L'utilisation du calendrier requiert que Javascript soit activé dans votre navigateur.
Pour plus de renseignements

Accueil > Travaux parlementaires > Travaux des commissions > Journal des débats de la Commission des institutions

Recherche avancée dans la section Travaux parlementaires

La date de début doit précéder la date de fin.

Liens Ignorer la navigationJournal des débats de la Commission des institutions

Version finale

41e législature, 1re session
(20 mai 2014 au 23 août 2018)

Le mercredi 24 août 2016 - Vol. 44 N° 135

Consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 98, Loi modifiant diverses lois concernant principalement l’admission aux professions et la gouvernance du système professionnel


Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Auditions (suite)

Ordre des conseillers et conseillères d'orientation du Québec (OCCOQ)

Ordre des agronomes du Québec

Ordre des architectes du Québec

Ordre des arpenteurs-géomètres du Québec (OAGQ)

Fédération des chambres de commerce du Québec (FCCQ)

Barreau du Québec

Intervenants

M. Guy Ouellette, président

Mme Stéphanie Vallée

Mme Mireille Jean 

Mme Diane Lamarre

M. Simon Jolin-Barrette  

*          Mme Josée Landry, OCCOQ

*          Mme Martine Lacharité, idem

*          M. René Mongeau, Ordre des agronomes du Québec

*          M. Guillaume LaBarre, idem

*          Mme Nathalie Dion, Ordre des architectes du Québec

*          M. Jean-Pierre Dumont, idem

*          M. Pierre Tessier, OAGQ

*          M. Luc St-Pierre, idem

*          M. Stéphane Forget, FCCQ

*          M. Michel Cournoyer, idem

*          Mme Claudia P. Prémont, Barreau du Québec

*          Mme Lise Tremblay, idem

*          Mme Sylvie Champagne, idem

*          M. Marc Sauvé, idem

*          Témoins interrogés par les membres de la commission

Note de l'éditeur : La commission a aussi siégé en après-midi pour procéder à l'élection à la  vice-présidence de la commission. Le compte rendu en est publié dans un fascicule distinct.

Journal des débats

(Dix heures dix-neuf minutes)

Le Président (M. Ouellette) : À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la commission des institutions ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.

La commission est réunie afin de poursuivre les consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 98, Loi modifiant diverses lois concernant principalement l'admission aux professions et la gouvernance du système professionnel.

M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?

Le Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Merlini (La Prairie) est remplacé par M. Reid (Orford); M. Leclair (Beauharnois) est remplacé par Mme Lamarre (Taillon); et Mme Maltais (Taschereau) est remplacée par Mme Jean (Chicoutimi).

Auditions (suite)

Le Président (M. Ouellette) : Merci. Nous entendrons cet avant-midi les organismes suivants : l'Ordre des conseillers et conseillères d'orientation du Québec, l'Ordre des agronomes et l'Ordre des architectes.

Avant de débuter, je veux vous souhaiter la bienvenue, chers collègues. Pour moi, c'est ma première journée d'auditions, et je suis très heureux de vous retrouver en ces circonstances. Nous en avons pour quelques jours ensemble à recevoir des groupes.

• (10 h 20) •

Donc, je souhaite la bienvenue aux représentants de l'Ordre des conseillers et conseillères d'orientation du Québec, représenté par Mme Josée Landry et Mme Martine Lacharité. Je comprends que c'est Mme Landry qui va nous faire la présentation de 10 minutes et que, par la suite, il y aura un échange avec Mme la ministre et les partis d'opposition. Mme Landry, à vous la parole.

Ordre des conseillers et conseillères
d'orientation du Québec (OCCOQ)

Mme Landry (Josée) : Merci, M. le Président. Mme la ministre, Mmes et MM. les députés, nous apprécions beaucoup d'avoir été invités à présenter notre point de vue sur ce projet de loi. Nous vous en remercions.

Mon nom est Josée Landry. Je suis nouvellement présidente de l'Ordre des conseillers et conseillères d'orientation du Québec, et je me sens d'autant plus privilégiée de pouvoir participer à cette commission. Je suis accompagnée de Mme Martine Lacharité, qui est directrice générale et secrétaire de l'ordre.

Tout d'abord, pour que vous puissiez bien comprendre notre communication, permettez-nous une clarification concernant la profession de conseiller d'orientation. Mes informations, c'est que plusieurs personnes considèrent encore les conseillers d'orientation comme des professionnels oeuvrant uniquement dans le secteur de l'éducation, auprès des jeunes et des adultes. Or, nous sommes un peu moins de 50 % à le faire. Les autres interviennent dans les secteurs de l'employabilité, de l'organisation, de la réadaptation, la santé et les services sociaux. Plusieurs pratiquent aussi en cabinet privé. Donc, l'orientation, c'est tout au long de la vie.

La formation permettant l'accès à notre ordre professionnel est une formation universitaire de deuxième cycle.

Vous comprendrez que l'intégration socioprofessionnelle des personnes immigrantes est une réalité dans la pratique de nombreux conseillers d'orientation. Nous avons choisi de vous faire part de notre position et de certaines recommandations en nous appuyant sur notre expertise concernant cette problématique. Dans un deuxième temps, nous avons choisi de vous partager nos initiatives en lien avec l'éthique et la déontologie au sein de notre ordre professionnel.

En premier lieu, donc, nous aborderons l'intégration socioprofessionnelle des immigrants. Et nous souhaitons d'abord distinguer ici deux choses : l'admission à un ordre professionnel d'un candidat formé à l'étranger puis ensuite l'insertion socioprofessionnelle des immigrants. Commençons donc par l'admission à un ordre professionnel d'un candidat formé à l'étranger.

Hier, le CIQ mentionnait qu'aujourd'hui le taux de reconnaissance complète ou partielle des compétences des immigrants par les ordres est de 95 %. Dans ce cas, nous questionnons l'apport d'un commissaire à l'admission, tel que proposé par le projet de loi. Ses pouvoirs de surveillance seraient accrus, alors que les ordres démontrent qu'ils ont déjà un processus de reconnaissance qui donne de très bons résultats. Il y a sans doute place à amélioration. Ainsi, au lieu d'accroître la surveillance, nous suggérons plutôt d'investir dans la mise en place de mesures de soutien pour les ordres telles que le développement d'outils pour procéder à la reconnaissance des acquis, l'élaboration de profils de compétence, l'accès pour les candidats aux formations d'appoint et aux stages. Finalement, nous croyons que le fait de détenir un permis d'un ordre professionnel n'est pas du tout garant de l'insertion en emploi.

Maintenant, au sujet de l'insertion socioprofessionnelle des immigrants, ceci peut vous sembler hors propos, mais nous croyons que l'insertion professionnelle des immigrants est plus large que l'admission à un ordre professionnel. Nous sommes persuadés que l'élargissement des pouvoirs du commissaire aux plaintes n'est pas un moyen qui peut avoir un impact significatif sur l'intégration des personnes immigrantes à la société québécoise. Il y a beaucoup de pression exercée sur les ordres, mais il faudrait également questionner la responsabilité de l'ensemble de la société.

À ce sujet, certaines recherches mentionnent que d'autres obstacles viennent freiner ou même empêcher l'insertion socioprofessionnelle des immigrants. Par exemple, la langue ou le pays d'origine peuvent expliquer une part des difficultés d'insertion au marché du travail, puisqu'il peut arriver que ces facteurs engendrent une certaine méfiance des employeurs et empêcher ces immigrants de faire valoir leurs titres de compétence ou de trouver un emploi reflétant leur niveau de scolarité. Nous croyons donc qu'il faut investir dans des mesures structurantes et des moyens d'action concertés des différents acteurs pour faciliter l'intégration en emploi autant des personnes non admissibles à un ordre que celles qui seraient admissibles. Par exemple, qu'offre-t-on aux personnes immigrantes qui ne sont pas admises à un ordre professionnel? Car elles n'ont pas accès à la formation d'appoint et aux stages.

À ce sujet, nous saluons la Stratégie d'action en matière d'immigration, de participation et d'inclusion 2016-2020, qui préconise une vision porteuse d'un projet collectif rassembleur pour l'ensemble de la société. Notamment, une mesure nous a interpellés plus particulièrement, puisqu'elle propose de résoudre les difficultés liées à la reconnaissance des compétences des personnes immigrantes afin que leur contribution à l'essor économique soit rapide et réussie.

Pour mettre en lumière l'importance de travailler en collaboration avec différents acteurs, nous souhaitons vous partager un projet novateur financé par le MIDI et réalisé par deux conseillères d'orientation du Club de recherche d'emploi Montréal Centre-Ville entre 2012 et 2014. Il s'agit d'un programme de transition de carrière, dans le secteur de la santé, auprès d'environ 400 médecins diplômés à l'étranger non admissibles à leur ordre professionnel. Les retombées du projet sont de deux ordres. Tout d'abord, il a permis d'augmenter la capacité de médecins diplômés à l'étranger à gérer leur nouvelle carrière au Québec, tout en demeurant le plus près possible de leur niveau de formation et de compétence. Ensuite, grâce à des partenariats avec les employeurs du milieu de la santé, avec des organismes publics et parapublics, il a permis d'intégrer l'approche par compétences pour organiser des stages d'expérimentation et de validation dans des emplois ne nécessitant pas de permis de pratique. De plus, il a permis d'utiliser des outils de sélection et d'intégration des nouveaux employés, développés avec cette approche par compétences. Ce projet a été réalisé, entre autres, grâce à la reconnaissance des acquis et des compétences dans les processus d'embauche.

Maintenant, ici, nous trouvons important de vous présenter ce que signifie justement le processus de reconnaissance des acquis et des compétences, que nous appellerons maintenant la RAC, R-A-C. Pour expliquer ce processus complexe, nous devons faire une distinction entre la RAC formelle et la RAC non formelle. La RAC formelle est un processus qui conduit à une reconnaissance officielle par un organisme reconnu : des établissements d'enseignement, des ordres professionnels ou des métiers réglementés. Elle peut donc conduire à la délivrance d'un diplôme, la reconnaissance de cours, la délivrance d'un permis ou d'une carte de compétence. Pour sa part, la RAC non formelle est également essentielle dans le processus d'insertion socioprofessionnelle, bien qu'elle ne conduise pas à une reconnaissance officielle. Il peut s'agir notamment d'un bilan de compétences que s'approprient les immigrants qui sont en processus de transition de carrière.

Il faut également distinguer l'accompagnement dans le processus de la RAC et l'évaluation de la maîtrise des compétences qui, elle, doit se faire par un expert de contenu. Il en est ainsi en éducation, mais également pour les ordres professionnels. Ce sont des experts de contenu qui peuvent se prononcer sur les connaissances, mais également sur les compétences acquises. Nous nous questionnons : Comment le commissaire à l'admission pourrait-il juger des compétences requises pour les 52 professions sans s'associer à des experts de contenu? L'intégration socioprofessionnelle des immigrants est une problématique plus large que celle de l'admission à un ordre de candidats formés à l'étranger. Nous recommandons que les ordres professionnels soient soutenus pour la mise en place d'outils favorisant la reconnaissance des acquis et des compétences plutôt que d'accroître la surveillance de leur processus d'admission.

Maintenant, si vous permettez, je vais passer à notre point suivant, qui concerne l'éthique et la déontologie. Nous entendons bien qu'il existe un déficit de confiance de la part de la population envers les ordres professionnels, mais aussi que, souvent, des initiatives positives en matière de protection du public sont passées sous silence. Nous profitons de cette tribune pour présenter les initiatives que nous avons mises en place en ce sens.

Nous sommes convaincus que le maintien de la compétence en éthique est primordial. Notre ordre a donc inclus dans sa politique de développement des compétences pour ses membres la mise à jour des connaissances en éthique et déontologie à tous les cinq ans.

Il nous paraît important, dans ce cadre-ci, de vous informer des mesures mises en place par notre ordre au cours des 10 dernières années pour s'assurer que nos membres développent une pratique professionnelle intègre. Ainsi, nous avons développé deux formations à distance en tenue de dossiers, nous avons un service-conseil aux membres par courriel et principalement par l'animation d'un forum en éthique, nous avons développé des fiches déontologiques, et nous avons la rédaction d'une chronique régulière dans notre magazine professionnel.

Plus récemment, nous avons élaboré une formation en collaboration avec la Faculté d'éducation de l'Université de Sherbrooke, une formation en ligne en éthique et en déontologie. Le principal objectif de la formation est de permettre aux étudiants en formation initiale en orientation et aux candidats à l'admission à l'ordre d'acquérir des connaissances sur l'éthique professionnelle, la déontologie et le professionnalisme, en plus de permettre aux conseillers d'orientation en exercice de mettre leurs connaissances à jour dans ce domaine.

En résumé, nous souscrivons donc entièrement à l'importance que le projet de loi accorde à la formation en éthique et en déontologie.

Ceci complète notre présentation. Nous vous remercions de votre attention.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, Mme Landry. Mme la ministre.

• (10 h 30) •

Mme Vallée : Merci. Alors, merci, bon matin. Merci de votre présentation.

Dans un premier temps, vous mentionnez que la délivrance d'un permis d'un ordre, ce n'est pas garant d'une insertion professionnelle qui est réussie. C'est certain que ça aide, ça contribue à cette insertion professionnelle. Et vous mentionnez que le bureau du commissaire peut contribuer à une meilleure reconnaissance des acquis de la formation mais que ces interventions, et là je vous cite, «n'apportent rien de spécifique pour faciliter l'accès au marché du travail».

Qu'est-ce qu'on pourrait ajouter au mandat du commissaire pour apporter plus, pour bonifier son travail? Parce qu'on s'entend, là, dans la façon dont certaines présentations sont faites, on s'oppose à certains pouvoirs d'un commissaire, pouvoirs qu'il a déjà, en passant, hein? Le commissaire aux plaintes, actuellement, commissaire qui deviendrait le commissaire à l'admission, qui s'appelle le commissaire aux plaintes, a déjà des pouvoirs, a déjà la possibilité de porter un regard dans certains contextes, et on élargit, on lui permet de porter ce même regard sur l'ensemble des admissions, donc qu'il s'agisse d'étudiants étrangers ayant obtenu une formation ici, au Québec, étudiants québécois ayant besoin d'une formation d'appoint ou de nouveaux arrivants. Alors, ce n'est pas des nouveaux pouvoirs qu'on crée, là, ce sont des pouvoirs que l'on étend. Ça, c'est clair.

Mais ce qui m'intrigue, c'est que, dans votre mémoire, vous dites : Ces interventions... dans son mandat actuel, dans le mandat qu'a le commissaire actuellement, les interventions n'apportent rien de spécifique. Donc, je présume que vous avez peut-être des pistes de solution, des suggestions concernant des interventions, ou des pouvoirs, ou une façon, un regard qui pourrait peut-être permettre de bonifier le travail.

Le Président (M. Ouellette) : Mme Lacharité.

Mme Lacharité (Martine) : Je peux répondre. Je pense que ce qu'on a suggéré davantage dans notre mémoire puis dans la présentation, c'est plus d'outiller, c'est... On comprend que la reconnaissance d'acquis et des compétences est un processus qui est complexe, qui demande des experts. Alors, ce que les ordres ont besoin, c'est davantage d'outils pour les aider à faire cette reconnaissance de compétences là.

Puis, bon, je comprends, là, vous dites que le commissaire a déjà ce mandat-là, il l'a auprès des personnes qui sont formées à l'étranger. De notre côté, il n'y a pas nécessairement de problématique en lien avec les personnes qui sont formées au Québec. Alors, c'est dans ce contexte-là aussi qu'on trouve qu'il n'y a pas nécessairement besoin d'élargir son mandat.

Mme Vallée : En fait, le mandat du commissaire, c'est vraiment de poser un regard sur le processus, pas sur le fond, hein? Puis ça aussi, c'est important de faire la distinction. Ce n'est pas le contenu, c'est vraiment le processus, c'est de veiller à s'assurer que le processus soit juste et équitable, peu importe qui s'adresse... qui fait cette demande de reconnaissance. Alors, dans le fond, c'est un principe d'équité, c'est un principe de justice naturelle, à savoir que, peu importe le demandeur, la provenance de la demande, le processus mis en place va être équitable. On n'entre pas dans le contenu, nous. C'est pour ça que peut-être qu'il n'y a pas une... il y a peut-être une distinction qui est fort importante à faire.

Et, dans ce processus-là, le commissaire peut diriger des recommandations vers, oui, les ordres, mais une recommandation qui pourrait aussi être dirigée vers d'autres intervenants du système, d'autres joueurs. Parce que c'est vraiment... L'objectif, c'est d'avoir une vision transversale des processus d'admission, d'émettre des recommandations, qui pourraient aussi toucher le gouvernement du Québec, là, on s'entend, là, le gouvernement n'est pas étranger à tout ça, et qui permettra éventuellement, dans le cadre, par exemple, des discussions qui pourraient avoir lieu au pôle, de venir corriger un processus qui pourrait s'avérer inéquitable, d'où l'institutionnalisation du pôle. Le pôle est le lieu, finalement, où tous ces acteurs-là vont se réunir pour échanger, pour faire le point, et, sans venir toucher à l'autonomie de chacun des acteurs, on a une table où on échange et où on fait le point sur ce qui ne va pas.

Donc, c'est quand même important de faire cette distinction-là, là. Le commissaire, son rôle, c'est vraiment d'évaluer le processus, d'émettre des recommandations quant au processus qui est mis en place. Et c'est ce qui semble manquer, d'ailleurs, c'est ce qui... La Protectrice du citoyen, hier, nous en parlait, on a des enjeux... Vous disiez : Il n'y a pas de problème. Mais, oui, il y a des problèmes. Des étudiants étrangers formés au Québec font face parfois à des problèmes lorsque vient le temps de faire leur entrée, de faire leur intégration professionnelle, et ça, même si la formation a été donnée au Québec. Alors, on doit avoir une vision plus large pour peut-être venir apporter... et bonifier ce qui se fait déjà. Puis il y a de très belles choses qui se font, effectivement, de très beaux projets qui sont mis en place, mais... et c'est vraiment pour améliorer les façons d'aller de l'avant.

Donc, je pensais que c'est important, là, de faire le point parce que je sentais que, dans votre présentation, on ne parlait pas de l'évaluation du processus, mais je pensais que vous aviez comme perception que le commissaire entrait vraiment, là, dans le contenu.

Le Président (M. Ouellette) : Mme Landry.

Mme Landry (Josée) : Merci. Pour nous, s'il y a un pouvoir d'enquête, effectivement on se questionne jusqu'où ça va aller, ce pouvoir d'enquête. Vous parlez du processus versus le contenu. Ce qu'on se pose comme question, c'est comment une personne, dans ce rôle-là, va pouvoir statuer sur l'accès à une profession sans en connaître nécessairement...

Mme Vallée : Mais le pouvoir d'enquête du commissaire ne change pas, il a déjà un pouvoir d'enquête. Alors, le pouvoir d'enquête qu'il a actuellement, lorsqu'il s'agit de regarder le processus qui s'adresse à un nouvel arrivant, il a un... Le commissaire, on s'entend, est en place depuis six ans, il a un pouvoir d'enquête, il fait... il émet des recommandations. Bien, le même pouvoir s'applique maintenant ou s'appliquerait pour l'ensemble des admissions pour s'assurer que l'équité existe, peu importe qui... que le processus soit équitable, peu importe qui souhaite entrer dans le système.

Et, on s'entend, l'objectif de la protection du public demeure, c'est-à-dire que, si l'entrée dans une profession, elle est assujettie à des règles de compétence, elle est assujettie à une formation, mais c'est la même chose pour tout le monde. L'objectif de protection du public est de... il est le même. Que ce soit un Québécois qui a fait toute sa scolarité... qui est né au Québec, qui a fait sa scolarité au Québec, ou un étudiant étranger qui a fait sa scolarité au Québec, ou le nouvel arrivant qui a eu une formation à l'étranger et qui arrive, ultimement, pour faire leur entrée dans un ordre professionnel, ces gens-là doivent avoir une maîtrise de fond des connaissances, doivent maîtriser ces connaissances-là. On sait, oui, ici, il y a une maîtrise de la langue française qui s'ajoute comme... au Québec, qui est là, mais il y a aussi ces connaissances de base qui sont nécessaires pour assurer la protection du public, mais ça, c'est la même chose.

• (10 h 40) •

Donc, dans le fond, l'objectif du commissaire est vraiment de porter un regard sur le processus mis en place. Lorsque vient le temps d'évaluer ces compétences-là, est-ce qu'on l'a fait de façon équitable? Est-ce qu'on l'a fait d'une façon correcte? Est-ce qu'il y aurait des améliorations à apporter, que ce soit au sein des ordres, que ce soit au sein des maisons d'enseignement? Parce qu'il peut arriver qu'on va requérir soit d'un Québécois qui a eu un parcours... Un citoyen québécois qui a eu un parcours de formation atypique, ce qu'on va lui requérir, d'aller suivre certains cours d'appoint, certaines formations, est-ce qu'on va avoir les mêmes exigences pour un nouvel arrivant qui a eu une formation similaire? Donc, c'est vraiment l'objectif du rôle du commissaire.

Il n'a pas des pouvoirs d'enquête... Ses pouvoirs d'enquête ne seront pas différents des pouvoirs d'enquête qu'il possède déjà. On ne fait que l'étendre pour avoir cette vue d'ensemble qui est nécessaire et pour arriver à poser une forme de diagnostic qui sera ramené par la suite, notamment, autour de la table du pôle. C'est la vision. Ce n'est pas de venir... L'objectif, ce n'est pas de venir porter atteinte à l'autonomie ni des universités ni des ordres professionnels, c'est d'avoir un regard qui est indépendant et qui est beaucoup plus global. Parfois, lorsqu'on a un regard global d'un tiers, on a une perception différente, puis ça nous amène aussi à revoir un processus, ce n'est pas...

Alors, c'est important, parce que je lis certains mémoires, puis j'entendais les gens hier, c'est la première journée, mais j'ai senti qu'on croyait qu'on avait donné des pouvoirs additionnels d'enquête, des superpouvoirs, puis ce n'est pas l'objectif. On a tout simplement pris les pouvoirs qui existaient en vertu de la loi puis qui avaient été mis en place, qui avaient été adoptés à l'époque, et on les étend à d'autres champs.

Le Président (M. Ouellette) : Mme Lacharité.

Mme Lacharité (Martine) : Peut-être que ce qu'on... L'incompréhension, c'est au niveau du... autour du processus d'admission. Peut-être que vous pouvez, peut-être éventuellement, nous l'expliquer. Vous voyez quoi comme processus d'admission? Parce que, dans l'admission qui n'est pas... nous, qu'on appelle chez nous — là, je vais parler pour chez nous — l'admission automatique, on a quatre diplômes qui offrent... qui donnent accès puis qui sont édictés par le gouvernement, ces gens-là, on les admet automatiquement. Alors, les processus d'admission, c'est sûr qu'on applique le règlement du gouvernement. Puis on a aussi, comme vous le savez, un règlement sur les équivalences de formation et de diplômes qu'on applique aussi puis qui est adopté par le gouvernement. Ça fait que c'est peut-être à ce niveau-là qu'on se demande c'est quoi, les processus d'admission qui font si problème, permettez-moi l'expression, pour qu'on élargisse le mandat du commissaire aux plaintes actuellement.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la ministre.

Mme Vallée : Les enjeux, parfois, sont vraiment au niveau de la reconnaissance par rapport aux diplômés qui sont atypiques, et ça, c'est de s'assurer que le processus va être équitable. Parce que, parfois... Puis, on entend, la balle va se lancer entre les institutions d'enseignement et les ordres, et je pense qu'il est important d'avoir un regard, dans certains cas, sur le processus qui a été mis en place pour permettre cette formation-là.

C'est certain que vous dites : Oui, nous admettons les diplômés en vertu d'un règlement que vous édictez. Je pense qu'il est important de mentionner que ce règlement est édicté à la demande des ordres professionnels en question. Ce n'est pas le gouvernement du Québec qui dit : Voilà! Il y a une consultation, il y a un travail qui se fait avec les ordres et avec l'Office des professions. Lorsqu'on me demande de faire des modifications réglementaires — j'en ai encore signé ce matin — c'est suite à une demande de l'ordre qui demande de reconnaître... qui va demander de reconnaître... et en collaboration avec les maisons d'enseignement. Et il y a toute une consultation. Ce n'est pas le gouvernement qui unilatéralement va vous dire : Vous reconnaissez tel ou tel diplôme, là. Puis on s'entend que les maisons d'enseignement vont modifier parfois le nom d'une formation, vont ajouter des maîtrises, vont ajouter... Bref, peut-être qu'il y a un certain nombre de formations qui vont donner justement droit à une reconnaissance.

Mais ce qui est important, je pense, ultimement, dans tout ça, ce qui est important, c'est de s'assurer que celui ou celle qui fait cette demande-là et qui rencontre une problématique puisse avoir une oreille, puisse avoir une porte à laquelle frapper, et que cette ressource-là puisse évaluer le processus, est-ce que le processus est équitable. Si la personne n'a pas accès, n'a pas été reconnue comme étant apte à intégrer un ordre professionnel, est-ce que ça s'est fait en raison de critères objectifs qui sont tout à fait justifiés? Parce qu'on s'entend, l'objectif des ordres, c'est de protéger le public. Alors, si la personne n'est pas... peu importe d'où elle vient, si la personne n'est pas compétente et n'a pas les compétences requises, il n'y a pas de problème. Mais, si la personne a les compétences requises et puis qu'il y a une problématique qui s'est manifestée dans le processus, est-ce qu'il ne serait pas important d'être informé de cette problématique-là et de voir à y apporter des solutions? Ultimement, c'est aussi simple que ça, dans le fond, l'exercice qu'on vous propose.

Le Président (M. Ouellette) : Vous permettrez une courte réponse. Mme Lacharité. Parce que...

Mme Vallée : Excusez-moi.

Le Président (M. Ouellette) : Mme Landry.

Mme Landry (Josée) : J'avais une idée, je l'ai perdue. Oui! bien, c'est justement, ce qu'on questionne, c'est : Où est le problème? Parce qu'on ne voit pas de problème d'équité en termes d'admission, que la formation soit faite au Québec ou à l'étranger. On parlait de reconnaissance des acquis dans notre présentation. On ne peut pas parler pour tous les ordres, mais, de façon générale avec les statistiques qu'on voit, on n'a pas vu nécessairement de données qui nous démontrent qu'il y a une problématique au niveau de l'admission à des ordres professionnels. Chez nous, on n'en vit pas non plus. Alors, il est là, notre questionnement, aussi : Où est le problème?

Le Président (M. Ouellette) : Merci, Mme Landry. Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Jean : Merci, M. le Président. Bonjour, Mme Landry et Mme Lacharité. Bienvenue à l'Assemblée nationale. Merci d'avoir déposé votre mémoire, c'est toujours intéressant pour pouvoir faire avancer notre réflexion

J'aurais une question. Dans votre mémoire, à la page 5, vous référez à l'importance de la francisation et de peut-être quelques problématiques là-dessus. Pourriez-vous un petit peu élaborer sur le sujet?

Mme Lacharité (Martine) : C'est sûr que le problème, souvent, au Québec, c'est le fait que l'apprentissage du français est obligatoire puis, même dans le contexte de... Vous le savez, pour être admissible à un ordre, il faut avoir une connaissance minimale du français, il faut pouvoir passer l'examen de l'Office de la langue française, alors ce qui fait que, dans certains cas... en tout cas, chez nous, ça peut être un exemple, c'est que, dans certains cas, ça va évidemment empêcher des personnes d'avoir accès à notre ordre, parce qu'ils n'ont pas une connaissance suffisante de l'anglais... une connaissance suffisante du français, mais là ce n'est pas de notre ressort à nous, c'est que la loi est ainsi faite.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Jean : Merci. Selon votre expérience ou votre connaissance, parce que vous êtes quand même dans le milieu, est-ce que c'est une problématique importante, cette francisation-là, actuellement? Est-ce que les immigrants qui arrivent sont bien encadrés? Est-ce qu'ils ont ce qu'il faut pour pouvoir se franciser, au niveau de pouvoir, justement, obtenir le permis auquel ils aspirent?

Le Président (M. Ouellette) : Mme Lacharité.

Mme Lacharité (Martine) : Je vous dirais que je n'ai pas de données claires là-dessus, mais c'est sûr que c'est une démarche qui est difficile, parce qu'il y a eu évidemment des coupures particulières dans les réseaux. C'est souvent le réseau de l'éducation, les services d'éducation des adultes qui ont les montants, là, pour pouvoir franciser les personnes, alors, à ce niveau-là... Mais je ne pourrais pas m'avancer, là, dans... Je n'ai pas de données précises à vous donner, mais c'est sûr que c'est difficile pour la francisation actuellement.

Mme Jean : Merci. Une autre question. À la page 1, si je me souviens bien, vous faites deux recommandations. Une première, vous mentionnez qu'une table de concertation ou une plateforme de concertation serait importante pour pouvoir, justement, assurer la collaboration de tous les intervenants. Et, à la recommandation 2, vous avez des réserves... ou vous n'êtes pas d'accord avec l'implantation d'un pôle de coordination. J'aimerais savoir votre perception justement dans ces deux choses-là qui peut-être peuvent se retrouver sur le même niveau.

Le Président (M. Ouellette) : Mme Landry.

Mme Landry (Josée) : Merci. En fait, nous, ce qu'on parle, c'est davantage d'y aller vers une collaboration concertée avec les différents acteurs, notamment les établissements d'enseignement et le marché du travail. Parce qu'on vous a parlé, là, du projet de nos collègues conseillères d'orientation, et ce qui ressort de ce projet-là aussi, c'est que, malgré, par exemple, la francisation, la reconnaissance des acquis, ou compétences, ou scolarité acquis à l'étranger, au Québec, est difficile, notamment par l'accès aux stages en milieu de travail. Donc, il y a encore aujourd'hui beaucoup de préjugés face à l'intégration des immigrants et la reconnaissance surtout de ce qui a été acquis à l'étranger.

Et, dans le projet dont on a parlé ce matin, il y a certaines personnes qui ont eu accès à des stages. 100 % de ces personnes-là se sont placées par la suite, mais c'est laborieux. Et ces personnes-là, les conseillères d'orientation qui ont fait le projet, continuent à chercher des collaborateurs pour pouvoir étendre ce projet-là et permettre à des immigrants... Ce n'est pas seulement la francisation ou faire reconnaître, hein, les compétences ou les connaissances, c'est aussi s'approprier un parcours professionnel. Pour la personne immigrante, il y a aussi de réfléchir elle-même à ce qu'elle a à offrir, puis comment elle peut l'offrir au Québec aussi, puis comment elle peut avoir accès à de la formation d'appoint ou à des stages pour pouvoir intégrer le marché du travail et l'emploi. C'est ça, pour nous aussi, c'est plus large que l'admission à un ordre professionnel, parce que, dans l'exemple qu'on vous donnait, dans le projet, ce sont des médecins qui n'ont pas accès à leur ordre professionnel ici. Qu'est-ce qu'on fait avec ces personnes-là, on attend que la formation soit disponible ou qu'il y ait des stages? Est-ce qu'il n'y a pas un autre moyen d'intégrer ces personnes-là à la société et surtout à l'emploi par des collaborations avec, par exemple, le marché du travail ou les établissements d'enseignement?

