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Version finale

37e législature, 1re session
(4 juin 2003 au 10 mars 2006)

Le mercredi 2 juin 2004 - Vol. 38 N° 20

Consultations particulières sur le projet de loi n° 55 - Loi modifiant la Loi sur la Société de l'assurance automobile du Québec et d'autres dispositions législatives


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Table des matières

Journal des débats

(Quinze heures trois minutes)

La Présidente (Mme Harel): Alors, nous allons donc débuter nos travaux. Je déclare la séance ouverte. Alors, je vais demander aux membres de la commission et aux personnes qui sont parmi nous de bien vouloir éteindre leurs téléphones cellulaires pendant la séance.

Alors, je rappelle le mandat de la commission, qui est de procéder à des consultations particulières et de tenir des auditions publiques sur le projet de loi n° 55, Loi modifiant la Loi sur la Société de l'assurance automobile du Québec et d'autres dispositions législatives.

Je vais vous demander, M. le secrétaire, d'annoncer les remplacements.

Le Secrétaire: Oui, Mme la Présidente. M. Tremblay (Lac-Saint-Jean) est remplacé par M. Jutras (Drummond).

La Présidente (Mme Harel): Alors, nous allons donc entreprendre les auditions. Je rappelle le temps consacré aux remarques préliminaires, qui est de 20 minutes. Nous allons y procéder immédiatement. Alors, 10 minutes pour le groupe parlementaire formant le gouvernement et 10 minutes pour le groupe parlementaire formant l'opposition.

Alors, nous avons un premier groupe... Nous avons donc, cet après-midi, deux associations qui viendront présenter leur mémoire devant la commission, soit la Fédération motocycliste du Québec ainsi que le Comité d'action politique motocycliste. Et nous ajournerons à 17 h 20, compte tenu du défaut d'un troisième groupe de se présenter devant la commission.

Remarques préliminaires

Alors, ceci étant fait, je vais vous inviter, M. le ministre, à faire vos remarques préliminaires.

M. Yvon Marcoux

M. Marcoux: Alors, merci, Mme la Présidente. Je voudrais également évidemment souhaiter la bienvenue à vous-même, comme présidente de la commission, aux membres de la commission à la fois du côté gouvernemental et puis également du côté de l'opposition officielle, M. le député de Drummond, qui est le porte-parole en matière de transports. Je voudrais aussi peut-être, Mme la Présidente, vous présenter les deux personnes. Il y a M. Jacques Brind'Amour, qui est à ma droite, ici, qui est le président-directeur général de la Société de l'assurance automobile du Québec, et Mme Marie Blanchet, qui est attachée politique à mon cabinet. Et il y a également des personnes de la Société de l'assurance automobile du Québec qui nous accompagnent ici. Je veux également souhaiter la bienvenue aux deux groupes qui ont accepté de venir faire une présentation devant la commission parlementaire à l'occasion de l'étude du projet de loi n° 55.

Quelques brèves remarques, Mme la Présidente, pour vous rappeler quel est l'objectif essentiel du projet de loi n° 55: c'est de séparer la mission assurance de la Société de l'assurance automobile du Québec des autres mandats que cette société exerce actuellement. Donc, le projet de loi crée ce qu'on appelle une fiducie d'utilité sociale. Donc, une fiducie, c'est d'abord et avant tout un patrimoine distinct, un patrimoine... ce qu'on appelle d'affectation, c'est-à-dire que les sommes qui composent ce patrimoine-là ne peuvent pas être utilisées à des fins autres que celles pour lesquelles il est spécifiquement destiné, et, dans ce cas-ci, c'est pour payer les indemnités d'assurance aux personnes, conducteurs, conductrices qui sont couverts par le régime d'assurance automobile du Québec.

Au cours des années, il y a différents mandats qui ont été attribués à la Société de l'assurance automobile du Québec, mandats qui sont totalement ou partiellement financés par la société. Je pense, par exemple, au transport ambulancier pour lequel la société, chaque année, présentement verse à peu près 50 millions de dollars. Il y a également le Programme d'adaptation des véhicules et de vignettes pour personnes handicapées où la société contribue pour un montant de l'ordre de 10 millions de dollars. Et on sait que la société également est responsable, là, de l'émission des permis et également des immatriculations du contrôle routier.

Donc, dorénavant, avec la création d'une fiducie d'utilité sociale, les sommes qui vont être perçues comme contributions d'assurance vont être versées dans cette fiducie et ne pourront plus servir à financer ses autres mandats qui vont être exclus dorénavant des responsabilités de la Société de l'assurance automobile du Québec.

Je voudrais peut-être vous rappeler aussi que la Société de l'assurance automobile du Québec est sous-financée depuis un certain nombre d'années ? ce n'est pas nouveau ? parce que les sommes qui sont perçues annuellement par le régime d'assurance et les autres mandats sont insuffisantes pour financer les dépenses. Jusqu'en l'année 2000, les rendements qui étaient générés sur les placements de la société ont servi à compenser les manques à gagner. Toutefois, cette situation a commencé à changer en 2001. Par exemple, les fonds de la société investis à la Caisse de dépôt et placement ont subi des pertes qui ont totalisé 1,7 milliard de dollars au cours de 2001 et 2002. Ça veut dire que la valeur marchande des placements de la société est passée de 7,6 milliards à la fin 2000 à 5,9 milliards de dollars à la fin 2002. Alors, ce sont donc des sommes importantes. Et, compte tenu des méthodes d'amortissement en place, il y a une partie considérable de ces pertes qui n'est reconnue que dans les prochains exercices financiers de sorte qu'au cours des cinq prochaines années, selon les estimés de la SAAQ, ces pertes vont représenter un manque à gagner de plus de 350 millions de dollars par année.

Je veux également rappeler qu'en 2001 et 2002 la SAAQ a modifié les conventions comptables ? c'était tout à fait légal ? mais évidemment qui ont contribué à réduire les déficits qui étaient anticipés. Ainsi, sans ces modifications, par exemple, en 2001, la SAAQ aurait déclaré un déficit de 160 millions de dollars plutôt qu'un déficit déclaré de 33 millions de dollars et, en 2002, aurait déclaré un déficit de 264 millions plutôt qu'un déficit de 160 millions de dollars. Et, pour l'année 2003, c'est-à-dire l'année qui s'est terminée en décembre dernier, le rapport annuel de la SAAQ n'a pas encore été déposé. Il le sera bientôt. Mais les prévisions étaient qu'il y aurait un déficit de plus de 300 millions de dollars pour l'année 2003.

n (15 h 10) n

D'ailleurs, simplement vous dire que le ministre des Transports du temps, en 2001, lors d'une commission parlementaire, avait déjà évoqué que la SAAQ s'en allait vers des déficits importants, et, même en 2001, déjà qui lui... parlait de 200 millions de dollars. Évidemment, ça a été 33 millions avec des modifications de règles comptables. Donc, avec les dispositions actuelles de la loi telle qu'elle est, si nous devions respecter les exigences relatives au sous-financement et à la capitalisation, ça voudrait dire, ça, des hausses significatives à court terme pour les assurés. Et le gouvernement veut éviter une telle situation. Et c'est pourquoi le projet de loi n° 55 apporte beaucoup de souplesse dans le cadre d'un rétablissement graduel de la situation financière de la SAAQ, et ce, pour maintenir évidemment et renforcer la sécurité des assurés. Alors, s'il n'y avait pas de changement, ça veut dire qu'il devra y avoir une correction immédiate sans aucun délai qui serait de nature à entraîner des effets négatifs importants possiblement à court terme pour les assurés.

Alors, comme pour la CSST donc, il y a la création d'une fiducie d'utilité sociale, d'un patrimoine distinct. Et ça, ça implique, en vertu des dispositions du Code civil, comme ça a été fait il y a deux ans pour la CSST, d'accorder plus d'autonomie dans la gouvernance de la société. En d'autres termes, la société doit être plus distante du gouvernement qu'elle l'est maintenant pour répondre aux critères de la fiducie. C'est une exigence du Code civil. Alors, il y a, oui, plus d'autonomie, dans un premier temps, au niveau de la gouvernance et du conseil d'administration de la société d'une part. Dans la nomination des membres, le processus va être différent. Et, deuxièmement, aussi, comme dans le cas de la CSST, c'est le conseil d'administration de la société qui, dans ses nouvelles dispositions et avec les exigences d'une fiducie, aura le pouvoir d'établir le niveau requis des contributions d'assurance. Alors donc, évidemment c'est maintenant le conseil d'administration qui aura ce pouvoir-là.

Cependant, il est essentiel d'assurer une prise de décision qui soit transparente, qui soit publique, un processus également qui soit impartial et un processus qui soit imperméable à la politique. Donc, le projet de loi prévoit la nomination d'un comité d'experts, d'un conseil d'experts dont le mandat sera de revoir la démarche qui sera suivie par la société, de vérifier les données qui sont utilisées par la société pour modifier ses règlements. Et ça, c'est essentiel pour assurer une transparence. Et il y aura, de la part du conseil ? c'est décrit dans la loi ? l'obligation d'une consultation publique. Le rapport sera rendu public. Et de plus, dans la loi, nous décrivons un certain nombre de critères que le conseil d'experts devra obligatoirement prendre en considération dans l'évaluation des modifications, là, qui vont être proposées par la Société de l'assurance automobile du Québec, alors des critères qui sont, par exemple: l'examen des dépenses annuelles de la société, l'examen des mesures de prévention qui sont prises en matière de sécurité routière, les contributions ? voir si les contributions sont justes et raisonnables ? quelle est la politique de financement de la société, ses prévisions actuarielles, quelle est la qualité de service fournie par la société aux assurés.

Donc, ce sont des critères très précis dans la loi qui devront être appliqués par le comité d'experts dans l'examen des modifications qui sont proposées par la Société de l'assurance automobile du Québec.

Alors donc, la loi prévoit également que la société n'aura plus à contribuer aux autres mandats financièrement, et toutes les sommes perçues auprès des automobilistes seront consacrées au paiement d'indemnités aux assurés, et ça, de le faire d'une façon qui soit souple. Et c'est pour ça qu'on prévoit que la capitalisation, par exemple, pourra être rétablie sur une période de 15 ans et non pas à court terme, comme le prévoit la loi actuelle.

Alors, Mme la Présidente, je voudrais simplement vous dire en terminant que je suis heureux qu'on puisse avoir des groupes qui viennent faire part de leurs commentaires. Et nous aurons l'occasion, à ce moment-là, de discuter sans doute de d'autres enjeux qui découlent de ce projet de loi là, mais essentiellement c'est de créer un patrimoine distinct à l'intention des assurés et de rétablir la situation financière sur un certain nombre d'années, de façon graduelle.

La Présidente (Mme Harel): Merci, M. le ministre. Alors, la parole est maintenant au porte-parole de l'opposition officielle et député de Drummond.

M. Normand Jutras

M. Jutras: Alors, merci, Mme la Présidente. M. le ministre, M. le président de la Société de l'assurance automobile et MM. les collègues d'un côté et de l'autre de la Chambre.

Alors, dans un premier temps, je voudrais dire que je suis heureux que le ministre ait répondu positivement à ma suggestion d'inviter des groupes pour se faire entendre par rapport au projet de loi qui nous intéresse, le projet de loi n° 55. Je pense que c'est toujours bon d'aller en consultations publiques pour voir quelle est l'opinion des citoyens et des citoyennes par rapport à des projets de loi que nous déposons ici. Évidemment, c'est à pied levé. C'est pour ça que j'en suis d'autant plus reconnaissant aux groupes qui se présentent aujourd'hui, là, parce que le délai était des plus courts. Alors, j'en remercie d'autant plus les deux groupes qui se présentent ici aujourd'hui. Puis les autres groupes qui, malheureusement, ont décliné, c'est parce qu'effectivement le temps était trop court. Il aurait été évidemment préférable que, dès le dépôt du projet de loi, des consultations soient convoquées. Et là, à ce moment-là, les gens auraient pu se faire entendre. En tout cas, on va composer avec la situation telle qu'elle se présente aujourd'hui.

Concernant le projet de loi n° 55, là, moi, je pense qu'il va falloir, par rapport à ce projet de loi là, faire preuve de franchise et de transparence et dire les choses telles qu'elles sont, et, comme je dis souvent à nos amis d'en face, être capables d'appeler un chat un chat et être capables d'appeler un chien un chien. Autrement dit, qualifier les choses telles qu'elles sont. En fait, il m'apparaît de façon évidente, Mme la Présidente, qu'il y a deux buts qui sont poursuivis par le gouvernement libéral dans la présentation de ce projet de loi là. Le premier but, c'est de sortir du périmètre comptable du gouvernement la Société de l'assurance automobile du Québec. Pourquoi? Parce qu'elle est déficitaire et le gouvernement ne veut donc pas avoir, dans son périmètre comptable... ne veut donc pas avoir, dans son rapport financier, le déficit de la Société de l'assurance automobile du Québec.

Quand le ministre dit: «Bien, nous agissons dans la foulée de ce que vous avez fait par rapport à la CSST», bien je rappellerai au ministre que sa collègue présidente du Conseil du trésor avait qualifié ce genre d'opération là de «magouille». Alors, lorsqu'on a fait l'adoption du principe ? j'en ai parlé dans mon allocution puis j'ai posé la question au ministre ? est-ce qu'il considère que c'est une magouille? J'imagine que non parce que, s'il considérait que c'est une magouille, il ne se livrerait pas au même exercice, à moins qu'il dise que la présidente du Conseil du trésor, lorsqu'elle a fait cette déclaration-là, bien elle a erré et manifestement, là, comme on dit en langage populaire, elle s'est mis un doigt dans l'oeil. Alors donc, moi, ça m'apparaît bien évident, puis je pense qu'il faudrait le dire, là: C'est ça qui se passe; il y a un déficit à la Société de l'assurance automobile du Québec, et le gouvernement ne veut pas l'avoir dans son livre comptable. Il veut que ce soit à part. Et la preuve de ça, Mme la Présidente...

Posons la question autrement: Si la Société de l'assurance automobile du Québec était en surplus, pensez-vous qu'on serait ici aujourd'hui en train d'étudier ce projet de loi là? C'est évident que je pense que, là, tous les travaux de la Chambre seraient finis ? ils sont finis de l'autre bord, là, depuis 12 h 30. Bien, nous autres aussi, là, on ne serait pas ici en train d'étudier ça parce que c'est évident que le gouvernement ne voudrait pas sortir la Société de l'assurance automobile de son périmètre comptable. Je pense que poser la question, c'est y répondre. Et on peut reposer la question autrement. Quand le gouvernement libéral, avant 1994, a siphonné les surplus de la Société de l'assurance automobile du Québec autant comme autant, jusqu'à plus de 2 milliards de dollars, dans ce temps-là, il était bien heureux d'avoir la Société de l'assurance automobile du Québec dans son périmètre comptable et d'aller réduire ses déficits parce que ces déficits, rappelons-le, du temps du gouvernement libéral, c'étaient toujours des déficits records. Mais il était bien content d'aller chercher de l'argent là pour effectivement faire en sorte que ces déficits soient moindres. Alors, c'est à mon avis la première raison qui fait que nous sommes appelés à étudier ce projet de loi là.

n (15 h 20) n

L'autre raison ? et ça aussi, j'invite le ministre à la transparence, Mme la Présidente ? c'est que les usagers de la route, les automobilistes, camionneurs, motocyclistes, etc., doivent s'attendre à des hausses substantielles des contributions d'assurance qu'ils auront à verser. Pas des hausses minimes, je dis: des hausses substantielles. C'est évident que c'est ça qui s'en vient. Et j'espère que le ministre va le dire tout au cours de l'étude du projet de loi, parce que je suis convaincu qu'à la Société de l'assurance automobile on a déjà fait des projections dans ce sens-là. Il y a des actuaires qui travaillent là. Ils savent qu'est-ce qui s'en vient pour les usagers de la route. Et j'aimerais ça que, là aussi, le ministre soit transparent et qu'il nous dise de quel ordre ce sera. On parle d'un étalement sur les années qui sont devant nous. D'accord. Mais sur combien d'années ça va être étalé, premièrement? Et, deuxièmement, ces hausses-là seront de quel ordre? Je pense que c'est primordial que les gens, que les usagers de la route sachent à quoi s'en tenir.

