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Version finale

34e législature, 1re session
(28 novembre 1989 au 18 mars 1992)

Le jeudi 28 novembre 1991 - Vol. 31 N° 27

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude détaillée du projet de loi n° 125, Code civil du Québec


Journal des débats

 

(Neuf heures quarante-cinq minutes)

Le Président (M. Lafrance): Bonjour à tous. Je vous demanderais, s'il vous plaît, de bien vouloir prendre place. Je réalise que nous avons le quorum. J'aimerais donc déclarer cette vingt-cinquième séance de travail ouverte, en rappelant à tous le mandat qui est de procéder à l'étude détaillée du projet de loi 125, Code civil du Québec. Mme la secrétaire, est-ce que nous avons des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président, il y a un remplacement. Mme Bleau (Groulx) est remplacée par Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata).

Le Président (M. Lafrance): Merci. Je vous rappelle l'horaire de ce matin. Nous allons siéger de 9 h 30, donc à partir de maintenant, jusqu'à 12 h 30. Est-ce qu'il y aurait des déclarations de début de séance?

De la publicité des droits (suite)

De l'immatriculation des immeubles

Sinon, lorsque nous avons cessé nos travaux, hier soir, nous en étions au chapitre quatrième qui traite de l'aliénation d'une partie de lot. Je demanderais, peut-être, à M. le député de Sherbrooke de bien vouloir nous lire le texte d'introduction à ce chapitre quatrième.

M. Rémillard: Le député de Sherbrooke est notre lecteur, M. le Président...

Une voix: Par excellence.

M. Rémillard: ...par excellence. On l'apprécie beaucoup.

M. Hamel: Ça me rappelle mon jeune temps de collège.

Une voix: Ça fait longtemps. M. Hamel: Oui, avant-hier.

M. Rémillard: Et qu'est-ce que vous lisiez, à ce moment-là? Déjà le début du Code civil, la réforme du Code civil?

M. Hamel: Non, mais ça s'inspirait, je pense, du vieux Code français. Alors, merci, M. le Président. Chapitre quatrième, De l'aliénation d'une partie de lot, articles 3033 à 3035.

Le chapitre quatrième du titre quatrième qui porte sur l'aliénation d'une partie de lot, sans se situer en marge de la réforme proposée, traite de cas d'exception que justifient l'étendue du territoire québécois, l'absence d'arpenteurs-géomètres dans les régions éloignées et l'activité particulière qu'est l'agriculture.

Après avoir rappelé la sanction du principe de l'interdiction de publier une aliénation entre vifs d'une partie de lot, le chapitre crée une exception lorsque l'immeuble se trouve à plus de 345 kilomètres d'un bureau ou qu'il est situé dans un zone agricole établie en vertu de la Loi sur la protection du territoire agricole.

Lorsque dans l'une ou l'autre hypothèse, une aliénation entre vifs survient, l'officier de la publicité des droits la publie au registre foncier et transmet une copie de document au ministre responsable du cadastre qui procède à l'actualisation du plan cadastral.

L'objectif constamment poursuivi est la conservation à jour du cadastre. L'expérience québécoise qui date de 1867 a démontré, hors de tout doute, que les mesures incitatives sont insuffisantes pour empêcher la détérioration du cadastre et, par voie de conséquence, l'index des immeubles que le législateur veut remplacer par un registre foncier fiable.

Lé chapitre 4 comporte deux volets: à l'article 3033, le particulier doit supporter les frais de la modification cadastrale qui identifiera l'immeuble qu'il a acquis et qui correspond à une partie de lot; aux articles 3034 et 3035, le ministre responsable du cadastre assumera les coûts de la modification cadastrale requise: seules des circonstances particulières expliquent cette prise en charge par l'État de la conservation à jour du cadastre. Merci.

De l'aliénation d'une partie de lot

Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le député de Sherbrooke. J'appelle donc les articles contenus à ce chapitre quatrième, soit les articles 3033 à 3035 inclusivement.

M. Rémillard: M. le Président, nous avons, à ces articles, quatre amendements à proposer.

Tout d'abord, l'intitulé du chapitre quatrième, immédiatement avant l'article 3033, est remplacé par le suivant: "Des parties de lot". M. le Président, c'est une modification d'appellation que justifie le fait qu'il ne s'agit pas tant de l'aliénation d'une partie de lot, mais, d'abord, de l'immatriculation des parties de lot. En raison de cet amendement, l'intitulé du chapitre quatrième, immédiatement avant l'article 3033, se lirait comme suit: "Des parties de lot".

L'article 3033 est remplacé par le suivant:

"Les droits énoncés dans la réquisition constatant l'acquisition d'une partie de lot ne peuvent être inscrits sur le registre foncier, jusqu'à ce qu'une modification cadastrale attribue: "1° un numéro cadastral distinct à la partie acquise et à la partie résiduelle; ou, "2° lorsque la partie acquise est fusionnée à un lot contigu, un numéro cadastral distinct à l'immeuble qui résulte du fusionnement, ainsi qu'à l'immeuble qui résulte du morcellement. "Dans les deux cas, une référence précise à la modification cadastrale doit être contenue au rapport d'actualisation des droits de la fiche de l'immeuble nouveau."

