Journal des débats de la Commission de la santé et des services sociaux
Version préliminaire
42e législature, 1re session
(27 novembre 2018 au 13 octobre 2021)
Cette version du Journal des débats est une version préliminaire : elle peut donc contenir des erreurs. La version définitive du Journal, en texte continu avec table des matières, est publiée dans un délai moyen de 2 ans suivant la date de la séance.
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Le
vendredi 2 octobre 2020
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Vol. 45 N° 63
Interpellation du député de Rimouski à la ministre responsable des Aînés et des Proches aidants sur le sujet suivant : La nécessité de tenir une enquête publique indépendante sur la gestion de la pandémie de COVID-19 dans les CHSLD
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Intervenants par tranches d'heure
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Provençal, Luc
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LeBel, Harold
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Blais, Marguerite
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Arseneau, Joël
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Provençal, Luc
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Poulin, Samuel
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Sauvé, Monique
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Blais, Marguerite
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Boutin, Joëlle
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LeBel, Harold
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Provençal, Luc
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Lecours, Isabelle
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Sauvé, Monique
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Blais, Marguerite
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Boutin, Joëlle
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Zanetti, Sol
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Provençal, Luc
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Blais, Marguerite
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Poulin, Samuel
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Sauvé, Monique
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Arseneau, Joël
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9 h 30 (version révisée)
(Neuf heures cinquante-neuf minutes)
Le Président (M. Provençal)
: À l'ordre, s'il vous plaît! Je déclare la séance de la Commission
de la santé et des services sociaux ouverte. Je demande à toutes les personnes
dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils
électroniques.
La commission est réunie afin de procéder
à l'interpellation du député de Rimouski à la ministre responsable des Aînés et
des Proches aidants sur le sujet suivant : La nécessité de tenir une
enquête publique indépendante sur la gestion de la pandémie de COVID-19 dans
les CHSLD.
Mme la secrétaire, y a-t-il des
remplacements?
La Secrétaire
: Oui, M.
le Président. Mme Blais (Abitibi-Ouest) est remplacée par Mme Boutin
(Jean-Talon); M. Tremblay (Dubuc) est remplacé par M. Poulin
(Beauce-Sud); M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine), par M. LeBel
(Rimouski).
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup. Je comprends qu'il y a… il n'a pas remplacé.
Des voix
: …
• (10 heures) •
Le Président (M. Provençal)
: On parle de remplacement. O.K. Donc… mais vous allez avoir
les deux droits de parole, je vais le <mentionner. Oui. Bien, on va
s'assurer…
>
10 h (version révisée)
< La Secrétaire: ...
M. Poulin
(Beauce-Sud),
M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine) par
M. LeBel
(Rimouski).
Le Président (M. Provençal)
:
Merci
beaucoup. Je comprends qu'il n'est pas
remplacé.
Des voix
: ...
Le Président (M. Provençal)
:
On parle de remplacement?
O.K., donc... mais
vous allez avoir les deux droits de parole. Je vais le >mentionner.
Des voix
: ...
Le Président (M. Provençal)
: Oui, bien, on va s'assurer qu'il l'a présentement.
Je comprends qu'il y a une entente à
l'effet que l'opposition officielle interviendra lors de la deuxième, quatrième
et sixième série d'interventions, alors que le deuxième groupe d'opposition
interviendra lors de la cinquième série d'interventions. Par ailleurs, je
comprends qu'il y a consentement pour permettre au député des
Îles-de-la-Madeleine de participer à la séance d'aujourd'hui et d'intervenir
lors du premier bloc d'intervention du troisième groupe d'opposition et lors
des remarques finales. Est-ce qu'il y a consentement?
Des voix : ...
Le Président (M. Provençal)
:Consentement. Merci. M. le député de
Rimouski, vous avez la parole pour 10 minutes.
Exposé du sujet
M. Harold LeBel
M. LeBel : Merci, M. le
Président. Bon matin, tout le monde. Ce matin, l'idée... on appelle ça une
interpellation, mais c'est de faire un débat sur ce qu'il s'est passé au
printemps dernier dans nos CHSLD et de voir comment on peut répondre aux Québécois
puis aux Québécoises de cette situation-là et comment on peut analyser tout ce
qu'il s'est passé, mais d'une façon publique pour que tout le monde puisse voir
puis participer à cette réflexion sur comment on a vécu ce printemps dans nos
CHSLD. C'est pour ça qu'on demande puis qu'on va redemander, semaine après
semaine, on ne lâchera jamais, une commission d'enquête indépendante, bien sûr,
mais publique, pour que les Québécois puissent participer à cette réflexion-là
puis puissent y assister, entendre des témoins qui viennent nous expliquer
qu'est-ce qu'il s'est passé et qu'est-ce qu'ils pensent qui pourrait être
amélioré pour l'avenir.
Il y a plein de raisons qui pourraient...
qui font en sorte qu'on devrait avoir cette commission-là puis qu'on va l'avoir
un jour, je suis certain, mais la principale raison, c'est
3 939 décès, près de 4 000 décès. On s'habitue, avec les
points de presse, et tout ça, de nommer le nombre de décès, mais je le sais,
puis la ministre, puis tout le monde ici, les députés, on le sait que, derrière
le nombre, il y a des personnes, il y des gens, il y a des dames, il y a des
monsieurs, il y a des familles, il y a des personnes qui sont parties, que le
deuil n'est pas encore fait. Ça fait que, derrière les chiffres, il y a des MM. Tremblay,
Nguyen, il y a des monsieurs... et c'est pour eux autres qu'on fait cette
démarche. C'est ces gens-là, ces familles, ces gens qui sont décédés dans des
situations... puis on l'a vu, là, dans des émissions tout dernièrement à TVA
avec J.E. ou Enquête à Radio-Canada, des gens qui sont morts dans
des histoires d'horreur, d'une façon épouvantable, et les familles doivent
faire le deuil de tout ça. Et, maintenant, comment on fait? Comment on fait
pour faire le... Ça va?
Le Président (M. Provençal)
: Oui, ça va. Allez-y, M. le député de Rimouski.
M. LeBel : Comment on
fait pour faire la lumière sur tout ça, pour répondre aux <citoyens?
Parce qu'il y a des...
M. LeBel :
…épouvantable, et les familles doivent faire le deuil de tout ça. Et,
maintenant,
comment on fait, comment on fait pour faire… Ça va?
Le Président (M. Provençal)
:
Oui, ça va. Allez-y,
M. le député de
Rimouski.
M. LeBel : Comment on
fait pour faire la lumière sur tout ça, pour répondre aux >citoyens?
Parce qu'il y a des politiciens… comme politiciens, comme législateurs, on pose
des questions, mais c'est surtout la population qui pose des questions.
Pourquoi les mesures essentielles pour prévenir la propagation du virus ont été
mises en place si tardivement dans les CHSLD? Pourquoi aucune directive n'a été
envoyée dans les CHSLD quand on a su que les personnes pouvaient être
asymptomatiques? Pourquoi les mesures de quarantaine des employés qui
revenaient de voyage étaient non rétroactives? Pourquoi les équipements de
protection n'étaient pas envoyés en priorité dans les CHSLD? Pourquoi il était
impossible d'arrêter les mouvements de personnel? Pourquoi des experts, des
médecins gériatres n'étaient pas écoutés par la Santé publique? Que le comité
des aînés, le comité aîné a été créé un mois après le début de la tragédie?
Surtout, comment se fait-il que des personnes soient décédées seules et, pour
certaines personnes, de faim et de déshydratation? Toutes des questions, comme
je dis, que les politiciens et politiciennes peuvent poser, mais c'est des citoyens,
des professionnels de la santé, des proches qui n'ont pas pu vivre leur deuil,
c'est des victimes collatérales du système.
Ma question hier ici, au salon bleu, qui
redemandait encore à la commission d'enquête publique, la ministre a répondu,
puis je cite : «Sylvain Gagnon a fait un rapport au CHSLD privé Herron, il
est sorti. Yves Benoita fait un rapport sur les 100 morts au CHSLD
Sainte-Dorothée. Et le gouvernement a demandé à Joanne Castonguay, la
Commissaire à la santé et au bien-être, de faire une enquête qui sera
indépendante.» En anglais, on dit du «name-dropping», tu sais, les gens ne nous
suivent pas là-dedans, là, il y a différents rapports qui arrivent de partout.
Et le texte de Paul Journet dans LaPresse
aujourd'hui, c'est assez clair, là, la Protectrice du citoyen, elle dit : «Je
ne laisserai pas se faire tabletter mon rapport.» Ce qu'elle dit, c'est que les
derniers rapports qui ont été tablettés, ses rapports à elle. Le journaliste
disait : «Or, le lendemain, un autre rapport a été déposé sur les
résidences pour aînés sans même avoir droit à une conférence de presse. Il y a seulement
eu un communiqué diffusé vendredi, après 15 heures, le moment de la semaine
où les médias sont les moins attentifs.» C'est ça, les rapports. Les rapports
faits comme ça, commandés par le gouvernement, déposés au gouvernement, qui
passent à travers le filtre des conseillers en communication, qui nous dit :
Bien là, ce rapport-là, on va sortir tel élément. On va sortir telle heure, une
heure après la conférence de presse des ministres pour être sûr que le ministre
ne répondra pas, c'est ce qui a été fait cette semaine.
On va s'assurer qu'il y ait une stratégie
de communication pour que ça fasse le moins de mal possible. C'est ça, les
rapports, c'est ça, les rapports, c'est comme ça que ça fonctionne. Et le texte
du journaliste, ce matin, est très clair là-dessus et vraiment nous donne…
quand j'ai vu ça, ce matin, j'ai dit : Ça tombe pile, c'est exactement ce
qu'on dit. Ce n'est pas des rapports comme ça que ça nous prend, c'est vraiment…
l'enquête est publique, publique, indépendante, qui va se faire à visière
levée, qui ne sera pas gérée par les sbires en communication derrière les
portes closes du cabinet du premier ministre. Ce <n'est pas comme…
M. LeBel : ...quand j'ai
vu ça ce matin, j'ai dit : Regarde, ça tombe pile, là. C'est
exactement
ce qu'on dit. Ce n'est pas des
rapports comme ça que ça nous prend, c'est
vraiment une
enquête qui est publique, publique, indépendante,
qui va se faire à visière levée, qui ne sera pas gérée par des sbires en
communication
derrière les portes closes du cabinet du
premier ministre. Ce >n'est
pas comme ça que ça doit se faire. Puis ça ne doit pas... Parce que ça prend...
La population doit voir, doit comprendre, doit pouvoir, même, témoigner s'ils
veulent témoigner. On pourrait les entendre, venir expliquer qu'est-ce qu'ils
ont vécu et qu'est-ce qui pourrait être fait. Je pense, entre autres, à tous
les proches aidants qui ont vécu cette situation-là.
Puis ce que je dis aussi, on le doit aux
familles, on le doit à tout ce monde-là. Mais ça fait partie d'un genre de
processus de guérison pour que les gens puissent vraiment participer à... on
dit débriefer, mais participer à cette réflexion sur qu'est-ce qu'il s'est
passé et comment ils peuvent... leur donner la parole, qu'il y ait une
commission indépendante avec des commissaires qu'on pourrait nommer, qui
pourraient aller dans les régions entendre les gens pour qu'on puisse évacuer
ce qu'il s'est passé et expliquer pour... puis ça, je le répète, on le doit à
toutes ces personnes, on parle de 4 000 décès... pour que ces
4 000 décès, ça ne soit pas juste un chiffre, parce que c'est des
noms qu'il y a derrière ça puis qu'on doit être capable de leur donner des
réponses.
Je ne peux pas croire qu'au Québec, après
une tragédie aussi meurtrière qu'on a vécue, qu'on va finir ça par un rapport
qui va être déposé au gouvernement et qu'il y aura une gestion politique du
rapport. Je ne peux pas croire ça. Je pense qu'on est... Actuellement, on a
vécu tellement de choses, un drame, qu'on doit être capable de se placer
au-dessus de tout ça et de faire en sorte que tout le monde puisse participer à
la cette réflexion, comment on a traité les aînés.
Actuellement, ce qu'on fait, puis je sais
que la ministre est de bonne foi, là, puis la pression est énorme sur ses
épaules, je le comprends, je le dis souvent puis je... Je le... Mais, quand la
ministre nous dit en pleine télé que c'est un échec, ce qu'il est arrivé dans
les CHSLD, puis qu'elle lève les épaules quand on lui dit : Est-ce que
vous auriez pu faire plus? Je comprends son désarroi, mais, en même temps, la
population qui voit ça, ils se disent : Là, on veut avoir des réponses. On
veut avoir la vérité. On veut savoir qu'est-ce qu'il s'est passé. Pas pour
donner des blâmes pour donner des blâmes. On sait, là, que cette pandémie-là,
que c'est arrivé... N'importe quel gouvernement aurait été pris un peu
là-dedans et c'est... On n'est pas jamais préparé à ça. On sait ça, mais on
doit aller au bout des choses pour les gens, pour les personnes. On doit aller
au bout de la... Donner la vérité. Et la vérité, ça ne peut pas être par des
rapports qui vont être publiés sur Internet, des rapports qu'on va... qu'on
va... Je ne peux pas dire manipuler, ce n'est pas un bon mot, mais c'est des
rapports qui vont être gérés d'une façon de communication politique. Ça ne peut
pas... Ça ne peut pas être ça. Je ne peux pas croire dans le plus profond de
moi-même que c'est ça qu'on va avoir.
Il y a eu... puis je reviendrai plus tard,
mais il y a eu d'autres commissions <d'enquête sur des...
M. LeBel : ...qu'on
va... je ne peux pas dire «manipuler», ce n'est pas un bon mot, mais c'est des
rapports qui vont être gérés, en fait, d'une façon de
communication
politique.
Ça ne peut pas. Ça ne peut pas être ça. Je ne peux pas croire, dans le profond
de moi-même, que
c'est ça qu'on va avoir.
Il y a eu, puis je
reviendrai plus tard, mais
il y a eu d'autres
commissions >d'enquête
sur des drames comme ça, et ça fait partie du processus de guérison.
• (10 h 10) •
Parce qu'on a été blessé, tout le Québec a
été blessé, au printemps passé. On est capable, tous les partis politiques
confondus, à arriver à se donner une façon pour répondre aux Québécois puis
leur permettre de participer à la grande réflexion nationale qu'on doit se
donner sur ce qui est arrivé à nos aînés, à nos familles. Je le sais... Personnellement,
dans ma famille, je pense à des cousins, des cousines, je pense à eux autres en
parlant, ils n'ont pas fait le deuil encore, puis je sais qu'il y a plein de
monde de vous autres, que vous connaissez qui n'ont pas encore fait le deuil.
Bien, pour ces gens-là, on a besoin d'une vraie commission d'enquête qui va
faire... qui va lever tout doute, qui n'aura aucune... ça va être très clair
pour tout le monde, on va prendre le temps de bien analyser qu'est-ce qu'il
s'est passé au printemps pour faire en sorte que plus jamais ça n'arrive.
Et s'il faut changer des façons de faire
par rapport à nos aînés, par rapport au traitement qu'on donne à nos aînés,
bien, on pourra le faire ensemble, tout le monde. Il me semble qu'on est rendus
là et il me semble qu'on est capable de faire ça, au Québec, on est capable de
se donner cette façon de faire le deuil de ce qu'il s'est passé, en respect
puis en mémoire de tous ceux qui sont partis, 4 000 personnes. C'est
beaucoup. Merci.
Le Président (M. Provençal)
: Merci. Mme la ministre, je vais vous céder la parole pour
les 10 prochaines minutes, pour votre déclaration d'ouverture. À vous la
parole, madame.
Réponse de la ministre
Mme Marguerite Blais
Mme Blais (Prévost) :
Merci, M. le Président. Nous vivons l'un des pires moments de notre histoire.
Et, tout d'abord, j'aimerais offrir mes plus sincères condoléances aux
personnes et aux familles des personnes qui sont décédées lors de la première
vague et aussi aux personnes qui sont décédées et qui décèdent actuellement
dans cette deuxième vague.
Je vais parler avec mon coeur, du moins,
pour la première partie. Je vais m'adresser à vous, je m'adresse à mes
collègues, aux collègues des oppositions. Vous me connaissez, M. le Président,
j'ai toujours eu à coeur le bien-être des aînés. Nous vivons une pandémie, et déjà,
à notre arrivée, le réseau était brisé. Il n'y avait plus de garde-fou, plus de
chien de garde, un réseau gargantuesque. Dès le début, les yeux du monde entier
étaient tournés vers l'Asie et l'Europe, où les hôpitaux débordaient, où le
personnel devait choisir entre soigner une maman ou une personne âgée. On ne
voulait pas faire ces choix-là, au Québec, chaque être humain a le droit d'être
soigné dans la dignité. On ne voulait vraiment pas faire ce choix au <Québec.
Le réseau manque de personnel, et ce, depuis longtemps...
Mme Blais (Prévost) :
...ou une personne âgée. On ne voulait pas faire ces choix-là au
Québec.
