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Version finale

41e législature, 1re session
(20 mai 2014 au 23 août 2018)

Le mercredi 25 novembre 2015 - Vol. 44 N° 77

Étude détaillée du projet de loi n° 78, Loi encadrant l’octroi des allocations de transition aux députés qui démissionnent en cours de mandat


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Table des matières

Remarques préliminaires

M. Jean-Marc Fournier

M. Bernard Drainville

M. Benoit Charette

Mme Françoise David

Étude détaillée

Question de règlement sur la recevabilité d'amendements

Décision de la présidence

Autres intervenants

M. Maka Kotto, président suppléant

M. Donald Martel

M. Harold LeBel

Note de l'éditeur : La commission a aussi siégé en soirée pour l'étude détaillée du projet de loi n° 59, Loi édictant la Loi concernant la prévention et la lutte contre les discours haineux et les discours incitant à la violence et apportant diverses modifications législatives pour renforcer la protection des personnes. Le compte rendu en est publié dans un fascicule distinct.

Journal des débats

(Quinze heures onze minutes)

Le Président (M. Kotto) : Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des institutions ouverte. Et je vous prierais, cependant, de vous assurer que vos appareils électroniques sont en mode silencieux afin de ne pas perturber nos travaux.

La commission est réunie afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 78, Loi encadrant l'octroi des allocations de transition aux députés qui démissionnent en cours de mandat.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Billette (Huntingdon) remplace M. Rousselle (Vimont); M. Drainville (Marie-Victorin) remplace Mme Hivon (Joliette); M. LeBel (Rimouski) remplace M. Leclair (Beauharnois); M. Kotto (Bourget) remplace M. Marceau (Rousseau); M. Martel (Nicolet-Bécancour) remplace M. Jolin-Barrette (Borduas); et M. Charette (Deux-Montagnes) remplace Mme Roy (Montarville).

Remarques préliminaires

Le Président (M. Kotto) : Bien. Alors, nous débuterons avec les remarques préliminaires. M. le ministre responsable de la Réforme des institutions démocratiques, vous disposez d'un maximum de 20 minutes pour vos remarques préliminaires.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier : Je ne prendrai pas les 20 minutes, M. le Président. Merci beaucoup. Je salue l'ensemble des membres de la commission. Je vais me concentrer sur le 78, et pas sur le 79. Essentiellement, il y a trois articles dans le projet de loi. Je suis avisé qu'une de nos collègues fera un ou deux amendements tantôt... en fait, deux amendements en deux genres, et peut-être que je profiterai des remarques préliminaires pour en parler déjà un peu à l'avance.

Essentiellement, l'objectif... Et le titre du projet de loi ne peut être plus clair, Loi encadrant l'octroi des allocations de transition aux députés qui démissionnent en cours de mandat. Alors, l'objectif, le principe du projet de loi, c'est de regarder les députés qui quittent en cours de mandat. Ce n'est pas pour regarder d'autre chose et c'est pour considérer comment on règle ce départ en cours de mandat. Ça, c'est le principe de base. Une fois que j'ai dit ça, je sais que notre collègue de Gouin a déjà manifesté, on l'a dit... j'en ai discouru d'ailleurs lors du débat sur le principe, sur son intention d'inclure aussi la question des allocations de transition pour quelqu'un qui ne se représente pas ou quelqu'un qui se présente aux élections et perd, et là on est dans un autre horizon que le départ durant mandat.

D'abord, je tiens à rappeler que le rapport L'Heureux-Dubé proposait que toutes les mesures entrent en vigueur à la prochaine législature, à la législature suivante, la législature qui a adopté, ce qui nous amène, dans le fond, à fin 2018, début 2019. C'est ça, l'esprit. À l'égard des départs durant mandat, d'une part, il y avait manifestation d'au moins deux partis politiques qui ont déposé des projets de loi sur cette question spécifique, manifestant l'intention que cela arrive plus vite pour cette question-là. J'étais avisé de cela et, comme vous le savez, je cherche à avoir un appui unanime derrière la question qui est celle des conditions de travail des députés, là, je ne cherche pas à ce que ce soit un groupe qui l'impose à quelqu'un d'autre et je me suis dit : Bon, voilà, on nous propose d'arriver plus vite. Qu'en est-il sur le fond?

On est face à des députés qui, en 2014, se sont présentés avec un cadre de travail, qui, d'eux-mêmes, décident, si on veut, d'être en bris de contrat, c'est-à-dire de cesser... au moins, de décider de cesser d'apporter leur contrepartie au contrat. C'est une décision personnelle. Qu'elle soit justifiée ou pas n'est pas tellement important ici, là — ça viendra plus tard — sur les conséquences, mais il s'agit d'une décision prise par un des députés plutôt que par la législature. Conséquemment, je crois qu'à partir de cette décision on peut appliquer dorénavant à ceux qui voudraient faire ce genre de choix de briser eux-mêmes le contrat initial... on pourrait, dès la sanction, changer la règle.

Par contre, pour ceux qui ne sont pas en bris de contrat, ceux qui sont arrivés en 2014, continuent leur prestation de travail, est-ce que la législature voudra imposer — enfin, rétroactivement — de nouvelles conditions de travail? D'une part, cela m'affecte un peu parce que c'est comme changer les conditions de travail. On peut discourir sur quel est ce genre de travail, est-ce que c'est une allocation de transition ou est-ce que c'est un salaire différé. Vous savez qu'il y a différentes façons de voir ce qu'étaient ces montants-là, là, peu importent les noms qu'on leur donnait. Reste qu'on assisterait à une législature qui vient changer les règles, alors que les députés se sont présentés sans connaître ces règles-là. Cela me semble affecter des droits, d'une part, et ils ne respectent pas la volonté de L'Heureux-Dubé. Donc, à l'égard de cette question-là, je vais être assez ferme. Jusqu'à un certain point, je dirais — et je sais que j'aurai l'occasion de le redire tantôt si les amendements arrivent — je crois qu'ils ne respectent pas le principe même du projet de loi qui est sous étude parce qu'il s'intéresse, ce projet de loi, à la question des départs durant mandat.

Ceci étant, la députée de Gouin, lorsqu'elle avait évoqué sa réaction au projet n° 78... Et je l'avais entendue à la radio à ce moment-là, et je m'étais dit : Woups! il y a quelque chose que je n'avais pas vu. Dans le départ durant mandat, quelqu'un quitte, il n'y a pas de justification, bien, il n'y a pas d'allocation de transition — qui va être un nouveau terme reconnu comme concept pour l'avenir — mais quelqu'un quitte pour une raison de maladie ou son conjoint, sa conjointe est malade... Bon, je prends un exemple, j'en parlais avec la députée de Gouin un peu plus tôt, imaginons le député ou la députée dont le conjoint ou conjointe, par sa situation, ne peut pas faire en sorte que le député soit absent de la maison cinq jours semaine et qu'il doit être à la maison constamment ou, en tout cas, quelques heures par jour, donc impossible de pratiquer le travail de député. Ça ne veut pas dire que cette personne-là n'est pas en mesure de travailler un petit peu autour de son conjoint ou sa conjointe, là, dans les environs.

Alors, la question qui est à débattre — encore une fois, avant de dire que je serais favorable, j'aimerais qu'on en débatte, qu'on en discute — la question est la suivante. Dans le cas de ceux qui... Lorsque le 79 sera adopté et qu'ils auront respecté leur contrat, et pour qui il y aura une allocation de transition qui cessera ou qui diminuera en fonction du revenu de travail, que devrions-nous faire? Et je n'ai pas de réponse complète parce qu'il y a un petit peu de compassion en moi qui a l'air à me dire : Mais tu es-tu sûr que tu veux faire ça à quelqu'un qui a des problèmes de santé ou sa conjointe a des problèmes de santé? Mais je veux qu'on en débatte.

Cette personne-là quitte durant mandat, ce qu'on ne veut pas vraiment encourager. Soyons francs, ce n'est pas l'objectif ici d'encourager le départ durant mandat, ça coûte 700 000 $, faire une élection partielle. Mais, dans ce cas-là, l'allocation de transition pour quelqu'un, tel qu'il est écrit dans le projet de loi, pour quelqu'un qui quitte... justifiée par le Commissaire à l'éthique et qui occupe un emploi néanmoins ou qui, une fois que la condition de santé est terminée et occupe un emploi, là il n'y aurait pas la déduction de l'allocation par rapport au salaire obtenu. Vous voyez un peu le... Alors, là-dessus, il y a une question parce que ce n'est pas prévu dans le projet de loi. Le projet de loi, on a fait L'Heureux-Dubé intact. C'est ce que je veux faire, d'ailleurs, à tous égards.

Sauf que, là, il y a une espèce d'idée de concordance à se demander. S'il y en a un dont on réduit le revenu de travail de l'allocation quand c'est la fin de mandat, que fait-on de celui qui quitte durant mandat? Pour une bonne raison, mais que fait-on? Et je dois vous dire que j'ai besoin de vos lumières — dans le fond, ça sert à ça, des commissions parlementaires — parce que j'ai un petit bout qui me dit : Mais là, admettons, là, lui-même, le député, est malade, puis là je suis en train de dire : Oui, tu es malade, mais tu n'es pas assez malade puis... Là, je suis un peu mal à l'aise. Je ne sais pas comment vous réagissez à ça. Ton conjoint ou ta conjointe, il faut que tu quittes, puis sais-tu quoi? Bon, l'allocation, là, je te coupe ça parce qu'on veut être pareil comme ce qu'on fait dans l'autre cas. Il y a une partie de moi qui dit : Il y a une certaine logique à faire pareil. Puis il y a une partie de moi qui me dit : Tu ne trouves pas que tu es un peu dur sur le monde qui ont des problèmes?

Alors, je vous soumets ça parce que je le dis... parce que, d'entrée de jeu, on connaît assez le 78, il y a pas beaucoup d'articles. Je pense que je connais assez la position de tout le monde, mais ça, ça va être un petit débat qu'on pourrait avoir, quitte à ce qu'on se dise : Est-ce qu'on le règle tout de suite? Est-ce qu'on le réglera dans le 79? Est-ce que... Pour ce qui est de la temporalité du changement ou de la correction, ça aussi, ça peut être débattu, mais je voulais profiter de mes remarques préliminaires pour mettre un peu la table sur, je crois, des questions qu'on pourrait bénéficier d'un échange pour éclairer nos lanternes, étant entendu que le fondement de ma démarche, pour moi, restera d'être le plus fidèle dans 78 et 79 au rapport L'Heureux-Dubé. Merci, M. le Président. Et bonne chance à nos collègues pour la suite des choses.

• (15 h 20) •

Le Président (M. Kotto) : Merci, M. le ministre. J'invite maintenant le porte-parole de l'opposition officielle en matière d'éthique et d'intégrité et député de Marie-Victorin à faire ses remarques préliminaires.

M. Bernard Drainville

M. Drainville : Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Salutations aux collègues. Salutations au ministre. Et, bien sûr, M. le Président, salutations à vous, qui allez présider nos travaux. Je salue également les équipes qui accompagnent le ministre en particulier.

Alors, évidemment, M. le Président, on entame le dernier droit qui va nous permettre, finalement, d'abolir ces primes, qu'on va devoir, effectivement, renommer de plus en plus «allocations de transition». Et je suis assez d'accord que c'est... je préfère les mots «allocation de transition», ça fait moins récompense, hein? La prime, ça envoie un message quasiment pas de... On ne veut pas encourager les gens, mais, quand on leur dit : Tu pourrais te mériter une prime, il me semble que ça un petit côté incitatif, le mot «prime», alors que le mot «allocation de transition», je le trouve plus neutre et je trouve qu'il dit mieux ce à quoi ces allocations-là ou ces montants d'argent là doivent servir.

Alors, bien entendu, M. le Président, j'ai l'impression de me répéter un peu parce que ça fait je ne sais pas combien d'interventions que je fais sur ce sujet-là, mais on se réjouit, évidemment, du fait que le ministre ait repris, pour l'essentiel, le libellé du projet de loi n° 33, qu'on avait déposé lorsque nous étions au gouvernement. Le projet de loi n° 33, qui a été repris dans un projet de loi déposé dans cette présente législature par le député de Verchères, projet de loi qui porte le numéro... je pense, c'est 398.

Alors, le ministre a fait un petit ajustement, une petite modification au projet de loi initial, et je dois dire, M. le Président, que nous sommes à l'aise avec ce changement-là qui a été apporté par le ministre, qui prévoit essentiellement que c'est le Commissaire à l'éthique qui va déterminer si la prime doit être versée ou pas, alors que, dans le projet de loi initial, le Commissaire à l'éthique recommandait, mais, ultimement, c'était le Bureau de l'Assemblée nationale qui prenait la décision. La recommandation du Commissaire à l'éthique devait quand même être rendue publique. Donc, on savait ce que le commissaire en pensait, mais c'est les députés, ultimement, à travers le BAN, qui prenaient la décision. Là, c'est le Commissaire à l'éthique qui va prendre la décision, et je pense que c'est une bonne idée, M. le Président, que l'on dessaisisse complètement les députés de cette décision-là. Je pense que ça va donner à la décision d'accorder ou pas la prime en vertu des raisons de santé ou des raisons familiales, là, un caractère plus objectif, plus impartial et donc plus crédible. Je pense, la décision va être moins susceptible d'être questionnée ou remise en question si le commissaire la prend puis que les députés n'ont pas un mot à dire sur la finalité de la chose.

J'ai posé cette question-là lors du débat sur le principe. Je me suis posé la question : Est-ce que la décision du commissaire sera rendue publique ou pas? Le ministre, si je me rappelle bien, m'a répondu : Écoutez, c'est un peu délicat parce que, s'il la rend publique, est-ce qu'il doit aussi rendre publiques les raisons? Et, à ce moment-là, on rentre dans des considérations personnelles, des considérations de santé, notamment. Alors, il faudrait voir. Est-ce qu'on pourrait, comme je l'avais prévu d'ailleurs dans 33, prévoir que la décision est rendue publique, que la décision d'accorder ou pas la prime est rendue publique, mais la justification pour la décision, les détails de la décision, ça, ça reste confidentiel parce qu'il est question, bien entendu, de la situation personnelle d'un ou d'une députée?

Alors, on aura cette discussion-là au 12.1, lors de la discussion sur l'article 12.1, M. le Président. Chose certaine, moi, je veux vous dire que je pense que, ce projet de loi là, il faut tendre le plus possible vers une adoption unanime. Je suis d'accord là-dessus avec le ministre, je pense qu'il faut vraiment tout faire pour qu'on l'adopte, tout le monde ensemble, et je pense que ce serait aussi, M. le Président, un très beau signal à envoyer à nos concitoyens. Lors du débat sur le principe, j'ai utilisé les mots «cadeau de Noël». Je pense, ce serait, effectivement, reçu, pour certains de nos concitoyens, à tout le moins, comme une sorte de cadeau de Noël, comme une sorte de geste de bonne volonté de notre part et un geste de reconnaissance que c'est une décision nécessaire, qu'on a trop attendu pour poser ce geste-là. C'est une façon de dire à nos concitoyens : Nous vous avons compris. Nous vous avons entendus, nous vous avons compris. On sait à quel point ça vous met en furie, alors on s'ajuste. On resserre beaucoup, beaucoup, on met fin aux allocations de transition pour les députés démissionnaires. Dans les faits, c'est ça qui devient la nouvelle règle, et les seules exceptions permises seront les exceptions pour ceux et celles d'entre nous qui devront quitter parce qu'ils sont obligés de quitter, essentiellement.

