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Version finale

36e législature, 2e session
(22 mars 2001 au 12 mars 2003)

Le mercredi 11 décembre 2002 - Vol. 37 N° 101

Étude détaillée du projet de loi n° 139 - Loi modifiant certaines dispositions du Code de procédure pénale


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Table des matières

Journal des débats

(Onze heures cinquante-huit minutes)

Le Président (M. Lachance): À l'ordre! À l'ordre, s'il vous plaît! La commission des institutions... Je déclare la séance ouverte, bien sûr. Alors, la commission des institutions a comme mandat de poursuivre l'étude détaillée du projet de loi n° 139, Loi modifiant le Code de procédure pénale.

Est-ce qu'il y a des remplacements, Mme la secrétaire?

La Secrétaire: Non, M. le Président, aucun remplacement.

Le Président (M. Lachance): Merci. Alors, je souhaite la bienvenue à toutes les personnes qui sont ici présentes pour l'étude de ce projet de loi qui n'est pas très volumineux mais qui, quand même...

M. Jutras: Est significatif.

Le Président (M. Lachance): Il n'y a pas de doute là-dessus, significatif, comme le dirait M. le ministre.

Étude détaillée

Code de procédure pénale

Dispositions générales

Dispositions introductives (suite)

Alors, au moment d'ajourner nos travaux la dernière fois, la semaine dernière, nous en étions toujours à l'article 1. Alors, est-ce que, M. le ministre, vous avez des précisions ou des commentaires à faire ou bien si je cède la parole à la porte-parole de l'opposition officielle, Mme la députée de Bourassa?

M. Jutras: Mme la députée de Bourassa m'avait demandé des documents.

Mme Lamquin-Éthier: Oui. J'allais vous le demander.

M. Jutras: Oui. Alors, je les ai. Et on a des copies pour tout le monde.

Mme Lamquin-Éthier: Les revenus, là?

M. Jutras: Oui, c'est ça.

Mme Lamquin-Éthier: Puis les suites quant aux recommandations?

n (12 heures) n

M. Jutras: Oui, c'est ça. Alors donc, le suivi des recommandations dont on a parlé la semaine dernière, les recommandations du Comité qui avait été mis sur pied, là, composé de victimes, pour voir qu'est-ce qu'on pouvait faire à ce niveau-là. Alors donc, c'est le Rapport du Comité consultatif sur la révision du régime d'indemnisation des personnes victimes d'actes criminels ? Suivi des recommandations. Alors, je dépose donc ça.

Mme Lamquin-Éthier: Merci beaucoup.

M. Jutras: Et aussi je dépose, là, le plan de développement du réseau des CAVAC, partant de 2003-2004, les coûts de développement, les effectifs prévus, les ajouts et le budget total auquel on arriverait, là. Bon, l'an prochain on parle de 4 671 000, après ça, en 2004-2005, 6 769 000, et ainsi de suite.

Documents déposés

Le Président (M. Lachance): Alors, les documents sont déposés. C'est un document de travail?

M. Jutras: Oui, c'est ça.

Le Président (M. Lachance): Je constate, M. le ministre, que, dans votre document de travail, toutes les régions administratives ne sont pas représentées. Est-ce que vous pouvez nous expliquer? Évidemment, ce qui me saute aux yeux c'est que la région Chaudière-Appalaches n'est pas identifiée comme telle. C'est à proximité de la région de la Capitale-Nationale?

M. Jutras: Oui. Alors, c'est un des objectifs que l'on vise, M. le Président, quand on parle de la consolidation du réseau des CAVAC et quand on parle aussi non seulement de la consolidation, mais de l'expansion du réseau des CAVAC. C'est de voir à augmenter le nombre des CAVAC, là, à travers le Québec. Prochainement, il y en a un qui s'installera en Gaspésie. Mais l'objectif, effectivement, est de faire en sorte qu'il y en ait dans chacune des régions administratives.

Présentement, ce qui se passe pour la région de Chaudière-Appalaches... En fait, c'est le CAVAC Québec qui effectivement dessert... Il y a la même chose aussi dans mon coin, M. le Président, c'est le CAVAC Mauricie?Centre-du-Québec. Mais, en fait, l'objectif, ce serait de faire en sorte qu'il y en ait un dans chacune des régions administratives du Québec.

Remarquez que présentement il y a des points de services, et en Chaudière-Appalaches c'est ce qui se produit, puis c'est la même chose chez nous, dans la région Centre-du-Québec. Mais on parle effectivement d'augmenter le nombre de CAVAC.

Le Président (M. Lachance): Merci. Mme la députée de Bourassa.

Mme Lamquin-Éthier: Merci, M. le Président. Mes salutations, M. le Président, Mme la secrétaire, M. le ministre. Salutations également à nos collègues et à toutes les personnes qui nous accompagnent. Merci d'avoir déposé les documents.

Si vous me permettez une première question rapide sur le document de travail Plan de développement concernant le réseau des CAVAC, dans la première colonne de gauche, là où sont énumérées les différentes régions, à l'item Projets spécifiques, à la deuxième ligne, c'est marqué «Suivi ? j'imagine "intervention" ? 24 heures, sept jours sur sept». Il avait été question de mettre en place une ligne téléphonique qui était 24 heures, sept jours. Il y en a déjà une qui existe. Quelle est la distinction entre la proposition qui est faite pour en mettre une en place avec celle qui existe déjà?

M. Jutras: Présentement, il existe la ligne SOS violence conjugale.

Mme Lamquin-Éthier: Celle qui est en bas?

M. Jutras: C'est ça. Et présentement il existe la ligne SOS violence conjugale qui est financée, là, à même cette enveloppe-là, et l'objectif, c'est de rajouter une autre ligne téléphonique qui serait en opération 24 heures sur 24, sept jours sur sept, et là ce serait pour les victimes d'actes criminels, là, «at large», comme on dit.

Mme Lamquin-Éthier: O.K., et non pas spécifiquement violence. Quand vous avez les deux lignes, là, il y a des montants qui suivent évidemment au bout des deux lignes. Vous avez: ligne téléphonique 24 heures, sept jours, pour le budget total de 200 000, 2003-2004. Et en dessous vous avez: suivi intervention 24 heures, sept jours, 200 000. C'est quoi, cette distinction-là?

M. Jutras: Alors, effectivement, bon, la ligne téléphonique 24 heures sur 24, sept jours sur sept, là, c'est celle à laquelle je faisais référence, là, il y a quelques instants.

Mme Lamquin-Éthier: La première ligne. O.K.

M. Jutras: Maintenant, le suivi de l'intervention 24 heures sur 24, sept jours sur sept, alors ce n'est pas le suivi de la ligne téléphonique, mais c'est le suivi auprès des victimes. Alors, si, par exemple, vous avez...

Mme Lamquin-Éthier: Donc, c'est un service qui va être mis en place?

