Journal des débats de la Commission des institutions
Version préliminaire
42e législature, 1re session
(début : 27 novembre 2018)
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Le
mardi 19 novembre 2019
-
Vol. 45 N° 60
Étude détaillée du projet de loi n° 32, Loi visant principalement à favoriser l’efficacité de la justice pénale et à établir les modalités d’intervention de la Cour du Québec dans un pourvoi en appel
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9 h 30 (version non révisée)
(Dix heures)
Le Président (M.
Bachand) :À l'ordre, s'il vous plaît! Merci
beaucoup. Très content de vous retrouver en ce beau mardi matin.
Alors, ayant constaté le quorum, je déclare
la séance de la Commission des institutions ouverte. Je demande bien sûr à
toutes les personnes présentes dans la salle de bien vouloir éteindre la
sonnerie de leur appareil électronique.
La commission est réunie afin de procéder
à l'étude détaillée du projet de loi n° 32, Loi visant principalement à...
10 h (version non révisée)
Le Président (M.
Bachand) : ...très content de vous retrouver en ce beau mardi
matin. Alors, ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission
des institutions ouverte. Je demande bien sûr à toutes les personnes présentes
dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils
électroniques.
La commission est réunie afin de procéder
à l'étude détaillée du projet de loi n° 32, Loi
visant principalement à favoriser l'efficacité de la justice pénale et à
établir les modalités d'intervention de la Cour du Québec dans un pourvoi en
appel. Avant de débuter, Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements? Oui?
La Secrétaire
: Oui.
Mme Anglade (Saint-Henri—Sainte-Anne) est remplacée par Mme David (Marguerite-Bourgeoys);
Mme Robitaille (Bourassa-Sauvé) est remplacée par M. Fortin (Pontiac); Mme Weil
(Notre-Dame-de-Grâce) par M. Kelley (Jacques-Cartier); M. Fontecilla (Laurier-Dorion)
par M. Nadeau-Dubois (Gouin); M. LeBel (Rimouski) par Mme Hivon (Joliette).
Le Président (M.
Bachand) : Et également j'aurais besoin de votre consentement
pour un remplacement ce soir, donc seulement de 19 h 30 à
21 h 30, donc le député de Beauce-Nord remplacerait le député de
Vachon pour la séance de soirée. Est-ce qu'il y a consentement?
Une voix
:
Consentement.
Le Président (M.
Bachand) : Merci, M. le député. Merci beaucoup. Avec beaucoup
d'enthousiasme. Avant de débuter les remarques préliminaires, je dépose les
documents reçus depuis la fin des consultations particulières et que vous avez
reçus par courriel, donc le mémoire de la Commission des droits de la personne
et des droits de la jeunesse, ainsi que le mémoire de la Chambre des huissiers
de justice du Québec.
Nous allons donc débuter les remarques
préliminaires avec, d'abord, Mme la ministre. Vous disposez de...
20 minutes, pardon. Mme la ministre.
Mme LeBel : Merci, M. le
Président. Merci à tout le monde, merci à mes collègues. On débute,là, l'étude
détaillée du projet de loi n° 32, un projet de loi
qui vise principalement à favoriser l'efficacité de la justice pénale et à
établir les modalités d'intervention de la Cour du Québec dans un pourvoi
d'appel, mais principalement favoriser l'efficacité de la justice pénale, et
surtout de permettre des mesures d'adaptabilité, d'ouverture pour des programmes
d'adaptabilité, au niveau de la cour municipale, particulièrement, en justice
pénale.
Donc, je suis extrêmement heureuse, ce
matin, de débuter ça, et je suis contente de constater la forte présence de mes
collègues de l'opposition officielle et leur intérêt pour ce dossier qui, peut-être,
pour les gens moins initiés, peut avoir l'air anodin, mais qui va faire une
différence en matière d'accessibilité à la justice, une différence certaine.
Alors, je rappelle que ce projet de loi, M.
le Président, a été présenté, pour les fins de l'histoire récente, à l'Assemblée
nationale, le 13 juin 2019, et que son principe a été adopté le 6 novembre
2019. Par ailleurs, avec mes collègues de la banquette ministérielle et de l'opposition,
nous avons, les 29 et 30 octobre derniers, tenu des consultations particulières
avec plusieurs groupes directement concernés par les modifications qui sont
proposées. Au premier chef, d'ailleurs, on a entendu l'association des avocats,
dont le Barreau, et des intervenants agissant auprès de la clientèle... les
plus vulnérables. On a entendu, je pense, un bel échantillonnage, en consultations
particulières, des gens qui sont soit touchés par le projet ou par les modifications,
soit qui sont amenés à les utiliser, à les appliquer ou à travailler avec ces
différents outils que le p.l. n° 32 va mettre de
l'avant. Et je pense qu'on a eu un tour d'horizon qui va nous permettre, lors
de l'étude détaillée, de pouvoir avancer rondement et même apporter les améliorations
nécessaires pour s'assurer, tous autant que chacun, parce que c'est notre responsabilité,
à tous, autour de la table, en tant qu'élus de l'Assemblée nationale, à
s'assurer que les projets de loi qui sont finalement adoptés par cette
Assemblée sont les meilleurs possible pour les objectifs qu'ils visent. Donc,
on est heureux d'avoir pu compter sur leur apport pour bonifier notre projet de
loi afin qu'il réponde effectivement le mieux possible aux réalités du terrain,
mais toujours eu égard à l'objectif qui est poursuivi par ce projet de loi là,
qui est l'efficacité de la justice pénale.
Je remercie donc également tous ceux qui
se sont présentés, puis plusieurs ont témoigné, on les a entendus, mais aussi plusieurs
ont témoigné par le biais de dépôt de mémoires, qu'on a examinés, lus et
analysés avec beaucoup d'attention. Je veux aussi remercier, je le fais à
nouveau, mes collègues de l'opposition et leurs équipes respectives, les gens
qui les accompagnent. Il ne faut jamais oublier les gens qui travaillent avec
nous qui ont permis... et leur ont permis d'avoir des interventions qui
étaient, ma foi, fort ciblées et pertinentes.
Donc, au cours de l'étude détaillée, bon,
j'aurai l'occasion, d'entrée de jeu, je l'annonce, de présenter plusieurs amendements,
notamment des amendements qui répondent aux commentaires et préoccupations qui
ont été formulés lors de ces échanges, des préoccupations qui ont mis en
lumière effectivement peut-être certains angles morts qu'on n'avait pas
l'occasion de voir au départ. On a l'objectif, des fois, qui est tout à fait
louable, mais, quand on consulte les gens du terrain, on est capable de mettre
en lumière des fois les... je dirais les détails d'application pratique. La
théorie et la pratique, je suis bien placée pour le savoir, ce sont deux choses
souvent fort différentes, donc c'est très important d'avoir leur apport. Donc,
on a pris compte de ces commentaires-là, M. le Président, et on déposera effectivement
différents amendements au fil de l'étude...
17847 Mme LeBel : ...de mettre en
lumière des fois les... je dirais les détails d'application pratique. La
théorie et la pratique, je suis bien placée pour le savoir, ce sont deux choses
souvent fort différentes, donc c'était très important d'avoir leur apport.
Donc, on a pris compte de ces commentaires-là, M. le Président, où on déposera
effectivement différents amendements au fil de l'étude détaillée pour répondre
à ces commentaires.
Je pense que ce qui ressort des
consultations, des commentaires de mes collègues de l'opposition lors des
adoptions de principe, c'est qu'essentiellement, le projet de loi n° 32
est un projet qui fait l'unanimité, un certain consensus dans son principe,
dans son objectif et que c'est essentiellement un bon projet de loi. Mais,
effectivement, je le réitère à nouveau, il y a eu des commentaires, on va en
discuter ensemble et il y aura des bonifications qui pourront être apportées.
À titre d'exemple, on nous a parlé du fait
que le programme d'adaptabilité pourrait peut-être être plus flexible, plus
équitable et rejoindre une clientèle plus large. On va tenter d'en tenir compte
dans l'ouverture qu'on en fera, toujours en réitérant que le projet de loi
n° 32 ne crée pas les programmes, fournit l'ouverture nécessaire, hein,
pour ce faire, mais on va tenir compte des commentaires dans nos réflexions et
nos discussions.
Donc, on va proposer, en ce sens, une plus
grande autonomie pour les municipalités dans la création de ces programmes, la
reconnaissance des démarches du défendeur, entre autres, avant son entrée au
programme, et mettre un terme à l'emprisonnement pour non-paiement d'amendes.
Donc, ce sont des commentaires qui sont revenus et qui étaient partagés par
plusieurs intervenants.
On va d'ailleurs faire profiter de nos
travaux pour effectuer certains travaux de concordance nécessaires suite à
l'adoption du projet fédéral, le C-75, qui a supprimé l'exigence des règles de
cour en matière criminelle par le gouvernement provincial, donc on devra faire
les ajustements. Il me reste combien de temps, M. le Président?
Le Président (M.
Bachand) : 14 minutes, vous avez du temps amplement.
Mme LeBel : Ah! parfait, mon
Dieu! j'ai en masse de temps pour continuer ce qu'il me reste à faire pour mes
remarques préliminaires.
Mon intention donc, en déposant le projet
de loi n° 32, M. le Président, est de mettre de l'avant des solutions
innovantes. Le tout pour permettre de réduire les délais judiciaires et
d'offrir une alternative aux tribunaux pour certaines clientèles plus vulnérables.
Je l'ai dit au départ de mon allocution, il y a plusieurs petites mesures,
plusieurs mesures, plusieurs outils qui sont fournis également à nos
intervenants du système de justice, mais ce que je veux mettre en lumière,
l'objet principal, c'est vraiment l'offre d'alternatives aux tribunaux pour
certaines clientèles plus vulnérables grâce à des mesures d'adaptabilité. Pour
moi, c'est un pas en avant dans notre volonté, au ministère de la Justice,
d'apporter des solutions innovantes.
La transformation de la justice, M. le
Président, ce n'est pas qu'une affaire de virage technologique, c'est une
affaire de virage de mentalité, d'ouverture vers, entre autres, des pratiques
innovantes. Et, le projet de loi n° 32, les mesures d'adaptabilité
s'inscrivent dans cet objectif et dans cette vision globale de la
transformation de la justice.
Donc, on ajoute... on ajuste notre système
à ceux qui en ont le plus besoin pour répondre aux besoins du citoyen. Le
citoyen au coeur du système de justice, c'est une autre priorité. Dans ce
cas-ci, les personnes, entre autres en situation d'itinérance, qui vivent avec
des problèmes de santé mentale ou de toxicomanie. Notre objectif, M. le
Président, est de réduire le phénomène de porte tournante qu'on voie trop
souvent, comme quand on pratiquait, ou qu'on pratiquait comme moi, ou qu'on
pratique encore dans les palais de justice, le système de porte tournante où le
système judiciaire n'est pas adapté pour répondre aux besoins de ces
citoyens-là, est outillé avec des mesures plutôt punitives, coercitives. Il y a
des mesures de réhabilitation, mais l'accent est mis sur la réhabilitation, la
réinsertion et l'aide aux citoyens dans ces mesures d'adaptabilité.
Le projet vise également à bonifier le
régime d'aide juridique pour permettre aux avocats de prendre en charge leurs
clients dans le début des procédures judiciaires, afin de leur offrir les
meilleurs conseils possible, toujours dans un contexte de déjudiciarisation du
parcours. C'est ce qu'on appelle ouvrir le panier de services. Donc, on ajoute
au panier de services l'aide juridique pour l'accompagnement dans ces mesures
de rechange là, qui n'étaient pas nécessairement prévues au moment où on se
parle.
En matière d'aide juridique, on a été
sensibilisés par les différents groupes sur le besoin d'utiliser un langage
clair dans l'interprétation, de faciliter aussi l'accès non seulement par les
seuils, mais par le processus administratif. Et on va mettre des mesures dans
le projet de loi dans ce sens-là et j'espère qu'elles seront appuyées par mes
collègues de l'opposition.
De façon générale, les mesures qui sont
proposées par ce projet de loi serviront notamment à la mise en oeuvre de notre
plan pour transformer et moderniser la justice afin d'en améliorer
l'efficacité. On ne peut pas trop le répéter, donc je pense que c'est important
de le dire, c'est la vision globale. On veut faciliter le travail des
intervenants judiciaires, améliorer la rapidité des procédures, toujours avec
le même objectif, s'assurer que la justice soit rendue dans les meilleurs
délais possibles et de la meilleure manière possible. Ce qu'on doit favoriser
en matière de justice, c'est que les causes voient leur aboutissement naturel
et ne soient pas interrompues pour des questions de délais, et que la
conclusion ne soit pas rendue, peu importe cette conclusion.
• (10 h 10) •
On a entendu plusieurs commentaires sur la
justice en région. Le projet de loi modifie donc la Loi sur les tribunaux
judiciaires afin de passer de 306 à 308 le nombre de postes de juges qui compose
la Cour du Québec, afin de mieux répondre à...
Mme LeBel : ...ne soit pas
interrompu pour des questions de délai et que la conclusion ne soit pas rendue,
peu importe cette conclusion.
On a entendu plusieurs commentaires sur la
justice en région. Le projet de loi modifie donc la Loi sur les tribunaux
judiciaires afin de passer de 306 à 308 le nombre de postes de juges qui
composent la Cour du Québec afin de mieux répondre à la demande de certains
districts judiciaires. Donc, ce sera l'occasion de réaliser une des recommandations
du juge Pigeon de changer le district de résidence de certains juges de la Cour
supérieure dans certaines régions également, qui était une demande et un besoin
sur le terrain.
Comme vous pouvez le constater, M. le Président,
ce projet de loi vise donc à améliorer le fonctionnement de notre système de
justice de nombreuses manières. C'est une des façons de le faire, une des
pièces de ce grand échiquier. J'espère donc qu'on va pouvoir compter sur la
collaboration de mes collègues des autres formations afin d'en procéder à
l'étude le plus rapidement possible, naturellement avec diligence, je n'en
doute pas de la part de mes collègues. Mais plus rapidement on pourra mettre
ces mesures en place, plus rapidement on pourra adresser les problèmes au sein
de notre système de justice, M. le Président. Merci.
Le Président (M.
Bachand) : Merci infiniment. Je cède maintenant la parole au
porte-parole de l'opposition officielle, M. le député de LaFontaine, s'il vous
plaît.
M. Tanguay
: M. le
Président, vous me cédez la parole, mais je ne vais pas commencer mes remarques
préliminaires, que ce soit clair. Mon bloc remarques préliminaires, si
d'aventure j'ai l'occasion de le faire ce matin, je le ferai dans un deuxième
temps. Donc, vous me cédez la parole pour que je puisse faire dans un premier
temps, conformément à l'article 165 de notre règlement, je fais motion
pour ajourner nos travaux.
Le Président (M.
Bachand) : Je vais suspendre quelques instants, s'il vous
plaît. Merci.
(Suspension de la séance à 10 h 11)
(Reprise à 10 h 17)
Le Président (M.
Bachand) : À l'ordre, s'il vous plaît. La commission reprend
ses travaux. Nous sommes maintenant sur la motion qui a été présentée par le
député de LaFontaine. M. le député de LaFontaine, vous avez 10 minutes
pour le groupe parlementaire.
M. Tanguay
: Merci beaucoup,
M. le Président. Alors, nous avons devant nous une motion d'ajournement qui est
importante pour nous, pour le groupe parlementaire que nous représentons, soit
l'opposition officielle à l'Assemblée nationale. Mais, d'abord, vous me
permettrez de saluer Mme la ministre, vous saluer, M. le Président, de saluer
mes collègues qui représentent l'opposition officielle, la collègue de
Marguerite-Bourgeoys, collègue de Pontiac et collègue de Jacques-Cartier, de
même que le collègue député indépendant de Chomedey qui est avec nous ce matin.
Et vous me permettrez aussi de saluer mes collègues de la banquette
ministérielle. Et en tout respect pour mes collègues tout autour de la table,
puis particulièrement pour mes collègues de la banquette ministérielle, je vais
expliquer pourquoi la motion d'ajournement. Et j'ai eu l'occasion d'en glisser
mot brièvement à Mme la ministre par respect pour elle pour lui dire ce qui
s'en venait.
Alors, M. le Président, dans le contexte
de la motion d'ajournement, on ne me fera pas un 211 sur la non-pertinence si
je vous dis le contexte qui fait en sorte que cette motion est pleinement
justifiée. Lors de la dernière élection générale, les Québécoises, Québécois
ont envoyé à l'Assemblée nationale les 125 députés ont été élus. Et de cela
découlent quatre groupes parlementaires, le groupe formant le gouvernement, le
groupe formant l'opposition officielle, la deuxième opposition et la troisième
opposition. Plus que, je vous dirais, dans l'histoire récente et moderne de
l'Assemblée nationale sur la 42e législature, ce qui doit être la clé de voûte,
c'est la collaboration, la coopération, de se parler pour qu'on se comprenne
puis de faire en sorte qu'on puisse notamment organiser ensemble nos travaux
pour qu'on puisse être efficace là-dedans.
Il est clair, M. le Président, qu'au terme
de notre règlement de l'Assemblée nationale, celui qui aura toujours le dernier
mot, c'est le leader du gouvernement, c'est lui qui peut dire : Écoutez,
ma patience est à bout. Je juge que les échanges se terminent là, voici comment
on va se gouverner. Et ça, ça a toujours été, M. le Président, la lettre du
règlement de l'Assemblée nationale. Sous la 42e législature, ce qui doit être
également mis en application, c'est non seulement la lettre du règlement, mais
l'esprit du règlement de l'Assemblée nationale. Et là-dessus, M. le Président,
il y a même une disposition qui fait écho des us et coutumes dans notre
Parlement qui fait en sorte que l'on doit considérer les us et coutumes lorsque
l'on fonctionne.
• (10 h 20) •
Alors, lorsque le leader du gouvernement,
par exemple, dans un projet de loi, là, c'est le projet de loi n° 32,
lorsque le leader du gouvernement nous dit : Bien, écoutez, envoyez-nous,
par exemple, notre liste de groupes, on envoie une liste de groupes qui,
tantôt, peut avoir 10, 15, 20, 30 groupes, il doit y avoir une nécessaire
négociation. Lorsque le gouvernement nous dit : Bien, écoutez, moi, ce
sera ces huit groupes-là, puis il faut toujours couper la liste, M. le
Président, en deux, en trois puis en quatre, et qu'après certains échanges,
finalement, on passe de huit à 10, alors qu'au début on était 30, bien, force
est de constater que ce que dit le leader du gouvernement, c'est comme ça qu'on
va marcher. Puis, si on se rebiffe et si les trois oppositions font front
commun, on a ce qu'on a vécu jeudi dernier, on a une motion, et j'y vais de
mémoire, en vertu de l'article 146, qui fait en sorte que le leader du
gouvernement — ce n'est pas 146 — fait en sorte que le leader
du gouvernement — oui, c'est 146... en commission — que le
leader du gouvernement peut statuer et dire…
M. Tanguay
: ...et
si les trois oppositions font front commun, on a ce qu'on a vécu jeudi dernier,
on a une motion et j'y vais de mémoire en vertu de l'article 146, qui fait
en sorte que le leader du gouvernement — ce n'est pas 146 — qui
fait en sorte que le leader du gouvernement — oui, c'est 146 — envoie
en commission, que le leader du gouvernement peut statuer et dire : Bien,
c'est ces groupes-là que nous allons entendre. Exemple, dans le contexte, et
j'utilise l'analogie pour expliquer pourquoi ma motion d'ajournement, c'est ça
la pertinence sous 211, l'analogie, c'est ce qui s'est passé en matière de
renseignements personnels, on passé tout le reste... la plus grande moitié de
notre journée de jeudi pour débattre d'une motion qui nous imposait la
consultation non pas de neuf, mais de six groupes, M. le Président, est-ce qui
a trait aux renseignements personnels, pour entendre Desjardins, la fuite. Et
ça, c'est une motion sous 146 qui nous a imposé, et jeudi, pas neuf groupes,
mais six groupes seront entendus, puis je termine bientôt l'analogie et la
parenthèse, parce que le gouvernement a décidé d'utiliser une motion pour
l'imposer, ce qui ne s'était pas faite depuis 16 ans, M. le Président,
excusez du peu, ce qui ne s'était pas fait depuis 16 ans, plaidée et
votée. Et ça avait été M. le Président, depuis la dernière année, depuis le
1er octobre dernier, c'était la quatrième fois que le leader du
gouvernement nous déposait une telle motion. Jeudi, il s'est rendu jusqu'au
bout de son idée, brisant ainsi depuis 16 ans la... pas la lettre,
l'esprit du règlement, parce qu'en vertu de la lettre du règlement, il a
parfaitement le droit. Puis on ne peut pas fonctionner comme ça.
Donc, il a été décrété, malgré les
représentations que nous avons faites, moi, cet avant-midi, je devrai, M. le
Président, m'absenter entre 10 heures et midi, ça a été clairement dit au
leader du gouvernement, notre porte-parole officiel, parce que j'ai de
valeureux collègues qui sont avec moi, la collègue de Marguerite-Bourgeoys,
Pontiac et de Jacques-Cartier, et le député indépendant qui est là, lui aussi,
on est les seuls cinq à matin représentant les oppositions, M. le Président, il
a été décrété que nonobstant le fait que moi comme porte-parole, j'étais absent
ce matin, que nous allions siéger. Je serai, M. le Président, totalement
présent cet après-midi. Nous sommes prévus pour de 15 h 15 à
18 heures et, ce soir, de 19 h 30 à 21 h 30, et le reste
de la semaine aussi.
Autrement dit, pourquoi la motion
d'ajournement? Pourquoi il fait ça, le député de LaFontaine? C'est parce que ça
ne se fait pas, M. le Président. Ça ne se fait pas, décréter, comme leader du
gouvernement : Bien, je ne prends pas en compte le fait que votre
porte-parole est absent ce matin. Et moi, je fais en sorte que vous allez
siéger, qu'il soit là, qu'il ne soit pas là. Ça, ça ne se fait pas. Et c'est à
regret, M. le Président, parce que je respecte mes collègues. Puis moi, là, je
suis ici pour travailler. Puis vous allez voir cet après-midi, là, nos
amendements, là, sont déjà prêts article par article. On a travaillé très fort
avec Sophie Chateauvert à la recherche. Et je la salue pour le travail qu'elle
a fait. Moi, ça me passionne.
Et la ministre pourrait témoigner, M. le
Président, qu'on a déjà adopté, elle et moi, deux projets de loi. On a déjà
contribué à adopter, parce qu'on n'aurait pas pu le faire seuls, avec les
autres collègues le projet de loi n° 6 qui faisait en sorte d'orchestrer
une mise à jour du registre du Commissaire au lobbyisme. Ça a très bien été. Le
Commissaire au lobbyisme était là. Il répondait à nos questions. On a déposé
des amendements. La ministre de la Justice avait une... avait l'esprit ouvert
et a fait écho à plusieurs de nos amendements. Et je la salue pour ça. Ça a été
rondement, M. le Président.
On a adopté un projet de loi un peu plus
technique en deux séances sur le projet de loi n° 20, M. le Président. Et
vous avez présidé nos travaux. Vous avez vu que c'était des questions
éminemment techniques. Une chance qu'on avait le secours, moi et Mme la
ministre, de deux représentantes du ministère de la Justice et également des
régimes de retraite gouvernementaux pour répondre à nos questions éminemment
techniques. On a fait un beau travail sans amendement, mais avec une
compréhension de ce qu'on votait, projet de loi n° 20 qui faisait en sorte
de mettre à jour les régimes de retraite pour une certaine catégorie de juges
de la Cour du Québec.
Donc, des exemples qui plaident le passé
est garant de l'avenir. On est capables de travailler. Moi, cet après-midi,
là... Ce matin, je devrai m'absenter. Bien, je devrai m'absenter, mais force
est de constater, et j'en suis désolé pour la ministre puis pour mes collègues,
ce matin, là, ce matin, on n'aura pas l'occasion, on n'aura pas l'occasion
d'aborder la lecture, M. le Président, de l'article 1. Et ça, c'est
malheureux. On peut comme Assemblée nationale respecter tous les collègues qui,
ici, auraient plein d'autres choses à faire, M. le Président. Chose certaine,
on ne perdra pas notre temps parce que mes collègues feront des remarques
préliminaires. Mes collègues de Marguerite-Bourgeoys, Pontiac et
Jacques-Cartier sont ici pour faire des remarques préliminaires, et ils vont
nous parler de façon tout à fait pertinente, et intéressante, et valeureuse
pour le débat que nous allons faire en quoi le projet de loi n° 32, entre
autres notamment quant au programme d'adaptabilité, celles et ceux les plus
vulnérables de notre société, en quoi, eux, ça se répercute, notamment, ils
vont aborder cette question-là, chez leurs concitoyens et concitoyennes.
Alors, on va les entendre et on va les
écouter. Et pour ce qui est de travailler sur l'article 1, M. le
Président, force est de constater que ça ne sera clairement pas avant
15 heures cet après-midi, ce qui aurait peut-être pu être possible ce
matin, mais ce qui ne sera clairement pas possible parce que, voyez-vous, déjà
là, en partant, il n'y aurait pas eu de motion d'ajournement si d'aventure le
leader de...
M. Tanguay
: …les
entendre, on va les écouter. Mais pour ce qui est de travailler sur l'article
1, M. le Président, force est de constater que ça ne sera clairement pas avant
3 heures cet après-midi… ce qui aurait peut-être pu être possible ce
matin, mais ce qui ne sera clairement pas possible. Parce que voyez-vous, déjà
là, en partant, il n'y aurait pas eu de motion d'ajournement si d'aventure le leader
de l'opposition avait pu faire en sorte de considérer la non-disponibilité du porte-parole,
de moi-même en l'instance.
Alors, moi, M. le Président… il revient à
mes collègues de donner suite à cette motion d'ajournement, en tout respect
pour mes collègues, motion d'ajournement qui ferait en sorte de... oui, de
reporter à cet après-midi la séance qui est prévue jusqu'à midi aujourd'hui, de
faire en sorte de considérer, lorsqu'un porte-parole ne peut pas, pour des
raisons majeures, ce n'est pas un caprice, bien, de faire en sorte qu'ils ont
le loisir, les collègues de la banquette ministérielle, de voter en faveur de
cette motion.
Et si d'aventure, M. le Président, il ne
leur est pas loisible de voter en faveur de cette motion d'ajournement qui
ferait en sorte qu'on continuerait cet après-midi, bien, chose certaine, ce
matin sera une preuve évidente et patente, quand il n'y a pas de collaboration,
quand il n'y a pas de coopération, quand le leader met son pied à terre puis
dit : C'est ça, puis oubliez la non-disponibilité de votre porte-parole
seulement pour les deux heures de l'avant-midi… Bien ça se fait, ça, quand on
est au gouvernement. Puis, je peux vous dire, sans trahir de secret de caucus,
M. le Président… ça se faisait sous les législatures précédentes. Quand le caucus
des députés disait à notre leader : Écoute, tu nous fais siéger à des
moments où ils sont non productifs… ça, ça se dit, puis le leader s'ajuste. Et
la ministre, les ministres également, ça, ça se dit, puis le leader s'ajuste.
Alors, c'est en ce sens-là, M. le
Président, de façon tout à fait respectueuse… les collègues en face ont assez
d'expérience pour voir que l'on fait ce que l'on a à faire. Nous, c'est… notre
motion d'ajournement, c'est notre seule arme, notre seule réponse que l'on peut
offrir. Et voilà pourquoi, en tout respect, on dépose cette motion
d'ajournement ce matin.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup, M. le député de LaFontaine. Je me
tourne vers les banquettes gouvernementales. Intervention, Mme la ministre.
Mme LeBel : Je serai très
brève, M. le Président. Je comprends. Je ne commenterai pas, parce que je ne
suis pas partie à ces discussions… ce que mon collègue vient de dire. Tout ce
que je peux vous dire, M. le Président, c'est que nous sommes prêts, ce matin,
nous sommes prêts à travailler sur projet de loi n° 32, mes collègues sont
prêts à travailler sur le projet de loi n° 32. Et je vais limiter mes
remarques à celles-ci.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. Dans le règlement, ce sont… les groupes
parlementaires ont droit de parole, mais la commission est souveraine, alors si
la commission donne son consentement, je reconnaîtrais le député de Chomedey…
M. Ouellette : Merci, M. le
Président.
Le Président (M.
Bachand) :Est-ce qu'il y a le consentement?
Excusez… Consentement, merci. M. le député de Chomedey, s'il vous plaît.
M. Ouellette : Merci, M. le
Président. J'ai bien entendu les commentaires de mon collègue de LaFontaine,
mais pour les gens qui nous écoutent et puis les gens qui sont ici ce matin,
qui se demandent un peu, bon, qu'est-ce qui se passe, je dois malheureusement
confirmer les… parce que je suis partie, comme député indépendant, je suis
partie à tous les échanges entre les groupes, entre les groupes reconnus à
l'Assemblée nationale, et effectivement, M. le Président, il y a… à plusieurs
occasions, il y a très peu de collaboration de la part du bureau du leader du
gouvernement dans certains projets de loi.
Et je pense que les explications de mon
collègue de LaFontaine sont assez claires. Ce n'est pas des absences futiles et
sans raison. Il est porte-parole et il prend très à cœur son travail, sa
fonction. Il adore toutes les questions de justice. Pour siéger avec le député
de LaFontaine depuis déjà plusieurs années, il est dans son élément. Et je
trouve ça déplorable qu'on en soit obligé à faire une motion d'ajournement et
que, par la suite, bien, que tous et chacun des députés des oppositions
devront, en l'absence du député de LaFontaine, exploiter la période de
remarques préliminaires qui leur est disponible ou octroyée. Parce que
définitivement, ce matin, et même à plus qu'une reprise malgré les
explications, ça fait une semaine que ça… ça fait une semaine qu'il y a des
échanges de part et d'autre, et il y a totalement absence de collaboration de
la part du bureau du leader du gouvernement.
• (10 h 30) •
Ce n'est pas la faute de la ministre, et
je comprends et je suis… et je pense que ça a été très clair et… M. le député
de LaFontaine, que vous informiez la ministre des procédures que vous vouliez
utiliser ce matin. Je pense que ça se fait en toute transparence. On est tous
là pour faire avancer, on est tous là pour travailler le projet de loi. Je veux
dire, j'étais très heureux ce matin, puis j'y reviendrai dans mes remarques
préliminaires, de voir…
10 h 30 (version non révisée)
M. Ouellette : ...que ça
se fait en toute transparence. On est tous là pour faire avancer. On est tous
là pour travailler le projet de loi. Je veux dire que j'étais très heureux ce
matin, puis j'y reviendrai dans mes remarques préliminaires, de voir deux
cahiers d'amendements, le tome I et le tome II. J'ai... honnêtement,
si j'ai... si la motion d'ajournement est disponible, j'ai énormément hâte
d'aller voir parce qu'avec l'ensemble des recommandations qui nous ont été
faites par les groupes que nous avons entendus, par l'ensemble des commentaires
qu'on a entendus, mais je pense que tout le monde est dans des bonnes
dispositions, il faudra peut-être rappeler.
Puis pour avoir été du côté ministériel
pendant plusieurs années, de voir les deux côtés de la Chambre, tu réalises
qu'à certains moments tu peux, comme député ministériel, te poser énormément de
questions, comment ça se fait que puis comment ça se fait que, mais quand tu
est partie aux échanges puis que tu vois de quelle façon est-ce que ça... de
quelle façon est-ce que ça s'oriente ou de quelle façon est-ce que ça répond,
ou quel genre de discussion on a pour débuter un projet de loi, et je le donne
à Mme la ministre, là, 161 articles, 63 recommandations des groupes,
c'est un projet de loi qui est important. C'est un projet de loi qui va
nécessiter... puis Mme la ministre a été très ouverte, beaucoup d'explications
parce que la confiance du public présentement est au plus bas dans... face à
certaines institutions. Les gens se posent beaucoup de questions. Il n'y a pas
d'article facile dans le projet de loi, et je pense que ça doit être fait
consciencieusement. Je pense aussi qu'à tous les niveaux et, comme je l'ai
mentionné, être très près de tous les échanges qu'il y a, je le déplore très
sincèrement, ce manque de collaboration. Ce n'est pas la première fois. M. le
député de LaFontaine, vous avez fait état que la motion de jeudi dernier pour
les données personnelles, c'était la quatrième fois. Il y avait été utilisé la
même motion pour la commission de l'exploitation sexuelle des mineurs.
Et il y a plusieurs choses qui changent,
et on se sent... les parlementaires, on se sent pressés, on se sent bousculés,
on se sent... je vous dirai, là, le respect de notre travail, on ne semble pas
avoir au bureau du leader du gouvernement, la même compréhension du respect du
travail des parlementaires à l'intérieur des commissions parlementaires. Vous
l'avez dit tantôt, M. le Président, les commissions sont souveraines, je
voudrais bien... je voudrais bien en être convaincu. À tout moment, ça devrait
être comme ça. Mais il y a tellement d'éléments extérieurs, M. le Président,
qui influencent sur le déroulement du travail législatif qu'on a à faire qui
n'ont pas rapport et qui ne sont pas assis dans la salle avec nous parce que je
pense que tous les parlementaires qui sont assis, qui sont avec nous ce matin,
on est là pour faire le meilleur projet de loi, on est là pour être pour être à
l'écoute de la population parce que le produit fini influence le quotidien des
citoyens du Québec, d'où toute la notion de professionnalisme qu'on avance puis
qu'on met de l'avant dans nos travaux. Mais je pense qu'il faut y mettre du
sien puis je pense qu'il faut que tout le monde nous aide à avoir les
meilleures dispositions possible au niveau de la Commission des institutions
pour être en mesure de faire notre travail de législateur. Et dans le cas
particulier pour débuter l'étude du projet de loi n° 32, les conditions
gagnantes, comme dirait quelqu'un que j'ai déjà entendu, les conditions
gagnantes n'y sont pas, et il y a du sable dans l'engrenage. Et je suis de tout
coeur avec la motion d'ajournement demandée par le député de LaFontaine. Merci,
M. le Président.
Le Président (M.
Bachand) : Merci, M. le député de Chomedey. Ceci met fin à la
période d'échange. Nous allons maintenant mettre la motion à la mise aux voix.
Est-ce que la motion du député...
Une voix
: ...
Le Président (M.
Bachand) : Vote par appel nominal.
Mme LeBel : Est-ce que...
Je ne sais pas, ce n'est pas de mon ressort nécessairement, M. le Président, je
m'en excuse. Vous allez...
M. Ouellette : ...la motion
d'ajournement demandée par le député de LaFontaine. Merci, M. le Président.
Le Président (M.
Bachand) :Merci, M. le député de Chomedey.
Ceci met fin à la période d'échange. Nous allons maintenant mettre la motion à
la mise aux voix. Est-ce que la motion du député...
Une voix
: ...
Le Président (M.
Bachand) : Vote par appel nominal.
Mme LeBel : Est-ce que... Je
ne sais pas, ce n'est pas de mon ressort nécessairement, M. le Président, je
m'en excuse, vous allez me corriger si c'est le cas. Est-ce qu'on peut vous
demander une légère suspension? On aimerait pouvoir se parler, est-ce que c'est
possible? Est-ce que moi, je peux le demander?
Le Président (M.
Bachand) : Est-ce qu'il y a consentement? On va prendre
quelques instants. Merci.
(Suspension de la séance à 10 h 35)
(Reprise à 10 h 46)
Le Président (M.
Bachand) :À l'ordre, s'il vous plaît! La
commission reprend ses travaux. Nous étions sur la motion d'ajournement du
député de LaFontaine. J'étais prêt à mettre la motion... la mettre aux voix. Ça
va là-dessus? Alors, est-ce que le... Puis, M. le député de LaFontaine, vous
aviez demandé un appel nominal.
M. Tanguay
: Vote
nominal, s'il vous plaît.
Le Président (M. Bachand) :
Alors, ceux qui sont pour la motion, s'il vous plaît.
La Secrétaire
: Pour,
contre, abstention. M. Tanguay (LaFontaine)?
M. Tanguay
: Pour.
La Secrétaire
: Mme David
(Marguerite-Bourgeoys)?
Mme David : Pour.
La Secrétaire
:M. Fortin (Pontiac)?
M. Fortin :
Pour.
La Secrétaire
: M. Kelley
(Jacques-Cartier)?
M. Kelley
: Pour.
La Secrétaire
: Mme LeBel
(Champlain)?
Mme LeBel : Contre.
La Secrétaire
: M. Lévesque
(Chapleau)?
M. Lévesque (Chapleau) :
Contre.
La Secrétaire
: Mme Lecours
(Les Plaines)?
Mme Lecours (Les Plaines) :
Contre.
La Secrétaire
: Mme Lachance
(Bellechasse)?
Mme Lachance : Contre.
La Secrétaire
:
M. Martel (Nicolet-Bécancour)?
M.
Martel
:
Contre.
La Secrétaire
:
M. Lafrenière (Vachon)?
M. Lafrenière : Contre.
La Secrétaire
:
M. Lamothe (Ungava)?
M. Lamothe : Contre.
La Secrétaire
:
M. Lemieux (Saint-Jean)?
M. Lemieux : Contre.
La Secrétaire
:
M. Ouellette (Chomedey)?
M. Ouellette : Pour.
La Secrétaire
:
M. Bachand (Richmond)?
Le Président (M.
Bachand) : Abstention. La motion est rejetée. Merci. On
retourne maintenant aux remarques préliminaires. M. le député de LaFontaine,
s'il vous plaît.
M. Tanguay
: Oui. Merci
beaucoup, M. le Président. Alors, projet de loi n° 32,
projet de loi n° 32, projet de loi qui est important,
projet de loi qui contient de bonnes mesures, des objectifs louables, M. le
Président. Projet de loi qui vise à mieux adapter le système judiciaire aux
clientèles vulnérables puis favoriser le recours aux nouvelles technologies
d'information et optimiser la justice pénale. Projet de loi qui reprend
beaucoup, mais pas toutes, des dispositions qui étaient déposées, qui étaient
incluses dans le projet de loi n° 168, qui avait été
déposé dans le contexte de la 41e législature. Projet de loi n° 168 déposé par la précédente ministre de la Justice,
Mme Stéphanie Vallée, comportait entre autres plusieurs dispositions en
matière civile qui... puis ça, ça participe peut-être d'une déception
constructive, là, qui n'ont pas été reprises pour l'essence dans le projet de
loi n° 32. Les dispositions civiles du 168 de la
41e législature n'ont pas été dans leur ensemble reprises dans le projet
de loi n° 32. On aura l'occasion, peut-être,
d'effleurer le sujet et peut-être, qui sait, de déposer des amendements, le cas
échéant.
Mais lorsqu'on dit : Objectifs, donc,
louables du projet de loi n° 168, on parle ici, puis
mes collègues auront l'occasion dans le 20 minutes qui leur sont tous
alloués, de parler des parler des objectifs louables, quand on parle de
clientèles vulnérables. Alors, oui, faire en sorte qu'il y ait de plus grandes
disponibilités de programmes d'adaptabilité. Programmes d'adaptabilité,
clientèles vulnérables, on parle entre autres d'une clientèle de femmes et
d'hommes qui sont itinérants, qui... donc dans la rue, qui n'ont pas évidemment
accès aux ressources de la majorité des Québécoises et des Québécois. Donc,
avoir des programmes lorsqu'ils enfreignent la loi, lorsqu'un constat
d'infraction leur est émis, parce qu'ici on parle de justice pénale.
• (10 h 50) •
On parle donc de quoi? On parle des lois
provinciales, dans certains cas on va parler de lois fédérales qui sont
soumises à la procédure du Code de procédure pénale, mais très, très
majoritairement, de lois provinciales et de règlements municipaux. Alors, lois
provinciales, on pense tout de suite au Code de la sécurité routière. Celles et
ceux, je vous donne un exemple, un exemple, celles et ceux qui lavent les
parebrises. On voit ça souvent, M. le Président, à Montréal, celles et ceux qui
lavent le...
M. Tanguay
: ...du Code
de procédure pénale et très, très majoritairement de lois provinciales et de
règlements municipaux. Alors lois provinciales, on pense tout de suite au Code
de la sécurité routière. Celles et ceux, je vous donne un exemple, un exemple,
celles et ceux qui lavent les parebrises. On voit ça souvent, M. le Président, à
Montréal, celles et ceux qui lavent le parebrise, qui sont itinérants et qui
techniquement en vertu du Code de la sécurité routière n'ont pas le droit,
n'ont pas le droit à une lumière rouge de circuler entre les véhicules, de
laver le parebrise et de demander un don. Ça, la réaction policière à
l'occasion, bien, ce sera d'émettre un ticket, d'émettre un billet, une
contravention, contravention de plusieurs dizaines de dollars.
Et un des groupes qui est venu nous voir,
la Clinique droits devant, ça a été, M. le Président, pour tous les collègues
autour de la table, je crois, en tout cas je parle en mon nom personnel, et à
l'époque la collègue de Notre-Dame-de-Grâce m'accompagnait, ça a été, là, notre
coup de coeur, la Clinique droits devant. Puis j'aurai l'occasion de citer...
Et je vais déjà pour les collègues qui ont le bénéfice de ce mémoire-là,
j'aurai l'occasion de citer un extrait à la page 8, en haut de la
page 8 de leur mémoire.
Ça a été un témoignage réellement, je vous
dirais, bouleversant dans le sens positif de l'expression d'une personne qui a
pu obtenir l'avantage, je dirais, d'un programme d'adaptabilité, qui en a été
le premier surpris. On lui donnait un nom fictif, Michel. Il s'appelait Michel,
nom fictif, mais il racontait, la citation est tout à fait exacte, où il a pu
bénéficier d'un programme d'adaptabilité. Et il voyait d'entrée de jeu le
procureur et voyait le juge d'un oeil très, très inquisiteur, très inquiet et
jugeait gravement, je vous dirais, ces deux intervenants de la justice.
Et à la fin, lorsque le programme
d'adaptabilité lui a été octroyé, lorsqu'on lui a dit : Bien, écoute,
prends en main ta vie. Tu seras considéré pas des heures au cachot, ou pas des
heures de bonne conduite strictement, mais prends en main ta vie. Peux-tu faire
des démarches pour trouver un appartement? Peux-tu faire des démarches pour
trouver un emploi? Et on ne lui demandait pas : Trouve un emploi, puis
trouve un appartement, puis ramène-nous le bail signé puis le contrat d'emploi.
On lui demandait de faire des démarches, de reprendre de façon... Pour certains
d'entre nous, M. le Président, c'est l'évidence, ce sont des gestes, pas
quotidiens, mais qui arrivent dans une vie, de dire : Bien, oui, il faut
que je me trouve un emploi et je vais le faire. Puis il n'y a pas personne qui
va m'applaudir parce que j'ai mis à jour mon C.V. et que je l'ai soumis, que
j'ai assisté... j'ai sollicité des entrevues.
Mais pour des personnes vulnérables, des
personnes qui sont entre autres, pas tous, mais entre autres sont dans la rue,
sont des itinérants, ont collecté des centaines, même dans des cas des milliers
de dollars d'amende, infraction au Code de la sécurité routière, circule entre
les voitures, squeegee, c'est l'expression consacrée, lave le parebrise, demande
l'aumône, ça lui est la plupart du temps refusé et que, là, les policiers ne
savent pas trop comment gérer ça, vont leur donner une première contravention,
une deuxième, une troisième. Ça, M. le Président, ça ne vient pas du tout, du
tout aider la personne. Ça n'aide pas, je vous dirais, au-delà de la justice,
ça n'aide pas la réinsertion, ça ne fait pas cheminer dans le sens positif la
personne.
