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Version finale

42e législature, 1re session
(27 novembre 2018 au 13 octobre 2021)

Le jeudi 23 janvier 2020 - Vol. 45 N° 7

Consultations particulières et auditions publiques sur l’exploitation sexuelle des mineurs


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Table des matières

Auditions (suite)

Conseil de la nation anishnabe de Lac-Simon et ville de Val-d'Or

Service d'aide et de traitement en apprentissage social (SATAS)

Centre d'aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel Abitibi (CALACS-Abitibi)

Mmes Virginia Wabano et Mary Ortepi

M. Donald Nicholls

Autres intervenants

M. Ian Lafrenière, président

M. Denis Lamothe

Mme Christine St-Pierre

Mme Méganne Perry Mélançon

M. Alexandre Leduc

M. Guy Ouellette

Mme Kathleen Weil

Mme Lucie Lecours

Mme Nancy Guillemette

M. Frantz Benjamin

M. Christopher Skeete

*          M. Pierre Corbeil, ville de Val-d'Or

*          Mme Adrienne Jérôme, Conseil de la nation anishnabe de Lac-Simon

*          Mme Jeannette Brazeau, idem

*          M. Pierre Papatie, idem

*          Mme Chantal Lessard, SATAS

*          Mme Josée Bélisle, CALACS-Abitibi

*          Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Neuf heures vingt minutes)

Le Président (M. Lafrenière) : Alors, bon matin à tous et à toutes. Merci d'être présents avec nous. Journée importante pour nous ici, à Val-d'Or. Alors, très heureux de saluer toutes les personnes qui sont dans la salle aujourd'hui. Merci aux représentants des médias qui sont avec nous. Merci à M. le maire de nous accueillir ici, à Val‑d'Or. Adrienne, merci beaucoup de nous accueillir. Et on a plusieurs personnes qui sont présentes. J'ai, entre autres, M. Guy Bourgeois, ex-collègue, qui est avec nous. Merci d'être là. On a plusieurs chefs, Mme Kistabish qui est là, et plus tard se joindront à nous MM. Konrad Sioui et Paul McDougall.

Auditions (suite)

Alors, sans plus tarder, je laisserais la déclaration d'ouverture à M. le maire, M. Pierre Corbeil, maire de la ville de Val-d'Or, qui nous accueille ici. M. le maire, je vais vous laisser faire la déclaration d'ouverture de cette consultation ici, à Val-d'Or, dans le contexte de la Commission spéciale de l'exploitation sexuelle des mineurs. M. le maire.

Conseil de la nation anishnabe de Lac-Simon et ville de Val-d'Or

M. Corbeil (Pierre) : Merci. «Meegwetch.» M. Lafrenière, président de la commission spéciale, Mme Adrienne Jérôme, cheffe de la nation anishnabe du Lac-Simon. Mme Kistabish, cheffe des Abitibiwinnis à Pikogan, membres de la commission, membres des médias, mesdames et messieurs, «kwe», bonjour.

Tout d'abord, permettez-moi de vous souhaiter, au nom des citoyens, et citoyennes, et des élus de notre ville, la bienvenue en territoire anishnabe, en Abitibi-Témiscamingue, dans la MRC de La Vallée-de-l'Or et à Val-d'Or, secteur du Dubuisson. Voilà pour la géographie.

Le choix de notre ville comme lieu de rencontre de la commission spéciale m'apparaît singulier, mais judicieux. D'abord, précisons que Val-d'Or n'a pas le monopole ni l'exclusivité de ce phénomène. Vous êtes ici à la jonction du Nord-Ouest québécois et du Nord-du-Québec, une jonction où se côtoient des cultures et des modes de vie singuliers, soit les premières nations anishnabe et crie, québécoises de souche, et nouveaux arrivants. Vous aurez par contre l'opportunité d'entendre comment le phénomène peut se manifester de façon différente à distance des grands centres.

Aujourd'hui, à Val-d'Or et au Québec, grâce à vos travaux, c'est collectivement que nous faisons face à cette perversion qu'est l'exploitation sexuelle chez les mineurs. Cette réalité destructrice nous interpelle. Bien sûr, à titre d'élus et de citoyens, mais également comme parents et, pour ma part, comme grands-parents.

Comme si la situation n'était pas déjà complexe, l'avènement des nouvelles technologies et des réseaux sociaux, combinés à la vulnérabilité, voire aux faux espoirs de libération et d'accomplissement des victimes, viennent ajouter à l'attirail des abuseurs.

D'ailleurs, M. le Président, j'ose à peine imaginer ce que vous avez pu voir et entendre au cours de votre carrière de policier. Cependant, je demeure convaincu que votre expérience bénéficiera grandement à la commission spéciale. C'est un défi de taille que de protéger les plus faibles et les plus vulnérables de notre société, et ce, peu importe le milieu, l'origine et la classe sociale.

En terminant, je remercie les citoyens et organismes qui prennent part aux discussions et qui déposeront des mémoires. Vous êtes la voix de ces affligés. Aux membres de la commission de même que tous ses acteurs, je souhaite qu'au terme de vos consultations vos réflexions engageront notre société vers un avenir plus égalitaire et protecteur envers nos jeunes citoyens parfois plus vulnérables. Merci. «Meegwetch.»

Le Président (M. Lafrenière) : Merci beaucoup, M. le maire. Encore une fois, merci de nous accueillir ici. Je dois dire que, dès les premiers instants où la commission a décidé de se déplacer à Val-d'Or, on a toujours eu un partenariat très facile avec vous et les gens de la ville. Un grand merci.

Maintenant, du conseil des nations anishnabes du Lac-Simon, la cheffe, Mme Adrienne Jérôme. Mais avant tout, cheffe, «kwe», merci beaucoup de nous avoir accueillis hier soir. Les gens de la commission ont eu la chance d'aller vous rencontrer à Lac-Simon, ça a été un grand, grand plaisir. «Meegwetch.» Merci beaucoup.

Et je vais vous laisser aussi nous présenter les gens qui sont avec vous... là, je ne veux pas me tromper dans le terme, mais comme Kukuné qui va être avec nous aujourd'hui pour nous faire...

Une voix : Kukum.

Le Président (M. Lafrenière) : 17903   Le Président (M. Lafrenière) : Kukum. Je le savais, que je me tromperais. Lui, tantôt, il m'a bien expliqué que, quand vous lui dites de s'asseoir, il s'assoit. Ça, il me l'a bien dit. Il a dit : On me dit de m'asseoir, je le fais. Alors, de présenter les gens qui sont avec vous. Et merci beaucoup d'être ici ce matin. Merci infiniment.

Mme Jérôme (Adrienne) : Bien. Bon, bonjour, tout le monde. Je suis bien contente, je suis heureuse aussi d'être ici aujourd'hui avec les aînés de ma communauté, ceux qui participent souvent dans les sessions où est-ce qu'on fait des rassemblements, des sessions de guérison aussi pour nos gens de la communauté. Il y a la «kukum» Jeannette Brazeau — nous autres, on l'appelle toujours «kukum» — puis aussi le «mushum» Pierre Papatie. C'est grand-maman Jeanette puis grand-papa Pierre. C'est comme ça qu'on les appelle, tous nos aînés, c'est «kukum» et puis «mushum». Puis on a de la misère à les... Les appeler comme par leur prénom, c'est juste quand c'est nécessaire.

Je suis bien contente d'être ici. J'aimerais vous dire qu'on est honorés, hein, la communauté de Lac-Simon, puis j'aimerais remercier M. Lafrenière, dire la bienvenue à toute votre équipe. Merci à M. Corbeil, à cheffe Monik Kistabish. Je ne veux pas trop nommer tout le monde parce que je vais en oublier certains. Mais je suis vraiment comme honorée à chaque fois que nos aînés se déplacent pour venir à... tu sais, purifier, tu sais, pour purifier et aussi pour prier pour notre communauté, parce que c'est nos représentants d'aînés de la communauté.

Puis, tu sais, on s'est rencontrés, hier soir, on a partagé beaucoup, beaucoup, beaucoup de choses. C'est avec les intervenants, avec nous aussi, en tant que leaders, puis nos aidants naturels, nos aînés, qu'on a partagé hier plusieurs de nos modes de vie, surtout, puis comment que la communauté marche aussi, comment que la communauté peut se mobiliser. Tu sais, ça ne paraît pas, mais, tu sais, de ma communauté, là, il y a plusieurs gens qui ne sont plus dans le trafic, qui ne font plus... C'est comme toujours, beaucoup se mobilisent pour se guérir.

Tu sais, l'exploitation sexuelle chez les mineurs, nous autres, ça ne date pas d'hier. Ça date de plusieurs générations. Tu sais, hier, on parlait, on a quatre générations à guérir, peut-être la cinquième qui s'en vient. Tu sais, l'exploitation sexuelle, ça a débuté même avant le pensionnat, parce que beaucoup de nos enfants, beaucoup des enfants qui viennent du pensionnat, tu sais, ils ont été exploités sexuellement, tu sais, à chaque jour, même.

• (9 h 30) •

Tu sais, c'est une grande étape pour la communauté. Tu sais, nous autres, on a toujours comme dénoncé, dénoncé des choses, pour que ça fasse partie de notre guérison. Puis on va toujours le faire encore, de dénoncer. Nous avons déjà un programme, qui a été mis en place avant les fêtes, qui s'appelle Wigobisan. C'est un programme de sensibilisation des mauvais touchers puis des bons touchers. On a beaucoup de travail, on a beaucoup de travail. Parce que moi, j'ai mentionné hier à M. Lafrenière et à son équipe qu'on n'ouvre pas des plaies pour ouvrir des plaies. Ça nous prend, nous autres, un filet de sécurité. Puis, quand on ouvre des plaies comme l'exploitation sexuelle chez les mineurs, parce que c'est arrivé, ce n'est pas juste arrivé aujourd'hui, mais c'est arrivé avant, c'est comme une autre ouverture de plaie. Puis on va s'attendre, nous autres, à avoir un... Tu sais, on a vécu plusieurs drames, puis je ne veux pas que ça arrive à ma communauté. C'est pour ça, moi, que j'ai dépêché juste mes intervenants. C'est juste mes intervenants qui vont participer à cette commission. J'ai le devoir, moi, en tant que cheffe, de protéger mon monde. Si vous n'êtes pas capables de nous offrir un filet de sécurité, mais c'est avec les intervenants que vous allez avoir affaire. Ma communauté a beaucoup, beaucoup, beaucoup de blessures. Comme je vous dis, là, ce n'est pas encore guéri. On a quatre générations à guérir. Peut-être la cinquième s'en vient aussi.

Puis on va toujours être de l'avant dans les commissions, moi, en tant que cheffe, puis Jeannette aussi, en tant qu'aînée, puis Pierre. Puis aussi il y a les aidants naturels qui existent dans ma communauté, qui sont là, à chaque soir, à chaque jour, pour nos jeunes. On a mis un système sur l'exploitation sexuelle sur les mineurs. On a mis un système en place de la communauté. Oui, il y a nos enfants qui ont été victimes dans le... Il y a du monde qui vient au Lac-Simon, qui essaie d'enlever nos enfants parce que c'est des enfants vulnérables. Mais nous autres, on a mis un système d'alerte dans la communauté à chaque fois. C'est ce qu'il y a de plus beau dans la communauté, parce que ça prend toute une communauté pour élever un enfant. Ça, on le dit souvent, souvent, souvent, même dans nos réunions, dans les réseaux sociaux.

Puis je ne veux pas que, tu sais, dans tout ça, l'exploitation sexuelle, dans toutes les plaintes... Parce qu'il va y avoir quand même... Même si on ne veut pas, même si on met juste nos intervenants de l'avant, il va y en avoir, ça, des victimes qui vont dénoncer, qu'on va devoir les ramasser. Parce que souvent, tu sais, quand une commission du gouvernement du Québec vient chez nous, on n'est jamais éligibles au financement. On n'a jamais, nous autres, des personnes qui vont intervenir parce que c'est un long processus quand on veut guérir quelqu'un, parce qu'il n'y a pas juste l'exploitation sexuelle, parce qu'il y a d'autre chose qui est arrivé dans sa vie. Puis on peut toucher les personnes qui ont vécu le pensionnat. Puis c'est souvent ça, le... Nous autres, on dit souvent : C'est comme des mauvaises intentions, la communauté. C'est toujours ça parce qu'on est toujours en train de vouloir se relever, mais il y a toujours quelque chose qui vient nous piquer dans le coeur. Puis ce serait bon qu'on fasse partie... Tu sais, la commission, je ne sais pas...

En tout cas, on est quand même contents parce qu'on va avoir un défi à relever non pas juste pour les communautés, mais pour les gens de l'Abitibi ou Québec. Il va y en avoir plein dans les communautés. Je remercie, moi, tout le monde de nous avoir invités. Mais il faut se rappeler que, tu sais, on est sur le territoire des Algonquins, puis c'est très vaste. On a partagé beaucoup ce qu'on vivait dans le territoire, ce qu'on vit encore à chaque jour avec notre communauté.

Je vais céder la parole à «kukum» Jeannette puis «mushum» Pierre pour faire la cérémonie d'ouverture, la prière d'ouverture de cette commission.

Le Président (M. Lafrenière) : Merci beaucoup.

Mme Brazeau (Jeannette) : Moi, je vais juste... Bonjour. J'espère que vous avez bien dormi hier soir. En tout cas, moi, j'ai bien dormi. Puis moi, je vais faire juste l'introduction de notre spiritualité, le rituel, puis mon «mushum», lui — mon «mushum», je l'appelle tout le temps mon «mushum» — il va faire la prière d'ouverture.

Au début, je vais commencer avec... Au début, moi, quand j'ai commencé la spiritualité... Avant de retracer ce chemin-là qui a été mis de côté, il faut que je dise aussi... Je suis une ex-pensionnaire. J'ai passé huit ans dans un pensionnat, puis la honte... Aujourd'hui, je ne veux plus porter de la honte. Au début, même dans ma communauté, j'avais honte de tenir une plume. J'avais honte d'avoir du tabac dans mes mains. J'avais honte de mon tambour, tout le rituel, les danses puis les chants.

Je vais juste faire une introduction, moi, pour la signification de la plume d'aigle. C'est très rare qu'un Anishnabe, il porte des plumes parce que plus souvent ça a été donné par un aîné pour la connaissance. Aussi, aujourd'hui, je vois beaucoup de jeunes qui retournent beaucoup dans le bois, mais ils trouvent des plumes d'aigle. La plume d'aigle, lui, il représente... c'est l'oiseau qui vole le plus haut, jusque... Comme on dit, c'est lui qui amène nos prières vers le Créateur, vers l'infini.

Nous honorons aussi la mère Terre, la mère Terre qui a toutes les nations, va marcher avec nous autres. «S» représente le lever du soleil, la naissance puis la race jaune aussi. Puis le Sud, il représente la nation anishnabe. Il représente aussi les «kukums», les «mushums». Puis l'Ouest, c'est la tombée du soleil. Il représente tout ce qu'on a porté dans notre journée. C'est de le laisser vers l'Ouest. Tous les fardeaux, ce que nous avons porté aujourd'hui, ils retournent vers l'Ouest pour pouvoir mieux se... pour alléger cette douleur-là. Puis l'Ouest, aussi, représente la race noire, mais représente aussi quand il y a un deuil dans notre communauté, où c'est là qu'ils retournent vers... C'est la vie du repos pour les personnes qui sont décédées. J'ai connu beaucoup de personnes qui sont décédées, qui sont parties vers le monde des esprits, ceux qui ont vécu des souffrances. Puis, au Nord, ça représente la médecine, une médecine blanche. Pour les «kukums», les «mushums», ça représente la sagesse.

Chaque animal aussi représente les quatre directions. Au Nord, c'est l'ours blanc, c'est vous tous aussi, les nations, la nation allochtone. J'aime mieux dire (s'exprime dans une langue autochtone). Mais je suis sûre qu'il y en a qui comprennent quand je dis le mot (s'exprime dans une langue autochtone). (S'exprime dans une langue autochtone), c'est vous autres, puis la sagesse aussi de nos ancêtres, les grands-parents de nos parents, qui nous ont laissé tout cet héritage de sagesse.

Les quatre... Nous avons tous un chiffre quatre qui représente aussi les émotions, le mental, le physique puis le spirituel. Alors, ça fait comme une roue, une roue à chaque jour.

La plume d'aigle, aujourd'hui, que je porte dans mes mains, ça, c'est l'équilibre. Il y a un chemin au milieu, l'équilibre, l'homme et la femme. Ce qui suit ici, c'est nos enfants, nos petits-enfants, nos arrière-petits-enfants. C'est ça que ça représente, la plume d'aigle. Alors, si je lève ma plume vers le Créateur, il va tout entendre notre prière.

• (9 h 40) •

Nous avons aussi quatre médecines. Le tabac, qui représente tous les remerciements... Quand je prends la médecine dans le bois, je vais mettre du tabac pour le remercier. Si un homme coupe un arbre, il va mettre du tabac au pied de l'arbre pour dire : Pardonne-moi parce que j'ai besoin... parce que je sers à quelque chose, mais je ne le coupe pas pour rien. Il y a le «sweet grass» aussi, l'herbe, le foin d'odeur, qui représente... ça, c'est les cheveux des grands-mères. On fait comme des tresses puis on allume ça. Puis c'est ça qui représente aussi notre médecine. Puis le «sweet grass»... C'est ça, le «sweet grass». Mais la sauge, elle représente comme la purification. Avec toute la honte, moi, que j'ai vécue, avec la sauge, aujourd'hui, je me dis : Pourquoi que Jésus, il prenait de l'encens dans les temples dans la Terre sainte, à Jérusalem? Bien, pourquoi un Anishnabe aussi, il ne le fait pas? Puis c'est ça, moi, ma compréhension, aujourd'hui, que j'ai retrouvée dans mes racines. Puis l'autre, c'est le cèdre, le cèdre qui représente beaucoup la médecine pour les femmes. On porte beaucoup de cèdre, nous autres. On utilise beaucoup de cèdre quand on fait des cercles de guérison, soit dans le rite à sudation ou quand on a besoin de médecine pour les bébés. En tout cas, c'est long à expliquer, mais le cèdre aussi, c'est une médecine.

Alors, je vous ai fait l'introduction un peu de comment est-ce que nous autres... partager, moi, notre spiritualité. Puis je vais laisser mon «mushum» ouvrir la prière d'ouverture, mais ça va être fait seulement qu'en algonquin. Mais je suis sûre que vous allez être inspirés, hein, Mushum? «Meegwetch.»

M. Papatie (Pierre) : Bonjour, content d'être ici à matin, content de faire l'ouverture de votre rencontre. La prière est très importante chaque matin. C'est une nouvelle journée, nouvelle expérience qu'on va apprendre aujourd'hui encore. Chaque jour, on prend de l'expérience. Chaque jour. Hier, c'était l'expérience d'hier. Aujourd'hui, on va... de l'expérience encore. J'espère que ça va être enrichissant. Moi, je le souhaite, parce que la prière, c'est très important. Chaque matin, quand tu te lèves le matin, tu te tournes vers l'Est, où est-ce qu'il y a le lever du soleil. Nos ancêtres faisaient ça quand ils se levaient. Ils faisaient face au soleil, dire merci, demandaient au Créateur qu'on puisse marcher sur la mère Terre comme on devrait marcher. C'est très important. Moi, je porte... parce que le ruban représente nos ancêtres. Il ne faut pas qu'on oublie d'où on vient. Nos ancêtres nous ont laissé les héritages, les enseignements, tout ce qu'on utilise aujourd'hui. C'est pour ça qu'on met toujours des rubans. Peu importe la couleur, ça représente nos grands-pères, notre mère, qui sont partis dans le monde des esprits. Aujourd'hui, quand je communique avec le Créateur, quand je demande au Créateur de nous donner, puisqu'on va marcher sur la mère Terre encore aujourd'hui, la force, j'utilise souvent ma langue pour demander au Créateur de nous aider. Même si vous ne comprenez pas, il n'y a rien là, utilisez votre manière de prier. Que tu sois catholique, utilise-le, c'est le même Créateur qu'on parle. On demande au même Créateur de nous donner la force aujourd'hui. (S'exprime dans une langue autochtone).

Mme Brazeau (Jeannette) : Je vais juste finir avec de l'eau. J'ai demandé à Adrienne, notre cheffe, pour faire la bénédiction de l'eau parce que les femmes sont importantes. Les femmes sont toutes porteuses de... Nous sommes toutes porteuses de l'eau. Nous avons porté notre bébé pendant neuf mois, puis c'est important d'avoir cet honneur-là. Nous autres, on le fait souvent à chaque cérémonie. «Meegwetch.» Bonne journée.

Le Président (M. Lafrenière) : Merci. On va suspendre deux petits instants pour laisser prendre place à nos premiers invités. Mais je demanderais, Kukum, Mushum, est-ce que vous voulez venir avec nous ici, en avant? Je pense que... Depuis tout à l'heure, on a dit qu'il fallait travailler ensemble. Ce serait intéressant de prendre une bonne photo ensemble aujourd'hui. Alors, venez avec nous. Le chef Gerry Mapachee, joins-toi avec nous. La cheffe de Kitigan Zibi, Monik, venez avec nous. On va prendre une photo de famille ici ensemble. Viens, Monik.

(Suspension de la séance à 9 h 49)

(Reprise à 9 h 55)

Le Président (M. Lafrenière) : Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la commission spéciale à la Maison du citoyen de Val-d'Or ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.

La commission est réunie afin de procéder aux consultations particulières et aux auditions publiques de la Commission spéciale sur l'exploitation sexuelle des mineurs.

Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire : Non, M. le Président, il n'y a aucun remplacement.

Le Président (M. Lafrenière) : Merci. Alors, encore une fois, merci au maire de Val-d'Or, à la cheffe du Conseil de la nation anishnabe. Kukum, Mushum, merci beaucoup pour l'ouverture que vous nous avez faite. Vous nous avez bien inspirés.

Nous allons commencer avec le premier groupe aujourd'hui. Alors, nous recevons le Service d'aide et de traitement en apprentissage social en Abitibi-Témiscamingue, SATAS. Alors, je vous rappelle que vous disposez d'une période de 20 minutes pour nous faire votre présentation. Commencez par vous présenter. Vous avez 20 minutes pour l'exposé. Et par la suite il y aura une période de 25 minutes d'échange avec les membres. Je vais commencer par vous dire merci beaucoup d'être avec nous aujourd'hui.

Service d'aide et de traitement en
apprentissage social (SATAS)

Mme Lessard (Chantal) : Merci beaucoup. M. le Président, les membres de la commission, mon nom est Chantal Lessard. Je suis directrice générale du Service d'aide et de traitement en apprentissage social, le SATAS. Mais le SATAS, ça va aussi. Pour le bénéfice des membres et du président, je suis également directrice d'une maison de transition, en fait d'un organisme qui s'appelle le centre résidentiel communautaire de l'Abitibi-Témiscamingue et du Nord-du-Québec. On appelle ça un CRC. C'est la seule maison de transition qui existe ici, en région. Celle qui est la plus proche après, c'est celle en Outaouais, ou à Saint-Jérôme, ou à Kangirsuk, au Nunavik. Donc, on accueille une population d'hommes judiciarisés pour des périodes de remise en liberté sous condition.

Le SATAS, en fait, on a été invités à la commission parce qu'on offre des services... Notre mission première, c'est d'offrir des services à des personnes qui ont des comportements violents en contexte conjugal, mais dans d'autres contextes aussi. Et, bien, qui dit violence dit violence sexuelle aussi. Donc, on traite... En fait, on ne traite pas, pour l'instant, la violence sexuelle, mais on fait de la prévention. Puis je vais vous expliquer pourquoi on ne fait pas de traitement actuellement au niveau de la délinquance sexuelle.

Je vais dire d'emblée que je suis intimidée par les membres de la commission, qui sont si nombreux. Je ne m'attendais pas à... Je ne sais pas, je n'avais pas figuré dans quoi je m'embarquais quand j'ai répondu oui au courriel. J'espère que vous avez reçu mon mémoire parce que je n'en ferai pas la lecture. En fait, j'ai plus le goût de le faire dans un exposé puis peut-être dans un échange par la suite. Je me suis pris des notes au fur et à mesure que je relisais mon mémoire, et donc vous n'avez pas tous les moments croustillants qu'on va aborder aujourd'hui par rapport à ça.

Juste pour conclure avec qui est le SATAS, on fait de la prévention, de la sensibilisation et du traitement au niveau des violences, l'utilisation de la violence sous toutes ses formes. Mais on fait aussi de la formation, des conférences. Et on est également instigateurs et coordonnateurs avec d'autres membres, dont la Sûreté du Québec, le CAVAC et une maison d'hébergement de la région... on est coordonnateurs régionaux pour le projet Rabaska, qui est un projet pour la prévention des homicides conjugaux. Donc, on est très impliqués dans notre milieu. On a développé un partenariat et une concertation très intéressante dans les dernières années.

Et, moi, ça fait huit ans que je suis directrice du SATAS et du CRC puis j'ai vu la concertation sur le territoire se développer et s'améliorer grandement. Puis pourquoi je dis ça? Parce que je vais faire des recommandations par la suite, au niveau des instances provinciales, par rapport à la concertation. Ce n'est souvent pas au niveau des régions, au niveau du plancher des vaches, que les problèmes de concertation se passent, mais plus au niveau des instances provinciales.

