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Version finale

41e législature, 1re session
(20 mai 2014 au 23 août 2018)

Le mercredi 21 mars 2018 - Vol. 44 N° 189

Étude détaillée du projet de loi n° 157, Loi constituant la Société québécoise du cannabis, édictant la Loi encadrant le cannabis et modifiant diverses dispositions en matière de sécurité routière


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Table des matières

Étude détaillée (suite)

Décision de la présidence sur la recevabilité d'un amendement

Décision de la présidence sur la recevabilité d'un amendement

Décision de la présidence sur la recevabilité d'un amendement

Intervenants

M. Richard Merlini, président 

Mme Lucie Charlebois

M. Sylvain Pagé

Mme Lise Lavallée

M. Simon Jolin-Barrette

Mme Manon Massé 

*          Mme Christine Lavoie, ministère de la Santé et des Services sociaux

*          Témoin interrogé par les membres de la commission

Journal des débats

(Onze heures treize minutes)

Le Président (M. Merlini) : À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare donc la séance de la Commission de la santé et des services sociaux ouverte. Je demande à toutes les personnes présentes dans la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine de bien vouloir éteindre toute sonnerie de tout appareil électronique.

La commission est réunie ce matin afin de poursuivre l'étude détaillée du projet de loi n° 157, Loi constituant la Société québécoise du cannabis, édictant la Loi encadrant le cannabis et modifiant diverses dispositions en matière de sécurité routière.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements en ce beau mercredi matin?

La Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Simard (Dubuc) sera remplacé par M. Plante (Maskinongé); M. Turcotte (Saint-Jean), par M. Bourcier (Saint-Jérôme); et M. Paradis (Lévis), par M. Jolin-Barrette (Borduas).

Le Président (M. Merlini) : Très bien. Merci beaucoup.

Étude détaillée (suite)

Lors de l'ajournement de nos travaux, hier soir, nous étions à l'étude d'un amendement proposé par M. le député de Borduas à l'article 7 de la Loi encadrant le cannabis qui est introduite par l'article 12 du projet de loi n° 157. Est-ce que j'ai d'autres interventions? M. le député de Labelle.

M. Pagé : Oui. Alors, merci, M. le Président. Bonjour à tous et à toutes. Alors, nous reprenons nos travaux. Effectivement, la deuxième opposition a déposé un amendement pour exclure les établissements d'enseignement et/ou universitaires quant à la possession de cannabis, et, si je me souviens bien, bon, il y avait la fédération, je pense, des cégeps et le milieu universitaire aussi qui nous avaient sensibilisés à cet égard-là, où ils nous disaient par contre d'exclure les résidences. Alors, leur volonté, c'était non à la possession de cannabis dans les lieux... dans les milieux universitaires ou encore collégiaux, sauf pour les résidences.

Alors, j'aurais un sous-amendement que je pourrais proposer, mais, avant de le déposer, je voulais vérifier avec la ministre quel regard elle jetait à l'égard des ces propositions qui nous ont été faites par le milieu universitaire et collégial qui... je ne sais pas si elle a bien entendu tantôt ce que je disais, mais qui souhaitait que la possession n'existe pas dans les milieux universitaire et collégial, sauf dans les résidences, pas pour la consommation, mais pour la possession.

Alors, on aurait un sous-amendement qui est prêt, là, mais, avant d'aller dans cette voie, je voulais juste l'entendre afin de... Parce que notre sous-amendement dirait, si on le déposait... À la fin de «collégial ou universitaire», on ajouterait les mots «excluant les résidences étudiantes». On devrait plutôt dire : «Les résidences pour étudiants», là, mais voilà. Alors, je voulais vérifier avec elle quelle serait sa réaction par rapport à cela.

Le Président (M. Merlini) : Merci, M. le député de Labelle. Mme la ministre.

Mme Charlebois : En fait, M. le Président, je comprends la préoccupation du député de Labelle, mais c'est parce qu'il faut s'y rendre, à la résidence. On ne peut pas se téléporter. Puis je me souviens d'une télésérie, il y a quelque temps déjà, jadis, peut-être que le député de Labelle s'en souviendra, certainement pas le député de Borduas, mais ça s'appelait Jinny. Elle faisait comme ça puis elle était rendue où elle allait, la dame. Ça fait qu'elle se déplaçait comme ça. On n'est pas rendus dans cette société-là, malheureusement, alors il faut se rendre à la résidence. C'est pour ça qu'on laisse la possession, pas l'utilisation, là, pas l'usage, juste la possession.

Et puis il y a même des profs qui peuvent aller en acheter à l'heure du dîner, là. Ça n'empêche pas... La possession ne fait pas en sorte qu'on est en utilisation, là. Le prof et le personnel, tout autre, de soutien, etc., là, alors c'est... Là, c'est vraiment venir encadrer la possession mais dans les limites de ce que nous pouvons faire, et, quand on arrivera à l'usage, là, on va être beaucoup plus restrictifs. Là, on entend les mémoires des gens, là.

M. Pagé : J'entends bien, puis c'est vrai parce que je me suis posé la même question. Je me suis dit : Bon, entre la SQDC et la résidence, bien, il faut s'y rendre. Sauf que leur préoccupation, c'est surtout que, si on n'inscrit rien à cet égard-là, bien, ça veut dire qu'une personne pourrait en avoir carrément sur elle et être en classe, sans consommer, bien sûr, parce qu'on va exclure la consommation.

Alors, est-ce qu'il y a lieu de trouver les mots qui pourraient dire : «Lors du transport et les résidences» pour éviter que des gens se retrouvent, justement, à avoir avec eux... je suis allé en acheter ce matin, et, pendant toute la journée, j'en ai dans mes poches, j'en ai... puis je peux en distribuer à des amis dans la classe, effectivement, ou encore en dehors de la classe. C'est ce que l'on souhaiterait éviter. Peut-être que la formulation «excluant résidences étudiantes» n'est pas suffisante.

En même temps, j'entends bien la préoccupation et la réalité, qui est tout à fait vraie, mais je cherche à faire écho pas seulement à mes préoccupations, mais à celles qui nous ont été manifestées de la part des centres collégiaux et universitaires.

• (11 h 20) •

Mme Charlebois : À ce qu'on m'indique, la possession peut être contrôlée seulement par les corps policiers. C'est ça? Alors, de ce fait, ce ne serait même pas applicable concernant la possession. Ça fait que je ne vois pas l'utilité, tu sais, de réglementer... Quand on va arriver à l'usage, là, ça va être autre chose parce que c'est visible quand on en fait l'usage. Mais la possession, il faut aller carrément gratter dans les poches du monde, là, pour savoir.

Alors, c'est bien beau de faire des lois et des règlements, mais, si on ne les met pas en application, ça ne donnera strictement rien. Et, comme je vous dis, il n'y a que les corps policiers qui peuvent fouiller les personnes pour savoir si elles détiennent du cannabis ou pas. Alors, à partir de ce fait... Puis j'ai le goût de vous dire, puis je le sais que ce n'est pas une bonne... on fait une loi, puis ce qui se passe en ce moment ne s'appliquera pas une fois la loi faite, mais il n'en demeure pas moins qu'en ce moment il y a des gens qui en ont déjà sur eux qui ne sont pas dépistés. Quand ce sera légal... parce que je rappelle que ça va être une substance légale, là. Ce n'est pas comme... C'est comme si, des fois, on reste avec ce qu'on a en tête pour l'illégalité, on essaie de faire appliquer ça dans la légalité, mais là ça va être légal.

Moi, ce qui me préoccupe dans les établissements d'enseignement postsecondaire, c'est la consommation ou l'usage, mais pas la possession, parce que, comme je vous dis, tu peux être allé à la boutique chercher ton cannabis pour la journée, ou la semaine, ou peu importe, pour la quantité que tu vas chercher, mais il n'empêche pas que tout le monde peut faire l'acquisition à toutes sortes d'heures dans la journée, parce qu'on sait que les heures de cours dans les universités, c'est très aléatoire. Ça peut être le matin, l'après-midi. Ce n'est pas comme à l'école primaire ou secondaire, entre telle heure et telle heure, là. Alors, les gens pourront être allés faire leurs achats et ils seront dans les collèges et universités.

Je comprends votre préoccupation, mais il faut pouvoir vraiment la mettre en application, cette règle-là, là. Et j'ai le goût aussi de vous dire que les cégeps, les collèges, les universités pourront se faire des politiques sur le campus, comme ils font pour d'autres choses, là, en ce moment, là. Ce n'est pas dans la loi qu'on va établir ça. Puis là ça sera sous leur supervision, mais en ce moment, dans l'article de loi, c'est vraiment les corps policiers qui peuvent fouiller les gens pour savoir s'ils ont du cannabis dans les poches, puis cannabis qui sera légal au moment où notre loi sera en vigueur, là. Parce que, nous autres, notre loi ne sera pas en vigueur, si elle est adoptée, bien entendu, tant et aussi longtemps que la loi fédérale ne sera pas adoptée aussi.

Alors, c'est un peu pour ça. Puis, tu sais, comme je vous dis, un, il faut se rendre à la résidence. Deux, si on n'a pas de possibilité de la mettre en application, M. le Président, je ne vois pas l'utilité de faire ça. Et, de plus, les campus pourront se faire leurs propres politiques.

Le Président (M. Merlini) : M. le député de Labelle.

M. Pagé : Bien, j'entends que la ministre me dit : C'est parce que le problème, c'est d'appliquer cette règle-là, si on la mettait, si on mettait la règle dans l'article 7. Mais le dernier alinéa, M. le Président, de l'article 7, où on fait référence à des terrains, des locaux, des bâtiments d'établissements d'enseignement, qu'est-ce qu'il dit, le dernier alinéa? Il dit : «Quiconque contrevient aux dispositions du premier alinéa ou [...] celles d'un règlement pris en application du deuxième alinéa en ayant en sa possession une quantité totale de cannabis équivalant à 30 grammes ou moins de cannabis séché — à l'article 3, bon — commet une infraction et est passible d'une amende de 250 $ à 750 $.» C'est déjà prévu dans la loi que quiconque contrevient à ce qui est nommé plus haut comme établissement contrevient, il peut avoir une amende de 250 $ à 750 $, et, en cas de récidive, ces montants sont portés au double.

Alors, j'essaie de voir la différence entre, justement, les établissements que l'on souhaite ajouter, en excluant, bien entendu, les résidences... Parce que je pense qu'il faudrait exclure les résidences. Alors, je ne comprends pas l'argument de la ministre, là.

Mme Charlebois : Bien, le problème d'application s'applique pour le transport. Alors, il va falloir faire une enquête du diable pour dire est-ce qu'il est en train de transporter sa marchandise. Il l'a-tu acheté pour se rendre chez eux? C'est-u pour aller à la résidence? Bref, ça va être bien compliqué. Puis là, je vous rappelle, c'est un produit légal, puis on s'adresse à des adultes. On ne s'adresse pas...

Ici, dans l'alinéa 1°, 2°, on parle de mineurs. On parle d'établissements d'enseignement préscolaire, services d'enseignement primaire, secondaire, formation professionnelle, services éducatifs pour adultes, formation générale, parce que souvent la formation professionnelle ou services pour adultes, comme je prends la Cité-des-Jeunes à Vaudreuil, bien, c'est dans le même bâtiment que l'école secondaire, là. Ça fait que c'est pour ça qu'on l'a mis comme ça. Mais il y a aussi les centres de la petite enfance. Il n'y a pas grand personnes majeures là. Alors, on vient interdire... Puis ceux qui sont majeurs ne sont pas supposés d'avoir ça dans leurs poches le temps qu'ils gardent des enfants et qu'ils donnent des services éducatifs, parce que garder, c'est une chose, mais donner des services éducatifs, c'en est toute une autre.

Alors, je le répète, on fait affaire avec des adultes. On ne parle pas de l'usage. Moi, ce que l'article vient faire, c'est protéger des jeunes. Et j'entends vos préoccupations, mais je le dis, je le répète, les universités et les collèges pourront se doter de politiques sur leur campus, pourront faire ce qu'ils ont à faire. Mais, pour ce qui est de la possession pour des adultes, une fois que le produit va être légalisé — ce n'est pas l'usage, là, on parle de possession — je trouve ça très malaisant.

Le Président (M. Merlini) : Merci, Mme la ministre. Ça va, M. le député de Labelle? Oui, allez-y.

M. Pagé : Bien, ça va...

Le Président (M. Merlini) : Non, je parlais par rapport à votre intervention. Si vous avez une autre intervention, vous pouvez la faire.

M. Pagé : Ça va. En fait, c'est parce qu'on va être capable de l'appliquer dans certains établissements, et là la réponse que j'ai, c'est comme si ça devient trop compliqué de l'appliquer dans d'autres établissements. Je comprends qu'il y a un volet qui n'est pas évident, là, dans le transport. C'est pour ça que je disais, dès le départ de l'intervention et de cet éventuel sous-amendement, que peut-être je ne déposerai pas s'il n'y a pas d'ouverture, mais d'exclure les résidences. Et, l'argument qui m'est présenté, que, bon, ça risque d'être trop compliqué à faire appliquer, je ne suis pas certain que c'est le meilleur argument, en tout respect, là.

Et je vous dis que ce que nous souhaiterions est conforme à ce qui avait été exprimé. C'est la Fédération des cégeps, où pourtant, dans certains cégeps, il y a des jeunes qui entrent, et ils ont 17 ans, ils sont mineurs. Ils sont mineurs. Il y a des jeunes, quand ils suivent leur cheminement assez rapidement, la première année, ils sont à 17 ans. Et, ce qu'ils disaient, leur quatrième recommandation, la Fédération des cégeps recommande que le paragraphe 1° de l'article 7 du chapitre II se lise comme suit : «Sur le terrain, dans les locaux et dans les bâtiments mis à la disposition d'un établissement d'enseignement, excluant les résidences étudiantes des cégeps et des universités».

Alors, je fais écho à cette demande. Ce n'est pas un caprice du député de Labelle, mais je fais vraiment écho aux demandes de gens qui sont en contact avec ces jeunes sur une base régulière. Et, en tout respect, je pense que la proposition de la deuxième opposition est peut-être trop limitative, mais en même temps il ne faut pas être trop ouvert et de dire : Bien, parce que ça va être compliqué, bien, ils pourront justement, parce qu'ils ont 18 ans et plus, bien, en avoir en leur possession dans les classes, à la sortie des classes, partout sur le campus universitaire ou encore un campus collégial.

Alors, il me semble qu'on enverrait, encore là, un meilleur message si on répondait à la préoccupation de la Fédération des cégeps du Québec et des universités. Mais, s'il n'y a pas d'ouverture, regardez, je ne ferai pas perdre de temps à personne, là, je ne déposerai pas le sous-amendement. Mais, s'il y a une ouverture de le travailler d'une quelconque façon pour que, lors du transport et excluant, là... bon, pour éviter, à tout le moins, que ça se retrouve à l'intérieur des bâtiments, à l'intérieur des bâtiments où il y a justement des cours. Parce que, là, de la façon dont la loi est écrite, si l'amendement de la deuxième opposition n'est pas adopté, la façon que la loi est écrite, je le répète, les jeunes pourraient avoir... des jeunes étudiants pourraient avoir, dans leurs poches, du cannabis dans les classes. Alors, il me semble qu'on devrait encadrer un petit peu plus. Oups! je sens que...

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre. Je vois la main levée.

Mme Charlebois : Oui. Je vais faire faire une grande découverte au député de Labelle, il y a déjà des jeunes qui ont du pot dans leurs poches dans les classes. Il y a même des enseignants qui ont du pot dans leurs poches. Et j'ai le goût de vous dire : Oui, oui, oui, je suis allée au cégep puis, je vais vous dire, moi, je suis rentrée à 15 ans au cégep. J'étais comme dans les exceptions des exceptions, mais, dans ma tête, là, je n'avais pas 15 ans. J'étais avec le monde qui avait 17, 18, là, j'avais bien plus cet âge-là, mes parents même qui se posaient des questions. C'est parce que moi, j'évoluais avec du monde plus vieux que moi. Dans ma tête, je n'étais pas du tout dans le même esprit, là. À l'époque, là, j'avais le même âge qu'eux autres mentalement puis là... Même que je ne comprenais pas que je ne pouvais pas aller dans les bars, parce que je me disais : Bien, tous mes amis y vont. Mais j'avais 15 ans, tu sais.

Une voix : ...

• (11 h 30) •

Mme Charlebois : Non, non. Je suis allée à 17 ans et 364 jours, puis je me suis fait prendre. Ce n'était pas très jojo, pour une journée, je n'étais pas contente. Mais, ceci étant dit, j'ai toujours été comme ça, moi, je me faisais toujours prendre quand je faisais des mauvais coups.

Alors, ceci étant dit, là, on parle d'un produit qui va être légal, qui va s'adresser majoritairement à des adultes, et ceux qui sont mineurs dans les cégeps, sincèrement, là, ils vont être avec une grande partie de gens qui sont majeurs. Puis on est en période de transition pour devenir un adulte. Ils le savent, ils le sauront, de par toute la prévention qu'on a faite, qu'eux n'ont pas le droit parce qu'ils sont mineurs. Puis là je sais que le député de Borduas va me servir un argument, de, ah! bien, comment on va faire pour... Mais c'est comme... À un moment donné, il faut tracer une ligne, et, dans les résidences...

Une voix : ...

Mme Charlebois : Bien, je le vois dans ses yeux, c'est comme s'il était mon fils, je suis capable de lire par son expression ou sa non-expression tout ce qu'il veut me dire. C'est la même chose, chez moi, avec mon jeune garçon. Alors, c'est les talents d'une mère, que voulez-vous faire?

Alors, tout ce que je veux dire, c'est qu'on se donne beaucoup de difficultés pour gérer quelque chose... Tu sais, à l'usage ça va être autre chose, mais, pour la possession, dans la majorité des cas, ce sont des adultes. Sincèrement, je trouve qu'on en fait toute une histoire, puis, comme je vous dis, il y a des gens qui vont aller faire leur acquisition puis, dans l'application, ça ne se fera pas.

Ça fait que, tant qu'à faire quelque chose qu'on ne fera pas, pour la suite des choses, moi, j'aime mieux me donner... Je le sais, que c'est l'argument que vous n'aimez pas, mais c'est la réalité. Puis, en ce moment, c'est illégal. Puis il n'y a personne qui va leur enlever dans les poches, là, que je sache, parce que c'est un réseau qui est très, très grand. Alors là, ce qu'on dit, ils peuvent posséder. Si tu es d'âge adulte, tu peux te rendre à ta résidence pour ta propre consommation. C'est son milieu de vie, là...

M. Pagé : ...

Mme Charlebois : Oui, il y en aura, dans la classe, mais il n'en consommera pas, au même titre qu'il y a... des gens peuvent avoir un paquet de cigarettes, au même titre qu'un jeune peut avoir un sac à dos avec une bouteille de vin, la même affaire, même affaire. Il n'est pas en train de consommer, il est en train... il a été faire l'acquisition de son produit, il l'a avec lui, puis il ne le consomme pas dans la classe, là.

Alors, moi, en ce sens-là, j'entends bien vos préoccupations, mais non seulement je trouve ça difficile... Parce que ça va être un produit légal, parce qu'on parle à une majorité d'adultes, parce que ça va être difficile de mettre en application, parce qu'il y a des gens qui vont être en train de le transporter pour amener à la résidence, pour toutes ces raisons-là, je trouve ça inapproprié.

Je n'ai plus d'autres arguments, sauf que de vous dire que ça m'apparaît bien intense. Je vais restreindre le restant, M. le Président, par politesse et gentillesse pour mes collègues, je ne veux pas qu'ils prennent ça sur un mauvais ton, là.

Le Président (M. Merlini) : Merci, Mme la ministre. M. le député de Labelle.

M. Pagé : Bien, je ne vous cacherai pas une certaine déception, pour ne pas dire une déception certaine, parce qu'il s'agit quand même d'une clientèle qui est bien différente d'une clientèle plus âgée dans un milieu de travail, des gens qui sont rendus à avoir une famille. Là, on est dans la clientèle à risque, où nous avons entendu les arguments de la deuxième opposition, justement, sur le 18-21 ans. Nous sommes en plein là-dedans, là, dans le 18-21 ans, dans cette clientèle qui est plus à risque et qui sont des plus gros consommateurs.

Il est vrai que, présentement, il y a peut-être eu trop de laxisme à l'égard de la possession et même de la consommation. Cela dit, je pense que, depuis le début, on s'est dit qu'on ne voulait pas que «légal» soit synonyme de «banal», alors, d'encadrer un petit peu plus, il me semble que ça répondait à cette préoccupation, et surtout qu'on reprenait le libellé de la demande de la Fédération des cégeps du Québec, mais, bon, compte tenu que je n'entends pas d'ouverture, le sous-amendement qui était prêt, je ne le déposerai pas. Je ne le déposerai pas, je ne veux pas faire du temps pour faire du temps. Je ne le déposerai pas, mais je ne vous cacherai pas une certaine déception.

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : M. le Président, la dernière incohérence que je peux soulever c'est : on va permettre à 18 ans et plus d'aller faire l'acquisition, mais pas de le posséder dans ses poches sur le campus. Il y a quelque chose qui ne fonctionne pas, là. Il y a une incohérence, là. Si, à 18 ans... On a fait, hein, l'argument qu'on plaidait pour que 18 ans... prévention en santé, bien, si tu peux en faire l'acquisition, tu peux certainement l'avoir dans tes poches, là.

Et il y a des gens à l'université, là, qui étudient longtemps. Ils font des doctorats, des maîtrises, etc. Ils ont jusqu'à 30 ans. Ils auront du pot dans leurs poches s'ils le désirent. Quand on dit : Tu es un adulte, tu es autorisé à acheter un produit légal, je ne vois pas pourquoi tu ne pourrais le posséder, peu importe le lieu où tu es.

Le Président (M. Merlini) : M. le député.

M. Pagé : Bien, elle a raison. Elle a raison, sauf qu'on le sait que c'est une clientèle qui est plus à risque. Et c'est la raison aussi que même l'Ordre des psychologues, quand ils sont venus nous dire : Ça devrait être 21 ans, mais, si vous adoptez 18 ans, réglementez aussi sur le taux de THC, parce qu'effectivement on est dans une clientèle qui est plus à risque...

Alors, compte tenu que c'est une clientèle qui est plus à risque puis qu'on décide de... oui, on se rend aux arguments de santé publique, allons-y avec 18 ans, mais encadrons de façon plus serrée. Et on le sait, qu'effectivement il s'en passe déjà beaucoup. Alors, quand on dit d'encadrer de façon plus serrée et que la Fédération des cégeps et les universitaires nous disent : Bon, bien, pouvez-vous au moins la limiter, la possession, strictement aux résidences... Parce qu'ils le constatent, ils le constatent de visu, là, comment ça se passe. Alors, de dire : Bien, ces gens-là, c'est rendu des adultes, et puis ils en auront sur eux, dans leurs sacs à dos, dans des classes, pour moi, ça banalise. Pour moi, ça banalise.

Mais, bon, j'aurais bien aimé voir une ouverture où on aurait pu amener le transport jusqu'à la résidence ou bien trouver une formule où on dirait qu'on pourrait exclure à l'intérieur du bâtiment d'études. Est-ce que ça pourrait être ça, la formule qu'on pourrait utiliser? Peut-être que si, au moins, on avait cette formule-là qui dirait : Bien, dans un bâtiment, là où il y a des classes, là, il n'y a pas... Est-ce qu'on peut au moins trouver cette formule-là pour, je dirais, à tout le moins, répondre? Là, on ne dirait pas : «Excluant les résidences», mais on dirait : Dans les bâtiments où on parle du lieu d'études, où il y a des classes. Si on fait ça, tu peux te rendre à la SQDC jusqu'à tes résidences. Donc, on pourrait couvrir le transport. Est-ce qu'on n'a pas, là, une voie de passage?

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : Bien, pas pour moi, M. le Président, parce que je le dis et je le répète, la prévention va être faite en amont. On a mis une règle, qu'à partir de 18 ans, tu es un adulte, tu peux te procurer du cannabis, et on l'a votée même hier, cet article-là. Alors, moi, à partir de ce fait-là, si à 18 ans tu as pu aller... tu as pu faire l'acquisition, tu as eu de l'information à la boutique de cannabis, on t'a déjà donné beaucoup de prévention dans les établissements, etc., bien, moi, je ne vois pas, tu sais, comment tu peux aller en acheter puis ne pas le posséder. Ça ne marche pas, là. Il faut être cohérent, là.

