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Version finale

32e législature, 4e session
(23 mars 1983 au 20 juin 1984)

Le jeudi 15 décembre 1983 - Vol. 27 N° 211

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Examen de l'administration et du fonctionnement de la Commission de la santé et de la sécurité du travail


Journal des débats

 

(Onze heures huit minutes)

Le Président (M. Blouin): La commission élue permanente du travail reprend ses travaux. Je vous rappelle le mandat de cette commission, qui est d'examiner l'administration et le fonctionnement de la Commission de la santé et de la sécurité du travail.

Les membres de cette commission sont: M. Bisaillon (Sainte-Marie), M. Cusano (Viau), M. Dean (Prévost), M. Fréchette (Sherbrooke), Mme Harel (Maisonneuve), M. Lafrenière (Ungava), M. Lavigne

(Beauharnois), M. Pagé (Portneuf), M. Baril (Arthabaska), M. Maltais (Saguenay), M. Champagne (Saint-Jacques) et M. Champagne (Mille-Îles).

Les intervenants sont: M. Sirros (Laurier), M. Côté (Charlesbourg), M. Leduc (Fabre), M. LeMay (Gaspé), M. Polak (Sainte-Anne), Mme LeBlanc-Bantey (Îles-de-la-Madeleine) et M. Vaugeois (Trois-Rivières).

Nous allons maintenant inviter les représentants de l'Association des entrepreneurs en construction du Québec à venir s'asseoir à la table des invités. Alors, j'invite les représentants de l'association à s'identifier, pour les fins du journal des Débats, et ensuite à nous livrer le contenu de leur mémoire.

Auditions AECQ

M. Dion (Michel): M. le Président, madame et messieurs les membres de la commission, on doit vous aviser que le président de l'association est actuellement en Italie; cela n'a aucune relation avec les derniers événements qu'on connaît. À cause de la température et de certains événements, il n'a pu revenir à temps. Notre mémoire sera donc présenté par le vice-président, M. Claude Daoust, qui est à ma gauche. Également, si vous voulez comprendre notre situation, une partie du mémoire sera présentée par M. Claude Girard qui fait partie d'un comité qu'on vous expliquera au cours de la présentation de notre mémoire, soit le comité de surveillance des finances de la CSST.

On a tenté de donner suite à votre voeu d'hier soir, c'est-à-dire de résumer une partie de notre mémoire. Vous allez comprendre quand même que, dans la nuit, il était difficile d'y arriver totalement. Je pense qu'on a réussi à diminuer, dans une bonne proportion, le temps de l'exposé. On a gardé les parties essentielles. Alors, effectivement, vous pourrez, à toutes fins utiles - on vous a distribué le texte -consulter les parties qu'on n'aura pas lues et on demanderait que le contenu total de notre mémoire fasse partie du journal des Débats, même si des parties n'auront pas été exposées devant la commission.

Le Président (M. Blouin): Cela va. Vous vous identifiez, s'il vous plaît?

M. Dion: Mon nom est Michel Dion, directeur général de l'AECQ.

Le Président (M. Blouin): Et ceux qui vous accompagnent?

M. Dion: M. Daoust, à ma gauche, vice-président de l'AECQ; M. Claude Girard, qui siège au comité de surveillance des finances et membre de l'AECQ; M. Alfred Régnier, du personnel de l'AECQ, responsable du dossier santé et sécurité.

Le Président (M. Blouin): Merci, M. Dion.

M. Daoust (Claude): J'aimerais vous donner, peut-être, un petit aperçu, un petit historique de l'AECQ et de son mandat en santé et sécurité. L'association que je représente ici, aujourd'hui, a effectivement vu le jour en février 1976. Une loi adoptée en 1975, à la suite de la commission Cliche, a en effet regroupé tous les employeurs de l'industrie de la construction pour les fins des relations du travail.

Bien qu'il ait tendance à diminuer officiellement depuis deux ans naturellement, il y a beaucoup de faillites depuis deux ans - notre "membership" représente encore, aujourd'hui, près de 13 000 entreprises. Alors que notre mandat principal est la négociation du décret, il est par essence également celui de voir à l'application de toutes les conditions du travail.

La santé et la sécurité, quoique nullement négociables, sont, à toutes fins utiles, des conditions du travail. Pour les plus susceptibles, disons que, directement ou indirectement, la santé et la sécurité et, par le fait même, la prévention des accidents à

la source, affectent journalièrement l'activité d'un employeur et des salariés sur un chantier. Nos membres ont, en 1978, saisi l'ampleur et l'importance de la question et ont dès lors accordé librement des fonds à l'association pour s'occuper du mandat de la sécurité et de la santé.

J'aimerais établir le cadre de notre intervention à ce sujet. Nous soulignons peut-être de façon brutale, dans notre mémoire, qu'il nous est apparu inconcevable de ne pas être invités à exposer nos commentaires devant cette commission parlementaire. C'est tout de même très frustrant, vous l'admettrez, de contribuer à plus de 15% du budget de fonctionnement - en effet, cela est 17%, 126 000 000 $ - sans avoir droit de parole. Évidemment, nous remercions M. le ministre, ou encore M. le président de la commission, de nous avoir au moins accordé ce droit fondamental.

C'est sûrement à vol d'oiseau, vous le constaterez, soit par manque de temps ou de ressources, que nous tenterons d'illustrer nos difficultés, nos inquiétudes - comme quelqu'un le disait si bien chez nous - face à ce deuxième stade olympique qu'est la CSST.

Plusieurs points n'apparaissent pas au dossier car, à notre avis, ils cadreront mieux lors de l'étude du projet de loi 42, non pas parce que nous espérons que ledit projet soit passé, tout au contraire'. Nous sommes convaincus que le gouvernement sera, après cette commission parlementaire, très conscient des trop graves malaises à la CSST et qu'il surseoira sans hésitation, en administrateur prudent, audit projet, sauf en ce qui concerne les implications du 38.4.

Pour nous, cette commission parlementaire est un peu comme une bouée de sauvetage dans une mer déchaînée qu'est l'administration de la CSST. Serons-nous rescapés ou victimes? L'avenir le dira et, jusqu'à un certain point, l'avenir est entre vos mains. C'est une autre commission parlementaire où les employeurs se vident le coeur, diront certains individus. Mais ces gens ont tendance à oublier que nous faisons partie de l'entreprise privée où la législation, la réglementation restrictive et négative de nos droits sont monnaie courante de telle sorte qu'il est devenu très difficile d'exercer un commerce profitable.

Nous soulignons dans notre mémoire les difficultés de notre marché concurrentiel. Si dans les autres provinces, avouons-le, il y a la concurrence ouverte des non-syndiqués, ici, c'est pire, nous avons celle du marché noir, des illégaux du système. La surréglementation qui nous affecte devient alors, vous le comprendrez, intenable, car les autres s'en foutent. Ils passent outre à la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction, au règlement de placement, à la régie, à la qualification, aux ratios d'apprentis compagnons, aux impôts et j'en passe.

Nous sommes de toutes parts surveillés, inspectés, contraints. On nous poursuit. On appose des scellés et, par-dessus tout, on veut même nous dire, sinon nous montrer comment gérer notre entreprise. C'est pour cela qu'il fallait qu'on vienne vous dire et vous montrer humblement comment, entre autres, la CSST est devenue un ennemi du patronat de la construction qu'elle envoie promener après l'avoir courtisé à tour de bras.

J'aimerais parler du rôle de la construction au conseil d'administration de la CSST. Savez-vous, MM. les membres de la commission parlementaire, que sur un budget de cotisations de 756 000 000 $, en 1982, l'industrie de la construction a versé 125 800 000 $, soit 17%? Compte tenu de l'importance de notre industrie, nous étions très satisfaits d'être représentés au conseil d'administration de la CSST par M. Jean-Claude Murray lequel, soit dit en passant, s'acquittait de ce mandat avec brio, sans compter ses efforts. C'était le problème, il en faisait trop, il en voyait trop et, surtout il en soulevait trop. Par surcroît, il mettait le doigt sur des "fatiguantes", comme on le dit souvent. Il parlait un peu trop, il était un peu trop honnête.

Nous n'étions pas dans le secret des dieux, mais la première chose que nous avons sue, c'est que, malgré la recommandation unanime du CPQ et de la chambre de commerce - du moins, on nous dit qu'ils étaient unanimes - le ministre du temps a évincé M. Murray. Était-ce un motif de sang nouveau? Non, la plupart des autres membres ont été renommés. Était-ce un motif de degré d'importance de l'industrie de la construction? À vous d'y répondre, surtout si on considère que, du côté syndical, il y a au moins un gars de la construction, de la FTQ. Était-ce le désir de donner un siège à un autre secteur tout aussi important? À vous également de juger de la logique de M. Marois quand il affirmait que Mme Grimard était de la construction. Une petite remarque en passant, j'ai remarqué qu'hier, lorsque certaines paroles ont été dites par M. Lavallée, il n'y a pas tellement de gens du côté patronal qui ont donné la réplique pour la construction.

Pourquoi donc nous expulser? Peut-on croire que le président-directeur général de la CSST n'avait rien à dire ou à faire dans cela, comme il l'a laissé entendre? C'était une façon élégante de s'en sauver, mais celle-là, messieurs de la commission, nous ne l'avons pas avalée et nous ne l'avons pas acceptée non plus.

M. Fréchette: Pour notre bonne compréhension, M. Dion nous a informés que vous avez remanié un tant soit peu le document.

M. Daoust: C'est cela.

M. Fréchette: On a un peu de difficulté, en tout cas, moi, j'ai un peu de difficulté à vous retrouver dans les pages que vous êtes à lire. Est-ce que vous pourriez nous indiquer où vous en êtes actuellement?

M. Dion: M. le ministre, concernant votre voeu d'hier, ce qu'on a fait, en théorie, c'est un résumé. Il suit l'ordre des sujets qui sont dans le mémoire. On est actuellement à l'industrie de la construction et sa non-présence au conseil d'administration. On a passé l'AECQ et son mandat. On a passé le deuxième sujet, le cadre de notre intervention. On est au troisième sujet du mémoire. Cela vous donne une idée du nombre de pages qu'on a pu couvrir déjà en le résumant.

Le Président (M. Blouin): MM. Dion et Daoust, ce que je vous suggère et ce que font les organismes habituellement, lorsqu'ils résument des mémoires comme vous le faites, c'est qu'au moment où ils abordent un nouveau sujet ils nous indiquent la page à laquelle ils en sont rendus.

M. Daoust: Vous devriez être aux pages 6 et 7, parce que ce sont les deux pages qui couvrent le sujet...

Le Président (M. Blouin): Cela va.

M. Daoust: Mais les mots ne sont pas textuels.

Le Président (M. Blouin): Oui, oui. Cela va.

M. Daoust: Comme vous le savez, on s'est efforcé hier soir de mettre cela de façon un peu plus concise.

Je vous disais, messieurs de la commission, que ce geste d'être expulsé, on ne l'a pas avalé. On ne l'a pas accepté et on n'est pas près de l'accepter. Le ministre actuel le sait. Il le comprend et nous sommes convaincus qu'il corrigera cet affront fait à l'industrie de la construction. Nous voulons un membre votant au conseil d'administration de la CSST, un membre que nous nommerons nous-mêmes. Finies la politique et les nominations par les intermédiaires. Hier - un petit à-côté ici -M. Sauvé vous a indiqué - c'était peut-être, justement, le fait qu'on n'était pas là - qu'il y avait 26 comités ad hoc à la CSST. Nous vous rappelons qu'un comité ad hoc, ce n'est pas décisionnel et en plus, on participe à trois de ces comités. Il ne faudrait pas que quelqu'un prétende ou laisse entendre qu'on est présent autant que si on était au conseil d'administration. Ce n'est pas vrai.

Nous allons passer à la loi et son objectif, tel qu'on le voit. Dans cette partie de notre exposé, nous voulons rappeler que la loi devait impliquer les intervenants, non pas les ignorer ni les maltraiter. Je m'excuse, M. le Président, vous m'aviez demandé... Je vous situe. C'est aux pages 7 et 8. Donc, la loi devrait impliquer les intervenants, non pas les ignorer, ni les maltraiter. C'est une demi-réussite car 50% des gens du monde syndical sont impliqués ou plutôt, certains chefs syndicaux sont très impliqués, mais nous, du monde patronal de la construction, on n'est pas là.

Nous voulons ici vous informer des principes que l'AECQ prône en santé et en sécurité. Vous trouverez cela en annexe dans votre livre bleu. La CSST est un organisme qui administre le fonds d'assurance collective que les employeurs ont établi pour dédommager les travailleurs en cas d'accidents du travail.

L'AECQ estime que le patronat est apte à assumer ses responsabilités en matière de prévention, formation, inspection, indemnisation et réadaptation, à l'intérieur d'un cadre législatif définissant ces besoins.

C'est pourquoi la CSST devrait être dirigée par un conseil d'administration exclusivement patronal. Le ministre du Travail pourrait y déléguer un observateur. Ainsi, les mêmes objectifs généraux seraient atteints, mais à un coût inférieur, l'organisme étant administré selon des critères plus sévères, propres à l'entreprise privée.

Quant au rôle des travailleurs et de leurs syndicats dans ce domaine, il devrait se jouer au niveau du lobbying politique dans la confection du cadre législatif et au niveau de l'entreprise dans la participation aux comités de prévention.

Comme alternative à la CSST et compte tenu du cadre législatif mentionné, l'entreprise devrait pouvoir s'assurer contre les accidents du travail auprès des assureurs privés. Si cette alternative était refusée et si le paritarisme continuait d'exister à la direction de la CSST, l'AECQ prônerait alors le paritarisme au niveau des contributions de la commission.

L'AECQ considère comme inacceptable la philosophie qui prévaut actuellement à la CSST et considère M. Robert Sauvé comme inapte à remplir sa fonction à cause de son attitude antipatronale. La CSST agit comme un organisme à vocation sociale et démontre un préjugé favorable envers les travailleurs et leurs syndicats.

La CSST dilapide sans gêne les cotisations des employeurs en utilisant le conseil d'administration paritaire comme couvert, les représentants patronaux étant constamment bousculés par des fonctionnaires favorables à la partie syndicale.

L'AECQ n'écarte pas la possibilité de

recourir à la retenue des cotisations pour obtenir les améliorations souhaitées et compte que les autres secteurs industriels se montrent plus critiques envers la CSST.

L'AECQ dénonce la philosophie qui anime les dirigeants de la CSST et la considère comme antipatronale. L'AECQ estime que le conseil d'administration de la CSST devrait être formé exclusivement de représentants patronaux. L'AECQ considère la CSST comme un organisme à qui les patrons confient un fonds d'assurance collective établi pour les cas d'accidents du travail. L'AECQ souhaite que la loi soit modifiée pour permettre à l'entreprise privée de concurrencer la CSST.

La réglementation à outrance que présageait le projet de loi 17 n'a pas manqué de se réaliser.

Une voix: Quelle page?

M. Daoust: Vous devriez être dans la section de la loi et son objectif, probablement à la page 8.

Une vraie usine à faire des règlements et Dieu sait que, dans certains cas, ils sont à forte tendance prosyndicale. Le malheur de tout cela est que les bénéficiaires, les rentiers disent ne pas en avoir assez; c'est insuffisant. Nous, nous crions parce que cela coûte trop cher. Eux crient parce que les services et les bénéfices sont inadéquats. Le problème serait-il causé par une tierce partie, soit l'administration?

Passons, si vous le vouiez, à l'étude de certaines données que nous avons ramassées pour illustrer nos positions. Je vous passe M. Claude Girard qui est membre du comité de surveillance des finances.

M. Girard (Claude): M. le Président, vous pouvez suivre une partie de notre texte à compter de la page 9 du mémoire complet qui vous a été remis, le document bleu.

Dans ce contexte plus que difficile, où la notion de profit est carrément écartée, notion pourtant qui fonctionne honnêtement dans plus d'une entreprise privée et même dans quelques-unes des nombreuses sociétés d'État du gouvernement du Québec, nos membres ont vu naître, avec le début des années quatre-vingt, un monstre bureaucratique; et je ne caricature pas en le qualifiant de structure de l'homme d'un milliard, qui grandit démesurément en se nourrissant de leur argent, notre argent. Ce monstre, aux pouvoirs sans précédent, leur donne des directives, souvent sous la forme d'avis d'infraction, sur la gestion de leurs chantiers et les inonde d'obligations incompatibles avec une saine administration.

Peu de gens savent exactement ce qu'il en coûte pour administrer ce cirque. Peu d'entreprises ont les moyens de se payer, particulièrement dans les périodes économiques difficiles que nous vivons, une armée de recherchistes, de statisticiens, de professionnels de tout acabit pour préparer des montagnes de documents, tableaux, graphiques, etc., qui permettent d'aveugler même le plus attentif des yeux inquisiteurs. Vous-mêmes, messieurs et mesdames de la commission parlementaire, aurez probablement droit à ce traitement.

Peu d'entre nous connaissent les sommes d'argent mis en fiducie par la CSST. Les chiffres font rêver, de quoi amoindrir un déficit gouvernemental; mais le rêve se traduit souvent par un cauchemar pour ceux qui doivent payer la note au bout de la ligne. En l'espace de quatre exercices financiers, la CSST a accru ses revenus de 65%, passant de 579 000 000 $ en 1979 à 958 000 000 $ en 1982. Ces revenus totaliseront environ 1 055 000 000 $ en 1983, ce qui donnera, pour la période de cinq ans, une augmentation d'environ 82%, tel que cela est décrit au tableau du milieu de la page 11.

Il y a des fois, messieurs les membres de la commission parlementaire, où nous ne pouvons plus contrôler notre réaction, pour ne pas dire notre colère, devant certains agissements de la CSST. À titre d'exemple, prenons deux minutes pour regarder de plus près la capitalisation. (11 h 30)

Certains peuvent se surprendre que, dans le contexte économique qui a prévalu il y a si peu de temps, la CSST n'ait pas tiré un plus gros avantage de cette conjoncture favorable, laquelle a fait grimper les taux d'intérêt à des sommets jamais atteints de mémoire d'homme. En effet, la CSST, riche de ses nombreux milliards, a effectivement fait de bons placements et réalisé des revenus peu prévisibles. Mais pour la majorité des cotisants au régime, cette augmentation extraordinaire des revenus a surtout permis aux dirigeants de la CSST de faire miroiter des images de saine gestion de la capitalisation sans apporter aux fournisseurs de fonds une réduction de leur fardeau financier.

La CSST réalisait des revenus supérieurs à ceux jamais espérés ou projetés lorsque le placement initial, relatif à une dépense future, a été effectué à la Caisse de dépôt et placement du Québec, ce qui lui permettait d'imputer des revenus d'intérêt supplémentaires à son fonds capital. La CSST n'aurait-elle pas pu imputer à la cotisation ces revenus inespérés, ce qui aurait diminué le fardeau des employeurs? Notons également que les facteurs de projection utilisés par les actuaires pour établir le coût d'une rente n'ont jamais, semble-t-il, atteint en pourcentage le taux d'intérêt inflationnaire. Raison additionnelle pour ne pas imputer lesdits surplus au fonds capital.

Mais voilà le punch: la CSST s'est

prévalue de cet apport inespéré de fonds pour établir une nouvelle norme de financement, réalisant qu'il serait pour le moins immoral de continuer un système de pleine capitalisation, le fonds en capital rapportant déjà annuellement, à lui seul, près d'un quart de milliard en intérêts - c'est inscrit "million", mais c'est une erreur de frappe, c'est effectivement "milliard"; 200 000 000 $, 250 000 000 $.

On a voulu nous vendre cela, c'est-à-dire la réforme du mode de financement comme étant un cadeau du projet de loi 42. Nous considérons comme inacceptables de telles présentations, car il aurait fallu plutôt dire la vérité sur la provenance entre guillemets, de la réduction, et surtout avouer honnêtement que cette réduction était moindre que prévu parce que le projet de loi 42 en absorbera quelques millions.

La progression de la cotisation des patrons a été non moins impressionnante et inquiétante. De 480 000 000 $ en 1979, cette cotisation se trouve, en 1983, à 822 000 000 $, soit une augmentation de 71%. Selon les informations que nous détenons, l'industrie de la construction a eu droit à un traitement privilégié, soit une augmentation de 93% pour la même période, soit 64 000 000 $ de cotisations en 1979 et 123 000 000 $ ou 125 000 000 $ - dans cet ordre de grandeur - pour 1983. Le tableau de la page 15 vous donne en détail la progression de la cotisation tant au niveau général que pour le secteur de la construction. Ce qu'on y remarque ou la principale conclusion de ce tableau est que jamais la contribution du secteur construction depuis 1978 n'a été inférieure à au moins 15% des revenus de cotisation de la commission, ce qui, à notre avis, justifie largement un siège au conseil d'administration.

Pourquoi la construction a-t-elle droit à ce traitement spécial? Les secteurs à haut indice de risques sont pénalisés par la restructuration des services financiers, les différents modes de financement et les nouveaux critères de base retenus pour établir la tarification depuis 1979 ou l'avènement de la CSST. La restructuration au plan régional a fait grimper les coûts administratifs pour lesquels l'industrie de la construction est cotisée à partir du coût de de ses propres accidents. Les critères de base retenus pour les fins de tarification ont éliminé toute relation avec le principe de la mutualité pour restreindre celui-ci à l'intérieur d'un groupe réduit d'entreprises réunies dans une unité. Une unité, je parle de la classification de la CSST qui reconnaît environ 680 unités. Ajoutons à cela que notre confusion est encore plus grande lorsqu'on constate une diminution constante du nombre d'accidents dans le secteur de la construction, diminution qui s'observe depuis 1977 par rapport à la progression du coût global des accidents. Sans aller jusqu'à prévoir une diminution des coûts, nous aurions pu espérer à tout le moins une certaine stabilisation de ceux-ci. Ce fut le contraire, nous observons une progression constante moyenne de 11,6% par année, pour la période 1979 à 1982.

De 1971 à 1982, soit une période d'environ douze ans, la cotisation des employeurs a été augmentée de 578% au Québec, alors qu'en Ontario pour la même période la cotisation ne progressait que de 364%. Si nous tenons compte des stricts coûts d'administration directs - ne pas confondre avec ce que la CSST appelle les frais de chargements - nous réalisons que ceux-ci sont passés de 44 000 000 $ en 1979 à 116 000 000 $ en 1983 pour une augmentation de 162%. Sont inclus dans les frais d'administration le traitement des fonctionnaires de la CSST, les dépenses de fonctionnement: téléphone, frais d'ordinateurs, etc., les dépenses en capital et les dépenses de transfert. Vous avez également la distribution au bas de la page 17 du montant de 110 000 000 $ des frais directs d'administration tel qu'il appert au rapport annuel de la CSST, vérifié par le Vérificateur général. Cela totalisait, pour l'année 1982, 110 000 000 $.

Déjà en 1978, alors que la commission établissait de nouvelles normes de fonctionnement en introduisant dans un premier temps la régionalisation, les coûts d'administration devaient connaître en l'espace d'un an une augmentation de plus de 18%. La mise en place de la deuxième phase de la restructuration, associée à l'impact de la loi 17 et la création de la CSST, provoquait une autre augmentation moyenne de plus de 30% par année pour les années subséquentes à 1978, avec un bon spectaculaire de 65% en 1981, alors que la CSST amorçait au cours de cette année 1981 le processus qui l'amènerait en trois ans à doubler au moins son personnel. Ce qu'il y a de plus aberrant dans les quelques chiffres cités c'est que les coûts d'accident, qui sont à l'origine les causes de toutes ces dépenses, n'ont, eux, progressé que de 52% pour l'ensemble de l'industrie, passant de 386 000 000 $, en 1979, à 585 000 000 $ pour 1982.

Ces chiffres sont encore plus significatifs dans l'industrie de la construction où les coûts sont passés de 52 600 000 $, en 1979, à 71 200 000 $, en 1982, pour une augmentation totale de 35% pour quatre exercices financiers, soit moins de 10%, même 9% par année ou que l'inflation courante.

Le tableau du milieu de la page 19 illustre la progression du coût des accidents, lequel est passé en 1979 de 385 000 000 $ à 585 000 000 $ avec les pourcentages

correspondants à la dernière ligne.

Nous n'hésitons pas à qualifier de scandaleux et d'injustifiable le fait que la CSST ait connu une telle progression de ses dépenses alors que le reste du monde normal se serrait la ceinture et se contentait du strict nécessaire. Le gouvernement est sans doute au courant que, dans notre industrie plus que dans toute autre, la crise a frappé très durement et elle n'est pas finie. Ce n'est certainement pas avec surprise que vous constaterez dans un document en annexe que, selon les données statistiques, non pas de l'AECQ, mais bien de l'Office de la construction du Québec, OCQ, plus de 3000 employeurs en construction ont disparu en trois ans, que les heures travaillées déclarées atteignent à peine 50% de celles qui s'exécutaient il y a environ cinq ans.

Pour nous permettre peut-être de situer le tout dans une perspective un peu plus globale, disons que le maximum d'heures travaillées dans le secteur de la construction s'est situé vers 1975-1976 à environ 150 millions d'heures et que, selon les plus récentes compilations préliminaires de l'office de la construction, on estime pour 1983 que cela ne devrait pas excéder 70 millions à 75 millions d'heures. Notre industrie vivote, agonise et, pendant ce temps, la CSST grossit, cotise, réglemente, pénalise, abuse de ses droits, nous charrie et, finalement, nous met dehors parce que nous nous plaignons. La CSST n'a pas fini de nous faire avaler la pilule que, déjà, elle veut nous purger avec de nouveaux champs d'indemnisation qui sont prévus dans le projet de loi no 42, qui a été déposé à l'Assembée nationale.

Nous nous en voudrions de ne pas ouvrir une parenthèse sur les taux de cotisation, le calcul du maximum assurable et, évidemment, le système mérite-démérite, car on ne peut de fait dissocier ces trois éléments. Bien sûr, le sujet à lui seul vaudrait une commission parlementaire. Vous m'excuserez, mais il y a une partie du texte qu'on a ajouté pour vous dispenser de certaines annexes du mémoire.

En ce qui concerne le maximum assurable, plusieurs interventions ont été faites par l'AECQ concernant le calcul de ce maximum assurable. Ces interventions ont été faites simultanément tant auprès de la CSST qu'auprès du ministre avec des résultats, avouons-le, peu tangibles. Il faut se rappeler que le système établi au Québec permet, pour ce maximum assurable, de stabiliser artificiellement la cotisation des employeurs. Nous considérons que le maximum assurable, porté à 29 000 $ en 1982 et à 31 500 $ en 1983, s'il permet de maintenir une cotisation dans des limites qui semblent raisonnables, permet tout autant à la CSST de payer des prestations qui sont en relation avec ce même maximum assurable.

Il faut comprendre que ces prestations se paieront pendant de nombreuses années, qu'elles seront indexées annuellement et qu'elles vont grever tout particulièrement les réserves actuarielles.

Quant au système mérite-démérite, la CSST le modifie périodiquement malgré les récriminations des employeurs. La CSST n'a pas tenu compte de l'inéquité du système vis-à-vis des employeurs qui ne peuvent démontrer dans leur unité une masse salariale crédible. Ce facteur est d'autant plus inéquitable que les frais de chargements qui viennent grever les cotisations sont calculés à partir du coût des accidents et non pas de la masse salariale. Aux argumentations du comité de surveillance des finances, la CSST fait la sourde oreille et ne prétend pas vouloir rendre le système plus équitable pour le secteur de la construction en calculant les frais de chargements à partir de la masse salariale. (11 h 45)

Je reviens au mémoire à la page 21. La façon de la CSST d'imputer les frais de chargements provoque, pour les secteurs lourdement cotisables, une injustice flagrante. Nous sommes d'avis que l'industrie de la construction doit supporter sa part, mais il nous apparaît contraire à toute logique que nous payions deux ou trois fois plus que d'autres, sur la base des frais de chargements inclus dans le taux de cotisation.

Nous avons fait réaliser, à même les cotisations de nos membres, une étude sur ce point et nous avons tenté d'en discuter le contenu avec la CSST. Nous vous laissons le soin de vous enquérir des résultats de ce travail de collaboration.

Il est cependant, un énoncé que nous nous faisons souvent servir en guise de réponse: "Le taux de cotisation d'une unité est relativement stable sur une certaine période." Attention, encore là, on ne se gêne pas pour nous lancer des chiffres triturés ou pour le moins favorablement présentés.

Tel que mentionné tantôt, j'ouvre une parenthèse ici: "On ne peut pas, à notre avis, dissocier le taux de cotisation du maximum assurable". Je vous explique un peu ou je veux en venir. Le taux de cotisation peut être maintenu plus ou moins artificiellement sans pour autant stabiliser la cotisation. La méthode est simple, car la cotisation peut se jouer, sur plus d'un facteur, un peu comme dans le cas des taxes municipales: ou bien on ajuste le taux, ou bien on augmente la valeur de l'évaluation. À la CSST, on ajuste le taux ou le maximum assurable et parfois les deux. Le tableau suivant illustre ce système. Je voudrais attirer l'attention des membres de la commission sur les chiffres suivants. Pour 1981, à titre de référence sur le taux pour un employé, j'ouvre une parenthèse ici pour

signaler que, dans le domaine de la construction, les plombiers ainsi que les électriciens sont les deux corps de métier les plus nombreux, donc, pour un plombier, en 1981, avec un maximum assurable de 23 500 $ et un taux de cotisation de 5,51 $, la cotisation d'un employeur à la CSST pour ce salarié atteignait 1294 $, En 1984, toujours pour la même unité, on constate que le taux est sensiblement le même qu'il était en 1981, soit 5,52 $, une variation de 0,01 $ les 100 $, ce qui est quand même négligeable mais, en raison du jeu du maximum assurable, de fait, la cotisation de l'employeur, pour un plombier, passe, en 1981, de 1294 $ à 1738 $ pour 1984.

Plusieurs provinces ont fait un usage calculé de l'état des salaires cotisables pour stabiliser ou éviter l'augmentation du taux de cotisation. C'est particulièrement le cas au Québec, alors que l'augmentation de la masse salariale cotisable a été modifiée à la hausse, chaque année, alors que la plupart des provinces ont tendance, à quelques exceptions près, à maintenir le maximum assurable cotisable stable pour une période de deux ou trois ans.

J'ouvre ici, une autre parenthèse. Ainsi, pour 1984, la CSST a projeté une masse salariale cotisable, pour la construction, de 1 881 000 000 $, pour une cotisation de l'ordre de 125 000 000 $ ou 128 000 000 $, soit une augmentation de 28% de la masse salariale assurable. En chiffres absolus, une augmentation de 404 000 000 $. Alors, l'augmentation de la masse salariale assurable, de fait, se traduit par une augmentation en chiffres absolus de 404 000 000 $, c'est-à-dire que, en 1983, la masse salariale assurable était aux alentours de 1 400 000 000 $ pour la construction et ce sera 1 880 000 000 $ en 1984.

Cette augmentation de l'estimation de la masse salariale se traduit dans les faits par une augmentation estimée des heures travaillées, environ 26 000 000 à 28 000 000. Or, les dernières compilations de l'Office de la construction démontrent qu'au contraire, le nombre d'heures travaillées en 1983 ne pourra excéder le nombre d'heures travaillées en 1982. On doit donc s'attendre à un autre déficit pour 1984. Lorsqu'un organisme calcule le taux de cotisation à partir d'une masse salariale qui n'évolue qu'à partir du taux d'inflation et d'accroissement de l'activité économique, il se doit d'augmenter le taux de cotisation pour compenser l'écart du coût de ces dépenses qui ne sont pas couvertes par le produit de l'accroissement de la masse salariale.

Dans le cas de la CSST, la masse salariale à partir de laquelle on calcule le taux de cotisation n'augmente pas seulement par le fait de l'accroissement du revenu ou de l'activité économique, mais s'accroît surtout parce qu'elle est plus ou moins indexée au salaire moyen des travailleurs qui sert d'indice de base. Pour comprendre ce qui se passe lors de l'application d'un tel système, c'est que l'augmentation est constante et finit par créer un taux supérieur à quelque système que ce soit.

Dans le tableau qui suit, à la page 25, nous avons choisi trois genres d'activités reliées et représentatives du secteur de la construction, trois taux de cotisation que l'on peut qualifier de moyens afin de ne pas tenir compte des extrêmes qui varient de 1,80 $ à plus de 25 $ des 100 $ assurables pour certaines unités. Le tableau est très significatif et prouve hors de tout doute que la CSST impose un fardeau anormal à l'industrie de la construction. La cotisation moyenne au Québec, démontrée dans le tableau de la page 25, est de 7,32 $ pour les trois secteurs utilisés en référence, alors que la moyenne pour l'ensemble des provinces est de 3,33 $, soit un ratio de 2.2 à 1. Ceci est obtenu en tenant compte du maximum assurable propre à chaque province. Si nous pondérons le taux des trois autres provinces, en ramenant le maximum assurable, identique pour chaque province, le ratio est très peu modifié, le taux moyen pour l'ensemble est alors de 3,38 $ au lieu de 3,33 $, et le ratio devient alors de 2.17 à 1 au lieu de 2.20 à 1.

Vous avez, à la page 25, pour les dix provinces canadiennes, le taux de cotisation moyen basé pour les trois secteurs de la construction, soit le bâtiment, le secteur des routes et des grands travaux et les ouvriers en électricité. Vous avez ensuite la moyenne, le taux moyen pour chacun de ces trois secteurs. Il faudrait corriger l'en-tête de la cinquième colonne où une erreur s'est glissée. On y lit: Masse salariale de base. De fait, c'est inexact, c'est: Maximum assurable. À la cinquième colonne, les mots "masse salariale" doivent être remplacés par "maximum assurable". Ce n'est pas en milliards, c'est en dollars.

Dans la quatrième colonne, on remarque, pour situer l'origine des chiffres qu'on vous a cités précédemment, sur la ligne Québec un taux moyen pour le bâtiment de 7,59 $, pour les constructeurs de routes 8,57 $ les 100 $, pour les ouvriers en électricité, 5,81 $ les 100 $, ce qui fait un taux moyen de 7,32 $ qui a été mentionné précédemment à la page 24. Cette même façon de procéder a été retenue pour l'ensemble des provinces et nous donne le ratio de 3,33 $ par rapport à 7,32 $, ce qui se traduit par le ratio de 2.2 à 1. La dernière colonne, finalement, tient compte d'un maximum assurable uniformisé pour l'ensemble des provinces afin d'éliminer toute disparité, même si on a jugé bon de faire l'exercice pour assurer l'exactitude des chiffres qu'on vous avance. De fait, on

constate que le taux moyen pondéré ne change que de 0,05 $ les 100 $, ce qui est quand même assez négligeable.

Le Président (M. Blouin): Messieurs, je vous signale que votre présentation a déjà pris 45 minutes.

M. Girard: J'ai presque fini. Une voix: Pas de problème.

Le Président (M. Blouin): Vous deviez résumer certains des aspects que vous aviez traités.

M. Pagé: Cela aurait pris normalement trois heures, ils sont en train de résumer.

M. Dion: M. le Président, si vous me le permettez, je voudrais souligner deux points. Premièrement, on a tenté de résumer les chiffres par bien des moyens; on a essayé de trouver des solutions.

Le Président (M. Blouin): Je ne parle pas des chiffres, M. Dion, je parle du texte lui-même.

M. Dion: II était très difficile de résumer la section où on traite des chiffres; sinon, vous pourriez confondre les chiffres.

Le Président (M. Blouin): Très bien, je comprends.

M. Dion: Cette partie n'est pas résumée, on s'en tient au mémoire.

Le Président (M. Blouin): Parfait, cela va.

M. Dion: La deuxième chose que je voudrais bien vous faire comprendre, c'est qu'effectivement on n'a plus de place au conseil d'administration de la CSST et c'est le seul endroit où on peut dire ce qu'on a à vous dire.

M. Girard: On a pratiquement fini, d'ailleurs.

Le Président (M. Blouin): II suffit de le dire succinctement.

Une voix: II reste à peu près cinq pages.

Le Président (M. Blouin): Cela va.

M. Girard: Des points peu importants, diront certains, mais pour nous, de l'industrie de la construction, qui payons dans certaines unités de trois à quatre fois et plus le taux moyen au Québec, et souvent aussi, pour le même travailleur, deux ou trois fois le taux de l'Ontario, c'est plus que des détails. Signalons également que cette façon de faire progresser la cotisation par l'ajustement à la hausse du maximum assurable nous est particulièrement préjudiciable dans la construction parce que, encore là, la CSST a trouvé moyen de nous pénaliser davantage. Il faut comprendre que les prestations aux accidentés sont en relation avec le maximum assurable retenu et non pas le salaire réel gagné. Pour illustrer ceci, un travailleur de la construction a un salaire moyen d'environ 11 000 $. Ce sont des chiffres confirmés par l'Office de la construction. Quand on prend le maximum assurable, on fait des calculs en fonction d'un montant de 29 000 $ et de 31 500 $. Nous sommes également pénalisés par le système de calcul en fonction du salaire projeté selon le décret au lieu de prendre en considération le salaire moyen ou réel de l'accidenté. Un document en annexe illustre ce point.

Quelques réflexions sur l'état général des revenus et dépenses de la CSST. Nous sommes bien limités dans nos moyens pour discuter à fond de ce sujet. Il est évident que nos ressources en personnel ne peuvent rivaliser avec celles de la CSST. D'autre part, l'engagement d'une firme habile à mieux nous éclairer est dispendieux mais, plus encore, il faut ajouter que l'information, souvent filtrée et incomplète de la CSST, spécialement depuis l'expulsion de notre représentant, nous rend le tout très complexe.

Le tableau qui suit, et qui va terminer notre exposé en ce qui concerne la partie financière, nous permet cependant, sous toute réserve, de réaliser la progression des revenus et dépenses de la CSST et de constater qu'un déficit de fonctionnement a commencé à s'installer dès l'exercice financier de 1980 alors que depuis 1975 la CSST avait réussi, tant bien que mal, par le biais d'un nouveau système de financement, à équilibrer ses budgets.

Pour 1984, un nouveau système de financement a été adopté qui permettra à la CSST de réduire, dans une certaine mesure, le fardeau de certains cotisants au régime. Par contre, par ce nouveau système, la CSST risque d'augmenter son déficit à long terme car il sera pratiquement impossible à celle-ci de garder un taux de cotisation stabilisé pour cinq ans dans les limites du raisonnable, avec les dépenses projetées, en tenant compte strictement de la décroissance du coût des accidents. Pour ne citer qu'un exemple, nous croyons que la CSST projette de dépenser, au seul chapitre de la prévention, 94 000 000 $ en 1984, 122 000 000 $ en 1985, 155 000 000 $ en 1986, 200 000 000 $ en 1987 et 342 000 000 $ en 1990. Il va sans dire que ces projections sont données en dollars courants. (12 heures)

Si on transpose ces dépenses en dollars, ayant comme base de valeur l'année 1982, ceci donnerait quand même une progression de 79 579 000 $ en 1984 pour atteindre environ 170 000 000 $ en 1990. On devrait aussi tenir compte de l'évolution des structures de la CSST, qui n'ont cessé de croître depuis 1980 et qui ne pourront se stabiliser qu'à moyen terme, nous l'espérons, si l'on considère que cet organisme compte un effectif de 2600 employés alors qu'il était d'un peu plus de 1500 en 1979; que l'effectif autorisé est de 2800 employés pour 1984 et que cette force d'employés semble déjà requise, alors que la plupart des programmes proposés par la CSST n'en sont encore qu'à l'état d'embryon.

Enfin, un autre sujet dont il faudra tenir compte dans le futur est celui de l'impact sur la cotisation que pourrait avoir le projet de loi 42. Mais nous en reparlerons en temps et lieux.

Simplement un bref commentaire pour expliquer le tableau de la page 30. Je vous fais grâce... Les chiffres qui sont là proviennent des rapports annuels de la CSST. Le point qu'on a signalé au préalable est que, d'une part en 1980 la CSST a réalisé un excédent budgétaire de 43 000 000 $; en 1981, il y a eu un premier déficit de l'ordre de 11 000 000 $; en 1982 de 57 000 000 $ et, sur la base des chiffres estimés que nous avons pu obtenir, il devient évident que la CSST se dirige pour 1983 vers un déficit qui pourrait excéder les 100 000 000 $. Merci.

M. Daoust: M. le Président, je vais aller très rapidement dans les quelques pages qui suivent afin de répondre à vos désirs. Je retourne à l'attitude antipatronale à laquelle j'ai fais référence précédemment en vous disant que tout ce qui précède, j'en suis à la page 31, pourrait être un préambule à ce qui suit.

Déjà les mesures prévues par la loi sur la santé et la sécurité du travail laissaient présager l'instauration d'un système chromé de protection des travailleurs, sans égard aux coûts et surtout bien encadré dans la petite bourgeoisie syndicale du Québec.

L'administration du système a été confiée à une armée de fonctionnaires surprotégés par un contrat de travail que seuls nos fonctionnaires possèdent. Le tout est dirigé par un homme qui n'a aucune gêne à démontrer son attitude arrogante et antipatronale. Lui demander de rendre compte de l'utilisation de notre argent nous vaut une réponse négative, évasive pour le moins. Soit dit sans malice: il est surprenant que le président-directeur général ne soit pas devenu imberbe de la gauche à force de recevoir l'accolade de ce même côté.

Les employeurs de la construction sont épuisés de payer pour se faire assommer par le système. On les étouffe sous la réglementation, les formulaires, les inspections et les exigences impossibles à rencontrer. Le gouvernement a déjà entendu ce discours, nous direz-vous. Bien sûr'. Nous vous référons à tous les mémoires, les lettres, et les interventions du secteur de la construction. Ce cri de détresse a déjà été lancé lors d'une précédente commission parlementaire. Vous pouvez en voir un extrait en annexe.

Il est de plus en plus pressant que vous y prêtiez l'oreille et que vous preniez les mesures pour ramener les gens sur terre.

On tente par tous les moyens de faire porter au patron de la construction le chapeau de maître-d'oeuvre. C'est plus facile. On le rend responsable sans tenir compte de l'échéancier serré fixé par le client ou encore des changements en cours d'exécution exigés par les donneurs d'ouvrage sur lesquels l'entrepreneur n'a aucun contrôle.

L'employeur est là seul et toute la structure de la CSST lui tombe dessus. On le pénalise même pour les négligences de ses propres salariés. Contrairement au principe du droit criminel, il est préjugé coupable. Nous voudrions, sur ce dernier point, vous souligner que l'un de vos confrères, devenu juge depuis, Me Robert Burns, ne se gênait pas, dans un de ses jugements fort à point d'ailleurs, pour fortement suggérer à la CSST de changer d'attitude face à l'employeur et aux salariés. Le jugement intervenait dans une poursuite contre l'entreprise BCF Erectors Ltd pour infraction relative au port de la ceinture de sécurité. Le juge Burns a dénoncé l'attitude de la CSST et suggéré à celle-ci de poursuivre la partie fautive à l'avenir. Et je vous donne un extrait: "C'est peut-être dans la politique de la CSST de ne pas poursuivre les individus, mais peut-être que le monde se réveillerait et s'apercevrait que ce n'est pas seulement les employeurs qui ont à passer au "cash" dans ces affaires-là".

Même au niveau des cadres sauf, heureusement, dans quelques exceptions, nous notons une philosophie défavorable au patronat et nettement favorable, non pas aux travailleurs, mais aux syndicats. Le récent règlement sur les comités de la santé et de la sécurité en est une illustration nette. Nous ne prévoyons pas, en effet, que le salarié syndiqué d'un établissement possède, à de tels comités, la majorité des sièges syndicaux et un droit de vote, même s'ils ne sont qu'une infime minorité dans l'établissement, la majorité n'étant pas syndiquée. Que peut penser une personne qui imagine un tel règlement? Comment un homme d'affaires peut-il espérer être traité avec justice et compréhension par des gens qui conçoivent de telles règles?

Le fonctionnaire de la CSST, sans commentaires sur sa provenance, semble endoctriné et convaincu que, dans chaque

patron, il y a un criminel en puissance et que, dans chaque représentant syndical, il y a un homme magnanime et voué corps et âme au bien-être des travailleurs syndiqués, naturellement, et, finalement, il est convaincu qu'en chaque salarié non syndiqué, il y a un syndiqué en puissance et il fait tout pour y arriver. Mais que fait-on des écervelés qui travaillent sans vouloir porter le casque, la ceinture de sécurité, les lunettes protectrices, etc.? On les récompense et on envoie la facture à l'employeur. Les apôtres syndicaux qui sont aujourd'hui glorifiés, qu'ont-ils fait avant l'ère des subventions? Bien sûr, il y a toujours eu quelques ténors, entre autres, à la CSN qui se sont fait entendre pour dérider plus souvent qu'autrement le public, mais le refrain a toujours été le même sur un ton que vous connaissez: Mon cher patron, c'est à ton tour de payer.

Ce sont les fonctionnaires ci-haut décrits qui, à la CSST, interprètent et appliquent la réglementation. Leur intervention biaisée, souvent inopportune et maladroite, a causé la rupture d'un équilibre existant depuis nombre d'années dans l'application du code de sécurité de la construction quant à la fourniture de l'équipement pour la protection individuelle. En effet, avec le temps, les travailleurs et les employeurs ont développé un modus vivendi basé sur le bon sens et l'efficacité. Le travailleur fournissait ainsi lui-même les pièces de protection comme les bottes et les gants de sécurité. En contrepartie, l'employeur fournissait le casque de sécurité, certains appareils pour la protection de l'ouïe, etc. Tous les intervenants de la construction ont interprété leur code ainsi jusqu'à ce que la CSST décide que les employeurs devraient dorénavant se transformer en magasin de bottes, casques, lunettes, chemises, boléros, etc.

Parlons un peu du service d'inspection. Nous ne saurions parler des abus administratifs de la CSST sans vous relater l'histoire du service d'inspection. Au niveau du service d'inspection, la patience des employeurs a été mise à contribution pendant trois ans avant qu'un reflet de discipline semble vouloir s'installer dans ce service. Alors que la CSST tentait de créer des surhommes polyvalents dans tous les champs d'activité reliés au travail, les employeurs devaient subir les décisions arbitraires et souvent coûteuses de la part des inspecteurs. Nous vous référons aux notes en annexe. Se rendant compte enfin que la CSST voyait trop grand dans ses illusions, le vice-président du service d'inspection acceptait de former un comité ad hoc pour étudier les politiques et procédures administratives de son service. Ce comité paritaire devait se pencher sur un manuel de politique d'inspection, sur un manuel d'opération et enfin, ce comité recevait les statistiques périodiques en matière d'accidents et il était informé de façon assez concrète des activités du service d'inspection. Alors qu'une certaine collaboration semblait s'installer au niveau des intervenants, inspecteurs, représentants patronaux et syndicaux, la CSST a décidé de repartir à zéro, à nouveau. Le vice-président à l'inspection a été écarté du conseil d'administration et n'a jamais été remplacé. Le service de l'inspection a été absorbé par le service de la prévention et toute la politique ainsi que les procédures mises de l'avant par les services d'inspection ont été, à toutes fins utiles, éliminés pour être remplacés par d'autres sur lesquels les intervenants sont très peu informés.

La guerre interne pour la prise du pouvoir qui s'est jouée entre les services de prévention et ceux de l'inspection a été faite sur le dos des employeurs et au détriment de ceux-ci qui ont eu à subir un arbitraire décisionnel qui n'avait jamais été atteint, même durant les pires années de l'OCQ. Les entreprises, particulièrement celles du secteur de la construction, ont été obligées de défendre leurs droits les plus légitimes de gérance par des brefs d'évocation, des actions en nullité, etc., devant le pouvoir judiciaire.

Certaines entreprises ont même dû prendre des poursuites contre les intervenants représentant la CSST en recours de dommages et intérêts pour excès de juridiction et abus de droits et pouvoirs de la part des fonctionnaires. De plus, le système de statistiques qui permettait à notre association de faire un travail de prévention planifié n'est plus disponible depuis la prise du pouvoir par les services de prévention. Nous nous abstiendrons de mettre en évidence ce que cette querelle interne a détruit au niveau des fonctionnaires chargés d'appliquer la loi, vous laissant le soin de juger l'imbroglio que la fusion des services a pu créer.

Parlons du service de prévention. Contrairement à ce que pouvait nous faire luire le livre blanc sur la santé et la sécurité, spécialement à l'égard de la prise en charge par le milieu de travail et de la mission de prévenir à la source les accidents du travail et ce, dans un esprit de justice sociale, le service de prévention a tôt fait de manifester, lui aussi, un fort penchant pour le monde syndical. Nous avons déjà parlé plus tôt de l'action de la CSST à l'égard des équipements de sécurité. À notre connaissance, il n'y a pas de règlement qui ait été proposé, qui ne modifiait pas les règles établies entre les anciens partenaires.

Nous tirons notre exemple du programme de prévention. Tel qu'appliqué par le service de prévention, il devient un règlement contraignant qui décourage l'employeur le mieux intentionné. À l'AECQ,

nous avons dû mettre rapidement sur pied un service pour aider nos membres qui, déjà, se voyaient bousculés par l'obligation de fournir un programme de prévention. Le guide préparé par les fonctionnaires de la CSST dépassait les limites normales. Nous n'avons pas dit la loi parce que, encore là, elle avait été écrite en accordant un pouvoir presque illimité, du moins selon les prétentions des fonctionnaires. Il n'est pas surprenant que les fonctionnaires de la CSST se plaignent que les employeurs ne fournissent pas le programme de prévention. Les motifs sont de deux ordres: d'abord, les fonctionnaires élargissent le sens de la loi quant à l'obligation de fournir le programme et, deuxièmement, ils exigent de la part de l'employeur qu'il y inclue des informations ou des méthodes d'opération qui n'ont, entre autres, rien à faire avec l'objectif du programme. C'est de l'ingérence.

