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Version finale

38e législature, 1re session
(8 mai 2007 au 5 novembre 2008)

Le mercredi 10 septembre 2008 - Vol. 40 N° 45

Consultations particulières sur le projet de loi n° 92 - Loi affirmant le caractère collectif des ressources en eau et visant à renforcer leur protection


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Table des matières

Journal des débats

(Quatorze heures quatre minutes)

Le Président (M. Bergman): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, on a un quorum. Je déclare la séance de la Commission des transports et de l'environnement ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.

Le mandat de la commission est de poursuivre les consultations particulières et auditions publiques à l'égard du projet de loi n° 92, Loi affirmant le caractère collectif des ressources en eau et visant à renforcer leur protection.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Diamond (Marguerite-D'Youville) est remplacé par M. Gosselin (Jean-Lesage); M. Domingue (Bellechasse) est remplacé par M. Roy (Montmagny-L'Islet); et M. Deslières (Beauharnois) est remplacé par M. Trottier (Roberval).

Auditions (suite)

Le Président (M. Bergman): Merci. Alors, cet après-midi, on va entendre trois groupes. On commence avec le Regroupement des organisations de bassin versant du Québec, représenté par M. Jean Landry, le président, et M. Jean-Paul Raîche, le premier vice-président. Vous avez 15 minutes pour votre présentation, suivies d'un échange avec les membres de la commission pour un autre 45 minutes.

Regroupement des organisations
de bassin versant du Québec (ROBVQ)

M. Landry (Jean): Merci beaucoup, monsieur...

Le Président (M. Bergman): S'il vous plaît, faites votre identification, vous et votre collègue. Et vous avez le micro maintenant pour les prochaines 15 minutes.

M. Landry (Jean): D'accord. Merci beaucoup, M. le Président. Mme la ministre, MM. et Mmes les députés, les commissaires, le Regroupement des organisations de bassin versant du Québec, le ROBVQ, tient à remercier les membres de la commission de lui accorder l'opportunité de faire valoir son point de vue dans le cadre des consultations particulières et auditions à l'égard du projet de loi n° 92. Nos propos d'aujourd'hui constituent essentiellement un résumé du contenu de notre mémoire qui s'intéresse principalement aux articles du projet de loi n° 92 traitant des cinq thèmes suivants: l'eau, ressource collective; les principes; les actions en réparation des dommages causés à l'eau; la gouvernance de l'eau; et le Bureau des connaissances sur l'eau.

Le Regroupement des organisations de bassin versant du Québec est un organisme à but non lucratif qui a été créé en 2001. Le ROBVQ compte, aujourd'hui, 41 organismes membres sur l'ensemble du territoire québécois. En plus de représenter ses membres, le ROBVQ a pour mandat de promouvoir les grands principes de la gouvernance participative et de la gestion intégrée et concertée de l'eau à l'échelle des bassins versants.

Les organismes de bassin versant, eux, sont également des organismes à but non lucratif qui agissent à titre de tables de concertation où siègent des acteurs et gestionnaires de l'eau de différents milieux qui ont un impact ou un intérêt sur les ressources en eau, comme par exemple les MRC et les municipalités. Les mandats dévolus aux organismes de bassin versant par le biais de la Politique nationale de l'eau et du cadre de référence pour les organismes de bassins prioritaires sont les suivants: élaborer le plan directeur de l'eau en informant et en favorisant la participation de la population; faire signer des contrats de bassin aux acteurs de l'eau; suivre la mise en oeuvre de ces contrats de bassin; et enfin faire la mise à jour des plans directeurs de l'eau, des PDE.

De façon globale, le ROBVQ considère le projet de loi n° 92 comme une décision fondamentale en ce qui concerne la reconnaissance légale du caractère collectif des ressources hydriques de surface et souterraines du Québec. Cette reconnaissance fait de l'État le gardien de cette ressource, ce qui permettra à la société québécoise d'assurer, sur son territoire, la pérennité de la qualité et de la quantité de cette ressource essentielle à la vie, et cela, en harmonie avec les principes du développement durable.

Ce projet de loi confirme également le choix du gouvernement du Québec de faire en sorte que la gouvernance et la gestion des ressources en eau doivent être réalisées de manière intégrée et concertée à l'échelle des bassins versants. En concordance avec l'annonce, en septembre 2007, de la volonté du gouvernement du Québec de redéfinir tout le Québec méridional en zones de gestion intégrée de l'eau, le ROBVQ souhaite que ce projet de loi définisse clairement les outils d'encadrement qui permettront aux organismes de bassin versant d'assumer efficacement, sur l'ensemble de ce territoire, leur mission de concertation des acteurs de l'eau et leur mandat d'élaboration des plans directeurs de l'eau.

Donc, en ce qui concerne le libellé de la section I, L'eau, ressource collective, il apparaît fondamental pour le ROBVQ que l'article 1 du projet de loi établisse que les écosystèmes aquatiques et les milieux humides font partie, au même titre que l'eau de surface et de l'eau souterraine, du patrimoine commun de la nation québécoise. Le ROBVQ considère que la protection de ces éléments et leur mise en valeur dans le respect des équilibres naturels et biologiques sont d'intérêt général et permettront d'assurer la pérennité de la ressource.

Par ailleurs, le ROBVQ se questionne sur le sens et la portée juridiques du terme «nation québécoise» tel qu'il est utilisé dans le libellé de l'article 1. N'étant pas un organisme spécialisé en cette question, il se permet uniquement de soulever la question à laquelle d'autres intervenants auront certainement la réponse.

n (14 h 10) n

Le ROBVQ considère que le projet de loi devrait intégrer un principe général d'accès aux cours d'eau et aux plans d'eau pour tous les citoyens du Québec, et ce, en respectant les droits des riverains. Nous considérons que les efforts accomplis au Québec pour améliorer la qualité de l'eau doivent avoir pour objectif de garantir à la population autant l'accès pour la consommation domestique que pour les usages récréatifs. Ainsi, le ROBVQ recommande que le libellé de l'article 2 soit reformulé de façon à intégrer la notion d'accès à l'eau pour les usages autres que la consommation.

En ce qui concerne les principes énoncés dans la section II, le ROBVQ juge que la gestion intégrée... gestion concertée et intégrée, pardon, des ressources en eau nécessite la considération du principe de précaution tel que défini dans la loi n° 118, Loi sur le développement durable. Ainsi, le ROBVQ recommande que ce principe soit intégré à la section II du projet de loi.

Par ailleurs, le ROBVQ est d'avis que le principe de participation démocratique est également fondamental et pour cette raison il recommande que celui-ci soit également intégré dans le projet de loi. Ce principe repose sur deux éléments incontournables de la gestion intégrée et concertée des ressources en eau, soit l'accès de la population et des acteurs de l'eau à l'information relative à l'environnement et, deuxièmement, l'étroite association de ceux-ci à la prise de décision et à l'élaboration de projets ayant une incidence majeure sur la gestion et la mise en valeur des ressources en eau.

Concernant le principe d'utilisateur-payeur et de pollueur-payeur, il nous semble particulièrement important de rendre la contribution des acteurs proportionnelle aux dommages qu'ils causent aux ressources en eau, aux écosystèmes aquatiques et aux milieux humides mais également à l'usage qu'ils en font. En conséquence, le ROBVQ propose d'inclure le principe de réparation sous celui plus général de pollueur-payeur. Ce principe, reconnu dans la Loi sur le développement durable et une des dispositions prévues dans la Politique nationale de l'eau, stipule qu'un usager doit financer les externalités négatives de son activité, y compris les coûts environnementaux.

Concernant nos commentaires et suggestions sur la section III, le ROBVQ est en accord avec l'article 9 qui précise que «les indemnités obtenues dans le cadre d'une action intentée en vertu de la présente section sont versées au Fonds vert». Toutefois, il estime que ces sommes versées au Fonds vert devraient être consacrées à la protection, à la planification et au financement d'actions qui s'inscrivent dans le cadre d'une gestion intégrée et concertée des ressources en eau.

Par ailleurs, le ROBVQ est d'avis que le projet de loi devrait comporter une section complémentaire entièrement consacrée aux redevances, dans laquelle seraient définis les différents types de redevance et les modalités de redistribution des indemnités perçues et versées au Fonds vert.

Pour ce qui est de la section IV portant sur la gouvernance de l'eau, le ROBVQ est heureux de constater que l'article 11 du projet de loi accorde une reconnaissance légale au mode de gestion intégrée et concertée des ressources en eau, tel qu'il a été défini dans la Politique nationale de l'eau. Le ROBVQ considère que la gestion par bassin versant est le mode de gestion des ressources en eau le plus adéquat qui tient compte des interrelations entre les usages et les conséquences, puisque cette gestion s'appuie sur la perspective de la relation amont-aval dans l'aménagement et le développement intégré et durable du territoire. Le ROBVQ insiste sur le fait que la gestion intégrée par bassin versant doit se faire par l'intermédiaire des organismes de gouvernance de l'eau qui oeuvrent à l'échelle des bassins versants, tel que défini dans la Politique nationale de l'eau et le cadre de référence. Le ROBVQ souhaite que la future loi sur l'eau soit très claire à ce sujet. L'intégration du concept de gestion écosystémique à celui de gestion intégrée et concertée nous semble également impérative.

Le ROBVQ rappelle que, dans un contexte de gestion intégrée des ressources en eau, la concertation multisectorielle doit se faire par l'entremise d'un organisme de gouvernance participative à l'image des actuels organismes de bassin versant, tel que défini dans la Politique nationale de l'eau, qui permet la conciliation des orientations et la planification des actions à réaliser par les gestionnaires municipaux et autres, les usagers économiques et les groupes communautaires présents sur le territoire du bassin versant concerné.

À l'article 12.1, il est mentionné que «le ministre du Développement durable, de l'Environnement et des Parcs peut établir [des] orientations fondamentales d'une gestion intégrée et concertée des ressources en eau». Puisque ces orientations sont fondamentales, le ROBVQ recommande vivement de les identifier et de les intégrer directement dans le texte législatif. À cette fin, le ROBVQ propose quatre orientations développées à partir des cinq grandes orientations qui ont servi d'assises à la Politique nationale de l'eau, à savoir: la gouvernance de l'eau et la gestion intégrée et concertée de l'eau, comprenant également le Saint-Laurent; la protection de la qualité de l'eau et des écosystèmes aquatiques; l'assainissement de l'eau et l'amélioration de la gestion des services d'eau; le développement des activités récréotouristiques liées à l'eau.

Au sujet de l'article 12.2° et 12.3°, le ROBVQ a toujours considéré que c'était au gouvernement de définir les bassins versants et groupements de bassins versants qui devaient être pris en charge par les organismes de gouvernance de l'eau. Le ROBVQ recommande que soit ajouté à la loi un article en ce sens qui pourrait s'inspirer de l'article L212-1 du Code de l'environnement de la France, qui se lit comme suit: «L'autorité administrative délimite les bassins ou groupements de bassins en déterminant le cas échéant les masses d'eau souterraine et les eaux maritimes intérieures qui leur sont rattachées.»

Le ROBVQ est favorable au regroupement de bassins versants dans le cadre d'un processus de redécoupage du Québec méridional en zones de gestion intégrée de l'eau dans l'optique où cette démarche vise la couverture d'un territoire continu et l'obtention d'unités de gestion des ressources en eau aux superficies plus homogènes. Par ailleurs, dans un souci de cohérence et d'exhaustivité, le ROBVQ recommande de modifier le libellé de l'article 12.3° et 12.3°a. L'article 12.3° pourrait se lire comme suit: «Pour chacune des unités hydrographiques visées au paragraphe 2°, que soit institué un organisme de gouvernance de l'eau [selon les principes de la Politique nationale de l'eau].» De son côté, l'article 12.3°a pourrait se définir de la façon suivante: «[Pourvoir à la constitution d'un] organisme ayant pour mission la gouvernance de l'eau et la concertation des acteurs en s'assurant d'une représentation équilibrée et paritaire, à l'échelle du bassin versant, des utilisateurs et des acteurs provenant des quatre secteurs suivants, [soit le secteur] municipal, économique, communautaire et gouvernemental. Cet organisme de gouvernance est une personne morale dont le mandat principal est de réaliser et de mettre en oeuvre un plan directeur de l'eau. Le ministre responsable prévoit les règles applicables à son fonctionnement et à son financement.»

La reconnaissance légale de cet organisme de gouvernance comme personne morale aurait l'avantage de modifier le statut actuellement ambigu des organismes de bassin versant, reconnus comme des organismes à but non lucratif, dont la mission et les mandats sont fixés par le gouvernement et non par ses membres et qui n'ont pas vraiment de comptes à rendre au gouvernement autrement que par une convention de financement.

Le ROBVQ est d'avis que la principale règle applicable à son fonctionnement devrait être la reddition de comptes. Comme la mission et le mandat des organisations de bassin versant seront déterminés par la loi, leur légitimité ainsi assurée devrait être renforcée par l'obligation de reddition de comptes, elle-même inscrite dans cette loi. Leur imputabilité au gouvernement est donc essentielle.

Le ROBVQ recommande fortement d'abroger le paragraphe 3°b de l'article 12 puisque cet article, dans sa forme actuelle, va à l'encontre de la gouvernance participative de la Politique nationale de l'eau. En effet, le ROBVQ est d'avis que le mandat de concertation doit être confié à un organisme de gouvernance de l'eau qui oeuvre à l'échelle d'un bassin versant ou d'un groupement de bassins versants. Il ne serait d'ailleurs pas pertinent de confier ce mandat à une autre structure qui ne serait pas représentative de l'ensemble du territoire du bassin versant et de tous les acteurs et de ce fait ne serait pas en mesure d'assumer véritablement la mission de coordination d'une table de concertation.

Les frontières d'un bassin versant dépassent les frontières des municipalités, des MRC, des régions et même, dans certains cas, des provinces et des pays. La gestion par bassin versant implique une hydrosolidarité des acteurs vivant en amont avec ceux en aval. Tous les acteurs d'un bassin versant doivent accepter le partage de leurs responsabilités et participer au dialogue sans revendiquer leur prépondérance sociale. L'absence de dialogue entre tous les acteurs d'un bassin versant et le refus de reconnaître la légitimité de l'autre dans le processus de décision ne peut que mener à des conflits dont les générations futures en subiront les conséquences.

Le ROBVQ est évidemment en accord avec la formulation de l'article 13, qui précise les modalités de diffusion du plan directeur de l'eau élaboré par les organismes de bassin versant ainsi que l'utilisation de cet outil par les différentes instances décisionnelles. Le ROBVQ estime que, dans une logique de concertation des acteurs, la prise en considération du PDE par les MRC est vivement souhaitée puisque le schéma d'aménagement et de développement constitue un moyen inéluctable pour la mise en oeuvre du PDE et pour permettre à celui-ci d'atteindre la grande majorité des municipalités du Québec. Le ROBVQ recommande que les instances décisionnelles, soit les MRC et les municipalités, aient à produire un rapport qui serait remis au ministre et transmis aux organismes de bassin versant, dans lequel seraient précisées et expliquées les raisons qui ont motivé l'appropriation ou le refus d'une partie ou de la totalité des éléments de contenu du PDE.

n(14 h 20)n

Donc, je passe certaines sections, juste pour indiquer qu'en ce qui concerne la création du Bureau des connaissances sur l'eau l'article 14 précise que les données et les informations collectées par le Bureau des connaissances de l'eau permettront notamment de soutenir les besoins en connaissances sur l'eau et fournir à la population une information qui soit le plus fiable, et complète et à jour possible. Le ROBVQ recommande de modifier le libellé de cet article de façon à ce qu'il soit clair que cette information sera également accessible aux organismes de bassin versant et aux différents acteurs de l'eau. De même, le ROBVQ souhaite vivement faire partie intégrante de la structure de l'éventuel Bureau des connaissances sur l'eau à titre de membre.

En terminant, nous vous invitons à consulter nos recommandations portant sur la section VI du projet de loi en ce qui concerne les prélèvements d'eau et l'entente Saint-Laurent?Grands Lacs. Je vous remercie de votre attention.

Le Président (M. Bergman): Merci, M. Landry, pour votre présentation. Maintenant, Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Oui. Merci beaucoup. Donc, bienvenue aux représentants du Regroupement des organismes de bassin versant du Québec. Je suis très fière de vous saluer ici, au salon rouge de l'Assemblée nationale, à une étape qui, je pense, est importante et qui me rappelle l'une des toutes premières rencontres que j'ai menées avec vous comme ministre de l'Environnement.

Lors de cette première rencontre, vous m'aviez émis le souhait, vous m'aviez fait la recommandation que soit reconnu légalement le principe de la gestion intégrée par bassin versant et que soit également reconnue légalement la nécessité de la production d'un plan directeur de l'eau. Et, même si je comprends bien que, dans la rédaction des articles, il y a encore des commentaires, des précisions souhaitées, des modifications souhaitées, je remarque dans votre mémoire qu'à quelques occasions vous utilisez des termes comme «vous êtes heureux de constater» mais qu'il y a quand même, donc, ces principes que vous avez défendus devant moi, qui étaient inscrits dans une politique nationale de l'eau, mais que vous souhaitiez que ce soit inclus, qu'il y ait une reconnaissance donc légale de cela. Moi, je vous dis avec un sourire que je suis assez fière qu'on en soit rendus au moins à débattre du libellé dans un texte légal de cette reconnaissance.

Maintenant, avec vous, je pourrais vous dire, là, qu'il y a des commentaires très, très pointus dont je prends note. Je vais vous donner un exemple: vous souhaitez que l'information développée par le Bureau des connaissances sur l'eau soit disponible pour les citoyens. Je pense que vous avez constaté, lors de l'annonce faite la semaine dernière, qu'il y aurait un portail, donc que c'est bel et bien le cas. Et je pourrais faire un paquet de commentaires sur des dimensions très précises, mais vraiment je pense qu'il faut profiter de votre passage ici pour tenter d'avoir un débat de fond sur la question des liens du travail de concertation mais des liens à développer en termes de gouvernance entre les organismes qui doivent produire un plan directeur de l'eau selon la définition qu'on en donne dans notre projet de loi et le monde municipal. Vous savez que, durant cette commission parlementaire, il y aura des représentants du monde municipal qui vont venir plaider ici, avec arguments à l'appui, que, par exemple, la notion d'un plan directeur de l'eau devrait plutôt être confiée et relever d'organismes municipaux, donc d'élus de la population qui sont ensuite redevables et imputables devant une population de l'application ou pas d'un plan directeur de l'eau, de son intégration à un schéma d'aménagement, etc.

Et par ailleurs ? et j'aime bien nommer un chat un chat ? vous faites beaucoup, beaucoup de recommandations sur la définition de l'organisme de gouvernance, là, au niveau de l'échelle d'un bassin versant. Mais vous savez, et à moins que la situation n'ait évolué dernièrement, puis vous m'en informerez, mais que, dans certaines régions du Québec, il y a même des organismes de bassin versant qui sont favorables au fait que finalement l'organisme reconnu soit, par exemple, une CRE, un conseil général des élus. Je pourrais donner l'exemple du Bas-Saint-Laurent, à moins que la situation ait évolué. Et donc vous voyez qu'il y a, à ma connaissance, même au sein des organismes de bassin versant, des débats, des discussions sur comment est-ce qu'on articule cette question de la gouvernance de l'eau entre des organismes représentatifs d'un bassin hydrographique et la question de l'imputabilité du monde municipal par rapport à cela.

Donc, compte tenu qu'on sait que nous aurons des représentants d'organismes municipaux qui vont venir devant nous, je veux entendre, vous, vos arguments par rapport aux modifications que vous souhaitez dans la rédaction de nos articles de loi. La consultation sert vraiment à ça, à ce qu'on entende les arguments de tous et chacun, puis ça va nous éclairer, nous, ensuite pour l'étude article par article de cette loi.

M. Raîche (Jean-Paul): Oui. C'est une très bonne question et c'est sûrement un choix de type politique qui doit être fait dans ce cas-là. Ce qui est derrière ce débat-là, c'est: Est-ce que nécessairement ça doit être des organismes formés strictement d'élus municipaux dans le cadre de l'élaboration d'un plan directeur de l'eau? Parce que le mandat, c'est d'élaborer un plan directeur de l'eau. Donc, c'est de savoir: Est-ce que ça doit être strictement des représentants du milieu municipal ou si on doit intégrer, à l'intérieur de l'organisme qui aura à définir ou à élaborer un plan directeur, si on doit intégrer ce que la Politique nationale de l'eau disait, le secteur économique, les agriculteurs, les forestiers et autres, industriels et le secteur communautaire?

Nous, on est toujours... on est partisans de ce choix-là. Nous essayons de le réaliser actuellement parce que c'était le choix qui avait été fait. Vous savez, sur les organismes de bassin, il y a quand même le tiers du secteur municipal qui est représenté, et, ce tiers du secteur municipal étant présent, lorsque nous travaillons avec eux, on constate à quel point ils sont généralement heureux de l'existence des autres acteurs sur le comité qui permet de définir le plan directeur. Donc, c'est relatif au niveau de la province. Ça varie. Il y a des endroits où ça fonctionne très bien, d'autres endroits où c'est plus remis en question.

Mais, connaissant très bien la situation dont vous avez parlé, un cas particulier, il y en avait deux. Il y avait le cas du Saguenay?Lac-Saint-Jean. Je pense qu'actuellement c'est plus revenu au sens où on le préférait, nous, en termes d'organisme. Je pense que ça, à ce niveau-là, ça me semble positif. Au niveau de la région du Bas-Saint-Laurent, il y avait quand même une problématique particulière. La problématique est la suivante: les organismes de bassin versant cherchaient des moyens financiers. Ils n'étaient pas financés adéquatement, et ça, je pense, ça a été reconnu par l'ensemble des acteurs. Et, lorsqu'on cherche des moyens financiers, on cherche des bailleurs de fonds, et, entre autres, les CRE sont des bailleurs de fonds.

Il y a deux orientations que les organismes ont prises. Les bailleurs de fonds, dans ce sens-là, nous, avec les CRE, on a beaucoup d'ententes, bon nombre d'organismes ont des ententes avec les CRE, mais ce sont des ententes pour des actions concrètes. Dans le cas du Bas-Saint-Laurent, on voulait des ententes pour la réalisation ou la rédaction du plan directeur de l'eau. Dans ce cadre-là, ça a permis un certain cheminement pour permettre justement ce financement-là, mais peut-être que, si le financement avait été approprié au départ, je pense que la dynamique aurait été différente, dans ce cas-là.

Maintenant, pour revenir à la question, question très importante: Est-ce que les organismes doivent être structurés strictement avec des élus du secteur municipal?, je dirais que, si on reconnaît dans la loi, comme on le recommande, si on reconnaît dans la loi un organisme, reconnu dans la loi, avec une composition très précise, comme on l'indique, et qui a une reddition de comptes au gouvernement qui est fiduciaire de l'eau, j'ai l'impression que le principe de reddition de comptes, avec des mécanismes de reddition de comptes, c'est comme pour d'autres organismes qui existent d'ailleurs au Québec, ça permettrait de répondre à cette espèce de question qui est régulière de l'imputabilité. Je ne crois pas et on ne croit pas que l'imputabilité est strictement en fonction d'un suffrage universel, d'une élection. On pense qu'il y a une imputabilité avec reddition de comptes qui peut se faire au gouvernement, puis c'est le gouvernement... je pense que c'est le... on pense que c'est le gouvernement qui est le fiduciaire de l'eau. Donc, ça change la dynamique avec ce qu'on propose et ça dépendra évidemment de ce qu'il y aura dans ce projet de loi.