M. le Président, le remplacement, d'ordre technique, distingue entre deux possibilités: 1° la partie de lot acquise est destinée à former un immeuble distinct; 2° la partie de lot acquise est destinée à être fusionnée à un lot contigu.

Quelle que soit la possibilité recherchée, la partie résiduelle du lot qui a fait l'objet du morcellement reçoit un nouveau numéro, celle destinée à former un immeuble distinct également. Enfin, lorsque la partie acquise est destinée à être fusionnée à un lot contigu, le numéro correspondant à celui-ci est remplacé par un nouveau numéro qui identifie l'immeuble nouveau: le lot contigu et la partie acquise qui lui a été incluse.

En raison de cet amendement, l'article 3033 se lirait comme suit: "Les droits énoncés dans la réquisition constatant l'acquisition d'une partie de lot ne peuvent être inscrits sur le registre foncier, jusqu'à ce qu'une modification cadastrale attribue: "1° un numéro cadastral distinct à la partie acquise et à la partie résiduelle; ou, "2° lorsque la partie acquise est fusionnée à un lot contigu, un numéro cadastral distinct à l'immeuble qui résulte du fusionnement, ainsi qu'à l'immeuble qui résulte du morcellement. "Dans les deux cas, une référence précise à la modification cadastrale doit être contenue au rapport d'actualisation des droits de la fiche de l'immeuble nouveau."

M. le Président, le projet est modifié par la suppression de l'article... M. le Président, est-ce qu'on peut suspendre quelques secondes? Il y a une petite vérification technique à faire en ce qui regarde les deux prochains articles. M. le Président, on m'informe que nous n'avons pas de modification à l'article 3034. Quant à l'article 3035, l'amendement n'est pas encore distribué. Nous allons le distribuer dans quelques instants. Si vous le permettez quand même, M. le Président, je pourrais lire cet amendement à 3035; les membres de la commission vont l'avoir dans quelques instants.

Donc, l'article 3035 est modifié par la suppression de la dernière phrase du deuxième alinéa. M. le Président, la phrase supprimée était inutile. Le dépôt du plan vaut publication de son existence. En raison de cet amendement, l'article 3035 se lirait comme suit: "L'officier transmet au ministre responsable du cadastre une copie de tout document énonçant une aliénation qu'il a inscrite sur le registre foncier, sous l'autorité du décret. "Sur réception du document, le ministre prépare la modification qui donne lieu à l'attribution d'un numéro cadastral distinct à chacune des parties de lot qui résulte de l'aliénation." Voilà, M. le Président.

Le Président (M. Lafrance): Merci. M. le ministre. Est-ce qu'il y a des commentaires touchant cet article 3033 tel qu'amendé, 3034 et 3035 tels qu'amendés? Oui, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Harel: Faut-il comprendre qu'à l'article 3033 tel qu'amendé, ça ne concerne que des immeubles qui sont déjà immatriculés? C'est bien le cas? C'est lorsqu'il y a morcellement d'un lot qui est déjà entier.

M. Rémillard: Manifestement, par le nouveau 3033, il s'agit bien de ce cas-là. Il faut comprendre que lorsqu'on aborde l'article 3033. au départ, on est en territoire cadastré. Donc, c'est dans ce contexte-là que s'applique l'article 3033.

Mme Harel: En territoire non cadastré, comment va se passer la numérotation?

M. Rémillard: On en a parié un petit peu hier, mais, si vous le permettez, je vais demander à Mme Longtin, pour cette question technique, si elle peut nous l'expliquer.

Le Président (M. Lafrance): Me Longtin.

Mme Longtin (Marie-José): Oui, M. le Président. Principalement, c'était régi par les articles 3015.1 qu'on a mis sur la table ainsi que 3017. Donc, en territoire non cadastré, par définition, l'objet ou l'assiette du droit n'a pas fait l'objet d'un plan, donc est désigné par des points de repère sur le terrain, les tenants et aboutissants. La description, donc, se fait par cette illustration de la description physique ainsi que par le numéro de la fiche immobilière, une fois que celle-ci est ouverte au bureau d'enregistrement.

Mme Harel: À 3034, M. le Président, on dit, dans le commentaire: Contrairement au droit actuel qui limite aux territoires rénovés la possibilité d'un décret permettant une aliénation entre vifs d'une partie de lot située dans une zone agricole, l'article 3034 étend la possibilité du décret à tout le territoire cadastré. Ça veut dire quoi exactement?

M. Rémillard: M. le Président, en ce qui regarde ce changement par rapport au droit actuel qui vient modifier la situation en fonction des territoires rénovés et la question du zonage agricole, je vais demander à Me McMurray de revenir nous expliquer un petit peu ce qu'elle nous a expliqué hier.

Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Alors, Me McMurray.

Mme Harel: La question est de savoir...

Le Président (M. Lafrance): Oui, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Harel: ...si c'est du droit transitoire ou si on envisage cette disposition comme permanente. Si c'est le cas, quel est l'avantage de procéder comme ça en regard de la façon de faire actuelle?

M. Rémillard: Ce n'est pas du droit transitoire. Là, on est vraiment dans le droit à une situation qui va devenir permanente, à moins que je ne me trompe. On me dit que ce n'est pas du droit nouveau. Je vais demander à Mme McMurray de le confirmer.

Mme Harel: Mme McMurray, je vous réfère au commentaire qui paraît à la page 200, de l'article 3034, qui stipule que, contrairement au droit actuel qui limite aux territoires rénovés la possibilité d'un décret, l'article 3034 étend la possibilité du décret à tout le territoire cadastré. Donc, si c'est du droit actuel, il est modifié ou bien le commentaire n'est pas exact.

Mme McMurray (Carole): Non. Je suppose que le commentaire est exact. Ce qu'il y a de nouveau, c'est l'élargissement de la disposition. Nous avons déjà une disposition semblable, mais qui serait élargie à tout le territoire pour simplement faciliter les transactions en matière de zonage, lorsqu'on est dans un territoire zone agricole. De toute manière,...

Mme Harel: Vous voulez dire pour faciliter les transactions en matière de zonage?

Mme McMurray: Si vous me permettez, juste un moment.

Mme Harel: D'accord, si vous pouviez m'expliquer en quoi ça va les faciliter en matière de zonage.

Mme McMurray: L'article 3034 vise à permettre, comme c'est inscrit, l'inscription sur le registre foncier d'une aliénation d'une partie de lot qui est située dans une zone agricole. Alors, contrairement à l'article 3003 et à l'article 3012, c'est une exception, c'est une dérogation à l'article 3012 qui interdit l'inscription d'un transfert de droit de propriété au registre foncier.

Mme Harel: Sans le consentement des créanciers? (10 heures)

Mme McMurray: Oui. Enfin, ici, il ne s'agit pas d'une question où on met en péril les droits des créanciers. Il s'agit simplement de permettre et de permettre temporairement l'inscription au registre foncier d'une transaction sur une partie de lot, puisque l'article 3035, ensuite, énonce que l'officier doit transmettre au ministre responsable une copie de tout document qui énonce une aliénation qu'il a inscrite sur le registre foncier. Mais là, c'est dans le cas où c'est autorisé par décret. Alors, ça couvre le cas d'une aliénation d'une partie de lot qui est située dans une zone agricole. L'objectif est de permettre l'inscription temporaire d'un transfert de propriété dans une zone agricole, le temps que le ministre responsable du cadastre modifie les plans.

Mme Harel: Est-ce qu'il est fréquent qu'il y ait morcellement sur des terrains protégés par le zonage agricole?

Mme McMurray: À notre connaissance, le pendant de l'article 3034 n'a jamais été utilisé dans le droit actuel.

Mme Harel: Alors, là, vous l'élargissez.

Mme McMurray: Oui. C'est un élargissement qui permettra, si besoin est, de ne pas retarder une transaction qu'il serait nécessaire ou utile de faire dans une zone agricole en raison des formalités qui sont requises pour procéder. Mais il faut comprendre que l'aliénation d'une partie de lot doit être autorisée par décret.

Mme Harel: Je comprends, madame, justement.

Mme McMurray: Le seul intérêt de 3034, c'est d'en permettre l'inscription au registre foncier, le temps que le plan qui immatricule les nouvelles parties soit présenté par le ministère de l'Énergie et des Ressources au bureau de la publicité.

Le Président (M. Lafrance): Merci, Me McMurray. Je note qu'on est en train de vous distribuer l'amendement qui nous a été lu déjà par M. le ministre, à l'article 3035. Oui, Me McMurray.

Mme McMurray: Pour un complément d'information...

Mme Harel: Un instant, s'il vous plaît. M.

le Président, je pense qu'on va demander de suspendre cet article 3034. Je crois comprendre qu'il était question de supprimer 3034 ou de le modifier. 3034 est laissé tel quel. Alors, on va devoir obtenir plus d'explications avant de pouvoir voter sur 3034.

Le Président (M. Lafrance): Oui. Merci, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve. Je pense que Me McMurray aimerait aussi apporter un supplément d'information. Alors, Me McMurray.

Mme McMurray: J'aimerais peut-être rectifier une information ou compléter une information que j'ai donnée. C'est que les dispositions actuelles du Code civil du Bas Canada limitent aux territoires rénovés la possibilité d'inscrire à l'index des immeubles une transaction sur une partie de lot parce que ce n'est qu'en territoire rénové qu'il y a une interdiction d'inscrire dans l'index des immeubles des parties de lot. On sait qu'à l'extérieur du territoire rénové, on inscrit des parties de lot à l'index des immeubles alors qu'avec le droit nouveau, en vertu de 3012, on ne pourra pas - et à l'égard de tous les immeubles indépendamment de leur statut, qu'ils soient rénovés ou non - inscrire de droits de propriété. Alors, c'est le motif qui justifie l'élargissement. C'est tout simplement une concordance avec 3012.