Chaque être humain a le droit d'être soigné dans la dignité. On ne voulait
vraiment pas faire ce choix au >Québec.
Le réseau manque de personnel, et ce,
depuis longtemps, des années à procrastiner sur l'embauche de préposés aux
bénéficiaires, d'embauche d'infirmières, d'infirmiers, à fermer des cohortes
universitaires, à faire des congédiements massifs, des mises à la retraite
hâtives, et j'en en passe.
M. le Président, dans plusieurs
établissements, dans les CHSLD, dans les résidences privées pour aînés, ce fut
l'horreur. Oui, ce fut l'horreur. Nous avons demandé plusieurs inspections
spécifiques afin de comprendre les drames. Nous avons mandaté des inspecteurs
indépendants expérimentés.
Dans le rapport du CHSLD Herron, il est
clairement défini que le contexte privé du CHSLD, la mauvaise collaboration et
le manque de personnel ont été à la source du drame qu'ont vécu les résidents
et les familles. Il y a des CHSLD privés qui vont mal. Il y a des CHSLD privés
qui vont bien. Il y a des CHSLD publics qui vont mal, comme le CHSLD public de
Sainte-Dorothée à Laval, où on a dénombré le plus grand nombre de décès, et des
CHSLD publics qui vont très bien.
Avons-nous fait tout ce qu'il fallait?
Nous l'avons espéré et nous avons appris en même temps que le virus nous
rattrapait. Mon mea culpa, je l'ai fait, et, M. le Président, je le fais encore
ce matin. Comme notre premier ministre l'a souvent mentionné, nous avons
construit l'avion en plein vol. Tout était nouveau. Tout était à repenser, et
vite.
Au début, nous pensions que nos hôpitaux
allaient être débordés. Nous avons délesté des soins, retardé des chirurgies,
sorti les aînés des centres hospitaliers, transféré dans des CHSLD où nous les
avons crus en sécurité. Mais ce virus est pernicieux. Il est sournois. Il est
vicieux. Il est meurtrier.
On voulait tellement protéger nos aînés
dans les milieux vulnérables qu'on a empêché les proches aidants d'entrer.
Cette décision était crève-coeur, mais elle était empreinte de bonne volonté et
de bienveillance. Nous avons dû renverser le fardeau de la preuve. Plus jamais
les proches aidants ne devront être mis à la porte, oubliés. Si un <CHSLD,
une RPA, une RI désire avoir une dérogation, elle doit en faire la demande au ministère...
Mme Blais (Prévost) :
...le fardeau de la preuve. Plus
jamais les
proches aidants ne
devront être mis à la porte, oubliés. Si un >CHSLD, une RPA, une RI
désire avoir une dérogation, elle doit en faire la demande au ministère, et un
suivi serré sera effectué.
Chaque geste a été scruté, discuté,
analysé. Vous devez vous en douter. Il y a eu de multiples cellules de crise à
partir de tôt le matin jusqu'à tard le soir. Le devoir du premier... du gouvernement,
c'est de protéger ses citoyens. C'est ce qu'on a voulu faire. Au moment où
chaque décision était prise, nous pensions que c'était la bonne décision, celle
qui ferait le moindre mal, car, à chaque décision, il y a l'envers de la
médaille.
Au Québec, nous avons eu la tempête
parfaite : la semaine de relâche plus tôt qu'ailleurs au pays, un manque
criant de personnel, des négociations en cours, des frontières qui tardaient à
fermer leurs portes. La semaine de relâche, M. le Président, a beaucoup joué
contre nos actions, car beaucoup de personnes qui revenaient travailler dans
nos milieux étaient asymptomatiques. On ne savait pas encore que cela était
possible. On a appris en même temps que le monde entier qu'une personne
asymptomatique pouvait être porteuse du virus. Cependant, plus on regardait
vers l'Europe, plus les lits des hôpitaux débordaient, plus il y avait de
morts.
M. le Président, j'ai eu de multiples questions,
dans cette Chambre et ailleurs, surtout sur la mobilité de la main-d'oeuvre qui
a été aussi un facteur déterminant et nommé dans les rapports des enquêteurs.
Ils ont raison. Il faut empêcher le personnel de se promener d'un établissement
à l'autre, d'un étage chaud à un étage froid, d'une zone à l'autre.
Au début, M. le Président, il manquait
d'équipement. Des cargaisons entières ne sont jamais arrivées au pays avec le
matériel. Il fallait devenir indépendant dans la production de notre matériel.
Au début, on ne savait pas que le port du masque pouvait protéger des personnes
asymptomatiques.
J'ai eu des critiques, des questions, avec
raison, parce qu'il manquait de préposés aux bénéficiaires, qu'ils n'étaient
pas assez payés. On y a remédié. 7 100 préposés ont été formés et engagés,
et on est en train d'en former 3 000 autres. M. le Président, les
Québécoises, les Québécois ont levé la main, se sont mobilisés, ont changé de
carrière, sont sortis de leur retraite. On peut collectivement être fiers de
leur engagement en temps de pandémie.
On a ajouté des primes <COVID...
Mme Blais (Prévost) :
…3 000 autres.
M. le Président, les
Québécoises, les
Québécois
ont levé la main, se sont mobilisés, ont changé de carrière, sont sortis de
leur retraite. On peut collectivement être fiers de leur engagement en temps de
pandémie.
On a ajouté des primes >COVID et,
à la fin des négos, nos préposés aux bénéficiaires auront un meilleur salaire
et de meilleures conditions. Nous avons été clairs et fermes : pour le
réseau de la santé, la mobilité, c'est terminé. Seule une situation
exceptionnelle, tel un bris de service, justifie un déplacement. Cette décision
doit être documentée et approuvée.
M. le Président, je le disais il y a
quelques minutes, la pénurie de main-d'oeuvre perdure depuis de nombreuses
années. Nous avons tout mis en place pour recruter et valoriser les professions
de la santé. Dans les derniers jours, c'est 3 523 candidats à
l'exercice de la profession d'infirmières et d'infirmiers, dont
155 praticiennes spécialisées qui ont passé leur examen professionnel. Il
s'agit de la plus grande cohorte connue de l'Ordre des infirmiers et des
infirmières du Québec. Je tiens à les féliciter, à les encourager, et surtout à
leur dire merci. Merci pour votre engagement personnel, professionnel et même
familial.
En plus du personnel, un élément majeur
manquait à notre réseau. Dans mes visites, nombre de fois, j'ai entendu des
familles et du personnel me dire qu'il n'y avait pas de patron dans la bâtisse.
Pendant la première vague, nous n'avons… encore pris davantage conscience du
problème qu'avait créé le gouvernement précédent, où 1 300 cadres ont
été coupés en 2015. Dernièrement, nous avons pris l'engagement de remédier à la
situation et que chaque CHSLD aurait un gestionnaire sur place. Nous avons
réglé le problème en quelques semaines. Chaque CHSLD a désormais un gestionnaire
qui travaille sur place et qui sera imputable de sa gestion.
• (10 h 20) •
M. le Président, je suis en accord avec
beaucoup de critiques de la part de mes collègues. Cependant, je ne suis pas en
accord avec les propos concernant le Commissaire à la santé et au bien-être, et
j'y reviendrai.
Le Président (M. Provençal)
: Nous allons débuter la période des échanges avec le député
du troisième groupe d'opposition, le député des Îles-de-la-Madeleine, pour les
cinq prochaines minutes.
Argumentation
M. Arseneau : Merci
beaucoup, M. le Président. Alors, comme mon collègue l'a exprimé, la crise dans
les CHSLD du printemps dernier, c'est une tragédie dont les Québécois vont se
souvenir toute leur vie, parce qu'on l'a vécue essentiellement en direct à la
télévision, sans compter ceux qui l'ont vécue directement, là, collés à la
fenêtre des CHSLD desquels ils étaient exclus, exclus d'aller voir leurs
proches, aller voir leurs parents.
Il y a des <blessures, qui ont été
provoquées par les…
M. Arseneau : ...toute
leur vie
parce qu'on l'a vécue essentiellement en direct à la
télévision, sans compter ceux qui l'ont vécue
directement, là, collés à
la fenêtre des CHSLD desquels ils étaient exclus, exclus d'aller voir leurs
proches, d'aller voir leurs parents.
Il y a des >blessures qui
ont été provoquées par les événements, là, qui prendront des années à guérir et
à soulager, mais il y a un moyen de soulager la souffrance, c'est d'aller au
fond des choses. M. le Président, l'hécatombe qu'on a connue, c'est beaucoup
trop grave pour que cette analyse, là, des événements soit faite derrière les
portes closes du gouvernement. Pour les familles et pour qu'on fasse
collectivement la paix avec ce drame innommable, on doit avoir une enquête
publique.
La ministre vient d'apporter un certain
éclairage sur la situation, un certain jugement, certaines analyses. C'est
malheureusement trop court. On ne peut pas se contenter de ces réponses. La
ministre, je le regrette, et le gouvernement ne peuvent pas être juge et partie
sur la situation du printemps et des 15, ou 25, ou 30 dernières années de
décisions qui ont peut-être donné le résultat. Il faut aller beaucoup plus loin
dans l'analyse, de façon beaucoup plus profonde. On doit faire la lumière sur
ce qu'il s'est passé et répondre à de nombreuses questions, et j'en ai
quelques-unes.
Pourquoi près de 4 000 de nos aînés
sont morts dans les CHSLD, dans des conditions absolument inimaginables?
Pourquoi plusieurs ont souffert de déshydratation, de malnutrition, de peur et
d'anxiété? C'est ce qu'on pourrait appeler mourir dans l'indignité. Pourquoi
des parents, des grands-parents ont rendu leur dernier souffle seuls, isolés de
leurs familles et trop souvent dans d'atroces souffrances auxquelles on a été
confrontés, tous, Québécois, ensemble, en direct à la télévision?
Comment peut-on se contenter d'un rapport
produit par la machine bureaucratique? Comment peut-on parler, là, de
négligence organisationnelle ou d'une série de décisions historiques, là, qui
auraient mené à un hécatombe comme celui-là?
Il faut expliquer, il faut décortiquer, il
faut pouvoir faciliter la compréhension de tous pour générer une certaine paix,
une certaine acceptation et, pour toutes les familles endeuillées, favoriser le
deuil.
Pourquoi nos professionnels de la santé en
CHSLD ont-ils été majoritairement contaminés par la COVID-19, à la hauteur de
5 000 travailleurs au mois de mai, certains étant même décédés au
combat et ayant contaminé des patients au passage?
Pourquoi est-ce que
1 000 militaires ont dû être déployés par l'armée canadienne, dans
20 CHSLD du Québec, en renfort pour combler le manque criant de personnel
dans les CHSLD?
Pourquoi est-ce que le CHSLD Vigi
Mont-Royal, au pire de la pandémie, comptait 100 % de ses <patients
infectés par la COVID-19T?
Pourquoi certains CHSLD ont-ils
manqué...
M. Arseneau : …dans
20 CHSLD du Québec, en renfort pour combler le manque criant de personnel
dans les CHSLD? Pourquoi est-ce que le CHSLD Vigi de Mont-Royal, au pire de la
pandémie, comptait 100 % de ses >patients infectés par la COVID-19?
Pourquoi certains CHSLD ont-ils manqué cruellement d'équipements de protection
individuelle? Pourquoi est-ce qu'on a forcé les professionnels à utiliser des
équipements, des gants, des masques et des jaquettes souillés depuis deux,
trois, quatre, cinq jours? Pourquoi est-ce que les CHSLD n'avaient pas de plan
de remplacement des employés infectés et aucune stratégie pour faire face à une
éclosion? Pourquoi est-ce que le CHSLD Sainte-Dorothée… les patients testés
positifs, en zone rouge, étaient séparés par un simple rideau de douche des
autres patients qui attendaient leur résultat de dépistage? Pourquoi les
employés qui présentaient des symptômes de la COVID-19 ont-ils été forcés de
continuer à travailler auprès des patients des CHSLD? Pourquoi des familles
n'ont jamais été informées de l'état de santé de leurs parents avant qu'il ne
soit trop tard, avant qu'ils cessent de manger, avant qu'ils tombent dans un
état comateux? Pourquoi est-ce que la Colombie-Britannique a mieux fait que
nous? Pourquoi est-ce qu'on a été incapable d'interdire la mobilité de
personnel? Pourquoi aucune directive concernant la prévention et le contrôle
des infections n'avait-elle été envoyée dans nos CHSLD avant la mi-mars, alors
qu'on savait, depuis le mois de janvier, que c'étaient les aînés qui seraient
les plus touchés par le virus?
M. le Président, la seule stratégie qu'on
avait, c'est que le virus n'entre pas les CHSLD, mais il est entré, et on était
mal préparés pour y faire face. Le gouvernement ne pourra pas faire obstacle à
la vérité. Les familles ont le droit de savoir, et c'est uniquement avec une
enquête publique indépendante que ce sera possible. Les familles ont surtout le
droit d'être entendues, M. le Président.
Le Président (M. Provençal)
: Merci, M. le député. Mme la ministre, je vais vous recéder
la parole pour cette période d'échange.
Mme Blais (Prévost) : M.
le Président, je l'ai dit, j'ai fait mon mea culpa, je prends ma part du blâme.
Je suis en accord avec plusieurs critiques, mais je ne suis pas d'accord avec
la critique concernant le Commissaire à la santé et au bien-être.
Tout d'abord, la loi constitutive sur le
Commissaire à la santé et au bien-être, article 21, lui donne tous les
pouvoirs d'une commission d'enquête, à l'exception de celui d'imposer l'emprisonnement.
C'est dans la loi, M. le Président. D'ailleurs, Mme Joanne Castonguay l'a
réaffirmé lors d'une entrevue à LaPresse, le 19 août
2020. Elle dispose notamment du pouvoir d'astreindre les témoins à comparaître.
M. le Président, le Commissaire à la santé
et au bien-être a été créé en 2005. Je n'étais pas en politique à ce moment-là,
mais permettez-moi de souligner ce que le ministre de la <Santé et des
Services sociauxT de l'époque, M. Philippe Couillard, mentionnait lors de
sa création. Donc : «La population, avec…
Mme Blais (Prévost) :
...je n'étais pas en
politique à ce moment-là, mais permettez-moi de
souligner ce que le
ministre de la >Santé et des Services sociaux
de l'époque, M. Philippe Couillard, mentionnait lors de sa création. Donc :
«La population, avec la mise en place de cette institution du Commissaire à la
santé et au bien-être, disposera d'un rapport originant d'une institution
crédible qui lui donnera l'état de la situation pour le système de santé et de
services sociaux. Par ailleurs, il est important, pour le Québec, pour l'État
du Québec, de disposer d'un tel mécanisme de reddition de comptes et d'imputabilité.»
Quelques années plus tard, lorsque le gouvernement
a voulu abolir le poste de Commissaire à la santé et au bien-être, je me
souviens que les oppositions ont vivement critiqué le gouvernement. Je vais
rappeler à mon collègue de Rimouski, des Îles-de-la-Madeleine, mes collègues,
quelques faits, des articles, des conférences de presse de sa formation politique
et d'autres organismes qui dénonçaient l'abolition du poste de Commissaire à la
santé et au bien-être.
Dès l'annonce du gouvernement précédent,
l'ex-porte-parole du Parti québécois en matière de santé, l'ex-députée de Taillon,
Mme Diane Lamarre, dénonçait la perte du seul organisme ayant l'expertise
et l'indépendance requises pour amener le réseau à s'améliorer.
Le 24 décembre 2015, l'Ordre des
conseillers et conseillères d'orientation du Québec était inquiet : «Comme
organisation ayant pour but la protection du public, l'ordre ne peut que déplorer
la perte d'un éclairage et d'une perspective uniques, indépendants sur les
besoins de santé et de bien-être des citoyens et sur la manière dont on y
répond. Aucune autre structure n'a rempli ce rôle et ne pourra le remplir avec
la même indépendance.»
Le 21 mars 2016, le commissaire
Salois répondait au gouvernement en mentionnant : «C'est l'indépendance de
notre institution qui lui donne sa pertinence et sa force. Le priver d'un
regard critique et neutre pour éclairer la prise de décision serait une erreur
du point de vue d'une gouvernance qui se veut moderne et transparente. Le
commissaire agit un peu comme un chien de garde indépendant pour notre réseau
public de santé et de services sociaux, et c'est pourquoi il est essentiel de
maintenir le poste.» Je m'arrête là.
• (10 h 30) •
Le Président (M. Provençal)
: Merci, <Mme la ministre. Nous...
>
10 h 30 (version révisée)
<1263
Mme Blais
(Prévost) : ...un peu comme un chien de garde
indépendant pour
notre réseau public de santé et de services sociaux, et c'est pourquoi il est
essentiel de maintenir le poste.
Je m'arrête là.
Le Président (M. Provençal)
:
Merci, >Mme la ministre. Nous allons
terminer la première série d'interventions avec le député de Beauce-Sud. Je
vous cède la parole.