Puis j'ai bien aimé l'exemple que le ministre a utilisé. On ne se le souhaite pas à personne, M. le Président, mais c'est un fait qu'on peut imaginer un député ou une députée qui doit quitter parce que son conjoint ou sa conjointe vit un problème de santé grave, puis on se sent l'obligation de rentrer à la maison pour en prendre soin, pour être avec elle. Donc, je pense que la loi, de la façon dont elle est écrite... Puis je fais confiance au Commissaire à l'éthique pour que la jurisprudence qui se développera autour de cette loi-là sera équitable, sera juste. Je pense que le mot «juste» est celui qui doit s'appliquer ici. Je pense qu'on trouvera dans l'accumulation, dans l'addition des décisions du Commissaire à l'éthique un juste équilibre qui fera en sorte que les personnes qui ont vraiment besoin, qui doivent obtenir cette allocation de départ, cette allocation de transition pourront l'obtenir dans les cas de force majeure, quand ce sera vraiment nécessaire et je fais confiance à la bonne volonté puis au sens du jugement du Commissaire à l'éthique.

Puis on n'est pas des sans-coeur, M. le Président, autour de cette table, on est des êtres humains, puis je pense qu'on saura... Je pense que le Commissaire à l'éthique saura s'ajuster, saura prendre les bonnes décisions et je pense qu'il saura puiser dans la bonne volonté des gens qui siègent dans les Parlements, dans notre Parlement, les espèces de balises, mettons, humanitaires qui départageront le vrai du faux, qui départageront le nécessaire de l'artifice.

Et donc c'est un projet de loi nécessaire. Je pense qu'il va, effectivement, nous aider, et ça va nous donner un instrument, M. le Président, pour, parfois, dans certaines entrevues qu'on doit faire puis où on se fait piquer, on se fait dire par certains animateurs, notamment, qu'on est des ci, puis on est des ça, puis qu'on est des... Je pense qu'on pourra, après l'adoption de ce projet de loi là, dans les semaines ou les mois qui vont suivre, on pourra se servir de cet exemple-là pour montrer qu'on est capables de travailler ensemble pour poser des gestes positifs, on est capables de s'ajuster aux sentiments de l'opinion publique. Ce n'est pas vrai qu'on est sourds puis on est aveugles, on est capables de comprendre la frustration que peuvent vivre parfois nos concitoyens, puis on s'ajuste en conséquence, puis je trouve que ce projet de loi là, c'est une réponse à ça. Alors, c'est un geste de bonne volonté. Je pense que ça va contribuer, d'une certaine façon, à lutter contre le cynisme et, donc, à réparer un tant soit peu le lien de confiance, qui est amoché, M. le Président. Ça fait des années qu'on le dit. Alors, c'est un geste d'intégrité.

Et j'ai écouté avec attention ce que le ministre a dit à propos du contrat, le contrat moral, et il a raison. C'est l'argument, moi, que j'utilisais depuis le début, je disais : Quand on se présente aux élections, il y a une espèce de contrat moral qui existe à partir de ce moment-là entre les électeurs qui nous ont envoyés au Parlement pour les représenter et nous-mêmes. Si on leur disait, au moment où on se présente aux élections : Vous savez, je me présente, mais je ne suis pas sûr que je vais faire quatre ans, il y en a peut-être qui seraient élus sur cette base-là, mais il y en a une couple qui ne seraient pas élus sur cette base-là, M. le Président. Ça, je suis sûr de ça. Alors, quand on se présente, d'une certaine façon, on dit aux électeurs : Bien, si j'y vais, j'y vais pour servir mon mandat, j'y vais pour faire le mandat au complet. Alors, il y a une forme de contrat et, dans ce contrat-là, il y a également la rémunération qui vient avec le contrat.

• (15 h 30) •

Et donc j'ai bien entendu la représentante de Québec solidaire et députée de Gouin nous soulever les amendements dont elle souhaite nous saisir. Je ne veux pas entamer tout de suite la discussion autour de ces amendements-là, on pourra le faire en temps et lieu, mais je dois vous dire, M. le Président, qu'il y a deux éléments fondamentaux qui vont nous guider dans les délibérations que nous aurons dans les prochains jours. Cette notion de contrat, elle est très importante, à notre avis, et il faut faire attention de changer rétroactivement le contrat. Et, par ailleurs, il y aura aussi cette idée que le projet de loi qui est devant nous, c'est, pour l'essentiel, le projet de loi n° 33 que nous avions déposé. Et nous souhaitons, M. le Président, que ce projet de loi là soit adopté avant Noël, et donc il faudrait se garder de trop s'égarer, d'emprunter des sentiers qui pourraient nous amener à une situation où on serait dans l'impossibilité de le faire adopter. Alors, je nous appelle à la sagesse.

Je comprends très bien qu'il y a des discussions plus délicates qu'il nous faudra avoir lors de la discussion sur le projet de loi n° 79. Ce sera l'occasion, lors de la discussion sur 79, quand elle viendra, de se saisir d'un certain nombre de questions qui sont plus délicates, du type de celles qui sont posées par les amendements qu'a évoqués la députée de Gouin. Alors, je vous dis d'emblée, M. le Président, que, nous, ce que nous souhaitons, c'est que le projet de loi, il soit adopté. Et, s'il y a des enjeux pour le rendre peut-être plus... Comment dire? S'il y a des enjeux de perfectibilité, peut-être devrons-nous convenir que la meilleure façon de les aborder, c'est par l'entremise du 79 plutôt que par l'entremise du 78, celui sur les primes.

Alors, je vais me limiter à ça pour le moment et je vais écouter, bien sûr, avec attention les interventions des collègues en souhaitant qu'on puisse procéder et adopter d'ici vendredi prochain le projet de loi n° 78, M. le Président. Merci de votre écoute.

Le Président (M. Kotto) : Merci pour ces remarques. Alors, j'invite maintenant le porte-parole du deuxième groupe d'opposition en matière de réforme des institutions démocratiques et député de Deux-Montagnes à faire ses remarques préliminaires.

M. Benoit Charette

M. Charette : Merci, M. le Président. Je serai extrêmement bref à ce moment-ci. Je pourrais répéter ce qui a été dit à plusieurs reprises à travers différentes interventions. Je sais que le Parti québécois en a fait par le passé, nous en avons fait de notre côté depuis quelques années aussi. Je vois maintenant le leader du gouvernement, qui reprend essentiellement les mêmes préoccupations qu'on a pu exposer par le passé. Donc, nous accueillons, naturellement, avec beaucoup de satisfaction le dépôt du présent projet de loi. On aura certainement quelques questions. Il est, effectivement, sujet d'amendements. Reste à voir comment ils seront défendus, mais, pour le reste, on accueille favorablement le dépôt du projet de loi et on espère pouvoir procéder le plus rapidement possible pour son adoption.

Le Président (M. Kotto) : Bien, merci. Alors, est-ce qu'il y a d'autres membres qui souhaiteraient faire des remarques préliminaires? Oui, Mme la députée de Gouin.

Mme Françoise David

Mme David (Gouin) : Oui. Merci, M. le Président. D'entrée de jeu, je voudrais dire que nous n'avons pas la moindre intention de faire de l'obstruction sur ce projet de loi, sachant que la partie qui nous dit : Un député démissionnaire sans raison valable ne touchera pas d'allocation de transition, c'est un sujet sur lequel nous sommes tous d'accord à l'Assemblée nationale. Et donc je pense que, si on se contentait seulement de ça, ça irait très rapidement, mais... Et, là-dessus, ma formation politique, bien entendu, est en accord. Mais c'est là que le plaisir de la chose commence, nous croyons que c'est insuffisant. Et vraiment ça n'est pas pour repousser aux calendes grecques l'adoption du projet de loi n° 78, nous pensons que nous pourrions procéder rapidement, puis je vais expliquer rapidement, moi aussi, en remarques préliminaires ce que nous croyons qui devrait être fait.

Je pense que c'est important, là, aujourd'hui, si on veut parler de perception populaire, si on veut parler de confiance de la population à l'égard des députés de toute la classe politique, si on veut faire la démonstration de notre entière bonne foi, il faut que ce que nous adoptons soit applicable à nous-mêmes. Je pense que c'est la meilleure preuve de la véracité, de la pertinence, de l'efficacité de ce qu'on avance. Donc, oui, j'aurai des amendements, j'en ai déjà parlé, qui demanderont, dans le fond, qu'on règle complètement la question de l'allocation de transition. Pas seulement pour dire : Certains députés n'y auront pas droit dans certaines conditions, mais pour dire qu'il s'agit d'une allocation de transition. Ce n'est pas un salaire différé, ce n'est pas une prime de départ — là-dessus, je suis absolument en accord avec le leader de l'opposition officielle — c'est une allocation de transition.

Une allocation de transition veut dire une chose très simple, il y a un moment où le député part — disons pour de bonnes raisons, ou alors le député est défait à l'élection ou alors il ne se représente pas — il a besoin d'un moment de transition. Il ne touche pas l'assurance-emploi, il a besoin d'une allocation pour l'aider à vivre. Moi, je trouve ça normal, mais ça s'appelle une allocation de transition. Je ne comprends pas pourquoi on devrait reporter à la prochaine législature l'adoption d'une allocation de transition avec tout ce que ça veut dire. Et donc, oui, dans le projet de loi n° 79, il y a un certain nombre d'articles qui la définissent très bien. Et tout ce que j'ai fait, c'est d'aller chercher ces articles-là pour les ramener à 78, précisant ainsi ce qu'est véritablement une allocation de transition. Ce n'est pas une prime de départ, ce n'est pas un chèque interminable avec lequel un député pourrait vivre deux ans, même s'il a commencé à travailler le lendemain, c'est une allocation de transition. J'entends bien le leader du parti gouvernemental qui nous dit : Oui, mais, pour certains députés, ça représentait un salaire différé. Je souligne amicalement que, dans le cas des employés municipaux, quand on a parlé de retraite, les employés municipaux plaidaient aussi qu'il s'agissait de salaire différé, ce qui n'a pas empêché d'aller légiférer dans leur régime de retraite.

À mes yeux, aux yeux de ma formation politique, une allocation de transition n'est pas un salaire différé, c'est une allocation de transition pour aider un député à reprendre pied. L'un des députés démissionnaires du présent gouvernement, Gilles Ouimet, a dit, au moment de sa démission : Je vais prendre l'allocation de transition, mais, dès que je trouve en emploi, je cesse de la toucher. Bien, pourquoi on n'est pas capables, tous et toutes ensemble, de se dire ça?

J'ai en tête aussi le cas d'un ministre qui a démissionné il n'y a pas si longtemps, qui, le lendemain, retrouvait son emploi de médecin, mais touchait quand même une allocation de transition considérable. Ça, ça a choqué autant l'opinion populaire que d'autres députés démissionnaires qui ont touché, effectivement, leur allocation de transition, mais qui, dans leur cas, n'avaient pas d'emploi tout de suite.

Donc, je ne saisis pas très bien — et je suis tout à fait prête à en débattre — pourquoi on est si soucieux de reporter à la prochaine législation l'adoption de tout ce qui touche l'allocation de transition. On en fait une partie avec 78, j'en suis aussi heureuse que mes collègues, mais, tant qu'à y être, tant qu'à être sur le sujet, je suggère, évidemment — et j'y viendrai éventuellement — qu'on balise cette allocation de transition, qu'on lui donne tout son sens, tel que le voulait le rapport L'Heureux-Dubé, et je vais proposer aussi que l'ensemble de la question, l'ensemble de l'oeuvre, donc, soit applicable dès la présente législature. Merci, M. le Président.

Étude détaillée

Le Président (M. Kotto) : Merci, Mme la députée. Est-ce que d'autres membres souhaiteraient prendre la parole pour des remarques préliminaires? Non? Alors, s'il n'y a pas de motion préliminaire, nous allons immédiatement débuter l'étude article par article. M. le ministre, la parole est à vous.

M. Fournier : Je propose, M. le Président, que nous commencions par l'article 1.

Des voix : ...

M. Fournier : ...bonne méthodologie.

Le Président (M. Kotto) : Très bonne idée.

M. Fournier : Alors, je vais le lire pour que ceux qui nous écoutent à distance puissent savoir de quoi nous parlons. L'article 12 de la Loi sur les conditions de travail et le régime de retraite des membres de l'Assemblée nationale est remplacé par le suivant :

«12. Un député qui est défait lors d'une élection ou qui termine un mandat à ce titre sans être candidat à l'élection qui suit la fin de ce mandat a droit à une allocation de transition. Un député qui démissionne en cours de mandat a également droit à une allocation de transition, à la condition que sa démission soit justifiée par des raisons familiales sérieuses ou par un problème de santé important affectant un membre de sa famille immédiate ou lui-même.»

C'est l'article 1. On verra plus tard, à l'article 2, le rôle du Commissaire à l'éthique. Mais l'article 1, tel qu'il est libellé, amenant un nouvel article 12, permet de faire la différence entre les départs durant mandat et ceux de fin de mandat, M. le Président. Pour le reste, je pense que tous les députés savent de quoi on parle.

• (15 h 40) •

Le Président (M. Kotto) : Est-ce qu'il y a des interventions sur ce premier point?

M. Drainville : M. le Président, évidemment, lorsque nous avions rédigé le projet de loi n° 33 à l'origine, on s'était demandé qu'est-ce qui peut bien justifier une exception à la règle, hein? La raison de santé nous est apparue, bien évidemment, comme une raison évidente qui justifierait le versement de la prime, mais on avait décidé, après discussion, d'ajouter également les raisons familiales pour couvrir le cas comme celui que j'ai évoqué tout à l'heure, le cas, par exemple, de la conjointe. Ou ça pourrait être un enfant également. Ça pourrait être un de nos enfants qui se retrouve avec un problème de santé ou à qui il arrive un malheur, et puis là ça change la dynamique complètement du fonctionnement de la famille, et puis le député ou la députée décide, à ce moment-là, qu'il n'a tout simplement plus la possibilité de continuer à faire son travail, à bien représenter des citoyens parce que la situation familiale a fait en sorte que tu dois rentrer à la maison, aller t'occuper de ton enfant ou aller t'occuper de ton conjoint ou de ta conjointe.

Je voulais juste savoir — je ne doute pas que le ministre ait en tête des cas comme ceux-là, mais j'étais juste curieux de l'entendre — à titre de ministre parrain du projet de loi, j'aimerais savoir s'il a d'autres cas comme ceux-là qui sont en tête. Parce qu'il faut bien se rendre compte, M. le Président, que, lorsque le Commissaire à l'éthique prendra ses premières décisions, il va peut-être relire les échanges que nous avons eus au moment de l'adoption du projet de loi pour, justement, se guider dans ses décisions, et je pense que la volonté du législateur, elle doit être versée au procès-verbal de cette commission pour, justement, baliser éventuellement les décisions qui pourraient être prises d'accorder ou pas une allocation de transition. Alors, j'aimerais entendre le ministre sur le genre de raisons familiales sérieuses ou de problèmes de santé affectant un membre de la famille immédiate ou lui-même auxquels il pense lorsqu'il propose ce texte.

Le Président (M. Kotto) : Le député de Marie-Victorin vous interpelle, M. le ministre.

M. Fournier : C'est avec bonheur que j'interviens, M. le Président. En fait, pour être franc, je dirai, c'est vrai pour cette disposition-là, mais ce sera vrai pour les autres de 78 et toutes celles de 79. Essentiellement, il s'agit d'une oeuvre législative pour nous qui veut donner corps législatif à un rapport, le rapport L'Heureux-Dubé. D'ailleurs, je suis heureux de constater que les whips de nos différents partis sont avec nous. C'est eux, en tant que whips, qui, à l'occasion d'une réunion du Bureau de l'Assemblée nationale, ont donné mandat à un comité indépendant.

