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Version finale

36e législature, 1re session
(2 mars 1999 au 9 mars 2001)

Le mercredi 3 novembre 1999 - Vol. 36 N° 35

Étude détaillée du projet de loi n° 54 - Loi modifiant la Loi sur les substituts du procureur général


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Table des matières

Remarques préliminaires

Étude détaillée


Autres intervenants
M. Roger Bertrand, président
M. Benoît Pelletier
M. Christos Sirros
M. Normand Jutras
*M. Mario Bilodeau, ministère de la Justice
*Témoin interrogé par les membres de la commission

Journal des débats


(Dix heures neuf minutes)

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Je déclare les travaux de la commission ouverts. Cette commission est réunie afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 54, Loi modifiant la Loi sur les substituts du procureur général.

M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Dupuis (Saint-Laurent) est remplacé par M. Sirros (Laurier-Dorion).


Remarques préliminaires

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Très bien. Nous en venons aux remarques préliminaires. J'inviterais à ce moment-ci Mme la ministre à bien vouloir y aller de son intervention.


Mme Linda Goupil

Mme Goupil: Merci, M. le Président. Bonjour, tout le monde. Alors, j'aimerais au préalable, avant de commencer, vous faire part des gens qui m'accompagnent pour que vous puissiez savoir qui ils sont. Alors, à ma droite, le sous-ministre associé, Me Mario Bilodeau. Il y a également M. Pleau, qui est juste ici, en arrière, M. Grégoire et M. Mercier ainsi que M. Chalifour également, qui est mon attaché politique. Alors, nous pouvons débuter immédiatement?

(10 h 10)

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Très bien. Nous en sommes donc aux remarques préliminaires.

Mme Goupil: Alors, le projet de loi n° 54, qui est intitulé Loi modifiant la Loi sur les substituts du procureur général, comme je l'ai déjà mentionné, vise essentiellement à éliminer toute ambiguïté quant au pouvoir des substituts d'autoriser eux-mêmes des poursuites qui sont intentées en vertu du Code criminel et ainsi d'assurer la sécurité juridique des dénonciations qui sont déposées en cour au nom du Procureur général par ses substituts.

Alors, comme vous le savez, le Code criminel permet, en principe, à toute personne d'intenter une poursuite criminelle en déposant une dénonciation auprès d'un juge de paix. Toutefois, pour 13 catégories d'infraction, le Code ne permet le dépôt d'une dénonciation qu'avec le consentement préalable du Procureur général afin notamment de protéger les justiciables contre des poursuites abusives par des citoyens. Tel est le cas pour l'enlèvement d'un enfant par un parent, la corruption d'enfants ou la nudité dans un endroit public.

De plus, pour deux autres catégories d'infraction, le Code exige le consentement préalable personnel et par écrit du Procureur général. Il s'agit du cas d'une nouvelle poursuite après qu'il y a eu rejet d'un acte d'accusation ou celui d'un acte d'accusation lorsque l'accusé a été libéré à l'enquête préliminaire.

En 1969, le législateur québécois adoptait l'article 4a de la Loi sur les substituts du procureur général en cohérence avec le Code criminel, en prescrivant que les substituts ont notamment le pouvoir d'autoriser les poursuites en vertu du Code criminel sauf dans les cas où l'autorisation préalable du Procureur général est requise. Cette cohérence ne dura que quelques mois, puisque le Parlement fédéral modifiait ultérieurement le Code criminel pour préciser la notion de substituts légitimes du Procureur général et leur attribuer le pouvoir d'autoriser eux-mêmes les poursuites dans les 13 catégories d'infraction dont j'ai fait état précédemment.

À la suite de cette évolution législative et respectant en cela l'un des principes d'interprétation voulant que la loi la plus récente l'emporte sur la loi la plus ancienne, il a été décidé de mettre en application la modification du Code criminel sans modifier la Loi sur les substituts du procureur général. En effet, il est apparu que le paragraphe a de l'article 4 était toujours pertinent, puisque le membre de phrase qui dit «sauf dans les cas où l'autorisation préalable du Procureur général est requise» demeurait justifié pour les deux catégories d'infraction pour lesquelles le Code criminel exigeait le consentement préalable personnel et par écrit du Procureur général.

Dans les faits, les substituts ont donc autorisé les dénonciations à compter de l'entrée en vigueur de la modification du Code criminel, et ce, jusqu'en 1993, alors que ce pouvoir du substitut a été contesté. La validité de l'autorisation donnée par un substitut a alors été évoquée devant le tribunal. Afin de prévenir des contestations ultérieures, le Procureur général de l'époque a délégué, le 18 mars 1993 et tel que le lui permet la Loi sur le ministère de la Justice, son pouvoir d'autorisation aux substituts en chef et adjoints pour tous les cas où le Code criminel permettait déjà à ceux-ci d'agir. À partir de ce moment et jusqu'à récemment, les dénonciations ont par conséquent été autorisées par les substituts en chef ou adjoints.

Le 9 mars 1999, un jugement la Cour du Québec déclara que cette délégation administrative n'habilitait pas les substituts en chef à autoriser les dénonciations lorsque l'autorisation préalable du Procureur général était requise, et cela, sans distinguer entre la simple autorisation préalable et celle qui, en plus, doit être personnelle et par écrit. Alors, depuis ce jugement, la sécurité juridique exige que seuls le Procureur général, son sous-procureur général et son sous-procureur général adjoint puissent, en vertu de la Loi sur le ministère de la Justice, donner le consentement préalable requis par le Code criminel.

Alors, comme on peut le deviner sans doute, cette décision a eu pour effet de complexifier le processus décisionnel, car les seules personnes habilitées à agir ne sont pas nécessairement toujours accessibles afin de signer personnellement l'autorisation, soit en raison d'un éloignement physique ou encore en raison de l'exercice de responsabilités nombreuses. De plus, elles ne peuvent prendre une décision sans prendre obligatoirement connaissance des dossiers, ce qui, dans les faits, alourdit davantage le processus et risque d'engendrer des retards indus dans le traitement du dossier.

Alors, comme vous le savez, un retard dans la prise de décision peut avoir des conséquences dramatiques, dans certains cas. Je pense particulièrement à l'enlèvement d'un enfant par un parent pour s'enfuir vers un pays étranger d'où il est impossible de faire revenir l'enfant.

On voit donc que la situation actuelle ne peut perdurer encore longtemps. Et il devient très urgent, si l'on veut écarter les inconvénients dont je viens de parler, de modifier la Loi sur les substituts du procureur général afin que plus rien n'alourdisse l'application du Code criminel et que ces poursuites soient de nouveau autorisées avec toute la célérité voulue.

C'est pourquoi, M. le Président, je propose de modifier l'article 4 de la Loi sur les substituts du procureur général de façon à y supprimer la disposition qui empêche les substituts d'autoriser les poursuites. C'est là le seul objet du projet de loi n° 54. Et tous les substituts, quel que soit leur statut, pourraient alors agir. On disposerait ainsi de la latitude nécessaire pour agir efficacement et avec célérité, le tout conformément à la lettre et à l'esprit du Code criminel. Je vous remercie.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Merci, Mme la ministre et députée de Lévis. Nous en sommes toujours aux remarques préliminaires. M. le porte-parole de l'opposition officielle et député de Marquette.


M. François Ouimet

M. Ouimet: Merci, M. le Président. À mon tour de saluer toutes les personnes qui nous accompagnent pour tenter de voir un peu plus clair sur les motifs derrière le projet de loi n° 54 et à savoir si le projet de loi qui est devant nous répond bien aux exigences qui découlent de l'arrêt Tibbo.

Je souligne dès en partant que je suis un petit peu étonné des propos de la ministre, qui nous parle d'une très grande urgence à ce moment-ci. Je lui rappelle quelques faits qui sont survenus au mois de juin dernier, alors que nous recevions, nous de l'opposition et sûrement la ministre à son cabinet, parce que la lettre lui était adressée par le président de l'Association des procureurs chefs et chefs adjointes et adjoints du Québec, Me Jean Lortie...

La lettre, il l'a écrite en date du 11 juin 1999. Nous l'avons reçue à nos bureaux à trois reprises, à la première reprise, à 16 h 4, et par la suite deux fois, à 16 h 5. Au moment où il rédigeait la lettre, le président de l'Association des procureurs-chefs disait ceci. Et je me permets de lire in extenso la lettre, et vous allez comprendre, M. le Président, le lien par la suite avec l'urgence que plaide aujourd'hui la ministre de la Justice, Procureur général.

Me Lortie disait ceci: «Mme la ministre, je m'adresse à vous comme Procureur général du Québec et comme législateur pour mettre fin à l'incertitude et au danger que pourrait représenter le report de l'adoption du projet de loi n° 54 pour l'administration de la justice au Québec.» On se rappelle qu'au mois de juin le projet de loi n° 54 avait été déposé par la Procureur général, mais, pour des raisons que nous ignorons, il n'a jamais été appelé.

«Le substitut du Procureur général a discrétion pour autoriser une dénonciation à l'égard de tous les crimes prévus au Code criminel, y compris un meurtre, sans le consentement du Procureur général, dans le cadre des directives émises par le Procureur général et dont l'application fait consensus. Toutefois, le législateur fédéral a prévu que, pour un petit nombre d'infractions, dont l'enlèvement d'enfants, le consentement du Procureur général est obligatoire – et ça, on le retrouve dans le Code criminel aux articles 283 et suivants.

«Il est toutefois reconnu par la définition de l'article 2 du Code criminel que le Procureur général comprend leurs substituts légitimes. Au Québec, et c'est un cas unique au Canada, la Loi sur les substituts du procureur général a restreint cette définition en imposant l'obligation du consentement par le Procureur général lui-même ou le sous-procureur général, mais en déléguant l'exercice de ce pouvoir aux procureurs-chefs ou leurs adjoints. Une décision récente et inattendue a rendu illégale cette sous-délégation, il s'agit de l'arrêt Tibbo – jugement rendu par la Cour du Québec, chambre criminelle, 9 mars 1999.

