délai qui, bon, pour elle il n'y a pas de problème au niveau des délais. C'est un délai qui est raisonnable. Évidemment, si on peut les améliorer, on va toujours chercher à les améliorer, ça, je comprends ça,, puis c'est tout à fait louable comme intention. Mais, pour Me Viens, deux ou trois mois, c'est tout à fait raisonnable. Mais, là, je comprends que ce sont des dossiers où vous nous dites qu'il n'y a pas dé problème, là. Des dossiers où tout va bien, tout est parfait, il n'y a aucune ambiguïté, c'est deux ou trois mois. À partir du moment où il y a un malaise dans le problème, ça peut être combien de temps?

Mme Viens (Christine): Les délais peuvent s'allonger si, par exemple, des pièces sont manquantes au dossier.

M. Bélanger: Oui.

Mme Viens (Christine): Évidemment, la victime doit faire en sorte que le ministre puisse se prononcer sur sa réclamation à partir de tous les éléments. Alors, il y a certains retards qui peuvent être attribuables à la victime. Certains autres dossiers, lorsqu'il peut y avoir, par exemple, faute lourde ou qu'une enquête est nécessaire, peuvent être plus longs. Les délais que je vous ai donnés sont les délais qu'on m'indique, les délais moyens lorsque les dossiers ne présentent pas de difficultés. On fera tout notre possible pour améliorer les situations. Ce que je disais, c'est que je ne crois pas que ce soient des délais déraisonnables.

M. Bélanger: Au niveau des délais, présentement, qu'on a pour la révision puis l'appel, ce sont des délais d'à peu près combien de temps qu'on a présentement?

Mme Viens (Christine): Ce qu'on m'indique ici, ce sont des délais de 10 à 12 mois de la réception de la demande de révision à la décision. Ces délais sont évidemment longs. Je soumets que le processus que nous avons proposé dans la réforme vise à simplifier les procédures de façon à raccourcir ces délais.

M. Rémillard: On vise entre quatre à six mois, dépendant de la complexité des cas. Mais il faut bien comprendre que, lorsqu'il y a révision, demande de révision, on doit à ce moment-là entendre... on doit prendre le moyen, on vient d'en disposer... et c'est parce qu'il y a complication quelque part. Alors, quand il y a complication dans ce domaine-là, ce n'est pas facile, il ne faut pas brusquer les choses aussi. Alors, c'est pour ça qu'on a l'article 137, qui permet aussi de prendre des moyens nécessaires pour qu'avant que la décision finale soit prise il y ait quand même moyen de compenser dans certaines circonstances.

M. Bélanger: Je pense que la révision, d'après les articles de loi qu'on a adoptés, la révision ne suspend pas l'exécution de la première décision, hein? C'est ça?

Mme Viens (Christine): C'est exact.

M. Bélanger: C'est ça. Justement, c'est ça qu'on a prévu à ce moment-là. Si on accordait l'indemnité dès la première décision, on va avoir le droit de toucher la victime, son indemnité jusqu'à la décision finale.

Mme Viens (Christine): C'est ça.

M. Bélanger: Puis les délais devant la CAS, on s'attend à des délais de combien, à peu près, devant la Commission des affaires sociales? Je pense que, là, c'est plus encore, hein?

Mme Viens (Christine): D'après l'information auprès de la CAS — donc, ce sont des informations que nous tenons de la Commission des affaires sociales — de la réception de la demande d'appel à l'inscription au rôle, il s'agit de délais de huit à 12 mois.

M. Bélanger: Huit à 12 mois.

(16 h 40)

Mme Viens (Christine): Et, de l'inscription au rôle à la date de la décision, de trois à six mois.

M. Bélanger: Je pense que c'est une amélioration sensible. Auparavant, c'était plus élevé que ça, les délais?

M. Rémillard: Beaucoup plus.

M. Bélanger: Oui. Je pense que ça a déjà été presque jusqu'à trois ans.

M. Rémillard: Et ils sont dans un processus... M. Bélanger: De réorganisation.

M. Rémillard: ...de réorganisation pour baisser ça encore considérablement.

M. Bélanger: D'accord. Ça va.

Le Président (M. Dauphin): Ça va? Alors, l'article 137, adopté. J'appelle l'article 138, auquel cas il y a un amendement. M. le ministre.

M. Rémillard: Oui, M. le Président. Il y a un amendement à l'article 138 qui se lit comme suit: Remplacer le paragraphe 2° par les suivants: «2° lorsque le réclamant ne résidait pas au Québec à la date de la manifestation du préjudice et n'y a pas résidé depuis; «3° lorsque le réclamant résidait au Québec à la date de la manifestation du préjudice ou y a résidé depuis cette date mais n'y réside plus depuis au moins trois ans, au moment de la demande de capitalisation.»

M. le Président, cet amendement a pour objet d'étendre le délai au cours duquel le réclamant ne réside pas au Québec avant qu'il ne puisse présenter une demande de capitalisation de l'indemnité de remplacement du revenu à laquelle il a droit. Il permet d'éviter qu'un réclamant ne quitte le Québec que pour réclamer le paiement de l'indemnité en un versement unique, alors que, s'il y demeure, elle continue à lui être versée périodiquement.

Le Président (M. Dauphin): Des questions ou commentaires sur l'amendement qui est devant nous?

M. Bélanger: Adopté.

Le Président (M. Dauphin): L'amendement est adopté. Est-ce que l'article ainsi amendé est adopté?

M. Bélanger: On n'a toujours pas de nouvelles relativement à cette notion de résidence. On a suspendu certains articles. On devrait sous peu, là...

M. Rémillard: Y revenir.

M. Bélanger: D'accord. Adopté.

Le Président (M. Dauphin): Donc, adopté. J'appelle l'article 139.

M. Rémillard: Qui se lit comme suit: «Les frais visés à l'article 93 peuvent être payés, à la demande du réclamant, directement au fournisseur.»

M. le Président, cet article permet au ministre, à la demande du réclamant, de payer les frais directement au fournisseur. Il est conforme à la Loi sur l'assurance automobile.

M. Bélanger: Adopté.

Le Président (M. Dauphin): Adopté. J'appelle l'article 140.

M. Rémillard: Qui se lit comme suit: «Le montant d'une prestation impayé à la date du décès de la personne qui y a droit est versé à sa succession.»

Cet article prévoit le versement d'une indemnité impayée, au décès d'une victime, à sa succession. Il est conforme à la Loi sur l'assurance automobile.

M. Bélanger: Adopté.

Le Président (M. Dauphin): Adopté. J'appelle l'article 141.

M. Rémillard: Qui se lit comme suit: «Lorsque le réclamant est un mineur ou un majeur protégé qui n'a pas de capacité juridique reconnue en vertu d'une disposition du Code civil du Québec, le ministre verse le montant de la prestation auquel il a droit à son tuteur ou à son curateur, selon le cas, et avise le Curateur public.»

M. le Président, cet article énonce qu'une indemnité payable à une victime mineure ou majeure protégée qui n'a pas de capacité juridique au sens du Code civil du Québec est versée à son tuteur ou à son curateur. Le ministre avise le Curateur public de ce versement. Cet article est conforme aux nouvelles dispositions du Code civil du Québec et s'inspire de la Loi sur l'assurance automobile.

M. Bélanger: Adopté.

Le Président (M. Dauphin): Adopté. J'appelle l'article 142.

M. Rémillard: Qui se lit comme suit: «Les indemnités de remplacement du revenu sont réputées être le salaire du réclamant et sont saisissables à titre de dette alimentaire conformément au deuxième alinéa de l'article 553 du Code de procédure civile (L.R.Q., chapitre C-25), compte tenu des adaptations nécessaires. À l'égard de toute autre dette, ces indemnités sont insaisissables. «Toute autre prestation versée en vertu du présent titre est insaisissable.»

M. le Président, cet article énonce le principe de Pinsaisissabilité des indemnités versées par le ministre, à l'exception de l'indemnité de remplacement du revenu, qui est saisissable à titre de dette alimentaire. Cet article est conforme à la Loi sur l'assurance automobile.

M. Bélanger: M. le Président, au niveau de la technique de rédaction, je me demandais si ça n'aurait pas été préférable — je suis loin d'être un expert dans le domaine, j'aimerais juste avoir une réponse là-dessus — plutôt de proclamer Finsaisissabilité et de dire qu'elles ne sont saisissables que dans les cas prévus au Code de procédure ou au Code civil. Pourquoi venir dire «et sont saisissables à titre de dette alimentaire»? Ça n'aurait pas été préférable plutôt de proclamer Finsaisissabilité et qu'elles ne peuvent être saisies qu'en conformité à... je ne le sais pas, moi.

Normalement, il me semble que dans d'autres lois... Je regarde, en tout cas, la Loi sur les accidents du travail: Les prestations accordées en vertu de la présente loi à l'article 20 sont incessibles et insaisissables — bon, c'est clair — sauf comme il est autrement prévu. Il pourrait être marqué: sauf comme il est autrement prévu par la loi. Moi, je comprends que... je suis tout à fait d'accord avec le principe que, pour des dettes alimentaires, ça doit être saisissable, là, mais, c'est au niveau de la technique, là, de rédiger. Pourquoi? Pourquoi cette façon-là?

M. Rémillard: On m'informe, M. le Président, que les deux modèles peuvent exister, mais que, par souci de cohérence, on s'est collé, si vous voulez, à la rédaction de la Loi sur l'assurance automobile, mais je peux demander à nos légistes. Me Gauvin, est-ce que vous aimeriez nous faire un commentaire sur ce point-là bien précis?

Le Président (M. Dauphin): Me Gauvin.

Mme Gauvin (Franchie): J'aimerais peut-être vous demander une précision. Ce que vous souhaiteriez, c'est qu'on...

M. Bélanger: Ah mais...

Mme Gauvin (Francine): ...précise la règle à l'effet que c'est insaisissable et, l'exception, que...

M. Bélanger: Bien, je pose la question, tout simplement, parce que, normalement, les autres lois que j'ai vues, quand il y a des dispositions d'insaisissabilité dans d'autres lois...

Mme Gauvin (Francine): Oui.