M. Jutras: Oui, c'est ça. Alors, vous avez une victime, à 3 heures du matin, qui est en état de panique, qui a des besoins. Alors, on sera en mesure de lui répondre et même de l'accompagner, là, de rejoindre cette personne-là et de lui offrir dès lors des services.

Le Président (M. Lachance): Mme la députée de Bourassa, je voudrais simplement vous signaler une question technique mais qui a quand même son importance. Je vois que les travaux se déroulent bien, dans une certaine convivialité, dans une convivialité certaine, mais on m'indique que votre temps de parole jusqu'à maintenant sur l'article 1 est de l'ordre de 24 minutes.

Mme Lamquin-Éthier: Donc, on n'a pas de problème, il n'y a pas péril en la demeure? Aidez-moi à bien vous comprendre.

Le Président (M. Lachance): Bien, c'est 20 minutes, la norme, la règle.

Mme Lamquin-Éthier: Ah! Donc, j'ai dépassé?

Le Président (M. Lachance): Oui, tout à fait.

Mme Lamquin-Éthier: Alors, nous allons tomber dans le vif. Ha, ha, ha! M. le Président, nous aimerions, en ce qui a trait au deuxième alinéa de 8.1 et au troisième alinéa de 8.1, déposer des amendements. Je vous explique le pourquoi. Lorsqu'on fait lecture du deuxième alinéa, plus particulièrement si on commence ? un, deux, trois, quatre ? à la quatrième ligne, mettons, là, il est indiqué... Bon, je vais le lire: «Cette contribution devient exigible comme une amende lorsqu'un défendeur consigne un plaidoyer de culpabilité ou est déclaré ou réputé déclaré coupable d'une infraction, que cette contribution soit mentionnée ou non dans le jugement. Sauf en ce qui a trait à l'emprisonnement, les règles prévues au présent Code relatives au recouvrement d'une amende, y compris les frais d'exécution, s'appliquent au recouvrement de cette contribution et, à cette fin, cette dernière est réputée faire partie de l'amende.»

Ça, je vous lis ça parce que je voudrais reprendre les commentaires du Barreau. Mais l'amendement se lit avec le «Toutefois, en cas de paiement partiel d'une amende, la contribution est réputée payée en dernier lieu.» Alors, compte tenu, M. le ministre, des objectifs que vous poursuivez, une première réaction d'étonnement, qu'en cas de paiement partiel d'une amende la contribution soit réputée payée en dernier lieu. Et l'amendement se lirait comme suit: Remplacer, à la fin du deuxième alinéa de l'article 8.1 du Code de procédure pénale ? est-ce que vous avez l'amendement, M. le ministre? ? ...

M. Jutras: Oui, je l'ai.

Mme Lamquin-Éthier: ...introduit par l'article 1 du projet de loi, le mot «dernier» par le mot «premier», pour s'assurer, somme toute, ou pour que les victimes aient l'assurance que les montants ? vous fixez une contribution de 10 $, là ? aillent bien aux victimes pour leur permettre justement d'avoir des services dont elles ont besoin. Ici, le paiement partiel est réputé payé en dernier lieu. Alors, on s'étonne que ce ne soit pas priorisé et on pense, compte tenu des objectifs que vous poursuiviez, que ça devait être plutôt priorisé.

Le Président (M. Lachance): Alors, là-dessus je déclare l'amendement recevable.

(Consultation)

Le Président (M. Lachance): Est-ce que, Mme la députée de Bourassa, vous avez d'autres commentaires sur votre amendement ou bien si vous avez terminé?

Mme Lamquin-Éthier: Bien, c'est le principal commentaire, le plus important, compte tenu des objectifs qui sont poursuivis, à savoir de donner des meilleurs services aux victimes. Sinon, on risque de passer à côté, à mon avis. Et je sais que ma collègue de Viger partage la même préoccupation, celle des victimes, de faire en sorte qu'on puisse leur donner des meilleurs services.

n(12 h 10)n

Le Président (M. Lachance): M. le ministre, sur l'amendement.

(Consultation)

Mme Lamquin-Éthier: Si vous me permettez, M. le Président, je disais tout à l'heure, en ce qui avait trait à la phrase commençant par le «Sauf» dans le deuxième alinéa de 8.1, que je reprenais ma lecture là parce que je voulais aussi reprendre un commentaire qui est formulé par le Barreau du Québec dans une lettre qui était adressée par le bâtonnier, M. Claude G. Leduc, lettre transmise à M. le ministre de la Justice en date du 26 novembre. Le Barreau disait: «Enfin, sauf en ce qui a trait à l'emprisonnement, ce sont les règles prévues au Code de procédure pénale, y compris les frais d'exécution, qui s'appliqueront au recouvrement de cette contribution, puisqu'elle est réputée faire partie de l'amende. Cela aura un effet escalatoire qui fera substantiellement augmenter les frais qui sont déjà très élevés à l'heure actuelle.»

Alors, une première question, M. le ministre: Avez-vous pris connaissance du commentaire formulé par le Barreau? Est-ce que, effectivement, il y aura un effet escalatoire? Et, effectivement, actuellement, pouvez-vous nous confirmer l'exactitude du propos, à savoir que les frais sont déjà très élevés et qu'ils le seront davantage avec ce qui est prévu dans l'alinéa?

M. Jutras: Dans le cas présent, les frais d'exécution ne sont pas en fonction de la suramende; les frais sont fixés en fonction de l'amende et de l'étape des procédures évidemment où on s'est rendu. Alors, j'ai un peu de difficulté, là, avec cette remarque du Barreau quand ils nous disent que finalement on va assister à une escalade des coûts. Ça, je ne suis pas d'accord avec ça. Par contre, je retiens le paragraphe suivant, quand le Barreau dit qu'il est depuis longtemps conscient du manque de financement des programmes relatifs aux victimes. Alors, ça, ça m'apparaît, là, vraiment la remarque la plus pertinente.

Moi, ce que je réponds, M. le Président, à l'amendement qui nous est proposé, c'est qu'il faut voir de quelle façon est construit l'article 1. Ce qu'on nous dit, c'est que cette contribution devient exigible, comme une amende, lorsqu'un défendeur consigne un plaidoyer de culpabilité ou est déclaré ou réputé coupable d'une infraction, que cette contribution soit mentionnée ou non dans le jugement. Alors, ça veut donc dire que... Finalement, ce qu'on a prévu, c'est que ce ne sera même pas nécessaire que le juge dise qu'il condamne à la suramende. Le seul fait de la condamnation, et même si le juge n'en parle pas, le seul fait de la condamnation, ça va faire en sorte que cette contribution, à ce moment-là, devient exigible, que le défendeur ait consigné un plaidoyer de culpabilité ou qu'il ait été déclaré coupable ou réputé déclaré coupable d'une infraction. Ça, moi, je pense, M. le Président, que c'est une disposition qui a des effets positifs.