«L'étude sur l'opportunité d'en appeler de cette décision à laquelle a participé l'Assemblée des chefs et chefs adjoints amène à la conclusion que les chances de succès étaient minces et que l'amendement à la loi demeure le seul outil pour remédier aux effets de ce jugement, puisque la cause en est la loi du Québec.»

Voici le paragraphe déterminant en ce qui concerne l'exercice des responsabilités de la Procureur général depuis la lettre du mois de juin par Me Lortie. Il dit ceci:

«Il m'appert, tant personnellement qu'au nom de l'Association que je représente, que retarder à octobre ou novembre – et nous sommes au mois de novembre – prochain l'adoption de cet amendement nous plongerait dans cinq ou six mois – donc, six mois – d'incertitude pendant lesquels ne fut-ce qu'une seule situation où, à titre d'exemple, un enlèvement d'enfant réussi constituerait un drame de trop pour le Québec.

(10 h 20)

«Je me permets, Mme la ministre, d'envoyer copie de cette lettre au critique parlementaire de l'opposition en matière de justice en espérant que l'Assemblée nationale prendra noblement ses responsabilités de législateur.

«Je vous prie d'agréer l'expression de mes sentiments les meilleurs.»

Voilà l'alarme sonnée par Me Lortie plaidant l'urgence au mois de juin. Dès la réception de la lettre, j'ai avisé le leader de l'opposition pour dire: Il semble qu'il y a une situation urgente, d'après ce que nous pouvons comprendre de la lettre de Me Lortie. Nous avons demandé un débat d'urgence pour pouvoir répondre à la demande de Me Lortie. Ça a été refusé au mois de juin. Nous avons fait toutes les mises en garde qui s'imposaient. Et aujourd'hui, au mois de novembre, la ministre plaide devant nous la très grande urgence, alors qu'elle semblait exister également au mois de juin, cette très grande urgence.

La ministre, au moment où nous étions au salon bleu, elle était au salon rouge en train de débattre d'un autre projet de loi. Nous étions prêts à tout faire pour l'accommoder afin qu'elle puisse se rendre au salon bleu et amorcer dès ce moment-là un débat d'urgence pour voir un peu plus clair en ce qui concerne le projet de loi n° 54. Mais ça a été refusé.

Alors, je ne sais pas trop ce qui s'est passé au niveau du cabinet de la ministre et au niveau de son équipe sous-ministérielle. On nous arrive aujourd'hui en plaidant l'urgence, la même urgence que plaidait Me Lortie au mois de novembre et à laquelle la ministre a décidé de ne pas donner suite. Alors, M. le Président, vous comprendrez notre étonnement concernant ce premier fait.

Deuxième fait d'importance, le mémoire déposé au Conseil des ministres. Le volet qui est normalement accessible au public nous a été refusé, malgré nos nombreuses demandes d'obtenir copie de ce volet d'un mémoire qui est normalement réservé aux membres du public.

Troisièmement, notre compréhension du projet de loi n° 54 fait en sorte que nous ne sommes pas sûrs à ce moment-ci si le projet de loi n° 54 répond aux objectifs que prétend vouloir atteindre la ministre de la Justice. Parce que, lorsqu'on prend connaissance de l'article 283 du Code criminel, en particulier du deuxième alinéa, qui parle du consentement du Procureur général, on peut lire ceci: «Aucune poursuite ne peut être engagée, en vertu du paragraphe 1° concernant l'enlèvement d'enfant, sans le consentement du Procureur général ou d'un avocat qu'il mandate à cette fin.»

La modification législative proposée par la ministre vise tout simplement à biffer les mots «sauf dans les cas où l'autorisation préalable du Procureur général est requise», et ça, c'est dans le texte d'une loi provinciale sur les substituts du Procureur général.

Alors, je pense que nous requérons, de ce côté-ci, beaucoup d'éclaircissements afin de bien comprendre qu'est-ce qui est en train de se passer avec ce projet de loi, puisque la question demeure et elle est entière: En quoi, en retirant ces mots, nous répondons à l'exigence de l'article 283 du Code criminel adopté par le Parlement fédéral? Et ça, mon adjoint, qui est à mes côtés, Me Poirier, a eu plusieurs discussions avec les représentants de la ministre au niveau de son cabinet et plus récemment avec le sous-ministre adjoint responsable des affaires criminelles et pénales. Et je pense qu'on n'arrive pas, de ce côté-là de la Chambre, à éclairer la problématique.

Alors, je pense qu'à moins que mes collègues aient d'autres remarques préliminaires à faire ce n'est pas clair, ce qui se passe avec ce projet de loi ci. D'autant plus qu'il y a un volet du mémoire normalement distribué aux parlementaires, qui est réservé aux membres, aux gens du public qui ne nous est pas accessible. Alors, ça, la ministre n'a pas encore réussi à nous dire pourquoi elle refuse toujours de nous donner accès à ce volet du mémoire.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Merci, M. le porte-parole de l'opposition officielle et député de Marquette. Toujours au stade des remarques préliminaires, est-ce qu'il y a d'autres interventions? Sinon, nous pourrions commencer à procéder à l'étude article par article. À ce moment-ci, Mme la ministre, si vous voulez intervenir, j'aurais besoin du consentement des membres.

Des voix: Oui.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Ça va? Très bien, allez-y, Mme la ministre.


Mme Linda Goupil

Mme Goupil: Alors, d'abord, M. le Président, je vais reprendre les trois éléments qui ont été soulevés par le député de Marquette. Je suis un peu surprise de voir que c'est lui-même qui apporte aujourd'hui la motion d'urgence qui a été présentée par l'opposition.

Je vais me faire un plaisir de lui rafraîchir la mémoire, à lui ainsi qu'aux personnes qui l'accompagnaient à ce moment-là. D'abord, lorsqu'on veut déposer une motion d'urgence à l'Assemblée nationale, il y a un forum pour le faire, et on sait aussi le temps dont nous avons besoin pour la débattre.

D'abord, ce n'était pas la première fois que nous vous parlions de cette urgence-là. C'est le 13 mai, M. le Président, la première fois où j'ai fait part à l'opposition officielle, en Chambre, de l'importance du projet de loi n° 54. Ce n'était pas la première fois qu'elle avait été mise au courant de l'importance de ce projet de loi. Et je lui avais exprimé les raisons pour lesquelles il était primordial que nous allions de l'avant, par une allocution qui avait été faite en Chambre le 13 mai.

Maintenant, M. le Président, je rappellerai aussi qu'au moment où cette motion d'urgence a été faite nous étions ici même, en commission parlementaire, sur le projet de loi n° 28, des sages-femmes. Nous étions en commission après évidemment nous être entendus avec l'opposition, parce que ma collègue de la Santé, Mme Marois, qui elle aussi faisait l'objet de cette commission parlementaire... nous avions pris des arrangements à ce moment-là avec l'opposition pour faire en sorte que, pour une première partie, c'était moi qui devais la présenter et, la deuxième, ça devait être ma collègue. Finalement, pour des raisons que nous ne nous expliquons pas encore, il n'avait pas été possible de procéder de la façon dont nous nous étions entendus. Alors, il est évident que l'horaire, vous le connaissiez, il était très chargé. Et, n'eut été de ce projet de loi là, évidemment on aurait pu continuer à répondre aux questions que vous aviez à ce moment-là.

Maintenant, quant à la confidentialité du mémoire qui est présenté au Conseil des ministres, je le répète à nouveau, M. le Président, comme je l'ai mentionné au député de Marquette à l'époque où le mémoire a été présenté, comme des représentants de mon cabinet l'ont également expliqué à votre attachée de presse, qui était présente, qui aujourd'hui n'est plus là – mais ça a été réexpliqué aussi à M. Poiré – alors, les éléments ne devaient pas être connus du public afin de maintenir une saine administration de la justice. C'est la raison pour laquelle nous ne pouvions pas dévoiler la confidentialité de ce mémoire. Nous vous l'avions mentionné. Et ces préoccupations ont d'ailleurs été clairement exprimées tant dans mon allocution qu'à l'occasion des discussions qui ont pu être faites entre les membres de mon cabinet et des membres de votre cabinet. Et, encore une fois, lorsque j'ai...

M. Ouimet: ...

(10 h 30)

Mme Goupil: Oui, mais maintenant on lui a parlé, puis c'est une personne, une dame avec laquelle nous avons eu beaucoup de collaboration aussi. Alors, c'était la personne toute désignée pour lui expliquer. Et, comme je vous le mentionnais, vous savez, lorsqu'on parle de dossiers où il pourrait être question notamment d'enlèvement d'enfant, il est évident que nous devons prendre toutes les mesures nécessaires pour nous assurer que nous ne mettons pas en péril l'administration de la justice, particulièrement en matière criminelle.

Maintenant, quant à l'objectif de ce projet de loi, je vous l'ai mentionné, c'est tout simplement pour permettre aux substituts de continuer à faire leur travail comme ils le font depuis de nombreuses années. Vous savez qu'il y a eu le jugement en mars, qui est un jugement que nous nous devons de respecter. Et il est clair que la façon pour corriger, je dirais, la problématique qui a été soulevée par ce jugement, c'est par une modification législative, qui est fort simple, nous en convenons, elle est d'un seul article, qui permet en somme aux substituts de continuer à faire leur travail comme ils l'ont toujours fait jusqu'à maintenant. Par le passé, ils le faisaient en fonction d'une mesure administrative qui a été adoptée en 1993. Maintenant, on nous dit que cette mesure administrative là, selon l'interprétation du jugement, n'est pas valide. Donc, nous ne pouvons pas nous permettre de mettre en péril la sécurité de l'administration de la justice au Québec. Et c'est la seule et unique raison pour laquelle nous proposons cette modification de l'article 4. Si vous me permettez, je demanderais à M. Bilodeau d'y apporter peut-être un élément supplémentaire pour la spécificité de l'article 283.


