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Version finale

36e législature, 2e session
(22 mars 2001 au 12 mars 2003)

Le mercredi 19 février 2003 - Vol. 37 N° 113

Consultations particulières sur le document intitulé Rapport sur la mise en application de l'article 5.1 de la Loi sur les architectes


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Table des matières

Journal des débats

(Neuf heures trente-trois minutes)

Le Président (M. Lachance): À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre! Je déclare la séance de la commission des institutions ouverte et je rappelle le mandat de la commission qui est de procéder à des consultations particulières et tenir des auditions publiques sur le document de consultation intitulé Rapport sur la mise en application de l'article 5.1 de la Loi sur les architectes.

Est-ce qu'il y a des remplacements, M. le secrétaire?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. Mme Leduc (Mille-Îles) est remplacée par M. Duguay (Duplessis); M. Paquin (Saint-Jean) est remplacé par M. Rioux (Matane); Mme Lamquin-Éthier (Bourassa) est remplacée par M. Bergman (D'Arcy-McGee); et, enfin, M. Bégin (Louis-Hébert) assiste aux travaux de la commission à titre de député indépendant.

Le Président (M. Lachance): Merci, M. le secrétaire. Alors, je souhaite la bienvenue à tout le monde et je vous souhaite une bonne journée avec ces auditions. Je demande aux personnes qui auraient un téléphone cellulaire ouvert de bien vouloir le fermer, s'il vous plaît, pendant la séance. Et nous allons tour à tour entendre, cet avant-midi, l'Ordre des technologues professionnels du Québec et, par la suite, l'Ordre des architectes du Québec. Mais auparavant, nous entendrons les remarques préliminaires, et je débute immédiatement avec M. le ministre qui est responsable de l'application, responsable des Ordres professionnels. M. le ministre de la Justice.

Remarques préliminaires

M. Normand Jutras

M. Jutras: Alors, M. le Président, d'abord, je voudrais remercier les députés membres de la présente commission de participer à l'exercice que nous allons faire ici aujourd'hui, entre autres, saluer notre collègue de Louis-Hébert qui a travaillé, à l'époque, dans ce dossier-là. J'aimerais également présenter les personnes qui m'accompagnent. Alors, à ma droite, Me Jean-K. Samson, qui est président de l'Office des professions du Québec; Me Jean-Martin Poisson, qui est assis à l'arrière, des services juridiques de l'Office des professions du Québec; et, à ma gauche immédiate, Philippe Champagne-Mercure, qui est conseiller politique à mon cabinet, responsable des dossiers des droits professionnels. Je veux saluer aussi les représentants des différents ordres professionnels qui sont ici pour la présente commission.

Alors, nous allons donc aujourd'hui tenter de faire un bilan d'une expérience du système professionnel qui concerne plus particulièrement le domaine de l'architecture. Avant d'examiner les résultats de cette expérience, il est important de faire un rapide retour en arrière. Le monde professionnel du Québec est aussi varié effectivement que complexe. Bâti sur l'idée d'autogestion et d'autodiscipline, il cherche également à faire converger ces règles de pratique vers un objectif de protection du public.

Vingt-cinq ans après sa création, le système professionnel devait s'ajuster aux changements considérables de notre société et de son environnement, de ses besoins et de sa culture. Il y a trois ans, ma prédécesseure, Mme Linda Goupil, a mis sur pied, avec l'aide de l'Office des professions du Québec, un plan d'action qui s'articulait selon trois objectifs. Le premier, c'était d'assouplir et d'alléger le cadre réglementaire; le deuxième, accroître l'efficience des mécanismes de protection du public; et le troisième, promouvoir une plus grande ouverture des milieux professionnels, entre autres la multidisciplinarité et l'interdisciplinarité. Six projets ont donc vu le jour avec un agenda exigeant. Parmi ces projets, on trouvait la mise à jour du champ de la pratique des architectes et de la Loi sur les architectes en général. Trois ans plus tard, le plan d'action a produit des changements: Premièrement, une loi a prévu la possibilité pour les professionnels d'exercer en société; deuxièmement, les mécanismes d'inspection professionnelle et de discipline ont été revus en profondeur, et l'Office est à préparer un projet de législation; troisièmement, les champs d'exercice du domaine de la santé ont été révisés, et une loi a permis une avancée importante pour l'organisation professionnelle de 11 professions de réseau de la santé.

La Loi sur les architectes a également été revue en 2000. Elle a modernisé des règles qui n'avaient pas été mises à jour dans des aspects essentiels depuis 25 ans. Dans cette optique, la Loi révisée sur les architectes tient compte des tendances actuelles du milieu. Une première tendance mise sur un contrôle stricte de l'exercice de la profession visant à la fois une forte protection du public et une valorisation de l'apport artistique de l'architecte au niveau du patrimoine architectural québécois. Ce point de vue reflète entre autres la position de l'Ordre des architectes. Une seconde tendance, portée principalement par l'Ordre des technologues professionnels, tend vers une certaine libéralisation de l'activité, une valorisation des acquis de la formation collégiale et une prise en compte des autres modes de contrôle des activités de construction.

Nous avons été attentifs à ces tendances, à ces attentes, et la loi a produit une certaine libéralisation de la pratique de l'architecture là où la protection du public est déjà garantie par d'autres mécanismes. Nous avons, à cet égard, livré la marchandise et donné au milieu cette adaptation des règles lui permettant de fonctionner sans des règles et des normes qui étaient dépassées. Nous avons aussi livré d'importants éléments d'adaptation permettant plus de souplesse en intégrant plus facilement les techniques et les compétences nouvelles, chacune selon son niveau et son apport aux besoins du marché. Dans cet esprit, après avoir confirmé le rôle essentiel des architectes, nous avons misé sur la capacité de cette profession de gérer de façon réaliste et dynamique l'ouverture du domaine.

Ainsi, la loi a-t-elle confié au bureau de l'Ordre des architectes le rôle et l'obligation de déterminer par règlement, et parmi les actes réservés aux architectes, ceux qui, suivant certaines conditions, pourraient être accomplis par d'autres catégories de personnes. Afin de suivre cette démarche d'ouverture, nous nous sommes donné rendez-vous deux ans plus tard pour en rendre compte au législateur.

J'ai donc déposé, en décembre dernier, un rapport à l'Assemblée nationale et j'ai tenu à ce que le débat puisse se faire publiquement sur la base de ce rapport. Rappelons que l'Ordre des architectes a remis un projet de règlement à l'Office des professions du Québec qui interprète cette dynamique d'ouverture en prévoyant que certaines activités ou certains actes pourraient être autorisés à des catégories de personnes. Le projet de règlement est en annexe du rapport, et tous ont eu l'opportunité de l'examiner. Or, c'est bien à cette problématique d'ouverture que la loi avait voulu qu'on apporte réponse en donnant à l'Ordre des architectes un rôle central d'initiative et de proposition.

n(9 h 40)n

Sans préjuger de ce que nous conclurons, j'ai cru nécessaire d'entendre les principaux intéressés qui, sans égard à la liste proposée au règlement, me semblent être également des acteurs naturels du domaine. J'ai voulu donner aux principaux intéressés l'occasion de faire part de leurs opinions, commentaires et propositions. Je souhaite donc que nos travaux soient ouverts, sincères et empreints du souffle que nous avons voulu donner en 1999 et aussi en l'an 2000 à cette mise à jour. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Merci, M. le ministre. J'invite maintenant le porte-parole de l'opposition officielle et député de D'Arcy-McGee à nous faire part de ses remarques préliminaires. M. le député.

M. Lawrence S. Bergman

M. Bergman: Merci, M. le Président. D'abord, à mon tour, M. le Président, permettez-moi de saluer officiellement nos collègues, ceux qui feront des présentations ainsi que ceux qui les accompagnent. Je reconnais aussi la présence du président de l'Office des professions, M. Samson, et pour le saluer pour le bon travail de l'Office des professions, toujours d'une manière très professionnelle, et je le remercie.

C'est grâce au dévouement de ceux qui sont présents aujourd'hui et leur efficacité que nous avons un des meilleurs systèmes professionnels du monde. Toutefois, le monde qui nous entoure évolue, et alors, nous devons mettre à jour notre système professionnel de temps en temps, de façon à ce qu'il soit adapté à la réalité de la vie quotidienne de la population québécoise.

En décembre 1999, le gouvernement péquiste a reconnu les besoins d'une mise à jour importante de notre système professionnel en déposant un plan d'action qui mette l'emphase sur trois objectifs principaux vers lesquels notre système professionnel devrait tendre, à savoir: premièrement, assurer la protection du public; deuxièmement, alléger et assouplir le cadre réglementaire; et troisièmement, favoriser une plus grande ouverture à la multidisciplinarité et à l'interdisciplinarité.

Or, la loi n° 132, adoptée en décembre 2000, et dont nous sommes réunis aujourd'hui pour étudier la mise en application d'un de ses articles, est la démonstration de l'incohérence du gouvernement dans ses actions. En vertu de l'article 5.1, le bureau de l'Ordre des architectes a le devoir de, et je cite, «par règlement, déterminer parmi les actes visés à l'article 16 ceux qui, suivant certaines conditions prescrites, peuvent être posés par des classes de personnes autres que des architectes». Fin de la citation. En vertu de l'article 22.1, le gouvernement doit faire rapport de l'application dudit règlement à l'expiration du délai de deux ans à compter de l'entrée en vigueur de la loi n° 132. M. le Président, voilà où nous sommes aujourd'hui.

Dans son rapport, le ministre admet que l'application de l'article 5.1 de la loi n° 132 constitue un échec, et je le cite: «Force est de constater que, deux ans après l'entrée en vigueur de l'article 5.1, qu'aucun règlement d'autorisation d'actes n'est encore en vigueur. Il en découle une incapacité de fait à porter un jugement, basé sur l'expérience ou l'observation, sur l'application du mécanisme d'autorisation d'acte prévu par la loi et sur sa capacité de solutionner la problématique existante de façon satisfaisante.» Fin de la citation.

M. le Président, si nous sommes face à un lamentable échec, le gouvernement est le seul à blâmer de cette aventure. L'opposition officielle avait prédit, dès l'adoption du principe, en décembre 2000, que la loi n° 132 serait un échec, car il s'agissait d'une solution étroite qui ne prenait pas en considération l'ensemble de la problématique. Tout d'abord, M. le Président, le sens même de la loi n° 132, et en particulier l'article 5.1 qu'il introduit, va exactement à l'encontre des trois objectifs du plan d'action que j'ai énuméré plus haut. Mais, en plus d'aller à l'encontre des objectifs qu'il s'était imposés lui-même, le gouvernement péquiste s'est déchargé de sa responsabilité de légiférer en obligeant l'Ordre des architectes de définir ce qui constitue des actes professionnels d'architecture.

M. le Président, lors de l'étude détaillée de la loi n° 132, j'exprimais mon inquiétude vis-à-vis le fait que le gouvernement délègue ses pouvoirs et ceux de l'Office des professions à un ordre professionnel. Notre système professionnel qui est un des meilleurs dans le monde a pour objectif premier d'assurer la protection du public. Or, une telle délégation va à l'encontre de cet objectif. La ministre de l'époque m'avait répondu, et je la cite: «Ce qui est proposé, c'est ce qui existe déjà dans le système professionnel de la santé.» Fin de la citation. Cette délégation, M. le Président, a eu pour conséquence de semer la discorde dans le milieu plutôt que de favoriser le dialogue entre les intervenants intéressés par la question, et conséquemment de privilégier la formation d'un consensus autour de cette question.

M. le Président, l'Ordre professionnel des architectes s'est vu la responsabilité de définir de façon détaillée ce qui constitue un acte professionnel d'architecture, tâche que le gouvernement n'a pas assumée lui-même en décembre 2000. Ce n'est qu'en octobre 2002, soit près de deux ans plus tard, que le gouvernement a reçu le projet de règlement que nous devions étudier l'application aujourd'hui. Dans le monde moderne où la multidisciplinarité et l'interdisciplinarité sont essentielles pour assurer une saine compétitivité entre entreprises québécoises sur les plans local, national, international, il n'est possible d'atteindre les objectifs que l'on se fixe seulement que si chacun contribue à l'amélioration de sa situation, et s'il y a un consensus objectif... une solution à apporter à un problème.

M. le Président, la problématique entourant les actes d'architecture est complexe, comme le démontre le projet de règlement, et c'est en impliquant tous les intervenants que nous avons une meilleure chance d'obtenir une solution durable. M. le Président, j'invite donc les groupes à profiter de l'opportunité qu'ils ont aujourd'hui de s'exprimer ouvertement, librement et surtout publiquement, de façon à ce que le gouvernement et l'Office des professions puissent avoir une vision de l'ensemble sur la problématique que nous devons régler. M. le Président, il s'agit là d'une seconde chance d'obtenir un consensus qui aurait dû être fait il y a deux ans.

Je suis sûr que vous allez saisir l'occasion de nous faire entendre tous les groupes ici devant nous, de faire entendre le gouvernement et l'Assemblée nationale. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Merci, M. le député de D'Arcy-McGee. Et j'invite maintenant M. le député de Louis-Hébert, en vous indiquant que le temps alloué est six minutes. M. le député.

M. Paul Bégin

M. Bégin: Merci, M. le Président. Je dois dire que, initialement, je n'avais pas prévu d'être ici aujourd'hui. Cependant, on est venu me rencontrer dans mon bureau de comté pour me parler d'un problème que j'ai déjà eu, en tant que ministre responsable de l'application des lois professionnelles, à regarder de près, avant de passer à autre chose. Et je dois dire que j'ai revécu, à ce moment-là, ce que j'avais eu à faire au moment de cette étude. Et, entre-temps, je m'étais rendu compte que beaucoup de choses s'étaient passées.

En fait, si on regarde le dossier d'aujourd'hui, il est un parmi d'autres dossiers, il n'est pas le dossier. On est en face d'une modification profonde de notre système d'ordres professionnels. On se rappelle que, au début des années soixante-dix, on a pu créer l'Office des professions, le Code des professions, on a organisé vraiment le fonctionnement des professions à Québec. Et, comme le disait le député de D'Arcy-McGee, je crois que nous avons fait un travail exemplaire à l'époque. Cependant, la vie a continué à suivre son cours, mais surtout a changé beaucoup de choses. Et j'ai été appelé, comme ministre responsable des lois professionnelles, à repenser toute cette question-là. Entre autres, j'ai fait adopter une loi concernant la multidisciplinarité, c'est-à-dire la possibilité que des membres d'ordres professionnels différents puissent former une association et travailler en collégialité, ce qui aurait été absolument considéré comme étant non seulement utopique, mais complètement fou, il y a une quinzaine d'années. Alors que, aujourd'hui, même si on n'a pas encore utilisé à fond cette ouverture, on sait qu'on se dirige vers cette multidisciplinarité.

n(9 h 50)n

Il y a aussi ? et ça, ça s'est développé au cours des années ? l'interdisciplinarité, c'est-à-dire que différents ordres professionnels sont appelés à travailler en collaboration les uns par rapport aux autres, la proximité des actes qu'ils posent étant très forte. Et, à cet égard, le projet de loi n° 90 qui a été adopté au mois de juin 2000 représente, à mon point de vue, le summum de ce travail en collégialité puisqu'on travaillait avec 12 ou 13 ordres professionnels dans le secteur de la santé. Quand on sait qu'il y a 45 ordres professionnels au Québec, il y en a 25 dans le domaine de la santé, et là, on parlait pour 12 d'entre eux, donc, on était dans des actions très proches les unes des autres, particulièrement, pour prendre une image claire: les actes du médecin par rapport aux actes de l'infirmière et par rapport aux actes de l'infirmière auxiliaire, et multipliez ceci en cascade tout autour de ce qui se passe en relation avec le traitement qu'on accorde à des patients. Donc, on a cette interdisciplinarité.

Les technologues et les architectes sont, à mon point de vue, dans un positionnement semblable, c'est-à-dire qu'ils sont dans une mouvance où les choses ayant évolué, on doit resituer les actes des uns par rapport aux actes des autres. En 1973, l'Ordre des technologues n'existait pas ou à peu près pas. La formation menant à un diplôme de technologue, à ma connaissance, n'existait pas non plus, s'est développée au cours des ans et, aujourd'hui, on a des ordres professionnels qui... l'Ordre professionnel des technologues.

Donc, on est en face d'ordres professionnels traditionnels comme l'architecture, le Barreau, les comptables, etc., et d'autres ordres... ou un autre ordre, l'Ordre des technologues, où les gens agissent dans des champs de compétence qui, historiquement, étaient utilisés en totalité par un ordre professionnel. Par exemple, le médecin, c'est lui qui est capable de traiter toute la question de la santé. C'est lui qui peut poser... qui recouvre l'ensemble du secteur de la santé, mais on a convenu que l'organisation du travail serait beaucoup mieux faite si, par exemple, il y avait d'autres personnes qui posaient certains gestes, comme l'infirmière qui a une formation spécialisée et qui peut poser des gestes qui se rapprochent de ceux que le médecin généralement pose, et il y a d'autres gestes posés par l'infirmière auxiliaire qui sont différents mais qui sont, disons, plus éloignés du début. Donc, on a eu un partage des actions.

Je crois que l'Ordre des architectes, comme l'Ordre des ingénieurs, comme les avocats, comme à peu près tous les ordres traditionnels, se voit placé dans l'obligation de voir des gens se présenter et dire: Nous pouvons exercer et poser des gestes dans le domaine où vous êtes, et on est aujourd'hui devant ça. Qu'est-ce que c'est qu'on doit faire? Je dois dire qu'à l'époque, au moment où je traitais du dossier, j'avais voulu trouver une formule, je dirais, à la limite, mathématique, qui aurait réglé le problème, qui aurait été objective c'est-à-dire, et qui aurait été évolutive dans le temps.

Pour bien se comprendre, les architectes avaient... en haut de 100 000, c'était réservé totalement à eux, mais 100 000 $ en 1940 puis 100 000 $ en l'an deux mille, ce n'est pas le même 100 000 $. On le sait bien, tout le monde: ce n'est pas pareil. Donc, ça n'évolue pas. Par contre, on peut avoir des normes objectives comme de dire 30 m². Bien, 30 m² en 1940 puis 30 m² en l'an 2000, c'est toujours 30 m², et ça, c'est objectif. Donc, trouver des solutions comme celles-là.

Il ne semble pas que... D'abord, non, je n'avais pas trouvé la solution, mais on a tenté, semble-t-il, de le faire. Je n'ai pas lu, je le dis, je le confesse tel quel, parce que je ne me préoccupais pas d'une façon immédiate de ce dossier-là, le règlement. Mais il m'apparaît que, si ce règlement qui a été préparé par l'Ordre des architectes n'a pas cette ouverture vers l'incorporation dans la vie professionnelle de ceux qui sont des technologues en architecture, nous sommes placés devant un problème sérieux, et il faut qu'il y ait une réponse adéquate qui soit donnée de la même manière que dans le projet de loi n° 90 qui posait des problèmes bien plus aigus que ceux-là. On a réussi à les solutionner. Alors, il faut qu'on trouve une réponse.

J'écouterai ce que les gens auront à dire, je porterai mon jugement à la fin mais, pour le moment, il me semble que ce que je viens de dire constitue l'orientation, la balise qui va me servir à porter un jugement sur ce qu'on aura fait ou pas fait et dire si c'est satisfaisant ou non satisfaisant et est-ce qu'on doit, si c'est insatisfaisant, prendre d'autres moyens que ceux qui ont été pris pour le moment? Alors, voilà l'esprit dans lequel je travaille, M. le Président, d'ouverture, mais aussi avec une connaissance et un souci de cohérence avec la mouvance législative depuis quelques années dans ce champ de compétence.

Le Président (M. Lachance): Merci, M. le député de Louis-Hébert, pour vos remarques préliminaires, et ceci constitue là la fin des remarques préliminaires.

Auditions

Nous allons maintenant aborder de façon proprement dite la présentation par les groupes intéressés. Et j'invite immédiatement les représentants de l'Ordre des technologues professionnels du Québec à bien vouloir prendre place, s'il vous plaît.

Alors, bonjour, messieurs, et bienvenue à cette commission. J'invite le porte-parole à bien vouloir s'identifier ainsi que les personnes qui l'accompagnent, et je vous rappelle que le temps alloué pour votre présentation est de 20 minutes.

Ordre des technologues
professionnels du Québec (OTPQ)

M. Bernier (Alain): Alain Bernier, président de l'Ordre des technologues professionnels du Québec. M. le ministre, distingués membres de la commission des institutions, bonjour. Je suis accompagné dans cette noble Assemblée, à ma gauche, de M. Réjean Touchette, technologue professionnel, vice-président aux affaires administratives. M. Touchette.

M. Touchette (Réjean): Bonjour.

M. Bernier (Alain): Et, à ma droite, de M. Richard Legendre, technologue en sciences appliquées, vice-président aux communications.

M. Legendre (Richard): Bonjour.

M. Bernier (Alain): Depuis que le gouvernement et l'Office des professions ont entrepris de revoir les champs de pratique de l'architecture, ils ont toujours reçu une collaboration exemplaire de l'Ordre des technologues professionnels. Nous avons offert nos conseils et notre expertise et nous avons aussi appuyé le gouvernement, malgré les longs délais ? c'est un dossier qui traîne depuis 20 ans, ça ? et plusieurs déceptions. Au nombre, mentionnons le projet de loi n° 132 qui n'a pu à ce moment inclure la reconnaissance de la formation académique des technologues professionnels et de leur appartenance au système professionnel. Ce même projet 132 n'actualisait qu'à demi le seuil obsolète des 100 000 $ de coûts de travaux de 1973. Le 100 000 $ est un barème qui a été entré dans la Loi des architectes en 1973.

À l'opposé, l'Ordre des architectes du Québec a fait montre de moins de collaboration. En effet, l'OAQ a utilisé plusieurs manoeuvres carrément dilatoires pour faire échec à l'obligation qui lui est faite par la loi n° 132 de procéder à l'autorisation d'actes à des classes de personnes autres que les architectes. L'OAQ disposait d'un délai de deux ans pour régler la question de l'autorisation d'actes. Or, l'OAQ a attendu jusqu'à la dernière minute pour déposer un règlement. De plus, si on lit bien, ce n'est pas un règlement qui a été déposé mais seulement un projet pour consultation qui nécessitera d'autres tournées provinciales, échanges, discussions, repoussant encore plus loin l'échéance jusqu'aux calendes grecques.

Durant ces deux années, malgré nos invitations répétées, aucune discussion ou consultation n'a eu lieu avec nous; plusieurs lettres, aucune réponse. Enfin, le document déposé par les architectes ne contient aucune autorisation d'acte. Il propose plutôt de subordonner toutes les autres classes de personnes aux architectes, y compris même les ingénieurs qui vont venir vous dire qu'ils ne sont peut-être pas très d'accord avec ça. La proposition tardive soumise constitue même une tentative de détournement des intentions de l'article 5.1 en cherchant à élargir l'étendue de l'exclusivité au-delà de l'article 16 actuel de la Loi sur les architectes. On comprend bien que c'est seulement signer et sceller des plans, tandis que, là, on voit apparaître un... ce n'est même pas des actes, c'est le processus, c'est toute une série de sous-tâches, d'activités. On est rendu à demander l'exclusivité en estimation, inspection, puis même en correspondance d'affaires liée à du suivi de projet. Les secrétaires vont devenir, hein, dans la construction, membres de l'Ordre des architectes.

M. le ministre, dans votre rapport, déposé au mois de décembre dernier, vous avez conclu à un échec, non sans raison. Face à cet échec, nous sommes d'avis que vous devez trancher et nous vous proposons humblement, dans notre mémoire, un modèle d'autorisation d'actes qui respecte les compétences des diverses classes de professionnels et qui assure la protection du public, modèle qui va dans la voie des mesures de modernisation du système professionnel comme déjà mises en oeuvre dans la santé par la loi n° 90. Ça vient d'être signalé que c'est la voie de l'avenir, puis on est tout à fait d'accord avec cette vision-là.

n(10 heures)n

Dans l'organisation moderne du travail et de la société, il y a des modèles plus progressistes que la supervision directe et la subordination. Il y a aussi place à l'autonomie, à la responsabilité, et surtout entre professionnels dans un même système avec les mêmes encadrements. Mais avant de vous faire cette proposition, permettez-nous de vous présenter les arguments qui la soutiennent. Examinons d'abord la formation académique des technologues professionnels en architecture. C'est important de le faire, car l'un des arguments des architectes, c'est que seule une formation universitaire peut offrir des garanties nécessaires raisonnables à la protection du public pour tout bâtiment au-delà de ce qui est déréglementé par la loi n° 132, qui se limite à 300 m² et moins. Il faut se rappeler que, ce qui est dans n° 132, c'est permis à toute personne sans aucune formation dans le domaine. N'importe quel citoyen sur le trottoir qui n'a pas suivi une heure de cours là, aucune expérience, peut faire ce qui est dans 132.

L'Office des professions a réalisé une étude comparative de la formation de l'architecte et du technologue en architecture. On y apprend que les technologues en architecture possèdent la compétence pour exécuter, de façon autonome, les travaux sur des bâtiments dont la surface n'excède pas 600 m² et trois étages, soit 1 800 m² au total, visés par la partie IX du Code de construction. Cette étude établit que les technologues détiennent une solide formation académique en technique de construction, dessin d'architecture, sécurité et code, tout ce qui touche à vrai dire la qualité de construction et la sécurité du public, soit 70 % en nombre de crédits, en durée dans ces domaines, de la formation de niveau universitaire. La formation inclut également des ateliers de projets et des stages. Les technologues sont aussi formés pour travailler en équipe multi et pluridisciplinaire avec les architectes, ingénieurs, designers et autres spécialistes du domaine, acousticiens, etc., à des bâtiments de toute taille et fonction. Ils sont très présents dans les firmes d'architectes.

Une autre étude, réalisée celle-là par un comité de praticiens experts indépendants, nommés par le ministre, affirme que les technologues sont plus souvent occupés, en carrière, que les architectes à dessiner des plans détaillés ainsi qu'à faire la surveillance de travaux de construction. Ils sont très près de la pratique, ils font un petit peu moins d'administration, d'encadrement. Ils travaillent beaucoup, beaucoup d'heures, là, à développer les dessins de détails puis à être très présents dans le concret. Ce qui leur assure le développement continu de leurs compétences et l'acquisition, par l'expérience, de solides expertises techniques au fil d'un cheminement de carrière.

Tant l'Office que le comité d'experts indépendants sont unanimes à constater que les technologues possèdent une large et solide formation en architecture dès la diplomation et une capacité de développement professionnel continu de savoir et savoir-faire, de réalisation. Ils reconnaissent sans doute que les technologues détiennent les connaissances pertinentes sur le Code national du bâtiment, qui est la norme principale pour la sécurité et une bonne qualité de construction, et sur les normes de protection contre les incendies. Ils sont enfin d'accord pour dire que les technologues, avec la préparation acquise par trois ans d'études dans un programme solide, chargé et exigeant, que dispensent les collèges du Québec, pourraient exercer au-delà du seuil des 300 m² déréglementés par la loi n° 132. Il faut se rappeler que c'est déréglementé à des non-formés. Voilà qui nous semble être concluant quant à la capacité des technologues professionnels d'offrir les garanties nécessaires à la sécurité du public.

Examinons maintenant le seuil des 100 000 $, qui est apparu pour le première fois en 1973. Il y a 30 ans, le législateur a estimé que la sécurité du public ne serait pas compromise dans les cas où des technologues professionnels signeraient et scelleraient les plans d'immeubles, à condition que le coût de la construction, sans le terrain ? il faut se rappeler que c'est sans le terrain, c'est le coût physique de monter le bâtiment, les matériaux, la main-d'oeuvre ? n'excède pas 100 000 $. En appliquant un taux d'inflation très conservateur, ce seuil serait aujourd'hui d'environ 450 000 $. Mais, si on regarde le coût au mètre carré, ceci nous donne des superficies de l'ordre de 600 m² ou des constructions, si on veut imager, de la taille d'un huit logements.

Voilà un deuxième argument qui démontre que la sécurité du public ne serait pas compromise dans des immeubles de 600 m² dont les plans auraient été signés et scellés par des technologues professionnels. La qualité de la formation et la compétence des diplômés du collégial n'ont pas dû reculer durant les 30 dernières années d'évolution des programmes et de l'enseignement, du moins devons-nous oser l'espérer, sans ça, le système d'éducation, il marche à reculons.

Poursuivons notre analyse en abordant, cette fois, la partie IX du Code national du bâtiment. Ceci vise les bâtiments d'une hauteur d'au plus trois étages et d'une superficie de plancher par étage d'au plus 600 m², soit 1 800 m² au total. Elle renferme des exigences et des solutions détaillées concernant ces établissements et tous les tableaux requis aux dimensions et spécifications de toutes les composantes d'une construction. Normalement, avec les notes explicatives, plus les codes illustrés, comme on a amenés ici, là, il y a toute la technologie. Tout est normé. C'est très bien connu, très bien documenté, c'est une science relativement abordable. C'est aussi détaillé qu'un devis d'exécution utilisé pour de grosses constructions. C'est un guide normé, très complet et très accessible à une personne bien formée comme le technologue.

Or, l'Office des professions et le comité d'experts indépendants ont conclu que les technologues possèdent la formation et les compétences pour signer et sceller de façon autonome les plans d'immeubles désignés à la partie IX du Code national du bâtiment. Rappelons ici que le Code des professions définit, à 37r, à l'article 37r, le champ de compétence des technologues professionnels comme l'exercice dans le domaine des sciences appliquées à partir de normes, codes et standards reconnus. Mais, si on irait dans l'ordre jusqu'à 1 800 m², à la rigueur, on serait exactement dans cet encadrement-là. Voilà un troisième argument qui justifie d'accorder aux technologues professionnels d'exercer au-delà des limites des 300 m².

Il y a d'autres arguments qui plaident en faveur des technologues professionnels. En consultant la Loi sur le bâtiment, on réalise que plusieurs bâtiments de plus de 300 m² ne sont pas considérés comme des édifices publics depuis le mois de juin 2000 et comme le stipulait déjà, auparavant, la Loi sur la sécurité dans les édifices publics. Les immeubles, par exemple, de neuf ou 10 logements répartis sur deux étages ou, encore, des bâtiments de huit logements sur trois étages et quelques autres catégories ne sont pas considérés, en termes de risques, comme des édifices publics suivant cette réglementation.

Les immeubles publics, eux, pour leur part, sont soumis systématiquement aux inspections de la Régie du bâtiment, ce qui fournit une garantie de conformité supplémentaire au Code. Depuis novembre 2000, tous les édifices classés publics sont systématiquement inspectés pendant la construction pour s'assurer de la qualité de construction, de la conformité au Code, ce qui donne une garantie de sécurité du public supplémentaire. Avant, la pratique, c'était de vérifier les plans, mais on n'allait pas voir les jobs. Asteur, on va voir les jobs sur le terrain. Or, il se trouve que les inspecteurs de la Régie devant vérifier la conformité de ces bâtiments sont en majorité des technologues. Hein, c'est un hasard. C'est donc dire que la Régie du bâtiment du Québec considère que les technologues possèdent les connaissances et les compétences pour inspecter des bâtiments en construction de plus de 300 m², et d'ailleurs tout édifice public, peu importe sa grosseur.

Comment peut-on expliquer que ces mêmes technologues n'ont pas le droit de signer et de sceller les plans de ces mêmes immeubles, mais qu'on les juge assez compétents pour vérifier leur conformité aux différents codes et lois du secteur de la construction? Ça nous apparaît pour le moins illogique. Et pourquoi ne peuvent-ils même pas, de façon autonome, intervenir dans le champ complet des édifices classés, eux, non publics, qui sont pourtant moins à risque? Ça a 300 m² puis ça n'atteint même pas le niveau de ce qu'on appelle un édifice public.

Terminons notre argumentation en disant quelques mots sur l'allégement réglementaire souhaité par le gouvernement. Le législateur a déréglementé les immeubles de moins de 300 m². Cela représente une infime partie du domaine de la construction, principalement l'unifamilial résidentiel. Pour le reste, une partie considérable, les consommateurs n'ont qu'un seul choix: retenir les services d'un architecte.

Considérant que les technologues professionnels possèdent la formation et les compétences pour exercer au-delà de 300 m², nous croyons que les consommateurs devraient avoir la possibilité, selon leurs besoins et à l'intérieur d'une certaine limite ? qu'on est là pour établir ? de mandater le professionnel compétent de leur choix. Je veux dire, on a deux professionnels compétents qui sont encadrés par le système professionnel, formés par le système d'éducation du Québec, ils sont sur le marché, je pense qu'il faut se fier un peu à l'intelligence du citoyen, là, puis il choisira le professionnel dans cette section-là, dans cette strate-là, avec lequel il a confiance et qu'il est confortable.

Instaurer un allégement réglementaire permettant le choix au citoyen entre architecte et technologue professionnel pour les bâtiments de 300 à 600 m² irait d'ailleurs dans le sens et l'ordre de grandeur des législations des juridictions voisines, l'Ontario puis le Nouveau-Brunswick ont déjà déréglementé jusqu'à 600 m², les diverses autres provinces, à 470, 500, puis c'est les ordres de grandeur, qui placent l'exclusivité de pratique des architectes au-delà de 300 m².

M. le ministre, lorsque le projet de loi n° 132 a été déposé, l'Ordre des technologues professionnels avait exprimé sa déception face aux limites étroites du projet. L'Ordre estimait qu'elles n'actualisaient qu'à demi le seuil des 100 000 $ et ne reconnaissaient pas l'existence des technologues comme spécialistes bien formés dans le domaine. Or, des analyses menées par l'Office des professions et le comité d'experts indépendants formé par le gouvernement établissent clairement et sans doute que les technologues professionnels possèdent le niveau et la qualité de formation et toutes les compétences pour exercer au-delà de 300 m². De plus, un organisme du gouvernement comme la Régie du bâtiment, comme de très nombreuses municipalités qui font la même chose, estime que les technologues possèdent les connaissances et les compétences pour faire l'inspection d'un bâtiment en construction de plus de 300 m².

Malgré notre déception, M. le ministre, nous avons accepté d'appuyer le projet de 132 en échange d'engagements pris par la ministre de l'époque. En effet, nous avions reçu la garantie, par l'ajout de l'article 50, que des dispositions seraient prises dans un délai raisonnable ? pas dans trois siècles ? pour accorder une place aux technologues dans le domaine de l'architecture. La commission parlementaire nous en fournit ici l'occasion. La ministre s'était également engagée à faciliter l'adoption de règlements, par l'article 22.1 ou d'autres mécanismes du Code des professions, si l'Ordre des architectes refusait de mettre en oeuvre l'article 50 du projet de loi. On comprend bien qu'il n'y a pas grand monde qui est prêt à céder les parties d'un monopole, hein, de gaieté de coeur. Nous sommes aujourd'hui rendus à cette étape, M. le ministre.

C'est donc avec respect que nous vous proposons d'accorder aux technologues professionnels le droit de signer et de sceller les plans d'immeubles dont la superficie brute totale des planchers n'excède pas 600 m² répartis sur trois étages. Donc, ce n'est pas la partie IX, c'est un tiers de la partie IX. Nous vous proposons d'accorder ce droit aux technologues professionnels tant pour les habitations unifamiliales et multifamiliales que pour les établissements commerciaux, d'affaires et industriels à faibles risques, ce qui correspond aux édifices identifiés dans la partie IX. Le libellé exact de notre proposition se trouve dans le mémoire que nous vous avons fait parvenir.