Je comprends le malaise du ministre. Le malaise du ministre, c'est de dire: Bien, écoutez, là, moi, si je suis obligé d'aller annoncer des hausses substantielles de contributions d'assurance après l'augmentation des frais de garderie, après l'augmentation des frais d'électricité, après l'augmentation des frais du transport en commun, après l'augmentation de la taxe scolaire, que vont vivre, entre autres, de façon particulière mais de façon importante les Montréalais, après le fait qu'on n'a pas eu de réduction d'impôts, alors qu'on nous en avait promis... Bien, je comprends le ministre d'être mal à l'aise et de craindre de dire, devant la population du Québec, qu'il va y avoir des hausses substantielles. Mais à l'évidence c'est l'autre but, Mme la Présidente ? et, je le répète, j'invite le ministre à la transparence: on veut sortir du périmètre comptable ce déficit-là. Deuxièmement, il y a des hausses substantielles qui s'en viennent pour les usagers de la route. La preuve en est que nous répondons, Mme la Présidente, à une commande du ministre des Finances. Comment expliquer que nous sommes ici aujourd'hui en train d'étudier ce projet de loi là, alors que le ministre nous parle d'une consultation qu'il veut faire sur le régime d'indemnisation sans égard à la responsabilité, communément appelé le «no fault», qu'on va faire fin de l'été ou à l'automne, qui peut avoir des répercussions, qui va avoir des répercussions vraisemblablement sur la Société de l'assurance automobile du Québec. Et puis là on modifie la loi avant de faire ces consultations-là?

Alors, de deux choses l'une, là: c'est soit que vraiment on répond à une commande du ministre des Finances ou c'est que la consultation sur le «no fault», ça va être une consultation bidon. Moi, c'est ça que je pense: ça va être une consultation bidon. On va perdre notre temps, ça va mener nulle part. Alors donc, répondons à la commande du ministre des Finances, se dit probablement le ministre des Transports. Et c'est ce qui fait que nous sommes ici aujourd'hui.

Je rajoute aussi, Mme la Présidente, qu'en fait ce que l'on constate de la part du gouvernement, c'est qu'il se déleste de ses responsabilités. Je le disais: il y a des hausses substantielles qui s'en viennent. Et, plutôt que de prendre le taureau par les cornes et de faire face à la situation et dire: «Voici, Mmes, MM. les Québécois et Québécoises, à quoi vous devez vous attendre», bien là on va confier ça à un comité d'experts qui va faire rapport au conseil d'administration. Puis là c'est la Société de l'assurance automobile du Québec qui va prendre la décision. Et le gouvernement va dire: Bien, moi, je ne suis pas responsable de ça, là; écoutez, c'est la Société de l'assurance automobile qui gère ça, puis là allez voir la Société de l'assurance automobile si vous avez à vous plaindre de ça, mais ce n'est pas le gouvernement. Mais là, là, Mme la Présidente, là, il ne faut pas prendre les gens pour des imbéciles, tu sais.

En fait, là, c'est ça, la situation qui est devant nous: c'est des hausses substantielles. Et j'aurais aimé, j'aurais préféré, Mme la Présidente, que le gouvernement libéral fasse face à ses responsabilités plutôt que de pelleter ça dans la cour d'un voisin. Mais en fait ce n'est même pas un voisin, c'est somme toute la même personne. Mais là on va en faire une autre personne pour que ça paraisse mieux.

M. Pinard: Non élue, non élue.

M. Jutras: Puis en fait, encore là mon collègue le député de Saint-Maurice me dit: Finalement, ça va être géré par des non-élus, des gens qui ne rendent pas des comptes à la population comme nous, les parlementaires, comme nous, les élus de l'Assemblée nationale, nous sommes appelés à rendre des comptes à notre population.

Et je termine parce qu'on me fait signe que mon temps est déjà écoulé. Par ailleurs, on se retrouve avec un conseil d'administration à la Société de l'assurance automobile du Québec qui sera composé d'une étrange façon. Le ministre des Transports, dans ses remarques sur l'adoption de principe, disait: Ça va être un conseil d'administration indépendant du gouvernement. Je veux bien qu'il soit indépendant du gouvernement, mais il va être nommé par le gouvernement libéral. Et, quand on sait le nombre de nominations partisanes qu'ils ont faites depuis qu'ils sont en poste, on peut donc s'attendre que les gens qui seront là seront très proches du gouvernement libéral. Ils seront donc à l'écoute de ce que le gouvernement libéral dira et ils auront une oreille très attentive à ce que le gouvernement dira. Mais, à tout événement, Mme la Présidente, on procédera donc à l'étude du projet de loi, puisque le gouvernement obéit à une commande de son ministre des Finances.

Auditions

La Présidente (Mme Harel): Alors, merci, M. le député de Drummond. Nous allons donc entreprendre la partie d'auditions. Et je vais inviter le président de la Fédération des motocyclistes... non, le président de la Fédération motocycliste du Québec, M. Bernard Benoit, à prendre place.

Alors, bienvenue, M. Benoit. Je vous rappelle le temps alloué pour la présentation de votre mémoire: il s'agit d'une période de 20 minutes et qui sera suivie par la suite avec un échange de 20 minutes avec la partie ministérielle et 20 minutes avec l'opposition.

Fédération motocycliste du Québec (FMQ)

M. Benoit (Bernard): Merci, Mme la Présidente. Alors, excusez si je suis un peu nerveux; c'est la première fois que je mets le pied dans cette enceinte. Mes respects à toutes les personnes qui sont autour de cette table et qui consacrent de leur temps pour les affaires de notre province.

La Fédération motocycliste du Québec ne se prétend pas experte en matière de gestion et d'administration d'organismes telle la Société de l'assurance automobile du Québec et à ce titre ne se considère pas en mesure de proposer un modèle particulier de fonctionnement dans le cadre du projet de loi sur lequel nous sommes aujourd'hui invités à présenter nos observations. La Fédération n'a pas non plus préparé un mémoire, puisqu'elle a eu l'occasion de consulter et d'intervenir dans celui préparé par le Comité d'action politique motocycliste, qui sera présenté aux membres de cette commission tout de suite après mon intervention. En conséquence, la FMQ appuie sans réserve ce mémoire. Je me limiterai donc à exposer brièvement quelques préoccupations, réserves et corrections principalement liées à notre champ d'expertise, soit la sécurité motocycliste, ainsi qu'au volet assurance, donc des préoccupations que nous croyons déceler dans ce projet de loi.

Dans un premier temps, nous nous interrogeons sur la pertinence de ce projet de loi autre qu'à titre de moyen pour écarter le bilan de la SAAQ du périmètre comptable du gouvernement. Nous ne voyons rien dans le projet qui soit de nature à améliorer l'efficacité actuelle de la société dans le mandat qui lui est confié. Une expression anglaise dit qu'il est mal avisé de réparer ce qui n'est pas brisé. Jusqu'ici, la SAAQ, sans être parfaite, a été l'un des organismes publics qui a le moins fait l'objet de scandales. Elle et ses cotisants, les usagers de la route, en ont plutôt été victimes lorsqu'on pense aux sommes pigées dans ses coffres, alors en excellente position actuarielle, pour être versées au fonds consolidé du gouvernement afin de réduire ses déficits budgétaires de l'époque.

Dans ces conditions, nous croyons qu'un projet de loi utile ne devrait pas viser à écarter les états financiers de la société de ceux du gouvernement mais plutôt garantir d'écarter le gouvernement des fonds de la société. Tous les moyens devraient être mis en oeuvre pour éviter que la SAAQ ne devienne une autre Hydro-Québec. Cette dernière, fondée à l'origine pour garantir la livraison d'électricité à des coûts raisonnables à toute la population québécoise, a été dénaturée de cet objectif initial pour devenir une société à laquelle le gouvernement demande de générer des profits toujours plus substantiels à verser au fonds consolidé de la province.

Nous ignorons quel peut être le modèle de fonctionnement idéal, mais il devrait, à toutes fins pratiques, maintenir les avantages que le régime sans égard à la faute a apportés aux Québécois depuis 25 ans. Toute modification envisagée devrait préserver l'essence ? au prix où elle est ? de la philosophie du régime, à savoir la maximisation des ressources financières pour indemniser les victimes plutôt que leur gaspillage en contestations, et ceci, en parallèle avec des actions concrètes en prévention.

Un fonctionnement qui se rapprocherait trop du modèle des assureurs privés risque de ne pas accorder suffisamment de ressources à l'aspect préventif, entraînant ainsi une spirale à la hausse des coûts d'indemnisation et, conséquemment, des contributions requises pour financer le régime. Tout comme les déficits actuariels peuvent entraîner une hausse des contributions requises, les conséquences d'une bonne performance devraient se refléter dans la fixation des cotisations, ce qui pourrait signifier des baisses ou encore l'attribution de ristournes.

n (15 h 30) n

De plus, en référence à l'alinéa 4° de l'article 17.7, une tarification tenant «compte des risques différents inhérents à chaque catégorie d'assurés, de l'autofinancement visé pour chacune de ces catégories ainsi que de l'équité à maintenir entre chaque catégorie d'assurés», cette tarification-là peut s'avérer un exercice plus coûteux que bénéfique. L'orientation actuelle de la société vise le niveau de risque de chaque catégorie. Ainsi, les usagers vulnérables, donc plus à risque, tels que les piétons, les cyclistes et les motocyclistes, devraient cotiser davantage alors qu'ils sont généralement victimes du comportement fautif d'un autre usager. La commission notera au passage que, parmi ces usagers vulnérables bénéficiaires d'indemnisation de la SAAQ, seuls les motocyclistes font l'objet de contributions au fonds d'assurance de la société. Où est l'équité dans ce cas?

Poussant plus loin la définition des catégories de risque, il faudrait s'interroger sur la contribution à exiger des conducteurs de véhicules considérés plus sécuritaires, Mercedes ou Volvo par exemple, ou encore de ceux parcourant plus de kilométrage que d'autres. Le niveau de risque vu sous cet angle s'applique en assurance vie ou maladie lorsqu'on considère l'état de santé préalable d'une personne. Cependant, la même logique ne s'applique pas en assurance en cas d'accident. Ici, on calcule une tarification uniforme, car le risque n'est pas inhérent à l'individu, sauf dans les situations d'occupations ou de sports dangereux. Dans cet esprit, l'utilisation du réseau routier ne devrait pas représenter une occupation ou un loisir plus hasardeux pour un usager que pour un autre. Conséquemment, la tarification en ce qui a trait à la contribution d'assurance devrait être uniforme pour tous les possibles bénéficiaires d'indemnisation. Une telle approche favoriserait de plus la responsabilisation collective de tous les usagers.

La possibilité de voir le gouvernement utiliser son imagination créatrice pour invoquer de nouvelles façons de légalement puiser dans les fonds de la société, évitant ainsi des hausses d'impôts mais entraînant des augmentations des contributions à la SAAQ, nous préoccupe aussi à la lecture de l'alinéa c de l'article 2 où il est dit que «la Société a pour fonctions d'appliquer le Code de la sécurité routière [...] notamment en ce qui a trait [...] aux normes de sécurité routière concernant les véhicules». Notre crainte est que le ministre de la Sécurité publique refile à la SAAQ de généreuses factures pour des contrôles policiers relatifs à la conformité des systèmes d'échappement, par exemple. Un tel élément, bien que contenu dans le Code de la sécurité routière, a peu à voir avec les aspects sécurité et prévention censés constituer les priorités de la société.

Au point Pouvoirs de la section I, il serait utile d'ajouter un alinéa i qui spécifierait le pouvoir d'«éditer des normes précises de tarification après consultation avec ses actuaires et les comités d'usagers de la route». Un peu plus haut, à l'alinéa d, où il est mentionné d'«intervenir dans toute action résultant d'un accident causé par une automobile», nous suggérerions de remplacer «une automobile» par «un usager de la route». En effet, un véhicule par lui-même cause rarement un accident. Cela se produit généralement quand une personne en prend ou en perd, pourrait-on dire, le contrôle.

À l'alinéa 8° de l'article 17.7, il y aurait lieu selon nous de préciser la formulation actuelle, qui se lit: «tenir compte des préoccupations économiques et sociales que lui indiquent la Société et la population», en y ajoutant «par le biais, nommément mais non exclusivement, des tables de travail et/ou de concertation avec des organismes impliqués dans le milieu tels CAA-Québec, l'Association de protection des automobilistes, la Fédération motocycliste du Québec, le Comité d'action politique motocycliste, Vélo Québec, l'Association du camionnage», etc.

Considérant toujours la philosophie de base du régime d'assurance automobile québécois, il serait opportun de retrouver, au sein du conseil d'administration de la société de même que parmi les membres du comité d'experts proposé, des représentants du milieu coopératif ainsi que des usagers. En tout état de cause, dans l'éventualité où ce projet de loi concrétisait la création d'un fonds d'assurance nettement distinct des états comptables du gouvernement, il serait impératif que les sommes prélevées par le gouvernement au début des années 1990 soient reversées au fonds afin de rétablir l'équilibre actuariel de ce dernier avant de tenter de le faire par une hausse des cotisations des usagers. N'eût été de ces prélèvements et en dépit des rendements négatifs des dernières années sur les placements, peut-être la caisse de la SAAQ ne serait-elle pas actuellement et actuariellement déficitaire aujourd'hui.

Quelle que soit la formule retenue, nous considérons que les élus devraient demeurer directement redevables des orientations et de la gestion de la société, car ce sont, dans le contexte des années 2000 et de l'actualité canadienne récente, les seules personnes qu'il soit encore possible de démettre de leur poste sans risque d'exposer l'ensemble des contribuables à de coûteuses poursuites.

La fédération tient finalement à remercier cette commission de lui avoir donné l'occasion d'exprimer son point de vue sur ce projet de loi. En espérant que notre intervention aura pu apporter une valeur ajoutée pour contribuer à la prise de la meilleure décision pour l'ensemble des entités et des personnes visées.

La Présidente (Mme Harel): Alors, je vous remercie, M. Benoit. Et nous allons donc débuter l'échange avec les membres de la commission. M. le ministre.

M. Marcoux: Alors, merci, Mme la Présidente. Merci également, M. Benoit, d'être présent. Je sais que c'était avec un délai assez court, mais votre présentation était excellente. Donc, on voudrait vous remercier.

Si vous me permettez, je vais faire seulement deux commentaires par rapport à ce qu'a indiqué le député de Drummond au sujet d'abord des hausses et de la transparence. Vous savez, d'abord, en 2001, le ministre de l'époque indiquait que la société ferait un déficit de l'ordre de 200 millions en 2001. Il y a eu des modifications de règles comptables qui ont ramené ça à 33 millions. Ça a été la même chose l'année suivante. Deuxièmement, on se rappellera également que le rapport Breton nous indiquait que le gouvernement qui était là avant le 14 avril dernier avait justement prévu... a augmenté, après les élections évidemment, c'est bien sûr ? et c'est une grande transparence ? les tarifs de contributions d'assurance de 30 $ en 2003 et de 30 $ en 2004. Et c'est inscrit très, très clairement dans le rapport Breton. Alors, évidemment les automobilistes, aujourd'hui, paieraient 190 $ et non pas 130 $. Donc, il y a eu un gel pour 2002, pour 2003 et 2004. Et, lorsque le député de Drummond parlait de la SAAQ, j'avais un peu l'impression parfois qu'il considérait que les gens de la SAAQ n'avaient pas nécessairement toute la compétence pour administrer cette institution dans le nouveau rôle qu'on lui décerne avec le projet de loi.