M. François Ouimet

M. Ouimet: M. le Président, si vous le permettez, on passera la parole immédiatement après à Me Bilodeau. Quant à l'urgence, là, puis pour clore le débat là-dessus, la ministre semble nous indiquer, en tous les cas dans les propos qu'elle vient juste de tenir, que ce n'était pas assez urgent au mois de juin, parce qu'il y avait le projet de loi des sages-femmes.

Mme Goupil: Ce n'est pas ça que j'ai dit, M. le Président.

M. Ouimet: Par ailleurs, notre règlement de procédure prévoit exactement des dispositions. Lorsqu'une situation urgente met en péril, selon ses propres dires, l'administration de la justice, il y a un dispositif dans notre règlement pour pouvoir faire des débats d'urgence sur une situation qui arrive soudainement. La ministre a décidé, au mois de juin, de ne pas... trouvait, en tous les cas, que la situation ne commandait pas une urgence. Et ses propos tantôt, c'était que «nous avions un projet de loi sur les sages-femmes et j'estimais que c'était plus important de traiter des sages-femmes que le péril en ce qui concerne l'administration de la justice».

Et ça, je clos le débat sur toute la question de l'urgence, là, c'est évident, là, avec les documents que nous avons eus. C'est un très grand mot que de dire que l'administration de la justice est mise en péril par le jugement rendu par la Cour du Québec et...

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Avez-vous terminé, M. le député?

M. Ouimet: Là, il reste le fardeau de la preuve à démontrer, parce que, s'il y a quelque chose qui n'est pas clair, c'est la disposition législative que vous voulez apporter pour répondre au jugement de la Cour du Québec. Moi, je n'arrive pas à comprendre quels objectifs on poursuit lorsqu'on décide d'enlever l'autorisation de la Procureur général. Est-ce que ça répond à 283.1?


Étude détaillée

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Ce qui nous amène donc à l'objectif même...

M. Ouimet: Voilà, dans le vif du projet de loi.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): ...du mandat de la commission qui est d'examiner, à ce moment-ci, le projet de loi article par article. Avec votre collaboration, je vous proposerais qu'on passe directement au premier article. Mme la ministre.

Mme Goupil: M. le Président, il n'y a effectivement qu'un seul article, qui est l'article 4 de la Loi sur les substituts du Procureur général. Est modifié par la suppression, au paragraphe a, de ce qui suit: «sauf dans les cas où l'autorisation préalable du Procureur général est requise.»

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): J'autorise quelques mots sur les motifs à l'appui de cet article.

Mme Goupil: Évidemment, la disposition du paragraphe a de l'article 4 de la Loi sur les substituts du Procureur général vient restreindre l'application de l'article 2 du Code criminel. En effet, alors que l'article 2 de ce Code établit clairement que le Procureur général inclut les substituts, le paragraphe a de l'article 4 restreint la compétence des substituts en prévoyant que ceux-ci ne peuvent agir quand l'autorisation du Procureur général est requise par le Code criminel.

Alors, la modification qui est proposée vise donc à supprimer la disposition qui empêche les substituts du Procureur général d'autoriser certaines poursuites au nom du Procureur général, comme le permet le Code criminel. Également, j'ajouterais que cet article-là n'enlève absolument rien au pouvoir du Procureur général. Tel qu'il existe, il demeure entier dans ensemble, il suffit simplement de permettre aux substituts de pouvoir continuer à travailler comme ils l'ont toujours fait jusqu'à maintenant.

J'ai expliqué cela au député de Marquette dès le mois de mai. Je l'ai réexpliqué dans le cadre d'une allocution, je l'ai redit à nouveau lorsque j'ai fait la lecture en Chambre dernièrement, et je vous dirais, M. le Président, qu'il s'agit tout simplement d'un article qui permet de continuer à faire le travail comme les substituts l'ont toujours fait jusqu'à maintenant.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): C'est bien ça. Est-ce qu'il y a des interventions sur cet article? M. le porte-parole de l'opposition et député de Marquette.

M. Ouimet: Question de fond: Est-ce que le projet de loi n° 54 répond exclusivement et n'a que comme seule portée de répondre à l'arrêt Tibbo et ne porte strictement que sur l'article 283, au niveau de l'enlèvement d'enfant, et n'a pas d'incidence sur d'autres dispositions du Code criminel?

Mme Goupil: M. le Président, dans l'allocution dont j'ai fait lecture en débutant ce matin cette commission, j'ai mentionné qu'évidemment c'est en regard de l'article 282, tel que nous le mentionnons, et pour les 13 autres articles. Je pense qu'ils apparaissent dans le cahier bleu que vous avez. Nous avons remis un cahier qui est le cahier bleu, M. Ouimet, l'annexe A.

M. le Président, je m'excuse, je pensais que cet...

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Allez-y, Mme la ministre.

Mme Goupil: La modification que nous apportons est pour permettre que les substituts puissent continuer à travailler comme ils l'ont toujours fait dans tous les cas où les infractions pour lesquelles le consentement du Procureur général est requis. Et il y en a 13. D'ailleurs, ils apparaissent dans le jugement Tibbo. Tous les articles qui apparaissent également à l'annexe A, ils apparaissent dans le jugement de l'arrêt Tibbo. Alors, évidemment, la modification qui est apportée dans l'article 4, c'est justement de permettre que dans tous les endroits où le consentement du Procureur général est requis ça puisse continuer à se faire comme ça se faisait dans le passé. Et vous avez la nomenclature des articles 136, 163.1 et 163.2. Est-ce que vous les avez? La liste? On vous les a transmis?

M. Ouimet: Pour mes collègues, je ne sais pas s'ils l'ont. Moi, vous me l'avez transmise. C'est vrai que c'était dans le jugement Tibbo.

Mme Goupil: On me dit que nous allons avoir les photocopies dans quelques instants. Je m'excuse, j'étais convaincue que c'était dans le document.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): De façon à peut-être à faciliter les travaux, souhaiteriez-vous que nous suspendions les travaux quelques minutes pour vous permettre d'en prendre connaissance?

M. Ouimet: Quelques minutes.

Mme Goupil: Ça ne me dérange pas du tout.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Alors, je vais suspendre les travaux pour 10 minutes.

(Suspension de la séance à 10 h 37)

(Reprise à 10 h 43)

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. Nous en étions donc toujours à l'article 1. M. le député de Marquette.

M. Ouimet: M. le Président, je vais poser une question pour tenter de circonscrire le plus possible le débat. Prenons pour acquis qu'à la fin de nos travaux aujourd'hui le projet de loi n° 54 est adopté sans modification. Partons de cela. Prenons pour acquis que demain matin la Procureur général donne mandat à Me Suzanne Nault d'entamer des poursuites ou d'autoriser des poursuites en matière d'enlèvement d'enfant, au niveau de l'article 283. En quoi est-ce que le projet de loi ou la loi adoptée, 54, permet plus à Mme Nault de faire demain ce qu'elle ne pouvait pas faire dans le cadre du dispositif du jugement où, à la page 8 du jugement, le juge dit ceci: «Me Suzanne Nault, en sa qualité de substitut permanent et substitut en chef adjointe, est-elle le substitut légitime dont fait état l'article 2 du Code criminel?» Le juge répond: «Je ne le crois pas.»

Alors, en quoi l'adoption du projet de loi n° 54, dans un cadre identique où demain matin 54 est adopté – Mme Nault a le mandat, dépose la poursuite – en quoi est-ce que la situation est plus légale en regard de l'arrêt Tibbo? Peut-être Me Bilodeau a réponse rapide à la question.

Mme Goupil: Je vais y répondre et Me Bilodeau pourra compléter, si la réponse ne vous est pas suffisante. D'abord, si vous prenez le jugement, à la page 9 du jugement Tibbo, celui que vous avez entre les mains, en haut, lorsqu'on lit le jugement, c'est indiqué: «Conséquemment, le substitut du Procureur général de la province de Québec n'est pas, en cette qualité, le substitut légitime, en raison du libellé de l'article 4 de la Loi sur les substituts du procureur général.»

Si vous prenez l'article 4 avec la modification que nous voulons y apporter pour corriger, nous indiquons: L'article 4 de la Loi sur les substituts du procureur général est modifié par la suppression, au paragraphe a, de ce qui suit: «sauf dans les cas où l'autorisation préalable du Procureur général est requise.» Alors, à ce moment-là, on vient de clarifier le libellé de l'article 4 pour qu'il n'y ait plus d'interprétation comme on a donné dans le jugement Tibbo.

M. Ouimet: Et ça, c'est bon pour l'ensemble des articles énoncés dans le jugement.

Mme Goupil: Tout à fait, dont vous avez la liste à l'annexe.

M. Ouimet: Ce que vous me dites, au niveau de votre jugement comme Procureur général, c'est: Si 54 est adopté aujourd'hui, demain, cas d'enlèvement d'enfant, Me Nault autorise une poursuite, on vient de tasser complètement le jugement Tibbo parce qu'on a effectué une modification législative, et donc la poursuite ne peut pas tomber sur une technicalité.

Mme Goupil: C'est ça.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Chapleau.