Si la CSST s'en tenait aux termes de la loi et du règlement, il serait fort possible pour l'employeur de se conformer à cette nouvelle exigence, mais les penseurs de la CSST ont pondu un questionnaire qui va jusqu'à exiger de l'employeur des renseignements sur son administration, ses droits de gérance, bref une cueillette d'informations qui n'est pas en relation avec la santé et la sécurité. (12 h 15)

II faut comprendre que les employeurs sont de plus en plus réticents à fonctionner dans le système interrogatoire qui permet ensuite à la CSST d'élaborer de nouveaux contrôles. Dans le même sujet, il faut ajouter que le programme de prévention pour établissement et les comités de santé et de sécurité sont pour nos membres de nouvelles sources d'irritation.

Même si la loi exclut, et pour cause, les chantiers de construction de la définition d'établissement et même si les chantiers de construction sont déjà couverts par leurs propres règlements sur ces deux sujets, la CSST a décidé de compter les salariés sur le chantier comme partie à l'établissement qu'est l'entreprise de construction.

M. le Président, je termine. Puisque les obligations varient selon le nombre d'employés qu'a l'établissement et puisque, par leur nature, les équipes de chantiers occupent et diminuent sans cesse, l'employeur ne sait plus à quelle sainte réglementation se vouer.

Quand il veut contester les décisions étranges de ces fonctionnaires, la loi prévoit qu'il doit s'adresser à un bureau de révision formé également de fonctionnaires de la CSST. Vous trouverez en annexe quelques exemples de tels abus.

Je vais sauter quelques pages et je vais vous laisser le loisir de les lire un peu plus tard.

En ce qui concerne le service de réparation je voulais faire simplement un à-côté et amener quelque chose à votre connaissance. Cela a été mentionné un peu plus tôt. À la fin du cahier, vous avez un tableau qui vous donne une comparaison de revenus estimés d'un salarié de la construction s'il travaille ou s'il participe au système de réparation. Je crois que c'est important de le comprendre. Un employé qui travaille 960 heures dans la construction c'est une des annexes à la fin, il n'y a pas de page...

M. Dion: C'est une annexe qui est sur le biais dans votre cahier. Si vous suivez les pages bleus, c'est la troisième ou la quatrième annexe.

M. Daoust: Si j'avais lu toute la chose, cela se serait enchaîné, mais j'essaie de vous faire grâce pour réduire le temps qu'on prend.

Un employé de construction qui travaillerait 960 heures - d'après le syndicat, ce sont les heures moyennes de la construction - gagnerait un revenu total net, incluant ses prestations d'assurance-chômage, de 16 258 $. Avec la CSST, il gagne 21 000 $. C'est plus payant d'être malade que de travailler. Après cela, vous allez essayer de me faire croire que l'employé a avantage à revenir travailler plus vite qu'autrement. C'est un peu dur à avaler.

Je vais tout de suite aux conclusions. Je vous fais grâce de quelques pages. Je suis rendu à la page 46.

Les exemples d'anomalies administratives et de fonctionnement qui auront été donnés par nous et par d'autres au cours de ces quatre jours ne seront toujours que la pointe de l'iceberg. Nous ne serions pas surpris que le président-directeur général et son équipe démontrent, dans leur témoignage, que la gestion de la CSST est sans reproche.

La hausse effrénée des dépenses, l'augmentation en flèche du personnel, la distribution de subventions aux syndicats pour des causes qui n'existent pas, le gaspillage de l'Institut de recherche en santé et sécurité et à la CSST dont la principale recherche jusqu'ici a été consacrée à se trouver une vocation, les millions échappés en direction des départements de santé communautaire, les DSC, qui permettent de dissimuler 700 à 800 fonctionnaires sans mandat précis, le dédoublement d'équipement de recherche de luxe aux DSC et à l'IRSST, tout cela n'est probablement que le fruit de l'imagination. Pourtant, les 128 000 000 $ qui doivent être expédiés en 1984 à la CSST par les entreprises que nous représentons pourraient bien devenir également le fruit de l'imagination, si des actions radicales ne sont pas prises sans délai pour corriger la situation.

Déjà, au début de 1983, 1708 entreprises de construction nous ont déclaré, par écrit, être prêtes à ne pas payer leur cotisation à la CSST si on n'obtenait pas justice. Ces entreprises avaient déclaré 27 000 000 d'heures travaillées, soit 31% du total, et elles savaient ce qu'elles faisaient; ce ne sont pas des entreprises de broche à foin, ce sont des entreprises responsables. Nous croyons que le gouvernement n'a plus le choix. Ce n'est pas à la SAQ que le mouvement de privatisation doit commencer, mais bien à la CSST. Là aussi, la modération aurait meilleur goût.

Le système d'indemnisation des victimes d'accidents du travail doit être confié à l'entreprise privée et les mesures de luxe qu'on y a assorties avec le temps doivent être interrompues, au moins jusqu'à ce que les citoyens et les entreprises du Québec aient vraiment les moyens de se les payer. Nous demandons finalement que la prise en main transitoire de la CSST soit assurée par un comité de gestion formé exclusivement de chefs d'entreprises qui prendraient la charge complète de l'administration de la CSST avec une direction technique quotidienne assurée par une équipe de spécialistes prêtés par l'entreprise privée. C'est là notre recommandation. Le remède peut paraître d'importance, mais il n'est qu'à la dimension du mal qu'il faut guérir.

Je voudrais ajouter ici un paragraphe: avant de vous quitter, je m'en voudrais de ne pas donner la réplique à M. Lavallée, qui nous critiquait hier pour le retard à former l'Association sectorielle paritaire. Cela avait l'air de vous intéresser. Peut-être que si la loi n'obligeait pas la formation de cette association, les demandes syndicales seraient un peu plus réalistes. Une chose est drôle, c'est que tandis que les patrons refusent d'accepter la structure proposée par le syndicat - parce que celui-ci nous réserve en quelque sorte un rôle d'observateur - la CSST, une fois de plus, s'ingère dans nos affaires et s'efforce de nous faire avaler une structure qui ressemble drôlement aux demandes syndicales. La CSST démontre une fois de plus son penchant prosyndical. Je vous remercie au nom de mes confrères de nous avoir écoutés aussi patiemment.

Le Président (M. Blouin): Merci, messieurs. M. le ministre.

M. Fréchette: Oui, M. le Président. Dans mes remarques préliminaires, je voudrais remercier les représentants de l'AECQ de nous avoir soumis leurs observations, qu'on retrouve d'ailleurs dans un document passablement étoffé, qui est long, et qui va au-delà des observations qui ont été faites depuis plus d'une heure maintenant.

Ce n'est pas mon intention d'entrer dans des questions d'ordre particulier, parce qu'il y a tellement de sujets qui ont été touchés que l'exercice en serait trop long et, deuxièmement, il y aurait sans doute des risques sérieux à ce que nous entreprenions une discussion serrée à bien des égards. Je vais donc m'abstenir, encore une fois, de poser des questions sur des sujets d'ordre particulier. Je ferai quelques remarques d'ordre général et poserai une ou deux questions également d'ordre général.

D'abord, je voudrais, aussi sereinement que possible, remettre un certain nombre de choses dans leur vraie perspective, quant à l'invitation qui a été faite à l'association que nous venons d'entendre. Ses représentants disent regretter qu'ils n'aient pas été invités, il me semble qu'il est important de vous donner l'interprétation que nous nous faisons de ce à quoi on s'est référé.

La motion qui a permis la convocation de cette commission a été adoptée par l'Assemblée nationale le 17 novembre dernier. Pour mémoire, autant pour les membres de la commission que pour ceux qui sont témoins, je vous lis très rapidement le texte de la motion qui a été adoptée par l'Assemblée nationale et à l'unanimité après un amendement présenté par le ministre du Travail à la motion principale qu'avait soumise le député de Viau. La motion amendée se lisait ainsi: Que la commission permanente du travail se réunisse les 12, 13, 14 et 15 décembre pour examiner l'administration et le fonctionnement de la Commission de la santé et de la sécurité du travail et qu'à cette fin soient entendus le président de la CSST, son conseil d'administration ainsi que tout organisme que la commission jugera utile d'entendre.

M. le Président, je ne veux pas en faire un plat, mais il me semble qu'il y a certaines choses qui doivent être placées dans leur vraie perspective. Je voudrais faire référence, pour ceux qui ont le goût d'en faire l'exercice, au journal des Débats. Lorsque le député de Viau, porte-parole officiel de l'Opposition en matière de santé et de sécurité, a soumis sa motion, son argumentation, il a fait l'énumération d'une dizaine d'organismes, neuf à mon souvenir -cela peut être revérifié, mais il me semble que c'était neuf - qu'eux de l'Opposition souhaitaient voir entendre par cette commission. Nous avons, de consentement, après avoir regardé la liste, accepté d'entendre tous les organismes que nous avait suggérés l'Opposition. Depuis ce temps, une couple d'entre eux se sont désistés. Quelques jours après l'adoption de la motion, des représentations nous ont été faites par le représentant de l'Opposition dans le sens que l'Association des entrepreneurs en construction du Québec désirait être entendue et nous avons acquiescé à la demande dès lors qu'elle nous a été soumise.

C'est comme cela que le processus s'est fait. Je voulais simplement que ce soit clarifié par rapport au reproche qui a été fait à la commission.

M. le Président, l'Association des entrepreneurs en construction du Québec a réclamé, avec l'insistance que vous savez, de pouvoir être représentée au conseil d'administration de la Commission de la santé et de la sécurité du travail. Compte tenu de la situation qui existait, compte tenu de sa représentativité dans ce secteur de l'économie et dans l'ensemble de l'économie du Québec, il me semble qu'il s'agit là d'une requête qui est tout à fait bien fondée. J'ai déjà eu l'occasion, d'ailleurs, et je pense que les témoins qui sont à la table le savent, de leur dire à une, deux ou trois reprises qu'effectivement leur requête m'apparaissait bien fondée et jusqu'à ce matin je continue de prétendre que c'est toujours bien fondé sous réserve, cependant, de la question que je poserai à nos témoins qu'ils pourront noter ou à laquelle ils pourront me répondre tout de suite, mais il va nous falloir clarifier une situation. (12 h 30)

J'ai cru comprendre, autant par votre argumentation écrite que par les conclusions de votre mémoire écrit, que votre souhait, sinon votre désir, ou alors votre objectif, c'est que cette commission, à toutes fins utiles, devrait disparaître et être remplacée, nous avez-vous dit, par - aussi à toutes fins utiles - l'entreprise privée. J'ai cru comprendre aussi - je voudrais que vous soyez assurés de l'occasion que vous aurez pour répondre à ces questions - que vous souhaitiez que l'État se retire purement et simplement de ce genre de champ d'action. Cela ne me fait pas de doute quant à la participation des travailleurs. Vous avez été fort clairs à cet égard. Vous nous avez même dit - on doit retrouver cette observation dans le mémoire - que le rôle des travailleurs devrait être réduit au lobbying politique. Remarquez que je ne conteste d'aucune espèce de façon les objectifs que vous poursuivez mais je vous signale également en toute déférence que l'argumentation que j'ai entendue ce matin ne m'a pas encore convaincu qu'il fallait aller jusque là. Cependant, voici la question que je veux vous poser par rapport à votre participation au conseil d'administration. Est-ce que vous allez vous sentir à l'aise d'y être? Est-ce que vous allez accepter d'y participer suivant les règles du jeu si, à toutes fins utiles, l'objectif ultime que vous recherchez est la disparition pure et simple de l'organisme lui-même? Ce sont mes premières questions.

M. Daoust: M. le ministre, il est vrai que, dans notre exposé, nous mentionnons que nous aimerions remplacer le système actuel par un système d'entreprise privée parce que nous sommes persuadés que cela serait beaucoup plus efficace, que cela donnerait de meilleurs services aux travailleurs pour un montant d'argent beaucoup plus minime.

Quant à la question d'être confortable au conseil d'administration, je peux vous dire que, dans le passé, on était là. On n'était peut-être pas confortable ou peut-être qu'on n'aimait pas ce qui s'y passait, mais au moins on y était. Au moins, il y avait quelqu'un qui pouvait, à l'occasion, être assez honnête ou être assez franc pour sortir la crasse, pour parler des choses qui s'y passaient, des chiffres qui étaient cachés ou dissimulés et les rapporter au public ou au moins au ministère. Vous me direz que cela n'a pas été très efficace parce qu'on l'a mis dehors. Mais quand même, on espère que c'était un cas spécifique et que cela ne se reproduira pas.

Ma réponse est simple. Il est bien évident que ce n'est peut-être pas la première option que nous prônons mais nous serions très satisfaits, pendant que le système existe, d'être au moins présents dans ce système.

M. Fréchette: Votre réponse elle-même, M. Daoust, m'oblige à réfléchir davantage. Vous dites: Pendant que le système existe. Est-ce à croire, donc, que l'objectif que vous poursuivriez en y étant serait effectivement d'essayer de faire disparaître le système?

M. Daoust: M. le ministre, on espérerait, en étant présent et en ayant à notre disposition les informations que nous n'avons pas dans le moment et en assumant ou en tenant pour acquis qu'on nous permettra d'être honnêtes dans nos gestes et de divulguer les choses qu'on veut divulguer, que vous en viendrez à la même conclusion que nous.

M. Fréchette: Bon. Alors...

M. Dion: M. le ministre, me permettriez-vous de faire une intervention?

Le Président (M. Blouin): Oui. Allez-y.

M. Dion: D'abord, il y a deux points sur lesquels j'aimerais revenir. Quant au résumé que vous avez fait tantôt sur la façon dont on a été invité devant la commission, je pense qu'il est exact et c'est d'ailleurs la raison pour laquelle on s'est adressé à vous, M. le ministre, par télégramme pour se faire inviter devant la commission. On avait porté à notre connaissance la liste des invités qui devaient se présenter devant la commission et on trouvait aberrant et inacceptable que l'industrie de la construction ou du moins la partie patronale n'y soit pas. D'ailleurs, je

pense qu'on souligne dans notre texte que vous êtes intervenu, vous ou le président de la commission - c'est probablement vous qui êtes intervenu - à la suite de notre télégramme pour qu'on puisse se présenter devant la commission et nous l'apprécions.

Effectivement, la deuxième chose concerne notre présence au conseil d'administration. Il faut vous dire que par notre présence au conseil d'administration, dans le cadre actuel de la boîte, c'est sûr qu'on fait une proposition de remplacer cette boîte. Des gens pourraient nous dire: Ce n'est pas en changeant une structure qu'on règle un problème. Actuellement, on voit la structure dans un état tel qu'on se dit: II n'y a pas d'autre moyen, il faut changer la structure. Si au CA on est présents et qu'on ne nous met pas un bâillon, qu'on n'empêche pas les gens de parler sous la menace d'être expulsés, de ne plus se voir représenté au conseil, si on nous laisse la liberté d'oeuvrer, d'agir et de défendre les intérêts des gens de la construction, je pense qu'on peut entrer dans cette structure et chercher à la rendre meilleure, chercher à la modifier. C'est sûr que la structure, telle qu'elle existe actuellement, on veut la voir changer pour une autre structure; elle ne nous satisfait pas.

Mais, dans notre texte, on vous dit une chose. On ne vous dit pas carrément de mettre la structure à terre. On peut déduire cela, oui, à la limite. On vous dit: Donnez une compétition, par l'entreprise privée, à la CSST. On vous dit dans le texte, assez clairement - j'espère que cela est clair: Si on pouvait compétitionner la CSST par l'entreprise privée.

Si vous me permettez, une légère parenthèse. Actuellement, on a des employeurs qui ont à envoyer des gens en dehors du Québec - par exemple, en Algérie, ou quelque chose de ce genre - et ils doivent assurer leurs salariés parce qu'ils ne sont pas couverts par le système. Ils font affaires avec l'entreprise privée, les compagnies d'assurances. Je ne veux pas me faire dire: Ce n'est pas tout à fait la même affaire. Toutes proportions gardées, les coûts d'assurances ne sont d'aucune proportion avec ceux de la CSST. Il ne faut pas nous apporter l'argument que c'est à cause des coûts des programmes de prévention, les coûts de l'IRSST. Oui, c'est probablement à cause de tout cela. C'est que le système, à l'heure actuelle, est tellement développé que le coût moyen est rendu, comme vous le voyez, à 7,32 $ au Québec par rapport à 3,30 $. Le vice-président est un employeur de la section structure, il fait affaires au Québec, il paie un taux au-dessus de 25 $. Il s'en va en Ontario et il paie un taux, je pense, qui est au alentour de 7 $ ou 8 $ ou quelque chose comme cela.

C'est cela, M. le Président, M. le ministre, madame de la commission, qu'on dénonce à l'heure actuelle. On dit que le système est inacceptable comme tel. Dans notre texte, on le dit, M. le ministre, vous êtes un des deux ministres qui avez dit: Oui, vous allez être à la commission un jour. Le jour, on voudrait savoir exactement lequel. Si ce n'était pas trop pousser, on aimerait savoir quand. On sait qu'on va y être, vous l'avez dit; le ministre Tardif, je crois, l'a dit également au congrès de l'APCHQ. On est satisfait de se faire dire cela, on a hâte que cela arrive, on est prêt à y aller, on est prêt à essayer de collaborer, à travailler dedans.

Mais si la condition pour y aller est une condition qui peut ressembler à celle de M. Murray, c'est-à-dire si tu parles trop fort tu vas sortir, là on n'est pas d'accord pour accepter le système. Cela est clair.

M. Fréchette: Je vous remercie, M. Dion, cela replace les choses dans le sens que je l'avais toujours compris d'ailleurs. C'est comme cela que je l'avais toujours compris.

Une voix: II est beaucoup plus éloquent que moi.

M. Dion: C'est parce qu'on ne se parle pas assez souvent, M. le ministre. C'est peut-être pour cela.

M. Fréchette: Peut-être. Une autre observation et une dernière question quant à moi. Vous avez entendu, hier, le conseil d'administration et plus particulièrement un représentant de la partie syndicale, un représentant de la partie patronale qui, l'un et l'autre, ont souligné les difficultés qu'un organisme comme celui-là pouvait représenter au niveau de son fonctionnement à cause, très précisément, de la parité qu'on y retrouve. Cela a été dans ce sens que l'observation de M. Laberge a été faite; M. Dufour, également, il me semble. J'essaie de ne pas déformer ce qu'ils ont dit, ni leur pensée. Ils ont convenu, tous les deux, encore une fois, que cela n'était pas toujours simple, pas toujours facile mais que, par ailleurs, ils acceptaient le principe même de la parité qu'on retrouve autant au conseil d'administration que dans l'ensemble des organismes ou des structures prévus par la loi.

M. Laberge a ajouté - il me semble que c'est lui en tout cas: Oui, c'est dur de fonctionner en paritarisme comme cela, c'est difficile. Il y a parfois des discussions qui sont ardues, sauf que cela serait peut-être davantage laborieux pour toutes les parties si ce n'était pas le système de la parité qui existait. À ce moment-là, chacun élaborerait ses propres structures et ses propres moyens d'action. Il n'est écrit nulle part que cela

ferait l'affaire de l'autre partie. M. Laberge a ajouté: Si cela devait procéder par voie de décrets gouvernementaux, par exemple, on demanderait, chaque fois qu'un décret est adopté ou qu'il est prépublié dans la Gazette officielle, d'être entendu en commission parlementaire, alors que cette parité que l'on connaît nous permet de procéder à des discussions de fond à l'intérieur même de l'organisme. Cela rejoint encore le fond de votre argumentation, M. Daoust ou M. Dion. Est-ce que vous remettez fondamentalement en cause le principe de la parité de la représentation?

M. Daoust: M. le ministre, jusqu'à maintenant on n'a pas vraiment eu la chance d'essayer le système de parité. On n'est même pas là. Si on avait la chance de l'essayer librement, sans aucune contrainte, peut-être qu'après on pourrait rendre un jugement; mais dans le moment, il est impossible de rendre un jugement, je veux dire avec le système tel qu'il est là. On ne participe pas. Si on participait, dans un an peut-être que je pourrais vous dire: oui, le système fonctionne, non, il ne fonctionne pas. Mais dans le moment...

M. Fréchette: Vous y avez été un petit moment.

M. Dion: Encore là, M. le ministre, je pense qu'il faut comprendre la position du monde patronal. On paie des sommes d'argent qui s'en vont à la CSST. Il y a des gens qui nous rétorquent: Bâdrez-nous pas, vous ne faites que payer vos dus. L'employeur est d'accord pour payer ou pour indemniser ses salariés qui ont des accidents, les vrais. On est tous d'accord avec cela. Il n'y a pas un employeur dont vous entendrez dire qu'il est un tueur volontaire. On disait à un moment donné: On serait des fous, ce serait de la folie furieuse de mieux blesser nos gens pour payer plus à la fin. On serait réellement des caves. C'est sûr et certain que ce que nous pensons à la CSST, c'est à l'administration de l'argent, qui est notre argent; on pense que c'est nous qui devrions l'administrer. On n'a pas objection à du paritarisme pour discuter des choses qui devraient être faites. Par exemple, si à un moment donné on veut s'en aller pour dire qu'on doit faire de la prévention, c'est évident qu'on devrait s'asseoir avec la partie syndicale et éviter les problèmes en en discutant au préalable. D'accord, mais quand il s'agit d'administrer les sommes d'argent -c'est ce qu'on veut lancer comme message -c'est notre argent qu'on veut administrer et on veut qu'il soit bien administré. C'est là qu'on veut garder un contrôle.

J'ouvre une parenthèse sur l'association sectorielle. D'ailleurs, je vais lancer un compliment à Jean Lavallée ou à Louis

Laberge. Cela va leur faire plaisir. Je pense qu'il a dit hier... C'est intelligent, il parle intelligemment habituellement et il l'a dit intelligemment hier: Ne nous bourrez pas l'association sectorielle de force. Je pense que c'est le message, dans le fond, qu'on pouvait... En tout cas, nous, c'est ce que nous avons compris. Parfois, on comprend ce qu'on veut. Ne la mettez pas de force dans la gorge des gens de l'industrie de la construction, l'association sectorielle. Vous ne ferez jamais marcher une organisation en l'imposant, en la forçant avec un vote de président qui se sacre de ce que les patrons pensent de l'association sectorielle. Vous n'arriverez nulle part avec cela. Cela prend la collaboration des deux. Ce qu'on a dit, nous: dans l'association sectorielle, il y aura des sommes d'argent à administrer, on veut contrôler les sommes d'argent, ce sont nos sommes d'argent. On pense de cette façon, nous. Quand on va discuter de ce qu'on fait avec ces sommes, comment on les dépense, comment on les utilise, comment on fait nos programmes, c'est évident qu'on est d'accord pour parler avec la partie syndicale, pour discuter avec elle. On l'a fait. Ce n'est pas d'aujourd'hui. On a déjà parlé avec Lavallée et Laberge. On a même déjà parlé avec Michel Chartrand. On parlait, nous, avec Michel Chartrand. Il m'a mis mon manteau hier; je ne suis pas en chicane avec lui. On est capable de se parler. On a discuté des équipements de sécurité. On a fait cela. On est capable de le faire.

Mais quand on arrive aux sommes d'argent et qu'une tierce partie se met à les gaspiller à coups de millions d'un bord et de l'autre, on ne veut pas cela. On n'est pas d'accord avec cela et c'est là-dessus qu'on veut, comme patrons, avoir le contrôle. Quant au reste, oui, d'accord, on est prêt à accepter le paritarisme. On n'est pas contre cela, loin de là. Si vous lisez nos déclarations de principe, c'est cela, notre position. Dans l'association sectorielle - la parenthèse que j'ai ouverte - c'est la même position qu'on a: on est prêt à faire une association sectorielle; que les gens ne s'inquiètent pas. On n'est pas des bornés. On sait que cela peut être utile et que cela peut rendre des services. Mais on veut la contrôler. On ne veut pas que cela devienne une organisation ou un éléphant où l'argent entre là-dedans et s'en va n'importe où et n'importe comment. C'est notre argent. On veut le contrôler. On va s'asseoir avec la partie syndicale et on va définir les choses à faire dans l'association sectorielle. Mais on n'ira pas se faire dire par le gars qui ne paie pas: Cela va être 50 000 000 $ cette affaire-là. Non! C'est notre argent et on ne veut pas que les gens disent: C'est 50 000 000 $ là-dedans. Nous, on va dire: Nous sommes prêts à investir 5 000 000 $ et, là, on va discuter avec les autres sur la

meilleure façon de dépenser dans l'intérêt des vrais travailleurs et des vrais patrons. C'est cela notre position. (12 h 45)

M. Fréchette: M. le Président, j'ai une dernière observation. C'est M. Girard, je pense, qui a parlé en votre nom quant à un aspect très important de l'ensemble de la situation qui nous préoccupe, c'est-à-dire le financement, ses méthodes et, enfin, les conséquences que cela a chez vous. Je voudrais vous signaler que, évidemment, lorsque nous tiendrons la commission parlementaire sur la loi 42, ce sera le forum tout à fait choisi pour revenir à cet égard. M. Dion, afin qu'il n'y ait pas de quiproquo ni d'ambiguïté nulle part, je vous invite dès maintenant à participer à la commission parlementaire sur la loi 42. Nous allons annoncer les dates très bientôt.

M. Dion: M. le ministre, on va venir et je vous garantis, tenant compte de la compréhension habituelle que vous manifestez, que vous allez comprendre que cette affaire-là n'a pas de sens. Cela a de l'allure quant au 3804, mais cela n'a pas de sens de créer de nouveaux champs d'indemnisation qui vont ajouter encore un autre 100 000 000 $ dans quelque temps. Cela n'a pas de sens.

M. le ministre, vous allez atteindre, vous aussi, le même âge que j'ai. Vous êtes plus jeune que moi et, un jour, vous allez devenir sourd naturellement. C'est naturel de devenir sourd et vous n'accepterez pas que la CSST indemnise des gens qui deviennent sourds de façon naturelle en prétendant que c'est à la suite d'accidents du travail. On n'acceptera pas cela nous non plus. Ce sont de nouveaux champs d'indemnité.

Le Président (M. Blouin): Merci M. Dion. M. le député de Viau.

M. Cusano: Merci M. le Président. Vous dites dans votre mémoire - et les faits nous le font constater - que vous n'êtes pas représenté au conseil d'administration. Vous dites aussi qu'à la suite de sorties, par votre représentant, sur des abus administratifs qui ont été commis, à l'époque, on l'aurait mis à la porte. Pouvez-vous nous dire quelles sont ces anomalies administratives que votre représentant avait soulignées?

Le Président (M. Blouin): M. Dion.

M. Dion: Si vous me le permettez, effectivement, je pense que la personne qui était la plus apte à répondre à cette question était M. Murray. On a tenté d'amener M. Murray à la commission. Pour des circonstances incontrôlables, M. Murray n'a pu venir, mais je pense que M. Girard est assez au courant des faits qui sont survenus à ce moment; je parle de ce qu'il avait souligné.

Le Président (M. Blouin): M. Girard.

M. Girard: Merci M. le Président. M. Murray a alimenté, à l'époque où il siégeait au conseil d'administration, du mieux possible le comité de surveillance des finances créé par l'AECQ. Un certain nombre d'anomalies dont la principale est, sans aucun doute, le déficit budgétaire, mentionné hier, déficit de l'ordre de 48 000 000 $ ou 50 000 000 $. Il y un certain nombre d'autres choses qui sont également mentionnées dans l'une des annexes du mémoire et qui font état des principales anomalies administratives. D'une part, il y a une chose importante qui est la récupération de la non-récupération, si vous voulez, des dépenses faites par la CSST relativement à des accidents causés par une tierce partie, assurés par la Régie de l'assurance automobile. Ce que je veux dire par cela, c'est qu'un travailleur victime d'un accident d'automobile dans le cadre de son travail était, jusqu'en 1983, indemnisé par la CSST et la CSST ne prenait aucune action pour aller récupérer à la Régie de l'assurance automobile les sommes qui auraient dû être payées par cet autre régime financé directement par chacun des utilisateurs.

On a estimé qu'il y a eu, en 1982, environ 205 accidents mortels au Québec et que 25% de ces accidents mettaient en cause un véhicule automobile assuré par la RARQ. Et là, évidemmment, nous n'avons aucune statistique sur les accidents non mortels qui mettaient également en cause ce même genre de véhicule. Je ne pourrais pas estimer ou vous donner un ordre de grandeur des chiffres, mais il y a suffisamment d'argent dans cela, je pense... Tout le monde sait que, lorsqu'une mort survient en milieu de travail, les montants payés sont très substantiels.

On a également parlé dans le cadre des actions du comité du maximum assurable dont je vous ai entretenus tantôt. On a aussi constaté que la CSST a mis au point un manuel des politiques administratives du service de la réparation. Il y a un comité ad hoc qui avait été formé pour étudier ces différentes politiques. Le comité ad hoc en question n'a jamais pu terminer ses travaux. Notre comité a essayé, à plusieurs reprises, de faire modifier certaines politiques du service, particulièrement celle voulant que, pour déterminer la prestation d'un accidenté, il serait dorénavant tenu compte des salaires effectifs d'un contrat de travail. Quant à la période retenue, on ne tiendrait plus compte des quatre semaines précédant l'accident, mais plutôt des quatorze jours. Cette façon d'agir du service de la réparation au milieu d'un exercice financier a permis que deux systèmes se chevauchent, ce qui a créé des

problèmes au niveau des entreprises. À la demande répétée des membres du comité qui voulaient rencontrer les responsables du service de la réparation, la CSST a toujours accusé une fin de non recevoir.

Un autre article sur lequel on s'est attardé, c'est celui des excédents budgétaires de l'IRSST où on s'est rendu compte que, pour la première année de fonctionnement, 1981, sur un budget de 13 000 000 $, à la fin de l'année 1981, il y avait un excédent budgétaire de 3 000 000 $; alors 3 000 000 $ sur 13 000 000 $, cela fait un ratio qui est quand même assez impressionnant. Cela fait pas loin de 25% des sommes qui n'ont pas été dépensées. On s'est également rendu compte qu'il n'y avait aucun rapport d'étape qui était produit par les gens qui bénéficiaient des subventions accordées par l'IRSST. On s'est également rendu compte que, au niveau des équipements dont l'institut s'était doté, on se promenait en Cadillac au Québec.

M. Dion: Si vous me permettez, M. le Président... Si je suis trop long, ne vous gênez pas pour me le dire. Je ne dirais pas que j'ai la parole facile, mais je parle facilement.

Dans le fond, M. Murray était dans la délégation patronale. Je ne veux pas lui donner un titre, mais il semblait que c'était plutôt celui qui était attaché aux questions financières à la CSST. Pour ce qui est de mettre le point exactement sur ce qui a fait que M. Murray "a sorti ou n'a pas été renommé" - mettons tout cela entre guillemets, sans malice - je ne peux pas vous dire carrément: c'est sur tel point. Je peux vous dire que l'une des actions finales de M. Murray était une lettre qui avait été adressée au ministre du temps, M. Marois, et qui semble avoir fait déborder le verre. Mais il faut retenir une chose, c'est que M. Murray étant le bonhomme qui était impliqué au niveau des questions financières - j'espère ne pas dire de choses fausses à l'heure actuelle, c'est du moins l'information qu'on avait - c'est évident qu'il touchait le point sensible de l'organisation, il touchait ce qui est le point sensible du patronat, nos sous. Quand M. Murray posait des questions, c'était pour savoir pourquoi, alors que dans un budget, on avait accepté 2000 postes pour du personnel on se retrouvait à la fin de l'année avec un rapport sur lequel on en voyait apparaître 2500 et 2600; il voulait savoir comment il se faisait qu'il y avait encore 200, 500, 600 personnes de trop. Qu'est-ce qui est arrivé? M. Murray était tannant. Vous le constatez et on n'a pas le choix, on est obligés de vous avouer que oui, c'est vrai, nous, de la construction, sommes tannants, non pas seulement pour l'être, c'est naturel. La construction n'est pas comme d'autres; on ne peut pas être considérés comme les autres; vous ne nous considérez pas à nulle part comme les autres. Vous avez adopté une Loi sur les relations du travail pour la construction; il y a un petit paragraphe dans cette loi, la Loi sur la CSST, spécialement pour la construction. On forme obligatoirement une association sectorielle. La construction a des problèmes différents. Si vous nous parlez des cinq jours indemnisables dans la construction, cela n'est pas viable, ce n'est pas pensable; cela a augmenté les accidents. Si vous pensez que le problème des maux de dos dans l'industrie de la construction, ce n'est rien... Peut-être que ce n'est rien ailleurs, chez nous, c'est quelque chose. Les quatorze jours de la loi 42 qui s'en vient, ce sera énorme chez nous. Le système de calcul du salaire du maximum assurable chez nous, c'est une façon de prendre le décret pour compter cela. Nous avons des statistiques dans l'industrie de la construction qui démontrent un taux de salaire - je lance un chiffre comme cela, mettons 10 000 $ - si on prend le décret pour déterminer le maximum assurable d'un travailleur de la construction, on dit: c'est un employé qui devrait gagner 15,00 $ l'heure, 40 heures par semaine, 50 semaines, si on est gentil, au lieu de 52. On fait le total et on se dit que son salaire est de tant et il est au maximum. C'est cela qui fait qu'on a une situation spéciale et que M. Murray s'est ramassé dehors, du moins c'est ce qu'on pense.

Le Président (M. Blouin): M. le député de Viau.

M. Dion: Vous avez mis en application ce que je vous avais suggéré.

M. Cusano: Sur ces menaces d'expulsion, on comprend parfois que, lorsque des personnes cherchent à savoir ce qui se passe à l'intérieur d'une boîte, cela en offusque certaines autres. Ma question précise - c'est dommage que M. Murray n'ait pas pu être ici aujourd'hui - à votre connaissance, ces menaces d'expulsion et l'expulsion même étaient recommandées et faites par qui?

M. Dion: M. le Président, je voudrais tout de suite... J'espère que ce n'est pas nous qui induisons la commission en erreur. Il n'y a pas eu d'expulsion; il n'y a pas eu de menaces d'expulsion. Ce n'est pas la réalité, M. Cusano.

M. Cusano: On s'est servi...

M. Dion: Au moment du renouvellement des mandats, des nominations, le nom de M. Murray apparaissait sur les recommandations du Conseil du patronat, selon ce qu'on dit dans notre mémoire et dans celui de la

chambre de commerce et M. Murray n'a pas été renommé. Je ne voudrais pas qu'on nous fasse dire des choses qu'on n'a pas dites. Je ne veux pas accuser le ministre du temps de l'avoir expulsé, ce n'est pas le cas. Il ne l'a pas renommé, il l'a oublié.

M. Cusano: Merci.

M. Dion: Je pense que M. Fréchette sait qu'il nous a oubliés.

M. Cusano: Le fait est que vous n'êtes plus là. Le fait est que vous contribuez énormément. Cela m'amène à une autre question. Présentement, quelles voies employez-vous, autres que les conférences de presse, pour faire valoir vos préoccupations auprès de la CSST, auprès du conseil d'administration?

M. Dion: M. le Président, si j'étais haïssable, il y en a qui diraient parfois le gouvernement, parfois l'Opposition, parfois les commissions parlementaires. Je dois vous dire que normalement l'information doit nous venir de la délégation patronale qui siège à la CSST. Évidemment, on n'est pas présent; on ne peut pas enregistrer notre voix. Je pense que ces gens-là font le maximum pour traduire la pensée de l'industrie de la construction mais ce n'est pas comme être assis là, ce n'est pas voter, ce n'est pas donner notre point de vue. C'est évident.

Il peut se trouver - je dois vous le dire honnêtement - des situations où nous, de la construction, on pourrait avoir des exigences. Par exemple, quand on demande de réviser notre taux de cotisation, c'est évident que notre position peut être préjudiciable aux autres personnes de l'industrie parce que si mon taux baisse et que la CSST a besoin d'une certaine somme, il faudra que le taux des autres soit augmenté. C'est peut-être vrai. Cela peut créer des conflits.

M. Cusano: À la page 42 de votre mémoire, vous dites que la CSST a pondu un questionnaire qui va jusqu'à exiger de l'employeur des renseignements sur son administration, ses droits de gérance, bref une cueillette d'informations qui n'est pas en relation avec la santé et la sécurité. Pouvez-vous nous en donner des exemples?

Le Président (M. Blouin): C'est pour expliciter le paragraphe de la page 42.

M. Dion: C'est quand même un énoncé général. Je pense que si vous désirez des précisions, j'en ai quelques-unes. Dans l'ensemble du guide fait par la CSST pour préparer un programme de prévention - il faudrait effectivement avoir le texte et le regarder - vous allez vous rendre compte qu'il y a une série de questions qui nous apparaissent - évidemment, vous allez dire: C'est votre jugement, d'accord - non pertinentes à la mise en place d'un programme de prévention. Je peux vous donner une idée. On pense qu'il est non pertinent de demander à un entrepreneur comment il fera sa coulée de béton. L'employeur peut décider, parce qu'il y a un ensemble sur son chantier et qu'il voit son chantier, que la méthode la plus pratique pour faire sa coulée de béton serait à l'aide d'un petit véhicule motorisé avec une grue qui circulera et il montera son ciment de cette façon-là, avec des "buckets". Le jour où il doit le faire, il s'aperçoit que le moyen le plus pratique est l'utilisation d'une pompe à béton. Or, si on a obligé l'employeur à décrire son moyen d'exécution - c'est à titre d'exemple que je vous le donne, ce qu'on n'acceptera jamais d'ailleurs - et qu'au moment de l'exécution, ce moyen est un moyen différent utilisé, on a en définitive mal rempli notre programme de prévention, on n'a pas répondu. Je voudrais que vous preniez cela sous réserve, on m'a dit que certains ont même eu le front d'aller demander à des entrepreneurs de montrer leur soumission, de montrer les contrats qu'ils ont eus. C'est quand même aberrant, je ne vois pas ce que cela vient faire dans la santé et la sécurité. Si c'est pour savoir si l'entreprise est en santé ou pour voir si le contrat est sécuritaire, je ne sais trop, pour l'entrepreneur... Il y a des choses - vous allez voir, il y a une couple d'exemples qu'on vous a donnés - abusives. Nous, quand on pense à un programme de prévention, entre autres, c'est un programme où l'employeur doit dire quels sont les risques et comment il va faire pour les contrer, sans plus. Ils ne viennent pas nous dire comment on va faire de la construction, ils ne viennent pas nous dire quelle méthode on va utiliser pour faire de la construction. Ils n'ont pas d'affaire à savoir certaines affaires, cela ne les regarde pas.

M. Daoust: Je pourrais vous donner un exemple, peut-être personnel, une des choses qu'ils demandent...

Le Président (M. Blouin): M. Daoust, nous devons maintenant suspendre nos travaux. Nous reprendrons notre échange avec votre organisme à 15 h 15 et non à 15 heures puisqu'il y a une cérémonie au salon rouge. Donc, la commission suspend ses travaux jusqu'à 15 h 15.

(Suspension de la séance à 13 h 2)

(Reprise de la séance à 15 h 20)

Le Président (M. Blouin): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission élue permanente du travail reprend ses travaux. Au moment où nous nous sommes quittés, la parole était au député de Viau. M. le député.

M. Cusano: Merci. Vous avez mentionné dans votre mémoire que certains travailleurs refuseraient de porter l'équipement de sécurité nécessaire. Puis-je vous demander de votre côté, du côté patronal, quelles ont été les mesures incitatrices pour faire comprendre les dangers qui peuvent exister et la nécessité de porter une ceinture de sécurité, des bottines de sécurité, des casques ou autres choses? Avez-vous pris certaines mesures?

M. Daoust: Je vous disais ce matin que les patrons avaient, il y a quelques années, volontairement investi de l'argent dans un fonds pour faire de la prévention et de l'éducation en sécurité. Je crois que c'est quelque chose comme 1 500 000 $. Je vous cite ce chiffre de mémoire, c'est environ 1 500 000 $. On n'a pas demandé de subvention. On est très conscient du fait que la sécurité, ça paie, mais à la condition, naturellement, que l'employé soit conscient qu'il doit être sécuritaire, que c'est pour son bien-être. Contrairement à certains syndicats - je pense surtout au Syndicat des métallos, qui a reçu environ 1 300 000 $ de subvention et on se demande encore ce qu'il a fait avec - nous n'avons pas demandé d'argent, nous l'avons pris dans notre poche.

Je suis très heureux que vous ayez remarqué que, dans notre mémoire, on a justement fait le point. On est conscient de la sécurité, on est prêt à payer pour et il ne faudrait pas confondre nos commentaires de ce matin. Nous sommes conscients des coûts et nous sommes conscients aussi de l'administration des coûts; nous admettons qu'il faut dépenser de l'argent pour en faire. On a donné des cours de sécurité à tous les employeurs et travailleurs qui le demandaient, on les donnait gratuitement.

M. Cusano: Merci, c'était ma dernière question.

Le Président (M. Blouin): Merci, M. le député de Viau.

M. le député de Prévost.

M. Dean: Merci, M. le Président. Je sais que la subtilité et les nuances de langage ne sont pas nécessairement caractéristiques des gens de la construction, tant du côté syndical que du côté patronal. Si un éditorialiste a reproché à certains défenseurs des accidents du travail leur ton parfois agressif et leur vocabulaire peut-être radical, je constate également que le radicaliste de droite emploie parfois des paroles aussi dures que le radicaliste de gauche; un tend à donner raison à l'autre.

J'aurais à poser un certain nombre de questions à l'association. Ce que je trouve déplorable, c'est que, même s'il y a de réels problèmes à régler, je ne suis pas sûr que le ton de votre mémoire vous aide. À la page 5, vous faites référence, sans le dire expressément, au travail au noir dans l'industrie de la construction. Je voudrais savoir si votre association favorise le travail au noir et en fait la promotion.

Deuxièmement, vous faites une affirmation très gratuite, à mon avis, en vous référant, à la page 46, à des cours de santé et de sécurité syndicaux qui n'existent pas. J'aimerais bien que vous précisiez et que vous prouviez ce que vous alléguez, car je sais que des cours syndicaux en santé et en sécurité se donnent par centaines, par milliers et qu'il y a une comptabilité assez rigide des subventions qui viennent de la CSST.

J'essaie de comprendre ce qui est écrit à la page 47 où vous dites qu'au début de 1983 1700 entreprises ont déclaré, par écrit, être prêtes à ne pas payer leur cotisation. Vous ajoutez: "Ces entreprises avaient déclaré 27 000 000 d'heures travaillées, soit 31% du total et elles savaient ce qu'elles faisaient." Est-ce que je dois comprendre de cette remarque que vous favorisez, en plus, la fraude fiscale? Ce que je comprends de cette phrase, c'est que les employeurs ne déclarent pas les heures travaillées ni pour la CSST, ni peut-être pour autre chose. Comme on dit, les paroles s'envolent et les écrits restent. Je lis ce que vous avez écrit.

Finalement, votre association est-elle affiliée ou non au Conseil du patronat? Si oui, ètes-vous d'accord avec les politiques véhiculées en santé et sécurité par le Conseil du patronat? Sinon, allez-vous vous retirer du Conseil du patronat, de la même façon que vous êtes prêts à vous retirer de la Loi sur la santé et la sécurité du travail?

Dernière chose. Votre recommandation globale, au fond, c'est que vous voulez que la CSST soit abolie en faveur d'un régime privé d'assurance dirigé par les patrons. Je vous demande simplement si vous savez que, dans les neuf autres provinces canadiennes auxquelles vous vous comparez assez souvent, il n'existe aucun système semblable, que je sache. Dans toutes les provinces sans exception, il y a une régie gouvernementale quelconque, il y a un fonds d'accidents du travail qui est régi par l'État et où, d'une façon ou d'une autre, le monde patronal et syndical a son mot à dire. Je veux savoir si vous savez cela, parce que cela semble être le "punch" de votre mémoire.

M. Daoust: Si vous le permettez, M. le Président, on va peut-être se diviser...

Le Président (M. Blouin): M. Daoust,

oui.

M. Daoust: ...les questions, parce qu'il y en a plusieurs.

Le Président (M. Blouin): II y a quatre volets à la question.

M. Daoust: II y en a dont je suis plus au courant que mes confrères...

Le Président (M. Blouin): Très bien.

M. Daoust: ...mais, d'un autre côté, il y en a dont ils sont certainement plus au courant que moi.

À votre question à propos de la page 5 concernant le travail au noir, on a dit à maintes reprises dans les journaux et à la commission parlementaire qu'on était contre le travail au noir. On a, d'ailleurs, eu des rencontres avec le ministre pour le mettre au courant du phénomène que cela enlevait des impôts, cela coûtait de l'argent à tout le monde. On a même mis une clause dans le décret qui a été négociée avec le syndicat la dernière fois qui, à toutes fins utiles, éliminait la possibilité de faire du travail au noir. Le gouvernement a décidé de ne pas la retenir. Je pense que c'est la réponse à votre première question.

Je vais en sauter une concernant les cours de sécurité syndicale. On y répondra à la fin de ma riposte. En ce qui concerne les pages 46 et 47, où on dit que "1708 entreprises de construction nous ont déclaré par écrit être prêtes à ne pas payer leurs cotisations à la CSST", vous vous demandez si c'est de la fraude, si elles rapportent les heures, si elles ne les rapportent pas. Je croyais que c'était assez clair, mais je veux quand même l'expliciter davantage. Depuis plusieurs mois, plusieurs années, nos membres se plaignent du traitement qu'on reçoit à la CSST, du type d'administration, de la qualité de l'administration, des taux qui, d'après nous, sont injustes, enfin, un paquet de choses. Ils nous ont demandé de prendre des mesures - c'est logique - pour essayer de corriger la situation. Ils se sont aperçus que même avec toutes les représentations qu'on faisait, apparemment, les oreilles n'étaient pas aussi sympathiques qu'ils l'auraient espéré.

Ils ont fait beaucoup de pressions pour savoir quels gestes concrets nous allions poser. On leur a demandé ce qu'ils étaient prêts à faire pour gagner leur cause. On l'a demandé à tous les entrepreneurs. Il faut quand même comprendre qu'on ne peut pas obliger nos membres à répondre à un questionnaire, pas plus que le syndicat ne peut le faire avec les siens. Mais, parmi celles qui ont répondu - je crois que 1708 entreprises représentent quelque chose comme 96%; je ne suis pas sûr du chiffre, mais c'est plus de 90% - 1708 entreprises ont déclaré: Si on n'est pas capables d'avoir satisfaction, pourquoi paie-t-on? Peut-être qu'on devrait retenir nos cotisations à la CSST. Ce n'est pas qu'elles ne déclarent pas leurs heures, mais elles disent: Qu'est-ce que cela nous donne? On paie pour cela et il n'y a personne qui nous écoute.

Le point qu'on essayait de soulever, c'est que ces 1708 entreprises représentent 27 000 000 d'heures, 31% du total. Ce ne sont donc pas de petites compagnies. Je ne veux pas qu'on prenne mes mots et qu'on les revire à l'envers, mais ce ne sont pas des compagnies de broche à foin; ce sont des compagnies sérieuses qui ont pesé leurs paroles, leurs gestes et qui se posent de drôles de questions. Est-ce que, moralement, elles sont obligées de verser de l'argent dans un fonds alors qu'elles n'ont rien à dire sur son administration et qu'elles se font taper sur la tête constamment? C'est cela que le paragraphe voulait dire, c'est ce que je croyais que cela disait.

En ce qui concerne notre affiliation au Conseil du patronat, disons que nous sommes membres du Conseil du patronat. C'était et c'est encore une façon de se tenir au courant de certains dossiers. Est-ce que nous sommes d'accord avec ses positions en ce qui concerne la loi de la CSST? C'est bien apparent que, dans les grandes lignes, c'est oui. Nous aussi, nous sommes d'accord que la loi 17 devrait exister. Nous ne sommes simplement pas d'accord, comme lui, le conseil, ne l'est pas non plus, sur sa composition complète. Nous aimerions y voir certaines modifications, tout comme il le désire.

J'essaie de voir les dernières autres choses.

Le Président (M. Blouin): La CSST...

M. Daoust: Vous parlez des recommandations que nous faisons: pour éliminer le système et le remplacer par un système privé. Vous faites allusion aux neuf autres provinces. Il ne nous est jamais venu à l'esprit...

Le Président (M. Blouin): J'espère que vous allez répondre à toutes les questions.

M. Daoust: Oui, oui, il y en a seulement une pour laquelle je n'ai pas les chiffres.

Le Président (M. Blouin): Cela va.

M. Daoust: Dans la dernière question, si je me rappelle bien, on demandait de mettre le système dans les mains d'une entreprise privée. M. Dean nous faisait la comparaison avec les neuf autres provinces. Je vous ferai remarquer qu'il ne nous est jamais venu à

l'idée d'essayer d'aller chercher dans chaque province ce qu'il y avait de mieux ou ce qu'il y avait de pire et d'essayer d'en faire une sorte de chameau censé représenter un cheval ou quelque chose comme cela. Ce n'était pas notre idée. Indépendamment des gestes ou des actions qui sont posés dans d'autres provinces, nous avons fait une étude de ce qui d'après nous devrait être en vigueur ici et nous en venons à la conclusion que cela devrait être soit le système que nous avons tel quel, mais avec des modifications, un vrai paritarisme ou, à défaut de cela, l'entreprise privée.

Le Président (M. Blouin): Très bien.

