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Version finale

40e législature, 1re session
(30 octobre 2012 au 5 mars 2014)

Le mercredi 20 novembre 2013 - Vol. 43 N° 60

Consultations particulières sur le livre blanc sur la création d'une assurance autonomie intitulé L'autonomie pour tous


Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Auditions (suite)

Conseil québécois de la coopération et de la mutualité (CQCM)

Regroupement provincial des comités des usagers (RPCU)

Curateur public

Observatoire Vieillissement et Société (OVS)

Régie régionale de la santé et des services sociaux du Nunavik (RRSSSN)

Mémoires déposés

Remarques finales

Mme Françoise David

Mme Sylvie Roy

M. Yves Bolduc

M. Réjean Hébert

Autres intervenants

M. Lawrence S. Bergman, président

Mme Suzanne Proulx

Mme Marguerite Blais

Mme Diane Gadoury-Hamelin

*          Mme Jocelyne Rouleau, CQCM

*          M. Gaston Bédard, idem

*          Mme Marie-Joëlle Brassard, idem

*          M. Pierre Blain, RPCU

*          M. Claude Ménard, idem

*          M. Normand Jutras, Curateur public

*          M. Pierre Berger, bureau du Curateur public

*          M. Pierre Lamarche, idem

*          Mme Gloria Jeliu, OVS

*          M. Pierre-Étienne Laporte, idem

*          M. André Ledoux, idem

*          Mme Denise Destrempes, idem

*          Mme Minnie Grey, RRSSSN

*          Mme Dalacia Tulugak, idem

*          M. Bobby Snowball, idem

*          Mme Martha Annanack, idem

*          M. Yoan Girard, idem

*          Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Onze heures quatorze minutes)

Le Président (M. Bergman) : À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, collègues, ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de la santé et des services sociaux ouverte.

La commission est réunie afin de procéder aux consultations particulières et auditions publiques sur le livre blanc sur la création d'une assurance autonomie intitulé L'autonomie pour tous.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire : Oui, M. le Président. Mme Roy (Arthabaska) remplace Mme Daneault (Groulx).

Auditions (suite)

Le Président (M. Bergman) : Merci. Alors, collègues, on reçoit maintenant le Conseil québécois de la coopération et de la mutualité. Alors, bienvenue à la commission parlementaire. Vous avez 10 minutes pour faire votre présentation, suivie d'un échange avec les membres de la commission. Pour les fins d'enregistrement, on a besoin que vous nous donniez vos noms, vos titres, et le prochain 10 minutes, c'est à vous.

Conseil québécois de la coopération
et de la mutualité (CQCM)

Mme Rouleau (Jocelyne) : Alors, M. le Président, M. le ministre, membres de la Commission de la santé et des services sociaux, alors je suis Jocelyne Rouleau, administratrice au CQCM et directrice générale de la Confédération québécoise des coopératives d'habitation. Je suis accompagnée aujourd'hui par M. Gaston Bédard, directeur général intérimaire, et Mme Marie-Joëlle Brassard, directrice de la recherche et du développement.

Dans un premier temps, je tiens à vous remercier du temps accordé aujourd'hui au Conseil québécois de la coopération et de la mutualité, le CQCM, afin de connaître notre vision concernant la mise en oeuvre du projet d'assurance autonomie. Avant que M. Bédard n'entre dans le vif du sujet, permettez-moi de vous dresser un bref portrait de notre organisation et de ce que représente le mouvement coopératif et mutualiste au Québec.

Fondé en 1940, le CQCM regroupe l'ensemble des réseaux coopératifs et mutualistes québécois, qui oeuvrent au sein de plus de 40 secteurs d'activité économique et sociale. Nous pouvons également compter sur un réseau de coopératives de développement régional qui assure notre présence dans toutes les régions du Québec. Les coopératives, au Québec, ce sont 3 300 entreprises, 95 000 emplois, 30 milliards de chiffre d'affaires et 230 milliards d'actif.

Comme le reconnaît la Loi sur l'économie sociale adoptée le 10 octobre dernier, les coopératives et les mutuelles contribuent positivement au développement socioéconomique du Québec, et ce, depuis plus de 160 ans. Elles le font dans le respect des principes coopératifs, notamment en assurant l'exercice du pouvoir démocratique par les membres et l'engagement envers les communautés, deux principes qui ont grandement guidé la rédaction du mémoire que nous vous présentons aujourd'hui.

Les coopératives, ce sont des entreprises collectives à vocation économique dont la première finalité est de répondre à un besoin. Le capital est donc un moyen plutôt qu'un objectif. Par leur mode de gouvernance, qui est strictement encadré par la Loi sur les coopératives, elles impliquent leurs membres au sein de leurs instances décisionnelles et retournent tous leurs excédents vers le milieu soit en réinvestissant dans la coopérative soit en commandites ou en ristournes aux membres. C'est donc un modèle d'entreprise qui, selon nous, assure un meilleur partage des responsabilités mais surtout une meilleure redistribution des retombées au bénéfice de la collectivité.

Nous saluons la volonté et l'objectif du gouvernement de favoriser le maintien des personnes aînées dans leur milieu de vie, de même que des personnes en situation de handicap. Bien que vous ayez déjà entendu la Fédération des coopératives de services à domicile et de santé du Québec le 5 novembre dernier, dont nous appuyons les orientations, il était essentiel pour le CQCM de pouvoir également apporter son éclairage sur la question dans une vision plus globale de ce que peut représenter la contribution du modèle coopératif à une éventuelle politique nationale de soutien à l'autonomie.

D'ailleurs, les coopératives oeuvrent au sein de plusieurs secteurs d'activité qui influent sur la santé des gens : les coopératives de santé, de services à domicile, d'alimentation, d'habitation, etc. Mentionnons que le CQCH a produit un mémoire dans le cadre de la présente consultation relativement aux coopératives d'habitation pour aînés soutenues par la communauté. Je cède maintenant la parole à M. Gaston Bédard pour la suite de la présentation.

• (11 h 20) •

M. Bédard (Gaston) : Merci. Merci, Mme Rouleau. Je voudrais, premièrement, préciser quelque chose que j'ai retrouvé dans le livre blanc auquel on souscrit, puis on apprécie, d'ailleurs, et c'est sur quoi va porter notre présentation puis qu'a porté notre mémoire également. Puis c'est inscrit à la page 20. Si vous me permettez, je vais juste le relire, parce que, pour nous, c'était fondamental : «Au-delà de [la] question du financement — c'est ce que vous avez écrit dans le livre blanc — l'assurance autonomie redonne à la personne en perte d'autonomie la maîtrise — puis le mot «maîtrise», pour nous, était fondamental, c'est l'appropriation — d'un certain nombre d'options fondamentales : le choix de son lieu de vie, le choix du type de prestation de services» etc. On va y revenir, mais c'est notre base de travail. D'ailleurs, ça fait du pouce à ce qu'on a également écrit dans notre propre mémoire, le Conseil québécois de la coopération et de la mutualité. Selon l'Organisation mondiale de la santé, le fait de participer à une instance décisionnelle sur les enjeux qui nous concernent influe positivement, c'est un déterminant très positif sur la santé des personnes, surtout des personnes vieillissantes. Ça fait qu'on va y revenir, sur la participation des personnes, qui est le propre de notre présentation de ce matin.

Donc, quelques minutes, si vous me permettez. C'est sûr que nous, on souscrit à ce qui est aussi également inscrit dans le livre blanc, le fait qu'on partage la responsabilité entre l'État et les divers acteurs socioéconomiques quant à l'absorption des impacts du vieillissement de la population. Pour nous, on trouve que c'est important d'inclure d'autres partenaires dans cette responsabilité, comme vous le proposez. Dans cette voie, dans cette foulée, on croit aussi qu'on se sent interpellés, le monde coopératif, par nos entreprises d'économie sociale de soutien à domicile et de vie aussi au quotidien. On a déjà plusieurs entreprises, 102 coopératives et OBNL qui sont déjà très actifs dans le domaine du soutien aux services à domicile et aussi on a également des coopératives de santé.

Comme l'a mentionné Mme Rouleau, nos organisations coopératives… Puis, vous le dites dans votre mémoire... dans votre livre blanc, c'est important d'impliquer les gens qui se sentent interpellés dans ces services-là. Et notre modèle de gouvernance des coops, des mutuelles, ça invite les gens à s'impliquer directement comme membres, comme usagers, comme soutien aussi, parce qu'on a différentes formes de coopératives qui, des fois, apportent des nuances sur : Est-ce qu'on a juste des usagers à la coop? On peut aussi avoir des membres soutien dans la coop. On va y revenir un peu plus tard.

Pour les minutes qu'il me reste — parce qu'on garderait davantage de temps, comme c'était prévu, à une période de questions — j'irais sur les cinq recommandations qu'on a. On n'en a pas beaucoup, mais, pour nous, elles sont importantes et viennent compléter ce que vous avez déjà reçu dans le mémoire de la Confédération des coopératives d'habitation, à laquelle Mme Rouleau a fait allusion, et aussi le mémoire et la présentation que La Fédération des coopératives de services à domicile et de santé vous a envoyé et a fait également une présentation ici, sur place.

Donc, la première recommandation, pour nous, puis vous le retrouvez dans notre mémoire, c'est l'importance d'impliquer les personnes dans leur organisation au niveau de la santé, donc reconnaître la valeur ajoutée de la participation des usagers au sein des instances décisionnelles pour déterminer leurs besoins, leurs structures et même les personnes et les services qui vont les accompagner dans la réponse à leurs besoins. Il y a différentes façons de faire, on pense que le modèle coopératif est peut-être un modèle facilitant à ce niveau. On pourra y aller sur des questions par après.

J'irais aussi sur la recommandation 2, essayer d'être cohérent avec la recommandation 1, bien sûr. La deuxième, c'est : les réseaux coopératifs, on pense qu'ils peuvent contribuer, peuvent être un apport certain, quitte à être bonifiés, à être revus dans la prestation de services, à être revus dans ses structures, si nécessaire, en fonction de l'évolution des besoins de nos différentes clientèles. Mais le modèle coopératif, le modèle mutualiste et le modèle des organisations sans but lucratif, actuellement, qui offrent déjà des services dans ce sens, sont des modèles qui impliquent les gens, les participants et les usagers, et on pense qu'on devrait les reconnaître sans… pas sans certification, tout en reconnaissant également, puis je l'ai dit tantôt, qu'ils doivent poursuivre leur évolution dans leurs structures, le profil des individus, selon les besoins des usagers, selon les services qu'on a à offrir. Donc, il y aurait des formations, des programmes de certification qui nous permettraient éventuellement d'évoluer vers une réponse toujours adaptée aux besoins des usagers, qu'on parle dans l'assurance autonomie.

La recommandation 3. En fait, on dit aussi, dans notre recommandation 3, c'est d'inclure les usagers dans la certification. La certification va tenir compte, bien sûr, de besoins, ce qui est déjà prévu en partie dans le livre blanc, des formations, mais aussi inclure les usagers dans l'identification des besoins puis l'identification aussi des parties prenantes pour leur offrir ces services. Ça, c'est dans notre recommandation. Donc, on pourra y revenir à la période de questions.

La recommandation 4, c'est de prévoir des lieux de concertation, des lieux de coordination. Je ne vous apprends rien, vous l'avez dit, d'ailleurs, dans votre livre blanc, c'est écrit également dans notre mémoire, la santé ce n'est pas juste une chose, il y a beaucoup de déterminants, surtout pour les personnes plus âgées ou des personnes qui vivent certains handicaps. Ça touche tantôt l'habitation, ça touche tantôt l'alimentation, et il y a aussi des…

Le Président (M. Bergman) : En conclusion, s'il vous plaît.

M. Bédard (Gaston) : … — oui — des éléments de prévention. Ça fait qu'à ce moment-là il faut s'assurer d'avoir des lieux de coordination pour avoir une approche plus multidisciplinaire. Ça fait que c'est ce qu'on propose dans notre mémoire.

Et finalement je termine en disant que notre dernière recommandation touche des lieux, des laboratoires pour s'assurer qu'on évolue dans certains de ces services-là. Ça fait que, ça, il ne faudrait peut-être pas l'échapper dans le temps, c'est plus en termes de perspective. On irait aux questions.

Le Président (M. Bergman) : Merci pour votre présentation. Maintenant, pour le bloc du gouvernement, M. le ministre.

M. Hébert : Bonjour, M. Bédard, Mmes Brassard et Rouleau, bienvenue, merci de votre mémoire. Comme vous le savez, le mouvement coopératif est extrêmement important dans la prestation de services aux personnes qui présentent des incapacités, que ce soient les personnes âgées en perte d'autonomie ou les personnes handicapées, je pense que la place du mouvement coopératif est essentielle et je pense que ça s'inscrit très bien dans plusieurs orientations gouvernementales.

Notamment, la loi-cadre sur l'économie sociale, que nous avons adoptée il y a quelques mois, je pense que c'est une volonté extrêmement claire et bien appuyée de ce gouvernement d'appuyer et de soutenir le mouvement coopératif dans les services à la population. Et vous avez soulevé un élément philosophique, je dirais, qui est au coeur de l'assurance autonomie et au coeur du mouvement coopératif, c'est-à-dire la maîtrise de l'usager, et je pense que l'assurance autonomie redonne à l'usager la liberté, la liberté de choisir d'abord là où il veut vivre, mais aussi la liberté de choisir par qui il veut recevoir les services, et c'est ça, l'essence même de l'assurance autonomie.

Le mouvement coopératif est déjà très impliqué dans les entreprises d'économie sociale à l'aide à domicile. L'un des débats que nous avons eus ici au cours des dernières semaines a tourné autour des activités de la vie quotidienne et les soins personnels, qui devait donner ces services-là. Certains groupes, notamment les groupes syndicaux, souhaitaient que ce soit une exclusivité du réseau public. D'autres nous disaient… et l'Association québécoise de gérontologie, encore hier, nous disait l'importance de pouvoir confier les soins personnels également aux entreprises d'économie sociale de façon à limiter le nombre d'intervenants. On a eu également certains groupes qui nous ont dit que la qualité des services dans les entreprises d'économie sociale pouvait soulever des interrogations. Alors, j'aimerais vous entendre sur la place qu'occupent les soins personnels dans les entreprises d'économie sociale et ce que vous voyez comme perspectives.

Le Président (M. Bergman) : M. Bédard.

• (11 h 30) •

M. Bédard (Gaston) : En fait, on vous l'a déjà mentionné dans un mémoire précédent, que déjà les entreprises d'économie sociale, les entreprises de services à domicile sont déjà impliquées dans la vie quotidienne. Près de 15 % du nombre d'heures données sont déjà au niveau de la vie quotidienne.

Moi, personnellement, puis je l'ai mentionné en entrée de jeu, c'est qu'il est important, je pense, pour l'État de continuer à travailler avec des partenaires locaux, régionaux et ne pas essayer de tout prendre sur ses épaules. Il faut partager cette responsabilité-là, vous le dites dans votre mémoire, puis nous, on souscrit à ça, ça fait partie de notre modèle, d'ailleurs, puis de nos aspirations. On dit que, les coops, il faut donner une place aux gens de pouvoir se prendre en main. Ça fait que, si on ne partage pas avec des partenaires qui ont cette conviction-là, je pense que vous allez tout prendre sur vos épaules.

Donc, je fais juste répondre en disant : Je ne pense pas que ça va diminuer la qualité de services pour autant, il s'agit juste de bien identifier le besoin, bien identifier les profils… les services et puis après ça se structurer ou évoluer puis former notre monde en conséquence pour offrir cette qualité de services là. Ça permet surtout... puis je l'ai dit d'entrée de jeu, c'est déterminant au niveau de la santé, d'impliquer vraiment au quotidien les gens puis s'adapter aussi au niveau local.

Vous avez fait allusion, Dr Hébert, aussi à l'exclusivité. En fait, moi, je pense que, dans un premier temps, il faut s'entendre… bien, en tout cas, ce sera à vous à décider les représentants, décider si, oui ou non, on utilise des partenaires, au niveau du terrain, de l'entreprise collective ou privée, mais on utilise des partenaires ou tout est gardé au niveau de l'État, puis, ensuite de ça, on verra les entreprises qui répondent à la certification que vous souhaitez. O.K.? Puis moi, je suis prêt à faire le pari que les entreprises d'économie sociale qui sont déjà impliquées vont être capables de répondre à la demande et aux besoins, pas sans une révision peut-être de leurs structures parce que les besoins vont changer encore. Il y en a des nouveaux qui sont arrivés. Depuis le milieu des années 90, on est impliqués dans les services à domicile, puis je pense que ça a été, selon nous, un beau succès, ça répondait à des besoins. Aujourd'hui, peut-être que ces besoins-là évoluent, et il faut aussi revoir nos approches, nos structures, nos services pour répondre à des nouveaux besoins.

Je vous réponds en disant : Moi, je ne suis pas inconfortable du tout, du tout par rapport à certains qui ont mentionné qu'on devrait éviter d'étendre les partenaires puis qu'on devrait concentrer le service plus dans les sociétés déjà qui existent, les sociétés d'État… même pas des sociétés de l'État, en fait, déjà, dans les entreprises de santé qui existent, comme les CLSC et les autres. Moi, je pense que c'est important de continuer à travailler avec des partenaires puis absolument pas de la privatisation ou encore faire du travail de seconde main. Au contraire, il faut s'assurer que ces entreprises-là par contre répondent à un besoin, puis il faut s'assurer aussi d'une bonne certification en conséquence, puis je ne suis pas inquiet qu'on va pouvoir y parvenir.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Donc, vous êtes d'accord avec une orientation que nous avons, de soumettre l'ensemble des prestataires, incluant vos organisations, à un processus de certification pour être en mesure de juger de la qualité de la formation de votre personnel et de la qualité des services que vous donnez aux personnes.

M. Bédard (Gaston) : On l'a écrit dans notre mémoire. Pour nous, c'est un incontournable. Je pense qu'il faut prendre le temps de certifier les personnes qui vont offrir ces services-là, comme on le fait dans des ordres professionnels, les gens sont certifiés pour offrir tel ou tel service, bien la même chose… Nos organisations, je pense qu'elles vont bien se soumettre à ces processus-là puis, je dirais, s'actualiser en conséquence par rapport aux besoins, les nouveaux besoins qu'on va devoir répondre. Ça fait que ce processus de certification là, j'y ajoute — puis c'est dans notre recommandation n° 3 — que ça vaut la peine aussi que vous pensiez d'inclure les usagers dans ce processus de certification.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Vous avez déjà mis en place des processus de contrôle de qualité et des standardisations de vos formations. J'aimerais que vous nous en parliez.

M. Bédard (Gaston) : Ah, je ne sais pas si...

Le Président (M. Bergman) : M. Bédard.

M. Bédard (Gaston) : M. le Président, je vais laisser la parole à Mme Brassard pour quelques éléments à ce niveau.

Le Président (M. Bergman) : Mme Brassard.

Mme Brassard (Marie-Joëlle) : Là-dessus, La Fédération des coopératives de services à domicile et de santé a indiqué quels étaient les processus pour la certification. Effectivement, la fédération est partenaire avec l'État, au niveau du ministère de la Santé, pour justement s'assurer qu'il y ait un encadrement sur le plan de la certification. Maintenant, l'idée, c'est de dire : Dans la mesure où les services évoluent, il faut aussi que la certification évolue. Et, comme les usagers sont membres des conseils d'administration, des instances décisionnelles des entreprises, à ce moment-là, ce sera important de vérifier la concordance avec les besoins et l'évolution aussi des services.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Certains groupes ont souligné les conditions de travail qui ont cours dans les entreprises d'économie sociale en invoquant le fait que ce sont surtout des femmes qui y travaillent et que les conditions de travail ne sont pas optimales. J'aimerais vous entendre là-dessus.

Le Président (M. Bergman) : M. Bédard.

M. Bédard (Gaston) : Je ne ferais pas un long débat là-dessus. Mais, quand on a mis en place les coopératives, au milieu des années 90, les coopératives des services à domicile, il y avait des besoins puis on a tenté de répondre à ces besoins-là. Puis actuellement, quand on fait nos sondages, c'est très positif, les gens sont très heureux de ce qu'on leur offre comme services. Puis il y avait un profil d'employé qui avait été déterminé pour répondre à ces services-là. C'est bien sûr que, si on... Puis ça évolue rapidement, les attentes, les besoins de nos usagers. On en a 87 000, je crois, actuellement. Les besoins de nos usagers évoluent. C'est sûr qu'à ce moment-là il faut concourir aussi à des personnes qui continuent à parfaire leur formation pour répondre à des nouveaux besoins.

Donc, pour moi, je vous dis, Dr Hébert, à date, je pense que les gens ont bien répondu aux attentes, mais je reconnais que les besoins évoluent rapidement puis qu'il faut aussi que nos organisations, nos gens, nos programmes de formation et autres, nos processus aussi de contrôle continuent à évoluer. À date, — Mme Brassard en a fait rapidement allusion — on a déjà certains processus, parce que nos coopératives sont régionales, donc on a un encadrement qui est local et régional, ce qui permet de s'assurer d'une certaine qualité des intervenants, des indicateurs très précis qui ont été développés maintenant en lien avec les services qui pourraient être offerts, additionnels, surtout au niveau de la vie quotidienne. C'est sûr que je pense qu'il y a des processus de contrôle, des programmes de formation qui sont à développer pour pouvoir répondre à éventuellement des critères qui vont être dans certaines certifications que vous allez demander pour les gens qui vont offrir ces services-là.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Vous soulevez dans le mémoire un élément extrêmement important, c'est-à-dire comment on assure la liaison entre les organismes comme les vôtres et le reste des partenaires du réseau. Dans le réseau intégré de services aux personnes âgées, parmi les six éléments, le premier élément qui est absolument fondamental, c'est la mise en place de tables de concertation aux niveaux stratégiques et de tables également au niveau des coordonnateurs de programmes. C'est, à mon avis, l'élément fondamental du réseau intégré, et c'est là que doivent s'incarner les mécanismes de liaison que vous soulevez. Alors, c'est important de ne pas faire l'économie de cette structure de concertation locale lorsqu'on met en place les réseaux intégrés. Et je pense que le rappel que vous faites est extrêmement important pour qu'on puisse s'assurer que, dans toutes les régions du Québec, il y ait ces tables de concertation et ces mécanismes de coordination de l'ensemble des partenaires qui sont impliqués dans le réseau intégré de services.

Le Président (M. Bergman) : M. Bédard.

M. Bédard (Gaston) : Oui, effectivement. Vous permettez, M. le Président, juste une réaction. C'est l'objet de notre recommandation n° 4. Pour nous, c'est important d'avoir ces lieux de concertation, ces lieux de coordination qui sont déjà en place ou à être bonifiés, selon le cas, autant au niveau régional qu'au niveau provincial. Parce qu'on a parlé tantôt de multidisciplinarité de l'approche, ça fait qu'il faut aussi tenir compte d'autres éléments qui sont éventuellement supportés par d'autres ministères. Ça fait que c'est dans ce sens-là qu'on y a été de notre recommandation 4 sans avoir été très, très précis dans la façon de faire au niveau de la coordination.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose.

Mme Proulx : Merci, M. le Président. Alors, bonjour, M. Bédard, Mme Brassard et Mme Rouleau. Ça me fait plaisir de vous avoir ici ce matin. Ça me fait doublement plaisir parce que je pense que c'est une opportunité intéressante que nous avons peut-être de vous entendre mieux expliquer ce que c'est que le modèle coopératif. On a, depuis le début des auditions, — qui se terminent, d'ailleurs, aujourd'hui — rencontré beaucoup de groupes, et il y a un constat que je fais, à savoir que les entreprises d'économie sociale et le mouvement coopératif est encore très mal connu, suffisamment mal connu, je dirais, pour générer aussi beaucoup de préjugés. C'est une opportunité que je vous donne de nous expliquer peut-être ce que c'est qu'une coopérative.

Quand on parle, dans le grand champ de l'économie sociale, ça comprend les organismes communautaires, ça comprend les entreprises d'économie sociale, par exemple, comme les EESAD, le soutien à domicile, ça comprend aussi tout le mouvement coopératif, et ce qui lie toutes ces formes d'entreprises, c'est le mot «collectif». On parle, là, d'entrepreneuriat collectif. J'aimerais ça que vous nous expliquiez, disons, la valeur ajoutée de la forme d'un modèle d'entreprise coopérative ou d'entreprise d'économie sociale et de ce que ça peut représenter comme valeur ajoutée dans une communauté, notamment dans ce projet que nous avons d'assurance autonomie.

M. Bédard (Gaston) : Je ne sais pas si vous voulez faire un petit bout, Mme Rouleau, sur la…

Le Président (M. Bergman) : Mme Rouleau.

Mme Rouleau (Jocelyne) : Oui, bien, écoutez, au niveau des… Je veux dire, nous… en tout cas, moi, je vais parler un peu dans l'habitation, là. Je veux dire, c'est sûr et certain, en tout cas, qu'au niveau de l'habitation tous les services, en tout cas… Voyons! Les gens ont des besoins. O.K.? Les coopératives, étant donné qu'elles répondent à un besoin et que les usagers sont là, bien c'est sûr et certain que les liens se font beaucoup mieux et que c'est beaucoup plus efficace.

Mme Proulx : Est-ce que vous diriez — parce que je pense que c'est monsieur qui le mentionnait tantôt — qu'une coopérative ou une entreprise d'économie sociale, c'est aussi un lieu d'habilitation, si on veut, des usagers, puisque, comme il s'agit d'une forme de gestion coopérative, de gestion participative, c'est une opportunité pour les gens de se former, d'apprendre aussi, de développer des nouvelles compétences? Est-ce que vous voyez les mouvements coopératifs comme un lieu d'habilitation pour les usagers?

• (11 h 40) •

M. Bédard (Gaston) : Absolument. Absolument. Si vous me permettez, Mme Rouleau. Je vais poursuivre, M. le Président. Mme Rouleau l'a mentionné, c'est des gens qui se prennent en main, donc c'est une prise en charge locale ou régionale, selon les circonstances. Puis la finalité, c'est sûr, elle n'est pas privée, hein, c'est de se donner des services, il y a différents moyens, mais c'est de réussir à répondre à nos besoins.

Puis tantôt je l'ai mentionné en entrée de jeu, au niveau de l'Organisation mondiale de la santé, on dit : Plus que les gens vont être impliqués dans leur devenir, leurs services, plus qu'ils vont avoir la chance de prendre des décisions respectueusement par rapport à leurs profils d'évolution, plus que c'est des déterminants positifs. Puis le modèle coopératif… le modèle coopératif ou d'autres entreprises d'économie sociale, c'est ce que ça permet. Donc, c'est de là notre prétention de dire que vous avez entre les mains… Parce que ce n'est pas mon modèle, c'est un modèle de la société québécoise plus particulièrement. Il y en a ailleurs aussi, dans d'autres régions. Mais, au Québec, c'est un modèle qui est déjà omniprésent, puis on aura la chance de l'utiliser puis, en plus, en impliquant les gens.

Puis, en 1995, si ma mémoire ne me fait pas défaut, c'est en 1995 qu'on a créé des coopératives de solidarité. Donc, en plus, on a créé des coopératives qui permettent, selon le besoin, d'aller chercher d'autre soutien local, que ce soient d'autres membres, des entrepreneurs locaux qui viennent s'impliquer pour aider la coopérative à assumer pleinement sa responsabilité ou sa mission. Vous avez parlé d'éducation, vous avez parlé de prise en charge, vous avez parlé de formation. Effectivement, dans les finalités des coopératives, c'est au coeur même de leur mission. Outre la réponse directe à un besoin qui est précis, il y a aussi tout cet aspect d'éducation, cet aspect de formation en plus de cet aspect de prise en charge puis cet aspect de partage.

Vous avez fait aussi allusion à quelque chose d'autre qui, pour moi, est fondamental, c'est : c'est un mouvement. Puis ce n'est pas un faux mouvement, c'est un mouvement. Mme Rouleau l'a dit en entrée de jeu tout à l'heure, on existe depuis pas mal d'années, un peu plus de 75 ans, et on s'entraide; ça, c'est important pour nous. Ça fait que, quand M. Caron est venu, au nom de sa fédération, avec d'autres personnes, vous présenter leur mémoire sur les services à domicile et de santé, tout le mouvement était avec lui. Si, demain matin, on a besoin de créer quelque chose de spécial pour l'aider à ce que ses coops puissent s'actualiser par rapport aux nouveaux besoins, le mouvement va être là.

Donc, c'est un mouvement où on s'entraide. Comme on a créé, par exemple, une alliance particulière pour pouvoir soutenir le démarrage de coopératives, donc on ne travaille pas en silo, on est ensemble, un mouvement. Ça inclut les grandes coopératives, comme des coopératives plus humbles mais tout aussi importantes dans les régions ou les mutuelles. Puis ça vaut pour les autres entreprises d'économie sociale, puisque maintenant on fait partie d'un grand chapeau qui s'appelle l'économie sociale. C'est très clair. D'ailleurs, le Dr Hébert en a fait allusion tout à l'heure, c'est une loi qui a été, pour nous, une date importante, c'est pour ça qu'on s'en souvient bien, c'est le 10 octobre dernier. Ça fait que c'est très clair au niveau de cette loi-là. Donc, j'espère que ça répond…

Mme Proulx : Tout à fait.

M. Bédard (Gaston) : … à votre question. Vous vouliez ajouter…

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose, il vous reste deux minutes.

Mme Proulx : Oui. Bien rapidement, vous savez que le projet d'assurance autonomie va certainement… Puisque l'objectif, c'est de donner le choix aux personnes de pouvoir demeurer à la maison le plus longtemps possible et demeurer où elles souhaitent demeurer, donc on présume que ça pourrait aussi favoriser l'émergence de nouveaux types d'habitation, dont des coopératives d'habitation. Est-ce que vous vous êtes penchés sur cette question-là, le fait que, de l'assurance autonomie, une des solutions possibles serait de démarrer plus de projets de coopératives d'habitation?

Le Président (M. Bergman) : M. Bédard. Mme Rouleau.

Mme Rouleau (Jocelyne) : Oui, effectivement, il y a différents modèles, en ce moment, de coopératives d'habitation, dont une dont je pourrais donner l'exemple, en tout cas, une coopérative qui est à Vaudreuil, qui a intégré au sein de la coopérative un service. Il y a un CSSS, il y a des employés du CSSS qui sont à l'intérieur. Il y a des unités qui sont réservées pour des gens dont une des deux personnes est en phase… est en perte d'autonomie, et le proche aidant reste dans la coop, si bien… C'est totalement intégré, c'est-à-dire que le proche aidant a un soutien, la personne qui a besoin de soins un petit peu plus… a le soutien aussi et il y a aussi des familles à travers ça. Alors, c'est un ensemble complètement multigénérationnel, intergénérationnel, en tout cas, et qui peut desservir beaucoup de gens.

Le Président (M. Bergman) : Merci beaucoup. Malheureusement, le temps s'est écoulé. Pour le bloc de l'opposition officielle, Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.

Mme Blais : Merci beaucoup, M. le Président. Mme Rouleau, Mme Brassard, M. Bédard, j'aime beaucoup votre mouvement. Dans mon comté, j'en ai beaucoup, et je suis les mouvements coopératifs, les coopératives et les OBNL de très, très près depuis très longtemps, et je considère que c'est essentiel. Vous avez mis le doigt sur quelque chose de fondamental, que je partage aussi avec le ministre, c'est-à-dire que la personne soit au coeur des décisions.

D'ailleurs, j'aime le titre de votre mémoire, Coopérer pour vieillir en santé, ça ressemble à Vieillir et vivre ensemble — Chez soi, dans sa communauté, donc un ensemble de dispositifs. Puis le ministre le sait, par exemple, les municipalités amies des aînés, il n'y a pas de politique — nous sommes rendus à plus de 704 — si la personne âgée ne fait pas partie des prises de décision. Je vois le regroupement des usagers juste derrière, où on a mis en place des comités d'usagers dans les résidences privées parce que les gens avaient besoin d'un droit de parole pour s'exprimer. Alors, ça m'apparaît tout à fait essentiel.

Et nous partageons… même si on ne partage pas certaines choses par rapport au financement puis à la structure, mais, par rapport au fait où les gens veulent grandir, vieillir chez eux le plus longtemps possible, c'est tout à fait légitime, et il faut mettre en place, je pense, toutes les mesures nécessaires. Donc, vous êtes une clé là-dedans, une clé très importante. Ce n'est pas seulement, pour moi, une clé de soins et de services, mais c'est une clé, comme le mentionnait la députée de Sainte-Rose à la fin, une clé aussi au niveau de l'habitation. Parce que, si notre habitation, notre habitat, si notre communauté n'est pas prête pour offrir les services, bien je pense que c'est difficile de rester à la maison, que nous soyons en situation de handicap ou en perte d'autonomie en vieillissant.

Donc, ça, je crois qu'il faut continuer à multiplier — vous avez donné l'exemple à Vaudreuil, là — bien il faut qu'il y ait encore plus d'exemples aussi probants. Comme à Québec, Chez soi, où il y a, par exemple, un édifice pour les personnes âgées, un autre pour les personnes en situation de handicap, les familles, puis ces gens-là se retrouvent, puis ça devient un milieu de vie et un milieu d'expression. Et c'est ça que vous faites, et c'est pour ça que votre rôle est très important. Et je souhaite que vous continuiez. J'ai l'air à prêcher, là, mais c'est parce que j'aime ce que vous faites et je souhaite que vous continuiez à vous développer le plus possible parce que la personne prend les décisions. Et je crois que jamais, jamais, jamais un ministre ou qui que ce soit ne devrait imposer un projet sans que la personne fasse partie du processus décisionnel, ça m'apparaît essentiel pour la réussite.

Maintenant, je vais aller à une question maintenant que je vous ai vantés beaucoup. Autre chose que j'aime, vous êtes parmi les premiers à parler des Premières Nations. Vous parlez ici de terre et de culture et de l'importance de s'occuper des Premières Nations. J'aimerais vous entendre là-dessus.

Le Président (M. Bergman) : M. Bédard.

M. Bédard (Gaston) : Je ne voulais pas vraiment aborder la question ce matin parce qu'on a un... on travaille un projet éventuellement à soumettre qui touche peut-être une organisation de soutien aux Premières Nations dans le respect puis dans le partenariat avec d'autres organisations qui existent déjà. Peut-être, je vais laisser... parce que je sais que Mme Brassard m'a fait signe qu'elle voulait intervenir. Si vous me permettez, M. le Président, je vais lui laisser introduire puis vous répondre puis je compléterai au besoin.

Le Président (M. Bergman) : Certainement. Mme Brassard.

• (11 h 50) •

Mme Brassard (Marie-Joëlle) : La question à la fois des Premières Nations et de l'habitation, mettons qu'on croise les choses parce qu'effectivement il y a un besoin en habitation important au niveau des Premières Nations, mais, lorsqu'on le croise avec la dimension coopérative, avec le modèle coopératif, on obtient, à ce moment-là, un respect des particularités, que ce soient des particularités culturelles, parce que les personnes en question qui se dotent de services sont les mêmes qui les définissent, ces services-là. Donc, quand on arrive avec les particularités à la fois culturelles ou même au niveau des immigrants à Montréal, c'est un moyen par excellence pour soutenir l'intégration des immigrants.