M. Poulin : ...Président.
Cher collègue de Chaudière-Appalaches, c'est un plaisir de vous retrouver à la
Commission de la santé et des services sociaux. Je tiens évidemment à saluer la
ministre responsable des Aînés et des Proches aidants et la personne qui
l'accompagne, toujours un plaisir de vous retrouver. Ma collègue la députée de
Jean-Talon, de Lotbinière-Frontenac, notre recherchiste, également, qui nous
accompagne. Je veux saluer le député des Îles-de-la-Madeleine, le député de
Rimouski, la députée de Fabre et, évidemment, les gens très professionnels qui
les accompagnent. C'est un plaisir de vous retrouver ce matin.
Vous savez, le plus grand défi qu'on a,
comme 125 députés à l'Assemblée nationale, nous qui recevons énormément de
messages, énormément de courriels, où on est témoins d'énormément de situations
qui sont difficiles, c'est de ne pas devenir insensibles aux préoccupations des
Québécois, de ne pas devenir insensibles aux préoccupations de nos aînés. Et je
le dis et je le répète parce qu'on vit un moment historique, une pandémie mondiale,
où il arrive des choses qui ne seraient probablement jamais arrivées ou qui ne
seraient certainement pas arrivées de cette façon-là, compte tenu de la
situation assez exceptionnelle qu'on vit. Et, quand je discute également avec
la fonction publique québécoise, je leur répète aussi ça. Je leur dis :
Malgré qu'à tous les jours, vous voyez des gens, là, qui vivent des moments
difficiles, malgré que, tous les jours, vous vivez des situations difficiles,
vous ne devenez pas insensibles... ne devenez pas insensibles, gardez votre
sensibilité.
Puis je le disais, cette semaine, au salon
bleu, puis on en discute entre députés à l'Assemblée nationale : Est-ce
qu'on parle trop fort au caucus, est-ce qu'on parle trop fort au Conseil des
ministres, est-ce qu'on parle trop fort en comité ministériel? Non, non, parce
qu'on est sensibles puis qu'on reste, d'abord et avant tout, les représentants
de notre population et les guerriers de notre population. Et ça, bien, je pense
que ça doit nous habiter, malgré la situation très exceptionnelle que l'on vit.
Vous savez, M. le Président, le premier
ministre du Québec est un homme de résultats. Il axe son axe politique sur
comment on peut faire la différence auprès des gens. Et l'un des plus grands
problèmes qu'on a eus lorsqu'on est arrivés en fonction, c'est la rareté de
main-d'oeuvre, c'est... qu'on savait depuis des années, là, qui n'est pas
arrivée en 2014, qui n'est pas arrivée en 2010, là, qui existait au moins
depuis les années 2000. Alors, quand on est arrivés dans nos CHSLD, bien, il en
manquait, du monde, et le travail n'a pas été fait pour combler ces postes-là.
Et je me souviens, quand le premier
ministre est arrivé devant les médias, il a dit : Nous, on va former
10 000 employés ou préposés aux bénéficiaires. Mais moi, je ne
croyais pas, je disais : Bien, voyons donc, 10 000, est-ce qu'on va
réussir à le faire? Bien, savez-vous quoi? On est en train de le faire puis on
a réussi. Puis, déjà, c'est 7 000 préposés de plus qui est dans le
réseau de la santé. C'est du jamais vu dans l'histoire du Québec. Puis le
premier ministre le dit souvent : Bien, si j'ai l'occasion d'avoir juste
fait ça dans le réseau de la santé, bien, je vais être fier. Bien, <savez-vous
quoi? Oui, on a...
M. Poulin : ...à le
faire, mais savez-vous quoi, on est en train de le faire puis on a réussi. Puis
déjà, c'est 7 000 préposés de plus qui est dans le
réseau
de la santé. C'est du
jamais vu dans l'histoire du
Québec. Puis
le
premier ministre le dit souvent : Bien, si j'ai l'occasion d'avoir
juste fait ça dans le
réseau de la santé, bien, je vais être fier. Bien,
>savez-vous quoi? Oui, on a toutes les raisons d'être fiers, puis on est
en train d'en former de 2 000 à 3 000. Et, avec les années, évidemment,
il y en aura davantage, parce qu'on a revalorisé le rôle de préposé aux
bénéficiaires, ce que jamais les précédents gouvernements n'ont réussi à faire.
Alors, ça, c'est un geste concret qui fait toute la différence.
On va vous parler, plus tard, des maisons
de répit pour les proches aidants, sous l'impulsion d'une ministre des Proches
aidants, hein, c'est le fun, avoir ça, et de pouvoir le mentionner, de pouvoir clairement
l'indiquer, les choix qu'on a faits. Vous parlez des investissements également
qu'on a faits dans les soins à domicile, qui sont importants, dans la
rénovation des CHSLD, on va y venir aussi. Parce que ce n'est pas tout, de dire
que des CHSLD... que c'était seulement un rideau qui les séparait, c'est parce
qu'on ne les a pas rénovés puis il n'y a pas... l'argent nécessaire n'a pas été
mis dans les dernières années. Et je trouve ça encore regrettable que les
précédents gouvernements en... sont pas suffisamment occupé.
Puis évidemment, bien, on a construit...
on va construire des maisons des aînés à travers tout ça. Je dis : On les
construit présentement, parce qu'il y a déjà des appels d'offres qui sont en
cours. Et elles ne seront pas vides, M. le Président, ces maisons des aînés là.
Et la ministre des Aînés et des Proches aidants porte ce projet-là parce
qu'elle sait qu'il y aura des aînés, ce sera peut-être vos parents, vos oncles,
vos tantes, mais aussi ce sont des familles qu'on connaît qui vont profiter de
ces espaces-là, qui sont nécessaires parce qu'il y a des gens sur les listes
d'attente. Alors, quand j'entends le Parti libéral nous dire qu'ils sont contre
les maisons des aînés, je ne peux pas concevoir qu'on est contre des espaces
pour les aînés et les familles du Québec. Alors, poser des gestes, c'est
important. Puis, vous savez, on pourrait dire que les précédents gouvernements,
M. le Président, n'ont peut-être pas posé les gestes nécessaires, mais, encore
pire, on a coupé dans certains secteurs, et ça, ça fait mal au réseau de la
santé et ça fait mal à nos aînés à travers le Québec. Alors, on pose des
gestes, on est en action. Et la COVID-19 nous aura permis certainement de
pouvoir mettre l'emphase sur certaines mesures et de mettre les sommes
financières qui sont au rendez-vous. Et je pense que le bilan de notre ministre
l'a démontré allégrement, M. le Président. Merci.
Le Président (M. Provençal)
: Merci, M. le député. Nous allons maintenant à la deuxième
série d'interventions, et je cède la parole à la députée de l'opposition
officielle, la députée de Fabre. À vous la parole, madame.
Mme Sauvé : Merci
beaucoup, M. le Président. Alors, je veux saluer la ministre, je veux saluer,
bien sûr, mes deux collègues, et je veux remercier particulièrement le collègue
de Rimouski, ce matin, pour la demande qu'il fait. Il sait qu'il a tout mon
appui, et je serai avec lui dans sa ténacité à le demander aussi.
5 823 personnes, M. le Président,
sont décédées au Québec, et, parmi eux, plus de 3 000 aînés en CHSLD.
On entend des <bribes d'information, mais le Québec doit savoir ce qui s'est
vraiment passé. 3 954 familles qui sont éprouvées puis qui méritent qu'on
leur dise vraiment tout ce qui s'est passé. J'ai...
Mme Sauvé :
...3 000 aînés en CHSLD, on entend des >bribes d'information, mais
le Québec doit savoir ce qu'il s'est vraiment passé, 3 954 familles qui
sont éprouvées puis qui méritent qu'on leur dise vraiment tout ce qu'il s'est
passé. J'ai demandé, tellement de fois, à la ministre responsable des Aînés,
depuis des mois, des décisions qu'elle avait prises, et j'attends encore
tellement de réponses. Je ne comprends pas, et, dans les propos qu'elle a
nommés ce matin, je ne comprends pas pourquoi, aujourd'hui, on est là à encore
demander une commission d'enquête indépendante et publique. Pourquoi ce n'est
pas encore sur la table? La population, M. le Président, a besoin de savoir.
Vous savez, il y a eu beaucoup de
questions qui ont été amenées par mes collègues, et c'est ça qu'on veut savoir,
les décisions politiques, le processus politique qui a mené à des prises
d'action. Je vais reprendre quelques propos qu'ils ont nommés, mais bien sûr,
pourquoi? Pourquoi on a interdit aux proches aidants, alors que, après, on leur
a donné l'accès? On nous nomme la Santé publique, mais, en même temps, quand on
interdisait l'accès des proches aidants, on accueillait des bénévoles de Je
contribue dans nos CHSLD. Pourquoi les délais à chaque fois? Pourquoi les
réactions si lentes, si lentes dans chacune des décisions? Ce sont les
décisions politiques qu'on a besoin de savoir.
Dans le reportage du 24 septembre à Enquête,
il y avait un commentaire qui m'a marquée et qui nous faisait dire : Une
semaine d'inactions, c'est des dizaines et des centaines de personnes décédées.
M. le Président, la ministre a tantôt
nommé le mandat qui a été confié à la Commissaire à la santé et au bien-être,
Mme Castonguay. Et, bien sûr, je reconnais toute sa compétence, mais je
regarde aussi le mandat qui est le sien. Et, si vous êtes comme moi, très
visuel, et que vous avez devant vous l'organigramme du ministère de la Santé et
des Services sociaux, si l'organigramme était très complexe, il y a un lien qui
est très simple à faire, le ministre de la Santé est ici et les deux ministres
délégués est le lien direct, direct avec la Commissaire à la santé et au
bien-être.
Alors, loin de questionner du tout la
compétence de Mme Castonguay. Son mandat à elle et le mandat qui lui a été
confié, c'est de regarder ce qu'il se passe dans le réseau de la santé, c'est
de regarder les ressources qui sont en place, les services qui sont rendus et
le mandat confié. Le mandat confié au mois d'août, c'était vraiment de dire :
Est-ce qu'elle peut regarder l'ensemble du réseau de façon administrative,
nommé par le Conseil des ministres, et donc en lien direct avec le ministre de
la Santé? Nous ne sommes pas dans l'évaluation publique, indépendante et neutre
des choix politiques qui ont été faits tout au long de cette gestion de la
crise.
M. le Président, bien, bien, bien des <citoyens,
et bien des groupes, et bien des interlocuteurs fondamentaux autour de toute la
question de la gestion de crise ont levé la main. Ils ont...
Mme Sauvé :
…tout au long de cette gestion de la crise.
M. le Président, bien, bien,
bien des >citoyens, et bien des groupes, et bien des interlocuteurs
fondamentaux autour de toute la question de la gestion de crise ont levé la
main. Ils ont levé la main. Depuis le 17 avril, les deux recours
collectifs envers, évidemment, le CHSLD Herron, il y avait déjà, au moment
du recours collectif, 31 décès au CHSLD d'Herron; le recours collectif, le
20 avril, contre le CHSLD de Sainte-Dorothée, encore là, 67 morts...
La Protectrice du citoyen, Marie Rinfret, lorsqu'elle a annoncé la tenue
d'une enquête impartiale, on était déjà à 3 606 morts dans les CHSLD.
Quand le gouvernement a rendu public le rapport des Forces armées canadiennes,
on était, évidemment, dans cette montée des décès dans les CHSLD, et, lorsque
Me Descary, la coroner en chef, le 17 juin, a ordonné la tenue d'une
vaste enquête, nous étions rendus à 3 849 décès dans les CHSLD.
• (10 h 40) •
M. le Président, pourquoi la ministre ne
répond pas à la question de mon collègue, à la question qu'on pose? Pourquoi
elle se refuse à une commission d'enquête publique indépendante et neutre?
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup, Mme la députée. Nous poursuivons cette
deuxième série d'interventions avec Mme la ministre.
Mme Blais (Prévost) : M.
le Président, je ne suis pas du tout d'accord avec la finale de cette première
partie de la députée de Fabre. Écoutez, nous avons mandaté
Mme Joanne Castonguay, qui est le Commissaire à la santé et au
bien-être, et je suis actuellement en train de faire la démonstration qu'elle a
toute l'indépendance voulue. Alors, je poursuis.
Toujours le 21 mars, c'était au tour
de l'Ordre des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux
du Québec d'être déçu. Et là je parle de l'abolition du Commissaire à la santé
et au bien-être par le précédent gouvernement, le gouvernement libéral. Et là,
on dit : «Avec l'abolition de ce poste d'observateur des travailleurs
sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux, avec l'abolition de ce poste
d'observateur indépendant, c'est un autre témoin de la qualité des soins et des
services qui disparaît», Claude Leblond, président.
Le 2 avril 2016, la FTQ signe
une forte lettre d'opposition et d'opinion, dont j'aimerais lire quelques
passages :
«Pour les parlementaires, le Commissaire à
la santé et au bien-être constitue une source indépendante de renseignements
qui permet d'évaluer la performance du réseau et de proposer des solutions
innovantes. Pour la population, le Commissaire à la santé et au bien-être <fournit
une information de qualité…
Mme Blais (Prévost) :
...qui permet d'évaluer la performance du réseau et de proposer des solutions
innovantes. Pour la
population, le Commissaire à la santé et au
bien-êtreV >fournit une information de qualité permettant de mieux
comprendre les enjeux du système de santé. De plus, le commissaire recueille et
transmet les préoccupations des citoyennes et des citoyens ainsi que leurs
perceptions du réseau.»
Le 6 avril 2016, Me Paul Brunet — oui,
celui qui critique les gouvernements en place, qui critique tous les
gouvernements — de la protection des malades, il salue la qualité du
travail du commissaire et de sa grande indépendance par rapport au ministère de
la Santé et des Services sociaux, alors que les deux fédérations médicales sont
en désaccord avec son abolition.
Le 27 avril 2016, il y a une
coalition qui réclamait le maintien du commissaire. Lors d'un important point
de presse de cette coalition était présente Mme Diane Lamarre, au nom de
son parti, le Parti québécois. À cette conférence de presse, il a été nommé, et
je cite : «Je m'inquiète de la disparition de celui que je considère comme
le vérificateur de la santé», je répète, là : «...que je considère comme
le vérificateur de la santé...»
Je pense qu'on n'a pas compris. Je vais le
répéter : À cette conférence de presse, il a été nommé, et je cite, c'est
Mme Diane Lamarre, hein? «Je m'inquiète de la disparition de celui que je
considère», et on considère qui?, le Commissaire à la Santé et au Bien-être, «comme
le vérificateur de la santé et même plus, car il a une fonction bonifiée.» Et
là, M. le Président, on est en train de dire, ici, dans cette Chambre, que le Commissaire
à la Santé et au Bien-être n'a pas toute l'indépendance pour être en mesure de
faire une enquête. C'est ça qu'on est en train de dire?
Je ne comprends pas, là. Je ne comprends
pas, parce que les députés de Rimouski et des Îles-de-la-Madeleine veulent
avoir une enquête indépendante, alors que son parti politique mentionnait que
le vérificateur, avec toute l'indépendance, pourrait être en mesure de le
faire, et même que c'était bonifié. Et je reviendrai avec la bonification.
Le Président (M. Provençal)
: Merci, <Mme la ministre. Nous allons conclure la
deuxième série...
Mme Blais (Prévost) :
...alors que son parti politique mentionnait que le vérificateur, avec toute
l'indépendance, pourrait être en mesure de le faire, et même que c'était
bonifié. Et je reviendrai avec la bonification.
Le Président (M. Provençal)
:
Merci, >Mme la ministre. Nous allons
conclure la deuxième série d'interventions avec la députée de Jean-Talon, dont
c'est la fête aujourd'hui. Alors, je vous souhaite bonne fête, madame, avant
que vous preniez la parole.
Mme Boutin : Merci, M.
le Président. C'est vraiment un privilège d'être ici, honnêtement, à ma fête en
plus, au salon bleu. On oublie un petit peu pourquoi on fait de la politique
puis qui nous sommes. Dans le fond, on représente des citoyens. Puis moi, j'ai
envie d'avoir une discussion, là, totalement... presque informelle, là, d'être
transparente, puis qu'on se dise les vraies affaires. Parce que, des fois, la
politique a tendance à être un petit peu une pièce de théâtre. Ça fait que je
vais parler au nom des aînés de mon comté puis au nom des aînés que je connais
qui... certains sont décédés, même, en CHSLD, pas en temps de COVID, mais
avant.
Je pense qu'au Québec, collectivement, on
l'a un petit peu échappé. On l'a échappé par rapport à nos aînés. Moi, si
j'étais dans l'opposition, je serais un petit peu gêné même, aujourd'hui, un
parti en particulier. Puis, je vous avertis, je vais être supertransparente.
Oui, M. le Président.
Une voix
: C'est ta
fête.
Mme Boutin : Oui, c'est
ma fête. Puis ce n'est pas grave, vous pouvez me chicaner, je suis un peu
rebelle dans l'âme.