Je cède maintenant la parole au vice-président aux affaires administratives de l'Ordre, M. Réjean Touchette. M. Touchette est un technologue professionnel en architecture, responsable de l'entretien et des travaux aux immeubles de l'Agence spatiale canadienne de Saint-Hubert, une installation très complexe, et consultant en pratique privée depuis 22 ans. Il vous expliquera ce que nous vous proposons à l'aide de schémas.

n(10 h 10)n

M. Touchette (Réjean): Merci, M. le président. Pour présenter ma présentation, j'ai une petite présentation de prête. Pour moi, c'est plus facile de m'exprimer par dessins ? étant technologue, le domaine graphique est plus facile. Alors, présentement, il y a trois types de bâtiments de régis par le...

Une voix: ...baisser la lumière. Ce serait peut-être plus facile.

Le Président (M. Lachance): Il y a les intéressés de la télévision aussi, M. le député.

M. Bernier (Alain): Vous les avez également sur papier...

Une voix: On l'a sur le document.

M. Bernier (Alain): Oui, vous les avez sur papier aussi, les informations.

M. Touchette (Réjean): Il y a trois types de bâtiments qui sont régis par la loi. L'unifamilial, qui est complètement déréglementé. On parle également du multifamilial. Présentement, la loi a déréglementé les bâtiments de quatre logements et moins, deux étages et moins, 300 m² et moins, ce qui correspond à des petits logements de 75 m, maximum qu'on peut faire. On propose, nous, le libre choix au consommateur du professionnel de son choix pour les bâtiments de huit logements, trois étages et 600 m² et, au-delà de huit logements, de maintenir le champ de pratique exclusif des architectes.

La même logique s'applique pour les bâtiments en commercial, lorsqu'on parle de commercial, c'est également les bâtiments industriels à risques faibles et moyens et les bâtiments d'affaires, où, présentement, deux étages et moins, 300 m² est déréglementé. N'importe qui, quiconque peut le faire. Ce qu'on propose, c'est une strate réservée aux deux professionnels dans la mesure de trois étages, 600 m², et de maintenir l'exclusivité des architectes pour les bâtiments plus grands.

La logique de cette proposition s'appuie sur l'article 37r du Code des professions et des activités professionnelles pouvant être exercées par un technologue professionnel, qui dit que le technologue peut exercer, dans la limite de ses compétences, selon des procédés, des méthodes et des normes reconnus. Or, ces bâtiments font partie de la partie IX du Code national du bâtiment, qui est une frontière technologique reconnue. En fait, c'est une frontière de fait et naturelle. Les deux parties du Code... La partie IX du Code du bâtiment s'applique aux bâtiments de trois étages et moins, 600 m² d'aire, et les usages d'habitation, établissements d'affaires, établissements commerciaux et établissements industriels à risques faibles et moyens, alors que la partie III s'applique aux bâtiments plus grands. En fait, les petits bâtiments renferment des exigences détaillées, avec des descriptions bien précises, alors que les bâtiments de la partie III à VI renferment plutôt des atteintes, des objectifs qui demandent un niveau de conception plus poussé.

On a extrait quelques exemples du Code du bâtiment où on a un tableau concernant la conception des murs. Alors, le Code est très détaillé à cet effet, il donne la résistance au feu selon les différentes compositions et le degré de résistance acoustique. Alors, il s'agit seulement que d'assembler ou d'extraire les données de ce tableau-là. Un autre exemple est concernant la conception d'éléments architecturaux. Pour les cheminées, par exemple, le Code détermine exactement la hauteur des cheminées, quel est le dépassement par rapport au toit, et etc. La conception est quand même assez simple.

Au niveau structural, il y a des tableaux qui indiquent, selon l'essence, la qualité du bois et les portées, le type de charpente, le type de pièce de bois à utiliser. Et on a des tableaux semblables pour l'acier. Et, pour les bâtiments de 100 000 $ et plus, tout comme les architectes, les plans doivent être faits par un ingénieur. Le Code pousse les détails jusqu'à préciser les grandeurs de clous, les longueurs de clous et la quantité de clous pour chacune des pièces de bois, et le Code donne également les prescriptions concernant les ouvertures des issues, la distance de parcours, les rayonnements, etc. Alors, au niveau de la conception pour des bâtiments de 600 m² et moins, l'emplacement, le positionnement des issues est quand même assez simple.

Alors, le technologue professionnel en architecture est un membre du système professionnel compétent et encadré. En tant que membre d'un ordre professionnel, il a comme objectif la protection du public. Il a, également, au même titre que les architectes, une assurance pour erreurs et omissions. Il est soumis à un comité d'inspection professionnelle qui lui dit ses erreurs. Il est également soumis à un syndic et à un comité de discipline.

Alors, pour ces raisons, la proposition que nous présentons aujourd'hui nous apparaît juste et raisonnable. Et ces éléments vous démontrent qu'elles sont dans les limites des compétences des technologues professionnels.

M. Bernier (Alain): Très à l'intérieur des limites, parce que ça correspond, comme on disait, à un tiers des surfaces, un tiers de la dimension, de la grosseur d'un bâtiment qui est sous la technologie et la normalisation de la partie neuve du Code et autres documentations de l'industrie très étoffées là-dessus.

Le Président (M. Lachance): Alors, merci messieurs.

M. Bernier (Alain): Le 100 000 est déjà disparu.

Le Président (M. Lachance): Nous allons maintenant aborder la période des échanges avec les parlementaires, et j'invite M. le ministre responsable de l'application des lois professionnelles à amorcer ces échanges. M. le ministre.

M. Jutras: Oui. Alors, M. Bernier, bienvenue à cette commission. M. Touchette; M. Legendre, bienvenue également. Et merci de la présentation que vous nous avez faite.

Moi, ce que je voudrais savoir, c'est qu'il y a eu deux temps forts, en quelque sorte, au cours des dernières années dans ce long cheminement d'un dossier: il y a eu le revirement jurisprudentiel qu'on a connu en 1996, vous y faites référence dans votre mémoire, et il y a eu, en l'an 2000, l'adoption du projet de loi n° 132. Moi, ce que je voudrais savoir, c'est que, sur le terrain, pour les membres de votre Ordre, qu'est-ce que... puis, si vous êtes capable de me le dire par rapport aux deux étapes, je l'apprécierais, ce que j'aimerais savoir, c'est qu'est-ce que ça a représenté sur le terrain? Quelles ont été les conséquences pour vous par rapport à ce que vous avez connu antérieurement?

M. Bernier (Alain): Je pense que M. Fernand Roger, qui est ici derrière nous, de Dessins Drummond, pourrait vous expliquer que ça a fait très mal, en 1996, de se faire dire par les juges que le 100 000 n'avait pas évolué puis que, le 100 000, les tribunaux devaient l'appliquer puis renvoyer ça dans le fond; au Parlement de faire ses ajustements, de moderniser, d'actualiser. Ça empêchait, strictement parlant, tout le monde de gagner sa vie. Ceux qui avaient développé une pratique privée se sont ramassés au chômage: plus de contrats, plus d'ouvrage, plus moyen de bouger. Fini.

En 2000, avec 132, on a été remontés ? comme on disait, c'est un peu désolant ? au même niveau qu'un citoyen qui n'a aucune formation, qui n'est pas membre d'un ordre professionnel, qui n'a pas d'encadrement. C'est un peu difficile à comprendre pour les gens qui se sont investis une bonne partie de leur vie à étudier puis à se développer une compétence puis un champ de pratique là-dedans. À 300 m², les gens ne peuvent pas faire une pratique rentable. Ils sont limités dans...

Prenez un quatre logements, 132, ça dit quatre logements. Quatre logements pour 300 m² total, c'est quatre petits logements de 75 m², ça fait à peu près 800 pi². Tu as de la misère à faire des quatre et demi, tu as de la misère à faire quatre logements quatre et demi. Il ne faut pas que les garde-robes soient trop grands, hein? Bon. Ça fait que tu es limité à peu près à du duplex, du triplex. Puis, dans le commercial, 300 m², ce n'est pas très gros, c'est 50 par 60, en pieds, là, si vous êtes plus confortable en pieds. Il ne se bâtit pas grand-chose, dans les banlieues et même en ville, où il y a un petit commerce en bas puis un logement par-dessus, qui va rouler dans le 3 300 pi², là.

Ça fait qu'à vrai dire c'est comme... C'est bien, là, l'idée d'avoir déréglementé pour que chacun puisse faire sa petite maison privée avec un entrepreneur qui le conseille, là, on n'est pas contre ça. Mais, d'avoir mis le plafond, sur la tête d'un professionnel formé, à 300 m², c'est lui dire: Tu n'as pas de carrière, tu n'as pas d'avenir, puis tu vas crever avec ça, donc tu es fait pour être un bon employé docile.

M. Jutras: O.K. Maintenant, pour être certain que je comprends bien votre proposition, ce que vous nous dites... Bon. C'est-à-dire, en l'an 2000, il y a eu une déréglementation jusqu'à 300 m², et là ce que vous nous proposez, votre proposition, c'est à l'effet qu'il y aurait un secteur réservé, de ce que je comprends, c'est-à-dire de 300 à 600 m². Les technologues, ça ferait partie de leur champ, et évidemment les architectes en seraient aussi, mais cette partie-là ferait partie de votre champ.

M. Bernier (Alain): Oui, ça deviendrait une zone de partage d'actes. Comme on disait, libre choix du consommateur d'aller avec la personne en qui il a confiance, qui a un bon c.v., là, un bon portefeuille de projets, un beau portfolio, là. La personne pourrait prendre des ententes avec le professionnel, collégial ou universitaire, dans cette zone-là.

n(10 h 20)n

M. Jutras: Puis, la déréglementation jusqu'à 600 m², ça, l'avez-vous examinée, l'avez-vous envisagée?

M. Bernier (Alain): La déréglementation pure à tout citoyen jusqu'à 600? Là, ce ne serait peut-être pas prudent. Puis, si on regarde ça dans le contexte de la protection du public, là, on commence à jouer dans un peu plus d'usagers dans le bâtiment. Un huit logements, si on prend des quatre et demi, on peut avoir à peu près trois, quatre personnes par logement, on se ramasse une trentaine de personnes sur trois étages, l'escalier, évacuation. Je pense que c'est préférable de garder le 300 à 600 entre spécialistes formés et aussi qui sont membres d'un ordre professionnel, donc ils doivent toujours penser en premier à la protection du public, à leurs compétences, à ne pas prendre de mandat pour lequel ils ne se sentent pas confortables, ils ont leur code de déontologie aussi, et qui prendront aussi... qui seront prudents, qui vont pratiquer en étant très prudents, en se renseignant auprès des fournisseurs sur les limites des produits, en consultant les codes, aussi en consultant les autorités réglementaires. C'est des gens qui ont une formation pour comprendre ce qu'ils font puis poser les questions quand ils ont des incertitudes aussi, qui vont pratiquer de façon prudente, par rapport au citoyen qui pourrait être un peu cow-boy dans cette zone-là.

M. Jutras: Il avait été aussi beaucoup question, là, dans l'époque allant de 1995 à l'an 2000, de la formation des technologues et, bon, qu'il devait y avoir une révision du programme de formation des technologues. J'aimerais que, à ce chapitre, vous nous disiez qu'est-ce qui s'est fait dans ce domaine-là.

M. Bernier (Alain): Réjean, tu as participé aux discussions là-dessus.

Le Président (M. Lachance): M. Touchette.

M. Bernier (Alain): M. Touchette.

M. Touchette (Réjean): Oui, merci. La révision du programme en architecture a été faite. Elle a été adoptée par le ministère de l'Éducation et elle va être mise en application dans la prochaine session, dans les prochaines sessions. Alors, les modifications qui ont été apportées visent à augmenter la formation dans le domaine de la conception, principalement conception en architecture et dans le domaine de la conception aussi au niveau technologique, au niveau des assemblages. Alors, il y a eu des compétences de rajoutées ou de précisées à cet effet-là. Malgré que les technologues, antérieurement, avaient quand même ces compétences-là dans le programme collégial, et elles ont été précisées dans le nouveau programme.

M. Jutras: Alors, donc, pour ceux qui sont déjà sur le terrain depuis plusieurs années, là, qu'est-ce que vous dites à ce moment-là pour eux?

M. Bernier (Alain): Ils ont la compétence. Il n'y a pas eu un remaniement de fond en comble du programme, il a été plutôt actualisé, modernisé. Mais les gens apprenaient leur Code, apprenaient les technologies, même de bien plus gros bâtiments que ça. Les gens... En technologie d'architecture au D.E.C., je connais à peu près ce qui s'enseigne là-dedans. Ça fait 27 ans que je forme des technologues en génie civil puis dans le domaine de la construction, ça fait que je connais à peu près le niveau, là. Puis j'ai participé au développement des programmes puis à toutes ces instances-là. Pour le genre de bâtiments qu'on propose, là, puis même, je vous dis, là, même à trois fois plus gros, jusqu'à 1 800 m², les technologies sont très accessibles, les mesures pour assurer la sécurité du public sont très accessibles à quelqu'un de formé. La formation antécédente était tout à fait correcte.

Là, étant donné qu'on s'en allait vers un partage d'actes, on s'est assurés, parce qu'on a été partenaires dans ces discussions-là, on s'est assurés avec le ministère de l'Éducation que tout était là puis que tout serait conservé là. Parce que, des fois, il peut y avoir des petites tendances, certains ont essayé de faire baisser le niveau du programme ? je ne vous dirai pas qui ? mais on a résisté, puis ça a maintenu le niveau. Mais ça a été mis à jour avec les nouvelles technologies.

M. Jutras: Cette proposition-là que vous nous faites aujourd'hui, finalement, elle n'est pas nouvelle, hein? Parce que c'était... je ne sais pas depuis quand c'est votre proposition, là, mais, en tout cas, quand on avait fait la commission parlementaire en l'an 2000, déjà vous étiez là, et c'était déjà votre proposition, puis je pense que c'était même votre proposition antérieurement.

Lorsque... depuis 1994 ou 1995 que ce dossier-là est actif, je me souviens que ? et ça, c'est du temps de mon prédécesseur, là, le député de Louis-Hébert ? il y avait eu un comité qui avait été formé, il y a eu des rencontres qui se sont faites, à l'époque, entre votre ordre et l'Ordre des architectes. Est-ce que cette proposition dont vous nous parlez aujourd'hui, est-ce que cette proposition-là, déjà, à l'époque, était sur la table? Est-ce qu'elle a été discutée avec l'Ordre des architectes? Et comment ça avait été reçu?

M. Bernier (Alain): Pour se préparer à la commission parlementaire, j'ai fait faire un relevé, au siège social, de toutes nos positions historiques puis de nos échanges de lettres ? il y en a un classeur, une demi-tonne de papier là-dessus depuis 20 ans ? puis on a fait un relevé à peu près de nos discussions puis de ce qu'on a fait comme solutions, et c'est le filon. Ce qu'on propose, là, le 600 m², pas dans les fonctions à risque... Parce que vous remarquerez qu'on ne demande pas de travailler dans le A, donc édifices de rassemblement de publics. Dans le B, ça, c'est un peu technique, là, pour les gens qui ne sont pas dans le Code, mais les fonctions B, c'est quand les personnes ne peuvent pas évacuer rapidement: hôpitaux, convalescence, ces choses-là. Donc, on se limite dans les fonctions à risque faible et usage courant, où les gens peuvent entendre l'alarme, évacuer rapidement, etc. Et le 600 m² a toujours été le filon historique de cette chose-là.

On n'a pas tellement... Oui, ça a été discuté en long et en large dans plusieurs époques, avec plusieurs présidents de l'Ordre des architectes, qui, des fois, disaient: Oui, oui, oui, ça aurait du bon sens, puis là il faut que je présente ça à mon bureau, mais ça s'adonne que, les événements politiques, on changeait de président, il se faisait sacrer dehors par son bureau, parce qu'il était trop «friendly» avec des technologues, etc. Ça n'a jamais avancé.

Puis, comme je vous dis, là, il n'y a personne qui lâche un bout de monopole sans être forcé. À un moment donné, c'est beau discuter, mais je vais être mort puis on va discuter encore. Puis, de toute façon, on vous l'a dit: depuis deux ans, on ne discute plus, parce qu'on leur a envoyé des lettres pour avoir des réunions puis discuter de 5.1, puis, aux dernières nouvelles, ils ne m'ont pas parlé puis ils n'ont pas parlé à personne de l'Ordre que je connais.

M. Jutras: La proposition d'un règlement qui est sur la table, qui a été déposée par l'Ordre des architectes à l'automne, là, vous en avez pris connaissance?

M. Bernier (Alain): Oui. Ça, comme je vous l'ai dit, là, dans mon allocution ? puis c'est très bien traité dans notre mémoire ? ça, c'est du détournement, là, parce que, là, on prend l'acte général qui est de signer puis sceller des plans puis on est en train d'en faire 39 sous-opération. Puis, si vous regardez où le technologue serait classé là-dedans, ce serait un consultant externe non reconnu par une loi. On a fait un petit calcul, où il y a des losanges, des x puis des zéros, là, bien, on est des nuls parce qu'on n'a le droit de rien faire, puis c'est toujours sous supervision. Ce n'est pas ça, le concept d'autorisation. Quand tu autorises un professionnel à agir, là, c'est parce qu'il est de plein pouvoir et de plein droit. Hein, il n'est pas un subalterne. C'est le système féodal, cette affaire-là. Mais on est sortis de là depuis le Moyen Âge, si je ne me trompe pas, on n'embarquera pas là-dedans, nous autres.

M. Jutras: Maintenant, vous parlez... votre proposition parle de 600 m². Où vous le prenez, ce 600 m² là? Pourquoi pas 700 ou 800? Je comprends qu'il fallait que vous traciez une ligne à quelque part, mais sur quoi vous vous êtes basés pour dire: Bon, bien, c'est à 600 m²?

M. Bernier (Alain): Bien, il y a aussi les tendances et des précédents. Comme j'ai parlé dans l'allocution, si on prend, par exemple, l'Ontario, qui est un de nos voisins, bien, ils ont fait de l'allégement réglementaire jusqu'à 600 m² de surface totale, répartis sur trois étages. Le Nouveau-Brunswick, même logique, pour des fins commerciales, résidentielles, institutionnelles et services personnels. Donc, on est allés un peu, là, dans une tendance, là, de marché.

Puis aussi, bien, ça fait très longtemps qu'on en discute, puis on veut avoir une position qui est d'affaires, dans le fond, pour finir par en finir, pour avoir quelque chose, là. Parce que c'est sûr qu'on pourrait prendre la ligne dure puis dire: Bien, 1 800, on est justifiés, on a la compétence, c'est normé; puis un technologue, c'est reconnu par le Code des professions qu'il a son travail; son champ de pratique, c'est de travailler suivant des normes. Mais on veut aussi arriver à un arrangement d'affaires puis laisser au législateur une marge de manoeuvre pour trouver un arrangement d'affaires, commerciales. Hein, c'est un partage un moment donné, là, aussi. Ça fait qu'on comprend bien qu'il y a une assiette de construction, puis il va se faire un certain partage des honoraires. On n'est pas trop gourmands, on est des gens bien raisonnables.

M. Jutras: Vous avez parlé aussi de la comparaison avec l'Ontario et le Nouveau-Brunswick... Vous avez parlé de la comparaison avec l'Ontario et le Nouveau-Brunswick, mais, dans le cas de ces provinces-là, ça a été une déréglementation totale, hein, je pense, jusqu'à 600 m². Il n'y a pas un secteur réservé, là, comme dans la proposition que vous nous faites. La déréglementation est totale jusqu'à 600 m².

M. Bernier (Alain): C'est ça.

M. Jutras: Oui?

M. Bernier (Alain): Oui.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Duplessis.

n(10 h 30)n

M. Duguay: Oui. Alors, merci beaucoup, M. le Président. Alors, moi également, messieurs, je désire vous souhaiter la bienvenue. Et merci beaucoup pour l'information que vous nous transmettez, ça nous aide bien gros, compte tenu que moi, je n'ai pas eu le plaisir de vous recevoir dans mon bureau de comté. J'ai reçu les architectes, mais vous n'êtes pas venus. Alors, ça répond un peu à certaines questions que je soulevais. Sauf qu'il y a un point sur lequel vous êtes... vous avez ressorti... Dans votre mémoire, notamment au niveau de la rentabilité, vous dites que tout ce qui est en bas de 300 m² ou, en tout cas, dans la limite du 300 m², ce n'est pas nécessairement rentable, mais le fait de monter à 600 mètres, est-ce que vous avez fait une projection, à savoir: ça vous permettrait de vivre? Et également vous avez précisé que ce n'est pas un champ global au niveau du 600 mètres, mais bel et bien dans des sphères délimitées.

M. Bernier (Alain): À risque limité, oui, pour les occupants. Eh bien, c'est que, jusqu'en 1996 là, le 100 000 permettait de se rendre à 600 m², donc, ça correspond à peu près à du champ historique. Puis avant... il faut dire qu'avant les années quatre-vingt-dix, là, il n'y a pas eu beaucoup d'agressivité sur le terrain. Il y avait beaucoup de construction au Québec, puis les architectes universitaires, leurs bureaux étaient très bien nantis en contrats prestigieux, les constructions commerciales, institutionnelles, etc.

Les années quatre-vingt-dix, ça a été le désert en construction, hein? Les heures travaillées, le nombre de travailleurs dans la construction, ça a baissé de 40, 50 %. Quand les gens sont affamés, ils commencent à se mordre, hein? Ça fait que ça a déclenché la guerre des tranchées dans les années quatre-vingt-dix. Puis là, bien, pour avoir du travail, bien, si une loi nous permet de tasser quelqu'un, on le tasse, hein? C'est là que la guerre s'est déclenchée en 1996. Moi, ça a été ma compréhension comme quelqu'un qui regardait ça dans le milieu puis un peu de l'extérieur, oui.

M. Duguay: Merci.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Frontenac.

M. Boulianne: Merci, M. le Président. Alors, bienvenue, M. Bernier, M. Touchette, M. Legendre. Je veux revenir sur la question du ministre. Vous avez répondu peut-être en partie. Alors, ce qu'on comprend, c'est que, au moins, vous êtes unanimes au moins sur un objectif avec les architectes, la protection du public. Je pense qu'autour de ça vous avez des échanges et vous avez des contacts. Est-ce que, officiellement, sur le projet, l'Ordre des architectes vous a consultés, puis est-ce que vous avez émis des commentaires là-dessus?

M. Bernier (Alain): Sur ce qu'eux ont déposé comme projet pour consultation, j'ai vu ça quand l'Office des professions me l'a envoyé. Ce n'est pas parce qu'on ne l'a pas demandé. Même, d'ailleurs, au mois de juin 2002, on a rencontré le président de l'Office pour leur demander... Parce qu'on n'avait pas de réponse quand on disait: Où ça s'en va, y a-tu des orientations, on a rencontré le président de l'Office qui a dit: Bon, on va aller aux nouvelles, puis dès qu'on sait quelque chose, on vous informera. Puis même, il semble, parce que j'ai vu les lettres d'échange que l'Office a envoyées, il semble que même l'Office a eu de la difficulté à finir par avoir quelque chose. Moi, c'est de même que je l'ai vu, là.

M. Boulianne: Est-ce qu'il y a encore du temps?

Le Président (M. Lachance): Oui.

M. Boulianne: Moi aussi, ça fait deux ans, là, qu'on vous entend, vous venez, vous avez toujours... on a l'impression qu'on a toujours les mêmes problèmes au niveau du champ d'application. Alors, vous parlez toujours de formation, vous parlez évidemment de compétences. Est-ce qu'il n'y aurait pas une autre solution? Est-ce qu'il y a, par exemple, un champ exclusif, là, de pratique? Ça ne pourrait pas régler les problèmes? Est-ce que vous avez envisagé une autre solution que seulement?

M. Bernier (Alain): Mais, champ exclusif, vous voulez dire juste pour les technologues?

M. Boulianne: Oui.

M. Bernier (Alain): Bien, étant donné que les deux personnes ont la formation pour pratiquer... Bon, l'architecte universitaire a la formation pour pratiquer dans toutes dimensions de bâtiments, et notre conclusion, puis ce n'est pas juste la nôtre, là, les analyses sur les contenus de formation faits l'Office, puis des comités indépendants qui ont été consultés arrivent à la conclusion, puis les programmes de formation le prouvent, que le technologue professionnel est capable de façon très contrôlée, très sécuritaire de faire le type de bâtiment dont on parle. Ça fait que je ne vois pas pourquoi on aurait la prétention de sortir les architectes d'un travail qu'ils peuvent faire, fait de bonne qualité, puis offrir leurs services aux citoyens. Je ne suis pas corporatiste à ce point-là.

Le Président (M. Lachance): M. Legendre.

M. Legendre (Richard): Peut-être que je rajouterais que, au niveau... en fait, comme M. Bégin mentionnait tout à l'heure, l'Ordre des technologues fait partie d'un des éléments que le gouvernement du Québec a mis en place de multidisciplinarité, lorsque l'Ordre des technologues a été créé en 1980, fait en sorte qu'on regroupe énormément de disciplines. Par exemple, moi, je ne suis pas en architecture, je suis en technologie de génie électrique, on en a dans le domaine de la foresterie, on en a dans le domaine de l'agroalimentaire. Alors, pour nous, pour les technologues, on a été habitués à ce contexte-là de multidisciplinarité, alors, je pense que ça allait de soi pour nous de ne pas exiger quelque chose uniquement pour nous, calqué sur un vieux modèle.

M. Bernier (Alain): Puis, si je peux donner une précision à votre question, c'est prenons le modèle de la santé. Je ne pense pas que l'Ordre des infirmiers et infirmières ait des prétentions qu'elle pose des actes qu'un médecin ne peut pas poser. Elle va donner, par exemple des traitements suivant des protocoles, des piqûres, elle va changer des pansements, mais elle n'ira pas dire au médecin: Touche pas à ça, tu n'as pas la formation. Le médecin est peut-être occupé à d'autre chose, puis c'est mieux l'utiliser; c'est mieux utiliser les ressources humaines puis tout l'investissement qu'on met en formation et en rémunération là-dedans de mettre le médecin sur le diagnostic, puis que d'autres groupes s'occupent de donner des soins. Mais, de façon autonome, à partir de règles et de protocoles, nous autres, là, on l'a notre protocole, c'est la technologie. La technologie, là-dedans, elle est normée, encadrée, quelqu'un de formé est capable d'utiliser ça de façon très sécuritaire, surtout que c'est dans un système professionnel. Puis s'il fait des niaiseries, on va s'en occuper.

Le Président (M. Lachance): Merci. M. le député de D'Arcy-McGee et porte-parole de l'opposition officielle.

M. Bergman: Merci, M. le Président. M. Bernier, M. Touchette, M. Legendre, merci pour votre présentation, c'est fort intéressant, et les problèmes que vous soulevez sont des problèmes auxquels nous devons trouver une solution. Dans la loi n° 90, on a trouvé des solutions, les ordres professionnels se sont mis ensemble pour essayer de régler cette situation. Et la loi n° 90, nous l'avons adoptée à l'Assemblée nationale il y a quelque mois. Ici, peut-être que nous sommes sur le mauvais chemin pour solutionner ces problèmes.

Vous faites référence, dans votre mémoire, que vous avez eu une collaboration exemplaire vous-même à l'Office des professions malgré plusieurs déceptions, et j'aimerais avoir une idée de ces déceptions.

Vous faites référence au projet de loi n° 132, étant une première étape et que la loi n° 132 n'a pas pris en considération votre formation. C'est une loi où votre appartenance au système professionnel n'était pas prise en considération. Alors, j'aimerais avoir plus de détail sur cette question.

Et vous misez, dans votre présentation aujourd'hui, sur le 300 m² ou 600 m² au lieu de l'article 5.1 et le règlement qui devait être déposé ou qui était déposé par l'Ordre des architectes devant cette commission. Et vous dites que le 300 m² constitue une limite injustifiable en considération de votre formation et en considération de la réserve de l'arrêt 1973.

Alors, est-ce que vous demandez en fait que le projet de loi ou la loi n° 132 ou, en particulier, l'article 16.1 soit rouvert et que vous demandez au gouvernement pour présenter un autre projet de loi? Car il semble que l'article 5.1 dans votre esprit n'a pas réussi. Et est-ce qu'on doit retourner à l'article 16.1? Est-ce que vous demandez... est-ce que, ça, c'est vos demandes au gouvernement? Car, à mon avis, nous sommes ici pour discuter le règlement ensemble, en vertu de 5.1 mais, en fait, il y avait un échec. Et est-ce que vous demandez de retourner aux discussions qu'on a eues avant l'adoption du projet de loi n° 131 où il y a une importante étape qui a été faite à l'adoption de l'article 16.1 et où, à ce moment, il semble qu'il y avait une coordination, il semble qu'il y avait une acceptation de ce nouveau seuil? Alors, j'aimerais avoir vos idées sur ces questions, M. Bernier.

M. Bernier (Alain): Bon, côté des déceptions, il y a eu les délais. C'est à partir du... on savait même avant 1996 que le 100 000 posait un problème. D'ailleurs, il y avait déjà eu des tribunaux qui s'étaient prononcés puis qui avaient interprété le 100 000 $ autrement là, jusqu'à ce qu'en 1996 un tribunal dise c'est 100 000 $ de travaux de construction, puis la loi est obsolète mais il faut l'appliquer pareil. Puis là ça venait de bloquer la pratique privée pour nos membres. Ça, c'est une déception.

Alors, dans 132, la déception, c'est qu'on a été assimilé à un citoyen ordinaire non formé. Ce serait comme de dire qu'une infirmière n'a pas plus de compétence dans la santé qu'un père ou une mère de famille. Me semble que ça ne va pas, là. Ils sont allés étudier trois ans puis c'est des praticiens du domaine, ils doivent avoir un niveau de compétence et d'intervention reconnu plus haut que le citoyen ordinaire, Dr Maman, là, hein? Bon. Ça, c'est un autre genre de déception. Bon.

Ça fait que, pour vraiment reconnaître que les gens ont une formation décernée par l'État, qu'on recrute des jeunes là-dedans, qu'on leur dit: C'est des belles carrières, puis c'est intéressant technologue en architecture, il faut se rappeler aussi qu'on ne veut pas faire une guerre avec les architectes là. La majorité des technologues diplômés de collège, ils travaillent dans des firmes d'architectes puis c'est un des rares secteurs, moi, j'ai vu que les patrons, ils dénigrent leurs employés, ils trouvent que leurs employés, c'est des pas bons. Puis quand ils vous font des propositions de même là, ils trouvent qu'ils sont moins compétents que quelqu'un qu'ils engagent sur la rue puis qu'ils gardent chez eux pendant 10 ans: Ne va pas à l'école, ça ne rien à rien, tu fais 10 ans d'apprentissage dans nos bureaux, là, puis tu vas devenir plus compétent qu'une bibite qui s'appelle un consultant externe non reconnu par une loi.

n(10 h 40)n

On remarquera d'ailleurs dans le règlement qu'ils vous ont proposé ? grosse déception! ? que le mot «technologue» est exorcisé. Ça n'existe pas. Ça apparaît dans le dernier, dernier tableau, mélangé avec 47 sortes de personnes, y compris plombier. Ça va? Mais c'est la principale personne avec qui ils travaillent dans leur firme. C'est assez rare comme secteur, comme milieu. Les médecins n'ont jamais nié l'existence d'infirmières puis leur valeur. Je ne comprends pas ça. Nous autres, on est pour que... les architectes, c'est des gens compétents, sérieux puis qu'on aime travailler avec, mais eux autres, ça a bien l'air qu'ils ne veulent pas voir les technologues le moindrement en liberté puis un peu en compétition avec eux autres. Bon. Ça fait que ça, c'est une question qui est... c'est décevant comme secteur puis comme qualité de relations. Mais, en tout cas, bon. Les déceptions, on en a en masse.

Après ça, pour ce qui est de la question de quel serait le véhicule législatif pour régler le litige et le problème, débloquer ça, nous, on ne voudrait pas aller vers rouvrir la loi, retourner au parlement voter une loi. Bien, non, on peut travailler à l'intérieur de 5.1, parce que le Code des professions, à l'article 12, alinéa 2°, permet que l'Office «recommande au gouvernement d'adopter, par règlement, tout règlement dont l'adoption par le Bureau est obligatoire en vertu du présent code ? bon, puis il y avait une obligation de résultat dans 5.1, puis il n'y en a pas eu de règlement satisfaisant, il y a eu une fantaisie qui est sortie, là ? [...] à défaut par le Bureau de l'adopter dans le délai que fixe l'Office». Ça va? Bon, bien, le Conseil des ministres, à mon avis, après écriture de l'Office... Moi, je comprends, là, qu'il y aurait un mécanisme ici qui permettrait d'opérer dans 5.1 sans faire tout le tour du processus législatif. Est-ce que ça répond à vos questions?

M. Bergman: M. le président. M. Bernier, vous parlez d'obligation des autres ordres et, dans votre mémoire, vous faites référence à l'engagement de la ministre de l'époque à faciliter l'adoption des règlements. Et, si l'Ordre refuse de mettre un règlement, il semble que, dans vos discussions avec la ministre, vous avez eu une entente avec elle, qu'elle va adopter des règlements dans ce domaine. Mais la question des délégations d'actes, comment est-ce que c'est possible une délégation d'un acte par un ordre professionnel s'il n'y a pas dans la loi qui constitue cet Ordre, la Loi sur les architectes, vraiment une définition de leur champ de pratique ou leur champ d'activité? Est-ce que c'est possible d'avoir une délégation d'acte quand vraiment il n'y a pas, dans la loi même de l'Ordre des architectes, une définition de leur champ de pratique? Alors, comment est-ce qu'il peut y avoir une délégation d'acte où il n'y a pas de définition de leur champ de pratique?

M. Bernier (Alain): Ma compréhension, dans la Loi sur les architectes, du champ de pratique défini là-dedans, c'est l'article 16, qui dit que les pratiques exclusives de l'architecte, de signer, sceller des plans pour l'agrandissement, construction, reconstruction, rénovation de bâtiment de tel grosseur... ce qui a été modifié par 132, donc, en sortant de là, le 300 m² et moins pour certaines fonctions. Donc, il est défini là. Alors, je ne pense pas qu'on soit obligés de repasser par un exercice comme ça, de subdiviser, comment faire des plans et devis en 39 étapes, y compris la correspondance d'affaires pour savoir qu'un architecte, ça fait de la construction. Je ne pense pas que ce soit nécessaire.

Puis comment est-ce que vous pensez que le public va se retrouver là-dedans, dans qui fait quoi, là? Même un entrepreneur qui va faire affaire avec des professionnels, il va y perdre son latin, dans un tableau comme ça: un petit x, une petite étoile, un petit zéro, tu fais ça avec un ingénieur, tu fais ça avec un autre, avec surtout des appellations aussi confusantes que consultant externe reconnu par une loi puis non reconnu par une loi. C'est tellement confusant que, dans la lettre que j'ai reçue du président de l'Ordre des architectes, il nous baptise dans la mauvaise colonne. Il me transmet que, nous autres, on va agir suivant le consultant externe reconnu une loi. Ça ne doit pas marcher parce que, quand tu regardes dans les définitions de ce qu'ils ont proposé, être reconnu par une loi, ça correspond à avoir un champ de pratique exclusif que les technologues n'ont pas, c'est à titre réservé. Ça fait que même eux autres, ils ont de la misère à comprendre. Je ne sais pas comment que le citoyen ordinaire va se retrouver.