Et là les coopératives de solidarité permettent aussi d'introduire des membres de la communauté qui sont en soutien et qui peuvent justement faire un lien. Donc, ils ne sont pas enfermés dans un modèle où ils demeurent en ghetto, mais ils sont complètement ouverts à leur environnement. Et les organismes du milieu peuvent aussi utiliser la coopérative comme lieu où il y a un genre de carrefour où les gens partagent à la fois certains services, par exemple les organismes communautaires qui utilisent les locaux d'une coopérative d'habitation. Ça se fait fréquemment. Et c'est ces modèles-là qu'on est en train de développer pour soutenir à la fois l'intégration, à la fois la correspondance à des besoins très particuliers et qui sont définis par les personnes qui les vivent.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne. M. Bédard?

M. Bédard (Gaston) : ...ce que Mme Brassard a dit à la fin, c'est que, dans le fond, nous, dans notre modèle ou nos prétentions, il faut éviter de faire du top-down ou s'ingérer dans leurs affaires mais les impliquer, juste les soutenir mais les impliquer eux-mêmes dans différentes organisations d'approches plus coopératives. Dans notre cas, c'est ce qui est souhaité sur plusieurs volets. On a parlé de l'habitation, on peut parler aussi de certains services au niveau de la santé, mais je parle de la prévention surtout, éducation et autres.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.

Mme Blais : Peut-être une dernière question avant de céder la parole à mon collègue. Tout ce modèle coopératif me semble très important pour combattre aussi la pauvreté. Quand on parle de pauvreté, on ne parle pas que d'une pauvreté financière, mais d'une pauvreté qui s'articule autour de la solitude. Et on sait que, lorsqu'on est en situation de handicap ou quand on vieillit, on est souvent pris dans cette solitude. Et il me semble que le mouvement coopératif permet à la personne de s'exprimer, de partager et d'avoir aussi un sentiment de pouvoir sur ses propres réalisations. Je ne suis pas dans le champ, là, hein?

M. Bédard (Gaston) : Non, non. C'est...

Le Président (M. Bergman) : M. Bédard.

M. Bédard (Gaston) : Vous me permettez? Effectivement, pour nous, c'est plus qu'un rêve, là, dans les déterminants de la santé, c'est clair, d'impliquer les gens, mais aussi via des coopératives d'habitation. Moi, personnellement, j'ai contribué aussi à mettre, dans mon bénévolat, des coopératives d'habitation pour personnes vivant des handicaps particuliers, puis, ces mêmes personnes là, on les retrouvait dans un... J'avais l'impression qu'ils avaient changé du jour au lendemain, juste le fait qu'ils se retrouvent ensemble, qu'ils s'entraident et puis qu'ils ont un certain contrôle sur leur environnement.

Ça fait que, le modèle coopératif permet… — il n'y a pas d'exclusion — permet à différentes catégories de personnes à pouvoir répondre à certains... à leurs besoins propres, puis tantôt ça peut être dans des éléments de coopératives de proximité, c'est la même chose. Localement, dans mon quartier ou dans mon village, je peux faire des choses. Puis ça a une valeur économique, il ne faut pas l'oublier, puis ça a une valeur sociale extraordinaire.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Bienvenue à notre commission. On a eu l'occasion de se rencontrer à quelques reprises, puis je crois que le mouvement coopératif au Québec est très développé, et en plus vous faites partie intégrante de chacune des localités.

Au niveau de votre implication, vous avez des projets probablement dans des grandes municipalités, mais vous en avez aussi dans des municipalités très, très petites. Est-ce que vous pourriez m'en parler? Parce que moi, je viens du Saguenay—Lac-Saint-Jean — je pense que les gens commencent à le savoir — puis on a eu des projets dans quelques villages où les municipalités voulaient garder les personnes aînées qui devaient partir pour s'exiler vers les grandes villes, mais ils ont réussi à les garder parce qu'ils ont réussi à avoir des projets, justement, d'organisations coopératives dans les petites municipalités.

Le Président (M. Bergman) : M. Bédard.

M. Bédard (Gaston) : Effectivement, on est un mouvement qui est très déconcentré, là, qui essaie de supporter, là, chaque quartier, chaque municipalité dans ses besoins, puis c'est pour ça qu'on a développé beaucoup le concept aussi, depuis un certain temps… quoique ça existe depuis longtemps, mais on l'a articulé puis on lui met un nom : maintenant, on parle d'économie de proximité. Donc, on s'assure de pouvoir, avec l'aide des gens localement… de répondre à certains besoins tantôt dans l'hébergement, tantôt au niveau de l'alimentation ou l'agroalimentaire. Ça on l'a fait beaucoup, on a des exemples très, très concrets. Je vais inviter Mme Brassard à vous donner des exemples, tant dans votre région natale, là... Je ne sais pas si vous êtes né dans cette région-là également...

Le Président (M. Bergman) : Je m'excuse, M. Bédard. Collègues, on est appelés à un vote à l'Assemblée nationale, alors je suspends nos travaux pour quelques instants. On est appelés à l'Assemblée nationale pour un vote. Je suspends pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 11 h 54)

(Reprise à 12 h 5)

Le Président (M. Bergman) : À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, la commission reprend ses travaux. Et on était au bloc de l'opposition officielle. M. le député de Jean-Talon.

M. Bédard (Gaston) : …si vous le permettez, M. le Président, Mme Brassard répondre.

Le Président (M. Bergman) : Mme Brassard.

Mme Brassard (Marie-Joëlle) : Alors, on nous a demandé des exemples au niveau de l'habitation. Je pense qu'on peut parler d'un précurseur, dans la municipalité de Racine, où une première coopérative d'habitation sous la forme solidarité a été mise en place. Et puis c'est un des promoteurs ou… un important promoteur à ce moment-là, c'est Gaston Michaud, qui lui-même est une personne aînée qui voulait soutenir le développement puis le maintien des personnes dans sa communauté. Et puis, dans cette perspective-là, les personnes aînées se sont regroupées pour se doter de services, à la fois d'avoir un habitat qui était convenable en fonction de leurs besoins, mais aussi en lien avec la communauté. Je vais vous donner un exemple très concret. Par exemple, l'école primaire est à côté de la coopérative d'habitation pour aînés, et les jeunes, sur l'heure du midi, peuvent aller manger à la cafétéria avec les personnes aînées, et souvent, bien, il y a des éléments d'échanges portant sur l'historique du village ou des choses comme ça.

On a aussi évidemment un soutien qui se fait naturellement entre les personnes, puis les proches aidants peuvent aussi être membres du conseil d'administration, de telle sorte que, quand il y a des besoins à développer ou des liens avec la communauté… parce que les organismes communautaires, en tant que membres de soutien, sont admissibles aussi, donc il y a toujours possibilité de tricoter des liens. Et les organisations communautaires sont aussi… peuvent aussi être dans les espaces publics, occuper les espaces qui sont à l'intérieur de la coopérative d'habitation pour aînés. C'est pour ça qu'on parle de «soutenus par la communauté». Je parlais de l'exemple de Racine, là.

Le Président (M. Bergman) : Malheureusement, on doit suspendre encore notre séance pour quelques instants. Alors, je suspends nos travaux pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 12 h 8)

(Reprise à 12 h 9)

Le Président (M. Bergman) : À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Le mouvement coopératif a beaucoup d'adaptation, j'espère, parce qu'aujourd'hui il y a de la perturbation à l'Assemblée nationale.

M. Bédard (Gaston) : …on est accroché aux besoins des gens. On s'adapte, donc.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Là, ce que vous constatez, c'est qu'en politique on ne contrôle pas tout, hein, on est très dépendants des événements.

Si je reviens à ce que vous faites actuellement, actuellement vous faites quand même un bon travail, vous encouragez également les gens au maintien à domicile, vous avez mis en place des services, les entreprises d'économie sociale fonctionnent bien. L'assurance autonomie est une nouvelle structure de financement, c'est une nouvelle… moi, j'appelle ça… c'est pratiquement un nouveau monstre bureaucratique qu'on met en place. Seriez-vous capables de continuer à faire la même chose en améliorant puis en travaillant avec le ministère puis avec la société en général, et de continuer à faire ce maintien à domicile?

Le Président (M. Bergman) : M. Bédard.

• (12 h 10) •

M. Bédard (Gaston) : J'ai de la… En fait, ma réponse… Je ne vais pas éviter votre question, au contraire, là, elle est tout à fait pertinente, mais, pour nous, de la façon qu'on a positionné notre mémoire, c'est de dire : On souhaite que des gens soient de plus en plus autonomes à la maison ou dans des lieux communs, comme des coopératives, comme Mme Blais à mentionné tout à l'heure. Nous, ça nous tient à coeur. Il y a des fois un passage, sans tomber dans une dépendance, d'une structure qui appartient à d'autres. On dit que les coops, les mutuelles et certaines organisations d'OBNL sont des facilitants. On va s'ajuster par rapport aux nouveaux besoins, parce qu'il y a des besoins qui vont s'amplifier, on connaît l'évolution de notre démographie. Chez nous, il y a des besoins qui vont s'amplifier. Ça fait qu'à ce moment-là on va ajuster nos besoins. Puis on a déjà des structures, on veut juste les faire évoluer en conséquence.

Est-ce que, pour la société québécoise, on a besoin de ce nouveau programme pour pouvoir faire face aux enjeux de demain? Je me garde une réserve avant de répondre à ça. Pour l'instant, j'ai l'impression que, dans le livre blanc, ce qui est cerné, nous, on y adhère, ce qui est cerné. Je ne parle pas de financement, je parle des choix qu'on est en train de faire comme société, des orientations qu'on est en train de faire, d'essayer de bien équilibrer ce qu'on doit accorder à cette catégorie de population versus d'autres catégories qu'on répond aussi à des besoins, que ce soient les bébés ou les gens entre les deux, entre mon âge et les bébés, là. Je suis entre les deux. Disons, plus l'autre bord, là, mais… avant que le Dr Bolduc me le dise, là.

Des voix : Ha, ha, ha!

M. Bédard (Gaston) : Mais je pense qu'on y adhère, à cette préoccupation. La façon qu'on le partage au niveau financement, on n'a pas voulu… En tout cas, dans notre mémoire, vous allez le lire — peut-être que c'est déjà fait, d'ailleurs, Dr Bolduc, on vous l'a envoyé juste en début de semaine, je crois — on ne s'est pas imposés dans ce choix-là. On dit que ça, c'est un choix de société et on verra comment on partage cet aspect-là.

Est-ce que les processus, à date, peuvent convenir, ceux qu'on a, ou on doit légèrement les modifier? Je vais juste terminer ma réponse en vous disant, bien respectueusement : C'est sûr que les besoins évoluent, la société évolue, puis il faut aussi que nos processus évoluent. Maintenant, comment puis le chemin le meilleur?, je n'ai pas vraiment la réponse. À date, on dit juste que se préoccuper de façon plus intense sur le fait de vouloir garder nos gens, puis de trouver des moyens, les déterminants, qu'on dit, pour les soutenir, puis des déterminants qui incluent la prévention comme on a parlé tout à l'heure, je pense que ça, c'est gagnant pour notre société, puis on y souscrit largement.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. D'ailleurs, tous, on souscrit, puis tous, on sait qu'il va y avoir des changements puis une évolution. La question : Est-ce que le moyen proposé par l'assurance autonomie est le bon? Et, comme de fait, dans votre mémoire — c'est pour ça que j'en arrivais à cette question — vous ne parlez pas vraiment de financement et puis vous ne vous êtes pas positionnés pour savoir est-ce que c'était la bonne façon de financer. Parce qu'il y a des inconnus dans le projet, on ne sait pas, à la fin, qu'est-ce qui va arriver pour celui qui cotise, celui qui va recevoir les services, puis à quel niveau qu'on va le couvrir, et combien ça va coûter au système en général. Donc, c'est pour ça que vous n'avez pas pris position, dans votre mémoire, par rapport à cet élément-là.

Le Président (M. Bergman) : M. Bédard.

M. Bédard (Gaston) : Exact. Je dois répondre oui, oui à votre question. Il y a une préoccupation qu'on a, puis je ne suis pas sûr si on l'a écrit très clairement dans notre mémoire, c'est l'équité. Il faut s'assurer qu'on reste, dans notre prestation de services via nos entreprises d'économie sociale, nos entreprises de services à domicile ou autres… — parce qu'il ne faut pas oublier nos coopératives de santé qui peuvent faire un bout, ou d'autres coopératives — il faut juste s'assurer de rester équitables. Je ne sais pas comment on va travailler au niveau de la péréquation par rapport aux régions ou autres, mais il faut s'assurer de rester équitables. Puis après ça, bien, il y a des choix de société au niveau des argents parce que, on le sait tous comme citoyens payeurs de taxes, les argents, ça n'arrive pas du ciel, hein, vous composez avec ce que vous pouvez taxer puis de le répartir. Puis avec aussi la partie que nous, on ne néglige pas, qui est que l'usager peut aussi prendre parce qu'il décide de la prendre par rapport à certains services.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Oui, merci, M. le Président. C'est certain qu'il y a des valeurs avec lesquelles nous sommes d'accord, entre autres le choix de l'usager. Alors, je pense que chaque usager veut rester à domicile le plus longtemps possible. Lorsqu'il est obligé de quitter le domicile, c'est parce qu'il y a des circonstances qu'il ne contrôle pas, dont la santé. Des fois, c'est parfois le soutien, mais il y a des gens qui, à un certain niveau, ne pourront pas rester à domicile. Ça, cette commission parlementaire a servi à ça. Parce qu'au début le projet d'assurance autonomie, c'était comme si tout le monde allait avoir le droit… allait pouvoir rester à domicile, mais même le ministre puis les experts ont reconnu qu'il y a des clientèles qui vont devoir aller en CHSLD et en ressources intermédiaires. Déjà, le fait d'avoir eu ce changement dans le discours, je pense, c'est déjà quelque chose de bon.

Pour se prononcer sur l'assurance autonomie, moi, je pense — puis je ne sais pas si vous êtes d'accord — qu'il faut avoir le projet final parce que, tout dépendant des montants qui vont être octroyés, tout dépendant de l'évaluation puis également de savoir est-ce que le ministre va maintenir, là, le choix, entre autres, des prestataires... Ça, je pense que oui, mais il lui a été demandé à plusieurs reprises à ce que ce soit fait seulement par le public et qu'il n'y ait plus de… entre autres, des entreprises sociales et qu'il n'y ait surtout pas de privé. Et ce qu'on a compris de la part du ministre, c'est qu'il allait maintenir cette orientation, qu'il y aurait le choix des prestataires, dont le privé, les entreprises d'économie sociale et également le public. Ça, est-ce que vous avez suivi un petit peu notre commission parlementaire?

Le Président (M. Bergman) : M. Bédard.

M. Bédard (Gaston) : Oui. Dans le fond, je vais juste revenir sur ce à quoi on souscrit. Nous, on croit que… puis vous aussi, je le sais parce que je vous ai entendu à plusieurs reprises, vous croyez que… Le fait de rester à domicile ou dans des endroits communs, comme des coopératives, puis que les personnes sont impliquées dans leurs soins, je pense que c'est des déterminants qui sont très, très positifs. Hier, j'étais à l'institut de gériatrie de Montréal, et puis la directrice de la recherche nous faisait référence en disant : C'est beau qu'on vit plus âgés, mais ce qu'on cherche, c'est que les gens vivent plus en santé plus longtemps. C'est surtout ça. Puis une des façons de faire, dans le débat, entre autres, c'étaient des déterminants, dont… — c'est pour ça que je suis à l'aise de le redire encore aujourd'hui — dont la prise en charge, un peu, de ma prestation, la prise en charge de mes soins. Puis je suis d'accord avec vous qu'il vient à un moment donné, dans la vie, où c'est beau, bien vouloir, mais il faut passer à une autre étape. Puis c'est là qu'on a aussi… on a la chance, chez nous, au Québec, d'avoir des institutions pour pouvoir aussi nous soutenir dans cette étape plus cruciale de notre vie.

Maintenant, au niveau des coûts, est-ce qu'il faut attendre à la fin? Je pense qu'il y a des principes de base auxquels on souscrit puis qui font partie des valeurs coopératives, c'est-à-dire d'essayer d'aider les gens à prendre en charge leur vie, leurs déterminants, qu'ils aient un contrôle dessus. Puis ça, c'est dans le livre blanc, puis nous, on souscrit à ça d'emblée.

Il reste le financement. Comme citoyens, c'est sûr, vous l'avez bien dit, on... Ça, c'est éventuellement un autre débat, je pense, qui est à venir, en tout cas si je comprends bien, là. Puis j'ai entendu quelques propos hier par des personnes qui ont fait des interventions. Je n'ai pas de commentaire par rapport à ça parce qu'on ne s'est pas penchés sur la question. Nous, vous avez compris qu'au niveau coop on s'est surtout penchés sur la prise en charge de notre destinée, des personnes par les personnes, comme je l'ai dit souvent, pour les personnes. Ça fait qu'on pense que ça a une valeur. Et je comprends votre question. Puis vous allez me dire : Gaston, tu ne veux pas y répondre. Ça va.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Non, bien…

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon, il vous reste 1 min 30 s.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci. Bien, ça va être un commentaire. Aujourd'hui, c'est notre dernière journée d'audition des mémoires. Des groupes sont venus, et, quand on lit les mémoires puis on écoute les groupes, ils viennent tous en disant : On est pour l'assurance autonomie, mais… Ils rajoutent un gros «mais», là, avec vraiment quatre grosses lettres — M-A-I-S, là — et c'est là qu'ils disent qu'ils ne peuvent pas vraiment se prononcer tant qu'ils n'ont pas tous les éléments.

Puis on a eu un groupe hier auquel j'ai posé la question, là. À un moment donné, on ne peut pas juste dire : Je suis pour avec des «mais», on vote pour ou on vote contre. Parce que, comme députés, c'est ce qu'on va devoir faire. Et puis à la fin ils étaient… Au début, ils étaient pour les principes, mais, si le projet restait comme ça, dont entre autres la contribution de l'usager, ils disaient : Nous autres, on va être contre, là.

Donc, quand les gens vont venir… en assumant qu'il va y avoir le dépôt d'un projet de loi, quand les gens vont venir représenter, il va falloir qu'ils nous redonnent leur position claire sur le projet de loi. En partant avec le principe… Si vous posez à quelqu'un : Est-ce que vous préférez aller au ciel? Je ne connais pas beaucoup de monde qui va dire non, là, tu sais, tout le monde va dire oui. Mais, quand on va regarder les conditions pour y aller, peut-être que ce n'est pas tout le monde qui va y avoir accès. Donc, ça va être peut-être ça, là, je pense, l'enjeu du dépôt de projet de loi et des prochaines auditions au niveau des mémoires. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bergman) : Malheureusement, le temps s'est écoulé. M. Bédard, Mme Brassard, Mme Rouleau, merci pour votre patience. Vous avez vu la vie parlementaire en action. Et merci pour votre présentation.

Et, collègues, je suspends nos travaux pour quelques instants seulement.

(Suspension de la séance à 12 h 19)

(Reprise à 12 h 26)

Le Président (M. Bergman) : Alors, on souhaite la bienvenue…

Des voix :

Le Président (M. Bergman) : À l'ordre, s'il vous plaît! On souhaite la bienvenue au Regroupement provincial des comités des usagers.

Des voix :

Le Président (M. Bergman) : S'il vous plaît, collègues. À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, bienvenue à l'Assemblée nationale. Vous avez 10 minutes pour faire votre présentation, suivie d'un échange avec les membres de la commission. Pour les fins d'enregistrement, on a besoin de vos noms, vos titres. Et les prochaines 10 minutes, c'est à vous.

Regroupement provincial des
comités des usagers (RPCU)

M. Blain (Pierre) : Mon nom est Pierre Blain, je suis le directeur général du Regroupement provincial des comités des usagers. Et je suis accompagné du président, M. Claude Ménard, qui va faire l'introduction.

Le Président (M. Bergman) : M. Ménard.

M. Ménard (Claude) : Alors, bonjour, M. le Président, M. le ministre, membres de la commission assurance autonomie. Fondé en 2004, en lien avec le projet de loi n° 83, le Regroupement provincial des comités des usagers du réseau de la santé et des services sociaux défend les droits des usagers et représente les quelque 600 comités d'usagers et de résidents des établissements de santé et de services sociaux du Québec, qu'ils soient publics, privés, conventionnés ou autofinancés. Plus de 83 % de tous les comités des usagers et de résidents sont membres du regroupement provincial, ce qui en fait le groupe le plus représentatif des usagers du réseau de la santé et des services sociaux au Québec.

Le livre blanc sur la création d'une assurance autonomie, L'autonomie pour tous, se veut une réflexion sur la réponse du Québec en tant que société au vieillissement de la population. Il fait des constats et propose des voies de réflexion et de solution. Cette réflexion a commencé il y a déjà 10 ans, mais jamais encore nous n'étions allés aussi loin dans notre prise de conscience collective sur les implications du vieillissement de la population de notre réseau de santé et de services sociaux.

D'ailleurs, il n'y a pas que le secteur de la santé et des services sociaux qui sera affecté par le vieillissement de la population québécoise, les secteurs économique, social, démocratique en ressentiront tout autant les effets. Le regroupement provincial croit qu'il faut dès maintenant amorcer le virage et prendre des décisions, car le temps presse.

Le Regroupement provincial des comités d'usagers appuie la démarche de création d'une caisse autonomie. En effet, si la création d'une assurance autonomie telle qu'elle est présentée dans ce livre blanc se réalise, elle sera le XXIe siècle de ce qu'a été l'assurance santé au XXe siècle, c'est-à-dire une avancée majeure.

Cependant, plusieurs enjeux doivent être abordés, et des décisions demandent à être prises pour en assurer le succès. L'un de ces enjeux concerne la lutte contre la pauvreté. Comment pourrons-nous maintenir à domicile les personnes qui n'auront pas les revenus nécessaires pour demeurer chez elles? Deux autres enjeux importants sont de rendre les services accessibles et d'offrir des ressources suffisantes pour répondre à la demande. Pour la suite, le directeur général va enclencher la démarche.

Le Président (M. Bergman) : M. Blain.

• (12 h 30) •

M. Blain (Pierre) : Merci. Dans la section Vieillissement et incapacités, le livre blanc présente les projections démographiques qui font ressortir l'ampleur du vieillissement de la population au Québec dans les prochaines années. Le RPCU constate que ces chiffres correspondent à la réalité qui attend le Québec et le monde en général d'ici quelques années. En plus de devoir répondre aux besoins des personnes vieillissantes, l'assurance autonomie devra tenir compte des besoins d'autres clientèles, comme les personnes handicapées et les personnes ayant une déficience intellectuelle. Le RPCU veut s'assurer que toutes les clientèles qui souhaitent demeurer chez elles auront accès aux soins nécessaires. Naturellement, cela se fera pour autant que les capacités de la personne le permettent.

Les conditions de maintien à domicile... Mais, avant de parler de certaines conditions pour le maintien à domicile, le RPCU revient sur une condition essentielle au maintien, c'est-à-dire la lutte contre la pauvreté. En effet, sans revenu adéquat, les personnes âgées ou les autres clientèles ne pourront pas demeurer à domicile. Il existe donc des conditions pour que le maintien à domicile soit possible. La première condition est bien sûr l'accès à un médecin de famille; la deuxième est l'autonomie de la personne et l'ampleur de ses incapacités; enfin, il faut que les services soient surtout disponibles.

Il est largement admis que les personnes âgées veulent vieillir chez elles. D'ailleurs, le gouvernement précédent a publié la politique Vieillir et vivre ensemble — Chez soi dans sa communauté, au Québec, qui ouvrait, à mon point de vue, la voie au maintien à domicile. Pour qu'une personne puisse demeurer chez elle, il faut que cela lui soit possible, c'est-à-dire que ses incapacités le permettent et qu'elle reçoive le soutien nécessaire. Il y a une gradation dans les incapacités pour une personne âgée, une personne handicapée ou une personne ayant une déficience intellectuelle, il y a un seuil où les soins à domicile ne sont pas possibles. Il faudra donc que le régime à mettre en place en tienne compte, car autrement ce régime serait trop dispendieux à gérer.

Nous croyons que les personnes doivent être passablement autonomes pour pouvoir demeurer chez elles. Le livre blanc fait référence, d'ailleurs, à l'Outil d'évaluation multiclientèle pour cibler les besoins. Cet outil comprend le Système de mesures de l'autonomie fonctionnelle, le SMAF, qui met en évidence un ensemble d'incapacités qui, regroupées en fonction de leurs similitudes et des besoins qui en résultent, sont désignées sous l'appellation du ISO-SMAF. Plusieurs se sont questionnés à savoir si ces instruments n'avaient pas leurs limites et surtout s'il ne devrait pas y avoir d'autres outils pour que le plan d'intervention soit bien mis en place. Nous lançons la question.

La difficulté avec le maintien à domicile est en effet l'intensité des besoins. Si une personne a vraiment besoin d'aide pour s'habiller, elle a besoin de cette aide sept jours par semaine et 365 jours par année. Si une personne a vraiment besoin d'aide pour s'alimenter, elle a besoin de cette aide trois fois par jour et tous les jours de l'année. Alors, qui lui apportera cette aide? Nous croyons que les soins de santé sont déjà bien identifiés. Maintenant, on pense que ça prend l'aide comme telle. On croit donc qu'aucune assurance ou caisse d'autonomie ne pourra combler tous les besoins. C'est pourquoi il faudra que l'assurance autonomie établisse ses limites et les services qui pourront être couverts.

Le RPCU rappelle que les services d'hébergement en CHSLD seront toujours nécessaires et qu'il faut porter une attention particulière pour les prévoir correctement. Nous avons commandé une étude économique, et l'objectif de cette étude était d'évaluer l'accroissement des besoins et des coûts associés aux soins à domicile et aux besoins en CHSLD après l'implantation d'une politique de valorisation du maintien à domicile. Ce que notre étude nous montre, c'est qu'en fin de compte, en axant vers le maintien à domicile, on va couper des coûts, bien sûr, en hébergement, mais, à ce moment-là, il faut qu'on réinvestisse vers le service à domicile. Et c'est là où le plan d'intervention devient extrêmement important. Il doit être fait par un professionnel compétent qui aura toute la latitude pour offrir des services dont la personne aura besoin. Il faudra surtout que les ressources soient disponibles. Les centres de santé, les CSSS, d'ailleurs desquels relèvent les soins à domicile, devront s'adapter à cette nouvelle réalité et y consacrer les ressources nécessaires. Selon le mémoire déposé par l'AQESSS, cela est possible, et nous croyons aussi, au RPCU, que cela sera possible.

Donc, j'insiste encore sur la disponibilité des services. Si les services ne sont pas disponibles, aucune assurance autonomie, aussi bonne soit-elle, ne pourra combler les besoins de maintien à domicile. Pour que les projets puissent aussi porter ses fruits, il faut aussi veiller à l'amélioration de la qualité, et cela passe bien sûr par une évaluation des services offerts. Les comités des usagers sont bien placés pour contribuer à cet aspect. Le RPCU croit que les comités des usagers devraient être mis à contribution en participant activement à l'évaluation de la satisfaction des usagers en maintien à domicile, chose qui ne se fait pas vraiment actuellement. Il y a beaucoup de réticences à cet effet et pour lever ces réticences, le RPCU croit qu'il faut donner des outils d'évaluation aux comités des usagers, et nous pourrions les développer et les offrir aux comités comme tels.

Les proches aidants, pour nous, sont des partenaires à part entière. Les soins à domicile sont trop souvent cependant l'apanage des proches aidants, la plupart du temps une femme avec un emploi et une famille, qui doit compenser en plus pour les soins ou les services pour un membre de la famille âgé ou handicapé. Dans notre sondage que nous avons réalisé pour la Semaine des droits des usagers, plus du tiers des Québécois disent apporter une contribution personnelle, et ce taux s'élève à 43 % chez les personnes âgées de 65 ans et plus. Mais, pour nous, ce qui est important, c'est de parler d'argent, bien sûr. Nous avons fait un autre sondage qui montrait que les Québécois étaient en partie divisés pour savoir : Est-ce qu'on doit payer plus ou on doit payer moins? 44 % des Québécois disent qu'on est prêts à contribuer plus, un tiers disent non.

Mais ce qui est important, c'est plutôt de voir les scénarios de transfert des patients vers les soins à domicile, qui doivent être analysés. Nous avons fait cinq scénarios, nous avons fait cinq hypothèses de coûts qui pourraient influencer. Donc, on pense qu'en déplaçant les clientèles vers le maintien à domicile, on pourra économiser des sommes absolument importantes qui pourront justement servir pour financer les soins comme tels. Et, pour nous, on pense que, s'il y a caisse, on pense qu'il devrait y avoir une caisse d'autonomie, mais elle devrait être capitalisée, c'est-à-dire il ne faut pas que cet argent-là puisse être détourné — j'emploie le mot «détourné», mon directeur des communications m'a dit : Ne faites pas ça, je le dis pareil — à d'autres fins que celles-là, et on pense qu'actuellement il y en a eu trop, de cas, comme tels.

Mais qui doit payer? Bien, c'est ça. La caisse d'autonomie doit être équitable, en lien avec les besoins et financée adéquatement. On croit qu'il faudrait y avoir une répartition, une juste répartition entre l'État et la contribution des individus. Et on s'entend toujours, dans ce cas-ci, pour des aides à domicile. Les soins, pour nous, sont toujours assurés par le système public. C'est l'aide à domicile qui, elle, doit avoir une contribution de l'usager comme tel. Et ne devrait-on pas favoriser une approche comme pour les garderies à 7 $ par jour? Quel serait le coût juste? C'est à vous, je pense, à le voir. On croit aussi que cette équité doit être interrégionale et elle doit être partout disponible sur le territoire. Je passe la parole maintenant à M. Ménard pour terminer, pour la conclusion.

Le Président (M. Bergman) : M. Ménard.

M. Ménard (Claude) : Pour que l'on puisse bien vieillir chez soi, il faut se garder en santé toute sa vie. Le Québec doit également réfléchir à plus long terme et se pencher sur la prévention de la santé. La prévention et de bonnes conditions de vie doivent se développer dès le plus jeune âge. L'école doit aussi inciter les jeunes à adopter de saines habitudes de vie, à se nourrir correctement et à faire de l'exercice.

En conclusion, le maintien à domicile est incontournable, cela fait consensus. Il reste maintenant à trouver la bonne formule. Ce qui semble achopper est le financement du maintien à domicile. Combien les Québécois devraient-ils payer pour s'offrir ces services? La caisse d'économie propose une avenue. Aux parlementaires d'en décider entre vous. Le Regroupement provincial des comités d'usagers appuiera ce qui sera juste, équitable et raisonnable.

Le Président (M. Bergman) : Merci. Merci pour votre présentation. Maintenant, pour le bloc du deuxième groupe d'opposition, Mme la députée d'Arthabaska.

Mme Roy (Arthabaska) : Merci. Je remercie les collègues qui me laissent commencer. On a souvent… Plus le groupe est petit, plus on est multitâches. Donc, on est le troisième groupe, donc ça me fait beaucoup de rôles à assumer.

J'ai lu dans votre mémoire que votre représentativité est énorme : l'alliance des centres jeunesse, l'Association des établissements privés conventionnés, Fédération des centres de réadaptation et déficience intellectuelle et TED, centres de réadaptation en déficience physique, en dépendance, centres hospitaliers à vocation psychiatrique, secteur anglophone, établissements à vocation universitaire. Ça fait combien d'usagers, tout ça?

M. Blain (Pierre) : 8 millions.

Mme Roy (Arthabaska) : C'est tous les Québécois.

Des voix :

M. Blain (Pierre) : On naît usager et on meurt usager.

Mme Roy (Arthabaska) : Ça fait que, finalement, quand vous avez fait des sondages, vous avez eu à peu près un millier de réponses.

M. Blain (Pierre) : Nous avons consulté principalement les comités des usagers, qui représentent justement, dans les établissements, la population comme telle des usagers du réseau qui sont eux-mêmes élus par la population. Donc, on pense qu'ils sont représentatifs.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée d'Arthabaska.

Mme Roy (Arthabaska) : Si je comprends votre mémoire, vous êtes pour, mais sans… mais en attendant d'avoir plus de précisions puis plus de… parce que c'est…

• (12 h 40) •

M. Blain (Pierre) : Nous, non. Je pense que non. On n'a pas besoin… Bien oui, on va avoir besoin de plus de précisions pour savoir quels vont être les transferts qu'on va pouvoir faire en maintien à domicile. Nous, nous avons élaboré des scénarios, justement. On dit qu'on peut aller jusqu'à telle intensité, mais, à partir du moment où on a une intensité plus grande, il faudra bien sûr que les services soient plus larges, et c'est ça qui risque de coûter plus cher. Donc, il faut déterminer d'abord les services qu'on veut offrir.

Mme Roy (Arthabaska) : C'est sûr. Ça va être le point de rupture pour chacune des choses, autant pour le financement que pour les services offerts, que pour jusqu'à quand, au maintien à domicile, jusqu'à combien d'heures-soins, c'est le point de rupture de toutes ces questions-là qui va faire que vous allez avoir une discussion avec tout ce monde-là, les 8 millions, et puis que vous allez pouvoir peut-être nous revenir plus précisément. C'est ça que vous me dites? C'est comme ça que je comprends ça.

Le Président (M. Bergman) : M. Blain.

M. Blain (Pierre) : Ce que je dis, c'est que je pense que c'est aux parlementaires à prendre cette décision-là de voir jusqu'où on veut transférer. Il y a des choses qu'on ne pourra jamais faire. Je vais vous donner un exemple. Mes amis Gomard, Maryvonne et Alain Gomard, en France, cette année, quand je les ai visités, reçoivent des services à domicile qui sont, justement, de l'aide mais également des soins. Et, pour eux, c'est essentiel pour pouvoir le faire. Ils demeurent dans une maison, sept étages, imaginez-vous, devant la mer, et on a tout de même mis en place des soins à domicile pour les aider. Ça leur coûte quelque chose, bien sûr, parce que, comme partout, les soins à domicile coûtent quelque chose, ils ont les moyens de pouvoir le payer. Mais, nous, je pense qu'on est capables aussi de le faire. Et c'est pour ça qu'on a lancé l'idée peut-être de le faire comme les garderies à 7 $. Les gens pourraient contribuer selon leurs moyens, et, à ce moment-là, la différence est compensée par la caisse comme telle.

Mme Roy (Arthabaska) : Ça me surprend, cette comparaison-là avec les garderies à 7 $ parce que les garderies à 7 $ ne prennent pas en compte la capacité de payer des personnes puis vous, vous voulez qu'on la prenne en compte.

M. Blain (Pierre) : Nous, dans ce cas-ci, je pense qu'on devrait en tenir compte, effectivement, de la capacité de payer. Des personnes qui sont en résidence privée, qui, dans certains cas, paient des loyers assez importants, je pense, devraient avoir aussi une contribution peut-être un peu plus importante.

Le Président (M. Bergman) : Malheureusement, le temps s'est écoulé pour…

Mme Roy (Arthabaska) : …les personnes…

Le Président (M. Bergman) : …le deuxième groupe d'opposition. Maintenant, pour le bloc du gouvernement, M. le ministre.