Mme Jean : Merci.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la députée de Chicoutimi.

• (10 h 50) •

Mme Jean : Merci. Une petite question d'appoint, peut-être rapidement parce qu'on aura une autre question après ça à vous poser. Est-ce qu'à ce moment-là le pôle de coordination qui est proposé, selon vous, devrait intégrer la société civile ou des intervenants qui représenteraient le marché du travail pour qu'elle soit performante?

Le Président (M. Ouellette) : Mme Lacharité.

Mme Lacharité (Martine) : Dans le fond, ce qu'on... Le pôle, il existe déjà. Le questionnement qu'on a : Est-ce qu'il doit être inscrit dans la loi? Est-ce que le fait de l'inscrire dans la loi va mieux permettre aux personnes de se concerter? Est-ce qu'on a pensé — évidemment, je vais dans votre sens — d'ajouter les réseaux d'employeurs, d'élargir, finalement, la participation au pôle? Puis est-ce qu'on a besoin, finalement, de l'intégrer dans la loi pour, finalement, favoriser cette concertation-là?

Le Président (M. Ouellette) : Mme la députée de Taillon.

Mme Lamarre : Merci beaucoup, M. le Président. Bonjour, Mme Landry. Bonjour, Mme Lacharité. Moi, ce qui m'intéresse beaucoup, c'est la pratique innovante dont vous faites... à laquelle vous faites référence à la page 7 de votre mémoire, donc deux conseillères d'orientation, Mme St-Amand et Mme Mocka, qui ont mis en place un programme de transition de carrière pour les médecins formés à l'étranger et non admissibles au Collège des médecins du Québec. Deux questions. D'abord, est-ce que ces deux personnes, qui ont quand même une expertise, vous ont parlé qu'elles trouvaient que ces personnes-là étaient victimes d'une certaine forme de discrimination en n'ayant pas accès aux stages, mais en ayant toutes les compétences nécessaires? Premier élément. Et, deuxièmement, est-ce qu'elles ont fait, par exemple, après leur étude, un sondage ou une évaluation du taux de satisfaction de ces professionnels, ou de leur insatisfaction, de se retrouver dans le poste qu'ils occupent après?

Le Président (M. Ouellette) : Mme Landry.

Mme Landry (Josée) : Merci. L'initiative de ce projet-là, enfin la raison pour laquelle elles ont initié ce projet-là, c'est leur sentiment d'impuissance face aux risques de discrimination envers cette clientèle-là. Est-ce qu'elles ont fait un sondage après? Ça, je ne suis pas certaine, mais je sais qu'il y a... Dans leurs statistiques, ce qui ressort, comme je vous le disais, les personnes qui ont eu accès à des stages de validation et d'expérimentation d'emploi ont été placées en emploi, étaient évidemment très satisfaites parce qu'elles ont pu s'intégrer en emploi, dans des emplois qui ne sont pas régis par un permis de pratique mais qui se rapprochaient le plus possible de leurs niveaux de scolarité et de leurs compétences acquises à l'étranger.

Maintenant, ce qu'elles ont ressorti aussi, c'est qu'il y a 70 %, environ 70 % des personnes qui ont participé au projet de transition de carrière qui sont retournées aux études par la suite, ici, au Québec.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la députée de Taillon. Il vous reste 1 min 30 s.

Mme Lamarre : Tout simplement, est-ce que ce ne serait pas intéressant d'avoir accès à cette étude-là? Est-ce que la commission ne pourrait pas avoir accès à ces documents? Est-ce qu'elles ont publié quelque chose? Est-ce qu'elles ont fait un rapport écrit?

Le Président (M. Ouellette) : Mme Landry.

Mme Landry (Josée) : Dans notre magazine de l'ordre professionnel, on a déjà deux articles, qui sont cités dans notre mémoire, qu'on pourrait vous envoyer, ils sont... on les a mis en référence. Est-ce qu'elles ont écrit un rapport? Sûrement, il faudrait leur demander. Écoutez, nous, on vous partage cette expérience, on n'y a pas participé, là, évidemment, mais ça va nous faire plaisir, là, oui, de vous faire suite.

Le Président (M. Ouellette) : ...faire plaisir de faire suivre au secrétariat de la commission les interrogations de Mme la députée de Taillon, qu'on recevra avec beaucoup de plaisir, qui vont éclairer les membres de la commission. Mme la députée de Taillon, 30 secondes.

Mme Lamarre : Je redonnerais la parole à ma collègue de Chicoutimi.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la députée de Chicoutimi, pour finir en beauté.

Mme Jean : Merci. Alors, je réfère encore un peu à ce que je parlais tout à l'heure au niveau du pôle. Le CIQ proposait un comité multisectoriel, auquel peut-être vous adhérez. Est-ce que, selon vous, ce comité-là pourrait répondre à vos exigences de responsabilisation des intervenants?

Le Président (M. Ouellette) : Mme Lacharité, oui.

Mme Lacharité (Martine) : Oui. Oui, parce que c'est... mais c'est sûr que sa composition est importante, puis des personnes qui sont porteurs des dossiers puis qui peuvent prendre des décisions, c'est sûr que c'est... on est d'accord avec ça.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, Mme la députée de Chicoutimi. M. le député de Borduas. Heureux de vous retrouver.

M. Jolin-Barrette : Merci, M. le Président. Le plaisir est partagé. Bonjour, Mme Landry, Mme Lacharité, merci de votre contribution aux travaux de la commission. J'aimerais qu'on reparle du commissaire aux plaintes ou du commissaire à l'admission aux professions. On nous dit : L'objectif, c'est d'élargir son carré de sable, et il y a déjà le pouvoir d'enquête actuellement. Vous, vous le percevez comme un dédoublement, comme un alourdissement du système professionnel. Je me demandais : Chez vous, à l'ordre, est-ce que vous avez déjà eu des problématiques avec des candidats québécois ou des candidats qui ont fait une partie de leur formation à l'étranger où il y avait un problème au niveau de l'admission à l'ordre chez vous? Est-ce que c'est déjà arrivé?

Mme Lacharité (Martine) : Du côté de?

M. Jolin-Barrette : Du côté de candidats québécois.

Mme Lacharité (Martine) : Québécois.

M. Jolin-Barrette : Pas le volet des gens qui ont eu leur formation à l'étranger, des immigrants, où présentement c'est déjà dans la juridiction du commissaire, mais pour les candidats québécois qui visent l'élargissement?

Mme Lacharité (Martine) : Je peux peut-être juste vous préciser un petit peu comment ça fonctionne, là, quand... On a un comité d'admission, on a un comité d'admission par équivalence qui étudie les dossiers de tous les candidats, entre autres ceux qui proviennent du Québec comme ceux qui proviennent de l'étranger, et ce comité-là statue puis fait des recommandations. Mais, si la personne n'est pas satisfaite des recommandations, elle a une instance pour venir présenter sa situation au comité exécutif de l'ordre, qui, elle, prend acte et regarde la situation.

Puis, dans notre... Je pourrais vous dire : Depuis peut-être cinq ans, on a rencontré deux personnes à l'exécutif qui étaient venues, finalement, faire valoir qu'il y avait des choses de plus à ajouter dans leur démarche, leur expérience. Le comité exécutif n'a pas statué, a comme retourné ces éléments-là au comité d'admission par équivalence, et ça s'est réglé à ce niveau-là. Ça fait qu'on n'a pas de... Oui, il y a des gens qui questionnent, il y a des gens qu'on revoit, qu'on réanalyse certaines données, qui doivent nous fournir aussi des documents ou des éléments qui vont permettre au comité d'admission par équivalence de regarder vraiment bien la situation. Puis des fois, bien, les pièces arrivent un petit peu au fur et à mesure. Alors, les gens sont entendus au niveau du comité exécutif chez nous, et par la suite ils vont soit poursuivre ou tout simplement... Mais c'est arrivé, je pense, deux fois dans les cinq dernières années, de plaintes de ce type-là, de démarches comme celle-là.

M. Jolin-Barrette : Donc, je comprends qu'il y a la possibilité d'être entendu puis il y a des instances au sein même de l'ordre, ça fait que ce n'est pas un réel problème actuellement chez vous, puis vous n'avez pas eu cette connaissance-là.

Au niveau du pôle de coordination, dans votre mémoire, vous soulignez que vous ne souhaitez pas nécessairement la tenue de cette instance-là. Il y a un autre groupe, dans son mémoire, qui mentionne que... si on n'élargissait pas le pouvoir du commissaire mais plutôt que les problématiques soulevées relativement à l'admission étaient déférées au pôle de coordination, comment vous verriez ça? Tu sais, dans le fond, que, plutôt que ça tombe dans la juridiction du commissaire, ça soit le pôle de coordination avec les différents intervenants qui traitent de ces dossiers? Parce que, dans le fond, tous les intervenants seraient à ce pôle, du milieu universitaire, des ordres professionnels...

Le Président (M. Ouellette) : Mme Landry.

Mme Landry (Josée) : Merci. Nous, en fait, ce qu'on souhaite, c'est une collaboration des différents acteurs. Alors, ce que vous mentionnez présentement, ça pourrait être intéressant selon qui fait partie de ce pôle et ça pourrait être intéressant pour regarder justement la problématique d'une façon plus globale, incluant plusieurs acteurs représentant différents intervenants, là, le marché du travail, comme je disais tout à l'heure, les établissements d'enseignement, etc.

M. Jolin-Barrette : Parce qu'il y a déjà une liste en annexe du projet de loi, là, avec les organismes que vous soulignez aussi.

J'avais une question relativement à l'éthique et à la déontologie. Dans votre mémoire, à la page 13, vous dites : L'ordre n'a pas vraiment de levier sur ce qui est enseigné en matière de déontologie à l'université. Pouvez-vous nous dire où est la problématique là-dedans que vous soulevez?

Le Président (M. Ouellette) : Mme Lacharité.

Mme Lacharité (Martine) : Nous, on s'assure... C'est sûr que, dans nos normes d'admission, on a des crédits qui sont dans les normes d'admission pour que les étudiants de nos quatre universités, là, des quatre programmes universitaires, aient les connaissances en éthique et en déontologie, mais on n'a pas... on peut vérifier, mais on n'a pas accès au contenu de ces formations-là.

Parce que, vous savez, l'éthique, c'est très large. On peut réfléchir, oui, on peut... mais, tu sais, dans les besoins ou dans ce qu'on voit, nous, comme important, c'est de faire en sorte que les étudiants acquièrent des connaissances sur la déontologie professionnelle, sur la... tu sais, qu'ils puissent aussi réfléchir en délibération éthique en lien avec des cas particuliers qui arrivent dans les milieux de pratique qui touchent, là, les... Et ça, bien, on n'est pas...

Ça fait que ce qu'on se dit, c'est que... en mettant l'accent un petit peu plus sur l'éthique, c'est que ça pourrait peut-être nous donner la possibilité de porter un regard sur les contenus. C'est beau de dire : Oui, on l'offre, mais, quels sont les contenus qui sont présentés dans les curriculum, ça, on ne peut pas nécessairement le vérifier.

Le Président (M. Ouellette) : Rapidement, M. le député de Borduas, 30 secondes.

• (11 heures) •

M. Jolin-Barrette : Oui. Actuellement, dans le fond, est-ce que le diplôme universitaire donne directement accès à votre ordre professionnel?

Mme Lacharité (Martine) : Quatre diplômes universitaires, oui.

M. Jolin-Barrette : O.K. Et il n'y a pas de mesure de contrôle par l'ordre pour évaluer la connaissance en matière d'éthique et déontologie, on se fie sur ce qu'il y a à l'université.

Mme Lacharité (Martine) : Oui, c'est ça.

M. Jolin-Barrette : O.K.

Le Président (M. Ouellette) : Merci de vos réponses. Merci de votre participation, Mme Josée Landry et Mme Martine Lacharité, représentant l'Ordre des conseillers et conseillères d'orientation du Québec.

J'inviterais maintenant M. René Mongeau et M. Guillaume LaBarre, représentant l'Ordre des agronomes du Québec, à s'avancer à l'avant. Je suspends quelques minutes.

(Suspension de la séance à 11 h 1)

(Reprise à 11 h 2)

Le Président (M. Ouellette) : On reprend nos travaux. Nous recevons maintenant l'Ordre des agronomes du Québec, M. René Mongeau, son président, et M. Guillaume LaBarre, son directeur général et secrétaire. Vous avez 10 minutes pour nous présenter votre mémoire ou ce que vous avez à nous dire, et après il va y avoir un échange avec Mme la ministre et les porte-parole des deux oppositions. Je vous laisse la parole.

Ordre des agronomes du Québec

M. Mongeau (René) : Merci, M. le Président. Alors, comme vous nous avez présentés, je suis René Mongeau, je suis le président de l'Ordre des agronomes du Québec, et M. Guillaume LaBarre, qui m'accompagne, qui est le directeur général et secrétaire de l'ordre.

Alors, évidemment, on veut remercier la commission de nous recevoir. Mme la ministre, membres de la commission, merci de nous donner l'opportunité de nous exprimer auprès de cette commission sur la loi n° 98. Évidemment, notre but aujourd'hui est de non pas parler au nom des ordres, puisque le CIQ l'a fait déjà hier, mais plutôt vous donner l'opportunité de mieux connaître les processus qui fonctionnent bien ou qui ne fonctionnent pas vraiment bien, nécessairement, à l'Ordre des agronomes. Alors, c'est l'objectif de notre mémoire et de notre présentation.

Alors, évidemment, d'entrée de jeu, aussi, je veux saluer la volonté de la ministre de la Justice, Mme Vallée, de moderniser le Code des professions. Évidemment, on offre toute notre disponibilité pour faire avancer ce projet-là, et à l'égard de toutes les instances.

Évidemment, l'ordre considère que le projet est important et nécessaire tant pour l'évolution du système professionnel que pour la société, notre société, au regard de la protection du public. Il va sans dire que cette modernisation est attendue depuis longtemps par l'ensemble du système professionnel, évidemment le Conseil interprofessionnel et les différents ordres. La société évolue, on le voit, on le sent. La gouvernance des organisations et les règles d'éthique doivent être adaptées aux avancées sociales et technologiques.

Toutefois, quoique ce projet de loi n° 98 apporte certaines solutions à ces enjeux, nous voulons porter à l'attention de la commission quelques points qui n'apporteront pas, selon nous, de gains réels. Alors, nous vous soumettons, bien sûr, quelques suggestions, quelques pistes de solution.

Alors, ainsi les éléments du projet de loi qui nous interpellent particulièrement, et vous ne serez pas surpris, sont évidemment l'élargissement du rôle du commissaire, du commissaire aux plaintes vers l'admission, les pouvoirs de l'Office des professions, la gouvernance des ordres professionnels. Alors, c'est sur ces trois points-là, essentiellement, qu'on veut vous entretenir aujourd'hui.

Alors, concernant l'intégration des personnes immigrantes et le besoin d'un commissaire à l'admission, à cet égard, l'ordre du Québec considère... l'Ordre des agronomes du Québec considère que les dispositions réglementaires et les directives administratives dont on s'est dotés nous permettent d'assurer un processus d'admission efficacement et rigoureusement. Il est important de souligner que, déjà, depuis plusieurs années, la provenance de nos nouveaux membres admis à l'ordre par le biais des équivalences de diplômes de l'extérieur du Québec se situe à environ 30 % annuellement. Alors, on vise ça constamment.

Face à cette demande croissante, nous avons développé plusieurs outils d'accompagnement pour les personnes qui veulent obtenir un permis de pratique à l'ordre, dont des séances d'information annuelles, un guide complet sur les différentes facettes de la pratique en neuf modules, un vidéo qui permet de visualiser le processus d'entrevue, et, dans le cas où un candidat ne rencontre pas tous les critères d'équivalence, il est référé à des personnes-ressources identifiées dans chacune des deux universités qui dispensent la formation et qui leur proposent personnellement un cheminement de formation complémentaire.

D'autre part, nous sommes à développer une formation d'appoint, en fait des outils d'intégration socioprofessionnelle pour les... destinés aux personnes immigrantes pour faciliter leur intégration au secteur de l'agroalimentaire du Québec. À cet égard, les deux universités sont aussi tout à fait aptes à les offrir. Les travaux de communication... d'avancement de ce projet ont déjà été entamés, il y a plus de deux ans maintenant. De plus, les candidats peuvent bénéficier d'une formation à distance qui est offerte par les universités et qui est vraiment en développement pour l'adapter aux besoins des personnes immigrantes.

En ce qui concerne l'intégration des personnes en agronomie, des immigrants en agronomie, vous l'avez entendu aussi de la part de l'ordre qui nous a précédés, le véritable problème se situe plutôt dans le plan de l'obtention d'un emploi : 30 % de nouveaux agronomes, donc c'est beaucoup d'agronomes qui doivent se trouver un emploi à la suite de cette admission-là, et les propositions du projet de loi de nommer un commissaire à l'admission, à notre égard, n'apporteront pas de solution à cette situation-là. Alors, nous pensons que les énergies devraient plutôt être déployées sur des outils d'aide à l'intégration des immigrants en milieu de travail, et, à cet égard, j'aimerais mentionner que le travail actuel du comité intersectoriel sur l'intégration des personnes immigrantes au sein du ministère de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion nous apparaît très pertinent et qu'une bonification de ce comité en comité permanent interministériel en matière de reconnaissance des acquis et des compétences, tel qu'il a été proposé par le CIQ, nous apparaît tout à fait une avenue efficace.

Quant à la mobilité de la main-d'oeuvre, parce qu'en écoutant le mot de Mme la ministre hier, qui élargissait la discussion sur la mobilité de la main-d'oeuvre interprovinciale et internationale... en agronomie, nous avons constitué il y a déjà plus de deux ans un regroupement des ordres de chacune des provinces et qui s'axe essentiellement sur la mobilité de la main-d'oeuvre. Donc, le travail, et la mission, de cette organisation-là est de développer des outils qui vont faciliter la mobilité de la main-d'oeuvre. Donc, on n'a pas... on a déjà eu cette initiative de se donner des outils pour faciliter cette mobilité-là.

Donc, l'ordre, vous comprenez, n'est pas favorable à l'augmentation des pouvoirs du commissaire dédié à l'admission. Nous pensons que ces pouvoirs accrus ajouteraient un engrenage qui alourdirait le travail de l'Office des professions, qui engendrerait des coûts importants, sans réelle valeur ajoutée là où ça compte. En fait, notre objectif, notre mission, là où ça compte, c'est la protection du public, et on ne voit pas vraiment, chez nous, de valeur ajoutée à cet égard-là. Certaines lourdeurs actuelles ont déjà des conséquences importantes déjà sur le processus de protection du public, et nous souhaitons que le présent projet engendre non seulement une modernisation, mais aussi une plus grande célérité des processus qui ont une influence directe sur la protection du public. Nous souhaitons ainsi plus de rapidité en matière de révision des règlements et des lois qui modernisent chacun des ordres, dont la Loi sur les agronomes, bien sûr.

Et un petit aparté sur la Loi sur les agronomes. Vous avez, comme toute la population, lu les enjeux sur les pesticides. Bien, la Loi sur les agronomes nous permettrait d'être beaucoup plus vigilants sur la façon d'utiliser les pesticides au Québec. Alors, c'est une des conséquences sur la protection du public sur laquelle on souhaiterait voir plus de résultats.

Concernant l'Office des professions, en ce qui concerne justement l'office, l'ordre aimerait souligner que nous avons toujours travaillé en étroite collaboration avec celui-ci et nous pensons que les pouvoirs actuellement dévolus à l'Office des professions sont adéquats pour lui permettre d'intervenir efficacement auprès des ordres. C'est notre vécu, et on a toujours été des collaborateurs. Sur cet autre point, le projet de loi n° 98 nous semble donc aller un peu trop loin. Nous ne voyons pas à quels besoins ces mesures répondraient, sauf, exception, pour permettre à l'office d'intervenir auprès des ordres. Nous ne voyons pas l'utilité d'une règle générale à cet effet. Il en est de même pour les pouvoirs d'enquête sans autorisation ministérielle. Ce pouvoir constitue un moyen d'exception, à notre avis, qui doit nécessiter la validation de la ministre ou du ministre responsable lors de situations exceptionnelles.

• (11 h 10) •

Concernant la gouvernance des ordres, au point de l'éthique et de la déontologie, en matière d'éthique et déontologie, l'ordre appuie les mesures qui rendraient obligatoire une formation à l'ensemble des candidats et des membres des ordres. D'ailleurs, l'Ordre des agronomes du Québec applique déjà ces mesures depuis 2009, alors qu'elle a intégré au programme de formation des agronomes, avec la collaboration des deux facultés, l'agriculture, l'agronomie, une obligation de formation en déontologie et en éthique.

Alors, nous trouvons également essentielle la formation des administrateurs quant à leur rôle au sein du conseil d'administration d'un ordre et leurs obligations éthiques. Toutefois, notre avis est que chaque ordre devrait pouvoir développer ses propres normes d'éthique et de déontologie, créant ainsi des conditions plus favorables à leur appropriation, ce qu'on trouve majeur. Donc, on peut avoir un beau code, mais il est essentiel de se l'approprier. Alors, l'Office des professions du Québec pourrait jouer un rôle de guide auprès des ordres en proposant un cadre général.

Concernant le cumul des fonctions des dirigeants des ordres, nous souhaitons que le projet de loi respecte les besoins de flexibilité de gouvernance des ordres, qui varient en fonction de la diversité de leurs ressources et de leur taille. Quoique nous ne soyons pas favorables à cumuler des fonctions de directeur général et de président sur une base permanente, l'ordre suggère toutefois de maintenir la possibilité de permettre au président de cumuler les deux fonctions de façon intérimaire. Nous avons déjà vécu une situation semblable qui a permis à l'ordre de garder son efficacité par un remplacement temporaire du président à la direction générale.

De même, la possibilité du cumul des fonctions de directeur général et de secrétaire accorde la flexibilité nécessaire aux organisations qui ne peuvent se permettre la multiplication des rôles. Vous comprenez qu'il y a des ordres qui, pour le même nombre de membres, ont le double ou le triple de personnel, et qui fait en sorte que chaque ordre a besoin d'avoir une organisation qui réponde à sa capacité et à ses ressources.

Concernant le conseil d'administration des ordres, au chapitre de la composition des conseils, nous sommes favorables à l'augmentation de la proportion des représentants du public. C'est une mesure qui est nécessaire à la transparence et à la diversité des idées. Toutefois, cette modification engendrera pour nous des conséquences sur le conseil, qui nous oblige à modifier quelque peu notre conseil. Alors, on trouve que cette recommandation-là est un peu rigide et on suggère que, pour... les conseils qui ont de 16 à 18 membres puissent conserver leur conseil tel qu'il est actuellement. C'est une question, en fait, d'investissement de nos ressources où on mettra notre temps dans la prochaine réorganisation. Par conséquent, pour les conseils de taille raisonnable, donc, les modifications demandées nous paraissent peut-être un peu trop rigides.

Alors, en ce qui a trait à la divulgation de la rémunération des dirigeants, l'Ordre des agronomes du Québec y est tout à fait favorable. Nous appuyons donc la solution présentée par le Conseil interprofessionnel qui suggère d'inclure cette formation au rapport annuel d'un ordre professionnel.

Alors, en conclusion, nous accueillons favorablement le projet n° 98. Toutefois, nous attirons l'attention de la commission à l'effet que certaines mesures ne faciliteraient pas de remplir le mandat de protection du public, sur les points de l'augmentation des pouvoirs de l'office, l'interdiction du cumul des fonctions de la présidence et de la direction générale et les pouvoirs accrus du commissaire dans le processus d'admission.

Alors, je vous remercie, c'est un peu ce qu'on voulait partager aujourd'hui.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. Mongeau. Mme la ministre.

Mme Vallée : Merci. Alors, merci, M. Mongeau. Merci de votre participation, M. LaBarre, de votre participation aux travaux de la commission. M. Mongeau, je sais également que vous étiez des nôtres hier, étant membre du conseil d'administration du CIQ aussi, donc vous étiez... je pense que vous avez suivi nos travaux.

M. Mongeau (René) : Vos travaux, mais à distance, je n'étais pas sur place.

Mme Vallée : À distance, mais je suis persuadée que vous étiez très intéressé par ce qui s'est dit.

J'ai une série de questions pour vous, notamment parce qu'hier on a eu différents intervenants qui se sont succédé. Et la Protectrice du citoyen, elle, s'est présentée devant nous et nous disait que, sur la question des pouvoirs de l'office... c'est-à-dire le pouvoir d'enquête de l'office qui n'était plus assujetti à l'autorisation ministérielle, s'est réjouie de cette modification législative là. Et je me demandais... J'aimerais que vous élaboriez davantage, parce qu'est-ce qu'il n'y a pas actuellement, dans la forme, dans la structure du Code des professions, une discrétion ministérielle qui pourrait, dans certains cas peut-être, empêcher l'office de faire justement son travail de protection du public et de pouvoir intervenir plus rapidement lorsqu'est portée à son attention une situation particulière, une situation qui suscite un questionnement au sein d'un ordre professionnel?

Ce n'est pas toujours que les enjeux des ordres font l'objet de couverture médiatique. Au cours des dernières années, on a eu des situations qui ont été largement médiatisées, mais, au-delà de ça, est-ce qu'il ne serait pas opportun, est-ce qu'il n'est pas opportun de permettre à l'office de faire un premier tour de roue sans nécessairement devoir se tourner vers le ou la ministre en titre pour obtenir réponse à des questions? Parce qu'il n'est pas question... dans ces pouvoirs d'enquête qui sont accordés à l'office, il n'est pas question d'en arriver avec une décision, c'est-à-dire d'imposer unilatéralement un accompagnement, une tutelle, peu importe, là. On est vraiment dans la prise d'information, la cueillette d'information et l'intervention plus proactive, parce que, lors des crises qui ont été largement médiatisées, certains disaient : Bien, l'office n'est pas suffisamment proactif. Certaines critiques de certains commentateurs, c'était que l'office n'était pas... ne pouvait pas... avait un peu les mains liées justement par le code, par la formulation du code. Et est-ce qu'il n'est pas opportun, dans des cas, de permettre à l'office d'intervenir en amont plutôt que d'attendre qu'une crise prenne des proportions peut-être démesurées et là amène une attention médiatique qui, bien souvent, va rebondir sur le bureau du ministre ou de la ministre en titre?

M. Mongeau (René) : Comme on l'exprimait ici, et je vais vous partager plutôt le vécu qu'on a, et l'office pourra vous confirmer, probablement, j'espère, que, quand on a des demandes de l'office... Pour nous, l'office, c'est la référence. C'est le bras du gouvernement qui nous demande des comptes ou qui demande des ajustements. Je pense qu'une bonne majorité des ordres se comportent... Je ne veux pas... Je dis «une majorité», je ne connais pas la microgestion que l'office reçoit ou a à faire, mais je pense que la majorité des ordres répondent assez bien aux demandes de l'office. Dans mes conversations, dans mes échanges avec les différents présidents-directeurs généraux des ordres, je ne sens pas ce refus-là. Mais évidemment on n'est pas à l'office pour saisir ces détails-là. Mais, dans notre cas, on collabore constamment.

Alors, on comprend que, quand il y a des problèmes exceptionnels... Parce que ceux qu'on a tous en tête sont, à notre avis, assez souvent des problèmes exceptionnels. Et, dans ces problèmes exceptionnels, on pense solutions exceptionnelles. Et je pense que, pour la ministre ou le ministre, il est certainement important d'avoir un travail commun sur une décision d'aller plus loin à l'égard d'un ordre. C'est l'opinion qu'on se fait de l'élargissement. On a de besoin du support de l'office dans des situations complexes. Et ça, on a besoin, selon nous, d'améliorer ce support-là. Pour notre part, encore là je vais vous partager le vécu chez nous, quand on est arrivés à des situations complexes pour lesquelles on ne voyait pas nécessairement une solution, on a fait appel à l'office et on n'a pas eu tout à fait l'appui ou le support, je dirais, de l'office dans des situations pour lesquelles on aurait souhaité avoir leur contribution.

Alors, pour notre part, le regard qu'on a là-dessus, c'est : oui, plus de support, oui, plus d'outils. Si l'office a besoin d'experts au niveau de l'admission pour aider les ordres à bonifier leurs processus, on voit ça d'un bon oeil. Par contre, là, des pouvoirs élargis, on n'a pas un vécu où on a senti, dans notre part, qu'il fallait que l'office intervienne sur un angle plus réglementaire.

Mme Vallée : Quand vous mentionnez avoir besoin de support supplémentaire de l'office, à quoi faites-vous référence précisément?

• (11 h 20) •

M. Mongeau (René) : Bien, en fait, dans l'histoire de l'Ordre des agronomes, moi, je suis arrivé comme président parce que le président précédent a dû démissionner de ses fonctions pour une situation d'apparence de conflit d'intérêts puis de bris de confiance. On a fait appel à l'office pour avoir un support dans un processus qui n'était pas évident à gérer. Alors, on n'a pas eu... J'étais administrateur à ce moment-là. J'en avais fait part, même, quand je suis arrivé comme président à l'ordre, j'avais fait part à l'office qu'on aurait souhaité avoir un peu plus d'appui. C'est le genre d'exemple où, oui, on a besoin d'avoir un lieu où on peut se référer, parce que, comme vous le savez, surtout pour les élus, on n'a pas nécessairement toute l'expérience voulue pour gérer ces situations-là. Et de prendre l'expérience à l'interne, c'est bien, mais, comme  président ou présidente, de prendre de l'expérience et de la connaissance à l'externe, c'est essentiel aussi.

Alors, ce genre de situation là... Récemment, on a fait aussi appel à l'office pour d'autres conseils où on nous a dit : Bien, nous, on ne conseille pas là-dessus... je ne me souviens plus ce qui était exactement la question, là, parce que c'était une question réglementaire où on voulait avoir une opinion, puis l'office dit : Bien, on ne donne pas ce genre d'opinion là. Alors, on n'a pas senti un accueil, disons. On souhaiterait que l'office nous offre... offre davantage un soutien ou un support aux ordres dans des contextes difficiles.

Mme Vallée : Vous proposez dans votre mémoire justement de confier à l'office un rôle de guide en matière de normes d'éthique et de déontologie qui serait applicable aux administrateurs. Alors, qu'est-ce que vous verriez comme étant un guide qui pourrait être... ou des normes qui pourraient s'appliquer à l'ensemble des ordres? Parce qu'évidemment, à partir du moment où l'office émet un guide, on s'entend que l'objectif, c'est que les ordres s'en inspirent et puissent aller de l'avant. Donc, qu'est-ce que vous aviez envisagé, de façon plus précise?

M. Mongeau (René) : Je le vois un peu sur la même idée, quand on dit : On a besoin de sentir de l'office une part de soutien, une ressource. L'office a un regard sur l'ensemble des ordres, ils ont cette qualité-là. Évidemment, CIQ a un regard de ce même type, mais d'un autre... sur un autre angle. Donc, l'office est bien placé pour tracer les principales lignes d'orientation qui devraient être suivies par les ordres à titre de guide.