Et le dernier point. Je voudrais simplement rappeler au député de Drummond que la CSST évidemment a été exclue du périmètre comptable par le gouvernement précédent qui l'avait incluse en 1998. Et, quand la présidente du Conseil du trésor avait indiqué quelle était la position à ce moment-là, c'était que d'une part nous étions contre l'inclusion justement d'un périmètre comptable en 1998 et nous avions été conséquents en 2002, en disant que nous étions pour l'exclusion du périmètre comptable parce que les sociétés comme ça ne devaient pas normalement venir jouer dans les états financiers du gouvernement de façon... Évidemment, en 1998, c'était pour atteindre le déficit zéro qu'on avait fait ça. Donc, c'est conséquent tout le long. On avait dit: On était contre et on était pour le principe. Alors, je veux juste simplement vous rappeler.

Et, troisièmement, pour la distance avec le gouvernement, la CSST, vous savez, établit ses propres cotisations, puis la RAMQ également. Et ça, c'est le gouvernement précédent qui a établi que, pour les hausses... ou en fait pour la tarification dans l'assurance médicaments, dorénavant ce serait le conseil d'administration de la Régie de l'assurance maladie du Québec. Et ça, ça a été introduit par l'ancien gouvernement. Alors, je pense que... simplement rappeler certains éléments.

Alors, M. Benoit, je voudrais d'abord vous dire: vous parlez ou vous semblez inquiet du maintien d'un régime sans égard à la faute. Enfin, vous avez mentionné qu'il ne faudrait pas le changer. Et ça, tout ce que je peux vous dire là-dessus, c'est que les fondements et les acquis du régime d'assurance automobile du Québec, tels qu'ils existent depuis 1978, vont y demeurer même ? et ça fera l'objet d'un autre débat ? si nous avons l'intention d'y apporter une exception très, très précise dans le cas de victimes de conducteurs condamnés au criminel pour des actes criminels majeurs. Mais tout le reste va y rester. Vous avez parlé aussi de la sécurité. Écoutez, je pense que la Société de l'assurance automobile du Québec a accompli beaucoup en matière de sécurité routière depuis 25 ans. On le voit d'ailleurs par l'évolution du bilan routier où on constate que le nombre de décès a diminué de façon très, très considérable depuis 1978. Et, même au cours des trois dernières années, il y a une tendance vraiment à la baisse des décès, une amélioration. Et tant mieux. Et, dans ce cadre-là, le mandat de la société relativement à la sécurité routière demeure entier avec le projet de loi. Et ça, je pense que c'est extrêmement important. Si jamais vous aviez des doutes là-dessus, je voudrais que vous puissiez les exprimer.

Vous avez parlé aussi, à un moment donné, dans votre mémoire, parce que, je m'excuse, je n'avais pas votre texte écrit... que nous ne devrions pas arriver à une situation où il y aurait du gaspillage en contestations. Je voudrais simplement peut-être saisir un peu mieux ce que vous vouliez évoquer en disant ça. Et pourquoi cette préoccupation? Et est-ce que c'était relié au projet de loi actuel?

La Présidente (Mme Harel): M. Benoit.

n (15 h 40) n

M. Benoit (Bernard): Oui. Merci, Mme la Présidente. Alors, juste pour le premier point mentionné par M. le ministre, au niveau de la sécurité, effectivement le bilan de la société est très positif. Et ça revient à l'élément que je mentionnais tantôt: Comme ça va bien, pourquoi modifier une recette gagnante?

Dans un second temps, l'élément où je parlais de contestations, c'était plus spécifique à la question du régime sans égard à la faute. Je faisais allusion de cette façon-là au fait que les sommes qui sont perçues par la société ? et la philosophie qui a été celle de la société depuis 25 ans ? sont plutôt affectées à indemniser les victimes plutôt qu'en frais juridiques à n'en plus finir pour établir des responsabilités, et ainsi de suite. Alors, c'est dans ce contexte-là que je mentionnais le fait que ça avait été bien fait jusqu'ici, où les sommes ont été judicieusement utilisées plutôt que d'être affectées à des contestations pour établir la responsabilité d'un acte, etc. Ça a plus rapport avec la question du régime sans égard à la faute qu'avec l'objet du présent projet de loi.

M. Marcoux: O.K. Donc, ça, ça va demeurer. Je pense que, là-dessus, là, sauf une exception... Mais ça, ça fera l'objet d'un autre débat, et c'est un contexte très, très limité.

Vous avez également indiqué, je pense, que... Évidemment, il y a les automobilistes ou en fait tous les conducteurs d'un véhicule routier qui contribuent actuellement, qui paient des primes d'assurance, et également les motocyclistes. Vous avez également parlé des piétons et des cyclistes. Est-ce que vous suggérez que ces derniers, soit les cyclistes ou les piétons, devraient également être mis à contribution, parce que vous dites: Dans plusieurs cas, eux-mêmes peuvent être la cause de l'accident et non pas nécessairement l'automobiliste ou le motocycliste?

M. Benoit (Bernard): Sur ce point-là, la question des piétons et des cyclistes, c'est que ce sont des personnes qui, comme vous le mentionnez... comme M. le ministre le mentionne, peuvent parfois être la cause de l'accident qui se produit. Cependant, le fait est ? et le but visé ici n'est pas de se pencher sur établir des responsabilités parce qu'on parle d'un régime sans égard à la faute ? mais c'est principalement de...

Quand on parle d'équité au niveau des cotisations, on a une catégorie de victimes qui ont droit à des indemnisations de la Société de l'assurance automobile mais qui ne cotisent pas, à toutes fins pratiques. Alors, dans cette optique-là, je laisserai le Comité d'action politique motocycliste, qui va prendre la suite après ma présentation, pour poser ou présenter un élément de solution qui va permettre de faire en sorte que tout le monde cotise équitablement dans ce système-là sans qu'il y ait nécessairement une facture d'envoyée à chaque piéton et à chaque cycliste québécois. Mais c'est dans cette optique-là que je mentionnais ce point. Parce que, lorsque les informations avaient été diffusées l'automne dernier à l'effet de possible augmentation des contributions d'assurance de la Société de l'assurance automobile du Québec, une des argumentations qui avaient été présentées par les gens en place avait été d'avoir un principe équitable de cotisation pour toutes les parties concernées. Alors, dans cette optique-là, on se demandait où se trouvait l'équité, alors qu'une partie des personnes qui ont droit à des bénéfices ne cotisent pas du tout. Alors, c'est dans cet esprit-là. Je ne sais pas si ça répond clairement à la question.

M. Marcoux: Mme la Présidente, moi, j'aurais peut-être une autre question, là. Si les membres de la commission ont certaines questions, on peut leur laisser l'opportunité de le faire.

Vous avez également fait référence à la composition du conseil d'administration en indiquant que, parmi les groupes qui sont mentionnés, on devrait peut-être y ajouter soit des représentants des coopératives ou des usagers. Bon. Les usagers. J'imagine que la très grande majorité des individus ou des personnes qui sont nommées sont elles-mêmes des usagers de la route. Je pense que ce soit... Parce que tous ceux qui conduisent une automobile ou un autre véhicule sont déjà des usagers de la route. Maintenant, vous parlez des coopératives aussi. Est-ce que vous aviez... Pourquoi, de façon plus précise, les coopératives ou d'autres groupes?

M. Benoit (Bernard): Oui. Bien, évidemment la question des usagers, pour revenir sur ce point-là, on a mentionné, dans le projet de loi, quelqu'un qui représente le domaine du droit, etc. Évidemment, ils peuvent en même temps être des usagers. Mais on parle ici de gens qui siégeraient vraiment là, dans ce contexte-là, dans cet esprit-là pas en tant que spécialistes ou connaissants dans le droit, les affaires, ou etc., mais au niveau du point de vue de l'usager, qui seraient là à ce titre-là. Les usagers, on parle de gens qui paient une contribution.

Dans un second temps... Excusez, j'ai un blanc de mémoire sur la deuxième partie...

M. Marcoux: La question des coopératives.

M. Benoit (Bernard): O.K., oui. O.K. Représentants du secteur coopératif; je n'ai pas de parti pris pour ce secteur-là du tout. Mais, dans mon esprit, dans l'optique du fonctionnement de la société, qui est un organisme sans compétition, qui est obligatoire pour tout le monde, je me disais que, pour assurer que la direction ou l'orientation adoptée par la société ne devienne pas trop une orientation qui est typiquement entreprise privée avec notion de profit, etc., la présence de gens du secteur coopératif ne nuirait pas aux orientations de la société, en ce sens que ce serait plus difficile de s'écarter de la mission première qui est de fournir un service ou un produit à l'ensemble des usagers dans les meilleures conditions possible. Et, ce qu'on veut dire, c'est au meilleur coût possible en même temps.

M. Marcoux: O.K. Merci. Je pense que j'ai quelques collègues qui avaient des questions à poser aussi. Alors, je vais leur laisser le loisir de le faire. Je pourrai revenir à la fin, Mme la Présidente, s'il reste du temps.

La Présidente (Mme Harel): Merci, M. le ministre. Je pense qu'il serait peut-être heureux que nous procédions par alternance et je reviendrai à vous. Ou vous préférez terminer le bloc?

M. Marcoux: 20 minutes, 20 minutes. Je pense que ce serait peut-être ça, oui.

La Présidente (Mme Harel): Oui. Vous préférez terminer le bloc. Alors, je vais vous inviter à prendre la parole, M. le député de Portneuf.

M. Soucy: Je m'excuse, Mme la Présidente, et, considérant que je suis arrivé en retard, je n'avais pas entendu les consignes qui avaient été données, là, quant à...

La Présidente (Mme Harel): Il n'y en avait pas eu encore.

M. Soucy: Il n'y en avait pas eu? O.K. Merci.

M. Benoit, d'entrée de jeu vous nous dites que vous n'êtes pas d'accord avec le fait qu'on sorte la SAAQ du périmètre comptable et d'un autre côté vous voudriez que la SAAQ se comporte un peu comme une fiduciaire ou une compagnie privée qui donne des redevances ou qui protège les sommes qui sont versées et qu'on ait une administration qui soit, dans sa gestion, à l'écart de possibles ponctions du gouvernement, comme il a été mentionné.

Pouvez-vous m'expliquer comment vous voyez ça, cette espèce de... Vous voulez qu'on reste ensemble, mais qu'il y ait une administration distincte. Comment ça peut se faire, ça, dans les faits?

M. Benoit (Bernard): Comme je le mentionnais tantôt, Mme la Présidente, la fédération et moi-même n'avons pas la prétention d'être des experts dans la façon de structurer le fonctionnement de l'organisation. Cependant, ce qu'on émet, c'est... L'objectif qui devrait être gardé à vue, en ce sens que, comme je le mentionnais plus tôt... que la mécanique qui va être utilisée ou ce qui sera mis en place, s'il y a des changements qui sont apportés, garantisse que les sommes qui sont destinées à un but spécifique soient vraiment préservées à cette fin. Et ce qu'on a vu jusqu'à maintenant, c'est que, qu'une entité soit distincte ou qu'elle soit dans le même giron, c'est possible, je pense, de gérer des sommes et des actifs. La Caisse de dépôt et placement fait ce travail-là, si je ne m'abuse. Elle détient des sommes excédentaires de différents organismes publics, et je crois bien qu'elle doit faire une gestion distincte de ces sommes-là et ne pas tout mélanger ça ensemble pour arriver puis dire après: Bien, il n'y a plus d'argent là parce qu'on a eu besoin de plus ailleurs.

Donc, les sommes destinées à une fin spécifique ou qu'elle gère au nom d'un organisme spécifique sont propres à cet organisme-là. Ça n'empêche pas la caisse de gérer l'ensemble de ces sommes-là. Alors, l'objectif, c'est simplement de s'assurer que les sommes qui ont été cotisées par les contributions d'assurance servent effectivement à faire le travail qu'elles doivent faire et non pas être affectées à d'autres fins générales des opérations gouvernementales.

M. Soucy: J'en aurais une autre.

La Présidente (Mme Harel): Oui...

M. Soucy: Est-ce qu'il reste... Combien de temps il nous reste, Mme la Présidente?

La Présidente (Mme Harel): Combien de temps reste-t-il?

Une voix: Il reste 5 min 30 s.

n (15 h 50) n

La Présidente (Mme Harel): 5 min 30 s. Alors, si vous me permettez, M. le député de Portneuf, le ministre m'a indiqué qu'il voulait à nouveau questionner. Et je reviendrai avec vous par la suite.

M. Marcoux: Peut-être, Mme la Présidente, pour apporter une précision qui est importante. Et, après ça, le député de Portneuf, je lui laisserai la parole.

Dans votre mémoire, vous exprimez justement, selon vous, la nécessité que les sommes qui sont prélevées auprès des assurés servent uniquement dans le fond au paiement des indemnités et également à la sécurité routière. Et c'est précisément l'assurance, là, que prévoit ce projet de loi là parce que ce que l'on dit, c'est que, comme c'est un patrimoine distinct, que c'est une fiducie, les sommes qui sont perçues comme contributions d'assurance ne pourront servir qu'à soit payer des indemnités ou encore mettre en oeuvre des mesures de sécurité routière qui sont de nature à améliorer le bilan routier, de sorte que, si on le fait, évidemment on réduit incidemment les indemnités qui sont payables.

Alors, la crainte que vous exprimez, par exemple, à l'égard du ministère de la Sécurité publique qui refilerait de généreuses factures, ça ne pourra plus se faire comme... Actuellement, la société finance, en tout ou en partie, donc à même des contributions d'assurance, le transport ambulancier à la hauteur de 50 millions, l'adaptation de véhicules ou de vignettes à la hauteur de 10 millions, partiellement également les activités reliées au contrôle routier. Alors ça, là, ça va être tout à fait distinct. Et dorénavant le transport ambulancier, là, ça devra être assumé, par exemple, par le ministère de la Santé et des Services sociaux. Pour le transport adapté, les personnes handicapées, l'adaptation de véhicules, ça devra être dorénavant effectué par le ministère des Transports à même les crédits.

Donc, ça vient, là, garantir que le fonds dorénavant ne sera appliqué que pour verser des indemnités ou encore pour mettre en oeuvre des mesures de sécurité routière. Et ça, je pense que, là, c'est une garantie et une assurance vis-à-vis les gens qui contribuent, que dorénavant les sommes qu'ils versent ne pourront plus être utilisées à d'autres fins que ça. Ça, je pense que c'est très, très clair avec le projet de loi. Et c'est pour ça... Puis d'ailleurs, oui, il y a une distance avec le gouvernement. Donc, le gouvernement, quel qu'il soit, ne pourra plus avoir aucune influence, là, quant à l'utilisation des sommes perçues auprès des assurés.

La Présidente (Mme Harel): M. Benoit.

M. Benoit (Bernard): Écoutez, la fédération et moi-même ne nous prétendons pas experts en interprétation des lois ou projets de loi. Si M. le ministre nous dit que cette façon de faire là va éliminer ça, ce n'était pas la lecture qu'on faisait du texte qu'on avait en main. En tout état de cause, tel que mentionné dans ma présentation, si on opte pour cette position-là, il faudrait s'assurer, dans un premier temps, que les sommes qui ont été prélevées par le gouvernement à d'autres fins soient remises au fonds avant qu'on mette les usagers à contribution pour renflouer le déficit actuariel. Ça, c'est un élément de base primordial, à notre sens.

La Présidente (Mme Harel): M. le ministre.