M. Bélanger: ...on commence par dire: C'est insaisissable. D'accord? On commence par proclamer le principe de Finsaisissabilité et, après, on dit qu'elles peuvent être saisies dans des cas conformément à la loi ou au Code de procédure civile. D'accord? Mais, là, c'est plutôt le contraire. C'est parce que c'est un peu ambigu. On dit qu'elles «sont réputées être le salaire du réclamant et sont saisissables à titre de dette alimentaire». Et après ça on dit: À l'égard de toutes les autres dettes, ces indemnités sont insaisissables. En tout cas, c'est peut-être rien que de l'effet de style, là, mais je ne sais pas.

M. Rémillard: Les deux façons sont envisageables.

M. Bélanger: Oui.

M. Rémillard: Mais, là, comme ils ont pris la même façon dans l'autre loi, je crois qu'on est mieux de garder cette façon-ci, M. le Président, parce que ça fait deux techniques de rédaction. Alors, mieux vaut garder la même technique de rédaction, puisque les résultats sont les mêmes.

M. Bélanger: Ça va.

Le Président (M. Dauphin): Adopté. J'appelle l'article 143.

M. Rémillard: Qui se lit comme suit: «Le ministre doit, sur demande du ministre de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu, déduire des prestations payables au réclamant en vertu du présent titre celles qui lui ont été versées personnellement ou à sa famille en vertu de la Loi sur la sécurité du revenu (L.R.Q., chapitre S-3.1.1) et qui sont remboursables en vertu de l'article 35 de cette loi. «Le ministre remet le montant ainsi déduit au ministre de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu.»

Alors, cet article, M. le Président, prévoit qu'à la demande du ministre de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu le ministre de la Justice déduit certaines sommes d'argent des indemnités qu'il verse à une personne et les lui remet. Cet article est conforme à la Loi sur l'assurance automobile de même qu'à une disposition semblable de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles.

M. Bélanger: M. le Président, je regarde, ici, la suggestion faite par deux avocats de l'aide juridique sur l'article 143 à l'effet qu'ils suggèrent que cette disposition ne devrait s'appliquer que pour l'indemnité de remplacement du revenu. Ça, je pense que c'est tout à fait logique. Et, dans le cas d'un montant forfaitaire, il faudrait prévoir un amendement à l'article 120.1 du règlement sur la sécurité du revenu pour prévoir qu'il n'y aura aucun remboursement.

Je dois comprendre que, quand il y a des montants forfaitaires, c'est surtout quand il y a eu un DAP, un déficit anatomophysiologique, qui a été octroyé, et, à ce moment-là, c'est pour une indemnité pour perte de jouissance de la vie ou déficit. Alors, finalement, si je comprends bien la portée de cet article de loi là, c'est que les montants qu'on va recevoir à titre de dédommagement pour un DAP, à ce moment-là, vont devoir être remboursés au ministère de la Sécurité du revenu. Est-ce que je comprends bien? Non? Non?

M. Rémillard: Non, pas tout à fait, non. Il y a des nuances à apporter.

M. Bélanger: Oui?

M. Rémillard: Me Gauvin a bien étudié cet aspect-là. M. le Président, avec votre permission, je lui demanderais de nous faire un commentaire.

Le Président (M. Dauphin): Avec plaisir. Me Gauvin.

Mme Gauvin (Francine): Oui, en fait, ce que prévoit l'article 143, c'est que le ministre doit, sur demande du ministre de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu, déduire les prestations ou les sommes qui lui sont remboursables en vertu de l'article 35 de cette loi, donc la Loi sur la sécurité du revenu. Dans le règlement sur la sécurité du revenu, on a prévu de façon spécifique qu'une personne n'est pas tenue de rembourser au ministre, en application de l'article 35 de la loi, les prestations qu'elle a reçues lorsque le droit réalisé — et on a, au quatrième paragraphe — constitue une indemnité pour dommage non pécuniaire et qui est liée à une perte d'intégrité physique ou psychique. Ce qui voudrait dire que, dans les cas où le ministre, dans l'application du régime d'indemnisation, accorderait à une personne une indemnité forfaitaire pour compenser une perte d'intégrité physique ou psychique, la personne ne serait pas tenue de rembourser au ministre de la Sécurité du revenu la somme qu'elle a reçue. Donc, le ministre de la Justice ne serait pas tenu de rembourser le ministère de la Main-d'oeuvre.

M. Bélanger: Ça me fait penser à mon cas particulier qu'on avait soumis l'autre fois.

Mme Gauvin (Francine): Effectivement. (16 h 50)

M. Bélanger: On voulait faire une capitalisation. Mais, là, il y avait un problème parce que la personne était mineure, et il ne pouvait pas y avoir de capitalisation parce qu'elle était mineure.

Mme Gauvin (Francine): C'était une rente qu'elle recevait aussi.

M. Bélanger: Oui. C'est ça.

Mme Gauvin (Francine): C'était une compensation de...

M. Bélanger: Oui.

Mme Gauvin (Francine): C'était versé sous forme de rente et non pas sous forme de montant forfaitaire.

M. Bélanger: Donc, si je vous comprends bien, c'est qu'à partir du moment où le montant forfaitaire correspond à un dédommagement pour un déficit anatomophysiologique...

Mme Gauvin (Francine): Une perte d'intégrité physique ou psychique.

M. Bélanger: ...prenons cet exemple-là... Mme Gauvin (Francine): Oui.

M. Bélanger: ...à ce moment-là, il n'y a pas de déduction faite, de remboursement fait au ministère du Revenu. C'est ça?

Mme Gauvin (Francine): Parce qu'elle n'est pas tenue de rembourser ce ministère-là.

M. Bélanger: Elle n'est pas tenue. Bon. O.K. Mais, pour tous les autres montants forfaitaires qui pourraient être octroyés, à ce moment-là, oui, il pourrait y avoir...

M. Rémillard: Ça pourrait être comme... Autre, ça serait quoi?

Mme Gauvin (Francine): C'est des remboursements de frais, c'est... Il n'y a pas d'autre indemnité forfaitaire de prévue que pour compenser une perte d'intégrité physique ou psychique. Donc, il n'y aurait pas d'application, là...

M. Bélanger: O.K.

Mme Gauvin (Francine): ...de 143 à cet égard-là.

M. Bélanger: Parfait. Et l'article 120.1 du règlement, est-ce que c'est ce que vous venez de me lire? C'est ça, hein? C'est ça. Merci. Adopté.

Le Président (M. Dauphin): Adopté, 143. J'appelle l'article 144, auquel cas il y a un amendement. M. le ministre.

M. Rémillard: À 144, l'amendement se lit comme suit, M. le Président: L'article 144 est modifié par l'insertion, dans la quatrième ligne du deuxième alinéa et après le mot «reçoit», des mots «de la personne responsable du préjudice ou».

M. le Président, cet amendement a pour objet de préciser que la prestation versée à la victime est réduite des montants qu'elle perçoit à la suite d'un recours civil ou autrement de la personne responsable du préjudice qu'elle a subi.

M. Bélanger: Adopté.

Le Président (M. Dauphin): L'amendement est adopté. Est-ce que l'article, tel qu'amendé, est adopté?

M. Bélanger: M. le Président, j'aimerais, relativement à l'article 144, faire part des commentaires formulés par le Protecteur du citoyen relativement à cette disposition, et je lis à la page 9 de son rapport: «Cette disposition, en ce qui concerne notamment la déduction de la prestation versée en vertu de régimes de rentes ou de pension, même si elle a pour but d'éviter qu'une personne reçoive pour une même période une double indemnité, peut causer préjudice à la victime d'un acte criminel ou au sauveteur qui a aussi droit à une prestation d'invalidité, par rapport à une autre victime qui n'y a pas droit. «Ce préjudice découle du fait que la rente d'invalidité versée, par exemple, par la Régie des rentes du Québec est imposable alors qu'une indemnité de remplacement du revenu versée par le ministre de la Justice ne le sera vraisemblablement pas, dès que l'article 488 RI du Règlement sur les impôts aura été modifié par concordance avec le nouveau régime.» alors, il continue: «l'indemnité de replacement du revenu représente 90 % du revenu net d'une victime, lequel s'obtient en soustrayant du revenu brut annuel de celle-ci un montant équivalent à l'impôt provincial, à l'impôt fédéral et aux cotisations à l'assurance-chômage et à la régie des rentes du québec, que la victime aurait dû payer n'eût été de l'incident.» et là on donne des exemples. «il est donc tout à fait inéquitable que les victimes visées par le projet de loi soient ainsi pénalisées pour avoir cotisé obligatoirement à un régime de rentes ou de pension afin d'obtenir une protection en cas d'invalidité.»

Je voudrais savoir quelle est la réaction du ministre suite à ces propos du Protecteur du citoyen.

M. Rémillard: Alors, comme toutes les remarques que nous fait valoir.le Protecteur du citoyen, on regarde très attentivement, et, dans ce cas-ci, ça se réfère à des cas très ponctuels.

M. Bélanger: Oui.

M. Rémillard: Alors, on a demandé à des experts du ministère des Finances, du ministère du Revenu, de la Régie des rentes et de la Société de l'assurance automobile, dont on sait que le régime d'indemnisation prévoit une clause similaire. Alors, ces ministères et organismes ont mis sur pied une table de concertation pour voir toute la réelle situation et l'impact de cette situation. Alors, au moment où on se parle, M. le Président, je pense que ce serait bien téméraire d'aller plus loin et de voir tous les impacts d'une telle proposition, si ce n'est de dire qu'on la fait étudier.

M. Bélanger: Donc, si je comprends bien les propos du ministre, il est conscient que les cas qui sont présentés ici par le Protecteur du citoyen posent problème, et il essaie, de concert avec les autres ministères impliqués, de trouver une solution au problème. Est-ce que c'est bien ce que je dois comprendre?

M. Rémillard: C'est à peu près ce que vous devez comprendre.

M. Bélanger: Ha, ha, ha! Et est-ce que je dois aussi comprendre qu'on devrait donc s'attendre à des modifications de la situation?

M. Rémillard: Je ne sais pas si ça va être prêt à temps parce que ce n'est pas facile. Ce n'est pas des cas très, très nombreux, mais il reste quand même que ce n'est pas une raison pour les mettre de côté parce que ce n'est pas très nombreux. Mais il reste que ça demande aussi de la table de concertation... Je ne pense pas avoir de résultats avant la fin de nos travaux. Pas possible.