On existe depuis 1996, le SATAS, et on a éventuellement grandi à travers le territoire. On offre maintenant des services dans trois MRC, Val-d'Or, Rouyn et Amos. Faute de ressources financières supplémentaires, je ne suis pas capable d'offrir des services à La Sarre à temps plein. Donc, on y va de façon très... On y va aux deux semaines. Et je ne suis pas capable d'offrir des services au Témiscamingue à temps plein ou à temps partiel. Donc, clairement, le territoire n'est pas desservi actuellement en matière de traitement en prévention et sensibilisation à la violence sous toutes ses formes.

J'aurais trois caractéristiques majeures à vous faire part par rapport à l'offre de service que nous, on est capables d'offrir en matière de traitement de la violence. On est évidemment un très grand territoire. Vous en avez constaté l'étendue, ne serait-ce que juste pour y venir. Mais aussi on est un territoire qui est isolé des grands centres. Le Saguenay—Lac-Saint-Jean est à deux heures de Québec ou à peu près, je ne sais plus. L'Outaouais, bon, ce n'est pas une région, ils ont quand même des services, ils sont aussi près d'Ottawa. Donc, on est une des seules régions, peut-être avec la Côte-Nord, qui est aussi isolée des grands centres, avec la Gaspésie. Qu'est-ce que... Ah! O.K. Oui, là, on... Oui, c'est ça, hein, on se parle, on se comprend.

Ceci étant dit, pourquoi que je parle de l'étendue puis du caractère isolé... Oui, l'Ungava aussi.

• (10 heures) •

Des voix : Ha, ha, ha!

Mme Lessard (Chantal) : Ça me fait penser à un film où est-ce qu'elle dit que c'est comme... Puis là il faut qu'elle dise bonjour à tout le monde, parce que finalement... Je ne prétends pas être la seule à être isolée. Par contre, et là vous allez être d'accord avec moi, le fait d'être isolés nous oblige à avoir des services de généralistes mais nous oblige aussi à avoir des services spécialisés.

Donc, on est dans une dualité toujours et on essaie de répondre à l'ensemble des besoins tout en essayant de développer une expertise. Traiter la délinquance sexuelle, c'est une expertise. Traiter la violence conjugale, c'est une expertise. De mon point de vue et du point de vue de SATAS, ce n'est pas quelque chose qu'un généraliste qui fait de l'accompagnement psychosocial peut faire de façon pointue. Je ne dis pas qu'un intervenant psychosocial ne peut pas aider, soutenir quelqu'un qui présente une problématique de délinquance sexuelle ou de violence, mais ne peut pas traiter cette problématique-là.

On l'a vu avec la cérémonie d'ouverture, on en entend parler abondamment, on est un territoire où est-ce qu'il y a beaucoup de communautés distinctes au niveau autochtone. Le Témiscamingue a été majoritairement des communautés anglophones, donc on a le défi supplémentaire en Abitibi-Témiscamingue, et là je ne sais pas pour la Gaspésie puis l'Ungava, mais pour l'Abitibi-Témiscamingue, d'offrir des services bilingues. Ça, c'est une autre chose à tenir compte lorsqu'on parle de services ici, en région.

Et on a également des allochtones bilingues parce qu'on est très près des frontières... Des frontières! Mon Dieu, c'est intense, mon affaire! Bon, on connaît mes allégeances, maintenant. Mais je... On est près des lignes de l'Ontario, c'est ça que je voulais dire. C'est une frontière. C'est pour me détendre, là, que je fais ça, là, ce n'est pas pour... Bon.

On est principalement financés par le ministère de la Santé et Services sociaux à partir du Programme de soutien des organismes communautaires. Ça, c'est juste pour la petite histoire, mais on a aussi des ententes spécifiques avec le ministère de la Sécurité publique pour le volet prévention qu'on fait dans le milieu carcéral.

On a une entente spécifique aussi, depuis les cinq dernières années, de 23 000 $ en délinquance sexuelle avec le ministère de la Santé et Services sociaux. Pourquoi j'insiste sur le 23 000 $? C'est pour vous dire à quel point je n'ai pas beaucoup de sous pour mettre de l'avant un service de traitement en délinquance sexuelle.

Sans enlever absolument rien aux ressources et au vécu des victimes féminines, une partie de mon témoignage aujourd'hui va porter aussi sur l'absence, la quasi-absence de services pour les hommes qui ont été victimes d'agressions sexuelles, d'abus sexuels dans l'enfance. Et on le sait très bien puis les recherches le démontrent abondamment que, autant pour une victime féminine que pour une victime masculine, les conséquences à l'âge adulte sont très importantes et une grande partie des agresseurs sexuels à l'âge adulte ont été abusés dans l'enfance. Donc, si on ne donne pas de services à des jeunes hommes, des jeunes garçons qui sont victimes d'agressions sexuelles dans l'enfance, on porte flanc à une augmentation ou, en tout cas, à un passage à l'acte à l'âge adulte.

Actuellement, en Abitibi-Témiscamingue, à moins que je ne suis pas au courant des dernières nouvelles, mais en Abitibi-Témiscamingue, il n'y a que le CAPACS, en Abitibi-Ouest, qui est un CALACS, un centre d'aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel, qui offre des services pour les hommes victimes. C'est des choix d'organisation, c'est des organisations d'action autonomes. Ils ont le choix, mais je voulais saluer devant la commission le choix que le CAPACS a fait en Abitibi-Ouest puisqu'ils vivent aussi quelques conséquences d'avoir fait ce choix-là, tout comme à Gaspé... que le CALACS ont fait. Et donc nous, on veut commencer à collaborer aussi beaucoup avec le CAPACS pour pouvoir offrir des services de traitement, des services de prévention, des services d'intervention auprès des hommes et des jeunes garçons qui sont victimes d'agression sexuelle.

Un autre des points importants de ma contribution à la commission aujourd'hui, c'est de mettre de l'avant la concertation et le partage d'expertise, qui n'existent pas assez, en fait, entre les organismes qui viennent en aide aux hommes... principalement aux hommes. SATAS et CRC, j'offre des services aux deux sexes, mais j'offre des services principalement à des hommes. Donc, on a développé une expertise par rapport à l'aide aux hommes, et le CAPACS a clairement développé des services spécialisés auprès des victimes d'agression sexuelle féminines. Et nous, ce qu'on veut éventuellement, c'est de pouvoir partager cette expertise-là pour, d'une part, les outiller pour intervenir auprès des hommes, puis nous, pouvoir avoir l'expertise aussi au niveau des délits à caractère sexuel, des conséquences, et de partager nos expertises.

En Abitibi-Témiscamingue, actuellement, il n'y a pas de traitement pour les agresseurs sexuels, à part un psychothérapeute, à Senneterre, qui accepte de prendre des clients qui sont clairement délinquants sexuels. Je vous parlais d'expertise tantôt, c'est important, et on commence... le SATAS commence à offrir des services en prévention. Pourquoi on ne fait pas de traitement? Parce qu'on n'a pas, actuellement, les moyens financiers d'obtenir des psychothérapeutes. Le projet de loi n° 21, qui a été déposé il y a plusieurs années, a mis un cadre à la psychothérapie beaucoup plus restreint, et, en même temps, les sommes d'argent qui auraient permis aux organismes qui faisaient du traitement en délinquance sexuelle... n'ont pas suivi. Il y a beaucoup d'organismes qui n'ont pas été en mesure de s'ajuster.

Parce qu'embaucher un psychothérapeute, actuellement, je ne sais pas si vous consultez dans la vie, mais c'est entre 80 $, 90 $ à 150 $ de l'heure, et on ne parle même pas d'embaucher un psychothérapeute pour faire du groupe. Là, on tombe à 300 $ de l'heure. Donc, SATAS met de l'avant des stratégies, à partir de son 23 000 $, pour éventuellement développer des psychothérapeutes à l'intérieur de notre organisation, mais c'est un processus qui est très long parce qu'il n'y a pas de cours disponible à distance, on n'est pas en mesure de former et de... on n'a pas de psychothérapeute non plus qui accepte de venir superviser les personnes qui sont dans nos organisations pour pouvoir en faire des psychothérapeutes, éventuellement. Donc, c'est un travail de très longue haleine pour pouvoir en arriver là. Pour obtenir des services pour la délinquance sexuelle en Abitibi-Témiscamingue, il faut, à peu près, avoir été judiciarisé, puisqu'il y a les services correctionnels du Québec et les services correctionnels du Canada qui offrent des services de traitement à l'intérieur des murs, mais il n'y a rien au niveau du suivi en communauté par la suite.

Je suis généralement perçue, sur les tables de concertation, comme quelqu'un qui a une opinion et quelqu'un qui n'a pas beaucoup peur de la partager. C'est pour ça que je vous disais que j'ai été intimidée. Donc, peut-être qu'aujourd'hui je vais me garder une petite gêne, mais peut-être pas. L'exploitation sexuelle, à mon sens, l'exploitation sexuelle des mineurs, ou l'exploitation sexuelle point, mais là on est dans une commission spéciale pour les mineurs, ça fait partie d'un continuum de la violence. Je ne sais pas, l'objectif... c'est sûr que je ne connais pas à fond tous les objectifs puis les résultats que la commission a en tête, mais si ça découle sur un plan d'action ou si ça découle sur une politique ou... Ça serait intéressant de le voir comme dans un continuum. L'exploitation sexuelle des mineurs, ce n'est pas juste une question d'exploitation des mineurs, c'est une question de délinquance, de violence, c'est une question de crime organisé, de socialisation des garçons et des filles, c'est une question d'égalité, c'est une question de prévention des agressions sexuelles, d'éducation sexuelle, de famille, d'école. C'est une question de pauvreté, quand on sait qu'un des facteurs importants qui mène les femmes à la prostitution, c'est la pauvreté. Donc, ça fait partie d'un tout.

Dans une époque pas si lointaine — je pense que cette instance-là existe, mais que, dans les faits, elle ne se réunit plus — il y avait, jadis, un comité interministériel en matière de violence conjugale. Ça fait des années que ce comité-là ne s'est pas assis ensemble. Il n'y a pas d'instance provinciale, au niveau de la concertation entre les ministères, ne serait-ce qu'en violence conjugale. Donc, quand on parle d'exploitation sexuelle des mineurs, ce serait tout à fait pertinent d'avoir une instance comme non partisane aujourd'hui. Je vous félicite, d'ailleurs, les élus, d'être autour d'une même table pour un problème commun. Parce qu'en fait ce que je propose aussi dans mes recommandations, c'est qu'on...

• (10 h 10) •

Et là c'est utopique, là, mais moi, je suis une fille qui rêve dans la vie, là, et j'espère que ce n'est pas une utopie... mais moi, j'entends beaucoup, beaucoup de guerres entre les regroupements, que ce soit À coeur d'homme, la FEDE, le regroupement des maisons d'hébergement, alors que moi, sur mon territoire, je suis capable de m'entendre, de travailler. Ne serait-ce que dans le Rabaska, lorsqu'on a créé le projet Rabaska pour la prévention des homicides conjugaux, on n'a pas décidé de travailler en fonction d'une définition de la violence conjugale. On a décidé de travailler dans un objectif commun qui est sauver des vies.

Donc, si on se donnait un objectif commun, au niveau provincial, de faire cesser l'exploitation sexuelle, ou d'augmenter le sentiment d'égalité, ou, en tout cas, de... puis pas juste le sentiment, mais que le phénomène d'égalité entre les hommes et les femmes devienne une réalité, je pense que travailler dans un objectif commun, plutôt que dans une définition, ça pourrait être utile.

Pour répondre aux questions de la commission, parce que, là, il doit commencer à me manquer un petit peu de temps, j'ai... En matière de prévention, de sensibilisation et d'éducation, quelles mesures pourraient être employées auprès des jeunes et de leurs proches, des potentiels clients abuseurs et des acteurs indirects de l'exploitation sexuelle pour diminuer les risques d'exploitation? Je vais me permettre de juste énumérer mes recommandations parce qu'il me reste cinq minutes. Favoriser le changement social vers une plus grande égalité entre les sexes. Que dans les mesures gouvernementales de chaque loi, chaque politique tende le plus possible vers l'égalité. Dans nos organisations, nous, on a des valeurs, on a une mission, puis dans chacune de nos politiques, on essaie de faire transparaître nos valeurs et notre mission et on s'assure que tout ça est cohérent. Donc, je pense que, pour tendre vers l'égalité dans notre société, il va falloir que nos politiques le soient aussi.

Éducation sexuelle dès le primaire puis dans un programme-cadre qui est offert par des personnes qui sont compétentes et qui veulent le faire, pas par le prof de maths. Ce n'est pas par le prof de français, pas par le prof d'éducation physique. Sensibilisation des parents, dans les milieux de la petite enfance, milieux scolaires, sur les conséquences d'une socialisation conservatrice. Notre façon de socialiser les garçons et les filles est encore très conservatrice, et ça a des conséquences dévastatrices en matière de violence conjugale, de violence sexuelle, à plusieurs niveaux. Être en mesure de mieux dépister les violences sexuelles, donc de la formation. Développer des mécanismes de concertation entre les organismes. Développer des activités de prévention et de sensibilisation adaptées qui s'adressent plus spécifiquement aux hommes et aux jeunes garçons. Et voilà.

En matière de dépistage et de signalement, quelles mesures pourraient contribuer à une meilleure détection des victimes d'exploitation sexuelle? Les recommandations que le SATAS fait, c'est soutenir la formation des intervenants autant pour les victimes que les auteurs, soutenir financièrement les organismes dans le rôle qu'ils sont amenés à jouer dans la trajectoire des services en matière d'agression sexuelle et d'exploitation sexuelle; favoriser le transfert d'expertise dans les organismes; documenter et inclure le point de vue des hommes dans les modalités de sensibilisation, tant comme agresseurs que comme victimes de violence sexuelle; s'assurer que l'accessibilité des services pour les hommes ayant été abusés dans l'enfance soit présente.

En matière d'intervention, quelles mesures pourraient faciliter les démarches de suivi auprès des victimes? Commencez par utiliser ce qui existe déjà. Je pense qu'on n'a pas à réinventer la roue. Actuellement, dans les tribunaux, il y a des mesures qui existent, de façons de témoigner, par des paravents, par des vidéos, par l'accompagnement d'un... Ça va jusqu'à l'accompagnement d'un chien dans les salles de cour. Je pense que ce n'est pas partout qu'on l'utilise. Pour avoir discuté avec certains partenaires qui oeuvrent auprès des victimes, c'est quelque chose qui n'est pas utilisé dans tous les palais de justice ou qui n'est pas disponible. Moi, je pense qu'on ne devrait pas toujours réinventer la roue puis on devrait utiliser qu'est-ce qui est possible, qu'est-ce qui est disponible.

Contraindre ou inciter les proxénètes, les trafiquants, je ne pense pas que... bien, en fait, je ne le sais pas. Est-ce qu'augmenter les sentences... Est-ce que contraindre une personne à recevoir de l'aide... Bien, ça n'a pas fait ses preuves, à plusieurs égards. Moi, ce que je dis, c'est, comme directrice d'une maison de transition, injecter davantage d'argent en matière de surveillance, en matière d'accompagnement dans la communauté. On incarcère les gens, ça coûte des millions d'incarcérer des gens, alors que lorsqu'on les suit en communauté puis qu'on les suit de façon adéquate, ça a été démontré qu'un risque de récidive diminue. Mais les ressources en communauté sont clairement insuffisantes pour faire le travail.

Conduire les acteurs indirects à cesser d'alimenter la dynamique d'exploitation sexuelle. Je lisais un article justement, hier, de La Presse, au niveau d'une campagne qui avait été faite en Suède. Ça a pris 20 ans. Ils ont interdit l'exploitation sexuelle en Suède, ça a pris 20 ans pour faire ce changement-là, mais aujourd'hui les jeunes hommes qui ont été interrogés disent : C'est loser d'avoir recours à des services sexuels. Donc, il y a un travail de fond à faire au niveau de la sensibilisation, au niveau du changement social d'égalité et de perception de c'est normal d'utiliser des services sexuels. Il faut que ça change.

Mon Dieu! J'ai trop d'affaires à dire. Vous avez eu mon mémoire. Sérieusement, je terminerais, en fait, sur... Les façons de fonctionner actuelles, des fois, c'est comme on fait des plans d'action puis, à un moment donné, on se rend compte qu'il y a une mesure qui n'a pas été... Ah mon Dieu! on l'a oubliée, cette mesure-là puis là, tout d'un coup, on reçoit de l'argent ponctuel. En région, ça n'aide pas, les mesures ponctuelles. Il faut se casser la tête dans notre quotidien pour pouvoir avoir 5 000 $ pour pouvoir faire une action qui va durer l'année financière dans laquelle on nous demande de le faire.

D'essayer... en tout cas, d'essayer de penser les plans d'action en fonction des réalités de l'ensemble du Québec. Montréal a sa réalité, Gaspé a sa réalité, l'Abitibi a sa réalité. Pourquoi qu'on a toujours besoin d'avoir des trucs mur à mur? Je n'en ai pas autant d'immigrants en Abitibi-Témiscamingue qu'à Montréal. J'en ai, mais je n'en ai pas autant. Moi, en Abitibi-Témiscamingue, ce que j'ai besoin, c'est plus d'argent pour toucher plus de monde, pour toucher plus de territoire. Donc, c'est ça. Aïe! C'est trop... c'est bien trop vite, 20 minutes. Moi, je pensais que... C'est ça.

Le Président (M. Lafrenière) : Bien, merci, Mme Lessard. Mais il y a pire que ça, il va y avoir à répondre à des questions pendant 25 minutes alors que...

Mme Lessard (Chantal) : Mais ça, j'adore ça.

Le Président (M. Lafrenière) : ...j'ai déjà neuf questions d'enregistrées.

Mme Lessard (Chantal) : Est-ce que là je vais pouvoir dire des affaires que je n'ai pas dites?

Le Président (M. Lafrenière) : Oui. Le défi va être pour les députés. Je vous demande d'avoir des questions très courtes. On a déjà neuf questions d'enregistrées. On va débuter avec le député d'Ungava, s'il vous plaît.

M. Lamothe : ...je tiens à m'excuser. Quand vous avez parlé tantôt que l'Abitibi, c'était la région la plus éloignée... la pancarte, puis ça vient me chercher, ces choses-là, parce que... Juste une parenthèse, c'est que l'Abitibi-Témiscamingue a tendance à oublier l'Ungava beaucoup.

Mme Lessard (Chantal) : Je ne l'oublie pas.

M. Lamothe : Non. Bien, ce n'est pas... Ce n'est rien de personnel. Mais, par contre, c'est que l'Abitibi-Témiscamingue, c'est plus de 1 000 emplois, des gens qui viennent travailler chez nous, à Hydro-Québec ou dans les mines. C'est plus de 125 millions de retombées économiques, l'Abitibi-Témiscamingue. Puis ce n'est rien de personnel. Je tiens à m'excuser, tantôt, ça vient me chercher, ces choses-là, quand on oublie l'Ungava. Merci.

Mme Lessard (Chantal) : Bien, je vous partage tellement... Je sympathise parce que, quand Montréal oublie l'Abitibi-Témiscamingue, je suis dans la même situation. Mais on est sollicités beaucoup par... Là, l'Ungava, là, je ne sais plus qu'est-ce que ça comprend, là, mais, tu sais, moi, la Jamésie, on a beaucoup de demandes, et le Nunavik aussi pour des échanges de services.

M. Lamothe : C'est ça. L'Ungava, c'est le Nunavik, territoire cri, la Jamésie. Merci.

Mme Lessard (Chantal) : ...je sympathise, je... C'est bon. Ça me touche aussi, je suis une fille de région.

Le Président (M. Lafrenière) : Députée de l'Acadie.

Mme St-Pierre : Merci beaucoup, M. le Président. Merci pour ce témoignage passionné et passionnant. J'ai deux ou trois questions. Je vais essayer de faire vraiment rapidement parce que je sais que mes collègues aussi ont des questions importantes, et on veut vous entendre.

Vous ne faites pas de distinction, dans votre témoignage, entre les Premières Nations et la population, l'autre...

Mme Lessard (Chantal) : Les allochtones.

Mme St-Pierre : Les allochtones. Ça me frappe un peu, et hier soir, on a entendu des témoignages où on nous disait : Les solutions ne sont pas nécessairement vos solutions. Les solutions, les modes, la façon de travailler devraient être différentes. Pourquoi vous n'avez pas fait de différence entre le travail que vous faites auprès des Premières Nations et le travail auprès des allochtones?

• (10 h 20) •

Mme Lessard (Chantal) : Parce que j'avais juste 20 minutes, mais c'est inclus dans le mémoire que j'ai déposé. Quand vous demandez si on devait tenir compte des particularités, moi, je suis de l'école qu'il faut toujours tenir compte des particularités de toutes les clientèles.

Quand je disais qu'on ne peut pas être des généralistes et des spécialistes à la fois, c'est... en fait, on l'est, mais c'est ça qui est difficile. Moi, à Val-d'Or, j'ai une clientèle beaucoup plus importante au niveau autochtone qu'à Amos ou à Rouyn et je dois adapter... et je dois transformer, en fait... parce qu'on a tendance à vouloir toujours adapter nos services, mais, à travers la maison de transition, j'ai très bien appris qu'il ne faut pas adapter nos services, il faut transformer, il faut aller vers un traitement qui correspond vraiment à leur culture puis à leurs valeurs. D'ailleurs, on le fait, à la maison de transition, par le biais d'un projet qui s'appelle Horizon.

Mais, au SATAS, oui, j'en fais une, distinction entre les deux peuples, mais, comme je vous dis, c'est difficile, des fois, d'avoir à être spécialisé en violence puis, après ça, être spécialisé en violence en milieu autochtone. Donc, oui, il y en a une, différence entre les deux, oui, il y a une différence entre la victimisation du peuple autochtone et les victimes du peuple allochtone. Mais aujourd'hui j'avais envie de parler d'égalité, j'avais envie de parler de socialisation, j'avais envie de parler de quelque chose qui est beaucoup plus profond, en matière de changement social, pour en arriver à éradiquer la violence sexuelle.

Mme St-Pierre : Je voudrais savoir si vous avez eu, dans votre pratique — vous êtes criminologue — vous avez eu, dans votre pratique, des expériences qui pourraient être éclairantes et qui pourraient peut-être être transmises ailleurs au Québec, des exemples de types de thérapies ou de types d'interventions qui sont uniques ou que vous avez développés ici, sur le territoire, et qu'on ne connaît pas ailleurs?

Je vous demande ça parce que... Je vais faire ça très rapidement. J'étais journaliste, dans mon ancienne vie, et j'étais venue ici, il y a plusieurs années, faire un reportage sur la communauté qui avait décidé de se prendre en main par rapport à la violence et par rapport aux agressions sexuelles, et ils avaient développé un programme avec Portage. C'est un programme qui mettait en face à face la personne qui avait agressé et la personne qui avait été agressée. J'avais eu l'occasion de tourner ça et j'avais trouvé ça... d'abord, ça m'avait frappée énormément, et il semblait que, pour la communauté, c'était une façon vraiment d'avoir une véritable thérapie plutôt que d'avoir une peine d'emprisonnement, et ça a avait été, à l'époque, enfin, semble-t-il, entre guillemets, un succès.

Je me dis : Est-ce que vous avez des exemples à nous donner de types d'interventions qui sont uniques à la région et qui ont porté leurs fruits? Je comprends qu'il y ait des enjeux budgétaires, là, mais quand même.

Mme Lessard (Chantal) : J'en ai parlé, hein?

Mme St-Pierre : Oui, vous en avez parlé, alors on a bien compris.

Mme Lessard (Chantal) : Bon, uniques en région, présentement, je pense que qu'est-ce qui est unique en région, c'est d'avoir développé le programme PIVOT pour nous autres. Le programme PIVOT, c'est un programme de prévention de la délinquance sexuelle et ça permet à des hommes qui n'ont pas encore commis ou qui ont commis... puis on fait de la prévention de la récidive, à ce moment-là, de venir faire un programme avec nous. Encore là, c'est un programme de prévention, donc je ne peux pas aller très loin, je ne peux pas faire de l'intervention parce que je n'ai pas de psychothérapeute.

La maison de transition, nous, on veut aller vers un programme de justice alternative. C'est dans mes cartes pour les cinq prochaines années, et, clairement, on veut s'inspirer des cercles de guérison. On est dans la justice alternative, on est dans la justice réparatrice et c'est ce vers quoi on veut tendre. SATAS est en discussion aussi avec une étudiante à la maîtrise qui travaille au CAVAC. Donc, c'est pour vous montrer aussi que, sur le territoire, il y a beaucoup de collaboration qui se fait entre une ressource pour hommes puis une ressource pour les victimes. Donc, je suis en discussion avec une étudiante à la maîtrise pour développer peut-être un programme de justice réparatrice à partir du Programme PIVOT, à partir des délinquants sexuels auxquels nous, on a accès puis par rapport aux victimes d'agressions sexuelles, que la CAVAC a accès aussi.