M. Hébert : Merci beaucoup, M. Ménard, M. Blain, de votre mémoire et surtout des travaux que vous avez réalisés pour être en mesure de juger le cadre financier, sur lequel je vais revenir un peu plus tard. Dans votre mémoire, vous soulevez l'inéquité entre les services qui sont offerts d'une région par rapport à l'autre, également d'un milieu de vie par rapport à l'autre. C'est un constat qu'ont fait également, bon, la Protectrice du citoyen, le Vérificateur général. J'aimerais vous entendre sur cette inéquité de la situation actuelle.

Le Président (M. Bergman) : M. Blain.

M. Blain (Pierre) : Merci. On l'a vécu souvent avec nos comités des usagers, et ce sont eux qui nous le disent, il faut que les services soient disponibles un peu partout. Le problème dans une région, dans beaucoup de cas, c'est très large, vous le savez, la plupart de vous, les députés, vous êtes dans des régions qui ont des très grands territoires. Est-ce qu'on doit déplacer les gens pour les amener dans des CHSLD? C'est là qu'est toute la problématique. On ne doit pas déraciner les gens, et c'est pour ça qu'en pouvant offrir à domicile des soins, ce sera beaucoup plus facile. Et je pense qu'avec des avenues comme des coopératives, comme on nous a présentées tantôt, d'autres groupes d'économie familiale, je pense que ça pourrait être des choses possibles.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : En fait, l'assurance autonomie vise à uniformiser l'allocation de soutien à l'autonomie. Et, dans chacune des régions, dépendamment de la disponibilité des services, bien cette allocation-là va servir à avoir un plan de services individualisés qui répond aux besoins. Alors, on est vraiment dans cette optique de l'équité entre les régions.

Vous soulevez avec beaucoup de justesse le rôle des proches aidants, vous nous invitez à évaluer leurs besoins, à leur fournir des services. J'aimerais vous entendre sur les services qui devraient être rendus disponibles via l'assurance autonomie.

Le Président (M. Bergman) : M. Blain.

M. Blain (Pierre) : Déjà, vous avez mentionné dans le livre blanc déjà des services qui sont donnés aux proches aidants. On pense que, malheureusement, ils ne sont pas toujours disponibles, on pense qu'il devrait être ajouté beaucoup plus. Mais, pour nous, on ne peut pas bâtir une politique de maintien à domicile sur les proches aidants, c'est impossible. Pour moi, les proches aidants sont là, mais comme complément, et je pense qu'il faut qu'on leur donne des compensations quelconques pour pouvoir le faire, et je pense qu'à partir de ce moment-là la caisse d'autonomie pourrait peut-être servir à ça.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Par contre, il faut s'assurer de la qualité des services, de l'accréditation des prestataires, que ce soient des prestataires d'entreprises d'économie sociale ou des prestataires qui peuvent être des proches aidants. Alors, comment vous voyez cette accréditation de services et l'assurance de la qualité?

Le Président (M. Bergman) : M. Blain.

M. Blain (Pierre) : Bien, nous avons insisté, dans notre mémoire, sur la formation qui doit être nécessaire pour ces personnes-là. Je pense que… Moi, j'ai toujours un peu de craintes, justement, effectivement. Bon, cet été, j'ai eu un autre cas, justement, chez une autre amie. Je suis allé en France encore, puis elle était tombée sur son balcon. Elle avait la chance cependant d'avoir des gens qui veillaient sur elle, mais même là… Moi, je ne savais pas comment la lever. Alors, par conséquent, je pense que même les proches aidants doivent, eux aussi, avoir des formations pour qu'on puisse s'assurer qu'ils comprennent bien la façon d'agir avec les personnes âgées.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Vous abordez un point essentiel, central, dans l'assurance autonomie, qui est l'évaluation des besoins avec l'Outil d'évaluation multiclientèle. Vous nous invitez à compléter l'Outil d'évaluation multiclientèle avec d'autres dimensions pour que les plans de services puissent vraiment capter les besoins. À quoi vous faites référence quand vous dites : Il y a d'autres éléments qui devraient être ajoutés dans l'évaluation?

Le Président (M. Bergman) : M. Blain.

M. Blain (Pierre) : Ça, ce sont des éléments qui nous ont été apportés par nos membres, principalement dans les résidences privées conventionnées, qui disent qu'il faudrait qu'on élargisse, justement, un outil d'évaluation pour pouvoir bien savoir quels sont les besoins que les gens devraient avoir pour maintenir à domicile ou même pour les accueillir dans un CHSLD, surtout que, si on veut déplacer… Parce que nous, on dit qu'il va y avoir à peu près peut-être 15 000 places qui devraient être créées si on ne fait rien, donc ça veut dire que ce seraient 15 000 personnes qui demeureraient chez elles et avec des besoins particuliers. Donc, est-ce qu'on ne devrait pas raffiner un peu plus? C'est la question qu'on pose.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Pouvez-vous aller plus loin, dans votre pensée? «Raffiner», vous voulez dire quoi?

M. Blain (Pierre) : C'est que je pense que ça va…

M. Hébert : Certains nous ont suggéré la participation sociale. Est-ce que c'est à ça que vous référez?

Le Président (M. Bergman) : M. Blain.

M. Blain (Pierre) : Pas comme tel. Je pense qu'il faut que l'instrument puisse bien saisir si la personne est capable de… les incapacités. On le saisit déjà, pardon. Le SMAF saisit bien quelles sont les incapacités, mais, entre avoir des incapacités et les services qu'on doit recevoir, c'est là qu'il faut faire vraiment le lien entre les deux.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : O.K., je vois. Vous me parlez de seuils, de limites du maintien à domicile. Vous comprendrez que ces seuils-là ne peuvent pas être absolus, ça dépend de l'environnement dans lequel la personne est. En d'autres termes, quelqu'un qui reste dans une résidence collective, une résidence pour aînés, peut avoir un seuil extrêmement loin pour la limite du maintien à domicile, alors que, quelqu'un qui reste dans le 3e Rang Sud d'une municipalité plus isolée, le seuil n'est pas le même. Donc, l'environnement physique est important. L'environnement social également est important. Alors, déterminer des seuils a priori au-delà desquels il n'y a plus de maintien à domicile possible, ça me semble difficile. Alors, je ne sais pas si… Comment vous voyez ça, vous?

Le Président (M. Bergman) : M. Blain.

M. Blain (Pierre) : En réalité, je pense que je reviens à la question précédente que vous avez posée, parce que vous venez de mettre une balise qui est importante : le milieu dans lequel la personne vit. Et je pense que c'est là aussi qu'il va falloir tenir compte de ces choses-là. Quel est l'environnement? 45 % des Québécois nous disent, dans notre sondage, qu'ils n'ont personne pour les aider. C'est entendu que ça va être difficile. Mais, dans des milieux urbains, où on peut avoir justement de l'aide de groupes communautaires, je pense que ça, ça peut être plus facile de mettre en place. Par la suite, cependant, si on parle dans des régions éloignées, c'est là qu'il s'agira de voir. Et c'est dans ce cas-là où on parle que le plan d'intervention est si important. Il va falloir que la personne qui le fasse en tienne compte parce qu'autrement on ne pourra pas.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : J'en viens sur les analyses économiques que vous avez produites. Le député de Jean-Talon, il voudrait qu'on puisse dire dès maintenant quel va être le montant de l'allocation et comment va être l'ajustement par rapport au revenu de la personne. On n'en est pas là, on est encore à définir le cadre du régime d'assurance maladie et le cadre financier. J'aimerais vous entendre sur l'étude que vous avez réalisée.

Le Président (M. Bergman) : M. Blain.

M. Blain (Pierre) : Merci. On n'a pas fait faire d'étude de coût, présentement, pour savoir combien devrait coûter l'assurance autonomie. Ce qu'on a fait faire, c'est : À partir des chiffres disponibles — parce que tous ces chiffres-là, ce sont des chiffres publics — qu'est-ce qu'on pourrait économiser? Donc, si on est capables d'économiser, est-ce qu'on est capables, à partir de ce moment-là, d'en prendre une partie pour pouvoir offrir des services?

Donc, comme tel, non, on n'a pas pris position sur le seuil qui devrait être fait. Cependant, on pense qu'il y a des économies possibles qui peuvent être faites et, à ce moment-là, on peut dégager… Et je pense que ça a été déjà, même, le sujet du maintien à vivre chez soi, c'était ça qu'on voulait faire, c'était générer des économies, par la suite le faire. Après ça, combien ça va coûter à l'individu?, bien, ça, c'est une autre paire de manches.

• (12 h 50) •

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Mais faire des économies... Moi, je ne voudrais pas qu'on diminue les lits de CHSLD pour être capables de transférer ça dans les soins à domicile, on s'entend là-dessus.

M. Blain (Pierre) : On s'entend.

M. Hébert : Pour moi, il y a des économies à générer, mais il faut amorcer la pompe, comme disait mon père. Alors, il faut mettre de l'argent dedans, et c'est ce que nous prévoyons faire, là, 500 millions dans les soins à domicile pour amorcer la pompe, de façon à ce qu'on puisse opérer ce virage-là. Alors, vous êtes d'accord avec cette stratégie?

Le Président (M. Bergman) : M. Blain.

M. Blain (Pierre) : Pour nous, on pense que oui. Je pense que c'est raisonnable. Et effectivement vous avez raison, il ne faut pas faire des économies pour faire des économies. Faire des économies, c'est pour investir, pour pouvoir investir pour que tout le monde puisse le faire. Donc, je pense que ça peut être une façon de le faire.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre, il vous reste 11 minutes.

M. Hébert : Vous avez, dans cette analyse économique, différents scénarios. J'aimerais ça que vous nous parliez de ces scénarios-là.

M. Blain (Pierre) : Les différents scénarios, justement, touchent l'intensité des besoins possiblement. Donc, il y a des scénarios dépendant des catégories d'ISO-SMAF, bien sûr. Je ne suis pas un spécialiste, je pense qu'il y a un ministre qui est plus spécialiste que moi là-dedans. Et donc, cette intensité-là, est-ce qu'elle peut se traduire directement par un transfert à domicile? Et c'est là plutôt, la diminution des coûts en CHSLD. C'est là où notre deuxième tableau… qui présente les économies possibles. Donc, c'est dans ce sens-là où on peut faire une... Donc, si on se dit : Si on n'en prend qu'une partie puis qu'on transfère... Et c'est là qu'il s'agit de voir. Est-ce qu'on peut penser qu'un SMAF 14 peut demeurer à domicile? Bien, ça, c'est une autre paire de manches.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : O.K. J'aimerais savoir si le détail de cette étude pourrait être disponible.

M. Blain (Pierre) : Avec grand plaisir. Je l'ai donnée, d'ailleurs, tantôt au député de Jean-Talon. Je pourrai vous la faire communiquer aussi 

M. Hébert : Je suis sûr que...

Le Président (M. Bergman) : ...s'il vous plaît, pour l'envoyer au secrétaire de la commission...

M. Blain (Pierre) : Parfait. Avec grand plaisir.

Le Président (M. Bergman) : ...qui va l'envoyer à tous les membres de la commission.

M. Blain (Pierre) : Avec grand plaisir.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Je suis sûr que le député de Jean-Talon va être très intéressé par ce genre d'analyse.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Toujours.

M. Hébert : Dans votre mémoire, vous nous parlez de politique de prévention. Alors, nous sommes à mettre la dernière touche à une politique nationale de prévention qui aborde un certain nombre de préoccupations que vous avez, en termes de lutte à la pauvreté, et d'accès au logement, et d'environnement sain, etc. Alors, ça, c'est aussi un autre grand projet de notre ministère et de notre gouvernement. Alors, je peux vous dire que ce que vous soulevez est tout à fait important.

M. Blain (Pierre) : Je pense qu'il faut voir à plus long terme. Pour moi, c'est une chose qui est importante. Et c'est un peu ça qui est arrivé avec l'assurance maladie parce que — je suis peut-être le plus vieux dans la salle — je me souviens, en 1970, quand ça a été fait, il y avait eu des protestations contre l'assurance maladie, que ce n'était pas possible, il y avait même eu une grève de médecins, qui disaient que ce n'était pas là. Alors… Enfin. Mais je pense que la prévention est la voie pour le maintien à domicile, surtout plus tard, bien…

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Oui. Parce que M. Castonguay, qui a développé cette assurance maladie, avait aussi eu des oppositions dans son grand projet, hein? Ce n'était pas...

M. Blain (Pierre) : Moi, je me souviens, ça fait... Comme je vous dis, je suis le plus vieux ici, peut-être que je suis le seul qui m'en rappelle, mais il y avait eu une grève des médecins parce qu'on avait dit que ce n'était pas possible. Ma famille, grâce au ciel... Ma nièce a été la première diagnostiquée, à peu près, au Québec, avec la fibrose kystique. Ma soeur et mon beau-frère se sont ruinés dans les années 50 parce que ça n'existait pas. Quand est arrivée l'assurance maladie et que la fille de sa fille a eu ça, bien ça a été beaucoup plus facile.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Et on est face à une situation où il y a des gens qui ont une perte d'autonomie, qui se ruinent à s'acheter des services ou qui ont des proches... un proche, ou une proche le plus souvent, qui s'épuise au détriment de sa santé pour avoir des services et qui finalement en viennent à la conclusion qu'il faut aller en centre d'hébergement et de soins de longue durée, qu'il faut se séparer de son conjoint, se déraciner de son milieu. Et ces situations, qui étaient des drames vécus dans les années 60, 70, avant l'implantation de l'assurance maladie, on les vit dans les années 2000 avant l'implantation de l'assurance autonomie, d'où l'importance de pouvoir mettre sur pied cette nouvelle mesure de solidarité sociale.

Le Président (M. Bergman) : M. Blain.

M. Blain (Pierre) : Je pense que... Bon, c'est la position du livre blanc. Je pense qu'elle est raisonnable, à ce niveau-là, pour le maintien à domicile, c'est entendu.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Je vais passer la parole à ma collègue.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose, il vous reste 7 min 30 s.

Mme Proulx : Merci, M. le Président. Bonjour, messieurs. Je regarde votre mémoire et j'aimerais souligner quelques éléments qui m'apparaissent les éléments fondamentaux de toutes les discussions qu'on a depuis le début des auditions du livre blanc sur l'assurance autonomie, et ce sont les données sur le vieillissement, à la page 7 de votre mémoire, et je vais me permettre tout simplement de les redire.

«Alors qu'à la fin des années 2000 les gens de 65 ans et plus constituaient environ 13 % de la population, en 2031, ils représenteront un Québécois sur quatre. Le nombre de personnes de 75 ans et plus augmentera aussi de façon importante, tout comme le nombre d'individus de 85 ans et plus.»

Alors, le constat qu'on fait, c'est qu'il y a une situation qui est, on pourrait dire, universelle, inéluctable et irréversible, et c'est le vieillissement. Tout le monde est touché par le vieillissement, tout le monde va vieillir. Et je pense que, comme société, on est aussi face à un choix : ou bien on laisse les choses telles qu'elles sont, mais les projections nous indiquent qu'on va avoir de sérieux problèmes, dans les années à venir, si on ne bouge pas… Si je comprends bien votre position, c'est de dire : Nous devons amorcer dès maintenant un virage majeur vers l'assurance autonomie, c'est-à-dire la possibilité pour les gens de demeurer à la maison, mais surtout d'obtenir les soins dont ils auront besoin à domicile. Et ce qu'il y a derrière la proposition d'assurance autonomie, c'est d'offrir aux personnes, aux Québécois et aux Québécoises, le choix, une diversité de choix pour pouvoir continuer à vivre dans l'environnement que les gens auront choisi.

Maintenant, vous qui êtes du comité des usagers et qui êtes bien au fait de différentes dimensions dont on doit tenir compte dans tout ce virage qu'on souhaite amorcer, j'aimerais ça que vous nous disiez, selon vous, quel sera le plus grand défi, l'enjeu véritablement névralgique dont on devrait se préoccuper en priorité si on veut s'assurer que, comme société, on amorce un virage et que ce soit une réussite. Quels sont les éléments clés dont on doit tenir compte et dont on doit se préoccuper vers ce grand virage de la société vers une assurance autonomie?

Le Président (M. Bergman) : M. Blain.

M. Blain (Pierre) : Bien sûr, les soins de santé, il y a cette préoccupation-là, mais, pour moi, les soins de santé sont déjà offerts, ils sont là. Pour moi, l'amorce a été faite avec le maintien à domicile. Vieillir chez soi, pour moi, c'est la bonne chose. Maintenant, il faut donner... tout va tourner alentour des services qu'on va offrir.

Présentement, notre problème, c'est qu'on dirait que les CHSLD... pas les CHSLD, plutôt les CSSS font plutôt les plans d'intervention en fonction de leurs besoins plutôt qu'en fonction de l'usager. Quand on a à couper... On en a vu, CSSS Lucille-Teasdale, à Montréal, qui est dans un quartier pauvre, on a coupé les services à domicile. Les madames d'Hochelaga-Maisonneuve, au troisième étage, elles n'ont plus, justement, d'accès, on n'a plus la possibilité de les aider à faire leur épicerie, et tout ça.

Il faut qu'on donne d'abord des services de base et, là, à ce moment-là, avec des services de base, on va pouvoir offrir le plus de services possible. Et, pour moi, les services de base, ce ne sont pas ceux qui vont coûter le plus cher. Pour moi, les services de base, ce sont ceux qui sont essentiels pour le maintien. Quand on dit que l'intensité est importante, quand on a besoin de s'habiller, de l'aide pour s'habiller sept jours par semaine, là, je ne suis pas sûr que ça devient vraiment un maintien à domicile. Mais, pour moi, une personne qui est capable d'avoir de l'aide continuellement...

J'en ai une autre, amie, justement, une madame de 92 ans qui demeure à l'Île-des-Soeurs, à Montréal, et qui a la chance d'avoir quelqu'un qui l'aide au moins une fois par semaine pour l'amener faire son épicerie. Mais elle est chanceuse. Mais c'est ça qu'on a besoin d'avoir, des gens qui vont aider.

Le Président (M. Bergman) : M. Ménard.

M. Ménard (Claude) : Si je me permets de résumer ce que le directeur vient de vous présenter, c'est : l'humanisation des soins au quotidien. C'est la personne d'abord, ce qu'elle a besoin, que ça lui soit accessible, et non d'être là, en attente, en disant : Peut-être que...

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose.

Mme Proulx : Oui. Merci, M. le Président. Justement, vous parlez du besoin autour... de la priorité qu'on devrait donner aux services, à la livraison des services. J'aimerais vous entendre sur la proposition d'une caisse réservée pour une assurance autonomie. Qu'est-ce que vous en pensez?

Le Président (M. Bergman) : M. Blain.

• (13 heures) •

M. Blain (Pierre) : Je vais être obligé, encore une fois, de prendre mon exemple français, effectivement, où c'est la personne qui décide des services. Les services sont offerts par la municipalité, qui sont... Il y a un panier de services qui est offert par la municipalité, et la personne les choisit. Et je pense que c'est ça qu'il nous manque jusqu'à présent, d'avoir cette espèce de choix là. Il y a des gens qui font plus... qui aiment mieux travailler avec un que de travailler avec un autre. Dans le fond, ça devient pareil comme un engagement. On engage quelqu'un pour venir... Déjà, faire entrer quelqu'un chez soi, c'est tout un... quelque chose. Par conséquent, si on a la possibilité de choisir qui viendrait chez soi, je pense que ça serait quelque chose d'important, plutôt que le CSSS décide : C'est elle qui va là.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose, il vous reste 1 min 30 s.

Mme Proulx : La députée de Masson a une question à poser.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Masson, il vous reste 1 min 30 s.

Mme Gadoury-Hamelin : Oui. Alors, bonjour, merci d'être là. Mon questionnement… Dans le cadre de la commission, on a parlé beaucoup des entreprises d'économie sociale qui pourraient remplir un rôle de façon importante auprès des gens, justement, dans l'humanisation des soins et des services qu'ils peuvent rendre aux personnes aînées pour leur permettre de rester à la maison. Vous, selon votre opinion, est-ce que vous pensez que, si on supporte mieux les entreprises d'économie sociale dans la formation de leur personnel, est-ce que vous pensez que c'est une solution?

Le Président (M. Bergman) : M. Ménard.

M. Ménard (Claude) : Pour nous... On pense que c'est une solution, oui, effectivement, mais c'est la formation et aussi faire en sorte que les gens veuillent conserver leur travail, il faut que les conditions de travail soient aussi importantes. Encore une fois, je reviens avec mon exemple : les gens sont bien payés et, à ce moment-là, aiment ce qu'ils font. Alors, je pense que c'est important de pouvoir donner aussi cette chose-là. Mais la formation est essentielle. On ne prend pas n'importe qui pour faire ça. C'est comme les préposés aux bénéficiaires dans les CHSLD, normalement on ne prend pas n'importe qui. On va en parler peut-être en commission parlementaire bientôt. Et, à ce moment-là, je pense que c'est important de les former correctement.

Le Président (M. Bergman) : Malheureusement, le temps du bloc du gouvernement s'est écoulé. Maintenant, pour le bloc de l'opposition officielle, Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.

Mme Blais : Merci beaucoup, M. le Président. M. Ménard, M. Blain, merci d'être ici aujourd'hui pour cette dernière journée, mais non la moindre, journée importante. Écoutez, je suis heureuse aussi que vous ayez mentionné la politique Vieillir et vivre ensemble. Le virage, il ne se fait pas avec l'assurance autonomie, ça a commencé aussi avec la politique Chez soi : le premier choix, où il y a eu des intentions, des montants d'argent qui se sont mis en place. Et la politique a vraiment donné, je crois — Vieillir et vivre ensemble — des orientations. Entre autres, la politique de prévention que le ministre développe, bien ça découle de la politique Vieillir et vivre ensemble. Et on est toujours très satisfaits quand les gouvernements, les nouveaux gouvernements continuent les bonnes actions qui sont inscrites à quelque part dans une politique.

Le ministre mentionne... il vous a posé une question : Est-ce que vous considérez que 500 millions de dollars sur cinq ans, ça permet justement de prendre ce virage? Et je tiens à souligner, il faut que je le dise, que, dans le budget que nous avions mis en place pour la politique Vieillir et vivre ensemble, c'était grosso modo autour du 500 millions sur cinq ans : première année, 50 millions; deuxième année, 149 millions, puis je pourrais continuer comme ça. Donc, on est pas mal, là… on se ressemble, là, tous les deux, là-dessus.

Ma grande préoccupation, et notre grande préoccupation, est de savoir : Est-ce qu'on doit faire une nouvelle structure, sortir le 4,3 milliards de dollars du ministère de la Santé pour le confier à la RAMQ, ajouter 100 millions par année, ou 50 millions, 149 millions, 200 millions, bon, par année pour faire cette gestion-là ou si on devrait corriger les irritants qui existent actuellement — vous parliez, là, de certaines personnes dans Hochelaga-Maisonneuve qui n'avaient pas les services — donc, apporter des corrections immédiatement, faire en sorte que les enveloppes soient vraiment attachées très, très serrées et fonctionner avec un système qui fonctionne relativement bien plutôt que de corriger les écueils?

Parce que, vous savez, vous comme moi, qu'un jour on ne peut pas rester chez soi et qu'on sera obligés d'aller en RI et/ou en CHSLD. Mais essayons de les garder à la maison le plus longtemps possible. Mais, si les services ne sont pas là, on n'est pas capables de les garder à la maison. Vous êtes d'accord avec moi?

M. Blain (Pierre) : Absolument.

Mme Blais : Est-ce qu'on serait capables de faire ça sans être obligés d'inventer une nouvelle structure?

Le Président (M. Bergman) : M. Blain.

M. Blain (Pierre) : Au RPCU, on a toujours dit : Il faut passer de la bureaucratie aux services. Pour nous, c'est là qu'est le point le plus important. Est-ce qu'on est capables de le faire dans la structure actuelle ou on doit mettre une autre structure? Je vous laisse, vous, les députés, d'en débattre. Pour moi, ce qui est important, je pense que la caisse d'autonomie doit être protégée. Pour moi, c'est ça qui est la chose la plus importante. Il faut que l'argent qui soit là… Puis vous vous souvenez, Mme la députée, que je vous ai challengée quelquefois, justement, en disant : Oui, mais l'argent n'a pas été dépensé. On avait mis cet argent-là, mais ça n'a pas été dépensé. Ici, il faut surtout que l'argent soit dépensé, mais, pour qu'il soit dépensé, il faut que les services soient là.

J'ai parfois un peu de problèmes avec les grosses structures, effectivement, du ministère de la Santé. Je ne suis pas sûr que les directions générales vont toujours comprendre exactement qu'est-ce qu'elles doivent faire. Et c'est pour ça qu'il faut que ce soit correctement mis en place. Alors, ça peut être mis en place à l'intérieur du ministère, d'une certaine façon, mais, pour nous, une possibilité peut être cette caisse-là aussi.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.

Mme Blais : Avant de passer la parole à mon collègue, vous avez mentionné en quelque part que ça prendrait 15 000 nouveaux lits en 2022. Si on ne poursuit pas l'intensification des services à domicile, où vous pensez que ça va prendre 15 000 nouvelles places?

Le Président (M. Bergman) : M. Blain.

M. Blain (Pierre) : On pense que le maintien à domicile va faire en sorte qu'on n'aura pas besoin de ces places-là, justement, parce que des services devraient être mis en place. Et ça, bien sûr, c'est mon économiste qui a fait ces études-là. Là, je laisse les spécialistes peut-être y répondre plus correctement. Mais on pense qu'effectivement ce sont des projections qui sont réalistes.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Bien, bienvenue à notre commission. De toute façon, avec ou sans la nouvelle structure, c'est ce qui doit être fait. Puis, comme disait ma collègue, on avait déjà commencé à investir dans le maintien à domicile. Il y a des endroits au Québec qu'on a atteint… Puis je pense que le ministre répète le même chiffre que moi — au moins on s'entend là-dessus — c'est que ça va prendre à peu près 2,5 places par 100 personnes de 65 ans et plus, de CHSLD. Ça, je pense qu'on peut s'entendre là-dessus.

Et, quand vous prenez ce chiffre-là avec le 0,8 place de ressources intermédiaires… Puis je prenais un communiqué de la région de Québec aujourd'hui, qui, eux autres, vont ouvrir des places en ressources intermédiaires. Ils ont probablement des patients qui sont en CHSLD qui devraient être en ressources intermédiaires. Parce qu'ils n'ont pas de places en ressources intermédiaires, bien là ils sont obligés de les mettre en CHSLD. Principe très simple pour nos auditeurs, c'est que, lorsque vous devenez trop lourd puis on n'a pas les ressources nécessaires, il faut aller à la ressource plus lourde. Donc, c'est ce qui fait qu'à Montréal et à Québec il y a cette transformation qui est en train de se faire. Par la suite, on devrait être capables de garder le reste de la clientèle qui nécessite des soins à domicile, à domicile.

La question… Il y a des endroits, par contre, la population va croître beaucoup plus… marqué, de façon beaucoup plus importante, et ces endroits-là, ils vont avoir besoin de places de CHSLD. Il y a probablement d'autres endroits qu'on n'aura pas besoin d'en construire. Parce que, si vous ne construisez pas de places de CHSLD à 2,5, il va falloir les prendre et les déménager de région pour les envoyer dans une région où ils ont peut-être trop de places qu'on ne devrait pas fermer pour le moment. Qu'est-ce que vous en pensez, de ça? En passant, ça s'est fait au Québec, hein? Moi, je me souviens que les gens de La Baie, à Chicoutimi, devaient être hospitalisés à Métabetchouan en CHSLD, et jusqu'au jour où est-ce qu'on a corrigé cette iniquité en construisant des places et en fermant des places du côté du Lac-Saint-Jean.

Le Président (M. Bergman) : M. Blain.

M. Blain (Pierre) : Vous avez raison. Et d'ailleurs vous avez raison. Nous, on a toujours crié qu'on avait eu à peu près 5 000 places de CHSLD qui avaient été fermées puis on n'était pas d'accord. La différence… ce que vous apportez, effectivement ça va être, encore une fois, une équité régionale. Je pense qu'il y a des régions qui sont peut-être mal desservies et je pense qu'il devrait y avoir effectivement de meilleurs services. Et d'ailleurs on le dit dans notre mémoire, on dit que le maintien à domicile ne pourra pas remplacer tout ce qu'il y a comme services en CHSLD. Donc, si effectivement il faut le voir, il faut qu'on le prévoie, à ce moment-là, pour que l'équité soit correcte parce que… justement pour éviter le déracinement de la population. On le voit à tous les jours.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Et vous comprenez qu'indépendamment que l'on fasse ou pas l'assurance autonomie ça prend des investissements dans les soins à domicile. C'est des enveloppes qui sont protégées, et ces enveloppes-là, à ce moment-là, vont permettre de diminuer le nombre de lits qu'on a besoin en CHSLD, si on se fie à la croissance. Parce que ça, c'est une chose aussi qu'on a apprise au début. C'est comme je vous avais dit, on devait fermer les places de CHSLD. Puis je pense que le ministre a corrigé le tir, il a dit : On va faire des économies, on va arrêter d'en ouvrir. Mais, quand on fait l'évaluation des populations du Québec, il y a des endroits, c'est : soit qu'on va prendre le patient puis on va le déménager, si on y va avec un taux de 2,5; ou encore on va devoir quand même construire des places de CHSLD. À ce moment-là, votre position, est-ce qu'on devrait les construire, les places, ou on déplace les patients? Je répète la question.

Le Président (M. Bergman) : M. Blain.

• (13 h 10) •

M. Blain (Pierre) : Pour moi, il y a une chose qui est claire, on ne déracine pas les gens, c'est certain, mais c'est toujours une question de moyens. On a eu un cas, justement, sur la Côte-Nord, notre président du comité des usagers de Sept-Îles, justement, nous est arrivé en disant : Il y a une inéquité dans notre région, on n'a pas suffisamment de places en CHSLD, qu'est-ce qu'on peut faire? Pendant ce temps-là, on avait construit ailleurs, on en a fait. Mais je pense qu'il va falloir avoir des seuils minimaux partout.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Bien, M. le Président, c'est… le raisonnement est très simple : si vous n'avez pas le nombre de places nécessaires, le 2,5, votre patient, si vous ne le déracinez pas, va rester à l'hôpital. Ça fait que c'est pour ça que, dans cette transformation-là, indépendamment, encore là, si on a ou pas l'assurance autonomie, il faut qu'on fasse des plans de croissance. Puis j'ai des collègues qui sont des Laurentides, Laval, Lanaudière. Vous savez, au cours des 20 prochaines années, ils vont augmenter d'à peu près 30 % leur population. Ça, ça veut dire que, les Laurentides, c'est 150 000 personnes de plus, c'est non seulement le vieillissement de la population, mais le nombre de personnes supplémentaires qui vont dans ces secteurs-là. Moi, j'aimerais ça qu'on m'explique que, s'ils ont 150 000 personnes, puis ces gens-là vieillissent, avec les ressources actuelles qu'ils ont en CHSLD, comment on va faire pour ne pas construire de nouvelles places en CHSLD.

Le Président (M. Bergman) : M. Blain.

M. Blain (Pierre) : Je pense que la question est légitime. Cependant, tout va dépendre par la suite aussi de l'intensité qu'on va vouloir mettre au niveau des services à domicile. Pour moi, les services à domicile, ça reste toujours, ce n'est pas des soins. Le service à domicile est avant tout de l'aide comme telle. Par conséquent, les RI sont là pour donner des soins aussi, parce que les gens sont là, donc il y aurait peut-être une avenue possible.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Un, là, je pense qu'on peut donner des soins à domicile, on peut augmenter l'intensité. Je pense qu'il y a un niveau d'intensité. Tantôt, vous parliez des profils 14 puis 13, c'est difficile, à ce moment-là, de les garder à domicile, où ça demande tellement de ressources… Puis, encore là, même si vous avez, des fois, des profils qui peuvent demeurer à domicile, ça vous prend un support, ça vous prend des gens, des proches aidants qui vont donner un coup de main. Parce que, dans votre scénario, vous aviez fait une analyse provinciale avec tant de places, mais il va falloir tenir compte qu'il va falloir en ouvrir, de ces places-là.

Mais je reviens aux propos… Indépendamment du côté économique, quelle que soit la méthode qu'on prend avec ou sans assurance autonomie, on va investir dans les soins à domicile. La question : Est-ce qu'on a besoin de créer une nouvelle structure bureaucratique pour donner des soins? Puis là, il faut que vous compreniez, quand on fait ce type d'investissement dans une structure, avant d'obtenir vraiment des résultats, ça peut prendre quelques années, versus, comme a dit ma collègue, de tout de suite dire : Bien, on va se mettre à 2,5 le plus rapidement possible et on investit l'argent directement dans les soins plutôt que d'investir dans une structure.

M. Blain (Pierre) : Oui, mais…

Le Président (M. Bergman) : M. Blain.

M. Blain (Pierre) : Pardon. Bien sûr, les structures, pour nous, on n'aime pas ça. Comme je vous ai dit, il faut passer de la bureaucratie au service. Quel est le meilleur moyen de donner le service? Pour moi, c'est des structures qui doivent être souples, facilement et surtout… qui sont proches de la population, et il faut que les budgets puissent être là. Alors, quelle est la formule? Est-ce que l'assurance maladie, présentement, est une structure qui n'est pas capable de gérer ça? Ça, je ne sais pas, je ne peux pas vous répondre.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Jean-Talon, il vous reste cinq minutes.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Bien, c'est intéressant parce que vous représentez quand même tous les usagers, pas seulement que les usagers qui sont de… qui nécessitent du maintien à domicile, mais pour les personnes aînées. Si c'est vrai pour l'assurance autonomie, pourquoi on ne fait pas la même chose pour les gens qui ont le cancer?

Le Président (M. Bergman) : M. Blain.

M. Blain (Pierre) : Parce que, bien, les soins à domicile pour le cancer…

          M.Bolduc(Jean-Talon) : …là on fait un programme puis on prend une enveloppe, comme disait M. Castonguay — qui, lui, appelait ça un corps étranger, le fait de créer une nouvelle structure — on prend le programme, et on désintègre le système, puis on dit : Maintenant, ça sort du système, et on va le gérer indépendamment. Si je fais ça pour le maintien à domicile pour les personnes aînées, pourquoi je ne ferais pas ça pour le cancer? En passant, pourquoi je ne ferais pas ça aussi pour la santé mentale, qui a des grands, grands, grands besoins? Autrement dit, pourquoi je ne fragmente pas tout mon réseau de la santé et je ne ferais pas des enveloppes pour chacun, qui, à la fin… Je tiens à vous le dire, si on répond aux besoins de tout le monde, il va falloir avoir le budget que ça coûte, là. Mais pourquoi je ne fragmenterais pas mon système? Si c'est vrai pour les personnes aînées, pourquoi ce n'est pas vrai pour la santé mentale?

Le Président (M. Bergman) : M. Blain.