Le libellé qu'on retrouve à l'article 12 est exactement celui de l'article 12 amené par l'article 1, est exactement le libellé que l'on retrouve à la recommandation 9, où on parle de problèmes de santé importants — c'est exactement l'expression qui est utilisée ici — touchant un député ou un membre de sa famille immédiate ou pour des raisons familiales sérieuses. Encore une fois, le «important» et le «sérieux» ont été la manière de qualifier les problèmes familiaux ou de santé suggérée directement par L'Heureux-Dubé. Effectivement, on a nommé tantôt des questions familiales qui peuvent être des problèmes de santé à quelqu'un de notre famille. Il peut y avoir des questions concernant la famille qui sont autres que la santé, qui peuvent être en périphérie, en tout cas. L'accompagnement d'un enfant vivant une période particulière de sa vie, complexe, ne mettant pas nécessairement une question de santé en place, peut aussi être un des éléments.

Une façon de répondre complètement à la question, c'est de dire ceci. Par l'article 2 du projet de loi, il reviendra au Commissaire à l'éthique de s'inspirer des pratiques d'ailleurs. Incidemment, le Commissaire à l'éthique a lu le rapport L'Heureux-Dubé. Il a même, dans son rapport, lui-même publié en février dernier... Je pense, c'était février, je n'en suis plus sûr. Dans son rapport sur les premières années de son travail, il a suggéré à notre législature d'adopter une loi faisant en sorte qu'à l'avenir ce soit toujours un comité indépendant qui fasse nos conditions de travail et il demande même que ce soit exécutoire. Alors, autant la commission le demande que lui, le Commissaire à l'éthique, a suggéré que ce soit ainsi qu'on le fasse. Donc, il est déjà saisi de ça et, puisqu'il en est saisi, il a déjà vu que, dans ce rapport-là, on fait référence à des pratiques dans d'autres juridictions, notamment en Colombie-Britannique, et donc, pour tout ça, il y a déjà un corps jurisprudentiel auquel il pourra se référer à l'occasion de demandes à venir.

Donc, peu importent les exemples qu'on puisse donner, il devra s'inspirer de son propre jugement, de la valeur des mots, autant «important» que «sérieuses»... la santé ou à la famille, et il en est déjà saisi. Alors, je crois qu'on n'a pas besoin d'énumérer des tonnes d'exemples différents parce que les balises qui ont été données par L'Heureux-Dubé me semblent suffisantes pour que le Commissaire à l'éthique puisse exercer un jugement correct, d'autant, rappelons-le, que le Commissaire à l'éthique ne relève pas de l'exécutif, il relève du législatif, il est choisi par les membres de l'Assemblée. Alors donc, je suis assez satisfait, ayant mis les balises que L'Heureux-Dubé nous suggère, que le Commissaire à l'éthique, qui en est déjà saisi et qui, à cet égard-là, n'a pas fait de remarques, mais qui en a fait une sur une autre disposition... m'amène à dire qu'il est tout à fait à l'aise pour pouvoir procéder.

Le Président (M. Kotto) : Merci, M. le ministre. D'autres interventions? Pas pour le moment. Alors, est-ce que l'article 1 est adopté, dans ce cas?

Des voix : Adopté.

• (15 h 50) •

M. Fournier : L'article 2 : Cette loi est modifiée par l'insertion, après l'article 12, du suivant :

«12.1. Le Commissaire à l'éthique et à la déontologie détermine si l'une des conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 12 est satisfaite.

«Avant de rendre sa décision, le commissaire donne au député démissionnaire l'occasion de présenter ses observations et d'être entendu. Le commissaire transmet sa décision par écrit au député concerné ainsi qu'au secrétaire général de l'Assemblée nationale.

«En cas de décision favorable, le paiement de l'allocation est rétroactif à la date de fin du mandat.»

Alors, ici, il y a un certain nombre de choses à préciser, on aura sans doute un échange sur le sujet. Clairement, c'est le Commissaire à l'éthique, donc, qui détermine si les conditions prévues de santé ou de famille ont été rencontrées. On a déjà discuté de cela. On nous dit qu'il permet au député démissionnaire durant mandat de se faire entendre. Audi alteram partem, M. le Président. Le commissaire transmet sa démission par écrit au député, c'est normal, au secrétaire général. Pourquoi? Parce qu'il doit y avoir chez le secrétaire général, évidemment, une information concernant l'allocation en question. Parce que, si la décision n'arrivait pas, l'allocation n'arriverait pas non plus. Parce que, dans le concept ici qui est mis en place, il faut se souvenir que ce n'est que pour les raisons susmentionnées à l'article 12 qu'il y a une allocation. À défaut de celle-ci, il n'y a pas d'allocation. Alors, forcément, d'où vient l'allocation? Vient du Secrétariat de l'Assemblée nationale. Il faut bien qu'il soit au courant qu'un chèque doit être émis. Alors donc, là-dessus, il n'y a pas de difficulté.

Intervient la question de est-ce que l'Assemblée doit être au courant qu'il y a effectivement ou non une décision. D'ailleurs, notre collègue de Marie-Victorin a évoqué cette question où il pourrait y avoir une certaine information donnée à savoir que, ah! voici un député qui aura droit à une allocation et voilà un député qui n'y aura pas droit. En fait, j'imagine que nous ne le saurions, dans son hypothèse, que lorsqu'un député a satisfait aux conditions de l'article 12 et que, donc, l'allocation est transmise.

Alors, je soumets humblement — je l'ai un peu dit, d'ailleurs, la semaine dernière sur le principe — le code d'éthique lui-même nous stipule que l'avis du commissaire, en toute matière, est confidentiel. Il peut être rendu public par le député qui demande l'avis, mais est confidentiel. Alors, la question est la suivante : Devons-nous donner une information de ce type? Le Commissaire à l'éthique est détenteur de nombreuses informations qui sont confidentielles, concernant la vie financière non seulement des ministres, et de leurs conjoints, et de leurs familles, mais des députés, et un grand nombre sont confidentielles.

Et, lorsque le code d'éthique a été adopté, et je m'en souviens parce qu'on a été deux ministres différents à s'occuper de ce dossier-là, mais l'ancien député de Jonquière, lui, a fait le travail tout le long, et ça a été assez... Chicoutimi, pardon, excusez-moi, oui, j'ai oublié. Et Dieu sait qu'on y a travaillé, cette question-là de confidentialité — il ne m'en veut pas, je suis sûr — la question de confidentialité était fort importante parce que c'était la question de dévoilement d'éléments très, très personnels qui n'ont pas nécessairement à être connus. Même dans un monde de grande transparence, il reste qu'il y a des éléments de vie privée qu'on veut protéger. Vous savez que — pour faire une petite parenthèse — je suis responsable de l'accès à l'information et de la protection de la vie privée, et l'un s'oppose à l'autre, et il faut toujours trouver le point d'équilibre entre l'un et l'autre. On peut être totalement en transparence, mais ça peut donc nous faire mal en termes de bris à l'égard d'éléments de confidentialité dont on croit, je crois, que nous souhaitons protéger.

Alors, conséquemment, on est, encore là, à une question d'équilibre. Personnellement, je crois que nous devrions laisser le Commissaire à l'éthique rendre sa décision et en informer le secrétaire général, cela restera confidentiel. Et, s'il y a lieu, il y aura une allocation de transition qui sera transmise. À défaut, par le Commissaire à l'éthique, de trouver les raisons susmentionnées à l'article 12, il n'y en aurait pas.

Moi, je pense qu'on peut avoir confiance au Commissaire à l'éthique parce que dans l'autre cas, à partir du moment où, dans la sphère publique, on saura : Voilà quelqu'un qui a un problème de santé ou de famille, là on dira ce qu'on voudra, mais les députés ne sont pas des citoyens anonymes. Je pense que, ça, je ne convaincrai pas personne ici, tout le monde est assez au courant de la chose. Et quel est le plus grand plaisir de personnes qui ont... Bien, des fonctions qui sont un peu connues, quel est le plus grand plaisir? C'est d'aller gratter, justement, tous ces éléments, notamment de santé. Et je crois que, si j'avais à choisir, dans ce point d'équilibre, entre l'accès à l'information et la protection de la vie privée, je me satisferais, dans ce cas-ci, de la confiance donnée à Commissaire à l'éthique pour qu'il prenne sa décision et qu'il puisse la conserver confidentielle pour que, le député qui a déjà suffisamment à supporter des difficultés de santé ou familiales, que je ne lui impose pas un fardeau supplémentaire. C'est une question d'équilibre. Voilà où mon jugement m'amène à tirer la ligne de démarcation. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Kotto) : Merci, M. le ministre. Y a-t-il des interventions? M. le député de Marie-Victorin.

M. Drainville : Alors, si je comprends bien, M. le Président, le ministre préfère s'en tenir à une décision, donc, du Commissaire à l'éthique qui serait transmise à la fois au député et au secrétaire général de l'Assemblée nationale parce que, bien entendu, c'est le secrétaire général qui enclenche le processus qui mène au versement de la prime ou, du moins, il doit être impliqué dans ce processus-là, et seuls les députés, donc, et le secrétaire général de l'Assemblée seraient informés de la décision du commissaire.

Moi, je pense que la transparence, M. le Président, elle est importante dans ce processus-là. Je pense que, si la règle devient qu'il n'y a plus de prime ou d'allocation de transition pour les députés démissionnaires et que le Commissaire à l'éthique rend une décision exceptionnelle de verser, d'accorder le versement de la prime, je pense qu'il serait normal que les citoyens québécois, qui vont devoir assumer le coût lié au versement de cette prime, je pense qu'il serait normal que les citoyens en soient informés.

Je n'irais pas, par contre, M. le Président, je le précise, je n'irais pas jusqu'à préciser les raisons pour lesquelles la décision a été prise favorablement. Je n'irais pas jusqu'à préciser les raisons qui ont amené le commissaire à rendre sa décision. Ça, je pense que ça doit rester confidentiel, mais je pense que la décision du commissaire de verser une prime devrait être rendue publique. Je pense qu'on va avoir de la difficulté à justifier que ça ne le soit pas, M. le Président. Je pense que ça va être compliqué pour nous, comme législateurs, de défendre l'idée que le commissaire pourrait décider de verser une prime exceptionnellement à un député ou à une députée, mais que jamais ce ne sera connu et que jamais ce ne sera rendu public parce que le député ou la députée en question et le secrétaire général, bien entendu, ne le divulgueront, et le Commissaire à l'éthique, non plus, bien entendu.

Alors, je me vois mal, M. le Président, voter pour ce projet de loi et dire : On abolit les primes, mais, si jamais certaines primes sont versées, jamais les citoyens québécois n'en seront informés. Il me semble qu'il y a quelque chose qui ne marche pas, là. Alors, je le soumets pour la réflexion. Je pense qu'on est en train de voir, là, comment on pourrait rédiger un amendement, là. Je ne veux pas bousculer nos travaux, M. le Président, je ne veux pas bousculer personne autour de cette table, puis, en quelque part, je réfléchis un peu à voix haute aussi, là, en vous livrant mes commentaires, là, mais je nous invite à nous mettre collectivement dans un espace où on se retrouve face à nos concitoyens, là, puis ils nous demandent : Bien oui, mais pourquoi tu ne veux pas que ça se sache? Pourquoi tu ne veux pas nous le dire, là, s'il y en a, une prime, qui a été versée ou pas, là? Puis on va répondre quoi à cette question-là? On va répondre : Bien, c'est parce que c'est confidentiel. Non, ce n'est pas confidentiel. Les raisons pour lesquelles le commissaire rend sa décision sont confidentielles, mais la décision comme telle, elle, elle n'a pas besoin d'être confidentielle. Puis, dans la mesure où c'est nous, concitoyens, contribuables, qui la payons, la prime, on peut-u savoir s'il y en a une ou s'il n'y en a pas eu.

Puis faisons confiance, à ce moment-là, M. le Président, à l'institution du commissaire, qui, comme je l'ai dit tout à l'heure, pourra s'appuyer à la fois sur le texte de loi, mais sur aussi, je dirais, une certaine générosité d'âme, là, qui existe, là. Moi, là-dessus, je suis peut-être encore un peu naïf, M. le Président, mais j'ai tendance à faire confiance. Dans des situations difficiles qui touchent une famille, qui touchent un enfant, qui touchent une conjointe, je pense que notre système de valeurs chez nous, là, au Québec, puis notre système de valeurs comme institution, puis notre système de valeurs comme parlementaires va faire en sorte que quelqu'un qui doit l'obtenir, la prime, va l'avoir. Je suis pas mal sûr de ça, puis je pense que, s'il faut trancher, j'ai l'impression que c'est le sentiment humanitaire qui va prévaloir. Si on est dans l'hésitation, je pense qu'ultimement c'est l'élan du coeur qui va primer, M. le Président. Donc, je n'ai pas trop d'inquiétudes, là, sur le fait que quelqu'un qui mérite, qui a besoin de cette allocation-là pourra l'obtenir, mais il me semble que ce serait correct... bien, plus que correct, en fait, nécessaire qu'on informe le public.

Puis est-ce que l'ex-député, l'ex-parlementaire pourrait se faire éventuellement questionner, recevoir un appel d'un journaliste qui lui demandera : Bien, comment ça se fait que tu as eu une prime? Je pense que ce sera possible, pour l'ex-parlementaire, de dire : Écoutez, c'est la décision du Commissaire à l'éthique, j'ai fait mes représentations et je n'ai pas d'autres commentaires. Merci beaucoup, bonsoir, tu sais.

Je ne sais pas, je réfléchis un peu à voix haute, je le dis en toute sincérité, mais, sincèrement, je vois mal comment on va être capables de défendre que la décision ne soit jamais rendue publique. Les raisons personnelles, à mon avis, ne nous mènent pas logiquement à dire que la décision doit rester cachée. Les raisons personnelles, confidentielles doivent nous amener à conclure que la nature de la décision ou les critères sur lesquels s'appuie le commissaire pour rendre sa décision doivent rester, eux, doivent rester confidentiels, mais la décision, elle, comme telle, je pense qu'il faut la rendre publique. Je vais laisser mes collègues intervenir là-dessus, M. le Président, mais je dois vous aviser d'emblée que nous allons déposer un amendement là-dessus.

• (16 heures) •

Le Président (M. Kotto) : O.K. Je vois Mme la députée de Gouin lever la main.

Mme David (Gouin) : Merci, M. le Président. Alors, brièvement, je vais dire qu'en réfléchissant, en écoutant bien le leader du gouvernement et celui de l'opposition officielle, puis vraiment bien en essayant, moi aussi, de trouver un point d'équilibre, là, je pense que je me range du côté du point de vue du leader de l'opposition officielle pour des raisons très simples, je pense que, de toute façon, si on veut être réalistes, le ou la députée démissionnaire va se faire demander par tout le milieu journalistique pourquoi il démissionne, est-ce qu'il prend l'allocation de transition. J'aimerais qu'on prenne l'habitude de changer notre vocabulaire tous ensemble et qu'on appelle un chat un chat, c'est une allocation de transition. Donc, je pense que, de toute façon, la question va être posée par nos amis journalistes, qui sont plutôt tenaces en cette matière, et que, donc, on va, tout un chacun, le jour où ça arrivera, là, on va devoir répondre de nos actes. Chaque député doit répondre de ses actes, qu'il démissionne en fin de mandat, en cours de mandat, qu'il soit défait, qu'il ne se représente pas, etc. Le ou la députée, le leader du gouvernement l'a dit, nous sommes pas mal sous la loupe, et nous devons répondre de nos actes.