Les traitements en délinquance sexuelle... puis, comme criminologue, moi, je l'ai inscrit dans mon mémoire, mais traiter un proxénète puis traiter un délinquant sexuel, c'est deux choses complètement différentes, je suis désolée. Pour moi, un proxénète, ça n'a pas un profil de délinquant sexuel. Ça a un profil de valeur criminelle, d'appât du gain, de personnalité antisociale. Quand on parle d'un homme qui consomme de la pornographie juvénile, qui fait des leurres informatiques... parce que je me référais à la définition que la commission donne de l'exploitation sexuelle, les deux délits qui se retrouvaient en exploitation sexuelle. Vous parliez de leurre informatique puis de, voyons... leurre informatique et de consommation de pornographie juvénile. C'est des gens qui se retrouvent actuellement dans notre Programme PIVOT, parce que, généralement, la première offense, ils n'obtiendront pas une sentence suffisante, hein? C'est épouvantable, ce que je dis, mais ils n'obtiendront pas une sentence suffisante pour pouvoir avoir un traitement soit à Percé, parce que, pour aller à Percé pour aller faire le PETRAAS, il faut avoir au moins 12 mois de sentence, puis là, si on a une sentence de plus de deux ans, là, on va obtenir un traitement par les services correctionnels du Canada.

Encore une fois, je le répète, mais il n'y a pas de maintien des acquis lorsqu'ils reviennent en région parce qu'il n'y a pas personne qui fait ce genre de travail là. Et on le sait que l'autosurveillance puis le maintien des acquis est un facteur très important, déterminant, voire essentiel pour la prévention de la récidive.

Le Président (M. Lafrenière) : Merci beaucoup. Députée de Gaspé.

Mme Perry Mélançon : Merci, M. le Président. Vraiment heureuse de vous entendre ce matin. Merci d'être là. C'est important de parler des réalités des régions qui sont plus loin puis qui doivent composer avec la distance aussi de l'offre de services. On pourrait en parler encore longtemps, juste du budget qui devrait être alloué à ça, là, d'être capable d'offrir le service sur tout le territoire quand on est situé à un endroit spécifique, donc...

Puis je tenais aussi à vous remercier d'avoir souligné le fait que certains CALACS ont perdu du financement parce qu'ils ont décidé d'élargir leur service, de l'offrir aussi aux jeunes garçons, parce que, pour moi, c'est une aberration. Je n'ai pas passé de message au gouvernement encore dans cette commission, mais je pense que celui-là, je vais le passer, parce que La Bôme-Gaspésie CALACS, ils sont dans cette situation-là. J'ai déjà sensibilisé la ministre de la Condition féminine là-dessus et je pense que ça, effectivement, il faut continuer à dénoncer ce manque de financement là.

Alors, vous avez parlé d'une maison d'hébergement, qui est un de vos partenaires, au SATAS, et j'aimerais savoir un peu votre vision là-dessus. Comment est-ce qu'on peut... tu sais, au niveau de la sortie des jeunes, que ça soit des garçons ou des filles, dans quel environnement on devrait les faire grandir ou les faire développer, là, pour finalement se sortir du trauma et d'avoir les soins nécessaires, là, pour vraiment ne pas retomber, là, dans cette situation...

Mme Lessard (Chantal) : La maison d'hébergement avec laquelle je travaille, c'est Alternative pour elles. C'est une maison d'hébergement pour les femmes qui ont été victimes de violence conjugale. Donc, c'est dans le cadre de mon mandat en violence conjugale que je collabore grandement avec Alternative pour elles. Mais, pour ce qui est des victimes d'exploitation sexuelle, puis là on va parler comme si on était une... bien, en fait, ça serait difficile, pour nous, d'avoir une masse critique pour avoir une ressource d'hébergement pour les femmes ou les hommes qui ont été victimes d'exploitation sexuelle.

Par contre, quand je parlais de pauvreté, tantôt, aider ces gens-là à sortir de la pauvreté, si c'est le cas, favoriser le retour à l'école, favoriser le retour sur le marché de l'emploi, l'accès à un logement... je fais du coq-à-l'âne, mais je parlais au maire Corbeil tantôt et je lui proposais un projet que la maison de transition veut mettre de l'avant à Val-d'Or, qui est un... tu sais, ça va être de l'hébergement pour notre clientèle qui est vulnérable. Je pense que des ressources comme la maison de transition, des ressources comme la maison d'hébergement Alternative pour elles pourraient avoir un volet violence sexuelle puis avoir, peut-être, un ou deux lits, trois lits de disponibles, spécifiques, pour ça, pour s'assurer qu'on... ces femmes-là, ces hommes-là sont...

Mme Perry Mélançon : Encadrés.

Mme Lessard (Chantal) : Je n'ose pas dire le mot «encadrés», mais entourés, dans un environnement sécuritaire, qu'ils ne soient pas toujours confrontés à leur milieu criminogène ou le milieu dans lequel ils seraient susceptibles de retomber; d'avoir la possibilité de consolider des décisions avant d'être reconfronté à son proxénète ou reconfronté à un risque de rechute, parce que la toxicomanie fait partie aussi des enjeux... mon Dieu, c'est concomitant, là, la prostitution... Là, on parle de prostitution, on parle d'exploitation sexuelle, on parle de plein de choses, mais moi, je pense que l'environnement sécuritaire, le fait d'avoir la possibilité de se concentrer sur cette guérison-là, c'est la clé. C'est ça, les maisons d'hébergement pour les victimes de violence conjugale, une des grosses... une des choses qui, en tout cas, qui m'apparaît la plus importante, c'est de ne plus avoir à se soucier d'autre chose que ma guérison. Je suis logé, je suis nourri, je suis dans un milieu sécuritaire, si j'ai perdu mon emploi ou je ne suis pas capable de travailler, je... tu sais, financièrement, on le sait, là, le stress financier d'avoir à s'occuper de tout ça. Donc, la maison d'hébergement vient combler les besoins de base, ce qui nous permet, par la suite, de se reconstruire. Mais ça prend des gens compétents dans l'expertise aussi pour que ces personnes-là, ces victimes-là, puissent se reconstruire.

Mme Perry Mélançon : Merci beaucoup. J'aurais eu une autre question, mais je sais qu'on est plusieurs, hein, en lice? Probablement, ça va être répondu avec les autres collègues.

Le Président (M. Lafrenière) : On a un beau défi. Je m'excuse. Merci beaucoup. Député d'Hochelaga-Maisonneuve. On va tenter de garder nos réponses les plus courtes possible, il nous en reste encore cinq en quelques minutes. Député d'Hochelaga-Maisonneuve.

• (10 h 30) •

M. Leduc : Merci. Bien, merci de vous être présentée aujourd'hui. Étant député d'Hochelaga-Maisonneuve, une circonscription particulièrement petite, là, qui se fait en 15 minutes est-ouest en auto, 20 minutes si on pogne quelques lumières sur la rue Ontario...

Mme Lessard (Chantal) : Elle est bien habitée, votre circonscription.

M. Leduc : Oui, bien habitée. Cependant, on fait face, nous aussi, parfois à des dossiers de pauvreté. Et vous l'avez évoqué. Là-dedans, il y a des groupes qui ont commencé à en parler, en particulier cette semaine. Est-ce que vous avez des pistes de solution? Parce que certains groupes faisaient référence au fait qu'on pourrait réfléchir à hausser les prestations d'aide sociale, par exemple, ou on a fait référence aussi à un parcours de sortie de la prostitution en France, qui offre des prestations spéciales aux femmes qui s'engagent dans ce parcours-là. Est-ce que c'est quelque chose sur lequel vous avez réfléchi?

Puis je pose une dernière, deuxième petite question en même temps, par rapport au financement. Vous avez évoqué... Donc, des fois, des projets particuliers, c'est difficile. D'autres groupes ont proposé de faire des projets sur au moins cinq ans. Est-ce que c'est quelque chose qui pourrait vous aider, ça aussi?

Mme Lessard (Chantal) : Oui. Bien, à la première question, je ne suis pas une experte de la pauvreté. Je ne suis pas une experte non plus du processus de sortie de la prostitution. Moi, j'interviens principalement auprès des auteurs de violence. Ça fait que c'est sûr que je vais laisser le CALACS répondre à votre question. Puis je n'ai pas assez d'expertise non plus au niveau du revenu minimum garanti. Tu sais, en tout cas, bref, j'en ai plein dans ma cour avant ça. Mais je vais laisser les autres experts dans la matière répondre.

Pour ce qui est des projets sur des plus longues périodes, moi, dans mes demandes de financement, dans mes négociations de contrats que je fais avec les ministères, c'est toujours ça que je mets de l'avant. J'essaie de signer des contrats de minimum trois ans pour être capable, bien, d'assurer mes ressources humaines, d'assurer une continuité de service, d'assurer surtout la continuité de service pour la clientèle. Moi, offrir un service que je ne suis pas capable... que je vais avoir deux, trois personnes qui vont venir puis qu'après ça je vais leur dire : Bien, je ne peux plus t'aider... parce que le temps d'implanter le service, le temps d'avoir des gens puis de leur donner un service, puis là les gens ont commencé à en entendre parler, puis là ils veulent le service, puis là je leur dis : Bien, je n'ai plus d'argent... Ça fait que, oui, je veux des contrats de cinq ans.

M. Leduc : C'est dit.

Le Président (M. Lafrenière) : Merci beaucoup. Député de Chomedey.

M. Ouellette : Merci, M. le Président. Merci d'être là. C'est rafraîchissant en ce début de journée.

Vous avez mentionné du crime organisé tantôt. Est-ce qu'on a une présence marquée du crime organisé, pas juste en Abitibi-Témiscamingue... Deuxième question, je vais vous amener au Témiscamingue parce que vous m'avez dit que vous étiez là de façon sporadique, probablement une question de ressources, là. Mais, en crime organisé, est-ce que c'est quelque chose qui est visible dans vos interventions?

Mme Lessard (Chantal) : Bien, dans une autre vie, j'étais agente de libération conditionnelle pour les services correctionnels du Canada, puis ça fait 16 ans de ça. Ça fait qu'on a vécu des périodes beaucoup plus intenses au niveau du crime organisé à Val-d'Or et au Témiscamingue. J'ai côtoyé, on s'entend, là, tu sais, des têtes dirigeantes, là... Mon Dieu! Mon char est dans le parking, mais...

M. Ouellette : Oui, mais vous êtes à Val-d'Or.

Mme Lessard (Chantal) : Tu sais, on s'entend, là, que ce n'est pas le même niveau de crime organisé à Val-d'Or qu'à Montréal, bon, mais ça reste du crime organisé, ça reste qu'il y a des têtes dirigeantes, ça reste... bon, et qui dit crime organisé dit bars de danseuses, dit escortes, dit plein... bon, dit exploitation sexuelle et éventuellement, probablement, d'implication de mineurs par rapport... danse ou autres, traite humaine.

Par le biais du fait que je suis directrice d'une ressource en réinsertion sociale, je sais que, dans mon service, SATAS, il y a des gens qui font partie du crime organisé ou, en tout cas, d'une organisation criminelle de trafic de stupéfiants. Bon, par contre, ils sont dans le service SATAS parce qu'ils ont des comportements violents, et violents en contexte conjugal la plupart du temps. Mais on sait aussi que, dans le crime organisé, la violence, c'est quelque chose qui est valorisé puis qui est mis de l'avant. En milieu carcéral, le SATAS offre des services de prévention de la violence, prévention de l'utilisation de la violence sous toutes ses formes. Et on avait inclus de façon systématique les gens qui avaient été arrêtés pour des délits qui faisaient référence à une certaine forme de crime organisé parce que, justement, au niveau des valeurs, ça faisait partie de ça.

M. Ouellette : On va parler de tourisme sexuel maintenant parce qu'on est à proximité de l'Ontario. Pour avoir oeuvré plusieurs années au Témiscamingue, dans la région de Ville-Marie, Notre-Dame-du-Nord avait beaucoup de tourisme sexuel par rapport à l'Ontario. Puis vous m'avez mentionné tantôt que vous devez dispenser, dans plusieurs communautés, des services bilingues, et vous avez certaines communautés, particulièrement au Témiscamingue, que c'est unilingue anglophone. Donc, ça me fatiguait un peu que vous me disiez que vous n'aviez pas des services à temps plein au Témiscamingue. C'est parce que le besoin n'est pas là?

Mme Lessard (Chantal) : Ah non! Le besoin est là. Le besoin est là. C'est juste que le SATAS a une vocation régionale. Par contre, moi, je reçois du PSOC, le Programme de soutien aux organismes communautaires, 258 000 $ par année. J'ai une coordination. J'ai un intervenant à Val-d'Or. J'ai un intervenant et demi à Rouyn. J'ai un intervenant à temps plein à Amos qui fait La Sarre et qui donne des services en détention. Je ne vois pas... Je n'ai pas les moyens financiers de louer un local, d'assurer un temps plein au Témiscamingue, puis, même encore, au Témiscamingue, je l'installe à Ville-Marie. Il y a une heure de route pour faire Témiscaming. Puis là il faut qu'il soit bilingue, puis il faut qu'il ait un bac, tu sais? Ça fait que c'est ça.

M. Ouellette : Et donc ils sont défavorisés.

Mme Lessard (Chantal) : Clairement, puis ils sont défavorisés... Non, je...

M. Ouellette : Non, vous pouvez le dire.

Mme Lessard (Chantal) : Bien, d'après moi, il y a des secteurs, il y a des MRC, dans notre région, qui sont plus défavorisées que d'autres, dont le Témiscamingue et La Sarre. Puis actuellement c'est des MRC que je ne suis pas capable d'offrir un service à temps plein. Mais je ne voulais pas parler de financement abondamment. Je voulais juste... Mais c'est ça.

M. Ouellette : Non, mais c'est la réalité puis, je pense, c'est important qu'on la connaisse aussi.

Mme Lessard (Chantal) : Et c'est pour ça que je fais des demandes de financement ponctuelles et c'est pour ça que je demande des financements qui sont sur plusieurs années, pour pouvoir consolider un financement au niveau du Programme de soutien aux organismes communautaires.

Le Président (M. Lafrenière) : Merci. Députée de Notre-Dame-de-Grâce.

Mme Weil : Merci beaucoup de votre présentation. Moi, ma question... On a eu le privilège hier de passer, donc, la soirée avec la nation anishnabe et on les a beaucoup écoutés. Puis je veux aller vraiment là-dessus pour voir ce que vous voyez comme solution. Moi, je résumerais ça comme... Ils voudraient qu'on inverse la pyramide, au lieu que ça soit nous, collectivement, les gouvernements, les deux paliers de gouvernement, les différents ministères, qui déterminent les besoins et amènent les solutions, que ça émane de la communauté et que nous, on puisse traduire tout ça en financement. Bon, alors donc, on va toucher le financement. Vous, dans le travail que vous faites, est-ce que... Et on a une approche, l'autre chose, par silo. Eux, c'est l'approche holistique. Donc, on voit tous les problèmes et toujours des disputes entre, bon, les deux paliers de gouvernement, et donc chacun qui tire la couverture vers son autonomie, son indépendance, sa juridiction, etc.

Est-ce que vous, vous avez l'occasion, donc, de travailler de près, quand vous touchez aux enjeux qui touchent particulièrement les autochtones, de cocréer, disons, les solutions qui sont adaptées à leurs besoins? Puis avec le financement... Vous avez très peu de financement. Puis on va regarder toutes ces questions-là. Mais, au-delà de financement, montants, je parle plus de vision et de politique publique, est-ce que vous avez l'occasion de travailler avec eux? Parce qu'eux, quand on parle d'expertise, ils nous ont dit et répété... et j'ai eu l'occasion de parler une heure avec une intervenante qui m'a expliqué cette expertise et les résultats qu'ils ont avec leur approche. Avez-vous l'occasion de travailler, comme ça, de près, avec eux pour amener des solutions qui ne sont pas nécessairement dans les critères de ces programmes? Et je comprends que vous avez des barrières. Et qu'est-ce que vous en dites?

Mme Lessard (Chantal) : J'en dis que je suis tout à fait d'accord avec eux, que la pyramide devrait être inversée pour les autochtones et pour les allochtones. Je trouve que notre participation ici aujourd'hui est formidable parce qu'on a l'occasion de vous parler de nos besoins. Puis j'ai l'occasion de vous dire comment le SATAS voit le financement ou voit une problématique en particulier. Je pense qu'on devrait partir des besoins. Puis on a un petit peu plus ces instances-là, au niveau allochtone, par la CROC-AT, là, le regroupement des organismes communautaires de l'Abitibi-Témiscamingue. Ils ont développé des mécanismes pour dire : O.K., là, il y a tant d'argent qui arrive par le Programme de soutien aux organismes communautaires, voici comment on va faire la distribution en fonction des besoins régionaux. Ça fait que cette instance-là existe un petit peu plus au niveau allochtone. Mais je suis tout à fait d'accord avec eux qu'on devrait identifier les besoins des communautés puis financer en fonction des besoins de communautés que... Mais moi, je suis de l'école des communautés autochtones ou allochtones, des communautés en général.

• (10 h 40) •

Mme Weil : Avez-vous eu l'expérience... Comme, traitement des abuseurs, on a même parlé de ça, puis ils ont... parce qu'ils travaillent avec les enfants très, très jeunes, et tout le long de leur parcours. Ils sont capables d'opérer un changement, éventuellement, beaucoup de patience, mais beaucoup de... Ils sont très assidus. Est-ce que vous avez eu l'occasion, dans vos mêmes programmes et vos approches, d'intégrer leurs approches et faire quelque chose ensemble ou est-ce que vous êtes contraints par les critères des programmes gouvernementaux?

Mme Lessard (Chantal) : Non, on n'a pas tant d'échanges. J'en voudrais plus. On n'a pas tant d'échanges sur l'expertise qu'ils ont dans leur communauté par rapport au traitement de leur communauté, par rapport, exemple, à la prévention ou au traitement de la délinquance sexuelle au Lac-Simon, ou à Pikogan, ou autre. Par contre, ça devient de plus en plus présent dans nos ressources. Nous, on a beaucoup plus d'échanges avec Pikogan parce qu'on est à Amos. Mes sièges sociaux sont à Amos, donc j'ai plus d'échanges. Tristement, on n'a pas tant d'échanges entre les communautés et mes ressources. Par contre, on fait partie des tables de concertation. Ça commence. C'est une relation de confiance qui doit se créer. On n'est pas encore là présentement, mais j'y crois.

Puis en même temps je trouve que l'approche des Premières Nations, des autochtones, l'approche holistique, l'approche globale est beaucoup... Moi, j'adhère beaucoup plus à ça que dans des créneaux très, très spécifiques. Une problématique de toxicomanie, une problématique de délinquance sexuelle, une problématique de valeurs criminelles, ce n'est pas juste une affaire, c'est un traitement de la personne au complet. Donc, l'approche holistique me parle beaucoup. À la maison de transition, on est rendus là. On a embauché une ressource qui est vraiment dédiée à la communauté autochtone dans le projet Horizon . Puis c'est en collaboration avec les services correctionnels du Canada que j'ai pu développer ce projet-là. Et ça donne des résultats vraiment formidables. Puis je me suis rendu compte que le fondement de ce projet-là, moi, je pensais que c'était la sécurisation culturelle, c'était d'offrir un milieu sécuritaire pour la clientèle qui venait chez nous, puis finalement je me suis rendu compte que le fond de ce projet-là, c'est la réconciliation. Puis, à tous les jours, je me rends compte à quel point on a à aller vers eux puis qu'on s'attend à ce que ce soit eux qui viennent vers nous. Je vis des affaires vraiment, vraiment extraordinaires à travers ce projet-là.

Mme Weil : Excellent. Merci.

Le Président (M. Lafrenière) : Merci beaucoup. Députée de Les Plaines.

Mme Lecours (Les Plaines) : Merci beaucoup, M. le Président. Vous avez parlé de coordination, en fait de manque de coordination. Ce n'est pas la première...

Mme Lessard (Chantal) : Concertation.

Mme Lecours (Les Plaines) : De concertation. Ce n'est pas la première fois qu'on en entend parler. Vous, vous dîtes que ce devrait être les instances provinciales qui organisent... Est-ce que j'ai bien compris?

Mme Lessard (Chantal) : Non. Moi, ce que je dis, c'est que je pense... Ma perception, c'est qu'au niveau provincial il y a un manque de communication puis il y a un manque de... Les gens se battent sur une définition plutôt que se mettre ensemble dans un objectif commun. C'est ça que je dis.

Mme Lecours (Les Plaines) : Entre les différents ministères, là où il y a des programmes...

Mme Lessard (Chantal) : Entre les différents ministères. Mais en fait je parlais de regroupements parce que, pour ce qui est des ministères, c'est un petit peu lointain pour moi, qu'est-ce que chaque ministère pense, là. Moi, je vous parle de la table de concertation de Montréal. Je vous parle des regroupements pour les maisons d'hébergement, la FEDE, À coeur d'homme. Je vous parle de... Moi, ce que je dis, c'est qu'au niveau... Moi, dans ma région, ce que je vis n'a rien à voir avec ce que j'entends au niveau provincial, puis, pour moi, ça ne fait pas de sens que ça... En fait, j'ai l'impression que le changement au niveau de la concertation puis du partenariat va se faire par la base, alors que j'aimerais ça, être inspirée par les instances gouvernementales puis par les instances provinciales qui regroupent les organisations comme moi.

Mme Lecours (Les Plaines) : Et, quand vous parlez du partage d'expertise qui est absent, ce n'est pas dans la région, c'est entre régions? C'est ce que je comprends?

Mme Lessard (Chantal) : C'est dans la région. C'est au niveau provincial aussi. Je pense qu'on aurait avantage à se trouver un objectif commun, à se trouver un langage commun pour pouvoir partager nos expertises. Puis moi, je parle à travers le projet Rabaska, où est-ce que... Il y a cinq ans, là, le SATAS, s'asseoir avec les maisons d'hébergement, ça n'existait pas, et maintenant ça existe, puis on se parle presque à tous les jours. On collabore dans un objectif de protéger des gens, sauver des vies puis aider les gens qui sont des auteurs de violence. Puis c'est ce changement-là que je pense qui... Moi, je trouve que c'était assez révolutionnaire dans les cinq dernières années. Moi, je n'avais pas vu ça avant, en concertation puis en partenariat, sur mon territoire, avant ce projet-là.

Mme Lecours (Les Plaines) : O.K. Je trouve ça intéressant parce qu'effectivement on a entendu plusieurs belles initiatives. Et est-ce qu'on doit dédoubler tout ça? Ça, c'est l'autre question, là. Mais je vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Lafrenière) : Merci beaucoup. Deux dernières questions, rapidement, députée de Roberval.

Mme Guillemette : Merci, M. le Président. Je trouve ça très intéressant, le côté que vous apportez, des hommes. Il y a des services pour les hommes judiciarisés. Pour un homme qui n'est pas judiciarisé et qui voudrait recevoir des services, est-ce qu'il y a quelque chose de formel?

Mme Lessard (Chantal) : Bien, actuellement, je suis capable d'offrir à Amos seulement le programme PIVOT, qui est offert gratuitement puis qui est offert à une clientèle volontaire. Mais, pour le reste, l'homme doit se présenter en CLSC ou dans un cabinet privé. Et on n'est pas à la même place, exemple, que d'autres pays en Europe où est-ce qu'ils ont mis... Actuellement, ici, si un homme va dans des services puis il dit qu'il a des fantasmes au niveau du passage à l'acte sur un enfant, le psychothérapeute est obligé de le dénoncer. Donc, cette protection-là, c'est correct dans le sens que je pense qu'il y a une discussion à y avoir par rapport à ça. Mais le fait d'avoir cette épée de Damoclès sur la tête, l'homme n'ira jamais dire ça.

Puis en même temps les services publics, ils sont capables de faire jusqu'à un certain point... Il y a des listes d'attente pour voir un psychothérapeute ou pour voir un travailleur social dans nos réseaux publics. Et on le sait, que, bien, dans les 10 dernières années, il y a eu beaucoup de travaux, il y a eu beaucoup de discussions autour de l'aide aux hommes. Je pense que c'est moins lointain. Maintenant, si je vous dis que la demande d'aide chez les hommes est très difficile... Donc, avant qu'un homme se rende au CLSC pour dire à la madame à l'accueil ou au monsieur à l'accueil... de dire : Moi, j'ai besoin d'aide parce que j'ai des pensées qui me font peur par rapport à un passage à l'acte... On n'est pas rendus là, là.

Puis nous, SATAS, on a élargi, sur le territoire, entre autres, de La Sarre ou ailleurs, des fois, notre service en violence conjugale à de la relation d'aide pour des clients qui avaient des pensées puis qui avaient un risque de passage à l'acte, puis on a essayé de les diriger le mieux possible vers des ressources spécialisées, mais ces ressources-là n'existent pas.

Le Président (M. Lafrenière) : Merci beaucoup. Dernière question, député de Viau.

M. Benjamin : Merci, M. le Président. Merci pour votre présentation. Donc, ce matin encore, la cheffe du Conseil de la nation anishnabe nous a rappelé qu'elle a quatre générations à guérir. Et merci, dans votre présentation, de nous avoir rappelé que les particularités régionales sont nécessaires. Et, moi, quand je suis arrivé ici, depuis hier, une des choses que j'ai observées, c'est... Une des grandes particularités de cette région, je crois, c'est les enjeux, dans le continuum dont vous avez parlé tout à l'heure, auxquels font face les Premières Nations. Et une de vos recommandations, et j'aime toutes vos recommandations, mais il y en a une en particulier : s'assurer de l'accessibilité des services pour les hommes ayant été abusés dans l'enfance. Lorsqu'on connaît la réalité des Premières Nations, lorsqu'on connaît aussi les obstacles que, par exemple, la communauté, par exemple, de Lac-Simon... est-ce qu'il y a une possibilité, toujours dans cette perspective de particularité régionale, d'amorcer... je veux bien que l'enjeu des ressources soit un enjeu gouvernemental, la disponibilité des ressources, mais une réflexion afin que cet enjeu de particularité régionale puisse prendre en compte aussi que le... qu'il puisse... non seulement un dialogue, mais des besoins aussi de ces communautés-là? Donc, où est-ce que vous en êtes dans cette réflexion-là?

