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Version finale

41e législature, 1re session
(20 mai 2014 au 23 août 2018)

Le mardi 7 novembre 2017 - Vol. 44 N° 140

Mandat d'initiative - Utilisation des appareils de téléphonie mobiles au volant


Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Auditions

Société de l'assurance automobile du Québec (SAAQ)

CAA-Québec

Bureau du coroner

Ministère des Transports, de la Mobilité durable et de l'Électrification des transports
(MTMDET)

Sûreté du Québec (SQ)

Intervenants

M. Alexandre Iracà, président

M. Ghislain Bolduc

M. Marc H. Plante

M. Jean Habel

M. Guy Bourgeois

M. Martin Ouellet

M. Benoit Charette

M. Jean Boucher

*          M. Dave Leclerc, SAAQ

*          Mme Lyne Vézina, idem

*          Mme Sophie Gagnon, CAA-Québec

*          M. Marco Harrison, idem

*          Mme Isabelle Godbout, idem

*          M. Luc Malouin, Bureau du coroner

*          M. Paul-André Perron, idem

*          M. Jérôme Unterberg, MTMDET

*          M. Stéphane Martinez, idem

*          Mme Mélanie Dubé, idem

*          M. Patrick Després, SQ

*          M. Francis Bernardin, idem

*          Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Dix heures une minute)

Le Président (M. Iracà) : À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des transports et de l'environnement ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires et appareils électroniques.

La commission est réunie afin de procéder aux audiences publiques dans le cadre des consultations particulières réalisées relativement au mandat d'initiative sur l'utilisation des appareils de téléphonie mobiles au volant.

Alors, Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements pour ce mandat?

La Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Martel (Nicolet-Bécancour) sera remplacé par M. Charette (Deux-Montagnes).

Le Président (M. Iracà) : Merci beaucoup, Mme la secrétaire.

Auditions

Alors, voici l'ordre du jour de cet avant-midi. Nous entendrons les groupes suivants : la Société de l'assurance automobile du Québec et CAA-Québec. Alors, évidemment, je souhaite la bienvenue à tous, chers collègues, chers auditeurs, les gens dans la salle. Nous allons avoir un beau mandat, un beau mandat de consultations sur un sujet intéressant, qui préoccupe, j'en suis certain, une grande partie de la population.

Je vous demande... Je vais demander au premier groupe — alors, vous êtes déjà installés — de vous présenter ainsi que les personnes qui vous accompagnent. Je vous rappelle que vous disposez d'une dizaine de minutes pour votre exposé. Par la suite, nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Alors, sans plus tarder, la parole est à vous.

Société de l'assurance automobile du Québec (SAAQ)

M. Leclerc (Dave) : Merci, M. le Président, MM. les députés. C'est avec plaisir que la Société de l'assurance automobile du Québec participe aujourd'hui aux auditions de la commission pour échanger sur l'utilisation des appareils mobiles au volant. Je me présente, Dave Leclerc, je suis vice-président aux affaires publiques et à la stratégie de prévention routière. Je suis accompagné de Mme Lyne Vézina, qui est directrice de la recherche et du développement en sécurité routière à la SAAQ. Vous pouvez compter sur notre entière collaboration pour répondre à vos questions et, au besoin, vous revenir rapidement avec des compléments d'information.

Avant d'aborder plus spécifiquement l'utilisation d'appareils mobiles au volant, je me permets de mentionner que la mission de la société est de protéger la personne contre les risques liés à l'usage de la route. À cette fin, la société doit notamment veiller à ce que la législation en matière de sécurité routière soit adéquate et mener des actions de sensibilisation et de prévention.

Le cellulaire fait partie désormais de la vie de la majorité des Québécois. Selon le CEFRIO, en 2016, six adultes sur 10 possédaient un cellulaire, et cette proportion était de huit sur 10 chez les 18-44 ans. Bien que les appareils technologiques facilitent la réalisation de nombreuses tâches quotidiennes, leur utilisation peut devenir une source de distraction importante lorsque l'on conduit. En effet, conduire est une tâche complexe, qui exige toute notre attention, puisque le cerveau humain n'est pas conçu pour faire plusieurs tâches à la fois. Par exemple, texter en conduisant oblige à quitter les yeux de la route entre quatre et six secondes. À une vitesse de 90 kilomètres-heure, c'est comme traverser un terrain de football les yeux fermés.

Bien que de courte durée, l'effet de l'utilisation du cellulaire au volant est comparable à celui de conduire avec les facultés affaiblies par l'alcool en ce qui concerne le temps de réaction et le risque de collision. Plusieurs études démontrent en effet que l'utilisation du cellulaire au volant augmente le risque de collision. On parle en général de quatre fois plus pour le cellulaire, mais de 20 fois plus pour le texto. En effet, lorsque le cellulaire est utilisé au volant, on observe notamment que le temps de réaction pour freiner augmente, que la réalisation de tâches comme conduire en ligne droite est plus complexe, les obstacles sont plus difficiles à éviter et la perception visuelle est réduite.

Bien que nous sommes au fait des risques liés à l'utilisation du cellulaire au volant, il est difficile d'établir précisément son impact sur le bilan routier québécois. Effectivement, le nombre exact de décès causés par l'utilisation du cellulaire au volant n'est pas connu car les policiers ont besoin de preuves évidentes de son utilisation lors de l'accident pour se prononcer. Il existe donc très peu de rapports d'accidents qui en font mention comme cause principale de l'accident. Toutefois, la distraction au volant sous toutes ses formes, par exemple fumer, boire, manger ou, à la limite, texter, est l'une des causes les plus souvent mentionnées par les policiers dans les rapports d'accidents avec blessés et décès. La distraction est en cause dans la moitié des accidents avec dommages corporels et près du tiers dans les accidents mortels.

Quant au profil des contrevenants, les études démontrent que les conducteurs qui utilisent un appareil mobile au volant sont majoritairement des hommes âgés entre 20 et 44 ans. Dans ce cas comme dans toutes les problématiques de sécurité routière, une approche multidimensionnelle impliquant plusieurs intervenants est à privilégier, laquelle fait appel à des actions qui visent à changer les comportements, à améliorer les infrastructures routières et la sécurité des véhicules.

De son côté, pour contrer le phénomène de l'utilisation du cellulaire au volant et amener les conducteurs à adopter des comportements toujours plus sécuritaires, la société mise sur une stratégie d'intervention qui consiste à agir simultanément sur trois volets : tout d'abord, déployer en continu des actions de prévention et de sensibilisation; ensuite, en collaboration avec les agents de la paix, s'assurer que les contrôles soutiennent les messages de sensibilisation, augmentant ainsi le niveau de perception du risque d'être intercepté chez les conducteurs; et, enfin, veiller à ce que la législation soit adéquate.

En sensibilisation, les actions de la société ont d'abord porté sur le cellulaire au volant et, depuis 2011, incluent aussi le texto et la distraction de manière générale. Au cours des cinq dernières années, plus de 5 millions de dollars ont été investis pour mener des campagnes de sensibilisation en lien avec le cellulaire, le texto ou encore la distraction, qui ont été diffusées à la télé, à la radio, sur le Web et sur les médias sociaux, sans compter les nombreuses actions qui ont été déployées sur le terrain en collaboration avec nos partenaires.

De plus, comme il est souvent difficile de résister à la tentation d'utiliser son appareil mobile, la société a développé, en 2012, l'application Mode conduite. Cette solution simple et gratuite permet au conducteur de bloquer ses appels ou encore ses messages lorsqu'il est au volant en activant simplement l'application. Par ailleurs, pour inciter les changements de comportements, il est primordial que des mesures de contrôle adéquates soient en place afin de dissuader les contrevenants.

Annuellement, c'est environ 64 000 constats d'infraction en lien avec l'utilisation d'un appareil mobile au volant qui sont remis chaque année par les policiers et les agents de la paix. En analysant les infractions, on constate que le niveau de récidive est élevé. Il se situe à 28 % pour une deuxième infraction ou plus. Pour repérer les conducteurs délinquants, plusieurs stratégies sont donc utilisées. Par exemple, les contrôleurs routiers de la société, en collaboration avec les policiers, ont récemment mené des interventions à bord d'un autobus afin d'être placés plus haut pour détecter les infractions liées à l'utilisation du cellulaire au volant, tant chez les automobilistes que chez les conducteurs de véhicules lourds. Ces actions, qui sont souvent reprises par les médias, contribuent à accroître la perception du risque d'être intercepté si l'on utilise un appareil mobile lorsqu'on conduit. Enfin, les actions de sensibilisation et de contrôle doivent être appuyées par une législation adéquate et facile d'application.

L'interdiction de faire usage d'un appareil muni de fonctions téléphoniques tenu en main au volant d'un véhicule est entrée en vigueur, je vous le rappelle, en 2008 à la suite d'une modification législative. L'amende est de 80 $ à 100 $ et, depuis 2015, le nombre de points d'inaptitude au dossier du conducteur en infraction est passé de trois à quatre à la suite d'un changement réglementaire. L'imposition de quatre points est très sévère, puisque, par exemple, pour un apprenti ou un nouveau conducteur, cela entraîne immédiatement la perte de son permis de conduire pour une durée minimale de trois mois. Il faut aussi rappeler que l'établissement des sanctions doit faire en sorte que le contrevenant ait la perception qu'il sera puni et que le délit soit puni par une peine proportionnelle à ce délit. Il faut également trouver un juste équilibre afin que la combinaison du montant de l'amende et du nombre de points d'inaptitude n'amène pas les policiers à être réticents à l'appliquer.

Consciente de l'impact du fléau de l'utilisation des appareils mobiles au volant, la société a entrepris une vaste réflexion. En effet, en collaboration avec le ministère des Transports, de la Mobilité durable et de l'Électrification des transports, la société a tenu, au début de l'année, une consultation publique sur la sécurité routière dans 11 villes et sur le Web. Il s'agissait ici d'une première. Le bilan est positif. Des milliers de personnes ont fait des suggestions pour améliorer la sécurité des usagers de la route, notamment en matière de distraction. Par exemple, poursuivre la sensibilisation, augmenter la sévérité des sanctions, en particulier pour les récidivistes, accroître les contrôles et punir toutes les actions incompatibles avec la conduite, comme fumer, boire ou manger.

Dans sa réflexion, la société a considéré l'ensemble des commentaires et suggestions recueillis en plus d'analyser, comme elle le fait toujours, les meilleures pratiques existantes dans d'autres administrations. À la suite de ces analyses, différentes recommandations de modifications législatives seront faites par la société au nouveau ministre des Transports visant spécifiquement la distraction au volant.

Là-dessus, je vous remercie, et nous sommes disposés à répondre à vos questions.

• (10 h 10) •

Le Président (M. Iracà) : Merci beaucoup, M. Leclerc. Vous êtes plus que dans les temps. Félicitations! Vous vous êtes pratiqué pour arriver juste correct.

Alors, nous allons débuter la période d'échange, toujours avec la partie gouvernementale, et je vais céder la parole au député de Mégantic. La parole est à vous pour un temps approximatif de 15 minutes.

M. Bolduc : Merci, M. le Président. Bonjour, monsieur. Bonjour, madame. Il me fait plaisir de vous recevoir ici aujourd'hui sur un sujet qui est très populaire, je dirais, mais qui est aussi très controversé, puisqu'il y a beaucoup d'adhérents, il y a beaucoup de clients qui utilisent les téléphones cellulaires.

Mais avant de s'attaquer directement au cellulaire au volant, est-ce que vous avez une idée générale du nombre d'accidents, avec ou sans blessure, mais total, puis est-ce qu'il y a une croissance sur les routes du Québec?

M. Leclerc (Dave) : En fait, est-ce qu'on a une idée générale? On a une idée générale selon les rapports de police. Comme je le disais tantôt, dans l'allocution, c'est que, dans le fond, les policiers doivent avoir une preuve probante de l'utilisation du cellulaire pour l'inscrire au rapport de police. Donc, le terme distraction, lorsqu'on parle d'accident, est très général. Il implique toutes sortes de distractions. Ça peut être la distraction en raison d'un animal, ça pourrait être la distraction en bordure de route, ça peut être la distraction à l'intérieur d'un véhicule. On parlait de boire, manger ou même fumer. Donc, est-ce qu'on est capable immédiatement de parler de combien il y a de décès ou encore de blessés sur nos routes, au Québec, en lien avec l'utilisation du cellulaire? Difficile de l'évaluer.

Toutefois, le terme «distraction» est mentionné dans les rapports de police à peu près 50 % du temps dans les accidents impliquant des dommages corporels. Pour ce qui est des décès, on parle à peu près de 30 %. Mais distraction, je vous le rappelle, ça englobe l'ensemble des distractions qui sont connues. Est-ce que c'est en augmentation? Je vous dirais qu'au cours des dernières années on remarque que c'est relativement stable. Pour ce qui est des accidents mortels, pour la distraction, on parle environ de 30 %.

M. Bolduc : Maintenant, quand on regarde l'ensemble du portrait, il y a une autre variable qui, pour moi, là... nous semble assez évidente, c'est la question de la densité de trafic ou du volume de trafic sur des routes. C'est entendu que, dans des secteurs ruraux, où il y a peu de trafic, le risque d'accident est complètement différent de celui de Montréal, mais, quand les gens sont arrêtés dans le trafic, ils peuvent texter sans être dérangés ou, au fond, ils ne font pas partie du trafic. Comment on traite ça, ce genre d'affaires là? Est-ce que la société a des données sur les différents impacts de densité, puis le trafic de Montréal, puis qu'est-ce qu'on fait quand quelqu'un texte ou parle au téléphone, mais l'auto est arrêtée?

M. Leclerc (Dave) : Bien, évidemment, je ne me substituerai pas aux méthodes d'enquête des policiers, parce que les policiers font des interventions, particulièrement aux intersections, pour justement prendre les conducteurs en flagrant délit, je dirais, de texter ou encore de parler au téléphone cellulaire lorsque les gens sont arrêtés aux intersections.

Pour ce qui est du niveau de la densité, selon nos données et statistiques... Et je dois vous dire qu'on fait des enquêtes terrain durant particulièrement l'été vraiment, pour aller valider certaines informations, et là on parle d'observations, et on observe des milliers, voire des centaines de milliers de comportements chaque été pour voir quel est, justement, le comportement des usagers.

Ce qu'on remarque, c'est que, dans les régions de Montréal, Montérégie et Laval, il y a un niveau de distraction plus élevé qu'ailleurs au Québec. Donc, pour ce qui est de la densité, vous avez raison là-dessus, effectivement, il y a possiblement plus de moments pour être distrait lorsqu'on est peut-être dans un trafic plus dense, plus lent, plus ralenti. On est peut-être aussi... comme conducteur, peut-être qu'on se dit : Bien, justement parce que ça va moins rapidement, parce qu'il y a de la densité, parce que je suis arrêté, il y a moins d'impact sur ma distraction. En fait, est-ce que ma distraction a moins d'impact sur mon comportement? Peut-être que c'est le cas, tout simplement, mais effectivement, ça marche aussi... on remarque que la distraction est plus grande dans les régions plus denses.

Le Président (M. Iracà) : M. le député.

M. Bolduc : Merci, le Président. Vous parlez, à un moment donné, aussi des camions. Puis j'ai une remarque à faire ici puis je voudrais vous entendre là-dessus, parce que, comme vous le savez très bien, les fameux CB, dans les camions de vrac, sont en utilisation depuis au moins 30 ans et ils ont des réseaux très efficaces et très fonctionnels. L'arrivée des téléphones cellulaires dans les voitures n'en est qu'une génération subséquente, si vous voulez.

Est-ce qu'il y a des données probantes sur, par exemple, la distraction au volant dans les camions de transport, etc.? Parce que ça fait tellement longtemps, on doit avoir quelque chose là-dessus.

M. Leclerc (Dave) : Je vais laisser ma collègue Mme Vézina répondre.

Le Président (M. Iracà) : Mme Vézina.

Mme Vézina (Lyne) : Bien, effectivement, par rapport aux CB, bien, on n'a pas de données précises par rapport aux CB, mais cependant il y a une exclusion dans la législation quand on parle d'un appareil... quand on dit... l'article 439.1 du Code de la sécurité routière prévoit qu'on ne doit pas tenir en main un appareil muni d'une fonction téléphonique, il y a une exclusion pour les CB.

Cependant, ça ne veut pas dire que ce n'est pas distrayant, et c'est un peu pour ça aussi que les efforts de Contrôle routier Québec prévoient, dans le fond, s'adresser à cette question-là de façon particulière, et c'est pour ça qu'ils ont fait, en collaboration avec les organisations policières, des interventions plus ciblées, plus marquées auprès des conducteurs de poids lourds en regard de la distraction.

M. Bolduc : Maintenant, quand je regarde sur les amendes incluant les nouvelles amendes, on peut considérer ici que le Québec, en fait, parmi toutes les provinces, est à peu près le plus bas en termes d'amendes financières. Sur les points, il y a l'Île-du-Prince-Édouard qui a cinq points et le Manitoba, les autres sont trois ou quatre. Mais pour l'amende elle-même spécifiquement, le Québec actuellement est le plus bas.

Est-ce que vous avez des commentaires sur cette situation-là? Est-ce que vous croyez qu'il devrait y avoir, je dirais, des ajustements?

M. Leclerc (Dave) : Mais, en fait, ce que je vous dirais là-dessus, c'est que notre analyse a été faite depuis quelques mois, particulièrement à la suite aussi de la consultation publique qu'on a menée cet hiver. Il est clair que la population, je pense, est prête à une augmentation des sanctions, et je vais parler de sanctions plutôt générales parce qu'évidemment on parle d'amendes financières. On est effectivement les plus bas au Canada. On voit que les autres provinces ont commencé à bouger ou ont commencé à faire part de certaines intentions.

Évidemment, ça fait partie de nos réflexions parce qu'il faut être aussi comparables. On essaie toujours de se comparer un peu à ce qui existe dans les autres administrations, et effectivement peut-être que d'être plus dissuasif, ça serait favorable. Alors, est-ce qu'on sera en mesure de faire des recommandations en ce sens? Je pense que oui. Je pense que tout le monde est prêt au Québec d'avoir des sanctions plus sévères en termes de distraction au volant.

Le Président (M. Iracà) : Merci. M. Leclerc. M. le député de Maskinongé.

M. Plante : Merci beaucoup, M. le Président. M. Leclerc, Mme Vézina, bienvenue.

Tout d'abord, j'aimerais souligner vos nouvelles campagnes publicitaires au niveau de la distraction, mais surtout du texto au volant qui, je crois, sont marquantes et portent leurs fruits. À deux doigts de la mort est une signification très, très lourde dans la tête des gens, et je pense que vous avez bien ciblé, justement, dans cette campagne publicitaire là, le public que vous tentez de joindre, là, parce que, même dans vos données et dans votre présentation, vous parlez que c'est les plus jeunes surtout qui sont les plus victimes de distractions au volant.

En parlant de distraction au volant, j'aimerais qu'on parle d'équipements dans nos voitures qui sont de plus en plus équipées. De plus en plus, on peut même texter de façon vocale avec les commandes au volant. On peut téléphoner quand on est au volant, changer la station de radio. On sait que maintenant on a des chargeurs... et puis c'est même ça, c'est le MP3, là, qui fonctionne dans les voitures, ça fait que ce n'est même plus des chargeurs de disques. On parlait au début, il y a quelques années, des accidents causés par les changements de disques. Maintenant, plus besoin, donc tout est centralisé entre l'appareil mobile et la voiture. De plus en plus, les constructeurs automobiles trouvent des façons de faciliter la vie des conducteurs, mais je crois, à mon avis, qu'il s'agit quand même de distractions pour le conducteur, et j'aimerais vous entendre parler là-dessus.

• (10 h 20) •

M. Leclerc (Dave) : Bien, en fait, lorsqu'on parle de distractions générales, et c'est ce que je mentionnais en début d'ouverture tantôt, c'est de dire que, oui, la technologie facilite les tâches quotidiennes, particulièrement aussi dans les voitures. On remarque de plus en plus effectivement que les constructeurs permettent maintenant de texter de façon vocale à l'intérieur du véhicule. Même moi, mon véhicule a cette fonctionnalité-là, ce qui peut être très pratique dans certains cas.

Mais évidemment, comme je le disais également, on a besoin de toute notre concentration lorsqu'on est au volant. Donc, c'est une tâche quand même assez complexe, il y a beaucoup d'informations qui rentrent. Est-ce que la technologie vient nous aider? Oui, à certains niveaux, mais il faut avoir un juste dosage. On a l'aide à la conduite, on a, par exemple, maintenant, les GPS inclus dans les équipements de voiture. Lorsqu'on dit les GPS, oui, c'est utile à la conduite, mais il faut peut-être prévoir son trajet avant de quitter. Avant de partir en voyage, il faut peut-être inscrire notre trajet à l'intérieur pour ne pas avoir justement à toucher aux appareils.

Alors, oui, il y a du bon, mais il y a tout cet aspect-là qui amène une distraction supplémentaire, et c'est pour ça que la sensibilisation parle aussi de distractions plus générales. On n'est pas uniquement sur le cellulaire texto, on est... De façon générale, il faut avoir de l'attention pour conduire et avoir un comportement sécuritaire sur la route. Alors, effectivement, les équipements dans les automobiles sont intéressants, mais il faut être prudent dans leur utilisation. Il faut être conscient que ça amène une distraction supplémentaire, et évidemment ça fait partie des messages de la société.

Le Président (M. Iracà) : Merci, M. Leclerc. Je vais céder maintenant la parole au député de Sainte-Rose.

M. Habel : Merci beaucoup, M. le Président. À mon tour de saluer M. Leclerc et Mme Vézina. Merci d'être ici pour parler d'un sujet très important qui est l'utilisation du texto au volant. Je pense que l'une des statistiques que vous avez données, c'est l'exemple de texter en conduisant qui oblige à quitter la route des yeux pendant quatre ou six secondes, qui est l'équivalent d'un terrain de football. Je pense que juste cet exemple-là est très frappant.

Vous avez parlé de plusieurs distractions au volant : fumer, boire, manger, texter, il y a aussi l'utilisation des GPS. Est-ce que vous avez été capables de voir quel était le plus distractif entre les cinq composantes?

M. Leclerc (Dave) : Bien, évidemment, il y a toute la notion de qu'est-ce que ça exige, la tâche qu'on est en train de faire. Vous avez parlé de boire, manger, texter. On a même vu des gens se brosser les dents ou encore se passer la soie dentaire, là, ça va jusque-là, ou encore tricoter au volant. Alors, voyez-vous, il y a toutes sortes de distractions, toutes sortes de tâches.

Évidemment, l'aspect de texter est beaucoup plus difficile, parce qu'évidemment ça prend une certaine dextérité manuelle, je dirais, et, en plus, il faut être là de façon mentale. Donc, c'est cognitif. Donc, il faut réfléchir à la discussion qu'on a. Donc, c'est clair, et je le disais, c'est 20 fois plus risqué, il y a 20 fois plus de risques de collision qu'uniquement le cellulaire en main. Pourquoi? Parce qu'effectivement il y a la manipulation de l'appareil qui est difficile, mais aussi toute l'implication intellectuelle qu'il faut avoir dans cette discussion-là. Alors, ça amène beaucoup plus de risques et un plus grand risque de collision. Alors, effectivement, le texto est, parmi les distractions, possiblement la distraction la plus importante.

Le Président (M. Iracà) : M. le député de Sainte-Rose.

M. Habel : Oui. Merci, M. le Président. Vous avez parlé aussi de la campagne de sensibilisation, 5 millions investis, puis mon collègue de Maskinongé a parlé aussi de l'impact, disons, frappant de cette campagne. Vous avez parlé aussi de 64 000 constats d'infraction. Est-ce que vous êtes capables de voir l'évolution? Est-ce qu'il y a eu plus de constats d'infraction suite à cette sensibilisation-là ou il y a eu moins de constats d'infraction suite aux compagnes de sensibilisation?

Le Président (M. Iracà) : M. Leclerc.

M. Leclerc (Dave) : Oui, merci. Je ne peux pas répondre de façon très spécifique. Tout ce que je vous dis, c'est qu'en moyenne, c'est à peu près 64 000. Ça peut varier d'une année à l'autre, le nombre d'infractions, et on les a évidemment selon les années. C'est sûr que, dans les débuts des années 2000... on était en 2008, il y en avait beaucoup moins. Après ça, ça a augmenté évidemment parce que, bon, les policiers en ont constaté davantage. Aussi, avec la présence de plus en plus... le cellulaire, texto, le téléphone intelligent est de plus en plus disponible pour M. et Mme Tout-le-monde, donc on en voit davantage. On parlait de six adultes sur 10. Alors, clairement, peut-être que le nombre d'infractions va augmenter. Présentement, on est dans une moyenne de 64 000.

En lien avec la sensibilisation, ce qu'il est important de dire, c'est que, lorsqu'on fait une campagne de sensibilisation, si on veut que la recette fonctionne bien, il faut que les policiers appuient les messages de sensibilisation en même temps que le message est en ondes. Donc, si vous avez vu la campagne récente de la société à la télévision, à la radio, peu importe, si vous l'avez entendue, il faut que parallèlement à ça il y ait des actions terrain menées par les policiers, et là le message vient d'être augmenté. Donc, oui, c'est important, il faut faire attention, il y a un risque, mais aussi il y a le risque d'être intercepté.

Est-ce qu'il y a un lien nécessairement de dire : Il y a plus d'infractions lorsqu'il y a une campagne de sensibilisation? Pas nécessairement, même possiblement moins parce que les policiers aussi vont faire de la sensibilisation. Ils vont intervenir, mais aussi en matière de sensibilisation. Donc, ce n'est pas parce qu'ils arrêtent quelqu'un, qu'ils interceptent un conducteur contrevenant, qu'ils vont nécessairement appliquer une infraction, particulièrement dans les temps de campagne. Il faut avoir un message aussi cohérent entre les organisations pour être certain de dire : Je t'informe que c'est dangereux, il y a un risque, tu es intercepté. Dans certains cas, il y aura une contravention. Peut-être que, dans d'autres cas, il y aura uniquement de la sensibilisation. Évidemment, ça appartient à la discrétion du policier, tout simplement. Donc, je ne suis pas capable de faire l'adéquation parfaite entre sensibilisation et contravention.

Le Président (M. Iracà) : Merci, M. Leclerc. Je vais céder la parole maintenant au député d'Abitibi-Est. Il vous reste environ 2 min 30 s.

M. Bourgeois : Merci, M. le Président. M. Leclerc, Mme Vézina, écoutez, moi, j'ai quelques petits points plus directs parce que vous me parlez de recommandation de modification, vous n'en avez pas vraiment fait état, vous avez parlé plus des constats, des analyses qui ont été faites. J'aimerais ça que vous nous donniez peut-être un peu, de ce côté-là, vos recommandations, des pistes, dans un premier temps.

Dans un deuxième temps, est-ce qu'à votre connaissance il existe des systèmes, au niveau des véhicules, permettant de bloquer l'utilisation de ce système-là au niveau du conducteur? Et est-ce qu'il y a des juridictions qui en font l'application?

M. Leclerc (Dave) : Merci. Pour les recommandations, vous comprendrez qu'on n'a pas encore eu la chance de rencontrer le nouveau ministre, M. Fortin, et vous me permettrez de lui parler de nos recommandations plus spécifiquement parce qu'on souhaite avoir effectivement un échange sur ça. La seule chose que je peux vous dire par contre, c'est clair que, pour nous, je l'ai mentionné tantôt, on m'a questionné sur le niveau des sanctions, pour nous, il est clair que la sanction n'a pas évolué depuis 2008. On est rendus en 2017. Alors, c'est clair que la sanction devra, à notre sens, évoluer. De quelle façon? Ça reste à déterminer. Je vous ai parlé tantôt de la récidive, je vous ai parlé de différents éléments, tout ça fait partie de notre analyse.

Et où est-ce aussi... je dirais, où sont rendus les Québécois? Et les Québécois nous ont dit, en consultation publique, clairement : On est prêts à des sanctions plus sévères, il faut intervenir. Alors, ça va faire effectivement partie de notre analyse et ça fera partie certainement de nos recommandations auprès du ministre, mais je vais me limiter là pour l'instant.

Pour ce qui est des brouilleurs d'ondes, si vous me permettez l'expression, les brouilleurs d'ondes, il faut bien comprendre qu'ils sont interdits présentement par Industrie Canada. On ne peut en fabriquer, on ne peut en importer, on ne peut en vendre. Alors, c'est interdit de façon fédérale. C'est de juridiction fédérale, et, à notre connaissance, non, il n'y a pas d'administration qui adopte cette avenue-là.

L'autre enjeu qu'il y a avec les brouilleurs d'ondes, c'est effectivement de pouvoir limiter ou de circonscrire le brouillage d'ondes aux conducteurs. Est-ce qu'on doit interdire à tous et chacun d'utiliser son cellulaire texto dans la voiture lorsqu'on conduit? Pas certain, et la capacité du brouillage d'ondes est plutôt limitée dans ce sens-là. Par contre, on sait que certains constructeurs automobiles réfléchissent à cette situation-là et à ce genre de solution là pour voir de quelle façon on serait capable de mieux contenir cette envie de texter ou encore de parler au cellulaire au volant.