Les aînés sont vraiment les grands oubliés
de notre société, moi, je l'ai souvent dit, puis j'en prends la responsabilité
moi-même.
Je me souviens, ma mamie était dans un
CHSLD. Elle a été transférée de deux, trois CHSLD. Plus son état se dégradait,
plus elle devait être dans une résidence, dans le fond, qui demandait de plus
en plus de soins. Puis elle était très, très, très lucide. Je regrette de ne
pas être allée assez la visiter, parce que les aînés vivent une très grande
solitude, souvent. Et son plus grand souhait, à la fin, c'était de décéder, en
fait. Elle priait tous les jours que le petit Jésus vienne la chercher.
Parce qu'on les a un petit peu oubliés. On
les a envoyés dans un CHSLD. On est très occupés, tout le monde. Puis les
CHSLD, l'idée de base était très bonne. Il fallait que des gens s'occupent de
nos aînés, une population vieillissante, et tout. Pourtant, nos aînés, c'est
ceux qui ont construit le Québec. Ils ont construit notre système d'éducation,
nos écoles, nos routes, le système de santé. Ils ont été là. Ils ont gardé nos
enfants. Et, traditionnellement, souvent, c'était les grands-mères,
s'occupaient de leur mère, s'occupaient de leurs enfants, de leurs
petits-enfants. Elles ont été très, très, très présentes. Et beaucoup d'entre
eux, finalement, bon, ils ont terminé leur vie dans un CHSLD, souvent très,
très seuls.
Puis l'état des CHSLD, bon, varie d'un
endroit à l'autre. Il y a des très bons CHSLD qu'ils soient publics ou privés,
c'est assez variable. Mais je pense que, d'année en année, avec les coupures
qu'il y a eu, les coupures au niveau du personnel soignant, le manque
d'entretien, la vétusté des lieux, l'état s'est dégradé à un point tel qu'on en
est venu à une catastrophe avec le COVID. Vraiment, là, c'est une catastrophe.
Tout le monde se le dit. Mais le contexte était là bien avant notre arrivée
puis bien avant le COVID.
Moi, j'ai un CHSLD, dans mon <comté,
il s'appelle Saint Brigid's HomeV. Quand j'ai fait ma campagne électorale en
2019, je suis allée les...
Mme Boutin :
...dégradé à un point tel qu'on en est venus à une catastrophe avec la
COVIDT.
Vraiment, là, c'est une catastrophe.
Tout le monde se le dit.
Mais le contexte était là bien avant notre arrivée puis bien avant la
COVIDT.
Moi, j'ai un CHSLD, dans mon >comté,
il s'appelle Saint Brigid's Home. Quand j'ai fait ma campagne électorale en
2019, je suis allée les visiter, mais on ne pouvait pas rentrer parce qu'il y
avait une éclosion de gastro. Il y a eu 13 personnes qui sont décédées de
la gastro. Je ne savais même pas que des gens pouvaient mourir encore de la
gastro. Puis une des grandes raisons de ça, c'est qu'au niveau des infrastructures
les couloirs sont tellement petits qu'on ne peut même pas passer une chaise
roulante puis un chariot alimentaire là-dedans.
Ça fait longtemps qu'on aurait dû
réinvestir, qu'on aurait dû reconstruire des CHSLD, qu'on aurait dû rénover.
Puis, s'il y a une personne, au Québec, qui est arrivée ici, en politique, là,
avec l'intention de changer les choses — elle n'avait même pas besoin
de revenir en politique, en passant, mais elle est revenue spécialement pour
s'occuper des aînés, parce qu'elle avait vécu ça, elle, s'occuper d'un proche
aidant, de son mari — bien, c'est la ministre des Aînés, qui est ici.
Elle est arrivée puis, tout de suite, elle
s'est dit : Ça n'a pas de bon sens, il faut changer. Il faut changer la
donne. Les aînés doivent vieillir dans la dignité, doivent avoir de meilleurs
soins, mais aussi qu'on soit capable de briser leur isolement. Donc, le concept
des maisons des aînés est venu.
Puis moi, j'étais un peu sceptique au
début parce que je trouvais que c'était cher, tu sais. Je suis très
transparente. Sauf que ce concept-là est absolument nécessaire, nécessaire pour
que les aînés aient l'impression qu'ils vieillissent, dans le fond, comme dans
des petites maisons, dans un environnement beaucoup plus humain, qu'ils aient
un environnement beaucoup plus sécuritaire également, parce que, là,
actuellement, ce n'est pas le cas.
Puis on voudrait changer ça du jour au
lendemain, là, mettre à terre tous les CHSLD, en reconstruire des nouveaux, là,
qui permettent une meilleure aération, de la meilleure sécurité. Ce n'est pas
possible de faire ça en six mois. Ça prend du temps.
Puis l'action a été posée dès notre
arrivée. Il y a un engagement qui a été fait, bien, 2 500 nouvelles
places en CHSLD, 2 600 nouvelles places en maison des aînés. On est
déjà en action. Puis j'étais très contente, d'ailleurs, d'avoir la première
maison des aînés qui a été annoncée dans mon comté, parce que j'ai énormément
d'aînés dans mon comté.
• (10 h 50) •
Donc, tout ça pour dire que, comme je le
dis, on l'a un petit peu échappé au Québec. Tout le monde est responsable. Le
gouvernement doit être le premier responsable, en tout temps, peu importe le
parti politique, pour protéger nos aînés, pour protéger les populations
vulnérables, puis c'est le temps d'être en action dès maintenant, puis c'est ce
qu'on a commencé à faire, M. le Président, et c'est ce qu'on va continuer à
faire. Merci.
Le Président (M. Provençal)
: Merci, Mme la députée. Troisième série d'interventions, et
je cède la parole au député du troisième groupe d'opposition, le député de
Rimouski.
M. LeBel : Merci, M. le
Président. La ministre a parlé beaucoup de ma collègue, mon ex-collègue Diane
Lamarre. Je veux la saluer, Diane. Pendant tout ce printemps dernier, elle
était souvent à TVA à commenter. Elle donnait des réponses, elle était toujours
présente, et je veux la féliciter pour son travail. Ça a aidé beaucoup de
familles à comprendre ce qu'il se passait.
Aujourd'hui, la ministre essaie de nous
montrer, démontrer, comme si je faisais un procès à la Commissaire à la santé.
Je n'ai jamais fait ça. Je dis que ce n'est pas la bonne instance à cause de
toute la tragédie qu'on a vécue. Ça fait que je ne comprenais pas pourquoi
revenir toujours là-dessus. La question, c'est que ce n'est pas la bonne
instance pour l'instant, mais ça ne remet pas en question le travail de la
commissaire. Je n'ai jamais fait de procès.
Puis je ne fais pas de procès du <gouvernement
non plus...
M. LeBel : ...un procès
à la commissaire à la santé. Je n'ai
jamais fait ça. Je dis que ce n'est
pas la bonne instance à cause de toute la tragédie qu'on a vécue.
Ça
fait que je ne comprends pas
pourquoi revenir
toujours
là-dessus.
La
question, c'est que ce n'est pas la bonne instance pour l'instant,
mais ça ne remet pas en
question le travail de la commissaire. Je n'ai
jamais
fait de procès.
Puis je ne fais pas de procès du >gouvernement
non plus. Les députés d'en face nous ramènent... Ah! la faute des libéraux, les
péquistes, des déclarations des péquistes. On est... Je n'ai pas voulu faire
ça. Depuis le début, je n'ai jamais voulu rentrer dans la partisanerie. Je me
dis, ce qu'on a vécu comme drame doit nous placer, tout le monde, au-dessus de
cette partisanerie-là. Je fais bien attention d'attaquer personnellement. Je ne
veux pas faire ça. Je dis qu'on a besoin d'une commission d'enquête. C'est tout
ce que je dis.
Au printemps dernier, l'Ontario
répertoriait 1 400 décès dans les CHSLD, dans ses CHSLD. Chez nous, c'était
proche 4 000. Alors que la COVID-19 a fait moins de victimes dans leurs
CHSLD, l'Ontario a choisi de mettre en place une commission d'enquête publique,
publique et indépendante. La commission ontarienne a le mandat d'enquêter
notamment au travers de rencontres publiques sur la propagation dans les CHSLD
et des mesures prises par le gouvernement. Leurs conclusions devront être
présentées le 30 avril 2021.
La Commissaire à la santé et du bien-être
fera son enquête de manière privée, c'est ça le mandat, pour fournir des
recommandations au 1er septembre 2021. Elle devra évaluer la performance
du réseau, seulement du réseau, incluant les interventions en matière de santé
publique puis pour la gestion des soins. On connaît la performance du réseau.
Le ministre l'a dit à la télé. C'est un échec. Bon, il faut aller plus loin. D'un
côté, on a une enquête en Ontario avec des entrevues publiques et, de l'autre,
au Québec, une enquête qui va se tenir derrière des portes closes.
On le répète, ce qu'on veut du
gouvernement, c'est qu'il mette en place un processus transparent qui permette
de faire la lumière sur la tragédie dans les CHSLD au nom de tous les décès.
Dans les dernières années, il y a eu quelques commissions d'enquête, ça, pour
des stratégies. La mine Belmoral à Val-d'Or dans les années 80, huit décès,
commission d'enquête. L'effondrement du pont de la rivière Sainte-Marguerite à
Sept-Îles dans les années 80, six travailleurs décédés, commission
d'enquête. L'effondrement du viaduc de la Concorde, cinq décès, commission
d'enquête.
Tous avaient des audiences publiques.
Aucune commune mesure avec la tragédie nationale qu'on vient de vivre, là. C'était
normal de faire ça. Mais là on parle de 4 000 décès et on hésite à
mettre en place une commission d'enquête. On hésite. Je ne comprends pas
pourquoi. Tous les décès, toutes les vies brisées, c'est un des pires drames qu'on
a jamais vécus, puis on refuse de mettre en place... On a fait toute la lumière
par une commission publique, publique et indépendante, et on nous revient en
essayant de nous faire accroire qu'on fait un procès de la commissaire à la
santé ou on fait... Non, ce n'est pas ce qu'on fait.
Moi, ce que je demande, là, pour le reste
de la séance, ce que je demande aux gens d'en face, ce n'est pas de nous
rappeler le passé, de nous rappeler des... Il faut sortir de ce... de tout ça,
de la faute des libéraux, la faute des péquistes, la faute de Matusalem, la
faute de je ne sais pas qui. Tu sais, ce qu'on a vécu au printemps passé, c'est...
On n'a jamais vécu ça. Puis la ministre le sait, là, je ne fais jamais des cas
personnels là-dessus. Puis elle le sait. On va... On peut travailler ensemble.
Mais, pour travailler ensemble, pour sortir de là puis ne pas essayer de
s'accuser mutuellement de différentes choses qui n'avaient pas été faites, puis
qui avaient été faites, ou que... C'est une seule <chose...
M. LeBel : …au
printemps passé, c'est… on n'a jamais vécu ça. Puis la ministre le sait, là, je
ne fais jamais des cas personnels
là-dessus, puis elle le sait. On peut
travailler ensemble mais, pour travailler ensemble, pour sortir de là puis pas
essayer de s'accuser mutuellement de différentes choses qui n'avaient pas été
faites, qui ont été faites ou… C'est une seule >chose à faire, c'est une
commission d'enquête publique indépendante, que les citoyens vont pouvoir
suivre, qui vont avoir confiance à tout ça, qui vont pouvoir même témoigner. On
va pouvoir suivre, avoir des réponses en direct, que les citoyens, les travailleurs
de la santé, les élus aussi, dans les régions, pourraient intervenir.
Jamais on n'a vécu un drame aussi important
qu'on a vécu au printemps. Les gens sont nerveux par ce qu'il va nous arriver à
l'automne. Il faut déjà bouger, il faut déjà faire des choses actuellement,
mais il faut prendre le temps, pour tout ce monde-là, de faire… d'aller au fond
des choses et de sortir de l'accusation partisane et de sortir sur des procès
que je ne veux pas faire sur un commissaire à la santé ou autrement. Ce n'est
pas ça qu'on fait.
On demande une chose pour les Québécois,
pour les Québécoises, pour notre société, pour l'avenir de ce qu'on veut
prendre soin de nos aînés, une vraie commission d'enquête publique et
indépendante qui va faire un rapport directement à la population sans passer
par des stratégies gouvernementales ou partisanes. C'est ce que je souhaite du
plus profond de moi-même et c'est ce que je propose. Merci.
Le Président (M. Provençal)
: Merci, M. le député. Alors, Mme la ministre, je vous
recède la parole.
Mme Blais (Prévost) : M.
le Président, j'ai beaucoup trop d'admiration et d'estime pour le député de
Rimouski pour penser qu'il y a une question, là, de procès par rapport au
Commissaire à la santé et au bien-être. Mais j'essaie de faire la démonstration
que le Commissaire à la santé et au bien-être, qui a été désigné par le
gouvernement, pour faire justement une enquête sur ce qu'il s'est passé, est un
bon véhicule pour le faire. C'est ça que je fais, et je suis bien obligée de
parler un peu du passé pour comprendre le présent et me projeter dans l'avenir,
par rapport à ça.
Et c'est la même chose, s'il y a eu autant
de morts, il faut comprendre aussi qu'on avait des installations vétustes,
qu'il manquait de personnel. Puis je pourrais épiloguer, là, longtemps, puis on
le sait, qu'on a… c'est un peuple invisible, le peuple des aînés, puis je
reviendrai là-dessus.
Mais permettez-moi de revenir sur le fait
que le Commissaire à la santé et au bien-être, Mme Castonguay, l'a dit,
dans LaPresse, le 19 août dernier, qu'elle dispose du
pouvoir d'astreindre des témoins à comparaître. Donc, elle peut le faire, elle
est indépendante pour le faire. Si elle choisit d'avoir des témoins, elle va le
faire. Ce n'est pas le premier ministre qui va dire à Mme Castonguay quoi
faire, elle a cette indépendance.
Alors, je vais poursuivre. Dans un <communiqué
de presse du Parti québécoisT, le 20 mai 2016, Mme Lamarre
dénonce des coupures, au ministère de la Santé, de 700 millions,
et se prononce, comme suit, au sujet du commissaire : C'est sans compter
le refus…
Mme Blais (Prévost) :
...quoi faire, elle a cette
indépendance. Alors, je vais poursuivre.
Dans un >communiqué de presse du
Parti québécois, le 20 mai 2016, Mme Lamarre dénonce des coupures au ministère
de la Santé de 700 millions et se prononce comme suit au sujet du
commissaire : «C'est sans compter le refus du ministre de laisser des
experts indépendants — c'est des experts
indépendants — évaluer les effets de ses réformes et de ses actions arbitraires.»
Le 24 mai 2016, Mme Lamarre, qui
marrainait une pétition ici même, à l'Assemblée nationale, pour le maintien du
poste de commissaire... Bien, je vais vous en lire un extrait, M. le Président,
de cette pétition. Bien oui! «Considérant que l'abolition du poste de
Commissaire à la santé et au bien-être est un recul démocratique sans précédent
pour le milieu de la santé et des services sociaux;
«Considérant que le mandat du commissaire
est d'apporter un éclairage pertinent au débat public et à la prise de décisions
gouvernementale pour contribuer à l'amélioration de l'état de santé et au
bien-être des Québécoises et des Québécois;
«[...]Considérant la nécessité d'évaluer,
de façon critique et indépendante, les impacts des décisions du gouvernement
sur l'accès aux soins et [aux] services de qualité...»
Puis là, après ça, on dit qu'on a choisi
le mauvais véhicule pour faire une enquête? Moi, je ne comprends pas, là, M. le
Président.
Le lendemain, en point de
presse — on est rendu le 25 mai 2016 — au nom de son
parti, Mme Diane Lamarre s'exprime ainsi : «Le Commissaire à la santé
et au bien-être était une institution qui était essentielle pour la
transparence, essentielle pour pouvoir apprécier, évaluer, analyser et, donc,
corriger les problèmes de notre système de santé.»
Donc, que les gens, la CSQ aient vraiment
compris l'importance de la mission de ce commissaire, son rôle de sentinelle,
de chien de garde par rapport au système de santé... Écoutez, si mon collègue a
oublié, là, j'aimerais lui rappeler que Mme Diane Lamarre a déjà travaillé
de près avec le personnel du Commissaire à la santé et au bien-être. Dans le
même point de presse du 25 mai 2016, elle qualifie le travail du personnel
d'une grande indépendance.
• (11 heures) •
Alors, je ne vois pas pourquoi on fait un
débat politique sur le fait de vouloir une enquête indépendante, alors que le
Commissaire à la santé et au bien-être a toute l'indépendance requise pour
faire une enquête. Pourquoi on s'est tant battu, M. le Président, pour garder
le Commissaire à la santé et au bien-être? Nous <avons nommé...