Évidemment, les administrateurs qui sont autour d'une table ont tous leur idée de ce que ça pourrait être, mais, encore là, les administrateurs arrivent de l'extérieur, sont élus. Ils arrivent avec une connaissance qui vient de leur propre culture. Donc, d'avoir un guide qui ramène l'idée générale de la protection du public et des obligations des administrateurs, en termes d'éthique et de déontologie, crée un message qui est porteur d'une certaine objectivité que les administrateurs ont besoin d'entendre en même temps.

Alors, recevant le message de l'office, dans le cadre d'un guide, et non pas d'un code systématique, mais plutôt d'un guide, les ordres peuvent constituer et s'approprier le code qu'ils développeront pour leurs administrateurs, et c'est dans ce sens-là qu'on voit le rôle de l'office, pour appuyer ou guider les ordres pour développer leur propre code, et non pas se faire imposer un code. Enfin, c'est un petit peu comme ça qu'on l'avait compris, dans l'orientation, là, il y avait une possibilité de se faire imposer un code d'éthique. On souhaite plutôt une démarche qui permettrait aux administrateurs de se l'approprier, ce code d'éthique là, donc en se le créant eux-mêmes.

Mme Vallée : Mais est-ce qu'il ne va pas, justement, de la protection du public d'assurer qu'un code d'éthique soit mis en place de façon quand même assez uniforme au sein des ordres?

M. Mongeau (René) : Ah, tout à fait, hein? Je ne sais pas si je ne m'exprime pas clairement. On est tout à fait d'accord avec cette idée d'avoir un code d'éthique sur une base uniforme. Mais il faut créer un processus qui permette aux administrateurs de se l'approprier.

Alors, vous savez comme moi, adultes, majeurs et vaccinés, on aime bien contribuer au développement des choses et on se les approprie, alors que, quand on vous amène un document tout fait, bon, c'est facile d'échapper des morceaux, si on peut dire ça comme ça. Alors, on aimerait mieux un guide qui permettrait aux administrateurs de développer leur propre code à partir de ce guide-là.

Mme Vallée : J'aimerais vous entendre parce que vous avez mentionné qu'un conseil d'administration composé de moins de 18 membres pourrait entraîner des bouleversements. En fait, en quoi un C.A. qui est composé de 18 membres entraînerait des bouleversements moins grands qu'un C.A. composé de 16 membres? On a un jeu de deux membres. C'est parce qu'hier on entendait notamment l'Ordre des chimistes, qui a apporté des modifications au sein de son ordre. C'est un ordre qui n'est pas très... qui comporte à peu près... qui est similaire au vôtre, là, en fait de membership, je dirais, et qui ont apporté des modifications au cours des dernières années. Ils ont apporté des modifications, qu'on retrouve notamment dans le projet de loi, sans bouleversements majeurs, là. Pour eux, ça semblait tout à fait correct. Différents experts en matière de gouvernance nous disent : C'est important de réduire la taille des conseils d'administration pour s'assurer d'avoir une meilleure prise de décision, ça va plus rondement. Donc, j'aimerais vous entendre parce que vous avez une vision qui est un petit peu différente de celle que certains groupes ont partagée avec nous hier, donc ça a suscité des questions.

M. Mongeau (René) : Évidemment, on est favorables à un conseil d'administration qui est restreint, ce n'est pas le nombre de personnes qui fait la qualité mais la qualité des personnes qui le constitue. On a un conseil d'administration actuellement qui... En fait, comme je vous dis, on parle pour nous, on a un conseil d'administration qui, avec le changement proposé au Code des professions, va amener une nuance d'un membre, donc on a un administrateur qu'il faudra repenser comment on va gérer cette dimension-là. Alors, dans ce sens-là, on trouve que d'avoir une rigidité à un près, puisqu'on a un conseil d'administration qui fonctionne bien, un code qui viendrait nous dire : Bien, à un près, vous devez faire un changement, ça nous amène à faire une analyse, un travail de fond sur comment on va restructurer ça, alors qu'on n'a pas un problème là.

Alors, quand on parle de la variante de ressources d'un ordre à l'autre, nos ressources étant relativement limitées, on sait qu'on a des endroits sur lesquels il faut travailler à l'égard de la protection du public, et ce n'est pas notre premier lieu. Alors, dans ce sens-là, on dit : Si le Code de professions est rigide à un près dans sa volonté, là on va devoir se pencher pour s'adapter à ça, ce n'est pas... on ne revendique pas ça, mais on souhaiterait mettre nos énergies ailleurs, qui auraient une efficacité plus grande sur notre mission première.

Mme Vallée : Qu'est-ce que vous pensez des rapports que le commissaire... les différents rapports de mission du commissaire? Parce que notre commissaire aux plaintes, que l'on souhaite renommer commissaire à l'admission, a quand même émis un certain nombre de rapports. Il a émis un rapport qui portait sur la formation d'appoint dans les collèges, dans les universités. Quelle est l'opinion de l'ordre à cet égard? Parce qu'on se lance la balle parfois entre les ordres, entre les universités, et quelle est votre opinion sur ce rapport-là?

M. Mongeau (René) : On conçoit que quelqu'un de la compétence du commissaire aux plaintes nous avise, nous donne sa perception dans un rapport semblable. Ça nous met aussi alertes sur les réelles obligations, mais ça amène certaines contraintes qui, parfois, dépassent la compréhension du commissaire. Et, à titre d'exemple, à l'Ordre des agronomes, quand on a développé notre formation d'appoint, dans un premier temps, où le commissaire était assez sévère à l'égard de certains aspects, il y avait une dimension rigide, il y avait un regard rigide sur cet aspect-là. Chez les agronomes, il y a un enjeu de bien saisir que la formation d'agronome, ce n'est pas un agriculteur bien éduqué. Il y a une tendance, des fois dans la population, à comprendre qu'un agronome, c'est un agriculteur éduqué. Non, ce sont des universitaires. Alors, on voulait s'assurer que les gens qui passaient par la formation d'appoint passent par un processus universitaire. Et le commissaire aux plaintes a été sévère, je dirais, à cet égard-là, nous indiquant que c'était à nous de reconnaître qui pouvait donner les formations, mais ce n'était pas nécessité que ce soit une formation universitaire. Donc, vous voyez un peu la zone où on a eu une longue discussion, très, très longue discussion. Et, quand on parle de lourdeur d'un commissaire qui vient enquêter éventuellement sur l'admission ou sur d'autres aspects, on y a mis un certain temps sur cette interrogation-là.

Alors, vous voyez un peu la nuance que je pourrais apporter à un rapport. Oui, c'est intéressant de bien comprendre, d'avoir une vue élargie de ce que peut être la formation d'appoint, mais en même temps il est essentiel que le commissaire comprenne bien pour chacun des ordres ses propres enjeux et ses propres besoins.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la députée de Chicoutimi. Mme la députée de Chicoutimi!

Mme Jean : Ah! merci. Je ne vous avais pas entendu.

Le Président (M. Ouellette) : Ah! bien, je m'excuse.

• (11 h 30) •

Mme Jean : Pas de problème. Merci beaucoup. Bonjour, M. Mongeau et M. LaBarre. Bienvenue, encore une fois, à l'Assemblée nationale. On est heureux de vous accueillir et surtout d'avoir vos expériences, et le partage de ce que vous avez développé, et vos commentaires sur le projet de loi. Merci beaucoup.

Je comprends que votre ordre a fait ses devoirs, a bien travaillé. À ce que j'ai pu voir, vous avez développé des outils pour l'intégration des nouveaux arrivants et pour faire en sorte qu'ils soient le plus possible aidés, secondés dans leur processus. Je comprends que vous avez démontré du leadership à plusieurs niveaux, dont le code de fonctionnement de votre conseil d'administration, et tout, ce qui... Je vous félicite d'avoir fait ça, c'est vraiment bien.

Je comprends aussi, par rapport à votre introduction, qu'il y a des facilités actuellement pour les immigrants de venir ici et de s'intégrer grâce, en partie, à ce que vous avez fait, mais qu'ils se retrouvent devant une problématique qui est des problèmes à l'emploi. Donc, selon vous, ces problèmes à l'emploi là, une fois qu'ils ont passé à travers le processus, qu'ils ont leur accréditation, ça vient d'où, la problématique? Quelles sont les sources principales de problématique à l'emploi que retrouvent ces nouveaux arrivants là une fois qu'ils ont passé à travers le processus?

Le Président (M. Ouellette) : M. Mongeau.

M. Mongeau (René) : Oui. En fait, d'abord, la formation d'agronome n'est pas une formation contingentée, donc les universités sont capables d'accueillir les gens en agronomie. Vous savez comme moi que le monde agricole n'est pas un monde en pleine expansion. Il y a des domaines qui sont en pleine expansion. Le monde de l'agriculture, on fait affaire à un territoire qui est déjà déterminé, et le nombre d'agronomes nécessaires pour supporter le développement agricole... Actuellement, les agronomes répondent à peu près au besoin, là, on pourrait dire qu'on est dans un marché en équilibre. Alors, au fur et à mesure... Donc, comme on est dans un marché en équilibre, l'arrivée de gens de l'étranger nécessite leur acceptation dans un milieu qui est déjà plutôt conservateur. Alors, cette notion d'intégration de gens qui ont une autre culture dans un milieu plutôt conservateur nécessite un processus d'intégration, je dirais, assez fin, qui permet d'avoir des contacts avec le milieu, de créer une zone d'acceptation des gens de l'étranger. Donc, on est face à cet aspect-là.

Alors, les immigrants qui arrivent bien préparés, qui comprennent bien les enjeux du Québec, qui comprennent bien la dynamique géoagricole du Québec, voient assez rapidement... arrivent à trouver assez rapidement un emploi, alors que les autres qui sont restés un peu, je dirais, réservés sur ces connaissances-là font face à un enjeu qui est assez complexe.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Jean : Est-ce que je comprends, à ce moment-là, que certaines formations pourraient être ajoutées aux nouveaux arrivants pour pouvoir justement acquérir ces notions-là de la situation de l'agriculture au Québec au niveau législatif, au niveau aussi territorial, au niveau de son fonctionnement... de sa culture? Est-ce que vous pensez que ce serait quelque chose à penser ou à intégrer, ou c'est déjà intégré?

M. LaBarre (Guillaume) : Ce sont des aspects sur lesquels on travaille déjà. M. Mongeau mentionnait tout à l'heure la formation d'appoint qu'on a proposée, puis, bon, qui a connu certains problèmes, et sur laquelle on continue à travailler en ce moment, notamment avec le MIDI, ces formations d'appoint là contiennent... ou, en fait, prennent considération de ces aspects-là, et vont un peu plus loin, je dirais même, en incluant... Par exemple, il y a le volet déontologique et éthique adapté à la situation du Québec qui est donné dans les universités et qui va faire l'objet de ces formations d'appoint là. Donc, c'est une formation qui va un peu plus loin, effectivement, que simplement l'intégration socioprofessionnelle en tant que telle, mais évidemment c'est le gros morceau de... puis c'est très, très utile pour les gens, effectivement. L'expérience nous montre que c'est très utile pour ces gens-là.

M. Mongeau (René) : Alors, dans la formation d'appoint — peut-être en complément — on ne vise pas de refaire la formation des gens mais qu'ils comprennent bien que, quand on part d'un pays de sécheresse puis qu'on s'en vient dans un pays où on a à gérer le surplus d'eau, bien, il faut bien comprendre ça en partant. On peut avoir de bonnes connaissances agronomiques dans un pays concerné par ces enjeux-là et, si on n'est pas adapté à faire face à cette situation-là ici, on vient de manquer quelque chose. Alors, vous voyez un peu les enjeux.

M. LaBarre (Guillaume) : Je mentionnerais peut-être, en complément aussi, que les statistiques des dernières années nous montrent qu'effectivement les choses qui ont été mises en place, notamment le Mémento, qui est le guide, là, qui a été fait... en fait, qui a été créé pour aider les personnes immigrantes à passer l'examen de l'Ordre des agronomes, donc à avoir leur permis pratique. Depuis la mise en place de ces outils-là, la statistique de rétention des professionnels a augmenté de façon quand même... Je n'ai pas les chiffres exacts en main... en tête, là, mais de façon quand même significative.

M. Mongeau (René) : Notre processus, peut-être en complément, est de... Mémento permet à certains immigrants qui ne sont pas encore arrivés au Québec d'apprendre ce qu'est l'agronomie au Québec, juste par ce document-là, et d'arriver et de réussir l'examen. Alors, ça, on a ça ponctuellement, je dirais, des gens où qu'on a... qui nous ont surpris par ce document-là, et ils avaient une assez bonne connaissance pour réussir l'examen.

Le Président (M. Ouellette) : Je pense qu'on a une réponse complète. Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Jean : Oui, je pense que oui. Dans un autre ordre d'idées, au niveau du code de déontologie, où vous mentionnez votre réserve quant à... le droit de l'office d'imposer un code, vous n'êtes peut-être pas sans savoir que l'Ordre des administrateurs agréés a, dans les années 90, si je me souviens bien, émis une liste de... ils appelaient ça les saines gestions de gouvernance, comme des règles d'éthique de base de gouvernance. Est-ce que vous pensez que c'est quelque chose qui pourrait servir de base et qui serait acceptable, en faisant mention ou en faisant référence aux saines gestions de gouvernance? Est-ce que ça pourrait vous rendre ça plus acceptable de dire que ça serait plus encadré ou imposé, ces normes-là?

Le Président (M. Ouellette) : M. Mongeau. Ah! M. LaBarre.

M. LaBarre (Guillaume) : En fait, je pense que oui. Effectivement, ce serait un départ. Puis je crois que ça va dans le sens de ce que nous proposons dans le mémoire, c'est-à-dire que l'office joue un rôle de guide. Donc, avec la compétence de l'office... Et M. Mongeau l'a mentionné, les administrateurs des ordres, ce ne sont pas des spécialistes nécessairement en gouvernance et sur ces aspects-là. Donc, effectivement, un guide de ce type-là, une base proposée par les administrateurs agréés est sans doute une pierre d'assise intéressante, là, et qui va nous permettre d'adapter chacun de ces documents-là à la situation particulière des professions qui sont chapeautées par les ordres, puis je crois que c'est à cet égard-là que c'est important d'avoir une flexibilité et de ne pas avoir un seul document pour l'ensemble des 46 ordres.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la députée de Chicoutimi, deux minutes.

Mme Jean : Merci. Dans le fond, vous seriez ouverts à un certain encadrement, donc un minimum de rigidité, mais à l'intérieur... dans lequel vous auriez une certaine flexibilité pour adapter à votre réalité, à votre conseil d'administration à vous...

M. Mongeau (René) : Exactement.

M. LaBarre (Guillaume) : Non seulement ouverts, je crois, mais très favorables à un encadrement certain, mais tout en respectant ou en permettant d'avoir la possibilité d'adapter ces choses-là à la situation particulière de chacune des professions.

Le Président (M. Ouellette) : M. Mongeau, en complémentarité? Non, ça va? C'est la même chose?

M. Mongeau (René) : Ça va.

Le Président (M. Ouellette) : O.K. Mme la députée de Chicoutimi, une minute.

Mme Jean : Merci. Une question peut-être à grand déploiement, vu qu'il nous reste une minute, ce n'est pas beaucoup, là. Vous parlez du contrôle de l'office vis-à-vis les ordres et vous avez des réserves au fait que ce contrôle-là ou l'action, la possibilité d'action de l'office pourrait être étendu avec le projet de loi. À quel niveau ça vous ferait plus de contraintes ou que ça ferait des problèmes à l'ordre que ces nouveaux pouvoirs là, qui sont peut-être plus des étendues de nouveaux pouvoirs que des nouveaux pouvoirs? À quel niveau ça vous fait une grande difficulté?

M. Mongeau (René) : En fait, à notre égard, il n'y a pas de difficulté, puisque, comme on dit, les demandes de l'office, pour nous, sont des demandes auxquelles on répond, on collabore. Par contre, on sent davantage de besoins... notre besoin est plutôt... on sent un besoin accru de soutien. Alors, on se demande comment l'office... à quel égard l'office a vraiment besoin de pouvoirs accrus, puisque... En tout cas, dans notre vécu, ce n'est pas... on n'a jamais senti que, si l'office avait plus de dents, il serait capable de venir chercher quelque chose qu'on leur refuse. Disons ça comme ça. On n'a jamais senti ça.

Et la réponse qu'on donne à ça, c'est : À problème exceptionnel, solution exceptionnelle, mais d'en faire un cadre général, parce qu'il y a des situations exceptionnelles... On se demande quel est vraiment le problème, dans quelle proportion. Et, si vous nous demandez notre opinion sur les pouvoirs accrus de l'office, bien, on ne sent pas nécessairement... on ne sent pas qu'il y a une zone là, puis on ne se défend pas de ça, puisqu'on n'a pas à se... je veux dire, on n'a pas de vécu dans ce sens-là.

Mme Jean : Merci.

Le Président (M. Ouellette) : M. le député de Borduas.

• (11 h 40) •

M. Jolin-Barrette : Merci, M. le Président. Bonjour, M. LaBarre. Bonjour. Merci pour votre contribution aux travaux de la commission. Je voulais vous demander... Sur la question du commissaire, vous logez au même endroit que le CIQ, il y a une réduction... vous ne souhaitez pas un élargissement de ses pouvoirs. Pour ce qui est du pôle de coordination, là vous proposez également un comité interministériel. Je vous pose la même question que j'ai posée aux groupes précédents : Si la fonction que l'on souhaite donner au commissaire aux plaintes serait plutôt dévolue au pôle de coordination, où là les acteurs du milieu, les différents intervenants siégeraient à ce comité, si jamais, suite aux démarches qu'un individu fait... on parle d'un individu québécois, là... bien, en fait, qui a suivi sa scolarité au Québec, fait le processus à travers l'ordre pour être reçu à l'ordre, et, bon, passe toutes les étapes, et par la suite il y a quelque chose de problématique avec son admission, s'il pouvait se référer à ce pôle de coordination là, qu'est-ce que vous en pensez?

Le Président (M. Ouellette) : M. Mongeau.

M. Mongeau (René) : En fait, un lieu d'analyse, de compréhension des enjeux et des contraintes, on ne peut pas être contre la vertu, je pense que cette analyse-là, elle doit être faite en quelque part. Là où on a un inconfort, c'est d'avoir un commissaire. Alors, pour nous, la notion de commissaire, c'est un enquêteur, alors on sent cette zone d'empiètement dans le terrain des ordres qui est agaçante. Mais qu'il y ait un comité, en quelque part, un pôle qui vienne faire l'état d'une situation et en faire des recommandations, c'est un élément, c'est un aspect.

Par ailleurs, on sent qu'on a besoin d'aller plus loin qu'un pôle d'analyse, mais un pôle d'action. Et où est la zone d'action? Alors, comme on disait tantôt, l'enjeu que les agronomes ont au Québec, les nouveaux arrivants, c'est de se trouver un emploi. Probablement que le meilleur lieu pour développer un pôle d'action serait le ministère de l'Immigration et de l'Intégration des personnes, où ils sont vraiment axés sur des résultats concrets pour ces gens-là.

Alors, vous voyez que le pôle de réflexion et d'analyse... Je pense qu'on a besoin de situer ces enjeux-là. Par ailleurs, on comprend que la majorité des... Les principaux problèmes sont connus aussi, hein, dans le milieu. Je pense que, quand vous allez avoir entendu tous les ordres, vous allez saisir exactement déjà où sont les enjeux d'intégration des personnes. Mais qu'il y ait un pôle de connaissances et un pôle d'action, un lieu d'action, ça serait vraiment, je pense, une belle façon d'arrimer et d'offrir des solutions à cet enjeu-là.

M. Jolin-Barrette : Au cours des dernières années, est-ce que vous avez eu des candidats qui ont suivi leur formation au Québec ou qui ont suivi une partie de leur formation à l'étranger, mais que c'est des candidats québécois, qui se sont retrouvés dans une situation où ils n'ont pas pu être admis à l'ordre?

M. LaBarre (Guillaume) : Oui. À ma connaissance, depuis ma courte expérience à l'ordre, on a eu un cas qui nous est arrivé, et il y a un processus en place. Et c'est un peu dans ce sens-là qu'on trouve étrange de rajouter une autre... de rajouter ce même rôle là à une autre instance.

Et, pour répondre à votre question clairement, oui, on a eu une personne qui était issue d'un cheminement de formation, donc qui n'était pas... qui n'avait pas fait la formation dans une des deux universités reconnues automatiquement par l'ordre. Cette personne-là a fait, bon, une demande d'équivalence de formation. À la première analyse, on a eu un refus de cette équivalence-là, et il y a eu... il y a un autre comité qui est chargé de réviser ces décisions-là, le cas échéant, lorsque le candidat se sent lésé, ce qui a été fait, et la décision a été effectivement changée ou modifiée pour accepter cette personne-là à l'ordre, effectivement.

Donc, il y a un processus en place très clair qui fait que, cette personne-là qui se sent lésée, en fait, il y a un lieu où elle peut s'adresser.

M. Jolin-Barrette : Et là on parle d'un cas sur combien d'années?

M. Mongeau (René) : M. LaBarre est là depuis quatre ans maintenant, moi, je suis administrateur déjà depuis... président depuis huit ans puis j'ai été administrateur six ans, et, dans toutes ces années-là, je ne me souviens pas d'avoir eu à... que l'ordre ait eu à gérer de cas semblables. C'est des cas exceptionnels. Donc, je pense que, sur un nombre... plusieurs années, on a très, très peu de cas semblables. Et M. LaBarre, bien... il y a un comité de révision des équivalences dans un cas semblable, oui.

M. Jolin-Barrette : O.K. Sur la question du directeur général, vous mentionnez dans votre mémoire que le conseil d'administration doit pouvoir se départir de son directeur général si jamais il y a un conflit de vision entre le conseil et le directeur général. Dans le projet de loi, on propose une majorité des deux tiers. Je comprends que vous, vous souhaiteriez ne pas avoir du tout de balise au niveau du tiers ou...

M. Mongeau (René) : La préoccupation principale qu'on a à cet égard-là... je vais parler... le directeur m'entend, il pourra corriger si... mais la préoccupation principale qu'on a, c'est d'enchâsser le rôle de directeur dans une loi, donc d'enchâsser le rôle d'un employé dans une loi. On commence à sentir une certaine fonctionnalisation, si on peut dire ça, d'un ordre professionnel en intégrant le rôle du directeur général. De un, est-ce que ce sont tous les ordres, dans le développement des choses, qui auront le moyen d'avoir un directeur général? Ça, c'est une chose. Est-ce que c'est nécessaire d'avoir un directeur général? Pensons à des plus petits ordres. Et, si demain l'Ordre des agronomes réduisait son nombre de membres de la moitié pour une raison ou pour une autre, est-ce qu'on aurait encore le moyen d'avoir un directeur général? Donc, d'enchâsser ce rôle-là dans la loi, c'est le principal inconfort qu'on a.

Par la suite, la notion du deux tiers, c'est une notion secondaire, je vous dirais, parce que, dans le vécu qu'on a eu, assez souvent, quand on a eu à faire... bien, non, pas «assez souvent», quand on a eu à prendre ces décisions-là, c'était unanime. Alors, on comprend que, quand c'est... c'est toujours des décisions difficiles à prendre. Donc, on ne s'attardera pas à la notion du deux tiers, mais plutôt que d'avoir le rôle du directeur général... d'insérer ce rôle-là dans la réglementation.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. René Mongeau, M. Guillaume LaBarre, représentant l'Ordre des agronomes de Québec.

Je demanderais maintenant à Mme Nathalie Dion et à M. Jean-Pierre Dumont, représentant l'Ordre des architectes du Québec, de bien vouloir s'avancer. Je suspends quelques minutes.

(Suspension de la séance à 11 h 46)

(Reprise à 11 h 49)

Le Président (M. Ouellette) : Nous reprenons nos travaux. Nous recevons maintenant l'Ordre des architectes du Québec. Mme Nathalie Dion, vous allez nous faire votre présentation de 10 minutes, et par la suite il y aura un échange avec Mme la ministre et les porte-parole des deux partis d'opposition. Mme Dion.

Ordre des architectes du Québec

Mme Dion(Nathalie) : Merci. Alors, bonjour. Merci de nous recevoir. Je suis accompagnée de Jean-Pierre Dumont, directeur général de l'ordre, qui a participé à la préparation de notre mémoire, il pourra répondre aux questions avec moi.

Alors, le 11 mai, la ministre de la Justice, Stéphanie Vallée, a déposé un projet de loi, le projet de loi n° 98, qui fait suite aux recommandations de la commission Charbonneau. L'OAQ était lui-même intervenu devant la commission Charbonneau, auprès de qui il a déposé un mémoire intitulé Promouvoir l'intégrité. Il recommandait notamment que les outils et les ressources des ordres professionnels soient renforcés et mieux adaptés à leur mission de protection du public.

L'OAQ reconnaissait toutefois que la Loi modifiant le Code des professions en matière de justice disciplinaire, entrée en vigueur en 2013, constituait un progrès. Il avait d'ailleurs appuyé son adoption en diffusant un communiqué intitulé Projet de loi sur la justice professionnelle : un premier pas prometteur.

Dans ces documents, l'OAQ estimait que la réflexion sur le système professionnel devait se poursuivre. En effet, lors de sa création en 1974, il constituait un pas en avant pour la protection du public et il a bien servi les intérêts de ces derniers, mais il a pu évoluer, alors que les pratiques professionnelles, elles, ont beaucoup changé.

• (11 h 50) •

L'ordre préconisait, par exemple, des modifications en ce qui concerne la gouvernance. Il renchérissait également sur les propos tenus en 2013 par la Protectrice du citoyen, Raymonde Saint-Germain, qui souhaitait, entre autres, que les ordres professionnels accordent à des représentants citoyens une place davantage significative dans leur administration. Il nous semblait en effet nécessaire de mettre en place des mesures visant à renforcer le lien de confiance et le respect du public envers les ordres.

C'est dans ce contexte que s'inscrit notre intervention, et le mémoire qui vous a été remis.

L'OAQ appuie le projet de loi n° 98, car il apporte des améliorations notables au fonctionnement du système professionnel. Son adoption serait un pas dans la bonne direction. Et l'OAQ souscrit pleinement aux objectifs poursuivis.

Comme vous l'avez sûrement noté, nous avons divisé notre mémoire en deux parties, la première se concentre sur les articles qui nous semblent pouvoir être améliorés, et la seconde aborde certains termes de façon plus générale, quoique toujours en lien avec le projet de loi. Elle propose aussi des idées pour aller plus loin en matière de modernisation du système professionnel.

Plusieurs articles traitant de la gouvernance des ordres suscitent des commentaires. Selon nous, les règles de gouvernance devraient être harmonisées, dans la mesure du possible. En effet, les règles concernant la composition des conseils d'administration, les modalités d'élection et les assemblées générales ne devraient pas tant se différencier d'un ordre à l'autre. Actuellement, chacun des 46 ordres doit adopter ses propres règlements et politiques en matière de gouvernance. Cela engendre des coûts et des lourdeurs administratives à l'Office des professions, notamment, pour des questions qui ne sont pas en lien direct avec la protection du public.

Bien entendu, une telle harmonisation des règles de gouvernance devrait viser l'optimisation des conseils d'administration et du fonctionnement général des ordres, et ce, en fonction des principes de gouvernance généralement reconnus, et ceux-ci tendent à réduire le nombre d'administrateurs pour favoriser l'efficacité et le développement de l'expertise au sein des conseils.

Nous comprenons que le législateur cherche à inciter les ordres à adopter une meilleure pratique. Cependant, leur laisser le choix d'amorcer ou non les chantiers pertinents et d'investir les ressources nécessaires à l'actualisation de leurs structures nous paraît insuffisant pour mettre en branle les changements qui s'imposent dans l'ensemble du système professionnel.

Il est notamment proposé, dans l'article 61 du code, que le nombre de membres d'un C.A. soit entre huit et 15, chiffre institué par règlement de l'ordre. Le projet de loi invite donc les ordres à réduire la taille de leur C.A. à l'intérieur des paramètres prescrits. Cependant, selon nous, laisser aux conseils d'administration la décision de réduire ou non le nombre de leurs administrateurs débouchera sur le statu quo dans les organisations où les paramètres sont déjà respectés. Il nous semble que le système professionnel gagnerait en simplicité si un nombre d'administrateurs précis était prescrit par le code. Ce nombre pourrait varier en fonction de la taille de l'ordre. Néanmoins, on observe que le travail et les responsabilités d'un conseil d'administration demeurent sensiblement les mêmes qu'un ordre ait beaucoup de membres ou qu'il en ait peu, tous étant tenus aux mêmes obligations. Une fois ce nombre d'administrateurs déterminé, les ordres agiraient en conséquence.

L'ordre est d'accord avec la proposition, à l'article 78 du code, d'augmenter le nombre d'administrateurs issus du public. Dans son ensemble, le projet de loi semble viser un seuil minimal de 25 %. Dans certains cas, il prévoit même un pourcentage de 30 %. Si le législateur souhaite un nombre supérieur pour tendre vers un meilleur équilibre, il devrait être fixé dans le Code des professions.

L'instauration d'un code d'éthique et de déontologie des administrateurs est traitée aux articles 79.1, 87 et 87.1 du Code des professions. Nous trouvons que l'intention est louable et nous appuyons le principe. Cependant, ici encore, les moyens pour atteindre l'objectif d'une meilleure éthique nous paraissent des sources de lourdeur administrative et de retard de mise en oeuvre. Vu l'application générale des principes en la matière, pourquoi obliger l'adoption de 46 codes d'éthique et de déontologie? En quoi les principes en la matière seraient-ils différents d'un ordre professionnel à l'autre?

Une question nous semble plus importante encore : Comment veiller à la bonne application de ces codes? Quel organisme ou quel comité serait chargé d'enquêter sur un ordre et de le sanctionner? Des administrateurs ou des employés de cet ordre? Une telle solution serait source de conflit d'intérêts ou, à tout le moins, de manque d'indépendance.

Pour aller plus loin, il nous semble pertinent, dans le contexte de la réforme du Code des professions, d'attirer l'attention sur quelques autres considérations ou constats de nature systémique.

La première, le financement des ordres professionnels. Comme les ordres sont financés par leurs propres membres, il existe des variations importantes entre leurs budgets de fonctionnement. Alors que certains sont contraints de fonctionner avec un minimum de ressources, d'autres ont un budget suffisant pour investir en publicité, en relations publiques et dans les activités de lobbying et de promotion. N'y aurait-il pas lieu d'entamer une réflexion sur le financement des ordres professionnels en vue d'assurer qu'ils bénéficient tous des ressources et de l'expertise nécessaires au bon accomplissement de leurs mandats?

Sur la publicité, et la promotion des membres, et la relation média. Le projet de loi demeure muet sur ces questions. Dans le contexte de sa mission de protection du public, un ordre peut-il investir une partie de son budget dans la promotion et la valorisation de ses membres? Il y a plusieurs écoles de pensée sur le sujet, qui fait d'ailleurs l'objet de nombreuses discussions au sein des ordres. Vu l'importance des investissements liés à de telles démarches, il nous semble important de profiter de l'actualisation entamée pour aborder cette question.