M. Pagé : Non, mais ce que je viens de dire, c'est que, si on récrit le sous-amendement, qui dirait que ça serait exclu dans les milieux de cours, dans les bâtiments où il y a de la formation, alors les gens pourraient partir de la SQDC, se rendre jusqu'à leur résidence, et il n'y aurait aucun problème sur le campus. Mais, où il y aurait un problème, ce serait dans les classes. Alors, ça réglerait le problème, là, du transport et de la possession lors du transport. Je pense qu'on pourrait au moins se rendre jusque-là. Je pense qu'on serait...

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : Bien, ça va devenir complexe parce que des bâtiments, il y en a partout. Il va y avoir des cas d'exception. Je me souviens, pour le tabac, même, qu'il y avait des cas d'exception sur des terrains. On avait eu une discussion...

M. Pagé : ...il n'y a pas de classe à l'intérieur des résidences.

Mme Charlebois : Non, mais, dans les établissements, les bâtiments peuvent être mis un peu partout, puis moi, au cégep de Valleyfield, je m'excuse, là, mais les classes puis la résidence... les résidences étaient directement au-dessus des classes, là. Là, ils sont en train de modifier ça, mais il y a des cégeps dans le Québec, ça doit être encore comme ça. Si c'est encore comme ça à Valleyfield... Ils sont en train de faire différemment pour la suite des choses, mais ce n'est pas encore changé.

Alors, tout ça pour vous dire qu'honnêtement je trouve qu'on fait beaucoup pour pas grand-chose. Je comprends, là, qu'on a peur puis je comprends que c'est un nouveau produit, mais il va être légal, on parle à des adultes. Moi, tant qu'ils ne consommeront pas... Puis je reviens à ma prémisse : les universités et les collèges pourront se doter de politiques sur leur campus, ce qu'ils font déjà pour d'autres substances. Alors, je n'ai pas d'autres arguments que ça, puis honnêtement je... Non, je n'adhère pas à cette philosophie-là. Je suis désolée.

Le Président (M. Merlini) : Merci, Mme la ministre. M. le député de Labelle.

M. Pagé : Je suis surpris, là. Puis là je reprends le mot à mot, là : On fait beaucoup pour pas grand-chose. C'est quelque chose d'important. C'est quelque chose d'important. De dire : On fait beaucoup pour pas grand-chose, je suis surpris d'entendre cela. Là, il y a un autre argument qui est : les universités pourraient probablement réglementer d'une quelconque façon. Est-ce que, légalement, les universités pourraient dire elles-mêmes ou les directions de centres collégiaux pourraient dire elles-mêmes : Moi, là, dans une salle de classe, je n'en veux pas dans les sacs à dos puis dans vos poches. Est-ce qu'elles auraient le pouvoir légal de le faire compte tenu de ne pas l'inscrire dans la loi puis compte tenu du débat que nous avons maintenant?

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

• (11 h 40) •

Mme Charlebois : M. le Président, là, j'entends les arguments, puis, quand je dis la phrase que j'ai dite, là, il faut faire attention puis la citer dans l'ensemble du contexte, là. «Pas grand-chose», en termes de moyens, je veux dire, là, parce qu'on ne sera pas capables de mettre ça en application. On ne sera pas capables, puis vous le savez comme moi, là. Alors, moi, je pense que, de toute façon, si c'était majoritairement... Puis on le fait, là, pour l'école primaire, secondaire, services éducatifs, puis on le fait pour l'ensemble des personnes qui vont être là, là, mais pas dans les établissements où on fait affaire avec des adultes qui ont été capables d'en acquérir. Les adultes, s'ils ont été capables d'en acquérir, bien, c'est parce qu'ils ont le jugement fait pour prendre des décisions, puis ils peuvent l'avoir sur eux en autant qu'ils ne le consomment pas dans ces établissements-là.

Alors, moi, je ne suis pas d'accord avec vos prémisses, de dire : C'est inquiétant. C'est inquiétant d'avoir deux joints dans mes poches, mais... En tout cas, je ne comprends pas, là, parce que je ne l'utiliserai pas, il est dans mes poches. Puis, si j'ai une autre activité après mes cours, puis, bon, je décide, avec mes amis, d'aller fumer mon joint, bien, j'ai le droit ailleurs, mais pas sur le campus. On va réglementer sur les terrains, puis tout ça, mais... Puis le jeune, il ne reviendra probablement pas à l'université. Mais, ceci étant dit, on peut avoir peur d'avoir peur, mais, tu sais, à un moment donné, il faut faire face à la réalité. Puis, comme je vous dis, puis ce n'est pas parce que... En ce moment, c'est illégal, là, il y a des gens qui se promènent avec ça, là. Allez-y, à l'université, aujourd'hui, là, vous allez peut-être bien avoir des surprises, là. Ça fait que je ne vois pas toute la justification, là. L'objectif, ce n'est pas de banaliser, là, c'est vraiment d'interdire de consommer dans des lieux où on ne veut pas qu'ils consomment. Ça, c'est une façon de ne pas banaliser. Autrement, je ne vois pas la justification, là. La possession... Ça peut être pour toutes sortes de raison qu'on a notre marchandise avec nous. Puis, marchandise, là, on ne parle pas de 150 grammes non plus.

Le Président (M. Merlini) : M. le député.

M. Pagé : Oui. Sauf que l'article 7 prévoit déjà des amendes pour certains établissements. Alors, l'argument de dire que, bien, pour certains établissements, je pourrais le faire appliquer, mais je ne pourrais pas là, honnêtement, je ne pense pas que ça tient la route. Puis, si on est capables de l'avoir, ce règlement-là, pour les établissements x, y, bien, je pense qu'on peut les avoir pour z aussi, bon, d'une part. D'autre part, et là je reprends ma question... Parce que, bon, je n'ai pas entendu de réponse à cet égard-là, et là je la repose, la question, puis c'est correct, là, parce que nous autres aussi, des fois, on jase puis on manque des petits bouts, là, ce n'est pas du tout un reproche.

Mme Charlebois : En fait, le jasage, c'est de l'information qu'on...

M. Pagé : Oui, oui, oui. Non, c'est correct, c'est correct. Ce que je demandais... Parce que vous avez précédemment dit : Bien, les directions pourront se doter peut-être d'un code de vie, d'un code d'éthique ou de certains règlements. Mais, compte tenu de ce qu'on se dit maintenant et qu'on ne l'inscrit pas dans la loi, est-ce que ça serait légal qu'une direction d'un cégep ou d'université dise : Légalement, vous n'avez pas le droit d'avoir, dans votre sac à dos ou sur vous justement, du cannabis dans les salles de classe? Par contre, est-ce que ça peut être légal que ça soit une directive de la direction d'un des deux centres d'études supérieures?

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : Les politiques qu'ils se donnent peuvent amener à des sanctions disciplinaires de leur propre établissement. Mais je vais, moi aussi, poser une question au député de Labelle, puis j'ai hâte de voir la réponse : Outre ce qu'il m'a déjà dit, qu'un jeune pourrait en donner à un mineur, en quoi c'est inquiétant de posséder du cannabis dans ses poches puis dans une salle de cours?

Le Président (M. Merlini) : M. le député.

M. Pagé : Bien, je pense qu'on a fait un long débat sur toute la banalisation. Et, à l'égard des 18-21 ans, nous savons que nous sommes dans une catégorie plus sensible. Les plus forts consommateurs, on l'a dit encore hier, les plus forts consommateurs sont justement dans cette catégorie. Et on a acquiescé au fait que, oui, on est mieux, justement, que ces gens aillent acheter dans un endroit où ils vont être conseillés... et non vendu par le pusher du coin, qui va vendre n'importe quoi, puis qui peut leur passer de la scrap, et qui va vouloir juste leur en vendre plus. Alors, à cet égard-là, nous sommes d'accord.

Mais nous savons, pour toutes sortes d'arguments qui ont été donnés, que c'est une clientèle qui est plus à risque. Et le fait de l'encadrer un peu plus, bien, il me semble qu'on envoie un message, dire : Regardez, là, pour vous autres, oui, c'est légal, mais on ne veut quand même pas voir ce produit se promener partout. C'est comme si, bien, je pourrais arriver dans ma salle de cours, j'ai une bouteille de vin, j'ai trois, quatre bières dans le sac à dos, puis ce n'est pas grave, ce n'est pas important, quand on sait que, bien, prendre une bière, tu n'es pas soûl, mais fumer un joint, tu as changé ton état. Alors, compte tenu que c'est une clientèle qui est plus à risque... Et même, je le répète, l'ordre des psychiatres qui est venu nous dire : Bien, si vous allez à 18 ans, bien, réglementez plus sur le taux de THC, soyez plus sévères. Alors, il y a des messages qui nous sont envoyés pour un encadrement plus serré pour cette clientèle.

Puis je sais que c'est une préoccupation de la deuxième opposition parce que leur amendement va justement dans ce sens-là. C'est une préoccupation, puis on la partage aussi, cette préoccupation-là, mais en se disant : Trouvons le juste compromis. Et je pense que, si ça n'avait pas été quelque chose d'important, bien, la Fédération des cégeps du Québec, là, elle ne nous en aurait pas fait une recommandation. La Fédération des cégeps du Québec, je rappelle à la ministre, là, nous dit : «...mis à la disposition dans un établissement d'enseignement excluant les résidences des cégeps et des universités.» Alors, ils sont d'accord avec la proposition de la CAQ qu'il faut exclure tous ces campus, sauf pour les résidences. On convient qu'il y a une problématique dans le transport. C'est pour ça qu'on se dit : Bien, dans le fond, ce qu'ils voulaient, c'est qu'on n'en retrouve pas partout, partout, puis qu'on n'en retrouve pas dans les classes ou dans les bâtiments connexes. Alors, je ne sais pas si j'ai répondu à la ministre et que j'ai réussi à la convaincre, mais...

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : Pas vraiment, parce que, M. le Président, je ne vois pas quelqu'un arriver — mettons que ça, c'est un Ziploc plutôt qu'un coffre de crayon — puis dire : Aïe! Moi, j'ai mon cannabis ce matin. Non. C'est des adultes qui vont être... On leur a donné la possibilité d'acquérir du cannabis parce qu'on jugeait qu'ils avaient la compétence et le jugement pour faire un choix éclairé.

Je comprends que vous voulez encadrer plus serré, mais il y aura d'autres endroits pour le faire, notamment quand vous me parlez de toutes sortes d'autres règles, notamment le THC, etc. Il y aura d'autres endroits où on pourra avoir des mesures percutantes. Mais celle-là... Je trouve qu'il y a une dichotomie entre le fait de leur permettre d'en acquérir puis leur dire : Tu ne peux pas en avoir dans tes poches. Honnêtement, ça ne transpercera pas le pantalon puis ça ne jumpera pas sur l'autre à côté, là, le THC. Ce n'est pas de même que ça fonctionne. Puis il n'y a personne qui va rentrer dans la salle de cours avec son sac, puis le brandir, puis dire : Moi, j'en ai ce matin. Puis, en plus, on a fait un amendement à l'article 4 qui interdit d'en donner à des mineurs, puis, en plus, c'est criminel au fédéral. C'est ça, hein? Je ne me trompe pas?

Alors, tu sais, moi, je veux bien, là, qu'on ait peur, mais, à cet article-là, je trouve que ce n'est pas justifié, puis moi, je suis prête à resserrer ailleurs, notamment sur d'autres normes, mais pas ça. Pas ça parce que c'est comme être incohérent avec le fait qu'on leur permet d'en acheter puis en même temps on leur dit : Tu n'as pas le droit d'en posséder. Ça ne marche pas. Si tu as le droit d'en acheter, tu as le droit d'en posséder. Ce qu'on dit : Il y a des places pour en faire l'usage, par exemple, ça. Puis c'est vrai pour l'ensemble des adultes, pas juste pour 18 ans, là.

M. Pagé : Regardez, je souhaite qu'on finisse là-dessus, là, parce qu'on... je ne veux pas qu'on passe la journée là-dessus, mais...

Le Président (M. Merlini) : Il vous reste très peu de temps aussi.

M. Pagé : ...dans le même souci de cohérence, si tu as le droit d'en acheter, tu as aussi le droit d'en consommer. Et, si tu en as en ta possession, je peux vous dire que ça peut être pas mal plus tentant d'aller consommer sur le bord de la porte ou dans les toilettes parce que tu en as en ta possession, directement dans la salle de classe. Aïe, ça te tente-tu, là, à la sortie du cours, ou on prend-tu une pause puis... Tandis que, si tu as obligation, en vertu de la loi, tu ne peux pas en avoir sur toi dans les salles de classe, il me semble que ça limite un peu plus. Puis je n'invente rien, là. C'est l'argumentaire... Nous, on se base sur l'argumentaire des gens qui ont réfléchi à cela et qui, au quotidien, sont en contact avec ces étudiants. La Fédération des cégeps du Québec, les universités, c'est ce qu'ils nous ont demandé. C'est eux qui nous l'ont demandé. Ce n'est pas le député de Labelle qui le demande, là. Alors, je reprends leur argumentaire, qui m'apparaissait comme, je pense, très convaincant.

Le Président (M. Merlini) : Merci, M. le député de Labelle. Mme la députée de Repentigny, vous avez levé la main, à vous la parole.

• (11 h 50) •

Mme Lavallée : Oui. Effectivement, j'ai un peu de misère avec les arguments donnés par la ministre concernant la possession par des adultes. À la question qu'elle a posée à mon collègue, je dirais : En quoi c'est inquiétant pour un prof de secondaire d'être en possession de cannabis? En quoi c'est inquiétant pour un prof de primaire d'être en possession... Il ne consomme pas, il possède du cannabis dans ses poches. En quoi c'est inquiétant qu'un prof qui enseigne aux adultes... que ça soit inquiétant qu'il en ait dans... qu'il en possède dans ses poches? En quoi c'est inquiétant qu'un agent correctionnel en possède dans ses poches? Le rôle du gouvernement, c'est de dire qu'on n'en veut pas dans des lieux d'enseignement. Et, si les cégeps et les universités nous ont demandé ça, ce n'est pas banal. Dans les lieux d'enseignement, on dit qu'on ne veut pas que les gens en possèdent et on ne veut pas qu'ils en consomment. C'est un et l'autre. Donc, à ce moment-là, que ça soit... À mon avis, que ça soit un prof de cégep, de primaire, secondaire, cégep, université, c'est la même chose.

Donc, nous, on dit : Notre rôle, facilitons la tâche des cégeps et universités, puis envoyons un signal fort que, pour nous, c'est tolérance zéro dans les lieux d'enseignement, à quelque niveau que ce soit. Sinon, à ce moment-là, l'argument où on dit que ce n'est pas grave de posséder, bien, à ce moment-là, pourquoi c'est si grave de posséder pour un prof adulte au primaire, un prof adulte au secondaire, un prof adulte qui enseigne à la formation aux adultes puis un agent correctionnel, qui sont tous des adultes qui font juste posséder dans leurs poches? Ça fait qu'à un moment donné il faut que les arguments se tiennent. Moi, quant à moi, le choix que je fais, c'est de dire que, dans les lieux d'enseignement, peu importe le niveau, c'est non. C'est tout.

Le Président (M. Merlini) : Merci, Mme la députée de Repentigny. Mme la ministre.

Mme Charlebois : Bien, tout simplement, la réponse, c'est parce qu'ils sont en milieu d'enfants. On ne parle pas pantoute de la même affaire, là. On est dans un milieu d'enseignement primaire, secondaire et des services de garde, on est en présence d'enfants mineurs, alors que, quand tu es dans une université et les cégeps, tu es majoritairement dans un monde d'adultes. Je n'ai pas d'autre réponse, M. le Président.

Le Président (M. Merlini) : Merci. M. le député de Borduas, il vous reste sept minutes de temps d'intervention sur votre proposition d'amendement.

M. Jolin-Barrette : Merci, M. le Président. Avec égard pour la ministre, là, la réponse qu'elle vient de nous donner, ça ne fonctionne pas parce qu'à 7, paragraphe 3°, on interdit de posséder du cannabis dans les lieux de détention correctionnelle, où c'est uniquement une clientèle adulte.

Mme Charlebois : Franchement, c'est une question de sécurité. On ne parle pas pantoute de la même affaire. Tu es dans un centre de détention, là. Tu n'es même pas supposé d'avoir le droit de fumer en aucun endroit, là.

M. Jolin-Barrette : Non, on parle de possession, Mme la ministre.

Mme Charlebois : ...

M. Jolin-Barrette : ...alors, ce qu'on dit...

Le Président (M. Merlini) : Évitez les interpellations, s'il vous plaît.

Mme Charlebois : Bien...

Le Président (M. Merlini) : Évitez les interpellations.

Mme Charlebois : Bien, je vais le laisser finir son argument.

Le Président (M. Merlini) : Oui, s'il vous plaît, Mme la ministre.

M. Jolin-Barrette : Ce qu'on dit, M. le Président, c'est que, dans les lieux d'enseignement, on ne devrait pas en avoir, peu importe l'âge. La ministre nous dit : Ah! c'est pour les enfants. Attention! L'article n'est pas uniquement dirigé vers les enfants. Il est dirigé vers des endroits où on ne souhaite pas que les gens aient en leur possession du cannabis pour ne pas que ça favorise la consommation. Alors, ça prend une cohérence gouvernementale à un certain moment.

Et nous, on pense que de rajouter les cégeps et les universités, avec l'exception pour les résidences, ça permettrait d'atteindre l'objectif recherché. Parce que les adultes, là, qui enseignent au primaire, là, bien, ils le gardent dans leurs poches, supposons. Alors, pourquoi dire : Bien eux, ils n'ont pas le droit, mais, au cégep et université, ils auraient le droit? Il faut être cohérent. Il faut interdire dans tous les lieux d'enseignement la possession de cannabis. C'est la chose raisonnable. Et c'est un principe de précaution à mettre en place.

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : Dans un centre de détention, là, M. le Président, il faut savoir qu'il peut y avoir du trafic. Je ne sais pas s'il a déjà parlé avec des gens qui travaillent dans des centres de détention, là. Il y a aussi incohérence parce que, sur le terrain, bien, il y a du trafic. Si vous ne le savez pas, je vous le dis, là, il y en a à l'interne, oui, et de produits légaux même. Ça fait qu'allez-y faire un tour, parlez avec des détenus, là, vous allez avoir des méchantes surprises.

Deuxième élément, il n'y a pas de permission de fumer ni tabac ni cannabis dans un établissement, mais à l'extérieur, dans un centre de détention. Alors, je ne vois pas pourquoi tu as le droit de posséder. Tu ne peux pas même en consommer. Il n'y a pas un espace, il n'y a pas un pouce carré où tu peux en consommer. Alors, quand tu es dans un établissement postsecondaire, tu n'es pas en prison. Tu vas sortir de là puis tu vas aller ailleurs à un moment donné. Sincèrement, votre argument ne tient pas plus, là.

Quant à moi, là, il y a un drame ici, M. le Président, avec pas grand-chose. On ne parle pas de consommation, on parle de possession. J'ai tout dit les arguments que j'avais à donner. On peut en parler. Il reste sept minutes, je pense. Je vais vous écouter.

Le Président (M. Merlini) : ...

Mme Charlebois : Bien, je vais vous écouter jusqu'à la fin, puis je vous donnerai ma dernière remarque, mais sincèrement j'ai tout dit ce que j'avais à dire. Et je pense qu'on exagère, sincèrement, parce qu'on permet à des gens de 18 ans et plus de faire l'acquisition. Pas le gars qui est en centre de détention. Il ne sortira pas, lui, pour aller s'en acheter. S'il sort, là on a un problème. On a un maudit problème parce qu'il est supposé être en dedans. On va parler...

Une voix : ...

Mme Charlebois : Non, mais parlons le vrai langage, là. Moi, je suis sûre qu'il y a du monde qui m'écoute, puis ils entendent la vraie affaire, là. Puis ils savent, les détenus, qu'ils n'ont pas le droit de fumer ni cigarette ni... encore moins du cannabis, parce qu'il est illégal en ce moment, hein? Puis, quand il sera légal, ils n'ont pas un pouce carré qu'ils ont le droit. Pourquoi tu posséderais? Il y a zéro raison, là, zéro raison. Ce qu'on veut éviter, ici, c'est un enjeu de sécurité. Ne comparons pas les cégeps puis les universités avec un centre de détention. Mettons les arguments aux bons endroits, Seigneur, là! On dépasse la borne.

Le Président (M. Merlini) : M. le député de Borduas, j'ai fait une erreur, ce n'est pas sept minutes que vous disposez, mais bien de 17 minutes.

M. Jolin-Barrette : Ça va être encore plus plaisant, M. le Président. Écoutez, là, M. le Président, je veux que la ministre m'écoute bien, là, l'argument qu'elle vient de soulever avec les centres de détention, là, c'est le même argument qu'on veut faire avec les cégeps et les universités, parce que...

Une voix : ...

M. Jolin-Barrette : Oui, parce que... Mme la ministre, est-ce qu'il sera permis de consommer du cannabis sur un campus universitaire?

Mme Charlebois : M. le Président, non, mais tu peux sortir du campus universitaire à la minute où ton cours finit, là, même si ton cours n'est pas fini. Tu n'es pas en prison. Tu es sur un site universitaire et sur un site collégial.

M. Jolin-Barrette : Ça, on le sait très bien.

Mme Charlebois : Méchante nuance.

M. Jolin-Barrette : On le sait très bien. Le professeur du primaire, là, l'éducatrice en CPE, le professeur au secondaire, là, lui, est-ce qu'il est conscrit à l'école? Est-ce qu'il couche à l'école? Est-ce qu'il vit à l'école ou il retourne chez eux le soir ou le midi? Il peut aller s'acheter du cannabis.

Mme Charlebois : Non. Il est dans un milieu de vie où il y a des jeunes, mineurs, à majorité.

M. Jolin-Barrette : Est-ce qu'il y a des mineurs au cégep? La réponse, c'est oui. Est-ce que les jeunes entre 18 et 21 ans, c'est les plus à risque d'avoir des conséquences à fumer du cannabis? La réponse, c'est oui.

Là, l'approche responsable à avoir, là... Et la ministre peut très bien le faire, elle nous a dit au début du projet de loi, là : Je suis ouverte à étudier les propositions des oppositions. On le fait respectueusement, l'opposition officielle est d'accord avec nous sur ce point-là, la Fédération des cégeps est d'accord, le bureau des recteurs universitaires est d'accord, pour eux, ça va être extrêmement difficile à gérer, le fait de permettre la possession de cannabis sur des campus universitaires et collégiaux.

Nous, ce qu'on dit, c'est : Empêchons la possession, à part dans les résidences universitaires, résidences collégiales, on peut comprendre, il y a une minorité des étudiants qui sont là, ça peut aller. Mais la conséquence, M. le Président, là, c'est... Lorsque vous avez du cannabis en votre possession, là, supposons, au cégep... Je vais vous donner l'exemple, là, moi, j'ai été au cégep Édouard-Montpetit, qui est circonscrit, à Longueuil, par deux rues : Gentilly puis chemin Chambly, O.K.? La distance entre le cégep, supposons, le bloc D et la rue Gentilly, bien, c'est à peu près 10 secondes de marche. Et là, avec le projet de loi gouvernemental qu'on a, là, ça veut dire que moi, étudiant au cégep, je pourrais partir durant ma pause, si j'ai le cannabis... J'ai le droit de posséder du cannabis en vertu du projet de loi gouvernemental. Alors, à ma pause, je sors. Je dis : Ah! bien, je vais aller fumer du cannabis. Je traverse, je m'en vais sur le trottoir — parce qu'actuellement c'est permis de consommer dans des lieux publics, d'ailleurs on va vous proposer un amendement pour interdire ça — et là, de fumer, et de retourner par la suite à mon cours. Et d'inviter par ailleurs mes collègues aussi, les autres étudiants dans ma classe qui sont là.

Et est-ce que, s'il y a des étudiants mineurs dans ma classe, avec moi... Moi, supposons, j'ai plus que 18 ans, j'ai 18 ou 19 ans, puis il y a des mineurs de 17 ans qui suivent le même cours que moi, puis là on sort tous ensemble. Pensez-vous qu'ils vont se carter entre eux, ils vont se dire : Aïe, montre-moi tes cartes avant que je te donne une poffe de mon joint, je veux te carter? C'est la facilité, c'est la banalisation du cannabis avec le libellé qu'on a actuellement.