M. Daoust: En ce qui concerne la dernière question, sur les cours de sécurité, je vais demander à mon confrère d'y répondre.

Le Président (M. Blouin): Pour ce qui est des cours de sécurité, c'était un commentaire du député de Prévost. Je ne pense pas qu'il y avait une question.

M. Dion: M. le Président, j'allais dire, en peu de mots - je pense que les syndicats se chargeraient de nous le dire et peut-être de vous le dire - que notre vocation, c'est de servir nos membres, c'est-à-dire les employeurs. Nous avons tout fait, nous avons mis en branle des cours de sécurité, nous avons donné des cours à 3000, 4000 ou 5000 employeurs. Ce n'était pas notre fonction de donner des cours aux travailleurs de la construction. Nous avons tout de même constaté que, du côté syndical, le mécanisme de mise en place pour offrir des cours a été très lent. Il a attendu le moment où des subventions ont été accordées. Je dois vous dire qu'il y a des employeurs qui se permettent régulièrement, par l'entremise de contremaîtres ou de leurs gérants de projets, de demander à leurs travailleurs d'utiliser les équipements et les méthodes de sécurité. C'est courant.

Le Président (M. Blouin): Cela va. Merci, M. Dion. Cela va, M. le député de Prévost?

M. Dean: Sauf que je voudrais faire un commentaire et dire que cela n'aide pas la cause de l'association de faire des affirmations qui ne sont carrément pas vraies.

Le Président (M. Blouin): M. Dion.

M. Dion: M. le Président, je ne pense pas que M. Dean ait fait la démonstration qu'on a dit des choses qui n'étaient pas exactes. Quand il me dit: Est-ce que vous allez rester dans le Conseil du patronat...

Le Président (M. Blouin): M. Dion, il s'agit d'une expression d'opinion. Nous connaissons la vôtre, nous connaissons celle du député de Prévost et je ne voudrais pas qu'on entame un débat sur cela.

M. Dion: Je m'excuse d'avoir parlé en même temps que vous. Le son n'est pas tellement fort et on a de la misère à vous entendre.

Le Président (M. Blouin): D'accord. M. le député de Sainte-Anne.

M. Polak: Merci, M. le Président. D'abord, j'ai une question d'ordre général. Je suis ici depuis le début de cette commission. J'essaie vraiment d'être objectif dans cela. Nous avons entendu les mémoires des travailleurs ou des représentants des travailleurs qui ont parlé, par exemple, de l'examen médical, des délais énormes, de l'administration, de la paperasse, etc. Ce sont vraiment des exemples où il est impossible d'inventer. Il y en a trop. Il y a en avec des statistiques, avec des noms, avec des dossiers, avec des numéros. Cela m'a vraiment touché et cela m'a frappé. Ce n'est pas seulement une association, c'est une fédération qui en représente huit ou neuf. Il y en a plusieurs qui sont venues et on retrouvait un peu le même thème. Évidemment, la conclusion n'est pas seulement qu'on critiquait le fonctionnement de la CSST, mais presque le système, la manière dont cela marche.

J'ai écouté votre mémoire ce matin. J'ai noté qu'il y a au moins une chose que vous partagez avec les travailleurs, c'est que vous vous plaignez aussi des délais. Cela semble être un élément auquel vous souscrivez, à savoir que les délais nuisent à tout le monde. Pourriez-vous me donner un rapide commentaire sur ce que les accidentés ont dit? Je comprends que ces gens luttent pour leur affaire, tout comme vous travaillez pour votre affaire. Quel est votre commentaire là-dessus? Moi, je trouve cela scandaleux, la manière dont cela fonctionne apparemment.

Le Président (M. Blouin): En somme, vous nous demandez un commentaire sur les délais à la CSST.

M. Polak: Je demande un commentaire sur ce qui a été dit depuis deux jours par différents représentants des travailleurs et des travailleuses. Peut-être diront-ils que c'est exagéré ou que ce n'est pas vrai ou encore peut-être le confirmeront-ils. C'est le commentaire que je demande.

Le Président (M. Blouin): Si les délais sont trop longs, d'accord. M. Dion.

M. Dion: Je pense que vous venez de faire le point. Je pense qu'il ne nous appartient pas de faire des commentaires sur les gens qui se sont présentés devant la commission. Par contre, je vous souligne que, dans notre mémoire, on a, à certains endroits dans nos annexes, fait état des nombreux délais, spécialement les délais lors des auditions. Ce que vous dites est véridique, M. le député. Pour la partie patronale, les délais - je ne veux pas parler pour la partie syndicale - sont extrêmement onéreux. Quand cela prend au-dessus de six mois - on ne ménage pas nos mots en disant cela et je dois vous dire qu'on est modérés -pour avoir une décision et que les paiements s'exécutent durant cette période, je dois vous dire qu'il y a des sommes énormes impliquées dans les cas de règlements d'indemnités et toutes ces choses-là. Mais c'est encore pis quand il s'agit de l'arrêt d'un chantier, par exemple, pour une raison décelée par un inspecteur et que, effectivement, il peut s'avérer ensuite que c'est une erreur de jugement de la part de l'inspecteur. On cite quelques cas; évidemment, on n'a pas fait un catalogue des cas là-dedans. On ne voulait pas que le document soit comme une espèce d'index de tous les embêtements qu'on a eus, mais on en a souligné quelques-uns. Par exemple, quand un bonhomme décide, seulement à l'oeil comme cela, que l'échafaudage mesure 18 mètres, que cela prend un plan, qu'il arrête le chantier pendant deux ou trois jours et que l'employeur aussi est arrêté dans ses travaux, cela coûte de l'argent à l'industrie de la construction. Par les temps qui courent, je ne pense pas qu'il y ait beaucoup d'entrepreneurs qui aient bien du "loose" sur les soumissions pour y arriver. Ce sont des sommes énormes que l'industrie paie dans ces cas-là.

Le Président (M. Blouin): Cela va. Merci.

M. Polak: D'accord. Aux pages 9 et 10 de votre mémoire, vous parlez d'un monstre bureaucratique, vous parlez d'un cirque, des recherchistes, statisticiens, professionnels. Enfin, vous donnez vraiment une description d'un paradis de la paperasse avec tous ces fonctionnaires de la CSST. On a entendu parler souvent de cela. Quand vous parlez avec les travailleurs de la construction, trouvent-ils en général que cela va mieux maintenant qu'auparavant quand on avait, disons, quatre ou d'autres organismes impliqués dans votre industrie? Est-ce que cela va mieux? Est-ce qu'il y a un meilleur résultat au point de vue de la prévention? Est-ce qu'il y a moins d'accidents graves? On peut être prêt à payer un certain prix pour les frais administratifs, si on sait qu'il y a des résultats. Est-ce que les résultats sont moins bons ou aussi mauvais qu'auparavant? Est-ce que c'est seulement un alourdissement de l'appareil?

M. Daoust: D'après mon expérience personnelle, je peux vous répondre qu'à un programme de télévision qui s'appelle Droit de parole, environ 90% des syndiqués qui ont pris la parole ont exprimé...

Le Président (M. Blouin): M. Daoust, je voulais justement rectifier un peu le tir. Je demanderais au député de Sainte-Anne de ne pas vous demander des avis sur ce que les autres peuvent penser, mais bien de donner votre avis à vous là-dessus.

M. Polak: M. le Président...

Le Président (M. Blouin): Oui, M. le député de Sainte-Anne.

M. Polak: ...question de règlement. Nous sommes ici pour un débat ouvert.

Le Président (M. Blouin): Oui.

M. Polak: II ne faut pas être stériles. On a un groupe qui donne son point de vue et un autre le sien. Je voudrais seulement mettre les deux ensemble. Il y a peut-être une connexion à faire. Pourquoi ne pourrait-il pas faire de commentaire sur le mémoire des autres, par exemple, comme les autres vont le faire sur son mémoire? Le député de Prévost vient de les accuser d'être des gens de droite, etc. Moi, je voudrais vraiment en toute objectivité...

Le Président (M. Blouin): Cela n'a aucun rapport, M. le député de Sainte-Anne. Vous savez très bien que nous avons commencé à entendre l'Association des entrepreneurs en construction du Québec et que ces gens ont eu une période de temps généreuse pour s'exprimer. Maintenant, il est normal que nous devions resserrer un peu la procédure pour que nous puissions ensuite entendre l'autre organisme qui est prévu. C'est dans cette perspective que je vous demande de leur adresser des questions qui les concernent directement et non pas de commencer à leur demander des avis sur d'autres groupes qui, d'autre part, se sont fait entendre à notre commission, pour la plupart d'entre eux, parce qu'on ne s'en sortira pas.

M. Polak: M. le Président, vous êtes le "boss", mais je vous dirai que c'est une drôle de manière d'essayer de trouver un consensus. À tout événement, je vais sauter cela et je vais aller à la page 11 où on parle de la progression des revenus. Vous avez indiqué qu'en 1979 les revenus de la CSST étaient de 579 000 000 $, et c'est

rendu maintenant à 1 000 000 000 $. Je pourrais vous dire: Mais oui, c'est évident parce qu'il y a le facteur de l'inflation; le gars qui gagnait, en 1979, 1000 $ gagnait, en 1983, peut-être 1500 $, je ne sais pas. Avez-vous comparé cette augmentation énorme de 182% avec le taux de l'inflation?

Le Président (M. Blouin): M. Dion.

M. Dion: Écoutez, je ne veux pas que cela devienne une guerre de chiffres. La projection qu'on fait là, qui démontre une augmentation de 182%, c'est évident qu'elle est énorme et que nous, on la considère énorme. C'est évident qu'il y a une partie de cela qui est implicable à des taux d'inflation. On va nous dire que les médecins coûtent plus cher que les hôpitaux coûtent plus cher, mais nous on va aussi vous dire qu'il n'y a moins d'accidents qu'il y en avait. On l'a démontré. On a un tableau qui le démontre. Il y a moins d'accidents. Si on a mis une machine en place qui est supposée être plus efficace, ou qui devrait en théorie l'être, il me semble qu'on devrait avoir des résultats meilleurs que 182% d'augmentation. Il faut vous dire qu'il y avait 1500 employés, il n'y a pas tellement longtemps, à la CAT ou au début de la CSST. Aujourd'hui, on se retrouve avec 2800 personnes. On peut se poser des questions. Est-ce que tout cela est nécessaire, à l'heure actuelle, pour y arriver?

Ils vont nous dire qu'ils font des programmes de prévention. C'est évident qu'il se fait des programmes de prévention. Il y a l'exemple d'ici et il y a l'exemple d'ailleurs. On regarde la nôtre aller et on regarde les autres aller et on vous dit que nos cotisations sont montées de tout près de 600%, alors que dans d'autres endroits les cotisations ont à peine monté de quelque 300%. On se pose des questions sur le système, sur la façon d'administrer. Soit dit en passant, on peut avoir l'air, avec nos arguments et la façon de les défendre, des gens de droite. Je peux vous dire qu'on ne s'excusera pas d'avoir l'air des gens de droite, au contraire.

À toutes fins utiles, on s'est rendu compte que nous, on n'est pas contents de payer ce montant. On considère que c'est trop payer. On doit dire que vous vous êtes rendu compte - et on peut s'en rendre compte, nous aussi, sur nos chantiers - que ceux qui en bénéficient ou qui devraient en bénéficier ne semblent pas être contents, non plus. À un bout, on n'est pas content et, à l'autre bout, on n'est pas content. Il se passe quelque chose entre les deux.

Le Président (M. Blouin): Cela va.

M. Polak: À la page 16 de votre mémoire, vous parlez de tarification. Est-ce que j'ai bien compris que vous trouvez que, dans votre secteur de la construction, la tarification n'a pas été établie d'une manière objective? Aurait-elle dû être établie sur une autre base? Quelle est cette autre base? Au point de vue de la tarification, je ne m'y connais pas beaucoup. Est-ce qu'on n'a pas pris l'industrie de la construction comme une unité, évidemment avec des subdivisions, des sous-classes? Comment cela fonctionne-t-il? Si vous aviez le droit de dire à M. Sauvé, à la CSST de faire un changement, qu'est-ce que vous lui suggéreriez de faire au point de vue de la tarification dans votre secteur?

M. Dion: On pourrait le faire de deux façons, M. le Président. Je peux demander à M. Girard d'aller dans les détails pour l'expliquer. On a fait faire une étude. D'ailleurs, là-dessus on a engagé des gens parce que cela nous paraissait aberrant, le taux où on en était rendu. On peut, très superficiellement, vous expliquer ceci. Vous arrivez à un taux moyen à la CSST que je dirais, fictivement, de 3 $. Dans ce taux moyen, il y a un montant qui est pour des frais de chargement, des frais généraux que j'appellerai en langage vulgaire, pour moi, des frais d'administration. Si le taux moyen de l'industrie de la construction est 9 $, ces frais de chargement, dans le taux de 9 $, sont trois fois. Autrement dit, c'est trois fois 3 $. Je vous le donne peut-être d'une façon très simpliste et je sens qu'il y aurait peut-être des gens qui voudraient me dire, à la CSST, que c'est très simpliste, l'explication.

Effectivement, dans un taux de base de 3 $, il y a des frais de chargement. Si je paie dans l'industrie de la construction trois fois le taux de base, je paie trois fois les frais de chargement. C'est grossi, mais c'est cela. Cela donne à peu près cela. Si vous voulez plus de détails, M. Girard peut vous en parler pendant une autre demi-heure.

M. Polak: Non. Je comprends la critique, mais disons que, si vous aviez le droit de dire: On suggère une autre formule ou une approche différente pour notre industrie de la construction, qu'est-ce que vous suggéreriez? (15 h 45)

M. Dion: Encore là, c'est très complexe. Évidemment, il y a d'autres façons de faire le calcul, il y a d'autres façons de le faire que celle dont ils se servent, eux. Je vous le dis comme ça; cela ne donne pas plus de détails. Au lieu de nous servir du coût, nous nous servons de la masse salariale. Ceux qui ont fait cette étude ont aussi fait des projections. C'est cela qui nous a frustrés. Si vous me le permettez, M. le Président, je prendrai peut-être une minute là-dessus.

Les gens que nous avons engagés pour cela sont des experts, des connaisseurs, ils

ont, d'ailleurs, fait ce genre d'études pour d'autres provinces. Ce n'est pas une cachette, ils sont connus des gens de la CSST, ceux qui ont travaillé pour nous. On s'est assis avec les gens de la CSST et on leur a dit: On a fait un projet et on voudrait faire une simulation pour la construction. On espérait, à ce moment-là, pouvoir obtenir de la CSST une espèce de coopération pour arriver à faire quelque chose. Finalement, on n'est arrivé nulle part. Cela peut n'être que des graines, mais, au moins, on aurait eu une certaine satisfaction s'il y avait eu une simulation de notre projection ou de la philosophie qu'on présentait. Ce n'était pas une affaire inventée ou pigée en l'air; cela s'était vu ailleurs, cela pouvait se faire ailleurs. C'était quelque chose qui était vendu par des actuaires; ce n'étaient pas des inventions d'avocats, de droitistes ou de gauchistes, si vous voulez. À toutes fins utiles, il n'y a pas eu d'expérience de faite, ils n'ont pas voulu la faire. Je pense qu'il aurait été honnête de la faire.

Par contre, il y a une conséquence à tout cela: si, demain matin, moi, du secteur de la construction, je réussissais à établir que mes taux sont trop élevés et qu'ils devraient être réduits, il est évident qu'il faudrait que la charge soit répartie ailleurs. Là, j'aurais peut-être un paquet de monde, même du côté patronal, qui vont me dire: Écoutez, vous autres de la construction, vous vous déchargez pour nous charger. C'est sûr.

M. Dean nous a demandé comment on se sentait dans le Conseil du patronat; je pourrais lui retourner la question et lui demander comment il se sent dans la confédération. On se sent comme on se senti On n'est pas toujours d'accord avec tout, mais on essaie de travailler quand même. C'est un peu la même chose. On sait que, si on fait un ajustement, on va peut-être gagner quelque chose, mais il se peut que cela touche les autres, tout simplement.

M. Polak: D'accord, une dernière question, M. le Président. À la page 25, vous avez un tableau. Je pense que le député de Prévost y a référé un peu. En conclusion, on peut voir qu'à Québec on paie le double du niveau national; je viens de le calculer et c'est presque le double de l'Ontario. C'est toujours difficile de comparer le Québec et l'Ontario, mais est-ce qu'on peut dire qu'à Québec on donne le double en bénéfices? Sans connaître exactement le système ontarien, je voudrais savoir quels sont les bénéfices qui sont payés là, le système qui existe là-bas du côté prévention, inspection et tout le reste. Comment cela peut-il se comparer avec le Québec? On paie le double. Je n'aurais peut-être pas d'objection à payer le double si je recevais le double des bénéfices, mais si les bénéfices sont presque les mêmes, il y a peut-être un autre problème dans la forteresse administrative. Pourriez-vous faire un commentaire là-dessus?

M. Dion: Je ne voudrais pas aller dans les détails et faire, point par point, la comparaison entre les régimes de l'Ontario et du Québec. Je dois quand même vous dire que notre statistique a été généreuse parce qu'en faisant la moyenne on a additionné le Québec. Si on avait exclu le Québec, l'écart aurait été plus grand. Effectivement, au Québec, nous avons un système qui est très généreux; l'Ontario, comparativement au Québec, a un système aussi généreux. Les deux systèmes peuvent avantageusement se comparer.

M. Polak: Merci.

Le Président (M. Blouin): Merci beaucoup. Merci, M. le député de Sainte-Anne. Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: Merci, M. le Président. Vous concluez votre mémoire, en disant: "Le remède peut paraître d'importance, mais il n'est qu'à la dimension du mal qu'il faut guérir." Cela m'a fait penser un peu à un médecin qui, parce que son patient était malade et qu'il ne réussissait pas à le soigner, se décidait, en désespoir de cause, à le tuer. Cela, au sens où vos recommandations ne portent pas sur des griefs fondés sur le fonctionnement de la CSST, mais sur son existence elle-même.

Je voulais vous demander, M. Dion, si j'ai bien compris en résumant comme ceci: Vous avez dit: On est prêt à s'asseoir, mais j'ai cru comprendre que vous étiez prêt à vous asseoir avec vos vis-à-vis syndicaux du milieu de la construction après avoir établi vous-mêmes le niveau d'indemnisation et votre niveau de cotisation. Vous avez fait allusion au fait que la construction est un monde bien particulier, avec des règles du jeu bien particulières, j'imagine.

Je voulais vous demander si vous ne pensiez pas que, tôt ou tard, vous vous relèveriez pour vous traverser mutuellement parce qu'il y a quelqu'un qui, tôt ou tard, va essayer d'augmenter le niveau d'indemnisation et la conclusion est que, s'ils réussissent à nous traverser, à ce moment, tant pis pour nous et tant mieux pour eux; ou bien c'est le contraire et on va les traverser. Je me demandais si c'était cela le monde particulier, si c'était cela les règles particulières, si c'était cela les rapports de force dans votre secteur.

Vous savez, on peut simplifier bien des choses en disant: D'un côté, il y en a qui veulent des hausses d'indemnisation et, d'un autre côté, il y en a qui veulent des baisses de cotisation. Cela me semble un peu

simplifier les choses, évidemment, mais, dans la mesure, par exemple, où vous nous dites: Nous aussi, nous voulons diminuer nos cotisations en diminuant les accidents, c'est une manière d'y arriver. Vous pouvez aussi demander à vos propres membres de choisir -parce qu'il y aura un choix à faire, cela se pose toujours dans la vie réelle en termes de choix - entre augmenter la productivité, le rendement ou la cadence au risque même d'augmenter la fréquence des accidents. Mais entre baisser la cotisation ou augmenter la productivité, vous pouvez comprendre qu'on peut penser raisonnablement que les choix ne sont pas dans l'absolu et qu'il y a, là aussi, des intérêts en cause.

Pour ceux qui veulent hausser les indemnités ou, en fait, même couvrir un champ plus vaste que ce qui est couvert en termes d'indemnisation - c'est là qu'il y a, je pense, un préjugé favorable - on peut penser qu'entre être indemnisé et ne pas être blessé, ne pas être tué, la plupart choisiraient de ne pas perdre un oeil, une jambe, un bras ou un genou. C'est là que vient le préjugé favorable à ceux qui sont susceptibles d'être victimes de ces accidents.

Le Président (M. Blouin): Mme la députée de Maisonneuve, est-ce qu'il y avait des questions précises?

Mme Harel: Bien, vous allez voir, je pense que M. Dion va me répondre.

M. Dion: On en a compris une couple.

Le Président (M. Blouin): Oui, je sais que M. Dion peut nous répondre, mais ce n'est pas cela qui me préoccupe. Si vous avez de brefs commentaires à l'exposé de Mme la députée, d'accord.

M. Dion: Je pense que votre problème, c'est mes longueurs. Ce n'est pas le fait que je ne répond pas. J'ai compris Mme Harel. Je pense qu'on se comprend bien. Je vais essayer de répondre sans prendre tous les points dans l'ordre. D'abord, je vous ferai un premier commentaire. Quant à nous, il n'y a pas de contradiction entre productivité et sécurité. Il n'y a aucune contradiction là. Je pense que les deux vont exactement de pair. Nous travaillons afin de faire comprendre à l'employeur qu'il va obtenir une plus grande productivité en promouvant la sécurité. C'est un fait indéniable. Un petit détail bien facile. Prenez deux chambres exactement pareilles, placez des deux par quatre partout à terre dans une pièce et videz complètement l'autre chambre. Faites-y travailler deux peintres de même capacité. Vous allez vous apercevoir que celui qui n'a rien qui l'embarrasse, s'il ne court aucun danger de s'accrocher les pieds dans quelque chose, va finir sa chambre avant l'autre.

C'est clair et net parce qu'il va pouvoir travailler d'une façon sécuritaire et produire davantage. Donc, si sa position est sécuritaire, sa production sera nettement rentable pour l'employeur. Donc, l'employeur est d'accord sur la santé et sur la sécurité parce que cela accroît la productivité. Il n'y a là aucun problème.

Vous dites - je ne les prends pas dans l'ordre - blessés et indemnisés. C'est évident qu'on est pas nonos au point de penser qu'un gars s'arrache un bras pour recourir à la CSST. C'est sûr et certain. On conçoit bien cela. D'ailleurs, ce n'est pas de ces cas qu'on parle; on parle peut-être des 37% de maux de dos. Vous savez, un doigt arraché, c'est un doigt arraché. C'est malheureux, cela fait mal. Une personne morte, c'est une personne morte; c'est malheureux et il n'y a pas un employeur qui tue son monde seulement pour le plaisir de le tuer. Or quelqu'un qui est réellement blessé, il est évident que c'est un problème. Je pense que personne ne le fait exprès pour se blesser. J'espère, du moins, que nous n'en sommes pas rendus là dans la paresse afin de ne pas vouloir travailler. Cela n'existe pas. Nous n'en connaissons pas et nous ne le prétendons pas.

On parle de ce qui n'est pas la vraie blessure, de la fausse blessure. Ce sont les choses qui nous apparaissent comme un abus du système; un système qui fait que, à toutes fins utiles, une personne blessée, même réellement blessée, peut aussi profiter du système. Au lieu de prendre quinze jours pour régler le problème, elle peut, s'il y a avantage, rester sur le système pendant deux mois. Ce sont les abus que peut donner le système. Même dans le cas d'une réelle situation, il peut y avoir un abus du système parce que le système est rentable.

M. Daoust vous disait ce matin: C'est favorable, au point de vue des gains, de recevoir des prestations de la CSST. On a donné l'exemple du bonhomme qui fait 900 heures par année. Mais si on vous donnait l'exemple de quelqu'un qui n'en fait que 500, vous verriez qu'à toutes fins utiles, avec le système, il peut peut-être aller se chercher 4000 $, 5000 $, 7000 $ ou 8000 $ par année. Il a - peut-être été vraiment blessé, mais il peut tirer des bénéfices du système.

Vous avez parlé de s'asseoir. Je pense que vous vouliez savoir, au fond, si on veut réellement s'asseoir et travailler dans le système, si on est réellement prêts à travailler dans le système, à faire l'échange pour faire marcher le système. Bien sûr qu'on est prêts à s'asseoir et à essayer de faire marcher le système de la CSST. De toute façon, je pense qu'on l'a démontré. Chez nous, on investit de l'argent pour faire de la sécurité. Chez nous, on n'a jamais dit à nos employeurs: II faut que vous soyez contre la CSST. Il faut que vous fassiez ceci

et il faut que vous fassiez cela. Ce n'est pas ce qu'on a dit. On est d'accord avec un système raisonnable. C'est ce qu'on a dit et on pense qu'il y a des choses, actuellement, qui ne sont pas raisonnables.

Notre mémoire vous surprend. Je sais qu'il vous surprend, le mémoire. L'industrie de la construction est peut-être celle qui va le plus vous surprendre si vous regardez comme il faut les chiffres. C'est évident. Regardez les autres industries. Si on avait un taux, je ne sais pas, de 2,25 $ l'heure dans l'industrie de la construction, on ne japperait pas. On ne crierait pas, on ne ferait pas, de scènes aussi fortes que cela, on se dirait: Peut-être que le système ne va pas trop mal, etc. Mais on n'est pas à des taux de 2,25 $ et, dans la construction, ce ne sont pas des crayons qu'on manipule. On manipule des outils. Les gens se parlent comme ils se parlent sur les chantiers de construction et ils se "garrochent" des briques quand ils ont quelque chose à se "garrocher". Ce ne sont pas des crayons qu'ils ont dans les mains. Quand ils échappent quelque chose, c'est une brique qu'ils échappent. C'est un outil qu'ils échappent. Ce n'est pas une gomme à effacer qu'ils vont échapper. Les accidents dans la construction, c'est plus dangereux. Je ne dis pas qu'il est naturel d'avoir des accidents dans la construction. C'est dommageable. Ce n'est pas naturel, mais maudit, on est dans une industrie qui est faite ainsi. Cela nous coûte cher et nous disons: C'est peut-être normal qu'on soit là. On a demandé au ministre d'être présent à la CSST. Il nous a dit qu'on serait là. Je peux vous dire que déjà, si cela avait été le cas avant la commission, notre conclusion aurait été différente. On aurait dit: M. le ministre, on est content d'aller s'asseoir là et on est prêt à faire l'essai du système pendant un an, deux ans ou six mois et on va se battre dedans. Peut-être qu'on aurait dit quelque chose de différent dans notre conclusion.

Le Président (M. Blouin): D'accord. Cela va, M. Dion?

M. Dion: Ah! Arrêtez-moi.

Le Président (M. Blouin): Cela va, Mme la députée de Maisonneuve?

M. Dion: Je n'ai pas tout couvert. Je sais qu'il y en avait une autre.

Mme Harel: Cela fait plusieurs années que cela se poursuit, finalement, cette discussion. On a, d'une certaine façon, un certain malaise. On se dit devant cette commission depuis le début: S'il y a bien des choses qui ont changé au Québec, on peut être rassuré; il y a des choses qui ne le sont pas et c'est l'attitude des uns et des autres. Mais en tout cas! Cela va, M. le Président.

Le Président (M. Blouin): Merci. M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Merci, M. le Président. J'aurai un bref commentaire, une question générale et quelques questions précises en souhaitant qu'on puisse le faire dans les meilleurs délais. Messieurs de l'AECQ, vous nous avez présenté votre mémoire et on constate que vous n'y êtes pas allés avec le dos de la cuillère. Vous y êtes allés avec la cuillère, la cuillère à soupe, probablement, et la pelle. C'est probablement ce pourquoi vous êtes le seul groupe à qui le ministre n'a pas dit au début que vos remarques étaient pertinentes. Je suis bien heureux de vous rencontrer aujourd'hui, parce qu'on sait que le secteur de la construction est important au Québec. On sait que vous avez fait l'objet de commentaires. Le secteur de la construction, en général, a fait l'objet d'inquiétudes et de critiques en regard des accidents de travail qui s'y produisent.

Il faut convenir qu'après quelques jours d'échange dans le cadre du mandat de notre commission la loi 17 a créé une certaine ambiguïté. Je m'explique et j'aimerais avoir vos commentaires, M. Dion ou M. Daoust -ou vos autres représentants - sur le sujet. L'objectif de la loi 17 était de procéder par l'implantation de systèmes paritaires à différents niveaux jusqu'au conseil d'administration pour tenter de dégager des moyens, des systèmes ou des méthodes pour éliminer à la source les risques d'accidents. Le conseil d'administration, vous y avez fait allusion, on l'a entendu hier. Devons-nous conclure qu'il y a une certaine ambiguïté à l'égard de l'appartenance ou du rôle joué par chacune des personnes présentes à ce conseil? Compte tenu que c'est assez surprenant de voir des travailleurs et des travailleuses qui viennent ici nous faire part d'inquiétudes, de récriminations et de demandes bien précises, c'est à se demander si ces travailleurs et ces travailleuses ne se retrouvent pas dans les gens qui sont supposés les représenter au conseil d'administration. (16 heures)

On peut se poser la même question en voyant votre association, qui est une association patronale du monde de la construction, apporter des commentaires, des propositions, des commentaires très durs, très sévères - je pourrai y revenir plus spécifiquement tantôt - sur un organisme qui est administré par un conseil d'administration paritaire où des partenaires du monde patronal siègent. Abstraction faite du problème que vous avez vécu avec le non-renouvellement du mandat de M. Murray, devons-nous comprendre de la position que vous adoptez et aussi des situations qu'on a vécues assez éloquemment hier entre deux personnes qui ont consacré leur vie au monde

syndical que ce ne sont pas tous les groupes qui se retrouvent dans la représentation existant au conseil d'administration?

M. Daoust: Vous faites référence à nos partenaires patronaux au conseil d'administration, vous parlez certainement du CPQ. On a aussi dit tantôt qu'on est membre du Conseil du patronat du Québec; on n'est pas les seuls membres, c'est bien évident. Toutes les industries sont membres à certains niveaux du Conseil du patronat du Québec. On n'a sûrement pas tous les mêmes objectifs ou les mêmes demandes. Ce n'est certainement pas une critique que je fais ici du Conseil du patronat du Québec; c'est une position logique. S'il représente plusieurs parties - on va simplement parler du taux de cotisation - qu'il y a des parties qui payent peut-être 0,50% ou 0,75% et nous qui payons 0,25%, c'est difficile - je le comprends -pour le Conseil du patronat de présenter une politique au conseil d'administration qui favoriserait une redistribution des taux ou un nouveau calcul. Pour nous faire plaisir, il pénaliserait la majorité des autres membres. Comme je vous l'ai dit, ce n'est pas une critique contre le CPQ, je le comprends et je ferais la même chose, c'est logique il représente tout le monde. Mais, à ce moment-là, on ne considère pas que c'est une représentation par un partenaire. On est membre de cette association au même titre qu'un autre membre.

Le Président (M. Blouin): M. Dion.

M. Dion: II faut, quand même, reconnaître que sur les points majeurs - on a soulevé certains points majeurs, par exemple, l'association sectorielle, le comité de santé et de sécurité; on a parlé généralement des coûts de la CSST donc, des budgets - le Conseil du patronat - je ne veux pas faire allusion et répéter les paroles de M. Dufour - s'est effectivement prononcé à l'occasion et très régulièrement contre les choses qui se faisaient au niveau de la CSST. En tant que membre du conseil d'administration, la délégation patronale, à notre connaissance, n'a pas toujours tout adopté et accepté au conseil d'administration de la CSST. Il y a plusieurs des points sur lesquels on n'est pas d'accord, par exemple, notre association sectorielle. Je sais que la délégation patronale a la même position que nous et elle nous a appuyés. Sur la question du budget qui a été discutée hier, les 48 000 000 $, on est loin d'avoir des divergences de vues. Sur la question des comités de santé et de sécurité, on est loin d'avoir des divergences de vues, loin de là. Si vous me soulevez le point de la tarification, il y a peut-être celui-là, mais cela ne veut pas nécessairement dire qu'on est en conflit avec le Conseil du patronat en ce qui a trait à la tarification. On a une vision différente ou qui est peut-être la même que celle du Conseil du patronat, mais on sait que cela aura des conséquences.

Le Président (M. Blouin): Merci. M. le député de Portneuf.

M. Pagé: J'ai des questions précises dont la première s'adresse à M. Daoust. Vous avez formulé ce matin - c'est, d'ailleurs, rédigé dans votre mémoire - des accusations qui sont graves à l'endroit de la personne du président-directeur général de la Commission de la santé et de la sécurité du travail. On sait qu'il a des responsabilités importantes. On sait qu'il a un pouvoir certain, qui est même visible. Je vais citer vos paroles parce que vous avez dit et je l'ai bien noté: "M. Sauvé n'est pas apte à remplir les fonctions qu'il occupe." Dans votre document à la page 31, vous dites: "Le tout est dirigé par un homme qui n'a aucune gêne à démontrer son attitude arrogante et antipatronale."

Le terme qui m'a surpris c'est "arrogant" parce qu'à moins que je ne me trompe, lorsqu'on a à juger ou à apprécier si une personne est arrogante, on s'appuie sur des attitudes; l'arrogance se manifeste par des attitudes, lesquelles s'appuient sur des faits. Le but de la commission n'est, évidemment, pas de faire le procès de quiconque. Il va de soi qu'on ne peut demeurer indifférent à une expression d'opinion par un groupe comme le vôtre qui porte autant à conséquence pour une personne qui joue un rôle de premier plan, finalement, dans la commission. Sur quoi, sur quels faits précis vous appuyez-vous pour en arriver à porter un jugement aussi sévère à l'égard du président?

Le Président (M. Blouin): M. Daoust.

M. Daoust: À maintes reprises, par différents comités qui existent ou qu'on a tenté de former, on a demandé certaines informations de différentes natures. Bien souvent, on ne nous a même pas répondu ou bien on a refusé de nous donner les informations en prétendant que ce n'était pas notre droit, qu'on n'avait pas d'affaire à savoir cela. C'est nous qui payons; j'appelle cela de l'arrogance. Quand je paie la note, j'ai le droit de poser des questions; il me semble que c'est logique. Si vous allez au restaurant, vous commandez un repas, cela vous coûte 10 $, quand le garçon vous apporte votre repas, si vous n'êtes pas content, vous posez des questions ou vous faites des remarques.

Le Président (M. Blouin): C'est principalement sur le refus de vous fournir des informations.

M. Daoust: II y a parfois des refus catégoriques, parfois des lenteurs lamentables dans les délais.

Le Président (M. Blouin): Cela va.

M. Pagé: Si je comprends bien, c'est à partir d'expériences vécues, des contacts que votre association ou vous-même avez avec le directeur que vous en venez à une telle conclusion.

M. Daoust: De la correspondance, enfin, tout cela.

M. Pagé: D'accord.

M. Daoust: Vous me demandez des faits concrets, je ne peux pas vous sortir une lettre de ma poche. Je ne suis pas venu ici pour faire le procès de M. Sauvé non plus, mais on en vient à une conclusion parce qu'on est exposés à certaines choses.

Le Président (M. Blouin): Cela va.

M. Pagé: À la page 20 de votre document, vous vous référez au nombre d'heures travaillées, vous vous référez au taux d'accidents, etc. On sait que ce soir et demain soir, probablement jusqu'à minuit, M. Sauvé aura l'occasion de répondre à nos questions, comme il a eu, d'ailleurs, l'occasion de répondre à certaines questions, tant lors de l'étude des crédits du ministère du Travail que lors d'une question avec débat qu'on a soulevée ici à la fin du mois de mai dernier. On se rappellera que le président-directeur général nous avait indiqué que, à preuve que les mandats exercés par la Commission de la santé et de la sécurité du travail et que la réforme engendrée par la loi 17 commençaient à porter fruit, il suffisait de regarder une diminution du nombre d'accidentés dans le monde de la construction. Cela a été un élément qu'il a apporté dans un échange qu'on a eu ici déjà.

Pour ceux qui nous écoutent, pour ceux qui nous liront dans le journal des Débats, pourriez-vous faire une rétrospective des chiffres qui sont éloquents et qui peuvent expliquer largement la diminution du nombre d'accidents dans le domaine de la construction? Cela est, évidemment, relié à la diminution du nombre d'heures effectivement travaillées au Québec. On se rappellera qu'il y a quelques années seulement c'était 110 000 000 ou 112 000 000 d'heures, si ma mémoire est fidèle. Cela sera ou cela a été 72 000 000 ou 75 000 000 l'année dernière et, d'ailleurs, c'est probablement ce qui explique le règlement de placement dans l'industrie de la construction adopté par le gouvernement, par un arrêté en conseil, à la suite d'une proposition de l'OCQ, en 1978. C'est probablement ce qui explique aussi des modifications éventuelles qui seront apportées.

En fouillant dans le rapport annuel de l'OCQ, en communiquant avec vous ou encore en communiquant avec les syndicats, on peut le savoir, mais je voudrais que vous puissiez bien clairement le confirmer devant cette commission-ci. Je vais, évidemment, par incidence, vous poser la question: Est-ce que vous voyez une relation entre la diminution du nombre d'accidents et la diminution du nombre d'heures effectivement travaillées?

Le Président (M. Blouin): M. Dion.

M. Dion: Cela peut être compliqué comme réponse. D'abord, je dois vous dire honnêtement - on l'a mentionné dans notre mémoire - qu'il est sûr et certain qu'on travaille avec les chiffres et les données qu'on peut obtenir ou qu'on a.

Effectivement, on peut être restreint dans nos moyens, c'est sûr. Nous prétendons que, possiblement, la CSST n'est pas étrangère à ce que l'industrie de la construction, comme toutes les autres industries à l'heure actuelle, connaisse une diminution de la fréquence des accidents et des taux d'accidents, ce qui est fort possible. Mais je dois vous dire que nous avons constaté - et on est sûr de notre affaire de ce côté - que, depuis que l'AECQ a investi des sommes d'argent, qu'elle a mis en place un personnel en matière de santé et de sécurité, qu'elle a dispensé aux employeurs des cours, depuis que, dans une certaine mesure, des cours ont pu être donnés à des travailleurs de la construction - ce n'était pas nécessairement avec la CSST - il y a nettement une différence dans l'industrie de la construction. Il y a une différence vers le mieux dans l'industrie de la construction. Je ne suis pas assez nigaud pour dire que la CSST y est étrangère. C'est sûr et certain qu'il y a une amélioration dans l'industrie de la construction.

Par contre, je dois vous dire qu'il y a une diminution des heures dans l'industrie de la construction. C'est vrai, on travaille à peu près à un rythme de 50% des heures actuellement. Peut-être en allant un peu plus loin, en travaillant les événements, si la relance dans l'habitation actuellement fait qu'il y a 38 000 unités qui ont été bâties et que cela est censé rapporter environ 800 000 ou 900 000 heures par unité, on peut presque prétendre qu'un bon pourcentage des heures de l'industrie de la construction viennent de l'industrie de l'habitation. Est-ce que je suis nigaud en disant qu'un chantier d'habitation c'est moins dangereux qu'un viaduc, qu'un pont, qu'un tunnel, qu'un métro etc? C'est peut-être vrai, c'est peut-être possible. Autrement dit, c'est peut-être que l'activité de l'industrie, actuellement, est moins

grande. C'est peut-être dû au fait que l'activité est différente dans l'industrie de la construction qu'il y a une certaine différence à la baisse des accidents dans cette industrie. C'est possible. Dieu sait que depuis au moins cinq ans que nous nous activons en matière de santé et de sécurité, que nous donnons des cours à nos employeurs, que nous envoyons des bulletins, que nous donnons de la formation, que nous avons des conseillers sur le chantier et que nous aidons nos employeurs à faire leur travail en santé et sécurité, nous aimons croire, à l'heure actuelle, qu'il y a des résultantes de cela, et nous sommes convaincus qu'il y en a. Nous avons des échos de nos membres dans des assemblées à savoir que cela a donné des résultats. Cela est positif de ce côté.

Le Président (M. Blouin): Merci, M. Dion.

M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Toujours à cet égard, vous avez référé à quelques reprises aux services d'inspection. Pour nous ici qui ne sommes pas sur le terrain, comme pour les gens de la commission qui ne sont pas sur le terrain, eux non plus, bien souvent c'est bien beau sur papier; les modèles sont parfaits quand on les voit sur papier. Mais, dans les faits, les services d'inspection de la Commission de la santé et de la sécurité du travail sont le résultat de l'intégration de quatre services d'inspection au lendemain de la loi 17. Vous avez référé aux services d'inspection qui vous sont propres dans votre milieu. D'autres groupes, dont la FATA, si ma mémoire est fidèle, ont référé aux services d'inspection dans la construction. C'est quoi, le problème des services d'inspection de la Commission de la santé et de la sécurité du travail spécifiques au monde de la construction, premièrement? Un deuxième volet: est-ce que vous étiez mieux servis lorsque les services d'inspection relevaient de l'Office de la construction du Québec? Un troisième volet: qu'est-ce que vous répondez à l'argument voulant que les inspecteurs soient aujourd'hui moins formés ou moins au courant de ce qu'est la construction qu'ils ne l'étaient avant?

Le Président (M. Blouin): Cela va. M. Dion ou M. Daoust. L'un des deux ou les deux à la fois.

M. Daoust: Non, pas en même temps. Quels sont les problèmes? Vous demandez aussi dans la troisième étape...

M. Pagé: D'un aspect particulier, l'OCQ.

M. Daoust: ...si les inspecteurs sont qualifiés. Vous savez, quand on ne participe pas à la composition d'un programme et qu'il n'y a pas de consultations sur ce programme, sur la rédaction de ce programme ou ces choses, c'est très difficile d'arriver avec un programme logique. Je vais vous donner un exemple d'inspection très ridicule qui m'est arrivé il y a deux semaines. Un inspecteur vient sur mon chantier de construction, va dans la roulotte. La porte est ouverte, la fenêtre est ouverte, la fournaise est fermée. Mes hommes sont là en train de prendre le café, à 10 heures. Il me donne une infraction parce qu'il ne fait pas 21° Celsius dans la roulotte. C'est contre la Loi sur la santé et la sécurité du travail. Ce sont mes hommes qui ouvrent la porte et qui éteignent la fournaise. Le gaz est là, le réservoir est plein. (16 h 15)

En faisant ce règlement, on a pensé peut-être à un électricien assis à l'intérieur, qui travaille au chaud et qui, lorsqu'il dîne, doit être au chaud. Le monteur d'acier qui travaille dehors avec une chenille, qui a trois chemises et toute la patente, une motoneige, lorsqu'il prend son café à 10 heures, ne va pas se déshabiller tout nu pour être confortable. S'il a trop chaud, ses lèvres deviennent toutes gercées. Il pose donc des gestes qui le rendent confortable. C'est le travailleur. Je lui donne tout ce qu'il veut en fait de chaleur et il fait ce qu'il veut avec cela. C'est lui qui décide de la chaleur. L'inpecteur passe. Je trouve que cela n'a aucune logique. Peut-être que si on participait à la préparation des programmes, des normes, ces choses n'arriveraient pas. Ce sont des irritants. Je suis obligé de téléphoner, d'appeler quelqu'un au bureau d'inspection et de lui dire: Cela n'a pas de sens, ce que tu viens de faire, jusqu'au moment où je peux trouver quelqu'un d'assez logique pour me dire: C'est vrai, cela n'a pas de sens.

Le Président (M. Blouin): Oui, cela va.

M. Daoust: Vous avez demandé si on était mieux servi avec l'OCQ. C'est avant mon temps. Je vais laisser parler M. Dion.

Le Président (M. Blouin): M. Dion.

M. Dion: Effectivement, je dois vous dire qu'on peut remarquer qu'il y a deux problèmes concernant l'inspection. Je fais des suppositions, je ne veux pas porter d'accusations. Si la personne est compétente, cela dépend comment elle applique sa compétence, comment elle exerce son jugement. Effectivement, là-dessus, on vous a cité le cas du bonhomme qui arrive sur un chantier, qui est probablement un bonhomme compétent. Il connaît un chantier de construction. Il sait ce que c'est, un échafaudage. Il regarde cela. Il décide à

l'oeil, parce qu'il connaît son code. Il sait qu'à 18 mètres il doit y avoir un dépôt de plan pour l'échafaudage, mais il décide à l'oeil qu'il a 18 mètres. Là, il arrête le chantier. Cela peut être un bonhomme compétent qui sait ce qu'est l'industrie de la construction, mais qui applique mal ces choses, qui abuse dans leur application. Dieu sait qu'à un moment donné, quand ils commencent à travailler dans un service comme cela, il y a des gens qui aiment se faire valoir et montrer qu'ils en savent, qu'ils y vont, qu'ils sont bons, envoie donc, ils sont compétents dans "la job" qu'ils font.

On a entendu des murmures à l'occasion. Des gens ont dit: Ils sont venus dire que nous étions tous des fous. Ce n'est pas vrai, on n'est pas venu dire ici que les gens de la CSST étaient tous des fous, loin de là. Il y a une note dans notre document, et c'est très clair, Dieu sait qu'il y a des gens qui peuvent être compétents à la CSST. On ne les nomme pas. À toutes fins utiles, je pense qu'on n'est pas ici pour donner des noms.

Il y a l'autre problème du bonhomme qui n'est réellement pas compétent. M. Pagé a noté avec justesse qu'il y avait un amalgame de quatre services d'inspection à un moment donné. Cela a amené des inspecteurs d'autres champs d'activité que ceux de la construction. Très vulgairement, vous allez dire: II pousse à l'extrême. Cela n'a pas d'allure, M. Dion est malade. Il aurait pu y avoir un inspecteur en boucherie qui serait arrivé sur un chantier. Vous allez me dire: Cela ne se peut pas. D'accord, cela ne se peut pas, mais cela aurait pu arriver.

Je dois vous dire que vous avez le droit, vous en avez la possibilité, de vous informer de ce qui est arrivé des deux morts sur le chantier d'Habitat. J'espère qu'il n'y a pas de danger à parler de cela. Je ne veux pas me retrouver avec une poursuite ici. Sur le chantier d'Habitat, il y a eu deux morts. Un inspecteur de la CSST y était passé environ deux heures avant, mais il n'avait rien vu, absolument rien. Les travaux étaient en cours, pas depuis une demi-heure, ils étaient en cours depuis un bon bout de temps. Je ne veux pas accuser le bonhomme, je ne veux rien dire contre le bonhomme, en tout cas, je veux mettre toute la protection de mon côté à l'heure actuelle, mais, selon ses compétences, il ne pouvait pas le voir, parce que je pense que c'était un bonhomme qui n'était pas de l'industrie de la construction et c'était peut-être difficile pour lui de s'apervoir si la méthode qui était utilisée était correcte ou non. Je ne le sais pas, je ne porte pas de jugement, mais il n'a rien vu et l'accident est arrivé deux heures après. Dans le fond, c'est cela que nos employeurs ont eu à subir à un moment donné. On s'est souvent retrouvé dans les systèmes d'inspection - s'il y a eu des modifications, ce n'est toujours pas parce qu'on avait complètement tort et qu'on avait imaginé des choses - avec des employeurs qui appelaient nos conseillers et qui disaient: Cela n'a pas d'allure, le gars ne connaît même pas la construction et il vient nous dire des affaires.

Le Président (M. Blouin): M. Dion, je pense qu'on comprend bien le message que vous voulez nous livrer.

M. Dion: Vous avez de la misère avec moi.

Le Président (M. Blouin): M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Très brièvement...

M. Dion: Je ne suis pas capable!

M. Pagé: Je vais essayer, M. Dion. Ici, on peut recevoir un commentaire qui nous est fait par les gens du milieu qui disent: II y a de bons services d'inspection. D'autres vont soutenir que les gens qui font les services d'inspection ne font pas leur job, ne sont pas compétents. Vous feriez peut-être un bon diplomate. Vous avez dit: Ils sont bons. Il y en a de bons, mais il y en a d'autres qui sont moins bons. Vous avez fait référence aux normes et à leur interprétation, à la façon dont les normes sont interprétées. Vous êtes sur le terrain. Êtes-vous plus satisfait des services d'inspection actuellement que dans le temps de l'OCQ? C'est cela, ma question.

M. Dion: Disons que cela s'améliore, honnêtement; autrement, ce serait mentir. Je serais un bon diplomate et probablement aussi un bon politicien. À toutes fins utiles, je pense que cela s'améliore; honnêtement, avec le temps, c'est normal que les choses s'améliorent. Je dois revenir et vous donner un exemple. Quant le gars arrive et dit: Pour faire ta coulée de ciment, cela te prend des bottes de construction, alors que des bottes de caoutchouc avec des caps d'acier vont bien, c'est parce qu'il y a quelque chose que le gars ne connaît pas et cela a coûté de l'argent à l'employeur d'arrêter une coulée de béton. Ces "bebelles"-là, je pense qu'elles disparaissent de plus en plus. En tout cas, il y a au moins des gens, à un certain niveau, un petit peu plus haut, qui sont capables de les arrêter. Maintenant, tranquillement, ces choses cessent. Cela s'améliore.

M. Pagé: Si je comprends bien, vous aviez un bon service à l'OCQ; vous aviez des inquiétudes à l'égard du service de la Commission de la santé et de la sécurité du travail au début, mais cela s'améliore. C'est

cela?

M. Dion: On va se donner cinquante, cinquante en bons diplomates.

M. Pagé: Ça marche.

M. Dion: Les services qu'on avait à l'OCQ étaient faits, quand même, par des gens de la construction. Si c'est une conclusion pour vous, c'en est une.

Le Président (M. Blouin): Cela va.

M. Pagé: Une dernière petite question sur le service d'inspection. À la page 38, vous vous inquiétez que le vice-président à l'inspection ait été écarté du conseil d'administration au profit du vice-président à la prévention. Il y a eu une intégration d'inspection et prévention.