Au sujet du recrutement et du développement des compétences des syndics. Le Code des professions prévoit la nomination de membres de la profession pour occuper la fonction de syndic et de syndic adjoint. Or, la formation de base de plusieurs professions a peu à voir avec l'application d'une réglementation professionnelle et le développement de compétences en matière d'enquête. Cette situation a pour effet de rendre difficiles dans plusieurs ordres le recrutement et le maintien en poste des syndics, qui est pourtant une fonction clé. Il nous apparaît en effet que le métier ou la fonction d'enquêteur est un domaine d'expertise en soi. Combiner différentes expertises au sein d'un bureau de syndic permettrait de recourir à des enquêteurs de carrière formés à cette fin dans les établissements appropriés, des écoles de police notamment, et ainsi de constituer des équipes des bureaux de syndic encore plus dynamiques et compétentes.

Au sujet de l'approbation des arrangements de reconnaissance mutuelle, ou ARM. Ce système d'accords conclus entre un ordre québécois et un organisme de réglementation étranger, ce qui est certainement le moyen le plus efficace pour favoriser l'accueil des professionnels étrangers, pourrait être allégé. Or, l'obligation d'adopter un règlement chaque fois qu'un ARM est conclu peut avoir pour effet de retarder, voire de décourager la conclusion de tels accords.

Sur le recours à un organisme tiers pour évaluer les compétences d'un candidat formé à l'étranger. Dans la même veine, l'ordre recommande que le Code des professions autorise clairement un tel recours. Ce droit ne devrait pas être perçu comme la renonciation d'un ordre à ses obligations, mais plutôt comme une manière de les assumer de façon optimale dans une perspective de mise en commun des ressources financières, humaines et matérielles à l'échelle canadienne. Actuellement, l'économie générale du Code des professions n'est pas claire à ce sujet et invite à certains dédoublements ou à des complexités administratives. Par exemple, pourquoi demander à un ordre de valider ou de recommencer l'évaluation réalisée par un organisme tiers qu'il a déjà reconnu comme étant compétent?

Sur l'assujettissement des firmes à l'encadrement des ordres. La commission Charbonneau recommandait de modifier le Code des professions pour que les firmes de services professionnels reliées au domaine de la construction soient assujetties au pouvoir d'encadrement des ordres professionnels dans leurs secteurs d'activité. L'OAQ appuie cette recommandation.

En conclusion, l'Ordre des architectes réitère qu'il se réjouit du dépôt de ce projet de loi qui renforce la protection du public et contribue à la modernisation du système professionnel. Il nous semble toutefois que plusieurs aspects pourraient être bonifiés.

Alors, nous vous remercions de nous avoir donné la possibilité de nous exprimer. Nous demeurons à la disposition de la Commission des institutions, du gouvernement et de l'Office des professions pour poursuivre la réflexion et préciser notre position. Celle-ci peut quand même se résumer ainsi : que le système professionnel soit résolument tourné vers l'amélioration constante de la protection du public et que les Québécoises et Québécois n'entretiennent aucun doute à ce sujet. Merci.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, Mme Dion. Mme la ministre.

Mme Vallée : Merci beaucoup. Merci pour votre présentation qui est fort intéressante, qui suscite aussi beaucoup de questions, puis on a peu de temps.

Vous dressez dans votre mémoire... en fait, vous faites valoir l'importance, dans le domaine du possible évidemment, d'harmoniser les règles de gouvernance des ordres, notamment en matière de composition des C.A. et en matière de modalités d'élection. Qu'est-ce qui pourrait constituer une proposition optimale de représentants du public au sein d'un conseil d'administration? Je vous pose la question parce qu'on a eu différentes propositions hier, au courant de la journée, et puis certains considéraient qu'un pourcentage de 40 % serait optimal, d'autres variaient, d'autres allaient même au-delà de ça. Par exemple, IRIS nous disait : Un tiers devait être issu du public, un tiers issu d'organisations de consommateurs, pour vraiment assurer une protection du public, et donc un tiers devait faire partie de l'ordre. Alors, on a des visions très variées. J'aimerais vous entendre sur cette question.

Mme Dion (Nathalie) : Bien, je dois dire qu'on était d'accord avec la proposition d'atteindre entre 25 % et 30 %. Les autres propositions nous semblent intéressantes. Il y aurait lieu de réfléchir plus longuement à celles-ci, vous dire que, maintenant, la proposition d'un tiers provenant également d'associations de consommateurs, c'est une réflexion qui devrait être entreprise peut-être, sur laquelle, pour le moment, on ne s'est pas penchés. Jean-Pierre, est-ce qu'on aurait ajouté là-dessus...

M. Dumont (Jean-Pierre) : C'est bien certain qu'on n'est pas des spécialistes de cette question-là, mais la littérature ou les études de gens plus compétents en la matière fixe, en fait... Il faut établir, dans le fond, un nombre où les personnes en question vont être suffisamment influentes pour pouvoir participer activement à la discussion et être pleinement intégrées à un conseil d'administration constitué de professionnels. On a entendu hier des chiffres de 35 %, 40 %. Je crois que ça pourrait être un chiffre raisonnable.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la ministre.

• (12 heures) •

Mme Vallée : Pour la fonction... On a aussi abordé la question de la scission entre la fonction de directeur général et la fonction de président. Bon, certains groupes considèrent que c'est très important de faire cette distinction-là. Il y a des ordres, même des petits ordres, qui ont procédé à des changements internes. D'autres ordres nous disent : Écoutez, ce n'est peut-être pas possible. Qu'est-ce que vous pensez, vous, de cette proposition de vraiment établir une distinction entre le rôle du président du conseil d'administration et le rôle de la direction générale?

Mme Dion (Nathalie) : Pour nous, c'est clair que cette fonction doit être distincte. Il nous apparaît que le rôle du président de conseil, justement, est celui de diriger également le conseil d'administration, de voir aux affaires de l'ordre, d'avoir un pouvoir qui est partagé avec les membres du conseil d'administration. Mais on comprend que le poste de direction générale est différent, il reçoit ses instructions depuis le conseil d'administration. Pour nous, c'est deux fonctions qui doivent être distinctes.

Mme Vallée : Je comprends que vous êtes aussi... Vous oeuvrez au sein d'un ordre qui compte un peu plus de 3 600 membres, donc c'est... Parce qu'on nous disait... certains nous disaient : Bien, en fonction des ressources qui sont mises à la disposition des ordres... il faut considérer la taille de l'ordre et les ressources de l'ordre, et, à ce moment-là, permettre, dans certains cas, qu'il y ait cumul de fonctions. Mais je comprends que, pour vous, la taille de l'ordre n'est pas un facteur à considérer.

Mme Dion (Nathalie) : Non, mais on s'est quand même prononcés en faveur d'une réflexion sur le financement des ordres, qui pourrait peut-être... si cette réflexion avait lieu puis amenait à des changements, pourrait peut-être justement venir diminuer ces écarts entre les ordres qui ont les moyens d'avoir, de constituer des équipes permanentes très larges contre celles qui n'ont pas les moyens. Évidemment, on comprend qu'il y a certaines tâches qui sont augmentées par le nombre de membres, mais il y a des fonctions qui sont importantes et qui sont essentielles. Je peux comprendre que des petits ordres ont de la difficulté à venir combler ces différentes fonctions là, mais, pour nous, effectivement, le problème ne se pose pas, et on est en faveur d'une séparation de ces deux rôles.

Mme Vallée : Je comprends aussi, également... Dans votre réflexion sur les modifications, sur la question du code d'éthique, de déontologie, votre crainte, la crainte que vous formulez, si je vous comprends bien, c'est que d'attendre que chaque ordre édicte son propre code, ça crée des lourdeurs, et vous seriez plutôt favorables à un cadre qui serait uniforme pour tous les ordres. Tout à l'heure, on a ordre qui nous disait : Bien, nous, on souhaite une flexibilité, une meilleure modulation en fonction du champ d'action, d'intervention de l'ordre, en fonction des spécificités de l'ordre. Comment peut-on arriver... Comment pourrions-nous arriver à reconnaître les spécificités d'un ordre en ayant... en même temps en imposant un cadre fixe?

M. Dumont (Jean-Pierre) : C'est certain... Il y a peut-être quelques années, on n'aurait peut-être pas répondu, on n'aurait peut-être pas... on aurait peut-être énoncé un point de vue différent. Mais on a entamé il y a quelque temps, peut-être deux ans, une réforme de notre propre gouvernance et on s'est rendu compte que, d'une organisation à l'autre, ces spécificités-là ne varient pas tant que ça. Un conseil d'administration a une responsabilité qui est relativement commune d'un ordre à l'autre, particulièrement les ordres professionnels, où la mission est clairement établie dans le Code des professions. Donc, les administrateurs ont des rôles qui sont similaires d'un ordre à l'autre, peu importe la dimension de l'ordre, peu importe le domaine d'activité.

Et, dans ce sens-là, on se dit, par, je vous dirais, économie de ressources ou d'échelle, qu'à partir du moment où on a des principes communs qui pourraient être discutés avec l'Office des professions ou le ministère de la Justice... on se dit : À partir du moment où on a des principes communs de gouvernance, il y aurait peut-être moyen d'arriver à ce que les ordres professionnels mettent en place un code d'éthique et de déontologie sans passer nécessairement par une obligation de 46 règlements qu'on adopterait, 46 règlements qui auraient à passer par l'Office des professions, obtenir une approbation. Parce qu'à la limite, lorsqu'on consacre nos énergies sur ces questions juridico-administratives, on ne s'occupe pas nécessairement de protection du public au sens de la profession même. En architecture, c'est d'assurer la qualité des services en architecture, c'est de bonifier nos services d'inspection professionnelle, de formation continue et du bureau du syndic. La gouvernance de notre conseil d'administration, c'est un peu une question qui est en marge de ce mandat fondamental là. Alors, nous, on est pour une simplification, puis, quand on voit, à quelque part, qu'il va y avoir 46 règlements qui vont être adoptés, on sait que ça peut poser problème lorsqu'on aura, nous, à adopter des règlements qui sont plus en lien avec la profession.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la ministre.

Mme Vallée : Vous notez dans votre mémoire que le commissaire aux plaintes, tel qu'on le connaît actuellement, a un pouvoir de recommandation, et, bon, il ne prescrit pas, il n'a pas de compétence sur les décisions des ordres, sur les acteurs, et vous nous dites : Les pouvoirs du commissaire... puis là je cite votre mémoire : «...ses pouvoirs seraient positivement renforcés si ses avis étaient décisionnels et non consultatifs.» Donc, vous nous dites ça, évidemment, tout en considérant que le mandat du commissaire ne devrait pas être étendu à l'admission des personnes qui sont formées au Québec, là. Mais par contre vous suggérez qu'il y ait des... que les pouvoirs du commissaire soient renforcés. Alors, j'aimerais ça vous entendre sur cette proposition.

M. Dumont (Jean-Pierre) : Bien, c'est une proposition... En fait, là aussi, on examine les pouvoirs du commissaire, on sent qu'il y a une volonté de lui donner un rôle particulier. Nous, bien entendu, au niveau de la fixation de la norme, au niveau des exigences que ça prend pour devenir professionnel, pour devenir architecte dans notre cas, on considère que ça revient pleinement à l'ordre en question. Là où on peut concevoir que, du point de vue du public, il peut y avoir une difficulté. Lorsque, par exemple, il y a une décision qui est rendue par l'ordre et qui est insatisfaisante du point de vue du public, on peut comprendre qu'il y ait, à quelque part, un besoin de rechercher une instance qui pourrait siéger en appel ou avoir un certain pouvoir décisionnel, et c'est un petit peu dans ce sens-là que notre intervention doit s'inscrire. Et là, à partir de ce moment-là, on n'a pas la solution, mais on... Dans le fond, on laisse le législateur réfléchir à cette question-là, mais on se dit : S'il faut donner un sens à la fonction du commissaire, ce n'est peut-être pas tant sur l'établissement de tout le processus d'admission, qui comprend d'édicter la règle, qui est d'édicter la norme, c'est peut-être plus au niveau décisionnel, quand il y a un candidat qui peut apparaître être lésé par une décision d'un ordre.

Mme Vallée : Mais, à ce moment-là, est-ce que vous ne croyez pas que de donner de tels pouvoirs au commissaire porterait encore plus atteinte à l'autonomie des ordres que d'élargir ses pouvoirs de recommandation à l'ensemble du processus?

Mme Dion (Nathalie) : Ce pouvoir-là serait exercé au moment où il y aurait une plainte, où il y aurait un désaccord. Mais de lui donner... Est-ce que ça nécessite pour autant qu'il doit avoir un droit de regard sur l'ensemble des questions d'admission et de formation, je dirais, qui inclut chez nous les études universitaires, le stage et un examen professionnel?

• (12 h 10) •

Mme Vallée : Le regard qui est porté par le commissaire, puis comme je le mentionnais un petit peu plus tôt ce matin, c'est vraiment sur le processus, en fait sur l'équité du processus, et le commissaire va être amené à apporter des recommandations si une problématique est notée dans le cadre du processus, pas sur le fond. Donc, ce n'est pas tant sur le fond, mais sur la façon, sur l'équité.

Et l'objectif d'ouvrir et d'accorder au commissaire un spectre plus large, c'est d'assurer que ce processus-là, bien, il soit équitable pour l'ensemble des candidats qui souhaitent intégrer un ordre professionnel, qui souhaitent intégrer une profession, et c'est l'objectif. Ce n'était pas de créer nécessairement un tribunal d'appel de la décision de l'ordre, qui pourrait éventuellement amener à renverser la décision de l'ordre, ce n'est pas l'objectif qui est visé. Vous, ce que je comprends, c'est que vous dites : Bien, s'il y a des problématiques, est-ce qu'il n'y aurait pas lieu de donner un pouvoir additionnel? Mais là, auquel cas, on viendrait donner un pouvoir... on viendrait créer une instance d'appel de la décision de l'ordre, je pense, qui fragilise peut-être davantage l'autonomie, là. J'essaie de voir. Je regarde Mme Desrosiers en arrière. Je ne sais pas si elle le perçoit comme ça, mais je...

M. Dumont (Jean-Pierre) : Nous, en fait, c'est sûr qu'en examinant le projet de loi n° 98, avec le temps qu'on avait pour l'examiner, bien entendu, on cherchait à savoir exactement ce que le commissaire... ce qu'on voulait faire avec le commissaire. Parce que, bien entendu, pour l'établissement de la norme, le processus, mettre en oeuvre les processus d'admission, nous serions tentés de faire confiance aux ordres parce que cette fonction-là est bien assumée. Puis on voyait une forme de dédoublement. À partir du moment où on voit une forme de dédoublement de la fonction, on a tendance à ne pas être d'accord avec un tel dédoublement.

Là, on cherchait, à quelque part, une façon pratique de voir quelle pourrait être l'utilité ou, en tout cas, comment on pourrait bonifier ce rôle-là à l'intérieur du système actuel.

Le Président (M. Ouellette) : Une minute.

Mme Vallée : Bon. Vous avez abordé la question du recrutement, du développement des compétences des syndics. On nous a proposé hier... La Protectrice du citoyen prévoyait : Est-ce qu'il ne serait pas opportun que les syndics aient un propre code d'éthique? Je ne sais pas si c'était quelque chose qui, dans votre réflexion, avait été abordé.

Mme Dion (Nathalie) : On n'a pas abordé cette question-là particulièrement, mais je pense que ça serait... et on ne s'opposerait pas à ce que les syndics aient un code d'éthique, c'est sûr. Notre réflexion était plutôt sur le fait qu'il y ait la difficulté de recruter des syndics, des personnes, et tout en étant, dans notre cas, architectes, qui détiennent les compétences et la capacité de bien remplir ce rôle-là. Alors, notre réflexion était plutôt à l'idée de faire en sorte que les gens... On n'exclut pas qu'il doit y avoir des membres d'un ordre qui soient au sein des bureaux de syndic, mais qu'il y ait des équipes qui soient constituées, qui permettent d'aller chercher d'autres compétences, qui pourraient ne pas être celles des personnes actuelles.

Actuellement, les syndics, syndics adjoints sont tous des architectes membres, évidemment, des ordres, des professionnels membres de leurs ordres, d'où la difficulté. En architecture, on ne possède pas nécessairement une capacité particulière pour l'enquête et pour... Mais qu'ils soient soumis à un code de déontologie ne nous apparaît pas que...

Mme Vallée : Donc, c'était...

Le Président (M. Ouellette) : Merci, Mme la ministre.

Mme Vallée : D'accord. Merci.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Jean : Merci, M. le Président. Bonjour, Mme Dion, M. Dumont. Bienvenue à l'Assemblée nationale. Je suis particulièrement heureuse de vous accueillir aujourd'hui, ayant été membre de votre ordre pendant quelques années, bien, plusieurs années. Il y a longtemps. Vous n'étiez peut-être même pas encore à l'école. Je suis très heureuse de vous accueillir aujourd'hui puis d'accueillir le résultat de votre réflexion, qui me semble très intéressante.

Vous avez abordé... Concernant le pouvoir du commissaire, le pôle de coordination, dans le projet de loi n° 98, on parle d'enquête et rarement de processus. Peut-être que l'ambiguïté viendrait de là. Je ne sais pas si vous, vous avez vu une distinction là-dessus. Parce que je vois bien que la compréhension que vous avez faite était comme plus au niveau de l'enquête et moins du processus. Est-ce que je me trompe en soupçonnant ça?

Mme Dion (Nathalie) : En effet. Ce n'est pas tout à fait au niveau... On comprend, là, qu'il y ait une ambiguïté, d'après ce qu'on comprend puis ce que nous exprime la ministre sur les processus.

Mme Jean : D'accord. Le pôle de coordination, on sent que vous êtes... vous avez fait vos devoirs, vous avez étudié là-dessus. Donc, il y a déjà un comité qui existe et qui donne peu de résultats, mais vous trouvez l'idée louable. Donc, vous êtes d'accord avec l'idée de créer une plateforme de concertation, de coordination.

Si vous avez vu la proposition du CIQ, qui propose un comité multisectoriel, est-ce que c'est quelque chose auquel... vous trouvez que c'est une belle plateforme ou une belle avenue de créer un comité multisectoriel qui dépasserait peut-être le comité multiministériel qui existait, donc qui pourrait peut-être intégrer d'autres intervenants que des ministères, c'est-à-dire peut-être plus de société civile ou... Est-ce que vous avez quelque chose là-dessus?

Mme Dion (Nathalie) : Tout à fait. Je pense qu'effectivement le pôle mérite d'être... son rôle mérite d'être mieux défini et puis... mais on ne s'opposerait pas à ce qu'il y ait des pôles multisectoriels. Bon. On partage aussi certaines préoccupations avec d'autres ordres professionnels qui ont... qui travaillent dans des domaines semblables aux nôtres, et ce serait l'occasion, une belle occasion d'avoir des rencontres puis des discussions sur des sujets qui sont plus larges que juste notre profession à nous.

Mme Jean : Je n'ai pas vu dans votre mémoire, mais peut-être qu'il est là puis je ne l'ai pas vu... Au niveau de la représentativité, il y a des propositions de favoriser, par exemple, dans les conseils d'administration, la représentativité dans les conseils d'administration, la possibilité ou l'obligation d'intégrer, par exemple, la présence d'un jeune. Aussi, on parle des représentants des régions et de faire en sorte que les représentants des régions ne soient pas élus, parce qu'on aimerait qu'ils s'occupent plus de la protection du public que d'être un représentant régional.

Au niveau de la représentativité hommes-femmes, est-ce qu'il y a une réflexion faite de votre côté à ce niveau-là, au niveau de l'Ordre des architectes, pour que les hommes et les femmes soient représentés le plus équitablement possible, c'est-à-dire 50-50?

Mme Dion (Nathalie) : En effet, il y a une réflexion qui a été entamée là-dessus. D'abord, oui, on se prononce sur les jeunes, si on peut dire, ce qu'on disait, ce n'était pas tant le nombre d'années inscrit, parce que, chez nous, des fois, les architectes arrivent tard dans leur profession, alors c'est plutôt... on référait plutôt à l'âge qu'au nombre d'années inscrit. Et puis, dans la réflexion qu'on a entamée sur la gouvernance, je dois dire qu'on s'est penchés aussi sur la représentativité ou plutôt le mode électoral, et on en était revenus quand même au mode par région, à défaut d'avoir trouvé un meilleur mode qui... Bien qu'on est conscients qu'on ne souhaite pas que ces gens soient... se sentent comme représentants de leurs régions, ça nous permettait quand même d'aller chercher... Parce qu'en architecture, tout particulièrement, à peu près... plus de 50 % des membres sont à Montréal, c'est-à-dire que ça signifierait que, si on n'ouvrait pas ce mode électoral, on pourrait se ramasser avec des candidatures uniquement de notre région. Donc, on souhaite quand même avoir... aller chercher l'intérêt des gens d'un peu partout, au même titre qu'on souhaite avoir plus de femmes.

Chez nous, en plus, le nombre de femmes au sein de notre ordre grandit à une croissance fulgurante. Alors, c'est sûr que ça va être une préoccupation. J'avouerais que, pour le moment, dans notre nouveau mode de gouvernance, on n'a pas mis de processus défini, mais on le fait dans la recherche. On suscite, on va chercher l'intérêt de notre membership féminin, mais je ne pense pas qu'on a trouvé la recette miracle pour atteindre encore la parité.

M. Dumont (Jean-Pierre) : En fait, au point de vue de la parité hommes-femmes, l'Ordre des architectes a adopté, il y a peut-être cinq ou six ans de ça, une résolution claire à l'effet qu'à chaque fois qu'un poste au conseil d'administration doit être coopté ou, en fait, choisi par le conseil d'administration, bien, on allait tendre vers la parité hommes-femmes.

Mme Dion (Nathalie) : À cette occasion-là.

M. Dumont (Jean-Pierre) : À cette occasion-là. Mais c'est le processus, lorsque le conseil d'administration doit nommer un administrateur, on a cette résolution-là qui s'applique.

Mme Jean : Merci. On a eu une suggestion hier au niveau de la représentativité dans les conseils d'administration, que les sièges pourraient être caractérisés, que ce soit régional, ou que ce soient les jeunes, ou autres caractéristiques qu'on pourrait donner. Est-ce que c'est quelque chose auquel vous êtes ouverts ou que...

Mme Dion (Nathalie) : Oui, certainement, on n'a pas d'objection à ce qu'effectivement ce soit caractérisé. J'imagine que, dans certaines professions, ça peut aussi aller avec le type. Dans certaines professions, on réunit des membres qui ont des pratiques ou des secteurs d'activité différents, on peut comprendre l'importance à cette occasion-là, ce qui est beaucoup moins le cas, je dirais, dans notre profession, mais on pourrait... On ne s'opposerait pas... c'est une suggestion qui est intéressante.

• (12 h 20) •

Mme Jean : Merci. On parlait tout à l'heure de l'harmonisation des règles de déontologie et d'éthique par rapport à l'ensemble des ordres. On a plusieurs sons de cloche qu'on entend depuis hier là-dessus. Il y avait des réserves d'émises sur, justement, le fait que des règles soient imposées par l'Office des professions au niveau de l'éthique. Je comprends que vous, vous avez une vision quand même un peu différente, dans le sens que l'harmonisation des règles, pour vous, ce serait vu d'un bon oeil, ça permettrait, si j'ai bien compris, l'économie de sous, l'économie d'énergie de chacun des ordres. Pouvez-vous me compléter là-dessus puis m'exprimer c'est quoi, votre pensée réelle, pour justement prendre en considération la réalité d'un ordre plus petit par rapport à la réalité d'un ordre plus important, si on compare, par exemple, l'Ordre des architectes et l'Ordre des ingénieurs, qui sont assez différents?

Mme Dion (Nathalie) : C'est ça qu'on... Ce qu'on exprimait, c'est qu'on parle de l'éthique des conseils d'administration, évidemment, on ne parle pas du code d'éthique de...

Mme Jean : ...d'administration.

Mme Dion (Nathalie) : Ce qu'on exprimait, c'est que, de notre point de vue, le rôle d'un conseil d'administration devrait être le même et conserver, appliquer les mêmes codes d'éthique et de déontologie quelle que soit la profession qu'il... quel que soit l'ordre pour lequel il siège, la profession qu'il représente. Dans le fond, ce qu'on exprime, c'est qu'on ne comprend pas pourquoi cette éthique ou cette déontologie serait différente d'un membre d'un conseil d'administration à un autre, puisqu'il n'y a pas de lien nécessairement dans l'éthique à la profession que la personne exerce.

M. Dumont (Jean-Pierre) : D'autant plus parlant d'un ordre de plus petite dimension, les ressources qui sont nécessaires à investir dans cette démarche-là... pour l'avoir vécu — nous avons embauché un consultant — ça demande de revoir l'ensemble de notre réglementation, l'ensemble de nos mécanismes, l'ensemble de nos processus, convaincre chacun de nos conseils d'administration. Et je me dis que l'énergie que ça demande pour initier tout ce travail-là... Je me rends compte... je constate que ça ne sera peut-être pas tous les ordres qui vont amorcer ces chantiers-là. C'est toujours un effort, et, encore une fois, on est toujours un petit peu en marge de notre réelle mission, qui est d'assurer la qualité des services professionnels. Alors, elle vient un peu de là, notre proposition d'harmonisation.

Mme Dion (Nathalie) : Oui, peut-être comme vous dites, Jean-Pierre, comme tu dis, Jean-Pierre, liée au fait qu'on est en train de faire cet exercice-là, nous, de refonte... ou revoir notre gouvernance, et c'est un exercice qui exige beaucoup de temps. On ne dit pas qu'on ne voulait pas le faire, puisqu'on s'est engagé à le faire, mais c'est un exercice qui prend beaucoup d'énergie sur chacun de ces aspects réglementaires là.

Mme Jean : Merci.

Le Président (M. Ouellette) : On n'a plus de temps, Mme la députée de Taillon, ce sera pour un autre tantôt. M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : Merci. Mme Dion, M. Dumont, bienvenue à l'Assemblée nationale. Je tiens à vous féliciter pour votre mémoire, c'est très bien construit.

D'entrée de jeu, à la page 5 de votre mémoire, vous dites... relativement à la nomination du vice-président et du président de l'office, par rapport à la réduction de 10 à cinq ans, vous êtes en accord, tout ça. Mais vous dites : «Il [faut] s'assurer par ailleurs d'éviter les nominations partisanes par le gouvernement.» Est-ce que vous avez eu l'impression qu'il y a beaucoup de nominations partisanes qui sont effectuées?

Mme Dion (Nathalie) : Bien, je pense que, de façon générale, il faut éviter les nominations partisanes, mais il n'y avait pas de sous-entendu dans cette question-là... dans cette phrase-là.

M. Jolin-Barrette : Parfait. Au niveau de l'augmentation des administrateurs nommés, donc vous dites : Pour certains, c'est 25 %, pour certains, ça va tendre vers 30 %. Donc, c'est préférable d'avoir davantage d'administrateurs nommés sur les conseils d'administration.

Mme Dion (Nathalie) : Oui. En plus, ça nous permet d'aller chercher des compétences qu'on n'a pas nécessairement au sein de nos professions. Donc, on est en accord avec ça du moment que... Puis on doit le dire, au sein de notre ordre, on a des administrateurs nommés d'une très, très grande qualité et compétence, et c'est très, très utile pour nous.

Puis je dois dire aussi que ces questions-là ont cheminé dans la gouvernance, et puis ça nous a permis de voir, dans la... Nous, on s'engage à réduire la taille de notre C.A. puis augmenter la proportion d'administrateurs nommés. Mais, comme... Ce qu'on disait, c'est que, des fois, dans le rapport même du projet de loi, il y avait deux... une fois, c'était 25 %, une fois, c'était quasiment 30 %. Alors, c'était ça qu'on disait, mais on ne s'oppose pas à un et à l'autre, mais on n'a pas réfléchi nécessairement à la possibilité d'aller à 40 %.

M. Jolin-Barrette : Je vais vous poser la question que j'ai posée aux précédents intervenants : Est-ce que, chez vous, c'est arrivé, pour des candidats qui ont fait leurs études au Québec ou qui ont fait une partie de leurs études à l'étranger, qu'il y ait une problématique au niveau de l'admission en lien avec l'élargissement de la sphère de compétence que l'on souhaite donner au commissaire aux plaintes?

Mme Dion (Nathalie) : ...m'en souvenir, moi, ça fait plus de 10 ans que je siège au conseil d'administration, Jean-Pierre, tu es là depuis encore plus longtemps...

M. Dumont (Jean-Pierre) : Non, pas particulièrement.

M. Jolin-Barrette : Donc, vous n'avez pas eu de cas sur lequel le commissaire aux plaintes ou le commissaire à l'admission aurait à enquêter ou aurait à faire des recommandations?

Mme Dion (Nathalie) : Vous parlez de membres qui ont... d'architectes qui ont étudié au Québec, et qui sont allés étudier à l'étranger, et qui sont revenus.

M. Jolin-Barrette : Exactement.

Mme Dion (Nathalie) : Non.

M. Jolin-Barrette : Ou de candidats qui ont étudié uniquement au Québec.

Mme Dion (Nathalie) : Pas dans mon souvenir, non.

M. Jolin-Barrette : O.K. Au niveau du financement des ordres, vous l'avez abordé un peu, est-ce que vous pensez à une formule de péréquation qui pourrait avoir lieu avec l'office? Parce que, bon, il y a plusieurs ordres qui disent, lorsqu'on les rencontre : C'est difficile pour nous, c'est difficile parce que soit qu'on n'est pas beaucoup de membres ou soit que les cotisations ne sont pas élevées. Donc, pour vous, le questionnement relativement au financement des ordres, ça prend quelles mesures?

Mme Dion (Nathalie) : On n'a pas précisé de mesures particulières autrement que de dire qu'il y a une réflexion qui doit être faite, peut-être qu'une péréquation, c'est une option, mais il doit y avoir une réflexion parce qu'évidemment... Effectivement, nous, on ne peut pas se plaindre parce qu'on est d'une taille moyenne et nos membres paient une cotisation généreuse, donc on arrive à rendre les services qu'on a. Mais on comprend que, pour certains ordres, ça doit être très, très difficile d'y arriver puis on comprend que les moyens sont démesurément différents, énormément différents entre un ordre qui a plus de 10 000 membres puis un ordre qui en a 500. Puis, en fait, si on reconnaît la nécessité d'un ordre professionnel pour cette profession, il doit y avoir un encadrement qui serait le même. Et je ne dis pas que ces ordres-là n'exercent pas suffisamment leur encadrement, mais ils doivent disposer de moyens qui leur permettent de faire... d'exercer ce rôle-là de façon à ce que le public soit bien protégé.

M. Jolin-Barrette : Sur la question de la radiation temporaire, là, à la page 9, en prévision... bien, en fait, pour laisser le temps au syndic de faire son enquête, vous soulevez des interrogations relativement à la présomption d'innocence. Est-ce que vous pouvez nous expliquer votre point là-dessus, l'impact?

Mme Dion (Nathalie) : On disait qu'en attendant la décision du conseil de discipline en cas d'infraction grave... Nous avons des réserves sur le texte en ce qui concerne le droit et le respect des droits fondamentaux et de la présomption d'innocence.

M. Jolin-Barrette : Parce que, dans le fond, dans le projet de loi, ça prévoit quand même que la personne pourrait contester la décision, là, au niveau du conseil de discipline, mais c'est le fait d'être suspendu durant une période de trois mois, puis peut-être un prolongement... un autre de trois mois, ce serait difficile pour le professionnel.