>
11 h (version révisée)
<1263
Mme Blais
(Prévost) : ...alors que le
Commissaire à la santé et au
bien-être
a toute
l'indépendance requise pour faire une
enquête. P
ourquoi
on s'est tant battus,
M. le Président, pour garder le
Commissaire
à la santé et au
bien-être?
Nous >avons nommé
Mme Joanne Castonguay. Et là, après toutes ces batailles, nous lui avons
confié le mandat de faire cette enquête. Et là, maintenant, on dit que ce n'est
pas le bon véhicule, ce n'est pas la bonne personne pour faire l'enquête?
Autre conférence de presse...
Le Président (M. Provençal)
:Mme la ministre, je dois vous couper
la parole. On finalise la troisième série d'interventions avec la députée de Lotbinière-Frontenac.
Je vous cède la parole, madame.
Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac) :
Merci, M. le Président. Comme ma collègue l'a dit, ma collègue de Jean-Talon
l'a dit, on l'a échappé au Québec. Mais la maturité d'une société se reconnaît
dans sa capacité à admettre ses erreurs, et il faut avoir l'humilité et la
rigueur de le reconnaître et de les réparer.
Notre gouvernement a reconnu sa part de responsabilité
dans cette tragédie dès la mi-avril. Et je suis aussi très contente que la
cheffe de l'opposition officielle a elle aussi reconnu, sur les ondes de Radio-Canada,
que le Parti libéral du Québec était, en grande partie, responsable de la situation
déplorable des CHSLD, qui perdure depuis des années.
Cependant, au-delà de la distribution des
fautes, il faut souligner comment nous, comme gouvernement, nous avons corrigé
la situation. Nous n'avons pas attendu des années avant de faire des ajustements.
Nous sommes un gouvernement proactif, qui sait observer les lacunes, dresser
des bilans et mettre en place des politiques pour y remédier.
Bien avant la pandémie de la COVID-19, une
réflexion était déjà en cours au sein de notre gouvernement à l'effet de
conventionner les CHSLD privés. Toujours dans l'optique d'harmoniser les
pratiques et les conditions de travail dans l'ensemble du réseau, nous avons budgété,
l'an dernier, 50 millions pour rehausser le per diem dans le secteur
privé. L'important, pour nous, c'est d'offrir la même qualité de soins pour nos
aînés, peu importe le type d'établissement qu'ils ont choisi.
Nous allons donc travailler sur deux
fronts. Nous allons développer des places d'hébergement dans différents milieux,
tout en créant 2 600 nouvelles places en maisons des aînés. Nous
avons le souci de maintenir en opération une diversité de types d'hébergement.
Dans le contexte pandémique actuel, notre mission principale est de nous
assurer que tous les patients soient bien traités, qu'ils soient en CHSLD
privé, privé conventionné ou privé non conventionné.
Je le redis encore, la santé et
l'intégrité morale et physique des personnes vulnérables ne devraient jamais
dépendre du statut administratif de l'institution qui les prend en charge. C'est
pourquoi nous nous sommes empressés de rehausser la quantité de personnel <disponible
dans le réseau par l'ajout...
Mme Lecours
(Lotbinière-Frontenac) : ...privé non conventionné. Je le redis
encore, la santé et l'intégrité morale et physique des personnes vulnérables ne
devraient
jamais dépendre du statut administratif de l'institution qui
les prend en charge. C'est pourquoi nous nous sommes empressés de rehausser la
quantité de personnel >disponible dans le réseau par l'ajout de plus de
8 000 préposés aux bénéficiaires. Nous pouvons aussi travailler à
stabiliser les équipes et nous assurer que les soins appropriés sont donnés à
chaque patient.
Nous travaillons aussi à rehausser les
connaissances du personnel en matière de prévention et de contrôle des
infections. En limitant l'apparition d'éclosion et en contrôlant mieux si elles
surviennent, nous pourrons faire en sorte que la tragédie de ce printemps ne se
reproduise pas cet automne. Cela se fait, en autre, par la mise en place de
bulles de vie dans les CHSLD. Celles-ci vont permettre l'application des
pratiques de prévention et de contrôle des infections tout en maintenant les
activités régulières et la socialisation. La solitude et l'isolement ne
devraient pas frapper encore plus durement que le virus.
Du côté administratif, nous allons nous
assurer que soit désigné, pour chaque milieu, un gestionnaire responsable de
l'application de ces mesures. Une fois ce lien de communication établi, le
gestionnaire pourra soulever rapidement les difficultés éprouvées par
l'établissement.
Nous allons aussi effectuer plus de
surveillance auprès des institutions privées. D'ailleurs, notre parti déplore,
depuis longtemps, la diminution importante des visites d'évaluation et
d'inspection dans les milieux de vie pour aînés. Avant même la pandémie, nous
nous étions engagés à reprendre le contrôle, et c'est ce qu'on a fait. En
résidence privée pour aînés, on est passé de 190 inspections en 2018 à 554 inspections
en 2019. Depuis le début de la pandémie, nous avons redoublé d'ardeur. À ce
jour, près de 11 000 visites de vigie ont été effectuées.
Voilà à quoi ressemble l'action d'un
gouvernement qui prend ses responsabilités, M. le Président. Merci.
Le Président (M. Provençal)
: Merci, Mme la députée. Nous allons initier la quatrième
série d'interventions avec la députée de l'opposition officielle, Mme la
députée de Fabre. À vous la parole.
Mme Sauvé : Merci
beaucoup, M. le Président. J'aimerais revenir sur la notion de l'imputabilité,
l'imputabilité face à la gestion de crise. On se rappellera, on a eu un des
pires bilans de la planète. Et, clairement, 3 954 aînés dans les
CHSLD, qui sont décédés, c'est 3 954 familles qui sont encore
éprouvées. Et, si mon collègue de Rimouski me le permet, je vais reprendre
l'expression tantôt qu'il a amenée, ça nous prend cette commission d'enquête
publique indépendante pour un processus de guérison pour l'ensemble du Québec,
pour ces familles de 3 954 décès, leurs parents, qui sont morts
seuls, qui sont morts dans la <souffrance et qui sont morts souvent
déshydratés...
Mme Sauvé :
…tantôt, qu'il a amené, ça nous prend cette commission d'enquête publique
indépendante pour un processus de guérison, pour l'ensemble du Québec, pour ces
familles de 3 954 décès, leurs parents qui sont morts seuls, qui sont
morts dans la >souffrance et qui sont morts souvent déshydratés.
Au Québec, quand on se compare aux autres
provinces du Canada, on regarde, sur les aînés qui ont été contaminés,
26 % dans les autres provinces sont décédés, au Québec, 42 %. Quand
on prend la case départ du début de la pandémie, au mois de mars, quand on
compare à la Colombie-Britannique dans la gestion de crise qui était la nôtre,
la Colombie-Britannique, M. le Président, partait du même, même, même endroit,
une criante pénurie de personnel. Et, pourtant, la Colombie-Britannique, en
trois mois, a su arrêter complètement le mouvement de personnel, et on en parle
encore aujourd'hui, particulièrement en ce qui a trait aux infirmières.
M. le Président, on a besoin de cette
commission d'enquête publique, la population en a besoin, les
3 954 familles en ont besoin, de cette transparence, de cette
information complète, neutre, qui nous fait foi et qui nous fera foi des choix
politiques, des décisions qui ont été prises avec l'information qu'ils avaient
de la Santé publique. On a besoin de savoir ça.
Et j'ai besoin de questionner, bien sûr, l'imputabilité
de la ministre dans cette gestion de crise, et je vais me permettre, si vous le
voulez bien, de lire deux extraits. D'abord, un extrait qui provient du
verbatim et des extraits de l'Assemblée nationale, le 20 février dernier,
donc, quelques semaines avant le début de la pandémie, la ministre responsable
des Aînés a dit ceci : «Je peux vous dire une chose[...], quand je demande
au sous-ministre d'écrire une directive puis quand je la signe, directive qui
va au P.D.G., je peux vous dire que c'est une directive qui vient du ministre
et que cette directive doit être suivie. C'est comme ça que ça fonctionne. C'est
comme ça que ça doit fonctionner. Le ministre a une imputabilité, tout comme
les directeurs généraux ont une imputabilité, comme les personnes qui
travaillent au ministère de la Santé et des Services sociaux, les
sous-ministres, les sous-ministres adjoints. Nous avons une imputabilité envers
le public. Moi, je prends mes responsabilités.» 20 février.
Lors du reportage d'Enquête, le
24 septembre, lorsque la journaliste lui demande si elle a assez de
pouvoir au Conseil des ministres, la ministre dit : «Le pouvoir, c'est
extrêmement relatif, le pouvoir, c'est celui que le premier ministre te donne,
c'est le premier ministre qui a le pouvoir.» 20 février,
24 septembre, avant la pandémie, après, face à la gestion de crise. Comme
le dirait ma cheffe de l'opposition officielle, vous savez, on est ministre ou
on ne l'est pas.
Alors, j'ai besoin de savoir qu'il y aura
une commission d'enquête publique indépendante qui fera la pleine lumière sur
la réelle imputabilité de la ministre responsable des CHSLD. Parce que les
3 950 familles ont besoin d'entendre ça, M. le Président, ils ont
besoin d'entendre quel est le rôle qu'elle a joué, quelle est sa
responsabilité. On ne peut pas, à quelques semaines de la pandémie, dire qu'on
est pleinement <responsable et imputable et après…
Mme Sauvé :
...responsable des CHSLD
parce que les 3 950 familles ont
besoin d'entendre ça,
M. le Président, ils ont besoin d'entendre quel
est le rôle qu'elle a joué, quelle est sa
responsabilité. On ne peut
pas, à
quelques semaines de la pandémie, dire qu'on est
pleinement
>responsable et imputable et, après, c'est la faute du premier ministre
du Québec.
• (11 h 10) •
Alors, moi, j'ai besoin, pour les aînés
qui nous appellent dans nos bureaux de comté, pour les aînés qui sont morts
dans des souffrances terribles et pour toutes ces familles qui ont besoin de
réponses à toutes les questions auxquelles on ne répond pas, toujours, M. le
Président... Alors, je souhaite cette commission d'enquête, et, avec mon collègue
et avec mes collègues, on sera tenaces, parce que la population ne peut pas se
contenter de ce bilan, une crise humanitaire au Québec. Et, en comparaison,
nous sommes un des pires bilans de la planète. Nous devons cela à nos aînés et
aux citoyens du Québec. Merci beaucoup, M. le Président.
Le Président (M. Provençal)
:Merci, Mme la députée. Mme la
ministre, vous reprenez la parole.
Mme Blais (Prévost) : Je
vais continuer par rapport au Commissaire à la santé et au bien-être parce que
le sujet aujourd'hui, c'est une enquête indépendante versus ce qu'on dit qui ne
serait pas indépendant de la part du Commissaire à la santé et au bien-être. Le
gouvernement du Québec a choisi le Commissaire à la santé et au bien-être parce
qu'il a toute l'indépendance pour faire une enquête.
On parle d'enquête, alors voici, je
poursuis : autre conférence de presse du Parti québécois, Mme Diane
Lamarre, le 4 décembre 2017, où étaient réunis Me Jean-Pierre Ménard, le
Conseil pour la protection des malades, le regroupement Médecins québécois pour
le régime public et le Réseau FADOQ.
J'ai également, aux fins d'informer les
oppositions, un communiqué de presse de l'ex-co-porte-parole de Québec
solidaire, le Dr Amir Khadir, qui décrivait l'abolition du poste du Commissaire
à la santé et au bien-être comme suit : «La volonté du
gouvernement libéral ne fait aucun doute : censurer une voix indépendante
qui ne se gênait pas pour informer le public sur les lacunes du système de
santé.»
M. le Président, il reste
encore beaucoup, beaucoup d'autres témoignages sur l'indépendance et sur
l'importance de cette institution, mais je vais terminer cette liste par les engagements
électoraux du Parti québécois de 2018, où nous pouvons lire que l'ex-chef du
Parti québécois, M. Jean-François Lisée, affirme qu'il va réhabiliter le <commissaire.
Il inscrit à sa plateforme électorale : «Le commissaire,
c'est le seul organisme à pouvoir apprécier et à pouvoir mesurer la performance
de notre système de santé...
Mme Blais (Prévost) :
…affirme qu'il va réhabiliter le >commissaire. Il a inscrit à sa
plateforme électorale : «Le commissaire, c'est le seul organisme à pouvoir
apprécier et à pouvoir mesurer la performance de notre système de santé de
manière neutre et objective.»
La commissaire est le seul organisme à
pouvoir apprécier et mesurer la performance de notre système de santé de
manière neutre et objective. On me demande ici de ne pas faire de partisanerie.
Bien, je ne fais pas de la partisanerie. Je suis en train de répéter ce que tout
le monde dit, que cette personne est neutre et objective pour être en mesure de
faire une enquête. J'ai fait la preuve que cette personne était neutre et
objective.
M. le Président, pendant plus de
trois ans, le Parti québécois… puis j'aime beaucoup mes collègues, là,
mais vous avez fait l'éloge du commissaire, de son indépendance, de son
impartialité, de son expertise. Moi, je m'explique mal pourquoi vous avez
changé d'opinion. Moi, je ne comprends pas pourquoi les opinions ont été
changées.
Ici, aujourd'hui, le sujet, je le sais,
qu'on veut parler de l'imputabilité de la ministre. On peut en parler. Si vous
voulez savoir si je prends mes responsabilités, M. le Président, oui, je les
prends, mes responsabilités. Je ne suis pas revenue en politique pour vivre la COVID-19.
Il n'y a pas personne au Québec qui veut vivre la COVID-19. Il n'y a pas
personne à travers le monde. Il n'y a pas personne qui avait un guide, comment
traiter la COVID-19.
Oui, je les prends, mes responsabilités.
Je ne me défie pas devant mes responsabilités. En conférence de presse, on m'a
dit que je me défilais, en quelque sorte. Non, je ne me défile pas. Je suis ici,
devant vous, M. le Président, pour dire que je prends l'entièreté de mes
responsabilités et que j'ai dit : Oui, c'était un échec. Qu'est-ce que
vous voulez? Quand on voit autant de morts dans nos CHSLD, il n'y a pas
personne qui peut se réjouir, M. le Président. C'est d'une tristesse inouïe.
Mais le Commissaire à la santé et au bien-être a été mandaté pour faire une
enquête indépendante. Le commissaire peut faire ce travail.
Vous savez, il y a eu la première vague,
il y a eu ces décès, mais, actuellement, là, on est encore dans la COVID-19, ce
n'est pas fini. On est encore dedans. Il y a encore des morts à tous les jours.
Alors, moi, je pense, là, qu'il faut laisser le rapport de la commissaire
arriver et puis on va avoir encore à se questionner sur la deuxième vague,
parce que c'est dans l'ordre des choses, M. le Président. Alors, je reviendrai
ultérieurement.
Le Président (M. Provençal)
: Merci. Mme la députée de <Jean-Talon, vous prenez la
suite.
Mme Boutin :
Merci,
M. le Président…
Mme Blais (Prévost) :
...et puis on va avoir encore à se questionner sur la
deuxième vague,
parce que c'est dans l'ordre des choses,
M. le Président. Alors, je
reviendrai, ultérieurement.
Le Président (M. Provençal)
:
Merci.
Mme la députée de >Jean-Talon,
vous prenez la suite.
Mme Boutin : Oui, M. le
Président. Mme la ministre a dit quelque chose qui m'a... un terme qui m'a quand
même frappé, tout à l'heure, elle a parlé du peuple invisible. Ça me rappelle
un certain reportage de Richard Desjardins sur un autre sujet. Mais elle a
raison, les aînés sont le peuple invisible du Québec. Les aînés n'ont pas de
grand lobbyiste pour les défendre, ils n'ont pas de grand syndicat pour les
défendre puis amener leurs priorités au gouvernement. Pourtant... ma collègue
députée de Prévost et ministre des Aînés est pourtant celle qui a amené cette
priorité-là dans notre gouvernement en 2018. Elle s'est battue pour que les
aînés deviennent une priorité gouvernementale, puis ça, c'était pour la
première fois au Québec. Moi, j'en étais vraiment très, très fière. Parce qu'on
s'entend, au Québec, la population est vieillissante, tout le monde, on en
parlait déjà, de l'état des CHSLD au Québec, il y a eu plusieurs rapports qui
sont sortis. C'est sûr que le COVID a vraiment mis à nu nos plus grandes
fragilités puis a mis à nu... a donné naissance à une catastrophe. C'est arrivé
au Québec, c'est arrivé ailleurs au Canada, mais ailleurs dans le monde, également.
Ce n'est pas propre au Québec seulement.
Je pense que la ministre est très
consciente de son imputabilité par rapport aux aînés au Québec. En partant, dès
qu'elle est arrivée au pouvoir, avant même le COVID, elle avait pris en
action... s'était mise en action pour lancer le chantier des maisons des aînés,
chantier des CHSLD, le chantier des proches aidants, également.