Ça fait que, en pratique, c'est très clair actuellement pour les citoyens. Les villes comprennent, les entrepreneurs comprennent, à peu près tout le monde dans le milieu comprend. Un architecte, ça fait des plans et devis puis les services connexes. Puis les services connexes, aux dernières nouvelles, là, ils ne sont pas dans le champ de pratique exclusif. Il y a bien du monde qui font de la gérance de projets puis de l'inspection de chantiers puis qui ne sont pas architectes, puis il n'y a pas de mort, il n'y a pas de cadavre, il n'y a pas de catastrophe, la société marche depuis un bon bout de temps.

M. Bergman: Vous faites référence dans votre mémoire à des mots, «élitiste», «corporatiste», et c'est des accusations qui sont vraiment sérieuses en relation de notre système professionnel, en relation de la perception du public de ce que, nous, les ordres professionnels sommes et leur tâche et les questions de protection du public.

Et, comme vous avez dit, et on est d'accord ici aujourd'hui qu'ici au Québec on a monté et on a un des meilleurs systèmes professionnels dans le monde et un système qui apporte beaucoup de fierté à nos professionnels et à tous nos citoyens. Est-ce que vraiment, dans cette question, il y a une question de corporatisme ou d'élitisme entre les ordres en question? Est-ce que c'est vraiment quelque chose que, vous, vous sentez?

M. Bernier (Alain): Entre nous autres, le système professionnel est très, très bien. Je suis au conseil d'administration du Conseil interprofessionnel du Québec, puis leur trésorier, ça fait que je pense que j'y crois parce que j'y participe pas mal.

Notre système professionnel protège très, très le public. Il est très bien centré sur la qualité de la formation initiale, la formation continue, la responsabilisation des professionnels, les mécanismes de contrôle, d'encadrement. C'est très, très bien quand on prend un groupe puis la relation entre ce groupe-là puis le citoyen. C'est très, très bien ça. Mais après ça, ça fait comme des petits silos un à côté de l'autre. C'est évident que... puis c'est propre à l'être humain de dire: Ça, c'est mon jardin, il est à moi. Ça fait que, quand tu es ingénieur, tu dis: L'ingénierie, ça m'appartient, surtout que c'est une loi exclusive. Tu n'aimes pas que les gens pataugent trop, trop là-dedans. Bon. C'est la même affaire pour un architecte, ça va être la même affaire pour un comptable, un avocat, puis toutes, toutes les professions. D'ailleurs, quelqu'un le soulevait tantôt, il faut changer un peu la mentalité que le jardin est 100 % à moi, parce qu'on a développé différents niveaux de formation, on a développé d'autres groupes de professionnels, il y a des chevauchements dans les compétences, puis on a vu tout le travail qui s'est fait dans le secteur de la santé. Ça a été un travail exemplaire. Les gens ont mis un petit peu de côté leur chasse gardée, puis leur corporatisme, entre guillemets, pour le bien collectif, le bien public. Bon. Il semble que, pour d'autres groupes, ce soit plus difficile de faire ce genre d'ouverture là.

M. Bergman: Vous avez, dans votre mémoire, exposé la question de délégation d'acte et les questions qu'une délégation veut dire une autonomie, une responsabilité au délégataire. Mais quelle est la responsabilité, si délégation est vraiment possible dans notre système professionnel, quelle est la responsabilité de l'architecte qui délègue des actes à une autre personne? Dans votre mémoire, il semble que vous dites qu'une délégation, ça implique une autonomie envers le récipiendaire d'une délégation, mais est-ce qu'il n'y aucune obligation, aucune responsabilité par l'architecte qui, en fait, à la fin de la journée, il signe, il scelle les plans? Car, en relation du public, le public veut savoir à qui ils se rendent dans la question de responsabilité, dans une question de faute, dans une question d'erreur, est-ce que l'architecte demeure responsable ou, dans une délégation, est-ce que ceux qui reçoivent la délégation assument la responsabilité et quelle est la protection du public et la clarté pour le public.

Le Président (M. Lachance): M. Bernier.

M. Bernier (Alain): Dans le 300 à 600 m², c'est plus une autorisation au concept qu'on veut. C'est être reconnu comme professionnel compétent, autonome. Donc, on prend l'entièreté: on a la relation avec le client, on signe le plan et devis, on a nos assurances professionnelles, puis on assume complètement nos responsabilités. Donc, on ne veut pas être en relation de subordination, on veut être en relation d'autonomie. C'est ça la logique du 300 à 600 m².

Pour tout le reste de l'industrie, les technologues sont condamnés puis les architectes malheureusement sont condamnés à vivre avec les technologues, c'est complémentaire. L'industrie est faite de même. Moi, je suis obligé de vivre avec puis, dans ce secteur-là, bien, c'est la dynamique qu'on va avoir à discuter bientôt sur la Loi sur les ingénieurs. Avec les pratiques modernes, l'organisation du travail moderne, bien, on a de moins en moins de supervision directe par-dessus l'épaule. Il va falloir même dans le secteur du 600 m² en montant, là, il y aurait des choses à regarder du côté de la distance de supervision. Puis, ce serait préférable que beaucoup de travaux se fassent par des professionnels parce que le professionnel universitaire ne peut pas tout vérifier, n'a pas le temps de tout voir, il y a des choses assez complexes. Ces éléments-là, il serait préférable qu'ils soient faits dans son équipe par un autre professionnel. Puis c'est d'ailleurs un modèle qu'on va proposer dans la Loi sur les ingénieurs qui est à venir.

n(10 h 50)n

M. Bergman: M. le président, vous dites dans votre mémoire que les technologues possèdent une large part de la formation des architectes dans les questions des techniques en construction, les codes d'inspection, direction des travaux. Est-ce que vous pouvez, pour cette commission, nous expliquer s'il n'y a aucune différence entre la formation des technologues et la formation des architectes, ceux qui ont leur maîtrise en architecture, qui ont les degrés d'université? Est-ce qu'il n'y a aucune différence de formation entre un technologue en architecture et un architecte dans la question de formation et d'éducation?

M. Bernier (Alain): C'est tout à fait évident qu'il y a une différence de formation, sans ça on ferait fausse route dans le système de l'éducation. On dépense de l'argent dans les universités pour rien. On est mieux de fermer ça, là. Ça coûte cher à diplômer le monde. C'est comme en médecine, là. Normalement, l'universitaire va être formé pour travailler sans filet, hein. Il va pouvoir travailler encadré par les normes, bien entendu, il est capable de comprendre, mais il va être capable de faire de la recherche, du développement scientifique, d'aborder des cas, là, qui sont moins classiques. Faire des palais des congrès là, ce n'est pas tellement normé, on n'en fait pas tous les matins, mais faire un six puis un huit logements, c'est assez connu comme technologie, hein. Il y en a pas mal au Québec, là. Donc, il faut regarder la complexité puis la grosseur de l'oeuvre. Ça fait que l'universitaire a un niveau de compréhension des principes, vocabulaire, outils mathématiques plus élevé. Les gens qui vont en architecture normalement font sciences de la nature comme niveau collégial préparatoire.

C'est un peu comme la relation ingénieur avec technologue dans le domaine du génie, les choses qui sont classiques, éprouvées, bien solutionnées, le technologue, comme 37r le dit, est capable de s'en charger de façon autonome, en faire un grand bout tout seul, puis les problèmes plus difficiles et moins évidents, bien, c'est le rôle de l'universitaire de prendre contrôle de ça, là.

M. Bergman: Est-ce qu'on peut retourner, M. le président, à la question qui a été demandée de vous par le ministre, les conséquences, jusqu'à ce jour, de la mise en application de l'article 16.1 dans le domaine de la construction?

Et, deuxièmement, on me dit qu'il y a une pénurie de technologues maintenant sur le terrain en matière de construction. Est-ce qu'il y a vraiment une pénurie de technologues? Et quels sont les effets de l'article 16.1 sur le terrain à ce jour?

M. Bernier (Alain): Bon, si on regarde du côté des effectifs, d'ailleurs dans le mémoire qu'on vous a fourni, en annexe, vous avez un extrait de la revue de l'Ordre des architectes. Eux constatent que leurs membres ont de la difficulté à fournir, parce que, là, actuellement, le 0-300 m² est déréglementé, mais tout de suite au-dessus de 300, les villes exigent ? elles appliquent la loi ? les villes exigent d'avoir des plans signés et scellés par architecte, puis eux-mêmes reconnaissent que les effectifs, là, c'est... leurs membres ont de la difficulté à prendre tous les petits mandats, hein. Bon.

Côté des technologues, en termes de disponibilité, c'est connu que, à cause de la démographie puis toutes sortes de raisons ? puis les sciences appliquées sont peut-être un peu moins attirantes pour une partie des jeunes là ? il y a des problèmes de recrutement dans le réseau collégial dans plusieurs disciplines. Il y a aussi, ça existe un peu tous ces problèmes-là quand on va en ingénierie comme dans d'autres domaines.

La construction va bien, mais on est dans des bonnes années. Dans les années quatre-vingt-dix, l'industrie allait mal, il y a moins de monde qui se sont inscrits. Donc, on a comme un trou, là. Dans la profession, là, il y a une période où il est rentré sur le marché moins de technologues, moins d'architectes, moins d'ingénieurs, parce qu'on entendait dire que la construction allait mal. Puis là, il y a des gens qui sont rendus à l'âge de la retraite, ça fait qu'il y a des départs massifs aussi dans ces métiers-là. Ça fait qu'effectivement le recrutement puis la main-d'oeuvre qui diplôme est rare.

C'est sûr que, moi, j'enseigne, en génie civil, les lois et règlements là, gestion et réglementation, puis on a mis ça en cours de sixième session parce qu'on préfère leur dire juste à la dernière session qu'avec ce diplôme-là ils ont le droit de ne rien faire. Comme ça au moins on les garde pendant trois ans. Ça sauve la job des profs, hum. C'est sûr, pour le recrutement, d'aller dire à des jeunes: Là, tu vas faire trois ans d'études puis tu vas avoir à peu près juste le droit d'être un employé docile à 12 $ de l'heure. C'est un peu dur sur le recrutement. Ça ne favorise pas le recrutement. Parce qu'il y a des gens aussi là qui veulent se développer une carrière personnelle, qui veulent être autonomes, avoir une pratique privée.

Le Président (M. Lachance): Alors, merci, MM. Bernier, Touchette et Legendre.

M. Bégin: ...

Le Président (M. Lachance): Oui. Bien, M. le député de Louis-Hébert, je vous avais demandé de me signaler votre intention.

M. Bégin: ...j'ai dit oui.

Le Président (M. Lachance): Ça n'a pas été très explicite. Alors, je vous accorde quelques minutes, mais il faudrait que, à l'avenir, ce soit beaucoup plus explicite.

M. Bégin: O.K. Je serai beaucoup plus explicite à l'avenir, M. le Président. Soyez-en certain.

Le Président (M. Lachance): Allez-y, M. le député.

M. Bégin: Merci, M. le Président.

M. Gautrin: Il faut apprendre à vivre l'opposition.

M. Bégin: Que voulez-vous.

M. Gautrin: Il n'a pas connu.

M. Bégin: Les difficultés de l'opposition. Alors, écoutez, vous avez présenté le point de vue des technologues, tout à l'heure nous allons entendre celui des architectes, et, nous, nous sommes les législateurs. Mais toute la loi, le Code des professions est basé sur une chose: c'est la protection du public. Ce pourquoi, il y a un Code des professions, c'est pour protéger le public. Et dans le cas des architectes et des technologues, le mot «protection du public» est un petit peu élargi par rapport à celui qu'on a dans les autres parce qu'on a la sécurité du public qui est en cause, la sécurité physique des personnes. Alors, il y a aussi dans la loi, dans le Code civil, de tout temps, ce qu'on appelait autrefois «le 1688», la responsabilité de l'architecte et des ingénieurs qui est très lourde parce que c'est une obligation de résultat, il y a une présomption qui est là, et c'est les seuls qui dans les professions ont un tel fardeau sur les épaules. C'est donc que le législateur, de tout temps... Et ça, ce n'est pas récent, ça date de 1880. Au moment du Code en 1867, on avait déjà ces concepts-là même s'ils n'étaient pas élaborés de la même manière. Donc, on a dit: Il faut qu'il y ait la sécurité du public. J'entends le débat, c'est de dire: Bon. Je pense que je peux faire ça. L'autre dit: Oui, mais moi, c'est à moi déjà, donc je le garde. À ce moment-là, à mon point de vue, nous, comme législateurs, on est en dehors de la coche. La vraie question qu'on devrait se poser, c'est: Est-ce que, d'abord, vous êtes prêts à assumer la même responsabilité que les architectes et les ingénieurs que l'on retrouve à l'article... c'est, à moins d'erreur de ma part, maintenant à 21 du Code civil....

M. Bernier (Alain): 2118.

M. Bégin: ... ? oui, c'est parce qu'il y a plusieurs articles, mais, en tout cas ? et avoir cette responsabilité-là parce qu'elle est au-delà de la simple responsabilité, elle va beaucoup plus loin, un? Deux, est-ce qu'on est capable de dire: La formation qui est donnée dans tel domaine permet d'assurer la protection du public, la sécurité du public ou pas? Troisièmement, est-ce qu'on est capable d'aller à ce qui est peut-être plus loin mais beaucoup plus flou à déterminer, c'est quoi, le patrimoine bâti? Est-ce que c'est ça l'intérêt public là-dedans? Est-ce que c'est le patrimoine puis la conservation, l'amélioration, la continuation du patrimoine au sens le plus noble du mot? Est-ce que vous avez quelque chose qui se rapproche de ça? Parce que, c'est beau faire un plan des boîtes à beurre, c'est magnifique, on peut vivre dedans, mais ça n'aide pas beaucoup le patrimoine bâti. D'ailleurs, on doit dire que, depuis 30 ans, 40 ans, il y a une amélioration depuis 10 ans, je dirais, mais pendant une vingtaine d'années, le patrimoine bâti y a goûté pas mal, hein. Les plans étaient faits par je ne sais pas qui, puis c'était réalisé par je ne sais pas trop quoi, mais ce n'est certainement un éloge à l'architecture que nous avons vécue.

Donc, est-ce que vous êtes en mesure de dire ? et là c'est, pour moi, fondamental ? que, ce que vous demandez, vous êtes prêts à accepter qu'il y ait une responsabilité inscrite dans le Code civil comme pour les architectes pour la partie que vous faites là et que vous avez, et que, là, on puisse le prouver objectivement la formation nécessaire, que vous avez également les repères que vous avez, là, que sont les techniques, le Code du bâtiment et tout ça, toute une série d'encadrements qui font que finalement c'est l'application ? je ne dirais pas bête et méchante ? mais c'est une application assez mathématique des choses? Alors, est-ce que c'est ça? Parce que la même question va être posée tout à l'heure à d'autres personnes.

M. Bernier (Alain): Oui. C'est exactement ça. Il faut comprendre que 1688 dans le temps, qu'il a été créé, l'article sur l'obligation de résultat des architectes et ingénieurs pour les vices de construction, il n'y avait pas encore de formation collégiale. Les technologues n'étaient pas constitués en ordre professionnel, ce qui arrivé seulement en 1980, hein, donc après les lois de 1973 sur la Loi sur les architectes, la Loi sur les ingénieurs. Donc, c'est un niveau professionnel encadré, reconnu par l'État. Bon. On serait fier, on serait content d'être dans 2118, ça roule. Enchâssez-nous là-dedans, on va être heureux. Rentrez-nous dans 2118, 2119, 2120, c'est dans ce coin-là. C'est 2118 pour les vices de construction majeurs, puis après ça, 2120, si je ne me trompe pas, pour les défauts mineurs d'un an. Puis, après ça, il y a des mécanismes de défense dans 2119, 2121, en disant que c'est la faute du client ou c'est la faute du sous-traitant. Là, on peut aller en cour puis on se garroche des tartes tout le monde pour ne pas payer la facture. Mais ça, tout le monde... Bon. Ça, c'est les assureurs qui s'occupent de ça, là.

n(11 heures)n

Mais on est prêt à prendre... C'est normal, l'Ordre, il a le même mandat, la même mentalité que les autres ordres. Il n'y a pas deux sortes d'ordres, là. Il n'y a pas les ordres corrects, puis les ordres moins corrects, les pratiques exclusives qui s'occupent du public, puis les autres, eux autres, ça n'a pas de conscience. Ce n'est pas de même que ça marche, là. Dans mon Ordre, on a la même discipline puis la même foi à protéger le public. Donc, je ne demanderais jamais... puis, en mon âme et conscience, je ne serais pas confortable de demander un champ de pratique où on ne peut pas garantir à 100 % que le travail va être bien fait, que la sécurité humaine... Dans le fond, le Parlement, là, peut organiser le règlement qu'on demande, il n'y aura pas de cadavre calciné, il n'y aura pas d'effondrement puis on ne sera pas à J.E. à toutes les semaines avec des catastrophes de construction.

Pour ce qui est du côté, là, de la valeur du patrimoine...

Le Président (M. Lachance): Rapidement, s'il vous plaît.

M. Bernier (Alain): Oui. Bon, pour le patrimoine, la qualité visuelle de ce qu'on construit, là, la majorité de ce qui est mal fait, c'est ce qu'on appelle la construction d'entrepreneurs, puis avec le 0-300 m² déréglementé, là, c'est fait par des dessinateurs de sous-sol puis un petit peu tout le monde qui n'ont pas de formation en conception architecturale. Puis ce n'est pas nous autres qui le dit, là; ça a été fait par des comités d'experts indépendants, ils ont analysé les formations. Puis les technologues en architecture, là, ça a plusieurs cours de dessin d'architecture, des cours d'atelier de design, des cours de rendu architectural, des cours de créativité. Ça apprend le métier, ça apprend le métier au complet, mais à un niveau pour l'appliquer de façon autonome sur les bâtiments plus petits. Ça ne fait pas des horreurs, ça ne fait pas des cages à poulets.

Le Président (M. Lachance): Merci, messieurs, pour votre présentation ici aujourd'hui. Merci.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Gautrin): Alors, on va recommencer nos travaux. C'est avec plaisir que nous accueillons ici l'Ordre des architectes du Québec. Alors, M. Lalonde, est-ce que vous... Claude Hamelin Lalonde, hein, c'est ça?

M. Hamelin Lalonde (Claude): Oui.

Le Président (M. Gautrin): Est-ce que vous pourriez présenter les personnes qui vous accompagnent, s'il vous plaît? Vous connaissez... vous êtes un expert des témoignages, alors vous le savez, vous avez une heure pour faire votre présentation, fractionnée en 20 minutes pour la présentation du mémoire, 20 minutes aux questions des parlementaires représentant le parti ministériel et 20 minutes pour les parlementaires de l'opposition.

Ordre des architectes du Québec (OAQ)

M. Hamelin Lalonde (Claude): Merci, M. Gautrin. Donc, M. le ministre, Mmes, MM. membres de la commission parlementaire des institutions, M. le président de l'Office des professions. Donc, à titre de président de l'Ordre des architectes, il me fait plaisir de vous présenter les personnes qui m'accompagnent aujourd'hui, soit: M. André Bourassa, à ma gauche, architecte, administrateur de l'Ordre et membre du groupe de travail du 5.1; à ma droite, M. Michel Gagnon, architecte et membre du groupe de travail; à l'extrême gauche, M. Jean-Pierre Dumont, secrétaire de l'Ordre; et nos conseillers juridiques, donc à ma gauche, Me Joli-Coeur, et à ma droite, Me Gilles Grenier.

L'Ordre des architectes du Québec est un ordre professionnel de 2 700 membres dont la principale fonction est d'assurer la protection du public en régissant la pratique de l'architecture au Québec. Pour remplir son mandat, l'Ordre des architectes a mis en place divers mécanismes qui assurent la compétence de ses membres, et ce, tant au seuil d'entrée de la profession que tout au long de sa carrière.

Les candidats à l'admission doivent compléter une formation universitaire de cinq ans, donc un niveau de maîtrise, effectuer un stage de formation professionnelle de 5 600 heures, l'équivalent de trois ans, et réussir les neuf parties de l'examen préalable à l'exercice de l'architecture en Amérique du Nord. Par ailleurs, tout au long de leur carrière, les architectes sont obligés à maintenir leurs compétences à jour. Leur pratique professionnelle fait d'ailleurs l'objet d'une surveillance générale de l'Ordre qui veille à ce qu'ils prodiguent un service conforme aux normes de compétences reconnues.

L'Ordre, comme je le disais, compte plus de 2 700 membres, quelque 650 stagiaires et 25 étudiants en cléricature qui sont en voie de rejoindre les rangs de la profession. Nos stagiaires proviennent en majeure partie d'une des trois écoles d'architecture au Québec, soit Laval, Montréal et McGill. Un peu plus de la moitié de nos membres oeuvrent à Montréal et 25 % du tableau de l'Ordre sont des femmes.

L'article 5.1 de la Loi sur les architectes est entré en vigueur le 5 décembre 2000 à la suite de l'adoption du projet de loi no 132 qui est venu actualiser le champ d'exercice exclusif des membres de l'Ordre des architectes du Québec. Il y figure l'obligation de déterminer, parmi les actes visés à l'article 16, ceux qui, suivant certaines conditions, peuvent être posés par des classes de personnes autres que des architectes. L'Ordre n'a pas tardé à agir et, dès le mois suivant, une réflexion s'amorçait au bureau de l'Ordre et, ensuite, par un groupe de travail.

Des travaux menés ces deux dernières années ont permis l'adoption d'un projet de règlement qui a été transmis à l'Office des professions du Québec en octobre 2002. En parallèle, les membres de l'Ordre et les organismes externes ont été invités à se prononcer sur le projet en question. C'est avec satisfaction que l'Ordre des architectes vous rencontre ce matin dans le cadre de cette commission parlementaire qui a pour but d'étudier le rapport du ministre sur la mise en application de l'article 5.1. Notre exposé portera sur notre démarche dans l'élaboration du règlement, les conséquences de la Loi sur les architectes, les éléments de l'article 5.1, avant de conclure sur cinq considérations.

Le processus de recherches, de travail et de consultations a été des plus exigeants, et nous sommes particulièrement fiers d'avoir réussi à préparer ce projet de règlement en moins de deux ans. En plus de mener une réflexion approfondie sur les conséquences de la nouvelle loi, nous avons procédé à une analyse détaillée et comparative d'une série de documents concernant aussi bien la définition des actes professionnels de l'architecte que la délégation d'actes que l'on retrouve dans la réglementation professionnelle. Vous trouverez une bibliographie de la documentation consultée à l'onglet 9 du document qui vous a été déposé.

n(11 h 10)n

À l'intérieur de cette démarche, nous avons procédé à l'étude et l'analyse des règlements adoptés par d'autres ordres professionnels. Cette étude nous a aussi révélé, avec grand étonnement d'ailleurs, l'écart important qui existait dans le délai d'adoption de certains de ces règlements. C'est ainsi que les infirmières ont proposé le règlement 23 ans après l'adoption de leur loi, les dentistes, comme les médecins d'ailleurs, huit ans après. Certains ordres tels que les optométristes, les podiatres, les médecins vétérinaires et les chimistes n'ont même jamais adopté un tel règlement, même s'ils ont toujours l'obligation.

Quelles sont les conséquences de la nouvelle loi? Deux ans après l'entrée en vigueur de la Loi sur les architectes, nous constatons que sur le plan juridique la loi est désormais claire, sans ambiguïté et qu'elle protège le public de façon satisfaisante. Le remplacement de la norme monétaire, celle dont on parle, du 100 000 de coûts de travaux, et ce remplacement de la norme par une norme d'usage, surface et de nombre d'étages a clarifié les enjeux et permis aussi de limiter les interprétations divergentes. La responsabilisation des municipalités a aussi permis un contrôle plus efficace de la loi.

Les modifications apportées à la loi en décembre 2000 avaient pour but d'assouplir et d'alléger le cadre réglementaire en mettant à jour une norme rendue désuète avec le temps. Et je rappelle la norme du 100 000. Les résultats de ces travaux ont mené à d'importants changements qui se sont traduits par la déréglementation complète de la maison unifamiliale isolée et des bâtiments résidentiels, commerciaux, d'affaires et industriels d'au plus deux étages et 300 m². En termes de référence, une superficie de 300 m², c'est un peu plus grand qu'un McDonald ou un Tim Horton. La zone déréglementée est donc très vaste et offre beaucoup de potentiel à celui ou celle qui veut exercer sans être architecte.

Sur le plan économique, nous réalisons qu'un an après l'entrée en vigueur de la nouvelle loi, 100 % du nombre de mises en chantier des maisons individuelles au Québec sont dans la partie déréglementée. En dollars, la valeur des permis de bâtir dans le résidentiel représente quelque 3,6 milliards sur un total de 7,5 milliards pour l'année 2001. On peut donc dire que 50 % de la construction au Québec est déréglementé.

Dans ce contexte, nous considérons que le premier objectif du gouvernement, d'assouplir le cadre réglementaire, a manifestement été atteint. Les données sur les mises en chantier et les statistiques sur la valeur des permis de bâtir qui échappent dorénavant au cadre réglementaire de la Loi sur les architectes le démontrent entièrement.

Le second objectif, d'améliorer les mécanismes de protection du public prévus par le Code des professions, est aussi atteint grâce à l'introduction dans l'article 16.2 de définitions claires et sans ambiguïté, ainsi qu'à l'article 17 de la loi qui confirme le rôle important des municipalités dans son application.

Quant au troisième objectif, d'accroître la coexistence de plusieurs disciplines et la mise en commun des compétences respectives, je vous dirais que c'est le fondement même du règlement proposé par l'Ordre. Par ce règlement, nous avons cherché à établir les bases d'une plus grande coexistence avec les autres intervenants, reconnus ou non par une loi, qui participent à l'élaboration d'un projet d'architecture ou qui en augmentent l'expertise.

Cette réalité a toujours fait partie de l'évolution de la pratique de l'architecture. Rappelons que traditionnellement, la formation des architectes se faisait dans les ateliers des bureaux d'architectes et que de grands architectes, tels que Frank Lloyd Wright, sont issus de cette tradition.

Dans le projet de règlement, les étudiants de l'Ordre ou de l'Institut royal d'architecture du Canada sont ceux qui peuvent accéder à la pratique autrement que par un programme universitaire. J'ajouterais que nous sommes la seule profession qui avons cette distinction. Il y a donc, dans ce projet, non seulement une coexistence avec d'autres disciplines, mais surtout une ouverture pour les personnes qui travaillent, au sein des bureaux d'architectes, à devenir elles aussi architectes. Et je vous dirais que les technologues sont les premiers intéressés par ce programme.

Revenons à l'article 5.1. Donc, l'article 5.1 nous obligeait à répondre à trois éléments précis, soit de déterminer les actes visés par l'article 16, ceux qui, suivant certaines conditions prescrites, peuvent être posés par des classes de personnes autres que des architectes. Donc, trois choses à déterminer: les actes, les classes de personnes et les conditions.

Les actes décrits à l'article 16 ne sont pas de signer et sceller des plans et devis, mais bien de concevoir, de préparer des plans et devis pour la construction, l'agrandissement, la reconstruction ou la démolition d'un édifice. Cette réalité nous a donc obligés à décortiquer les services de l'architecte à l'intérieur du règlement 5.1. Avant d'autoriser d'autres personnes à poser des actes, il fallait, en premier, définir les actes professionnels de l'architecte, tâche difficile du fait qu'il fallait, d'une part, identifier et établir une liste des actes reliés au service d'architectes et, d'autre part, s'appuyer sur une référence reconnue.

Après avoir consulté plusieurs documents comme des contrats types ou le Manuel canadien de pratique en architecture, nous avons décidé de retenir comme canevas un décret du gouvernement du Québec intitulé Tarifs d'honoraires pour services professionnels fournis au gouvernement par les architectes.

En plus de son caractère officiel, ce décret du gouvernement du Québec a l'avantage de décrire tous les actes reliés aux services rendus par l'architecte, et de les regrouper en six catégories distinctes, et même de reconnaître certaines classes de personnes associées à nos services. De ces services, on y retrouve les services consultatifs; les études préparatoires; le concept de même que les plans et devis préliminaires; les plans et devis définitifs; la cinquième catégorie englobe les services durant la construction, ou communément appelé «surveillance de chantier»; et la sixième décrit les services supplémentaires rendus par l'architecte à diverses étapes du projet.

Cette approche intègre l'ensemble des services rendus par l'architecte et correspond adéquatement au rôle de l'architecte à chacune des étapes d'un projet. Évidemment, chaque projet d'architecture, du plus simple au plus complexe, fait appel à des actes et des tâches spécifiques dans la préparation des documents contractuels qui varieront effectivement selon l'importance ou le caractère particulier d'un projet.

Pour déterminer les classes de personnes, l'Ordre s'est inspiré du Manuel canadien de pratique de l'architecture publié en 1999. Ce document, préparé sous la direction et la supervision de l'Institut royal d'architecture du Canada, a été rédigé en collaboration avec l'Ordre et tous les organismes provinciaux réglementant la profession d'architecte au Canada. Cette liste de collaborateurs est indiquée à l'annexe I des notes explicatives que vous trouverez à l'onglet 3 de votre document. Comme vous pourrez le constater, cette liste est très diversifiée puisqu'un projet, comme on l'a déjà dit, exige souvent des compétences multiples.

n(11 h 20)n

Tout comme un technologue en architecture participe à la production de dessins et de plans, d'autres collaborateurs peuvent se joindre à l'équipe de réalisation d'un projet. Mentionnons, par exemple, le spécialiste en quincaillerie, le spécialiste en ascenseur, l'estimateur agréé, le scénographe, dans le cas d'une salle de concert, le designer d'intérieur, l'urbaniste ou l'ingénieur, avec qui nous collaborons sur la majeure partie de nos projets.

L'Ordre a jugé nécessaire d'effectuer là aussi un regroupement de classes de personnes selon leur formation, leur expérience ou leur statut par rapport à l'architecte responsable du projet. On a ainsi déterminé deux groupes de classes de personnes, soit le personnel de l'architecte et les consultants externes.

Je vous rappelle rapidement les groupes et les classes de personnes, donc: le personnel de l'architecte; le personnel de l'architecte avec 10 ans d'expérience et plus; le personnel de l'architecte remplissant les conditions d'admissibilité à une profession ou à un métier reconnu par la loi; les stagiaires; les étudiants de l'Ordre à la cléricature; les personnes inscrites au programme de cours de l'Institut royal d'architecture du Canada; les consultants externes reconnus par une loi; et les consultants externes non reconnus par une loi. À titre d'exemple, les technologues en architecture, les ingénieurs, les urbanistes peuvent se retrouver dans les catégories personnel reconnu par une loi ou consultants externes reconnus par une loi. Les designers d'intérieur, eux, se retrouvent à la catégorie des consultants externes non reconnus par une loi.

La dernière condition, cette dernière exigence, est celle d'établir selon quelles conditions d'autres personnes que les architectes pourront poser des actes. Comme d'autres règlements adoptés en vertu des lois professionnelles, l'Ordre a déterminé sa surveillance comme condition à l'autorisation d'acte. Dans le projet de règlement, on retrouve deux formes de surveillance: la surveillance immédiate et la surveillance à distance.

Notre projet définit la surveillance immédiate comme celle qu'effectue l'architecte sur le travail d'une personne de telle sorte que l'architecte a pleine connaissance et pleine maîtrise du travail exécuté. Cette surveillance immédiate se traduit bien souvent par la présence de l'architecte sur les lieux de travail, tout comme le fait une pharmacienne ou un pharmacien pour ses employés ou un dentiste pour l'hygiéniste dentaire.

Par opposition, la surveillance à distance est celle où l'architecte peut être consulté en tout temps et en vertu de laquelle il s'assure de la conformité des informations qui lui sont transmises. C'est le cas, par exemple, d'un acousticien ou d'un scénographe qui prépare des plans pour une salle de spectacle qui seront intégrés aux plans de l'architecte.

Comme on peut le voir, le règlement ne fait référence qu'à des actes et des tâches réalisés sous la responsabilité de l'architecte qui, dans le cadre d'un projet, agit comme maître d'oeuvre.

Puisque les services en architecture s'inscrivent dans un processus d'ensemble, une réalité demeure: l'architecte, tout comme l'ingénieur, a une responsabilité de résultat, en vertu du Code civil, pour les immeubles qu'il a conçus, les conseils et les expertises qu'il a donnés, les plans qu'il a préparés ou les travaux qu'il a surveillés. Dans ces circonstances, l'Ordre juge inconcevable de permettre que des actes soient délégués sans cette obligation de surveillance.

En terminant, M. le Président, voici cinq considérations auxquelles nous arrivons suite à la préparation de ce projet de règlement.

L'Ordre juge qu'il est fondamental de conserver les balises du champ de pratique exclusif telles qu'elles sont actualisées dans la Loi sur les architectes. Ces balises de 300 m² et de deux étages représentent effectivement un seuil minimum pour assurer la protection du public. Cette exigence correspond d'ailleurs à celle qui existe dans la Loi sur la sécurité dans les édifices publics, où l'intervention d'un architecte est obligatoire. Cette obligation doit être maintenue puisque en termes de protection du public, les risques au fil du temps n'ont pas changé.

L'Ordre réalise aussi que, sur le plan économique, près de la moitié de la valeur de la construction échappe à la Loi sur les architectes. Plus de 3,6 milliards de travaux de construction au Québec peuvent être faits par d'autres que des architectes, dont les 400 technologues spécialisés en architecture qu'on compte au Québec. La déréglementation actuelle englobe 100 % des mises en chantier, des maisons individuelles au Québec, peu importe la valeur de celles-ci. De plus, tous les bâtiments de moins de 300 m² dans les secteurs commerciaux, industriels et d'affaires sont aussi déréglementés, ce secteur déréglementé auquel peuvent s'adonner les 400 technologues en architecture, et je le répète: secteur de 3,6 milliards.

Troisièmement, l'Ordre constate qu'il est impossible de concilier les exigences d'accès à la profession d'architecte imposées à nos stagiaires en architecture, exigences uniformes en Amérique du Nord que... de concilier, dis-je, ces exigences avec les revendications d'un groupe ou même d'une industrie qui oeuvre dans le domaine de l'architecture sans être architecte, et surtout sans fournir les garanties de formation, de compétence, d'éthique et d'imputabilité qui vont de pair avec le fait d'être architecte. L'Ordre des architectes a compris et comprend toujours que le projet de loi n° 132, tel qu'il a été adopté, répondait aux attentes du législateur en matière d'assouplissement réglementaire.

De plus, l'Ordre croit...

Le Président (M. Gautrin): ...

M. Hamelin Lalonde (Claude): J'ai fini, il me reste une page.

Le Président (M. Gautrin): Ah bon. O.K. Parfait. Compte tenu de l'importance de votre témoignage, je ne voudrais pas du tout vous interrompre. Mais seulement, est-ce qu'il y a consensus pour qu'on le laisse...

Une voix: ...

Le Président (M. Gautrin): Merci.

M. Hamelin Lalonde (Claude): Donc, je reprends. Merci. L'Ordre croit, tout comme nos conseillers juridiques nous l'ont précisé, que l'article 5.1 de la Loi sur les architectes n'est pas l'outil approprié pour créer de nouveaux champs de pratique exclusifs ni de nouveaux titres réservés.

Enfin, l'Ordre considère que le projet de règlement proposé répond en tous points aux trois prémisses de l'article 5.1 de la Loi sur les architectes. Ce règlement va dans le sens de l'intérêt public qui a droit à une architecture de qualité et à des bâtiments qui seront sécuritaires et agréables à vivre.

Alors, nous sommes heureux et fiers du projet de règlement déposé. Ce règlement va dans le sens d'une meilleure pratique de l'architecture, ce qui est dans l'intérêt de toutes les Québécois et de tous les Québécois.

En terminant, je remercie tous ceux et toutes celles qui ont collaboré à la préparation de ce projet de règlement, et je vous remercie de votre attention et de votre écoute.