M. Marcoux: Alors, tout simplement donc, je comprends votre inquiétude, là, quand vous parliez peut-être de refiler les factures. Quant au passé, évidemment on ne pourra pas refaire le passé, je pense, là-dessus. Mais c'est clair que, pour l'avenir, quels que soient les gouvernements, ça va être clair et ça ne pourra plus être affecté à d'autres fins. Et évidemment ces sommes-là ont aussi également servi à des fins de services publics dans le temps, là, mais ça ne justifie pas de refaire la même chose. Et ça, ça va être éliminé pour l'avenir, et c'est très, très clair.

La Présidente (Mme Harel): Alors, il vous reste une minute, M. le député de Portneuf.

M. Soucy: Je vous remercie, Mme la Présidente. Alors, ce que je comprends de votre intervention...

La Présidente (Mme Harel): Pour la question et la réponse.

M. Soucy: Merci. Alors, M. Benoit, ce que je comprends, c'est que vous souhaitez qu'il y ait un fonds, que le fonds soit dédié vraiment pour ceux qui contribuent. Vous nous suggérez aussi de faire des prélèvements ailleurs pour assurer la cotisation qui incomberait normalement aux cyclistes ou aux piétons. Est-ce que je dois... C'est correct. Et est-ce que vous accepteriez encore que le gouvernement ou du moins la SAAQ dépose ces sommes ou ces trop-perçus à la Caisse de dépôt et placement du Québec, sachant qu'on a fait des pertes qui sont plus grandes que celles qui ont été normalement reconnues?

M. Benoit (Bernard): Écoutez, je pense que la Caisse de dépôt et placement n'a pas fait de pire travail ou de meilleur travail que la plupart des autres institutions financières dans le contexte économique des marchés financiers que la planète entière a pratiquement connus dans les dernières années. Alors, je ne pense pas qu'on doive larguer la façon de faire ou les compétences de la Caisse de dépôt et placement. Je ne verrais pas d'objection à ce que cette institution-là continue à faire la gestion des sommes en question.

La Présidente (Mme Harel): Alors, je vous remercie. Nous en sommes maintenant à la période dévolue aux députés de l'opposition. Et je reconnaîtrai le porte-parole, le député de Drummond.

M. Jutras: Alors, bonjour, M. Benoit, et bienvenue. Pour quelqu'un qui dit qu'il n'est pas habitué au présent lieu, laissez-moi vous dire que vous faites très bien ça comme présentation d'un mémoire devant une commission parlementaire. Votre propos est clair, et on comprend très bien où vous allez.

Relativement au périmètre comptable du gouvernement dont on a parlé à date... Et le ministre, entre autres, a fait référence, là, au rapport Breton. Vous allez vous rappeler, le rapport Breton, c'était le supposé trou, là, de 4 milliards que le gouvernement libéral invoquait beaucoup peu de temps après son élection l'année dernière, là. Puis là c'était de savoir qu'est-ce qu'il fallait inclure dans le périmètre comptable du gouvernement. Et le gouvernement libéral, invoquant ce que j'appelle, moi, «le trou Breton», disait qu'il y avait un trou de 4 milliards de dollars. Mais le même gouvernement, le gouvernement libéral, il l'a creusé lui-même, ce trou-là. Parce qu'avec les mêmes critères, quand on applique la même médecine, on s'aperçoit que le trou Breton, il est rendu à 6 milliards. Puis là c'est les libéraux qui sont au pouvoir.

Et par ailleurs, quand le ministre nous dit qu'il n'était pas d'accord avec l'inclusion, à l'époque, là, de certains organismes à l'intérieur du périmètre comptable du gouvernement, mais ce même M. Breton à l'époque avait louangé le gouvernement du Parti québécois d'avoir fait ça en disant que le gouvernement en était rendu aux règles comptables les plus claires en Occident. C'était ça qu'il disait, M. Breton.

Mais par ailleurs je vous entendais relativement à l'article 17.7, l'alinéa 8°, qui dit: «tenir compte des préoccupations économiques et sociales que lui indiquent la Société et la population». Puis là vous parliez de table de concertation où ces préoccupations-là pourraient être exprimées. Je sais ? je suis informé, là, mais vous pourrez me le confirmer ? que la table de concertation, entre autres, là, avec votre fédération puis le Comité d'action politique motocycliste, elle est en branle, elle est en marche. Je vois que vous faites signe que oui, là. Mais, moi, allant au-delà de ça, je pense qu'effectivement la table pourrait servir à ça et exprimer les préoccupations des motocyclistes.

Mais, au-delà de ça, il m'apparaît qu'au niveau du conseil d'administration de la Société de l'assurance automobile du Québec, il pourrait y avoir effectivement des représentants des usagers, des représentants des motocyclistes. Puis, dans le cadre de la commission parlementaire, je vais tenter de convaincre le ministre de ça, que des gens qui sont vraiment des usagers de la route, là, et non pas seulement des représentants du domaine des assurances, du droit, de la santé, là, mais des usagers de la route et vous, qui avez une connaissance tout à fait particulière d'un secteur particulier, là, de véhicules qu'on retrouve sur nos routes... Moi, je verrais en tout cas très bien que vous vous retrouviez ou que de vos représentants se retrouvent sur ce conseil d'administration là. Et ça m'apparaîtrait beaucoup mieux que la table de concertation. La table de concertation, c'est bien, c'est même très bien. Mais être aussi au niveau du conseil d'administration, ça m'apparaîtrait mieux, comme par exemple on voit au niveau de la Régie de l'assurance maladie, où on retrouve des représentants des consommateurs qui sont là, tu sais, des représentants effectivement, des usagers qui sont là.

Alors, est-ce que vous avez pensé à une façon de faire adhérer ces usagers-là? Parce que je sais qu'il y a une fédération des automobilistes, il y a une fédération des motocyclistes. Vous êtes-vous penchés là-dessus? Vous avez parlé des coopératives, là. Ça peut être une solution, mais...

La Présidente (Mme Harel): M. Benoit.

n (16 heures) n

M. Benoit (Bernard): Oui, Mme la Présidente. Alors, le but de cette mention-là que nous faisions au niveau des tables, c'est qu'il existe effectivement déjà des tables de concertation. Il y en a une qui s'est tenue depuis l'été dernier sur la vitesse à laquelle la fédération participe. Il y a différents moyens comme ça. Le but de cet ajout-là, c'était simplement de donner un moyen concret de préciser, là, au niveau... Quand on mentionnait que le comité d'experts devrait tenir compte des préoccupations économiques et sociales que lui indiquent la société et la population, mais on se disait: Le travail qui est fait au niveau de ces tables-là, au lieu que ce soit simplement un exercice de style, que ce soit effectivement mis à contribution et que des conclusions de ces tables-là soient utilisées par le comité d'experts pour tenir compte des préoccupations en question.

Maintenant, la formule pour que des représentants des usagers participent au conseil d'administration ou soient membres du conseil d'administration de la société, je pense qu'à ce moment-là il s'agirait simplement de modifier le projet de loi pour faire en sorte qu'explicitement, en plus de mentionner les cinq secteurs, si ma mémoire est bonne, de spécialisation qui sont mentionnés dans le projet de loi, on y inclue également des représentants de groupes d'usagers identifiables. Et je parle ici fort probablement autant des gens qu'on parlait tantôt ? les piétons, les cyclistes, les motocyclistes, les conducteurs de véhicules réguliers ? mais qu'ils soient là à titre spécifiquement de représentants de ces groupes d'usagers là.

Alors, comme M. le ministre le faisait remarquer tantôt, la plupart de ces gens-là sont déjà possiblement des automobilistes. Mais être là à titre d'un spécialiste du droit des affaires ou être là à titre de conducteur automobile et représentant les intérêts des usagers-payeurs, conducteurs automobiles, c'est peut-être différent.

M. Jutras: Écoutez, je vais poser une autre question, puis après mes collègues pourront poser des questions parce que je sais qu'ils veulent poser des questions. Vous disiez aussi... Une des craintes que vous exprimez par rapport à la constitution de ce fonds d'assurance là, c'est que la Société d'assurance automobile agisse dorénavant davantage plus comme une compagnie d'assurance, là, dans le vrai sens du mot, là ? une compagnie d'assurance comme on les voit, là, sur le terrain ? et que l'aspect prévention soit mis de côté. J'aimerais ça vous entendre un peu plus là-dessus, voir ce que vous voulez dire exactement.

M. Benoit (Bernard): Oui. Notre crainte, c'est... Et je reviens avec la mention mentionnée plus tôt à l'effet que, l'historique de la société jusqu'à maintenant... le travail qu'elle a fait au niveau de gérer son mandat ou de gérer la mission qui était la sienne, nous croyons que ce travail-là a été bien fait, en ce sens qu'on est considéré comme un exemple à travers la planète, le régime de l'assurance automobile du Québec. Notre crainte, c'est que, dans la foulée des contraintes actuelles, des contraintes financières, etc., tout à coup, et en changeant une formule qui à date a donné d'excellents résultats, on perde de vue ces objectifs fondamentaux là.

Dans le domaine privé, un assureur peut faire de la prévention, mais l'expérience démontre jusqu'à maintenant que ces efforts-là sont faits aux mauvais endroits ou aux mauvais moments ou, en tout état de cause, que ces efforts-là ne donnent pas vraiment de bons résultats. L'assureur n'est pas vraiment préoccupé par ce fait-là pour la simple raison qu'en bout de ligne les coûts inhérents à toutes ces réclamations, à ces indemnisations-là sont finalement refacturés aux usagers. Le jeu de la compétition fait en sorte qu'il y a quand même certaines contraintes, mais tous les assureurs sont affectés par une telle situation. Et, comme leur mode de fonctionnement fait que leur rémunération, si on veut, ou leur revenu provient de la différence ou de l'administration qui est chargée sur les règlements des sinistres, à ce moment-là, c'est un pourcentage. Alors, si le chiffre est plus gros, bien ça va donner des revenus plus substantiels. Donc, la préoccupation n'est pas aussi présente.

La société, dans son mandat qu'elle avait et dont elle s'est acquittée, avait pour but évidemment d'indemniser les victimes. Mais la meilleure chose à faire, c'était d'essayer de réduire le plus possible le niveau des indemnités en faisant de la prévention. Des efforts ont été faits là-dessus; il peut y en avoir encore plus. Au niveau des motocyclistes particulièrement, on considère qu'il n'y a pas eu tous les efforts qui pourraient être faits. On envisage l'avenir comme étant peut-être meilleur sur ce point-là. Il y a du travail qui se fait à ce niveau-là. Mais c'est en ce sens-là que notre crainte, c'est à l'effet que modifications-là viennent faire perdre de vue le mandat premier, la raison fondamentale et les choses qui ont fait que la société est si bien positionnée dans le marché actuel.

Quand on se compare à d'autres, on peut toujours trouver qu'on est beaucoup mieux. Mais, dans certains domaines, on est peut-être mieux de ne pas se comparer, surtout quand on est le leader. Je pense qu'il faut fixer nous autres mêmes nos normes plutôt que de se comparer à l'environnement externe.

M. Jutras: Merci.

La Présidente (Mme Harel): Merci, M. Benoit. Je reconnaîtrai maintenant le député de Chutes-Chaudière.

M. Picard: Merci, Mme la Présidente. Merci, M. Benoit. Vous n'êtes peut-être pas un expert, mais vous êtes un digne représentant des payeurs de taxes. Puis je pense en tout cas que, dans vos deux pages de mémoire, vous avez bien perçu, là, je pense, le but. Le but du gouvernement, c'est d'enlever le pouvoir aux élus, les élus qui ont des mandats temporaires, parce que les décisions ne satisferont pas la population. La population a le pouvoir de les mettre hors jeu.

Donc, avec ce projet de loi là, on veut donner le pouvoir à un comité d'experts. Tout à l'heure, M. le ministre parlait des médicaments. Malheureusement, moi, puisque je fais partie de l'Action démocratique du Québec, on ne peut rien me reprocher ici. On ne peut pas dire, là: Vous, vous avez fait pire; nous, on va faire mieux. En tout cas. Parce qu'on entend souvent ça ici. Est-ce que vous seriez d'accord... Parce que le projet de loi, là, qu'est-ce que je trouve triste, c'est un projet de loi majeur, c'est un virage à 180 degrés pour moi, et on fait des consultations particulières. Il y a des consultations générales aussi qu'on peut faire, mais on invite... On dit: Tous ceux qui veulent venir discuter du projet, venez, on va en discuter. Là, on a fait des consultations particulières, et, malheureusement, bien il y a seulement deux groupes, les deux groupes qui vont être ici. Je vous en remercie, mais c'est quand même triste pour, je dirais, l'ampleur du dossier que nous avons sur la table.

Ma question. Tantôt, vous avez parlé que les anciens gouvernements ont pris de l'argent dans la société. Supposons que le gouvernement en place dirait: O.K., il y a eu 2 milliards qui a été pris depuis x années, là on le remet dans le fonds. Est-ce que vous seriez en faveur du principe d'avoir un comité d'experts puis avec les principes généraux du projet de loi si au moins on corrigeait des erreurs du passé?

La Présidente (Mme Harel): M. Benoit.

M. Benoit (Bernard): Oui, Mme la Présidente. C'est ? comment je pourrais dire? ? essentiel, à notre sens. C'est essentiel de corriger les erreurs du passé, comme M. le député le mentionne. Pourquoi? Parce que les usagers ont payé, ont versé les sommes là, ces sommes-là ont servi à d'autres fins. Et, avant de redemander aux usagers de renflouer la caisse, il serait important que les sommes qui ont été affectées à d'autres fins, même si on réfère au passé... Je pense que ce ne serait que justice qu'elles soient remises à l'endroit où elles devaient être initialement.

Dans un second temps, le fait de rétablir les choses comme ça, ça ne signifierait rien si on ne se donne pas des moyens d'empêcher qu'à l'avenir la même situation se répète. Et c'est en ce sens que ce que j'ai fait comme présentation, ce que nous faisons comme présentation, la fédération ne prétend pas dire: Oui, on y va; non, on n'y va pas. Ce qu'on dit, c'est: Premièrement, si ça fonctionne bien, on se demande pourquoi on le modifie. Et, dans un second temps, si, parce que certaines choses nous ont échappé puis parce que l'évolution exige qu'il faut apporter des améliorations, certaines améliorations doivent être apportées, donnons-nous des moyens de faire en sorte que la mission fondamentale de l'organisme soit préservée et qu'elle ait le pouvoir de continuer à la mener à bien et possiblement à l'améliorer par rapport à ce qu'elle a fait jusqu'ici.

La Présidente (Mme Harel): Alors, dernière question, M. le député de Chutes-Chaudière.

n (16 h 10) n

M. Picard: Merci, Mme la Présidente. Vous indiquez, dans votre mémoire ? je vais vous citer: «La possibilité de voir le gouvernement utiliser son imagination [créative] pour invoquer de nouvelles façons [légales pour] puiser [des] fonds [dans] la société.» Donc, le message que vous passez, en tout cas que, moi, je comprends en lisant cette phrase-là, c'est que, même si M. le ministre dit: Bien là on vous assure qu'actuellement, là, avec ce projet de loi là, on va créer une fiducie puis on n'y touchera pas, mais vous nous dites: Il n'y a rien qui nous dit que la loi ne sera pas modifiée dans cinq, 10, 15 ou 20 ans ou vous allez trouver un moyen... Vous passez le message aux élus comme le message, je vais dire, de non-confiance que l'on perçoit dans la population. Est-ce que je fais une bonne lecture de votre message?

La Présidente (Mme Harel): M. Benoit.