M. Pelletier (Chapleau): À première vue, M. le Président – parce que c'est une question quand même qui est assez technique et complexe – lorsqu'on lit le Code criminel du Canada, lorsqu'on lit l'article 283, paragraphe 2°, lorsqu'on prend connaissance de la définition du Procureur général, qui se trouve dans le Code criminel du Canada, j'en viens à la conclusion qu'il faudrait que les substituts du Procureur de la couronne soient spécifiquement mandatés, expressément mandatés pour porter des accusations au nom du Procureur général du Québec. Et, actuellement, ce n'est pas le cas, ce n'est pas ce qu'on voit à la lumière de la modification proposée par l'article 4. Il n'y a pas de mandat spécifique pour porter les accusations qui sont prévues par l'ensemble des dispositions du Code criminel qui exigent le consentement du Procureur général ou d'une personne qu'il mandate pour porter des accusations.

C'est-à-dire qu'au lieu de procéder sous la forme positive vous mandatez tout le monde pour porter les accusations, mais vous le faites expressément.

Mme Goupil: Tout le monde?

M. Pelletier (Chapleau): Ce n'est pas tout le monde? Qui voulez-vous mandater?

Mme Goupil: Les substituts.

M. Pelletier (Chapleau): Bien, les substituts, mais vous devez le faire, à mon avis, expressément.

Mme Goupil: Qu'est-ce que vous entendez par «expressément»?

M. Pelletier (Chapleau): Vous devez avoir une disposition qui dit: Le Procureur général du Québec mandate tous les substituts du Procureur de la couronne à porter les accusations visées par les articles untel, untel, untel du Code criminel.

Mme Goupil: C'est ce que l'article 2 dit, du Code criminel. Quand on donne un pouvoir de délégation, c'est à ces personnes.

M. Pelletier (Chapleau): L'article 2 dit que vous pouvez mandater des gens.

Mme Goupil: Non, ce n'est pas ça.

M. Pelletier (Chapleau): Non?

Mme Goupil: Non. Je vais le lire, il est juste ici. Vous voyez, quand on parle de Procureur général, on dit: «À l'égard des poursuites visées par la présente loi, le Procureur général, le Solliciteur général de la province où ces poursuites sont intentées et leurs substituts légitimes...» Ce sont les substituts du Procureur.

M. Pelletier (Chapleau): Oui, mais, si vous regardez, par contre, l'article 283 du Code criminel, on exige qu'il y ait une personne qui soit mandatée.

Mme Goupil: Si vous me donnez quelques instants...

M. Pelletier (Chapleau): Oui, oui.

Mme Goupil: ...la différence qu'il y a à l'article 283b, le dernier paragraphe, le consentement du Procureur général: «Aucune poursuite ne peut être engagée en vertu du paragraphe 1° sans le consentement du Procureur général ou d'un avocat qu'il mandate à cette fin.» Dans cette particularité, quand on regarde 283, paragraphe 1° – c'est dans le cas d'enlèvement d'enfant – on dit: «Qu'il y ait ou non une ordonnance rendue par un tribunal au Canada.»

Bon, prenons l'exemple de parents qui, avant d'entamer des procédures judiciaires, se séparent. Exemple, monsieur et madame ont un conflit. Ils ne savent pas encore s'ils vont se séparer. Ils n'entament pas encore de procédure, mais, pour un des deux, c'est clair qu'ils veulent se séparer. À ce moment-là, vous savez que, comme il n'y a pas de jugement, les deux parents ont l'autorité parentale sur l'enfant, et un des parents pourrait décider à un moment donné de ne pas ramener l'enfant, après une entente dont il aurait convenu avec la mère.

(10 h 50)

Exemple: Je prends l'enfant pour la fin de semaine puis je te le ramène dimanche soir. Le père ou la mère. Prenons l'exemple du père, il ne ramène pas l'enfant. À ce moment-là, on n'a pas de jugement de la cour. Donc, il n'y a pas un jugement qui permettrait d'aller rechercher. À ce moment-là, il est évident que, dans ces cas-là, on a prévu – et ça, c'est à la suite d'un arrêt de la Cour suprême, je pense...

M. Bilodeau (Mario): En fait, suite à des difficultés, ils ont adopté l'article 283.1, qui n'existait pas avant.

Mme Goupil: Parce que, dans ce cas-là, il y a eu certains problèmes. Et pour justement éviter qu'on n'ait pas, je dirais, de poignée légale, si vous me permettez l'expression, on a mentionné, à l'article 283.1 et 283.2, cette disposition particulière. Mais c'est uniquement pour être capable de régler cette problématique-là, dans le cas où il n'y avait pas d'ordonnance d'un tribunal, que l'on puisse intervenir. Excusez-moi.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Juste pour vous mentionner que, tout à l'heure, M. Bilodeau est intervenu, pour les transcripts. Ça va. Très bien. Allez-y, madame.

Mme Goupil: Peut-être, M. Bilodeau, est-ce que vous auriez quelque chose à ajouter à l'égard de ça? Oui?

M. Bilodeau (Mario): Et, pour éviter les abus, lorsque l'article 283.1 a été adopté, on a prévu que ça prenait le consentement du Procureur général, pour que n'importe qui ne puisse pas porter des accusations contre n'importe qui, étant donné le pouvoir concédé à quiconque, au Code criminel, d'accuser des gens. C'était le but.

M. Pelletier (Chapleau): Je comprends très bien. Sauf que justement l'article 283 et les autres dispositions, si je comprends bien, où le consentement du Procureur général est requis, toutes ces dispositions-là demandent que vous donniez un mandat à des gens pour porter des accusations. Il faut que des gens soient mandatés.

La question qui se pose dès lors, c'est de savoir: Est-ce qu'il suffit d'élargir le concept ou de clarifier le concept des personnes qui peuvent légitimement porter des accusations au nom du Procureur général du Québec pour conclure de ce fait que ces gens-là sont mandatés pour les fins précises des articles qui sont ici visés? Ma réponse est non.

Mme Goupil: Pour quelle raison?

M. Pelletier (Chapleau): Pour quelle raison? Parce qu'on demande un mandat. On demande un mandat, ce qui est une exigence additionnelle, vous l'admettez, à celle que l'on retrouve dans la définition du Procureur général de l'article 2 du Code criminel. Vous venez tout juste de l'admettre.

Mme Goupil: En fait, ce que j'ai fait...

M. Pelletier (Chapleau): Donc, puisque l'on demande qu'il y ait un mandat...

Mme Goupil: Je n'ai pas admis, j'ai fait la lecture. Alors, c'est différent, Me Pelletier.

M. Pelletier (Chapleau): Non, je comprends. Mais, même si vous deviez ne pas l'admettre, lorsqu'on demande un mandat, lorsqu'on demande qu'il y ait des gens de mandatés, il faut les mandater clairement, expressément. Vous pourriez dire, à ce moment-là, de façon expresse, de façon explicite: Tous les substituts du Procureur général sont mandatés pour porter des accusations en vertu de l'article 283 du Code criminel, en vertu des articles 136, 163, et ainsi de suite. Et là, à ce moment-là, la situation serait très claire.

La technique que vous employez actuellement, qui est tout simplement de prévoir – vous employez une technique négative – que des accusations puissent être portées par tous les substituts du Procureur général et qu'il n'y ait plus de cas où l'autorisation préalable du Procureur général soit expressément requise, n'est pas suffisante parce que ça n'équivaut pas à un mandat express ni explicite aux fins de l'article 283 ni aux fins des autres dispositions dont il s'agit ici au Code criminel.

Mme Goupil: M. le Président, si vous me permettez. Vous savez, la loi qui est habilitante dans ce dossier-là pour justement les délégations de substituts du Procureur général, c'est la Loi sur les substituts du procureur général. Dans la loi habilitante, si on prend l'article 3, il est clairement indiqué que les représentants du Procureur général, les substituts, représentent le Procureur général devant les tribunaux en matière criminelle ou pénale. C'est la loi habilitante qui le décrit de façon spécifique, que ce sont les substituts qui remplacent le Procureur général dans le cadre de ses fonctions. Et ça, c'est le cadre de la loi habilitante.

Alors, la raison pour laquelle nous ne l'avons pas indiqué, c'est que nous n'allons pas à l'encontre de la loi habilitante. Tout ce que l'on vient de faire, c'est de s'assurer, par une simple modification qui aurait pu être faite aussi dans le passé, qui n'a pas été choisie... Puis ça, on pourrait en rediscuter, au moment où ça a été fait par simple mesure administrative, parce que la loi habilitante le disait clairement, que les substituts représentent le Procureur général. Ce sont eux qui sont mandatés pour le faire et personne d'autre.

Alors, en venant modifier de la façon dont on le propose, on s'assure effectivement qu'il n'y aura plus d'interprétation comme on l'a donnée, parce que de façon précise on le mentionne tout simplement en enlevant «sauf dans les cas où l'autorisation préalable du Procureur général est requise». Donc, on n'a pas à le refaire à nouveau. Ça serait comme redondant de le faire de façon spécifique, puisque d'office dans la loi habilitante les substituts ont ce pouvoir de représentation du Procureur général. Ce sont seulement eux qui peuvent le faire.

M. Pelletier (Chapleau): D'abord, le juge Lortie, je pense, qui a rendu le jugement ici, a dû se tromper quelque part, puisqu'il n'a pas trouvé que c'était si clair que ça, premièrement.

Mme Goupil: C'est pour ça qu'on corrige.

M. Pelletier (Chapleau): Deuxièmement, avec les corrections que vous proposez, moi, je serais prêt à plaider devant n'importe quel tribunal qu'il n'y a personne qui est mandaté pour porter des accusations spécifiques en vertu de l'article 136 du Code criminel.

Mme Goupil: L'article 136, c'est quoi?

M. Pelletier (Chapleau): L'article 136 et les autres, là, 163 et, par ailleurs, l'article qui est en cause, c'est quoi? 283? Ce que je vous dis, Mme la ministre – ce n'est pas rien que pour faire le pointilleux – je suis convaincu qu'en vertu de l'article 283 du Code criminel et les autres dispositions ici mentionnées, dont 136 et les autres, je suis persuadé qu'il faut que vous donniez un mandat.