Le Président (M. Iracà) : Merci, M. Leclerc. Ceci met fin au bloc d'échange avec la partie gouvernementale. Nous allons procéder au deuxième bloc d'échange avec l'opposition officielle. Alors, je vais céder la parole au député de René-Lévesque.

M. Ouellet : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, à mon tour de vous saluer, messieurs mesdames.

D'entrée de jeu, je voudrais saluer le travail que vous avez fait pour le mandat d'initiative, mais j'aurais aimé plus de mordant. Je vais être honnête avec vous, je comprends que vous voulez attendre l'arrivée du nouveau ministre... bien, l'arrivée... la rencontre avec le nouveau ministre des Transports, mais on est présentement en mandat d'initiative sur la problématique des cellulaires au volant, et je ne pense pas que nos citoyens, citoyennes au Québec pensent qu'il faut que ça devienne un enjeu politique. Je pense que les gens sont au courant qu'on fait face à un fléau de danger et que c'était la place ce matin pour discuter.

Donc, j'aurais aimé ça que vous vous mouilliez un peu plus. Je comprends que vous voulez échanger avec le ministre, mais on est en mandat d'initiative ce matin, et j'aurais aimé obtenir, de votre part, les recommandations, déjà des pistes de solution, parce que votre consultation a commencé au début de l'année. Vous semblez avoir entre les mains des recommandations. Donc, je suis un peu... honnête avec vous, je suis un peu déçu. J'aurais aimé ça que ce matin on puisse avoir le fruit de votre travail, parce qu'on vous a ce matin, on a les gens de la CAA, on va avoir le bureau du coroner. On va avoir un paquet de gens aujourd'hui qui vont venir nous nourrir notre réflexion et malheureusement, en commençant avec vous, vous vous gardez un moment de discussion avec le ministre.

Alors, je suis un peu surpris et même déçu, je vous dirais. J'aurais aimé et j'aimerais encore, si c'est possible, de vous entendre sur des recommandations suite à votre consultation, parce que c'est... Je pense que c'est majeur, là, tout près de 11 villes, puis vous avez fait ça sur le Web, puis je pense que vous avez fait ça très, très, très scientifique, là. Ça veut dire qu'on est capable de ressortir des tendances de ce qu'il y a eu dans votre consultation. Ça fait que j'aimerais vous entendre là-dessus, s'il vous plaît.

• (10 h 30) •

M. Leclerc (Dave) : En fait, si vous me le permettez, je dirais simplement que, oui, la consultation publique nous a amené certains constats, des constats aussi qu'on avait déjà faits par ailleurs dans nos analyses en analysant aussi d'autres juridictions. Clairement, et je l'ai mentionné tantôt sans rentrer dans l'exactitude de nos recommandations, c'est clair qu'il va falloir augmenter les sanctions. Ça, pour nous, c'est une évidence, et les Québécois sont rendus là. Et, si vous avez regardé, effectivement, la synthèse de la consultation publique, vous constatez que les gens souhaitent des sanctions plus sévères. On le retrouve également dans plusieurs sondages à la suite de nos campagnes pour voir un peu comment nos campagnes ont été appréciées et comment les gens les ont reçues, et les gens nous disent clairement qu'ils souhaitent des sanctions plus sévères.

Maintenant, les travaux de la commission pourraient nous amener à avoir une autre réflexion ou à une analyse plus en profondeur. Vous faites un mandat d'initiative. Donc, pour nous, le travail que la commission fera après avoir entendu les différents intervenants sera certainement quelque chose qui viendra alimenter notre réflexion.

Deuxièmement, cet été aussi, on a mené des enquêtes, encore, terrain sur la distraction et on est allés vérifier certains aspects, entre autres chez les piétons. Est-ce qu'on doit peut-être intervenir chez les piétons? La question se pose. Il y a certaines provinces qui ont même parlé d'intention. Toutefois, chez les piétons, il faut valider quel est leur comportement présentement sur les routes du Québec. Alors, cet été, nous avons mené des enquêtes terrain d'observation sur le comportement, oui, des automobilistes en lien avec la distraction, mais également des piétons. Alors, les résultats de ça ne sont pas encore complétés. La compilation n'est pas encore complétée parce que c'est des centaines de milliers d'informations qu'on a à compiler et à analyser, et ça, ça va faire partie effectivement de notre réflexion, en plus des travaux de la commission.

Le Président (M. Iracà) : M. le député.

M. Ouellet : Merci. Donc, vous parlez de sévérité des sanctions. Donc, on peut penser qu'on parle d'augmentation des amendes, mais aussi de l'augmentation des points d'inaptitude suite à une infraction, ou même à multiplier dans le cas de récidive. Je ne vous paraphrase pas, mais ça peut tendre jusque-là.

M. Leclerc (Dave) : Lorsqu'on parle de sanctions, c'est un amalgame de tout ça, effectivement. C'est les amendes, ça peut être les points, ça peut être la notion de récidive, c'est un ensemble de tout ça. «Sanctions» est très large. Alors, pour nous, effectivement, il faut augmenter la sévérité.

Le Président (M. Iracà) : Merci, M. Leclerc. M. le député.

M. Ouellet : Bien, écoutez, de ce que je me souviens, vous me corrigerez si j'ai tort, mais je crois que le ministre veut déposer son projet de loi avant les fêtes. Alors, assurément, on va espérer que cette rencontre... j'espère qu'elle est cédulée à votre agenda avec le ministre.

M. Leclerc (Dave) : Oui, je vous le confirme.

M. Ouellet : On a l'opportunité de lire dans les médias son agenda de ministre. Alors, j'espère que vous allez être inscrit très prochainement, parce qu'effectivement c'est un fléau. Le collègue de Mégantic faisait mention de la distraction possible ou augmentée dans le cas du trafic. Mais je vous dirais que, pour moi, pour rouler sur la 138, il y a d'autres genres de problèmes routiers qui peuvent survenir, notamment la présence d'animaux qui peuvent traverser la route, la somnolence aussi, le longue distance sans croiser quelqu'un qui fait qu'effectivement on peut être plus distrait. Ça fait que je pense que, dans votre analyse... Je présume que, dans votre analyse, il va y avoir aussi cette différence entre la conduite urbaine et la conduite en milieu plus rural ou, du moins, dans des routes, je dirais, plus secondaires, une 138 ou une 132 à double voie qui, malheureusement, amène des rencontres transversales plus fréquentes comparativement à une autoroute.

J'aimerais revenir un peu sur les applications technologiques. Vous avez parlé dans votre introduction de votre application Mode conduite. Combien de téléchargements vous avez eus?

M. Leclerc (Dave) : J'y vais de mémoire parce que, là, mes chiffres sont... je les ai... C'est environ 5 000 à mon souvenir. Il faut dire, par contre, que l'application Mode conduite, qui a été développée en 2012, elle était uniquement applicable pour Android, parce qu'à l'époque on avait fait même des démarches auprès de Apple, mais Apple ne souhaitait pas que certaines applications interviennent sur des fonctions natives du téléphone comme le cellulaire ou le texto. Donc, évidemment, l'application s'est limitée au mode uniquement Android.

Ce qu'il faut dire aussi, c'est qu'il y a d'autres entreprises, d'autres secteurs qui ont développé ce genre d'application, je pense, même certaines compagnies d'assurance privées qui ont développé certaines applications. Évidemment, nous, c'était une solution qu'on voulait proposer. On ne voulait pas simplement faire uniquement de la sensibilisation et de la prévention. On voulait offrir une opportunité, une solution au conducteur. On a développé cette application-là, d'autres en ont fait de même. Et on est contents aussi de constater que maintenant... et là je parle d'Apple uniquement... a, dans sa dernière mise à jour, proposé ce genre, je ne dirais pas d'application, mais de fonction téléphonique qui permet de bloquer les messages et les téléphones entrants tout simplement en envoyant aussi un message à son interlocuteur pour dire : Je suis présentement en train de conduire, je te rappelle plus tard ou je texte plus tard, peu importe. Et ça, pour nous, c'est important parce qu'on le disait d'entrée de jeu : Les gens ont de la difficulté à s'empêcher de répondre, hein? L'enjeu, là, c'est vraiment une question... On devient presque... C'est une dépendance, le téléphone et le cellulaire. Lorsque ça sonne, lorsque ça vibre, on se sent presque obligé de répondre de façon immédiate.

Alors, il faut amener ce genre de solution là pour permettre aux automobilistes d'avoir des options. Effectivement, il y a les mains-libres, il y a les différentes technologies dans la voiture. Mais souvent ce qu'on dit aussi, c'est que, si vous êtes incapables de vous empêcher, prenez le téléphone, fermez-le ou mettez-le dans le coffre de la voiture tout simplement pour vous empêcher... Mais les applications mobiles, au moins, donnent cette opportunité-là d'avoir... et d'être conscient aussi, de dire : Il y a des outils qui existent. Je ne serai pas impoli avec personne si je ne réponds pas. Je vais tout simplement mentionner que je suis en conduite automobile et que ce n'est pas le moment de répondre. Alors, effectivement, les applications sont intéressantes comme solutions proposées au conducteur.

Le Président (M. Iracà) : Merci, M. Leclerc. Il vous reste deux minutes.

M. Ouellet : Effectivement, c'est une des bonnes mises à jour, le dernier IOS. Le reste, on en reparlera dans un autre mandat d'initiative. Mais effectivement moi, je l'utilise, et ça envoie des messages directement aux gens qui nous envoient des textos. Est-ce que vous seriez favorables à ce que ces nouvelles fonctions là, qui sont sur Apple, mais qui pourraient être sur Android ou sur Samsung, peu importe, là, deviennent obligatoires de facto? Lorsqu'on arrive dans une automobile, c'est appliqué et finalement c'est impossible ou, dans le cas d'urgence... un peu comme on a du verrouillage de nos téléphones si on n'a pas le code, mais, si on a un appel d'urgence, on a moyen de contourner pour une situation x. Est-ce que vous seriez favorables à ça? Est-ce qu'on pourrait aller jusque-là?

Le Président (M. Iracà) : M. Leclerc.

M. Leclerc (Dave) : En fait, la question est bonne, et, rapidement, comme ça, je vous dirais que je serais hésitant à l'imposer parce que ça reste qu'on est dans le domaine du comportemental, et ça a son effet limité, l'application, parce qu'il faut l'activer. C'est un choix personnel, hein? Chaque conducteur doit choisir de ne pas texter ou de ne pas répondre au cellulaire. C'est un choix, c'est un comportement. C'est pour ça, d'ailleurs, que la société travaille beaucoup en prévention et en sensibilisation. C'est une action personnelle dans sa voiture. De mettre active l'application, c'est un geste, il faut être conscient de le poser. Donc, ça a un effet quand même limité. Combien de personnes qui sont incapables de s'empêcher? Peut-être qu'ils vont commencer à l'utiliser au début puis peut-être que, par la suite, ça va arrêter après deux, trois fois, quelques trajets, ils vont l'oublier. Alors, ça a quand même un effet limité, je vous dirais, les applications, parce que ça nécessite un geste.

Le Président (M. Iracà) : Merci beaucoup. Il vous reste une minute.

M. Ouellet : Bien, écoutez, j'ai effectivement vu vos campagnes de sensibilisation. Elles sont très bonnes, elles sont très frappantes. On y va sur la conséquence. Vous parliez tout à l'heure que c'est comportemental. Est-ce qu'à la société vous avez pensé aussi faire des publicités ou de la sensibilisation sur comment agir avant d'entrer dans l'auto, où est-ce qu'on aurait des comportements... je ferme mon cellulaire ou je mets mon application? Parce que, là, on y va sur la conséquence de texter. Avez-vous réfléchi sur changer le comportement, mais avant la mise en route?

Le Président (M. Iracà) : En 30 secondes, M. Leclerc.

M. Leclerc (Dave) : 30 secondes? C'est une très bonne suggestion. Ça fait toujours partie de nos stratégies, je dirais, publicitaires pour voir de quelle façon on doit travailler sur quel angle, sur quel axe pour avoir le plus d'effet possible, et cette idée-là, elle est intéressante. On le travaille aussi sur le terrain avec nos partenaires. Donc, peut-être dans des actions plus limitées, mais plus directes avec le citoyen, ce genre d'intervention là peut effectivement être passé comme message par nos équipes.

Le Président (M. Iracà) : Merci beaucoup. Alors, ceci met fin au bloc d'échange avec l'opposition officielle. Nous allons procéder à un nouveau bloc d'échange, le dernier mais non le moindre, avec le deuxième groupe d'opposition, et je vais céder la parole immédiatement au député de Deux-Montagnes.

M. Charette : Merci, M. le Président. M. Leclerc, Mme Vézina, merci d'être avec nous ce matin. Le temps est très, très limité, donc ce sera de brèves questions, pour ma part.

Vous avez mentionné qu'il n'y a pas eu de modifications réglementaires ou législatives au Québec depuis 2008. Vous avez mentionné... peut-être réglementaire avec l'augmentation d'un point de démérite, effectivement, mais essentiellement, depuis 2008, pas de modification majeure. Vous avez mentionné que le Québec, par rapport aux autres provinces, est la province qui pénalise, en quelque sorte, le conducteur fautif de façon moins sévère. Est-ce que les changements au niveau des autres provinces ont été faits récemment ou ça date d'un certain nombre d'années, pour l'essentiel?

M. Leclerc (Dave) : Bien, je vous demanderais, Mme Vézina...

Le Président (M. Iracà) : Oui, Mme Vézina.

Mme Vézina (Lyne) : Bien, on voit que... Peut-être rappeler... Le Québec a été aussi la deuxième province à introduire une interdiction du cellulaire au volant après la Nouvelle-Écosse, donc, en 2008. Les autres provinces et territoires ont suivi par la suite, et il y en a certaines qui ont effectivement révisé leur législation. On parle de 2015. On parle aussi qu'il y a des intentions qui ont été annoncées, là, par certaines administrations récentes, donc, peut-être qui... C'est un domaine en évolution, je dirais. La plupart des administrations ont introduit leurs mesures à peu près en même temps et se voient en droit ou en... se voient un peu l'obligation de réviser ces restrictions-là compte tenu de l'évolution du phénomène.

Le Président (M. Iracà) : Oui, M. le député.

M. Charette : Merci. Est-ce que diriez que le Québec est en retard par rapport à ses voisines en termes de soit législation ou encore de modification, de mise à jour de ces modifications?

Le Président (M. Iracà) : Oui, M. Leclerc.

• (10 h 40) •

M. Leclerc (Dave) : En fait, je vous dirais que, clairement, sur les amendes, bien, il n'y a pas eu de changement depuis 2008. Est-ce qu'on est en retard? Ça reste à voir parce que le taux de... On le disait tantôt, on n'est pas capables de savoir clairement l'impact du cellulaire, texto sur le bilan routier. On a une approximation en termes de distraction, et ce taux-là est assez stable. Alors, en ce sens-là, est-ce qu'on est vraiment en retard? Difficile à dire. Toutefois, j'aurais tendance à vous dire qu'en amenant peut-être des sanctions plus sévères, en ajustant la législation, peut-être qu'effectivement on aura un impact plus marqué et peut-être qu'on va remarquer une diminution. Évidemment, ça reste à voir, et c'est plein d'éléments qui doivent jouer en même temps pour avoir un impact sur le bilan routier. Alors, difficile de dire maintenant si on est en retard parce que, pour le nombre de points d'inaptitude, on se situe dans la moyenne canadienne, et, je vous le rappellerai, les points d'inaptitude, c'est très important, entre autres, pour les nouveaux conducteurs, les apprentis. Certaines provinces s'attardent effectivement à des sanctions plus sévères aussi chez les apprentis, comme l'Ontario. On a un système qui cible particulièrement les apprentis, les nouveaux conducteurs.

Le Président (M. Iracà) : Merci, M. Leclerc. M. le député de Deux-Montagnes.

M. Charette : Merci. Vous avez fait référence à la consultation que vous avez menée. Sans nous révéler de grands secrets ce matin, est-ce que vous pouvez nous dire quelle est la proportion des recommandations... Parce que votre mandat était beaucoup plus large, on s'entend, que le cellulaire au volant. Quelle est la proportion des recommandations qui touchent spécifiquement le cellulaire au volant versus d'autres mesures qui seraient peut-être proposées, là, qui touchent, de façon plus globale, la sécurité routière?

M. Leclerc (Dave) : Je n'ai malheureusement pas la donnée précise. Vous comprendrez qu'il y avait différentes thématiques abordées lors de la consultation. Chose certaine, c'est que la distraction a attiré beaucoup l'attention. Ça, je peux vous le confirmer, il y a eu beaucoup d'intérêt par rapport à la distraction. Peut-être aussi un fait intéressant, c'est que, dans les différents sondages que l'on fait, 98 % des adultes québécois considèrent la distraction au volant comme un problème très ou assez grave. Donc, on parle de 98 % de la population. 89 % estime que les conducteurs québécois sont très ou souvent distraits. Et autre particularité de cette donnée, qui est intéressante, qu'on a aussi révélée peut-être aussi lors de la consultation, c'est que, lorsque les conducteurs évaluent leur propre comportement, la perception change, vous comprendrez. En effet, seulement 9 % d'entre eux s'avouent être distraits à l'occasion. Alors, vous voyez, il y a vraiment une question de perception, et c'est ce qu'on a remarqué aussi lors des consultations.

Le Président (M. Iracà) : M. le député.

M. Charette : Merci. Vous avez mentionné que vous n'avez pas encore eu l'occasion, et on peut comprendre, de rencontrer le nouveau ministre des Transports. Sa nomination est encore toute récente. Mais aviez-vous rencontré son prédécesseur, M. Lessard, sur cette question-là, alors qu'il avait la responsabilité?

M. Leclerc (Dave) : Bien, ce n'est pas un secret de polichinelle, il y a un travail qui s'est fait au cours des derniers mois sur la modification du Code de la sécurité routière. Effectivement, il y a eu des rencontres avec le ministre précédent.

M. Charette : Et le volet du cellulaire au volant avait été abordé à ce moment-là?

M. Leclerc (Dave) : Ça fait partie de l'ensemble des questions abordées lors de la modification du Code de la sécurité routière. Vous comprendrez qu'il n'y a pas uniquement la distraction. Ça englobe plusieurs choses.

M. Charette : Et vous, de votre côté, vous avez pu donc faire part au ministre Lessard de vos préoccupations. Ça fait un certain temps, on s'entend, mais vos recommandations, de façon générale, elles sont prêtes depuis quand, depuis le printemps dernier?

M. Leclerc (Dave) : Difficile à évaluer parce que, comme je vous disais, c'est un peu toujours en évolution, hein? On a fait des recommandations, effectivement, au ministre précédent. Ça, je ne peux pas vous le cacher. Toutefois, c'est toujours en évolution. Comme je vous disais, il y a eu des enquêtes terrain cet été. Il y a le mandat d'initiative de la commission, qui est intéressant, voir aussi le rapport de la commission. Alors, comme je vous disais, c'est un peu en évolution. Est-ce que nos recommandations sont finales? Non, c'est des recommandations et ça reste peut-être sujet à discussion. C'est prêt depuis quand? Je ne suis pas capable de l'évaluer parce qu'évidemment on a fait notre consultation cet hiver, la fin de l'analyse, peut-être, durant l'été. On a proposé certaines avenues au ministre précédent, mais, comme je vous dis, c'est toujours en évolution.

Le Président (M. Iracà) : Merci. M. le député.

M. Charette : N'y voyez pas de question piège, mais je m'interroge de mon côté parce que cette réforme au niveau de la sécurité routière, on l'attend depuis longtemps au Québec. En fait, on est à notre quatrième ministre des Transports au cours de la présente législature, et tous avaient pris l'engagement de soumettre une proposition de réforme à ce niveau-là. On est rendus au quatrième. Les mois, les années ont passé sans que cette réforme-là soit présentée. Est-ce qu'on peut expliquer, de façon purement factuelle, tous ces retards-là par rapport à un engagement qui est pourtant précis, par rapport à un sujet qui est drôlement important? Les chiffres le démontrent. Pourquoi tant tarder avant de nous proposer une réforme qui est certainement très attendue?

Le Président (M. Iracà) : En 10 secondes, s'il vous plaît, M. Leclerc.

M. Leclerc (Dave) : Bien, en 10 secondes, je ne commenterai pas, mais, rapidement, juste pour vous dire qu'il y a eu un changement réglementaire concernant justement les sanctions en 2015, avec les points d'inaptitude qui sont passés de trois à quatre.

Le Président (M. Iracà) : Alors, je vous remercie pour votre contribution aux travaux de la commission.

Je suspends les travaux quelques instants afin de permettre au groupe de CAA-Québec de s'installer. Merci beaucoup de votre présence à l'Assemblée nationale.

(Suspension de la séance à 10 h 45)

(Reprise à 10 h 48)

Le Président (M. Iracà) : À l'ordre, s'il vous plaît! Nous reprenons nos travaux. Je souhaite la bienvenue aux représentants de CAA-Québec. Bienvenue à l'Assemblée nationale, la maison du peuple. Alors, je vous demande de bien vouloir vous présenter, ainsi que les personnes qui vous accompagnent. Je vous rappelle que vous disposez d'une dizaine de minutes pour votre exposé. Par la suite, nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Sans plus tarder, la parole est à vous.

CAA-Québec

Mme Gagnon (Sophie) : Merci, M. le Président. Distingués membres de la commission, bonjour. Je suis Sophie Gagnon, vice-présidente, Communications et affaires publiques, chez CAA-Québec. Les gens qui m'accompagnent sont, à ma droite, M. Marco Harrison, directeur de la Fondation CAA-Québec, qui est active en sécurité routière, et, à ma gauche, Mme Isabelle Godbout, recherchiste-analyste au sein de notre équipe en communications en affaires publiques.

Merci de nous entendre dans le cadre de cet important mandat d'initiative sur l'utilisation du cellulaire au volant. Depuis longtemps, CAA-Québec, et, de plus en plus, par l'entremise de sa fondation, est un acteur très engagé en sécurité routière. Par nos interventions, nos initiatives, nous apportons une contribution que l'on estime notable à l'amélioration du bilan routier. Nous en sommes très fiers. Vous comprendrez donc aisément que votre mandat d'initiative nous interpelle particulièrement puisque l'utilisation du téléphone cellulaire au volant est une problématique majeure en sécurité routière. Les statistiques que je vais vous livrer nous donnent malheureusement raison.

Selon l'institut américain Virginia Tech Transportation, les conducteurs qui textent au volant sont 23 fois plus susceptibles d'être impliqués dans une collision ou une quasi-collision que les conducteurs attentifs. Selon le National Safety Council, un accident de voiture sur quatre, on parle de 26 %, est causé par l'utilisation du téléphone, y compris la fonction mains libres, et, d'après les estimations, les conducteurs qui utilisent leur téléphone au volant ne voient que 50 % — c'est l'effet de vision tunnélaire — de l'information qui est présente dans leur environnement visuel de conduite, pourtant si important. Encore trop de gens aujourd'hui continuent de banaliser les risques de l'utilisation du téléphone cellulaire au volant. C'est pourquoi nous souhaitons que les recommandations que fera la présente commission au terme de ses travaux mènent à l'adoption de nouvelles mesures en la matière. À notre avis, il faut maintenant envoyer un message clair à la population.

• (10 h 50) •

En résumé, les recommandations de CAA-Québec à la commission visent essentiellement une législation avec plus de mordant en considérant une gradation des sanctions en fonction de la gravité des gestes posés, des forces de l'ordre mieux outillées afin qu'elles soient mobilisées davantage pour intervenir, des mesures d'éducation et de sensibilisation encore plus efficaces — on a fait beaucoup, on peut faire mieux, on peut continuer — et des mesures cohérentes destinées à la population quant aux distractions cognitives au volant, dont celles causées par l'utilisation du cellulaire, mais aussi, de plus en plus, des systèmes d'infodivertissement. On aura l'occasion de vous en toucher un mot.

En mars dernier, lors de la vaste consultation publique sur la sécurité routière au Québec, qui a été tenue par la Société de l'assurance automobile du Québec, six de nos recommandations visaient la problématique du cellulaire au volant. Essentiellement, nous les maintenons toutes et nous vous les présentons aujourd'hui. Alors, j'y vais en rafale.

La première. On recommande d'augmenter le nombre de points d'inaptitude pour les récidivistes à l'intérieur d'un délai de deux ans. Selon nous, le nombre de points d'inaptitude en cas de récidive devra être déterminé en fonction de la gravité relative de l'infraction ainsi que de l'acceptabilité sociale. Évidemment, il revient au législateur de déterminer ce que représente la gravité de l'infraction et de mesurer également l'ampleur de l'acceptabilité sociale. Mais, à titre d'exemple, on soumet à la commission qu'aux quatre points déjà prévus au Code de la sécurité routière à la première offense deux autres points pourraient s'ajouter pour une deuxième offense survenant, bien sûr, dans un délai de deux ans, soit pour un total de... c'est-à-dire, six points à la deuxième offense qui s'ajouteraient aux quatre premiers, donc un total de 10. Une troisième offense également à l'intérieur d'un délai de deux ans signifierait donc la suspension du privilège de conduire puisque six points s'ajouteraient encore au dossier. On veut vraiment marteler le fait qu'on veut s'attaquer aux gens qui sont les inconditionnels du cellulaire.

Concrètement, nous privilégions cette avenue, soit l'augmentation du nombre de points d'inaptitude, à l'augmentation de l'amende. Nous croyons que l'effet dans le temps de l'inscription de points d'inaptitude à un dossier de conduite est plus durable que celui d'une amende, qui a un impact financier immédiat, il faut le dire, mais plutôt temporaire, puis c'est particulièrement vrai pour ceux qui ont la capacité de payer. L'usage de l'automobile étant au coeur de nos activités quotidiennes, s'attaquer au nombre de points porte donc beaucoup plus à réflexion pour le contrevenant. Puis il faut dire aussi que l'inscription de points d'inaptitude à un dossier de conduite va avoir une conséquence directe financière puisque le renouvellement du permis de conduire, subsidiairement, là, subséquemment, va être plus coûteux pour la personne qui est visée. Concrètement, la contribution d'assurance triplerait pour un individu ayant cumulé de 10 à 14 points d'inaptitude. Alors, il y a un impact financier également et, n'oublions pas, il y a également un risque de perte du privilège de conduire, suspension du permis.

Deuxième recommandation. Nous recommandons d'élargir la présomption prévue au Code de la sécurité routière, c'est l'article 439.1, afin qu'un conducteur qui tient en main un appareil qui est semblable à un appareil muni d'une fonction téléphonique alors qu'il se trouve derrière le volant soit réputé faire l'usage d'un appareil qui est muni d'une fonction téléphonique. Le but de cette recommandation est de donner une plus grande portée à cet article quant à son application et à envoyer un signal clair aux forces policières quant à l'intérêt d'appliquer l'article. Selon nous, c'est à celui qui prétend ne pas tenir en main un appareil muni d'une fonction téléphonique qu'il incombe de le démontrer, et, pour ce faire, par exemple, la production du relevé téléphonique s'avère une bonne pratique.

Certains faits évoqués devant les tribunaux sont à la base de notre recommandation. On évoque souvent, par exemple : Je manipulais un iPod, j'avais mon rasoir, un porte-monnaie. On a vu toutes sortes d'images qui ont été présentées. En d'autres termes, CAA-Québec estime qu'un tel élargissement de présomption pourrait en décourager certains qui évoquent notamment la manipulation d'objets, comme je le mentionnais, de toutes sortes et non d'un téléphone, sans pour autant brimer, et ça, c'est important, le droit fondamental d'un individu de défendre sa cause en produisant en preuve son relevé téléphonique, par exemple. Cette mesure a le potentiel d'encourager les forces de l'ordre à appliquer davantage l'article 439.1.

Troisième recommandation, ouvrir le dialogue avec le fédéral pour créer des dispositions spécifiques dans le Code criminel relatives à l'utilisation du cellulaire au volant lorsqu'il y a morts ou blessés graves. Dans les années 80, je peux vous le rappeler, vous vous en rappellerez comme moi, devant l'ampleur de la problématique de l'alcool au volant, le gouvernement canadien a ajouté de nouvelles dispositions spécifiques au Code criminel, et le message qui s'en est suivi était très clair : L'alcool au volant, c'est criminel. Et, puisque l'utilisation du téléphone cellulaire au volant est un comportement socialement répréhensible, avec des statistiques maintenant bien établies, et potentiellement fatal, nous croyons qu'il est temps pour le gouvernement canadien de créer des sanctions spécifiques au Code criminel en fonction de la gravité de l'infraction. Pour nous, à situation exceptionnelle, il faut une mesure d'exception. En somme, le message qui serait envoyé ne pourrait pas être plus clair : Le cellulaire au volant, c'est criminel. À notre avis, cette référence au caractère criminel du geste ne laisse aucune ambiguïté sur le message, tout comme ce fut le cas et c'est encore le cas pour l'alcool au volant. Évidemment, la sensibilisation et l'éducation seraient aussi grandement facilitées.