Mme Harel: M. le Président, les experts auront l'occasion d'échanger là-dessus. Mme McMurray va certainement reconnaître qu'il y aurait matière à plus d'information pour l'Opposition.

Le Président (M. Lafrance): Oui, M. le député de Chapleau.

M. Kehoe: Je pense qu'il y a déjà eu des discussions entre les juristes des deux côtés et puis il n'y en a pas...

Mme Harel: L'article ne devait pas revenir ici, M. le député de Chapleau.

M. Kehoe: Je n'ai pas d'objection.

Mme Harel: L'article devait être supprimé. Alors, comme...

M. Kehoe: II y a eu des discussions, mais je ne pense pas qu'il y ait eu une décision de prise. De toute façon, on peut suspendre, pour revenir sur ces articles lorsque le ministre sera présent.

Mme Harel: On va suspendre pour que les experts et les légistes puissent en parler plus longuement.

Le Président (M. Lafrance): S'il n'y a pas d'autres commentaires sur ces articles, le nouvel intitulé au chapitre quatrième est donc adopté tel que proposé. L'article 3033 est adopté tel qu'amendé. L'article 3034 est laissé en suspens et l'article 3035 est adopté tel qu'amendé.

De la radiation

Nous en arrivons maintenant au titre cinquième qui traite de la radiation et qui touche les articles 3036 à 3052 inclusivement. Permettez-moi de vous lire le texte d'introduction à ce titre cinquième.

Le titre cinquième traite de la radiation et se divise en trois chapitres portant respectivement sur les: 1° causes de radiation; sur 2° certaines radiations; et sur 3° les formalités et les effets de la radiation.

Le titre cinquième reprend, en les adaptant au système de publicité proposé, de nombreuses règles du droit actuel. S'il innove, c'est surtout sur ces points: 1° il tire, en matière de radiation, des conséquences qui résultent de la confiance qu'on doit avoir dans le registre (articles 3041 et 3052): le jugement en rectification ou en radiation d'une inscription ne peut porter atteinte au tiers de bonne foi qui s'est fié au registre; 2° il concilie, en matière de consignation d'une somme d'argent, le livre Des priorités et des hypothèques et le livre De la publicité des droits (article 3043), 3° ii généralise, en matière de droit réel d'exploitation des ressources de l'État, une règle du droit actuel particulière à l'abandon ou à la révocation d'un droit minier (article 3048); 4° il formule dans un texte une règle pratique: la radiation du principal s'étend à ses accessoires (article 3051).

Le chapitre premier, pour sa part, traite des causes de radiation et touche les articles 3036 à 3043. Permettez-moi de vous lire le texte d'introduction à ce chapitre premier.

Des causes de radiation

Le chapitre premier du titre cinquième qui porte sur les causes de radiation distingue les différentes sortes de radiation, innove en exten-sionnant la radiation à toute inscription et en instituant, dans un cadre précis, la radiation d'office de l'hypothèque éteinte; il détermine aussi le cadre précis dans lequel est admise la radiation soit de l'hypothèque légale des personnes qui ont participé à la construction ou à la rénovation d'un immeuble, soit de la déclaration de résidence familiale.

Le chapitre premier détermine également les cas où le tribunal peut ordonner une radiation, les limitations que la loi attache aux conséquences d'une radiation judiciaire, les conséquences

qui résultent de la quittance totale d'une créance et la manière d'obtenir une réduction d'hypothèque à la suite d'offres valables ou de la consignation d'une somme d'argent.

J'appelle donc les articles contenus à ce chapitre premier, Des causes de radiation, soit les articles 3036 à 3043 inclusivement.

M. Kehoe: M. le Président, dans cette section, il y a cinq amendements. L'article 3036 est remplacé par le suivant: "La radiation résulte d'une inscription qui vise la suppression d'une inscription antérieure sur le registre approprié; elle s'obtient, à moins que la loi n'en dispose autrement, par la présentation d'une réquisition faite suivant les règles applicables au registre foncier ou au registre des droits personnels et réels mobiliers. "La radiation est volontaire ou, à défaut, judiciaire; elle peut aussi être légale."

M. le Président, l'article définit la radiation et précise que la radiation est volontaire et non conventionnelle. En raison de cet amendement, l'article 3036 se lirait comme suit: "La radiation résulte d'une inscription qui vise la suppression d'une inscription antérieure sur le registre approprié; elle s'obtient, à moins que la loi n'en dispose autrement, par la présentation d'une réquisition faite suivant les règles applicables au registre foncier ou au registre des droits personnels et réels mobiliers. "La radiation est volontaire ou, à défaut, judiciaire; elle peut aussi être légale."