M. Dumont (Jean-Pierre) : Oui. Écoutez, ça, c'est une question... c'est un petit peu... On est un petit peu au niveau du principe, vous dire exactement un détail, je n'ai pas de... on n'a pas de réponse précise à votre question.

M. Jolin-Barrette : Parfait. Au niveau de la publicité des ordres, des activités commerciales, on a abordé un peu cette question-là hier avec d'autres intervenants, au niveau du fait que certains avaient des activités commerciales puis que certains proposaient de vraiment centrer la mission d'un ordre sur la protection du public ou uniquement sur la protection du public. C'est quoi, votre avis là-dessus, par rapport, bon, un, à la publicité puis, deux, les activités commerciales des ordres professionnels?

Mme Dion (Nathalie) : Bien, la réponse qu'on a donnée, justement, c'est qu'on se questionne là-dessus, qu'il devrait y avoir un encadrement. Il n'y a pas, actuellement, rien qui encadre ça.

Vous savez, nos membres nous le demandent constamment : Faisons de la publicité, faisons de la publicité, parce qu'ils voient des publicités de d'autres ordres. Ce qu'on dit, c'est qu'il faut recentrer cette activité-là sur la protection du public. Encore là, quel sera le mécanisme, qui décidera du bon moyen ou jusqu'à quelle mesure c'est un... une publicité devient un véhicule de protection ou, l'inverse, de promotion, c'est difficile. On n'a pas de solution nécessairement, mais c'est une question qui doit être abordée parce qu'il y a... encore là, on doit se recentrer, effectivement, sur le rôle de protection du public. Par ailleurs, est-ce que ça proscrit la possibilité de le faire, dans quelle mesure on peut le faire? C'est ces questions qu'on doit se poser.

M. Dumont (Jean-Pierre) : Oui, puis on est aussi dans le domaine... on est dans le domaine de la perception du public aussi. On peut bien assumer notre rôle de protection du public, mais, si le public ne nous perçoit pas comme tel, bien, on a, à quelque part, à faire une réflexion à ce sujet-là. Puis on se dit toujours : Bien, c'est ça, est-ce que le public voit des ordres... Parce que la majorité du public ne fait pas nécessairement affaire avec les ordres, et il voit les ordres aller, il voit les ordres s'exprimer, et c'est souvent... bien, ce qu'il voit, c'est la publicité, et, à ce moment-là, bien, bien sûr, lorsque la publicité vise à faire la promotion d'une profession ou des membres, bien, ça ne peut pas faire autrement que de créer une perception à l'effet que les ordres professionnels ne sont pas là pour protéger le public mais plutôt faire la promotion des membres. Alors, ce qu'on soulève dans le mémoire, dans le fond, c'est d'avoir cette réflexion-là, qui est quand même fondamentale, et on n'a pas toutes les réponses à la question.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. le député de Borduas. Puisque la protection du public était quelque chose qui m'intéressait, j'ai permis la réponse.

Mme Nathalie Dion, M. Jean-Pierre Dumont, représentant l'Ordre des architectes du Québec, merci d'être venus déposer en commission parlementaire.

La commission suspend ses travaux jusqu'à 13 h 45, où elle procédera à l'élection à la vice-présidence de la commission, et les auditions se poursuivront ensuite à compter de 14 heures. Merci.

(Suspension de la séance à 12 h 30)

(Reprise à 14 h 4)

Le Président (M. Ouellette) : À l'ordre, s'il vous plaît! La Commission des institutions reprend ses travaux. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.

Nous poursuivons les consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 98, Loi modifiant diverses lois concernant principalement l'admission aux professions et la gouvernance du système professionnel.

Nous entendrons cet après-midi les organismes suivants : l'Ordre des arpenteurs-géomètres du Québec, la Fédération des chambres de commerce du Québec et le Barreau du Québec.

Représentant l'Ordre des arpenteurs-géomètres du Québec, M. Pierre Tessier, vous allez nous livrer le message de l'Ordre des arpenteurs-géomètres, pour une période de 10 minutes, et après il va y avoir une période d'échange avec Mme la ministre et les porte-parole de chacun des partis d'opposition. M. Tessier, à vous la parole.

Ordre des arpenteurs-géomètres du Québec (OAGQ)

M. Tessier(Pierre) : Merci, M. le Président. Je suis accompagné aujourd'hui de M. Luc St-Pierre, qui est secrétaire et aussi directeur général de notre ordre.

Je tiens à vous remercier ainsi que Mme la ministre, d'autres ministres aussi, MM. et Mmes les députés de nous donner l'occasion de vous faire part de nos commentaires sur le projet de loi n° 98.

L'Ordre des arpenteurs-géomètres a une longue histoire, qui remonte en 1882, avec la création de la quatrième corporation professionnelle québécoise et qui est devenue, en 1974, l'Ordre des arpenteurs-géomètres du Québec. L'ordre regroupe un peu plus de 1 000 membres habilités à exercer, de façon exclusive, la profession d'arpenteur-géomètre. Soulignons que l'arpenteur-géomètre est aussi un officier public.

Notre ordre considère que le projet de loi n° 98 présente de nombreuses et notables améliorations concernant l'admission aux professions et à la gouvernance du système professionnel. Nous émettons toutefois certaines réserves et soutenons à cet effet les observations et recommandations du Conseil interprofessionnel du Québec.

En ce qui concerne l'admission, le contrôle d'admission. Nous sommes préoccupés par les nouveaux pouvoirs qui seraient attribués au commissaire à l'admission, je pense que ce n'est pas une surprise pour personne aujourd'hui. À notre avis, les processus actuels sont déjà largement encadrés par les ordres professionnels, l'Office des professions et le milieu de l'éducation. Depuis 1974, ces processus ont fait l'objet de modifications et d'améliorations successives issues de la réflexion et de l'expertise de nos membres, du syndic, de l'inspecteur professionnel et du conseil d'administration. De plus, l'Office des professions a joué un rôle de premier plan dans cette évolution par le biais des modifications réglementaires.

Signalons également l'étroite collaboration entre l'ordre et l'Université Laval, qui est la seule institution universitaire au Québec à former les arpenteurs-géomètres, ce qui permet d'assurer que les compétences enseignées et celles évaluées soient au même diapason. Pour être admis à l'ordre, un bachelier en sciences géomatiques ou son équivalent doit notamment avoir réussi des évaluations professionnelles ainsi qu'un stage de formation d'une durée d'un an.

L'ordre fait appel à chaque année à une équipe de professionnels accompagnés d'un expert en mesures d'évaluation afin de préparer des examens que devront réussir les candidats et candidates. Le contenu des examens écrits est commenté et approuvé par le conseil d'administration. En cas d'échec d'un des examens, tout candidat ou candidate peut adresser une demande de révision au conseil d'administration.

Considérant les efforts consentis annuellement pour développer un processus d'admission que nous jugeons rigoureux, objectif et équitable, nous nous expliquons mal la volonté gouvernementale de créer une autre instance d'appel.

Maintenant, pour l'intégration professionnelle des immigrants. En ce qui concerne l'intégration professionnelle des personnes immigrantes, dans notre cas, le problème est essentiellement géographique. En effet, à leur arrivée, les immigrants sont très majoritairement concentrés dans la région métropolitaine, alors que la seule institution offrant la formation d'arpenteur-géomètre est située dans la ville de Québec. Pour nous, la solution à ce problème est l'injection de fonds gouvernementaux permettant le développement de formations d'appoint disponibles en ligne, et ce, même si le bassin d'usagers potentiels est limité, il est souvent très limité.

En résumé, la question que nous nous posons et que nous vous posons est la suivante : Existe-t-il un problème suffisamment sérieux pour justifier l'élargissement du rôle actuel du commissaire aux plaintes?

Maintenant, en ce qui concerne la gouvernance. Comme le Conseil interprofessionnel du Québec, l'ordre appuie la plupart des modifications proposées par le projet de loi en matière de gouvernance, notamment celles modifiant la Loi sur les arpenteurs-géomètres. Nous nous questionnons par contre sur la limitation du nombre de mandats à la présidence. Pourquoi? Parce que l'Ordre des arpenteurs-géomètres est un petit ordre professionnel, tant en termes de nombre de membres que de ressources financières. Conséquemment, le poste de président n'est pas particulièrement convoité. Par contre, il est toujours possible que, dans le futur, un candidat ou une candidate puisse se montrer intéressé à occuper cette fonction pendant plusieurs années. C'est pourquoi nous sommes en principe en désaccord avec la proposition de limiter à trois le nombre de mandats à la présidence de l'ordre.

• (14 h 10) •

Par ailleurs, si la limitation de la période de présidence est maintenue, nous proposons que celle-ci soit exprimée en nombre d'années, par exemple maximum de neuf ans ou 12 ans, plutôt qu'en nombre de mandats, puisque la durée de ces derniers pourra varier entre deux et quatre ans, selon le choix des ordres, et ainsi créer des inéquités entre eux.

Les frais en matière disciplinaire. Le projet de loi n° 98 prévoit de modifier l'article 151 du Code des professions afin de permettre à l'ordre de récupérer les frais engagés dans le cadre du processus d'enquête lorsque l'intimé est reconnu coupable d'une plainte disciplinaire. L'ordre salue cette modification qui lui permettrait de récupérer une partie des sommes injectées dans ce même processus d'enquête.

Dans le même sens, nous souhaitons que l'Office des professions adopte, conformément au pouvoir réglementaire déjà prévu au deuxième paragraphe de l'article 12.3 du Code des professions, un règlement fixant le montant des frais pouvant être exigés pour une personne qui demande l'avis du comité de révision. De tels frais, si minimes soient-ils, permettraient de limiter, sinon d'éliminer les demandes futiles.

J'aimerais maintenant prendre quelques minutes pour porter à votre attention certaines initiatives de l'ordre qui rejoignent des objectifs du projet de loi.

Relativement à l'obligation d'une formation en éthique et en déontologie, notamment. Depuis plus de 20 ans, le programme de baccalauréat en sciences géomatiques de l'Université Laval inclut un cours d'éthique et de déontologie. Depuis longtemps, l'ordre collabore avec l'université dans l'élaboration du contenu de cette formation. En plus de cette formation spécifique, l'ordre dispense depuis cinq ans une formation complémentaire en déontologie à tous les finissants, et cette formation est rendue obligatoire depuis 2014.

Depuis de nombreuses années et sur une base régulière, nous offrons des formations en déontologie à nos membres sous forme de cours magistraux, de conférences, de vidéos éducatifs, et j'en passe. Des tournées provinciales sont également organisées et permettent au syndic et à l'inspecteur d'informer les membres des principales problématiques identifiées par l'ordre et les sanctions et conséquences qui en résultent pour le public et le professionnel.

Maintenant, relativement à l'obligation qu'auront les administrateurs du conseil d'administration d'un ordre à suivre des cours en matière de gouvernance et d'éthique. L'ordre invite régulièrement ses administrateurs à suivre différentes formations en matière de gouvernance et d'éthique et assume les dépenses inhérentes à celles-ci. De façon générale, la grande majorité des administrateurs participent aux diverses activités de formation qui leur sont proposées, particulièrement celles organisées par le Conseil interprofessionnel du Québec.

Enfin, en ce qui concerne la composition du conseil d'administration. Le conseil d'administration de l'ordre est constitué de 14 administrateurs, dont trois sont nommés par l'Office des professions et 11 sont élus. De ces 11 un administrateur est inscrit au tableau depuis moins de 10 ans au début de son mandat. Quant aux femmes, elles représentent 13 % des membres du conseil... non, excusez-moi, 13 % des membres de l'ordre et représentent 18 % des administrateurs élus au sein du conseil, et cette dernière statistique est relativement stable depuis au moins une décennie. Aussi, l'ordre entend éliminer son comité exécutif et réduire la taille de son conseil d'administration dès que les articles 80 à 83 du projet de loi seront en vigueur.

Je vous remercie de votre attention.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. Tessier. Mme la ministre.

Mme Vallée : Merci, M. le Président. Alors, M. Tessier, merci beaucoup pour votre présentation, pour votre mémoire. C'est intéressant parce que vous faites partie, votre ordre fait partie des 10 plus petits ordres professionnels en fait de taille. Vous comptez un peu plus de 1 000 membres. Je pense que vous avez une expérience, en matière de gouvernance, qui est quand même intéressante parce que vous avez séparé, si je comprends bien, le rôle de président et de directeur général. Comment ça s'est articulé? Parce qu'on a eu différents points de vue quant à cette modification législative qu'on s'apprête à... qu'on a présentée, et certains nous disent : Ça n'a pas d'impact et ça n'aura pas d'impact; peu importe la taille d'un ordre, il doit y avoir cette distinction entre le président et le directeur général. Et d'autres nous disent : Il faut faire attention, il y a des ordres qui ne pourront peut-être pas aménager ce changement-là ou aller de l'avant avec un changement comme ça. Alors donc, j'aimerais vous entendre, parce que vous êtes quand même très représentatifs des ordres de petite taille.

Le Président (M. Ouellette) : M. Tessier.

M. Tessier (Pierre) : Oui. D'entrée de jeu, je vous dirais que, personnellement, je considère que ces deux rôles doivent être distincts, de toute façon. Parce que je ne sais pas à quel moment ou à quelle époque — peut-être le secrétaire et directeur général pourra vous en informer — cette distinction s'est faite, mais, je pourrais dire, le résultat est là, il est probant, il fonctionne très, très bien. Le président du conseil d'administration est là pour gérer le conseil d'administration et voir au bon fonctionnement de l'ordre, qui, lui, est administré par le directeur général. M. St-Pierre?

Le Président (M. Ouellette) : M. St-Pierre.

M. St-Pierre (Luc) : Oui. Luc St-Pierre, directeur général et secrétaire.

Alors, effectivement, il y a à peu près 25 ans... En fait, partons de 1974, alors c'était le poste de secrétaire, le poste de directeur général n'existait pas, et, il y a à peu près 25 ans, le conseil d'administration a décidé, après avoir fait une analyse, que le secrétaire pourrait être également directeur général, alors ils ont combiné le poste de directeur général et secrétaire. Peut-être une dizaine d'années plus tard, ils se sont posé la question : Devrait-on avoir un président-directeur général? Et, après avoir analysé les tenants et aboutissants de tout ça, ils ont décidé de maintenir le statu quo, à savoir un président pour le conseil d'administration et un directeur général et secrétaire pour les opérations de l'ordre.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la ministre.

Mme Vallée : Et cette dynamique-là vous convient, n'a pas causé de problème dans les modifications qui ont été apportées, dans le sens qu'il n'y a pas eu d'enjeux particuliers qui ont résulté de ce changement qui a été apporté il y a quand même bon nombre d'années.

M. St-Pierre (Luc) : Je pense que le principal impact, c'est que le secrétaire s'est retrouvé avec un petit peu plus de choses à faire dans sa liste d'activités, mais, outre ça, non, ça n'a posé aucune difficulté, aucun problème.

Mme Vallée : D'accord. J'ai un petit peu sourcillé quand j'ai lu votre mémoire, sur la question de la durée des mandats, ça m'a fait sourciller, mais ce n'est pas... c'est que vous indiquez, à la page 6 de votre mémoire : «...au courant des dernières années, nos membres se sont montrés peu intéressés par les affaires de l'ordre et sa mission de protection du public...» Alors, ça, je dois vous dire, ça m'a un petit peu surprise que les membres s'étaient intéressés peu... s'étaient montrés peu intéressés.

Vous nous dites : La limitation des mandats... on craint que la limitation des mandats n'ait pour effet de rendre plus difficile le recrutement de candidats, de candidates intéressés à siéger au conseil d'administration, puis j'aimerais... Je cherche à comprendre. Je comprends qu'il y a des enjeux quant à la limitation des mandats. On a entendu hier des gens disant : C'est intéressant de les limiter, mais il faudrait quand même permettre un minimum de temps, parce que, pour arriver à bien comprendre le fonctionnement de l'ordre... parce que ce n'est pas... Bien souvent, la présidence, on ne fait pas ça à temps plein, on a une vraie vie aussi en parallèle. On a besoin d'avoir un certain temps pour se familiariser avec l'ensemble des dossiers et des enjeux, et donc de limiter, ça peut être un petit peu contraignant, mais, oui, ultimement, il doit y avoir une place pour le renouvellement des visages autour de la table. D'autres personnes comme vous ont dit : Bien, on est plus ou moins à l'aise avec la limitation de mandats. Mais jamais on ne nous a mentionné que la limitation de mandats serait un élément dissuasif pour quiconque serait peut-être intéressé à s'impliquer et compliquerait le recrutement. Alors, là-dessus, j'aimerais vous entendre.

M. Tessier (Pierre) : Peut-être que notre mémoire n'est pas assez clair à ce sujet. Ce qu'on veut dire, actuellement : nous, on a choisi d'avoir dans le futur un mandat de deux ans. Pourquoi? Parce qu'on l'a dit, on a de la difficulté à recruter des gens au poste de président, puis, pour une durée plus longue, ça nous apparaissait peut-être difficile. On a choisi deux ans puis on se dit : Ça pourrait arriver dans le futur qu'on ait quelqu'un qui soit vraiment intéressé à rester pendant plus longtemps et donc avoir... effectuer plusieurs mandats. Et où on a tiqué un peu, c'est qu'on se dit : Nous, si on se limite à trois mandats, ça donne six ans, si un autre ordre professionnel a une période, a des mandats de quatre ans, le président peut rester en poste pendant 12 ans. Donc, pourquoi les gens ne resteraient pas... on n'aurait pas pour tous une période prédéfinie, je dis neuf ou 12 ans, tout simplement?

Mme Vallée : D'accord. Je comprends. Alors, compte tenu que la durée des mandats est variable d'un ordre à l'autre...

M. Tessier (Pierre) : Variable, c'est exactement cela.

• (14 h 20) •

Mme Vallée : ...il serait peut-être plus à propos d'y aller en termes d'années plutôt qu'en termes de mandats. D'accord.

Puis l'autre petite chose, c'est que l'élargissement du... Et vous avez utilisé le terme «une instance d'appel» pour qualifier le rôle du commissaire aux plaintes, que nous proposons de renommer commissaire à l'admission... aux admissions, ce n'est pas une instance d'appel, là, on s'entend. C'est un pouvoir de recommandation, ce n'est pas une instance d'appel, ce n'est pas... Le commissaire n'a pas le pouvoir de changer la décision, mais il a plutôt le pouvoir de l'analyser et de recommander des pistes de solution si le processus mis en place devait comporter une quelconque irrégularité. Donc, je tiens à vous rassurer, là, ce n'est pas du tout un processus d'appel de la décision des ordres ou un processus d'appel d'une décision d'une instance universitaire, c'est vraiment ce regard critique qui est sur l'ensemble de l'organisation, qui se pose sur l'ensemble du système et qui nous amène peut-être à améliorer — enfin, on l'espère — nos pratiques et nos processus. Donc, pour moi, c'est important de faire la distinction, parce que ce n'est pas du tout... l'objectif n'est pas du tout de venir compromettre l'autonomie des ordres, là.

M. Tessier (Pierre) : Mais nous craignons quand même... C'est quand même une étape supplémentaire qui s'ajoute. Ce que nous craignons, c'est peut-être le volume, le volume de travail qui attend le commissaire à l'admission. Si on regarde l'article 12, premier alinéa, parmi ses tâches : «De recevoir et examiner toute plainte d'une personne relative à l'admission [et] — deuxième alinéa — vérifier le fonctionnement de tout processus ou activité relatif à l'admission», cela pour 46 ordres qui contrôlent 54 professions. La tâche nous apparaît plus que vaste, énorme, même.

Mme Vallée : Bien, c'est certain que 54 professions, ce n'est pas rien. Mais en même temps, hier, on faisait le parallèle avec la Protectrice du citoyen, qui, elle, pose un regard sur l'ensemble de l'activité gouvernementale. Ça non plus, ce n'est pas rien, puis je pense qu'elle y arrive. Donc, il s'agit toujours de voir... et de voir le nombre ultime que ces dossiers vont générer.

Je voulais aussi revenir... Lorsque vous avez parlé, je voulais vous questionner, parce que vous avez mentionné la difficulté de recruter des membres au sein de l'équipe. Vivez-vous ce que d'autres ordres vivent quant à la difficulté de recruter des membres intéressés à assumer les fonctions de syndic?

M. Tessier (Pierre) : Oui, définitivement. Définitivement, parce que de toute façon un poste de syndic, c'est très particulier. On s'entend que ce n'est pas tous les individus qui sont prêts... En fait, c'est une tâche ingrate, il ne faut pas se le cacher. Oui. Déjà, dans le passé, nous avons... Nous avons recruté, cette année ou il y a un an, un deuxième syndic, puis on pourrait dire, mon Dieu, qu'il vient de nous sauver un peu la vie, parce qu'on avait un syndic qui était complètement débordé et qui ne... On ne trouvait pas de relève. Là, on vient de trouver, on a eu une perle rare qui s'est présentée.

Mme Vallée : Quand on a eu... L'ordre qui vous a précédés cet avant-midi nous a soulevé cet enjeu-là de difficulté de recruter des gens intéressés par... Et on a également reçu hier une recommandation de la Protectrice du citoyen suggérant de mettre en place un code d'éthique pour les syndics, qui pourrait les accompagner de façon un petit peu plus indépendante. Donc, je comprends que le recrutement de syndics fait partie des enjeux.

Est-ce que vous savez si... Est-ce que c'est un élément qui fait l'objet de discussion, par exemple, au sein du CIQ ou d'autres organisations, ces enjeux de recrutement de syndics?

M. Tessier (Pierre) : Je ne pourrais pas vous répondre à cet effet-là.

Mme Vallée : O.K. D'accord.

(Consultation)

Mme Vallée : Oui, j'essaie de... J'ai perdu le fil. Est-ce que vous... Parce que vous vous préoccupez de l'élargissement des pouvoirs du commissaire. Actuellement, le commissaire a quand même un certain nombre de pouvoirs. Il est présent, il est sur le terrain depuis plus de six ans. Il a déjà des pouvoirs de recommandation. Donc, ses pouvoirs sont les mêmes, ils sont simplement applicables à l'admission, à l'admission des étudiants, nonobstant le fait... en fait, peu importe la provenance de l'étudiant et peu importe là où l'étudiant aurait obtenu sa formation.

Qu'est-ce qui vous préoccupe de cet élargissement-là, compte tenu qu'il existe déjà, là? On n'arrive pas avec une entité qui est nouvelle.

M. Tessier (Pierre) : Je reviens peut-être... une partie de la réponse que j'ai donnée tout à l'heure, c'est le volume, le volume de travail. Dans le cas de l'Ordre des arpenteurs-géomètres, on reçoit, en termes d'intégration professionnelle, peut-être, quoi, deux à trois demandes...

M. St-Pierre (Luc) : Ceux qui arrivent de l'extérieur du pays?

M. Tessier (Pierre) : Oui.

M. St-Pierre (Luc) : Mettons cinq par année. On va dire cinq par année, à peu près.

M. Tessier (Pierre) : Cinq par année, alors qu'on a des cohortes d'étudiants qui se présentent à nos examens d'entrée, et là on parle de 60 à 100 personnes qui arrivent. Si ces gens qui... Parce qu'il y en a malheureusement qui échouent l'examen, un des examens. Et je regarde : «Le commissaire peut recevoir et examiner toute plainte», donc des individus, des candidats ou candidates qui sont insatisfaits de la note qu'ils ont reçue ou qui ont échoué lèvent la main et vont voir le commissaire.

Mme Vallée : Ça, je tiens à vous rassurer, ce n'est pas l'objectif du rôle du commissaire. Ce n'est pas de venir s'ingérer, par exemple, dans l'évaluation, ce n'est pas un appel d'un examen, ce n'est pas un appel, c'est vraiment le processus mis en place. Ce n'est pas... L'objectif n'est pas de venir se mettre les deux mains dans un examen et de valider le fond de l'examen, là, ou de réviser la note reçue à l'examen, c'est vraiment de pouvoir poser un regard sur la façon, donc le processus pour en arriver à l'admission ou au refus d'accès à une profession.

Vous, vous l'avez perçu comme étant une ingérence, par exemple, dans l'évaluation...

M. Tessier (Pierre) : Dans l'évaluation, oui.

Mme Vallée : ...dans le processus d'évaluation, par exemple un appel d'une note insatisfaisante.

M. Tessier (Pierre) : Exactement, oui. Mais là où... Par contre, le processus, j'ai un peu de difficultés à vous suivre, le processus est établi depuis longtemps. Donc, c'est quelqu'un qui aurait fait une encoche au processus, qui n'aurait pas suivi les règles.

Mme Vallée : Mais, actuellement, ces gens-là, si un processus devait comporter une problématique, ils vont cogner à quelle porte, actuellement?

M. Tessier (Pierre) : Au conseil d'administration.

Mme Vallée : Oui. Mais, une fois le conseil d'administration... Il n'y a personne qui peut émettre une recommandation. Et le processus n'est pas le fait seulement que d'un ordre, et c'est aussi la vision qui est présentée, c'est-à-dire que le processus d'admission de profession, c'est un processus qui interpelle bon nombre d'acteurs, pas seulement que les ordres, là. Et c'est pour ça, là, qu'en instituant le pôle on amène différents intervenants autour de la table, parce que ces organismes-là pourront participer à... peuvent participer à une meilleure intégration ou à une intégration plus difficile de par les règles qu'ils mettent en place, de par un certain nombre de facteurs. Donc, il n'y a pas que les ordres, là.

M. Tessier (Pierre) : D'accord.

Mme Vallée : Parce que souvent on se relance la balle. On en discutait hier. Le milieu de l'enseignement va dire : Bien, les ordres ont leur rôle à jouer. Et les ordres vont dire : Le milieu de l'enseignement a un rôle à jouer aussi, au niveau de ce qui peut être offert. Mais là le président me fait signe, alors...

Le Président (M. Ouellette) : Oui, le président vous fait signe.

Mme Vallée : Oui. Excusez-moi.

Le Président (M. Ouellette) : Donc, je ne sais pas, sur le dernier commentaire de la ministre, si vous avez une courte réponse. Mais, si vous n'en avez pas, on ira probablement en continuant avec Mme la députée de Chicoutimi.

• (14 h 30) •

Mme Jean : Merci. Bonjour, M. Tessier et M. St-Pierre. Bienvenue ici, à la commission, et à l'Assemblée nationale. Merci aussi pour l'effort que vous faites pour le mémoire et de venir partager avec nous vos idées et vos interrogations.

Lorsque j'ai lu le mémoire, effectivement, moi aussi, je me suis posé la question... ou ce qui a attiré beaucoup mon attention, c'est lorsqu'il est mentionné les difficultés pour l'Ordre des arpenteurs-géomètres de recruter des administrateurs ou des gens pour s'impliquer dans le conseil d'administration de l'ordre, qui est un ordre qui est là pour protéger le public. Comment expliquez-vous ce manque d'intérêt là des arpenteurs-géomètres membres de votre ordre vis-à-vis l'importance de protéger le public par des saines gestions ou en s'en occupant comme il faut?

M. St-Pierre (Luc) : Si vous permettez. Luc St-Pierre. Comme c'est moi qui souvent tente de solliciter les membres pour s'impliquer, je suis un peu à l'aise de répondre à votre question. En fait, dans le mémoire, on a quand même souligné que, lorsqu'ils ont à faire un choix entre le temps qu'ils doivent consacrer à leur travail, à leurs familles, à leurs loisirs, bien souvent l'ordre est en quatrième position dans ça, pas qu'ils estiment que ce n'est pas important, mais ils font un choix. Et ce qu'on constate, c'est que, de plus en plus, c'est difficile. J'ai régulièrement des conversations avec mon vis-à-vis ontarien, qui est, dans le fond, l'autre association d'arpenteurs-géomètres, qui est la plus grosse au Canada après nous, et il me dit que c'est une problématique non seulement au sein du conseil d'administration, mais au sein des comités qui permettent à l'ordre de bien fonctionner. Et souvent, à la blague, on dit : Si demain matin tous les 55 ans et plus quittaient nos comités, les trois quarts des comités vont arrêter de fonctionner. Alors, ce n'est pas un reproche qu'on fait. On comprend que les gens font des choix de vie et de priorités, mais ça a un impact. Alors, ceux avec qui j'en discute, ils sont totalement conscients de l'importance de le faire, mais on est en quatrième position dans les choix de vie, et heureusement il y en a qui finissent par nous choisir, mais ils sont de moins en moins nombreux.

M. Tessier (Pierre) : Par contre, je vous dirais qu'une fois que les gens se sont intégrés au conseil d'administration ils s'y donnent à plein, et souvent, maintenant, ce qu'on a, c'est des gens qui demandent un deuxième et même un troisième mandat. Donc, c'est de les attirer. Une fois qu'ils sont en place, ça va très, très bien.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Jean : Merci. Merci. À la page 5, vous mentionnez, puis on en a parlé un petit peu, des grandes réserves que vous avez. Par exemple, vous écrivez : «Permettre à un candidat ou à une candidate ayant épuisé ses recours au sein de l'ordre l'accès à un autre forum pour se plaindre du processus d'admission constitue à notre avis une remise en question du rôle fondamental des ordres en la matière.» L'idée du commissaire... d'étendre le pouvoir du commissaire et du pôle de coordination et l'idée de pouvoir porter un jugement sur... porter un oeil sur le processus global au niveau de l'admissibilité. Donc, lorsqu'on parle d'une vision globale, on parle au-delà de ce qui se passe à l'ordre. On parle, par exemple, des universités, des ministères. Il n'y a pas seulement que le ministère de l'Enseignement et pas seulement que l'Office des professions, mais aussi les ministères de l'Immigration... d'autres ministères qui sont impliqués dans tout ça. Je me demande comment... J'essaie de concilier entre le fait que vous dites que c'est mentionné... que ça remet en question le rôle fondamental des ordres, et moi, je ne le vois pas comment ça le remet en question, justement. Est-ce que vous pourriez m'éclairer où est-ce que vous voyez à quel point ça embarque par-dessus le rôle fondamental ou ça diminue le rôle fondamental de l'ordre?

M. Tessier (Pierre) : Bien, en fait, ce que l'on considérait, c'est que, normalement, l'admission... L'admission, c'est une des tâches principales d'un ordre professionnel, ensuite le contrôle de la compétence, oui. Et, pour nous, oui, il y a d'autres acteurs, le monde de l'éducation, ça, on en convient. Peut-être qu'on est dans une situation particulière où on est d'un à un. On a d'excellentes, mais d'excellentes relations avec l'Université Laval, qui est le seul fournisseur, je dirais, de candidats. On siège sur les comités de programme et en plus, par le biais du comité de formation, on a des représentants de l'Université Laval, du ministère de l'Éducation et de notre ordre. On est en constant échange entre les trois. Donc, à date, notre vision, c'est qu'on n'a pas de problème. On ne voit pas le problème qui pourrait exister.

Mme Jean : Alors, je comprends que vous m'exprimez qu'une situation comme la vôtre est quand même exceptionnelle, par rapport à d'autres ordres où la complexité peut être un peu plus grande, considérant que la formation n'est pas «one to one», un à un, mais...