Avant de parler de ça, juste dire également
que toute la question des préposés aux bénéficiaires, on a commencé à y
remédier, comme mon collègue de Beauce-Sud l'a mentionné tout à l'heure, mais,
à notre arrivée, je me souviens d'un chiffre qui avait marqué mon esprit, on
nous disait qu'il manquait 30 000 préposés aux bénéficiaires sur
quatre ans, fait que c'est beaucoup, là... ou sur cinq ans. C'est énorme. C'est
énorme, d'engager des gens, également, surtout que la profession, ce n'était
pas vraiment une profession très attirante. Moi, je ne connaissais personne qui
voulait devenir préposé aux bénéficiaires. Donc, rapidement, c'est sûr, sous
l'impulsion de la pandémie, il a fallu rembaucher rapidement, donc rehausser
les compétences, montrer que cet emploi-là, c'est un emploi qui est digne, c'est
un emploi qui est complètement essentiel dans le réseau des CHSLD. Donc, on
s'est mis en branle pour former — on en a 7 000 de formés
jusqu'à maintenant — 10 000 préposés aux bénéficiaires
qu'on va envoyer... qu'on est en train d'envoyer dans les CHSLD.
Ça, c'est en plus de l'embauche de
gestionnaires. Ma collègue de Frontenac, tout à l'heure, l'a mentionné, on
avait comme engagement de remédier à la situation du manque de gestionnaires,
donc un gestionnaire par CHSLD. Le ministre de la Santé l'a annoncé hier, on a
été capable d'atteindre la cible de 412 gestionnaires, donc un par CHSLD,
pour qu'il y ait de l'imputabilité dans les CHSLD.
Ça, c'est en plus du plan d'action qui a
été déposé en vue de la deuxième vague, un plan d'action qui vise à mieux
contrôler les accès dans les CHSLD, un plan d'action qui vise à créer des zones
rouges pour pouvoir contrôler la propagation dans les résidences pour personnes
âgées, plan d'action qui vise à améliorer la <communication pour être
certain...
Mme Boutin :
...en plus du plan d'action qui a été déposé en vue de la
deuxième vague.
Un plan d'action qui vise à mieux contrôler les accès dans les CHSLD. Un plan
d'action qui vise à créer des zones rouges pour pouvoir contrôler la
propagation dans les résidences pour personnes âgées. Plan d'action qui vise à
améliorer la >communication pour être certain que les directives qui
partent du ministère, qui partent du cabinet se rendent rapidement dans les
CHSLD, qu'il y ait une meilleure coordination sur le terrain.
La ministre est extrêmement consciente de
son imputabilité et de son rôle là. D'ailleurs, je trouve qu'elle en prend des
fois peut-être un... je comprends qu'elle est ministre, là, mais ce n'est
pas... elle n'est pas la seule responsable. Elle est en action dès maintenant.
On peut faire toutes les enquêtes du monde, mais là on est dans une deuxième
vague, il faut passer à l'action dès maintenant.
Par après... Il me reste juste
1 min 35 s pour parler des proches aidants. C'est quelque chose
qui lui tenait à coeur dès son arrivée au pouvoir. Les proches aidants, c'est
complètement essentiel. On l'a vu, le fait de fermer la porte aux proches
aidants en CHSLD pour mieux contrôler la propagation, ça l'a un petit peu nui à
certains aînés qui vivent déjà une solitude. Mais les proches aidants,
justement, sont là pour amener un appui supplémentaire, s'assurer que les
aînés — c'est très concret, là, comme travail, là — soient
bien hydratés, mangent bien. Mais l'objectif était bien intentionné. Il était
simplement pour contrôler la propagation.
Moi, je suis extrêmement fière de voir une
ministre qui a déposé, au printemps dernier, le projet de loi n° 56. Un
projet de loi qui — un des meilleurs au monde, pour vrai, il n'y a
pas beaucoup de pays qui ont fait ça jusqu'à maintenant — qui va
viser à mieux encadrer et permettre un meilleur soutien pour les proches
aidants. Là, on est dans... On a une population qui vieillit. Moi, je fais
partie de la génération sandwich. Donc, je m'occupe de mes enfants puis je vais
m'occuper de mes parents. Puis, plus ça va aller, plus est-ce qu'on va avoir un
immense besoin de soutenir les proches aidants, d'avoir des maisons de répit,
des maisons Gilles-Carle, d'avoir des maisons des aînés qui vont être capables
de recevoir nos aînés. Nos aînés, c'est notre plus grande richesse. Mais c'est
aussi, puis c'est égoïstement que je le dis, pour soutenir les gens dans ma
génération qui doivent payer pour l'éducation de nos enfants, s'occuper d'eux,
mais également s'occuper des aînés tout en travaillant à temps plein. Moi, c'est
sûr que je vais devoir faire ça.
Donc, la ministre des Aînés a une
compréhension du terrain que peu de gens l'ont en ce moment au Québec. Puis
elle est déjà en action. Puis on va poursuivre le travail. Moi, je... Elle a
tout mon support. Elle va toujours l'avoir, tant qu'elle va être là. Alors,
merci.
Le Président (M. Provençal)
: Merci. Merci beaucoup. Nous allons débuter maintenant la
cinquième série d'interventions avec le député du troisième groupe... du
deuxième groupe d'opposition, le député de Jean-Lesage. À vous la parole.
• (11 h 20) •
M. Zanetti : Merci, M. le
Président. Merci à tout le monde d'être ici présent aujourd'hui pour discuter
de cet enjeu important.
Évidemment, moi, ma formation politique
est parfaitement en accord avec la tenue d'une enquête publique indépendante
sur la gestion de la pandémie de COVID-19 dans les CHSLD, c'est sûr. Cela dit,
il y a beaucoup de rapports qui ont été faits et il y a beaucoup de choses
qu'on sait déjà qu'on peut faire. Alors, moi, je pense qu'on doit ne pas faire
obstacle à de nouvelles enquêtes, bien sûr, mais il faut aussi rapidement
passer à l'action, parce qu'il y a des choses qui sont urgentes.
Parmi les choses qui sont urgentes, il y a
une suggestion qu'on a faite dont je voudrais <parler, dans les dernières
semaines, et c'est la question de la nationalisation...
M. Zanetti : ...on doit
ne pas faire obstacle à de nouvelles enquêtes, bien sûr, mais il faut aussi
rapidement
passer à l'action parce qu'il y a des choses qui sont urgentes.
Parmi les choses qui sont urgentes, il
y a une suggestion qu'on a faite, dont je voudrais >parler, dans les
dernières semaines, et c'est la question de la nationalisation des CHSLD
privés. Ça a même été évoqué au printemps dernier, si je me souviens bien, par
le ministre de l'Économie, qui a comme lancé ça de même, comme une piste de
réflexion. Ensuite de ça, on a senti que, ah! ce n'était peut-être pas ça qui
allait être privilégié. Mais je pense que c'est une intuition juste et je veux
vous en parler aujourd'hui.
Les soins de longue durée pour les aînés,
là, ce n'est pas quelque chose avec lequel il devrait être permis de faire de l'argent.
Parce que, quand on permet de faire de l'argent avec ça, ce que ça a comme
conséquence, c'est que non seulement ça nous coûte ce que ça coûte, mais, en
plus de nous coûter ce que ça coûte, ça nous coûte le profit que du monde
veulent faire avec ça. Et il n'y a pas de raison pour laquelle la société québécoise
devrait payer pour du profit sur quelque chose. On devrait, pour ce genre de
chose là, qui est un service public essentiel, qui assure la dignité humaine,
juste payer ce que ça coûte.
Quand quelqu'un va essayer de faire du
profit avec ça, là, qu'est-ce qu'il va faire? Je veux dire, la première chose
qu'il va faire, là... C'est fou, parce que c'est ce que disait Karl Marx dans Le
Capital. On ne le cite pas souvent, là, mais c'est exactement ça qu'il
disait puis c'est exactement ça qu'il se passe Il coupe sur le temps de
travail, il coupe sur les conditions des employés. Puis c'est là qu'il fait ce
que Karl Marx appelait la plus-value, c'est là qu'il fait ce qu'on va dire qui
est son profit.
Ça fait que, tu sais, on le sait depuis
longtemps. Quand on regarde les conditions de travail dans les CHSLD, il y a du
monde qui font ça à 13 $ de l'heure, près du salaire minimum. Et qu'est-ce
que ça fait? Ça fait que le monde n'ont pas envie d'aller là. Et là ça crée de
la pénurie, ça crée de l'exode. Et là ça fait qu'on n'est pas capable de donner
le même niveau de service. Ça fait que, parce qu'à l'origine on a voulu
permettre à du monde de faire des profits sur quelque chose, bien, ça finit
par, tu sais, faire en sorte qu'on n'est pas capable de livrer la marchandise.
Puis ce n'est pas bon. Je veux dire, on est responsable de ça.
Alors, je pense que la nationalisation des
CHSLD privés... D'ailleurs, je pense que la... tu sais, il y a énormément de
CHSLD qui sont publics, et puis ça marche bien. Tu sais, il n'y a pas de
plus-value à dire : Quand il y a du monde qui font du profit avec ça, ça
ne marche plus. Il n'y a pas de... ça n'existe pas, ces études-là, c'est des
spéculations qu'on a faites à une certaine époque, là, dans les 20 dernières
années où est-ce qu'on a dit : Ah! privatise, ça va être plus efficace.
Bien, ce n'est pas vrai que c'est ça qu'il se passe. On est capable d'avoir un
niveau d'efficacité extraordinaire dans le régime public quand on y croit.
Puis je prends un <exemple hors
CHSLD, mais, mettons, on regarde, là, l'IUCPQV à Québec, ce qu'on appelait, à
l'époque où les hôpitaux avaient des noms dont on pouvait se souvenir,
l'hôpital Laval...
M. Zanetti :
...efficace. Bien, ce n'est pas vrai que c'est ça qui se passe. On est capables
d'avoir un niveau d'
efficacité
extraordinaire dans le régime
public quand on y croit.
Puis je prends un >exemple hors
CHSLD, mais, mettons, on regarde, là, l'IUCPQ à Québec, qu'on appelait, à
l'époque où les hôpitaux avaient des noms dont on pouvait se souvenir, l'Hôpital
Laval. Bien, ça, là, c'est un centre mondialement reconnu, un centre
d'expertise d'une efficacité extraordinaire, si ce n'étaient pas des réformes
Optilab qui viennent un peu entraver sa performance. Mais c'est une des
preuves, puis il y en a plein d'autres, puis on pourrait trouver des CHSLD
publics où c'est des exemples extraordinaires de bonne gestion, où il n'y a pas
une cent qui se perd et où les qualités des services sont vraiment au rendez-vous.
Alors, je pense qu'on doit faire... une
des choses qu'on doit faire, là, c'est, oui, faire des enquêtes, bien sûr, mais
revenir à cette foi-là puis à cette confiance-là qu'on a envers le système
public, qui est capable des meilleures pratiques de gestion, qui est capable surtout
de nous donner un service au moindre coût possible, parce que personne n'essaie
de se faire de l'argent avec ça.
Et donc c'est ça que... c'est à cette
réflexion-là que j'invite nos collègues du gouvernement à réfléchir. Il y a quelque
chose d'important. Il faut décentraliser le réseau, donner de l'autonomie de
gestion localement dans ce qu'on appelle, aujourd'hui, les CHSLD. Il faut les
nationaliser, ceux qui sont privés. Il faut aussi changer de modèle. Ça,
j'entends bien que la ministre est d'accord avec cette idée et déjà a lancé d'autres
choses en ce sens. Il faut investir massivement dans les soins à domicile...
Le Président (M. Provençal)
:Je vous remercie, M. le député. Vous
étiez... Vous aviez une très belle envolée, mais je dois vous couper. Mme la
ministre.
Mme Blais (Prévost) :
Bien, écoutez, M. le Président, j'avais l'impression que c'est moi qui parlais.
Des voix
: Ha, ha, ha!
Mme Blais (Prévost) :
Bien, tout à fait. Écoutez, j'écoute le député de Jean-Lesage... Peut-être pas
avec les mêmes termes, hein? Mais, quand même...
Vous savez, j'ai visité 103 CHSLD. J'en
ai visité, des publics. J'en ai visité, des CHSLD privés conventionnés. J'en ai
visité, des CHSLD privés. Il y a des bons privés, mais j'ai vu des choses, là,
je vais vous dire bien franchement, j'ai dit... je me suis questionnée.
J'ai appris que, dans des CHSLD privés, le
per diem par lit était pas mal inférieur au per diem d'un CHSLD privé
conventionné. Comment voulez-vous, si le per diem est de 165 $ ou de
185 $, comparativement à 250 $... comment voulez-vous donner la même
qualité de soins et de services à la personne? C'est impossible. C'est
impossible.
J'ai appris qu'au fil des ans ce qu'on
faisait, on fermait les yeux, fermait les oreilles, on se bouchait la bouche,
et on achetait des lits au plus bas soumissionnaire puis on plaçait des gens
dans les CHSLD privés. On leur donnait des contrats pour un an. Pendant <ce
temps-là, les propriétaires, quand ils allaient cogner...
Mme Blais (Prévost) :
...qu'on faisait, on fermait les yeux, on fermait les oreilles, on se bouchait
la bouche et on achetait des lits au plus bas soumissionnaire puis on plaçait
des gens dans les CHSLD privés, on leur donnait des contrats pour un an.
Pendant >ce temps-là, les propriétaires, quand ils allaient cogner à la
porte des banques pour avoir un prêt, pour être capables de rénover le CHSLD,
ils ne pouvaient pas le faire parce que le contrat était d'un an. Comment on
peut arriver? Le banquier, il ne voulait pas prêter de l'argent. Alors, c'était
une roue. Alors, j'ai commencé à questionner, j'ai dit : Qu'est-ce qu'on
peut faire? J'apprends que, depuis les années 80, il n'y a plus de CHSLD
privé conventionné, on ne veut plus les conventionner. Ce sont des contrats
privés qu'on achète, des places qu'on a achetées. J'ai dit : On ne peut
plus faire ça. Mais ce n'est pas simple, il y a des contrats qui sont signés
sur plusieurs années, il y a différents prix qui sont achetés, ce sont tous des
contrats individuels. On a 59 CHSLD privés conventionnés, 41 CHSLD
non conventionnés et 312 CHSLD publics.
Récemment, on a conventionné un premier
CHSLD, depuis les années 80, à Waterloo, un premier qu'on a réussi à
conventionner. On a 50 millions de dollars depuis deux ans dans le budget
pour arriver à conventionner des CHSLD. Ce qu'on a fait, parce que c'est
complexe, à la fois avec le Trésor, avec le gouvernement, avec l'orientation,
on a quand même été en mesure de rehausser entre 15 et 17 millions de
dollars, peut-être même un peu plus, les per diem pour des CHSLD privés, pour
faire en sorte...
Puis ce qui était compliqué, M. le
Président, c'est qu'on ne veut pas que l'argent aille dans la poche du
propriétaire, on veut que l'argent aille dans la poche de professionnels de la
santé. C'est de ça dont on doit tenir compte, parce que les professionnels de
la santé étaient payés pas mal moins cher. Ça fait que, si tu reçois 185 $,
comment tu veux payer ton personnel adéquatement et correctement?
Ça fait qu'on est en train de faire ça. Ça
fait que je pense que ça va rassurer le député de Jean-Lesage, je pense comme
lui. C'est la même chose dans plusieurs RPA. On a créé des milieux de vie, on
en a 2 600.
• (11 h 30) •
Quand il y a eu le rapport sur l'Auberge
des Trois Pignons, entre autres, que Sylvain Gagnon a fait une enquête
indépendante, il s'est avéré, entre autres, qu'il y avait des personnes qui
résidaient là qui étaient pas mal trop en perte d'autonomie pour vivre dans une
résidence privée pour aînés. Ces gens-là auraient dû vivre dans un CHSLD ou
dans une RI. Alors, j'ai dit : Qu'est-ce qu'on fait? Auparavant, les CISSS
et les CIUSSS s'occupaient des RPA au niveau des inspections, mais c'était
souvent quand le propriétaire fermait ses portes. Il fallait replacer les gens.
Pendant la COVID-19, les CISSS et les CIUSSS ont dû aller prêter main forte.
Ils se sont rendu compte que la qualité des soins et des services, pour <certaines
résidences...
>
11 h 30 (version révisée)
<1263
Mme Blais
(Prévost) : ...au niveau des inspections, mais c'était souvent quand
le propriétaire fermait ses portes. Il fallait replacer les gens. Pendant la
COVID-19T,
les CISSSV et les CIUSSSV ont dû aller prêter main-forte. Ils se sont rendu
compte que la qualité des soins et des services pour certaines résidences, pas
pour toutes, là, il ne faut pas... pour >certaines résidences n'était
pas au rendez-vous.
Alors, on a mis en place un comité,
rapidement, de P.D.G. de CISSS et de CIUSSS, entre autres, avec le P.D.G. du
CIUSSS de la Capitale-Nationale, pour voir comment les CISSS et les CIUSSS
pourraient travailler davantage pour être en mesure d'être à l'écoute, d'être
présent pour des personnes qui ont besoin de plus de soins. Alors, on était en
train... Oh! c'est déjà terminé?