M. Bélanger: Parce qu'on nous parle ici... Je pense que le Protecteur du citoyen, justement, fait mention déjà que, justement, la Régie des rentes, la Société de l'assurance automobile et le ministère du Conseil exécutif étudient présentement des avenues, mais il me semble qu'on étudie depuis un bout de temps. Ça fait combien de temps qu'on étudie là-dessus?

M. Rémillard: C'est assez récent. M. Bélanger: C'est assez récent?

M. Rémillard: Ah oui, oui. Ça ne fait pas très longtemps. Ils l'étudient pour la Société de l'assurance automobile en particulier, donc pour voir, nous, les impacts. Alors, quand on aura le résultat de tout ça, s'il faut faire un amendement, on le fera, mais, d'ici la session, ce n'est pas possible.

M. Bélanger: II faudrait s'attendre, à ce moment-là, à une modification de toutes les lois qui sont ainsi concernées.

M. Rémillard: De toutes les lois qui prévoient... Oui. Si c'est ça, la conclusion.

Le Président (M. Dauphin): Ça va, M. le député d'Anjou?

M. Bélanger: Adopté.

Le Président (M. Dauphin): Adopté. Donc, l'article 144 est adopté tel qu'amendé. J'appelle l'article 145, auquel cas il y a aussi un amendement.

M. Rémillard: Oui, M. le Président, qui se lit comme suit: Remplacer, dans la troisième ligne de ce qui précède le paragraphe 1°, le mot «profite» par le mot «profitent».

Alors, M. le Président, cet amendement est strictement d'ordre rédactionnel.

Le Président (M. Dauphin): Est-ce que l'amendement clérical ou rédactionnel est adopté?

M. Bélanger: Adopté.

Le Président (M. Dauphin): Et l'article, maintenant, tel qu'amendé?

M. Bélanger: Je regarde ici les remarques formulées par l'organisme Plaidoyer-Victimes relativement à l'article 145, premier alinéa en particulier, et l'organisme, tout en étant d'accord avec le principe, se pose des questions. Et je lis les commentaires, à la page 28, de l'organisme: «Toutefois, nous nous interrogeons sur la pertinence d'assujettir certaines catégories de victimes au contenu de cet article. Il nous apparaît évident que les victimes susceptibles d'être soumises à l'application de cet article sont celles qui connaissent personnellement leurs agresseurs, notamment les femmes violentées et les personnes âgées abusées par un proche. Est-ce à dire que ces catégories de victimes seront davantage "contrôlées" afin que le ministre puisse s'assurer que les prestations ne profitent aux auteurs du crime?»

Alors, c'est l'interrogation formulée par ces organismes. Et le Conseil du statut de la femme, d'ailleurs, s'interroge un peu de la même façon sur la portée de cet article. Est-ce que, finalement, ça va être un groupe, qu'on pourrait dire, de victimes qui vont peut-être bénéficier, si on peut dire bénéficier, d'une protection plus accrue ou d'une surveillance plus accrue? (17 heures)

M. Rémillard: M. le Président, de fait, on peut s'interroger comme le fait le groupe Plaidoyer-Victimes. On sait que cet article 145 prévoit le pouvoir du ministre de prendre certaines mesures afin d'éviter que les indemnités qu'il verse à un réclamant ne bénéficient à l'auteur de l'infraction criminelle, au départ. Et je dois dire, M. le Président, que cette mesure fait notamment suite à une demande formulée par l'Association québécoise plaidoyer-victimes, lors du Sommet de la Justice, à l'effet de prévoir un mécanisme visant à éviter que l'agresseur puisse s'enrichir des indemnités versées à sa victime. Alors, au départ, c'est ce qui était prévu. Maintenant, on se pose d'autres interrogations.

Il peut y avoir des exemples, M. le Président, qu'on peut citer. Je vois ici une note qu'on me donne avec des exemples. On dit: On pourrait suspendre temporairement le versement d'une indemnité forfaitaire pendant la période où un conjoint violent suit une thérapie lorsque la victime continue à cohabiter.

Deuxièmement: On pourrait suspendre temporairement le versement d'une indemnité forfaitaire le temps que la victime réorganise sa vie; comme, par exemple, déménagement et changement de compte de banque.

Autre cas: Dans le cas d'une personne âgée violentée par un de ses proches, on pourrait étaler et verser à un autre membre de la famille l'indemnité due à la victime. Ou, encore... Bref, ces mesures ne visent qu'à venir en aide à une victime et cela ne remet nullement en question le droit à l'indemnité. On me souligne que la majorité des États américains ont une disposition semblable.

Alors, d'une part, il ne faut pas pénaliser la victime, mais ne pas faire en sorte aussi que le criminel — l'auteur de l'infraction criminelle, qui est le criminel — bénéficie de l'indemnité. Et, là, on peut aller très loin, on peut relier ça au fait de dénoncer, le «dénoncement» de l'acte criminel. Vous savez, c'est toujours difficile parce que, par exemple, la femme qui est victime d'acte criminel, victime d'agression, victime de violence conjugale, elle retourne au foyer et elle continue à vivre avec son mari ou son conjoint qui l'a agressée, qui l'a battue, et, nous, on lui donne une indemnité. Donc, elle continue à vivre avec cette personne-là et elle continue à le faire vivre, d'une certaine façon, à même des indemnités qu'elle reçoit. Il y a des situations qui devront être appréciées comme ça.

Alors, il ne faut pas pénaliser non plus... Il faut penser aux enfants qui vivent dans tout ça. Il ne faut pas que les enfants soient pénalisés parce que, tout à coup, on coupe des revenus. Il ne faut pas briser une famille. Il y a bien des éléments, M. le Président. Et c'est comme ça qu'on en était venu, au Sommet de la Justice, à la position que nous avons dans le projet de loi.

Me Viens, qui a donc l'expérience de ces cas, pourrait peut-être nous faire des commentaires, avec votre permission, M. le Président.

Le Président (M. Dauphin): Avec plaisir. Me Viens.

Mme Viens (Christine): La problématique de la violence conjugale est complexe et, en ce qui concerne l'indemnisation des victimes d'actes criminels, pose un défi à l'État qui veut indemniser les victimes tout en évitant de créer un incitatif à une violence accrue. Il faut dire que la violence conjugale a comme particularité d'être souvent à répétition. Évidemment, c'est le cas dans la majorité des cas. C'est un processus qui est

continu de violence et il est difficile pour les victimes de s'en sortir. Elles continuent souvent à cohabiter, et il n'est pas de l'intention de l'État de les forcer à cesser de le faire. Mais qu'est-ce qui arrive si une victime de violence conjugale reçoit une indemnisation? Elle continue à cohabiter avec l'agresseur, les actes continuent à se répéter, elle revient voir le ministre pour une nouvelle indemnisation, elle retourne cohabiter avec l'agresseur et elle revient. Ce n'est pas une situation qui serait impensable, et même on commence, à ce qu'on m'a dit, à la Direction de l'indemnisation des victimes d'actes criminels, à avoir de telles situations. Alors, ça pose un réel défi au ministre d'assurer que les sommes ne sont pas un motif pour l'agresseur de répéter ces actes.

Dans les États américains, la majorité des programmes prévoient que les indemnités peuvent être refusées lorsqu'il peut en résulter un enrichissement injuste ou un bénéfice économique substantiel pour l'agresseur. Donc, il y a refus. Ce n'est pas une voie que nous avons choisie, dans le respect des droits des victimes. Cependant, cette mesure viserait à protéger la victime dans des exemples comme ceux qu'a mentionnés le ministre.

M. Bélanger: M. le Président, il faut bien comprendre, quand je parlais, auparavant, du Conseil du statut de la femme et puis de l'organisme Plaidoyer-Victimes qui faisaient des commentaires, les deux organismes sont pour le but visé par cette disposition, c'est-à-dire éviter qu'un agresseur puisse s'enrichir des indemnités versées. Ça, je pense, là-dessus, sur le principe, tout le monde est d'accord. C'est de savoir: comment va-t-il s'appliquer? À partir de quels critères? Lui, le Conseil du statut de la femme, aurait préféré peut-être, au lieu que ça soit discrétionnaire au ministre, à ce moment-là, eux autres suggéraient qu'on puisse mettre que le ministre peut offrir au réclamant certaines modalités, certaines dispositions, au lieu de le mettre à la discrétion du ministre.

M. Rémillard: Les cas, M. le Président, sont complexes et on ne peut pas établir de règles d'une façon générale. Et, moi, je crois que dans ces cas-là, où il y a tellement de sensibilité, puis tellement d'aspects humains importants, il faut étudier cas par cas. Ça ne se tranche pas au couteau — sans jeu de mots — directement, dans des cas comme ça. Alors, peut-être que Mme Viens pourrait compléter mes commentaires, M. le Président.

Le Président (M. Dauphin): Me Viens.

Mme Viens (Christine): Nous avons envisagé cette question de consentement de la victime, mais ça ne nous est pas apparu souhaitable pour la raison suivante, c'est que le consentement est justement souvent la problématique dans ces cas de violence conjugale. La personne est sous le joug de son agresseur. Donc, mettre une règle comme ça pourrait même générer, si on veut, une violence de la part de son agresseur, puisqu'il reprocherait à la victime d'avoir consenti à certaines choses.

Alors, comme le disait M. le ministre, ce n'est pas un problème simple. Ça ne serait pas aider la victime que de la placer dans une position où elle devrait faire un choix.

Le Président (M. Dauphin): M. le député.

M. Bélanger: Sauf, M. le Président, que la question que je me pose, s'il n'y a pas consentement de la part de la victime, là, à concourir à ce genre de mécanisme, comment peut-on verser l'indemnité sans être certain qu'elle va être versée soit au conjoint agresseur ou à la personne qui est en contact avec la victime, là, qui est la source du problème? Je me demande... J'essaie d'imaginer le mécanisme. La seule chose, c'est de suspendre carrément les paiements. Parce que même de payer dans un compte séparé, dans une autre institution financière ou... Qu'est-ce qu'on pourrait... J'essaie d'imaginer, là. C'est quoi le seul recours qui va être disponible? Ça va être de suspendre le paiement purement et simplement?

Mme Viens (Christine): C'est que...