Et en bout de piste, l'organisme qui est
venu nous témoigner de ça, Clinique droits devant, on avait Mme Fortin,
M. St-Jacques. Puis M. St-Jacques, il n'était pas prédestiné à ça,
mais il nous a affirmé qu'il avait un bac, je pense, en sciences politiques, il
avait étudié en sciences politiques, mais une personne réellement de coeur,
tout comme Mme Fortin, dédiée à la cause des itinérants qui font face à la
justice. Imaginez donc qu'une personne qui n'a pas d'emploi, qui n'a pas de
logement, de domicile fixe, une personne, donc, qui est seule dans la rue,
imaginez cette personne devant une juge et un procureur. Imaginez la détresse
de cette personne et imaginez de se faire taper sur la tête au sortir de cette
audience-là : Bien, écoutez, mon cher ami, vous avez 4 000 $ de
billets d'infraction puis vous avec fait du squeegee. 4 000 $. Payez
maintenant sinon vous allez en prison. Imaginez comment on vient de renfoncer
cette personne-là. Et ils ont témoigné de l'impact très négatif de
l'ostracisation qui est ajoutée à cette personne-là lorsqu'on lui dit :
Bien, tu vas aller faire un séjour en prison. Imaginez le passage en prison ou
de faire face à une peine, à une sanction pénale. Ils ont dit : Ça, non
seulement ce n'est pas anodin, ça peut être, dans certains cas, déterminant
dans un sens très négatif sur la suite des choses pour cette personne-là.
Puis socialement, M. le Président,
socialement ça participe ces dernières, je dirais, ces dernières années,
peut-être même 10, 20 dernières années, d'une justice qui se veut plus
humaine, moins répressive, plus aidante dans le sens de : On va cheminer
avec ces personnes-là et faire en sorte, donc, de les... de les faire cheminer
sur la bonne voie. Pas la bonne voie parce que nous, socialement, on dit :
Bien, il y a une seule façon seulement de vivre sa vie, puis la bonne façon de
vivre sa vie, c'est ça. Non, mais de les aider en leur donnant des outils, en
identifiant...
M. Tanguay
: …dans le
sens de… on va cheminer avec ces personnes-là et faire en sorte donc de les
faire cheminer sur la bonne voie, pas la bonne voie parce que, nous,
socialement, on dit : Bien, il y a une seule façon seulement de vivre sa
vie, puis la bonne façon de vivre sa vie, c'est ça. Non, mais de les aider en
leur donnant des outils, en identifiant de l'aide. Puis, quand on met quelqu'un
en prison ou qu'on lui impose une pénalité ou un billet d'infraction, ce n'est
pas une main tendue, ce n'est pas de l'aide, donc justice plus humaine. Ça,
j'aurai l'occasion, si le temps alloué m'est permis, de reprendre la citation
en fin de mes remarques préliminaires, à la page 8 de ce mémoire, qui avait été
le dernier groupe que nous avons entendu, en fin de journée, M. le Président,
vous étiez là, la ministre et les collègues autour de la table étaient là, ça a
été… honnêtement, ça nous a permis de finir sur une note extrêmement, je
dirais, d'espoir et positive, je dirais, positive dans des contextes, dans des
contextes où la justice pénale peut être et ne doit pas être inhumaine, mais
doit être là pour aider.
Et ça, je vous dirais aussi, j'ouvre une
parenthèse, ça participe également d'une prise de conscience, et ça, on vient
de voir le dépôt, il y a quelques semaines, du rapport de la commission Viens, par
rapport à notre relation de nation à nation, mais d'individu à individu aussi,
parce que les nations, c'est important, mais d'individu à individu et de système
judiciaire, du système pénal, système correctionnel, judiciaire, donc santé, ainsi
de suite, comment, nous, individuellement, certains d'entre nous représentent
l'État, comment ils interagissent avec, entre autres, les femmes et les hommes
qui sont… qui participent des nations autochtones.
Ça, cette nouvelle approche humaine là
pour beaucoup, il faut le reconnaître et, encore une fois, j'espère, et j'en
suis convaincu que c'est plus qu'hier, moins que demain, une justice plus
ouverte, plus sociale, plus humaine. Oui, il peut y avoir, dans certains cas, M.
le Président, qui, à l'époque, là, remettons-nous il y a 50 ans, il y a 100
ans, là, la demande de pardon, la justice n'en avait que faire de la demande de
pardon. Mais on se rend compte que, dans un processus de réhabilitation, non seulement
on doit aussi s'assurer que la personne qui a commis une faute reconnaisse,
puisse faire amende honorable et puisse, également, dans certains cas, pas dans
tous les cas, puis ce n'est pas applicable, là, copier-coller dans tous les
cas, mais également demander pardon, parce qu'on oublie souvent aussi, de
l'autre côté, la victime, la victime qui veut reprendre, dans certains cas, le
contrôle de sa vie, qui veut participer à la réhabilitation, et ça, sur une
base volontaire, comment, nous, nous, étant le législateur, on peut faire écho
de c'est quoi.
Ce que je viens de vous dire, M. le
Président, c'est les programmes d'adaptabilité, de s'adapter, on s'adapte, ça,
on veut dire qu'on y va au cas par cas. Ce n'est pas vrai qu'on va dire, dans
tous les cas de figure : Bien, qu'il se trouve un emploi, qu'il se trouve
un logement, qu'il demande pardon, puis merci, bonsoir, au suivant, là. Non, on
va y aller de façon très tangible au cas par cas pour dire : Dans ce cas-ci,
considérant l'historique, considérant les agissements de la personne, que l'on
dit aujourd'hui, qui ont été fautifs et qui participent de peine soit en
matière du droit civil, soit en relevant de la loi provinciale, de la loi
fédérale et, à la limite, du Code criminel, lorsque l'on tient compte donc de
l'historique de la personne, de la faute qui a été commise, du contexte de la
faute, de la victime également, du contexte, de l'ouverture de la victime de
participer également, éventuellement, par son témoignage dans le contexte de
l'imposition d'un programme… ou de l'offre, devrais-je dire, d'un programme
d'adaptabilité, lorsqu'on considère tout ça dans un contexte bien précis,
bien, on vient, M. le Président, rendre une justice beaucoup plus humaine, au
moment même où on la rend plus humaine, au moment même où ce qui est demandé à
la personne de faire.
Je vous ai donné l'exemple d'une
personne : Bien, pourrais-tu commencer à travailler, puis on va t'aider
sur ta consommation? On n'en parle pas beaucoup, hein, mais il y a souvent de
la consommation, alcool, drogues. Si ça s'applique à ce cas-là, il faudrait
travailler là-dessus : Qu'est-ce que tu peux faire? Et les petits progrès
pour celles et ceux qui n'ont pas, M. le Président, qui ne font pas face à de
la dépendance aux alcools, aux drogues, écoutez, d'être sobre pendant 24
heures, d'être pendant quelques jours, je veux dire, il coule de source, ça ne
demande aucun effort. Mais pour des personnes qui, dans certains cas, pas dans
tous les cas, bien évidemment, puis ce n'est pas juste les personnes en cas
d'itinérance, des personnes qui ont un toit, un bon emploi, peuvent avoir des
défis de consommation d'alcool, de drogues, mais de dire : Écoute,
peux-tu, programme d'adaptabilité, travailler sur ça? Peux-tu travailler sur un
programme qui ferait en sorte de te sortir de ta dépendance à ces
substances-là? Est-ce que tu pourrais remettre un peu d'ordre, entre guillemets,
dans ta vie, reprendre ta vie en main pour ne pas non seulement qu'on se
retrouve dans le système judiciaire dans un mois, six mois, un an, mais pour faire
en sorte de t'aider? Et ça, il faut épauler les gens.
• (11 heures) •
Donc, ce qui a été dit, M. le Président,
puis je reviendrai au mémoire de l'association des groupes d'intervenants en
défense des droits de la santé mentale, qui, eux, ont dit, M. le Président, et
je vais les citer : «Avant toute mise en place de nouveaux programmes…
11 h (version non révisée)
M. Tanguay
: ...et ça...
il faut épauler les gens. Donc, ce qui a été dit, M. le Président, puis je
reviendrai au mémoire de l'association des groupes d'intervenants en défense
des droits de la santé mentale, qui eux, on dit, M. le Président, et je vais
les citer : «Avant toute mise en place de nouveaux programmes
d'adaptabilité, des règles relatives à la poursuite, est-ce qu'on pourrait
faire un état des lieux?» On a entendu un représentant, deux représentants de
la police municipale de Québec, qui ont dit... qui sont venus nous dire, eux,
qu'ils avaient un programme mis en place justement qui était un programme
d'adaptabilité et qui faisait en sorte, M. le Président, de façon... avec des
résultats très, très tangibles, de souligner leur succès, mais également de
souligner les défis. Le programme s'appelle le programme IMPAC, c'est la ville
de Québec, M. Robert Pigeon, qui est président de l'association aussi, qui est,
par ailleurs, président de l'Association des directeurs de police du Québec,
qui est venu nous dire : Bien, nous, dans la ville de Québec, on a un programme
qui s'appelle IMPAC. Et le programme IMPAC a pour but de faire en sorte de, M.
le Président... C'est intervention multisectorielle programmes d'accompagnement
à la cour municipale. Intervention multisectorielle. Pas juste la police qui
dit : Voic ton billet d'infraction, puis on se retrouvera devant le juge.
C'est un peu court. C'est aller beaucoup plus loin que cela. Multisectorielle
d'accompagnement à la cour municipale. D'accompagnement. Vous voyez que, là, M.
le Président, la justice prend un tout nouveau regard. Avant, là, encore une
fois, il y a 30 ans, 50 ans, il n'était pas question d'accompagner, c'était,
pour vous, contrevenant : Vous allez subir. Là, est-ce qu'on peut
accompagner? Donc, eux sont venus nous dire ça, que dans leur coin de pays,
dans la ville de Québec, ça fonctionnait, et que, sur le terrain, ils avaient
pu développer une certaine expertise, ils étaient prêts à la partager, ils
étaient prêts à mettre ça en commun avec d'autres programmes d'adaptabilité qui
se font un peu partout au Québec.
Ce qu'est venu nous dire l'organisme l'Association
des groupes d'intervention en défense des droits en santé mentale du Québec...
ils sont venus nous dire : Bravo aux programmes d'adaptabilité, mais est-ce
qu'on pourrait faire un état des lieux? Est-ce qu'on pourrait se réunir et
aller chercher les meilleures pratiques à gauche et à droite et est-ce qu'on ne
pourrait pas permettre aux corps municipaux, notamment, de multiplier ça? Parce
que vous savez, M. le Président, l'objectif, c'est de faire en sorte qu'il n'y
ait pas une justesse... une justice, pardon... pour qu'elle soit juste, pour
qu'il n'y ait pas une justice à deux, trois, quatre, 10 vitesses. Donc, tout
dépendamment, bien, moi, je suis dans la ville de Gatineau, je suis dans la ville
de Québec, je suis à Saint-Ferréol-les-Neiges, ou je suis en Beauce, ou je suis
aux Îles-de-la-Madeleine, bien, écoutez, je ne suis pas chanceux, je ne suis
pas sur le bon territoire puis je n'ai pas de programme d'adaptabilité. Comment
on pourrait, de façon intelligente, ordonnée, et surtout concertée... Il faut
s'adapter au cas par cas, puis ce n'est pas vrai que l'on doit donner un
formulaire standard pour dire : Bien, vous avez un cas a, b, c, d.
L'adaptabilité est réfractaire à la catégorisation et aux cases. Comment
donner, donc, toute la souplesse, mais comment donner une culture de nouvelle
justice, de savoir-faire.
Ville de Québec avait un beau programme en
place, et l'organisme, donc, santé... Association des groupes d'intervention de
défense des droits en santé mentale du Québec nous a dit essentiellement, en
conclusion de leur mémoire, deux choses : Pouvons-nous faire un état des
lieux, d'un, et, de deux, lorsque l'on parle de concertation, pouvons-nous
mettre dans le coup le système judiciaire, la Sécurité publique et le système
de santé et services sociaux? Il y a deux volets, on a une ministre de la Santé
et un ministre délégué aux Services sociaux. Moi, quand je regarde ça, M. le
Président, je vois déjà là quatre ministères, quatre ministres interpellés. La
ministre de la Justcie, la ministre de la Sécurité publique, la ministre de la
Santé et le ministre responsable des Services sociaux. Dans un contexte...
Et je crois comprendre que mes collègues
auront l'occasion, le collègue de Pontiac, entre autres, de revenir sur le
projet de loi n° 2, et il va parler de ce qui n'est
pas banal, à savoir la consommation de cannabis. Ça, ça interpelle directement
le ministre délégué à la Santé... aux Services sociaux. Et donc faire en sorte
aussi, M. le Président, que le système de justice puisse bénéficier, et c'est
ce qui était proposé par le groupe, inviter, donc, les ministères... de
l'adaptabilité, et tout ça ne mettant des tribunaux spéciaux sur place. Est-ce
qu'on pourrait développer une certaine expertise en matière... relativement...
découlant de la magistrature, d'avoir des tribunaux spéciaux en la matière,
tribunaux spéciaux en matière d'adaptabilité? Parce que, là, M. le Président,
ça prend un minimum de cohésion et, je vous dirais, de comparable. Oui,
adaptabilité au cas par cas, mais il ne faudrait pas que ce soit de façon
excessivement disparate que les programmes puissent être acceptés. Donc,
pourquoi des tribunaux spéciaux en la matière, ils auraient une pertinence?
Parce qu'on pourrait développer, pas pour être encarcanés, mais pour avoir des
guides d'une certaine jurisprudence en la matière, certaines...
M. Tanguay
: …au cas par
cas, mais il ne faudrait pas que ce soit de façon excessivement disparate que
les programmes puissent être acceptés. Donc, pourquoi des tribunaux spéciaux en
la matière… il y aurait une pertinence? Parce qu'on pourrait développer, pas
pour être encarcanés, mais pour avoir des guides d'une certaine jurisprudence
en la matière, certaines jurisprudences qui vont venir aiguiller, aider,
suggérer… les juges, femmes et hommes, qui auront à justement décider si en la
matière ça tient la route ou pas.
Et la jurisprudence, M. le Président, lorsqu'on
la lit, la jurisprudence, c'est un chapitre dans la vie d'une personne. Lorsque
vous lisez un jugement, vous pouvez le prendre de deux façons : Bien,
c'est froid, c'est la justice qui parle, puis les conclusions, c'est «condamné»
et quelle est la peine, ou «libéré» parce que non… pas de condamnation, mais il
y a une histoire humaine derrière ça. La jurisprudence est excessivement également,
il ne faut pas le sous-estimer, enrichissante en termes d'expérience humaine.
Et ça…peut-être qu'il y aurait lieu d'avoir des tribunaux spéciaux, on aura
l'occasion de faire le débat.
Je salue la ministre qui a dit :
Bien, on a pris le temps de la pause pour travailler sur des amendements. Je la
remercie. Et je crois comprendre qu'on aura accès aux amendements, le cas
échéant, pour pouvoir déjà nous faire une tête là-dessus.
Mais il y a une chose excessivement
importante, M. le Président, je ne vous ai pas parlé… puis si plus de temps
m'avait été dévolu… on aura l'occasion de le faire en article par article,
j'aurais pu vous parler des éléments très techniques. Mais quand on parle
d'éléments techniques, il ne faut pas les sous-estimer. Quand je vous disais
que les objectifs du projet de loi étaient louables, qu'il reprenait pour
beaucoup le projet de loi déposé par Stéphanie Vallée, la ministre de la de la
Justice de la législature précédente… était louable parce que, dans un premier
cas, elle… le projet de loi n° 32 vise à mieux adapter le système
judiciaire aux clientèles vulnérables. Mais, du même souffle, on vient
dire : favorise le recours aux nouvelles technologies, puis : optimise
la justice pénale. Il ne faudra pas que la recherche de ce deuxième et
troisième objectifs là, nouvelles technologies… optimiser la justice, viennent
desservir le premier objectif qui est de dire : Bien, on doit travailler
avec une clientèle vulnérable.
Et vous me permettrez de souligner une
expression qui est ressortie. Le premier groupe qui est venu nous parler, il
s'agit de l'association des groupes d'intervention… santé mentale, nous est
dit : Il existe au Québec, ce que nous considérons être «la fracture numérique».
Alors, vous êtes une personne vulnérable, on veut de meilleures… par ailleurs…
l'usage de technologies et optimiser la justice, il ne faudra pas que ça se
fasse sur le dos des personnes plus vulnérables. Et je laisserai mes collègues
citer, en haut de page 8, le magnifique extrait de la Clinique droits devant.
C'est tout le temps qui m'est imparti, merci, M. le Président.
Le Président (M.
Bachand) : Merci, M. le député de LaFontaine. M. le député de
Chomedey, s'il vous plaît.
M. Ouellette : Ah oui? Déjà?
Le Président (M.
Bachand) : Eh oui!
M. Ouellette : Eh bien! C'est
bien. Bien, ça va me faire plaisir, M. le Président, d'intervenir au niveau des
remarques préliminaires. Le projet de loi n° 32, c'est un projet de loi
qui est important. Et d'entrée de jeu, j'assure la ministre de ma collaboration
sur les différentes étapes de ce projet de loi là. C'est 161 articles, M. le
Président. C'est important, c'est un projet de loi qui est quand même assez
costaud, qui change beaucoup de lois, particulièrement dans un contexte où nos
institutions sont questionnées. On remet en question les interventions
policières, on remet en question les interventions du Directeur des poursuites
criminelles et pénales, où les gens se questionnent beaucoup sur l'utilisation
ou la non-utilisation… où, dans certains cas où… je ne veux pas inventer un
nouveau mot à matin pour me retrouver dans le journal, là, mais où il y a des
gens qui semblent outrepasser leur pouvoir ou ne pas les utiliser de la bonne
façon. On est dans cette période-là.
• (11 h 10) •
Je comprends, et pour en avoir… avoir
échangé brièvement là-dessus avec Mme la ministre et en avoir parlé avec mes
collègues, on est en Code de procédure pénale. Mais, dans les notes
explicatives du projet de loi, M. le Président, on touche à des choses qui sont
passablement importantes. On touche à des choses qui sont déjà dans nos
institutions, sont déjà inscrites au niveau du Code criminel et devraient
normalement être appliquées selon les règles de l'art par… autant les agences
policières du Québec que le bureau des poursuites… le Directeur…
M. Ouellette : ...sont déjà
inscrites au niveau du Code criminel et devraient normalement être appliquées
selon les règles de l'art par autant les agences policières du Québec que les
bureaux des poursuites... le Directeur des poursuites criminelles et pénales.
Mais il y a, je pense M. le Président, beaucoup de questionnements dans la population.
Chaque jour, on nous rapporte d'autres situations où il semble que les
différentes lois ne sont pas appliquées comme elles devraient l'être ou qui...
qu'on a outrepassé à différents endroits, puis j'y reviendrai tantôt.
On... Je me permettrai un commentaire dans
mes remarques préliminaires, parce que plusieurs des membres de la commission
sont membres de la commission l'exploitation sexuelle chez des mineurs, et on
se retrouve avec beaucoup de plaisir, parce qu'on a l'impression c'est une
commission qui était politique qui va probablement permettre d'inscrire ou qui
va probablement permettre d'amener une réflexion sur une nouvelle façon de
faire des interventions des députés qui sont membres d'une commission. Le temps
de parole n'est pas déterminé en fonction des votes de la population, mais en
fonction des questions qui viennent à l'esprit des différents membres de la
commission et je pense qu'à la lumière des travaux qui ont été faits jusqu'à
maintenant, je pense qu'on réussit à atteindre nos objectifs.
Il y a des... il y a beaucoup d'attentes
et plusieurs personnes viennent nous souligner certaines sphères d'activités ou
certains endroits où on devrait intervenir pour déjà faciliter certaines
choses, autant au niveau des survivantes, autant au niveau des différents
organismes qu'on a entendus. Et dans les commentaires qu'on s'est permis de
faire, les membres de la commission, M. le Président, c'est de dire :
oups, pourquoi est-ce qu'on n'introduirait pas un papillon dans le projet de
loi n° 32?
On est en justice et ça pourrait être
quelque chose qu'on pourrait amener à l'attention de la ministre et de ses
légistes. Ça se fait. Ça fait 12 ans que je suis à l'Assemblée nationale, ça
s'est fait dans les législatures antérieures, ça s'est fait dans des
commissions antérieures et je pense que ça sera des choses qu'on pourra amener
à l'attention de la ministre. Mais déjà, je mets la table et je me fais un peu
le porte-parole de différents points de vue qu'on a exprimés au cours de la
commission.
Un des items, c'est la liste des crimes
admissibles à l'IVAC qui n'a pas été révisée depuis 1985 et qui est laissée au
bon vouloir du fonctionnaire qui reçoit le cas. Donc s'il est dans une bonne
journée, bien, ça va être couvert. S'il est dans une moins bonne journée et
qu'il applique textuellement ce qui est écrit à l'annexe de la liste des crimes
admissibles, bien, ça ne sera pas couvert et là il va falloir... ça va amener
une deuxième ronde qui va faire décortiquer, et là, ça va mêler nos
statistiques parce que la raison pour laquelle on va intervenir, ça ne sera pas
la raison majeure. Ça fait qu'on en a parlé en commission et c'est quelque
chose, je l'annonce à la ministre, c'est quelque chose qu'on va en cours
d'étude de notre projet de loi, regarder pour un papillon.
Je sais que la ministre avait mentionné
qu'elle était en train de regarder une refonte potentielle ou est en train de
regarder, là, pour la loi de l'IVAC, différentes choses. Mais j'étais un peu
surpris parce que... en réponse à une question des oppositions, je pense que
c'est la semaine dernière ou il y a deux semaines au salon bleu, ce n'était
pas aussi catégorique, dans le sens qu'elle ne le regardait pas, là... ce
n'était pas quelque chose qui était sur sa table à dessin à court terme. La
réponse qui a été donnée pas la ministre...
M. Ouellette : ...deux
semaines au salon bleu, ce n'était pas aussi catégorique, dans le sens qu'elle
ne le regardait pas, là... ce n'était pas quelque chose qui était sur sa table
à dessin à court terme. La réponse qui a été donnée pas le ministre des
Finances puis le président du Conseil du trésor, bien, c'était quelque chose
qui était là, mais ce n'était pas quelque chose qu'on regarderait à court
terme, alors que c'est des choses qui sont portées à notre attention par tous
les intervenants, c'est des choses qui sont... qui sont portées à notre
attention par tous les intervenants ou la majorité des intervenants qui
viennent déposer devant les membres de la commission sur l'exploitation
sexuelle des mineurs.
Un autre élément qu'on va apporter,
sûrement, à l'attention de la ministre et de ses légistes, c'est les mesures d'adaptabilité.
On en parle beaucoup. On va en parler dans ce projet de loi là, mais il y aurait
peut-être une réflexion à faire dans certaines des mesures d'adaptabilité qui
pourraient être utilisées et qui pourraient être adaptées — c'est probablement
le terme qu'on va utiliser — à tout le milieu ou à toute la notion
des crimes des gens qui sont impliqués dans le dossier de l'exploitation
sexuelle des mineurs. Donc, d'entrée de jeu, même si c'est dans nos remarques
préliminaires... mais c'est quelque chose qu'on va parler, c'est définitivement
quelque chose qu'on va apporter à l'attention de la ministre dans l'étude de
notre projet de loi. On a 161 articles, on va avoir du temps pour en
parler.
Sans prendre les deux tomes qui nous ont
été remis ce matin, je suis heureux d'entendre, de la part de la ministre,
d'entrée de jeu, dans ses remarques, qu'elle aura des amendements à déposer,
parce que dans les 10 organismes qui sont venus déposer devant nous, M. le
Président, 63 recommandations qui nous ont été faites par les différents
d'organismes, d'éléments à préciser, ou de choses à changer, ou de points à
éclaircir qui nous ont été apportés par les organismes qu'on a pu entendre.
C'est 10 organismes qu'on a entendus, c'est 13 mémoires qu'on a eus.
Et il y a eu effectivement plusieurs points qui étaient intéressants.
Dans les notes explicatives, je me suis
demandé... C'est sûr 90 % des articles du projet de loi sont à être mis en
application quand le gouvernement le décidera et non pas à la sanction. Il y a
10 % des articles qui vont entrer en vigueur, environ 10 % des
articles qui vont entrer en vigueur à la sanction quand on aura terminé notre
étude détaillée, mais plus de 90 %, c'est dans le temps. Là aussi, je
reprends certains commentaires qu'on a eus de projets de loi qui ont été adoptés
et qui ne sont pas en vigueur. Donc, c'est des... il y a des clarifications
qu'on aura besoin de la part de la ministre et de la part de ses légistes sur
le... dans le temps, avoir un échéancier de la mise en vigueur de certains des
articles qui seront adoptés.
J'ai... Si vous voyez mon cahier, M. le
Président, oui, j'ai plein de notes, effectivement, parce que j'aurai besoin,
de la part de la ministre, de plusieurs explications pour m'assurer, quand on
va parler d'introduire le mandat d'entrée dans le Code de procédure pénale,
bien, le cadre et surtout la reddition de comptes qui vont être faits. Je
comprends que ça se fait au criminel, mais, avec tous les dérapages qu'on
observe, avec certains dérapages qu'on observe régulièrement dans les activités,
on va avoir besoin de plus d'information. Puisque c'est nous, les législateurs,
bien, on aura besoin d'être plus rassurés puis d'avoir plus de... être certains
qu'on prend les bonnes décisions.
• (11 h 20) •
On a beaucoup parlé de permettre aux agents
de la paix d'exiger une pièce d'identité. On a eu plusieurs commentaires sur
l'identification. Et je comprends qu'on est dans le Code de procédure pénale.
Et plusieurs d'entre nous alentour de la table, on sait exactement de quoi on
parle, et on sait exactement où ça dérape, puis on sait exactement comment ça
doit être balisé...
M. Ouellette :
...permettre aux agents de la paix d'exiger une pièce d'identité. On a eu
plusieurs commentaires sur l'identification, et je comprends qu'on est en Code
de procédure pénale, et plusieurs d'entre nous alentour de la table, on sait
exactement de quoi on parle et on sait exactement où ça dérape puis on sait
exactement comment ça doit être balisé, mais on va vouloir que ça le soit pour
justement se sécuriser et faire en sorte que ça sera appliqué de la meilleure
façon possible. J'ai mis le mot «balisé» dans plusieurs des notes explicatives
d'entrée du projet de loi. On se question aussi beaucoup sur les ordonnances de
communication. On aura besoin... on aura besoin de ces balises et puis de nous
assurer qu'on a les bonnes choses.
À chaque fois qu'on fait un projet de loi,
M. le Président, on a toujours peut de ne pas en oublier. Et je me souviens du
projet de loi n° 1 sur les nominations, on pensait
qu'on avait tout prévu, sauf que, quand il est arrivé le temps des comités de
députés, on s'est aperçu qu'on n'avait pas prévu le rapport, on n'avait pas
prévu qui était membre, on n'avait pas prévu plein de choses et, à chaque fois
que ce genre de situation là nous touche, bien, le projet de loi qui vient
après, bien, on est encore plus prévenant ou on est encore plus précautionneux
particulièrement sur les détails.
Moderniser les règles de signification des
actes de procédure, bien, j'aurai des exemples à donner à Mme la ministre sur à
partir du moment où ça va être signifié, ou quand un rapport est fait, et les
façons de signification. Dans plusieurs cas, ça peut sembler des détails. Il y
a plusieurs personnes qui sont venues nous voir en commission, pour eux, c'est
plus que des détails au niveau de la signification. Et ce qui des fois peut
paraître très simple sera peut-être... amènera, dans certains cas, des
situations qui sont définitivement plus compliquées.
Donc, comme je le mentionnais, M. le
Président, je vous en avais glissé un mot tantôt dans la motion d'ajournement,
la ministre aura, de la part du député de Chomedey, toute sa collaboration. Il
y aura effectivement beaucoup de questionnements du député de Chomedey. Ce
n'est pas parce que certains de... certaines dispositions, on les a déjà dans
le Code criminel, qu'il faut faire un copier-coller et l'amener dans le Code de
procédure pénale. Et comme je lai mentionné et sans crainte de me répéter, à
tous les jours, on a, on réalise et on s'aperçoit de dérapages dans certains
articles du Code criminel, donc ça ne sera pas... ça ne sera pas parce que
c'est là, on va faire un copier-coller puis on le mettra dans le Code de
procédure pénale.
Ça fait que ce sera mes remarques
préliminaires, M. le Président, à ce stade-ci, et je répète à Mme la
ministre : Je suis tout ouïe et j'ai hâte de commencer l'étude du projet
de loi et qui va sûrement amener des améliorations. Je lui aurais, si on avait
pu le faire, sans y apporter une motion de scission, mon collègue d'Ungava a
fait un plaidoyer extraordinaire quand les gens du DPCP sont venus à la la
commission d'exploitation sexuelle des mineurs, sur la justice, dans son comté.
Bon. Avoir voulu allonger la procédure, j'aurais fait une motion de scission.
J'aurais voté son article sur les deux juges qu'elle va avoir que le projet de
loi y prévoit de façon à ce qu'elle puisse nommer ces deux juges parce qu'ils
sont, selon les informations qu'on a eues de 306 à 308, mais ces deux-là s'en
vont dans le Grand-Nord ou s'en vont dans son territoire à lui. Donc, ils
vont... on va être obligés d'attendre après toutes les étapes. Je lui aurais
donné tout de suite, ça, ce petit bout là parce que le plaidoyer que notre
collègue d'Ungava nous a fait la semaine dernière était très éloquent, et je
pense que les gens du DPCP en ont pris très bonne note, et il sera rapporté à
qui de droit et sûrement que... et sûrement que ces commentaires-là vont
parvenir aux oreilles...
M. Ouellette : ...nous a fait
la semaine dernière était très éloquent, et je pense que les gens du DPCP en
ont pris très bonne note, et sera rapporté à qui de droit, et sûrement que ces
commentaires-là vont parvenir aux oreilles de la ministre. Merci, M. le
Président.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup, M. le député de Chomedey. Mme la
députée de Marguerite-Bourgeoys, s'il vous plaît, pour 20 minutes. Merci.
Mme David : Merci beaucoup. Je
vais partir mon chronomètre parce que des fois on dépasse, hein, ou on projette
mal le temps qu'il nous reste.
Alors, je suis particulièrement heureuse
d'intervenir dans ce projet de loi là parce qu'il y a beaucoup de choses, dans
le projet de loi, qui me font plaisir. Il y a beaucoup de choses qui traitent,
et mon collègue de LaFontaine l'a bien dit, de justice sociale. Et, quand on
parle de justice sociale, c'est sûr que j'ai un intérêt particulier et je suis
contente que tout le monde ici, je pense, semble avoir... Je n'étais pas aux
consultations particulières, mais tout le monde semble avoir une sensibilité, une
humanité qui me réjouit.
Première raison de réjouissance... Mais là
je vais peut-être aller là où vous ne vous y attendez pas, mais c'est une de
mes nombreuses anciennes vies. Un des mémoires qui m'a particulièrement
intéressée est celui de Marie-Ève Sylvestre, qui est doyenne de la Faculté de
droit de l'Université d'Ottawa. Or, d'une part, une femme doyenne en droit,
c'est toujours très sympathique, et ça montre un progrès de société dans le
cher milieu juridique.
Deuxièmement, son sujet de recherche n'est
pas tout à fait habituel pour une doyenne. Bien, c'est une femme. Souvent, les
femmes s'intéressent à des sujets humains, on le sait, sociaux. Mais qu'elle
soit doyenne avec des travaux de recherche qui portent sur la pénalisation de
la pauvreté, la judiciarisation de la pauvreté, les conflits sociaux liés à
l'itinérance, le travail du sexe, l'usage d'alcool et de drogues et la
dissidence politique, bravo, Université d'Ottawa.
Alors, ça, ce n'était pas tout à fait
pertinent à notre propos, mais quand même. Si je comprends bien... Je ne sais
pas si elle est venue présenter, si elle faisait partie des consultations. On
me dit que oui. Et donc j'ai lu avec beaucoup d'attention et de satisfaction ce
mémoire qu'elle a présenté avec sa collègue qui est d'une autre université que
je connais bien, Céline Bellot. Alors, voilà deux femmes qui osent s'attaquer à
des sujets pas nécessairement les plus populaires, les plus rentables au niveau
des organismes de recherche, mais ô combien importants au niveau, évidemment,
de notre justice.
Les gens comme moi, comme d'autres qui ne
proviennent pas du milieu juridique, ont souvent une impression, ma foi, assez,
j'oserais dire, entrepreneuriale, ou bureau privé, ou image d'avocat qui...
avec beaucoup, beaucoup, là, de règles de procédure puis de code pénal,
criminel, etc., des gros livres, là, pour les procédures pénales, et tout ça.
C'est un peu ésotérique pour les non-juristes.
Mais, dans ce projet de loi ci, c'est
comme si le côté humain ressortait beaucoup plus, qui n'est pas un dossier
facile parce que... Parlons d'itinérance, et ce n'est pas le seul, je le sais
que ce n'est pas la seule clientèle qui est visée par le projet de loi. Je me
suis écrit quelque part, là, l'acronyme, parce qu'évidemment il faut toujours
se sensibiliser à tous les acronymes. Les amendes non payées, là, c'est PNE ou
MENP... NPA, NPA, non-paiement d'amende, et ENPA, là, je disais que c'était
peut-être e quelque chose, là, comme e-mail, e... Bien non, c'est
emprisonnement pour non-paiement d'amende. Alors, les ENPA puis les NPA, ceux
qui nous écoutent, vous savez maintenant ce que ça veut dire.
Ce n'est pas seulement la clientèle
itinérante, mais c'est quand même une clientèle qui est particulièrement,
j'oserais dire, visée par ce sujet. Et moi, j'ai appris beaucoup de choses en
lisant les mémoires. Je ne savais pas que la ville de Montréal, Québec,
Val-d'Or ont des mesures vraiment de programmes qu'on appelle d'adaptabilité.
• (11 h 30) •
Je parlerai tout à l'heure de Droits
devant, qui est aussi une clinique que j'ai découverte. Je n'étais pas ici
quand... Si je comprends bien, les gens l'ont découverte, cette clinique qui
n'est pas une clinique juridique. Ce n'est pas une clinique avec des juristes,
c'est bien écrit. C'est une clinique d'accompagnement juridique, mais ce n'est
pas une clinique qui offre des services juridiques. Bravo, bravo! C'est
formidable. Et bravo qu'elle soit reconnue à sa juste valeur par le milieu
juridique. Mon collègue de LaFontaine a dit tout à l'heure...
11 h 30 (version non révisée)
Mme David : ...juridique.
Ce n'est pas une clinique avec des juristes. C'est bien écrit, c'est une
clinique d'accompagnement juridique, mais ce n'est pas une clinique qui offre
des services juridiques. Bravo! Bravo, c'est formidable, et bravo qu'elle soit
reconnue à sa juste valeur par le milieu juridique.
Mon collègue de LaFontaine a dit tout à
l'heure : C'est quelqu'un diplômé en science politique. Bon, alors, ce
sont des gens qui ont vraiment le coeur, je pourrais dire, à la bonne place,
comme on dit communément, et qui s'occupent des clientèles littéralement les
plus vulnérables de la société.
On n'en parle pas assez souvent. On n'en
parle pas assez souvent à l'Assemblée nationale. On n'en parle pas assez
souvent dans la société en général. Ce n'est pas une clientèle qui... On essaie
qu'elle nous rejoigne le moins possible, au sens où on met le «eux» et le
«nous», c'est-à-dire eux, qui passent leur vie dans la rue, pour qui, pour la
plupart...
Et je m'inclus là-dedans, M. le Président,
c'est presque incompréhensible de se dire : La nuit dernière, la nuit
d'avant, depuis trois, quatre nuits, on gèle. Il fait froid. Et là il y a, vous
avez entendu, là, plein de mesures qui se prennent pour accélérer et aller de
façon beaucoup plus hâtive dans l'ouverture de places pour que des gens
puissent coucher quelque part. Mais on essaie de s'imaginer, chacun dans notre
vie, notre famille immédiate, nos enfants, notre famille élargie, cousins,
cousines, voisins, quelqu'un qui arriverait dans sa vie en situation
d'itinérance...
Et je suis toujours frappée quand je lis,
j'écoute, j'entends des témoignages. Il n'y a pas «eux» et «nous». Ce «eux» là
était nous très souvent dans la vie, quelqu'un qui est vraiment... s'est
enfoncé dans un problème d'alcool, s'est enfoncé dans la toxicomanie, a perdu
tous ses avoirs pour une question de jeu pathologique. Ce sont toutes les
faiblesses de... j'oserais dire, de la nature humaine, et personne n'est à
l'abri. On parle beaucoup de problèmes de santé mentale. On en parle plus
qu'avant. C'est un progrès de société qu'on en parle plus qu'avant.
Mais, quelque part, quand il y
a — et mon collègue de LaFontaine a employé le mot «squeegee» tout à
l'heure — quand il y a quelqu'un qui vient nettoyer notre fenêtre,
qui d'entre nous ne s'est pas dit à un coin de rue : J'espère que la
lumière va devenir verte avant qu'il arrive à ma fenêtre? Moi-même, je l'ai
déjà pensé. Et qui ne s'est pas dit : Mes portes sont-elles barrées? Qui
ne s'est pas dit : Ah non! je n'ai pas d'argent puis je n'ai pas le goût
de lui en donner? Ça nous dérange. Combien de gens disent : Moi, dans la
voiture, c'est ma bulle, c'est mon endroit où je suis bien?
Et un «squeegee», un itinérant... Puis de
ce temps-ci, j'entends pas mal d'histoires de jeunes qui ont eu des vies, là,
que personne ne souhaiterait à ses propres enfants, personne. Et ces gens-là
aboutissent dans la rue et viennent cogner à notre fenêtre, j'oserais dire, de
voiture, et on se dit : Non. On baisse les yeux, comme on baisse les yeux
sur la rue et comme on baisse les yeux dans le froid parce que nous, on a
froid, puis on se dépêche d'entrer dans notre SAQ, ou dans notre boutique, ou
dans notre pharmacie, puis on ferme les yeux, littéralement.
Et je m'inclus là-dedans, je le répète, M.
le Président, c'est un réflexe humain. C'est un réflexe de : la société va
prendre en charge. Et, quelque part, ce projet de loi ci répond à un besoin de
la société.
Alors, je me sens particulièrement fière
de faire partie d'une société qui... Je ne dis pas que le projet de loi est
parfait, puis mon Dieu que je vais laisser les juristes regarder tous les
détails, l'étude détaillée, tout ça. La ministre annonce des amendements.
Bravo, c'est formidable. Mais je suis quand même fière de dire : On a au
moins ça à se mettre sous la main. Et le «ça» à se mettre sous la main, il est
progressiste, j'oserais dire.
J'ai même vu qu'il y avait une association
des juristes progressistes. J'ai dit : Mon Dieu Seigneur! Je ne
connaissais pas ça. Ce n'est pas pire. Depuis hier, on a un sénat progressiste,
avez-vous remarqué, les sénateurs progressistes du Québec, les anciens
sénateurs libéraux? Le mot «progressiste», bon, bien, c'est plutôt sympathique
d'entendre ça pour faire progresser notre société.
Et je pense que ce projet de loi ci fait
progresser notre société. Il faut absolument... Je ne dis pas que rien
n'existait avant. La ministre ne part pas de zéro. Mais elle aura le bénéfice
de pouvoir dire, quand le projet de loi sera adopté, parce que ça semble être
quand même... tout le monde le dit, je n'étais pas là, je le répète, aux
consultations...
Mme David : ...je pense que ce projet
de loi ci fait progresser notre société. Il faut absolument... je ne dis pas
que rien n'existait avant, la ministre ne part pas de zéro, mais elle aura le
bénéfice de pouvoir dire quand le projet de loi sera adopté... Parce que ça
semble être quand même — tout le monde le dit, je n'étais pas là, je
le répète, aux consultations particulières — mais ça semble quand
même être intéressant la perspective de dire : On va améliorer notre
système de justice.
Ça n'a juste pas de bon sens de mettre en
prison des gens dont la principale infraction, je le répète — et ça,
c'est la page 15 du mémoire Droits devant, ils disent bien ce sont les
constats d'infractions qu'eux ont recensés par les clients qui sont venus chez
eux — c'est... 19 %, c'est : piéton traitant avec
l'occupant d'un véhicule. C'est une belle phrase pour dire un squeegee
d'habitude ou quelqu'un qui demande avec son verre de carton comme ça :
Pouvez-vous me donner de l'argent? Le problème aussi, c'est qu'on en a plus de
monnaie dans nos poches, là. Vraiment, il faut vouloir pour donner maintenant
sur la rue et donner dans les voitures parce que la monnaie est de moins en
moins présente. Alors là, ça, je ne sais pas ce qui va arriver avec cet
aspect-là de la situation d'itinérance.
Mais quand 19 % c'est piéton traitant
avec l'occupant d'un véhicule ou 7 %, giser ou flâner ivre sur la voie ou
dans une place publique... Il n'y a pas grand monde qui se lève le matin en
disant : Moi, je rêve de devenir un itinérant qui quête sur le coin de la
rue à moins 15° dehors après avoir passé la nuit, s'il est chanceux, dans un
gite. Parce qu'on sait que la situation d'itinérance fait en sorte que ce n'est
pas tout le monde qui peut être admis dans un gite parce qu'il n'y a pas assez
de place. On est dans une société... Et mon collègue de LaFontaine l'a dit tout
à l'heure, il a parlé de fracture numérique, moi, je vais parler de fracture
tout court, de fracture sociale.
Au Québec, on est dans une situation,
disons-le, actuellement exceptionnelle. Exceptionnelle pour les gens qui sont
dans la société civile, j'oserais dire, productive, dans la société civile qui
travaille. Je me souviens des années 80, ma première hypothèque était à
18 %, de mon petit condo. Bien là, nos jeunes, là, de 30 ans, je vais vous
dire une affaire, ils ne connaissent pas ça les hypothèques élevées, ils ne
connaissent pas ça le taux d'intérêt élevé, ils ne connaissent pas ça être en
chômage puis se dire : Oïl, oïl, oïl, il y a eu une récession en 84, en
88.
On est en ce moment, là, dans une société,
je dirais, au Québec, hyperprivilégiée avec les goussets du gouvernement, pour
toutes sortes de bonnes raisons, toutes sortes de bonnes raisons, très garnis,
mais on est plus que jamais à risque d'une très grande fracture sociale. Parce
que plus on s'en va vers le bien-être, le plein emploi, etc., plus ceux qui ne
peuvent pas suivre vont être restés... vont être laissés loin derrière. Et il
faut absolument tenir compte de ces fractures-là parce que, regardons dans
d'autres pays...
Puis, on ne sait pas lire l'avenir, on ne
peut pas lire l'avenir, mais ce qu'on vit actuellement, c'est comme... Moi je
me disais toujours quand j'étais ministre : Regarde, c'est un privilège,
c'est un siège emprunté, tu es locataire, puis dans deux ans tu ne sais pas où
tu vas être. Bien, c'est la même chose pour l'économie, c'est la même chose
pour le bien-être. On en santé peut-être en ce moment, tous ici, demain matin,
on peut ne plus être en santé.
Mais les gens qui n'ont pas eu cette
chance dans la vie... On ne devient pas itinérant parce que c'est un choix, je
le répète. La nature humaine est faite en sorte qu'elle a des vulnérabilités,
et quand ce sont des enfants qui ont pu être placés, abandonnés, qui ont pu
vivre de la violence sexuelle, de la violence physique, qui sont complètement
acculturés, qui sont déracinés, bien, ils sont... Et écoutez des témoignages
d'itinérants. Écoutez leur vie passée, ceux qui s'en sortent, parce qu'il y en
a qui s'en sortent. Et ce projet de loi ci fait en sorte qu'il y en a qui vont
s'en sortir. Il y en a qui ne s'en sortent pas mais pendant qu'ils essaient de
s'en sortir, il faut absolument les accompagner là-dedans. Est-ce que c'est
facile? Non. Est-ce que c'est simple? Non.