Par contre, si on dit : Vous n'avez pas le droit de posséder du cannabis sur les campus universitaires, sur les campus collégiaux à tout le moins, peut-être que, durant une pause collégiale, bien, ils vont y penser puis ils vont se dire : Bien, on a juste 15 minutes, on va aller prendre un café au lieu d'aller prendre un joint. Puis moi, là-dessus, là, je trouve que c'est fondamental de dire : Ne banalisons pas et faisons en sorte que c'est clair. On veut un environnement d'éducation qui est sain. On dit aux jeunes maintenant : Faites du sport, mangez bien, hydratez-vous. Et là, de l'autre côté, on dit : Bien, à l'école, au cégep puis à l'université, bien, vous avez le droit d'avoir... vous allez pouvoir en posséder, puis vous irez à la limite du parking, là, si vous voulez fumer votre joint, là, puis vous reviendrez à votre cours après. Bonjour, la motivation, bonjour, les notes, bonjour, l'ambiance aussi.

Alors, moi, je pense que c'est un message de société. Il faut dire, là... Il faut favoriser le fait... la performance à l'école, le soutien à l'école, la prévention à l'école. Et je rappellerais à la ministre qu'il y a des études qui ont été sorties au Canada ainsi que... il y en avait une avec l'université de Maastricht, aux Pays-Bas, et ils ont modifié leur réglementation, eux. Et, en modifiant leur réglementation... Le sujet de l'étude, c'était le suivant. Ils interdisaient maintenant aux étudiants étrangers de pouvoir acheter du cannabis aux Pays-Bas, à Maastricht. Et là ils ont étudié ça quand ils ont... Avant, tout le monde avait le droit d'en acheter, que vous soyez un étudiant local ou un étudiant étranger. Mais, à partir du moment où ils ont interdit, dans le fond, aux étudiants étrangers d'en acheter, bien, ils ont constaté que leurs notes, à ces étudiants étrangers là qui allaient à l'université, ont augmenté substantiellement. Alors, on voyait un lien entre la consommation et la réussite scolaire, et la performance scolaire.

Alors, moi, là, comme député, comme parlementaire qui siège à l'Assemblée nationale, où est-ce qu'on parle d'éducation constamment, où est-ce que le gouvernement nous dit : Ce qui est important, c'est la réussite scolaire des jeunes, d'avoir des outils dans la vie pour réussir, bien, je vois très mal pourquoi est-ce que le gouvernement s'entête à vouloir permettre la possession sur les campus collégiaux et universitaires, d'autant plus que c'est possible de le limiter.

• (12 heures) •

Le Président (M. Merlini) : Merci, M. le député de Borduas. Mme la ministre.

Mme Charlebois : Bien, moi, M. le Président, si je fais le pari de faire confiance aux jeunes de 18 ans et plus, je fais le pari de me dire que, quand les jeunes vont dans un établissement postsecondaire, ils sont capables de posséder et de ne pas consommer. Je fais ce pari-là. Je ferai remarquer aux députés des oppositions que la santé publique ne s'est pas positionnée à cet égard-là, c'est bien simple, parce que ce qu'ils considéraient le plus important, c'est l'usage. Et le mot «confiance» est bien important pour les jeunes. C'est comme si on perd confiance en nos jeunes de 18 ans et plus. Moi, je veux bien qu'on encadre, mais il faut laisser une marge de manoeuvre quand même et ne pas faire semblant que... Ils sont capables de jugement. Ils sont capables de jugement. On a déjà été jeunes.

Puis j'espère que le député de Borduas ne pense pas que les jeunes ne sortent pas, puis qu'ils ne vont pas dîner à la brasserie, puis qu'ils ne vont pas prendre des bières à l'heure du dîner. Moi, je peux vous dire que, quand je suis allée au cégep, il y en avait une maudite gang qui allait à la Brasserie Olympique le midi, notamment la fin de semaine. Ils ne sont pas devenus fous pour autant, là, puis ils ont fini leurs cours avec succès à part ça. Ça fait partie du processus de la vie, de faire de l'apprentissage, voyons! Mais est-ce que le fait de posséder va faire en sorte que ces gens-là ne seront plus capables d'étudier? Franchement, là, il faut remettre les choses en perspective.

Je l'ai dit, moi, je pense que le préjudice à la santé va être à l'usage dans les établissements, et non pas à la possession. Puis les jeunes, si on leur permet d'aller acheter du cannabis à 18 ans, ils sont capables de le posséder, peu importent les lieux. La seule place où on ne le permet pas, c'est là où la majorité de la clientèle avec qui on fait affaire, c'est des jeunes à moins de 18 ans, où on donne des cours dans une école primaire, secondaire, où on donne des services de garde. C'est là où on ne veut pas que la possession soit présente. Mais, outre ça... Puis même que, dans un service de garde, on va peut-être demander... genre, comme les centres de traitement de dépendance où on demande de ranger les médicaments sous clé, ce sera peut-être la même chose, M. le Président.

Mais, ceci étant dit, arrêtons d'infantiliser les gens de 18 ans et plus, là, s'il vous plaît. On ne parle pas de la consommation, puis d'incommoder les autres, puis la santé publique. On parle de posséder. Je vous le dis, le THC, il ne sautera pas sur les autres, là, c'est sûr. Je n'ai pas d'autre argument, M. le Président.

Le Président (M. Merlini) : Merci, Mme la ministre. M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : Bien, écoutez, elle nous dit : Les gens sont capables de jugement. Si on prend cette rhétorique-là, là, c'est la même pour les éducatrices en CPE, c'est la même pour les enseignants au primaire, c'est la même pour les enseignants au secondaire. Dans le fond, vous leur dites : Eux ne sont pas aptes, ils n'ont pas de jugement. C'est ça que vous leur dites. C'est ça que vous leur dites, clairement. Nous, là, notre critère, là, c'est «un lieu d'enseignement». La facilité, la banalisation, ça passe par le lieu d'enseignement. C'est comme du chocolat. Si vous n'en avez pas, là, sur vous, vous n'en mangerez pas. Puis, si le dépanneur est fermé pour aller vous chercher du chocolat, bien, ça se peut que votre rage de sucre, elle passe.

Alors, à un moment donné, c'est la disponibilité du produit. Plus vous avez une disponibilité, une facilité, une accessibilité, bien, plus vous allez être tenté d'en consommer, d'en prendre, de faire usage de la substance. Ça, c'est comme dans tout. Demandez-vous pas pourquoi les entreprises font du marketing pour vous dire : On vous offre ci, on a des heures étendues. On nous bombarde de messages parce que plus vous êtes soumis à la tentation, plus vous risquez d'y succomber, M. le Président. Alors, voyez-vous, c'est un cours 101 de marketing, là. Alors, je pense sérieusement que... Et la ministre le sait très bien, elle a eu une entreprise, alors, pour augmenter les ventes, il fallait faire du marketing, du démarchage. Alors, c'est un peu la même chose qui s'applique dans ce cas-ci. Moi, j'ai confiance aux jeunes, mais je ne suis pas naïf et je ne pense pas qu'il faut banaliser le produit. L'accessibilité, lorsqu'elle est présente, c'est beaucoup trop facile.

Le Président (M. Merlini) : Mme la députée de Repentigny.

Mme Lavallée : Oui. La ministre, tout à l'heure, a utilisé des mots... qu'il faut faire confiance, il faut arrêter d'infantiliser les personnes de 18 ans et plus. Je reviens encore sur les profs de primaire, secondaire, des profs qui enseignent aux adultes, la formation générale aux adultes. Eux aussi, il faut arrêter de les infantiliser, parce qu'on présume que, si ces gens-là possèdent le cannabis, ils ne sont pas là pour aller en donner à des jeunes qui sont mineurs, là, et c'est des adultes aussi. Donc, si on a confiance aux adultes, on devrait avoir confiance aux enseignants au primaire, au secondaire. On devrait avoir confiance aux gardiens de prison parce que ces gens-là, ils ne vont pas travailler pour faire du trafic de drogue, là. Ils ont le droit de posséder. On leur fait confiance. On est certains qu'ils vont faire un bon usage de la possession du cannabis qu'ils ont dans leurs poches.

Donc, à un moment donné, c'est nous, comme gouvernement, avec cette loi-là, qui devons envoyer des messages qui sont clairs, ne pas envoyer un message de non-banalisation. Donc, il faut ne pas banaliser ce produit-là. On parle de saines habitudes de vie. C'est des valeurs qu'on défend. Donc, ces valeurs-là, c'est important, puis la valeur de l'éducation. Puis ce n'est pas vrai que le cannabis n'a pas d'incidence sur le niveau d'apprentissage à quelque niveau que ce soit. Donc, à ce moment-là, je pense qu'on facilite le travail des cégeps, universités. Ils l'ont demandé. On doit entendre leur message, donc, de dire qu'à quelque niveau d'éducation que ce soit, malgré la confiance qu'on a et malgré le fait qu'on ne veut pas infantiliser les gens, on envoie le message que, dans les lieux d'apprentissage, on n'en veut pas.

Le Président (M. Merlini) : Merci, Mme la députée de Repentigny. Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.

Mme Massé : Oui, merci, M. le Président. En fait, je reviens sur la question de la confiance. Ce que vous dites, Mme la ministre, dans le fond, c'est que l'apprentissage de la vie, ça inclut aussi d'apprendre à se mettre des limites soi-même. Ça veut dire aussi apprendre à manoeuvrer dans ce monde sur lequel on ne s'est pas mis à légiférer sur la quantité de sucre qu'il y a dans les céréales, alors que c'est extrêmement nocif pour la santé, on ne s'est pas mis à légiférer sur la quantité de sel qu'il y a dans les patates frites de chez McDonald's, parce que c'est aussi extrêmement nocif pour la santé, mais on fait confiance aux gens qu'ils sont capables d'avoir une analyse, et donc de choisir ou non d'aller chez McDonald's, ou quoi que ce soit.

Donc, pour moi, la notion de confiance, c'est aussi profondément faire confiance que, comme humain, dans la mesure où tu as de l'information... pas le régime de peur, là. Pour moi, la banalisation, ce n'est pas de faire peur au monde. Ce n'est pas de dire : Regarde, tu n'as pas le droit, puis tu n'as pas le droit d'en avoir sur le campus parce que, si tu en as sur le campus, dans le fond, ça banalise. Non, non. La banalisation, c'est quand on ne se donne pas les réels moyens de faire de l'éducation, de la conscientisation, de la sensibilisation pour que les gens comprennent c'est quoi, l'enjeu, comprennent de quoi il retourne.

Moi, je connais des jeunes adultes, en fait lorsqu'ils étaient adolescents, qui avaient dans leur famille des gens qui avaient la schizophrénie, et, lorsqu'on a expliqué à ces jeunes-là qui consommaient... Aïe! Là, c'était illégal, imaginez, puis en plus ils avaient en bas de 18 ans, donc très illégal. Ils consommaient... On a pris la peine de conscientiser sur l'enjeu qui concernait cette personne-là, non pas que cette personne-là était porteur ou porteuse, déjà, de symptômes de schizophrénie, mais que, oui, effectivement, la schizophrénie faisait partie de son profil familial, de son ADN familial. Bien, je peux vous dire que cette... Et on a dit à cette personne-là : Écoute, je ne te dis pas que tu ne peux pas consommer, je te dis juste qu'il faudrait que tu attendes un petit peu dans ta vie. Puis on a travaillé à conscientiser cette personne-là parce que les parents étaient inquiets, et je comprends.

• (12 h 10) •

Bien, donner du pouvoir au monde, c'est de leur donner de l'information, c'est de leur donner des moyens de pouvoir comprendre c'est quoi, les enjeux pour eux autres, autour d'eux. Alors, dans ce sens-là, moi, j'en suis quand la ministre dit : Bien, écoutez, là, on fait affaire avec des adultes.

Et d'ailleurs je suis d'accord avec ma collègue de Repentigny. Si on fait confiance aux adultes au niveau cégep et université, on devrait leur faire aussi confiance au niveau de la petite enfance, parce que le THC ne saute pas d'une... Moi, j'en suis, là. Moi, j'aurais enlevé tout ça, ces affaires-là, là. On se fait confiance. On fait confiance. Alors, dans ce sens-là...

Puis aussi, attendez, il y avait d'autres arguments au niveau cégep et université, c'est la question de l'accessibilité, c'est vrai. C'est vrai. Déjà, d'ailleurs, c'est sur les campus, déjà c'est là. C'est juste qu'actuellement c'est illégal. Et je pense que mon collègue de Borduas a raison. Les jeunes, entre nous... entre eux, là, parce que, moi, ce n'est plus mon cas, je veux dire, les jeunes, entre eux, ils ne se cartent pas, là. Ils ne se cartent pas non plus lors des partys organisés par l'association étudiante pour savoir s'ils ont 18 ans, pour prendre une bière. Ils ne se cartent pas non plus quand ils sortent prendre une bière — je reprends votre exemple — sur l'heure du midi ou quoi que ce soit. Et je ne voudrais surtout pas que, pour s'assurer qu'ils ne le fassent pas, bien, on se dise : À partir de maintenant, on va interdire. Pour moi, la prohibition, je vous l'ai dit hier, je vais continuer à le répéter, la prohibition a fait ses preuves qu'elle n'atteint pas l'objectif de santé publique qu'on vise à travers une loi comme celle-là.

Alors, moi, dans ce sens-là, j'ai plutôt tendance... Mais, vous savez, je n'ai pas le droit de vote, M. le Président, alors, à part mon pouvoir de parole, je n'ai pas un grand pouvoir dans cette commission. Je n'ai pas l'impression que, d'y ajouter «un établissement d'enseignement collégial et universitaire», on vient envoyer un signal de banalisation. Au contraire, on envoie un signal d'on vous fait confiance. Et on vous fait confiance, ça, quand tu as 16, 17, 18, 19, 20, 21 ans, et même 55 ans, si vous voulez mon point de vue, ça change. Ça change notre capacité de dire à nous-mêmes, de dire aux autres autour : Bien, tu sais quoi, je n'irai pas fumer avec toi sur l'heure du midi, j'ai un examen après-midi. La confiance, là, ça fait ça aussi.

Alors, moi, l'amendement, je suis complètement contre. Et, sur la question de la confiance, bien, on pourrait élargir même, à mon sens, en éliminant la question des autres institutions d'enseignement.

Pour ce qui est de la question du pénal... pas du pénal, pardon, du carcéral, bien là, je suis obligée d'être d'accord avec la ministre, dans le sens où, par définition, ces gens-là sont pris là. C'est ça, l'objectif de la prison. Alors, ni la possession... Ça ne se peut pas. Tu ne peux pas en posséder parce que, théoriquement, tu ne peux pas le consommer parce que tu ne peux pas quitter les lieux. Alors, bon, là-dessus, je suis d'accord avec la ministre.

Et peut-être, puisque... Bien, en fait, Mme la ministre, est-ce que... Parce que je suis d'accord avec mon collègue de Labelle. Il y a des lieux spécifiques où on peut agir. Et, nous, dans mon parti politique, c'est ça qui nous inquiète, c'est la quantité de THC qu'on va retrouver là-dedans, parce qu'actuellement c'est de la cochonnerie. Ce qui se retrouve dans mon comté, à chaque coin de rue, c'est de la cochonnerie qui fait profondément... On n'est plus au chanvre indien, là, qui pousse naturellement, là. On est à du quelque chose shooté avec... Bref, je sais qu'il en a été question ou qu'il en... Bref, là-dessus, est-ce qu'on peut avoir l'assurance que le projet de loi va donner des indications claires que c'est là-dessus qu'on veut agir?

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : C'est intéressant, la question de la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques, parce que c'est quelque chose qui me préoccupe beaucoup, la teneur en THC, effectivement, et on s'est gardé un pouvoir réglementaire. On a tous les pouvoirs, en fait, qu'on veut, à ce niveau-là, pour pouvoir avoir un contrôle sur les quantités de THC et tout autre produit, là. Mais on attend de voir ce que le fédéral va mettre dans ses propres règlements, dans sa loi. Nous, on va être capables ensuite de s'ajuster.

Et, ceci dit, même dans ce qu'on est en train de faire, là, si on s'apercevait que ça nous mène à une dérive, on aurait une possibilité, par règlement, de l'interdire. Alors, je ne vois pas pourquoi ça fait qu'on en parle parce que, bon, ce n'est pas nécessairement ce que je souhaite, mais... Puis moi, je n'en vois pas, de cas de dérive, là-dedans. Mais, pour ce qui est du taux de THC, ça, ça m'inquiète. Ça, ça m'inquiète beaucoup plus que ce qu'on est en train de discuter, et c'est pour ça qu'on s'est gardé tous les pouvoirs, pour nous permettre d'ajuster ça, justement. Et on attend de voir ce que le fédéral va avoir mis dans la sienne pour, nous autres, s'ajuster ensuite.

Le Président (M. Merlini) : Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.

Mme Massé : Je sais, Mme la ministre, que vous venez de dire ça pour rassurer les collègues des oppositions, mais, moi, ça ne me rassure pas. C'est correct, c'est une clause qui permet d'ajuster. Mais l'interdiction, je réitère, a fait ses preuves. C'était illégal. Tu étais passible d'avoir des conséquences pour toute ta vie au niveau criminel, et les jeunes et les moins jeunes, tellement que les policiers en sont arrivés à faire : Oh! on va tolérer si vous en possédez telle quantité, telle quantité. C'est pour vous dire à quel point il y avait quelque chose là-dedans qui, dans la prohibition, dans l'interdiction, dans le... Et là, écoutez, là, quand on parle de banalisation, quand tu as la GRC qui fait le tour des écoles pour dire : Tu vas revirer fou si tu fumes un joint, là, aïe, ils ne banalisaient pas pantoute, là, eux autres, là. Au contraire, ils mettaient le feu aux poudres un peu, hein? Mais, au lieu de faire de l'éducation, on a utilisé la peur, on a utilisé l'interdiction, on a utilisé le criminel.

Moi, je pense que, là, si on ouvre les valves puis on se dit : O.K., là, dans le fond, ce qu'on souhaite, c'est de s'assurer, au niveau de la santé publique... Donc, c'est pourquoi ma question autour du THC, au niveau de la réduction des méfaits, donc ça veut dire éducation, sensibilisation. Tu sais, qu'est-ce qu'à mon sens ça va donner de plus de dire, même aux universités, aux cégeps... Parce qu'il n'y aura quand même pas des détecteurs de pot à chaque entrée de porte, là, pour dire : Vous ne pouvez pas rentrer parce que vous avez sur vous des substances légales que vous êtes en droit de posséder à l'extérieur d'ici. Bien, c'est quoi, ils vont ouvrir les cases? Non, rendu à l'université, il n'y a plus beaucoup de casiers. Comprenez-vous? Je me dis, à un moment donné, aussi : Si on veut envoyer un signal de non-banalisation, je ne trouve pas, perso, et mon parti, on ne trouve pas que c'est le bon chemin.

Le Président (M. Merlini) : Merci, Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques. Mme la ministre.

• (12 h 20) •

Mme Charlebois : Bien, sur cet élément-là, je suis assez en accord avec la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques. Pour ce qui est du THC, on aura d'autres articles un peu plus tard qui vont... C'est pour ça qu'on a mis un article, dans la première partie de la loi, où on parle du fonds de prévention à 25 millions minimum. C'est un minimum. Puis il faut effectivement le faire dès la fin de l'école primaire, secondaire, etc. C'est là qu'il faut commencer à faire de la prévention, de l'éducation. Et, vous avez raison, ce n'est pas des campagnes de peur qu'il faut faire, là. Il faut donner de l'information et faire confiance aux gens puis leur capacité de jugement. Moi, je considère que j'ai été jeune, puis je ne suis pas différente de l'ensemble de la population — on a tous été jeunes — puis j'ai été capable de jugement. Ça fait que je ne vois pas pourquoi les jeunes d'aujourd'hui seraient différents de ce qu'on a été, sincèrement. Au contraire, ils sont mieux informés. Quant à moi, là, les jeunes, aujourd'hui, prennent des meilleurs choix, en tout cas, dans mon environnement. Puis peut-être que c'est moi qui est débranchée, mais je ne pense pas.

Je regarde juste le tabac. À mon âge, là, au secondaire, tout le monde fumait. C'étaient des exceptions qui ne fumaient pas, M. le Président. Aujourd'hui, la vapeur, est-ce qu'il en reste? Oui, il en reste qui consomment le tabac. Mais la majorité, c'est assez surprenant comment les jeunes ont bien intégré... pas parce qu'ils se font dire : Tu vas mourir puis tu vas... oui, ultimement, que... Mais on leur donne l'information pour dire la quantité de produits qu'il y a là-dedans, qu'est-ce que ça fait sur le corps humain à long terme, à moyen terme, à court terme. Les jeunes sont capables de faire la part des choses.

Et je suis assez d'accord avec la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques sur le fait que de renseigner plutôt que de faire des campagnes de peur fait en sorte qu'on a une population, parce que les jeunes sont capables de parler avec leurs parents... qui sont mieux informés et qui sont capables, ultimement, de prendre des bonnes décisions, mais d'influencer les autres aussi. C'est ça qui est le plus important.

Le Président (M. Merlini) : Merci, Mme la ministre. Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.

Mme Massé : Justement, dans cette perspective-là, c'est sûr qu'il y a le fonds. Le fonds à 25 millions, ce n'est pas des peanuts. Mais, quand même, le Québec, c'est grand, l'ensemble des écoles, bon, etc., c'est... Moi, je pense, Mme la ministre, qu'il faut, si on veut être solides là-dessus... Puis, moi, ce que je souhaite, c'est que mon peuple soit solide là-dessus, qu'on n'aille pas, avec une décision comme celle-là, comment dire, un peu coincée, ou mitigée, ou quoi que ce soit... Je pense qu'il faut qu'on l'assume pleinement. Ce n'est pas honteux d'assumer qu'une plante, un plant qui existe depuis des millénaires sur cette terre, qui est utilisé par plein de monde sur la terre pour des objectifs récréatifs, certes, et plein d'autres objectifs... Je ne veux pas qu'on ait la tête...

Une voix : ...

Mme Massé : ...je ne veux pas qu'on se mette la tête dans le sable — une chance que tu es là. Et, dans ce sens-là, Mme la ministre, moi, je pense qu'il y a peut-être une opportunité, au-delà du fonds, que, là, vous devriez aller convaincre votre collègue à l'Éducation, c'est les cours d'éducation à la citoyenneté.

Je vais vous faire le lien. Vous allez comprendre. C'est-à-dire que c'est un ensemble. Je vous parlais tantôt de la confiance en soi, c'est un ensemble. Mais après ça, avec la confiance, il y a aussi un besoin d'avoir des connaissances, d'avoir des connaissances sur c'est quoi, ce plant-là, sur la loi qui l'encadre, sur les impacts potentiels, les enjeux entre adolescent et 21 ans, le fait, tu sais, qu'on informe. Aussi, cette formation-là nous permettrait, par exemple, d'avoir aussi, et on le dit depuis longtemps, de la formation, auprès de nos jeunes du primaire, secondaire, sur toute la question des saines relations, donc pas de relation de pouvoir, de faire en sorte qu'entre eux, dans un couple, peu importe qu'ils soient hétérosexuels ou homosexuels, les gens soient dans des relations égalitaires.

Et même chose, au niveau de la citoyenneté, face à la conduite automobile, la responsabilité, tout conducteur qui a un véhicule derrière les mains, face à leur propre vie, à la vie des gens qui les entourent, et donc, le mixte consommation-conduite, éducation à la citoyenneté, à mon sens, et notamment sur la question des saines relations, je pense qu'on donnerait de l'«empowerment», la reprise de pouvoir chez les gens marginalisés, chez les femmes, pour dire : Bien, toi, tu aimerais peut-être ça que je consomme avec toi, là, mais moi, parce que je sais qu'on est supposés d'être dans une relation égalitaire, bien, je mets mon poing sur la table puis je te dis : Non, je ne veux pas consommer avec toi. On redonne de la confiance. En faisant des citoyens et citoyennes responsables, en permettant, du primaire jusqu'au secondaire, de développer ce sentiment qu'on est des citoyens responsables, qu'on a notre place dans cette société-là et qu'on peut agir dans cette société-là, bien, on contribue.