Le Président (M. Gautrin): Je vous remercie, M. Hamelin Lalonde. Et je vais passer la parole maintenant au député de Drummond, qui est ministre de la Justice, responsable des lois professionnelles. M. le député de Drummond.

M. Jutras: Merci, M. le Président. Alors, bienvenue, M. Lalonde, à cette commission. Je souhaite la bienvenue aussi à ceux qui vous accompagnent, et merci pour votre présentation.

Ma première question, M. le Président, je voudrais savoir, quand on regarde encore une fois les deux étapes qu'il y a eu, soit l'étape de 1996, qui a été le revirement jurisprudentiel, et, par la suite, le projet de loi, la loi n° 132 qui a été adoptée à l'an 2000, sur le terrain, qu'est-ce que vous avez vu comme différence à partir de ce moment-là? Est-ce que, pour les membres de l'Ordre des architectes, il y a eu une différence sur le terrain?

M. Hamelin Lalonde (Claude): Une différence sur quel aspect? L'aspect...

n(11 h 30)n

M. Jutras: Bien, vous étiez présent, j'ai posé la même question au niveau de l'Ordre des technologues. Eux, me disent que, bon, sur la plan du marché, ça a fait une énorme différence, certains technologues n'ont plus eu de travail, ils se sont retrouvés en chômage. Alors, moi, ce que je veux savoir: Du côté des architectes, qu'est-ce que ça a représenté? Est-ce qu'il y a une différence ou, pour vous, le marché est demeuré tel quel, est demeuré le même?

M. Hamelin Lalonde (Claude): M. le ministre, je vous dirais que, du côté économique, je ne peux pas répondre à ça. Mon mandat est de réglementer la profession. Du côté réglementaire, je peux vous dire que le nouveau projet de loi est réellement une amélioration considérable. Vous savez que le 100 000 était une norme qui fixait, dans le temps, une norme monétaire, et que cette norme monétaire là, on l'a. On a utilisé d'autres balises et je vous assure, M. le ministre, que ça a été une amélioration incroyable pour la sécurité du public. Maintenant, c'est clair: Qu'est-ce qui est fait par un architecte ou qu'est-ce que ne prend pas un architecte?

Du point de vue économique, ce que je vous ai mentionné, ce sont des statistiques et, au-delà de ça, je ne peux pas vous dire quel est l'avantage économique ou non de mes membres.

Le Président (M. Gautrin): M. le député de Drummond.

M. Jutras: Et vous nous parlez, avec la loi n° 132, d'une amélioration de la protection du public. Est-ce que, encore là, vous avez des données à ce chapitre? Est-ce que vous pouvez nous dire: Bien, voici, avant, quelle était la situation, voici en quoi le public était menacé et voici les problèmes qu'il y a eus et, maintenant, qu'est-ce qu'il en est de cette amélioration?

Le Président (M. Gautrin): M. Gagnon, c'est vous qui répondez?

M. Gagnon (Michel): Oui. Bien, vous savez, avant décembre 2000, ce qui se passait sur le terrain, c'est qu'il y avait beaucoup de pratiques qui étaient non conformes à la loi qui existait autrefois, c'est-à-dire le 100 000 $. Donc, il y avait un exercice sur le terrain; tout le monde ? beaucoup de gens, en tout cas ? dérogeait à la loi et, nous, en tant qu'Ordre des architectes, on avait de la misère à faire appliquer la loi compte tenu du grand nombre de gens qui outrepassaient le 100 000 $ en termes de construction, d'une part. D'autre part, il faut voir aussi comment ça peut s'appliquer sur le territoire québécois en fonction des régions, c'est-à-dire que le coût d'une construction à Hull, à Montréal, à Québec puis à Gaspé varie terriblement. On peut reprendre ça à l'inverse: c'est que ça coûte moins cher à Gaspé puis plus on monte vers Hull, plus ça coûte cher. Alors, la valeur du 100 000 $ était d'autant plus mise en question en fonction de cet aspect-là.

Alors, qu'est-ce que ça a fait sur le terrain? C'est que c'est venu ? comment dire? ? rendre conforme ce qui était pratiqué de façon non conforme avant. C'est ce qui s'est passé en réalité.

Le Président (M. Gautrin): M. le député de Drummond.

M. Jutras: Mais, par contre, si on parle de sécurité ou si on parle de protection comme telle, là, vous dites: Oui, ça a clarifié les choses à partir des textes de loi. Mais moi, je vous demande, sur le terrain, est-ce que vous étiez à même de constater effectivement une menace pour le public? Puis est-ce que vous l'avez constatée? Puis avez-vous des cas?

Le Président (M. Gautrin): M. Hamelin Lalonde.

M. Hamelin Lalonde (Claude): Je pense que si M. Joli-Coeur veut...

Le Président (M. Gautrin): Donc, M. Bourassa? Me Joli-Coeur.

M. Joli-Coeur (André): Votre question, en pratique, est juridique, M. le ministre. Avant l'existence de l'article 17, il était très difficile de faire le contrôle sur le champ du respect de la loi qui a pour but de protéger le public. Alors, faisons l'équation que la loi est là pour protéger le public: nous avions une difficulté à protéger le public parce que l'article 17, deuxième paragraphe, n'était pas là; l'article 17, deuxième paragraphe, qui a été mis de l'avant par votre gouvernement, a réglé une grosse partie du problème et, en ce sens-là, la protection du public s'est trouvée décuplée.

Le Président (M. Gautrin): Merci. M. le député de Drummond.

M. Jutras: Oui. Lorsque vous nous avez dit, M. Lalonde, que, avec la norme du 300 m², il y avait 50 % de la construction, des chantiers qui étaient déréglementés ? c'est bien ce que vous nous avez dit? ? je comprends que, quand vous parlez du 50 % de la construction qui est déréglementée, vous incluez à l'intérieur de ça la construction d'établissements d'affaires puis d'établissements commerciaux et d'établissements industriels et comprenant donc aussi le résidentiel. C'est tout le marché que vous incluez?

Le Président (M. Gautrin): Qui répond? Me Joli-Coeur.

M. Hamelin Lalonde (Claude): Statistiquement parlant...

M. Joli-Coeur (André): Je suis dépositaire des statistiques, ce sont des statistiques de l'État, que vous retrouvez à l'onglet 7 du document qui est devant vous, et vous retrouvez les statistiques qui viennent tantôt de la SCHL, tantôt de Statistique Canada. En valeur ? il faut prendre les valeurs en bas ? la moitié, en valeur, de la construction au Québec est déréglementée. La moitié, et les statistiques séparent mal, malheureusement, les deux logements puis les quatre logements. Ce dont je vous parle, c'est ce dont nous sommes certains avec le tableau statistique. Alors, ce dont nous sommes certains, c'est le résidentiel, et c'est ça qui est exclu et qui est la moitié de la construction au Québec, qui a été réglementée, qui ne l'était pas avant, qui ne l'était pas. C'était la norme du 100 000, M. le ministre.

Et quant aux mises en chantier, bien, c'est la même chose.

M. Jutras: ...

M. Joli-Coeur (André): Bien, onglet 7, M. le ministre.

Le Président (M. Gautrin): M. le ministre.

M. Hamelin Lalonde (Claude): M. le ministre, c'est que...

Le Président (M. Gautrin): M. Hamelin Lalonde.

M. Hamelin Lalonde (Claude): ...dans la catégorie résidentielle, on regroupe ce qu'on appelle la résidence unifamiliale et on regroupe aussi l'unifamiliale jumelée, et on regroupe aussi le multifamilial. Donc, il faut faire une ligne quelque part qui n'est pas difficile. Et même, les statisticiens, je ne sais pas si... mais nous, ce qu'on a pris, les valeurs sûres qu'on a été capables d'établir nous amènent près de 50 %.

Je vous rappelle aussi que les statistiques qu'on a viennent simplement des municipalités qui ont 10 000 de population et plus. Toutes les autres municipalités ne sont pas là. Donc, par extension, sans vouloir faire de la statistique, on présume que, si les municipalités sont plus petites, le champ de 300 m² est d'autant plus grand à l'intérieur de ces municipalités-là, petits commerces, petites caisses populaires, petites banques, donc... et cette proportion-là n'est pas tenue dans les statistiques.

Donc, comme on vous dit, on a ramassé toute l'information, les statistiques, et on arrive, par approximation, à une valeur d'à peu près 50 %.

Le Président (M. Gautrin): M. le ministre.

M. Jutras: Mais je reviens là-dessus parce que je trouve que ce n'est pas clair là. Votre 50 %, c'est 50 % de quoi? Êtes-vous en mesure de me le dire?

M. Hamelin Lalonde (Claude): C'est toute la construction.

M. Jutras: Est-ce que c'est de tous les chantiers de construction?

M. Hamelin Lalonde (Claude): Oui.

M. Jutras: C'est de tous les chantiers de construction.

M. Hamelin Lalonde (Claude): Tous les chantiers.

M. Jutras: Incluant, là, les grands chantiers et incluant les établissements d'affaires, les établissements industriels, etc.

M. Hamelin Lalonde (Claude): Oui.

M. Jutras: C'est ça que vous nous dites?

M. Hamelin Lalonde (Claude): Oui.

Le Président (M. Gautrin): Merci.

M. Joli-Coeur (André): 3,6 milliards déréglementés, M. le ministre.

Le Président (M. Gautrin): Sur un 7 milliards qui l'est, à peu près.

M. Joli-Coeur (André): Onglet 7, en valeur. En mises en chantier, c'est plus grand, évidemment, parce qu'il y a plus de mises en chantier de petits que de gros.

Le Président (M. Gautrin): Est-ce que vous avez terminé, M. le ministre?

M. Jutras: Non, je n'ai pas terminé.

Le Président (M. Gautrin): Alors, continuez, M. le ministre.

M. Jutras: Je voudrais savoir: Est-ce que sur le terrain finalement, l'Ordre des architectes, les membres architectes, là, vous n'avez pas eu certaines difficultés depuis l'adoption de la loi n° 132 quant au fait de rendre les services? Et je m'explique. Je veux vous référer au bulletin d'information de l'Ordre des architectes du Québec là, le bulletin Esquisses, c'est celui de novembre, décembre, janvier 2002-2003, le volume 13, no 5, où on y lit là... C'est Claude Bonnier, enquêteur, qui dit: Le bilan... Et il parle là du bilan, suite à... après deux ans de cette nouvelle loi là. Il dit: «Le bilan n'est toutefois pas tout à fait rose: en effet, nous avons appris que des citoyens ont eu du mal à intéresser un architecte à leurs projets. Ces projets, probablement moins alléchants pour toutes sortes de raisons, font néanmoins partie du champ d'exercice exclusif aux architectes et la demande de documents produits par un architecte provenait de municipalités. La situation est un peu gênante: un inspecteur municipal exige à un citoyen un document produit par un architecte et le citoyen est incapable d'en trouver un qui veuille faire le boulot.» Et l'auteur dit: «Ces situations sont malheureuses, d'autant plus que la Loi sur les architectes est une loi d'ordre public qui vise à protéger les citoyens en leur assurant des édifices sécuritaires qui ont été conçus par les seules personnes qui possèdent les compétences nécessaires: les architectes.»

Alors, est-ce que, finalement, on ne se retrouve pas avec un problème, et, à partir de ça, un constat qui est fait là? J'imagine que c'est un des vôtres, ça, là, Claude Bonnier. Est-ce qu'on ne se retrouve pas avec un problème puis est-ce qu'il n'y aurait pas lieu effectivement de penser à un partage de compétences quand on voit ça? Si effectivement c'est la situation et que les architectes ne peuvent pas répondre à la demande?

Le Président (M. Gautrin): M. Bourassa.

M. Jutras: Ils ne peuvent pas répondre à la demande et, aussi, il y a des choses qui peuvent être moins intéressantes pour vous autres.

Le Président (M. Gautrin): M. Bourassa.

n(11 h 40)n

M. Bourassa (André): C'est clair qu'il y a différents types d'architectes. C'est clair qu'il y a différents types de projets aussi. Et, d'autre part, on a vécu une situation conjoncturelle assez intense au niveau économique ? vous en êtes sûrement conscients, et très heureux aussi ? depuis deux ans environ, notamment due, entre autres, au programme d'accélération des dépenses du gouvernement du Québec qui a créé, sur le marché de la construction touché par les architectes, d'intenses activités. Cependant, il n'y a pas seulement les architectes qui sont touchés par cette situation économique plus intense récente. Les entrepreneurs de travaux routiers vous diront aussi qu'ils ne peuvent pas répondre à plus que tant de milliards de travaux par année. Certaines firmes d'ingénieurs nous disent aussi les mêmes commentaires.

Donc, c'est clair qu'il y a là-dedans une période d'adaptation aussi, suite à la loi révisée. C'est une période d'adaptation tout à fait normale, adaptation de la part des architectes, de certains architectes qui sont moins habitués à certains types de projets, mais adaptation aussi de la part des officiers municipaux qui ont eu à s'acclimater avec ça. On a eu toutes sortes de demandes, effectivement, dans nos pratiques récemment par rapport à ça, mais c'est une période d'adaptation tout à fait normale dans tout changement de cadre réglementaire, je pense.

Comprenez bien que les architectes n'ont pas qu'une pratique d'hôpitaux, d'écoles ou de rénovation de parlements: les architectes ont une pratique très diversifiée. Le marché résidentiel touche plusieurs architectes quand même de la part du marché réglementé. C'est clair cependant que, à l'occasion, certains technologues au chômage ? s'il y en a, je ne les ai pas rencontrés, soyez-en certain ? il peut arriver que la musique enregistrée ? vous comprendrez qu'on parle des plans à répétition ? ça peut enlever un certain marché aux technologues mêmes, puisque les petits projets sont souvent répétés à partir des mêmes plans.

M. Gagnon (Michel): Si vous me permettez de rajouter quelque chose. Moi, j'ai plusieurs bureaux au Québec, en fait, on en a quatre dont un dans le bas du fleuve. Actuellement, on cherche des techniciens, des technologues, pour remplir des postes, et on a de la misère à en trouver, d'une part, parce que les gens ne veulent pas aller travailler en région ? c'est bien connu, je pense bien ? quoiqu'il y a déjà un cégep là-bas qui forme des technologues en architecture, bon, d'une part. D'autre part, quand vous posez la question, en tout cas, je ne veux pas vous mettre des paroles en bouche, mais vous semblez dire que l'architecte qui a refusé de faire un mandat selon M. Bonnier dans le rapport de Esquisses, ce serait uniquement...

Une voix: ...

M. Gagnon (Michel): Oui, oui. Non, non. Je comprends très bien. Je n'ai pas de problème avec ça. Juste pour faire une explication sur ce qui est écrit dans le texte, c'est que l'architecte ou le bureau d'architectes qui doit rendre ces services-là doit aussi être en mesure d'avoir du personnel à l'interne. Son personnel à l'interne, toujours en vertu de 5.1, ça peut être toutes sortes de personnes, entre autres, des technologues, et il se peut que, dans les circonstances ou dans le cas présent, le bureau qui a été ou les bureaux qui ont été demandés pour faire l'ouvrage, peut-être avaient-ils un problème de recrutement de personnel aussi, dépendant de l'endroit où la question a été posée. Est-ce qu'on est en plein coeur de la ville de Montréal qui est en plein boom actuellement? Est-ce que les bureaux de la ville de Montréal, qui sont pleins d'ouvrage, puis heureusement ? puis pas seulement les bureaux d'architectes, probablement beaucoup d'autres bureaux aussi ? peut-être ont-ils un problème de ressources, effectivement, sur le terrain, de ressources disponibles à Montréal? Est-ce que c'est le cas ailleurs? Il faut regarder tout ça dans un contexte et mettre la question en perspective. Voilà.

M. Jutras: Dernière question, parce que je vois que mes collègues ont des questions aussi. Je comprends de votre position, et le ton du président était ferme, alors je comprends qu'il n'y a aucune ouverture de votre part à la proposition que nous ont faite les technologues juste avant vous, là ? vous avez entendu leur présentation ? en disant: Bien, nous, de 300 à 600 m², on a compétence pour oeuvrer dans ce champ-là et on voudrait partager ce champ-là avec les architectes. Alors, je comprends que, de votre part, il n'y a aucune ouverture pour le partage de ce champ-là.

M. Hamelin Lalonde (Claude): Je vous dirais qu'il faut voir la dynamique de votre question dans un autre angle, si vous me le permettez, jamais oublier que, là, on regarde l'espace au-dessus du 300 m², jamais en dessous. Si vous me permettez un exemple corporel: le 100 000 représentait le poignet. On a augmenté ici, et tout ce qu'on regarde, ce n'est pas ce qui est en bas du poignet, c'est ce qu'il y a en haut.

Sur le terrain, vous savez que les services qu'on doit faire, que ce soient des services de dessins ou des service d'architecture, ça prend du monde. Ça ne veut pas dire que c'est réglementé: quand c'est réglementé, ça prend absolument un architecte. Mais en bas, si vous voulez faire votre résidence et vous décidez de prendre un technologue, vous décidez de prendre un architecte, il faut qu'il y ait des professionnels, et aussi des non-professionnels, mais il faut qu'on remplisse aussi la commande. Ça ne veut pas dire qu'au-dessus ou au-delà du seuil on ne peut pas répondre à la commande: il faut répondre aux deux. Et je vous dirais que, même si c'est déréglementé, je n'ai jamais eu, au niveau de ma pratique, jamais tant de demandes à faire de l'unifamilial résidentiel. Je ne comprends pas, mais je suis obligé de fournir ce service-là.

Et, d'un autre côté, pour répondre à ce que M. Beaumier disait, je pense ? et je le fais dans mon bureau ? actuellement, on a de la difficulté à avoir des gens qui vont venir compléter ou vont nous permettre de répondre aux demandes. J'aime mieux, éthiquement, dire à mon client: Je m'excuse, actuellement, si vous voulez avoir votre projet, j'aime mieux vous référer à un autre, je ne peux plus, je ne suis pas capable de faire l'ouvrage. Je pense que, dans une dimension telle, c'est plus honnête et c'est plus professionnel de le faire comme tel. Mais jamais oublier que, même si c'est déréglementé, si les gens demandent autant aux technologues qu'aux architectes, en dessous du seuil, on doit fournir les services.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Duplessis.

M. Duguay: Oui, alors, merci beaucoup, M. le Président. Alors, messieurs, je désire vous remercier, bien sûr, pour votre présentation. Et, M. Lalonde Hamelin, tantôt, vous avez fait référence, dans votre exposé, à la place que vous faites aux technologues. Et quand on regarde le document que vous nous avez déposé à l'onglet 3, on voit un peu, on lit de quelle façon. Sauf que ma question, c'est beaucoup plus sur l'onglet 2 où, là, on voit dans le tableau synthèse, là, le rôle de chacun. Et ma question est fort simple, c'est: À quel endroit on retrouve le technologue là-dedans, dans les cinq carreaux qu'il y a là?

M. Hamelin Lalonde (Claude): Je demanderais à M. Gagnon de répondre, s'il vous plaît.

Le Président (M. Lachance): M. Gagnon.

M. Gagnon (Michel): Oui. D'abord, les technologues, on les retrouve évidemment dans la colonne des consultants externes reconnus par une loi. Quoi qu'en dise l'Ordre des technologues, à mon sens, à moins que je ne me trompe, le Code des professions, s'il n'est pas une loi, en tout cas, on peut considérer qu'il est assimilé à une loi. Et, quelque part, si le Code des professions ne reconnaît pas les technologues ? et si je ne me trompe pas, c'est en vertu de l'article 37r, à moins que je sois en quelque part, dans mon alphabet, mêlé ? je ne vois pas comment les technologues peuvent prétendre qu'on n'a pas reconnu qu'ils étaient des consultants externes reconnus par une loi. Je pense que, en quelque part, on essaie de parler un langage nord-américain, mais on ne parle pas le même langage. Alors... Mais, dans notre esprit à nous, de bonne foi, on intègre les technologues dans la colonne des consultants externes reconnus par une loi.

M. Hamelin Lalonde (Claude): Comme ils pourraient l'être aussi à l'intérieur, comme un ingénieur pourrait travailler à l'intérieur d'un bureau d'architecte.

Le Président (M. Lachance): Merci. M. le député de D'Arcy-McGee et porte-parole de l'opposition officielle.

M. Bergman: Merci, M. le Président. M. Hamelin Lalonde, M. Bourassa, M. Gagnon, Me Grenier, Me Joli-Coeur, Me Dumont, merci pour votre présentation, c'est toujours clair, et on vous remercie pour votre présentation. On voit qu'il y a une divergence d'opinions ce matin, et laissez-moi aller à votre conclusion où vous dites que la balise de 132, vous voulez la maintenir et encore surtout la question du 300 m² et le 600 m².

Pouvez-vous expliquer pour cette commission exactement comment la protection du public serait affectée si la balise n'était pas 300 m², mais 600 m²? Et vous faites référence à la formation, l'éthique et la crédibilité au dessus du 300 m², si la balise pour les technologues était jusqu'à 600 m². Pour être clairs, pour nous qui ne sommes pas des architectes ou des technologues, pouvez-vous nous expliquer où il y a le manque de formation, où il y a le manque d'éthique, où il y a le risque pour le public, où il y a le manque de protection du public? Et aussi, vous pouvez me dire, sur le plan économique,

n(11 h 50)n

M. Hamelin Lalonde (Claude): C'est tout un menu. Bon, je vais essayer de...

M. Bergman: Je vous demande la question, car je sais que dans...

M. Hamelin Lalonde (Claude): Une par une, s'il vous plaît.

M. Bergman: Dans tous nos entretiens, toutes vos présentations, M. Hamelin Lalonde, étaient toujours très professionnelles, très claires, avec beaucoup de précision. Et je sais que, nous, les commissionnaires et le ministre, on peut compter sur beaucoup des faits pour nous aider pour faire une décision qui serait éclairée.

M. Hamelin Lalonde (Claude): Bon, si je me souviens bien, là, votre première question était une question au sujet du 300 m², deux étages. Je rappellerais qu'on fait toujours référence aussi aux 600 m². La grande nuance qui a été faite par rapport à d'autres provinces, c'est qu'ils ont établi une limite par rapport à ce qui est établi dans le Code de la construction, petits bâtiments, et la partie 3 ? pour les gens plus techniques ? donc la partie 9, petits bâtiments, et, si vous êtes plus que 600 m², l'application va se faire selon la partie 3 qui est beaucoup plus exigeante.

Donc, les provinces ou les États américains qui n'ont pas ces mêmes balises là... Et, particulièrement au Québec, on avait une grande différence. Le législateur avait reconnu avec la loi S-3, avait déterminé qu'est-ce que c'était, un bâtiment, un édifice public. Et, dans le contexte de l'allégement, nous, on reconnaissait... le législateur avait dit: Au-delà de 300 m², deux étages, bâtiment commercial, industriel ? les habitations, aussi, multifamiliales étaient comprises là-dedans ? ça prend l'intervention d'un architecte.

Donc, à partir de cette particularité de notre législation, on a établi que le risque se situait là et que le risque, dans le temps, n'avait pas changé. On a beau nous donner... Si je vous donne un exemple de terrain, si vous me le permettez: ce n'est pas parce que nos voitures sont plus performantes qu'on peut changer une zone de 30 km lorsqu'on est dans une zone d'école et que je pourrais probablement ou peut-être me promener 60 ou à 70 parce que ma voiture a des freins particuliers, toute une technologie.

Il a fallu, quand on a étudié l'actualisation de notre loi, établir le risque. On a déterminé le risque et on s'est entendu pour dire que, au-delà, en reconnaissant ce qui existe comme réglementation, que 300 m², au-delà de ça, ça prenait un architecte. Mais nous, on n'est pas pour... On vous dit que, en tant que compétence, on s'est basé sur ce fait-là et on le reconnaît.

M. Bergman: Mais pour retourner ma question, M. le Président: Pourquoi est-ce que le risque commence au-dessus de 300 m²? Pourquoi est-ce qu'on ? comme vous avez dit avec votre schéma ? pourquoi est-ce qu'on est au-dessus de 300 m², et le risque commence, on va à la couleur jaune ou à la couleur orange de risque? Pourquoi est-ce que le risque...

M. Hamelin Lalonde (Claude): Bien, la même raison du 50 km. Pourquoi c'est 50 km?

M. Bergman: Et est-ce que vous pouvez nous dire pourquoi est-ce qu'il y a un manque d'éducation au-dessus de 300 m², jusqu'à 600 m²?

M. Bourassa (André): On pourrait parler certainement, dans l'ampleur qui grandit, des bâtiments à ce moment-là, des accès aux issues, de la sécurité du public à l'intérieur des immeubles. D'autre part, il faut comprendre que la protection du public, en ce qui concerne l'architecture, ce n'est pas strictement une protection du public de peur qu'un plafond tombe sur la tête ou qu'un écroulement d'édifice survienne. La protection du public concerne très certainement le patrimoine architectural dont on parle aussi, un édifice qui va garder beaucoup plus sa valeur économique. Et quand on sait... Je vous donnerais une image. Le gouvernement en ce moment s'apprête à faire des investissements majeurs dans deux mégahôpitaux, et, avant de le faire, la question se pose et se repose souvent: il veut faire les bons choix.

Pour un individu qui se construit une résidence ou un petit bâtiment, c'est souvent l'investissement de sa vie. Donc, c'est très important que les questions se posent fondamentalement, non pas juste pour ne pas que le plafond s'écroule, mais pour que la conception architecturale même tienne la route pendant longtemps. Et cet aspect-là est fondamental dans la protection du public. C'est pourquoi la différence de formation est si importante et si majeure au niveau de la conception entre une formation de technologue et une formation d'architecte.

Je vous le répète: On a parlé que, dans la formation des technologues, il s'est ajouté quelques heures de conception; on ne dénigre pas ça, mais je veux rappeler que, dans la formation des architectes, il s'est ajouté une année entière de diplôme universitaire et une année entière de stage, ce qui porte la formation totale à huit années. C'est considérable et c'est, entre autres aspects, sur les éléments de conception architecturale et qui revient, M. Bergman, à la question de ce seuil: plus les bâtiments ont d'ampleur, plus la conception doit être étudiée à maints égards pour maintenir toujours des objectifs fondamentaux en architecture, c'est-à-dire d'avoir des bâtiments qui soient fonctionnels, harmonieux puis durables. C'est trois aspects-clés, et c'est d'intégrer tous ces éléments-là qui est la grande science de l'architecture.

M. Bergman: La question, M. le président, M. Lalonde, a été soulevée, ce matin, par les technologues que, et je cite: «La Régie du bâtiment du Québec et les municipalités embauchent des inspecteurs, en majorité des technologues, pour faire les inspections des immeubles en construction de plus de 300 m², et c'est une source de frustration.»

Alors, j'aimerais que... vous avez la chance pour répondre à ce point pour cette commission et pour le ministre.

M. Hamelin Lalonde (Claude): André et M. Gagnon, s'il vous plaît.

M. Bourassa (André): De la bouche même des représentants qui nous transmettent ce genre de commentaires à la Régie du bâtiment, ce qu'on nous mentionne, c'est que les inspecteurs de la Régie du bâtiment, avec toutes leurs compétences, ils ont quand même à connaître des règlements et à appliquer des règlements.

Le caractère créatif n'intervient pas du tout dans cette tâche-là, qui n'est pas une tâche que je veux dénigrer, c'est une tâche fondamentale avec laquelle on a à vivre toutes nos années de pratique, mais ce n'est pas le même niveau de tâches. L'immeuble peut être d'une grande ampleur, on en convient, mais l'intervention de l'inspecteur de la Régie du bâtiment par rapport à cet immeuble-là en est un d'appliquer des règlements existants. Alors, c'est toute la différence du monde.

Encore une fois, on ne dénigre pas là-dedans: c'est toute la différence entre avoir à concevoir et créer ces immeubles-là et appliquer une réglementation lors d'une inspection a posteriori dans ces mêmes immeubles.

Une voix: M. Gagnon.

M. Gagnon (Michel): Oui. Juste pour renchérir sur ce que mon confrère vient de dire: il faut prendre en considération que la formation d'un architecte en conception, ce qu'on peut appeler conception ? je ne parle pas de technique ? la question qui a été posée est purement technique parce que le bâtiment, il est construit; son portrait, son image, sa figure, sa conception est déterminée. On va inspecter une technique, on va inspecter voir si ça a été fait selon des codes. Quand on parle des codes, on parle de technique. À nulle part dans le Code national du bâtiment vous allez voir qu'on dit comment faire de la conception comme telle; on va faire de la conception technique mais pas de la conception architecturale, c'est complètement autre chose.

Et si on se rapporte à ça, vous devez considérer que l'architecte a environ 30 fois plus d'heures de formation qu'un technologue. Et je veux bien croire ? puis mon confrère l'a dit tout à l'heure ? qu'on a rajouté une année au cours universitaire puis une année au niveau du stage; à ce que je sache, à moins que les cégeps changeraient leur philosophie ou leur approche et que le gouvernement leur donnerait les budgets en conséquence, le cours au cégep en techniques, c'est trois ans. On peut bien rajouter des heures de conception, tant mieux, mais il va falloir qu'on en enlève ailleurs. Alors, si on parle de la technique, on va peut-être gagner de la conception, mais à quelque part, on n'en a pas gagné plus sur le total. Le mieux qu'on a fait, c'est qu'on en a ajouté sur le total. C'est autre chose.

M. Bergman: Est-ce que je peux, M. le Président, sur le suivi... Dans le mémoire ? et c'est la seule manière qu'on peut faire la comparaison, et je m'excuse ? des technologues, ils nous disent que les technologues possèdent une large part de la formation d'architecte sur les techniques en construction, les codes, l'inspection, la direction des travaux. Est-ce que vous pouvez m'expliquer votre perception de cette indication?

Voulez-vous que je...

Des voix: ...

M. Hamelin Lalonde (Claude): Oui.

n(12 heures)n

M. Bergman: Il y avait une phrase dans la présentation des technologues qui a été faite où il y a une indication que les technologues possèdent, et je cite, «une large part de la formation des architectes, dans les questions de techniques en construction, les codes, l'inspection, la direction des travaux».

J'aimerais avoir votre perception de ces commentaires. Vous avez fait référence à la formation, à l'éducation; alors, pour faire suite à votre réponse, pouvez-vous nous donner un commentaire sur cette partie?

M. Gagnon (Michel): Si vous regardez... Je suis allé un petit peu sur Internet, comme tout le monde fait de temps en temps. Je suis allé chercher dans les cégeps au Québec, en technologie de l'architecture, quel était ce qu'on appelle un «curriculum vitae de cours», que vous connaissez. Dans certains cégeps, on retrouve, par exemple, sous le numéro 221331-89 créativité, esthétique, architecture I. La plupart des cégeps ont tous ce cours-là. Certains ont ? comment dire ? le chapitre II du même cours, intégré dans leur curriculum vitae de cours, sous la partie créativité. Quand les technologues dans leur mémoire nous disent qu'ils possèdent une bonne partie de la formation des architectes, c'est bien plus en vertu d'aspects techniques des choses. Parce que, dans les cours de technologie dans les cégeps ? ce qui est tout à fait correct, remarquez que je n'ai rien contre le cours qui est donné aux technologues, absolument pas ? mais là on parle de Code de construction, on parle de dessins d'architecture, on parle de dessins assistés par ordinateur, on parle vraiment de tous les aspects techniques qui sont également des choses nécessaires à l'architecte. Il faut qu'on ait ça aussi. C'est dans ce rapport d'éléments là que les technologues affirment ? et avec raison, sous un certain aspect, un peu moins sur l'aspect technique ? qu'ils ont une bonne part de la formation des architectes. Mais là il faut distinguer l'aspect technique des choses et l'aspect créativité des choses. C'est deux mondes complètement différents.

M. Bergman: Quand on parle de la responsabilité de l'architecte à l'égard des plans et devis qu'il signe et scelle, et on prend les gestes posés par quelqu'un d'autre en vertu de délégation d'un certain acte, c'est quoi, la responsabilité de l'architecte quand vous avez les questions de délégation? Où est-ce que la responsabilité tombe? Est-ce qu'elle tombe avec ceux qui délèguent ou ceux qui reçoivent la délégation? Et encore, question de protection du public. Et on rentre dans la question de surveillance, surveillance de près ou surveillance à distance. Est-ce que vous pouvez éclairer cette commission sur ces questions s'il vous plaît?

M. Joli-Coeur (André): Me Bergman, le député de Louis-Hébert s'est un peu exprimé sur ça aussi tout à l'heure. La responsabilité telle qu'elle existe actuellement, au-delà des responsabilités découlant du Code des professions et des lois d'ordre professionnel, dans le cas des architectes, est bien ancrée dans notre Code civil sous 1688 autrefois, maintenant sous 2118, 19, 20, où on parle de création, surveillance, ainsi de suite, suivi de la construction. Alors, la responsabilité est entière. Puis il est impensable, sur le plan juridique dans l'état actuel des choses, déléguer quelque acte en tant qu'architecte ? je dis bien en tant architecte ? à quelqu'un d'autre sans en assumer la responsabilité et sa surveillance. Et il est évident que, dans le cadre juridique actuel de responsabilité, on ne peut pas faire autrement que d'avoir une surveillance constante à distance ou proche, telle que qualifiée dans notre règlement. La responsabilité est entière au sens de 2118, 19, il y a un renversement de fardeau de preuve, il y a une responsabilité directe, une obligation de résultat. On n'en sort pas.

Le Président (M. Lachance): M. le député de D'Arcy-McGee, votre temps serait écoulé. On doit partager le temps avec le député indépendant de Louis-Hébert.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Lachance): Alors, j'imagine qu'il aura une bonne question.

M. Bégin: Je ne parle plus de ce bord-là, je parle de ce bord-ci.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Lachance): M. le député de Louis-Hébert.

M. Bégin: Alors, merci, M. le Président. Je reviendrais à ce que le ministre soulevait tout à l'heure. Je pense qu'on n'a pas répondu à la question. On a parlé techniquement que, compte tenu que le 100 000 $, certains ne le respectaient pas, il y avait plus d'infraction avant et, etc. Mais ce n'est pas la question qu'il posait. La question n'est pas de savoir s'il y avait des infractions techniques, parce que le 100 000, on le sait, à moins d'erreur, ça vaut à peu près 400 000 et ça faisait longtemps que ça durait. Donc, techniquement, il y avait une faute. Mais la question qu'il posait était de savoir s'il y avait des problèmes de responsabilité qui se posaient.

Et là ma question va être plus directe: Est-ce qu'il y a des histoires d'horreur, de cas de construction qui se seraient effondrées, où il y aurait eu des problèmes de responsabilité dans la préparation des plans suite au fait qu'on ait confié, mettons, avant jusqu'à 100 000, et maintenant selon, depuis deux ans, depuis les nouvelles normes? Est-ce qu'on a des situations où des technologues ont utilisé leur science et ont commis des erreurs graves? Je ne parle pas qu'il n'y ait pas une faute, ils sont humains comme tout le monde, je suis certain qu'ils en ont commis quelques-unes. Mais je veux savoir s'il y a vraiment, par le nombre de cas, une démonstration qu'en fait la formation n'est pas bonne ou que... en tout cas, peu importe, on ne fait pas ce qu'il faut et qu'en conséquence on a des cas de responsabilité, et là je parle de responsabilité au sens de sécurité du public, je ne parle pas de l'autre volet que vous avez soulevé, sur lequel je reviendrai.

M. Bourassa (André): Évidemment, statistiquement, on n'a pas préparé de recherche à cet égard-là, ce n'était pas l'objectif de notre présentation aujourd'hui. C'était vraiment de vous exprimer pourquoi notre règlement a sa raison d'être tel qu'il est présenté dans le cadre législatif qui est le nôtre en ce moment.