Le projet est modifié par l'insertion, après l'article 3036, de l'article 3036.1: "L'inscription dont la date extrême d'effet est limitée par la loi, ou par la réquisition d'inscription, est périmée de plein droit le lendemain, à zéro heure, de la date d'expiration du délai fixé par la loi ou inscrit sur le registre, si elle n'a pas préalablement été renouvelée."

M. le Président, l'ajout introduit la notion de péremption d'inscription puisée à l'article 67(2) alinéa 1 du décret du 14 octobre 1955 pour l'application en France du décret du 4 janvier 1955 portant réforme de la publicité foncière. La péremption de l'inscription, lorsqu'elle est subie, laisse subsister le droit. Le titulaire ou le créancier peut alors faire procéder à une nouvelle inscription produisant son effet et prenant rang à la date, l'heure et la minute de la présentation de la nouvelle réquisition d'inscription. Cette nouvelle réquisition ne peut prendre la forme d'un avis de renouvellement, car on ne peut renouveler une inscription périmée. En raison de cet amendement, l'article 3036.1 se lirait comme suit: "L'inscription dont la date extrême d'effet est limitée par la loi, ou par la réquisition d'inscription, est périmée de plein droit le lendemain, à zéro heure, de la date d'expiration du délai fixé par la loi ou inscrit sur le registre, si elle n'a pas préalablement été renouvelée."

L'article 3037 est modifié: 1° par l'insertion, dans la première ligne du deuxième alinéa, après le mot "hypothèque" des mots "qui est éteinte, ou d'une restriction au droit de disposer, ou de tout autre droit dont la durée est déterminée"; 2° par le remplacement, dans les première et deuxième lignes du même alinéa, des mots "des registres" par les mots "le registre approprié"; 3° par le remplacement, dans la deuxième ligne, du mot "éteinte" par le mot "périmée"; 4° par l'insertion, dans la même ligne, après les mots "qui n'a plus d'effet", d'une virgule; 5" par la suppression de la dernière phrase du deuxième alinéa.

M. le Président, c'est une modification rédactionnelle de concordance avec les articles 2965 et 2966 et de complément à l'article 3036.1 qui introduit la péremption d'instance dans le nouveau droit. La disposition prévoit l'accomplissement des opérations qui incombent à l'officier lorsque la péremption d'inscription survient. Le texte supprimé dans l'article 3037 original est repris dans l'article 3037.1. En raison de cet amendement, l'article 3037 se lirait comme suit: "L'inscription d'un droit est radiée, du consentement du titulaire ou du bénéficiaire de ce droit. "Néanmoins, l'inscription d'une hypothèque qui est éteinte, ou d'une restriction au droit de disposer, ou de tout autre droit dont la durée est déterminée, qui, d'après le registre approprié, est périmée ou celle de l'adresse qui n'a plus d'effet, peut être radiée d'office par l'officier. La radiation est motivée et datée." (10 h 15)

Le projet est modifié par l'insertion, après l'article 3037, de l'article 3037.1: "L'hypothèque immobilière garantissant le prix de l'emphytéose, la rente créée pour le prix de l'immeuble, la rente viagère ou l'usufruit viager, l'hypothèque immobilière constituée en faveur de l'Office du crédit agricole du Québec ou de la Société d'habitation du Québec, ou celle constituée en faveur d'un fondé de pouvoir des créanciers pour garantir le paiement d'obligations ou autres titres d'emprunt, ne peuvent être radiées d'office."

M. le Président, l'article reprend la dernière phrase du deuxième alinéa de l'article 3037 original, mais limite la disposition au registre foncier. Il est aussi de concordance avec l'article 1205 en ce qui concerne l'emphytéose. Par ailleurs, il étend à la Société d'habitation du Québec l'avantage dont bénéficie l'Office du crédit agricole du Québec. En raison de cet amendement, l'article 3037.1 se lirait comme suit: "L'hypothèque immobilière garantissant le prix de l'emphytéose, la rente créée pour le prix de l'immeuble, la rente viagère ou l'usufruit viager, l'hypothèque immobilière constituée en faveur de l'Office du crédit agricole du Québec ou de la Société d'habitation du Québec, ou celle cons-

tituée en faveur d'un fondé de pouvoir des créanciers pour garantir le paiement d'obligations ou autres types d'emprunt, ne peuvent être radiées d'office."