Le Président (M. Merlini) : Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques, je comprends l'importance que vous accordez à l'éducation auprès de nos jeunes dans l'enjeu qui touche particulièrement le projet de loi n° 157, mais je me dois vous rappeler qu'on est sur la proposition d'amendement de M. le député de Borduas, qui consiste en les établissements d'enseignement collégial et universitaire. Alors, je vous demanderais, si c'est dans la mesure du possible, de revenir vers ça, parce que vous étiez là-dessus tantôt.

Mme Massé : C'est vers là que je voulais aller.

Le Président (M. Merlini) : Et je comprends votre enthousiasme à parler du besoin de l'éducation auprès de nos jeunes, mais là on s'en va plus loin que la proposition d'amendement de M. le député de Borduas.

Mme Massé : Oui. Merci, M. le Président. J'accepte tout à fait cette mise à l'ordre.

Le Président (M. Merlini) : C'est correct, oui.

Mme Massé : C'est mon côté passionné que vous connaissez bien. En fait, le lien spécifique que je fais, c'est que, si on ne veut pas que nos jeunes et, plus tard, nos adultes aient enregistré qu'il y a quelque chose de banal dans la consommation de l'alcool, la consommation du sucre, du sel, du cannabis, de la haute vitesse, bien, on a des moyens qui s'appellent le cursus scolaire de nos jeunes, parce que, là, tout le Québec passe au travers ça. Il était là, mon lien, plutôt que de dire : Bien, au niveau cégep et université, on interdit la possession sur les sites, où là je trouve qu'on a beau mettre ça là au nom de quelque chose qui est louable, on a beau mettre ça là, mais en fait on n'atteint pas l'objectif. Voilà un peu ma prise de parole.

Le Président (M. Merlini) : Merci beaucoup, Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques. M. le député de Labelle, il vous reste très, très peu de temps, alors allez-y rapidement.

M. Pagé : Alors, je dépose le sous-amendement, M. le Président. Modifier l'article de la Loi encadrant le cannabis édicté par l'article 12 du projet de loi : Modifier l'amendement proposé à l'article 7 de la Loi encadrant le cannabis édicté par l'article 12 du présent projet de loi par l'insertion, avant «d'un établissement d'enseignement», de «des salles de cours et lieux connexes».

Le Président (M. Merlini) : Merci, M. le député de Labelle, pour votre proposition de sous-amendement. On va en faire les copies et le distribuer aux membres.

Je suspends donc quelques instants.

(Suspension de la séance à 12 h 26)

(Reprise à 12 h 31)

Le Président (M. Merlini) : Nous reprenons donc nos travaux. La proposition de sous-amendement de M. le député de Labelle a été distribuée, les membres en ont pris connaissance. M. le député de Labelle, pour vos explications pour votre sous-amendement.

M. Pagé : Oui. Alors, M. le Président, bon, j'ai écouté très attentivement l'ensemble des arguments qui nous ont été donnés, de toutes les formations politiques, toutes les formations politiques, les arguments également de la ministre, et je reviens sur la recommandation n° 4 de la Fédération des cégeps, qui demandait d'exclure les résidences étudiantes des cégeps et des universités, pas que des cégeps, et des universités. Et, bon, quand on a écrit, on doutait qu'il y avait un problème là parce qu'effectivement la possession, lors du transport, bon, avec la formulation de la Fédération des cégeps, ne couvrait pas cet aspect-la. Par contre, mon collègue de Borduas, je pense qu'il a fait un très bon plaidoyer — d'ailleurs, c'est sa formation — un très bon plaidoyer à l'égard de la banalisation.

Et aussi je rappellerai à la ministre que je n'étais pas sous l'impression qu'il y avait autant de mineurs dans un centre collégial, mais la Fédération des cégeps nous écrit : «La Fédération des cégeps a constaté avec étonnement que le gouvernement québécois interdit, d'une part, à un mineur d'avoir en sa possession du cannabis, à l'article 4, alors qu'il est possible, d'autre part, pour les étudiants majeurs d'en posséder sur les terrains, dans les locaux et dans les bâtiments des établissements d'enseignement supérieur, à l'article 7. Ces articles peuvent engendrer des difficultés d'application dans les collèges quand on considère que près d'un cégépien sur quatre est mineur.» C'est près du quart des cégépiens qui sont des mineurs. Je n'étais pas sous l'impression que c'était autant que ça. J'avais l'impression que ceux qui entraient à 17 ans, c'étaient ceux qui avaient commencé peut-être un peu plus tôt leur vie scolaire. Mais, non, c'est un sur quatre des étudiants qui, dans les centres collégiaux, sont des mineurs. Donc, il y a une difficulté d'application de la loi, d'une part.

Et effectivement la formulation de dire, bien : O.K., on va le permettre quand même, seulement dans les résidences... S'il y avait un problème avec ce qu'on aurait pu déposer puis que, finalement, on n'a jamais déposé... Parce que j'avais bien entendu la ministre, et son argument, il était bon, à savoir que, bien, vers les résidences, donc, ce serait légal. Donc, il fallait quand même trouver la voie de passage.

Je rappelle à la ministre... Quand elle nous disait plus tôt, là : Bien, nous, on était plus jeunes, là, on est allés dans les cégeps, l'université, puis on n'était pas plus fous, puis on regarde aujourd'hui le comportement des jeunes, mais moi, je me souviens que, dans les salles de classe, il y a même des profs qui fumaient. C'est interdit aujourd'hui. On en vendait dans les distributrices. Aujourd'hui, il n'y en a plus, dans les distributrices, c'est interdit. Pourtant, la cigarette est quand même un petit peu moins pire, je pense, que de consommer sur une base régulière du cannabis. Et, même, ça va plus loin que ça. Maintenant, vous sortez des salles de classe, puis, si vous voulez avoir un Coke ou un Pepsi, pour ne pas faire de publicité à aucune boisson gazeuse, bien, souvent, ce n'est même plus permis parce qu'il y a des établissements maintenant qui interdisent les distributrices de boissons sucrées. Là, on ne viendra pas me dire que d'avoir en sa possession, justement, dans les salles de classe et dans les salles connexes ou encore dans... Parce qu'on a mis «dans les lieux connexes», là, parce qu'il faut inclure les corridors, ou encore l'amphithéâtre, ou peu importe, là. Parce que j'ai compris aussi que la ministre dit : Il peut y avoir un établissement d'enseignement puis les résidences au-dessus. Alors, je pense qu'on a assez bien focussé sur des salles de cours et les lieux connexes.

Alors, quand on voit tout ce que l'on fait aujourd'hui pour mieux encadrer le tabac, les aliments... Parce qu'il y a aussi des aliments, maintenant, qui sont bannis. Moi, ma fille, dans son école secondaire, là, des frites, il n'y en a plus. Il n'y en a plus, des frites, il n'y en a plus. Il n'y a plus de boissons sucrées à la polyvalente Saint-Joseph, à Mont-Laurier. Pourquoi on a sorti ça? Parce qu'on a considéré que c'était malsain pour la santé. On prêche pour les saines habitudes de vie.

Alors, tu sais, j'entends bien qu'on peut sortir sur l'heure de dîner puis aller prendre une bière à la brasserie, je l'entends. Quand tu prends une bière à la brasserie, tu n'es pas soûl, tu n'es pas soûl. Je suis convaincu, M. le Président, que ça vous est déjà arrivé, vous, et moi, ça m'est également arrivé. Et j'aime ça aussi prendre parfois, à l'occasion, un verre de vin rouge sur l'heure du dîner — c'est plus 5 à 7, mais ça va arriver sur l'heure du dîner — mais je ne suis pas en état d'ébriété. Mais, si c'est très facile, si, justement, c'est plus banal de sortir, puis j'en ai dans mes poches, comme disait le député de Borduas, et de payer la traite, puis sans... je suis convaincu qu'on ne va pas carter nos amis, et un sur quatre, c'est un mineur, donc on se met en position de fragilité, là.

Alors, je ne comprendrais pas pourquoi on n'accepterait pas, à tout le moins, ce volet-là qui dit... On ne dit pas que sur l'ensemble du campus universitaire, on ne dit pas que sur l'ensemble du campus collégial, mais ce qu'on dit, c'est : À tout le moins, dans les salles de classe et la salle connexe, les corridors immédiats, là, on peut-u au moins l'interdire là? Alors, si, cela, on l'adopte, ça va forcer quelqu'un qui vient d'aller s'en acheter à aller le mener dans sa chambre de résidence, mais pas se promener avec, dans son sac à dos, une quantité... Puis on sait, là, on peut acheter jusqu'à 30 grammes. 30 grammes, là, on l'a dit hier, là, vous êtes capable de rouler probablement 70 à 80 joints avec ça, là. Ce n'est pas rien, là. Tu paies la traite à pas mal de monde, là, dans la pause, là.

Alors, il me semble que de l'interdire, à tout le moins, dans les salles de cours et les lieux connexes, ce serait le minimum qu'on devrait adopter. Et je pense que ça répondrait aussi à la préoccupation qui nous a été présentée par les fédérations des cégeps et des universités.

Le Président (M. Merlini) : Merci, M. le député de Labelle. Est-ce que j'ai d'autres interventions sur la proposition de sous-amendement de M. le député de Labelle? Mme la ministre.

Mme Charlebois : Est-ce que je peux demander une suspension, M. le Président?

Le Président (M. Merlini) : Oui, certainement.

Je suspends donc les travaux quelques instants.

(Suspension de la séance à 12 h 38)

(Reprise à 12 h 57)

Le Président (M. Merlini) : À l'ordre, s'il vous plaît! Nous reprenons donc nos travaux, et, en vertu de l'article 44 de notre règlement, la commission...

Je suspends donc nos travaux jusqu'à 15 heures, cet après-midi. Nos travaux sont suspendus.

(Suspension de la séance à 12 h 58)

(Reprise à 15 h 10)

Le Président (M. Merlini) : À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend donc ses travaux.

Je vous rappelle que le mandat de la Commission de la santé et des services sociaux est de poursuivre l'étude détaillée du projet de loi n° 157, Loi constituant la Société québécoise du cannabis, édictant la Loi encadrant le cannabis et modifiant diverses dispositions en matière de sécurité routière.

Évidemment, je demande à toutes les personnes dans la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine de bien vouloir éteindre toute sonnerie de tout appareil électronique.

Lors de la suspension de nos travaux, ce midi, nous étions à l'étude d'un sous-amendement de M. le député de Labelle à l'article 7 de la Loi encadrant le cannabis qui est introduit par l'article 12 du projet de loi n° 157, et Mme la ministre avait demandé une suspension. Alors, je vais donner la parole à Mme la ministre.

Mme Charlebois : Alors, M. le Président, vous m'excuserez pour mon léger retard, mais j'étais en comité ministériel, et, comme j'ai rien qu'une paire de jambes, il fallait que je m'en vienne, puis aussi, de temps en temps, on a des besoins normaux de santé qu'il faut assouvir.

À ce moment-ci, vous savez tout de ma vie privée, alors nous continuons donc, et je vais demander une suspension de l'article, parce qu'il y a des discussions en cours entre diverses parties, étant donné la complexité de l'amendement proposé par mes deux collègues et de Labelle et de Borduas.

Le Président (M. Merlini) : Merci, Mme la ministre. Alors, est-ce que j'ai d'abord le consentement pour suspendre l'étude du sous-amendement de M. le député de Labelle? M. le député de Borduas, vous souhaitez intervenir?

M. Jolin-Barrette : Oui, consentement, et dire à la ministre qu'on la remercie pour regarder le tout pour faire avancer l'article.

Le Président (M. Merlini) : Alors, j'ai bien votre consentement également, M. le député de Labelle...

M. Jolin-Barrette : On la remercie pour l'effort.

Le Président (M. Merlini) : ...pour suspendre l'étude de votre sous-amendement?

M. Pagé : Oui, consentement, mais aussi j'irais même un petit peu plus loin, parce que, dans la réflexion que je sens, et je remercie, là, pour le travail qui se fait présentement, s'il fallait que notre sous-amendement éventuel ne s'adresse qu'au niveau collégial, bien, je pense que ce serait déjà un compromis qui pourrait être fort intéressant.

Le Président (M. Merlini) : Votre commentaire est donc noté. Est-ce que j'ai également votre consentement pour suspendre l'étude de la proposition d'amendement de M. le député de Borduas? Consentement. Alors, également, cette proposition d'amendement est donc suspendue

 Est-ce que j'ai votre consentement pour suspendre l'étude de l'article 7? Consentement. Très bien.

Alors, l'étude de l'article 7 étant suspendue, nous pouvons aller à l'article 8. Mme la ministre, pour la lecture.

Mme Charlebois : Alors, l'article 8, M. le Président :

«Dans tout lieu, le cannabis doit être gardé de manière sécuritaire, dans un endroit qui n'est pas facilement accessible aux mineurs.

«Dans une résidence privée où sont offerts les services d'une ressource intermédiaire ou d'une ressource de type familial visée par la Loi sur les services de santé et les services sociaux (chapitre S-4.2) ainsi que dans une résidence privée où sont fournis des services de garde en milieu familial au sens de la Loi sur les services de garde éducatifs à l'enfance, il doit en outre être gardé dans un endroit verrouillé.

«Quiconque contrevient aux dispositions du premier ou du deuxième alinéa commet une infraction et est passible d'une amende de 250 $ à 750 $. En cas de récidive, ces montants sont portés au double.»

Et nous avons un amendement.

Le Président (M. Merlini) : Oui, Mme la ministre. Allez-y.

Mme Charlebois : Ici, on propose de modifier l'article 8 de la Loi encadrant le cannabis, proposé par l'article 12 du projet de loi, par le remplacement, dans le deuxième alinéa, de «au sens» par «, qu'ils soient fournis par des personnes reconnues ou non à titre de responsable de tels services en vertu».

Ici, cet amendement a pour objet de prévoir les normes d'entreposage sécuritaire du cannabis pour la garde en milieu familial dans une résidence privée. Ça applique également à une personne qui n'est pas une ressource reconnue à titre de responsable de service de garde en vertu de la Loi sur les services de garde éducatifs à l'enfance.

On se souviendra ici que j'avais eu une question, en Chambre, de la députée de Joliette, et ça avait semblé la surprendre que je lui réponde ce que je lui avais répondu. Elle m'avait questionnée spécifiquement sur les services de garde en milieu familial non reconnus, puis j'avais dit : Écoutez, si on a oublié un segment dans le projet de loi, nous allons faire l'amendement.

Alors, on arrive avec cet amendement, justement, spécifiquement pour ça et, dans l'ensemble de l'oeuvre, comme je le disais, on prévoit que le cannabis doit être gardé de façon sécuritaire. L'endroit dans lequel il est conservé ne doit pas être facilement accessible aux mineurs. Et l'article prévoit des règles supplémentaires dans certains endroits. Ainsi, le cannabis doit être gardé sous clé dans une résidence privée où sont offerts des services de ressource intermédiaire ou services de ressource de type familial. Il en va de même pour les résidences privées où sont fournis des services de garde en milieu familial et, comme je vous le disais, pour les services non reconnus, également.

Et finalement l'article prévoit la contravention aux articles prévus au premier et au deuxième alinéa, ce qui constituerait une infraction passible d'une amende, qui peut être doublée en cas de récidive. Et cet article a pour but de protéger la santé et la sécurité du public. Des règles particulières s'appliquent dans les endroits fréquentés par les clientèles vulnérables.

C'est un peu aussi le modèle que nous avons calqué sur les centres de traitement de dépendances, où tous les médicaments sont conservés dans un endroit qui est verrouillé. Alors, on a un petit peu le même modèle ici pour le type de services dont je vous ai fait mention, M. le Président.

Le Président (M. Merlini) : Merci, Mme la ministre. Est-ce que j'ai des interventions à la proposition d'amendement à l'article 8? M. le député de Labelle.

M. Pagé : Bon, là, ici, on est strictement pour des endroits publics. C'est bien cela? Ça ne concerne pas du tout les résidences privées.

Mme Charlebois : Non, il y a «dans résidences privées où sont offerts des services d'une ressource intermédiaire».

M. Pagé : Oui, oui, c'est ça. Mais chez moi, là, ma maison, là, ça ne me concerne pas.

Mme Charlebois : Non, ça ne vous concerne pas. Ça concerne là où il est dispensé des...

Une voix : ...

Mme Charlebois : Dans tous les lieux?

Une voix : ...

Mme Charlebois : Dans tous les lieux, le cannabis doit être gardé de manière sécuritaire, dans un endroit qui n'est pas facilement accessible aux mineurs. Donc, ça veut dire que, dans une résidence comme la mienne, où mes petits-enfants viendraient, si j'ai du cannabis, il faut qu'il soit dans un endroit où il ne doit pas être accessible aux mineurs. C'est ça?

Une voix : ...

Mme Charlebois : Tout lieu, oui. Pour répondre à la question du député de Labelle, moi, mes petits-enfants, s'ils viennent chez moi puis j'ai du cannabis, il faut que je les mette pas accessibles à eux.

M. Pagé : Bon, bien, c'était justement cela, parce que, dans le deuxième alinéa, effectivement, là, on s'adresse vraiment, bon, à des résidences privées, mais de milieu de garde, des ressources intermédiaires. Donc, c'est quand même des endroits publics privés, mais publics, là, on s'entend.

Alors donc, le premier alinéa concerne également nos résidences à nous, notre condo personnel, notre chalet, et tout le reste. Bon, de manière sécuritaire pour ces endroits-là, qui sont des endroits privés, comment on les qualifie, les manières sécuritaires? Parce que vous avez fait mention, vous avez dit : Dans des résidences, bien, c'est des endroits... c'est verrouillé, c'est... Bon, j'imagine que ça va être la même chose, mais là...

Mme Charlebois : Là où sont dispensés les services, comme je vous le disais, de ressources intermédiaires...

M. Pagé : Non, mais pour les résidences privées.

Mme Charlebois : ...type familial, résidences de type service de garde, etc., là, ça doit être verrouillé. Autrement, chez vous comme chez moi ou comme chez quiconque, il faut que ce soit dans un endroit sécuritaire, un peu comme ce que vous faites avec vos médicaments, finalement. Vous ne les laissez pas à la portée des enfants. Les médicaments sont tout aussi nocifs pour des enfants. Des produits de nettoyage, qui sont très, très, très dangereux, on ne laisse pas ça à la portée des enfants. Alors, il faut s'organiser pour rendre notre milieu de vie sécuritaire.

M. Pagé : O.K. Là, c'est parce qu'on prévoit des amendes. Qui va vérifier ça? J'entends ça, là, mais je me dis : Dans la vraie vie, là, comment on va gérer ça? Parce que, tu sais, toujours le principe d'une loi, il faut qu'on soit capable de la faire respecter.

Mme Charlebois : C'est toujours sur dénonciation. Par exemple, je nous cite souvent en exemple, je vais chez vous, vous avez des petits-enfants dans la maison...

M. Pagé : Je vous invite, d'ailleurs.

Mme Charlebois : Vous allez m'inviter? Bon. Mes petits-enfants seraient chez vous, comme par hasard, et vous laisseriez traîner du cannabis sur le coin du comptoir, je vous dénonce, et là il y aura une inspection qui sera faite. Mais c'est sur dénonciation.

Une voix : ...

Mme Charlebois : Pardon?

M. Jolin-Barrette : Il ne vous réinvitera pas.

Mme Charlebois : Non, c'est sûr, mais ça n'arrivera pas. Je suis convaincue que non seulement il ne laissera pas le cannabis accessible, mais mes petits-enfants sont trop loin de chez lui pour aller le voir.

M. Pagé : Sauf que là ne présumez pas que j'aurai du cannabis chez moi, là.

Mme Charlebois : Non, c'est ça que j'ai dit.

M. Pagé : C'est ça. Non, c'est parce que, bon, tu sais, je pense à l'alcool, bon, on a de la bière dans le frigo, on a des bouteilles de vin au sous-sol pour garder ça au frais. Est-ce que c'est jugé «de façon sécuritaire»? Bon, un enfant, un jeune enfant peut difficilement ouvrir une bouteille de vin ou ouvrir une bouteille de bière. Mais un plus jeune enfant pourrait plus aisément tomber sur du cannabis et, d'une façon quelconque, en consommer.

Mme Charlebois : Me permettez-vous un commentaire?

M. Pagé : Alors, c'est pour ça, le «plus sécuritaire», j'essaie de voir jusqu'à quel point...

• (15 h 20) •

Mme Charlebois : Mais permettez-moi un commentaire. Tu sais, on donne l'esprit, mais les parents, les grands-parents, peu importe qui, dans sa maison, reçoit du monde, on a tous une responsabilité, là. On ne va pas inspecter les produits de nettoyage, on ne va pas inspecter comment vous entreposez votre boisson, mais tout le monde est conscient qu'il y a un risque pour nos enfants, là. Sauf que c'est la même chose pour le cannabis, c'est la même chose pour nos médicaments.

Alors, s'il y avait négligence, là, vous allez être à l'amende puis, pire que ça, vous allez probablement devoir répondre à d'autres pans, comme la protection de la jeunesse, par exemple, ou quoi que ce soit, là. Mais là je suis rendue loin, là, mais la plupart des gens dans la population ne vont pas mettre le cannabis à portée d'un enfant, là. Il y en a qui n'ont pas un sens des responsabilités élevé. Il y en a. Moi, je peux dire que, dans ma vie, j'en ai vu, mais j'en ai vus pour d'autres raisons que le cannabis, là. Alors, dans l'ensemble de la population, ça va être très bien respecté, on envoie l'esprit de la loi, et, si ce n'est pas respecté, il y aura dénonciation, et quand il y a dénonciation, c'est là qu'on peut vérifier la chose.

M. Pagé : Votre expression est la bonne. Dans l'ensemble de la population, il n'y a pas de problème. 99 % des automobilistes ne font pas d'excès de vitesse. Mais souvent toutes ces règles à propos des contrevenants, c'est en fonction d'une infime partie de la population, et, malheureusement, on serait surpris de voir jusqu'à quel point des fois, pour des gens qui sont des gros consommateurs, jusqu'à quel point le cannabis, c'est banal, c'est vraiment banal. Et là il y a des ados dans la maison, ils grandissent là-dedans, et je suis pas mal certain que, si on faisait des vérifications, on aurait malheureusement de très mauvaises surprises.

Bien, écoutez, je pense qu'on fait un pas dans la bonne direction. La question que je me posais, c'est : Comment on va réussir à faire respecter cet article de loi? Vous me dites... Si c'est à partir d'une dénonciation, bien, je comprends que ce sera la façon de faire.

Mme Charlebois : Et c'est les corps policiers qui vont aller vérifier.

Le Président (M. Merlini) : M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : Oui. Merci, M. le Président. Alors, je comprends que ceux qui sont chargés de l'application de la loi, c'est les corps de police municipaux ou la SQ, lorsque c'est desservi par un territoire de la SQ. Donc, l'économie de la loi, dans le fond, à chaque fois qu'il y a une sanction pénale, dans le cadre du projet de loi n° 157, ça va être la police qui va être chargée de donner un constat d'infraction pénale. C'est ça?

Mme Charlebois : C'est ça. Dans la possession, c'est toujours les policiers. Pour d'autres raisons, comme l'usage, ça pourrait être d'autres gens.

M. Jolin-Barrette : O.K. Quand ça va être l'usage, ça pourrait être d'autres gens. Exemple?

Mme Charlebois : Bien, des inspecteurs, proprement dit, du ministère.

M. Jolin-Barrette : O.K. La question que j'ai à vous poser, Mme la ministre, c'est à votre paragraphe deux : «Dans une résidence privée où sont offerts les services d'une ressource intermédiaire ou [...] en vertu...», lorsqu'il y a une garderie dans un lieu privé, là, à ce moment-là, est-ce que les inspecteurs du ministère, lorsqu'ils vont...

Mme Charlebois : De la Famille?

M. Jolin-Barrette : ...de la Famille ou, j'imagine, Santé et Services sociaux pour les ressources intermédiaires. Il y a des inspecteurs qui vont visiter?

Mme Charlebois : Oui.

M. Jolin-Barrette : Eux, s'ils constatent, dans le fond, que le cannabis n'est pas placé, est-ce qu'eux...

Mme Charlebois : Ils vont le dénoncer.