M. Tessier (Pierre) : Oui, peut-être qu'il y a des situations qu'on ne vit pas actuellement. Je veux dire, je répète, encore là, on est sur le comité de programme depuis... bien, depuis toujours, je dirais, avec l'université, donc on se prononce directement sur le contenu des cours. Et, même, il y a eu l'an dernier une révision complète du programme en sciences géomatiques, et on était un des gros... des principaux acteurs de ce processus.

Mme Jean : Dans un autre ordre d'idées, dans la même page, par exemple, vous parlez : «[Le] processus supplémentaire de la révision aura pour effet d'ajouter des tâches aux ordres professionnels.» Dans ma compréhension à moi, à part de répondre aux questions qui pourraient être posées... J'aimerais ça avoir une idée justement de l'ampleur des tâches qui vous reviendraient, supplémentaires.

Le Président (M. Ouellette) : M. St-Pierre.

M. St-Pierre (Luc) : Oui, Luc St-Pierre. Alors, bien, ce qu'on anticipe... Et puis je pense que ça serait en complément peut-être à une question qui nous a été posée tantôt, lorsqu'on lit que le commissaire est chargé de recevoir et d'examiner toute plainte, on comprend très bien qu'on parle ici des processus. Mais, pour avoir à gérer à l'occasion une certaine, peut-être, bon, disons, frustration, mécontentement de candidats, ils vont remettre en question les processus, il ne fait pas de doute, bien sûr qu'ils ne diront pas au commissaire : Je n'apprécie pas le résultat de mon examen écrit, je fais une plainte. Non, non, non. L'examen écrit était trop difficile, l'examen écrit, j'avais un temps insuffisant, ce qui m'a... la formation que j'ai reçue pour cet examen-là était déficiente. C'est comme ça.

Alors, notre préoccupation, c'est qu'on s'est dit que, si graduellement ça devient une mécanique et, pour le candidat, bien sûr, à zéro frais pour faire ce type de plainte là, alors ça risque de devenir un outil. Et là on se dit que, oui, bien sûr qu'ultimement le commissaire pourrait nous dire : Écoutez, j'ai examiné ça et j'estime que votre processus est très bien. Il n'y en a pas, de problème. Mais il n'en demeure pas moins que, pour recevoir et examiner toute plainte, il va quand même bien s'informer à nous pour savoir qu'est-ce qu'il en est. Et à l'Ordre des arpenteurs-géomètres, le comité d'admission, c'est trois personnes. C'est Luc St-Pierre, qui agit comme secrétaire, et c'est deux adjointes. Alors, évidemment, il faudra prévoir du temps pour, dans le fond, j'imagine, clarifier la situation pour que le commissaire, ultimement, puisse dire à quelqu'un : Écoutez, j'ai examiné le processus, il m'apparaît correct.

Mais là quelqu'un fait un stage de formation professionnelle, parce que nous, on a un stage d'un an, et il n'est pas satisfait... Alors, je vous rappelle que, là, il y aura eu un maître de stage, il y aura eu un comité de six personnes qui s'occupent du comité des stages, qui auront vu le stage, ultimement, le conseil d'administration, s'il n'est toujours pas satisfait. Alors, on a une trentaine de personnes, là, qui se sont occupées du candidat en question. Mais, si ultimement il dit que le processus de stage, de formation est déficient : J'estime que, par exemple, l'ordre n'a pas mis en place des mécanismes pour s'assurer que le maître de stage est suffisamment compétent, tiens, pour faire ce stage-là, alors on aura, bien sûr... Bien sûr qu'ultimement on est confiants que le commissaire pourrait dire que tout est correct, mais on va passer des heures... Alors, ces trois personnes-là, que je vous décrivais à l'instant, vont cesser de s'occuper des affaires courantes de l'admission pour consacrer de l'énergie.

Évidemment, si j'étais un ordre à 150 employés, j'aurais la direction de l'admission, et là je pourrais leur confier, leur dire : Écoute, ces deux personnes-là, là, je veux qu'elles travaillent plus fort, ça fait que tu vas les mettre sur «réponses au commissaire» et ça va bien aller. Mais, moi, ce n'est pas ça. Moi, j'ai des personnes clés qui vont arrêter leurs activités. Et, quand on dit que, pour nous, c'est un rôle, bien, c'est que, depuis 40 ans et encore aujourd'hui, parce qu'on le dit, qu'on le fait à chaque année, on fait un exercice pour s'assurer que ce processus-là est rigoureux. Et bien sûr, ultimement, le conseil d'administration, de toute façon, y voit également.

Alors, c'est ça quand on dit : Un étage de plus, du temps additionnel, du personnel qui va devoir consacrer de l'énergie. Pas qu'on a l'impression que tout le monde va aller se plaindre, mais... Écoutez, moi, comme directeur général, je réponds beaucoup quand même au téléphone, et, je pense — et comme arpenteur-géomètre, soit dit en passant, qui a exercé — souvent, lorsque le public est insatisfait, à tort ou à raison, toutes les mécaniques possibles pour se plaindre... Et on ne porte pas de jugement là-dessus, c'est leur droit de le faire. Mais, nous, comme on est dans les opérations, comme directeur général, je sais l'impact que ça va avoir. Alors, c'est un peu ça, là, nos préoccupations.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. St-Pierre. M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : Merci. Bonjour, M. Tessier. Bonjour, M. St-Pierre. Bienvenue à l'Assemblée nationale. Merci pour votre contribution aux travaux de la commission. Pour le commissaire aux plaintes, et j'ai posé la question aux intervenants avant vous, on élargit son champ d'action. Est-ce que vous, au cours des dernières années, au sein de l'ordre, vous avez eu une problématique par rapport aux gens qui ont été formés au Québec, sur lequel le commissaire aurait désormais juridiction? Est-ce que c'est déjà arrivé, des cas comme ça, au sein de l'ordre?

• (14 h 40) •

M. St-Pierre (Luc) : Alors, Luc St-Pierre, directeur général.

Non, et tellement... Je me permets ceci : c'est que, lorsqu'on... Évidemment, on suit avec intérêt les travaux de la commission, et j'espère qu'à un moment donné on connaîtra tous ces problèmes qu'on a pour créer le... extensionner le mandat du commissaire, parce que nous, on n'en a pas. Évidemment, moi, j'ai des discussions avec d'autres directeurs généraux, et on essaie de comprendre : Mon Dieu, qu'est-ce qu'on échappe partout? Alors, pour répondre à votre question, à l'Ordre des arpenteurs-géomètres, non, on n'a pas eu de difficultés particulières.

M. Jolin-Barrette : Parfait.

Le Président (M. Ouellette) : M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : Oui. Je crois savoir que, bon, dans le projet de loi n° 49 et dans le projet de loi n° 77, qui avaient été déposés antérieurement, on venait moderniser le champ d'exercice de vos professionnels membres. Je voulais savoir ça fait combien de temps que la demande a été déposée, de modernisation du champ puis de l'actualisation de la loi.

M. St-Pierre (Luc) : Oui. En fait, on fait référence essentiellement aux changements qu'on a...

M. Tessier (Pierre) : Aux changements récents de...

M. St-Pierre (Luc) : Aux changements récents, oui, parce que c'est très récent, oui. Alors, c'est une couple d'années, maximum. Je dirais une couple... oui, effectivement, une couple d'années, pas plus que ça.

M. Jolin-Barrette : O.K. Au niveau... Dans votre mémoire, à la page 5, vous indiquez, dans le fond, que, pour le commissaire aux plaintes, vous ne souhaitez pas l'ajout d'une nouvelle structure mais de l'investissement financier. Pouvez-vous détailler cette proposition-là?

M. St-Pierre (Luc) : Oui. Bien, écoutez, moi, je suis au front, comme directeur général. Je les vois, les problématiques des gens qui arrivent de l'extérieur, c'est avec moi qu'ils viennent jaser, c'est avec moi qu'ils viennent dire que, là, ils ne savent pas qu'est-ce qu'ils vont faire la semaine prochaine pour payer l'épicerie. C'est moi qui les reçois. L'équipe d'admission, c'est trois, puis c'est moi qui les reçois. Alors, la grande frustration, effectivement, c'est qu'on a... Généralement, les gens qui arrivent de l'extérieur ont... J'ai vu les chimistes qui disaient : Faire de la chimie, peu importe sur la planète Terre, c'est de la chimie. Je vous dirais que faire des travaux d'arpentage, et d'arpentage dans le grand sens, parce que c'est plus que juste mesurer des terrains, là... Je vous dirais que la formation universitaire scientifique et technique, effectivement on la reconnaît généralement très facilement parce que c'est universel, c'est des mathématiques, la trigonométrie, de la géométrie, alors ça va bien. C'est le droit foncier. On a tout un volet, nous, de nos quatre ans d'université, on étudie le droit, mais rattaché au droit de propriété. Alors, c'est ce qu'on appelle le droit foncier, là, dans notre jargon. Alors, souvent, quand quelqu'un nous arrive du Maroc, de l'Afrique, de la Côte d'Ivoire, de la Roumanie, son volet scientifique et technique est reconnu, pas de problème, mais le volet... Bien sûr, les cours qu'il a suivis en droit, bien, c'est attaché à son pays. Si, demain matin, je veux exercer en Iran puis il y a une problématique, il me manque des notions.

Alors, ceci étant dit, on a cherché des solutions pour rapidement qu'ils aient accès à ces cours-là pour pouvoir avoir, obtenir le permis dans les meilleurs délais. Et c'est là qu'on frappe un mur, parce que le problème, comme le président l'a exprimé, c'est la quantité de personnes. Alors, on a approché l'Université Laval et on a dit : Si on le fait dans le cadre des cours du programme courant, c'est 18 mois. Alors, actuellement, un immigrant, quand on lui dit : Il te manque des cours en droit foncier, on lui dit que ça va être 18 mois, les suivre, pas parce qu'il y en a pour 18 mois, mais, avec les prérequis, et tout, ça finit que c'est sur une période de 18 mois. On a approché l'université pour regarder pour un certificat en droit foncier. Ça nous aurait rendu service, en six mois, on aurait tout suivi. Et puis nous, on avait d'autres projets pour ce cours-là, pour des cours de perfectionnement, par exemple, des professionnels qui ont un petit peu besoin de retourner sur les bancs d'école.

Ça allait très bien jusqu'au moment où on nous pose la question qui tue : Combien de candidats annuellement, M. St-Pierre? Bien, j'ai dit : Écoutez, l'année passée, ce n'était pas une bonne année, on n'en a pas eu. O.K., bon, c'est correct. Cette année, comment prévoyez-vous... Écoutez, si on est chanceux, je pense que trois, on devrait en avoir trois cette année. La discussion a été assez brève, ils nous ont dit : Oubliez ça, on ne fera pas un certificat pour trois candidats à l'occasion.

Il y avait effectivement à notre disposition des... Il y a quatre ou cinq ans, j'ai examiné cette possibilité-là où on pouvait financer l'organisation de ces cours-là, et ça a été le même problème. On m'a présenté les programmes, etc., les subventions possibles, wow! sauf que, la question, combien en aurez-vous? Et, quand je leur parle d'entre zéro, un, deux et trois, on me dit non. Mais le problème, après que, ces gens-là, on leur dit que c'est 18 mois, c'est que moi, je les reçois au bureau avec la famille, puis tout, là, pour me dire : Là, écoute, là, moi, 18 mois, ça n'a pas de bon sens, puis en plus je ne le savais pas, moi, je me suis installé à Montréal, à Laval, là il faut que je descende à Québec, là, ma femme, elle ne s'est pas trouvé un emploi encore, les petits sont... En tout cas, ce n'est pas facile.

Alors, c'est là qu'on dit que... C'est sûr que ce n'est pas beaucoup, je le sais, mais c'est des êtres humains, là, on ne peut pas leur dire : Écoute, vous n'êtes pas nombreux, désolés, ça va être 18 mois. Ce n'est pas tenable à long terme. Là, on le fait, les plus courageux vont faire le 18 mois puis ils vont suivre les cours. Puis on a des gens qui arrivent de l'extérieur du pays, qui sont devenus des arpenteurs-géomètres, puis ça va très bien, ils ont des belles carrières, aucun problème de ce côté-là, puis ça s'intègre relativement bien. Mais la difficulté est là, le noeud est là.

Et on sait par contre que, pour trois ou quatre nouveaux candidats arpenteurs-géomètres aujourd'hui, on a probablement perdu six à 10 candidats potentiels. 18 mois, ce n'était pas possible, ou ils ont commencé, puis là ils ont réalisé que ce n'était pas possible à long terme, et là on ferme les dossiers. Alors, on ouvre des dossiers d'équivalence, les gens, on leur dit qu'est-ce qu'ils ont besoin, ils sont motivés, ils commencent, puis là ils s'aperçoivent qu'avec les contraintes... Parce qu'on se comprend, hein, c'est souvent des gens qui exerçaient dans leurs pays, qui avaient une profession, dans leurs pays, d'arpenteurs-géomètres ou de géomètres experts, et qui arrivent ici, et ils s'attendent à travailler relativement rapidement. Ils savent bien que ce n'est pas la semaine prochaine, mais 18 mois... Ils donnent 18 mois : Bon, O.K., là, tu seras apte à faire les examens de l'ordre dans 18 mois. Oh!

Alors, c'est là. Injecter de l'argent, écoutez, c'est une façon de le dire, mais, nous, il va falloir trouver une solution. Lorsqu'il y en a juste trois ou quatre, ils méritent autant, ces trois ou quatre là, d'avoir des options que si les ordres... Il y a des ordres qu'il va en arriver 50, 60, 100. Fantastique pour eux. Mais on ne peut pas, nous autres, dire aux trois, quatre : Désolés, vous n'êtes pas beaucoup, donc il n'y a pas d'option.

Alors, en partant, l'ordre n'a pas les budgets pour se lancer dans une école de l'ordre qui viendrait donner ces cours d'appoint là, c'est beaucoup trop lourd, on l'a examiné, ça aussi. Il faudrait facturer des montants exorbitants, on n'est pas vraiment organisés. L'université est prête à collaborer, mais pas avec trois candidats à l'occasion. Alors, on l'a exprimé en parlant de sommes additionnelles à injecter, là. Voilà.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. Luc St-Pierre, M. Pierre Tessier, représentant l'Ordre des arpenteurs-géomètres du Québec.

 J'inviterais maintenant la Fédération des chambres de commerce du Québec à s'avancer. Je vais suspendre quelques minutes.

(Suspension de la séance à 14 h 47)

(Reprise à 14 h 49)

Le Président (M. Ouellette) : Nous reprenons nos travaux. Nous recevons maintenant la Fédération des chambres de commerce du Québec par le biais de son président-directeur général par intérim, M. Stéphane Forget. C'est vous, M. Forget, qui allez faire la présentation de 10 minutes, et après il va y avoir un échange avec Mme la ministre et les porte-parole des deux partis d'opposition. Je vous laisse la parole.

Fédération des chambres de commerce du Québec (FCCQ)

M. Forget (Stéphane) : Alors, merci beaucoup, M. le Président. Mme la ministre, MM., Mmes les députés, merci. Je suis accompagné de Michel Cournoyer, qui est expert-conseil à la fédération, spécialisé dans les questions de main-d'oeuvre et d'immigration.

• (14 h 50) •

Alors, peut-être un bref rappel, parce que c'est plutôt rare que nous venons devant la présente commission, vous rappeler que la fédération porte deux chapeaux, son premier, c'est de fédérer, de réunir les quelque 140 chambres de commerce à travers le Québec, et son deuxième chapeau, c'est d'être la chambre de commerce du Québec, dans le fond la chambre provinciale, avec près de 1 200 entreprises qui sont directement membres de la fédération. Et c'est à cet égard-là que nous avons plusieurs comités avec des entreprises membres et que nous nous intéressons notamment aux questions de main-d'oeuvre, d'immigration et, en partie, ce qui nous concerne aujourd'hui.

Donc, évidemment, nous n'avons pas la prétention de se présenter devant vous aujourd'hui en étant des experts des ordres professionnels, cependant deux choses. Tout d'abord, lorsque le projet de loi a été déposé, il y a eu un intérêt chez un certain nombre de nos membres à l'égard de ce qui est sur la table, et, deuxièmement, vous comprendrez que tout ce qui est relié à la main-d'oeuvre, aux enjeux de main-d'oeuvre, bien, c'est une préoccupation, et vous en traitez dans le présent projet de loi.

À cet égard, la fédération et ses membres sont depuis longtemps actifs sur les questions relatives au marché du travail et à l'immigration ainsi que celles portant sur le développement et la reconnaissance des compétences. Ces enjeux sont d'ailleurs d'autant plus importants en raison des défis démographiques qui menacent la prospérité du Québec pour les prochaines décennies. Nous avons d'ailleurs déjà fait part de nos préoccupations à cet égard lors des récentes consultations sur le projet de loi n° 70, la loi sur l'immigration et sur la planification de l'immigration au Québec 2017-2019.

La fédération est d'avis que le présent projet de loi comprend des éléments qui permettront de renforcer la confiance du public envers le système professionnel au Québec.

Les ordres professionnels sont dotés de pouvoirs exceptionnels qui influencent significativement l'offre de services professionnels dans de nombreux domaines d'activité et qu'ils doivent exercer dans l'intérêt du public. Mais l'octroi de ces pouvoirs comporte toutefois un prix dans la mesure où le système professionnel limite indûment l'accès à l'exercice des professions réglementées. Ainsi, pour bien servir l'intérêt public, un système professionnel doit-il être conçu de manière équilibrée.

Cet équilibre aura une importance grandissante puisque l'effectif des ordres professionnels est en croissance. Au rythme où vont les choses, le travail d'une personne sur 10, au Québec, va être régi par un ordre professionnel d'ici 2020.

La fédération croît dans un climat d'affaires sain, basé sur la confiance et considère que le projet de loi va dans la bonne direction en proposant des modifications visant un modèle de gouvernance des ordres. Le projet de loi n° 98 répond également directement à plusieurs recommandations de la Commission d'enquête sur l'octroi et la gestion des contrats publics dans l'industrie de la construction.

Plus particulièrement, la fédération considère que l'imposition de la présence d'un minimum de 25 % des administrateurs provenant du public permettra de renforcer sensiblement la confiance quant au fait que les ordres fassent de la protection du public leur unique raison d'être et leur seul mandat. Afin de renforcer, d'ailleurs, ce lien de confiance, la fédération est d'avis qu'il serait peut-être bien de remplacer le mot «principal», dans le rôle des ordres, par «unique». Ce changement permettrait de dissiper toute ambiguïté à l'égard de leur mandat et éviter que la ligne, parfois mince, entre le rôle d'une association professionnelle et d'un ordre professionnel ne soit jamais traversée.

La fédération considère que les changements à la structure de gouvernance et les obligations de formation que propose le projet de loi sont fondés, mais ils ne peuvent pas garantir à eux seuls la saine gestion du système professionnel dans l'intérêt du public. Au-delà de ces structures et de la formation des administrateurs, la fédération croit qu'il est important de viser également les compétences de gestion des administrateurs ainsi que les pratiques de gestion, car, en définitive, c'est de leur pratique que les administrateurs et gestionnaires ont à répondre. Je fais référence ici au principe de saine gestion généralement reconnu.

Dans un deuxième temps, le projet de loi vise également à faciliter l'admission aux professions des personnes formées à l'étranger notamment en élargissant les pouvoirs du commissaire aux plaintes concernant les mécanismes de reconnaissance des compétences professionnelles et en proposant de le renommer commissaire à l'admission aux professions, en instituant le pôle de coordination pour l'accès à la formation et en simplifiant la procédure relative à la mise à jour des compétences professionnelles dans le cadre de la mise en oeuvre des arrangements de reconnaissance mutuelle des qualifications professionnelles.

La FCCQ croit que les modifications proposées aux fonctions du commissaire lui permettront, dis-je, d'avoir un regard global et cohérent sur le rôle de tous les acteurs en matière d'admission aux professions lors de l'examen d'une plainte, la vérification des processus ou lorsque son avis est sollicité. En outre, les travaux du pôle de coordination pourront permettre de mieux cerner les difficultés qui demeurent en matière de reconnaissance des compétences acquises à l'étranger. Toutefois, la fédération considère qu'en amont, à tout le moins pour le secteur privé, c'est l'arrimage de l'immigration au besoin de main-d'oeuvre des entreprises qui demeure l'élément clé à une meilleure intégration des personnes immigrantes.

Il est toujours très difficile de prendre la juste mesure du problème de la non-reconnaissance des qualifications des personnes formées à l'étranger. De fait, selon une étude de l'Institut de la statistique du Québec réalisée en 2011, 30 % de la main-d'oeuvre... dont de nombreux jeunes nés et formés au Québec considéraient eux-mêmes être surscolarisés pour l'emploi qu'ils détiennent. Ce phénomène n'est pas unique au Québec et s'observe également dans d'autres pays industrialisés, notamment les États-Unis et l'Union européenne.

Cette inadéquation vaut également pour les personnes qui sont formées à l'étranger. À cet égard, la fédération considère que les résultats décevants en matière d'insertion professionnelle des personnes immigrantes s'expliquent largement par une création d'emplois globalement insuffisante et qu'à cet égard il importe de favoriser davantage la croissance économique et la prospérité du Québec à long terme à l'aide de tous les moyens dont nous disposons. Toutefois, le profil de l'immigration et son établissement sur le territoire sont également largement en cause, car les difficultés d'insertion témoignent d'un arrimage déficient avec les besoins des entreprises, notamment ceux des régions. Mais il faut voir dans l'inadéquation le facteur clé de la surscolarisation dont sont victimes de trop nombreux nouveaux arrivants sur le marché du travail.

Ainsi, la fédération est d'avis, tout comme elle l'a mentionné lors des consultations tenues la semaine dernière sur la planification de l'immigration, qu'il faut davantage axer le système d'immigration sur la demande en favorisant le recrutement direct par les entreprises et qu'une refonte globale de la grille de sélection est nécessaire pour la rendre plus optimale afin de mieux servir la prospérité du Québec et l'insertion professionnelle des personnes immigrantes. Je vous rappelle que, trop souvent, un immigrant qui se voit accepté à l'étranger pour venir au Québec a l'impression que, lorsqu'il arrive au Québec, il y a quelqu'un qui l'attend pour lui offrir un emploi.

Le système professionnel participe directement à mettre en valeur la qualité de la main-d'oeuvre du Québec. Il s'agit là de l'une des clés de la prospérité pour le Québec, compte tenu de la rareté grandissante de la main-d'oeuvre sous le fait du vieillissement de la population. La fédération est d'avis que le projet de loi n° 98 rétablit un certain équilibre qui permettra de renforcer la confiance du public en général et faciliter la reconnaissance des compétences acquises à l'étranger. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la ministre.

Mme Vallée : Merci beaucoup pour votre présentation fort intéressante puis qui amène une autre perspective dans nos consultations d'aujourd'hui. Dans votre mémoire, vous nous indiquez... vous avez élaboré un petit peu, mais j'aimerais peut-être qu'on aille un petit peu plus en profondeur, vous indiquez : «...le système professionnel limite indûment l'accès à l'exercice des professions réglementées.» C'est à la page 6, dans la section Un équilibre qui revêt une importance grandissante. Pouvez-vous nous illustrer un petit peu, par quelques exemples, là, votre vision et pourquoi vous y allez... Parce que c'est une information qui est quand même très forte, et j'aimerais avoir peut-être une meilleure illustration de ce que ça...

M. Forget (Stéphane) : Oui. Je vais demander à mon collègue Michel Cournoyer de vous donner la réponse.

Mme Vallée : Travail d'équipe.

M. Cournoyer (Michel) : Oui. Je vous dirais d'emblée que, si c'était à réécrire, je le referais tout de suite, parce que la plupart des gens interprètent la phrase pas dans le sens qu'on voulait qu'elle soit interprétée. Cette phrase-là ne veut pas dire qu'on considère que le système professionnel, actuellement au Québec, a un coût économique important. On dit qu'un système professionnel qui serait utilisé indûment, dans le sens qu'il va au-delà du mandat de la protection du public, pourrait avoir des conséquences importantes, économiques, dans le sens que, si on restreint indûment l'accès à l'exercice d'une profession, évidemment, si ça réduit la concurrence, ça augmente les salaires, ça fait augmenter les prix, et donc les conséquences économiques y sont. Mais on ne considère pas que c'est la situation actuellement au Québec.

On considère toutefois que c'est un équilibre que la loi permet et que cet équilibre-là doit être conservé, d'autant plus que le poids des personnes qui sont régies par un ordre va en augmentant. Ce n'est pas rien, là, 10 %, d'ici 2020, de la population en emploi au Québec pourrait être régie par un ordre professionnel. Et, quand on dit ça, là, on n'inclut pas toutes les personnes qualifiées obligatoirement, par exemple des grutiers, des mécaniciens d'ascenseur. Donc, on arrive à des proportions importantes du marché du travail, là, qui sont encadrées et réglementées, et ça, ça fait toujours dire aux économistes : Bien, on perd de la flexibilité, de l'adaptabilité, et ça, c'est le contraire de la prospérité et de pouvoir plus facilement faire face à la concurrence étrangère.

• (15 heures) •

Mme Vallée : Et, j'imagine, c'est ce qui vous amène aussi à nous suggérer une modification à l'article 23 du code. Parce que vous allez très loin, vous dites : L'unique fonction des ordres professionnels est la protection du public, et donc la principale fonction des ordres professionnels est la protection du public. J'aimerais aussi vous entendre sur ce qui vous a amenés à faire cette recommandation-là qui est très forte. Je comprends que vous souhaitez que l'ambiguïté quant au rôle des ordres soit mise de côté. On a entendu beaucoup, au cours des derniers mois, au cours des dernières années, dans le public, dire : Bien, il y a un certain... une forme de lobby qui se fait, il y a un protectionnisme qui est issu... Il y a toutes sortes de perceptions qui circulent, et vous arrivez avec cette recommandation-là. Alors, j'aimerais vous entendre.

M. Forget (Stéphane) : Notre perception à cet égard-là, c'est que toutes les autres fonctions ou la plupart des autres fonctions menées par les ordres professionnels sont des moyens qui visent à s'assurer de la protection du public. Quand on parle de formation continue, de reconnaissance des compétences, ou autres, ce sont tous des moyens dont disposent les ordres professionnels pour s'assurer essentiellement que ce soit dans le but de défendre l'intérêt du public, s'assurer que l'intérêt du public est bien défendu. Donc, c'est à cet égard-là qu'on a discuté avec un certain nombre de nos membres au sein de nos différentes instances. Ils sont arrivés à dire : Pourquoi on n'y va pas avec l'objectif ultime ou le rôle fondamental des ordres professionnels en disant : ce qu'ils doivent faire, c'est justement la défense de l'intérêt du public, et tout ce qui est périphérique à cela qui est très important, ce sont des moyens pour atteindre cet objectif-là?

D'ailleurs, c'est un drôle de hasard... bien, pas drôle, je m'excuse, ce n'est pas drôle, mais c'est un hasard peut-être d'apprendre, hier, le décès de l'ancien président du Collège des médecins, qui disait qu'au cours de sa carrière ce qui a été son principal objectif et ce qu'il a toujours vu comme étant son principal rôle, c'était de toute évidence la protection du public. Donc, lui, il voyait ça probablement, je ne veux pas utiliser ses mots, mais comme étant la raison fondamentale des ordres professionnels. Donc, c'est pour ça qu'on pense que c'est un moyen d'éviter cette ambiguïté-là.

Mme Vallée : Et de l'écrire de façon très claire à l'intérieur du code qui a comme objectif justement le contrôle ou l'encadrement de cette mission de protection du public.

M. Forget (Stéphane) : Voilà.

Mme Vallée : D'accord. Vous avez aussi mis de l'avant une proposition qui concerne la réalisation d'un audit de gestion sur chaque ordre sur les bases des principes de saine gestion. Donc, qui devrait, selon vous, là, être chargé d'aller de l'avant avec un tel audit? Et comment on peut s'assurer... comment on pourrait s'assurer de faire cohabiter une telle proposition et l'autonomie des ordres? Parce qu'il y a ce principe d'autonomie des ordres qui est là et qui est très important, et ce principe d'autonomie puis d'autogestion des ordres, il est aussi très fragile, je vous dirais, dans ce sens qu'on... Non, il n'est pas fragile, mais il est très bien protégé, je vous dirais. Alors, comment cette solution-là pourrait quand même cohabiter avec ces principes-là?

M. Forget (Stéphane) : Je vais débuter, puis je laisserai Michel par la suite... Je vous dirais que notre réflexion à cet égard-là vient du fait qu'on a beaucoup, au cours des dernières années, parlé du rôle des administrateurs de société. On a mis beaucoup d'emphase sur la formation, sur la responsabilité des administrateurs de société, s'assurer qu'ils aient... puis de là est née toute sorte d'organisation. Je pense même au gouvernement du Québec qui exige de ses administrateurs de suivre des formations d'administrateur de société. Donc, dans un premier temps, il était clair pour nous que plus les administrateurs seront bien formés, mieux ils vont être capables de jouer leur rôle dans les organisations où ils vont être.

Par la suite, bien, évidemment, il y a la responsabilité de gestion, puis, dans nos entreprises, dans les entreprises qu'on représente, c'est une responsabilité fondamentale. Maintenant, qui en est le responsable? Est-ce que ce sont les ordres eux-mêmes qui devraient avoir la responsabilité de s'imposer cette règle-là? C'est peut-être une façon de le voir.

M. Cournoyer (Michel) : Oui. En fait, un audit de gestion, c'est, vis-à-vis la gestion, ce qu'est une vérification financière authentifiée. Donc, le principe de l'audit de gestion, c'est de revoir des politiques internes de l'entreprise, de l'organisation, de l'ONG, l'ordre dans ce cas-ci, et de l'analyser dans un contexte de gestion du risque, et de faire des recommandations à la haute direction.

Je vais vous donner des exemples qui, dans ma vie professionnelle, là, se sont passés suite à des audits de gestion, comme par exemple : Est-ce que les activités principales auxquelles se livre l'organisation font partie de la planification et les résultats qui sont visés sont clairs et transparents et sont présentés au conseil d'administration? Quand une activité importante vient de l'initiative d'un gestionnaire, qu'elle engage des ressources importantes, et les résultats ne sont pas atteints, c'est la pérennité de l'organisation qui est mise en péril. La question, donc, d'un audit de gestion, c'est vérifier est-ce que les règles de planification à l'intérieur de l'organisation font en sorte qu'il y a une obligation de présenter les principales activités et les résultats escomptés.

Un autre exemple : Les délégations de signature et les approbations des frais de déplacement et de représentation, par exemple, de la haute direction, est-ce que c'est bien encadré par les règles de régie interne? C'est des éléments qui sont... ce sont des éléments fort sensibles dans l'opinion publique, et donc il s'agit de voir à ce que... par exemple, les dépenses de la personne, du P.D.G. ou de la P.D.G., en termes de dépenses de représentation, frais de déplacement, par qui ils sont approuvés. Est-ce que c'est les pratiques qu'on retrouve dans des organisations similaires? Est-ce qu'il y en a, effectivement, des dispositions? J'ai vu des ONG où il n'y en avait pas, et puis la personne qui était P.D.G. approuvait elle-même son compte de dépenses.