Par contre, là où, effectivement, je trace une ligne, c'est sur les motifs. Donc, je souscrirais à cette idée que la décision du Commissaire à l'éthique soit rendue publique, quelle qu'elle soit, mais c'est tout. Après, il appartient au député lui-même ou à la députée de dire ou de ne pas dire, si tel est son bon vouloir, dans quelles circonstances il ou elle démissionne. Et je vous soumets qu'on en a vu pas mal, de démissions, ces dernières années, généralement les gens nous ont expliqué pourquoi ils quittaient et ils le faisaient d'eux-mêmes. Alors, j'ai l'impression que ça va continuer, tout simplement. Donc, je souscrirais à cette idée de rendre publique la décision d'accorder ou non l'allocation de transition, mais pas les motifs, laissant à la personne démissionnaire ou, en ce qui me concerne, en fin de mandat, ou défait, ou quoi que ce soit, le soin de rendre publics ou non les motifs.

Parce que, s'il y a un point sur lequel je suis d'accord avec le leader du gouvernement, c'est qu'il y a parfois dans des familles, par exemple, des situations délicates qu'un député, par respect pour les membres de sa famille, ne voudra pas expliquer publiquement, considérant que les membres de sa famille ont, eux, le droit à une vie privée. Alors, je comprends très bien ce qu'a dit le leader du gouvernement, mais je pense que, si on disait : On trace une ligne, la décision est rendue publique, point barre, pas de motif, le ou la députée décidera bien de ce qu'il ou elle voudra dire.

Le Président (M. Kotto) : Merci, Mme la députée de Gouin. D'autres interventions? Oui, M. le député de Deux-Montagnes.

M. Charette : Oui, assez brièvement. Ça fait longtemps qu'on réfléchit à la question. Du côté de la deuxième opposition, au moment de formuler notre propre projet de loi, qui a été déposé à travers deux législatures différentes, on avait même pensé à un moment soumettre la décision littéralement au BAN. Et, plus la réflexion s'est poursuivie, plus on en est arrivés à la conclusion, compte tenu de la nature de la démission possible, compte tenu des difficultés sans doute réelles vécues par le ou la députée ou un membre de sa famille, qu'effectivement le Commissaire à l'éthique était le répondant le plus naturel pour devoir trancher.

Et je suis, malgré tout, sensible à l'élément de transparence, à l'élément de reddition de comptes, mais je pense que le ou la députée qui est contraint de démissionner dans des circonstances difficiles a aussi droit à pouvoir refaire éventuellement une vie professionnelle, et c'est là où le jugement du Commissaire à l'éthique n'a pas à être rendu public de façon automatique. Ce que l'on aimerait, de notre côté, c'est que, par souci de transparence, on puisse faire une certaine reddition de comptes à la fin d'un mandat, qu'on puisse retrouver, par exemple, le montant total des allocations qui auront été versées sans qu'on y associe le nom d'un ou d'une députée, mais publiquement mentionner que le trésor public aura eu à payer, par exemple, x centaines de milliers ou x dizaines de milliers de dollars. Donc, on ne différencierait pas le bénéficiaire ou la bénéficiaire, mais on rendrait publics, par souci de transparence, les montants qui auront été versés.

Mais je suis assez sensible aux arguments du leader sur la nécessité ou la capacité du député ou de la députée à devoir refaire sa vie ultimement après son passage en politique. Donc, oui à la transparence, mais sans associer le montant à un individu en particulier, mais plutôt une reddition de comptes publique, en quelque sorte. À la fin d'un mandat, en termes de montants de transition, tant d'argent aura été versé. C'est peut-être la piste d'atterrissage qu'on serait tentés de proposer, là, du côté de la coalition.

Le Président (M. Kotto) : D'autres interventions? M. le député de Marie-Victorin.

M. Drainville : Est-ce que je peux poser une question au député de Deux-Montagnes, M. le Président?

Le Président (M. Kotto) : Je pense que oui.

M. Drainville : Bon. Alors, je veux juste comprendre, M. le député, est-ce que vous parlez d'une reddition de comptes sur une base annuelle ou est-ce que vous parlez sur une base de quatre ans? Donc, on aurait le résultat du nombre de primes versées...

Une voix : ...

M. Drainville : ... — merci — du nombre d'allocations versées au bout de quatre ans, mettons, si on parle d'un gouvernement majoritaire, et avec le montant total du nombre de primes versées, ou est-ce qu'on aurait les noms avec les primes à côté? Ou comment? Je veux juste comprendre votre idée.

Le Président (M. Kotto) : M. le député de Deux-Montagnes.

M. Charette : La mécanique pourrait être discutée entre nous, c'est bien certain. Mais, a priori, ce ne serait pas par année parce que, s'il n'y avait qu'une seule démission au cours d'une année x, ce serait facile de l'associer à un ou à une députée. Donc, on pourrait penser à ce type de reddition de comptes là par mandat, tout simplement. Donc, si le mandat, il est majoritaire, donc il y aurait un bilan de fait par mandat, comme on le fait actuellement. C'est déjà le cas actuellement, on comptabilise par mandat, plus souvent qu'autrement, le nombre de députés démissionnaires. On pourrait le faire pour calculer ce qu'il en aura coûté au trésor public par mandat, mais toujours conserver ou avoir un souci pour le ou la députée qui aura sans doute traversé un moment difficile et qui sera en quête de refaire sa vie professionnelle, tout simplement.

Le Président (M. Kotto) : M. le député de Marie-Victorin.

M. Drainville : Juste une complémentaire, M. le Président.

Le Président (M. Kotto) : Oui.

M. Drainville : Donc, juste pour être bien clair, donc, on parle, à la fin du mandat, on aurait le nombre de primes qui auraient été versées, par exemple, le montant qui s'y rattache. Est-ce que le nom des personnes qui auraient obtenu l'allocation... est-ce que leur identité serait divulguée ou pas?

M. Charette : Non. Bien, selon le modèle que l'on serait tentés de proposer, le nom ne le serait pas pour qu'on ne puisse pas associer, justement, une difficulté à un individu en particulier. Ça pourrait être fait à travers le rapport annuel en fin de... Bien, c'est-à-dire il y a un rapport annuel qui est fait par l'Assemblée nationale, mais le dernier rapport annuel d'un mandat pourrait être l'occasion de transmettre le montant en question, mais avec une certaine confidentialité sur le nom du ou de la bénéficiaire de ces sommes-là.

Le Président (M. Kotto) : Merci, M. le député de Deux-Montagnes. M. le ministre.

• (16 h 10) •

M. Fournier : Bien, je vais d'abord réagir au député de Deux-Montagnes. Merci de l'effort d'essayer de trouver un point de jonction, je vais probablement... De toute façon, mon objectif étant d'être unanimes, je vais moi-même trouver le point de jonction, probablement, puis on va essayer de trouver un libellé qui fait l'affaire de tout le monde. Mais la difficulté avec cette proposition-là, c'est la suivante, c'est-à-dire qu'à partir du moment... Puis c'est intéressant, j'y ai pensé, moi aussi. Mon problème, c'est que, lorsque le rapport va arriver, là, la question, ça va être : C'est qui? C'est qui? C'est qui? Et là on va être à courailler littéralement... Pas nécessairement, là, mais ça peut amener ça, en tout cas, l'espèce de course à qui l'a reçue, qui ne l'a pas reçue, puis là on peut imaginer que ça... Tu sais, il peut arriver plein de cas de figure, là, il peut y avoir un décès par... et on n'a pas le goût, honnêtement, de revenir sous les feux de la rampe. Il faut penser aussi, on est en train de discuter de questions humanitaires, là, dans le fond, là, là où les questions les pires concernent la nature humaine. Bon. Alors donc, je mettrais de côté celle-là.

J'entends mes collègues, qui disent : Écoutez, la vie privée sera protégée dans la mesure où la personne peut toujours refuser de dévoiler les raisons qui ont amené le Commissaire à l'éthique de le faire, elle peut toujours dire non. Je vais me fier à leur espérance. Et, en même temps, j'entends le leader de l'opposition qui dit : Bien, il faut le dire. Alors, moi, si je veux avoir une décision où on est tous ensemble, je vais être prêt... et j'imagine qu'on le sera tous à des moments différents, mais prêt à faire des rapprochements.

Je ne sais pas, mon collègue de Marie-Victorin avait un amendement. Je sais qu'on faisait écrire tantôt quelque chose qui pourrait ressembler, de mémoire, à quelque chose comme : «Le commissaire fait avis public en cas de décision favorable sans dévoiler les motifs.» Alors, ça pourrait ressembler à quelque chose comme ça qu'on pourrait inférer avant le dernier alinéa. Je ne sais pas ce que mon collègue avait comme amendement, mais on pourrait glisser quelque chose comme ça. Essentiellement, il s'agit de trouver les mots qui disent : Quand il y a une décision favorable, on dit qu'il y aura allocation sans dire pourquoi. C'est un peu le libellé que je vous disais. Je ne sais pas comment ça va ressortir de la machine en arrière, mais je sais que mon collègue...

Le Président (M. Kotto) : M. le député de Marie-Victorin.

M. Drainville : Sincèrement, M. le Président, la formulation que le ministre vient d'évoquer me conviendrait parfaitement. S'ils veulent nous l'écrire, bien, on va le déposer avec plaisir.

M. Fournier : ...en processus d'écriture.

M. Drainville : Ils ont juste à réécrire exactement ce que le ministre vient de dire, et je pense que ça serait parfait. Ce n'est pas nécessaire d'être plus compliqué que ça, là.

M. Fournier : C'est plus compliqué, par exemple, parce que j'écris mal et je parle vite, alors ce n'est pas une formule gagnante.

Le Président (M. Kotto) : Mme la députée de Gouin, oui.

Mme David (Gouin) : Mais donc le corollaire, M. le Président, si on se comprend bien, c'est que, si le Commissaire à l'éthique rend avis public en cas de décision favorable, l'absence d'avis du commissaire va venir dire aux gens qui nous observent qu'il n'y a pas de décision favorable. On se comprend bien là-dessus?

M. Fournier : Évidemment.

Mme David (Gouin) : C'est évident.

M. Fournier : Évidemment.

Mme David (Gouin) : C'est clair.

Le Président (M. Kotto) : M. le ministre.

M. Fournier : Donc, le libellé serait celui-ci : «Le commissaire doit faire avis public en cas de décision favorable, mais ne peut divulguer les motifs de sa décision.»

Le Président (M. Kotto) : Est-ce que...

M. Drainville : C'est bien. La seule question que je me pose avec ce libellé-là, c'est la période de temps à l'intérieur de laquelle il doit rendre ou elle doit rendre publique cette décision-là parce qu'à la rigueur...

M. Fournier : Je crois que ça s'infère d'«en cas de décision favorable». C'est-à-dire «Le commissaire doit faire avis public en cas de décision favorable» au moment de la décision favorable. Je ne pense pas que le Commissaire à l'éthique va le faire quatre ans après ou trois ans après. Nous, comme législateurs, on lui dit : Décision favorable, avis public. Alors, moi, ça ne me dérange pas, là, on peut bien dire «au moment de la décision», «dans la semaine qui suit». Moi, personnellement, là, je vais m'en remettre à votre grand bonheur, mais moi, je crois que ça dit ce que ça a à dire, là. Le commissaire, qui est toujours une personne en qui on a confiance, qui est indépendant de l'Assemblée, reçoit le mandat d'analyser s'il y a des justificatifs, et, s'il y a une décision favorable, on dit : Il doit faire avis public. Alors, honnêtement, je m'attends à ce qu'il fasse dans les délais normaux.

M. Drainville : Je pense qu'on va le laisser comme ça, d'abord parce que, comme l'a dit, M. le Président, le ministre, ça semble suffisamment explicite. Et, en n'inscrivant pas dans la loi un échéancier précis, ça peut peut-être, dans certaines situations, donner au Commissaire à l'éthique la marge de manoeuvre pour ne pas accabler davantage la personne qui... Tu sais, s'il y a une situation, mettons, familiale très difficile, peut-être que le commissaire pourra dire : Bien, écoute, je ne vais pas rendre ça public tout de suite, là, je vais te donner le temps de te revirer de bord. Tu sais, encore une fois, il faut essayer de se projeter un peu dans l'avenir, là, il y aura peut-être des situations qui vont être particulièrement difficiles, là, et peut-être que le commissaire pourra se dire : Bien, je vais prendre un peu plus de temps pour éviter d'attirer l'attention médiatique sur cette situation-là. Alors, peut-être que c'est mieux comme ça, effectivement, de lui donner une certaine latitude.

Le Président (M. Kotto) : D'autres commentaires? Oui, M. le député de Deux-Montagnes.

M. Charette : J'écoute avec intérêt, naturellement, les propos de mon collègue de l'opposition officielle. Si on est conscient qu'il y a un risque dans certains cas, il faut que ce risque-là soit bien mesuré, il faut qu'il soit bien calculé. Donc, on revient à la question de départ : Est-ce que c'est pertinent d'associer une décision pour chacune des démissions qui aura eu cours? Donc, je reviens avec la formule que l'on proposait. Par souci de transparence au niveau de la gestion de fonds publics, on pourrait faire un bilan. Et il reste à voir la fréquence des sommes versées, mais, de là à l'associer à une démission en particulier selon le jugement ou le calendrier du Commissaire à l'éthique, on revient avec la même question de départ.

Le Président (M. Kotto) : Alors, d'autres interventions? M. le député de Marie-Victorin.

M. Drainville : J'entends les propos de notre collègue de Deux-Montagnes, je comprends, là, ce qui l'anime, là, dans ses interventions. Mais je reviens quand même à mon point premier, M. le Président, je pense que c'est normal que nos concitoyens soient informés d'une décision exceptionnelle de verser une allocation de transition. Je pense que de ne pas le faire, c'est comme si on ne leur faisait pas confiance. C'est comme si on ne leur faisait pas confiance, c'est comme si on ne voulait pas qu'ils sachent.

Puis moi, encore une fois, j'en reviens à ce que je disais tout à l'heure, je ne me sens pas capable de défendre une décision comme celle-là, d'une part. Puis, d'autre part, mettons qu'on déciderait, là, qu'on rend public le montant total des primes versées avec le nombre de primes qui ont été versées, là on ne saura qui l'a eue de qui ne l'a pas eue. Ça fait que, là, tous ceux ou celles qui ont démissionné pendant le mandat pourraient être questionnés : C'est-u toi qui l'a eue? Parce que, vous vous rappelez, là, on le sait, là, à la fin de chaque élection, rappelez-vous, quand il y a des collègues... peu importe le parti politique, là, chers confrères et consoeurs, peu importe le parti politique, à la fin de chaque élection, on a toujours droit à un beau papier, là, avec les visages, là, hein? Bon, bien là, ce qu'on va avoir, c'est les visages de tous les députés qui ont quitté, là, puis là avec un gros chiffre en haut, puis un point d'interrogation : Lequel de ces méchants-là ou de ces méchantes-là était assez malade, là, pour avoir une allocation de transition, là?

Moi, j'aimerais mieux qu'on dise : Quand le commissaire dit : Il y en a une, il le rend public, il le met sur le site Internet, mettons, du commissariat, là, du commissaire à l'éthique, puis... On le sait, là, les journalistes, ils finissent par connaître un peu nos vies, là. Si le commissaire a décidé de rendre une décision, là... Puis elle va l'être, fondée. Inquiétez-vous pas qu'elle va l'être, fondée, là, parce que, je veux dire, la loupe va être là, là, puis ça va être comme : Aïe! toi, là, tu es bien mieux de prendre une bonne décision, puis elle bien mieux d'être justifiée, puis il est bien mieux d'être assez malade pour l'avoir, là.