M. Jolin-Barrette : Ils vont le dénoncer. Là, c'est la police qui vient par la suite. Ils n'ont pas ce pouvoir-là, eux, d'imposer... de noter le manquement?

Mme Charlebois : À ce qu'on m'indique, ils ont le pouvoir, eux, de donner des amendes au même titre que nos polices du tabac, là, nos inspecteurs, qu'on appelle polices du tabac, communément, là, mais, en fait, c'est des inspecteurs.

M. Jolin-Barrette : O.K. Donc, à la fois, l'inspecteur du ministère de la Famille et à la fois du ministère de la Santé et des Services sociaux, lorsqu'ils font leur inspection, ils ont ce pouvoir-là de donner un constat d'infraction de 250 $ à 750 $.

Mme Charlebois : Oui, on m'indique que les deux peuvent donner des constats d'infraction, effectivement. Non seulement ça, mais ceux qui sont responsables des services de garde, quand un inspecteur du bureau coordonnateur puis... bon, etc., là, tu mets ton permis ou, en tout cas, l'autorisation que tu as d'effectuer des services de garde en danger, là.

M. Jolin-Barrette : Donc, ils pourraient à la fois avoir une sanction pénale, le constat d'infraction, et, à la fois au niveau administratif, ça pourrait être un des motifs de suspension de permis.

Mme Charlebois : Tout à fait.

M. Jolin-Barrette : O.K. Si je reviens au paragraphe un : «Dans tout lieu, le cannabis doit être gardé de manière sécuritaire, dans un endroit qui n'est pas facilement accessible aux mineurs.» Je ne veux pas qu'on refasse le débat, là, sur 7, puis on va attendre votre amendement, mais, exemple, dans un lieu comme le cégep, où il y a des mineurs, bien, comment est-ce qu'il serait... Si on ne fait pas l'amendement, là, puis je le propose à des fins de réflexion, là, bien, vu qu'il y a des mineurs au cégep, il faudrait que le cannabis aussi soit dans des lieux qui sont sécuritaires. Et là, pour donner de l'argument à ce qu'on disait tout à l'heure, le collègue de Labelle et moi, là, si on le permet au cégep, bien, il y a des mineurs qui vont être en contact avec aussi. Donc, c'est difficile d'arrimer ça avec le premier paragraphe de l'article 8.

Mme Charlebois : Bien, je ne pense pas qu'on peut comparer des services de garde avec des jeunes, quasi-majorité, du collégial, mais je n'ai jamais mentionné que je déposerais un amendement. J'ai dit qu'il y avait des discussions qui avaient cours. Soit dit en passant, on a suspendu l'article 7, ça fait qu'attendons d'y revenir. Là, on est sur l'article 8.

M. Jolin-Barrette : Mais, pour des fins de réflexion, Mme la ministre, je vous le soulève. Mais, lorsqu'on fait l'interprétation de la loi, le critère, c'est : vous êtes mineur. Ce n'est pas : vous avez 17 ans et six mois, le critère d'appréciation de la loi. S'il y a une infraction, il y a une infraction. Dans le fond, la loi s'applique de la même façon pour tout le monde. Ça a une portée générale et impersonnelle. Alors, la loi s'applique de la même façon. Ça fait que, pour les fins de l'article 7, là, je vous le soumets aussi, ça militerait en faveur de l'exclure, notamment sur les campus collégiaux, justement à cause du paragraphe un de l'article 8.

Mme Charlebois : J'en prends bonne note.

Le Président (M. Merlini) : Très bien. Est-ce que j'ai d'autres interventions à la proposition d'amendement de Mme la ministre? M. le député de Labelle.

M. Pagé : En fait, quand on dit que ça peut être la SQ ou la sûreté municipale qui peut répondre, justement, à une plainte d'un citoyen qui fait un constat, est-ce que... Parce qu'il y a certaines infractions où ce n'est pas nécessairement des...

Une voix : ...

M. Pagé : Oui, parce qu'il y a certaines infractions où il peut y avoir un inspecteur municipal qui peut donner des contraventions. Est-ce que, dans ce cas-ci, une municipalité pourrait dire... Bien, parce que moi, là, j'en ai 27, maires, là, puis j'en ai une couple, là, qui sont anticannabis, et ils vont tout faire pour réglementer puis resserrer le plus possible pour en voir le moins possible sur leur territoire. Alors, s'ils décidaient de se doter d'un constable anticannabis et qui ferait passablement de zèle, est-ce qu'il pourrait... Est-ce qu'une municipalité pourrait se donner le pouvoir de dire : Bien, moi, j'ai un constable spécialement là-dessus, et il fait le tour des résidences, et il donne des contraventions? Est-ce que ça pourrait se faire? Et évidemment ça ne serait pas un constable qui relèverait de la sûreté municipale ou encore de la Sûreté du Québec.

Mme Charlebois : Si une municipalité, puis on en a vu une dernièrement, là, qui a décidé de se doter d'un règlement, se dotait d'un règlement en ce sens-là, son inspecteur municipal pourrait donner une contravention pour l'usage, pas pour la possession, là, possession dans ce qu'on est... On est toujours... Parce que, là, on confond toujours, hein? On se parle puis on... Mais, pour la possession, ça prend vraiment un policier. Et/ou dans les services de garde, dans les ressources de type familial, etc., là, c'est ou bien le ministère de la Santé ou bien le ministère de la Famille.

M. Pagé : O.K. Mais l'article 8 dont on discute, là, pour l'amende dont on discute au troisième paragraphe, c'est obligatoirement la Sûreté du Québec ou la sûreté municipale.

Mme Charlebois : Dans une résidence et aux deuxième et troisième alinéas, bien, les... pas le troisième, mais le deuxième alinéa, les ministères concernés, les inspecteurs des ministères concernés.

M. Pagé : O.K. Bien, en tout cas, je ne sais pas pour quelle raison on ne pourrait pas donner à une municipalité ce pouvoir-là de pouvoir faire une inspection sans que ça soit quelqu'un qui a une formation à Nicolet, qui est officiellement un policier, parce que c'est des constats très simples à faire. Quelqu'un entre, on vient vérifier chez vous si vous entreposez correctement du cannabis, et on constate qu'il y en a qui traîne sur le comptoir, puis il y a des enfants autour, je pense que ça n'a pas besoin d'avoir un gros cours de policier pour savoir que la personne est en infraction.

Alors, c'est la raison pour laquelle je pose la question, parce que de plus en plus d'élus municipaux souhaitent être très vigilants. Et est-ce que c'est vraiment nécessaire que ça soit un policier dûment reconnu qui fasse ces constats-là?

Mme Charlebois : Bien, ce qu'on souhaite, c'est avoir une application pour la possession standardisée à travers tout le Québec. Et honnêtement on n'est pas dans... On est dans la dénonciation. Fouiller, c'est vraiment la Sûreté du Québec ou un officier de... un agent de la paix, là, je ne sais pas trop, une police municipale et/ou la Sûreté du Québec puis les inspecteurs qui sont affectés à ces dossiers-là avec toujours les mêmes méthodes. Alors, on souhaite une application standardisée. C'est plus pour ça, là, puis c'est les recommandations qu'on a eues de différentes instances, là, juridiques.

M. Pagé : C'est bon.

Le Président (M. Merlini) : Est-ce que j'ai d'autres interventions à la proposition d'amendement de Mme la ministre? Je n'en vois pas. Est-ce que la proposition d'amendement de Mme la ministre à l'article 8 de la Loi encadrant le cannabis est adoptée?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Merlini) : Adopté. Nous revenons donc à l'article 8 tel qu'amendé. Est-ce que j'ai des interventions? Je n'en vois pas. Est-ce que l'article 8 est donc adopté?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Merlini) : Adopté. Mme la ministre, article 9, s'il vous plaît, dans le chapitre III, Culture de cannabis à des fins personnelles.

• (15 h 30) •

Mme Charlebois : Alors, M. le Président, article 9 : «Il est interdit de faire la culture de cannabis à des fins personnelles.

«Cette interdiction de culture s'applique notamment à la plantation des graines et des plantes, la reproduction des plantes par boutures, la culture des plantes et la récolte de leur production.

«Quiconque contrevient aux dispositions du premier alinéa en faisant la culture de quatre plantes de cannabis ou moins dans sa maison d'habitation commet une infraction et est passible d'une amende de 250 $ à 750 $. En cas de récidive, ces montants sont portés au double.

«Aux fins du troisième alinéa, une "maison d'habitation" a le sens que lui donne le paragraphe 8 de l'article 12 de la Loi sur le cannabis (Lois du Canada — et là seront indiqués l'année et le numéro du chapitre.»

Ici, M. le Président, on interdit la culture de cannabis à des fins personnelles, où que ce soit. Il précise de plus ce que comprend la culture.

Enfin, il établit que la culture de quatre plantes de cannabis ou moins dans sa maison d'habitation constitue une infraction, et on détermine les amendes dont est passible le contrevenant.

Le Président (M. Merlini) : Merci beaucoup, Mme la ministre. M. le député de Labelle.

M. Pagé : Bon. Vous avez vu comme moi, Mme la ministre, que... Je suis convaincu qu'on a porté à votre attention les évaluations qui ont été faites par plusieurs avocats, juristes, qui pensent que cet article-là, le moindrement qu'il sera contesté, ne tiendrait pas la route face au fédéral. Normalement, une province peut restreindre ce qu'Ottawa décide de légaliser. Et là, en interdisant totalement, bien, on va totalement à l'encontre de la volonté du législateur fédéral. Plusieurs nous ont dit, bon : À la limite, un, ou deux, ou trois, ça devrait passer la route parce qu'on peut restreindre, mais le zéro plant, si le moindrement c'est contesté en cour, on devrait perdre notre cause. Bon. Ça, c'est la première des choses.

La deuxième des choses : l'Ontario, c'est permis. On fait souvent référence aux autres provinces autour de nous. Et je ne sais pas, le Nouveau-Brunswick, c'est permis à combien... Est-ce que c'est permis au Nouveau-Brunswick? Est-ce qu'on a la...

Mme Charlebois : ...le Manitoba, c'est interdit. Je peux vous faire la liste des provinces, si vous voulez, tant qu'à faire.

M. Pagé : Oui, oui, oui, ça pourrait être utile. Bien, à tout le moins les provinces limitrophes, là, parce que c'est toujours...

Mme Charlebois : Bien, je pense que oui, là, tout le monde va partir sur la même base. Ontario, bon, production personnelle, ils n'en parlent pas.

M. Pagé : Mais c'est permis en Ontario.

Mme Charlebois : C'est les limites fédérales.

M. Pagé : Quatre plants.

Mme Charlebois : Québec, c'est interdit. Manitoba, c'est interdit...

M. Pagé : Nouveau-Brunswick?

Mme Charlebois : Je descends, là. Une page à la fois. Nouveau-Brunswick, permis dans les limites fédérales. Alberta, permis dans les limites fédérales. (Interruption) Excusez pour le micro.

Une voix : ...

Mme Charlebois : Ah! Saskatchewan, c'est les limites fédérales. La Colombie-Britannique, permis dans les limites fédérales, mais il y a des exceptions, puis c'était le... non, ce n'était pas la même chose. Après ça, Île-du-Prince-Édouard, c'est les limites fédérales. Colombie-Britannique, est-ce que je l'ai dit?

Une voix : Oui.

Mme Charlebois : Et Nouvelle-Écosse, permis dans les limites du fédéral. On est deux, bref, si ma mémoire est bonne, à interdire la production. Mais moi, j'ai toujours parlé de cohérence avec l'Ontario, je n'ai pas parlé que c'étaient mes frères siamois. Alors, la cohérence, ce n'est pas nécessairement identique, d'une part.

D'autre part, on nous a dit pendant les consultations d'être plus restrictifs, alors c'est ce qu'on fait. D'autant plus que le produit va être disponible dans les... — voyons! je vais le dire — dans les boutiques de la Société québécoise du cannabis. Et il y aura toujours lieu de revoir ultérieurement. Mais, en attendant, commençons de façon plus serrée, et on verra.

Mais ici c'est certainement de voir... Tu sais, s'il n'y avait pas d'accessibilité autre, je comprendrais. Mais, comme on a une accessibilité autre, je pense qu'on peut y aller de façon graduelle. Et ici la production personnelle qui ne serait pas contrôlée... Je me posais des sérieuses questions, la semaine dernière, j'étais dans un coin de la Montérégie où il y avait des édifices à logements, il y avait plus que 20 portes à l'édifice en question, je me disais : Où ils vont mettre ça, dans la cour?, d'une part. D'autre part, je me disais : Dans l'édifice à logements, ça va être terrible. L'autre chose, je pensais à sur ma rue ou la rue d'un autre, où il y a des maisons côte à côte, côte à côte, côte à côte. Moi, ça ne me tente pas d'en avoir, mais le voisin décide que «je veux en avoir», puis lui, il décide pour toute la rue; on va-tu créer un autre marché?

Alors, moi, je dis : Donnons-nous du temps. On verra, quand on revisera la loi, s'il y a lieu de changer ça, cette application-là. Ça va être un processus, je le disais, la légalisation, ça va être évolutif, alors donnons-nous la chance de commencer avec les boutiques, puis par la suite on verra.

Le Président (M. Merlini) : Merci, Mme la ministre. M. le député de Labelle.

M. Pagé : Bien, je suis heureux d'entendre la ministre dire qu'on n'est pas frères siamois avec l'Ontario. Effectivement, on a plusieurs différences. Sauf qu'il arrive assez souvent qu'on dit : Par souci de cohérence, pas juste l'Ontario, mais le Nouveau-Brunswick, parce que ce sont les deux seules provinces qui sont limitrophes au Québec, même si, par le Grand Nord, Terre-Neuve n'est pas tellement loin, on voit presque de l'autre côté. Mais disons qu'on ne voyage pas si aisément avec Terre-Neuve.

Il y a aussi une question, bon, pas juste de cohérence avec les autres provinces, mais il y a des gens qui... en tout cas, chez moi, j'ai eu des représentations de gens qui disent : Bien, ça n'a pas l'air cher, un gramme à 7 $, 8 $, 10 $, mais, pour des gens qui consomment un peu plus, ça finit par être un coût assez élevé, et, bon, si, au moins, on nous permettait un ou deux plants à la maison, que... Bien, évidemment, c'est une culture qui leur permet de pouvoir avoir des résultats à moindre coût, à moindre coût. Et il est vrai que quatre plants, d'après ce qu'on nous a dit... C'est assez difficile de figurer, quatre plants, ça donne quoi, comme culture au final puis comme résultat final, mais il paraît que c'est quand même beaucoup. Et on a fini par trouver quelqu'un, nous, qui nous a un peu orientés et qui nous a dit : Bien, deux plants, là, des bons consommateurs, sur une base annuelle, je pense qu'ils vont bien répondre à leurs besoins.

Alors, moi, j'aurais, M. le Président, un amendement que je voudrais déposer et qui se lirait comme suit : Modifier l'article 9 de la Loi encadrant le cannabis, édictée par l'article 12 du présent projet de loi :

1° par l'insertion, dans le premier alinéa, après «faire la culture», de «de plus de deux [plants]»; et

2° par le remplacement, dans le troisième alinéa, de «quatre plantes de cannabis ou moins» par — donc, on remplace par — «trois ou quatre plantes de cannabis».

Le Président (M. Merlini) : Merci, M. le député de Labelle. Nous allons faire les... Oui, Mme la ministre.

Mme Charlebois : Avant qu'on étudie l'article du député de Labelle, est-ce que je dois rappeler à tout le monde qu'on a adopté un article qui interdit la possession d'un plant de cannabis, à 4.1?

Le Président (M. Merlini) : Alors, nous allons suspendre quelques instants pour faire les photocopies et la distribution aux membres.

Mme Charlebois : Et ça a été adopté de façon unanime.

Le Président (M. Merlini) : Oui. Oui. Je suspends les travaux quelques instants.

(Suspension de la séance à 15 h 39)

(Reprise à 15 h 49)

Le Président (M. Merlini) : Nous reprenons donc nos travaux.

Décision de la présidence sur la
recevabilité d'un amendement

Suite à la proposition d'amendement de M. le député de Labelle, je rends donc la décision suivante en vertu de l'article 198, qui se lit ainsi : «Tout amendement doit, au moment où il est proposé, sur motion sans préavis, être transmis au président. Celui-ci décide de sa recevabilité.»

Et, en fonction de la décision 244/28 dans notre jurisprudence parlementaire, la proposition d'amendement de M. le député, elle est irrecevable, puisqu'à l'article 4.1 nous avons adopté un amendement dans lequel il dit : «Il est interdit d'avoir en sa possession une plante de cannabis.

«Quiconque contrevient aux dispositions du premier alinéa commet une infraction et est passible d'une amende de 250 $ à 750 $. En cas de récidive, ces montants sont portés au double.»

Et la décision sur laquelle je m'appuie, la jurisprudence, nous indique qu'«est irrecevable un amendement qui contredit une décision que la commission a rendue au sujet d'un amendement antérieur».

Donc, la proposition d'amendement de M. le député de Labelle est donc irrecevable. Alors, nous revenons donc à l'étude de l'article 9. Est-ce que j'ai des interventions? M. le député de Labelle.

• (15 h 50) •

M. Pagé : Bien, écoutez, M. le Président, j'entends bien et je vais respecter votre décision, bien sûr. Mais, dans les débats précédents qu'on avait eus sur 4.1, notre compréhension était que le mot «possession», dans ce cas-là, ne comprenait pas nécessairement le mot «faire la culture de». Parce qu'on a eu des échanges à cet égard-là, et j'ai même discuté avec mon collègue tantôt, et c'est un peu la compréhension que nous avions ici. Bon. Si ce n'est pas le cas, bon, malheureusement, on a mal compris. On est quelques-uns à voir mal compris, mais, bon, compte tenu, maintenant, qu'on a adopté 4.1, qu'on ne peut pas revenir en arrière à moins d'un consentement — mais j'ai compris qu'il n'y aura pas de consentement — donc, évidemment, on va passer à autre chose.

Mais il n'en demeure pas moins que, par souci de cohérence avec nos... pas nos frères siamois, mais avec nos voisins et aussi, je dirais, par sensibilité à l'égard des gens moins fortunés qui déjà, de toute façon... Souvent, on le dit, là, souvent, les gens en consomment, et déjà, souvent, ces gens-là ont des plants à la maison pour des fins personnelles, et là on va carrément leur interdire. Et il y a tellement de juristes et de constitutionnalistes jusqu'à maintenant qui nous ont dit : Bien, on peut restreindre, mais on ne peut pas aller complètement contre la loi fédérale. Et vous savez ce qui va arriver avant longtemps, ça risque d'être contesté, il va y avoir des frais importants qui vont certainement être obligés d'être dépensés par le gouvernement du Québec pour défendre sa position. Et, au final, comme à chaque fois, le fédéral gagne dans ce genre de situation là. Mais alors, si c'est la voie que le gouvernement a choisie, ce sera sa décision.

Le Président (M. Merlini) : Merci, M. le député de Labelle. Est-ce que j'ai d'autres interventions? M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : Oui. Merci, M. le Président. Bien, écoutez, avec l'article 9, on est en accord sur le fait de ne pas pouvoir cultiver de plants à des fins personnelles, de cannabis. D'ailleurs, c'était dans notre plan qu'on a déposé, parce qu'on considère que ça crée une accessibilité, une facilité d'accès, notamment pour les jeunes, pour les enfants, donc on apprécie que le projet de loi interdise complètement la culture.

Sur le point de la contestation, d'une éventuelle contestation judiciaire, moi, j'ai bien confiance que l'article se défend. J'ai confiance au Procureur général du Québec de faire les représentations nécessaires qui s'imposent. Il y a de l'espace pour le faire, pour le plaider, et je suis convaincu que le gouvernement du Québec a fait l'analyse requise pour s'assurer qu'on pouvait le faire. Et la latitude, elle est présente dans le projet de loi fédéral.

Alors, c'est important que ça soit un choix du Québec de dire : Nous, dans un souci de sécurité publique, dans un souci de santé publique, dans un souci d'aller progressivement, nous faisons le choix, comme État, de ne pas permettre la culture à domicile, et on veut, à des fins de santé publique et de sécurité, orienter les consommateurs vers les magasins d'une filiale de la société d'État pour faire en sorte que la consommation se fasse d'une façon responsable. Et, à ce titre-là, une liberté individuelle peut être restreinte, comme on le fait dans le cadre du projet de loi, et ça se justifie très légitimement de le faire à l'intérieur du projet de loi. Alors, juste valider que la ministre est d'accord avec ce que je dis.

Le Président (M. Merlini) : Merci, M. le député de Borduas. Mme la ministre.

Mme Charlebois : Non seulement je suis d'accord, mais on a fait les vérifications : on ne pourrait pas aller au-dessus de quatre plants, mais, en deçà de quatre plants, on est pleinement dans notre champ de compétence. Et je sais qu'il existe des juristes qui veulent plaider d'autre chose, mais moi, je me suis assurée que nos juristes à nous sont capables, avec le Procureur général, de défendre cette cause-là et... À partir du moment où tu fais un projet de loi, hein, tout est contestable. Mais il faut juste être certain qu'on peut le défendre et qu'on peut en débattre. Et j'ai vérifié avant.

M. Jolin-Barrette : Un dernier point, M. le Président. Sur le quatrième paragraphe, en ce qui concerne le terme «maison d'habitation», je veux juste m'assurer que ma compréhension est exacte, là. On réfère au projet de loi C-45, au paragraphe 8 de l'article 2, et je vais le lire :

«Définition de maison d'habitation.

«(8) Pour l'application du présent article, maison d'habitation, en ce qui a trait à un individu, s'entend de la maison où il réside habituellement et vise notamment  :

«a) tout terrain sous-jacent de cette maison ainsi que tout terrain adjacent qui est attribuable à celle-ci, y compris une cour, un jardin ou toute parcelle de terrain similaire;

«b) tout bâtiment ou toute structure qui se trouve sur un terrain visé à l'alinéa a).»

Alors, on comprend que, si vous êtes dans un bloc-appartements, c'est également visé par «maison d'habitation» si vous êtes dans un condominium, c'est également visé par «maison d'habitation», donc toutes formes d'habitation sont couvertes par le terme «maison d'habitation».

Mme Charlebois : Tout à fait, et les terrains adjacents, et tout ça.

M. Jolin-Barrette : Donc, dans tous types d'habitation, au Québec, vous n'allez pas pouvoir faire la culture de cannabis.

Mme Charlebois : Sauf si vous avez une prescription, où, là, vous avez la permission du gouvernement fédéral. Parce que vous avez notamment une prescription qui fait que votre situation médicale vous le permet.

M. Jolin-Barrette : Parfait.

Le Président (M. Merlini) : Est-ce que j'ai d'autres interventions à l'article 9? Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.

Mme Massé : Oui, merci, M. le Président. En fait, je ne sais pas exactement comment le prendre. Je pense qu'à quelques reprises j'ai laissé entendre à la ministre que j'espérais pouvoir venir débattre, justement, sur l'article 9. Parce que je n'en suis pas au niveau légal, je n'en suis pas à la contestation, et tout ça, je fais confiance à ce que mes collègues disent, mais, ceci étant dit, pour moi, c'était important qu'on ait l'opportunité de pouvoir discuter de la possibilité de cultiver à la maison.

Et j'ai souvent... bien, en fait, à deux reprises — pour certains, c'est souvent, pour d'autres, non — j'ai indiqué à Mme la ministre que je trouvais ça important de discuter avec elle de ça parce que, dans les faits, vous le savez, M. le Président, j'ai travaillé toute ma vie avec des gens pauvres, et, les gens pauvres, là, une des façons qu'ils arrivent à pouvoir avoir une certaine autonomie sur un certain nombre de choses, c'est parce qu'ils les produisent eux-mêmes, pas pour les vendre, pas pour les distribuer ou faire que les enfants tombent dans les plants, mais pour être tout simplement capables de soutenir, dans ce cas-là, la possibilité de pouvoir faire pousser du pot.

Alors, c'est sûr que les deux bras me tombent, en disant... Bien, en fait, je ne comprends même pas pourquoi on débat de l'article 9, puisque tout ça a été réglé hier. Tout ça a été réglé hier à l'unanimité. Bien, moi, ça fait depuis le début de la... je tasse des affaires pour être ici aujourd'hui, à l'article 9, pour faire ce débat-là, pour qu'on puisse en discuter.