Le Président (M. Dauphin): Me Viens, pour les fins du Journal des débats.

Mme Viens (Christine): Étant donné que cet article ne vise en aucune façon à contrecarrer les droits de la victime à l'indemnité, je soumets qu'une suspension indéfinie serait une façon de faire de façon détournée ce qu'on ne veut pas faire de façon directe. Donc, je ne crois pas que ça soit de bonnes solutions. Cependant, comme dans l'exemple qui était mentionné, si l'agresseur suit une thérapie, on pourrait suspendre pour une période déterminée, le temps de voir comment il va s'amender ou changer son comportement. La victime peut aussi avoir entrepris, dans son processus de réadaptation, elle-même une thérapie qui, dans ces cas-là, vise à améliorer l'estime de soi et son autonomie, donc, la rendre plus «secure» à l'égard de son agresseur. Alors, ça pourrait être des suspensions de périodes limitées.

M. Rémillard: M. le Président...

Le Président (M. Dauphin): M. le ministre.

M. Rémillard: ...si vous me permettez, sans prendre trop de temps de cette commission, je vois quand même une relation qu'on doit faire entre l'article 11, qu'on devra revenir rediscuter — on a vu toutes les interventions sur la place publique — et le principe à l'effet qu'on doit collaborer pour dénoncer. Il faut qu'on comprenne qu'à un moment donné, dans le contexte de la violence conjugale, il y a à prendre en considération le bien-être de la femme qui est agressée, qui est battue,

le bien-être des enfants aussi qui sont là. Et, quand Mme Viens nous parle des thérapies qu'on doit offrir à l'homme violent, il faut qu'il soit dénoncé si on veut lui offrir une thérapie. Alors, c'est ça que le ministre... On donne, dans cet article, la discrétion au ministre pour apprécier. Parce qu'il ne faut pas nécessairement couper l'indemnité à la victime parce que l'homme, son conjoint, continue à vivre dans le foyer conjugal. Ça peut être une bonne chose qu'il continue à y vivre. Puis les enfants qui sont là et que leur père est avec eux, ça peut être une bonne chose, mais il faut l'apprécier et il faut surtout que cette personne-là ait été vue et ait reçu les traitements nécessaires ou en reçoive encore ou, bref, soit sous contrôle médical ou même policier, s'il le faut, pour ne pas mettre la sécurité de la personne en jeu. (17 h 10)

Mais, moi, je me dis dans tout cela: Pensons en termes de victime. Mais la victime n'est pas simplement celle qui a été agressée, qui a été battue, les enfants sont aussi des victimes d'une façon subséquente en voyant leur mère, ce qui s'est passé, en vivant dans un foyer qui peut être aussi désuni à cause de ça.

Alors, c'est pour ça que c'est complexe, M. le Président, et je crois que mettre une discrétion au niveau du ministre, dans ces cas-là, c'est peut-être plus sage. J'ai cette impression-là.

Le Président (M. Dauphin): Ça va, M. le député d'Anjou?

M. Bélanger: M. le Président, c'est parce que j'imaginais le cas d'une femme habitant avec un conjoint violent et, qui, justement, à répétition serait battue, finalement, et qui, à répétition, donc, se retrouverait à l'IVAC. Et puis qui n'est pas encore rendue, dans son cheminement, à justement vouloir agir. Malheureusement, je pense — en tous cas, Me Viens pourra le confirmer — ce sont des cas qui arrivent. À ce moment-là, je comprends qu'on peut suspendre temporairement, comme mesure pour éviter l'enrichissement de l'agresseur, on peut suspendre temporairement mais, finalement, le seul recours qu'il va y avoir, c'est de complètement couper, à un moment donné, la prestation. C'est ça?

M. Rémillard: Non, non. Moi, pour ma part...

M. Bélanger: On va faire quoi? On va continuer? On va continuer...

M. Rémillard: Moi, le cas que vous venez de mentionner, c'est encore un autre cas où on ne pourrait pas vivre un cas comme ça si la victime collabore avec le système policier et le système de justice pour faire que son conjoint ait des traitements ou soit tout simplement emprisonné ou je ne sais trop quoi. Parce que là, quand vous me dites que ça fait deux fois, trois fois que cette personne-là est battue, il faut la protéger. Ça n'a pas de bon sens. Là, ce n'est plus simplement une question d'argent. Ce n'est pas une question simplement de lui donner des sous, c'est une question de la protéger. Il faut la protéger.

M. Bélanger: Je suis d'accord avec ça, mais si la personne voit à un moment donné qu'elle n'est pas prête à prendre de décision psychologiquement... Je pense que Me Viens le comprend très bien. C'est très complexe, au niveau psychologique, la situation d'une victime de violence conjugale. Je comprends qu'on peut y mettre une obligation de collaborer, mais, si elle n'est pas prête psychologiquement à agir relativement à son conjoint, tout ce qu'elle va faire, c'est que vous ne la reverrez plus devant l'IVAC. Elle ne viendra même plus vous voir, elle va continuer à se faire battre, puis en plus elle n'aura plus le droit à rien. C'est ça qui va arriver. C'est tout simplement ça qui va arriver.

M. Rémillard: Oui, mais...

M. Bélanger: Parce qu'il ne faut pas penser que parce qu'on y met une obligation légale... Je sais, légalement, du point de vue purement légal, on peut trouver que c'est tout à fait louable, mais dans les faits, quand on connaît la psychologie de ces victimes-là, qui est complexe — Me Viens, je pense, va reconnaître ça avec nous — ce qui va arriver, c'est que, si on force trop la personne à vouloir porter plainte et qu'elle ne le veut pas, qu'elle n'est pas prête psychologiquement à le faire, elle ne viendra plus voir l'IVAC, tout simplement, et elle va continuer d'une façon silencieuse d'être une victime d'actes criminels qui, à ce moment-là, n'aura le droit à aucune ressource.

M. Rémillard: Mais ce que Me Viens me dit — je vais lui demander de compléter — c'est que la personne, à ce moment-là, est déjà engagée dans le processus. Je vais demander à Me Viens de compléter.

Mme Viens (Christine): La personne qui fait une demande d'indemnisation à l'IVAC... Il faut dire que des cas se sont présentés où il y a eu des cas à répétition, mais il faut dire que la personne est déjà quand même engagée dans un processus de sortir de chez elle et de son isolement et de commencer à parler, parce que, lorsqu'elle va à l'IVAC, il faut qu'elle décrive les circonstances. Donc, il faut qu'elle commence à dire: Je suis battue par mon conjoint. Parce qu'elle ne pourra pas dire «je suis battue», comme ça. Déjà, il y a un processus qui est enclenché. Alors, ici, c'est un incitatif à aller plus loin et à l'aider à se reprendre et à reprendre son autonomie.

La dénonciation aussi peut être un processus thérapeutique dans certains cas. On n'en parle pas, mais les gens qui travaillent de façon plus directe avec les victimes disent souvent qu'elles ont beaucoup de satisfaction d'avoir eu le pouvoir de se tenir, de dénoncer et de raconter les événements qu'elles ont vécus devant un

tribunal. C'est une démarche qui n'est pas facile, mais, souvent, quand elles ont réussi à le faire, elles en tirent beaucoup de satisfaction et elles en sortent grandies.

M. Bélanger: M. le Président, je sais qu'on va revenir là-dessus, sur la question de l'obligation de dénoncer, de collaborer et tout ça. Ce que je retiens des témoignages d'organismes qui travaillent auprès des victimes d'actes criminels, justement, c'est le fait que, bon, il faut, à un moment donné, en arriver à un geste positif de la part de la victime pour qu'elle se sorte de ce cercle vicieux. On ne peut pas accepter, ni même alimenter une situation de violence à répétition. Ça, c'est complètement hors de question. Mais, aussi, je pense que ce qu'on doit retenir, c'est qu'il faut absolument que ça devienne volontaire de la part de la victime, le fait de vouloir s'en sortir. On ne peut forcer ça. On ne peut pas la forcer. C'est pour ça que cette obligation de dénonciation, en tout cas dans le cas des victimes de violence conjugale, je sais qu'on va y revenir, mais j'ai beaucoup de difficultés à penser que c'est par une obligation, que c'est par un mécanisme un peu de pression qu'on va arriver vraiment à faire sortir la personne de ce cercle vicieux. Puis, dans le cas aussi d'un enfant mineur qui serait victime d'un acte criminel relativement à son milieu, encore là, le même problème peut jouer. Ce n'est pas toujours souhaitable de, justement, sortir l'enfant de son milieu familial suite à un incident ou même à un acte criminel.

M. Rémillard: Oui, évidemment, pour le mineur, il y a la DPJ qui est là.

M. Bélanger: Oui, mais...

M. Rémillard: Je pense que le terme utilisé par le député d'Anjou est juste dans le sens de «cercle vicieux». Bon, le cercle vicieux, vous l'avez en violence conjugale, oui. Vous pouvez l'avoir aussi dans le milieu, c'est-à-dire dans le domaine de la mafia, dans le domaine de la drogue, dans ces domaines-là où quelqu'un est pris dans le cercle...

M. Bélanger: ...dans l'engrenage.

M. Rémillard: ...est pris dans l'engrenage. Et, à ce moment-là, comment fait-on, nous, pour lui venir en aide et protéger cette personne? C'est ça qui est notre défi, à nous, comme parlementaires: de trouver le meilleur moyen de l'aider, de protéger cette personne-là et aussi de protéger par le fait même la société. Alors, c'est ça qui est notre grand défi.

Et la violence conjugale... N'oublions pas que nous avons, depuis cinq ans, des policiers qui sont formés pour aider sur le plan psychologique, qui ont une expertise particulière de la violence conjugale. N'oublions pas que les procureurs de la couronne ont une expertise particulière. On a essayé de mettre, là, tout un ensemble d'événements, mais, depuis cinq ans, la violence conjugale est devenue un crime; il y a quelques années, c'était simplement une affaire de famille. Alors, comment trouver le moyen de prendre en considération l'aspect humain et la difficulté pour certaines victimes, bien sûr, de dénoncer leur agresseur et l'auteur de la violence et, en plus, de protéger cette personne et de l'aider à se sortir de ce cercle vicieux ou infernal dans lequel elle est? Moi, je crois qu'on a ici des exemples qu'on veut citer. Je crois qu'on a un juste milieu qui est là.