M. Blain (Pierre) : Parce que présentement je pense que la population qui a le plus de besoins sont les personnes aînées. Je reviens encore sur mes exemples français, excusez-moi, mais, en France, il y a l'hospitalisation à la maison. Je ne pense pas qu'on ait ça, nous, ici, encore. Puis je ne suis pas sûr que le système pourrait le permettre. Mais c'est, pour moi, justement, quand on parle de… La personne que je vous parlais concernant le maintien à domicile, en France, M. Gomard, a eu un cancer, et bien sûr les traitements se font ailleurs, mais après ça tout le suivi est fait à la maison.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Oui. C'est parce qu'on a eu des gens, hier, qui sont venus nous parler de la France, et c'est relativement fragmenté. Puis je pense qu'on essaie de garder nos gens beaucoup en externe, le plus possible à domicile. Là, il faut être prudent parce que, des fois, des gens, il y en a qui sont capables de se déplacer, parce que, de faire des soins à domicile, il y a un coût également, ne serait-ce que le nombre d'interventions par personne est beaucoup plus limité que lorsque les gens se déplacent. Mais, lorsqu'on peut, je pense qu'il faut le faire.

C'est pour ça… La question de base qu'on va avoir dans le projet, on est d'accord avec les principes. Moi, je pense que la transformation va se faire indépendamment ou pas de l'assurance autonomie. La question de base : Est-ce qu'on recrée une nouvelle structure avec une nouvelle façon de faire, une enveloppe qui, en passant, est sortie du contexte global? La question des soins intégrés, de la continuité des services peut-elle être mise en jeu? Et je sais que le ministre a dit : Oui, mais, par rapport au financement, on va y aller selon les besoins. Ça, on n'ouvre pas... on ne discutera pas longtemps du débat de savoir combien les gens vont payer pour avoir leurs soins, mais il reste que, même en termes de principes d'intégration...

À un tel point que moi, je me dis, si on avait un système dans lequel c'était fragmenté comme ça, généralement la plupart des gens vont vous dire : Non, vous devriez ramener ça en soins intégrés et en soins continus et non pas fragmenter. Et, en passant, les gens nous disaient, hier, qu'en France c'était beaucoup ça, c'est-à-dire c'était la fragmentation avec différents types de payeurs pour différents types de services, puis ils fonctionnaient sur de multiples caisses. Il ne semblerait pas que ce soit si efficace et efficient que ça.

Le Président (M. Bergman) : M. Blain.

M. Blain (Pierre) : Peut-être, mais, pour moi, je pense qu'on revient, à ce moment-là, à soins, soins de santé. Pour moi, justement, maintien à domicile, dans beaucoup de cas, c'est de l'aide, ce n'est pas des soins de santé comme tels. Il y a probablement une très grande partie de la clientèle... Ma madame, encore une fois, de 92 ans, française, qui demeure à l'Île-des-Soeurs, elle n'est pas malade, elle n'a pas besoin de soins de santé, elle a besoin d'aide. Alors, pour moi, c'est là où on ne peut pas faire une comparaison entre une personne cancéreuse puis, nécessairement, une personne âgée.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon, deux minutes.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Sauf que, pour atteindre un niveau de 2,5 places par 100 personnes de 65 ans et plus, là… Il y a des gens qui vont avoir besoin de soins. Je vais vous donner un exemple. Il y a des MPOC — maladie pulmonaire obstructive chronique — qui vont avoir des traitements d'inhalothérapie à domicile, sinon ces gens-là vont se retrouver dans des endroits comme en CHSLD. Il y a des gens qui, à la fin de leur vie, ont besoin d'une grande intensité de soins. Je pense que le ministre va pouvoir dire la même chose que moi. Théoriquement, c'est ces gens-là qui font la différence entre être en CHSLD et être à domicile. Parce que ceux qui ont juste besoin d'aide à domicile, même actuellement ils ne sont pas dans les CHSLD, ils reçoivent des services différents, ils ont des aidants naturels. Mais ceux qu'on parle de garder à domicile, c'est des gens qui sont malades, là, qui vont avoir des vrais, vrais soins, là : des infirmières, visites à domicile avec des médecins, peut-être de l'inhalothérapie, la nutritionniste qui va donner un coup de main. C'est ces gens-là, qu'on va avoir, là, c'est plus que juste : On va vous aider à vous habiller.

Le Président (M. Bergman) : M. Blain.

M. Blain (Pierre) : C'est pour ça que je pense qu'on a parlé d'intensité. Je pense que ce n'est pas pour tout le monde. Et, pour moi, c'est la base de tout.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon, il vous reste une minute.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Oui. Bien, pour terminer, M. le Président, juste en passant, on partage les mêmes objectifs. Dans les moyens, on peut avoir des différences, puis je pense qu'à la fin il faut atteindre les mêmes résultats. Puis un élément important, ce qu'il faut vraiment mettre au centre de nos préoccupations, c'est l'usager. Sauf qu'il ne faut pas lui compliquer la vie. Et puis il faut savoir également tous les impacts par rapport au projet d'assurance autonomie, donc combien il va débourser de sa propre poche pour recevoir des services. Merci de votre collaboration.

Le Président (M. Bergman) : Malheureusement, le temps s'est écoulé. M. Ménard, M. Blain, merci d'être ici avec nous aujourd'hui, de partager votre expertise avec nous.

Et, collègues, je suspends les travaux de la commission jusqu'à 15 heures aujourd'hui. Merci beaucoup.

(Suspension de la séance à 13 h 19)

(Reprise à 15 h 7)

Le Président (M. Bergman) : À l'ordre, s'il vous plaît! Collègues, la commission reprend ses travaux. Nous allons poursuivre sans plus tarder les consultations particulières et auditions publiques sur le livre blanc sur la création d'une assurance autonomie intitulé L'autonomie pour tous.

Alors, nous recevons maintenant le Curateur public du Québec. Mes collègues, je vois que le Curateur public, M. Normand Jutras... on était collègues ensemble ici, à l'Assemblée nationale. On a été élus pour la première fois en 1994, lui comme député de Drummond et moi comme député de D'Arcy-McGee. Alors, c'est vraiment un grand plaisir de vous souhaiter la bienvenue à l'Assemblée nationale, ici, aujourd'hui, Me Jutras.

Alors, Me Jutras, vous avez 10 minutes pour faire votre présentation. Suivra un échange avec les membres de la commission. Et, pour les fins d'enregistrement, on a besoin des noms... votre nom et les noms de vos collègues ainsi que leur titre. Alors, encore bienvenue à l'Assemblée nationale, Me Jutras.

Curateur public

M. Jutras (Normand) : Alors, merci, M. le Président. Alors, Normand Jutras, Curateur public du Québec. Alors, M. le Président, M. le ministre, membres de la commission, alors c'est avec beaucoup d'intérêt que le Curateur public se présente aujourd'hui devant vous pour vous faire part de notre position concernant le livre blanc, là, L'autonomie pour tous.

Avant d'aller plus loin, je voudrais vous présenter les personnes qui m'accompagnent : à ma droite, Pierre Lamarche, qui est directeur général des services aux personnes; à ma gauche immédiate, Pierre Berger, qui est directeur des politiques et du développement; et, à ma gauche lointaine, Raynald Leblanc, directeur général de l'administration, de la planification et des communications.

Alors, dans un premier temps, je voudrais vous rappeler la mission du Curateur public. Et, de cette façon, vous comprendrez mieux la position que nous vous exprimons aujourd'hui, là, relativement au livre blanc L'autonomie pour tous. Alors, le Curateur public, en vertu de la Loi sur le curateur public et en vertu du Code civil, il voit à la protection des personnes inaptes. Qui sont les personnes inaptes? Alors, ce sont des personnes qui sont incapables de prendre soin d'elles-mêmes ou qui sont incapables de prendre soin de leurs biens, de gérer leurs biens, ou les deux à la fois. Alors, comment ça se répartit? Alors, 40 %, ce sont des déficients intellectuels; 30 %, des gens qui ont des problèmes de santé mentale; 20 %, des personnes qui ont des maladies dégénératives, démence sénile ou Alzheimer; 10 %, traumatismes crâniens ou autres causes moins connues. Alors, nous voyons donc à la protection de ces personnes, à la protection de leurs intérêts, la défense de leurs intérêts, la défense de leurs droits. Et un principe aussi qui nous habite toujours, qui nous anime toujours, c'est la sauvegarde de l'autonomie de ces personnes, d'où, entre autres, notre grand intérêt, là, de l'autonomie pour tous qu'on retrouve, là, dans le livre blanc.

• (15 h 10) •

Alors, le nombre de ces personnes au Québec, les 13 000 qui relèvent du Curateur public même, c'est quand aucun proche ou aucun parent n'a voulu ou n'a pu prendre la charge de la personne. Alors, ces gens-là, nous nous en occupons au quotidien. Nous voyons à leur protection, comme je vous le disais, mais nous gérons leur patrimoine, nous percevons leurs revenus, nous payons toutes les factures qui peuvent les concerner : médicaments, vêtements, des choses d'utilité courante. Et ce qui fait bien réaliser, je pense, l'ampleur de la tâche qui nous incombe, entre autres, je vous donne cet exemple-là, à chaque année, nous faisons 26 000 déclarations d'impôt, 13 000 au fédéral, 13 000 au provincial.

Il y a aussi les personnes qui sont sous curatelle ou tutelle privée, à savoir quand un proche ou un parent a accepté de prendre la charge de la curatelle. Alors, pour ces personnes, nous avons un devoir de surveillance de l'administration du patrimoine. On nous fait un rapport annuellement, et nous voyons ce qu'il en est. Et nous avons aussi un devoir d'accompagnement pour faire en sorte que les proches acceptent davantage la tâche d'être curateurs. Alors, nous accompagnons ces gens-là, nous les informons, nous répondons à leurs questions, nous les soutenons pour que ce rôle finalement leur soit plus facile. Et il y a aussi 12 000 personnes, là, qui sont sous des mandats d'inaptitude, à savoir, ils ont confié mandat à quelqu'un, un proche généralement, de s'occuper de leur personne ou de leurs biens advenant leur inaptitude.

Alors, l'assurance autonomie, on le dit tant et plus, elle se justifie au premier titre par le vieillissement de notre population, un vieillissement marqué, d'ailleurs. Et, cette réalité, nous y sommes confrontés quotidiennement, au Curateur public, parce que, je vous le disais, 20 % des personnes que nous représentons, ce sont des personnes qui sont atteintes de maladie dégénérative. Mais, depuis quelques années, bon an, mal an, les nouveaux régimes que nous ouvrons, à 50 %, ce sont des personnes atteintes de maladie dégénérative due au vieillissement de la population. Alors donc, 50 % à chaque année, ce sont des cas de maladie dégénérative. Et, dans notre clientèle, c'est entre 40 % à 43 % des gens que nous représentons qui ont déjà 65 ans et plus. Alors, quand on lit dans le mémoire que c'est en 2031 que le quart de la population aura 65 ans et plus, nous, c'est déjà le cas.

Et, même si la majorité des personnes que nous représentons vivent en hébergement, il y en a 15 %, des gens qui sont sous curatelle publique, 15 % qui vivent à domicile. Puis, dans le cas des curatelles privées, c'est 41 % qui vivent à domicile. Alors, c'est donc 2 000 personnes, curatelle publique, qui vivent à domicile; 3 500, dans le cas des personnes qui sont sous curatelle privée. Alors, ça veut dire que c'est 5 500 personnes dont nous nous occupons et qui finalement, là, sont concernées par l'assurance automobile… l'assurance autonomie, dis-je, excusez-moi.

Alors, pourquoi le Curateur public est d'accord globalement, là, avec le principe de l'assurance autonomie? Bien, d'abord, nous souscrivons au principe d'offrir les services aux personnes à leur domicile. Et cela, comme vous venez de le voir, concerne beaucoup de personnes que nous représentons. Nous sommes aussi d'accord avec l'idée de protéger ce financement, nous considérons aussi que l'allocation de soutien à l'autonomie, c'est une excellente avancée, et finalement nous ne pouvons qu'applaudir à l'aide aux proches aidants. Les services à domicile favorisent l'autonomie des personnes, et la sauvegarde de l'autonomie, c'est un des grands principes qui nous guident.

Cependant, des clarifications s'imposent. D'abord, la contribution financière de l'usager, qui serait demandée à l'usager. Alors, une contribution pourrait être exigée de l'usager. Qu'en sera-t-il pour les personnes inaptes qui sont aussi des personnes handicapées? Alors, vous allez vous rappeler que le décret de 1988 qui visait le transfert des programmes gérés par l'Office des personnes handicapées à différents ministères, ce décret-là disait — puis il n'a pas été modifié depuis — que les personnes handicapées ne doivent pas assumer les coûts supplémentaires qui sont liés à leur incapacité. Et ce principe-là aussi a été maintenu dans l'actuelle politique de soutien à domicile Chez soi : le premier choix. Ce principe-là est maintenu. Nous demandons donc que ce principe soit sauvegardé. Alors, en conséquence, il nous faut, à notre avis, modifier… clarifier, c'est-à-dire, les modalités de la contribution financière. Et ce que nous demandons surtout, si on modifie les modalités : à tout le moins, que les personnes que nous représentons ne se retrouvent pas en situation d'appauvrissement par rapport à la situation actuelle.

La participation sociale. Alors, je reviens encore sur le principe de la sauvegarde de l'autonomie, qui est un des principes qui nous guident. Alors, quand nous ouvrons un régime, on se demande toujours : Est-ce que c'est nécessaire d'ouvrir un régime? Jusqu'où faut-il aller dans ce régime-là? Est-ce qu'on peut peut-être l'ouvrir proportionnellement?, de sorte que, quand on ouvre un régime, on tient compte de l'opinion de la personne que nous représentons. Alors, nous disons qu'il faudrait aussi, dans le cas de l'autonomie pour tous, tenir compte de l'opinion de ces personnes-là parce que les profils ISO-SMAF malheureusement ne prennent pas nécessairement en compte, là, effectivement, les désirs de la personne et surtout son implication sociale, qui peut être plus grande dans un cas que par rapport à un autre.

Le crédit d'impôt de maintien à domicile, est-ce qu'il sera maintenu ou non? Alors, on se posait la question. Ce que nous demandons à cet égard, nous demandons soit de le maintenir, ou, si vous décidez de le modifier, on peut être ouverts à ça aussi, mais, encore là, ce que nous demandons, c'est qu'il n'y ait pas d'appauvrissement pour les personnes que nous représentons.

Le rôle des entreprises d'économie sociale et d'aide domestique. Alors, c'est sûr qu'à la lecture du livre blanc on constate que ces entreprises vont voir leur rôle grandement accru. Alors, les observations que nous vous faisons à cet égard, ce sont les suivantes. D'abord, il va de soi, il y a un grand besoin de formation qui s'imposera, particulièrement pour les AVQ. Il faudra aussi atteindre une uniformité de services à travers le Québec, cela s'impose. Il faudra éviter aussi que ces entreprises refusent de donner certains services ou choisissent même parfois ce qui est le plus payant ou, des fois, ce qui est le moins de trouble. Et je vous rappelle aussi, pour avoir frayé beaucoup avec le milieu communautaire, c'est que ces entreprises aussi veulent toujours le plus d'autonomie possible, alors il faudra tenir compte de ce principe qui les anime.

Les personnes qui sont atteintes de troubles de santé mentale, à la lecture du livre blanc, elles semblent exclues. À un moment donné, on fait une certaine énumération, mais on ne retrouve pas nommément les personnes qui sont atteintes de troubles de santé mentale. Et je vous disais, là, que c'est 30 % de notre clientèle. Alors, ce que nous disons, c'est qu'il faudrait inclure ces personnes-là, le dire clairement, là, que ça soit clairement énoncé parce que ce sont parfois des personnes inaptes qui, elles aussi, peuvent avoir besoin d'aide à domicile.

Sixièmement, il faut établir clairement aussi le partage des responsabilités entre le gestionnaire de cas du CSSS, la personne desservie, ses proches aidants et son représentant légal. Alors, ce qu'on veut, avec l'assurance autonomie, c'est qu'il y ait plus de personnes qui vont vivre à domicile. Alors, évidemment, pour ça, bien, ça va impliquer plus de services, mais plus de travail également, entre autres pour nos curateurs délégués qui s'occupent de ces personnes-là sur le terrain. S'il y a plus de personnes qui sont à domicile, donc plus de travail pour aller voir ces personnes-là.

Mais aussi je pense que c'est important de préciser comment va se faire l'élaboration du plan de services, comment va se faire le suivi puis comment va se faire l'évaluation des services. Qui va faire ça? Si, par exemple, ce sont nos curateurs délégués... Et ce que je dis, là, tout de suite, on n'a pas d'objection à faire ça, sauf que ça va être plus de travail, et ça va demander plus de ressources humaines, et ça va demander plus de ressources financières. Alors, tu sais, on voit bien, quand va s'établir le plan de services, bien il faudra vraisemblablement que le curateur délégué soit là, donne son opinion, donne son opinion par rapport à ça.

Il y aura le suivi qui se fera par la suite. Si la personne n'est pas satisfaite des services qui lui sont rendus, plus souvent qu'autrement ce seront nos curateurs délégués qui devront intervenir pour cette personne-là, voir peut-être à ce qu'on trouve un autre prestataire de services, et aussi au niveau des évaluations. Alors, on sait, sur le terrain, comment ça fonctionne. À un moment donné, les gens trouvent qu'ils n'ont pas assez d'heures, demandent plus d'heures. Alors, qui va faire ça? Ça va être les curateurs délégués, les gens qui nous représentent auprès de cette personne-là, ou ça va être les proches aidants, ou les représentants légaux qui s'occupent de ces personnes-là puis qui vont devoir, donc, faire le suivi, faire l'évaluation des services et faire peut-être des demandes supplémentaires.

Alors, ce que nous demandons à cet égard, on demande qu'effectivement ce soit clarifié, le partage des tâches. Et, si vous en venez à la conclusion qu'effectivement ce seront les curateurs délégués, ou les curateurs privés, ou tuteurs privés, bien, forcément, il y aura plus de travail pour ces personnes-là. Parce qu'au Curateur public, depuis environ deux ans, on a pris ce qu'on appelle un virage famille pour faire en sorte que les familles s'impliquent davantage. Bien, on pense que l'assurance autonomie, à cet égard-là, c'est une bonne chose parce que ça va être moins d'obstacles pour les parents ou pour les proches s'ils savent qu'effectivement il y a un bon programme d'assurance autonomie. Mais il faut, à ce moment-là, être conscient de ce que ça va représenter comme tâches supplémentaires.

Par ailleurs, aussi, il y a les délais d'implantation, qui nous semblent très rapides. Alors, effectivement, c'est une réforme qui est d'envergure et…

• (15 h 20) •

Le Président (M. Bergman) : En conclusion, s'il vous plaît.

M. Jutras (Normand) : En conclusion? Alors, j'atterris, là, M. le Président. Alors, c'est une réforme qui est de grande envergure puis qui nécessite des changements importants. On a affaire à une clientèle qui est vulnérable. Les organisations devront s'adapter. Alors, nous proposons donc un plan d'implantation établi en concertation avec les acteurs concernés, dont le Curateur public, et prévoir aussi des budgets de transition pour que la réforme se fasse sans risque de compromettre momentanément les services pour certains usagers. Alors, c'est rapidement présenté, M. le Président, j'avais 10 minutes, mais nous avons livré l'essentiel de notre position.

Le Président (M. Bergman) : Merci pour votre présentation. Maintenant, pour le bloc du gouvernement, M. le ministre.

M. Hébert : Bien, merci, messieurs, d'être là aujourd'hui et de votre mémoire, qui appuie ce projet de société extrêmement important. Vous êtes appelés à intervenir auprès, comme vous l'avez souligné, de plusieurs... des personnes... soit des personnes âgées en perte d'autonomie ou des adultes handicapés. Comment est-ce que vous voyez votre rôle, le rôle du Curateur public dans le contexte de l'assurance autonomie?

Le Président (M. Bergman) : Me Jutras.

M. Jutras (Normand) : Oui. Bien, j'en ai parlé brièvement, là, M. le ministre. Entre autres, les curateurs délégués. Bon, les curateurs délégués sont, sur le terrain, chargés de voir à la protection de ces personnes-là, voir à la défense des intérêts et des droits de ces personnes-là. Alors donc, je reviens à l'exemple que je donnais, quand viendra le temps d'établir un plan de services, bien, moi, je pense qu'il va falloir que notre curateur délégué soit là à côté de la personne qui va faire l'évaluation parce que souvent aussi ce sont des personnes vulnérables, ce sont des personnes qui ont de la difficulté à s'exprimer, qui ont même de la difficulté à dire quels sont leurs besoins. Alors, ça va donc prendre quelqu'un qui est à côté qui va dire : Oui, mais tenez compte de tel élément, tenez compte de tel autre élément. Alors, déjà, donc, on voit que, quand l'élaboration du plan de services va se faire, les curateurs délégués devront donc être là.

Mais il y aura aussi par la suite le suivi. Puis je reviens toujours au même élément, ce sont des personnes vulnérables, souvent qui ont de la difficulté à s'exprimer. Alors, si la personne n'est pas satisfaite des services qui lui sont rendus et veut changer, par exemple, de prestataire, bien, là, encore là, pour faire ce suivi-là, nos curateurs délégués, leurs services seront requis, et puis finalement ça va être des négociations de contrats. Alors, déjà, on est impliqués, comme Curateur public, dans la négociation des contrats pour les personnes que nous représentons, on gère leur patrimoine, alors, là, on va gérer, avec des prestataires de services, là, les services qui sont rendus. Ça va être des genres de contrats qui vont se faire, alors... On intervient déjà par rapport à ça, alors on est prêts à le faire, mais ce que nous vous disons, c'est que ça va être du travail supplémentaire.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : J'entrevois que les plans de services reçoivent l'approbation formelle de la personne ou de son représentant. Alors, dans les personnes que vous représentez, ce sera donc le rôle du curateur de procéder à cette approbation formelle là. C'est bien ce que je comprends?

M. Jutras (Normand) : Oui. Bien, moi, je le vois comme ça, M. le ministre. Je vous le soumets de cette façon-là. Parce qu'il y aura, là, ce qu'on appelle l'intervenant pivot du CSSS, là, mais c'est une négociation qui va se faire, et qui va se faire à deux, ou à trois, là, tout dépendant aussi de l'aptitude de la personne qui est là de répondre elle-même aux questions qui lui seront posées puis de pouvoir exprimer elle-même correctement ses besoins. Et je vous rappelle, je vous rappelle que, dans ce cas-là, c'est 2 000 personnes, là, nous, dont on va devoir s'occuper, là, sur tout le territoire du Québec.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Évidemment, le suivi va être fait par le gestionnaire de cas, mais vous avez tout à fait raison de dire que le représentant légal va être mis à contribution. Et l'évaluation des services, par contre, c'est surtout le gestionnaire de cas qui va avoir cette responsabilité-là. Mais l'opinion du représentant légal va être également importante, effectivement. Il y a un travail d'équipe à mettre en place.

M. Jutras (Normand) : Mais il y a beaucoup d'interventions qui vont se faire en cours de route, là, parce que l'évaluateur de services, le représentant du CSSS, oui, il va y aller, mais, à un moment donné, en cours de route, s'il se présente quelque chose, s'il se présente une difficulté, bien là c'est la personne inapte accompagnée de son curateur privé ou accompagnée du curateur délégué qui pourra faire des représentations, là, à la personne pivot, à l'intervenant pivot.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Certains groupes de personnes handicapées nous ont recommandé d'avoir de la souplesse sur l'âge, c'est-à-dire qu'il y a certains mineurs de moins de 18 ans qui sont émancipés et qui pourraient être couverts par l'assurance autonomie. Quelle est votre opinion par rapport à cette suggestion?

Le Président (M. Bergman) : M. Jutras.

M. Jutras (Normand) : Oui. Écoutez, nous, notre clientèle, là, elle est de tous les âges, là, entre autres quand on pense surtout aux personnes déficientes intellectuelles. Alors, oui, on est ouverts, nous sommes ouverts à une proposition comme celle-là.

Mais ce qu'il faut tenir en compte aussi quand on parle des personnes déficientes intellectuelles, oui, elles peuvent arriver jeunes, là, avec ces besoins-là, mais vous connaissez les statistiques à cet égard-là, hein, elles sont assez étonnantes à quel point l'espérance de vie des personnes déficientes intellectuelles s'est allongée à travers les années. Quand on dit que, dans les années 1930, 1940, une personne trisomique avait une espérance de vie de 10 à 15 ans et qu'aujourd'hui ces personnes-là ont une espérance de vie de 60 à 65 ans, alors ça vous montre, là, à quel point ces gens-là, qui auparavant n'étaient pas sous un régime de curatelle pour une longue période, bien maintenant elles sont longtemps sous un régime de protection.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Le livre blanc prévoit un mécanisme d'accréditation des prestataires, qu'il soit public, privé, associatif ou au privé lucratif. Ce mécanisme, donc, accréditerait la formation du personnel et la qualité des services. Est-ce que vous êtes en faveur de cet élément du livre blanc et d'un projet de loi éventuel?

Le Président (M. Bergman) : M. Jutras.

M. Jutras (Normand) : Un mécanisme?

M. Hébert : Oui, d'accréditation des prestataires.

M. Jutras (Normand) : Oui?

M. Hébert : Vous savez, tous les prestataires, que ce soit l'entreprise d'économie sociale ou la résidence privée d'hébergement. Ce que nous voulons faire, c'est retrouver une gestion publique, donc qu'on puisse accréditer la qualité des services et la formation du personnel. Est-ce que c'est une mesure qui vous apparaît appropriée et nécessaire?

Le Président (M. Bergman) : M. Jutras.

M. Jutras (Normand) : Bien, moi, ça m'apparaît, M. le ministre, même essentiel parce que les services qui vont être rendus à ces gens-là, ils sont nombreux, mais ce sont des services aussi... des services intimes, là. C'est des bains qui vont être donnés, c'est aller prendre soin de la personne, c'est lui laver les cheveux, c'est lui tenir compagnie, c'est l'aide au lever, l'aide au coucher. Alors, ce n'est pas n'importe qui qui peut faire ça. Puis ça ne peut pas se faire de n'importe quelle façon. Ça prend une formation et surtout, surtout... je sais que ça s'est dit devant la commission, ça va prendre une stabilité. S'il faut qu'à chaque semaine les gens qui viennent rendre les services, ça change... Puis, quand bien même que ça ne serait pas à chaque semaine, si ça change trop souvent, ces personnes-là, on le sait, elles sont vulnérables, et, quand arrive une personne nouvelle, elles sont facilement déstabilisées puis elles se demandent ce qui leur arrive.

Hier, j'avais une réunion du comité de protection, un comité qui est constitué en vertu de la Loi sur le curateur public, puis une médecin, là, qui siège sur ce comité-là me disait à quel point, quand elle intervient auprès de ces personnes-là... À un moment donné, ça prend pratiquement un 10 minutes, là, pour dire : Bien, je m'en viens vous voir pour telle situation, puis j'ai telle chose à vous faire. Puis là la personne n'est pas encore en confiance. Alors, elle dit : Je peux passer aisément un 10-15 minutes à lui expliquer ce que je viens faire auprès d'elle. Puis là le traitement n'est pas encore fait.

Alors donc, ce que je dis, c'est qu'effectivement l'accréditation, ça m'apparaît essentiel, puis il va falloir que de la formation soit donnée à ces gens-là parce qu'on n'intervient pas auprès de ces personnes-là comme on intervient, par exemple, auprès d'une personne, là, qui est en possession de toutes ses facultés, puis qui peut bien réagir, et qui comprend bien ce qui se passe, et qui se situe bien dans le temps, là.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

• (15 h 30) •

M. Hébert : Vous abordez... les usagers qui reçoivent des services dans les programmes de santé mentale, et vous nous dites : Il faudrait également les inclure. On sait, actuellement, en tout cas, que les outils d'évaluation pour ces personnes-là sont différents des personnes présentant des incapacités, qu'elles soient jeunes ou âgées, que les programmes d'intervention sont différents, que même les ressources sont différentes jusqu'à un certain point. Comment vous voyez l'inclusion de ces personnes-là? Vous n'êtes pas le premier organisme à nous soulever cet enjeu-là. Alors, comment vous voyez intégrer les personnes avec des problèmes de santé mentale dans le contexte de l'assurance autonomie?

Le Président (M. Bergman) : Me Jutras.

M. Jutras (Normand) : Oui. C'est qu'il y a des personnes qui ont des problèmes de santé mentale, bon, qui sont sous curatelle, ce ne sont pas toutes ces personnes-là qui effectivement, là, vont avoir besoin de soins à domicile parce que, quand on regarde, nous, notre clientèle, ce sont peut-être les personnes qui sont les plus autonomes finalement et qui ont moins besoin de suivi, là. Mais par ailleurs il y a de ces personnes-là qui deviennent vraiment inaptes et qui ont besoin de services à domicile. Alors, il faudra donc les évaluer, comme ça se fait en vertu de l'ASA, là, et voir : Bien oui, cette personne-là est inapte, et, oui, elle a besoin de soutien à domicile, et, oui, elle a besoin de services. Alors, je pense que ça pourra se faire de la même façon que ça va se faire pour les autres personnes. Est-ce qu'il y a autre chose à rajouter?

M. Hébert : O.K.

Le Président (M. Bergman) : M. Berger.

M. Berger (Pierre) : Peut-être un autre élément à considérer, c'est tout le soutien aux proches, puisque l'assurance autonomie prévoit le soutien aux proches. Et le soutien aux proches, c'est quelque chose qui a été inventé d'abord dans le domaine de la santé mentale, ça a été les premiers à établir un programme comme ça. Après ça, il y a eu l'OPHQ qui en a développé un. Le ministère de la Santé en avait développé un aussi. Donc, c'est quand même un concept important. Mais, si on ne veut pas créer des disparités de services encore plus importantes que qu'est-ce qui existe actuellement, il faudrait peut-être que ça tourne autour d'un même programme. Donc, il y a peut-être un avantage à penser à une certaine intégration à ce niveau-là.

M. Jutras (Normand) : Quand M. Berger parle…

Le Président (M. Bergman) : M. Jutras.

M. Jutras (Normand) : …de l'aide aux proches, de l'assistance aux proches, on le vit beaucoup dans les cas de santé mentale, parce que souvent les proches vont être épuisés par le fils, par exemple, qui développe des problèmes de santé mentale, et... Parce que c'est le fils qui revient à domicile souvent, puis, plus souvent qu'autrement… Bien, là, il est rendu dehors parce qu'il n'a pas payé son loyer ou il a contracté des dettes et son frigo est vide. Et il se retrouve souvent chez ses père et mère, puis, à un moment donné, les parents deviennent… ils lancent, en quelque sorte, la serviette, là, ils sont découragés. Et, dans ces cas-là, l'aide aux proches effectivement va s'avérer d'une importance capitale.

Puis souvent, ce qu'on constate, nous, ces gens-là vont dire : Bien, prenez-le, là, sous la curatelle publique, nous, on est épuisés, on veut prendre une certaine distance par rapport à notre fils ou par rapport à notre fille. Mais on espère, nous, avec notre virage famille, pouvoir faire en sorte que même ces personnes-là qui sont proches, là, de ces gens-là qui ont des problèmes de santé mentale puissent s'impliquer davantage. Mais souvent, là, elles ont besoin d'un répit. Et ce qui arrive dans le cas actuel, souvent, bien, le répit leur est accordé par le Curateur public parce que le Curateur public prend la responsabilité de la personne.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Donc, à partir du moment où ils ont des incapacités, cette population-là devrait être couverte dans l'inclusion de l'assurance autonomie, si j'ai bien compris ce que vous avez dit, là, que ce soit un problème de santé mentale, ou un problème de maladie d'Alzheimer, ou un problème de santé physique, l'incapacité est probablement le critère d'entrée dans le régime d'assurance autonomie. Est-ce que je comprends bien?

M. Jutras (Normand) : C'est ça, oui.

M. Hébert : O.K. Les personnes handicapées, vous soulevez le concept de gratuité. Actuellement, ils ont accès à des services qui leur sont donnés gratuitement. Est-ce que ces services-là comblent l'ensemble de leurs besoins, d'après votre évaluation, chez les handicapés plus jeunes?

M. Jutras (Normand) : Je vais laisser la parole à M. Berger parce qu'il a travaillé longtemps à l'Office des personnes handicapées du Québec.

Le Président (M. Bergman) : M. Berger.

M. Berger (Pierre) : Bon. C'est sûr que… Je ne sais pas sur quelle base vous faisiez votre évaluation quand vous êtes intervenu, dans les dernières semaines, là, pour dire qu'il y avait un faible pourcentage des services qui étaient offerts par le secteur public. Sans doute qu'on ne référait pas juste aux personnes qui ont de grandes incapacités, parce que, chez les personnes qui ont de grandes incapacités, sans dire qu'on puisse évaluer très clairement le pourcentage, la proportion des besoins comblés, mais la plupart de leurs services, ils les reçoivent du réseau public. Et, dans ce cas-là, ça m'apparaît assez clair qu'il y a une responsabilité publique qui nécessite effectivement… Je ne me souviens plus c'était quoi, la question initialement, mais…

M. Hébert : …ils reçoivent tous les services dont ils ont besoin. Le pourcentage qu'on évoquait, c'est les personnes âgées, là, surtout, alors…

M. Berger (Pierre) : Oui. Quand j'étais à l'OPHQ, on a essayé d'obtenir des données là-dessus, puis des données précises. Contrairement à ce qui se fait dans les CHSLD, il y a le taux de satisfaction des besoins qui est mesuré, et, au niveau de l'aide à domicile, il n'y avait pas de calcul très précis là-dessus. Il y avait des données qui existaient, il y avait des études qui avaient été faites, mais c'est sûr que ça ne couvre pas nécessairement 100 % des besoins, mais 100 % des services qu'ils recevaient venaient généralement du réseau public, sauf dans des cas exceptionnels, comme Claude Léveillée ou M. Jutras, là.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Donc, ça ne couvre pas 100 % des services, mais ces services-là sont gratuits. Alors, la participation publique n'est pas de 100 %, mais elle est d'un certain pourcentage que vous avez de la difficulté à estimer. Mais est-ce que certaines personnes se paient des services en supplément de ceux qui sont donnés par l'État, dans les personnes que vous représentez?

Le Président (M. Bergman) : M. Berger.

M. Jutras (Normand) : Oui.

Le Président (M. Bergman) : Me Jutras.

M. Jutras (Normand) : Oui, parce qu'il y a des personnes qui ont de l'argent, alors ils peuvent donc se payer des services.

M. Hébert : Ils n'ont pas la gratuité, dans ce cas-là.

M. Jutras (Normand) : Non.

M. Hébert : Vous nous recommandez, comme plusieurs groupes, de protéger le financement dans une caisse de soutien à l'autonomie. J'aimerais ça que vous nous disiez les raisons qui vous incitent à nous faire cette recommandation.

Le Président (M. Bergman) : Me Jutras.