Parce que, M. le Président, il y a des gens qui sont venus nous dire que si on veut faire une jambette au crime organisé, que si on veut faire une jambette aussi à tout ce qui est surproduction dans des lieux d'habitation — pas une production contrôlée, une surproduction — bien, une des façons d'y arriver, c'est de dire : O.K., on va mettre un plafond. On va mettre un plafond parce que l'idée de tout cet exercice de légalisation, c'est de sortir de l'interdit, c'est de se dire, collectivement, qu'on sort de l'interdit pour faire en sorte non pas de banaliser, mais pour faire en sorte de décriminaliser, entre autres, sortir ça des mains du crime organisé, de s'assurer que les gens vont avoir de la qualité au niveau du produit, de cette agroculture qu'est le cannabis.

Et, pour moi, c'est comme si on disait : Bien, vous savez, puisque... je ne le sais pas, moi, les pommiers, tiens, on va dire ça, les pommiers, là, c'est dérangeant, les pommiers. Moi, j'ai des voisins, j'ai eu dans ma vie des voisins, voisines qui avaient des pommiers, là, puis, quand les pommes se mettent à tomber sur ton terrain, là, c'est bien dérangeant. Bien, en même temps, bon, tu sais, on en fait-u un drame? Est-ce qu'on se dit que ça n'a pas de bon sens que mon voisin ait décidé de planter un pommier? Je ne veux pas comparer les pommes au cannabis, mais ce que je veux dire, c'est : À un moment donné, la notion de nuisance publique... 95 % de la population serait incapable d'identifier c'est quoi, la belle plante qui pousse chez le voisin d'à côté. On n'est même pas capables entre nous de savoir ça a-tu quatre pieds, ça a-tu cinq pieds, ça prend-u ça de large, ça prend-u ça de large, puis on dit que c'est une nuisance. En fait, je suis... Bon.

• (16 heures) •

Puis il y a une autre affaire. Moi, une des présentations qui m'avaient frappée, parce que toute la question de la dépendance, quand on parle de santé publique, là, c'est important : lorsque l'Association québécoise des centres d'intervention en dépendance sont venues. Permettez-moi, M. le Président, de relever une de leurs citations. Ce qu'ils disaient, c'est que «l'association appelle à la prudence quant à l'interdiction de la culture du cannabis à des fins personnelles. Selon l'association, il est plus indiqué de permettre dès maintenant la culture dans les domiciles, considérant le fait que cette pratique existe déjà à l'heure actuelle et que le nombre de producteurs à domicile risque d'augmenter», surtout si on en permet zéro puis une barre, là, on s'entend, là. Donc, ça va être une pratique où, encore là, soit par dénonciation, soit parce que la police... Donc, on est encore dans la réprimande. Donc, «l'association y voit une opportunité pour le gouvernement — puis on en fait partie, dans cette prise de décision là, le législateur — de se doter de moyens pour encadrer cet aspect de la légalisation tout en respectant les préoccupations générales [de] la sécurité de la population». Alors, les deux sont possibles.

Il y a une autre association, celle de la promotion de la santé des personnes utilisatrices, qui, elle, nous rappelait qu'en ce qui concerne les risques pour les tiers, qui était une partie de l'argument de Mme la ministre, il existe de nombreuses plantes, encore là, je les cite, là, «dont la toxicité est plus élevée que celle du cannabis[...] — je vous fais part des... — Nous ne croyons donc pas que les risques associés à la culture [du] cannabis sont des motifs raisonnables pour interdire la culture personnelle.»

Alors, moi, dans le fond, je me dis : O.K., on va autoriser à des grosses compagnies d'acheter des serres, de tasser les tomates, de faire pousser des plants de pot. Puis ça, on va trouver ça correct. On va acheter leur production, qu'on va vendre dans notre réseau public. Et par contre la personne qui, chez elle, veut faire pousser deux, trois, maximum quatre plants, elle, par exemple, elle, on va lui dire : Tu n'as pas le droit, alors que les grosses compagnies que le gouvernement canadien nous envoie plongent dans les argents et que ce n'est pas tellement drôle de voir ce que... Mais nous autres, on n'aura pas le choix, on va être obligés de le vendre. Peu importe ce qui se sera passé avant, on va être obligés de le vendre.

Quelqu'un qui ne voudrait pas ça, M. le Président, ne peut même pas dire : O.K., moi, je me tasse de ça parce que je ne veux pas encourager ces argents d'abris fiscaux, parce que je ne veux pas... puis j'ai le pouce vert, puis, moi, ça me tente, puis j'aime mieux contrôler ma qualité, comme plusieurs Québécois et Québécoises font actuellement, M. le Président. La scrap qui se vend dans les rues, là, la façon dont le monde responsable a réussi à contourner ça, parce qu'on n'a pas eu le courage politique de légiférer, ça a été de faire pousser des plants chez eux, de bonne qualité, pas d'hydroponique dans le sous-sol, où est-ce que la moisissure... Ça, c'est toujours les exemples qu'on amène. Ça, à partir de quatre, c'est illégal. C'est dit dans la loi canadienne, ça fait que ça va demeurer. Mais, en bas de quatre, c'est de permettre à du monde qui veulent soit prendre soin de leur santé, qui n'ont pas l'argent pour aller sur le réseau public, comme ils le font... On encourage l'agriculture urbaine pour les tomates. Ça fait que, pour moi, il y a une espèce de non-sens là-dedans. En tout cas, je suis un peu...

Alors, M. le Président, permettez-moi... Parce que ce que je comprends, c'est qu'on ne pourra pas discuter. La décision est prise, puis là on dit «sous consentement», et la CAQ et la partie gouvernementale disent : Il n'y en aura pas, de consensus. Bon, bien... Mais moi, je veux déposer mon amendement puis je vais vous expliquer pourquoi après je tenais tant à le déposer, cet amendement-là.

Le Président (M. Merlini) : Alors, allez-y pour la lecture de votre amendement, Mme la députée.

Mme Massé : Avec plaisir, M. le Président. Donc, c'est de remplacer l'article 9 de la Loi encadrant le cannabis par le suivant :

«La culture de cannabis à des fins personnelles est permise. Il est toutefois interdit de faire la culture de plus de quatre plantes de cannabis dans une maison d'habitation.

«L'expression "culture de cannabis" comprend la plantation des graines et des plantes, la reproduction des plantes par boutures, la culture des plantes et la récolte de leur production.

«Aux fins du troisième alinéa, une "maison d'habitation" a le sens que lui donne le paragraphe 8 de l'article 12 de la Loi sur le cannabis (Lois du Canada).»

Le Président (M. Merlini) : Merci beaucoup, Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques. Nous allons faire les copies et la distribution pour que les membres puissent en prendre connaissance.

Je suspends les travaux quelques instants.

(Suspension de la séance à 16 h 5)

(Reprise à 16 h 11)

Le Président (M. Merlini) : À l'ordre, s'il vous plaît! Nous reprenons donc nos travaux après cette suspension qui a permis la distribution de la proposition d'amendement de Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.

Décision de la présidence sur la
recevabilité d'un
amendement

La présidence doit, en vertu de l'article 198, juger de la recevabilité de la motion. Et, en vertu de la jurisprudence à la décision 244/28 et la décision que j'ai rendue concernant la proposition d'amendement de M. le député de Labelle, votre proposition d'amendement est donc jugée irrecevable.

Ceci dit, ceci décidé, ça n'empêche pas le débat autour de l'article 9 et de continuer votre plaidoyer au niveau de l'article 9. La décision dit simplement que la proposition d'amendement est irrecevable en vertu de l'amendement qui a introduit l'article 4.1 que nous avons adopté. Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.

Mme Massé : Oui. En fait, M. le Président, j'aurais... Et là je ne suis pas une spécialiste — j'ai beau avoir du renfort, mais je n'ai pas tout ce renfort-là — mais je pense que... Je ne sais pas comment faire ça, mais j'en appellerais de votre décision, puis je vais expliquer pourquoi si c'est comme ça qu'on peut le faire.

Le Président (M. Merlini) : Pardon, excusez?

Mme Massé : J'en appellerais de votre décision de la non-recevabilité. Et, si ça se fait comme ça, je vous expliquerais pourquoi.

Le Président (M. Merlini) : Malheureusement, en vertu de l'article 41, une fois la décision rendue, elle ne peut pas être portée en appel, comme vous dites.

Mme Massé : Bon, bien, je vais quand même vous expliquer pourquoi.

Le Président (M. Merlini) : Allez-y, ça fait partie du débat, ça fait partie de votre argumentaire autour de l'article 9.

Mme Massé : Bien, j'imagine que oui.

Le Président (M. Merlini) : À vous la parole, Mme la députée.

Mme Massé : Merci, monsieur. J'ai combien de temps?

Le Président (M. Merlini) : On va vérifier. Je vais vous le dire en...

Mme Massé : En cours de route? C'est parfait. En fait...

Le Président (M. Merlini) : Excusez-moi, Mme la députée. En principe, l'article 9, qui contient quatre alinéas, vous permet un temps maximal de 80 minutes.

Mme Massé : Ah! je parle plus vite que ça. Je vous remercie.

En fait, vraiment, ce que j'essaie ici de partager en soulignant qu'à mon sens il y a peut-être une... que j'en appelle de votre décision, c'est que, lorsque vous avez accepté l'amendement de la ministre en 4.1... Et, pour la ministre, à tout le moins, comment elle nous l'a exprimé tantôt, c'était évident pour elle qu'à partir du moment où on adoptait 4.1 ça réglait la question du 9, ça réglait la question qu'il n'y aurait personne qui ne pourrait, donc, posséder de plantes, et donc, par conséquent, bien, ça règle la question du 9. Donc, en plus de ce que je vous ai dit plus tôt, j'avais déjà annoncé... mon collègue Amir avait déjà... mon collègue de Mercier avait déjà annoncé que, nous, la question des plantes à la maison, le nombre maximal, c'était quelque chose qui, pour nous, était majeur et qu'on voulait pouvoir débattre de ça, qu'on avait de l'argument, etc. Alors, c'est sûr que, lorsqu'on me dit qu'avec l'adoption de 4.1 ça dispose du chapitre III, il me semble que, comme... pardon, de l'article 9 du chapitre III...

Une voix : ...

Mme Massé : Au complet?

Une voix : ...

Mme Massé : Oui, bien, c'est ça, au complet. Je n'étais pas à côté de mes baskets. Donc, ça veut dire... Et il me semble que ça, dans le débat, ça n'a pas été amené, nommé comme ça hier. Il me semble que... Parce que vous savez — et, là-dessus, merci à mes collègues élargis — que posséder un plant et cultiver un plant, d'un point de vue légal, ça pourrait être vu comme deux choses différentes. Je pourrais cultiver le plant que vous possédez et que vous m'avez demandé de cultiver parce que moi, j'ai le pouce vert. Qui possède, vous ou moi?

Alors, pour nous, quand on entendait la notion d'avoir en sa possession une plante de cannabis, à aucun instant on n'a pensé que ça disposait, dans ta maison privée... Oui, on voyait, là, le transport entre l'Ontario puis le Québec. On voyait tout ça, mais on ne voyait pas que, dans la maison privée, le débat était fini. Alors, c'est pour ça, M. le Président. Je comprends que je ne peux pas le faire, mais c'est pour ça que je me dis : Bien, quand vous avez adopté la question du 4.1, si ça disposait... — en tout cas, on fait ça, nous autres, dans nos assemblées générales — si ça disposait de l'article 3, bien, il fallait être clair... de l'article 9, il fallait être clair là-dessus.

Alors, pourquoi, moi... Donc, voilà la raison pour laquelle j'irais en appel. Et, dans ce sens-là, je vais commencer la discussion... Ah non! Pourquoi j'ai présenté l'amendement même si je m'attendais un peu à cette réponse-là? Je l'ai dit un petit peu tantôt dans mon introduction passionnée, c'est qu'on a devant nous un projet de loi qui se veut, sans banaliser, enlever une charge négative, avec des modèles d'interdiction, de coercition, la police là-dedans, «enwoye», qui dit, dans le fond, qui envoie le message, dans le fond, qu'il y a quelque chose de pas correct, il y a quelque chose de méchant, de mauvais, alors que je pense que, dans mon intro tantôt, j'ai amené plusieurs éléments qui, au contraire, font en sorte que, les gens, je leur fais confiance. La ministre disait ça plus tôt par rapport à nos jeunes, de jeunes adultes. Bien, moi, je ne le fais pas juste sur les jeunes adultes. Je le fais sur l'ensemble de la population du Québec. Je leur fais confiance.

Et, dans ce sens-là, pour moi, de mettre l'article 9 tel qu'il est... Puis je ne suis pas sûre s'il ne faut pas dire «était». S'il est caduc, il va falloir qu'à un moment donné on nous le dise, qu'il est caduc. Donc, voyez-vous, là, il est formulé : «Cette interdiction de culture s'applique notamment à la plantation». O.K., O.K., là, la police arrive... Si vous regardez, notre amendement n'est pas... reprend beaucoup du texte de l'article 9, mais on le pogne plus par un bout où on ne joue pas la police, on ne joue pas le justicier, oui, on légalise, mais, dans le fond, c'est méchant. On va plus par le bout de, et c'est pour ça, «la culture du cannabis à des fins personnelles est permise». C'est positif, ça. C'est comme... Bon, là, ça ne peut pas être ça puisqu'à l'article 4.1, si, effectivement, on peut me faire la démonstration que posséder veut dire la même chose que cultiver et que, parce que je cultive, je possède... Je trouve, c'est une bonne question, ça. Donc, cette dimension positive nous apparaissait plus favorable que la répression et le doigt en l'air, l'interdiction.

Et peut-être une question à vous, M. le Président, avant d'aller questionner la ministre, est-ce qu'il est juste... Parce que je fais mon éducation. J'en suis seulement à ma première législature. Dans une situation comme celle-là, est-ce qu'il serait juste de penser que, malgré ce que je viens de vous exposer, s'il y avait réellement un consentement de tout le monde, de toutes les parties autour de la table, nous pourrions revoir l'article 4.1 soit pour le préciser, soit pour l'éliminer, soit pour nous laisser faire le débat dans l'article 9 et y intégrer la dimension qui m'apparaît beaucoup plus... du 4.1? Est-ce que ma compréhension des règles de fonctionnement là-dessus est juste?

• (16 h 20) •

Le Président (M. Merlini) : Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques, oui, sur consentement de la commission, on peut réouvrir un article qui a été étudié et adopté, selon le vouloir et le consentement des membres de la commission. Le travail qui a été fait, la proposition d'amendement a été étudiée hier, et les membres de la commission l'ont adoptée, comme vous l'avez souligné, à l'unanimité.

Maintenant, une fois l'article adopté, la présidence doit se gouverner en fonction du règlement. C'est comme ça qu'on doit présider nos séances de commission. Les décisions que j'ai rendues ne sont pas un reflet sur l'idée ou le débat derrière... de ne pas empêcher le débat, mais de respecter le règlement. Et je suis obligé d'appliquer le règlement comme il l'est et de décider que ces amendements-là sont irrecevables. Ça n'empêche pas le débat. Ça dit simplement que, compte tenu de l'article qui a été adopté, je me dois d'appliquer le règlement tel qu'il est. Ça n'empêche pas le débat. Ça n'empêche pas de faire valoir les points comme vous le faites, à ce moment-là.

Mais, pour votre question, effectivement, avec le consentement unanime des membres, on pourrait réouvrir un article du projet de loi qu'on a à étudier pour en disposer de la façon dont les membres souhaitent en disposer.

Mme Massé : Bien. Alors, est-ce que je peux demander s'il y a consentement pour qu'on... Je ne sais pas comment le dire, là.

Le Président (M. Merlini) : De réouvrir l'étude de l'article 4.1?

Mme Massé : Réouvrir l'article 4.1 pour clarifier des affaires.

Le Président (M. Merlini) : Alors, est-ce que j'ai le consentement des membres de la commission pour réouvrir l'étude de l'article 4.1?

Mme Charlebois : Non, et je veux m'expliquer.

Le Président (M. Merlini) : Il n'y a pas de consentement. Mme la ministre, vous souhaitez offrir une explication additionnelle?

Mme Charlebois : Oui.

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : Premier élément. Quand on étudie un projet de loi, les collègues ici, on est assis à tous les articles. On ne vient pas juste quand ça nous tente, là, ou à un article spécifique. Non, mais...

Mme Massé : M. le Président...

Le Président (M. Merlini) : Il n'y a pas de prêt d'intention. C'est simplement, comment on dirait, un état de fait.

Mme Charlebois : Alors, ce que je veux dire, c'est que 4.1 a été adopté hier soir à l'unanimité, à 20 h 5. Je note tout, moi, là. J'ai même dit, quand on a adopté 4.1... Je me souviens... Là, on est en train de faire ressortir le verbatim parce qu'il n'est pas encore officiel, mais j'ai quelqu'un qui est en train d'écouter mot pour mot ce que j'ai dit. Mais j'ai dit quelque chose du genre... Puis je ne veux pas induire personne en erreur. Ça fait que, quand j'aurai le verbatim exact, je vous le donnerai. Mais j'ai même dit que 4.1 était une forme de complément à 9, parce que j'ai dit : La possession, de toute façon, on s'en vient avec une interdiction de culture à 9. Je m'en souviens très bien, que j'ai dit ça. Comment, avec quels mots, puis «le», «la» puis «de», là, je ne peux pas vous le dire en ce moment. Quand j'aurai le texte exact, je vais vous le donner, mais j'ai bien mentionné que les deux étaient en relation.

Et j'ai aussi le goût de vous dire...

Le Président (M. Merlini) : ...

Mme Charlebois : ...— oui, oui, M. le Président, une chance, vous me ramenez à l'ordre — que posséder ne veut pas nécessairement dire que tu cultives, mais, quand tu cultives, tu possèdes. C'est sensiblement ce que j'ai dit hier soir, puis ça a été adopté à l'unanimité. Mais j'aurai le bon verbatim. Ça ressemble pas mal à ça. Je l'aurai tantôt.

Puis ce n'est pas pour être déplaisante, mais, si on fait ça tout le long du projet de loi, retourner en arrière, on n'en sortira pas. Puis ça a été adopté parce qu'on l'a étudié. Puis je me souviens qu'il y a eu des discussions fort importantes sur cet amendement-là, parce que les autres amendements avant, là, c'était à 17 h 25, celui-là a été adopté à 20 h 5. Puis, je vous le dis, je note tout, tout, tout, la date, l'heure, tout ça, en cas que j'aie besoin de retourner en arrière. Ce n'est pas pour être déplaisante, c'est juste parce qu'il faut à un moment donné avancer. Je suis prête à vous entendre. Vous avez le droit à 80 minutes. Prenez-les, tentez de me convaincre. Mais, en attendant, moi, un, je n'acquiesce pas à retourner en arrière, et, deux, il y avait une volonté qui était là. Je n'ai pas fait ça pour être malfaisante, là, sincèrement, là. Je n'avais pas d'intention derrière le point quand on a étudié 4.1.

Le Président (M. Merlini) : Merci, Mme la ministre. Est-ce que j'ai d'autres interventions à l'article 9? Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.

Mme Massé : Oui. Si j'étais ici... Non, sans commentaire. Je vais aller sur le fond, puisqu'on n'a pas eu la chance de discuter du fond.

Une voix : ...

Mme Massé : Ah non! Regarde, moi non plus, Mme la ministre, je ne veux pas étirer longuement. Si vous pouviez savoir comment qu'on aimerait que ce projet-là soit adopté. On vous a dit d'entrée de jeu qu'on serait avec vous sur ce projet de loi là. On vous a dit d'entrée de jeu les articles qui nous mettaient profondément mal à l'aise. Alors, loin de moi l'idée de vouloir étirer la sauce pour rien.

Mme Charlebois : ...vous imputer de motif, Mme la députée.

Mme Massé : Ça m'a donné un petit peu cette impression-là.

Mme Charlebois : Non, non.

Mme Massé : Merci de le préciser. Bref, le cannabis, communément appelé, au Québec, le pot, est une plante qui est connue et utilisée du peuple québécois depuis très longtemps. Et peut-être que la Colombie-Britannique nous a dépassés en termes d'utilisation, mais il m'apparaît plutôt évident que le Québec a, depuis longtemps, je pense... Le Québec est prêt pour la légalisation parce que, dans les faits, on a vite compris que, le crime organisé, on l'avait laissé trop longtemps faire, que le crime organisé est en train de scraper le cerveau de nos enfants, que le crime organisé était en train de faire perdre des milliers et peut-être même... pas peut-être, des centaines de milliers de dollars en taxes à l'État, que, le crime organisé, on n'arrivait plus à le contrôler, parce que nos prisons débordent, parce qu'on a un arrêt Jordan sur le dos, parce qu'etc.

Alors, la réduction des méfaits, c'est une approche où le Québec est reconnu partout sur la planète. Ça fait que c'est sûr que, lorsqu'on arrive à la légalisation, inévitablement, on est supposés, au Québec, d'être en avant, d'être en avance. Et, pour moi, lorsqu'on se refuse de reconnaître qu'il y a des gens, déjà... pas des malfaisants, pas des criminels, pas des gens qui veulent opérer des entreprises en dessous de la couverte, mais tout simplement des gens qui veulent cultiver pour leur consommation, des fois pour des raisons économiques, des fois pour des raisons politiques, puis il y a peut-être d'autres raisons que je ne connais pas non plus, je trouve ça vraiment aberrant, aberrant, qu'au Québec on ne soit pas capable de dire : Oui, on reconnaît que, chez vous, là, tu peux cultiver comme tu le fais pour plein d'autres choses, comme tu le fais pour des plantes encore plus toxiques, on permet ça. On permet ça parce que ce n'est plus un enjeu moral. Avant, c'était moral. Quand ce n'était pas légal, on pouvait nous faire peur. On pouvait nous dire qu'on était hors-la-loi. On pouvait nous brasser le bâton puis dire : On va vous taper sur les doigts. Mais là c'est ça, l'objectif, c'est d'enlever ce «stigma» là, c'est de faire en sorte qu'on puisse lever cette chape de plomb du jugement qui est porté sur les gens qui consomment du pot, pas banaliser comme on le fait avec l'alcool, pas banaliser, mais enlever cette chape de plomb là.

Ça fait que c'est sûr que, quand on voit le deux poids, deux mesures... C'est-à-dire, avec l'alcool, on a eu la prohibition pendant des années au Québec. Lorsqu'on a levé ce voile-là, on a assumé collectivement nos responsabilités en mettant, c'était quoi, la régie des alcools? Non? La Société des alcools, je pense.

Une voix : ...

• (16 h 30) •

Mme Massé : La Commission des liqueurs. C'est ça que je cherchais. Je réentendais mon père dire le mot. La Commission des liqueurs. Bien, on a assumé. On a assumé cette transition de la prohibition... Et Dieu sait que, du dommage, l'alcool, c'en fait, là. Mais on a assumé. On a pris en charge, à travers la Commission des liqueurs, mais la Société des alcools aujourd'hui, on a fait du contrôle, on a fait... On s'est assuré de la qualité. On s'est assuré de la distribution égale sur le territoire aussi. Moi, je trouve qu'avec les éléments qu'on a avec le cannabis, ici, au Québec, on peut retourner dans notre histoire collective puis se dire : Bien, comment c'est possible au Québec d'enlever l'élément prohibitif, enlever l'élément punitif pour légaliser? Mais, justement, je prends l'exemple de l'alcool parce qu'il y a plein de monde au Québec qui choisissent de faire leur vin, leur bière. Aïe! Quand tu fais ta bière, là, ça ne revient même pas à 1,50 $ la bouteille. C'est intéressant. C'est intéressant économiquement, puis, si tu es assez habile, ça peut faire de la bonne bière. Pour le vin, c'est une autre paire de manches. Non.

Une voix : ...

Mme Massé : Oui, c'est ça. Mon père a fait son vin toute sa vie, puis excuse, papa, mais ce n'était pas toujours très, très bon. Mais, bref, il y avait cette possibilité-là de le faire, parce qu'on avait enlevé l'élément de la prohibition, parce qu'on avait enlevé l'élément moral de dire que consommer de l'alcool, c'est mauvais. Puis, dans ce temps-là, c'était même... religieusement parlant, ce n'était pas bien bon.