L'article 3039 est modifié par l'ajout, après le premier alinéa, de l'alinéa suivant: "Hors le cas où les époux y consentent, la réquisition doit être accompagnée d'un certificat de décès et d'une déclaration attestée de la liquidation de fa succession ou d'une copie du jugement, selon le cas." M. le Président, c'est l'ajout d'une précision technique concernant la justification de la réquisition de radiation de la déclaration de résidence familiale. En raison de cet amendement, l'article 3039 se lirait comme suit: "L'inscription d'une déclaration de résidence familiale n'est radiée, à la réquisition de tout intéressé, que dans les cas suivants: les époux y consentent, l'un des époux est décédé et sa succession est liquidée, les époux sont séparés de corps ou divorcés, la nullité du mariage est prononcée ou l'immeuble a été aliéné du consentement des époux ou avec l'autorisation du tribunal. "Hors le cas où les époux y consentent, la réquisition doit être accompagnée d'un certificat de décès et d'une déclaration attestée de la liquidation de la succession ou d'une copie du jugement, selon le cas."

Aussi, dans cette section, M. le Président, il y a trois articles dont on demande la suspension, soit les articles 3038, 3041 et 3042, à des fins d'examen additionnel par des spécialistes des deux côtés.

Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le député de Chapleau. Est-ce qu'il y aurait des commentaires touchant ces articles 3036 à 3043 inclusivement, en vous rappelant, comme vient de le dire M. le député de Chapleau, que les articles 3038, 3041 et 3042 seront laissés en suspens?

Alors, l'article 3036 est donc adopté tel qu'amendé. Le nouvel article 3036.1 est adopté tel que proposé. L'article 3037 est adopté tel qu'amendé. Le nouvel article 3037.1 est adopté tel que proposé. L'article 3038 est laissé en suspens. L'article 3039 est adopté tel qu'amendé. L'article 3040 est adopté tel quel. Les articles 3041 et 3042 sont laissés en suspens et l'article 3043 est adopté tel quel.

Nous en arrivons maintenant au chapitre deuxième qui traite de certaines radiations. Permettez-moi de vous lire le titre d'introduction de ce chapitre deuxième, De certaines radiations. Il touche donc les articles 3044 à 3048 inclusivement.

De certaines radiations

Le chapitre deuxième du titre cinquième qui porte sur certaines radiations traite de la radiation d'un droit viager ou de l'hypothèque qui le garantit, de l'hypothèque en faveur de l'État et des droits éteints par l'exercice des droits hypothécaires, par une vente forcée ou par le délaissement.

Ce chapitre traite aussi des radiations auxquelles peut donner lieu un préavis de vente pour défaut de paiement de l'impôt foncier et de la radiation d'un droit réel d'exploitation des ressources.

Malgré la nouveauté dans sa formulation, le chapitre n'innove que sur deux points: premièrement, il intègre les différentes modalités d'exercice sur un droit hypothécaire, tel que le préavis d'exercice d'un recours, l'abandon de la prise en paiement, le délaissement, la saisie et l'absence d'exercice du recours; deuxièmement, il étend à tout droit réel d'exploitation des ressources de l'État une règle du droit minier actuel. Les radiations visées sont particulières et nécessitent des règles spécifiques.

J'appelle donc les articles contenus à ce chapitre deuxième, soit les articles 3044 à 3048 inclusivement.

M. Kehoe: M. le Président, nous demandons la suspension de l'article 3046 et il y a trois amendements, dans cette section. L'article 3045 est modifié: 1° par l'insertion, dans le troisième alinéa, après les mots "la présentation," des mots "d'une copie"; 2° par le remplacement, dans le même alinéa, du mot: "certifié" par le mot "certifiée". M. le Président, l'amendement opère des ajouts techniques. En raison de ces amendements, l'article 3045 se lirait comme suit: "L'inscription d'une hypothèque en faveur de l'État est radiée ou réduite» par la présentation d'un certificat du Procureur général ou du sous-procureur général du Québec, ou d'une personne désignée par le Procureur général, énonçant que telle hypothèque est éteinte ou réduite. "Elle l'est aussi par la présentation d'un certificat du ministre ou du sous-ministre du Revenu, ou d'une personne désignée par le ministre du Revenu, énonçant que telle hypothèque est éteinte ou réduite, si cette hypothèque a été constituée en vertu d'une loi dont l'application relève de ce ministre. "Elle peut l'être encore par la présentation d'une copie d'un décret du gouvernement, certifiée par le greffier du Conseil exécutif."

L'article 3047 est modifié par le remplacement, dans le premier alinéa: 1° des mots "la vente elle-même" par les mots "l'adjudication"; 2° des mots "l'acte de vente consenti" par les mots: "la vente définitive consentie".

M. le Président, il s'agit de précisions d'ordre technique de concordance avec les articles 2997 et 3046. En raison de ces amendements, l'article 3047 se lirait comme suit: "L'inscription du préavis de vente pour

défaut de paiement de l'impôt foncier et celle de l'adjudication sont radiées à la suite de l'inscription de la vente définitive consentie par l'autorité municipale ou scolaire ou de l'acte constatant que l'immeuble a fait l'objet d'un retrait. "L'inscription du préavis de vente pour défaut de paiement de l'impôt foncier est aussi radiée à la suite de la présentation de la liste des immeubles non vendus."