Par ailleurs, si on réfère à l'économie du Code de procédure pénale... Et là, M. le Président, je voudrais vous référer à l'article 162, qui dit ceci: «Le défendeur qui transmet la totalité du montant d'amende et de frais réclamé sans avoir consigné de plaidoyer est réputé avoir transmis un plaidoyer de culpabilité.» Alors donc, ça veut donc dire qu'à ce moment-là on évite un procès. Ce qu'on prévoit, c'est que vous avez transmis le montant de l'amende et vous avez transmis le montant des frais réclamés. Alors, à ce moment-là, vous êtes considéré comme étant coupable, et, à ce moment-là, c'est le deuxième alinéa qui s'applique, c'est-à-dire que cette contribution de suramende de 10 $ devient donc, à ce moment-là, immédiatement exigible.

Et l'autre article aussi auquel je veux vous référer, c'est l'article 165 du Code de procédure pénale qui dit: «Lorsque le défendeur a transmis ou est réputé avoir transmis un plaidoyer de culpabilité sans indication de son intention de contester la peine réclamée, il est réputé avoir été déclaré coupable de l'infraction.» Parce que là ça voudrait dire que... Et, à ce moment-là, encore là, on évite un procès. Et, ce que propose ma collègue, j'essaie de voir comment on pourrait concilier ça avec les articles 162 puis 165.

Mme Lamquin-Éthier: Si vous me permettez, M. le ministre, je comprends bien ce que vous m'expliquez. À l'article 162, il est question d'un défendeur qui va transmettre la totalité du montant de l'amende. Dans le cas qui nous occupe, on est en situation où un paiement partiel est transmis, donc on est plus dans 164 que dans 162.

Si, lorsqu'un paiement partiel est transmis, votre préoccupation en bout de ligne, là, pour tout le projet de loi, l'ensemble des articles dont nous ferons l'étude... Et vous avez vous-même repris fort pertinemment le commentaire qui avait été formulé par le Barreau du Québec, où il constatait l'insuffisance des sommes dont disposent actuellement les victimes, ce qui vient confirmer votre intention de les augmenter, ce qui vient nous faire penser qu'il y a peut-être un risque, à l'heure actuelle, dans ce paragraphe-ci, puisque, en cas de paiement partiel, la contribution est réputée payée en dernier lieu, donc elle n'est pas priorisée. Et, dans la partie accessible du mémoire que vous nous avez transmis, si on fait la comparaison...

En annexe, il y a une liste, l'annexe 2... l'annexe 3, pardonnez-moi, M. le ministre, où il y a un tableau comparatif des autres provinces et territoires au Canada qui ont mis en place un programme équivalent avec celui qui est sous étude. Vous observerez ? vous l'avez sûrement déjà observé ? que ça avait été priorisé. Là, je ne reprendrai pas... Je pense que vous l'avez vu, là, mais c'est tout à fait clair que la suramende est priorisée, d'autant plus que cet article-là dit «en cas de paiement partiel d'une amende». Ils disent «d'une» et non pas «de l'amende». C'est très imprécis, et on observe qu'il y a un manque d'harmonisation d'un article à l'autre quant à l'utilisation: «d'une amende», «de cette amende», «de l'amende». «De l'amende», «des frais aussi réclamés», ce n'est pas précisé non plus dans le texte, on parle juste... «le montant partiel d'une amende» et non pas «de l'amende et des frais réclamés». Ce serait dommage que les intentions poursuivies ne puissent pas être rencontrées parce qu'il n'y a pas de priorisation.

M. Jutras: Oui, mais l'objectif que l'on poursuit, par contre, c'est d'éviter des procès.

Mme Lamquin-Éthier: Oui.

M. Jutras: Je vous donne un exemple qui pourrait se produire.

Mme Lamquin-Éthier: O.K.

M. Jutras: Dans le cas d'un individu qui, par exemple, serait condamné à 125 $ d'amende avec des frais ? bien, qu'il consignerait, là ? qui sont de 25 $, et il y a la suramende de 10 $, alors ça lui fait donc 160 $ à payer. L'individu, là, qui envoie un chèque de 150 $, alors, en vertu de l'article 163...

Mme Lamquin-Éthier: 164.

M. Jutras: ...163, on dit: «Le défendeur qui ne transmet ni...»

Mme Lamquin-Éthier: Il a plaidé comment, là?

M. Jutras: Non, ce n'est pas celui-là, hein? C'est...

Mme Lamquin-Éthier: Non. 164.

M. Jutras: C'est 162.

Mme Lamquin-Éthier: Bien non!

M. Jutras:«Le défendeur qui transmet la totalité du montant d'amende et de frais réclamé sans avoir consigné de plaidoyer est réputé avoir transmis un plaidoyer de culpabilité.» Alors là on évite un procès. Cet individu-là est donc considéré comme ayant transmis un plaidoyer de culpabilité, il est déclaré coupable, et, à ce moment-là, ça veut dire qu'on évite donc un procès, et la suramende devient automatiquement exigible.

Mme Lamquin-Éthier: Oui. O.K., parfait. Mais poursuivez votre raisonnement, redonnez-moi le montant total de l'amende, des frais, la contribution de 10 $, et dites-moi si votre défendeur transmet la totalité dans une «shot», fait un chèque ? 165 ? ou il fait un paiement partiel. Et, s'il fait un paiement partiel, expliquez-moi qu'est-ce qui est priorisé: l'amende et les frais ou la...

M. Jutras: Oui, mais, s'il fait un paiement partiel, il faut faire un procès, tandis que là, ici, dans le cas présent, on a le paiement complet de l'amende et des frais, on évite un procès et la suramende est automatiquement exigible.

Mme Lamquin-Éthier: L'article dit bien: «Toutefois, en cas de paiement partiel d'une amende, la contribution est réputée payée en dernier lieu.»

M. Jutras: C'est ça.

n(12 h 20)n

Mme Lamquin-Éthier: M. le ministre, qu'on la paie en premier ou en dernier, pour reprendre les fins théoriques de la discussion, ça n'évite pas le procès, au demeurant, là, en paiement partiel.

M. Jutras: Oui, mais, si...

Mme Lamquin-Éthier: À 162, vous évitez le procès parce qu'il est réputé avoir transmis un plaidoyer de culpabilité. Donc, il ne conteste pas, il paie. En cas de paiement partiel, il peut avoir transmis, avec ou sans plaidoyer... Donc là la situation est différente. Je crois que...

M. Jutras: Si on suit votre raisonnement, si...

Mme Lamquin-Éthier: Mais il n'y a pas de procès, dans 162, parce qu'il transmet un plaidoyer de culpabilité. Est-ce que c'est exact?

M. Jutras: C'est ça, oui. Il paie le montant de l'amende et des frais.

Mme Lamquin-Éthier: O.K. Dans 164, il y a un procès?