Mme Lessard (Chantal) : Dans la réflexion de l'accès aux ressources pour les hommes?

M. Benjamin : De l'accès aux ressources pour les hommes, et notamment pour des communautés. Donc, je fais référence au Conseil de la nation anishnabe, donc, qu'on a rencontré hier, donc, et ça peut être aussi d'autres communautés qui, aujourd'hui, ne se retrouvent pas, n'ont pas accès à ces ressources-là. Je sais que la difficulté des ressources, elle est globale pour l'ensemble du milieu communautaire. Mais qu'est-ce que vous pensez par rapport à cet enjeu?

• (10 h 50) •

Mme Lessard (Chantal) : De ma perception, j'ai l'impression... Puis je ne suis pas en train de dire qu'ils ont full ressources, là, mais j'ai l'impression que les hommes anishnabe, les hommes au Lac-Simon, ou à Pikogan, ou à Kitcisakik... j'ai l'impression qu'ils ont accès davantage à des services d'aide, en tout cas, à une écoute, à une reconnaissance des impacts de leur victimisation par le passé, que dans le milieu allochtone, et de là l'importance, pour SATAS, éventuellement, comme Mme Will...

Mme Weil : Weil.

Mme Lessard (Chantal) : ...Weil, excusez-moi, le disait, l'importance du partage d'expertise parce qu'ils ont développé des choses au niveau du traitement pour les hommes qui ont été victimes, de là l'importance du partage entre les ressources allochtones et autochtones. Mais la prise en charge, la reconnaissance, l'empathie que ces hommes-là ont été victimes et que ces hommes-là ont besoin d'aide, ma perception, c'est que, dans les communautés, cette empathie-là, cette reconnaissance-là est beaucoup plus importante et que ces hommes-là sont pris en charge lorsqu'ils le souhaitent. Peut-être que je me trompe.

Le Président (M. Lafrenière) : Je vous remercie pour votre contribution aux travaux de la commission.

Je vais suspendre quelques instants, le temps de laisser le prochain groupe prendre place. Merci infiniment. Merci.

(Suspension de la séance à 10 h 51)

(Reprise à 11 h 2)

Le Président (M. Lafrenière) : Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants du CALACS-Abitibi.

Mais, avant de vous laisser faire votre présentation, tout à l'heure, j'ai souligné la présence de plusieurs personnes qui étaient dans la salle et j'ai fait un impair incroyable, j'ai oublié de saluer M. Jacques Harnois, M. Harnois qui est du bureau du ministre Pierre Dufour. Alors, merci beaucoup d'être avec nous pendant nos travaux.

Une voix : ...

Le Président (M. Lafrenière) : J'ai corrigé tout ça. Merci. Merci d'être avec nous aujourd'hui.

Alors, pour les représentants du CALACS-Abitibi, je vous rappelle que vous disposez d'une période de 20 minutes pour faire votre présentation. Vous allez commencer en vous présentant vous-mêmes, nous faire votre exposé. Et par la suite, avec les membres de la commission, il y aura une période d'échange pendant 25 minutes. Encore une fois, merci d'être avec nous aujourd'hui.

Centre d'aide et de lutte contre les agressions à caractère
sexuel Abitibi (CALACS-Abitibi)

Mme Bélisle (Josée) : C'est moi qui vous remercie. Je vous remercie réellement de vous être déplacés en région. C'est vraiment rare qu'on a la chance d'exprimer notre vécu, nos besoins, ce qui se passe chez nous.

Moi, je m'appelle Josée Bélisle, je suis intervenante communautaire depuis 30 ans. Je suis coordonnatrice administrative au CALACS-Abitibi. Et là je vais commencer en vous disant que, si ma collègue Chantal Lessard était intimidée, tantôt, c'est incroyable ce que je le suis, parce qu'effectivement elle est reconnue pour avoir le parler assez facile. Un peu moins, moi. Par contre, l'avantage que j'ai de passer derrière Mme Lessard, c'est que je vais essayer de ne pas être redondante. J'ai écouté les recommandations de Mme Lessard, et sincèrement nous aurions pu les cosigner tellement elles sont cohérentes avec ce que nous, on voudrait recommander.

Alors, vous avez aussi entendu mes partenaires du regroupement québécois des CALACS, les centres d'aide pour les victimes d'agression sexuelle. Là aussi, je vais faire attention pour ne pas répéter nécessairement ce que vous avez déjà entendu. Donc, ça ne sera pas une présentation aussi exhaustive que vous venez de recevoir. Je vais quand même m'attarder plus particulièrement à ce qui se passe en région.

Donc, je disais que ça fait 20 ans que je suis dans les CALACS. Je travaille avec une clientèle principalement de femmes, malgré qu'on reçoit chaque année deux à trois demandes d'aide de la part des hommes. Évidemment, moi, je suis mère de quatre garçons, alors on ne ferme pas la porte aux hommes. Par contre, étant donné qu'on a été créés par et pour des femmes, on n'est pas la ressource principale pour leur venir en aide. Alors, ce qu'on va faire, c'est qu'on va les recevoir, quand vous cognez dans un CALACS, vous cognez toujours à la bonne porte, on les reçoit et on va travailler avec nos partenaires pour leur offrir vraiment des services qui soient plus adaptés à leurs besoins.

Alors, l'Abitibi, c'est une région gâtée en frais de CALACS. On est très chanceux, on a cinq CALACS, dont un en émergence au Témiscamingue. Ce n'est pas cinq CALACS qui sont financés de façon équitable, là, et de façon... pour être fonctionnels. Entre autres, La Sarre et Amos ont encore la moitié du financement des CALACS de Rouyn et Val-d'Or.

J'ai travaillé à Val-d'Or pendant plusieurs années. Ça a été une belle période, mais aussi une période beaucoup plus rock-and-roll en termes de travail auprès des victimes. Val-d'Or, ça bouge. D'ailleurs, il y a une particularité, à Val-d'Or, qui est intéressante, c'est qu'elles ont un projet, qui va se terminer dans... je ne pourrais pas vous dire combien de temps, mais pour travailler spécifiquement auprès des femmes en prostitution, en fait, pour les aider dans la sortie de prostitution. Alors, ça, c'est rare qu'il y ait des projets comme ça en région. Et ces femmes-là ont aussi des projets de travail en collaboration avec les premiers peuples. Alors, c'est quand même un CALACS qui est très proactif et collaborateur, tu sais, auprès de cette population-là.

Je vais boire de l'eau, je vais essayer de me calmer. Ça se peut que je regarde un peu mes feuilles au début. Ça va m'aider.

Le Président (M. Lafrenière) : Tout se passe très bien.

Mme Bélisle (Josée) : Oui. Alors, il y a quelques années, j'ai suivi une formation sur l'accompagnement des victimes d'exploitation sexuelle et l'accompagnement des intervenants aussi. C'était une formation qui était offerte par l'UQAM grâce à un fonds du ministère de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur. J'ai toujours été très préoccupée par cette problématique-là. Je vais parler sans choix, quelquefois, de prostitution, d'autres fois d'exploitation sexuelle, puis, pour moi, c'est important d'utiliser les bons termes parce que je travaille beaucoup avec des... pas nécessairement les bons termes, mais les deux termes, parce que je travaille avec des jeunes adolescents et qu'ils ont besoin d'entendre les mots, ils ont besoin que ça fasse une image pour eux.

Donc, j'ai aussi fait partie du comité provincial qui a élaboré le modèle de services intégrés pour intervenir auprès des femmes en sortie de prostitution. Évidemment, ma participation visait à mettre en lumière les préoccupations spécifiques à notre région. En 2015, j'ai participé à la recherche sur le portrait de la prostitution en Abitibi-Témiscamingue, qui a été menée en collaboration avec l'UQAT et un organisme, qui s'appelait le Gîte L'Autre Porte, qui a été mis sur pied spécifiquement pour soutenir les femmes en sortie de prostitution. Malheureusement, faute de financement récurrent et faute de financement tout cours et d'épuisement des bénévoles et militantes qui souhaitaient mettre sur pied cet organisme-là, il a dû fermer. Mais le portrait existe encore, et d'ailleurs vous pouvez le retrouver sur Internet si vous écrivez «portrait de la prostitution en Abitibi-Témiscamingue, des services existants et les besoins des femmes et des filles au moment de la sortie».

Alors, évidemment, je suis aussi membre de la table régionale de concertation en agression sexuelle et violence conjugale. Il y a six ans, j'ai fait une tentative, on a demandé un fonds à Condition féminine Canada pour mettre sur pied un projet qui visait le... il y a six ans, pour mettre sur pied un projet qui visait à réseauter les intervenants du réseau du communautaire, de la justice, et l'objectif de ce projet-là était de se faire une analyse et de développer une expertise concertée en matière d'exploitation sexuelle des jeunes. On ne parlait même pas, à ce moment-là, de prostitution adulte. Malheureusement, ce projet-là devait durer trois ans, puis on a dû y mettre fin. On a dû y mettre fin, je pense, parce qu'on était trop avant-gardistes. Nos partenaires ne voyaient pas du tout, à leurs yeux, de situation de prostitution en Abitibi-Témiscamingue, alors on avait beaucoup de difficulté à aller chercher les partenaires et à bâtir cette concertation. On a décidé d'y mettre fin parce que c'était trop compliqué.

• (11 h 10) •

J'ai aussi eu un projet, cette fois-là, qui venait du ministère de la Sécurité publique, qui était pour travailler auprès des jeunes filles qui ont subi de la violence sexuelle dans l'enfance et qui visait à contrer la délinquance et, vraiment, la délinquance subséquente à la violence sexuelle qu'elles ont subie. Ça a été un projet qui a été très intéressant, qui a duré trois ans, qui m'a permis d'avoir des groupes de soutien auprès de ces jeunes filles-là. À ce moment-là, on parlait vraiment de jeunes filles qui étaient victimes d'agression sexuelle dans l'enfance. Ça a été toute une surprise pour moi, sur les deux groupes que j'ai pu monter, de constater qu'il y avait à peu près la moitié de celles-ci qui avaient déjà été mises en situation d'exploitation sexuelle. Alors, c'était nouveau pour nous. On a dû vraiment essayer de comprendre davantage cette problématique-là, d'en parler avec les jeunes, et ça a été super intéressant.

Lié à ce projet-là, il y avait tout un volet de prévention scolaire qu'on faisait à Lac-Simon, qui est une communauté autochtone, vous en avez entendu parler. Je vais prendre une gorgée d'eau. Donc, pendant trois ans, on a fait la prévention des agressions à caractère sexuel à Lac-Simon. La première année, on s'est rapidement rendu compte que nos façons de faire, nos outils, les solutions qu'on leur proposait n'étaient pas du tout adaptés. Il faut comprendre qu'on a des petites communautés. Là, je vous parle de communautés autochtones, mais la même chose se passerait probablement si on avait une école secondaire dans un petit village. Tout le monde se connaît, les jeunes qui sont dans les groupes, les classes, ont grandi ensemble. Alors, dans une classe, je peux retrouver une victime, je peux retrouver un adolescent qui a commis des actes à caractère sexuel, je peux retrouver la blonde de cet agresseur-là. Alors, quand on arrivait, il y avait comme un silence complet qui s'installait, des capuches qui se levaient sur les têtes. Et puis on a dit : Écoute, on ne peut pas continuer comme ça, on leur fait vivre une revictimisation, on les indispose. C'est très intrusif, parler de violence sexuelle, alors c'est encore plus intrusif pour ces jeunes-là.

Tu sais, on est des étrangers, on est allochtones. Souvent, le contact qu'ils ont eu avec nos populations blanches a été des contacts d'enseignants, de policiers, de travailleuses sociales, qui étaient toujours en lien d'autorité. Donc, on a réalisé que ça ne marchait pas bien.

On a rencontré, par un heureux hasard, un monsieur, je ne nommerai pas son nom parce que je ne sais pas où est-ce qu'il est rendu maintenant dans la vie, qui était intervenant à l'école Amik-Wiche, à ce moment-là, qui nous a proposé de faire les choses différemment. Il nous a dit... il m'a dit, parce qu'en fait c'était moi : Ces enfants-là ne savent pas ce que leurs parents ont vécu. Ils savent que... tu sais, ils ont vaguement connaissance que leurs parents ont vécu des choses difficiles, mais ils n'en parlent pas, ils n'en entendent pas parler. Alors, si on essayait de passer par ce chemin-là pour les toucher? On a changé la configuration de la classe, on a assis les jeunes en cercle, puis ce monsieur-là a parlé de son expérience personnelle à lui, à travers les pensionnats, les conséquences que ça a eues sur sa propre vie, et tout d'un coup on a vu des grands yeux s'ouvrir. On a senti un intérêt de la part de ces jeunes-là et on a pu combiner nos façons de... notre approche, nos savoirs, tiens, je dirais. On a pu combiner nos savoirs de façon à offrir à ces jeunes-là une prévention, mais qui soit sécuritaire au niveau affectif, qui soit sécuritaire... Donc pour moi, la collaboration entre le peuple autochtone et le peuple allochtone, elle est essentielle si on veut toucher ces jeunes-là.

Autre particularité que je remarque en prévention... parce que ça fait des années, là, j'ai fait de la prévention en violence conjugale, je la fais maintenant en violence sexuelle, mais autre constat qui est assez significatif chez nous, c'est... on a un programme de prévention provincial qui inclut un atelier spécifique sur l'exploitation sexuelle. Et, si nos jeunes commencent à reconnaître plus aisément, plus facilement la violence sexuelle, quand on aborde le terme d'exploitation sexuelle, on les perd totalement. On les perd dans le sens où ils ne voient pas la prostitution, l'exploitation sexuelle comme étant une forme de violence que les jeunes subissent, peu importe... On a fait des tentatives de mettre la victime très jeune, là : À 12 ans, elle a reçu de l'argent pour des photos nues, est-ce que vous croyez que c'est de l'exploitation? Et pour eux autres, dès lors où il y a l'échange de biens, d'argent, il y a comme une notion de consentement, et c'est très difficile de les amener à voir la violence qu'il y a derrière ce phénomène-là.

Donc, c'est d'une importance, moi, je pense, capitale que notre message social soit le même, qu'on parle de prostitution adulte ou prostitution chez les jeunes. Parce que le message qu'ils reçoivent, ces jeunes-là, c'est qu'il peut être légitime de se prostituer, que ça peut être un travail que d'avoir accès à du sexe tarifé pour les hommes. C'est correct tant qu'on a plus de 18 ans puis, quand on a moins de 18 ans, ça devient de l'exploitation sexuelle. C'est très difficile comme concept pour ces jeunes-là. Alors, je pense que c'est important que notre message, il soit clair, qu'il soit le même. Et d'ailleurs la réalité, moi, je le constate, je travaille avec des femmes qui ont un vécu en lien avec la prostitution et avec des jeunes filles aussi, qu'est-ce qui les amène à la prostitution, c'est souvent les mêmes choses, et les facteurs de maintien sont souvent les mêmes aussi.

Je ne sais pas combien il me reste de temps.

Le Président (M. Lafrenière) : Il vous reste cinq minutes.

Mme Bélisle (Josée) : Il y a des choses que je tenais à vous dire sur l'Abitibi. Je vous ai dit tantôt : On a la chance d'avoir cinq CALACS, des intervenantes qui sont formées spécifiquement pour travailler auprès des jeunes. Moi, chez moi, j'ai une coordonnatrice des services à la jeunesse. Elle est dans la vie de ces jeunes-là en milieu scolaire, elle est dans les activités, les sorties, les événements. Donc, les jeunes la voient, la côtoient pour différentes raisons. Ça devient une personne qui est significative pour eux et à qui ils peuvent se référer, et ils se sentent en sécurité de se référer à elle. Malheureusement, comme mes collègues d'avant, ce sont des projets. Je l'ai encore pour un an, puis après ça tous les efforts qu'on aura faits seront à recommencer. Le projet de prévention en milieu autochtone, on commençait à le développer, on avait un bon travail de collaboration, c'était un projet de trois ans. Je ne sais plus ce qu'il en est aujourd'hui. Je ne sais même pas... peut-être que les personnes du Lac-Simon pourront vous le dire, je ne sais pas s'il y a encore de la prévention scolaire en agressions sexuelles qui est faite à l'école secondaire et primaire.

Donc, il y a une réalité aussi. Ce que ça prend, en fait, pour qu'il y ait de la prostitution, pour qu'il y ait de la prostitution qui s'organise, c'est un groupe de personnes qui a de l'argent pour payer. On a ça en Abitibi : chez nous, les hommes gagnent des bons salaires. Ils partent sur des runs, ils reviennent, ils ont de l'argent. Ça prend aussi une population qui subit davantage de facteurs de vulnérabilité. On a ça aussi en Abitibi : les communautés autochtones, mais aussi plein d'autres facteurs de vulnérabilité. Et ça prend une pauvreté financière... ça prend des gens qui ont besoin d'argent, tu sais? En Abitibi, on a le taux le plus élevé de différence de revenu salarial chez les hommes et chez les femmes. Je pense qu'au niveau provincial les femmes ont à peu près 74 % du revenu des hommes; chez nous, en Abitibi, c'est 59,9 % du revenu des hommes. Donc, nos femmes en Abitibi gagnent moins, sont plus dépendantes financièrement de leurs conjoints.

Ça a des conséquences à plusieurs niveaux. Vous allez remarquer que le taux de violence conjugale en Abitibi est beaucoup plus élevé qu'ailleurs aussi. Si je vous parle de violence sexuelle, l'Abitibi-Témiscamingue a le taux le plus élevé d'agressions à caractère sexuel chez les moins de 18 ans, et ce taux est plus du double du taux provincial. Puis là je vous parle des jeunes. Si je vous parle des adultes, on est la deuxième région qui a le taux le plus élevé de dénonciations, on s'entend, l'autre région étant la Côte-Nord. Donc, c'est sûr qu'en termes de personnes il y a moins de personnes, mais en termes de taux, c'est des problématiques qui sont très présentes.

• (11 h 20) •

Alors, ce qu'on remarque, c'est que, dans le continuum de violence qui va être subie plus spécifiquement par les femmes, même si, évidemment, il y a des hommes qui la subissent... Et ce phénomène-là a encore plus d'ampleur au niveau de la population autochtone. C'est une problématique qui fait partie d'un continuum de violence des femmes. Alors, ma collègue en a parlé, et ça va être important que les mesures ne soient pas seulement liées à la victimisation, mais qu'elles touchent les rapports entre les sexes, la pauvreté chez les femmes et le soutien qu'on peut leur apporter à différents niveaux.

Je tourne vite. Un point qu'on oublie souvent et auquel nous, on est confrontés, c'est que, bien, ici, la prostitution, elle est rarement organisée. Il n'y a pas de groupes, il n'y a pas de gangs de rue. Il y a des groupes criminalisés, mais il n'y a pas de gangs de rue comme on peut le voir dans les grands centres, alors c'est une prostitution qui va être moins... chez les jeunes et chez les femmes, moins structurée, moins contrôlée, qui va être beaucoup plus mue par les besoins, besoin d'un toit, besoin de nourriture, besoin d'objets de qualité. J'ai des jeunes filles qui ont des besoins très grands et pour qui ça peut être une solution d'offrir du sexe tarifié. Et ça va se passer des fois, aussi, à la fin des partys, à la fin des bars, pour continuer le party. Tu sais, les gars sont très jeunes, gagnent des 100 000 $ par année, alors, souvent, c'est circonstanciel, je dirais, plus. Alors, c'est important que les solutions qui vont être proposées à nos communautés, bien, reflètent la réalité qu'on vit.

Ce qu'on voit aussi, c'est des femmes qui reviennent, qui reviennent des grands centres, Gatineau, Montréal, en gros, et qui ont été victimes d'exploitation sexuelle sur une certaine période, puis, quand ça va vraiment mal, elles reviennent en région. Il n'y a pas de dépistage qui est fait auprès de ces personnes-là. On n'est pas formés, nécessairement, pour le faire, et ce n'est pas d'emblée qu'elles vont nous dire qu'elles sont en processus de sortie de prostitution. Chez nous, les victimes ne se présentent jamais spécifiquement parce qu'elles ont vécu l'exploitation. C'est souvent en cours de parcours qu'on va découvrir leur vécu et qu'on va pouvoir leur proposer un soutien qui est à la hauteur de leurs besoins, même si on n'est pas capables, fondamentalement, mais... Alors, il n'y a pas beaucoup de dépistage qui se fait. Quand les jeunes se retrouvent en centre jeunesse, c'est souvent pour d'autres raisons qu'elles vont avoir été accueillies. Donc, c'est très rare qu'on va creuser assez loin pour découvrir qu'elles ont subi de l'exploitation sexuelle. Ça va être important de penser à nos jeunes adultes qui reviennent en région et qu'il y a des services qui soient adaptés à la réalité de ce qu'elles ont vécu ici, chez nous.

J'essaie de passer toutes les recommandations parce qu'en fait on recommande de la formation en dépistage, de la formation des intervenants, on recommande de nous donner les moyens d'agir, de nous donner... On a le vouloir, on a la structure. Cinq CALACS dans une région, là, vous ne verrez pas ça ailleurs, là. On a la structure pour le faire; on n'a pas le moyen financier de développer autant qu'on voudrait. On essaie de faire avec ce qu'on a, par contre, puis on travaille très fort.

Je vais donc m'arrêter ici et vous donner la parole parce que je pense que j'ai pris amplement le temps qui m'était alloué.

Le Président (M. Lafrenière) : C'était parfait. Merci beaucoup, Mme Bélisle. Et on va passer maintenant à la période d'échange avec les députés.

Première chose, avant de laisser la question au député de Chomedey, juste vous dire que vous avez touché quelque chose d'important tantôt. Vous avez parlé du fait que, lorsqu'il y a un échange d'argent pour les services sexuels, pour plusieurs personnes, ça sous-entend une notion d'acceptation, et on l'a entendu beaucoup, nous aussi, dans la commission aussi, comme mécanisme de défense pour des abuseurs — que je n'appellerai pas clients aujourd'hui, puis vous comprenez pourquoi — où on se dit : Écoutez, à partir du moment où j'ai échangé de l'argent contre un service, je deviens client, et il y avait un consentement, puis, en plus de ça, j'ai payé. Alors, c'était une notion qui était très intéressante et avec les notions de vulnérabilité que vous amenez aussi, avec l'écart de richesse, de salaires et tout. Alors, merci beaucoup. Merci de votre présentation. Et il y a le député de Chomedey qui avait une question pour vous.

M. Ouellette : Merci, M. le Président. Merci, Mme Bélisle, de votre témoignage en commission aujourd'hui. L'étude que... la recherche que vous avez faite, ça date quand même de cinq ans. Est-ce que vous diriez que c'est encore d'actualité aujourd'hui, que vous avez encore un très bon portrait de la situation en Abitibi-Témiscamingue — je vais rajouter le Témiscamingue, là? Est-ce que c'est encore les mêmes paramètres où ça pourrait être encore les mêmes conclusions que vous aviez il y a cinq ans?

Mme Bélisle (Josée) : En fait, elle date effectivement de cinq ans, elle touchait particulièrement la prostitution adulte, et la recherche était faite dans un but de connaître qu'est-ce qui apporte ces femmes-là dans la prostitution, qu'est-ce qu'elles ont besoin pour en sortir. Alors, à ce niveau-là, je dirais que oui, les conclusions sont les mêmes. Par contre, je crois qu'il y a une augmentation du phénomène, particulièrement... qui déboule, là, particulièrement chez les jeunes femmes adultes, chez les jeunes mineures. Je pense que... Tu sais, on a accès aux réseaux sociaux, nous autres aussi, ici, là, ça fait que je pense que c'est un facteur de vulnérabilité qui est de plus en plus présent et qui va faire en sorte que... qui va changer un peu le portrait.

Il y avait aussi une surreprésentation des femmes autochtones, là, au moment de la recherche. Je crois que cette surreprésentation-là, elle est encore là parce qu'on ne fait pas grand-chose pour changer les choses. Ça prend une volonté politique forte. C'est dur changer des mentalités, c'est sur du long terme.

M. Ouellette : Vous nous avez mentionné... M. le Président, vous avez mentionné que vous aviez cinq CALACS en Abitibi. On a beaucoup stigmatisé la région de Val-d'Or. Depuis des années, là, on dirait qu'il y a juste à Val-d'Or que ça se passe et qu'ailleurs en région... Et Mme la cheffe, hier, nous en parlait par rapport au Lac-Simon, il y a beaucoup d'événements qui se sont passés au Lac-Simon, mais on a tout focussé sur Val-d'Or. La recherche d'il y a cinq ans arrivait avec des conclusions encore pour Val-d'Or. Diriez-vous que... bon, c'est peut-être surévalué que tout se passe à Val-d'Or, je comprends que c'est le plus grand centre, mais que la problématique peut être aussi présente partout en Abitibi-Témiscamingue?