Le Président (M. Lafrance): M. le député de Chapleau, je remarque qu'on nous a distribué ici un amendement à l'article 3046 et vous nous avez dit qu'on le laissait en suspens. Alors, vous désirez, je présume, retirer...

M. Kehoe: C'est ça. L'amendement aussi. Oui, retirez-le pour tout de suite.

Le Président (M. Lafrance): D'accord. Merci.

M. Kehoe: L'article 3048 est modifié par l'ajout, après le deuxième alinéa, de l'alinéa suivant: "Lorsque l'abandon ou la révocation concerne un droit qui a été immatriculé, l'officier en donne avis au ministre responsable du cadastre afin qu'il puisse, d'office, annuler l'immatriculation du droit."

M. le Président, c'est l'ajout d'une précision technique qui permet d'épurer le registre foncier et de conserver à jour le cadastre. En raison de cet amendement, l'article 3048 se lirait comme suit: "L'inscription d'un droit réel d'exploitation des ressources de l'État est radiée, lorsque le ministre responsable de la loi qui régit ce droit avise l'officier de la publicité des droits de l'abandon ou de la révocation du droit qui n'est pas exempté de l'inscription. "L'avis doit désigner le droit abandonné ou révoqué et identifier la fiche immobilière visée; l'abandon ou la révocation est inscrite sur cette fiche, ainsi que sur celle de l'immeuble sur lequel s'exerçait le droit. "Lorsque l'abandon ou la révocation concerne un droit qui a été immatriculé, l'officier en donne avis au ministre responsable du cadastre afin qu'il puisse, d'office, annuler l'immatriculation du droit."

Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le député de Chapleau. Est-ce qu'il y aurait des commentaires touchant ces articles 3044 à 3048 inclusivement? Oui, Mme la députée de Terre-bonne.

Mme Caron: J'aurais une question, M. le Président. Est-ce que le cas d'abandon est fréquent? Est-ce qu'on a relevé si le cas d'abandon était fréquent?

M. Kehoe: Encore une fois, est-ce qu'on peut appeler Mme McMurray pour qu'elle nous fasse son expertise?

Le Président (M. Lafrance): Me McMurray.

Mme McMurray: M. le Président, à notre connaissance, non, les cas d'abandon ne sont pas très fréquents, mais nous n'avons pas de statistique précise, cette question relevant du ministère de l'Énergie et des Ressources.

Mme Caron: Est-ce que vous savez ce qui a été fait à l'heure actuelle, puisque cet article est de droit nouveau?

Mme McMurray: L'objectif de cette disposition est de permettre le maintien à jour du registre foncier puisque ce qui est de droit nouveau, c'est la possibilité d'immatriculer le droit réel d'exploitation des ressources de l'État.

Mme Caron: Mais, actuellement, qu'est-ce qui se passait en cas d'abandon?

Mme McMurray: Les droits miniers sont actuellement inscrits dans le registre des droits miniers. S'il y a un abandon, il y a une mention d'abandon. Mais le droit réel n'étant pas immatriculé, il n'y a pas lieu de fermer la fiche de lot. Alors, ici, l'assiette d'un droit réel d'immatriculation peut être immatriculée; s'il n'y a plus de droit qui est exercé à l'égard de cette assiette, il y a lieu de fermer l'affiche de lot et, donc, aussi d'annuler l'immatriculation. C'est tout simplement une question de mise à jour du registre foncier et des plans.

Mme Caron: Est-ce que ce serait possible de vérifier au niveau des données pour les cas d'abandon au ministère concerné?

Mme McMurray: S'il y a des abandons aujourd'hui, ces abandons sont notés au registre minier, mais, comme je l'ai mentionné, il n'y a pas lieu de faire une modification de plan puisqu'il n'y a pas eu d'immatriculation.

Mme Caron: Mais simplement comme information, à savoir s'il y en a effectivement beaucoup dans la réalité ou non?

Mme McMurray: Oui, on peut vérifier si ces données sont disponibles et vous les fournir.

Mme Caron: Je vous remercie.

M. Frenette (François): M. le Président. (10 h 30)

Le Président (M. Lafrance): Oui, Me Frenette. M. le député de Westmount.

M. Holden: Oui. Je voulais demander à Mme McMurray, si je me souviens bien, il y a une limite de temps. Ces droits existent pendant

tant d'années et il faut investir de l'argent dans le droit minier. Est-ce que c'est comme ça qu'on arrive à l'abandon? C'est après une période de temps où on n'a pas réalisé ou on n'a pas investi dans la mine? Est-ce que c'est ça qui arrive pour l'abandon?...

Mme McMurray: ...toutes les modalités concernant l'octroi des droits réels d'exploitation des ressources de l'État relèvent des dispositions concernant la Loi sur les mines, laquelle loi est sous la responsabilité du ministre de l'Énergie et des Ressources.

M. Holden: Je savais déjà parce que j'avais fait un peu de droit minier, mais je ne me souviens pas le nombre d'années... L'abandon arrive au bout d'un certain nombre d'années, quoique c'est automatique, l'abandon...