M. Forget (Stéphane) : Mais loin de nous l'idée de jouer sur l'autonomie des ordres professionnels. C'était dans le sens, toujours dans le sens de, quand on veut bien jouer le rôle de défense des intérêts du public, comment on fait pour s'assurer qu'on soit vraiment efficace, qu'on ait une gestion efficace des choses, et d'utiliser les saines pratiques de gestion. C'était pour nous un moyen additionnel de dire : On est entre bonnes mains, les ordres professionnels font les choses de façon diligente, et on est vraiment entre bonnes mains. C'est un peu dans ce sens-là que nous proposions cela.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la ministre.

Mme Vallée : O.K. Vous avez aussi mentionné dans votre mémoire qu'il y avait un nombre limité de plaintes qui portaient sur la non-reconnaissance des qualifications qui étaient déposées auprès du commissaire. Vous laissez sous-entendre qu'il y a certaines explications qui pourraient être sous-jacentes à cette non-reconnaissance... à ce nombre limité de plaintes là et qu'il serait faux de prétendre qu'il n'existe pas de problématique. J'aimerais vous entendre, parce que, je vais vous dire, pour être bien honnête avec vous, depuis hier, c'est assez partagé, hein, ce n'est pas tout le monde... puis on ne reconnaît pas... Certains nous disent : Il n'y en a pas, de problème, ou il y a très peu de problèmes, ou on n'est pas en accord avec un élargissement du champ de la mire du commissaire parce qu'on croit que ça va être trop lourd, ça va être une structure additionnelle, ça porte atteinte à l'autonomie. Bref, tous y vont de leurs analyses. Mais j'aimerais vous entendre sur cette affirmation.

M. Forget (Stéphane) : Michel.

• (15 h 10) •

M. Cournoyer (Michel) : Oui. Certes, vous touchez là un des points importants du mémoire, là. Prendre la juste mesure du phénomène, c'est probablement la plus grande difficulté qu'on a. Là, la fédération en a discuté en comité spécial et on n'arrive pas à dire est-ce que c'est effectivement un phénomène important qui explique les difficultés d'insertion professionnelle que connaissent les personnes formées à l'étranger ou que... On n'arrive pas à... parce que les évidences peuvent être contradictoires, parce qu'on observe aussi des choses pour l'ensemble de la population, qui s'observent... notamment un phénomène de l'inadéquation entre la formation et les besoins du marché du travail. Ça ne s'observe pas juste pour les personnes immigrantes, mais ça s'observe aussi pour des Québécois de souche. On fait état, là, d'une étude de l'ISQ où les proportions de personnes qui occupent un poste pour lequel ils sont surscolarisés sont assez importantes, et ça, ce n'est pas propre au Québec, là, c'est propre à l'ensemble des pays industrialisés, parce que, croit-on, il y a beaucoup trop de personnes qui choisissent leurs orientations professionnelles non pas en fonction des perspectives professionnelles, mais selon d'autres critères, et ça crée des inadéquations entre les besoins réels du marché du travail et les orientations en matière d'éducation qu'on choisit, les choix professionnels qu'ont faits les jeunes.

En ce qui concerne, maintenant, la question des plaintes, un nombre limité de plaintes, la première chose qu'on s'est fait dire, c'est qu'il y a des nouveaux arrivants qui considèrent que porter plainte peut être préjudiciable à leurs perspectives professionnelles, et ils ne le feront pas. Et là, du moment qu'on accepte un argument comme celui-là, on en vient à penser même que le nombre de plaintes n'est plus un indicateur. Et c'est dans ce sens-là où on dit tout simplement, là, qu'il y a tellement de contradictions dans les données et l'information qu'on reçoit qu'il est très difficile de jauger, de mesurer ou de trouver la juste mesure, là, du phénomène. Et on pense que le bureau de coordination, si c'est comme ça, pourra...

Mme Vallée : ...appeler le pôle...

M. Cournoyer (Michel) : Le pôle, excusez.

Mme Vallée : ...mais le nom importe peu, c'est l'objectif qui...

M. Forget (Stéphane) : C'est un moyen qui pourrait peut-être nous permettre de résoudre cette ambiguïté-là.

M. Cournoyer (Michel) : Oui, au niveau de comprendre mieux le phénomène, mais, au niveau des solutions, on considère que c'est avant tout une meilleure adéquation entre l'immigration et les besoins de main-d'oeuvre dans les entreprises, qui va répondre au phénomène de la surscolarisation des personnes immigrantes, qui est transformée par une perception de non-reconnaissance des compétences.

Le Président (M. Ouellette) : Dernière minute, Mme la ministre.

Mme Vallée : Il y aurait tellement... On nous dit souvent que l'approche par compétences est peut-être... apporte plus de transparence, plus d'objectivité dans les exigences en vue d'une pratique professionnelle. Est-ce que vous êtes d'accord avec cette affirmation-là?

M. Forget (Stéphane) : Bien, je vous dirais que... Pour nous, de toute évidence, une des façons de régler le problème, c'est que l'immigration se fasse sur la demande. La proposition de Mme la ministre de l'Immigration, où on va permettre maintenant aux employeurs d'aller piger dans des bassins, va de toute évidence améliorer ou réduire les enjeux qu'on a par rapport à la reconnaissance des compétences, parce qu'on va choisir des gens qui sont déjà sélectionnés et qui, quand ils vont arriver ici, parce que l'employeur l'aura choisi, vont avoir déjà un poste. Donc, il y a une partie du problème, à notre avis, qui va se régler par la façon que nous allons sélectionner notre immigration et parce que nous allons travailler sur la demande plutôt que sur l'offre.

Mme Vallée : Merci beaucoup.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Jean : Merci. Alors, bienvenue, MM. Forget et Cournoyer. Heureuse d'avoir vos commentaires, très intéressants. Vous avez un point de vue affaires qui éveille bien des idées et qui m'intéresse particulièrement. Vous soulevez une image qui est intéressante, entre le fait que... la grande difficulté d'intégration des nouveaux arrivants n'étant pas ce qu'on pense principalement, mais plutôt liée à la disponibilité d'emploi, la croissance économique, comment ça va bien, dans le fond, dans le pays d'adoption qui est chez nous. Il va sans dire que, ces temps-ci, ce n'est peut-être pas le meilleur moment qui se passe, qu'on vit actuellement.

Vous faites mention qu'il devrait y avoir un lien entre l'immigration et la demande en main-d'oeuvre, ce qui me semble quelque chose de très logique. On parle en même temps... Bien, ma question est : Comment on peut, dans le contexte de ce sur quoi on est en train de travailler aujourd'hui, faire le lien entre, justement, les nouveaux arrivants ou la demande ou... Comment on peut mettre tout ça ensemble? La piste de solution que j'entrevois... Et le pôle de coordination qui est proposé dans le projet de loi, dans lequel on veut étendre... et qui existe déjà et dans lequel on veut étendre les participants, est-ce que, selon vous, ce pôle-là pourrait être une plateforme où la société civile, où les employeurs pourraient participer et influencer à ce niveau-là, dans la coordination?

M. Cournoyer (Michel) : Disons qu'on fonde un espoir que les travaux du pôle vont nous permettre de mieux cerner les problématiques et de faire la part des choses en ce qui concerne... Parce qu'il y a aussi tout un flottement de vocabulaire. Je vais vous donner l'exemple. Lorsqu'on rencontre le ministère de l'Immigration et on le questionne sur l'équivalence des diplômes, on lui dit : Écoutez, là, vous êtes en train de nous dire que vous êtes capables d'attester qu'un diplôme d'une grande université au Québec, reconnue dans le top 100 mondial... des équivalences entre ces diplômes qu'elle octroie et les diplômes dans les principaux pays d'immigration du Québec, que sont la Chine, le Maroc, l'Algérie et Haïti. Quand on dit ça aux gens de l'Immigration, ils nous disent tout de go qu'effectivement le terme est mal choisi, qu'on ne peut pas dire comme ça, d'emblée, que ces diplômes-là sont équivalents.

En fait, même, du point de vue économique, tu sais, il y a des grandes disparités dans la valeur économique d'un diplôme. Si on a un M.B.A. d'une grande université américaine — je ne vais pas en nommer une — c'est certain qu'on commande une rente, sur le marché du travail, beaucoup plus forte.

Donc, il y a une incompréhension dans le vocabulaire même, puis on pense que les travaux du pôle, justement en permettant un vocabulaire commun, vont nous permettre de voir plus clair et de mieux juger de l'importance de chacun des facteurs dans la contribution à la problématique.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la députée de Taillon.

Mme Lamarre : Merci beaucoup. Moi, je vous écoute, puis ce que je me dis, c'est : Est-ce qu'on donne l'heure juste aux candidats à l'immigration? Est-ce qu'on leur donne l'heure juste quand on fait la promotion du Québec, lorsqu'on les invite à venir? Est-ce qu'on leur donne vraiment les bons paramètres?

Et je retiens de ce matin deux témoignages de deux ordres différents, l'Ordre des arpenteurs‑géomètres qui fait référence au droit foncier du Québec, pour lequel il faut avoir des informations et des compétences, et les agronomes qui disaient : Bien, on accueille des gens qui ont une expertise en gestion de la sécheresse, puis là on doit avoir une expertise en gestion des surplus d'eau. Donc, on se rend compte que... 18 mois de formation, ça peut paraître inabordable, mais en même temps, si ça donne accès pour ensuite 30 ans à une carrière, à une profession, je pense que ce n'est pas mauvais. Ce qui est complètement inconcevable, c'est que la personne, en quittant son pays d'origine, ne le sache pas, que ça, c'est la condition.

Est-ce qu'il n'y a pas une espèce de promotion faite par le gouvernement qui ne donne peut-être pas l'heure juste aux nouveaux arrivants?

M. Forget (Stéphane) : Je vais vous donner une première partie de la réponse, je laisserai Michel compléter. Je ne peux pas vous dire si on leur donne l'heure juste. Ce qu'on sait, par contre, c'est que, je pense, on ne se rend pas service mutuellement. C'est pour ça que, les modifications qui vont être apportées bientôt, et qu'on aura discutées avec le ministère de l'Immigration, où on va changer notre façon, en partie, de sélectionner, qu'on va aller sur la demande plutôt que sur l'offre, qu'on va permettre aux entreprises d'aller recruter directement dans le bassin des gens qui ont besoin, on va de toute évidence améliorer notre adéquation entre nos besoins de main-d'oeuvre et les gens que nous allons accueillir.

Alors donc, est-ce qu'on leur donne l'heure juste? Je ne sais pas. Mais, à partir du moment où on va venir changer la façon de sélectionner, en tenant compte de tous les paramètres qui sont propres au Québec, évidemment, là, on a eu l'occasion d'en discuter, que ce soit eu égard à la langue, à l'apprentissage, à l'insertion, on s'entend, à cet égard-là... mais, quand on change les paramètres et qu'on axe sur la demande plutôt que sur l'offre, on se rend service davantage mutuellement, que ça soit nous, ici, au Québec, les entreprises et les immigrants que nous allons recevoir.

M. Cournoyer (Michel) : Oui. J'ajouterais à ça que la perception même du processus, malgré l'information qu'on peut leur transmettre, aux personnes immigrantes... et on pense qu'il y a eu tellement de représentations puis on voit des efforts dans... du moins, on nous démontre qu'il y a des efforts. La perception des personnes immigrantes elle-même pose problème. Une étude récente des personnes immigrantes disait que les gens, lorsqu'ils arrivent au Québec, certaines personnes, puis qu'ils sont en chômage, vont dire : J'ai été sélectionné sur la base de mon éducation et donc j'attends qu'on me fasse une offre. La responsabilité de la recherche d'emploi au Québec, ça appartient aux candidats, là, ça n'appartient pas à personne d'autre. Et je ne crois pas que ça soit à l'État, là, de faire une garantie d'emploi aux personnes.

Mme Lamarre : C'est ça. Je pense qu'on a des standards de sécurité qui sont particuliers. On entend un cas de légionellose potentiel puis on est tous mobilisés. Mais j'entends aussi votre... Et vous êtes les seuls à nous avoir présenté ça, c'est la création d'emplois qui est déficiente. Si on avait beaucoup d'emplois, on n'aurait pas autant de problèmes. Et vous faites référence au fait que les emplois en région ne sont pas comblés ou ne sont pas promus. Est-ce qu'il y a un problème aussi dans la distribution de ces emplois-là? Vous semblez dire qu'il y aurait plus d'emplois disponibles ailleurs, en région. Nous, on le pense aussi, là, mais...

• (15 h 20) •

M. Forget (Stéphane) : Bien, de toute évidence, s'il y a plus de création d'emplois, ça va aider à les sélectionner. Mais, si on a plus de postes disponibles, on n'améliore pas notre adéquation entre les besoins du marché du travail et la disponibilité, on va se retrouver dans la même situation.

Je vais prendre une statistique qu'on a utilisée la semaine dernière, qui est assez parlante : il y a 24 % des immigrants unilingues francophones qui rentrent au Québec qui sont en chômage. Les mêmes immigrants unilingues francophones à Toronto, il n'y en a que la moitié, 12 %, qui sont en chômage. Pourquoi? Parce qu'il y a une question d'adéquation. C'est la conclusion à laquelle on est arrivés.

Alors, oui, il faut créer plus d'emplois, il faut accroître la prospérité. Deux, il faut améliorer l'adéquation. Et, trois, on pense que, si on améliore l'adéquation, ce sera beaucoup plus facile d'attirer les immigrants en région au Québec.

Le Président (M. Ouellette) : Dernière question, Mme la députée de Taillon. Il reste 45 secondes.

Mme Lamarre : 45 secondes.

Mme Jean : Est-ce que je peux en poser une?

Mme Lamarre : Oui, vas-y.

Mme Jean : Vous mentionnez dans votre mémoire la référence aux saines gestions de gouvernance qui a été réalisée par l'Ordre des administrateurs agréés. Selon vous, est-ce que cette saine gestion là, ou ce document-là, ou ce rapport-là peut être utilisé par l'Office des professions pour imposer le cadre et imposer les règles au conseil d'administration des ordres?

M. Forget (Stéphane) : Je ne sais pas si le mot... si j'oserais utiliser le mot «imposer», mais, de toute évidence, c'est un cadre qui est reconnu et qui peut certainement accroître encore un peu plus la confiance du public envers nos ordres.

Le Président (M. Ouellette) : Merci. M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : Merci, M. le Président. M. Forget, M. Cournoyer, bonjour. Merci pour votre contribution. La discussion est intéressante sur l'immigration. Tout à l'heure, vous avez dit : Il faudrait que le Québec modifie sa grille de sélection. Quels critères, au niveau de la grille de sélection? Je ne veux pas qu'on refasse le débat qui a eu lieu au cours des derniers mois, là, mais je serais quand même intéressé de l'entendre.

M. Cournoyer (Michel) : Je vais tenter de faire un zoom. C'est un vaste... La plupart des pays qui sont en avance — on parle des pays en avance, Australie, Nouvelle-Zélande et le Canada, le reste du Canada par le système Entrée express — se dirigent vers ce qu'on appelle un système mixte. Un système mixte, c'est un... Le système qu'on a au Québec depuis une vingtaine d'années, on l'appelle basé sur l'offre. Pourquoi? Parce que les profils des candidats donnent des points, et c'est ce profil-là, qui est le profil personnel, qui fait que la personne est sélectionnée ou pas. Et donc ce sont les caractéristiques de l'offre qui gouvernent.

On a énormément compté sur la scolarité et on a donc une immigration, à Montréal, qui est plus scolarisée que celle de Toronto et de Vancouver. Et il n'est pas surprenant non plus qu'on ait de la difficulté à régionaliser notre immigration, parce qu'évidemment une personne... Là, on parle d'une scolarité moyenne, si ma mémoire est bonne — je ne veux pas vous induire en erreur — si ma mémoire est bonne, c'est 17 ans, c'est quand même de longues études. Ces personnes-là... Règle générale, une personne qui a 17 ans de scolarité, elle fait partie... qui vivait dans un milieu urbain dans son pays d'origine, s'attend à vivre les habitudes d'une vie urbanisée ici, au Québec, aussi. Et ça fait partie de la problématique de l'immigration, la régionalisation de l'immigration, c'est-à-dire le profil pour lequel on accorde énormément de points dans la grille de sélection.

Nous, on dit : Il y a déjà des points qui sont octroyés du fait d'avoir une offre d'emploi. On dit : Haussons de manière très importante ces points. Le Canada l'a fait dans le système express, dans la première sélection d'immigrants, à l'échelle du Canada en 2015. 65 % des immigrants sélectionnés détenaient une offre d'emploi. Ce n'est pas rien, ça. Nous, je ne pense pas qu'on atteigne les 20 %, parce que ce n'est pas le système qu'on privilégie. Cependant, la fédération dit : Il faut aller dans ce sens-là. Il faut axer notre sélection vers la demande, c'est-à-dire permettre aux employeurs de faire des offres d'emploi et aussi recruter dans le bassin de personnes, de candidats qu'on aura déclarés admissibles et qu'on aura mis dans la banque de déclaration d'intérêt.

M. Jolin-Barrette : Donc, concrètement, diminuer le nombre de points à accorder à la scolarité, parce que ça ne donne pas grand-chose d'avoir un Ph. D. s'il n'y a pas d'emploi de professeur, tout ça, d'augmenter le nombre de points pour les offres d'emploi validées. Par rapport à ça, dans la piscine... dans le bassin plutôt, est-ce que les ordres professionnels valident... Est-ce que le processus est déjà effectué à partir du moment où le candidat se retrouverait dans le bassin, au niveau de l'admissibilité à l'ordre professionnel? Parce que j'imagine que vous allez militer en ce sens-là, pour que la personne qui se fait recruter par l'employeur soit... Parce qu'il y a un travail à faire d'arrimer à la fois l'ordre professionnel, d'arrimer l'employeur pour que la personne qui arrive au Québec, dès le jour 1, puisse pratiquer.

M. Forget (Stéphane) : Ça peut être difficile. Je pense aux gens qui nous ont précédés, quand on a vu les difficultés pour former les gens pour obtenir les équivalences. Je pense que d'arriver au jour 1, et tout le monde est prêt, et la personne qui doit être membre d'un ordre professionnel est prête à embarquer sur le marché du travail... Je pense que, là, il y a plusieurs embûches qu'il va falloir qu'on règle en amont, à mon avis, là.

M. Cournoyer (Michel) : Oui, oui, tout à fait. Bien, je vais donner un exemple où ça peut être plus facile. Certainement que l'employeur qui offre un poste dans un emploi réglementé, là, par un ordre professionnel... Un stage d'appoint, c'est bien... c'est facile, là, d'organiser un stage d'appoint, il y a un intérêt, la personne s'en vient, et donc on fait déjà dès le premier jour un pas vers la reconnaissance. C'est déjà mieux que de... la personne attend chez elle à l'aide sociale. Parce qu'ils ont droit à l'aide sociale un coup admis et puis ils attendent d'être appelés par un ordre professionnel pour passer un test, ou une commission scolaire, ou un cégep, ou une université pour suivre des cours d'appoint.

M. Jolin-Barrette : Ça, c'est sûr. Sauf que l'employeur qui ne peut pas nécessairement offrir le stage puis qui a besoin d'un professionnel tout de suite, il n'a pas le temps d'attendre que l'immigrant professionnel ait le temps d'avoir sa formation d'appoint ou son équivalence aussi. Donc, il faut réfléchir à ce niveau-là aussi.

M. Forget (Stéphane) : Mais en même temps il y a beaucoup d'employeurs que ça fait longtemps qu'ils attendent pour combler des besoins de main-d'oeuvre. Alors, je pense que ça, c'est comme un stage, ça. Ça fait que quelqu'un qui forme un stagiaire, tu sais que tu investis dans quelqu'un qui va être prêt dans un an ou deux, mais tu fais l'investissement, puis ça vaut la peine.

M. Jolin-Barrette : Oui. J'avais une autre question qui n'est pas abordée dans votre mémoire. Hier, on a eu un peu la discussion, le sujet a été soulevé, notamment au niveau de l'assujettissement des cabinets et des sociétés aux normes déontologiques. Qu'est-ce que vous en pensez, dans le fond, que les syndics puissent...

M. Forget (Stéphane) : On n'a pas du tout réfléchi à cette question-là ou discuté avec nos membres chez nous. Alors, je serais bien, bien embêté, là, de commenter ou de vous répondre à cette question-là. Vous m'excuserez, là, à cet égard-là.

M. Jolin-Barrette : Il n'y a pas de problème.

Le Président (M. Ouellette) : Et c'est une très bonne réponse pour terminer le bloc de M. le député de Borduas. M. Stéphane Forget, M. Michel Cournoyer, représentant la Fédération des chambres de commerce du Québec, merci de votre collaboration.

Je vais suspendre quelques minutes. Je demanderais aux représentants du Barreau de venir s'avancer, s'il vous plaît.

(Suspension de la séance à 15 h 28)

(Reprise à 15 h 32)

Le Président (M. Ouellette) : Nous reprenons nos travaux. Nous recevons maintenant le Barreau du Québec. Nous recevons Me Claudia Prémont, bâtonnière du Québec, et je pense que vous allez faire la présentation, vous allez nous présenter les personnes qui vous accompagnent, vous avez 10 minutes. Après ça, il va y avoir un échange avec Mme la ministre et les représentants, les porte-parole officiels de chacun des partis d'opposition. Mme Prémont, à vous la parole.

Barreau du Québec

Mme Prémont (Claudia P.)  : Oui. Merci, M. le Président. Bonjour, Mme la ministre de la Justice, Mmes et MM. les membres de la commission. Alors, je suis la bâtonnière du Québec, Claudia P. Prémont, et je suis accompagnée de la directrice générale de notre ordre professionnel, Lise Tremblay, Me Lise Tremblay; Me Sylvie Champagne, à ma gauche, qui est secrétaire de l'ordre; et Me Marc Sauvé, qui est directeur de notre Service de recherche et législation au Barreau du Québec.

Alors, le Barreau a soumis son mémoire, notre position est d'ailleurs reprise de façon sommaire à la page 2. Nous appuyons les modifications proposées, particulièrement sur la gouvernance des ordres professionnels, la suspension ou la limitation provisoire lors de certaines poursuites criminelles, le secret professionnel et l'échange d'information. Nous avons toutefois des réserves quant à la transformation du poste de commissaire aux plaintes en commissaire à l'admission. Et, dans les quelques minutes qui nous sont allouées, je vais rapidement reprendre certains des points que je viens de citer.

Alors, au niveau de la gouvernance en premier lieu, alors, comme je l'ai dit, nous appuyons les modifications proposées. Comme vous le savez très certainement, au Barreau du Québec, nous avons été précurseurs et, voilà maintenant un peu plus d'un an, nous avons mis en place une nouvelle gouvernance, qui s'apparente énormément à ce qu'on retrouve dans le projet de loi n° 98. Ce que nous pouvons vous dire : Tant au niveau de la composition de notre conseil d'administration, du nombre de membres autour de la table, tout cela a clairement contribué à un conseil d'administration plus agile, plus efficient, plus efficace. Alors, on peut vous confirmer le tout, à cet égard-là.

Maintenant, toujours en ce qui touche la gouvernance, au niveau de l'éthique et de la déontologie des administrateurs, alors, à cet égard-là, notre compréhension, évidemment l'office pose des normes minimales, et nous, évidemment, les ordres, pouvons être plus contraignants sur certains points. Et, à cet égard-là, ce qu'on dénote, c'est que possiblement que le processus par règlement pour des modifications quant aux normes nous semble être lourd, et on vous propose plutôt de permettre aux ordres de fonctionner par résolution du conseil d'administration pour émettre des normes quelque peu plus contraignantes.

Maintenant, au niveau de la compétence pour trancher les différends, alors, très rapidement, ce qu'on dit, c'est que c'est quelque chose d'important, le rôle du poste pour trancher les différends, et on pense qu'il y aurait lieu de mieux le baliser, à cet égard-là, par rapport à ce qui apparaît au projet de loi n° 98.

Procédure d'examen et d'enquête, suspension provisoire d'un administrateur. Bien humblement, nous avons déposé en annexe à notre mémoire notre propre code de déontologie. Je crois qu'on a une certaine expérience en la matière, on a réfléchi et on vous invite à vous en inspirer si vous croyez pertinent, évidemment, de le faire.

Quant au conflit d'intérêts, à notre avis, il est difficile d'identifier tous les cas de conflit d'intérêts, alors c'est peut-être un petit peu hasardeux de vouloir faire une liste des conflits d'intérêts possibles. De notre côté, comme vous allez le voir au code de déontologie, on a plutôt parlé de situations dans lesquelles l'administrateur pourrait se retrouver dans un conflit qu'il qualifierait d'apparent ou de réel et, à ce moment-là, qu'est-ce qu'il a à faire.

Quant aux articles 122.01 à 122.05, qui se verraient modifiés au Code des professions, c'est-à-dire la suspension ou la limitation provisoire, évidemment, comme vous le savez, c'est une demande de longue date de la part du Barreau, alors nous appuyons évidemment les modifications proposées. À notre avis, ces dispositions permettent clairement de protéger le public pendant la période d'attente entre le moment où on apprend qu'un acte a été commis et la fin de l'enquête du syndic, pour, finalement, le dépôt de la plainte, et on pense que c'est important de pouvoir permettre à un ordre professionnel, pour la protection du public, d'agir pendant cette période-là, de façon urgente dans certains cas. Évidemment, c'est exceptionnel, parce qu'on parle d'accusations graves, passibles de cinq ans ou plus d'emprisonnement, alors ce sont des cas, en partant, quand même très exceptionnels.

Selon nous, et ça, on y réfère de façon plus précise, évidemment, je pense qu'on développe bien à cet égard-là, ça n'entache aucunement la présomption d'innocence en tant que telle. Et il y a toujours une discrétion, je pense que le syndic se doit évidemment d'appliquer sa décision de demander au conseil de discipline la suspension provisoire avec, évidemment, discernement. Et par la suite, évidemment, le conseil de discipline décidera si, oui ou non, il l'accorde, également avec certains critères.

Au niveau de la présomption d'innocence, on vous réfère à de la jurisprudence. À notre avis, la Cour suprême a reconnu que le droit professionnel... Évidemment, on a l'équilibre entre la protection du public et la présomption d'innocence de l'autre côté, et on pense... on peut faire un petit peu un parallèle avec l'article 130 du Code des professions, et ça a été reconnu que ce n'est pas une atteinte à la présomption d'innocence en tant que telle, de limiter, dans certains cas, le droit individuel du professionnel. On vous réfère à certaines améliorations, néanmoins, aux pages 13, 14 et 15 de notre mémoire, concernant la suspension, la limitation provisoire.

Maintenant, le commissaire aux plaintes, qui devient le commissaire à l'admission. Alors, à cet égard-là, nous avons des réserves, et je vous les explique. Tout d'abord, on a toujours été d'accord avec la mise en place du commissaire aux plaintes pour, entre autres, se pencher sur les possibles biais systémiques lorsque des gens, des professionnels formés à l'extérieur du Québec veulent entrer dans les ordres professionnels ici. Et cela, on est toujours parfaitement d'accord avec le rôle que le commissaire peut avoir à cet égard-là. Toutefois, la façon dont est présenté le nouveau rôle du commissaire, qui maintenant s'appellerait commissaire à l'admission, selon nous, ça ne répond à aucune problématique, en tout cas, vérifiée, nous, au Barreau, d'une part, mais on a de la difficulté à comprendre à quelle problématique cela répond même lorsqu'on parle des 46 ordres professionnels. Alors, à notre avis, pourquoi élargir de façon importante, voire drastique les pouvoirs du commissaire s'il n'y a pas véritablement de problématique?

• (15 h 40) •

Ce qu'on propose, c'est vraiment une solution qui, à notre avis, répond bien peut-être à certains objectifs, comme, entre autres... Parce qu'il faut aussi se poser la question si la problématique... Comme, pour nous, c'est un petit peu dans un flou, à cet égard-là, si la problématique est la formation offerte par rapport à l'adéquation du marché, c'est une chose, si c'est la question que certains diplômes ne sont pas reconnus après les études, puis la personne se cogne à la porte de son ordre, c'est autre chose. Mais, cela étant dit, on pense que ça devrait passer par le pôle de coordination, un pôle de coordination qui est déjà en place avec tous les intervenants, avec un pouvoir, effectivement, de recommandation. Et on considère que c'est une plateforme collaborative. Puis, à partir du moment où des solutions sont trouvées en collaboration avec tous les intervenants, je pense que c'est toujours plus facile par la suite de l'appliquer, et de l'appliquer rapidement et bien, comparativement à une recommandation, par exemple, que le commissaire pourrait faire et qui, malheureusement, peut-être, dans certaines situations, n'aurait pas l'aval de l'ordre qui serait visé par ladite recommandation.

Alors, à cet égard-là, c'est notre proposition pour possiblement répondre à la question des professionnels formés au Québec. Et, au-delà de ça, le commissaire, à partir du moment où il se prononce autant sur les professionnels formés ici que les professionnels formés à l'extérieur, on s'entend que ça prend une compétence. On est 46 ordres professionnels. Il y a plusieurs processus différents. Alors, nous, ce qu'on prévoit ou ce qu'on entrevoit, c'est possiblement la mise en place d'une machine assez importante avec plusieurs employés et avec, finalement, en bout de ligne, des fonds publics qui, à notre avis, pourraient être investis ailleurs et, par le biais du pôle de coordination, atteindre exactement les mêmes objectifs.

Alors, je sais que le temps file. On est ouverts à toutes les questions. C'étaient les quelques mots que j'avais à dire pour mettre la table. Évidemment, notre mémoire, comme vous l'avez constaté, touche à d'autres questions, et nous sommes disponibles pour répondre à vos questions. Merci.

Le Président (M. Ouellette) : Et c'est sûr qu'il va y en avoir, Me Prémont.

Mme Prémont (Claudia P.)  : Oui.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la ministre.

Mme Vallée : Merci. Alors, merci, Mme la bâtonnière, Me Prémont. Merci à toute l'équipe pour votre présentation.

J'aimerais vous entendre un petit peu davantage élaborer sur l'expérience de la dernière année et demie ou des deux dernières années du Barreau qui vit avec un changement... qui vit le changement de gouvernance, là. Vous avez initié, je dirais, un peu la tendance, suite aux modifications qui ont été apportées à la Loi sur le Barreau. Pour certains, ces changements-là comportent, pour certains ordres, bon nombre d'interrogations. On nous a abordés avec différentes recommandations, notamment de ne pas scinder le rôle de président et de directeur général pour les petits ordres. On a abordé la question du nombre d'administrateurs, du nombre d'administrateurs du public, les enjeux de la représentation régionale. Mais je sais que vous le vivez. Alors, j'aimerais ça, pour le bénéfice des collègues de la commission parlementaire, pour le bénéfice aussi de nos travaux, que vous nous éclairiez un petit peu sur l'expérience que vit le Barreau avec cette nouvelle forme, ce nouveau mode de gouvernance, qui avait fait grincer quelques dents à l'intérieur même de l'ordre, malgré tout le travail en amont qui avait été fait par vos prédécesseurs.

Le Président (M. Ouellette) : Me Prémont.