M. Jutras: C'est ça.

Mme Lamquin-Éthier: Alors, que ce soit réputé payé en dernier ou en premier, il y a un procès pareil, donc ça n'évite pas le procès, d'où l'intérêt, vu les objectifs que vous poursuivez, de vous assurer, puisque le cautionnement est destiné à garantir, en cas de déclaration de culpabilité, le paiement de l'amende et des frais, d'où l'intérêt de garantir que les sommes iront bel et bien aux victimes, sinon on passe à côté, d'autant plus que vous admettez l'insuffisance des sommes actuellement dévolues.

M. Jutras: Oui, mais si, par contre, on suit votre raisonnement et qu'on fait passer la suramende en premier, et puis là il manque de l'argent, à ce moment-là, il n'y aura donc pas la totalité du paiement de l'amende et des frais qui est réclamé et là il va falloir faire un procès, il va falloir faire un procès pour une suramende de 10 $. Bien oui.

Mme Lamquin-Éthier: Bon, reprenez ce que vous me dites, là.

M. Jutras: C'est que votre raisonnement, vous, c'est de dire: Faisons passer la suramende en premier.

Mme Lamquin-Éthier: Priorisons-la pour avoir l'assurance qu'elle ira bel et bien aux victimes.

M. Jutras: C'est ça. Alors, à ce moment-là, ça veut dire que... Parce que là on est dans les transmissions de plaidoyer puis on est dans l'exécution des jugements. Alors, ça veut dire que, si vous faites passer la suramende en premier et il n'y a pas de paiement complet, alors, à ce moment-là, on se retrouve avec un procès, parce que, pour éviter le procès, il faut que ce soit la totalité du montant de l'amende et des frais qui soit payée, et, de cette façon-là, on évite un procès.

Mme Lamquin-Éthier: M. le ministre, est-ce que la solution au dilemme que nous avons ne serait pas d'inclure «y compris la contribution»...

Une voix: Où?

Mme Lamquin-Éthier: ...à l'article 164, «destiné à garantir, en cas de déclaration de culpabilité, le paiement de l'amende, des frais, y compris la contribution», et, de toute façon, ce qui rejoindrait plus la préoccupation du ministre?

(Consultation)

Mme Lamquin-Éthier: D'ailleurs, on peut peut-être, par souci d'harmonisation, faire également la même proposition d'amendement en ce qui a trait à 62, «Le défendeur qui transmet la totalité du montant total de l'amende, des frais et de la contribution», et reprendre le même à 164.

Le Président (M. Lachance): Alors là, écoutez, madame, je comprends que votre suggestion peut être intéressante, mais ça ne fait pas partie du projet de loi n° 139.

Mme Lamquin-Éthier: Oui, c'est un amendement.

Le Président (M. Lachance): Là, à ce moment-là, il faudrait inscrire un nouvel article dans le projet de loi n° 139. Ce serait ça, votre amendement?

Mme Lamquin-Éthier: Oui, de modifier l'article 162 pour qu'il se lise «Le défendeur qui transmet la totalité du montant total de l'amende, des frais et de la contribution», et faire la même proposition en ce qui a trait à 164.

164, M. le Président, on le voit un petit peu plus loin, à l'article 4, donc on pourra...

Le Président (M. Lachance): Alors, à ce moment-là, ça veut dire que, par logique, si vous voulez l'introduire, ce serait entre l'article 3 et l'article 4 du projet de loi actuel. Mais, pour le moment, si vous permettez, on va procéder de façon rationnelle, parce que là, autrement, on va avoir des problèmes.

Mme Lamquin-Éthier: Vous avez bien raison.

Le Président (M. Lachance): On va disposer de l'amendement que vous avez déposé concernant les modifications à 8.1.

Mme Lamquin-Éthier: Donc, il faudrait les retirer puis déposer un autre amendement.

M. Jutras: Bien là c'est parce que vous êtes en train de remettre en question l'économie de la transmission des plaidoyers puis l'économie du Code de procédure pénale, parce que finalement vous voulez vous assurer que la suramende aille aux victimes. Nous autres, quand on a fait ces prévisions-là, on a tenu compte du fait... Puis, moi, c'est là que la formulation m'apparaît la plus heureuse, de dire que la contribution est automatiquement exigible. Et là je vous réfère à la première phrase du deuxième alinéa: «Cette contribution devient exigible comme une amende lorsqu'un défendeur consigne un plaidoyer de culpabilité ou est déclaré ou réputé déclaré coupable d'une infraction, que cette contribution soit mentionnée ou non dans le jugement.» Alors, ça démontre...

Mme Lamquin-Éthier: ...devient un plaidoyer de culpabilité.

M. Jutras: Laissez-moi finir, s'il vous plaît. Alors, ça démontre bien que... Ça m'apparaît plus facile de cette façon-là. Ça n'a même pas besoin d'être précisé dans le jugement, du moment que vous êtes déclaré coupable de quelque façon que ce soit, la contribution, elle devient exigible.

Alors là, vous, somme toute, vous prenez pour acquis ou, en tout cas, vous pensez que ça pourrait arriver fréquemment que les 10 $ ne seraient pas payés. Moi, je ne vois pas pourquoi les gens ne paieraient pas le 10 $ alors que vous avez des procédures d'exécution qui y sont prévues. Et pourquoi remettre en question finalement l'esprit de la loi, quand on parle des procédures préalables à l'instruction puis des transmissions du plaidoyer, alors que finalement l'argent va y aller, aux victimes? Et puis c'est sûr que ce 10 $ là va être payé, parce que, si la personne ne le paie pas, le 10 $, les procédures d'exécution vont se continuer contre elle. Alors, ça veut dire qu'on est en train, là... Je veux bien qu'on broie du noir, puis je veux bien que ça aille mal dans la vie, puis je veux bien qu'on frappe des murs, là...

Mme Lamquin-Éthier: C'est prêter des intentions, là.

M. Jutras: ...mais là je pense qu'on est en train effectivement de broyer du noir.

Mme Lamquin-Éthier: Pas du tout.

M. Jutras: Vous prenez pour acquis que le 10 $ ne sera pas payé...

Mme Lamquin-Éthier: Bien non. Ce n'est pas ça que je dis.

M. Jutras: ...alors que vous avez les pouvoirs d'exécution, à l'endroit de ce 10 $ là, de la même façon que vous les avez pour l'amende et les frais.

Mme Lamquin-Éthier: M. le ministre, je comprends ce que vous dites, là, mais je ne suis pas d'accord. Il ne faut pas nous prêter d'intentions.

M. Jutras: Non, non, je ne vous prête pas d'intentions, là.

Mme Lamquin-Éthier: On ne présume pas qu'il ne veut pas payer, ce n'est pas ça du tout. On ne broie pas du noir, on ne frappe pas un mur, on veut tout simplement avoir l'assurance que le 10 $ va aller là où il doit aller, c'est-à-dire aux victimes qui n'ont pas assez de services.