Je regarde. Il y a un livre ici, «Intervention socio-judiciaire en violence conjugale», de Yves Morier, Catherine Bluteau, Guy Bruneau, Claire Lessard, Pierre Beaudet. Alors, ce sont des gens, des procureurs de la couronne, des policiers, des gens qui oeuvrent dans le domaine de la violence conjugale. Et ce qu'ils écrivent... C'est un livre qui est très bien fait, ce livre. Je ne sais pas si vous le connaissez, je vais vous le passer, tout à l'heure. Il est très, très bien fait et c'est exactement ce qu'ils recommandent. C'est exactement ce qu'ils recommandent. Je lisais ça, justement en fin de semaine, et la conclusion pour sortir du cercle infernal de la violence conjugale: II est important de publier cet ouvrage pour fournir un cadre de référence afin de raffiner les méthodes d'intervention en balisant les agir complémentaires des divers intervenants, et la démonstration aux victimes de l'importance d'une dénonciation judiciaire des sévices vécus brisera le cycle de la violence. Les gens en arrivent tous à cette conclusion-là.

Alors, nous, comme parlementaires, c'est de trouver quand même des moyens. Que des cas exceptionnels puissent être traités, je veux bien, mais il faut quand même qu'on garde l'objectif bien clair devant nous.

Le Président (M. Dauphin): Merci, M. le ministre. (17 h 20)

M. Bélanger: M. le Président, je pense que mon but n'est pas de remettre en cause le besoin psychologique ou le bienfait psychologique de la dénonciation; je pense que, ça, c'est acquis. Il reste à savoir comment on obtient, finalement, cette action de dénoncer? Est-ce qu'on l'obtient par une imposition dans la loi ou par une aide apportée dès le début, un soutien psychologique apporté dès le début à la victime, sans imposition, pour amener finalement un cheminement? C'est évident que, comme je le disais, c'est un cercle vicieux qu'il faut briser. Mais de quelle façon on le brise? On le brise par une imposition de la loi ou par un appui, une aide psychologique dès le début, un soutien psychologique pour faire en sorte que la victime fasse son cheminement jusqu'à, finalement, dénoncer l'acte reprehensible et la personne qui cause, qui crée cet acte reprehensible?

Je pense qu'il ne faut pas, ici, mélanger deux choses qui sont, d'après moi, tout à fait distinctes. Il ne faut pas mélanger l'aspect «sécurité» de la personne et l'aspect «indemnisation». Là, ici, présentement, on a une loi d'indemnisation des victimes d'actes criminels, ce

n'est pas une loi de la sécurité publique qui prévoit des mesures de protection de la victime. Il faut garder ça à l'esprit et se concentrer dans notre cheminement aussi et dans notre raisonnement sur cet aspect-là: c'est une loi d'indemnisation, de réhabilitation pour aider la victime d'actes criminels. Mais, au niveau de la protection, je ne pense pas que ce projet de loi va donner des ressources additionnelles à la Sécurité publique ou aux forces policières. et on en conviendra tous, tant d'un côté ou de l'autre de cette table, m. le président, les ressources que nous avons au niveau de la sécurité publique sont limitées et elles ne pourront jamais accorder une protection à 100 % aux victimes d'actes criminels. je pense qu'il faut être conscients de ça. c'est pour ça, je pense, qu'il faut vraiment se concentrer uniquement sur l'aspect «indemnisation-réhabilitation» de la victime. l'aspect «sécurité», évidemment, je ne pense pas que c'est le but de cette loi-là.

M. Rémillard: M. le Président...

Le Président (M. Dauphin): M. le ministre.

M. Rémillard: ...peut-être que je suis fautif, d'ailleurs, parce que c'est moi qui ai engagé le débat, on est en train de faire le débat sur l'article 11. Ça va être un des grands débats, je pense, qu'on aura à faire. Moi, je soumets bien respectueusement qu'on devrait attendre à l'article 11. J'aimerais ça qu'on le garde pour la fin, parce que ça amène tout un aspect, une psychologie et une approche de ce projet de loi. Peut-être que j'ai trop ouvert, M. le Président, dans mes discussions à ce moment-ci pour cet article.

Le Président (M. Dauphin): Si j'ai bien compris, refermons un peu le débat et...

M. Bélanger: Je plaide coupable, moi aussi. Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Dauphin): ...adoptons l'article 145, tout en prenant fait et cause de vos plaidoyers de culpabilité.

M. Bélanger: Pour en revenir à l'article 145, donc, je dois comprendre que le ministre ne croit pas qu'il est nécessaire de revenir sur le caractère discrétionnaire; c'est à sa discrétion, à ce moment-là, qu'il peut...

M. Rémillard: Je crois que c'est une bonne chose de garder la discrétion du ministre.

M. Bélanger: D'accord. Adopté.

Le Président (M. Dauphin): Adopté tel qu'amendé. J'appelle l'article 146.

M. Rémillard: M. le Président, connaissant vos qualités de lecteur, pouvons-nous vous demander de nous lire l'article 146?

Le Président (M. Dauphin): Avec plaisir. Je m'en allais justement vous l'offrir, M. le ministre. «Lorsqu'en raison d'une infraction criminelle une victime est incarcérée dans un pénitencier, est emprisonnée dans un établissement de détention ou est en détention dans une installation maintenue par un établissement qui exploite un centre de réadaptation visé par la Loi sur les services de santé et les services sociaux et modifiant diverses dispositions législatives ou dans un centre d'accueil visé par la Loi sur les services de santé et les services sociaux pour les autochtones cris et inuit, le ministre doit réduire l'indemnité de remplacement du revenu à laquelle elle a droit en raison du préjudice qu'elle subit, d'un montant équivalant annuellement au pourcentage suivant: «1° 75 % dans le cas d'une victime sans conjoint ni personne à charge; «2° 45 % dans le cas d'une victime qui a un conjoint ou une personne à charge; «3° 35 % dans le cas d'une victime qui a un conjoint et une personne à charge ou qui a deux personnes à charge; «4° 25 % dans le cas d'une victime qui a un conjoint et deux personnes à charge ou qui a trois personnes à charge; «5° 10 % dans le cas d'une victime qui a un conjoint et trois personnes à charge ou plus ou qui a quatre personnes à charge ou plus. «Cette réduction demeure en vigueur jusqu'à la fin de la période d'incarcération, d'emprisonnement ou de détention de la victime ou, le cas échéant, jusqu'à la date du jugement déclarant celle-ci non coupable de l'infraction criminelle. «Elle est réajustée pendant l'incarcération, l'emprisonnement ou la détention de la victime, dans les cas et aux conditions déterminés par règlement du gouvernement, en fonction du fait qu'elle ait ou non un conjoint et du nombre de personnes à sa charge visées au premier alinéa. «Pour l'application du présent article, l'indemnité de remplacement du revenu à laquelle a droit une victime ayant, à la date de la manifestation de son préjudice, un conjoint ou une ou plusieurs personnes à charge au sens de l'article 73 est versée à ces personnes, selon les conditions et les modalités déterminées par règlement du gouvernement. «Si la victime est déclarée non coupable de l'infraction pour laquelle elle a été incarcérée, emprisonnée ou détenue, en vertu d'un jugement ayant acquis force de chose jugée, le ministre doit lui remettre le montant qui a été soustrait de l'indemnité de remplacement du revenu avec intérêts fixés conformément aux dispositions de l'article 148 et calculés à compter du début de la réduction.»

Ce n'est pas nécessaire de le lire dans la version anglaise, non?

M. Rémillard: Nous connaissons à quel point, M. le Président, vous pourriez nous le lire aussi facilement en anglais, et je sais même en italien...

Le Président (M. Dauphin): Ha, ha, ha!

M. Rémillard: ...mais je crois que c'est suffisant.

Le Président (M. Dauphin): Merci. Alors, questions, commentaires sur l'article 146.

M. Rémillard: M. le Président, cet article prévoit la réduction du montant de l'indemnité de remplacement du revenu d'une victime lorsque celle-ci est incarcérée, emprisonnée, tenue de loger dans un établissement ou placée sous garde en milieu ouvert ou fermé. Cette réduction varie selon que la victime ait ou non un conjoint et selon le nombre de personnes à charge. Le cas échéant, le ministre devrait verser cette indemnité réduite au conjoint et aux personnes à charge de cette victime selon les conditions et modalités qui seraient déterminées par règlement. Cet article est conforme à la Loi sur l'assurance automobile. m. le président, il y a un exemple qui m'est donné ici que j'aimerais vous donner: une victime emprisonnée dans un établissement de détention en raison d'une infraction criminelle a droit à une indemnité de remplacement du revenu payable à tous les 14 jours de 400 $. la victime n'ayant aucune personne à charge, l'indemnité est réduite dans une proportion de 75 %, selon la règle édictée à l'article 146 de la loi. cette réduction équivaut à un solde payable à tous les 14 jours de 100 $.

M. le Président, la situation visée ici est notamment celle d'une victime déjà admissible à une indemnité de remplacement du revenu et qui, postérieurement, est incarcérée suite à la perpétration d'une infraction criminelle.

M. Bélanger: M. le Président, quand j'ai vu cet article...

Le Président (M. Dauphin): M. le député d'Anjou.

M. Bélanger: ...je vous avoue que j'ai eu de la difficulté à le comprendre, Justement, dans l'exemple que vient de me donner le ministre de la Justice, une personne qui est incarcérée a droit à une indemnité de remplacement de revenu. Elle n'a aucune personne à charge, elle n'a aucun conjoint. Moi, je regarde, là, quelqu'un qui serait incarcéré pendant 10 ans et qui aurait droit à une indemnité de remplacement de revenu pendant longtemps, c'est payant. Je veux dire, vous restez aux frais de l'État. Parce que, il faut le dire, ça ne vous coûte rien pour être en prison.