M. Benoit (Bernard): Oui, Mme la Présidente. Bien, notre compréhension, à la lecture du texte dont nous avons eu l'occasion de prendre connaissance ? et peut-être que notre lecture était erronée ? quand on parlait qu'une partie du mandat de la société ou que la société a pour fonction d'appliquer le Code de la sécurité routière, notamment en ce qui a trait aux normes de sécurité routière concernant les véhicules, à notre sens ceci pouvait être assez largement interprété, en ce sens qu'appliquer les normes de sécurité routière concernant les véhicules... Un contrôle routier... Dans le texte dont on a pris connaissance, on identifie spécifiquement les contrôles routiers pour les véhicules de transport, etc. Mais, en ce qui concerne les normes de sécurité routière concernant les véhicules, ça semble être en général. Et, lorsque, par exemple, un corps policier, à un endroit quelconque, décide, lors d'une fin de semaine, de faire des interventions particulières de vérification ? on le vit régulièrement en motocyclette; on veut vérifier si nos casques sont conformes, si nos silencieux sont conformes, etc.

Alors, on se disait: Est-ce que ce bout de loi là pourrait être interprété comme étant: Bien, c'est le mandat de la société? La société décide de confier le travail au corps policier, alors le corps policier... le ministre de la Sécurité publique pourra envoyer une facture d'honoraires à la société pour l'avoir aidé à exécuter cette partie-là du mandat. C'est la lecture que nous faisions de ce passage-là, et c'est pourquoi nous mentionnions l'imagination créatrice, là, pour dire: Bien ça, ça nous permet de faire ça. Alors, ça donnerait un moyen d'aller puiser à nouveau des sommes qui ne sont pas destinées à ces fins-là.

La Présidente (Mme Harel): Merci, M. Benoit. Je reconnaîtrai le député de Saint-Maurice.

M. Pinard: Alors, merci, Mme la Présidente. Alors, bienvenue. Bienvenue à la Fédération motocycliste du Québec et à son président, M. Benoit. Je vous ai écouté religieusement, et surtout les dernières interventions que vous avez faites me préoccupent beaucoup, parce que je vais essayer de relier vos interventions avec les propos que j'ai entendus tout à l'heure du ministre, le ministre des Transports.

M. le ministre des Transports a parlé de... la fiducie qui sera créée aura deux objectifs très précis: le premier, c'est de s'occuper de verser les indemnités; et le deuxième, c'est d'assurer la sécurité des usagers. Assurer la sécurité des usagers, ça m'apparaît excessivement large. Et je comprends votre intervention lorsque vous dites: Il ne faut pas oublier que, dans le passé, le gouvernement libéral à l'époque avait quand même soutiré des sommes d'argent très importantes qui étaient à la société. Et ce que vous dites, c'est qu'avant de débuter il faudrait qu'on remette les cartes sur la table, qu'on se remette à la case départ et qu'on rembourse d'abord ce qu'on a pillé. Et je vous comprends. On vit exactement le même phénomène avec la caisse d'assurance chômage au fédéral.

Moi, quand on parle d'assurer la sécurité des usagers et lorsque vous reliez aussi que les piétons ainsi que les cyclistes sont également des usagers, je vais jusqu'à me poser une question ? et je vais vous en faire part pour voir votre raisonnement: Est-ce qu'assurer la sécurité des usagers, par exemple, permettrait au ministre des Transports de demander à la fiducie de lui donner les sommes nécessaires pour établir, par exemple, des pistes cyclables au Québec? Parce qu'on assure la sécurité des cyclistes lorsqu'on confectionne des pistes cyclables, vous allez admettre. À ce moment-là...

La Présidente (Mme Harel): Je vais vous demander de conclure, M. le député de Saint-Maurice.

M. Pinard: Déjà, Mme la Présidente?

La Présidente (Mme Harel): Oui, si vous voulez qu'il vous réponde...

M. Pinard: Alors, j'aimerais que vous me répondiez dans ce sens-là. Et également j'aimerais que vous me parliez de la différence qui existe au niveau des motocyclistes entre les propriétaires... Il y a des propriétaires de motocyclette, pour ne pas les nommer ? Tex Lecor, Marcel Aubut, je pense à Mongrain ? qui ont des motos de très fort calibre, hein; c'est au moins 1 500. Il y a des 1 600. Maintenant, il y a des 2 000 cc sur le marché. Et il y a aussi d'autres motocyclistes qui ont des petites cylindrées mais de modèle différent. Et je pense qu'il y a là un écart important, malgré l'expérience des conducteurs, malgré le style de moto, qui fait une grande différence au niveau des deniers qu'on est obligé de verser à la SAAQ. Alors, j'aimerais vous entendre là-dessus.

La Présidente (Mme Harel): M. Benoit.

M. Benoit (Bernard): Mme la Présidente, je vais essayer de bien comprendre la question de M. le député. Dans un premier temps, la formulation qu'a faite le député de notre crainte effectivement se traduit aussi par une option comme celle-là, celle d'aménager des pistes cyclables et que des fonds de la SAAQ soient mis à contribution pour améliorer la sécurité de cette catégorie d'usagers là.

En ce qui a trait à la deuxième partie de l'intervention de M. le député au niveau de la cylindrée des motos, cette partie-là à notre sens a peu ou pas d'impact. Je reviens à un argument présenté dans mes notes tantôt à l'effet qu'un véhicule, par lui-même, ne cause pas de dommages, n'embête pas personne. Il peut y avoir un stationnement plein de 2 000 motos ici. Si personne n'y touche, ça ne dérange rien, ça ne fait pas de bruit; c'est à la minute que quelqu'un embarque dessus. Même chose pour une automobile. Dès que quelqu'un prend le volant, c'est là qu'il peut se produire quelque chose. Alors, la dynamique, elle est plus au niveau des individus qu'au niveau des véhicules. À cet effet-là, l'expérience vécue spécifiquement au niveau de la moto, au cours des dernières années, avait été, entre autres, l'abolition des cours de conduite obligatoires à un certain moment, abolition contre laquelle la fédération s'était prononcée, mais qui avait quand même été mise en vigueur et qui finalement... Les cours sont redevenus obligatoires lorsqu'on s'est rendu compte que le bilan de sécurité motocycliste se dégageait dangereusement.

Alors donc, la cylindrée des motos a peu ou pas d'importance, à notre sens. C'est plutôt la compétence de ceux qui les manient à laquelle on doit porter attention, et c'est là que les efforts de développement en sécurité doivent se concentrer.

La Présidente (Mme Harel): Alors, merci. Merci, M. Benoit, au nom de la commission.

Nous allons donc procéder à l'audition du Comité d'action politique motocycliste. Et je vais inviter ses représentants à prendre place.

Une voix: ...suspendre?

La Présidente (Mme Harel): Oui. Nous allons suspendre pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 16 h 18)

 

(Reprise à 16 h 22)

La Présidente (Mme Harel): Nous allons donc reprendre nos travaux. Je vais inviter le Comité d'action politique motocycliste à se présenter, prendre place. Et les porte-parole peuvent-ils se présenter?

Comité d'action politique
motocycliste (CAPM)

M. Noiseux (Normand): Alors, bonjour. Bonjour, Mme la Présidente, M. le ministre.

La Présidente (Mme Harel): M. Noiseux.

M. Noiseux (Normand): Oui.

La Présidente (Mme Harel): C'est bien le cas? M. Normand Noiseux?

M. Noiseux (Normand): Oui, exactement.

La Présidente (Mme Harel): Vous allez nous présenter, j'imagine, Mme Lucie Landry-Létourneau.

M. Noiseux (Normand): Oui.

La Présidente (Mme Harel): Bienvenue. La secrétaire corporative du Comité d'action politique, c'est bien cela?

M. Noiseux (Normand): Exact. M'accompagnent aussi Mme Monique Maheux et Pierre Hébert, qui sont du sous-comité de la région métropolitaine de Québec. Il y a aussi M. Serge Lajeunesse et Pierre Mercier, qui sont aussi administrateurs du CAP.

On peut y aller, Mme la Présidente?

La Présidente (Mme Harel): Oui. À vous la parole.

M. Noiseux (Normand): Merci. Alors, Mme la Présidente, M. le ministre, mesdames et messieurs, d'abord merci de nous donner l'opportunité de nous présenter devant vous.

Le Comité d'action politique motocycliste, ci-après appelé CAPM, a été fondé le 2 octobre 1993, et représente l'immense majorité des organisations motocyclistes du Québec, et est un organisme autonome composé uniquement de motocyclistes sans distinction d'appartenance et sans discrimination aucune. Le CAPM est un front commun pour la défense et la promotion des droits et libertés de tous les motocyclistes. Il a d'ailleurs reçu, au cours des années, un appui non équivoque par leur présence à la Journée du loup. Lors de la dernière édition tenue à Québec, en 2004, plus de 10 000 motocyclistes ont réaffirmé leur support aux actions entreprises par le CAPM. Il est composé de bénévoles et a su maintenir, depuis plus de 10 ans, une influence mobilisatrice guidée par ses valeurs de dialogue et de concertation. Ses paramètres d'action se situent toujours dans le respect des lois et règlements édictés par les autorités gouvernementales.

Sa mission. En fait, le Comité d'action politique est reconnu comme le seul porte-parole politique de la communauté motocycliste du Québec et représente celle-ci auprès des organismes voués à l'atteinte de la mission ou susceptibles de l'entraver. Sa principale mission: combattre toute forme de discrimination à l'égard des motocyclistes et entre eux. En décembre 2003, suite à de nombreuses démarches, le CAPM rencontrait le cabinet du ministre des Transports afin de faire valoir ses revendications en regard d'une hausse, qui semblait imminente, des droits d'immatriculation et d'assurance des motocyclistes. À cette occasion, nous déposions un document intitulé Arguments prônant le gel des immatriculations motocyclistes, une vision différente et élargie du monde motocycliste. La position du CAPM a d'ailleurs été appuyée par la signature d'une pétition qui regroupe plus de 17 000 noms représentant près de 15 % de la population motocycliste.

Les argumentations des motocyclistes sont que les hausses des droits d'immatriculation et d'assurance ont, sur ses adeptes, un impact différent de celui qu'on retrouve dans la majorité des autres usagers de la route. En se basant sur l'expérience passée, elles diminuent de façon substantielle le nombre de motocyclettes enregistrées et, en termes d'impact économique, elles priveraient le gouvernement d'entrées de taxes qui dépasseraient vraisemblablement les primes additionnelles qui seraient perçues par la SAAQ. À notre avis, si le projet de loi sous sa forme actuelle ne visait que l'élimination du déficit à présenter à la population et de transmettre l'odieux à une entité administrative, il pourrait être une réussite. Par contre, s'il se veut une réflexion sérieuse du rôle de la SAAQ dans notre société et sur ses actions, il y a place à une étude sérieuse.

Lors de la création de la SAAQ en mars 1978, un choix de société avait été fait. Et, à l'examen, il nous apparaît fort judicieux en ce qu'il vise d'abord l'indemnité de la victime sans égard à la responsabilité. Celle-ci n'est sûrement pas parfaite mais à coup sûr perfectible et avant tout enviée par plusieurs de nos voisins. La petite histoire de la SAAQ nous démontre que plusieurs interventions gouvernementales sont venues perturber son autosuffisance à travers les années. Et nous reviendrons d'ailleurs sur ce point. D'autre part, nous prétendons qu'au cours des dernières décennies le motocyclisme n'a pas reçu sa juste part d'attention de nos dirigeants gouvernementaux, incluant la SAAQ, en ce que la moto a été considérée comme un loisir plutôt que comme un véhicule de transport et n'a donc pas bénéficié d'une intégration sérieuse au sein des usagers de la route. L'image de la motocyclette au Québec ne se compare en rien aux pays européens et certains États américains où elle est au contraire perçue comme une solution à plusieurs problèmes tels que les engorgements routiers, la pénurie de stationnement et l'économie d'essence, pour n'en nommer que quelques-uns. En conséquence, les décisions prises à son égard ont relevé selon nous plus de l'improvisation que d'une vision intégrée et à long terme de ce véhicule.

Nous devrions donc nous réjouir en ce que le projet de loi n° 55 vienne encadrer les interventions gouvernementales dans l'auto-insuffisance de la SAAQ. Nous croyons que, bien que l'objectif soit louable, la raison fondamentale en est questionnable... de la façon dont fonctionnera dorénavant la SAAQ... parce qu'elle sera préoccupante pour l'ensemble des usagers de la route et particulièrement pour le motocyclisme.

La création d'entités administratives hors du périmètre comptable du gouvernement qui, sous le couvert de l'autosuffisance, iront chercher, dans les poches des contribuables, dont les motocyclistes, des sommes que le gouvernement aurait eu à justifier par la levée de taxes et d'impôts... Ce faisant, le gouvernement écarte certaines situations embarrassantes qui nuisent à sa recherche de l'équilibre budgétaire.

Ce projet de loi a le travers de ne pas tenir compte des actions passées et de tenter de laisser croire que le déficit actuel de la SAAQ est tributaire uniquement du mauvais rendement des marchés boursiers au cours des dernières années. Nous demeurons très inquiets quant aux solutions faciles qui contribueraient à augmenter les tarifs plutôt que de mettre l'accent sur la prévention. L'éducation et la prévention au niveau du motocyclisme n'ont pas été selon nous à la hauteur des dangers qu'on semble attribuer à ce véhicule. Le présent projet de loi ne nous sécurise pas à ce propos, car on n'y sent pas une implication suffisante des usagers de la route dans les groupes décisionnels.

Ni la SAAQ ni le ministre des Finances ne parlent des ponctions de plusieurs milliards de dollars effectuées dans les différents gouvernements, au fil des ans, dans le fonds d'indemnisation des victimes d'accidents de la route de la SAAQ. Ces piges auxquelles le CAPM s'est d'ailleurs opposé en 1994 par un recours collectif avec le Dr Carol Villeneuve ne sont jamais évoquées même si elles sont en bonne partie responsables de la situation financière de la SAAQ. Celle-ci veut régler en partie sa situation pécuniaire sur le dos des motocyclistes en dépit du fait que notre bilan routier est bien loin d'être négatif et en amélioration constante depuis plusieurs années. La rigueur administrative exigerait que le gouvernement contribue au Fonds d'assurance afin d'en rétablir l'équilibre et ensuite donne à la SAAQ le mandat d'atteindre l'autosuffisance. Ainsi, ceux qui ont bénéficié des ponctions passées seraient aussi contributeurs au rééquilibre et non uniquement les usagers de la route.

La caractéristique prédominante de la SAAQ est d'abord d'être étatique. Dans les faits, le projet de loi n° 55 l'éloigne de la surveillance des élus et lui attribue quasiment l'autonomie d'une entreprise privée, à la différence qu'elle n'aura pas de compétiteurs. Elle relèvera donc plus des activités d'administrateurs que celles d'élus. Donc, peu importe la tarification qui sera fixée, il n'y aura pas d'alternative pour les contributeurs, car la clientèle est captive. Tout ceci rend inquiétant l'éloignement que ce projet de loi créera avec les élus de la SAAQ. Si le passé est garant de l'avenir, il n'y a aucune raison de se réjouir, car nous ne percevons pas de façon claire, dans les modifications à la loi, comment l'absence, dénotée au cours des dernières décennies, de la SAAQ dans le milieu motocycliste va changer. Si les mêmes attitudes continuent, nous passerons plus de temps à dénombrer les victimes qu'à en diminuer le nombre.

n (16 h 30) n

Cette réflexion est suscitée par le fait qu'on semble considérer la motocyclette comme un véhicule au même titre que l'automobile quand il s'agit de faire de la prévention. À témoin, l'absence régulière de communication concernant le motocyclisme, que ce soit sur son site Internet ou dans la documentation qu'elle distribue lors du renouvellement des droits d'immatriculation, d'assurance et de permis de conduire. Elle est pourtant dans une position rêvée pour communiquer, à chaque saison, à l'ensemble des usagers de la route et leur indiquer le retour des motocyclistes sur la route.