Et ça m'amène à la quatrième recommandation, amener l'ensemble des intervenants à travailler de façon concertée afin de parler d'une même voix et de véhiculer un message commun. Tous les principaux intervenants sont visés, que ce soient les corps policiers, la SAAQ, CAA-Québec et notre fondation, mais les compagnies de téléphones cellulaires aussi, etc. Ils doivent innover dans la prévention et la sensibilisation pour rejoindre les diverses clientèles à l'aide d'un message commun : L'utilisation du téléphone cellulaire, appareil tenu en main, textos, appareil mains libres, est inacceptable.

À l'image de la tournée que fait notre fondation dans plusieurs écoles secondaires à chaque année, il est nécessaire de parler concrètement à nos jeunes adultes des dangers que cela représente pour la conduite automobile. Au cours des dernières années, nous avons rencontré quelque 20 000 jeunes dans des écoles secondaires, principalement de quatrième et cinquième secondaire, en leur offrant une expérience virtuelle des risques, et leurs commentaires sont alors sans équivoque. Oui, on a fait des progrès, mais, collectivement, il faut faire plus. Il est temps de faire mieux, et, même si nous référons aux jeunes, évidemment, la problématique touche l'ensemble des conducteurs.

La cinquième recommandation, et M. Leclerc de la SAAQ l'a abordé, nos commentaires vont dans le même sens, ça concerne le brouillage d'ondes. Un mot sur cette mesure qui est proposée par d'autres autorités. On dit : Il faut faire attention. Il faut être prudent face à une telle mesure car nous sommes d'avis que des appels d'urgence doivent pouvoir continuer d'être effectués à bord d'un véhicule, puis, effectivement, comme l'interdiction du cellulaire ne s'applique pas aux passagers, ceux-ci doivent pouvoir utiliser leurs appareils en voiture. Pour le moment, CAA-Québec ne dispose pas de suffisamment d'information pour se positionner. Mais n'oublions pas qu'une telle solution, si elle était sérieusement envisagée, ne devrait pas se traduire par une hausse de frais pour le propriétaire d'un véhicule qui devrait acheter des équipements supplémentaires, payer pour. Il faut faire attention à la poche du consommateur. Et, bien sûr, une telle question interpelle le gouvernement fédéral, les autorités américaines et les fabricants.

Finalement, notre sixième recommandation — c'est un marathon — réglementer les systèmes d'infodivertissement. Bien que cette recommandation-là ne vise pas directement le cellulaire au volant, nous croyons pertinent de sensibiliser dès maintenant la commission à cette réalité de plus en plus présente dans les véhicules.

Nous portons à votre attention une très récente étude de l'université de l'Utah, qui a été supportée par nos collègues américains de l'AAA Foundation for Traffic Safety, qui portait sur les systèmes d'infodivertissement. C'est une étude qui doit être encore d'une durée... jusqu'en 2019, mais on a déjà évalué plus de 30 systèmes d'infodivertissement, et tous ceux qui ont été testés jusqu'à présent, on évalue leur potentiel de distraction cognitive de modérée à très élevée. Il n'y en a pas un qui a été jugé comme étant sans danger, et ils ont fait énormément de travaux sur la distraction dans les véhicules.

Puisque ces systèmes représentent une source de distraction importante pour le conducteur d'un véhicule, le gouvernement du Québec devrait faire pression auprès de Transports Canada afin d'encourager une réglementation, notamment par rapport à la taille des écrans, la programmation et l'utilisation de ces appareils. Minimalement, Transports Canada et ses homologues provinciaux devraient s'engager à sensibiliser les consommateurs.

En conclusion, je conclurais en disant qu'en matière d'utilisation des appareils de téléphonie mobile au volant nous sommes prêts pour de nouvelles actions concrètes. La mise en place d'une seule mesure n'arrivera pas à contrer le fléau. Il faut nécessairement une combinaison de sensibilisation, de législation et de coercition. Ce sont les trois règles d'or en matière de sécurité routière. Et, ne l'oublions pas, conduire demeure un privilège. Conserver ce privilège nécessite l'adoption de comportements responsables, au risque d'en subir les conséquences.

Le Président (M. Iracà) : Merci beaucoup, Mme Gagnon. J'ai étiré un petit peu le temps parce que c'était tellement intéressant. Alors, nous allons débuter les blocs d'échange et, comme à l'habitude, nous allons procéder avec la partie gouvernementale en premier. M. le député de Mégantic, la parole est à vous.

• (11 heures) •

M. Bolduc : Merci, M. le Président. Bonjour, Mme Gagnon, M. Harrison et Mme Godbout. Ça me fait plaisir de vous recevoir ici. Tout d'abord, je voudrais vous poser des questions générales, un peu plus larges. Combien il y a de membres de CAA au Québec?

Mme Gagnon (Sophie) : 1 million presque 300 000 membres.

M. Bolduc : 1,3 million. Donc, c'est définitivement une population représentative sur un total de, quoi, 4, 5 millions de chauffeurs?

Mme Gagnon (Sophie) : Presque 5 millions de conducteurs immatriculés.

M. Bolduc : Pardon?

Mme Gagnon (Sophie) : Environ 5 millions de conducteurs immatriculés.

M. Bolduc : Donc, plus de 25 % à peu près.

Mme Gagnon (Sophie) : Oui. Oui. Exact.

M. Bolduc : O.K. Puis ces membres-là, est-ce qu'ils sont des gens qui sont là depuis longtemps? Généralement, quand vous êtes membre du CAA, c'est pour la vie?, est-ce que c'est temporaire?, est-ce qu'il y a une rotation?

Mme Gagnon (Sophie) : Je vous dirais que la base des nouveaux membres a tendance à être un peu plus jeune que la moyenne provinciale, mais on a tellement un indice de fidélité élevé, et je tairai des statistiques... Non! Mais, non, on a tendance à avoir une moyenne d'ancienneté, les gens sont avec nous pour plusieurs années, et on a énormément d'occasions... peut-être que j'anticipe votre commentaire, mais on a beaucoup d'occasions de contribuer à les éduquer de par des articles dans le magazine CAA-Québec, nos infolettres auxquelles sont abonnées plus de 600 000 personnes. Alors, on n'hésite jamais à faire de la sensibilisation à nos membres.

M. Bolduc : Merci. Vous nous avez mentionné que votre fondation est aussi préoccupée par la sécurité routière et les analyses. J'aimerais vous entendre là-dessus parce que finalement vous jouez un rôle partiellement parallèle à la Société d'assurance automobile. Puis est-ce qu'il y a une action concertée, ici, ou si vous agissez de façon indépendante, etc.?

Mme Gagnon (Sophie) : Écoutez, je vous dirais que, de façon régulière, peut-être pas autant qu'on aimerait, mais on essaie de le faire régulièrement, on est en lien avec les gens de la Société de l'assurance automobile pour parler des problématiques pour s'assurer d'enligner nos actions terrain, parce qu'on se plaît à dire que CAA-Québec a la capacité d'être déployé sur le terrain.

Et je laisserais Marco compléter ma réponse, mais, si ce n'est pour vous dire que notre fondation, elle a neuf ans d'existence, et un des premiers travaux qu'elle a menés, un des premiers... oui, un travail important qu'elle a mené, en 2013, avec l'aide de la Société de l'assurance automobile, ça a été une vaste enquête auprès des conducteurs au Québec. Et, parmi les conclusions, on avait enquêté auprès de 5 000 détenteurs de permis de conduire représentatifs de la population et on a pu constater que, bien souvent et malheureusement, les gens se perçoivent beaucoup plus favorablement que dans la vraie vie en général. Le grand constat qu'on avait tiré avec la fondation, c'est que l'enfer, c'est les autres. Je pense que, pour ça, ça a été un moteur de notre action. Et on fait beaucoup et de plus en plus d'actions terrain, et je laisserais Marco peut-être compléter.

M. Harrison (Marco) : Bien, écoutez, la principale mission de la fondation, c'est faire la promotion de la sécurité routière dans le but d'améliorer le bilan routier québécois. Deux tranches d'âge particulièrement ciblées, les jeunes conducteurs et les aînés. On fait beaucoup, beaucoup, comme Sophie le disait, d'interventions directement sur le terrain, on va rencontrer les gens, on va les sensibiliser, on va les éduquer à la sécurité routière et à l'environnement dans lequel ils évoluent au niveau de la conduite automobile.

M. Bolduc : Maintenant, vous parlez des jeunes et des aînés. En fait, ils ont deux caractéristiques très différentes, là, il y en a un qui ne voit plus clair, puis l'autre, il ne sait pas trop. Comment est-ce que vous les groupez ensemble pour faire des analyses et de la sensibilisation?

M. Harrison (Marco) : Au niveau des jeunes conducteurs principalement, on fait une tournée dans les écoles secondaires, on vise les élèves de quatrième et cinquième secondaire, donc des nouveaux conducteurs ou des futurs conducteurs qui sont très près de l'obtention du permis de conduire, et on les sensibilise en leur faisant une présentation qui dure une période scolaire type, au niveau de l'alcool au volant, les distractions au volant, la fatigue au volant, et on leur fait faire de l'expérimentation sur notre simulateur de conduite, principalement au niveau des distractions et du texto au volant.

Et ça, ça les sensibilise énormément parce qu'à la fin de l'expérimentation on est capable de leur dire : Écoute, la portion dans laquelle tu as fait des textos au volant, tu as été 50 % du temps que tu ne regardais pas la route; si je te demandais d'embarquer avec moi en disant que je vais me fermer les yeux 50 % du temps, tu vas-tu embarquer? Et là ils nous disent : Non. Bien, pourquoi tu le fais quand tu textes au volant? Et là ils disent : Oh! tu as absolument... vous avez absolument raison. Et ça, je vous dirais, ça frappe beaucoup l'imaginaire des jeunes. Les interventions sur le terrain directement avec eux sont très efficaces.

Au niveau des aînés, on le fait d'une façon différente, mais on va aussi les rencontrer. On leur fait aussi expérimenter le simulateur de conduite. Mais, les aînés, ce qu'ils nous disent, après avoir expérimenté, ils nous disent : Je pensais que j'étais un bon conducteur, mais j'avais oublié des choses, vous m'avez rappelé des bons principes, vous m'avez rappelé des bonnes façons de faire. Et le but ultime avec les aînés, pour nous, c'est de les maintenir au volant de façon sécuritaire le plus longtemps possible. On le sait, l'automobile est au coeur de nos activités quotidiennes, et c'est la même chose pour les aînés. Et de perdre leur permis de conduire ou de devoir accrocher leurs clés, prendre la retraite de la conduite, pour eux, souvent, ça signifie une perte d'autonomie énorme.

M. Bolduc : Je vous remercie. Puis c'est très important parce que je mentionne les aînés, je ne veux pas être négatif, j'avais... j'ai eu, en fin de semaine en fait, quelqu'un qui avait 102 ans qui avait encore son permis de conduire, et en fait le point le plus important qu'elle avait, c'était de ne pas perdre son permis de conduire. À mon avis, puis je vous demande un peu ce que vous en pensez, une des choses les plus importantes, c'est que les aînés sont souvent un peu dépassés par l'encadrement de la nouvelle voiture, le GPS, les téléphones cellulaires et toutes les options parce qu'il y a toutes sortes de boutons un peu partout. Puis je pense que c'est bien plus pour eux une source de distraction, puis c'est un peu embêtant et difficile parfois pour eux de maîtriser l'ensemble des outils disponibles. Est-ce que vous avez de l'information là-dessus?

M. Harrison (Marco) : Souvent, pour les aînés, on ne se servira pas de la technologie montée à bord, on va la désactiver effectivement parce que pour plusieurs, c'est distrayant ou il y a un manque de compréhension de la façon de les utiliser de la bonne façon. On est actuellement en train de supporter une étude qui se fait à la TELUQ, par rapport à ce phénomène-là, étude dont on devrait avoir les résultats sous peu. Ça fait déjà quatre ans que cette étude-là est en cours, et à ce moment-là on pourra en discuter de façon beaucoup plus large, que ce soit avec vous ou que ce soit avec le public en général, leur expliquer qu'est-ce qui se passe avec la technologie montée à bord et les aînés.

M. Bolduc : On est ici pour discuter du cellulaire au volant, mais vous nous parlez aussi, un peu plus large, des distractions, en fait se répandre du café sur nous, manger, se maquiller, il y a toutes sortes d'activités, et des fois on ne fournit pas à les imaginer. J'en vois passer régulièrement avec des petits chiens sur eux. Je ne sais pas si c'est distrayant, mais je penserais que oui, etc., là. Est-ce que vous pouvez discerner comment l'impact du téléphone au volant représente vs l'ensemble des autres distractions? Est-ce que vous avez une idée là-dessus?

Mme Gagnon (Sophie) : J'aimerais vous citer quelques statistiques. Mais je ne veux pas vous relancer avec votre petit chien, j'ai déjà vu sur la 20, entre Québec et Montréal, un joueur de trompette les deux mains sur sa trompette derrière le volant. C'était... je n'ai jamais battu ça, je n'ai jamais vu d'autres choses, là, mais c'était assez impressionnant.

Mais, au-delà de l'anecdote, je vous dirais que, et peut-être, Marco ou Isabelle, vous pourrez compléter, les statistiques récentes des dernières années de la Société de l'assurance automobile du Québec sont assez préoccupantes. On est pratiquement nez à nez entre... au niveau des décès qui sont liés à l'alcool, qu'on a souvent dit être le fléau numéro un. Mais on lie environ 124 décès à la distraction pour 140 décès, maintenant, à l'alcool. Et, dans les blessures graves, pratiquement deux fois plus désormais de blessés graves... de blessés graves, exactement, qui sont liés à des comportements impliquant de la distraction, que l'alcool au volant. On parle de 686 versus 340, des statistiques assez préoccupantes.

Je vous dirais qu'il y a des limites à la capacité de la Société de l'assurance automobile et des corps policiers à compiler les données précisément liées à la distraction, qu'est-ce que comporte la distraction. Ces données-là touchent l'ensemble de la distraction, incluant ma trompette et votre petit chien, mais incluant surtout, dans une proportion qui est estimée à plus de 90 %, 95 %... en lien avec l'utilisation du cellulaire au volant. Donc, en allant vers des mesures beaucoup plus musclées législativement, en incitant... en outillant davantage les forces policières à appliquer les dispositions du Code de la sécurité routière, on va toucher directement à un fléau qui représente la majorité, là, des cas de blessure et de décès.

Le Président (M. Iracà) : Merci beaucoup. Je vais céder la parole maintenant au député de Maskinongé.

• (11 h 10) •

M. Plante : Merci beaucoup, M. le Président. Donc, bonjour, bienvenue. Je vais avoir juste une question, et c'est suite à vos propos au niveau de l'analyse des systèmes d'infodivertissement ou des nouveaux systèmes dans les voitures de plus en plus équipées.

J'en ai parlé aux interlocuteurs précédents, à ce niveau-là aussi, ça m'interroge beaucoup parce que, veux veux pas, la technologie avance de plus en plus, on est de plus en plus portés vers des voitures non seulement performantes, mais avec un équipement qui nous permet, je vous dirais, quasiment d'avoir un cinéma maison à l'intérieur de la voiture, là. Donc, on texte vocalement, on parle au téléphone en fonction mains libres, il y a le système de navigation qui nous attend, donc, si on veut un restaurant, station-service, etc., la voiture nous indique. Et même, en embarquant dans la voiture, elle nous dit combien de temps pour se rendre au domicile quand on est à l'extérieur. Donc, c'est beaucoup, beaucoup d'améliorations qui ont été faites, depuis, je vous dirais, les 10 dernières années, mais majoritairement depuis les cinq parce que même des voitures de catégories moins luxueuses ont ces équipements-là de base maintenant. Donc, ce n'est plus réservé aux voitures de luxe seulement.

Donc, vous parlez de sensibilisation, de législation ou un petit peu de coercition par le... doubler les amendes, etc., et aussi les points. Vous ne parlez pas des amendes, mais vous parlez bien de doubler le nombre de points perdus lors d'une infraction. Mais, avec toutes ces fonctions-là au véhicule, c'est difficile pour le législateur, pour nous tous ici, de pouvoir suivre la technologie. Et j'imagine que, pour les gens de la Sûreté du Québec, donc les agents, de voir vraiment, au moment instantané qu'ils commettent... l'arrestation de la personne, qu'est-ce que la personne était en train de faire dans le véhicule. Ça doit être de plus en plus difficile aussi. Donc, quelles sont les avenues que vous proposez?

Mme Gagnon (Sophie) : Bien, vous soulevez un... Votre commentaire est lié beaucoup à la fabrication des voitures, à l'évolution de la technologie. C'est sûr qu'on ne peut pas arrêter le progrès. Je vous dirais que, de ce côté et en marge de ce qu'on a proposé, particulièrement sur la sensibilisation, sur la législation et sur la coercition, il y a tout l'aspect aussi des représentations qu'on peut faire auprès des manufacturiers, auprès des gouvernements, des instances réglementaires.

C'est sûr que c'est un peu plus loin de ce qu'on a présenté ce matin, mais l'étude dont je vous fais référence, c'est clair qu'elle sert, au niveau des États-Unis, au niveau du fédéral aussi, à sensibiliser les autorités à mettre en place des moyens de sensibilisation mais aussi de réglementation, par exemple d'obliger les constructeurs à verrouiller des systèmes lorsque le véhicule est en mouvement. Il y a beaucoup de manufacturiers qui ont quand même certaines bonnes pratiques là-dedans, il y en a d'autres que c'est moins... Mais c'est un travail de longue main qu'il faut faire, et, bien, je pense que c'est un ensemble de mesures. Et il faut aussi éduquer les citoyens à bien utiliser ces mécanismes-là. Les GPS, on a appris à s'en servir. Il faut travailler... il faut les programmer avant de partir, il faut avoir des... Il y a des bonnes pratiques. Puis certainement qu'on va continuer, nous, à véhiculer des bonnes pratiques puis à sensibiliser les autorités. Nos collègues d'Ottawa sont à pied d'oeuvre là-dessus.

Le Président (M. Iracà) : Merci, Mme Gagnon. Il y a le député de Sainte-Rose qui désire vous poser une question. La parole est à vous.

M. Habel : Oui. Merci, M. le Président. Rapidement, parce qu'on a parlé beaucoup d'infodivertissement, j'aimerais que vous me parliez un peu des manufacturiers qui développent de plus en plus des systèmes de sécurité à l'intérieur des véhicules, qu'on soit distraits par un texto au volant ou par d'autres distractions. Mais, par exemple, je me souviens d'une annonce, là, où il y a un enfant qui court en avant du véhicule puis, automatiquement, il s'arrête. Est-ce que vous pouvez me parler du développement de ce type de fonction de sécurité?

Mme Gagnon (Sophie) : Simplement un commentaire pour dire que, d'un point de vue de sécurité routière, la plupart de ces systèmes-là sont très intéressants. Il y a une marche inexorablement enclenchée vers des véhicules qui seront de plus en plus autonomes. Ces systèmes-là en font partie en fait, à certains degrés, et on les dit souvent plus sécuritaires; à terme, on estime que les véhicules autonomes seront même plus sécuritaires que le conducteur. On n'est pas encore rendus là, mais c'est clair qu'il y a beaucoup de ces fonctions-là, que ce soient les caméras de recul, les systèmes d'assistance au freinage, qui ont de bons effets. Mais, en même temps, il faut être conscient que le conducteur demeure la personne. C'est sûr qu'il y a toujours le risque d'induire des faux sentiments de sécurité, c'est une préoccupation qu'on a toujours. Il faut que les gens se rappellent que c'est ultimement eux qui ont la responsabilité du véhicule, et ça risque d'être encore comme ça longtemps, malgré l'arrivée incessamment des véhicules autonomes.

M. Harrison (Marco) : Au niveau des distractions, si je peux me permettre, les technologies passives sont beaucoup moins distractives qu'une technologie active. Le freinage automatique, c'est une technologie passive et c'est un système de sécurité. On n'a pas à vouloir que le freinage s'applique, ça se fait de façon automatique, donc c'est passif. Quand on intervient par rapport à une technologie, on la dit active, et celle-là, elle peut être beaucoup plus distractive.

Le Président (M. Iracà) : Merci beaucoup. Alors, il reste 30 secondes, M. le député d'Abitibi.

M. Bourgeois : Rapidement.

Le Président (M. Iracà) : Un petit commentaire, parce que...

M. Bourgeois : Merci. Donc, juste... je veux revenir sur la notion où vous avez parlé d'augmenter les points d'inaptitude. Vous ne le combinez pas avec une augmentation des amendes. Pourquoi?

Mme Gagnon (Sophie) : Bien, écoutez, notre recommandation principale se situe au niveau du nombre de points d'inaptitude. La capacité de payer des... On sait qu'on est taxés, on a des amendes, le porte-monnaie est souvent mis à contribution. En même temps, je vous dirais qu'on ne s'est pas attardés de façon très précise à chiffrer une augmentation. On sait que l'Ontario s'apprête à le faire. Mais, entre les deux, c'est-à-dire entre les points d'inaptitude et l'amende, on a clairement fait notre choix. On pense que l'impact sur le renouvellement va avoir un élément financier, mais, là où ça va faire le plus mal... Et je pense qu'il faut que les mesures législatives soient toujours équilibrées et incitent à respecter la loi, mais sans non plus créer un sentiment, chez l'automobiliste ou la personne qui est visée, là, qu'ils sont traités... on veut faire la piastre avec leurs amendes. Donc, nous, on s'est dit : S'il faut mettre des énergies à quelque part, c'est sur les points d'inaptitude.

Le Président (M. Iracà) : Merci, Mme Gagnon, ceci met fin au premier bloc d'échange. Nous allons procéder au deuxième bloc d'échanges avec l'opposition officielle, et je cède la parole au député de René-Lévesque.

M. Ouellet : Merci beaucoup, M. le Président. Donc, à mon tour de vous saluer. Je tiens à saluer la vigueur de vos recommandations. Je pense que vous n'avez pas eu la peur de vous mouiller. Il y en a six, je vais en prendre quelques-unes, puis on aura l'opportunité d'échanger.

Je voudrais faire un peu de pouce sur le dernier débat qu'on vient d'avoir, sur les points d'inaptitude versus les amendes. On a vu, lorsque le gouvernement a décidé de doubler les amendes et de doubler... des amendes, pardon, dans le cas des chantiers, la vitesse sur les chantiers, on a vu effectivement une modification du comportement. Quand vous nous dites que, si on fait juste travailler sur les points d'inaptitude... puis qu'il faudrait respecter la capacité de payer, vous n'êtes pas en train de nous dire qu'il ne faudrait pas augmenter les amendes parce que, si jamais les gens les ont, ils ne seront pas capables de les payer?

J'essaie de comprendre un peu votre raisonnement sur la capacité de payer. On cherche à condamner un comportement, dans certains cas à l'amender ou même à le corriger. Une amende salée, moi, à proprement dit... au volant, je pense que j'ai plus peur de pogner une amende salée que perdre des points d'inaptitude. J'aimerais vous entendre là-dessus, sur cette réflexion sur la capacité de payer, parce que je vais être honnête avec vous, je ne vous suis pas vraiment beaucoup là-dessus, là.

Le Président (M. Iracà) : Merci. Mme Gagnon.

Mme Gagnon (Sophie) : Oui. Bien, écoutez, je ne voudrais pas que vous preniez le commentaire sur les amendes comme étant une fin de non-recevoir. Notre recommandation vise d'abord et avant tout à augmenter les points d'inaptitude sans négliger l'impact financier, qu'on trouvait déjà présent en termes d'impacts sur le renouvellement.

Maintenant, dans sa grande sagesse, le législateur pourra évaluer la pertinence de hausser les amendes, mais nous, on a la prétention de dire que l'élément qui fera le plus mal risque d'être vraiment la question des points d'inaptitude. Est-ce qu'il pourrait y avoir un ajustement des amendes? Parce qu'effectivement on le disait, ça fait depuis 2010 que ça n'a pas... 2008 que ça n'a pas été augmenté. Puis je vous dirais aussi qu'aux abords des chantiers la question de doubler l'amende, c'est lié aussi avec des...

Mme Godbout (Isabelle) : Bien, c'est parce que, sur les chantiers de construction, c'est souvent... les amendes sont remises par des radars photo, alors qu'on ne peut pas... Il n'y a pas de points d'inaptitude qui sont reliés aux amendes qui sont... aux infractions, en fait, qui sont captées par les radars photo. Alors, c'est là, la différence, je pense, et tandis que l'impact des points d'inaptitude... Certains qui vont avoir des contraventions, ils vont dire : Oui, le montant de l'amende, il peut être salé, sur l'instant présent, mais, une fois qu'il est payé, c'est oublié. Par contre, les points d'inaptitude, le fait qu'il y a un impact sur le renouvellement du permis de conduire, c'est moins oublié parce que l'impact, il est assez grand. Si vous étudiez, en fait, la contribution d'assurance qui est reliée à chaque point d'inaptitude, dans le fond, vous allez voir que c'est important. Puis ça, ça dure pendant deux ans aussi, là, dans le dossier du conducteur.

Le Président (M. Iracà) : Merci, Mme Godbout. Mme Gagnon.

• (11 h 20) •

Mme Gagnon (Sophie) : Un petit complément d'information aussi qui est important. Pour nous, c'est important de lier l'amende et le nombre de points d'inaptitude. On l'a dit d'entrée de jeu, c'est un exemple qu'on vous a donné, là, hausser le deux points, mais c'est important de la lier à la gravité relative au geste et à l'acceptabilité sociale. Et, pour nous, on reconnaît au législateur le devoir de mettre ça dans la balance, de voir, par exemple, entre une infraction auprès d'un autobus scolaire, lorsqu'on dépasse sans respecter l'arrêt-stop, par rapport à l'ensemble des mesures. Alors, on n'est pas une autorité experte en la matière. C'est sûr qu'il faut qu'il y ait une gradation et il faut s'attarder à l'acceptabilité sociale, où en est rendue la population.

Moi, du côté de CAA-Québec, si on avait à miser sur un niveau d'acceptabilité sociale, je pense qu'on est mûrs pour faire des mesures plus musclées, la société est prête. Maintenant, restera à voir quel niveau, puis s'il faut hausser les amendes aussi. C'est simplement que notre position prévoit... privilégie l'aspect des points sans exclure une hausse des amendes, mais ce n'est pas notre préférence.

Le Président (M. Iracà) : Merci. M. le député.

M. Ouellet : Merci. Oui, puis je comprends aussi, dans votre membership... Tu sais, vous allez aller de l'avant vers une meilleure sécurité par la perte... en ayant des points d'inaptitude, pardon, et la perte de permis. Et je comprends que, comme organisation, de plaider haut et fort une augmentation des amendes, issu d'un groupe comme le vôtre, ça peut avoir un impact, tu sais, sur le membership. Je comprends.

Mme Gagnon (Sophie) : ...je ne vous ne cacherai pas qu'on y pense, mais, je vous dirais, principalement, on a à coeur d'avoir une position toujours équilibrée pour le consommateur en général, payeur de taxes, contribuable, consommateur qui a une capacité finalement de payer. Mais, oui, c'est correct.

M. Ouellet : Je comprends que vous nous tracez un chemin, puis c'est à nous de choisir la vitesse et le lieu d'atterrissage.

Mme Gagnon (Sophie) : Exact.

M. Ouellet : Une autre recommandation intéressante, d'élargir la présomption sur l'usage des téléphones ou des appareils similaires à un téléphone. Est-ce que vous avez un contentieux juridique qui est venu un peu baliser, je vous dirais, votre recommandation? Parce que, là, on vient changer le fardeau de la preuve, je comprends vraiment bien où est-ce que vous voulez vous en aller. Puis je trouve ça même fortement intéressant parce que, là, c'était-u un téléphone, c'était-u un iPod touch, qu'est que j'avais dans les mains, c'était-u un portefeuille? Là, ce serait l'inverse. Donc, il y a des implications juridiques. Est-ce qu'un contentieux s'est penché là-dessus?

Mme Gagnon (Sophie) : On a Me Godbout qui a regardé la question, qui suit énormément la jurisprudence, l'évolution des décisions. Marco Harrison, qui est policier à la retraite de la SQ, puis je le laisserai compléter l'information, a également discuté de la mesure, et on l'a regardé avec l'avocat-conseil, notre conseiller juridique interne, qui a également discuté de la mesure. Mais évidemment je ne peux pas vous dire qu'on a signé une opinion, une opinion juridique ferme là-dessus, mais on est assez confiants que la mesure est applicable. Marco, peut-être tu peux continuer.

M. Harrison (Marco) : C'est que la façon de voir les choses, c'est qu'un appareil, un smartphone, un appareil de téléphone intelligent contient des données et des renseignements personnels qui sont protégés par les chartes. Donc, on ne peut pas donner aux policiers le pouvoir de saisir pour inspection. O.K.? Donc, s'il ne peut pas faire ça, la preuve qu'il doit amener à la cour est beaucoup plus difficile à établir à cause de cette barrière-là. Puis cette barrière-là, elle doit demeurer. La charte protège ces renseignements-là, et ça doit demeurer. Donc, de dire que la personne est réputée avoir un appareil muni d'une fonction téléphonique en main fait en sorte que cette personne-là, si elle n'était pas en train d'utiliser un appareil téléphonique, par la simple production de son relevé de téléphonie cellulaire, peut se défendre à la cour. C'est seulement dans cette optique-là que cette recommandation-là est faite, c'est pour donner des outils.