Mme Beauchamp: Donc, si je comprends bien vos arguments, deux natures, premièrement disant: Il y avait une problématique de financement et qui amenait peut-être des acteurs à vouloir établir des alliances très, très, très serrées avec, par exemple, des CRE. Ce que vous me dites, là, c'est qu'entre autres l'augmentation de 150 % du budget dévolu à des organismes de bassin versant a peut-être amené, je dirais, un changement dans l'attitude de certains organismes de bassin versant. Et vous me dites aussi que... votre autre argument, c'est la notion d'imputabilité que vous nous invitez à introduire dans la loi.

Je ne veux pas travestir votre pensée. Est-ce que par ailleurs les modifications que vous nous invitez à faire dans la rédaction des articles qui entourent la gouvernance de l'eau, dans la définition précise de ce qu'est l'organisme de gouvernance, là ? je vais l'appeler ainsi... Est-ce que quand même votre intention n'est pas de... Votre proposition n'est-elle pas quand même de préciser cela à un point tel que ça va exclure derechef la possibilité que ce soit un organisme d'élus? Je dis «un organisme d'élus» mais, par exemple, une CRE ou... Est-ce que dans le fond la volonté exprimée, vous, politiquement votre choix, c'est de dire: Ça ne devrait pas être une CRE à l'échelle du territoire québécois et ça doit être la reconnaissance formelle de structures qu'on appelle jusqu'à maintenant, là, à votre image, un organisme de bassin versant? C'est ça? Votre message politique aujourd'hui, c'est celui-là?

n(14 h 30)n

Le Président (M. Bergman): M. Landry.

M. Landry (Jean): Oui, effectivement. Ce qu'on propose, c'est d'appliquer la Politique nationale de l'eau, qui définit très bien la gestion à l'échelle des bassins versants via des organismes de concertation multisectoriels, donc dans lesquels on retrouve trois grands groupes d'utilisateurs qui font tous les trois partie de la décision, qui participent aussi à l'élaboration du plan directeur de l'eau, et c'est tout ce qui fait la beauté du modèle québécois, je vous dirais, cette notion de gestion participative. On a reçu différentes délégations de différents pays, et c'est ce qui les intéresse le plus du modèle québécois. Tu sais, c'est agréable de voir que l'ensemble des usagers participent à la décision. Donc, tout ça pour répondre à votre question. Oui, nous, ce qu'on désire, c'est que la gestion par bassin versant se fasse via les organismes de gouvernance que sont les organismes de bassin versant parce qu'on croit sincèrement que c'est de cette façon, et avec l'outil du plan directeur de l'eau, qu'on va réussir à avoir une meilleure gestion des ressources en eau, au Québec, pour aujourd'hui mais également pour les générations futures.

Le Président (M. Bergman): M. Raîche.

M. Raîche (Jean-Paul): J'ajouterais à cela qu'il y a une différence. On constate, au niveau des organismes de bassin versant ou les demandes qui nous sont faites, parce qu'on est des organismes de services aussi, on constate qu'il y a une très grande différence entre les grandes municipalités et les municipalités en milieu rural, c'est que généralement ils n'ont pas l'expertise, ils n'ont pas les moyens financiers aussi de prendre le temps d'aller chercher l'information en ce qui concerne la gestion par bassin versant, concerne l'eau. Alors, ils font appel énormément à nous. Il n'y a pas la même dynamique avec les petites municipalités qu'avec les grandes municipalités, qui ont les moyens, d'ailleurs, vous savez, les grandes villes ont les moyens d'avoir le personnel qu'il faut pour faire la recherche puis se renseigner, ce qui n'est pas le cas... Et d'ailleurs la plupart...

On a beaucoup de projets actuellement au niveau des organismes de bassin versant. En tout cas, l'organisme dont je suis le président, on a beaucoup de projets avec ces municipalités-là. Donc, il y a une dynamique différente, là, qu'il faut prendre en considération. D'ailleurs, si on consultait ces municipalités-là dans l'ensemble, j'ai l'impression qu'elles seraient favorables à notre approche d'avoir un organisme de bassin où il y a à la fois le secteur municipal et les autres secteurs. D'ailleurs, je pourrais me permettre de dire en boutade: Je suis président d'un organisme, n'étant pas un élu, je leur demande à chaque fois que le président soit élu, puis ils me disent: Non, non, non, tu fais bien le travail. Ça fait que, dans ce sens-là, je pense qu'il y a une reconnaissance quand même de la pertinence et de l'expertise d'autres que des élus municipaux.

Le Président (M. Bergman): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Oui. Bien, je vous remercie pour ces précisions, ces explications. Je pense que, du côté du gouvernement, on a voulu envoyer un signal, je pense, très, très fort. Il y a eu un signal politique très fort envoyé lorsqu'on a pris la décision, dans le dernier budget, d'augmenter de 150 %... On est passés de 1,2 million... puis on a additionné, là, 3 millions de plus par année avec un principe de redécoupage du Québec méridional mais le soutien financier aux organismes de bassin versant. Mais vous comprenez qu'on va devoir recevoir des représentants, par exemple, de MRC qui vont venir nous expliquer une autre vision des choses, mais c'est pour ça que je voulais vraiment que vous expliquiez, vous donner le temps d'expliquer comme il le faut, pour le bénéfice de tous les parlementaires, votre position.

Je voudrais peut-être vous entendre un peu plus. Vous nous invitez à ce que, toujours dans le thème de la gouvernance de l'eau, parce que je crois que, là, vraiment vous êtes... Même si vous avez des commentaires sur d'autres sujets, là, moi, je veux vraiment entendre votre expertise sur ce sujet-là. Vous nous invitez à détailler, je dirais, dans la loi, à expliciter dans la loi les orientations fondamentales d'un plan directeur de l'eau. Vous nous faites quelques propositions dans votre mémoire. Je voulais vous entendre peut-être un petit peu plus sur la nécessité que vous y voyez.

Puis je vais vous donner un exemple. C'est parce que, la loi, on doit la faire dans un contexte où on croit qu'elle est bonne presque à vie, dans le sens qu'elle doit vraiment être pérenne, et je vais peut-être vous donner un exemple. Je voyais la liste, là, peut-être que je ne retrouverai pas facilement la page, mais je voyais la liste des items que vous nous proposez d'intégrer à la loi. Il y a peut-être ? je pense que je suis en page 10, hein ? la gestion intégrée et concertée, la protection de la qualité de l'eau, l'assainissement de l'eau, le développement des activités récréotouristiques. Vous me dites qu'il y a quatre orientations qui devraient être inscrites dans la loi sous la notion de plan directeur de l'eau, et je me demande si vraiment il faut suivre cette voie, lui donner une dimension légale, ou si on ne doit pas accepter que la loi reconnaît officiellement et légalement les plans directeurs de l'eau mais que, par rapport aux orientations qu'on se donne dans un horizon plus lointain, à long terme, le fait qu'il y aura peut-être des orientations nouvelles et que c'est un très lourd fardeau, d'un point de vue législatif, que d'ouvrir une loi puis d'apporter des modifications...

Je vais peut-être vous donner un exemple. Je me disais: Est-ce qu'il n'y aura pas de plus en plus inscrit dans des dimensions fondamentales d'un plan directeur de l'eau, par exemple, la notion de l'adaptation aux changements climatiques? Et pourtant, là, on ne le retrouve pas dans votre proposition, et j'en passe. Mais, je me dis, dans le futur, c'est assez évident, je crois, que d'éventuels plans directeurs de l'eau vont tenter de commencer à faire les projections des gestes à poser dans un contexte d'adaptation. En tout cas, il y a des régions du Québec où ils se sentent déjà très interpellés par ça.

Donc, je voulais avoir un peu votre réaction, parce que, moi, je n'ai pas d'oeillères, là, je suis là pour vous écouter. Mais est-ce qu'il n'y a pas là une dimension un peu trop formelle d'aller expliciter ça dans la loi? Puis est-ce qu'on ne devrait pas se donner un peu plus de marge de manoeuvre pour qu'en tenant compte d'un contexte réel un ministre puisse envoyer certains messages spécifiques, à un certain moment donné, sur les attentes par rapport aux plans directeurs de l'eau?

Le Président (M. Bergman): M. Landry.

M. Landry (Jean): Oui. Si vous me permettez, un élément sur lequel on voulait insister au départ, c'était la formulation qui disait que le ministre peut établir les orientations. Nous, il nous apparaissait que les orientations, elles doivent être définies de toute façon pour qu'on sache dans quelle direction on va. Donc, l'expression «peut» déjà nous interpellait. On disait: Il est important qu'on sache dans quelle orientation on doit aller, et ça doit être défini par le gouvernement qui est toujours le fiduciaire, je répète, de l'eau. Ça, c'est un premier élément. Ce n'étaient pas tellement des orientations pour le PDE, c'est des orientations de la loi, c'est-à-dire des orientations précises dans ce cadre-là, et ça ne voulait pas dire qu'il ne devait pas y en avoir d'autres. Ce sont des orientations qui nous apparaissent fondamentales, qui étaient dans la politique et qu'on doit déjà défendre. Le projet de loi de l'eau actuellement insiste beaucoup, et c'est à juste titre, sur les prélèvements, sur la quantité beaucoup plus que sur la qualité de l'eau. Il y a la LQE qui... Il y a la loi qui est toujours là comme telle. Mais on voulait qu'il y ait des orientations précises qui y soient pour mentionner qu'il y a, O.K., il y a la gestion par bassin versant, il y a la gestion du Saint-Laurent, c'est important. On doit l'indiquer.

Deuxième élément, c'est qu'il faut protéger la qualité de notre eau, il faut qu'on assainisse l'eau, il faut aussi qu'on développe des activités récréotouristiques parce que, nous, on met un principe de l'avant, c'est le principe non seulement de l'accès à l'eau potable, mais de l'accès aux plans d'eau. Alors, c'était dans ce sens-là qu'on soulevait...

Mme Beauchamp: M. Raîche, M. Landry, on me dit qu'il me reste peu de temps. Ça fait que, si jamais, par une autre question, vous pouvez commenter un peu l'articulation en termes de gouvernance entre les organismes de bassin versant, les comités ZIP, le Saint-Laurent, ça va m'intéresser. Ça aurait été ma question si j'avais eu plus de temps.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Roy: Merci beaucoup, M. le Président. Messieurs, bonjour et bienvenue. Merci beaucoup pour votre mémoire. On veut toujours avoir un peu plus d'argent. Vous n'en aviez pas beaucoup pour faire le travail, on vous en a donné d'autre. On se lance dans un grand, grand dossier, celui de la protection de l'eau. On va éventuellement avoir des redevances sur nos eaux, et ça, je l'espère, on l'a maintes fois répété. Maintenant, est-ce que vous calculez que les montants qui ont été ajoutés sont encore une fois aujourd'hui suffisants ou on va devoir rajouter des montants pour que vraiment vous ayez les moyens de faire une saine gestion des bassins versants?

Le Président (M. Bergman): M. Landry.

M. Landry (Jean): Merci, M. le Président. D'abord, les nouvelles argents que vous faites référence sont associées au redécoupage territorial. Effectivement, on n'a pas fait de calcul, là, très, très exhaustif, mais on pense qu'avec ce qui a été annoncé ? il s'agira de voir aussi l'étendue de chacun des territoires, là, qui sera définie ? mais nous croyons, puis par expérience, que ça pourrait être suffisant, oui, pour l'instant. Mais, à savoir éventuellement s'il y a de nouvelles responsabilités qui sont conférées aux organismes de bassin, là il faudrait voir, mais à l'oeil comme ça, là, on devrait être corrects.

n(14 h 40)n

Le Président (M. Bergman): M. Raîche voulait commenter.

M. Raîche (Jean-Paul): Oui. Si vous me permettez, j'ajouterais que la situation a quand même changé la dernière année, là. Il faut être conscient qu'il y a eu quand même des sommes supplémentaires importantes qui ont été ajoutées par le plan cyano. Ça a permis aux organismes de bassin versant, dans certains cas, d'augmenter leurs budgets de travail. Alors, la situation, je ne dirais pas que c'est suffisant, loin de là, mais il faut séparer deux choses: il faut séparer les sommes d'argent pour l'organisme de bassin donc pour remplir son mandat pour faire un plan directeur de l'eau, et les sommes d'argent qui seront nécessaires pour le mettre en action, ce plan directeur de l'eau, donc les actions terrain.

En ce qui concerne l'élaboration d'un plan directeur de l'eau, on sent qu'il y a un cheminement très positif qui se fait puis qui va nous permettre d'avancer. Je ne sais pas si ce sera suffisant, on le verra. La réalisation des plans directeurs de l'eau, on compte sur les redevances. Ça, c'est une autre question. On compte sur le milieu. On a toujours dit, nous: Les organismes de bassin versant, pour élaborer leurs plans directeurs de l'eau, c'est l'argent qui doit venir du gouvernement, mais, pour les actions concrètes pour le réaliser, ça doit venir du milieu et des redevances, et ça, on ne sait pas encore si on aura les moyens financiers de réaliser ces actions-là. Mais ça, je pense que c'est un peu normal.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Roy: Merci, M. le Président. Vous parlez, votre première recommandation, à l'effet que le projet de loi devrait permettre de garantir un droit d'accès aux plans d'eau et aux cours d'eau, concrètement. Quand on dit, et je l'ai mentionné plusieurs fois, qu'on n'a pas d'accès à différents plans d'eau, les utilisateurs, on est une province d'eau, on vit dans un pays d'eau, il y a des gens qui veulent vivre sur l'eau ne peuvent pas le faire. Ils sont privés par des riverains qui se sont accaparé les abords, donc on n'a aucune place d'accès à l'eau. On se permet de la regarder, de la voir, mais on ne peut pas l'utiliser.

Donc, est-ce que c'est dans vos mandats ou dans votre mandat des bassins versants de nous redonner ces droits-là, aux personnes qui veulent utiliser l'eau comme loisir?

Le Président (M. Bergman): M. Landry.

M. Landry (Jean): Effectivement, ce qu'on voudrait faire, c'est... Dans le cas où on est en propriété privée, c'est certain que c'est toujours difficile de faire comprendre aux propriétaires riverains que la rivière ou le lac qu'il y a en avant de lui, bien ce n'est pas nécessairement à lui. Donc, il doit permettre à d'autres utilisateurs d'avoir accès aux plans d'eau. Mais il y a d'autres façons aussi, donc il y a de la sensibilisation à faire, mais il y a aussi tout l'aménagement, je dirais, des parcs publics et des lieux publics, qui pourraient être mieux aménagés.

Notamment ici, dans la région de Québec, le boulevard Champlain, le réaménagement du boulevard Champlain en est un très bon exemple. On avait un boulevard industriel, puis regardez maintenant, les gens l'utilisent, les gens se sont réapproprié le fleuve. Donc, c'est par des actions comme ça qu'on va réussir, je pense, à redonner le goût de l'eau aux Québécois, et ça, les Québécois l'ont, le goût de l'eau, sauf qu'ils n'ont pas nécessairement accès à l'eau. Et ce qu'on dit, c'est que, si on améliore la qualité de l'eau pour la consommation, donc directement on améliore la qualité de l'eau des habitats aquatiques, et donc ça va permettre d'améliorer la qualité du contact que les citoyens ont avec l'eau.

Combien de lacs, combien de plages sur le fleuve sont fermés parce que la qualité de l'eau ne permet pas d'avoir accès à l'eau? Donc, c'est ça, c'est: si on améliore la qualité de l'eau, il faut penser aussi qu'on va créer une demande en améliorant la qualité de l'eau. Les gens vont vouloir avoir accès. Donc, il faut prévoir des accès à l'eau.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Roy: Merci, M. le Président. Dans le même ordre d'idées, on a des lacs et des rivières superbes. Donc, nos lacs vont tomber dans des rivières ou des rivières vont alimenter un lac, ce même lac va décharger dans une autre rivière, d'un à l'autre. On a voulu s'établir sur le bord des plans d'eau pour avoir la paix, pour avoir la beauté du plan d'eau, pour avoir la quiétude, pour pouvoir jouir de ce plan d'eau là, de la vision du plan d'eau. Malheureusement, c'est rendu un peu catastrophique de voir le nombre de bateaux à moteur qui ont envahi de trop petits plans d'eau.

J'avais déjà posé la question à Mme la ministre concernant qui a les droits d'interdire ou de faire un plan directeur concernant les embarcations à moteur sur les plans d'eau. On m'avait mentionné d'aller voir les municipalités, que c'était aux municipalités à régir... Mais, vous autres, au niveau des bassins versants, est-ce que vous avez votre mot à dire dans ces dossiers-là ou si c'est carrément un dossier de ville? Parce que c'est les mêmes bassins versants.

Le Président (M. Bergman): M. Raîche.

M. Raîche (Jean-Paul): Merci, M. le Président. Il faut préciser qu'en ce qui concerne la circulation des bateaux sur les plans d'eau il y a une procédure à suivre. Il faut que la municipalité puisse faire une demande au MAMR, qui, lui, travaille avec le fédéral. Vous savez, il y a une procédure. Donc, nous ne pouvons pas changer cette procédure-là. Cependant, ce que nous pouvons faire, nous, les organismes de bassin versant, c'est, au niveau des plans directeurs, selon ce qui sera décidé par l'ensemble des intervenants. Actuellement, ce sont les municipalités, le secteur économique, etc., au niveau des organismes de bassin. Ça pourrait faire partie d'orientations ou d'actions au niveau des plans. Mais il y a plusieurs façons d'intervenir. Ce n'est pas nécessairement par une loi.

Dernièrement, il y a eu une problématique, c'est au lac Massawipi, et ils ont dû reculer parce qu'ils n'avaient pas respecté la procédure. Comme c'est sur mon bassin, je connais bien la dimension. Et ce que je suggérais à l'époque aux maires de la région, c'est peut-être d'aller plus à court terme vers une entente de manière à mieux baliser la circulation des bateaux avec les associations. C'est possible. Là, c'était la question des «wakeboards» en particulier. Nous, on n'est pas contre les usages, on est contre les usages qui ont des conséquences négatives. Donc, il s'agit d'éliminer la conséquence négative plutôt que l'usage, et je pense qu'il y a moyen, nous, de travailler dans ce contexte-là, et c'est pour ça, la concertation. Mais, pour que la concertation ait lieu, il ne faut pas qu'il y ait seulement le milieu municipal. D'ailleurs, pour rejoindre un peu ce que je disais tout à l'heure, il faut que l'ensemble des intervenants soient interpellés.

Puis, au niveau d'un plan d'eau aussi, au niveau des bateaux, souvent on parlait d'accessibilité à l'eau. Les riverains, lorsqu'ils voient leurs lacs dépérir, bien ils ne sont pas très, très intéressés à ce qu'il y ait une rampe permettant que des étrangers, comme ils disent, viennent déposer leurs bateaux sur l'eau. Donc, il faut qu'il y ait aussi une certaine... C'est pour ça qu'on disait «avec le droit des riverains, avec certaines règles qu'il faut respecter lorsqu'on donne ce droit-là». Alors ça, c'est quand même important et c'est le but justement des organismes de bassin versant de réfléchir dans ce contexte-là.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Roy: Vous avez dit une phrase bien importante. Si on veut aujourd'hui que l'eau appartienne à tout le monde et qu'on va reconnaître l'eau comme patrimoine à tout le monde, j'insiste sur le fait que les gens qui sont sur le bord d'un lac... Comme le lac Massawipi, où on a fait un tournoi de pêche dernièrement, le lac, l'eau ne leur appartient pas, ils ont acheté un terrain. N'essayez pas d'aller mettre un bateau ou même d'aller à la pêche en kayak au lac Beauport, ils vont tout faire pour vous chasser du lac. Vous n'avez pas d'affaire là, c'est leur lac. Ils paient cher, ils ont des grosses cabanes, on n'a pas d'accès là. Le poisson qu'il y a là, on ne le pêche pas. On ne connaît rien, mais on ne le pêche pas, mais on ne veut pas que tu y aies accès.

Donc, les municipalités ou encore une fois les organismes de bassin, comment qu'ils peuvent faire pour aider ces gens-là qui veulent avoir un accès sur des lacs dits privés? Ce n'est pas un lac privé, le lac Beauport, c'est juste parce qu'il n'y a plus de place à passer.

M. Landry (Jean): ...d'accès public, effectivement.

Le Président (M. Bergman): M. Landry.

M. Landry (Jean): Excusez, M. le Président. Il manque, c'est ça... La grande majorité des cas, comme vous faites référence au lac Beauport, les gens se sont approprié les rives, comme vous dites, et c'est effectivement un problème dans bien des cas, et souvent les gens protègent leur lac en disant: Je veux préserver le lac parce que je veux qu'il reste beau, et tout ça. Mais tu regardes ce qu'eux font, eux-mêmes, ils posent des gestes qui sont beaucoup plus dommageables que de laisser un citoyen en canot pêcher dans le lac.

Donc, je reviens à la sensibilisation et à la circulation de l'information, la transmission de l'information qui va permettre de donner aux citoyens riverains peut-être une autre vision de leur lac et se dire qu'en fin de compte le lac appartient à tout le monde, l'eau appartient à tout le monde, et ce n'est pas contre nature de permettre à d'autres citoyens d'y avoir accès.

Ce qu'on appelle, nous... c'est des conflits d'usage, et on pense que la table de concertation que constitue l'organisme de bassin est le meilleur organisme, à tout le moins celui dans lequel les gens vont être tentés de venir se référer parce qu'ils ne se sentent pas... C'est des organismes qui sont neutres, autrement dit. Ils ne prennent pas parti pour l'un ou pour l'autre, ils ne sont pas des organismes municipaux, ce n'est pas des organismes environnementaux, ce n'est pas un organisme qui représente les industriels, on est là pour recevoir l'ensemble des doléances de tout le monde mais essayer de trouver un terrain d'entente.

n(14 h 50)n

Le Président (M. Bergman): M. Raîche, il reste trois minutes dans ce bloc de temps. M. Raîche.

M. Raîche (Jean-Paul): Excusez, M. le Président. Ce que j'aimerais rajouter, ce qui est très important, c'est que la qualité de l'eau d'un lac, ça dépend du bassin versant. Si on veut intervenir sur le lac et améliorer le lac, il faut intervenir sur l'ensemble du bassin. Comment convaincre les gens d'un bassin versant qui n'ont pas accès au lac de mettre la main à leurs poches, je m'excuse, et de dire: Vous allez participer financièrement à améliorer la qualité de l'eau de ce lac-là? On le vit, on rencontre les gens. C'est pour ça qu'on a toujours l'approche par bassin versant, et il faut absolument que les gens du bassin se sentent impliqués, pas juste financièrement, se sentent impliqués parce qu'ils ont récupéré les usages du lac, et ça, je pense que, de plus en plus, les riverains vont le saisir. Très important dans le contexte de la gestion par bassin versant.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Roy: Merci. C'est très paradoxal, hein, parce que j'ai une embarcation bien sûr avec un moteur pour la pêche où je fais du fleuve, des grands plans d'eau, mais je ne verrais pas ce même bateau là sur un petit plan d'eau juste pour virer, pour brasser la soupe. On sait qu'un moteur normal, 50 chevaux, on va chercher 8 pi de sédimentation. Comment peut-on, aujourd'hui, dans les compétences qu'on a, continuer à permettre ça en se défendant, d'un côté, au niveau des algues bleues, en brassant cette sédimentation-là puis en envoyant ça dans la rivière qui va découler du lac? Donc, on est conscients, il va falloir... Est-ce qu'il n'y a pas un plan directeur? Vous parlez d'un plan directeur. Est-ce que ça ne fait pas partie d'un plan directeur?

Le Président (M. Bergman): M. Raîche.

M. Raîche (Jean-Paul): Oui, effectivement, ça fait partie d'un plan directeur, mais en même temps il faut faire attention, lorsqu'on fait un plan directeur, un organisme de bassin versant doit travailler toujours dans une certaine objectivité, hein, on s'entend, puis l'information qu'il véhicule doit être la plus fondée possible.