Mme Bélisle (Josée) : La problématique est présente partout mais sous différentes formes. Il faut comprendre que Val-d'Or, c'est la porte d'entrée de l'Abitibi-Témiscamingue, donc le milieu criminalisé est plus présent. Il faut comprendre aussi que les autres... dans les autres villes, vous ne verrez pas de prostitution de rue, alors qu'à Val-d'Or elle est présente et elle est visible. Donc, ça a un impact sur notre perception. Alors, je pense que, oui, effectivement, Val-d'Or est particulièrement touchée par les problèmes de prostitution, mais non exclusivement. Je pense que, comme je vous parlais tantôt, souvent, chez nous, on va parler de prostitution de survie, de fin de mois, on va parler de prostitution circonstancielle. Elles ne vont pas nécessairement être dans un parcours prostitutionnel de l'enfance à l'âge adulte, ça va être par moments dans leur vie. Alors, il y a des différences, mais il y a effectivement une distinction, moi, je pense, entre Val-d'Or et les autres villes.

M. Ouellette : En terminant, je me permettrais un commentaire. Pour avoir regardé... Merci de nous avoir donné l'information pour le lien. Et il y a une statistique, dans la recherche, qui est venue me chercher un peu, qu'on disait que 100 % des femmes qui sont en situation de prostitution, un, il y a un indice de pauvreté au niveau du revenu, et il y a aussi... 100 % des femmes, il y a un indice de consommation ou de dépendance à la consommation. Et je pense que ça parle, ça aussi. Mon collègue...

• (11 h 30) •

Mme Bélisle (Josée) : C'est spécifique. C'est spécifique à cette recherche-là qui était : femmes adultes particulièrement victimes de prostitution de rue. L'indice de pauvreté, effectivement, il se situe partout. Au niveau de la consommation, ce n'est pas un rapport de 100 % qu'on devrait faire, je crois. Si on évalue partout en région et si on tient compte de la prostitution juvénile autant que prostitution adulte, je crois que cette statistique-là pourrait être nuancée.

Le Président (M. Lafrenière) : Merci beaucoup. Députée de l'Acadie.

Mme St-Pierre : Merci. Merci beaucoup, c'est vraiment très éclairant, ce que vous nous dites. Et vous nous invitez aussi à prendre conscience du poids des mots. Parce que le mot «prostitution», on l'avait un peu banni de notre vocabulaire, et peut-être que parfois il faut l'utiliser pour vraiment que ça rentre dans le cerveau bien comme il faut. Alors, moi, je note, là, qu'il y a quelque chose là sur lequel vous nous avez un petit peu... vous avez montré qu'il y a vraiment un vocabulaire qui doit, à certains moments, être vraiment précis et bien utilisé.

Mme Bélisle (Josée) : C'est ça.

Mme St-Pierre : Je vais faire... je veux parler de récurrence des budgets, les projets de trois ans, de cinq ans. Plusieurs sont venus nous dire : On a vu des projets trois ans, cinq ans, puis, à un moment donné, boum! c'est fini. Et je pense que c'est un défaut des... puis je me mets dans le lot, là, comme ancienne ministre, c'est un défaut des gouvernements. C'est-à-dire, tu es toute fière d'aller annoncer devant des caméras : Ah! j'annonce 50 millions sur cinq ans puis j'ai une belle photo dans le journal puis un beau topo à la TV. Je pense qu'il faut que nous parlions de récurrence de budgets. Je pense qu'il faut que... Bien sûr, l'argent, c'est le nerf de la guerre, et surtout lorsqu'on parle d'êtres humains, là.

Vous avez parlé d'un projet, tout à l'heure, de trois ans qui vous a... sur des jeunes victimes d'agression sexuelle et vous notez dans vos groupes que la moitié de ces jeunes, de ces victimes-là vont possiblement... bien, c'est-à-dire, ont été victimes d'exploitation sexuelle, ont fait de la prostitution. C'est dommage que ce soit trois ans. Alors, je pense qu'il y a une réflexion, et je le dis à mes amis ici, autour, il y a une réflexion à faire, très profonde, et d'inviter peut-être... C'est sûr que c'est difficile, quand le ministre fait son budget, là, on le comprend, il y a toutes sortes d'enjeux, toutes sortes de demandes partout, puis ça vient de partout. Mais il reste qu'il y a une question qu'il faut se poser quand on parle, enfin dans notre dossier à nous, d'exploitation sexuelle des mineurs.

Je voudrais vous poser une question — peut-être que vous n'êtes pas la personne pour nous répondre, mais enfin — ...le phénomène de «fly-in/fly-out». Ça, là, on sait qu'il y a des gens qui viennent du Sud, qui partent du Sud, viennent travailler deux, trois semaines ici ou plus au nord encore, et après ça ils retournent. Mais, pendant qu'ils sont en haut, l'épouse n'est pas là, puis ils sont libres comme l'air, et des fois on peut voir des... bien, pas des fois, on voit des comportements. Est-ce que vous notez vraiment... Est-ce que vous êtes capable de nous faire un profil du client ou des clients? Ou comment on peut essayer de le montrer, lui aussi, du doigt puis de lui faire prendre conscience que l'exploitation sexuelle d'une mineure, bien, c'est déviant, et c'est de la pédophilie?

Mme Bélisle (Josée) : En fait, nous, on aurait aimé... On avait déjà présenté un projet qui allait dans ce sens-là, qui visait à sensibiliser plus particulièrement les hommes qui vont travailler au Nord-du-Québec. On aurait aimé ça monter ce projet-là en collaboration avec les communautés autochtones pour leur faire prendre conscience de la réalité de ces personnes-là et pour prévenir l'exploitation sexuelle. On a présenté un projet dans ce sens-là, qui n'a pas été accepté. Votre question, en fait, c'est : Quel est le profil des abuseurs sexuels que nous...

Mme St-Pierre : Est-ce que vous avez des gens qui viennent majoritairement de l'extérieur ou si la clientèle, elle est ici, là?

Mme Bélisle (Josée) : Mais, chez nous, la clientèle fait du «fly-in/fly-out», vont travailler dans le Nord-du-Québec et reviennent. Ça fait que, souvent, ils vont avoir été partis 15 jours sans sorties, sans avoir... Et c'est des jeunes hommes, là, ils gagnent des gros salaires. Ils reviennent en région, il n'y a pas de fin de semaine pour eux parce qu'ils partent du 14-14. Donc là, l'argent coule à flots, c'est le plaisir, ce qui est tout à fait normal, là, la vie d'un jeune homme qui a beaucoup d'argent. Mais ça amène un profil de... pas de clients, d'abuseurs qui des fois n'ont même pas conscience des abus qu'ils posent. On a des jeunes garçons, autant chez les mineurs, qui ne sont pas conscients qu'ils sont en train de commettre de l'exploitation sexuelle. Monsieur le disait tantôt, à partir du moment où ils paient, cette nuance-là ne se fait plus dans leurs têtes.

Le Président (M. Lafrenière) : Merci beaucoup. Député d'Ungava.

M. Lamothe : Bonjour. Juste vous ramener tantôt, quand vous avez mentionné qu'à un moment donné vous avez été impliquée au Lac-Simon dans une école parce que les jeunes ne savaient pas ce qui est arrivé aux parents. C'était en quelle année, ça?

Mme Bélisle (Josée) : Ça doit faire sept ans à peu près.

M. Lamothe : O.K. Puis ça, c'était votre initiative à vous?

Mme Bélisle (Josée) : C'était l'initiative du CALACS Assaut sexuel secours, dans le cadre du projet qui visait à travailler auprès des jeunes qui avaient eu une agression sexuelle, dans le but de prévenir la criminalité et la délinquance subséquente. Alors, avec ces sous-là, on a discuté avec les écoles, on a voulu faire de la prévention et on a inclus l'école de Lac-Simon dans notre projet de prévention. C'est donc dans ce cadre-là où j'ai été amenée à travailler auprès de ces jeunes-là.

M. Lamothe : Félicitations, madame! Je vais vous dire pourquoi je vous félicite. Moi, j'ai travaillé huit ans en milieu isolé avec les Inuits puis les Cris. Quand j'ai travaillé avec les Cris, la seule communauté qui était reliée par réseau routier était Chisasibi. Quand on est isolé, les services gouvernementaux sont plus loin, sont moins... peut-être pas efficaces, ils sont moins efficaces. Tu es isolé, ça fait que tu vis l'isolement.

J'ai pris ma retraite en 2008 à Kuujjuaq, puis le chef de police de Lac-Simon, Jean Vicaire, aujourd'hui, était chef de police en 2011, il m'a sorti de la retraite pour venir le remplacer parce qu'il voulait prendre des vacances. Je l'ai fait pour lui. Quand je suis arrivé au Lac-Simon, en 2011, j'ai constaté ce qu'était la communauté. Je n'avais jamais vu une communauté si frappée, dans le sens socialement marquée. Puis j'ai fait de l'isolement pendant huit ans. Puis la première réflexion, je me suis dit : Comment qu'une communauté comme ça peut être si en «bad shape» quand tu es à 40 kilomètres de Val-d'Or?

Ce que je veux dire dans ma réflexion, quand je vous félicite : Si les services gouvernementaux, les gens qui étaient impliqués depuis tant d'années, qui le sont encore aujourd'hui, avaient eu l'initiative de votre organisme et de vous... Sécurité publique, je l'ai vu, je l'ai constaté; la Justice, je l'ai vu, je l'ai constaté; la Santé, Services sociaux, je l'ai vu et constaté. On s'est fermé les yeux pendant les dernières années, on avait... ils n'ont pas joué leur rôle social, que vous avez joué.

Puis, si le Lac-Simon est encore dans une condition quand même sérieusement précaire, c'est dû justement à l'aveuglement volontaire qui s'est fait pendant toutes ces années-là. 40 kilomètres de Val-d'Or, tout le monde sait la misère, les difficultés qu'ils vivaient, puis il n'y a pas personne qui n'a rien fait. Puis, quand je vous entends, suite à ce que vous avez fait, bien, je tiens à vous féliciter.

Mme Bélisle (Josée) : Merci. D'ailleurs, j'aimerais souligner qu'on a beaucoup d'ambition, nous autres, dans la vie, là, puis on ambitionne un jour étendre nos services dans le Nord-du-Québec, tout le secteur de la Jamésie, mais aussi la route de la Baie-James et éventuellement, ça ne sera pas moi parce que j'ai peur des avions, mais on aimerait tellement déployer nos services au Nunavik parce que les besoins sont grands, parce que là aussi il y a des spécificités dont il faut tenir compte puis qu'on pense qu'on pourrait collaborer avec ces gens-là.

M. Lamothe : Bien, c'est gentil de penser à nous, mais pensez aussi à la communauté qui est à 40 kilomètres de chez vous.

Mme Bélisle (Josée) : Oui. Ah oui! Ah oui! On y pense continuellement. D'ailleurs, la collaboration se fait.

Le Président (M. Lafrenière) : Merci beaucoup.

Mme Bélisle (Josée) : Merci.

Le Président (M. Lafrenière) : Dernière question, députée de Notre-Dame-de-Grâce.

• (11 h 40) •

Mme Weil : Oui. Merci beaucoup pour ce que vous faites. Vous avez une connaissance fine. Et, comme vous dites, cinq CALACS, c'est quand même extraordinaire, mais le financement, c'est là, le nerf de la guerre, hein?

Je reviens sur la question de ma collègue, les «fly-in/fly-out». Parce qu'on a appris des choses, nous, très loin d'ici... bien, assez loin d'ici, pas si, si loin que ça, mais... dans les journaux, dans le contexte de la crise qui s'est passée ici, à Val-d'Or, et l'enquête. Et des fois c'était assez brutal, dans le sens que la fille était surtout autochtone, laissée dans le froid, dans la neige, puis... Bon. Et vous, dans votre mandat, je regardais votre mission et vous parlez de... vous avez aussi une mission d'éducation et de sensibilisation de la population.

Je voulais voir : Est-ce que vous avez déjà essayé... Ce n'est peut-être pas des gens d'ici, mais ils sont ici, sur le territoire, donc ils ont une responsabilité, les employeurs ont une responsabilité. Puis personne ne peut fermer ses yeux après tout ce qu'on a appris, hein, globalement, comme société. Est-ce que vous avez peut-être des campagnes dédiées à ça... évidemment, tout le reste est important aussi, mais des employeurs et de ces travailleurs? Parce que, comme vous dites, eux, ils pensent que : J'ai donné de l'argent... Et ça, c'est vrai partout. Beaucoup d'organismes nous disent la même chose. Est-ce que vous avez pensé à ça? Pensez-vous pouvoir avoir une campagne qui rejoint ces employeurs?

Parce qu'il faut changer l'homme et la mentalité. On a tous dit ça. On a même évoqué l'importance d'avoir des porte-parole masculins qui pourraient jouer un rôle. Puis je voulais juste voir vos idées, votre réaction à tout ça. Puis...

Mme Bélisle (Josée) : Oui. Comme je vous disais tantôt, on y a sérieusement pensé. On a élaboré, dans le cadre de l'appel de concept de Condition féminine Canada, que vous avez peut-être entendu parler... on avait mis sur pied un concept qui visait précisément à rejoindre les employeurs et les personnes concernées. Malheureusement, le projet n'a pas été retenu. Là, écoute, j'imagine qu'ils reçoivent des dizaines de projets et des centaines.

Et je voulais dire autre chose. Vous parliez de la crise autochtone et tout ça. Moi, avant-hier, j'ai pris l'autobus en direction de Montréal pour aller à une réunion. Il y avait un passager... deux passagers autochtones qui demandaient à ce qu'on les débarque à l'embouchure de la fourche pour aller à Lac-Simon. Alors, c'est gentil, je pense que le conducteur accepte de les débarquer, mais de la façon dont il leur a adressé la parole, c'était inadmissible. J'aurais voulu me lever pour lui dire : Changez de ton. Mais je n'étais pas capable. Donc, il y a encore cette... Ils subissent encore cette oppression-là, encore ce racisme-là : On est arrivé, là, réveille-toi, là, envoie! débarque! on est arrivés. C'était tellement heurtant que je me dis...

Il y a une volonté, il y a une volonté de changer, il y a... Vous avez parlé de réconciliation. Il y a une volonté, mais, tabarnouche! ça ne rejoint pas tout le monde, là, tu sais?

Mme Weil : Est-ce que vous pourriez partager votre projet pour qu'on puisse comprendre ce que vous aviez en tête, surtout pour rejoindre, bon, notamment, j'imagine, ces employeurs, pour qu'on puisse peut-être s'en inspirer puis voir... Parce que, je pense, c'est une excellente idée, excellent projet, puis ça rentre dans le cadre de ce qu'on entend et de notre mission.

Mme Bélisle (Josée) : Bien, oui. Effectivement, là, c'est sûr que, pour nous, on est en fin d'année. On fait la demande de PSOC qu'on a... On est deux employés à temps plein, ça fait que c'est sûr que ça ne sera pas demain, là, mais éventuellement...

Mme Weil : Qui pourrait nous inspirer pour une mesure, là.

Mme Bélisle (Josée) : Oui.

Mme Weil : Merci.

Mme Bélisle (Josée) : Oui, ça me fera plaisir.

Le Président (M. Lafrenière) : Merci beaucoup pour votre contribution à nos travaux.

La commission suspend ses travaux jusqu'à 13 heures. Merci infiniment.

(Suspension de la séance à 11 h 43)

(Reprise à 13 heures)

Le Président (M. Lafrenière) : Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! La Commission spéciale sur l'exploitation sexuelle des mineurs reprend ses travaux à la Maison du citoyen de Val-d'Or. Je fais un rappel aux gens qui sont présents dans la salle de bien vouloir fermer les sonneries de leurs appareils électroniques, s'il vous plaît.

Cet après-midi, nous entendrons Mme Virginia Wabano, de même que Mme Mary Ortepi qui nous vient de North Bay. J'aimerais souligner de même la présence de plusieurs personnes qui se sont déplacées cet après-midi, dont une collègue policière d'Ottawa qui est avec nous aujourd'hui, Mme Patricia Guerin. Merci d'être venues nous voir aujourd'hui. Merci beaucoup.

Alors, pour les gens du Conseil cri de la santé et des services sociaux de la Baie-James, je voudrais vous remercier d'être avec nous. Vous avez 20 minutes pour faire votre présentation... de vous présenter toutes les deux. Et, par la suite, il y aura une séance d'échange avec les membres de la commission. Je vois que vous avez déjà le casque d'écoute, alors vous avez compris qu'il y a une traduction simultanée. Alors, ça va faciliter le tout. Pour les membres de la commission, il y a un casque d'écoute qui est devant vous aussi. Merci beaucoup. Bonne présentation. Merci d'être là.

Mmes Virginia Wabano et Mary Ortepi

Mme Wabano (Virginia) : (S'exprime dans une langue autochtone).

First, before I begin, I would like to take this time to honor my presence before the Creator of all things, Gzheminido, as I stand here in the traditional lands of the Algonquin Nation. «Meegwetch» for giving life through all the elements, the air we breathe, the water for nourishment, warmth from the sun and the land to provide and sustain all.

«Wachiya», everyone. I am a Cree woman, a great-grandmother, a grandmother, a mother, a sister, an auntie. I am a beneficiary under the James Bay and Northern Québec Agreement, affiliated with the Cree of the Waskaganish First Nation and a member to the Moose Cree First Nation. My name is Emma Virginia Wabano. I am the local director of the Community Miyupimaatisiiun Center for the Cree nation of Waswanipi. I have my colleague here with me Mary Ortepi, for support.

On behalf of the Cree Board of Health and Social Services of James Bay, I would like to extend our gratitude for the opportunity to present to the Commission regarding sexual exploitation of minors. As I sit before you, I come with diverse feelings of sadness and hope as we share with you the realities of sexual exploitation of minors. I am honored that we have this opportunity to share ways in which to address sexual exploitation of minors. However, at the same time, there is this overwhelming degree of sadness knowing that children are subjects to dangerous and unsafe environments that threaten their well-being and health. Yet, I remain hopeful that our presentation will help make a real impact in helping children escape from a life of sexual exploitation.

Our presentation today will cover the Cree Board of Health and Social Services of James Bay official statement, the history and context, the portrait of the situation in Eeyou Istchee, sharing of a story from a survivor of sexual exploitation, needs of sexual exploitation victims, the resources and strategies for improvement. You have a copy of the presentation with you.

The vision statement of the Cree Board of Health and Social Services of James Bay is individuals, families and communities strive to achieve «miyupimaatisiiun», reflective of «nishiiyuu». The term «miyupimaatisiiun» refers to a holistic state of well-being that not only encompasses the physical, emotional mental and spiritual aspects of one's life, but also includes the family, community and environment. «Miyupimaatisiiun» is achieved by embodying traditional Cree values and knowledge, «nishiiyuu», when delivering programs and services.

As you see on the map, Cree Board of Health is responsible for delivering health and social services in Eeyou Istchee within region 18 of the Québec health network. As you can see on the map displayed, Eeyou Istchee encompasses nine Cree communities. And, when you add 5% of non beneficiary residents to our population, we are servicing approximately 20,000 people.

It is also important to highlight some of the aspects of Canadian history that has ongoing effects on the indigenous population. The context in which we provide programs and services is necessary to understand. In the 1800s, policies were established that allowed the federal government to create Indian residential schools. Unfortunately, many indigenous children were removed and separated from their families and communities to attend these schools. We are talking about over 130 schools located in every province and territory. While most indigenous residential schools ceased to operate by the mid-1970s, the last federally ran school closed in the late 1990s.

Ten decades or so later, in 1998, the Royal Commission on Aboriginal Peoples recommended a public investigation into the various forms of abuse and violence experienced at residential schools. As a result, compensation was provided to indigenous resident school students, and the federal government called for implementation of 94 calls to action from the Truth and Reconciliation Commission. The implementation of these calls to action continues today.

In addition, between 1995 and 1999, indigenous and Inuit children were taken into care and placed with non-indigenous parents, where they were not raised in accordance with their cultural traditions, nor taught their traditional languages. This practice is referred to as the Sixties Scoop.

As emphasized by the Native Women Association of Canada, the colonial legacy has forced indigenous women and girls into dangerous and precarious social and economic conditions which in turn have made them more vulnerable to different kinds of violence. This includes of exploitation and human trafficking, a prevailing concern that has yet to be properly addressed and recognized.

Although the indigenous and the western views of health differ in many ways, they both agree that health results from a combination of many factors under the social determinants of health. It has been recognized how strongly the social environment affects a population's health. These social determinants of health include factors such as housing, income and education. More recently, we have learned that social justice issues such as racism, discrimination and inequalities in people's power and resources affect health. In other words, a social determinant lense shows us just how deeply past and present colonial policies have affected communities' ability to afford the social, economic and political conditions conducive to a healthy lifestyle.

Our persistent failure to grasp the true impacts of colonization may explain why existent health and social programs have done so little to narrow the health gap. These conditions have made many indigenous children vulnerable to being exploited.

There's a definition under the Criminal Code of Canada that is... reads... Sorry. Where is it? OK. So, there is a definition — it's not on this page — that is recognized under the Criminal Code of Canada.

The portrait of the situation in the territory of Eeyou Istchee. Despite the James Bay and Northern Québec Agreement in 1975 and the creation of the Cree Board of Health in 1978, many inequalities remain, such as intergenerational trauma from residential schools, difficult access to housing and poor housing conditions, low income and food insecurity.

• (13 h 10) •

Our community members are concerned about human trafficking, and certain groups are particularly more vulnerable. Some examples of the concerns brought to the forefront include girls potentially recruited when traveling to urban centers. Also, two-spirit people can face rejection in both indigenous communities as well as the mainstream LGBTQA communities. The rejection experience can place the individual at a higher risk for homelessness, food security and substance abuse, thus creating a greater vulnerability and can lead to a higher risk of sexual exploitation. However, it is becoming evident that organizations work more and more closely with the LGBTQ community, as we need to reduce the stigmatization that they live with every day and need to prevent and reduce acts of violence towards them.

Also, often, the notion of consent is misunderstood. A lot of cases go unreported. In spite of the lack of specific data on sexual exploitation of minors in the region, experts tend to agree that indigenous youth are more vulnerable to these occurrences. Some of the reasons include : youth who have experienced adverse childhood events are known to be at higher risk, and we know indigenous children are currently overrepresented in the department of the youth protection system, both in Québec and Canada. Also, as a result of multiple Canadian colonial policies, they also have a higher prevalence of all forms of collective and interpersonal violence in communities.

Other risks I previously stated are under the social determinants of health and, we know, are highly relevant in the context of indigenous communities. In addition, women and youth represent 4% of the Canadian population, and 50% of woman and youth trafficked are indigenous. When looking at our population in Eeyou Istchee concerning these occurrences, our data indicates that our population is young, with nearly four out of ten below 20 years old. An estimate of 80 to 100 sexual abuse medical kits, known as rape kits, were used in the territory in 2018, and seven sexual abuse cases under the age of 18 were also reported in the same year.

Foster home placements. In the years 2002 and 2003, there was 2,768 placements; in the years 2010 to 2011, 4,569; in the year 2018 to 2019, 3,779. Given that as many as 20% of homes in Eeyou Istchee are considered overcrowded versus 1% in Québec, the impact of housing overcrowding cannot be overstated. Indeed, overcrowding has long been recognized as an important contributing factor for family violence and child sexual abuse, both in indigenous and non-indigenous contexts. Yet, when the lack of alternative housing is combined with the lack of services and the lack of trust in the child protection and criminal system, it can easily be understood now how some youth may have no other choice than to leave the community. Unfortunately, it is not uncommon that, once in urban centers, they find themselves only more isolated and hence extremely vulnerable to being recruited by criminal organizations to exploit them through prostitution.

On the slide of statistics, you will see our statistics on the rates of hospitalization for suicide attempts and hospitalization following an assault within a two-year period. Data obtained clearly displays the highest prevalence is among youth ages 18 to 24. I have brought with me a short video by Mrs. Saganash, who, unfortunately, cannot be here with me today. She is a survivor of sexual exploitation. So, we will play that video now.

(Présentation audiovisuelle)

• (13 h 15   13 h 20) •

Mme Wabano (Virginia) : «Meegwetch.» That is Mrs. Saganash. She has experienced this situation for over a period of seven years and she was young at the time.

Speaking of the resources that she refers to, our organization, Cree Board of Health, has developed a sexual assault response protocol to guide local front line workers in assisting adult victims of sexual assaults, victimizers and their families at the time of disclosure. We also have at our disposal culturally relevant tools from the Foundation of the sexual assaults protocol. This tool provides the seven sacred teachings: courage, honesty, humility, compassion, respect, sharing, and wisdom. Also, we have... the sexual medical kits are accessible in our community Miyupimaatisiiun Center which refers to a CMC's and is administered from trained clinicians, both on the use of the kits and cultural safety. However, even if a rape kit is completed, many choose not to file a complaint. This is also relevant in other regions, where, in 2019, only six cases reported by aboriginal victims in Montréal... due to feat of retribution, threats of legal implications related to drugs, sex work and social family and peer pressure.

We also have a program called AMA, Â Mâshkûpimâtsît Awash, means «strong and healthy children», and it's a program adapted from SIP, which, I believe, you are all familiar with. The aim of this program is to give Eeyou families the accompaniment and support they need to raise happy, strong and healthy children. The AMA program seeks to reinforce parents existing strength and skills and to assist communities in their efforts to improve families living conditions.