Le Président (M. Lachance): Mme la députée de Viger.

n(12 h 30)n

Mme Mancuso: Oui. C'est une question de priorités. Si on dit qu'on va prioriser ces fonds-là pour que l'argent aille aux victimes, ça va aller plus rapidement s'ils sont payés en premier. Parce que, des fois, on le sait, si on se lance en procès, ça pourrait prendre six mois, ça pourrait prendre huit mois, ça pourrait prendre... dépendamment des cours. Donc, c'est une question de remplir le fonds plus vite.

M. Jutras: Bien, M. le Président, je vais répondre à ce que vient de dire la députée de Viger. Alors, ce n'est pas exact, ce qu'elle dit, parce que, s'il y a un paiement partiel... Puis, même en prenant pour acquis que le 10 $ serait payé en premier et qu'il serait priorisé pour les victimes, s'il y a un paiement partiel, on ne peut pas le prendre, ce 10 $ là, puis le verser parce qu'il faut attendre l'issue du procès. D'ailleurs, l'article 164 le dit, ce n'est qu'un cautionnement, à ce moment-là, qui... Alors, on ne peut pas commencer, lorsqu'on a un paiement partiel, on ne peut pas commencer à distribuer l'argent. L'argent ne s'en va pas au fonds consolidé du revenu ou dans l'administration de la justice, on est obligé d'attendre l'issue du procès. Alors, cet argument-là ne tient pas.

Mme Lamquin-Éthier: Sauf que 164 veut également dire que, bon, effectivement, le paiement est réputé constitué, c'est-à-dire est un cautionnement qui, lui, est destiné à garantir l'amende et les frais. Nous, on veut que ça garantisse également la contribution de 10 $, et ce n'est pas dit nommément. Et je ne pense pas qu'il s'agisse de changer l'esprit, loin de là notre idée, c'est tout simplement de nous assurer, comme ma collègue vient de vous le rappeler, que le montant, le 10 $, ira bel et bien aux victimes. C'est pour ça qu'il nous paraissait intéressant, et à 162 et à 164, de préciser dans le texte le montant total, pour l'amende, des frais et de la contribution et de reprendre, par souci d'harmonisation aussi, la même formulation à 164.

M. Jutras: Oui, mais l'argument de 164 ne tient pas parce que, dans ce cas-là, on parle d'un paiement partiel. Que le paiement partiel soit quant à la suramende, ou qu'il soit quant à l'amende, ou qu'il soit quant aux frais, cet argent-là est, somme toute, consigné, et on ne peut pas y toucher tant que l'issue du procès n'est pas atteinte. Alors, cet argument-là ne tient pas. On ne peut pas invoquer 164 au soutien des prétentions que vous nous faites valoir.

Mme Lamquin-Éthier: M. le ministre, si vous poussez votre raisonnement, votre défendeur est condamné. O.K.? Puis, en supposant qu'il n'ait pas factuellement l'argent pour payer la contribution, qu'est-ce qu'on fait avec la contribution?

M. Jutras: Alors, on se retrouve donc dans la situation où, la personne, il lui manque 10 $, puis elle ne peut pas payer le 10 $.

Mme Lamquin-Éthier: Bon. Alors, si vous ne priorisez pas le 10 $, qu'est-ce qui va passer en premier: l'amende puis les frais?

M. Jutras: C'est ça qui est prévu dans le projet de loi, oui.

Mme Lamquin-Éthier: Donc, le 10 $, il a des petites ailes?

M. Jutras: C'est ça qui est prévu dans le projet de loi. Et ce que je vous dis, moi: la suramende, avec le jugement qui est prononcé, ça va de soi. Ça vient d'emblée, ce montant-là doit être payé. Alors, à ce moment-là, vous, vous vous dites: Le 10 $ ne sera pas payé, ou vous prenez l'exemple où quelqu'un aurait été condamné à 150 $ d'amende, comme je prenais comme exemple tantôt. Bien là il n'y aura pas d'argent pour le 10 $.

Mme Lamquin-Éthier: Plus les frais, plus le 10 $.

M. Jutras: Oui. Alors, moi, ce que je dis, c'est que vous êtes en train de prévoir une situation qui m'apparaît tout à fait marginale, mais, nous... Je ne dis pas que ce n'est pas impossible que ça se produise, qu'à un moment donné, parmi les défendeurs du Québec, il y ait quelqu'un à qui il va manquer 10 $ pour s'acquitter de son obligation, ça peut arriver. On peut imaginer ça. Sur les milliers et milliers d'amendes au Québec, il pourrait arriver que, quelqu'un, il lui manque 10 $.

Mme Lamquin-Éthier: M. le ministre, on peut penser que le législateur n'a pas pour habitude de parler pour ne rien dire. S'il a prévu, à l'article 164, le paiement partiel, c'est qu'il existe dans la réalité de tous les jours des situations où un défendeur ne peut pas payer la totalité du montant de l'amende, des frais, y compris la contribution. Vous avez une amende de 150 $ plus les frais, plus le 10 $. Mettons qu'on arrive en bout de ligne avec 170 $. Au-delà de l'exemple que vous nous donnez, ça se peut très bien que le défendeur n'ait pas l'argent au-delà du 10 $, là. Il peut être squeezé pour le total et offrir de payer partiellement. Et, dans ce cas-là, ce qui est priorisé, c'est l'amende et les frais et non pas la contribution. Donc, le risque est sérieux et réel. C'est raisonnable que ça n'aille pas...

M. Jutras: C'est là que je ne suis pas d'accord avec vous de dire qu'il y a un risque réel et sérieux, parce que...

Mme Lamquin-Éthier: Mais les autres provinces l'ont priorisé.

M. Jutras: Si vous me permettez...

Mme Lamquin-Éthier: Bien oui, mais...

M. Jutras: ...c'est là que je ne suis pas d'accord avec vous quand vous dites qu'il y a un risque réel et sérieux. On parle d'une suramende de 10 $. Alors, moi, je dis: Quand on va arriver à l'exécution de ces jugements-là, le risque réel et sérieux que vous avancez, à savoir que quelqu'un ne pourrait pas payer le 10 $, moi, ça ne m'apparaît pas un risque réel et sérieux.

Et aussi ce qu'il ne faut pas oublier, là, c'est que, dans le cas présent, on n'a pas... Attendez.

Mme Lamquin-Éthier: Prenez, M. le ministre, un défendeur qui est condamné à 300 $, O.K., amende, frais, contribution, et il offre en paiement partiel 200 $, restant un solde de 100 $.

Une voix: Ce n'est pas 10 $ de solde, là.

Mme Lamquin-Éthier: Non, non, ça peut être... C'est ça, au-delà du 10 $, l'exemple qui nous est servi. Il y a d'autres situations bien différentes que le 10 $, là. Puis, le Nouveau-Brunswick, on observe que l'amende et la suramende doivent être payées en même temps. Donc, c'est important, ça confirme une volonté.