• (11 h 40) •
Et vos gens qui sont venus parler de la
Clinique Droits devant ou le mémoire de Marie-Ève Sylvestre le dit très bien,
ce sont des gens qui ont souvent de lourds passés. Il y en a que c'est un passé
lourd beaucoup plus récent et qui peuvent s'en sortir rapidement. Mais on n'a pas
le droit comme société de les abandonner. On n'a pas le droit pas le droit de
les juger. On n'a pas le droit de les juger, parce qu'on a tous quelqu'un
quelque part dans notre environnement immédiat qui a des problèmes soit de
santé mentale, de consommation, qui en arrache. Il n'y a personne qui a dit
qu'en naissant, qu'en venant au monde, la vie allait être belle. Il n'y a
personne qui a dit ça, puis on ne peut pas...
Mme
David : ...pas le droit de les juger, on n'a pas le droit de les
juger, parce qu'on a tous quelqu'un quelque part dans notre environnement
immédiat qui a des problèmes soit de santé mentale ou de consommation, qui en
arrache. Il n'y a personne qui a dit qu'en naissant, qu'en venant au monde, la
vie allait être belle, il n'y a personne qui a dit ça, puis on ne peut pas
promettre ça à personne. Mais il y en a qui l'ont eue plus dure que d'autres,
puis, pour entendre beaucoup, beaucoup, beaucoup de choses en ce moment sur nos
enfants, sur nos enfants qui sont malheureusement trop maltraités, trop
ballottés, trop victimes de toutes sortes de choses, on peut imaginer que ceux
qui sont élevés avec beaucoup plus de privilèges et de chances, comme la grande
majorité des enfants du Québec... Et, Dieu merci, je le répète, on est une société
privilégiée, l'école est gratuite, l'école est accessible, les CPE... on est
une société qui aide beaucoup nos familles, nos enfants, qui essaie de mettre
un filet social. Mais on en échappe. Ce n'est pas pour rien que le mot «filet»,
là... Il y a des trous dans le filet, puis, quand on va à la pêche puis qu'on
ramasse des poissons, il y en a qui retombent. Eux, ils sont chanceux, ils ne
seront pas pêchés, c'est la bonne chose. Mais, dans le filet social, ceux qu'on
échappe, c'est ceux qui sont effectivement, pour toutes sortes de raisons
sociales, personnelles, des raisons de maladies mentales qui peuvent être
génétiques, qui peuvent être acquises... Il y a toutes sortes de raisons de
pauvreté, de consommation, d'alcoolisme, de... — enfin, il y a
tellement de raisons pour devenir fragile et vulnérable — de divorce.
On voit encore des homicides intrafamiliaux épouvantables, encore un en fin de
semaine, c'est inimaginable. Vous allez dire : Oui, mais c'est une
minorité. Mais c'est une minorité de trop.
Alors, je le
répète, des projets de loi comme celui-ci font en sorte qu'on puisse au moins
apporter notre touche d'humanité dans une façon de dire : On va
accompagner ces gens-là. Mais ça ne sera pas simple, là. Les procureurs sont
peut-être plus habitués... le modèle prison, le modèle : Tu vas passer
tant de temps. Mais essayez d'imaginer ces gens si vulnérables en prison. Bien,
on les imagine, puisqu'ils y vont, mais on n'est pas plus avancés dans la
justice, comme on dit, plus les programmes d'adaptation, d'adaptabilité.
Justement, il faut s'adapter à chaque individu devant nous, et l'objectif pour
un peut être d'être sobre pendant trois semaines, et c'est un grand succès,
puis, s'il a réussi trois semaines — mais il faut qu'il soit
accompagné — bien, imaginer un autre trois semaines puis un autre
trois semaines, puis là tu adaptes. Mais l'autre, ça peut être... et je lisais
quelque part, c'était touchant de dire : Le succès pour un itinérant dans
un programme d'adaptabilité — puis c'est dans le mémoire, je pense,
Droits devant — c'est de dormir 20 jours au même endroit. Bien, nous,
là, on trouve qu'on découche trop souvent pour venir à Québec; nous, on
aimerait ça, dormir 20 jours au même endroit.
Mais, dans une
situation d'itinérance, quand le détachement est tellement grand et que dans le
fond la rue — et on l'entend malheureusement trop
souvent — c'est devenu leur famille, on se dit que la marche est très
haute. Alors, quand l'objectif du programme d'adaptabilité, c'est de
stabiliser... On dit souvent en médecine : On va mettre le patient aux
soins intensifs, il faut le stabiliser. Mais, en médecine, c'est super accepté,
puis on a besoin de nos médecins spécialistes, puis on a besoin... C'est notre
vie. Mais stabiliser un itinérant, ça devrait être aussi l'équivalent des soins
intensifs pour notre société, puis les soins intensifs pour notre société,
bien, c'est les gens les plus en besoin, et les plus en besoin, ça prend des
moyens. Prenez des patients en soins intensifs branchés de partout, ça coûte
des milliards à l'État chaque année. Des programmes d'adaptabilité, je suis
sûre... je n'ai pas les chiffres, Mme la ministre, mais je suis sûre que ce
n'est pas tant d'argent que ça, et, oui, c'est du cas par cas.
Et, dans le
projet — et je vais devoir terminer là-dessus... C'est toujours
triste d'arrêter en pleine lancée, alors je vais essayer d'atterrir. Dans les
programmes d'adaptabilité... Ça ne va pas être facile, de un, et, des mémoires
nous mettent en garde, si on veut les mettre à la grandeur du Québec, ça va en
prendre, d'autres cliniques Droits devant, ça va en prendre, des gens partout
qui accompagnent ces gens-là. Alors, j'ai lu quelque part, M. le
Président : Quand la loi sera adoptée — bravo,
bravo! — ce n'est que... ce ne sera que le début, le travail restera
à faire. Et là, je vais terminer en disant que je souhaite du fond du coeur que
non seulement la loi, avec les amendements et tout, soit adoptée
éventuellement, mais que le reste suive, puis le reste, la ministre a...
Mme David : ...que ce ne sera
que le début, le travail restera à faire. Et là je vais terminer en
disant : Je souhaite du fond du coeur que non seulement la loi avec les amendements
et tout soit adoptée éventuellement, mais que le reste suive. Puis le reste, la
ministre, elle ne peut pas faire ça toute seule. Il va falloir l'aide de ses
collègues, la Santé, les Services sociaux, l'argent au rendez-vous. C'est ce
que je nous souhaite collectivement, M. le Président.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup, Mme la députée.
M. le député de Gouin, s'il vous plaît.
M. Nadeau-Dubois : Merci, M.
le Président. Bonjour à tous et toutes. Très content d'être parmi vous cet
avant-midi. Le projet de loi que nous avons devant les yeux est un projet de
loi... c'est un peu un miniomnibus en justice. Il y a toute sorte de choses
différentes, ça touche une diversité d'enjeux. Parfois des enjeux techniques,
notamment la comparution à distance, ce genre de chose. De notre côté, à la
deuxième opposition, il y a deux enjeux qui vont nous préoccuper en
particulier. Puis la plupart de nos interventions en commission... bien, lors
de l'étude détaillée, la plupart de nos interventions, donc, vont se concentrer
sur ces deux enjeux-là.
Le premier, c'est la question d'aide
juridique. Je ne surprendrai personne en disant que, pour nous, la question de
l'accès à la justice, c'est un enjeu très important. La justice, c'est un
service public, hein? On l'oublie souvent. On parle des services publics, on
dit souvent l'éducation, la santé. C'est ce qui nous coûte le plus cher
collectivement. Mais la justice aussi, c'est un service public, et l'accès à la
justice, c'est extrêmement important. Puis, dans une société de droit, le fait
qu'il y ait une iniquité dans l'accès à la justice, bien, c'est un problème...
c'est un problème de fond puisque ça fait en sorte que, dans les faits, les
citoyens, citoyennes ne sont pas égaux et égales devant la loi s'ils n'ont pas
tous et toutes accès à la justice. Donc c'est extrêmement important, puis il y
a des dispositions du projet de loi qui portent sur l'aide juridique.
Dispositions qu'on va vouloir bonifier pour une raison simple : quand on
n'a pas les moyens de faire valoir nos droits, bien c'est comme si on n'avait
pas ces droits-là.
Le deuxième enjeu qui va nous intéresser beaucoup,
et je ne surprendrai pas la ministre parce que je pense que j'ai eu des
questions assez claires sur le sujet lors des consultations particulières,
c'est la question de l'identification, une disposition du projet de loi qui est
tout sauf banale au sujet des cartes d'identité. Ce projet de loi là, s'il est
adopté dans son état actuel, permettrait à un agent de la paix qui veut
décerner un constat d'infraction d'exiger une pièce d'identité alors qu'aujourd'hui
il doit y avoir, si le Code de procédure pénale était gardé dans son état
actuel, il doit avoir des motifs pour le faire. Le projet de loi donnerait le
pouvoir à un policier d'exiger, dès le début de son interaction avec le citoyen
et la citoyenne, une pièce d'identité.
Cette disposition-là du projet de loi a
été dénoncée par le Barreau du Québec, a été dénoncée également par les
différents organismes communautaires qui sont venus témoigner lors des
consultations. Ça a été dénoncé également par les experts, les universitaires
qui sont venus témoigner. Ça a été dénoncé aussi par l'association des avocats
de la défense. Tout le monde y a vu, M. le Président, ce qu'on y avait vu à
Québec solidaire, c'est-à-dire une disposition supplémentaire pour... qui va,
disons, augmenter les risques de profilage social et de profilage racial. Pour
une raison très simple : les parties de la population qui ont des chances
de ne pas avoir de cartes d'identité sur eux et sur elles, c'est des gens en
situation de précarité, des gens en situation de vulnérabilité. Le collègue de
l'opposition officielle, le député de LaFontaine, parlait des gens qui font du
jogging, ça c'est un exemple amusant. Je ne sais pas si notre leader du
gouvernement avait ses cartes sur lui quand il est allé faire du jogging au
printemps dernier. Mais ce qui est plus inquiétant, c'est le fait qu'on va
donner un outil supplémentaire pour faire du profilage.
• (11 h 50) •
Et le mémoire du Barreau, sur cette
disposition du projet de loi là, est très, très dur, hein? Le Barreau, c'est
lui qui le dit, ce n'est pas nous, parle de ça comme d'une porte ouverte pour
des dérives de la part des forces policières. Et ça, c'est le Barreau du Québec
qui le dit, ce n'est même pas Québec solidaire. Puis j'ai envie de dire :
Dans le contexte du dépôt du rapport Viens il y a quelque temps, dans le
contexte du dépôt du rapport du SPVM sur le profilage racial, on ne devrait pas
aller dans ce sens-là. On devrait être en train d'aller dans le sens inverse,
et, dans une espèce de coïncidence absolument exceptionnelle, hier même, la
ville de Montréal...
M. Nadeau-Dubois : …il y a
quelque temps dans le contexte du dépôt du rapport du SPVM sur le profilage
racial. On ne devrait pas aller dans ce sens-là. On devrait être en train d'aller
dans le sens inverse, et, dans une espèce de coïncidence absolument
exceptionnelle, hier même, la ville de Montréal a interpellé les élus québécois
à ce sujet-là, au sujet des interpellations policières sans fondements en
disant justement qu'il fallait faire quelque chose sur la question, et nous
sommes en train d'étudier un projet de loi qui pourrait aggraver le problème.
Donc, vous comprendrez, M. le Président, que, pour nous, ce n'est pas… c'est
n'est tout simplement pas envisageable, là, d'adopter le projet de loi tel
qu'il est et de ne pas l'amender sur cette question-là. Parce qu'en permettant
d'exiger sans motif raisonnable une pièce d'identité, ce qu'on fait
indirectement, c'est créer une infraction du simple fait de ne pas avoir de
pièce d'identité. J'ai bien entendu la ministre dire que ce n'était pas son
intention, je le crois. Par contre, c'est l'effet de la disposition qui est
dans le projet de loi. Ça va créer par la bande, indirectement, une infraction
du simple fait de ne pas avoir de pièce d'identité puisque le projet de loi le
dit clairement : Si on refuse ou on n'est pas en mesure de donner une
pièce d'identité, ça devient possible, pour un policier, d'arrêter sans mandat.
Donc, c'est la création par la bande d'une infraction pour ne pas avoir de
carte d'identité. Or, dans une société de droit, dans une société de type
libéral, le… c'est… le… on ne devrait pas exiger des gens qu'ils aient une
pièce d'identité en tout temps.
Et je me permettrais un commentaire
éditorial, M. le Président, les régimes politiques qui, historiquement, ont
exigé que les gens aient des cartes d'identité en tout temps, ce n'étaient pas
des régimes politiques libéraux, ce n'étaient pas des régimes politiques
démocratiques. Et ça, ce n'est pas un détail et ce n'est pas une technicalité.
C'est un enjeu de principe, pour nous, et on va travailler très fort, je vous
le dis d'emblée, à convaincre la ministre qu'il faut revoir cette
disposition-là.
Puis pour illustrer pourquoi, j'ai envie
d'utiliser un exemple tiré de l'actualité récente, un article qui est paru le
17 novembre dernier, un Montréalais d'origine haïtienne qui poursuit la
ville de Montréal parce qu'il estime d'avoir été victime de profilage racial de
la part d'un policier qui s'était montré très insistant pour que le monsieur
lui montre une carte d'identité, suite à quoi… suite à une infraction banale…
bien, banale, une infraction au code de la route, là. Il n'avait pas respecté
une signalisation piétonne. Toutes les infractions sont des infractions, mais
ce n'était pas une infraction criminelle, personne n'a été blessé. Le policier
avait demandé une pièce d'identité, le ton est monté, et le Montréalais, donc,
en question, qui était un gardien de sécurité au cégep Ahuntsic, bien, porte
maintenant plainte, donc, et poursuit la ville pour 15 000 $ en
dommages moraux et 3 000 $ en dommages punitifs.
Et cet exemple-là, donc, on a un agent de
sécurité qui reçoit un constat d'infraction parce qu'il a traversé la rue à un
autre endroit qu'au passage piéton, ce qui est certes une infraction, mais une
infraction, disons, fréquente et qui ne… comment dire... qui ne blesse
personne, on est dans une infraction relativement banale, si vous me permettez
l'expression… Donc, le monsieur ne traverse pas la rue au passage piéton, il
est interpellé et il reçoit un constat d'infraction, le ton monte, l'agent en…
l'agent… bien, en fait, l'homme a refusé de donner une pièce d'identité, comme
c'est son droit à l'heure actuelle.
Une voix
: …
M. Nadeau-Dubois : En fait,
non, on me dit qu'il n'en avait pas sur lui, puisque ça peut arriver.
D'ailleurs, moi, M. le Président, si, en ce moment, on m'en demandait une… En
ce moment, je n'en ai pas sur moi. Donc, c'est bien la preuve que ça peut
arriver dans la vie.
Donc, le monsieur, donc, n'avait pas sa
pièce d'identité, l'agent est même allé jusqu'à entrer dans le cégep pour
interpeller le patron du gardien de sécurité en question pour informer le
patron de ce qui venait de se passer et puis faire des réprimandes, on présume,
là, sur le comportement de l'agent de sécurité en question. Le patron n'était
pas au cégep à ce moment-là. Il est revenu le lendemain, le même agent de
police, pour être sûr de bien parler au patron et dire que ce n'avait pas
d'allure parce que son employé avait été impoli.
Bon. On comprendra que le monsieur en
question, l'homme en question, le citoyen en question porte plainte,
maintenant, pour profilage racial. Et tout ça part d'où, M. le Président? Tout
ça part du fait que l'homme n'avait pas sur lui…
M. Nadeau-Dubois : ...pour être
sûr de bien parler au patron et dire que ça n'avait pas d'allure parce que son
employé avait été impoli.
Bon, on comprendra que le monsieur en
question, l'homme en question, le citoyen en question porte plainte maintenant
pour profilage racial. Et tout ça part d'où, M. le Président? Tout ça part du
fait que l'homme n'avait pas sur lui cette pièce d'identité. Peut-être que des
collègues me diront : Oui, mais ça part en fait de l'infraction, ça part
en fait du fait qu'il a traversé la rue au mauvais endroit, certes, mais il
n'avait pas de pièce d'identité sur lui et c'est pour ça que la situation a
dégénéré dans son interaction avec le policier. Donc, ça, c'est un exemple que
vous je donne, M. le Président. Il y en aurait beaucoup d'autres. Mais ce genre
d'interaction là, entre des forces policières puis les citoyens, citoyennes,
surtout des gens issus des minorités, c'est ce qui fait mal à la confiance
entre les forces policières et la population. Et donner un outil de plus qui,
potentiellement, pourrait être utilisé dans des pratiques de profilage social
et racial, ce n'est pas la bonne voie, bien au contraire.
Je parlais de la résolution de la ville de
Montréal, hier, qui demandait la fin des interpellations policières sans
fondement. Je parlais du rapport Viens, du rapport du SPVM. On ne peut pas
aller dans cette direction-là. Ce n'est juste pas possible. C'est très
inquiétant. On va travailler très fort pour convaincre la ministre de ça.
Je voulais prendre le temps d'expliquer
notre position. La ministre... Puis en fait, avant de passer à mon prochain
sujet, je veux quand même revenir sur une interaction que j'ai eue lors des
consultations avec le président du... bien, le directeur général du Service de police
de la ville de Québec, qui est aussi à la tête de l'Association des directions
de police au Québec. Et j'ai demandé, donc, à cet intervenant, je lui ai parlé
des critiques que le Barreau faisait sur cette disposition du projet de loi.
J'ai demandé : Qu'est-ce que vous pensez de ça? Puis en fait, je lui ai
posé une question très simple, j'ai dit : Est-ce que, selon vous, ça
existe, le profilage social et le profilage racial dans les corps de police au
Québec? Il m'a donné une réponse longue et un peu ambiguë. Je l'ai relancé.
J'ai dit : Bien, vous savez que la ministre de la Sécurité publique
elle-même a reconnu que ça existait et il y a même un groupe de travail sur la
question. On ne doit pas faire un groupe de travail sur un enjeu qui n'existe
pas. Et dans une deuxième relance, donc, il ne m'a pas non plus répondu sur
l'existence ou pas de profilage social et racial au Québec. J'ai trouvé ça
surprenant qu'on ne puisse pas admettre quelque chose d'aussi simple et d'aussi
documenté, que c'est une pratique qui existe. C'est un défi pour les corps de
police en Amérique du Nord, en général. Ce n'est pas un procès des policiers
d'ici, c'est juste un défi des corps policiers partout, notamment au Québec. Et
l'intervenant en question, qui est quand même à la tête de l'Association des
directions de corps de police n'a même pas été capable de me dire que ça
existait.
Je l'ai relancé, je lui ai dit :
Bien, qu'est-ce que vous répondez aux critiques du Barreau, là, qui disent que,
dans le projet de loi, il y a des dispositions qui vont ajouter un outil
potentiel de profilage social et racial? Et la réponse, M. le Président, ne m'a
pas rassurée. Il m'a répondu, je paraphrase, là, qu'il était bien content du
projet de loi parce que ça allait rendre les interventions policières plus
rapides et plus efficaces. Ce n'est pas une réponse rassurante quand la
question est : Rassurez-nous. Quand moi, ma question c'était... Je
demandais à être rassuré sur l'effet des dispositions dans le projet de loi. Et
la réponse a été : Ça va rendre les interventions policières plus rapides
et plus efficaces. Ce n'était pas du tout rassurant comme réponse. J'ai relancé
en disant : Bien là, vous ne me rassurez pas. Et la deuxième réponse a été
de me dire qu'il y avait des mesures de déontologie possibles si jamais des
gens se sentaient lésés. Donc, on me disait : Après coup, si ça se passe
mal, les gens ont des recours. Certes, mais l'idéal, ce serait qu'on ne se
rende pas là et l'idéal... en fait, pas l'idéal, mais ce qui serait raisonnable,
c'est de ne pas adopter la disposition du projet de loi qui va donner un outil
de plus pour aggraver le problème.
Donc, je vous vois me faire signe, M. le
Président. Je vais m'arrêter ici. J'aurai d'autres remarques par la suite sur
d'autres dispositions du projet de loi, parce qu'il y a aussi du bon dans ce
projet de loi puis je m'en voudrais beaucoup de ne pas le mentionner. Mais ça
fait le tour pour ce qui est de cette question spécifique des cartes
d'identité. Puis j'ai grand espoir de poursuivre les discussions avec la
ministre.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup, M. le député. Alors, ceci dit et
compte tenu de l'heure, la commission suspend ses travaux jusqu'après les
affaires courantes. Merci beaucoup.
(Suspension de la séance à 12 heures)
15 h 30 (version non révisée)
(Reprise à 15 h 37)
Le Président (M.
Bachand) :À l'ordre, s'il vous plaît! La
commission reprend ses travaux. Bienvenue. Lors de la suspension de nos
travaux, cet avant-midi, le député de Gouin n'avait pas terminé ses remarques
préliminaires. M. le député, je vous cède donc la parole pour une durée de
5 min 45 s. M. le député de Gouin, s'il vous plaît.
M. Nadeau-Dubois : Merci
beaucoup. Je ne serai pas très long. Je pense que j'ai expliqué en détail, plus
tôt aujourd'hui, nos inquiétudes au sujet de la question des cartes d'identité,
cette disposition-là du projet de loi, mais j'avais promis de dire également
quelques mots sur des aspects qui nous réjouissent, puis je ne voudrais pas
manquer à ma parole.
Alors, oui, bien sûr, un projet de loi qui
va dans le bon sens sur le plan des mesures d'adaptabilité, ça va permettre de
déjudiciariser, espérons-le, des situations qui, en fait, n'auraient jamais dû
être judiciariser. Ce n'est pas par le bâton de la loi qu'on sort les gens ni
de la pauvreté, ni de la précarité, ni de la marginalité. Donc ça, c'est un
projet de loi qui va dans le bon sens, à ce niveau-là. C'est d'ailleurs pour ça
qu'on a voté en faveur du principe du projet de loi, plus tôt, durant la
session parlementaire.
Il y a quand même, néanmoins, quelques
éléments à regarder. Je vais notamment avoir des questions… C'est parce que je
pense qu'il y a un dilemme, en tout cas, un dilemme… Il y a un équilibre à
trouver dans le projet de loi entre oui, une préoccupation de flexibilité pour
les cours de justice, mais aussi il y a une préoccupation d'équité puis d'une
certaine uniformité, il va y avoir un équilibre à trouver entre ces deux
principes là. On va avoir des questions sur le sujet, que ce soit sur les
infractions couvertes, que ce soit sur les… En fait, vraiment sur les
infractions. Où est-ce qu'il faut en tolérer un minimum? Est-ce qu'il faut
exclure certaines infractions? C'est des questions qu'on va avoir pour la
ministre.
Il y a également… On pense à des
améliorations qui peuvent être apportées, notamment sur les démarches qui ont
été effectuées antérieurement au programme. C'est un des intervenants en
commission parlementaire qui nous a sensibilisé à ça. On a trouvé ça bien
intéressant.
Et bien sûr il y a la question de
l'emprisonnement pour dette qui découle de constats d'infraction. Les
représentations qui nous ont été faites en commission parlementaire sont assez
intéressantes puis assez convaincantes sur l'inutilité de ces mesures
d'emprisonnement là, et on aura certainement des questions et peut-être des
amendements sur le sujet.
Alors, je m'arrête ici, et au plaisir de
discuter des différents enjeux dans les prochains jours.
• (15 h 40) •
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. Dans mon empressement d'entendre le
député de Gouin, j'ai oublié de vous rappeler le…
M. Nadeau-Dubois :
...convaincante sur l'inutilité de ces mesures d'emprisonnement là. Et on aura certainement
des questions et peut-être des amendements sur le sujet. Alors, je m'arrête
ici, et au plaisir de discuter des différents enjeux dans les prochains jours.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup. Dans mon
empressement d'entendre le député de Gouin, j'ai oublié de vous rappeler le
mandat de la commission. Alors donc, je vous rappelle que la commission...
M. Nadeau-Dubois : ...le bon
sujet?
Des voix
: Ha, ha, ha!
Le Président (M.
Bachand) : Oui. Je vous rappelle que la commission est réunie
afin de poursuivre l'étude détaillée du projet de loi n° 32, Loi visant
principalement à favoriser l'efficacité de la justice pénale et à établir les
modalités d'intervention de la Cour du Québec dans un pourvoi en appel. Sur ce,
je laisse la parole à Mme la députée de Joliette, s'il vous plaît, merci.
Mme
Hivon
: Merci
beaucoup, M. le Président. Donc, je suis heureuse, à mon tour, de faire mes remarques
préliminaires à l'étape, donc, du début de l'étude détaillée du projet de loi
n° 32, un projet de loi très important sur la voie de la déjudiciarisation
et d'une offre élargie de solutions en matière de justice pénale.
Je veux bien sûr en profiter pour vous
saluer, M. le Président, saluer la ministre, toute son équipe, mes collègues de
la partie ministérielle et mes collègues porte-parole des oppositions en
matière de justice. Je suis désolée de ne pas avoir été avec vous ce matin,
mais je vous ai suivis en partie en distance... à distance. Donc, j'ai pu
constater la pertinence de tous ces discours, de remarques préliminaires. Donc,
je suis heureuse de pouvoir prendre la parole à mon tour. Je dis ça sans
ironie. Il y avait des discours intéressants, beaucoup de points qui ont été
soulevés.
Donc, je vais faire des remarques relativement
brèves, simplement pour dire que je pense qu'il va falloir apporter beaucoup de
soins à l'étude de ce projet de loi là, qui embrasse quand même très large,
parce qu'il se veut un omnibus, donc qui touche beaucoup de sujets sur lesquels
on ne pourra pas faire l'économie, quand même, d'une étude approfondie, parce
qu'il y a des enjeux très, très importants. On est ravis de voir, donc, toute
la question des programmes d'adaptabilité qui vont être prévus noir sur blanc
dans le projet de loi, bien entendu. Je pense que, de plus en plus , il faut
être conscient que la justice n'apporte pas toujours des réponses adéquates à
des problématiques sociales et qu'il faut donc faire un meilleur arrimage entre
des enjeux et des problèmes sociaux qui ont des répercussions dans le milieu
juridique et judiciaire. Mais justement il faut faire cet arrimage-là entre ces
deux niveaux de problèmes qui parfois nous amènent à ne pas porter le bon
remède ou, je dirais, la bonne manière de s'occuper de ces problèmes-là.
Donc, évidemment on pense à toute la
question de l'itinérance, des enjeux aussi de santé mentale, de toxicomanie qui
font en sorte qu'il y a des gens qui se retrouvent avec beaucoup d'infractions
et qui se retrouvent devant les tribunaux alors que ce n'est pas leur place. Et
je trouve ça important, avant d'aborder aussi la question spécifique de la réponse
judiciaire, de se questionner aussi comme société sur tout le travail qu'on
devrait faire en amont en prévention de ces problèmes sociaux là qui sont très
importants. Ce matin, j'entendais encore avec l'hiver hâtif que des refuges
débordent déjà pour les personnes qui sont itinérantes. Il y a quelques années
j'ai eu la chance de piloter la première politique nationale de lutte contre
l'itinérance. Et il est important, une fois qu'on a des bonnes assises et une
bonne politique, d'avoir des plans d'action très concrets qui viennent apporter
des bonnes réponses.
Et donc ces réponses-là sont multiples,
mais un des enjeux, bien sûr, c'est toute la question de la judiciarisation. Et
donc au moins avec ce projet de loi qui nous occupe aujourd'hui, le projet de
loi n° 32, on tente d'apporter des réponses. Et je pense qu'il faut, oui,
amener ces réponses-là, mais il ne faut jamais oublier que c'est en amont et en
prévenant l'arrivée même de ces problèmes-là d'itinérance, de ces problèmes
sociaux là, de la judiciarisation aussi à l'origine de la remise des constats
d'infraction. Il y a des endroits au Québec où on essaie de plus en plus de
s'éloigner même de constats d'infraction puis on essaie de travailler beaucoup
plus dans une approche de proximité avec une police de proximité pour essayer,
justement, de ne pas judiciariser à outrance.
Bref, on comprend quand même qu'il va
demeurer des enjeux et qu'il faut essayer d'amener la réponse la plus adéquate
possible. Et à cet égard-là, on se réjouit, nous aussi, de voir qu'on consacre
ces programmes-là noir sur blanc dans le projet de loi. Mais il va falloir
s'assurer qu'on le fait le mieux possible parce que, si c'est une avancée, et
je pense qu'on le reconnaît tous et toutes, il va falloir qu'il y ait une
préoccupation pour l'accessibilité à ces programmes-là. Donc, c'est une chose
de permettre une grande marge de manoeuvre aux municipalités, notamment aux
villes...
Mme
Hivon
: ...va
falloir s'assurer qu'on le fait le mieux possible. Parce que, si c'est une avancée,
et je pense qu'on le reconnaît, tous et toutes, il va falloir qu'il y ait une préoccupation
pour l'accessibilité à ces programmes-là. Donc, c'est une chose de permettre
une grande marge de manoeuvre aux municipalités, notamment, aux villes dans la
mise en place de ces programmes-là, mais c'en est une autre également de partir
de la perspective du contrevenant, entre guillemets, ou, enfin, de la personne
qui pourrait bénéficier de ce programme-là, et de se dire que, selon l'endroit
géographique où elle se trouve au Québec, elle pourra ou ne pourra pas
bénéficier d'une approche judiciaire plus adaptée à sa réalité. C'est certain
qu'on est conscients que le gros de ces problèmes-là peut se vivre davantage en
ville, en milieu très urbain, dans les grandes villes, mais il ne faut pas
minimiser la réalité aussi des petites villes, des régions plus éloignées. Moi,
je peux vous dire, à Joliette, qu'il y a de ces enjeux-là et on ne voudrait pas
qu'il y ait des citoyens qui puissent avoir accès à ces programmes-là et
d'autres non, juste de par l'endroit où ils vivent, où on leur a remis un
constat d'infraction. Donc, ça je pense que c'est vraiment une préoccupation
qu'on doit conserver.
Je pense que le gouvernement peut aussi
être un vrai leader dans un partenariat avec les villes, avec les municipalités
pour faire en sorte que ces programmes–là voient le jour de la meilleure des
manières possible et que ces programmes-là sont les plus efficaces et les plus
adaptés possible. Alors, on va avoir l'occasion d'y revenir, je pense que ça va
être une discussion très intéressante, comme c'est toujours intéressant quand
on crée un peu des nouveaux modèles de justice ou qu'on généralise des modèles
de justice émergents. Alors, j'ai bien hâte qu'on puisse entrer dans le vif de
ce sujet-là. Donc, bien sûr, on est d'accord avec cette idée-là, mais on pense
qu'on doit s'assurer de la plus grande accessibilité possible, et tout en
gardant une certaine forme, oui, de flexibilité, mais, en même temps, en
partant du point de vue du citoyen, ça doit nous encourager à aller plus loin.
Aussi, des fois, le milieu peut devenir
l'ennemi du bien, donc il va falloir s'assurer que l'encadrement qu'on prévoit
de ces programmes-là ne fera pas en sorte qu'on pourrait se retrouver au bout
du compte avec des sentences plus sévères ou avec un nombre d'heures, comme
certains groupes nous l'ont dit, qui n'aurait pas de limite, par rapport à des
travaux compensatoires qui connaissent une limite. Et ce n'est pas parce qu'on
devrait arriver, donc, dans un programme plus formel, un programme
d'adaptabilité, qu'on devrait s'éloigner d'un plafond d'heures. Je pense que
c'est un véritable enjeu sur lequel il va falloir s'arrêter. Donc, bien sûr,
tout cela est très positif, mais le diable se cache souvent dans les détails,
donc on va avoir beaucoup de questions.
Deux autres éléments sur lesquels je veux
dire quelques mots en remarques préliminaires, bien sûr, tout le volet de
l'aide juridique. Les mots ont un poids, ont une importance, donc j'ai entendu
ce matin que la ministre se disait ouverte à apporter certains amendements,
j'espère qu'un de ces amendements-là va être de ne pas changer le vocabulaire
néfaste, grave, de... Quand on part de l'idée que le législateur ne parle pas
pour ne rien dire, bien, évidemment, quand on change des mots, c'est que ça
doit avoir une portée. Et je dois vous dire que, comme plusieurs intervenants
qui sont venus, on ne comprend pas la portée, ce qui est recherché par le
changement de ce vocabulaire-là en lien avec l'aide juridique. Même chose,
comme le souligne la commission des droits de la personne, qui a déposé son
mémoire ce matin... dont on a reçu le mémoire ce matin. Je pense qu'il va
falloir aussi s'assurer qu'il n'y aura pas de restriction dans l'accès à l'aide
juridique, à des services qui sont présentement couverts et qui ne le seraient
plus. Il faut aussi se questionner si on ne doit pas élargir pour pouvoir mieux
accompagner, avec l'aide juridique, des personnes qui vont éventuellement
pouvoir bénéficier des programmes d'adaptabilité. Donc, il va y avoir aussi un
bon débat à faire à cet égard-là pour s'assurer que l'aide juridique ne va pas
être restreinte et que l'accès à l'aide juridique pour lequel on se bat
tellement ne va pas être restreint de par des modifications qui sont apportées
par le projet de loi.
• (15 h 50) •
Et, bien sûr, en terminant, il y a toute
la question du volet des droits fondamentaux. Il y a des enjeux très, très
sérieux. Encore une fois, on se questionne sur les intentions de la ministre, du
gouvernement, notamment sur le fait de créer une infraction lorsqu'une personne
n'aurait pas sur elle une carte d'identité. C'est très inquiétant, d'un point
de vue de profilage social et racial, le Barreau du Québec, notamment, l'a fait
ressortir, plusieurs autres groupes qu'on a eu la chance d'entendre. Je pense
qu'on ne peut pas prendre ces éléments-là à la légère. Je m'explique mal le
fondement de cette volonté-là, donc j'imagine que la ministre va nous éclairer,
mais je pense qu'on ne peut pas avoir en tête qu'une question de pouvoir
accru...
Mme
Hivon
:
…plusieurs autres groupes qu'on a eu la chance d'entendre. Je pense qu'on ne
peut pas prendre ces éléments-là à la légère. Je m'explique mal le fondement de
cette volonté-là, donc j'imagine que la ministre va nous éclairer, mais je
pense qu'on ne peut pas avoir en tête qu'une question de pouvoir accru des
forces policières au nom de l'efficacité parce qu'on risque de se retrouver
avec des problèmes beaucoup plus grands sur les bras que ceux que, peut-être,
je présume, on souhaiterait éviter. Donc, ça, c'est une très grande préoccupation
qui nous habite.
Donc, je vous remercie de votre attention,
M. le Président. Puis j'offre toute notre collaboration à la ministre. Notre
objectif, c'est qu'à travers ce projet de loi là on en arrive à faire de
réelles avancées pour les personnes qui doivent être directement concernées,
pour l'efficacité de notre justice pénale mais aussi pour l'équité de notre
justice pénale. Et on est tous conscients de l'électrochoc que l'arrêt Jordan a
créé dans notre système de justice, et je pense qu'il y a du positif dans le
sens où ça force à l'action, mais encore faut-il que ça nous force à poser les
bons gestes et les bonnes actions. Merci beaucoup.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup. Alors, M. le
député de Jacques-Cartier, s'il vous plaît.
M. Kelley
: Merci
beaucoup, M. le Président. Je veux juste ajouter des commentaires parce que je
suis pas mal d'accord avec tous les propos de mes collègues, de l'opposition
ici. Je pense qu'il y a des éléments dans le projet de loi qui sont très
intéressants, des avances pour la société.
Je pense vraiment de la question
d'encadrer les systèmes informatiques... Je me souviens... Et je sais que, Mme
la ministre, vous avez participé à des sessions à The Lord Reading Society à Montréal.
Et, je me souviens, une fois, quand c'était... le vice-président d'Air Canada a
présenté sur l'intelligence artificielle qui est utilisée présentement par Air
Canada, il a dit : Il y a peut-être des façons d'appliquer ça au système
de justice pour être plus efficace, de peut-être réduire les coûts pour des
personnes, d'ajouter un plus grand accès à la justice. C'était très, très intéressant.
Certains avocats dans la salle étaient… a eu certaines craintes que peut-être
ça va réduire leurs nombres d'heures qu'ils peuvent facturer le client, et tout
ça. Mais, quand même, beaucoup des personnes ont dit : Oui, c'est une
avance, c'est sûr.
Mais jeudi dernier l'ancien président des
États-Unis Barack Obama était à Montréal, puis c'était intéressant parce qu'il
a parlé... pas nécessairement de l'intelligence artificielle dans le système de
justice, mais juste une mise en garde en général que c'est important pour les
gouvernements de commencer de regarder la question.
Et on est un petit peu en arrière...
l'encadrement de tout ça. Alors, quand même, je pense, c'est un gain pour nous
qu'on est ici aujourd'hui de regarder comment on peut améliorer le système mais
aussi encadrer ça correctement. Je pense, ça, c'est très important pour le
Québec et pour notre société.
Je pense que tout le monde a pas mal… Et
je veux juste continuer un petit peu sur la thématique de l'accès à la justice
parce que, je pense, tout le monde, à un certain moment dans leur vie, vont
probablement utiliser le système de justice. Quand même, le processus de
mariage, c'est géré par le ministère de la Justice. Alors, on regarde dans
notre vie quotidienne, on est touchés par le système de justice. Quand même, si
c'est une facture de stationnement, il y a une chicane avec... des fois, avec
une ville, n'importe quoi, ça, peut être, peut prendre un avocat, puis accès à
la cour, et tout ça. Alors, si c'est… C'est juste important de toujours
rappeler que c'est quelque chose qui est utilisé par beaucoup de Québécois,
mais ce n'est pas nécessairement un système qui est toujours accessible ou une
accessibilité est vraiment universelle. 55 % des Québécois qui sont
poursuits... ou parties d'une... poursuivis ou d'une poursuite civile, ils sont...
bien, ils décident d'autoreprésente à cause du fait que ça coûte trop d'argent
d'avoir un avocat.
Et c'est vrai, parce que je peux juste
penser quand même d'un ami qui a acheté une maison. Deux ans après ça, il a
reçu une offre d'une entreprise à l'extérieur pour travailler avec un contrat
d'un an. Il a décidé de louer sa maison à quelqu'un. Grosso modo, c'était une
mauvaise expérience. La personne a arrêté de payer son loyer chaque mois. Il a
aussi commencé de faire vraiment des dommages à la maison.
Mais tout ça, d'avoir... de forcer cette
personne-là de payer pour des rénovations, de repayer tout le loyer, là,
c'était tout un processus. Et, pour un jeune homme qui a eu un bon emploi, mais
quand même ce n'était pas une personne qui était partie de la classe riche, ça
a coûté beaucoup d'argent pour une jeune personne. Et ça, c'est quelqu'un qui a
un emploi, comme je dis, qui était vraiment dans la... je dis, dans la classe
moyenne, un bon emploi, un bon avenir. Mais il y a beaucoup des personnes de notre
société qui n'ont pas ces moyens-là.
Alors, je pense...
M. Kelley
: ...mais
quand même ce n'était pas une personne qui était partie de la classe riche, ça
a coûté beaucoup d'argent pour une jeune personne, et ça, c'est quelqu'un qui a
un emploi, comme je dis, qui était vraiment dans la... je dis, dans la classe
moyenne, un bon emploi, un bon avenir. Mais il y a beaucoup des personnes, dans
notre société, qui n'ont pas ces moyens-là, alors, je pense que c'est important
qu'on continue de discuter de l'enjeu de l'accessibilité à la justice partout
sur le territoire du Québec et je pense qu'on a vraiment une opportunité ici,
avec le projet de loi n° 32, de regarder le rapport
de la commission Viens pour s'assurer que, oui, on va — j'ai lu dans
les notes, je n'étais pas ici pour les audiences publiques, les consultations
publiques, je sais que le député d'Ungava a beaucoup d'expérience dans ces
questions-là — qu'on va ajouter deux juges pour le Grand Nord.
Ça, c'est sûr que, ça, c'est un ajout pour le Grand Nord, pour les peuples
autochtones. Mais, dans le rapport de la commission Viens, il y a beaucoup
des éléments qui parlent de la réalité autochtone puis comment on peut
s'assurer que le système est mieux encadré pour eux autres aussi.
Je regarde la réalité dans le
Grand Nord. Est-ce que c'est important de s'assurer que les juges qu'on va
ajouter vont avoir pas juste une connaissance des enjeux puis les réalités dans
le Grand Nord, mais peut-être aussi ils sont des personnes qui viennent de
la... qui ont été autochtones quand même? Est-ce que c'est une opportunité pour
le Québec de faire une avance pour les peuples autochtones du Québec? Est-ce
que c'est aussi une occasion de poser des questions? Ajouter deux juges, c'est
excellent. Mais, pour le Nord et pour nos peuples autochtones, est-ce que
maintenant c'est peut-être le moment de regarder si c'est nécessaire d'ajouter
plus de juges? Je pense qu'on a une opportunité aujourd'hui de vraiment... pas
juste aujourd'hui, mais dans les semaines, d'avoir une excellente discussion
sur comment on peut rendre la justice plus accessible pour les peuples
autochtones et des personnes plus vulnérables dans notre société parce que
c'est la réalité sur le terrain.
Et quand même à Montréal, je sais que
certains de mes collègues de l'autre côté de l'opposition ont été bien
impliqués dans le dossier de Cabot Square. Or, quelqu'un qui habile le
centre-ville de Montréal, qui utilise la station de métro d'Atwater souvent, la
situation à Cabot Square, il y a beaucoup des personnes dans une situation
très difficile. Je suis très content qu'on aura à faire une annonce importante
avec la ville de Montréal là-dessus. Mais quand même, juste pour les personnes
qui sont là, il y a beaucoup des étudiants, il y a beaucoup des jeunes
familles, il y a beaucoup des personnes qui circulent à la station de métro
d'Atwater, et ce n'est pas toujours évident pour les forces policières sur le
terrain. Mais quand même je sais qu'il y a beaucoup de travail qui a été fait.
Mais, quand on regarde le... arrestation, je comprends que les policiers sont
dans une situation difficile. Mais en même temps il faut avoir des politiques
en place pour aider des personnes qui sont dans une situation, qui rentrent
dans la ville, des peuples autochtones, c'est des personnes inuites, il faut
s'assurer que les policiers sont bien encadrés, mais aussi que ces
personnes-là, dans cette situation, sont bien entourées aussi. Alors, comme je
dis, je pense qu'on a beaucoup de... il y a vraiment une opportunité de parler
de ces enjeux très importants pour notre société. Alors, c'est tout pour moi,
M. le Président.
Le Président
(M. Bachand) : Merci beaucoup, M. le député de
Jacques-Cartier. M. le député de Pontiac, s'il vous plaît.
M. Fortin :Bonjour. Bonjour à vous, M. le Président. Merci de m'accueillir
à la Commission des institutions. Honnêtement, je pense que c'est la première
fois que j'y siège en cinq ans, mais je devrais le faire plus souvent parce que
c'est intéressant, ce qu'on étudie ici.
Je salue mes collègues, bien évidemment
les collègues qui sont ici. Je leur reconnais une certaine expertise. Je vois
des anciens policiers. Et j'entendais le député de Chomedey, ce matin
également, ses remarques d'ouverture qui reflètent bien une certaine vision du
système de justice, une certaine expérience, une certaine proximité au système
de justice.
Je vous fais une autre confidence, M. le
Président, je n'ai jamais mis les pieds dans une cour du Québec dans l'ensemble
des palais de justice du Québec, dans les palais de justice, oui, mais dans la
salle pour y être comme défendant, pour y être en fait d'un côté ou de l'autre,
je n'ai jamais eu cette, disons, opportunité parce qu'on en parlait comme
service public, de la justice, tantôt. Mais je pense qu'il y a beaucoup de
monde qui aimerait se passer de cette opportunité-là, dans la vie, de se
présenter en cour. Souvent le plus loin on peut le tenir le système de justice,
ce n'est pas toujours une mauvaise chose dans la tête des gens, et je peux les
comprendre jusqu'à un certain point.