Cependant, je voudrais juste vous rappeler que les histoires d'horreur dans le domaine du bâtiment ne concernent encore une fois pas des plafonds qui tombent sur la tête ou des immeubles qui s'écroulent. La science du bâtiment est quand même une science en constante évolution, M. Bernier l'a souligné tout à l'heure en parlant des architectes comme des gens qui font de la recherche, et c'est vrai, mais on ne fait pas que ça. On fait aussi toutes sortes d'autres activités dans le contexte du bâtiment et je peux vous dire qu'en ce moment, un des problèmes majeurs qu'on rencontre dans la conception de bâtiments concerne davantage la qualité d'air dans nos maisons, concerne davantage la stabilité et la non-stabilité des matériaux qui sont utilisés versus cette qualité d'air là de façon générale et c'est le danger qu'on rencontre en appliquant constamment des recettes, puisqu'on parlait des recettes de la partie IX, sans comprendre ce qu'on fait. Alors, c'est pour ça que, même dans le cas d'une maison, c'est important que vous compreniez qu'on n'a pas qu'à appliquer de la partie IX, mais il faut comprendre ce qu'on fait et être en mesure d'améliorer ça. Parce que, en ce moment, je peux vous dire que ? vous ferez des statistiques au niveau des compagnies d'assurances ? la question des moisissures et de la qualité d'air est en train de devenir un problème majeur, majeur pour la sécurité et la santé du public. À ce niveau-là, ce n'est pas que des recettes qu'on peut appliquer, mais il faut véritablement faire preuve de créativité et de créativité dans la science technique même. La créativité, ce n'est pas qu'une oeuvre plastique, ce n'est pas qu'une architecture au sens esthétique, c'est aussi la créativité dans les solutions qu'on amène pour ne pas que ce genre de situation là ne se produise constamment.

M. Bégin: Mais est-ce que vous n'êtes pas un peu sévère, parce que, à ce que je sache, par mon expérience populaire, il y a de très nombreux problèmes d'air dans les bâtiments qui ont été conçus par des architectes, que ce soit dans des industries, des commerces, des hôpitaux, des bureaux, des centres d'achats, à peu près partout autrement dit? Est-ce que vous n'êtes pas sur un terrain dangereux là?

M. Bourassa (André): Nous sommes tout à fait au fait de cette situation. Cependant, vous devrez admettre que, dans ces parties de plus grands immeubles où la qualité d'air est en problème, la spécialité dévolue à cette partie d'immeuble malheureusement est une spécialité qui concerne d'autres professionnels du bâtiment que... Ce n'est pas nous autres.

M. Bégin: Je reviens à ma question: Donc, vous n'avez pas de statistiques...

Le Président (M. Lachance): Rapidement, M. le député.

M. Bégin: ... ? oui ? vous n'avez pas de statistiques là-dessus? Deuxième question, et là c'est peut-être une incompréhension de ma part. Le mot «surveillance» a deux sens: la surveillance d'une personne à distance, comme vous avez mentionné; mais j'ai compris, peut-être à tort, que vous pensiez que la surveillance que ne fait pas le technologue et que l'on retrouve dans les dispositions du Code civil est la surveillance de l'exécution des travaux eux-mêmes qui entraînent une responsabilité distincte de celle de la conception des plans. Bon. Alors, qu'est-ce que vous avez voulu dire ou est-ce que j'ai mal compris? J'ai cru comprendre que vous disiez: S'ils avaient aussi cette responsabilité-là, eux. Est-ce que c'est ça que vous vouliez dire ou autre chose?

M. Hamelin Lalonde (Claude): Vous avez raison, il y a réellement une nuance entre les deux. La surveillance des travaux est une chose. Donc, souvent mon client me demande de faire conception, plans et devis et surveillance des travaux. Et quand on parle de cette surveillance-là, c'est celle que l'on retrouve aussi comme responsabilité au Code civil. Dans notre règlement...

M. Bégin: Est-ce que le technologue peut, ayant fait des plans, faire la même surveillance que vous, au même titre, de ce qu'il a fait? Oui?

M. Hamelin Lalonde (Claude): Oui.

M. Bégin: O.K. D'accord. Je m'informe.

M. Hamelin Lalonde (Claude): O.K. Et l'autre surveillance, c'est celle qui est à l'intérieur du règlement et qui se rattache soit à une surveillance immédiate ou... donc qui pourrait aller en surveillance sur un chantier, il est pour moi ou il est une entreprise et...

M. Bégin: ...surveillance de chantiers.

M. Hamelin Lalonde (Claude): Oui, mais jamais oublier que, à la fin, c'est moi qui en prend la responsabilité. Il y a une nuance entre les deux.

Le Président (M. Lachance): Alors, c'est tout le temps dont nous disposions. Merci, messieurs de l'Ordre des architectes du Québec pour votre présentation ici ce matin. Merci.

Et, là-dessus, je suspends les travaux de la commission jusqu'à 14 heures cet après-midi.

(Suspension de la séance à 12 h 10)

 

(Reprise à 14 h 3)

Le Président (M. Lachance): À l'ordre, s'il vous plaît! Je déclare ouverte la séance de la commission des institutions, et je rappelle le mandat: le mandat est de procéder à des consultations particulières et tenir des auditions publiques sur le document de consultation intitulé Rapport sur la mise en application de l'article 5.1 de la Loi sur les architectes.

Alors, cet après-midi, nous entendrons d'abord les représentants de l'Ordre des ingénieurs du Québec; par la suite, la Société des designers d'intérieur du Québec; pour terminer avec les représentants de l'Union des producteurs agricoles.

Je souhaite la bienvenue aux représentants de l'Ordre des ingénieurs du Québec, et je vous invite, messieurs... D'abord j'invite le porte-parole à nous faire part de son nom ainsi que les personnes qui l'accompagnent, et je vous indique que vous avez une enveloppe de temps de 20 minutes pour nous faire part de vos commentaires.

Ordre des ingénieurs du Québec (OIQ)

M. Lefebvre (Gaétan): Bonjour, M. le ministre, M. le Président, distingués membres de cette commission. Mon nom est Gaétan Lefebvre, ingénieur, président de l'Ordre des ingénieurs du Québec. Je suis accompagné à cette table de M. Michel Dagenais, à ma gauche, ingénieur, secrétaire et directeur général par intérim de l'Ordre des ingénieurs; et de Me Jules Brière, à ma droite, qui est conseiller juridique auprès de l'Ordre.

L'Ordre des ingénieurs a été fondé en 1920. Sa mission est d'assurer la protection du public en contrôlant l'exercice de la profession d'ingénieur dans le cadre des lois constitutives de l'Ordre et de mettre la profession au service de l'intérêt du public. Actuellement, l'Ordre compte plus de 46 000 membres et se place au deuxième rang des ordres professionnels en termes de nombre de membres, précédé, comme vous le savez, par l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec. J'ajouterai que toute personne désirant exercer comme ingénieur doit être membre en règle de l'Ordre et respecter les lois et règlements qui gouvernent notre profession, dont un code de déontologie. D'emblée, permettez-moi de rappeler que la Loi sur les ingénieurs a fait, en son temps, l'objet d'un examen attentif par cette même commission parlementaire des institutions dans le cadre du processus de révision de notre loi, processus qui n'a pas abouti.

Revenons donc à la consultation d'aujourd'hui. En effet, l'Ordre des ingénieurs du Québec et l'Ordre des architectes du Québec sont tous deux touchés par le processus de révision du système professionnel québécois, et, plus précisément, dans le cadre du cinquième projet de la mise à jour du système professionnel québécois qui porte sur la révision des champs de pratique des architectes et des ingénieurs pour tenir compte des nouvelles conditions de l'exercice.

L'Office des professions du Québec a ciblé ces deux professions d'exercice exclusif afin que nos ordres respectifs mettent à jour leurs champs de pratique. En effet, l'environnement dans lequel évoluent les ingénieurs et les architectes a considérablement modifié les conditions d'exercice de la pratique. L'un des facteurs justifiant cette révision est l'émergence de professionnels de niveau technique qui exercent dans le même domaine qu'eux.

L'obligation faite à l'Ordre des architectes d'adopter un règlement de délégation d'actes par l'introduction de l'article 5.1 nous apparaît incompatible avec l'un des objectifs principaux de la réforme qui est l'allégement et l'assouplissement réglementaire. En l'absence d'une description actualisée du champ de pratique dans la loi, il devient extrêmement difficile de rédiger un règlement de délégation qui soit limpide, simple et compréhensible. Ledit règlement doit combler cette lacune de la loi. Ainsi, dans un premier temps, il doit circonscrire les actes réservés à l'architecte, ceux qui peuvent être délégués, déterminer les personnes auxquelles ces actes peuvent être délégués et les conditions dans lesquelles il est possible de le faire. On voit qu'un tel règlement de délégation devient alors nécessairement lourd et complexe.

Dans son rapport sur le système professionnel québécois de l'an 2000, l'Office des professions soulignait, en 1997, l'échec de ces règlements dits de délégation d'actes, règlements qui étaient alors principalement instaurés dans le domaine de la santé. Le rapport de l'Office mentionne que ce mécanisme n'avait pas permis d'atteindre ses objectifs. Rappelons qu'on voulait assouplir le champ d'exercice exclusif et favoriser la pratique en interdisciplinarité. Au contraire, cette méthode a donné lieu à des dissensions inter-ordres et à la mise en place d'une réglementation lourde et complexe. L'Office recommandait que ces règlements de délégation soient remplacés par la mise en place de conditions associées à l'exercice d'une activité ou d'un acte réservé. Ces règlements de délégation devaient être abolis. Six ans plus tard, ces recommandations sont toujours d'actualité. Alors, pourquoi imposer de tels règlements en 2003?

L'Ordre des ingénieurs recommande fortement de privilégier la solution qui répondra aux objectifs suivants: doter chacune des lois faisant l'objet d'une révision d'une description actualisée claire, concise et globale de son champ de pratique; 2° circonscrire le cadre dans lequel des activités ou des actes réservés exclusivement à des professionnels peuvent être posés par des tiers; et 3° se donner les moyens de le faire par la détermination de conditions précises permettant à un professionnel d'agir en toute autonomie sans créer de liens de subordination. Ce type de solution aurait l'avantage d'être souple, de favoriser l'utilisation optimale des ressources, tout en balisant de manière adéquate l'exercice d'activités ou d'actes réservés. Le public doit pouvoir facilement identifier son interlocuteur et connaître son champ d'expertise et de responsabilité.

En conclusion, la détermination de conditions associées à l'exécution d'une activité ou d'un acte réservé doit remplacer le processus de règlement de délégation d'actes pour que chaque ordre puisse atteindre l'objectif qui est d'alléger le cadre réglementaire et d'ouvrir à la multidisciplinarité et à l'interdisciplinarité.

n(14 h 10)n

Je termine ici, M. le Président, pour réserver le temps nécessaire aux échanges avec les membres de la commission, et je vous remercie de votre attention.

Le Président (M. Lachance): Merci, M. Lefebvre. Et nous allons maintenant amorcer la période d'échange avec M. le ministre responsable de l'application des lois professionnelles. M. le ministre.

M. Jutras: Alors, M. Lefebvre, je vous souhaite la bienvenue à la présente commission parlementaire et je souhaite la bienvenue également à ceux qui vous accompagnent, Me Brière et M. Dagenais. Dans votre mémoire, effectivement, on y lit... vous faites mention, vous en avez fait mention aussi dans votre présentation que vous venez de faire devant nous, bon, de l'émergence des professionnels de niveau technique et de la difficulté qu'il y a, effectivement, à combiner les ordres professionnels de niveau technique et les ordres professionnels qu'on pourrait dire de formation universitaire. Et vous nous parlez aussi, là, de la façon de préciser les champs de chacun des ordres. Est-ce que je vous comprends bien: Est-ce que vous nous dites finalement que, selon vous, ce qu'il faudrait, c'est... Autant quand on parle d'un ordre professionnel technique ou que l'on parle d'un ordre professionnel de formation universitaire, là, est-ce que vous nous dites que dans les lois constitutives de chacun de ces ordres-là, c'est là que devrait apparaître la description des actes qui peuvent être posés par les professionnels de ces ordres différents là?

M. Lefebvre (Gaétan): C'est exactement la conclusion à laquelle on arrive, c'est-à-dire qu'on a des domaines, des champs d'activité, mais il y a aussi la question de quels actes on pose eu égard... dans ces domaines-là. Et, effectivement, la Loi sur les ingénieurs est ainsi constituée, l'actuelle loi. Et donc, votre conclusion est tout à fait exacte. Me Brière, si vous avez...

Le Président (M. Lachance): Me Brière.

M. Brière (Jules): Oui, juste pour compléter. Il y a deux aspects à cette question-là: celui dont M. le président vient de parler, mais aussi l'aspect de l'opportunité de définir des champs de pratique exclusifs à des professions de caractère dit technique, comme vous les appelez, et ça, c'est une question qui concerne l'Office des professions et qu'il n'est pas souhaitable, peut-être, de régler nécessairement quand on se demande qui d'autre qu'un professionnel, à titre réservé, peut poser des actes dans certaines conditions. Parce que c'est deux... Ou on veut alléger la réglementation et permettre à des tiers, appelons-les des tiers, par rapport à un architecte ou à un ingénieur, de poser certains actes dans des cadres déterminés, mais ce tiers-là n'est pas nécessairement un autre professionnel. On peut vouloir tout simplement alléger la réglementation. Mais, si on fait ça et, en même temps, on reréglemente pour déterminer qui est ce tiers et dans quel champ peut-il exercer, bien, le sens de ce que l'Ordre des ingénieurs a dit, c'est qu'on n'atteint pas l'objectif d'allégement réglementaire dans un cas comme celui-là et on crée une situation ou un système très complexe où il est encore plus difficile de s'y retrouver pour le public que ce ne l'est jusqu'à maintenant.

Il existe, dans la Loi sur les ingénieurs, des façons de permettre à des tiers d'exercer certains actes à certaines conditions qui sont déterminées dans la loi, et ça nous paraît une approche plus prometteuse que celle de demander de définir des champs plus exclusifs soit à même la Loi des ingénieurs ou la Loi des architectes ou dans une loi distincte, pour revenir à la question que vous posiez, là. Vous savez, ce n'est pas nécessairement un jugement favorable à l'idée de redéfinir des champs d'exercice exclusifs ou des actes d'exercice exclusifs à d'autres ordres professionnels, ce n'est pas le but ou ce n'était pas l'intention de l'intervention de l'Ordre ici.

M. Jutras: Bon. Mais je comprends que, finalement, ce que vous n'appuyez pas ou, en tout cas, ça, vous n'êtes vraiment pas d'accord avec ça, c'est la délégation d'actes à partir d'un ordre vers un autre ordre. Ce que vous dites, c'est: Campez les champs de chacun, précisez les champs de chacun, mais ne procédons pas par délégation d'un ordre à un autre. Mais, vous savez, la voie réglementaire, elle a quand même ses avantages. Elle a l'avantage... C'est vrai qu'on parle beaucoup d'allégement réglementaire puis c'est vrai qu'il faut procéder à l'allégement, ça, j'en conviens tout à fait. Mais, d'un autre côté, c'est plus facile de procéder à des changements de règlement que de procéder à un changement de loi. Alors, si on se retrouve à choisir entre les deux, oui, on parle d'allégement réglementaire, mais l'allégement législatif, il fait partie... il doit faire partie de notre vie aussi, là. Parce que, quand on campe des positions dans une loi, bien là, on est davantage... je ne dirai pas qu'on a les deux pieds dans le ciment, là, mais disons qu'on est plus fermement lié que par des règlements.

M. Brière (Jules): Moi, je m'en voudrais... Je ne voudrais pas exprimer une opinion dissonante à celle du ministre de la Justice sur cette question-là, mais je dirais que c'est vrai en théorie. Je suis entièrement d'accord avec vous, la loi nous met les pieds dans le ciment. Mais, dans la pratique, lorsqu'il s'agit d'un acte de législation délégué et qui intéresse plus d'une profession, je vous souhaite bonne chance si vous pensez que vous pouvez changer ça facilement.

M. Jutras: Non, ce n'est pas facile. Je ne dis pas que c'est facile. Mais je pense que c'est plus facile, c'est ça que je dis, c'est plus facile par voie réglementaire que par voie législative. Mais je pense que ce qu'on vit aujourd'hui, ça nous montre que, effectivement, ce n'est pas facile, je pense que vous en convenez. Je ne sais pas si mes collègues ont des questions?

Le Président (M. Lachance): M. le député de Frontenac.

M. Boulianne: J'en avais une, elle était semblable à la vôtre, mais j'en ai une autre. Alors, bienvenue. Bienvenue, M. Lefebvre, M. Dagenais, M. Brière. Ce matin, nous avons rencontré, là, des technologues, des architectes. On a parlé beaucoup de protection du public, on a parlé aussi de la sécurité. Et l'Ordre des architectes nous a fait voir que les responsabilités professionnelles des architectes étaient importantes, étaient, si vous voulez, très bien encadrées. Est-ce que vous autres... comme ingénieurs, est-ce que vous avez la même responsabilité puis est-ce que vous avez de la difficulté de l'appliquer, responsabilité professionnelle?

M. Dagenais (Michel): En fait, vous avez raison...

Le Président (M. Lachance): M. Dagenais.

M. Dagenais (Michel): ...lorsque vous parlez de responsabilité, parce que, en bout de ligne, l'architecte ou l'ingénieur qui signe et scelle des plans en prend la responsabilité complète. Et, chez nous, en fait, pour ce qui est du génie, cette responsabilité-là est clairement définie, et on n'a pas de difficulté à faire appliquer ça. Mais les travaux se font, en fait, sous la responsabilité de l'ingénieur, supervision et direction immédiate d'un ingénieur, que ce soit un technicien, un dessinateur ou autre personne qui est appelée à intervenir dans un projet.

M. Boulianne: Mais peut-être que j'ai mal compris aussi, dans votre mémoire, à la page 7, quand vous parlez de l'angle de la protection du public, vous dites qu'il y a des problèmes d'application, il y a, un moment donné, un problème majeur «qu'il est urgent de régler». Vous faites référence à la loi ou...

M. Dagenais (Michel): On fait référence, justement, à la Loi sur les ingénieurs qui doit être en fait actualisée avec l'évolution de la technologie depuis 1974. En fait, on connaît différents domaines qui ont émergé ou encore qui ont été formés par la combinaison de certaines sciences ou spécialités, et il faut redéfinir, en fait, notre loi pour mieux préciser ces domaines-là qui émergent et qui continuent, en fait, de nous arriver au fil des ans.

M. Lefebvre (Gaétan): En fait, j'ajouterais qu'effectivement c'est l'évolution des situations ou des travaux qui requiert des ingénieurs. On forme des ingénieurs, et ils oeuvrent dans des champs d'application nouveaux, et ces champs-là ne sont pas décrits dans notre loi. Quand on dit: On veut actualiser la loi, c'est-à-dire qu'on veut reconnaître dans une loi que l'ingénieur, pour la protection du public, se situe dans ces champs d'activité et pose des actes de génie, qui sont définis par ailleurs dans un autre article de notre loi.

n(14 h 20)n

M. Boulianne: Je m'attarde aussi que les relations, en tout cas, entre les technologues et les architectes, en tout cas, étaient plutôt à sens unique. On a dit: Nous autres ? si je prends les mots de M. Bernier ? alors, on collabore, on leur trouve des qualités puis on n'a pas de misère à travailler avec eux. Sauf qu'il nous a dit que ce n'était pas réciproque du côté des architectes, même, on les ignorait. Est-ce que vous pouvez nous parler de vos relations, vous autres, avec les technologues?

M. Dagenais (Michel): Bien, écoutez, d'une façon générale, il n'y a pas de problème particulier. C'est exceptionnel lorsqu'il y a des difficultés, en fait, de collaboration. C'est surtout, en fait, ceux qui veulent oeuvrer seuls et, en fait, poser des actes qui nous sont réservés dans notre champ. Mais, d'une façon générale, en fait, à l'intérieur soit de projets de construction, soit par le génie civil, ou encore à l'intérieur d'entreprises manufacturières, les rôles sont bien définis et les relations sont cordiales.

M. Boulianne: Vous pensez que, sur un projet comme ça, aussi important que ça, vous autres, vous auriez dû, ainsi que les technologues, travailler à l'élaboration de ce projet-là, être consultés officiellement, travailler, présenter ça en même temps que les architectes?

M. Lefebvre (Gaétan): Vous voulez dire par rapport à notre loi, à nous?

M. Boulianne: Oui.

M. Lefebvre (Gaétan): O.K. Par rapport à la leur, on comprend qu'on n'a pas été impliqués dans la dynamique parce que c'est vraiment de leur domaine. Les ingénieurs et les architectes partagent aussi, en tout cas, oeuvrent dans le même champ, et, dans la vie, il n'y a pas de difficulté, chacun pose les actes et a la responsabilité de ses actes dans ce domaine-là. En fait, tout le problème, c'est quand un acte est posé et que la responsabilité... Il faut qu'il y ait une responsabilité d'associée à l'acte qui est posé si on veut protéger le public.

M. Dagenais (Michel): J'ajouterais que...

Le Président (M. Lachance): M. Dagenais.

M. Dagenais (Michel): ...il y a une différence importante entre les architectes et les ingénieurs. En génie, en fait, si vous regardez ce qui se passe en termes de formation au Québec, on a une quinzaine d'universités ou écoles qui vont donner, en fait, là, une cinquantaine de spécialités ou d'options à l'intérieur de ces spécialités-là. Ça fait qu'on est... En fait, on a un éventail très vaste où l'ingénieur travaille et oeuvre. Pour ce qui est de l'architecte, en fait, ça n'a pas la même envergure en termes de variation. On peut parler de différentes grosseurs de bâtiments, mais ça demeure quand même toujours une chose bien précise.

Le Président (M. Lachance): Merci. Oui, M. le ministre.

M. Jutras: Il nous reste du temps?

Le Président (M. Lachance): Oui, oui, tout à fait. M. le ministre.

M. Jutras: Comment... Vous, les ingénieurs, vous vivez beaucoup, vous autres aussi, avec des technologues, là, dans différents domaines. Qu'est-ce que... Comment vous voyez que cette collaboration-là entre ces différents ordres là pourrait s'articuler? Parce que, que l'on parle de délégation d'actes, ou que l'on parle d'adoption d'un règlement, ou que l'on parle d'adoption de loi, pour chacun des ordres professionnels, il faut toujours, à un moment donné, faire des délimitations, et on le voit, là, ce n'est pas facile.

Et remarquez que, le printemps dernier, avec le projet de loi n° 90, on a réussi à asseoir plusieurs ordres professionnels ensemble. Puis je peux dire qu'on a réussi à élaborer un projet de loi très intéressant, à la satisfaction de tous les ordres professionnels concernés, et je pense que c'était heureux pour tout le monde, et tout le monde d'ailleurs s'en est déclaré heureux. J'ai eu l'occasion de rencontrer des représentants de ces ordres professionnels là puis qui saluaient l'action du gouvernement puis qui disaient: Bravo! puis on est contents du dénouement du dossier et puis de la façon que ça s'est passé.

Mais, je vous pose la question: Comment vous verriez que cette collaboration-là pourrait s'articuler puis pour éviter d'en venir à ce genre de situation tel qu'on vit aujourd'hui?

M. Dagenais (Michel): Le comment est, à mon avis, difficile à préciser à ce moment-ci, mais je pense qu'il faut garder en mémoire la notion de responsabilité finale du produit en vertu de notre mission qui est la protection du public: C'est qui qui prend la responsabilité finale et comment la protection du public est assurée? Si on est capable de camper ça, on va pouvoir, en fait, aller plus loin.

M. Lefebvre (Gaétan): Peut-être en complément, notre loi prévoit, à l'article 5, que pour certains tiers il y a comment on s'arrime les uns aux autres, et il y en a une particulière aux technologues professionnels où il est dit qu'ils peuvent exercer en autant qu'ils sont formés pour le faire. Donc, ça a pris cette formulation dans la loi actuelle. Il y a sûrement des façons de trouver des aménagements quant à la... s'ils posent un geste qui est un geste final et qu'ils en prennent la responsabilité. Et les domaines où... en fait, c'est les domaines d'entrepreneurs où les technologues sont entrepreneurs qui peuvent créer... où là on exerce, dans un même domaine, l'évaluation ou l'inspection des résidences, par exemple. Donc ça, c'est un domaine où les deux, aussi bien les technologues que les ingénieurs, oeuvrent, mais on ne peut pas donner le même type d'avis parce que, sur la structure, ça va relever d'un ingénieur, parce que c'est de la formation d'un ingénieur. Vous voyez, il faut arrimer et les formations et la nécessité sur le terrain quant à la responsabilité de l'acte posé.

M. Jutras: Oui?

M. Brière (Jules): Je pense qu'il est prématuré, comme le disait M. Dagenais aussi, d'arriver avec une suggestion concrète. D'abord, on n'y a pas réfléchi assez longtemps, et ce n'est pas facile. Mais l'idée qu'il y a dans ce mémoire-là, c'est que toute formule souple va être préférable à la formule de caractère législatif, que ce soit par règlement ou par loi, là. Et ce que vous avez fait dans le domaine de la santé, là, récemment, est sûrement une piste qui offre plus de latitude, plus de souplesse et est plus porteuse de résolution des conflits interordres professionnels, là.

Dans le secteur plus technique, là, des ingénieurs, par exemple, il a déjà été envisagé, dans une vie antérieure, lorsqu'on discutait de la révision de la Loi sur les ingénieurs en 1998, au moment où l'avant-projet de loi avait été déposé, une forme d'allégement à la pièce, un peu. Dans le cas des ingénieurs, il s'agissait en particulier, on appelait ça des directives de surveillance, plutôt que de réserver aux ingénieurs la fonction de surveiller des travaux de structure, que ces travaux-là de surveillance puissent se faire mais dans un cadre que l'ingénieur responsable détermine, et, à ce moment-là, le travail peut être fait par un technicien sans que... qui garde alors toute son autonomie ou sa compétence pour exercer cette responsabilité-là mais dans le cadre d'une directive adaptée à tel chantier ou à tel travail. Enfin, ça, c'est un exemple de formule qui est envisageable.

M. Jutras: Merci.

Le Président (M. Lachance): Très bien, merci. M. le député de D'Arcy-McGee et porte-parole de l'opposition officielle.

M. Bergman: Merci, M. le Président. Merci, les représentants de l'Ordre des ingénieurs. Je vous remercie pour votre présentation. Je l'ai trouvée très intéressante et informative. Et il me semble que la solution que vous envisagez, c'est une solution qui nous met dans une bonne piste, et on doit tirer des leçons de votre mémoire.

Premièrement, en relation avec votre commentaire de l'avant-projet, sur votre ordre en particulier, je peux vous dire que, le 7 mai 2002 et le 12 décembre 2002, à l'Assemblée nationale, j'ai demandé, au ministre responsable de l'application des lois professionnelles, des nouvelles sur le projet de loi en ce qui concerne votre ordre professionnel et, jusqu'à ce jour, j'attends des réponses plus formelles et un projet de loi en ce qui concerne les études qu'on a faites il y a quelques années.

Une voix: ...

M. Bergman: J'ai eu une réponse, mais j'attends le projet de loi. Est-ce que vous pensez qu'il y a une raison pour laquelle on n'a pas vu un projet de loi jusqu'à ce moment?

M. Dagenais (Michel): En fait, la raison que je vois, c'est que la démarche qui a été entreprise pour en arriver à un projet de loi en est une qui est longue et laborieuse, pour les raisons que j'ai mentionnées tout à l'heure, parce que, finalement, les domaines où l'ingénieur oeuvre sont nombreux et variés, ce qui rend la chose complexe et longue.

n(14 h 30)n

M. Bergman: Vous avez mentionné la possibilité d'actes qui peuvent être posés par des tiers en relation au projet de loi devant nous aujourd'hui. Quelle sera la responsabilité de l'architecte ou du professionnel en question quand un acte qui serait posé par un tiers... Qui sera la personne responsable, le tiers ou le professionnel qui a délégué l'acte, dans votre exemple?

M. Dagenais (Michel): À mon avis, si on parle des architectes, en fait, c'est l'architecte qui est le maître d'oeuvre, en fait, c'est lui qui en fait a le projet et qui signe et scelle ses plans, donc c'est lui qui en prend la responsabilité. Et c'est là, en fait, que toute la difficulté réside. Si, en fait, on délègue à quelqu'un une partie et qu'on n'a aucun droit de regard, aucun droit de supervision, et puis qu'on va en plus nous obliger à prendre la responsabilité de l'acte posé par un tiers, il y a quelque chose d'incongru, à mon avis, là-dedans, là.

M. Bergman: Mais, s'il y a autorisation pour que l'acte soit posé par un tiers, je comprends que la responsabilité reste avec le professionnel qui délègue l'acte pour être posé par un tiers?

M. Dagenais (Michel): En autant que c'est fait sous sa direction et supervision immédiate, je ne vois pas de problème à ce que l'architecte, à ce moment-là, prenne ses responsabilités en bout de ligne.

M. Bergman: Parfait. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Merci. Est-ce qu'il y a d'autres interventions?

Alors, merci, messieurs de l'Ordre des ingénieurs du Québec, MM. Lefebvre, Dagenais et Brière, pour votre présentation ici, à l'Assemblée nationale, aujourd'hui. Merci beaucoup.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Lachance): À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons maintenant poursuivre nos travaux avec les représentants de la Société des designers d'intérieur du Québec, à qui je demande de bien vouloir prendre place.

Alors, bienvenue, madame, messieurs. Vous avez vu comment nos travaux se font. Alors, je vous indique que vous avez également une présentation possible de 20 minutes. Et j'invite le porte-parole à s'identifier ainsi que les personnes qui l'accompagnent.

Société des designers d'intérieur du Québec (SDIQ)

M. Lapointe (André): Bonjour, M. le Président, M. le ministre, mesdames et messieurs les députés. Mon nom est André Lapointe. Je suis le président de la Société des designers d'intérieur du Québec, la SDIQ; ce poste est bénévole au sein de la société. Dans la vie quotidienne, je suis le gestionnaire de projet des aménagements intérieurs pour Travaux publics et Services gouvernementaux Canada, donc le gouvernement canadien, dans la province de Québec.

Je suis accompagné cet après-midi des personnes suivantes: immédiatement à ma droite, Me Jacques Beauchamp, conseiller juridique pour la SDIQ; à mon extrême droite, Mme Tiiu Poldma, professeure en design d'intérieur à l'Université de Montréal et membre du conseil d'administration de la SDIQ et de l'Association des designers d'intérieur du Canada, l'ADIC; à ma gauche, M. Denis Chouinard, designer d'intérieur, conseiller principal en aménagement et gestion de l'espace pour Desjardins Sécurité financière; M. Chouinard est de la région de Québec.

Comme vous pouvez le constater, le groupe représente à la fois les aspects juridiques, éducatifs et pratiques de la profession de designer d'intérieur. Je dis «profession» de designer d'intérieur car c'est effectivement ce que nous sommes, des professionnels au service du public et réunis au sein d'une association professionnelle qui s'intègre dans une industrie importante pour le Québec.

J'ose espérer que cette présentation saura vous sensibiliser à notre point de vue et que nous sortirons de cette commission parlementaire plus rassurés sur l'avenir de notre profession.

Mais je laisse la parole à Me Beauchamp, qui vous présentera les grandes lignes de notre mémoire relativement au rapport sur la mise en application de l'article 5.1 de la Loi sur les architectes. Me Beauchamp.

Le Président (M. Lachance): Me Beauchamp.

M. Beauchamp (Jacques): Merci. M. le Président, M. le ministre, MM. les députés. Alors, tout d'abord, la Société des designers d'intérieur du Québec voudrait vous remercier de les recevoir aujourd'hui. Nous sommes dans un contexte un peu particulier, puisque la Société des designers d'intérieur n'est pas un ordre reconnu, ni à titre réservé ni à champ de pratique réservé. Donc, dans une position un peu délicate, si on veut. Donc, on est d'autant plus reconnaissants que vous le fassiez, qu'on est à toutes fins pratiques, là, comme on pourrait dire, traités comme le commun des mortels.

Donc, c'est une occasion unique pour nous non seulement de vous parler du projet de règlement qui a été déposé par les architectes, mais aussi peut-être de vous parler de façon plus précise, de vous faire connaître de façon plus précise qui sont les designers d'intérieur et pourquoi nous devrions avoir un rôle à jouer dans le milieu de la construction. Alors, au tout début, je vais passer à travers le mémoire et vous citer des extraits du mémoire, et de cette façon-là vous allez mieux comprendre la position de notre Société.

La Société des designers d'intérieur du Québec, la SDIQ, est une organisation professionnelle qui regroupe des centaines de professionnels qui oeuvrent dans tous les secteurs de l'industrie de la construction: le résidentiel, l'industriel, l'institutionnel et le commercial. Ces professionnels offrent des services à travers le Québec et sont affiliés à des organismes similaires au niveau national canadien, nord-américain et international. Conséquemment, la SDIQ voit au développement du design d'intérieur comme outil économique, mais aussi comme outil culturel du Québec, avec en plus un rayonnement international.

La SDIQ regroupe des professionnels du design d'intérieur qui ont un impact économique important pour le Québec. Et je vous fais grâce de tout l'impact économique, que vous trouvez à la page 4 de notre mémoire. Dans le domaine du design, la SDIQ et ses partenaires ont développé une vaste expertise qui est reconnue tant au Canada qu'à l'étranger.

En association avec FERDIE, la Fondation d'études et recherches en design d'intérieur de l'Est du Canada, la SDIQ a, de concert avec l'Université de Montréal et d'autres institutions, mis sur pied des programmes de formation en design d'intérieur. Au fil des années, la SDIQ a non seulement été le fer de lance du développement du design d'intérieur au Québec, mais aussi, en collaboration avec FERDIE, la force vivante et dynamique derrière le développement de ce champ de pratique professionnel. Son prochain objectif, c'est d'occuper la place qui lui revient non seulement au niveau de son champ d'expertise économique mais aussi professionnel.

S'appuyant sur leur maturité et leur expertise, les designers d'intérieur désirent maintenant se regrouper au sein d'une nouvelle association professionnelle dont le seul objectif sera la protection du public. Cette démarche est en voie de réalisation et la création d'une autre organisation pour défendre les intérêts commerciaux de l'industrie en général est aussi en gestation.

Avec nous, nous espérons que tous les membres de cette commission parlementaire jugeront que l'heure est à l'action et qu'il est important de poser les jalons qui mèneront vers le développement durable non seulement d'une industrie déjà florissante, mais aussi d'un ordre professionnel dédié à la protection du public dans un domaine aussi spécialisé et complexe aujourd'hui que celui de l'aménagement intérieur des bâtiments de toutes sortes.

Vous avez, à l'annexe I de notre mémoire, une copie du mémoire qui a été produit par FERDIE, qui explique beaucoup plus en détail quelles sont les fonctions du designer d'intérieur, et vous allez voir, à travers aussi de notre mémoire, des recoupages qui se font sur notre présentation.

Quelles sont les principales prises de position de la SDIQ? Nous croyons que le projet de règlement élaboré par l'Ordre des architectes ? soit dit en passant que la Société, comme l'Ordre des technologues ou des ingénieurs, n'a pas été consultée avant la présentation du projet de règlement de l'Ordre des architectes ? non seulement ne répond pas adéquatement à l'obligation faite à l'esprit de l'article 5.1 de la Loi sur les architectes, mais qu'il démontre de façon évidente que l'approche suivie par la ministre Linda Goupil pour faire coexister d'anciennes professions avec les nouvelles professions se dirige peut-être vers un échec.