Mme Prémont (Claudia P.)  : Alors, évidemment, moi, j'y suis depuis septembre dernier, mais j'ai vécu, à l'époque où j'étais bâtonnière de Québec, l'ancien fonctionnement du Barreau du Québec, où on se retrouvait à près de 40 personnes autour d'une table à discuter d'enjeux importants. C'est clair qu'on n'a pas les coudées franches de la même façon, et je pense qu'on ne va pas au fond des choses non plus de la même façon que lorsque nous sommes 16.

L'autre commentaire, et je laisserai mes collègues ajouter, évidemment, selon leur vision et leur position au Barreau, mais, l'autre commentaire, je vous dirais qu'à l'époque il y avait deux représentants du public sur près de 40 personnes. Aujourd'hui, il y a quatre représentants du public sur 16 personnes, et c'est clair que ça amène une autre dynamique, mais je pense que ça amène une vision nécessaire et extrêmement importante pour nous. On le voit, ça nous fait changer quelquefois nos paradigmes, nos façons de voir les choses, mais c'est clairement positif, à mon avis.

En ce qui concerne le rôle... le fait que, dans le projet de loi n° 98, on détermine la directrice ou le directeur général, pour nous, ce n'est pas véritablement un enjeu prioritaire, parce qu'évidemment on le vit, et, de notre côté, c'est extrêmement bien défini, le rôle de la directrice générale et le rôle du conseil d'administration. Mais, en ce qui me concerne, pour avoir vécu antérieurement avec un très, très grand ou large conseil général et des conseils exécutifs qui devaient se rencontrer de toute façon de façon régulière, je vous dirais que je pense que le fonctionnement tel que défini présentement amène, comme je l'ai dit rapidement d'entrée de jeu, vraiment un conseil plus agile, plus efficient, plus efficace et plus, comment je dirais... Je sens les gens vraiment intéressés et qui travaillent au bien du Barreau. Moi, c'est comme ça que je le vis. Peut-être que Mme la directrice générale peut...

Mme Tremblay (Lise) : Bien, je le vis beaucoup comme Mme la bâtonnière. Je vous dirais que la plus grande différence, pour avoir vécu les deux systèmes, c'est que, dans un conseil d'administration réduit, il est clair que les administrateurs se sentent plus responsables, plus imputables et plus décisionnels. Quand tu arrives dans un conseil général, qu'on faisait quatre fois par année, par opposition à un conseil d'administration qui se tient à tous les mois, bien, il est évident que, dans le conseil général, je vous dirais, puis j'exagère à peine, peut-être 20 personnes sur 40 n'avaient rien lu. Ils ne se sentaient pas responsables, parce qu'ils sentaient que les décisions étaient prises en amont. Là, c'est clair qu'ils se sentent responsables. Ils doivent prendre les décisions, ils doivent souvent voter, ils ne peuvent pas se cacher derrière le nombre pour le faire.

En tout cas, moi, je trouve ça extraordinaire. Est-ce que c'est plus challengeant pour la bâtonnière? Absolument. C'est quelque chose, parce que le silence n'existe pas, O.K.? Ils sont 16, donc, encore une fois, ils ne se cachent pas derrière le nombre pour ne pas intervenir puis donner leurs points de vue.

Je vous dirais que le fait qu'il y ait des jeunes au conseil d'administration, nos jeunes, qui sont quand même nombreux chez nous, c'est sûr que ça pousse. Les jeunes, par définition... bon, il y a plein de jeunes autour de la table, ça pousse, ça veut que les choses avancent. Je pense que c'est essentiel, dans la société dans laquelle nous vivons, que nous ayons des jeunes au sein de notre conseil d'administration. C'est la relève, ils ont des idées différentes, ils voient ça autrement puis ils sont surtout, généralement, très articulés et pas très gênés d'exprimer leur position. Je pense que c'est à peu près ça pour moi.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la ministre. Woups! Peut-être que Mme Tremblay...

Mme Vallée : Bien, je vais laisser compléter, parce que c'est quand même un enjeu important, la question de la gouvernance, et puis je sais que ça suscite une variété...

Le Président (M. Ouellette) : Me Champagne.

Mme Champagne(Sylvie) : Oui. C'est au niveau de la représentation régionale. C'est sûr qu'au Barreau, on est 15 sections, et, en réduisant le nombre d'administrateurs à 16, il y avait des concessions à faire. Et les membres du conseil général ont travaillé très, très fort pour trouver, être créatifs, et ils ont fait de nombreux ateliers, et le résultat est dans notre règlement sur les élections, où il y a une alternance, puisqu'il y a 13 sections qui ne peuvent plus être à chaque année autour de la table.

Donc, il faut inviter les ordres professionnels à s'asseoir, et à travailler, puis à rédiger des scénarios, à discuter ensemble, parce que je pense que, si l'objectif est de réduire et aussi de donner une place plus importante aux représentants du public, qui sont maintenant 25 %, il faut être vraiment très créatif et penser à l'extérieur de la boîte souvent pour trouver des résultats. Et je pense que le compromis, l'équilibre qu'ils ont trouvé fonctionne très bien.

Le Président (M. Ouellette) : Le jeune Me Sauvé n'a pas d'autres commentaires?

M. Sauvé (Marc) : Je pense que ce qui a été exprimé résume très bien les... enfin, les grands enjeux et ce qui ressort de la nouvelle gouvernance.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la ministre.

Mme Vallée : J'aimerais vous entendre sur toute la question de la suspension, limitation provisoire. Vous faites des suggestions dans votre mémoire, une bonification, une proposition de bonification du projet de loi. J'aimerais qu'on vous entende sur cet enjeu-là, parce que ça également, ça suscite aussi certains commentaires et ça polarise, je vous dirais, les gens. Je comprends que c'est une demande que le Barreau a formulée depuis longue date et j'aimerais vous entendre sur les bonifications qui sont proposées à votre mémoire.

• (15 h 50) •

Mme Prémont (Claudia P.)  : Oui, bon, alors, sur les pistes d'amélioration, la première, je pense, qui est importante, parce que c'était peut-être certaines préoccupations de certains ordres, c'est la question de ce qui sera dit devant le conseil de discipline. Est-ce que, par la suite, on peut, évidemment, s'en servir dans le cadre du procès criminel? Alors, nous, ce qu'on propose, c'est la possibilité d'un interdit de publication et, à l'instar des articles 517 et 539 du Code criminel, ce qu'on vous dit, c'est qu'il serait opportun de prévoir explicitement que le professionnel, lorsqu'il se présente devant le conseil de discipline, peut demander au conseil que la preuve présentée devant lui ne soit ni diffusée ni autrement rendue publique. Alors, évidemment, l'objectif, c'est de protéger tous les droits du professionnel, dont, évidemment, la présomption d'innocence, lorsque le procès aura lieu. Alors, ça, on pense que c'est une mesure qui est de nature à rassurer les gens qui peuvent être préoccupés, entre autres, par une possible brèche au concept de présomption d'innocence.

Maintenant, ce qu'on propose aussi, c'est le délai pour rendre une décision. Ce qu'on indique, c'est que la décision... À l'article 122.0.2, on dit que la «décision doit être rendue au plus tard sept jours suivant la fin de l'instruction», et ce qu'on souligne, c'est qu'un libellé comme celui-là est susceptible, là, d'imposer un délai qui peut être qualifié «de rigueur». Alors, il ne faudrait pas, évidemment, que le fait que la décision ne soit pas rendue à l'intérieur du sept jours fasse perdre, évidemment, la possibilité d'obtenir ce qu'on recherche. Alors, ce qu'on propose, c'est plutôt : «Cette instruction débute au plus tard dans les 10 jours de la signification de la requête, et le conseil de discipline rend sa décision dans les sept jours suivant la fin de l'instruction», pour être certain qu'il n'y a pas de droit à cet égard-là, parce qu'évidemment l'objectif, c'est la protection du public par une mesure d'exception comme celle-là.

Ensuite, au niveau des critères décisionnels, alors ce que l'article dit, 122.0.3, c'est que, «dans sa décision, le conseil de discipline tient compte du lien entre l'infraction alléguée et l'exercice de la profession ou de l'atteinte à l'honneur ou à la dignité de la profession». Alors, nous, ce qu'on propose plutôt pour que ce soit possiblement... en tout cas, que le critère... Ça nous apparaîtrait plus clair si l'extrait d'«ou de l'atteinte à l'honneur ou à la dignité de la profession», du premier alinéa, était remplacé par ce qui suit : «Et de la mesure dans laquelle la confiance du public envers les membres de l'ordre risque d'être compromise si le conseil de discipline ne prononce aucune ordonnance». Alors, je pense que c'est... Je crois que l'objectif, il est là, hein, à partir du moment où la confiance du public dans l'ordre est compromise, je pense que c'est clairement cela. Et c'est plus clair, mieux balisé, à notre avis.

Alors, c'étaient les quelques pistes d'amélioration. Et je pense que l'interdit de publication, en soi, nous semble être extrêmement important, vu, évidemment, la procédure d'exception de l'article... 122.0.1 à 122.0.5.

Mme Vallée : Pour la question de l'admission aux professions et du rôle du commissaire, évidemment ce ne sont pas les pouvoirs du commissaire qui sont modifiés par le projet de loi, mais plutôt son champ d'application, son champ de compétence. Vous utilisez... vous indiquez dans votre mémoire : Les pouvoirs sont trop larges, trop imprécis. En quoi ces pouvoirs qui existent pour un domaine particulier deviennent-ils trop larges et trop imprécis lorsqu'on élargit le spectre, le regard, finalement, du commissaire?

Mme Prémont (Claudia P.)  : Bien, en réalité, sincèrement, nous, on est ouverts à améliorer le système, puis je pense qu'on l'a toujours démontré antérieurement. Ce que je souligne, ce qu'on comprend mal, c'est que, selon nous, il n'y a pas véritablement de problématique en ce qui concerne... Vous dites : On ouvre sur, effectivement, un champ de compétence. On n'en voit pas, des problèmes, à cet égard-là.

Maintenant, s'il y avait effectivement un problème soulevé, encore une fois on se pose la question : Est-ce que ce qui est proposé par le commissaire et ce sur quoi ça aboutirait, c'est-à-dire une recommandation... est-ce que c'est la meilleure façon pour améliorer si effectivement il y en a une, problématique? Et, nous, ce qu'on dit : Non. Et on pense que le pôle de coordination, et de la façon qu'il est formé, a pleinement la capacité, avec tous les intervenants qui sont autour de la table, de trouver une solution si problème il y avait.

Alors, c'est dans ce sens-là, pourquoi créer ce nouveau poste là, si vous voulez, qui est quand même... qui se voit effectivement élargi, alors qu'on a, selon nous, déjà ce que ça prend pour répondre... En tout cas, selon ma compréhension de la problématique possible, comme je vous dis, nous, on n'en voit pas véritablement, mais, si quelqu'un, par exemple, après avoir suivi une formation, se fait finalement dire : Non, nous, on ne reconnaît pas ça, bien, on envoie justement la problématique au pôle. Les gens autour, les divers intervenants, parce que tout le monde y est, s'entendent pour dire est-ce qu'on devrait on non reconnaître. Puis, à ce moment-là, en amont, on vient modifier l'article 184 et on règle peut-être le problème de façon plus rapide, plus efficace avec les intervenants en place.

Mme Vallée : L'objectif, pour le rôle du commissaire, était d'être un peu l'oreille qui reçoit cette information, à l'effet qu'il y a un enjeu qui s'est produit, et qui peut faire un certain nombre de recommandations, qui seront par la suite adressées par les membres du pôle. Donc, on ne crée pas une nouvelle entité, parce que le commissaire existe déjà, on lui permet tout simplement de porter son regard sur un spectre un petit peu plus large pour, justement, avoir cette possibilité d'émettre des recommandations, qui toucheront peut-être... ou qui pourraient amener les membres du pôle à se pencher ensemble, en collégialité, sur la question. Parce que ce sont des enjeux où c'est très difficile de travailler en silo. On est un petit peu condamnés à se parler puis à échanger. Et c'est pour ça aussi qu'on considère important de consacrer le rôle du pôle et d'y ajouter des partenaires.

Vous avez, au sein du Barreau, un comité sur les communautés culturelles. Quelle a été la position du comité quant à cette proposition d'ouvrir le spectre du commissaire?

Le Président (M. Ouellette) : En 30 secondes.

Mme Prémont (Claudia P.)  : Peut-être Me Sauvé... Il n'y en a pas.

Mme Tremblay (Lise) : Le Comité sur les communautés culturelles ne s'est pas prononcé de façon précise parce que seule la présidence a eu le temps de consulter. À son avis, il est clair que, pour les candidats formés à l'étranger, il est important qu'il y ait un mécanisme, puis celui du commissaire va. Elle estime que les problèmes liés à la communauté culturelle ou aux communautés culturelles sont souvent des problèmes liés aux stages, à se trouver un stage, puis que peut-être que cette problématique-là, pour l'ensemble des ordres, doit être revue. Elle en est là.

L'élargissement, là, vous savez, Mme la ministre... Vous avez posé la question de savoir «trop large, trop imprécis», qu'est-ce qu'on voulait dire. Il est clair pour nous autres que les candidats formés ici, au Québec, ils le sont en vertu de lois et de règlements adoptés par l'Office des professions, par le gouvernement. C'est extrêmement balisé, tous les processus sont balisés. Dans la loi, c'est tout à fait imprécis... Non, je recommence. Il me semble à moi, à mon humble avis, que c'est imprécis, les pouvoirs du commissaire pour les candidats formés au Québec.

Je vous donne un exemple. L'étudiant qui échoue son examen à l'École du Barreau, y a-tu le droit d'aller cogner à la porte du commissaire pour dire : Moi, je l'ai échoué parce qu'il faisait trop chaud dans la salle, ils nous ont mis 200 dans la salle? Il y a un problème de processus. S'il a le droit de faire ça, ça me pose personnellement un problème parce que, le commissaire, peu importe la recommandation qu'il pourrait nous faire, qu'est-ce que vous voulez que je vous dise? Il y a 1 400 étudiants qui écrivent les examens. On pense que nos salles sont adaptées. Alors, l'imprécision vient du fait qu'il est impossible... il n'y a pas de critères précis pour lesquels un candidat formé au Québec pourrait s'adresser au commissaire, donc, si c'était dans le cadre que je vous ai donné. C'est un simple exemple. Je pourrais vous en donner des millions, mais on n'a pas le temps.

Le Président (M. Ouellette) : Non, on n'aura pas le temps des millions. Même...

Mme Vallée : Non, je comprends, puis on va s'arrêter là. Mais l'objectif, ce n'est pas de transformer le commissaire en comité d'appel pour un examen. D'autres ordres ont formulé ça. Alors, je vous entends bien.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, Mme la ministre. Mme la députée de Chicoutimi.

• (16 heures) •

Mme Jean : Merci, M. le Président. Alors, bon après-midi à tous. Me Prémont, Me Champagne, Me Tremblay et Me Sauvé, alors merci d'être ici, puis merci pour l'oeil éclairé que vous nous apportez, autant dans vos commentaires que par le mémoire que vous avez déposé. J'apprécie beaucoup ce que j'y ai trouvé.

Je poursuivrai dans la même veine du commissaire à l'admissibilité. Vous avez... en tout cas, moi, j'ai condensé votre idée dans un paragraphe de la page 20 de votre mémoire, où vous en parlez, puis le commentaire de tout à l'heure aussi... Je reformule mon commentaire. Lorsqu'on parle de pouvoir étendu, je suis un petit peu d'accord avec vous, ou pas, en tout cas ça m'a fait interroger, de savoir : lorsqu'on étend l'éventail de l'action d'un commissaire, j'aurais l'impression qu'on étend aussi son pouvoir. Donc, ça va un peu ensemble, ce n'est pas... c'est difficile de séparer les deux. Ça fait que, la question, pour moi, je la trouve intéressante, ou le commentaire, ou bien votre vision me semble intéressante, et j'aurais tendance à réfléchir là-dessus pour effectivement considérer qu'il y a une augmentation du pouvoir entre les mains du commissaire.

Vous parlez aussi, dans le paragraphe en question : «Il nous apparaît évident que l'ajout de pouvoirs au commissaire doit être discuté plus amplement et doit être nettement mieux balisé.» On s'est retrouvés avec des commentaires aussi de d'autres ordres, depuis deux jours, entre justement comment on pourrait faire la distinction entre le fait que quelque chose touche le contenu d'une admissibilité et l'autre touche le processus. Je pense que c'est clair dans l'intention qu'on ne veut pas toucher au contenu par la loi, mais on veut pouvoir toucher au processus pour essayer de trouver et d'enrayer les biais systémiques — j'aime bien l'expression. D'ailleurs, c'est vous qui l'avez dite tout à l'heure, c'est des biais systémiques. Mais en même temps je pense que ça peut créer beaucoup de problèmes, puis c'est ça que vous soulevez aussi, si effectivement le commissaire entre dans le contenu ou que ça permet des plaintes dans le contenu, ou la manière, ou la technicalité des examens ou des procédures d'admission. Donc, moi, j'accueille bien le commentaire à ce niveau-là, qu'il y a des précisions à faire pour éviter ces dérapages-là au niveau de la loi n° 98.

Maintenant, est-ce que vous faites un lien entre le commissaire à l'admissibilité et le pôle de coordination qui est proposé, qui peut être aussi un comité multisectoriel? Selon ce que j'entends de votre part, le comité en question ou le pôle en question peut très bien faire le travail s'il y a un biais systémique qui serait soulevé. Pour pouvoir faire un diagnostic, je pense, convenable, ça prend une vue d'ensemble, et les participants, dans un comité ou dans un pôle comme ça, ont leurs vues à eux et vont échanger, et ça risque peut-être d'être un peu suffisant comme point de vue. Donc, le commissaire pourrait peut-être être la personne qui peut aller plus loin que les discussions autour du pôle en question, de coordination, mais aller chercher des informations avec son pouvoir, par exemple, d'aller poser des questions, pour arriver après ça avec une identification d'un potentiel biais systémique et, à ce moment-là, le déposer au pôle de coordination. Et, à partir de là, est-ce que c'est comme ça que vous voyez le lien entre le commissaire et le pôle en question? Est-ce que c'est quelque chose qui est dans votre visée?

Mme Prémont (Claudia P.)  : Bien, tout d'abord, le commissaire tel qu'il existe présentement, puis d'aller s'assurer qu'il n'y a pas de biais systémique par rapport aux immigrants qui arrivent, qui sont formés à l'extérieur puis qui veulent entrer dans nos ordres professionnels... Nous, on considère que le commissaire devrait être maintenu. Alors donc, le commissaire, tel qu'on le connaît, tel qu'il est défini aujourd'hui, devrait demeurer parce qu'il a sa raison d'être pour ce type de dossier là.

Maintenant, ce qu'on dit, c'est que, sur le reste, s'il y a certaines difficultés, je sais que... Nous avons entendu que, dans certains ordres, il peut y avoir une difficulté lorsqu'on arrive avec la formation, comme je le disais tout à l'heure, au risque de me répéter. Alors donc, on a une formation qui est peut-être moins définie, moins clairement définie, puis, après avoir été formé puis avoir eu des informations à l'effet que ça nous donnait droit de devenir professionnel pour tel ordre professionnel, malheureusement ça ne fonctionne pas. Bien là, à ce moment-là, nous, on pense que, pour trouver une solution... Pour voir s'il y a lieu effectivement de reconnaître cette formation-là ou plutôt de trouver d'autres solutions, on pense que ça passerait... la solution serait trouvée plus facilement et surtout appliquée plus facilement par tous les intervenants si on passait par le pôle de coordination. Alors, nous, c'est comme ça qu'on le voit.

Maintenant, si un individu, un étudiant dépose... Si on se dit : Le commissaire touche aussi à la formation, l'étudiant va déposer... rencontrer le commissaire, dépose sa plainte : Moi je ne suis pas satisfait pour x, y, z raisons, il faut aussi se dire : Est-ce que l'objectif est véritablement atteint? Si c'est un cas particulier... Parce que, là, on parle d'un cas qui peut être bien, bien précis, comme a donné... Lise pourrait donner... Me Tremblay pourrait donner bien des exemples à cet égard-là, avec la connaissance qu'elle a de l'École du Barreau, entre autres. Alors, est-ce que l'objectif est atteint lorsqu'en bout de ligne c'est une recommandation qui serait faite? Est-ce que cette personne-là ne sera pas plus frustrée que satisfaite en bout de ligne, parce que, si de toute façon l'ordre n'est pas en accord et n'applique pas la recommandation, bien, on recommence à la case n° 1 pour cette personne-là? Alors, c'est véritablement comme ça, à moins qu'on comprenne mal la problématique. Parce qu'encore une fois il y a des questions qui ont été posées. On a essayé de comprendre qu'est-ce que ça visait comme problématique, la nécessité, effectivement, de soumettre les étudiants formés ici au processus de commissaire à l'admission, et on ne voit pas véritablement à quoi ça répond.

Mme Jean : De mon côté, la compréhension que j'en avais faite de... pour étendre justement le pouvoir du commissaire aux étudiants québécois m'est venue du fait que, de plus en plus, puis vous m'expliquerez... vous me direz ce que vous en pensez, de plus en plus il y a des profils atypiques même auprès des étudiants québécois, donc qui vont prendre... qui ne vont pas prendre le chemin officiel pour avoir une profession, mais qui vont aller suivre quelques sessions à l'étranger, qui reviennent, et que... un peu la même chose qu'un étudiant étranger qui arrive avec la formation extérieure. Est-ce qu'à ce niveau-là l'application ou l'étendue du pouvoir du commissaire serait pertinente selon vous?

Mme Prémont (Claudia P.)  : Je pense que maître...

Mme Tremblay (Lise) : On dit oui. On dit oui.

Mme Prémont (Claudia P.)  : Oui. Absolument.

Mme Tremblay (Lise) : On dit que, si on doit élargir un peu le commissaire à l'admission outre les étudiants formés à l'étranger, les étudiants qui ont un parcours atypique, oui, assurément. C'est une nouvelle façon de faire, ça n'existait pas. Il y a 10, 15 ou 20 ans, tout le monde suivait des parcours identiques. On en a quelques-uns chez nous, puis ce n'est pas facile de déterminer effectivement s'ils sont admissibles ou non à l'école. Ils passent par le processus des équivalences comme s'ils étaient des étudiants qui ont été formés à l'étranger, alors qu'en réalité ils ont été formés en partie au Québec, ou en partie ailleurs, ou en totalité au Québec mais en suivant un parcours qui n'est pas le bac en droit chez nous, par exemple. Oui, on se disait que ça pourrait être une façon de... ça pourrait être intéressant, parce que le commissaire possède déjà une certaine expertise avec des parcours atypiques, par définition.

Mme Jean : Merci. Il nous reste 44 secondes en tout, un peu moins d'une minute. Rapidement, concernant la suspension de permis, est-ce que... comment rassurer quelqu'un qui a perdu son permis pour une accusation qu'il a reçue, mais qui s'avère être innocent? Est-ce que sa réputation peut être entachée?

Mme Prémont (Claudia P.)  : La suspension, vous parlez de la suspension provisoire?

Mme Jean : Oui, suspension provisoire pour crime important, là.

Mme Prémont (Claudia P.)  : Oui, c'est certain. Là, c'est certain que c'est l'objectif. De toute façon, à partir du moment... Parce que c'est très, très exceptionnel, comme on le disait tout à l'heure. C'est quand même des accusations importantes de cinq ans ou plus d'emprisonnement. Et je pense que c'est l'objectif. Quel est l'objectif qu'on vise? Bien, c'est vraiment de protéger le public pendant une période de temps où il y a une enquête qui doit se faire, et ça, ça nous apparaît être extrêmement important. Je ne vous dirai pas qu'il n'y a pas d'impact relié à ça, mais on pense que c'est... pour l'avoir vécu dans notre ordre, on pense que c'est quelque chose, effectivement, d'important pour vraiment maintenir la confiance du public dans les ordres professionnels.

Mme Jean : Merci beaucoup.

Le Président (M. Ouellette) : M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : Oui. Me Prémont, Me Champagne, Me Tremblay, Me Sauvé, bonjour, bienvenue à l'Assemblée nationale.

D'entrée de jeu, moi aussi, je vais aborder la question du commissaire aux plaintes. Dans votre mémoire, vous nous indiquez, à la page 21, que vous avez une préoccupation relativement aux ressources qui pourraient être requises par le commissaire aux plaintes, donc au niveau des ressources, mais aussi au niveau de la compétence, si je peux dire, aussi, puis des pouvoirs qui lui seraient délégués aussi, parce que, dans le projet de loi, on prévoit également, là, qu'il pourrait s'adjoindre... dans le fond, il pourrait donner, déléguer son pouvoir à toute personne pour faire l'enquête. Puis moi, je me questionnais sur le fait qu'il pourrait peut-être aller à l'externe. Est-ce que vous voyez une problématique à ce niveau-là, qu'on confie à quelqu'un un pouvoir d'enquête comme ça puis, dans le fond, qu'il pourrait le déléguer?

• (16 h 10) •

Mme Prémont (Claudia P.)  : Effectivement, ce à quoi on réfère, puis je l'ai dit un petit peu d'entrée de jeu, c'est qu'on pense que c'est mettre en place un système ou un organisme qui va nécessiter, évidemment, de l'embauche d'employés et qui va nécessiter l'injection de fonds publics, alors qu'à notre avis, pour revenir à l'idée dont je vous ai déjà fait part, le pôle de coordination est déjà là, il peut atteindre les objectifs visés. Cela étant dit, comme je l'ai dit d'entrée de jeu, 46 ordres professionnels avec des processus différents, des formations différentes, peu importe la personne qui remplira le rôle du commissaire à l'admission, je ne crois pas qu'il peut détenir nécessairement l'expertise nécessaire pour décider et recommander dans tous les secteurs. Alors, nécessairement, je présume qu'il y aura l'embauche d'analystes, d'adjoints, d'experts à l'externe, et, oui, on pense que c'est très bureaucratique, technocratique, et c'est très, très lourd, et que ça va coûter cher.

M. Jolin-Barrette : O.K. Mais, en fait, j'aimerais que vous nous partagiez votre expérience par rapport à la réforme de la Loi sur le Barreau, sur la question des gens qui peuvent siéger au conseil d'administration du Barreau versus ceux qui étaient membres... bien, en fait, qui étaient impliqués dans une association professionnelle. Parce que, là, dans le projet de loi, on vise la même chose qui avait été adoptée dans la Loi sur le Barreau, puis ça pourrait poser certaines difficultés pour certains ordres professionnels qui siégeaient. Comment vous avez réussi, au Barreau, là, à gérer cette situation-là pour les gens qui étaient membres... bien, qui étaient dirigeants d'association?

Mme Prémont (Claudia P.)  : Je vais laisser la parole à Me Tremblay ou Me Champagne parce que je n'étais pas nécessairement là au moment où le tout s'est discuté et négocié.

Le Président (M. Ouellette) : Me Champagne.

Mme Champagne (Sylvie) : Oui. En fait, cette question-là a été soulevée assez rapidement dans la discussion des travaux parce qu'effectivement il y a des gens qui sont beaucoup impliqués tant dans leurs ordres que dans les associations professionnelles, et il arrivait quelquefois qu'il y avait des situations de conflit d'intérêts. Parce que la mission première de l'ordre professionnel, c'est la protection du public. C'est sûr qu'il y a un volet vie associative, mais le premier mandat, c'est la protection du public. Donc, chez nous, on a dit : Pour éviter le problème des doubles chapeaux, c'est plus sain puis c'est plus préventif de faire en sorte que l'administrateur qui vient siéger au conseil d'administration du Barreau ne porte qu'un seul chapeau. Sa mission, c'est clair, il doit agir dans l'intérêt supérieur du Barreau, dont la mission est la protection du public. Donc, c'est comme ça que le conseil général est arrivé à mettre cette règle, et ça évite... Parce que, des fois dans le feu de l'action, les membres vont discuter, puis là quelqu'un dit : Oh! c'est vrai, moi, je suis peut-être en conflit d'intérêts, est-ce qu'il faut que je participe à la discussion? Est-ce que je dois sortir? En mettant cette règle-là très clairement au départ, bien, les gens ont un choix à faire : est-ce qu'ils continuent à s'investir dans l'association professionnelle ou ils se retirent pour devenir candidats puis après ça faire l'élection?

M. Jolin-Barrette : O.K., je vous remercie. À l'article 65 du projet de loi, on prévoit qu'on pourrait récupérer les frais d'enquête du syndic. Comment vous percevez cela? Parce que, dans l'éventualité où quelqu'un se ferait approcher par le syndic et avouerait sa faute rapidement, on pourrait limiter, supposons, les coûts, tout ça, il y a une question aussi pour le professionnel fautif qui est repenti, supposons. Est-ce que vous voyez qu'on devrait intégrer des balises?

Mme Prémont (Claudia P.)  : On ne s'est pas positionnés véritablement, ce n'était pas un des enjeux prioritaires pour nous.

M. Jolin-Barrette : Parfait. Sur la question de la suppression de l'autorisation d'enquête donnée par la ministre de la Justice pour une enquête que l'Office des professions voudrait mener, où loge le Barreau à ce niveau-là?

Mme Prémont (Claudia P.)  : À cet égard-là, à notre avis, il s'agit vraiment d'une décision politique, et je pense que ça appartient aux parlementaires et au gouvernement de décider de quelle façon ils vont fonctionner. Nous, en tant qu'ordre, évidemment à partir du moment où il y a une enquête qui nous vise, bien, bien évidemment on sera transparents, on va collaborer comme on l'a toujours fait. Alors, pour nous, c'est vraiment une question qui revient au gouvernement et aux parlementaires, de décider de quelle façon ils entendent procéder.

Le Président (M. Ouellette) : Dernier commentaire, M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : Oui. Je fais le lien avec le projet de loi n° 107, par rapport au syndic. Dans le fond, le DPCP pourrait, dans le fond, stopper les enquêtes d'un syndic et dire : Bien, on va vous accorder une immunité. Comment est-ce que le Barreau perçoit cette situation, pour la protection?

Mme Prémont (Claudia P.)  : Pour nous, au niveau du projet de loi n° 98, on n'a pas nécessairement à se positionner à cet égard-là. Éventuellement, parce qu'on n'est pas nécessairement au même moment, lorsqu'on parle de la suspension qui est visée, et pour laquelle, évidemment, nous sommes parfaitement d'accord, comme j'ai dit tout à l'heure, dans le projet de loi n° 98, c'est avant le dépôt de la plainte. Donc, évidemment, on parle de ce qui va se passer par la suite.

Sincèrement, il y a des questions, un questionnement à faire. Je pense que notre réflexion n'est pas terminée. Mais une chose est certaine : nous sommes d'avis que le projet de loi n° 98 et particulièrement la suspension ou la limitation provisoire peuvent être mis en place, et le débat peut se faire au niveau du projet de loi n° 107 pour l'immunité qui pourrait être accordée par le DPCP au moment du dépôt de la plainte.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, Me Prémont.

Mme Prémont (Claudia P.)  : Merci.

Le Président (M. Ouellette) : Me Claudia P. Prémont, Me Sylvie Champagne, Me Lise Tremblay et Me Marc Sauvé, représentant le Barreau du Québec, merci pour votre contribution aux travaux de la commission.

La commission ajourne ses travaux à demain, le jeudi 25 août, à 10 h 15, où elle poursuivra son mandat. Merci.

(Fin de la séance à 16 h 16)

Document(s) associé(s) à la séance