• (16 heures) •
D'entrée de jeu, par exemple, je veux
dire, M. le Président, je tiens à saluer notre ancienne collègue Stéphanie
Vallée parce que, quand j'ai commencé à regarder le projet de loi, je me
suis...
16 h (version non révisée)
M. Fortin :
...de justice, ce n'est pas toujours une mauvaise chose dans la tête des gens,
et je peux les comprendre jusqu'à un certain point.
D'entrée de jeu, par exemple, je veux
dire... M. le Président, je tiens à saluer notre ancienne collègue Stéphanie
Vallée parce que, quand j'ai commencé à regarder le projet de loi, je me suis
rendu aux notes explicatives et je me disais : Mon Dieu! Il me semble qu'il
y a des choses que je reconnais là-dedans. Il me semble qu'il y a des... même
des mots qui ressemblaient beaucoup à ce qu'il y avait dans le projet de loi
n° 168.
Quand je regarde : «Le projet de loi
vise à introduire le mandat d'entrée, lequel permettra à celui qui est chargé
de l'exécution du mandat d'amener, d'emprisonnement ou d'arrestation de
pénétrer dans une maison d'habitation pour procéder à une arrestation», je suis
pas mal sûr que c'était dans le projet de loi n° 168, qui avait été
présenté en 2017.
Quand je regarde la question de la justice
communautaire ou du programme d'adaptabilité, de prévoir des mesures qui
permettent de tenir compte de la situation sociale de certains défendeurs, notamment
pour favoriser leur réhabilitation, je me souviens que c'était dans le texte du
projet de loi n° 168, qui avait été déposé par ma collègue à l'époque.
Alors, il y a beaucoup de choses qui se
ressemblent dans le projet de loi. Il y a des choses qui n'y sont pas, cependant.
Et ça, je sais que le Barreau du Québec était venu le dire lors des consultations
particulières, qu'il était déçu de voir qu'il n'y avait pas beaucoup de mesures
en matière civile, contrairement au projet de loi n° 168 qui, lui, en
avait davantage à l'époque. Alors, je profite de l'occasion pour saluer
Mme Vallée, qui, je l'espère, je l'espère, suivra l'évolution de nos
travaux.
Le député de LaFontaine dans ses remarques
d'ouverture un peu plus tôt y a fait référence, quand on a étudié le projet de
loi sur le cannabis... et je sais que certains collègues étaient là. Je pense
au député de Nicolet, je ne sais pas s'il était là à ce moment-là. Le député de
Chapleau y était. Le député de Vachon y était aussi. Et ma collègue de
Marguerite-Bourgeoys y était, que je suis très heureux de retrouver aujourd'hui.
Et son intervention un peu plus tôt m'a
rappelé à quel point elle nous a manqué au cours des dernières semaines alors
qu'elle était... qu'elle participait à la commission Laurent... En fait, je ne
devrais pas dire la commission Laurent parce que je trouve ça un peu réducteur
pour les autres membres de la commission qui siègent sur cette question
importante qui est la direction de la protection de la jeunesse.
Mais j'étais content de la retrouver, puis
elle a participé avec d'autres membres aux travaux de la Commission de la santé
et des services sociaux sur le projet de loi cannabis. Et on avait passé
beaucoup de temps à ce moment-là à débattre... et débattre, ce n'est peut-être
pas le bon mot, mais à vouloir comprendre ce que le ministre délégué à la Santé
avait en tête quand lui-même nous parlait de ce concept-là de justice
communautaire. Et on est passés à... Disons que le ministre a commencé en étant
plutôt volubile, en tentant de nous expliquer où il voulait en venir, et qu'à
la fin on l'était un peu moins. Et on disait : Bien, attendez, la ministre
de la Justice va nous préciser ce qui s'en vient, elle a quelque chose qu'elle
va déposer, on va pouvoir savoir le portrait global.
Alors là, aujourd'hui, on a une meilleure
idée, on a une meilleure idée d'où le gouvernement veut aller avec ces
choses-là, parce qu'a ce moment-là, M. le Président, ce n'était vraiment pas
clair. On nous avait dit, par la voix du ministre délégué à la Santé, qu'un
policier pourrait décider, en regardant une personne, si cette personne-là
méritait un ticket ou non, si le ticket devrait être diminué, si... Et on
parlait à ce moment-là de la nouvelle demande de 100 $ pour possession de
cannabis pour les 18-21 ans.
Et on nous avait parlé du concept de
justice communautaire, mais la façon que c'était expliqué, ça nous était apparu
à l'époque plutôt brouillon, plutôt mal ficelé, plutôt mal réfléchi. Alors, je
pense qu'il y a beaucoup de gens qui vont vouloir comprendre les détails de la
chose. Et je pense que ce sera fort probablement une des parties importantes de
toute l'étude qui suivra nos remarques d'introduction.
Évidemment, on va avoir des questions très
pointues sur certains enjeux. Et j'entendais le député de Gouin plus tôt y
faire référence, et il avait raison de le faire, toute la question de
l'article 19. L'article 19, M. le Président, du projet de loi fait en
sorte qu'un policier qui a raison de croire qu'il y aurait infraction pourrait
demander, pourrait exiger une pièce d'identification. Et le député de Gouin a
fait, un peu plus tôt dans son allocution, référence à un cas bien particulier
d'une personne qui avait traversé la rue, peut-être pas au bon endroit, disons,
au bon moment, au bon endroit, et le policier lui avait exigé une pièce
d'identification. Mais l'exemple...
M. Fortin :
…le député de Gouin a fait, un peu plus tôt dans son allocution, référence à un
cas bien particulier d'une personne qui avait traversé la rue, peut-être pas au
bon endroit, disons, au bon moment, au bon endroit, et le policier lui avait
exigé une pièce d'identification. Mais l'exemple, aussi valide soit-il, ce
n'est pas le cas qui est nécessairement problématique. C'est un des cas qui
peut être problématique, mais on peut aller plus loin que ça, le policier peut
aller plus loin que ça. Dans ce cas-là, le policier, fort probablement, a vu,
de ses yeux, la personne commettre une infraction. Il était pas mal certain
qu'il avait commis une infraction. Il l'a vu traverser la rue au mauvais
endroit, et je ne pense pas que ça ait même été remis en question par le garde
de sécurité, à ce moment-là.
Mais ce que l'article 19 vient dire,
essentiellement, c'est que si le policier croit ou suspecte ou pense qu'il y
aurait infraction, a raison de croire qu'il y aurait infraction, pas quand
c'est un cas évident, documenté, quand il y a infraction, mais quand on pense
qu'il pourrait y avoir infraction. Quand un policier vous voit d'un côté de la
rue et dit : Bien, comment vous vous êtes rendu là? Je pense que vous avez
traversé au mauvais endroit. Là, il peut vous demander une pièce d'identification.
Alors, on est très loin, très loin de ce qui est le cas en ce moment. On est
très loin de traiter les gens de façon équitable, disons, parce que, quand on
parle de toute la question du profilage, quand on parle de toute la question…
et je ne prête aucune mauvaises intentions aux policiers de façon générale,
mais quand on parle de profilage, quand on parle de mesures qui font en sorte
que certaines tranches de la population plus vulnérables peuvent être éprouvées
de façon disproportionnée, bien, en voilà une.
Ce n'est pas pour rien, et la députée de
Marguerite-Bourgeoys y a fait référence en long puis en large, à la question de
l'itinérance, mais ce n'est pas pour rien que les itinérants, au Québec,
reçoivent beaucoup plus de constats pour avoir traversé une rue au mauvais
endroit, ce qu'on appelle, je n'ai pas trouvé de terme en français, pour ça,
là, mais le fameux «jaywalking», là, ils traversent… reçoivent beaucoup plus de
constats, ils sont plus propices à ça, ils sont plus vulnérables à se trouver
dans cette situation-là. Et il ne faudrait surtout pas, pour un projet de loi
qui met de l'avant, et il y a des bonnes choses dans le projet de loi, là, mais
qui met de l'avant un concept de justice communautaire... Quand la ministre de
la Justice nous dit, elle-même, qu'une des choses qu'elle veut, c'est mettre
fin au phénomène des portes tournantes. Bien, les portes tournantes, c'est
quand on fait référence à l'itinérance, souvent, le concept des portes
tournantes, en justice, c'est à eux qu'on fait référence, les gens qui sont
incapables de payer leur amende puis les gens qui reviennent constamment dans
le système, qui reviennent constamment en cour, que les amendes s'accumulent,
les pénalités sont de plus en plus sévères.
Alors, pour un projet de loi qui devrait
vouloir mieux traiter ces gens-là, s'assurer qu'ils sont respectés davantage,
bien, malheureusement, il y a des mesures comme celles-là, comme
l'article 19. Les itinérants souvent n'ont pas de pièce d'identité sur
eux, les itinérants souvent se retrouvent dans une position plus vulnérable où
ils peuvent recevoir des constats que vous, moi et quelqu'un d'autre ne
recevrait peut-être pas, M. le Président. Le projet de loi se doit de corriger
certains des articles qu'il avance.
M. le Président, je ne sais pas si vous
avez vu ce matin, mais ce matin, il y avait un article de La Presse,
pendant qu'on siégeait, pendant que je regardais les remarques que je pourrais
utiliser, en après-midi, que j'étais en train de me préparer, que j'écoutais,
en même temps, le plaidoyer du député de LaFontaine, il y a un article qui a
dit qu'un jeune sur cinq, un jeune sur cinq, connaît un épisode d'itinérance
après la fin de sa prise en charge à la DPJ. Un jeune sur cinq. Alors, si on a
un projet de loi qui, malheureusement, et je pense que ça va contre les
intentions du gouvernement, je ne crois pas que c'était ce qu'il voulait faire,
mais si on a un projet de loi qui, malheureusement, peut faire en sorte de
cibler ou, disons, de mener à ce que les itinérants soient en position encore
plus vulnérable face au système de justice, et qu'on sait que, peut-être, ces
gens-là se retrouvent en situation d'itinérance parce qu'on n'en a pas fait
assez comme État, parce que, comme protection de la jeunesse, on n'en a pas fait
assez.
• (16 h 10) •
C'est vraiment à nous, M. le Président, à
corriger le projet de loi. Et je suis content qu'il y a beaucoup d'amendements
qui ont été présentés, parce que les groupes qui sont venus en commission
parlementaire ont mené à ces amendements-là, les commentaires qu'ils ont faits
ont mené à ces amendements-là. Et ça, c'est une très bonne chose que la
ministre soit ouverte à faire des amendements, à faire des changements, à faire
des modifications pour améliorer le projet de loi, mais on espère très
sincèrement que cette question-là va être adressée lors des travaux de la
commission, parce que la question des portes tournantes, effectivement, on doit
s'y attarder, on doit s'y attaquer, on doit en faire davantage et on…
M. Fortin :
…à faire des amendements, à faire des changements, à faire des modifications
pour améliorer le projet de loi, mais on espère très sincèrement que cette question-là
va être adressée lors des travaux de la commission, parce que la question des
portes tournantes, effectivement, on doit s'y attarder, on doit s'y attaquer.
On doit en faire davantage et on doit s'inspirer de ce qui se fait de mieux, un
peu comme le programme IMPAC du Service de police de la ville de Québec. Je
pense que c'est l'intention de tout le monde, je pense que c'est l'objectif du projet
de loi, mais il faut juste s'assurer qu'on aille tous dans cette direction-là
et que, pour certaines populations qui sont les plus vulnérables, on ne prenne
pas un pas de recul. Je vous remercie, M. le Président.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup, M. le député.
Est-ce qu'il y a d'autres interventions? S'il n'y a pas d'autre intervention,
nous sommes maintenant à l'étape des motions préliminaires. Y a-t-il des
motions préliminaires? Pas d'autre motion préliminaire, donc nous allons
prendre en considération maintenant l'article 1 du projet de loi. Oui, M. le
député de LaFontaine, s'il vous plaît.
M. Tanguay
: …préciser,
à moins d'indication contraire, donc, conformément à l'article 245 de notre règlement,
nous demanderons donc que nous procédions article par article, alinéa par
alinéa et paragraphe par paragraphe.
Le Président (M.
Bachand) : Parfait. C'est bien noté. Merci infiniment. Donc,
Mme la ministre, la parole est à vous, je vous laisse donc lire et expliquer
l'article 1.
Mme LeBel : Ça ne change pas
la façon dont je fais la lecture, j'imagine.
Le Président (M. Bachand) :
Non, non, absolument pas.
Mme LeBel : Parfait. Merci. La
tête en bas ou… Bon. On commence. Merci, M. le Président. Article 1 : Le
Code de procédure pénale (chapitre C-25.1) est modifié par l'insertion, après
l'article 2.1, du suivant :
«2.2. Dans l'application du présent code,
il y a lieu de privilégier l'utilisation de tout moyen technologique approprié
qui est disponible tant pour les parties que pour le tribunal en tenant compte,
pour ce dernier, de l'environnement technologique qui soutient l'activité des
tribunaux.
«Sous réserve de l'article 61, un juge
peut utiliser un tel moyen ou ordonner qu'il le soit par les parties, même
d'office, notamment dans la gestion de l'instance.»
Commentaires. L'article proposé est
similaire à l'article 26 du Code de procédure civile. Il marque l'intégration
des technologies de l'information à la procédure pénale. L'utilisation de ces
technologies peut permettre d'accroître l'efficacité de la justice, d'augmenter
la qualité des services offerts, de diminuer les délais, ainsi que les coûts
afférents. La responsabilité du juge, dans la gestion de l'instance, justifie
le fait qu'il doit pouvoir donner l'utilisation de ces techniques malgré un
refus de l'une ou des deux parties. Cependant, il doit agir dans les limites
des technologies qui sont disponibles, tant pour les parties que pour le
tribunal, compte tenu des contraintes d'utilisation, dont les coûts qui leur
sont associés. Merci.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. Interventions? M. le député de
LaFontaine, s'il vous plaît.
M. Tanguay
: Oui, merci,
M. le Président. Alors, je suis heureux que nous débutions donc, cet après-midi,
nos travaux, on débute nos travaux de façon plus formelle article par article
cet après-midi, et j'ai dû mettre de côté donc mes requêtes préliminaires qui
étaient prêtes ce matin, mais que d'autres auraient plaidées à ma place.
L'article 1, des questions… puis je salue,
pour avoir déjà travaillé avec Mme la ministre, les autres collègues également
en matière de justice, je référerais au p.l. n° 6, p.l.
n° 20 ce matin, puis on a souvent des questions très, très pointues, et on
veut faire un arrimage. Puis, quand on dit, dans un code de procédure civile ou
code de procédure pénale, que les termes doivent avoir un sens non équivoque,
univoque et faire en sorte qu'il y ait donc un seul terme pour une même
réalité.
Premier élément. Quand l'on
fait le parallèle, et il est exact, entre le nouvel article 2.1 qui est
proposé, dont l'insertion est proposée ici, on fait le parallèle avec l'article
26 du Code de procédure civile, l'article 26 du Code de procédure civile, dans
son premier alinéa, est, à toutes fins pratiques, copié-collé avec le premier
alinéa du 2.2 proposé. Quand on regarde le deuxième alinéa de l'article 26 du
Code de procédure civile, on constate une uniformité de termes que l'on ne
retrouve pas dans le 2.2. Je m'explique. Ce n'est pas moi qui vais apprendre à
la ministre que dans les codes de procédure les définitions changent. Lorsque
vous parlez d'un juge ou du tribunal, les définitions, les compréhensions vont
souvent changer, et ce sera en lien avec les compétences, ce que peut faire un
juge. Je me rappelle, moi... Mme la ministre est davantage du point de vue
pénal ; moi, je suis davantage du point de vue civil, mais là-dessus il y
a une similitude, là : la compétence du juge dans son bureau, la
compétence du juge lors... en chambre d'audience, la compétence du juge en
procès, compétence du tribunal également. Il y a dans l'article 26 du Code de
procédure civile une compétence qui est donnée, un moyen qui peut être ordonné
ou permis par le tribunal dans le premier alinéa et par le tribunal dans le
deuxième alinéa. Or, l'analogie cesse lorsqu'on regarde le 2.2. Dans le 26 du
Code de procédure civile, on dit «le tribunal peut» puis dans le 2.1 «le
tribunal peut». Dans le 2.2, on dit : «Le tribunal, en tenant compte de...
M. Tanguay
: ...et
par le tribunal dans le deuxième alinéa.
Or, l'analogie cesse lorsqu'on regarde le
2.2. Dans le 26 du Code de procédure civile, on dit «le tribunal peut», puis
dans... «le tribunal peut». Dans le 2.2, on dit : «le tribunal, en tenant
compte de l'environnement approprié qui est disponible tant pour les parties
que pour le tribunal», «en tenant compte». Donc il y a moyen d'utiliser tout
moyen technologique. Mais, dans le 2.2, on dit : «un juge peut utiliser un
tel moyen ou ordonner qu'il le soit par les parties...». Alors que, selon moi,
c'est un questionnement, puis la ministre pourra me détromper, n'aurait-on pas
dû lire : «Le tribunal peut utiliser un tel moyen ou ordonner qu'il le
soit par les parties»?
Le Président (M.
Bachand) : Mme la ministre.
Mme LeBel : Dans
presque... je ne dirais pas l'entièreté parce que, quand on fait des englobants
comme ça, des fois on se trompe, mais partout dans le Code de procédure pénale,
on emploie le mot «juge», dans le Code de procédure civile, on emploie le mot
«tribunal», de façon générale. Comme vous l'avez bien noté, on n'introduit
pas ici une mesure qui n'a pas déjà été testée devant les tribunaux. Je pense
que la mesure du Code de procédure civile, si je ne me trompe pas, date de
2014, donc elle a déjà été testée et élaborée devant les tribunaux. À travers
le Code de procédure civile, on emploie beaucoup plus le mot «tribunal». À
travers le Code de procédure pénale, on emploie le mot «juge».
Dans le premier alinéa de 2.2, naturellement,
on dit que «tant pour les parties que pour le tribunal», parce que là, on ne
parle pas du juge lui-même, on parle de l'environnement dans lequel… le
tribunal au sens plus large, dans lequel les parties devront évoluer.
Je pense que ce qui est très important de
comprendre, parce que les commentaires qui ont été faits en consultations
particulières étaient la crainte qu'on force des parties à utiliser des
technologies qu'elles n'avaient pas à leur disposition ou que l'on force
peut-être des... que certains juges forcent des municipalités à se prévaloir
d'un environnement technologique. Ce qu'il est important de dire, c'est :
«qui est disponible — hein, donc — tant pour les parties
que pour le tribunal». Et c'est important de le dire également parce que l'article 29
de la loi qui concerne le cadre juridique des technologies de l'information
prévoit qu'on ne peut pas exiger de quelqu'un qu'il se procure une technologie.
Donc, ce que j'essaie d'expliquer par là,
c'est que, si les parties n'ont pas de façon personnelle cette technologie-là
de disponible, le juge ne peut pas forcer l'utilisation d'une technologie qui
n'est pas disponible.
Je prends un peu les devants sur certaines
de vos remarques, cher collègue, mais je convaincue... parce que ça faisait
partie de ce qu'on appelait... il y avait d'autres éléments, mais la fameuse
possibilité de fracture technologique, là. Mais je veux que ça soit clair qu'il
faut que la technologie soit disponible avant l'ordonnance du juge, si je peux
m'exprimer ainsi.
Si vous n'êtes pas assez... ma réponse
n'est peut-être pas assez technique à votre goût, je peux peut-être passer la
parole au légiste qui s'est occupé de cet article-là pour répondre de façon
plus pointue, cher collègue, mais...
M. Tanguay
: Pas
de problème. Juste...
Le Président (M.
Bachand) : M. le député, oui, allez-y.
M. Tanguay
:
Peut-être, avant de permettre... Donc, je comprends bien qu'à l'article 3
du Code de procédure pénale, l'on définit la compétence du juge, qui est en
lien avec Cour du Québec, cours municipales, et leurs compétences respectives
prévues en vertu de la loi.
Si l'on dit que, par cohérence interne au
Code de procédure civile, qui est bien rédigé, là, article 26 est bien
rédigé, jusqu'à preuve du contraire, où on dit, c'est davantage... Code de
procédure civile, «tribunal» qui est utilisé, et davantage, Code de procédure
pénale, «juge», qui est utilisé, il y a une cohérence, donc, interne au Code de
procédure civile à l'article 26 lorsqu'on dit «tribunal», «tribunal».
N'aurions-nous pas dû lire «juge» et «juge» dans le Code de procédure pénale?
Et pourquoi?
Mme LeBel : Bien, parce
qu'au premier alinéa ce n'est pas qui est disponible pour le juge lui-même,
c'est vraiment disponible pour le tribunal, qui implique la greffière aussi
puis l'environnement technologique dans lequel on évolue. Donc, le tribunal, si
je ne me trompe pas, au premier alinéa, a le sens plus large de
l'environnement, le lieu où on va procéder. Dans...
Le tribunal peut aussi, comme vous le
savez, vous l'avez souligné, cher collègue, avoir le sens du juge lui-même dans
le Code de procédure civile. Dans le premier alinéa, on va prendre
l'environnement technologique du tribunal, et pas celui du juge lui-même
comme... à titre d'individu.
M. Tanguay
: Vous
comprenez, M. le Président, que ce qu'on fait là, c'est toujours important
parce qu'évidemment ça, c'est un terreau qui est une... quasi une chasse
gardée, sauf ceux qui se représentent seuls, des avocates et des avocats,
savoir le code de procédure, tantôt civile, tantôt pénale. Alors, ce que nous
disons là souvent est utilisé lors des débats d'interprétation, qu'a voulu dire
le législateur. Alors, c'est pour ça que l'échange que l'on a ici est
important. Et, qui sait, peut-être qu'un jour, s'il y a un débat de
compétences, on pourra s'y référer, à ce que l'on dit. Alors, ce qu'on fait là
est important en termes de législateur.
Question, donc, miroir, puis j'entends
bien ce que dit Mme la ministre : Y a-t-il eu, à sa connaissance... je
sais qu'on n'amende pas l'article 26 du Code de procédure civile, mais y
a-t-il eu à sa connaissance, donc, pour le deuxième alinéa, auquel on fait
référence, de l'article 26 du Code de procédure civile, un débat
juridictionnel?
• (16 h 20) •
Parce que, vous me voyez venir, lorsqu'on
est en matière civile, vous avez raison, il y a le tribunal, il y a le juge
dans son bureau, il y a le juge lors de l'audition, au fond, il y a le... et il
y avait plusieurs compétences qui, tout dépendamment du chapeau que portait le
ou la...
M. Tanguay
: ...de l'article 26
du Code de procédure civile, un débat juridictionnel, parce que vous me voyez
venir, lorsqu'on est en matière civile, vous avez raison, il y a le tribunal,
il y a le juge dans son bureau, il y a le juge lors de l'audition au fond, et
il y avait plusieurs compétences qui, tout dépendamment du chapeau que portait
la ou le juge, en découlaient.
Y a-t-il eu donc, en matière civile, des
débats de compétence? Autrement dit, un juge dans son bureau pouvait-il, parce
que c'est marqué «tribunal», demander le recours à un moyen technologique ou
l'on pouvait plaider... bien, pas compétence, parce que c'est le juge dans son
bureau, or, 26 dit : C'est le tribunal. Comprenez-vous? On peut peut-être
demander au...
Le Président (M.
Bachand) : Est-ce qu'il y a consentement pour que... Oui. Avant
de débuter, peut-être vous identifier, s'il vous plaît. Merci beaucoup.
M. Robitaille (Jean-Félix) :
Jean-Félix Robitaille, du ministère de la Justice. Écoutez, je n'ai pas pu,
malheureusement, lire toutes les décisions qui ont pu avoir lieu, là, en vertu
de l'article 26 du Code de procédure civile, mais celles que j'ai pu lire,
c'était vraiment… la demande avait été faite à un juge d'utiliser… d'ordonner
l'utilisation d'un moyen technologique, là, et donc je dirais que, dans les cas
que j'ai pu voir, il s'agissait d'un juge. Donc, voilà.
M. Tanguay
: O.K.
Alors, parfait. Il n'y a pas de problème, puis on pourra clore le débat ici, M.
le Président, juste pour que l'on précise l'intention du législateur. Et je crois
donc dénoter de cela, puis tant mieux si c'est ça, puis on aura eu l'avantage
de le préciser que, tel que nous devons interpréter… pas l'article 26, parce
que ce n'est pas l'objet du débat, le nouvel article 2.2, lorsque l'on parle,
dans l'alinéa 1, du tribunal et, dans l'alinéa 2, le juge, l'approche qui est
l'intention du législateur est de dire : En somme, dans tous les cas
d'espèce, où il y a audition que ce soit techniquement sous un chapeau,
peut-être que l'analogie est imparfaite en matière civile, sous un chapeau de
juge en son bureau, de demande de son garde ou de toute procédure, ou à toute
étape d'un dossier, ou dans tout contexte de procédure, lorsque nous sommes
devant un juge, nous pouvons soulever et requérir un moyen technologique et, bien
plus important, le ou la juge peut proposer et requérir des moyens
technologiques et qu'en aucun cas une avocate ou un avocat ne serait justifié
de dire : Bien, vous n'avez pas compétence et d'ainsi initier un débat sur
les termes «juges et tribunaux».
Le Président (M.
Bachand) : Merci. M. Robitaille, peut-être rajouter.
M. Tanguay
: C'est un
«call» qui est assez lourd.
Le Président (M.
Bachand) : Mme la ministre, ça convient?
M. Tanguay
: C'est
l'intention du législateur.
Mme LeBel : Bien, c'est
l'intention de ne pas susciter de débat sur cette question, mais je pense que
là, le cœur du débat était en consultation, puis je vais y revenir, sur la
disponibilité de la technologie. Donc, il faut s'attendre que, pour ce faire,
il faut que la technologie soit disponible déjà, donc on ne peut pas forcer
l'usage d'une technologie qui n'est pas disponible, je pense que c'est
important de le dire parce que, quand on parlait de la fracture technologique,
on n'était pas sur la compétence, là, on était sur la disponibilité d'une telle
technologie, je veux que ce soit clair.
M. Tanguay
: Juste
pour… c'est correct, mais que la ministre me gratifie d'aller au-delà et pas
uniquement de ce qui a été entendu en consultation. Vous avez raison,
n'inquiétez-vous pas, mon amendement est prêt pour ce qui est venu nous dire
les procureurs des cours municipales, puis mon amendement est prêt pour ceux
qui sont venus nous dire, de l'Association des juristes progressistes, ça, je les
ai, il n'y a pas de problème. Mais je suis, à titre de législateur, sur
l'aspect… parce que là, juste pour le bénéfice de tout le monde autour de la
table, un juge peut ordonner qu'il le soit par les parties.
Alors, mon point et ma question à Mme la
ministre, puis c'est correct, on peut fermer la porte dès maintenant, il
serait… et c'est ce que je comprends, puis elle me corrige si j'ai tort, sinon
qu'elle me dise oui, c'est ça qu'il faut comprendre, je comprends qu'en tout
cas d'espèce, lorsqu'on est devant un juge ou une juge, peu importe qu'elle
soit dans son bureau, en audience, au fond d'un procès, requête préliminaire,
lorsqu'on est devant un juge, il ou elle a compétence dans tous les cas
d'espèce pour ordonner que l'on utilise des moyens technologiques. Est-ce que
j'ai raison de croire ça?
Mme LeBel : C'est l'intention.
M. Tanguay
: Parfait.
C'est ça qu'on veut avoir, M. le Président. Là, on vient de fermer une porte de
débat de compétence que peut-être des confrères, consoeurs auraient eu
intention de soulever.
M. le Président, on parle «sous réserve de
l'article 61», au deuxième alinéa, «sous réserve de l'article 61», et lorsqu'on
va voir
le Code de procédure civile, j'aimerais ça qu'on
nous donne plus amples explications… le Code de procédure pénale, pardon, on
dit «sous réserve ce l'article 61», en quoi était-il nécessaire de soulever
cette réserve de l'article 61?
Mme LeBel : Avec votre
permission.
Le Président (M.
Bachand) : Me Robitaille, oui.
M. Robitaille (Jean-Félix) :
Jean-Félix Robitaille, ministère de la Justice. L'idée de prendre… comme 61 est
une disposition…
M. Tanguay
: …Code de
procédure pénale, pardon. On dit : «Sous réserve de l'article 61». En quoi
était-il nécessaire de soulever cette réserve de l'article 61?
Une voix
: Avec votre
permission.
Le Président (M.
Bachand) : Me Robitaille, oui.
M. Robitaille (Jean-Félix) :
Jean-Félix Robitaille, du ministère de la Justice. L'idée étant de… comme 61
est une disposition générale, on voulait s'assurer qu'il n'y ait pas de conflit
potentiel entre les deux, et de s'assurer de… que 61 puisse garder tout son
effet, là, dans l'esprit des praticiens. Et c'était ça… là, était l'intention.
M. Tanguay
: Et à
l'intérieur de l'article… Je pense que vous aviez terminé.
Une voix
: …
M. Tanguay
: À
l'intérieur de l'article 61, ça veut dire à l'article 61, évidemment, on parle
des règles de preuve en matière criminelle, dont la Loi sur la preuve au Canada.
On parle évidemment de s'appliquer de façon à ce que les adaptations nécessaires
soient en… tenues compte. Donc, si je comprends bien, M. le Président, on ne
voulait pas limiter d'aucune façon les autres moyens d'utiliser des outils technologiques
qui sont par ailleurs prévus dans de telles lois, à l'article 61, sans plus,
là, sans plus?
M. Robitaille (Jean-Félix) :
Exact.
Mme LeBel : Mais…
Le Président (M.
Bachand) :Mme la ministre, pardon.
Mme LeBel : Bien, l'objectif, dans
le fond, c'est de faire en sorte que, s'il y avait le conflit potentiel, qu'on
n'envisage pas aujourd'hui, parce qu'on peut, hein… vous savez, le droit, c'est
vivant, donc en 2.2, paragraphe… deuxième alinéa, entre l'article 61 et ce
qu'on édicte à 2.2, bien c'est l'article 61 qui pourra… l'article 61 aura quand
même son plein effet et ne sera pas limité par l'article 2.2.
M. Tanguay
: Et ce qui
est intéressant, M. le Président, quand on regarde… et j'ai eu le bénéfice de
me procurer le Code de procédure pénale annoté, édition 2019, qui est préparé
par… directeur… DPCP, direction des poursuites criminelles et pénales. Et là,
c'est intéressant, parce qu'on toute la jurisprudence et les références
intéressantes.
De ce que, donc, je comprends, c'est que
2.2 fait miroir à l'article 26 du Code de procédure civile, mais ce faisant, il
y avait déjà un corpus quand même assez étayé, dans toutes les lois qui sont
mentionnées à l'article 61 et qui par ailleurs permettaient… donc, règles de
preuve en matière criminelle, Loi sur la preuve au Canada, Loi concernant le
cadre juridique des technologies de l'information, Code criminel et ainsi de
suite. Dans ces mêmes lois-là, M. le Président, ce n'est pas de droit nouveau…
que vient créer 2.2, mais on vient en quelque sorte, oui, le préciser dans le
Code de procédure pénale, mais on voyait déjà, avec la jurisprudence à l'appui,
que beaucoup de choses se faisaient déjà en cette matière-là. Donc, je pense
que c'était l'objectif de récupérer l'entièreté de ces possibilités-là? Point
d'interrogation.
Le Président (M.
Bachand) : Mme la ministre, ça va?
Mme LeBel : Oui. Pas de
commentaire.
M. Tanguay
: Oui, non?
Mme LeBel : Bien, j'ai dit ce
que… non, bien, j'ai dit ce que j'avais à dire. Donc, c'était pour s'assurer
que l'article 61 puis... tout le corpus qui va avec ça ait son plein effet, là…
il ne soit pas en conflit.
M. Tanguay
: L'article
61, M. le Président, fait référence, et dans sa jurisprudence, fait directement
référence à la Loi concernant le cadre juridique des technologies de
l'information. Et il y a même de la jurisprudence à cet effet-là… une loi
québécoise qui de mémoire a été adoptée en 2001. Je crois que Mme la ministre a
demandé… j'ai vu passer un article… a demandé à un professeur de droit de faire
une analyse quant à l'à-propos, l'applicabilité de la Loi concernant le cadre
juridique des technologies de l'information. J'aimerais savoir si sa réflexion
est avancée là-dessus. Sinon, je vais sortir le…
Mme LeBel : Je n'ai pas de
commentaire à ce sujet-là.
M. Tanguay
:
Pouvez-vous confirmer que c'est le cas ou non, vous ne le savez pas?
Mme LeBel : Honnêtement, là,
si je suis très honnête à ce moment-ci, je n'ai aucune idée à quoi vous faites
référence. Peut-être que j'ai dit quelque chose qui ressemble à ça, je ne le
nie pas, là, mais ce n'est pas à ma mémoire, là.
M. Tanguay
: O.K, donc…
O.K. Il n'y a pas de problème. Je vais faire sortir la référence. Si tu peux
faire la… Loi concernant le cadre juridique des technologies de l'information,
chapitre I.I, il n'y a pas, Mme la ministre, une analyse présentement faite par
un mandat donné... faite à un professeur d'université?
Le Président (M.
Bachand) : Mme la ministre.
Mme LeBel : Pardon,
excusez-moi, j'essayais de vérifier, effectivement si…
M. Tanguay
: Est-ce
qu'on peut suspendre?
Mme LeBel : Oui, ce serait
apprécié.
Le Président (M.
Bachand) : On va suspendre quelques instants. Parfait, merci.
(Suspension de la séance à 16 h 29)
16 h 30 (version non révisée)
(Reprise à 16 h 34)
Le Président (M.
Bachand) : Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay
: Oui, M.
le Président. Donc, le 3 juillet 2019, dans Droit-Inc, nous
apprenions : «Nouveau mandat du ministère de la Justice pour un prof de
l'UdM. Le professeur de l'Université de Montréal Vincent — Gautrin...
Gautrais, pardon — Vincent Gautrais, titulaire de la
Chaire L.R. Wilson, est mandaté par le ministère de la Justice du Québec pour
évaluer si la Loi concernant le cadre juridique des technologies de
l'information, C-1.1, est pleinement conforme à la réalité du XXIe siècle.
Cette loi a été adoptée par l'Assemblée nationale en 2001. L'étude du
professeur Gautrais évaluera si des pans de la réglementation devraient être
revus pour mieux refléter l'évolution du secteur des technologies de
l'information au XXIe siècle, qui est en perpétuel changement.» Fin de la
citation de l'article.
Donc, il appert effectivement que ce n'est pas Mme la ministre qui l'a déclaré, mais c'est un
mandat sous sa gouverne au sein du ministère de la Justice. Puis je lui demanderais s'il était possible pour elle de nous donner,
si ce n'est pas aujourd'hui,
ultérieurement, des précisions quant à ce mandat, parce
que vous comprendrez que, pour nous, on est en plein au
coeur... au coeur ce qui est discuté. Puis pourquoi j'ai accroché là-dessus?
C'est que, dans le contexte de l'article 61 auquel fait référence le nouvel article 2.2, il y a de la jurisprudence qui cite dans plusieurs cas d'application ladite loi concernant le cadre
juridique...
M. Tanguay
: ...de ce
qui est discuté. Puis pourquoi j'ai accroché là-dessus? C'est que, dans le
contexte de l'article 61 auquel fait référence le nouvel article 2.2,
il y a de la jurisprudence qui cite, dans plusieurs cas d'application, ladite
Loi concernant le cadre juridique des technologies de l'information. Et ça, si
d'aventure le ministère de la Justice fait déjà une évaluation sur le
bien-fondé ou pas au XXIe siècle de cette loi-là, bien, ça pourrait, le
cas échéant, être pertinent, M. le Président.
Le Président (M.
Bachand) : Merci. Mme la ministre.
Mme LeBel : On y reviendra.
M. Tanguay
: Parce que,
M. le Président, je dois vous dire que je pratiquais à l'époque, en 2001, quand
cette loi-là est sortie, et honnêtement, pour avoir pratiqué jusqu'en 2007,
même 2009, cette loi-là, et je le dis en tout respect, n'avait pas
d'application régulièrement dans nos cours de justice.
Lorsqu'on parlait de l'intégrité des
documents, sur quel support, sur quel outil technologique pouvons-nous faire la
preuve, jusqu'à quel point pouvons-nous ou pas contester la validité en matière
de preuve d'une clé USB, d'un DVD, présomption d'intégrité, et autres — cette
loi-là avait d'autres aspects — on est en plein dans le coeur de ce
que l'on veut faire ici par le Code de procédure pénale, qui relève du droit
québécois, et une loi québécoise qui est en plein sous ce secteur-là.
Alors, le cas échéant, si on confirme le
mandat donné par le ministère de la Justice à M. Gautrais, le cas échéant,
il s'agirait de savoir, M. le Président, via Mme la ministre de la Justice,
l'échéancier, la teneur du mandat, et donc avoir un peu plus de détails par
rapport à cela. C'est ce qui est demandé.
M. le Président, il y avait effectivement,
proposé par... Donc, je poursuis sur l'article 2.1. Dans le mémoire et
l'audition de l'Association des procureurs de cours municipales du Québec, leur
premier élément était de faire écho à une réalité qu'en matière de technologie
les cours municipales sont réellement précurseures en la matière. Cour
municipale de Laval est un premier de classe parce qu'elle est déjà une cour
sans papier.
Et eux disaient : Bien, il faut tenir
compte du fait que ce ne sont pas toutes les cours municipales qui sont au même
niveau, bien évidemment, donc voulaient introduire dans la rédaction de
l'article 1, qui introduirait le nouvel article 2.2, après «sous
réserve de l'article 61», d'ajouter les termes «et des limites des moyens
que la cour dispose», d'ajouter ces termes-là. Alors, ça, c'est la suggestion
de l'Association des procureurs de cours municipales. J'y fais écho. J'aimerais
savoir comment reçoit cette proposition... Comment la ministre de la Justice
reçoit-elle cette proposition?
Le Président (M.
Bachand) : Mme la ministre.
Mme LeBel : Merci, M. le
Président. Bien, on était très sensibles à cette préoccupation-là. Toutefois,
nous, on considère qu'à ce stade-ci, puis j'ai eu l'occasion de le dire tantôt,
d'entrée de jeu, que les termes «de tout moyen technologique approprié qui est
disponible tant pour les parties que pour le tribunal» répondent à cette
préoccupation-là, et que l'amendement n'est donc pas nécessaire, M. le
Président.
Le Président (M.
Bachand) : M. le député.
M. Tanguay
: Ne
croit-elle pas, «dans l'application du présent
code — 2.2 — il y a lieu de privilégier l'utilisation de
tout moyen technologique approprié qui est disponible tant pour les parties que
pour le tribunal», qu'il y aurait lieu, au deuxième alinéa... «sous réserve de
l'article 61 et des limites des moyens que la cour...» — des moyens
«dont la cour dispose» plutôt que «que la cour dispose» — qu'il y
aurait lieu quand même, quand on dit, il va sans dire, mais, comme législateur,
que de le rajouter là, ce serait tout à fait pertinent de le préciser? Parce
que, dans la même phrase, on dit que le juge peut l'ordonner.
Alors, dans la phrase qui est le deuxième
alinéa, sous réserve de l'article 61, un juge peut ordonner... peut
utiliser un témoin ou ordonner qu'il le soit par les parties, il s'agit là d'un
pouvoir qui est donné au juge de l'ordonner. Bien, dans le contexte de ce
pouvoir-là qui est dévolu au juge de l'ordonner, qu'on dit au juge : Vous
devez, par contre, considérer les limites des moyens dont la cour dispose...
qu'il y aurait lieu de le préciser là? Parce que ça ne participe pas du même
alinéa.
Le Président (M.
Bachand) : Mme la ministre.
Mme LeBel : Bien, je pense
qu'il est bon de réitérer à ce stade-ci, M. le Président, que l'article est
similaire à l'article 26 du Code de procédure civile. On en a parlé
tantôt. Ça ne pose pas de problème, 2014, le Code de procédure civile. Et nous
considérons, bien qu'on partage les préoccupations qui ont été soulevées lors
de la consultation particulière... On partage les préoccupations, mais on
considère que la rédaction, telle que proposée, le juge peut l'ordonner, mais
dans les limites du moyen technologique approprié qui est disponible tant pour
les parties que pour le tribunal.
Alors, on considère que... On partage les
objectifs, on partage les préoccupations, mais...
Mme LeBel : ...soulevé lors de
la consultation particulière.On partage les préoccupations, mais on considère
que la rédaction, telle que proposée, le juge peut l'ordonner, mais dans les
limites du moyen technologique approprié qui est disponible tant pour les
parties que pour le tribunal. Alors, on considère que... on partage les
objectifs, on partage les préoccupations, mais on considère que la rédaction,
telle que proposée, rend compte de ces objectifs-là.
M. Tanguay
: Moi, ça me
va, M. le Président, puis je ne déposerai pas l'amendement pour qu'on puisse en
débattre. Par contre, j'aimerais que l'on puisse dire... durant nos audiences,
que ce soit, donc, consigné dans les transcriptions de nos débats qu'il est de
l'intention du législateur que le pouvoir octroyé au juge par le deuxième
alinéa du nouvel article 2.2 doit nécessairement tenir compte des limites
de moyens dont la cour dispose, doit donc s'exercer en ayant en tête le premier
alinéa qui y fait écho, et que ça, ce soit très clair. Donc, pour moi, ce
serait important qu'on le dise à ce stade-ci, là.
Mme LeBel : Donc, je peux
confirmer que c'est l'intention du législateur que l'article se lise dans son
ensemble et qu'on tienne compte des moyens technologiques appropriés qui sont
disponibles pour les parties et pour le tribunal.
M. Tanguay
: M. le
Président, nous avons aussi entendu l'Association des juristes progressistes.
Je ne sais pas s'il y a d'autres collègues qui veulent s'inscrire dans le
débat, moi, je suis prêt à leur laisser...
Le Président (M.
Bachand) : ...si quelqu'un veut intervenir, juste à me faire
signe. Ça va?
M. Tanguay
: Si vous
avez des commentaires à l'article 1...
Le Président (M.
Bachand) : Mme la députée de Joliette, oui?
Mme
Hivon
: Oui.
Moi, je veux revenir plus sur le fondement de l'article. Donc, un des
changements, évidemment on comprend que c'est le pendant de l'article du Code
de procédure civile, mais en matière pénale, ça peut être plus lourd de
conséquences parce qu'on est face à de contrevenants, donc on veut s'assurer
qu'ils ont le sentiment qu'ils reçoivent un procès juste et équitable. Donc, ma
question, c'est de savoir lorsque, peut-être que c'est là que s'en va mon
collègue aussi, là, mais lorsqu'on parle que le juge peut ordonner même
d'office l'utilisation d'un tel moyen technologique, on va le voir plus loin,
on va le voir notamment à l'article 25 pour la visioconférence, mais ça
veut dire que par rapport à la situation actuelle, le juge va avoir des
pouvoirs plus importants de, par exemple, ordonner qu'un contrevenant puisse
comparaître par visioconférence.
Alors que dans l'état actuel des choses,
il pourrait exiger que ça se fasse en personne. J'aimerais juste ça que la
ministre nous explique l'objectif sur le fond des choses, qu'il puisse y avoir
vraiment une ordonnance et que d'office, le juge puisse forcer les parties à
utiliser les moyens technologiques. Par rapport à la situation actuelle, du
point de vue du contrevenant, de l'accusé, du respect de ses droits.
Le Président (M.
Bachand) : Mme la ministre.