Le Président (M. Iracà) : Merci, M. Harrison. M. le député.

M. Ouellet : Oui, merci.

Le Président (M. Iracà) : Deux minutes.

M. Ouellet : Oui. Troisième point que je trouve intéressant, vous voulez, dans le fond, qu'on ouvre des discussions avec le fédéral sur la possibilité d'amener des modifications au criminel, et vous choisissez en disant : Allons plutôt punir la conséquence que la cause. Donc, si c'est vraiment suite à un accident grave ayant mort d'homme, mort de femme, ce serait là qu'on devrait commencer à avoir les discussions pour changer et non pas le fait d'avoir conduit au volant avec le cellulaire, qu'on rendrait criminel. Donc, vous y allez vraiment sur la conséquence du geste plutôt que d'avoir commis le geste qui est un risque à la sécurité des autres.

Mme Gagnon (Sophie) : Oui, je comprends la portée de votre commentaire. Évidemment, cette recommandation-là s'articule et ne peut pas exister sans également l'application du Code de la sécurité routière, qui prévoit cette interdiction avec des amendes, des points d'inaptitude, qu'on espère rehausser, etc., donc sévir plus sérieusement avec le Code de la sécurité routière. Mais on dit : De la même façon que ça a été fait pour l'alcool au volant, on a sorti... de la conduite avec les facultés affaiblies ou, enfin, la négligence criminelle, on a sorti des articles précis qui avaient trait à l'alcool au volant et on les a enchâssés dans le Code criminel, on pourrait... C'est un copier-coller qu'on recommande de faire sur la base de l'utilisation du cellulaire pour vraiment frapper l'imaginaire, envoyer un message très clair, très fort, permettre aussi de donner un nouveau souffle aux activités de sensibilisation et d'éducation et envoyer un message sans équivoque à toute la population : C'est criminel, le cellulaire au volant. C'est sur cette base-là. Mais ça prend le législateur fédéral pour modifier le Code criminel.

Le Président (M. Iracà) : Merci.

M. Ouellet : Si je comprends...

Le Président (M. Iracà) : 40 secondes.

M. Ouellet : Oui. Donc, si je comprends bien, ce n'est pas... on ne rend pas criminel le fait d'avoir utilisé son cellulaire au volant, on rend criminelle la conséquence d'avoir utilisé le cellulaire au volant, qu'il y a eu dans certains cas mort de personnes, c'est ce que je comprends, la négligence. C'est ce que je comprends.

Mme Gagnon (Sophie) : Oui.

M. Harrison (Marco) : ...de criminaliser à ce niveau-là, c'est que les conséquences sont très graves. On a une perte de vie ou on a des gens qui vont être blessés de façon très importante. Ça fait qu'au même titre qu'actuellement c'est poursuivable en utilisant des articles un peu passe-partout du Code criminel, qui sont la négligence criminelle causant la mort ou des blessures ou la conduite dangereuse, d'avoir un article spécifique, ça permettrait d'établir aussi toute la règle en vertu de la preuve qui doit être présentée pour prouver l'infraction.

Le Président (M. Iracà) : Merci beaucoup. Alors, ceci met fin au bloc d'échange avec le groupe de l'opposition officielle. Nous allons procéder au troisième bloc d'échange avec le deuxième groupe d'opposition. Je cède la parole au député de Deux-Montagnes.

M. Charette : Merci, M. le Président. Mesdames, monsieur, merci d'être avec nous ce matin, très apprécié. On a eu l'occasion d'entendre, un petit peu plus tôt, la SAAQ, avec des éclairages tout à fait pertinents, mais en même temps un certain devoir de réserve compte tenu de son rôle, et on le comprend bien. Mais ce qui est intéressant avec votre groupe, non seulement vous apportez des recommandations précises, mais aussi vous avez un réseau pancanadien, en quelque sorte, avec les différentes, je ne sais pas comment vous les appelez, succursales ou autres à la grandeur du pays. Mais ça vous permet quand même d'avoir un regard, là, à la grandeur du pays.

Je vais vous poser essentiellement les mêmes questions : Est-ce que vous estimez que le Québec est en retard par rapport aux autres législations, réglementations qui s'appliquent dans les autres provinces canadiennes?

Mme Gagnon (Sophie) : Je n'aurais certainement pas tendance à dire qu'on est en retard, et là je parle d'un point de vue plus général en matière de sécurité routière. On a ce qu'on appelle un «task force» canadien qui permet à tous les responsables de chacune des provinces de se rencontrer quatre fois par année pour échanger, puis je dirais que, pour beaucoup, les problématiques dont on discute sont liées à la sécurité routière. Je ne vous cache pas qu'on parle beaucoup de cannabis ces derniers temps. Mais je ne crois pas qu'on est... Je pense que le Québec fait bonne figure, je pense que le Québec a une approche, puis il faut reconnaître qu'on est différents aussi.

Et, bien, je vais vous donner l'exemple des... En matière d'alcool, à peu près toutes les provinces canadiennes ont des mesures administratives à partir de 0,05. On n'en a pas au Québec. De ce côté-là, pour l'alcool, on a déjà mentionné que ça pourrait être intéressant de le faire. Le nouveau ministre a déjà fait son lit là-dessus en disant qu'il n'irait pas dans cette direction-là. C'est bien correct. En même temps, il y a des différences, je dirais, à certains égards, mais au total, tout, je pense qu'on ne fait pas mauvaise figure, bien au contraire. Isabelle, peut-être si tu veux ajouter.

Mme Godbout (Isabelle) : Non, ça va... C'est sûr que, lorsqu'on compare peut-être les sanctions, au point de vue amendes, avec les provinces voisines, on voit qu'il y a une certaine différence de philosophie. Par contre, eux, ils n'ont pas de régime public d'assurance automobile comme nous on a. Alors, l'impact sur la contribution d'assurance, pour eux, c'est inexistant, alors que pour nous, c'est présent.

Le Président (M. Iracà) : Merci. M. le député.

M. Charette : Et là aussi vous êtes moins liés que vos prédécesseurs à la question que je vais vous poser concernant les délais. Ça fait quelques années maintenant qu'on parle de réforme en matière de sécurité routière. Les trois ministres précédents avaient pris des engagements à ce niveau-là sans que ça ne prenne forme. Qu'est-ce qui, pour vous, peut être un frein? Comment expliquer des délais aussi importants avant de se commettre à mettre sur la table une proposition de réforme en matière de sécurité publique... pas publique, mais bien routière?

• (11 h 30) •

Mme Gagnon (Sophie) : On a eu plusieurs occasions, ces dernières années, de faire des recommandations d'aller de l'avant. Vous avez raison, c'est quand même des délais qui s'accumulent pour lesquels on n'a pas vraiment le contrôle. Il faut reconnaître qu'il est normal qu'un nouveau ministre puisse vouloir s'approprier des dossiers, prendre une décision en fonction de ses valeurs et de sa formation. Mais je vous dirais que ça serait le bienvenu, la réforme... la refonte du Code de la sécurité routière est attendue. En même temps, il y a eu des actions particulières à quelques égards. Mais, sans vouloir apporter une explication ou une justification, je pense qu'on est dus pour un dépôt de projet de loi. On l'apprécierait, oui.

Le Président (M. Iracà) : M. le député.

M. Charette : Vos prédécesseurs n'avaient pas eu encore l'occasion de rencontrer le nouveau ministre en poste. Est-ce que vous avez eu ce privilège-là? Est-ce que vous avez eu l'occasion d'échanger avec lui par rapport à vos recommandations, par rapport à vos autres préoccupations en matière de transport?

Mme Gagnon (Sophie) : Non, pas encore. On espère pouvoir le faire éventuellement, mais pas... C'est tout récent, mais on ne l'a pas rencontré.

M. Charette : Mais c'est des préoccupations, tout de même, que vous aviez pu partager à son prédécesseur. Donc, votre positionnement, il n'est pas...

Mme Gagnon (Sophie) : On a déposé un mémoire qui contenait 50 recommandations à la consultation de la Société de l'assurance automobile. On fait confiance en nos institutions aussi. C'est certain qu'on va ou on l'a déjà fait suivre, notre mémoire... bien, notre texte, au cabinet du nouveau ministre des Transports. Et je suis persuadée qu'il aura l'occasion d'en prendre connaissance.

M. Charette : Je vous remercie.

Le Président (M. Iracà) : Merci. Alors, M. le député, 1 min 30 s, rapidement.

M. Charette : Très, très brièvement, revenir sur une de vos recommandations, et mon collègue de René-Lévesque en a parlé, au niveau de la criminalisation non pas du fait de parler ou d'utiliser le téléphone cellulaire, mais bien de sa conséquence. Vous avez évoqué une partie de la réponse, mais ce serait réellement, pour vous, plus parlant que de bénéficier d'articles déjà existants qui font référence à soit la conduite dangereuse, soit à la négligence criminelle? Donc, pour vous, ce serait une portée plus grande ou un message plus direct à la population?

M. Harrison (Marco) : Écoutez, on l'a dit précédemment, Mme Gagnon l'a dit, au début des années 80, on a spécifiquement criminalisé l'alcool au volant, et ça avait eu des effets bénéfiques. On a juste à regarder le nombre de décès qui étaient reliés à l'alcool, à l'époque, comparativement à aujourd'hui. Il y a eu une diminution marquée. Donc, de criminaliser l'utilisation du cellulaire dans le cas grave où est-ce qu'il y a la mort ou des blessures graves, même permanentes, pour des gens, ça pourrait aussi frapper l'imaginaire. Mais surtout, pour les groupes aussi qui font de la prévention, de la sensibilisation, on pourrait avoir un message très, très, très clair à passer à la population et avoir des résultats, on l'espère, aussi bons qu'en matière d'alcool.

Le Président (M. Iracà) : Merci beaucoup. Alors, ceci met fin au bloc d'échange avec le deuxième groupe d'opposition. Je vous remercie pour votre contribution aux travaux de la commission parlementaire. Très gentil d'être venu et d'avoir fait votre exposé.

Alors, je vais suspendre les travaux jusqu'à 15 h 30, après les affaires courantes.

Merci beaucoup.

(Suspension de la séance à 11 h 33)

(Reprise à 15 h 47)

Le Président (M. Iracà) : À l'ordre, s'il vous plaît! Nous reprenons nos travaux. Alors, désolé du délai. Une période de questions, on sait à quelle heure ça commence, mais on ne sait pas souvent à quelle heure ça se termine. Donc, merci de votre présence. Veuillez, s'il vous plaît, éteindre la sonnerie de vos téléphones cellulaires.

Je vous rappelle que la commission est réunie afin de poursuivre les auditions publiques dans le cadre de consultations particulières réalisées relativement au mandat d'initiative sur l'utilisation des appareils téléphones mobiles au volant. Cet après-midi, nous entendrons le Bureau du coroner du Québec, le ministère des Transports, de la Mobilité durable et de l'Électrification des transports et nous terminerons avec la Sûreté du Québec.

Je souhaite donc la bienvenue au premier groupe, représentants du Bureau du coroner. Je vous demande de bien vouloir vous présenter ainsi que les personnes qui vous accompagnent. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé.

Par la suite, nous procéderons comme d'habitude à des périodes d'échange avec la partie gouvernementale et la première opposition, l'opposition officielle et le deuxième groupe d'opposition.

Alors, sans plus tarder, messieurs, je vous cède la parole.

Bureau du coroner

M. Malouin (Luc) : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, mon nom est Luc Malouin. Je suis coroner en chef adjoint du Québec. Je suis accompagné de M. Paul-André Perron, du bureau, lequel est le coordonnateur aux analyses et en recherche et prévention.

Alors, vous savez, on a une loi au Québec qui s'appelle la Loi sur la recherche des causes et des circonstances des décès. En vertu de cette loi, un coroner doit investiguer tout décès accidentel, entre autres, qui survient au Québec. Parmi le mandat des coroners, on doit établir les circonstances entourant les décès, entre autres. Alors, aujourd'hui, à votre demande, on va vous faire un constat de ce que les coroners ont constaté. On vous a remis un document qui vous donne des chiffres, des statistiques, qui vous dit, si on le regarde objectivement, qu'on a en moyenne six décès par année depuis 10 ans, et c'est une moyenne, et c'est un chiffre minimal. Donc, six décès par année où on peut identifier le cellulaire au volant comme étant une cause parmi d'autres ou très importante du décès. Naturellement, il faut relativer ce nombre de décès en tenant compte que, bon an, mal an, on a environ 350 décès par accidents automobiles sur les routes au Québec.

• (15 h 50) •

Il faut également tenir compte que ces chiffres-là, ce sont des chiffres minimums, parce qu'on n'a pas tout le temps l'information lorsqu'on fait une investigation. Le coroner est dépendant de la qualité du travail du policier qui est sur le terrain, et, si l'information, on ne réussit pas à l'obtenir, ça ne veut pas dire que le cellulaire n'était pas impliqué, mais c'est simplement qu'on n'est pas capable d'identifier cette cause-là parmi d'autres. Alors, ça nous donne donc à peu près 2 %, si on fait une moyenne, de décès accidentels résultant des cellulaires au volant au Québec.

Naturellement, les coroners ont le droit de faire des recommandations. Au fil des années, les coroners ont fait des recommandations concernant ce genre de décès. Les recommandations sont généralement de quatre ordres, je dirais : informer la population sur les dangers du cellulaire au volant; encourager la recherche en cette matière, parce que le problème n'est pas juste au Québec, mais est à la grandeur du Canada et, je dirais même, du monde; sensibiliser la population aux dangers; et certains coroners ont été aussi loin que de suggérer carrément la saisie du cellulaire au moment de l'infraction, comme on fait en matière d'alcool au volant, ou encore d'appliquer neuf points de démérite pour qu'il y ait une conséquence importante et majeure lorsqu'une personne est prise en train de texter, ou de parler, ou a, à tout le moins, son cellulaire au volant.

Il est important également, dans tous les chiffres qu'on a, de remarquer la tranche d'âge visée où on réalise que près de la moitié et même plus ont en bas de 44 ans. Alors, on dirait que les jeunes qui sont élevés avec le cellulaire, plus que ma génération, perdent moins l'habitude, parce que c'est eux autres qu'on retrouve en plus grand nombre comme victimes.

C'est donc ce que les coroners ont constaté au fil des ans, c'est donc les recommandations qui ont été faites. On peut dire, avec le recul, que la Société d'assurance automobile du Québec a fait énormément de campagnes de sensibilisation, et ils ont donné suite à ces recommandations-là. De la même façon, en 2015, si je ne m'abuse — c'est exact — on a augmenté de trois à quatre points d'inaptitude la conséquence d'être pris avec un cellulaire au volant. Est-ce que c'est suffisant? Quand on regarde les chiffres que certains coroners ont fournis, en 2011, on a 56 598 infractions données par les forces de l'ordre, comparativement à 18 248 en 2008. Bien sûr, mon chiffre n'est pas vraiment à jour, mais je dois aller avec les coroners, avec les rapports que j'ai. Autrement dit, la SAAQ a fait son travail de prévention, de sensibilisation. Il vous restera à déterminer si ce travail-là peut être amélioré en fonction d'une plus grande sévérité. Ça vous résume le travail des coroners en quelques minutes.

Le Président (M. Iracà) : Alors, merci beaucoup, M. Malouin, pour votre exposé. Et je vous rappelle, Mmes, MM. les élus qu'il y a un document qui a été distribué, quand même assez volumineux, là, de la part du Bureau du coroner, 185 pages, alors vous avez tous reçu une copie.

Nous allons débuter le bloc d'échange, mais, juste avant le bloc d'échange, j'aimerais saluer des étudiants du cégep de Trois-Rivières qui sont avec nous aujourd'hui. Alors, c'est important que vous soyez là. Aujourd'hui, c'est la problématique du cellulaire au volant, mais en commission parlementaire on a plusieurs beaux sujets, et c'est vous qui allez prendre notre place plus tard. Donc, merci d'être là.

Ceci dit, nous allons commencer un bloc d'échange avec la partie gouvernementale, et je cède la parole au député de Maskinongé.

M. Plante : Bien oui, merci beaucoup, M. le Président. Et effectivement, vous avez bien fait de saluer les étudiants du cégep de Trois-Rivières, qui est un cégep dans la plus belle région du Québec, la Mauricie. Alors, je suis très, très fier de vous voir ici en aussi grand nombre. Je reconnais quelques visages de ma circonscription ou, du moins, des parents que je connais un petit peu à travers la foule aujourd'hui.

Alors, je n'aurai qu'une seule question, parce que je devrai m'absenter pour un autre engagement, mais ma première question... Vous avez parlé tantôt des campagnes de sensibilisation de la SAAQ, justement, au niveau du cellulaire au volant. Ils ont eu des publicités assez marquantes tout au long des deux dernières années, mais je pense que cet été, je pense, c'est À deux doigts de la mort, là, qui est peut-être celle qui nous revient le plus rapidement à la mémoire. Elle a été la plus percutante, et j'aimerais savoir votre opinion, parce que, quand vous parlez d'informer la population, sensibiliser la population, je crois que la SAAQ a fait un travail quand même assez important dans ce sens-là et j'aimerais savoir votre appréciation du travail de la SAAQ et si les campagnes publicitaires étaient, selon vous, suffisantes, pas assez nombreuses ou si le message n'était pas assez percutant.

Le Président (M. Iracà) : M. Malouin.

M. Malouin (Luc) : Bien, écoutez, on a un sondage de la Société de l'assurance automobile du Québec qui dit que 98 % des conducteurs connaissent les dangers du cellulaire au volant, savent que c'est illégal, mais pourtant, dans ce 98 % là, un bon nombre le fait quand même. Alors, je ne pense pas qu'on puisse dire que quelqu'un au Québec ne sait pas que c'est dangereux, mais ça, c'est mon opinion, là.

Mais je prends les chiffres sortis par les coroners dans leurs rapports, tout le monde le sait, et les dernières campagnes, là, À deux doigts de la mort, étaient assez percutantes, donc je pense que la population est bien au fait de ça. Je voudrais souligner aussi le travail du ministère des Transports avec leurs haltes texto, hein? On va sur l'autoroute et on voit : Cinq kilomètres, halte texto. C'est une autre initiative pour encourager les gens à ne pas avoir le cellulaire en main.

Donc, pour répondre à votre question, moi, à date, je pense que ça fait le travail, mais je ne suis pas un expert en communication. Ce sont eux les experts.

Le Président (M. Iracà) : Merci, M. Malouin. M. le député.

M. Plante : Merci beaucoup pour votre réponse. Je n'irai pas plus loin, mais ça me percute beaucoup quand vous dites... bon, on n'est pas des experts, mais il y a quand même... Vous parlez de six décès apparentés au cellulaire au volant. C'est quand même six de trop, on va se le dire. Un décès, c'est toujours un décès de trop. Donc, c'est quand même criant et surtout quand vous nous dites que 90 % de la population est informée que c'est dangereux, mais on continue quand même à l'utiliser. Donc, je pense que c'est des phrases assez choc que vous nous mentionnez. Alors, je cède maintenant la parole à mon collègue de Mégantic. Merci beaucoup.

Le Président (M. Iracà) : Merci beaucoup, M. le député de Maskinongé. M. le député de Mégantic, la parole est à vous.

M. Bolduc : Merci beaucoup, M. le Président. Bonjour, messieurs. Très intéressant de voir les résultats, puis vous nous avez envoyé une pile impressionnante ici de cas, j'imagine... que je n'ai pas eu le temps de tout regarder. J'en ai regardé quelques-uns. Et vous nous parlez de 2 % des décès accidentels au Québec, puis ça, c'est un minimum. Puis je voudrais que vous élaboriez là-dessus, parce que j'imagine que les gens ne sont pas très jasants quand vous les recevez, hein?

M. Malouin (Luc) : Non, effectivement. Je vais laisser M. Perron parler de chiffres. C'est vraiment l'expert en cette matière.

Le Président (M. Iracà) : M. Perron.

• (16 heures) •

M. Perron (Paul-André) : Merci. Il est certain que, comme Me Malouin l'indiquait, ces chiffres-là, c'est ce qu'on a réussi à savoir. Dans certains cas, c'est flagrant, parce qu'on a un témoin qui nous dit, par exemple : Je parlais à la personne décédée, j'ai entendu : Boum, puis là ça correspond à l'heure de la collision. Il n'y a pas beaucoup de doutes. Mais dans bien des cas, une personne peut utiliser un cellulaire sans que ça laisse une trace très, très évidente, ne serait-ce que parce que le véhicule est incendié, que la personne a été éjectée, qu'on trouve le cellulaire à 10 mètres de la voiture. Nous, on a toutes sortes de scénarios comme ça, là.

Donc, dans bien des cas, il peut y avoir en particulier des types de manipulation qui ne sont ni des conversations ni des textos qui peuvent être associés à la distraction au volant, parce que la personne utilisait son appareil de téléphonie d'une manière ou d'une autre. Puis, si on n'a pas de témoin pour nous le dire, ce qui va être souvent le cas, ça, ça va échapper, là. Ça va demeurer une circonstance qui sera non résolue. Les policiers font ce qu'ils peuvent, mais parfois il n'y a pas de trace qui peut être détectée par les moyens normaux d'une enquête policière. Alors, comme l'investigation du coroner dépend de l'enquête policière, bien, ça se reflète sur les chiffres qu'on peut avoir. Donc, ces chiffres-là, on vous les montre, mais on vous les montre avec une certaine modestie parce qu'on est conscients que ce n'est peut-être pas le reflet parfait d'une réalité.

Le Président (M. Iracà) : Merci. M. le député.

M. Bolduc : Merci. Vous nous parlez du 2 %, puis je peux comprendre... Est-ce que, par exemple, vous avez, comme coroner, le pouvoir de, par exemple, valider si le téléphone cellulaire était en utilisation au moment, ou à peu près, de l'accident par rapport... ou, par exemple, il y a certains privilèges ou certaines lois qui empêchent, par exemple, la police ou d'autres gens de vérifier ou valider ce genre d'information là?

M. Malouin (Luc) : Effectivement, lorsqu'on est prévenus du cellulaire au volant, la bonne pratique maintenant de la part des coroners est de vérifier, d'aller chercher les informations auprès des fournisseurs, et notre loi nous permet d'obtenir toutes les informations auprès du fournisseur pour connaître l'utilisation. Alors, oui, mais encore faut-il qu'on soit informés au départ parce qu'on ne veut pas partir à la pêche. Donc, quand on a une information, effectivement, on va la confirmer avec le fournisseur de services de téléphonie.

M. Bolduc : Maintenant, vous nous parlez de 2 %, puis ça, c'est ce qui vous est rapporté, ce qui représente définitivement un minimum. Mais est-ce que vous avez, par exemple, des informations complémentaires sur les distractions? Parce qu'on parle de cellulaire, il pourrait être en train de souper, ou il pourrait être en train de regarder son GPS, ou d'avoir qui sait quelle autre activité. Et, dans les rapports qu'on a reçus, il y a beaucoup d'événements qui vont... jusqu'à même la conversation avec un passager, là, qui peut être aussi distrayante. Est-ce que vous, comme coroner, avez des informations à ce chapitre-là qui pourraient aider la commission à comprendre un peu ce qui se passe dans ces cas de décès là?

Le Président (M. Iracà) : M. Perron.

M. Perron (Paul-André) : D'abord, c'est une question qui soulève un enjeu important, qui est la variété des sources de distraction pendant qu'on conduit. La SAAQ a fait une enquête importante avec des observateurs, qui a permis, au fil des ans, là, d'observer que, oui, le cellulaire, c'est important. On dit souvent : Quand on parle au cellulaire, on a l'esprit ailleurs, il y a une sorte de dissonance cognitive. Mais ce n'est pas la source de distraction la plus fréquente. Il y en a beaucoup d'autres, sources de distraction. Parfois, un coroner, dans son rapport, peut arriver à l'identifier si on a un témoignage, mais là savoir si une personne lisait un journal, ou se maquillait, ou cherchait une cigarette dans son sac, s'il n'y a pas d'autre survivant dans l'habitacle, peut-être qu'on ne le saura jamais, là. C'est difficile à retracer.

Et l'autre chose qu'il faut avoir à l'esprit, c'est que, si on est capables de vous montrer ces chiffres-là avec leurs limites, c'est parce qu'il y a plusieurs années on était conscients qu'il y avait un phénomène en émergence qui demandait une surveillance particulière : le cellulaire. Donc, on l'inscrit, quand on le sait, dans une banque de données au fur et à mesure. Si on voulait retracer tous les cas de distraction, il faudrait faire des études particulières à partir de nos documents, de nos archives pour relever tous les cas où on peut détecter ce genre de problématique là. Donc, en théorie, c'est faisable. Il faudrait mettre des équipes de recherche, là, au travail.

M. Bolduc : O.K. Merci.

Le Président (M. Iracà) : Merci, M. le député. Oui, M. le député de Sainte-Rose, vous désirez poser une question.

M. Habel : Oui, merci, M. le Président. Bien, je vais faire du pouce avec mon collègue qui a parlé de distraction au volant, donné des exemples comme fumer, boire, manger, texter. On sait que la moitié des accidents sont causés à cause d'une distraction au niveau corporel et aussi le tiers des accidents mortels le sont à cause de la distraction. C'est ce que la SAAQ nous a dit d'entrée de jeu. Puis moi, je veux savoir... Parce que vous avez mentionné que 98 % des gens sont conscients de l'illégalité du geste. On a fait de la sensibilisation, investi 5 millions pour faire de la prévention, mener des campagnes, comme mon collègue a parlé, au niveau d'être à deux pouces de la mort. Est-ce que vous pensez qu'on devrait peut-être aller aussi en amont, c'est-à-dire les méthodes pour améliorer les technologies pour prévenir cette situation-là, ou on devrait continuer à faire de la sensibilisation au niveau de la conséquence?

M. Malouin (Luc) : Écoutez, il faut comprendre qu'on n'est pas des experts, au Bureau du coroner. La technologie évolue à une vitesse grand V. Moi, j'ai connu le téléphone Motorola haut de même, que peu d'entre vous avez connu, et aujourd'hui on a un ordinateur entre les mains. Demain, on nous parle de véhicules autonomes, et demain, là, ce n'est pas dans 20 ans. Est-ce que la technologie peut améliorer... Peut-être, mais il faudrait vraiment parler avec des gens spécialistes en cette matière. Chose certaine, on ne peut pas mettre de brouilleur d'ondes dans les autos. C'est illégal au Canada. Alors, est-ce qu'on peut avoir des applications de réponse automatique parce qu'on est dans l'auto? Peut-être. Ça existe déjà. Mais le problème, c'est : Est-ce que les gens vont s'en servir? Les gens sont tellement habitués d'avoir leur cellulaire, de répondre dans l'instantanéité, que... Est-ce qu'ils vont changer de comportement dans l'auto? Alors, je ne peux pas aller plus loin que ça dans ma réponse.

Le Président (M. Iracà) : Merci beaucoup. M. le député de Sainte-Rose, est-ce que ça va? Alors, M. le député d'Ungava.

M. Boucher : Bonjour, M. le coroner. Écoutez, vous parliez plus tôt de campagnes de sensibilisation, dont certaines étaient plus percutantes que d'autres, des images, des fois, qui nous marquent. Mais je regarde les jeunes en arrière, tu sais, on a souvent un sentiment d'invulnérabilité, tu sais : Moi, je suis bon au volant, je suis habile, les accidents, je laisse ça pour les autres. Qu'est-ce que vous pensez? À votre opinion, est-ce que des campagnes plus agressives ou des sanctions plus agressives peuvent dissuader, comme je pense à la saisie du véhicule pour 48 heures, le genre de chose comme ça, ou des amendes plus élevées, dire : Bien là, regarde, là, si je me fais prendre, là, c'est 1 000 $ d'amende ou je me fais saisir mon auto 48 heures? Pensez-vous qu'un a plus d'effet que l'autre?

M. Malouin (Luc) : Je ne suis pas le spécialiste des études, mais je pense que tout doit aller ensemble. C'est-à-dire qu'on doit autant éduquer, faire de la prévention, faire de l'information et qu'il y ait une conséquence aussi au bout. Je prendrais un parallèle pour ceux qui ont des enfants. On éduque nos enfants, on les élève, on les informe, on leur donne des limites. Mais, à un moment donné, il faut qu'ils sachent qu'il y ait une conséquence, et plus la conséquence est sévère, plus on risque d'avoir le résultat escompté. Est-ce que c'est vrai en matière de sécurité routière? M. Perron pourrait parler peut-être des autres expériences dans d'autres pays, mais force est de constater, aujourd'hui, et on a juste à aller marcher sur le bord de la rue regarder les autos qui circulent, il y a un laisser-aller parce qu'on va voir facilement, en quelques minutes, une dizaine de conducteurs avec le cellulaire au volant.

M. Perron (Paul-André) : Bien, juste en termes de principes généraux, il y a énormément de recherches qui se font sur toutes sortes de moyens de prévention dans toutes sortes de domaines, là : noyade, sécurité incendie, ainsi de suite. Il y a des choses qu'on sait, c'est que la sensibilisation, ça a une efficacité, et surtout quand c'est accompagné d'autres moyens. La sensibilisation à elle seule, c'est bien, mais c'est difficile de changer le comportement humain puis souvent ça prend du temps. Alors, ce qu'on sait en général sur les stratégies de prévention, c'est que ce sont les stratégies mixtes, c'est-à-dire qui combinent plusieurs moyens par des angles différents, qui ont le plus d'impact.