Alors là, on dit : Oui, on veut enlever ça en légalisant, mais en même temps, si vous voulez en faire chez vous, faites de la bière, mais pas de pot. Puis pas qu'on ne voulait pas l'encadrer... Ma proposition était de... comme le Nouveau-Brunswick, l'Alberta, la Saskatchewan, la Colombie-Britannique, l'Île-du-Prince-Édouard, la Nouvelle-Écosse — d'ailleurs, là-dedans, on en a des voisins, il n'y a pas juste l'Ontario comme voisin, là — on voulait dire : Bien oui, bien oui, quatre plants et moins, ça tient la route.

On a compris que ça a été adopté à l'unanimité hier. Ça, j'ai compris ça. Puis j'ai compris que le consentement pour revisiter, ce n'était pas possible. Donc, à quelque part autour de la table, il y a les autres partis qui considèrent qu'effectivement ça n'a pas de bon sens. Je ne sais pas comment les convaincre puis, en fait, M. le Président, je ne peux même plus les convaincre, parce qu'on ne peut plus modifier le chapitre III. Parce que, le chapitre II, même si c'est deux chapitres différents, l'article 4.1 vient nous empêcher de déposer des amendements qui pourraient... ne serait-ce qu'un plant de pot, un plant! Je peux vous dire une chose, mon père a fait son vin, ça occupe de la place dans une maison d'habitation. Il a fait, quelques années, sa bière. Quand il mettait un petit peu trop de sucre, puis ça faisait pop, pop, pop, ça aussi, c'était... mais, je veux dire, il n'y a pas de drame, là. Il n'y a pas de drame.

Alors, je voudrais plaider plus longuement. Et peut-être qu'il y a d'autres endroits où on pourrait... dans le projet de loi. Ah non! Mme la ministre, vous venez de me dire que «cultiver» veut dire automatiquement «posséder». Oui?

Mme Charlebois : Bien, quand il y a un plant qui pousse, on le... Bien, quand il y a un plant qui pousse, qu'il soit haut de même, ou haut de même, ou ça de haut, c'est un plant, on le possède.

Mme Massé : O.K. Régulièrement, quand mes amis partent en voyage, je m'occupe de leurs animaux de compagnie, je les amène chez moi. Je leur... occupe de leurs plantes, peu importe lesquelles, je les amène chez moi. Mais il n'y avait pas de plant de pot parce que c'était illégal.

Une voix : Vous voulez dire...

Mme Massé : Des «plantes». Oui, oui, mais je dis toujours «plants», hein? Tu sais, on parle comme ça au Québec, les plants de pot. Ce n'est pas des plantes de cannabis, là, mais, oui, c'est correct, des plantes de cannabis.

Mais tout ça pour vous dire que, si cette amie-là, je m'occupe de ses plantes, puis elles sont chez moi, je suis capable de vous faire la démonstration que ce n'est pas moi qui possède. Donc, d'entrée de jeu... Puis là il y a des gens qui sont... moi, je ne suis pas une avocate dans la vie, il y a des gens qui pourraient certainement plaider plus longuement que moi sur cette question-là. Mais je pense que, même si c'était ça, votre volonté, de cadenasser, dès le 4.1, l'article 9 pour qu'on ne puisse pas en débattre, pour qu'on ne puisse pas y apporter une ouverture pour mettre au moins un plant, bien, je me dis : Il y a peut-être des gens qui seraient capables de... en dehors de mon petit exemple bien simple, parce que c'est vrai que je prends soin des plantes de mes amies et que, lorsqu'elles partent en voyage pendant deux semaines, trois semaines, bien, c'est plus simple pour moi de les amener chez moi puis de les arroser, mais je ne les possède pas.

Alors, je vais m'arrêter là. Sur mon 80 minutes, il va certainement m'en rester, mais je vais continuer à réfléchir. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Merlini) : Merci, Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques. Et, pour parfaire vos connaissances de notre règlement et de nos débats parlementaires, vous ne pouvez pas indiquer que l'intention de 4.1... que l'intention était de cadenasser le chapitre III. Mais je le laisse aller, mais c'est juste à titre d'information que je vous le dis, parce que les membres l'ont adopté en toute connaissance, et, comme Mme la ministre l'a souligné tantôt, le débat a été fait, et les membres de la commission l'ont adopté. Mais ce n'était pas... D'indiquer qu'il y avait une intention autre, ce n'est pas quelque chose que normalement on permet. M. le député de Labelle.

M. Pagé : Oui, merci, M. le Président. La ministre va certainement se souvenir que, dans la tournée des régions que nous avons faite, il y a une question qui revenait souvent, même, des fois, elle me regardait, bon, elle savait quelle question j'allais poser parce que maintes et maintes fois je l'ai posée. Et la question était la suivante : Le nombre de plants à la maison, un deux, trois, quatre? Et est-ce qu'elle se souvient des réponses? Moi, j'essaie de fouiller, là... ceux qui m'ont répondu zéro plant, là, il n'y en a vraiment pas beaucoup, vraiment, vraiment pas beaucoup. Alors, j'essaie de voir de quel endroit vient ce fameux zéro plant parce que ce n'est pas une volonté qui a été exprimée dans nos consultations. Honnêtement, ce n'est pas une volonté qui a été exprimée dans nos consultations. Très, très peu nous ont dit zéro plant, vraiment pas.

Si vous avez dans vos mémoires de la santé publique les gens qui nous on dit zéro plant, je vous invite à les sortir parce qu'il n'y en a à peu près pas. Il n'y en a vraiment pas beaucoup, vraiment pas beaucoup. Et une des professeures, Line Beauchesne, Line Beauchesne qui est professeure au Département de criminologie à Ottawa et professeure en santé communautaire à Sherbrooke, qu'on a consultée lors de la tournée des régions et qui est revenue en commission parlementaire nous déposer un mémoire, bien, à la page 4, elle fait justement, là... en fait, à la page... je ne sais pas quelle page de son mémoire, peu importe, la page 12 de 15 de son mémoire. Dame qui nous a très impressionnés, là, parce qu'elle est très compétente en la matière, puis, comme vous voyez, elle a des compétences en criminologie et des compétences aussi en santé communautaire. Et Mme Line Beauchesne, enseignante à l'Université d'Ottawa, Sherbrooke également, criminologie et santé communautaire, elle dit à la fin, son commentaire, parce qu'elle plaide pour qu'on puisse permettre la production à domicile, elle dit : «Il serait aisé de créer un système simple d'enregistrement local des personnes qui ont des cultures à des fins personnelles et de former adéquatement les policiers municipaux aux règlements qui régissent ces cultures.»

Bon, la ministre va nous dire : Oui, mais on a adopté 4.1 et on ne peut plus en posséder. Je veux bien. Par contre, 4.1, quand j'ai posé la question : Oui, mais ceux qui vont faire le transport?, ah! non, non, mais ça, ce n'est pas pareil parce qu'eux, justement, c'est dans le cadre de la production et du transport. Donc, il y a quand même des endroits où on peut en posséder.

Les gens qui ont une prescription médicale... Ah! il y a une autre exception, les gens qui ont une prescription médicale. Donc, on peut en posséder si on répond à tel, tel, tel critère. Alors, compte tenu de ce que je viens de dire, compte tenu aussi qu'effectivement on peut produire du vin à la maison, on peut produire du tabac, de la bière, les États américains aussi qui ont légalisé permettent tous, semble-t-il, selon nos informations, la production à la maison aussi, compte tenu aussi de tous les aspects, je dirais, de coûts, de coûts de production, pour ne pas imposer aux gens, je dirais, l'obligation d'aller payer le gros prix à la SQDC, parce que ça va être un monopole aussi, compte tenu aussi qu'on souhaite, bien, en fait, sortir le marché illicite pour le rendre licite et qu'on ne veut pas que les gens aillent s'approvisionner, justement, au marché au noir, compte tenu de plusieurs éléments, je redéposerais l'amendement suivant. En fait, je vais faire plus court que tantôt. Tout ce que j'ai dit tantôt...

Le Président (M. Merlini) : Vous redéposez ou vous déposez?

M. Pagé : Je dépose l'amendement suivant. La première partie se lit de la même façon... Est-ce que je suis obligé de tout relire ou je... parce que, dans le fond, je vais juste ajouter un élément, je vais... et ensuite vous pourrez disposer de la recevabilité ou non. Alors, le premier...

Le Président (M. Merlini) : Lisez-le au complet.

M. Pagé : ...élément serait le même. Le deuxième élément...

Le Président (M. Merlini) : Lisez-le, s'il vous plaît. Pour les fins de l'enregistrement, il faut le lire.

M. Pagé : En totalité?

• (16 h 40) •

Le Président (M. Merlini) : Oui.

M. Pagé : Bon. Alors, voici : Modifier l'article 9 de la loi encadrant le cannabis édicté par l'article 12 du présent projet de loi :

1° par l'insertion, dans le premier alinéa, après «faire la culture», de «de plus de deux plantes»;

2° par l'insertion, dans le premier alinéa, après «fins personnelles», et c'est ici la nuance, «, sans avoir obtenu un permis de production auprès des autorités concernées conformément aux règlements édictés par le gouvernement»; et

3° — c'est la même partie — par le remplacement, dans le troisième alinéa, de «quatre plantes de cannabis ou moins» par «trois ou quatre plantes de cannabis».

Le Président (M. Merlini) : Merci, M. le député de Labelle. Nous allons faire les copies et en juger de sa recevabilité.

Je suspends les travaux quelques instants.

(Suspension de la séance à 16 h 41)

(Reprise à 17 h 19)

Le Président (M. Merlini) : À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, nous reprenons nos travaux après cette suspension suite à la distribution de la proposition d'amendement de M. le député de Labelle et un vote que nous avons tenu au salon bleu.

Décision de la présidence sur la
recevabilité d'un amendement

Alors, je vais rendre la décision concernant la recevabilité de l'amendement de M. le député de Labelle en vertu de l'article 198 et en cohérence avec les décisions que j'ai rendues pour les deux autres propositions d'amendement et la jurisprudence que nous donne 244/28 dans notre livre de jurisprudence. Je juge donc que la proposition d'amendement, elle est irrecevable parce que l'effet de la proposition d'amendement... Elle est identique aux deux autres amendements qui viendraient contrevenir... pas contrevenir, mais contredire la décision que nous avions prise en adoptant l'article 4.1, qui parle qu'on ne peut pas posséder de plants de cannabis. Voilà.

Nous revenons donc à l'étude de l'article 9. Est-ce que j'ai des interventions? M. le député de Labelle.

• (17 h 20) •

M. Pagé : Bien, écoutez, M. le Président, j'entends bien votre décision. Je vais la respecter, encore une fois. Mais je suis vraiment très étonné parce que, malgré l'article 4.1 que nous avons adopté, nous avons dit à 4.1 qu'il y avait des exceptions, que des gens pouvaient posséder, et ce sont les gens qui le transportent parce qu'ils sont autorisés, les gens qui ont une autorisation en vertu d'une prescription médicale. Donc, il y en a, des exceptions. Et l'amendement que nous avions déposé était justement en prévoyant ces exceptions. Alors, je m'explique vraiment mal votre décision, mais je vais la respecter. Alors, cela dit...

Le Président (M. Merlini) : Ma décision vient du fait, par rapport également aux autres amendements qui avaient été proposés, qu'on est ici dans deux chapitres, le chapitre II et le chapitre III, qui parlent à des fins personnelles, spécifiquement à des fins personnelles. On ne parle pas de fins thérapeutiques ou pour fins de transport et autres exceptions, comme vous l'avez mentionné. Alors, c'est ce qui explique la cohérence de ma décision par rapport aux autres décisions que j'ai rendues sur les autres amendements. C'est tout. Voilà.

M. Pagé : Je vous respecte.

Le Président (M. Merlini) : Merci beaucoup.

M. Pagé : D'autant plus que, depuis le début, vous faites un excellent travail. Donc, je ne remettrai pas en doute votre décision.

Le Président (M. Merlini) : Merci beaucoup. Merci, M. le député. Est-ce que j'ai d'autres interventions à l'article 9? Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.

Mme Massé : Oui. Je reviens donc encore sur le fond de l'article 9, que j'ai égaré, voilà, qui est ici. Alors, l'article 9, en fait, vient nous dire que la culture du cannabis à des fins personnelles en habitation, en maison d'habitation, est impossible. Ce que la ministre, avec l'article 4.1, vient nous dire aussi, que, même si ce n'est pas en habitation, ce n'est pas plus possible, hein, Mme la ministre, parce que veux juste être sûre que je comprends.

Mme Charlebois : Excusez-moi. C'est parce qu'on vérifie des affaires en même temps.

Mme Massé : Oui, c'est correct.

Mme Charlebois : Puis ça fait toujours partie du lot, hein, d'être à l'écoute. Puis, comme je l'ai dit hier, bien que je sois une femme, il arrive que trois, c'est trop.

Mme Massé : C'est bien correct. Ça me fait plaisir de répéter.

Mme Charlebois : Excusez-moi.

Mme Massé : En fait, je voulais être sûre de bien saisir puisque l'article 4.1 vient nous dire qu'il est impossible de posséder un plant de cannabis et que l'article 9 nous parle de maison d'habitation, ce n'est pas plus acceptable. Donc, quelqu'un qui voudrait faire pousser un plan de pot dans un local commercial, ça ne serait pas plus accepté?

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : Bien, honnêtement, on parle de culture à des fins personnelles. Quand on est rendus dans un local commercial, ça veut dire, ça présuppose qu'on a demandé un permis à Santé Canada.

Le Président (M. Merlini) : Mme la députée.

Mme Massé : En fait, je veux juste être sûre. Moi, je ne veux pas dire quelqu'un qui veut faire de la production pour en vendre, là. Je suis toujours dans la consommation personnelle. Vous savez ma position là-dessus. Alors, j'essaie de voir, pour les gens qui nous écoutent, s'il n'y a pas d'autres moyens où ils pourraient cultiver pour des consommations personnelles, mais qui n'est pas à la maison, puisque l'article qui nous concerne fait état d'une maison d'habitation.

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : Est-ce que vous permettez que Me Lavoie réponde à la députée pour plus de clarification?

Le Président (M. Merlini) : Oui. Est-ce que j'ai le consentement des membres de la commission pour que Me Lavoie puisse s'adresser à la commission?

Mme Massé : Bien sûr.

Le Président (M. Merlini) : Consentement. Me Lavoie, veuillez, s'il vous plaît, encore une fois, vous identifier pour les bienfaits de l'enregistrement.

Mme Lavoie (Christine) : Oui, bonjour. Je suis Christine Lavoie, avocate à la Direction des affaires juridiques au ministère de la Santé.

En fait, effectivement, là, c'est ça, c'est que le projet de loi C-45 prévoit, là, que c'est dans une maison d'habitation que ça peut être fait. Il y a une interdiction, mais il y a comme une exception qui dit : O.K., jusqu'à quatre plants, tel que décrit à l'article 8, là, du C-45.

Mme Charlebois : Dans une maison personnelle.

Mme Lavoie (Christine) : Oui, dans une maison d'habitation.

Mme Massé : Alors donc, est-ce que je comprends que quelqu'un pourrait produire dans ce qui n'est pas une maison d'habitation pour des consommations personnelles? Je veux vraiment qu'on fasse cette distinction-là, là. Pour moi, c'est clair, je ne suis pas... La question de la vente, on l'abordera... pas de la vente, mais de la production pour vendre, là, on abordera ça plus tard. Moi, je suis vraiment sur le chapitre III, sur la consommation personnelle. Est-ce que, donc, ça veut dire, selon le sens de l'article, là, que, si ce n'était pas produit à l'intérieur ou sur les terrains d'une maison d'habitation, on pourrait produire pour consommation personnelle?

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : Toujours Me Lavoie, s'il vous plaît.

Le Président (M. Merlini) : Me Lavoie.

Mme Lavoie (Christine) : En fait, non, justement, c'est la façon... Je vous épargne un peu le «wording» de la loi fédérale, qui est assez compliqué, mais en fait, non, l'exception qui est prévue pour vous permettre de cultiver jusqu'à quatre plants, c'est vraiment à l'intérieur de... bien, à l'intérieur... La maison d'habitation, c'est un concept, là, mais c'est dans la maison d'habitation. En dehors de ça, c'est interdit.

Mme Massé : Donc, par exemple, dans le sous-bois en arrière de chez vous...

Une voix : ...

Mme Massé : Non, bien là, ça peut être ta maison. Mais, bref, si je comprends bien, maître, ce que vous me dites, c'est : On n'a pas le droit de produire à nulle part, mais ils ont créé cette exception à l'intérieur de l'habitation, et donc c'est pour ça qu'ici on revoit l'habitation, pour faire simple.

Mme Lavoie (Christine) : C'est ça, parce que, là, mettons que vous donnez l'exemple du sous-bois, bien là, ça va dépendre, là, parce que, dans la définition de maison d'habitation, au fédéral, là, ça inclut tout terrain sous-jacent de cette maison ainsi que tout terrain adjacent qui est attribuable à celle-ci. Bon, là, ça va aller jusqu'où, là? On peut...

Mme Massé : Oui, oui, jusque sur le bord de la rivière.

Mme Lavoie (Christine) : C'est ça.

Mme Massé : O.K., O.K. Et je comprends donc qu'au sens de la loi fédérale je ne pourrais pas louer un local pour consommation personnelle et faire pousser. Ça ne serait pas recevable dans la loi fédérale.

Mme Lavoie (Christine) : À ma compréhension, non.

Mme Massé : O.K. Et à la compréhension de... Parce que vous avez une meilleure vue d'ensemble que moi sur notre projet de loi. Est-ce qu'il pourrait être pensable que quelqu'un, pour des consommations personnelles, puisse se mettre quatre, cinq personnes ensemble et dire : Regarde, on ne peut pas le faire à la maison, la ministre, elle ne voulait pas, elle voulait exclure ça, est-ce qu'on peut... Ça me stresse de poser la question parce que, si la réponse, c'est oui, je sens qu'on va avoir un amendement qui va venir boucher ce trou-là aussi. Mais vous comprenez ma préoccupation, c'est de permettre au monde de s'autonomiser là-dessus aussi. Donc, à votre compréhension, est-ce qu'on pourrait se mettre à 10, louer un local, se faire pousser deux plants chaque, et je ne serais pas punie même si on me dénonce? Parce que c'est ça que ça prend pour... Ça, je veux vraiment que les gens entendent, là, comment cette loi-là va être difficile d'application. Il va falloir que vous soyez dénoncé. Alors, si j'étais dénoncée avec ma gang de 10 parce qu'on fait, à 10, pousser 20 plants...

Le Président (M. Merlini) : Me Lavoie.

Mme Lavoie (Christine) : En fait, on n'aura pas besoin de déposer d'amendement parce que, non, ça ne le permettrait pas, le projet de loi, actuellement, compte tenu du fait que le fédéral le permet uniquement dans une fenêtre qui est la maison d'habitation. Puis là notre projet de loi, ici, il vient le bloquer, là. Ça fait qu'il n'y a plus de marge de manoeuvre, là. L'ensemble des lieux sont bloqués. Quand vous dites aussi que ça serait uniquement sur dénonciation, dans la plupart des cas, effectivement, là, ça pourrait être vrai. Ça pourrait être aussi, quand même, par quelqu'un, par constatation, ce qu'on pourrait appeler du «plain view», là, si la police pouvait s'en apercevoir.

Puis mon collègue vient de me donner une petite note aussi qui me dit que le fédéral entend donner des permis de microculture, aussi, là, de cannabis, avec une production. Ça fait que, là, est-ce que vos 10 personnes... C'est sûr que c'est à des fins commerciales, mais est-ce que les 10 personnes dont vous parliez pourraient entrer dans cette catégorie? Ça serait à voir, là.

Le Président (M. Merlini) : Merci, Me Lavoie. Mme la députée.

• (17 h 30) •

Mme Massé : C'est vraiment une très intéressante question puisqu'on pourrait susciter l'entrepreneurship local. On est fort au Québec pour mettre sur pied des PME, des coopératives, etc. On pourrait, pour que les gens puissent consommer pour eux autres, là, susciter l'entrepreneurship par, peut-être, ces microcultures, mais... Et on en est, à Québec solidaire, là, je pense qu'on l'a dit que nous, les mégaentreprises qui achètent des terres puis qui produisent pour l'ensemble du Québec, là... Nous, on favoriserait beaucoup plus la diversité des modèles d'affaires des agriculteurs, y compris les microcultures, pour la vente. Mais là, si le fédéral permet des microcultures, peut-être qu'il y a là, mes amis, une piste pour ne pas que vous soyez punis parce que vous voulez vous-même cultiver la qualité de votre pot. Il y a peut-être une piste. Mais d'ailleurs, ça me fait penser, non, il n'y a pas de piste, puisque le 4.1 vient dire que vous ne pouvez pas avoir en possession une plante de cannabis. D'ailleurs... Oui, c'est ça.

Mme Charlebois : Bien, M. le Président...

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : 4.1, on parle de possession à des fins personnelles. Et je veux juste dire, toujours à la députée, là : On peut constituer un groupe, on peut faire tout ce que... tu sais, une coop, s'acheter une serre, bref, même aller chercher du financement dans une institution bancaire, on peut faire tout ça moyennant qu'on a un permis du fédéral. Et là, quand on veut pouvoir... La consommation de ce produit-là doit être vendue à la Société québécoise du cannabis, selon le projet de loi, ça fait qu'on est encore, toujours, dans... Parce que tout produit doit être vendu et tout doit passer par la Société québécoise du cannabis, alors je ne veux pas... Puis, comme je le dis, la légalisation, c'est un processus évolutif. Le cannabis, en soi, n'est pas nouveau, mais le processus de légalisation est nouveau. La loi va être revue dans trois ans. S'il y a lieu de s'adapter, on s'adaptera, mais là je pense qu'il est prématuré de le faire, compte tenu de tout ce qu'on a entendu.

Le Président (M. Merlini) : Mme la députée.

Mme Massé : Oui. Je comprends bien. Mais c'est parce qu'il y a un article 9 qui dit qu'on ne veut pas qu'au niveau personnel les gens le cultivent qu'on se trouve dans la boucle que vous parlez, là.

Mais, quand vous dites que c'est évolutif, et tout ça, je l'entends, ça fait quelques fois que vous le dites. Quand je relisais le mémoire qui a été présenté par l'Institut de recherche et d'information socioéconomique, l'IRIS, il y a une phrase qui m'a frappée, en page 3, qui dit... Si vous permettez, je vais la lire. Il y a tout un paragraphe, là, qui parle de plusieurs choses, mais ce qui est le plus frappant, pour moi, c'est : «Aucun élément d'analyse rigoureuse n'indique qu'une telle pratique — c'est-à-dire celle de pouvoir cultiver à la maison, donc — facilite l'accès du produit aux mineurs ou n'augmente les risques de consommation accidentelle. Il semble que le gouvernement ait décidé de fonder ses choix sur des craintes sans fondement.»

Alors, puisque vous venez de le faire état, vous, vous êtes bien, bien enlignée sur on ne peut pas produire à la maison pour consommation personnelle et donc on verra en cours de route, à l'usage de cette nouvelle législation, cette nouvelle loi, qu'est-ce qu'on fera avec ça, mais, pour le moment, on ne peut pas le faire pour toutes sortes de raisons. Mais un institut de recherche est venu nous dire : Oui, mais c'est parce qu'il n'y a pas d'analyse rigoureuse qui nous fait dire que ça nous permet d'atteindre les objectifs dont vous faites part. Alors, est-ce que...

Mme Charlebois : Et l'inverse est aussi vrai.

Mme Massé : Bien, c'est ça. Est-ce que vous pourriez me partager sur toute la question de comment... Donc, vous avez des études qui disent comment l'accès au produit aux mineurs augmente les risques de consommation accidentelle. Vous avez des études là-dessus?

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : En ce moment, c'est ce qu'on dit. Puis c'est pour ça qu'on a fait un fonds de prévention et de recherche. Parce qu'il manque de recherche. Parce que le crime organisé ne vient pas nous faire état de leurs façons de faire...

Une voix : ...

Mme Charlebois : Non, les recherches qu'ils font, eux autres, c'est assez rudimentaire. Mais on a entendu ce que la CORPIQ a dit, ce que plusieurs associations... j'allais dire municipales, mais ce n'est pas ça, plusieurs associations de... — je vais le dire, là — de directeurs de police qui sont venues nous parler... Tu sais, la finalité, là, c'est... La terre n'arrêtera pas de tourner la journée qu'on va adopter ça.