Mme LeBel : Bien, le fait pour
le tribunal de pouvoir, M. le Président, l'ordonner d'office, naturellement
c'est de ne pas avoir à attendre qu'une des deux parties en fasse la demande.
Et c'est simplement dans un souci d'efficacité de l'instance, de gestion de
l'instance. Le juge étant maître de la gestion de l'instance, naturellement
doit tenir compte, et je le répète, de l'environnement technologique déjà
disponible. Et ça marque, dans le Code de procédure pénale, l'entrée du virage
technologique.
On espère que de plus en plus les
tribunaux seront équipés de ces mêmes moyens technologiques. C'est l'objectif.
On parle ici, bon, principalement des cours municipales, ça peut effectivement
tribunal, d'autres types de cour. J'en suis tout à fait consciente, mais c'est
pour marquer l'entrée des technologies dans le Code de procédure pénale,
l'efficacité de l'instance, la gestion d'instance, mais tout ça naturellement
en tenant compte de la disponibilité de cette technologie-là par le tribunal et
par les parties. C'est important de le préciser.
Mme
Hivon
: Je
pense que tout le monde est d'accord qu'il faut faire le virage technologique, mais
les questions qui se posent, je vous dirais moi en tout cas en ce qui me
concerne, sont de deux ordres. Un : qu'est-ce qui en ce moment est
impossible de faire et qui pourrait être utile et qu'on n'a pas
le loisir de faire parce qu'on n'a pas cette disposition-là
dans notre Code de procédure pénale?
Et par ailleurs, on sait qu'il y a des
situations où on a des contrevenants qui sont plus fragiles, qui peuvent avoir
des problématiques. On va en parler amplement dans le cadre de ce projet-là. La
ministre n'est pas sans ignorer ça, c'est quelque chose qui revient souvent de
la part, là, de certains défenseurs des droits de la personne. Donc, des
personnes ont des problématiques particulières, problèmes de santé mentale,
problèmes d'itinérance, de toxicomanie et qui vont... ça va être en sorte
qu'ils estiment que de comparaître, par exemple, par visioconférence peut
porter atteinte à leur pleine défense ou le moyen de se représenter.
• (16 h 40) •
Donc j'aimerais juste, c'est ça, ma
question est un peu à deux volets. Un : Qu'est-ce qui est impossible de
faire en ce moment et qui serait maintenant possible de faire avec cette
disposition-là. Quelles sont les limites dans le cadre juridique actuel? Et
deux, qu'est-ce qu'elle a à répondre à ceux qui s'objectent un peu? Les
juristes progressistes vont un peu vers ça. Mais de dire qu'il y a certaines
personnes plus vulnérables qui peuvent, donc, avoir plus de difficultés avec
ces moyens-là...
Mme
Hivon
: …à
faire en ce moment et qui serait maintenant possible de faire avec cette
disposition-là. Quelles sont les limites dans le cadre juridique actuel? Et
deux, qu'est-ce qu'elle a à répondre à ceux qui s'objectent un peu? Les
juristes progressistes vont un peu vers ça. Mais de dire qu'il y a certaines personnes
plus vulnérables qui peuvent donc avoir plus de difficultés avec ces moyens-là
technologiques. Il y a aussi l'argument qu'on entend parfois en région qu'on
pourrait se diriger… je ne vous dis pas que je fais mien nécessairement cet
argument-là, mais c'est quelque chose qu'on entend… une justice un peu à rabais
pour ne pas avoir à, nécessairement, déplacer les contrevenants et procéder par
visioconférence. Donc, je voulais juste savoir ce que le ministre répondait à
ces arguments-là.
Mme LeBel : Oui. Difficile
pour moi à ce stade-ci de donner des exemples de ce qui est impossible de faire
dans l'actuel des choses parce que dans l'état actuel des choses, peu ou pas du
tout de tribunaux sont informatisés de façon technologique. Donc, l'idée, c'est
vraiment de permettre ce virage technologique là et de ne pas faire en sorte
qu'il y ait des empêchements dans le futur si on n'introduit pas une telle
disposition dans le Code de procédure pénale.
Pour ce qui est de vos préoccupations et
celles des groupes qui sont venus par rapport aux personnes plus vulnérables,
il faut quand même…. Le juge devra rendre cette ordonnance, prendre cette
décision-là, s'il le fait d'office, en considérant les moyens des parties.
Donc, se sera partie de la considération du juge, non seulement la
disponibilité, la technologie, mais la capacité, pour la personne, de
l'utiliser aussi ou d'être rejointe par technologie. Je pense qu'on peut faire
confiance aux tribunaux pour être capables de juger en la matière de l'opportunité
quand une personne n'a pas accès ou n'a pas… n'est pas capable de façon
effective, là, de ce… de travailler avec cette technologie-là pour différentes
raisons. Peut-être pour faire un aparté, l'objectif de la comparution par
visioconférence, c'est dans l'intérêt du défendeur aussi, pour éviter souvent
qu'il soit détenu trop longtemps. On le voit pour la justice dans le Nord, on
parle d'une comparution par visioconférence. En matière pénale, souvent, dans
plusieurs cas, le contrevenant n'a même pas besoin d'être présent à la cour.
Souvent, on peut le faire en son absence, on peut procéder en son absence, donc
on n'est pas dans la même matière qu'en matière criminelle, où on pourrait
peut-être avoir plus de réticences. Mais tout ça est fait pour non pas… j'allais
dire bousculer les contrevenants, mais plutôt faciliter beaucoup de procédures
puis… ou donner aussi une ouverture en accès.
Ce n'est pas l'idéal, un accès par
technologie partout, tout le temps, mais souvent c'est mieux que de ne pas
avoir d'accès du tout. Donc, je pense qu'il faut favoriser l'emploi de ces
technologies-là.
Le Président (M.
Bachand) : Merci. Interventions? M. le député de LaFontaine….
M. le député de Gouin.
M. Nadeau-Dubois : Je trouve
les questions de ma collègue de Joliette intéressantes, et ça me fait
réfléchir. On nous a beaucoup parlé, lors des consultations, de la question de
la fracture numérique. On nous a parlé aussi des gens qui ont des problèmes de
santé mentale. Faisons une situation hypothétique, là, fictive, où une personne
préfère faire ça en présentiel, là, sous… Un contrevenant ne souhaiterait pas
utiliser un moyen technologique parce qu'il a des problèmes de santé mentale,
par exemple. Moi, quand je lis l'article, j'ai l'impression que le… ça
donnerait la possibilité au juge de dire : Bien, pour des raisons
logistiques, pragmatiques, j'ordonne quand même qu'on procède par un moyen
technologique. Est-ce que cette… Et donc, dans une telle situation, est-ce que
j'ai raison de dire qu'il n'y a rien dans l'article qui empêcherait un juge
d'ordonner qu'on procède par moyen technologique même si le contrevenant, par
exemple, pour une raison de santé mentale, préférait que ça ne soit pas le cas?
Le Président (M.
Bachand) : Mme la ministre.
Mme LeBel : J'ai du mal à
voir, honnêtement, là, dans quelle situation de cas de figure un tribunal ou un
juge, peu importe le terme qu'on emploie, aurait intérêt à ordonner
l'utilisation d'un moyen technologique alors que la personne concernée n'est
pas en mesure de suivre. Ce n'est pas l'objectif, ici.
Puis quand on parlait de fracture
technologique, si je me souviens bien, on parlait beaucoup aussi des moyens de
signification, dont on va parler à un autre article, de favoriser encore une
fois l'usage de la technologie dans les moyens de signification. Puis on nous
parlait de gens qui, surtout en situation d'itinérance ou n'ont pas de
courriel, n'ont pas d'adresse, donc, il fallait faire… il fallait être
conscients de ça. Mais, ici, le tribunal, quand il va le faire, doit tenir
compte du moyen technologique approprié qui est disponible tant pour les
parties que pour le tribunal. Donc, il y a une évaluation de tout ça qui
devrait être faite par le tribunal. Il faut, à ce… Et je vois mal, honnêtement,
là, je n'ai pas de figure en tête, et même j'essaie de me reporter à mon
ancienne vie, où je pourrais penser qu'un juge aurait forcé un moyen
technologique disponible au détriment d'une partie. Ça ne sera jamais
l'objectif. Et une partie pourra toujours le contester à ce moment-là. Il ne
faut pas que ça aille au détriment des droits des parties, là. Tout ça est dans
l'objectif d'un accès à la justice facilité pour tous, pour tous.
• (17 h 50) •
M. Nadeau-Dubois : Est-ce que
donc je…
Mme LeBel : ...au
détriment d'une partie, ça ne sera jamais l'objectif, et une partie pourra toujours
le contester à ce moment-là. Il ne faut pas que ça aille au détriment des
droits des parties, là. Tout ça est dans l'objectif d'un accès à la justice
facilité pour tous, pour tous.
M. Nadeau-Dubois : Est-ce
que donc je comprends que la notion de... la notion de moyen technologique
approprié, il faut comprendre la notion d'approprié comme incluant cette préoccupation-là,
c'est-à-dire si une des deux personnes... Si une des deux parties, disons, le
contrevenant, a un profond malaise ou un profond inconfort avec le moyen technologique
en question, est-ce que je comprends bien les propos de la ministre si je dis
que, dans la notion d'approprié, c'est inclus, ça, le confort des parties à
utiliser un moyen technologique?
Mme LeBel : Très
certainement un critère dont le tribunal devra tenir compte ou pourra tenir
compte dans son évaluation. Mais par contre on peut... Il faut permettre aussi
au juge de pouvoir, d'office, c'est-à-dire ne pas attendre qu'une des deux
parties le soulève parce que ça veut dire, quand un tribunal peut soulever de
lui-même la question de la technologie, de pouvoir le faire. À titre d'exemple,
on va prendre la transmission de procédure à la cour. Si tout le monde a un
courriel en 2019 et qu'une partie insiste pour produire ses documents papiers
par les moyens traditionnels, je pense que, dans ce cas-là, c'est approprié,
c'est disponible, c'est d'un usage connu par les parties, bien, il serait
peut-être approprié par le juge de forcer la transmission par un moyen
électronique d'une procédure. Donc... Mais il faut comprendre dans le terme
«approprié» qu'il y aura une évaluation faite par le tribunal de l'opportunité,
si je peux le dire comme ça, de l'utiliser dépendamment des circonstances. Et
il y a probablement plusieurs cas de figure qui pourront se décliner, autant de
cas de figure que de lieux où on se retrouvera et de parties qui seront concernées.
M. Nadeau-Dubois : C'est
parce que je me demande justement, si c'est fait d'office, comment est-ce que
le juge peut savoir? Je juge ne peut pas deviner le niveau de confort d'un
contrevenant avec une technologie donnée. Donc, si on lui donne le pouvoir de
le faire d'office, comment on protège le contrevenant puis ses droits là-dedans
si on lui annonce que, d'office, le juge a décidé que ce serait par un moyen
technologique x? Lui reçoit cette information-là. Comment on le protège dans le
processus?
Mme LeBel : Vous soulevez
quelque chose. D'office pour un tribunal, c'est à la différence de le faire à
la demande des parties. Donc, ça ne dispense pas le tribunal, parce qu'il
soulève la question lui-même, de faire l'évaluation appropriée, mais il n'a pas
besoin d'attendre qu'une des parties lui demande.
M. Nadeau-Dubois : Merci.
Le Président (M.
Bachand) : Intervention, M. le député de LaFontaine, s'il vous
plaît.
M. Tanguay
: Oui,
M. le Président. On a parlé un peu plus tôt de la Loi concernant le cadre
juridique des technologies de l'information. Dans la jurisprudence qui est
répertoriée dans le volume 2019 du... produit par le DPCP, Code de
procédure pénale annoté, on fait référence à cette loi quant aux nouvelles technologies
à deux articles, à l'article 61, on vient d'en parler, puis
l'article 2.2 proposé réfère directement à l'article 61. On réfère
également par jurisprudence citée à l'article 24 lorsque l'on considère en
matière de procédure pénale un mode de signification différent de ceux prévus
dans la présente section peut être autorisé par un juge si les circonstances
l'exigent. La ministre a-t-elle, et son ministère, et/ou son ministère, des
commentaires à faire quant à la possibilité, avec le nouvel article 2.2,
que plus facilement, et là c'est ex parte, on a vu la semaine passée au salon
bleu la signification d'ex parte, lorsqu'il y a demande de signification par
des moyens technologiques, avons-nous l'assurance que le juge ou la juge ne
sera pas tentée plus facilement d'autoriser des tels modes de signification
technologique? Moi, ma préoccupation, c'est qu'avec le nouvel article 2.2,
est-ce qu'on va élargir notre jurisprudence quant à des modes autres de
signification à l'article 24.
Le Président (M.
Bachand) : Merci. Mme la ministre.
Mme LeBel : M. le
président, on va parler de l'article 24, justement, et des modifications
proposées à l'article 9 du projet de loi. Je pense qu'on pourra faire ces
remarques-là à ce moment-là.
Le Président (M.
Bachand) :M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay
: M. le
Président, la ministre, c'est correct, elle peut décider de refuser de
répondre, mais là on est à l'article 2.2 et on fait une référence. On fait
une référence. Puis l'article 9, M. le Président, on va y être, là, mais l'article 9,
«L'article 24 de ce code est modifié par le remplacement, dans le deuxième
alinéa, de "Le" par "Lorsque l'autorisation d'un juge est
requise en vertu du présente section". Point, là. L'article 9, en
tout respect pour Mme la ministre, on ne va pas du tout, du tout, du tout
toucher à cette question-là. Là, j'en suis à des possibilités d'autorisation
par des juges de façon beaucoup plus libérale d'utilisation de moyens technologique.
Ma question : Avec 2.2, est-ce qu'on ne va pas, ce faisant, élargir
davantage les possibilités en vertu de l'article 24?
Le Président (M.
Bachand) : Merci.
Mme LeBel : On est en
train de vérifier quelque chose.
Le Président (M.
Bachand) : Est-ce que vous avez... On va suspendre quelques
instants? On va suspendre quelques instants.
(Suspension de la séance à 16 h 55)
M. Tanguay
:
...d'utilisation de moyens technologiques. Ma question avec 2.2 : Est-ce
qu'on ne va pas, ce faisant, élargir davantage les possibilités en vertu de
l'article 24?
Le Président (M.
Bachand) : Merci.
Mme LeBel : ...de
vérifier quelque chose, s'il vous plaît.
Le Président
(M. Bachand) : Est-ce que... excusez... pardon? On va
suspendre quelques instants.
Mme LeBel : ...
Le Président
(M. Bachand) : On va suspendre quelques instants. Merci
beaucoup.
(Suspension de la séance à 16 h 55)
(Reprise à 16 h 58)
Le Président
(M. Bachand) :À l'ordre, s'il vous
plaît! La commission reprend ses travaux. Mme la ministre, s'il vous plaît.
Mme LeBel : Oui, merci,
M. le Président. Donc, pour revenir sur la question de mon collègue, ce n'est
pas parce que je ne suis pas intéressée ou je ne veux pas lui répondre, mais
c'est parce qu'on va... toutes les balises auxquelles il fait référence, on
parle entre autres de moyens technologiques de signification, de transmission
d'actes de procédure, etc., on va y répondre, on va les baliser par d'autres
articles. Entre autres, à l'article 6 du projet de loi, on va introduire
20.2. À l'article 9, on va s'adresser à l'article 24 qui présentement
est un des articles, dans le Code de procédure pénale, qui parle de moyens
technologiques.
L'article 2.2 dans le fond est le
cadre général, l'environnement général pour introduire, dans... à l'intérieur
du Code de procédure pénale, des notions de technologies. Mais toutes les
préoccupations que vous avez, cher collègue, on va les baliser au fur et à
mesure dans les autres articles qu'on a introduits. Donc, je pense qu'on pourra
faire les discussions quand les articles concernés arriveront. Mais ça va être
plus facile pour moi de vous répondre de façon plus précise à ce moment-là.
Le Président
(M. Bachand) : Merci. M. le député de LaFontaine.
• (17 heures) •
M. Tanguay
:
Effectivement, on aura l'occasion de toucher à la... au mode de signification
dans les articles 4 et suivants. On verra jusqu'à quel point il y aura
lieu, à ce moment-là, de baliser. Et j'entends... et là, je fais une lecture en
diagonale pendant que je vous parle. Est-ce qu'on aura le loisir... c'est ce
que... Est-ce qu'on aura le loisir — et c'est la représentation de
Mme la ministre, M. le Président — dans les articles 4 et
suivants du projet de loi, de baliser et d'encadrer ce qui se fera en termes
d'autorisation de signification par moyen technologique? Est-ce que c'est ce
que je dois comprendre? Et j'aimerais que la ministre, le cas échéant... puis
on ne fera pas le débat sur les articles 7, 8 et suivants, 4 et suivants.
Mais à quel endroit pourrions-nous faire ce débat-là? Je ne le vois pas...
17 h (version non révisée)
M. Tanguay
: ...par
moyen technologique. Est-ce que c'est ce que je dois comprendre? Et j'aimerais
donc que la ministre, le cas échéant... On ne fera pas le débat sur les articles
7, 8 et suivants, 4 et suivants, mais à quel endroit pourrions-nous faire ce
débat-là? Je ne le vois pas.
Le Président (M.
Bachand) :Mme la ministre.
Mme LeBel : Oui. Donc, si vous
regardez l'article 6, notamment, notamment, parce que je n'ai pas... on a
d'autres endroits dans le... voyons, dans le projet de loi où on pourra en
parler, ou en discuter, notamment l'article 20.2, le deuxième alinéa, où on
introduit : «Cependant, la signification par un tel moyen n'est admise à
l'égard de la partie non représentée que si celle-ci consent ou qu'un juge
l'autorise. Donc, ça veut dire quand il n'y a pas d'avocat, donc ça veut dire probablement
justement les personnes qui sont peut-être plus vulnérables. Mais je pense
qu'on aura l'occasion d'en discuter, ces notions-là seront introduites, et ce
n'est pas dans le cadre de l'article 2.2, en tout respect... avec tout le
respect que je vous dois, cher collègue, ce n'est pas dans le cadre de
l'article 2.2 qu'on peut baliser ça. Mais je comprends vos préoccupations, et
on les entend.
M. Tanguay
: Et, M. le
Président, pour la réflexion, parce que je tiens toujours à souligner le fait
que, dans le 2.2, on met toujours le principe de base, dans la loi, on établit
les principes et on fait référence, entre autres à l'article 61, en disant que
2.2, qui est le principe de base... donc on privilégie l'utilisation des moyens
technologiques. Mais sous réserve de 61, je crois qu'il aurait été de bon aloi
d'identifier, dès l'article 2.2, l'article 24, où on parle de «mode de
signification différent de ceux prévus dans la présente section peut être
autorisé par le juge ou la juge». Ça, c'est l'article 24, premier alinéa. Je
crois qu'il aurait été de bon aloi... mais j'entends Mme la ministre qui dit
qu'on ne fera pas ça et je ne déposerai pas d'amendement, mais je le souligne.
Puis on pourra, le cas échéant, lorsqu'on sera rendus plus loin, notamment à
l'article 6, peut-être consentir à revenir à l'article 2. Mais il faut, je
pense... dans les premiers articles, lorsqu'on dit : Oui, privilégier
l'utilisation davantage de moyens technologiques, il faudra s'assurer qu'en
matière de signification, ça ne se fasse pas au détriment des parties qui ne
sont pas représentées. Parce qu'ici je suis dans le contexte de requête
introductive d'instance ou de la signification d'un constat d'infraction.
Et, M. le Président, à ce stade-ci, vous
me permettrez de faire référence à la décision Rivière-Beaudette... municipalité
de Rivière-Beaudette contre Sabourin, qui moi, honnêtement, m'a... a été une
révélation pour moi, et j'ai des sentiments partagés par rapport à ça. Alors,
c'est sous le... c'est dans le contexte de l'article 24, imaginez-vous la chose
suivante, M. le Président, et on fait un résumé, c'est J.E. 2015-719, cour municipale,
municipalité de Rivière-Beaudette contre Sabourin. Je lis le résumé du Code de
procédure pénale annoté : «La poursuivante étant dans l'impossibilité de
localiser utilement le défendeur autrement que par l'utilisation du réseau
social Facebook, elle demande l'autorisation de procéder à la signification du
constat d'infraction par voie électronique, soit par ce réseau social. Le
défendeur a été identifié par sa carte d'assurance maladie, mais des tentatives
pour signifier le constat par la poste certifiée et par huissier ont échoué, et
des recherches auprès de la SAAQ ont également été infructueuses. Deux
jugements ont déjà permis la signification par Facebook en matière civile.
L'étude de ces jugements ainsi que les articles 28 et 74 de la loi concernant
le cadre juridique des technologies de l'information convainquent le tribunal
que ce type de signification est juridiquement possible.» Fin de la citation.
Alors, M. le Président, moi, quand on me
dit : On a signifié un constat d'infraction par Facebook, comme
législateur, puis en tout respect pour nos tribunaux, moi, ça me préoccupe,
puis je vais... mes commentaires à ce niveau-là, surtout quand, dans la décision
qui suit, on cite R. contre Ahmed, en 1992...
J.E. 92-849, et j'ai ensuite juste un aspect du jugement, je n'en suis pas sur
le fond, on dit, je le cite : «Le défendeur bénéficie d'une protection à
l'égard d'une signification inefficace par le recours à la rétractation de
jugement.» Fin de la citation. Ça, avec égard, M. le Président, je ne pourrai
jamais, comme législateur, concevoir que la rétractation de jugement est, le
cas échéant, une avenue pour une signification qui aurait été autorisée de
façon trop généreuse, trop permissive ou, peut-être, dans certains cas,
déraisonnable. En tout respect pour nos tribunaux, là, on ne peut pas
dire : Bien, si jamais on s'est trompé, on a permis, exemple, une
signification Facebook, puis qu'il y a eu jugement par défaut, bien, la
personne, lorsqu'on lui signifiera le jugement pour l'exécuter sur ses biens,
saisir les biens ou la mettre sous le coup de la justice, bien, elle pourra
toujours faire une demande de rétractation de jugement. Le moyen de
signification, oui ou non Facebook, est tout à fait disproportionné s'il n'est
pas justifié en l'instance lorsqu'on vous dit : Bien, vous irez en
rétractation de jugement, parce qu'une rétractation de jugement, c'est lourd,
ça prend une preuve en soi, c'est des avocats, c'est des procédures et c'est
une audience...
M. Tanguay
: ...faire
une demande de rétractation de jugement. Le moyen de signification, oui ou non
Facebook, est tout à fait disproportionné s'il n'est pas justifié en
l'instance. Lorsqu'on vous dit : Bien, vous irez en rétractation de
jugement, parce qu'une rétractation de jugement, c'est lourd, ça prend une
preuve en soi, c'est des avocats, c'est des procédures et c'est une audience en
soi pour faire rétracter un jugement. Puis, M. le Président, vous avez besoin
de vous lever de bonne heure pour faire rétracter un jugement.
Alors, considérant cela, puis je prends
acte du fait que la ministre dit : Non, on ne fera pas ça à 2.2, à
l'article 1, je veux juste lui souligner ça, mes préoccupations. Lorsqu'on
sera d'accord, je l'entends, est-ce que d'ici à ce qu'on se rende aux
articles 4 et suivants, notamment 6, si Mme la ministre peut nous... peut-être
réfléchir sur des amendements, on pourra, le cas échéant, suspendre ces
articles-là qui pourront nous permettre d'encadrer ça? Parce qu'honnêtement, me
faire dire, moi : Oui, on va pouvoir signifier par Facebook, puis si
jamais on l'échappe, bien, il fera une rétractation de jugement, moi, je ne
peux pas applaudir en disant que c'est un meilleur accès à la justice, M. le
Président.
Alors, ça, quand j'ai vu cette
jurisprudence-là, de 2015, je suis un peu tombé en bas de ma chaise, mais je me
suis dit : Bon, il y a du bon là-dedans. Oui, à l'article 6 auquel
réfère Mme la ministre, quand les parties consentent, bien oui, vous pourrez me
signifier entre nous, moi, je suis la partie adverse, par courriel. Je
l'accepterai, il n'y a pas de problème. Mais lorsqu'on parle d'une... pas d'une
requête introductive d'instance, mais un premier coup de semence, qui est la
signification du constat d'infraction, s'il y a jugement par défaut... Il faut
faire très, très attention de ne pas l'échapper. Et ici, M. le Président, les
collègues en ont fait référence mais de façon plus précise. Je l'ai dit dans
mes remarques préliminaires. On a entendu l'Association des groupes
d'intervenants en défense de droits en santé mentale du Québec, qui sont venus
nous parler de la fracture numérique. Puis la fracture numérique, M. le
Président, vous pouvez être aujourd'hui numériquement présent, mais dans six
mois, vous pouvez être... faire face à une fracture numérique. La vie change.
Vous pouvez passer de domicile fixe à domicile non fixe. Et lorsque les cours
ont dit à 2.2 : Bien, on va privilégier les nouvelles technologies, bien,
il faut, je crois, à ce stade-là, j'entends Mme la ministre qui dit : Non,
on ne le fera pas, c'est correct, on ne fera pas d'amendement formel, là, mais
quand même, moi, j'ai ma préoccupation puis je sais que Mme la ministre ne le
prend pas à la légère non plus pour ne pas qu'il y ait aussi, à l'inverse, de
dérives.
Un autre élément, puis je ne ferai pas un
amendement formel, mais les collègues y ont fait référence aussi. L'Association
des juristes progressistes nous proposait de changer le mot, à 2.2, je ne ferai
pas d'amendement, où l'on dit, à 2.2 du projet de loi, on dit, M. le
Président : «Dans l'application du présent code, il y a lieu de
privilégier l'utilisation de tout moyen technologique...» Eux, l'Association
des juristes progressistes disait : On peut-u dire, plutôt que
«privilégier», privilégier, ça participe de donner préséance à, à «considérer»?
Considérer, ça veut dire : Pouvez-vous le considérer? Et ça donnait encore
plus de latitude, moins de pression, je vous dirais, pour les femmes et hommes
qui sont juge dans chaque cas d'espèce lorsque le législateur lui dit : Tu
dois le privilégier. Il y a lieu de privilégier, c'est en quelque sorte :
Tu dois le privilégier. C'est que, dans le doute, à la limite, tu dois l'autoriser,
tu dois le permettre, tu dois le privilégier, si tu n'as pas dans ton âme et
conscience de doute suffisamment qualifié. Mais de le considérer aurait permis,
je crois, une meilleure latitude pour, justement, nous éviter, dans le cas de
l'article 24, la signification de procédure des dérives. Parce
qu'honnêtement, M. le Président, là, quand que notre justice est rendue sur
Facebook, j'ai un gros drapeau jaune. Il n'est pas rouge, le drapeau, mais il
est jaune. Et je veux juste m'assurer que... Parce qu'il y a des semaines où on
n'ouvrira pas le Code de procédure pénale pour parler de significations, de
nouvelles technologies et de l'article 2.2, que ça reste. Et je voulais
faire cette intervention-là, M. le Président. Dans la tête de Mme la ministre,
il y a des personnes qui sont autour d'elle peut-être pour dire : Bien,
O.K., peut-être que, plus loin, on pourrait l'encadrer plus avant. Parce que,
force est de constater que, s'est déjà développé, s'est déjà développé avec le
Code de procédure pénale actuel, cette jurisprudence dite de Facebook. Imaginez
si on ajoute 2.2 puis qu'on dit : Vous allez privilégier. Je vais
dire : Là, on risque d'occasionner une pousse de jurisprudence qui va
aller non seulement dans ce sens-là, mais peut-être aller plus loin. Drapeau
jaune.
Le Président (M.
Bachand) : Merci. Interventions? M. le député de Gouin, s'il
vous plaît.
• (17 h 10) •
M. Nadeau-Dubois : J'allais
justement... j'ai été pris de court, mais c'est tant mieux, j'allais justement
faire allusion à la recommandation de l'Association des juristes progressistes
au sujet du mot «privilégier, qui signifie favoriser puis qui peut même être
interprété comme : Dès que c'est possible, c'est ce qu'on devrait faire,
là. Il me semble que le fait de faire les choses en présence devrait être la
norme et que l'utilisation par moyens technologiques devrait être un outil
puis, quant à nous, un outil...
M. Nadeau-Dubois : ...puis qui
peut même être interprété comme : Dès que c'est possible, c'est ce qu'on
devrait faire, là. Il me semble que le fait de faire les choses en présence
devrait être la norme et que l'utilisation de moyens technologiques devrait être
un outil, puis quant à nous un outil d'exception. Or, je constate que dans le Code
de procédure civile, c'est déjà écrit aussi «privilégier». D'abord, je crois,
on n'est pas obligés de faire un miroir exact, on pourrait changer. D'autre
part, est-ce que... depuis que ça a été introduit dans le Code de procédure
civile, est-ce que la ministre peut nous donner peut-être des informations sur
à quelle fréquence ça a été utilisé, pour comprendre dans le fond la mesure...
pour prendre la mesure de la modification qu'on va faire?
Le Président (M.
Bachand) : Mme la ministre, oui.
Mme LeBel : Non. Écoutez, non,
je ne peux pas vous dire à quelle fréquence ça a été utilisé. Aucun problème
n'a été nécessairement soulevé par rapport au terme «privilégier». Vous l'avez
bien dit, il faut privilégier dans la mesure du possible, mais on revient toujours
au terme «approprié», et quand c'est disponible, donc, parce que l'article doit
se lire dans son ensemble.
Non, on n'est pas obligés de faire miroir,
mais, quand on parle d'un environnement d'instance et de gestion de l'instance,
je pense qu'il est de bon aloi que dans la plupart des cas, quand on peut le
faire, que ce soit une instance pour le citoyen, que les questions de gestion
d'instance, peu importe le domaine du droit dans lequel on se trouve, soient le
plus arrimées possible.
Le Président (M.
Bachand) : M. le député de Gouin.
M. Nadeau-Dubois : Parfait.
J'entends la réponse. Je veux faire un pas en arrière et revenir sur un échange
qu'on a eu plus tôt, parce que je ne suis pas sûr d'être pleinement... en fait,
d'avoir pleinement compris les intentions de la ministre sur la question que
j'ai posée tout à l'heure sur la situation hypothétique dans laquelle une
personne ne serait pas à l'aise ou pas confortable avec un moyen technologique.
La ministre m'a répondu tantôt que le fait de le faire d'office signifie qu'il
n'y avait pas besoin d'avoir une demande de la part d'une des deux parties. Je
conçois et j'entends bien ça. Elle m'a dit : Et ça n'empêche pas en rien
le juge de s'assurer que les parties en question soient confortables. En effet,
ça ne l'empêche pas de le faire, mais ma lecture de l'article m'amène pourtant
à croire qu'il n'y a pas non plus ni une obligation, ni même une incitation
auprès du juge pour qu'il le fasse. On laisse un peu ça au bon vouloir, puis je
n'ai pas de doute à l'effet que la plupart des juges ont cette
préoccupation-là. Par contre, je reviens sur la situation dans laquelle ce
serait quelqu'un qui a par exemple des problèmes de santé mentale. Ce n'est pas
des cas si fréquents que ça, ce n'est pas tous les juges qui ont la formation,
peut-être, pour considérer ces enjeux-là. Pourquoi ne pas, dans le cadre de cet
article-là, inscrire quelque chose dans l'article qui viendrait inciter au
moins le juge à prendre ça en considération? Parce que ça pourrait être un
empiètement sur les droits fondamentaux dans certaines circonstances, et donc
il me semble qu'il n'y a pas dans ces situations quelque chose comme un excès
de prudence, bien au contraire.
Le Président (M.
Bachand) : Mme la ministre.
Mme LeBel : Bien, le juge
devra toujours, même... qu'il le fasse d'office ou à la demande d'une partie,
se conformer à ce que le premier alinéa dit, donc que ça doit privilégier
l'utilisation d'un moyen approprié qui est disponible tant pour le tribunal que
pour les parties. Donc, il ne peut pas faire fi du premier alinéa, parce qu'il
soulève ça d'office.
Le Président (M.
Bachand) : M. le député.
M. Nadeau-Dubois : Bon. C'est
vraiment le mot «approprié» qui pour la ministre est la réponse à cette
inquiétude-là, c'est ce que je comprends bien. Pour elle, ça signifie :
Est un moyen approprié un moyen avec lequel les parties sont confortables puis
un moyen pour lequel le contrevenant, par exemple, est à l'aise. Est-ce que je
comprends bien les intentions de la ministre?
Mme LeBel : Bien, dans son
cadre d'évolution du moyen approprié, le juge va tenir compte de tous ces
facteurs-là.
M. Nadeau-Dubois : Merci.
Le Président (M.
Bachand) : Merci. M. le député de LaFontaine, s'il vous plaît.
M. Tanguay
: ...achever
sur le... suite au collègue... aux propos du collègue de Gouin — puis
c'est bon, ce qu'on fait là, je veux dire à l'article par
article — qu'on me dise, moi, qu'au Code de procédure civile, c'est
marqué «privilégier», puis qu'il n'y a pas de problème, c'est une chose. Mais
là, on parle de quoi? Code de procédure pénale. En matière pénale, on a eu des
organismes qui travaillent avec des gens qui sont dans la rue, pour plusieurs,
des organismes qui travaillent avec des itinérants. Lorsqu'on parle de
procédure pénale, on ne parle pas d'un litige civil entre actionnaires, on ne
parle pas d'un litige civil pour un bornage de clôture, on ne parle pas d'un
litige civil pour des droits de succession, on parle de gens, M. le Président,
qui, dans beaucoup de cas, malheureusement trop élevés, sont vulnérables face à
la justice. Qu'on me dise qu'on applique en matière civile le même standard
qu'en matière pénale, M. le Président... Moi, je le souligne à doubles traits,
on n'est pas dans le même univers...
M. Tanguay
:
...pour des droits de succession. On parle de gens, M. le Président, qui, dans beaucoup
de cas, malheureusement trop élevés, sont vulnérables face à la justice. Qu'on
me dise qu'on applique en matière civile le même standard qu'en matière pénale,
M. le Président. Moi, je souligne à double trait : on n'est pas dans le
même univers.
On a eu des organismes qui sont venus nous
parler de leurs membres, de celles et ceux qu'ils représentent, qui ont des
défis de santé mentale. On a eu l'organisme, M. le Président, Clinique Droits
devant, qui est venu nous dire... faire état des infractions auxquelles on
parle, et ça, il y a beaucoup plus d'infractions qu'on ne voit pas en matière
civile : piéton traitant avec l'occupant d'un véhicule — c'est
les «squeegees» — giser ou flâner ivre sur la voie ou sur une place
publique, se coucher ou s'étendre sur un banc, ou sur un siège, ou sur le sol,
s'asseoir sur le sol ou occuper la place de plus d'une personne — on
parlait de «jaywalking» — traverser ailleurs qu'à une intersection.
Ça, M. le Président, c'est le quotidien est infractions pénales. Alors,
lorsqu'on nous dit : On applique le même standard qu'en matière de
bornage, en matière de succession, en matière civile, bref en matière pénale,
moi, M. le Président, je trouve qu'il y a là un drapeau rouge qui doit être
agité. Et c'est pour ça qu'à la réflexion je pense même que, par sa nature
même, on ne devrait pas avoir le même terme «privilégier» dans le Code de
procédure pénale qu'on retrouve dans le Code de procédure civile. On devrait
donc, à la nature... à la face même de la nature des personnes qui font face à
la justice, avoir «considérer».
Ajoutez à ça qu'à la fin... qu'on vous
dit : Vous avez été signifié par Facebook. Bon, c'est correct. Demandez
une rétractation de jugement. Personne vulnérable, dans beaucoup de cas,
beaucoup plus que dans le cas de matière civile.
Et, de deux, M. le Président, on parle de
quoi? On ne parle pas de dire : Vous clôture va être deux pieds en dedans,
deux pieds à l'extérieur. On ne parle pas que vous aurez droit à tel montant
pour la succession. On ne parle pas de telle division d'actif pour chicane
d'actionnaires. On parle de votre liberté. On parle de mettre en péril, mettre
sous condamnation votre liberté de circuler.
Alors, on parle de deux univers totalement
différents. Puis, ne serait-ce que pour ça, M. le Président, sous ces deux
approches là, je pense qu'il y aurait lieu... puis j'en suis d'autant plus
convaincu que, depuis le début de la conversation que l'on a, on ne devrait pas
avoir «privilégier». En matière pénale, ça devrait être «considérer».
Le Président (M.
Bachand) : Merci. Mme la ministre, s'il vous plaît.
Mme LeBel : M. le
Président, quand on parle des personnes vulnérables, j'en suis, il faut faire
attention.
D'ailleurs, on va adresser les moyens de
signification. La plupart du temps, dans un... quand on parle de matière
pénale, la procédure introductive d'instance, c'est le constat d'infraction.
Mon collègue parle de Facebook. Je pense
qu'il faut remettre les choses en perspective. Dans la jurisprudence, quand on
en est venu dans le passé à signifier des procédures introductives d'instance
par un moyen comme Facebook, quand on lit la jurisprudence et qu'on lit
l'article avec attention, c'est quand... le poursuivant doit faire la preuve
que tous les autres moyens utiles, appropriés, connus n'ont pas été utiles.
Même, à une certaine époque, on publiait dans les journaux. Donc, Facebook est
un média social. Donc, il y a une preuve par contre à faire devant les
tribunaux. Ce n'est pas le poursuivant qui, d'entrée de jeu, décide
qu'aujourd'hui je me lève, ça me tente de publier tous mes constats
d'infraction du Facebook. Doit démontrer que les autres moyens ne sont pas
nécessaires. Et, à une certaine époque, on publiait même dans les journaux,
donc... et c'est une procédure exceptionnelle.
Ceci étant dit, effectivement, les
constats en matière pénale touchent les gens qui sont vulnérables, qu'on parle
d'itinérance, ou de toxicomanie, ou de problèmes de santé mentale. J'en suis.
C'est pour cette raison qu'on va introduire dans le p.l. n° 32
ce qu'on appelle des «voies parallèles» avec des mesures de rechange, ou plutôt
des procédures d'adaptabilité.
Code de procédure pénale s'adresse aussi à
la loi sur l'environnement, aux infractions à la Loi électorale, à toutes
sortes de types d'infractions aussi, qui ont une certaine similitude avec ce
qu'on voit devant les tribunaux civils, où ce sont peut-être des compagnies ou
ça peut être des gens qui n'ont pas de problèmes de vulnérabilité comme on
soulève. Donc, on doit permettre l'ouverture des moyens technologiques.
Maintenant, «privilégier» ne veut pas
dire... veut dire «privilégier», c'est-à-dire de préférer à tout autre moyen,
dans la mesure où c'est approprié, où c'est disponible. Et, quand on parle des
personnes qui sont vulnérables, on va parler, à l'article 6... on va
parler des moyens de signification, qui est souvent, je ne dis pas toujours,
mais, dans la majorité des cas en matière pénale, à peu près le seul acte de
procédure qu'il va y avoir, c'est-à-dire le constat d'infraction. Il y a des
moyens de le faire. On va baliser ça pour s'assurer que les personnes
vulnérables sont rejointes de façon adéquate, surtout quand elles ne sont pas
représentées par avocat.
Donc, je partage les préoccupations de mes
collègues. Ceci étant dit, le doit pénal, le corpus pénal de façon générale ne
s'adresse pas juste à ça. Donc, le Code de procédure pénale est là pour toutes
les lois de nature pénale.
• (17 h 20) •
Je veux ramener aussi les pendules, un
code de... les lois pénales imposent des amendes, l'emprisonnement étant... et,
quand on est en non-paiement d'amende, puis, quand on est rendu à avoir une
amende, un non-paiement puis des dispositions...
Mme LeBel : …ne s'adresse pas
juste à ça. Donc le Code de procédure pénale est pour toutes les lois de nature
pénale. Je veux ramener les pendules. Un code de… les lois pénales imposent des
amendent, l'emprisonnement étant… est quand on est en non-paiement d'amende.
Puis quand on est rendu à avoir une amende, un non-paiement d'amende puis des
dispositions de… où on n'est plus dans les travaux compensatoires, mais on est
rendus dans l'emprisonnement, c'est parce qu'on a dépassé le stade de ... puis tout
le monde est convaincu que la personne a reçu sa procédure.
Donc, il faut… Je suis très consciente de
ce qu'on dit, je suis très soucieuse de ce qu'on dit, mais il faut quand même
penser aussi qu'on place… on veut faire un virage technologique, on en est, la
transformation de la justice. Il faut placer les balises à travers le corpus
législatif. C'est une des étapes de le faire. En matière civile aussi, il y a
des personnes vulnérables. Quand on parle de droit de la famille, quand on
parle de garde des enfants. Et cette… Où on parle de gens qui sont d'autres
natures, là. Ça ne me vient pas à l'esprit. Mais il y a aussi des personnes
vulnérables en matière civile, qui vont être poursuivies en matière civile. Ce
corpus existe déjà et on en tient compte.
Maintenant, on va, dans le reste des articles,
quand on va parler de transmission de procédure, de signification de procédure,
s'assurer qu'on ne commet pas d'abus. Encore une fois, des exemples comme
Facebook, pour revenir à ce que c'est, c'est-à-dire que ce sont les moyens
ultimes quand il n'y a plus d'autres moyens, et là il y a une démonstration
devant un juge qui doit être faite par le poursuivant que c'est ça ou je ne
peux pas le signifier, mon constat. Et, à un moment donné, il faut aussi avoir
des moyens de rejoindre les gens qui ont commis des infractions.
Le Président (M.
Bachand) : M. le député de LaFontaine, s'il vous plaît.
M. Tanguay
: C'est
correct. Je veux dire, on peut disconvenir de points de vue. Et, au début, je
vous avais dit que je n'avais pas l'intention de le déposer, mais, à la
réflexion, puis en entendant les collègues autour de la table, je pense que
plus que jamais il faut formellement déposer cet amendement-là.
Alors, avec votre permission, je
déposerais l'amendement suivant :
L'article 2.2 du Code de procédure pénale
proposé par l'article 1 du projet de loi est modifié par le remplacement, dans
le premier l'alinéa, du mot «privilégié» par «considéré».
On pourrait faire des photocopies, M. le
Président.
Le Président (M.
Bachand) : Alors, on va suspendre quelques instants. Merci.
(Suspension de la séance à 17 h 22)
(Reprise à 17h 27)
Le Président (M.
Bachand) :À l'ordre, s'il vous plaît!
Merci. La commission reprend ses travaux. M. le député de LaFontaine, s'il vous
plaît.
M. Tanguay
: Oui, M. le
Président...
Le Président (M.
Bachand) : Chut, s'il vous plaît! M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay
: Merci M.
le Président de ramener l'ordre dans nos délibérations et nous soutiendrons toujours
votre autorité pour se faire. Alors, je n'ai pas l'intention, M. le Président,
de redire ce que j'ai exprimé. Mon intention en déposant formellement l'amendement,
c'est donc d'en faire formellement la demande, qu'il y ait un vote là-dessus.
Le cas échéant, je vous demanderais un vote par appel nominal. Je ne veux pas
empêcher les collègues de dire ce qu'ils ont à dire là-dessus. Moi, je pense...
Puis la ministre a raison, je veux dire, quand elle dit que oui, il y a des
gens vulnérables en matière civile, j'en suis.
Mon point, c'est qu'en matière pénale, on
a davantage d'écho qu'il y a davantage de récurrences de personnes qui ont des
défis particuliers de santé mentale, des défis en matière d'itinérance, ou on
parlait entre autres de profilage. Puis ça a été abordé avec, entre autres, les
policiers qui sont venus nous voir. Il y a un enjeu. Puis la ministre de la
Sécurité publique l'a identifié. Il y a un enjeu de profilage. Alors que ce
soit par profilage ou autre, je ne pense pas qu'on parle d'un aussi grand enjeu
de profilage en matière de procédure civile. Mais en matière de procédure
pénale, la résultante d'un profilage pourrait être, le cas échéant, la
signification d'un constat d'infraction. C'est juste ça mon point.