Tout à l'heure, vous avez mentionné l'effet des bateaux à moteur sur les sédiments, et il y a deux types de sédiments. C'est sûr qu'un bateau à moteur fait des vagues, ça peut entraîner des sédiments au niveau des rives, mais les sédiments au fond du lac, c'est une autre chose. On n'a pas nécessairement une influence toujours sur les sédiments au fond d'un lac, et ça, vous savez, les études, il n'y a pas beaucoup d'études à ce niveau-là.

Je ne veux pas entrer dans le technique, là, mais l'avantage d'un organisme de bassin versant, c'est parfois de détruire des légendes, d'avoir une information plus pertinente, et cette crédibilité-là est essentielle. Puis, comme c'est notre seul mandat, l'eau, on a plus de chances d'avoir... C'est justement la qualité de ces informations-là. Puis, comme c'est régional, ce n'est pas strictement au niveau national, ça permet d'échanger plus adéquatement.

Le Président (M. Bergman): Malheureusement, le temps s'est écoulé. M. le député de Roberval.

M. Trottier: Merci, M. le Président. Tout d'abord, je vous remercie d'être présents parce que vous avez une expertise qui est extrêmement importante pour notre compréhension puis pour pouvoir bonifier le projet de loi.

J'aurais un certain nombre de questions. Notamment à la page 8, vous parlez de différenciation des redevances, puis, hier, M. Chevrette nous disait qu'on devrait peut-être examiner des redevances différentes en fonction de l'utilisation ou de la consommation. Je voudrais savoir ce que vous pensez de cette idée-là.

M. Landry (Jean): D'abord...

Le Président (M. Bergman): M. Landry.

M. Landry (Jean): Pardon. D'abord, on se colle beaucoup au rapport Beauchamp en ce qui concerne les redevances, c'est-à-dire qu'il prévoyait trois types de redevances: les redevances sur les branchements, les redevances sur l'utilisation, la consommation, et des redevances sur les rejets. Et entre en jeu aussi la notion d'utilisateur-payeur vis-à-vis ces redevances, et on croit que les redevances devraient s'appliquer à l'ensemble des usagers industriels mais devraient exclure la consommation domestique et la consommation faite par l'agriculture traditionnelle. Donc, c'est ce qui nous guide, là, au niveau des redevances par rapport aux utilisateurs-payeurs.

Pour ce qui est de la notion de pollueur-payeur, donc les rejets, à ce moment-là, c'est l'ensemble des utilisateurs qui devraient payer une redevance sur les rejets, autant les rejets domestiques, industriels, agricoles mais aussi tout ce qui a trait à la pollution diffuse également.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Roberval.

M. Trottier: Mais, quand certains intervenants nous disent: Moi, j'utilise de l'eau, mais je ne la consomme pas, je fais juste l'utiliser temporairement, puis je la traite, puis je la retourne, à ce moment-là, ça fait quand même une différence. Comment vous abordez ça, une question comme ça?

Le Président (M. Bergman): M. Raîche.

M. Raîche (Jean-Paul): Oui, M. le Président. Vous avez raison, il est très important de faire la différence. Lorsqu'il s'agit d'une entreprise qui prélève de l'eau et qui rejette 50 % de l'eau qu'elle a prélevée, ce n'est pas la même chose qu'une entreprise qui prélève de l'eau et rejette presque entièrement l'eau qu'elle a rejetée, et elle peut la rejeter d'une manière adéquate et elle peut la rejeter d'une manière non adéquate au niveau de la qualité. C'est dans ce sens-là qu'on dit, nous, que ce serait intéressant qu'on soit plus précis sur les types de redevances, les modalités des redevances à l'intérieur du projet de loi.

On n'a pas fait de recommandations très pointues, très précises à ce niveau-là parce qu'il y a tout un travail à faire. On demande tout simplement qu'on s'y attarde et on a donné des exemples. Si vous regardez le Code de l'environnement français, ils font des différences très précises, puis d'autres pays aussi. Ça fait qu'on dit: On peut peut-être s'en inspirer. Mais on n'a pas voulu entrer...

Vous savez, c'est un sujet très pointu. Par exemple, les redevances pour les pollutions diffuses, dans le Code de l'environnement français, on précise... Mais ce n'est pas une question simple, les redevances. Les redevances pour une industrie qui rejette des eaux et qu'on peut vraiment établir déjà que les eaux sont polluées, ce n'est pas la même chose que pour la pollution diffuse, vous en conviendrez. Alors, on établit ça comment, les redevances sur la pollution diffuse?

Pour les prélèvements, c'est relativement facile, on peut mettre des compteurs puis on le fait. Donc, on demande qu'il y ait une réflexion à ce niveau-là et qu'on le précise dans la loi de manière à ce qu'il n'y ait pas de... qu'on fasse ces distinctions-là puis qu'il y ait des orientations qui soient faites. Mais c'est sûr qu'on n'ira pas établir des montants de redevances, là, ce n'est pas ça qu'on demande, mais qu'il y ait une meilleure précision des types de redevances. Puis il pourrait y avoir des redevances, par exemple, qui sont allouées pour la remise en normes comme telle, la remise aux normes, pourquoi pas, ça pourrait arriver, pour les municipalités ou des choses comme ça. Donc, vous voyez un peu qu'on voudrait baliser davantage ce secteur-là.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Roberval.

M. Trottier: Hier, il y a quelques intervenants qui nous ont dit qu'on devrait avoir un statut spécial pour le Saint-Laurent. Comment on fait pour... Je sais que ce n'est pas une question facile, on en a discuté un petit peu auparavant, mais comment vous voyez ça, l'intégration du Saint-Laurent par rapport à l'ensemble des organismes de bassin versant?

Le Président (M. Bergman): M. Landry.

M. Landry (Jean): En fait, on a déjà commencé à discuter avec certains intervenants, notamment Stratégies Saint-Laurent, pour savoir comment on pourrait arrimer le travail des organismes de bassin versant avec celui des futurs organismes de gouvernance du Saint-Laurent. Pour le ROBVQ, la gestion intégrée du Saint-Laurent devrait se faire à l'image de ce qui est recommandé dans la Politique nationale de l'eau, c'est-à-dire une gestion intégrée de l'eau à l'échelle, qui comprend nécessairement un organisme de gouvernance et qui inclut les utilisateurs, les différents utilisateurs, les quatre grands groupes d'utilisateurs qu'on connaît, c'est-à-dire communautaire, industriel, municipal et gouvernemental, qui vient en support. Donc, c'est un peu donc le même patron d'utilisation.

Par contre, la difficulté de la gestion intégrée du Saint-Laurent, c'est qu'on a le Saint-Laurent, mais on a aussi tous les Grands Lacs qui sont à la tête du Saint-Laurent. Et donc, là, on est dans une autre province, dans un autre pays, aux États-Unis, etc. Donc, ce ne sera pas simple d'organiser la gestion du Saint-Laurent, effectivement. Mais par contre, nous, à notre niveau, au niveau des organismes de bassin versant, on verrait très bien, dans les zones, disons, tampons des berges du Saint-Laurent... Donc, nous, nos territoires s'accotent sur les berges du Saint-Laurent, et les territoires des ZIP, par exemple, incluent la même portion de territoire.

Donc, nous, ce qu'on suggère, c'est que, pour ces zones tampons là, il y ait un arrimage entre les éléments du plan directeur de l'eau qui s'appliquent pour ce territoire-là et qu'il y ait un arrimage avec les plans d'action ou les plans directeurs qui remplaceront ou qui vont remplacer les PARE, par exemple. Donc, ça va nécessiter vraiment une excellente communication entre les deux organismes, l'organisme de bassin versant et l'organisme du Saint-Laurent. Mais, pour répondre à votre question, ce ne sera pas évident de pouvoir arrimer tout ça.

Le Président (M. Bergman): M. Raîche.

n(15 heures)n

M. Raîche (Jean-Paul): Nous ne l'avons pas indiqué dans notre mémoire, mais nous avons toujours considéré qu'il doit y avoir des organismes équivalents aux organismes de bassin versant pour le Saint-Laurent. Nous avons régulièrement dit au MDDEP: Selon nous, ça ne devait pas être les ZIP. D'ailleurs, il n'y a pas des ZIP sur l'ensemble du territoire du Saint-Laurent, un peu comme pour les organismes de bassin versant actuels. Il doit y avoir des organismes... donc un redécoupage du Saint-Laurent adéquat de manière à ce qu'il y ait un organisme de gouvernance aussi pour le Saint-Laurent. Et il faut être bien conscient que la ville de Montréal est sur le Saint-Laurent, mais il n'y a pas un organisme de bassin versant actuellement qui y est, qui est dédié et qui s'occupe de la région de la ville de Montréal. Donc, il faut prendre ça en considération.

Il faut quand même qu'il y ait une intégration au niveau de l'ensemble. Il faut qu'il y ait une harmonie, une intégration de l'ensemble de la gestion de l'eau au Québec, sur tout le territoire, y compris le Saint-Laurent. Mais il y a aussi la dimension Saint-Laurent?Grands Lacs. D'ailleurs, on apprécie que l'entente Saint-Laurent?Grands Lacs soit intégrée dans la loi. Cependant, on ne l'a pas présenté tout à l'heure, mais, dans notre mémoire, on le dit, on aimerait aussi que ce soit étendu sur l'ensemble du territoire québécois, ce qu'il y a de bon dans l'entente. Pourquoi arrêter à Trois-Rivières? On arrête à Trois-Rivières parce que la définition du territoire... On arrête à Trois-Rivières, même on élimine Bécancour et le Saint-Maurice, et, nous, on considère qu'il y a des éléments importants.

Et, de la même façon, j'avais posé la question à Mme Beauchamp autrefois: Est-ce que le grand lac Champlain et le grand lac Memphrémagog... Est-ce qu'à ce niveau-là... C'est pour ça qu'on pose la question: Est-ce qu'il est concerné?, puisque, quand on définit le territoire, moi, ma lecture, c'est que le Memphrémagog et le Champlain sont dedans, l'entente, comme tel? Mais là ce n'est pas clair. Mais il me semble qu'elle est dans l'entente, en fonction du périmètre qui a été établi. Mais il faudrait établir ça sur l'ensemble du territoire québécois aussi, prendre ce qu'on peut transférer.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Roberval.

M. Trottier: Vous mentionnez en pages 12 et 13 qu'il faut qu'on prenne en considération l'exercice des attributions qui sont conférées dans le domaine de l'eau par rapport aux municipalités, qu'elles devraient le prendre en considération, mais vous dites: On ne devrait pas rendre ça obligatoire. Est-ce que vous pouvez expliquer davantage? Parce qu'il y en a qui voient ça différemment.

M. Landry (Jean): C'est-à-dire que...

Le Président (M. Bergman): ...

M. Landry (Jean): Oui. Merci. C'est-à-dire que ce qu'on voudrait, c'est que les municipalités, qui auront de toute façon participé à l'élaboration du plan directeur de l'eau parce que, je le rappelle, elles font partie des organismes de bassin, puissent prendre le plan directeur de l'eau et l'intégrer le plus possible à leurs schémas d'aménagement. Par contre, la portée légale du plan directeur de l'eau n'est pas nécessairement la même qu'un schéma d'aménagement. Donc, c'est pour ça qu'on ne veut pas qu'il y ait une obligation d'intégration. Ce qu'on veut, c'est qu'ils prennent le document et qu'ils prennent ce qui est bon pour eux, puis d'après moi ils vont avoir la majorité parce que, je le répète, ils vont avoir participé à l'élaboration du plan directeur de l'eau. Donc, ce qu'on voudrait, c'est qu'ils nous disent qu'est-ce qu'ils ont pris et qu'est-ce qu'ils ont rejeté et pourquoi ils les ont pris et pourquoi ils les ont rejetés. C'est ça qu'on voudrait savoir pour après ça pouvoir à la limite modifier ou essayer de répondre le plus possible à leurs schémas d'aménagement.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Roberval.

M. Trottier: Comment vous voyez l'arrimage entre le Bureau des connaissances de l'eau et votre organisation?

Le Président (M. Bergman): M. Raîche.

M. Raîche (Jean-Paul): Je pense que... Merci, M. le Président. D'abord, félicitations! De mettre en place un Bureau des connaissances de l'eau, pour nous c'est fondamental. Il faut qu'il y en ait un, il faut qu'il y ait une information centralisée, jusqu'à un certain point, qui va permettre... puis qui va être alimentée par des chercheurs, alimentée par des groupes, autant par les organismes de bassin que les MRC, les municipalités. Il y a déjà un certain portail de l'eau, en passant, ce qu'on appelle la SGGE dans notre langage, le système de gouvernance de l'eau. Ce Bureau des connaissances, donc il est bienvenu. Il faut qu'il soit alimenté, puis il va nous permettre d'avoir de l'information pour bonifier les plans directeurs de l'eau aussi puis aider les municipalités.

Prenez, par exemple, au niveau de l'eau souterraine. Actuellement, on a très peu de connaissances. Il faut améliorer... Et ça oriente les PDE, mais ça oriente aussi des décisions municipales, les décisions des MRC, c'est fondamental. Donc, pour nous, c'est tout à fait positif. Cependant, comme on l'a indiqué, on aimerait que ce Bureau-là intègre des groupes qui sont concernés. C'est pour ça qu'on demande que le ROBVQ soit représenté dans ce contexte-là. Mais pour nous c'est une bonne chose, comme tel.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Roberval.

M. Trottier: D'après vous, quelles sont les plus grandes embûches qu'on va rencontrer dans l'application de notre projet de loi? Puis est-ce que vous avez des solutions par rapport à ces embûches-là qui pourraient survenir?

M. Raîche (Jean-Paul): Bonne question. Ha, ha, ha!

Le Président (M. Bergman): M. Raîche.

M. Raîche (Jean-Paul): Vous m'amenez à dire que... La première embûche, ça va être d'abord que collectivement on accepte de mettre les moyens financiers qu'il faut pour les réaliser, ces fameux plans directeurs de l'eau. Quels que soient les groupes qui seront mandatés, ça va prendre les moyens financiers pour les réaliser. Ce n'est pas très élevé, remarquez, il ne faut pas penser que c'est ça qui va coûter le plus cher.

La deuxième, c'est d'avoir les moyens financiers et d'accepter, pour mettre en action ces fameux plans... C'est très dispendieux. Vous savez, récupérer... On travaille actuellement... Il y a eu des projets pilotes qui ont été mis de l'avant, qui ont été acceptés. Il y en a quatre. Mais, vous savez, pour récupérer un lac, là, pour être capable de faire qu'il soit... ça coûte très cher. Ça fait que c'est à mon avis une question financière et de choix.

Le Président (M. Bergman): Malheureusement, le temps s'est écoulé. M. Landry, M. Raîche, merci pour votre présentation. Merci d'être ici avec nous, aujourd'hui. Et je demande les gens du Regroupement national des conseils régionaux de l'environnement du Québec pour prendre place à la table.

Je suspends nos travaux pour quelques instants seulement.

(Suspension de la séance à 15 h 6)

 

(Reprise à 15 h 8)

Le Président (M. Bergman): À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, je souhaite la bienvenue au Regroupement national des conseils régionaux de l'environnement du Québec. M. Ruelland, M. Bourke, vous pouvez prendre votre place à la table.

Vous avez 15 minutes pour votre présentation, suivies d'un échange avec les membres de la commission pour un autre 45 minutes. Alors, s'il vous plaît, faites votre identification, et le micro, c'est à vous, monsieur.

Regroupement national des conseils
régionaux de l'environnement
du Québec (RNCREQ)

M. Ruelland (Jacques): Merci, M. le Président. Mme la ministre, MM. les députés, nous vous remercions de nous avoir invités à faire nos commentaires et nos observations sur le projet de loi puisque, comme vous le savez, notre réseau environnemental comprend 16 conseils régionaux de l'environnement en...

Le Président (M. Bergman): Pouvez-vous vous identifier, s'il vous plaît?

M. Ruelland (Jacques): Pardon. Jacques Ruelland. Je suis le président du Regroupement national des conseils régionaux, le RNCREQ. Je suis accompagné de Philippe Bourke, qui est notre directeur général et qui fera la présentation du mémoire.

Comme je le disais, nous représentons un réseau unique puisque nous sommes le seul réseau environnemental que l'on retrouve de manière structurée et dynamique dans toutes les régions du Québec, excepté évidemment le Grand Nord, et nous avons une longue expérience de la dynamique politique et administrative dans les régions du Québec et dans tous les domaines. Et c'est relativement important puisque le gouvernement du Québec a choisi, depuis quelques années, d'accentuer la régionalisation, la décentralisation, la déconcentration vers les régions du Québec et conséquemment de transférer des responsabilités et des pouvoirs à l'échelle de la région administrative. Donc, ce dossier-là s'inscrit aussi en partie dans cette dynamique-là.

n(15 h 10)n

Le deuxième point que j'aimerais souligner avant de passer la parole à Philippe, c'est de rappeler à tous... Et je n'ai probablement pas à vous le rappeler, mais on en est encore aux premiers balbutiements dans notre sensibilisation à la protection et à la valorisation de l'eau, hein? Ça ne fait pas de nombreuses décennies, c'est nouveau, de sorte qu'on est encore au niveau de l'acquisition des connaissances, de la sensibilisation à la valeur et à l'importance de l'eau, et on est encore loin d'avoir trouvé toutes les solutions efficaces et pertinentes dans la mise en oeuvre des différentes facettes de la protection de l'eau. C'est pour ça que le projet de loi est si important, parce qu'il assoit un certain nombre de principes fondamentaux sur lesquels on va donner à long terme des orientations.

J'écoutais la conversation au préalable, et il est évident qu'on n'a pas toutes les solutions, personne n'a toutes les solutions, mais je crois qu'on s'en va dans la bonne direction, et on va apporter notre contribution à cette réflexion-là.

Et je donne la parole à Philippe pour vous présenter les principaux éléments de notre réflexion sur le projet.

M. Bourke (Philippe): Parfait. Donc, merci beaucoup. Donc, j'y vais d'abord avec... On a séparé notre mémoire en deux parties, donc il y a des considérations générales qui sont même, dans certains cas, un peu à côté du projet de loi comme tel, mais ça nous interpelle dans la lecture du projet. Et ensuite il y aura une section où on aura quelques considérations plus spécifiques sur des articles libellés, des choses comme ça.

Donc, au niveau des considérations générales, le premier point qu'on a voulu soulever, c'est évidemment de dire, comme M. Ruelland vient de mentionner, qu'évidemment les conseils régionaux de l'environnement sont très satisfaits de voir arriver un projet de loi comme celui-là, c'était quelque chose de nécessaire. Évidemment, il y a le statut juridique de l'eau qui était une attente, là, depuis, entre autres, la commission Beauchamp. Donc, on vient préciser ça, d'en faire une ressource commune. C'est quelque chose de fondamental pour nous. Donc, en soi, c'est les éléments très importants qui sont mentionnés là.

Une des choses qui fait que c'est très intéressant pour nous aussi, c'est de voir toutes sortes de nouvelles dispositions qu'on introduit dans le régime de protection de l'environnement par ce projet de loi là. Il y a des choses très, très intéressantes pour nous lorsqu'on parle des principes de protection, des principes d'intégrité et écosystémiques, l'évaluation des impacts cumulatifs des différentes activités sur un même écosystème. Il y a l'intégration des enjeux, les changements climatiques, la question des pollueurs-payeurs, la responsabilité de tout le monde, le devoir d'agir, le préjudice écologique, donc toutes sortes de choses nouvelles, fascinantes, qui sont vraiment intéressantes pour nous et qui amènent le Québec vraiment à l'avant-scène au niveau de la protection de l'environnement dans le domaine de l'eau. Ceci dit, je me permets de dire: Malheureusement, ce qui est dommage dans ça, c'est que ça s'applique uniquement à l'eau. Mais, comme disait Jacques, on avance, on progresse, on fait un premier pas.

Et ça m'amène au deuxième point que je voulais soulever dans les considérations générales. C'est que, nous, au niveau des conseils régionaux de l'environnement, ça fait plusieurs années qu'on milite pour que le gouvernement du Québec se donne les moyens de faire une mise à jour du régime de protection de l'environnement au Québec. C'est un régime de protection de l'environnement qui était très innovateur à l'époque, au début des années soixante-dix, mais il a maintenant 35 ans et plus, et donc ça mérite d'être revu, comme ça se fait dans d'autres juridictions régulièrement. Et en fait, en quelque sorte, le projet de loi n° 92, avec toutes les innovations qu'il amène, il démontre la nécessité qu'on fasse une mise à jour mais, à ce moment-là, peut-être dans un contexte plus large où ce serait moins fragmentaire et on aurait une meilleure vision d'ensemble. Donc, c'est un point qu'on voulait soulever et qui nous a amené cette réflexion-là à la lecture du projet de loi. Donc, c'est un souhait qu'on exprime à la commission de demander au gouvernement du Québec de mettre en chantier cette modernisation de la loi québécoise sur la protection de l'environnement.

Un autre élément qu'on a voulu soulever dans le cadre des considérations générales, en fait c'est que le Regroupement des CRE s'explique mal pourquoi le gouvernement a choisi de ne pas appliquer à l'ensemble du Québec les dispositions de l'Entente sur les ressources en eaux durables du bassin des Grands Lacs et du fleuve Saint-Laurent. Donc, nous, on est un organisme qui représente toutes les régions du Québec et donc on trouve ça un peu important de mentionner que ce serait fondamental que toutes les régions du Québec aient le droit, donc pas uniquement les régions du Sud-Ouest du Québec, mais que toutes les régions aient droit au même statut de protection de leurs eaux.

Enfin, le dernier point que l'on soulève concernant les considérations générales, toujours à l'égard du projet de loi, c'est la question du droit à l'information et à la consultation. On sait que les questions d'accès à l'information ont été soulevées évidemment aussi lors de la commission Beauchamp sur l'eau. Et là je vais me permettre de citer le paragraphe qui concernait cet élément-là: «En matière d'information, la commission estime que l'accès à l'information constitue un droit fondamental du public, droit qui impose un devoir aux gestionnaires d'informer les populations sur l'état de l'eau, sur les pollutions et sur les résultats atteints par les différents programmes.»

On constate par contre que, dans le projet de loi n° 92, bien que ça ait pour objet de faire de l'eau une ressource commune et aussi de statuer sur l'intérêt général de cette ressource-là, il n'y a pas de disposition particulière pour s'assurer d'un accès du public à l'ensemble des informations qui concernent l'état de l'eau, ses usages ou la gestion.

Donc, j'arrive maintenant à la section sur les considérations spécifiques. Je vais sauter certaines sections pour être sûr de pouvoir compléter la présentation dans les temps qui nous sont permis. Alors, je m'en vais tout de suite à la page 10, où on parle de l'article 2. C'est un point d'ailleurs qui a été soulevé dans les échanges qu'il y a eu avec les intervenants précédents.

Donc, au niveau de l'article 2, le gouvernement propose d'insister sur le fait que chaque personne physique a le droit d'accéder à l'eau potable. Alors, nous, ce qu'on dit: Bien effectivement, c'est une très bonne chose, mais ça soulève la question de l'accès aux plans d'eau. Donc, on pense que ce serait nécessaire d'inclure dans le projet de loi une disposition aussi pour faire en sorte que chaque personne ait aussi un droit d'accès aux plans d'eau.