Maintenant, la question que vous soulevez, elle a été abordée de front par les coroners dans certains rapports, c'est-à-dire la sévérité des sanctions. La saisie du cellulaire a été suggérée à deux reprises, certainement, à ma mémoire, puis l'augmentation des points de démérite aussi, là, jusqu'à neuf points, de manière explicite, dans un cas très récent, là. On l'a eue en janvier 2017, là, cette recommandation-là de la part de Me Yvon Garneau, et dont la logique était justement l'idée que, oui... Je le sais parce que j'en ai parlé en long et en large avec lui puis je pense qu'il serait à l'aise, là, d'entendre ça aujourd'hui. C'est explicite dans ses rapports, il se dit : S'il y a tant d'infractions, c'est peut-être parce que les sanctions ne sont pas assez sévères pour dissuader les gens de parler. Maintenant, le nombre de points exact qu'il faut pour que la sanction soit convaincante, ça, je ne suis pas en mesure de vous dire qu'un nombre de points est plus... Où est le seuil dissuasif, ça, je ne le sais pas, là, mais le principe d'augmenter les sanctions, ça se reflète certainement dans les rapports des coroners.

Le Président (M. Iracà) : Merci beaucoup. Alors, je vais céder maintenant la parole au député d'Abitibi-Est pour un temps restant de trois minutes.

• (16 h 10) •

M. Bourgeois : Merci, M. le Président. Messieurs, bonjour. Moi, je veux aller un peu plus loin dans la résultante de l'utilisation du cellulaire, quel impact qu'il y a sur, je dirais, l'ampleur de l'accident, et à la fois pour l'utilisateur, qui, malheureusement... bon, on parle, dans le cas présent, de décès, mais pour les passagers, pour les autres utilisateurs de la route, parce que ce n'est pas nécessairement celui ou celle qui utilise le cellulaire qui décède, ça peut être aussi... Là, je rejoins le collègue de René-Lévesque là-dessus. Nous, dans nos régions, c'est des voies où on rencontre, donc, pour avoir malheureusement constaté ce résultat-là où, à un moment donné, c'est les gens qui s'en venaient en face qui se sont ramassés avec un véhicule, là, qui soudainement était dans l'autre voie, et malheureusement c'est eux qui ont subi... Est-ce que, dans vos rapports, vous avez remarqué... ce phénomène-là était plus amplifié face à l'utilisation du cellulaire par rapport à d'autres causes, par exemple chaussée glissante ou des problématiques de conditions routières?

Le Président (M. Iracà) : M. Malouin.

M. Malouin (Luc) : Écoutez, il faudrait faire le tour des 68 rapports pour répondre à votre question. Mais mon problème, c'est que, si celui qui textait n'est pas décédé, je n'ai aucun pouvoir d'investiguer cette personne-là parce que moi, pour pouvoir agir, je m'occupe des personnes décédées. Normalement, la personne qui texte et qui cause un accident mortel peut se voir accusée au niveau criminel de négligence criminelle, ou de conduite dangereuse, ou des choses de même. Moi, j'ai la résultante. Alors, je ne suis pas capable de vous dire : Oui, dans tel dossier, c'est clairement l'automobile qui s'en venait qui a occasionné le décès parce que lui était au volant. Moi, je ne peux pas vous le dire.

M. Perron, avez-vous connaissance d'un cas en particulier?

M. Perron (Paul-André) : Oui, on a des cas parce que, dans les chiffres qu'on a là, on voit qu'on a 68 décès, on a 63 collisions — parce qu'on a plus de décès que de collisions, parfois il y a plus qu'un décès, malheureusement — et, sur les 63 collisions, dans 55 cas, c'était le conducteur du véhicule lui-même qui manipulait un cellulaire. Donc, les autres cas, c'est l'autre conducteur. Parfois, les gens le disent tout simplement. Ça arrive qu'ils vont l'admettre. Et c'est un fait que, si l'autre conducteur survivant ne le dit pas puis que ça ne laisse pas de trace à l'enquête, à ce moment-là, ça peut passer sous silence. Mais, avec ce qu'on peut voir et confirmer de manière ferme, là, parmi les conducteurs décédés, ceux qui parlaient eux-mêmes au volant ou qui utilisaient leur cellulaire sont beaucoup plus nombreux que les autres, là. Mais c'est un phénomène qui existe aussi.

Puis l'autre pan de votre question est difficile à répondre de manière précise parce que, vous savez, les sources de collision... Les risques ne sont pas cloisonnés, hein? Souvent, ça se multiplie. Je vais vous donner un exemple simple. C'est qu'on sait qu'aujourd'hui il y a à peu près 30 %, un peu plus de 30 %, des conducteurs décédés qui ont une alcoolémie de 80 et plus, donc au-delà du seuil légal. Bien, dans mes 55 conducteurs, j'ai presque 30 % aussi de conducteurs qui avaient 80. Donc, d'une certaine manière, il y a une certaine logique parce que, si on a de l'alcool, le jugement est altéré. Peut-être qu'on va prendre plus de risques, donc on peut utiliser son cellulaire d'une manière qui est imprudente. Ça va ensemble.

Alors, c'est très difficile de pondérer tous ces critères-là de manière extrêmement précise. La SAAQ a des bons chiffres là-dessus, quand même, des bons aperçus. Mais il est vrai que le cellulaire, parfois il joue un rôle prépondérant, mais il n'est pas toujours isolé, là. On a des cas, là. Si vous regardez le dernier cas où Me Garneau a fait des recommandations, il y avait plusieurs éléments combinés. Il y avait l'état du véhicule, il y avait de l'alcool, il y avait des stupéfiants, il y avait l'absence de port de la ceinture. Il y avait bien des choses qui allaient ensemble, là, la vitesse également.

Le Président (M. Iracà) : Merci beaucoup, M. Perron. Malheureusement, ça met fin au bloc d'échange avec la partie gouvernementale. On va poursuivre avec l'opposition officielle, et je cède la parole au député de René-Lévesque.

M. Ouellet : Merci beaucoup, M. le Président. Donc, à mon tour de vous saluer, messieurs.

D'entrée de jeu, j'aurais une question assez succincte pour vous. On voit dans vos statistiques effectivement que ce sont les jeunes de 16 à 24 ans et de 25 à 34 ans qui sont majoritairement les victimes suite à l'utilisation du cellulaire au volant, mais on voit une différence marquée entre le sexe féminin et masculin dans vos statistiques. Croyez-vous que ça serait de bon augure si les législateurs que nous sommes légiféraient en fonction du sexe et de l'âge des utilisateurs pour avoir plus de poids, considérant que cette strate de gens est plus pondérée à l'intérieur même des statistiques? Est-ce qu'on devrait faire ça, c'est-à-dire y aller de façon plus sévère chez les jeunes garçons plutôt que chez les jeunes filles, ou d'avoir une modulation en fonction des chiffres que vous nous donnez pour les 66 décès dans ces 10 dernières années?

Le Président (M. Iracà) : Merci, M. le député. M. Malouin.

M. Malouin (Luc) : Oui, mais j'ai le goût de demander à M. Perron, qui connaît quand même beaucoup ce qui se fait dans les autres juridictions et les études sur la question, de répondre à cette question.

Le Président (M. Iracà) : M. Perron.

M. Perron (Paul-André) : D'abord, de manière générale, abstraction faite du cellulaire, les jeunes conducteurs sont surreprésentés dans les collisions de toute nature, là, en partant, il y a un facteur de risque significatif, et les hommes également. Puis les hommes, c'est triste à dire mais c'est vrai, pour tous les accidents, toutes les formes, ça commence jeune. Donc, le facteur sexe, malheureusement, il joue en défaveur des hommes pour toutes les formes, là, d'accidents qui sont mortels, de blessures et ainsi de suite. Alors, ce chiffre-là qui concerne spécifiquement le cellulaire au volant, il est, hélas! non surprenant. Ça reflète d'une manière peut-être un peu exacerbée ce qu'on observe pour l'ensemble des collisions, là, malheureusement. Peut-être que, par exemple, ce que ça peut nous suggérer, c'est que les campagnes de sensibilisation, évidemment, dans leurs limites, si on souhaite qu'elles aient un impact, il faut tenir compte de l'audience à laquelle elles s'adressent, autrement la communication a moins d'efficacité. Mais ça, j'imagine que les gens qui font de la prévention sont déjà au courant, là, des facteurs de risque associés au sexe et à l'âge, je suis certain. Je ne veux pas répondre à la place de la SAAQ, mais je serais très étonné de voir s'ils seraient surpris de voir ça, là. Je pense que, pour eux, c'est du connu, là.

Le Président (M. Iracà) : Merci.

M. Ouellet : Dans votre rapport, ce qui me surprend aussi... Parce qu'on dit souvent : Bon, O.K., il y a eu de la distraction, les gens étaient avec leur cellulaire. Mais on voit même qu'il y a eu deux décès sur 55 qui est associé à l'usage d'un appareil à mains libres. Donc, il y a aussi risque de décès. Même si le téléphone est sur le tableau de bord, on a l'option mains libres sur notre volant, il y a effectivement risque de mort. Vos statistiques le confirment : deux sur 55. Alors, ça, j'aimerais vous entendre là-dessus. Comment vous expliquez ça?

M. Malouin (Luc) : Il y a des études effectivement qui démontrent qu'il y a un risque très grand de parler au cellulaire mains libres même quand on est au volant. Alors, la loi, à l'heure actuelle, parle du cellulaire à la main, mais même le mains-libres occasionne un risque accru de distraction. Effectivement, il y a des études à cet effet-là, et on ne peut pas les contredire, et ça... Effectivement, il y a des gens qui ne sont pas capables de parler au téléphone tout en conduisant, qui vont carrément arrêter sur le bord de la route, et ils vont vous le dire : Moi, je suis trop distrait, je suis trop concentré sur ma conversation pour être capable de conduire en même temps.

Le Président (M. Iracà) : Merci. M. le député.

M. Ouellet : Parce que vous mettez dans vos recommandations la possibilité de saisir le cellulaire si effectivement il y a négligence de ce côté-là, mais, si la personne est mains libres, si on poursuit votre logique, il faudrait à ce moment-là saisir l'automobile puisque c'était l'automobile avec ses appareils qui était à ce moment-là l'agent disturbant, disons-le comme ça, distrayant, pardon, pour le conducteur.

M. Malouin (Luc) : Il faut faire quand même attention à ceci. La loi maintenant interdit le cellulaire au volant. Alors, les rapports du coroner s'attachent surtout au cellulaire au volant. Il n'y a pas d'illégalité à parler au Bluetooth comme il n'y a pas d'illégalité à marquer une adresse sur notre GPS intégré à notre auto. C'est permis par la loi. Alors, écoutez, la personne qui rentre une adresse, c'est également une source de distraction. Alors, si on voulait interdire toutes les distractions, je pense qu'il faudrait en faire la liste, ne serait-ce que manger tout en conduisant ou fumer tout en conduisant. Il y a une foule de situations. Effectivement, parce qu'on parle de cellulaire, le Bluetooth est là, c'est quand même un danger. Autant que l'alcool? Bien, pas autant en termes statistiques, mais l'alcool au volant... Et, on le sait, 30 % des accidents mortels, c'est l'alcool au volant. Et, dans toute la liste des causes de distraction au volant, il y a, entre autres, le cellulaire, mais il y en a énormément d'autres.

Le Président (M. Iracà) : Merci.

M. Ouellet : Autre question. Vous faites référence... Bon, depuis l'entrée en vigueur en 2008 de l'interdiction de conduire... Le coroner recommandait d'augmenter les points d'inaptitude. Il y a eu des modifications. On est passés de trois à quatre, et les statistiques nous démontrent qu'il n'y a pas eu d'amélioration nécessairement notable. Donc, je comprends qu'aujourd'hui votre bureau maintiendrait une augmentation des points d'inaptitude, et est-ce que cette augmentation-là irait encore une fois jusqu'à neuf points d'inaptitude? Parce que cet avant-midi les groupes de la SAAQ nous ont parlé plutôt d'une récidive, donc d'y aller avec une pénalité plus grande dans le cas d'une récidive. Là, vous y allez plutôt, si je comprends bien, à une première peine vraiment exagérée, donc neuf points d'inaptitude. Est-ce que ça serait toujours ça?

• (16 h 20) •

M. Malouin (Luc) : Le bureau n'a pas de position préétablie. Nous ne sommes pas des spécialistes en sécurité routière. Le bureau, ici, vous donne ce que les coroners, eux, sur le terrain, dans leur travail, ont suggéré. Bien loin de moi la prétention d'être un spécialiste et un expert en termes de nombre de points d'inaptitude, bien loin de moi la prétention de dire : Oui, légalement, on peut saisir un cellulaire au volant ou non. Alors, moi, je vous présente aujourd'hui le constat des coroners, leur position telle qu'elle existe sur le terrain et telle qu'ils l'ont écrite dans leurs rapports. On n'a pas pris, comme organisation, une position parce que ce n'est pas notre rôle de le faire, et on n'a pas les moyens parce que, si je défendais devant vous neuf points de démérite, il faudrait au moins que je m'appuie sur des études sérieuses, concrètes pour dire : On sait qu'à neuf points on va avoir un bon résultat. Est-ce que c'est sept points? Est-ce que c'est uniquement pour les récidivistes? C'est les gens qui connaissent ça qui pourront vous le dire. Le constat qu'on fait, et ça, je vous le redis, c'est qu'à quatre points d'inaptitude ça ne semble pas, quand on regarde nos chiffres, avoir un gros impact.

Le Président (M. Iracà) : Merci. M. le député.

M. Ouellet : Dans votre tableau, «Décès accidentels associés à l'usage du cellulaire», bon, vous avez parlé tout à l'heure d'une moyenne de six décès par année, mais on voit, en 2010, il y en a 11, puis on voit, en 2015, il y en a 13. Est-ce que, selon le travail que vous avez fait à votre bureau de coroner, il y a une tendance qui est sortie? Pourquoi est-ce qu'en 2010 c'était excessivement élevé puis pourquoi en 2013... Est-ce qu'il y a un corollaire qui vous est apparu ou si c'est simplement une fatalité qui fait que ces années-là étaient plus dramatiques que les autres?

M. Malouin (Luc) : C'est une moyenne. Alors, pourquoi, cette année-là, il y a eu plus d'accidents? Est-ce que des policiers ont prêté plus attention dans un nombre supérieur de dossiers ou est-ce que, ces années-là, les policiers ont vraiment visé tous les accidents, parce qu'on vous dit que c'est un minimum? Tout ça est possible. M. Perron a bien dit que c'est avec beaucoup d'humilité qu'on vous présente ces chiffres-là parce qu'on est dépendants du travail terrain policier pour être capables de faire notre travail. Maintenant, il a pu y avoir aussi, en 2010 ou en 2015, un ou deux accidents avec deux ou trois personnes qui ont décédé, et ça vient tout modifier la moyenne.

M. Ouellet : Donc, puis ce n'est pas un reproche, là, ce que vous me dites, c'est que vous n'êtes pas capables de sortir une tendance sur ces événements-là à long terme. Parce que la question que j'aurais eue pour vous : Suite aux chiffres qui sont très bas, est-ce que c'est suite à une campagne agressive de la SAAQ pour la sensibilisation ou une augmentation du nombre de tickets ou de surveillance faite par les policiers? Vous n'êtes pas capables, avec vos bureaux, de venir donner une explication à ces tendances-là qui viennent s'inscrire.

M. Malouin (Luc) : Moi, je ne peux pas. Peut-être que M. Perron pourrait...

Le Président (M. Iracà) : M. Perron, en une minute.

M. Perron (Paul-André) : C'est assez complexe. Il y a plusieurs phénomènes qui se superposent.

D'abord, si on regarde sur le très long terme, il y a plus de conducteurs, il y a plus de véhicules immatriculés, puis, en général, il y a moins de décès sur les routes. Alors, le bilan routier, globalement, s'est énormément amélioré au Québec. Ça, c'est sûr, il faut le reconnaître, c'est important.

Du côté du cellulaire, non, c'est difficile de faire une tendance avec ça parce qu'on n'a pas si long de données que ça qui sont fiables. Puis, quand on a des chiffres de cet ordre-là, il est normal que ça oscille pas mal. Vous parliez tantôt du mains-libres, je soupçonne que... pardon, du Bluetooth et tout ça, là, de ces appareils-là, je soupçonne qu'une partie de la sous-estimation vient de là. Peut-être que c'est plus difficile de détecter certains cas où on ne manipule pas un appareil à la main. Mais il est possible aussi que, donc, la variation, comme disait Me Malouin, soit dépendante, là, des limites, là, de nos sources de données.

Le Président (M. Iracà) : Merci beaucoup. Alors, ceci met fin au bloc d'échange avec l'opposition officielle. Merci beaucoup, M. le député. Nous allons passer la parole au député de Deux-Montagnes pour le dernier bloc d'échange. La parole est à vous.

M. Charette : Merci, M. le Président. MM. Malouin et Perron, merci pour votre présence. C'est très apprécié comme éclairage.

Vous avez mentionné à quelques reprises que votre travail était fait d'études des rapports des policiers, notamment. Donc, vous étiez un peu dépendants de cette collecte d'information qui est faite par les policiers. Est-ce que vous savez, sur le site d'un accident de la route, si les policiers, de façon systématique, évaluent cette possibilité-là ou on essaie plutôt, à travers des calculs, voir un petit peu les lieux d'impact et autres? Mais est-ce que c'est une variable qui est systématiquement vérifiée dans le travail policier, à savoir : Est-ce que le conducteur était en possession d'un téléphone, est-ce qu'il textait? Est-ce que c'est une petite grille qui fait état de cette variable-là systématiquement?

M. Malouin (Luc) : Je ne sais pas s'il y a une grille au niveau des corps policiers pour faire du travail terrain encore régulièrement. C'est toujours une question qu'on pose maintenant. C'est un réflexe qu'on a maintenant comme coroners, moins il y a 10 ans parce qu'il y a 10 ans on n'en parlait pas. Mais, au fil des années, je peux vous dire que c'est un réflexe qu'on a de poser la question aux policiers : Il y a-tu un cellulaire d'impliqué là-dedans, au même titre qu'on va demander : Il y a-tu de la drogue, il y a-tu de l'alcool, pourquoi cet accident-là? Alors, ça fait partie maintenant du réflexe du coroner et du policier également.

Le Président (M. Iracà) : M. le député.

M. Charette : Parce qu'on disait tout à l'heure, et mes collègues ont eu l'occasion de vous questionner avant moi sur le sujet : Les chiffres sont déjà très évocateurs, mais ça constitue un minimum. On ne peut pas savoir quel était ou quel est le portrait exact compte tenu des éléments que vous ne contrôlez pas. Mais, certainement, une donnée qui est frappante, c'est les groupes d'âge qui sont en cause. Et le hasard fait bien les choses. Jusqu'à il y a quelques instants à peine, on avait une cohorte de jeunes d'âge collégial, et c'est certainement aussi la cohorte ou, à tout le moins, le groupe d'âge qui est le plus représenté dans vos rapports. Est-ce que, selon vous... Comment je pourrais m'exprimer? Je comprends la nature de votre travail. Vous étudiez des cas lorsqu'il y a décès. Je comprends que vous faites des recommandations. Ces recommandations-là s'adressent, en quelque sorte, aux vivants pour éviter que pareille situation ne se reproduise. Est-ce qu'il vous arrive de travailler avec la SAAQ, qui collige des données elle aussi de son côté, qui va mettre en place des campagnes de publicité? Donc, bref, à travers les études que vous faites, les rapports que vous faites sur le type de profil ou les circonstances, est-ce qu'il y a ce type de collaboration là avec la SAAQ? Peut-être nous en dire davantage à ce niveau.

M. Malouin (Luc) : Comme coroner, sur le terrain, je peux vous dire que, lorsqu'arrive des événements où on veut faire des recommandations, effectivement, on a des communications au niveau de la SAAQ, le ministère des Transports et le coroner, comme avec beaucoup d'autres partenaires. M. Perron pourrait vous parler encore plus des échanges de bureaux au niveau de l'information.

M. Perron (Paul-André) : On partage nos données avec la SAAQ pour qu'elle puisse faire son travail de statistique en général, valider ses propres données. C'est arrivé dans le passé que la SAAQ vienne souvent fouiller dans nos dossiers pour travailler sur l'alcool au volant justement, pour voir, là, les caractéristiques des conducteurs, comment ils étaient affectés, ainsi de suite. Donc, il y a eu plusieurs, plusieurs collaborations à travers... Ça fait 16 ans que je fais ça, là, avec la SAAQ. Ce n'est pas, là, chaque semaine, là, mais c'est arrivé à plusieurs reprises.

Le Président (M. Iracà) : M. le député.

M. Charette : Est-ce que vous avez eu l'occasion de participer à la consultation menée par la SAAQ au cours de la dernière année? Est-ce que vous étiez partie prenante de cette consultation-là? C'était une consultation qui ne visait pas uniquement le cellulaire au volant, mais la sécurité routière en général. Est-ce que c'est un exercice que vous avez mené de votre côté?

M. Perron (Paul-André) : On ne l'a pas mené comme Bureau du coroner, mais la SAAQ est au courant de toutes nos recommandations. Toutes celles qui touchent au cellulaire sont envoyées à la SAAQ systématiquement. Donc, ils savent déjà qu'est-ce que le coroner a à dire. C'est déjà dans le rapport du coroner.

Le Président (M. Iracà) : M. le député.

M. Charette : Comme société, on a certainement cheminé par rapport à la question de l'alcool au volant. Il y a manifestement encore du travail à faire. On s'entend à ce sujet-là. Mais il y a sans doute une amélioration, là, notable au niveau du cellulaire si on se fie aux moyennes des 12 dernières années. Cette évolution-là est plus difficile à ce moment-ci à percevoir, à tout le moins. Si on parle de sécurité routière en général, est-ce que vous diriez que la question du cellulaire au volant devient, de nos jours, l'enjeu numéro un? L'alcool, il faudra toujours faire de la sensibilisation. La drogue, spécialement avec ce qui s'en vient en matière de légalisation de la marijuana, il y aura certainement aussi beaucoup de travail à faire, mais est-ce que ça devient un des enjeux principaux en matière de sécurité routière?

• (16 h 30) •

M. Malouin (Luc) : Je ne parlerais pas d'enjeu principal, mais c'est un enjeu important. On a en moyenne sept décès par année sur les routes. La grande majorité de ces sept décès-là, c'est notre jeunesse, c'est notre futur. Il faut peut-être trouver une façon de les protéger contre eux-mêmes, malheureusement. Mais c'est un élément parmi tant d'autres : la vitesse au volant, la fatigue au volant, l'alcool au volant, à compter de l'an prochain on va avoir la drogue au volant. Alors, ce sont tous des éléments qu'on doit tenir en compte, à mon humble avis, et le cellulaire fait partie d'un de ces éléments-là. Autant, quand j'ai commencé à conduire, on apprenait que la ceinture de sécurité était obligatoire et on devait la porter, aujourd'hui, c'est rentré dans les moeurs, et on a un très beau taux de succès. L'alcool au volant baisse, en termes d'infractions, notre bilan routier ne cesse de s'améliorer, donc il y a du travail qui a été fait pour améliorer notre bilan routier. Il reste quand même beaucoup de choses dans la distraction au volant, dont le cellulaire au volant, et il va falloir travailler collectivement pour ça.

Le Président (M. Iracà) : Merci beaucoup. M. le député, il vous reste 15 secondes.

M. Charette : Le temps de vous remercier pour votre présence très appréciée. C'est encore une fois un éclairage, là, qui est très pertinent pour nos travaux. Merci beaucoup.

Le Président (M. Iracà) : Alors, messieurs, je vous remercie pour votre contribution aux travaux de la commission.

Je suspends les travaux quelques instants pour permettre au prochain groupe de s'installer.

Alors, merci de votre préparation. À la prochaine.

(Suspension de la séance à 16 h 31)

(Reprise à 16 h 35)

Le Président (M. Iracà) : À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons reprendre nos travaux. Je souhaite la bienvenue aux représentants du ministère du Transport, de la Mobilité durable et de l'Électrification des transports. Je vous demande de bien vouloir vous présenter ainsi que les personnes qui vous accompagnent. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé. Par la suite, nous procéderons, comme à l'habitude, à des périodes d'échange.

Alors, je sais, M. le sous-ministre adjoint, que vous êtes un habitué des commissions parlementaires. Même si tout le monde vous connaît ici, vous allez être obligé de vous nommer ainsi que les gens qui vous accompagnent. Votre exposé débute à l'instant.

Ministère des Transports, de la Mobilité durable et
de l'Électrification des transports (MTMDET)

M. Unterberg (Jérôme) : Merci beaucoup, M. le Président. Merci à la commission de pouvoir aujourd'hui permettre au ministère de venir faire sa présentation concernant ce mandat d'initiative. Le temps est restreint, et je voudrais juste, avant de présenter celle-ci, introduire... présenter mes collègues : M. Stéphane Martinez, à ma gauche, qui est directeur des politiques de sécurité, toujours au ministère; à ma droite, Mélanie Dubé, qui est conseillère experte en sécurité routière, également au ministère.

Le plan de la présentation aujourd'hui. Nous allons vous présenter un léger contexte, on pense que c'est extrêmement important, ça va mettre en relief des facteurs qui sont sous surveillance puis des préoccupations aussi, à notre sens, au plan de l'intérêt public. Ensuite, nous voudrons attirer l'attention de la commission à l'effet que la problématique qui concerne... ce qui intéresse aujourd'hui la commission concerne l'ensemble des usagers, donc pas juste les usagers d'automobiles. On va vous parler des véhicules hors route, d'autres usagers, par exemple les piétons, aussi du réseau routier, qu'il soit supérieur ou local. Et on ne voudra pas consacrer beaucoup de temps, là, compte tenu du 10 minutes, pour rapidement arriver à des questions relatives aux solutions sur les axes d'intervention. On a identifié trois axes d'intervention et on aimerait consacrer une bonne partie de notre présentation à celles-ci.

On vous a déposé, aux membres de la commission, au secrétariat de la commission, la présentation qu'on vous diffuse aujourd'hui. Gênez-vous pas, évidemment, durant les questions, s'il y a certains éléments pour lesquels on aura passé plus rapidement en vue — là, c'est une estimation de notre part — d'aller plus directement à ce que nous présentons comme étant des solutions. Puis on aimerait faire une légère conclusion en bout de piste. Donc, sans plus tarder, je passerais la parole à mon collègue, M. Martinez.

Le Président (M. Iracà) : M. Martinez, la parole est à vous.

M. Martinez (Stéphane) : Merci. Alors, les éléments de contexte, écoutez, vous en avez eu toute la journée, hein, vous avez compris, les chiffres, ils sont partiels, ils ne sont pas toujours fiables, ils viennent de différentes sources. On ne vous refera pas tout ça. Nous travaillons avec les mêmes chiffres que les gens que vous avez entendus, ce matin et cet après-midi, ce sont toujours les mêmes chiffres qui reviennent.

Ce qu'on tire, nous, comme conclusion, et qui nous intéresse particulièrement, c'est que finalement il y a une dangerosité, quel que soit le type d'appareil utilisé, et puis il y a une corrélation : avec la fréquence d'utilisation, on voit augmenter la fréquence des accidents. Donc, cette corrélation nous interpelle parce que finalement, au ministère, évidemment, la sécurité au volant, la sécurité routière nous interpellent. Nous sommes aussi gestionnaires de réseau. Alors, toute notre présentation, elle tient au fait qu'on est, d'un côté, de la sécurité routière et, de l'autre côté, on est aussi gestionnaires du réseau.

Si vous allez à la première carte que je vous propose, vous voyez ce rôle du ministère et des municipalités. En bleu, les petits points, ce sont les accidents sur les réseaux. Et là on voit, par exemple, que, très logiquement, il y a une concentration, hein, des accidents qui sont liés au téléphone dans les zones urbaines principalement. Mais ce qu'on constate sur la carte, rapidement, c'est que, si vous partez vers la Gaspésie, ici, vous avez toute une ligne d'accidents liés à l'utilisation du téléphone. Parce que finalement, des statistiques qu'on peut faire avec les données partielles qu'on a, on déduit que 90 % des accidents proviennent en ligne droite sur une surface plane. C'est-à-dire que les accidents mortels, dangereux avec blessés graves, ce ne sont pas forcément les accidents en ville, ce sont quand les gens qui sont sur une ligne droite, qui s'ennuient et qui ont du temps... et qu'ils prennent leurs téléphones.

Si vous allez à l'acétate suivante, vous allez voir, sur le réseau municipal et sur le réseau du ministère, c'est à peu près équivalent : 710 accidents, 614. Mais, si vous prenez la dangerosité des accidents, c'est-à-dire quels sont les accidents qui ont mené à un décès, 79,3 % de ces accidents sont sur le réseau du ministère. C'est pour ça qu'on est concernés particulièrement. 62,8 % des accidents avec blessés graves sont aussi sur notre réseau.