Je le dis souvent, il y a beaucoup de choses, en trois ans, qui peuvent changer. Les législateurs que nous sommes vont peut-être même l'appeler avant trois ans. Dans le projet de loi, on a mis déjà de ne pas attendre cinq ans, de revoir tout le processus dans trois ans. Mais, s'il arrivait que le législateur décide avant ça de revoir le projet de loi parce que l'évolution autour de la légalisation fait en sorte qu'on doit le revoir, bien, je pense qu'il y a quelqu'un qui va lever la main, qui va dire : Aïe, il faudrait revoir le processus. Mais le plus loin qu'on va le faire, c'est dans trois ans.

Alors, donnons-nous la chance de voir comment ça va se dérouler, donnons donc la chance à tous les gens de voir comment tout ça va évoluer. Parce que, là, il y a beaucoup de choses qui se disent, mais on n'a rien, en tant que recherche scientifique, on n'a pas de données probantes, on n'a absolument rien. Dans trois ans, on va avoir des données, on va être capables de prendre des meilleures décisions. Et moi, je fais confiance à notre capacité d'analyser ces données-là. Je pense que ce n'est pas trois ans qui vont faire une si grande différence. Et, même, ça pourrait être aussi moins que ça.

Et il y a toujours le risque de détournement. Puis je le sais, que ce n'est pas tout le monde qui a des mauvaises intentions, j'entends bien la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques. Mais l'objectif de la loi en ce moment... Oui, on ne veut pas que ça devienne facilement accessible, et, dans ce sens-là, c'est pour ça qu'on a mis l'interdiction. Mais, si, comme je vous dis, dans trois ans, on décide de permettre un plant, deux plants, quatre plants, on le fera, là, on le fera, ça va être... Il va y avoir de toute façon une évaluation obligatoire du modèle de vente. Ça va être obligatoire. Il y a le comité de vigilance qui, à tous les ans, va faire un rapport. Ça fait qu'on va commencer à être plus structurés. Puis il va y avoir de la recherche qui va se faire à l'institut national, le directeur national de santé publique va pouvoir donner des mandats — il est assis derrière moi — il va pouvoir donner des mandats à l'Institut national de santé publique pour nous indiquer... de nous donner des données probantes pour prendre des meilleures décisions.

Alors, moi, c'est tout ce que je dis. Je ne dis pas que c'est pour toujours, ce n'est pas ça que je dis, là. Je dis : Pour le moment, gardons ça comme ça, allons-y de façon graduelle. Et c'est pour ça qu'on dit : En ce moment, ce n'est pas possible.

Le Président (M. Merlini) : Mme la députée.

Mme Massé : Mais c'est sûr que toute la question de la recherche, c'est souhaitable, parce qu'effectivement c'est difficile, quand quelque chose est prohibé, quand quelque chose est interdit, est illégal, difficile d'avoir des recherches, disons, qui contiennent l'ensemble des données.

Mais, Mme la ministre, justement pour cette raison-là, dans trois ans, vos recherches probantes n'auront aucune donnée sur qu'est-ce que ça veut dire avoir la liberté de pouvoir cultiver chez soi deux, trois, quatre plants de pot. Ça, on n'aura pas de données probantes là-dessus puisqu'on ne le permet pas.

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : Bien, il y aura certainement des questionnaires qui auront été rendus publics aux gens ou, en tout cas, les gens pourront certainement collaborer à des questionnaires, mais... D'autant plus qu'il y a des provinces où ça aurait été permis, ça fait qu'on pourra avoir les données d'ailleurs aussi, là. Le Canada va recueillir des données. Alors, moi, je suis confiante qu'on va être capables de prendre des meilleures décisions au fur et à mesure, là.

Même dans d'autres pans de la loi, sur des articles qu'on a déjà votés et d'autres qui s'en viennent, moi, je suis convaincue que ça va aller rapidement. Puis il va falloir revoir tout ça, là, rapidement parce que l'évolution va faire en sorte que, ce qu'on vote aujourd'hui, on va peut-être se dire dans deux ans : Hi! Ça, on n'aurait peut-être pas dû, puis ça, on aurait dû, puis il y a tout ça à revoir. Puis moi, je pense, moi, je suis confiante qu'on va évoluer avec un meilleur bagage de connaissances, qu'elles viennent d'ici ou d'ailleurs. On va avoir des bonnes indications.

• (17 h 40) •

Mme Massé : En fait, oui. Et d'ailleurs, si on regarde, la Fédération médicale étudiante est venue nous parler d'expériences, justement, d'ailleurs. Peut-être qu'on n'a pas des données probantes ici, au Québec, c'est normal, ce n'était pas légal encore. Mais qu'on pense en Uruguay, qu'on pense au Portugal, ils évoquent des expériences avec des données. Donc, j'en suis, sur la question d'utiliser des données ailleurs.

Mais il me semble que, si, justement, nous voulons faire la démonstration de cet élément sur lequel il y a énormément de résistance, de dire... le sens des responsabilités de quelqu'un qui décide de cultiver chez eux un plant de pot ou une plante de marijuana, ça serait, il me semble, intéressant d'avoir aussi nos propres données, d'une part, connaissant l'intérêt, pour le peuple québécois, pour plusieurs personnes, pas tout le monde, pour plusieurs personnes, l'intérêt par rapport au cannabis. Je veux dire, même si c'était illégal, on le sait, on ne s'en faisait pas une histoire morale.

Donc, il y a peut-être une ouverture qu'il n'y a pas dans le reste du Canada. Il y a peut-être nos façons d'être en relation avec nos voisins... est peut-être différent. Alors, je trouve qu'on se prive quand même d'une bonne base de connaissances. Tu sais, on pourrait y aller avec un, là, tu sais, si on veut se développer de la connaissance, si on veut se développer du savoir enraciné dans notre particularité québécoise. Peut-être qu'on pourrait y aller avec un pour qu'on puisse avoir ces données-là.

Mais, je sais que... J'essaie d'être convaincante. Je pense que... je vois que je touche la ministre sur certains points, je vois que... Tu sais, quand vous me répétez assez régulièrement, et donc vous le répétez à l'ensemble de la population québécoise, qu'on n'est pas obligés d'attendre trois ans, tu sais, on n'est pas obligés d'attendre cinq ans, on pourrait le faire au bout de trois ans puis même, si on en ressent le besoin, on pourrait le faire quasiment demain matin, est-ce que ce besoin-là... Tu sais? Je ne sais pas, là, si on se met à avoir des manifs dans la rue, là — parce qu'on est fort, nous autres, à Québec solidaire, on aime ça sortir dans la rue avec le monde — si les gens se mettent à sortir dehors puis dire : Ça n'a pas de bon sens, on veut pouvoir être autonomes, on veut que vous nous fassiez... vous enleviez la dimension criminelle, alors on veut que vous nous faites confiance, qu'on est des citoyens responsables, bien, peut-être que ça pourrait...

Je lance une idée, là, aux gens qui nous écoutent, là, puis qui veulent absolument faire pousser leurs plants de pot. Là, vous avez compris comme moi qu'avec la loi, telle qu'elle est là, vous ne pourrez pas, puis qu'on pourrait revoir ça à court terme, puis peut-être même d'ici jusqu'à la fin de l'adoption de ce projet de loi là — parce qu'il y a quand même plusieurs articles, puis il reste 35 jours avant la fin de la session — si vous vous faites entendre... La ministre semble avoir de l'ouverture en disant : Écoutez, on n'est pas obligés d'attendre le cinq ans, tu sais, on peut le faire au bout de trois ans, puis ça peut arriver. En tout cas, je lance ça.

Mon dernier point, puis ça va être vraiment mon dernier, c'est en fait la dimension, j'en ai parlé souvent, de quasiment... tu sais, quand c'est la police qui débarque chez vous parce que tu as un plant de pot parce que tu n'as pas l'argent pour aller te chercher ton gramme à la société. Même si, je le sais, il y a une unanimité ici pour dire qu'on va faire attention, qu'on ne va pas mettre les prix excessifs, qu'on va... etc. Si tu vois la police débarquer chez vous, c'est soit qu'il y a eu délation, donc, je ne sais pas, moi, tu as la peau un peu foncée, le voisin voit ce qu'il imagine être un plant de pot, tu lui tombes sur les nerfs, il appelle, il pense que le voisin a un plant de pot, oups! on prend notre corps policier... Ce qu'on veut éviter, là. Toute la logique de la légalisation, c'est de prendre cette plante-là et de la sortir des mains du crime organisé ou de décriminaliser ça. Bien là, oups! tout d'un coup, hop! on revient avec cette dimension-là, où on dit : Bien là, oui, effectivement, on peut... C'est par la délation, entre autres, qu'on peut découvrir ça.

Ça ne vous inquiète pas, ça, Mme la ministre? Parce qu'on le sait, tu sais, on le sait, c'est démontré, là, c'est la Commission des droits de la personne, ce n'est pas Manon, là, ce n'est pas la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques, qui parle, on le sait, que ça existe, le profilage racial, on sait que ça existe, le profilage social. Est-ce que vous ne craignez pas que le fait de ne pas permettre aux gens qui ont moins de moyens, et les autres, et tout le monde de pouvoir faire pousser quelques plants à la maison, ce n'est pas aussi, peut-être, d'ouvrir une... de porter flanc, comme on dit, à du potentiel de profilage?

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : Bien là, je pense qu'on est rendus loin, M. le Président, à faire du profilage racial avec la production de cannabis. Honnêtement, j'ai presque le goût de dire : Quelqu'un qui est haïssable, il va être haïssable, peu importe le sujet qu'il va toucher. Et on le sait tous, là, c'est une minorité dans la population, mais il faut qu'on vive avec. Puis ce n'est pas l'histoire... Un voisin qui ne veut pas s'entendre avec son voisin, là... Je me rappelle de mes cours au cégep, en droit des affaires, quand on veut s'obstiner puis être haïssable, là, tous les sujets peuvent être bons, à partir de la clôture jusqu'à la feuille d'arbre qui est chez le voisin, puis etc. Alors, je me rappelle très bien de ma première lecture du Code civil avec mon prof, là, je capotais, je me disais : Y a-tu du monde qui font ça vraiment? Ils n'ont pas de... Mais oui. C'est pour ça qu'il est prévu beaucoup de choses dans le Code civil.

Alors, moi, comme je le dis depuis le début, on est en train de légiférer. C'est un processus qui va être évolutif, la légalisation. Pour le moment, de notre côté, on pense qu'il faut interdire la culture à des fins personnelles et, quand on reverra la loi, on sera en mesure de prendre d'autres décisions, peut-être, peut-être pas. Je ne peux pas présumer de l'intention du législateur à ce moment-là. Mais, en tout cas, on aura de meilleures bases de données, puis, comme je vous dis, ça ne va rien changer, un haïssable va rester haïssable, que ça soit pour le plant de cannabis, ou bien pour l'arbre qui perd ses feuilles, ou bien pour la clôture qui est mal foutue, ou pour toutes sortes de raisons.

Mais moi, je pense que, si on revient à la base, là... Là, on parle... Honnêtement, je ne vois pas comment quelqu'un peut se mettre à faire du... Ça peut arriver, je ne dis pas que ça ne peut pas arriver, ça peut certainement arriver...

(Interruption)

Une voix : Excusez. Je n'ai aucune idée c'est quoi.

Mme Charlebois : Ça va finir par arriver.

Des voix : ...

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre? Ce n'était pas un verre d'eau, mais c'était un cellulaire.

Mme Charlebois : Non, mais, je ne sais pas, il a parti tout seul, puis je suis ricaneuse. Je m'excuse, M. le Président.

Le Président (M. Merlini) : Je vous en prie, Mme la ministre.

Mme Charlebois : C'est comme ça, c'est de famille, chez nous, on est ricaneux de nature. On n'a pas besoin de rien consommer pour être ricaneux.

Mais, ceci étant dit... je ne sais plus trop où j'étais, mais ce que je dis, c'est que nous, on pense que, pour le moment, avec l'interdiction de culture à des fins personnelles, ce serait mieux. On aura des meilleures bases de données, on pourra analyser ce qui se sera passé ailleurs. On aura aussi des recherches, il va y avoir des questionnaires auprès de la population. On va être en mesure de prendre des meilleures décisions quand on va revoir la loi. Et, si on décide de la revoir avant le trois ans, parce qu'il y aura une urgence quelconque, bien, on la reverra. Puis en même temps, bien, on profitera de revoir... Il y a beaucoup d'articles, là, que, je suis convaincue, moi, là, dans trois ans, là, on va pouvoir se rasseoir, puis se regarder, puis se dire : Aïe! Ça, on n'avait jamais pensé à ça, là.

Alors, moi, je demeure prudente là, je ne ferme pas la porte pour le futur. Je dis : Pour le départ, soyons plus restrictifs, puis ensuite on verra. Je ne dis pas jamais, là. Je dis que, pour l'instant, nous, on considère que, pour partir, une interdiction de culture à des fins personnelles, le temps qu'on fasse nos boutiques, le temps qu'on installe toutes nos choses, il y aura en ligne aussi, la vente en ligne... Il y a toutes ces choses-là qui vont nous permettre de rendre le produit accessible pour tous, alors donnons-nous une chance de mettre en place nos choses, d'évaluer.

Puis, comme je vous dis, il y aura le rapport du comité de vigilance à tous les ans, là, qui va nous faire des comptes rendus sur plein de choses. Ils vont faire des constats, eux autres aussi, à tous les ans, ils vont donner ça au ministre de la Santé. Le ministre de la Santé, il a 30 jours pour le rendre public, sauf si la Chambre ne siège pas. Mettons qu'ils rendent leur rapport public le 30 juin, bien, ça ira à la rentrée de septembre, pas plus tard que 15 jours après la rentrée, là.

Alors, cette base de données là, avec les données qu'on aura de l'institut national, là, tout le monde va suivre ça très serré, là, je le sens et je le souhaite. Je le souhaite, qu'il y ait de la recherche, pas juste en parler. Il faut qu'on fasse de la recherche, il faut qu'on soit capables de bien documenter pour bien ajuster quand viendra le moment d'ajuster. Alors, je ne veux pas être désagréable, ce n'est pas le but de l'exercice, là, mais on en a discuté longuement hier avec l'article sur la possession, à 4.1. Là, on est rendus dans la culture. Et, comme je le dis, dans trois ans, s'il y a lieu de revoir ça, je le répète, ça va nous... tout le monde, hein, on va se rasseoir puis on va réévaluer.

Parce que, tu sais, la boisson, je n'étais pas là dans le temps, quand il y a eu le même processus, là, mais...

Une voix : ...

Mme Charlebois : Oui, c'est sûr. Je suis quand même née plus tard que ça. Mais tout ça pour vous dire qu'il y a eu toute une évolution, puis ça a été rapide, là, rapide, rapide, rapide. Alors, ça sera sûrement la même chose pour la légalisation. C'est pour ça que je dis : Je ne ferme pas de portes pour le futur. Je ne dis pas : À tout jamais, je suis contre ça. Non, non. C'est : Pour le départ, faisons ça comme ça, puis on reverra dans trois ans.

Le Président (M. Merlini) : Mme la députée.

• (17 h 50) •

Mme Massé : Mais j'insiste encore. Parce qu'il y a un article où on va pouvoir en parler, puis après ça, bien, le tour va être joué, tu sais? Mme la ministre, vous disiez : Des haïssables, il y en a partout, puis, oui, c'est vrai, puis les enjeux de clôture, et etc. Sauf que, là, il y a un enjeu, c'est qu'il y a des amendes. Si tu veux faire pousser du pot chez vous parce que tu es pauvre, puis qu'en plus tu as la peau un peu foncée, puis que tes voisins ont décidé de s'en prendre à toi, bien, tu as une amende au bout.

Puis ça, moi, ce n'est pas une histoire que je raconte toute seule, là. On le sait, quand on regarde qui sont dans les prisons, qui sont notamment particulièrement identifiés, l'idée du profilage racial. Puis là, woups! tout d'un coup, tu es passible d'une amende de 250 $ à 750 $ puis tu peux en plus voir ça doubler parce que, dans les faits, tu es pris en récidive. Ça fait que, pour moi, on ne règle rien avec ça.

Je comprends que vous dites : On pourra le revoir, et tout ça. Mais, un, au Québec actuellement, même si c'est illégal, il y a déjà des gens, pour des raisons de santé, même s'ils n'ont pas de permis, des raisons de qualité, des raisons de pauvreté, qui cultivent, et, ces gens-là, je pense qu'on fait comme si ça n'existait pas. Mais ça existe. Et là on va se priver vraiment de données probantes, considérant qu'on n'étudiera pas cette dimension-là de la consommation personnelle, parce que ce qu'on veut regarder, c'est surtout la dimension de la vente, de la distribution ou la production. Moi, je me dis : On manque une belle occasion de nous équiper collectivement pour l'évaluer, cette dimension-là, parce que...

Est-ce que le crime organisé va arrêter de s'organiser puis de produire pour pouvoir vendre? Je ne le sais pas. On se le souhaite. C'est l'objectif. Puis on veut être de la partie pour s'assurer de ça. Mais une des façons de justement briser ces poches, qui pourraient émerger, de crime organisé qui maintient l'organisation criminelle autour de la vente du cannabis, bien, c'est de donner au monde qui n'ont pas les moyens de pouvoir, malgré la distribution en vente en ligne, malgré la distribution avec la société du cannabis... bien, c'est de leur donner le moyen de venir faire un pied de nez au crime organisé. Ça aussi, c'est un autre argument. Mais on ne pourra pas l'évaluer, on ne pourra pas l'évaluer, ce qui pose un enjeu.

D'ailleurs, je nous rappelle juste que, lorsque la Fédération médicale est venue, c'est un des mémoires qui a essayé de nous faire voir, d'une perspective médicale, là, avec... d'essayer de nous faire voir qu'est-ce qui se passe ailleurs dans le monde. Et notamment, dans leur présentation, le mémoire faisait état de la légalisation en Uruguay. Alors, ils ont les mêmes objectifs que nous autres : «L'objectif premier est de combattre la criminalité et le trafic des drogues — "good", on a le même objectif — le cannabis étant l'une des drogues les plus consommées dans le pays.» Ici, je ne sais pas si c'est le Ritalin ou les antidépresseurs, mais, en tout cas, le cannabis comme plante est certainement la plus consommée au Québec. «La loi invoque la protection de la santé publique dans ses premières dispositions — je pense qu'on est dans la même gang — son usage médical thérapeutique — ça, c'est déjà réglé au Canada — et sa volonté de protéger les habitants du pays du risque qu'impliquent les liens avec le commerce illégal et le trafic de drogues.» C'est intéressant. «La loi prévoit que les citoyens en âge de plus de 18 ans peuvent s'inscrire sur un registre — ah! une piste pas explorée si on veut des données probantes. Je ne dis pas que je le souhaite, là. Je suis en mode chercher une solution — afin de pouvoir cultiver jusqu'à six plants — quand même! — à la maison pour leur consommation personnelle.» Bon, «ils peuvent également former des groupes de producteurs», des microproductions, là, comme le propose le Canada.

Alors, c'est intéressant parce que, là, 2013... c'est quand même 2013-2018, ça fait cinq ans, ils ont une bonne pratique. Ça nous est ramené par la Fédération médicale étudiante puis ça vient nous dire : Bien, il y a peut-être des façons de se donner des poignées pour lutter contre le crime organisé, s'assurer une meilleure santé publique, s'assurer de briser le lien entre le commerce illégal... et ça s'appelle cultiver à la maison. C'est tous nos objectifs. Mais c'est comme si, dans tous ces objectifs-là, on met de côté l'idée de pouvoir cultiver pour des fins personnelles à la maison.

Alors, en voilà, des données probantes, Mme la... bien, probantes, non parce que «probantes», ça veut dire plus qu'un essai, comme dirait l'autre. Mais en voilà, des données, en voilà, des données qui cherchent à viser les mêmes objectifs que nous. Ils le font depuis 2013, puis leur hypothèse — puis je n'ai pas les données, peut-être que vous les avez — bien, c'est de dire... bien, de permettre aux gens de cultiver à la maison. Eux autres, ils rajoutent un élément registre. Ça peut être une piste. Vous recevez ça comment? Parce que vous étiez là, je le sais, lors de leur présentation. Vous recevez ça comment?

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : Bien, je les ai entendus, mais j'ai entendu aussi que ça ne fonctionnait pas très bien, qu'ils étaient en pleine évolution. Puis, encore là, il faut établir un registre étatique, hein, vous savez ça aussi. C'est complexe, leur affaire, ce n'est pas simple. Non seulement c'est complexe, mais, pour faire cette autoproduction dont vous parlez, là, il y a des choix : coopérative d'usagers, achats en pharmacie, production-distribution — ça, je ne sais pas trop c'est quoi, là. Mais tout ça pour vous dire que ça ne fonctionne pas tant que ça. Ils nous ont dit que les gens, puis je n'ai pas tout... je ne l'ai pas avec moi, là, le mémoire, mais ce n'était pas un franc succès, il y avait beaucoup à améliorer.

Et c'est dans ce sens-là, moi, que je dis que le trois ans va nous être fort utile, là. Je vous le dis, là, ce n'est pas parce que je suis fermée, c'est juste parce que, tant qu'à partir de quoi puis le faire tout croche, j'aime autant qu'on prenne notre temps pour bâtir quelque chose qui a plus de bon sens. Et là les gens n'aiment pas l'idée de s'inscrire dans un registre étatique, ce qui fait qu'ils n'ont pas tant d'inscriptions que ça, là, pour tout ça. Alors, ils ne sont pas plus avancés. Puis ça, ce n'est pas que... Ils ont des bonnes intentions, mais ils ne sont pas arrivés à leurs fins encore. Puis, vous le dites, c'est depuis 2013. Puis là le rapport que j'ai, ça date de février 2018, c'est assez récent, c'est assez récent. Alors, ça nous indique que ça ne fonctionne pas, leur façon de faire, bien qu'ils ont des objectifs nobles.

Prenons le temps, pendant ces trois ans-ci, de réfléchir à ce que nous voudrions faire pour la suite des choses, mais le faire correctement, adéquatement, toujours en poursuivant nos objectifs de sécurité et de santé publique.

Le Président (M. Merlini) : Mme la députée.

Mme Massé : Oui. Dernière... autour de ça. C'est sûr, et moi, je ne suis pas allée vers le registre, j'étais assurée que la dimension de leur projet qui ne marchait pas, c'était le registre. Parce que le registre est en train de te faire taguer, te faire identifier, surtout, la répression, et tout ça. Pour toutes sortes de raisons, moi, je comprends que le registre, ce n'était pas intéressant. Et c'est d'ailleurs pourquoi ce n'est pas le chemin que je privilégie. Le chemin que je privilégie, c'est que les gens puissent faire pousser, comme le dit le gouvernement canadien, quatre plants.

Mme la ministre, comment vous allez... Est-ce que, dans les études que vous allez faire, vous pouvez m'assurer que vous allez trouver des indicateurs, avec les gens qui vous entourent, pour «monitorer», là... je sais que c'est un anglicisme, mais pour surveiller le crime organisé, comment ils vont occuper l'espace qu'on laisse de libre parce qu'on ne laisse pas les gens cultiver chez eux? Est-ce que vous allez m'assurer que vous allez prendre soin de bien surveiller cette dimension-là?

Le Président (M. Merlini) : En moins d'une minute, Mme la ministre.

Mme Charlebois : C'est évident, M. le Président, qu'on va tenir compte dans nos études, nos recherches, de toute cette évolution du marché criminel, c'est superévident. C'est ce qu'on cherche à enrayer avec le projet de loi. Ça fait que c'est clair qu'on va suivre ça, un peu comme on suit la consommation de cannabis... bien, pas de cannabis, de tabac, excusez-moi — méchant lapsus. Alors, on va faire la même chose pour le cannabis.

Mais on pourra y revenir. Là, je sais que, M. le Président, vous brûlez d'envie de me dire que les travaux sont terminés, puisqu'il est 18 heures.

Le Président (M. Merlini) : Merci, Mme la ministre, membres de la commission. Il est en effet 18 heures.

Et, compte tenu de cette heure, la commission ajourne ses travaux au jeudi 22 mars 2018, après les affaires courantes, où elle se réunira en séance de travail. Bonne fin de soirée à tous.

(Fin de la séance à 18 heures)

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