Chii kayeh is another program, it's a school prevention and sexual health program offered to secondary school students. The program currently has seven components that focuses on healthy relationships from consent to self-esteem. The Cree Board of Health is actively working on the expansion of services. One example is our 24 hours psychosocial on-call service, currently a pilot project in one of the larger communities.

Community collective knowledge is a priority for us. We know we can do further if we seek out collaboration from our partners. We have created mechanisms to ensure that we establish and sustain local, provincial and federal partnerships as solutions proposed can't be efficient on the long term with all actors involved.

Under the Cree Board of Health regional strategic plan, priorities are two objectives specific to developing any efficient mental health network and facility, as well as increased access to sexual abuse awareness and prevention with community-based initiatives. With our recent signed five-year health agreement with the province, we will be building our first regional healing centre for addictions in territory while enhancing our capacity in offering prevention, outreach and harm reduction initiatives.

We are seeking an opportunity to modernize the S-5 Act to incorporate traditional help and methods. Example : recognition to offer traditional food at our establishments.

Our Nishiiyuu Department has continued to enhance its community and development efforts and is developing culturally relevant complementary services and programs, including the «miyupimaatisiiun», land-based healing and traditional medicine programs. As stated by the chairperson of the Cree Board of Health and Social Services of James Bay, Mme Bella Moses Petawabano, our Cree culture offers us the means to being healthy in our lives. It is the path to «miyupimaatisiiun». That is why our Cree health board is committed to bringing traditional Cree values and knowledge into all our programs and services. Our Council of Chishaayiyuu, our elders council, provides guidance and advice as we establish programs through our Nishiiyuu Miyupimaatisiiun Group. Through this group, the Cree health board is using traditional land-based healing to help people in need. We are also developing a traditional birth and knowledge program to ensure that the world our children enter into is the Cree world. We are also exploring ways of bringing traditional Cree medicine and healing into a conversation with Western medical knowledge to provide care that is culturally safe and competent, care that expresses our Cree history, culture and values.

We now have opened two women shelters in our territory Piipiichaau Uchishtuun, Robin's Nest, which serves women and their children who are experiencing domestic violence.

The nine Cree communities. Our current effort is creating programming that will offer options for reconciliation, rehabilitation and reintegration with the support, and knowledge, and wisdom of our communities. We also work with the Cree Women of Eeyou Istchee Association, who has a multi-year action plan on family and domestic violence to raise awareness among the population of indigenous communities about the nature of sexual assault and promoting healthy and respectful sexual education. This is under the Viens' Commission call for action No. 87 for indigenous authorities.

We also have a program called ACCESS Open Minds. It is a mental health program organized through the Cree nation of Mistissini that offers professional counselling at the community's family resource center. From July 2018 to August 2019, the service provided 401 individual consults to youth, an indicator that preference for access to services is needed in all Cree communities. We also work closely with the Eeyou Eenou Police Force, the Crime Victims Assistance Centre, the Sexual Assault Centre in Montréal, the Montréal police and also work with... participate in provincial questionnaires of sexual assault in Eeyou Istchee.

We come before you as well to make some recommendations. One of the recommendations is to have a system to contact to act immediately. There were several cases within the Cree nation where young girls went missing and were trafficked and exploited and had no means to contact. Also, the process of the resource tools for sexual assault medical kits or even the Crime Victims Assistance Centre processes... we need to simplify the resources. We also need to be involved at the provincial tables. Community initiatives must be supported by the Government with well researched programs and policies that are culturally appropriate.

We also recommend... review and incorporate the calls for action under the Truth and Reconciliation Commission, the national inquiry, the Viens' Commission, under the Health and Social services calls for action Nos. 74 to 107, specifically No. 86, initiate, try negotiations with the federal government and indigenous authorities to sustainably fund projects created by indigenous nations, communities and organizations that seek to identify, reduce, prevent and eliminate sexual assault.

Another call for action is No. 87, raise awareness among the populations of indigenous communities about the nature of sexual assault and promote a healthy and respectful sexuality education.

• (13 h 30) •

We agree with the commissions, the Viens' and the national inquiry, in regard to the development of specialized services at a regional level or in large communities. This is part of the development plan of the Cree Board of Health and Social Services of James Bay such as to give access in the region to specialized mental health and readaptation services and a culturally safe addiction, detoxification and treatment center.

Interventions to prevent social exploitation of minors and its consequences in the indigenous youth need to go far beyond the implementation of specific programs. It requires an intersectorial approach at several levels of governance as well as the provision of sustained founding, so that actions of lasting scope can be undertaken.

To better guide policies and programs in place, access to quality data is essential, including data on the overrepresentation of indigenous children in the youth protection, as well as the fairness of resources invested in support of services for families or sexual exploitation of minor victims. Evaluations should also accompany the development of any new interventions to monitor their implementation and outcomes. We have compiled documents to be tabled for the commission's further review and reference regarding sexual exploitation of minors.

We wanted to take this time to say «meegwetch» for your attention. (S'exprime dans une langue autochtone). Thank you all.

Le Président (M. Lafrenière) : «Meegwetch.» Merci beaucoup de votre présentation, Mme Wabano. Maintenant, on va commencer une période d'échange avec les membres de la commission. Première question, député de Sainte-Rose.

M. Skeete : Merci, M. le Président.

Thank you very much for being here, and a particular thanks to the young lady telling us her story. I think it's important when we hear first hand accounts of exploitation and most notably the precariousness that lead to that exploitation. I think it's very useful.

I also enjoyed, in your presentation, the remarks on the social detriments... determinants, rather, of health. I think it's important that we understand. And my colleague from Hochelaga-Maisonneuve has been very astute in raising the link between poverty and what we often see as the... even, the choice of prostitution, if you can call it that, because these determinants are critical in the decision, and the link that it has to sexual exploitation with regards to early childhood experiences, destitution at an early age. I think we see that in a lot of poor circumstances. I want to thank you for bringing that out. I think you're one of the first groups to actually bring that out.

I especially enjoyed... and this committee has also heard a lot of testimony about sexual education in general, empowering young girls in terms of education, yes, but I love that you highlight and even bold that the notion of content... of, rather, consent is misunderstood. I think, when we're elaborating our courses in terms of sexual education, the notion of consent needs to be articulated more fairly. Thank you for bringing that to our attention.

I have a question because you're actually on of the only groups, if not the only group, that actually measured the number of childhood sexual abuse for minors in your report, and you put the number of seven on your territory. My first question is : Seven abuse cases out of a total of a 100 in 2019, is that correct? On page 9 of your presentation, an estimate of 80 to 100 sexual assault med kits were used. So I'm assuming the med kits are used in the cases where people are going to be pursuing their aggressors. Of those, there are seven. Is it safe to say that there are between 7% and 9% on your territory involve minors?

Mme Wabano (Virginia) : The seven sexual assault cases are under 18. The 80 to 100 rape kits are in general.

M. Skeete : In general.

Mme Wabano (Virginia) : Yes. In general, yes.

M. Skeete : It's very important that I understand that number. Are you saying that around... and can we take away that about 7% to 9% of sexual abuse on your territory is exploitation of minors?

Mme Wabano (Virginia) : Yes.

M. Skeete : OK. That's interesting because we had a group tell us that it was infinitely smaller. So, thank you for giving us that number.

Can I ask, out of the 100 sexual assault med kits that were used, what your total population is? I don't know if you said it, but I missed it. What is the total population of your territory?

Mme Wabano (Virginia) : In the Cree nation, it's 20,000.

M. Skeete : So, 20,000. I won't be too long, Mr. President. Just give me another couple of minutes.

I have the responsibility of maintaining the relationship between the English community of Québec and the Government of Québec. And, in one of your recommendations, you mentioned the participation at provincial tables. A lot of people in the English community in particular have brought that to my attention.

Can you tell me, when you say participation at the tables, is it a sense of belonging? Is it because you feel that you are not welcomed? Is it because you are not invited or is it because you don't understand the mechanisms that lead to participating on those tables? Can you give me sense of why you are not already there?

Mme Wabano (Virginia) : To better understand, to bring the understanding of developing culturally safe programming, because many of the programs that are brought, like... For example, we had the SIP. I think most of you are aware of the SIP Program, how Cree health board adapted that program to their needs, so it's culturally relevant.

However, when a lot of programs are made, that's not taken into consideration from the aboriginal perspective. So, being able to sit at these tables and share our knowledge, our traditional knowledge in developing programs for aboriginal communities is very important, and this is why we recommend that we sit at these provincial tables as well.

M. Skeete : My question was: Why aren't you there already? Is that because you're not invited?

Mme Wabano (Virginia) : Yes. We are not invited.

M. Skeete : OK. Thank you.

Le Président (M. Lafrenière) : Thank you. Prochaine question... Sure.

Mme Wabano (Virginia) : I just wanted to add a comment to your question in regards to the 80 to 100 raped kids based on the 20,000 population. As I said in my presentation, many fear to report, and this is why, you know, I... Even myself, I think 80 to 100 is a lot, you know, considering...

M. Skeete : And it's a low end, right? Because those are people who actually are coming forward. Thank you.

Le Président (M. Lafrenière) : And this is only the cases reported, we got that right. Thank you.

Mme Ortepi (Mary) : And there's also the... you know, there are different communities in the hospitals outside of our territory that victims will access that we don't have the stats on. So that's a missing piece of the information.

Le Président (M. Lafrenière) : Great. Thank you both.

Question, députée de l'Acadie.

Mme St-Pierre : Merci beaucoup, M. le Président.

Thank you, thank very much. On your PowerPoint, you say that girls are potentially recruited when traveling to urban centers. My question is : Are they recruited by their own people or by people from the South? Who is the person who is recruiting girls from your community?

Mme Wabano (Virginia) : As you know, our territory, we... Some of our medical support comes from Montréal urban centers, so our community members travel there and, at times, they do require escorts or they need to travel with someone to their appointment, their medical appointment. And there have been several cases where some of these young girls have been recruited not only by aboriginal people, but also non-aboriginals. And, you know, we had a few cases of young girls that went missing. I'm not sure if you've heard about it, but Lynn Iserhoff was also a young girl that went missing in Montréal.

And now, you know, because of the exploitation that is happening in these urban centers, it is now happening within our Cree communities. Not long ago, we had training with the Montréal police on human trafficking. They came to the community, and, at that presentation, a community member came forth and said that, you know, there's a pimp in our community. So this is why, you know, it's very important that we address these issues and be able to bring out these stories, because it is happening right in our own communities now, not only in urban centers.

• (13 h 40) •

Une voix : The other place that it's happening also is that when we have youth that are going for a higher education. They're away from home, they're going through culture shock and they're also targets at that time, and their safety is at risk when they're trying to go for a higher education. So, that's an area that still needs to be, you know, looked at to provide some good support for them.

Mme St-Pierre : And about the LGBT communities, LGBT people, do they have to go south or they... My comprehension of your PowerPoint is the fact that they can't live in their own community up north. They have to move south if they want to live their LGBT situation.

Mme Wabano (Virginia) : There's a lack of support for the population of LGBTQ within the Cree territory. However, recently, I believe this is going to be the second year now, they're going to have a conference for that population. However, it's not within the Cree territory. They're having it in an urban center for safety.

Mme St-Pierre : Is there a link between LGBT and suicides?

Mme Wabano (Virginia) : Yes. Yes, there's a link in many forms, even addictions, sexual exploitation and sexual assault. They are linked to suicides.

Mme St-Pierre : OK. Thank you very much.

Le Président (M. Lafrenière) : Thank you. Our next question will be from Notre-Dame-de-Grâce's colleague, please.

Mme Weil : Thank you very much for your participation. Myself too, I mean, the statistics that... the statistics where you say women, in youth, represent 4% of the Canadian population, 50% of women in youth traffic are aboriginal. Those statistics, where are... Where do you find those statistics? Where do they come from?

Mme Wabano (Virginia) : ...organization.

Mme Weil : OK. That's shocking.

Mme Wabano (Virginia) : You'll find more in detail in the documents that we will provide for you.

Mme Weil : Now, we do see... You know, I live in Montréal and I live in an area where we're always in... very frequently in contact... visually, we can see the desperation, what they're living, a lot of women. And there's a lack of shelters for these women, so they're... Just recently, an organization called Chez Doris was able to secure funding from the provincial Government and the municipal Government anyhow to open a home because they're extremely vulnerable. They're targeted, they're found and there's been several deaths, actually, an astounding number of deaths just in the last year. So there's urgency to work there.

So, the scenario that you described to us is... many leave then. They leave because of an incident that happened, they can't stay there anymore, there's shame, all sorts of reasons, and land up in Montréal very vulnerable. I mean... So, you make the link, which is kind of... for some, we've had somebody... group obviously working in region telling us a little bit about that «trajet» that they live. And for some of us who live in these urban areas, we see it, but, other than that, do we know the origins of it? Do we understand all the elements of it? Generally, we do, but you've brought lots of clarity to it.

I'd like to talk to you about the police because one of the groups in Montréal told us and gave us an example of a woman, a mother waiting at the bus station frantically because her daughter had to come to Montréal. I don't know if it was for a medical examination of something. She never made it. She never made it, but she had an impossible time getting a hearing from anybody. They did not take it seriously, they waited a long time, kept... brushing her off, saying: Just go home. She was waiting at the bus station. She said, «No, I want to wait.» They gave her a ticket because she was being like vagrant or whatever. They finally found the girl, who had been in captivity and, of course, you know, experienced all the violence that you can imagine.

Tell me about your experience with that, because we don't often have an opportunity to speak to people close up with that reality. And we have a lot of police forces that we meet, and they are so dedicated to this, so dedicated to this cause, and we meet with them there. They're champions to save these people. That's what they want to do. But then you read a story like that and, you know, you try to imagine the kind of education that has to be made to alert and sensitize also a certain... And this was a recent case that she was describing. Can you talk to us about that?

Mme Wabano (Virginia) : You know, I am very appreciative of the dedication of police officers. I work closely with the Montréal... And, not too long ago, a young lady from Val-d'Or or was residing in Val-d'Or went missing. And because of the connection that I have within my network, the family reached out to me and they were getting threats from the traffickers. And they started sending me messages through my cell phone, and immediately I sent it to the Montréal police because they believed that's where she was being transported.

Because they work with the human traffickers, the police, they know the behaviors, the attitudes, the common ways to lure girls and... their statements are... You know, they had an idea who this person was and, luckily, you know, they did find that girl.

You know, this is only one story of many. Like I said earlier, it's happening in our community. I live in the community of Waswanipi, and, when the Montréal police came to do that training, like I said, a community member came to see me, and said: I want to speak to you, and told me about her daughter.

We have many of our people that reside in a place called Espresso, in Montréal, when they go for medical appointments, and, up the street, there is a bar named Andrew's Pub. Two girls went missing from there while they were out there supporting their grandmother going for medical. They went missing for five days. The young girl said: I woke up in this real nice home, they started buying us things. And then her mom messaged her and said: If you don't respond back to me, I'm going to call the police. And she found out that, you know, they were in this human trafficking ring. And she said: I fear for my daughter because I believe money, clothing, the high lifestyle is overpowering her. And the mother felt that that human trafficker or pimp is now common to the community of Waswanipi.

Mme Weil : ...police because you have this link, you worked with the SPVM then, directly, which helps the police, obviously, in terms of... Your competency, your experience, they know they can work with you.

In that particular case, what did they... did the SPVM get involved? Were they able to get involved and found the girls?

Mme Wabano (Virginia) : Yes.

Mme Weil : OK. That's good news.

Mme Wabano (Virginia) : Yes. And this is where we know we need to have a system to act immediately. You know, under the police system, you have to wait, what, 48 hours before you report, and 48 hours, that may be too late.

Mme Weil : OK. Thank you.

Mme Ortepi (Mary) : I think also there is a very big difference when we, as Cree health board, link up with different organizations, be it the police or whoever we are working with, as opposed to an individual that is on the street, that is looking for help and asking for help, because that is when the stereotypical images that what our First Nations person is comes into play. And that judgment is already made before... they're brushed off or not taken seriously.

I mean, there is a lot of, you know, racism within the police force and within a lot of the helping organizations, and I think that's where, when we talk about cultural safety, that's where cultural safety comes into play to provide a safe way for people to access service.

And also, when you think about a healing path, it has to be a culturally safe path also. But, if you are a person that is on the street and you are needing help, good luck, because there is a lot of work to be done.

• (13 h 50) •

Mme Weil : ...that's what it seemed to me.

Mme Ortepi (Mary) : Yes. When you were talking about these police officers that so want to help, why would I like to meet them? It would be a breath of fresh air, right? Because I think that the reality of racism and being First Nations, being a person of color, being from the North, being from another society and system, you know there's a lot of preconceived ideas of who we are and judgment made.

Mme Weil : Would you say that, yes, the specialized units would have the sensitivity, but then they're needs to sensitization of... in general of all police forces?

Mme Ortepi (Mary) : Absolutely. Yes, absolutely.

Mme Weil : Basically, that's the takeaway that I...

Mme Ortepi (Mary) : I think at all levels. You know, when you look at the systems that are in place, often times, you know, we have the good intentions of individuals to come and provide support and help, but if you're not including the people that you are helping, if you're not... if they don't, you know... You are doing what has been done a thousand times over and only fails. You put on your cape, and you're going to come and save us, and you have all the answers. And, to be really frank, our contact with you has caused us all these problems that we're trying to deal with.

 And I'm saying that in a very respectful way, because colonization, the impact of it, we're still, you know, trying to recover from that and trying to find a sense of self of who we are. So, that time when things are planned for us, without our consent, without our involvement and without consideration of our culture, that time is coming to an end because it's a waste of money, a waste of effort and it's not a recognition of that paternalistic view, you know, that has always existed in Canada.

So, this has to change. We all have to really work together and come to a place where we respect each other, we respect each other's cultures, each other's ways. And we need to walk that talk. I hear it a lot, but I don't see it in action. Thank you.

Mme Weil : Thank you for that, because it resonates. We talked about that this morning. It's the clear message we got last night. When we met on the reserve, they said : You know, we have to be right there, on the front line, bringing the solutions. No more top down, it's just... and a lot of frustration with this top down, very sort of pyramidal, you know, structure.

Mme Ortepi (Mary) : This is why I wanted a recommendation that says that we have participation at these tables.

Mme Weil : Yes, the tables. Thank you.

Le Président (M. Lafrenière) : Thank you so much. Next question from Viau.

M. Benjamin : Merci. Merci, M. le Président. Merci pour votre présentation. Un des éléments que vous avez mentionnés, et je suis d'accord avec vous, c'est par rapport à l'expérience de l'enfance. Or, dans les statistiques que vous nous avez présentées, donc on parle... Je veux parler des «foster parents», donc «foster home placements». Donc, on parle de 3 777 «foster home», des placements de l'enfant en 2018‑2019. Il me semble que, quand je regarde par rapport à la population, donc moins de 20 000, ça m'apparaît comme beaucoup.

Parlez-moi de cette expérience. Est-ce qu'il y a un lien entre cette expérience et, par exemple, les cas, par exemple, qu'il pourrait y avoir au niveau du dossier que nous abordons aujourd'hui, l'exploitation sexuelle des mineurs?

Mme Wabano (Virginia) : With foster care, I'm going to give you in a context. You know, we know how residential school was, and residential school was an era, and then this concept, you know, is also still happening today in terms of foster care.

In our territory, we also have programs where young people need to be housed because of education, because of sports, leaving the community to go school down south. There's still in-homes, and with foster care, you know, within the territory... and not only in our territory, but, you know, they're outside of our territory too. And, you know, a lot of that is related to, you know, again, residential school, lack of parenting skills and, you know, that bound that never happened, you know, over... intergenerational impacts. And so, many children are placed in foster care because of their safety.

And however there are programs, and, you know, we have social workers that are trying to build that, you know, to close that gap and be able to support the families. We have a program in the community of Mistissini, it's empowering families, youth and families to be able to reconnect. So, that is a project, a pilot project that is happening right now, and it seems to be working very well. And hopefully that, you know, it will expand into the other communities to deal with the no foster care placements.

Mme Ortepi (Mary) : When we look historically, there were many policies that were put into place to get rid of the Indian problem, and moving the children was saving them from their culture. When we begin to look at things like the Sixties Scoop, 50,000 children were removed across Canada. And, during that time, it was like a Sears catalog, but what that catalog contained were pictures of First Nations children that were for sale. You could buy a child, and this was not open to just Canada, but it was open around the world. So, when you opened this book, you would have a picture of a child, five years old, will grow up to be a good worker, has some issues with... behaviour issues, you know, is having difficulty adjusting, but, you know, worth, you know, $50, if you would like to buy this child.

So there's a long history and legacy, within Canada, of all the different policies that were put into place to promote assimilation and to promote the Indian... getting rid of the Indian problem. And, when I look at the system that is in place right now with the youth protection, it's a replacement of that system: removing children from their homes, from their families, from their communities without recognizing why is there no parenting skills.

I grew up, I'm one on the people that survived being taken from my family at the age of five because I turned six in April. I did not come home until I was 13. And so, when I think about this, this time in my life and trying to understand all the ways of thinking that made this happen, it really is a black mark on Canada.

And so, when I look at a system of... you know, of the amount of children that are in foster care, the over-representation of First Nations, 30% in all of Canada, that's an over-representation of the amount of First Nations people in Canada. There's so many things that continue, that don't stop because we don't have the information and we don't study the history to make these changes. When I think of the amount of money that a person gets when they are fostering a child, why not take that money and put it into supporting the families that need that support? Teaching them about parenting, providing a support of services, so that First Nations kids can stay in their communities, where they belong. Because I can tell you, from my own experience, it's very hard to be away from home. It's very hard to be punished for speaking your language. It's very hard not to know if you're ever going to go back. This is what the history is. And when you look at our First Nations community, it's important to understand with those eyes. It's important to understand what it is you're looking at. It's important to understand why our people end up on the streets.

• (14 heures) •

It's a long history and it is very recent. The last residential school that was closed was in the province of Québec. It is our generation. It's not three generations away.

So, we are struggling. But the continued way in which different departments in which people still believe that they have the right to make decisions for us, as First Nations people, without our consent, without our involvement, continues to perpetuate that wheel of colonization. And I think that is something that we all have a responsibility to change and to put an end to. And the only way we can do that is to work together. The Cree health board has worked very hard, we have worked very hard, as an organization, to bring healing to our people and to go back to our culture, to go back to our ways of welcoming a child.

Once, there was a day, when I was young, when someone was with child, and we would celebrate, and little hats would be made, and it was a wonderful time. And then came the time when they took our children. And what did that teach you? My mother said it taught her : Don't love your child, don't hug your child. When someone was pregnant, it wasn't a time of celebration. Rather, it was a time of pity, of remorse. No hats were made. No family gathered in... because this child would be taken and this child may never come home. And so, my mother said we learned not to love our children, not to hug our children and to know that, when they left, maybe they wouldn't come back. So, the more you loved them, the more painful it would be.

And I left when I was five and I came home when I was 13. I'm one of the ones that made it home. But we still have the trauma of this legacy. We have the trauma because people are afraid to love their children. We take it for granted. You take it for granted to have a child, and you raise it, and you cuddle it, and you hug it, and you love it because you know no one was ever going to come and take it away from you. That is not our history, and it's a sad, really sad history because we have elders that, now, are still not able to hug their children and we have parents that weren't hugged, and don't know how, and are afraid, and don't know why.

So, this journey has been a very difficult journey. And it's only with understanding, it's only with compassion, in our place, forgiveness, so that we can still reach out and try to work with all of you that we can build a new path and build a journey that we actually walk together. And I hope to live long enough — and I have gray hair now — to see that journey. I think that, when I heard about the police officers that really, really cared and really want to work, and from their hearts, it's like a bird singing on a beautiful morning. I'm hoping to believe in that.

So, as the Cree nation, as the Cree health board, those are all the things that we carry. Those are all the things that we look at. And we're trying very hard to reach out, and work on programs, and work on things that change how we see each other, and how we view each other, and also to be aware of where we have journeyed both of us, you and I... comes to our country, to our home. I hope that the journey forward will be one of respect. I hope that the journey forward will be one where we are involved in things that pertain to us. We are not your children. We are a people, the First Nations people of this country. In our healing, you don't have the answers, but we would very much appreciate it if you supported us in our journey in finding our answers. «Meegwetch.»

Le Président (M. Lafrenière) : «Meegwetch.» Thank you. Next question from Hochelaga-Maisonneuve.

M. Leduc : Pas évident de poursuivre après ça.

Le Président (M. Lafrenière) : C'est dur, je sais.

M. Leduc : On savait qu'en venant ici on aurait des témoignages poignants. Puis, étant père d'une petite fille de deux ans, j'ai de la misère à comprendre qu'on puisse prendre des enfants à cinq ans puis ne plus les revoir jusqu'à... En tout cas, ça me bouleverse.

Et ça me bouleverse aussi, ce qu'on a entendu de Mme Saganash, que je connais un peu pour avoir été dans des événements politiques avec elle dans les dernières années. Je ne connaissais pas son histoire. Donc, je la découvre aujourd'hui. Puis je ne sais pas si elle nous écoute, mais, camarade, je te trouve très courageuse, ne lâche pas.

Ma question concerne l'enjeu du racisme. On a reçu avant-hier Femmes autochtones du Québec, qui ont évoqué la question du racisme dans toute cette thématique de l'exploitation sexuelle juvénile, des mineurs. Ils ont fait référence au syndrome de Pocahontas. Je ne sais pas si, dans le contexte, de Val-d'Or, dans le contexte de votre communauté, de vos communautés... Est-ce que ça résonne, ça aussi? Dans le fond, finalement, ma question, si je peux la résumer ainsi, quelle est la place du racisme à l'intérieur de cet enjeu-là? C'est une question assez large, oui.