Ça fait que, le Commissaire à l'éthique, je pense qu'il va sentir le poids de la décision qu'il doit prendre. Et, lorsqu'elle sera prise, je pense qu'à l'intérieur du petit monde dans lequel on vit, là, on finit par connaître parfois les problèmes de santé de nos confrères et consoeurs, peu importent les partis, d'ailleurs. C'est ce qui fait que notamment, quand un confrère ou consoeur tombe malade, souvent ce n'est pas juste les membres de son parti qui lui manifestent des témoignages d'appui, c'est l'ensemble des collègues, peu importe la formation politique, qui prend un moment pour lui lâcher un coup de fil ou pour lui envoyer une carte ou pour lui souhaiter bonne chance dans son épreuve, là. Alors, on finit par le savoir, ce qui se passe. On finit par partager, je dirais, jusqu'à un certain point, les vicissitudes de la vie de chacun, là, puis les journalistes aussi finissent par le savoir aussi.

Alors, pourquoi ne pas faire preuve de transparence avec nos concitoyens, là, puis leur dire : Quand il y en aura une, prime, vous allez le savoir? On ne fera pas un show avec ça, là, il y aura quelque part, possiblement sur le site Internet... La décision sera rendue, et, comme ça, il n'y a pas personne qui va dire qu'on essaie de faire des cachettes. Moi, il me semble que c'est le meilleur équilibre qu'on puisse trouver sur cette question-là, qui, par ailleurs, est fort délicate, puis je comprends très bien qu'on ne puisse pas la voir ou l'aborder tous de la même façon.

Le Président (M. Kotto) : M. le député de Nicolet-Bécancour.

• (16 h 20) •

M. Martel : Merci, M. le Président. Bien, je m'immisce un petit peu pour donner mon avis parce que je pense que c'est un peu le but recherché. On jase, comme on dit, puis moi, j'ai un sérieux malaise avec et la proposition amenée et ce que le leader de l'opposition amenait parce que j'ai l'impression qu'on regarde une solution d'aujourd'hui à des problèmes qui vont être réglés, dans le sens qu'une fois qu'on va appliquer les mesures qu'on applique on n'est plus dans la même dynamique, on est dans un... Moi, je pense, pourquoi qu'aujourd'hui c'est fondamental que ça soit connu, c'est parce que c'est un peu aberrant, c'est un peu excessif comme traitement que l'élu a. On le change, ça, on le change. Là, on dit : On règle cette partie-là.

Là, on arrive dans des situations où la personne qui va toucher à une allocation, c'est à la suite d'un drame. C'est à la suite d'un drame médical, c'est à la suite d'un drame personnel, familial. Puis je ne veux pas faire mon plus vertueux, mais je ne pense pas que le public, il veut absolument savoir. Le public veut savoir actuellement parce qu'il y a des abus, parce qu'il y a une espèce d'aberration par rapport à ce que les gens ont comme conditions. On n'est plus dans cette dynamique-là. Ça fait que moi, je pense que la personne...

Puis, comme mon collègue de Deux-Montagnes dit, je pense, où on doit une espèce de transparence, c'est de dire après une certaine période de temps : Voici combien d'argent. Je pense que les contribuables ont le droit de savoir : Voici le bilan, après tant d'années, combien qui a été versé en allocations de transition. Mais, sincèrement, d'associer ça à un individu qui va toucher une rémunération à la suite d'un drame personnel, moi, je ne suis pas à l'aise. Je ne suis pas à l'aise, puis je ne pense pas que les citoyens soient si voyeurs que ça, de dire : Combien qu'il a eu? Il a-tu été malade? Moi, je ne pense pas que les citoyens sont là.

Le Président (M. Kotto) : M. le député de Rimouski.

M. LeBel : Je vais prendre ça autrement. Dans le fond, on ne veut plus qu'il y ait d'allocation de transition pour rien, on ne veut plus qu'il soit donné... Ce qu'on dit : Il n'y en a plus, c'est fini, ça. Il n'y aura des allocations que si tu démissionnes en cours de mandat, que s'il y a vraiment un cas exceptionnel. Ça fait que, bref, les gens... Puis là on leur dit : S'il y a un cas exceptionnel, pour te backer, le Commissaire à l'éthique, lui, il va décider que, oui, c'est vraiment un cas exceptionnel. Bref, ce que ça veut dire, c'est que quelqu'un qui démissionne en cours de mandat, puis ce n'est pas pour des raisons exceptionnelles, il n'ira pas demander un avis au Commissaire à l'éthique, là, il va démissionner puis il va s'en aller chez eux, puis ça va être fini. Puis la personne qui, elle, démissionne pour un cas exceptionnel, elle, elle va être contente, cette personne-là, ce député-là va être content de demander à l'éthique... que le Commissaire à l'éthique le dise. Lui, ça va venir le conforter. Devant son citoyen, il dit : Oui, j'avais raison de dire que c'était un cas exceptionnel, le Commissaire à l'éthique vient de me le confirmer.

Ça fait que, bref, dans ce sens-là, moi, je pense, ça... C'est pour ça que j'étais d'accord avec l'amendement, c'est que ça vient... Quelqu'un qui démissionne puis qui n'a pas de raison exceptionnelle, qui n'est pas à cause de la santé, il va s'en aller chez lui, puis ça va être réglé, puis c'est ça qu'on veut. Mais quelqu'un qui est pour la vraie raison, bien, il va être... il va avoir le... Tu sais, le Commissaire à l'éthique... oui, c'est vrai, tu as raison. Puis il va être bien, il va aller chez eux, puis, devant tous ses citoyens, il pourra dire : C'était vraiment pour une raison exceptionnelle. Ça fait que, dans ce sens-là, ça confirme notre objectif, l'objectif de la loi, c'est qu'on n'aura plus d'allocation pour rien. Puis, s'il y a de l'allocation pour quelque chose, bien, ça va être prouvé à la face du monde que c'est pour vrai que la personne est partie pour des raisons familiales exceptionnelles ou de santé. Ça fait que je trouve que c'est une bonne affaire, puis, en même temps, ça va dire aux députés qui ont le goût de démissionner : Tu ne joues pas avec ça, là, tu ne t'inventes pas des raisons familiales ou tu n'inventes pas des affaires pour rien parce que tu as le Commissaire à l'éthique qui va... Ça fait que moi, je trouve que c'est parfait, ça confirme ce qu'on veut comme objectif.

Le Président (M. Kotto) : M. le député de Deux-Montagnes.

M. Charette : Je vais essayer de comprendre le raisonnement. Mon collègue de Rimouski vient de mentionner que ça serait un soulagement pour le député si le Commissaire à l'éthique abonde dans le sens de sa prétention d'un problème de santé ou de famille. Il faut savoir qu'on touche au code d'éthique. À partir du moment où on accepte l'amendement qui est proposé, on doit aussi modifier notre code d'éthique parce que ce qui est clairement écrit dans le code d'éthique, c'est que l'avis du commissaire est confidentiel et ne peut être rendu public que par le député ou avec son consentement écrit. Donc, à la limite, si c'est un soulagement pour le député, l'ancien député, de se voir octroyer pareille réponse de la part du Commissaire à l'éthique, il aurait le loisir de rendre public le jugement du Commissaire à l'éthique, mais, de par lui-même, notre code d'éthique précise que l'avis du commissaire est confidentiel. Donc, si on accepte cet amendement-là, il faut aussi amender, pour ne pas dire modifier notre code d'éthique, et là on s'embarque dans une autre ronde de discussions.

Donc, moi, a priori, je préfère le libellé initial du projet de loi, mais, si on doit exposer une préférence, je suis d'avis qu'il faut être transparent, je suis d'avis qu'il faut une certaine reddition de comptes et je reviens avec l'idée qu'on soumettait, qu'il y ait un bilan de fait à la fin d'un mandat, de sorte que les contribuables puissent savoir le montant de la prime. Et ça peut rejoindre, dans une certaine mesure, la préoccupation de mon collègue de Marie-Victorin parce que lui-même disait que, dans certains cas, le Commissaire à l'éthique pourrait ou devrait reporter sa décision pour des raisons... Bref, là, la décision serait définitivement reportée à la fin d'un mandat avec un montant global qui serait indiqué pour que nos concitoyens et concitoyennes puissent avoir une idée de ce que représente cette nouvelle formule.

Le Président (M. Kotto) : Merci, M. le député de Deux-Montagnes. M. le ministre.

M. Fournier : Bien, d'abord, juste pour prendre au... Honnêtement, c'est un débat intéressant, hein, parce que trouver les points d'équilibre, ce n'est jamais évident. L'important, c'est de voir jusqu'où on est capables de faire un pas pour essayer de trouver un consensus autour de la table, je pense, en ces matières, là, qui concernent nos conditions de travail. Je pense que c'est l'oeuvre qu'on devra tenter de faire autant sur le 78 que sur le 79. Moi, je suis parti du point où je voulais, au maximum, protéger la vie privée. Mon collègue de Marie-Victorin dit : Oui, je comprends, puis je suis d'accord, mais donne-moi un petit peu plus de transparence. La collègue de Gouin va dans ce sens-là. Du côté de la deuxième opposition, vous nous proposez une autre formule qui n'est pas inintéressante parce qu'elle distance les personnes, mais elle offre, on l'a vu, un problème, c'est que, étant distancée des personnes, mais étant dévoilée néanmoins, là il reste juste à essayer de remettre les bons morceaux du puzzle à la bonne place, puis là c'est la quête de qui est quoi et qui a eu quoi. Et là je pense que c'est encore plus fatiguant. Mais c'est plein de bon sens, là, comme recherche d'équilibre, là. Mais le problème, c'est qu'il y a un côté pervers qui ne fonctionne pas. Bon.

Évidemment, il y a l'argument de : Faudrait-il changer le code d'éthique? Ça, ça m'émeut moins parce que nous, on est des machines à changer les lois. Ça fait que changer un article, en changer deux, ce n'est pas la fin du monde, mais je ne crois pas qu'on ait besoin de le faire, ceci étant, parce que l'article du code d'éthique parle en termes généraux des avis, et là on a une loi particulière qui vient créer une disposition particulière. Et, comme les dispositions se lisent et s'interprètent les unes par rapport aux autres, on n'a pas besoin de changer le code d'éthique, on vient juste dire qu'en cette matière particulière avis public sans motif est donné. Alors, jusqu'à un certain point, je pense que ça, ça règle l'argument du code d'éthique. Bien sûr, ça crée un régime particulier par rapport au code d'éthique, mais on n'est pas obligés de modifier le code d'éthique parce que la loi elle-même, en son article 12.1, si l'amendement était adopté, viendrait créer ce cadre particulier. Alors, encore une fois, parce qu'on a, je pense, un peu fait le tour de la question, je... Le député de Rimouski a amené une façon intéressante de voir la chose...

M. Drainville : Tentative de compromis, M. le Président.

M. Fournier : Ah! moi, les compromis, je suis toujours partant.

Le Président (M. Kotto) : M. le député de Marie-Victorin.

M. Fournier : En plus que ça me permet de reprendre mon souffle.

M. Drainville : ...j'entends les arguments des collègues de la deuxième opposition, puis je pense qu'on va tous essayer de se rejoindre quelque part. Si on disait que les montants des primes et les noms des bénéficiaires étaient rendus publics dans le rapport annuel du commissaire, donc ça ne serait pas nécessairement tout de suite, ça serait une fois par année. Donc, il y aurait quand même... peut-être pas toujours, là, parce que peut-être que, dans certains cas, la prime serait versée un mois ou deux avant la publication du rapport annuel, mais, dans certains cas, il pourrait s'écouler une certaine période de temps avant que le nom soit connu. Alors, on pourrait dire à nos concitoyens : Dans le rapport annuel, vous allez savoir qui reçoit la prime.

Je trouve qu'un an, c'est raisonnable, on ne peut pas plaider que... enfin, nos concitoyens ou même des journalistes ne pourront pas plaider qu'on veut le cacher. Je pense qu'une fois par année, ce serait raisonnable. Ce serait relativement rapproché de la décision, mais il y aurait quand même — dans certains cas, du moins — une certaine distance entre le moment où la prime est versée, donc le moment où la décision est prise, et le moment où l'information est publiée. Alors, au lieu de proposer une fois tous les quatre ans, comme le fait la deuxième opposition, ce serait une fois par année, puis il me semble que le rapport annuel pourrait être une occasion pour le faire. Là, j'essaie vraiment de trouver une position mitoyenne qui puisse rallier tout le monde, M. le Président. C'est un effort de bonne volonté, là. N'en doutez point, j'espère.

• (16 h 30) •

Le Président (M. Kotto) : Merci, M. le député de Marie-Victorin. D'autres interventions? M. le ministre, oui.

M. Fournier : M. le Président, les rapports de l'Assemblée...

Une voix : Rapports d'activité.

M. Fournier : Les rapports d'activité de l'Assemblée annuels?

Une voix : C'est annuel, oui, pour 2014-2015.

M. Fournier : On a une rubrique Allocations de transition, donc on a déjà les montants. Donc, la proposition qui était faite, c'est déjà quelque chose qui existe. Alors, si on ne change rien, si on ne met pas d'amendement, là, on va se retrouver avec la disposition que vous souhaitiez. Ça veut dire qu'il y a déjà une rubrique annuellement — ce n'est pas aux quatre ans, là, c'est annuellement — sur les montants. Bon.

À partir de là, y en a-tu un? Il y en a-tu deux? Il y en a-tu trois? À la fin du jour, là, à la fin du jour, il y a quelqu'un qui va se poser la question puis, après ça, qui va aller dans la rubrique du rapport de l'Assemblée, puis qui va dire : Bon, bien, c'est déjà indiqué. Alors...

M. Drainville : Est-ce que je peux poser une question...

Le Président (M. Kotto) : M. le député de Marie-Victorin.

M. Drainville : Est-ce qu'on peut nous indiquer très clairement s'il y a seulement les montants qui sont indiqués au rapport ou est-ce que les députés bénéficiaires sont...

M. Fournier : Ça, je peux répondre, ce ne sont que les montants.

M. Drainville : Ah! c'est ça, oui. Comme je vous l'ai dit tout à l'heure, moi, je pense qu'il faut que l'identité des députés bénéficiaires soit connue, puis je vais vous dire pourquoi. Si ce n'est pas connu, le nuage de suspicion, là, il va être là, là, tu sais. C'est une mauvaise traduction peut-être, là, «cloud of suspicion», là, mais, tu sais, l'espèce de... Mettons qu'il y en a deux qui partent, là, dans la même année, puis mettons qu'au rythme où on a eu des départs depuis 18 mois, là, ce n'est pas un chiffre exagéré, là, bon, puis il y en a un qui l'a eue, puis l'autre qui ne l'a pas eue, bien, c'est qui qui l'a eue, puis c'est qui qui ne l'a pas eue, puis... Ah! moi, je pense qu'il faut éviter ça, là, il faut éviter... On est mieux d'être transparents puis de le dire délicatement une fois par année. Mais il faut, à mon avis, le dire, M. le Président, sinon ça va être pire. Ça va être pire parce que, là, au lieu que ce soit connu, les journalistes vont vouloir savoir c'est lequel. Ça fait que, là, ils vont se mettre à taponner, puis à poser des questions, puis... Aïe! non, on ne veut pas ça, là. Moi, je suis sûr qu'on ne veut pas ça, M. le Président.