M. Jutras (Normand) : C'est parce que ce n'est pas la première fois que ce point-là est discuté ici, à l'Assemblée nationale, là. Et moi, quand j'entendais les arguments pour, les arguments contre, je suis retourné au rapport Clair, je suis allé relire les pages de ce rapport-là, puis je suis retourné au rapport Ménard, de Jacques Ménard, et dans les deux cas… Dans le cas du rapport fait par Michel Clair, je pense qu'ils étaient 10 commissaires — il y a eu unanimité — qui disaient que, oui, il faudrait une caisse, puis il faudrait une caisse autonome. Et les arguments qui sont invoqués, c'est de dire : Bon, bien, là, à ce moment-là, cette clientèle-là, en quelque sorte, ses services lui seront assurés, c'est une protection qui est accordée, l'argent est là, on garde cet argent-là pour ces personnes-là, mais en autant qu'on n'aille pas toucher à la caisse, là, comme ça s'est fait dans d'autres cas. Puis aussi ce qui s'était dit… ce qui se disait dans le rapport Clair, c'était une question de justice intergénérationnelle. Bon. Et je suis allé consulter aussi le rapport de Jacques Ménard, puis là je pense qu'eux autres, c'étaient 14 commissaires, et il y a eu… M. Ménard, dans son préambule, disait qu'il y avait eu… à 82 %, je pense, qu'il y avait… les gens allaient dans le même sens. Et c'étaient les mêmes arguments qu'on retrouvait, de protection de ces personnes-là, d'équité intergénérationnelle.

Parce qu'effectivement, si on garde le principe actuel des vases communicants, bien, effectivement, c'est des vases communicants, puis, des fois, bien, il y en a un peu plus dans tel vase puis il y en a moins dans tel vase. Et puis, quand on sait comment notre société évolue puis comment même, des fois, il y a des modes d'opinion, alors est-ce qu'il n'y a pas lieu, là, tenant compte du lourd fardeau qui s'en vient pour la société québécoise en raison du vieillissement marqué de notre population, du vieillissement rapide de notre population, bien, est-ce qu'il y a pas lieu effectivement de protéger cette caisse-là? Et moi, je me disais : Bien, coudon, quand on lit ces deux rapports-là commandés par des gouvernements successifs et que tout le monde conclut dans le même sens, et avec autant de personnes aussi qui y ont contribué, bien, moi, en tout cas, j'achète, là, cette position-là. Je pense que monsieur...

Le Président (M. Bergman) : M. Berger.

M. Hébert : Quand on entend la Protectrice du citoyen nous dire également que les argents attribués aux soins à domicile sont, en fait, utilisés à d'autres fins, bien on est convaincus que ce qui existait au moment du rapport Clair et au moment du rapport Ménard est encore bien d'actualité. Vous vouliez ajouter quelque chose, monsieur…

Le Président (M. Bergman) : M. Berger.

• (15 h 40) •

M. Berger (Pierre) : Oui. Moi, je voulais juste ajouter quelque chose au niveau de la responsabilité collective aussi par rapport à la question de l'incapacité. Parce que, là, je reviens sur la question de la contribution financière. Un élément qui est à considérer, c'est qu'on ne choisit pas notre état de santé puis notre… Si on naît handicapé ou si on le devient au fil du temps, si on développe des incapacités, ce n'est pas un choix qu'on fait, c'est une conséquence. Et généralement, socialement, ce qu'on a fait depuis le début des années 80, c'est de dire : Il y a une responsabilité collective là-dessus. À quelle hauteur doit-elle être? Est-ce qu'on doit couvrir des besoins de façon extrême, comme Claude Léveillée se payait lui-même des services d'aide à domicile supplémentaires? Il y a quand même une couverture minimale à assumer. Puis là-dessus il y a toujours eu une reconnaissance de la responsabilité collective, ce qui nous fait douter de la pertinence d'avoir une contribution financière pour des services qui ne seront jamais à la hauteur de ce que Claude Léveillée pouvait se payer, par exemple.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre, il vous reste quatre minutes.

M. Hébert : Et, même s'il est arrivé que des caisses puissent être utilisées à d'autres fins, au moins on le sait, c'est transparent, alors que la situation actuelle, c'est… on ne le sait pas, si l'argent n'est en fait pas utilisé à bon escient. Au moins, il y a un débat public qui s'engage, et on ne peut pas le faire à l'insu du public.

M. Jutras (Normand) : Dans un cas comme dans l'autre, ce qui est proposé autant dans le rapport Ménard que dans le rapport Clair, c'était de confier l'administration de cette caisse-là à la Régie des rentes, tu sais, pour la mettre davantage à l'abri.

M. Hébert : Il y avait des hypothèses également de confier à la Régie de l'assurance maladie du Québec, qui gère déjà le PEFSAD et gère déjà la contribution de l'adulte hébergé. Est-ce que ça vous apparaît une solution qui nous permettrait d'utiliser déjà une structure en place sans rajouter de structure? Parce que notre objectif, c'est qu'il n'y ait pas de nouvelle structure, qu'on utilise ce qui existe actuellement. Est-ce que la solution d'une gestion par la Régie de l'assurance maladie vous apparaît être une solution intéressante?

M. Jutras (Normand) : Oui. J'aurais confiance aussi en la Régie de l'assurance maladie, oui.

M. Hébert : Deux petits mots. Je pense qu'il reste…

Le Président (M. Bergman) : Il vous reste trois minutes.

M. Hébert : Ah! Trois minutes, quand même. Au niveau de la participation sociale, je retiens votre suggestion. Il y a d'autres groupes qui nous ont aussi recommandé d'ajouter l'évaluation de la participation sociale dans l'Outil d'évaluation multiclientèle. Je pense que c'est un élément important.

Pour les crédits d'impôt, pour nous, ce qui est important, c'est que les gens ne puissent pas avoir du financement des deux mesures, crédit d'impôt et l'allocation de soutien à l'autonomie. Alors, il y aura l'un ou l'autre qui restera disponible. Alors, il y a des gens qui préféreront avoir le crédit d'impôt, d'autres qui préféreront avoir l'allocation de soutien à l'autonomie. Alors, on prévoit que les deux modalités puissent être disponibles. Mais on peut… on n'aura pas droit à l'un et l'autre, alors, de façon à ce qu'on ne finance pas deux fois la même affaire.

M. Jutras (Normand) : Ce que l'on veut éviter, M. le ministre, c'est que les personnes que nous représentons se retrouvent dans une situation d'appauvrissement.

M. Hébert : Alors, c'est bien noté, oui.

M. Jutras (Normand) : Oui. Il y a M. Lamarche...

Le Président (M. Bergman) : M. Lamarche.

M. Lamarche (Pierre) : Oui. L'économie générale du système va être modifiée, donc possiblement le crédit d'impôt au maintien à domicile. On sait aussi qu'il y a des aides techniques qui sont payées en établissement, pas payées à domicile. Donc, l'économie générale du système va être modifiée. Et nous, on va vouloir s'assurer, dans le fond, que les 2 000 personnes qu'on représente, qui peuvent être touchées par cette mesure-là, dans le fond, ne connaîtront pas un appauvrissement. Il y a beaucoup de cas uniques, beaucoup de cas d'espèce à l'intérieur de ces groupes-là, et donc on va vouloir les suivre pour être certains qu'il n'y a pas d'appauvrissement à l'échelle macro, là, je dirais, mais aussi à l'échelle individuelle. Parce qu'on est les représentants légaux de chacune de ces personnes-là. Donc, on risque d'arriver, à un moment donné, où quelques personnes, par le nouvel environnement, pourraient connaître des répercussions.

Et Me Jutras faisait allusion à l'individualisation. Il faudra être sûr aussi qu'on pourra intervenir pour corriger les situations si jamais le système a entraîné certains effets négatifs, qui n'étaient pas prévisibles peut-être au départ, mais, quand on l'applique au cas à cas, on rencontre des difficultés.

Le Président (M. Bergman) : Alors, ceci met fin au bloc du gouvernement. Pour le bloc de l'opposition officielle, M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Bienvenue à notre commission. C'est un organisme pour lequel j'ai beaucoup de respect parce que vous vous occupez quand même des gens que personne d'autre ne s'occupe, en leur mettant des régimes en place. Quand vous parlez de protéger le financement, ça veut dire que c'est une enveloppe qui est dédiée, protégée. Est-ce que vous parliez également qu'il fallait la capitaliser, comme c'était le sujet dans les rapports?

Le Président (M. Bergman) : Me Jutras.

M. Jutras (Normand) : Ça, écoutez, c'est toute une question, là… Encore là, toujours référant aux deux rapports dont je vous ai parlé, là, il en était question, de la capitalisation, en fait, pour prévoir les coups durs, là, qui peuvent arriver dans le futur. Moi, écoutez, c'est bien embêtant de répondre à cette question-là, je ne suis pas un actuaire et… Moi, ça m'apparaîtrait une bonne chose, mais, tu sais, je vous donne mon opinion sous toutes réserves, là, parce que c'est une question qui est délicate et qui est difficile surtout. Puis je pense que c'est une décision qui va vous revenir, à vous autres, les élus, là, cette décision-là.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Oui. D'ailleurs, la position, je pense, est déjà prise : il n'y aura pas de capitalisation. Parce que c'est sûr que ça va être une grande... une facture importante. En tout cas, on va voir la proposition du ministre dans son projet de loi. Nous, nous croyons que... C'est sûr qu'il y a toute une structure qu'on veut changer. Il demeure que, si on a des budgets qui sont dédiés, protégés... Parce que, moi, en passant, dans le réseau de la santé, il y a moyen de protéger des budgets, puis on est capables de suivre le dollar au dollar près. Il s'agit juste seulement que d'être vigilant. Puis ça ne prend pas nécessairement un plus gros système d'information, ça prend même, je pense, un plus petit système d'information, plutôt que de transformer complètement puis de sortir tout un système, qui est le médecin à domicile puis les soins aux personnes âgées, sortir ça du système de santé puis de le ramener d'une autre façon. En tout cas, moi, personnellement, on va avoir des discussions lors du projet de loi, mais disons que j'ai des doutes que ça va être plus efficace. Quand vous dites que vous avez des ressources, un curateur délégué, ça peut s'occuper de combien de personnes?

Le Président (M. Bergman) : M. Jutras.

M. Jutras (Normand) : Présentement, présentement, la charge des curateurs délégués, en moyenne, là, c'est 160 personnes.

M. Bolduc (Jean-Talon) : 160 personnes?

M. Jutras (Normand) : Oui.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Pour un curateur délégué?

M. Jutras (Normand) : Oui.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Ça veut dire qu'au total vous avez combien de curateurs délégués?

Une voix :

M. Jutras (Normand) : 105. Je pensais 110, mon collègue me dit 105.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : O.K. Ça prend des chiffres précis, ici, là.

M. Jutras (Normand) : Oui? Ah bon!

M. Bolduc (Jean-Talon) : Hein, il faut vous entendre entre vous autres, là. Et puis, en termes de charge de travail, ça va vous en demander plus, parce que ce que vous me dites, c'est que, naturellement, il va y avoir des discussions avec l'intervenant pivot ou le gestionnaire de cas. Et naturellement, habituellement, le rôle du curateur délégué, c'est de défendre l'intérêt de la personne qu'il s'occupe, puis il va essayer d'aller chercher le maximum.

M. Jutras (Normand) : Oui, c'est sûr. Alors, c'est pour ça que, dans notre mémoire puis dans ma présentation, je disais que, pour nous, ça va représenter un surcroît de travail. Ce surcroît de travail là, on est prêts à l'assumer, mais ce que nous disons dès maintenant, c'est que ça va prendre plus de ressources, et financières et matérielles. Parce que, dans la vraie vie, comme vous le dites, c'est ça qui va arriver, il va falloir que le curateur délégué soit là, à côté de la personne, puis puisse... Parce que, comme je le disais, souvent ces personnes-là ont de la difficulté à s'exprimer puis à dire quels sont leurs besoins. Alors, le curateur délégué devra donc être là puis participer à l'élaboration du plan de services.

Puis on le sait que, des fois, il y a des contestations par rapport à ça, il y a des changements qui peuvent survenir. La personne, bon, elle était bien, telle journée, puis, deux jours après, son état de santé s'est détérioré. Alors, il va falloir que nos gens fassent le suivi de ces personnes-là puis, là, bien, dire : Bien là, il faudrait des heures supplémentaires, communiquer avec le CSSS pour demander des heures supplémentaires, puis... Alors, c'est... Même les députés, des fois, sont impliqués là-dedans parce que les gens vont voir les députés pour essayer d'avoir des heures supplémentaires. Alors, on le sait que ça va représenter du travail.

Et puis, c'est la même chose aussi dans le cas des curateurs et des tuteurs privés, parce qu'eux souvent, ce sont en même temps des proches aidants… mais pas nécessairement, mais souvent, ce sont aussi des proches aidants. Alors, eux aussi, là, au même titre qu'un curateur délégué, devront s'occuper de la personne. Bien, la même chose pour le curateur privé, il devra, lui aussi, être là, faire les représentations, faire le suivi et puis, s'il y a une insatisfaction par rapport aux services, de la façon qu'ils sont rendus, il devra intervenir également, alors.

Et nous, on trouve que c'est une bonne chose, l'autonomie pour tous, surtout dans le cadre, comme je le disais, dans le cadre du virage famille que nous avons pris, c'est... On va aider les proches aidants. Alors, tant mieux, ça va aider les familles, ça va aider les proches à accepter davantage ces tâches-là. Mais il faut se dire les vraies affaires, comme on dit, c'est sûr que ça va être plus de travail.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Puis ce que vous semblez insinuer, c'est que ça prendrait pratiquement également un droit d'appel en cas d'insatisfaction. Et, sur la quantité de cas, il va certainement y avoir des gens qui n'auront peut-être pas l'évaluation... ou qui s'attendraient à avoir plus. Donc, eux autres, ça leur prendrait un droit d'appel sur un principe de justice.

Le Président (M. Bergman) : Me Jutras.

• (15 h 50) •

M. Jutras (Normand) : Ah bien, là, non, je ne dirais pas, là, qu'il va falloir prévoir un droit d'appel, là, parce que ça s'en vient... À un moment donné, il va y avoir une lourdeur administrative qui va se rajouter à ça. Moi, ce que j'ai vécu alors que j'étais député — parce que les gens viennent nous voir aussi pour ça — c'est qu'à un moment donné, bon, il y avait une certaine insatisfaction qui pouvait se présenter par rapport aux services rendus, surtout par rapport à l'évaluation qui avait été faite. Les gens disaient : Bien là, j'ai 1 h 30 min par jour; en fait, mon père, il aurait besoin de 2 h 30 min par jour. Bon. Mais généralement ça pouvait se négocier, et ça pouvait se négocier assez bien. Puis j'espère, puis je suis sûr que le régime va pouvoir conserver cette souplesse-là sans qu'on soit obligés, là, de prévoir un appel devant l'agence de santé ou…

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Sauf que ce que vous dites là, c'est dans un système où ça se faisait à l'amiable, mais là on s'en va dans un système organisé, dans lequel l'évaluation, lorsqu'elle va avoir été faite, va correspondre à un montant de services ou à un moment d'argent équivalent en services. Vous comprenez? En tout cas, vous connaissez le principe de la Régie des rentes, de la SAAQ et puis de la CSST. Quand tu mets des systèmes en place, il faut que tu prévoies qu'il y en a, sur les milliers de personnes qui vont recevoir les services, il y en a qui vont dire : C'est injuste. On va se retrouver avec une lettre dans le journal. On pense à mettre des mécanismes d'appel parce que, si la CSST l'a, si la SAAQ l'a, puis si la Régie des rentes l'a, pourquoi est-ce que l'assurance autonomie ne l'aurait pas?

M. Jutras (Normand) : Oui…

M. Bolduc (Jean-Talon) : Là, vous défendez les… vous défendez vos commettants, là, c'est…

Le Président (M. Bergman) : Me Jutras.

M. Jutras (Normand) : Oui, oui. Oui, c'est ça, on voit à la protection de ces personnes-là. Mais vous parlez du système actuel, où vous dites : Ça se fait à l'amiable. Bien, moi, en tout cas, pour avoir lu le livre blanc, je vois encore la possibilité, là, de discussion à l'amiable, là, parce que, si on rentre les procédures judiciaires à l'intérieur de ça puis on se retrouve avec des appels… Moi, je dis que ce n'est pas souhaitable. Et je pense qu'à l'intérieur du système tel qu'il est proposé il y a moyen de garder encore un service de négociation à l'amiable. Je pense que c'est ça qui est préférable.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Surtout qu'il y a des groupes qui sont venus, des groupes qui défendaient, justement, les usagers, qui, eux autres, disaient qu'il fallait que la personne soit accompagnée. Puis ça, c'est correct, parce qu'on veut que les personnes soient… qu'il y ait la bonne décision qui soit prise. Mais ils ont insisté également qu'il devrait y avoir un mécanisme d'appel parce que, de leur expérience, l'intervenant ou les intervenants font des évaluations différentes pour la même personne, puis, même si on standardise, il y a toujours une variabilité. Donc, à ce moment-là, il faut prévoir un mécanisme, peut-être facile, peut-être pas trop compliqué, mais ça prend un mécanisme quand même d'appel pour que, si la personne n'est pas satisfaite, on soit capables de référer… peut-être qu'une tierce partie puisse donner son opinion. Puis, si ça confirme, bien, tant mieux. Si ça infirme, à ce moment-là on va faire le correctif.

Le Président (M. Bergman) : Me Jutras.

M. Jutras (Normand) : Bien, écoutez, s'il fallait en venir là, j'espère que la procédure sera la plus simple possible et la moins formaliste possible. Mais par ailleurs aussi ce que je peux vous dire, M. le député, c'est que déjà, nous, là, sur le terrain, nos curateurs délégués procèdent beaucoup à l'amiable, tu sais? Quand ils vont voir des personnes qu'on représente dans des ressources intermédiaires ou dans des CHSLD — hein, il y en a beaucoup qui sont dans des CHSLD — il y a beaucoup de ces demandes-là qui se font à l'amiable. Puis je pense que c'est la meilleure façon de les traiter aussi. Parce que, tu sais, on tente de retrouver, là, un milieu de vie, qu'on appelle, qui serait le plus familial possible. Alors, si on veut préserver ça, bien je pense qu'il faut éviter dans la mesure du possible, à mon avis, le formalisme.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.

Mme Blais : Merci, M. le Président. Bonjour, très heureuse de vous revoir, de revoir M. Berger, que j'ai connu à l'Office des personnes handicapées aussi, et M. Lamarche, au ministère.

Vous avez parlé de la politique Chez soi : le premier choix, une politique de 2003. Donc, il y avait eu un virage, un désir de vouloir rester à la maison le plus longtemps possible. Il y a eu la politique Vieillir et vivre ensemble, qui a été déposée le 3 mai 2011. Donc, c'est une poursuite.

Là, il y a l'assurance autonomie. On veut prendre 4,3 milliards de dollars, ce sont les sommes consacrées à la fois aux personnes aînées, mais aussi aux personnes en situation de handicap, de 18 ans et plus, les mettre… les confier à la RAMQ, ajouter 100 millions par année prévus pour les aînés, mais ça va toucher aussi les personnes en situation de handicap.

Et, si on englobe les personnes ayant des problèmes de santé mentale, et qu'on veut offrir plus de services, et qu'on veut offrir des services aux proches aidants, comment on va faire, avec les mêmes sommes d'argent, pour être en mesure de fournir encore plus de services aux personnes et s'assurer de la qualité, alors que j'ai entendu aussi, pendant la commission, qu'il manquait de travailleurs sociaux, qu'il manquait d'infirmières... un manque de médecins à domicile? Alors, moi, je veux vous entendre là-dessus. Et, entre autres, les personnes en situation de handicap, est-ce qu'elles ont, en général, assez de services pour être en mesure d'assurer ce qu'on appelle une autonomie pour vivre à domicile le plus longtemps possible?

Le Président (M. Bergman) : Me Jutras.

M. Jutras (Normand) : Bien, je pense que le principe de base que l'on retrouve dans ce livre blanc là, c'est qu'on se dit... c'est que ça coûte moins cher de garder ces personnes-là à domicile que de les avoir en institution. Et, tout de suite en partant de ce principe-là, je pense que déjà ça va être plus facile à organiser.

Mais c'est sûr que la commande, sur le plan financier, elle est importante également. Il y a certaines prévisions qui sont faites, là, dans le livre blanc. Nous autres mêmes, on a demandé, peut-être, là, que des précisions soient faites, qu'il y ait un plan d'implantation qui soit prévu et auquel, entre autres, on pourrait participer, là, à titre de Curateur public, parce qu'on le sait ce que ça va représenter chez nous, mais ça va représenter d'autres surcroîts de tâches ailleurs également. Alors, c'est pour ça que nous sommes d'avis que, si le plan d'implantation était précisé puis s'il y avait aussi même un plan de transition et des budgets de transition, bien ça pourrait faire en sorte que le passage va mieux se faire. Mais c'est sûr que la commande financière, elle est importante.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.

Mme Blais : Vous touchez au nerf de la guerre, là, tu sais. Parce que je crois que c'est fondamental, on veut tous que les gens vivent à domicile le plus longtemps possible. Vous le savez, pour s'occuper des personnes en situation de handicap, ce n'est pas seulement les soins et les services, c'est l'adaptation du domicile, c'est l'environnement social aussi, il y a une vie sociale, une vie participative, c'est le transport, c'est la vie, quoi! On ne peut pas être désincarné de cette vie-là. Et donc, on touche à un point, et ça, ça va être très, très important, parce qu'il va falloir à la fois former les gens...

Si on veut donner plus de soutien aux proches aidants, on va le faire comment? Ça veut dire plus d'heures de répit pour ces personnes-là. Donc, moi, je pense qu'il va falloir définir très clairement quels sont les coûts, combien ça va coûter, surtout si on ne veut pas capitaliser dans cette caisse-là. Et, si on dit qu'au bout de cinq ans, bien, tout est à faire au niveau de la capitalisation... Parce que c'est un peu ce que le livre blanc dit aussi, là : Après qu'on aura injecté 100 millions par année pendant cinq ans, en 2016‑2017, bien, là, il faut capitaliser, il faut trouver une autre solution si on veut continuer à la viabilité de cette assurance autonomie.

Ma question est la suivante : Est-ce que vous pensez que c'est trop rapide pour implanter un tel projet social — c'est un projet de société — ou si on devrait y aller peut-être un peu plus lentement, et ne pas revivre le film du virage ambulatoire, et de faire en sorte que ce soit un projet structurant pour la société, pour les années à venir.

Le Président (M. Bergman) : Me Jutras.

M. Jutras (Normand) : Je vais quand même revenir, là, sur la première partie de votre intervention. Bon, vous dites : Oui, ça va être une énorme tâche, là, que d'organiser ces soins-là à domicile, ces services-là à domicile. Mais c'est quoi, le choix qu'on a? On a ce choix-là, de faire en sorte que les personnes vivent plus à domicile en leur fournissant des services, ou, sinon, c'est quoi? Ça va être nos CHSLD qu'il va falloir grossir, grossir, grossir, puis faire en sorte qu'on les agrandit puis on rajoute des chambres. Alors, si on ne faisait rien, c'est devant cette situation-là qu'on va se retrouver. Alors, moi, je pense que c'est préférable, effectivement, là, de prévoir l'autonomie des personnes, la préserver, cette autonomie-là et faire en sorte que les personnes vivent plus à domicile. Entre les...

Mme Blais : Tout à fait d'accord avec vous.

• (16 heures) •

M. Jutras (Normand) : C'est ça. Entre les deux, je pense que cette situation-là est préférable. Bon. Et la deuxième partie de votre intervention, c'était : Bon, bien, là, est-ce qu'il ne faudrait pas y aller peut-être sur une plus longue période de temps? Oui. Bien, dans notre mémoire, c'est un peu ce qu'on propose. Ça nous apparaît rapide, là, de tout de suite... On parle de 2014. Alors, je le dis, c'est une réforme qui est d'envergure, c'est énormément d'organisation à planifier. Au niveau des entreprises d'économie sociale, moi, je trouve que ça aussi, là, c'est une grosse commande, là, la formation qu'il va falloir donner à ces personnes-là. Puis on le sait, dans les milieux communautaires, malheureusement souvent les gens ne sont pas suffisamment payés, il y a un énorme roulement de personnel. Alors, si on veut faire en sorte qu'il y ait moins de roulement de personnel puis que les gens en fassent vraiment un métier qu'ils vont aimer puis qu'ils vont faire à long terme, bien ça prend de la formation. Et, à cet égard-là, moi, je trouve que la commande est importante, et elle va être grosse à livrer.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Bien, je pense qu'il faut en faire la discussion parce que, tu sais, des gens arrivent avec des gros, gros, gros projets, puis, quand on regarde plusieurs années après, ça a été une erreur de tout vouloir faire en même temps. Deuxièmement, on a déjà des bons acquis dans le réseau de la santé, hein, tout le monde reconnaît : la création des CSSS, les intervenants pivots qui sont en place, le SMAF qui est déployé. Je pense qu'il y a plusieurs choses qui sont positives. Et, à la fin, on veut tous le même résultat, c'est-à-dire que les gens sur le terrain puissent prendre en charge des gens pour les garder à domicile.

Ça, le virage à domicile a été commencé voilà plusieurs années, ça continue, il faut injecter plus d'argent. Et beaucoup de groupes sont venus en nous disant : La première chose que ça nous prend, ça nous prend certainement plus d'argent, ça… puis il faut changer nos manières de faire. Puis il y en a plusieurs qui sont venus nous dire : Vous savez, il faut changer non seulement les méthodes de faire, il faut réorganiser pour que les gens voient plus de patients, que ce soit plus productif. Entre autres, le Vérificateur général a dit : Première chose à faire, c'est d'améliorer la performance du réseau. Mais, de réinjecter de l'argent sans améliorer la performance, on va juste mettre plus d'argent.

Le côté financier devient important parce que, si on vient avec une trop grosse facture, c'est là qu'on arrive normalement à des coupures. Et puis il ne faut pas faire ce changement non plus dans une période où il y a des coupures dans le réseau de la santé. On entend des rumeurs, à ce temps-ci, qu'il y aurait des grosses coupures dans le réseau de la santé. Si on essaie de faire un virage comme ça en même temps qu'on fait des coupures dans le réseau de la santé, ça commence à ressembler à des histoires de désinstitutionnalisation et également à des histoires de virage ambulatoire. Ça, il va falloir que le ministre nous garantisse aussi qu'il n'y ait aucune coupure, là, dans la prochaine année puis dans les deux ou trois prochaines années. Je ne sais pas ce que vous en pensez. Parce que c'est complexe, comme changement. Je ne vous demande pas de commenter sur les coupures, mais sur l'ampleur du changement qu'il y a à faire.

Le Président (M. Bergman) : M. Jutras.

M. Jutras (Normand) : Oui. Ça, je suis d'accord avec vous que c'est un changement d'une vaste amplitude, là. Mais, quand vous apportez l'argument que, bon, il y aurait des coupures peut-être dans le milieu de la santé, bien je reviens à mon argument de tantôt, des vases communicants, là, que ça passe d'un vase puis ça s'en va à l'autre, ça va remplir l'autre vase. Alors, c'est pour ça que fondamentalement, au Curateur public, on est d'accord avec le programme d'assurance autonomie parce que, on se dit, on prévoit, on prévoit ce qui s'en vient, là. Puis on le sait, là, ça fait 20 ans qu'on en parle, du vieillissement de la population, puis ça fait 20 ans qu'on le dit que c'est un vieillissement marqué, puis que ça vieillit plus vite au Québec qu'après… le deuxième pays, là, après… le deuxième État après le Japon. Alors, on est confrontés à cette situation-là.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Côté santé mentale, je trouve ça intéressant parce qu'on parle des handicaps, les gens avec des handicaps, des gens qui souvent doivent être pris en charge. Santé mentale, connaissez-vous des outils qui pourraient nous permettre d'évaluer ça? Puis vous, votre recommandation, ce serait de mettre ça en même temps dans le programme d'assurance autonomie.

Le Président (M. Bergman) : M. Jutras.

M. Jutras (Normand) : Oui. C'est ce que nous recommandons. Nous représentons de ces personnes-là aussi, qui se retrouvent souvent, elles aussi, dans des états d'inaptitude et qui peuvent requérir des services à domicile. Il y en a beaucoup de ces personnes-là qui sont à domicile et qui peuvent avoir besoin de ces besoins-là. Puis, au niveau de leurs capacités organiques, de leurs capacités fonctionnelles, bien, entre autres, le SMAF peut déjà contribuer, dans le cas de ces personnes-là, à évaluer leurs incapacités. Parce que souvent ces gens-là ont des problèmes de santé mentale, mais ils ont d'autres problèmes également. Alors, ça pourrait… Déjà avec le SMAF, on aurait une bonne idée, là des besoins de ces personnes-là. Est-ce qu'il y a autre chose à rajouter?

M. Berger (Pierre) : On peut bonifier le SMAF.

M. Jutras (Normand) : Oui. M. Berger me dit : On peut bonifier le SMAF. Puis c'est ce qu'on propose aussi. Quand on dit d'évaluer la participation sociale des individus, bien c'est une façon de bonifier le SMAF, de mieux évaluer les besoins de gens.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Quand on parle de gens avec des handicaps, comme de fait, les groupes qui représentent les handicapés sont venus nous dire qu'ils ne devraient pas payer en regard de leur handicap. Le ministre, je crois, a été assez clair avec eux autres, l'assurance autonomie va faire en sorte que ces gens-là pourraient payer s'ils ont des revenus, au même titre que les autres personnes, là, qui sont en perte d'autonomie. C'est quoi, votre position là-dessus? Même si vous nous l'avez dit tantôt, si c'était par décret, je peux vous dire que, dans le projet de loi, si on met ça, le décret, il n'existera plus, là, la loi va l'emporter sur le décret. Qu'est-ce que vous pensez de cette mesure-là puis de cette orientation-là?

Le Président (M. Bergman) : Me Jutras.

M. Jutras (Normand) : Ce que nous disons, M. le député, puis on l'a exprimé dans notre mémoire, nous voulons, nous, que ce principe-là soit conservé. Le principe, il a été émis dans ce décret-là en 1988, il a toujours été conservé depuis. Dans la politique Chez soi : le premier choix, ce principe-là a été maintenu. Puis, tu sais, c'est le principe qui dit : Si une personne handicapée, à côté de moi, a plus de besoins en raison de son handicap, c'est à la collectivité à supporter ça. Bien oui. Nous qui sommes à la défense de ces personnes-là, ce que nous demandons, c'est que ce principe-là soit maintenu.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon, il vous reste deux minutes.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Et, si vous avez des usagers que vous vous occupez, qui, eux autres, peuvent avoir un certain montant d'argent que vous gérez et que ça leur donne des revenus suffisants pour être capables de contribuer à l'assurance autonomie comme tous les autres usagers, je suppose que vous êtes d'accord pour ça?

Le Président (M. Bergman) : Me Jutras.

M. Jutras (Normand) : Le principe que nous demandons qu'il soit conservé, c'est le non-appauvrissement des personnes que nous représentons. Vous pouvez changer les modalités, mais on ne veut pas que les personnes que nous représentons, suite à l'implantation de cette réforme-là, se retrouvent plus pauvres qu'avant.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Ça, c'est une règle générale. Mais admettons que quelqu'un aurait vraiment des bons revenus. On refait le calcul différemment avec la nouvelle règle à calculer, là. À ce moment-là, cette personne-là, par souci d'équité envers les autres, pourrait connaître peut-être une baisse de revenus. Mais j'assume que cette personne-là aurait quand même des revenus suffisants, ça serait seulement qu'il faudrait établir la même règle pour tout le monde et ne pas avoir de clause grand-père associée sur le principe de l'appauvrissement. Non?

Le Président (M. Bergman) : Me Jutras.

Des voix :

M. Bolduc (Jean-Talon) : Sur 12 000 personnes, le cas va arriver.

M. Jutras (Normand) : Oui, oui, c'est sûr.

Des voix :

M. Bolduc (Jean-Talon) : Sur 2 000? Excusez, 2 000 personnes, le cas va arriver.

Le Président (M. Bergman) : M. Berger.

M. Berger (Pierre) : Ce qui est clair, c'est que l'incapacité, il y a une responsabilité collective derrière, c'est le principe qu'on défend, pour un certain niveau de services, pour le moins. C'est sûr qu'on ne peut pas nécessairement tout couvrir. Tantôt, je vous donnais un exemple de Claude Léveillée. Il n'y a pas un État qui pourrait soutenir des personnes handicapées au même niveau que Claude Léveillée se le payait. Tant mieux si, lui, il avait les moyens de se le payer. Mais quand même on répond aux besoins relativement à l'incapacité. Il y a une responsabilité collective reconnue qu'on demande qui soit maintenue parce que, sinon, ça revient à appauvrir aussi ces gens-là s'ils doivent contribuer.

Le Président (M. Bergman) : Ceci met fin au bloc de l'opposition officielle. Me Jutras, M. Lamarche, M. Leblanc, M. Berger, merci pour votre présentation, merci d'être ici avec nous aujourd'hui.

Et je suspends pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 16 h 9)

(Reprise à 16 h 11)

Le Président (M. Bergman) : À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, je demanderais à l'Observatoire Vieillissement et Société de prendre place à la table. Mme Destrempes, Dre Jeliu, M. Ledoux, M. Pierre-Étienne Laporte, pouvez-vous prendre vos places à la table? À l'ordre, s'il vous plaît! On demande à Mme Destrempes, Dre Jeliu, M. Ledoux et M. Pierre-Étienne Laporte de prendre leurs places à la table.

Alors, collègues, on reçoit maintenant Observatoire Vieillissement et Société. Je vois qu'on reçoit parmi ce groupe M. Pierre-Étienne Laporte, ancien collègue à l'Assemblée nationale du Québec, ancien député d'Outremont. Alors, M. Pierre-Étienne Laporte, on vous souhaite la bienvenue, certainement, et bienvenue à tout le groupe. Vous avez 10 minutes pour faire votre présentation, suivie d'un échange avec la commission. Pour les fins d'enregistrement, donnez-nous vos noms, vos titres, et le prochain 10 minutes, c'est à vous.

Observatoire Vieillissement et Société (OVS)

Mme Jeliu (Gloria) : M. le Président, bonjour, M. le ministre, Mmes MM. les députés du gouvernement et de l'opposition. Nous sommes ici les représentants de l'organisme de l'Observatoire Vieillissement et Société. L'Observatoire Vieillissement et Société est un organisme sans but lucratif qui est actif depuis bientôt 10 ans et qui est rattaché à l'Institut universitaire de gériatrie de Montréal. Il a pour mission de promouvoir le bien-vieillir des aînés en aidant la réflexion et la prise de décision individuelle et collective sur les défis, nombreux d'ailleurs, qu'engendre le vieillissement de la population et ses conséquences sur la société. Il dénonce également la présence d'un âgisme rampant aussi bien dans la presse que dans les milieux de travail et dans la société en général. C'est pourquoi la politique d'une assurance autonomie telle que présentée par le gouvernement représente à ses yeux un projet d'étude incontournable. Je n'ai pas dit «facile», j'ai dit simplement «incontournable».

Quelle est, maintenant, la position de l'OVS — OVS étant Observatoire Vieillissement et Société? Le comité ad hoc de l'OVS a étudié soigneusement le livre blanc sur la création d'une assurance autonomie, aussi est-il heureux de présenter ce mémoire qui pourrait peut-être contribuer à la réflexion touchant ce projet qui est destiné à l'amélioration des conditions de vie des personnes âgées. Les membres du comité considèrent que la raison d'être des dispositions présentées est plus que légitime et urgente compte tenu des changements démographiques bien connus, tels que le vieillissement accéléré de notre population et la montée incontournable du nombre de personnes en perte d'autonomie. Les membres du comité estiment que des mesures urgentes s'imposent. Ils sont d'accord avec les principes qui sous-tendent ce document et qui en rendent leur application salutaire.