Force est de constater qu'il était peut-être naïf de penser qu'un ordre professionnel dont les secteurs commerciaux les plus lucratifs lui ont échappé au fil des années, par indifférence ou autrement, aurait l'audace et la maturité nécessaires pour s'amputer lui-même de sources de revenus importantes pour ses membres. Peut-on exiger d'une partie qu'elle soit juge et partie en même temps, sous le prétexte qu'elle est constituée pour assurer la protection du public? De toute évidence, demander à l'Ordre des architectes de laisser la place à d'autres professions occupant le même espace de pratique était sans doute bien intentionné mais peu réaliste.

n(14 h 40)n

L'erreur de départ n'a-t-il pas été de laisser croire aux architectes qu'ils pourraient avoir le contrôle absolu de tout le domaine des plans et devis dans le secteur de la construction, sauf pour les bâtiments résidentiels et de moindre envergure? De plus, comment expliquer qu'on puisse permettre à d'autres professionnels que les architectes de faire des plans et devis pour les résidences sans limite de coûts, alors qu'on interdit aux mêmes personnes de travailler dans des bâtiments commerciaux de petite envergure? Alors, à titre d'exemple, quelqu'un peut vouloir se construire une résidence de 15 millions; il n'y a aucune restriction. Mais quelqu'un voudrait construire un petit immeuble commercial de 300 m², là, comme vous avez dans le... il ne pourrait pas le faire. Alors, il y a quelque chose qui ne fonctionne pas dans la rédaction actuelle de la loi.

Comme nous le mettrons en lumière dans le présent mémoire, il se peut fort bien que la réforme de la Loi sur les architectes soit arrimée sur une fausse perception du champ de pratique des architectes, à savoir que l'architecte est la seule personne qualifiée pour assurer la protection du public dans un monde aussi complexe que celui d'aujourd'hui, alors que la spécialisation est de mise. L'architecte, derrière le projet de loi n° 132, est un architecte de la Renaissance, qui sait tout dans tous les domaines, ce qui est très loin de la réalité quotidienne non seulement au Québec, mais à travers le monde.

Nous voulons vous démontrer, preuves à l'appui, que le designer d'intérieur, dans son champ spécifique, est non seulement aussi qualifié que l'architecte pour occuper ce champ de pratique, mais, dans bien des cas, mieux qualifié que l'architecte. Sauf vouloir se fermer les yeux pour ne pas voir la réalité par crainte de fragiliser encore plus une profession qui dans bien des domaines bat parfois de l'aile, il faut reconnaître que les designers d'intérieur ont développé une expertise plus grande que les architectes dans l'aménagement intérieur des bâtiments.

Qui dit aménagement intérieur ne dit pas nécessairement architecture. Pour faire cette démonstration, nous vous montrerons que l'appareil éducatif du Québec est mobilisé pour fournir à ceux qui désirent s'orienter dans cette profession une formation académique de haut niveau et un encadrement professionnel pour la vérification de l'expertise développée.

Nous déplorons que la Loi sur les architectes, volontairement ou involontairement, privilégie une approche corporative restrictive comme solution pour harmoniser les problèmes de l'industrie de la construction, en prévoyant un accroissement des pouvoirs de l'Ordre des architectes du Québec au détriment des autres groupes. Le législateur devrait plutôt préconiser une polyvalence des divers intervenants de l'industrie de la construction et un support aux professions en émergence.

Au chapitre 2.3 de notre mémoire, nous avons élaboré sur l'impact économique négatif que pourrait avoir l'adoption du projet de règlement de l'Ordre des architectes. Le projet de règlement de l'Ordre des architectes aura un impact économique négatif pour l'industrie du design d'intérieur en particulier et résultera en une augmentation générale des coûts pour le donneur d'ouvrage. Une étude d'impact économique préliminaire, vérifiée de situations vécues par nos membres, nous permet d'entrevoir des répercussions économiques néfastes suite aux modifications à la Loi sur les architectes et l'adoption de la proposition des architectes. D'où l'importance pour le gouvernement de reconsidérer son approche vis-à-vis le design d'intérieur au Québec.

Ce projet de règlement permet à l'Ordre des architectes de placer sous tutelle les designers d'intérieur, de s'ingérer dans le fonctionnement du marché du design d'intérieur et d'en paralyser la progression. Les travaux de personnes qualifiées, designers d'intérieur, techniciens, technologues, deviendraient sous l'autorité de l'architecte, ce qui engendrerait des coûts additionnels pour tous, et ce, sans compter l'effet de dominos que celui-ci aurait sur les entrepreneurs spécialisés, les sous-traitants et les fournisseurs.

À notre avis, le projet de règlement de l'Ordre des architectes ainsi que la loi... Malheureusement, nous avons beaucoup de sympathie pour le gouvernement, mais nous croyons que la loi, telle qu'elle est rédigée actuellement, était une erreur, ou le texte en tout cas, en ce qui concerne les designers d'intérieur, la rédaction de la loi actuellement est loin d'être satisfaisante.

Dans le reste du Canada, comme dans plusieurs États aux États-Unis, la profession de designer d'intérieur est reconnue comme titre réservé. Pourquoi, au Québec, la résistance de certains organismes, alors que le monde entier a déjà accepté haut et fort que le design d'intérieur soit une spécialité distincte de l'architecture? Vous serez sans doute estomaqués de voir à quel point, dans les autres provinces canadiennes ou aux États-Unis, ils ont accordé le titre réservé de «Certified Interior Designer». Qui est plus, en France, on parle d'architecture d'intérieur et on a créé un ordre indépendant de celui des architectes.

Nous avons fait un examen détaillé des articles 16 et 16.1 de la Loi sur les architectes pour en arriver à la conclusion qu'en ce qui concerne les champs de pratique des designers d'intérieur, cette loi est confuse, difficile d'application, réductrice et indirectement destructive de toute l'industrie du design d'intérieur. En voulant faire une place aux designers d'intérieur, la rédaction de l'article 16.1 conduit exactement à l'inverse, soit l'élimination inévitable, à long terme, de cette profession.

En résumé, nous voulons vous faire la démonstration que la meilleure façon de protéger le public, d'assurer la viabilité économique de l'industrie du design d'intérieur et de libérer l'industrie de la construction d'un carcan trop rigide... il convient au législateur de prendre en considération quatre mesures concrètes: accorder aux designers d'intérieur qui ont une formation académique et une expertise suffisante le titre réservé de designer d'intérieur en vertu du Code des professions; modifier la Loi sur les architectes pour abroger le deuxième alinéa de l'article 16.1 ou le remplacer par un article qui stipulerait que l'aménagement intérieur ne constitue pas des travaux d'architecture et ne relève pas du champ de pratique de l'architecture; modifier la Loi sur le bâtiment pour autoriser spécifiquement les designers d'intérieur à signer des certificats de conformité pour les plans et devis d'aménagement intérieur; modifier la Loi sur les architectes pour autoriser les designers d'intérieur à faire des plans et devis d'architecture en dehors de leur champ de pratique moyennant certaines restrictions.

Et nous avons présenté, à l'intérieur de notre mémoire, une façon pour y arriver, c'est-à-dire de baser le pouvoir qui pourrait être donné aux designers d'intérieur sur la formation académique et les années d'expérience pour avoir des équivalences entre un designer d'intérieur et un architecte. On a de la difficulté à comprendre comment il se pourrait qu'un architecte qui n'a aucune pratique peut faire plus nécessairement qu'un designer d'intérieur qui a 20 ans de pratique, qui a vécu les situations d'aménagement.

Alors, dans le fond, la problématique générale se présente de la façon suivante. Le plan d'action pour la mise à jour du système professionnel québécois présenté par la ministre Linda Goupil, en décembre 1999, à titre de ministre responsable de l'application des lois professionnelles, avait à son début suscité de grands espoirs chez les designers d'intérieur. Ce plan de mise à jour du système professionnel avait comme principaux objectifs, qui avaient retenu notre attention, un assouplissement et un allégement du cadre réglementaire et une plus grande ouverture des milieux professionnels à la coexistence de plusieurs disciplines et à la mise en commun de leurs compétences respectives.

La présentation du projet de loi n° 132 et son adoption en décembre 2000 aurait pu annoncer des jours meilleurs pour les designers d'intérieur. La réalité est tout autre. D'une part, les articles 16 et 16.1 ont reçu une interprétation et une application tellement restrictive que les designers d'intérieur se retrouvent aujourd'hui dans une situation pire que celle qu'ils côtoyaient avant l'adoption de la loi. Encore récemment, dans la ville de Gatineau, un designer d'intérieur se voyait refuser ses plans, jusqu'au moment où un avis juridique des conseillers juridiques de la municipalité lui a permis de signer les plans qu'il avait préparés.

Les bonnes intentions de la ministre à l'époque, exprimées lors de l'adoption de la loi, ne se sont pas concrétisées. Voici une première cause de déception. La deuxième, c'est le retard, bien entendu, dans la mise en application, par l'Ordre des architectes, de l'article 5.1 de leur loi. Pour les designers d'intérieur, il n'y a que des miettes sur la table.

J'aimerais revenir, si vous me permettez, sur le projet de règlement qui a été déposé par l'Ordre des architectes. Quand on lit le projet de règlement de l'Ordre des architectes, on s'aperçoit que les architectes prennent une position, si on veut, globalisante. Pour eux, l'architecture, c'est tout. Alors, quand vous regardez aussi l'article 16.1 de la loi, l'alinéa 2, quand on parle d'aménagement intérieur et qu'on veut exclure de l'architecture l'aménagement intérieur, alors il faut penser que l'aménagement intérieur y était, au départ. Alors, ça veut dire qu'indirectement, ce que le législateur a fait, il a décrit l'architecture comme étant la construction de l'édifice et même, aussi, l'aménagement de l'intérieur, le travail que fait actuellement les designers d'intérieur. Or, pour nous, ce n'est pas la façon de régler le problème pour les designers d'intérieur, parce que ça les prive à toutes fins pratiques de leur profession.

J'aimerais attirer votre attention sur les pages 15 et 16 de notre mémoire qui expliquent en gros d'où vient le statut de designer d'intérieur, quelles sont les influences qu'il a subies à travers les années. D'abord, vous avez toute l'influence française et l'influence nord-américaine. Il faut comprendre qu'ici, sur le territoire nord-américain, on ne reconnaît pas, comme en France, le statut d'un architecte d'intérieur. Par contre, il s'est développé une profession qui est très vigoureuse aux États-Unis, qui est le design d'intérieur, qui a un champ de pratique très particulier qui est celui qui se limite à l'aménagement intérieur des bâtiments.

Vous avez aussi un graphique qui explique un peu que, si le designer d'intérieur ? et ceux qui pourraient le penser encore aujourd'hui ? vient d'une tradition artistique ? et c'était ça un peu la réalité au Québec, où on avait la Loi sur des décorateurs ensembliers ? cette situation-là est dépassée aujourd'hui. Maintenant, les designers d'intérieur... Et j'ai apporté ici, avec moi, des exemples. Ici, vous avez le document qui est demandé aux designers d'intérieur pour leur examen de qualification, qui est produit par une société américaine, je pense, qui explique ? comment, je pourrais dire ça, donc? ? qui devrait vous rassurer sur la qualification que les designers d'intérieur doivent obtenir pour pouvoir travailler.

n(14 h 50)n

J'aimerais aussi, en terminant, attirer votre attention sur le fait qu'il existe actuellement, au Québec, une formation pour les designers d'intérieur qui est donnée au niveau du cégep, qui est donnée au niveau de l'université et qui, à mon avis, quand on regarde... Nous avons déposé, avec les documents que nous avons envoyés, une série d'exemples de cours qui sont donnés au niveau universitaire, qui sont donnés au niveau collégial, qui, je pense, devraient vous démontrer hors de tout doute que les designers d'intérieur sont prêts à assumer des responsabilités de protection du public. De même, nous avons déposé aussi avec notre mémoire toute une série de lettres qui ont été envoyées par différentes organisations à travers le Canada, à travers les États-Unis, qui devraient vous rassurer que ce n'est pas une demande farfelue qui est faite, d'avoir au moins un titre réservé, sinon un champ de pratique.

En conclusion, je pense qu'on a expliqué au tout début que nos principales conclusions sont que nous pensons que la loi devrait être amendée; que l'article 16.1, deuxième alinéa, devrait être amendé, parce que, dans sa rédaction actuelle, et je n'ai pas élaboré beaucoup sur la rédaction de 16.1, deuxième alinéa, mais dans sa rédaction actuelle, l'article 16.1, deuxième alinéa, prête à tellement d'interprétations divergentes que c'est difficile d'interprétation pour, d'abord, les municipalités; et surtout que, après l'adoption de la loi, dans le marché, après l'adoption de la loi, l'Ordre des architectes s'est dépêché d'aviser toutes les municipalités que, dorénavant, plus aucun plan ne pouvait être signé sans le sceau d'un architecte, ce qui, à mon avis, était aller un peu trop loin et de prendre position de façon trop catégorique par rapport au travail que pouvaient faire des designers d'intérieur. Merci beaucoup.

M. Lapointe (André): Messieurs, mesdames, comme vous venez de l'entendre, les designers d'intérieur du Québec, que nous représentons, sont loin d'être satisfaits de la tournure des événements depuis l'adoption de la loi n° 132. Nous fondons beaucoup d'espoirs sur cette commission parlementaire afin que le gouvernement rectifie son tir, à défaut de quoi nous sommes très inquiets pour l'avenir de la profession de designer d'intérieur et pour l'industrie en général du design d'intérieur au Québec. Merci.

Le Président (M. Lachance): Merci. M. le ministre responsable de l'application des lois professionnelles.

M. Jutras: Alors, M. le président, Me Beauchamp et madame, monsieur, je vous souhaite la bienvenue à la présente commission. Je vous remercie de votre présentation, c'était bien intéressant. Je vais tout de suite enligner ma première question avec la fin, là, de votre intervention, Me Beauchamp, quand vous nous avez parlé de la difficulté que les designers d'intérieur ont connue sur le terrain depuis l'adoption du projet de loi n° 132. Alors, j'aimerais savoir, pour vous autres, sur le terrain, ça représentait quoi, concrètement?

Le Président (M. Boulianne): Je vous remercie, M. le ministre. M. Beauchamp.

M. Beauchamp (Jacques): Disons que ce qui arrive le plus souvent, c'est que ? comment expliquer ça? ? quand les designers d'intérieur se présentent à une municipalité pour recevoir l'approbation de leurs plans, les autorités municipales ou les gens qui sont responsables du service d'urbanisme ? puis ici, souvent, ce sont des architectes qui sont en charge des services d'urbanisme ? prennent une attitude très restrictive pour l'acceptation des plans. Pour eux, là, comment ils voient la loi, c'est que tous les plans doivent être signés par les architectes et il n'y a aucun... personne d'autre peut faire des plans.

Et quand vous regardez la rédaction de l'article 16.1, deuxième alinéa, vous vous rendez compte que n'importe quel juriste qui voudrait mettre cet article-là à mal n'aurait pas beaucoup de difficulté, parce qu'on parle d'«aménagement intérieur». Donc, ça voudrait dire que quand les gens se présentent, quand les designers d'intérieur se présentent pour faire approuver des plans, ils n'ont aucun statut, ils sont considérés comme n'importe quel citoyen. Alors, ils se font refuser; il faut qu'ils se battent. Ils ne peuvent pas se promener... tous les designers d'intérieur ne peuvent pas se promener avec un avocat qui va expliquer à l'officier municipal qu'il interprète mal la loi.

Et ensuite, quand vous regardez l'article 16.1, au deuxième alinéa, de la façon dont il est rédigé, où on parle qu'il n'aura pas un impact sur la structure de l'édifice ou n'aura pas un impact... à mon avis, c'est un problème de rédaction. C'est que l'article, de la façon dont il est rédigé, fait en sorte que tout le champ est occupé par les architectes, et ça fait en sorte que maintenant les gens se servent de ça. Les architectes eux-mêmes, dans leur publicité, disent: N'oubliez pas maintenant que, dans les municipalités... Ils demandent même aux municipalités de se servir... de devenir les policiers de la Loi sur les architectes: Protégez notre loi; ils demandent aux municipalités de faire ça. Alors, les designers d'intérieur se voient refuser souvent leurs plans et se voient refuser un champ de pratique qu'ils occupaient avant.

M. Jutras: Et quand vous dites que, bon, la voie retenue dans cette loi-là, ça conduit à l'échec, là, vous faites référence à quoi?

M. Beauchamp (Jacques): Excusez-moi?

M. Jutras: Vous avez dit, dans votre intervention, que la voie retenue dans la loi n° 132 mène à l'échec. Vous nous avez dit ça, là.

M. Beauchamp (Jacques): Bien oui, parce que...

M. Jutras: Eh bien, vous faites référence à quoi, là, justement?

M. Beauchamp (Jacques): On fait référence au fait que justement vous avez une disposition dans la loi qui dit à l'Ordre des architectes... Puis je pense que les ingénieurs ont dit la même chose, à un moment donné, ils nous ont dit: Écoutez, vous demandez aux architectes de se prononcer sur leur propre champ de pratique et de dire à d'autres personnes de venir pratiquer dans ce qu'ils considèrent leur champ de pratique.

À mon avis, le problème est de deux natures. Le premier problème: que, c'est la seule loi où un ordre n'a pas une définition de son champ de pratique. Je pense, il y a d'autres personnes qui ont dit ça, aussi. On ne définit pas ce qu'est l'architecture. Alors, eux, en prennent évidemment très larges, ils disent: Tout est architecture. Alors, évidemment, ça élimine un paquet de gens qui ne peuvent pas pratiquer. Deuxièmement, en faisant ça... Et après ça, vous leur dites: Bien, écoutez, maintenant que tout est architecture, dites-nous ce que vous allez laisser aux autres? Alors, c'est comme vivre un peu sous la tutelle des architectes. C'est les architectes qui vont déterminer à l'avenir ce que les autres professions vont faire parce que, eux, se posent en décideurs ultimes de tout ce qui va se faire au niveau de l'architecture au Québec.

Je pense que la conclusion vient du fait qu'on a associé architecture... on a pris une position, au départ, que l'architecture ça devrait inclure l'aménagement intérieur, alors que ce n'est pas le cas.

M. Jutras: Alors donc, je comprends que, à ce sujet, vous rejoignez plutôt l'opinion de l'Ordre des ingénieurs, là, à l'effet que la délégation d'acte telle qu'on... Non?

M. Beauchamp (Jacques): À mon avis, je pense que ce n'est pas une bonne solution.

M. Jutras: Ah bon! O.K. Alors donc, vous dites oui à ce que j'avance. Vous rejoignez la position de l'Ordre des ingénieurs là-dessus, là?

M. Beauchamp (Jacques): C'est ça.

M. Jutras: C'est ça. O.K. Maintenant, vous nous avez dit, vous nous proposez aussi que l'Ordre des designers d'intérieur... qu'il y ait un ordre constitué, un ordre professionnel qui soit constitué, là, à titre réservé, bon, puis vous parlez d'une modification de l'article 16.2. Vous nous avez dit aussi que, chez les designers d'intérieur, il y en a qui ont une formation technique et il y en a qui ont une formation universitaire. Alors, on a un peu le même problème que dans d'autres domaines, là, dans d'autres champs. Alors, comment le voyez-vous à ce moment-là, ce mariage-là, au sein d'un même ordre professionnel?

M. Beauchamp (Jacques): Au niveau de...

M. Jutras: Ceux qui ont la formation technique puis ceux qui ont la formation universitaire.

M. Beauchamp (Jacques): Bien, il n'y a pas de problème. Ceux qui ont une formation... vous voulez dire collégiale?

M. Jutras: C'est ça, oui.

M. Beauchamp (Jacques): Bon. Bien, on le dit dans notre mémoire, ceux qui ont... Je pense que l'élément déclencheur, pour le droit de pratique, devrait être un examen de qualification, qui existe au même niveau... qui existe pour les designers d'intérieur comme il existe pour les architectes. Il y a un examen qui est préparé par... qui est fait aux États-Unis mais qui est accepté ici, au Canada, à travers tout le Canada, comme étant un examen de très haut niveau. Alors, celui qui est designer d'intérieur, qui a fait un diplôme collégial ? et c'est ça qu'on a proposé dans notre mémoire ? lui, il va avoir plus d'années de pratique, il devrait avoir plus d'années de pratique et passer un examen de qualification. Et ça, ça va lui donner accès à faire certaines choses.

C'est un peu ce qu'on a décrit dans notre mémoire, on dit: L'accès à faire quelque chose ne devrait pas être basé simplement sur le fait que vous avez le titre d'architecte puis vous avez plus ou moins de compétences dans certains secteurs. Il devrait plutôt être basé sur le fait que vous avez des années d'expérience puis des études. Alors, plus vous avez d'études, moins vous avez peut-être besoin d'années d'expérience. Puis c'est ça qui vous donnerait le droit de pratiquer dans certains domaines. C'est un peu la façon dont on le voit.

Le Président (M. Boulianne): M. le ministre.

M. Jutras: Ça va. Merci.

Le Président (M. Boulianne): Ça va? Est-ce qu'il y a d'autres question du côté ministériel? Oui, M. le député de Duplessis.

M. Duguay: Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Alors, moi également, je désire vous souhaiter la bienvenue et merci également pour les messages que vous nous passez. Juste une question peut-être pour comprendre la portée de ce que vous nous indiquez comme conclusion. À la fin de votre mémoire, au niveau des cinq recommandations qu'on y retrouve, est-ce qu'on doit comprendre ? puis vous avez écouté comme nous, ce matin, autant les groupes qui vous ont précédés ? est-ce qu'on doit comprendre que, pour rendre les dispositions de la loi n° 132 applicables et les règlements préparés par les architectes, est-ce qu'on doit comprendre que les cinq recommandations que vous énumérez doivent être intégrées à l'intérieur des orientations gouvernementales?

M. Beauchamp (Jacques): Je ne sais pas si je comprends bien votre question. Je m'excuse.

M. Duguay: Est-ce que je dois comprendre que les cinq recommandations qu'on y retrouve sont conditionnelles à rendre acceptables les dispositions de la loi n° 132 et du code de règlement qui a été déposé par les architectes? Parce que vous arrivez avez cinq recommandations...

M. Beauchamp (Jacques): Oui, on arrive avec cinq conclusions. Oui.

n(15 heures)n

M. Duguay: C'est ça. Alors, est-ce que ces cinq recommandations-là... Parce que, là, vous avez relaté toute la problématique que vous vivez avec les dispositions de la loi n° 132. Alors, est-ce qu'on doit comprendre que, en tant que législateurs, vous nous demandez d'intégrer...

M. Beauchamp (Jacques): Oui, ce qu'on demande, ce que la Société des designers d'intérieur demande, c'est que... Vous savez, la difficulté, c'est qu'on est obligés de vous demander d'amender la loi, parce que la loi, à notre avis, est mal faite. C'est regrettable, on préférerait ne pas être obligés de vous demander ça ? on a beaucoup de sympathie ? demander au gouvernement de changer une loi qu'il a adoptée, là, mais je pense qu'on n'a pas le choix. À notre avis, ça a été un peu improvisé quand ça a été rédigé. Donc, on est face à des difficultés aujourd'hui avec lesquelles c'est difficile de vivre. Alors, c'est pour ça qu'il faut, à notre avis, amender cette loi-là.

Maintenant, on pense aussi que la façon de procéder en demandant à l'Ordre des architectes... Le résultat, c'est un peu ça qu'on a aujourd'hui: demander à l'Ordre des architectes de déterminer ce que les autres vont pouvoir faire. À notre avis, ça risque de conduire à un échec, à long terme, cette façon de procéder là.

M. Duguay: Donc, ce que vous venez nous dire, c'est que les règlements qui ont été préparés par les architectes...

M. Beauchamp (Jacques): Ah! On n'est pas d'accord du tout avec ça.

M. Duguay: ...ne répondent pas du tout à vos attentes.

M. Beauchamp (Jacques): Ah! pas du tout, pas du tout, pas du tout. Je pense, comme les groupes qui sont venus ici faire des présentations, on trouve que ça... D'abord, c'est inapplicable. Comment voulez-vous que, tous les jours, les gens se promènent avec la feuille avec les petits carreaux puis les petits ronds puis disent: Écoute, ça, tu as le droit de le faire? À mon avis, c'est tout à fait pas réaliste. Même, je pense que c'est ça, la problématique pour nous: c'est que l'approche globalisante des architectes, à notre avis, est fausse au départ. C'est un peu...

M. Duguay: Merci.

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. le député de Duplessis. Est-ce qu'il y a d'autres questions? Ça va. Alors, M. le porte-parole de l'opposition officielle.

M. Bergman: Merci, M. le Président. Merci pour votre présentation, et je l'ai trouvée intéressante. Aussi, vous nous avez donné beaucoup de documentation pour qu'on puisse être prêts pour cette commission parlementaire. Et je sais aussi que vous passez beaucoup de temps pour essayer d'être admis comme ordre professionnel. Et je vois votre intérêt dans notre système professionnel, qui est vraiment admirable.

Vous faites référence, en quelques places dans votre mémoire, à des programmes de formation en design intérieur et que c'est une formation de haut niveau. Est-ce que vous pouvez, pour nos collègues, nous indiquer les programmes de formation que quelqu'un suit pour avoir un diplôme dans votre profession?

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. le député de D'Arcy-McGee. Alors, madame...

Mme Poldma (Tiiu): Alors, bonjour....

Le Président (M. Boulianne): Mme Poldma? oui.

Mme Poldma (Tiiu): Bonjour, merci. Juste avant que je commence, on m'a dit que je pouvais juste mentionner que je viens d'avoir un petit accident dans la voiture en sortant ici, de Montréal. Alors, la voiture a capoté, mais je suis ici quand même. Alors, je pense que c'est important de mettre à la table.

Alors, pour la formation, oui, mon point de vue sur ça, ça vient d'un peu d'expérience. Je travaille dans le domaine depuis 20 ans, dans le design d'intérieur, comme designer d'intérieur avec une formation universitaire. Et je suis en ce moment en train de finir un doctorat qui porte sur les questions de formation de design d'intérieur.

Alors, pour répondre à votre question, je peux vous dire que la formation en design d'intérieur, ça prend deux niveaux, si on peut dire. Le premier, c'est le baccalauréat universitaire de trois ans, à ce moment implanté à l'Université de Montréal, qui a une formation qui suit des règlements établis par un organisme qui s'appelle FIDER, la Fondation de design d'intérieur et d'éducation et recherche nord-américaine. La deuxième formation, c'est la formation collégiale, qu'on appelle plutôt technique, mais quand même qui a... les mêmes niveaux de standards que FIDER. FIDER recommande que maintenant, dès janvier 2003, toute formation professionnelle du plus haut ordre serait une formation universitaire. Par contre, l'examen NCIDQ accepte les gens avec une formation technique, si on peut dire, si, avec leur pratique, ils démontrent la capacité d'être professionnels, avec le passage d'examens. Alors, la formation collégiale, en bref, se forme en quatre volets: la formation-création, la formation technique en construction, la formation communication et la formation ? excuse-moi, j'ai oublié un peu la dernière ? mais c'est plutôt design.

Alors, les aspects de formation sont assez complexes et assez organisés vers le champ de pratique, qui est un aménagement d'intérieur, oui, mais aussi une réponse à la responsabilité de la protection du public, qui exige que tous les détails, tous les aménagements, toutes les implications... On peut s'impliquer dans la construction de plafonds, on peut s'impliquer dans la... On a la connaissance pour faire des plans mécaniques, des plafonds réfléchis, l'éclairage, la couleur, la lumière, le choix de matériaux, au moins que ça ne touche pas le bâtiment et que ça n'affecte pas toutes les lois... le Code du bâtiment, le National Building Code of Canada. Et alors, toutes nos formations, c'est de viser à faire quelque chose de créatif, mais le faire avec responsabilité et en tenant compte des conditions du bâtiment.

Alors, pour nous, c'est très clair que notre limite, c'est où l'architecte et son cadre de bâti sont affectés. On ne touche pas à la structure, on ne touche pas aux choses qui peuvent affecter la sécurité du public, selon le Code du bâtiment. Et alors, on opère avec ces connaissances-là et on les exige, en enseignant des choses comme le système environnemental, dessins d'architecture, design, etc.

Le Président (M. Boulianne): Merci.

M. Bergman: M. le Président?

Le Président (M. Boulianne): Oui, M. le député de D'Arcy-McGee.

M. Bergman: Oui. Merci pour votre réponse, et nous sommes heureux que vous êtes ici en bonne santé. Et vous voyez que la route de...

Mme Poldma (Tiiu): Tout est bien, merci.

M. Bergman: ...l'Assemblée nationale n'est pas, des fois, tellement facile.

Vous faites référence que vous êtes aussi qualifiés que l'architecte pour occuper ces champs de pratique, mais dans bien des cas mieux qualifiés que les architectes. J'aimerais que vous précisiez les champs où vous êtes mieux qualifiés, et dans le côté de l'expérience, dans le côté de formation, pour nous donner des exemples concrets pour le bénéfice de notre commission.

M. Beauchamp (Jacques): Je vais demander à Mme Poldma de répondre aussi, une spécialiste en...

Le Président (M. Boulianne): Oui. Alors, Mme Poldma, on vous écoute.

Mme Poldma (Tiiu): Merci, messieurs et madame. Je vais prendre deux volets en répondant à votre question, si je peux. Le premier, c'est concernant l'aspect humain. Si on peut dire, le design d'intérieur, on s'occupe des détails de l'être humain dans sa vie quotidienne. Alors, ça veut dire que notre intérêt, c'est de vraiment regarder comment les gens fonctionnent, leur interactivité sociale, leur interactivité entre eux quand ils font des tâches dans les lieux, dans les établissements, commercial ou résidentiel. Alors, notre intérêt, c'est vraiment d'améliorer la qualité de vie avec le fonctionnement des activités à l'intérieur d'un espace.

Alors, le deuxième volet, c'est que notre intérêt, c'est aussi de faire des choix prudents, encore pour que la santé et le bien-être soient bien supportés. Alors, ça veut dire que, si, moi, je fais le design d'un bureau, j'ai un intérêt à connaître non seulement les activités, comment les tâches sont faites, mais aussi l'éclairage, comment ça donne le bon pied de bougie sur l'étage, comment on organise ça avec un électricien, comment le système de ventilation amène une bonne qualité de vie.

Mais on le fait d'une façon, si on peut dire, à petite échelle. Moi, je vois comme l'architecte qui fait à grande échelle le bâti, d'une façon à plus grande échelle, en fonction du contexte urbaniste, nous, on va travailler avec les architectes pour réaliser l'aspect plutôt intérieur vers l'extérieur, si on peut dire. Alors, c'est notre intérêt, exactement comme on a ici, autour de la table, de joindre les gens ensemble dans une activité et de le faire avec une bonne santé.

Alors, comme, moi, j'enseigne aussi la pratique de design intérieur, et comme j'ai dit, avec 20 ans de pratique, en faisant plus de 300 commerces différents, je peux vous assurer que le champ de connaissance que j'ai, ça amène à une rare responsabilité de la protection du public, mais en même temps avec un côté esthétique et d'amélioration de la vie des personnes entre elles. Alors, c'est un peu dans ce sens-là qu'on parle, je pense, d'une spécificité de design intérieur et d'un cohérence avec l'architecte pour l'environnement bâti en total.

M. Beauchamp (Jacques): Je voudrais peut-être ajouter...

Le Président (M. Boulianne): Oui, M. Beauchamp.

M. Beauchamp (Jacques): ...ajouter aussi que c'est juste une résultante de la réalité de tous les jours. Vous savez, le monde devient tellement complexe aujourd'hui. Prenez l'exemple des avocats. L'avocat qui, avant, pratiquait dans presque tous les domaines se sentait à l'aise de pratiquer dans presque tous les domaines. Aujourd'hui, il n'y a pas d'avocats qui peuvent prétendre être bons dans tous les domaines, donc ils doivent se spécialiser. Alors, quand l'architecte vient ici vous dire: Nous, les architectes, on peut tout faire; ce n'est pas grave, on va couvrir tout le domaine de la construction dans ses moindres détails, on trouve ça irréaliste, on trouve que ce n'est pas réaliste de faire ça.

n(15 h 10)n

Qu'un architecte se spécialise dans son domaine de la construction de l'édifice, dans le bâti, dans la structure et qu'il laisse à d'autres spécialistes... Il n'y a pas d'autres façons de voir la réalité aujourd'hui, à notre avis, parce que ? et ça devrait être la réalité de toutes les autres professions ? c'est que ça devient tellement complexe et tellement spécialisé aujourd'hui qu'il faut scinder. Ce qui était vrai il y a peut-être 25 ans, quand quelqu'un finissait son cours classique puis qu'il connaissait à peu près tout ce qu'il devait connaître de la science, aujourd'hui c'est impossible. Alors, c'est vrai aussi pour l'architecte. Alors, l'architecte devrait se limiter à un secteur, d'être très bon dans son secteur mais ne pas vouloir faire tous les secteurs.

Mme Poldma (Tiiu): Je ne sais pas si...

Le Président (M. Boulianne): Oui, madame.

Mme Poldma (Tiiu): Et ce que je peux ajouter aussi dans ce sens-là mais aussi dans l'autre sens, que... Moi, je pense que c'est important d'ajouter que c'est... Par exemple, je vous donnais un exemple, à l'Université de Montréal, nous sommes dans un programme en design d'intérieur en ce moment, un programme qui est parmi les écoles de design industriel, design et urbanisme, architecture paysage et architecture, et on lance un cours, dans lequel j'enseigne, où on travaille dans un atelier multidisciplinaire où on travaille avec les architectes, urbanistes, etc., ensemble, pour réaliser un projet. Alors, on a une place là et on respecte ça, tout le monde parmi nous, dans les professions, qu'il y a une place pour le design d'intérieur parmi les autres professions. Et c'est dans ce sens-là, je pense, qu'on parle de tout le monde... le monde devient très compliqué. Mon doctorat, ça porte sur toute la complexité de notre vie quotidienne et comment vraiment le designer d'intérieur doit réagir à ces complexités-là et comment notre formation, comme on vient de vous le mentionner, apporte ces questions-là.

Le Président (M. Boulianne): Merci beaucoup. M. le député de D'Arcy-McGee.

M. Bergman: Merci, M. le Président. On a entendu, avec beaucoup de raison, depuis ce matin, les mots «alléger le fardeau réglementaire», et vous faites référence aussi au rapport du Groupe conseil sur l'allégement réglementaire au premier ministre du Québec, qui a été fait le 29 mai 1998. Et, avec raison, vous faites une mise en garde générale dans ce domaine. Est-ce que vous pouvez expliquer, pour cette commission, pourquoi procéder par voie de règlement, ce serait un fardeau, ce ne serait pas alléger le fardeau réglementaire?

M. Beauchamp (Jacques): Je pense que ça dépend surtout du règlement. Celui qui a été soumis par l'Ordre des architectes est vraiment... à notre avis, il présente des difficultés d'application qui ne sont pas, là, réalistes dans le monde de tous les jours. Si on est capable de faire un règlement simple, qui va identifier les actes qui peuvent être posés par certaines catégories de professionnels aux autres actes posés par certaines catégories professionnelles, tant mieux. Mais, ce n'est pas... Si on est pour arriver à des règlements aussi compliqués, celui qui a été déposé, je ne vois pas en quoi ça va aider personne, tous les jours, pour faire son travail. C'est ça, la difficulté.