En plus, même si cette indemnité est fortement réduite, dans le cas où il n'y a aucune personne à charge, on continue à recevoir 25 % de l'indemnité de remplacement de revenu. moi, personnellement, j'ai de la difficulté à comprendre ça. parce qu'en plus, je veux dire, on ne perd pas de revenu quand on est en prison. on est en prison parce qu'on a commis un délit relativement à la société. donc, je pense que, normalement, les régimes d'assurance-salaire ne s'appliquent pas si vous êtes en prison. alors, j'aimerais vraiment qu'on m'explique le pourquoi. moi, je comprends pour les cas des personnes à charge. on ne doit pas causer préjudice aux personnes à charge; ça, je suis tout à fait d'accord, conjoint et personnes à charge qui sont aussi des victimes relativement à ce qui est arrivé. mais sans personnes à charge là...

Le Président (M. Dauphin): M. le ministre.

M. Rémillard: M. le Président, de fait, c'est un sujet que j'ai beaucoup discuté avec mes collaborateurs et avec les différents intervenants. Je me souviens, au Sommet de la Justice, d'en avoir discuté aussi, et je crois que les questions qui sont posées par le député d'Anjou sont fort pertinentes. Il y a quelques situations auxquelles on peut se référer.

Pensons, par exemple, à quelqu'un qui est victime d'un acte criminel, donc qui a droit à une indemnité, et qui, pendant qu'il reçoit cette indemnité, fait un acte criminel et se retrouve en prison.

M. Bélanger: Oui.

M. Rémillard: Le principe de l'indemnité, c'est d'indemniser pour une perte de revenu actuelle ou future.

M. Bélanger: Oui.

M. Rémillard: Alors, il faut tenir compte évidemment que cette personne qui est emprisonnée n'a pas à payer d'épicerie, n'a pas à payer son logement, c'est aux frais de l'État: logée, nourrie, blanchie, aux frais de l'État au départ. Donc, ça lui coûte moins cher. Il y a une réduction. Mais cette personne peut avoir à charge, évidemment, des enfants, une personne...

M. Bélanger: Oui, mais sans charge.

M. Rémillard: ...ça, on le comprend, on n'en parle pas.

M. Bélanger: Sans personne à charge. (17 h 30)

M. Rémillard: Quand c'est avec des personnes à charge, on comprend très bien. Cette personne n'a pas de personne à charge. Alors, jusqu'où peut-on aller dans la diminution de l'allocation qui est donnée, respectant ses droits? Est-ce qu'on doit suspendre complètement? Parce que la personne en prison peut aussi pouvoir gagner des sous. Il y a des programmes qui lui permettent

de gagner des sous. Ça existe très bien. La personne peut même être un travailleur autonome, recherchiste pour des émissions de radio et de télévision et, en prison, avoir la permission de faire de la recherche, envoyer des topos. En fait, on peut penser à des possibilités qu'ils offrent maintenant de plus en plus pour que les gens puissent gagner des sommes d'argent. Us donnent une partie au système pénitencier, mais ils en gardent aussi. Alors, si la personne est tellement handicapée qu'elle ne peut pas gagner ces sommes d'argent, il y a aussi à prendre ça en considération. Alors, M. le Président, ces éléments-là, moi, qu'il y ait une diminution, je dois vous dire, je suis très sympathique à ça, très sympathique à ça.

Maintenant, il y a aussi nos gens des affaires constitutionnelles et de la Charte des droits et libertés qui nous disent, bon, l'article 15. Moi, je dis que, par l'article 1 de la Charte canadienne et par l'article 9 de la Charte québécoise, on pourrait quand même pouvoir plaider que c'est raisonnable, mais il y a donc un moyen terme. Mais de là à dire carrément que, parce que cette personne est incarcérée, on coupe tout, ça peut être, peut-être, trop catégorique.

L'autre exemple qu'on peut avoir, c'est que, la personne, elle est en prison et elle est victime d'un acte criminel en prison. Ça, ça se peut aussi. Et là aussi il faut apprécier s'il y a une perte de revenus, parce qu'un prisonnier a des revenus. Si l'acte criminel l'empêche d'avoir ces revenus, est-ce qu'elle n'a pas droit à une indemnité, même si elle est en prison?

M. Bélanger: Sauf que 146 ne s'applique pas, dans votre cas, parce que 146, on le lit, ça fait réellement mention de quelqu'un qui a subi, qui est victime d'un acte criminel avant.

M. Rémillard: Avant.

M. Bélanger: L'article 146 ne s'applique pas, dans ce cas-là.

M. Rémillard: Je vais vérifier ça. Mme Viens, c'est ça? L'article 146, vous l'interprétez comme ça?

Mme Viens (Christine): Je l'ai toujours interprété comme s'appliquant dans les deux situations.

M. Rémillard: Dans les deux situations.

Mme Viens (Christine): Maintenant, si ce n'est pas ça qui est écrit, là...

M. Rémillard: C'est les deux situations. Mme Gauvin, comment ça a été écrit? Quand on en a discuté, en tout cas, avec les légistes, j'avais bien en tête les deux situations.

M. Bélanger: Je suis très bien le raisonnement du ministre, mais je pense qu'à ce moment-là on devrait mettre un mécanisme de fardeau de prouver qu'il y a effectivement une perte de revenus de la part de la personne détenue. je pense que là ça serait raisonnable, tout à fait raisonnable. surtout, là, dans un régime où on est, présentement, de rationaliser les dépenses de l'état, moi, je pense que ça serait au détenu, à ce moment-là, de prouver qu'il y a, effectivement, perte de revenus pendant son incarcération. et s'il n'y a pas perte de revenus, moi, je ne vois pas pourquoi... écoutez, moi, je vois ça, là, les payeurs de taxes, présentement, qui sont égorgés, je pense que tout le monde est d'accord là-dessus, je ne vois pas... je pense qu'on pourrait les exempter, en tout cas, de ces paiements-là. je pense qu'on pourrait et ça serait tout à fait raisonnable. moi, personnellement, je serais pour suspendre. non pas de faire perdre à vie ce bénéfice mais, pendant le temps de l'incarcération, on suspend, tout simplement, le paiement de l'indemnité de remplacement de revenus et, dès sa sortie, il l'aura. il a droit, à ce moment-là, au versement. parce que, sinon, je pense qu'on parle ici quasiment d'enrichissement sans cause, là. c'est presque payant, là, de rester au pénitencier pendant 10 ans, à recevoir 25 %.

M. Rémillard: Écoutez, si je comprends bien, vous dites suspendre, oui, mais vous dites aussi que, s'il démontre qu'il y a une perte de revenus pendant qu'il est détenu, ça pourrait s'appliquer? Ce n'est pas comme ça que j'interprète votre intervention?

M. Bélanger: Perte de revenus, oui, mais pas une perte de revenus, là, qu'il aurait pu gagner à l'extérieur. Il est en dedans, là, parce qu'il a commis un geste...

M. Rémillard: Oui.

M. Bélanger: Parce que, là, le ministre faisait référence à des cas particuliers par des programmes à l'intérieur où il aurait pu avoir des revenus de par ses fonctions, ses capacités.

M. Rémillard: Oui.

M. Bélanger: Bon, à ce moment-là, je pense que...

M. Rémillard: Oui, mais, regardez bien, prenons un cas bien précis. Non, mais c'est un point important, M. le Président. Prenons un cas précis: la personne qui est victime d'un acte criminel et qui perd l'utilisation du bras droit. Cette personne commet un acte criminel un peu après. Elle reçoit de l'indemnité à cause de ce bras droit là. Elle a commis un acte criminel et elle est incarcérée. En prison, ils fabriquent je ne sais pas trop quoi, mais ils peuvent fabriquer quelque chose qui donne un revenu. Ce n'est pas souvent des sommes énormes, mais ça leur permet de...

M. Bélanger: C'est minime. Très minime, souvent.

M. Rémillard: Oui, mais ça leur permet de monter. Ce que je veux dire, c'est qu'il y a un revenu et, normalement, cette personne-là pourrait bénéficier de ce revenu pour sa cantine, etc. Et, parce qu'elle a été victime d'un acte criminel, elle ne peut pas le faire, comme les autres détenus le font. Est-ce que ce n'est pas justifié, à ce moment-là, qu'elle ait cette indemnité? C'est une question qu'on peut se poser. Ce n'est pas justifié qu'elle ait cette indemnité?

M. Bélanger: Parce que la perte de revenus qui lui a été octroyée a été octroyée par rapport à un revenu qu'il avait alors qu'il était à l'extérieur et non pas relativement à une perte de revenus qu'il subit pendant qu'il est en dedans.

M. Rémillard: Attention. C'est que notre loi est bien en fonction d'une perte de revenus présents ou futurs.

M. Bélanger: Oui.

M. Rémillard: Alors, on ne dit que parce que vous êtes en prison... C'est un petit peu ça. Il faut faire attention de ne pas être aussi trop catégorique, parce que le détenu a des droits aussi.

M. Bélanger: Ah oui, oui, oui.

M. Rémillard: Vous n'êtes pas dépourvu de tout droit parce que vous avez fait un acte criminel, à un moment donné, et que vous payez votre dette à la société. Alors, c'est pour ça que je me dis: Soyons attentifs à des situations qui peuvent se produire et qui pourraient nous amener à causer aussi un préjudice à certaines personnes. Moi, j'essaie simplement de trouver le moyen. Je suis d'accord que, quand la personne est incarcérée, elle n'a pas les mêmes dépenses et elle est aux frais de l'État, pour une très grande partie, pour ses conditions de vie. Donc, par le fait même, ça demande un ajustement. Mais est-ce qu'on ne doit pas prendre aussi en considération un manque à gagner qui pourrait arriver? Je ne dis pas que ça arrive tout le temps, mais qui pourrait arriver parce qu'elle est en prison, qu'elle pourrait avoir la possibilité de gagner et qu'elle ne le fait pas.

M. Bélanger: Je pense qu'il serait tout à fait raisonnable, M. le Président, de prévoir un mécanisme spécial pour ces cas-là. En tout cas, j'ai de la difficulté à accepter ça. Je trouve que c'est vraiment assez payant d'être dans ces conditions-là. Quelqu'un qui subit une incarcération longue, j'ai vraiment beaucoup de difficultés à justifier ça, même, je suis dans l'impossibilité de justifier ça.

M. Rémillard: Peut-être que Mme Gauvin pourrait nous faire plus de commentaires, M. le Président.

Le Président (M. Dauphin): Très bien. Me Gauvin.