Concernant la prévention, jusqu'à ce jour, c'est le monde motocycliste qui s'est pris en main à la mesure de ses moyens et a tenté de pallier pour l'absence de la SAAQ dans ce domaine. Évidemment, le motocyclisme étant formé d'associations mais également en grande partie de motocyclistes individuels, il aurait espéré la collaboration de la SAAQ dans la diffusion de son message. Il est primordial que le présent projet de loi tienne compte des réalités de certains véhicules qui, par leur spécificité, ne doivent pas être noyés dans la masse et administrés par des non-initiés. Comment ne pas se questionner sur une organisation qui avait aboli l'obligation des cours de conduite pour motocyclistes il y a quelques années?

Chaque année, la SAAQ dépense des millions de dollars perçus auprès des automobilistes mais aussi des motocyclistes pour défrayer les dépenses engendrées par les piétons et les cyclistes qui ne contribuent en rien au financement du système. Le bilan routier de 1996 à 2002 démontre que les piétons et les cyclistes, au cours des sept dernières années, ont été impliqués dans 17 % des décès, alors que les motocyclistes n'ont été impliqués que dans 7 %. Il y a lieu d'avoir une réflexion très sérieuse sur la façon de faire contribuer ces deux catégories qui se retrouvent dans l'ensemble des indemnisés. Une partie des impôts aux particuliers perçus pourrait être transférée annuellement à la SAAQ en guise de contribution globale. Évidemment, cette alternative devrait s'accompagner d'un renforcement par la SAAQ de la mise en force de règlements s'adressant aussi aux piétons et aux cyclistes.

Que dire maintenant des agriculteurs qui circulent sur les voies publiques avec des véhicules et des équipements de ferme non immatriculés à cette fin et non conformes à la sécurité routière et qui trop souvent se retrouvent impliqués dans des accidents avec motocyclette? Lors de la Journée du loup, cette année, nous avons rencontré un motocycliste dont l'épouse est décédée suite à un accident causé par un équipement agricole qui manifestement n'avait pas suivi les règles élémentaires de sécurité. S'il était présent aujourd'hui, son témoignage serait plus qu'éloquent. Est-ce un autre accident comptabilisé au dossier des motocyclistes?

Dans son mémoire déposé en novembre 1999, le CAPM soulevait le fait suivant: la Fédération moto-tourisme du Québec, FMTQ, qui, aujourd'hui, est la FMQ, avec d'autres groupes motocyclistes, avait alors exposé les conclusions du rapport Hurt. Cette étude américaine, la plus exhaustive jamais faite en matière d'accidents de moto, concluait que, dans les collisions impliquant une moto et un autre véhicule, la faute était attribuable au conducteur de l'autre véhicule dans 65 % des cas. Une tarification qui ne tiendrait pas compte de cette réalité et qui serait basée essentiellement en fonction des coûts, étant donné la vulnérabilité des motocyclistes, serait automatiquement vouée à une inéquité importante. À la lumière des informations connues à ce jour, la SAAQ ne posséderait pas les statistiques permettant de connaître les situations d'accidents où la faute est attribuable au conducteur de l'autre véhicule. Cette lacune nous apparaît comme très importante, compte tenu qu'elle est capitale dans la recherche de l'équité envers les motocyclistes.

La tarification de la motocyclette doit absolument tenir compte de la double tarification que les motocyclistes subissent. Selon les statistiques de la SAAQ, plus de 99 % des motocyclistes sont également des automobilistes. Les contributions sont cumulatives, alors que le risque ne l'est pas, puisque, dans une très grande proportion, un des deux véhicules est forcément inutilisé pendant que la personne se sert de l'autre. Les critères de tarification situés au premier alinéa de l'article 17.7 de la future loi de la SAAQ seront vraisemblablement basés sur des données que possédera la SAAQ et qui seront rendues disponibles au conseil d'experts. Il faudra donc que ces critères et les données les supportant soient également disponibles aux groupes qui voudront se prévaloir des consultations publiques afin qu'ils puissent en évaluer la rigueur et leur impact sur la tarification. L'expérience nous a prouvé que la perception du motocyclisme par des non-initiés est souvent bien loin de la réalité. À ce titre, vous comprendrez que nous puissions nous inquiéter que les critères de tarification soient décidés sans la participation des principaux intéressés. Certains pourront prétendre que ce n'est pas d'usage de le faire dans le monde de l'assurance. Par contre, puisque nous devons considérer la SAAQ comme une société d'État ayant le monopole de la tarification dans son domaine, il est raisonnable de croire que les approches pourraient être différentes.

Dans le cadre de nos préoccupations, il y a le piteux état du réseau routier qui n'est pas pris en considération lors des accidents impliquant des motocyclettes. Les commentaires que nous recevons à ce sujet sont fréquents. Il faut être motocycliste ou avoir déjà été passager sur une moto pour comprendre comment ce facteur augmente le risque de façon substantielle de la conduite. On nous dit fréquemment que les motocyclistes devraient recevoir une prime de risque pour conduire dans de telles conditions.

La tarification est bien évidemment tributaire des indemnités qui sont versées, qu'elles soient corporelles ou matérielles. À ce chapitre, nous ne pouvons qu'approuver l'intention mentionnée par le ministre des Transports à l'Assemblée nationale en ce qu'elle demande à la SAAQ de changer ses méthodes et de parfaire l'administration des différents programmes. Selon notre compréhension du paragraphe de l'article 17.7 de la nouvelle loi, il nous apparaît raisonnable de croire que le conseil d'experts devra avoir une connaissance du motocyclisme pour faire son travail. Nous ne voyons vraiment pas, dans la qualification des membres de ce conseil, ce qui leur permettra de porter un jugement adéquat sur les préoccupations sociales de la population. Encore ici, l'absence d'utilisateurs dans le processus est manifestement selon nous une carence. Certaines règles de fonctionnement du conseil d'experts sont aussi décrites au cinquième paragraphe de l'article 17.6. La définition des modalités du mandat du conseil d'experts par la SAAQ nous apparaît un peu surprenante. En fait, selon notre compréhension de ce paragraphe, c'est l'entité qui sera examinée qui donne les modalités du mandat à ses examinateurs. Nous croyons qu'il serait normal que les modalités du mandat soient issues d'un accord entre la SAAQ et le gouvernement ou la Commission des transports afin d'en garantir l'impartialité.

La composition du conseil d'administration nous apparaît préoccupante quant à l'absence de représentation des utilisateurs. Nous ne pouvons concevoir que la SAAQ, qui sera dorénavant responsable d'établir la tarification des usagers de la route et des programmes de prévention, en plus d'être éloignée des élus, n'aura aucun représentant des utilisateurs sur son conseil d'administration. Il y a sûrement des gens de calibre qui pourraient occuper une telle fonction et qui rendraient ainsi la SAAQ plus transparente aux yeux de la population en général.

Au deuxième alinéa de l'article 23.0.19, on indique que «la commission parlementaire compétente [...] peut au moins une fois par année entendre le président et directeur général [de la SAAQ]». Nous croyons que le verbe «pouvoir» devrait être remplacé par «devoir» afin de ne pas se retrouver devant des situations difficiles, particulièrement pendant les premières années de ce nouveau mode de fonctionnement. En outre, puisqu'on va assister à un changement majeur, il nous apparaîtrait raisonnable que le président et directeur général de la SAAQ ait à venir présenter à la Commission des transports et de l'environnement un plan de mise en place de ces nouveaux mécanismes et des actions de modernisation et de contrôle des coûts qu'il entend mettre de l'avant pour se conformer aux nouvelles dispositions de la loi. Sauf l'élément cité ci-dessus, nous n'avons pas vu de mécanisme de suivi tel qu'il est utilisé pour Hydro-Québec, par exemple. Nous ne voulons pas nous prétendre des experts en matière administrative gouvernementale, mais il nous apparaît essentiel que la prévention soit de rigueur afin d'éviter des dérapages qui seraient de nature à enlever la crédibilité à cette transformation et se traduire par des contributions excessives auprès des utilisateurs de la route.

Il faut également ajouter que ce projet de loi amènera des frais de restructuration inhérents à tout changement qui seront vraisemblablement intégrés aux contributions qui seront déboursées par les usagers de la route. Donc, il ne faut pas les négliger.

La tenue de consultations publiques est définitivement une amélioration en regard de la situation qui règne actuellement. Pour que les situations soient considérées... pour que les consultations, désolé, soient considérées positivement, il faudrait qu'elles aient un impact sur les décisions et ne pas être uniquement un exercice pour permettre aux intéressés de parader sans pour autant influencer le résultat final. La crédibilité de ces consultations en dépendra. Cependant, elles ne devraient pas se substituer à l'implication directe des utilisateurs de la route dans le processus décisionnel. La crédibilité des consultations publiques sera également tributaire du sérieux qu'on voudra bien leur donner. À ce titre, il nous apparaît que la disponibilité des données qui auront permis à la SAAQ et au conseil d'experts de poser leur diagnostic... et le taux de contribution en conséquence est primordial. Il est en effet facile de soutenir certaines prétentions lorsqu'on est le seul à posséder les données pour le faire. La disponibilité de ces données nous apparaît tout à fait justifiée par l'expérience du passé qui nous a démontré que les données présentées par la SAAQ sous forme de statistiques peuvent être vues sous plusieurs angles et être interprétées de plusieurs façons.

De plus, les mécanismes de diffusion et de la tenue des consultations publiques qui sont décrits au paragraphe de l'article 17.6...

Nous pensons que la prise en compte de la langue n'est pas suffisante. Il faudrait y adjoindre fort probablement une notion de couverture nationale.

Il est indéniable que, si la SAAQ doit se rentabiliser uniquement en fonction de sa situation financière actuelle, ce sont les usagers de la route qui en paieront la note. Ceci laisse également entrevoir que les hausses de tarification pourraient s'effectuer en cascade sur plusieurs années. À ce chapitre, nous croyons que la SAAQ, à très court terme, aura une image claire des hausses de tarification successives qui seront nécessaires pour atteindre son autosuffisance et elle devrait donc en faire connaître la teneur le plus tôt possible. Cette demande de notre part ne doit cependant pas être perçue comme une acceptation des hausses de tarifs éventuelles, car nous maintenons notre principe que nous défendons depuis des années, à savoir: pas un dollar d'augmentation sans justification.

En conclusion, il est important de faire ressortir les éléments majeurs présentés dans le présent document qui devraient être pris en considération dans le cadre de la révision de l'étude du projet de loi n° 55, Loi modifiant la Loi sur la Société de l'assurance automobile du Québec et d'autres dispositions législatives. Le projet de loi n° 55 éloigne la SAAQ de la surveillance des élus et ne lui donne pas les pouvoirs d'une entreprise privée. La tendance à créer des entités administratives hors du périmètre comptable du gouvernement est inquiétante, car, bien que plusieurs de ses objectifs soient louables, certaines de ses conséquences nous apparaissent néfastes. L'intention mentionnée par le ministre des Transports à l'Assemblée nationale, en ce qu'elle demande à la SAAQ de changer ses méthodes et de parfaire l'administration des différents programmes, est excellente.

n (16 h 40) n

Les critères de tarification ne doivent pas être décidés sans la participation des principaux intéressés. Nous ne voyons vraiment pas, dans la qualification des membres du conseil d'experts, ce qui leur permettra de porter un jugement adéquat sur les préoccupations sociales de la population. Les modalités du mandat confié au conseil d'experts doivent être issues d'un accord entre la SAAQ et le gouvernement ou la Commission des transports et de l'environnement afin d'en garantir l'impartialité. La représentation des usagers de la route au conseil d'administration de la SAAQ est essentielle si on veut créer un équilibre. Une table permanente d'usagers experts pourrait grandement faciliter le lien avec les usagers de la route en regard de la compréhension des causes d'accidents et de la communication aux différents usagers de la route. Un plan de mise en place de nouveaux mécanismes et d'actions de modernisation et de contrôle des coûts que la SAAQ entend mettre de l'avant pour se conformer aux nouvelles dispositions de la loi doit être présenté à la commission. La crédibilité des consultations publiques dépend des impacts qu'elles auront sur les décisions. Ces éléments majeurs doivent être harmonisés en fonction des préoccupations du motocyclisme qui ont été citées en détail dans le présent document, dont un bref résumé ci-après.

L'histoire de la SAAQ nous démontre que plusieurs interventions gouvernementales sont venues perturber son autosuffisance à travers les années. La rigueur administrative exigerait que le gouvernement contribue au fonds d'assurance avant d'en rétablir l'équilibre et ensuite donne à la SAAQ le mandat d'atteindre son autosuffisance. Le régime d'indemnisation sans égard à la faute ne semble pas en équilibre avec les paramètres de tarification qui, dans le cas des motocyclistes, leur attribuent la responsabilité d'accidents où ils sont manifestement victimes. Plus de 99 % des motocyclistes sont également des automobilistes et, à ce titre, ils paient une double contribution, alors que le risque ne l'est pas, puisque ces deux véhicules sont forcément utilisés pendant que la personne se sert de l'autre.

En terminant, ce projet de loi ne règle en rien les raisons historiques qui ont amené la position financière que connaît actuellement la SAAQ. Il identifie plutôt, sans les nommer spécifiquement, qui paiera la facture. Le motocyclisme québécois pourrait être à l'aube d'une période plutôt sombre si la SAAQ donne intégralement suite à ses projets passés. La distance mise entre la SAAQ et les élus par ce projet de loi créera à notre avis plus de problèmes qu'il n'en réglera. Tel que présenté, le projet de loi, il relève plus de l'exercice comptable que d'une vision sociétale.

Mme la Présidente, M. le ministre, mesdames et messieurs, nous vous remercions pour votre attention. Vous trouverez, dans le document que nous vous avons fait parvenir, plus de détails sur les différents éléments et réflexions sur les sujets soulevés aujourd'hui. Merci.

La Présidente (Mme Harel): Merci, M. Noiseux. Alors, nous allons procéder à l'échange avec les membres de la commission. M. le ministre.

M. Marcoux: Alors, merci, Mme la Présidente. M. Noiseux, Mme Landry-Létourneau, merci d'être là et d'avoir présenté votre dossier avec autant de précision et de clarté. D'ailleurs, nous avions déjà aussi un document que vous nous aviez présenté il y a quelque temps, là, sur le groupe de travail interministériel sur le motocyclisme québécois. Donc, il y a déjà des liens avec à la fois la Société d'assurance automobile du Québec et le ministère des Transports et puis également la mise en place d'une table de concertation. Je pense qu'il y a différents enjeux autres qu'uniquement ceux-là, là, qui touchent tout ce qui est l'industrie du motocyclisme, les usagers. Alors ça, je pense que c'était très important que nous puissions, avec vous, continuer de travailler sur ces enjeux-là.

En ce qui a trait à l'aspect financier, je voudrais peut-être préciser qu'en créant un patrimoine distinct et ce qu'on appelle, dans le jargon juridique, «une fiducie d'utilité sociale», comme ça a été le cas pour d'autres organismes gouvernementaux ? je mentionne la CSST, La Financière agricole et d'autres ? ça permet de garantir que les contributions versées dans ce fonds-là devront être utilisées uniquement aux fins spécifiées, et dans le cas qui nous occupe, soit les indemnités versées aux victimes pour préjudice corporel ou encore pour des fins de sécurité routière. Et je voudrais simplement vous préciser sur ce plan-là ? parce que M. Benoit tantôt y a fait référence: pour ce qui touche la sécurité routière, là, il n'y a rien de changé avec le projet de loi n° 55 par rapport à ce qui existe actuellement parce qu'on modifie ? et, je pense, M. Benoit y faisait référence, ce n'est pas toujours clair dans les projets de loi, là ? parce qu'on modifie l'article 2 de la Loi sur la Société de l'assurance automobile du Québec, mais on ne touche pas au paragraphe qui parle de la sécurité routière et on maintient exactement le même paragraphe. Alors, ce qu'on appelle le paragraphe c de l'article 2 actuel n'est absolument pas modifié, et, actuellement, on dit: «La société a pour fonctions: [entre autres] [...] d'appliquer le Code de la sécurité routière [...] notamment en ce qui a trait à l'immatriculation des véhicules [...] aux permis [...] aux licences, aux normes de sécurité routière concernant les véhicules ainsi qu'aux obligations en cas d'accident.» Alors ça, là, ce n'est pas touché. Il n'y a rien de modifié là-dedans.