Si on avait procédé autrement, si on avait, dans la loi, défini... on avait osé définir dans la loi ce qu'était l'architecture, quitte à faire un débat un peu plus long sur le sujet puis à définir ce qu'était l'architecture, bien, peut-être, comme on le fait pour les avocats... Vous savez, les avocats, ils en ont une définition des actes qu'ils peuvent faire. J'imagine que ? je n'ai pas regardé la Loi des ingénieurs ? les ingénieurs aussi ont des choses qu'ils peuvent faire. Mais pourquoi, là, l'architecture, tout d'un coup, on n'est pas capable de définir ce que c'est, ce que va faire l'architecte? On est obligé de dire: Bien là, non, l'architecte, lui, on ne peut pas toucher à son champ de pratique, il est tellement global, il fait tout, il peut tout faire. C'est ça qui, à notre avis, vient causer problème dans la réforme qui a été faite pour l'Ordre des architectes. Alors, à notre avis, c'est là qu'est le problème. Donc, vous êtes obligés de retourner à une réglementation qui, là, devient évidemment très fastidieuse, très compliquée, alors, au lieu de simplement le mettre dans le texte de loi.

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. Beauchamp. M. le député.

M. Bergman: Vous faites référence à des coûts de construction plus élevés si vous n'êtes pas impliqués. Et j'aimerais comprendre pourquoi les coûts de construction seraient plus élevés sans votre implication?

M. Beauchamp (Jacques): Bien, d'abord, tout monopole conduit, normalement, à une augmentation, à un moment donné, des coûts de construction, parce que plus grand vous avez un monopole, plus les gens ont tendance à augmenter les tarifs. À partir du moment où vous évacuez de tout le domaine de la construction les designers d'intérieur, bien là, encore là, vous... j'imagine qu'un architecte va vouloir demander plus cher pour ses services, alors que le designer d'intérieur peut le faire. Vous savez, les architectes, ils peuvent faire... ils peuvent s'essayer puis faire, même si ce n'est pas leur domaine... ce n'est pas leur...

Prenons un exemple, on trouve dans le domaine de l'éducation une majeure puis une mineure. Un architecte peut faire une majeure en architecture puis une mineure en design, mais quand... il peut aller en faire du design. Mais, si vous êtes obligé d'engager des gens surqualifiés dans certains domaines pour faire quelque chose, vous faites augmenter les coûts automatiquement. Et lui, le designer d'intérieur, si vous lui mettez des bâtons dans les roues puis vous ne lui permettez pas de faire approuver ses plans quand il ne fait que de l'aménagement intérieur, puis qu'il est obligé d'engager un architecte pour respecter, si on veut, la loi, puis se couvrir, bien, à ce moment-là, vous lui occasionnez des coûts, à lui aussi. Alors, c'est dans ce sens-là que ça va augmenter les coûts pour la construction. À un moment donné, il y a quelqu'un qui doit payer pour ça, là, qui va faire que... Il va falloir qu'il paie pour les services des architectes. Déjà eux-mêmes se plaignent qu'ils ne sont pas capables de faire tout le marché. Alors, ça va augmenter les coûts.

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. Beauchamp. M. le député, vous avez encore du temps.

M. Bergman: Est-ce que vous pouvez nous expliquer, dans d'autres juridictions, le rôle du designer d'intérieur?

M. Beauchamp (Jacques): Bien, je sais que, dans sept provinces canadiennes et aux États-Unis... Il y a un gros débat, actuellement, aux États-Unis, entre les architectes et les designers d'intérieur que ce sont vraiment deux professions séparées. Il y a 22 États américains qui reconnaissent le titre de Certified Interior designer. Ils reconnaissent l'équivalent d'un titre réservé, c'est-à-dire que seuls les gens qui ont reçu cette formation-là peuvent signer Certified Interior Designer. Ça se fait dans 22 États américains, sept provinces canadiennes, vous avez reçu, là, avec vos documents, toute la liste des provinces où on accepte ce titre-là.

C'était quand même un peu surprenant qu'au Québec, vous savez ? on fait un peu folklorique ? on est encore à se poser des questions si le designer d'intérieur a un rôle à jouer dans notre société, alors que tout le reste du monde le reconnaît. Je veux dire, on a un peu de difficultés à comprendre comment ça se fait qu'on n'arrive pas ici, au Québec, à percer. Est-ce que ça a été une mauvaise stratégie des designers de se faire connaître? Est-ce que ça a été une influence trop grande des architectes dans ce domaine-là? Mais il reste un fait, que tout le reste du monde, là, reconnaît les designers d'intérieur, puis, au Québec, nous, on ne semble pas... on les classifie encore... Pourtant, on a le système d'éducation qui forme des designers d'intérieur. On a un examen de qualification de haut niveau qui est là, mais on persiste à dire: Non, non, non, designers d'intérieur, vous, vous n'avez pas le droit d'avoir un titre réservé.

On ne demande même pas un champ de pratique. J'ai ici un document qui a été préparé par l'Association des designers d'intérieur de l'Ontario. Eux sont rendus à demander un champ de pratique réservé. Puis nous, on est encore à discuter si on va avoir un titre réservé. Alors, vous savez, on fait un peu... on trouve que ça fait un peu rétrograde. On devrait passer ce débat-là puis... Puis surtout qu'il y a un domaine qui est reconnu, même dans le système d'éducation. Avec toutes nos taxes on paie pour un système d'éducation pour former des designers d'intérieur puis, exactement comme les technologues disaient tantôt, après ça, on leur dit: Ah! bien non, là, vous avez fait des études en design d'intérieur, mais ça ne veut rien dire, vous êtes aussi bons qu'un avocat. Alors, moi, je pourrais faire du design d'intérieur, je peux signer designer d'intérieur, puis... C'est ridicule. C'est ça qui est un peu choquant pour les designers d'intérieur, c'est que c'est ridicule le système actuel. Ça ne fait pas beaucoup de sens.

Le Président (M. Boulianne): Merci. Oui, M. le député. Vous avez encore du temps, oui.

M. Bergman: Vous faites référence... en relation de l'application que vous avez faite pour être admis comme ordre professionnel, vous faites référence aussi à la coexistence de plusieurs disciplines et la mise en commun de leurs compétences respectives. Est-ce que la fusion... Et, depuis ce matin, on voit des chevauchements de responsabilités des membres de différents ordres professionnels. Est-ce que la fusion de votre groupe avec un ordre professionnel est toujours une possibilité?

M. Beauchamp (Jacques): Bien, je sais qu'à un moment donné il y avait des discussions que les designers d'intérieur puissent se joindre aux technologues. C'était une des options qui avait été envisagée à un moment donné. Je pense, même, il y avait... l'Office des professions était impliqué à l'époque. Par la suite, vous savez, le temps a passé, et c'est devenu moins important.

Il y a certainement, à un moment donné, des questions à se poser, mais la difficulté, c'est que, si vous demandez aux designers d'intérieur un peu comme il s'est fait en France, où les architectes d'intérieur se sont dissociés de l'Ordre des architectes, c'est un peu... Et placer les designers d'intérieur sous la tutelle des architectes, vous savez ce qui va arriver en fin de compte, c'est que les architectes, vous savez, ils vont protéger leur territoire plus facilement qu'ils vont protéger... On n'est jamais aussi bien servi que par soi-même. Surtout que, là, si la première étape était qu'on accorde aux designers d'intérieur un titre réservé, ce serait déjà une première étape. Alors... Mais c'est très difficile pour les designers d'intérieur qui ont vraiment...

Puis ce n'est pas le champ de pratique des technologues, les designers d'intérieur ne sont pas dans le champ de pratique des technologues. La difficulté vient simplement du fait qu'il y a quelqu'un qui décide, qui a décidé que l'aménagement d'intérieur, c'était de l'architecture. Alors, que voulez-vous dire? C'est là qu'est la difficulté. Mais je ne pense pas que ce serait une très heureuse initiative qu'on soumette les designers d'intérieur à l'intérieur de l'Ordre des architectes.

Le Président (M. Boulianne): Merci beaucoup. Merci. Alors, je vais revenir. Il resterait du temps du côté ministériel. M. le ministre, vous avez demandé la parole.

n(15 h 20)n

M. Jutras: Quand je lis votre mémoire... Et là vous nous décriez aujourd'hui l'article 16.1, deuxième alinéa, là, tu sais, comme quoi, bon, ça ne vous convient pas puis qu'il n'y a pas lieu que cet article-là soit là. Par ailleurs, quand je lis votre mémoire, je me dis, on n'est pas loin, là. Parce que, à la page 18 de votre mémoire, vous écrivez, vous dites que l'article aurait dû se lire ainsi: «Pour les fins de la présente loi, les travaux d'aménagement intérieur ? au milieu de la page, là ? de tout édifice ou partie d'édifice ne sont pas des travaux d'architecture. Cependant, si ces travaux d'aménagement intérieur ont un impact significatif sur l'architecture de l'édifice ou de partie d'édifice, ils doivent aussi faire l'objet de plans et devis d'architecture selon l'article 16.»

Puis, après, vous écrivez: «Cela ferait en sorte que, seulement si un aménagement intérieur affecte dans ses composantes essentielles l'intégrité structurale d'un bâtiment, il doit faire l'objet de plans et devis signés et scellés par l'architecte.» Alors, vous dites... Si on touche à l'intégrité structurale d'un bâtiment, ça, vous dites: Ça, ça appartient aux architectes, et nous, les designers d'intérieur, on n'a pas d'affaire là.

Puis, quand on regarde 16.1, le deuxième alinéa ? c'est là que je dis que, finalement, on n'est pas loin ? on dit que ça ne s'applique pas, l'article 16 ne s'applique pas «pour une modification ou rénovation de l'aménagement intérieur de tout édifice ou partie d'édifice qui n'en change pas l'usage ? ça, par contre, effectivement, ça vous n'en parlez pas, là ? ni n'en affecte l'intégrité structurale ? alors, finalement, on se rejoint, là, on se rejoint en tout cas ? les murs ou séparations coupe-feu, les issues et leurs accès ainsi que l'enveloppe extérieure».

Puis l'enveloppe extérieure, on s'entend, vous êtes des designers d'intérieur, ça fait qu'on ne parle pas de l'enveloppe extérieure. En tout cas, il me semble qu'on n'est pas loin l'un de l'autre. Je comprends tout votre argument de dire: Bon, la délégation, date... à partir d'un ordre professionnel. Bon. Ça, je comprends ça. Mais, sur 16.1, alinéa 2, là, j'ai plus de difficultés à vous suivre.

M. Beauchamp (Jacques): ...

M. Jutras: Oui, oui, c'est pour ça que je vous pose la question.

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. le ministre. M. Beauchamp.

M. Beauchamp (Jacques): D'abord, c'est une approche qui est totalement différente. Dans l'article actuel, ce que vous faites au départ, vous dites au départ que l'aménagement intérieur, c'est de l'architecture. Après ça, vous dites: Étant donné que c'est de l'architecture, on va éliminer certains aménagements, on va permettre à tout le monde, pas juste aux designers d'intérieur. Comme j'ai dit tantôt, tout le monde a le droit de faire de l'aménagement intérieur, sauf. C'est là que vient la difficulté. Nous, ce qu'on propose, ce n'est pas ça, on dit: Au départ, admettez que... que les architectes admettent que faire de l'aménagement intérieur, ce n'est pas de l'architecture.

Maintenant, si vous faites de l'aménagement intérieur et que, pour une raison ou pour une autre, vous devez toucher à des éléments qui concernent l'architecture... parce que, dans le sens commun, l'architecture, là, tout le monde sait que l'architecture, ça veut dire, vous savez, les murs puis le toit, puis tout ça. Si vous regardez les anciennes cathédrales en France, puis tout ça, il n'y en avait pas beaucoup d'aménagement intérieur, c'était facile de dire que l'architecte, il faisait juste l'enveloppe, puis tout ça. Alors, si vous dites ça au départ, que, quand la personne qui aura la responsabilité de faire l'aménagement intérieur viendra toucher à la structure d'une façon significative... on dit «significative» parce qu'il ne faut pas tomber, aussi, dans le délire: chaque fois que vous touchez à une porte, vous êtes obligé d'aller demander à un architecte sa permission. Il ne faut pas non plus... Parce que, là, dans le texte actuel, quand vous dites «affecte quelque chose»... «affecter», vous savez, j'ai regardé dans le dictionnaire, ça veut dire toucher quelque chose. Ça veut-u dire que chaque fois qu'un designer d'intérieur va aller toucher un petit aspect d'une porte ou d'un mur vous allez lui dire: Touche pas à ça, c'est un architecte?

Alors, nous, on dit: Faites-le à l'envers, dites que l'aménagement, ce n'est pas dedans mais, après ça, dites que, si vous faites de l'aménagement et que ça vient toucher, à ce moment-là, il y aura deux plans: il y aura le plan de l'aménagement intérieur qui sera signé par le designer d'intérieur et, si ça touche à l'architecture, ce sera signé par l'architecte. C'est comme ça qu'on le voit. On le voit juste à l'envers. Vous pensez que ça va donner le même résultat, mais, à la fin... Vous savez, sans ça, vous placez tout le monde sous la tutelle des architectes, hein? À la fin de la journée, là, quand vous dites que tout est architecture, tout le monde est sous la tutelle des architectes. On n'a pas le choix.

M. Jutras: Et, en fait, ça rejoint votre argument de dire, bien, qu'on ait un ordre professionnel...

M. Beauchamp (Jacques): Bien, je pense que, pour assurer la protection du public, ce serait que pas tout le monde se déclare demain matin designer d'intérieur. Vous savez, ce serait peut-être utile que, pour la protection du public, il y ait au moins un titre réservé. D'autant plus, vous savez, on ne casse pas la glace ici, là, hein? Tout le monde le fait à travers le Canada, puis vous avez tous les documents qui vous le démontrent. Vous avez même des projets de loi qui sont adoptés dans les différentes provinces. Ça se fait aux États-Unis de plus en plus. Encore dernièrement, l'État du New Jersey a accordé le titre de designer certifié.

Alors, pourquoi le Québec, tout d'un coup, se traîne la patte? Qu'est-ce qui nous retient de l'accorder aux designers aujourd'hui, là? Y a-tu quelque chose de spécial qu'on ne sait pas qui fait qu'on ne peut pas l'accorder?

Le Président (M. Boulianne): M. le ministre.

M. Jutras: Vous êtes combien de designers, au Québec, d'intérieur?

M. Lapointe (André): 700.

M. Jutras: 700. Et êtes-vous en mesure de me dire combien ont une formation technique ou collégiale, combien ont une formation universitaire?

M. Chouinard (Denis): 60 % collégial, 40 % universitaire.

M. Lapointe (André): Il faut bien comprendre que la formation universitaire est reconnue seulement depuis cinq ans, donc c'est quand même...

M. Beauchamp (Jacques): C'est ça, c'est une nouvelle profession, alors, vous savez, il faut que les anciennes professions fassent un peu la place aux nouvelles professions. S'ils ne font pas de place, ces nouvelles professions là ne pourront pas se développer. Vous allez faire des programmes d'éducation qui vont mener nulle part, comme disaient les technologues, hein? C'est ça qui va arriver à la fin de la journée, les gens vont abandonner, parce qu'ils vont dire... Puis on ne s'est pas consultés, les technologues et nous, puis on arrive à la même conclusion à la fin de la journée. On ne dira pas aux designers qu'ils n'ont pas d'avenir, parce qu'ils ne marcheront pas dans ce domaine-là.

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. Beauchamp.

M. Jutras: Et la formation se donne où et comment s'appelle le bac?

M. Beauchamp (Jacques): Ça se donne à l'Université de Montréal, à l'UQAM aussi.

Le Président (M. Boulianne): Oui, madame.

Mme Poldma (Tiiu): Oui. Il y a deux programmes, effectivement. Moi, je parlais de l'Université de Montréal qui est le baccalauréat en design d'intérieur. Et l'autre, c'est le baccalauréat en design de l'environnement, qui est donné à l'UQAM, dans lequel sont formés plusieurs designers d'intérieur. Alors, il y en a plusieurs qui sont connus sur le marché ici, à Montréal, beaucoup qui viennent avec la formation de l'UQAM, mais les autres, 40 % vient de l'extérieur du Québec. Comme, moi, mon baccalauréat, c'était d'une autre classe complètement, ce n'est pas de Québec.

Le Président (M. Boulianne): Merci. M. le ministre.

M. Jutras: Quand vous nous parlez d'une formation en design d'environnement... c'est ça que vous avez dit, design?

Mme Poldma (Tiiu): C'est celui-là à l'UQAM.

M. Jutras: À l'UQAM, oui, oui, oui. Est-ce que... Là, on y forme des designers d'intérieur, mais est-ce qu'on y forme aussi des designers d'extérieur?

Mme Poldma (Tiiu): Oui. Mais je ne connais pas si bien la formation. Mais il me semble qu'ils commencent avec design général puis, après ça, ils divisent dans les différents secteurs de design et de l'architecture, paysage et tout. Mais, à l'Université de Montréal, c'est l'envers, on a les différentes disciplines qui existent indépendamment dans les baccalauréats, ou des maîtrises, ou des doctorats.

Le Président (M. Boulianne): Merci. Est-ce qu'il y a consentement pour que le député de D'Arcy-McGee pose une question? Allez-y, M. le député.

M. Bergman: Une petite question, M. le Président. Vous faites référence, dans votre mémoire, que la Société des designers d'intérieur du Québec va cesser ses opérations et qu'il y aurait la Corporation professionnelle des designers d'intérieur du Québec qui va recevoir des lettres patentes. Est-ce qu'il y a une raison pour que la SDIQ va cesser ses opérations? Et combien de membres étaient dans la SDIQ et combien de membres sont dans la nouvelle corporation? Est-ce que la nouvelle corporation est encore formée et combien de membres est-ce que vous avez dans la nouvelle?

M. Beauchamp (Jacques): Je suis content que vous me posiez la question. Suite, justement, à la préparation de la commission parlementaire, il s'est fait une réflexion au niveau des designers d'intérieur vraiment pour réfléchir: Comment se fait-il qu'après tant d'années et tant d'efforts, puis tant d'énergie, puis tant d'argent dépensé, ça n'avait pas abouti? Puis, une des raisons qui était identifiée, c'est le fait que les designers d'intérieur, pour toutes sortes de raisons, mal conseillés ou... que voulez-vous, se sont identifiés à une loi de 1935 qui était la Loi des décorateurs ensembliers, qui est une loi ? curieuse loi d'ailleurs ? publique mais à caractère privé, qui se retrouve dans les statuts refondus de 1964 mais qui ne se retrouve plus dans les statuts refondus de 1970, qui existe dans le panorama législatif, si on veut, mais qui regroupait des décorateurs ensembliers de Montréal et de Québec. Alors, les gens ont réalisé, finalement, qu'on ne peut pas se rattacher à une loi... Quand on n'est pas un décorateur ensemblier, on n'essaie pas de revendiquer, d'améliorer cette loi-là. Il faut faire d'autre chose. C'est la première réflexion.

n(15 h 30)n

La deuxième réflexion, vous allez vous apercevoir que, pour rencontrer les exigences d'être un ordre professionnel, que ce soit à titre réservé ou à champ de pratique réservé, il y a certaines conditions à rencontrer, dont des conditions de protection du public, mais aussi toute une question de formation professionnelle, de contrôle, de syndic et de pratique professionnelle, et que là il était temps pour les designers d'intérieur de se diviser, si on veut, en deux groupes.

Alors, il va exister dorénavant deux regroupements: le regroupement qui va s'appeler «corporation»... mais on n'a pas le droit d'utiliser le mot «corporation» avant d'être une corporation ? dans le mémoire, c'est marqué «corporation» ? d'une association professionnelle des designers d'intérieur, qui va ne s'occuper que de la formation professionnelle et de travailler dans le sens d'obtenir un statut de titre réservé; et il va se créer une fédération de tous les intervenants du design d'intérieur, comme industrie, pour ne pas mêler les deux tout le temps, pas toujours avoir un pied dans l'industrie puis un pied dans la formation professionnelle. Alors, deux vocations très différentes.

Le Président (M. Boulianne): Merci beaucoup. Alors, merci, Mme Poldma, M. Beauchamp, M. Lapointe et M. Chouinard.

Alors, je demanderais aux représentants de l'UPA de s'approcher, s'il vous plaît.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Boulianne): Alors, bienvenue, donc, à l'Union des producteurs agricoles à cette commission. Alors, vous avez 20 minutes pour présenter votre mémoire, et vous présenter et présenter votre collègue. Alors, allez-y.

Union des producteurs agricoles (UPA)

M. Lacasse (Christian): Alors, M. le Président, membres de la commission, M. le ministre. Alors, moi, c'est Christian Lacasse, je suis vice-président de l'Union des producteurs agricoles, je suis producteur moi-même, producteur laitier, dans la région de Bellechasse; et ma collègue, Johanne Brodeur, Me Johanne Brodeur, qui est conseillère, là, à notre service juridique à l'UPA.

Le Président (M. Boulianne): Alors, bienvenue.

M. Lacasse (Christian): On est très heureux que vous ayez accepté de nous recevoir aujourd'hui pour vous présenter, là, quelques observations, quelques préoccupations que nous avons suite à l'adoption de la loi et en fonction des prochaines étapes, là, qui est l'adoption d'un règlement.

Je vais faire une courte entrée en matière, par la suite Me Brodeur pourra poursuivre avec différents éléments, là, contenus dans notre mémoire, que vous avez sûrement, là, déjà lu, sujet de grand intérêt pour les producteurs agricoles. Et on n'est pas à la première représentation sur ce sujet-là depuis l'adoption de cette loi-là, et même avant l'adoption de la loi, parce que, partant d'une situation où la très grande majorité des bâtiments agricoles étaient exemptés de plans d'architectes, on se retrouve aujourd'hui contraints.

Alors, je n'ai pas besoin de vous dire à quel point il y a des préoccupations, il y a des interrogations sérieuses qui se posent, chez les producteurs et productrices agricoles, concernant ces nouvelles obligations-là, pour ne pas dire des inconvénients, aussi. Alors, il y a des impacts, je dirais, administratifs, parce qu'il y a toujours des démarches à faire lorsqu'on est obligé de... on est contraint à des plans d'architecte, mais aussi des conséquences économiques qui, si on ajoute à un paquet d'autres obligations que les producteurs sont déjà contraints, ça fait en sorte, là, ça devient... ce n'est pas surprenant, là, que les producteurs sentent un grand inconfort par rapport à ça.

Ce qu'on va également soulever, c'est la démarche aussi au cours... Il faut se rappeler qu'au moment de l'adoption de la loi, on aurait souhaité avoir une exemption, que les producteurs puissent poursuivre avec une exemption. Et la réponse qu'on nous avait faite à ce moment-là, c'est: Bon, sur cet objectif-là, on pourra voir qu'est-ce qui peut être fait au niveau de la réglementation ou du règlement d'application. Alors, je dirais, c'est la raison pour laquelle aujourd'hui on se présente, c'est toujours dans ce même objectif-là. S'il n'a pas pu être atteint par la voie de la loi, il faut voir maintenant comment on peut l'atteindre par voie réglementaire.

Et je vous dirais qu'on est assez mécontents des différents événements qui se sont déroulés depuis l'adoption de la loi. On aurait souhaité être consultés, voire même informés, je dirais, là, du travail qu'il y avait à faire, en fonction de l'objectif qu'on poursuivait. Sauf que, je vous dirais, depuis deux ans, il a fallu faire pas mal de tapage pour venir à bout d'être entendus, seulement entendus; et on se retrouve aujourd'hui sans nécessairement avoir des réponses concrètes par rapport à l'objectif, à la demande, aux attentes qu'on avait.

Je m'arrête là-dessus. Je laisserais, là, Me Brodeur poursuivre. Et on pourra par la suite, là, échanger, si vous avez des questions supplémentaires.

Le Président (M. Boulianne): Alors, merci, M. Lacasse. Alors, Mme Brodeur.

Mme Brodeur (Johanne): Merci, M. le Président. Alors, j'irai en trois étapes: je compléterai rapidement l'historique qu'a fait M. Lacasse; par la suite, je vous ferai l'historique non pas législatif, mais du vécu des producteurs durant ces deux années; et, par la suite, je vous exposerai l'objectif que l'on vise aujourd'hui et les modifications qu'on désire voir apporter au règlement tel qu'il vous est soumis aujourd'hui.

Au niveau du rappel historique, en l'an 2000, dans les années 1999, lorsque Mme Linda Goupil était aux commandes du ministère, elle avait visé comme objectif en faisant la réforme, notamment, le fait qu'il y ait moins de réglementation; le fait qu'il y ait une multidisciplinarité et que des techniciens ou autres puissent participer, dans le cas des architectes, à certains travaux; et aussi l'objectif de ne plus avoir une limite monétaire qui était devenue désuète parce qu'elle n'avait pas été indexée, c'est-à-dire une exemption pour tout bâtiment dont le coût de construction était de 100 000 et moins; alors, ça, c'était devenu désuet. Et l'objectif de la ministre à l'époque était donc de viser la vocation du bâtiment, plutôt qu'une limite monétaire. C'est-à-dire qu'il n'était pas nécessaire, à l'époque, d'avoir un plan d'architecte pour tout bâtiment dont les coûts étaient inférieurs à 100 000; et la modification qui a été faite est maintenant une modification que vous retrouvez à l'article 16 de la loi et qui dit... qui y va plutôt par exemptions par vocation du bâtiment, c'est-à-dire une maison unifamiliale, etc. Je reviendrai au libellé de cet article.

Dès le début du processus, l'Union des producteurs agricoles est intervenue pour sensibiliser les parlementaires aux problèmes vécus par les agriculteurs, agricultrices de la province. On nous a répondu à ce moment-là que nous trouverions réponse dans la réglementation qui devait, en vertu de l'article 1, être adoptée incessamment. Or, nous sommes deux ans plus tard, le règlement n'a toujours pas été adopté et, malgré nos nombreuses demandes, nous n'avons été entendus que par l'Ordre des architectes, qui a daigné nous rencontrer, effectivement; nous avons rencontré l'Ordre des architectes, mais le 28 octobre, soit après que le règlement ait été rédigé, après qu'il ait été fourni à l'Office, et nous n'en avons eu possession que le 20 décembre. Donc, la rencontre a porté sur des objectifs généraux.

n(15 h 40)n

Est-ce que, pendant ces deux années-là, c'est-à-dire entre l'année d'entrée en vigueur, le 5 décembre 2000, et le moment où la réglementation aurait dû être adoptée, donc en décembre 2002 ou plus tard... Parce qu'on doit vous faire rapport aujourd'hui de la mise en application du règlement; or, ce règlement n'existe toujours pas, il sera difficile, donc, d'élaborer sur la mise en application. Mais, durant ces deux années-là, est-ce qu'il y a eu suspension de l'application de la loi ou est-ce que l'Ordre des architectes a témoigné d'un quelconque laxisme ou, disons, largesse dans l'interprétation de sa loi? Bien, notre réponse, c'est: non. Durant ces deux années, les producteurs et productrices du Québec ont malheureusement été, entre guillemets, les victimes ou ont subi les effets d'une application de cette loi de façon textuelle.

Ce que l'Ordre des architecte a fait, c'est qu'elle a distribué aux diverses municipalités un document, que vous trouverez en annexe de mon document, intitulé... que j'ai mentionné comme étant l'Annexe B. À l'Annexe B, vous trouverez donc un document qu'a fait circuler l'Ordre. Vous trouverez aussi, comme Annexe C, diverses correspondances adressées aux municipalités du territoire du Québec et à certaines municipalités en particulier.

Ce que nous avons vécu, c'est, de notre point de vue, que les architectes ont fait publicité, évidemment, et correctement, de la modification de la loi, mais en ne mettant pas, selon nous, l'accent suffisamment sur les exemptions qui existaient dans la loi, mais bien sur les amendes qu'une municipalité peut encourir si elle laisse quelqu'un délivrer un permis alors qu'il n'y a pas de plan d'architecte. Et lorsque vous lirez les annexes B et C, vous verrez que le ton des correspondances aux municipalités est beaucoup plus celui de: Si vous émettez un permis et que vous n'avez pas exigé les plans et devis d'un architecte, vous êtes vous-mêmes passibles d'une amende de 10 000 $. Et, en plus, la personne qui construit sans avoir un plan d'architecte est, elle aussi, passible d'une amende, et elle peut construire cette construction-là alors même que vous lui avez délivré un permis et qu'elle se croit à l'abri d'une poursuite.

Notre propos est à l'effet que cette représentation-là faite par l'Ordre des architectes manquait de nuance et a amené les municipalités à être mélangées, à trouver des difficultés dans l'interprétation qui devait être faite de la Loi des architectes. Certaines municipalités ont vu comme: Ah, enfin, il va nous arriver un autre fardeau; maintenant, en plus d'avoir l'émission des permis, la supervision des distances séparatrices pour les odeurs en milieu agricole, en plus, il va falloir surveiller si effectivement il y a des plans d'architecte.

Alors, il y a certaines municipalités qui ont réagi. Vous trouverez en Annexe D deux résolutions de municipalités qui demandent au Parlement de modifier la Loi sur les architectes ou tout au moins d'en modifier certains... d'en faire certaines nuances, puisque l'interprétation est devenue pour elles très difficile. Elle est devenue difficile pour elles notamment parce que plusieurs municipalités n'exigeaient pas, dans leur réglementation municipale, de plans et devis faits par un architecte. Pour certaines municipalités, aucuns plans et devis faits par un, appelons-le «expert reconnu par la loi», pour utiliser les termes de la réglementation qui vous est soumise... et pour certaines municipalités, bien, on demandait des plans d'ingénieur.

Pour certaines municipalités qui ne demandaient pas du tout de plans, elles ont pris la Loi sur les architectes comme étant l'imposition maintenant faite à une municipalité, malgré sa réglementation municipale. Habituellement, la réglementation sur les permis de construction est assez simple, dans les municipalités. Alors, certaines municipalités ont cru que la Loi sur les architectes venait amender leurs propres règlements municipaux pour venir ajouter une obligation, même si elle n'était pas requise dans leur réglementation municipale, soit l'obligation d'émettre un plan et devis d'architecte.

Or, ce n'est pas la position de l'Union des producteurs agricoles. On pense que, si on rencontre la réglementation municipale, on devrait nous émettre le permis. Mais on comprend que, si la réglementation municipale demande un plan et devis, si l'exemption ne s'applique pas à nous, il devrait y avoir, selon l'interprétation qui est faite de l'Ordre des architectes de sa loi, un plan d'architecte.

Alors, tout ça, sur le terrain, s'est traduit durant les deux dernières années par des municipalités qui étaient réticentes à émettre les permis, des municipalités qui, bien que leurs législations à elles n'exigeaient pas de plans, se sont vues tout à coup à dire: Votre dossier, il est complet au niveau municipal, M., Mme productrice et producteur, mais il y a la Loi sur les architectes et maintenant vous devez déposer un plan. Alors, évidemment, ça a retardé certains travaux et ça a occasionné des problèmes au niveau de l'émission des permis dans plusieurs municipalités.

L'autre problème auquel je voudrais vous sensibiliser, avant d'arriver aux modifications que l'on voudrait voir faites à la réglementation, c'est le suivant. Les producteurs et productrices du Québec, lorsqu'elles décident d'investir dans leur entreprise, doivent faire face à différents ministères, des réglementations municipales, des réglementations au niveau du MAPAQ, des réglementations au niveau de l'environnement. Elle doivent avoir souvent affaire à un notaire, affaire à un arpenteur-géomètre, affaire à un ingénieur agricole, affaire souvent à un avocat, affaire la plupart du temps à un agronome. Vient, en sus de toutes ces obligations-là, maintenant, l'obligation de payer des frais pour des plans et devis d'architecte.

Or, il y a certaines situations qui choquent le sens commun. Prenons le cas de fosses de lisier à purin. Comme tel, c'est une structure en béton assez simple. Est-ce qu'on a besoin d'un plan d'architecte pour une fausse de déjection animale? Est-ce qu'il y a un travail d'architecture là-dedans, ou si ce n'est pas purement un travail d'ingénierie? C'est un trou avec une base et il y a du ciment là-dedans; il n'y a pas de sortie de secours, il n'y a pas d'accès au public, il n'y a pas de toiture, il n'y a pas... La liste pourrait être longue, mais ça choque un peu le sens commun. Si j'ai une étable, et qu'à quelques pas de l'étable j'ai un silo, et que je dois construire, entre l'étable et le silo, quelques mètres de toiture, ce qu'on appelle habituellement une... vous allez m'aider, là, mais une cabane à ensilage...

M. Lacasse (Christian): ...

Mme Brodeur (Johanne): ...alors, disons, pour abriter le producteur quand il va chercher l'ensilage puis qu'il le ramène dans l'étable, et que cette construction-là a quelques mètres de long, quelques mètres de haut et se compose d'une toiture mais que l'ensemble excède 300 m², est-ce qu'on va demander un plan d'architecte pour ça? Est-ce qu'on va demander un plan d'architecte à un producteur qui va construire une porcherie où il n'y a jamais accès au public, où il n'y a pas de bureau, où il n'y a pas de salle de bain, où il n'y a pas d'escalier, où il n'y a pas de sous-sol et où il n'y a jamais de deuxième étage? Alors, il me semble qu'il y a certains cas où ça choque le sens commun.

C'est pour ça que, ce qu'on vous demande, c'est... La réglementation qui est devant vous aujourd'hui procède en énumérant la totalité des listes d'activités que peut faire un architecte. Je me permettrais à ce stade-ci un commentaire. Dans les notes explicatives, il est tout à fait vrai, et au crédit des architectes, qu'ils expliquent que, quand un professionnel autre a une compétence, c'est lui qui doit l'exercer. Mais je ne peux pas m'empêcher, lorsque je lis la liste, de m'apercevoir que plusieurs des actes cités sont du ressort exclusif d'une autre profession.

À titre d'exemple, dans l'Annexe I du règlement qui vous est soumis, on dit qu'à l'article 3.1.5 le schéma d'implantation de l'édifice sur le site... «Schéma d'implantation de l'édifice sur le site», c'est ce qu'un arpenteur-géomètre qualifierait de certificat de localisation. Est-ce que cet acte-là n'est pas du ressort strict et unique des arpenteurs-géomètres? Et à cet effet-là, vous devriez recevoir une lettre de l'Ordre des arpenteurs-géomètres.

Quant à l'article 5.1.10 de l'annexe 1, M. le ministre Jutras, vous avez reçu une lettre du bâtonnier Claude Leduc, hier. Effectivement, l'article 5.1.10 mentionne que l'interprétation des documents contractuels est du ressort de l'architecte. Je comprends qu'il y avait une note explicative, mais, même là: «L'interprétation d'un document contractuel est du ressort exclusif des avocats et des notaires. Il ne peut donc être, par le biais d'une réglementation, un acte réservé aux architectes.» Et je ne crois pas non plus que ce soit dans l'intérêt du public de confier exclusivement aux architectes tant la situation du bâtiment sur le site que l'interprétation des documents contractuels.