Vous avez également la situation de l'Île-du-Prince-Édouard où tout argent reçu doit servir à payer la suramende avant l'amende. Je pense que là aussi c'est extrêmement important. Et, qui plus est, à cet endroit-là, c'est comptabilisé dans des comptes distincts et séparés. Pour la Saskatchewan, la suramende doit être payée avant l'amende également, la même chose pour l'Alberta, où la suramende doit être payée avant l'amende. Donc, il y a d'autres provinces qui ont dû faire les mêmes observations que nous, qui voulaient aussi s'assurer que les argents aillent aux victimes et qui ont pris la peine de faire en sorte que la suramende soit payée avant l'amende. Donc, ils l'ont priorisé.

M. Jutras: Oui. Maintenant, dans cette suramende-là que l'on rajoute, ce qu'on a voulu aussi comme esprit, là, puis non seulement comme esprit, mais comme lettre... Parce que ça apparaît comme tel dans l'article 8.1. On a exclu l'emprisonnement pour le non-paiement de la suramende, et ça, ça rejoint un peu l'argument qu'on avait avancé la semaine dernière, à l'effet que c'est une suramende qui va aux victimes. Mais, par contre, effectivement, on était obligés de reconnaître qu'il n'y a pas nécessairement un lien avec l'infraction comme dans le cas des suramendes en vertu du Code criminel. Alors, on s'est dit: On va exclure la peine d'emprisonnement pour le défaut de paiement de la suramende.

Mais là, s'il fallait qu'on suive votre raisonnement, que je l'accepte puis qu'on dise qu'on fasse l'amendement dans ce sens-là, ça veut dire que là vous allez permettre l'emprisonnement pour le non-paiement de la suramende, et ça, moi, je ne suis pas capable d'aller dans ce sens-là. Parce que, si vous dites que la suramende passe en premier, puis après ça, en bout de piste, il manque de l'argent puis il manque, entre autres, le 10 $, bien là ça veut dire que cette personne-là, somme toute, parce qu'il manque le 10 $, va se retrouver en prison. Moi, je pense que c'est le genre de mesures, dans le cas des paiements d'amendes, qu'on veut éviter le plus possible, et ça ne rejoint pas ce qu'on veut à l'intérieur de notre projet de loi.

(Consultation)

Le Président (M. Lachance): Alors, nous en sommes toujours à l'amendement sur l'article 8.1. Est-ce qu'il y a d'autres commentaires, Mme la députée de Bourassa?

Mme Lamquin-Éthier: Oui, mais il n'a pas répondu. Tout à l'heure, M. le ministre, je vous donnais l'exemple d'une amende de 300 $, les frais, incluant votre contribution, ou la contribution, un paiement partiel de 200, laissant un solde de 100 $. Est-ce que là vous emprisonnez le défendeur s'il n'est pas capable de payer le 100 $?

M. Jutras: Dans ce cas-là, il y a une possibilité, oui, parce que le juge...

Mme Lamquin-Éthier: Donc, le 10 $ va se perdre s'il est emprisonné?

M. Jutras: Oui.

Mme Lamquin-Éthier: Et pourquoi les autres provinces... J'imagine qu'elles ont fait...

Une voix: ...

n(12 h 40)n

M. Jutras: Ah oui, c'est ça. Non, le 10 $ ne sera pas purgé, dans un cas comme ça, parce qu'on a dit: «Sauf en ce qui a trait à l'emprisonnement...» Alors donc, on a voulu, par cette disposition-là, non seulement éviter la peine d'emprisonnement pour quelqu'un qui ne paie pas la suramende, mais, en plus de ça, on évite le principe à l'effet que l'emprisonnement purge l'amende qui n'est pas payée.

Mme Lamquin-Éthier: Comment expliquez-vous que, pour les provinces dont je vous ai fait la liste, on ait pris la décision de prioriser la suramende, de faire en sorte que, législativement parlant, il soit prévu qu'elle soit payée avant l'amende? Ça originait... D'ailleurs, vous l'avez incluse vous-même, cette... Vous avez fait l'exercice comparatif avec les autres provinces pour montrer que cette idée-là existait ailleurs, poursuivait le même objectif. Mais là ils ont décidé que la suramende devait être payée avant l'amende. Comment se fait-il que...

M. Jutras: Écoutez, là il faudrait faire le tour de ces législatures-là, voir qu'est-ce qui les a poussées à faire ça. À prime abord, moi, ce qui me vient à l'esprit, c'est que, vu que les régimes d'indemnisation et d'aide dans les autres provinces sont beaucoup moins généreux que celui du Québec, bien là c'est peut-être de cette façon-là qu'ils ont voulu se rattraper. C'est une explication que j'avance, là, mais je pense que ça a plein de sens que ce soit ça qui se soit passé dans les autres législatures.

Mme Lamquin-Éthier: Je pense qu'il y a juste une province ? c'est Terre-Neuve, je crois, sous réserve ? qui a aboli l'indemnisation mais qui a gardé le service d'aide. Les autres provinces, là, vous parlez à la fois d'indemnisation et d'aide. Terre-Neuve a aboli l'indemnisation puis elle a gardé un service d'aide. Le comparatif qui est fait ici se rapporte au service d'aide, pas à proprement parler à l'indemnisation, un. Et, deux, tout argent reçu doit servir à payer la suramende.

M. Jutras: Oui, mais, pour faire, Mme la députée... M. le Président, pour faire la véritable comparaison, bon, il y a le fait que je vous parle de notre régime qui est plus généreux, mais il y a aussi... Il faudrait voir comment fonctionne, là, leur système de transmission de plaidoyer. Il faudrait faire ce qu'on appelle du droit comparé, puis je pense bien que ce ne sera pas le but du présent exercice.

Par ailleurs, ce que je veux porter à votre attention aussi, M. le Président, c'est que...

(Consultation)

M. Jutras: Et l'autre élément que je veux porter à votre attention, c'est que, d'après les chiffres que nous avons au niveau du BIA, le Bureau des infractions et des amendes, le système de perception que nous avons, c'est 90 % des amendes et des frais, là, qui sont payés au complet, et les projections que nous avons faites au niveau des revenus, c'est en fonction de ce 90 % là.

Le Président (M. Lachance): D'autres commentaires sur l'amendement, Mme la députée de Viger?

Mme Mancuso: Oui. M. le Président, je voulais porter à l'attention du ministre l'article 321 du Code de procédure pénale. Et, à l'article 328, on dit que «les sommes dues par[...] ? le ? défendeur sont recouvrées à même le cautionnement lorsque celui-ci en a fourni un et que ce cautionnement n'est pas confisqué. Lorsque le montant du cautionnement excède la somme due, le reste est remis à celui qui l'a versé.» Donc, ça, c'est beau. Et à l'article 328: «Le percepteur et le défendeur peuvent conclure par écrit une entente prévoyant que les sommes dues seront payées par versement selon[...] ? les délais et ? modalités qu'ils auront déterminés.» Donc, dans ce cas-ci, si...

M. Jutras: Le premier article que vous avez dit, c'était quoi?

Mme Mancuso: 321.