Ensuite, page 11, on parle de l'article 7. Alors ça, c'est vraiment... Quand je parlais tantôt d'une véritable révolution qu'on peut constater grâce à ce projet de loi-là lorsqu'on parle du régime de protection de l'environnement, c'est vraiment, entre autres, au niveau de cet article 7 là qu'on retrouve ces éléments très intéressants parce qu'on introduit, entre autres, la notion de préjudice écologique dans le droit environnemental québécois. C'est quelque chose de tout à fait nouveau. Donc, le gouvernement ici reconnaît la valeur de l'eau et des écosystèmes qui en dépendent et conséquemment il responsabilise ceux qui pourraient altérer cette valeur. C'est une implication concrète du principe de pollueur-payeur, qui est désormais d'ailleurs enchâssé aussi dans la Loi sur le développement durable. Donc, je fais un clin d'oeil ici, mais on voit que la Loi sur le développement durable, elle n'a pas été adoptée pour rien, on voit comment elle est capable maintenant d'aller s'inscrire un peu partout dans les projets de loi qui sont formulés par le gouvernement.

On arrive maintenant à l'article 11 ? je suis en page 13 ? qui concerne la gestion par bassin versant. Évidemment, nous aussi, on est très contents de voir que le gouvernement va un peu plus loin dans cette volonté d'inscrire la gestion par bassin versant dans les politiques. Maintenant, il va enchâsser ce principe-là dans la loi pour instaurer la gestion par bassin versant.

Ce qu'on a voulu souligner par contre dès le départ, c'est que, de ce qu'on prend de la lecture des articles qui concernent la gestion par bassin versant, dans le projet de loi n° 92, on se limite uniquement à la question de la gestion par bassin versant des ressources en eau, alors que, nous, dans notre conception de ce qui est la gestion par bassin versant, c'est une gestion intégrée de l'ensemble des ressources d'un territoire, qui s'adonne, à ce moment-ci, à être le bassin versant des cours d'eau. Et donc, à notre avis, la priorité du gouvernement à cette étape-ci, c'est de s'assurer que tous les gestionnaires de ressources, qu'ils soient publics ou privés, dans le domaine de l'agriculture, de la forêt, de l'urbanisation, de l'aménagement du territoire, des infrastructures, soient en mesure de démontrer qu'ils prennent en compte la gestion intégrée par bassin versant dans leurs outils de gestion et de planification du développement. Donc, il faut que ça devienne une culture dans la gestion que de prendre en compte la capacité du support des bassins versants dans les choix de développement qui sont faits. Donc ça, c'est un élément fondamental qu'on pense qui doit être bien enchâssé dans les modes de gestion de la société québécoise.

Dans un deuxième temps, là, je me concentre un peu plus sur ce qu'il y avait dans le projet de loi, donc on parle de la gestion intégrée par bassin versant des ressources en eau. Donc, à cet endroit-là, le gouvernement rappelle le mandat qui a été confié aux organismes de bassin versant de réaliser et de mettre en oeuvre un plan directeur de l'eau. Pour les CRE, c'est un mandat très important qui leur est confié, et on pense que c'est nécessaire, et c'est en soi donc un important jalon qui est mis ici, dans la mise en place ou dans la mise en oeuvre de la Politique nationale de l'eau.

Toutefois, on est obligés de constater que le processus et les modalités de mise en oeuvre et d'application des plans directeurs de l'eau ne sont pas encore précisés et arrêtés, ce qui occasionne des conflits, entre autres, avec les instances qui exercent les responsabilités légales en matière d'aménagement du territoire. C'est un sujet qui a été abordé d'ailleurs par Mme Beauchamp tout à l'heure. Effectivement, ça crée des hésitations, des oppositions, chacun a sa position, à savoir comment on va procéder. Évidemment, là, on constate qu'il n'y a pas de réponse précise dans le projet de loi. On comprend que ce n'est pas facile, ce n'est pas des solutions évidentes. M. Ruelland le disait tantôt, on apprend, on essaie de trouver des mécanismes d'arrimage, ce n'est pas facile.

n(15 h 20)n

On n'a pas de grande solution à proposer, si ce n'est qu'on a eu l'occasion de voir ce que la Fédération québécoise des municipalités avait proposé en 2003, lorsqu'ils ont analysé le cadre de référence sur la gestion intégrée de l'eau par bassin versant, et on pense que ça mérite d'être examiné peut-être plus attentivement, cette proposition-là. Mais, et ça, j'insiste beaucoup là-dessus, si jamais on décide d'aller vers un modèle, l'important, ça va être surtout de s'assurer que ça se fait de façon concertée avec les acteurs impliqués. Et évidemment, dans ce cas-ci, il faudra mettre à contribution les organismes de bassin versant pour voir comment eux peuvent trouver leur compte dans un modèle comme celui-là.

Ensuite, je suis en page 16. On parle du Bureau des connaissances sur l'eau. Donc, évidemment, nous aussi, on appuie ça. On sait que c'est un premier pas qui a été fait. Il y a eu des annonces cette dernière semaine pour investir des sous pour approfondir les connaissances dans le domaine des eaux souterraines. Ce qu'on dit ici, c'est qu'il faudra aller plus loin ensuite parce qu'il y a beaucoup de connaissances à aller chercher aussi au niveau de la qualité de l'eau des eaux de surface et dans toutes sortes d'autres domaines liés à l'environnement.

Page 18, je suis à l'article 31.74, dans lequel on inscrit une disposition qui fait en sorte d'exclure de certaines dispositions de la loi les prélèvements d'eau qui sont destinés à produire de l'énergie. Alors, là-dessus, nous, ça... Bon, évidemment, on peut comprendre que, dans le contexte particulier du Québec, il y a peut-être lieu de prévoir, dans ce contexte-là, pour la production hydroélectrique, des modalités particulières, mais ça ne veut pas dire qu'il faut complètement l'exclure du projet de loi. Je pense que ce qu'il manque, là, c'est peut-être de dire en contrepartie ça va être dans quelles conditions que ça va se faire. Et, entre autres, dans cet article-là, on parle des ouvrages de dérivation et de retenue eu égard ou non à la production d'hydroélectricité. Alors, à ce moment-là, on n'est pas convaincus de l'utilité, dans ce cas-là particulier, d'avoir des dispositions qui permettraient d'exclure ces ouvrages-là.

Ensuite, je vais à la page 20, l'article... mais en fait c'est dans la continuité de l'article 31.75, où on parle des prélèvements d'eau de 75 000 litres par jour et moins qui ne seraient pas assujettis à une autorisation. Nous, ce qu'on dit, c'est: Oui, mais il faudrait quand même que ces prélèvements-là soient documentés, c'est-à-dire qu'on soit capables d'avoir une mesure, quels sont ces prélèvements-là, où est-ce qu'ils sont, de manière à pouvoir poser un regard éclairé sur les usages qui sont pris dans un même bassin versant, par exemple. Donc, même s'il n'y a pas de certificat d'autorisation, il faudrait qu'il y ait une déclaration de ces prélèvements-là.

Article 31.77, je suis en page 21. Ici, ce que je voulais surtout souligner, c'est que, comme on l'a dit dans les considérations générales, il y a un droit important pour l'information publique. Ça soulève une interrogation ici lorsqu'on parle de la ministre qui peut également prendre en considération les observations que le public lui a communiquées relativement à ce prélèvement d'eau. C'est la seule place où il y a une forme de consultation du public, mais ça apparaît très fragmentaire. Alors, nous, on pense que c'est un manque aussi. Il faut des dispositifs pour pouvoir consulter le public ? évidemment, dans le cas de très gros ouvrages, à ce moment-là, il pourrait y avoir le processus d'évaluation environnementale qui s'applique ? et peut-être trouver un mécanisme pour faire des consultations moins formelles mais quand même qui puissent apporter...

Le Président (M. Bergman): En conclusion, s'il vous plaît.

M. Bourke (Philippe): ...une participation citoyenne dans ces débats-là.

En conclusion, bien, je rappelle en fait les éléments majeurs qui nous... en fait le résumé de notre position par rapport au projet de loi. D'abord, on réitère notre appui au gouvernement du Québec à l'adoption de ce projet de loi là. On veut profiter de cette tribune-là pour demander à ce qu'il y ait une véritable mise à jour du régime de protection de l'environnement québécois et aussi un chantier pour constituer et mettre à jour périodiquement un bilan sur l'état de l'environnement.

En ce qui concerne spécifiquement le projet de loi n° 92, on souligne que le gouvernement doit forcer les gestionnaires des ressources naturelles et du territoire à mettre en oeuvre la gestion intégrée par bassin versant. Il doit clarifier les mécanismes qui permettront la mise en oeuvre des plans directeurs de l'eau. En outre, le RNCREQ considère essentiel de voir à ce que les dispositions de l'Entente sur les ressources en eaux durables du bassin des Grands Lacs s'appliquent à l'ensemble du territoire québécois et que des dispositions soient ajoutées pour garantir le caractère public de toutes les informations relatives à l'eau. Merci.

Le Président (M. Bergman): M. Bourke, M. Ruelland, merci pour votre présentation. Mme la ministre, pour un bloc de 17 minutes.

Mme Beauchamp: Merci beaucoup. Bonjour à vous deux. Grand plaisir de vous recevoir au salon rouge de l'Assemblée nationale. Et, d'entrée de jeu, merci pour ce mémoire, qui est très important à mes yeux et qui, et ce n'est pas pour commenter l'âge de personne, là, mais qui est empreint d'une certaine sagesse, qui, je pense, est sûrement révélateur du fait que le réseau des CRE, des conseils régionaux en environnement, est un réseau de qualité, solide mais qui existe depuis déjà bon nombre d'années, et je suis certaine que votre mémoire témoigne de cela, de la maturité de la concertation qui existe au sein même de votre réseau, d'une certaine maturité de réflexion. Et vous comprenez qu'avec ces commentaires je suis en train de vous dire, là, que globalement on va examiner bien attentivement l'ensemble de vos commentaires.

Mais vous comprenez, forts de votre expertise, de votre enracinement dans chaque région du Québec, que je vais quand même beaucoup concentrer mes questions sur l'aspect de la gouvernance de l'eau, d'autant plus que je vous ai trouvés très modestes durant votre présentation parce que vous avez sauté par-dessus le paragraphe où vous mentionnez que vous êtes les géniteurs de bon nombre de ZIP et de bon nombre d'OBV qu'on retrouve sur le territoire. Je pense que ça vous amène à être très bon commentateurs, là, de la question de la gouvernance de l'eau.

Vous-mêmes, dans votre mémoire, et c'est assez rare, mais vous reprenez des extraits de la commission Beauchamp, où la commission Beauchamp disait: Bien, la mise en place d'une gouvernance basée sur la gestion intégrée par bassin versant, il faut y aller... il ne faut pas y aller de façon... bien, enfin, vous le citez, mais ils disent quelque chose comme: il ne faut pas y aller de façon soudaine et précipitée. Puis il y a même la notion d'apprendre sur le tas qui était carrément inscrite dans la commission Beauchamp.

Maintenant, les organismes de bassin versant, il en existe en ce moment 33. Ce n'est donc même pas tout le territoire du Québec habité qui en est couvert, mais... existent déjà depuis maintenant quelques années. C'est très jeune dans l'histoire du Québec, on le sait, mais quand même... existent déjà depuis un certain nombre d'années, puis on peut sûrement tirer déjà certaines conclusions des expériences vécues dans certaines régions. Vous comprenez donc que ma question est assez large, mais vous mentionnez dans votre mémoire qu'il faut donc accepter que le temps joue en faveur de la meilleure définition possible des instances à mettre en place sur la gouvernance de l'eau, mais vous nous invitez à nous inspirer de commentaires de la FQM en 2003 puis qu'un débat se fasse de façon éclairée et concertée sur ce dossier.

Je voudrais peut-être quand même que vous nous en disiez déjà un peu plus sur pourquoi vous croyez que cette étude est inspirante et peut-être que vous nous fassiez part, à tout le moins, de vos bons conseils sur la question de la gouvernance de l'eau.

Puis je vais terminer en vous disant... Parce que, vous savez, je sais que c'est complexe vraiment, il y a plusieurs acteurs de l'eau, puis, au Québec, on a le Saint-Laurent, et tout ça. Je suis aussi préoccupée un peu par une réaction d'un citoyen, que je vais qualifier de fameux citoyen ordinaire, qui de loin nous voit aller et a l'impression qu'on multiplie des structures. Là, je ne parle pas de la multiplication des OBV, je suis pour qu'il y ait plus d'OBV au Québec, là. Je voulais juste être rassurante. Mais toute la question de l'articulation entre des organismes de bassin versant, ensuite la question du fleuve, parce qu'on a été interpellés très clairement sur la question du fleuve, donc la question de l'articulation avec les ZIP... Il y a même certains qui nous ont appelés à mettre en place une forme de comité national pour le fleuve. Donc, sur cette grande question de la gouvernance, la question donc de l'imputabilité quant à la production et la prise en considération d'un plan directeur de l'eau, je voudrais vous entendre un peu plus.

Le Président (M. Bergman): M. Bourke.

M. Bourke (Philippe): Je vais laisser M. Ruelland...

Le Président (M. Bergman): M. Ruelland.

M. Ruelland (Jacques): Quand on regarde le territoire, on constate qu'il y a deux grandes réalités, c'est que d'abord les territoires hydrographiques et les territoires administratifs ne correspondent pas, hein, et, deuxièmement, qu'il y a des autorités qui ont des pouvoirs juridiques clairs et qui ont été accentués récemment. On a confié la LCM aux MRC, la Loi sur les compétences municipales, la LAU est en révision. Je ne suis pas assez familier avec les dispositions de la révision pour savoir comment ça va se traduire dans les pouvoirs ou les responsabilités qui vont être confiés au monde municipal. Donc, on consolide les pouvoirs municipaux dans le secteur de l'eau et face à ça on a créé des organismes qui sont de concertation, sans statut juridique particulier, qui sont les organismes de bassin, qui ont des responsabilités de concertation. Donc, ce n'est pas une discordance qui est voulue, mais il y a quand même, là, deux difficultés majeures.

n(15 h 30)n

Parallèlement à ça, on voit que le gouvernement a créé les commissions des ressources naturelles du territoire, avec lesquelles on peut faire une certaine analogie, mais là ça relève des CRE. Moi, je siège sur une commission des ressources naturelles. Je peux voir, dans les Laurentides, toutes les disparités d'intérêts et les réalités qui sont très différentes d'un bout à l'autre de la région et d'un secteur à l'autre. Ça demande énormément de concertation pour convenir de certains consensus. Les réalités sont totalement différentes, dans le sud de la région et dans le nord, pour l'ensemble des... que ce soient les mines, les forêts ou le territoire. Mais là il y a un organisme qui chapeaute à l'échelle de la région. Mais en même temps cette région-là ne correspond pas non plus, au niveau des ressources naturelles, à l'entité administrative.

Alors, nous, notre proposition ici, c'est peut-être d'y aller de manière plus ciblée, en fonction des responsabilités, par exemple, de l'industrie forestière dans les unités d'aménagement forestier, Philippe l'a abordé, de leur imposer... ou de les encadrer de manière à ce qu'on exploite la forêt dans une perspective en tenant compte des exigences du bassin versant. Dans le secteur agricole, il y a déjà des initiatives qui ont été prises par le monde agricole, par le MAPAQ et qui sont aidées par le ministère pour circonscrire des problématiques agricoles dans des secteurs agricoles plus particuliers parce qu'on sait que la pollution agricole a un impact majeur sur le réseau hydrique.

Notre proposition, c'est peut-être d'éviter d'avoir un système mur à mur et rigide sur l'ensemble de la province et de tenter, en fonction des réalités régionales ou sous-régionales et des leaders ou des responsables de secteur comme l'industrie forestière, le monde agricole, le monde municipal dans l'eau potable et le traitement des eaux usées, de les responsabiliser et de leur donner des obligations de résultat avec un mécanisme de concertation qui susciterait une certaine cohérence au niveau du bassin hydrographique, parce que le bassin hydrographique, il ne correspond à aucune de ces réalités-là, ni de la forêt, ni de l'agriculture, ni du monde municipal, ni de l'industrie, donc qu'on ait un plan directeur qui rassemble l'ensemble des considérations et des objectifs, comme on le fait dans le plan directeur pour une région... ou pour un bassin versant plutôt et qu'on donne des mandats particuliers à ces gens-là avec une certaine obligation de résultat en fonction de leurs responsabilités. Peut-être que c'est l'approche dans le moment qui est la plus réaliste, parce qu'on est encore à une étape très, très préliminaire de la conscientisation au niveau de la gestion de l'eau puis sa conservation, sa préservation, donc c'est très difficile de mobiliser le milieu et d'en faire une priorité sur le terrain dans l'ensemble du Québec.

Je ne sais pas si Philippe veut rajouter quelque chose à ça.

M. Bourke (Philippe): Oui, bien, moi, je veux rajouter quelque chose, effectivement. Ce qui est la beauté de la structure d'un organisme de bassin versant ? puis, je dirais, ça s'approche de la nôtre aussi, puis c'est ce qui est essentiel, puis c'est ce qu'on veut préserver ? c'est qu'autour de ce noyau-là c'est là qu'on... Parce que c'est plus communautaire, c'est le milieu qui s'exprime, donc il y a un sentiment d'appartenance qui est fort au milieu, il y a un attachement, il y a une volonté d'agir, et c'est ça que... Évidemment, si c'est uniquement, par exemple... Je ne dis pas que c'est blanc ou noir, mais, si ça relève uniquement du municipal, on perd ce point d'appui là qui est nécessaire pour avoir une vision durable, intégrée de la gestion. Alors, il faut ménager cette nécessité d'avoir effectivement l'imputabilité municipale mais tout en préservant la participation citoyenne, l'apport unique et les forces vives du milieu.

Et c'est là qu'on est... Puis effectivement le débat n'est pas facile. Chaque région est un peu différente parce que, dans certains cas où un organisme de bassin versant... Puis ça s'applique à un CRE aussi, où l'organisme est là depuis longtemps puis s'est constitué par lui-même parce que les gens ont dit: Il faut s'organiser pour faire quelque chose, et ce sentiment-là est très, très fort, ça fait des organismes de bassin et... ou inversement des CRE qui sont beaucoup plus organisés, beaucoup plus structurés, beaucoup plus forts, alors que, dans d'autres cas où ça a été plus parce qu'il y a eu des politiques qui ont été mises en place puis qui ont mis en place la structure, bien là c'est plus long. Ça ne veut pas dire que ce n'est pas possible. C'est plus long, alors ça crée des dynamiques totalement différentes. Dans une région, ça va bien aller parce que cette force-là est là, est présente, puis la compréhension des enjeux est là.

Je ne sais pas si ça vous éclaire un peu, mais c'est...

Le Président (M. Bergman): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Oui. Bien, en fait, bien honnêtement, je pense que je suis très, très proche de partager votre opinion sur la chose suivante: moi, je pense que c'est assez évident avec les gestes même financiers qu'on a posés. Moi, honnêtement, de façon évidente, la loi, je pense, ça transparaît de la loi. Je suis une partisane d'organismes de bassin versant. Mais, tout comme vous le mentionnez dans votre texte... Vous dites: Mais il y a des municipalités qui souhaitent, vous dites, qui souhaitent obtenir une responsabilité accrue dans la question de la gestion de l'eau par bassin versant, puis vous dites: Ça doit être un élément pris en considération. Ça reprend un peu les propos que vous venez de tenir.

Mais ensuite M. Ruelland dit: Puis ensuite, bien, peut-être que la solution, c'est de donner du temps au temps et d'avoir cette approche ciblée. Puis vous dites même, dans votre mémoire, une mise en oeuvre graduelle, puis des approches ciblées, puis qu'on accepte d'apprendre dans cette mise en place d'une gestion intégrée par bassin versant à l'échelle du Québec.

Ma question, c'est: Quand je lisais votre mémoire, j'avais l'impression que vous nous demandiez presque ? ce n'est pas écrit mais presque ? comme de suspendre les articles qui concernent la gouvernance de l'eau pour faire un peu un débat autour de la proposition de la FQM et je me demandais si j'interprétais bien ce passage-là. Ou en fait ma question donc plus directement, c'est: Dans le fond, honnêtement, les articles qui sont sur la gouvernance de l'eau à mon avis, je pense, reflètent un peu cet état de situation qu'on décrit en ce moment, où on se dit: Peut-être que le temps va nous donner des réponses plus précises. Il y a donc des définitions sur ce que doit être un organisme qui doit être un organisme de concertation avec différents acteurs, il y a cette obligation de produire un plan directeur de l'eau, puis, on dit, il y a le fait que les autorités qui ont des compétences à exercer doivent prendre en considération...

Est-ce qu'à votre avis, pour le moment, cette question, tout ce thème de la gouvernance de l'eau, est-ce que vous pensez qu'en ce moment ça présente une efficacité suffisante, là, pour qu'on soit capables d'avancer encore pendant un bout de temps, au Québec, sur cette question ou si vous dites: Non, franchement ? parce qu'il y en a qui vont nous demander de plutôt préciser, puis c'est comme si, vous, vous disiez, bien, une approche graduelle puis une approche ciblée ? ou si vous dites: Bien, finalement, honnêtement, ça représente peut-être l'état de situation ou le mieux qu'on puisse faire, puis laissons du temps au temps pour nous donner des réponses plus précises dans le fond sur ces questions?

Le Président (M. Bergman): M. Ruelland.

M. Ruelland (Jacques): Oui, effectivement, c'est important de clarifier. Nous, ce qu'on tente d'éviter... On constate qu'il y a une polarisation, là, entre une approche par bassin versant intégrale à l'ensemble du Québec et le monde municipal qui dit: On a des pouvoirs, on a des responsabilités, on va les exercer à l'échelle du bassin versant et on pense que ni une ni l'autre des solutions n'est satisfaisante dans le moment ou n'est réaliste. Je ne pense pas que le monde municipal, avec son «track record», en particulier depuis un certain nombre d'années, depuis le début, et sa vision très territoriale, là, de ses responsabilités, a la perspective nécessaire pour faire de la gestion par bassin versant. Et en même temps les organismes de bassin versant n'ont pas l'autorité et les moyens de gérer, de manière intégrée, la ressource sur l'ensemble d'un bassin versant. Il y a des bassins versants qui couvrent deux, trois régions administratives en plus de cinq, six MRC, là.

Donc, ce qu'on dit, c'est: Bien, ajustons nos stratégies. On a l'objectif, ajustons nos stratégies en fonction de la réalité du milieu et des pouvoirs ou des responsabilités existants. Je veux dire, la façon que l'exploitation forestière se fait, c'est un vrai scandale pour la protection du réseau hydrique. Donc, conséquemment, il y a des exigences qui devraient être imposées, des obligations à l'industrie forestière qui s'inscrivent dans l'objectif de la loi et de la gestion par bassin versant. Dans le secteur agricole, c'est peut-être encore pire. Et déjà, si on agit efficacement dans des milieux déjà circonscrits, où on connaît déjà les responsables, et qu'on en fait une priorité, et que tout ça, c'est coordonné, à l'échelle d'un bassin versant, par un organisme qui peut être l'OBV, bien peut-être qu'on va obtenir des résultats plus rapides que de tenter de dire: Bien, c'est soit les OBV soit le monde municipal qui gère ça.

n(15 h 40)n

On ne pense pas que ce soit réaliste de mettre l'ensemble de la mise en oeuvre de la gestion intégrée sous un chapeau ou sous l'autre. C'est pour ça qu'on arrive à des solutions peut-être plus nuancées mais sans vouloir, d'aucune façon, retarder les choses, au contraire. Je pense que, dans la forêt, dans l'agriculture, dans la consommation d'eau potable au niveau municipal, et tout ça, dans le gaspillage, il y a des actions urgentes à poser, mais ce n'est pas en vue de retarder les choses, c'est qu'on voit bien les difficultés à la fois administratives, organisationnelles et politiques, là, auxquelles cette mise en oeuvre là va faire face.