Oui, il y a des cliniques d'aide et de
soutien en matière civile, mais en matière pénale, il y en a, je crois, bien
davantage. Et dans des cas, M. le Président, ou notamment en matière
d'itinérance, Clinique Droits devant, matière de santé mentale également, un
peu plus tard, un peu plus haut avec d'autres intervenants. On parle de gens
qui, piéton traitant avec l'occupant du véhicule, gisant ou flânant ivre sur la
voie, se... Ça, ça a occasionné... Les chiffres sont là. On parlait de
737 constats d'infraction remis à 272 personnes qui ont été compilés
par la Clinique Droits devant, qui eux, M. le Président, parmi les services,
aident gratuitement les personnes à connaître leur situation judiciaire et à
régulariser leur situation dans les grandes villes de Montréal et faciliter la
régularisation de leur situation judiciaire pour les personnes itinérantes,
notamment.
• (17 h 30) •
Alors moi, j'ai dit ce que j'avais à dire
là-dessus. Je pense que, oui en matière de procédure civile jusqu'à maintenant,
il n'y aurait pas d'écart qui nous a été signifié, mais en matière de procédure
pénale ou... et je le répète, en matière de procédure civile, là, on ne vous
emprisonne pas pour dettes. C'est fini, ça, en matière de procédure civile.
Mais lorsqu'il y a justice pénale, il peut y avoir des conséquences sur votre
liberté. On va vous imposer des peines aussi parce que ce n'est pas toujours
des mesures d'adaptabilité...
17 h 30 (version non révisée)
M. Tanguay
: ...où,
et je le répète, en matière de procédure civile, là, on ne vous emprisonne pas
pour dettes. C'est fini, ça, en matière de procédure civile. Mais lorsqu'il y a
justice pénale, il peut y avoir des conséquences sur votre liberté, on va vous
imposer des peines aussi parce que ce n'est pas toujours des mesures
d'adaptabilité, et ça, en ce sens-là, je pense que ça doit être un deuxième
élément par rapport à l'épée de Damoclès quand vous faites affaire avec...
lorsque vous faites face à des accusations de nature pénale. Oui, je le sais
que, la nature pénale, ça peut être aussi des grandes corporations en matière
environnementale, mais, moi, ce qui m'intéresse, là, c'est les plus
vulnérables, M. le Président. Et je pense qu'en conclusion, avant de
permettre... avant même d'indiquer aux juges, hommes et femmes, que vous pouvez
et vous devez privilégier les nouveaux moyens technologiques, en matière
pénale, je ferais différemment, oui, je ferais différemment qu'en matière
civile et là, et c'est le but de mon amendement, de notre amendement, plutôt
que de dire «privilégier», «privilégier», ça veut dire vous le faites passer
devant, je dirais «pouvez-vous le considérer», et en ce sens-là, ça laisserait,
je pense... ça donnerait le bon ton, d'entrée de jeu, avec ce nouvel
article 2.2. Alors, c'est ça, M. le Président, et j'aurai l'occasion, le
cas échéant, de vous demander un vote par appel nominal sur cet amendement-là.
Le Président
(M. Bachand) : Interventions sur l'amendement du député de
LaFontaine? M. le député de Gouin, s'il vous plaît.
M. Nadeau-Dubois : C'est
un amendement très intéressant et, s'il y a un vote, on va voter pour. J'invite
la ministre à le considérer, l'amendement.
Une voix
: ...
M. Nadeau-Dubois : Et
même en fait... non...
Des voix
: ...
M. Nadeau-Dubois : Non
pas à le considérer, mais à le privilégier puisque c'est beaucoup plus fort
comme terme, «privilégier» que «considérer», et c'est la pertinence de
l'amendement en question de venir modérer le propos de l'article pour que ce
soit, oui, un outil dans le coffre à outils des tribunaux mais que ça ne soit
pas... que ça ne devienne pas la norme parce que, bien que les moyens
technologiques puissent être utiles, et ils le sont certainement dans plusieurs
occasions, on est d'avis que la justice... on est d'avis que la justice est
mieux servie, règle générale, lorsque les gens sont en chair et en os les uns
devant les autres. Alors, j'invite la ministre à considérer l'amendement, ça
démarrerait nos travaux sur un bon pied.
Le Président
(M. Bachand) : Merci. Interventions? S'il n'y a pas
d'autre intervention, nous allons mettre l'amendement aux voix. Est-ce que
l'amendement à l'article 1 est adopté?
M. Tanguay
: Appel
nominal, s'il vous plaît.
Le Président
(M. Bachand) : Vote par appel nominal, Mme la secrétaire,
s'il vous plaît.
La Secrétaire
: Pour,
contre, abstention, M. Tanguay (LaFontaine)?
M. Tanguay
: Pour.
La Secrétaire
:
Mme David (Marguerite-Bourgeoys)?
Mme David : Pour.
La Secrétaire
:
M. Kelley (Jacques-Cartier)?
M. Kelley
: Pour.
La Secrétaire
:
Mme LeBel (Champlain)?
Mme LeBel : Contre.
La Secrétaire
:
M. Lévesque (Chapleau)?
M. Lévesque (Chapleau) :
Contre.
La Secrétaire
:
Mme Lecours (Les Plaines)?
Mme Lecours (Les Plaines) :
Contre.
La Secrétaire
:
Mme Lachance (Bellechasse)?
Mme Lachance : Contre.
La Secrétaire
:
M. Martel (Nicolet-Bécancour)?
M.
Martel
:
Contre.
La Secrétaire
:
M. Lamothe (Ungava)?
M. Lamothe : Contre.
La Secrétaire
:
M. Lafrenière (Vachon)?
M. Lafrenière : Contre.
La Secrétaire
:
M. Lemieux (Saint-Jean)?
M. Lemieux : Contre.
La Secrétaire
:
M. Nadeau-Dubois (Gouin)?
M. Nadeau-Dubois : Pour.
La Secrétaire
:
M. Bachand (Richmond)?
Le Président
(M. Bachand) : Abstention. Donc, l'amendement est rejeté.
Nous retournons donc à l'article 1. Interventions? S'il n'y a pas d'autre
intervention sur l'article 1, je mettrais l'article 1 aux voix.
Est-ce que l'article 1 est adopté?
M. Tanguay
: Sur
division, M. le Président.
Le Président (M.
Bachand) : Sur division, merci beaucoup. Article 2, Mme la
ministre, s'il vous plaît.
Mme LeBel : Oui. Alors,
je vais lire l'article principal et j'aurai un amendement à proposer, M. le
Président. Donc, article 2 : L'article 11... merci.
«L'article 11 de ce code est remplacé
par les suivants :
«11. Le procureur général ou le directeur
des poursuites criminelles et pénales peut :
«1° intervenir comme partie en première
instance pour se substituer ou non à la partie qui a intenté une poursuite;
«2° intervenir comme partie en appel pour
se substituer ou non à la partie qui était poursuivante en première instance;
«3° ordonner l'arrêt d'une poursuite,
avant que jugement ne soit rendu en première instance, qu'elle ait été intentée
par lui ou par tout autre poursuivant;
«4° permettre la continuation d'une
poursuite dans les six mois de l'arrêt de celle-ci, qu'elle ait été intentée
par lui ou par tout autre poursuivant.
«L'intervention, l'arrêt ou la
continuation — pardon — a lieu, sans avis ni formalité et
sans avoir à démontrer un intérêt, dès que le représentant du procureur général
ou du directeur des poursuites criminelles et pénales en informe le greffier.
Celui-ci en informe sans délai les parties.
«Lorsque le procureur général ou le
directeur des poursuites criminelles et pénales intervient comme partie dans
une instance, il devient partie à toute instance subséquente.
«L'intervention de l'un de ceux-ci comme
partie en première instance pour se substituer à la partie qui a intenté une
poursuite a pour effet de modifier la désignation du poursuivant sur le constat
d'infraction.
«11.1. Dans une instance mettant en cause
une question d'intérêt public, le...
Mme LeBel : ...il devient
partie à toute instance subséquente.
«L'intervention de l'un de ceux-ci comme
partie en première instance pour se substituer à la partie qui a intenté une
poursuite a pour effet de modifier la désignation du poursuivant sur le constat
d'infraction.
«11.1. Dans une instance mettant en cause
une question d'intérêt public, le juge peut, même d'office, ordonner au
poursuivant d'inviter le procureur général ou le directeur des poursuites
criminelles et pénales à intervenir.»
Excusez-moi, M. le Président. Commentaire
sur cet article. L'article proposé modifie l'article 11 du Code de
procédure pénale afin que son libellé reflète mieux les prérogatives
historiquement reconnues par la common law au procureur général et au Directeur
des poursuites criminelles et pénales et les fonctions conférées au Directeur
des poursuites criminelles et pénales, notamment par les articles 1 et 13
de la Loi sur le Directeur des poursuites criminelles et pénales.
L'article précise que, lorsque le
procureur général ou le Directeur des poursuites criminelles et pénales
intervient comme partie dans une instance, il est réputé être partie à toute
instance subséquente.
Enfin, il précise que l'intervention du
procureur général ou du Directeur des poursuites criminelles et pénales comme
partie en première instance pour se substituer à la partie qui a intenté une
poursuite aura pour effet de modifier la désignation du poursuivant sur le
constat d'infraction.
Est-ce que j'introduis mon amendement à ce
stade?
Le Président (M.
Bachand) :S'il vous plaît.
Mme LeBel : Parfait. Amendement,
article 2, l'article 11 du Code de procédure pénale : Insérer à la
fin de ce qui précède le paragraphe 1° du premier alinéa de
l'article 11 du Code de procédure pénale, dont le remplacement est proposé
par l'article 2 du projet de loi, ouvrez la parenthèse : «lorsqu'à
son avis, l'intérêt public l'exige».
L'amendement proposé donne suite à un
commentaire du Barreau du Québec entendu en consultations particulières, M. le
Président, qui est d'avis que le pouvoir conféré au procureur général ou au
DPCP ne devrait être exercé que très exceptionnellement lorsqu'il estime que la
décision originale est contraire à l'intérêt de la justice et à l'intérêt
public ou qu'elle est susceptible de déconsidérer l'administration de la
justice.
En d'autres termes, on doit permettre au
DPCP ou au PG d'intervenir comme intervenant sans nécessairement se substituer,
mais on doit baliser cette intervention, d'où la proposition d'amendement où on
indique que l'intérêt public doit l'exiger, M. le Président.
Le Président (M.
Bachand) : Nous allons suspendre quelques instants, s'il vous
plaît. Merci.
(Suspension de la séance à 17 h 37)
(Reprise à 17 h 39)
Le Président (M.
Bachand) :À l'ordre, s'il vous plaît!
Merci. La commission reprend ses travaux. Nous sommes maintenant sur l'amendement
proposé par la ministre à l'article 2. Interventions? M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay
: Oui, M. le
Président. Premier questionnement, donc, lorsque... juste pour le mettre dans
les transcriptions, là, donc dans les micros. L'amendement... Soyons d'abord
sur l'amendement proposé par Mme la ministre, le nouvel article 11 qui
remplacerait, donc, l'article 11 actuel du Code de procédure pénale.
L'amendement aurait pour effet de modifier ce nouvel article 11 de manière
à ce que soit lue la première ligne : 11. Le procureur général ou le Directeur
des poursuites criminelles et pénales peut, lorsqu'à son avis l'intérêt public
l'exige... après ça, les deux-points, et on y va avec le reste de
l'énumération. Alors, c'est notre compréhension de... et je vois que c'est effectivement
le cas.
Là, M. le Président... Puis ça fait effectivement
écho de ce que le Barreau est venu nous dire. Le Barreau du Québec était d'avis
que «le pouvoir ainsi conféré au PG ou au DPCP ne devrait être exercé que très
exceptionnellement, lorsqu'il estime que la décision originelle est contraire à
l'intérêt de la justice et à l'intérêt public ou qu'elle est susceptible de
déconsidérer l'administration de la justice».
• (17 h 40) •
Premier questionnement : Pourquoi la ministre
a-t-elle conservé... Là, je n'ai pas le verbatim du mémoire du Barreau, mais
les notes que j'en avais prises à...
M. Tanguay
: …exercé
que très exceptionnellement lorsqu'il estime que la décision originelle est
contraire à l'intérêt de la justice et à l'intérêt public auquel... est
susceptible de déconsidérer l'administration de la justice. Premier questionnement :
Pourquoi la ministre a-t-elle conservé… Là, je n'ai pas le verbatim du mémoire
du Barreau, mais les notes que j'en avais prises à l'époque, c'est qu'il y
avait trois considérants, pas seulement l'intérêt public, qui est l'un deux,
mais il y avait l'intérêt de la justice, qui est un concept tout à fait
reconnu, l'intérêt de la justice, et il y avait l'aspect susceptible de
déconsidérer l'administration de la justice. Alors, pourquoi ne pas avoir
repris et l'intérêt de la justice qu'on retrouve, mais aussi l'intérêt public
et la déconsidération, le cas échéant, de l'administration de la justice? Pourquoi
on devrait faire ce choix de l'un sur les trois?
Mme LeBel : Je veux peut-être
vous répondre en prenant un détour, si vous le permettez, de la façon
suivante : L'article 11, présentement, qu'on se propose de remplacer dans
le Code de procédure pénale existe déjà, donne déjà la possibilité au
poursuivant de se substituer. Le problème, c'est que… qu'on a dans l'état
actuel des choses, c'est que le poursuivant, le DPCP ou le Procureur général du
Québec… parce que le poursuivant, souvent, peut être un poursuivant municipal,
on le comprend, ou un autre type de poursuivant… ne pouvait pas intervenir pour
faire valoir un point de droit précis sans être obligé de prendre la cause,
l'enlever au… de se substituer dans tous les cas.
Donc, la première étape…Puis je le fais
comme ça parce que je pense que c'est important… La première étape, c'était de
permettre, donc, d'intervenir comme parti pour se substituer ou non. Donc,
c'est le «ou non», finalement, qu'on est venus ajouter pour permettre au PG ou
au DPCP, dans le cas… dans ces cas-là, de pouvoir venir faire valoir un point
de droit sur une question qui est d'intérêt public, donc d'intérêt qui n'est
pas nécessairement sur les faits de la cause, naturellement, mais on peut
penser à des types de dossiers… et je vais vous ramener… probablement pas dans
des cas de contraventions, là, mais on parle de lois en environnement ou de
types de dossiers pénaux avec une importance… je veux dire… je n'allais pas
dire supérieure parce que tout est dans l'œil du contrevenant, mais qui a…
d'une gravité objective peut-être plus grande… permettre au PG ou au DPCP
d'intervenir.
Maintenant, la crainte du Barreau était
que, dans l'état actuel de l'article 11 comme on le proposait, c'est que le
poursuivant plus intervenir à tout moment sans justifier son intervention.
Donc, nous décidons d'introduire l'amendement pour justement baliser
l'intervention. Mais il ne faut pas limiter l'intervention du poursuivant.
Parce qu'elle est existait déjà, cette possibilité-là. Le problème, c'est qu'il
devait se substituer, ce qui n'est pas nécessairement ni dans l'intérêt du
contrevenant ni dans l'intérêt du poursuivant d'origine.
Maintenant, pour ce qui est de baliser
l'intervention, le critère d'intérêt public est un critère qui est une notion
qui est largement utilisée lorsqu'il est question du rôle et des
responsabilités du poursuivant public. Alors, c'est un critère qui est dans les
interventions de la Couronne, en règle générale, ou du Procureur général.
L'intérêt public est le critère, souvent, qui est utilisé pour baliser les
interventions du Procureur général. C'est pour cette question-là qu'on a
privilégié cette notion-là, et on considère, à ce stade-ci, que ça va répondre
aux préoccupations du Barreau, tout en notant que, dans l'état actuel des
choses, le PG puis le DPCP pouvaient faire la même chose. Tout ce qu'ils
avaient à faire, c'est à se substituer. On y ajoute la possibilité de le faire
sans se substituer, et on balise cette possibilité-là pour répondre les préoccupations.
Le Président (M.
Bachand) : Merci. M. le député.
M. Tanguay
: Oui.
Là-dessus, M. le Président, je soumets à Mme la ministre… Premier élément. Je
soumets à Mme la ministre que, dans le cas de… dans l'économie… tel que rédigé,
le Code de procédure pénale… dans l'économie du texte du Code de procédure
pénale, là, on ne retrouve pas «intérêt public», mais on retrouve «intérêt de
la justice». Donc, premier élément. On m'indique… puis qu'on me corrige si j'ai
tort… mais, dans le Code de procédure pénale, le concept qui revient, ce n'est
pas l'intérêt public, mais l'intérêt de la justice. Alors, on introduirait…
Pourquoi ne pas avoir privilégié les trois? Puis, après ça, je vais revenir, M.
le Président, sur l'utilisation nécessaire, quant à moi, des trois. Pourquoi ne
pas avoir, dans l'amendement, précisé comme ailleurs dans le Code de procédure
pénale l'intérêt de la justice plutôt que l'intérêt public?
Mme LeBel : Alors, je reviens
à ce que je vous ai dit. Dans l'origine, l'intérêt public dans… est le concept
qui s'intéresse uniquement à l'appréciation qui est faite par le Procureur
général ou le DPCP quand… une intervention qu'ils doivent faire. Donc, c'est un
concept qui se rattache aux actions du DPCP, du Procureur général. C'est pour
ça que dans ce cas-ci… L'intérêt de la justice, c'est un concept qui est plus large,
qui va couvrir un ensemble de situations plus multiples. On le retrouve aussi,
mais ce n'est pas… On ne parle pas, dans ce moment-là, des interventions du
DPCP ou de la justification de l'intervention du DPCP ou du Procureur général.
Donc, on a repris le concept qui, actuellement, balise les interventions dans
d'autres endroits où c'est demandé, qui balise les interventions, soit du DPCP,
soit du Procureur général. Et, en… dans ces cas de figure là, quand on parle de
baliser l'intervention du PG ou du DPCP, on parle d'intérêt public.
M. Tanguay
: Et…
Mme LeBel : …habituellement,
balise les interventions dans d'autres endroits où c'est demandé, qui balise
les interventions soit du Procureur général et, dans ces cas de figure là,
quand on parle de baliser l'intervention du P.G. ou du DPCP, on parle d'intérêt
public.
M. Tanguay
: Et donc, si
je comprends bien, Mme la ministre, parce que, dans des cas d'espèce, ça va
être plus permissif et, dans d'autres cas d'espèce, selon l'expression, là,
intérêt de la justice, intérêt public ou susceptible de déconsidérer l'administration
de la justice, selon le cas d'espèce, si le Procureur général ou le DPCP avait
une porte ouverte autre que seulement l'intérêt public, s'il pouvait donc
intervenir comme partie en première instance, intervenir comme partie en appel
ou ordonner l'arrêt d'une poursuite, si on lui dit : Tu pourras le faire,
puis j'arrête là, si on pourrait lui dire… si on lui dit : Tu pourras le
faire uniquement dans l'intérêt public et ne pourra prendre que cette porte-là.
Si d'aventure — puis là je
réfléchis tout haut avec Mme la ministre — on donnait suite à ce que
le Barreau suggère, en page 2 de leur mémoire, et que l'on ajoute deux autres
portes, tu pourras le faire si c'est dans l'intérêt de la justice
ou — ça me parle beaucoup plus, ça me parle beaucoup plus, M. le
Président — tu pourras le faire, si en ne le faisant pas, on est
susceptible de déconsidérer l'administration de la justice. Ça me parle plus
parce que, moi, quand on me dit : On ouvrirait une autre porte, exemple,
l'arrêt d'une poursuite, j'aimerais ça, moi, que le Procureur général et le
DPCP puissent justifier l'arrêt d'une poursuite, pas uniquement par le porte de
l'intérêt public, qui est une porte extrêmement importante, mais par d'autres
considérants que l'intérêt public qui pourraient être aussi… écoutez, si on
continue là-dedans, si nous n'arrêtons pas la poursuite, on va peut-être, je ne
sais pas, le justifier en intérêt public, mais chose très certaine, nous
sommes, si nous ne le faisons pas, susceptibles de déconsidérer
l'administration de la justice.
C'est juste ça, mon point, de permettre au
P.G., le Procureur général ou au DPCP, trois portes, plutôt qu'une pour, dans
le cas d'espèce là, ordonner l'arrêt de poursuite, ça me semble moins
limitatif. Voilà.
Mme LeBel : Le fait de pouvoir
ordonner l'arrêt d'une poursuite — avant que… était
rendu — existe déjà dans le Code de procédure pénale, cet aspect-là,
on ne l'ajoute pas. Là, où le Barreau soulevait une préoccupation, c'était dans
le fait qu'on pouvait permettre au P.G. ou au DPCP, dans le nouvel amendement,
d'intervenir sans avoir à se substituer, et ce qu'il craignait, c'était qu'il y
ait une multiplication… multiplicité, que je cherchais à dire, là, des
poursuivants contre lui. Alors, on ne peut pas… il faut permettre au P.G. ou au
DPCP d'intervenir sur vos droits particuliers dans l'intérêt public, mais sans
nécessairement avoir besoin de se substituer. Le fait d'ordonner l'arrêt d'une
poursuite, là, on le balise, mais il existait déjà dans… ce n'est pas cette
notion-là qu'on introduit, qui est nouvelle, là.
Ceci étant dit, quand on parle de
l'intérêt de la justice, je vais vous donner un exemple, je n'ai pas un cas de
figure particulier, mais quand c'est un contrevenant ou un défendeur
dépendamment, qui veut soulever une question, il ne soulève pas l'intérêt
public, il va soulever l'intérêt de la justice parce que, dans son cas à lui,
l'intérêt public, bien, souvent, ce n'est pas l'intérêt qu'il veut soulever,
mais on est vraiment… là, on vient vraiment ajouter une balise pour répondre
aux préoccupations du Barreau et, moi, je suis respectueusement soumise et
convaincue que ça va venir baliser effectivement les interventions du
procureur, ce qui ne l'empêche pas de faire comme avant, de se substituer, à ce
moment-là, il doit assumer la poursuite juste pour vous.
M. Tanguay
: C'est bon.
Et, moi, M. le Président, on pourrait même m'opposer, en toute honnêteté
intellectuelle, on pourrait même m'opposer que le Barreau avait la préoccupation
de limiter le pouvoir du Procureur général et du DPCP, et que le Barreau
demandait à ce que ce soit balisé sous trois portes, que la ministre décide de
le baliser en ne lui permettant qu'une seule porte. L'intérêt public, ça va
davantage même dans le sens de ce que proposait le Barreau, parce qu'à un seul
titre, il considère juste l'intérêt de la justice, ton pouvoir sera balisé par
ça et tu n'auras pas l'usage des deux autres portes.
Alors, moi, j'entends Mme la ministre, M.
le Président, puis je suis conscient aussi des concepts en matière de Procureur
général, DPCP, en matière de ce qu'ils ont à gérer en vertu de l'article 11,
que l'intérêt public soit la grille d'analyse qui couvre les cas d'espèce,
bien, moi, ça me va, M. le Président, quant à cet amendement-là.
• (17 h 50) •
Dernier point, par contre, dernier point,
par contre, quelle serait… puis là je ne veux pas présumer d'un débat
constitutionnel, là, quelle serait la justifiabilité… je vais poser ma question
comme ça, ne serait-il pas trop facile pour le Procureur général et le DPCP,
pour lesquels on veut…
M. Tanguay
: ...puis là
je ne veux pas présumer d'un débat constitutionnel, là. Quelle serait la
justifiabilité... Je vais poser ma question comme ça : Ne serait-il pas
trop facile pour le Procureur général et le DPCP, pour lesquels on veut qu'ils
limitent leurs pouvoirs d'intervention, de dire, lorsqu'on écrit : À ton
avis, est-ce que l'intérêt public l'exige? Si on enlevait «à ton avis» et qu'on
disait : Ils peuvent le faire lorsque l'intérêt public l'exige, on
introduit là un débat purement objectif — je ne sais pas si la
ministre me suit là-dessus — en disant : Lorsque l'intérêt du
public l'exige... donc démontre l'intérêt public. Si on vous dit : à votre
avis, l'intérêt public l'exige, je vais vous dire : Démontre qu'à ton avis
c'est l'intérêt public. Je ne sais pas si vous me comprenez, au niveau de mon
fardeau de preuve, il est différent. Si je vous dis : Faites-moi la preuve
que c'est votre avis ou faites-moi la preuve que c'est l'intérêt public qui
l'exige, ce n'est pas le même fardeau. Je veux juste m'assurer qu'on a une
réflexion là-dessus.
Le Président (M.
Bachand) : Mme la ministre.
Mme LeBel : Bien, je dois dire
que, d'entrée de jeu, là, j'étais très sensible aux arguments du Barreau puis
je voulais quand même apaiser certaines craintes. Mais la jurisprudence en
matière d'intervention du DPCP ou du Procureur général... l'exercice d'un
pouvoir discrétionnaire, parce que ça devient un pouvoir discrétionnaire, vous
l'avez dit, d'intervenir, est extrêmement bien balisé par la jurisprudence. Le
code de déontologie des avocats aussi. Puis je peux vous dire que d'entrée de
jeu, on n'était pas... nous, et je ne suis même pas convaincue que c'était
nécessaire de le baliser, parce que je pense que le poursuivant, de toute
façon, quand il fait une intervention, elle peut être contestée, il doit toujours
démontrer qu'il a exercé son pouvoir discrétionnaire de façon adéquate. On
vient ajouter un critère, que le juge devra évaluer, dans l'exercice du pouvoir
discrétionnaire, c'est-à-dire l'intérêt public de façon extrêmement précise.
Je pense que ça devrait, en tout respect,
suffire à apaiser les craintes sur ce doute-là. Mais la jurisprudence en
matière d'intervention du PG ou du DPCP dans ce type d'intervention là est
extrêmement bien balisée au niveau du pouvoir discrétionnaire, je peux vous
rassurer là-dessus.
M. Tanguay
: Non, je
trouve ça éclairant, ce que nous soumet Mme la ministre. Autrement dit, le
débat, le cas échéant, dans nos cours, quant à l'exercice, ce serait... le
débat, ce serait est-ce qu'il a ou elle a bien exercé son pouvoir
discrétionnaire? A-t-il bien exercé son pouvoir? Donc, le débat qu'il y aurait,
ce ne serait pas tant de dire : Montre-moi, par a plus b, que l'intérêt
public l'exige, mais ce serait a-t-il bien exercé son pouvoir discrétionnaire,
a-t-il fait toutes les analyses, la rigueur et les standards? Je sais que c'est
assez étayé. Donc, ce à quoi la ministre nous fait référence, c'est à ce
niveau-là.
Est-ce que, puis on pourrait faire une ...
Est-ce que la ministre a l'information sous la main, ou quelqu'un qui travaille
avec elle... est-ce que dans de pareils cas de l'exercice d'une discrétion
Procureur général ou DPCP, dans d'autres loi, il est dit... en l'absence de
«lorsqu'à son avis», il est dit «lorsque l'exige l'intérêt public»? Est-ce qu'il
y a de tels cas, ou peut-elle affirmer que non, il n'y en a pas, dans tous les
cas d'espèce, on l'a toujours rédigé... pas «l'intérêt public l'exige, seul»,
ça a toujours été «lorsqu'à son avis?
Le Président (M.
Bachand) : Mme la ministre.
Mme LeBel : C'est extrêmement
difficile, honnêtement, de répondre de façon exhaustive. Ce que je peux vous
dire, c'est que, quand on parle de baliser le pouvoir discrétionnaire du
poursuivant et que la jurisprudence le fait, bien, c'est ce critère-là d'intérêt
public qui est étudié dans la jurisprudence. Mais est-ce que ça apparaît dans
une loi particulière, on n'a pas fait le recensement, on n'est pas en mesure de
vous répondre, non.
M. Tanguay
: Et c'est
sûr que, là, il s'agit des lois sur l'administration fiscale, pas besoin
d'aller chercher, là, puis c'est un autre contexte, ce n'est pas la même
affaire, je le sais, mais «le ministre peut, lorsque l'intérêt public l'exige, notamment
préserver...»... Alors, je le sais, que l'analyse qui serait faite quant à
l'exercice discrétionnaire dans le contexte de cette loi-là du ministre, probablement
des Finances, lorsque l'intérêt public l'exige, il devra faire une analyse, est-ce
que l'intérêt public l'exige, oui ou non? Ma lecture... beaucoup plus axé,
donc, le débat, sur y a-t-il intérêt public, démonstration d'intérêt public ou
pas? Là, ce que je comprends... puis je comprends la nature discrétionnaire du
DPCP qui dit : Dans tel dossier, on poursuit oui on ne poursuit pas, puis il
y a des balises, il y a une grille d'analyse. Lorsqu'à son avis, autrement dit,
on doit, s'il n'a pas outrepassé l'exercice de son pouvoir discrétionnaire, on
ne peut pas substituer sa propre discrétion à la discrétion du DPCP. Ça, j'en
suis.
Mais ma question était juste de nous
assurer que l'on a bien pesé «lorsqu'à son avis», l'introduction de ces
mots-là, et que l'on ne va pas, puis c'est ça ma seule préoccupation, M. le
Président, que l'on ne va pas changer ce qui, historiquement, a toujours été le
débat lorsqu'il y avait contestation de l'exercice d'un pouvoir
discrétionnaire, là.
Le Président (M.
Bachand) : Merci. Intervention...
M. Tanguay
: ...et
de ces mots-là et que l'on ne va pas, puis c'est ça ma seule préoccupation, M.
le Président, que l'on ne va pas changer ce qui historiquement a toujours été
le débat lorsqu'il y avait contestation de l'exercice d'un pouvoir
discrétionnaire, là.
Le Président (M.
Bachand) : Merci. Intervention? Sina pas d'intervention que
l'amendement de la ministre, je mets aux voix. Est-ce que l'amendement est
adopté?
Des voix
: Adopté.
Le Président (M.
Bachand) : Adopté. C'était l'amendement à l'article 2,
pardon. Merci. On revient sur l'article 2. Intervention? M. le député de
LaFontaine, s'il vous plaît.
M. Tanguay
: Oui,
M. le Président. Nous avons, si vous me permettez, l'Association québécoise des
avocats et des avocates de la défense nous soulevait quant à l'article 2,
les notes que j'ai prises sont les suivantes, c'est la capacité même de se
défendre et la mobilisation de ressources hors de portée du justiciable qui est
en cause ici. Si de tels pouvoirs devaient être envisagés, ils devraient à tout
le moins être encadrés par des exigences équivalentes à celles qui sont
requises des organismes tels que l'Association québécoise des avocats et des
avocates de la défense lorsqu'ils demandent exceptionnellement le statut
d'intervenant généralement devant la Cour d'appel du Québec ou la Cour suprême
du Canada. Je ne sais pas si Mme la ministre a eu l'occasion de faire une
réflexion quant à ce point soulevé par l'association.
Mme LeBel : Bien, on
vient y répondre encore une fois par le biais de l'amendement puis par le biais
de la façon dont c'est procédé à l'époque. Ou plutôt pas à l'époque, mais dans
l'état actuel du droit, le DPCP ou le PG a tout le loisir d'intervenir et de...
Mais il doit se substituer. Maintenant, on va... On balise cette
intervention-là. On l'encadre dans le cas où l'intérêt public l'exige à son
avis. Et ça va être sur... C'est souvent, ça va être sur... À ce moment-là, si
le DPCP ou le PG ne décide pas ou ne juge pas opportun de se substituer parce
qu'il a toujours l'opportunité de le faire selon l'article, bien, c'est parce
qu'il va intervenir sur un point précis.
Donc, l'association n'était pas contre,
mais demandait à ce qu'on balise ce pouvoir d'intervention. Donc, l'idée n'est
pas que le DPCP va intervenir sur des questions factuelles, mais on parle
encore de l'intérêt public qui l'exige. Et habituellement ce sont des questions
de droit très pointues ou de cohérence des interventions, j'imagine, là. C'est
difficile d'imaginer des cas de figure mais on vient, je pense, répondre
également à cette préoccupation-là de balise l'intervention et de s'assurer
qu'on n'a pas la pleine force du PG ou du DPCP contre un contrevenant. Ce n'est
pas l'objectif. D'ailleurs, c'était déjà possible. Le DPCP pouvait déjà se
substituer. Maintenant on lui permet juste de faire une intervention plus
ciblée, plus pointue s'il le juge approprié quand l'intérêt public l'exige, tel
que l'amendement proposé.
Le Président (M.
Bachand) : M. le député.
M. Tanguay
: Oui.
Merci, M. le Président. Quel est... J'aimerais entendre la ministre de façon
plus particulière l'à propos, donc, d'ajouter un 11.2 qui vient de façon
spécifique dans une instance mettre en cause une question d'intérêt public. Le
juge peut même d'office ordonner au poursuivant d'inviter le procureur général
ou le Directeur des poursuites criminelles et pénales à intervenir. Puis si
elle peut éclaire ma lanterne, est-ce de droit nouveau? Est-ce que c'était déjà
écrit à quelque part? Et pourquoi le prévoir à 11.1?
Le Président (M.
Bachand) : Mme la ministre.
Mme LeBel : Encore une
fois, c'est une question de donner aux tribunaux des outils et d'harmoniser le
plus possible quand c'est utile de le faire, parce que ce n'est pas à n'importe
quel prix, j'en suis d'accord, avec l'article 79 du Code de procédure
civile qui va permettre au tribunal de demander l'intervention du procureur
général ou du directeur des poursuites — de demander d'ailleurs et
non pas ordonner — l'intervention du DPCP ou du PG quand à son avis
aussi une question d'intérêt public devrait être débattue en sa présence. Donc,
le juge peut aussi trouver qu'il y a une question d'intérêt public qui dépasse
la poursuite comme telle qui devrait être débattue devant lui et demander que
ce soit le PG ou le DPCP dépendamment de la nature ou du type de procédure, là,
qui intervienne. Mais la question d'intérêt public demeure à ce moment-là.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. Écoutez, je sais que vous aimeriez
continuer encore, mais compte tenu de l'heure la commission va suspendre ses
travaux jusqu'à 19 h 30. Merci.
(Suspension de la séance à 17 h 59)
19 h 30 (version non révisée)
(Reprise à 19 h 32)
Le Président (M.
Bachand) :O.K. À l'ordre, s'il vous plaît!
Merci beaucoup, et bonsoir.
Lors de la suspension de nos travaux cet
après-midi, nous discutions de l'article 2, amendé, du projet de loi.
Interventions? M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay
: Oui, merci
beaucoup, M. le Président, de me repasser la parole dans ce contexte. Le projet
de loi... J'en étais... Vous me mettez au défi, je relève le défi avec brio, M.
le Président. 11.1, pourquoi on a ça?
Mme LeBel : J'avais
répondu. Relevez à nouveau.
M. Tanguay
: Pas
sûr... Pas sûr, M. le Président. J'aimerais que Mme la ministre étaie sa
réponse.
Mme LeBel : Alors, je
vais verser ma réponse précédente ici... Non, mais sans blague, j'avais
répondu.
Ce que je disais, c'est que... c'est ça,
que ça... ça permet... C'est l'article qui dit que le juge peut lui aussi
demander au P.G. ou au DPCP d'intervenir, mais ce sont selon les mêmes
critères, c'est-à-dire dans une question d'intérêt public.
Donc, c'est simplement qu'ici le juge,
lui, proprio motu, alors d'office, décide ou voit dans une instance une question
qui mériterait que le Procureur général ou le DPCP intervienne. Il peut le
faire, demander l'intervention. Mais la notion d'intérêt public s'applique
aussi, comme pour la première phase, où c'est le Procureur général ou le DPCP
qui décideraient de le faire, tel qu'on l'a décidé... discuté précédemment.
M. Tanguay
: Et ma
question, M. le Président, est peut-être davantage... pas peut-être, elle est davantage...
11.1 vient écrire, vient préciser que le juge peut, même d'office, ordonner au
poursuivant d'inviter le P.G. ou le DPCP à intervenir.
Ma question, de compréhension seulement,
là, la ministre saura éclairer ma lanterne : Est-ce que ça, ce n'est
pas... Deux choses, l'une, ce n'est pas déjà prévu par ailleurs? J'imagine que
non puisqu'on l'inscrit là. Est-ce que ça découlait... Et de quelle autre
source ça découlait, à ce moment-là, ce pouvoir au juge d'ordonner ça? Parce
que je suis certain que l'on ne fait qu'écho peut-être de jurisprudence...
(Consultation)
Le Président (M.
Bachand) :Mme la ministre.
Mme LeBel : Oui. Non, ce
n'était pas dans le Code de procédure pénale. Naturellement, bon, il ordonne au
poursuivant de le faire, parce qu'on s'entend que le P.G., le DPCP n'est pas
encore... n'est pas partie devant lui, donc il doit passer par le poursuivant
actuel. Mais ça s'inspire de l'article 79 du Code de procédure civile, qui
prévoit que «dans une instance qui met en cause une question d'intérêt public,
les tribunaux peuvent, même d'office, ordonner aux parties d'inviter le Procureur
général du Québec à intervenir comme partie».
Donc, c'est simplement, encore une fois,
une question d'arrimage avec ce qui existe déjà dans la procédure civile parce
que l'article 11... n'était peut-être pas, à ce niveau-là, complet et ne
permettait pas au tribunal de le faire d'une façon officielle, donc...
Mais la notion d'intérêt public demeure la
clé de cette intervention.
M. Tanguay
: Et...
Merci. Est-ce que l'article 79 dans le Code de procédure civile, qui est un
peu notre pendant, auquel on fait miroir, était de droit nouveau ou il existait
déjà avant le 1er janvier 2016?
Mme LeBel : Il faudrait
regarder. Il faudrait... Je vais regarder parce que tantôt j'étais dans le Code
de procédure civile, j'avais les années d'adoption, là, mais... 79, c'est ça?
M. Tanguay
: Oui.
M. Tanguay
: ...on
fait... était de droit nouveau ou il existait déjà avant le 1er janvier
2016?
Mme LeBel : Il faudrait
regarder. Je vais regarder. Parce que tantôt j'étais dans le Code de procédure
civile, j'avais les années d'adoption, là, mais... 79, c'est ça?
M. Tanguay
: Oui.
(Consultation)
Mme LeBel : 2014, 2014.
Une voix
: ...
Mme LeBel : Bien,
l'article 79, tel qu'il... dans le Code de procédure civile actuel, est
adopté en 2014. Maintenant, quelles étaient les modifications qui ont été
faites en 2014? Difficile de le savoir, là.
M. Tanguay
: Et je vous
soumettrais que, le Code de procédure civile, pour avoir participé, à l'époque,
aux débats, probablement que tous les articles sont de 2014 parce qu'il y a eu
une mouture, il a été revisité.
Mme LeBel : Bien, ça se peut,
mais, moi, c'est la seule indication que je peux vous donner vite de même, là.
M. Tanguay
: Là, je
vois, M. le Président, que vous vous impatientez.
Le Président (M.
Bachand) : Non, non, non, c'est juste pour la suite des choses.
Alors donc, laissez peut-être un petit temps entre vos interventions pour qu'on
puisse vous écouter et vous entendre.
Mme LeBel : Sinon, je devrai
aller m'asseoir à côté de vous, ce sera plus...
Le Président (M.
Bachand) : Alors, M. le député, s'il vous plaît.
M. Tanguay
: M. le
Président, alors, mon point, c'est qu'à 11.1, oui, on fait miroir avec 79,
mouture mise en vigueur 1er janvier 2016 du Code de procédure civile de la
loi de 2014, oui. Mon point est que... Est-ce que ça, c'est un pouvoir qui
existait avant?
Mme LeBel : Je serais bien
embêtée de vous le dire. Moi, ce que je sais, c'est qu'il existe de façon
actuelle dans le Code de procédure civile. Le pouvoir n'existait pas comme tel
dans le Code de procédure pénale. L'article 11 actuel ne permettait pas, à
moins que je me trompe, au tribunal. C'est pour ça qu'on a introduit 11.1.
Mais la modification qui a eu lieu en 2014
sur l'article 79...
Une voix
: ...avant,
c'était 97.
Mme LeBel : Est-ce que vous
me...
M. Tanguay
: Ah! 97,
ça, ça me dit de quoi. Moi, je suis de l'ancien régime.
Mme LeBel : Oui, peut-être que
c'était dans la refonte. Laissez-moi juste regarder deux secondes, si vous me
permettez.
M. Tanguay
: Oui. Vous
pouvez suspendre, M. le Président.
Le Président (M.
Bachand) : Je pense qu'on va suspendre parce que ça semble...
c'est un élément important.
Alors, on suspend quelques instants.
Merci.
(Suspension de la séance à 19 h 37)
(Reprise à 19 h 43)
Le Président (M.
Bachand) :À l'ordre, s'il vous plaît!
Alors, Mme la ministre.
Mme LeBel : Oui. Alors, pour
être certaine, M. le député, de bien répondre à votre question, si vous
permettez, on peut peut-être continuer à faire les vérifications nécessaires.
On a déjà une idée de réponse, mais on veut être certains de vous donner la
réponse la plus exacte possible. On peut suspendre, si vous voulez, l'étude de
cet article-là et passer à l'article 3.
M. Tanguay
: Oui.
Mme LeBel : Et par la suite on
pourra... avec le consentement de tout le monde. Naturellement, moi, je le
propose, là, mais...
Le Président (M.
Bachand) : Est-ce qu'il y a consentement pour suspendre
l'article 2?
M. Tanguay
:
Consentement.
Le Président (M.
Bachand) : Consentement. Merci beaucoup. Article 3, Mme la
ministre, s'il vous plaît.
Mme LeBel : Merci, M. le
Président. Article 3 : «L'article 14 de ce code est modifié par
l'ajout, à la fin, de l'alinéa suivant:
«Un défendeur peut, avec le consentement
du poursuivant, renoncer à la prescription acquise à l'égard de la poursuite.»
Commentaires. L'article proposé modifie
l'article 14 du Code de procédure pénale afin de permettre à un défendeur,
avec le consentement du poursuivant, de renoncer à la prescription acquise à
l'égard d'une poursuite pénale.
Le Président (M.
Bachand) : Interventions? M. le député de LaFontaine, s'il vous
plaît.
M. Tanguay
: Mais, M.
le Président, donc «Un défendeur peut...» Donc, il s'agit d'ajouter : «Un
défendeur peut, avec le consentement du poursuivant, renoncer à la prescription
acquise à l'égard de la poursuite.» Oui. Dans quel cas d'espèce... Avez-vous...
Je ne sais pas si la ministre pourrait nous illustrer ce qu'on veut faire ici.
Dans quel cas d'espèce il y aurait renonciation à la prescription acquise à
l'égard de la poursuite?
Mme LeBel : Oui, absolument.
D'ailleurs, c'est un des articles qui a été... qui a fait l'objet de bons
commentaires et non pas de mauvais commentaires pendant la consultation.
Naturellement, on s'entend que c'est une prérogative du défendeur de renoncer à
la prescription et non pas du poursuivant, ce qui est tout à fait normal. C'est
pour permettre une meilleure négociation. Quelques fois, il arrivait au
procureur, le poursuivant voulait négocier un article... un autre article du
Code de la sécurité routière, à titre d'exemple, et au moment des négociations,
une infraction moindre, qui n'est pas nécessairement moins incluse, et on ne
pouvait pas faire la négociation parce qu'il y avait prescription et personne
n'avait moyen d'y renoncer. Donc, à ce moment-là, avec... Naturellement, si on
désire faire une telle négociation, que la prescription serait un obstacle à
cette négociation-là pour substituer une infraction...