M. Dion: On ne s'inquiète pas du départ de la personne. On s'inquiète du geste, de l'ensemble.

M. Pagé: D'accord. Voulez-vous dire par là que cette intégration des deux aspects combien importants de l'action de la commission a donné lieu depuis à un effort plus accentué sur la définition de moyens, de documents, de réglementation en regard de la prévention, au détriment de l'inspection?

M. Dion: Je ne veux pas répondre pour eux, mais peut-être qu'ils pourront vous dire oui. Quant à nous...

M. Pagé: Mais j'aime bien avoir les deux côtés.

M. Dion: ...je dois vous dire que les vannes se sont fermées; l'information est moins... En tout cas, on a plus de difficulté. Encore là, ma réponse est mitigée, parce qu'il y a des gens de ce service de qui, je pense, on a une excellente collaboration et il y a des gens de qui on n'a pas de collaboration. Ce que l'on vous dit, c'est qu'on commençait à polir l'autre système quand il a sauté. On recommence à zéro avec un nouveau système auquel on a de la difficulté à avoir accès. Aujourd'hui, on n'a plus la possibilité d'avoir certaines informations qui nous permettaient d'améliorer le secteur de la construction, d'améliorer auprès de nos employeurs la prévention des accidents. On déplore cela. C'est une goutte dans le verre parmi tant d'autres, mais c'en est une.

Le Président (M. Blouin): Cela va.

M. Pagé: Mais les vannes se sont fermées, selon ce que vous dites.

M. Dion: Oui, en partie.

M. Pagé: Oui, d'accord. Une dernière question, M. le Président. Je n'ai pas abusé, j'ai pris 17 minutes jusqu'à maintenant. À la page 46, vous faites une affirmation qui, elle aussi, est grave, parce que, si elle est fondée, cela indiquerait que la Commission de la santé et de la sécurité du travail n'a pas de contrôle sur les sommes, les subventions qui sont versées. Vous dites: "La distribution de subventions aux syndicats pour des cours qui n'existent pas". C'est grave. C'est quoi?

M. Dion: Des subventions aux syndicats pour des cours qui n'existent pas. Vous aurez le loisir de leur poser des questions, à savoir s'ils ont donné des subventions et à quoi elles ont servi. Nous, on prétend qu'elles n'ont pas servi à donner des cours ou, du moins, pas totalement servi à donner des cours.

M. Pagé: Oui, mais j'aimerais que vous précisiez un peu, parce que, si on pose la question à l'honorable juge et qu'il dit que les subventions ont servi, on ne sera pas plus avancés.

M. Regnier (Alfred): M. le Président, lorsqu'on affirme que des cours sont inexistants, on pourrait difficilement en faire la preuve, parce que nous n'avons pas un contrôle absolu sur les finances des syndicats. Mais il reste qu'ils reçoivent des subventions et que nous n'avons jamais été informés quant à la distribution de l'argent, nous n'avons jamais été informés sur l'utilisation que les syndicats en font. Toutefois, nous sommes conscients d'une chose: c'est que certains syndicats ont tenté de mettre sur pied des programmes, des cours de sécurité. Effectivement, il s'en donne au Conseil des métiers de la construction, il s'en donne à la FTQ, il s'en donne à la CSN certainement, mais on a lieu de croire que ce sont très souvent des cours bidon.

Le Président (M. Blouin): Des cours?

M. Regnier: Des cours bidon. Des cours qui ne riment à rien. En ce moment, il y a un cours de délégué syndical à la prévention. Certains locaux peuvent tordre le bras de leurs membres pour essayer de constituer un groupe de 20 ou 25 personnes et terminent avec seulement une personne ou deux. Si on nous dit que les syndicats dispensent de la formation et vont chercher des subventions à la CSST, on voudrait être certain que ces sommes d'argent servent effectivement à donner des cours, mais des cours complets, comme il s'en donne dans les centres de formation professionnelle, comme il s'en

donnera éventuellement dans les commissions scolaires sous l'égide du ministère de l'Éducation et de la CSST. On comprend mal qu'il y ait tout un réseau de formation qui existe et qu'on ne s'en serve pas, alors qu'on a un réseau parallèle où la CSST n'a aucun contrôle. Il y a des cours de 24 heures qui se donnent sur 8 heures. Il y a aussi des cours qui ont une certaine relation avec la sécurité, mais, comme je vous le dis, cela ne peut pas être un cours qui puisse aller dans le sens de faire de la sécurité sur les chantiers, si ce n'est pour former des délégués pour des futurs règlements qui s'en viennent.

Le Président (M. Blouin): Cela va. Merci, M. Regnier.

M. Pagé: M. le Président, c'était ma dernière question. Je voudrais faire un commentaire à M. Dion. On a constaté que, même si cette commission a le mandat d'étudier l'administration de la Commission de la santé et de la sécurité du travail, plusieurs des intervenants en ont profité -c'est légitime et on est d'accord avec cela -pour nous présenter des demandes bien précises, bien particulières, auxquelles ils tenaient. Je retiens la question du retrait préventif qui a fait l'objet de plusieurs représentations et demandes ici. Je retiens aussi que vous aviez une demande particulière à formuler avec beaucoup d'insistance et même avec beaucoup de chaleur, c'était la possibilité qu'un de vos délégués puisse siéger au conseil d'administration. Bonne chancel J'espère que le ministre pourra vous donner une réponse favorable dans des délais qu'on espère les meilleurs.

Le Président (M. Blouin): Merci, M. le député de Portneuf. M. le député de Viau, vous aviez une question supplémentaire.

M. Cusano: Oui. Vous avez dit que le nombre d'accidents a diminué. Il y a une question que je me pose. Je ne sais pas si vous avez des statistiques ou même s'il est possible d'avoir certaines statistiques. Si l'on pouvait faire un graphique des accidents, est-ce qu'on pourrait faire la distinction entre les accidents graves et les accidents mineurs? Par le graphique de ces chiffres, est-ce que les deux lignes en question, c'est-à-dire celle qui représenterait les accidents graves et celle qui représenterait les accidents mineurs, seraient parallèles ou si vous n'êtes pas capables de nous le dire?

Le Président (M. Blouin): Cela va? M. Girard.

M. Cusano: En d'autres mots...

Le Président (M. Blouin): C'est cela.

M. Cusano: ...est-ce que les accidents graves ont diminué? La gravité des accidents a-t-elle diminué et les accidents moins graves ont-ils diminué proportionnellement, de la même façon?

Le Président (M. Blouin): M. Girard.

M. Girard: II y a environ deux ans, on a fait une étude à l'association des entrepreneurs pour essayer d'étudier justement ce problème. On s'est rendu compte que - évidemment, je vous cite des chiffres de mémoire, car on partait de l'étude de 1971 et je pense qu'on avait des estimations pour l'année 1982 à ce moment-là - avant 1976, c'est-à-dire avant qu'on introduise la notion des cinq premiers jours payables directement par l'employeur, il y avait un ratio de l'ordre de 45% pour les accidents de moins de cinq jours - donc, des accidents mineurs - et de 55% pour des accidents de plus de cinq jours. Ils peuvent être également mineurs, mais la période d'indemnité est prolongée.

Or, avec l'avènement de la notion des fameux cinq jours dont on a parlé en 1976, cela a pris un an, je pense, et le ratio est devenu exactement l'inverse, c'est-à-dire qu'il y a eu 55% des accidents qui étaient de moins de cinq jours et 45% qui étaient de plus de cinq jours.

Le Président (M. Blouin): Cela va. (16 h 30)

M. Daoust: Dans la même optique, il serait peut-être bon de noter que le pourcentage d'accidents mineurs, si on veut, pourrait certainement être réduit en statistique si on pense que le taux de rejet des réclamations au Québec est de 0,6% alors qu'en Ontario il est de 6,4%. Je tiens pour acquis que, dans les réclamations de 6,4% rejetées en Ontario, ce sont principalement des accidents mineurs, j'imagine. Je fais un raisonnement et je me dis: S'ils les ont rejetées, ce ne sont probablement pas des accidents majeurs; c'était douteux si c'était un accident ou non, une maladie. Mais quand je fais la comparaison, 6,4% contre 0,6%, je me pose de drôles de questions.

Le Président (M. Blouin): Cela va? M. le ministre, une dernière question.

M. Fréchette: Oui, M. le Président, une dernière question. C'est plutôt dans le but de préciser une réponse qui a déjà été donnée à une question. Le député de Portneuf et moi, on n'est pas souvent d'accord. Il y a des choses sur lesquelles on s'entend, et c'est la question qu'il vous a posée et sur laquelle il a insisté, me semble-t-il, avec beaucoup de

pertinence. C'est une question importante. Vous faites une affirmation qui est sérieuse et, à la question qu'il vous a posée, j'ai entendu des explications. Vous comprenez que je fais allusion à l'affirmation que vous faites en vertu de laquelle des subventions seraient accordées sans que, par ailleurs, des cours soient donnés. C'est sérieux comme affirmation et cela peut même, si on prend les choses au pied de la lettre, prendre l'allure d'une accusation formelle. Par ailleurs, en réponse à la question qui était posée, on a expliqué que les cours qui se donnaient n'en étaient pas vraiment. Ce n'est pas le genre de cours qui doivent être donnés. Ma question très précise est la suivante: Affirmez-vous qu'effectivement il se donne des sommes d'argent sans que des cours soient donnés ou, alors, les sommes d'argent qui sont données ne servent pas aux fins auxquelles vous souhaiteriez qu'elles servent? Il y a toute la différence du monde entre les deux affirmations.

M. Dion: Je pense que vous allez comprendre, M. le ministre. Je suis avocat comme vous et, pour être prudent et pour ne pas me retrouver en situation difficile comme organisation, disons que notre interprétation est que les sommes d'argent ne servent pas juste... C'est tout simplement pour être très prudent à l'heure actuelle. Cependant, il y a une chose que je suis prêt à regarder, c'est qu'on va vérifier notre affirmation et, si elle devait être plus que celle que je viens de limiter là, on vous en informera.

Le Président (M. Blouin): Au nom des membres de la commission, je remercie donc les représentants de l'Association des entrepreneurs en construction du Québec d'avoir bien voulu nous livrer leur intervention et aussi de s'être prêtés de bonne grâce aux échanges avec les membres de cette commission. Merci beaucoup.

Sur ce, j'invite maintenant les représentants de l'Association des mines de métaux du Québec Inc., à bien vouloir venir prendre place à la table des invités.

M. Dion: On n'a pas eu l'occasion de vous remercier de votre patience. Surtout à mon égard, vous avez été très patients.

Une voix: On accuse le mouvement syndical au niveau des subventions...

Le Président (M. Blouin): Non, non, monsieur, je m'excuse, mais ce n'est pas le moment de rétorquer. Nous ne sommes pas dans un débat ici. Nous rencontrons des organismes qui nous livrent leur opinion et ce sont les membres de la commission qui jugent du contenu des opinions qui nous sont livrées.

L'Association des mines de métaux du Québec Inc., s'il vous plaît. Aux fins du journal des Débats, si vous voulez bien vous identifier, s'il vous plaît, et ensuite nous livrer le contenu de votre mémoire.

Association des mines de métaux du Québec Inc.

M. Langlois (Gonzague): M. le Président, MM. les membres de la commission, mon nom est Gonzague Langlois. Je suis le directeur général de l'Association des mines de métaux du Québec. J'ai, à mon extrême gauche, Claude Drouin, qui est notre directeur technique; M. Camil Marcoux, qui est vice-président de Noranda; M. Michel Lefebvre, qui est directeur général des mines Gaspé et en même temps président de l'association; à ma droite, M. Daniel Goffaux qui est assistant directeur des mines Northgate Patino à Chibougamau et M. Michel Rodrigue, qui est vice-président de l'association et directeur des mines Niobec à Chicoutimi.

La Commission de la santé et de la sécurité du travail, établie en vertu de la Loi sur la santé et la sécurité du travail, existe maintenant depuis trois ans. Étant donné le caractère novateur et souvent expérimental des mesures de la loi 17, nous considérons que le gouvernement a été sage d'accepter de convoquer cette commission parlementaire pour évaluer l'administration et le fonctionnement de l'organisme chargé de l'application de cette loi, soit la CSST.

Même si l'organisme en est encore à ses débuts, il occupe déjà et occupera de plus en plus une place considérable dans les entreprises. Aussi, nous aurions aimé bénéficier de beaucoup plus de temps pour préparer un mémoire plus étoffé que celui-ci. Malheureusement, lors de l'annonce de la commission parlementaire, le 17 novembre dernier, tous les groupes patronaux ont cru, d'après les déclarations faites, qu'ils étaient tout simplement exclus de la discussion. Ce n'est qu'après quinze jours et à la suite de pressions que nous avons obtenu la permission de nous faire entendre et c'est, selon nous, la seule et unique raison qui explique la présence d'un nombre aussi restreint de groupes patronaux à cette commission. Pourtant, à titre de payeurs, les groupes patronaux auraient dû être les premiers invités à se présenter. Nous avons donc l'impression, ainsi que l'AECQ qui vient de faire la présentation de son mémoire, que sans l'avoir voulu nous sommes en train d'assumer le rôle de porte-parole de la partie patronale. J'ai très bien compris, M. le ministre, vos explications de tout à l'heure et je pense que vous n'aurez pas besoin de revenir là-dessus, mais on tenait à souligner tout simplement que, selon nous, nous n'étions pas invités au début, jusqu'à ce

que la situation se clarifie.

Avant d'entrer dans le vif du sujet, il est bon, nous croyons, de se rappeler quels étaient les objectifs poursuivis par le législateur lors de l'approbation de la loi et de l'établissement de l'organisme qui devait l'administrer. Dans la préface du livre blanc sur la santé et la sécurité du travail publié en octobre 1978, l'honorable Pierre Marois, qui devait par la suite parrainer la loi, affirmait ce qui suit: "La définition de ce nouveau régime est fondée sur la conviction que seule une participation active et volontaire du milieu de travail lui-même va permettre de faire face aux problèmes sérieusement. Aucun pouvoir constitutionnel ne peut suppléer à la connaissance du milieu et de ses caractéristiques que peuvent développer les hommes et les femmes qui y travaillent et y vivent." Jusqu'ici, nous sommes absolument d'accord.

M. Marois continuait: "L'État ne voit pas pour autant ses responsabilités et ses tâches diminuer. Son intervention sera cependant orientée dans un sens bien particulier. Plutôt que de prétendre régler les problèmes à la place des citoyens impliqués, il s'emploiera à mettre à la disposition de ces derniers les outils et les moyens leur permettant de trouver eux-mêmes les solutions. Il faudra, bien sûr, fixer et ajuster au besoin les règles du jeu, assurer la reconnaissance des droits et des devoirs de chacun et établir des normes. Il faudra aussi quelquefois animer le jeu, mettre de l'huile dans le système, stimuler la prise en charge. Mais, à cette fin, il n'est aucunement besoin de faire surgir quelque supermachine bureaucratique investie du pouvoir tout-puissant de décider à la place des gens."

Voyons maintenant, après ces paroles rassurantes, de quelle façon on a ajusté le système, on a mis de l'huile dans le système plutôt, et de quelle sorte de modeste machine bureaucratique on a accouché. Six mois à peine après la publication du livre blanc, on présentait, en première lecture, le projet de loi 17 qui contenait 335 articles. Nous n'avons pas à vous redire en détail ce que contient la loi. Permettez-nous cependant de mentionner que l'article 223 permet à la commission qui administre la loi de faire des règlements dans 41 champs d'activité industriels et, en plus, dans un 42e qui lui permet de "prescrire toute autre mesure utile à la mise en application de la présente loi."

Il est important d'ajouter ici que, malgré les très nombreuses représentations des employeurs au moment du dépôt de la loi, le gouvernement n'a pas daigné retenir une seule recommandation de la partie patronale, si ce n'est peut-être le retrait préventif qu'il a appliqué pour la travailleuse enceinte en rendant l'employeur financièrement responsable d'une situation qui ne relève en rien - nous l'espérons - de sa responsabilité. En 1984, cette mesure sociale coûtera au-delà de 16 000 000 $ aux employeurs.

Cette loi met l'accent sur le paritarisme obligatoire. Nous avons toujours dit que la participation des travailleurs et des syndicats, pour être efficace, doit être volontaire. D'ailleurs, l'ex-ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, M. Marois, l'a lui-même reconnu dans la préface du livre blanc: "II est vrai, comme on se plaît à le répéter dans divers milieux, que la santé et la sécurité, pour l'essentiel, ne se négocient pas." À constater la difficulté qu'a la CSST de mettre en place les organismes paritaires, on s'aperçoit que forcer le paritarisme relève beaucoup plus d'une vue de l'esprit que d'un sain réalisme.

Jusqu'à l'annonce de la loi 17, des organismes volontaires ont fonctionné et accompli des choses intéressantes dans le secteur minier. Chose étrange, cependant, cette loi, qui se voulait le promoteur de la prise en prise en charge par les parties, a stoppé ces initiatives paritaires, lesquelles ont beaucoup de mal à redémarrer dans le nouveau contexte. J'aimerais ajouter ici et citer M. Laberge qui a dit, hier, que, pour faire de la prévention comme pour faire du paritarisme, il faut changer les mentalités. Or, on change difficilement les mentalités avec des lois et des règlements et il faut un certain temps pour le faire.

La loi 17 entend nationaliser la médecine industrielle en la confiant entièrement aux départements de santé communautaire, lesquels ne sont certainement pas équipés pour remplacer les services dont le secteur minier s'est doté au cours des années. Pour notre secteur, cette disposition de la loi ne peut que diminuer considérablement la qualité des services à la disposition des travailleurs. C'est pour cela, d'ailleurs, que la totalité des entreprises minières n'ont pas fait reconnaître leurs services médicaux par les DSC. Ces entreprises essaieront donc de continuer à fournir leurs propres services de santé industrielle aux travailleurs, tout en étant conscientes qu'elles seront dorénavant soumises à des tracasseries très embarrasantes au nom, par exemple, de la confidentialité des dossiers médicaux et qu'elles devront assumer les coûts additionnels des services confiés aux DSC.

Pour administrer la loi 17, le gouvernement a créé la Commission de la santé et de la sécurité du travail, immense superstructure avec ses 2600 employés - on l'a répété à plusieurs reprises aujourd'hui -répartis dans onze régions pour administrer les services de réparation des accidents et des maladies industrielles et dont une partie importante des effectifs intervient

directement dans l'administration des entreprises par ses services de prévention et d'inspection, cette même supermachine bureaucratique que se défendait d'instituer l'ex-ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, M. Marois, dans la préface de son livre blanc.

Ce livre blanc mentionnait, d'ailleurs, que le budget annuel dévolu aux services de formation, d'information et de recherche, c'est-à-dire de prévention, devrait être, tout au plus, de 16 000 000 $. En dollars de 1983, cela équivaudrait à environ 27 000 000 $. Or, dans les dernières propositions budgétaires, la CSST alloue à l'article des programmes de prévention et de recherche environ 80 000 000 $ et ceci, à une époque où il n'y a que dix catégories d'entreprises couvertes par la loi et que l'application de la loi n'en est, en fait, qu'à ses débuts. Vers quels coûts se dirige-t-on et, surtout, quels succès peut-on en attendre?

Le secteur minier a, depuis 1948, établi sur des bases solides son propre système de prévention, lequel a été rodé et amélioré au cours des 35 années subséquentes. Ce système tient compte de trois principes fondamentaux en prévention d'accidents, soit la responsabilisation de tous les intervenants, le contrôle à la source et la supervision des méthodes de travail. (16 h 45)

La CSST met de l'avant, comme base de prévention, le contrôle à la source et les activités paritaires. Nous aussi nous croyons que les activités paritaires sont nécessaires, pour autant qu'elles soient volontaires.

Convaincus de la supériorité de leurs méthodes et tout en respectant la loi, les employeurs miniers ont cru nécessaire de conserver leur propre approche en sécurité, malgré les difficultés et le travail additionnel que leur causent les interventions de la CSST. Nous y sommes, d'ailleurs, habitués puisque, depuis 1975, nous avons relevé dans le secteur minier pas moins de quatorze enquêtes qui, selon nous, n'ont rien ajouté de nouveau à la connaissance du milieu, tout en ayant coûté bien au-delà de 10 000 000 $. Une seule, toutefois, si on exclut les descentes faites dans certaines mines, a été effectuée par la CSST, celle des Mines Gaspé qui a duré deux ans et a coûté plus de 1 000 000 $.

Le programme de prévention requis par règlement a nécessité plusieurs mois de travail aux employés de l'association pour créer un modèle à l'intention de ses membres et ce scénario a été répété dans chacune de nos entreprises afin de pouvoir satisfaire aux exigences de la CSST avant la date limite. Je dois ajouter ici que 100% des entreprises se sont conformées à cette mesure. Ce n'est qu'un début, car ni les nouveaux comités de sécurité avec pouvoirs décisionnels, ni le futur représentant à la prévention, ni les services de santé de l'État n'ont encore fait sentir leur présence sur le plancher des entreprises. Tous ces intervenants ont des pouvoirs décisionnels et, en cas de conflit, il est prévu que c'est la CSST-Prévention qui sera l'arbitre décisionnel.

Jusqu'à présent, la CSST administre 33 règlements en vertu de la loi 17, en plus de 19 autres en vertu de la Loi sur les accidents du travail, dont trois en vertu de la Loi sur l'indemnisation des victimes d'amiantose ou de silicose dans les mines et les carrières.

Les employeurs en général sont donc présentement soumis, de la part de la CSST, à pas moins de 52 règlements différents qui leur causent plus ou moins d'embêtements. Ce n'est pas fini, puisque la direction de la CSST continue de proposer à vive allure des règlements pour couvrir de nouveaux champs d'activités.

De nombreux règlements ont fait l'objet de sérieuses contestations et ont donné lieu à d'interminables discussions comme, par exemple, le comité de santé et de sécurité, le représentant à la prévention, les premiers secours, etc. Mais, en plus, la CSST interprète les règlements existants suivant des formules qui lui sont propres et il y a des conflits. C'est le cas du fameux problème du paiement des bottes de sécurité par l'employeur, même si les employeurs avaient déjà des prévisions relatives aux équipements de protection personnelle dans les conventions collectives. Présentement, les mines déboursent annuellement, après entente avec leurs travailleurs, au-delà de 5 000 000 $ pour les équipements de sécurité et elles ne voient pas le besoin d'augmenter cette somme. La résistance des employeurs et les actions en cours retardent avec raison l'application de cette directive.

Ce qu'on a appelé l'histoire des bottes de sécurité a aussi mis à jour une procédure de révision absolument aberrante qui force l'employeur à contester en dernière instance devant celui qui a émis la directive. Cette procédure est aussi présentement contestée devant la Cour supérieure.

D'autre part, on est surpris de voir que les articles 245 et 250 du nouveau projet de loi sur les lésions professionnelles vont encore plus loin que la pratique actuelle de la CSST, car la loi accorde le droit à la direction de la CSST de renverser pratiquement à sa guise ses propres décisions et même celles de la Commission des affaires sociales.

La direction de la CSST a proposé un programme sur les premiers soins, lequel empêcherait l'employeur de traiter une blessure mineure sur le site de l'entreprise. Pour les mines qui sont, la plupart du temps, loin des services hospitaliers, mais qui, en

général, sont très bien organisées sur place avec une infirmière ou un infirmier, une telle réglementation signifierait des coûts additionnels aussi élevés qu'inutiles, en plus de forcer le travailleur à subir des délais pour son traitement.

Les Mines Selbaie, par exemple, situées à 135 milles d'Amos - après information, j'ai corrigé mon texte - évaluent à plusieurs centaines de milliers de dollars par année le coût additionnel d'une telle réglementation, étant donné que chaque sortie est susceptible de leur coûter une somme d'environ 500 $.

La direction de la CSST a aussi tenté d'imposer aux employeurs une réglementation universelle sur les campements, y compris les campements temporaires, en spécifiant dans le détail les exigences nécessaires à un bon environnement. Ces exigences vont de la surface vitale à accorder par employé avec tout l'équipement nécessaire, au menu balancé des repas et à un système d'alimentation en eau chaude et en eau froide dans les tentes-dortoirs. Après bien des discussions, il semble que le secteur de la construction sera le seul à jouir de tels standards.

Enfin, la CSST a commencé à produire des projets de règlements pour certaines susbtances qui pourraient causer des dommages à la santé des travailleurs. On a déjà émis un projet sur la silice, un autre sur le plomb. Il pourra y en avoir plusieurs centaines d'autres si on tient compte du fait que plus de 6000 substances susceptibles de comporter des dangers ont été repérées dans les diverses activités industrielles.

Cette présente tendance à vouloir tout réglementer, jusque dans les moindres détails, nous incite à penser que l'objectif de la CSST semble être de vouloir résoudre tous les problèmes de prévention d'accidents et de maladies professionnelles par un réseau de règlements précis et détaillés, appliqués par des inspecteurs généralistes, avec le moins d'interprétation possible, puisque souvent ceux-ci ne peuvent avoir qu'une connaissance superficielle des secteurs industriels inspectés. C'est, en somme, la robotisation de la prévention et, dans un tel système, tout spécialiste, qu'il soit médecin ou autre, n'est plus guère nécessaire ou, du moins, est utilisé inefficacement.

Consciente de cette lacune dans le système, la CSST s'emploie, depuis plusieurs mois, à intégrer ses services de prévention et d'inspection. Cette intégration ne peut aboutir, comme nous l'avons toujours craint, qu'à un vaste réseau d'inspection, étant donné qu'il est toujours beaucoup plus facile de faire respecter des règlements que de motiver des personnes.

Avec l'aide des membres patronaux et quelquefois syndicaux du conseil d'administration de la CSST, ainsi que par des contestations devant les tribunaux, les employeurs ont pu jusqu'à présent résister à cette manie de la direction de la CSST de vouloir réglementer les moindres activités des entreprises ou, du moins, ramener ces règlements à des contenus plus réalistes. On peut se demander pour combien de temps, cependant, puisque le nouveau projet de loi 42 accorde à la CSST une latitude encore plus grande dans son pouvoir d'intervention. Parmi beaucoup d'autres, l'article 35 stipule que la commission décide elle-même si le travailleur est atteint d'amiantose ou de silicose; par l'article 250, la commission s'arroge le droit de renverser les décisions de la Commission des affaires sociales ou encore l'article 282 permet de poursuivre l'employeur ou son représentant sans être obligé de lui signifier un avis d'infraction. La commission a un faible pour la théorie "je viendrai comme un voleur".

Au centre de cette toile d'araignée qu'on est en train de tisser autour de lui, avec tous ces règlements, ces comités, ces inspecteurs et ces monceaux de paperasse, l'employeur doit continuer à produire à des prix compétitifs et, lorsqu'il faillit à la tâche, on le traite de mauvais administrateur.

Parlons maintenant des services de réparation des accidents et maladies industrielles découlant de la Loi sur les accidents du travail. Les anciennes administrations de la CAT ont toujours accordé un certain bénéfice du doute aux travailleurs. Disons tout de suite que les employeurs miniers sont d'accord pour traiter aussi généreusement que possible les vrais accidentés et les véritables victimes de maladies industrielles. C'est pour cela, d'ailleurs, qu'ils ne se sont pas opposés à la formule de l'indexation annuelle du salaire de base et à la formule des 90% du salaire net. Ils veulent, cependant, limiter les abus et ils ne veulent surtout pas que leurs fonds servent à payer des pensions à des profiteurs du système. À cause de la tendance de la commission à accepter la grande majorité des réclamations douteuses, semble-t-il, sans au moins une enquête sommaire, le nombre des profiteurs augmente et la fréquence de leurs réclamations se multiplie.

Bien qu'il soit difficile d'évaluer le pourcentage exact de ces réclamants, nous croyons que, dans le secteur minier, leur nombre ne dépasse guère 15% du total, étant donné que la grande majorité de nos travailleurs sont, selon nous, consciencieux et honnêtes. Nous en déduisons donc que la libéralité de la commission à accepter des réclamations et à les compenser sert surtout à ceux qui abusent du système, exemple, le fait de ne plus exiger la signature de l'employeur sur la formule de réclamation, mesure présentement pratiquée, mais que le nouveau projet de loi 42 veut légaliser par ses articles 37, 42 et surtout 173.

À titre d'exemple, j'aimerais vous lire une lettre envoyée par le surintendant à la prévention d'une mine du Nord-Ouest québécois à un agent de la CSST en rapport avec l'affluence des réclamations pendant la période de chasse à l'orignal. Nous avons omis les noms pour ne pas causer de préjudice. "Cher monsieur, lors d'une rencontre informelle dans le bureau de M. X, de la CSST, il y a quelque temps, nous avions mentionné que les problèmes sociaux, familiaux ou de relations de travail peuvent engendrer facilement des pertes de temps compensables. Nous vivons actuellement un tel phénomène avec la saison de la chasse. Environ 50% de nos employés s'absentent durant cette période. "Considérant ce désir des employés, d'une part, et les contraintes de la production, d'autre part, on accorde au moins une semaine de vacances aux employés qui en font la demande. Malheureusement, 90% de ceux-ci demandent la première semaine. On laisse partir le nombre maximum la première semaine et le reste la deuxième. Ce choix est fait selon la demande et l'ancienneté des travailleurs. "Les employés suivants ont démontré à la direction leur très grande déception pour la période de vacances offerte parce qu'ils étaient déjà organisés avec des amis pour la première semaine de chasse. (Ici, on nomme les sept travailleurs). Parmi ces sept personnes, quatre ont déjà rapporté un accident (les documents sont annexés). Ceux-ci ont des faits accidentels dont on ne peut prouver l'inexistence et ont reçu des soins médicaux dont on ne peut démontrer la non-pertinence. "Actuellement, on attend que les trois autres se manifestent. Les contremaîtres sont avisés de porter une attention particulière à la prévention des accidents face à ces derniers. "Nous vous informons de ces faits pour démontrer l'accessibilité facile pour tout travailleur aux prestations de votre commission."

Et il y a un nota bene qui dit: "M. Untel nous avertit ce midi que le Dr Untel l'arrête de travailler jusqu'au 19 octobre." Cette lettre était datée du 10 octobre.

Au cours des dernières années, de nombreux cas de ce genre se sont accumulés dans les dossiers des mines.

Il faut ajouter ici que la politique des cinq jours payables directement par l'employeur à l'accidenté facilite énormément cette tendance puisque le réclamant peut recevoir instantanément son émolument et que, à notre connaissance, la commission ne réclame jamais les sommes consenties, même dans les cas où elle n'accepte pas la réclamation. Tout au plus, au lieu de facturer ces sommes à l'employeur impliqué, elle les transfère au fonds général, lequel -il faut le rappeler - est aussi défrayé par les employeurs.

C'est une pratique connue de la commission de ne réclamer que très rarement les fonds consentis à celui qui en profite, même dans les cas d'erreur et même si elle y est tenue par la loi. Le nouveau projet de loi 42 vient, d'ailleurs, légaliser cette pratique par l'article 117, entre autres. La loi 42 prolonge à quatorze jours la période à être défrayée par l'employeur. Les abus et le fardeau financier seront donc multipliés par trois. Ce système est, d'ailleurs, unique en Amérique du Nord et, selon nous, il n'a pas sa raison d'être, surtout depuis que la commission s'est dotée d'un système de communication et d'ordinateurs au coût de plusieurs dizaines de millions de dollars.

Les employeurs et les travailleurs sont tenus de par la loi de rapporter à la commission tous les accidents survenus à l'intérieur d'un très court délai, soit dans les deux jours ouvrables qui suivent le supposé accident. La commission pourrait donc facilement établir, comme elle le propose, d'ailleurs, dans la loi 42 pour d'autres motifs, des paiements de dépannage aux bénéficiaires avant l'acceptation finale de la réclamation et même avant la réception du rapport médical qui est, apparemment, le principal responsable des retards.

Le fait d'étendre à quatorze jours la période à être défrayée directement par l'employeur non seulement ouvre la porte toute grande aux abus des profiteurs du système, mais nous apparaît comme une preuve supplémentaire d'incompétence administrative d'autant plus sérieuse que la commission a présentement accès aux meilleurs moyens de communication sur le marché, ce dont elle ne profitait pas il y a plusieurs années. (17 heures)

Depuis quelques années, la commission a accordé beaucoup d'importance à la réhabilitation des anciens accidentés. Nous ne pouvons, évidemment, qu'être en faveur d'une telle attitude, surtout lorsqu'il s'agit de réhabilitation physique. Cependant, la commission s'occupe aussi de réadaptation sociale de ces travailleurs, comme le stipule l'article 56 de la Loi sur les accidents du travail. La portée de cet article est tellement étendue que la commission peut prendre toutes les initiatives qu'elle désire au niveau de la distribution des fonds, rôle dans lequel elle excelle. Cela peut aller des pensions temporaires à l'achat d'équipement ou à des subventions au futur employeur, comme on l'a constaté de nombreuses fois. Ces gratifications s'appellent recherche d'emploi, stabilisation économique ou réintégration sociale. On a l'impression que, pour la CSST, la réhabilitation signifie

principalement de verser des prestations.

Les employeurs ne refusent pas de jouer un certain rôle social à l'endroit de ces personnes, mais il nous semble qu'on a largement dépassé les limites de la responsabilité de l'entreprise et que, souvent, par l'intermédiaire de la CSST, on lui fait faire office d'assurance-chômage et de bien-être social.

Permettez-nous de citer un exemple qui se répète à plusieurs dizaines d'exemplaires dans le secteur minier. Nous nous référons ici à un travailleur d'une mine qui, après avoir été embauché en mars 1980, subissait, en novembre 1980, un accident dont la description est la suivante, selon le rapport de l'accident: "En descendant d'un échafaud, le genou s'est barré de lui-même; depuis, difficulté et douleur au mouvement." Ce travailleur, après plusieurs visites au médecin et un retour au travail de courte durée, a reçu, à toutes fins utiles, pleine compensation jusqu'au 30 août 1982, soit durant 22 mois, d'abord, pour incapacité de retour au travail et, ensuite, pour recherche d'emploi.

En décembre 1981, ce travailleur avait été mis à pied pour raison de surplus de personnel. Il avait été engagé durant la période de construction. Depuis septembre 1982, ce travailleur, même s'il a trouvé de l'emploi, continue de recevoir environ 900 $ mensuellement à titre d'aide financière en stabilisation économique. Bien plus, la coopérative des services agricoles qui l'emploie a reçu, jusqu'à maintenant, 8600 $ de subventions de la CSST dans le cadre d'un programme de formation pour cet employé, lequel, apparemment, n'est pas encore satisfait puisqu'il a fait une demande à la compagnie d'assurances de la mine en question pour obtenir des prestations supplémentaires.

Dans le domaine de la santé industrielle, les abus sont encore beaucoup plus flagrants. Le secteur minier a été affecté par deux problèmes particuliers, celui de la surdité et celui des pneumoconioses. Au niveau de la surdité, les réclamants obtiennent des pensions lorsqu'il y a une diminution réelle de l'ouïe. Les employeurs miniers ont dû, depuis quelques années, verser annuellement plusieurs millions de dollars pour compenser les cas de surdité même si, dans la très grande majorité des cas, il n'y a pas perte d'emploi.

Depuis quelques années, cependant, la CSST accorde aussi des pensions plantureuses pour surdité à des retraités, en invoquant la perte d'intégrité physique et, surtout, leur incapacité de retour au travail. Un des derniers exemples dont on nous a informés concerne un travailleur de 64 ans, à la retraite, qui s'est vu accorder une généreuse pension indexée lui rapportant mensuellement 1471,61 $ pour une incapacité de retour au travail évaluée à 70% à cause de sa surdité. Ce cas a été capitalisé à 222 737 $, somme qui évidemment sera facturée à l'employeur.

Cet exemple est loin d'être unique. Nous savons que des pensions ont été accordées, pour surdité, à des retraités de plus de 70 ans et même de 80 ans. Jusqu'à maintenant, le record concerne une personne compensée pour surdité lorsqu'elle avait dépassé les 90 ans. D'ailleurs, il n'y a pas que les travailleurs manuels qui sont tentés de profiter du système. Nous avons dans nos dossiers le cas d'un ancien directeur de mine qui, même s'il a été peu exposé au bruit pendant toute sa carrière, a obtenu, à 71 ans, une pension de 10% pour surdité à titre d'incapacité de retour au travail et qui, par la suite, a voulu la faire augmenter à 15%. Pour ce faire, on mentionnait dans le rapport d'évaluation: "II possède une formation de base; il sait lire et écrire." Or, on sait qu'il a un diplôme du MIT comme ingénieur et, deuxièmement, on ajoutait qu'il était manoeuvre au traitement de minerai pendant les dix dernières années de sa vie. En ce qui concerne les pneumoconiose (silicose et amiantose), le système établi par la direction de la CSST coûte encore beaucoup plus cher au secteur minier, puisque le travailleur ne peut occuper un emploi sur le site minier lorsqu'on décèle un début d'altération attribuable à la silicose ou à l'amiantose, même s'il n'y a aucune incapacité de travail, ce qui lui permet de recevoir pleine compensation à partir d'une condition évaluée à un DAP de 5% qui ne correspond nullement à une incapacité réelle.

Le travailleur qui perd son emploi reçoit donc jusqu'à sa retraite une pension équivalant à 90% de son salaire net. La plupart de ces cas sont capitalisés à plus de 200 000 $ chacun.

Les experts médicaux nous affirment que l'incapacité physique n'apparaît que lorsque le DAP dépasse 15%. Or, il y a présentement, selon les rapports de la CSST quelque 380 cas, que vous pourrez voir à l'annexe III, qui ont été compensés avec un DAP plus bas que 15%. Cela inclut, bien sûr, le cas de ceux qu'on a appelés les miraculés, parce que, après un examen de contrôle, toute trace de pneumoconiose avait disparu. On en avait repéré 48 en septembre 1983, et, lorsque tous les cas auront été réexaminés, ils pourraient bien se retrouver une centaine. Nous évaluons à une somme de 75 000 000 $ ces pensions accordées sans justification depuis 1975, montant que les employeurs défraient et devront défrayer dans l'avenir.

Les mines d'amiante seulement évaluent à plus de 40 000 000 $ le montant global des pensions inutiles qu'elles ont payées en vertu de ce programme depuis la fin de 1975 et elles contestent devant les tribunaux la légalité de ces paiements par la commission.

Si elles obtiennent gain de cause, elles seront en droit d'exiger un remboursement total, ce qu'elles feront sans doute.

Cependant, si la CSST rembourse les mines d'amiante sans forcer les pensionnés à rembourser la commission, ce qui nous paraîtrait inhumain, ce sont tous les autres employeurs qui seront appelés à payer la note pour couvrir une administration pour le moins discutable de la loi 52 sur l'indemnisation des pneumoconioses.

Nous sommes donc en face d'un beau gâchis que les employeurs miniers essaieront d'empêcher de se perpétuer par tous les moyens possibles. La partie patronale tient absolument à faire table rase de l'ancien programme et à repartir sur des bases raisonnables, c'est-à-dire permettre la réassignation des travailleurs dans les endroits du site minier qui, selon le médecin désigné, seraient compatibles avec l'état de santé du travailleur. Les syndicats nous semblent prêts à accepter cette formule.

Or, on retrouve dans le nouveau projet de loi 42 plusieurs articles sur l'amiantose et la silicose qui non seulement légalisent globalement l'administration de la commission dans ce domaine depuis 1975, mais qui, comme les articles 358, 359 et 360, empêchent toute révision en appel des décisions de la commission en ces matières et stipulent que, nonobstant l'obtention du gain de cause devant les tribunaux d'appel, le pensionné conserve quand même sa rente.

Ici, je ne peux pas résister à vous lire une partie de l'article qui est paru dans le Devoir de ce matin, dont le titre est "Amiantose: la Cour supérieure donne raison à la société Asbestos." Je pense que je peux le citer, parce que c'est public présentement. L'article débute en citant le juge Roland Durand, qui disait: "II est trop facile pour la Commission de la santé et de la sécurité du travail d'être généreuse avec l'argent des autres." Un peu plus loin, on dit: "La CSST interprétait la loi de 1975 à la lumière d'un règlement datant de la même époque et suivant lequel il suffisait que les médecins établissent un diagnostic d'amiantose pour que le travailleur perde son certificat de santé. Il était dès lors considéré par la CSST comme ayant perdu son emploi à cause d'une incapacité permanente. Le travailleur pouvait dans ces conditions retirer 90% de son salaire net à titre d'indemnisé. Bref, la CSST interdisait, dans ses directives administratives aux comités de pneumoconiose, aux comités d'experts comme à ses bureaux de révision des décisions, de considérer les possibilités que l'ouvrier occupe un autre emploi dans l'établissement minier avant de lui accorder une indemnité." Le journaliste cite le juge, encore une fois: "Le tribunal ne peut croire, écrit le juge, que ce soit l'intention de la loi qu'on accorde une indemnité de 90% de son revenu net disponible à un ouvrier atteint de déficit anatomophysiologique nominal de 5% un jour pour, le lendemain, réduire cette indemnité de la moitié parce qu'il est apte à occuper un autre poste pour le même employeur." Le juge blâme également la Commission des affaires sociales de se défiler devant ses responsabilités.

Il y a un autre paragraphe qui peut être intéressant. Le magistrat note que "bien des employés ont perdu leur emploi à cause d'une décision administrative de la CSST qui, en leur retirant automatiquement leur certificat médical, ne tenait pas compte de la capacité réelle du travailleur d'occuper le même emploi ou un autre ailleurs dans l'établissement de son employeur". Fin de la citation.

Tout cela coûte énormément cher aux entreprises minières québécoises et, malgré les récentes déclarations sur la baisse du taux moyen de cotisation, en faisant jouer la réserve accumulée, il faut bien constater que les déboursés des employeurs miniers pour la CAT, d'abord, et pour la CSST, ensuite, ont considérablement augmenté depuis 1975. D'ailleurs, selon les rapports officiels, les dépenses totales de la CAT et de la CSST sont passées, comme vous le savez, de 280 000 000 $ à 946 000 000 $ en 1982.

On pourra voir à l'annexe 4 que dans les mines de métaux non ferreux les déboursés de la CSST sont passés de 720 $ par employé en 1975 à 2502 $ en 1982. Dans le cas des mines de fer, qui font partie d'un groupe différent, ce coût est passé de 192 $ par employé en 1975 à 1085 $ en 1982. La différence de coût entre ces deux groupes de mines s'explique par le fait que les mines de métaux non ferreux doivent, selon la loi, absorber le coût des pensions payées aux anciens accidentés et aux victimes de maladies professionnelles attribuées aux mines fermées. Depuis 1925, il y a au-delà de 50 industries minières qui ont fermé leurs portes. Il y a ainsi plusieurs millions de dollars par année qui sont absorbés par les mines de métaux non ferreux actuellement en fonctionnement. Les dossiers des réclamants attribuables aux mines fermées sont pour nous un énorme problème parce qu'il n'est pas possible d'avoir une information sur leur véracité ou leur validité. D'ailleurs, la CSST refusait, il y a quelques mois, la demande de l'association de recevoir, au nom de ses membres, les informations nécessaires à la compréhension des dossiers attribuables aux mines fermées.

Une telle augmentation de coût peut facilement être interprétée comme une augmentation importante des accidents dans les mines. En apparence, cela est vrai puisque la fréquence des lésions professionnelles compensées a considérablement augmenté depuis les trois dernières années pour revenir, comme nous l'avions dit au début, au cours des

représentations sur la loi 17, presque au même niveau qu'en 1947, c'est-à-dire juste avant l'établissement d'un programme de prévention dans le secteur minier. Le tableau de l'annexe 6 vous en donne l'explication.

La sévérité des accidents a cependant fortement baissé. Par exemple, alors qu'en 1975 les réclamations pour douleurs sans fait accidentel précis et les blessures mineures ne totalisaient qu'environ 15% du total des accidents compensés pour le secteur minier, en 1982, ce pourcentage atteignait 40%. Il y a dix ans - là, je parle pour les employeurs en général - il y avait 60 lésions professionnelles avec perte de temps dans les entreprises québécoises pour 100 accidents sans perte de temps. En 1982, ce chiffre était inversé et, pour 100 accidents sans perte de temps, il y a maintenant 135 autres accidents avec perte de temps.

D'autre part, les statistiques sur les accidents dans le secteur minier nous indiquent qu'en 1977 les blessures majeures, incluant les fractures, représentaient 55% du total des accidents, alors qu'en 1982 ce pourcentage avait diminué à 16%. Vous pouvez vous référer à l'annexe 8 pour ce faire.

De plus, une étude détaillée des accidents du travail dans deux mines en particulier, sur une période de deux ans, nous démontre que seulement 10% des accidentés dans ces deux mines ont eu, au cours de cette période, plus de deux accidents chacun; certains parmi ces 10% en ont eu jusqu'à six au cours des deux ans. Pour nous, c'est une indication claire que beaucoup d'accidents mineurs sont compensés et servent à augmenter la fréquence alors qu'un faible pourcentage des travailleurs miniers abusent du système. (17 h 15)

Quant aux accidents mortels, le rapport annuel de la CSST en rapporte un seul dans les mines et carrières en 1982, alors que le livre blanc sur la santé et la sécurité du travail en rapportait 21 en 1975 et 19 en 1976, pour les mêmes secteurs. Je dois ajouter ici qu'on n'était pas d'accord avec les chiffres de 21 et 19; on croyait plutôt que c'était la moitié de ces chiffres-là. Mais je ferai remarquer à la commission que ces chiffres venaient de la même source que ceux de 1982.

Tout cet ensemble de données statistiques sur les accidents, illustrées dans les annexes VI à X, indique que, pendant que la fréquence totale des accidents compensés augmente, il y a une réduction très marquée des accidents sérieux, tels les fractures, blessures majeures et accidents mortels. Ceci est une indication très claire qu'il y a un grand nombre de réclamations pour malaises mineurs, lesquels font souvent l'objet d'indemnisation sans raison valable. C'est la raison qui nous amène à être convaincus du fait qu'il n'y a pas de contrôle adéquat à la CSST sur la validité et la pertinence des réclamations qui lui sont adressées.

En somme, ce long plaidoyer démontre, selon nous, que le législateur, pour résoudre les problèmes de prévention des lésions professionnelles, a misé sur des objectifs non encore expérimentés en Amérique du Nord, soit le paritarisme forcé et le contrôle des accidents à la source, à l'aide d'une très nombreuse réglementation. C'est ce que nous avons appelé la robotisation de la prévention. Pour implanter un tel système, la loi a prévu la création d'un organisme que l'on nous avait promis modeste et qui est vite devenu la supermachine bureaucratique que l'on connaît. La direction de cet organisme pousse souvent jusqu'à l'absurde la réalisation des objectifs proposés par la loi à l'aide de directives et de règlements dont certains sont fort irréalistes et par des interventions de plus en plus nombreuses à l'intérieur des entreprises, réduisant ainsi considérablement la marge de manoeuvre de ceux qui doivent produire.

L'employeur, qui en défraie entièrement le coût sans aucun droit de regard, se sent étouffé par une réglementation nombreuse, souvent irréaliste, par des interventions au sein des entreprises, non seulement inopportunes mais aussi très coûteuses, enfin par une libéralité telle à l'endroit de la réparation et de la réadaptation qu'il se sent souvent obligé de contester de nombreux cas devant les tribunaux. Tout cela coûte extrêmement cher aux entreprises, en temps aussi bien qu'en argent. Malgré cela, les employeurs miniers ont pu, comme on l'a démontré précédemment, réduire de façon importante les accidents sérieux dans leurs entreprises, même si la fréquence d'accidents dans les mines est revenue au niveau de 1947. Cette augmentation de fréquence s'explique par la libéralité du système de réparation et de réadaptation mis en place par la CSST au cours des dernières années. Ce système a été l'occasion de nombreux abus de la part des profiteurs sans mieux protéger les véritables victimes des lésions professionnelles.

Quant aux employeurs miniers, ils continuent leurs réelles activités de prévention des accidents et des maladies industrielles chez leurs travailleurs en utilisant et en améliorant les approches et les méthodes qu'ils ont expérimentées au cours des dernières décennies. La santé et la sécurité leur semblent trop importantes pour qu'ils abandonnent un système en l'efficacité duquel ils croient fermement et qui a le support, ils en sont convaincus, de la très grande majorité des travailleurs eux-mêmes.

Pour les aider à remplir adéquatement leur rôle en prévention d'accidents en même temps que de réduire autant que possible les coûts inutiles en ces temps de récession, les

employeurs miniers aimeraient faire, au sujet de l'administration de la CSST, trois recommandations principales qui découlent d'ailleurs du contenu de ce mémoire: Premièrement, diminuer le plus possible la réglementation présente et future dans le domaine de la prévention et rendre celle qui existe plus réaliste afin de laisser une marge de manoeuvre suffisante aux employeurs, lesquels ont, qu'on le veuille ou non, le principal rôle à jouer dans la prévention des lésions professionnelles.

Deuxièmement, afin d'éliminer les coûts inutiles qui surchargent les entreprises, les employeurs miniers recommandent d'abord, pour les cas de pneumoconiose, la réassignation des travailleurs qui n'ont pas d'incapacité physique dans des endroits de travail qui, selon les médecins, sont compatibles à leur état de santé. Des dizaines de millions de dollars seront ainsi épargnés et les employeurs impliqués ne deviendront pas des assistés sociaux de luxe au crochet des employeurs. Il est clair, cependant, que la norme "zéro" exigée présentement par la CSST pour la qualité de l'environnement ne règle pas le problème.