M. Jutras: O.K.

Mme Mancuso: À l'exécution des jugements. Donc, le but poursuivi par notre amendement, c'est de s'assurer que, dans ces cas-ci, dans les circonstances où il y a des paiements partiels, quand on est rendu à l'étape de l'exécution du jugement et qu'il y a une entente entre les parties, on puisse appliquer la suramende en premier lieu parce que, on ne sait pas, des fois c'est des jugements qui peuvent être... des montants... On parle de montants de 150 $ aujourd'hui, mais ça pourrait être une amende de 1 000, de 2 000. Il y a plein de règlements et de lois qui prévoient des grandes sommes. Donc, si on pense que ça va être payé en dernier, ça pourrait vouloir dire que, après 12 paiements, après 18 paiements, on va attendre un an et demi pour transférer cette somme-ci dans le compte à cet égard. Donc, c'est pour ça que je voulais ramener ça à votre attention, pour qu'on puisse regarder cette perspective-là.

M. Jutras: Oui, c'est sûr que, quand on regarde les articles du Code de procédure pénale qui ont trait à l'exécution des jugements, bon, on le sait, effectivement, qu'un défendeur peut prendre des arrangements et effectivement payer à tempérament, comme on dit, payer à tant par mois. Mais il demeure qu'en bout de piste l'argent va être perçu. Là, effectivement, il peut arriver que l'argent va être perçu plus tard, mais il sera quand même perçu, et, à ce moment-là, la suramende étant perçue, bien, ça veut dire que l'argent pourra donc aller aux victimes. Par ailleurs, je ne sais pas si on a...

Mme Mancuso: Oui, c'est ça, je...

Le Président (M. Lachance): Mme la députée de Viger.

Mme Mancuso: J'essaie de comprendre c'est quoi, le but qu'on poursuit. Je pense que le but, c'est d'indemniser les victimes. Donc, on dit déjà que ce n'est pas assez, il manque des fonds. Donc, je comprends mal la réticence du ministre, à cet égard, de vouloir prioriser...

Au début, comme vous dites, c'était peut-être 10 % des gens qui ne payaient pas en totalité. Donc, je ne vois pas comment ça pourrait empêcher de poursuivre les objectifs de la loi si on vous demande de prioriser ça dans le cas des paiements partiels.

M. Jutras: Oui, mais, en fait, il y a trois raisons. Il y a d'abord le fait qu'on a fait des projections à partir de ce qu'on peut constater comme exécution de jugements et comme exécution totale des jugements, et, quand on regarde les projections financières que l'on a faites pour les besoins qu'on a à ce niveau-là, on dit: On va pouvoir répondre aux besoins des victimes. Ça, c'est la première raison.

La deuxième raison, c'est qu'on a voulu exclure la peine d'emprisonnement dans le cas d'une personne qui ne paie pas la suramende, et ça, quand on sait que l'emprisonnement, ça doit être toujours le dernier recours... Alors, quand on rajoute une suramende puis qu'on dit: Bien, si une personne ne paie pas la suramende, elle va aller en prison, moi, je vais vous dire que je ne rejoins pas ça, je ne suis pas capable de proposer ça.

Et le troisième élément aussi, c'est que ce que l'on veut faire, ce que vous nous proposez de faire, c'est de remettre en question et de chambarder notre Code de procédure pénale quant aux transmissions de plaidoyers, et, moi, je pense que ce n'est pas nécessaire de faire cela parce que, l'objectif que vous voulez, à savoir que ces suramendes-là aillent aux victimes, à l'aide aux victimes d'actes criminels, on va pouvoir l'atteindre sans cela. Alors, moi, pour ces trois raisons-là, c'est pour ça que je ne vous suis pas relativement à l'amendement que vous nous proposez.

Mme Mancuso: Bien, je crois difficilement, M. le ministre, qu'on va chambarder tout le Code de procédure pénale en ajoutant cette petite modification là. Je crois que c'est assez facile à comprendre c'est quoi, l'objectif qu'on vise. Il s'agit de faire peut-être d'autres petites modifications qui pourraient faciliter cet objectif. Et, on est complètement d'accord avec vous, on ne voudrait pas que... moi, de ma part. On ne vise pas non plus l'emprisonnement des gens pour avoir manqué de payer les 10 $. Donc, je crois qu'on est sur la même longueur d'onde, mais il s'agit d'une priorité. C'est tout.

M. Jutras: Mais la raison pour laquelle je dis que par votre amendement vous allez chambarder l'esprit de notre Code de procédure pénale quant à la transmission des plaidoyers, c'est que, entre autres, ce que vous proposez pourrait entraîner des procès pour non-paiement d'une suramende, et, moi, provoquer des procès pour le non-paiement d'une suramende de 10 $, ça aussi, je ne vous suis pas là-dessus.

Le Président (M. Lachance): Mme la députée de Bourassa, en vous signalant qu'il vous reste sept minutes sur l'amendement.

Mme Lamquin-Éthier: Sur l'amendement? Qu'est-ce qu'on fait, là, si on...

M. Jutras: Votez. Ha, ha, ha!

n(12 h 50)n

Mme Lamquin-Éthier: Bon, je vais demander le vote. Mais allez-vous l'appeler pour l'ensemble de l'article ou sur l'amendement?

Le Président (M. Lachance): Non, non, sur l'amendement d'abord.

Mme Lamquin-Éthier: Bon. Alors, vote par appel nominal.

Le Président (M. Lachance): Très bien. Alors, Mme la secrétaire.

La Secrétaire: Mme Lamquin-Éthier (Bourassa)?

Mme Lamquin-Éthier: Pour.

La Secrétaire: Mme Mancuso (Viger)?

Mme Mancuso: Pour.

La Secrétaire: M. le ministre?

M. Jutras: Contre.

La Secrétaire: M. le député de Frontenac?

M. Boulianne: Contre.

La Secrétaire: M. le député de Saint-Hyacinthe?

M. Dion: Oui.

Une voix: Contre.

Une voix: Oui, il est contre.

Mme Lamquin-Éthier: Non, vous êtes pour.

Une voix: Ha, ha, ha!

Une voix: Tu votes contre l'amendement de madame.

M. Dion: Ah! il faut que je sois contre.

Des voix: Ha, ha, ha!

La Secrétaire: M. le député de Champlain?

M. Beaumier: Contre.

La Secrétaire: Mme la députée de Mille-Îles?

Mme Leduc: Contre.

La Secrétaire: M. le Président?

Le Président (M. Lachance): Abstention.

La Secrétaire: Alors, 2 pour, 5 contre, 1 abstention.

Le Président (M. Lachance): Alors, l'amendement de Mme la députée de Bourassa est rejeté. On revient à la discussion sur l'article 1.

Mme Lamquin-Éthier: Bien, peut-être pour clore, pour ajouter qu'il ne s'agissait pas de chambarder, puisqu'il y a déjà une application qui est prévue, vous avez vous-même un amendement qui est prévu à l'article 164.