Mme LeBel : ...des négociations,
une infraction moindre, qui n'est pas nécessairement moins incluse, et on ne
pouvait pas faire la négociation parce qu'il y avait prescription, et personne
n'avait le moyen d'y renoncer. Donc, à ce moment-là, avec... Naturellement, si
on désire faire une telle négociation, que la prescription serait un obstacle à
cette négociation-là pour substituer une infraction plutôt qu'une autre, bien,
avec «le défendeur peut le faire», avec le consentement de poursuivant, naturellement...
pour permettre de réactiver, si je peux le dire de cette façon-là, ce n'est peut-être
pas le bon terme, un article qui avait été... qui était déchu, là, une
infraction qui était déchue par la prescription.
M. Tanguay
: Oui, tout
à fait.
Mme LeBel : C'est à l'avantage
du défendeur, si vous permettez, d'y ajouter...
M. Tanguay
: Bien oui, tout
à fait, tout à fait, je le reconnais. Il y avait l'association des procureurs
de la cour municipale qui avait le commentaire suivant au deuxième alinéa de
l'article 14. Je sais que vous ajoutez un troisième alinéa, donc on n'est pas
là, mais eux en profitaient pour parler, quant à l'article 14... devrait être
modifié par l'insertion, à la suite de «dispositions spécifiques» de «à une loi
ou un règlement municipal». Ainsi, ils croyaient qu'il était important que
l'exception du deuxième alinéa de l'article 14 puisse s'appliquer aux
poursuivants municipaux. «Il serait injuste, donc — c'est leurs
dires — dans l'exemple de coupe d'arbres, la responsabilité pénale du
contrevenant soit écartée par simple erreur procédurale. Nous rappelons qu'il
appartient toujours à la poursuite de prouver l'identité du responsable de
l'infraction lors de la présentation de la preuve.» Donc, eux... je ne sais pas
si la ministre a eu l'occasion de faire une réflexion quant à ce qui était
proposé par l'Association des procureurs de cours municipales.
Le Président (M.
Bachand) : Mme la ministre.
Mme LeBel : Non. Je n'ai pas
de commentaire à cet égard. Mais je peux peut-être juste vous préciser, tantôt,
dans mon exemple, là, naturellement, c'est quand il s'agit de passer d'une
infraction criminelle, surtout une infraction pénale, les infractions pénales
se prescrivant toujours par le même délai, là, donc je voulais juste le
préciser, au niveau de la prescription. Mais j'avoue que non, M. le député, je
m'excuse, là, mais ce n'est pas quelque chose qui m'a accroché, honnêtement.
M. Tanguay
: Donc, eux
disaient : «Toutefois, à l'égard d'une disposition spécifique...»
Mme LeBel : Oui, c'est le
deuxième alinéa de 14, c'est ça?
M. Tanguay
: Eux
disaient d'ajouter «à une loi ou un règlement municipal». Autrement dit, ils
voulaient élargir la possibilité aux règlements municipaux.
Mme LeBel : Ce n'est pas
quelque chose qu'on a considéré, puis je ne pense pas que, en tout cas, en tout
égard, que ce soit pertinent de le faire, à ce stade-ci, là, mais...
M. Tanguay
: Est-ce
qu'on peut suspendre, le cas échéant, là, l'article, puis revenir? Moi, mon
point, M. le Président, ce n'est pas de suspendre pour faire du temps puis
retarder l'adoption, mais, si l'on souligne un élément qui peut-être mériterait
une réponse à l'Association des procureurs de cours municipales, qui le
soulevait, et qu'il resterait... et qu'il demeurerait une analyse à faire, moi,
je suis bien disposé à le suspendre sur ce seul aspect là qui, lorsqu'il sera
comblé, bon, après ça, moi, sur le fond... sur le fond, je n'ai pas de problème
avec l'article 3, là, on pourrait l'adopter tout de suite, mais on pourrait peut-être
se donner le loisir de nous revenir avec une analyse spécifique par rapport à
ça.
Le Président (M.
Bachand) : Si vous êtes d'accord, on va suspendre quelques
instants les travaux pour pouvoir voir si on va suspendre l'article ou pas.
Alors, on va suspendre les travaux. Merci.
(Suspension de la séance à 19 h 48)
(Reprise à 19 h 52)
Le Président (M.
Bachand) : Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Et on a
trouvé un cellulaire ici. Alors donc, Mme la ministre, s'il vous plaît.
Mme LeBel : Oui. Alors,
on peut peut-être, pour être... bien répondre à la préoccupation de mon
collègue qui est soulevée dans le mémoire et s'assurer d'y répondre
adéquatement, je vais vous demander de suspendre l'article 3. Par
contre...
Le Président
(M. Bachand) : Parce qu'on va avoir besoin du
consentement. Alors, c'est juste pour que, tout le monde, on soit attentifs à
la ministre, s'il vous plaît. Mme la ministre.
Mme LeBel : Donc, je vous
demanderais de suspendre l'article 3. Ça va?
Le Président
(M. Bachand) : S'il y a le consentement pour ça, puis ce
n'est pas l'article 3. Le but... la procédure, la démarche qui serait...
qui vous est suggérée, c'est : on suspend 3 pour pouvoir mieux revenir à 2
avec les explications de la ministre.
Mme LeBel : Revenir à 2,
oui.
Le Président (M.
Bachand) : Donc, premier consentement pour suspendre
l'article 3?
M. Tanguay
: Oui.
Le Président
(M. Bachand) : Ça va. Et consentement pour revenir à 2?
M. Tanguay
: Oui.
Le Président (M. Bachand) :
Merci beaucoup.
Mme LeBel : Et sur ce,
avec votre permission, on pourra donner la réponse ici à ma gauche.
Le Président
(M. Bachand) : Oui...
Mme Pomerleau (Kathye) :
Bonjour, Kathye Pomerleau du ministère de la Justice.
Donc, cet article s'inspire, comme disait
Mme la ministre, de l'article 79 du Code de procédure civile et des
articles 1 et 13 de la Loi sur le Directeur des poursuites criminelles et
pénales. On vient clarifier les pouvoirs du D.G. et du DPCP avec cette disposition.
Le Président
(M. Bachand) :M. le député.
M. Tanguay
: ...question
à Mme la spécialiste. Donc, il découlait de ces articles-là ce que nous
formalisons à 11.1.
Mme Pomerleau (Kathye) :
Oui.
M. Tanguay
: Pas
d'autre question.
Le Président
(M. Bachand) : Interventions sur l'article 2? S'il
n'y a pas d'autre intervention, est-ce que l'article 2, tel qu'amendé, est
adopté?
Des voix
: Adopté.
Le Président
(M. Bachand) : On revient à l'article 3. Mme la
ministre.
Mme LeBel : Dons, on
pourra peut-être passer à l'article 4, si vous permettez.
Le Président
(M. Bachand) : Est-ce qu'il y a consentement pour qu'on
puisse aller à l'article 4? On attend encore la réponse sur
l'article 3. Ça va? Consentement. L'article 4, s'il vous plaît.
Mme LeBel : O.K. Donc,
article...
Le Président
(M. Bachand) : Mme la ministre.
Mme LeBel :
Article 4, j'aurai l'article original, j'aurai également un amendement à
proposer, alors je procède de la même façon que tantôt, article 4 :
Les articles 19 et 20 de ce code sont
remplacés par les suivants :
«19. La signification d'un acte de
procédure prescrite dans le présent code ou dans les règlements du tribunal
peut être faite par tout mode approprié qui permet à celui qui signifie de
constituer une preuve de la remise, de l'envoi, de la transmission ou de la
publication de l'acte de procédure.
«La signification peut notamment être
faite par poste recommandée, par un service de messagerie ou un autre porteur,
par un moyen technologique, par un agent de la paix, par un huissier ou par
avis public.
«Quel que soit le mode de signification
utilisé, le destinataire qui accuse réception de l'acte de procédure...
Mme LeBel : ...la
signification peut notamment être faite par poste recommandée, par un service
de messagerie ou un autre porteur, par un moyen technologique, par un agent de
la paix, par un huissier ou par avis public.
Quel que soit le mode de signification
utilisé, le destinataire qui accuse réception de l'acte de procédure ou qui
connaît... ou qui reconnaît l'avoir reçu est réputé avoir reçu signification de
cet acte.
19.1 Un acte de procédure, autre qu'un
constat d'infraction, une demande de rétractation de jugement, un avis d'appel
ou une demande de permission d'appeler, peut être signifié uniquement au
procureur du défendeur s'il est ainsi représenté.
Article 20.La signification au moyen de
la poste recommandée, d'un service de messagerie ou d'un porteur se fait par
l'envoi de l'acte de procédure à la résidence ou à l'établissement d'entreprise
du destinataire ou, s'il s'agit d'une personne morale, à son siège, à l'un de
ses établissements ou à l'établissement d'un de ses agents. L'envoi postal est
considéré un envoi recommandé lorsque la réception ou la livraison est
attestée.
L'acte peut également être envoyé à la
personne désignée par le destinataire ou à son domicile élu inscrit au registre
des entreprises. Si le destinataire n'a ni résidence, ni siège, ni
établissement, ni agent ayant un établissement au Québec, l'acte, y compris
ceux mentionnés à l'article 19.1, peut être envoyé au procureur qui le représente.
Lorsque la réception de l'acte est
attestée, la signification est réputée faite à la date où l'avis de réception
est signifié par le destinataire ou par toute autre personne à qui l'acte peut
être remis en vertu de l'article 21. Lorsque la livraison de l'acte est
attestée, la signification est réputée être faite à la date de l'avis de
livraison, sauf si une peine d'emprisonnement est réclamée pour la perpétration
d'une infraction.
Commentaire. Cette disposition indique les
principaux modes pouvant être utilisés pour signifier en acte de procédure en
matière pénale. En utilisant l'expression «par tout mode approprié» qui permet
à celui qui notifie de constituer une preuve de la remise de l'envoi, de la
transmission ou de la publication de l'acte de procédure et le terme
«notamment», la disposition n'exclut pas la possibilité que la signification
puisse éventuellement prendre d'autres formes. Ces autres formes devront être
autorisées par un juge, à moins d'être prévues par la loi. L'article établi également
une présomption que le destinataire qui accuse réception d'un acte de procédure
ou qui reconnaît l'avoir reçu est réputé avoir reçu signification de cet acte.
Cette présomption est inspirée de celle prévue au troisième alinéa de
l'article 110 du Code de procédure civile. C'était le commentaire pour
l'article 19.
Article 19.1. Cette disposition
précise qu'un acte de procédure autre qu'un constat d'infraction, une demande
de rétractation de jugement, un avis d'appel ou une demande de permission d'appeler
peut être signifié uniquement au procureur du défendeur s'il en est ainsi
représenté. Les actes de procédure mentionnés dans cette disposition devront
être signifiés au défendeur. Vu les conséquences qu'ils peuvent avoir sur le
défendeur, il est préférable qu'il en reçoive une copie directement, d'autant
plus qu'il pourrait ne pas être représenté par un procureur à ce moment.
Commentaire concernant l'article 20.
Cette disposition reprend essentiellement l'article 20 actuel. Toutefois,
il est proposé d'y clarifier la notion de poste recommandée de façon à y
inclure la poste prioritaire qui est actuellement traitée comme un mode
distinct de signification. De plus, cette disposition introduit la possibilité
de signifier un acte de procédure au moyen d'un service de messagerie ou d'un
autre porteur. Cette disposition précise également à quel endroit un acte de
procédure peut-être signifié et à qui il peut être remis de façon à faciliter
la signification. Enfin, cette disposition précise à quel moment la signification
est réputée avoir eu lieu, avoir eu lieu, c'est ça, dans le cas où la livraison
de l'acte est attestée. La présomption ne s'applique pas si une peine
d'emprisonnement est réclamée pour la perpétration d'une infraction.
Quant à l'amendement, si vous permettez,
article 4 pour l'article 20 du Code de procédure pénale. Dans le
texte anglais du troisième alinéa de l'article 20 du Code de procédure
pénale proposé par l'article 4 du projet de loi :
1° remplacer «receipt of the proceeding is
recorded» par «attestation is made of receipt of the proceeding»;
2° remplacer «delivery of the proceeding
is recorded» by «attestation is made of delivery of the proceeding».
Donc l'amendement est pour la version
anglaise, ou anglophone?
Une voix
: Anglophone.
Mme LeBel : Anglophone, merci.
Le Président (M.
Bachand) : Alors, on va suspendre quelques instants. Merci.
(Suspension de la séance à 18 h)
20 h (version non révisée)
Le Président (M.
Bachand) :À l'ordre, s'il vous plaît! La commission
reprend ses travaux. Alors, nous sommes sur l'amendement proposé par la ministre.
Alors, interventions? M. le député de LaFontaine, s'il vous plaît.
M. Tanguay
: M. le
Président, je… Puis ce n'est pas la première fois, puis c'est correct, là, puis
je ne veux pas mettre la ministre en boîte ou sous… sur la défensive parce que
ça relève de bien avant elle et moi. Au Québec, on travaille sur les textes de
loi en français. On débat sur des mots, des termes, on veut trouver le mot
exact. Vous vous rappelez, «considérer» et «privilégier», comment, en français,
ça faisait, selon nous… de l'opposition officielle et des autres oppositions également…
toute la différence du monde, qui justifiait un article. Ça, c'était dans le
débat français dans la langue française, qui est la langue… une des deux
langues de législation.
Moi, encore une fois, puis je ne vais pas
prendre énormément de temps sur l'amendement… L'amendement, on va l'adopter,
là. Je veux dire… Mais je trouve ça assez déconcertant, je vais le dire de
même… puis ce n'est pas moi qui vais régler ça aujourd'hui, là, le Canada a 152
ans… mais, comme législateur québécois… et je sais qu'il y avait un litige, à
l'époque, qui avait été soulevé par le Barreau du Québec quant à l'adoption
dans les deux langues officielles, au Québec, de notre législation, et la
version anglophone a force de loi au même titre que la version française,
francophone… Mais force est de constater que si nous n'avons pas à adopter, au
final, par notre procédure parlementaire le texte de loi en anglais, force est
de constater que nous devons, semble-t-il, adopter des amendements au texte de
loi en anglais. Alors, je veux dire, c'est correct, mais… Et on doit se
rabattre sur la bonne analyse du service de traduction de l'Assemblée
nationale.
C'est juste ça. Je profite de cette
occasion-là pour resouligner, M. le Président, mon inconfort et le fait que je
trouve ça assez particulier que l'on nous dise : Bien, il y a un article
20 qui existe en anglais, et voici des erreurs de traduction, et nous, on
n'aura pas loisir, sauf aujourd'hui, d'apprendre qu'il y avait cet article-là
en anglais. Donc, j'apprends que l'article 20 en anglais se lit comme suit, et
j'apprends aussi qu'il serait de bon aloi de modifier la traduction de cette
façon-là. Je trouve qu'il est tout à fait particulier et peut-être
questionnable… pas questionnable en ce qu'il faudrait remettre en question la
façon de procéder, mais questionnable en ce que, M. le Président, moi, comme
législateur, j'ai l'impression d'être pris dans un sac quand on arrive avec ça.
Puis je ne vise pas la ministre, ça s'est
fait bien avant la 42e législature. Quoique depuis la 42e on en voit de plus en
plus, de cela. Et je relance mon invitation, peut-être, à l'Assemblée
nationale, à la présidence de l'Assemblée nationale, de nous aiguiller quant à
l'adoption des textes en anglais parce que, de temps en temps, peu importe le
projet de loi, il nous arrive, pouf!, des amendements dans la version
anglophone de nos textes de loi. Alors, je sais qu'il y a eu des débats…
M. Tanguay
: ...mon
invitation peut-être à l'Assemblée nationale, à la présidence de l'Assemblée
nationale de nous aiguiller quant à l'adoption des textes en anglais parce que,
de temps en temps, peu importe le projet de loi, il nous arrive, pouf! des amendements
dans la version anglophone de nos textes de loi.
Alors, je sais qu'il y a eu des débats
constitutionnels dans l'histoire récente du Québec et du Canada, puis je ne
veux pas ouvrir une boîte de Pandore, mais c'est juste qu'à toutes les fois,
moi, je... On va le voter, l'amendement, là, mais, à toutes les fois... Honnêtement,
je ne peux pas attester de la valeur ajoutée que j'aurai lorsque je voterai en
faveur de cet amendement-là parce que, première fois que je lis l'article 20
en anglais, et là on nous dit : Bien, la traduction nous demande de
modifier cela. Quand on sait la valeur des mots, l'importance des mots, surtout
en matière juridique et encore plus en légistique... Puis je faisais référence
aux mots «privilégier» et «considérer». On a passé quand même plusieurs minutes
là-dessus.
Voilà, moi, ça ne sera pas sur le fond parce
que, sur le fond, M. le Président, que voulez-vous, d'accord, «it sounds good».
If you prefer, I can
express myself in English and do it in English, but, at the end of the day... «It
sounds good», mais il faudrait peut-être pour nous, législateurs, nous
aiguiller davantage par rapport cela. Puis je pense que c'est un point qui
n'est pas anodin parce que c'est important au Québec. Oui, on légifère en
français et en anglais, ce n'est pas anodin, mais il faudrait juste, nous,
législateurs, peut-être nous parfaire notre approche par rapport aux textes
législatifs des projets de loi en anglais, chose que l'on ne peut pas attester
présentement. Je pense que c'est important de légiférer également dans les deux
langues, mais force est de constater qu'on va passer ce chemin-là aujourd'hui
de cette façon-là.
Alors, voilà, ce n'est pas sur le fond,
c'est sur la forme, puis je nous invite, nous, les 125 députés, à
peut-être avoir cet examen de conscience là peut-être. Voilà.
Le Président (M.
Bachand) : Merci. Interventions sur l'amendement de la
ministre? S'il n'y a pas d'intervention, je vais procéder à la mise aux voix.
Est-ce que l'amendement à l'article 4
est adopté?
Des voix
: Adopté.
Le Président (M.
Bachand) : Adopté. Merci. Nous retournons maintenant à l'étude
de l'article 4. Interventions? M. le député de Gouin. Excusez-moi. M. le
député de Gouin, s'il vous plaît.
M. Nadeau-Dubois : J'ai trouvé
les remarques de l'opposition officielle assez intéressantes tantôt sur
l'utilisation de médias sociaux pour communiquer avec les gens et je pense que
l'article 4 porte notamment sur ça. J'aimerais entendre la ministre sur
cette question-là parce qu'il me semble qu'en ouvrant la porte à une
signification par un moyen technologique...
C'est une formulation qui est très
générale. On peut imaginer plusieurs moyens technologiques, différents médias
sociaux, différentes applications. Cette formulation-là est, par définition,
très, très large, ouvre la porte à toutes sortes de choses, et on pourrait
imaginer que ce serait communiqué par des applications ou des médias sociaux
dont le contenu est utilisé après ça par les entreprises en question. C'est
connu que, par exemple, que le contenu des messageries privées sur Facebook est
ensuite commercialisé, en tout cas, ça peut faire partie de types de données
qui sont commercialisées par Facebook comme entreprise.
Est-ce qu'il n'y a pas des dérives
potentielles à ce que des moyens comme ceux-là soient utilisés pour signifier
des actes de procédure? C'est quand même des informations sensibles. Qu'est-ce
que la ministre pense du fait que des entreprises privées pourraient devenir
propriétaires de ces données-là si c'est signifié par ces applications ou des
médias sociaux qu'on connaît qui ont ces pratiques-là, dans le fond, tout
simplement? Est-ce qu'il n'y a pas place à des dérives? J'aimerais que la
ministre, peut-être, nous rassure là-dessus.
Le Président (M.
Bachand) : Merci. Mme la ministre, s'il vous plaît.
Mme LeBel : Non, je ne pense
pas. Il faut... La méthode Facebook, pour ne pas l'appeler comme ça, va être
encadrée par l'article 6 qui propose l'article 20.2, de la signification par
des moyens technologiques. Et, encore une fois, c'est toujours un moyen...
quand on en est à publier sur un Facebook tel que la jurisprudence le
mentionnait, c'est quand on est arrivé à avoir épuisé tous les autres moyens,
et c'est l'équivalent de la publication dans les journaux de l'époque, pour
signifier et tenter de rejoindre quelqu'un. Et comme vous pourrez le voir à
l'article 6 qui propose 20.2, cette signification par un tel moyen est admise à
l'égard de la partie non représentée que si elle y consent ou que c'est
autorisé par un juge. Donc, il doit y avoir une démonstration.
• (20 h 10) •
L'article 19 vient ouvrir les façons de
signifier, et qui étaient... pour ne pas les limiter à la poste et au huissier,
parce qu'il y a plusieurs autres façons de signifier. Mais ce qui demeure et
demeurera toujours important, c'est qu'on puisse faire la preuve de la
signification, et c'est ce que l'article 19 dit. Donc, dans le présent... dans
les règlements du tribunal... bon, «peut être fait par tout mode approprié...
Mme LeBel : ...les façons
de signifier, et qui étaient... pour ne pas les limiter à la poste et au
huissier parce qu'il y a plusieurs autres façons de signifier.
Mais ce qui demeure et demeurera toujours
important, c'est qu'on puisse faire la preuve de la signification, et c'est ce
que l'article 19 dit. Donc, dans le... dans les règlements du... bon,
«peut être fait par tout mode approprié qui permet à celui qui signifie de
constituer une preuve de la remise». Donc, il va toujours demeurer une preuve
de signification à y être faite. Sinon, si on ne peut pas prouver la
signification, on ne peut enclencher les procédures.
Donc, c'est simplement pour sortir du
carcan, qui était très rigide, du Code de procédure pénale, qui permettait à
l'époque... je pense que c'était la poste et l'huissier, là, par moyen...
«faite au moyen de la poste, ou par un agent de la paix, ou un huissier». Donc,
c'était très, très encarcané comme procédure de signification. Maintenant, on
ouvre, mais on garde... La finalité d'une signification, c'est de pouvoir en
prouver l'existence, c'est-à-dire qu'on a bien remis le document en question.
Donc, il devra y avoir une preuve qui est constituée de la remise de la
signification.
Pour ce qui est des moyens technologiques
de signifier, c'est 20.2 ou 6, là, qui va pouvoir encadrer ça. On est vraiment
dans l'article de nature générale qui vient décloisonner, si on veut, les modes
potentiels de signification. On va avoir... et, bon, encadrer la poste
recommandée d'une autre façon... ouvrir un peu avec des pratiques plus modernes
de façons de rejoindre les gens. Et, quand on parle des moyens technologiques,
ça sera à 6 pour 20.2, si je ne me trompe pas.
Le Président (M.
Bachand) : Merci. Interventions? M. le député de Gouin,
allez-y, oui, oui.
M. Nadeau-Dubois : C'est
sûr que ça nous amène à parler des autres articles. J'imagine que le président
va faire preuve de flexibilité puis nous laisser changer, là. Ça fait que je
comprends que la porte qui est ici grand ouverte va être, disons, entrebâillée
un peu plus loin dans le projet de loi. Et ce que je comprends de ce que la
ministre me dit, c'est que ça devra être autorisé par un juge ou ça devra être
consenti d'emblée par la partie. Est-ce que je comprends bien?
Mme LeBel : Bien, dans le
cas de la signification par un moyen technologique, qui va être...
M. Nadeau-Dubois : Dans
le cas de la signification par moyen technologique.
Mme LeBel : Oui, qui va
être... qui serait visé par 20.2 quand... le cas échéant, quand le... quand ici
le projet de loi est adopté.
M. Nadeau-Dubois : Donc,
si quelqu'un dit : Moi, je ne veux pas que ça passe par un moyen
technologique x, mettons, par Facebook parce que justement je ne veux pas que
ça soit des données qui circulent dans cette entreprise-là, si la personne ne
consent pas, ça ne sera pas possible, à moins qu'un juge, dans un cas de
dernier recours, l'autorise. Est-ce que je comprends bien?
Mme LeBel : Puis on
s'entend que, de façon générale, si on est capable de rejoindre quelqu'un par
Facebook, l'idée, ce n'est pas de publier sur son mur qu'il a une
contravention, là, c'est peut-être de le rejoindre par la messagerie Facebook,
qui demeure un moyen quand même privé de communiquer, malgré tout, on le...
bien, privé... plus privé que son mur Facebook.
Mais il faut y aller par le système de, je
dirais, l'entonnoir élargi, c'est-à-dire qu'on va toujours privilégier la
signification la plus directe possible, la plus... Mais, à un moment donné, il
vient des temps où on n'est pas capable de rejoindre les gens, où les seules
façons de les rejoindre, ce sont les divers médias sociaux que l'on connaît
maintenant. Mais ça devra se faire dans l'encadrement prévu dans
l'article 20.2, dont on parlera à l'article 6 du projet de loi.
Le Président (M.
Bachand) : Oui. Mme la députée de Joliette, s'il vous plaît.
Mme
Hivon
:
Oui, merci beaucoup. Je suis désolée pour... Il y a un autre débat... Je fais
juste le dire, je pense que je peux invoquer ma propre absence. Donc, il y a un
autre débat sur le projet de loi n° 40 au salon bleu, ce qui explique mes
entrées et sorties.
Au 19, troisième alinéa, «le destinataire
qui accuse réception de l'acte de procédure», pour qu'il soit réputé avoir
accusé réception, est-ce que ça doit se faire de manière positive :
J'accuse réception? Donc, de voir que le message a été lu avec une notification
demandée, «le message a été lu», n'est pas suffisant pour juger qu'il y a eu
accusé de réception?
Mme LeBel : Non, il doit
accuser de manière positive. L'idée, c'est que, souvent, on ne peut pas... On
ne pourrait pas invoquer, quand on admet avoir reçu la signification ou, entre
autres... à titre d'exemple, quand on a payé l'amende.
Mme
Hivon
:
Ça, ça va. Oui.
Mme LeBel : Payer
l'amende est une façon d'accuser réception ou de contester le constat est une
façon d'accuser réception. Mais on aurait pu, probablement, en vertu des
articles précédents... on pouvait invoquer le vice de signification, même si on
l'avait réellement reçu.
Donc là, on ne pourra plus invoquer un
vice de signification en disant : Bien, écoutez, il n'a pas été signifié
par le moyen de la poste, ou du huissier, ou par un moyen approprié. Je demande
au poursuivant de faire la preuve de la signification, alors que, de façon
évidente, il l'a reçu parce qu'il l'a soit payé puis il demande une
rétractation, peu importe, ou soit qu'il conteste. Donc, à partir du moment où
il accuse réception d'une façon positive, de cette façon-là, bien, il est
réputé avoir été dûment signifié pour les fins de la procédure.
Donc, c'est de privilégier le fond et
d'évacuer les vices de forme.
Mme
Hivon
:
O.K. Ça, ça va de soi, je comprends bien. Mais le destinataire qui accuse
réception de l'acte de procédure quand... par exemple, par un moyen
technologique, quand... je veux dire, pour qu'on... qu'il soit vu...
Mme LeBel : ...et d'évacuer les
vices de forme.
Mme
Hivon
: O.K.
Ça, ça va de soi, je comprends bien, mais le destinataire qui accuse réception
de l'acte de procédure, par exemple, par un moyen technologique, quand... Je
veux dire, pour qu'il soit vu comme ayant accusé réception... s'il n'a pas payé
son constat, par exemple, qu'il ne l'a pas contesté et qu'il dit :
Écoutez, moi, je n'ai jamais reçu ça, est-ce que le fait de voir que le message
a été lu, par exemple, est suffisant pour dire qu'on pourra y opposer ça :
Voyez, votre message... on a une notification que votre message a été lu?
Messenger, courriel, ce qui ne veut pas dire que ce serait nécessairement la
personne elle-même, là, on peut imaginer...
Mme LeBel : Non, bien, il va
toujours bien falloir que quelqu'un fasse la preuve, pour que la présomption
fonctionne, qu'il a accusé réception. À partir du moment où le poursuivant veut
invoquer que le message marqué comme lu est une accusation de réception et que
le défendeur la conteste, ça prendra une appréciation du tribunal, j'imagine.
Mme
Hivon
: Je
veux juste être sûre que ça, ce n'est pas réputé être un accusé de réception.
On se comprend que la ministre ne pense pas que cela vaut accusé réception.
Mme LeBel : Ça prend un geste
plus positif de la personne, à mon sens, pour être capable de faire une preuve
satisfaisante à ce niveau-là, surtout s'il conteste ne pas l'avoir reçu.
Mme
Hivon
: O.K.
Mme LeBel : Malgré la mention
«lu».
Mme
Hivon
: Oui,
c'est ça.
Le Président (M.
Bachand) : Intervention? M. le député de LaFontaine, s'il vous
plaît.
M. Tanguay
: Oui. Merci
beaucoup, M. le Président. Dans... L'Association des juristes progressistes
sont venus nous dire, faire référence à... lorsque l'Assemblée nationale a
adopté la Loi instituant le nouveau Code de procédure civile, loi adoptée en
2014, mise en application le 1er janvier 2016, elle a simplifié les termes
utilisés en matière civile quant à la signification et notification.
Alors, pour la ministre, question, on se
réfère beaucoup au Code de procédure civile. Or, au Code de procédure civile,
il y a comme deux paliers, si vous me permettez l'expression, de communication,
il y a la signification et la notification. En quoi, dans le contexte de Code
de procédure pénale, n'aurions nous pas pu considérer la notification pour
certaines procédures?
Le Président (M.
Bachand) : Mme la ministre.
Mme LeBel : Oui. Bien là, on
part de deux traditions, si... bien, pas des traditions, parce que c'est
codifié, mais, quand même, qui... de deux traditions distinctes. Quand on parle
du... le Code de procédure civile fait une distinction entre la notification
puis la signification, ce que le Code de procédure pénale ne fait pas. La
notification comprend l'ensemble, dans procédure civile, dont vous avez
probablement une meilleure connaissance que moi pour l'avoir appliqué plus que
moi dans votre pratique, pour porter... C'est l'ensemble des moyens qui sont
prévus pour porter un document à la connaissance des intéressés. C'est la
notification. Alors que la signification se rapporte à la signification comme telle,
par huissier, de façon traditionnelle. Le Code de procédure pénale ne fait pas
cette distinction-là.
Donc, on a voulu garder... ne pas
introduire une distinction au Code de procédure pénale qui n'existait pas, puis
on parle beaucoup plus de signification, en matière pénale, plutôt que de
notification de document, là, qui est un niveau peut-être... je ne veux pas le
dire de cette... bien, peut-être un niveau de différent, moindre, de pris de
connaissance, qui n'implique pas aussi un calcul de délais ou un calcul de...
alors que la signification, souvent, est le point de départ de calculs.
M. Tanguay
: Je vous
soumettrais que la notification aussi peut être le point de départ de calculs,
de délais. Par contre, c'est au niveau du rigorisme qui est exigé quant à la
preuve, quant au procédé même d'informer une partie ou un tiers, n'aurait-il
pas été lieu... puis j'aimerais savoir si les gens qui travaillent avec Mme la
ministre se sont posé cette question-là dans un contexte de procédure pénale.
Parce que, dans un contexte de procédure pénale, il arrive de multitudes de
requêtes incidentes en cours d'instance, et qui peut appeler des tiers,
également, on vient de le voir, à 11 puis à 11.1, appeler des tiers.
N'aurait-il pas été pertinent aussi, par effet miroir, d'analyser la
possibilité de faire de la notification? Puis, M. le Président, je le dis avec
le sourire au coin des lèvres, il y a un petit piège dans ma question, puis je
vais y arriver dans quelques instants.
Le Président (M. Bachand) :
Parfait.
Mme LeBel : Si on peut
permettre de répondre...
Le Président (M.
Bachand) : Alors, si vous êtes d'accord, on va permettre à M.
Roy...
M. Tanguay
: Le piège
est pour vous.
Le Président (M.
Bachand) : Premièrement, vous identifier et répondre à la
question, s'il vous plaît. Merci.
M. Roy (Vincent) : Vincent
Roy, avocat au ministère de la Justice. En fait, c'est vraiment... il faut
garder à l'esprit que c'est vraiment deux régimes complètement distincts,
signification, en matière pénale, notification, en matière civile. Quand le
corpus a été révisé, en 2016, on a bien fait attention de vraiment distinguer
les deux régimes. Ce qu'il y a de particulier, surtout en matière pénale, c'est
que la signification peut se faire vraiment par tous les modes, y compris, dans
certains cas, en laissant l'acte... le constat d'infraction sur une voiture.
Donc, si on se reportait en civil, ce serait en fait la notification. Donc,
toute la logique au complet serait à revoir si on voulait modifier les textes.
• (20 h 20) •
M. Tanguay
: Lorsque
vous faites référence à deux régimes distincts, à quoi faites...
M. Roy (Vincent) : ...ce qui a
de particulier, surtout en matière pénale, c'est que la signification peut se
faire vraiment par tous les modes, y compris, dans certains cas, en laissant
l'acte... le constat d'infraction sur une voiture. Donc, si on se reportait en
civil, ce serait en fait de la notification. Donc, toute la logique au complet
serait à revoir si on voulait modifier les textes.
M. Tanguay
: Lorsque
vous faites référence à deux régimes distincts, à quoi faites-vous référence
lorsque vous dites : Régime?
M. Roy (Vincent) : C'est
l'ensemble des règles de notification qui sont prévues au Code de procédure
civil versus les règles de signification au Code de procédure pénale.
M. Tanguay
: Et
pourquoi ce serait plus permissible ou justifiable en matière civile et non pas
en matière pénale?
M. Roy (Vincent) : Ce n'est
pas tant une question de permissibilité que vraiment une distinction dans les
définitions utilisées dans les deux régimes.
M. Tanguay
: Et en quoi
c'est applicable en matière civile et pas en matière pénale? Je veux
comprendre. Là, vous dites : Au niveau de... Ça se fait dans un, ça ne se
fait pas dans l'autre. Mais en quoi ça peut bien se faire dans l'un et mal se
faire dans l'autre? En quoi l'opportunité est-elle saluée en matière civile et
plus questionnable en matière pénale?
Le Président (M.
Bachand) : Mme la ministre.
Mme LeBel : Bien, je pense que
c'est de changer toute une façon de... Et comme il vient de le mentionner,
entre autres dans le Code de la sécurité routière, la signification du constat
sur le parebrise est acceptée. Ce qui équivaut, finalement, à la notion de
notification en civil. C'est juste une question de... C'est comme s'il fallait
arrimer et introduire la notion de notification dans le Code de procédure
pénale, là, on viendrait changer toute une tradition ou un régime qui n'est pas
nécessaire de faire, là. Les...
M. Roy (Vincent) : C'est un
petit peu comme juge et tribunal, tantôt...
Mme LeBel : Oui, c'est un peu
comme la notion de juge et de tribunal de tantôt, là, en matière... Dans le
Code de procédure civile, dans le Code civil, on parle de notion de tribunal.
Dans le Code de procédure pénale, on parle de la notion de juge. C'est pour
être sûr de garder les mêmes notions, là. Mais, dans les faits, la notification
se retrouve en pénal, mais elle s'appelle... c'est un moyen de signification
particulier.
M. Tanguay
: La
lourdeur de la notification, je vous le soumets, est moindre que la
signification. Et dans le Code de procédure civile, on ne parle pas de requête
introductive d'instance ou de signification de jugement, c'est souvent des
demandes en cours d'instance. Alors, pourquoi, dans les demandes en cours
d'instance — ça se passe dans les deux régimes, là, pénal ou civil,
les demandes en cours d'instance, il peut y en avoir — pourquoi ça
serait plus permissible et plus justifié et plus de la nature même du Code de
procédure civile de faire par notification à l'occasion et non pas en matière
pénale?
Mme LeBel : De facto, ce n'est
pas plus permissible. C'est une question de définition et de vocabulaire. Ici,
on introduit, dans le Code de procédure pénale, des nouveaux modes de
signification, mais on ne fait pas toute la révision de tout le Code de
procédure pénale ou de toutes les lois de nature pénale, à titre d'exemple, le
Code de la sécurité routière, qui permet une signification via parebrise qui,
dans les faits, équivaut, si on veut faire une équivalence, à un type de
notification en civil. Donc, on ne veut pas refaire tout le vocabulaire du
régime pénal au grand complet dans toutes les lois pénales. Dans le régime
pénal, signification a une portée plus large que juste par huissier.
Donc, «inclut» ou «comprend» des
notifications, si on veut, et ils se retrouvent en civil. Alors qu'en civil,
pour une raison que j'ignore, à une certaine époque on a choisi de parler de
notification pour toutes les façons de signifier des procédures qui sont autres
que par huissier et de signification quand on parle du huissier. On a choisi de
faire cette distinction-là en civil, qui n'a pas été faite en pénal. Mais, de
facto, il y a des choses en pénal qui se signifient, qui équivalent à une
notification puis l'acte de... Donc, ce n'est pas plus permissif, c'est une
question de vocabulaire et de façon dont les deux régimes ont été construits.
Mais ici, là, l'objectif n'est pas de
revoir toutes les façons de signifier puis de l'arrimer avec le Code de
procédure civile. Entre autres, je vous remets à titre d'exemple, le Code de la
sécurité routière, qui n'est pas l'objet de notre projet de loi, qu'on
n'adresse pas dans le projet de loi, où la signification par parebrise est permise,
qui n'est pas une signification par huissier qui vaudrait une notification en
civil si on veut faire une équivalence.
Donc, il n'y a pas de dommage, il n'y a
pas de préjudice pour personne, c'est une question de termes et de vocabulaire
dans deux régimes différents.
M. Tanguay
: Par
contre, lorsque l'on vise, comme c'est l'objectif du projet de loi n° 32, de rendre plus efficace, de simplifier, de rendre
une justice plus accessible, ce faisant, je vous soumettrais qu'avant 2014, il
est vrai de dire que la notification, ça existait, mais ça n'a jamais été
poussé au point où la loi de 2014 a réellement fondé et multiplié les régimes
et les possibilités de notification en matière de procédure civile. Ce qui fait
en sorte que le Code de procédure civile, mis en application le
1er janvier 2016, avait réellement un régime beaucoup plus bonifié de
possibilités et de notifications, là.
Alors, mon point, et je reviens à la
question, pourquoi ne pas, et c'est de façon contemporaine, on parle de quelques
années, pourquoi ne pas avoir, si l'on veut simplifier et rendre moins
rigoristes les demandes, puis je ne parle pas d'un constat d'infraction d'un
parebrise, là, qui est un peu la requête introductive d'instance, la
signification du constat d'infraction, mais les demandes en cours d'instance,
pourquoi...
M. Tanguay
: …alors, mon
point, je reviens à la question : Pourquoi ne pas, et c'est de façon
contemporaine, on parle de quelques années, pourquoi ne pas avoir, si on veut
simplifier et rendre moins rigoristes les demandes, puis je ne parle pas d'un
constat d'infraction dans le parebrise, là, qui est un peu la requête
introductive d'instance, la signification du constat d'infraction, mais les
demandes en cours d'instance, pourquoi n'avoir pas permis ce régime-là également
qui vise à simplifier sans perdre d'efficacité par la notification, mais en
matière pénale?
Mme LeBel : Je ne suis pas vraiment
certaine de bien comprendre votre question, puis je vais y répondre comme suit.
Présentement, outre la question de vocabulaire, dans le Code de procédure
pénale, on introduit des modes de signification qui sont de la nature d'une
notification, on ne fait juste pas de distinction de vocabulaire, ce sont
toutes des significations. La différence, c'est que, dans le régime civil du Code
de procédure civile, le terme «signification», dans la définition, signifie par
huissier uniquement, alors que «notification» donne tous les autres moyens qui
sont aussi permis dans le Code de procédure pénale. Et, comme je vous dis, on
s'adresse… là on n'est pas dans la révision complète de toutes les lois pénales
et du terme «signification», on permet simplement d'ajouter quelques moyens
d'ouvrir.
Parce que, déjà, la signification, dans
le Code de procédure pénale, avant même l'amendement qu'on vous propose, était
par la poste, par agent de la paix ou par missive. C'est déjà une différence
avec le Code de procédure civile qui, pour lui, c'est juste le huissier, la
signification. Donc, déjà, la signification avait une portée plus large en
pénal et de la nature de la notification pour certains aspects, si on peut le
dire comme ça. Mais ça ne donne pas plus de droit, ça ne donne pas plus de
moyen, ça n'enlève pas de moyen, c'est simplement d'avoir, dans le régime
pénal, la même cohérence, la signification a une portée plus large, et on la
précise dans le Code de procédure pénale ou dans les lois qui sont concernées.
À titre d'exemple, le Code de la sécurité routière qui permet la signification
sur le parebrise.
Le Président (M.
Bachand) : Merci. M. le député.
M. Tanguay
:
L'opportunité de le faire, M. le Président, ici, lorsqu'on lit l'article
19 : «La signification d'un acte de procédure prescrite dans le présent
code ou dans les règlements du tribunal peut être faite par tout mode approprié
qui permet à celui qui signifie de constituer une preuve de la remise, de
l'envoi, de la transmission ou de la publication de l'acte de procédure.
«La signification peut notamment être
faite par poste recommandée, par un service de messagerie ou un autre porteur,
par un moyen technologique, par un agent de la paix ou par huissier ou par avis
public.
«Quel que soit le mode de signification
utilisé, le destinataire qui accuse réception reconnaît avoir reçu
signification.»
Toute la nomenclature, si je comprends
bien la ministre, M. le Président, parce que ce n'est pas uniquement… ce n'est
pas le fait de dire qu'il s'agit uniquement de la même réalité appelée sous
deux vocables différents, ce n'est pas la même réalité. Dans le Code de
procédure civile, on parle, à l'article 110, «la notification peut être faite
par tout mode approprié qui permet à celui qui notifie de constituer une
preuve». Et là on reprend le même vocabulaire de l'article 110, là, de
procédure civile, on le reprend à l'article 19 de la notification.
Alors, vous voyez, je viens de vous lire
19, je vais vous lire 110, Code de procédure civile : «La notification
peut être faite par tout moyen approprié qui permet à celui qui notifie de
constituer une preuve de la remise de l'envoi de la transmission de la
publication. Elle l'est notamment par l'huissier de justice par l'entremise de
poste, de document, moyens technologiques.»
Alors, en quoi, l'aspect de notification
qui avait été galvanisé et confirmé par la réforme de 2014, appliqué en 2016,
n'aurait pas pu trouver écho ici.
Mme LeBel : Oui, je dois dire
aussi qu'en droit criminel non plus, la notion de notification n'existe pas.
O.K. Il y a peut-être l'explication suivante, en civil, il peut y avoir une
gradation dans l'importance des documents, mais habituellement, en matière
civile, les documents importants sont signifiés, alors que les autres sont
notifiés. Cette gradation-là, cette distinction-là n'existe pas non plus en
pénal ou en criminel, habituellement, c'est le constat, c'est l'acte… bon, il y
a certaines requêtes également. Mais en criminel, comme en pénal, la notion de
notification n'existe pas. S'il fallait l'introduire à l'article 19, ça
viendrait changer le régime et il faudrait ajuster toutes les autres lois
pénales. Et le Code criminel fait aussi référence au Code de procédure pénale
dans certaines instances.
Je le répète, ça ne change pas le fait que
les moyens qui seront à la disposition ne sont pas les mêmes, mais ils peuvent
être similaires dans les deux cas. Et, à ce stade-ci, on ne juge pas opportun
d'introduire la notion de notification dans le Code de procédure pénale.
• (20 h 30) •
M. Tanguay
: Puis c'est
correct, je comprends qu'on n'a pas la même vision là-dessus, mais ce sur quoi
on se rejoint, M. le Président, très clairement, puis je ne veux pas rouvrir le
débat de l'article 2.2, puisque l'on vient de vivre, M. le Président, les
dernières minutes, sont à l'effet que procédure civile et procédure pénale ont
leur limite en termes de comparaison entre les deux régimes. Ça, on vient de le
vivre, dans les dernières minutes, M. le Président…
20 h 30 (version non révisée)
M. Tanguay
:
…rejoint, M. le Président, très clairement, puis je ne veux pas rouvrir le
débat de l'article 2.2, mais ce que l'on vient de vivre, M. le Président,
les dernières minutes sont à l'effet que procédure civile et procédure pénale
ont leurs limites en termes de comparaison entre les deux régimes. Ça, on vient
de vivre, dans les dernières minutes, M. le Président, un débat qui nous a
démontré que l'on ne peut pas tout simplement dire, quand ça fait notre
affaire, puis je ne vise pas personne, puis ce n'est pas dit méchamment :
Bien, ça se passe de même puis c'est dit comme ça dans le Code de procédure
civile, copier-coller, on le met.