Et l'aspect de la sécurité routière à mon avis est extrêmement important pour tenter d'améliorer le bilan routier. Si on l'améliore ? et ça a été le cas au cours des années ? bien ça réduit également l'impact sur les indemnités payées, et je pense que c'est tout le monde qui y gagne. D'abord, un décès ou un blessé grave, c'est toujours un drame. Donc ça, un seulement, c'est un de trop. Mais il est clair que la société conserve exactement à cet égard-là le même mandat qu'elle a présentement. Il n'y a aucune modification de faite, hein? Ça, je pense que c'est important parce que c'est une fonction pour laquelle le rôle de la société, là, je pense, a été extrêmement positif au cours des années, depuis 1978.

Actuellement, ce que j'ai mentionné aussi, je voudrais simplement le rappeler, c'est que les fonds de la société servent à financer d'autres mandats. Je vous ai parlé des ambulances. Actuellement, c'est 50 millions que la société paie, là, pour les ambulances. Elle paie ça aux agences régionales de la santé et des services sociaux. À compter du 1er avril 2005, là, ça va être terminé, ça. Je vous parlais également de l'adaptation des véhicules et des vignettes pour les personnes handicapées. C'est de l'ordre de 10 millions. Ça va être terminé, ça; le fonds, là, ne servira plus à ça. En partie également, il y a des sommes qui servaient, là, pour tout l'aspect administratif qui n'étaient pas reliées nécessairement au paiement des indemnités ou aux opérations mêmes d'assurance de la société. Ça aussi, ça va être clair, ce ne sera plus là.

Donc, ce qui va être affecté pour l'utilisation des contributions, là, ce sera uniquement ce qui est relié aux opérations d'assurance comme telles et puis également à la sécurité routière. Alors, déjà en partant, là, annuellement, on va retrancher du financement de la SAAQ, là, des sommes qui sont reliées à d'autres mandats, et ça, je pense que de le clarifier à moyen terme, c'est positif, et on va savoir exactement puis les assurés aussi vont savoir à quoi servent leurs contributions.

Vous avez parlé de la nécessité pour évidemment les consultations du conseil d'experts d'avoir toutes les données possibles ou les statistiques dont ils peuvent se servir. Il y aura des consultations qui vont être publiques. Je veux dire, actuellement, il n'y en a pas, de consultation; il peut y avoir une publication, dans la Gazette officielle, d'un règlement, là, mais c'est tout. Alors, le processus qui est mis en place, je pense, va être transparent et va permettre aussi d'évaluer ce que présente la SAAQ sous différents éléments qui sont mentionnés, là, à l'article 17. Et tous les groupes auront l'occasion, à ce moment-là, aussi de se présenter devant le conseil d'experts et de faire valoir leurs arguments. Et ça, là, actuellement dans le processus, ça n'existe pas, même si c'est approuvé par le gouvernement.

Alors, je ne sais pas si vous trouvez que les... Parce que les éléments qui sont compris ou les critères qui sont indiqués à l'article 17.7, là, donc que devra examiner le conseil d'experts en consultation publique, pour vous, est-ce que ça semble suffisant? Vous en avez parlé, vous avez dit: Bien, on veut avoir évidemment toute l'information. Et ça, c'est essentiel quant à moi, là. Mais, si ce souhait-là est rempli, est-ce que vous jugez que les critères qui sont énoncés, là, sont suffisants pour dans le fond apporter un avis éclairé, et en considérant l'ensemble des principaux éléments, donc on me parle des frais d'administration de la SAAQ, on me parle de justesse et raisonnabilité de hausse de primes, le cas échéant, d'équité également? Est-ce que pour vous c'est suffisant ou si le conseil devrait tenir compte d'autres éléments?

La Présidente (Mme Harel): M. Noiseux.

M. Noiseux (Normand): Alors, Mme la Présidente, je pense que la question est quand même relativement vaste parce qu'effectivement il y a plusieurs paramètres à tenir compte.

n (16 h 50) n

Enfin, si on regarde la question des audiences publiques ou du conseil d'experts, notre intention était de s'assurer effectivement que, un, on aurait des avis suffisants pour être capables de se préparer, parce que tout le monde doit concevoir que les groupes de défense n'ont pas évidemment les moyens financiers d'avoir des gens en statistiques, etc., qui peuvent être aussi rapides à étudier les choses ? donc, ça demande un délai minimum ? et d'avoir un certain nombre effectivement de statistiques détaillées ou ventilées suffisamment pour être capables d'avoir notre propre vision de la situation. Parce que souvent, lorsque les statistiques qui nous sont présentées sont trop condensées, enfin elles risquent de cacher énormément de choses derrière. Et on sait que dans le fond, dépendant de celui qui regarde les chiffres, ou dépendant de la manière dont il regarde, ou avec l'oeil de qui le regarde, on peut évidemment faire dire beaucoup de choses. Alors ça, c'est excessivement important.

Cette question-là, si vous me permettez, me permet de dire: le conseil d'experts est une chose, mais il faut que les utilisateurs selon nous soient mieux représentés aussi au sein de la SAAQ. Et, à ce niveau-là, le motocyclisme demeure quand même une particularité. Parce qu'on peut avoir des utilisateurs qui sont, par exemple, au conseil d'administration de la SAAQ et connaissent très bien l'auto; donc, ils sont des usagers par eux-mêmes. Mais qui connaît vraiment la moto? Est-ce qu'on a des gens là qui vont connaître la moto? Et là je prêche en faveur du motocycliste. C'est excessivement important parce que ce n'est pas un véhicule comme les autres. C'est un véhicule qui est particulier, avec lequel il faut faire des choses de prévention. Et ça, on le dit souvent. Dans le fond, de hausser les immatriculations n'enlèvera jamais un accident sur la route. La prévention, l'éducation, la formation, la sensibilisation des gens, c'est de cette façon qu'on va améliorer notre bilan routier.

Donc, la participation des motocyclistes, oui, au niveau des conseils d'experts, si on obtient les données, c'est effectivement un pas intéressant. Mais il faut aussi que l'utilisateur soit dans les groupes décisionnels le plus près possible pour influencer les décisions à la base. D'essayer d'influencer des décisions ou des choses lorsqu'elles ont été prises, c'est excessivement difficile. Donc, lorsqu'on est capable de travailler à la base des décisions, c'est sûr qu'à ce niveau-là il y a beaucoup plus de bénéfices pour les deux parties, entre autres, parce que personne ne va perdre son temps.

M. Marcoux: Vous avez également mentionné, M. Noiseux, que vous aviez des préoccupations évidemment justement quant au rôle de la société en ce qui touche la sécurité reliée aux motocyclistes. Est-ce que vous inférez que, dans le passé, il n'y en a pas suffisamment qui a été fait? Ou est-ce que les motocyclistes ont été en quelque sorte, là, moins bien... on s'en est moins bien préoccupé que les autres types de véhicules sur la route, sur le plan de la prévention également?

M. Noiseux (Normand): Mme la Présidente, oui, c'est notre perception qu'effectivement tout n'a pas été fait effectivement pour faire la prévention nécessaire. Je le redisais dans le texte tantôt, on le redisait: c'est qu'effectivement beaucoup de ces préventions-là ont été faites surtout de la part des motocyclistes. Et on sait très bien que nos moyens sont quand même limités. Nos moyens sont limités de deux façons et financièrement, ça va de soi, pour être capables de faire de la prévention sur un plan relativement national. Mais notre capacité aussi de rejoindre ces motocyclistes-là est limitée.

Il faut savoir que, le monde organisé, si on parle des associations, on parle probablement d'au plus 50 % des motocyclistes. Quand on parle de 100 000 motocyclistes, ça veut donc dire qu'il y a 50 000 motocyclistes qui sont des motocyclistes qu'on appelle dans le jargon des «loners», des gens qui se promènent tout seuls, et qu'on ne peut pas rejoindre, que le milieu motocycliste n'est pas capable de rejoindre ces gens-là. Et c'est là où on pense qu'une bonne complicité entre le milieu motocycliste et la SAAQ dans les programmes de prévention permettrait, justement par le canal de la SAAQ, de rejoindre ces gens-là et de faire avec eux de la prévention et de la sensibilisation, des choses comme ça.

Et je pense que cette complicité-là ? et vous n'êtes pas sans savoir que c'est probablement un des sujets qu'on veut adresser à la table de travail ? nous semble extrêmement prometteuse parce que, là, on pourrait travailler sur les problèmes à la base, ce qui n'est pas le cas présentement.

Donc, actuellement, on est évidemment handicapés et par les moyens et de communication et financiers. Donc, je crois qu'une complicité serait effectivement valable.

M. Marcoux: Bien, je pense d'ailleurs que ce sera là un des sujets importants à la table de concertation qui, j'espère, va pouvoir se mettre en oeuvre le plus tôt possible. Si j'ai bien compris ? peut-être une dernière question, Mme la Présidente, si mes collègues, là, ont aussi également des questions ? vous mentionnez, dans votre présentation, que, si un automobiliste évidemment est également motocycliste en même temps, il se trouve à payer deux fois. Mais je me dis: Est-ce que ce n'est pas la même chose pour un automobiliste qui a également un camion, ou qui a un Winnebago, ou qui a un autre type de véhicule autre qu'une motocyclette? Est-ce qu'on devrait aussi, dans ces cas-là, dire: Bien, écoutez, là, vous payez en double. Parce que dans le fond, si on veut être équitable, il doit payer. Si, moi, je veux avoir un type de véhicule, bien je paie pour. Puis, si je veux en avoir un autre, je devrais payer pour comme les autres. Parce que j'ai eu l'impression que vous disiez: Bien, c'est un peu comme étant une double tarification. Peut-être que j'ai mal compris?

M. Noiseux (Normand): Alors, Mme la Présidente, effectivement votre compréhension est la bonne. Effectivement, la double tarification, c'est d'avoir deux véhicules en sachant très bien qu'il y en a un des deux, la plupart du temps, qui va être utilisé. On n'a pas la prétention de vouloir avoir un traitement de faveur, de dire que les motocyclistes sont les seuls dans cette situation-là. Vous avez bien compris effectivement que les autres groupes effectivement qui seraient dans cette situation-là devraient être regardés sérieusement. Parce qu'effectivement, à partir de ce moment-là, il y a selon nous une surcontribution à cause de cette situation-là. Et je crois que ça vaut la peine de le regarder de façon très sérieuse.

La Présidente (Mme Harel): Merci, M. Noiseux. Oui, alors, M. le député de...

M. Dubuc: Allez-y.

La Présidente (Mme Harel): ...d'Iberville.

M. Dubuc: La Prairie.

La Présidente (Mme Harel): La Prairie. C'est voisin.

M. Dubuc: Bien, c'est une question qui va peut-être...

La Présidente (Mme Harel): C'est voisin.

M. Dubuc: Merci, Mme la Présidente. La question s'adresse à M. Noiseux. C'est une question qui rejoint peut-être le ministre. Que c'est qui m'a intrigué tantôt ? je n'ai peut-être pas bien compris, là: il y avait 7 % d'accidents de moto qui seraient... puis 65 % qui seraient causés par les automobiles. J'ai-tu bien compris ça?

La Présidente (Mme Harel): M. Noiseux.

M. Noiseux (Normand): Oui, Mme la Présidente. Selon le rapport Hurt, qui est un rapport très, très détaillé, ce qu'eux ont donné, le résultat de leurs études dit que, dans le cas où il y a des collisions où il y a deux véhicules qui sont impliqués, dans 65 % des cas, le véhicule automobile est celui qui a causé l'accident. Souvent ? puis c'est le plus fréquent ? soit le véhicule qui coupe le chemin tout bonnement parce qu'il n'a pas vu la motocyclette, ou etc. Mais ce que ce rapport-là dit, c'est que, dans 65 % des cas, c'est l'automobiliste qui a causé l'accident.

La Présidente (Mme Harel): Oui.

M. Dubuc: J'ai d'autres petites questions sur le même sujet, là ? puis vous aviez peut-être répondu tantôt ? sur le nombre de blessés chez les motos. Avez-vous le pourcentage? Parce que, tant qu'à 7 %, on sait bien que les gens qui sont en moto, malheureusement, ne sont pas protégés du tout ou très peu. On s'en va en moto, l'automobile, elle est protégée par l'auto; à ce moment-là, le motocycliste, il ne l'est pas... la moto. Y a-tu un pourcentage de blessés? Il y a souvent des décès aussi, là. Avez-vous des chiffres sur ça?

M. Noiseux (Normand): Malheureusement, nous n'avons pas les chiffres en main, mais nous pourrions vous les faire connaître. En fait, c'est des chiffres très connus parce que la SAAQ les publie de façon très, très détaillée à tous les ans. C'est d'ailleurs des chiffres évidemment qu'on se sert. Peut-être juste ajouter que la meilleure protection ? et c'est pour ça qu'on insiste tellement sur la prévention et la sensibilisation ? la meilleure protection du motocycliste, elle est dans la tête, elle est dans le fait que le motocycliste, lorsqu'il monte à bord de son véhicule, est sensibilisé qu'il est sur la route, qu'il fasse attention. Qu'ils aient des cours parce que c'est aussi une machine qui est différente d'une auto, et c'est par ça qu'il faut commencer. C'est extrêmement important.

La Présidente (Mme Harel): Merci. Merci, M. Noiseux. La parole est au député de Portneuf.

M. Soucy: Merci, Mme la Présidente. Combien il nous reste de temps, là?

Une voix: ...

M. Soucy: Quatre minutes. Alors, merci. Alors, M. Noiseux, d'abord je voudrais vous féliciter pour la qualité de la recherche documentaire que vous nous avez fait parvenir. Je l'ai lue avec beaucoup d'attention. Ayant fait un peu de moto dans le passé, je trouve que c'est bien documenté.

Par contre, d'entrée de jeu vous dites que vous êtes le seul porte-parole. Puis là vous êtes le deuxième qu'on entend. Alors, comment on peut prétendre être le seul porte-parole pour les motocyclistes? D'abord, ma première question.

M. Noiseux (Normand): Oui, Mme la Présidente. En fait, le CAPM est un regroupement, en fait est un front commun dont la FMQ est partie prenante, mais il y a aussi beaucoup d'autres groupes motocyclistes. Donc, on est là pour la défense des droits et libertés. Donc, on est le seul porte-parole en termes de défense des droits et libertés. On ne veut pas évidemment se substituer, par exemple, à la Fédération motocycliste, qui a, en termes d'intérêt, la prévention, et les choses comme ça. Donc, on ne veut pas prendre sa place. Mais, quand c'est le temps de droits et libertés, on fait front commun.

M. Soucy: O.K.

La Présidente (Mme Harel): M. le député de Portneuf.