Puis celui qui ne l'a pas demandée ou celle qui ne l'a pas demandée parce qu'elle savait qu'elle n'y avait pas droit, elle rentre à la maison, puis là : C'est-u toi qui l'a eue? T'es-tu partie avec un chèque? Tu t'es trouvé une job. Tu es partie tout de suite, puis tu es allée travailler. Dis-moi pas qu'en plus tu es partie avec un chèque. Bien non, je ne suis pas partie avec le chèque. Bien, on ne le sait pas, ce n'est pas toi, ce n'est pas écrit. Aïe! Aïe! Aïe!

Le Président (M. Kotto) : Alors, d'autres commentaires? M. le ministre.

M. Fournier : J'en aurais un petit dernier parce que tantôt, évidemment, on a transcrit ce qui a été dit à la volée, puis, à force de me relire à la volée, je finis toujours par dire : Bien, coudon, il me semble que ça glisse mal. Alors, si on récrivait un peu l'amendement sur lequel je nous inviterais presque à voter, juste... C'est le même, mais réécrit un petit peu pour que ça se lise mieux, me semble-t-il : «En cas de décision favorable, le commissaire doit faire un avis public sans divulguer les motifs de sa décision.» C'est la même chose, mais écrit un peu différemment. Ça a l'air moins boiteux, là. C'était un petit peu boiteux, c'est plus propre.

M. Drainville : Je vis bien avec ça.

M. Fournier : Alors, moi, honnêtement, là, on peut pousser puis chercher, puis, à la fin du jour, c'est ou bien on ne le dévoile pas ou bien on le dévoile plus loin, puis tout le monde cherche c'est qui, ou bien on dit : Regarde, dis-le donc, puis ça finit là.

Le Président (M. Kotto) : Techniquement, M. le ministre, je vous suggère, dans l'hypothèse où vous déposeriez...

M. Fournier : Un amendement mieux écrit?

Le Président (M. Kotto) : Un amendement mieux écrit, mais retirer le premier amendement.

M. Fournier : Oui. Ah oui! Bien, retirez-le, puis faites une petite boule de papier avec ça, puis lancez-le bien loin. Puis d'ailleurs, le temps que vous faites la boule puis que vous l'envoyez, le texte va arriver en arrière, donc vous aurez une autre copie.

Le Président (M. Kotto) : Un échange là-dessus en attendant les copies?

M. Fournier : ...qui a démontré une recherche de compromis.

Le Président (M. Kotto) : Des interventions sur la nouvelle proposition d'amendement?

Mme David (Gouin) : Je ne comprends pas très bien.

Le Président (M. Kotto) : Mme la députée de Gouin.

Mme David (Gouin) : Oui. Plutôt que de parler avec mon voisin, je vais m'exprimer devant tout le monde. C'est parce que, là, il y a quelque chose qui m'échappe un tout petit peu, c'est qu'on a eu un amendement... Bon, parce que celui qui vient d'être déposé est quand même, en substance, le même, là. Le député de Deux-Montagnes, c'est ça, nous a dit : Non, ça ne fait pas mon affaire. Ils ont expliqué pourquoi — il y a quand même des motifs intéressants — et, donc, proposaient pour chaque mandat, qui peut durer soit quatre ans, soit moins... Là, j'ai compris qu'après il y a eu une espèce de tentative de compromis sur un an. Et là, si je comprends bien, cette tentative de compromis sur un an n'existe plus parce que... parce que quoi? Est-ce que c'est parce que nos amis de la deuxième opposition ne s'y rallient pas ou parce que d'autres ne s'y rallient pas?

M. Fournier : Parce que, dans le rapport...

Le Président (M. Kotto) : M. le ministre.

Mme David (Gouin) : Oui, dans le rapport d'activité, c'est déjà présent.

M. Fournier : Dans le rapport d'activité annuel, la proposition est déjà en vigueur, dans le fond. Ça fait que, dans le rapport d'activité annuel de l'Assemblée, il y a une rubrique Allocations de transition, et donc le montant est déjà indiqué. Donc, à cet égard-là, la proposition, ce serait comme être assez redondant, alors donc pas nécessaire. On revient donc à la discussion initiale, est-ce qu'on souhaite, finalement, qu'en cas de décision favorable le commissaire doit faire un avis public sans divulguer les motifs de sa décision ou on ne le souhaite pas?

Voici, je vous le transmets. J'ai compris de la discussion jusqu'ici qu'il y a une recherche, de la part de l'ensemble, à ce qu'il y ait un certain élément, plus fort que ce qui est prévu actuellement dans le projet de loi, d'information du public lorsqu'il y a, effectivement, reconnaissance par le commissaire qu'une des causes de l'article 12 est présente. Alors, moi, je m'y rallie. Voici un peu comment on l'écrit. Si ça reçoit l'assentiment de tout le monde, voilà où on en sera.

Le Président (M. Kotto) : Des commentaires? Est-ce que l'amendement, tel que proposé, est adopté?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Kotto) : Adopté. S'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons procéder à la mise aux voix. Est-ce que l'article, tel qu'amendé, est adopté?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Kotto) : M. le ministre.

M. Fournier : M. le Président, alors : L'article 13 de cette loi est modifié par le remplacement, au début du premier alinéa, de «Cette allocation» par «L'allocation de transition».

Essentiellement, c'est un amendement qui vise à une lecture plus facile du nouveau texte tel qu'il se lira après amendement. Parce que vous vous souvenez qu'on vient juste de débattre de 12.1, et 12.1 vient, dans le fond, nous faire perdre de vue de quoi parlons-nous donc. Parce qu'à 12, allocation de transition, à 12.1, c'est qu'est-ce qu'on fait avec cette allocation-là. Et là, 13, vu qu'on a créé 12.1, on finit par s'y perdre... de quoi on parle, l'allocation de transition. Avant, c'était «Cette allocation est égale». Maintenant, c'est «L'allocation de transition est égale». Alors, c'est simplement une expression qui vient s'ajouter, une espèce de cohérence pour tenir compte de 12.1. Donc, voilà.

Le Président (M. Kotto) : Mme la députée de Gouin, des commentaires?

• (16 h 40) •

Mme David (Gouin) : Merci, M. le Président. Non, ça n'est pas un commentaire, M. le Président, c'est qu'à cette étape-ci je pense que ce serait le temps pour moi — et j'ai hâte d'en débattre avec les collègues — de déposer... Bien, en fait, j'ai plusieurs amendements qu'on peut considérer un par un ou en bloc parce que c'est, en fait, le remplacement, donc, de l'article 3, tel que libellé dans le projet de loi n° 78, par les articles qui, dans le projet de loi n° 79, concernent l'allocation de transition. Je peux donc déposer l'ensemble, M. le Président. Là, il faut que je me fasse aider un petit peu en matière de procédure.

Le Président (M. Kotto) : Techniquement, on peut procéder en analysant ou en commentant un à un des amendements, sinon en bloc, mais cela prendrait le consentement des membres de la commission.

M. Fournier : ...la chose suivante, d'abord que notre collègue, en bloc, nous réinterpelle sur ses amendements en bloc, ce qu'elle cherche à faire. Et je vais le lui laisser faire, mais je crois qu'elle cherche à nous dire qu'elle veut intégrer dans le 78 les éléments du 79. Elle le fera, et, une fois qu'elle l'aura fait, j'interviendrai — je suis sûr que mes autres collègues interviendront aussi — pour faire valoir des éléments.

Je note au départ que j'invoquerai probablement la recevabilité, qui sera un des éléments que je soulèverai et, s'il y a lieu, d'autres. Mais, à ce stade-ci, je suis tout à fait consentant à ce qu'on le regarde en bloc, c'est beaucoup plus facile pour la compréhension. Et je pense qu'on a, d'ailleurs, tous saisi l'idée en plus.

Le Président (M. Kotto) : Bien.

Mme David (Gouin) : On pourrait attendre de les avoir, M. le Président.

Le Président (M. Kotto) : Oui, on va attendre. On peut suspendre quelques instants en attendant.

Mme David (Gouin) : Oui, merci.

(Suspension de la séance à 16 h 42)

(Reprise à 16 h 50)

Le Président (M. Kotto) : Alors, nous allons reprendre nos travaux. Je donnerai, à ce stade-ci, la parole à Mme la députée de Gouin pour qu'elle puisse nous expliquer sa démarche.

Mme David (Gouin) : Merci, M. le Président. Je pense que tout le monde comprendra que, pour l'instant, là, sous réserve de ce qui se passera plus tard, je n'irai pas dans le mot à mot de chacun des amendements que je dépose. Je pense que l'intérêt, à ce stade-ci de la discussion, c'est d'avoir une discussion de fond. Enfin, c'est ce que je souhaite. Et cette discussion de fond, à mon avis, devrait porter sur deux questions qui sont intimement liées.

La première, c'est : Allons-nous convenir ensemble que ce dont nous parlons, c'est d'une allocation de transition? Ce n'est pas une prime de départ, ce n'est surtout pas une prime au départ, c'est une allocation de transition. Comme son nom l'indique, ça veut donc dire un montant qui est remis au député parce que le ou la députée est dans une situation de recherche d'emploi, et il y a un moment où il faut combler la période de recherche d'emploi. Le député n'ayant pas droit à l'assurance-emploi — je le répète pour le bénéfice des gens qui nous écoutent — donc c'est un peu normal qu'il y ait une allocation de transition. C'est l'esprit, c'est ce que ça aurait dû toujours être dans la lettre et dans la loi, c'est-à-dire aussi bien par écrit que dans la tête des députés, dans la compréhension des députés. Personnellement, c'est ce que j'ai toujours compris.

Alors, je pense que, si on donne tout son sens aux trois mots «allocation de transition», il faut qu'il devienne clair que cette allocation est remise à un ou une députée qui, du jour au lendemain, n'est plus député, quelles que soient les circonstances — et ça, je reviendrai sur les circonstances — et qui est à la recherche d'emploi. Un ou une députée partant à la retraite, à mon avis, n'a pas besoin d'une allocation de transition, puisque cette personne va toucher une retraite. Une personne qui trouve un emploi le lendemain ou qui retrouve son emploi... Et ça, ça arrive assez régulièrement pour des collègues qui font oeuvre dans la médecine, dans des grands bureaux d'avocats, de notaires, etc., on a un certain nombre de collègues qui retrouvent l'emploi qu'ils avaient laissé temporairement pour devenir députés et qui le retrouvent immédiatement, cet emploi. Dans ce cas-là, je ne vois vraiment pas pourquoi on touche une allocation de transition. Je rejoins en cela les conclusions du rapport L'Heureux-Dubé, en passant, ce comité indépendant qui nous dit : Une allocation de transition, c'est une allocation de transition et ce n'est rien d'autre. Alors, ça, c'est mon premier point.

Le deuxième, mais c'est : Pourquoi est-ce que ça ne serait pas applicable dès maintenant, dès maintenant voulant dire durant la présente législature? Cela devrait donc s'appliquer aussi bien à des députés démissionnaires qui ont droit à l'allocation de transition. Je rappelle que les articles qu'on vient d'adopter nous indiquent que certains n'y auront même pas droit, de toute façon, parce que le Commissaire à l'éthique en jugera ainsi. Mais, si le ou la députée démissionnaire a le droit de recevoir une allocation de transition, parfait. Mais, à ce moment-là, ça va être une allocation de transition. Si ce député ou ce ministre démissionnaire, le lendemain, redevient ce qu'il était avant et a un emploi, il ne la touchera pas.

Mais je vais plus loin. Nous sommes 125 députés. En 2018, il y aura une élection générale. Comme à l'habitude, certains députés ne se représenteront pas, et d'autres, malheureusement, seront défaits à l'élection. Donc, il y aura un certain nombre de députés en recherche d'emploi. Il y en aura aussi qui s'en iront à la retraite, ça dépend de l'âge. Donc, faut-il donner une allocation de transition à un ou une députée qui, en 2018, par exemple, ne se représenterait pas et partirait à la retraite ou serait défait à l'élection et partirait à la retraite? Ma réponse à moi, c'est non. Je ne vois pas, aux yeux de la population, là, ce qui justifie, même en ce moment, qu'un ou une députée, au terme de la législature, reçoive une allocation de transition, même si la personne a un emploi le lendemain ou même si la personne part à la retraite. À ce moment-là, on va appeler les choses par leur nom, on ne parlera plus d'allocation de transition — c'est pourtant le titre du projet de loi — on parlera de prime, effectivement. Il faudra expliquer à la population que nous, les députés, nous considérons que nous avons droit à cette prime, ça s'ajoute à notre salaire. Pas sûre que ça va être tellement populaire, moi.

Je considère — et ma formation politique considère, ce n'est peut-être pas l'opinion de tout le monde — que, comme députés, nous avons des revenus et des avantages sociaux considérables, très éloignés de ce que gagnent les gens dans la moyenne de la population, et ajouter quelque chose qui ressemblerait à une prime au moment de la fin d'une législature, franchement, ne nous paraît pas fonctionner avec le débat que nous avons actuellement, justement. Il y a un débat entre la population et nous, hein, il faut en convenir, là, sur nos conditions de rémunération, sur les privilèges que nous avons, et il me semble qu'on donnerait tellement un bon signal si on disait : C'est une allocation de transition, c'est à ça que ça doit servir, point barre.

Et deuxièmement, tout cela, donc l'ensemble des amendements qui viennent du projet de loi n° 79 et qui peuvent très bien être mis ici, là, tout ça s'applique dès la présente législature. Là, je pense qu'on est vraiment en train de répondre à un désir de la population, là, un désir profond de voir ses députés comprendre ce qu'elle vit, cette population, et être capables de dire : O.K. On pose un geste. Puis, franchement, ça n'est pas un geste tellement difficile, c'est d'appeler une allocation de transition une allocation de transition, puis c'est de lui donner son sens dès maintenant. Voilà.

Le Président (M. Kotto) : Merci, Mme la députée de Gouin. M. le ministre.

M. Fournier : Merci, M. le Président. J'ai eu l'occasion de le dire dans mes remarques préliminaires, j'ai eu l'occasion aussi de le dire sur le principe la semaine dernière, dans la présentation de notre collègue il y a deux éléments. Il y en a un sur... Ou, en tout cas, j'infère sur l'autre, là, je veux simplement dire que, là-dessus, je pense qu'il y a peut-être du travail qu'on peut faire sur la situation de concordance entre le départ durant mandat, pour lequel, avec le projet de loi actuel, il n'y a pas de compensation si, d'aventure, celui qui quitte ou celle qui quitte a droit et obtient une allocation de transition, mais, par ailleurs, travaille... Donc, à cet égard-là, je crois qu'il pourrait y avoir, en tout cas, tout au moins une discussion et peut-être même un amendement pour corriger la chose pour que ce soit cohérent.

Je ne vais pas plaider très longtemps sur la proposition que fait notre collègue en bloc parce que je vais d'abord plaider sur la recevabilité. Le projet de loi n° 78 porte sur les départs durant mandat, et pas sur les départs post mandat. Et c'est, évidemment, une des conséquences du choix législatif — salué par plusieurs, dois-je dire, auquel j'ai réfléchi longuement, pourrait-il aussi dire — qui fait en sorte que nous allons de l'avant avec le sujet des départs durant mandat. Et de venir inclure des éléments d'après mandat ne respecte pas le principe de ce projet de loi. Alors, il y a déjà, donc, un élément d'irrecevabilité de l'amendement, puisque c'est un principe autre qui vient s'ajouter dans celui-ci.