Le Président (M. Provençal)
: Terminé, Mme la ministre.
Mme Blais (Prévost) : On
est en train d'avancer par rapport à ça.
Le Président (M. Provençal)
: M. le député de Beauce-Sud, vous prenez la suite.
M. Poulin : ...je ne peux
pas céder mon temps, malheureusement, à la ministre, mais j'aurais bien aimé
continuer de l'entendre, parce qu'effectivement ça démontre tout le travail qui
est accompli depuis deux ans pour améliorer notre réseau de la santé.
Puis, vous savez, on est sorti d'une des
réformes les plus importantes du réseau de la santé, en 2015, qui a été pilotée
par le député de La Pinière, et cette réforme-là, j'ai rarement entendu
des gens nous dire que les effets à long terme étaient positifs, et qu'on a vu
une différence, et que les conditions de vie de nos aînés se sont améliorées,
que les conditions de travail de nos professionnels se sont améliorées,
peut-être à part les médecins, mais, sinon, ça n'a pas été au rendez-vous.
Alors, on arrive aussi de cette réforme-là qui était importante.
Puis je comprenais, tout à l'heure, les
députés de l'opposition nous dire : Pourquoi vous revenez dans le passé?
Bien, parce que ce n'est pas si lointain, 2015, ce n'est pas si lointain, 2016.
Nous, on est arrivés en fonction il y a deux ans, avec un réseau de la santé
qui sortait de l'une des plus grandes et l'une des pires réformes qu'il y a eu,
avec également des gens qui se retrouvaient dans les CISSS, qui devaient mettre
en place cette réforme-là. Alors, il faut se remettre dans ce contexte-là pour
savoir tout le travail qui a été fait.
Puis, vous savez, M. le Président, dans le
cycle d'un gouvernement, il y a des dates à ne pas manquer, il y a des
rendez-vous à ne pas manquer, et la ministre des Aînés et des Proches aidants,
elle ne manque jamais ces rendez-vous là. Entre autres, l'un, qui est très
important, c'est, comme on dit dans le jargon politique, qui est plaider ses
crédits, aller cogner aux Finances, aller voir le Trésor, mais surtout les
Finances, aller voir le premier ministre puis dire : Moi, j'ai des
projets, moi, j'ai des dossiers, puis il faut s'en occuper. Puis la moyenne au
bâton de la ministre, là... je ne veux pas dire que nos autres collègues ne
performent pas, mais elle est assez exceptionnelle, merci, dans l'argent qui a
été investi auprès de nos aînés au Québec. Puis là je parle du futur, là, puis
de ce qui s'en vient pour les aînés, grâce au travail, encore une fois, de la
ministre, qui plaide ses crédits aux bonnes dates.
2,6 milliards pour une transformation
majeure des milieux d'hébergement, je répète, 2,6 milliards de dollars, c'est
2 600 places en maisons des aînés, qui, je le rappelle, M. le
Président, ne seront pas vides. Ce sera peut-être votre famille, vos parents,
vos grands-parents qui en profiteront. Rénovation et reconstruction de
2 500 places en CHSLD, alors, on ne laisse pas de côté, M. le
Président, les CHSLD du <Québec. Au contraire, on investit des sommes qui
sont fort importantes...
M. Poulin : …c'est
2 600 places en maisons des aînés qui, je le rappelle, M. le
Président, ne seront pas vides, ce sera peut-être votre famille, vos parents,
vos grands-parents qui en profiteront. Rénovation et reconstruction de
2 500 places en CHSLD. Alors, on ne laisse pas de côté, M. le
Président, les CHSLD du >Québec, au contraire, on investit des sommes
qui sont fort importantes.
200 millions pour embaucher du
personnel dans le réseau de la santé, mes collègues députés de Lotbinière-Frontenac,
Jean-Talon et la ministre en ont parlé abondamment, de ces préposés aux
bénéficiaires là que nous avons formés rapidement et qui se retrouvent aujourd'hui
même dans le réseau de la santé. Et j'aimerais entendre des oppositions qui
trouvent que c'est une bonne idée puis qu'on a fait le travail à ce niveau-là.
280 millions de dollars pour les
soins à domicile, parce que ce n'est pas vrai, M. le Président, que tout le
monde va aller dans nos maisons des aînés puis que tout le monde va aller en
CHSLD, alors il faut investir.
70 millions pour développer des lits
d'hébergement en CHSLD, puis, des fois, le mot «million», on le dit tellement
souvent qu'on a l'impression que ce n'est pas rien, mais ce n'est quand même
pas banal.
50 millions pour le rehaussement des
per diem des CHSLD privés non conventionnés, on en a parlé.
30 millions pour bonifier le
programme des gicleurs dans les RPA.
5 millions pour améliorer l'environnement
physique des CHSLD, parce qu'on sait que c'est important que nos aînés se
retrouvent dans des lieux qui sont agréables et qui correspondent à leurs
besoins. On révise la certification des RPA à travers tout ça puis, mes collègues
en ont parlé, on augmente le nombre d'inspections dans les résidences privées
pour aînés.
Ça, là, ça coûte des sous, M. le Président,
et c'est des sous que ma collègue a été chercher pour le bien des aînés à
travers le Québec. Puis moi, quand... Et c'est surtout le Parti libéral qui dit
ça : Oui, on vous a laissé des surplus, on vous a laissé des surplus. M.
le Président, c'est l'argent des Québécois. S'il y a eu une condition gagnante
sur le plan financier au cours des dernières années au Québec, c'est parce que
les Québécois en ont payé le prix, des choix des précédents gouvernements.
Alors, ces surplus-là ont été faits sur le dos, par moment, des aînés. Alors,
oui, il est normal, et la ministre le répète assez souvent, que cet argent-là
revienne aux aînés au Québec.
On n'a pas eu de cadeau quand on est
arrivés en fonction, c'était l'argent des Québécois que les Québécois paient à
chaque semaine, sur leur «slip» de paie, quand ils reçoivent leur paie. Alors,
ça, il faut se rappeler, ça que, malgré la situation économique lorsqu'on est
arrivés, qu'il a fallu aller plaider les crédits pour que l'argent descende.
Puis, en plus de tout ça, ce n'est pas
tout d'avoir de l'argent, est-ce qu'elle descend? Bien, à tous les jours, on
s'assure qu'il y ait des patrons dans les CHSLD, qu'il y ait des gens sur le
terrain qui s'assurent que l'information se rende bien, mais que les sommes
financières descendent. On crée des postes. On invite les gens à appliquer et à
les combler. Ça va permettre aux sommes qu'on a été chercher de s'assurer que
les services se donnent.
Alors, on plaide les crédits, on s'assure
que les services sont donnés puis que nos aînés puis que leurs familles soient
rassurés par les soins qui sont offerts par le gouvernement du Québec. Et ça,
je pense qu'on peut en être fiers, on peut en être heureux. Et ça, on va encore
ressentir les effets positifs, au cours des prochaines années, du travail de la
ministre et de notre gouvernement. Merci.
Le Président (M. Provençal)
: Merci, M. le député. La dernière série d'intervention
appartient à la députée de Fabre, pour quatre <minutes. Madame.
Mme Sauvé :
Merci beaucoup, M. le Président. Écoutez, clairement, je vais nous ramener un
peu, là, parce qu'on est aujourd'hui face à une demande sur une commission
d'enquête publique indépendante, alors on va se ramener à ça...
Le Président (M. Provençal)
:
...dernière série d'interventions appartient à la
députée
de
Fabre pour quatre >minutes. Madame.
Mme Sauvé : Merci
beaucoup, M. le Président. Écoutez, clairement, je vais nous ramener un peu,
là... parce qu'on est, aujourd'hui, face à une demande sur une commission
d'enquête publique indépendante, alors on va se ramener à ça, et à la gestion
de crise, et à l'imputabilité de ce gouvernement. C'est de ça dont il est
question aujourd'hui. Vous savez, il y a eu beaucoup, beaucoup de mains qui se
sont levées pour dire : Il faut un éclairage, il faut un éclairage. Puis
l'éclairage complet, c'est la commission d'enquête indépendante.
On a eu des mains qui se sont levées dans
nos bureaux de comté à travers cette pandémie puis qui veulent des réponses. On
a des gens qui nous ont dit clairement : Il faut aller plus loin, parce
que les questions que vous posez, on attend, comme vous, toujours les réponses.
Les mains se sont levées, les reportages sont arrivés, et, je l'ai dit tantôt,
depuis le 17 avril, que ce soient les groupes de citoyens qui ont fait des
recours collectifs jusqu'au coroner en chef, le 17 juin, il y a eu toutes
ces mains levées, très importantes, de dire : Il y a une crise, une crise
humanitaire. Il faut la nommer, il faut avoir les réponses, il faut des
enquêtes, puis, en même temps, en sachant très bien qu'il faut aller aussi,
aussi plus loin.
M. le Président, il y a eu des
reportages-chocs auxquels on a… qu'on a regardés très attentivement, le
24 septembre dernier, et il y a encore des images qui nous marquent, des
images difficiles. Des images de drame humain, des aînés qui souffrent, des
aînés qui sont morts seuls, déshydratés. Il ne faut plus jamais que ça arrive
et, clairement, clairement, il faut comprendre tout ce qu'il est arrivé.
J'ai entendu, lors de l'émission J.E.,
les grands constats, les CHSLD qui n'étaient pas prêts, on le sait, le manque
d'équipement, les gens du personnel de la santé qui ont continué à travailler
alors qu'ils avaient des symptômes. On a revu cette histoire-là. On savait,
bien sûr, des choses, mais on a appris aussi des nouvelles choses. Et c'est
pour ça qu'il faut aller au bout, au bout de découvrir tout ce qu'il s'est
passé, et non pas seulement dans la prestation du réseau de la santé, mais dans
les décisions politiques qui ont été prises. Et ça, c'est la commission
d'enquête publique et indépendante qui va permettre de le faire.
Alors, on a ces images qui sont très
fortes. Et je vous dirais qu'il y a des mots... J'ai regardé encore... Encore
hier, j'ai regardé le reportage de J.E. sur l'hécatombe. Et il y a des
mots, là, qui sont tellement durs, les mots entre autres de M. Bédard.
Imaginez qu'il a sorti 200 corps des CHSLD durant la première vague. Il a
dit ces mots : «C'était l'antichambre de la mort. J'ai vu les traces de
larmes séchées sur leur visage. Ils sont partis seuls, livrés à eux-mêmes, sans
famille».
Il faut comprendre absolument, absolument
ce qu'il s'est passé. Et j'entends tantôt... J'entends, bien sûr, la ministre,
qui dit qu'elle est... Elle est imputable, comme elle l'a dit le
20 septembre. Donc, malgré les propos du 20... du... Pardon. Alors, qu'elle
imputable, comme elle l'a dit le 20 février, malgré les propos qu'elle a
tenus le 24 septembre. Alors, c'est tant mieux.
Alors, pourquoi? Pourquoi ne pas tenir une
commission d'enquête? Qu'est-ce que la ministre responsable des <CHSLD
ne...
Mme Sauvé :
…comme elle l'a dit le 20 septembre. Donc, malgré les propos du… pardon,
alors qu'elle est imputable, comme elle l'a dit, le 20 février, malgré les
propos qu'elle a tenus le 24 septembre, alors c'est tant mieux. Alors,
pourquoi, pourquoi ne pas tenir une
commission d'enquête? Qu'est-ce que
la ministre responsable des >CHSLD ne souhaite pas qu'on apprenne dans
une commission d'enquête publique? Parce que je ne vois pas de raison pour
laquelle on s'obstine à ne pas en vouloir une. Je ne comprends pas la raison,
j'ai besoin de savoir.
Il y a 412 gestionnaires qui sont
imputables, la ministre est aussi imputable. Allons vers une commission
d'enquête pour toutes ces familles, les 3 950 familles qui attendent
toutes les réponses. Merci, M. le Président.
• (11 h 40) •
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup, Mme la députée.
Conclusions
Nous en sommes aux dernières
interventions. Alors, Mme la ministre, vous avez la parole pour 10 minutes.
Mme Marguerite Blais
Mme Blais (Prévost) :
Alors, M. le Président, je suis d'accord avec la députée de Fabre, il faut
comprendre ce qu'il s'est passé. C'est la raison pour laquelle nous avons
mandaté… c'est la raison pour laquelle j'ai voulu faire ce plaidoyer, pour
faire la démonstration que le Commissaire à la santé et au bien-être, c'est une
personne indépendante, c'est une personne qui est impartiale, c'est une
personne qui peut faire une enquête, qui peut assigner des témoins. Alors, on
est d'accord pour faire une enquête. Tout le monde est d'accord ici, on en fait
une, enquête, on est en train d'en faire une.
Vous savez, ce n'est jamais drôle, là. On
est assis ici aujourd'hui puis on ne veut pas mettre le blâme sur personne.
Mais, quand on parle de nos aînés, puis ma collègue le mentionnait, parce que
j'avais dit «le peuple invisible», ça m'a toujours frappé, M. le Président, de
constater combien les aînés étaient invisibles au Québec. Ils sont devenus
visibles avec la COVID. C'est-tu assez épouvantable?
La première fois que j'ai fait de la politique,
je ne pouvais pas comprendre comment ça se fait qu'il y avait autant d'âgisme,
comment c'était difficile. On se battait pour avoir de l'argent pour les aînés.
Comment ça se fait que tout était compliqué par rapport aux aînés? J'avais déjà
dit : Ce n'est pas sexy, vieillir. Puis là on avait dit : C'est
effrayant, ce qu'elle dit là. Bien, c'est parce que, bien souvent, tu prends ta
retraite, c'est comme si tu te retirais de la vie, c'est comme si tu devenais
une personne qui n'est plus active dans la société, alors que c'est totalement
faux. Puis il faut dire que c'est près de 90 % des personnes âgées qui
vivent à domicile. C'est 2,8 % en CHSLD, c'est 8 % en résidence. Ces
gens-là, là, paient des taxes et des impôts
Mais moi, là, je suis revenue, parce que,
justement, je me suis dit : On ne voit pas les aînés puis on ne voit pas
les proches aidants non plus. J'ai dit : Je vais revenir, pour qu'on les
voie. J'ai découvert une personne qui s'appelle le premier ministre du Québec,
qui a dit : Oui, on va en faire une, politique des proches <aidants.
Oui, on va...
Mme Blais (Prévost) :
...je suis revenue,
parce que
justement, je me suis dit : On
ne voit pas les aînés puis on ne voit pas les proches aidants non plus. J'ai
dit : Je vais revenir pour qu'on les voie. J'ai découvert une personne qui
s'appelle le
premier ministre du
Québec, qui a dit : Oui, on
va en faire une
politique des
proches >aidants. Oui, on va
rendre les milieux de vie des aînés plus attrayants, oui, on va faire de la
gériatrie sociale; oui, on va faire des maisons de répit. Je suis sortie de ma
retraite pour ça, puis on a commencé à le faire. Puis j'ai dit : Moi, là,
avant de vraiment construire les maisons des aînés, il faut que je comprenne davantage
les CHSLD. Ce n'est pas en faisant une visite ou deux visites dans un CHSLD
qu'on sait comment ça fonctionne.
La députée de Fabre m'a déjà demandé mes
rapports. Bien, les rapports, là, moi, je n'ai pas fait de rapports comme tels,
mais les gens qui me suivaient, là, ils corrigeaient au fur et à mesure. Et je
peux vous dire une chose : Je faisais des visites-surprises, mais je
faisais des visites aussi avec les directions, puis, quand je voyais, par
exemple, des fenêtres brisées — oui, j'ai vu un CHSLD ici, à Québec
où l'air rentrait — j'ai dit : Ça n'a aucun sens, vous allez le
réparer. Bien, on va le réparer, bien, c'est parce qu'on va le reconstruire.
Bien, vous allez le reconstruire quand? Ça fait combien d'années que vous
pensez de le reconstruire? Bien, ça fait 25 ans. Bien, on peut-tu,
entre-temps, faire de quoi? On peut-tu faire des rénovations? C'est ça que j'ai
fait quand j'ai visité des CHSLD.
On parle de la COVID-19. Oui, ça a atteint
les personnes âgées; oui, il y a le personnel qui est rentré de vacances, qui
était asymptomatique; oui, il a manqué d'équipement; oui, on avait coupé pour
44 millions de dollars en santé publique. Ça veut dire qu'on a coupé des
cliniciens en prévention et contrôle des infections. Oui, il y a des endroits
où tu as quatre personnes âgées pour une chambre avec une petite toilette. Oui,
il y a des toilettes où on ne peut pas rentrer avec un fauteuil roulant, M. le
Président. Oui, au CHSLD de Sainte-Dorothée, il y a un rideau qui sépare des
lits. Comment voulez-vous que les gens ne se transmettent pas le virus? Oui, ma
collègue a raison : on ne peut pas construire des CHSLD du jour au
lendemain, mais on va en faire, des CHSLD, on n'a pas le choix.