Le Président (M. Bergman): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Oui. Je veux juste... Parce que je ne suis pas sûre, honnêtement... Moi, je comprends la dynamique que vous me décrivez. Je veux juste savoir si, aux fins de l'étude des articles de la loi qui concernent la gouvernance... Est-ce que vous nous dites: Écoutez, compte tenu de la difficulté de trancher cette question, c'est vivable tel que c'est défini là, ou si vous nous dites: On vous invite à revoir ces articles-là, le thème de la gouvernance, là, qui décrit que ça prend un organisme de concertation, qu'il doit y avoir la production d'un plan directeur de l'eau qui doit être pris en considération par les autorités qui ont à exercer des compétences?

M. Ruelland (Jacques): On est d'accord avec l'objectif.

Le Président (M. Bergman): S'il vous plaît, une courte réponse, le temps...

M. Ruelland (Jacques): Pardon. On est d'accord avec l'objectif, mais on pense, comme l'a mentionné Philippe, que la stratégie, c'est de tenter de s'assurer de la collaboration de tout le monde dans la mise en oeuvre de tout ça. On est d'accord avec l'objectif et la démarche de gouvernance, mais je pense qu'il ne faut pas privilégier certains acteurs au détriment de ceux qui sont principalement responsables de la dégradation ou de la pollution.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Roy: Merci, M. le Président. Vous avez parlé de mécanismes qui pourraient être instaurés pour analyser les petits projets. Avez-vous simplement un exemple de petit projet quand vous parlez de petits projets dans votre mémoire? Avez-vous une idée d'exemples à me donner?

M. Bourke (Philippe): Je m'excuse, pourriez-vous répéter? J'étais en train de prendre une note.

M. Roy: Non, vous parlez... simplement vous mentionnez des exemples de mécanismes qui pourraient être instaurés pour analyser des petits projets. Donc: «...est toutefois d'avis qu'un mécanisme plus léger mais formel devrait être institué pour [des] projets de prélèvement de plus petites envergures.» Qu'est-ce que vous entendez par cette phrase-là?

Le Président (M. Bergman): M. Bourke.

M. Bourke (Philippe): En fait, on n'a pas fixé de limite, mais je pourrais peut-être faire une analogie en prenant un très, très gros projet puis un petit. Un très gros, ce serait, par exemple, une énorme usine ou un très vaste développement résidentiel qui s'installe dans un secteur et donc qui va demander des besoins en eau importants. Alors, en ce cas-là, on pense qu'il devrait y avoir une évaluation des impacts qui se fait, donc appelons ça la grande mécanique; par contre, lorsque ça concerne un petit projet, un petit développement domiciliaire, dans ce cas-ci, qui ne va pas avoir nécessairement un impact très lourd sur les besoins en eau mais quand même un qui pourrait être significatif, bien, à ce moment-là, prévoir un mécanisme qui soit plus de l'ordre de la négociation ou de la médiation mais qu'au moins il y ait une forme où les gens peuvent s'exprimer sur ce projet-là, même sans qu'on rentre dans toute la démarche structurée, là, d'une commission du BAPE, par exemple, qui serait très exigeante.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Roy: C'était ma question suivante, vous avez devancé. Est-ce que vos compétences sont demandées lors d'audiences du BAPE? Est-ce que vous êtes appelés à commenter des projets? Est-ce qu'on vous demande des références? Est-ce que vous établissez, même comme ici, des mémoires? Qu'est-ce que vous faites lors des audiences du BAPE?

M. Bourke (Philippe): En général, on participe aux audiences du BAPE, mais ce n'est jamais parce que c'est à la demande, c'est parce qu'on en sent le besoin et la nécessité. Parce qu'on a une expertise, on veut la faire partager. Évidemment, lorsque ça concerne des projets dans des territoires ou des régions administratives, ce sont les conseils régionaux de l'environnement eux-mêmes qui interviennent lors des commissions du BAPE. Lorsque c'est des projets plus d'envergure nationale, des commissions génériques, à ce moment-là, c'est le regroupement qui prend la parole au nom de l'ensemble des conseils régionaux de l'environnement pour exprimer, comme on le fait aujourd'hui effectivement, des positions, là, par rapport à la protection de l'environnement dans ces enjeux-là.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Roy: Merci. Excusez mon ignorance. Simplement pour les gens qui nous écoutent, on connaît le ministère du Développement durable, de l'Environnement. Là, c'est un regroupement national des conseils régionaux sur l'environnement. Donc êtes-vous un organisme gouvernemental, indépendant? Vous êtes payés par qui? Donc, c'est quand même important, là, de juste le mentionner pour que les gens comprennent bien.

Le Président (M. Bergman): M. Ruelland.

M. Ruelland (Jacques): On est un organisme indépendant qui obtient une petite subvention du ministère de l'Environnement, une subvention de fonctionnement annuelle et trisannuelle puisqu'on a un protocole d'entente avec le ministère et qu'on est un partenaire privilégié du ministère dans certains dossiers, entre autres dans la promotion du développement durable. Mais on n'a pas d'obligation de résultat autre que de s'engager à faire la promotion du développement durable et de la protection de l'environnement auprès du ministère.

Et je profite de l'occasion pour vous dire que, de tous les organismes sectoriels, nous sommes de loin l'organisation qui bénéficie des fonds gouvernementaux les plus faibles, je dirais même de trois fois inférieurs dans certains cas et quatre fois inférieurs à, par exemple, le secteur du loisir, le secteur du tourisme et même celui de la culture, et, avec les fonds qu'on obtient, on génère, dans certains cas, de cinq à 10 fois... on génère des effets multiplicateurs de cinq à 10 fois, en termes de budget annuel dans nos régions, du montant de la subvention que nous obtenons, qui est environ 100 000 $ par année.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Roy: Merci, M. le Président. Vous avez parlé aussi de donner accès aux plans d'eau. On en a parlé avec les gens de bassins versants avant vous, et le questionnement est le même. On a des intérêts, et vous l'avez mentionné, on a des intérêts municipaux qui sont bien sûr pécuniaires pour eux. Ils voient de bons comptes de taxes, de belles grosses maisons, ils voient l'intérêt d'avoir ces gens-là aux abords d'un cours d'eau. Tantôt, on a apporté le point qu'il n'y a plus d'accès pour les gens qui... C'est un lac, un beau lac qui était dans une région. La municipalité a dit: Bien, on va le développer. Mais en même temps ils viennent nous voir puis ils nous demandent des subventions pour entretenir les chemins alentour de ces lacs-là parce que les riverains qui paient des taxes trouvent que c'est mal entretenu. Donc, quand on parle d'appropriation d'eau, même les municipalités se sont approprié ces lacs-là pour en tirer profit et sans tenir compte de grandes normes environnementales.

Donc, on va se situer comment avec eux, maintenant? Qu'est-ce qu'on va devoir faire?

Le Président (M. Bergman): M. Ruelland.

M. Ruelland (Jacques): C'est un problème social important puis qu'on a soulevé en 2006, lors de l'organisation... On a organisé le premier Forum national sur les lacs en 2006, et on vient de tenir le deuxième en 2008, et, dans les deux cas, on a abordé cette thématique-là, qui est celle de l'accessibilité physique et financière aux plans d'eau. C'est un problème important, et une des solutions qu'on préconise, d'abord dans le secteur municipal et aussi sur les terres publiques, c'est d'obliger les autorités, qu'elles soient gouvernementales ou municipales, à réserver des secteurs sur les plans d'eau qui soient d'accès public pour tout développement domiciliaire ou tout développement de villégiature. Ça, c'est une des recommandations qu'on a faites déjà depuis plusieurs années et qui commencent à s'instaurer. Entre autres, on travaille avec le MRNF, secteur territoire, qui fait du développement sur les terres publiques pour développer des modèles d'accessibilité au public, à la fois pour pouvoir s'installer mais aussi pour pouvoir bénéficier des plans d'eau.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Roy: Je le vis constamment, les Québécois pensent ? je devrais dire: Pensent-ils à tort? ? que tout leur appartient. C'est-à-dire que bien sûr on a un territoire, on a des plans d'eau, on a des rivières. Est-ce que tous les Québécois devraient avoir accès à ces plans d'eau là ? et là on va revenir avec un grand mot ? gratuitement ou si on se doit, par peur de la détérioration du territoire, de réglementer, vraiment de façon très précise, l'accessibilité à ces territoires-là?

Le Président (M. Bergman): M. Ruelland.

M. Ruelland (Jacques): On pose plusieurs gestes là-dessus depuis un certain nombre d'années, on fait comme les gens du ROBVQ l'on mentionné. Il faut aborder la gestion des plans d'eau, et en particulier des lacs, dans une perspective de bassin versant puisque c'est l'ensemble des impacts sur le bassin qui se répercutent sur le lac. Avec l'épisode, le phénomène des cyanobactéries, il y a plusieurs MRC et plusieurs municipalités qui ont pris une série de mesures pour réduire la dégradation du milieu physique autour des plans d'eau, soit par la protection de la bande riveraine, le contrôle. Le gouvernement a mis 15 millions, là... 150 millions sur 10 ans dans la lutte aux cyanobactéries, récemment. Il y a toutes sortes de programmes, comme la gestion des fossés, où il se fait énormément d'érosion par la sédimentation, donc il y a toutes sortes de programmes dans diverses régions du Québec qui visent à revoir la façon qu'on gère les fossés. Donc, il y a toute une série de mesures qui visent à sensibiliser à la fois les décideurs et les usagers à la valeur de l'eau et à la nécessité de la protéger.

n(15 h 50)n

Mais, comme vous le savez très bien, on part de loin. Ça a pris un certain nombre de phénomènes de dégradation pour sensibiliser les gens. C'est loin d'être complété, mais je pense que maintenant on est sur la bonne voie parce que, là, il y a une sensibilisation nouvelle à l'importance de l'eau, à sa qualité et à sa quantité, et il y a toute une série de démarches à la fois gouvernementales, et municipales, et communautaires qui se font pour s'attaquer à la question, que ce soient des problèmes physiques ou des problèmes sociaux reliés à la question de l'eau. On commence, là. Au moins, je pense qu'on est sur la bonne voie.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Roy: Merci. Je veux être sûr d'être bien, bien, bien compris et que personne ne pense que je pends une épée de Damoclès sur la tête de qui que ce soit, mais, dans la notion d'utilisateur-payeur, où on a parlé, hier, de faits, d'actes, là, à ce moment-là, on peut faire deux choses: on peut parler de l'an 1, jour 1, effacer tout ce qui est passé avant, dire: On ne sera pas responsables, je ne me sens pas responsable de la dégradation du lac. J'ai, pour une municipalité, accepté d'avoir un grand nombre de chalets, accepté d'avoir un grand nombre de bateaux, accepté, aujourd'hui, de... Collectivement, on paie pour la dépollution de ces lacs-là, on paie pour la protection des berges, on paie collectivement toujours, mais on parle ici de la notion pollueur-payeur. On l'a fait. Et, vous l'avez dit, on vient de loin. À l'époque où on a commencé les grands barrages, le mot «environnement» n'existait même pas, et donc ça ne fait pas terriblement longtemps, puis, vous l'avez mentionné, on est aux premiers balbutiements.

Donc, qu'est-ce qu'on va faire avec la dégradation de ce qui est fait actuellement? Parce que, là, on n'a plus de raison de dire qu'on est au jour 2. On est au jour 1, on sait ce qui se passe, et, demain, qu'un nouveau lac s'installe et qu'une municipalité laisse s'installer des chalets avec des bateaux à moteur pour détruire l'ensemble du milieu hydrique, là, il y a une responsabilité. Qu'est-ce qu'on va faire dans ce cas-là? C'est autant une pollution que n'importe quelle autre.

Le Président (M. Bergman): M. Ruelland.

M. Ruelland (Jacques): Je pense que, quand vous regardez toute la facette des problématiques reliées à l'eau, c'est peut-être dans le secteur des lacs où c'est le plus encourageant. D'abord, les lacs sont des milieux relativement circonscrits, qui sont occupés par des gens qui ont des sentiments d'appartenance. C'est peut-être dans ce milieu-là où la mobilisation est la plus forte puis où on commence même... Dans certaines municipalités, on forme des comités de bassin versant de lacs à l'intérieur d'une municipalité. À mon avis, les choses vont beaucoup mieux à cause des cyanos en grande partie. Les actions sont beaucoup plus structurées, beaucoup plus coordonnées dans le secteur des lacs, et l'espoir est beaucoup plus grand d'arriver à des solutions relativement rapides que dans le secteur agricole puis dans le secteur forestier ou dans le secteur municipal et industriel. Les problèmes semblent plus spectaculaires dans le secteur des lacs à cause des cyanos, mais ça semble être relativement plus facile, sur le plan technique, de s'attaquer à ces problématiques-là, à la fois avec la population et sur le terrain, que dans des grandes problématiques comme l'agriculture, la forêt ou la gestion municipale de l'eau. Moi, je suis très encouragé par ce qui se fait dans le secteur des lacs, là.

Mais c'est sûr qu'il y a des mentalités. Il y a encore du monde qui disent: Ah! bien, je suis chez moi, je vais faire ce que je veux. Mais il commence à y avoir une pression sociale très grande des occupants des plans d'eau pour mobiliser tout le monde vers la restauration de leurs plans d'eau quand c'est dégradé ou les protéger quand ce n'est pas dégradé. Mais, comme vous l'avez mentionné, il y a encore une mentalité de club privé, que les gens qui sont autour des lacs voient le milieu comme leur milieu privé, et ça, c'est une question d'attitude sociale qu'il faut changer graduellement.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Roy: Merci. Donc, si je reviens à ma notion d'utilisateur-payeur, pollueur-payeur, si, demain matin, on tombe avec ce problème-là... Tant mieux si vous dites que les lacs vont bien. Je suis content de l'apprendre. Je suis même surpris.

M. Ruelland (Jacques): Je ne dis pas que les lacs vont bien; je dis que de façon générale les lacs sont en bonne santé, selon les spécialistes, en général et que la mobilisation vers la restauration du milieu est peut-être la plus efficace et la plus rapide dans ce milieu-là comparativement au secteur agricole, ou au secteur forestier, ou au secteur municipal. Donc, moi, je trouve ça encourageant parce que le gouvernement a mis beaucoup d'argent dans ce domaine-là. Et, en termes de pollueur-payeur, ce n'est pas la collectivité qui paie la restauration autour des lacs, à part des fonds provinciaux qui sont mis dans ça, ce sont les riverains eux-mêmes, c'est la municipalité qui investit, c'est la CRE de la région, c'est les organismes de bassin versant ou c'est nous, mais ce n'est pas... C'est des investissements qui sont circonscrits aux milieux dans lesquels on retrouve des lacs, là.

M. Roy: Merci.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Vachon.

M. Bouchard: Oui. Merci, M. le Président, M. Bourke, M. Ruelland. M. Ruelland, je ne veux pas vous mettre à la torture plus longtemps, mais je reviens à la page 15 de votre mémoire puis je dois avouer que je n'ai pas tout à fait bien compris quelle est votre position à l'égard de la gouvernance, à qui devrait être attribuée la gouvernance des bassins versants. Dans votre mémoire, vous dites... bien vous déplorez que ce ne soit pas suffisamment clair dans l'énoncé de la loi tel qu'on le voit maintenant. Par ailleurs, vous référez à une étude de la Fédération québécoise des municipalités qui a été... une proposition qui a été formulée en 2003. Nous sommes en 2008. C'est comme si, depuis ce temps-là, il n'y avait eu rien qui se soit passé sur le territoire qui puisse nous indiquer vers quelle direction aller.

Je sais que c'est difficile, là, de répondre à la question que je vais vous poser, mais je vais vous demander, de telle sorte à ce qu'on puisse sortir d'ici avec une idée la plus claire possible de quelle est votre position: À supposer qu'on vous n'ayez pas le droit au gris et que vous ayez...

Une voix: ...

M. Bouchard: ...au gris et que vous ayez à décider entre le blanc et le noir, puis vous choisissez qui est le noir et qui est le blanc, où est-ce que vous mettez vos oeufs? Autrement dit, est-ce que vous pensez qu'à l'heure où on se parle les organismes de bassin versant devraient être constitués d'un membership multisectoriel, y incluant les municipalités, ou est-ce que vous pensez qu'on devrait le confier à des élus, y compris les municipalités? Quelle est votre position?

Le Président (M. Bergman): M. Ruelland.

M. Ruelland (Jacques): Je pensais avoir répondu à ça. Ça me semble... Si vous voulez que je sois blanc ou noir, je vais vous dire que, moi, je privilégierais le monde municipal puisque ce sont eux qui détiennent l'autorité sur le territoire soit de la MRC ou de la municipalité et qu'ils ont des responsabilités juridiques claires en termes d'aménagement du territoire. Mais ce n'est pas réaliste de faire de la gestion par bassin versant à l'échelle de la municipalité ou de la MRC, les bassins hydrographiques ne correspondent pas. Donc, je suis obligé de vous donner une réponse grise, comme vous dites, puisque, nous, on considère... Et ce n'était peut-être pas clair tout à l'heure, mais on considère qu'il doit y avoir un plan directeur qui peut être et doit être coordonné par un organisme de bassin et dans lequel il y a un certain nombre d'acteurs de l'eau, dans le jargon qu'on utilise, qui ont des responsabilités spécifiques qu'ils doivent rencontrer: on a mentionné l'industrie agricole, l'industrie forestière, le monde municipal.

Dans le bassin de la rivière du Lièvre, il y a énormément de coupes forestières qui sont en territoire public. Ça ne relève ni d'une MRC, ni d'une municipalité, puis ni d'un organisme de bassin versant sur l'ensemble du territoire, mais la dégradation du milieu est générée par une industrie qui est celle de l'industrie forestière. Dans le secteur agricole, on sait comment ça fonctionne, ce n'est pas un organisme de bassin qui va mettre l'UPA au pas pour faire de la gestion par bassin versant. Donc, s'il n'y a pas des responsabilités spécifiques dédiées à l'atteinte de certains résultats pour l'industrie agricole, pour l'industrie forestière dans le cadre d'un plan directeur qui correspond au bassin hydrographique, on n'aura pas de résultat puis on va avoir juste de la chicane si on donne le mandat au municipal. Parce que, le municipal, on vient de leur donner la responsabilité de la LCM, là. Qu'est-ce qu'ils vont faire? Est-ce qu'ils vont déléguer leurs responsabilités à l'organisme de bassin? Ils n'accepteront jamais de faire ça.

Donc, moi, je pense que ça prend un plan directeur dans lequel les responsabilités respectives de chacun sont assumées et coordonnées de manière à ce que l'ensemble des actions cumulatives va correspondre aux objectifs qui sont inscrits dans le plan directeur.

M. Bouchard: O.K. Dans votre...

Le Président (M. Bergman): M. le député de Vachon.

M. Bouchard: Excusez-moi, M. le Président. Coordonnées par qui?

M. Ruelland (Jacques): Bien, par l'organisme qui est responsable du plan directeur, qui, dans la proposition, est l'organisme de bassin.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Vachon.

M. Bouchard: Bon. Alors, écoutez, votre préférence irait vers les municipalités, mais vous constatez qu'elles ne sont pas capables de faire le travail. Mais par ailleurs vous dites...

M. Ruelland (Jacques): Non, ce n'est pas ma préférence. Je m'excuse, ce n'est pas ma préférence.

M. Bouchard: C'est ce que j'avais entendu.

n(16 heures)n

M. Ruelland (Jacques): Ce n'est pas ma préférence. Ce sont les lois qui donnent aux municipalités et aux MRC des pouvoirs d'aménagement du territoire et de gestion du territoire spécifiques, dont l'eau. L'eau est une responsabilité majeure du monde municipal. Alors, quand vous me dites: Bien, ça va prendre un organisme de bassin, oui, je veux bien, mais il va falloir que le monde municipal accepte de s'inscrire et de fonctionner dans le cadre d'un plan directeur qui pourrait être coordonné à l'échelle du bassin par un organisme comme un organisme de bassin qui n'a pas de pouvoir juridique.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Vachon.

M. Bouchard: Dernière petite question là-dessus: Et, si le projet de loi prévoyait que des municipalités sont assujetties à la prise en considération d'un plan directeur qui serait coordonné par des organismes de bassin versant, qui lui-même est imputable au gouvernement, comme le groupe précédent le proposait, est-ce que vous verriez là une avenue de solution intéressante?

Le Président (M. Bergman): M. Ruelland.

M. Ruelland (Jacques): Bien, je pense qu'on l'a mentionné à deux reprises, on pense que les agents économiques devraient être responsabilisés et forcés d'atteindre les objectifs du plan directeur dans leur secteur d'activité respectif. L'industrie forestière, l'industrie agricole, les producteurs industriels, et tout ça, devraient avoir l'obligation de se comporter de telle façon que c'est en accord avec les objectifs du plan directeur et les exigences du plan directeur. Mais encore une fois je ne pense pas qu'on peut forcer soit le monde municipal ou... accorder des pouvoirs uniques ou exclusifs au monde municipal ou aux organismes de bassin et espérer qu'on va avoir des résultats, parce que, là, on va polariser les choses. Je pense qu'il faut s'assurer que ces gens-là travaillent ensemble puis que le monde municipal, les agriculteurs, les forestiers, tous ces gens-là inscrivent leurs activités et leurs normes de fonctionnement dans le cadre d'un plan directeur qui correspond aux bassins versants.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Roberval.

M. Trottier: Oui. Bonjour, M. le Président. M. Ruelland, je suis très heureux de voir que les CRE existent encore. J'ai été un des premiers présidents de la CRE du Saguenay?Lac-Saint-Jean. Je constate que ce n'est pas encore facile.

M. Ruelland (Jacques): Les CRE. Les CRE.

M. Trottier: Mais à l'époque, nous autres, on utilisait... Il n'y avait pas de problème, il y avait juste le Conseil régional de l'environnement.

M. Ruelland (Jacques): Mais c'est un des premiers, d'ailleurs.

M. Trottier: C'est ça. En tout cas, c'est malheureux qu'il y ait encore des problèmes de financement. Il y en avait à l'époque, là, mais, semble-t-il, ça continue. J'espère que ça va se régler. Si on peut vous aider dans ce sens-là...

Votre mémoire est très intéressant à plusieurs points de vue parce qu'il apporte un éclairage qui à mon avis va nous aider, mais j'aurais besoin davantage d'explications sur certains aspects, entre autres au niveau de... Vous dites qu'il faudrait que les dispositions de l'entente sur les bassins des Grands Lacs et du Saint-Laurent s'appliquent à l'ensemble du Québec. Est-ce que vous pourriez me donner certaines règles plus précises que vous pensez qu'il serait très important qui soient appliquées? Puis également aussi comment vous voyez que ça pourrait s'appliquer?

Le Président (M. Bergman): M. Ruelland.

Une voix: C'est M. Bourke qui va répondre.

Le Président (M. Bergman): M. Bourke.

M. Bourke (Philippe): Bien, en fait, lorsqu'on regarde le projet de loi, dans les articles, disons, à partir de 31.91 et suivants, là, lorsqu'on parle justement de la... ? bon, en fait, c'est 31.89 et suivants ? on spécifie... Évidemment, on applique l'entente, qui dit grosso modo: On ne peut pas faire de prélèvement d'eau. Et ensuite on dit: Bien, si jamais il y en a, voici, il y a des conditions. Nous, on considère que ces conditions-là sont très rigoureuses, qui amènent des bonnes balises de protection, et on dit: Donc, si on décide malgré tout, pour toutes sortes de raisons, de faire des prélèvements et que ça respecte les conditions, bien voici, il faudra d'abord démontrer telle, telle chose, éviter que ça provoque des problèmes au niveau des conflits d'usage, il faudra éviter... d'abord démontrer qu'on n'a pas d'autre solution que de faire ce prélèvement-là, démontrer qu'on a fait des mesures d'économie et de conservation. Alors, c'est tout des choses très exigeantes qui vont s'appliquer uniquement sur une partie du territoire du Québec. Alors, dans l'autre partie du territoire, ce sera moins contraignant que de faire ce type de prélèvement là. Donc, c'est ce qu'on dit. Mais, on se dit, si c'est bon pour une partie du Québec, ça devrait être bon pour tout le reste, ces mesures de protection là devraient s'appliquer partout.