Et, allant simplement pour rajouter, le coeur qui amène à ce que nous choisissions que ce soit au moment de la sanction de 78 que ça prenne déjà effet, qui est déjà une petite altération par rapport à ce que L'Heureux-Dubé nous propose, le coeur la raison qui le motive, c'est qu'il y a, de la part de celui qui démissionne durant mandat, un choix initié par lui de cesser sa prestation de travail à l'égard du contrat convenu avec ses concitoyens de bénéficier, évidemment, de la rémunération qui vient de l'Assemblée nationale, rémunération dont on n'a pas besoin de se cacher. C'est un peu normal que ça se fasse, sinon il n'y aurait que des millionnaires ici. Ça a déjà eu lieu, d'ailleurs. Alors donc, il y a deux éléments très distincts.

• (17 heures) •

L'autre élément, c'est celui d'intervenir à l'égard de députés qui n'ont commis aucun bris et qui continuent de respecter leur contrat initial, et là on va dire : On va changer leurs conditions de travail. C'est pour ça qu'il y a deux principes différents, principes qui trouvent leur source à l'article 93 du rapport L'Heureux-Dubé. Je me permets de vous en lire un court passage qui permet de comprendre quelque chose. Le comité, dont tout le monde ici a, plus d'une fois, dit qu'il appuyait et le comité et le rapport, alors je tiens juste à le dire, «le comité recommande que les changements proposés, lorsqu'adoptés, entrent en vigueur à compter du début de la législature suivant l'adoption des modifications législatives et réglementaires donnant suite aux recommandations de ce rapport. Cela éviterait, d'une part, que le député statue sur ces propres conditions de travail — ce que nous allons être en train de faire. Cette façon de faire est de nature à atténuer le problème. D'autre part, les candidats connaîtront les conditions de travail du député avant de se lancer dans une carrière politique.»

Ils les connaîtront à la prochaine, comme ils devaient les connaître à la dernière, mais nous allons unilatéralement les transformer, allant à l'encontre du principe de base de L'Heureux-Dubé. Difficile de dire qu'on est pour quand on propose contre. Et je ne dis pas que, ma collègue, ce qu'elle propose n'est pas sans fondement. C'est d'ailleurs pourquoi on l'a mis dans le 79. Et ce qu'elle propose, d'ailleurs, elle propose de prendre le 79 et de l'amener dans le 78. En fait, on est d'accord sur la substance, c'est qu'elle veut devancer l'entrée en vigueur purement et simplement, ce que L'Heureux-Dubé nous a dit de ne pas faire. Là où il y a un changement et là où moi, j'accepte qu'on aille dès la sanction, pour les départs durant mandat. C'est qu'il y a là, dans ce contrat synallagmatique que nous avons entre nous-mêmes et nos électeurs, jusqu'à un certain point, qui amène une prestation de l'un et de l'autre, de l'Assemblée et du député, il y a un bris, il y a une des deux parties, c'est le député qui dit : Moi, j'arrête. Bien là, si c'est le cas, c'est à ton initiative et ce sera dès la sanction.

Évidemment, on connaît les deux matières qui permettent d'avoir quand même l'allocation, là, c'est d'autre chose. Alors, à cet égard, je crois donc que, inspirés du fondement de L'Heureux-Dubé, on voit que, les principes de 78 et 79, il y en a un qui s'appuie sur le bris de contrat initié par le député, et l'autre, sur les conditions de travail qui doivent être connues lorsque les candidats se présentent à la prochaine élection. C'est deux principes totalement différents. Et, évidemment, si L'Heureux-Dubé considère que c'est important pour les candidats de connaître leurs conditions de travail à la prochaine, bien, c'est important qu'ils les connaissent à la dernière.

Et là on va vouloir dire : Oui, mais ce n'est pas grave parce que, dans le fond, comment ils les ont compris, on peut se mêler de ça. Moi, M. le Président, je vais vous dire, je crois qu'il est un peu présomptueux, en tout cas, de dire : Ce que je pense, tout le monde l'a pensé. En démocratie, il arrive que les gens ne pensent pas la même chose. Ils peuvent interpréter les conditions de travail de façon différente, il y en a qui sont dans des situations différentes, et on se retrouverait à faire une violation d'un droit contenu dans le contrat de travail alors que la personne est en train de respecter son contrat de travail. Et je sais combien les questions des contrats de travail interpellent ma collègue de Gouin, je lui dis un peu mon étonnement devant son appel à ce que la législature soit celle qui brise le contrat. Mais j'en prends note. Mais je suis surpris quand même.

Question de règlement sur la recevabilité d'amendements

Alors, ceci étant, je plaiderai donc l'irrecevabilité. Et, si d'aventure, vous la considériez recevable, évidemment, peut-être que j'ajouterai quelques commentaires de mon cru.

Le Président (M. Kotto) : Mme la députée de Gouin.

Mme David (Gouin) : Si je comprends bien, M. le Président, là on est en train de discuter de la recevabilité des amendements?

Le Président (M. Kotto) : Absolument.

Mme David (Gouin) : D'accord. Donc, je peux plaider pourquoi moi, je les trouve recevables?

Le Président (M. Kotto) : Sentez-vous à l'aise.

Mme David (Gouin) : D'accord. J'aimerais d'abord signaler au ministre que, lorsque, de consensus... On dit souvent de consentement ici, moi, j'ajouterais, lorsque, de consensus, nous déciderions tous ensemble, avec l'aval de tous nos caucus, de modifier nous-mêmes nos propres conditions de travail, ce serait fort différent — je le dis respectueusement au leader du gouvernement — ce serait fort différent que lorsque nous décidons de modifier les contrats de travail des autres. Ici, nous travaillons à ce qui nous affecte nous-mêmes, et donc je pense que nous sommes totalement autorisés, nous-mêmes, à débattre avec nous-mêmes de ce que nous voulons.

Deuxièmement, je pense, moi, qu'évidemment — évidemment que je le pense — l'amendement est recevable. Pourquoi? Si on a été capables de s'entendre pour dire : Il y aura un projet de loi n° 78 dans lequel on va discuter d'une allocation de transition s'appliquant à la question des députés démissionnaires en cours de mandat, mais, en même temps, brisant un peu l'esprit du rapport L'Heureux-Dubé... Le ministre en convient lui-même, hein, le comité L'Heureux-Dubé aurait voulu qu'on discute tout ensemble. Donc, déjà, il y a un bris, là, auquel nous consentons de consensus, nous consentons à débattre 78 tout seul avant de débattre l'entièreté de 79, qui fait le tour, là, de la question de la rémunération.

Qui plus est, le leader du gouvernement nous dit qu'il serait prêt à regarder possiblement un amendement... ou, en tout cas, il y a une hypothèse de discussion qui serait possible, là, pour resserrer les balises autour d'une allocation de transition pour un député démissionnaire en cours de mandat qui démissionne pour des raisons, là, acceptées par le Commissaire à l'éthique, et donc il a droit à l'allocation de transition. Le fait de resserrer l'allocation de transition pour le député démissionnaire, mais qui a de bonnes raisons de le faire, là on est tout à fait sur un autre terrain, je le soumets au ministre, là. Ce député n'a pas opéré de bris de contrat, il démissionne pour des raisons jugées raisonnables par le Commissaire à l'éthique. Il va donc recevoir l'allocation de transition. Évidemment que je vais être d'accord, moi, avec le fait que l'allocation de transition en soit une vraie. Et donc, s'il recommence à travailler le lendemain, il n'en a pas besoin.

Mais c'est pour dire que plutôt, peut-être, que de discuter de la recevabilité de l'amendement, ça serait plus intéressant de discuter du fond. Est-ce qu'on va unilatéralement changer les choses — c'est la question que le ministre me pose — et intervenir auprès de députés qui n'ont commis aucun bris? Mais le député démissionnaire en cours de mandat pour des raisons valables n'a commis aucun bris, comme ne commet aucun bris le député qui ne se représente pas à la prochaine élection. C'est exactement la même situation. Et ce que nous, nous prétendons, c'est que, si tous nos caucus, si tous les députés consentent à ce que, pour tout le monde, dès maintenant, l'allocation de transition en soit vraiment une, on ne brise rien du tout, nous consentons nous-mêmes, oui, à affecter, en quelque sorte, nos conditions de travail et de rémunération. Pourquoi? Parce qu'on trouve ça juste, tout simplement. Parce que c'est juste d'avoir une allocation de transition lorsque cette allocation s'applique. Si elle ne s'applique pas, s'il n'y a pas de transition, bien, il n'y en a pas, de transition. C'est juste ça que je suis en train de dire, M. le Président. Ça me paraît recevable, et je souhaiterais bien plus qu'on fasse le débat sur le fond que sur une question de procédure.

Le Président (M. Kotto) : Je vous entends bien, Mme la députée de Gouin, mais les règles nous imposent, évidemment, un...

M. Fournier : ...M. le Président, parce que peut-être...

Le Président (M. Kotto) : C'est juste une précision que j'apporte à Mme la députée de Gouin. Pour aller sur le fond, techniquement il faut que l'amendement soit recevable.

3233    M. Fournier : Ceci étant, M. le Président...

M. le ministre.

• (17 h 10) •

M. Fournier : ...je crois qu'à notre comportement nous avons quand même pas mal consenti à ce que la discussion sur la recevabilité soit une discussion de fond parce que nous sommes en train de discuter du fond. D'ailleurs, on en discute tellement, du fond, que, lorsqu'on arrivera à votre décision sur la recevabilité, il n'y a pas plus d'autre fond à discuter, on aura tout fait le tour du fond. Alors, ceci, je me permets de le dire parce que je crois que l'approche qu'on veut avoir, c'en est une, quand même, de respect le plus total. Pour moi, il est important de soulever la question de recevabilité en termes de procédure, ça me permet de déclarer le sens du 78 et le sens du 79. Et, si tant est qu'une décision sur la recevabilité me donnait raison, cela me permet de bien affirmer que c'est deux choses différentes. Bon, on verra la décision de la présidence, mais je ne veux pas empêcher mes collègues d'intervenir sur le fond de la recevabilité, qui se trouve à être le fond de l'ensemble de l'oeuvre.

Je voudrais quand même réagir à certains éléments. Notre collègue dit : Puisque je suis prêt à faire un aménagement particulier pour une transition en cas de quelqu'un qui a quitté pour des raisons de santé, cela signifie qu'on peut tout faire. Non. Pourquoi je me suis dit : Je vais me mettre à l'écoute des partis d'opposition, qui souhaitent que, le départ durant mandat, on le règle tout de suite dès la sanction? Bon, entre autres que je cherche à ce qu'il y ait la plus grande unanimité entre nous sur ces questions-là, je me suis dit : Il y a une certaine logique due au bris de contrat par la personne qui quitte. C'est pour ça qu'on est rendus là.

S'il est loisible que nous fassions un amendement, si tant est qu'il est souhaité pour que l'allocation, même pour le départ durant mandat pour des causes de santé ou de famille, en soit une de transition et, donc, qu'on considère s'il y a un revenu étiré, ça me semble être, tout simplement, une concordance à l'égard de l'allocation de transition avec celle qui est prévue pour ceux qui ne briseront pas leur contrat. Mais cela ne signifie pas que, parce que cette concordance-là peut être faite, que maintenant on va considérer que ceux qui sont en bris de contrat sont au même niveau que ceux qui ne sont pas en bris de contrat, la substance même du principe est la question du bris de contrat.

Maintenant, notre collègue dit : Écoutez, on peut le faire, parce que c'est entre nous qui allons voter nos conditions de travail. Donc, ce n'est pas pareil comme les autres contrats, puisque c'est entre nous puis que c'est pour nous. Ce qui m'amène quand même à une question fondamentale, là on est à un des éléments les plus importants du rapport L'Heureux-Dubé, justement nous ne devons pas voter nos conditions de travail. Je sais bien qu'on est un peu pris en ce moment parce qu'on les a toujours votées, mais la commission nous dit...«...le comité — le comité L'Heureux-Dubé, page 93, 94 — considère que la problématique où le législateur est juge et partie en matière de détermination de ses propres conditions de travail ne peut être résolue à long terme que par l'instauration d'un mécanisme régulier d'analyse par un comité indépendant dont les recommandations seraient exécutoires.» C'est la recommandation 31 qu'ils font.

Alors, à partir de là, quand on se dit on est d'accord par L'Heureux-Dubé, on dit : Bien, il ne faut plus qu'on s'en mêle. Alors, il faut quand même faire une loi, là. Incidemment, le prochain comité, parce que la loi n° 79, le projet de loi, va prévoir la création d'un comité pour donner suite à cette recommandation-là, va nous amener à un processus législatif pareil. Mais, puisqu'on aura créé par nos lois n° 78 et n° 79 un support législatif qui donne la valeur la plus exécutoire possible à ces comités-là, on devrait arrêter, justement, d'être dans la position de se dire : Oui, bien là, je le change, je ne le change pas, et on fait chacun un petit point de plus ou de moins sur le plan politique, et c'est ce qu'il faut éviter.

Alors, je fais simplement mentionner qu'il faut éviter, justement, d'intervenir dans nos conditions de travail. Et, quand j'essaie de donner effet à L'Heureux-Dubé, qui nous dit à la prochaine législature, j'essaie de ne pas m'en mêler, comme ils me disent de ne pas m'en mêler. Puis le Commissaire à l'éthique est venu en remettre une couche, puis il a dit : Ne vous en mêlez pas, faites ce que L'Heureux-Dubé dit. Alors, j'essaie autant que possible, évidemment en me mettant à l'écoute des parlementaires, là... J'ai beau essayer puis dire : Je vais faire le maximum. Mais, si les parlementaires me disent : Oui, mais quand même... oui, mais quand même. Bien, on va essayer de s'entendre parce que je veux aussi... Tu sais, dans le monde réel, je veux leur donner suite, mais je fais partie d'un processus législatif où il faut bien que j'essaie de travailler pour avoir l'unanimité.

Alors, à partir de là, je regarde les dispositions et je me dis : La meilleure manière de donner suite à L'Heureux-Dubé, ce serait de prendre tout l'ensemble et de le mettre à la prochaine législature. Il y a déjà un certain temps que les indications me disent que, pour y arriver, il faut que je règle d'abord une autre question, c'est celle que nous sommes en train de régler, pour les départs durant mandat, que je trouve justifiée parce qu'il y a un bris de contrat. Alors, parfait, faisons-le, mais ne commençons pas à mêler les deux éléments parce qu'au-delà du fait que nous allons mêler deux principes nous allons frapper de front L'Heureux-Dubé, ce que je ne voudrais pas faire. Si on commence à frapper de front L'Heureux-Dubé dès le premier moment où nous commençons à discuter de la chose, on est en train de se donner tout un signal pour la suite. Alors, voilà. Peut-être que mes collègues veulent intervenir dans le débat, qui pourrait les intéresser grandement.

Le Président (M. Kotto) : D'autres commentaires? Mme la députée de Gouin, des commentaires?

Mme David (Gouin) : M. le Président, j'attendais de voir si les représentants de l'opposition officielle et de la deuxième opposition voulaient intervenir. Est-ce que je comprends que non? Je comprends que non, c'est intéressant.