• (16 h 40) •

Donc, vous comprenez qu'il y a une corrélation entre la distraction et la vitesse dans les conséquences de l'accident. Et là vous voyez que notre présentation, elle commence déjà à vous amener vers autre chose que simplement de la distraction. Le problème du téléphone au volant, ce n'est pas que la distraction, c'est la distraction par rapport à son environnement et par rapport à son usager. Alors, c'est une problématique qui concerne l'ensemble des usagers, pas seulement les gens au volant.

Si vous allez à la diapositive, page 7, une problématique... Si vous regardez, évidemment, les piétons et les cyclistes, tout à fait naturellement vous allez voir une concentration Montréal-Québec parce que c'est là que sont les piétons et les cyclistes. Bon. Si vous prenez plus particulièrement la ville de Montréal, bien — Mme Plante, qui a été élue, va être contente de voir qu'on parle d'une problématique qui lui tient à coeur — je veux dire, la concentration à Montréal n'est pas uniforme. Et c'est là où on comprend que la distraction, elle est répandue à la grandeur de la province. Ça, on vous l'a dit ce matin.

Mais le problème n'est pas forcément lié uniquement à la distraction. Il est lié à un ensemble qui fait : distraction, lieu où vous avez la distraction et infrastructure sur laquelle vous êtes. Et c'est ces trois éléments-là qui font le problème de la distraction au volant. Par exemple, à Montréal, vous avez une concentration dans l'axe Sainte-Catherine, à peu près, là, avec, dans l'autre sens, l'axe Saint-Laurent. C'est là où sont les gens principalement à vélo, à pied, alors c'est là où sont les problèmes. Ce n'est pas seulement les distractions, il y en a partout sur l'île, mais les accidents ne sont pas répartis partout sur l'île.

C'est une problématique qui concerne l'ensemble des usagers. On voulait vous glisser quand même un mot des usagers qui utilisent une aide à mobilité motorisée, donc les triporteurs, quadriporteurs. On a un projet pilote, depuis trois ans, qui encadre l'utilisation des triporteurs et des quadriporteurs et qui interdit l'utilisation, pour l'instant, du cellulaire de la même façon que si vous étiez en voiture. Et pour les personnes handicapées, c'est un problème de stigmatisation parce qu'ils se considèrent comme des piétons et non pas comme des conducteurs. Si ce sont des conducteurs, il va falloir effectivement peut-être leur mettre les mêmes règles qu'à tous les autres conducteurs. Mais, si ce sont des piétons qui, au lieu d'être sur leurs jambes, sont sur des roues, eux, ils disent : Bien, si on est des piétons, pourquoi quelqu'un qui marche a le droit d'avoir le cellulaire et pourquoi nous, qui sommes handicapés en fauteuil roulant, n'avons pas le droit d'avoir le cellulaire? Donc, vous voyez que la distraction au volant, le cellulaire, ça vous amène ailleurs qu'en dehors de la voiture.

Les véhicules hors route, par exemple. Il y a quelques années, si on avait dit : En motoneige, il y a un problème de cellulaire, tout le monde aurait rigolé. Avec les moufles, les motoneiges, vous lâchez une main, hop! vous prenez le champ tout de suite. Aujourd'hui, les véhicules ont évolué, vous avez des véhicules qui vous permettent d'utiliser le cellulaire parce que ce sont des quads à quatre places, toute la famille embarque, vous avez un volant comme dans une voiture, donc vous pouvez maintenant avoir un cellulaire. Donc, la problématique arrive dans les VHR, il n'y a pas encore de décès, pas encore d'accidents graves, mais elle arrive.

Là, où on voulait vous faire venir par rapport à notre travail à nous, au ministère, c'est que nous pensons que la solution, elle est sur plusieurs axes. On a vu ce matin, avec le travail de la SAAQ, il y a l'usager, la sensibilisation, il faut le faire et il faudra le faire à l'infini, il y a la technologie, les technologies elles-mêmes apportent aussi une solution, et il y a les infrastructures. Alors, je passe rapidement sur le travail de sensibilisation, vous l'avez vu ce matin par nos collègues de la SAAQ.

Pour la technologie, vous avez, on en a parlé aussi, j'étais là ce matin, beaucoup d'innovations, beaucoup de choses qui permettent à l'usager soit de se contrôler lui-même... C'est sûr que ça reste un contrôle que vous choisissez de faire. Et là on se trouve toujours à la même limite, la personne qui ne veut pas se contrôler, bien, il n'y a rien à faire pour le lui imposer. Vous avez la petite image qui est en bas, je l'aime beaucoup. Quand vous marchez, vous textez, et votre téléphone filme ce que vous devriez voir en face. Ça fait que finalement, si vous avez quelque chose, en textant, qui apparaît, bien, il apparaît dans votre téléphone également. Ça fait que ça, c'est : la technologie corrige la technologie. Ça, c'est toujours comme ça, le problème arrive, mais la solution s'en vient pas loin, tout simplement parce qu'il y a derrière des enjeux commerciaux, on le comprend. Nous, au ministère, évidemment, on a cette problématique comme les autres et on a commencé à travailler.

On a parlé des bandes rugueuses avant nous. Sachez que la bande rugueuse, c'est une bonne solution pour éviter les sorties de route. Ça coûte de 1 $ à 2 $ du mètre linéaire, donc c'est une solution abordable pour le Québec. Sur le réseau des autoroutes, c'est fait. On met maintenant même des bandes rugueuses sur les autoroutes quand ils partagent la même chaussée. Donc, quand vous êtes en double sens, là, on met une bande rugueuse médiane pour éviter les face-à-face. Donc, ce travail-là, il est fait, puis il reste maintenant un travail qui est fait de plus en plus sur certaines routes nationales afin de réduire les collisions frontales. La bande rugueuse, au début, c'était pour les gens qui s'endorment. Maintenant, c'est pour les gens qui textent ou qui téléphonent. Donc, on a trouvé là un intérêt double.

On a aussi installé, depuis quelques années, depuis 2015, des haltes texto. Ça a été évoqué aussi. On a huit haltes au Québec. Et je peux vous dire, parce que je sais que vous allez me poser la question, on a eu, depuis qu'on les a installées, 73 065 utilisateurs dans les haltes texto. Alors, on en a huit, on a 73 000 personnes qui se sont arrêtées pour envoyer un message, qui se connectent gratuitement. Donc on sait qu'il y a une réponse. Ce n'est pas pour rien, ça marche. C'est sûr que ça fait bizarre de dire aux gens : Arrêtez-vous pour texter, mais ça marche. C'est toujours 73 000 personnes qui n'ont pas texté en conduisant.

On a essayé aussi de faire des aménagements d'aires d'arrêt... mettre sur la route quand vous avez quelque chose d'urgent à faire. Ça s'en vient. On n'en a pas encore, mais ça s'en vient, c'est dans nos cartons.

Pour finir, je voudrais... on nous a envoyé quelques photos, parce que quand même il y a des choses qui se passent ailleurs. Notamment, par exemple, pour le piéton, c'était... Il y a 60 piétons, hein, qui décèdent au Québec par an. Ce n'est pas toujours de la distraction au volant, mais c'en est aussi beaucoup. Alors, vous avez là des images qui montrent soit des signaux lumineux, par exemple... Vous êtes en train de texter, la petite bande rouge à droite, là, elle s'allume quand le feu est rouge. Donc, quand le feu pour la circulation est rouge, que vous n'avez pas le droit de passer, la bande au sol s'allume aussi en rouge. Donc, quand vous êtes en train de texter, vous la voyez. Vous avez un panneau sympathique, en Suède, qui dit : Attention aux gens qui textent! Donc, ça, ça s'adresse aux automobilistes. Le problème, il est dans les deux sens, hein, pour le cellulaire. Ou alors des couloirs, par exemple, en Belgique, on voit, c'est un couloir dédié aux gens qui textent. Si jamais vous textez, prenez le couloir, vous allez pouvoir vous rendre à votre lieu. Vous avez le panneau en haut, en Hollande, c'est une projection en LED. Quand on pense souvent à la neige, bien ça, ça se projetterait sur la neige également et ça marche avec le feu de circulation. Vous voyez, en face, le feu est vert, la projection est verte pour le piéton...

Le Président (M. Iracà) : Merci beaucoup, M. Martinez. C'est très intéressant, mais je dois vous arrêter. Ça met fin à la période pour l'exposé.

M. Martinez (Stéphane) : Ça fait le tour de ce qu'on avait à dire.

Le Président (M. Iracà) : Parfait, excellent. Alors, bon timing. Nous allons procéder à la période d'échange et nous allons commencer avec la partie gouvernementale. Et je cède la parole au député de Mégantic.

M. Bolduc : Merci, M. le Président. Bonjour, messieurs. Bonjour, madame. Il me fait plaisir de vous recevoir cet après-midi. Puis moi, j'ai plusieurs questions qui impliquent finalement non seulement le cellulaire, mais les distractions en général. Mais, avant de commencer ça, j'aimerais savoir si vous avez une distribution saisonnière. On sait que les hivers, au Québec... pas que ça a un impact, mais peut-être. Est-ce que vous avez des données, en fait, en rapport ou en relation avec le ratio, appelons-le l'asphalte sécuritaire et la période hivernale, qui ajoute une dimension supplémentaire?

Le Président (M. Iracà) : Merci, M. le député. Je regarde nos invités, je vais céder la parole à un des trois. Oui, M. Unterberg.

M. Unterberg (Jérôme) : Merci. Merci, M. le député pour votre question. On a des banques de données avec lesquelles on extrait beaucoup d'information. Avec nous aujourd'hui, on n'a pas cette représentation, mais c'est quelque chose qu'on peut donc obtenir. Les banques de données ne sont pas parfaites, mais elles sont immenses puis, évidemment, elles sont limitées par les facteurs d'entrées. Là, on ne l'a pas avec nous, mais Mme Dubé, à ma droite, qui travaille sur ces banques de données là, me signale que c'est des choses qu'on pourrait faire ressortir.

M. Bolduc : ...l'information sera envoyée à la commission.

Le Président (M. Iracà) : Alors, vous pouvez passer l'information à la secrétaire de la commission, on va pouvoir la transmettre aux membres. Simplement un petit rappel, j'en profite pour vous dire que vous avez tous eu un document du groupe qui est ici, là. Alors, je continue le bloc d'échange. M. le député de Mégantic.

M. Bolduc : Merci. Vous nous parlez que 79,3 % des accidents mortels ont lieu sur le réseau du ministère et 62 % des blessés graves. En comparaison, j'imagine que le reste est centré, comme vous l'avez mentionné, sur Montréal et Québec, mais une partie du réseau de ces villes-là aussi appartient au ministère, n'est-ce pas? Est-ce que c'est inclus, exclu? Comment ça marche?

Mme Dubé (Mélanie) : Effectivement, ça inclut les réseaux du ministère, que ce soit dans les municipalités ou à l'extérieur, là, dans les...

M. Bolduc : ...

Mme Dubé (Mélanie) : Oui, exactement.

M. Bolduc : O.K. Puis là je vais faire un petit peu de sémantique, parce qu'il y a des routes numérotées qui appartiennent au ministère puis il y en a d'autres qui appartiennent aux municipalités. Vous parlez ici exclusivement des routes qui sont sous la supervision et l'entretien du ministère.

Mme Dubé (Mélanie) : Exactement, sous la gestion du ministère.

M. Bolduc : O.K. Ça, c'est important. Vous nous parlez aussi du fait qu'il y a beaucoup d'utilisation de téléphone cellulaire impliquant des usagers vulnérables, puis là on parle de cyclistes et de piétons. On en voit énormément se déplacer avec des écouteurs. Est-ce que vous avez des données là-dessus? Parce qu'ils écoutent soit leur téléphone intelligent, ils sont au téléphone, mais ils peuvent aussi écouter de la musique, etc., et ils n'ont pas conscience du bruit autour d'eux. Est-ce que vous avez des données là-dessus?

Mme Dubé (Mélanie) : Non, on n'a pas la donnée, il n'est pas possible d'avoir la donnée. C'est quand même assez, comme on l'a dit tout au long de la journée, difficile d'avoir des données concernant le cellulaire à travers les données concernant la distraction. La donnée concernant l'écouteur en tant que tel, on ne l'a pas exploitée, on ne l'a pas.

• (16 h 50) •

M. Bolduc : Ni au volant des voitures? On en voit avec des écouteurs au volant. Vous n'avez pas ça? Bon. Donc, je vais revenir à vos trois axes parce que vous avez des données, ici, vraiment intéressantes où vous avez fait toutes sortes d'innovations. Est-ce que vous avez des données sur l'effet de ces actions-là que vous avez mis, surtout au niveau de la sensibilisation, par exemple, comme les arrêts de textos ou les bandes rugueuses, etc.? Parce qu'il n'y en a pas partout, de ces services-là, mais surtout dans les plus grands réseaux, je dirais. Mais est-ce qu'on sait quel impact ces activités-là produisent?

Mme Dubé (Mélanie) : ...au niveau des bandes rugueuses, l'efficacité estimée, c'est d'environ de 20 % à 30 % de réduction des sorties de route. Donc, c'est quand même une mesure, là, au niveau des bénéfices-coûts, qui est intéressante, car faire une bande rugueuse, ça ne coûte pas très cher. Par contre, c'est ça, ça va dépendre, là, de plusieurs facteurs, dont la nature de la chaussée, la distance de la bande rugueuse par rapport à la ligne de rive, la largeur de l'accotement, là, il y a différents facteurs qui peuvent influencer l'efficacité de la bande rugueuse. Mais c'est quand même reconnu dans la littérature et par l'expérience que c'est une mesure efficace.

Le Président (M. Iracà) : Merci beaucoup. M. le député.

M. Bolduc : Merci. On a posé la question à la SAAQ, ce matin, qui n'avait pas de donnée — je ne sais pas si vous en avez — sur le fait, puis on le voit ici, que les centres urbains ont définitivement un taux d'accidents beaucoup plus élevé. Est-ce que vous avez des données en regard de la densité de trafic vs le nombre d'accidents? Il y a des routes qui sont très denses. Et est-ce que le taux d'accidents, en comparaison de la fréquence d'utilisation... est-ce qu'il y a une corrélation entre ces variables-là?

Le Président (M. Iracà) : Mme Dubé.

Mme Dubé (Mélanie) : À l'heure actuelle, le ministère, pour notre... on n'a pas de donnée sur le débit sur les réseaux municipaux. Par contre, on a des informations concernant les débits sur nos réseaux, ce qui serait possible, là... ce serait possible d'extraire probablement quelque chose. Par contre, le nombre d'accidents est quand même assez faible, là, concernant le cellulaire au volant. Donc, avec les données couplées avec les débits, je ne suis pas certaine que ça donnerait une statistique intéressante.

M. Bolduc : Vous ne pouvez pas nous dire s'il y a une corrélation effective entre la densité du trafic et le nombre d'accidents ou du cellulaire au volant, etc., là?

Mme Dubé (Mélanie) : Évidemment, en sécurité routière, la notion d'exposition au risque est quand même assez parlante. Donc, plus un usager vulnérable est exposé au risque du nombre grandissant d'automobiles, donc effectivement on peut croire qu'il va avoir plus de risque d'être impliqué dans un accident. Par contre, ce qu'on peut dire, bien souvent, quand la densité de circulation est importante, les vitesses sont moins élevées. Donc, probablement que l'impact va causer moins de dommages, je vais dire. La gravité des blessures va probablement être moins importante, là, quand la densité de la circulation est plus importante. Là, je parle en situation, évidemment, là, de congestion ou de vitesse un peu plus basse.

Le Président (M. Iracà) : Merci, Mme Dubé. M. le député.

M. Bolduc : Vous nous avez parlé qu'il y avait à peu près 60 piétons qui étaient blessés par année. Est-ce que vous avez les mêmes données pour les cyclistes sur les routes du Québec?

Mme Dubé (Mélanie) : Pour les cyclistes, c'est un petit peu moins, là. L'année dernière, je crois que c'est autour de 12 cyclistes qui sont décédés.

M. Bolduc : O.K. Est-ce que vous savez si les accidents piétonniers et les accidents des cyclistes ont aussi un impact créé par le cellulaire au volant?

Une voix : M. le Président.

Le Président (M. Iracà) : Oui.

Une voix : ...

Le Président (M. Iracà) : Vous avez des bonnes questions.

Mme Dubé (Mélanie) : En fait, dans les données qu'on a sur l'ensemble des statistiques qu'on a, c'est 131 accidents qui impliquent un piéton ou un cycliste. Et près de la moitié de ces accidents-là se retrouvent dans la région de Montréal, ce qui est comparable aux statistiques d'accidents en général, là, sans surprise.

Le Président (M. Iracà) : Merci beaucoup. Maintenant, je vais céder la parole au député de Maskinongé pour poursuivre l'échange.

M. Plante : Merci beaucoup, M. le Président. Donc, messieurs madame, bienvenue. Sujet d'importance et surtout sujet d'actualité, qui va l'être toujours parce qu'avec l'avancement technologique, avec le développement des nouvelles technologies on sait qu'on doit adapter nos façons de faire, hein, surtout. Et moi, ma question va être bien simple, et, vous allez voir, j'ai de la suite dans les idées parce que presque à chaque groupe j'essaie de me concentrer sur ce type de question là parce que ça m'intrigue beaucoup, sur le fait, justement, de l'avancement technologique des voitures, des constructions automobiles.

On sait qu'il y a une dizaine d'années tous les équipements, que ce soit GPS, que ce soit téléphone sans fil dans la voiture, ou etc., commandes vocales, étaient réservés aux voitures de luxe ou de certaines catégories plus élevées dans les voitures. Maintenant, ça vient comme modèle de base dans toutes, toutes, toutes les voitures, d'entrée de gamme à fin de gamme, donc ça vient... Et moi, mon questionnement est : On a pensé des haltes texto, on a pensé à des aménagements, mais comment on fait, au ministère des Transports... ou quelle est la vision du ministère des Transports face à l'avancement technologique? Parce qu'on sait qu'on s'en vient avec des voitures qui vont se conduire tout seul, ou il y en a qui le font, pratiquement, présentement. On peut parler des modèles électriques, d'ailleurs, de certaines voitures qui, avec les données GPS, se conduisent quasiment seules. Alors, j'aimerais avoir votre façon de penser ou quelles sont les étapes, au ministère des Transports, que vous avez ou les prévisions pour justement faire face à ces avancées technologiques là.

M. Unterberg (Jérôme) : Merci beaucoup, M. le député. Vous abordez un aspect extrêmement important parce qu'on pourrait dire que, jusqu'à ce jour, typiquement, l'action étatique s'est portée beaucoup sur l'axe un, là, qui était le comportement des usagers. Évidemment que, sur l'axe trois, on en a parlé un peu plus tôt, les haltes routières, les infrastructures, on agit déjà et on peut s'attendre à encore plus.

Mais, là où il y avait un axe sur lequel on pouvait dire : Nous étions moins présents, on s'en remet peut-être, peut-être beaucoup aux développeurs, aux constructeurs automobiles. Vous l'avez souligné, non seulement les technologies sont de plus en plus intéressantes, mais le rôle accru du ministère, dans notre vision, est important ici parce que ces technologies-là vont de plus en plus, à notre sens — et il y a eu un congrès important sur les systèmes de transport intelligents, à Montréal, qui a été tenu la semaine dernière — en contact avec des outils technologiques qui font partie du réseau supérieur et également pour les municipalités, là. On en voit déjà qui existent dans certains services de protection incendie, au Québec, mais on pourrait penser aussi aux communications sur les goulots, les accidents, l'information qui peut aller aux autorités policières, au service d'ambulance. Donc, il y a toute une panoplie de nouveaux événements, là, qui nous permettent d'échanger l'information de manière pertinente. M. Martinez a fait des travaux là-dessus aussi.

M. Martinez (Stéphane) : Oui. Évidemment, on se pose la question : On s'en va où avec ça? Et la technologie, comme je disais tout à l'heure, guérit la technologie. Vous avez, notamment grâce au téléphone, la possibilité d'être connecté, donc d'envoyer de l'information — on pense toujours que ça passe dans ce sens-là — mais aussi de recevoir de l'information. Donc, on sait déjà que, d'ici une dizaine, une quinzaine d'années, les véhicules vont non seulement être connectés entre eux, sans forcément passer par la personne, mais par son appareil, mais les véhicules vont pouvoir être connectés aux infrastructures, c'est-à-dire que véhicule et infrastructure vont se parler en temps direct pour recevoir de l'information, par exemple, sur l'état d'une chaussée ou un événement qui serait survenu incessamment. Donc, vous avez cette connexion infrastructure-véhicule, elle se fait rapidement au niveau du véhicule, parce qu'on comprend que c'est un argument de vente, et elle devra se faire aussi au niveau des gestionnaires de réseau pour que les infrastructures se modernisent pour pouvoir parler ensuite aux véhicules. Ça, c'est l'avenir, mais c'est dans 10 ou 20 ans.

Le Président (M. Iracà) : Merci. M. le député de Sainte-Rose pour un temps de trois minutes.

M. Habel : Oui. Merci, M. le Président. Je vais y aller rapidement parce que je sais qu'un autre de mes collègues veut poser une question. Vous avez parlé des mesures... on a parlé beaucoup des mesures législatives, des activités de sensibilisation, des activités de contrôle comme des points d'inaptitude. Mais vous avez apporté un élément très important au niveau des mesures de prévention, vous avez notamment parlé des bandes rugueuses, qui ont amélioré de 20 % à 30 % l'efficacité, vous avez parlé des haltes texto et des wifi. Vous avez parlé aussi des infrastructures de transports pour les piétons, notamment en Belgique, aux Pays-Bas, en Suède, en Allemagne, en Australie. Est-ce que vous pouvez nous dire quelle a été... les conséquences, positives ou négatives, de l'implantation de ces éléments d'infrastructure dans ces pays?

Le Président (M. Iracà) : Merci, M. le député. M. le sous-ministre.

M. Unterberg (Jérôme) : Je vais demander à Mme Dubé de...

Le Président (M. Iracà) : Mme Dubé.

• (17 heures) •

Mme Dubé (Mélanie) : En fait, ma réponse va être quand même assez brève. Ce que les études indiquent, c'est que c'est trop récent pour qu'on puisse évaluer, qu'on puisse bien évaluer, là, scientifiquement, je vais dire, l'efficacité de ces dispositifs-là parce que c'est quand même assez récent qu'on analyse, là, je veux dire, les accidents impliquant le cellulaire avec le piéton. Donc, c'est ce que révèlent, là, les études scientifiques à l'heure actuelle. Dans quelques années, là, je crois qu'on en saura davantage puis peut-être même de notre côté, là, on pourra en mettre en place et peut-être même les... bien, peut-être sur le réseau municipal, là, aider à les évaluer.

Le Président (M. Iracà) : Merci beaucoup. M. le député.

M. Unterberg (Jérôme) : ...

Le Président (M. Iracà) : Oui, M. le sous-ministre?

M. Unterberg (Jérôme) : Oui. Non, ça complète ma réponse.

Le Président (M. Iracà) : Ça va? Ça complète. M. le député? M. le député d'Abitibi-Est ou M. le député d'Ungava? Il vous reste 1 min 40 s.

M. Boucher : Je vais y aller très rapidement. Vous savez, bon, pour le cellulaire au volant, les campagnes, bon, de sensibilisation et d'éducation, mais il y a aussi le fait... si je texte ou si je parle au cellulaire, quel est mon risque pénal, à quelle amende je m'expose, quelles sont les sanctions? Puis je sais qu'il y a quelques années, sur les grands excès de vitesse, il y a eu comme des décisions majeures qui ont été prises là-dessus. Est-ce que vous avez des statistiques sur, bon, le taux de grands excès de vitesse? Est-ce que ça a diminué suite à ces sanctions plus fortes là ou ça n'a rien changé, là?

Le Président (M. Iracà) : En une minute.

M. Unterberg (Jérôme) : Nous pouvons... même réponse qu'un peu plus tôt j'ai donnée. On n'a pas apporté tout aujourd'hui, mais on est en mesure de fournir, s'il y avait une demande d'engagement, de fournir cette information-là à la commission.

Le Président (M. Iracà) : Merci. Alors, vous allez pouvoir envoyer ça comme d'habitude à la secrétaire de la commission. Ceci met fin au bloc d'échange avec la partie gouvernementale, malheureusement, mais heureusement l'échange se poursuit avec l'opposition officielle, et je cède la parole au député de René-Lévesque.

M. Ouellet : Merci, M. le Président. Donc, à mon tour de vous saluer, messieurs mesdames.

On a rencontré ce matin les gens de la SAAQ. Ils avaient plusieurs recommandations à nous faire... à faire, plutôt, dans le cas du cellulaire au volant. Ce qu'ils nous ont dit ce matin, c'est qu'ils attendaient une rencontre avec le ministre pour discuter des recommandations possibles. À l'intérieur de votre document ou de votre présentation, je ne vois pas de recommandation par rapport aux changements de comportements qu'on pourrait apporter par rapport à l'utilisation du cellulaire au volant. Est-ce qu'il y a une raison à ça? Parce que je veux juste bien saisir, là, dans le cas du ministère des Transports, quand... je vous entends depuis tantôt puis je vois vos documents, j'ai l'impression que votre champ d'intervention est comment les infrastructures peuvent être plus sécuritaires pour les conducteurs. Donc, j'ai moins l'impression que vous intervenez sur le comportement, donc la prévention, mais plutôt sur la correction ou sur la protection. Alors, j'aimerais vous entendre à ce sujet-là.

Le Président (M. Iracà) : M. le sous-ministre.

M. Unterberg (Jérôme) : Oui. Merci, M. le député, pour votre question.

Le ministre, évidemment, est responsable du ministère et, dans son portefeuille de responsabilités, il a également celle portée par la SAAQ. Il y a eu des rencontres avec M. Lessard, là, qui était ministre tout récemment. On a eu des nouvelles rencontres aussi avec M. Fortin sur une modification au Code de sécurité routière. Nous faisons ces représentations en général en présence de la SAAQ. Le ministre a déjà été saisi des travaux en cours et les réflexions, là, qui étaient jusqu'en date, là, du remaniement en cours. Évidemment, il doit s'approprier ce contenu et puis ajuster, le cas échéant, évidemment, avec ses préférences, ses priorités, ainsi de suite. Bon, vous connaissez mieux les travaux, là, des parlementaires que moi. Donc, je vous ferai grâce, là, des autres exemples, là.

Ce que je peux vous dire, c'est que nous travaillons avec le ministre sur tous les axes dont je vous parle. Dans mon secteur, nous sommes responsables du législatif et du réglementaire. Donc, on a évidemment, pour le Code de sécurité routière, préparé les échanges avec le ministre et son cabinet. Dans un autre secteur du ministère, on est responsables des infrastructures. Ce n'est pas chez moi que c'est porté. Par exemple, évidemment, tout relève du ministre et du sous-ministre, là, mais chez M. Lafaut, là, qui est sous-ministre adjoint, là... les questions de bandes rugueuses, là, ce n'est pas chez nous qui faisons ça, mais, lorsqu'on présente la réflexion, on consolide ces pensées-là évidemment pour le ministre qui est responsable de toute l'action du ministère et celle de la SAAQ.

Vous savez qu'il y a eu des consultations. Peut-être que la SAAQ en a parlé ce matin. Il y a eu des consultations qui se sont terminées, je pense bien, au mois de mars. Donc, au mois de mars, ces consultations-là ont vaillamment et puissamment inspiré les réflexions, là, des dernières moutures qui ont été considérées, qui sont en examen présentement. Évidemment, il appartient évidemment au ministre de disposer, là, de la présentation.

Le Président (M. Iracà) : Merci.

M. Ouellet : Ce n'est pas un reproche, c'est juste que... sans dire que j'ai l'impression d'avoir perdu mon temps aujourd'hui, c'est qu'on a deux groupes très axés dans la problématique et... parce qu'il s'en vient peut-être un projet de loi, parce qu'il y a eu changement de ministre, j'ai juste eu l'impression que j'ai peut-être manqué de moments pour échanger. On aura ces moments-là, je suis convaincu, lors des auditions sur le projet de loi, s'il y en a un, lors des consultations. C'est juste que là il faut que j'aille à des endroits puis je n'ai pas les réponses voulues.

Cela étant dit, je vois qu'il y a plusieurs opportunités que vous avez regardées pour améliorer ce qu'on appelle la protection ou du moins la correction du comportement. Est-ce qu'au ministère il y a effectivement des réflexions qui se sont déjà amorcées sur l'installation de nouvelles technologies? Je pense aux lumières qu'on voit en Hollande ou les lumières sur la chaussée en Allemagne, en Australie. Bref, est-ce que vous avez déjà commencé à réfléchir à ça? Et, si oui, si vous êtes d'accord avec moi, c'est sûr qu'on peut en mettre à un endroit, mais on ne peut pas en mettre dans tous les endroits du Québec. Donc, on vient corriger peut-être un endroit qui est accidentogène, mais le comportement global n'est pas changé ailleurs puisque de toute façon ces installations-là ne seront pas installées partout au Québec.