Enfin, les employeurs déplorent amèrement que la CSST, ayant à sa disposition des équipements de communication et des ordinateurs hautement sophistiqués, n'ait pas jugé bon d'établir des mécanismes de contrôle sévères pour éliminer autant que possible les profiteurs du système. Ces mêmes employeurs déplorent aussi que la présente Loi sur les accidents du travail accorde à la CSST une latitude presque illimitée au niveau de la réadaptation sociale. Une telle libéralité de la loi et de son administration sert surtout la cause des gens qui en abusent. Malheureusement, le projet de loi 42 va encore plus loin puisque non seulement il ratifie les actions passées, mais accorde beaucoup plus de pouvoirs à la commission. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Blouin): Merci beaucoup, M. Langlois. M. le ministre.

M. Fréchette: Oui, M. le Président, très brièvement. Je vous signale immédiatement que, quant à moi en tout cas, je n'aurai pas de question à poser à M. Langlois. Je voudrais simplement prendre 30 secondes pour les remercier d'être venus nos livrer leurs préoccupations. C'est, à mon sens, si clairement exprimé dans le mémoire que je ne sens pas l'utilité de poser des questions, d'autant plus qu'une bonne partie du mémoire, sinon l'essentiel, est en relation directe avec la loi 42 et, bien sûr, nous aurons l'occasion de rediscuter plus à fond tout ce dont l'Association des mines de métaux se préoccupe dans son mémoire.

Le Président (M. Blouin): Merci, M. le ministre. M. le député de Viau.

M. Cusano: Excusez; si le député...

Le Président (M. Blouin): M. le député de Saguenay.

M. Maltais: Merci, M. le Président. D'abord, un petit préambule très court et des questions très courtes aussi. J'aimerais vous remercier, M. Langlois, ainsi que les membres de votre association, pour votre mémoire.

Tout d'abord, vous avez fait un portrait très visible de ce qui se passe chez vous, dans vos entreprises. Votre mémoire nous démontre aussi beaucoup d'absurdités dans l'application, somme toute, des directives et des règlements de la CSST et nous démontre aussi des coûts tout à fait prohibitifs auxquels vous devez faire face, surtout lorsqu'on voit que le secteur minier n'est peut-être pas le plus progressif, actuellement, à cause de la crise économique au Québec.

Dans votre mémoire, vous soulignez à plusieurs reprises l'ingérence de la CSST dans l'application de ses règlements. Au tout début, j'aimerais souligner d'une façon particulière votre ténacité à vous faire entendre ici en commission parlementaire. Il semblerait que cela n'a pas été facile. Je pense que c'était une tribune pour vous et que vous deviez venir. Au début de votre mémoire également, vous soulignez que l'objectif de la loi 17, loi sur la CSST, a été raté. J'aimerais avoir une précision sur ce que vous dites, à savoir que la CSST, par ses inspecteurs et ses fonctionnaires, connaît très mal le milieu minier. Pourriez-vous expliciter un peu là-dessus?

Le Président (M. Blouin): M. Langlois.

M. Langlois: Ce n'est pas un reproche qu'on peut faire à la CSST de ne pas connaître le milieu minier. Le milieu minier, comme vous le savez, est un milieu très spécifique qui regroupe un nombre assez faible de travailleurs, environ 30 000, et, au niveau des cadres, c'est encore plus restreint. Ce n'est pas le reproche qu'on peut faire. Nous voudrions dire qu'auparavant le service d'inspection était sous la juridiction du ministère des Richesses naturelles. La condition pour devenir inspecteur de ce service dans le secteur minier, c'était d'être ingénieur de mine avec cinq ans d'expérience dans les mines. Lorsqu'on a transféré les services d'inspection à la CSST, on l'a fait selon un tout autre barème et je pense que d'autres l'ont dit avant moi à cette commission. Au lieu d'avoir des spécialistes pour inspecter le secteur, on s'est servi de généralistes. Nous nous sommes complètement opposés à ce

nouveau système et nous n'avons pas réussi à faire entendre notre voix. Il n'est pas étonnant que les nouveaux inspecteurs surtout au début et surtout ceux qui n'étaient pas inspecteurs miniers, parce qu'il y en avait quelques-uns qui étaient aussi ingénieurs - n'aient pas eu la môme connaissance du secteur que lorsque le service d'inspection était sous la juridiction du ministère des Mines. C'était donc un service d'inspecteurs qui faisaient respecter strictement les règlements. Depuis un an ou deux, avec les années, on s'aperçoit qu'on ne peut pas inspecter un secteur minier sans avoir des spécialistes du secteur. On revient, petit à petit, au système des ingénieurs miniers pour l'inspection des services.

Il y a autre chose dont j'aimerais parler au niveau du service d'inspection. Lorsqu'il était sous la juridiction du ministère des Richesses naturelles, ce n'était pas seulement un service de police qui inspectait et donnait des amendes, c'était un service aux employeurs, une sorte de service de consultants offerts aux employeurs, étant donné que ces gens étaient capables de le faire. Il s'est établi un vide dans le secteur à tel point qu'au niveau de notre association, on sent le besoin de faire une restructuration afin de pouvoir fournir des services plus poussés à nos membres. On n'a plus les services qu'on avait auparavant. Ce sont des lacunes très difficiles à corriger avec le système central d'inspection régionale, au lieu de l'inspection sectorielle qu'on avait auparavant.

M. Maltais: M. Langlois, dans votre mémoire, vous dites être un peu effaré par le nombre de règlements que la commission a créés; vous parlez de 41. Vous parlez surtout du dernier pouvoir accordé au P.-D.G. de la CSST; celui-là vous fait mal, il peut en créer d'autres et permet de prescrire toute autre mesure à la mise en application de la présente loi. Vous appréhendez cette situation et cela semble causer des inconvénients pratiques chez vous. Quels sont-ils dans l'application régulière?

M. Langlois: Je vais commencer à répondre et je passerai peut-être la parole à mon ami Claude Drouin, tout à l'heure.

M. Maltais: Oui, allez-y, pas de problème.

M. Langlois: Les inconvénients, en fait, c'est que plus il y a de règlements à respecter, plus la marge de manoeuvre des employeurs diminue, plus cela coûte cher aux entreprises. C'est cela, les inconvénients. On parle de déréglementation; si on s'est montré responsable envers nos travailleurs auparavant, je ne vois pas pourquoi on ne serait pas aussi responsable dans l'avenir. Je pense qu'on l'a prouvé pendant les trente dernières années. La réduction de la marge de manoeuvre fait qu'on se sent étouffé par les règlements, on se sent étouffé par diverses pressions autour de nous qui nous empêchent de travailler, finalement. Quant à la réglementation elle-même, j'aimerais demander à M. Drouin de faire des commentaires.

Le Président (M. Blouin): M. Drouin.

M. Drouin (Claude): Je n'ai pas énormément de commentaires supplémentaires à ajouter, sauf que plus il y a de règlements à respecter, plus on fait face à des normes très spécifiques sur lesquelles il faut agir. Quand je pense à un règlement, je pense à une intervention ponctuelle, à des choses qui se situent à une dimension, sur un élément mesurable ou quelque chose du genre. La mesure d'éléments ponctuels se fait à l'expérience de la réglementation dans le passé; je me réfère en particulier à l'étude d'un nommé Jones, à une étude qui a été faite au Wisconsin. On y déclare que par l'inspection, on ne peut réellement dépister au maximum que 29% d'éléments susceptibles d'être responsables d'accidents. Dans ces 29%, il n'y en a qu'un très petit nombre qu'on va dépister au moment de l'observation elle-même. (17 h 30)

C'est que l'inspection et le respect des normes, tout en étant des éléments extrêmement importants, n'ajoutent pas beaucoup à la possibilité de réduire la fréquence des accidents dans un milieu. Le respect des normes et des règlements est extrêmement important, par exemple, pour la réduction des accidents subséquents à une dégradation graduelle d'un certain milieu. Je pense, par exemple, aux treuils ou encore aux camions, choses dont on est plus facilement conscient; les pneus d'une automobile; un pneu va se dégrader graduellement, tous les jours. On ne le voit pas se dégrader, mais par un système d'inspection ponctuelle variant entre quinze jours et un mois, on est capable de le constater. Alors, pour prévenir les accidents sérieux comme cela, l'inspection est extrêmement importante et nous la souhaitons. L'inspection est aussi importante au point de vue des normes de l'environnement, de l'hygiène du travail, parce que, justement, quand on voit un milieu se dégrader à cause de concentration de poussière ou d'un polluant quelconque, l'observation visuelle est insuffisante. Il faut alors recourir à des mesures réglementaires et des normes. On croit beaucoup à ces choses, mais de là à avoir recours à la réglementation pour toujours aller dans des détails et des affaires, finalement, qui occasionnent des pertes de temps beaucoup

plus que ces sources d'efficacité en prévention, nous n'y croyons pas. Nous préférons des formules ouvertes qui donnent la chance aux parties, quand elles se rencontrent en milieu de travail, de se prendre en main et de s'autoréglementer par un programme de formation, un programme de motivation des parties.

Je ne suis pas contre la réglementation, mais, à un moment donné, ce n'est pas un outil de prévention, c'est un outil de nuisance.

M. Langlois: Quelques commentaires à ce sujet-là. La foule de règlements qu'on nous présente depuis un certain temps, cela veut dire énormément de travail, surtout quand ces règlements-là sont passablement farfelus. Il y a des fois où il faut discuter très longtemps pour les faire disparaître ou les amener à une base un peu plus réaliste. Je vous en ai mentionné deux ou trois au niveau des campements temporaires, par exemple, ou des choses comme cela. On perd énormément de temps alors que ce temps peut être employé ailleurs.

Le Président (M. Blouin): Cela va?

M. Maltais: Au niveau de la prévention, M, le Président - et peut-être que pour la bonne marche, M. Langlois, je vais m'adresser à vous et vous pourrez...

M. Langlois: D'accord.

M. Maltais: ...répartir les... - vous affirmez dans votre mémoire que ce qui se faisait avant était aussi bon et peut-être moins astreignant que ce qui se passe aujourd'hui. Il y a une chose qui me frappe, c'est que, semble-t-il, la loi 17 a stoppé les initiatives paritaires au niveau de l'employeur et du syndicat. Et je pense que, surtout dans le domaine minier, cela demande quand même une grande concertation de la part des deux parties parce que les patrons sont à l'extérieur et que les mineurs sont sous la terre. Alors, je pense que si cet esprit d'initiative est coupé entre les deux parties, cela doit présenter quand même des problèmes réels chez vous. Peut-être un petit mot d'explication là-dessus.

M. Drouin: Je pense qu'on nous interprète mal quand on dit cela.

M. Maltais: Oui, d'accord.

M. Drouin: La prévention comporte trois éléments: les conditions de travail, les méthodes de travail et les comportements des personnes en place. Les conditions de travail, ce sont les sources, par exemple, comme on parle dans la loi; la loi parle du contrôle à la source. On est d'accord avec cela à 100%, excepté que le contrôle à la source, en 1950, était beaucoup plus facile à faire qu'il ne l'est en 1980. Parce qu'il y a une loi qui s'applique en économie et qui est applicable en prévention aussi, c'est la loi qu'on pourrait appeler loi sur le rendement décroissant. En 1950, quand on faisait face à des conditions de travail - où c'était la mode de 1950 - corriger la source était facile. Tout était trou. Alors, boucher les trous, ce n'était pas compliqué, cela allait bien. Alors, c'était à l'état... De 1945 à 1950, c'était le début de la prévention systématique dans l'industrie minière. On a fait beaucoup de contrôle à la source, mais à mesure qu'on se raffine, le contrôle à la source devient aussi beaucoup plus raffiné et beaucoup plus exigeant. Il faut passer de la phase ordinaire, de bloquer par une barricade, ou quelque chose comme ça, de passer à des méthodes sophistiquées, mais la technologie n'est pas toujours là pour les corriger. Le meilleur problème qu'on peut connaître, c'est le bruit. On n'a pas les outils technologiques pour être efficace en protection contre le bruit. Mais pour protéger le milieu contre le bruit, cela prend beaucoup d'argent. Et ce n'est pas seulement une question d'argent, c'est que ce n'est pas nécessairement efficace. Je ne connais pas de chiffres précis, mais je connais très bien des sources ponctuelles qu'on a corrigées. Pour une seule source, on est rendu à 35 000 $. Quand il faut multiplier cela par le nombre de postes de travail, à un moment donné, cela devient une fortune.

Prévenir à la source, on est d'accord à ce que ce soit dans la loi. Le projet de loi parle de prévenir à la source. C'est le premier principe de la loi. Elle parle un peu des méthodes, mais elle n'est pas précise au sujet des méthodes de travail, parce que les méthodes de travail, c'est quelque chose qui relève de l'acte de production. On ne peut pas dissocier l'acte de production de l'acte de prévention. Il n'y a pas une activité qui ne comporte pas de risques. Il n'y en a pas une seule. Cela veut dire que, quand un homme fait une action en même temps qu'il travaille, il s'expose à quelque chose. L'exposition peut venir soit à partir du milieu, à partir de l'équipement avec lequel il travaille. Elle peut venir aussi à partir de la supervision de la conception de l'individu lui-même. L'acte de travail lui-même est indissociable.

La philosophie que nous avons développée concernant les mines, depuis 1942, appliquée depuis 1948 chez nous, fait qu'on a dit: On ne peut pas vivre autrement qu'en faisant de la prévention à travers la supervision. C'est pour cela que notre travail se fait par le truchement d'une association d'employeurs et non pas par une association sectorielle; pas encore. Je vais revenir à l'association sectorielle dans un instant, par

exemple. Permettez-moi de finir, vous n'avez pas le clou de la vraie réponse encore. Quand vous parlez de prévention par la supervision comme cela, c'est dire qu'on ne dissocie pas la production de la sécurité et il faut continuer en ce sens.

La loi n'a pas renié la prévention par la production. Elle n'en a simplement pas parlé, sauf indirectement à l'article 51 de la loi 17 où elle décrit l'obligation de l'employeur de donner de la supervision adéquate à ses gens et toutes ces choses-là. Mais, dans la loi, on a décidé que le principal outil d'intervention de la loi ne serait pas l'employeur. On dit plutôt tout au long que les parties vont se prendre en charge. Elle a mis l'accent sur le paritarisme. On n'est pas contre le paritarisme, on y croit. Pour notre part, l'Association des mines a pressenti la partie syndicale pour de l'action non paritaire. On n'est pas allé aussi loin que là. Le mois dernier, on n'en était pas encore rendu là.

L'action conjointe, à partir de 1975, on y a cru et on y croit encore. Cependant, il y a une différence entre se fier à un groupe de gens à l'extérieur de l'acte de production. Dans mon cas, concernant l'association de prévention, je ne me considère pas comme faisant partie de l'équipe de production. Je fais partie d'une équipe d'appui. Selon moi, le paritarisme, ce n'est pas une activité clef, c'est une activité d'appui. La loi dit que cela sera une activité clef tandis qu'on dit qu'il y a inversion dans la loi. Elle a pris une activité d'aide et elle en a fait le maître d'oeuvre. Nous ne croyons pas à cela. Nous disons que la loi va faire du bien éventuellement. M. Laberge, par exemple, disait hier que les parties vont changer d'attitude, d'accord, mais cela ne changera pas nécessairement au jour le jour l'action quotidienne qui doit être faite sur les lieux de travail. C'est là le but de l'intervention. On ne conteste rien, on dit que ce n'est pas la formule idéale.

Le Président (M. Blouin): Cela va, merci. M. le député de Saguenay.

M. Maltais: M. Langlois, dans le domaine de la médecine industrielle, vous ne semblez absolument pas d'accord avec ce qui se passe présentement, surtout que la CSST a confié ce domaine aux DSC. Vous déplorez le manque d'équipement. Vous déplorez finalement que ce soit le travailleur qui souffre de cette cause. Vous pourriez peut-être nous donner des petites explications là-dessus.

M. Langlois: Remarquez qu'on parle pour le secteur minier.

M. Maltais: Oui, toujours.

M. Langlois: On ne parle pas pour les autres secteurs. C'est une autre histoire. En ce qui concerne le secteur minier, on est passablement bien organisé. En fait, c'est en 1942 qu'on commence à s'occuper non pas de médecine industrielle comme telle, mais de silicose. On a formé le premier comité de silicose. On a fait des efforts pour obtenir, au début, un arrêté en conseil pour l'examen médical annuel, l'examen pulmonaire annuel à partir de 1946. On est venu à bout d'obtenir du gouvernement, en 1952, cet arrêté en conseil. En 1956, on a eu un médecin à l'association pour s'occuper plus particulièrement de la silicose. On s'est toujours occupé de cela et on a structuré nos services au niveau de l'association. À partir de 1956, on a pratiqué le retrait préventif à l'intérieur de l'entreprise, basé sur l'examen médical et basé sur l'analyse du milieu en fonction des poussières et tout cela. Donc, on a reclassé, on a fait de la réassignation au sein de nos entreprises à partir de 1956, ce qui nous a été enlevé par la loi 52 en 1975 parce que dès qu'on excluait le site minier, il n'y avait plus moyen de faire du retrait préventif à l'intérieur des entreprises. Ceux qui avaient perdu leur certificat médical étaient tout simplement compensés. On a continué, on a eu un autre médecin spécialiste pour l'ouïe en 1974 ou 1975, à temps partiel. Finalement, on a plusieurs médecins qui travaillent, cela coûte de l'argent, c'est évident. Cela coûte beaucoup plus cher que le système qu'on propose, mais c'est évident que ce n'est pas un système qui peut être étendu à tous les secteurs. Je comprends très bien la CSST de ne pas vouloir le faire.

Finalement, on arrive avec un système en confiant cela au DSC, des gens qui ne sont pas au courant de la médecine industrielle, qui ne sont pas des spécialistes en médecine industrielle et qui ont une population énorme à voir. Je pense que M. Drouin pourrait nous donner des chiffres à ce sujet. Dans le Nord-Ouest, il y a un ou deux médecins, par exemple, pour toute la population, pour tous les employés alors qu'on doit en avoir cinq ou six seulement pour le secteur minier. À ce point de vue, on dit que ce n'est pas intéressant pour nous autres de faire reconnaître nos services, même si on sait très bien qu'on va payer pour les services qui sont fournis par la DSC à travers la CSST.

Le Président (M. Blouin): Cela va? M. Maltais: Non, je n'ai pas fini.

Le Président (M. Blouin): D'accord, allez-y.

M. Maltais: M. Langlois, au niveau des

budgets, lorsque vous parlez ici dans votre mémoire en page 8 que tout au plus il devrait y avoir un budget de 16 000 000 $ consacré à la prévention et qu'en 1983 on se dirige vers 80 000 000 $, vous avez peur que cela s'accentue encore beaucoup plus. Au niveau de l'efficacité, cela représente quoi cette augmentation? Est-ce que véritablement le travailleur profite de ces millions qui sont consacrés à la prévention?

M. Langlois: Écoutez, je réponds encore pour le secteur minier. Je ne nie pas que certains secteurs aient négligé la prévention et que ce système peut être utile pour eux. Dans le secteur minier - c'est peut-être un peu cela qui nous choque - on pense qu'on n'a pas besoin de ce système et que le système qu'on a établi d'ailleurs va un peu à l'encontre de nos principes de base en prévention d'accidents. En fait, c'est une remise en question de ce qu'on a fait depuis 30 ou 35 ans et on pense qu'on a encore la vraie solution. On ne peut pas imaginer que le nouveau système basé strictement sur le contrôle à la source et le paritarisme va amener des résultats supérieurs à ce qu'on a. C'est pour cela qu'on dit dans notre mémoire qu'on continue à garder notre système même si c'est embarrassant.

À ce point de vue, le système de prévention qui a été instauré par la loi 17 et la CSST ne nous rapporte rien. Je ne sais pas si M. Drouin veut continuer à commenter à ce sujet, mais de toute façon, pour ma part...

Le Président (M. Blouin): Votre position est très claire. M. le député de Saguenay.

M. Maltais: Écoutez, en tout cas, il se reprendra tout à l'heure... Il y a une chose qu'on remarque, c'est que vous avez une peur bleue de l'ingérence continue de la CSST dans l'application des règlements chez vous. Est-ce bien cela que j'ai saisi aux pages 9 à 12? Ce qui ressort de cela, finalement, c'est que vous êtes en conflit continuellement dans l'application de ces règlements par rapport à la CSST?

M. Langlois: On ne peut pas dire qu'on a une peur bleue, mais on dit que la plupart de ces règlements sont inutiles, sont embarrassants et qu'ils réduisent la marge de manoeuvre des employeurs. On s'est conformé au règlement du programme de prévention. Cela a coûté énormément de temps et d'argent d'abord à l'association et après cela aux entreprises aussi sans que, d'après moi, cela rapporte grand-chose, du moins, pas pour le temps qu'on a consacré à cela et l'argent qu'on a investi pour préparer un programme de prévention, le déposer avant la date limite. On l'a fait avant la date limite. Je pense que les 100% d'entreprises minières concernées qui dépendent de l'association se sont conformées à la loi. On est un des seuls secteurs qui l'ait fait. On le fait, mais on n'est pas sûr du tout que cela rapporte pour l'argent et le temps qu'on met là-dedans. (17 h 45)

Le Président (M. Blouin): Merci. M. le député.

M. Maltais: M. Langlois, vous parlez beaucoup dans votre mémoire, particulièrement à la page 15, de pouvoirs arbitraires de la commission. Je cite: "Parmi beaucoup d'autres, l'article 35, par exemple, stipule que la commission décide d'elle-même si le travailleur est atteint d'amiantose ou de silicose; par l'article 250..."

M. Langlois: C'est la prochaine loi 42. M. Maltais: C'est la prochaine loi.

M. Langlois: Mais, en fait, on le pratique déjà.

M. Maltais: Vous le pratiquez déjà.

M. Langlois: C'est déjà pratiqué par la commission dans les cas de pneumoconiose, d'amiantose et de silicose. Certains jugements ont été rendus par des tribunaux de révision de la CSST dans lesquels, après un réexamen de l'employé qui avait 15% de déficit anatomophysiologique, après un examen de contrôle, on s'apercevait qu'il n'y avait plus rien. Autrement dit, des supposés miraculés. Il y a des déclarations des médecins qui disent: Nous, on a des directives, et étant donné que c'est une maladie qui est non régressive, on ne peut pas baisser le pourcentage.

M. Maltais: Au sujet des indemnités versées aux accidentés, vous n'y allez pas non plus de main morte. Vous avez des exemples bien concrets. Vous nous dites qu'il y a ni plus ni moins que des parasites des indemnités. Vous déplorez aussi - je suis très surpris de lire cela, je croyais que c'était plus sérieux - des critères d'admissibilité aux indemnités. Il semblerait que cela aurait une drôle d'influence sur vos coûts de production parce que vous avez une partie des cinq premiers jours que vous payez maintenant. Il semblerait aussi que les exigences de la CSST au niveau de l'admissibilité de ces critères... Finalement, tout le monde a un petit rhume et tout le monde vous coûte cinq jours. Est-ce fréquent et est-ce que cela vous cause des problèmes réels?

M. Langlois: Auparavant, au temps de la CAT, même si cet organisme n'était pas parfait, on avait certains inspecteurs. Premièrement, la déclaration d'accident

devait être paraphée par l'employeur et par l'accidenté. Maintenant, bien souvent, on ne s'occupe plus de la signature de l'employeur. Je ne sais pas si c'est dans la loi ou pas mais, de toute façon, on l'a mis dans la loi 42. En pratique, il arrive très souvent qu'un supposé accidenté va faire un rapport d'accident, va le signer lui-même, va l'envoyer à la CSST et l'employeur reçoit simplement le compte. Il est averti quand il reçoit la facture. C'est de cette manière que le système est très libéral. Nous, de toute façon, nous ne voyons aucun contrôle au niveau de ces cas.

En fait d'enquête, par exemple, à ma connaissance, il n'y a plus d'inspecteurs qui se promènent pour voir si les cas sont véridiques ou pas. Il y a toute une série de choses comme cela qui ont libéré le système. En libérant le système, c'est comme toute autre chose, il y en a qui en abusent. Il y a trois catégories: les professionnels, qui sont, à notre avis, un très petit nombre de gens qui essaient de passer leur vie avec les pensions de la CSST; il y en a d'autres... j'allais pour dire les accidents de chasse. Il y a la lettre qui parle des gens qui voulaient aller à la chasse. Je pense que les gens voulaient simplement aller à la chasse, c'était occasionnel. Étant donné que c'est facile de faire des réclamations à la CSST et d'avoir des pensions, en trichant un peu le système, on abuse. Moins il y aura de contrôle, plus on va abuser.

Je suis venu ici hier et avant-hier, un peu, et j'ai entendu des associations d'accidentés qui trouvent qu'ils n'en ont pas assez. Ils auraient probablement dit la même chose il y a dix ans, alors que le système était beaucoup plus fermé; il y avait tout de même certains inspecteurs qui contrôlaient les cas d'accident, ceux qui paraissaient louches. On libéralise encore plus et on se représente à la commission parlementaire pour dire qu'on n'en a pas encore assez. Évidemment, il n'y a pas de limite à cela.

Tout ce qu'on veut, c'est un certain contrôle; on veut pouvoir compenser les accidentés, mais les vrais accidentés. Ceux qui abusent du système, on veut pouvoir les contrôler jusqu'à un certain point. C'est simplement ce qu'on demande.

M. Maltais: M. Langlois, à un moment donné dans votre mémoire, aux pages 21 et 23, vous accusez somme toute la CSST de ne pas faire la récupération d'argent à laquelle elle a droit dans certains cas. Un peu plus loin, vous dites ni plus ni moins qu'elle dilapide les fonds, ce qui augmente vos cotisations qui sont, d'après vous, un peu trop élevées.

M. Langlois: Je n'ai pas utilisé l'expression "dilapider les fonds".

Le Président (M. Blouin): Un instant, M. Langlois, s'il vous plaît! M. le député va compléter sa question.

M. Maltais: Non, c'est mon interprétation de ce que j'ai compris, M. Langlois. Ce n'est pas vous qui le dites dans votre mémoire. Je comprends très mal cette façon, parce que si on ne récupère pas là où on doit récupérer et, finalement, si on... Vous dites que, dans la distribution des fonds, c'est un rôle dans lequel elle excelle. C'est une manière un peu cynique de le dire, mais il semblerait que ce soit la vérité. C'est quoi, au juste, cette histoire-là?

Le Président (M. Blouin): M. le député de Saguenay, désirez-vous obtenir des... Il me semble que l'exposé dans le mémoire est assez clair. Avez-vous une question relativement au contenu du mémoire?

M. Maltais: Pour moi, cela est une antithèse, M. le Président. D'une part, on dit que c'est une pratique connue de la commission de ne réclamer que très rarement ces fonds. Pour moi, c'est un préambule. Plus loin, on dit que la commission peut prendre toute initiative qu'elle désire au niveau de la distribution des fonds. Pour moi, c'est une question. Elle ne récupère pas les fonds. C'est une pratique courante et c'est plus facile pour elle de donner des fonds que de les récupérer. C'est un peu ce que vous nous dites.

Le Président (M. Blouin): D'accord. C'est une question. M. Langlois.

M. Maltais: C'est aux pages 21 et 23. C'est ce que je voudrais savoir.

M. Langlois: Évidemment, ce n'est pas tellement facile d'aller chercher des fonds qu'on a accordés, même par erreur, à des gens lorsqu'ils sont dépensés. Il est possible... On ne veut pas être absolu là-dedans, mais l'impression qu'on a... Moi, de toute façon, je n'ai jamais eu connaissance qu'on ait obtenu des fonds pour un employé ou un soi-disant accidenté, même par erreur, s'il n'y avait pas droit. Dans le cas des cinq jours, c'est patent. Même si le cas n'est pas accepté, l'employeur a payé les cinq jours et ce n'est pas l'employé qui rembourse l'argent à la commission. Évidemment, la commission le donne à l'employeur. Ce que l'employeur a donné est remboursé par la CSST - les cinq jours - par la suite, mais ce que la commission fait, elle transporte cet argent au fonds général, qui est aussi le fonds des employeurs.

M. Maltais: Vous parlez aussi, M. Langlois - toujours dans votre mémoire -d'un très généreux système de pension à des

retraités, et vous nous donnez des exemples. Il y en a même pour qui c'est plus payant de recevoir les prestations d'accident du travail que de travailler, avec ces pensions. J'imagine que ce sont quand même des cas particuliers et que je dois comprendre que ce n'est pas généralisé dans votre domaine, particulièrement aux mines, ou est-ce que ce sont des cas généralisés?

M. Langlois: C'est très difficile de répondre à cela. Cela reste toujours des cas particuliers, mais quand les cas sont tellement nombreux, cela devient presque une politique. Je pense que c'est même légal de le faire, en vertu de l'article 56. L'interprétation de l'article 56 est tellement large que je pense qu'on peut le faire légalement. On peut accorder ces pensions légalement, parce que ce n'est pas précisé. On pourrait le citer. Il est en annexe ici. Il reste une chose: quand on dit que ce sont des particuliers, il faut bien s'entendre; dans les cas de pneumoconiose, de silicose et d'amiantose, ce ne sont plus des cas particuliers, parce que tous les cas en haut de 5% qui, selon nous, ne correspondent absolument pas à une déficience physique, sont compensés automatiquement, parce qu'ils perdent leur certificat médical. Ce n'est plus un cas particulier. C'est un cas général. Dans le cas des compensations pour surdité, il faudrait voir... Je pense que c'est la direction de la CSST, beaucoup plus que nous, qui peut répondre à cela. Nous disons qu'il y a beaucoup de cas semblables. C'est tout ce qu'on peut dire.

M. Maltais: M. Langlois, à un moment donné, vous comparez les coûts de 1975 à 1982, au niveau des deux sortes de mines: les mines de fer qui font partie d'un groupe différent et les mines non ferreuses. Est-ce la même proportion d'augmentation qu'on a vue ou qu'on voit dans d'autres industries, par exemple, la construction ou je ne sais quoi? C'est quoi, la proportion?

M. Langlois: Je n'ai pas comparé avec d'autres industries. Je ne pourrais pas vous dire si les proportions sont les mêmes. Simplement, si vous vous référez...

M. Drouin: Je peux vous donner une explication. Il y a, évidemment, l'inflation qui est une chose, mais vous avez une explication à l'annexe 6 du tableau où on voit la variation de l'échelle des indemnités d'une année à l'autre. Vous avez la courbe au-dessus qui donne le taux d'indemnisation en fonction du système. Le système est lui-même plus généreux, surtout depuis l'adoption de la loi 114. C'est une explication de l'augmentation du coût. L'augmentation du coût n'est pas seulement conséquente à ce qu'on peut appeler de la libéralité, c'est le système aussi qui est devenu plus généreux.

M. Maltais: Mais, lorsque vous faites vos statistiques, est-ce que vous les faites...

M. Drouin: Non, je ne fais pas de statistiques, je les regarde seulement.

M. Maltais: Vous les regardez. Mais, est-ce que, dans la comparaison, on inclut le nombre d'heures travaillées, par exemple, proportionnellement? Est-ce qu'on a tenu compte de la proportion? Disons qu'en 1975, il y avait 10 000 000 d'heures travaillées. En 1982, j'imagine qu'il y en a moins de 10 000 000.

M. Drouin: Ce sont des tableaux de fréquence.

M. Maltais: D'accord.

M. Drouin: Cela tient compte du nombre d'heures. Je parle des statistiques en noir, non pas la ligne du haut.

M. Maltais: Vous nous dites finalement, à la fin de votre mémoire, qu'il y a quand même encore beaucoup d'accidents. Le domaine minier, c'est malheureusement un domaine, comme vous l'avez souligné, qui n'est pas facile. Est-ce que, dans les accidents qu'on retrouve depuis cinq ans, il y a moins de pertes de vie ou est-ce qu'il y a moins de blessures plus graves comme la perte de membres et ces choses-là?

M. Drouin: Vous avez la réponse, M... J'ai des problèmes, ici, et je ne me rappelle pas votre nom, M. le député de...

M. Maltais: Maltais, député de Saguenay.

M. Drouin: La réponse est ici dans le tableau de l'annexe VIII où on voit justement le taux de variation des accidents sérieux. On voit que les accidents sérieux sont passés de l'ordre d'environ 55% en 1977 à environ 16% en 1982. On est rendu environ à 19% en 1983, à l'heure actuelle. Le nombre total d'accidents sérieux diminue. C'est une statistique par rapport au nombre d'accidents compensés. Cela veut dire qu'en 1977, 45% des accidents compensés étaient considérés comme des accidents mineurs, tandis qu'en 1982, on est rendu à 84% des accidents jugés mineurs compensables. C'est cela qu'on vous dit justement. Avant cela, l'annexe VII démontre la même chose, savoir que, par exemple, en 1973, pour 100 accidents mineurs, 66 étaient sérieux, tandis qu'en 1981, pour encore 100 accidents mineurs, 132 sont sérieux, c'est-à-dire sont compensables. Cela veut dire qu'il y a

quelque chose qui ne tient plus dans tout cela. La fréquence augmente et, malgré tout, le taux d'accidents sérieux diminue.

M. Langlois: Pour les accidents mortels, la preuve est encore plus éclatante. Pour les membres de l'AMMQ, il y a un dernier tableau, à la page 10. Il y en avait douze en 1974 et, en 1982, il y en avait un. Évidemment, il y en a eu neuf en 1980, à cause de l'accident de Belmoral, mais cela a diminué graduellement.

M. Maltais: J'ai presque terminé, M. le Président, si vous le permettez.

Le Président (M. Blouin): II faut suspendre à 18 heures précises. Si vous pouviez conclure...

M. Pagé: On continuera tantôt.

M. Maltais: II nous reste quand même quelques minutes.

Le Président (M. Blouin): Oui.

M. Maltais: Dans votre conclusion, il y a quand même plusieurs points marquants. Il y a trois recommandations bien spécifiques, mais il y en a une qui semble tout à fait inacceptable pour l'ensemble de l'industrie minière. Vous dites ni plus ni moins: C'est un organisme qui devait être modeste et qui est devenu un monstre.

M. Langlois: Exactement. D'ailleurs, on n'a qu'à faire référence à la préface du livre blanc et aux paroles de M. Marois, qui le disait lui-même. On a commencé par la loi 17. Je pense qu'on a oublié le livre blanc dans la brume, lorsqu'on a rédigé la loi 17, parce que, dans la loi 17 elle-même, il y a un article, par exemple, qui touche 41 champs d'activité plus un 42e où on profite de la réglementation sur n'importe quoi; quand un organisme administre seulement un article comme celui-là, il faut qu'il soit gros. Tout de suite, la loi 17 contredit les objectifs du ministre Marois dans la préface du livre blanc. Premièrement, on est pris avec cela: cet organisme découle de la loi 17. En plus de cela, je pense qu'on l'a amplifié passablement.

Le Président (M. Blouin): Merci, M. Langlois. Merci, M. le député de Saguenay. On pourra revenir à 20 heures. Pour le moment, la commission élue permanente du travail doit suspendre ses travaux jusqu'à 20 heures.

(Suspension de la séance à 18 heures)

(Reprise de la séance à 20 h 21)

Le Président (M. Gagnon): À l'ordre! Lors de la suspension de nos travaux, nous étions à entendre l'Association des mines de métaux du Québec Inc. Je pense que l'audition du mémoire était terminée et que le député de Saguenay avait la parole. M. le député de Saguenay.

M. Maltais: Merci, M. le Président. Alors, nous en étions rendus au préambule, avant la conclusion du rapport. Et à la page 36, vous nous dites, messieurs, que, malgré les enfarges de la loi 17 et malgré aussi la difficulté d'application des nombreux règlements promulgués par cette loi et par la CSST, nombreux règlements que vous êtes obligés d'appliquer, vous continuez les activités de prévention des accidents et aussi des maladies industrielles. J'imagine que lorsque vous continuez ces activités, ce sont des coûts également parce qu'il n'y a rien de gratuit.

Finalement, on peut dire que, malgré la réglementation qui s'applique aux travailleurs, vous êtes conscients que cette réglementation n'est pas suffisante et vous êtes obligés de continuer de prévenir quand même, d'investir des sommes pour prévenir.

M. Langlois: On ne dit pas que la réglementation n'est pas suffisante, justement parce qu'on dit qu'il y a trop de réglementation. Et une de nos recommandations, la première, c'est la déréglementation. Ce qu'on dit tout simplement, c'est qu'on avait un système auparavant et qu'on aimerait bien qu'on nous laisse travailler. C'est pour cela qu'on suit... On a des approches auxquelles on croit, on a une base de prévention qui est établie depuis 35 ou 40 ans à laquelle on croit et qu'on a rodée pendant toutes ces décennies. On ne veut pas, justement, avoir une réglementation qui nous empêche de travailler à l'intérieur de notre schème. On est prêt à subir la réglementation qu'il y a, mais ce n'est pas parce qu'on le veut.

M. Drouin: Je n'en ai pas tellement long à ajouter, c'est qu'on va se conformer à tous les règlements qui vont sortir. Et le meilleur exemple qu'on puisse vous donner, c'est le règlement sur le programme de prévention. On a mis tous les efforts en marche pour s'assurer qu'on ferait de bons programmes de prévention parce qu'on trouvait dans le programme une quantité d'éléments intéressants. Comme, par exemple, le règlement mettant l'emphase sur l'entretien préventif, c'était une faiblesse qu'on avait chez nous, on en a profité pour renforcir la question de l'entretien préventif. Le règlement mettait de l'emphase sur les normes; on n'est pas d'accord avec l'approche des normes, mais on sait qu'il y avait des faiblesses là-dessus, on a embarqué.

On embarque dans tout cela, mais tout ceci pour dire qu'on va prendre dans la loi tout ce que l'on voit, où l'on est certain que cela va nous aider à faire avancer la cause; on va embarquer. Mais on ne changera pas la priorité. La priorité, pour nous, c'est la supervision et on va continuer là-dessus. On ne dira pas que c'est à travers des comités qu'on va s'acquitter de nos responsabilités. L'article 51 de la loi définit un paquet de chapitres. On n'est libéré d'absolument rien au point de vue des responsabilités. On va continuer là-dedans. Mais ce ne sera pas à travers le paritarisme qu'on croit pouvoir atteindre les objectifs beaucoup plus progressifs que ce que l'on a là. Mais on va collaborer à 100% partout où c'est possible.

M. Maltais: D'accord. Ma question -peut-être que je n'ai pas été assez clair -c'est qu'en sus des 42 règlements vous appliquez une politique qui vous est propre. Cette politique...

M. Drouin: Exactement.

M. Maltais: ...entraîne automatiquement des coûts, ce qui veut dire que vous avez ni plus ni moins une double taxation de ce côté. C'est une taxation volontaire de votre part.

M. Langlois: On est habitué à cela et on l'assume.

M. Maltais: Cela nous amène aux conclusions, M. Langlois. Parmi vos trois recommandations qui sont, je pense, très claires, la première nous dit que finalement la loi 17, dans son application, n'est pas réaliste, qu'il y a des irritants - c'est un mot bien à la mode par les temps qui courent - continuels et que toute cette réglementation n'apporte rien de nouveau aux travailleurs. Est-ce que c'est vrai?

M. Langlois: Très peu; je ne peux rien dire parce que c'est un mot absolu, mais très peu à nos travailleurs. Je pense que M. Drouin s'est exprimé très bien dans le cas du règlement sur le programme de prévention. Certains autres règlements n'apportent rien du tout. Il y a certains règlements qui sont proposés et on est obligé de se battre pour les éliminer parce qu'ils ne sont pas réalistes, ou les ramener à une base un peu plus réaliste.

M. Maltais: Si je comprends bien, parmi les 42 règlements vous trouvez qu'il y en a un peu trop.

M. Langlois: C'est-à-dire les 42 champs d'activité...

M. Maltais: Champs d'activité.

M. Langlois: C'est différent parce qu'un champ d'activité peut vouloir dire beaucoup de règlements. On dit qu'on ne résoudra pas le problème seulement avec des règlements. Cela en prend certains. Il y a certains règlements qui sont nécessaires, mais c'est ce qu'on appelle la robotisation de la prévention. Cela serait trop facile d'avoir toute une série de règlements très détaillés où on pourrait dire: On applique tel règlement et on règle le problème. Ce n'est pas vrai. Le problème de la santé et de la sécurité du travail se règle aussi avec les personnes. C'est la responsabilisation des personnes qui est le plus important élément dans cela. Beaucoup plus que les règlements. On ne nie pas qu'il doit y avoir de temps en temps certains règlements, mais une foule de règlements qui essaient de régler tous les détails, on est absolument contre cela. À notre point de vue, cela va à l'inverse de la responsabilisation parce que, quand tu as 100 ou 200 règlements, tu te fies sur les règlements et finalement tu n'es pas incité à faire de la prévention toi-même. C'est aussi simple que cela.

M. Maltais: Dans la recommandation 2, M. Langlois, vous dites: II est clair, cependant, que la norme zéro exigée par la CSST pour la qualité de l'environnement ne règle pas le problème. Là-dessus, vous faites référence à certaines maladies industrielles et aussi aux critères d'admissibilité qui ne font pas votre bonheur. Vous trouvez que la mesure est un peu trop "at large", si je peux m'exprimer ainsi. Finalement, c'est un contrôle tatillon et en réalité ce n'est pas un véritable contrôle, cela ne vous satisfait pas.

M. Langlois: Quand on parle de la norme zéro, c'est au niveau de l'amiantose et de la silicose. La CSST exige pour réassigner notre travailleur - elle n'est pas contre en principe - qu'il y ait zéro poussière d'amiante et zéro poussière de silice sur le site minier. Cela est irréaliste. On peut se promener ici dans la salle et on va trouver des poussières d'amiante et des poussières de silice. Donc, c'est absolument irréaliste. C'est aussi bien de dire qu'on défend de réassigner les travailleurs sur le site minier. Je ne sais pas si tu veux... (20 h 30)

M. Drouin: Moi, je regarde cela. Si je me rappelle les débats de 1975, la norme zéro, le mot était sorti cette fois à l'occasion d'une déclaration du Dr McDonald qui disait que la seule façon de s'assurer que quelqu'un ne fasse plus d'amiantose est de ne plus être jamais exposé à l'amiante. C'était quelque chose dans ce genre, je ne me rappelle pas les détails. C'est cela que cela voulait dire. C'est clair. La meilleure façon, d'ailleurs, de prévenir le divorce, c'est

d'interdire le mariage. C'est évident que c'est quelque chose dans ce genre qu'il faut faire. Mais la norme zéro, il y a une incongruité là-dedans qui vient du fait que ce n'est pas conforme à la politique de l'American Public Health Association qui était le barème utilisé par les médecins avant l'entrée en vigueur de la loi 52. Le retrait préventif d'un travailleur dans un milieu où il était exposé à la poussière ne dépendait pas seulement d'une observation de la qualité de ses poumons ou encore de sa capacité physique de respirer. Cela dépendait des années d'exposition et de la qualité de l'exposition. Par exemple, on disait: Quelqu'un qui avait atteint un état pulmonaire quelconque après 35 ans d'exposition, il lui restait deux ans d'exposition à faire et ils disaient: Ce type-là n'aura pas de problèmes à continuer jusqu'à la fin. En fait, les problèmes psychologiques qu'il est susceptible de développer si on le retire du milieu sont plus graves que les problèmes qu'il peut développer dans la continuation de l'exposition; mais, pour le même type d'exposition, un type qui a 35 ans ou 30 ans a besoin d'un retrait après cinq ou six ans d'exposition. En d'autres mots, la norme zéro est une norme administrative facile à régler, tandis que la norme ou la politique de l'APHA est une solution de problèmes cas par cas sur une base professionnelle, sur une base médicale. Je suis convaincu qu'un type de 35 ans qui aurait, par exemple, une radiographie d'une certaine importance, doit sortir complètement du milieu. Quand il est rendu à 63 ans, le problème n'est plus là. La norme zéro, c'est relatif. C'est fonction de quelque chose de beaucoup plus grand que du simple point de vue administratif.

M. Langlois: J'aimerais vous apporter un exemple de ce que je vous ai dit tout à l'heure au sujet de la norme zéro. On en a eu un exemple dans une mine de la Côte-Nord où un travailleur avait des rayons X ou une radiographie pulmonaire qui montrait des signes de silicose. On a voulu le recycler dans une chambre d'ordinateur, à atmosphère contrôlée, mais on n'a pas pu, parce que le règlement défendait de le recycler sur le site minier et que la chambre d'ordinateur était sur le site minier.

M. Maltais: Dans votre troisième recommandation, vous faites beaucoup état, d'abord, du manque de communication et de la très mauvaise gestion du système. Pour vous, ce serait quoi, l'idéal?

M. Langlois: Ce qu'on dit dans notre recommandation, au niveau des contrôles... D'abord, on ne parle pas du manque de communication. On dit qu'on s'est équipé de façon très sophistiquée avec des dizaines de millions de dollars au niveau des communications. Donc, on pourrait très facilement établir des contrôles pour les cas abusifs, comme on vous a démontré, par exemple, que la fréquence des accidents augmente parce qu'on compense de plus en plus les accidents mineurs et les accidents sans fait accidentel précis, et ces cas, on pourrait les contrôler très facilement à cause de l'équipement sophistiqué d'ordinateurs et de communications qu'on a dans le moment. Ce serait très facile. On m'a dit ce soir qu'on avait encore des enquêteurs. On n'en a jamais vu depuis trois ou quatre ans. On en avait auparavant, il y a dix ans. Il y avait des enquêteurs qui faisaient certaines enquêtes. Présentement, je pense que c'est disparu complètement du système. J'aimerais dire une chose là-dessus. On n'aide pas les travailleurs là-dessus. On aide ceux qui abusent du système. Ceux qui abusent du système, dans le fond, ils se cherchent une porte ouverte. Si la porte est ouverte, ils entrent. Je pense que j'en ai parlé un peu tout à l'heure et je crois qu'on doit y revenir: les travailleurs honnêtes qui sont accidentés, ceux-là doivent être compensés de la meilleure manière possible et réadaptés de la meilleure manière possible. Ce qu'on veut prévenir, ce sont les abus et on sait que c'est le petit nombre.

M. Maltais: M. le Président, j'aimerais remercier M. Langlois et les personnes de son association qui l'accompagnent. Même si les questions ont paru longues, j'aimerais seulement ajouter un petit point pour un certain éclairage et je prierais peut-être les personnes de la CSST d'écouter. Je ne connaissais pas les gens de l'association qui sont ici présentement. Cela fait seulement six mois que j'ai été élu député. Soyez sans crainte, ce n'étaient pas des questions plantées. Merci.

Le Président (M. Gagnon): Merci, M. le député de Saguenay. M. le député de Sainte-Anne.

M. Maltais: Je suis sûr qu'il y en a qui se sont reconnus, M. le ministre.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Sainte-Anne.

M. Polak: Merci, M. le Président. M. Langlois, d'abord, est-ce que votre association est présentement représentée ou est-ce qu'elle a déjà été représentée au conseil de la CSST?

Une voix: ...

M. Polak: Excusez-moi, mais c'est moi qui ai posé la question et c'est lui qui répond. D'accord?

Le Président (M. Gagnon): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Cusano: Tu peux t'asseoir là-bas. Une voix: ...

Le Président (M. Gagnon): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Cusano: Tu peux t'asseoir là-bas si tu veux répondre.

Le Président (M. Gagnon): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. le député de Sainte-Anne.

M. Polak: M. Langlois, ne portez pas attention à ce qui se passe de l'autre côté de la clôture, répondez donc à ma question.

M. Langlois: Je ne pense pas pouvoir dire que l'association est représentée au conseil d'administration. Il est vrai que notre directeur des services techniques siège au conseil d'administration de la CSST; il est là comme expert, il est le représentant du Conseil du patronat.

M. Polak: Avant vous, le mémoire de l'Association des entrepreneurs en construction nous a parlé du pourcentage - je pense que c'est à peu près 16% - du total des recettes auxquelles ils contribuent. Votre organisme, ou les mines, vous contribuez pour combien, au total, à l'enveloppe de la CSST, à peu près, en pourcentage?

M. Langlois: II faut bien s'entendre. Notre organisme représente à peu près 18 000 travailleurs; donc, on ne peut s'attendre à en représenter autant que ceux de la construction, qui, eux, en ont 125 000 ou 150 000. Si ma mémoire est bonne, l'organisme que je représente contribue en versant une somme de l'ordre de 25 000 000 $ environ. Faites la proportion avec le budget d'environ 980 000 000 $. Maintenant, cela n'inclut pas les services de prévention qu'on fournit, cela n'inclut pas toute une série d'autres choses.

M. Polak: Maintenant, j'imagine que les mines ne fonctionnent pas seulement dans la province de Québec. Si on parle sur le plan national - pour moi, le plan national veut dire le plan canadien - avez-vous des mines ou des membres qui gèrent des mines en Ontario, par exemple, en même temps que dans la province de Québec?

M. Langlois: C'est évident que les compagnies minières sont de grosses entreprises qui oeuvrent aussi bien internationalement que nationalement, mais il faut dire que les activités minières sont autonomes dans les endroits où elles s'exercent. Si on prend l'exemple de la compagnie Noranda, qui gère quelque chose comme 25 ou 30 mines à travers le monde et à travers le Canada, dont quelques-unes ici, au Québec, tout ce qui est au Québec est autonome.

Vous demandez la comparaison qui peut exister entre les autres provinces et le Québec.

M. Polak: Ce matin, un témoignage a été rendu. Si on prend l'exemple de l'Ontario et du Québec, on paie, dans le secteur de la construction, le double tarif pour à peu près les mêmes services; grosso modo, car c'est difficile à comparer.