Maintenant, le mandat peut être élargi. Vous pouvez l'élargir à l'ensemble des substituts du Procureur général, mais vous devez donner un mandat clair. Pourquoi? Parce que nous sommes en présence de dispositions particulières. Il ne suffit pas d'éliminer des exceptions pour donner un mandat. Vous devez le faire de façon explicite.

Mme Goupil: Ce n'est pas exceptionnellement, c'est d'office. Le pouvoir de délégation aux substituts, il est d'office dans la loi habilitante. Mais, si vous me permettez...

M. Pelletier (Chapleau): Oui, mais faites attention à votre loi habilitante, Mme la ministre, parce que, s'il y a un conflit entre votre loi habilitante et le Code criminel du Canada, c'est le Code criminel qui va l'emporter.

Mme Goupil: Oui, c'est évident. M. le Président, si vous permettez, je vais demander à M. Bilodeau d'apporter à nouveau des arguments pour vous expliquer la raison pour laquelle nous jugeons qu'il n'est pas nécessaire de le faire de la façon dont vous le proposez.

M. Bilodeau (Mario): C'est qu'il ne faut pas partir de l'article 283, à mon humble avis, pour comprendre le but de l'amendement, il faut partir de l'article 2 du Code criminel. Qui a pouvoir de poursuivre, au Canada, en vertu du Code criminel? C'est le Procureur général. Or, l'article 2 du Code criminel dit que le Procureur général comprend le substitut légitime. Donc, tous les substituts nommés par Mme Goupil ont le pouvoir de poursuivre en vertu du Code criminel. En outre, l'article 3 de la Loi sur les substituts dit que seuls les substituts peuvent représenter le Procureur général devant les tribunaux.

Le problème qui arrive avec 283, qui est un article qui date de 1983, pour prévenir la situation qu'a décrite Mme la ministre à l'effet que lorsqu'il n'y avait pas d'entente entre les parties les deux avaient des droits de garde, donc il ne pouvait pas y avoir d'enlèvement mais il pouvait y avoir des situations où il y avait quand même un enlèvement, le législateur a décidé de créer 283.

Mais, pour éviter les abus, pour éviter que des gens s'accusent mutuellement d'enlèvement, ils ont dit: On va mettre un contrôle sur la possibilité d'accuser. Donc, ne pourront déposer des accusations que ceux qui sont autorisés par le Procureur général. Qui est autorisé par le Procureur général? Ce sont les substituts légitimes, en vertu de 2, ou, autre situation, une personne spécialement mandatée qui serait, par exemple, l'avocat du père, qui est au courant de tous les faits et pour lequel la procureur général pourrait décider, plutôt qu'envoyer un de ses substituts plaider la cause, de le mandater pour prendre des poursuites en matière criminelle. Fait que l'on a vu à peu près jamais.

M. Pelletier (Chapleau): Me Bilodeau, si tous les substituts du Procureur général sont d'office mandatés pour porter des accusations en vertu de l'article 283, comment expliquez-vous ce jugement, ici?

M. Bilodeau (Mario): Je ne pense pas que Mme la ministre vous ait jamais dit qu'elle était d'accord avec le jugement. Nous ne sommes pas d'accord avec ce jugement. Cependant, les effets du jugement doivent être corrigés. Or, les solutions sont peu nombreuses, hein? Amendement législatif tel que proposé par Mme la ministre, appel qui créait une situation où demeurait l'incertitude. Parce qu'on continue à avoir des accusations d'enlèvement depuis l'arrêt Tibbo. Alors, le moyen choisi par la Procureur général a été l'amendement plutôt que l'appel. Mais ne voyez pas là un aveu de la part de la Procureur général qu'elle est d'accord avec le contenu du jugement Tibbo. Elle doit cependant vivre avec ses effets.

M. Ouimet: Juste un instant, ici.

Mme Goupil: M. le Président...

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le porte-parole de l'opposition et député de Marquette.

M. Ouimet: Je viens de relire, là. Vous avez dit, Me Bilodeau, que la Procureur général était en désaccord avec le jugement...

Mme Goupil: Non, non, non. Ce n'est pas ça qui a été dit.

M. Ouimet: ...ou ne partageait pas le jugement. Je ne veux pas...

Mme Goupil: Le contenu. Ce n'est pas ça qui a été dit.

M. Bilodeau (Mario): Le contenu, le raisonnement.

(11 heures)

M. Ouimet: Dans sa lettre, Me Lortie dit bien: «L'étude sur l'opportunité d'en appeler de cette décision à laquelle a participé l'assemblée des chefs et chefs adjoints amène à la conclusion que les chances de succès étaient minces.» Il ne dit pas, lui, qu'il craignait par rapport à l'incertitude, il dit qu'on s'est penché sur la question: Est-ce qu'on doit aller en appel ou pas de la décision? Si nous pensons que notre loi habilitante, elle est bonne et que le juge Lortie a erré, on va en appel. Mais ce n'est pas ça qu'il conclut, Me Lortie, il dit: On a fait l'analyse et on trouvait que les chances étaient minces de gagner. Donc, probablement que le juge Lortie avait raison, et, je pense, c'est le plaidoyer de Me Pelletier ici.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Mme la ministre.

Mme Goupil: Alors, M. le Président, je voudrais juste, s'il vous plaît, pour reclarifier les choses, parce que je ne voudrais pas qu'on me fasse porter des propos, des intentions que je n'ai pas dites... Je voudrais seulement répondre à ce que vous avez rajouté, à l'élément suite à votre proposition, pourquoi nous ne le faisons pas de la façon dont vous le proposez puis... Et, je vous l'ai déjà dit, ce n'est pas par complaisance, je trouve que vos propos sont tout à fait pertinents, puisque vous êtes un spécialiste au niveau du droit constitutionnel, particulièrement. Cependant, je pense qu'on s'est peut-être... Peut-être que je me suis mal exprimée, au moment où on ramène le débat uniquement dans l'objet de cette modification-là. C'est que la loi habilitante le décrit de façon précise, que les substituts représentent le Procureur général, sauf qu'il y a des articles dans lesquels on indique de façon particulière qu'on a besoin du consentement du Procureur, et, à cet égard, la délégation qui a été faite de façon précise dans ces cas-là, avec ce jugement-là, vient remettre en question la mesure administrative que nous avions en place qui faisait en sorte que, dans ces cas-là, il y avait des personnes qui étaient déléguées d'office pour le faire, et ce sont celles que je vous ai mentionnées tout à l'heure dans mon allocution.

Si on y allait de la façon dont vous le proposez, ça veut dire que, à chaque fois que nous voudrions modifier quelque chose au niveau d'un mandat spécifique pour un substitut de la Procureur général, il faudrait revenir à chaque fois parce qu'on viendrait remettre en question que d'office les substituts sont les mandataires de la Procureur général. Parce que ce sont des cas d'exclusion, parce que d'office, dans tous les cas, les substituts prennent les procédures sans l'autorisation de la Procureur général, ils sont délégués d'office. Sauf que, dans ces cas-là, ça prend le consentement au préalable, et il y a deux cas où ça prend le consentement écrit, et, si on ne vient pas les modifier, on conserve cette façon de faire dans deux cas précis parce que c'est vraiment des cas exceptionnels qui d'ailleurs, si je ne me trompe, ont été très peu utilisés au cours des cinq dernières années. Bon. Mais...

M. Ouimet: ...

Mme Goupil: Pardon? C'est celui dans le cadre d'une...

Une voix: ...

Mme Goupil: C'est ça. Je veux juste... Il y a dans deux cas. Il y a celui où une enquête préliminaire a été... Attendez un petit peu, là, parce que c'est très technique.

(Consultation)

Alors, c'est l'article 485.1: Aucune nouvelle poursuite après rejet d'un acte d'accusation sans consentement personnel écrit du Procureur général ou sous-procureur général.

L'article 577: «Acte d'accusation privilégié[...]. Si une enquête préliminaire n'a pas été tenue, un acte d'accusation ne peut être présenté [...] sans le consentement personnel écrit du Procureur général ou du sous-procureur général.» Même consentement requis pour une nouvelle dénonciation.

Alors, le consentement personnel du Procureur général est exigé à ce moment-là, et je vous dirais que la délégation qui est faite en faveur des substituts, qui est prévue à l'article 2 du Code criminel, ne peut pas s'appliquer, parce que de façon spécifique ça a été mentionné dans le Code criminel, et ça, on ne peut pas le changer.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Oui, M. le député.

M. Ouimet: ...dispositions du Code criminel...

Mme Goupil: Qui vont demeurer, on ne peut pas les modifier.

M. Ouimet: ...où la Procureur général doit absolument autoriser par écrit.

Mme Goupil: Tout à fait, personnellement, par écrit.

M. Ouimet: Les autres, elle peut se dessaisir de ses pouvoirs.

Mme Goupil: Elle ne se dessaisit pas de ses pouvoirs. En fait, elle conserve tous ses pouvoirs, mais elle a nommé de façon spécifique des gens, en fait, de par ces articles-là, qui peuvent le faire dans ces 13 cas là. Ils le font de façon spécifique, c'est uniquement ça.

M. Ouimet: Bien, non, vous vous dessaisissez de vos pouvoirs en vertu de votre loi habilitante. En tout temps, vos substituts peuvent déposer des accusations sans que vous les ayez autorisés, n'est-ce pas? Sauf pour les deux cas où ça prend une autorisation écrite. Mais, dans tous les autres cas d'accusation, de quelque nature que ce soit, à moins que j'aie mal compris, les substituts n'ont pas besoin de l'approbation de la députée de Lévis. Est-ce que j'erre dans mon interprétation?

Mme Goupil: En fait, c'est du Procureur général.