M. le Président, je vais simplement répondre quand même au ministre que, par le projet de loi n° 78, est-ce qu'on est capables de convenir qu'on est en train de discuter d'un petit morceau, j'en conviens, mais d'un petit morceau, d'un morceau, tout de même, de ce qui constitue l'ensemble de nos conditions de travail et de rémunération? Donc, on a extrait, pour des raisons que je comprends fort bien, du rapport L'Heureux-Dubé la question des allocations de transition pour des députés démissionnaires en cours de mandat. Donc, déjà — et je comprends très bien les raisons, là — déjà, on a touché un petit bout du rapport L'Heureux-Dubé. Donc, déjà, comme parlementaires, on est en train de discuter de conditions de rémunération. Est-ce que je souhaite qu'on en profite pour faire tout L'Heureux-Dubé? Bien sûr que non, je pense que le ministre le sait. Ce que je souhaite tout simplement, c'est que, puisqu'on est en train de discuter de l'allocation de transition, pourquoi ne pas appliquer cette question-là dès maintenant?

Et, quand le ministre dit avec une certaine verve : L'Heureux-Dubé nous dit : Surtout ne vous en mêlez pas, je soumets quand même humblement que, lorsque nous discuterons du projet de loi n° 79, nous serons en train, comme parlementaires, de nous mêler joyeusement de nos conditions de travail et de rémunération, comprenant, oui, que c'est pour la prochaine législature, mais on peut imaginer qu'un certain nombre d'entre nous y seront encore, dans la prochaine législature, et que, donc, nos discussions ne seront pas totalement, totalement dénuées — comment je dirais? — de notre propre expérience de vie, là, hein? On n'est pas des extrahumains ou des extraterrestres, là, on est des députés avec une certaine rémunération, certaines conditions de travail, et, quand on discute, il faudrait qu'on ait, tout le monde, la franchise de se dire qu'on pense un petit peu à nous forcément, là. Écoutez, c'est ça, la réalité.

Alors, moi, je continue de penser que les amendements que j'apporte sont recevables. Je suis d'accord avec le ministre, on est en train, en même temps, de faire un certain débat de fond, c'est tout à fait exact. C'est pour ça que j'aurais souhaité que mes collègues des deux autres oppositions s'expriment. Je continue de penser que c'est une discussion que l'on peut faire et ce sont des amendements que l'on peut adopter dès maintenant et sans grand problème pour peu qu'à 18 heures, comme prévu, on arrête la discussion, que les caucus soient consultés, qu'on revienne demain là-dessus. Je ne fais pas d'obstruction, là, je suis tout à fait d'accord avec le fait que tout ça doit être réglé avant Noël, il n'y a aucun problème. Je pense qu'il s'agirait simplement que les gens se parlent, et, si, de consentement et d'un grand consensus, dans cette Assemblée nationale, on disait : Mais oui on peut appliquer dès maintenant tout ce qui se rapporte à l'allocation de transition, personne ne se sentirait lésé, puisque tout le monde aurait consenti.

Alors, je pense que je n'ai rien à ajouter sur cette question-là. Je remercie le président et le ministre de m'avoir permis abondamment d'aller sur le fond de la question.

Le Président (M. Kotto) : Ne sommes-nous pas des démocrates? Est-ce qu'il y a d'autres interventions? M. le ministre.

M. Fournier : M. le Président, j'en ferais peut-être une dernière pour apaiser notre collègue de Gouin. D'abord, sur le fond, pour ceux qui se représenteront à la prochaine élection, ils le feront en connaissance de cause. La différence, c'est que, pour ceux qui l'ont fait à la dernière, on se trouverait à changer leurs règles alors qu'ils se sont présentés en toute connaissance de cause, et c'est donc la différence de la prochaine législature.

Maintenant, pour son désappointement de voir nos collègues de la première et de la deuxième opposition ne pas intervenir, je lui dirais que normalement, pour quelqu'un qui présente un amendement comme le sien, lorsqu'il y a une question de recevabilité, s'ils ne plaident pas, c'est qu'ils sont d'accord avec la partie gouvernementale et c'est pour ça qu'ils n'interviennent pas pour l'instant. Mais, si tant est qu'ils étaient en désaccord, probablement qu'ils interviendraient. Mais c'est normal, dans nos débats, on n'a pas à intervenir tout le temps, et il est possible qu'ils laissent porter par d'autres les thématiques qui sont présentées devant cette commission. Voilà, M. le Président.

Une voix : ...

M. Fournier : Oui, je sais très bien que vous faites confiance au président. Nous lui faisons tous confiance, au président.

Le Président (M. Kotto) : Oui. Nous allons, sur ce pas, suspendre quelques instants pour reprendre en délibération...

Mme David (Gouin) : ...quelque chose avant, M. le Président?

Le Président (M. Kotto) : Faites.

Mme David (Gouin) : Est-ce que je peux intervenir?

Le Président (M. Kotto) : Faites.

Mme David (Gouin) : O.K. Si le ministre a raison — je dis bien s'il a raison — je prends note, je prends note vraiment. Et, finalement, ce que je veux ajouter, c'est qu'avec le projet de loi n° 78 nous ne discutons pas seulement de députés qui seraient dans ce que le ministre appelle un bris de contrat. Parce qu'un député qui démissionne pour des raisons de santé ou des raisons familiales importantes, personne n'appellera ça un bris de contrat. Alors, je pense que, là, il faut faire les distinctions qui s'imposent, ce qui m'amène, d'ailleurs, à me dire qu'il faudra, de toute façon, pour les députés démissionnaires, si mes amendements sont jugés recevables, il faudra, de toute façon, pour les députés démissionnaires qui ont droit à l'allocation de transition, que ce soit une allocation de transition, il faudra au moins ça. C'est tout.

Le Président (M. Kotto) : Alors, je vais prendre ceci en délibération, mais, préalablement, nous allons suspendre quelques instants.

(Suspension de la séance à 17 h 20)

(Reprise à 17 h 25)

Décision de la présidence

Le Président (M. Kotto) : Alors, voilà, je suis maintenant prêt à rendre ma décision sur la recevabilité des amendements présentés par la députée de Gouin, soit l'amendement présenté à l'article 3 du projet de loi et les amendements proposant l'introduction des articles 3.1 à 3.5 au projet de loi. Ces amendements visent à modifier le calcul et les modalités de versement des allocations de transition aux députés.

Parmi les critères établis par la jurisprudence parlementaire, pour qu'un amendement soit recevable, il doit se rattacher au principe du projet de loi et ne peut ni le contredire ou l'écarter, ni l'élargir d'une manière telle qu'il va au-delà de l'objet du projet de loi. En l'espèce, comme son titre l'indique, le projet de loi n° 78 porte sur les allocations de transition des députés qui démissionnent en cours de mandat. De manière plus spécifique, il vise à rendre conditionnel l'octroi d'une telle allocation de transition pour les députés qui démissionnent en cours de mandat aux seuls cas où la démission du député est justifiée par des raisons familiales sérieuses ou par un problème de santé important affectant le député lui-même ou un membre de sa famille immédiate. Tel est le principe bien précis du projet de loi n° 78.

D'ailleurs, son préambule établit clairement que l'objet du projet de loi concerne l'octroi des allocations de transition au député qui démissionne en cours de mandat. Il précise en outre qu'un second projet de loi est présenté, lequel encadre notamment les autres conditions de travail des membres de l'Assemblée nationale applicables à compter de la 42e législature. Ainsi, il est à noter que le projet de loi n° 78 ne vise pas la situation des allocations de transition au sens large et qu'il ne porte donc pas sur les autres cas où des allocations de transition peuvent être versées, à savoir lorsqu'un député est défait lors d'une élection ou lorsqu'il termine un mandat à ce titre sans être candidat à l'élection qui suit la fin de ce mandat.

En contrepartie, l'autre projet de loi dont fait état le préambule du projet de loi n° 78, soit le projet de loi n° 79, intitulé Loi donnant suite au rapport du comité indépendant L'Heureux-Dubé et prévoyant les conditions de travail des membres de l'Assemblée nationale à compter de la 42e législature, a une portée beaucoup plus large. Il prévoit, en effet, plusieurs nouvelles conditions de travail pour les membres de l'Assemblée nationale à compter de la 42e législature, dont des modifications apportées à l'ensemble des allocations de transition.

D'ailleurs, il n'est pas inintéressant de souligner que les amendements de la députée de Gouin reprennent textuellement des articles de ce projet de loi n° 79. Comme le mentionnait le président de la Commission des finances publiques dans une autre décision, ce constat est assez révélateur du fait que les amendements se rattachent à un principe pouvant faire l'objet d'un projet de loi tout à fait indépendant et autonome. Ces amendements présentés par la députée de Gouin, qui auraient pour effet de modifier le calcul et les modalités de versement de l'ensemble des allocations de transition indépendamment des situations dans lesquelles elles sont versées, vont au-delà du principe du projet de loi n° 78. Pour toutes ces raisons, je déclare ces amendements irrecevables.

Alors, y a-t-il d'autres interventions sur cet article?

M. Fournier : On est sur l'article 3, M. le Président?

Le Président (M. Kotto) : Oui, M. le ministre.

M. Fournier : J'en ferais peut-être une parce que notre collègue de Gouin a indiqué... — puis là je vais la regarder pour être sûr que je ne me trompe pas en le disant, puis, si elle répond oui dans le micro, ça veut dire que je suis correct — invoque deux sujets. Il y en avait un qui était le sujet pour lequel vous venez de faire une décision d'irrecevabilité, qui consistait à régler la proposition qu'elle faisait de régler les allocations de transition pour ceux qui quittent à la fin d'un mandat. Il y avait un deuxième élément — et je sollicite sa réponse — qu'elle soulevait qui visait à assurer le caractère de transition, transition signifiant, à partir du moment où un autre revenu arrive, il devrait y avoir soit réduction de l'allocation de transition ou extinction — dépendamment du revenu autre — de l'allocation de transition.

Et je crois que là-dessus... Je regardais à nouveau les pages 70, 71 et 72 de L'Heureux-Dubé, la même section 4.5 sur l'allocation de transition règle d'abord la question d'en cours de mandat, ensuite vient parler de la fin du mandat parlementaire, mais qui, prise dans un tout, nous amène au concept de la transition. Et conséquemment, lorsqu'elle le soulève, elle pointe une possible omission dans le projet de loi actuel, celle de n'avoir pas transposé complètement l'aspect de transition à cause de la façon dont, dans L'Heureux-Dubé, c'est écrit. C'est-à-dire qu'on met le grand chapitre, on vient faire départ durant mandat puis, après ça, on vient faire le départ à la fin du mandat, et là on vient indiquer que c'est une transition à la fin. Et, par disposition dans le texte, cela nous a amenés à écrire comme si ne s'appliquait qu'au départ à la fin de mandat la question de la transition, alors que cette portion-là s'appliquait probablement à l'ensemble. En tout cas, il y a une certaine cohérence qu'on peut y trouver, cela me semble-t-il.

Je crois qu'à ce moment-ci, M. le Président, je demanderais à ma collègue de voir si j'ai bien compris, pour commencer, quand j'interprète ainsi ses propositions.

• (17 h 30) •

Mme David (Gouin) : Mettons, là, juste...

Le Président (M. Kotto) : Mme la députée de Gouin.

Mme David (Gouin) : Oui. Excusez-moi, M. le Président. Juste pour m'assurer, effectivement, qu'on se comprend, je vais, un petit peu, retraduire dans mes mots. Est-ce que je comprends que le ministre me dit que, si on discute uniquement du député démissionnaire en cours de mandat et qui a droit à l'allocation de transition, là on pourrait baliser cette allocation de transition, comme le propose le rapport L'Heureux-Dubé à la page 71, de façon à ce que ce soit une véritable allocation de transition? Est-ce que j'ai bien compris?

M. Fournier : Oui. On s'est donc, tous les deux, compris.

Mme David (Gouin) : Alors, ça, c'est déjà bien.

M. Fournier : Et on comprend qu'en ce moment, tel qu'il est écrit dans le projet de loi, le concept de transition, qui se trouve à la fin du chapitre Allocation de transition de L'Heureux-Dubé, a été transcrit comme ne s'appliquant qu'à la fin du mandat. Parce que, de la façon que ça arrive dans le texte, c'est après fin de mandat, mais l'intention de L'Heureux-Dubé était sans doute de l'appliquer au chapitre 4 point je ne sais plus combien...

Une voix : 4.5

M. Fournier : 4.5? 4.5, qui s'appelle Allocation de transition et qui s'applique donc aussi à la question des départs durant mandat.

Ceci étant, je suis donc disposé à présenter des amendements, mais je nous suggérerais... Parce que j'ai échangé du regard avec des collègues, et cet échange de regards m'a permis de comprendre que, s'il y avait un peu de temps pour que les caucus des différents partis puissent discuter de cet élément, cela aiderait dans la suite de nos échanges. On n'est, de toute façon, pas très loin du moment qui était annoncé pour la fin de nos travaux, je crois que cela permettrait un meilleur échange avec les caucus, bien comprendre le concept. Je suis même disposé... Si mes collègues le souhaitent, s'ils me disent : On peut l'avoir informellement, je pourrais échanger des propositions d'amendement informellement. Si on souhaite que je les mette sur la table, je peux les mettre sur la table. L'intérêt pour moi, c'est simplement que les caucus puissent avoir les meilleures discussions possible sur le sujet. Donc, mes yeux et presque mes oreilles, M. le Président, me suggèrent de soumettre un amendement à l'article 3, et qui amènera donc un changement à 3, et un amendement en insérant un article 3.1 par la suite. Je les dépose. Les gens en prendront connaissance, ils pourront en discuter dans les caucus, et le leader du gouvernement, dans la sagesse de sa chef de cabinet, pourra nous donner un moment pour revenir en commission, probablement rapidement, demain, je crois, et...

Des voix : ...

M. Fournier : Bon. Alors, dans sa sagesse qu'elle avait déjà exercée, donc on pourra revenir demain et entreprendre, si tant est que c'est le souhait de cette commission, cette modification.

Une voix : ...

M. Fournier : Comme quoi, M. le Président, puisqu'il n'y a pas de suspension et que les gens qui nous écoutent veulent que quelqu'un continue de parler, ce sera donc moi. Je voudrais, M. le Président, saluer les efforts de notre collègue de Gouin et lui dire que ce n'est pas parce qu'un dossier ne reçoit pas la recevabilité qu'on ne peut pas essayer de se retrouver à mi-chemin et faire des ententes entre nous.

Le Président (M. Kotto) : Alors, Mme la députée de Gouin.

Mme David (Gouin) : Oui, parce que, M. le Président, on ne va quand même pas laisser le ministre parler tout seul, là. Non, mais je voudrais simplement dire qu'à la page 71, recommandation 9, ça me paraît très clair, ce qui est là. Et donc je pense qu'on n'invente pas grand-chose, puis c'est ça qui est intéressant. Je parle, évidemment, de la page 71 du rapport L'Heureux-Dubé, il recommande qu'aucune allocation de transition ne soit versée au député qui démissionne en cours de mandat, sauf si la démission est justifiée, etc. Et il y a une phrase qui est ajoutée et qui est importante, là : «Le cas échéant, le calcul de l'allocation et son versement se feraient conformément aux recommandations 11 à 17.» Autrement dit, il existe déjà — puis c'est ce que j'avais essayé de faire, là — des dispositions qui permettraient d'avancer dans la discussion pour baliser l'allocation de transition devant être reçue par un député démissionnaire en cours de mandat. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Kotto) : Je vous en prie. S'il n'y a pas d'autre commentaire, je vais, dans ce cas, vous... M. le ministre, plus d'autres commentaires?

M. Fournier : Je suis épuisé.

Des voix : Ha, ha, ha!

Le Président (M. Kotto) : O.K. Parfait. Alors, la commission va suspendre ses travaux jusqu'à 20 h 30, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine, afin de poursuivre l'étude du projet de loi n° 59. Merci.

(Fin de la séance à 17 h 37)

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