Mme Gauvin (Franchie): Oui. Je voudrais peut-être simplement ajouter que, quand on a accordé le droit à une personne à une indemnité de remplacement du revenu, le droit à l'indemnité n'est pas basé sur les besoins de la personne. L'indemnité est basée sur le salaire qu'elle recevait au moment de l'infraction ou, éventuellement, le salaire qu'elle aurait pu recevoir, compte tenu de ses capacités résiduelles. Bon, c'est des règles qu'on a vues ensemble en commission parlementaire.

Donc, sur cette base-là, de dire qu'au moment où la personne est détenue on lui retire le droit à toute indemnité de remplacement du revenu parce qu'une partie de ses besoins ou de ses dépenses est comblée par l'État, ça ne réfère pas finalement à la raison d'être de l'indemnité de remplacement du revenu. Si je compare, par exemple, au régime de sécurité du revenu où la personne détenue n'a pas le droit à sa prestation, c'est justifiable dans le contexte où la prestation vise à combler les besoins de la personne. Et, à partir du moment où les besoins sont couverts, on peut être justifiés d'annuler la prestation.

Mais, là, il n'y a pas de lien entre l'indemnité qu'on lui accorde et le fait qu'on lui retire ce droit-là parce qu'elle est détenue. Alors, c'est sur cette base-là que ça m'apparaît difficile de justifier une annulation complète de la prestation.

M. Bélanger: Ce n'est pas relativement à ses besoins que je parle qu'on devrait suspendre, c'est que, tout simplement, c'est un remplacement du revenu. Je comprends le principe général et je ne veux pas remettre en question le principe général de la loi, mais, pour ce cas particulier, je pense qu'on peut prévoir des exceptions pour un cas particulier sans remettre en question le principe général de la loi.

Moi, personnellement, comme je vous le dis, j'ai beaucoup, beaucoup de difficultés... Je comprends qu'on me dit qu'il y a la même disposition, je pense, dans la loi de l'assurance automobile... (17 h 40)

M. Rémillard: Oui. Mais là je viens d'intercepter un papier entre Me Viens et Me Gauvin et il y avait un mot d'écrit. Je trouve ça intéressant: «hôpital». C'est-à-dire, lorsqu'on est hospitalisé, on est hospitalisé aussi et tout est payé par l'État, par l'assurance-hospitalisation. Est-ce qu'on ne peut pas faire un lien aussi dans ces cas-là? Évidemment, on va à l'hôpital parce qu'on est malade, on n'y va pas parce qu'on a fait un crime. Là, il y a toutes sortes de circonstances, si on part du principe que c'est payé par l'État.

Le Présidait (M. Dauphin): Mme la députée de Terrebonne.

Mme Caron: merci, m. le président je comprends bien l'interprétation à partir du principe. mais, si c'était vraiment à partir de ce principe-là, donc, il devrait recevoir, dans tous les cas, la pleine indemnité. il ne devrait même pas y avoir de réduction parce que, si c'est une question de principe, il ne devrait pas y avoir de réduction du tout. pourquoi on a pris la peine d'établir des taux: 75 %, 45 %, 35 %, 25 %, 10 %, dépendamment? donc, on a tenu compte, dans nos réductions, des besoins des personnes. en tout cas, ça m'apparaît que la preuve est là que ce n'était pas juste une question de principe.

M. Rémillard: On me dit, dans ce cas-là, que ce serait une surcompensation. Mais qu'est-ce que vous prévoyez, qu'est-ce que vous suggéreriez, vous? Ça serait quoi, votre suggestion?

Mme Caron: Je suis sensible à votre argument de principe, mais je me dis: Si c'est le principe qu'on veut conserver, bien, il n'y en aurait pas eu, de réduction, du tout. Donc, ce n'était pas vraiment le principe qu'on voulait conserver; on a vraiment regardé, on a tenu compte des besoins des personnes. Donc, il m'apparaîtrait normal, à ce moment-là, de tenir compte du revenu que la personne peut perdre à l'intérieur, mais pas à partir de ce qu'elle pouvait gagner à l'extérieur.

M. Rémillard: M. le Président.

Le Président (M. Dauphin): M. le ministre.

M. Rémillard: Le député de Hull pourrait peut-être nous faire part de ses commentaires là-dessus. C'est un problème, c'est un problème difficile.

Le Président (M. Dauphin): M. le député de Hull, vous qui êtes un homme d'expérience.

M. LeSage: M. le Président, j'ai peut-être de l'expérience mais, dans le domaine de l'incarcération, je n'en ai pas beaucoup. Moi, je serais tenté d'écouter un petit peu plus les arguments de l'Opposition et d'autres députés ministériels et les arguments du ministre avant de prendre position sur cet article.

Le Président (M. Dauphin): M. le député d'Orford?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Rémillard: Quant à l'adjoint parlementaire, M. le Président, je sais qu'il pense comme le ministre.

Des voix: Ha, ha, ha!.

Une voix: ...

M. Rémillard: C'était pour gagner du temps, pour pouvoir un peu réfléchir au problème.

Écoutez, moi, ou bien on le suspend, parce que c'est un réel problème... Moi, je ne voudrais pas qu'on soit trop radicaux, et qu'on soit bien conscients de toute la dimension de la difficulté que nous avons là. Quand vous parliez qu'il fallait avoir un mécanisme qui, finalement, prévoit que la personne, la victime se retrouve dans un état où elle a moins de besoins, parce que ses besoins sont assumés par l'État, bien, c'est ce que l'article 146 prévoit. Et c'est dans l'application de la Loi sur l'assurance automobile. Est-ce que ça a reçu une application, c'est prévu dans la loi? Me Viens, à votre connaissance, est-ce que c'est appliqué?

Mme Viens (Christine): Je ne saurais répondre à cette question, à savoir dans quelle mesure ça l'est et quelle est la fréquence des cas. Peut-être que je peux cependant dire que, au niveau de l'IVAC, le nombre de personnes qui sont détenues et qui ont fait une demande d'indemnisation au cours des cinq dernières années était... Il y a 47 demandes qui ont été formulées pour des personnes qui étaient détenues, sur cinq ans. Trente ont été rejetées. En fait, il y a simplement 11 demandes qui ont été acceptées, sur cinq ans.

M. Rémillard: On peut suspendre là-dessus.

M. Bélanger: Moi, je voterais contre. Si j'avais à voter présentement sur cette disposition, je voterais contre. C'est pour ça, je pense, qu'on est mieux, peut-être, de revenir.

M. Rémillard: Je comprends très bien, M. le Président. Si on expliquait au monde, si on faisait une ligne ouverte...

M. Bélanger: Ah, tiens, oui.

M. Rémillard: ...sur ce sujet-là. Je ne voudrais pas, encore une fois, qu'on me dise qu'on m'a trouvé un travail pour après...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bélanger: Loin de moi cette idée.

M. Rémillard: ...Ha, ha, ha! Pour après mon séjour en politique. Non, non, et je ne m'exerce pas. Tout ce que je dis, c'est que le monde qui dirait: Comment ça, vous leur payez une indemnité parce qu'ils ont été victimes d'actes criminels, eux-mêmes deviennent des criminels, ils sont à la charge de l'État et ça coûte, on le sait, en moyenne, un prisonnier, 145 $ par jour à l'État pour le garder en prison et, en plus, l'État leur donne une indemnité... C'est sûr que le monde va dire: Écoutez, qu'est-ce qui se passe?

Mme Caron: Surtout s'ils sont à Sainte-Anne-des-Plaines, dans un condo, et qu'ils ont des barres d'exercice en or, en plus.

M. Rémillard: Oui. Mais il ne faut quand même pas...

Mme Caron: Ça, c'est pire, là.

M. Rémillard: Oui, mais, là, je pense que vous êtes d'accord avec moi, il ne faut quand même pas faire, aussi, trop de démagogie, là.

Mme Caron: Mais c'est réel. Mais c'est réel, là, ce n'est pas de la démagogie, là.

M. Rémillard: Oui, mais... Je ne me prononcerai pas là-dessus, mais il faut être capables, aussi, de faire tous les discernements, comme parlementaires.

Alors, je suis bien prêt à dire, en conclusion, que 146, on le suspens. On y reviendra. On va en discuter.

Le Président (M. Dauphin): Alors, l'article 146 est suspendu. J'appelle maintenant l'article 147.

M. Rémillard: II y a un amendement, M. le Président.

Le Président (M. Dauphin): II y a un amendement.

M. Rémillard: L'amendement se lirait comme suit: Insérer, dans la troisième ligne, après le mot «expertise», les mots «sur présentation de pièces justificatives.»

M. le Président, cet amendement a pour objet de préciser que la demande de remboursement du coût d'une expertise médicale doit être accompagnée des pièces justificatives de concordance avec les autres dispositions du projet.

Une voix: II y a un vote?

Une voix: On va essayer de s'informer.

M. Rémillard: On va essayer de faire ça vite. Faire 147 et, après ça, il faut aller au vote.

M. Bélanger: À 147...

Le Président (M. Dauphin): On va s'informer. C'est le quorum? C'est le quorum.

M. Bélanger: Adopté.

Le Président (M. Dauphin): L'amendement est adopté. Est-ce que l'article est adopté tel qu'amendé?

M. Bélanger: Adopté.

Le Président (M. Dauphin): Adopté.

M. Rémillard: À l'article 148, il y a un amendement aussi.

Le Président (M. Dauphin): J'appelle l'article 148.

M. Rémillard: Alors, c'est un amendement qui se lit comme suit, M. le Président: Remplacer, dans la première ligne du deuxième alinéa et après le mot «fixé», le mot «par» par les mots «en vertu du deuxième alinéa de».

Alors, M. le Président, cet amendement a pour objet de préciser la référence à l'article 28 de la Loi sur le ministère du Revenu, de concordance avec la modification dont cet article fait l'objet, l'article 215 du chapitre 1 des lois de 1992. Il a pour effet de référer au taux d'intérêt applicable aux remboursements plutôt qu'à celui applicable aux créances de la couronne.

M. Bélanger: Adopté.

Le Président (M. Dauphin): L'amendement est adopté. Est-ce que l'article, tel qu'amendé, est adopté?

M. Bélanger: Adopté.

Le Président (M. Dauphin): Adopté. J'appelle l'article 149.