M. Ouimet: De la Procureur général. C'est ça?

Mme Goupil: Alors...

M. Ouimet: Est-ce que c'est ça?

Mme Goupil: Attendez un petit peu.

(Consultation)

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Mme la ministre.

Mme Goupil: Si vous permettez, M. le Président, je vais demander à M. Bilodeau de l'expliquer de la même façon qu'il vient de le faire.

M. Ouimet: Je voudrais juste réitérer la question, avec la modification proposée à la loi habilitante. Hormis les deux cas d'exception où ça prend une autorisation écrite, est-ce que ça veut dire que, dans n'importe lequel dossier, tout substitut du Procureur général peut déposer des actes d'accusation sans que la Procureur général ait droit de regard, si on en demeure, là, avec la Loi sur les substituts telle qu'amendée par le projet de loi n° 54? C'est ça qui est le fond de l'affaire.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Me Bilodeau.

M. Bilodeau (Mario): Je retiens l'expression «droit de regard», c'est l'une des conditions essentielles et une vertu cardinale, les substituts du Procureur général, de pouvoir exercer leur pouvoir de façon discrétionnaire et sans intervention extérieure. Ceci étant dit, ce que l'article 4 avait comme effet, c'était d'obliger le substitut légitime, le substitut puîné, d'aller chercher le consentement de 283.1 auprès de son chef ou de son adjoint, et c'est ce que le juge a dit qui était illégal, dans Tibbo, qui était une délégation qui était illégale. Tout ce qu'on fait aujourd'hui, c'est de remettre à qui de droit, le substitut légitime, le pouvoir d'exercer les poursuites à l'égard de toutes les infractions, y compris les 13 énumérées à cet endroit, sans aller chercher le consentement de son procureur-chef ou de son procureur-chef adjoint. C'est le seul effet que ça a.

M. Ouimet: Bien, vous n'avez pas répondu à ma question, là.

M. Bilodeau ((Mario): Et si vous y voyez là...

M. Ouimet: Non, non, je fais juste poser la question, je ne prête pas d'intention. Tantôt, vous avez dit, dans une intervention antérieure, que ça prenait le consentement de la Procureur général pour éviter des cas d'abus où les substituts poursuivaient. Je ne sais pas trop dans quelle matière, mais il y aurait eu abus à un certain moment donné, et donc la Procureur général devait émettre un certain consentement. Là, la question que je pose, elle est claire: Si on enlève, au niveau de l'article 4 de la Loi sur les substituts du Procureur général, «sauf dans les cas où l'autorisation préalable du Procureur général est requise», ça veut dire que les substituts peuvent déposer des accusations sans que la Procureur général ait un mot à dire?

Mme Goupil: Bien, c'est ce qu'ils font actuellement.

M. Ouimet: Parce que c'est la loi habilitante, elle délègue tout, absolument tous ses pouvoirs.

Mme Goupil: Et, M. le Président, vous me permettrez...

M. Ouimet: Les cas d'abus auxquels vous avez fait référence...

Mme Goupil: M. le Président, si vous permettez...

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Allez-y, Mme la ministre.

M. Ouimet: C'est parce que je veux juste comprendre, là.

Mme Goupil: Non, mais, M. le Président, là, j'aimerais quelque chose. Vous posez une question, c'est comme si on était dans un interrogatoire.

M. Ouimet: Non, non.

Mme Goupil: Un instant, là, qu'il nous laisse le temps de répondre.

M. Ouimet: Très bien.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): À ce moment-ci, je pense que la flexibilité qu'on s'est donnée permet quand même de progresser. Vous souhaitez à ce moment-ci, Mme la ministre, répondre? Allez-y.

Mme Goupil: Ce que j'aimerais, c'est que justement on puisse laisser le temps et qu'on comprenne bien ce que l'on veut retrouver.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Marquette.

Mme Goupil: M. le Président, ce qu'on voudrait juste... C'est parce que, si on veut répondre...

M. Ouimet: J'ai deux oreilles: une pour vous et une pour mon attaché.

Mme Goupil: D'accord. Alors, M. Bilodeau, vous pouvez y aller.

(11 h 10)

M. Bilodeau (Mario): Lorsque j'ai fait référence à des cas d'abus, je ne parlais pas de substituts du Procureur général qui portaient des plaintes, je parlais d'individus, de personnes, parce que le Code criminel permet à quiconque de déposer des plaintes. N'importe qui peut déposer une plainte. Or, le contrôle est justement pour prévenir l'abus de la part de ces personnes-là et non pas des substituts du Procureur général, qui exercent légitimement leurs pouvoirs. C'est dans ce contexte-là que je vous ai parlé d'abus.

M. Ouimet: Si la ministre me le permet, il n'y a pas eu de situations antérieurement où il y avait eu des abus au niveau de dépôts d'actes d'accusation par des substituts du Procureur général?

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Mme la ministre.

Mme Goupil: M. le Président, il y a un manuel qui indique les directives, très claires, qui encadrent le travail des substituts, et ils font leur travail de façon, je dirais, conforme aux mesures.

M. Ouimet: Ce n'est pas ça qui est en cause. Ce n'est pas ça qui est en cause, là.

Mme Goupil: Bon. Alors, ce n'est pas ça qui est ici. Alors, ça, c'est important.

Maintenant, M. le Président, vous savez que, la façon dont nous avons fonctionné jusqu'à maintenant, il faut se rappeler qu'elle émane d'une mesure administrative qui date de 1993, qui a été adoptée par le ministre de l'époque, qui était M. Gil Rémillard, dans laquelle on avait soulevé un événement à peu près comme celui dans l'arrêt Tibbo, qui ne s'était pas rendu devant le tribunal, et on a choisi d'y aller par une mesure administrative, à ce moment-là, qui n'avait jamais été remise en question.

Vous comprendrez que ce que nous voulons faire tout simplement, c'est qu'on veut chercher à éviter que des personnes se soustraient à l'application de la loi, parce que l'on ne pourrait pas obtenir un consentement rapidement – ça, c'est une chose – en temps opportun. On veut aussi rendre la Loi sur les substituts conforme au Code criminel, qui confirme que les substituts sont ceux qui sont délégués de par le Procureur général. On veut obtenir une sécurité juridique pour s'assurer qu'on puisse rapidement intervenir, comme nous l'avons fait jusqu'à maintenant.

Puis, enfin, bien, ce qu'on veut aussi, on veut se conformer à la décision de la Cour du Québec. Alors, si on l'a soulevé, il peut y avoir d'autres personnes qui dans l'avenir pourront à nouveau revenir là-dessus. On ne peut pas se permettre, pour la sécurité judiciaire, de mettre en péril des procédures à venir pour invoquer cette technicalité-là. Alors, ce que l'on fait tout simplement par cet article, c'est de s'assurer que ça ne pourra pas être soulevé à nouveau, pour qu'on puisse continuer à travailler comme nous l'avons fait jusqu'à maintenant.

Et en aucun cas la Procureur général ne se décharge de quelque responsabilité que ce soit. Alors, ça, il faut que ce soit clair. Est-ce que, depuis 1993, les Procureurs généraux précédents, en l'occurrence M. Rémillard, ont voulu se soustraire à des obligations? Loin de là. Ce qu'il a voulu faire, c'est s'assurer que l'on puisse être capable de se donner des outils pour être capable de fonctionner. Jusqu'à maintenant, ça a toujours bien fonctionné, ça a toujours été la façon de faire. Par cet amendement-là, nous voulons tout simplement s'assurer qu'on ne soulèvera pas ça à nouveau, et on ne veut surtout pas mettre en péril des façons de faire qui ont donné de bons résultats au Québec.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sirros: Merci, M. le Président. Comme les lois s'appliquent à tout le monde, peut-être le vrai test de la clarté des lois, c'est si les non-avocats, les non-initiés à tout ça comprennent. Alors, je ne suis pas avocat, mais je suis avec intérêt ce qui se passe ici. Alors, permettez-moi de vous dire brièvement ce que je comprends de nos débats ici, et peut-être ça va clarifier les choses.

Je ne constate aucune divergence sur les objectifs poursuivis, ni du côté gouvernemental ni du côté de l'opposition, je pense qu'on partage les mêmes objectifs. Il y a pourtant une différence sur les moyens qu'on choisit pour y arriver, pour s'assurer qu'effectivement l'objectif qu'on recherche sera atteint. Moi, ce que je comprends de la discussion ici, c'est que le Code criminel prévoit que dans certaines situations il y a un mandat express qui est exigé de la part de la Procureur général vis-à-vis de ses substituts pour intenter des poursuites par rapport à une série de situations qui sont énumérées dans la feuille que nous avons ici.

La Procureur général, ici, présente l'amendement à la loi habilitante sur les substituts pour dire tout simplement: Tous mes substituts ont le pouvoir que j'ai par rapport à toutes les situations, sans précisément nommer les situations pour lesquelles le Code criminel exige un mandat express. Alors, ce que je comprends ici, c'est que ce serait peut-être plus sécuritaire, par rapport à l'objectif poursuivi, si l'amendement que la ministre propose à la loi nommait expressément les situations que le Code criminel prévoit, pour ne laisser aucune marge de manoeuvre ou de doute dans l'esprit de quiconque au niveau d'un jugement éventuel sur des cas similaires quant à la capacité du substitut du Procureur général d'exercer son mandat.

Et ma question comme non-initié dans tout ça, c'est: Qu'est-ce que la ministre perdrait ou qu'est-ce que la loi ou la justice perdrait si on procédait de cette façon? Parce qu'il me semble que l'objectif poursuivi serait atteint à 100 %.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Mme la ministre.