Or, ce que nous vous demandons, ce que nous vous suggérons de faire, c'est d'ajouter au règlement une clause ? et vous l'avez dans les conclusions de notre mémoire ? qui dirait que lorsqu'un bâtiment a pour usage principal l'agriculture, tous les actes listés à l'annexe peuvent être posés par tout consultant externe reconnu par la loi ou tout consultant externe non reconnu par la loi. Autrement dit, que lorsque l'usage principal du bâtiment est l'agriculture et qu'il ne sert habituellement qu'à l'entreposage de machineries agricoles, d'intrants agricoles, soit de la nourriture, soit des produits chimiques, ou du lisier, ou autres, ou encore qu'il n'y ait jamais accès au public, qu'il n'y ait pas d'escalier, pas de deuxième étage, comme je vous ai dit, tous les exemples qui choquent le sens commun, que, dans ces cas-là, il y ait une exemption d'application de la loi aux bâtiments agricoles, ce qui permettrait aux producteurs et productrices d'investir sur leur entreprise beaucoup facilement et sans ajouter, à la longue liste de professionnels devant être consultés, l'architecte.

n(15 h 50)n

On comprend cependant qu'il y a certains bâtiments qui, lorsqu'ils ont plus que deux étages, lorsqu'ils ont un sous-sol, lorsqu'ils sont accessibles au public, là... on pourrait voir les représentations qui pourraient vous être faites. Mais, comme telle, la présentation de l'UPA, aujourd'hui, c'est de vous demander d'exempter les bâtiments agricoles, et ça peut se faire à l'intérieur du règlement, tout simplement en y ajoutant une clause, en mentionnant que, pour les bâtiments à usage principal agricole, que la Loi sur les architectes... en fait que les producteurs n'aient pas à déposer de plans et devis faits par ce type de professionnels.

Alors, c'était notre présentation. Et vous avez en annexe les résolutions des municipalités. Et la lettre du Barreau, je l'ai apportée avec moi; on m'a dit que vous en aviez copie, M. le ministre, mais je ne vous en ferai pas lecture, je prends pour acquis que vous en avez pris connaissance.

Le Président (M. Lachance): Merci, Me Brodeur, M. Lacasse. Le moins qu'on puisse dire, c'est que votre position, elle est limpide, elle est claire. M. le ministre.

M. Jutras: Je vous trouve chanceux, M. le Président, de trouver ça clair, mais peut-être je vais trouver ça clair dans deux minutes, là, on va clarifier des choses justement, là. Pourquoi dites-vous, quand vous donnez même l'exemple de la fosse à purin ou d'une remise quelconque, que ça vous prend des plans et devis d'architecte? Sur quoi vous vous basez?

Mme Brodeur (Johanne): En fait, les municipalités qui émettent les permis, et vous le verrez à la lecture des annexes...

M. Jutras: ...municipalités qui font la loi, là.

Mme Brodeur (Johanne): Non, absolument pas. Mais les municipalités ont reçu des documentations de l'Ordre des architectes afin de les sensibiliser à l'application qu'ils devaient faire de la loi ou tout simplement les sensibiliser qu'avant d'émettre un permis, ils devaient avoir un plan et devis d'architecte. C'est en général ce qu'ont compris les municipalités, c'est ce que nous comprenons à la lecture des documents de l'Ordre. Il est possible que la position de l'Ordre soit plus nuancée, mais, en général, si vous lisez les résolutions des municipalités, c'est ce qui est compris.

Si vous regardez l'article 16.1 et les exemptions. Alors si la loi ne s'applique pas à une fosse, il faut que la fosse rentre dans les exemptions de la loi, l'article 16.1. Or, à sa lecture, 16.1 dit: Il n'est pas nécessaire d'avoir un plan et devis pour des travaux d'architecture, alors: «une habitation unifamiliale», on est d'accord qu'une fosse, c'en n'est pas; «une habitation unifamiliale jumelée ou rangée», c'en n'est pas le cas; «habitation multifamiliale d'au plus quatre unités», ce n'est le cas. «Établissement commercial», «établissement d'affaires», «établissement industriel», est-ce que ça, ça fait référence à bâtiments agricoles? C'est là qu'est la problématique d'interprétation. Pour ma part, je pense qu'une fosse à purin, lorsqu'elle n'a pas de toit, est une construction et non pas un édifice. Sauf que, quand on va voir la municipalité, l'interprétation que la municipalité, elle, en fait, c'est: Écoute, je vais avoir 10 000 $ d'amende si tu n'as pas de plan et devis, parce que c'est une construction. Alors, il y aurait lieu de clarifier l'interprétation.

Et elle est encore rendue plus difficile pour la raison suivante. C'est que, quand on voit «établissement industriel», on nous dit: Mais Me Brodeur, «établissement industriel», si vous allez voir la Loi sur le bâtiment puis le Code de construction, il est écrit qu'un établissement industriel ? puis il y a «lourd», «moyen» et «léger» ? qu'un établissement industriel léger, ça peut être une ferme. Mais il y a un problème, c'est qu'on va chercher dans la Loi sur le bâtiment et dans le Code de construction cette définition-là, or la Loi sur le bâtiment ne s'applique pas aux usages agricoles, parce qu'il y a un règlement d'application de la loi qui exempte du Code de construction, du Code de sécurité et de la Loi sur le bâtiment, les usages agricoles. Donc, est-ce que, dans 16.1, est-ce qu'à la lecture de 16.1 les municipalités sont justifiées de conclure qu'un bâtiment agricole est exempté?

D'ailleurs, je vous amènerais à l'Annexe ? j'y arrive, un instant ? l'Annexe C de mon rapport. Alors, dans l'Annexe C du rapport, vous trouvez une multitude de documents qui émanent de l'Ordre des architectes. Et la quatrième page de ce document-là, qui est un extrait d'un cahier à spirale ? je m'excuse de vous le montrer comme ça, là, mais c'est ce document-là ? alors...

M. Jutras: L'Annexe C aussi.

Mme Brodeur (Johanne): L'Annexe C, quatrième feuille, c'est un document qui émane de l'Ordre. En bas, on voit inscrit, page 26, alors: «Des plans préparés, signés et scellés par un architecte sont-ils requis...» Premier point. «Les édifices agricoles sont-ils exclus de l'application de la Loi sur les architectes? Réponse: non. Explication: les édifices agricoles sont des édifices au même titre que les autres édifices. La Loi sur les architectes s'applique donc.» Alors, c'est ce qui est véhiculé. C'est la raison pour laquelle les municipalités vous ont soumis les résolutions que vous avez et c'est la raison pour laquelle, dans certaines municipalités, ils ont dit: Oui, mais, nous, notre réglementation municipale n'en exige pas, de plan d'architecte. Puis d'un autre côté on avait: Oui, mais on ne veut pas être passibles de 10 000 $ d'amende. Et, alors là, ça a tout retardé l'émission des permis pour les bâtiments agricoles. Et, pour ceux qui, finalement, se sont soumis, bien, ça leur a coûté 2 000, 3 000 $ et plus pour obtenir un plan d'architecte.

Et je dois ajouter qu'en région, certaines régions comme en Gaspésie, en Côte-Nord, ce n'est pas évident de trouver un architecte, premièrement, puis deuxièmement, parfois, ce n'est pas évident de trouver un architecte qui a de l'expérience dans les bâtiments agricoles. Parce qu'historiquement, les bâtiments agricoles ayant été exemptés, ils n'ont pas développé cette expertise-là, tout simplement.

M. Lacasse (Christian): Mais je voudrais quand même m'assurer que vous comprenez qu'on ne veut pas... Ce n'est pas juste par rapport aux structures d'entreposage, là, qu'on souhaiterait une exemption. C'était un exemple qu'on donnait qui nous semble le plus absurde. Mais en même temps, là, quand on parle d'une exemption possible de 300 m², il n'y a à peu près plus de bâtiments agricoles qui sont en bas de ça, là. Et, nous, on ne comprend pas que pour nos bâtiments, bon, pour habiter des animaux, il y a strictement l'exploitant, là, qui va travailler là quelques heures dans la journée, qu'on soit rendu, au Québec, à obliger les producteurs à avoir un plan d'architecte quand ils veulent... à faire affaire avec un architecte pour construire ce genre de bâtiment là. Nous, on ne comprend vraiment pas la nécessité, là, puis la pertinence; on trouve ça carrément exagéré.

M. Jutras: Oui. Écoutez, c'était l'autre question que j'avais, puis là, finalement, vous y avez répondu. Ce que vous nous dites, même, dans vos exploitations agricoles, les édifices, les bâtisses de moins 300 m², maintenant, c'est... généralement, c'est même plus que ça.

M. Lacasse (Christian): Oui. La très grande majorité des bâtiments maintenant sont au-delà de 300 m².

M. Jutras: Alors, la nécessité d'avoir des plans et devis signés et scellés par un architecte, pour un poulailler, vous, vous dites donc qu'on a beau penser à la protection du public, ce n'est peut-être pas nécessaire.

M. Lacasse (Christian): Bien là, il faudrait voir jusqu'à quel point c'est dans l'intérêt public, là... c'est l'intérêt public qui est en cause, là. Parce qu'en réalité, comme on vous dit, c'est l'exploitant, là, qui fait les travaux, et il y a peu d'accès, là, à d'autres personnes dans ces bâtiments-là.

M. Jutras: Parce qu'en fait, en pratique, j'imagine que ce sont plutôt ce qu'on pourrait appeler des bâtiments répétitifs, là, dans le sens que je pense qu'il n'y a rien qui ressemble plus à un poulailler qu'un autre poulailler, hein, c'est pas mal pareil, puis il n'y a rien qui ressemble plus à une étable qu'une autre étable, en tout cas c'est pas mal semblable de l'une à l'autre. Alors, j'imagine qu'en pratique, les exploitants agricoles, ils vont effectivement sans plan et devis d'architecte, normalement, là, hein? Sauf que là, vous avez une difficulté, je comprends, là, je comprends bien. Mais, ce que vous nous dites, c'est que ce n'est pas nécessaire?

n(16 heures)n

M. Lacasse (Christian): Je dirais, jusqu'à maintenant, là, disons jusqu'avant la loi, les producteurs ont toujours construit leurs bâtiments, bon, soit avec des entrepreneurs ou, bon, des producteurs aussi qui ont quand même des habiletés. Ils vont faire affaire avec des entreprises qui fabriquent des «trusts», si on veut, là. Bon. Alors, il y a quand même des... Ces entreprises-là font les «trusts» en fonction des conditions de bâtiment nécessaires au Québec, les normes qui sont requises pour ce genre de structures-là. Alors, moi, je pense qu'à ce niveau-là, pour s'assurer que les bâtiments ont la structure qu'il faut, qu'ils vont supporter la neige, qu'ils vont résister aux intempéries, je pense qu'il y a... les bâtiments ont fait la démonstration qu'ils peuvent résister à ça. Maintenant, pourquoi au-delà de ça demander un travail d'architecture? Moi, je... on ne voit vraiment pas en quoi ça peut améliorer les bâtiments actuels, parce que, bon, il n'y a pas d'accès aux personnes, il n'y a pas...

M. Jutras: O.K. Peut-être deux petites questions...

Le Président (M. Lachance): Oui, M. le ministre.

M. Jutras: ...parce que je sais que mes collègues aussi ont des questions. Oui, mais là, vous dites qu'il y a des entreprises spécialisées qui font ces bâtiments-là, qui construisent ces bâtiments-là. Comme des fosses à purin, il y a des entreprises spécialisées qui font ça. Mais est-ce que... À la base, savez-vous si ces entreprises-là obtiennent des plans d'architecte? Ça, c'est ma première question.

Je vous pose tout de suite l'autre et, après, je laisserai la parole à mes collègues. Quand vous nous avez dit, Me Brodeur... J'ai cru comprendre, puis je veux être certain que je vous ai bien comprise: nous avez-vous dit que vous voulez que ces travaux-là finalement soient toujours sous la supervision d'un consultant externe non reconnu par une loi ou consultant externe reconnu par une loi, tel qu'on le voit dans le projet de règlement des architectes? Est-ce que c'est ça que vous nous avez dit? Parce que, là, ça veut dire que... si on prend ce qu'il y a dans le règlement, ça veut dire, donc, que c'est toujours sous la supervision d'architectes.

Mme Brodeur (Johanne): Bien, écoutez, ce qu'on demande, ce qui est vraiment le souhait des producteurs agricoles, c'est d'avoir une exemption, qu'il y ait supervision ou qu'il y ait travail fait par un architecte. C'est parce que je comprends que, à ce stade-ci, on est à l'étude de la réglementation mais que la loi est déjà en vigueur. Évidemment, on préférerait un amendement à la loi qui, à l'article 16, viendrait carrément dire: 16d. Usages. On n'a pas besoin de plans et devis pour les usages principalement agricoles. Prendre le même texte et le même verbatim que le gouvernement du Québec a pris dans son règlement, exemptant les usages agricoles de l'application de la Loi sur le bâtiment. Je pense que, au niveau de la législation, ce serait tout à fait facile d'interprétation si le même vocabulaire était utilisé. Ça, c'est la première piste.

S'il n'était pas possible d'amender la loi, peut-on avoir le même résultat en modifiant la réglementation qui vous est soumise? Et c'est là qu'on a pensé que, s'il était ajouté un article au règlement en disant: Tous les actes qui sont listés là, à moins que... Et je n'étais pas à la présentation que l'Ordre des architectes vous a faite, mais, si leur prétention est à l'effet que tous les actes listés là ne peuvent se faire que sous la supervision d'un architecte, alors là, ma proposition ne peut pas valoir. Mais, si leurs représentations sont autres et qu'ils... parce que j'ai vu dans les notes explicatives qu'ils disaient qu'ils tenaient à respecter les champs de profession des avocats, des notaires, etc., parce qu'il y a plusieurs actes là-dedans qui posent des problèmes à d'autres ordres professionnels. Quand on regarde la liste, là, je ne vois pas pourquoi une interprétation de contrat devrait strictement être faite sous la supervision d'un architecte. Je dois vous dire que l'UPA est en train de construire... double sa superficie puis que les contrats, qui sont des contrats fort volumineux, on les interprète, là, vraiment, et c'est des avocats qui les interprètent, puis on agit pour certains points avec les architectes, mais pas sous la supervision de.

Alors, pour répondre à votre question précisément: s'il y avait ajout à la réglementation d'un article qui disait que, pour tous les bâtiments à usage principal agricole, ces actes-là peuvent être posés par toute autre personne, mais là évidemment pas nécessairement sous la supervision de l'architecte, bien là, on pense qu'on aurait trouvé une solution. Mais, si les représentations de l'Ordre ont été d'une autre nature, bien là, ma suggestion ne vaut pas.

Et pour ce qui était de votre première question, rapidement, allez-y, M. Lacasse.

M. Lacasse (Christian): Oui. À votre question, en fait, moi, je ne peux pas vous dire si... Selon moi, dans le cas de... Lorsqu'un producteur engage un entrepreneur pour construire un bâtiment agricole, il ne fait pas appel à un architecte. La même chose lorsqu'on producteur va acheter directement, va commander des «trusts» pour la toiture de son bâtiment, il va acheter une structure d'acier. Ce n'est pas des questions d'architecture qui se posent, là, c'est bien plus des questions d'ingénierie, là. Je pense que c'est plus avec des ingénieurs de calculer, bon, en fonction de la superficie du bâtiment, quelle va être la grosseur, là, des... à quelle distance on va mettre les «trusts», ces choses-là, puis comment on va faire la «trust» suffisamment forte pour résister, parce que... Mais ça, ça se fait. Moi, je pense que ça, c'est reconnu, là, c'est... Lorsque ces entreprises-là fabriquent ces choses-là, elles doivent faire affaires sur des questions... avec des ingénieurs qui sont reconnus. Ça, il n'y a pas de doute à mon esprit. Et c'est ce qui fait que nos bâtiment, finalement, là, restent convenables pour l'utilisation qu'on en fait.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Frontenac.

M. Boulianne: Merci, M. le Président. Bien, vous avez peut-être répondu en partie. Ce que vous dites, de toute façon... Moi, il y a des choses qui ne sont pas claires. Les architectes, vous le mentionnez textuellement, historiquement, ne détiennent aucune expertise dans ce domaine-là, le bâtiment agricole. Mais, toutefois, les ingénieurs, eux, agricoles sont spécialisés.

Est-ce que ça veut dire que, des plans venant des ingénieurs, vous allez les accepter puis venant d'un architecte, non?

Mme Brodeur (Johanne): Quand les municipalités... parce qu'il y a plusieurs régions qui m'ont envoyé des dossiers de demandes de permis, lorsqu'une municipalité requiert, pour l'émission d'un permis, un plan et devis, la plupart du temps et habituellement, presque à 99,9 %, l'ingénieur se tourne vers un ingénieur agricole et là, il va dire à l'ingénieur agricole: Dessine-moi une étable avec une stabulation libre et une alimentation robotisée. Et l'ingénieur agricole sait très bien ce que ça implique et il fait les plans, et le plan de l'ingénieur est déposé à la municipalité.

M. Boulianne: Quand vous parlez de sécurité, vous semblez dire ? je ne sais pas si j'ai bien compris ? que la sécurité n'est pas trop en question. Mais il y a des personnes qui entrent dans ces bâtiments-là, il y a des personnes qui voyagent, puis on est toujours... Je pense que, quand on va dans un bâtiment, on veut se sentir en sécurité même s'il y a de la machinerie. Vous avez pris un exemple, vous avez dit: Bon, l'édifice ou la machinerie, mais les personnes vont là. Il y a même de plus en plus, sur des fermes, de la formation. On va avec des jeunes. On va...

M. Lacasse (Christian): Oui, mais c'est quand même... C'est peu fréquent. Je pense qu'on peut s'entendre là-dessus: l'accès à des personnes est peu fréquent sur les fermes. Dans certaines entreprises, il est carrément interdit. Pour des questions sanitaires, il n'y a aucun accès qui est autorisé à aucune autre personne qui travaille dans le bâtiment. Puis, de façon très, très, très générale, l'accès, là, à ces bâtiments-là est réservé aux exploitants. Alors, il n'y a pas d'accès public sur les fermes de façon fréquente. Bon. Certaines entreprises peuvent recevoir un visiteur de temps à autre, mais c'est très, très limité.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Duplessis.

M. Duguay: Bon. Merci beaucoup, M. le Président. Moi, également, M. Lacasse et Mme Brodeur, merci beaucoup. Il y a juste par rapport... Je sais que, dans votre mémoire, vous nous indiquez que, lorsque la consultation s'est faite pour l'adoption des règlements, vous avez été mis à contribution mais peut-être juste à la toute fin. Or, vous, vous trouvez déplorable que l'Ordre n'ait pas désiré vous rencontrer avant, et je sais que ça a peut-être des conséquences aussi sur les objectifs que vous vivez ou que vous visez, à l'effet que, lorsqu'on parle des édifices ou des bâtiments qui peuvent être construits sur une ferme, en tout cas, là, vous ne soyez pas assujettis nécessairement aux services d'un professionnel pour la construction.

Comment, en tant que législateurs, on pourrait agréer à votre demande si jamais... comment vous voyez ça, vous autres... si jamais on voulait aller de l'avant, là, comment vous voyez ça si... Bon. Là, on sait que, au niveau des règlements... Puis on sait que vous avez fait référence, Me Brodeur, à l'effet que, dans la loi, elle est déjà en vigueur, donc, à moins de changer les dispositions de la loi... Mais croyez-vous qu'à l'intérieur des règlements on puisse trouver des correctifs qui puissent agréer à vos demandes?

Mme Brodeur (Johanne): La technique législative évidemment, comme je vous ai mentionné, on préférerait qu'il y ait une modification à la loi même. Par ailleurs, on pense que pourrait aussi être valide un ajout aux règlements mentionnant que les actes listés ne s'appliquent pas, ils n'ont pas à être faits ni par une autre personne ni par l'architecte, en mettant, dans cette réglementation-là, une exemption en disant que: N'a pas à être fait ni sous la supervision ni par un autre, et, pour utiliser les termes de la réglementation, «consultant externe non reconnu par la loi» ou «consultant externe reconnu par la loi», que, pour les bâtiments agricoles, l'exemption se retrouve dans la réglementation en utilisant le vocable de la réglementation.

n(16 h 10)n

Ce qui s'est passé historiquement, c'est qu'au moment où la loi est entrée en vigueur, on a fait des représentations et, à ce moment-là, on nous a dit: Patience, vous allez avoir réponse à vos maux dans la réglementation. C'est pour ça que vous voyez en annexe... Dès le 17 janvier... La loi est entrée en vigueur le 5 décembre, dès le 17 janvier, on écrivait à l'Ordre pour dire: Bien là, on est prêts, nous, on veut la faire, la réglementation, rencontrez nous. Et, finalement, malheureusement... et on l'a appris à la lecture des documents. Puis, quand on avait rencontré l'Ordre, on savait que le règlement était déjà tout rédigé lorsqu'on nous a rencontrés.

M. Lacasse (Christian): Ce n'est pas à la toute fin qu'on a été informés et consultés, c'est après que le règlement ait été rédigé, là.

Le Président (M. Lachance): M. le député de D'Arcy-McGee et porte-parole de l'opposition officielle.

M. Bergman: Merci, M. le Président. Me Brodeur, M. Lacasse, merci pour votre présentation, c'est fort intéressant. Et je vois une logique dans la demande que vous faites, mais j'ai un problème avec cette demande d'exemption. Vous demandez une exemption d'un bâtiment avec usage principal agricole, et je me demande: Qu'arrive-t-il dans un bâtiment, disons, industriel ou du même type, ou un bâtiment de storage, ou un petit garage où il n'y a aucun accès au public? C'est dans... c'est presque voisin à ce bâtiment industriel auquel vous faites référence: un doit avoir un architecte, l'autre, pas, dans votre exemple. Je ne comprends pas votre raisonnement d'exemption spécifique que vous demandez si on ne fait pas une exemption pour d'autres bâtisses d'un usage connexe, industriel, de garage. Aussi, il me semble que ? et peut-être que j'ai mes faits pas corrects ? il y avait un bâtiment agricole dans la Beauce dans lequel il y a eu une chute ou un problème il y a presque un an. Alors, dans cette optique, j'aimerais avoir votre vision.

M. Lacasse (Christian): Bien, moi, je crois... Nous, on parle en connaissant notre secteur, les bâtiments dans lesquels on travaille à tous les jours, et c'est pour ça que l'exemption qu'on demande, on la demande en fonction de ce qu'on connaît. Ça demeurera au législateur de voir si l'exemption doit être plus large que ça. Je ne crois pas... Nous, on serait mal placés pour juger ça, sauf que, tenant compte de la connaissance qu'on a des bâtiments agricoles, de l'utilisation qu'on en fait, de l'accès qu'il y a à ces bâtiments-là, on pense que c'est logique d'avoir une exemption. Pour ce qui est d'au-delà de ça, bien, ça, je pense que c'est...

M. Bergman: ...à ma question... Dans un sens, je trouve une certaine logique dans votre question, dans votre demande pour exemption. Mais, si j'étire la logique un peu, je vois qu'il n'y a aucune fin. Et, si on va d'une bâtisse agricole sans accès au public, on peut avoir une bâtisse de storage; on peut avoir une bâtisse industrielle, aucun accès au public; on peut avoir un garage. Et ces bâtiments peuvent être voisins l'un de l'autre. Alors, je ne vois pas comment on peut tirer une logique de votre demande d'exemption, à moins qu'il y ait une exemption, comme on dit en anglais, «across the board». Mais, dans ce sens, je ne vois pas comment on peut aller dans cette direction aussi.

Mme Brodeur (Johanne): J'aimerais ajouter que notre logique s'appuie aussi sur la logique antérieure du législateur. Si le législateur québécois n'a pas jugé bon d'inclure dans sa législation le Code du bâtiment agricole canadien, parce qu'il existe un Code de bâtiment agricole canadien spécifiquement pour les bâtiments agricoles, il ne s'applique pas au Québec, si le législateur qui a adopté une loi sur le bâtiment a jugé bon d'en exclure l'application à l'usage agricole et à d'autres usages, y compris certains usages industriels, si le législateur a jugé bon de ne pas appliquer le Code de construction puis le Code de sécurité, c'est qu'il y avait une logique en arrière de ça, et c'était basé sur l'histoire de la structure et de ces bâtiments agricoles là. Et la logique est aussi la suivante: Quelles normes va devoir appliquer l'architecte, va devoir tenir en compte l'architecte, alors que les normes législatives ne s'appliquent pas?

Et je terminerais en disant que la plupart des bâtiments neufs qui ont une grande superficie, bien, on vous l'a dit, il y a des professionnels quand même d'impliqués. Mais on ne pense pas qu'il y ait tellement d'architecture qu'un architecte devrait être impliqué, mais plutôt qu'il y a beaucoup plus d'ingénierie et qui fait en sorte que, là, à ce moment-là, il pourrait y avoir implication d'un ingénieur. Parce que les travaux d'architecture comme tels... Bien qu'il y ait un toit sur ces bâtisses-là, comme je vous ai dit, la plupart du temps, elle n'est pas accessible au public, il n'y a pas de salle de bain, il n'y a pas de bureau, il n'y a pas d'escalier. Donc là, il y a certains éléments qu'on retrouve habituellement dans l'architecture d'un édifice qu'on ne retrouve pas dans un bâtiment agricole.

M. Bergman: Mais, cette bâtisse, c'est dans la Beauce, qui est descendue il y a moins d'un an, c'est une bâtisse agricole, n'est-ce pas?

Mme Brodeur (Johanne): Elle s'est écroulée durant la démolition et non pas durant la construction, de mémoire, si ma mémoire est bonne.

M. Bergman: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Alors, merci, M. Lacasse et Me Brodeur. Et je dois vous dire à tous que je connais bien M. Lacasse comme producteur laitier de Saint-Vallier de Bellechasse. Puis c'est un producteur qui est performant, parce que imaginez-vous qu'il a gagné la médaille de l'Ordre du mérite agricole, la médaille d'argent, le 9 octobre dernier, en 2002. Alors, c'est une fierté pour les gens de mon coin de pays.

Remarques finales

Alors, nous allons maintenant aborder l'étape finale de nos travaux de ce jour, et ça s'appelle, justement, les remarques finales. Et, selon notre procédure, j'inviterais le porte-parole de l'opposition officielle à nous faire part de ses remarques.

M. Lawrence S. Bergman

M. Bergman: Merci, M. le Président. Quand vous dites «les remarques finales», je pense qu'on peut dire peut-être «remarques préliminaires», car on voit qu'avec la loi n° 132, le règlement qui a été déposé, le rapport du ministre et les consultations qu'on a faites aujourd'hui, il reste beaucoup de travail à faire sur ce dossier. Et je pense qu'à ce moment le fardeau, c'est au gouvernement de produire une réponse aux consultations qu'on a eues aujourd'hui.

Premièrement, j'aimerais remercier tous les intervenants. On voit qu'il y avait beaucoup de réflexion sur les problèmes qui ont été soulevés. Et on est à un moment très, très important dans notre système professionnel, important dans le sens qu'on doit donner une direction pour faire suite au rapport qui a été déposé. Les consultations que nous avons tenues aujourd'hui nous indiquent, M. le Président, la complexité d'une problématique relative à la pratique de l'architecture en général et des ordres connexes... les groupes connexes, et on voit qu'on doit avoir une meilleure coordination dans ce sujet.

Le projet de règlement, comme je l'ai mentionné ce matin, lors des remarques préliminaires, va dans le sens opposé des objectifs du plan d'action qui a été déposé par le gouvernement en 1999 et des modifications au système professionnel comme on l'observe dans le domaine de la santé. Et c'est important, M. le Président, que le gouvernement maintienne la même direction qu'ils ont prévue avec le plan d'action de 1999. Il faut essayer et tendre vers une corporation de façon à favoriser, comme j'ai dit ce matin, la multidisciplinarité et l'interdisciplinarité. Le mécanisme de délégation des actes, je pense qu'on l'a vu avec tous les intervenants, est trop lourd. Aussi, le mécanisme de délégation, c'est un mécanisme qui a beaucoup de côtés négatifs, de questions qui n'étaient pas répondues. Et même l'Office des professions a dit dans un document que ce mécanisme, c'est un mécanisme qu'on doit employer seulement dans des moments spécifiques, mais on ne peut pas l'imposer «at large» ou d'une façon générale. Alors, il serait plus favorable, M. le Président, d'entrevoir un système plus adapté à la demande des ordres aujourd'hui.

n(16 h 20)n

Il n'est pas trop tard pour que le gouvernement encourage un dialogue avec les différents intervenants que nous avons entendus aujourd'hui. On voit que chaque intervenant est prêt pour faire qu'est-ce qui est nécessaire pour arriver à une solution, et on doit se rappeler qu'une solution a un but seulement, et c'est la protection du public. Et le public attend de nous qu'on complète ce travail dans une manière efficace. Il faut arriver à une solution qui favorise l'établissement d'un consensus durable, et c'est la seule façon de régler le problème. Je pense que le gouvernement a une deuxième chance pour régler ce problème.

Alors, en terminant, encore, j'aimerais remercier ceux qui ont pris le temps pour intervenir devant nous: les membres de cette commission, vous-même, M. le Président, et mes collègues, et mon recherchiste qui était avec moi pendant toute cette journée. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Merci, M. le député de D'Arcy-McGee. Et je cède maintenant la parole à M. le ministre responsable de l'application des lois professionnelles et ministre de la Justice.

M. Normand Jutras

M. Jutras: Alors, merci, M. le Président. Alors, d'abord, je veux remercier mes collègues, là, autant de ma formation que mon collègue de l'opposition, pour leur contribution à nos travaux, leur collaboration. Je veux aussi remercier les différents ordres qui sont... les différents ordres professionnels qui sont venus devant nous aujourd'hui nous exposer leur position. Je parle des ordres professionnels et je parle aussi des autres associations, là, non constituées en ordres professionnels et qui nous ont exposé leurs prétentions. Je veux remercier évidemment, là, les gens de l'Office des professions, M. Samson, pour la collaboration de tout un chacun aujourd'hui dans la conduite de nos travaux.

C'est sûr que, quand on regarde le chemin parcouru au cours des dernières années, partant du revirement jurisprudentiel que nous avons connu en 1996, partant aussi du plan d'action qui avait été déposé par ma prédécesseure, Mme la députée de Lévis, on s'aperçoit qu'il y a eu un bout de chemin qui a été fait. On voit que, depuis ce temps, il y a eu une révision du programme de formation des technologues en architecture et il y a eu aussi le projet de règlement qui nous a été déposé par les architectes.

Du projet de loi n° 132, l'évolution qui est heureuse, c'est d'abord que nous ayons, comme législateurs, à ce moment-là, trouvé un critère objectif pour définir le champ. Parce que, auparavant, on se rappelle qu'on avait une norme monétaire, laquelle norme monétaire était décriée à peu près par tout le monde, et à peu près tous les ordres aussi nous demandaient de ne plus nous baser sur cette norme monétaire, qui était de 100 000 $ à l'époque, parce que, avec l'inflation, l'évolution du coût de la vie, on en arrive à une norme, finalement, qui ne correspond plus à la réalité. Alors, je pense que ça, effectivement, ça a été un plus d'avoir su trouver une norme qui est davantage objective, où on parle, bon, de 300 m², on parle du nombre d'étages. Alors, c'est plus facile, c'est plus facile à situer et c'est plus facile de savoir de quoi on parle, et ça suit mieux l'évolution qui peut se faire en ce domaine.

Ce que je veux dire aussi, c'est que ce qu'on s'aperçoit, et il y a au moins... bien, à peu près tous les ordres, finalement, le disent, c'est plus facile, dans ce domaine, de travailler lorsqu'il y a une collaboration entre les différents ordres professionnels. Les ingénieurs nous l'ont dit clairement. Les designers d'intérieur nous l'ont dit clairement, également. Et nous pouvons dire aussi que, comme législateurs, nous l'avons vécu clairement lors de l'adoption du projet de loi n° 90, où plusieurs ordres professionnels, au nombre de 11 exactement, se sont assis à la même table et, bien que dans certains cas ils pouvaient avoir des intérêts divergents, ils ont réussi à trouver un terrain d'entente. Et ça, je veux le dire, je veux le répéter, ce fut heureux pour tous les membres de ces ordres professionnels, ce fut heureux pour les ordres professionnels eux-mêmes, et surtout parce que, finalement, ce qui nous anime, c'est toujours la protection du public et c'est toujours de servir le public. Que l'on soit assis ici ou que l'on soit assis dans la salle, c'est ça qui nous anime, de mieux servir le public. Alors, je pense que, dans ce cas-là, c'est heureux, dans le cas du projet de loi n° 90, qu'il y ait une entente qui soit intervenue et à la satisfaction de tous et à la satisfaction des ordres professionnels.

Ce n'est pas le cas en l'occurrence. Mon collègue de l'opposition faisait encore appel à la possibilité d'une entente, moi aussi, je le dis: Je pense que c'est, encore là, ça qui est la meilleure solution, d'en venir à une entente entre les différents ordres professionnels. Puis, comme l'a fait mon collègue de l'opposition, bien, moi aussi, je fais ce même appel, s'il y a possibilité d'en venir à une entente. Je suis certain que c'est dans l'intérêt de tous, parce que ce qui doit nous animer, je l'ai dit et je le répète, ce qui doit nous animer, c'est la protection du public, nous sommes là pour servir les gens. Et, quand on parle de la protection du public, bien, ça rejoint effectivement ce service à la population.

Et ce qui doit aussi nous animer à d'autres égards, et ça, on le retrouve dans le plan d'action qui avait été déposé par ma prédécesseure, c'est: on veut aussi en venir à un assouplissement du cadre réglementaire. Alors, cela doit nous guider également, au même titre que la protection du public. Et ce qui doit nous guider également, c'est une plus grande ouverture des milieux professionnels à la coexistence de plusieurs disciplines, de plusieurs ordres professionnels ? là, je parle de multidisciplinarité ? et à la mise en commun des compétences respectives ? et là je parle d'interdisciplinarité. Alors, finalement, nous vivons tous dans la même société, et ce que nous voulons, c'est de permettre à toutes les compétences de s'exercer sans mettre en cause la protection du public, en voyant à ce que le public soit toujours protégé.

Moi, j'ai trouvé la journée intéressante. J'ai trouvé que les représentations qui nous avaient été faites étaient intéressantes. On s'aperçoit que ce n'est pas simple, mais, tenant compte de ce que je viens de dire, à savoir que nous sommes guidés par un désir d'allégement réglementaire, que nous sommes guidés par la protection du public, que nous sommes guidés par les principes, et mon collègue, aussi, de l'opposition y a fait également référence, de multidisciplinarité et d'interdisciplinarité, bien, dans ce sens-là, il nous faudra donc continuer notre réflexion animés par ce qui nous a été présenté aujourd'hui par les différents intervenants, que je remercie, parce que toutes ces interventions étaient intéressantes, ça nous a permis de bien comprendre les positions des différents ordres.

n(16 h 30)n

Alors, moi, je veux remercier encore une fois tous ces gens et leur dire que, dans l'évolution du dossier, pour la suite des choses, nous serons donc animés... nous allons réfléchir à ce qui nous a été présenté aujourd'hui, nous allons revoir tout ce qui en est de ces représentations et toujours en restant dans les objectifs qui font partie de notre plan d'action en matière professionnelle, bien, à ce moment-là, nous en viendrons, finalement, à une décision à un moment donné. Mais j'appelle encore, si possible, à la collaboration des ordres professionnels, c'est ça qui serait préférable. Mais, s'il advenait que rien ne bouge de ce côté-là, bien, animés par les arguments qu'on nous aura donnés aujourd'hui, bien, on ira plus loin.

Alors, je remercie donc mes collègues, je remercie les intervenants de la journée.

Documents déposés

Le Président (M. Lachance): Merci, M. le ministre. Et, avant de mettre un terme à nos travaux, je voudrais déposer deux documents qui émanent de Mme Sylvie Carrier: une lettre datée du 17 février 2003, signée par Mme Carrier, qui est designer d'intérieur; et un autre document qu'elle a déposé... qu'elle souhaite qu'on dépose à la commission. Alors, c'est fait. Et, là-dessus, je vous remercie de votre excellente collaboration. Et, comme la commission des institutions s'est acquittée de son mandat, j'ajourne les travaux sine die.

(Fin de la séance à 16 h 31)


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