S'il avère que la population vieillissante confirme son désir de demeurer à domicile, comme le soutient un sondage d'opinion de 2008, pour recevoir les soins nécessaires le plus longtemps possible, il n'apparaît pas que les intervenants éventuels qui dispenseraient ces soins aient été vraiment consultés et soient entièrement d'accord. Actuellement, les services d'aide à domicile qui sont dispensés par les CLSC et par l'intermédiaire des CSSS semblent particulièrement difficiles — je parle de l'accès — et nécessitent de très longues démarches. La connaissance exacte des démarches et des mécanismes qui vont conduire aux soins requis n'est probablement pas accessible à toute la population, compte tenu d'une alphabétisation parfois déficiente. Il est donc essentiel — et nous aimerions le suggérer avant l'application réelle de cette politique — qu'il y ait une campagne de sensibilisation sur ce projet, non pas de façon générale mais de façon concrète, afin de rejoindre le plus grand nombre de personnes intéressées.

Compte tenu du fait que non seulement, comme je l'ai dit, l'accès est difficile, mais la compréhension de la teneur même des dispositions peut apparaître complexe, l'évaluation des besoins telle qu'elle est présentée dans le livre blanc utilisera ou utiliserait des outils standardisés dont la validité devra être bien éprouvée. On parle du SMAF, qui est la mesure de l'autonomie fonctionnelle, et d'une autre évaluation qui arrive à des profils, avec une classification de 14 profils de besoins afin de tenir compte d'un bilan réel des besoins des personnes qui seront couvertes par cette assurance autonomie. Ceci ou cela fait ressortir le problème majeur des proches aidants, des pertes d'emploi chez eux, qui est fréquente, et surtout de leur épuisement progressif.

Je pense que ce sont des données qui sont bien connues, et toutefois les réponses à ces difficultés ne sont pas simples. Ce problème mériterait, à notre avis, une attention beaucoup plus détaillée, explicitant par ailleurs des règles claires de support financier. S'agit-il d'un support financier, comme cela est suggéré, en heures de services ou en espèces? À partir du moment où on parle d'espèce financière, il y a un problème que je vais soulever même s'il est délicat : la pénétration d'argent dans les foyers de personnes âgées qui sont entourées de leurs proches aidants n'est pas la garantie que ces sommes seront utilisées à bon escient. Donc, il est important que ceci soit vraiment détaillé clairement.

Maintenant, quelques mots concernant le personnel dont l'implantation de l'assurance autonomie aura besoin. Les soins à domicile, les AVQ et les AVD, qui sont différents des soins médicaux, lesquels sont accessibles en milieu hospitalier sur une base externe, sont dispensés par du personnel rattaché… je dis bien, actuellement par du personnel rattaché aux CLSC. Il s'agit actuellement d'un personnel bien formé, stable — et ceci est très important — et assez bien rémunéré. L'augmentation inévitable des besoins et donc du personnel, qui n'est d'ailleurs pas chiffrée clairement dans le document, le livre blanc, cette augmentation inévitable est mentionnée dans le livre blanc, et on suggère de recourir éventuellement aux entreprises d'économie sociale et parfois à des entreprises privées.

Ce recours vers le privé, qui semble soit privilégié soit inévitable, présentera ou présenterait des problèmes bien particuliers tels que… Et ceci, je pense, a dû être soulevé à plusieurs reprises auprès de cette commission. Ce personnel devra être… doit faire l'objet d'une formation très variable et non contrôlée du personnel. De plus, ce personnel — je parle surtout du personnel émanant des entreprises privées — risque d'être plus ou moins bien formé, risque d'être sous-payé et sans aucune garantie de stabilité, ce qui nous inquiète et nous apparaît essentiel compte tenu de la fragilité probable de la clientèle face à des changements de personnel. Je pense que ceci a dû être soulevé à plusieurs reprises également.

• (16 h 20) •

Outre l'absence d'une garantie de formation appropriée du personnel émanant des organismes privés ou des organismes d'entreprise… d'économie sociale, les membres du comité ad hoc — c'est-à-dire nous tous, dont la liste apparaît au début de ce mémoire — constatent qu'aucune mesure d'évaluation n'est prévue en cours de route quant à la qualité des soins prodigués et quant au degré d'efficience réelle de l'organisation des soins requis pour le maintien à domicile des personnes en situation de perte d'autonomie.

CHSLD et maintien à domicile. Ça, c'est un autre problème qui est particulièrement criant. On sait qu'environ 3 % des personnes de plus de 65 ans sont orientées vers les CHSLD, et ce nombre va certainement et très probablement augmenter, avec le vieillissement. De plus, il existe, comme cela a été mentionné dans le livre blanc, des disparités considérables selon les régions. Actuellement, les sommes allouées aux soins des personnes âgées par le SAPA et au soutien à domicile se chiffrent, d'après le livre blanc, à 2,9 milliards, dont plus de la moitié est consacrée aux CHSLD et environ 15 % seulement vers les services de soutien à domicile, alors que, dans d'autres pays, dont les pays nordiques et la France, ce pourcentage d'argent qui est alloué aux services de maintien à domicile est beaucoup plus élevé. On espère que le coût des CHSLD sera mieux contrôlé compte tenu d'une augmentation éventuelle des services à domicile, ce qui reste à prouver et qui est à la base même de la politique d'assurance autonomie.

À cet égard — un autre point bien présent et bien brûlant — la politique actuelle, celle d'un congé obligatoire et coercitif des personnes actuellement stabilisées, c'est-à-dire dont la condition aiguë n'est plus tellement majeure… sont invitées manu militari, semble-t-il, hors du milieu hospitalier, ce qui crée, à mon avis… ou à notre avis, des problèmes éthiques particulièrement criants qui pourraient être considérés comme des bavures impopulaires avant le début réel de l'implantation de l'assurance autonomie. Il nous apparaît irrecevable d'imposer le transfert de citoyens âgés malades qui occupent des lits aigus sans que l'organisation des soins à domicile soit bien rodée. Ce serait mettre… — passez-moi l'expression un peu vernaculaire — ce serait mettre la charrue avant les boeufs.

Enfin, le financement. Je ne m'étendrai pas beaucoup, même si c'est un sujet qui est particulièrement criant, car je pense qu'aucun de nous ici n'est particulièrement versé dans les finances et dans l'actuariat. Le coût réel du financement du projet n'est pas clairement précisé. Des estimés non gouvernementaux avancent le chiffre de 4,4 milliards. Les sources du budget éventuel, telles que prévues, ne sont pas clairement définies. On propose l'injection de 500 millions jusqu'à 2017-2018. Par la suite, on avance des sommes de 120 millions par an qui seraient proposées.

Dans une période où l'État-providence ne suffit plus, l'innovation essentielle pour rencontrer le défi du vieillissement et du soutien à domicile des personnes en perte d'autonomie nécessite, à notre avis, à notre humble avis, une planification plus détaillée, des mesures d'évaluation pour en déterminer l'efficience et une planification financière beaucoup plus ajustée. Néanmoins, le comité ad hoc souscrit entièrement, et je le répète, aux principes de cette politique et espère que certaines modifications la rendront plus réaliste.

En conclusion, notre comité constate avec étonnement qu'il n'est pas prévu de mettre en place un dispositif institutionnel d'évaluation de l'efficacité et de l'efficience de la mise en oeuvre et de l'application de l'assurance autonomie. De plus, il n'est pas exagéré de penser qu'il faut entretenir de sérieux doutes quant au financement du projet. En ces temps de coupures budgétaires, parfois draconiennes, où le gouvernement pourra-t-il puiser les fonds pour concrétiser son projet? Nous sommes très inquiets et cependant confiants dans la prudence et la sagesse du gouvernement.

Le Président (M. Bergman) : Dre Jeliu, merci pour votre présentation. Et maintenant, pour le bloc du gouvernement, M. le ministre.

M. Hébert : Merci beaucoup, mesdames messieurs, de ce mémoire. D'entrée de jeu, vous soulignez que ce ne sera pas un projet facile. Si c'était facile, ce serait fait. Alors, il faut faire autrement, il faut… Comme vous l'avez dit, vous qualifiez ce projet d'incontournable, de légitime et d'urgent. Et je suis tout à fait d'accord avec vous, il est urgent de pouvoir procéder à ce virage-là. Et c'est un virage qui va nécessiter des actions importantes pour qu'on puisse donner aux personnes âgées des meilleurs services pour éviter de recourir à l'hébergement en CHSLD.

Vous mentionnez à juste titre l'importance des proches aidants pour non seulement faire l'objet d'une évaluation de besoins, mais également être couverts par l'assurance autonomie. Je voudrais peut-être vous entendre un peu plus sur : Que devrait comprendre cette évaluation, que devrait couvrir l'assurance autonomie en termes de besoins chez les proches aidants?

Le Président (M. Bergman) : Dre Jeliu.

Mme Jeliu (Gloria) : Bon, écoutez, à mon humble avis, je suis pédiatre, je ne suis pas gériatre — je le deviendrai peut-être si le temps me le permet — mais l'évaluation des besoins est un élément incontournable et qui soutient la prestation des services. Or, cette évaluation des besoins, malheureusement, ne peut pas être statique. Les besoins, comme ça a été, je pense, suggéré à d'autres moments, ces besoins peuvent changer de jour en jour, de mois en mois, et, à cet égard, il devient essentiel que cette portion qui sous-tend l'implantation des soins doit être faite de façon aussi parfaite que possible. Ça veut dire quoi? Ça veut dire qu'il faut utiliser des instruments qui sont reconnus, qui sont validés.

Les instruments qui sont mentionnés ici, le SMAF et l'autre qui est l'organisation vers une sommation des besoins, qui donne un profil des besoins, il me semble que, pour ce faire, les besoins doivent… les outils, pardon, doivent être particulièrement bien validés. J'ai entendu dire, à l'extérieur, des remarques consistant dans le fait que la validité des instruments mentionnés n'est peut-être pas éprouvée par tous. Personnellement, je n'ai pas d'opinion là-dessus, mais je considère qu'effectivement la validité des instruments qui permettent de chiffrer ou de décrire la teneur des besoins des personnes en situation de dépendance est absolument importante et essentielle.

Pour ce faire, quels que soient les instruments utilisés, ils doivent être validés, je l'ai dit, mais ils doivent aussi être administrés par des personnes qui sont bien formées. On comprend, d'après le livre blanc, que le personnel actuel des CLSC et des CSSS ne suffira probablement pas à la tâche, il est déjà débordé. Je pense, personnellement, que le personnel des CLSC a déjà du mal à remplir ses propres… ses objectifs bien connus. Je pense en particulier aux SIPPE, qui s'adressent aux jeunes familles et aux jeunes mères adolescentes qui ont… dans des situations de pauvreté. Les SIPPE, à ma connaissance, n'ont pas connu encore de mesure d'évaluation confortable. Donc, on peut considérer qu'il y a encore du chemin à faire dans l'organisation des services des CLSC et dans la prestation de nouveaux services qui commandent la présence de personnel bien formé.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : C'est pourquoi le projet d'assurance autonomie élargit la gamme des prestataires en incluant les prestataires dans les entreprises d'économie sociale ou dans des résidences privées, avec une gestion publique de ces prestataires-là, c'est-à-dire un contrôle de qualité par la mise en place d'une accréditation des prestataires, qui doivent répondre à des normes de formation et des normes de qualité de services. Est-ce que cela vous rassure sur l'utilisation de prestataires autres que les prestataires publics?

• (16 h 30) •

Mme Jeliu (Gloria) : Ça jette une lumière sur ma distraction parce que je ne pense pas avoir — comment dirais-je? — pris connaissance d'une mention d'une accréditation précise de ce personnel qui devra faire l'évaluation des besoins. Mais je peux me tromper.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Vous parlez avec justesse des effets pervers d'une allocation en espèces, qui est utilisée dans certains pays, ce qu'on appelle le «Cash for Care» ou le «personal health budgets» au Royaume-Uni, qui ouvre la porte à des abus financiers...

Mme Jeliu (Gloria) : Possibles.

M. Hébert : ...des abus financiers et qui fait en sorte qu'on n'a pas de contrôle, justement, sur la formation du personnel, qui... Et nous voulons, et nous l'avons dit clairement dans le livre blanc, restreindre l'utilisation de l'allocation en espèces au chèque emploi-service, qui est déjà utilisé chez les personnes handicapées, pour engager du personnel. Mais nous souhaitons que ce personnel-là soit l'objet des mêmes contrôles de qualité de formation et de qualité des services que le personnel des entreprises d'économie sociale ou des autres prestataires. Alors, je vous rejoins tout à fait dans l'effet pervers d'une utilisation de l'allocation en espèces.

Le Président (M. Bergman) : Dre Jeliu.

Mme Jeliu (Gloria) : Vous m'en voyez, M. le ministre, ravie et en même temps inquiète parce que ce n'est pas du jour au lendemain que ça va pouvoir se mettre en place.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Je ne comprends pas ce que vous voulez dire.

Mme Jeliu (Gloria) : Disons, la mise en place et de l'accréditation, et de la formation du personnel, et du système de vérification de tout cela. D'où la mise en oeuvre progressive, qui est une des dernières recommandations qui pourrait être faite, la mise en oeuvre progressive d'une politique d'implantation de soins à l'égard des personnes âgées en situation de dépendance ou de perte d'autonomie.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

Une voix :

M. Hébert : Excusez-moi. Vous soulignez avec justesse la nécessité d'évaluer l'implantation de ce projet. Est-ce que vous avez en tête des moyens de procéder à cette évaluation-là? Comment vous nous suggérez de pouvoir nous assurer qu'il y aura une évaluation de l'impact et une évaluation du processus d'implantation?

Le Président (M. Bergman) : Dre Jeliu.

Mme Jeliu (Gloria) : Vous voulez que je réponde, M. le ministre, oui?

M. Hébert : Vous ou quelqu'un de votre groupe.

Mme Jeliu (Gloria) : Pardon?

M. Hébert : Vous ou quelqu'un de votre groupe.

M. Laporte (Pierre-Étienne) : Voulez-vous que je réponde?

Mme Jeliu (Gloria) : Oui, oui, bien sûr, M. Laporte.

Le Président (M. Bergman) : M. Laporte.

M. Laporte (Pierre-Étienne) : Bien, moi, disons, pour répondre à cette question-là, là, je pourrais prendre beaucoup de temps, là, mais, ce qui m'étonne dans... Ça ne m'étonne pas, parce que j'ai été à la fois haut fonctionnaire, professeur d'université, député. Ce qui ne m'étonne pas, c'est de voir, comme dans les politiques gouvernementales en général, l'absence d'une préoccupation majeure pour l'évaluation de la politique.

Vous parliez tantôt, par exemple, des proches aidants. Les données internationales là-dessus, sur les proches aidants, même dans les pays du nord de l'Europe, qui sont les pays, disons, exemplaires de ce point de vue là, sont à l'effet que le niveau d'épuisement est toujours très élevé. Alors, qu'est-ce qu'on prévoit dans ce cas-ci, par exemple, pour l'évaluation, disons, des proches aidants du point de vue de leur satisfaction, de leurs besoins, et ainsi de suite?

Mais il y a plusieurs autres aspects de... J'écoutais parler tantôt le président de la curatelle publique. Je n'ai pas compris, de la lecture du livre blanc, qui seront les organismes responsables de faire de l'évaluation d'efficacité et de l'évaluation d'efficience — Dre Jeliu l'a mentionné — de cette politique-là. Est-ce qu'il y a... On a mentionné, disons, la curatelle publique, le Protecteur du citoyen, le Vérificateur général, la RAMQ, et ainsi de suite, là, mais il n'y a pas...

La raison pour laquelle je vous mentionne ça, c'est que mon expérience personnelle m'a appris que, dans des livres blancs sur lesquels j'ai travaillé, par exemple comme le livre blanc sur l'Office de la langue française — comme ça a été rendu public par Camille Laurin — il n'y avait pas de dispositifs institutionnels d'évaluation de l'application de la charte. O.K.? Et c'est grâce à des personnes qui s'y intéressaient — il y avait des sociologues là-dedans — qu'on en est venus, par exemple, à mettre sur pied, d'une part, la commission de surveillance, mais, d'autre part, d'ajouter des rôles, des responsabilités d'évaluation au Conseil de la langue française.

Et, quand je parle d'évaluation, je parle d'évaluation de l'efficacité, c'est-à-dire jusqu'à quel point les objectifs de la politique sont-ils atteints, mais aussi d'évaluation d'efficience, au sens où jusqu'à quel point des objectifs non prévus et des objectifs non mentionnés par la loi… dans laquelle… livre blanc ou dans laquelle loi, jusqu'à quel point ces objectifs qui n'étaient pas prévus ont donné naissance à des effets qui, eux, sont assez contraires ou plutôt contraires aux objectifs ultimes qui sont visés.

C'est ce que, en sociologie, on appelle les effets pervers, pas pour entendre par là une notion morale, mais une notion d'évaluation de programme. C'est-à-dire, vous faites des effets pervers, en ce sens qu'il y a des effets de la politique qui n'ont pas été prévus nulle part dans les objectifs, mais qui apparaissent néanmoins dans la façon dont la politique est mise en oeuvre. Alors, moi, je termine là-dessus, là

M. Hébert : Je vous remercie.

M. Laporte (Pierre-Étienne) : Je trouve qu'il y a un déficit dans votre livre blanc en ce qui concerne l'évaluation.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Ce n'est pas la place, dans un livre blanc, de traiter d'évaluation, mais je retiens votre suggestion d'arrimer ce projet-là avec une évaluation formelle d'implantation et d'efficience. Deux autres groupes nous l'ont suggéré, des groupes de chercheurs, notamment de l'institut de gériatrie de Montréal. Et je pense que ce sera important d'associer cette innovation majeure avec une recherche sur le processus d'implantation et l'efficience de cette nouvelle mesure. Je vous remercie de votre…

M. Laporte (Pierre-Étienne) : Mais disons que, même si vous dites que ce n'est pas la place de le faire dans un livre blanc, est-ce que vous avez déjà tout de même, disons, une pensée de faite sur cette question-là?

M. Hébert : J'ai 35 ans de carrière de chercheur scientifique sur l'évaluation des systèmes de santé. Je peux vous dire que j'ai une pensée très précise là-dessus.

M. Laporte (Pierre-Étienne) : Alors donc, vous ne l'avez pas mentionné là-dedans pour la simple raison que ça ne faisait pas partie, de votre point de vue, d'un livre blanc.

M. Hébert : Non, c'est ça. Tout à fait.

M. Laporte (Pierre-Étienne) : Ah! Ça devait être la même…

M. Hébert : Ça fait partie de la politique qui va venir, là, et du projet de loi qui va être présenté, mais ça ne fait pas partie d'un livre blanc. C'est-à-dire, on ne va pas en consultations là-dessus. Mais vous faites bien de le souligner, et je pense que deux autres groupes l'ont souligné, on trouvera le moyen de créer un appel à projets pour qu'il puisse y avoir des scientifiques qui s'intéressent à l'implantation de cette nouvelle mesure de solidarité sociale.

M. Laporte (Pierre-Étienne) : Je vous remercie.

M. Hébert : Vous abordez le cadre financier. Alors, dans le livre blanc, nous avons donné le cadre général, le cadre financier général du livre blanc. Nous avons déjà, et Mme la première ministre s'est déjà prononcée en Chambre sur les décisions gouvernementales où c'est… le financement sera assuré par l'impôt. Parce qu'il y avait une option, au niveau du livre blanc, où il pouvait y avoir une… d'une cotisation et une capitalisation. Alors, l'ensemble, la majorité, la grande majorité des mémoires nous ont suggéré d'utiliser l'impôt. Et le gouvernement a fait son nid là-dessus.

Évidemment, les modalités, les modalités de détermination de l'allocation selon le profil et des modulations selon le revenu vont venir avec le projet de loi. Mais déjà le cadre financier, il est là, là. C'est ce que l'État prévoit consacrer à l'assurance autonomie. On sait qu'avec l'injection de 500 millions on va passer de 15 % de réponse aux besoins actuels à 30 %, 40 % et même plus pour les gens à plus faibles revenus. Alors, ce cadre financier là, c'est le cadre proposé par le gouvernement actuel.

Évidemment, les modalités, les modalités de détermination des allocations et la modulation selon le revenu restent à déterminer. Il fallait entendre les gens sur le livre blanc avant d'aller dans ces détails. Mais on a déjà, dans le livre blanc, le cadre financier de l'implantation de l'assurance autonomie, qui nous montre, comme vous le soulignez à juste titre, qu'une orientation vers les soins à domicile va nous permettre de contrôler davantage les coûts qui sont liés au vieillissement de la population.

Mme Jeliu (Gloria) : M. le ministre, me permettez-vous de poser, moi, une question? C'est à l'envers de ce qui est classique.

M. Hébert : Vous êtes tout à fait bienvenue.

Le Président (M. Bergman) : Dre Jeliu.

• (16 h 40) •

Mme Jeliu (Gloria) : La question que je me pose : Comment peut-on imposer des amendes aux hôpitaux et... aux CSSS, pardon, qui n'auront pas accepté d'avaliser les congés qui deviennent obligatoires de patients stabilisés? Or, une personne âgée que l'on appelle stabilisée, c'est une personne qui peut se déstabiliser le surlendemain de sa sortie. Et bien des personnes qui sont actuellement dans les milieux hospitaliers et qui encombrent, entre guillemets, les lits aigus et qui encombrent, de ce fait, par voie descendante, les urgences, qui sont… qui débordent, ces personnes, où vont-elles aller? Elles ne sont pas toutes prêtes à retourner à leur domicile et à y rester.

M. Hébert : Je peux répondre à votre question? Parce que vous l'avez déjà…

Mme Jeliu (Gloria) : Je serais…

M. Hébert : …vous l'avez déjà posée dans votre exposé initial et dans votre mémoire.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Je vais répondre à votre question.

Mme Jeliu (Gloria) : ...

M. Hébert : Pour moi, ce qui est inacceptable, c'est que les personnes âgées attendent 24, 36, 48 heures dans un corridor de salle d'urgence pour avoir un lit à l'hôpital. Pourquoi il y a des gens qui attendent d'avoir un lit? C'est parce qu'il y a des personnes âgées qui sont stabilisées qui attendent dans un lit d'hôpital. Et ça aussi, c'est inacceptable quand on sait le risque qui est associé à l'hospitalisation chez les personnes âgées : risque d'infection, risque de perte d'autonomie. Ce n'est pas un milieu de vie.

D'abord, ce n'est pas une pénalité. Ce qui est implanté actuellement à Montréal et à Québec, c'est ce qui fut implanté il y a cinq ans dans la région de l'Estrie, c'est que le CSSS a la responsabilité du patient même s'il est dans un hôpital qui n'est pas dans son établissement. Parce qu'actuellement personne n'a la responsabilité de ces personnes-là. L'hôpital le garde, mais le CSSS ne fait pas l'évaluation, ne s'occupe pas de ce patient-là, de sorte qu'il reste très longtemps dans un lit d'hôpital.

Alors, ce que cette mesure-là fait, c'est qu'elle rend le CSSS responsable. Dès l'entrée à l'hôpital, le patient de son territoire est sous sa responsabilité, de sorte qu'il doit y avoir des personnes qui vont évaluer cette personne-là rapidement pour prévoir la sortie soit vers le domicile avec des ressources supplémentaires, soit vers un centre d'hébergement ou une ressource intermédiaire. Et cette responsabilité-là, elle s'accompagne d'une responsabilité financière, c'est-à-dire que le CSSS est responsable financièrement de cette personne qui est à l'hôpital. Elle coûte 900 $ par jour à l'hôpital, alors qu'elle en coûterait 600 $ en centre d'hébergement, 400 $ en ressource intermédiaire, 350 $ avec des services intensifs de soutien à domicile.

Alors, vous voyez tout de suite que le CSSS va avoir un incitatif à s'occuper de ces patients. Ce qu'on veut, c'est que le CSSS soit responsable de ces patients-là et s'occupe de trouver la meilleure ressource pour la personne. Et nous avons injecté, je vous le rappellerai, dès cette année, 13 millions de dollars dans le soutien à domicile sur l'île de Montréal. L'argent est là, et les CSSS doivent utiliser ces fonds-là pour faire en sorte que les personnes ne se retrouvent pas dans un lit pendant des semaines, voire des mois, à l'hôpital avec un risque d'attraper toutes sortes de maladies nosocomiales et un risque de perdre l'autonomie, en plus d'avoir un milieu de vie qui, vous en conviendrez, dans un hôpital, n'est pas un milieu de vie adéquat pour une personne qui n'a plus besoin de soins hospitaliers.

Mme Jeliu (Gloria) : M. le ministre, ces détails m'apparaissent fort pertinents, et je dois m'inscrire en faux sur la qualité des informations qui traînent dans la presse et qui ne rendent pas compte de ce que vous venez de dire, qui éclaire de façon beaucoup plus recevable la situation.

M. Hébert : Et, vous savez quoi, en Estrie, ça a été… Parce qu'il y a trois régions, en fait, au Québec, où le problème est important parce que c'est des régions où l'hôpital ne fait pas partie du CSSS. Il y a un hôpital universitaire, et le CSSS, ce n'est pas le même établissement. Dans toutes les autres régions du Québec, quand l'hôpital fait partie du CSSS, ça se fait naturellement. Ça se fait naturellement parce que c'est le même établissement. Mais, dans la région de Montréal, dans la région de Québec et dans la région de Sherbrooke, ce n'est pas le cas. Alors, à Sherbrooke, où ça a été implanté, les CSSS n'ont jamais eu à débourser parce qu'ils se sont toujours occupés des patients avant le huit jours en question, alors. Et ce qui...

Mme Jeliu (Gloria) : Il y a peut-être plus de places dans la région de l'Estrie?

M. Hébert : Non, il y a moins de places. À Montréal, vous avez 4,2 lits d'hébergement pour 100 personnes âgées, alors qu'en Estrie on est à 2,5. En Estrie, il n'y a plus de liste d'attente, plus de liste d'attente, pourquoi? Parce qu'il y a des soins à domicile et il y a des ressources intermédiaires. Et cette responsabilité-là a fait en sorte que les patients n'attendent plus dans les lits d'hôpitaux. Et c'est ce qui va se passer à Montréal.

Vous savez, juste de dire qu'il allait y avoir cette mesure-là, déjà le nombre de patients en attente dans les lits d'hôpitaux a diminué de moitié. Alors, vous voyez tout de suite que les CSSS ont tout de suite mis en oeuvre des mesures pour s'occuper de leurs personnes âgées. C'est une responsabilité populationnelle qu'il faut qu'elle soit implantée dans le réseau, et c'est l'objet de cette mesure-là...

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre, il vous reste deux minutes.

M. Hébert : …qui, j'en conviens avec vous, n'a pas été bien rapportée dans les médias. Et je suis tout à fait d'accord, mais c'est une mesure qui est dans le plus grand intérêt des personnes âgées.

Une voix : Merci, M. le ministre.

Le Président (M. Bergman) : Il vous reste deux minutes, M. le ministre.

M. Hébert : Je m'excuse, je me suis emporté. Mais en tout cas. Mais c'était une conversation agréable. Écoutez, je souscris tout à fait à vos remarques et à vos préoccupations. Je peux vous assurer que l'urgence que vous soulevez, j'en fais mienne. Je pense qu'il y a urgence. Il faut faire les choses avec une bonne planification, néanmoins. Mais je pense qu'il faut imprimer un changement important à notre système de santé et de services sociaux pour faire en sorte de garder les personnes à domicile et de leur donner les services dont elles ont besoin. Puis je vous remercie de votre mémoire, et de votre appui, et de votre collaboration aussi, parce que ce n'est pas terminé, je pense que nous aurons à continuer ces échanges-là. Merci beaucoup.

Le Président (M. Bergman) : Ceci met fin au bloc du gouvernement. Maintenant, pour le bloc de l'opposition officielle, M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Bienvenue à notre commission. Puis c'est intéressant, vous êtes l'avant-dernier groupe, puis le ministre vient d'expliquer ce que j'expliquais beaucoup pour Montréal : il y a des places, beaucoup de places en CHSLD, mais il manque des places en ressources intermédiaires. Et pourquoi on dit parfois qu'à Montréal les gens sont très légers puis ils sont dans des CHSLD? C'est tout simplement, pas parce qu'ils ont fait nécessairement plus de maintien à domicile, parce que ça prend plus de ressources intermédiaires. Et, si on n'a pas ce continuum de services là, à ce moment-là, ça devient difficile à gérer. Il ne faut jamais oublier, lorsque vous avez quelqu'un qui est dans une ressource moyenne et qu'il n'y a pas assez de ressources moyennes, là, qu'il en manque, il ne retournera pas vers la ressource plus légère, il va toujours aller vers la ressource plus lourde. Donc, c'est le principe qui avait été appliqué.

Deuxièmement, le ministre vient de vous démontrer également que, sans assurance autonomie, les régions de l'Estrie, Arthabaska-les Érables, Saguenay—Lac-Saint-Jean ont réussi à faire que lui veut qu'on fasse avec l'assurance autonomie. Parce que, si ces régions-là sont déjà à 2,5 avec le nombre de ressources intermédiaires nécessaires, le nombre de CHSLD nécessaires et les soins à domicile bien développés, et que ça s'est fait sur plusieurs années voilà un certain temps, ça s'est tout fait sans assurance autonomie. Et pourquoi? Parce qu'ils ont amélioré leur performance.

Et, avant de réinjecter de l'argent... et ça en prend, un certain montant, mais, avant de rechanger complètement une structure puis de tout essayer de mêler le système, puis de sortir ça, puis de mettre ça à part, si on appliquait les principes qui ont été faits dans l'Estrie, Saguenay—Lac-Saint-Jean, Arthabaska-les Érables, on va avoir les résultats, sauf qu'à Montréal il faut développer en plus des ressources intermédiaires, comme Québec a annoncé cette semaine son plan de développement de ressources intermédiaires.

C'est ça, la solution, quant à moi, qui peut se faire beaucoup plus rapidement, sans mêler le monde, mais surtout sans prendre un grand risque financier, de savoir... qu'on ne sait pas comment ça va être après. Ça fait que c'est la logique un peu de ce qui se passe ici avec l'assurance autonomie.

Le Président (M. Bergman) : Dre Jeliu.

Mme Jeliu (Gloria) : Est-ce à dire que l'assurance autonomie deviendrait une planification peut-être pas aussi urgente qu'on le dit? Il y aurait peut-être d'autres solutions?

M. Bolduc (Jean-Talon) : Bien, la solution — on est en train de le faire à Montréal, puis le ministre l'a expliqué tantôt — il faut sortir les patients des lits de courte durée vers les CHSLD. Mais le problème, à Montréal... Vous savez, en médecine, Dre Jeliu, vous le savez, en médecine, avant de faire un traitement, il faut faire quoi?

Mme Jeliu (Gloria) : Un petit diagnostic, c'est préférable.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Un bon diagnostic. Et, si vous venez ici en disant qu'à Montréal l'assurance autonomie, par le maintien à domicile, va régler le problème et que vous évaluez que c'est des places en ressources intermédiaires qu'il vous manque, développez tant que vous voulez des places de maintien à domicile, ces gens-là vont continuer à se retrouver en CHSLD.

Donc, il faut faire le bon diagnostic. Et ce qu'il faut, et ça a été prouvé dans la région de Sherbrooke, prouvé dans la région du Saguenay—Lac-Saint-Jean, prouvé dans Arthabaska-les Érables… En passant, on est les trois représentants de ces régions-là. Ça a été prouvé que, dans ces régions-là, il n'y a pas de patients qui attendent dans les établissements en courte durée; les lits, c'est 2,5 par 100 personnes de 65 ans et plus, même des fois un petit peu plus bas; on a les ressources intermédiaires suffisantes, comme vient de dire le ministre; et on a forcé à développer les soins à domicile parce qu'on a réussi à se libérer des marges de manoeuvre financières pour mettre plus d'argent dans les soins à domicile. C'est ça, la stratégie qui a été prise, qui a été faite dans des endroits que ça a bien fonctionné.

Et ce qu'il faut faire, il faut faire ça à Québec — ils sont en train de le faire — à Montréal. Et toutes les régions actuellement au Québec, à ma connaissance, sont toutes en train de développer les services à domicile. Et, si vous mettez plus d'argent, avec la stratégie que je viens de vous dire, on ne passera pas deux à trois ans à se chicaner comment ça fonctionne puis qu'est-ce qui doit être fait, on peut le faire immédiatement.

M. Hébert : Moi, je ne me chicane pas.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Oui…

Le Président (M. Bergman) : À l'ordre, s'il vous plaît!

• (16 h 50) •

M. Bolduc (Jean-Talon) : Le ministre, il me taquine. Mais, au moins, il y a plusieurs choses sur lesquelles on s'entend. Mais le principe, puis c'est ça, la différence dans l'orientation, nous autres, on veut, un peu comme le Vérificateur général a dit, M. Castonguay a dit, d'abord améliorer la performance aux endroits où qu'ils sont non performants et on a des beaux modèles au Québec : l'Estrie, Arthabaska-les Érables et Saguenay—Lac-Saint-Jean. Il n'y a personne qui est venu ici, autour de la table, pour dire que, dans ces trois places-là, ça ne fonctionnait pas. Ça fonctionne très bien.

Le Président (M. Bergman) : M. Ledoux? Monsieur...

Mme Jeliu (Gloria) : Donc, il faudrait une solution intermédiaire avant une implantation générale. C'est ce que j'entends?

M. Bolduc (Jean-Talon) : Oui, je pense…

Mme Jeliu (Gloria) : C'est une réorganisation ou une bonification d'une structure actuelle qui a les ingrédients pour arriver aux objectifs poursuivis.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Absolument. Absolument. Et puis ça ne veut pas dire que ce que le ministre prône comme principes de base, c'est-à-dire plus de soins à domicile, l'utilisation des gestionnaires de cas, une enveloppe dédiée qui pourrait être gérée... En passant, une enveloppe dédiée, c'est le même vérificateur qui y va puis qui dit : Pourquoi vos dollars ne sont pas allés là? Je pense que les directeurs généraux, ils vont prendre encore plus leurs responsabilités. Là, on la prend, on la met à la Régie de l'assurance maladie du Québec, on établit des profils qu'il va falloir qu'il y ait un paiement qui va être un peu plus compliqué.

Le principe, également, du choix, ça, c'est déjà. Je pense que, si vous êtes en résidence privée, ça peut être fait par l'organisation de la résidence privée. Les entreprises d'économie sociale peuvent continuer d'être utilisées. Et là ça prend un programme d'assurance qualité qui est mis en place, comme on l'agrément avec Agrément Canada ou le conseil québécois de la qualité. Donc, il y a moyen rapidement d'atteindre des résultats beaucoup plus rapidement que de rejouer dans toute la structure qui… en passant, toutes ces transformations-là, ça se fait sur plusieurs années, puis on va avoir des résultats un peu plus tard, versus ce que je viens de vous dire.

Le Président (M. Bergman) : M. Ledoux.