Le Président (M. Bergman): M. le député de...

M. Trottier: Dans le fond, ce que, vous, vous nous dites, c'est: On a un bon modèle, appliquons-le sur l'ensemble du territoire.

M. Bourke (Philippe): Voilà.

M. Trottier: Sur la question des redevances...

Le Président (M. Bergman): M. le député de Roberval.

M. Trottier: Sur la question des redevances, comment vous voyez ça? Bon, tout à l'heure, je pense que vous étiez présent lorsque les gens des organismes des bassins versants disaient: Il devrait y avoir différents types de redevances. C'est quoi, votre position, vous, par rapport à ça?

M. Bourke (Philippe): Je ne sais pas si tu veux t'avancer. Moi, personnellement, on n'a pas abordé du tout cette question de redevances, elle n'est pas spécifiquement inscrite au projet de loi. On sait qu'on est en train de mettre la table pour pouvoir permettre, un jour, de les mettre. Il y a tout un débat sur... La question de l'utilisation des instruments économiques en protection de l'environnement, dans certaines juridictions en Europe, entre autres, c'est très avancé, on travaille souvent avec ces choses-là, les taxes, les redevances, les droits.

Nous, ça commence ici, au Québec, puis on met ça un peu... On en a mis une sur les matières résiduelles, là, pour l'enfouissement. On dit aux producteurs de matières: Vous allez payer pour la collecte sélective. On commence à mettre les pneus, etc. Là, on en a une sur l'eau. Bien, il faut comprendre qu'une redevance ou une taxe, oui, ça a des différents usages, c'est là pour prélever de l'argent, mais c'est aussi pour envoyer un signal de dire: Bien, faites attention, cette chose-là a une valeur. Et donc, à ce moment-là, tout l'éventail de modulations est possible. Est-ce qu'on pénalise plus un type d'usage qu'un autre? Est-ce qu'on va taxer davantage une dégradation plus grande d'un côté ou de l'autre? Effectivement, c'est un débat en soi, puis il va falloir que...

Je pense que les gens de ROBVQ avant l'ont dit, ce sujet-là, ça va être tout un... C'est un chantier en soi, il va falloir regarder attentivement l'application de ça. Il y a énormément de résistance, déjà. Là, il y a des gens qui vont passer ici, puis ils l'ont déjà fait, et qui... Tout le monde veut être exclu, etc. Donc, ça va être un débat en soi.

Donc, c'est quoi, la finalité qu'on recherche? C'est-u un moyen de financement ou c'est un moyen de donner une valeur et de dire: Bien, faisons-en un bon usage? Puis comment on arrive à atteindre les objectifs qu'on se fixe par rapport à ça? Quelle est la valeur de la redevance qui va faire que l'objectif va être atteint? Ça, c'est tout des questions à débattre.

M. Trottier: Mais, dans ce sens-là, justement, vous dites, là...

Le Président (M. Bergman): M. le député de Roberval.

M. Trottier: Oui, M. le Président. À la page 19, vous mentionnez, sur la question des redevances, là, qu'«il faudra [...] éviter de nuire indûment à certaines activités réputées pour leur grande consommation d'eau mais [qu'on] voudrait par ailleurs favoriser». Est-ce que vous auriez des exemples justement de... je veux dire, peut-être d'allumer une lumière rouge en disant: Écoutez, ça, peut-être que ces secteurs-là sont peut-être consommateurs mais très importants pour le Québec, pour différentes raisons?

M. Bourke (Philippe): Oui. Les producteurs maraîchers, on sait que c'est des très, très grands producteurs. En même temps, on est en train... on se donne une politique en matière agricole, on dit: On veut favoriser l'achat local, on veut que les gens mangent des légumes, on veut que ça vienne de proximité, on veut encourager le développement local. On n'est pas pour faire en sorte qu'une loi de protection de l'environnement vienne nuire à tout ça en se disant: Bien, écoutez, ça prend tellement d'eau, cette industrie-là, on va acheter nos légumes au Brésil puis en Chine parce qu'on veut protéger notre eau. Ça ne veut pas dire par contre... Quand on dit de faire attention, ça veut dire que, bon, bien, il faudra qu'il y ait des conditions pour ces gens-là: s'assurer qu'il n'y a pas de conflit d'usage, qu'ils font aussi quand même des mesures de conservation, qu'ils s'assurent que ce soit efficace, qu'il n'y ait pas de gaspillage, mais juste d'éviter de nuire à cette industrie-là, qui par ailleurs... Effectivement, elle est souhaitable, ça fait partie de l'économie des régions que cette production maraîchère là existe. Donc, c'en est un, exemple comme ça.

Le Président (M. Bergman): Malheureusement, le temps s'est écoulé. M. Bourke, M. Ruelland, merci pour votre présentation. Je demande les gens de Nature Québec pour prendre place à la table.

Je suspends pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 16 h 8)

 

(Reprise à 16 h 12)

Le Président (M. Bergman): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, je souhaite la bienvenue à Nature Québec, représenté par M. Drolet, M. Simard et M. Hudon. Bienvenue. Vous avez 15 minutes pour faire votre présentation, suivies d'un échange avec les membres de la commission pour 45 minutes. S'il vous plaît, vous identifier, et le micro est à vous pour faire votre présentation dans les prochaines 15 minutes.

Nature Québec

M. Simard (Christian): Oui. Bonjour. J'aimerais présenter les personnes à mes côtés: Charles-Antoine Drolet, qui est biologiste et qui est vice-président de Nature Québec; à ma droite, M. Marc Hudon, qui est directeur du programme Grands Lacs?Saint-Laurent, Nature Québec; et moi-même, Christian Simard, directeur général de Nature Québec.

Le Président (M. Bergman): Bienvenue.

M. Simard (Christian): Merci. Merci, Mme la ministre, merci, les membres de la commission, de bien vouloir nous recevoir pour l'étude de cet important projet de loi, un projet de loi que Nature Québec qualifie d'une loi importante mais qui comporte des lacunes importantes qu'on pourrait corriger, je pense, avec le travail conjoint du gouvernement et des membres de la commission.

Je fais simplement un survol rapide des principales composantes du projet de loi et de notre mémoire. C'est un projet de loi qui est nécessaire, le projet de loi qui est présenté, nécessaire parce qu'il encadre la Politique nationale sur l'eau enfin, qu'il intègre... C'est un projet un peu omnibus qui intègre une importante entente sur la ressource en eau dans le bassin des Grands Lacs et du Saint-Laurent, donc c'est un projet un peu omnibus parce qu'il prévoit un système d'indemnité en cas de dommage à l'eau ? il intègre les principes de pollueur-payeur, les principes aussi d'utilisateur-payeur ? mais qui comporte aussi, comme on le disait, des lacunes importantes. Par exemple, on parle de redevances à un seul endroit dans le projet de loi, dans les considérants, mais, dans les articles d'application, on ne les voit pas, et c'est quelque chose pour nous d'extrêmement important, qu'on doit mettre en place dans les meilleurs délais, un système de redevances sur l'eau, pour assurer la protection de la ressource.

On ne comprend pas qu'il soit possible, au Québec, encore de puiser, d'embouteiller, de commercialiser et même d'exporter l'eau dans les contenants de moins de 20 litres sans que la collectivité québécoise n'en reçoive un seul cent, comme c'est le cas actuellement, pour la gestion de l'eau mais aussi pour le développement de notre société. Donc, on se demande aussi pourquoi les barrages sont exclus d'une loi sur l'eau. C'est important, c'est une importante activité, là. N'importe quel Québécois, on ne pourra pas leur dire que ce n'est pas significatif quand on retient des quantités importantes d'eau pour produire de l'électricité ou pour des ouvrages de dérivation de retenue d'eau. C'est majeur et ce n'est pas dans la loi sur les ressources en eau. Il n'y a pas besoin d'assujettir à des certificats d'autorisation. La loi prévoit des autorisations pour le prélèvement de l'eau, c'est un vide dramatique qui vient être comblé, donc un système d'autorisation de prélèvement qui est assez bien défini par la loi.

Malheureusement, on traite un peu tous les usages sur le même pied. Si on exclut peut-être l'usage de l'eau potable, tous les autres usages... Donc, l'usage de l'eau potable, oui, est priorisé, mais tous les autres usages sont mis sur le même pied, doivent faire l'objet d'une conciliation, à l'intérieur des plans directeurs de l'eau, avec les différents acteurs, avec les différents acteurs des agences de bassin et des organismes de gouvernance prévus. Et ça peut arriver, à ce moment-là... c'est très, très difficile d'arriver avec une position cohérente sur l'eau. On suggère, dans le mémoire, une priorisation de ces usages-là. Quand il y a moins d'eau, on protège la ressource, la nappe; s'il y en a un peu plus, on fournit le besoin des familles; s'il y en a plus, la fonction agricole devrait être priorisée parce que c'est la nourriture des gens, c'est ce qu'on a besoin pour vivre; et ensuite, après, les activités de type industriel, touristique ou commercial, à ce moment-là, peuvent être utilisées. Et, lorsqu'il y a rareté d'eau, eh bien, on applique cette grille.

Les lacunes à corriger. Il n'y a pas de consultation lors du renouvellement des certificats d'autorisation ou même de l'émission. Ce serait important de prévoir un processus de transparence et d'avis public avec possibilité, pour le citoyen, de commenter. Les activités de dragage qui peuvent être très, très importantes dans le Saint-Laurent, soit pour l'entretien du chenal ou soit même... dans certains cas, il y en a qui pensent à surcreuser le chenal, c'est des activités qui ont un impact direct sur la qualité de l'eau. Et, dans les lacunes à corriger aussi, Nature Québec pense qu'il serait bon de prévoir que les indemnités prévues dans le Fonds vert, qui sont versées dans le Fonds vert, reviennent à des projets sur l'eau. Donc, dans le Fonds vert, on pourrait avoir un volet eau pour s'assurer que les indemnités ou les redevances sur l'eau reviennent à l'eau, sur l'air, reviennent à l'air, etc.

Donc, aussi on trouve qu'en général, dans le projet de loi, les délais sont un peu trop grands, qu'ils pourraient être ramenés à une durée plus raisonnable. Par exemple, quand on parle de 10 ans, oui, mais de 10 ans maximum. Le projet de loi prévoit qu'il est possible, pour la ministre, d'aller au-delà, ou, pour le titulaire ? je ne veux pas personnaliser ? pour le titulaire du ministère, d'aller au-delà du 10 ans sans justification, alors que, pour le ramener en bas de 10 ans, il faut que la ministre se justifie, et ça ne nous apparaît pas normal.

Donc, pour nous, projet important, mais on a passé à côté... depuis la Politique sur l'eau, qui prévoyait qu'en 2002... qui prévoyait que, dès 2003, la Politique nationale de l'eau, il y aurait un système de redevances mis en place. Ce n'est pas facile, mais je pense que c'est possible de le faire. Particulièrement, je pense qu'on peut commencer par les questions, là, d'eau embouteillée et je pense qu'on peut monter un système comme ça. Mais, dans certains cas, c'est vraiment criant.

Maintenant, j'inviterais M. Marc Hudon à nous présenter un peu la deuxième partie du projet de loi, une partie importante, qui est la mise en oeuvre du projet de loi sur le... C'est la mise en oeuvre d'une entente sur les Grands Lacs et le Saint-Laurent. M. Hudon.

Le Président (M. Bergman): M. Hudon.

n(16 h 20)n

M. Hudon (Marc): Alors, bonjour. Quand j'ai su qu'il y avait cette période de consultation parlementaire là, je me suis senti privilégié puis interpellé de venir parler, à tout le moins brièvement, en tant que... d'avoir été un témoin actif lors de la durée du travail qui s'est fait pour les négociations de cette entente-là, donc à partir d'environ 2001 aller jusqu'en 2005, au mois de décembre, quand Québec a signé ça, et vous mentionner, par le fait même, à quel point, quand on a côtoyé tous les acteurs autour du bassin des Grands Lacs, des grandes villes, des grandes industries, etc., à quel point on peut sentir comment le Québec est fragile. Et sa position géographique à l'intérieur du bassin le place en situation extrêmement précaire et dépendante de la meilleure gestion possible des eaux qui va se faire en amont de chez nous.

Et, dans le cadre de ce projet de loi là, eh bien, c'est finalement un aboutissement où je suis certain qu'il y a plusieurs yeux, à l'intérieur du bassin des Grands Lacs, qui sont rivés sur le Québec pour savoir si finalement nous allons aller de l'avant pour le mettre à l'intérieur de nos cadres de loi pour justement avoir un droit de regard sur ce qui se fait en amont de chez nous. En même temps, c'est 50-50, les gens de l'amont vont avoir un regard chez nous. Mais on a beaucoup plus à gagner à pouvoir les influencer puis à pouvoir les guider un peu dans la façon dont ils vont faire les prélèvements dans les années futures pour protéger nos propres besoins ici, chez nous. Donc, je tiens à féliciter le gouvernement d'en être rendu à ce point-là.

Au niveau des recommandations comme telles, nous, ce que nous souhaitons, c'est: que les articles de la loi ? 31.101 ? concernant la gestion et la conservation de l'eau soient applicables sur l'ensemble du territoire du Québec, en particulier ceux-là qui vont faire beaucoup de sens pour la protection des ressources; que le gouvernement du Québec rende publique, dans les meilleurs délais, chaque déclaration que le conseil régional effectuera sur la conformité des demandes d'autorisation de prélèvement d'eau à l'intérieur du bassin; que le gouvernement du Québec s'assure qu'il y a un mécanisme de reddition de comptes pour des promoteurs qui n'auraient pas réalisé les études nécessaires sur les impacts cumulatifs de leurs projets.

Ça a été tout un accomplissement d'abord de voir le nom «Saint-Laurent» inscrit dans cette entente-là mais aussi de voir la reconnaissance, que tout le monde a finalement reconnue, puis ça, ça a été grâce au travail du Québec, que les impacts cumulatifs soient inscrits dans cette entente-là, et ça, pour nous c'est extrêmement important. Chaque petit projet individuel qui va avoir lieu au coeur du bassin, bien il va devoir être mis en compte. La somme de l'ensemble de ces projets-là, à tous les cinq ans, va être examinée pour voir s'il n'y a pas un impact cumulatif, et pour nous c'était extrêmement important.

Finalement: que le gouvernement du Québec reconnaisse le rôle et l'importance... ici, ça s'appelle les comités ZIP, dans la mise en oeuvre de la gestion intégrée du Saint-Laurent. Donc, la gestion par bassin versant, elle est bien en place au Québec. Je pense qu'elle se déroule très bien. Maintenant, il s'agit, pour la gestion intégrée du Saint-Laurent, que les roues se mettent en branle dans les meilleurs délais pour justement s'arrimer avec ce qui va se faire en amont, et puis pour cela, bien, les acteurs qui sont impliqués au niveau des comités ZIP ou autres organisations attendent que ça, ce soit réalisé. Merci.

M. Simard (Christian): Merci. Je pense qu'il est important aussi... je pense qu'il est important qu'on ait une culture des Grands Lacs. C'est-à-dire qu'on est en fin d'un grand, grand système et qu'on se préoccupe beaucoup, beaucoup de ce qui se fait avant parce que ça a directement rapport avec la qualité de l'eau du Saint-Laurent, avec la qualité des écosystèmes. Il faut vraiment développer, là, une proactivité, tous les acteurs sociaux, et industriels, et autres, sur ce qui se passe avant que l'eau arrive dans le Saint-Laurent, et on a vraiment développé cette culture-là, culture de bassin. Souvent, Marc se sentait bien seul dans les grandes instances au niveau des Grands Lacs.

Maintenant, on va faire la lecture des recommandations rapidement avec M. Charles-Antoine Drolet et moi-même. Donc, Nature Québec recommande ? c'est en fin de mémoire: redevances et indemnités. Que le gouvernement mette en place rapidement un régime de redevances significatives pour l'utilisation ? prélèvement et rejet ? des ressources en eau du Québec; que le versement des indemnités dans le Fonds vert, indemnités versées à la suite d'actions en réparation de dommages, soit réservé pour des projets réalisés pour la conservation et la restauration des milieux aquatiques.

Que le projet de loi n° 92 établisse une priorisation ou une hiérarchisation des usages pour guider les décisions du ministre et des instances chargées des plans directeurs de l'eau; que le gouvernement se donne le pouvoir réglementaire pour assurer le maintien de la ressource; qu'il limite les ponctions commerciales dans les eaux souterraines à un certain niveau, niveau en deçà duquel il ne saurait y avoir d'exploitation pour garantir la recharge des nappes et le maintien des usages prioritaires. Donc, il se donne le pouvoir réglementaire de limiter les ponctions dans l'eau.

M. Drolet (Charles-Antoine): Concernant les barrages, ouvrages et dragages: que le projet de loi n° 92 soit amendé pour annuler l'exclusion accordée aux propriétaires de barrage ou d'ouvrage destiné à dériver ou à retenir l'eau ou à produire de l'énergie hydroélectrique; que le processus d'autorisation et de renouvellement prévu dans le projet de loi s'applique à ces ouvrages et qu'on puisse revoir la pertinence de l'ouvrage à la fin de sa vie utile. Dans le document, dans le... du mémoire, on donne des exemples de transformation, de révision de projets qui avaient déjà été réalisés, par exemple la rivière Penobscot, dans le Maine, qui est en train d'être retransformée en rivière naturelle quand on s'aperçoit que les impacts étaient importants. Que toutes les activités de dragage, de capitalisation et d'entretien soient couvertes par la présente loi et soient assimilées à des activités de prélèvement ou de dérivation, compte tenu de leurs impacts significatifs sur la quantité et la qualité de l'eau et le maintien des écosystèmes.

Consultation et participation publique. Nature Québec recommande d'instaurer un mécanisme de consultation publique entourant l'émission et le renouvellement des certificats d'autorisation qui régiront les prélèvements d'eau; que soit modifié aussi le deuxième paragraphe de l'article 13 de manière à créer l'obligation, pour les municipalités, d'appliquer les plans directeurs de l'eau.

Autorisation de prélèvement: que soit fixé à un maximum de 10 ans, sans exception, l'émission ou le renouvellement d'une autorisation de prélèvement, avec possibilité de réduire ce délai si l'intérêt public le justifie. En règle générale, Nature Québec est d'avis que les délais prévus à l'intérieur du projet de loi sont trop grands, particulièrement dans le contexte inconnu des changements climatiques.

Disposition spéciale sur la radiation nucléaire: que le gouvernement introduise une disposition spéciale limitant à 15 becquerels par litre la présence de tritium dans l'eau, comme c'est le cas en Californie, et non à 7 000 becquerels par litre, comme au Québec, soit 467 fois plus. Cette norme est faite sur mesure pour les anciens réacteurs de type CANDU et ne tient pas suffisamment compte de la santé publique et de l'environnement.

M. Simard (Christian): En conclusion, aux yeux de Nature Québec, le projet de loi n° 92 est à la fois satisfaisant et insatisfaisant. Il vient notamment officialiser une importante entente internationale qui limite les dérivations d'eau et qui est axée sur la conservation. Mais, s'il vient enfin encadrer d'importantes sections de la Politique nationale de l'eau, s'il vient encadrer les activités de prélèvement et prévoir le versement d'indemnités pour quiconque causerait un dommage au milieu aquatique, il demeure pratiquement muet sur la mise en place d'un système de redevances ou de royautés qui devrait découler de l'affirmation que l'eau est le patrimoine commun de la communauté québécoise.

Ce patrimoine ne peut être prélevé et commercialisé sans que la société québécoise en retire des bénéfices communs, bénéfices qui lui permettront de mieux s'orienter vers le développement d'une économie qui ne serait plus basée principalement sur l'exploitation des ressources naturelles. Ces bénéfices serviront enfin à internaliser les coûts environnementaux et de protection de la ressource que n'ont pas à payer, par exemple, ceux qui se contentent de puiser et de mettre en bouteille cette ressource.

C'est pourquoi Nature Québec demande aux parlementaires membres de la Commission du transport et de l'environnement de collaborer, au-delà des lignes partisanes, à améliorer ce projet de loi en travaillant ensemble pour en souligner les mérites et en combler les importantes lacunes avant son adoption finale, à l'automne 2008. Merci.

Le Président (M. Bergman): Merci pour votre présentation. Mme la ministre, pour un bloc de 17 minutes.

Mme Beauchamp: Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Bonjour, messieurs, puis merci pour votre contribution significative à nos travaux. Vous avez peut-être compris le président dire que j'ai un bloc de 17 minutes, puis j'ai pas mal de questions. Je vais m'appeler, moi, à la discipline puis, vous aussi, à l'efficacité.

Peut-être un premier commentaire. Je partage votre volonté de voir, au Québec, un régime de redevances. Les phrases que vous avez utilisées précédemment pour exposer votre position, je pourrais les reprendre. Je crois qu'il doit y avoir, au Québec, ce régime de redevances. Je ne crois pas qu'il soit normal qu'on puisse puiser de l'eau au Québec sans payer de redevances à la collectivité québécoise et je dis: Ce projet de loi est à mes yeux une étape nécessaire puisqu'on m'indiquait, d'un point de vue juridique notamment, la nécessité de clarifier le statut de l'eau. Je vous rappelle qu'encore hier on avait quelqu'un devant nous qui disait: L'eau, elle m'appartient, c'est ma propriété privée. Donc, il fallait passer cette étape de la clarification juridique d'un statut de l'eau comme chose commune faisant partie du patrimoine québécois.

Il y aura un règlement sur une déclaration obligatoire des prélèvements d'eau, donc ça va nous donner des bonnes indications pour travailler dans le réel pour, au cours de 2009, faire les débats, parce qu'on a vu aussi hier qu'il y aura des débats à faire sur les caractéristiques d'une redevance québécoise sur l'eau. Mais je partage votre point de vue qu'il doit y avoir une redevance, puis il y en aura une.

L'autre chose en partant, votre proposition, je regardais juridiquement la notion: que les indemnités soient versées au Fonds vert. Ça, c'était prévu dans la loi. Mais de rattacher le petit fil alors que c'est fait pour les redevances, c'est déjà prévu que les redevances soient versées au Fonds vert et soient dédiées à l'eau, hein? On dit familièrement: Que l'argent de l'eau aille à l'eau. Je réalisais que votre commentaire est extrêmement pertinent. On va regarder juridiquement la possibilité de préciser que l'indemnité versée au Fonds vert, une indemnité reçue en vertu des recours à la disposition du gouvernement pour corriger une situation, l'argent de l'eau aille à l'eau. On va regarder ce qu'on peut faire de ce point de vue là.

J'ai trois volets que je voudrais explorer avec vous. Je vais commencer en me rattachant à des discussions qu'on a eues cet après-midi. On a eu, avec d'autres groupes qui sont venus devant nous, beaucoup de discussions sur la notion de la gouvernance de l'eau. J'ai deux aspects puis, compte tenu notamment de la présence de M. Hudon et de sa connaissance au niveau du Saint-Laurent puis de ce qu'on a entendu aussi hier par rapport à un statut particulier pour le Saint-Laurent, je voudrais vous entendre sur votre vision des choses, sur l'articulation ? là, j'emploie le mot «articulation» à défaut d'un autre terme à définir ? mais l'articulation du travail entre les organismes de bassin versant, les municipalités mais aussi les ZIP, les zones d'intervention prioritaires mises en place dans le cadre de nos ententes avec le gouvernement fédéral sur le Saint-Laurent, juste voir comment vous voyez cette question de la gouvernance qui intégrerait le Saint-Laurent.