M. Langlois: C'est très difficile de faire des comparaisons. D'abord, si on se compare à l'Ontario, on compare sur des méthodes différentes, on fait des catégories différentes. Par exemple, les mines d'or sont ensemble, les mines de nickel sont ensemble. Je dois vous avouer que le peu de temps qui nous a été donné pour la préparation du mémoire ne nous a pas permis de faire la recherche nécessaire à la comparaison entre l'Ontario et le Québec ou même la Colombie britannique et le Québec.

M. Polak: Maintenant, au point de vue de la réglementation, il y a quelqu'un ici des mines Noranda, qui, peut-être, connaît quelqu'un travaillant pour Noranda en Ontario. Au point de vue de la réglementation, est-ce que Québec est vu comme un vrai problème, et beaucoup moins en Ontario, ou si Québec est un modèle où tout est magnifique et où tout va très bien, parce qu'on a un président de la CSST qui sait vraiment ce qu'il fait, alors que, dans d'autres provinces, ce n'est pas le cas? Y a-t-il des rumeurs qui circulent dans l'industrie à cet effet, y a-t-il des comparaisons entre l'une et l'autre?

M. Marcoux (Camil): L'impression qu'on a est que la réglementation au Québec est beaucoup plus sévère que dans les autres provinces et probablement ailleurs dans le monde. Maintenant, c'est difficile de répondre exactement à votre question, car, dans toutes les provinces, on trouve toujours que la réglementation est difficile. Il y a une chose qu'on commence à regarder, justement. Sans avoir d'étude de faite dans ce domaine, on a drôlement l'impression que, dans les montants payés en compensation dans les autres provinces et à la CSST ici au Québec, le pourcentage qui revient aux accidentés est minime en comparaison du montant total payé. Avec les informations qu'on a - je crois que la CSST serait peut-être plus en mesure de fournir l'information - on a l'impression que les accidentés

reçoivent entre 25% et 30% des montants versés à la CSST. Ces montants incluraient même des montants capitalisés. On parlait tout à l'heure, dans des cas de surdité, de 200 000 $, etc.

M. Polak: Selon votre connaissance personnelle, avez-vous l'impression que la lourdeur de l'appareil administratif - on a appelé cela le monstre administratif, la grande boîte ou un deuxième stade olympique - de la CSST, ici dans la province de Québec, en connaissance de cause, en parlant avec d'autres personnes d'autres provinces, en vous basant sur ce fait, avez-vous l'impression que ce n'est pas du tout la même histoire ailleurs qu'ici au Québec?

M. Marcoux (Camil): Lorsqu'on discute de ces problèmes avec les personnes qui travaillent dans les autres provinces, même si elles trouvent qu'elles paient assez cher pour les accidents, on a la sympathie de ces personnes envers le Québec.

M. Polak: Concernant le nombre d'accidents ou la gravité des accidents, en comparant d'autres provinces avec le Québec, avec ce grand appareil administratif, peut-on dire qu'au Québec il y en a beaucoup moins que dans d'autres provinces? A-t-on moins d'avantages ou est-ce que cela n'est pas prouvé?

M. Marcoux (Camil): Cela dépend des années dont on parle. Si on parle du passé, le Québec a toujours été reconnu comme ayant les meilleures fréquences au point de vue des accidents dans les mines. Depuis quelques années, depuis les années récentes, c'est le contraire. Dans nos statistiques concernant Noranda, le Québec est au bas de la liste. On pense qu'on fait le même travail que celui qu'on faisait au point de vue de la prévention. On pense qu'il y a moins d'accidents sérieux qu'on en avait, mais, pour une raison ou pour une autre, il y a plus d'accidents compensés que ceux qu'on avait dans le passé.

M. Polak: Je vais vous interroger, parce que vous parlez de ce sujet. À la page 32 de votre mémoire, vous faites référence à la prévention. Concernant la prévention, cela va beaucoup mieux maintenant. Peut-on créditer la CSST de cela ou peut-on dire que c'était déjà un système qui existait dans les mines, qu'on a développé, qu'on a peut-être eu l'appui de la part de la CSST, mais que ce n'est pas la CSST qui a fait changer la situation? Qui devons-nous créditer pour le changement qui a eu lieu, le fait qu'il y a moins d'accidents graves?

M. Langlois: Je pense qu'on l'a dit très clairement dans notre mémoire, parce qu'on croit beaucoup plus à notre système qu'à celui de la CSST. Je pense que vous pouvez tirer les conclusions à partir de cela. J'aimerais mentionner une chose, c'est qu'en 1974, on a engagé un bonhomme, M. Savoie, qui avait comme objectif de diminuer les accidents mortels. Je ne peux pas vous dire qu'il est le grand responsable du fait d'être parti de dix ou onze accidents mortels par année pour ramener ce nombre à un, mais, en fait, c'est ce qui est arrivé et il y a eu une diminution des accidents mortels. Il s'est appliqué spécialement à diminuer les accidents mortels. C'est un bonhomme qui travaille encore pour nous, qui est à son bureau à Val-d'Or et qui s'occupe strictement de la prévention. Nous avons deux ou trois inspecteurs à cet endroit. Sa vocation a été de diminuer les accidents mortels. Ce n'est pas la CSST qui est responsable de cela. (20 h 45)

M. Polak: D'accord. Je veux revenir sur ce que vous avez relaté à la page 26 de votre mémoire, les quelques exemples qui semblent vraiment très frappants, la surdité pour une personne de 70 ans, une de 80 ans et même une de 90 ans. Quand le cas est arrivé, avez-vous insisté pour que votre médecin ou le médecin de la compagnie examine également ce monsieur?

M. Langlois: Je pense qu'ils sont sourds. Il n'y a aucun doute là-dessus. Je ne sais pas s'ils sont sourds à cause de leur travail antérieur ou si c'est tout simplement à cause de la vieillesse, ce serait un débat à faire. J'ai dit avant le dîner que c'était permis par l'article 56 de la loi, en faisant une interprétation large de l'article ou peut-être d'un autre article. De toute façon, je pense qu'on avait le droit parce que le gars pouvait être compensé à vie. Que voulez-vous qu'on vous dise? Je pense que c'est la loi qui est fautive là-dedans. Je pense tout simplement qu'on ne devrait pas compenser les retraités, surtout pour surdité. On les compense - on est d'accord avec cela -quand ils sont au travail et ils ne perdent pas leur emploi.

M. Drouin: M. le Président, je sais qu'évidemment la commission est prise avec un problème d'indemnisation à vie et l'article 38.4. Cette fameuse gymnastique est extrêmement complexe. Il me semble que le gouvernement pourrait faire quelque chose de rapide pour aider la commission et là, je peux même travailler en ce sens, étant accidentellement membre du conseil d'administration. Il me semble qu'il n'y a pas de logique là-dedans. On peut trouver quelque part un trou dans la loi qui fait qu'on ne peut pas accorder des indemnités pour retour au travail à un gars de 90 ans. Il y a des maudites limites. Il y a quelque

chose qui ne marche pas là-dedans. Cela a beau être la loi. Il doit y avoir un trou dans la loi pour régler cela. Cela n'a pas de sens.

M. Polak: M. Langlois, tout de même, vous saviez qu'il y a un président-directeur général, le P.-D.G., et tout le monde parle de ce M. Sauvé. Quand des cas comme cela se produisent, est-ce que vous communiquez avec M. Sauvé pour dire: Voici, il y a quelque chose qui se passe, cela ne tient pas debout. Comment est-ce qu'il réagit? Est-ce qu'il est sourd ou est-ce qu'il vous écoute?

M. Langlois: Je ne peux pas dire que je communique personnellement avec M. Sauvé. Il y en a certains qui communiquent.

M. Polak: Pour moi, c'est important. Je voudrais savoir si M. Sauvé est au courant. Si c'est seulement un ou deux cas, je comprends que, dans les milliers de cas de la province de Québec, c'est bien difficile. Dans votre mémoire, vous dites: II y a un certain laxisme, un libéralisme, un abus du système, vous faites référence à cela. Ce sont tout de même des accusations assez graves. Je vous demande: Avez-vous pris le temps ou la peine de communiquer avec M. Sauvé et de lui dire: Voici, il y a cinq, six, sept ou huit cas. Il y a une limite parce que c'est notre argent, ce sont les employeurs qui paient. Qu'est-ce que vous faites avec cela? Votre laxisme. Vous êtes le grand "boss"? Avez-vous fait cette tentative soit avec lui soit avec un de ses vice-présidents ou quelqu'un qui s'occupe du dossier? Deuxièmement, quelle était la réaction?

M. Drouin: J'ai deux réponses à vous donner M. le député. La première, ce serait d'abord de poser à nouveau la question à M. le président quand il viendra ici. C'est lui qui va donner une réponse là-dessus. Deuxièmement, je crois qu'il y aurait peut-être lieu de penser à aider la commission, à guider la commission, à nous guider à la commission, de faire en sorte que nous ayons les contrôles de nos déboursés à la commission. Nous tenons un peu trop pour acquis - je n'ai pas le droit de parler comme cela, je ne suis pas à la commission - à la commission, on tient trop pour acquis le fait qu'il faut protéger le travailleur. Je suis d'accord avec cela. Mais, à un moment donné, il faut remettre à César ce qui appartient à César. Ce qu'on demande, c'est strictement de l'équité, pas autre chose que de l'équité, pas plus que cela, mais des contrôles.

M. Langlois: J'aimerais ajouter tout simplement que je crois personnellement que

M. Sauvé est très au courant de toutes ces questions.

M. Polak: II est au courant.

M. Langlois: Je le crois. Du moins, son personnel est sûrement très au courant de la question.

M. Polak: Maintenant, vous n'étiez pas ici et je sais que le président, cet après-midi, m'a refusé une telle question quand je demandais de comparer le mémoire d'un groupe avec celui d'un autre groupe. Je ne voudrais pas le faire pour respecter la jurisprudence créée par votre confrère, M. le Président. J'ai été très impressionné - je suis ici depuis le début, lundi - par le mémoire de ce groupement qui représente les accidentés. Il n'y a pas de doute dans mon esprit que, si cela prend un groupement ou une fédération pour représenter les accidentés et faire valoir leurs réclamations, il y a quelque chose qui ne marche pas, parce que, autrement, ils n'auraient pas besoin de cette représentation. Même si la moitié de ce qui a été dit est vrai, d'après moi, la situation est pas mal scandaleuse. Un élément qui sortait très souvent, c'étaient les délais, les délais d'appel, les délais pour produire la réclamation, pour se faire écouter et pour ouvrir les dossiers. Cela créait toutes sortes de problèmes. En physiothérapie, avant que ce soit permis, la personne, qui continuait de souffrir, était payée. En tout cas, tout le monde était d'accord que c'était un problème grave, le problème des délais. Quelle est votre opinion sur ce problème? Du côté patronal, avez-vous un commentaire là-dessus?

M. Drouin: M. le Président, là-dessus, personnellement, je ne pense pas que les mines aient beaucoup connu ce problème des gens qui se plaignent. Il y en a un qui fait la parade ici et qui dit qu'il n'a pas assez depuis des années, mais c'est un cas particulier. Je ne connais pas de problèmes personnellement où les gens se plaignent d'être sous-payés, mais il y en a, des sous-payés, c'est vrai. Et j'admets que les délais sont longs à cause des listes considérables d'attente pour passer en révision, des listes considérables d'attente pour passer à la Commission des affaires sociales, mais il me semble qu'il y a un message dans ces listes considérables d'attente. S'il y a tant de gens qui s'en vont en révision et en appel... Il y a deux sortes d'appel. Il y a ceux qui n'en ont pas assez et ceux qui pensent qu'il y en a trop eu. Il y a deux sortes de gens qui réclament. Il y a des sous-payés - je suis convaincu qu'il y en a - mais il y a des surpayés, et les employeurs sont aussi convaincus qu'il y en a. Tout cela pour dire qu'il y a du contrôle. La commission a pris une position dernièrement qui s'appelle la "reconsidération interne." Je pense que c'est un bon pas en avant, mais, d'un autre côté,

il faut absolument qu'il y ait, au niveau du fonctionnarisme, des gens qui prennent un peu leurs responsabilités. C'est peut-être cela, le problème.

M. Langlois: J'aimerais ajouter seulement un mot là-dessus, seulement un commentaire. Au niveau de notre association, on s'est efforcé de demander nous-mêmes à nos membres d'avoir un meilleur contrôle sur leurs cas, chacun de leurs cas et on s'aperçoit... Si vous regardez le tableau, à la page 6 ou 7, il y a une certaine remontée en 1983. On était descendu à 16% d'accidents graves et là, on remonte à 19%. C'est peut-être à cause du meilleur contrôle qu'on a demandé à nos gens d'exercer sur ces cas-là, de les contester, et des choses comme cela.

M. Polak: M. le Président, seulement une dernière question. C'est peut-être sur un plan personnel et cela n'affecte pas tellement votre mémoire, mais, à la page 5, vous avez parlé de la travailleuse enceinte. Dans l'industrie des mines de métaux, il n'y en a pas beaucoup, j'imagine.

Une voix: Non, non.

M. Polak: Deuxièmement, je voudrais seulement faire le point, parce que j'avais l'impression que c'était un peu l'opinion des hommes, comme on connaît généralement les hommes, parce que nous venons d'élire deux députés du sexe féminin, et pour nous, une travailleuse enceinte, ce n'est pas toujours un accident de travail.

Des voix: Ah! Ah!

M. Langlois: Ce que j'ai dit là-dedans -je ne veux pas aller plus loin que ce que j'ai dit - c'est qu'on espère que ce n'est pas l'employeur qui est responsable.

M. Polak: On s'entend bien. Merci.

Le Président (M. Gagnon): Merci, M. le député de Sainte-Anne. M. le député de Saint-Jacques.

M. Champagne (Saint-Jacques): Je vais être court, M. le Président. Je m'adresse à M. Langlois. Dans votre mémoire, à la page 31, on lit ceci: "Les dossiers des réclamants attribuables aux mines fermées sont pour nous un énorme problème - et là, j'insiste -parce qu'il n'est possible d'avoir aucune information sur leur véracité ou leur validité." Je voudrais savoir qui, chez vous, a demandé ces informations, quelles étaient les informations que vous vouliez, à qui les informations ont été demandées à la CSST et, finalement, quels motifs, quelles raisons on vous a données pour vous refuser ces informations.

M. Langlois: Votre question, en fait, on peut y répondre, parce que c'est seulement une question. Il reste que, jusqu'à maintenant, on ne peut pas, à cause de la confidentialité des dossiers... C'est une politique de la CSST de ne pas fournir de renseignements aux associations. Peut-être que M. Drouin pourra continuer là-dessus tout à l'heure. À cause des mines fermées, où plusieurs millions sont payés par la classe d'employeurs dont les membres font partie de compagnies qui existent encore, on a voulu avoir des renseignements pour pouvoir contrôler la véracité et la validité des cas. On a écrit à la commission, au vice-président de la commission, M. Bernier, et on nous a répondu qu'on ne pouvait pas les avoir, que cela nous prendrait une procuration de chacun de nos membres. Peut-être même pas cela... Je ne me souviens pas de la lettre, mais je pense qu'on l'a ici, on pourrait la lire. Cela disait qu'on ne pouvait avoir cette sorte d'information.

Vous comprendrez très bien qu'une information, comme cela a été le cas dernièrement, en 1983, au sujet de la surdité, qui a été imputée à une mine qui s'appelle Wasamac, qui a fermé ses portes en 1970 ou en 1971, personne n'est au courant de cela. Il n'y a pas un membre existant, il n'y a pas une activité parce que cela ne lui appartient pas. Cela va être imputé à la classe, mais personne ne peut savoir si le bonhomme a raison de réclamer pour surdité ou pas et, surtout, d'en faire porter la charge à une mine qui est fermée depuis une douzaine d'années. C'est cette information qu'on veut et je pense qu'on a le droit de l'avoir légalement. Il va falloir passer par un très long processus, il va falloir une procuration personnelle de chacun des présidents des mines qui sont membres de notre association afin d'obtenir le droit d'avoir des renseignements à l'association pour agir au nom de nos membres.

M. Champagne (Saint-Jacques): Si je comprends bien, on vous demande de payer, mais on ne veut pas vous donner d'explication.

M. Langlois: C'est à peu près cela.

M. Champagne (Saint-Jacques): Y a-t-il d'autres renseignements sur d'autres sujets que vous auriez demandés à la CSST et qu'on a refusé de vous donner?

M. Langlois: Non.

M. Champagne (Saint-Jacques): C'est le seul cas. Je n'ai pas d'autres questions, M. le Président.

Le Président (M. Gagnon): Merci, M. le député de Saint-Jacques.

M. le député de Viau.

M. Cusano: Je serai, moi aussi, très bref. Le mémoire est très bien présenté et j'apprécie spécialement les annexes qui montrent les tableaux. J'aurais deux questions. Voici la première. À la page 9, M. Langlois, vous avez dit que les interventions de la CSST vous causent des difficultés de travail et vous continuez, à l'autre paragraphe, en disant que vous êtes habitué à ces interventions. Vous parlez spécifiquement de 14 enquêtes de la part de la CSST. Pourriez-vous préciser comment ces enquêtes ont amené des difficultés dans le milieu du travail?

M. Langlois: II faut faire une distinction; cela nous apporte des difficultés parce que cela nous embête au point de vue du temps, etc. Au sujet de ces 14 enquêtes, nous avons préparé un mémoire pour le ministre du Travail et pour le ministre des Affaires sociales. Nous les avons énumérées; il y en avait 13 et il y en a une 14e qui est venue s'y ajouter. On a mentionné aussi certaines descentes de la CSST dans certaines mines qui, à notre avis, n'étaient pas nécessaires. Une, par exemple, s'est faite dans une mine de la Côte-Nord et on a saisi, avec l'aide de policiers armés, tous les documents et les dossiers des accidentés. On a fait une liste de 2500 infractions et imposé une amende de 625 000 $; après un an ou deux de discussions, finalement, on a réglé à l'amiable pour 16 000 $. C'est une descente qu'on a faite dans l'une des mines de la Côte-Nord.

Quant aux enquêtes, on commence par l'enquête Selikoff à Thetford; il y en a eu une à Noranda, on en a mentionné une à Gaspé, il y a eu un bilan de santé dans le Nord-Ouest. De toute façon, on en énumère 14, je ne suis pas pour toutes les énumérer ici. Je pense qu'on a eu assez d'enquêtes dans le secteur minier, on devrait nous ficher la paix pour un bout de temps. (21 heures)

M. Cusano: Merci. Dans votre tableau qu'on trouve à l'annexe VI, si je me permets de l'interpréter, vous avez des statistiques qui remontent à 1947. Si je comprends bien le tableau, ce qui apparaît en gris, c'est la fréquence des accidents, et la ligne qui suit, qui est au haut de cette fréquence-là, c'est l'indemnité; c'est-à-dire le montant qu'on...

M. Drouin: C'est le montant maximal...

M. Cusano: C'est cela, c'est le maximum assurable. Et on voit ici que...

M. Drouin: ...assurable, le maximum que l'individu reçoit. Excepté qu'à partir de 1990 - pas 1990, je suis mêlé - de 1978, à partir de 90% net, le chiffre qui est mis à la ligne... Il fallait que je me donne un barème quelconque, j'ai mis la courbe qui s'appelle l'homme marié avec deux dépendants, à partir de 90%, c'est le chiffre de cet homme-là. Là, c'est variable en fonction du revenu net de l'individu. Le revenu net varie en fonction du nombre de dépendants, l'impôt entre là-dedans. Alors, celui-là, c'est l'homme marié et deux dépendants.

M. Cusano: Et vous mentionnez les jours au haut. Pour les fins du journal des Débats, vous avez sept jours, de 1947 à 1955; cinq jours jusqu'à 1964, cela est quoi exactement?

M. Drouin: C'est la période d'attente avant d'avoir droit aux indemnités.

M. Cusano: Ah bon!

M. Drouin: Vous remarquez que, jusqu'en 1955, l'individu avait sept jours ouvrables d'absence avant d'avoir droit aux indemnités; et puis l'impact, quand cela a passé à cinq jours, a été quelque peu significatif, mais pas beaucoup. L'impact de cinq jours à trois jours a été négligeable. Et, de trois jours à un jour, il a été négligeable jusqu'à ce que l'on remonte l'échelle des indemnités. Mais ce qu'il est intéressant de remarquer, c'est le parallélisme qui existe entre la courbe de l'indemnité et la courbe de la fréquence des accidents. C'est très important de voir ce parallélisme dans ces deux-là. C'est pour cela qu'on n'est pas capable de nier que, à un moment donné, pour certaines personnes qui ont des tendances à profiter d'un système, il y a une incitation...

M. Cusano: C'est cela.

M. Drouin: ...pour certaines personnes. La zone que j'appelle "savonneuse"...

M. Cusano: C'était ma prochaine question, la zone "savonneuse".

M. Drouin: ...ce n'est pas péjoratif, c'était simplement le fait, c'est le temps où l'individu a droit aux cinq premiers jours payés directement par l'employeur. Là, il n'y a plus d'interruption dans la paie.

M. Langlois: Oui. J'aimerais juste ajouter une chose. C'est qu'on n'est pas contre le fait qu'on a augmenté les indemnités, mais, si on augmentait les indemnités et si on établissait des contrôles pour que ce soient les vrais accidentés qui en profitent, on serait absolument d'accord.

M. Cusano: Parfait, je vous remercie,

M. Langlois et vos confrères.

Le Président (M. Gagnon): Merci à l'Association des mines de métaux du Québec de sa présentation à cette commission parlementaire. J'inviterais maintenant le comité de direction de la Commission de la santé et de la sécurité du travail, la CSST, à prendre place à la table.

Une voix: Pourrait-on suspendre les travaux quelques instants?

Le Président (M. Gagnon): Pardon? Nous allons suspendre nos travaux pendant cinq minutes.

(Suspension de la séance à 21 h 4)

(Reprise de la session à 21 h 10)

Comité de direction de la CSST

Le Président (M. Gagnon): M. Robert Sauvé, en vous souhaitant la bienvenue, je vous demanderais de nous présenter les gens qui vous accompagnent et de faire lecture de votre mémoire.

M. Sauvé (Robert): M. le Président, M. le ministre, MM. les députés, il me fait plaisir de vous présenter mes collègues du comité de direction. À ma droite, M. Lionel Bernier qui est le vice-président à la réparation. À ma gauche immédiate, M. Jean-Louis Bertrand qui est vice-président à la prévention et à l'inspection. Et, M. Pierre Lafrance qui est le secrétaire de la commission.

Nous sommes très heureux, M. le Président, mes collègues et moi, de pouvoir vous fournir toutes les explications. Vous avez pu, je pense, partager notre quotidien. D'un côté, nous sommes des mesquins, trop laxistes dans l'inspection - et je pourrais continuer l'énumération - et de l'autre, nous sommes des Pères Noël, nous payons des gens qui vont à la chasse et nous harcelons les employeurs avec les inspecteurs.

Je voudrais profiter de l'occasion, M. le Président, pour remercier nos 2500 employés qui vivent quotidiennement avec ce que vous avez entendu. Nous sommes chanceux d'avoir des gens qui ont développé chez nous un très grand sentiment d'appartenance à la commission et qui travaillent très fort, et parfois, dans des conditions difficiles. Il y a des gens qui peuvent être exaspérés à l'occasion, qui ont des problèmes de comportement et qui peuvent même frapper des employés. Ce n'est pas toujours facile. Je tiens à les féliciter au nom de mes collègues, je pense que c'est une équipe assez extraordinaire.

Pour permettre un échange aussi complet que possible, je ne parlerai que de quatre sujets qui sont revenus dans de nombreuses remarques. Par la suite, je passerai la parole à mes collègues de la réparation et de la prévention et de l'inspection qui feront des remarques dans leur juridiction respective. Et vous avez remarqué que nous vous avons distribué quelques documents de façon que personne ne puisse dire que vous avez été inondés de documents, et que nous ne prenons pas tout le temps qui nous est alloué pour parler. Nous voulons répondre à vos questions.

Mes quatre sujets sont: les bureaux de révision, la médecine chez nous, le retrait préventif de la femme enceinte et la téléphonie. Mes collègues parleront de leurs sujets dans leur domaine respectif. Je pense que ce sont quatre sujets que nous avons beaucoup entendus au cours de ces quatre dernières journées.

Je commence par les bureaux de révision. Quand je suis arrivé à la commission, en février 1977, les commissaires du temps faisaient des auditions et les décisions étaient confirmées par la commission du temps. Chose à remarquer, ces auditions étaient discrétionnaires. Vous pouvez le remarquer tout de suite, la commission était donc juge et partie dans le temps. La commission, qui administrait l'application de cette loi, l'interprétait également en dernier ressort.

Immédiatement, au mois de septembre 1977, la loi 5 est entrée en vigueur et nous avons eu la création des bureaux de révision et l'appel à la Commission des affaires sociales. Je tiens à vous faire remarquer, M. le Président, qu'il y a douze commissions au Canada, les dix provinces et les deux territoires, et que, dans ces douze commissions, nous sommes la seule où il y a un appel à l'extérieur de la commission. Encore aujourd'hui, je me rappelle, pour avoir assisté à la réunion annuelle des commissions, m'être fait rabrouer par mes confrères présidents des autres commissions pour avoir créé ce précédent, parce que les bons amis disaient: Robert, tu crées un précédent fort dangereux. Tu n'auras plus de contrôle sur tes politiques. Ce sont les gens de l'extérieur qui vont faire cela.

Sur le plan des principes, c'est assez étonnant que des gens qui sont connus pour la défense des droits de la personne ne considèrent pas qu'ils sont juges et parties dans ce cas. Il y a une bonne nouvelle à l'horizon, je pense que l'Ontario aura une nouvelle loi en 1984, et il est possible qu'il y ait un recours à l'extérieur ou tout au moins un tribunal comme un bureau de révision, mais séparé de la commission.

Encore en 1983, nous sommes la seule commission au pays où il y a un droit d'appel à l'extérieur. Par le biais de la Loi sur la santé et la sécurité du travail, la Loi

sur le Barreau a été amendée pour permettre, comme cela se faisait et cela se fait chez nous, aux représentants syndicaux et aux non-avocats de représenter leurs collègues de travail. Je pense que c'est très important. Notre ami Claude Pétel - je ne sais pas s'il est dans la salle - peut aller devant la Commission des affaires sociales grâce à un amendement que nous avons suggéré et qui est dans la Loi sur la santé et la sécurité du travail.

Troisièmement, M. le Président, nous n'avons jamais comparu devant la Commission des affaires sociales pour pouvoir laisser libre cours aux parties. Bien plus, pour faciliter la tâche des parties, nous remettons le dossier intégral, sauf à l'employeur où la partie médicale est remise à son médecin. La CAS nous a souvent demandé de faire un tri dans les dossiers pour ne pas avoir de gros dossiers. Nous donnons intégralement les dossiers.

Une chose étonnante, M. le Président, c'est le seul endroit dans tout le système judiciaire ou quasi judiciaire où on fait le même procès deux fois. La cause, ou le procès de novo, comme on dit en termes juridiques, se fait d'abord devant le bureau de révision et on recommence la même chose devant la Commission des affaires sociales. C'est la raison pour laquelle nous sommes d'accord avec la suggestion contenue dans le projet de loi 42 qui veut une révision administrative et l'appel à la CAS, mais nous sommes entièrement d'accord, comme comité de direction, que tous les appels aillent à un tribunal administratif indépendant. Et, si je peux faire une suggestion, je crois que cela devrait être un nouveau tribunal administratif, parce que le Tribunal du travail est un peu en conflit et c'est lui qui décide déjà sur le plan pénal. Il ne pourrait donc pas exercer cette juridiction de révision. La CAS n'a pas de division spécialisée en inspection ou en finance, par exemple. Puisque nous avons prôné l'appel à l'extérieur et que nous sommes d'accord pour la rapidité des décisions, nous n'avons aucune espèce d'objection.

Je tiens à vous dire, M. le Président, qu'on a beaucoup parlé de délais. On semble dire qu'il y a énormément de demandes en révision. Dans les dernières années, en 1981, 1982, 1983, en chiffres ronds, nous avons reçu au-delà de 300 000 réclamations. Du 1er janvier 1982 au 31 décembre 1982, nous avons reçu 4781 demandes de révision sur au-delà de 300 000 réclamations. Ce sont 400 demandes par mois. Vous voyez que le pourcentage n'est pas énorme. Dans la même période, les bureaux de révision ont rendu 5593 décisions. Du 1er janvier 1983 au 30 juin 1983, nous avons reçu 3859 réclamations et les bureaux de révision ont rendu 3859 décisions.

Les délais: Au bureau de Longueuil, le délai moyen est de six mois. Au bureau de Hull, de dix mois. Au bureau de Rimouski, de six mois. Au bureau de Laval, de trois mois. Au bureau de Montréal, de huit mois. Au bureau de Sherbrooke, de quatre mois. En Abitibi, de trois mois. En Mauricie, de deux mois. Au Saguenay, d'un an. À Québec, de trois mois. Sur la Côte-Nord, de quatre mois. Ce qui est important, c'est que nous avons fait des expériences aux bureaux de Laval et de Montréal et il est extrêmement difficile de procéder avant quatre mois parce que les parties demandent de nouvelles expertises et vous savez que cela prend de trois à quatre mois, un minimum de trois mois dans certaines spécialités, pour avoir un rendez-vous et avoir le rapport pour pouvoir faire l'expertise.

Nous avons essayé. Le taux de remise dans le mois où on l'a essayé était de 40%. On parle beaucoup de délai. On parle de délai à la CAS. C'est vrai. Je pense que la situation va s'améliorer parce que cela ne relève pas de nous. Cela relève du ministère responsable de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, cette commission. Ces gens viennent d'ajouter des membres dans la division des accidents du travail. Eux aussi ont un haut taux de remise. Cela va jusqu'à un tiers à certains mois. C'est beaucoup. Cela ne dépend pas du tribunal, cela dépend des parties. Ils ont pris plus de temps à démarrer. En 1978, ils ont rendu 5 décisions. En 1979, 80. En 1980, 136. En 1981, 191. En 1982, 405. En 1983, 783. Vous voyez qu'ils semblent avoir pris un rythme qui va permettre d'amenuiser ces délais. Nous le souhaitons. Voilà, M. le Président, pour ce qui est des tribunaux, les bureaux de révision.

Le deuxième point que je voudrais traiter, c'est celui du retrait préventif de la femme enceinte. Nous sommes entièrement d'accord au comité de direction, et je pense que, sans vouloir présumer de sa décision, le conseil d'administration serait également d'accord pour qu'il y ait une politique globale de congés de maternité. Il est difficile de rester dans le système actuel où il y a trois organismes qui s'occupent de programmes de congés de maternité: la Commission des normes du travail, l'assurance-chômage et nous. Je pense que c'est une responsabilité de l'État que d'avoir une politique globale de congés de maternité. Nous n'avons pas d'objection à l'administrer, mais je pense que c'est une politique d'État. On a dit bien des choses sur la loi, mais la loi est assez explicite selon nous. Il y a d'abord la réaffectation avant le retrait préventif si la chose est possible. Si la réaffectation n'est pas possible, là le retrait préventif, doit s'exercer. La seule chose que nous avons dite, c'est que, six mois après le début de l'entrée en vigueur de cet article, après un certain temps d'expérience, la

condition personnelle doit être reliée au travail.

Il circule - et la Fédération des infirmières l'a fait circuler - un procès-verbal d'une rencontre entre des médecins des DSC de la région métropolitaine et des médecins de la réparation du bureau de Montréal. Un document du 23 mars. De cette réunion, il y a eu un document de travail -et c'est bien estampillé "Document de travail", à droite en haut - qui a été fait pour consultation. D'un côté, on nous reproche de faire de la consultation. De l'autre côté, on dit qu'on n'en fait pas assez. C'était un document pour consultation. Il n'y a aucune politique qui a été signée par le vice-président à la réparation ni approuvée par le comité de direction pour suggestion au conseil d'administration, parce que c'est une politique qui doit aller dans le manuel. Par voie de conséquence, elle doit être approuvée par le conseil. Cela veut donc dire que, si certains DSC appliquent cette politique, ce n'est pas la politique de la commission. Ils doivent continuer à fonctionner cas par cas et selon la situation de la personne en cause.

Il y a une chose intéressante, M. le Président. Je vous demanderais de regarder le tableau 25, intitulé: Retrait préventif de la travailleuse enceinte ou qui allaite, 12 décembre 1983, en bas à droite. Il faut savoir que le nombre de femmes enceintes au Québec, annuellement, varie entre 90 000 et 100 000. Vous voyez qu'en 1981, cela ne faisait que commencer. Il y a eu 1259 demandes de prestations. 1214 ont été acceptées, 45 ont été refusées pour un total d'indemnités versées de 2 600 000 $. En 1982, le nombre de demandes de prestations a triplé. Cela veut donc dire qu'il y a eu une politique d'information. Il y a eu 3915 demandes. 3543 ont été acceptées - c'est le tableau 25 intitulé: Retrait préventif de la travailleuse enceinte ou qui allaite - 372 ont été refusées pour un total de 13 800 000 $. Pour l'année 1983 - évidemment, il s'agit de demandes au 1er novembre 1983 et estimées en vertu de l'expérience que nous avons -pour 3925 cas, au moment où on se parle, il y a eu 3593 cas acceptés, 332 refusés pour un total de 16 500 000 $. On prévoit, en 1984, 4100 demandes.

En fait, quand le programme sera bien connu, selon nos estimations, il y aurait à peu près 5000 demandes de prestations par année. Vous constatez - parce qu'on a entendu bien des choses, il y a des gens qui ont dit: On a resserré la vis, on a resserré les politiques - une chose étonnante: il y a plus de cas acceptés en chiffres absolus en 1983 qu'en 1982 et le nombre de rejets est inférieur en chiffres absolus et en pourcentage. Voilà ce que j'avais à dire sur le retrait préventif de la femme enceinte. (21 h 30)

La médecine. D'abord, je pense qu'il est important de souligner la façon dont fonctionne le système d'évaluation médicale à la commission. L'évaluation médicale permet d'établir la relation entre la demande de prestations et la lésion, la durée de l'incapacité totale ou temporaire, la nécessité de soins de physiothérapie, par exemple, et elle a pour but de fixer le pourcentage de la perte d'intégrité physique lorsque la travailleuse ou le travailleur est atteint d'une incapacité permanente. Le rôle du médecin traitant est d'assurer au travailleur les soins adéquats et d'indiquer à la commission la durée et la fin des traitements ainsi que le taux de déficit subi. Là, on reçoit le rapport médical du médecin traitant; c'est là qu'entrent en jeu les médecins de papier, comme on l'a dit. Les médecins de la commission n'examinent et ne voient aucun patient; c'est bien important. Toute expertise est faite par des médecins externes à la commission. Ces médecins spécialistes évaluateurs sont des médecins de pratique privée reconnus par la corporation professionnelle; évidemment, ils ne sont pas des médecins fonctionnaires de la commission, ils viennent chez nous, payés à vacation, pour faire des expertises. Nous n'avons pas de liste d'experts, ce sont des médecins spécialistes qui s'offrent pour l'expertise.

Vous savez, 75% de nos cas sont des cas d'orthopédie. L'Association des orthopédistes a demandé à ses 198 membres s'ils étaient prêts à faire de l'évaluation; 120 ont répondu oui, donc 40% des médecins orthopédistes ne veulent pas faire d'évaluation pour toutes sortes de bonnes raisons. Par exemple, un médecin qui soigne son patient trouve difficile, à juste titre, de dire quand son patient ou sa patiente peut recommencer à travailler, de combien est son taux d'incapacité. Il y en a qui ne veulent pas faire cela et cela se comprend. Je ne peux pas forcer les médecins à le faire.

Ce qu'on sait, c'est que nous avons une liste de 120 médecins orthopédistes qui le font. Donc, la commission réfère le travailleur à un médecin spécialiste qui réalise l'évaluation. Pour faciliter la tâche de tout le monde, il y a quatre ans, nous avons décidé de faire un centre d'évaluation, c'est-à-dire de mettre à la disposition des médecins spécialistes des locaux pour l'expertise médicale, l'équipement et le secrétariat nécessaires à leur tâche.

Ce qui arrivait autrefois, c'est que l'accidenté allait voir le médecin spécialiste et nous attendions le rapport trois ou quatre mois. Il fallait prendre le rendez-vous et il nous arrivait même d'aller chercher le rapport sur le bureau du médecin pour faciliter la tâche de tout le monde. Vous allez comprendre que l'accidenté veut bien savoir s'il peut retourner à l'ouvrage, quelle

est sa condition et quel sera son taux d'incapacité s'il y en a. C'est tout à fait normal qu'une personne veuille le savoir. Entre-temps, si elle pouvait travailler pendant que nous attendions le rapport, nous déboursions une incapacité totale temporaire. En sains gestionnaires, nous avons décidé de dire aux spécialistes: Plutôt que de vous envoyer les patients chez vous, venez donc chez nous, on va vous donner un Dictaphone, on va vous donner un secrétariat et nous aurons tout le lendemain. Cela fonctionne à merveille.

C'est intéressant, sauf que nous ne sommes pas là, dans le cabinet médical. J'ai entendu une femme qui a dit qu'elle avait été examinée nue, devant tout le monde. Le bureau est au 28e étage du complexe Desjardins et le premier voisin est au Vermont, je pense. Il ne faut quand même pas exagérer. Au cas où il y aurait des problèmes, nous avons décidé d'avoir une politique d'accueil. Nous avons, depuis quelque temps, une personne qui reçoit les patients, les accidentés avant l'examen, qui leur explique ce qui va se passer parce qu'il y a des gens qui sont nerveux, qui voudraient savoir ce qui va se passer. Au sortir de l'examen, s'il y a quelque chose, nous espérons qu'elle le dira tout de suite. Il est bien évident que si, dans la matinée, il y a deux patients sur trois qui disent qu'ils ont été bardassés, on va savoir que le docteur Untel, qui n'est pas notre employé, a l'air de bardasser les patients et il y a quelqu'un du service médical qui va aller le voir pour lui dire: Écoute, on a des plaintes, cela ne peut pas fonctionner comme cela; ou tu changes ou tu arrêtes de faire des expertises. Et cela, on le saura. Sur le plan médical, j'espère avoir clarifié la situation et nous serons heureux de répondre aux questions sur ce plan.

Il me reste un sujet, qui a fait parler beaucoup, la téléphonie. Dieu sait que nous avons dépensé beaucoup d'énergie pour trouver des solutions à ce problème. C'est un problème très préoccupant, particulièrement à Montréal. Dans les autres régions, de façon générale, nous n'avons pas beaucoup de problèmes. Évidemment, s'est assez comique parce qu'on fait beaucoup de tests nous aussi. Nous allons dans les régions et nous allons visiter beaucoup d'entreprises, de mines, de chantiers forestiers, etc. Nous ne restons pas uniquement au bureau, nous sortons pour aller voir ce qui se passe sur le terrain, si les politiques ont de l'allure; nous allons vérifier un certain nombre de choses.

Nous appelons nous aussi. Il arrive qu'on a la communication immédiatement et il y a d'autres fois, deux minutes après, qu'on peut attendre. À Montréal, on a un système téléphonique très sophistiqué qui a coûté 400 000 $. Cela a été approuvé par le conseil d'administration parce que cela a été discuté au conseil. On disait: Comment se fait-il qu'on a tant de problèmes? Nous maintenons, en moyenne, vingt téléphonistes par jour à ce bureau qui reçoivent - et là, c'est un cycle bien connu - le lundi, à peu près 2400 appels et, le vendredi, cela descend à 1800 par jour. Au mois d'août, nous avons reçu 39 000 appels; au mois de septembre, 42 000; au mois d'octobre, 35 000; au mois de novembre, 42 000. Les taux d'appels auxquels on a répondu - et c'est là que c'est intéressant - 87% le lundi, 81% le mardi, 83% le mercredi, 95% le jeudi et 84,9% le vendredi. La moyenne d'employés est de vingt et le délai moyen d'attente avant réponse, en secondes, c'est: 44 secondes, 71 secondes, 56 secondes, 9 secondes et 52 secondes. Et j'ai pris une semaine au hasard.

Il y a des journées où vous pouvez attendre. Le lundi, c'est plus compliqué et, deuxièmement, la durée des communications est d'environ deux minutes par appel. Si vous voulez parler à tel agent d'indemnisation et qu'il est en train d'expliquer quelque chose à quelqu'un, à ce moment, vous avez des problèmes. Nous ne sommes pas satisfaits parce que, le taux de rejet dépassant 15%, nous trouvons que ce n'est pas normal. Les grands magasins tolèrent 15% - on ne se considère pas un commerce, mais les grands magasins qui sont en affaires considèrent que 15% est acceptable - nous, nous voudrions que ce soit un maximum de 10%.

Ce que nous avons fait, nous sommes en train de programmer le système. On espère qu'au mois de mai 1984, notre nouveau système de paiements permettra de payer deux fois par mois, ce qui fait que les gens n'appelleront plus pour dire: Est-ce que mon chèque est parti? Quand est-ce que je vais avoir mon chèque? Là, cela sera clair, comme l'aide sociale, deux fois par mois. Je ne veux pas qu'on se compare ou qu'on nous compare aux affaires sociales ou au bien-être, au salaire garanti, mais tout le monde saura à ce moment qu'on paie deux fois par mois. Ce sera clair et je pense qu'ailleurs, il n'y a pas de problème quand c'est très clair.

Deuxième mesure: avec le chèque qui sera émis au mois de mai, toutes les explications du chèque seront sur le talon. Et, depuis le 2 décembre 1983, les comptes médicaux sont payés par la RAMQ et nous remboursons la RAMQ. Ce qui fait qu'un certain nombre d'appels téléphoniques devraient disparaître, parce que, là aussi, c'est à la source qu'il faut corriger le mal; c'est de voir à ce qu'il y ait moins d'appels. Si on réussit, je pense que nous n'aurons plus, avec cette mesure importante, les problèmes que nous avons connus avec la téléphonie; c'était bien pire que cela en 1982. Mais cela ne nous satisfait pas encore, M. le Président, de voir ce qui se passe avec la téléphonie à Montréal. Ailleurs, ce n'est

que très sporadiquement qu'il y a un problème. C'est évident que, s'il y a deux téléphonistes et que l'une est malade, le temps que l'autre se familiarise, il peut y avoir des délais. Ce sont des choses normales partout.

Voilà ce que je voulais dire sur les quatre sujets qui ont fait parler beaucoup de gens. Nous avons suivi cela avec beaucoup d'intérêt. Nous savons qu'il y a toujours lieu à amélioration. Et je pense que nous avons fait des preuves dans ce sens-là. Je passerais la parole à mon collègue, Lionel Bernier.

Le Président (M. Gagnon): M. Bernier.

M. Bernier (Lionel): M. le Président, M. le ministre, MM. les députés, il me fait plaisir à mon tour d'avoir l'occasion, après ces quelques journées d'écoute, d'expliquer les programmes de réparation de la CSST et de répondre, au cours des heures qui vont suivre, aux questions qu'on se pose sur l'administration de ces programmes.

Nous avons tous pu constater, je pense bien, au cours des travaux de la présente commission, que tout le domaine de la réparation des lésions professionnelles comporte des volets qui sont loin de faire l'unanimité des parties intéressées, qui sont souvent carrément contradictoires et, selon les conceptions et les philosophies en présence, qui sont plus souvent qu'autrement irréconciliables ou en tout cas difficilement conciliables. Nous avons assisté à des commentaires, des comportements, des attitudes et des déclarations qui se reproduisent par dizaines de cas ou centaines de cas par semaine dans chacun de nos bureaux régionaux, où les employeurs contestent les demandes de prestation des accidentés et où les travailleurs revendiquent tous les droits que la loi leur reconnaît, et parfois au-delà.

Nos employés ont, à tous les jours, à concilier ces positions dans le cadre spécifique des lois que le législateur a adoptées et parfois dans le cadre de dispositions qui ne sont pas toujours aussi claires que nous voudrions qu'elles soient. Je veux dire que la Loi sur les accidents du travail actuelle, qui remonte à 1931, même si elle a été rapiécée à plusieurs reprises au cours des années passées, contient des dispositions - je me permettrai ce jugement - qui la rendent de plus en plus difficilement applicable.

Si on peut mesurer l'efficacité d'une loi par l'ampleur des contestations juridiques qui l'accablent, le nombre de contestations juridiques qui ont été dirigées contre cette loi depuis quatre ou cinq ans ont contribué, quant à nous, pour une bonne part, à en rendre l'administration plus complexe et plus hésitante. Je ne prendrai que les exemples de l'article 38.4 et celui de l'amiante.

(21 h 45)

On a fait état de l'article 38.4 au cours des débats qui sont passés. J'aimerais rappeler qu'avant 1978, les accidentés qui étaient indemnisés l'étaient sur la base ad hoc, sur la base des décisions purement médicales, sans qu'il existe nécessairement un barème officiel. Nous avons adopté un premier barème de déficit physique en 1978; et nous avons eu, par la suite, des décisions de la Commission des affaires sociales, des décisions des tribunaux civils nous disant que ce n'était pas suffisant d'avoir un barème de déficit physique; il fallait aussi déterminer la perte de la capacité de travailler. Nous avons bâti une méthode d'évaluation de la perte de la capacité de travail et, quand on dit qu'on a bâti une méthode, cela a l'air tout simple d'évaluer la perte de la capacité de travailler, mais, quand il s'agit de déterminer, pour un travailleur de 50 ans, de 55 ans, qui a une scolarité de trois ans ou de cinq ans et qui a mal dans le dos, quel est le pourcentage - parce que c'est ce que la loi nous oblige de faire, l'article 38.4 nous oblige à le faire - de perte de capacité de ce travailleur de façon permanente, à vie, quels que soient les programmes qu'on pourra retenir pour ce travailleur, c'est un problème très complexe.

Nous avons développé une méthode qui nous a permis de régler une bonne partie des dossiers, mais une bonne partie aussi de la contestation des travailleurs porte sur cet aspect de la loi. Il y a eu un recours collectif pour nous dire qu'on n'avait pas appliqué la loi depuis 1931. Nous avons eu une décision de la Cour suprême disant que nous devions adopter une méthode quelconque pour l'évaluer et nous avons essayé - en attendant que le législateur adopte des mesures différentes - de bâtir un système nous permettant de régler le plus grand nombre de cas possible. Mais cela n'a pas rendu facile l'administration de cette loi pour ceux qui, dans le champ, dans les régions, ont eu à l'appliquer.

Le deuxième problème a été celui de l'amiante. Là encore, différentes décisions des tribunaux sont venues rétrécir ou réduire le champ d'application de la loi et des règlements les concernant, de telle façon qu'aujourd'hui, malgré des opinions médicales universellement admises, il n'est plus possible de retirer un travailleur de l'amiante de son milieu de travail. Cela aussi, cela a été une période difficile.

Enfin, malgré les reproches qui peuvent nous être faits, d'un côté, de payer n'importe quoi, de gaspiller l'argent des employeurs et, de l'autre, de payer avec une parcimonie qui, selon ce qu'on a entendu, friserait l'indécence, je dois signaler qu'il existe tout de même, dans cette loi, un certain nombre de règles qui, d'un côté, limitent les avantages accordés aux

accidentés - ce n'est pas nous qui le faisons et, de l'autre, énoncent des principes d'équité favorables aux bénéficiaires. Cela aussi, on doit l'appliquer. Bien sûr, quand on le fait, on ne fait plaisir ni à l'un ni à l'autre.

Je ne citerai, rapidement, que trois articles. Premièrement, l'article 24, paragraphe 3, qui dit: Lorsqu'un travailleur refuse un examen médical - ce n'est pas une décision de la direction de la commission, cela est la loi - on suspend le paiement de l'indemnité à laquelle le travailleur a droit s'il refuse de se soumettre à l'un des examens prescrits par la présente loi ou ordonnés en vertu de l'une de ses dispositions, ou s'il entrave de quelque façon que ce soit l'un de ces examens et le paiement de l'indemnité reste ainsi suspendu jusqu'à ce que l'examen ait été fait.

Le paragraphe suivant, cela est la même chose, dans le cas du travailleur qui refuse de subir un traitement. Je cite deux exemples de limites qui sont dans la loi et qui nous sont imposées, qu'on doit appliquer quand cela se présente. Bien sûr, quand on applique ces deux articles, cela ne fait pas plaisir à ceux à qui on les applique et cela crée de la contestation parfois violente.

Nous avons un autre article, cependant, l'article 63, paragraphe 8, qui prévoit que la commission doit juger selon l'équité. Quand on applique cet article, ce sont les employeurs qui nous disent que nous n'avons pas assez de contrôle, que nous payons n'importe quoi. L'article se lit comme suit: "La commission rend ses décisions suivant l'équité, d'après le mérite réel et la justice du cas, et elle n'est pas tenue de suivre les règles ordinaires de la preuve en matière civile. Elle peut, par tous les moyens légaux qu'elle juge les meilleurs, s'enquérir des matières qui lui sont attribuées."

Et vous avez finalement l'article 111.8, qui dit que, dans le cas des maladies professionnelles mentionnées, le travailleur a droit à une présomption favorable. Par conséquent, quand le travailleur présente une réclamation pour une maladie professionnelle, que ce soit la surdité ou que ce soit une autre maladie professionnelle, lorsqu'il y a un rapport médical disant que ce travailleur-là a une maladie professionnelle, que la maladie est dans la liste de la loi et qu'il a occupé un emploi qui a pu lui transmettre cette maladie-là, c'est automatique, on doit reconnaître cette maladie comme étant professionnelle. Bien sûr, quand on le fait, particulièrement dans le cas de la surdité, cela crée des contestations.