Oui, on va faire des maisons des aînés.
Pourquoi? Parce que ça va être plus humain, parce qu'on va s'occuper des
personnes vivant avec des troubles neurocognitifs majeurs. On va les construire
où on va tenir compte, justement, de la pandémie de la COVID-19, pour qu'il y
ait de la ventilation, de la climatisation, pour qu'il y ait une cuisine plus
grande pour le personnel, pour qu'il y ait des lavabos. Le personnel s'infecte
encore dans les cuisines, M. le Président, puis on est dans la deuxième vague.
C'est ça, la réalité.
La réalité, c'est qu'on vit avec des
années de décisions. Oui, je <prends ma part de responsabilité,
puis je l'ai dit, à EnquêteV, j'ai pris toute la responsabilité.
Ils ont peut-être passé un bout, là, mais j'ai dit...
Mme Blais (Prévost) :
...
M. le Président, puis on est dans la
deuxième vague.
C'est
ça, la réalité. La réalité, c'est qu'on vit avec des années de décisions. Oui,
je >prends ma part de responsabilité, puis je l'ai dit, à Enquête,
j'ai pris toute la responsabilité. Ils ont peut-être passé un bout, là, mais
j'ai dit que j'ai pris toute la responsabilité et, je le redis aujourd'hui, je
prends l'entièreté de la responsabilité. Je suis revenue en politique pour
changer les choses, ce n'est pas vrai que je vais me cacher derrière un
paravent, je ne suis pas faite comme ça, je vais la prendre, je les prends, mes
responsabilités.
Ça a été difficile, on apprenait au fur et
à mesure. Là, aujourd'hui, on a du matériel. Là, aujourd'hui, on a formé des
champions en prévention et contrôle des infections. Là, on a un gestionnaire
par CHSLD. Quand j'arrive... quand je suis arrivée au Conseil des ministres
puis que j'ai dit au premier ministre : Les préposés ne sont pas assez
payés pour la lourdeur de la tâche, aujourd'hui, ce sont des personnes extrêmement
vulnérables qui vivent en CHSLD, bien, le premier ministre a dit : On va
augmenter les salaires des préposés aux bénéficiaires. On va attendre avec les
conventions au mois de mars. Bien, la COVID est arrivée avant. Mais le premier
ministre a dit : On va en former 10 000, préposés. Tout le monde
riait. Les gens disaient : Bien, ils vont former
10 000 préposés... Bien, hein? On en a formé 7 100 puis on est
en train d'en former 3 000 autres, préposés. On ne peut pas former
des infirmières de la même façon qu'on forme des préposés, ça prend trois ans.
Mais là on a mis un gestionnaire par établissement. Comment voulez-vous... s'il
n'y a pas de gestionnaire par établissement? Les CISSS et les CIUSSS, c'est
tellement gros, M. le Président, c'est difficile de pouvoir contrôler
localement ce qu'il se passe. C'est pour ça que ça prend un gestionnaire sur
place pour contrôler ce qu'il se passe.
Donc, on a une meilleure pratique
actuellement pour nos CHSLD. On veut aussi que le personnel arrête de se
mobiliser. Ce n'est pas d'hier, ça, que le personnel, il se promène. C'était
comme ça dans les CSSS, c'était comme ça dans les CISSS et les CIUSSS, ça fait
partie de leur entente collective. Ça a pris un décret ministériel pour dire :
Vous allez arrêter de vous promener. Ça se peut qu'il y ait des bris parce
qu'il manque d'infirmières. S'il y a des bris, il faut que ça soit documenté,
il faut que ça soit connu, il faut qu'on ait un registre, nous autres. Il faut
que le ministre de la Santé et des Services sociaux ait un registre. Il y a un
bris, pourquoi il y a un bris?
La même chose pour les proches aidants.
Parce que, des fois, les consignes ou les directives sont interprétées
différemment par les établissements. Là, maintenant, on a renversé le fardeau
de la preuve. Vous ne voulez pas que les proches aidants entrent, vous devez
faire la demande au ministère de la Santé et des Services sociaux. On va vous
donner la permission ou non, parce que les proches aidants, là, on ne veut plus
jamais, jamais, jamais que ça arrive que les proches aidants soient interdits,
ne puissent pas aller là. Oui, <quand on fait des erreurs, il faut
être...
Mme Blais (Prévost) :
...au
ministère de la Santé et des Services sociauxT. On va vous donner
la permission ou non,
parce que les proches aidants, là, on ne veut plus
jamais,
jamais,
jamais que ça arrive que les proches
aidants soient interdits, ne puissent pas aller là. Oui, >quand on fait
des erreurs, il faut être transparent, il faut le dire. On pensait bien faire,
mais ça n'a pas été une bonne idée, ça a été une idée... On pensait que c'était
pour être temporaire, ça a perduré dans le temps. À un moment donné, dans la
balance, le Dr Horacio Arruda a dit : Écoutez, on ne peut pas mesurer
l'angoisse, la détresse, les problèmes de santé mentale, mais effectivement ça
a affecté les gens.
Puis, tout à l'heure, le collègue de Jean-Lesage,
il parlait des milieux privés, des milieux publics, privés conventionnés. Qui
plus est, on a un projet de loi qu'on étudie actuellement, le projet de loi n° 52. Pourquoi? Pour faire basculer les commissaires aux
plaintes du privé au public. Écoutez, j'ai appris qu'il y avait des commissaires
aux plaintes qui étaient embauchés par les propriétaires. Donc, comment tu
veux, à un moment donné, te plaindre, apporter des plaintes quand tu es
embauché par le propriétaire? On avait... On a un système où on peut déposer
les plaintes, mais il y avait les CHSLD privés où il y avait zéro plainte.
Bien, ça ne se peut pas, ça ne se peut pas, qu'il y ait zéro plainte. Alors là,
on a un projet de loi, on essaie de changer les choses tranquillement, parce
que... Pas tranquillement, vite.
Je suis pressée, M. le Président, je suis
la plus vieille ici, à l'Assemblée nationale. C'est vrai que je pourrais
retourner chez nous, à 70 ans, puis cultiver mes patates puis mes tomates.
Mais j'ai décidé de me battre. Puis je pense qu'on peut bien se battre
ensemble, le député de Rimouski puis le député des Îles-de-la-Madeleine
ensemble, parce que le député de Rimouski, il a les mêmes valeurs.
Le Président (M. Provençal)
: Merci, Mme la ministre.
Mme Blais (Prévost) : Je
vais vous le dire, il a les mêmes valeurs.
Le Président (M. Provençal)
: Merci, Mme la ministre.
Mme Blais (Prévost) :
C'est terminé?
• (11 h 50) •
Le Président (M. Provençal)
: C'est terminé, Mme la ministre, malheureusement.
Mme Blais (Prévost) : Je
ne pensais pas que... O.K.
Une voix
: ...
Le Président (M. Provençal)
: Je demande au député des Îles-de-la-Madeleine de conclure
cette interpellation. Merci.
M. Joël Arseneau
M. Arseneau : Merci.
Merci beaucoup, M. le Président. Écoutez, je viens d'entendre la ministre
passionnée sur un certain nombre d'enjeux que l'on partage, sur un certain
nombre de constats que l'on partage. Ce sur quoi on ne s'entend pas, c'est sur
les moyens d'arriver à nos fins. Et je relève un certain nombre de
contradictions dans les propos de la ministre, qui dit, d'une part, être tout à
fait d'accord pour comprendre, pour aller au fond des choses, pour faire une
enquête, mais elle ne souhaite pas que l'enquête soit publique. C'est ce qu'il
faut comprendre de la décision du gouvernement. Elle dit, de la même façon,
qu'elle ne veut pas se cacher derrière un paravent. Mais pourquoi garder cette
enquête derrière ce fameux paravent?
Vous dites vouloir prendre vos responsabilités.
La responsabilité qui incombe à la ministre, c'est d'aller au fond des choses
avec une commission d'enquête publique, où l'on <pourra entendre les
témoins tous azimuts, en particulier les familles...
M. Arseneau :
...derrière ce fameux paravent. Vous dites vouloir prendre vos
responsabilités.
La
responsabilité qui incombe à la
ministre, c'est d'aller au
fond des choses avec une
commission d'enquête publique, où l'on >pourra
entendre, entendre les témoins tous azimuts, en particulier, les familles des
victimes, qui pourront donner leur version des choses.
Parce que vous parlez, Mme la ministre, en
tout respect, d'un peuple invisible, des aînés qui sont invisibles, et la
solution que vous trouvez, c'est de les rendre encore plus invisibles en
pelletant le dossier derrière les portes closes du travail d'une commissaire au
bien-être et à la santé, dont on entendra parler que lorsque le dépôt de son
rapport sera prêt à être fait. Et ce qu'on soupçonne, si on se fie au dernier
rapport, le rapport pourra peut-être aussi être rendu public un vendredi
après-midi, à 15 heures, dans un coin sombre du Web. C'est ce que l'on
veut, à tout prix, éviter avec la proposition que l'on défend aujourd'hui.
D'autre part, on dit qu'on veut mieux
comprendre ce qu'il s'est passé, pas seulement dans la gestion de crise, mais
qu'est-ce qui nous a amenés à ce constat d'échec que l'on partage tous depuis
20 ou 25 ans. D'une part, on dit qu'on veut comprendre et, d'autre part,
on nous dit que les constats sont là, les constats sont faits, et qu'il faut
passer à autre chose, il faut se tourner vers l'avenir. Et on nous abreuve...
Notre collègue de Beauce-Sud nous a inondés de chiffres tous plus intéressants
et impressionnants les uns que les autres, mais je pense que le chiffre qu'il
faut retenir, c'est 4 000, 4 000 victimes qui, actuellement, sont
négligées dans le processus qu'on a mis en place, 4 000 familles qui
ne sauront pas précisément pourquoi ce drame, cette tragédie est arrivée au
Québec, pourquoi on figure au bas de l'échelle des pays, et des États, et des
provinces canadiennes qui n'ont pas réussi... qui n'a pas... en fait, pourquoi
on n'a pas réussi à endiguer, de la même façon que les autres ou de façon
comparable, la COVID-19, particulièrement dans les résidences pour personnes
âgées.
Deux chiffres, donc, 4 000 victimes,
et le chiffre 1, une commission d'enquête. C'est ce dont on a besoin pour aller
au fond des choses. Il faut pouvoir analyser et réfléchir publiquement à ce qu'il
nous est arrivé comme Québécois et ce à quoi on a pu assister au cours des mois
du printemps. Tous les Québécois ont été témoins de ce qu'il se passait. Ils
ont été mis devant un fait accompli. On doit décortiquer les événements, aller
derrière les chiffres, derrière les événements et mieux comprendre. Beaucoup de
questions, on les a évoquées au départ, là, beaucoup de questions ont été
posées. Elles doivent être posées et répondues publiquement. On ne veut pas
d'un <simple rapport, on veut un processus, une démarche d'enquête
participative. Les Québécois ont subi...
M. Arseneau : ...ont
été posées, elles doivent être posées et répondues publiquement. On ne veut pas
d'un >simple rapport, on veut un processus, une démarche d'enquête
participative. Les Québécois ont subi un traumatisme sans nom au printemps. Il
faut qu'ils fassent partie de l'expérience et du processus qui nous permettra — on
l'a mentionné à quelques reprises — de guérir, de tourner la page
ensemble en ayant tiré certaines conclusions, certaines leçons de ce qu'il s'est
passé. Et je pense qu'il faut avoir le courage de le faire.
On a parlé beaucoup du fait que des
décisions, dans le passé, pouvaient avoir généré la situation actuelle. Nous ne
sommes pas là pour trouver des coupables dans la gestion de crise ou dans les gouvernements
qui se sont succédé et qui ont précédé le gouvernement actuel. D'ailleurs, la ministre
a déjà fait partie d'un autre gouvernement, qu'elle se plaît constamment à
blâmer pour un certain nombre de ces décisions passées. Le premier ministre
lui-même a fait partie d'un gouvernement du Parti québécois, où il a été ministre
de la Santé, où il a pris des décisions, où il n'a pas pris certaines
décisions. Nous ne voulons pas faire de politique partisane avec ce dossier-là,
nous voulons savoir pourquoi le Québec et ses gouvernements successifs,
incluant le gouvernement actuel, pourquoi le Québec a failli, pourquoi le Québec
a subi un échec aussi important et qu'il fait porter sur la santé et sur la vie
des personnes âgées les plus vulnérables de notre société.
Alors, on a, aujourd'hui, malheureusement,
évité le sujet clé que l'on a voulu amener à l'interpellation, celui de
débattre d'une commission d'enquête et de sa valeur. Pourquoi refuser une
commission d'enquête, qu'on pourrait appeler une commission d'enquête vérité,
passion et réconciliation avec ce peuple invisible que la ministre veut
défendre? Nous voulons savoir, nous voulons voir, nous voulons entendre. Nous
devons avoir à coeur... et conserver ce sens du devoir envers les victimes.
Moi, l'image qui me vient actuellement, là, qui me vient, c'est l'image des
singes de la sagesse, l'un se cachant les yeux, l'autre se cachant la bouche et
le troisième se cachant les oreilles. C'est ce qu'on ne doit pas faire
lorsqu'il est question d'aller trouver l'ensemble des réponses à toutes les
questions qui sont posées depuis le début de mars 2020.
Et je veux revenir rapidement sur la
question de la Commissaire à la santé et au bien-être. Nous ne critiquons pas,
d'aucune façon, la mise en place... la remise en place de ce poste-là et la
qualité de la personne qui a été nommée, mais on parle de deux choses <complètement
différentes. La commissaire a pour mission d'apporter un éclairage pertinent au
débat public et à la prise de...
M. Arseneau : ...place,
la remise en place de ce poste-là et la qualité de la personne qui a été
nommée, mais on parle de deux choses >complètement différentes. La commissaire
a pour mission d'apporter un éclairage pertinent au débat public et à la prise
de décision gouvernementale. C'est ça, le coeur de sa mission, et c'est une
mission qui va se déployer, au cours des années, en temps normal, là. On va
examiner... Et c'est son rôle, c'est son rôle, vous irez voir dans la
définition de la mission qu'on lui a donnée, de voir et d'évaluer la
performance du système de santé.
Ce dont il est question, c'est un
événement extraordinaire, un événement qui a bousculé nos vies, un événement
que la ministre a reconnu comme étant exceptionnel. Et, à événement
exceptionnel, solution exceptionnelle. Et quelle est cette solution
exceptionnelle? Elle existe dans la réglementation et dans les lois
gouvernementales, c'est la commission d'enquête publique. Qui sert à quoi? Qui
sert à enquêter de façon publique sur une question précise, un drame, par
exemple — comment peut-on penser à un drame plus important que celui
qu'on a vécu au printemps — et de faire rapport, évidemment, avec des
recommandations, une commission qui a les mêmes pouvoirs et immunités qu'un
juge de la Cour supérieure.
La différence, elle est là, elle est
simple, mais elle est fondamentale dans la procédure qu'on doit mettre en place
pour décortiquer les événements des derniers mois. On ne peut pas se contenter
strictement d'examiner la performance du système, il faut voir quelle était l'organisation
qui était en place, quelle était la planification qui avait été également mise
en oeuvre, quelles sont les décisions qui ont été prises de façon successive au
cours de la crise, qui se poursuit d'une certaine façon, il faut pouvoir
surtout entendre non seulement la version gouvernementale, qu'on a entendue,
là, ces dernières minutes, quand même, sur les causes, et les effets, et sur la
façon dont on a agi avec les moyens qu'on avait, il faut pouvoir entendre les
gestionnaires, il faut pouvoir entendre le personnel soignant, il faut prêter
l'oreille à ce qu'ont vécu les préposés aux bénéficiaires, il faut surtout
pouvoir donner la parole aux victimes et à leurs familles. Ce traumatisme-là,
si on veut s'en remettre de façon positive et constructive, il faut pouvoir le
décortiquer dans ses moindres détails, il faut jeter un éclairage complet sur
ce qu'il s'est passé, en tirer des leçons, avoir un certain nombre de
recommandations écrites par une commission indépendante qui aura fait le tour
de la question, et, comme ça, on pourra tourner la page et regarder vers
l'avenir sans oublier le drame du passé. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup, M. le député. Merci à l'ensemble des <gens
qui ont contribué...
>
12 h (version révisée)
<17947
M. Arseneau :
...
recommandations écrites par une
commission indépendante qui
aura fait le tour de la
question. Et comme ça, on pourra tourner la page
et regarder vers l'avenir, sans oublier le drame du passé.
Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Provençal)
:
Merci beaucoup,
M.
le député. Merci à l'ensemble des >gens qui ont contribué aux échanges aujourd'hui.
Compte tenu de l'heure, je lève la séance.
Et la commission, ayant accompli son mandat, ajourne ses travaux au mardi
6 octobre à 10 heures, où elle poursuivra un autre mandat. Bonne fin
de semaine à tous. Merci.
(Fin de la séance à 12 heures)