Et peut-être aussi une sous-question plus précise. Vous, vous mentionnez que vous souhaiteriez qu'il y ait une obligation, pour le monde municipal, de devoir... donc une obligation de tenir compte ou d'appliquer le plan directeur de l'eau. Jusqu'à maintenant, que ce soit le Regroupement des organismes de bassin versant ou même... Tantôt, la conférence régionale des élus, là, avait plutôt un discours qui disait: On n'en est peut-être pas tout à fait rendus là, il y a un risque de braquer beaucoup de gens, ce n'est pas le climat dans lequel on veut travailler, et eux donc... Par exemple, le ROBVQ est carrément venu dire que pour le moment la notion de prise en considération, c'était acceptable à leurs yeux. Donc, je voudrais vous entendre sur ce premier aspect de la gouvernance de l'eau et des plans directeurs de l'eau.

n(16 h 30)n

M. Simard (Christian): Marc, pour la question des ZIP et des comités de bassin versant, là, ton opinion là-dessus, peut-être revenir sur l'obligation prise en compte dans les municipalités, et je reviendrai.

Le Président (M. Bergman): M. Hudon.

M. Hudon (Marc): J'ai beaucoup d'années de mises au niveau du Saint-Laurent, via les comités ZIP, depuis le tout début, à la corporation nationale, à l'époque Stratégies Saint-Laurent. J'ai toujours été un ardent défenseur des comités de bassin. Même, à l'époque, il y avait le Réseau d'OR, je pense. Je ne sais pas s'ils existent encore, etc. Pour avoir présidé Stratégies Saint-Laurent 10 ans, une année avant son incorporation en plus, là, il y avait un genre de modèle de gouvernance à l'intérieur de ça. Ma philosophie, c'est que... Par rapport à ça, j'y ai réfléchi beaucoup. Je fais un petit détour pour répondre à votre question, Mme la ministre, mais je pense que la réponse que je me suis donnée, c'est qu'au Québec nous n'étions pas prêts à décentraliser vers la société civile davantage de pouvoirs que ce qui était en train de se développer par lui-même au sein des organisations membres de Stratégies Saint-Laurent. Et là il y avait des groupes environnementaux, il y avait des comités ZIP, etc.

On a étiré cette façon de faire là multisectorielle, dans la gestion de l'eau, au niveau du fleuve, elle a été poussée à la limite jusqu'à ce qu'en fait les gouvernements décident que ça prenait beaucoup de place dans l'esprit des gens, dans le milieu. Ça leur donnait beaucoup de latitude pour amener des éléments de décision face aux gouvernements. Mais, cela étant dit, au niveau des bassins versants, il y a les couloirs en amont du Saint-Laurent sur lesquels chacun des organismes de bassin versant est responsable, et il commence à se faire des plans directeurs, et ils ont vraiment une bonne compréhension des enjeux, etc. À l'embouchure de ces tributaires-là sur le Saint-Laurent, il y a les comités ZIP. Moi, depuis le début des travaux, la commission Beauchamp, le comité Saint-Laurent avant ça, etc., c'était toujours clair dans ma tête qu'il y aurait un arrimage quelconque aux embouchures des tributaires sur le fleuve, et les organisations se concerteraient au sein d'un soi-disant comité Saint-Laurent qui prendrait naissance, dans le temps, à l'échelle du Québec pour couvrir l'ensemble du couloir Saint-Laurent.

Le gros du problème, le gros du noeud était le rôle des élus municipaux, comment on allait pouvoir finalement intégrer... D'une façon volontaire, ça n'a pas marché parce qu'au niveau des comités ZIP, comme les comités de bassin présentement, c'est sur une base volontaire, à moins que ça ait changé, là. Je me trompe peut-être. Mais, sur une base volontaire, les élus n'ont pas beaucoup de temps de disponible, ils ne peuvent pas se couper en huit pour aller dans différentes organisations, donc ils vont là où leur mandat leur commande le plus d'aller. Mais les comités ZIP à la limite ont souffert beaucoup de ça parce qu'on n'a pas été capable de développer à temps une façon de faire pour comment encadrer la participation des élus au sein de leurs travaux. J'imagine que ça a été la même chose au niveau des comités de bassin. Mais, cela étant dit, ça demeure un défi important à relever, puis la solution, elle n'est pas facile, certainement.

M. Simard (Christian): Peut-être un complément d'information, si vous...

Le Président (M. Bergman): M. Simard.

M. Simard (Christian): Bon, il y a des comités ZIP. Il y en a un, entre autres, qui est amené à se transformer en agence de bassin. Il est sur le Saguenay. C'est normal un peu, je pense, dans la logique. Je pense qu'il y a moyen d'arrimer cela, mais le message qu'il faut faire, c'est qu'au Québec on crée beaucoup, beaucoup de structures de concertation, puis, à un moment donné, les structures s'entrechoquent. Et aussi ce qui arrive, c'est que les mandats de ces structures-là ne sont pas toujours clairs. Moi aussi, j'ai participé à la naissance des comités ZIP, puis, à un moment donné, quand vient le temps d'aller sortir des ressources puis dire: Bon, bien, on assainit un milieu, bien là c'est difficile, il n'y a pas de message gouvernemental si clair puis il n'y a pas toujours de ressources publiques ou privées bien, bien claires pour finir la job au-delà de la sensibilisation puis du nettoyage. Quand on arrive dans le noeud du problème, souvent ça bloque.

La crainte, c'est que... Il devrait y avoir à mon sens une logique, un peu comme sur les schémas d'aménagement, c'est-à-dire que les agences, ou les comités, ou les regroupements de bassin versant se voient dicter des objectifs: Il va y avoir un bureau d'information sur l'eau, il va y avoir un état de situation, vous avez un objectif d'assainissement dans votre bassin, arrivez avec un plan directeur de l'eau, puis il devrait y avoir une participation de tous les acteurs; et, selon ces orientations-là qui respecteraient une priorisation des usages, arrivez-nous avec un plan directeur, et, ce plan directeur là, si tout le monde y a été puis l'a fait avec sérieux, qu'il soit mis en application par les agences gouvernementales et les municipalités qui ont été présentes à sa composition. Bien, à ce moment-là, pour moi le problème...

Là, actuellement, on est tous dans la bonne volonté, on va se réunir très, très longtemps, on va réfléchir au premier plan de l'eau. Il ne faut surtout pas faire peur à personne parce que c'est sur une base volontaire. Mais, au bout du compte, ce flou-là peut arriver qu'avant d'avoir des résultats... Il peut y avoir des résultats extrêmement négatifs dans les bassins versants avant d'avoir des résultats positifs. C'est pour ça qu'à un moment donné il y a quand même une volonté gouvernementale, une volonté publique qui dit: Bien, on l'assainit-u le bassin? On se donne 10 ans ou on se donne cinq ans dans un plan directeur, on a des orientations à respecter et on trouve des solutions. Puis là il se fait des arbitrages entre les agricoles, les industriels mais un arbitrage basé sur la pérennité de la ressource. Là, actuellement, c'est: On en parle-tu? On va se regrouper, on va en parler, on va faire un premier cycle. Le cycle a été retardé.

J'ai écouté une conférence de M. Maranda l'an passé, à Sorel, où ça s'étire, ça s'étiole, on ne sent pas une volonté ferme d'amélioration de la qualité de l'eau par bassin versant parce qu'il faut respecter les intérêts de tous. Donc, cette conciliation entre la ressource et ceux qui l'utilisent peut se faire au détriment... On va tuer la poule, on va tuer la ressource, l'écosystème, et ça risque d'être très mauvais. Donc, un peu plus de discipline, un peu plus de rigueur, et, si les élus sont sur les plans directeurs de l'eau, je ne vois pas comment ils peuvent les signer autour d'un plan directeur de l'eau puis ne pas les appliquer après, avec la conclusion du plan directeur. Et je pense que la loi doit être claire, donner des signaux clairs aux citoyens, puis qu'on avance.

Le Président (M. Bergman): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Oui. Je vous écoute et en même temps je me dis: On a aussi été à l'écoute, et précédemment, avant même de présenter cette loi, du Regroupement des organismes de bassin versant, des conseils régionaux en environnement. Je comprends ça. En même temps, je me dis juste: Tantôt, M. Ruelland plaidait aussi pour qu'on tienne compte de la notion de temps et donner du temps au temps. Ce que je veux dire par là, c'est que je vous écoute et je sais ce que vous voulez dire, là. Je veux être bien comprise, je sais ce que vous voulez dire. Vous envoyez un signal d'urgence, un signal qu'il faut envoyer un message sérieux de prise en charge de la ressource dans les bassins versants. Mais par ailleurs il faut aussi réaliser que cette expérience-là québécoise est encore assez jeune.

Les organismes de bassin versant ont commencé à être financés par le gouvernement du Québec en 2003. On parle de quelque chose qui est assez jeune. À la limite, l'histoire des ZIP, parce que, moi aussi, j'aime bien dire que j'en ai été, c'est assez jeune encore. Et, moi, j'ai la prétention de dire que le fait que ce soit inscrit dans la loi... Parce que, là, quand même, il faut qu'il y ait un organisme représentatif. On nomme les acteurs qui doivent être autour de la table, donc on dit «dont le monde municipal». Le plan directeur de l'eau a une reconnaissance légale et même livrable, identifiée dans la loi, que doit produire cet organisme. Je me dis: Il y a quand même là l'expression d'une volonté claire. Je comprends donc du message de M. Hudon que vous dites: Bien, il y aura ce nécessaire arrimage, je vais résumer ça comme ça, que, dans votre vision des choses, il y aura les OBV, il y aura les ZIP, il y a un arrimage nécessaire à faire dans ce modèle de la gouvernance de l'eau. Je veux revenir... Par ailleurs, j'avais un autre volet, puis le temps file, mais c'est très important parce que pour moi une section importante de votre mémoire, c'est le questionnement que vous nous amenez sur la question de la priorisation des usages de l'eau en cas de conflit d'usage, et je veux vous entendre parce que la formulation que vous proposez, c'est la notion... Entre autres, en parlant de la préservation de la ressource et des écosystèmes, vous parlez de la satisfaction du besoin des familles, puis je veux vous entendre parce que pour moi, d'un point de vue légal, c'est extrêmement large, la notion des besoins des familles. Nous, on l'avait plus exprimé sous l'angle, vous savez, quasiment des besoins vitaux, d'approvisionnement en eau potable, de la sécurité, etc. Parce que je suis là puis je suis en train de me dire: Quelqu'un pourrait me dire que, par exemple, la préservation des emplois dans une communauté ferait partie du besoin des familles de telle communauté.

Ça fait que je ne sais pas si vous l'avez vu sous l'angle que, moi, je l'ai vu, mais je veux vous entendre là-dessus: Pour vous, la notion du besoin des familles, comment vous... Ou, un ministre qui doit interpréter cette priorisation que vous suggérez, vous nous suggérez quelle interprétation du besoin des familles?

M. Simard (Christian): Oui. Très rapidement...

Le Président (M. Bergman): M. Simard.

n(16 h 40)n

M. Simard (Christian): ...si vous me permettez ? merci, M. le Président ? très rapidement, oui, naturellement on ne l'a pas fait sur une formulation légale et on est conscients que ce qu'on a mis là, c'est un cadre. On pense qu'il devrait y avoir une hiérarchisation des usages. La compréhension qu'on avait sur le besoin des familles était en approvisionnement en eau potable. C'est parce que, quand on dit aussi: On priorise l'approvisionnement en eau potable, est-ce qu'on le priorise autant pour l'exportation des bouteilles d'eau ou la production massive de bouteilles d'eau ou pour directement l'approvisionnement en eau potable des communautés? C'est dans ce sens-là où on limitait un peu comme étant...

Priorité de base, c'est l'eau potable, mais l'eau potable, si elle est ici dans une nappe très limitée ou un bassin versant très affecté, c'est l'eau potable pour l'ensemble de l'Amérique du Nord ou pour l'exportation des bouteilles. Là, on n'est pas limités au besoin en eau potable des familles. J'avouerai, là, quand on dit «besoins des familles en eau», ce n'est pas les besoins des familles dans le sens général comprenant le besoin d'éducation ou d'abri, d'avoir une maison, là, la pyramide de Maslow, c'est véritablement les besoins des familles en eau potable dans la collectivité donnée. C'est dans ce sens-là qu'on le voyait. Ensuite, la fonction agricole.

On trouve ça important parce que quelque part comment on va aboutir à faire un plan directeur de l'eau cohérent si tous les usages sont sur le même pied, à la limite autant la ressource naturelle elle-même que... Moi, j'avoue, j'ai écouté, hier, la retranscription télévisée, là, où la dame disait: Écoutez, c'est à nous, là, puis je ne peux pas aller à la banque si ce n'est pas garanti que l'eau est à moi, là. J'avoue que j'ai sursauté.

Une voix: Moi aussi.

M. Simard (Christian): Et il est très clair que les forêts publiques sont là, les forêts publiques sont là, même système de CAAF même qui va être sans doute changé, puis il est possible d'aller là-dedans. Puis il y a aussi la propriété de la nappe phréatique. Ce n'est pas parce que tu as un lot en haut puis que tu perces en dessous que toute la nappe de la province t'appartient parce que tu as fait un trou dedans et qu'il n'y a pas moyen de faire une redevance. C'est plutôt choquant.

Mme Beauchamp: Laissez-moi du temps, M. Simard. Merci.

M. Simard (Christian): Oui.

Le Président (M. Bergman): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: C'est parce que je veux juste... Pour moi, à mes yeux, l'article 31.76 offre une priorisation des usages. J'avoue qu'elle n'est pas déclinée comme ce que vous proposez, mais je veux juste dire que pour moi elle mentionne que toute décision que prend le ministre doit satisfaire en priorité les besoins de la population en matière de santé, de salubrité, de sécurité civile, d'alimentation en eau potable. Donc ça, c'est la priorité, puis ensuite il y a une notion de conciliation.

Puis, dans le paragraphe 1°, c'est la notion d'assurer la protection de la ressource qui encadre tout ça. Ça, c'est le grand chapeau, puis après ça on dit qu'il y a une priorité pour la population, je vais résumer ça comme ça, puis ensuite la conciliation qu'on mentionne.

Je veux juste vous entendre, puis là c'est très malheureux que je manque de temps, mais sur la notion où, vous, vous proposez une priorisation de l'activité agricole par rapport aux autres. Vous savez aussi qu'il y a... Vous le savez, vous avez, je pense, participé à la commission Pronovost. Il y a tout eu aussi un discours, il y a un discours courant, je dirais, des groupes environnementaux sur la fonction agricole en disant: Bien, au Québec, on n'a pas juste un modèle agricole pour approvisionner à proximité les populations, on a aussi un modèle agricole que, je pense, vous-mêmes, vous qualifiez de type industriel. Donc, je voudrais vous entendre un peu plus sur vos arguments dans ce contexte-là où vous tenez aussi un discours donc, par exemple, à la commission Pronovost, l'argumentaire de votre proposition au niveau des priorités.

Le Président (M. Bergman): Une demi-minute pour une très, très, très courte réponse.

Mme Beauchamp: Ah, mon Dieu! Une demi-minute! Mais en tout cas je suis sûre qu'on va y revenir.

M. Drolet (Charles-Antoine): Juste un commentaire rapide, Mme la ministre, sur vos interventions récentes concernant le projet de loi et surtout la vision que vous en aviez, de la hiérarchisation des usages. Vous avez souligné, je pense, le... vous avez souligné l'importance de reconnaître l'eau comme étant un principe de vie au départ, puis je pense que c'est l'éclairage qu'on voulait donner à notre mémoire, qui n'apparaît peut-être pas dans le texte qui vous a été remis, mais je pense qu'il serait important de maintenir cet aspect-là parce que ça nous apparaît, nous aussi, comme étant la plus importante... Le plus important niveau d'utilisation, c'est celui d'abord du maintien des ressources vivantes et des écosystèmes.

Le Président (M. Bergman): Merci. M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Roy: Merci, M. le Président. Bonjour à vous trois, merci beaucoup d'être là. Moi, j'ai une question qui me brûle les lèvres depuis tantôt parce qu'on parle bien sûr des Grands Lacs. On a parlé de cette entente-là historique qui fait qu'on devrait être protégés contre nos amis Américains pour ne pas qu'ils dérivent rien, pour ne pas qu'ils prennent notre eau, mais, l'eau à l'heure actuelle qui est vendue commercialement au Québec et qui est en provenance de Mississauga, la ville de Mississauga pompe son eau où? Dans le lac Ontario ou dans la nappe souterraine?

Le Président (M. Bergman): M. Hudon.

M. Hudon (Marc): Je ne sais pas, monsieur.

M. Roy: Non, bien c'est parce que ce n'est pas juste deux bouteilles d'eau qu'ils vendent, quand même.

Le Président (M. Bergman): M. Hudon.

M. Hudon (Marc): Non.

M. Roy: Donc, déjà en partant, c'est ça que je disais hier, on rouvre une boîte où on espère que tout le monde va être des bons acteurs dans ça, mais cette eau-là, c'est de l'eau embouteillée qui vient des Grands Lacs, donc qui vient d'une ressource ? c'est en amont de chez nous ? dont on soutire... Donc, ce serait peut-être bon que vous vous penchiez sur le sujet simplement pour peut-être éventuellement nous arriver avec la réponse.

M. Hudon (Marc): On parle des contenants de moins de 20 litres, n'est-ce pas?

M. Roy: Oui, on parle des contenants de moins de 20 litres, mais on parle d'une quantité de contenants de moins de 20 litres, donc c'est une belle façon de détourner la loi.

Le Président (M. Bergman): M. Hudon.

M. Hudon (Marc): C'est la même façon pour tout le monde, cependant. Si on n'avait pas cette entente-là, on ne sait pas qu'est-ce que l'avenir pourrait nous réserver. Peut-être que ça se ferait dans des contenants de 50 litres ou 100 litres, je ne le sais pas. Mais, avec l'entente, on sait que, pour tout le monde, il n'y aura pas d'exportation dans des contenants supérieurs à 20 litres, sauf quelques rares exceptions: les causes humanitaires, etc., là, pour des périodes de temps limitées.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Roy: Merci, M. le Président. Donc, encore une fois, on voit bien que c'est de l'eau du fleuve qui est prise et revendue chez nous, embouteillée par une municipalité qui profite largement du fait qu'encore une fois on a simplement mis une parenthèse puis on a gardé moins de 20 litres, là. Mais la quantité est tout aussi grande que des contenants de 20 litres.

Le Président (M. Bergman): M. Simard.

M. Simard (Christian): Non, il y a peut-être une nuance.

M. Hudon (Marc): Ce que vous venez de dire là est absolument vrai, ça fait partie de notre discours. Cependant, dans le coeur de ce travail-là, il faut être bon joueur aussi, au sens où probablement le centre de l'Ontario est en train de s'assécher, lui aussi, et qu'eux-mêmes sentent la chaleur en termes de l'eau qui pourrait être puisée chez leurs voisins et dirigée vers l'extérieur du bassin des Grands Lacs. Donc, à quelque part, tout le monde a mis un peu d'eau dans son vin pour justement limiter les dégâts. Et certainement que l'entente améliore le statu quo, ça, vous pouvez en être assuré.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Simard (Christian): Si je peux, j'ai un élément de réponse, M. Roy. Ce qui est important, c'est qu'il y a huit États qui ont signé ça. L'Ontario, et le Québec, puis les huit États des Grands Lacs, ils ont voulu aussi défendre le bassin des Grands Lacs et du Saint-Laurent ? puis je vous entendais, hier, aux nouvelles ? face à l'appétit grandissant des États. Il faut faire attention aussi, c'est très important de conserver nos écosystèmes et notre eau parce qu'elle a plusieurs fonctions. Puis, de dire que c'est un patrimoine commun puis que ça nous appartient tous, c'est fondamental stratégiquement de le dire à ce moment-ci parce qu'on ne veut pas créer l'élément que cette eau-là, là, appartient... l'ALENA a ouvert au maximum... puis de dire que, pour satisfaire Las Vegas, arroser des terrains de golf au Colorado ou étancher la soif des Américains qui ne font pas de mesures de conservation très, très grandes dans les États du Midwest... Donc, c'est fondamental d'établir ça.

Ce n'est pas parfait, c'est un seuil minimum, on l'a dit, hein, un plancher minimal, mais, on est sûrs, les huit États et les deux provinces s'entendent pour dire: On garde notre écosystème puis on garde l'eau dans notre bassin. Des exceptions, oui, mais pas aussi grandes que des dérivations puis des canaux, là. 20 litres et moins, puis des petites bouteilles, ce n'est quand même pas des canaux de dérivation.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Roy: Merci, M. le Président. On parle d'activités de dragage. Autant dans certaines communautés comme chez nous ou dans le fleuve Saint-Laurent, on essaie, à l'heure actuelle, de remettre du bar dans le fleuve Saint-Laurent parce qu'on impute... au fait qu'on avait dragué et qu'on avait détruit des frayères. Donc là, on ramène des frayères, et le bar rayé s'est établi dans d'autres régions, dans d'autres endroits de fraie, mais on va devoir y arriver. Si on n'y arrive pas, si on ne peut pas faire de dragage nulle part, soit à l'entrée d'un quai comme à Berthier, comme à Montmagny, comme à l'île aux Grues, comme à Grosse-Île, pour que les bateaux puissent accoster ? donc là, on parle encore une fois de travail avec le monde municipal parce que c'est du tourisme ? donc comment on va arriver à concilier tout ça? Parce qu'on va avoir besoin de draguer une partie du Saint-Laurent encore une fois peut-être dans des petites municipalités mais dans une partie du fleuve aussi.

Le Président (M. Bergman): M. Hudon.

n(16 h 50)n

M. Hudon (Marc): Je vais faire un petit pont avec la question précédente pour vous répondre. Par rapport aux priorisations des usages de l'eau, il ne faudra pas que le Québec oublie la priorisation des usages de l'eau qui est faite en provenance des Grands Lacs vers le Québec. Et un de ces usages-là, c'est la navigation commerciale, et cette navigation commerciale là a besoin annuellement d'un dragage d'entretien pour la voie navigable.

Maintenant, la réponse que je vous apporte, puis je suis très au fait, là, au niveau de cet enjeu-là en particulier, mais... Vous avez utilisé le terme de l'épée de Damoclès un peu plus tôt, mais on a une épée de Damoclès que sont les variations des changements climatiques, qu'on ne connaît pas, et pour nous, au Québec, déjà il est dit que les niveaux des Grands Lacs vont baisser et qu'il va y avoir une perte au niveau de... je pense que c'est entre 7 % et 25 % dans les canaux de navigation. La solution facile, et rapide, et envisageable beaucoup, qui a été faite historiquement, c'est de draguer. On drague, donc on permet aux navires de passer. La solution plus difficile à prendre, sur laquelle il va falloir se pencher sérieusement, c'est des méthodes plus douces, avant de penser à faire du dragage, pour garder de l'eau pour les autres usagers. Parce que le Saint-Laurent est comme ça. Avec la voie navigable qui concentre la majorité de l'eau en son centre, on peut penser que, si les apports d'eau diminuent, l'eau en rive qui sert à tous les autres usages, dont les prises d'eau des municipalités, la pêche, la faune, etc., ça va diminuer pour se canaliser vers le centre.

Donc, ce qu'il faut commencer à réfléchir avec l'industrie et l'ensemble des usagers, la population au Québec, c'est quelle méthode on peut prendre pour faire la chose correctement. Peut-être qu'en bout de ligne on décidera, comme société, qu'il faut draguer, qu'il faut créer des infrastructures pour ralentir l'écoulement de l'eau, etc., avec les impacts que ça aura, mais certainement que le dragage est la solution dure, à mon sens. Il faut penser peut-être à diminuer le dragage d'entretien pour ralentir l'écoulement de l'eau et maintenir les autres usages, puis en même temps, bien, comment l'industrie peut s'ajuster à ça. Peut-être avec du transport de marchandises courte distance. Mais qui est prêt à faire davantage d'aménagements portuaires en rive au Québec?