Sur un autre plan, nous avons entendu des intervenants nous dire, d'un côté, que nos programmes de réadaptation n'étaient pas assez généreux, sinon inefficaces, et, de l'autre, qu'ils étaient trop - j'utiliserai des guillemets - "libéraux", même s'ils ne faisaient que résulter de l'application de la loi. Je pourrais peut-être rappeler brièvement ce qui a été fait en matière de réadaptation. Je n'apprendrai rien à personne sans doute en disant qu'en 1976-1977 - il s'agit de lire le rapport Riverin, qui a été produit à ce moment-là, ainsi que le rapport Mineau, alors à la Commission des accidents du travail de l'époque - il se ne faisait pas de réadaptation à la commission.

Nous avons, à compter de 1977-1978, commencé à bâtir des programmes de réadaptation qui pouvaient répondre aux réclamations, aux exigences des travailleurs et qui pouvaient en même temps humaniser tout le processus de réparation plutôt que de penser en simples termes d'indemnisation ou d'assistance financière. Nous voulions véritablement orienter nos programmes vers la réadaptation, pas seulement physique, mais aussi sociale. À ce moment-là, la réadaptation dans la loi était reconnue comme étant un privilège, c'est-à-dire que la commission pouvait accorder de la réadaptation, c'était une décision qui était arbitraire et qui n'était pas matière à appel.

En 1978, le législateur a fait de la réadaptation un droit dans la loi, et, à partir de ce moment-là, nous avons pu - il a donné des pouvoirs, il en a même fait le devoir à la commission - bâtir des programmes de réadaptation, ce que nous avons fait. Nous avons bâti une série de programmes de réadaptation avec des professionnels dans toutes les régions et nous avons demandé à ces professionnels d'inventer, avec nous, avec les travailleurs et avec les employeurs, des programmes de réadaptation. Nous avons aujourd'hui toute une série de programmes de réadaptation et, dans chaque cas, chaque fois qu'un travailleur est atteint d'un déficit physique et qu'il a des problèmes de retour en emploi, nous le référons en réadaptation, là où il y a des professionnels qui évaluent sa situation et bâtissent avec lui le programme adapté à sa condition.

Rapidement, je voudrais donner quelques chiffres par rapport à la réadaptation, c'est le tableau 19 que vous avez dans vos cahiers. Vous avez, dans ces tableaux, à la page 19 (les feuilles jaunes) le détail des programmes de réadaptation, l'énumération de ces programmes ainsi que l'évolution de ces programmes en termes de coûts depuis 1978. Vous pouvez voir qu'on avait, en 1978, des programmes de réadaptation qui nous coûtaient 3 300 000 $; et, en 1983, notre estimation, c'est que nos programmes de réadaptation vont coûter 52 000 000 $. Il faut dire que, dans les coûts de ces programmes, vous avez, particulièrement dans la première partie, des coûts qui sont des coûts d'indemnité pendant la période d'absence du travail.

J'aurai l'occasion, si vous avez des questions, de répondre plus précisément sur

chacun de ces programmes et de les expliquer, si vous le désirez.

Sur le plan médical, le président a expliqué le rôle des médecins. Je voudrais tout simplement préciser ceci. J'ai entendu cela au cours des premières journées de cette commission parlementaire et on a déposé des documents faisant état de commentaires qui étaient faits par des médecins dans les dossiers des travailleurs. Je dois dire que je ne tolère pas et que je n'accepte pas - et au comité de direction, nous ne tolérons pas, nous n'acceptons pas -que des fonctionnaires de la commission fassent des remarques ou des commentaires désobligeants dans le dossier des travailleurs. Nous avons, en 1978, averti notre personnel, parce qu'à ce moment-là, on avait deux groupes de gens qui pouvaient faire des commentaires dans les dossiers des travailleurs. On avait des enquêteurs qui, parce que les dossiers n'étaient pas remis aux travailleurs, sous le sceau de la confidentialité, pouvaient faire des commentaires qui n'étaient pas acceptables. Nous avons d'abord réglé cette question. Nous avons élaboré une politique écrite très sévère, dans laquelle nous avons défendu aux enquêteurs de faire des commentaires, quels qu'ils soient, sur des attitudes des travailleurs. Nous avons fait la même chose pour les médecins, parce que tant que les rapports médicaux n'étaient pas distribués à l'extérieur, qu'ils étaient confidentiels - et la confidentialité, c'était pour la commission... Lorsque nous avons décidé de remettre les rapports médicaux aux travailleurs, du même coup, nous avons informé les médecins. Et nous avons dit à nos médecins internes d'aviser les médecins externes, parce qu'il y a aussi des commentaires de la part de médecins de pratique privée. Nous les avons avisés que nous ne tolérerions pas et que nous n'accepterions pas de tels commentaires. Le président et moi-même avons fait une tournée régionale à plusieurs reprises. Nous avons rencontré nos employés et, chaque fois, nous sommes revenus sur ce sujet. Et nous les avons prévenus que, si de tels cas étaient portés à notre connaissance, nous prendrions des mesures disciplinaires.

L'autre point qui a été soulevé, c'est celui des cas particuliers qui ont été soumis à titre d'exemples de situations qui, dit-on, sont le reflet de situations générales à la commission. Bien sûr que cela paraîtrait trop facile si j'affirmais que les cas particuliers qui ont été soumis sont des exceptions. Si je disais cela, ce serait trop facile et on n'avancerait pas beaucoup dans le débat. Je pourrais, d'un autre côté, vous fournir un paquet de statistiques pour appuyer mon affirmation et dire: Ce sont vraiment des exceptions, voici ce qui se passe vraiment. De fait, je pense que les statistiques sont valables pour démontrer les résultats d'ensemble et on aura l'occasion de vous en fournir au fur et à mesure que l'on expliquera notre fonctionnement. Mais c'est seulement dans ce sens que je voudrais, quant à moi, les utiliser. Pour les cas particuliers, pour ceux qui ont été déposés ici, ou chaque fois qu'un cas particulier se présente à la commission qui touche ma juridiction, j'examine les dossiers; je les fais venir et je les examine. Je préfère toujours les regarder un à un, les évaluer et apporter les correctifs appropriés, lorsque je peux le faire. Lorsque les régions peuvent le faire, ce sont les régions qui interviennent et qui règlent les situations. (22 heures)

Les cas qui ont été soumis ici devant cette commission, je les ai fait relever et je les ai examinés un à un. Je ne les reprendrai pas un à un ici et je ne veux pas excuser nos employés pour ce qui s'est passé dans ces dossiers, mais je dois dire que lorsqu'on examine ces cas-là, ils sont extrêmement complexes. On comprend également pourquoi ces dossiers ont créé des problèmes. On se rend compte, par exemple, qu'il y a toujours un problème de communication entre le médecin traitant et les médecins spécialistes, bien souvent, à qui le médecin traitant réfère ses patients. On peut donc se rendre compte de cela dans les dossiers. On se rend compte également que le médecin traitant a beaucoup de difficulté à établir la relation de cause à effet entre la lésion et la pathologie d'origine non professionnelle. Le problème, dans ces cas-là, est que ce sont des gens qui ont eu une petite lésion bien souvent et, dans un certain nombre de cas, il n'y a même pas de taux d'incapacité qui a pu être accordé. C'est zéro ou 100%. Pourquoi dis-je cela? C'est parce que les gens ont une pathologie qui n'est pas reliée à la lésion professionnelle. Ils souffrent d'autre chose, mais la lésion professionnelle est un élément qui intervient. Par contre, le problème des médecins est de faire le partage entre ce qui est relié à la lésion professionnelle ou à autre chose.

Un travailleur qui a subi trois crises cardiaques et qui se coupe ensuite un doigt, ce n'est pas nécessairement parce qu'il s'est coupé un doigt qu'il ne peut pas retourner sur le marché du travail, mais cela ajouté à sa situation générale fait que c'est difficile. Il s'agit donc de déterminer si on lui donne 3% parce qu'il s'est coupé un doigt - comme on donnerait à un autre travailleur - ou si on lui donne 100% et on fait payer l'ensemble du coût de ce dossier par l'employeur. C'est aussi simple que cela comme question mais ce n'est pas si simple à régler.

En regardant ces dossiers, ce sont des éléments qu'on constate. C'est donc extrêmement difficile et, finalement, généralement, il y a quelqu'un qui tranche en

dernier ressort et qui doit prendre la décision. Même si la Régie des rentes a déclaré l'invalidité, cette invalidité de la Régie des rentes est très générale. Elle n'a rien à voir avec une blessure qui doit être compensée selon la loi. Je parle toujours dans le cadre de la loi parce qu'on a les limites imposées par la loi. On n'a pas le droit, en vertu de la loi, de payer pour une lésion qui n'est pas une lésion professionnelle.

Généralement, ce sont des cas de dos et il est extrêmement difficile d'établir cela. Je vous disais que je regardais certains cas où le médecin traitant ne peut même pas établir qu'il y a un taux d'incapacité, mais le travailleur ou la travailleuse, à cause d'autres facteurs, n'est pas capable de retourner à son travail ou encore l'employeur en profite à ce moment-là pour le congédier. Il y a aussi un autre facteur dans les dossiers déposés et qui est triste; dans certains de ces cas-là, ce sont des travailleurs d'origine ethnique étrangère qui sont unilingues, ne parlant ni anglais ni français. Cela ne facilite pas les rapports avec leur médecin traitant non plus qu'avec les médecins spécialistes qui les voient. Cela ne facilite pas non plus les rapports avec les employeurs ni avec personne. Il est très difficile d'expliquer à ce moment-là le partage de la relation entre la lésion et d'autres facteurs pathologiques qui n'ont aucun rapport avec la lésion professionnelle.

Il est bien évident - c'est un petit peu comme le retrait préventif de la travailleuse enceinte - que, bien souvent, dans ces cas-là, la solution est de reconnaître ces gens invalides, un point, c'est tout. C'est la solution la plus simple et la plus facile. Mais, une fois qu'on a dit cela, il faut regarder les conséquences.

Je voudrais terminer sur un dernier point: l'information aux accidentés. Nous avons vécu des temps où il était extrêmement difficile pour un accidenté -ayant moi-même eu à défendre des dossiers d'accidentés lorsque j'étais dans la pratique privée où j'ai connu cette expérience -d'avoir l'information de la commission concernant ses politiques d'évaluation ou ses politiques générales d'indemnisation. Comme c'était difficile d'avoir des auditions, j'ai attendu un an dans un cas pour essayer d'en avoir une et je n'en ai pas eu. C'est une mesure qui nous paraît importante d'informer les travailleurs de leurs droits. Nous avions à la commission toute une série de manuels qui fusionnaient des procédures, des politiques et des programmes. Nous avons finalement fait un manuel qui regroupe toutes les politiques et tous les programmes de la commission, et nous l'avons distribué largement. Nous l'avons rendu accessible à toutes les régions. Ce document a été ou sera...

Une voix: Il l'a été.

M. Bernier: Il a été déposé. Il contient toutes les politiques et tous les programmes, que ce soit d'indemnisation ou de réadaptation, les services médicaux. Il contient également les politiques concernant les médecins. Lorsqu'on dit que ce ne sont pas les médecins de la commission qui fixent les taux d'incapacité, la politique est très claire: le médecin doit trancher à partir de rapports d'experts et il doit, en priorité, utiliser le rapport du médecin traitant. La politique est très claire sur ce point et les autres politiques de réadaptation sont toutes aussi claires. Nous avons distribué ce manuel. Les parties l'ont. Les parties peuvent l'utiliser. C'est excellent lorsqu'un travailleur, un représentant des travailleurs ou d'un employeur peut dire à un fonctionnaire: Voici, c'est ce qui est inscrit dans votre manuel et vous devez appliquer cela. À ce moment-là, il doit le faire.

Nous avons également, récemment, commencé à publier un recueil de jurisprudence. Nous avons, d'abord, fait un recueil de jurisprudence concernant l'inspection et nous avons élargi. Nous en avons un maintenant concernant les décisions des bureaux de révision en matière de réparation. Ce recueil de jurisprudence est distribué à toute personne - j'ai un peu de difficulté à comprendre pourquoi on dit qu'on l'avait obtenu sous la couverture; c'est officiel, le conseil d'administration a tranché là-dessus - qui en fait la demande gratuitement. Nous avons, je pense, une liste d'environ 620 personnes qui l'ont demandé et qui vont le recevoir régulièrement. À compter de janvier ou de février, nous allons avoir un fascicule qui va regrouper l'inpection et la réparation, mais ce recueil de décisions est accessible à tout le monde.

Finalement, j'ai entendu également que les accidentés, dans certains cas, avaient de la difficulté à recevoir leur dossier. C'est une règle aussi très claire: tout accidenté qui en fait la demande reçoit dans les jours qui suivent son dossier intégral. S'il ne l'a pas demandé, lorsqu'il y a révision ou appel, nous prenons l'initiative de lui en envoyer une copie. Mais dès qu'il le demande, c'est automatique, nous lui en remettons une copie gratuitement. C'étaient les points que je voulais toucher. Je vous remercie.

M. Bertrand (Jean-Louis): Jean-Louis Bertrand.

Le Président (M. Blouin): M. Bertrand.

M. Bertrand (Jean-Louis): M. le Président, M. le ministre, MM. les députés, j'aimerais avec vous faire assez rapidement un tour d'horizon de la prévention et de l'inspection à la Commission de la santé et

de la sécurité du travail. Comme vous l'avez entendu à de multiples reprises, il s'agit de l'application de la Loi sur la santé et la sécurité du travail et, plus particulièrement, d'atteindre deux objectifs fondamentaux que fixe la loi: tenter d'éliminer à la source les dangers par le contrôle, et la participation active des employeurs et des travailleurs à la réalisation de cet objectif.

Depuis l'adoption de cette loi par l'Assemblée nationale, il y a deux champs qui me préoccupent davantage, soit l'inspection, d'abord, et la prévention, ensuite. Concernant l'inspection, depuis 1981, vous savez que tous les services d'inspection qui appartenaient auparavant à quatre organismes différents sont maintenant unifiés et, dès le début de l'année 1981, ces services étaient entièrement opérationnels. Comme vous vous en doutez sûrement, il a fallu s'assurer d'une formation adéquate de ces inspecteurs, préparer les manuels d'opération du nouveau service d'inspection, préparer évidemment aussi le manuel de l'inspecteur dont vous avez entendu parler, manuel qui a été, comme cela a été dit, discuté en comité plénier du conseil d'administration. Vous retrouvez essentiellement dans ce manuel les quatre types d'interventions qu'on retrouve dans la loi, soit l'intervention sur l'inspection de conformité qui a pour objectif d'aller dans une entreprise, au niveau d'un établissement, et de vérifier le respect des règlements. Comme vous le savez, ces règlements doivent être envisagés comme autant de règles de base de prévention. Le deuxième programme d'inspection concerne le cas de refus de travail; la loi nous demande d'intervenir dans des délais rapides pour pouvoir régler les cas de refus. Le troisième programme concerne les plaintes que les travailleurs ou les employeurs peuvent faire concernant l'application de la loi, et le dernier concerne les enquêtes d'accidents. Comme je vous le disais, ce service fonctionne depuis janvier 1981. Vous avez, dans les tableaux qu'on vous a remis, un tableau qui indique le nombre d'inspections de conformité - c'est le tableau 3 d'enquêtes d'accidents, de plaintes et de refus pour 1981, 1982 et 1983.

En plus, les services d'inspection ont préparé des guides techniques pour les fins de l'application de la réglementation et, particulièrement - et tantôt, on entendait les gens de l'Association des mines de métaux -par exemple, dans le secteur des mines, des guides concernant les treuils utilisés dans les mines. On est, quand même, des spécialistes au niveau du service de l'inspection et de la prévention. L'Association des mines de métaux, lors d'un dernier colloque portant sur la prévention, a demandé qu'un de nos inspecteurs se rende à son colloque, pour parler de l'entretien des treuils dans les mines. Je pense que c'est une reconnaissance par cette association du fait que certains de nos inspecteurs ont une bonne compétence.

En plus, le service d'inspection a dû préparer des inspections dans des champs nouveaux et particulièrement au niveau de l'agriculture. C'était un champ qui n'avait pas encore été abordé par l'inspection dans le domaine de la santé et de la sécurité. Aussi, nous avons dû créer un bureau de révision et, comme l'a dit tantôt mon collègue, M. Bernier, le rapport des décisions de ce bureau est disponible sur demande.

Quant à l'aspect de la prévention, l'objectif a d'abord été de mettre en place des équipes de base, tant à la direction générale que dans chacune des directions régionales et d'engager des spécialistes pour les fins d'application de la loi, particulièrement en hygiène, en médecine du travail, en toxicologie et du côté de la formation, de même, évidemment, que du côté de l'ingénierie. L'accent a été mis pour soumettre, aussitôt que possible, au conseil d'administration la réglementation de base pour les fins d'application de la loi. D'abord, une proposition pour déterminer les secteurs qui doivent être déclarés prioritaires pour les fins d'application de la loi; préparer aussi la réglementation de base dont les comités de santé et de sécurité, les règlements-cadres pour les associations sectorielles, les services de santé et les programmes de prévention, pour n'en citer que quelques-uns.

Nous avons aussi préparé des guides pour aider les employeurs et les travailleurs à appliquer la loi. Je vous réfère particulièrement au guide concernant l'élaboration d'un programme de prévention, tant dans les chantiers que dans les établissements. Je voudrais vous souligner que ces guides ont fait l'objet de consultations auprès des représentants tant des travailleurs que des employeurs et, particulièrement en ce qui concerne le programme de prévention sur les chantiers, en consultation avec l'Association des entrepreneurs en construction du Québec et les organismes qui en sont membres. La même approche s'est faite auprès de l'Association des mines de métaux pour justement s'assurer - et je le souligne que c'est un guide; ce n'était donc pas obligatoire - que ce soit l'outil le plus adéquat possible pour l'application de la loi au niveau des établissements ou des chantiers. Nous avons aussi pensé à d'autres types de guides comme celui qui concerne l'analyse des risques ou encore les registres de l'article 52. Je souligne toujours qu'il s'agit de guides et non pas de choses obligatoires. (22 h 15)

Nous avons, évidemment, mis aussi beaucoup l'accent sur l'information auprès des employeurs et des travailleurs, d'abord,

sur la loi elle-même. Nous avons aussi mis à la disposition des employeurs et des travailleurs l'information de base en santé et en sécurité, particulièrement par la création d'un centre de documentation et d'un répertoire toxicologique. Nous avons participé à des sessions d'information et de formation tant auprès des établissements eux-mêmes qu'auprès de groupes réunissant des employeurs ou des travailleurs dans un secteur, auprès de groupes spécialisés, par exemple, les colloques qu'on a tenus chaque année avec le Conseil du patronat.

Au niveau de guides plus techniques, nous avons sorti des guides concernant, par exemple, la lutte contre le bruit ou encore le guide concernant les respirateurs.

Nous avons aussi créé des liens étroits avec nos principaux partenaires dans l'application de cette loi, d'abord avec le ministère des Affaires sociales et son réseau et, plus particulièrement, avec les centres hospitaliers ayant un département de santé communautaire. Nous avons, avec eux, préparé et soumis au conseil d'administration un contrat type qui encadre les contrats spécifiques qui régissent les relations entre la commission et les centres hospitaliers ayant un département de santé communautaire. Ces liens nous assurent une coordination entre la commission et le réseau des affaires sociales, tant au niveau de l'ensemble du Québec qu'au niveau de chacune des régions. Au niveau régional, cela se fait par le biais de ce qu'on appelle une table de concertation qui réunit des représentants de la commission, de même que des représentants du CHDST ou encore d'autres organismes intéressés. Le principal est peut-être le ministère de l'Éducation.

Nous avons établi avec eux, comme la loi l'indiquait, des relations privilégiées, d'une part, pour assurer la formation de certaines ressources humaines qui manquaient au Québec pour permettre une bonne application de la loi. Je fais référence particulièrement à un cours qui a été mis sur pied en collaboration avec le ministère de l'Éducation et les cégeps pour former des techniciens en hygiène industrielle. Je suis bien heureux que les étudiants qui ont suivi ce cours aient tous trouvé un débouché au niveau du marché du travail.

Nous avons aussi assuré avec le ministère l'introduction dans les cours de formation professionnelle des éléments de santé et de sécurité. Évidemment, c'est un processus qui est assez long; le ministère revoit les profils de formation professionnelle. D'ailleurs, actuellement, il y a une réforme en cours de ce côté. On a eu l'assurance de leur part qu'au fur et à mesure de la révision des programmes les éléments de santé et de sécurité seraient introduits. Je pense qu'il est important que les futurs travailleurs, lorsqu'ils apprennent leur métier, apprennent aussi les règles de base en santé et en sécurité de sorte que, dès le départ - et cela a été cité comme un élément important - ils aient une connaissance des risques, des dangers inhérents aux tâches qu'ils vont exécuter, une connaissance de base des produits et des outils qu'ils vont manipuler suffisante pour y faire face adéquatement et s'intégrer dans l'approche que veut la loi, soit la prévention des accidents et des maladies.

Particulièrement avec le ministère de l'Éducation, nous avons mis l'accent sur la formation dans les profils qui conduisent au secteur de la construction. Nous pensions qu'il était important que tout travailleur de la construction reçoive des éléments de base de formation concernant le code de sécurité des travaux de construction. Comme vous le savez, c'est un programme qui a été développé, à l'époque, par l'Office de la construction du Québec et que nous avons poursuivi; ce programme se fait en relation étroite avec le ministère de l'Éducation et particulièrement les centres de formation professionnelle.

Un autre point sur lequel, évidemment, nous avons mis beaucoup l'accent, c'est la création d'associations sectorielles. Vous avez un tableau qui vous indique les associations sectorielles formées; c'est le tableau vert no 2. Sont formées actuellement les associations sectorielles dans les secteurs des affaires sociales, du transport et entreposage, du service automobile, de l'industrie des textiles primaires, de l'imprimerie et des activités connexes et de l'administration publique. Je pense qu'on voit là l'exemple qu'il est possible, pour les associations d'employeurs et les associations représentant les travailleurs, d'unir leurs efforts pour se créer un instrument leur permettant de gérer leur santé-sécurité dans leur milieu respectif. Nous espérons qu'au printemps 1984 l'association dans le secteur des produits de métal, de même que dans celui de la fabrication d'équipements de transport et de machines sera aussi opérationnelle.

Il y a un certain nombre d'associations sectorielles qui sont en suspens. Je pense que vous avez eu l'occasion d'entendre des représentants patronaux du côté des mines et du côté de la construction. Du côté de la construction, vous savez que la loi l'impose. Nous avons mis beaucoup d'efforts pour amener les deux parties, volontairement, à créer l'association sectorielle. Je pense que vous avez pu voir le type de blocage qui peut exister du côté patronal.

Cependant, ayant à l'esprit un des aspects de base au niveau de la création d'une association sectorielle, soit suggérer des modifications à la réglementation, nous avons, depuis maintenant plus d'un an et demi, créé un comité consultatif où siègent des représentants de l'Association des

entrepreneurs en construction, de même que des représentants des associations représentatives, au sens de la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction. Il y a aussi un comité conjoint auquel nous déposons des projets d'amendements au code de sécurité des travaux de construction; ces amendements sont discutés avec les représentants des deux parties. Ce comité consultatif, évidemment, forme des sous-comités pour examiner des points techniques précis, faire rapport au comité conjoint pour ensuite soumettre le tout au conseil d'administration, éventuellement, comme modification à la réglementation. Je pense que c'est un point important où les parties, tant patronale que syndicale, peuvent influer sur la réglementation.

C'étaient là les principaux points sur lesquels je voulais attirer votre attention. Je vous remercie de votre attention et je suis disposé à répondre à vos questions. Merci.

M. Sauvé: Avant de passer à la période de questions, M. le Président, je voudrais donner quelques mots d'explication sur cette brochure que vous avez, le Régime québécois de santé et de sécurité du travail, éléments de comparaisons avec d'autres régimes canadiens. Elle était dans les documents que nous vous avons donnés au début de la séance. C'est simplement parce que plusieurs questions ont été posées là-dessus. Si vous regardez le tableau 1 à la page 3, vous avez le nombre d'employeurs qui contribuent aux fonds d'accident pour l'année 1982; le Québec est toujours souligné; vous avez les dix provinces et les deux territoires. Le tableau 2 est le rapport entre les réclamations à la suite de lésions professionnelles et l'emploi total; c'est intéressant de regarder les comparaisons entre les différentes provinces. Les maximums assurables au tableau 3. L'indemnisation pour incapacité totale temporaire au tableau 4. L'indemnisation pour incapacité totale permanente, en 1983, au tableau 5. Ce sont des questions que les gens se posaient ou ont posées. Vous avez le rapport entre l'indemnité maximale prévue et la moyenne des salaires, le mode de rajustement des rentes pour incapacité permanente, les cotisations des employeurs en 1982, la masse salariale assurable par province et les montants perçus en millions; la masse salariale est en milliards: par exemple, on voit qu'au Québec nous avons cotisé sur 34 700 000 000 $ et nous avons perçu 667 000 000 $ de cotisations. Vous avez les revenus de placements des commissions à travers le Canada, la comparaison des taux moyens de contribution. Là, c'est intéressant; depuis l'année 1978 jusqu'à l'année 1984 comprise, vous avez la comparaison entre la Colombie britannique, l'Ontario et le Québec. Vous voyez que le taux moyen au Québec en 1978 était de 1,90 $, à la page 17 - je répète, 1,90 $ en 1978 - et qu'il est de 1,89 $ en 1984, alors qu'en Ontario il était de 1,57 $ en 1978, et de 2,17 $ en 1984, par rapport au nôtre à 1,89 $, et qu'en Colombie britannique il était de 2,07 $ en 1978 et de 2,86 $ des 100 $ de salaire en 1984.

C'est assez intéressant. On voit la situation financière des commissions au tableau 12. On a fait grand état, depuis le début de cette commission, du déficit de 39 000 000 $ de l'année 1982. Je vous rappelle, si vous lisez le document à la page 19, que l'Ontario, en 1982, a eu un léger déficit de 612 000 000 $. Vous n'en avez pas entendu parler beaucoup, M. le Président. Je pense que le nôtre, on aurait du le dire en anglais, on n'en aurait jamais entendu parler.

Voilà, M. le Président, nous sommes disponibles pour répondre à vos questions.

M. Cusano: C'est intelligent, cela!

Le Président (M. Gagnon): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Cusano: Très intelligent!

Le Président (M. Gagnon): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Cusano: On va s'en parler.

Le Président (M. Gagnon): À l'ordre! Vous aurez l'occasion de prendre la parole tantôt. Merci. M. le ministre.

M. Fréchette: Merci, M. le Président. La prudence devrait probablement m'inciter, à ce stade-ci, à ne pas intervenir du tout, particulièrement à la suite des sursauts que j'endends à ma gauche depuis quelques secondes. Le motif est très clair pour lequel ce devrait être cela et ce sera cela, quant à moi, tout en me réservant, bien sûr, le droit d'intervenir plus tard dans le cours de nos travaux par voie de commentaires ou par voie de questions. Je voudrais strictement me limiter à remercier les témoins qui viennent de se faire entendre et à tirer une première conclusion générale.

Je comprends que nos travaux ne sont pas complétés, loin de là; nous allons les continuer pendant la période prévue par l'ordre que l'Assemblée nationale nous a donné et conformément aux ententes qui sont intervenues entre les partis. Il y a, cependant, au-delà des personnes - et quand je parle des personnes, je ne réfère pas exclusivement et strictement à celles qui sont devant nous ce soir, mais à toutes les personnes que nous avons entendues depuis, maintenant, quatre jours - une constante qui

se dégage et à laquelle M. Bernier, en particulier, a référé dans son témoignage: c'est que nous sommes dans une matière qui, par son essence, est contentieuse. Il est très clair - je pense qu'on peut arriver à cette conclusion à ce stade-ci sans attendre la fin de nos travaux - que jamais personne ne sera satisfait de quelque système que ce soit. Cela me semble tout à fait évident. (22 h 30)

Nous sommes dans une matière qui est liée de très près à ce que j'appellerais le champs global ou la vaste juridiction des relations du travail et, comme je vous le disais il y a un instant, par essence même, il s'agit toujours de matière contentieuse qui devrait peut-être idéalement permettre que des consensus se dégagent sur le fond. Mais nous avons tous - quand je dis "nous", j'implique, évidemment, et peut-être au premier chef les gouvernements - un bon bout de chemin à faire pour espérer pouvoir atteindre cet idéal. Quelqu'un, au cours des quatre derniers jours, a dit: II n'y a pas simplement les lois qui font obstacle, mais il y a aussi les mentalités, les attitudes qui, à bien des égards, font en sorte que toutes espèces de litiges naissent à toute espèce d'époque, également. Est-ce que c'est à cause des lois? Est-ce que c'est à cause des règlements? Est-ce que c'est à cause, précisément, des mentalités? Peut-être qu'il y a un peu de ces trois éléments qui font que la situation, au Québec, est ce qu'elle est en cette matière.

Sur le plan encore de la constatation générale, il est fort évident, me semble-t-il, qu'ensemble nous allons avoir intérêt à continuer de nous parler, d'échanger des informations et des évaluations. Pour les motifs dont je vous ai parlé au tout début de ces remarques brèves, je n'irai pas plus loin ni dans mes observations ni, non plus, dans la possibilité qui est la mienne de procéder par voie de questions. Je me réserverai plutôt le droit d'intervenir après que mes collègues des deux côtés de la table auront exécuté leurs mandats respectifs.

Le Président (M. Gagnon): Merci, M. le ministre. M. le député de Viau.

M. Cusano: Merci, M. le Président. Depuis le commencement de cette commission, le tout s'est déroulé très calmement parce que les gens se sont présentés, sont venus ici en toute sincérité. Je me sens un peu offusqué présentement par certains commentaires. Je vais revenir aux commentaires. Je voudrais seulement rappeler à l'honorable juge que j'étais unilingue, je suis devenu bilingue et, après, je suis devenu trilingue. Qu'il veuille me parler en italien, en français ou en anglais, n'importe quand, on va y aller, on va se parler. Quand il fait des commentaires à savoir qu'il aurait dû présenter ces statistiques en anglais et qu'on aurait mieux compris, je comprends, M. le Président, que des témoins ici, des invités aient parlé de l'arrogance de l'honorable juge.

M. Sauvé: Je vous félicite, M. le député, de parler trois langues.

M. Cusano: Excusez, j'ai la parole, M. le juge, j'ai la parole. Vous allez avoir beaucoup de temps, M. le juge. On a entendu l'Assemblée des travailleurs et travailleuses accidentés du Québec. On a entendu, M. le Président, la Confédération des syndicats nationaux. On a entendu la Fondation d'aide aux travailleurs accidentés, la Corporation professionnelle des physiothérapeutes, le Mouvement d'aide aux accidentés du travail du Québec.

Je m'excuse si une fois de temps en temps je fais une erreur en français. On a entendu au bas de l'échelle. On a entendu aussi un groupe d'intervenants professionnels de la santé de CLSC, la Fédération québécoise des infirmières. Oui, il y avait un groupe d'intervenants professionnels. Ils étaient ici, M. le ministre. On a entendu les infirmières, l'Association des industries forestières du Québec. On a entendu le conseil d'administration de la CSST; on a pu remarquer un peu ce qu'était le paritarisme. C'était une "Candid Camera" M. le Président, oui, une "Candid Camera"; on a vu ce qu'est le paritarisme.

Une voix: Pourriez-vous nous dire en français à quoi cela correspond?

M. Cusano: Oui, "Candid Camera", c'est "les Insolences d'une caméra". On a entendu l'Association des entrepreneurs en construction et, tantôt, l'Association des mines de métaux. Le tout s'est déroulé dans le calme de la part des membres de cette commission. Je ne crois pas qu'il y ait eu d'arrogance de part et d'autre. Mais, lorsqu'on entend vos commentaires ou ceux de votre collègue, lorsqu'il parle des cas litigieux, il se réfère spécifiquement à des cas d'origine ethnique. Pour son information...

M. Fréchette: M. le Président, une question de règlement.

Le Président (M. Gagnon): Sur une question de règlement, M. le ministre.

M. Fréchette: M. le Président, je veux bien concourir à l'observation faite par le député de Viau que, depuis quatre jours, nos travaux se sont déroulés dans le calme, dans la sérénité. Je ne veux pas, non plus, empêcher le député de Viau de tirer des conclusions ou de procéder à des

interprétations, mais il me semble que la vérité a quand même sa place. J'ai entendu comme lui le vice-président à la réparation, M. Bernier, parler des motifs pour lesquels il peut y avoir parfois dans des dossiers de la difficulté à donner satisfaction à ceux qui demandent des renseignements. Or, ce à quoi le député de Viau se réfère est un élément parmi cinq ou six qui ont été soulevés par le témoin. Quand le député de Viau dit qu'il s'est référé spécifiquement ou exclusivement à cet aspect-là, je m'excuse, mais, en tout cas, quant à moi, ce n'est pas ce que j'ai compris.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Viau.

M. Cusano: Je suis d'accord avec le ministre que c'est entre autres choses. Mais on semble ramener cela, une fois de temps en temps, autour de cette table. Pour son information, je suis très proche de ces communautés culturelles et je peux lui dire que, lorsque quelqu'un a un malaise, il va s'assurer d'aller voir un médecin traitant qui parle sa langue maternelle. Proportionnellement, il y a assez de médecins qui parlent l'italien, il y a assez de médecins qui parlent le portugais, il y a assez de médecins qui parlent le grec. Avancer que c'est cela le problème, non. Mais, même si c'était cela, parce que ce n'est pas une exclusivité d'aller chez un médecin de sa langue maternelle, il me semble que toute personne qui va aller chez un médecin, si elle n'est pas capable de comprendre le médecin, va y aller avec un interprète, parce que sa santé, c'est quelque chose à quoi tout le monde tient.

Le président, parmi plusieurs remarques, parlait du service d'accueil. Vous avez instauré un service d'accueil, et, si ce service d'accueil fonctionnait si bien, je pense qu'on n'aurait pas entendu parler de tous les cas qui nous ont été présentés. Vous parlez d'un système sophistiqué de téléphonie et vous vous comparez à l'entreprise privée. Mais il y a une chose que vous oubliez dans toute cette question, c'est que, si un individu appelle chez Eaton et n'a pas de réponse, il va essayer Simpsons. Et s'il est à Laval et que cela ne fonctionne pas avec Simpsons ou La Baie, il va appeler Sauvé Frères. Il a un grand choix. Mais, malheureusement, les accidentés, les travailleurs ou les syndicats n'ont pas de choix. Lorsqu'ils ont des problèmes, ils ont seulement une place où appeler et, lorsque cela ne fonctionne pas là-bas, c'est aux bureaux des députés qu'ils appellent. Donner des chiffres indiquant que le lundi il y a plus d'appels téléphoniques que le mardi et ainsi de suite, ce sont des excuses. Statistiquement, c'est bien beau, mais cela ne donne pas un service à la clientèle et ce n'est pas d'aujourd'hui. Le service à la clientèle, pour moi, en ce qui concerne n'importe quel appareil gouvernemental, doit être un service adéquat et qui répond aux besoins des gens.

Les commentaires de M. Bernier nous ont dit beaucoup de choses et, M. le ministre, je ne ferai pas le tour de l'ensemble; je veux seulement en souligner quelques-unes. Vous dites: C'est sûr, tout le monde est d'accord, la réparation ne fait pas l'unanimité. C'est sûr! "Motherhood and apple-pie". Personne n'est contre la vertu. Ce sont des affirmations très gratuites et tout le monde peut les faire. Vous dites, entre autres, que vous avez bâti des méthodes qui facilitent la chose. D'un autre côté, vous dites que l'administration n'est pas facile.

Vous avez préparé des documents, on vient de nous donner certains documents. Je ne sais pas combien de documents vous envoyez partout. Je pense que c'est à peu près un centième. Vous dites que ces textes sont bien précis et, de l'autre côté, vous dites que ce n'est pas facile. Si c'est précis, si c'est bien fait, cela ne devrait pas être difficile. C'est simple! Il me semble que deux plus deux font quatre! Et vous avez des problèmes.

M. Polak: À la CSST, c'est cinq.

M. Cusano: Ah bon! On remarque aussi la date; je suis sûr que mes collègues vont en parler. On nous donne des documents, ici, de septembre 1983, c'est le volume no 1. On a pris des mesures. Est-ce la semaine dernière, est-ce que cela fait trois ou quatre mois que vous êtes en place? Je pense qu'on nous a dit que cela fait quatre ans que vous êtes là. On donne de la jurisprudence, volume 1, no 1, en septembre 1983. C'est cela que vous appelez de la clarté!

Vous dites que vous avez établi des méthodes de déficit physique très claires et précises. Encore là, si elles étaient très claires et précises, elles ne seraient pas contestées. Elles ne se ramasseraient pas devant la Commission des affaires sociales. On a vu des cas, ici, qui démontrent des grandes différences. Vous avez bâti quoi? Y a-t-il une chicane entre vous et la Commission des affaires sociales? Pourquoi on établit certaines choses à la Commission des affaires sociales et pas chez vous? Ce sont des questions que je me pose. Pourquoi, s'il y a des systèmes ailleurs, à la Commission des affaires sociales, ne prenez-vous pas un système en place? Non, vous le renvoyez. Sur votre information - je reviens encore sur le fait - vous dites: La politique est très claire. Je me pose la question, à savoir si cette politique est appliquée de la même façon dans toutes les régions parce que cela a été un de vos grands désirs, la régionalisation. On parlera des coûts de la

régionalisation après. C'est clair, c'est précis. C'est pour cela qu'il faut faire des conférences et expliquer tout cela. (22 h 45)

En tout cas, en ce qui me concerne, M. le Président, les témoignages qu'on a reçus ici n'ont fait que confirmer les quelques cas de mon comté. Lorsque les gens viennent chez nous, qu'est-ce qu'on fait? On a parlé de la téléphonie tout à l'heure. J'ai essayé moi-même d'appeler au bureau de Montréal. Je dois même vous avouer une chose: Je me suis fâché contre ma secrétaire parce que cela faisait trois jours que je lui demandais de rejoindre le bureau. Elle a dit: M. Cusano, c'est impossible. Elle m'a dit: J'appelle et on me fait écouter de la musique. J'ai dit: Je vais appeler. Je pense que je peux le répéter ici, je me suis fâché contre ma secrétaire et je lui ai dit: Donne-moi le numéro de téléphone et je vais appeler moi-même. J'ai appelé. Après deux ou trois appels, on nous fait entendre de la musique...

M. Pagé: De Radio-Canada!

M. Fréchette: Qui prône l'indépendance!

M. Cusano: ...de Radio-Canada, à ce qu'on me dit, qui prône l'indépendance. Vous me mettez les paroles dans la bouche, M. le ministre.

M. Fréchette: De la musique russe.

M. Pagé: M. le Président, pour l'information de ceux qui nous écoutent, il faut dire que c'est une "inside joke". C'est quelque chose qui s'est passé au mois de mai.

Une voix: Exactement.

M. Cusano: C'était de la musique russe et on expliquait comment la Russie avait obtenu son indépendance. Cela m'a frappé. Je sais que vous m'avez déjà expliqué que ce n'était pas vous qui aviez le contrôle, justement. Vous pouvez comprendre comment cela peut être frustrant pour l'individu qui vous appelle.

Vous dites que des accidentés peuvent recevoir leur dossier automatiquement. Il y a des cas dans mon comté de gens qui essaient de l'avoir. Je vous donnerai en temps et lieu les numéros de téléphone et les noms des personnes qui, justement, n'ont pas eu leur dossier automatiquement ou, si elles l'ont eu, cela a pris beaucoup de temps. On peut bien blâmer Postes Canada, mais ces gens ont eu beaucoup de difficultés.

M. le Président, c'est tout. On posera des questions très claires, très précises. Je m'excuse auprès des gens de cette commission si je me suis senti quasiment attaqué tout à l'heure. C'est parce que cela arrive un peu trop souvent et on accumule ces choses-là. Je m'en excuse auprès des membres de la commission. Je comprends très bien comment ces accidentés sont offusqués, frustrés à cause de leurs contacts avec la CSST. Merci.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Portneuf.

M. Sauvé: M. le Président, pourrait-on faire des remarques?

Le Président (M. Gagnon): Oui, effectivement.

M. Sauvé: Je pense que, sans cela, on va se perdre.

Une voix: Non, on ne se perdra pas. Le Président (M. Gagnon): M. Sauvé.

M. Sauvé: Je félicite le député de Viau de parler trois langues. J'en suis bien content. Tout ce que mon collègue, M. Bernier, a voulu dire, c'est que, parmi les problèmes, il y a des problèmes de communication et ce sont des cas que l'ATTAQ elle-même a soulignés. Lundi, l'ATTAQ a donné un certain nombre de cas. Nous y reviendrons. Nous avons fait sortir les dossiers. Vous allez voir ce que c'est, pourquoi ce n'est pas si facile. C'est beau à entendre comme cela, mais vous verrez ce que c'est sans personnaliser le débat, mais en prenant le dossier. Tout ce qu'il a voulu dire, c'est que certains des cas cités étaient ceux de gens d'ethnies différentes, des Grecs, des Portugais, etc. C'est tout ce qu'il a voulu dire.

M. Cusano: Le syndrome méditerranéen, M. le Président!

M. Sauvé: Pardon?

M. Cusano: C'est cela que vous appelez le syndrome méditerranéen.

M. Sauvé: Non.

Le Président (M. Gagnon): Excusez-moi, M. le député de Viau.

M. Sauvé: Je pense que c'est ce qu'on a dit tantôt, c'est qu'on ne tolère pas les remarques que des médecins ont faites dans les dossiers. M. Bernier a été très clair tantôt. Je voudrais bien qu'on se comprenne. On a dit que, comme politique, cela n'était pas toléré, mais on ne peut pas suivre à la piste les 2500 employés. Lorsque cela nous est souligné, des mesures disciplinaires sont prises. Si elles ne sont pas prises, elles

devraient être prises par le supérieur immédiat.

Ce que je disais, tout simplement - et c'est cela qui a fait sursauter le député de Viau, je pense - c'est que le déficit de 612 000 000 $ en Ontario, en 1982, c'était gros comme cela sur quatre lignes dans le Globe and Mail. C'est pour cela qu'au Québec on n'en a pas entendu parler. C'est tout ce que je voulais dire. Je ne vois pas pourquoi on sursaute. Je comprends, parce qu'on est de nationalité différente, qu'on peut être plus sensible, j'accepte cela. Mais je ne crois pas qu'il y ait grand-chose là-dedans.

Quand on parle de la téléphonie d'Eaton et d'Air Canada, je ne sais pas si vous avez déjà appelé chez Air Canada les jours de tempête ou même aux heures de pointe. Là aussi, il y a de la musique. Là aussi, il n'y a pas grand concurrence pour certains vols; entre Quebecair et Air Canada, des fois il n'y a pas grand concurrence.

Chez nous, on n'a le choix ni de nos clients employeurs, ni de nos clients travailleurs. Dans une compagnie d'assurances privée, on a le choix de son client, on a le choix d'accepter un client, un nouvel assuré. Un ancien assuré, si son ancien dossier est mauvais, on peut lui dire: Monsieur, on va hausser votre prime tellement, dans le fond, que la personne change de compagnie. Il n'y a pas de problème là-dedans. Il faut faire attention.

Je n'ai pas compris la remarque sur la CAS. Je ne sais pas. L'exemple qu'on a donné, c'est qu'il pouvait y avoir de la chicane. Il n'y en a pas du tout. Il n'y a pas de chicane, à ma connaissance, entre la Cour d'appel et la Cour suprême. On n'a pas compris du tout votre remarque.

Quant au dossier, si M. Bernier a dit cela, c'est que, quand quelqu'un va au bureau et veut avoir son dossier, s'il est là, il va l'avoir dans la journée. Si c'est un vieux dossier - de ce temps-ci, M. le Président, il y a beaucoup de cas de révision de vieux dossiers; c'est tout à fait normal dans une période de situation économique difficile, les gens font réviser les vieux dossiers - un dossier qui date de 1971, comme vous allez le voir tantôt dans certains cas, il n'est plus au bureau; il est dans ce qu'on appelle la voûte et il est sur microfilm. Il est au siège social à Québec. Il faut donc reconstituer le dossier et le faire revenir. Vous ne l'avez pas dans la journée, c'est évident. Il n'y a pas un système qui est comme cela.

Je pense qu'il faut faire bien attention. Je voudrais qu'on se parle bien clairement. Nous avons des livres ouverts. Nous avons des explications. Nous sommes prêts à tout faire. Ce que je veux vous dire, c'est que, si cela allait si mal... Ce n'est pas ce qui a été dit lors d'un sondage fait par SORECOM - pas par nous, pas un sondage interne, mais un sondage fait par SORECOM - entre le 25 octobre et le 2 novembre auprès de 715 accidentés - pas du public en général - dans la région de Montréal, Laval et Longueuil. Le taux de satisfaction: pour l'indemnisation, par exemple, 81% des gens se disent satisfaits du service; 63% se disent satisfaits de la réadaptation. Là-dedans, il y en a 10% qui ne répondent pas parce qu'ils n'ont pas eu les services. C'est pour cela que le pourcentage est un peu plus bas. Nous avons regardé cela. 76% jugent le personnel compétent. 73% ont contacté par téléphone. 67% se disent satisfaits des décisions du bureau de révision. 17% ne sont pas satisfaits. 72% des accidentés considèrent que la CSST joue très bien son rôle.

On a constaté, comme on le sait depuis longtemps, que nous avons un problème sur le plan médical. Les gens sont moins satisfaits parce qu'il y a un problème très simple, c'est que le médecin qui fait l'évaluation, qu'il travaille pour qui que ce soit, c'est lui qui dit: Chère madame ou cher monsieur, vous êtes apte à retourner au travail à telle date. Cela ne plaît pas toujours. Deuxièmement, c'est lui qui fixe -ou c'est elle, la femme médecin - le taux d'incapacité. Ce n'est pas toujours celui qu'on attendait. On nous dit qu'il y a de l'insatisfaction là-dedans. 55% sont satisfaits de la rapidité. Donc, on se dit: Pourquoi a-ton fait un sondage? Uniquement auprès des accidentés pour savoir quels étaient les points qui devaient être améliorés.

Je pense, M. le Président, que l'image n'est pas celle qu'on nous a donnée et j'espère qu'on aura l'occasion de revenir sur des cas qui ont été discutés. Les associations patronales aussi ont dit des choses assez cocasses. Nous avons entendu cela. Nous avons été, je pense, très patients. Nous avons attendu pendant quatre jours. C'est long. Quand vous ne pouvez pas répondre, c'est très long. J'ai été surpris d'apprendre que je pouvais être arrogant, quand on n'a même pas communiqué avec moi. C'est assez difficile à comprendre, cela aussi.

Le Président (M. Gagnon): Merci. M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Merci, M. le Président. Je dois vous exprimer, dans un premier temps, notre satisfaction de voir comparaître ici en commission parlementaire M. le juge Sauvé, président-directeur général de la Commission de la santé et de la sécurité du travail. Cela faisait déjà un bon bout de temps qu'on vous attendait. Non, c'est sincère. C'est plein d'enthousiasme. Depuis le mois de juin 1983 qu'on parle de la possibilité d'avoir un échange.

On aura passé ensemble l'étape d'une question avec débat. On aura passé ensemble l'étape de nombreuses questions, quoique

spécifiques, mais qui nous tenaient à coeur et qu'on a eu l'occasion de porter à l'attention du ministre du Travail qui a fait tout ce qui était humainement possible pour y répondre de son mieux compte tenu du fait, évidemment - cela va de soi - que les réponses devaient venir de votre commission et, plus particulièrement, de votre bureau.

La motion a été adoptée. Le gouvernement et l'Opposition ont accepté unanimement qu'on se réunisse du 12 au 15 -finalement, ce sera jusqu'au 16 décembre -pour que les parlementaires voient ensemble, avec ceux qui sont venus se faire entendre, de quoi retourne, finalement, l'administration de la Commission de la santé et de la sécurité du travail en termes de performance et en termes d'objectifs.

C'est donc dire qu'on s'appuyait - et on l'aura constaté dans les débats - sur deux objectifs dans le cadre de cette commission. Tout d'abord, un dialogue ou un échange avec la commission comme partenaire gouvernemental, évidemment, dans son objectif d'intervenir là-dedans et aussi avec ceux qui sont directement concernés par toute l'activité de la commission; c'était le premier objectif. Le deuxième, c'était de profiter de cette réflexion et de cet échange pour qu'on puisse voir ensemble si l'adoption de la loi 17, et son application subséquente par étapes, avait profité à la société québécoise, en général. Il faut en convenir: quand des centaines de milliers de réclamations arrivent chez vous chaque année, il faut dire que ce que vous administrez, c'est une boîte qui touche l'ensemble de la société.

La grande question est la suivante: La loi 17 a-t-elle atteint ses objectifs? Les idéaux auxquels tous ont été conviés en 1978 au moment du débat et en 1979 au moment de l'adoption ont-ils été atteints? S'ils l'ont été, tant mieux. S'ils ne l'ont pas été, pourquoi ne l'ont-ils pas été, dans quel cadre et dans quel délai pourront-ils l'être?