Je ne veux pas rouvrir le débat sur
l'amendement à l'article 2.2 qui faisait en sorte qu'en matière pénale, ce
que je disais depuis tantôt… Ce n'est pas la même chose en matière pénale que
c'est en matière civile. On peut-u, plutôt que de privilégier en matière civile
la notification ou la signification, on vient de le voir, par moyen
technologique, on peut-u le considérer, ça? On aurait une belle occasion, M. le
Président, de faire écho à tout ce débat-là, puis c'est le point que je voulais
démontrer. On ne parle pas tout le temps toujours de la même affaire. On
devrait peut-être le dire en des mots qui soient plus appropriés.
Je pourrais vous proposer de rouvrir
l'article 2.2. Je demanderais le consentement pour ouvrir
l'article 2.2, M. le Président.
17859 Le Président
(M. Bachand) : Est-ce qu'il y a consentement pour ouvrir
2.2?
Une voix : …
17859 Le Président
(M. Bachand) : Pas de consentement. M. le député.
11789 M. Tanguay : Ceci
dit, tout n'a pas été dit sur l'article 4. M. le Président, nous avons
aussi par ailleurs noté… noté... C'est celui-là ici. Alors, la…
Une voix : Ça, on vient de le
faire.
11789 M. Tanguay : Oui.
Ici, pardon. Alors, l'association des procureurs de cours municipales :
L'article 4 du projet de loi devrait être amendé par l'insertion, à la
suite de l'article 19.1… Je reprends. L'association des procureurs de
cours municipales : L'article 4 nous dit que l'article 4 du projet de
loi devrait être amendé par l'insertion, à la suite de 19.1 du code proposé, de
l'alinéa suivant : «Tout acte de procédure doit être signifié
uniquement au procureur du poursuivant s'il est ainsi représenté.
Je ne sais pas si la ministre a une
réflexion à cet effet?
17859 Le Président
(M. Bachand) : Mme la ministre.
17847 Mme LeBel : Ça… Oui,
j'ai une réflexion à cet effet. Présentement, c'est signifié à la ville, qui
est le poursuivant principal. Je pense qu'il faut laisser ça comme ça. Dans
plusieurs… Dans certains endroits, il y a des procureurs municipaux qui sont au
service de la ville. D'autres endroits, c'est des bureaux qui sont ad hoc. Ça
deviendrait extrêmement compliqué, pour le défendeur, de savoir ce… où il doit
signifier. Je pense qu'en… C'est une question de dire qu'on… que les greffes,
il y avait une procédure supplémentaire, mais je pense que c'est le poursuivant
qui doit l'assumer, cette difficulté supplémentaire là, pour permettre au
défendeur d'avoir un endroit unique clair où signifier, c'est-à-dire la ville
qui est, dans les faits, le poursuivant. Donc…
17859 Le Président
(M. Bachand) : Merci. M. le député.
11789 M. Tanguay : Ce
qu'on nous soumettait, à l'association des procureurs, à l'intérieur de leur
mémoire, page 7, c'est que, ce faisant, ça augmentait les délais de
traitement des demandes en plus d'augmenter les risques d'erreur et de perte.
C'est ce qu'eux ont soulevé, et eux plus que moi ont à vivre quotidiennement
avec cela. Alors, sans faire nécessairement mien ce point de vue là, je
pense que j'aimerais peut-être entendre de façon plus spécifique la ministre.
Est-ce qu'elle a des indications à l'effet que leur prétention est non
justifiée?
Mme LeBel : Je n'ai pas
aucune indication à l'effet qu'elle est justifiée ou non justifiée, à part le
témoignage qu'ils en ont rendu. Ceci étant dit, pour des raisons de cohérence,
de faciliter, pour le défendeur qui lui doit signifier, de trouver qui est le
bureau qui représente la ville, où est-ce qu'il doit signifier. Je pense que
c'est beaucoup plus simple. Oui, on pourrait décider que ça pourrait améliorer
les choses et faciliter, mais je pense que ce serait un risque pour le
défendeur que, moi, je ne suis pas prête à courir.
M. Tanguay
: Sur
19.1, M. le Président, puis je ne veux pas empêcher d'autres collègues
d'intervenir, on ajoute 19.1. On voit que l'ancienne mouture, la future
ancienne mouture pour encore quelques semaines ou sinon mois ou années, on ne
sait jamais, à l'article 19, 20, on ajoute 19.1 :
«Un acte procédure, autre qu'un constat
d'infraction — on a déjà l'image du parebrise de
tantôt — une demande de rétractation de jugement, un avis d'appel ou
une demande de permission d'appeler, peut être signifié uniquement au procureur
du défendeur s'il est ainsi représenté.»
Donc, déjà il y a une distinction basée
sur, je dirais, sur l'importance des procédures ou les conséquences d'une
procédure qui n'aurait pas par ailleurs été mise à la connaissance de la partie
intimée ou défenderesse, mais «peut être signifié uniquement au procureur du
défendeur s'il est ainsi représenté.» J'aimerais donc entendre la ministre sur
cet aspect nouveau, puis elle me corrigera si j'ai tort, mais on ajoute, là, à
19.1, puis probablement qu'on fait écho à de la jurisprudence.
Le Président
(M. Bachand) :Mme la ministre.
Mme LeBel : Oui.
Donnez-moi peut-être une petite seconde, s'il vous plaît, ça ne sera pas
long...
M. Tanguay
: ...signifié
uniquement au procureur du défendeur s'il est ainsi représenté. J'aimerais donc
entendre la ministre sur cet aspect nouveau. Puis elle me corrigera si j'ai
tort, mais on ajoute, là, à 19.1, puis probablement qu'on fait écho à de la
jurisprudence.
Le Président (M.
Bachand) :Mme la ministre.
Mme LeBel : Oui. Donnez-moi peut-être
une petite seconde, s'il vous plaît. Ça ne sera pas long.
(Consultation)
Mme LeBel : Oui. Donc...
Le Président (M.
Bachand) : Oui, Mme la ministre.
Mme LeBel : Oui. Merci. Naturellement,
c'est à partir du moment où le défendeur est représenté par un procureur, on
s'entend là-dessus. C'est pour favoriser la communication entre les avocats.
Et, habituellement, quand il est représenté par un avocat, le défendeur préfère
que l'avocat reçoive les actes de signification mais... les actes de procédure
signifiés. Je pense que c'est à l'avantage du défendeur. S'il n'est pas
représenté par avocat, naturellement, ça lui sera signifié personnellement,
mais j'ai du mal à voir, effectivement, le préjudice, là.
Le Président (M.
Bachand) : Si vous êtes d'accord, Mme la députée de Joliette,
je crois, hein?
Une voix
: ...
Le Président (M.
Bachand) :Ça va. O.K. Parfait. Désolé. M.
le député de LaFontaine.
M. Tanguay
: Sur ce
point-là, j'aurais terminé, mais, si la collègue de Joliette veut embarquer,
j'aurais d'autres commentaires sur l'article 19, mais je la laisserais
s'inscrire dans le débat.
Le Président (M.
Bachand) : Non, ça va.
Mme
Hivon
:
...je n'avais pas levé ma main.
Le Président (M.
Bachand) :O.K. Désolé. Merci. M. le
député.
M. Tanguay
: M. le
Président, de ce que je comprends, question courte, l'article 19 et les
autres articles aussi, 19.1 et 20, tant qu'à y être, ne requièrent pas
d'autorisation du tribunal. Suis-je bien fondé de le voir ainsi? Ils peuvent se
faire sans autorisation du tribunal.
Mme LeBel : Effectivement. Ce
sont les modes de signification réguliers, si on veut.
M. Tanguay
: Bon,
voilà. Quand, à 19, on introduit, parce que c'est nouveau, par un moyen
technologique une signification, on peut le faire sans autorisation du
tribunal.
Une voix
: ...
M. Tanguay
: On me
dit : Non, ça fait référence à.
Mme LeBel : Là, vous parlez de
19, là?
M. Tanguay
: Oui, à 19.
À 19, autrement dit, par rapport à l'actuel futur ancien 19, il n'y avait pas
par moyen technologique. Là, on propose par moyen technologique sans
autorisation du tribunal.
Mme LeBel : ...fait référence
au moyen technologique, mais, après ça, la façon de le faire par moyen technologique
est encadrée dans 20.2, à l'article 6. C'est-à-dire, regardez, ça
commence : La... 20.2 qu'on propose d'introduire : La signification
par un moyen technologique se fait par... bla, bla, bla.
Donc, oui, on vient donner, dans les modes
de signification générale, le faut qu'on peut le faire par moyen technologique,
mais, à 20.2, 6 du projet de loi, on vient encadrer la façon dont on peut le
faire quand il s'agit d'un moyen technologique. Donc, on part du moyen large,
puis après ça on vient, par l'article suivant, circonscrire la façon dont on
peut le faire quand il s'agit d'un moyen technologique. Mais c'est le principe
général qui est dans 19.
M. Tanguay
: Oui. Puis
on va revenir à 6 plus tard, mais je reviens sur mon fameux «signification Facebook»,
là. La signification par moyen technologique, à 20.2, introduit par 6... «La
signification par un moyen technologique se fait par la transmission de l'acte
de procédure à l'adresse que le destinataire indique être l'emplacement.» Là,
on ne parle pas de constat d'infraction, là.
Mme LeBel : On ne parle pas de
Facebook non plus.
M. Tanguay
: Bien,
c'est-à-dire... O.K. Bonne question. Facebook est-il un moyen technologique?
Mme LeBel : Non. À l'adresse
que le destinataire indique être l'emplacement où il accepte de le recevoir.
Bien, s'il dit : Moi, je le veux par mon Facebook, là, je veux dire, ça
sera son choix, mais c'est vraiment l'adresse. Donc, on peut penser à une
adresse courriel, à ce moment-ci, là, ou un télécopieur ou autre. Peut-être
qu'il n'y aura plus de télécopieurs rendu là, là, mais... on l'espère, mais un
courriel, mais c'est vraiment l'emplacement où il accepte de le recevoir.
M. Tanguay
: Est-ce que
Facebook est un moyen technologique?
Mme LeBel : Bien, je pense que
oui.
M. Tanguay
: O.K. Parce
que là on me dit : Retenez vos chevaux parce qu'à 19, moyen technologique,
on en parle à 20.2, mais, 20.2, on dit que ce n'est pas Facebook. Donc, moyen
technologique va au-delà de 20.2. Où est mon Facebook?
Mme LeBel : O.K. Si le
défendeur nous dit : Je veux être signifié par Facebook...
M. Tanguay
: C'est
20.2.
Mme LeBel : ...c'est 20.2,
O.K.?
M. Tanguay
: Mais ma
juriste, qui m'ont signifié, à mon défendeur, son constat d'infraction par
Facebook, il n'a jamais levé la main puis dire : Hé! Contactez-moi sur
Facebook.
(Consultation)
Mme LeBel : Si on n'est pas
capable de rejoindre… parce que, dans le cas qui nous occupe, la jurisprudence
est mentionnée, il n'y avait pas d'autre moyen de rejoindre, et le poursuivant
avait demandé l'autorisation au tribunal de le signifier par Facebook, parce
que c'était ce qu'on avait pu retracer, j'imagine, dans nos recherches, comme
étant une adresse connue, ça demeure le cas. Si le défendeur, on n'a pas
d'adresse connue, il ne nous donne pas d'adresse, de consentement, on ne sait
pas où le signifier, on fait des recherches puis on retrace un Facebook pour
lui, mais il va falloir que ce soit autorisé par le tribunal pour le faire…
M. Tanguay
: Ça, je
vous suis…
Mme LeBel : …parce qu'il n'y
aura pas consenti.
M. Tanguay
: …je vous
suis, puis je ne veux pas… je suis de bonne foi, là.
Mme LeBel : Mais on pourrait
en rediscuter à l'article 6 de façon plus attentive, là.
• (20 h 40) •
M. Tanguay
: Mais, à 6,
non, à 6, ce n'est pas Facebook, mais à 6, c'est mon constat d'infraction. Je
vous suis puis je veux juste comprendre, parce que peut-être qu'on conte une
histoire qui est mal rédigée, peut-être, je ne sais pas, mais, si on me dit que
Facebook, c'est un moyen technologique, tel que stipulé dans 19, si on dit…
M. Tanguay
: …je suis de
bonne foi, là.
Mme LeBel : Mais on pourrait
en discuter à l'article 6 de façon plus attentive, là?
M. Tanguay
: Bien, à 6,
non. À 6, ce n'est pas Facebook. Mais à 6, c'est mon constat d'infraction. Je
vous suis, puis je veux juste comprendre, parce que peut-être qu'on conte une
histoire qui est mal rédigée, peut-être, je ne sais pas. Mais si on me dit que
c'est un moyen technologique, tel que stipulé dans 19…
Mme LeBel : Oui.
M. Tanguay
: Si on dit
que, Facebook, c'est un moyen technologique tel que stipulé dans l'article 19
et qu'on dit que par ailleurs l'article 19 ne requiert pas d'autorisation du
tribunal, donc Facebook peut être un moyen technologique qui ne requiert pas
l'autorisation du tribunal.
Mme LeBel : Non. Ça dit que
c'est… on peut le faire si elle y consent ou si c'est autorisé par le tribunal.
M. Tanguay
: Je ne suis
pas à l'article 6.
Mme LeBel : Non, mais c'est ça
que ça dit, 20.2 : «la signification par un tel moyen n'est admise à l'égard
de la partie non représentée que si [elle] y consent ou [si] un juge
l'autorise.» Donc, on ne pourra pas le faire de nous-mêmes s'il n'y a pas de
consentement de la partie ou si le juge ne l'autorise pas.
M. Tanguay
: Je revire
ça de bord. C'est peut-être la porte d'entrée. Comment pourrais-je… par quel
article dois-je demander l'autorisation à un juge de signifier le constat
d'infraction par Facebook? Quel article m'exige…
Mme LeBel : Bien, 4. C'est 4.
Une voix
: Ça serait
20.2, c'est un moyen technologique.
Mme LeBel : Oui, ce serait
20.2, c'est un moyen technologique. Donc, il faut demander l'autorisation du
juge, à moins que la personne y ait consenti et lui ait dit… Si la personne
dit : Prend mon Facebook, genre, ça bien, il a consenti. Sinon, mais… le
poursuivant ne pourrait pas décider par lui-même, sans consentement de la
personne ou l'autorisation d'un juge, de passer par un moyen technologique, y
incluant notamment Facebook. Donc, le poursuivant ne peut pas le faire de
lui-même. Deux façons de le faire : consentement, autorisation du juge…
20.2.
M. Tanguay
: Je vous
suis, mais ma lecture de 20.2, puis c'est correct, là, qu'on a ça là, là, on
n'est pas devant la cour, là, mais mon autorisation de… c'est que, si la
personne, de mauvaise foi ou de façon déraisonnable, ne l'autorise pas en vertu
de 20.2, là je peux demander au juge de l'imposer. C'est ça le sens de
20.2 : le juge l'autorise ou l'ordonne. Si, de façon déraisonnable, moi,
je n'y consens pas, le juge va me dire : Non, tu vas consentir, je te
l'ordonne. Une fois que je suis déjà embarqué dans la procédure.
Mais je suis, ab initio, je suis chez moi.
Quelqu'un veut me signifier un acte de procédure. Je n'ai pas de consentement,
je ne suis pas devant le juge, je ne refuse pas de façon déraisonnable puis on
ne me l'impose pas. Je suis chez moi. On veut me signifier par un moyen
technologique ce qui est, en matière civile, une requête introductive
d'instance, ça ne s'appelle plus de même, mais c'est mon constat d'infraction.
On me dit à 19 : Tu peux le signifier en vertu d'un moyen technologique. À
qui dois-je demander? Deux choses l'une : moi, je suis le poursuivant, je
veux le signifier par Facebook, son constat d'infraction, je me fie sur 19 puis
je lui envoie parce que c'est un moyen technologique ou, en vertu d'un autre
article, je demande la permission?
Mme LeBel : Bien, c'est votre
lecture de l'article, avec beaucoup de respect. Ça ne dit pas, dans l'article,
qu'à défaut de consentement doit s'adresser… Ça donne juste deux façons de
pouvoir utiliser un moyen technologique : avec le consentement ou sur
autorisation. Maintenant, le juge décidera de… en vertu des arguments du
poursuivant s'il autorise ou non la signification, le juge devant privilégier
habituellement les moyens les plus simples de…
M. Tanguay
: O.K. Si
vous et moi, on va au restaurant puis on se demande ce qu'on va commencer… ce
qu'on va commander, il va falloir qu'on se rencontre d'abord au restaurant,
avant de se poser la question… ce qu'on va commander. Donc, 20.2 : «La
signification par […] moyen technologique se fait par la transmission de l'acte
de procédure à l'adresse que le destinataire indique être l'emplacement où il
accepte…» Il faut qu'il soit déjà au restaurant, là.
Moi, il n'est pas au restaurant, il n'a
pas été convoqué. Moi, je suis ab initio. Il n'y a aucune procédure, puis je n'ai
pas eu… moi, là, on veut me signifier un constat d'infraction. Je suis chez
moi, je ne sais même pas qu'il y a un constat d'infraction qui est pendant
au-dessus de ma tête. Il est clair que je n'aurai pas exprimé un choix de
dire : Bien, savez-vous quoi? Si vous voulez me signifier un constat
d'infraction, là, appel à la Terre, vous pourrez le faire à
marctanguay.hotmail.com. Ce n'est pas 20.2, ce n'est pas ce que 20.2 dit et
prévoit. C'est lorsque la signification par un moyen technologique, 20.2, se fait
par la transmission à l'adresse que le destinataire indique être l'emplacement…
Mme LeBel : Oui. C'est vrai
quand vous parlez de la première procédure.
M. Tanguay
: C'est ça
que je… C'est ça.
Mme LeBel : Oui, mais «ce»,
cet article-là s'adresse à toutes les significations, même des procédures en
cours de route, quand la procédure est déjà initiée. Maintenant, si on est au
départ, c'est sûr qu'on va aller… on ira à ce moment-là où… à celle qui est
connue publiquement comme étant l'adresse où il a accepté. Il faudra faire une
preuve que c'est cette adresse, et sinon, demander une autorisation du tribunal
pour passer par Facebook, à titre d'exemple, pour ne pas le nommer. Donc, il ne
faut pas oublier que cet article-là, de signification par des moyens
technologiques peut s'appliquer à beaucoup de moments de la procédure. Et
dépendamment du moment où on se trouve, bien, il faudra entrer par une des
portes qui le… permet d'entrer…
M. Tanguay
:
O.K. On chemine.
Mme LeBel : Mais si on parle
du constat d'origine, vous avez raison. Je ne peux pas… si je ne sais même pas
qu'il y a un constat contre moi, je ne peux pas consentir à la signification.
Mais une fois que le constat aura été émis, il y a d'autres procédures où j'aurais
pu dire au tribunal : À partir de maintenant, si vous avez d'autres
procédures à me signifier, c'est là que vous allez le faire. Là, vous aurez
donc consenti.
M. Tanguay
: C'est ça.
Je n'en suis pas là. J'en suis au premier coup, effectivement, je ne suis pas
au deuxième, troisième…
Mme LeBel : Bien, il devra
rentrer par une autre porte que celle-là, c'est-à-dire celle qui est connue
publiquement, où…
Mme LeBel : ...si je ne sais
même pas qu'il y a un constat contre moi, je ne peux pas consentir à la situation.
M. Tanguay
: C'est ça.
Mme LeBel : Mais, une fois que
le constat a été émis, il y a d'autres procédures où j'aurais pu dire au
tribunal : Bien, à partir de maintenant, si vous avez d'autres procédures
à me signifier, c'est là que vous allez le faire. Là, j'aurai donc consenti.
M. Tanguay
: Je n'en
suis pas là, j'en suis au premier coup, effectivement, je ne suis pas au
deuxième, troisième.
Mme LeBel : Bien, il y aura
une autre... il devra rentrer par une porte que celle-là, c'est-à-dire celle
qui est connue publiquement ou, ultimement, j'imagine, demander l'autorisation
du juge pour procéder par... Encore une fois, ne parlons pas de Facebook en le
nommant, là, mais, à titre d'exemple, parler de Facebook...
M. Tanguay
: Oui, oui.
Mme LeBel : Parce qu'on
pourrait faire une preuve, le poursuivant pourrait faire une preuve, de
dire : Je n'ai pas d'adresse connue, j'ai cherché dans les registres, j'ai
envoyé par la poste, il n'y avait personne, la lettre est revenue, elle est
connue à cette adresse, peu importe, là, vous connaissez comme quoi toutes les
procédures qu'on peut essayer de faire en signification. Et, à ce moment-là,
bien, on pourrait avoir une recherche qui est faite, le poursuivant fera une
preuve, et disant : Bien, moi, j'ai trouvé un Facebook pour lui, je vous
demande l'autorisation, en dernier recours, de le faire. Et là on ira par... le
juge l'autorise. C'est un cas de figure, il pourrait en avoir d'autres.
M. Tanguay
: Donc, si je
comprends bien, l'article 19, qui prévoit un... par signification, qui
prévoit toute signification par moyen technologique. L'article 19 établit
le principe : Tu peux signifier par moyen technologique. Aussitôt que je
dis : Hé! ça me tente de signifier par moyen technologique, à ce
moment-là, je dois me rabattre sur 20.2, et j'en suis à l'étape... pas de
l'adresse qu'il m'a donnée, il n'existe même pas, il ne sait même pas qu'il va
être en relation bientôt avec moi par rapport à ce litige-là, mais où il
accepte de recevoir... je ferai la preuve devant un juge que, par Facebook, il
a reçu des documents, il accepte des documents, et on peut lui communiquer, il
accuse réception ou envoie des messages : Oui, bien reçu, puis tout ça.
Et, à ce moment-là, je pourrai me faire autoriser par le juge une signification
par un moyen technologique. Autrement dit — puis je pense qu'on
chemine là-dedans, dans notre compréhension, parce que ce n'était pas clair
dans ma tête, là — article 19, on dit que tu peux signifier des
moyens technologiques... par moyen technologique, parfait. J'en suis à
l'exemple très simple de dire : La première étape, j'envoie le constat
d'infraction, il n'existe même pas, le litige. À ce moment-là, je me rabats sur
20.2. Première étape, constat à l'infraction, moyen technologique, il faut que
j'aille à 20.2. Et, si je veux y aller par Facebook, je ferai la preuve devant
un juge que, de façon usuelle, on voit qu'il le reçoit, puis je suis capable de
faire la preuve qu'il le reçoit et qu'il accuse réception par un «reply» ou peu
importe. À ce moment-là, le juge pourrait m'autoriser à lui signifier par
Facebook mon constat d'infraction. Ma lecture, est-elle...
Mme LeBel : C'est un des cas
de figure possibles.
M. Tanguay
: C'est
possible de faire ça de même.
Mme LeBel : Un des cas de
figure.
M. Tanguay
:
Pourrions-nous faire signification d'un constat d'infraction par un moyen
technologique sans passer par 20.2?
Mme LeBel : Non.
M. Tanguay
: Je pense
que la seule réponse, c'est non.
Mme LeBel : Normalement, non.
M. Tanguay
: O.K.
Mme LeBel : Parce que 20.2
signifie… Ça va? On revient-u… est-ce qu'on revient à 4? Parce qu'on a passé
beaucoup de temps sur 6.
Le Président (M.
Bachand) : J'ai entendu votre soupir, M. le député de
LaFontaine.
M. Tanguay
: Non, c'est
bon, merci beaucoup. C'est bon. Ça va pour moi.
Mme LeBel : On revient à 4, ça
va?
Le Président (M.
Bachand) : Interventions sur 4? M. le député de Gouin, s'il
vous plaît.
M. Nadeau-Dubois : Question de
compréhension… dans… en fait, non, je suis désolé. On a tellement parlé de
l'article 20.2 que j'étais dans l'article 20.2. Je poserai ma question quand on
y arrivera, M. le Président.
Mme LeBel : C'est apprécié.
Le Président (M.
Bachand) : O.K. Merci. Est-ce qu'il y a d'autres interveneurs
sur 4, l'article 4 tel qu'amendé? S'il n'y a pas d'autre intervenant, est-ce
que l'article 4 tel qu'amendé est adopté?
Des voix
: Adopté.
Le Président (M.
Bachand) : Adopté, merci beaucoup. Article 5, Mme la ministre,
s'il vous plaît.
Mme LeBel : L'article 5… M. le
Président, merci… l'article 5, donc, du projet de loi se lit comme suit :
5. L'article 20.1 de ce code est modifié :
1° par la suppression de «ou, lorsque le
témoin peut être ainsi rejoint, par télécopieur ou par un procédé
électronique»;
2° par l'insertion, après «paix», de «ou
une personne chargée de l'application d'une loi»;
3° par l'insertion, à la fin, de «ou cette
personne».
La modification apportée par le premier
paragraphe de cette disposition découle de l'introduction, en vertu de
l'article 6 du présent projet de loi, de règles spécifiques portant sur la
signification par un moyen technologique. Il n'est plus nécessaire de faire
référence ici à l'utilisation d'un télécopieur ou d'un procédé
électronique — c'était… inclus… — parce que ça devient
inclus dans un moyen technologique La modification des deuxième et troisième
paragraphes de cette disposition facilitera l'assignation de personnes chargées
de l'application de la loi.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. Interventions? Est-ce qu'on a besoin
de plus de temps pour l'article? On est correct? S'il n'y a pas d'autre
intervention sur l'article 5, je vais mettre l'article 5 aux voix. Est-ce que
l'article 5 est adopté?
Des voix
: Adopté.
Le Président (M.
Bachand) : Adopté. Merci beaucoup. Article 6, Mme la ministre,
s'il vous plaît.
• (20 h 50) •
Mme LeBel : Oui. Alors, nous
allons maintenant lire l'article 6 de façon officielle, M. le Président :
Ce code est modifié par l'insertion, après l'article 20.1, du suivant :
«20.2…
Le Président
(M. Bachand) : ...d'intervention sur l'article 5, je
vais mettre l'article 5 aux voix. Est-ce que l'article 5 est adopté?
Des voix
: Adopté.
Le Président
(M. Bachand) :Adopté. Merci beaucoup.
Article 6, Mme la ministre, s'il vous
plaît.
Mme LeBel : Oui. Alors,
nous allons maintenant lire l'article 6 de façon officielle, M. le
Président :
Ce code est modifié par l'insertion, après
l'article 20.1, du suivant :
«20.2. La signification par un moyen
technologique se fait par la transmission de l'acte de procédure à l'adresse
que le destinataire indique être l'emplacement où il accepte de le recevoir ou
à celle qui est connue publiquement comme étant l'adresse où il accepte de
recevoir les documents qui lui sont destinés, dans la mesure où cette adresse
est active au moment de l'envoi.
«Cependant, la signification par un tel
moyen n'est admise à l'égard de la partie non représentée que si elle y consent
ou qu'un juge l'y autorise.
«La signification est réputée faite le
jour de la transmission. Si l'acte de procédure est transmis après
17 heures, le samedi ou un jour férié, la signification est réputée faite
le jour ouvrable qui suit.»
Commentaires : Cette disposition vise
à permettre une utilisation plus large des technologies pour la signification
d'actes de procédures en matière pénale. Elle s'inspire des principes prévus
par la loi concernant le cadre juridique des technologies de l'information,
notamment en demeurant neutre par rapport aux moyens pouvant être utilisés.
La signification par un moyen
technologique se fait par la transmission de l'acte de procédure à l'adresse
que le destinataire indique être l'emplacement où il accepte de le recevoir ou
à celle qui est connue publiquement comme étant l'adresse où il accepte de
recevoir les documents qui lui sont destinés, dans la mesure où cette adresse
est active au moment de l'envoi. Il est important de souligner que ce mode de
signification ne peut être utilisé à l'égard de la partie non représentée par
avocat que si celle-ci y consent ou qu'un juge l'autorise.
Enfin, cette autorisation... cette
disposition précise à quel moment la signification par un moyen technologique
est réputée avoir eu lieu pour tenir compte du fait qu'un document envoyé par
un tel moyen est reçu dans les secondes ou les minutes qui suivent, mais que le
destinataire n'en prend pas nécessairement connaissance à ce moment.
Le Président
(M. Bachand) : Merci beaucoup. J'avais le député de Gouin
sur l'article... sur 20.2. M. le député de Gouin.
M. Nadeau-Dubois : Oui. D'abord
une question de clarification pour bien comprendre ce que nous avons devant les
yeux. On parle d'adresse ici et on dit l'adresse qui est connue publiquement
comme étant l'adresse où il accepte de recevoir les documents qui lui sont
destinés. Avoir des explications sur...
Mme LeBel : ...
M. Nadeau-Dubois : Est-ce
que c'est... par exemple, moi, j'ai un profil — on va reprendre les
exemples des dernières minutes — moi, j'ai un profil Facebook
personnel, j'ai une page Facebook de député, est-ce que ça, c'est une adresse
publiquement connue? Qu'est-ce qui fait qu'une adresse devient publiquement
connue comme étant celle où on accepte de recevoir des documents?
Mme LeBel : Bien, à titre
d'exemple, il y avait un dossier précédent dans lequel il a accepté de... une
adresse électronique ou une adresse quelconque où il a accepté de servir...
d'être signifié. On a cette adresse-là au dossier, et il avait déjà accepté
d'être signifié à cette adresse-là. Par contre, il faut que cette adresse soit toujours
active au moment où on s'en sert. Donc, si elle date de deux ou trois ans dans
les archives, on peut parler de gens qui avaient des dossiers précédents, mais
là il va falloir s'assurer que l'adresse est toujours active. Mais il avait déjà
accepté précédemment de recevoir des significations à cette adresse-là. Ça peut
être un exemple.
M. Nadeau-Dubois : Donc,
une fois qu'on consent à un moyen technologique une fois, on est réputé avoir
consenti pour toutes les fois qui s'ensuivent. Si moi, une fois, je dis :
Contactez-moi par courriel sur un dossier x, est-ce que donc dorénavant ça
devient une adresse publiquement connue comme étant celle où j'accepte de
recevoir des documents et donc, à partir de ce moment-là, je n'ai plus besoin
de consentir, plus jamais, puis je peux toujours recevoir ça par courriel?
M. Tanguay
:
Est-ce que tu peux le révoquer?
M. Nadeau-Dubois : C'est
parce qu'on pourrait penser que la personne, par exemple, n'est pas au pays
cette semaine-là, et dit : Envoyez-moi le par courriel. Mais est-ce que ça
veut dire qu'après ça, pour toujours, il y a un consentement qui est
irrévocable et on va toujours pouvoir dorénavant lui... lui signifier.
Mme LeBel : Bien, on ne
sera jamais dispensé de faire la preuve de la réception par contre, là, même si
on l'en envoyé par un moyen électronique. Mais, ceci étant dit, ça peut être
aussi une adresse où, sur... je ne sais pas, moi, une entreprise qui dit que
les documents... elle peut recevoir des documents par cette adresse. Il y a
plusieurs cas de figure. Mais il faut, à tout le moins, être capable d'établir
de toute manière pour que ce mode de signification là soit accepté que cette
adresse-là était une adresse qui remplit le critère de connue publiquement
comme étant une adresse où il accepte de recevoir les documents. On ne s'en
dispense pas d'établir ce critère-là au départ.
M. Nadeau-Dubois : Mais est-ce
qu'on... ma question, c'est : Est-ce qu'on le remplit, ce critère-là, pour
toujours dès que l'on consent une fois à l'utilisation d'un moyen technologique
donné? Est-ce que ça ouvre une porte qu'après ça on ne peut plus refermer parce
qu'on a consenti une fois en disant : Notifiez-le-moi par ce...
signifiez-le-moi par ce moyen x, à partir de ce moment-là, ça devient un modus
operandi, pour le poursuivant, dans toutes les autres affaires possibles?
Mme LeBel : Non, ce n'est
pas un consentement éternel, il faut que l'adresse demeure active, mais c'est
parce que... On va faire l'analogie avec une adresse...
M. Nadeau-Dubois : ...à partir
de ce moment-là, ça devient une adresse reconnue, et donc ça devient un modus
operandi pour le poursuivant dans toutes les autres affaires possibles.
Mme LeBel : Ce n'est pas un
consentement éternel, il faut que l'adresse demeure active, mais c'est parce
que... On va faire l'analogie avec une adresse physique de votre domicile.
Quand ça devient une adresse officielle sur un permis de conduire ou dans les documents
officiels, c'est une adresse que... on admet que l'adresse est un endroit où on
peut nous rejoindre. ÇA peut être le cas d'une adresse électronique, également,
où on dit, à un certain moment donné, de façon publique, ceci est une adresse
électronique — parce qu'on va parler plus d'adresse électronique, ici — où
je peux être rejoint. Maintenant, dans tous ces cas de figure là, même dans une
adresse... ça ne dispense pas de prouver que la signification a été reçue, là,
que ça a été signifié, là.
M. Nadeau-Dubois : La raison
pour laquelle on demande un consentement, dans le cas d'un moyen technologique
puis pas dans le cas des autres moyens, c'est parce qu'il y a une réalité
particulière aux moyens technologiques. Donc, pourquoi est-ce que, dans ce cas-là,
un consentement une fois serait valide... Est-ce qu'il n'y aurait pas moyen
d'introduire ici une disposition où on dirait : Bien, ce consentement-là,
il doit être réitéré à chaque fois, là? Et le fait de consentir une fois au
moyen technologique ne peut pas nous... ça ne peut pas devenir le critère qui
justifie... ça ne peut pas faire de ce moyen technologique, donc, une adresse
où on accepte de recevoir le document. Parce qu'il me semble que, sinon, ça
veut dire qu'on donne un consentement une fois, et il n'est plus révocable,
jamais. Alors que la notion de consentement, habituellement, implique qu'on
peut le retirer.
Mme LeBel : Bien, la notion de
consentement, ici, fait référence aussi à la notion de confirmation que c'est
une adresse où on peut être rejoint. Il n'est pas... il est beaucoup plus
facile de confirmer une adresse physique, le domicile de quelqu'un, qu'une
adresse email qui nécessairement... on le sait, hein, ne porte pas
nécessairement le nom de quelqu'un, on s'entend, et de reconnaître. Donc, ce
consentement-là est une façon de valider que l'adresse appartient bien à la
personne, mais ça ne dispensera jamais de prouver que la signification a bel et
bien été reçue, là. Ce n'est pas parce qu'on l'envoie à une adresse électronique
qui a été identifiée comme étant une adresse qui nous rejoint que ça va
dispenser de faire la preuve que je l'ai bien reçu, là.
M. Nadeau-Dubois : Je
comprends, c'est...
Mme LeBel : Oui, et on
pourrait aussi refuser de recevoir, à l'avenir, à cette adresse-là aussi.
M. Nadeau-Dubois : Comment, si
c'est un nouveau constat d'infraction?
Mme LeBel : Oui, mais l'idée,
là...
M. Nadeau-Dubois : Ils vont
vous écrire : Bonjour, on a un deuxième constat finalement, est-ce que
c'est encore correct si...
Mme LeBel : Bien là, on ne
peut pas se soustraire à une signification. Si l'adresse est valide puis elle
vous rejoint, je pense qu'un poursuivant ou le ministère public, dans le cas,
peut vous signifier à cette adresse-là. À partir du moment où vous allez
dire : Bien, écoutez, à partir de maintenant, je ne veux plus que vous
utilisez cette adresse, bien, je veux dire, la première signification va quand
même être valide, ce n'est pas... il faut... on ne peut pas en faire une façon
d'éviter la signification. Si cette adresse-là avait été valide dans un dossier
particulier, on signifie là, si la personne dit : Je n'ai jamais été
signifié parce que cette adresse-là n'est plus valide, on n'a pas de preuve de
signification, mais là on parle de signification d'acte de procédure, là, je
veux dire, il faut...
M. Nadeau-Dubois : Bien, il ne
s'agit pas d'éviter la signification, au contraire, là, on est en train
d'adopter des articles qui donnent plein, plein, plein de nouvelles manières
pour signifier, ça fait qu'on n'est pas dans une logique de restreindre, on
est, au contraire, en ce moment, puis c'est une bonne chose, de moderniser,
puis d'élargir, puis d'ouvrir une multiplicité possible de manières de
signifier. Ça fait qu'il n'y a personne, je pense, ici, qui souhaite donner aux
gens des moyens d'éviter, bien au contraire, on est en train de donner plein de
nouveaux moyens de signification. Ça fait qu'il ne s'agit pas d'éviter, mais il
s'agit de respecter la notion de consentement, qui implique qu'on peut le
retirer.
Or, ce que moi, j'entends, en ce moment,
de la ministre, c'est qu'elle me dit : Si, dans une affaire donnée, la
personne a donné son consentement pour être rejointe par un moyen technologique,
disons, une adresse courriel, un profil Facebook, la messagerie privée sur
Twitter, je ne sais pas, il y a plein de cas de figure, bien, qu'à partir de ce
moment-là, ça, ça devient une adresse connue publiquement où il accepte de
recevoir les documents qui lui sont destinés. C'est la réponse que la ministre
m'a faite. Donc, le consentement, il n'est plus... dans les faits, là, il ne
peut pas être retiré, puisque l'adresse va être connue publiquement puis, une
fois qu'on a donné le consentement, c'est fini, puis il faudra attendre d'être
signifié une seconde fois pour pouvoir retirer le consentement. Or, le mal sera
fait.
Mme LeBel : Quel mal?
M. Nadeau-Dubois : Bien, le
mal... le mal...
Mme LeBel : Le mal d'avoir été
signifié...une procédure que tu dois être signifié.
M. Nadeau-Dubois : Ce n'était
pas le meilleur choix de mots, ce n'est pas, en effet, un mal, mais, disons, le
bris de consentement aura été fait, puisque je l'avais donné seulement pour une
première fois. Je me demande...
Mme LeBel : Quel est le
préjudice?
• (21 heures) •
M. Nadeau-Dubois : Un
consentement, c'est censé être révocable, et là, il me semble que, quand je lis
ça, je vois un consentement qui n'est plus révocable, parce qu'une fois qu'on
l'a fait, on ne peut plus revenir sur la décision, parce que, par exemple, on
n'est plus confortable, parce qu'on a changé d'idée, parce qu'il y a eu une
brèche de sécurité sur un réseau social qu'on utilise. On avait dit oui. Il y a
une brèche de sécurité. Deux mois plus tard, on dit : Finalement, il y a
une brèche de sécurité sur Facebook, par exemple, c'est des choses qui
arrivent, on le sait. Et donc j'aimerais, moi...
21 h (version non révisée)
M. Nadeau-Dubois : ...on
ne peut plus revenir sur la décision parce que, par exemple, on n'est plus
confortable, parce qu'on a changé d'idée, parce qu'il y a eu une brèche de
sécurité sur un réseau social qu'on utilise. On avait dit oui. Il y a une
brèche de sécurité. Deux mois plus tard, on dit : Finalement, il y a une
brèche de sécurité sur Facebook, par exemple, c'est des choses qui arrivent, on
le sait. Et donc j'aimerais, moi, comme citoyen, changer de mode de communication.
Là, je ne peux plus le faire en fait. Je vais pouvoir le faire, mais a posteriori.
Donc, est-ce qu'il n'y a pas, là, un enjeu?
Mme LeBel : Oui, mais
première des choses, là, dans le cas de figure, il faut s'assurer que l'adresse
est toujours active. Bon. Ça pourrait être une façon de vérifier le consentement,
ça, si elle est active ou non. Mais d'une autre façon, je veux dire, il n'y a
pas de brèche de sécurité, là, on parle d'un acte de signification. Et quel est
le préjudice? Maintenant, à partir du moment où on reçoit une adresse valide
puis on dit : Je ne suis plus d'accord. Bon, bien on vient... On a été
signifié. Il n'y a pas de préjudice. Il n'y a pas de mal. Et on pourra retirer
le consentement pour le futur. Mais on parle de signifier un acte de procédure,
là. Bien, au niveau de l'envahissement de la vie privée, on n'est pas dans ce
domaine-là.
M. Nadeau-Dubois : Mais
je sais qu'on parle de...
Mme LeBel : Je veux juste
qu'on remette les choses en perspective.
M. Nadeau-Dubois : Oui,
je...
Mme LeBel : On parle de
la signification d'un acte de procédure par une adresse électronique, là.
M. Nadeau-Dubois : Oui,
je comprends, mais la raison pour laquelle il y a la notion... Je vais y aller
par le positif. Pourquoi est-ce qu'on demande le consentement des gens avant d'utiliser
un moyen technologique?
Mme LeBel : C'est une notion
de validation de l'adresse, d'accepter parce que ça vient valider que l'adresse
est valide pour cette personne-là, je veux dire. J'essaie de trouver...
M. Nadeau-Dubois : Mais
pourquoi on n'aurait pas à le faire une seconde fois pour signifier un second
acte de procédure ou un acte de procédure dans une tout autre affaire? Je
demande... C'est parce que, là, il y a une contradiction entre dire : Il
faut demander le consentement, mais qu'une fois que ce consentement-là est
donné, il n'est plus révocable.
Mme LeBel : Non, mais
c'est aussi une façon surtout de s'assurer que la personne est à l'aise si elle
n'est pas représentée par avocat. Peut-être qu'elle va dire : Bien, j'ai
une adresse e-mail, mais je n'ai jamais... Je n'ai jamais accès à mon
ordinateur, je n'ai pas de téléphone cellulaire. Oui, mon adresse est valide,
mais ça ne m'arrange pas que vous me signifiiez les procédures par ce moyen-là
parce que je ne les aurai pas en temps opportun, j'aimerais mieux les avoir
d'une autre façon. Il y a ça aussi, là, il y a une question de facilitation de
moyens, s'assurer que la personne est à l'aise avec ça. Mais après ça, une fois
qu'une adresse est connue, puis la personne est à l'aise avec ça, puis qu'on
signifie une adresse... une procédure, une autre procédure dans une autre... Bon,
il est malchanceux, il a un autre constat d'infraction qui arrive un jour,
O.K., et on avait au dossier une adresse valide, bien, tu sais, on va... C'est
sûr qu'on va signifier le premier constat si on considère qu'elle est encore
active. Puis par la suite, si la personne redit : Bien, maintenant, cette
adresse-là, bien, je n'y vais plus souvent, puis ça ne me conviens pas.
Procédez par un autre moyen. On ne le fera plus, là. Il faut comprendre qu'on
parle de... Il faut aller voter. Il faut comprendre qu'on parle de signifier
des actes de procédure, là, et de faciliter la transmission puis la
communication.
Le Président (M.
Bachand) :O.K. Je suspends les travaux
parce que les cloches nous appellent... Oui, je vous... Oui.
M.
Martel
:
Je vous proposerais peut-être d'ajourner les travaux, compte tenu qu'on va
aller voter puis qu'on va revenir ici peut-être vers 21 h 20,
21 h 25. Peut-être que ça vaut...
Des voix
: ...
Le Président (M.
Bachand) : O.K. Est-ce qu'il y a consentement pour que la...
Des voix
: ...
Le Président (M.
Bachand) :S'il vous plaît.
M.
Martel
:
J'ai fait des vérifications quand même un peu avant.
Des voix
: Ha, ha, ha!
Le Président (M.
Bachand) :S'il vous plaît! C'est
important, là, est-ce qu'il y a consentement pour que, dû au vote, que la
séance soit ajournée?
Une voix
: Oui.
Le Président (M.
Bachand) :On ajourne?
Des voix
: ...
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup.
(Fin de la séance à 21 h 3)