Le Président (M. Bergman): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Roy: Merci, M. Hudon. D'ailleurs, on le voit avec le Comité ZIP de Portneuf où la rivière est complètement déplacée par rapport... Portneuf sur la Côte-Nord. Donc, avec le Comité ZIP, on avait fait un reportage là-dessus, où le port n'est plus du tout à la même place parce que le fleuve a changé de place. Donc, on le voit très bien. C'est pour ça qu'on a des exemples qui sont très concrets.

Vous nous avez parlé tantôt d'une rivière dans le Maine qui a été revitalisée. Donc, son but était quoi? Hydroélectricité ou simplement un barrage?

Le Président (M. Bergman): M. Drolet.

M. Drolet (Charles-Antoine): Je pense que l'usage antérieur était l'hydroélectricité et qu'il y a une révision qui est en cours présentement pour redonner à la rivière son débit, son écoulement normal.

M. Simard (Christian): Peut-être un élément. Ce qui est vraiment étonnant dans ce cas-là, c'est que la compagnie d'hydroélectricité est avec les gens, puis ils s'entendent, ils vont démolir les deux premiers barrages puis ils vont réaménager les autres barrages sur la rivière, puis c'est fait en collaboration avec la compagnie d'électricité parce qu'ils ont vu que ça avait été un désastre. Il y a eu des pressions populaires, mais c'est incroyable quand même que... Je me demande si honnêtement on en est là avec Hydro-Québec, un jour, de discuter à enlever des barrages de production d'hydroélectricité dans certains milieux où il y aurait eu des impacts trop négatifs pour réintroduire des espèces. J'espère qu'un jour ça va arriver, mais je ne sens pas cette volonté, présentement.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Roy: Oui. J'arrivais justement à ce point-là. Vous vous en doutiez sûrement, M. Simard, que j'allais arriver avec un point comme celui-là. On critique souvent, oui, allégrement les ouvrages hydroélectriques. On a eu énormément de petits cours d'eau qui ont été harnachés, vivement critiqués au départ du projet, mais j'attends toujours les félicitations pour les projets qui ont revitalisé les rivières, comme celui-là de la rivière Rimouski, comme celui-là de la rivière Chaudière, qui n'a rien défait, contrairement à ce qui avait été prédit, le grand cataclysme de la rivière Chaudière. Pourtant, économiquement c'est rentable, la rivière n'est pas démolie, le barrage a été bien fait, il a toujours autant d'attrait touristique puis il y a un débit d'eau qui est régulier au niveau de la chute. Donc, qu'est-ce qu'on fait avec ces rivières-là où le travail a été bien fait?

Je suis d'accord avec vous, par le passé, on l'a vécu dans le passé. Je l'ai dit tantôt, est-ce qu'on est toujours un ou on est toujours 10, mais il va falloir recommencer? Ce qui est fait dans le passé, on l'a tous vécu, donc est-ce qu'on fait payer tout ce monde-là dans la nouvelle politique de pollueur-payeur? Est-ce qu'on va sur le fait puis les conséquences ou si finalement on recommence à neuf? Donc, qu'est-ce qu'on fait avec ces rivières-là ou ces barrages-là qui ont été faits?

Le Président (M. Bergman): M. Drolet.

M. Drolet (Charles-Antoine): Oui. Globalement, on a une préoccupation, nous, concernant l'écoulement de l'eau douce et de son rôle aux divers niveaux de l'écoulement du fleuve. Comme par exemple, il y a un papier scientifique qui est sorti récemment, qui démontre que le brochet et la perchaude, dans le lac Saint-Pierre, souffrent énormément du fait qu'on a écrêté les débits d'eau dans le fleuve suite au harnachement, par exemple, de la rivière des Outaouais et de la construction de Beauharnois. Sauf que le brochet et la perchaude ont peut-être perdu jusqu'à 78 % à 80 % de leur habitat de reproduction, c'est-à-dire qu'ils souffrent eux-mêmes de l'assèchement rapide des frayères avant de pouvoir compléter leur cycle. Puis, si on regarde plus loin, cette eau-là finalement s'écoule dans l'estuaire et dans le golfe, et, pour qui regarde un peu la littérature scientifique dans ce domaine-là, on s'aperçoit que l'eau douce a un rôle important dans l'écologie marine, dans la production marine d'espèces commerciales.

C'est pour ça que globalement, nous, ça nous préoccupe de voir l'ajout et l'impact cumulatif des divers harnachements qui se font autour des rivières, autour du golfe, et autour de l'estuaire, et dans le système Saint-Laurent en général, à cause de cet écrêtage des débits printaniers qui cause principalement le problème. Alors, bien sûr que, quand il y a des aménagements qui sont faits, qui améliorent la situation, on devrait souligner cette victoire-là, et on est peut-être négligents à féliciter les bons coups parce qu'on est trop assidus à regarder les problèmes.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Montmagny-L'Islet, il vous reste trois minutes.

M. Roy: Merci bien. Je reviendrai, bien sûr.

Je reviens sur les barrages. Vous mentionnez que les barrages sont... Ça aussi, ça vous semble un problème, et je sais que c'en est un. La solution à apporter va être quoi si on parle de... Parce que, n'oubliez pas, quand on est rendus comme le Saint-Maurice où on va avoir récupéré l'eau sept fois sans avoir atteint personne... Ça n'a pas touché La Tuque, ça n'a rien touché en bas, on a une nouvelle navigation. Passez sur le bord du Saint-Maurice le dimanche, je l'ai fait à huit reprises cet été, la rivière est envahie de kayaks, de canots, de bateaux, de plaisanciers, de baigneurs, puis pourtant c'est harnaché sept fois. Donc, l'eau, on ne la perd pas en faisant un barrage, on la redonne. On la garde un certain moment, on en puise ce qu'on a besoin de puiser et on la redonne au cours d'eau. Quels sont les effets négatifs, à ce moment-là?

Le Président (M. Bergman): M. Drolet.

M. Drolet (Charles-Antoine): Oui. Bien, on ne dit pas qu'il faut détruire tous les barrages qui ont été construits, loin de là. On dit simplement qu'au moment de l'échéance de la fin normale de vie de ces installations-là on évalue la pertinence de redonner le même rôle qu'on lui a donné jusqu'alors, c'est-à-dire que peut-être qu'on va reconduire la présence du barrage, qu'on va reconnaître que le barrage est nécessaire et qu'on devrait poursuivre. C'est simplement se donner l'occasion de réévaluer à des intervalles réguliers ces ouvrages.

Le Président (M. Bergman): M. Simard.

M. Simard (Christian): Aussi, je pense qu'il faut dire une chose qu'on ne voit pas, là, quand on se promène le long d'un cours d'eau: Quand tu transformes une rivière en lac, puis souvent en mauvais lac, parce que des lacs qui sont des réservoirs, ils ont un marnage, des fois ça peut être de 50 pi en haut, en bas, très rapidement, il n'y a pas une espèce qui s'adapte à ça. Bien sûr, pour le canot puis aller se promener là, il n'y a aucun problème, mais on transforme des rivières vivantes en mauvais lacs. C'est sûr que ça peut paraître beau, un lac, c'est beau, mais c'est un lac artificiel, et, quand on cumule l'ensemble de cette transformation-là, ce n'est pas vrai que le harnachement ne modifie pas les écosystèmes. Il les modifie profondément puis il modifie la productivité du Saint-Laurent.

On dit que le golfe est malade. Il est aussi malade de ne pas avoir d'eau douce au bon moment, au printemps. Et on dit que, quand on harnache toutes les rivières, bien c'est autant de solutés qu'on a à un malade, puis, quand on le harnache, on enlève son soluté, qui est l'eau au printemps, qui est un écosystème productif, pour en faire une régie d'eau. Au bout du compte, il y a autant d'eau à la fin mais au mauvais moment, puis une eau qui n'a pas cette qualité-là de participer à un écosystème.

Le Président (M. Bergman): En conclusion.

M. Simard (Christian): Je m'excuse de faire... mais c'est important de préciser ça.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Roberval.

M. Trottier: Merci beaucoup. Je trouve ça très intéressant, ce que vous dites, parce que dans le fond, à date, vous êtes les seuls qui ont apporté cet éclairage-là, puis je pense qu'avec la quantité de rivières qu'on a au Québec on devrait avoir une préoccupation plus grande. Puis, justement par rapport à ça, je me demande qu'est-ce que vous pensez de l'idée d'avoir un certain nombre de rivières du patrimoine au Québec qu'on pourrait préserver, qu'on pourrait avoir une certaine fierté. Est-ce que vous pensez qu'on est suffisamment avancés là-dedans ou est-ce qu'on doit continuer de faire des luttes sur chacune des rivières?

n(17 heures)n

Le Président (M. Bergman): M. Simard.

M. Simard (Christian): Oui, bien sûr, c'est un débat. Vous savez, il y a des changements climatiques, Marc en parlait tantôt, et ça va induire des bouleversements majeurs sur la biodiversité. C'est-à-dire, l'augmentation des températures va faire que les écosystèmes vont être bouleversés, et l'important, c'est de garder quand même des écosystèmes les plus fonctionnels puis d'en garder des beaux. Il y en a quelques-uns. Malheureusement, on attend toujours leur statut plus définitif. La Moisie, l'Ashuapmushuan, qui sont des réserves aquatiques mais toujours projetées, on est encore loin d'une vraie protection.

Puis effectivement de dire: Où on arrête, là? Est-ce qu'on garde des... Est-ce qu'on harnache tout ce qui bouge à un moment où on est en surplus d'énergie pour une fin d'exportation? Est-ce qu'on se ramasse avec les conséquences au Québec et on exporte l'énergie, mais on dit... À un moment donné, on disait il y a longtemps: De porteurs d'eau à exportateurs d'énergie. Des fois, c'est rien qu'une question d'échelle, c'est-à-dire qu'on devient quelque part des vecteurs d'énergie de développement pour d'autres, mais, nous, on se ramasse avec les impacts sur les écosystèmes. Donc, certainement qu'il faut avoir une stratégie de conservation plus forte, surtout au moment où on n'a pas fait tous nos devoirs en conservation, en éolien, en géothermie, en solaire. Je pense qu'on a le syndrome du castor, qui est très intéressant, qui a participé beaucoup au développement du Québec. Peut-être qu'il n'est plus aussi novateur qu'au début des années soixante.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Roberval.

M. Trottier: Vous mentionnez dans votre mémoire que vous souhaitez qu'il y ait une redevance, que vous qualifiez de significative. Est-ce que vous pourriez nous dire ça pourrait ressembler à quoi, une redevance significative?

Le Président (M. Bergman): M. Simard.

M. Simard (Christian): Quand on n'a pas la réponse, on dit: C'est une excellente question. C'est une excellente question, c'est-à-dire que... Bon, au tout début, en 2003, je pense qu'il y avait des déclarations, en 2002 ou 2003, que le premier effet donnerait environ 15 à 20 millions de revenus, mais c'était pour 2003. Peut-être que ça aurait été un début.

Maintenant, ce qui est important, c'est de bouger. On ne peut pas toujours dire... Puis je pense là-dessus, Mme la ministre, que c'est vrai qu'on est toujours pressés, puis c'est normal, c'est notre rôle d'être pressés. Mais c'est important, à un moment donné, d'avoir un courage politique puis de commencer quelque part. Parce que, vous savez, à un moment donné, les intérêts vont toujours dire: Aïe! elle a fait une étude, c'est lui qui devrait être payé en premier, ce n'est pas moi, c'est l'autre. Quand on voulu arrêter le tabac, là, c'est la même chose, les commandites, là, des événements. Maintenant, on est contents de l'avoir fait, tu sais, légiféré sur ça, puis collectivement on est contents.

Même problème avec la vitesse sur les routes, sur l'alcool, sur tout ce que vous voulez. Mais ce qui est important, c'est d'avoir un certain courage politique de dire: Là, c'est correct, ça commence. Puis je pense qu'on a manqué, là, une étape, parce que ça fait un maudit bout de temps qu'on en parle. Je pense qu'on aurait pu... Il me semble, dans cet exercice-là, je pense qu'on pourrait encore commencer quelque part, au niveau des redevances.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Roberval.

M. Trottier: Qu'est-ce que vous pensez de l'idée de donner un statut spécial au Saint-Laurent? Il y a plusieurs groupes qui pensent qu'on devrait lui donner un statut spécial, le reconnaître comme étant un patrimoine national. Pour vous, ça voudrait impliquer quoi si vous étiez d'accord avec ça?

M. Simard (Christian): On est contre.

Le Président (M. Bergman): M. Simard.

M. Simard (Christian): Non, ce n'est pas vrai. Ha, ha, ha!

Une voix: C'est écrit, là, maintenant.

M. Simard (Christian): C'est écrit. Non, on est contre ne pas le faire, donc on est pour le faire. Non, honnêtement, je pense que ça fait longtemps...

Nature Québec est à la base de Stratégies Saint-Laurent et collabore avec Les Amis de la vallée du Saint-Laurent. On ne l'a pas mis dans notre mémoire par redondance, mais on est extrêmement sympathiques à ça. On rend hommage à Frédéric Back. Il faut arrêter de tourner le dos au fleuve. Le lac Saint-Pierre est extraordinairement magané, là, au niveau de la concentration ? on n'en parle pas ? des algues bleues parce qu'elles sont très en profondeur au lac Saint-Pierre. C'est un écosystème ravagé, présentement. Donc, de redonner une grandeur au fleuve en le décrétant patrimoine national ou en lui donnant un statut comme ça, symboliquement ça nous fait avoir le goût de s'en occuper, et certainement qu'on est d'accord. Maintenant, on ne peut pas tout mettre dans tous les mémoires, mais certainement qu'on appuie cette chose-là.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Roberval.

M. Trottier: Monsieur...

M. Hudon (Marc): Ce que je peux rajouter là-dessus, c'est que c'est encore un combat présentement, dans les Grands Lacs, de faire reconnaître le terme «Saint-Laurent» dans les papiers de la discussion, dans les travaux, comités de travail, etc., sur des enjeux importants qui touchent les usages de l'eau. «Le fleuve Saint-Laurent», il faut pousser pour faire inscrire ce mot-là. Ça a été un combat pour l'inscrire dans le titre de l'Entente sur les ressources en eaux durables. Donc, si le Québec lui donnait finalement un statut, ça ne ferait qu'aider notre cause en amont en forçant les villes de l'amont à reconnaître justement ce signal clair là que pour le Québec c'est un atout absolument indispensable. Merci.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Roberval.

M. Trottier: Vous mentionnez que vous déplorez le fait que l'entente s'arrête à Trois-Rivières, sur les Grands Lacs, et que l'ensemble du Québec devrait avoir les mêmes types de dispositions. Est-ce qu'il y a certaines priorités que vous pensez qui devraient être répandues à l'ensemble du Québec? Puis lesquelles, à ce moment-là?

Le Président (M. Bergman): M. Hudon.

M. Hudon (Marc): Bien, idéalement, ce serait possiblement toute l'entente, mais disons que je suis teinté par la dureté que ça... le temps que ça a pris pour atteindre ce compromis-là. Donc, il n'est pas question pour moi, dans ma tête, avec tous les efforts qui ont été mis pour en arriver là, à cet outil décisionnel commun là, de tenter l'impossible en disant: Appliquons-le sur l'ensemble du Québec. Par contre, tout ce qui touche les clauses de conservation de mesures d'eau, les plans de réhabilitation, etc., ça, ça peut s'appliquer sur l'ensemble du Québec sans pour autant nuire à quelconque projet de développement qui pourrait avoir lieu à l'extérieur de la zone.

Déjà dans toutes les discussions qui ont lieu au coeur des Grands Lacs, quand on parle du bassin des Grands Lacs, la zone d'influence, c'est vraiment reconnu par tous, ça se termine au lac Saint-Pierre, à Trois-Rivières. Donc, nous, c'est certain qu'à Nature Québec on a poussé pour élargir, pour aller chercher même la ville de Québec et le golfe, parce qu'avec l'impact des changements climatiques, et le rehaussement de la température, et le rehaussement du niveau de la mer Atlantique, bien, la montée de la ligne d'eau salée, à l'est de l'île d'Orléans, bien ça va migrer s'il y a moins d'eau.

On a le problème inverse: dans les Grands Lacs, il y a moins d'eau, mais, à Québec, c'est l'inverse. Donc, on veut absolument que la zone d'influence des Grands Lacs tienne compte de la main gauche, il faut qu'elle sache qu'est-ce qui va se passer avec la main droite, qui est qu'à la ville de Québec, s'il y a moins d'eau qui provient de l'amont, ça va causer des problèmes majeurs possiblement pour les villes qui puisent leur eau dans le fleuve, à la hauteur de Québec.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Roberval.

M. Trottier: Comment vous expliquez qu'il y a une si grande différence par rapport aux normes minimales, là, sur la présence du tritrium dans l'eau? Comment vous expliquez ça, que le Québec aurait une norme 467 fois plus, on pourrait dire, permissive que la Californie?

Le Président (M. Bergman): M. Simard.

M. Simard (Christian): Merci de la question. D'ailleurs, je vous invite à aller voir dans le Règlement sur la qualité de l'eau potable, où l'ensemble des autres composantes radioactives sont limitées, 10, 15, huit, sept becquerels, puis on voit: tritrium, 7 000. On se dit: Pourquoi? C'est parce que ça, on en retrouve; les autres, on n'en retrouve pas beaucoup. Mais c'est surtout parce que CANDU, le type de réacteur canadien, qui n'est honnêtement pas très performant au niveau mondial, c'est refroidi à l'eau lourde, contrairement au refroidissement à l'eau en France ou dans d'autres procédés nucléaires. Eh bien, le système fait en sorte qu'il ne peut pas être plus performant que ça. Ça fait qu'on ajuste la norme au système défaillant plutôt qu'aux besoins ou à la prévention des citoyens. Et on le fait même pour la sortie aussi au niveau des cheminées.

Donc, c'est terrible, et, nous, on pense que c'est important de souligner ça à l'heure où Hydro-Québec a décidé d'aller de l'avant ? je pense qu'ils vont reculer, je vous prédis ça ? sur la réfection de Gentilly-2 puis la reconstruction de Gentilly-2 alors que c'est une technologie défaillante, celle de CANDU, et qui est de plus en plus abandonnée, et surtout qui est nocive pour l'environnement à l'heure où on n'a vraiment pas besoin d'énergie nucléaire au Québec. Et pour nous c'était de souligner l'incongruité d'avoir des normes permissives faites en fonction de la technologie et non de la santé des gens, et je pense qu'en pensant à ça puis en refaisant ça peut-être que ça nous ferait réfléchir à l'utilité de faire revivre un monstre mourant ? et j'emploie «monstre» à bon escient et en pesant mes mots ? un monstre mourant sur le bord du Saint-Laurent, de le faire revivre totalement inutilement, à des coûts sociaux, économiques et environnementaux qui nous apparaissent énormes.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Roberval.

M. Trottier: J'ai posé la question à d'autres, je vais vous la reposer: D'après vous, quelles sont les principales embûches qu'on va avoir dans l'application d'un projet de loi qui vise à faire la meilleure protection possible de l'eau au Québec, la meilleure utilisation? Puis quelles sont les solutions pour traverser ces embûches-là?

M. Simard (Christian): Excusez-moi, je ne suis pas sûr de bien comprendre.

M. Trottier: C'est que, vous savez, chaque fois qu'on fait un projet de loi, il y a toujours des gens qui sont contre, etc. D'après vous, quelles sont les principales embûches qu'on va avoir, qu'il faudrait éviter? Puis quelles sont les solutions pour arriver au meilleur projet de loi, compte tenu du fait qu'il y a toutes sortes d'intérêts qui ne sont pas toujours collectifs, comme on dit, des intérêts... Comment on va faire pour traverser les intérêts particuliers pour défendre les intérêts collectifs?

M. Simard (Christian): Moi, je pense que...

Le Président (M. Bergman): M. Simard.

n(17 h 10)n

M. Simard (Christian): Oui. Excusez-moi. Ma compréhension du rôle de parlementaire et d'un rôle de gouvernement, c'est d'abord le bien commun. Bien sûr qu'il y a des intérêts particuliers qui font valoir leurs points de vue et qui font valoir... mais qui sont là pour protéger le bien de leurs actionnaires en premier, et je pense qu'il faut pouvoir séparer le grain de l'ivraie. Et, quand c'est uniquement le bien de l'actionnaire, c'est-à-dire pas diminuer...

Quand on crée un produit pratiquement de marketing, comme l'eau en bouteille... Parce que, l'eau en bouteille, vous savez, on peut retrouver une meilleure qualité parfois dans l'eau du robinet. Mais on a créé, à force de marketing, de publicité et d'annonces, que... Au spectacle de Céline Dion, ça coûtait 4,50 $, une petite bouteille d'eau. Je ne te dis pas que c'est allé seulement... mais, à un moment donné, peut-être que ça a aidé à subventionner les fêtes. Mais il demeure que c'est devenu incroyable comme c'est un besoin: ça nous prend de l'eau en bouteille. Il faut gérer la...

Vous avez travaillé, je pense, d'autres parlementaires ici, sur la gestion de la récupération, la collecte sélective. Tous les impacts de ça sont sociaux, mais tous les profits de ça sont privés, sont faramineux et très importants, sinon faramineux, et la collectivité québécoise n'en retire rien en termes de redevance de ressources. J'invite à la sagesse du gouvernement, des parlementaires, en votre âme et conscience, de dépasser l'intérêt du marketing de quelques entreprises pour le bien commun des Québécois qui veulent qu'on gère leur eau de façon responsable. Et, s'il y en a qui en profitent, bien, que la société entière en profite, comme on a profité de l'hydroélectricité ou des choses comme ça dans le passé.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Roberval, il vous reste une minute.

M. Trottier: Je vais laisser M. Hudon...

Le Président (M. Bergman): M. Hudon.

M. Hudon (Marc): Un complément d'information possiblement. Je vais utiliser un exemple récent qui a eu lieu à Montréal, où un promoteur a dit qu'on devrait exporter l'eau du Québec. Moi, je tiens à vous dire que l'image que ça projetterait à l'intérieur du bassin des Grands Lacs, ce ne serait pas une bonne image de nous, au Québec, s'il fallait qu'un jour on se mette à faire ça dans le contexte qui s'en vient. Ce sera une décision de société à prendre si on décide de prendre une route en ce sens-là. Mais, quand vous me dites: Un des écueils à la mise en place d'une bonne loi comme celle qui s'en vient, c'est des promoteurs qui ont des idées comme ça mais qui sont méconnaissants de l'ensemble du risque que ça peut poser, nous, dans le travail que nous faisons dans les Grands Lacs, nous controns les initiatives de cette nature-là qui sont là par des promoteurs beaucoup plus, je dirais, importants et pesants et qui attendent le bon moment, la bonne circonstance où il va y avoir un agencement d'idées qui vont s'amalgamer ensemble et où on va en payer le gros prix, comme société, tous ensemble. Parce que ce n'est pas le projet comme tel qui va nous nuire, c'est ce qui va se faire ailleurs. Puis, quand on pense qu'il y a 2 millions de personnes à Montréal qui dépendent de l'eau du lac Ontario pour s'abreuver, sans compter tous les autres usages économiques, dont le récréotourisme, etc.

Le Président (M. Bergman): Malheureusement, le temps s'est écoulé. M. Hudon, M. Simard, M. Drolet, merci pour votre présentation. Merci d'être ici avec nous, aujourd'hui. Et j'ajourne les travaux jusqu'à mardi 16 septembre, à 9 h 30, où la commission se réunira à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine pour poursuivre ce mandat. Merci. Bonne soirée!

(Fin de la séance à 17 h 13)


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