Mme Goupil: Alors, je trouve qu'elle est très pertinente, votre question, parce que, évidemment, il faut que tout le monde puisse comprendre qu'est-ce qu'on recherche derrière une loi. Et, je suis heureuse aussi, vous pouvez être assuré que je n'en suis pas à une... Pour moi, l'objet d'une commission parlementaire est de s'assurer que l'on trouve la bonne façon pour le faire, et je n'en suis pas sur... Bien au contraire, par les échanges d'une commission parlementaire, on peut bonifier, on peut justement améliorer les choses, et c'est ma philosophie puis c'est ma compréhension d'une commission parlementaire.

Ceci étant dit, ce qui a été proposé fait en sorte que, à chaque fois que le Code criminel viendrait modifier un article dans lequel on devrait modifier soit une délégation, soit une façon de faire qui imposerait une façon différente aux substituts, il faudrait, à chaque fois, revenir et faire une modification par législation, ce qui est lourd, ce qui est long, et vous le savez, que ce n'est pas toujours aussi simple qu'on le souhaiterait. Et ce que ça aurait pour effet... Je ne sais pas si, ça, dans un premier temps...

M. Sirros: Peut-être juste sur ça...

Mme Goupil: Oui.

M. Sirros: Donc, si je comprends bien, vous voulez dire que, si dans l'avenir le Code criminel était amendé pour exiger d'autres mandats express, ça obligerait l'Assemblée nationale à revoter une loi.

Mme Goupil: Tout à fait.

M. Sirros: Et ma question serait: Et puis?

Mme Goupil: Bon. Je vais vous...

M. Sirros: Parce que, si le Code criminel prend la peine de nommément demander un mandat express, ça interpelle le législateur de l'autre côté qui applique cette loi de faire face à ça de façon peut-être plus spécifique, tandis que, si on prend une attitude qui dit: Bien, peu importe ce qu'ils vont faire au Code criminel, nous, pour l'avenir et pour toujours, on procède de cette façon-là... Je veux dire, encore une fois, qu'est-ce qu'on perd vraiment si ce n'est que d'être obligé, d'être saisi de se pencher sur l'évolution de notre droit, finalement?

Mme Goupil: Bon. D'abord, n'eût été de cela, évidemment, vous savez, on peut répondre que la législation, ce n'est pas toujours aussi rapide qu'on le voudrait, puis c'est bien pour les raisons que nous avons mises de l'avant. Mais il reste quand même que, quand on parle de l'administration de la justice, concrètement, sur le terrain, ça nous amène, à chaque fois qu'il y a des délais dans certains cas spécifiques, des problématiques importantes.

Maintenant, j'aurais une autre raison à vous donner, c'est qu'actuellement il n'y a aucune législation dans les autres provinces qui vient restreindre le pouvoir des substituts du Procureur général de consentir au dépôt d'une dénonciation pour des infractions concernées. À aucune autre province on demande... Ce qu'on nous demande de faire, là, c'est que, nous, nous le fassions, alors qu'il n'y a dans les autres provinces aucune exigence à cet égard. D'office, les substituts sont mandatés pour faire le travail, il y a des articles où on demande un consentement spécifique, et nous, ce que nous demandons, c'est de pouvoir continuer à appliquer la même mesure administrative – ce que nous avons fait depuis 1993 – qui n'a jamais été remise en question, et nous ne voyons pas la nécessité de le faire de cette façon, parce que c'est seulement que sur ces articles-là dans lesquels on vient clarifier par la disposition de l'article 4, tel qu'on propose comme modification. La mesure administrative de 1993, on demande qu'elle soit maintenant, de par cette législation-là, conforme à ce que nous avons toujours fait.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Chapleau.

M. Pelletier (Chapleau): Mme la ministre, M. Bilodeau, je dois vous dire que je comprends votre argumentation, puis je peux vous dire que c'est une argumentation qui se tient. Je comprends que vous me dites qu'à l'article 283 du Code criminel on mentionne que l'accusation peut être portée par le Procureur général ou la personne qu'il mandate. Je comprends que «Procureur général» est défini comme incluant les substituts du Procureur général, et donc vous dites que forcément le substitut du Procureur général peut porter une accusation en vertu de 283, de même que pourrait le faire toute autre personne qui serait mandatée par le Procureur général.

Mme Goupil: ...

M. Pelletier (Chapleau): Bien, c'est-à-dire, bien oui, forcément. Si vous mandatiez quelqu'un pour porter une accusation en vertu de 283, la personne pourrait le faire, de même que d'office tout substitut du Procureur général, puisque la définition de Procureur général inclut les substituts du Procureur général en vertu du Code criminel. Je comprends votre argumentation et, je le répète, ça se tient. Je comprends que vous renvoyiez aussi aux autres provinces canadiennes et à leur expérience, mais le problème, c'est qu'au Québec il y a une décision qui a été rendue le 9 mars 1999 où le juge Lortie dit ceci – écoutez bien parce que c'est important: «Me Suzanne Nault, en sa qualité de substitut permanente et substitut en chef adjointe, est-elle le substitut légitime dont fait état l'article 2 du Code criminel? Je ne le crois pas. De toute évidence, elle n'est pas l'avocate spécialement mandatée par le Procureur général pour autoriser la poursuite en vertu de l'article 283.1 du Code criminel.»

(11 h 20)

Cette preuve n'a pas été faite en ce sens devant la cour, ce qui veut dire que, selon le juge Lortie, pour porter une accusation en vertu de 283, il ne suffit pas d'être substitut du Procureur général, encore faut-il être spécialement mandaté par le Procureur général. Or, cette décision-là, même si vous n'êtes pas d'accord avec la logique du juge, elle n'a pas été portée en appel, que je sache. Et, comme vous l'avez dit, M. Bilodeau, nous devons vivre avec, et la ministre aussi doit vivre avec.

Je vais vous laisser répondre et, par la suite, si vous voulez – parce que je veux qu'il y ait une interaction sur la question que je pose – par la suite, j'enchaînerai avec le problème que pose la formulation officielle de la modification que vous proposez par rapport aux pouvoirs spéciaux qu'a le Procureur général en vertu de 485.1 et 577 du Code criminel. Je vais d'abord vous entendre sur le premier point.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Donc, nous y reviendrons. Mme la ministre.

Mme Goupil: D'abord, M. le Président, si nous revenons justement au jugement Tibbo, ce qui a été mentionné, c'est que le juge... Il y a deux choses là-dedans, qui sont différentes. La première, il dit que Me Nault ne serait pas légitime, en vertu de 4a. Alors, nous, ce que l'on fait par la modification, on viendrait la légitimer. C'est justement pour ça qu'on fait la modification proposée, parce que, avec cette modification-là, elle serait légitimée d'office. Quand il fait référence à l'article 283, par la loi habilitante qui fait en sorte que tous les substituts sont légitimés de représenter la Procureur général...

M. Ouimet: ...

Mme Goupil: Si vous me permettez, M. le Président, c'est parce que je voudrais répondre...

M. Ouimet: Non, non, juste sur ce point. Juste sur ce point.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Moi, je vous suggère, là, qu'on permette à la ministre de terminer, et vous pourrez revenir sur ce point en particulier.

M. Ouimet: Non, mais on pourrait évacuer ce point-là, si vous permettez. C'est parce que, à la page 9 du jugement, on dit: «Alors qu'aux termes de l'article 9 de cette même loi le Procureur général pourrait confier le mandat à un substitut ad hoc de poursuivre un contrevenant en vertu de l'article 283 du Code criminel il ne peut le faire à l'égard des substituts permanents sans enfreindre les dispositions de la loi.»

En quoi, ce que vous venez de dire, en modifiant l'autorisation au préalable de la Procureur général, est-ce qu'on répond à la question? Et à la lumière de ce qu'il dit à la fois à la page 8 et à la page 9? Parce qu'il n'est pas nommé précisément.

(Consultation)

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Très bien, Mme la ministre. Alors, on vous laissera répondre jusqu'au bout.

Mme Goupil: Alors, M. le Président, je voudrais répondre. Vous aviez deux questions. D'abord, la première, c'est que ce que nous voulons faire par cette modification-là, c'est permettre aux substituts de continuer à faire leur travail légitime, comme ils le sont de par la loi habilitante, à savoir représenter la Procureur général, dans un premier temps.

Deuxième des choses, lorsque vous faite référence à l'article 283 – et je le lis, là: «Aucune poursuite ne peut être engagée en vertu du paragraphe 1° sans le consentement du Procureur général ou d'un avocat qu'il mandate à cette fin» – le «ou qu'il mandate à cette fin», c'est quelqu'un d'autre qu'un substitut.

M. Pelletier (Chapleau): Oui, c'est ce que je disais tout à l'heure.

Mme Goupil: Tout à fait.

Une voix: ...comprend?

Mme Goupil: Tout à fait.

M. Pelletier (Chapleau): Votre thèse est pas mal. Elle est pas mal, votre thèse, sauf qu'il y a la décision Tibbo, qui semble exiger qu'il y ait un mandat explicite, y compris chez les substituts du Procureur général, pour porter l'accusation en vertu de 283.

Mme Goupil: J'ai énormément de respect pour votre opinion, et vous le savez, je vous l'ai mentionné, mais nous ne la partageons pas. Alors, ce qui est important, c'est de toujours se ramener à l'objectif de cet amendement-là qui est de permettre aux substituts de continuer de pouvoir faire le travail comme ils le faisaient, parce qu'ils sont mandatés d'office pour le faire en vertu de la loi habilitante et parce que, aussi, ce sont des pouvoirs qui sont, je dirais, non pas exceptionnels, mais ponctuels, où on dit que ça prend un consentement. Et, à ce moment-là, nous, comme les substituts ont le pouvoir de le faire d'office, nous voulons qu'ils puissent continuer à le faire et qu'il ne puisse pas y avoir un autre jugement qui soit prononcé comme celui que nous connaissons dans Tibbo.