M. Unterberg (Jérôme) : En effet, là, je n'ai pas pris ça, là, comme une attaque, évidemment, là, sur les représentations que vous avez faites. Ce que... un petit mot là-dessus, peut-être. Évidemment, on a tous remarqué que le ministre a annoncé, là, qu'il avait l'intention de déposer un projet de loi modifiant le CSR. Puis, si ça peut aider, là, je peux vous dire que ce sont mes instructions, les orientations d'aboutir rapidement dans les échanges que nous avons avec le cabinet, là, pour ce faire. Donc, je peux concorder avec ce qu'on a tous remarqué dans les médias, là.

Oui, le ministère y travaille. Je l'ai mentionné un petit peu plus tôt, par exemple, sur la conférence internationale, qui s'est tenue à Montréal, sur les systèmes de transports intelligents, là, nous avions plusieurs personnes présentes non seulement pour observer, recueillir, mais également communiquer. On a déjà des expériences que nous pouvons tirer aussi et partager sur la scène, avec d'autres administrations. Et nous cherchons actuellement aussi à s'assurer, dans les travaux de mobilité durable, du partage de l'information avec le réseau municipal. Nous avons mis sur pied récemment, donc, des structures de communication formelles avec le milieu municipal. Ce n'est pas toujours facile de distinguer... on parlait des VHR, la dernière fois, entre le réseau local et le réseau interrégional, mais la même chose aussi dans les municipalités. Des fois, s'il n'y avait pas une pancarte du MTQ, même si c'est MTMDET maintenant, on aurait de la difficulté à distinguer les deux.

Donc, nous sommes intéressés, dans notre mission, à la sécurité de tous sur la route et donc nous travaillons avec les autorités municipales pour faire ces échanges notamment. Je peux vous dire que, dans nos travaux sur la politique de mobilité durable, qui a été annoncée au dernier budget, là, en vue, là, d'adopter une nouvelle politique gouvernementale, pas juste du ministère, mais gouvernementale, pour mars 2018, nous travaillons avec non seulement les municipalités, mais également d'autres partenaires d'importance pour... est-ce Vision 0?, ça, ça appartiendra aux parlementaires à définir ces choses-là en termes de risque, mais notamment avec le milieu du camionnage, le ferroviaire, parce que le ferroviaire aussi est, en termes d'accidentogène, là, aussi un phénomène, là, on l'a vécu trop difficilement aussi, dans les dernières années, est également une préoccupation en interaction avec le réseau routier. Même chose aussi avec le milieu, donc, plus environnementaliste. Il y a des questions aussi... oui, une protection, mais jusqu'à quel point il y a des préoccupations environnementales sur cette chose-là? Tantôt, vous l'avez vu, dans les présentations, on l'a mentionné, les bandes rugueuses, certains se plaignent du bruit. Si je les mets dans des milieux fortement urbanisés, j'ai ma sécurité, mais il y en a d'autres qui disent : Les nuisances du bruit, c'est une préoccupation à entretenir aussi.

Donc, dans nos travaux de politique de mobilité durable, nous avons formellement plus de 25 partenaires et, en plus, nous avons des consultations en bilatéral que nous entretenons, par exemple, avec l'Union des municipalités du Québec et la Commission des transports qui siège à cet organisme-là. Il y a des élus, nous les avons rencontrés formellement dans ce cadre-là. Nous rencontrons également des gens à caractère plus scientifique pour recueillir aussi leur expertise dans les réflexions du ministère.

Le Président (M. Iracà) : Merci. Il vous reste deux minutes, M. le député.

• (17 h 10) •

M. Ouellet : O.K. Quelque chose qui me... pas qui m'a surpris, mais que vous avez souligné, effectivement, qui est un fait qui doit être dit plus souvent, 90 % des accidents arrivent dans des lignes droites. Donc, on s'entend que, quand les gens ont une sécurité... puis moi, je fais souvent de la route, sur la route 138, j'ai quelques bouts droits. Effectivement, quand c'est plus tranquille, disons que c'est plus facilitant de dire : Est-ce que je peux prendre mon téléphone pour voir si j'ai des messages?

Cela étant dit, vous avez parlé tout à l'heure que les bandes rugueuses ont quand même apporté une certaine... pas un certain aspect, mais une certaine efficacité, pardon, pour réduire les risques. Est-ce que le ministère a effectivement, dans ses cartons, le déploiement de plus de bandes rugueuses ailleurs au Québec? Parce que moi, je fais les autoroutes comme à peu près tout le monde ici. On s'en rend qu'il y en a effectivement du côté droit puis du côté gauche, mais sur plusieurs routes dites principales, je pense à la 138 ou la 132, c'est peu ou pas présent.

Alors, si c'est une façon du moins de ramener les voitures dans le droit chemin lorsqu'on est malheureusement distrait par un appareil mobile, est-ce que ça fait partie de votre planification? Est-ce que ce déploiement-là de ces bandes rugueuses pourrait arriver incessamment dans d'autres routes au Québec?

Le Président (M. Iracà) : Merci. En une minute. Allez-y.

Mme Dubé (Mélanie) : Oui, effectivement, le réseau des bandes rugueuses sur les autoroutes est complété, et puis, sur les routes nationales, il y en a de plus en plus, parce qu'on sait que c'est sur les routes nationales que les accidents mortels, là, arrivent le plus. Donc, c'est une des solutions pour pallier à ce type d'accident là, et effectivement, sur la 138, c'est dans les cartons du ministère, là, d'implanter ce type de bandes rugueuses là.

M. Unterberg (Jérôme) : Peut-être pour compléter également, là, donc on a procédé à ces installations de bandes rugueuses, là, médianes sur certaines routes nationales, là. Pour inventaire, là, on en a sur la route 116 entre Joliette et Saint-Esprit, sur la 158 entre Victoriaville et Plessisville. Et, comme vient de le dire ma collègue, il a été également envisagé d'en faire l'installation sur la 138, particulièrement entre Petite-Rivière-Saint-François et Saint-Tite-des-Caps.

Et puis on a une autre statistique aussi, là, qu'on aimerait partager. Le 25 %, là...

Le Président (M. Iracà) : Alors, malheureusement, le temps est imparti. Alors, vous allez peut-être pouvoir vous reprendre avec le deuxième groupe d'opposition. Alors, M. le député de Deux-Montagnes, la parole est à vous pour un bloc d'échange d'environ six minutes.

M. Charette : C'est gentil. Merci, M. le Président. Messieurs madame, un plaisir de vous recevoir cet après-midi. C'était un groupe incontournable compte tenu du sujet qui est discuté.

Vous avez mentionné que le ministre avait pris l'engagement de déposer sous peu une législation sur la sécurité routière. On en est ravis. Cependant, cet engagement-là a été pris il y a de cela un bon moment par ses prédécesseurs, mais pas son prédécesseur, mais ses prédécesseurs. Comment expliquer les délais? Je ne veux pas tomber dans la partisanerie ou dans la politique pure, mais est-ce que c'est parce qu'au fil du temps les ébauches qui avaient été préparées ont été modifiées au gré d'ajouts ou au gré de nouveaux éléments ou c'est tout simplement le contexte qui se prêtait mal, là, pour déposer cette pièce qui est attendue, là, depuis un petit moment déjà?

M. Unterberg (Jérôme) : Merci, M. le député, pour votre question. Évidemment, il appartient aux parlementaires de disposer de la question du moment opportun, là, pour présenter un tel projet de loi. Au ministère, nous sommes en mesure de faire l'accompagnement nécessaire lorsqu'il se doit. Je comprends, là, que nous aurons toutes les dispositions nécessaires, là, pour permettre au ministre de déposer incessamment. Quant au passé, j'ai remarqué d'une part, oui, qu'il n'y avait pas eu de projet de loi emportant toute une série de modifications, comme celui que je comprends que le ministre caresse présentement. Quoi qu'il en soit, nous avons inventorié, dans les dernières années, des modifications législatives qui ont été apportées dans d'autres projets de loi, mais qui modifiaient de CSR.

Par exemple, en juin 2016, dans le projet de loi n° 76, il y a eu des mesures concernant la circulation des véhicules à basse vitesse; dans le projet de loi n° 100, des mesures concernant la sécurité des cyclistes sur l'augmentation de sanctions pour les cas d'emportiérage ou l'introduction de... et pas ou, et l'introduction d'une distance de dépassement. Dans le projet de loi n° 122 que vous avez traité récemment ici, comme Parlement, il y avait des dispositions permettant aux municipalités, qui modifient encore le CSR, de gagner en autonomie par rapport à la détermination des limites de vitesse. Vous saviez, c'était fortement réclamé. Évidemment, il appartiendra aux municipalités d'apprécier, mais c'était une disposition pour leur permettre, dans certains cas, plus adéquatement et plus rapidement de procéder.

Un autre élément sur une disposition qui permettait de renforcer la sécurité, soit une disposition permettant d'adopter un règlement afin de permettre, toujours dans le même projet de loi, pardon, 122, d'adopter un règlement afin de permettre et d'encadrer le jeu libre sur les chemins publics dont la gestion lui incombe. Je ne sais pas si vous vous rappelez, là, certaines municipalités souhaitaient pouvoir encadrer, avoir des dispositions. Ce n'était pas possible dans le CSR. Les modifications dans le projet de loi n° 122 l'ont permis. Dans d'autres cas, je dois vous dire aussi qu'on a agi par le biais de dispositions déjà existantes au plan réglementaire. Donc, on a permis certaines choses au plan réglementaire qui influent sur la sécurité nonobstant une modification législative.

Et finalement, vous le savez, au niveau des projets pilotes, il y en a une série que se sont faits, qui nous permettent d'apprécier le caractère des quoi... on en a parlé tantôt, les AMM, là, les...

Mme Dubé (Mélanie) : Les aides à la mobilité motorisées.

M. Unterberg (Jérôme) : Les aides à la mobilité motorisées. Merci, Mme Dubé, pour le rappel de l'acronyme, c'est toujours intéressant. On va tirer les fruits de ces expériences-là, des projets pilotes, pour pouvoir les introduire.

Donc, mes explications quant aux travaux parlementaires puis la cadence sont limitées, j'en conviens, mais je voulais au moins rapporter comme inventaire de certaines dispositions qui avaient pu être introduites et traitées par, évidemment, votre Parlement.

Le Président (M. Iracà) : M. le député.

M. Charette : C'est gentil, merci. Et par rapport au projet qui est sur le point d'être déposé, quelle est la place de l'enjeu du cellulaire au volant? Sans avoir de grande primeur aujourd'hui, est-ce que vous pouvez quand même confirmer qu'il y a des dispositions qui aborderont spécifiquement la question du cellulaire au volant?

M. Unterberg (Jérôme) : Je ne suis pas en mesure, puisque ça appartient au ministre, évidemment. Mais ce que je peux vous dire... tenter le plus possible de répondre à votre question, j'ai entendu, par exemple, des préoccupations sur les questions législatives, puis on ne s'en est pas lavé les mains au ministère des Transports. Par exemple, j'ai entendu certaines questions de vos collègues aujourd'hui sur le caractère approprié, disons, de l'échelle de sanctions. On pourrait penser aussi peut-être qu'on pourrait même revoir sur le caractère récidiviste. Il y a des fois... il n'y a pas de mesure qui touche ça.

Donc, ce sont toutes des réflexions qui cogitent actuellement, je comprends, dans l'esprit du ministre. Et, M. le Président parlait un peu de mon expérience, mes visites ici, plutôt, en commission parlementaire. Je sais très bien que les parlementaires peuvent également bonifier, à travers les consultations des intervenants que vous réentendrez, et que vous pourrez, en discussions avec le ministre, certainement, là, bonifier le travail certainement pas parfait du ministère. Mais évidemment, le ministre, lui, vous l'apportera, puis vous pourrez échanger avec lui.

Le Président (M. Iracà) : Merci beaucoup. Une minute, M. le député.

M. Charette : Très rapidement. C'est gentil. Et, par rapport au cellulaire au volant spécifiquement, est-ce que vous sentez que vous avez suffisamment de données à votre disposition? Vous avez entendu comme nous les gens de la SAAQ, Bureau du coroner. C'est un domaine qui est suffisamment bien documenté à l'heure actuelle au Québec pour pouvoir agir et peut-être moderniser notre législation?

M. Unterberg (Jérôme) : Je vais vous répondre candidement, parce que je pense que ça, c'est une réponse que sur des faits. Puis ça va me permettre de peut-être demander à Mme Dubé, là, de peaufiner une remarque, là.

Le Président (M. Iracà) : En 30 secondes.

M. Unterberg (Jérôme) : En 30 secondes. Bien, je vais le faire direct à ce moment-là. C'est que souvent les autorités policières, je pense que vous l'avez remarqué, ils signalent qu'il y a eu une distraction. Mais quelle était véritablement la source de la distraction? Ça, ça repose comme une grande limite pour le ministère quand vient le temps d'apprécier les effets, l'efficacité, ainsi de suite. On va a donné des statistiques parce qu'on n'a pas peur des chiffres puis on vous a fourni... puis on vous dit, par contre, qu'elles émanent, ces statistiques-là, d'une population qui est plus grande, qui n'est pas toujours précise. Mais au moins, tout ce qu'on avait puis que là on était sûrs, c'était dans la déclaration de l'autorité policière, que ça venait du téléphone, pas une distraction sans dire c'est laquelle, on vous les a fournies aujourd'hui. Mais on sent bien, là, que ça aurait été utile d'avoir plus souvent l'information exacte.

Le Président (M. Iracà) : Merci beaucoup. Je vous remercie pour votre contribution aux travaux de cette commission. Merci beaucoup de votre préparation, présentation. À la prochaine.

Je suspends les travaux quelques instants pour permettre au prochain groupe de s'installer.

(Suspension de la séance à 17 h 19)

(Reprise à 17 h 21)

Le Président (M. Iracà) : À l'ordre, s'il vous plaît! Je souhaite la bienvenue aux représentants de la Sûreté du Québec. Je vous demande de bien vouloir vous présenter ainsi que les personnes qui vous accompagnent. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé. Par la suite, comme à l'habitude, nous procéderons à des périodes d'échange avec la partie gouvernementale et les oppositions.

Je rappelle aux élus qu'il y a un document qui a été distribué. Vous avez tous eu copie. Alors, c'est un mémoire qui nous a été distribué préalablement, à l'avance. Donc, on a tous une copie. Bienvenue, bienvenue chez vous, à la maison du peuple. La parole est à vous.

Sûreté du Québec (SQ)

M. Després (Patrick) : Merci beaucoup. Mon nom est Patrick Després, je suis le directeur de la Direction de la sécurité routière et de l'intervention policière. Je suis accompagné du sergent Francis Bernardin, spécialiste en sécurité routière à la même direction.

Une voix : ...

M. Després (Patrick) : Merci. Dans un premier temps, j'aimerais remercier la commission de nous permettre de vous adresser la parole aujourd'hui. C'est un moment privilégié pour nous de transmettre nos préoccupations.

Je vais passer rapidement les éléments de contexte. Cependant, bien que des collisions mortelles, au Québec, et avec blessés s'améliorent d'année en année, il demeure de nombreuses préoccupations, et la distraction au volant en est une d'importante pour nous. J'entendais mes collègues parler, et la Sûreté est un acteur important, mais qui est un élément parmi un ensemble d'acteurs en sécurité routière au Québec. Et la SAAQ, de laquelle... tout l'ensemble des données que vous avez dans notre document sont principalement tirées des données de la SAAQ, mais il faut mentionner que la SAAQ utilise les informations issues des policiers pour traiter, pour produire ces données-là. Ça fait que ça va être quelque chose... On va revenir là-dessus un peu plus tard.

Le MTMDET est également un partenaire fort important pour nous. La Sûreté du Québec, depuis 2013, a une politique en sécurité routière qui est basée sur un concept qu'on appelle EPIC. EPIC, c'est un acronyme pour E, éducation, P pour prévention, I pour intervention, qui est notre principal rôle, et le C pour la communication. Naturellement, la sécurité routière, c'est une réussite au niveau de la province quand on regarde les statistiques depuis les 40 dernières années. Nous avons passé de 2 200 collisions mortelles, environ, à, comme on l'a entendu tout à l'heure, à peu près 350 pour l'ensemble de la province. La Sûreté du Québec, elle, dessert une population d'environ 2,5 millions. Donc, nos statistiques sont incluses à ceux de la SAAQ.

Naturellement, nous avons participé aux consultations publiques de la SAAQ qui ont eu lieu durant le printemps dernier, et la Sûreté du Québec a déposé un mémoire qui avait neuf thématiques, dont celle de la distraction au volant qu'on parle aujourd'hui. De ces neuf thématiques-là, nous avons fait 47 recommandations, dont aujourd'hui j'ai l'intention de vous en parler de quelques-unes.

Avant d'aller plus loin, il faut dire que le CSR, le Code de sécurité routière, nous, en tant que policiers, on travaille avec les lois que vous, élus, vous nous dotez. Et actuellement, le Code de sécurité routière ne défie pas de façon précise la distraction au volant, mais a plutôt défini quatre articles différents que nous associons à la distraction au volant.

La première, c'est l'usage d'un appareil tenu en main, un téléphone cellulaire, comme on entend depuis tout à l'heure; l'accès à une image, qui est un écran ou une télévision; et le port de baladeur ou d'écouteurs; et une distraction, une vue obstruée par un animal ou tout autre objet. C'est clair qu'au niveau statistique la SAAQ... le policier fournit de l'information à la SAAQ via le rapport d'accident, la R1, qu'on appelle communément. Et nous, les policiers québécois, incluant la Sûreté du Québec, on a établi que dans 32 % des décès, une des causes principales était la distraction au volant. Je fais la précision, ici, de distraction au volant. Le cellulaire est inclus dans cette distraction-là, mais on utilise la notion beaucoup plus large. 40 % des blessés graves et 52 % des blessés légers, nous associons la distraction directement à ces collisions-là en tant que policiers.

À l'intérieur du mémoire, vous allez voir qu'on a fait des vérifications au niveau canadien, et les mêmes préoccupations sont présentes avec des pourcentages un peu moindres, et, en Amérique du Nord, c'est la même chose. Donc, pour nous, pourquoi on regarde les causes, c'est pour mieux cibler nos opérations policières. Donc, on utilise le bilan routier pour déterminer quel type d'opération nous allons faire et comment nous allons traiter ce bilan-là.

Afin de mieux comprendre comment intervenir, c'est sûr qu'on a regardé beaucoup d'études qui nous ont amenés à comprendre pourquoi la distraction était autant impliquée dans ces collisions-là. Et on voit que la distraction augmente le temps de réaction, le temps d'adaptation, les aptitudes à éviter des obstacles et au niveau de la perception visuelle qui est grandement réduite.

Tout à l'heure, j'entendais des questions par rapport au niveau du mains-libres. Le mains-libres, c'est sûr que, lorsqu'on conduit puis qu'on a une conversation au niveau du mains-libres, c'est une notion qui est associée à la tâche secondaire, c'est-à-dire que, oui, on fait deux choses en même temps, mais lorsqu'on fait deux choses en même temps, on ne les fait pas de façon parfaite l'une et l'autre. Autant notre conversation va être nuie par notre conduite que la conduite va être nuie par la conversation téléphonique. Et vous remarquerez que lorsque vous allez voir sur l'autoroute quelqu'un qui ne roule pas rapidement, qui est à 60 dans une zone de 100, régulièrement, cette personne-là est en train d'utiliser un cellulaire, soit mains libres ou un cellulaire en main. Ça, c'est un effet direct à la tâche secondaire.

Lorsqu'on utilise un téléphone cellulaire, les études que nous avons consultées ont déterminé qu'on avait 38 % plus de chance d'être impliqué dans une collision par rapport à celui qui n'utilise pas le cellulaire. Et lorsqu'on parle de texto, bien là, le risque est multiplié à 23 fois on est plus susceptible d'être impliqué dans une collision. Donc, non seulement la distraction est un risque important, mais le texto, de façon plus précise, l'est davantage.

Au niveau opérations policières, l'ensemble des organisations policières font des opérations nationales concertées, c'est-à-dire que tous les policiers, on travaille des thématiques simultanément, et actuellement, au Québec, il y en a cinq qui sont coordonnées par la Sûreté du Québec, principalement avec le Service de police de la ville de Montréal, l'ADPQ, ce qui se trouve à être l'Association des directeurs de police du Québec, c'est l'ensemble des autres sûretés municipales, et les contrôleurs routiers de la SAAQ.

Et lors de ces opérations-là, on vous donne un exemple, l'ONC, opération nationale concertée Distraction, qui a eu lieu au mois de septembre dernier, la Sûreté du Québec, durant ce week-end-là, a donné près de 495 constats sur les distractions. On va voir un peu plus loin qu'est-ce que nous entendons par constat de distraction. Donc, pour nous, un policier qui est en patrouille peut être à même de voir une multitude d'infractions, et, si on veut travailler une problématique précise, on doit établir des thématiques pour demander à nos policiers : En fin de semaine, on regarde la distraction au volant, voici les infractions qu'on aimerait que vous travailliez en priorité, naturellement.

Au niveau statistique, pour la Sûreté du Québec, on a... comme je l'ai mentionné tout à l'heure, le CSR nous indique quatre infractions : le conducteur a accès à un écran, un écran de TV, le conducteur utilise un cellulaire le conducteur a des écouteurs et le conducteur a une vue obstruée. Ces quatre infractions-là représentent, bon an, mal an, entre 13 000 et 15 000 infractions données par les policiers de la Sûreté du Québec. Ça représente à peine, en moyenne, entre 2,7 % et 2,8 % de l'ensemble des 500 000 constats que nous allons donner dans une année.

Pourquoi est-ce que ce chiffre-là est si peu important? C'est simplement par la difficulté que nous avons actuellement d'appliquer la loi telle qu'elle est écrite et avec les jurisprudences qui nous sont édictées par les tribunaux. Le policier doit être en mesure de démontrer que l'appareil est tenu en main et muni d'une fonction cellulaire, et on doit être en mesure, lorsqu'on constate l'infraction... lorsqu'on allume nos gyrophares, on va intercepter, bien, après, c'est rare que la personne a encore le téléphone entre les mains. Donc, on a des difficultés à établir que l'appareil en question est muni d'un mode de téléphonie.

Dans le cadre du mémoire sur la modification du CSR, comme je vous disais, on a traité la thématique de la distraction au volant. On a fait plusieurs recommandations. J'y vais rapidement, je vois le temps avancer.

Le premier problème, c'est être tenu en main. C'est un aspect qui nous empêche de travailler efficacement. Donc, nous avons proposé que cette notion-là soit retirée.

• (17 h 30) •

La deuxième, c'est qu'actuellement le policier n'a pas de pouvoir d'inspection visuelle à l'intérieur du véhicule, comme le détecteur de cinémomètre, le fameux détecteur de radar... nous le permet dans le CSR. Donc, encore là, l'ensemble des policiers et la Sûreté recommandent que le policier ait le pouvoir d'inspecter l'intérieur du véhicule.

Une autre obligation qui est absente, c'est l'obligation du conducteur de nous remettre l'appareil cellulaire afin que nous puissions vérifier s'il est bel et bien connecté à un réseau cellulaire et si c'est réellement un appareil cellulaire, parce qu'il peut y avoir des iPod, des enregistreurs et toutes sortes d'appareils que quelqu'un peut tenir en main de façon légale.

Ensuite de ça, au niveau... Nous n'avons pas actuellement de pouvoir d'inspection de cet appareil-là. C'est un pouvoir qui pourrait être fort intéressant, d'autant plus qu'actuellement le Code de la sécurité routière ne nous permet pas d'appliquer ces articles-là sur d'autres chemins que le réseau public. On ne peut pas travailler sur des sentiers ou des terrains de centres d'achats.

L'avant-dernier, au niveau de l'encadrement des autres formes de distraction, je vous ai parlé de quatre infractions, mais il y a une multitude d'autres distractions qui sont actuellement...

Le Président (M. Iracà) : En 25 secondes...

M. Després (Patrick) : En 25 secondes? Et, la dernière, nous avons fait des recommandations sur le régime des peines et sanctions administratives. Nous souhaitons obtenir l'autorisation de suspendre les permis dès les premières infractions, augmenter les amendes, et assortir tout ça avec des points d'inaptitude plus élevés.

Le Président (M. Iracà) : Merci beaucoup, M. Després. Nous allons passer présentement à la période d'échange avec la partie gouvernementale, et je cède la parole au député de Mégantic.

M. Bolduc : Merci, M. le Président. Bonjour, messieurs. Il me fait plaisir de vous recevoir cet après-midi. Et, à chaque rencontre, on apprend un peu d'information complémentaire, donc, j'imagine, ça nous aide beaucoup à avoir une image plus claire finalement de l'impact du cellulaire au volant.

Avant de commencer, j'ai une question ici parce que vous nous parlez qu'officiellement la Sûreté du Québec a sur son territoire... où elle couvre 2,5 millions de citoyens, et l'ensemble des statistiques que vous nous donnez ici ne représentent que ces 2,5 millions de citoyens là. Donc, c'est ça?

M. Després (Patrick) : Au niveau des constats, effectivement, ce sont des constats donnés par les policiers de la Sûreté du Québec, mais ça peut être un citoyen qui passe sur l'autoroute et qui est résident de la ville de Montréal, par exemple.

M. Bolduc : Je comprends, mais ça veut quand même dire qu'un citoyen sur cinq reçoit un constat par année. C'est quand même très significatif.

M. Després (Patrick) : Bien, en fait, sur la population québécoise, la Sûreté du Québec va émettre environ 500 000 constats. Mais un résident de Laval qui n'est pas couvert par la Sûreté du Québec peut aisément avoir un constat sur les réseaux supérieurs, qui est couvert par la Sûreté.

M. Bolduc : Mais est-ce que vous avez une idée de l'ensemble des constats si on inclut l'ensemble des réseaux municipaux, Montréal, Laval, Québec?

M. Després (Patrick) : Je n'ai pas le chiffre exact, mais actuellement la Sûreté du Québec représente environ un tiers des effectifs policiers au Québec. Si on fait une règle de trois, sans trop se tromper, on peut dire qu'il y a autant de constats qui vont se donner dans les autres tiers.

M. Bolduc : On ne se retrouve pas loin du un sur cinq constats par habitant. C'est quand même très sérieux si on considère qu'il y a presque 40 % des gens qui ne conduisent pas. Vous comprenez ce que je dis, là. Ça commence à être une donnée un peu spectaculaire, en tout cas, quelque chose que je ne m'attendais pas. Merci pour ça. C'est une bonne information.

Vous nous avez parlé qu'il y avait 2 000 accidents puis qu'aujourd'hui on est à 350. Vous parliez des décès, je pense?

M. Després (Patrick) : Oui, des collisions mortelles.

M. Bolduc : 2 200, c'était quand?

M. Després (Patrick) : C'est environ... C'est dans les années 1970. Là, je n'ai pas mes lunettes. La date, ici, c'est quoi qui est écrit là?

Une voix : 1973.

M. Després (Patrick) : 1973. Donc, environ 2 200 collisions mortelles en 1973. Et aujourd'hui, comme vous l'avez entendu via la SAAQ, nous sommes environ à 350 en moyenne par année.

M. Bolduc : Et est-ce que vous avez une idée de la croissance? Parce qu'il y a beaucoup plus de voitures aujourd'hui qu'il y en avait en 1973, donc ce n'est pas rien qu'une réduction d'un facteur de six. Le nombre de voitures est passé de quoi à quoi?

M. Després (Patrick) : Effectivement, lorsqu'on regarde les courbes — j'ai un graphique devant moi — mais effectivement le nombre de véhicules est en croissance inverse. On voit, par exemple, là, au niveau des véhicules, ici, je regarde — je n'ai pas mes lunettes — comme je vous disais, on est au-delà de 5 millions de titulaires de permis, alors que, dans les années 70, nous étions en bas de 2 millions.

M. Bolduc : O.K. Donc, le phénomène de six, puis là il y a deux et demi, ça fait qu'il y a une réduction par un facteur de 15 du nombre d'accidents mortels au Québec si on fait ces règles de trois là. Est-ce que vous pouvez nous donner des grandes règles qui semblent avoir fait que ça...

M. Després (Patrick) : Il y a plusieurs facteurs qui sont venus affecter notre bilan de cette façon-là. Naturellement, les véhicules sont de plus en plus sécuritaires, que ça soit les coussins gonflables, le système ABS, les ceintures de sécurité. Il y a aussi les élus, le législateur qui est venu rendre l'alcool illégal, le port de la ceinture obligatoire. Vous avez, au cours des 40 dernières années, émis un Code de la sécurité routière qui nous permet d'intervenir. Il y a également les routes, le MTQ, les municipalités ont rendu nos routes beaucoup plus sécuritaires. On entendait les bandes hachurées tout à l'heure. C'est un des exemples qui fonctionnent actuellement au Québec. Donc, la police, également, intervient avec des outils beaucoup plus sophistiqués qu'à l'époque, en 1973. Ce sont ces multifactoriels qui font qu'aujourd'hui la sécurité routière au Québec est ce qu'elle est, c'est-à-dire, selon nous, une réussite.

M. Bolduc : Je vais revenir à votre tableau à la page 8 un peu plus tard. Mais là on vous a écouté tout à l'heure et vous nous indiquez que vous croyez que le législateur devrait renforcer le pouvoir des policiers pour leur permettre d'inspecter les cellulaires, d'avoir, si on veut, des pouvoirs un peu plus larges pour couvrir le fléau, finalement, de la distraction au volant. Mais, pour moi, il y a une partie qui est admissible, il y a une partie qui est peut-être moins tangible. Je vous donne l'exemple, par exemple, du GPS, parler avec le passager, fumer ou d'avoir d'autres activités que le cellulaire, là, entre autres. Est-ce que vous avez d'autres opinions quant à ces autres distractions là?