M. Rémillard: II y a aussi un amendement à 149, M. le Président, qui se lit comme suit: Remplacer l'article 149 par le suivant: «149. Est passible d'une amende d'au moins 325 $ et d'au plus 2800 $, toute personne qui fait une déclaration sachant que celle-ci contient un renseignement faux ou trompeur ou qu'elle transmet un document contenant un tel renseignement en vue: «1° d'obtenir ou de recevoir une prestation à laquelle elle n'a pas droit; «2° de faire octroyer à une autre personne une telle prestation; «3° d'aider une autre personne à obtenir une prestation à laquelle elle n'a pas droit.»

M. le Président, cet amendement précise le libellé de la disposition et est conforme au droit pénal.

Le Président (M. Dauphin): Juste quelques minutes, parce que nous ne l'avions pas, l'amendement.

M. Rémillard: Ah! Je m'excuse, M. le Président.

Le Président (M. Dauphin): Si vous voulez nous permettre de le lire.

M. Bélanger: Je vois, M. le Président, que, par l'effet de l'amendement, on a enlevé ta disposition «encourage une autre personne». C'est ça? Le fait d'encourager une autre personne n'est plus une infraction? Aider une autre personne, c'est «aider». Dans 149, tel que présenté auparavant, au paragraphe 2°, on disait «aide ou encourage». Maintenant, on ne parle que d'aide à une autre personne.

Mme Lagrenade (Francine): La disposition qui est ici, telle que relibellée, est conforme au nouveau droit pénal, d'une part, et elle s'inspire de la Loi sur la sécurité du revenu — l'article 83, je crois, autour de ça — sauf relibellée sous un aspect seulement pour tenir compte, justement, d'un jugement de la Cour suprême qui avait réfuté le libellé «est supposé savoir». Mais, à part de ça, c'est tout conforme quant au reste.

M. Rémillard: Mais, au lieu d'avoir deux paragraphes, on en a trois.

M. Bélanger: On en a trois. (17 h 50)

Mme Lagrenade (Francine): Mais on retrouve le même contenu.

M. Bélanger: Merci.

Le Président (M. Dauphin): Je m'excuse. Pourriez-vous juste nous répéter votre nom? On ne l'a pas compris. Nom et qualité.

Mme Lagrenade (Francine): Francine Lagrenade, avocate au Bureau des lois au ministère de la Justice.

Le Président (M. Dauphin): Merci beaucoup. M. Bélanger: Adopté.

Le Président (M. Dauphin): L'amendement est adopté. Est-ce que l'article, tel qu'amendé, est adopté?

M. Bélanger: Adopté.

Recouvrement des prestations

Le Président (M. Dauphin): Adopté. J'appelle l'article 150.

M. Rémillard: M. le Président, je demande la permission de suspendre l'article 150.

Le Président (M. Dauphin): Alors, l'article 150 est suspendu.

M. Rémillard: Parce qu'il y a le Protecteur du citoyen qui nous a fait des commentaires qui méritent d'être regardés de près par les légistes.

Le Président (M. Dauphin): Très bien. Est-ce que nous appelons l'article suivant, 151?

M. Rémillard: Si vous voulez, M. le Président. Qui se lit comme suit: «Malgré l'article 150, lorsqu'à la suite d'une demande de révision ou d'un appel le ministre ou la Commission des affaires sociales rend une décision qui a pour effet d'annuler ou de réduire le montant d'une prestation, les sommes déjà versées ne peuvent être recouvrées, à moins qu'elles n'aient été obtenues par fraude ou que la demande de révision ou l'appel ne porte sur une décision rendue en vertu de l'article 150. »

M. le Président, cet article énonce qu'une indemnité réduite ou annulée à la suite d'une décision rendue ou en révision par le ministre ou en appel par la Commission des affaires sociales n'est pas recouvrable, à moins que le débiteur ne l'ait obtenue par fraude ou à la suite d'une décision en vertu de l'article 150. Cet article est conforme à la Loi sur l'assurance automobile.

M. Bélanger: Adopté.

Le Président (M. Dauphin): L'article 151, adopté. J'appelle l'article 152.

M. Rémillard: M. le Président, cet article se lit comme suit: «Malgré l'article 150, lorsque le ministre reconsidère sa décision parce que celle-ci a été rendue avant que n'ait été connu un fait essentiel ou a été fondée sur une erreur relative à un tel fait ou parce que celle-ci est entachée d'un vice de fond ou de procédure de nature à l'invalider, la somme déjà versée n'est pas recouvrable à moins qu'elle n'ait été obtenue par fraude. »

M. le Président, cet article énonce que, lorsque le ministre exerce son pouvoir de reconsidération, il ne peut recouvrer la somme déjà versée au débiteur, à moins que ce dernier ne l'ait obtenue par fraude. Cet article est conforme à la Loi sur l'assurance automobile.

M. Bélanger: Adopté.

Le Président (M. Dauphin): L'article 152, adopté. J'appelle l'article 153, que je vais lire, M. le ministre, pour vous donner un coup de main.

M. Rémillard: Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Dauphin): «La personne qui prive volontairement le ministre de son recours subroga-toire prévu à l'article 15 doit rembourser le montant de la prestation reçu du ministre. «Le ministre peut recouvrer cette dette dans les trois ans de l'acte qui le prive de son recours subrogatoire. «Il peut aussi remettre cette dette lorsqu'il juge que le montant ne peut être recouvré compte tenu des circonstances. »

Commentaires, M. le ministre, sur 153.

M. Rémillard: M. le Président, cet article vise à protéger le recours subrogatoire dont dispose le ministre en vertu de l'article 15 de la loi et est conforme à la Loi sur l'assurance automobile.

M. Bélanger: Adopté.

Le Président (M. Dauphin): Adopté. J'appelle l'article 154. «Le ministre met en demeure le débiteur par une décision qui énonce le montant et les motifs d'exigibilité de la dette. Elle comporte la mention du droit du débiteur d'en demander la révision et du délai pour lui présenter sa demande. «Cette décision interrompt la prescription prévue à l'article 150 ou 153, selon le cas.»

M. Rémillard: M. le Président, cet article prévoit la procédure utilisée par le ministre lorsqu'il procède au recouvrement d'une dette. Il est conforme à la Loi sur l'assurance automobile.

M. Bélanger: Adopté.

Le Président (M. Dauphin): Adopté. J'appelle l'article 155, qui se lit comme suit: «Lorsqu'une dette visée à la présente section n'a pas été recouvrée ni remise, le ministre peut délivrer un certificat: «1° qui atteste le défaut du débiteur de se pourvoir à rencontre de la décision rendue en vertu de l'article 154 ou, selon le cas, qui allègue la décision définitive qui maintient cette décision; «2° qui atteste l'exigibilité de la dette et le montant dû. «Ce certificat est une preuve de l'exigibilité de la dette. Il peut être délivré par le ministre en tout temps après l'expiration du délai pour demander la révision ou pour interjeter appel de la décision ou après la décision de la Commission des affaires sociales.» Commentaires.

M. Rémillard: M. le Président, cet article vise à établir une procédure pour le recouvrement judiciaire d'un montant dû au ministre en permettant au ministre de délivrer un certificat attestant de l'exigibilité de la dette. Cet article est conforme à la Loi sur l'assurance automobile.

M. Bélanger: M. le Président.

Le Président (M. Dauphin): M. le député d'Anjou.

M. Bélanger: Juste une question. Je voudrais savoir en quoi ça peut être utile, ce certificat-là. Ça sert à quoi, ce certificat-là?

M. Rémillard: Alors, Me Viens, M. le Président, peut répondre à cette question.

Le Président (M. Dauphin): Me Viens.

Mme Viens (Christine): Je pense que la réponse pourrait être trouvée à l'article 156. C'est que le certificat est déposé au greffe du tribunal compétent. Sur dépôt du certificat au greffe du tribunal compétent, il est exécutoire.

M. Bélanger: D'accord, parfait. Adopté.

Le Président (M. Dauphin): L'article 155, adopté. J'appelle l'article 156, qui se lit comme suit: «156. Sur dépôt de ce certificat au greffe du tribunal compétent, la décision du ministre ou de la Commission des affaires sociales devient exécutoire comme s'il s'agissait d'un jugement final et sans appel de ce tribunal et en a tous les effets.»

M. Rémillard: M. le Président, cet article énonce que le dépôt au greffe du tribunal compétent du certificat constatant l'exigibilité d'une dette rend la décision du ministre ou de la Commission des affaires sociales exécutoire. Cet article est conforme à la Loi sur l'assurance automobile.

M. Bélanger: Adopté.

Le Président (M. Dauphin): L'article 156, adopté.

Est-ce que vous voulez continuer, il reste trois minutes, ou si nous ajournons? On peut continuer, libre à vous.

M. Rémillard: M. le Président, si on peut faire l'article 157.

Administration et financement

Le Bureau d'aide et d'indemnisation des victimes d'actes criminels

Le Président (M. Dauphin): L'article 157? Alors, appelons l'article 157, que je vais vous lire: «157. Le Bureau d'aide aux victimes d'actes criminels, institué au sein du ministère de la Justice en vertu de l'article 8 de la Loi sur l'aide aux victimes d'actes criminels (L.R.Q., chapitre A-13.2), continue ses activités sous le nom de "Bureau d'aide et d'indemnisation des victimes d'actes criminels" conformément aux dispositions de la présente loi.»

M. Rémillard: M. le Président, cet article prévoit que le Bureau d'aide aux victimes d'actes criminels, institué au sein du ministère de la Justice, poursuit ses activités sous le nom de «Bureau d'aide et d'indemnisation des victimes d'actes criminels».

M. Bélanger: Adopté.

Le Président (M. Dauphin): L'article 157, adopté. On appelle l'article 158?

M. Rémillard: Alors, M. le Président, il y a eu un amendement à 158, et, avec votre permission et ta permission de cette commission, je pense qu'on pourrait suspendre ou ajourner sur 158.

Le Président (M. Dauphin): Nous l'avons, l'amendement, cependant.

M. Rémillard: Oui, oui.

Le Président (M. Dauphin): II a été distribué.

M. Rémillard: Alors, ça permettrait de le regarder.

M. Bélanger: Parfait.

Le Président (M. Dauphin): D'accord. Alors, la commission des institutions ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 17 h 58)

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