Puis vous comprendrez aussi que je ne veux pas commenter sur la place publique les raisons. Ce que nous avons retenu, c'est qu'il fallait un amendement législatif, et cet amendement législatif là, nous le proposons de façon fort simple, parce que ce n'est pas compliqué en soi. Vous comprenez?

M. Pelletier (Chapleau): Je comprends puis je comprends que chacun est sur ses positions et que, bon... Notre point de vue, je pense, vous le comprenez, moi, je comprends le vôtre. Je vais continuer avec le deuxième élément de ma question de tout à l'heure, si vous le voulez bien.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Très bien, vous pouvez y aller, mais le député de Drummond souhaitait intervenir. Est-ce que c'était sur cette question précise?

M. Jutras: Oui. C'était sur le point qu'on discute, avant de passer peut-être à l'autre élément.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Bon, d'accord. Alors, allez-y, M. le député de Drummond.

M. Jutras: Moi, je pense que, le député de Chapleau puis le député de Marquette, là, il y a un extrait du jugement dont ils ne donnent pas lecture, et c'est ça qui est l'extrait pertinent puis qui est le stare decisis dans le jugement Lortie. Et là je réfère à la page 8. Le député de Chapleau a lu, à la page 8, le paragraphe qui commence par: «Me Suzanne Nault, en sa qualité de substitut [...] est-elle le substitut légitime dont fait état l'article 2 du Code criminel? Je ne le crois pas.» Mais sur quoi il se base, le juge, quand il dit ça? C'est ce paragraphe-là dont on n'a pas fait lecture, c'est le dernier paragraphe de la page 8, qui dit: «L'expression "sauf dans les cas où l'autorisation préalable du Procureur général est requise" ne prête à aucune ambiguïté.»

C'est ça qui crée problème dans l'article 4, et c'est là-dessus que se base le juge Lortie pour rendre la décision qu'il rend. Il dit: «La seule interprétation à donner à cette restriction du paragraphe a de l'article 4 de la Loi sur les substituts du Procureur général est à l'effet qu'elle prive le substitut du pouvoir d'autoriser les poursuites portées en vertu du Code criminel lorsque l'autorisation du Procureur général est requise, notamment aux articles 136.1, 172.4...» En tout cas, tous les cas qui sont énumérés là. Alors, c'est là qu'est le stare decisis. Donc, ce qui crée problème dans l'article 4, ce sont les mots «sauf dans les cas où l'autorisation préalable du Procureur général est requise», puis, avec l'amendement législatif qu'on apporte aujourd'hui, ces mots-là, on les fait disparaître. Et c'est ça qui crée problème.

Puis, dans un sens, je la comprends, l'argumentation du juge Lortie, parce que, quand on réfère à l'article 4, on dit: «Tout substitut remplit, sous l'autorité du Procureur général, en outre des devoirs et fonctions que celui-ci détermine, les suivants:

«a) il examine les procédures et documents se rapportant aux infractions commises à l'encontre du Code criminel et, s'il y a lieu, autorise les poursuites contre les contrevenants, sauf dans les cas où l'autorisation préalable du Procureur général est requise.»

Donc, le substitut, dans un cas comme ça, ne peut pas être autorisé à porter les procédures, parce que là on réfère ici exactement à l'autorisation préalable du Procureur général. Donc, ça veut dire qu'on réfère à la Procureur général en chef du gouvernement. Alors, c'est là qu'est la décision, et, à ce moment-là, ça veut dire qu'en enlevant ça, bien, la difficulté que le juge a soulevée dans le jugement, bien, elle n'est plus là. Ça, c'est le premier élément.

Puis le deuxième élément, c'est que, quand on regarde à l'article 283, l'alinéa 2, on dit: «Aucune poursuite ne peut être engagée en vertu du paragraphe 1° sans le consentement du Procureur général ou d'un avocat qu'il mandate à cette fin.» Puis on retrouve cette disposition-là dans la dizaine d'articles pertinents, là. Pourquoi c'est là, ça? C'est pour tout simplement empêcher qu'un individu, qu'un particulier porte la plainte, c'est ça. Ce n'est pas pour donner mandat spécifiquement au Procureur général de porter une plainte, c'est pour empêcher qu'un individu, lui, porte une plainte, parce que le mandat général que le Procureur général donne déjà à ses substituts, il est dans l'article 2 du Code criminel puis il est, en plus de ça, dans l'article 4 de la loi habilitante.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Très bien. Alors, on en arrive à votre deuxième question, M. le député de Chapleau.

(11 h 30)

M. Pelletier (Chapleau): Oui. Bien, tout simplement, en réponse, moi, je trouve que c'est un excellent argument et puis je trouve que ça se tient. Donc, en soi, c'est un argument qui me convainc. En tout cas, personnellement. Je ne peux pas parler pour mes collègues, mais je pense que, effectivement, la clause que l'on propose d'éliminer a été l'un des facteurs qui a influencé le juge dans sa décision. Et donc, en ce qui me concerne, je suis assez convaincu. J'aurais aimé qu'il y ait des précisions additionnelles qui soient apportées, mais je pense que vous touchez un point important et, à ce moment-là, je dois m'incliner.

Le second point suivant, Mme la ministre... Bien, je ne sais pas si mes collègues...

M. Ouimet: Ça va.

M. Pelletier (Chapleau): Ça va?

M. Ouimet: Je dois dire que le député de Drummond m'a éclairé beaucoup également.

M. Pelletier (Chapleau): Il n'a pas l'air de le croire lui-même, il a l'air de penser... Le député a l'air de croire... M. le député, vous n'avez même pas l'air de croire qu'on a été convaincus par votre exposé. On était déjà en train de réfléchir sur ce point-là, votre intervention a amené l'argument final dont nous avions besoin.

Mme la ministre, le deuxième point que je voulais clarifier est le suivant – parce que je pense que vous avez toujours la conviction qu'avec nous notre but, c'est non pas de mettre un frein à l'initiative gouvernementale, mais de bonifier le travail – avec l'exception que vous apportez actuellement, n'y a-t-il pas un danger – enfin, avec les mots que vous voulez biffer à l'article 4 – qu'éventuellement on comprenne que, même dans le cas des articles 485.1 et 577 du Code criminel, même dans ces cas-là, le substitut du Procureur général puisse porter une accusation?

Mme Goupil: Non.

M. Pelletier (Chapleau): Non? Pourquoi?

Mme Goupil: Parce que, dans les dispositions du Code criminel, il n'y a que ces deux dispositions-là qui requièrent de façon spécifique le consentement personnel du Procureur général. Et je vous dirais que le consentement personnel du Procureur général ou du sous-procureur général est exigé, et les délégations en faveur des substituts qui sont prévues à l'article 2 du Code criminel ne peuvent pas s'appliquer, parce que, de façon très précise, si on prend le temps de le lire... Est-ce que vous avez le Code, juste un petit peu?

(Consultation)

Mme Goupil: Alors, à l'article 485.1, si on en prend la lecture, il est mentionné... D'abord, c'est une nouvelle procédure après le défaut de poursuivre. Alors: «a) Le consentement personnel écrit du Procureur général ou du sous-procureur général, dans toute poursuite menée par le Procureur général ou dans toute poursuite dans laquelle celui-ci intervient;

«b) une ordonnance écrite d'un juge...» C'est ce qu'on explique par la suite.

Alors, ce sont les deux seuls articles où il est spécifié que ça prend le consentement écrit. Alors, vous comprendrez que, à moins qu'il y ait une modification, qu'on vienne modifier le Code criminel ultérieurement... Ce sont des choses qui peuvent arriver, mais, dans l'interprétation, on ne pourrait pas utiliser le pouvoir habilitant de façon générale, alors que c'est de façon exceptionnelle dans ces deux cas où on demande d'avoir le consentement écrit.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sirros: Pour rien enlever à la clarté du député de Drummond, mais je dois dire qu'il a repris un peu ce que j'avais compris comme étant la réponse ici. Alors, je suis content si on peut dénouer tout ça avec les avocats puis les non-avocats arrivant à la même conclusion. Voilà. Alors, je pense que ça va nous permettre d'adopter cet article.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): ...l'utilité des travaux d'une telle commission pour à la fois clarifier les enjeux...

M. Sirros: Ah oui, ça m'a fait extrêmement plaisir.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'article 1? M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Je voudrais juste mentionner, M. le Président, que, de ce côté-ci, les trois parlementaires sont convaincus. Je sais que mon attaché politique, lui, demeure sceptique et pense que ça pourrait revenir devant nous à nouveau et que possiblement un avocat va plaider que ça ne répond pas tout à fait aux exigences du Code criminel. L'avenir saura nous le dire, mais, en tout cas, moi, je me rends aux arguments, tout comme le député de Chapleau et le député de Laurier-Dorion. C'est vrai que la ministre a longtemps plaidé le point, mais je pense que le député de Drummond a cristallisé l'affaire, et, moi, je suis prêt à passer au vote, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Alors, par voie de conséquence, est-ce que l'article 1 est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Adopté. Article 2, Mme la ministre.

Mme Goupil: Adopté.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Est-ce que vous pouvez en faire la lecture, s'il vous plaît?

Mme Goupil: Ah oui, excusez-moi. Alors: «La présente loi entre en vigueur le...» On va indiquer la date, ici, de la sanction de la présente loi.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Très bien. Est-ce qu'il y a des interventions? Est-ce que l'article est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Adopté. Est-ce que l'intitulé et les titres sont adoptés?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Est-ce que le titre du projet de loi est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Adopté. Alors, il n'y a pas, bien sûr, de motion de renumérotation dans les circonstances, et la commission, ayant complété ses travaux, donc ajourne ses travaux sine die. Je vous remercie de votre collaboration.

(Fin de la séance à 11 h 36)


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