M. Després (Patrick) : Il y en a plusieurs, des distractions, qu'on voit actuellement, surtout dans les régions métropolitaines. Vous savez, la congestion est un problème, et les gens utilisent leur véhicule pour manger. On voit régulièrement lire le journal, utiliser des tablettes pour lire l'actualité parce qu'on est arrêté puis on pense qu'il n'y a pas de problème. Mais, au niveau des collisions matérielles, il y en a une quantité phénoménale qui sont causées par ces distractions-là.

Au niveau des collisions mortelles et avec blessés, c'est sûr que c'est multifactoriel. La vitesse est réellement en cause. Ajoutez à ça la distraction, et là vous avez des collisions fort importantes. La distraction, comme je vous le mentionnais, ça peut être des animaux en liberté dans l'habitacle, associé à la nourriture, associé au téléphone, la conversation même mains libres, à toutes sortes de choses qui se passent à l'intérieur. C'est sûr qu'écrire cet article-là va constituer un défi en soi puisqu'effectivement il peut y avoir une multitude de situations qui peuvent être distrayantes. Cependant, les principales devraient être, selon nous, indiquées de façon claire afin de nous faciliter notre travail pour émettre un constat.

M. Bolduc : Maintenant, quand on arrive au tableau que vous avez sur le nombre de constats, dans les infractions, à la page 8, vous nous dites que, de 2013 à 2017... puis là je comprends que l'année 2017 n'est pas totale, donc on va passer de 2013 à 2016, où on a quand même eu une réduction significative du nombre total de constats, qui est de l'ordre d'une douzaine de pour cent, là, et, en même temps, on voit un peu le même... On ne voit pas nécessairement le même phénomène au niveau, par exemple, des écrans. Les cellulaires, ça semble être à la baisse, les écouteurs, c'est en augmentation, etc. Pour vous, quel est le principal obstacle pour qu'on s'attaque réellement à ça? On a parlé d'outils, vous avez parlé d'autobus, vous avez parlé de législation. Si vous avez à les prioriser, dans quel ordre vous les mettrez? Et le deuxième point, c'est : Est-ce qu'il y en a d'autres?

• (17 h 40) •

M. Després (Patrick) : Le premier point, là, naturellement, c'est le pouvoir d'inspecter le véhicule. Comme je mentionnais, lorsqu'on allume les gyrophares, les gens immédiatement vont ranger le téléphone soit dans l'accoudoir central ou la boîte à gants.

Deuxièmement, lorsqu'on dépose un constat, le juge va nous demander de démontrer les éléments constitutifs de l'infraction, et actuellement c'est difficile pour nous de le faire, ce qui fait que notre policier va indiquer ce qu'il a perçu, vu, mais il n'est pas en mesure de dire, hors de tout doute, dans bien des cas, que c'est un appareil cellulaire. Donc, avec la jurisprudence, nos policiers ont dû ajuster leur méthode de travail. Et c'est ce qu'on voit aussi, une baisse d'émission de constats au niveau du cellulaire parce que la jurisprudence vient nous modifier nos façons de travailler avec ce que les juges nous demandent.

Donc, l'inspection, le fait de vérifier l'appareil, l'obligation de remettre l'appareil également, un peu comme il s'est déjà fait, ce ne serait pas une nouveauté par le législateur. Mais, comme le détecteur de radar, nous avons des pouvoirs de fouille au niveau du véhicule. Bien, si le conducteur avait l'obligation de nous remettre son appareil et que nous avions la permission de faire une fouille visuelle à l'intérieur du véhicule, pas la valise, là, mais vraiment l'environnement immédiat du conducteur, on serait à même de pouvoir prouver au juge que la distraction était causée par un appareil muni d'une fonction téléphonique.

M. Bolduc : L'appareil, il disparaît dans la poche de l'individu, souvent, donc ça devient plus compliqué, là, même s'il quittait le véhicule, comment...

M. Després (Patrick) : C'est sûr qu'il y a certaines limites à ce pouvoir-là. Cependant, bien des gens vont se limiter à le mettre... l'accoudoir, le coffre à gants ou tout simplement sur le banc.

Le Président (M. Iracà) : Merci beaucoup. Je vais céder la parole maintenant au député de Sainte-Rose. La parole est à vous.

M. Habel : Oui, merci, M. le Président. Je vais faire un peu de pouce sur ce que mon collègue a parlé et que vous parliez ensemble, l'aspect de la présomption et aussi l'aspect de «hors de tout doute raisonnable». La CAA aussi est allée dans la même lignée que vous. Est-ce qu'il existe d'autres éléments législatifs où le fardeau de la preuve est inversé comme celui que vous proposez en ce moment?

M. Bernardin (Francis) : Effectivement, il y a des...

Le Président (M. Iracà) : Oui, allez-y.

M. Bernardin (Francis) : Il y a certains renversements du fardeau de la preuve en fonction du Code de la sécurité routière. Je pourrais vous fournir une liste de l'ensemble des infractions, là, mais il y a certains renversements de fardeau de la sorte, effectivement, au même titre que le Code criminel prévoit...

M. Després (Patrick) : Ça existe déjà.

M. Bernardin (Francis) : Par exemple, la personne qui est assise derrière le volant est censée avoir, par exemple, la garde ou le contrôle d'un véhicule. Donc, c'est un peu la même chose, là. Il y a plusieurs dispositions qui prévoient des renversements de fardeau de la preuve ou des présomptions simples, plutôt, là, qui peuvent être réfutées.

M. Habel : Vous avez parlé aussi du critère «appareil tenu en main», par rapport à enlever l'aspect «tenu en main». Pouvez-vous élaborer sur cette recommandation?

M. Bernardin (Francis) : Par rapport à ça, il y a une décision qui a été rendue dans l'affaire Pedneault-Turmel. Malgré le fait que le texte de loi réfère à un appareil téléphonique tenu en main, la jurisprudence a interprété de façon large le critère de «tenu en main». Donc, si la personne, par exemple le conducteur, a l'appareil cellulaire sur la cuisse et qu'elle touche à l'écran, ça va être réputé avoir été tenu en main. Donc, ce côté-là, l'interprétation large des tribunaux, nous a facilité jusqu'à un certain point l'application de la loi.

Le Président (M. Iracà) : Merci beaucoup, M. le député de Sainte-Rose. Alors, je vais céder la parole au député d'Abitibi-Est.

M. Bourgeois : Merci, M. le Président. Rapidement, deux éléments. Pour aller un petit peu plus loin sur ce que vous venez de mentionner, est-ce qu'à ce moment-là il devrait y avoir une réglementation qui oblige à ce que l'appareil soit disposé dans un objet qui le maintiendrait en place, donc, pour éviter la manipulation?

M. Bernardin (Francis) : Ça pourrait tout à fait être une option qui pourrait être envisagée par le législateur. Par contre, à partir du moment que... Si on parle d'un dispositif qui permettrait de tenir l'appareil cellulaire, présentement, malgré le fait qu'il y a un support prévu à cet effet-là, si l'appareil cellulaire est tenu dans le support et si le conducteur touche à l'écran, il est réputé avoir tenu l'appareil en main. Donc, il faut garder à l'esprit cette possibilité-là dans le cadre de votre proposition, là, mais ça pourrait être envisageable.

Le Président (M. Iracà) : Merci beaucoup. M. le député.

M. Bourgeois : Oui. Et, à votre connaissance... Vous parliez... Tout à l'heure, vous avez fait le parallèle avec un appareil qui vous servait à faire la détection de détecteurs de radars, et, à votre connaissance, est-ce qu'il existe ce type d'appareil là par rapport au cellulaire, être capable de déterminer s'il y a utilisation?

M. Després (Patrick) : Malheureusement, c'est une information que je ne possède pas. D'un point de vue technologique, si ça existe ou non, je ne peux pas vous dire.

Le Président (M. Iracà) : Merci beaucoup. Si vous avez terminé, il y a le député de Sainte-Rose qui a une autre question. M. le député de Sainte-Rose.

M. Habel : Oui, rapidement. Dans l'une de vos recommandations, vous avez parlé d'élargissement du champ d'application parce que, dans le fond, le Code de la sécurité routière se limite aux chemins publics, et vous parlez aussi des chemins privés ou des centres commerciaux, où il peut y avoir beaucoup de distractions dans ces environnements-là. C'est sûr que vous n'avez pas des données tangibles, mais, sur le terrain, là, vous qui... les personnes qui patrouillent... Est-ce que cette situation-là est très importante dans les centres commerciaux, par exemple?

M. Després (Patrick) : En fait, la Sûreté du Québec dessert maintenant plusieurs villes régionales d'importance. Et, dans les centres d'achats, l'usager piétonnier est plus vulnérable que celui qui est à bord d'une automobile. Ça fait que c'est vraiment cette clientèle-là qu'on vise à l'intérieur des centres d'achats, c'est vraiment la personne à pied, qui, elle, a peu de chances lorsqu'elle est heurtée par un véhicule. Donc, au niveau de la Sûreté du Québec, la dimension piéton, c'est quelque chose qui nous est apparu durant les dernières années, qui... À une certaine époque, rarement nous avions des collisions avec piétons sur l'autoroute ou nos municipalités plus rurales, mais maintenant, avec la venue de nos villes, c'est quelque chose qui nous préoccupe davantage.

Le Président (M. Iracà) : Merci. M. le député d'Ungava.

M. Boucher : Bon, je vais vous poser sensiblement les mêmes questions que je posais pour vos prédécesseurs. Dans ça, bien, il y a toujours l'utilisation du cellulaire au volant, le facteur conscientisation à travers des publicités souvent chocs, etc., mais, quand vient le temps de poser le geste, là : Je passe-tu un appel ou pas, je réponds-tu à mon texto, à quel risque que je m'expose, hein, s'il y a une police qui me voit, combien d'amendes ça va me coûter, combien de points de démérite? On sait que, bon, il y a eu, bon, jusqu'à neuf points qui a été suggéré. Vous suggérez peut-être le pouvoir de saisir le permis de conduire. Verriez-vous, par exemple, la saisie du véhicule pour une période de, peut-être, deux à cinq jours, quelque chose du genre? Pensez-vous que c'est quelque chose qui pourrait être possible et puis, de votre avis, qui pourrait être dissuasif?

Le Président (M. Iracà) : En 30 secondes.

M. Després (Patrick) : En 30 secondes? Oui, toute mesure supplémentaire va aider à dissuader parce que l'amende, au Québec, quand on compare avec d'autres provinces, elle est de beaucoup inférieure. Lorsqu'on saisit le véhicule ou le permis, c'est clair que c'est une action immédiate, qui n'est pas reportée dans le temps, donc qui sensibilise davantage le contrevenant à la situation et ce qu'il est en train de faire. Donc, nous croyons effectivement que toute mesure qui va augmenter le désagrément d'avoir un constat ou être intercepté va aider notre cause et diminuer l'utilisation de cellulaires et les distractions.

Le Président (M. Iracà) : Merci beaucoup, M. le directeur. Alors, ceci met fin au bloc d'échange avec la partie gouvernementale. Nous allons débuter un deuxième bloc d'échange avec l'opposition officielle, et je vais céder la parole immédiatement au député de René-Lévesque.

M. Ouellet : Merci beaucoup, M. le Président. Donc, à mon tour de vous saluer, messieurs.

D'entrée de jeu, j'aimerais vous entendre sur le critère de l'appareil tenu en main. Vous en faites mention dans votre document et vous voulez des changements, des changements à la disposition parce que les interprétations qu'on a données sur la version anglophone est venue donner une couleur à la jurisprudence et est venue modifier la façon dont vous intervenez. Ça fait que j'aimerais vous entendre là-dessus. De quelle façon nous pourrions amender la loi qui permettrait de meilleures interventions ou des succès plus grands quant aux interceptions que vous faites?

M. Després (Patrick) : Je vais laisser mon collègue répondre à cette question.

M. Bernardin (Francis) : Je vous dirais, de ce côté-là, c'est que le critère d'avoir tenu en main l'appareil pourrait tout simplement être retiré, malgré le fait que l'état actuel du droit fait que l'interprétation large des tribunaux a fait que ça nous permet de l'interpréter d'une façon quand même assez large. Par contre, en le retirant purement et simplement du texte de loi, par rapport à l'effet que l'appareil soit tenu en main, ça viendrait codifier l'interprétation large et libérale des tribunaux, qui prévoient à l'heure actuelle... Donc, ça serait tout simplement de... En retirant l'exigence de tenu en main, ça permettrait de codifier l'état du droit.

M. Ouellet : Donc, si je comprends bien, le policier aurait pu constater que le fautif l'avait en main, mais, lors de son interception, qu'il soit dans l'accoudoir, ça ne serait plus un motif pour dire : Bien, écoutez, M. le policier, je ne l'ai pas en main. C'est ce que je comprends, là, il n'y aurait plus d'interprétation, c'est : Je vous ai intercepté, vous l'aviez, là. Vous ne l'avez plus, mais le propos demeure.

M. Després (Patrick) : Effectivement, si vous permettez, si on pose la question à un citoyen puis qu'on parle de tenu en main, plusieurs croient que, s'il est sur le support, ils peuvent texter avec, alors que, lorsque... C'est sûr, lorsqu'on est policier ou on est avocat, on va comprendre les jurisprudences, l'implication. Mais, lorsqu'on lit le texte pur et dur, bien, ça peut porter à interprétation et donner la fausse impression à un citoyen qu'il est en droit de texter alors que l'appareil est sur l'accoudoir ou est sur un support. Donc, c'est un autre élément qui viendrait faciliter la compréhension de nos concitoyens.

• (17 h 50) •

M. Ouellet : Les gens de la SAAQ, ce matin, nous ont expliqué d'élargir la présomption sur l'usage justement des appareils téléphoniques. C'est-à-dire que, si j'ai bien compris, ça peut être interprété : Bien, écoutez, ce n'était pas un téléphone, c'étaient d'autres choses. C'est, dans le fond, au policier d'interpréter... pas d'interpréter, pardon, mais de justifier ce qu'il a vu comme étant un téléphone en question. Et là la SAAQ nous a dit : Si on versait la présomption à l'inverse, si votre constat est que c'est un appareil et que la personne dit que ce n'est pas ça, ça serait à elle de démontrer qu'elle respectait la loi. C'est ce que j'ai cru comprendre.

M. Després (Patrick) : C'est sûr que ça serait encore plus simple, on vous l'accorde. Mais nos propositions, on est allés différemment, c'est-à-dire qu'on a proposé l'obligation de nous remettre l'appareil. On a proposé la permission de pouvoir inspecter l'appareil pour aller chercher les éléments de preuve constitutifs. Les deux propositions arriveraient au même objectif, c'est-à-dire autant celui de la SAAQ, que vous m'avez décrit, que celui de la Sûreté du Québec, mais les deux propositions auraient pour objectif de diminuer le nombre d'usagers de la route qui sont distraits par l'utilisation d'un appareil cellulaire ou tout autre appareil qui serait décrit dans un nouvel article sur la distraction au volant.

M. Ouellet : Quand vous dites, dans votre mémoire puis tout à l'heure, de saisir l'appareil lors d'une arrestation, c'est de valider, dans le fond, c'est quoi, le modèle, mais ce n'est pas de le garder, de le mettre sous scellés lors de la cause.

M. Després (Patrick) : Non, pas du tout.

M. Ouellet : C'est vraiment de prendre des constatations sur...

M. Després (Patrick) : Lorsque vous regardez un appareil sans le déverrouiller, parce que, c'est sûr, le policier ne va pas jouer dans les textos ou quoi que ce soit, le premier icône que vous voyez en haut, vous avez le service qui est donné par Bell, Rogers, Vidéotron. Donc, on sait qu'il y a une compagnie qui offre le service. Et, à la droite, vous avez également, sur tous les modèles, des petites barres qui disent s'il y a du service ou pas. Donc, le policier qui prend un téléphone puis qui ne voit pas de fournisseur de service puis qu'il n'y a aucune barre, donc il n'est pas en mesure de dire que l'appareil est muni d'une fonction téléphonique qui fonctionne, parce que maintenant ce sont des petits ordinateurs, et on peut dicter à l'aide d'un téléphone cellulaire. On peut faire toutes sortes de choses à l'aide d'un... on peut filmer, photographier, alors que, là, actuellement, l'infraction parle vraiment d'un appareil qui est muni d'une fonction téléphonique.

Donc, ce n'est pas si invasif que ça dans le sens : c'est prendre l'appareil dans les mains et visualiser le fournisseur de service et si le signal entre. Mais il n'y a aucunement mention dans notre proposition d'avoir le code pour déverrouiller le téléphone et puis d'aller vérifier le contenu même de l'appareil.

M. Bernardin (Francis) : De façon à limiter le caractère intrusif de la vérification.

M. Ouellet : Vous nous avez parlé tout à l'heure d'augmenter les amendes dans certains cas, dans le fond, doubler les peines de points d'inaptitude. On nous a parlé, au courant de la journée, de la possibilité de saisir le cellulaire après l'infraction, donc, et peut-être même saisir le véhicule. Qu'est-ce que vous en pensez? Est-ce qu'on devrait aller jusque-là, permettre la saisie du véhicule à peut-être pas à une première offense, mais peut-être à une récidive, puis on va priver, dans le fond, le citoyen d'un outil qui est malheureusement mal utilisé? Qu'est-ce que vous en pensez?

M. Bernardin (Francis) : Ce qu'il faut garder à l'esprit, c'est que la saisie du véhicule peut potentiellement brimer le propriétaire du véhicule, alors que ce n'est pas nécessairement lui, le contrevenant, donc d'où la distinction, pourquoi on n'a pas nécessairement envisagé cette possibilité-là et plutôt d'y aller vers une suspension du permis de conduire de la personne qui commet réellement l'infraction, c'est-à-dire la personne qui est derrière le volant et qui utilise un appareil muni d'une fonction téléphonique.

Par rapport au fait de saisir l'appareil, le deuxième point que vous mentionnez, c'est sûr que nous, de notre côté, il y aurait un caractère de rétention de l'objet qui n'est pas nécessairement souhaitable au niveau administratif, qui serait d'une lourdeur possiblement excessive. Donc, ça n'a pas été privilégié de ce côté-là. Donc, c'est pour ça qu'on optait davantage pour vraiment pénaliser la personne qui commettait l'infraction en suspendant son permis de conduire.

M. Després (Patrick) : Parce qu'à ça je pourrais rajouter que, si vous regardez nos statistiques, on donne environ entre 13 000 et 15 000 constats pour les cellulaires. Ça représenterait autant d'appareils à saisir, et à gérer à titre de preuve, et, ultimement, à fournir, à amener à la cour, si était le cas. Donc, c'est sûr que, comme mon collègue l'a dit, au niveau administratif, ce n'est vraiment pas souhaitable que notre policier passe du temps à gérer une pièce à conviction au lieu d'intervenir sur la route.

M. Ouellet : Dites-moi, ce n'est pas facile, hein, intervenir... pas intervenir, mais intercepter des gens qui sont en train de texter. On a vu certaines méthodes qui ont été utilisées par le passé, des agents dans des autobus lors d'activités planifiées pour essayer de prendre les contrevenants. Avez-vous réfléchi à d'autres façons de... Je ne veux pas dire mieux intercepter, mais la façon la plus optimale de faire appliquer la loi, parce que ce n'est pas facile nécessairement... La nuit, le soir, je pense que c'est probablement plus facile quand les appareils sont rétroéclairés, on voit que quelqu'un a quelque chose dans les mains, mais, le jour, plus difficile. Alors, avez-vous réfléchi sur des façons de faire des interventions plus efficientes ou plus efficaces pour contrer ce fléau?

M. Després (Patrick) : Effectivement, vous l'avez mentionné, il y a plusieurs opérations avec des autobus. Par contre, c'est plus complexe, faire ça avec des autobus. On utilise des véhicules qui sont plus hauts. La Sûreté du Québec s'est munie de véhicules, de VUS, qui ont une garde au sol plus élevée, qui nous permet d'avoir une vue plongeante à l'intérieur du véhicule du citoyen qui est à côté de nous. On va voir également davantage de motocyclettes de police utilisées pour ce type d'opération là puisque le policier est plus haut et peut se rapprocher davantage du véhicule.

Donc, c'est sûr qu'on adapte nos méthodes à cette situation-là, mais actuellement, d'un point de vue technologique, on n'a pas de solution miracle puisque c'est le policier qui doit constater l'infraction. Et, en fait, nos stratégies, c'est d'utiliser des véhicules qui nous permettent d'avoir un meilleur visuel à l'intérieur du véhicule. Il va y avoir également l'utilisation de véhicules banalisés qui nous permettent d'aller sur le côté du... parce qu'une auto-patrouille lettrée avec des gyrophares, on nous voit arriver de loin, alors qu'un véhicule banalisé, bien, c'est sûr que ça nous permet de faire des interventions beaucoup plus rapprochées et de constater mieux l'infraction.

M. Ouellet : On voit que dans la loi on fait vraiment référence a un appareil qui est capable de transmettre par les ondes cellulaires. Donc, quand je vous entends, les fameux iPod, qui sont juste de la musique, pour vous, le fait que je suis en train de jouer avec, je ne suis pas en train de texter, ce n'est pas un motif raisonnable de m'arrêter et me donner une contravention. Est-ce que c'est ça que je comprends actuellement?

M. Després (Patrick) : Actuellement, là, c'est sûr qu'il y a différents... Si l'iPod ressemble à un téléphone, les chances de vous voir intercepté sont grandes. Par contre, il existe des petits iPod où tous les policiers savent pertinemment que ce n'est pas un téléphone. Donc là, à ce moment-là, c'est moins risqué de se faire intercepter. Cependant, nous proposons une infraction plus large au niveau de la distraction parce que l'iPod, lorsque je défile ma liste de musique, ça constitue une distraction qui est aussi dangereuse que le texto puisque mon attention est concentrée sur un appareil qui, lui, constitue une distraction en soi.

Le Président (M. Iracà) : Merci beaucoup. Ceci met fin au bloc d'échange avec l'opposition officielle. Malheureusement, il ne reste plus de temps. Ça passe toujours trop vite. Nous allons procéder au dernier bloc d'échange avec le député de Deux-Montagnes. La parole est à vous.

M. Charette : Merci, M. le Président. Merci, messieurs, d'être parmi nous cet après-midi. On a eu l'occasion d'entendre différents groupes tout au long de la journée, que ce soit le Bureau du coroner, que ce soit la SAAQ. Vous avez entendu, tout juste avant vous, le ministère des Transports. Et tous ces groupes disent utiliser vos données pour données statistiques, en quelque sorte. Donc, c'est des informations qui sont précieuses. Tous disent : Voici l'état des faits. Donc, c'est le minimum, parce que bien des accidents... il y a bien des incidents qui peuvent arriver sans qu'on ait eu la possibilité de déterminer qu'il y ait eu usage du cellulaire. Et j'étais curieux de savoir, auprès du ministère des Transports, je vous pose la même question maintenant, quelle est la procédure lorsqu'un de vos policiers arrive sur le lieu d'un appel suite à un accident. Qu'il y ait eu blessé, qu'il y ait eu mort d'individu ou simple accrochage et qu'il y a un signalement, est-ce que ça fait partie de la procédure de systématiquement valider ou tenter de valider s'il n'y a pas eu usage d'un téléphone en cours d'incident?

M. Després (Patrick) : Assurément, à la Sûreté du Québec, et j'oserais même dire pour l'ensemble des services de police, le policier sait que la distraction est une des trois principales causes au Québec de collisions mortelles et avec blessés graves. Et, lorsque notre policier a à compléter un rapport d'accident, il y a une section spécifique au niveau des causes. Donc, j'entendais parler de check-list tout à l'heure, là, mais il a à compléter ces champs-là et à se questionner sur la cause de la collision, et, ainsi, dans la liste des causes, la distraction est là. Notre policier a également le devoir de tenter d'identifier et voir s'il y a une infraction qui a été commise pour pouvoir émettre un constat d'infraction à une des parties qui aurait commis cette infraction-là.

Donc, oui, actuellement, non seulement nos policiers sont sensibilisés aux principales causes de collision, mais ont également... On leur demande, via des politiques de gestion très claires, d'identifier la cause de la collision et d'émettre un constat s'ils sont en mesure de recueillir les éléments qui peuvent les amener à prouver qu'il y a la commission d'une infraction.

Le Président (M. Iracà) : M. le député.

M. Charette : Et, si, par exemple, il y a deux véhicules d'impliqués, et le chauffeur du premier véhicule dit : Oui, oui, moi, j'ai vu, l'autre m'a rentré dedans parce qu'il utilisait le téléphone, là, ça devient un petit peu la parole d'un contre l'autre et c'est là où, peut-être, vous souhaiteriez avoir davantage d'outils à votre disposition, c'est-à-dire avoir la possibilité de regarder le téléphone.

• (18 heures) •

M. Després (Patrick) : C'est quelque chose qui nous aiderait davantage. Le citoyen va rédiger une déclaration disant : J'ai personnellement constaté que la personne avec qui j'ai eu une collision avait un cellulaire en main. Ça, c'est un des éléments de preuve. Par la suite, si on constate visuellement qu'il y a un téléphone dans l'auto, ça va faire un deuxième élément qui va nous amener... Et on va accumuler la preuve comme ça jusqu'à tant qu'on va en avoir suffisamment pour émettre un constat. Mais effectivement ce que nous proposons au niveau des recommandations va faciliter grandement notre travail pour pouvoir émettre davantage de constats parce que, comme vous l'avez vu dans les chiffres, c'est moins de 3 % de l'ensemble de nos constats, alors que ça représente au-delà de 30 % des causes de collision. Ça fait que, malgré notre bonne volonté, nous sommes limités par la preuve qu'on doit constituer.

Le Président (M. Iracà) : Merci. M. le député, 2 min 30 s.

M. Charette : Merci. Vous parliez de renverser la preuve dans certains cas. Les groupes qui vous ont précédé parlaient carrément de criminaliser le geste, l'action. Est-ce que c'est quelque chose qui est considéré de votre côté? Mais, à travers cette question-là, je veux surtout savoir... Si on renverse la preuve, si on touche au Code criminel, on change de juridiction du coup, donc c'est le Code criminel, donc c'est fédéral, qui s'applique. Quel est aussi votre degré d'interrelation avec les autres corps policiers provinciaux à travers le Canada? Est-ce que c'est un enjeu qui est discuté? Est-ce que c'est des représentations qui peuvent être faites?

M. Després (Patrick) : Je dirais qu'actuellement, là, on travaille beaucoup la légalisation du cannabis d'un point de vue pancanadien. On est très impliqués là-dedans. Au niveau sécurité routière, oui, on va échanger des bonnes pratiques. Mais une chose est claire, c'est que tout outil qui va nous aider à mieux intervenir va nous permettre de travailler directement cette cause-là. Et on est à la recherche constante de nouvelles méthodes, des nouvelles technologies qui nous permettent de le faire, et on a une vigie qui se fait au niveau des recherches. À l'intérieur du mémoire, on fait référence à plusieurs de ces recherches-là. Au niveau criminel, quelqu'un qui utilise un cellulaire en mains, a une collision et cause des dommages corporels, va être accusé de négligence criminelle et conduite dangereuse.

Le Président (M. Iracà) : M. le député, 1 min 30 s.

M. Charette : Très rapidement, là. Mais vous n'avez pas de position commune à travers les différents corps policiers provinciaux pour telle ou telle mesure? Malgré les échanges, là, il n'y a pas une position qui...

M. Després (Patrick) : Une position commune sur ce sujet-là? Non. Il y a un comité, qu'on appelle Traffic Committee, qui est au niveau de l'Association canadienne des chefs de police, et il y a des travaux qui se font là pour améliorer la situation individuellement. Mais actuellement, comme je vous disais, nos efforts concertés sont davantage au niveau de la conduite avec les capacités affaiblies par l'alcool et la drogue. Mais la distraction fait partie de discussions, mais, à ce que je sache, nous n'avons pas de position commune.

M. Charette : Tout à l'heure, on entendait — très, très rapidement — souvent : Il n'y a pas une seule cause. C'est-à-dire, la personne peut avoir le téléphone, elle peut aussi avoir bu, elle peut avoir... Bref, il y a plusieurs éléments qui vont déterminer l'accident lui-même. J'imagine, pour vous, voir l'arrivée de la légalisation de la marijuana, c'est une préoccupation supplémentaire. Ça pourrait être une cause supplémentaire qui viendrait compromettre la sécurité sur nos routes.

M. Després (Patrick) : Effectivement, c'est une prétention que nous avons. Nous croyons fermement que la légalisation va venir augmenter le risque d'utilisation du cannabis par un usager de la route.

Le Président (M. Iracà) : Merci beaucoup. Alors, M. le député, ceci met fin au bloc d'échange. Merci beaucoup de vous être préparés et d'être venus ici.

Alors, l'ordre du jour étant épuisé, je lève la séance et ajourne les travaux sine die.

Merci beaucoup.

(Fin de la séance à 18 h 4)

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