M. Soucy: Oui. Alors, dans votre exposé antérieur, vous avez fait allusion au fait que la grosseur des cylindrés avait plus ou moins d'importance sur le comportement. Par contre, est-ce que c'est par erreur qu'on peut penser que quelqu'un qui a une moto de course comparativement à un Gold Wing, il n'a pas le même type de comportement, comme on peut savoir que celui qui a une Ferrari, il n'aura pas le même comportement que quelqu'un qui a une berline, là?

n(17 heures)n

M. Noiseux (Normand): Alors, Mme la Présidente, c'est une question effectivement qui nous a été posée tantôt. En fait, la cylindrée n'a rien à voir avec la performance de la moto. Il faut savoir que les plus grosses cylindrées sont des routières. Des routières, pourquoi? Des routières à cause du confort, question de vibrations et aussi à cause du poids de la moto. Les motos probablement les plus performantes aujourd'hui sont probablement de cylindrées relativement basses. Alors, la notion de cylindrée ne joue pas avec la performance en termes de puissance, c'est-à-dire en termes de vitesse, etc. Ça fait que c'est un élément important. Parce qu'il y a très peu de grosses cylindrées. Si on regarde dans les motos sport, il n'y a pas beaucoup de grosses cylindrées; c'est vraiment dans les routières.

Évidemment, le comportement de l'individu sur la moto, c'est toujours une question... bien là on revient toujours à la question de sensibilisation. Il faut prendre ces gens-là dès le départ et les amener à une prudence. Il ne faut pas oublier que quelqu'un qui est imprudent en moto va être imprudent en auto. On ne change pas le comportement de la personne parce qu'elle est en moto ou en auto; elle va avoir exactement le même comportement. Donc, si on n'agit pas dès le moment où il est en moto ? parce que c'est souvent un des premiers véhicules ? on va retrouver inévitablement, sur la route, quelqu'un qui va aussi commettre des imprudences en auto et qui va aussi faire de la vitesse ou des choses comme ça. Alors, de là l'importance de la prévention et de l'éducation dès le départ.

M. Soucy: Est-ce que vous accepteriez qu'il y ait des cotisations qui soient différentes en fonction du type de moto ? de course plutôt qu'une moto de route?

M. Noiseux (Normand): Depuis le tout début, on s'est toujours opposés à la discrimination et à la catégorisation des motos parce qu'effectivement, à partir du moment où on va pénaliser une catégorie de motos, parmi cette catégorie-là, on va pénaliser beaucoup de gens qui se comportent convenablement et on va laisser les gens qui sont, excusez-moi, des têtes écervelées continuer.

À titre d'exemple, les motocyclistes qu'on reproche, par exemple, d'aller vite sur la route, c'est des gens, normalement, qui sont sur la route un an ou deux. Ils vont avoir une moto. Pendant un an ou deux, ils vont payer le prix d'assurance que ça coûte; ce n'est pas grave. Pendant deux ans, ils vont être sur la route. Après ça, ils vendent leur moto. Ce qui va arriver par contre, c'est que, pendant ce temps-là, les gens qui font de la moto pendant des années et des années, eux vont être pénalisés pendant des années et des années pour des comportements. Nous, on se dit ? et on revient un petit peu sur l'item de la FMQ: On doit peut-être s'adresser plus au conducteur et pénaliser le conducteur lui-même que de... le type de moto. Ça nous semble beaucoup plus équitable pour tout le monde.

M. Soucy: Merci.

La Présidente (Mme Harel): Merci, M. le député de Portneuf. La parole est maintenant au député de Drummond et porte-parole de l'opposition.

M. Jutras: Alors, bonjour, M. Noiseux, bonjour, Mme Létourneau, et bienvenue à la présente commission. Et merci pour la présentation de votre mémoire ? il est très bien fait, il est clair ? puis de vous être retournés aussi rapidement, là, pour vous retrouver dans la présente commission. J'aurai une seule question puis ensuite je laisserai le loisir à mes collègues de poser aussi des questions.

Je comprends votre réserve par rapport au projet de loi n° 55 parce que je partage la même réserve. Quand le ministre des Transports dit: «Là, on va créer un fonds d'assurance, puis ça va faire en sorte, là, le fonds d'assurance, que le gouvernement ne pourra pas aller toucher à ça», tu sais, le passé étant garant de l'avenir, c'était comme ça avant. Puis, de 1986 à 1994, le gouvernement libéral, alors qu'il était en place, quatre fois ? quatre fois ? il a adopté des projets de loi pour aller puiser dans le fonds de la Société de l'assurance automobile du Québec. Alors, moi, je dis: On n'a pas besoin de ce projet de loi là pour éviter ça. C'est une question de volonté gouvernementale, point à la ligne. Et par ailleurs, bien c'est inquiétant quand on sait que, quatre fois, là ? en 1986, en 1987, en 1990 puis en 1993 ? là le gouvernement est le maître du jeu puis il est allé puiser dans le fonds de la Société de l'assurance automobile du Québec. Et ça n'a pas été remboursé.

Par ailleurs, la question que je voudrais vous poser, c'est concernant, et vous y avez touchée, la composition du conseil d'administration de la Société de l'assurance automobile. Il a été question de la table de concertation, mais je comprends que vous voyez d'un bon oeil qu'il y ait des représentants des usagers au conseil d'administration. Ma question, c'est: Comment vous voyez l'accession de ces gens-là à ce conseil d'administration là? Comment on procéderait? Et est-ce que je dois comprendre de vos représentations que, spécifiquement, vous voyez un ou des représentants du milieu motocycliste?

La Présidente (Mme Harel): M. Noiseux.

M. Noiseux (Normand): Alors, Mme la Présidente, effectivement vous avez bien compris. La fin de votre question est tout à fait exacte pour la bonne et unique raison... et peut-être qu'à tort on voit le monde de la moto comme des gens de tel type et de tel type. Il faut savoir que maintenant le monde de la moto est extrêmement diversifié et on a, au sein de nos rangs, des gens très qualifiés dans toutes sortes de domaines qui pourraient être des candidats très intéressants pour le conseil d'administration de la SAAQ. Et ces gens-là sont aussi et des motocyclistes et souvent évidemment, la plupart du temps, des automobilistes. Donc, le fait qu'on aurait ce genre, ce calibre de personne là à cet endroit-là qui pourraient parler du motocyclisme en même temps qu'ils pourraient parler et avoir les intérêts des automobilistes aussi, ça nous apparaît quelque chose d'absolument essentiel. Parce que, comme on le disait tantôt, la motocyclette est un véhicule particulier et, si on ne la traite pas de façon particulière, on va continuer à avoir des hécatombes, on va continuer à vouloir hausser nos immatriculations et on va porter le fardeau finalement de la preuve, là, de toutes sortes de légendes aussi qui sont autour de ça.

Et on croit que c'est extrêmement important qu'on adresse les décisions à la base. Et c'est pour ça que le conseil d'administration à notre avis est plus important encore que le conseil des experts parce que c'est à cet endroit-là que les décisions importantes se prennent et c'est à cet endroit-là à notre avis que les usagers doivent se faire entendre.

M. Jutras: Ça va.

La Présidente (Mme Harel): Alors, M. le député de Masson.

M. Thériault: Merci, Mme la Présidente. Bienvenue, Mme Létourneau. Bienvenue, M. Noiseux. D'entrée de jeu, je dirais, j'ai un préjugé favorable à la moto. J'en ai eu moi-même une à une certaine époque. J'ai trouvé ça trop dangereux ? petite expérience malheureuse ? et j'ai changé ça pour un cheval.

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: Qu'est-ce qui est arrivé avec le cheval?

M. Thériault: Ce n'est pas moins dangereux, mais ça va moins vite. Mais, pour le bénéfice du député de Portneuf, concernant les cylindrées, je lui dirai, par exemple, que ma première moto était une cylindrée, un cylindre 500, une moto de type européen, custom. Ça n'avait rien à voir avec une moto de course, et c'était une vraie petite bombe. C'est le genre de moto qu'on prenait pour faire de la course sur la glace l'hiver. Et, sur un coin de rue, là, vroum, ça partait, ça, cette affaire-là, ça n'avait pas de bon sens. Et en quelque part, là, là, voilà l'exemple: Cylindrée 500, un seul cylindre, une vraie bombe, et, je veux dire, là on ferait quoi? Alors, vraiment, c'est des véhicules particuliers.

À vous entendre tantôt et à cause de ma pratique... Et on pourrait faire le tour de la table ici et dire: Quels sont les gens qui n'ont jamais conduit une moto? Je pense qu'il y aurait peut-être quelques mains. Quels sont les gens qui n'ont jamais conduit d'automobile? Il y aurait très peu de mains. Alors, moi, je vous dirai que ce qui manque à mon avis, c'est de la prévention et de l'éducation pas pour les utilisateurs seulement de la motocyclette, mais pour les conducteurs automobiles sur les routes.

Une voix: ...

M. Thériault: Exactement. Et je sais que maintenant les cours de conduite ne sont plus obligatoires, mais il y a quand même des cours et il y a certains avantages à prendre des cours.

J'ai une idée. Je vous la soumets. J'aimerais vous entendre là-dessus. Est-ce qu'il ne serait pas nécessaire qu'il y ait au moins, à l'intérieur de ces cours, un volet concernant la présence du motocycliste et d'une moto sur la route et comment se comporter comme véhicule automobile versus une moto sur la route? Parce qu'il me semble ? à moins que je me trompe et que ça a été corrigé depuis le moment où, moi, j'ai pris mes cours de conduite il y a quelques années ? il me semble que c'est complètement absent et qu'en quelque part, quand vous parlez, à la page 8, de compétences en matière de motocyclisme et du fait que vous considérez que vous n'en avez pas pour votre argent, vous payez. Mais en termes de communication, de publicité, de prévention et d'éducation, à la SAAQ, vous n'en avez pas pour votre argent. Qu'est-ce que vous pensez de cette idée? Est-ce que ce ne serait pas déjà faire un pas en avant et dans la bonne direction?

M. Noiseux (Normand): Alors, Mme la Présidente, ce genre de suggestion est de la musique à nos oreilles parce qu'effectivement nous ne sommes pas seuls sur la route. Et on peut regarder de toute façon les panneaux publicitaires qui le disent, qu'on n'est pas seuls. Ça fait que ce soient les motos, effectivement... Il faut faire attention de ne pas non plus blâmer les automobilistes. Quand un automobiliste coupe une moto parce qu'il ne l'a pas vue, de façon très claire, il ne l'a pas vue. Par exemple, d'annoncer que les motos arrivent sur la route au printemps, c'est déjà une sensibilisation. D'inclure, dans les cours effectivement d'auto, une partie motocyclisme, effectivement, probablement que ce serait une approche très intéressante.

n(17 h 10)n

C'est pour ça qu'il faut regarder la prévention dans son ensemble, parce que ce n'est pas aussi simple que ça en a l'air et on ne peut pas faire de la prévention du côté auto comme on en fait du côté moto. Mais c'est effectivement une excellente suggestion.

Et je dirais qu'il n'y a probablement pas beaucoup de personnes qui ont fait de la moto, mais, si on demandait de lever la main à tous ceux qui en ont fait ou qui auraient aimé en faire, probablement qu'il y aurait plus de mains qui se lèveraient.

La Présidente (Mme Harel): M. le député de Masson.

M. Thériault: Merci. Évidemment, effectivement il ne s'agit pas ici, à ce moment-là, de blâmer les conducteurs automobiles. Moi-même, descendant à Mascouche dernièrement, j'étais là pourtant, comme tout conducteur automobile est là dans son automobile, et j'ai fait une manoeuvre, et, au moment où j'ai fait ma manoeuvre, il y a une moto qui est passée, et je me suis senti moins coupable de la manoeuvre que je venais de faire parce qu'au fond j'avais regardé ce qu'il fallait pour un véhicule automobile mais pas pour une moto. Parce qu'il y a des angles morts avec une moto et il y a une façon... Et donc il faut donc redoubler de présence au volant. Et la différence avec une automobile et une motocyclette... Moi, d'ailleurs, j'ai appris à être là dans l'instant présent avec la moto.

En automobile, tu peux ne pas être là, tu es tout là quand même. En moto, si tu n'es plus là, tu vas être dans le décor et tu ne seras plus là pantoute. Et, dans ce sens-là, je pense que le confort automobile fait en sorte que, très souvent, on peut faire des manoeuvres sans prendre en compte que, sur la moto, là, c'est dans l'instant présent que ça se passe. Et je ne suis tout à fait pas surpris du chiffre de 65 % que vous notiez tout à l'heure à l'effet que, lorsqu'on parle de cause, hein... J'aurais donc pu, moi, faire ma manoeuvre, m'en aller et ne pas m'apercevoir qu'il était dans le champ. Et ça aurait été comptabilisé comment, ça, cette manoeuvre-là? Moi, je m'en vais. Je n'ai rien vu. Je ne regarde pas dans le rétroviseur. Je ne vois rien. Et, lui, il est dans le champ par exemple.

Alors, dans ce sens-là, moi, je pense qu'il faut absolument que ? et j'ai l'oreille du ministre présentement, là ? il faut absolument qu'au niveau de la SAAQ il y ait des campagnes de prévention et d'éducation importantes et qui font en sorte qu'en quelque part celui qui paie ses frais d'immatriculation et ses assurances, etc., puisse sentir qu'il est bienvenu sur les routes du Québec.

La Présidente (Mme Harel): Alors, M. Noiseux.

M. Noiseux (Normand): Oui. Mme la ministre, tout est question d'équilibre en prévention comme en autre chose. Donc, l'équilibre, c'est de faire de la prévention en travaillant du côté des motos mais aussi en travaillant du côté des autos parce qu'effectivement il faut que l'automobiliste soit sensibilisé. Mais il faut aussi que le motocycliste ait un comportement prudent. Donc, beaucoup plus de proaction et beaucoup plus d'éléments de prévention. Donc, l'équilibre entre les deux devrait donner effectivement quelque chose d'excellent.

La Présidente (Mme Harel): Alors, une dernière intervention. M. le député de Chutes Chaudière.

M. Picard: Merci, Mme la Présidente. Dans votre document... Bien, bonjour, dans un premier temps. Dans votre document, vous parlez de consultation publique, puis en tout cas, à la lecture, on perçoit peut-être une interrogation sur le sérieux de la démarche. Ma question est: Est-ce que ça vous rassurerait si cette consultation publique là serait effectuée par une commission parlementaire? Donc, le comité d'experts ferait ses calculs. Après ça, on irait en commission parlementaire où la population serait invitée.

Vous, est-ce que vous verriez ça d'un bon oeil que ce soit une commission parlementaire qui siégerait ici qui consulte la population sur les hausses proposées ou les tarifs proposés si, un jour, on n'a pas... Peut-être qu'un jour on aura des gels ou même des baisses. Il ne faut pas présumer, là. Mais comment vous percevriez cette idée?

La Présidente (Mme Harel): M. Noiseux.

M. Noiseux (Normand): Oui, Mme la Présidente. En fait, cette proposition transpire un peu du document. En fait, ce qu'on comprend du document, c'est qu'effectivement notre préoccupation, c'est que la SAAQ s'éloigne des élus. Donc, toutes les actions qui rapprocheraient la SAAQ, les décisions ou même les consultations ? ce genre-là ? qui rapprocheraient ça des élus, évidemment, nous, on regarde ça d'un oeil très, très positif.

La Présidente (Mme Harel): Merci. Alors, nous allons donc terminer nos travaux. Je vais vous remercier, M. Noiseux et Mme Landry-Létourneau ainsi que les membres du Comité d'action politique motocycliste.

Document déposé

Avant l'ajournement, je vais déposer la correspondance de la CAA, donc du Club automobile du Québec, sous la signature de son président-directeur général, M. Paul A. Pelletier, correspondance en date du 31 mai 2004 qui sera donc accessible au secrétariat de la commission parlementaire.

Alors, je vais donc ajourner les travaux sine die, à ce moment-ci. Merci.

(Fin de la séance à 17 h 15)


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