M. Ledoux (André) : Alors, si je vous comprends bien, la clé du succès ce serait le rôle que doivent jouer les CSSS dans le système.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Dans le plan du ministre, les CSSS, ils jouent le même rôle. Ça va être ceux qui vont gérer l'épisode de soins et qui vont faire une certaine allocation. Mais le rôle des CSSS actuellement, de la façon dont ça fonctionne, ça fonctionne déjà comme ça. C'est la façon dont ils vont chercher l'argent où, là, ça serait plus un paiement à l'activité. Mais ça, ça peut également se mettre en place d'une façon différente que de le centraliser.

M. Ledoux (André) : D'accord.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Là, c'est plus moi qui réponds aux questions, mais… Mais je pense que c'est important, en fin de…

M. Hébert : Il faudrait que tu fasses un livre blanc.

M. Bolduc (Jean-Talon) : C'est ça. C'est ça. Bien, le ministre… Puis on tient à le dire, les principes qui sont dans le livre blanc, de maintenir les gens à domicile, le programme pour les aidants naturels, ça doit tout être fait, ça. C'est sur le financement qu'on a une différence et c'est sur la façon de le faire qu'on a une différence. M. le Président, je vais laisser peut-être la parole à ma collègue, là, qui avait une question.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne, il vous reste 12 minutes.

Mme Blais : On va se le partager. Je suis toujours heureuse de revoir les gens de l'observatoire du vieillissement. Vous êtes d'ailleurs logés à l'institut de gériatrie, alors vous avez de très bons contacts. Et, Dre Jeliu, c'est un plaisir de vous revoir aujourd'hui.

Écoutez, moi, aussi, M. Laporte, j'avais des questions par rapport à l'ambiguïté. C'est sûr qu'un livre blanc, on ne peut pas tout dire, mais, dans un livre blanc... Quand vous avez posé la question concernant l'évaluation, c'était une question extrêmement pertinente. Et, quand ce n'est pas écrit à quelque part, on a lieu, à un moment donné, d'être inquiets et de poser des questions, comme le cadre financier. Depuis le début de cette consultation, les positions ont énormément évolué. On parlait d'une taxe, d'un impôt. Là, maintenant, c'est une caisse qui n'est plus capitalisée. On parle d'un ajout de 500 millions, 500 millions qui avaient été prévus dans le budget du gouvernement précédent, donc c'est des sommes qui étaient là. Et tout ça, c'est correct.

On vise les mêmes choses, maintenir les personnes à domicile le plus longtemps possible. Mais, par l'assurance autonomie, on vise non seulement les personnes aînées, mais aussi des personnes en situation de handicap. Et, juste avant vous, vous avez entendu le curateur, qui parlait aussi des personnes ayant des difficultés au niveau de la santé mentale et beaucoup plus de soins aux proches aidants. Et moi, j'ai une vive inquiétude quand j'entends et je lis régulièrement qu'il y a des coupures d'infirmières, qu'il manque de personnel soignant, des travailleurs sociaux. En plus, on ne veut pas payer pour ces services. Il manque ces personnels.

Vous le saviez, Dre Jeliu, les docteurs à domicile, là, il n'y en a pas. On veut maintenir le monde à domicile le plus longtemps possible, mais il va falloir développer la pratique de médecin à domicile parce que, sinon, comment on va faire pour réussir ce qu'on veut, qui est un magnifique rêve de société? Bien, je pense qu'il faut prendre le temps de faire les choses correctement. Et moi aussi, je suis inquiète par cette implantation aussi rapide. Et je trouve qu'on doit évaluer les choses, que le cadre financier... On n'en parle pas beaucoup, de cadre financier, mais il y a un coût. Ce n'est pas vrai qu'il n'y aura pas de coût, puis ce n'est pas vrai que, demain matin, tout le monde va avoir des services à 100 % gratuits. Je suis inquiète puis je veux un peu vous entendre là-dessus.

Le Président (M. Bergman) : Pierre-Étienne Laporte.

M. Laporte (Pierre-Étienne) : Bien, c'est-à-dire que, sur la question de l'évaluation, je regrette d'être en désaccord avec le ministre, on ne peut pas mettre la question du comment faire l'évaluation de politiques dans un livre blanc, mais on pourrait mettre au moins la question du pourquoi, et, dans ce document-là, la question du pourquoi n'est pas posée nulle part, on a tout simplement escamoté ce genre de questionnement là. Et puis moi, j'ai surtout insisté là-dessus parce que j'ai travaillé beaucoup dans le domaine de l'évaluation.

Pour revenir à la question que vous posiez tantôt, M. le député, c'est-à-dire l'information sur Sherbrooke, moi, j'ai fait partie de l'équipe de fondation de la Faculté de médecine de l'Université de Sherbrooke, où j'ai créé un département des sciences du comportement. Eh bien, ça ne fait pas d'hier… ce n'est pas d'hier qu'à Sherbrooke on se pose les questions que vous avez soulevées, là. On a eu un conseil régional de soins et de services, donc il y a eu une longue étape de préparation à l'action et à l'évaluation de l'action et des moyens d'action à Sherbrooke, ou c'est peut-être vrai au Lac-Saint-Jean ou ailleurs, mais il y a eu une longue préparation de ces choses-là, alors que, pour ce qui est de Montréal, à mon avis, on est dans une situation qui est très chargée d'incertitude. Alors, je ne sais pas si ça répond à votre question, là, mais…

Mme Blais : Mais ça presse quand même.

M. Laporte (Pierre-Étienne) : Oui, ça presse, je suis d'accord. Mais encore faut-il, disons, prendre les moyens pour qu'on puisse prévoir ce qui pourrait faire que… disons, énoncer les principes qui prévoient qu'il peut y avoir des effets imprévus qu'on appelle des effets pervers, et aussi que, pour toutes sortes de questions, disons, l'efficacité soit remise en question, soit mise en cause.

Alors, moi, c'est plutôt ma réaction au document, que j'ai... qui est en partie l'effet de mon… la conséquence de mon expérience professionnelle. J'ai trouvé, comme j'avais trouvé dans le cas de la Charte de la langue française, avec Camille Laurin, que vraiment, là, il aurait pu en parler, de cette question-là. Mais je vous avoue que… Là, je ne me ferai pas aimer, mais je vous avoue qu'étant donné mon expérience professionnelle je crois qu'à la fois chez les politiciens et chez les fonctionnaires l'évaluation, c'est trop largement mis de côté.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne, il vous reste six minutes.

Mme Blais : Oui, juste un commentaire. Moi aussi, je partageais votre inquiétude, Dre Jeliu, par rapport aux amendes qu'on impose… qu'on va imposer — parce qu'il y a eu un délai — pour sortir les personnes le plus rapidement possible lorsque le congé est signifié au bout de huit jours. Encore faut-il qu'il y ait des services à domicile, encore faut-il qu'il y ait une place en ressources intermédiaires ou encore faut-il qu'il y ait une place en CHSLD. Et en plus la grande majorité des hôpitaux ont une approche adaptée aux personnes âgées, de plus en plus, pour empêcher le delirium, pour faire en sorte que les personnes qui arrivent à l'urgence soient immédiatement transportées ailleurs, dans une chambre.

Alors, je pense qu'il faut continuer de travailler sur cette approche, que j'appelle hôpital ami des aînés, là. Mais ça se fait de plus en plus. Et ça, ça va empêcher ce genre de situation. Je suis d'accord avec le ministre, ce n'est pas la place des aînés à l'hôpital. Mais ce n'est pas par des amendes ou une espèce d'épée de Damoclès que ça va régler le problème des services à domicile ou en CHSLD. Puis là, bien, je laisse la conclusion à mon collègue, M. le Président.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon, il vous reste cinq minutes.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Bien, vous apportez la problématique de Montréal, j'aimerais ça qu'on en discute. Comme vous disiez, vous voulez qu'on agisse rapidement parce que Montréal est en difficulté. Les patients attendent dans les urgences, sont pris… c'est ça, les patients attendent dans les lits de courte durée, alors qu'ils devraient être en CHSLD. Mais, comme je vous disais, à Montréal, il y a un changement qui a été entrepris, ils sont en train de le faire, mais, s'ils n'ont pas les ressources intermédiaires nécessaires, c'est sûr que ça va continuer à engorger.

Puis moi, je suis d'accord avec ma collègue, de mettre de la pression sans donner les moyens, vous faites juste culbuter encore plus le problème. Un montant de 13 millions, ça ne crée pas des ressources intermédiaires demain matin. Il faut les créer, ces ressources intermédiaires là, il faut les acheter, il faut les développer, il faut les évaluer, donc il y a tout un système qui doit se mettre en place.

Mais on est d'accord si vous êtes d'accord, Montréal est peut-être un des endroits au Québec pour pouvoir accorder une priorité par rapport à ce changement, mais Montréal est en décalage. Puis je le leur ai dit à plusieurs reprises, ils ont été en décalage. Ils sont en train de récupérer, mais ça va prendre encore probablement quelques années.

• (17 heures) •

Le Président (M. Bergman) : Dre Jeliu.

Mme Jeliu (Gloria) : Moi, je n'ai pas de commentaire...

Le Président (M. Bergman) : M. Ledoux.

Mme Jeliu (Gloria) : ...par rapport à ce que vous venez de dire, M. le député. Par contre, je suis d'accord que la responsabilité des CSSS ne peut s'exercer que s'il y a des ressources qui peuvent accueillir les personnes qui, on est bien d'accord, n'ont aucun intérêt à mariner — passez-moi l'expression — dans des services où ils peuvent être contaminés par toutes sortes d'infections nosocomiales et même perdre la raison. Parce qu'on sait que les personnes âgées qui entrent dans les hôpitaux ont souvent de la confusion dans les jours qui suivent, et ce n'est pas pour rien, ce changement dramatique de milieu est particulièrement toxique pour une personne âgée. Donc, le séjour prolongé en milieu hospitalier, s'il n'est pas commandé par des difficultés organiques majeures, n'est pas aidant à la santé de la personne.

Ceci étant dit, le rôle des CSSS tel qu'il a été expliqué ne pourra s'exercer que s'il y a des ressources où les personnes qui dégagent ou qui libèrent les lits vont vraiment aller s'implanter avec prudence et avec succès. S'il n'y a pas de ressources intermédiaires, personnellement, moi, je n'ai pas de solution.

La dernière recommandation personnelle que j'aimerais faire, c'est que l'implantation progressive de l'assurance autonomie, indépendamment des problèmes financiers, que je ne toucherai même pas verbalement, pas le moins du monde, parce que ce n'est pas mon domaine... mais l'implantation progressive m'apparaît essentielle pour déterminer rapidement l'applicabilité de la politique. L'existence d'effets pervers, telle que soulignée par mon collègue à ma droite… Et ces effets pervers sont, par définition, inattendus. Donc, on ne peut pas les prévoir quelle que soit la durée de la réflexion préalable. Il faut l'essayer quelque part pour voir où sont les difficultés inattendues qui pourraient surgir quant à l'application d'une politique qui, par ailleurs, nous apparaît incontournable, urgente et peut-être idéaliste.

M. Bolduc (Jean-Talon) : M. le Président.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon, vous avez une minute.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci. Bien, écoutez, ce que vous venez de dire là, c'est la sagesse. Les grandes réformes, on en a vu plusieurs, là, ça a toujours du bon sens au début, c'est toujours conçu de façon idéale comme s'il n'y aurait pas de problème, puis là il arrive des imprévus, puis c'est après, quand on fait l'autopsie de l'échec, qu'on se rend compte qu'on aurait dû prévoir ça ou de le faire de façon plus progressive. Et, je suis d'accord avec vous, il faut prendre le temps de mettre les choses en place, il faut surtout vérifier : Est-ce que ça va fonctionner vraiment parce qu'on est dans un cadre idéal alors qu'on est dans la réalité? Est-ce qu'il y a assez de main-d'oeuvre? Est-ce que l'argent va être au rendez-vous? C'est toutes des questions auxquelles on doit répondre. Mais ce qui est inquiétant, c'est qu'on joue avec la vie des gens et la santé des gens. Donc, il ne faut pas jouer trop avec ça, il faut être très, très, très prudents. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bergman) : Malheureusement, le temps de l'opposition officielle s'est écoulé. Collègues, il y a un vote à l'Assemblée nationale, alors je vais suspendre notre séance pour quelques instants pour nous permettre d'aller voter. On va retourner avec les questions et le temps pour Mme la députée de Gouin. Alors, collègues, je suspends pour quelques instants pour aller voter.

(Suspension de la séance à 17 h 4)

(Reprise à 17 h 19)

Le Président (M. Bergman) : À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Collègues, on reprend nos travaux. On commence avec le bloc du deuxième groupe d'opposition. Mme la députée d'Arthabaska.

Mme Roy (Arthabaska) : Bonjour, merci d'être venus. On a ici deux façons de voir, moi, je dirais : un verre à moitié plein, un verre à moitié vide. On a un ministre qui dit : Ça me prend un outil pour faire les changements, il y a des changements à faire. Tout le monde s'entend à peu près sur les mêmes constats mais pas jusqu'à quel degré ou à quel niveau de précision. Ça nous prend, comme constats, des constats de base qui sont établis, généraux, la nécessité d'une bonne évaluation, la nécessité d'atténuer la différence entre chaque région. Et puis le ministre nous dit : Ça nous prend un outil pour le faire. Puis l'ancien ministre nous dit : Non, on devrait améliorer le système puis on verra après si on a besoin de cet outil-là.

• (17 h 20) •

Ce que suis contente, parce qu'on arrive à la fin de cet exercice-là, c'est que personne n'a fait preuve d'intransigeance dans le dossier à l'heure actuelle, autant les acteurs qu'on a rencontrés que les intervenants ici, autour de la table. J'ai l'impression que la discussion n'est pas terminée, mais il y a des choses qu'il faut qu'on se dise. Vous avez parlé d'indicateurs de performance ou d'évaluation. Il y a des milieux comme Arthabaska, on en a parlé, c'est un hôpital… un CSSS qui a été qualifié par l'agrément cette semaine. Ils ont été évalués pendant une semaine par Agrément Canada, ont obtenu la note de 94,5 %, ça veut dire qu'il y a quand même des évaluateurs de performance, pas seulement les évaluateurs de quelle est la rétention du personnel ou… il y a d'autres évaluateurs. Puis ce qui les fait bien se qualifier, c'est que leur maintien à domicile, les soins palliatifs à domicile font en sorte qu'il y a 55 % des gens qui meurent à domicile dans notre région. Par contre, la moyenne québécoise est de 9 %. Ça veut dire qu'il y avait… Ça, moi, il me semble que c'est le meilleur indicateur. Parce qu'on sait que la plupart des Québécois veulent mourir à domicile et non dans un hôpital ou un CHSLD. Donc, c'est la meilleure, je pense… Des indicateurs, c'est le meilleur.

Maintenant, pour avoir été députée dans d'autres comtés puis avoir fréquenté plusieurs régions, même d'un village à l'autre, il y a des personnalités, il y a des cultures dans chacun des endroits. Arthabaska, c'est une culture de performance, de réussite puis de travail ensemble. D'autres endroits, d'autres milieux, la culture n'est pas la même, ça fait que ça prend… Parce que, si c'était facile puis que tout le monde était comme nous, on n'en aurait même pas besoin, d'un livre blanc, puis ce serait réglé, on passerait… Puis peut-être même que M. Hébert ne se serait pas présenté… M. le ministre n'aurait pas décidé de venir essayer de mettre la main à la pâte pour régler quelque chose qui lui tient à coeur, je suis certaine. Donc, à partir de là, les diversités puis les indicateurs de performance qu'on a, moi, je pense qu'on peut faire un bon travail.

Maintenant, vous avez parlé de soins aux personnes, mais il y a aussi les aidants et aidantes qui sont souvent… plutôt des aidantes, qui se retrouvent dans le système peut-être bien avant la personne aidée. Vous ne nous en avez pas parlé. Est-ce que vous pourriez élaborer?

Le Président (M. Bergman) : Malheureusement, il reste une demi-minute sur ce bloc…

Mme Roy (Arthabaska) : Ah! J'ai été trop placoteuse.

Le Président (M. Bergman) : …et je dois être strict avec le temps. Madame.

Mme Jeliu (Gloria) : Disons que je vais essayer d'être particulièrement brève, puisque c'est la nécessité du lieu. C'est évident que le problème des proches aidants est majeur. Personnellement, je n'ai pas connu de famille avec des proches aidants, mais je sais par des amis que c'est une difficulté majeure dans la prestation des soins à domicile. Les personnes qui s'occupent d'une personne en fin de vie qui est malade sont des personnes qui sont rapidement épuisées. Et cet épuisement, que l'on pourrait qualifier d'un épuisement émotif, d'un épuisement physique, cet épuisement a besoin de répit. Et est-ce que, dans la structure prévisible ou prévue…

Le Président (M. Bergman) : En conclusion, s'il vous plaît.

Mme Jeliu (Gloria) : En conclusion. En conclusion : de prévoir pour les proches aidants des situations de répit accessibles et surtout efficaces et suffisamment longues.

Le Président (M. Bergman) : Merci, Dre Jeliu. Maintenant, pour le bloc de Mme la députée de Gouin, pour quatre minutes. Mme la députée de Gouin.

Mme David : Merci, M. le Président. Bonjour, merci beaucoup pour votre mémoire. Je vais aller droit au but sans plus de préambule. En page 2 de votre mémoire, vous dénoncez «la présence d'un âgisme rampant aussi bien dans la presse que dans les milieux de travail et dans la société en général». Là, on est loin de l'évaluation, mes collègues en ont abondamment parlé avec vous. Moi, je voudrais que vous me disiez sur quoi vous basez cette analyse-là, qui a l'air d'être bien importante à vos yeux, «la présence d'un âgisme rampant».

Mme Jeliu (Gloria) : D'abord, il faut clarifier le terme de «rampant». Dans mon esprit, un âgisme rampant, c'est un âgisme insidieux, un âgisme qui ne découvre pas son visage, qui n'agit pas à visage découvert, que ça soit dans les mots, que ça soit dans les situations. C'est ça, l'âgisme rampant, ce sont des préjugés qui n'ont pas de visage à découvert, hein?

Mme Destrempes (Denise) : Gloria, j'ajouterais que, par les projets de recherche qu'on a mis sur pied, on peut prouver que, oui, il y a de l'âgisme dans les milieux de travail, oui, il y a dans l'âgisme dans les médias. On a fait plusieurs projets de recherche qui ont démontré clairement que l'âgisme existait véritablement au Québec et dans plusieurs, plusieurs niveaux de la société.

Mme David : Je n'ai aucune…

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Gouin.

Mme David : Pardon.

Le Président (M. Bergman) : Il vous reste trois minutes.

Mme David : Je n'ai aucune difficulté à vous croire. Est-ce que vous diriez que, selon vous, selon l'état de vos recherches, selon votre expérience, c'est un phénomène en augmentation?

Mme Destrempes (Denise) : Ça, on ne peut pas le prouver, mais on le découvre à mesure, et, de plus en plus, je pense que la société en est consciente, et on en parle de plus en plus.

Mme David : Une autre question sur un tout autre sujet. Vous ne l'abordez pas trop directement. Un des grands débats que nous avons eus tout au long de la commission parlementaire, c'est : Qui doit payer et pour quels services? On comprend que maintenant il y a une position claire à l'effet que, dans l'ensemble de la caisse d'assurance autonomie, ça doit être financé par les impôts des particuliers et des entreprises, mais on comprend aussi que la porte est ouverte pour un certain nombre de soins ou services, là — ce n'est pas toujours très clair — qui peuvent être donnés à domicile et pour lesquels les gens devront payer. Moi, j'aimerais savoir où est-ce que vous tracez la ligne, vous, entre ce qui devrait être gratuit et ce qui pourrait demander une contribution aux usagers et usagères.

Mme Jeliu (Gloria) : Si je peux me permettre, par principe, notre système de santé est accessible à tous et il est gratuit. Toutefois, nous assistons depuis quelques années à des dérives de cette gratuité et de cette accessibilité. Que l'accessibilité soit moins bonne pour des raisons incontournables, je peux le comprendre, mais que les services privés deviennent une alternative officielle, je dirais, presque publique, ça me dérange parce que c'est une inéquité. On finira par donner de meilleurs services à ceux qui paient plus, et je trouve que cette inéquité sociale ne fait pas partie des principes généraux de notre système de santé.

Le Président (M. Bergman) : Malheureusement, le temps s'est écoulé. Alors, Mme Destrempes, Dr Jeliu, M. Ledoux, M. Laporte, merci d'être ici avec nous aujourd'hui et partager votre expertise.

Et je suspends pour quelques instants, collègues.

(Suspension de la séance à 17 h 28)

(Reprise à 17 h 31)

Le Président (M. Bergman) : À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, collègues, on reçoit la Régie régionale de la santé et des services sociaux du Nunavik. On vous souhaite la bienvenue. Welcome.

Vous avez 10 minutes pour faire votre présentation, suivie d'un échange avec les membres de la commission. You have about 10 minutes to make your presentation, followed by an exchange with the members of the commission.

Collègues, c'est possible qu'il y aurait quelques parties qui seraient faites en inuktitut, et il y aura une traduction en français pour ces parties.

Alors, je vous souhaite la bienvenue. Je vous demande, pour les fins d'enregistrement, de nous donner vos noms, vos titres.

I would ask you, for the purposes of our registration of your words, that you give us your names and your titles. So, you can start now.

Régie régionale de la santé et des services
sociaux du Nunavik (RRSSSN)

Mme Grey (Minnie) : [Interprétation] Thank you. Merci. En premier, je vais parler en ma langue, en inuktitut. Merci que nous soyons ici. Mon nom, c'est Minnie Grey, je suis la gérante de Nunavik, services sociaux et santé. Je vais parler un petit peu en français puis je vais faire ma présentation en anglais. [Fin de l'interprétation]

Bonsoir, M. le Président.

Le Président (M. Bergman) : Je suspends pour quelques instants. We'll stop the hearings for just a few minutes, so we can get our translation. Je suspends pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 17 h 33)

(Reprise à 17 h 37)

Le Président (M. Bergman) : Alors, encore bienvenue. Welcome. On a besoin de vos noms. We need your names. Vos titres. Your titles, and then you could start your presentation. Vous pouvez commencer votre présentation.

Mme Grey (Minnie) : I have with me Mrs. Martha Annanack, who's the Advisor for the Elders File in Nunavik. Next to me is Bobby Snowball, the President of the Nunavik Elders' Committee; and on my right is Mr. Yoan Girard, who is one of my directors at the Régie régionale du Nunavik. My name is Minnie Grey, I'm the Executive Director of Nunavik Regional Board.

(S'exprime dans sa langue).

Le Président (M. Bergman) : Pour la traduction, s'il vous plaît.

Mme Tulugak (Dalacia) : Avec ca?

• (17 h 40) •

Mme Grey (Minnie) : Oui. [Interprétation] O.K. Premièrement, avant, je veux dire un petit mot dans ma langue, puis après ça, je vais parler… faire ma présentation en anglais. [Fin de l'interprétation]

I've already introduced the members here with me, so the rest of my presentation will be in English… no. Actually I was going to speak a bit of French, thank you.

Bonsoir, M. le Président, M. le ministre, membres de la Commission parlementaire sur la santé et les services sociaux. Tout d'abord, j'aimerais remercier les membres de cette commission parlementaire de nous permettre de vous exposer nos préoccupations. C'est avec enthousiasme que l'organisation du Nunavik concernée par le sujet vous présente ce soir le fruit de leurs réflexions communes sur le projet d'assurance autonomie, mais accompagnée ce soir des organisations qui le représente.

So, when this project was first announced, last spring, our respective organizations have raised many questions arising from this proposal. It is for this purpose that we are here, introducing today a document that outlines these preoccupations surrounding the implementation of such a system on our territory.

We would like, first of all, to thank… I would like, for the benefit of the understanding, locate key features around Nunavik, giving their differentiation and distinction from the rest of Québec, such as the population, the regional disparities, the language, the culture, our health network, and some legal considerations, and finally our concerns about the implementation of the autonomy insurance project.

The Nunavik population is very young. 34% of Nunavik is aged less than 15 years and the birth rate, which is also twice as high as the provincial rate… The average age of the Nunavik population is 22.9 years old, roughly half of that of the provincial population, which is 41.5 years. The annual population growth rate is approximately 3%, three or four times higher than the Québec average.

The Nunavik region covers the territory located north of the 55th parallel, a service area of 500 164 sq. km or, roughly, it's one-third area of Québec. There is no terrestrial link between the region's communities or between Nunavik and the neighboring regions, so most of the population's travel is by air. We traveled by air today. And the majority of the consumer goods are also transported by air, as well as maritime shipping in the summer months, four months per year. Transportation modes involve costs relative to their use, for example, storage, financing, handling, petroleum products, etc. Such factors, on one hand, contribute to an increased cost of living and, on the other hand, greatly limit the variety and quantity of goods that can be transported. We will be hearing from Bobby from here and we will continue.

Le Président (M. Bergman) : Mr. Snowball.

M. Snowball (Bobby) : (S'exprime dans sa langue).

Le Président (M. Bergman) : One moment, please. If the translator could just take a seat near the microphone, it would be a little clearer for us.

Mme Tulugak (Dalacia) : This one?

Le Président (M. Bergman) : Yes.

Mme Tulugak (Dalacia) : OK.

Le Président (M. Bergman) : And just speak a little louder.

Mme Tulugak (Dalacia) : I speak louder?

Une voix : Yes.

Mme Tulugak (Dalacia) : OK…

M. Hébert : Vous devez parler plus…

Le Président (M. Bergman) : The translator should speak louder.

Mme Tulugak (Dalacia) : OK.

M. Hébert : Parce qu'on n'utilise pas l'appareil.

Le Président (M. Bergman) : So you can continue.

Des voix :

Mme Tulugak (Dalacia) : O.K. Lui, il va parler puis je répète après lui. O.K.? (S'exprime dans sa langue).

M. Snowball (Bobby) : (S'exprime dans sa langue).

Mme Tulugak (Dalacia) : On recommence.

• (17 h 50) •

M. Snowball (Bobby) : OK. [Interprétation] Au Nunavik, trois langues sont couramment utilisées dans les établissements et administrations : l'inuktitut, dialecte du Nunavik, le français et l'anglais. Cependant, l'inuktitut est la langue maternelle de la grande majorité de la population inuite. En 2006, l'inuktitut était la langue la plus parlée, dans 86,1 % des ménages du Nunavik, tandis que l'anglais et le français sont utilisés à l'école et au travail. En 2005, 90 % des aînés au Nunavik ne parlaient qu'une langue, l'inuktitut. 97 % d'eux le parlaient couramment. Ceci était preuve de la prépondérance de l'inuktitut comme langue parlée ainsi que de son importance dans les communications avec les aînés unilingues

L'importance croissante de l'anglais comme langue seconde est à noter. En 2005, 11 % des aînés du Nunavik parlaient anglais couramment comme langue seconde, mais la moitié de ces personnes étaient âgées de 60 à 64 ans, le groupe d'aînés le plus jeune au moment de l'enquête. La nouvelle génération d'aînés est probablement plus bilingue, inuktitut et anglais. Peu d'entre eux maîtrisent le français.

Mme Annanack (Martha) : Avant le contact — là, on parle de la culture — avant le contact avec les Européens, dans les XIXe siècle et XXe siècle, les Inuits étaient entièrement autosuffisants. Ils vivaient en petits groupes autonomes et dépendaient des fruits de la chasse, et de la pêche, et de la cueillette pour leur survie et besoins physiques. Ils étaient nomades, se déplaçant sur un vaste territoire où chaque lac, montagne, rivière, île et baie portait un nom. Des routes spécifiques furent prises à chaque année, reliant plusieurs différents sites de campement ensemble à travers la région du Nunavik. Chacun de ces sites de campement fut utilisé pour des activités spécifiques selon la saison.

Le droit coutumier réunit, avec sa nature informelle et souple et son fondement dans les pressions sociales, afin d'assurer que les gens se comportaient convenablement. Avec une fréquence croissante de contacts avec les étrangers durant le XXe siècle, la culture inuite a commencé à changer et à s'adapter au monde moderne. [Fin de l'interprétation]

Des voix :

Mme Grey (Minnie) : I will speak a little about the housing. In Nunavik, housing policies are rooted in the history of the 1960's settlements. Before the 1960s, as you know, Inuit were a nomadic people traveling and dwelling on different areas of specific territories. Many families used to gather in winter camps to share resources and to disperse in spring through summer to exploit different areas. Inuit were then driven into one-room unit public housing, at the time called the matchbox. In Nunavik, 80% of accommodations in the region is social housing managed by the Kativik Municipal Housing Bureau and 18% is subsidised by the employer. Since the market is saturated, inhabitants depend on Kativik Municipal Housing Bureau for accommodations and maintenance when necessary.

In 2005, the elders of Nunavik lived with, on average, five individuals in a household. 10% of households that include elders lived in dwellings with 10 plus individuals and only 6% of elders in Nunavik lived alone. Nunavik elders live alone much less often than seniors elsewhere in Québec, and the use of day centers for elders remains limited in Nunavik. The scarcity of accommodations for elders or beds in long term health care centers in Nunavik is normal. There are four elders' homes in Nunavik : Tusaajiapik, in Kuujjuaq; Sailivik, in Puvirnituq; Qilangnguanaaq, in Kangiqsujuaq; and M-19, in Kangiqsualujjuaq. Four others are planned in Salluit, Innukjuak, Umiujaq, and Kangirsuk. Bobby.

Des voix :

M. Snowball (Bobby) : We took the wrong… (S'exprime dans sa langue).

Des voix :

Mme Grey (Minnie) : OK. Our elder has lost his page, so I will speak for him. In relation to housing, intergenerational homes are another kind of solution to accommodate elders, a project that was developed by Nunavik's elders committee and its regional partners, Kativik Regional Government, Makivik Corporation, and the Kativik Municipal Housing Bureau.

An intergenerational home consists of a bedroom, bathroom, and joint kitchen, and living room linked by a door to the larger bedroom living space of a duplex unit. In 2009, pilot project allowed to build the first home of this kind in Kuujjuaraapik. Since them, five intergenerational homes have been built in four other villages : Umiujaq, Salluit, Inukjuak, and Puvirnituq. This design is deeply rooted in Inuit culture, as Inuit used to live together in built interconnected igloos to accommodate all the members of a growing family.

And, as far as legislation, I'm going to speak a little bit about Non-Insured Health Benefits, which is the National Inuit Health Benefits, but, as we know, in Québec, we call it SSANA. Like any other resident, First Nations people and Inuit access these insured services through provincial and territorial governments. Goods and services are not insured by provinces and territories or other private insurance plans. To support First Nations people and Inuit in reaching an overall health status that is comparable with other Canadians, Health Canada's Non-Insured Health Benefits Program provides coverage for a limited range of these goods and services when they are not insured elsewhere.

Medically necessary health benefit program that provides coverage for benefit claims for a specified range of drugs, dental care, vision care, medical supplies and equipment, short-term crisis intervention, mental health counselling, and medical transportation are provided for eligible First Nations people and Inuit. Yoan will be speaking on behalf of Makivik Corporation who was not able to be here.

Le Président (M. Bergman) : M. Girard.

M. Girard (Yoan) : En français. So…

Le Président (M. Bergman) : M. Girard.

M. Girard (Yoan) : Yes. Donc, on aimerait aussi vous introduire ce qui est, dans le fond, les principes de base des services de soins de santé et services sociaux au Nunavik, qui sont parmi la Convention de la Baie James et du Nord québécois, donc la CBJNQ.

C'est depuis le 11 novembre 1975 que la prestation des services de santé et de services sociaux au Nunavik se fait selon cette convention. Ce traité est protégé sous la constitution et, découlant d'un processus judiciaire entre les Inuits et les Cris, les Naskapis ainsi que le gouvernement du Québec, évidemment, relativement au projet de développement hydroélectrique dans le nord de la province, a eu comme effet le transfert du gouvernement fédéral au gouvernement provincial de la plupart des responsabilités concernant les services de soins de santé et de services sociaux à travers toutes les communautés inuites, y compris notamment les services de santé et de services sociaux. L'objectif majeur qui guidait ce principe était, entre autres, de rehausser le niveau de qualité de soins, de services de soins de santé et services sociaux à l'intérieur de leurs communautés.

Aussi, un autre aspect contenu dans la Convention de la Baie James, plus particulièrement au chapitre 15, qui est le Service de santé et de services sociaux — Inuit. Ce principe établit le cadre selon lequel le Québec octroie le financement des immobilisations et le financement de fonctionnement dans le secteur de la santé. Il stipule aussi la création de la régie régionale de la santé et des services sociaux ainsi que des deux centres de santé affiliés à la régie régionale de santé et de services sociaux.

À l'article 15.0.19 de la Convention de la Baie James, il est stipulé que «le budget du Québec pour chaque établissement prévoit des fonds pour financer les services de santé qui ne sont pas inclus dans les programmes provinciaux offerts à la population en général, mais qui sont fournis aux autochtones par le ministère de la Santé nationale et du Bien-être social ou par d'autres agences». On s'entend que la convention a été faite en 1975, et, depuis ce temps, les nomenclatures ont bien changé.

L'article 15.019, encore là, fait référence également aux services de santé non assurés, ce que Minnie vous a tout juste introduit, pour lesquels un financement supplémentaire serait rendu disponible aux établissements de santé du Nunavik en sus du financement provincial pour les services destinés à toute la population du Québec.

Un autre aspect aussi inclus dans l'article 15, plus particulièrement à l'annexe 1 de la Convention de la Baie James, est un aspect que le gouvernement du Québec reconnaît également les besoins particuliers des régions septentrionales et les problèmes qu'ils suscitent, tout comme le coût de la vie élevé, ainsi que tout le transport maritime et aérien, et aussi le fait qu'en ce moment même la population du Nunavik a une espérance de vie de 65,1 ans, comparativement à 80 ans pour le reste du Québec. Minnie.

• (18 heures) •

Le Président (M. Bergman) : Unfortunately, your time for the presentation is exceeded now. If you have much more of your presentation to go...

Mme Grey (Minnie) : We don't have… We would like to maybe…

Le Président (M. Bergman) : I have the consent, so continue, please.

Mme Grey (Minnie) : Yes. Our elder wanted to speak a bit about the income. So, I will allow him. Mr. Snowball… (S'exprime dans sa langue).

M. Snowball (Bobby) : O.K. (S'exprime dans sa langue). [Interprétation] Revenus, coût de vie : En 2004, le revenu total moyen des aînés au Nunavik, 19 250 $, était inférieur au revenu moyen des personnes âgées au Québec, environ 22 300 $. Cette différence de 13 % est importante, étant donné que les produits de première nécessité coûtent plus cher au Nunavik. Une proportion de 32 % des aînés touche un revenu d'un emploi d'une entreprise ou le fait d'être travailleur autonome. Le revenu total moyen est de 28 360 $. La moitié de ces aînés sont âgés en bas de 65 ans. 69 % de ces aînés ne reçoivent que des avantages de sécurité gouvernementaux comme revenus et augmentent ces revenus par la vente d'aliments et produits traditionnels. Le revenu total moyen est de 12 882 $.