En ce qui a trait au troisième alinéa de 8.1, qui se lit comme suit: «Les sommes perçues en vertu de cette contribution sont affectées à l'aide aux victimes d'actes criminels dans la mesure déterminée par le gouvernement», vous savez, M. le ministre, que le Barreau du Québec a formulé des commentaires. Le Barreau dit: «Au surplus, seul le gouvernement...» Si on regarde comment est rédigé l'actuel troisième alinéa, ça dit bien «dans la mesure déterminée par le gouvernement». Donc, le Barreau dit: «Au surplus, seul le gouvernement pourra déterminer la manière dont cette contribution sera affectée. Dans ce contexte, nous nous interrogeons sur la transparence de ce moyen de perception. Le manque de précision du troisième alinéa de 8.1 et les modifications apportées à l'article 15 de la Loi sur l'aide aux victimes d'actes criminels nous amènent à croire que seuls seront financés à même cette nouvelle imposition les régimes gouvernementaux mis en place actuellement. Il ne faut pas oublier qu'il existe des organismes qui oeuvrent auprès des victimes et qui font une tâche colossale, considérant le financement qu'elles reçoivent.» Alors, je dois dire qu'à l'instar du Barreau, effectivement, il n'y a pas d'assurance, encore une fois, que les objectifs poursuivis seront atteints, donc que la contribution ira bel et bien aux victimes.

Et je pense que vous avez en mémoire la lettre que vous a fait récemment parvenir Mme Liette Brousseau, qui est la présidente du Regroupement provincial des maisons d'hébergement et de transition pour femmes victimes de violence. Mme Hénault, présidente de la Fédération des ressources d'hébergement pour femmes violentées et en difficulté du Québec, avait également cosigné cette lettre-là. Et vous connaissez... Actuellement, le Regroupement a dénoncé en de nombreuses occasions la précarité financière et la difficulté de poursuivre, de consolider et d'augmenter les services qui sont donnés aux victimes.

Et l'amendement, M. le Président, que j'aimerais déposer se lirait comme suit: Remplacer le dernier alinéa de l'article 8.1 du Code de procédure pénale introduit par l'article 1 du projet de loi par ce qui suit: «Les sommes perçues en vertu de cette contribution sont affectées au Fonds d'aide aux victimes d'actes criminels.»

Donc, s'assurer que l'affectation soit faite directement au Fonds d'aide aux victimes d'actes criminels.

(Consultation)

Le Président (M. Lachance): Alors, l'amendement est recevable. Mais, au point de vue technique, là, Mme la députée de Bourassa, je ne suis pas très directif sur l'application du règlement, encore une fois, compte tenu du contexte, mais, étant donné que vous aviez épuisé votre temps sur l'article 1, techniquement, je suggérerais que cette motion d'amendement soit proposée par votre collègue de Viger qui, elle, n'a pas utilisé son temps. Et, à partir du moment où on discute sur l'amendement, là, à ce moment-là, bien sûr, vous avez droit à votre temps de parole de 20 minutes.

Mme Mancuso: Donc, M. le Président, je propose qu'on remplace le dernier alinéa de l'article 1 du Code de procédure pénale introduit par l'article 1 du projet de loi par ce qui suit: «Les sommes perçues en vertu de cette contribution sont affectées au Fonds d'aide aux victimes d'actes criminels.»

Le Président (M. Lachance): M. le ministre.

M. Jutras: Bien là ce n'est pas à eux autres à...

Le Président (M. Lachance): Bien, à moins que... Si vous voulez maintenant argumenter là-dessus... Mais vous pouvez réagir aussi. Qui veut commenter sur cet amendement?

Mme Mancuso: Oui. Donc, l'objectif poursuivi par cette modification, cet amendement, est simple. À l'article 1 du projet de loi, on dit: «Les sommes perçues en vertu de cette contribution sont affectées à l'aide aux victimes d'actes criminels dans la mesure déterminée par le gouvernement.» L'objectif poursuivi, c'est de rendre plus clair l'article et s'assurer que les fonds vont aller au Fonds d'aide d'actes criminels, parce que, de la façon que c'est rédigé présentement, c'est assez vague. Donc, en étant vague...

Les groupes qu'on a mentionnés tantôt, que ma collègue la députée de Bourassa a mentionnés tantôt, ces groupes de femmes veulent être assurés qu'ils vont pouvoir compter sur le gouvernement pour que le fonds ait des moyens suffisants. Donc, en proposant cet amendement, on vise à combler cet objectif.

Le Président (M. Lachance): M. le ministre.

M. Jutras: Oui. Bon, moi, là-dessus, M. le Président, je veux en premier répondre à l'argument du Barreau qui est contenu dans la lettre du 26 novembre 2002, et signée par la bâtonnier Leduc, quand il nous dit que «le manque de précisions du troisième alinéa de l'article 8.1 et les modifications apportées à l'article 15 de la Loi sur l'aide aux victimes d'actes criminels nous amènent à croire que seuls seront financés à même cette nouvelle taxe déguisée ? et je ne suis pas d'accord que le Barreau utilise cette expression-là; ça a été reconnu, une suramende, ce n'est pas une taxe; alors, à même cette nouvelle taxe déguisée ? les régimes gouvernementaux mis en place actuellement».

Moi, je pense qu'il y a deux choses qu'il faut dire par rapport à ça. Cet argent-là, c'est pour l'aide aux victimes d'actes criminels, et on ne veut pas que ça s'en aille dans le champ, comme on dit, parce qu'on le sait, qu'il y a plein d'organismes, entre autres, qui s'occupent de beaucoup de missions et qui viennent en aide à des personnes qui éprouvent des difficultés dans notre société. Et, entre autres, M. le Président, cet argent-là, ce n'est pas pour aller, entre autres, aux CALACS, qui sont les centres d'action, de lutte contre les agressions à caractère sexuel, qui, eux, ces centres-là, reçoivent un financement, et ce financement-là leur vient du ministère de la Santé et des Services sociaux, et qui ont toujours été, en plus de ça, M. le Président, qui ont toujours été mieux financés, entre autres, que le sont les CAVAC. Ce que l'on veut faire avec ce projet de loi là, c'est d'améliorer le financement des CAVAC et de faire en sorte qu'ils puissent offrir plus de services aux victimes parce que les CAVAC sont vraiment des collaborateurs du ministère de la Justice, ils sont là en complément à la mission de la justice. Ils sont vraiment ce qu'on appelle des partenaires sociojudiciaires.

Le Président (M. Lachance): M. le ministre, je m'excuse de vous interrompre, mais il est 13 heures, et, à moins d'une indication contraire, je dois mettre fin à nos travaux. Et, comme l'ordre de la Chambre ne précise pas à quel moment nous allons poursuivre nos travaux, je vais devoir ajourner les travaux. Alors, j'ajourne les travaux sine die.

(Fin de la séance à 13 heures)


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