Mme Ortepi (Mary) : It is a fairly large question. And, you know, 500 years of history, it's very difficult to have this conversation and to be able to respond in a good way. Pocahontas, yes, the romanticized version of abduction and dying far from home, away from your own people. I lived in Val-d'Or, I grew up in Val-d'Or in my teens, and, when I came here, and that was after getting out of one prison and into another prison, when I came here, what the elders and the women told me is : Never, never be picked up by the police. And, many times, women would come to my mother's house, having been victimized by the police who are supposed to protect them. And, at one point, I remember there was a game. The game was if you could find a young Cree girl, and get her really, really drunk, and you could get her drunk and give her a drug so that she wasn't aware, and she could be sexually abused and filmed being sexually abused. This was sold on the street. This made money. This is during my time. So, walking on the street was never safe. These games were not safe.

And it's really a strange thing to have to say at this time that it was the motorcycle gangs of Val-d'Or that kept me safer than the police. Isn't that a strange thing to say? Because we see them as being very... well, less than law-abiding, shall I say, but, if I found myself on the streets of Val-d'Or late at night, they said to me I could go up to anyone of them, and they would give me a ride home so I would be safe from the police. And that, really, is a very sad statement.

• (14 h 10) •

And the reason why we were targeted is because we don't talk. Why don't we talk? Because there is no safe place to talk, there is no one to listen to. And so, the more that we didn't talk, the more we became the targets. And, when they did talk, no one believed them years later. And so, you ask why there's a lack of trust in the system. I wished for a day, when I was young, that maybe I wouldn't be Cree. I'd be nice and white, and I could be safe, and I could go shopping, and I could spend time with my friends downtown, and I could make it downtown and home without living in constant fear, and looking over my shoulder, and knowing that, when I needed help, I could go and get the help that was supposed to be provided. And I was so grateful for the motorcycle gangs of Val-d'Or, and I still am, because they helped to keep me safe. When I needed help, they would put me on their motorcycles and take me home.

And so, Pocahontas, yes, she's the perfect victim, and she was a victim historically, and she continues to be a victim now. Sexual violence is not romantic. There's nothing romantic in that. It is aggression, and it kills our spirits, and there is no one to listen. The systems have to change. This has to change. And we're working hard at it, and the Cree health board. And we're hoping to have more involvement in the things that pertain to us and to have the courage to speak when you ask these questions.

I guess I've gotten my gray hair, and so I speak the truth now when I am asked. I don't sugarcoat it because my life hasn't been sugarcoated either. So, when you ask this question, I will be honest. And I know that sometimes I'm dealing with fragile egos. However, this is a conversation that we have needed to have for a very long time. And I'm really, really impressed and really happy that you have come here to listen to us. «Meegwetch.» Thank you so much for that respect. «Meegwetch.»

Mme Wabano (Virginia) : I want to add some comments. You know, not long ago... You're all familiar with the situation that happened, with the Val-d'Or situation, with the women that came forth, of the actions that were done by the service of the police who were to protect them. And that weighs very heavy on many, many aboriginal women and communities because Mary talks about trust. The trust in the police service is very big within Val-d'Or and it is a very big issue. And, you know, not long ago, there was a report that there was no act of violence there. And that really does kill our spirit, especially to women who are givers of children. And to be able to believe in the system is very difficult at times. But, like I said earlier, I am very grateful for those that do support in finding young missing women.

I'm not saying that the whole police force in this province or within Canada are the same. I'm not saying that. There are some good people out there and there are some that are not. And, with all the oppression that has come to aboriginal people over the years... I, myself, was a residential school survivor. I went when I was four years old. I turned five and I stayed there until I was 14. I am 57 years old right now and I've only lived with my parents for seven years of my entire life. Although I was one of the children that was able to maintain my language, it was because, when we had our breaks at Christmas, March, in the summer, we didn't live in the community, we lived in the bush, and that's where we maintained our bond with our family and our language.

And, with that, it has made me strong to be able to advocate for aboriginal people of all ages, know of what they go through. Exploitation of minors is rising. You know, they can go as far as $250,000 for a child to be exploited. Just recently, a young girl, she's Filipino, got out of the sex trade because now she didn't satisfy her trafficker who finally said : No, you can move along. There are a lot of systems, policies, protocols that don't help the situation, unlike...

The recommendation is we need to be involved. We need to be involved at these tables. We need to tell you what's happening. Our communities speak. Collective knowledge at the community level is very important. They're the ones that bring out all what we need to do for them. We're here to speak for them. And that's why I'm here today. I am very glad that I was given this opportunity and I want to thank the Cree Board of Health for allowing that opportunity to come and sit with you today. But the hurt and the pain is still ongoing today. It still is. «Meegwetch.»

Le Président (M. Lafrenière) : «Meegwetch.» Thank you so much for sharing with us. I'm going to correct one thing. You said you need to be involved. You don't need to be involved, you're part of it, and we'll be working together. This is not one meeting, one visit. We'll be working together. This is a strong position that we're taking with you. And thank you so much for being here today.

I'm going to suspend our work for a few minutes.

Une voix : ...

Le Président (M. Lafrenière) : Very quickly.

M. Lamothe : Guaranteed. Ms. Wabano, you mentioned that police don't take your report before 48 hours, a person who disappears. Which police are we talking about?

Mme Wabano (Virginia) : ...the police forces. Every time, when you call and you report...

M. Lamothe : 48 hours.

Mme Wabano (Virginia) : 48 hours.

M. Lamothe : Just don't make sense.

Mme Wabano (Virginia) : That's why you need a system to act immediately.

M. Lamothe : 48 heures, ça n'a pas de bon sens, ça, là, là!

Le Président (M. Lafrenière) : ...to mention you personally this. We're, at the very least, three ex-police officers, and this is not the way it should be.

M. Lamothe : No, not 48.

Le Président (M. Lafrenière) : We'll talk about that.

Mme Ortepi (Mary) : If you're lucky, if someone's listening.

Une voix : If?

Mme Ortepi (Mary) : If. Because, sometimes, what they're saying : Ah! they probably went out drinking, so what are you worried about? You're going to find them. It's all the stereotypical responses of not recognizing their critical situation.

M. Lamothe : No, not 48. At my time, it was 24. And, even at 24, it was long. But 48 just doesn't make sense, not at all.

Mme Wabano (Virginia) : In the case of Lynn Iserhoff, 48 hours.

M. Ouellette : And there was no «if» at the time, too.

M. Lamothe : What?

M. Ouellette : There was no «if».

M. Lamothe : Yes, yes. That's sad.

Mme Wabano (Virginia) : Many times, many times, that's what they tell you, 48 hours before someone is considered.

M. Lamothe : Thank you very much.

Mme Ortepi (Mary) : Or, the other one, not bothering to take anything at all and just say : You know, they're probably all drunk. They're probably hanging out with their friends.

Le Président (M. Lafrenière) : Unfortunately.

• (14 h 20) •

Mme Ortepi (Mary) : It's all the... You know, they're druggies, so they're probably hanging out in a back alley somewhere. So, it's all those kinds of responses and not taking this seriously because, even though our people are on the streets, we also have a network of... trying to keep them safe. And, when they fall off our radar, then we know there's something wrong, but that's not taken into consideration because what do we know and how important is it to find this person? It just isn't.

Le Président (M. Lafrenière) : You've been referring to Diane, Josée and Carlo from Montréal when you were talking about the survivors. We had the book My friend, my abuser. It was an important part for us to get more knowledge of it.

And, again, thank you. «Meegwetch.» Thank you.

(Suspension de la séance à 14 h 21)

(Reprise à 14 h 31)

Le Président (M. Lafrenière) : À l'ordre, s'il vous plaît! Je souhaite maintenant la bienvenue à M. Donald Nicholls. Bien, premièrement, M. Nicholls, merci d'être avec nous. Merci beaucoup. C'est très apprécié. Je vous rappelle que vous allez avoir le temps de faire votre exposé. Et par la suite il y aura une période d'échange avec les membres de la commission. Et, M. Nicholls, excusez-moi, je suis encore éprouvé de ma dernière rencontre, c'est une présentation combinée ou seule? Parce que je voyais 15-15. Donc, c'est 20-25?

Une voix : ...

Le Président (M. Lafrenière) : You're going to have 20 minutes to do your presentation. And afterwards there will be 25 minutes of exchanges with the members of the commission. I'm sorry for that. I was still thinking of the last presentation. Again, thank you so much for being here. This is extremely important for us. So, you get 20 minutes, sir. Thank you.

M. Donald Nicholls

M. Nicholls (Donald) : It's a pleasure, Mr. Chairman. Thank you to the select committee for having us here today. You have a very important mandate on the sexual exploitation of minors in Québec. And we're here to help you fulfill that mandate, provide some information and some answers.

You know, on the previous presentation, it's very hard not to get involved with the discussion and everything that was going on because it was so impactful, the stories that were told, and we appreciate that. And we're probably going to touch on a few of the things that they have touched on and maybe expand on those. And so, it was very good. It was a good start.

So, I know that you have asked us to come and present. First of all, we're representing the Cree Nation Government, the Department of Justice and Correctional Services. We've been... and had a department since 2008, when we signed an agreement with Québec, with the Québec Government, to create the Department of Justice and Correctional Services. And now we have over 60 some employees that are professionals, that work in corrections, and work in courts, and work with police. And we work in schools with interventions with children, and do cognitive behavior therapy, and we do a lot of outreach in the area of justice and corrections. So that's where we're coming from.

Before addressing the points, I know you wanted us to look at how we can better promote the denunciation of victim procurers and client abusers, and how we can better meet the needs of victims of sexual exploitation in the Cree communities, and how we can better promote repression of the client abusers. But, before we address these needs, it's important for us to shed some light on the context that enables sexual exploitation of indigenous youth in general and Cree youth in particular in our case and the measures to address the issues to be more effective if we understand the context and the reasons why indigenous people, especially indigenous women and children, are so vulnerable to sexual exploitation.

As you say in your document in the consultation paper that you sent us, the numbers are hard to come out with because it's obviously an activity that's dealt with intimidation, and with silence, and with a lot of measures that... the criminalization or the shaming aspect which prohibits people from coming forward. But you mention that, of course, they're in the urban centers, in Gatineau, in Montréal, in Québec City, and, we believe, of course, in the smaller urban centers like Val-d'Or and Chibougamau. This is also there and also it permeates, as you heard in the last presentation, into the communities itself.

Because these activities take place out of the public view, the denunciation reporting is depending on the victims, the families, the witnesses coming forward, and, consequently, you know, as you said, it's difficult to determine. And even those numbers... were reported, we know that would just be a small representation. We know that much of the activity that happens that's of a criminal nature, by the time it comes to a reporting or to court, only represents a small portion, especially when it comes to things involving sexual violence or exploitation. And, further complicating things, you know, there is, as mentioned before, some intergenerational trauma, and the abusers may be known to the people that are taken advantage of, the victims may be known, and so there's some attachment bonds to overcome as well.

In the final report of the National Inquiry into the Missing and Murdered Indigenous Women and Girls, it devotes an entire section to the sex industry, and sexual exploitation, and human trafficking. The national inquiry based its report and findings on testimonies collected across the country. Many of these testimonies paint a disturbing story that often reflects realities of the indigenous youth in Québec as well and some Cree youth in particular. So, we find that the national inquiry report is highly relevant to the work with this committee and speaking both of sexual exploitation and related human trafficking. And so, we've included a few quotes in there for you to look at from the national inquiry to further support the section that they created specifically. We know that the report is very large, but they devoted a specific section just on sexual exploitation, and it carries a number of recommendations with it as well. So, we would invite the committee to look at that.

The likelihood of indigenous people, particularly indigenous women, falling victim to violence, and sexual exploitation, and trafficking is fairly well documented. As Virginia had mentioned in her presentation just earlier, according to the NATO Association, more than half of all women trafficked in Canada are identified as aboriginal First Nation, and the correlation with this phenomenon is also hundreds of missing and murdered indigenous women and girls across Canada... presents significant safety and security concerns for all indigenous people. And so, you can see the statistics in the quote as well, that 50 some per cent are indigenous, whereas indigenous people only represent 4% of the population. This is included in this reference that we made from the NATO organization, but it's also included in the CNN report that was done a couple of years ago, when they looked at the Winnipeg situation of a young girl that was forced into human trafficking at age 11 by being invited by a friend to come to a party and then eventually forced to produce $1,000 to $2,000 a day. And also, besides the CNN report, the joint FBI-RCMP task force also refers to the statistic in some of their findings.

Indigenous women and girls have an overall rate of violent victimization twice as high as for indigenous men and close to three times as high for non-indigenous women. Between 1997 and 2014, there were 71 females sex worker victims of homicides who were identified as indigenous, representing one-third... one in three, sorry, 34%, of all female victims working in the sex industry. Indigenous women and girls make up the majority of those being subject to domestic violence... domestic sex trafficking, sorry, and violence probably, in Canada, although indigenous people only make up approximately 4%. And Virginia highlighted some of the reasons that traffickers, and procurers, and client abusers exploit victims' vulnerabilities. Indigenous youth and children fall victim to sexual exploitation and trafficking because they often find themselves in extreme vulnerability.

The national inquiry heard testimony that the factors that cause to become involved in the sex industry... Many of the girls and women in the sex industry have experience of child abuse, violence, trauma, and this may impact their vulnerability to exploitation and trafficking. It also heard testimonies about foster parents normalizing the exchange of sex for money and safety by sexually abusing and threatening foster children. The national inquiry reported stories, echoed by various witnesses, that demonstrate a connection between young indigenous girls' involvement in the child welfare system and sexual exploitation, sexual trafficking and survival street level sex work, I think what we had heard from the young lady that testified in the video earlier. Indigenous women and youth who will leave their communities for urban centers are particularly vulnerable.

Many historical and socioeconomic factors have contributed and continue to contribute today to the marginalization and vulnerability of indigenous women and youth. According to the report on the Truth and Reconciliation Commission of Canada, the disproportionate victimization of indigenous people can be explained as part as a result of indigenous children treatment in residential schools and that they were denied an environment of positive parenting, worthy community leaders and a positive sense of identity or self-worth. The legacy of residential schools, combined with centuries of ill-conceived policies and deeply held prejudices, have created an environment and certain realities that leave indigenous women and children particularly vulnerable to sexual exploitation.

• (14 h 40) •

In many residential schools, we know that physical, emotional, and sexual, and psychological abuse was commonplace. And, by the time these children returned home, they arrived having been victimized, with little connection to their families, language or culture and without the tools and support they needed to heal. In many cases, the remoteness of their community made it financially impossible to even return home and increased their susceptibility to victimization. Without an ability to heal, these harms were often passed to the next generation in a common reality called intergenerational trauma or intergenerational impacts. The cycle continues to be perpetuated without proper support and engagement.

Some of the socioeconomic conditions and housing, I think that Virginia touched on this point and said that... and we touched on it, the Grand Chief and others, when the Viens Commission went around... was that some of the socioeconomic factors could be poverty, overcrowded housing in the community, substance abuse, physical, and sexual, and psychological abuse. And you do not have adequate support for a healthy transition if you're going into an urban environment and you don't have the support to allow healing from harm or victimization or associated addictions, either in the communities or when you're in the urban environment. Some also may be attracted by the promise and enticements, including through Internet and social media... or that they were blackmailed into unhealthy situations, an environment leading to sexual exploitation and trafficking.

I don't know if the committee is aware, but the United Nations, this year, put out a special report on the Convention on the Rights of the Child, with guidelines recommending to state governments that children... to reduce this impact because they said that, as Virginia had mentioned, it's increasing at an alarming rate, that the sexual exploitation by predators to children through the use of Internet and multimedia is on the increase in the world. And so, they recommend a number of provisions to reduce this.

One of them is to say that all Internet providers in the state should remove child pornography, child images, child videos and should not allow those to perpetuate or continue to be cycled within the Internet community.

And also they recommend that we engage in something called economic empowerment, where we do income substitution, where we find that people that are in poverty conditions and that are turning to human trafficking... that we find other ways of providing incomes for them, so that we reduce the amount of people that are entering it because of sheer poverty.

Also, there is an interesting recommendation that they say that children should be involved in the development of policies within the state to protect their own welfare and that their shared ID should be done in an age-appropriate manner so that we should reach out to the children and solicit from them some ways of protecting them more in their environment.

And also there were some issues to better police the Dark Net and that, right now, it's being used to share a lot of information on children that are being trafficked.

So how can we better promote the denunciation by victims of procurers and client abusers? As mentioned earlier, traffickers, procurers and client abusers exploit victims' vulnerabilities. For as long as the victims remain in a state of vulnerability, it is more difficult for them to denounce the procurers and their client abusers.

The national inquiry noted that, due to the stigma of trafficking, victims may not want to report for many different reasons, including being physically, economically... or otherwise vulnerable position and being threatened by traffickers who use humiliation, or intimidation, or drugs, or anchors to prevent victims from reporting. For the same reason, youth involved in sexual exploitation may be reluctant to denounce the procurers or client abusers.

By the same token, reducing the vulnerability of those involved or susceptible to become involved will promote denunciation of abusers and potential abusers. And reducing vulnerability involves helping victims, potential victims and others, recognize and denounce an exploitative relationship, providing a safe and supportive environment for victims to come forward and reaching out to them and empowering young people so that they can avoid falling victim or so that they can break away from exploitative relationships.

Recognizing an exploitative relationship. Victims of sexual exploitation may be trapped in a legacy of intergenerational impacts of residential schools. They may need help to recognize the exploitative nature of relationships. They may need help to break the cycle of intergenerational trauma. The history of abuses related to residential schools, systemic discrimination and past and present policies and legislation may interfere with the connection between the individuals and their community or their family support structures. Work must be done in education and awareness with children and youth from early on, and children need to learn and understand that it is not normal to be sexually abused or touched in certain ways and that they should not keep certain secrets. Children must learn how to recognize an exploitative relationship and they must be given the tools and a safe environment to talk about these matters and to report any abuse.

As a part of our mandate, the Cree Department of Justice and Correctional Services, we established a Cree SNAP program, which means Stop Now and Plan. In collaboration with the Child Development Institute and the Cree School Board, our staff works with children ages six to 11 on essential life skills, on how to deal with conflict, anger, frustration and anxiety. This year, with our partners, we started to work with ages 12 to 17 as well. And the program gets children to think about consequences, options and plan positive before acting impulsively or making their problems bigger.

In 2016 and 2017, we worked with 2,301 Cree children in 138 classrooms. In 2017‑2018, we worked with 2,400 children in 153 classrooms, and last year, in 2018‑2019, we worked with 1,512 children in 99 classrooms. Through our Cree SNAP program, we're working to help children take control over and maintain respect for their bodies and to become aware of inappropriate requests from others. So, we created a special session, session 14, which specifically speaks to guarding against people asking them to do inappropriate things or touching them inappropriately. And then, also, when we work with this older kids, Grade 5, and 6, and upwards, we teach them about the dangers of sexting and exchanging texts and images of a sexual connotation through their emails, texts or social media.

The national inquiry called for health service providers and education service providers to develop and implement awareness and education programs for indigenous children and youth in issues of grooming for sexual exploitation. Personnel working in daycare and educational institutes... educational services, sorry, should be aware of the importance and the means of detecting indigenous children exposed or subject to sexual exploitation. Service providers working with indigenous people must be sensitized to indigenous realities. In particular, frontline interveners, medical doctors, social workers, welfare workers, probation officers, teachers, lawyers and police officers must be able to identify indigenous victims of sexual exploitation and take necessary measures to ensure that these individuals are protected and returned to a safe environment.

The Québec Government must carry out a province-wide campaign to educate, sensitize the public and those involved in certain industries that may unintentionally facilitate sexual exploitation of youth, including the hotel industry. In this regard, Manitoba could provide inspiration. Since 2010, the Manitoba Government has partnered with the Manitoba Hotel Association to promote a campaign to help staff in detecting, reporting and preventing child sexual exploitation. Recognizing that hotels are a place often used in sexual exploitation, the MHA campaign is aimed at providing frontline workers with information they can use to spot unsafe situations and to respond appropriately.

So, in providing a safe and supportive environment, the complaints filed by victims of sexual exploitation must be treated seriously and thoroughly. Victims must be confident that they can file a complaint and they must feel safe to come forward.

The national inquiry noted that the perception of impunity on the part of abusers at the idea that no one will come looking for them creates conditions for violence and abuse. Some indigenous youth may fear repercussions of reporting an incident because of an abusive relationship to the authority or frontline workers. They may be revictimized by the justice system, either because of little support that they've been provided with, or the difficulties of testifying or the fear of not being properly protected from violent exploiters. The national inquiry also noted the systemic indifference of the police and the justice system when it comes to indigenous women and girls involved in the sex industry.

• (14 h 50) •

At the end of the section of its report related to the sex industry, sexual exploitation and human trafficking, the national inquiry made some important findings, that police services struggle to effectively respond to cases of human trafficking, and sexual exploitation, and violence against women and people in the sex industry. And the detection of offenses such as human trafficking and sexual exploitation is difficult, compounded by difficulties investigating and prosecuting these crimes.

Current laws, including those regarding sexual exploitation and human trafficking, are not effective in increasing safety overall for indigenous women, girls and people in the 2SLGBTQQIA community because of the laws... that they do not acknowledge proper imbalances and social stigmas. Indigenous women, girls and people in the 2SLGBTQQIA people in the sex industry do not trust police services to keep them safe due to criminalization of their work and the racial and sexual discrimination they may encounter, as well as social stigmas attached to the sex industry in general. The rights, and safety, and security of indigenous women and people in the 2SLGBTQQIA people in the sex industry are not being recognized and protected. Addressing the findings would be a good start if we were to promote a denunciation by victims of procurers or client abusers.

In short, the Government must take appropriate measures to put an end to the culture of impunity and indifference in regard to indigenous women and girls involved in the sex industry. It must work at all levels to eliminate the fear and mistrust to stop indigenous women and girls who experience violence in the context of the sex industry from talking to the police. In addition, there must be concerted efforts, including by the Government entities and organizations involved in policing, justice, education, health and social services and the media to address many of the concerns raised above. For example, all frontline workers must receive training in matters related to sexual exploitation of indigenous youth and children, including with respect to the necessity of taking all complaints seriously and not ignoring any youth, especially those in vulnerable circumstances.

Special attention must be given during events such as festivals — I know you heard testimonies for, like, the Grand Prix — when a number of sexual abuses and demand for sexual services increase. Outreach programs with effective communication strategies must be developed and carried out to reach out to sexually exploited youth and children who may not be in a position to come forward on their own for various reasons. Shelters and transitional facilities with protection and care are required for a safe place for those who wish to come forward and break away from an exploitative environment.

The victims of the CAVAC or the crimes... sorry, of crime assistance centers, so the CAVACs, provide confidential and free of charge frontline services, including post-trauma, psychosocial interventions to victims of crime, their immediate families and to witnesses of crime. In many cases, CAVAC workers play a key role for victims by serving as their primary point of contact. The importance of CAVAC service is even more significant where the trust in authorities, including police, may be an issue. In Eeyou Istchee, the Justice Department operates Cree CAVAC services to service primarily the Cree individuals and the Cree communities.

All CAVAC personnel in Québec, particularly in urban centers such as Gatineau, Val-d'Or, Amos and Montréal, must be sensitized to the vulnerability of indigenous victims, particularly youth victims. They must be trained to adopt special approaches when dealing with indigenous youth, and particularly those involved with sexual exploitation. CAVACs, in certain urban centers, seem to have implemented special measures to monitor and address sexual exploitation of youth. In particular, a pilot project for the creation of an intersectorial team to deal specifically with sexual exploitation seems to have recently been established in Montréal. Such measures must take into account the special needs and circumstances of indigenous victims and youth and they must be established in all urban centers, particularly where indigenous youth and children are present.

Additionally, training must be provided to CAVAC personnel throughout Québec to increase awareness and sensitivity to particular circumstances of indigenous youth and vulnerabilities of sexual exploitation. The Montréal CAVAC appears to have begun to establish contacts with indigenous resources in order to better meet the needs of indigenous victims of sexual exploitation. And each CAVAC must identify the resources within their region and provide additional complimentary assistance to indigenous youth, such as native friendship centers. Each CAVAC must establish contacts and relationships with organizations to be prepared when the need arises. The implementation of these measures will require continued support, including technical and financial support, from the Government of Québec.

Empowering young people. Measures must be designed and implemented in collaboration with all stakeholders to empower young people to reduce their vulnerability and to help to avoid the traps or break away from sexual exploitation, for example basic skills. Some youth may have basic skills and they may not have any other way to get money or support, hence so may need to work with them to build their skill level to promote their empowerment and self-esteem and to help find alternative sources of income to reduce and eliminate their dependence on sex-related activities for money.

Safe shelters. In some cases, they may need a safe shelter to allow them to transition to a new living arrangement and to transform their lifestyles and they may need help with finding housing and employment.

Addiction behavior. Some may have developed an addiction to drugs supplied by their exploiters, so we'll need to work with them to address addictions. They may need crisis intervention, detoxification to address drug and alcohol abuse, and may be perpetuating or enabling their exploitation. They may need peer support programs, especially during exiting processes.