Les conditions socioéconomiques des aînés au Nunavik sont inférieures à celles des aînés de toute la province. Le revenu des hommes âgés au Nunavik est inférieur à celui d'autres hommes âgés ailleurs au Québec. Le revenu des femmes âgées au Nunavik et celui d'autres femmes âgées ailleurs au Québec est pratiquement identique. Dans les deux cas, le revenu au Nunavik est relativement bas, étant donné les prix plus élevés dans cette région, notamment pour la nourriture. [Fin de l'interprétation]

Mme Grey (Minnie) : Before going into conclusion, I would like to just draw your attention to a little bit about the services to persons lacking autonomy. These services are delivered to all 14 Nunavik communities, mainly through the home care services and through the existing network of health and social services. You will note that, in our brief, there is a diagram that shows how these... the structure of services that are done for the persons lacking of autonomy and the programs that fund them. The Health Board, through its regional mandate, is responsible for organizing health and social services in Nunavik, evaluating the efficiency of the programs and ensuring users receive good quality services that are appropriate for their needs. In addition, the Regional Board is responsible for allocating budgets to the institutions in the region.

Our concerns regarding this project. Because, due to the nature of the provision and funding of health and social services in Nunavik, we believe that the creation of an autonomy insurance will have impacts on the rights of Nunavummiut to receive a complete range of health services without cost. The autonomy insurance project lingers over problems bound to the aging of the Québec population, and challenges, personal and collective, brought on by a loss of autonomy.

And the objectives of this project… first aims at keeping people in loss of autonomy in their living environment as long as possible. It prioritizes aging at home and to receive therein adapted services according to all needs. It seeks to provide a real choice to the persons in loss of autonomy, as for their place of residence or for the type of services to be received.

These objectives, indeed recognized by us, are fully confronted by the Nunavik reality : insufficient resources or overcrowded housing does not allow the clientele to choose their own living environment; hosting services non-existent or limited preventing any choice in this respect; treatment and care services to the persons in loss of autonomy non-existent or limited, once again preventing any choice to this regard.

Nevertheless, the need for the aging population in Nunavik, or in loss of autonomy remains important. And yet, even their basic needs remain inadequately answered due to the lack of resources, being human, financial or in infrastructures. For example, the project calls for necessary additional hosting places in CHSLD, while Nunavik does not need additional places; it needs places, period.

At the introduction, the paper explains its objectives, which are to balance the desire for the persons to access services they require in their living environment, and the individual or collective capacities to finance those. The sustainable character of the collective resources is thus described as being crucial to the project. It thrives to define who should be responsible for the clientele in loss of autonomy, in between the public or private sectors, individuals or families.

It is important to specify that, in the case of Nunavik, these responsibilities are completely delegated to the public sector, since no private presence is observed in the territory. These responsibilities are, in Nunavik, equally shared in between the families and their communities. This creates a burden on these too few service providers, whether being the Health Board or the health centers, the families or the communities, and unequivocally fails the objectives of the project.

The project also proposes the creation of a financing tool, «caisse d'économie», in support to the autonomy insurance. We can anticipate serious difficulties in this respect, while the Government will be collecting funds for services that are insufficient, inexistent or not even suitable in the region due to the structure of our services. This will create a financial injustice for a category of residents of Québec, for example, the beneficiaries of the James Bay and Northern Québec Agreement. In the short term, the project for the Nunavik participants to the regime will contribute to the reduction of their already precarious quality of life, without any benefit in terms of servicing.

Indeed, these financial contributions are established according to three major principles : the «livre blanc», on equity, because everyone is entitled to treatments according to his needs; on neutrality, in between the various services offered, and all in respect of the person's choice; on protection of the most deprived. Unfortunately, we are forced to say that, concerning that, for Nunavik, there is no choice offered on treatments, locations, services. This clientele will instead suffer injustice, subjectivity and risks. The three main principles of the project shall not be met in the Nunavik context.

So, in conclusion, we acknowledge that organizing the services and differentiating responsibilities are a necessity when it comes to persons in loss of autonomy. However, for the Nunavik region, we are first concerned by the inadequate status of the basic services offered and by their financing.

The needs of the clientele in loss of autonomy can easily be limited, which the «livre blanc» does. But the finding of sustainable solutions for the Nunavik population will be more difficult. Indeed, and contrary to the rest of the province, the demographic trend is inverted in Nunavik, which means that the the current golden age for the Province of Québec is to be experienced later in Nunavik.

But the «livre blanc» focuses on the current needs for an aging general population, with impacts on its Inuit inhabitants already fragile in terms of economics. It fails at addressing the needs of the Inuit elders of today or tomorrow. For example, the financial contribution presently asked for long-term hosting of elders, where permitted, is problematic considering their already very limited financial resources. Thus, this call for cultural adaption to the project in respect of the Nunavik residents and realities.

• (18 h 10) •

Le Président (M. Bergman) : Thank you for your presentation, Mrs. Grey, and…

Mme Grey (Minnie) : Sorry, but I would like to make… go to the recommendations. It will be two minutes.

Le Président (M. Bergman) : Sure.

Mme Grey (Minnie) : In this respect, we recommend that the implementation of the project be suspended in Nunavik until such time programs be developed in between the Government of Québec and the Regional Board, for catching up regarding the services, treatments and offers to the clientele in loss of autonomy, allowing for this clientele real choices in these matters.

Concurrently and with the support of the interested provincial departments, we recommend that discussions take place between the Health Board and Health Canada to improve the service coverage to the persons in loss of autonomy under the national Inuit Health Benefits Program. In priority, the question of the financial contribution for long-term hosting shall be reviewed and solved at the satisfaction of all parties and for the benefit of an already fragile population. Thank you.

Le Président (M. Bergman) : Thank you very much. So, now is the exchange with the members of the commission. And we'll start with the Government exchange. M. le ministre, pour l'échange avec la Régie régionale de santé et de services sociaux du Nunavik. M. le ministre.

M. Hébert : Merci beaucoup. Merci, Mme Grey et M. Snowball, M. Girard, mesdames, merci de votre mémoire. J'ai d'excellents souvenirs de la visite au Nunavik que j'ai effectuée en avril dernier et je vous remercie de l'accueil très chaleureux que j'y ai reçu. Alors, je vais laisser… Are you translating?

Mme Grey (Minnie) : Ce n'est pas simultané.

M. Hébert : O.K. Allez-y.

Mme Tulugak (Dalacia) : O.K. Vous êtes venu au Nunavik?

M. Hébert : Oui, c'est ça. Alors, je vais recommencer? Alors, je voulais juste les remercier de l'accueil que j'avais reçu lorsque je suis allé en Nunavik au mois d'avril dernier.

Je reçois de façon très positive votre recommandation. Je pense que votre situation, comme celle des peuples autochtones, est extrêmement différente, et nous devons nous asseoir et discuter de la façon dont on peut améliorer les services.

        J'aurais une seule question. Vous mentionnez Santé Canada. Vous êtes une communauté conventionnée, et je me demandais quelle était l'implication de Santé Canada dans les services aux personnes âgées au Nunavik.

Le Président (M. Bergman) : Mrs. Grey.

Mme Grey (Minnie) : Yes, thank you. As I mentioned earlier, persons in lack of autonomy, services are delivered in the 14 regions and through home care and through existing networks of health and social services. But we also qualify under the James Bay and Northern Québec Agreement for other federal programs in which Health Canada provides funding, financial support through their programs in persons lacking of autonomy : support services, psychosocial services, physical rehabilitation services, and nursing services. So, we do access federal funding through their programs.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Merci. Comment vous voyez les discussions, là, à venir? Vous nous recommandez de mettre en place un comité pour discuter de la façon dont on pourrait améliorer les services à l'intérieur ou à l'extérieur de l'assurance autonomie. Est-ce que je comprends bien?

Mme Grey (Minnie) : Are you asking about the federal funding or for our own discussion? I think, in our region, as the «régie régionale» of Nunavik, we're in a very good position at this time in our discussions with your department… with your ministry. You can see Mme Rondeau behind you, who is a direct connection to our region. And we have a table of discussion… we have a table for discussions concerning our region since a few months now. And we're hoping that this particular subject will become one of our subjects of discussion amongst many discussions. So, I want to just reassure you that the concerns that we have in Nunavik are being addressed in a positive way through discussions with your ministry and our «régie régionale». So this is something that we would like to bring to that table.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Bien, je pense que c'est la façon la plus efficace de procéder. Je pense qu'on doit continuer les discussions bilatérales pour voir comment ça pourrait s'inscrire soit dans l'assurance autonomie ou encore à être géré à part de l'assurance autonomie. Alors, moi, ça compléterait les questions que j'ai.

Le Président (M. Bergman) : Mr. Snowball.

M. Snowball (Bobby) : (S'exprime dans sa langue). [Interprétation] Juste pour vous donner en attention, au début, on était des comités pour les anciens, les âgés. Maintenant, c'est plus que ça. À cette heure, c'est juste pas pour les aînés, c'est plus aussi... on a ajouté, parce que la vie est dure, parce qu'ils ont la responsabilité aussi avec leurs jeunes, comme pour faire dans la section où… pour le revenu. [Fin de l'interprétation]

Mme Grey (Minnie) : Just to add…

Le Président (M. Bergman) : Mrs. Grey.

• (18 h 20) •

Mme Grey (Minnie) : Thank you. Just to add to the Minister's last comment… And he mentioned having visited our region last winter. It was a great pleasure to host him. And he got a chance to visit himself our aging and very small infrastructures, mainly our health centers. We have many, many challenges in our region. And the majority of our population is very young, as I mentioned in my presentation. But part of our challenge is infrastructure. As you can see, as our population ages, we will be challenged for providing proper care facilities for our population.

But our main challenge right now is to plan and improve our existing aging infrastructure for our general population, especially in the area of our youths. So, at this time, we don't have any really facilities to care for elders. We have our... Through our community organizations, through the participation of the provincial programs, we are able to encourage the municipalities to create organizations that will provide day centers or care centers for the existing elders. So, there's much discussion to be done between ourselves, and our region, and the Ministry of Health.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Having been there, I acknowledge the specific challenges you have and I think we should have a specific discussion around how we can manage those challenges and how we can help your community to respond to the needs of the elderly population. So, that's why I think your suggestion is very welcome, and we will discuss about the action we should put forward in order to address the challenges.

Le Président (M. Bergman) : Thank you. Now, for the block of the Official Opposition, the Member of the National Assembly for Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Thank you very much. It's a pleasure to have you here, and... Je vais parler un peu en français. Je sais que vous avez fait un grand voyage. Vous êtes probablement le groupe qui avez fait le plus grand effort pour venir nous rencontrer, et c'est très, très apprécié, parce que je pense que c'est très important, dans le cadre d'une révision d'une façon de fonctionner avec les aînés au Québec, d'entendre votre point de vue.

Et, je suis d'accord avec le ministre, vous êtes dans une situation particulière, avec des problèmes très spécifiques qui demandent une organisation très spécifique pour répondre vraiment à vos besoins de chacune des communautés. Je pense qu'il y a un principe qui demeure le même, c'est de garder vos aînés dans vos communautés, avec tous les services nécessaires, et je sais que ça prend... Parce que je suis allé visiter il y a quelques années, et j'ai constaté que les besoins étaient grands, mais les ressources restent définitivement à être développées. Et puis je pense que ce que le ministre a dit, c'est-à-dire d'avoir des discussions en parallèle avec le ministère... Et également je sais que vous êtes en relation avec le gouvernement canadien. O.K. Puis j'irais un peu plus loin, il ne faut pas seulement que regarder la situation des aînés, il faut regarder la situation de toute la population, avec tous les besoins nécessaires depuis la naissance, ou même avant la naissance, jusqu'à la fin de vie.

Maintenant, j'aurais une question. Il s'agirait… Par rapport au logement, qui était vraiment un problème majeur, il devait y avoir du développement au cours des dernières années. Où en êtes-vous rendus dans le développement du logement pour votre communauté?

Mme Tulugak (Dalacia) : Ça, c'est votre question?

M. Bolduc (Jean-Talon) : Oui. La question c'est : Où en êtes-vous rendus pour le développement des logements dans vos communautés.

Mme Grey (Minnie) : Thank you for your words and your support. And I will do my best to answer your question. As the authority on the health sector in Nunavik, the Regional Board is also very party to the political file of housing issue in Nunavik. Mainly, our concern… Because we know that the housing shortage and the overcrowding situation of our region contribute to the situation of children that are neglected or in situation of not-wellness. Housing shortage brings on social problems. That affects children, that affects everyone. So, on our part, we are working in collaboration with Makivik Corporation, our political entity and as well as the Kativik Regional Government, who is also a representative of us politically, and we work very, also, well with the Kativik Municipal Housing Bureau, and along with working with our Public Health Department, who is very active in insuring that we provide proper data and information to our political allies, in this sense that overcrowding is also a public health treat.

We know, many times, in our communities, we have high rates of tuberculosis in recent years. We are seeing more and more incidents of infectious diseases, and so on. So, we are concerned as the health authority, but our political, as spokespersons, are still very much working and trying to work in collaboration to try to convince the Federal Government in addressing this issue as well. We've had very good rapport and collaboration with the province of Quebec as far as… acknowledging this problem, but we also need to inform the Federal Government of their responsibility through the James Bay and Northern Québec Agreement, which is a treaty made by the province and the Federal Government with our people.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

• (18 h 30) •

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. L'autre question que je poserais... On sait que vous avez 14 communautés, dont des communautés de quelques centaines de personnes. Est-ce que toutes les communautés sont capables de garder leurs personnes aînées localement ou parfois ils sont obligés d'aller vivre dans d'autres communautés parce qu'ils n'ont pas de lits disponibles pour les personnes aînées?

Mme Grey (Minnie) : At the moment, there are four communities, Kuujjuaq, Povungnituk, Kangiqsujuaq, Kangiqsualujjuaq, that have elders' home… what is considered an elders' home. And there are four other communities being planned : Salluit, Inukjuak, Umiujaq and Kangirsuk. So, that would mean eight. So, the outlying communities will need to send their elders that will need this type of care to the closest community. As such, in Kuujjuaq, Tusaajiapik is like a regional… is considered like a regional elders' home or day center where… I am from another community, so often members of my elderly community members are in Kuujjuaq. So, four in our region of 14 communities, and although four others are planned. I takes time to do that.

Le Président (M. Bergman) : Malheureusement, le temps s'est écoulé. M. le député.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Thank you to be here, and it's always a pleasure to see you.

Mme Tulugak (Dalacia) : (S'exprime dans sa langue).

Le Président (M. Bergman) : So, Mrs. Minnie Grey, M. Yoan Girard, M. Bobby Snowball, Mme Martha Annanack, thank you for being here with us today and giving us this presentation and the exchange with the members of the commission.

On vous remercie d'être ici avec nous aujourd'hui, partager votre expertise avec les membres de la commission.

Et je suspends nos travaux pour quelques instants seulement.

(Suspension de la séance à 18 h 32)

(Reprise à 18 h 34)

Le Président (M. Bergman) : À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît!

Mémoires déposés

Alors, avant de procéder aux remarques finales, je dépose les mémoires des organisations qui n'ont pas été entendues en consultations. Alors, le dépôt est fait.

Des voix :

Le Président (M. Bergman) : À l'ordre, s'il vous plaît! Avant qu'on commence les remarques finales, je vous demande le consentement pour permettre à la députée de Gouin pour faire ses remarques finales pour une période de trois minutes. Est-ce que j'ai le consentement? Consentement.

Remarques finales

Alors, collègues, nous sommes à l'étape des remarques finales. Je dois vous féliciter. On a reçu, en total, 81 mémoires. On a entendu, en commission parlementaire, 60 groupes. Alors, félicitations, c'est vraiment un bon, bon travail.

Je remercie toutes les personnes qui nous ont assistés : M. Mathew Lagacé, notre secrétaire; notre secrétaire, Mme Anik Laplante; et notre bien-aimée assistante, Claire Vigneault, pour toute sa patience avec nous.

Alors, collègues, on commence maintenant nos remarques finales. Mme la députée de Gouin, pour vous remarques finales pour une durée maximale de trois minutes. Mme la députée de Gouin.

Mme Françoise David

Mme David : Merci, M. le Président. Bien, d'abord, je voudrais remercier l'ensemble des collègues pour cet exercice que j'ai trouvé remarquable. En tout cas, moi, j'ai appris beaucoup, j'espère que c'est le cas de tout le monde. Je trouve qu'on a entre les mains, tout le monde, un projet intéressant. J'ai hâte de voir le projet de loi, je pense que ça va mériter d'amples discussions. Donc, merci de m'avoir bien accueillie. Je vais être, de toute façon, très brève.

Je voudrais juste attirer peut-être l'attention du ministre — et je sais qu'il est sensible à cet aspect des choses — au fait qu'à travers l'ensemble des auditions on a entendu beaucoup parler des femmes, hein, et je pense qu'on est tous et toutes d'accord là-dessus. On est devant un projet qui nous parle de femmes à titre d'usagères, de femmes aidantes ou proches aidantes, de femmes travailleuses dans des entreprises d'économie sociale ou dans les services publics. Et donc je pense qu'il serait intéressant de procéder à une analyse différenciée selon les sexes lorsqu'un projet de loi sera en confection, en production, pour vraiment se demander si les propositions qui sont mises sur la table correspondent aux besoins aussi bien des femmes que des hommes et qu'on s'assure que tout le monde y trouve son compte.

Je pense que la volonté du ministre — et, personnellement, je la crois sincère — c'est de permettre aux gens du Québec de vieillir dans la dignité. Hein, on veut pouvoir mourir dans la dignité. Je pense qu'on veut d'abord vieillir dans la dignité. Et ça, ça va demander une vision globale des choses. Ça va demander qu'on s'occupe aussi bien de revenu, que de logement, que, oui, bien sûr, de services à domicile. Viendront nécessairement les âpres questions de financement.

Moi, je suis très heureuse d'avoir vu, au fur et à mesure de la commission, on dirait, le ministre… en tout cas, être plus au clair, disons, sur le mode de financement d'une éventuelle caisse d'assurance autonomie, donc, un financement par le biais de l'impôt des particuliers et des entreprises, ai-je entendu dire le ministre avec un grand plaisir.

J'aimerais ajouter que, dans les services qui seront donnés à domicile et qui, pour une part — et il faudra bien voir laquelle — seront probablement tarifés, je soumets très respectueusement que, pour toutes les personnes, hommes ou femmes, et ce seront surtout des femmes, qui auront un revenu de moins de 20 000 $ par année, les services médicalement requis devraient vraiment être gratuits. Ça m'apparaît être la moindre des choses. Je soumets aussi qu'on devra, et beaucoup l'ont dit, s'assurer d'un soutien très, très clair, très précis aux proches aidantes. Alors, je n'épiloguerai pas là-dessus.

Et finalement je souhaite, en pensant aux femmes travailleuses des EESAD et des services publics, qu'on agisse sur le plan de la protection des emplois dans les services publics — qui sont souvent de bons emplois pour les femmes, à toutes sortes de points de vue — mais qu'on rehausse de façon significative les salaires et les conditions de travail de toutes ces femmes qui travaillent dans les entreprises d'économie sociale. Donc, encore une fois, merci beaucoup pour ce très bel exercice, merci à l'ensemble des collègues et au plaisir de se revoir autour d'un projet de loi.

• (18 h 40) •

Le Président (M. Bergman) : Merci, Mme la députée de Gouin. Maintenant, pour le deuxième groupe d'opposition, Mme la députée d'Arthabaska.

Mme Sylvie Roy

Mme Roy (Arthabaska) : Merci, M. le Président. Je veux remercier tous les groupes — qui nous écoutent peut-être encore — qui ont fait le travail, la démarche de réfléchir, d'écrire, de soupeser et de présenter leurs mémoires, de se déplacer ici puis d'essayer de donner, par leur participation, une bonification au projet.

Maintenant, si le fait de mourir à domicile est un indicatif des bons soutiens à domicile et des bons soins palliatifs, comme je le disais précédemment, le fait qu'il y ait plusieurs groupes d'intéressés par un projet est aussi un indicatif que c'est un projet qui préoccupe beaucoup de gens.

On n'en est qu'au stade du livre blanc. J'imagine qu'il y a eu des cheminements, des questions, ne seraient-ce que pour le soutien aux personnes handicapées ayant moins de 18 ans, ne seraient-ce que pour le dernier groupe qui est venu nous voir. Mais ça soulève tout un pan des autres peuples autochtones, que ce soient les Attikameks, les Cris, les Algonquins, qui ont des situations très différentes et puis qui ont des ressources différentes. Puis ça veut dire que ça, c'est un autre plan de travail qu'on vient d'ouvrir dans le dossier du soutien à domicile. Je ne sais pas si celui-là pourra être mis en… il va être mis en… je veux dire, en exergue un petit peu, parce qu'il y a d'autres choses à régler peut-être avant d'aller au même rythme que, comme ils disent, dans le sud. Maintenant... Même si on ne se trouve pas tellement dans le sud, pour nous.

Mais il y a eu aussi beaucoup de questionnements. Moi, ce que je souhaite, c'est qu'on continue de discuter sans se cristalliser dans des oppositions, pour faire évoluer le dossier le mieux que l'on peut pour nos aînés. C'est toujours… Ça ne fait jamais une grande histoire quand on ne se chicane pas beaucoup, mais c'est toujours rafraîchissant de voir qu'on a réussi à le faire ensemble. Donc, je pense que le travail va être…

Puis, M. le ministre va nous comprendre, qu'on le questionne, qu'on essaie d'en arracher un peu plus pour les aînés, mais on le fait pour son bien parce que, si on est très exigeants, il va pouvoir dire à son caucus puis à son ministre du Trésor : Bien, je n'ai pas le choix, il faut que tu m'en donnes plus. Donc, si on est assez exigeants avec vous, c'est simplement pour vous donner des arguments. Merci.

Le Président (M. Bergman) : Merci. Maintenant, pour les remarques finales de l'opposition officielle, pour une durée de six minutes, M. le député de Jean-Talon.

M. Yves Bolduc

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. D'abord, je pense que nous avons fait un bon travail. Ça fait quatre semaines que nous sommes ensemble, puis on a écouté tous en même temps plusieurs groupes. Mon premier mot, bien, c'est pour remercier tous les groupes qui sont venus. Il y a des groupes de tous les horizons, des usagers, des organisations, des groupes d'intérêt puis il y a également plusieurs groupes qui sont venus nous faire part de leurs demandes. Tous avaient un intérêt, c'était d'améliorer le sort de nos aînés. Et je pense qu'il faut se ramener à cette notion-là : Comment on fait pour avoir un meilleur système, pour offrir des meilleurs soins de façon à ce que nous aînés puissent recevoir tout ce qu'il faut pour, comme je reprendrais l'expression, vivre dignement jusqu'à la fin de leur vie?

Un mot également particulier pour les proches, qui, pour moi, sont importants. C'est les proches aidants, c'est eux autres qui contribuent beaucoup à supporter les personnes qui sont en perte d'autonomie. Puis également le troisième groupe, je pense, c'est le personnel qui va devoir s'impliquer dans le réseau et développer souvent des nouvelles façons de faire. Mais surtout c'est quand même un peu demandant de s'occuper de ces personnes.

La plupart des gens qui sont venus ont fait des excellents commentaires. Plusieurs groupes ont dit appuyer les principes de l'assurance autonomie, qui, je tiens à le dire… On croit que c'est les mêmes principes qu'on doit appliquer indépendamment des moyens qu'on va prendre, c'est-à-dire, on veut maintenir nos gens le plus longtemps possible à domicile dans les meilleures conditions possibles.

Moi, je rajouterais, j'insiste encore là-dessus puis je vais le ramener souvent, ça ne nous prend pas juste du maintien à domicile, ça nous prend aussi les autres ressources, qui sont les ressources intermédiaires et les CHSLD. Je pense qu'ici on a fait le consensus, là, pour dire qu'ici ça prend ce continuum de services.

Donc, pour moi, ce n'est pas juste une question de maintenir à domicile. Ça a peut-être été le mot de départ, mais c'est la condition générale des aînés. Et on sait qu'on doit avoir toutes les ressources disponibles, c'est la variété qui fait que c'est le succès. On a souvent cité les trois mêmes endroits pour le succès qu'ils ont eu dans leur approche pour les personnes aînées. Le critère que moi, je retiens toujours : quand vous n'avez pas de personnes qui attendent... en attente d'hébergement dans des lits de courte durée, c'est parce que vous avez fait le travail tant au niveau du maintien à domicile, ressources intermédiaires et CHSLD.

Puis le ministre a dit d'emblée qu'il y avait des acquis dans le réseau sur lesquels on devait bâtir, ça, j'y crois : la création des CSSS, réseau intégré de services, les intervenants pivots. Je rajouterais : les équipes multidisciplinaires qui travaillent bien ensemble, la qualité de la formation de notre personnel au niveau des soins, également l'importance des aidants naturels. Il y a eu tout ce dossier des aidants naturels, puis, si on veut vraiment améliorer le sort de nos aînés, il faut qu'on accorde cette attention particulière tant au niveau de la formation, mais également du répit, et comment on peut faire pour travailler avec eux autres pour répondre à leurs besoins.

J'insiste, c'est important que l'usager ait le choix, lorsqu'il le peut, de l'endroit où il va demeurer, en sachant qu'à certains moments donnés il y a des conditions qui ne seront pas remplies pour qu'il puisse demeurer à domicile. Ça, ça nous prend l'implication de l'usager, l'implication des proches aidants, mais ça nous prend un système très robuste.

Le moyen que le ministre a pris, c'est la création d'une caisse avec une nouvelle structure. Ça, personnellement, je pense qu'il va falloir en rediscuter. On est quand même ouverts à en faire la discussion. Mais je pense que le premier élément qui est important, c'est d'améliorer la performance du système, comme l'a dit le Vérificateur général, comme l'a dit M. Castonguay.

Un mot sur l'importance de la qualité de l'évaluation, formation du personnel; ça, pour moi, c'est essentiel. Actuellement, tout existe. Je pense qu'il y aurait moyen de faire mieux en forçant ou en travaillant avec les principaux endroits en difficulté. On parle souvent de Montréal, mais également la périphérie de Montréal. Et, ça, il faut travailler avec eux autres. Est-ce qu'on a besoin d'une grande réforme? On va en discuter. Ce que je comprends, c'est que le ministre va déposer un projet de loi, et, dans le projet de loi, on va voir, suite à nos consultations, qu'est-ce qui va être mis à l'intérieur.

Honnêtement, la difficulté, c'est le cadre financier qui ne tient pas la route, de un. Je pense que ça a été dit par plusieurs, là. On peut s'obstiner longtemps, mais, pour moi, il n'y a pas de cadre financier, il y a des prévisions de dépenses. Il faut être beaucoup plus robuste à ce niveau-là. Ça nous prend : le nombre de personnes qui vont avoir besoin d'autonomie, avec une prédiction sur les prochaines années — on peut faire ça, on peut avoir ça avec la démographie; le nombre de personnes qui vont avoir besoin de certains profils; les profils 1 à 14, il y en a combien dans chacune des catégories; combien on va payer pour chacun des profils; comment va être l'organisation des services.

À la fin, ça va faire une facture qu'il faudrait savoir qu'est-ce que ça représente puis c'est quoi, la contribution de l'usager, avec quel revenu également il va être dispensé puis à partir de quel revenu et quel montant qu'il va devoir payer. Ça, il faut qu'on ait ça lors du dépôt du projet de loi, même, si possible, avant. Par transparence, il faut qu'on partage ces chiffres-là. J'invite le ministre à être transparent et à nous donner l'information. Et il a dit que ce serait disponible pour le 31 décembre, donc on s'attendrait à ce que ces chiffres-là soient disponibles pour qu'on puisse en faire une bonne analyse.

Et puis on est d'accord également avec le principe de l'enveloppe protégée, mais je ne pense pas qu'on a besoin de créer une nouvelle structure style CSST ou encore Régie des rentes pour être capables de gérer. Et ça, je pense que ça va être un élément qui va être important.

Je pense que ça va être important également que, si une réforme comme ça se mettait en place, il n'y ait pas de coupures dans le réseau. On a actuellement des rumeurs de grandes, grandes coupures dans le réseau de la santé, plusieurs places sont en inquiétude. Je ne vois pas comment on pourrait faire pour donner plus de services aux personnes aînées puis en même temps avoir des contraintes financières imposées par le cadre financier gouvernemental. Donc, ça, il y a des questions que je pense qu'il va falloir que l'on pose là-dessus. Et, dès qu'on entend parler qu'il y a des coupures à quelque part, ça met en jeu le projet d'assurance autonomie.

L'autre élément, bien, c'est l'échéancier. Tout le monde dit 1er avril 2014. C'est très, très serré. Et souvent on peut avoir des bonnes idées, mais, quand tu arrives pour l'application, ça peut être difficile, surtout si on veut le faire rapidement.

Donc, M. le Président, je voudrais remercier tous mes collègues autour de la table, entre autres, mes collègues de Saint-Henri—Sainte-Anne, de Gatineau, les gens également du gouvernement et mes collègues de l'opposition, remercier votre équipe, M. le Président. Et puis je pense que tout le monde a fait un bon travail. Puis j'aimerais ça en profiter pour remercier notre grande responsable de tous nos documents, là, Natacha Joncas Boudreau, qui fait un travail extraordinaire. Vous savez, elle est toute seule pour plusieurs députés. Comme Sylvain Gobeil faisait à l'époque, elle fait un travail extraordinaire. Merci, M. le Président.

• (18 h 50) •

Le Président (M. Bergman) : Merci, M. le député de Jean-Talon. Maintenant, pour les remarques finales du gouvernement, pour une durée maximale de six minutes, M. le ministre.

M. Réjean Hébert

M. Hébert : M. le Président, merci. Alors, depuis le 23 octobre, nous avons eu 13 jours de travaux, nous avons reçu 81 mémoires, 60 groupes sont venus ici nous exposer leur point de vue et répondre à nos questions. Je pense que ça montre bien l'intérêt de la population envers un projet extrêmement important pour notre société. Je tiens à remercier l'ensemble des intervenants qui ont soumis leur mémoire et qui ont répondu à nos questions, je pense qu'ils ont participé à cette consultation avec beaucoup d'honnêteté, de franchise et d'expertise.

On a devant nous un défi de société, qui est le vieillissement de la population, et nous devons mieux répondre aux besoins des personnes âgées, et nous devons, en même temps, répondre aux besoins des personnes handicapées également. Et l'assurance autonomie est un moyen de pouvoir effectuer ce changement-là. Dans les années 70 a été mise en place l'assurance maladie, qui à l'époque était une bonne réponse aux besoins de santé d'une population surtout jeune, avec une couverture des services médicaux, une couverture des soins hospitaliers, et les soins à domicile se sont développés à la marge de ce régime-là. Et on s'aperçoit qu'il faut pouvoir faire un pas important pour mieux structurer l'accès aux soins à domicile.

Un des consensus qui s'est dégagé ici, c'est que le statu quo n'est pas tenable. Pour reprendre l'expression du professeur Couturier, du Centre de recherche sur le vieillissement, on a atteint un plafond de verre. Même dans les régions où on a développé des services intégrés, où on a priorisé les soins à domicile, on atteint un plafond de verre qu'il faut dépasser en changeant la structure de financement.

En fait, on a fait, au cours des dernières années, toujours la même chose avec peu ou pas de résultats concrets. Et la Protectrice du citoyen, le Vérificateur général, de nombreux groupes qui sont venus ici l'ont souligné, il y a des problèmes dans l'évaluation des besoins, des problèmes dans l'équité, dans l'accès aux services, des problèmes dans les plans de services et surtout l'insuffisance des ressources de soutien à domicile, quand on sait que seulement 15 % des services requis sont effectivement fournis par le service public. Alors, on a un plafond de verre, et, «pour réussir ce qu'on n'a jamais réussi, il faut faire ce qu'on n'a jamais fait», comme le disait si bien M. Caron dans son témoignage.

L'autre consensus que nous avons entendu largement, c'est l'importance de redonner aux personnes la liberté de choix, la liberté de choisir là où elles veulent vivre, la liberté de choisir le prestataire également. Et ça, ça oblige une autre façon de financer, ça oblige l'introduction d'une allocation de soutien à l'autonomie telle que proposée par le projet d'assurance autonomie, ce qui va permettre aux gens de pouvoir utiliser une variété de prestataires et ceux et celles qu'ils souhaitent voir entrer dans leur domicile, parce que je pense qu'il y a là une préoccupation importante de pouvoir choisir les personnes qui viendront donner les services dans le domicile.

Un autre consensus important, c'est la nécessité de protéger le financement. On l'a entendu à de nombreuses reprises, il faut absolument être en mesure de sécuriser les sommes qui sont dédiées aux soins à long terme parce que ces sommes-là sont souvent déviées vers les services hospitaliers, vers l'hébergement et on est dans un cercle vicieux où le moins de services on offre à domicile, le plus on a recours à l'hôpital et à l'hébergement et le moins il y a de budgets pour les soins à domicile. Et, ce cercle vicieux, il faut en sortir. Et on ne pourra pas s'en sortir en faisant des modifications à la marge du système de financement, il faut vraiment faire une modification importante et fondamentale dans le système de financement.

Nous avons aussi entendu beaucoup de groupes venir nous parler des proches aidants, de l'importance d'évaluer leurs besoins, de l'importance de pouvoir couvrir les services de répit qui sont nécessaires pour les proches aidants, mais surtout l'importance de pouvoir augmenter l'offre de services aux personnes dont ils s'occupent. Et ça, ça va permettre de libérer les proches aidants, leur permettre de rester sur le marché du travail également et leur permettre de pouvoir devenir des partenaires du réseau de la santé et des services sociaux au lieu d'être des ressources qu'on exploite à l'heure actuelle.

D'autres suggestions extrêmement intéressantes ont été formulées, notamment au niveau du rôle des entreprises d'économie sociale, au niveau du rôle des gestionnaires de cas, du contrôle de qualité des services de l'ensemble des prestataires, des modalités d'allocation qui devraient conserver le chèque emploi-service avec un souci de contrôler la qualité. Je tiens à assurer tous les groupes et mes collègues de l'opposition que nous allons prendre en compte tous ces commentaires pour formuler un projet de loi qui permettra justement de pouvoir mettre en place l'assurance autonomie avec l'ensemble des actions qui seront nécessaires pour qu'on puisse réellement avoir de meilleurs services et des services de plus grande qualité aux personnes âgées et aux personnes handicapées.

En terminant, je voudrais adresser mes remerciements d'abord à mes collègues de ma formation politique, le député de Berthier, la députée de Sainte-Rose, de Masson, la députée des Îles-de-la-Madeleine et le député d'Argenteuil. Merci d'avoir été à mes côtés. Je voudrais saluer également la participation de nos collègues de l'opposition officielle, du deuxième groupe d'opposition et de Québec solidaire. Je voudrais remercier l'équipe du ministère de la Santé et des Services sociaux qui a travaillé avec moi sur ce projet, de même que les attachés politiques qui ont travaillé sur ce projet et sur la commission parlementaire. J'aimerais remercier le personnel de la commission et vous particulièrement, M. le Président.

Encore une fois, merci, et je pense que la prochaine étape sera le dépôt du projet de loi, et l'étude de ce projet de loi, et également une consultation, encore une fois, sur les éléments du projet de loi que nous soumettrons le plus tôt possible, je l'espère.

Le Président (M. Bergman) : Merci, M. le ministre. Alors, collègues, compte tenu de l'heure, je lève la séance.

Et la commission, ayant accompli son mandat, ajourne ses travaux sine die. Merci, collègues.

(Fin de la séance à 18 h 55)

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