On a commencé à siéger lundi. Je dois, tout d'abord, vous dire qu'on a apprécié votre présence. Vous venez de nous signaler que vous avez été très attentif et que vous avez pris des notes - d'ailleurs, je peux confirmer que vous semblez avoir pris beaucoup de notes - sur les mémoires présentés par chacun et chacune. Il en ressort, après quelques jours d'auditions, un sentiment généralement exprimé dans les deux premières journées, tout au moins - et vous en conviendrez certes - de mécontentement à l'égard de votre commission. (23 heures)

À ce sujet, peut-être que je me trompe, mais je trouve trop facile l'argument voulant que le régime que l'on administre est tel que ceux qui paient vont toujours trouver qu'ils paient trop cher et ceux qui reçoivent sont susceptibles de trouver qu'ils ne reçoivent pas toujours assez ou pas suffisamment ou pas dans le bon délai.

Je dois témoigner, M. Sauvé, que je ne m'attendais pas à du mécontentement aussi fortement exprimé de la part des intervenants. Cela a été - et mon collègue de tout à l'heure en a donné la liste - à partir de l'Assemblée des travailleurs et travailleuses accidentés du Québec qui est venue porter à la connaissance des députés des faits troublants en regard non seulement de l'administration de la commission, mais aussi de l'application de la loi. Cela a été la Confédération des syndicats nationaux qui est venue nous entretenir sur des sujets plus particuliers, que ce soit sur la notion du retrait préventif, que ce soit sur la notion du droit de refus; ce sont quand même des éléments essentiels à l'appui de l'adoption de la loi 17, au coeur même. Cela a été aussi l'occasion pour la CSN de venir témoigner devant nous que, dans des secteurs aussi prioritaires que le monde de la forêt, la loi 17 n'avait pas changé grand-chose. Cela a été la Fondation d'aide aux travailleurs accidentés et plus particulièrement le témoignage de M. Chartrand qui a consacré sa vie à des questions comme celle-là, qui a été lui aussi très éloquent, très clair, qui a eu l'occasion d'adresser une note plutôt faible au service d'inspection de votre commission.

Cela a été la Corporation professionnelle des physiothérapeutes qui est venue témoigner et qui, encore une fois, a dressé un jugement sévère à l'égard de votre commission, de son administration et des relations de cette corporation avec votre commission. Cela a été le Mouvement d'aide aux accidentés du travail, avec M. Guay, qui est venu faire à la face de la commission la démonstration de cas pathétiques, des cas inquiétants. Je me rappelle, entre autres, l'aspect de la distorsion entre les pourcentages établis par la Commission de la santé et de la sécurité du travail et ce qui peut être établi par la Commission des affaires sociales, après le processus de la révision, évidemment.

Cela a été l'Association des industries forestières du Québec avec M. Duchesne qui est presque venu lancer un cri d'alarme à la commission en demandant, en souhaitant, tout au moins, que la Commission de la santé et de la sécurité du travail puisse s'appuyer sur l'expérience du passé, ajouter des initiatives pour atteindre enfin de véritables performances dans le secteur forestier. Cela a été l'association Au bas de l'échelle qui, avec la Fédération des infirmières, est venue aussi adresser des critiques sévères à votre organisme.

Aujourd'hui, c'est l'Association des entrepreneurs en construction du Québec qui, vous l'avez entendue comme moi, n'y est pas

allée avec le dos de la cuillère, qui vous a dit des choses, beaucoup de choses très dures sur lesquelles elle a dû atténuer, mais, pour d'autres, elle a totalement confirmé. Cela a été l'Association des mines de métaux du Québec qui est venue nous parler de votre performance.

Somme toute, ces témoignages sont devenus pratiquement de véritables accusations à l'égard de votre commission, accusations au niveau de la gestion, et Dieu sait si on en a parlé hier avec cet organisme paritaire que vous côtoyez au moins une fois par mois et qui forme le conseil d'administration! Si on fait référence à la façon dont votre budget pour la présente année a été adopté, il faut convenir que c'était peut-être dit de façon élégante, un peu comme on le fait en diplomatie, mais ce n'était pas facile, c'était dur pour votre organisme de savoir que ces gens, qui ont été conviés par vous à adopter un budget en première lecture, si je puis utiliser le terme, sans posséder les résultats de l'année 1982... Et en quelques secondes, peut-être quelques minutes - mais pas plus qu'un nombre de minutes qui se compte sur les doigts de la main - par coïncidence ou autrement, le rapport des états financiers 1982 serait arrivé, immédiatement après la première lecture, j'en conviens. Quand même, cela traduit une situation inquiétante qui implique une appréciation et un jugement sévères.

Donc, c'est le portrait. Cela a été reproduit assez sensiblement par les médias, les gens qui sont ici, les gens qui ne peuvent peut-être pas toujours faire des déclarations publiques, mais qui sont quand même intéressés et qui en viennent à la conclusion, après quelques jours d'audition, que vous avez été l'objet d'accusations dures et que c'est un réquisitoire sévère qui vous a été livré.

Vous arrivez; vous avez le privilège de témoigner; on vous écoute et là, la surprise de l'accusation fait place à une déception du plaidoyer. Vous arrivez, M. le juge, et vous me dites que vous vous êtes référé à des aspects spécifiques dans votre réponse, ce soir. Vous semblez faire fi de toutes ces accusations portées à l'endroit de votre organisme.

Vous avez parlé des droits des accidentés, par rapport aux droits des autres provinces. Entre parenthèses, si vous le permettez, j'apprécie ces références aux autres provinces et même le document que vous nous avez produit; cela nous témoigne que la Commission de la santé et de la sécurité du travail, c'est comme un peu partout au Québec: on est Canadien ou on ne l'est pas.

Vous nous parlez du retrait préventif, des médecins. Là, face à ce qu'on peut qualifier d'une série de critiques ou d'accusations, vous venez nous parler de la téléphonie, vous nous dites que 400 000 $ ont été investis à Montréal, que vingt téléphonistes travaillent en moyenne, qu'il y a 84% de réponses dans un délai de deux minutes, le lundi matin, qu'il y en a 93% le vendredi après-midi. Et vous coiffez le chapeau avec le sondage selon lequel 81% des gens seraient satisfaits.

C'est à se demander, M. le Président, si cela ne serait pas qu'en ce faisant, vous n'avez pas indiqué que tout ce beau monde s'est trompé durant trois jours et que nous avons raison. Nous avons encore devant nous 53 minutes, ce soir. Nous aurons trois heures demain après-midi et quatre heures demain soir. C'est donc dire qu'on a un laps de temps appréciable, ou tout au moins satisfaisant, pour avoir un échange utile et, je l'espère, fructueux. Je l'espère bien sincèrement.

Avant d'aborder des questions particulières qui se réfèrent à des pans entiers de l'activité de votre commission, je voudrais vous donner une chance, parce que vous avez pris beaucoup de notes lorsque les gens sont venus témoigner. Vous savez, il ne faut pas nous imputer des motifs comme cela.

M. Fréchette: ...sentence.

M. Pagé: J'apprécierais, M. le Président - si vous preniez tout au moins le temps qu'il nous reste ce soir et, si vous avez besoin de temps au début de l'après-midi demain, il vous sera loisible de le faire -que vous puissiez, dans le but de vous décharger finalement de ces nombreuses accusations qui ont plu depuis deux jours, répondre à chacun des mémoires qui ont été présentés ici, ces huit ou neuf mémoires. Vous pouvez le faire et cela serait tout à fait légitime, je pense. Ce à quoi, d'ailleurs, je m'attendais ce soir quand vous êtes arrivé - je dois en convenir, je sais que vous avez une expérience juridique assez poussée -c'est que vous preniez chacun des documents et que vous disiez: dans ce domaine, on a été accusé de telle chose, telle chose, telle chose; les réponses sont cela, cela, cela. Non pas parler de téléphonie, de 84% de performance dans un délai de deux minutes et d'une petite musique qui joue, parce qu'il y a des contradictions flagrantes.

On n'est pas à la commission et on n'est pas chez vous. Vous avez tenté - là je donne un exemple parmi tant d'accusations -de faire valoir tout à l'heure qu'il y avait une similitude, un suivi, une connexion, si je peux utiliser le terme, entre les décisions de la CSST et les décisions de la Commission des affaires sociales. À la page 4 du mémoire de l'ATTAQ, on indique clairement, disant que cela ne s'explique pas, que la Commission de la santé et de la sécurité du travail reconnaît des pourcentages

d'incapacité de 2%, 5%, 15% et que ces gens-là vont chercher des 20%, 50%, 80% et même dans certains cas 100% à la Commission des affaires sociales. Vous ne pouvez pas laisser traîner une accusation comme celle-là en l'air. Vous devez vous défendre. Et si on faisait le tour de ce mémoire-là, on en aurait beaucoup d'autres... Vous dites qu'il n'y a aucun médecin qui est à l'emploi de la commission. À la page 5 du mémoire, on dit très bien: "Le volet principal - c'était Mme Lefebvre qui parlait à ce moment-là - de cet appareil, c'est le bureau médical. Composé essentiellement de médecins fonctionnaires, pour une grande part, de généralistes, salariés à la commission (à l'exception de quelques-uns à vacation) ce bureau détient les pleins pouvoirs en matière médicale." Vous dites qu'il n'y a aucun médecin à votre emploi. Qui dit vrai? C'est une accusation qui est grave ici. Vous devez relever chacune de ces accusations parce que, si vous ne le faites pas, ce sont deux possibilités, M. le juge, et vous le savez: c'est soit un plaidoyer de culpabilité, un enregistrement, plutôt, de plaidoyer de culpabilité ou encore c'est de dire: Tous ces gens-là se sont trompés et j'ai la vérité. Je ne pense pas que vous ayez soutenu cela.

M. Fréchette: M. le Président, écoutez...

M. Pagé: Je terminais avant de céder la parole au ministre.

Le Président (M. Gagnon): M. le ministre...

M. Fréchette: M. le Président, j'ai une question...

Le Président (M. Gagnon): M. le ministre...

M. Pagé: Non, il n'y a pas de question. Je terminais, M. le Président.

M. Fréchette: M. le Président...

Le Président (M. Gagnon): ...une question de règlement?

M. Pagé: Une question de règlement sur quoi?

M. Fréchette: ...j'ai une question de règlement à soulever. Arrogance pour arrogance, paternalisme pour paternalisme et, finalement, juge pour juge, il y a un certain nombre de choses qui ont, en soi, des limites. Et là, M. le Président, on est en train de passer à jugement, voyez-vous, à rendre verdict, un peu comme on prévoyait que cela allait se terminer depuis le temps que c'est réclamé. On sait très bien que l'Opposition, depuis le temps qu'elle réclame cette commission, c'est en fonction de trouver des coupables sur la place publique. Et c'est carrément vers cela que maintenant on est en train de se diriger.

Le député de Portneuf est un avocat d'expérience, compétent, fort habile et, de surcroît, rendant jugement rapidement, même avant que les "accusés", aient eu l'occasion de témoigner. Dans ces circonstances, ils rendront leur verdict après que l'exercice aura été complété - cela sera leur droit strict - mais ils devraient au moins avoir la décence de laisser l'occasion à ceux qui sont l'objet de leur vindicte de s'expliquer jusqu'à la fin. Là, on oublie expressément les conditions ou les règles fondamentales que, je le croyais, le député de Portneuf respectait et connaissait. Mais il est en train de nous faire la preuve qu'effectivement cela ne pèse pas beaucoup dans la balance. Et quand on dit: Vous n'avez pas d'autre choix, ou bien c'est un verdict de culpabilité, c'est le juge qui parle aussi.

M. Pagé: M. le Président, sur les commentaires de mon collègue...

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Portneuf.

M. Pagé: ...on concourt dans le même sens. Je veux, par l'intervention que je viens de faire, la question que j'ai posée - parce que cette question est là - demander à la commission de réagir, de répondre et de répliquer aux nombreuses accusations qui ont plu contre elle depuis deux jours. Et, ce faisant - parce qu'il y en a dans chacun des mémoires - je vous demande de répondre à chacun de ces mémoires. Cela, c'est pour que les deux côtés de la médaille, en toute équité, en toute justice...

M. Fréchette: ...verdict.

M. Pagé: Mais si le témoin ou si la personne qui est visée dit: Je ne réponds pas... On vient me parler de téléphonie, M. le Président, ce soir, 84% et 93%, alors que c'est bourré d'accusations qui sont pas mal plus sérieuses en fait. Malgré tout l'aspect important des services à la clientèle, c'était pas mal plus sérieux et plus grave. Alors, la première question, c'est une proposition. Je vous propose, MM. de la commission de la santé, de faire le tour. C'est cela.

M. Sauvé: II y a beaucoup d'appréciation dans tout... (23 h 15)

Le Président (M. Gagnon): M. Sauvé, avant de vous donner la parole, sur la question de règlement, si je lis le mandat de la commission, je voulais moi aussi intervenir

tantôt parce que, de la façon dont les questions étaient posées, j'avais l'impression de présider un tribunal alors que c'est une commission parlementaire. Le mandat de la commission, c'est d'examiner l'administration et le fonctionnement de la Commission de la santé et de la sécurité du travail. On a parlé d'indemnisations, de verdicts de culpabilité.

M. Maltais: Bien non, bien non.

Le Président (M. Gagnon): C'est une commission parlementaire et c'est seulement dans ce sens que je veux vous ramener à l'ordre.

Une voix: On n'a pas dit cela, M. le Président, ce n'est pas nous.

Le Président (M. Gagnon): M. Sauvé.

M. Sauvé: M. le Président, nous ne sommes pas venus ici pour plaider, nous sommes venus ici pour répondre à vos questions. C'est bien différent, M. le Président, c'est une tout autre histoire. Si on avait parlé pendant des heures, on nous aurait dit: Ah! vous voulez occuper le temps, vous ne nous laissez pas le temps de poser des questions. Nous avons essayé de répondre sommairement aux grandes questions qui ont été posées, sans entrer dans tous les détails, en se disant: On va nous questionner. C'est tout à fait normal et c'est pour cela qu'on est ici. Nous sommes venus pour répondre de notre administration sur le plan du fonctionnement et de l'administration. Vous allez comprendre, M. le Président, que c'est très vaste et que nous avions fort bien compris que nous étions ici pour que nous questionnent les partis autour de la table. Si vous voulez procéder différemment, qu'on nous dise comment. Nous n'y avons pas d'objection. Je suis très disponible et mes collègues le sont aussi.

Le Président (M. Gagnon): Effectivement, M. Sauvé, vous êtes ici pour répondre aux questions des membres de la commission. M. le député de Portneuf.

M. Pagé: M. le Président, la démarche que je faisais, c'était strictement dans le but de permettre à la commission de réagir à chacun des mémoires. Nous aurions été disposés, quant à nous, à vous donner tout le temps nécessaire pour ce faire. Je ne parlerai pas de plaidoyers pour ne pas choquer mon ami, le député de Sherbrooke, mais je peux quand même confirmer tout au moins qu'en ce qui concerne ce que vous nous dites ce soir, à l'égard de toutes ces accusations qui ont été portées, je n'ai pas de défense à faire valoir et, si vous avez des questions, posez-les. Je vous l'offre.

Êtes-vous prêt à réagir?

M. Sauvé: Je n'ai pas dit cela, M. le Président. Faites attention! M. le Président, je n'ai pas dit qu'on n'était pas prêt à répondre et que ce qui est là est bien. On est capable de donner une multitude d'exemples, mais ce qu'on pensait, c'est qu'en répondant à des questions nous aurions pu établir toutes les politiques. C'est bien facile. J'ai expliqué, par exemple, comment fonctionnaient les bureaux de révision d'un bout à l'autre, depuis le début, leur évolution, ce qui devrait peut-être se faire selon ce que le législateur voudrait faire. Je pensais que, de cette façon, on pouvait dire: Y a-t-il d'autres choses qui peuvent être faites? Que pensez-vous de telle solution? Voulez-vous faire d'autres choses? Si on reprend chacun des mémoires - vous allez comprendre, comme M. le député l'a dit, que, dans celui de l'AECQ, entre autres, on n'y est pas allé avec le dos de la cuillère -ce sera probablement très long et je ne suis pas certain que ce sera très profitable à la commission. Lorsqu'on dit des choses, par exemple, que nous devrions poursuivre les accidentés dans les accidents d'automobiles, c'est une aberration et ces gens le savent fort bien. Nous sommes, en vertu de la loi, les premiers à payer. Je demanderais au député d'écouter, parce que, après cela, il pose des questions et il dit que je n'ai pas répondu.

M. Pagé: Je soulève une question de règlement à ce moment-ci. J'étais...

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Portneuf, sur une question de règlement.

M. Pagé: Je comprends, M. le juge, que vous avez le droit de formuler des commentaires, mais je peux vous assurer qu'on vous écoute. Malgré que j'ai été en train de faire un signe à mon collègue, je sais que vous étiez en train de parler du volet du mémoire de l'AECQ touchant la Régie de l'assurance automobile et les primes payées par rapport à celles de la CSST et tout cela.

M. Sauvé: C'est important...

M. Pagé: On vous écoute. On vous suit et on est très intéressé à vous.

M. Sauvé: Oui, mais j'ai vu tantôt que vous aviez posé des questions et je ne suis pas certain que vous ayez tout entendu.

M. le Président, ma question est la suivante: Les gens savent fort bien que nous sommes, en vertu de la loi, les premiers à payer et que la Régie de l'assurance automobile est un régime d'assurance "no fault", la responsabilité sans faute. En vertu

de quoi pourrions-nous poursuivre? D'où cela vient-il de penser cela? On nous a écrit pour dire: Quelle est l'entente que vous avez eue avec la RAAQ? Il n'est pas question qu'il y ait entente, ce n'est pas possible. Si on commence dans ce style, cela va avancer à quoi? Est-ce que cela est une accusation? Faut-il considérer que c'est une accusation? On n'en finira jamais et je pense que cela ne sera pas du tout utile. Nous sommes venus ici pour répondre à des questions et pour éclairer votre commission. Je peux parler longuement de toutes sortes de choses écrites dans ce mémoire et qui ne feraient pas avancer du tout les choses. Si les députés considèrent que c'est sérieux, nous allons répondre à toutes les questions sur ces mémoires qu'ils voudront bien nous poser. Quand il s'agit des taux dans la construction, il faudrait qu'on compare les mêmes choses qu'on les regarde et qu'on s'explique plus longuement.

C'est là-dessus qu'il faut travailler. Je pense que nous avons fait un changement important, en 1979, dans la construction et à la demande des gens de la construction. Avant 1979, M. le Président, dans la construction, il y avait trois unités de taux. La plupart des gens étaient à un taux couvert par le décret - tout le monde connaît le décret de la construction - tout le monde payait 4,70 $ les 100 $ de salaire. Ils disaient, à juste titre: Ce n'est pas correct qu'un entrepreneur qui fait du revêtement intérieur soit au même taux que celui qui fait du montage de charpente d'acier. À leur demande, nous avons fait 62 unités au lieu de 3. Le plus bas taux est à 1,45 $ maintenant et le plus haut est à 21,63 $. En Ontario, il y a douze unités. Vous voyez comment c'est difficile de comparer. On voit tout de suite la difficulté sur les taux de la construction. Nous avons 62 unités et nous les avons réparties au maximum possible à leur demande. Vous comprendrez fort bien que celui qui paie 1,45 $ ne veut pas monter et que celui qui paie 21,63 $ veut descendre.

Il n'y a pas de mystère dans l'assurance, M. le Président. C'est basé sur les coûts et, pour votre information, pour ceux qui lisent le rapport du surintendant des assurances, celui que maintenant on appelle, je pense, l'inspecteur général, les coûts d'administration de l'entreprise privée en assurance varient entre 25% et 30% alors que, chez nous, cela tourne entre 8% et 12%, selon les années. Il y a une énorme différence. On ne peut pas lancer toutes sortes de choses. Quand on se compare avec l'Ontario, en Ontario, il y a douze unités. C'est 3,33 $ le plus bas taux et 15,91 $ le plus haut. Est-ce qu'on va se mettre à regarder chaque page et dire: Voici, à telle place, il y a telle erreur, à telle place, il y a telle autre erreur. On n'a pas pensé qu'on avait été convoqué pour cela. On a pensé qu'on nous convoquait pour répondre à vos questions sur le plan des politiques que nous administrons, sur la loi que nous administrons.

Le Président (M. Gagnon): M. le ministre.

M. Fréchette: M. le Président, je vais effectivement, avec votre permission, poser quelques questions aux témoins qui sont devant nous après une observation d'ordre général qui m'est suggérée par les remarques du député de Portneuf. Le député de Portneuf, encore une fois très habilement, a fait la revue des commentaires qui nous ont été soumis depuis lundi dernier par les différents groupes et les différents organismes qui sont venus se faire entendre. Il était évident que nous ne devions pas nous attendre que ces gens viennent nous dire ou enfin mettent sur la place publique les choses qui vont bien. Cela m'apparaît de l'essence même de l'exercice qu'on est en train de faire.

Il ne faudrait quand même pas perdre de vue, et on me corrigera si je faisais erreur, qu'aucun des organismes que nous avons entendus depuis lundi dernier n'a réclamé la disparition ou l'abolition de l'organisme dont on discute, sauf l'AECQ, évidemment. Vous avez vous-même évalué qu'il y avait là des choses grosses dans le dossier de l'AECQ et qu'on n'y allait pas avec le dos de la cuillère. Que les organismes qui, régulièrement, traitent avec la Commission de la santé et de la sécurité du travail soient venus ici pour nous indiquer quelles sont les choses qui, dans leur évaluation, devraient être réévaluées et corrigées, cela m'apparaît tout à fait normal et, de surcroît, cela m'apparaît aussi satisfaire aux objectifs de cette commission. Cependant, aucun de ces organismes - sauf l'AECQ, et avec combien de réserves, après que quelques questions lui ont été adressées - personne n'a réclamé la disparition ou l'abolition de la Commission de la santé et de la sécurité du travail. Ce qu'on veut, c'est améliorer les choses qui sont améliorables et on l'a dit au tout début de la commission: II n'y a pas de lois, il n'y a pas de règlements, il n'y a pas de personnes qui ne soient pas perfectibles. Si c'est toujours l'objectif de la commission, je pense qu'on va atteindre notre objectif.

Je vais maintenant poser quelques questions, si vous me le permettez, M. le Président, aux gens de la permanence de la commission. Je prendrai les mémoires les uns après les autres et en procédant à l'inverse de ce qu'a fait le député de Portneuf. Je me référerai effectivement au mémoire de l'Association des entrepreneurs en construction du Québec. Je pense que tous

les observateurs, même ceux qui, à plusieurs égards, ont plusieurs reproches à faire à la Commission de la santé et de la sécurité du travail, vont convenir qu'il s'est agi là du mémoire à peu près le plus "dur" vis-à-vis de l'organisme. On retrouve dans ce mémoire une affirmation qui a été atténuée par M. Dion - je n'en disconviens pas - qui est lourde de conséquences et qui a presque l'allure d'une accusation. On a dit et on a écrit que la Commission de la santé et de la sécurité du travail fournissait des sommes d'argent ou fournissait des subventions à des associations syndicales dans le but de leur permettre de donner des cours et qu'effectivement, de semblables cours ne se donnaient pas. Oui, M. le député de Sainte-Anne. Vous pouvez manifester de la façon que vous le voudrez, c'est votre droit.

M. Pagé: ...

M. Fréchette: II s'endort. C'est aussi son droit.

M. Pagé: II siège la nuit à cause de vous.

M. Fréchette: M. le Président, ma question est la suivante: À partir de l'observation de l'AECQ qui peut prendre toutes sortes d'allures, est-ce qu'effectivement il se donne des subventions à des associations syndicales pour des cours de formation? Si oui, ces sommes d'argent sont-elles contrôlées par la commission et, s'il y a un semblable contrôle, la commission sait-elle s'il se donne des cours et quelle en est la nature? Quelle évaluation fait-elle des cours qui sont donnés?

M. Sauvé: M. Bertrand va commencer à répondre et, si c'est nécessaire, je compléterai, M. le Président.

M. Bertrand (Jean-Louis): M. le Président, tantôt, dans mon exposé général, j'ai indiqué que, dès le départ de la mise en vigueur de la loi, on avait mis en place les principaux mécanismes pour les fins de l'application. Or, les articles 104 et 106 de la loi prescrivaient que la commission pouvait verser des subventions aux parties patronales ou syndicales, aux associations patronales ou syndicales, pour les fins de formation et d'information. Dès le départ de la commission, celle-ci a voté des politiques de subvention, tant du côté patronal que du côté syndical. Dans ces politiques, évidemment, on indique, si c'est une politique acceptée par le conseil d'administration, les objectifs du programme, la base législative, les différentes définitions, les champs d'application, l'administration du programme, le budget et aussi comment ceux qui reçoivent des subventions doivent rendre compte de ces subventions et particulièrement sur le plan financier. Toute demande de subvention doit contenir une série de renseignements. (23 h 30)

Puisque M. le ministre a fait allusion aux subventions du côté syndical, vous me permettrez de prendre cette politique: Elle doit contenir le nom légal de la centrale ou de l'association syndicale, l'adresse du siège social, les noms et adresses des associations affiliées puisque, si on verse une subvention à une centrale, on doit avoir les informations concernant les associations affiliées, les copies du certificat d'accréditation syndicale, puisqu'il s'agit de subventions à des associations syndicales, les programmes d'activités projetés - il y a peut-être là plus d'intérêt pour votre commission - avec un résumé des sujets traités ou des cours qui seront donnés et aussi, pour les fins d'administration du programme, puisque les subventions varient selon le nombre de membres, le nombre de membres en règle, etc. Un autre élément important pour les fins de subventions, le secteur d'activités économiques des participants puisque, en vertu d'autres règles, on verse plus d'argent aux associations syndicales qui sont dans des secteurs d'activités prioritaires, toujours dans la même approche, soit de mettre d'abord en application la loi dans les secteurs qui ont été décrétés prioritaires puisque plus dangereux ou comportant plus de risques, selon nos statistiques.

La centrale ou l'association syndicale qui reçoit ce montant doit s'assurer de tenir des comptes et des registres qui reflètent fidèlement et complètement les mouvements de toute somme reçue ou utilisée pour la réalisation du programme d'information et de formation santé et sécurité. Ces comptes et ces registres, y compris toutes les pièces justificatives s'y rapportant, doivent être accessibles en tout temps au représentant de la commission. Ces registres doivent contenir un dossier pour chacune des sessions tenues en vertu du programme de formation et doivent inclure une fiche de renseignements sur les participants, puisqu'on peut rembourser le salaire des participants, les listes de présence pour chaque jour de session et, évidemment, une copie du programme de cette session.

Je vous indique cela, M. le Président, pour vous souligner qu'après que le montant a été versé, soit à la centrale syndicale, soit aux associations syndicales, une vérification est faite à la direction générale de la prévention de l'utilisation des sommes d'argent et on doit retrouver dans ces différents registres tous les renseignements pertinents pour justifier les dépenses d'argent qui sont faites.

Quant aux programmes qui ont été réalisés, en 1980 - c'était le départ - 170

participants pour la CEQ pour 4 sessions; à la CSD, 15 sessions pour 945 participants. En vous donnant ces chiffres, il y a peut-être un point supplémentaire à souligner: le nombre de participants par rapport au nombre de jours-participants. Souvent, on fait une session qui dure plus d'une journée; quand je donne un nombre de participants, ce peut être pour plus d'une journée. À la CSN, 55 sessions pour 1772 participants; à la FTQ, 159 sessions pour 3709 participants. Il y avait aussi d'autres syndicats non affiliés à une centrale qui ont demandé des subventions, soit la Fédération des syndicats du secteur de l'aluminium, 9 sessions pour 20 participants. Dans leur cas, c'est un peu spécial, ils ont décidé de former leurs participants de façon plus intensive et cela donnait dans ce cas 260 jours-participants. Ils ont choisi de former un nombre plus restreint de personnes, d'allouer leur budget à un nombre plus restreint pour une formation plus longue. D'autres optent pour une formation plus intensive d'une journée ou de deux jours pour des sessions particulières. C'est ainsi pour chaque année où les sommes votées par le conseil d'administration aux programmes en vertu des articles 104 et 106 sont distribuées, en vertu de la politique adoptée par le conseil, aux centrales ou aux associations syndicales qui doivent présenter un programme. Les sommes leur sont versées et elles doivent nous fournir par la suite un rapport de l'utilisation des sommes ainsi reçues. Je pourrais continuer pour les années subséquentes, mais je pense que la demande de M. le ministre portait davantage sur les mécanismes de contrôle et leur fonctionnement. J'ai aussi les chiffres pour 1982.

Le Président (M. Gagnon): M. Sauvé.

M. Sauvé: II est malheureux qu'on n'ait pas entendu cet après-midi la personne qui s'est levée pour expliquer comment se faisait la vérification à la suite des subventions. Il y avait dans la salle M. Leduc de la CEQ, qui aurait expliqué - parce qu'il a eu à justifier tous les cours - comment cela fonctionnait. Je pense que les gens savent qu'il y a une vérification importante qui se fait à la suite des subventions.

Le Président (M. Gagnon): M. le ministre.

M. Fréchette: Alors, M. le président, une autre situation dont l'Association des entrepreneurs en construction du Québec s'est amèrement plainte, c'est le fait que M. Jean-Claude Murray, qui était au conseil d'administration, n'a pas vu son contrat reconduit.

M. Pagé: Ma question, si vous le permettez, est sur le même sujet que la question précédente. Avant qu'on aborde la question du conseil, si vous le permettez.

M. Fréchette: Ah bon! Cela va, très bien.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Le ministre vient de mettre en relief les subventions qui sont versées par la commission à des organismes recevants, volontaires, qui se voient accrédités et à qui on confie un mandat de prévention. Dans les documents que vous avez produits ce soir, vous avez produit l'état de la situation des associations sectorielles au 30 novembre 1983. On y constate qu'il y a six associations différentes qui sont en opération dans autant de secteurs. Deux sont prévues pour le printemps 1984 et d'autres sont en suspens, malgré que je constate... C'est en suspens dans le secteur des forêts, pâtes et papiers, scierie, bois et meuble. On pourra revenir là-dessus demain. Premièrement, pourriez-vous m'indiquer la date d'acceptation par la Commission de la santé et de la sécurité du travail? Deuxièmement, la date d'acceptation par la commission...

M. Sauvé: De quoi?

M. Pagé: ...de l'association sectorielle...

M. Sauvé: De la fondation!

M. Pagé: ...de la fondation ou l'accrédiation, peu importe le terme, mais la date de la naissance de l'association; les budgets qui ont été alloués par la commission, budget antérieur et budget en cours, s'il y a lieu; les mandats que s'est fixés l'association en question depuis sa fondation; le nombre de réunions de son conseil d'administration interne depuis sa fondation; le personnel embauché depuis sa fondation; la structure, l'organigramme interne depuis sa fondation, évidemment. Et je me réfère à l'association du secteur des services automobiles dont la directrice générale est Mme Lisette Lapointe.

Le Président (M. Gagnon): M. Sauvé.

M. Sauvé: En attendant que M. Bertrand trouve les renseignements, je veux juste ajouter une chose sur les cours de formation. La politique a été établie et acceptée par les parties au conseil dès le début de la commission, dans la première année, et ce sont des montants substantiels que nous donnons. C'est-à-dire que le budget accepté par le conseil était, cette année, de l'ordre de 4 500 000 $ pour la formation en vertu de l'article 106, plus 1 000 000 $ que

le gouvernement donne pour la formation à la partie syndicale. C'est-à-dire que, dès le départ, nous avons donné 2 000 000 $ et 2 000 000 $ - c'étaient toujours des budgets adoptés par le conseil - et le gouvernement 1 000 000 $. La partie patronale a dit: Je n'en veux pas. Donc, la partie syndicale a dit, évidemment: Je le prends. Et la partie syndicale, depuis le début, reçoit 1 000 000 $ de plus. La partie patronale n'a jamais pris tout le montant qui lui est alloué parce qu'elle vient, au cours de l'année 1983, de jeter les bases du centre patronal de formation en santé et sécurité. Et il y a l'Association des hôpitaux du Québec qui en a une partie, l'UPA qui en a une partie. Je ne me souviens pas des autres; on pourrait les trouver. Ces subventions, du côté syndical, ne sont jamais suffisantes. La distribution se fait par la partie patronale selon ses critères, par la partie syndicale selon ses critères, à l'intérieur des 2 250 000 $ qu'elles reçoivent chacune. Il y a une distribution qui se fait. Nous n'avons, comme commission, qu'à exécuter la décision prise par les parties, respectivement. Il est bien entendu que c'est contrôlé, vérifié, comme M. Bertrand l'a expliqué tantôt, avec la politique qui a été adoptée par le conseil.

Je pense que M. Bertrand peut répondre à votre question sur l'association sectorielle des services automobiles.

Le Président (M. Gagnon): M. Bertrand.

M. Bertrand (Jean-Louis): Vous avez demandé une série de détails que je n'ai pas entièrement en ma possession ici ce soir. Je vais m'efforcer de retrouver et d'obtenir les réponses les plus précises possible et ce, le plus tôt possible pour les remettre à la commission. Je peux vous souligner, cependant, que l'association sectorielle des services automobiles va se pencher plus spécialement sur la production de programmes de prévention spécifiques aux établissements s'occupant de la vente des véhicules automobiles ainsi qu'aux stations-service.

Je pense que c'est là une association qui oeuvre dans un secteur qui n'est pas prioritaire. Cependant, dès le départ, ils ont voulu bien souligner leur intention d'implanter les éléments de la Loi sur la santé et la sécurité et c'est peut-être l'élément intéressant - de l'implanter sur une base volontaire, puisque ce n'est pas un secteur couvert par l'application de la loi, pour amener les parties à se prendre en charge avant même que la loi ou le règlement concernant le programme de prévention ne s'applique à eux. Je pense que c'est une initiative fort intéressante.

Au niveau de l'explication concernant l'association même, cette dernière a produit un dépliant qui s'intitule "L'Association sectorielle paritaire pour la santé et la sécurité du travail, secteur des services automobiles". Je pourrai le remettre avec plaisir à la commission; je n'en ai qu'un seul exemplaire dans mon cahier. On y répète les rôles et fonctions de l'association sectorielle et on y indique combien de travailleurs y sont réunis: 55 000 travailleurs et 9000 employeurs, répartis sur tout le territoire du Québec, qui regroupe, particulièrement, les établissements de détaillants de véhicules automobiles, les grossistes en véhicules automobiles et accessoires, les détaillants en pneus, accumulateurs et accessoires, les stations-service et postes d'essence, les ateliers de réparations des véhicules automobiles, débosselage et mécanique.

Évidemment, il s'agit d'un secteur spécial où vous avez beaucoup de petites entreprises. C'est donc un secteur à couvrir aussi sur l'ensemble du Québec et qui est peut-être caractéristique de ce secteur, par rapport à d'autres secteurs. On a parlé, par exemple, de celui des pâtes et papiers qui regroupe de gros établissements.

Dans son document d'information, l'association indique que l'année 1982 a été consacrée à la mise sur pied de l'association, à la préparation du règlement de régie interne, à l'assemblée générale de fondation et au programme d'action qui était axé sur l'information auprès des membres.

Actuellement, soit durant l'année 1983, l'association se dote du personnel requis pour entreprendre principalement l'action que je vous ai indiquée tantôt. Une autre mesure qu'elle a prise aussi, c'est de revoir l'ensemble de la réglementation qui s'applique à son secteur, pour en faire une grille, un peu sur le modèle de celle que la commisssion avait développée pour les secteurs prioritaires, pour aider les parties, et particulièrement la partie patronale, à se prendre en charge, pour pouvoir lire les règlements qui ne sont pas faciles à lire. Je pense que, pour plusieurs membres de la commission qui sont juristes, il n'est pas toujours facile de se retrouver dans un règlement. (23 h 45)

La commission a développé des grilles réglementaires pour aider les parties à se retrouver à l'intérieur de ces règlements. L'association sectorielle prend le même chemin. Évidemment, nous l'avons développée prioritairement pour les secteurs prioritaires. Il est intéressant de voir qu'une association qui n'est pas encore dans un secteur prioritaire développe le même type de grille. C'est là un des buts poursuivis, c'est-à-dire que l'association, les parties, tant du côté patronal que syndical, se prennent en charge et développent leurs propres outils, à leur mesure, et je pense que c'est éminemment souhaitable qu'on devrait faire en sorte que, de plus en plus, c'est l'association sectorielle

qui devrait être le premier intervenant auprès des parties patronale et syndicale dans un établissement.

Leurs services; vous avez parlé de l'organigramme. On le retrouve dans leurs documents d'information. Il y a le service d'information, le service de formation, le service de la recherche et le service de conseil. Évidemment, ce sont là les grandes divisions qu'on va retrouver dans toutes les associations sectorielles.

Évidemment, vous retrouvez aussi, comme on le retrouve dans toute association sectorielle, le conseil d'administration et un comité de direction, un comité administratif qui siège entre les réunions du conseil d'administration. Je vais obtenir pour l'information de la commission le nombre de réunions du conseil d'administration et je vais demander aussi, pour compléter l'information, le nombre de réunions du comité administratif. Je pense que M. le député voulait l'avoir depuis le début de la fondation de l'association.

M. Pagé: Si possible.

M. Bertrand (Jean-Louis): Je vais obtenir cela pour les fins de l'information de la commission. Quant à la structure, l'organigramme que je viens de vous indiquer rapidement satisfait-il le député ou si vous désirez un organigramme détaillé?

M. Pagé: Je vous remercie de vos commentaires. Je comprends que vous ne puissez répondre à toutes les questions ce soir, c'est tout à fait explicable. Je rappelle quand même les questions.

M. Sauvé: Excusez-moi un instant. Peut-on ajouter une chose que je pense importante? C'est la façon dont chaque directeur général ou directrice générale est embauché ou choisi. Jean-Louis.

M. Bertrand (Jean-Louis): Oui, la plupart des associations, à cause de la formation même du conseil d'administration qui est paritaire, employeurs et associations accréditées, choisissent de faire affaires avec des firmes-conseils pour la sélection de leur directeur général. Quant au nombre de personnes en poste actuellement, dans le cas des services automobiles, au 31 décembre 1983, il y avait six personnes en poste et il est prévu, dans son budget de 1984 qui est déposé, onze personnes.

M. Pagé: Dans les renseignements que vous fournirez demain à la commission, pourriez-vous nous donner la date précise de fondation et le budget pour l'année 1982, le budget pour l'année 1983...

M. Bertrand (Jean-Louis): Les budgets de 1982 et de 1983.

M. Pagé: Pour les années 1982 et 1983 et le budget requis et déposé de 1984, compte tenu que vous venez de me dire qu'il prévoit une augmentation de personnel, etc.

M. Bertrand (Jean-Louis): II est important que j'explique à la commission comment fonctionnent les budgets pour les associations sectorielles. Le conseil d'administration vote un montant pour les associations sectorielles. Ce budget ou cette enveloppe budgétaire, si vous voulez, est réparti entre les différentes associations sectorielles et chacune doit présenter ce qu'on appelle un budget programme dans lequel elle doit détailler l'ensemble de ses activités avec les montants requis pour ses activités. Ce budget est adopté par le conseil d'administration lui-même. Je pense que c'est important de le souligner. Ensuite la permanence, si vous voulez, verse le montant et s'assure des suivis budgétaires. C'est la façon de fonctionner. Lorsqu'on parle du budget pour l'année 1984, c'est évidemment le conseil d'administration qui devra recevoir les budgets et en décider. Je ne peux vous donner que la demande présentée par l'association et non pas le budget qui sera octroyé en 1984, puisque seul le conseil peut en décider.

M. Pagé: D'accord. Je voudrais quand même vous signaler, M. Sauvé et M. Bertrand, que les questions que je pose ne doivent, ni directement ni indirectement, être interprétées comme étant un doute sur les objectifs de l'association. On sait que, dans le secteur de l'automobile - d'ailleurs, cela avait été longuement évoqué ici lors de l'étude du projet de loi 17 - il y a beaucoup à faire. Vous avez mis le point sur un aspect particulier avec des PME, des entreprises qui ont eu souvent un, deux ou trois employés ou encore un propriétaire unique. L'objectif est tout à fait louable. Cependant, vous avez décrit sommairement - peut-être pourrez-vous ajouter demain - ce qui s'est fait depuis la fondation de l'association. En addenda, peut-être pourriez-vous - écoutez, comme je l'ai dit souvent, on n'est pas chez vous et on n'y va pas souvent - nous décrire quel est le processus? Comment s'enclenche le processus de création d'une association? À l'égard de cette association spécifique, si vous avez des documents, par exemple, requêtes, cosignatures, peu importe, à soumettre, à nous déposer, peut-être que vous pourriez nous les déposer. Quels sont les documents qui ont servi, sur lesquels se sont appuyées les parties pour que soit fondée et accréditée par la CSST l'association dans le secteur de l'automobile?

J'aimerais savoir le budget en 1982 parce qu'ils se sont mis sur pied.

Évidemment, il y a eu la fondation. Probablement que, comme les autres organismes, ils se sont trouvé un local et ont embauché du personnel. J'aimerais savoir combien de personnes ont travaillé en 1982. J'ai cru comprendre qu'en 1982 vous avez travaillé particulièrement sur un programme d'action qui est probablement la préparation de cela. On doit retenir que le document qu'ils ont produit est intéressant, mais il est davantage un document de promotion qu'un document d'information sur le contenu ou sur ce qu'il y a à faire dans le monde de l'automobile. C'est explicable qu'ils aient eu à faire de la promotion, je conviens de cela. En 1983, ils se sont dotés de personnel additionnel; donc, ils sont passés de moins de six à six. C'est donc dire qu'ils étaient de moins de six en 1982, évidemment. Là, ils sont à revoir l'ensemble de la réglementation - on sait que c'est assez disparate - et des services de formation. Je voudrais savoir ce que le service de formation a fait. Si le service de formation pouvait nous déposer des documents, son outil de travail finalement pour atteindre son objectif, ce serait intéressant. Aussi, évidemment, le nombre de réunions du conseil d'administration depuis la fondation. Je ne veux pas trop vous en demander, mais, si on pouvait aussi avoir - c'est peut-être possible que la directrice générale vous dise: II y a eu douze réunions - une copie au moins, peut-être pas de tous les procès-verbaux, mais des procès-verbaux confirmant la présence aux réunions et du nombre de réunions, cela serait peut-être intéressant de voir cela.

M. Bertrand (Jean-Louis): Vous allez comprendre, M. le député, que je vais évidemment devoir demander à l'association concernée de me fournir des détails aussi spécifiques que ceux que vous me demandez. Le délai pourrait être un peu plus long que le délai que vous avez mis à notre disposition comme témoins, mais je peux vous assurer que je vais obtenir tous ces documents dont on a pris note et vous les faire parvenir.

M. Pagé: D'accord.

M. Bertrand (Jean-Louis): II est peut-être important que je vous explique la façon, à la permanence de la commission, dont on a abordé la question de la création des associations sectorielles. Lorsqu'on a commencé le processus, on était évidemment devant l'ensemble des secteurs d'activité économique avec la prescription dans la loi de reconnaître une association sectorielle par secteur d'activité économique. Le processus s'est fait par la création de secteurs d'activité prioritaire. On s'est adressé alors aux principales centrales syndicales et plus particulièrement à la FTQ, par le biais de M. Boudreau, puisque les membres syndicaux étant des diverses centrales - à cette époque, c'était la CEQ, la CSN et la FTQ, mais aussi la CSD - il y avait une espèce d'entente selon laquelle M. Émile Boudreau, parce qu'il était reconnu comme porte-parole en matière de santé et de sécurité pour les travailleurs - je pense que cela a été reconnu de longue date - était celui qui nous était, si vous voulez, prêté par le monde syndical pour nous aider à retracer le plus précisément possible quelles étaient les principales associations syndicales dans les différents secteurs.

Du côté du Conseil du patronat, ces gens ont mis à notre disposition un de leurs permanents pour faire le même exercice, M. Duguay, du côté patronal, pour tenter de faire la liste la plus exhaustive possible des associations patronales dans les différents secteurs et pouvoir les regrouper par secteur. Nous avons développé, à la permanence, en utilisant les connaissances qu'on avait, que ce soient des affinités qu'on retrouve dans un secteur... C'est pour cette raison qu'on a parlé longuement ici, devant la commission, des secteurs des pâtes et papiers, de la forêt, des scieries, du bois et du meuble, qui sont des secteurs qui ont, entre eux, certaines affinités. Il fallait non seulement regarder les affinités entre des groupes à l'intérieur d'un secteur ou d'un sous-secteur, mais aussi regarder quelle était la nature de leurs relations. Par exemple, on sait maintenant que, dans le monde de la forêt, entre la forêt, les scieries et les pâtes et papiers, on assiste à une intégration de plus en plus grande d'où, évidemment, une affinité beaucoup plus grande entre la forêt et les scieries et aussi les pâtes et papiers par rapport, par exemple, au bois ouvré ou au meuble, qui est un peu distinct. On a donc dû faire une grille d'analyse pour examiner cet ensemble et proposer une possibilité de création d'associations sectorielles dans divers secteurs.

Nous avons, par la suite, convoqué les parties, tant patronales que syndicales, d'un secteur possible. Nous n'avons jamais tenté d'imposer d'avance un secteur à quiconque. Nous tentions de déterminer un secteur avec l'aide des personnes-ressources dont je vous parlais tantôt et nous convoquions les parties patronales et syndicales pour leur exposer, évidemment, l'objectif de la loi, la raison de la création d'associations sectorielles - je pense que tout le monde ici connaît cette loi - donc, leur exposer le but de l'association sectorielle éventuelle, leur offrir notre entière collaboration et aussi leur indiquer que le conseil d'administration ne reconnaît qu'une seule association par secteur d'activité économique, mais que la délimitation de ce secteur revenait - c'est une politique depuis longtemps acceptée par

le conseil d'administration - aux parties elles-mêmes. Donc, c'est à la suite de discussions entre les parties patronales et syndicales que devait se faire la délimitation du secteur. Dans certains cas, c'était peut-être plus facile. Entre autres, le secteur de l'automobile est un secteur intéressant de ce point de vue. Dans certains secteurs, il y avait une tradition qui préexistait - et que vous connaissez sûrement, M. le député -reliée au comité paritaire en vertu des décrets de convention collective. Dans ces secteurs, déjà, les parties étaient habituées.

On l'a aussi dans d'autres secteurs. Dans le secteur de l'imprimerie, c'est la même chose. À cause de la présence de comités reliés aux décrets de convention collective, il y avait une habitude de se réunir et donc de se parler peut-être plus facilement que dans d'autres secteurs où c'était même nouveau pour eux de s'asseoir ensemble comme associations patronales et syndicales à ce niveau. Je ne parle pas des négociations au niveau d'un établissement, mais de s'asseoir à un niveau de type sectoriel. Donc, dans ces secteurs, c'est sûr que cette habitude qui était déjà acquise a facilité de beaucoup nos contacts pour bien cerner quelles étaient les associations patronales ou syndicales dans le secteur concerné, de même aussi pour délimiter quel était le secteur propice pour leur action. Là-dessus, il y a des variations d'un secteur à un autre. Le secteur des affaires sociales, par exemple, qui réunit beaucoup d'employeurs, d'établissements et aussi beaucoup de travailleurs, c'est un gros groupe. Par ailleurs, pour un secteur comme le secteur de l'imprimerie, qui est un plus petit groupe, c'est l'affinité et la spécificité du secteur qui fait que ces gens-là désiraient un secteur qui leur soit propre.

Cela vous indique le cheminement que l'on suivait et que l'on a suivi pour tous les secteurs. Dans certains secteurs, auparavant, avant même que la loi soit en vigueur, il y avait déjà eu des discussions. Je pense particulièrement au secteur de la construction. Déjà, il y avait à l'époque à l'OCQ, relié à l'un des articles du décret de la construction, un comité conjoint qui se réunissait pour les questions de sécurité. J'ai eu l'occasion d'assister à une de ses rencontres où les parties, tant patronales que syndicales, voyant l'adoption éventuelle d'une loi, à cette époque, semblaient prêtes à démarrer au niveau d'une association sectorielle. Ces mêmes parties - c'est le cas e l'association sectorielle dans le domaine e la construction - sont délimitées par la loi elle-même. Donc, pour savoir quelles sont les associations patronales et syndicales, c'est plus facile dans ce secteur. Les discussions entre les parties ont démarré à cette époque et ont continué jusqu'à aujourd'hui. J'ai été heureux, quant à moi, d'entendre, tant du côté de M. Lavallée, qui est un des représentants du secteur syndical de la construction, que du côté de M. Dion, pour l'AECQ, que les deux témoignent de leur volonté d'en arriver à une association volontaire plutôt que forcée. (minuit)

Je dois en même temps vous indiquer que, depuis 1980, personnellement, je me suis même impliqué parce que je crois profondément qu'une association sectorielle peut être très utile, tant à la partie patronale qu'à la partie syndicale. J'ai dû me rendre compte qu'il était très difficile de les amener à un terrain d'entente non pas, dans ce cas-là, pour délimiter le secteur parce qu'il est délimité, mais pour en arriver à créer l'association d'une façon volontaire. La loi indique qu'on peut forcer la création -c'est le processus dans lequel on est - mais j'ose toujours espérer, quant à moi, qu'on va la créer d'une façon volontaire.

Le Président (M. Gagnon): Merci.

M. Bertrand (Jean-Louis): Demain, je pourrai compléter sur les autres...

Le Président (M. Gagnon): Merci, on pourra se revoir demain.

M. Pagé: Bonne nuit.

Le Président (M. Gagnon): La commission du travail ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 0 h 1)

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