Counseling and support. Some may feel stigmatized or shamed and they may need counseling or support services to have confidence to break the cycle of exploitation, and transform, and rebuild their life. They may need counseling services to allow them to explore healthy ways of coping with emotional and physical harm, trauma and abuse.

Protection. Some may be scared of the threats of violence by those exploiting them, so they need protection and safety. We need to monitor abusers, recruiters, including those gangs and criminal organizations, to prevent recruitment or harassment.

And community and family support. Some feel disconnected from their community or family and may have no means of connection that would assist in changing their situation. Some may need to work to rebuild their connections and their sense of community. They may need programs to promote cultural renewal, such as working with elders to pass on traditional teaching values and roles.

How can we better meet the needs of victims of sexual exploitation in the Cree communities? Victims have immediate needs of protection, care and service providers. The community and competent authorities must address these needs. In longer term, we must address the underlying factors : historical and systemic treatment, socioeconomic conditions, overcrowded and substandard housing. We must address the history of abuses related to residential schools, systemic discrimination, past and present policies that interfere with the connection between individuals and their community and family support structures.

Resources must be invested in victim services to support healing and change in hopes of stopping the cycle of intergenerational trauma. Witnesses before the national inquiry emphasized that any serious attempt to combat sexual exploitation or trafficking among indigenous girls and youth must be met with equal serious commitment to ensure that the adequate financial health and social support exist to make other options viable.

We must address socioeconomic conditions that indigenous women and youth do not have... to leave their communities in the first place. One of the most urgent needs, of course, with indigenous communities is a critical shortage of social housing. Until this single issue is resolved, the indigenous people will continue to be forced from their communities into urban centers, where there are risks of homelessness, violence or exploitation.

In the final report, the Public Inquiry Commission on Relations Between Indigenous Peoples and Certain Public Services in Québec recognized the need to improve living conditions and to address housing in indigenous communities. It called upon the Government of Québec to conclude agreements with the federal government, under which both levels of Government financially support the development and improvement of housing in all indigenous communities in Québec. It also called upon the Government to contribute financially to social housing initiatives for indigenous peoples in urban environments.

All these measures will come to nothing if we're not able to effectively communicate with current and potential victims. We must find a medium and a means to communicate directly with them through parents, guardians, families, friends, educators and frontline workers so that they know that support is available.

• (15 heures) •

Finally, how can we better promote the repression of client abusers? Again, traffickers, procurers, client abusers exploit victims' vulnerabilities. We must work at empowering victims and reducing their vulnerabilities so as to change the power dynamics, and to help them come forward, and to denounce the procurers and client abusers. Changing the power dynamics means empowering young people so that they have the means, and the confidence, and the strength to brake away from an exploitative relationship and environment or resist falling into one. We must do awareness campaigns. Province-wide and community awareness campaigns must be developed and used to sensitize the public and those involved in certain industries that may inadvertently facilitate the sexual exploitation of youth, including the hotel industry — and, as we mentioned, the Manitoba example. This should be initiated by Government in collaboration with stakeholders, including indigenous Governments and organizations, the police, the CAVACs, the media and concerned industries.

Institutions and policies. The institutions and policies must be reviewed and reformed to ensure protection and safety for all those who denounce client-abusers. The Government must put an end to the culture of impunity and indifference in regard to indigenous women and girls involved in the sex industry. It must work at all levels to eliminate the fear and mistrust that stop indigenous women and girls who experience violence in the context of the sex industry from talking to police.

Interprovincial and international collaborations. The Government must take part to ensure that police forces in Québec, whether it's the SQ, SPVM, Eeyou police force and other stakeholders, participate in interprovincial and international initiatives aimed at monitoring and repressing criminal organizations involved in cross-border human trafficking and sexual exploitation.

Also, Internet and social media. As we mentioned, the province-wide and community awareness campaigns must be developed to sensitize parents, educators, youth to the risk of the Internet and social media being used as a tool for recruitment. Policies and measures such as crime stoppers and surveillance mechanisms must be developed and implemented to protect youth, including the indigenous youth, from the danger of being recruited through the Internet and social media and to promote the repression of client-abusers through Internet or social media.

So, in conclusion, addressing sexual exploitation of youth will require concerted effort from the Government and all stakeholders. For a start, the Government could implement the United Nations Declaration on the Rights of Indigenous Peoples, article 7, that provides: «Indigenous individuals have the rights to life, physical [...] mental integrity, liberty [...] security of person. [...]and shall not be subject to any act of violence...» The Government should also implement recommended call for actions in the Truth and Reconciliation Commission, the National Inquiry on Missing and Murdered Indigenous Women and Girls and the Public Inquiry Commission on the relations between Indigenous Peoples and certain public services in Québec.

The implementation of the United Nations declaration and these recommendations and calls for actions will set up a proper condition and circumstances to better address and hopefully put an end to sexual exploitation of indigenous youth. Thank you.

Le Président (M. Lafrenière) : Thank you so much for that very complete presentation. We are now going to start with the first question from Sainte-Rose.

M. Skeete : Merci, M. le Président. Thank you for a rigorous and well-thought-out report. I think it helps us in a lot of ways.

We recently heard the Québec Association of Hotels... I don't know if that's a good translation, but, anyways, Hotels, the association that speaks on behalf of numerous hotels in Montreal area and Québec, and, in a lot of ways, they didn't seem very empowered by the issue. I think they felt as though it was a serious issue to them, but didn't really know how to tackle it. I was wondering if you can give me more information on what Manitoba has been doing. I'm very curious to see what specifically they have done and how they have partnered with the province.

M. Nicholls (Donald) : Oh! definitely. As we mentioned, in the National Inquiry's final report, which is very voluminous, there is a section that goes into much more detail on what they have done with the Manitoba experience, and we can provide that to the select committee, if you want. We can take that excerpt out, so that you don't have to rifle through a 700 pages document, and we will provide that to you as an example or as a model.

M. Skeete : Yes. Thank you. I appreciate that. I am sure that will be useful.

The second thing that you brought up, and I think it's the first time we have heard it, was regarding the potential partnership with Internet service providers and Internet companies, as it relates to the right to forget, or removing images, or things like that, that may appear on the Web.

I know that, in Europe, there is this concept about the right to forget. You know, I think if we all look back at our pre-Internet youths, thank goodness there were not the amount of cameras that there are today. And youth today doesn't have that advantage of being forgotten.

Do you have any thoughts on that in general? Do you have a little bit more that you can give us about what your vision would be in terms of that sort of partnership, what it would look like? I'm very intrigued because I think, a lot of ways, when teenagers are growing up, are learning, they are doing things that they may later forget, and then, of course, it's in the Universe, and now they can't get it back. Do you have any ideas about that at all?

M. Nicholls (Donald) : That recommendation, I would like to say, came from me, but it came out of the UN policies, right? And we can send you that list of policies. But, when it comes to social media or when it comes to the Internet providers, you know... You know, that recommendation is really to put upon them and saying that we will not tolerate this environment and that, if we are going to change the environment, we have to set out a clear message and say that this type of media should not be coming through your system.

But, when we come down to the creation, I think what you're asking... a little bit about the creation, you know, the right to forget and: Oh! someone took a picture of me inappropriately, and it's all over the place, I have been asked to talk to children and youth, especially on sports teams, about taking videos of each other when they're in the shower, in the change room, and then posting them to humiliate them or to whatever and explaining to them that this is illegal. It's an illegal act and it's child pornography. And they may be a child, but, once they start sending it around and it's an image that is sexually exploitive of an individual, whether they are doing it to shame them, or humiliate them, or whatever, it still amounts to an illegal act. And they have to be aware of that, right?

And so, I think that's a part of the awareness campaign to say, OK... And every time I go into a Montréal hospital, there's always a big poster, and it says : You have the right not to have your image taken, you can tell someone that has a camera and says to you... you can say to them : No, you're not allowed to take my picture and you're not allowed to keep it, you have to delete it. And they have that all over the place. I think we have to create an environment where we say : No, just because it's handy that you can have a very high quality phone that's also a camera and a video recorder... that we have to educate people and say : No, it's not right for these certain activities. And, if you do those activities, and you store those activities, and you start sending those around, then you're going to start contravening laws that exist for the protection of everyone, including yourself, right?

M. Skeete : So, to summarize, you see it as a two-pronged approach. The first one is on the more technological side, having that conversation with the tech industry, and, on the other side, you see it as an education, that we need to educate our children better as to what is appropriate, what isn't. And finally...

M. Nicholls (Donald) : ...third prong. I think you also have to raise awareness that... And I know that we mentioned a little bit, in some of the reports and some of the information that's here... is when it comes to the sex education. I think that we still have to have a way of educating children and youth in an appropriate way, but educating them about what's good or what's normal in sex education, not allowing the Internet, which has all of these other activities on it, and trying to think that that's a normal part of a relationship, right? And so, I think there's a third prong there too, it's that we have to educate that, if they do get into pornographic sites or what have you, for whatever reason, that that's not normal, that's not how a normal or a healthy relationship is.

And apart of that, we started this initiative about five years ago and we started teaching people what healthy or normal relationships are. We do a 10 days certificate, we teach you how to have a relationship with yourself, with your spouse, with your family and with others and what does that amount to. And I think we have to get back to those fundamental values and teach people about healthy relationships or partnerships as well and what that's a part of, not the fantasy or the exploitive parts, right?

M. Skeete : Well, thank you for adding that third prong, because that means there seems to be a consensus in terms of education and showing children who unfortunately are currently learning about sexuality through pornography. So, thank you for bringing that up. That's an important addition.

I have a final question, and it's a relatively short one, but can you give me a sense of what the attitudes are in the indigenous community about LGBT... and I always mix up the number of letters, but the LGBTQ community? What are the attitudes in the indigenous community? Because earlier it was said that there's a higher incidence of suicide in the community amongst that population. So, can you just give me a picture of whether or not that's something that should be on our radar, the level of tolerance, how those people are seen as being different or not, or just give me a sense from an outsider's point of view?

• (15 h 10) •

M. Nicholls (Donald) : Sure. And you noticed, the more that I talked about it, I get better at that acronym. It's a difficult one because, of course, it's us being more understanding, us having a wider perspective on people's choices and self-identifications.

You know, they say that justice is blind. We don't see the discriminatory parts or the differences in people, we try and treat people fairly. And Virginia mentioned that these conferences that happen annually happen outside of the territory, and every year they've come to us, to the Cree nation Government, to help support it, and we have supported the conferences for people to get together, and talk about their differences, and support each other, and all that.

So, I think that's growing. I think that there is a young man, also, that came up with a nice book, in Québec, talking about his experiences, and that got a lot of good traction too. He is a Cree, a Cree youth, that came out, and that... So, I think that that traction is growing, that sense that everyone has a right to choose, right?

M. Skeete : She also said that they couldn't do it in the community out of safety. So, I'm wondering : Should we, as a group, look at that as a way to help you guys, maybe financially or whatever, when we're doing our global education campaigns, to sort of help you guys out in terms of getting the word out on that? Is that something that you think that would be helpful? Because she did make the notion that it was... we're not doing it in the community because of concerns of safety.

M. Nicholls (Donald) : Yes. I haven't heard before about safety, but I think that anyone that feels that they are not in a safe place, we have to find out why, right? And some of the people coming forward with sexual exploitation, they need that safe place too, equally, as much as whether it's gender related or self-identification related.

And I know that Virginia had mentioned... and she gave some incredible examples, but I remember, one day, we were talking about sexual exploitation, and it was at a big commissioner's meeting, and there was a lot of executives there, and the SPVM, the special unit, was there, and they were talking a little bit of stories, and then one of the executive members stepped forward and she said : You know, 15, 20 years ago, I came to Montréal from my community to go to school, and then this person befriended me, and I thought he was my boyfriend, and then he became very abusive and told me I had to work on the street and earn him money. And she said : My choice was : Do I give up my education and go back to my small little community or do I start human trafficking in Montreal? And that was like fifteen or so years ago.

And so, she shared that story, and we are just like : Wow! That's... You know, like, she felt that that was a safe place. And then, right after that, one of the elders came forward and said : 30 years ago, in Val-d'Or, the same thing happened to me, you know, I was sexually exploited, and I was given a choice, and... you know, and then I did not go back for a while, you know, I went back to my community and went away.

So, it's been existing there for a while. It's not a new thing, the sexual exploitation. It's now that we, as organizations, and as governments, and agencies, are saying : Let's do something about it together because we find that it's rising at alarming rates. We find that other people are... We can see the harm that's happening. I think, maybe we are more aware because of social media and other things. So, it's there. But, in creating a safe space, I think that's always good for people to be themselves, and to express themselves, and what have you, and to feel safe to, obviously, get out of very violent situations.

M. Skeete : That's it for me. Thank you very much.

Le Président (M. Lafrenière) : Thank you. Next question from l'Acadie.

Mme St-Pierre : Merci beaucoup, M. le Président. Thank you very much for your presentation. Je vais poser ma question en français parce qu'elle est très pointue. C'est concernant votre conclusion.

Vous parlez, au paragraphe 65, de la déclaration des Nations unies sur les droits des Premières Nations. Vous dites qu'il faut appliquer l'article 7. La déclaration n'a pas été entérinée par le gouvernement du Québec. Le gouvernement fédéral a signé la déclaration. Au Québec, en vertu de la loi du ministère des Relations internationales et de la Francophonie, le Québec doit se lier à des conventions ou des ententes, des déclarations considérées comme importantes et majeures. Le Québec ne l'a pas signée. Est-ce que vous considérez ou est-ce que vous demandez à ce que le Québec entérine la déclaration des Nations unies sur les droits des peuples indigènes?

M. Nicholls (Donald) : That's a very big question. Because I'm here representing the Department of Justice and I don't represent... like, I'm not here representing the political unit. And they would probably address that more specifically to you, but, in this case, I'm saying that this provision, which is an international instrument that Canada is a part of and that... can influence us and say : Is there anything in here that we do not agree with? The individual's right to life, to physical or mental integrity, to liberty, your security, your person or that they shall not be subject to any act of violence, is there any part in this one provision that we would not uphold together and say : Yes, we believe that this... or that this announcement or this pronouncement is correct for all of us, that we believe that everyone should have these rights?

So, that's why I didn't put the whole declaration in there, that's not... I know this is not what this committee is about. So, it was just to highlight that this particular one, I think, speaks to all of us.

Mme St-Pierre : O.K. C'est parce que ça suggère qu'en n'ayant pas cette... en ne posant pas ce geste, ça suggère qu'il y aurait moins de protection ici, au Québec, alors que je crois que tous les citoyens du Québec ont la protection de la loi et doivent avoir la protection de la loi, mais que c'est une garantie dans notre système, ici, au Québec.

Je continuerais sur le numéro 66. Vous dites que le gouvernement doit faire en sorte que les recommandations de la commission sur la réconciliation... la vérité et réconciliation, les recommandations soient appliquées. Il y a dans ce rapport-là un rapport qui concerne le Québec «spécificiquement»... «spécificiquement», c'est ça — «spécificité». Est-ce que vous considérez que les recommandations qui concernent le rapport au sujet du Québec doivent préalablement être appliquées ou qu'on doive tout d'abord appliquer ces recommandations, faire en sorte que ces recommandations soient... Parce qu'on les a devant nous, il y a du concret, et on peut ensuite, dans notre rapport, continuer et travailler sur le rapport que nous allons déposer en octobre. Considérez-vous qu'il est urgent d'appliquer les recommandations du rapport vérité et réconciliation qui touchent le Québec?

M. Nicholls (Donald) : Yes. You know, the Truth and Reconciliation Commission came around to each of the provinces, and heard testimony of thousands, thousands of individuals, and came up with these calls to action which they thought that all States should do for indigenous people.

So, specifically, these are the items that, after this commission has visited all provinces... to say : For indigenous peoples, we believe that these are common and that they should be implemented by all States for better protection or better service to indigenous peoples. And so, yes, in my Department, we definitely highlight Truth and Reconciliation commissions when we're doing stuff and we say : Yes, we've checked this one and we went through the... And we do the checklist with the Government too and we say : O.K., well, this is a measure that's been highlighted maybe, in one of the inquiries, as being important, and we believe that it applies to us. And some of them we have already satisfied, some of them, with our good relationship with Québec, we have been able to achieve already.

And so, yes, for us, we look at these in the same way with the way that the declaration is meant for indigenous peoples, and it's to recognize that collective nature of rights that does not exist because the human rights system in the United Nations only recognized the individual rights since 1948, but it wasn't until the declaration came forward, that it represented collective rights as a community, that we could enjoy these rights together, right? And so, it recognizes that. So, that's why these provisions are brought forward, it's because they relate to indigenous peoples, and, for us, we've been an advocate of many of these for a while.

• (15 h 20) •

Mme St-Pierre : Juste pour continuer un peu, c'est parce que je trouve votre conclusion très large par rapport à notre sujet qui est quand même très spécifique, c'est-à-dire l'exploitation sexuelle des mineurs. Donc, je me demandais s'il y avait un message plus large, un message plus politique dans vos conclusions. Et là-dessus, à savoir si... à la conclusion n° 65, si ce serait un message important à envoyer de se lier à la déclaration des Nations unies. Je ne veux pas faire de vous un politicien, mais quand même, je voulais quand même essayer de comprendre vos conclusions parce que c'est très, très large par rapport au mandat que nous avons ici à la commission.

M. Nicholls (Donald) : You know, for us, to write our presentation, we tucked a lot of paths forward, and those are our recommendations specifically on the issue that the select committee is looking at. But, when we look at the broader table or the broader context... Because when you asked us some questions, and they were narrow questions at points, on what we could do... and we tried to show to you what we were doing within our Cree nation and what we were trying to do to reduce this.

But there's a realization that, no matter how much effort we do within, that, if the environment around us does not change too, the exploitation will continue, right? Unless there's a greater understanding and awareness, within Québec's side and these urban centers, of these rights, and of the vulnerability, and the situation, and the realities of indigenous peoples, then we can do many things in our own place, but, as soon as they leave and they come to other environments, then they're exploited. And, as Virginia pointed out, there are some people, now, that are coming from those urban centers to recruit directly within the communities, right? So, what measures do we have that would... It's you that have the measures to deal with the Québec communities or the Québec urban centers, and so that's the broader recommendation.

Mme St-Pierre : Thank you.

Le Président (M. Lafrenière) : Thank you so much. The last but not least. Notre-Dame-de-Grâce.

Mme Weil : Thank you very much for your presentation. I'm curious about the structure you have. And so, it's the Department of Justice within the Cree nation. So, the agreement that you signed reminded me... I know it was for Government, but was it «piloté» by the Minister of Justice of Québec, this agreement that... to create? Because it was signed, I think you said in your introduction, fairly recently, right, the creation?

M. Nicholls (Donald) : Yes. In 1975, when we did the James Bay and Northern Québec Agreement, in section 18, we talked about the administration of justice and we laid out a blueprint of what that department and what that administration would look like within Québec and in collaboration with Québec. And then it remained largely unimplemented until 2007, when we signed a new agreement that would allow us to implement it more.

And we created a Cree Québec judicial advisory committee with members of various ministries of the Québec Government and then various political representatives of the Cree Nation Government to advise on different developments within the department. And so, really, it's an implementation and it draws its linkage back to the 1975 James Bay and Northern Québec Agreement.

But, in 2007... well, a little bit earlier than that, with the «Paix des Braves», we started a new relationship and then we worked on how we were going to implement justice. So, in 2007, when we signed the agreement, we formed that advisory committee, we formed the department in 2008 and now we're tackling each area that we've agreed to.

Mme Weil : OK. So, where it gets complex is... Because I was Minister of Justice and I worked in, you know, more social areas, as immigration, all that. When you get into issues like youth protection, for instance, and what you do with the child and... So, we're hearing a lot from the community, right now, that would much prefer... well, much prefer, they'd recommend very strongly a bottom-up kind of... or a ground-up approach, as opposed top-down. And it's clear, you know, from the language you speak, you're exactly in line with what all the community is asking in terms of ways forward, as you put it, prevention, sensitization, education, accompaniment, all those things.

But I'd like to hear you on the structures we have and legal instruments that we use as governments, the Québec society, Canadian society and the roadblocks that that creates when a community is saying : We have the answers, you know, to our problems and we can deal better with them than you can. You take our children out of the community, you place them, they come back more damaged, they run away, they're victims of exploitation, etc. And, at the end of the day, justice is always... by all these issues. I know it for having been in Government for long... you know, for about eight years of my 10 years. And, for us, we're going to have to deal with these paradigms in terms of recommendations. The example that my colleague just gave is another one where it gets even more complicated, right, because there are international conventions on...

But I'd like to hear you on that and how you, the Cree nation, look at that issue, we talked about it this morning or this afternoon, this whole issue of placement of children and its reliving, that terrible period where children where taken away during the... You know, it's like colonization continuing. So, legally, how... and then conflicts between Canadian legislation and provincial legislation and disagreements, because we always get into the jurisdictional issues. So, do you see roadblocks in terms of... if you really drew the ideal map that you would draw to get where you want?

But you've got an agreement that you've signed, and so, obviously, there is certain basic rules of justice, as seen by... you know, how should I say, the broader... majority of society, with all the instruments that we have, charters of rights, you mentioned that, yet it doesn't necessarily recognize collective rights. But your reality is different, and your heritage is different in the way you deal with problems. And that's everything that we've been hearing while we've been here, and also Montréal, the same kinds of proposals.

You may have the key, you may have the key, maybe not today, but you may have the key for us to be able to see how we can get further and get across those barriers while still remaining within the broader rule of law, if you will, that's, you know... change the rule of law or how we work it. And I'm just wondering whether you see it could be that it would come from the community itself that makes the proposals that fits all of the requirements, and then we'll just try to... of course, the funding, but loosen some of those requirements that we always impose, all the different Ministries, all the departments. And it's understandable. It's accountability, it's, you know, the studies that they have. And they can't just change those rules. But how we can bring in that flexibility in... So, I was just wondering if you had any thoughts on that.

M. Nicholls (Donald) : Yes. Of course, another big question. I think that, you know, Virginia had mentioned before about building the women shelters. It was a year and a half roadblock by the Ministry because they would not recognize the Cree nation Government, even though it was recognized in an agreement and in legislation that had not reached the Ministries that they would be recognized to be able to build our own women shelter.

So, it took us a year and a half to get through those regulations before we were able to build. Everyone said: The women shelters are important, and we've proved the need for them. But, because of a small piece of regulation, that's... it prevented anyone from moving forward for a while until we met with the Deputy and Minister and were able to get... you know, to move pass that, to get an acknowledgment that we had already been... that the Assembly had already made an agreement with us, recognizing us as a regional government, and thereby we could actually build women shelters and we could build youth healing centers and other building that would better serve our population.

• (15 h 30) •

I think that some of those... I know that there's been sometimes, when I have been invited to meetings where new regulations and new laws have been put in place, in Québec, that drastically changed the way that we deal with the child welfare system. And people don't want to implement them because it means taking the children away from families or from communities. And they're trying to figure up ways not to break the law, but the ways to keep families together or to keep communities together. And I think that that was missing when that law was put together.

And I know that there has been a lot of advocacy across Canada to give child welfare to the indigenous nations so that they can come up with solutions, and they are ready to come up with good solutions to deal that way. I think that Mary Ellen Turpel, a former judge and advocate that works for... child advocate that works out of B.C., she said last year that, you know, the Cree nation, when it comes to child welfare, they're probably in the best position right now to create their own tribunal, you know, their own type of tribal court system where they could deal with matters that were more related to their communities and to their nation, that were more based on family principles and based to work in that area.

And, for sure, we continue to build the infrastructure to support more institutions and agencies within our Government that allows us to take better care and to do it in our way. When we did the youth healing center, that's one of the powers... and that's about to be opened in one of our communities, is that we can provide our own programming week and have our staff trained there. We can do it in our language, we can use the land as part of the healers. Like, wilderness therapy works six times as well as other types of therapy when dealing with addictions or other issues, mental health issues. And so, we can employ the use of our greatest resource, which is the land, and our culture, and our people to try and heal our nation.

But, sometimes, there are those regulatory barriers or the Government, you know, there are... (Interruption) Oups! There are people that do not... that are afraid of that change. And we're not. We're not afraid to go forward, and to build those institutions, and to work to make better lives for our people, and to move forward to provide better support and protections, and to give them values, and such, and build upon, and sometimes reverse that systemic discrimination that we talked about and that still exists out there. When they go, sometimes, to institutions or agencies, they still face that systemic discrimination and the stereotypes. And so, if we provide a lot of those within our nation, then it doesn't exist, right? Then, they feel confident, they feel empowered.

So, yes, I see that there are some barriers that we would like to work towards, you know, removing, you know, or making better together.

Mme Weil : Thank you.

Le Président (M. Lafrenière) : Well, first of all, thank you so much for your contribution to our commission. We'll be waiting for those documents that you said you would share with us. So, thank you so much.

C'est terminé pour nous, pour la commission, ici, à Val-d'Or. Juste deux petites secondes parce que ça va être un petit peu plus long. Donc, pour Val-d'Or, c'est terminé. On a terminé nos consultations à Montréal et à Val-d'Or. Cette commission va se déplace en visite dans les prochaines minutes. Et, pour les gens qui nous écoutent, bon, vous allez avoir des nouvelles de nous plus tard, mais, pour les consultations, c'est terminé pour le moment. Merci beaucoup.

On suspend les travaux.

(Fin de la séance à 15 h 33)

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