M. Kehoe: Je pense que dans la loi des mines, s'il n'y a pas une exploitation et si vous ne payez absolument rien à l'État durant une certaine période de temps... Je ne me rappelle pas... Quitte à vérifier, et on pourra vous donner la réponse.

M. Holden: En fait, on fait entrer la loi minière dans le Code, dans un sens.

Mme McMurray: Non, tout ce qui est prévu ici, par l'article 3048, c'est la publicité des droits miniers et non pas les règles relatives à l'octroi et à la gestion des droits.

M. Holden: O.K. Merci, M. le Président. Le Président (M. Lafrance): Me Frenette.

M. Frenette: Merci, M. le Président. Le troisième alinéa de 3048 parle du droit qui aurait été immatriculé. Est-ce qu'à l'article 3020, ce n'est pas l'assiette qui est immatriculée?

M. Kehoe: Peut-être que la sous-ministre pourra mieux répondre à cette question-là.

Le Président (M. Lafrance): Mme la sous-ministre.

Mme Morency (Lise): Je pense que la seule chose que je puis dire, c'est qu'on va regarder à nouveau la proposition de modification, c'est-à-dire la proposition telle qu'elle a été présentée ici et s'il y a lieu, effectivement, de corriger, pour indiquer qu'il s'agit bien de l'assiette du droit qui est immatriculée. On va faire les amendements nécessaires.

M. Frenette: Si j'ai bien compris, il pourrait y avoir abandon du droit, mais, dans le fond, la fiche pour l'assiette pourrait demeurer, parce que le droit pourrait être exercé à nouveau, soit...

Mme Morency: Je suggérerais qu'on puisse rediscuter ensemble de ce problème-là, et revenir plutôt par une proposition de modification, s'il y a lieu.

M. Kehoe: On peut le laisser comme ça. et s'il y a lieu de rouvrir l'article... ou suspendre avec un petit s.

Le Président (M. Lafrance): S'il n'y a pas d'autres commentaires, l'article 3044 est donc adopté comme tel. L'article 3045 est adopté tel qu'amendé. L'article 3046 est laissé en suspens. L'atricle 3047 est adopté tel qu'amendé et l'article 3048 est laissé en suspens tel qu'amendé.

Des formalités et des effets de la radiation

Nous en arrivons maintenant au chapitre troisième qui traite des formalités et des effets de radiation, et qui touche les articles 3049 à 3052 inclusivement.

Permettez-moi de vous lire le texte d'introduction à ce chapitre troisième. Le chapitre troisième du titre cinquième, qui porte sur les formalités et les effets de la radiation, traite successivement de la forme de la réquisition pour inscrire une rectification, une radiation ou une réduction d'inscription, de la réquisition fondée sur un jugement qui ordonne la radiation, de l'exécution provisoire, des conséquences du consentement à la radiation d'un droit principal et des effets de l'ordonnance de radiation d'une radiation erronée.

J'appelle donc les articles contenus à ce chapitre troisième, soit les articles 3049 à 3052 inclusivement.

M. Kehoe: M. le Président, dans cette section, il y a trois amendements. L'article 3049 est remplacé par le suivant: "La réquisition qui vise la réduction d'une inscription suit les règles applicables au registre approprié."

M. le Président, la radiation résulte d'une inscription faite sur le fondement d'une réquisition. Aussi, il n'est besoin d'une précision technique que pour tenir compte de la réduction d'inscription, puisque la réduction n'est ni l'inscription ni la suppression d'un droit, d'où l'amendement. En raison de cet amendement, l'article 3049 se lirait comme suit: "La réquisition qui vise la réduction d'une inscription suit les règles applicables au registre approprié."

L'article 3050 est modifié par l'insertion, dans le premier alinéa, après les mots "radiation d'un droit publié" des mots "ou la réduction d'une Inscription".

M. le Président, il s'agit d'un ajout d'une précision technique. En raison de cet amendement, l'article 3050 se lirait comme suit: "La réquisition fondée sur un jugement qui ordonne la radiation d'un droit publié ou la

réduction d'une inscription n'est admise que si ce jugement est passé en force de chose jugée. "L'exécution provisoire n'est pas admise lorsque le jugement porte sur la rectification ou la radiation d'une inscription. "Le greffier du tribunal est tenu de délivrer un certificat attestant que le jugement n'est pas susceptible d'appel ou que, les délais d'appel étant expirés, il n'y a pas eu d'appel ou encore qu'à l'expiration d'un délai de trente jours de la date du jugement aucune demande en rétractation de jugement n'a été présentée."

L'article 3051 est remplacé par le suivant: "La radiation de l'inscription d'un droit principal autorise la radiation de l'inscription des droits accessoires et de toutes les mentions relatives à ces inscriptions."

M. le Président, la radiation du droit principal emporte celle des droits accessoires, peu importe de qui émane la radiation. Cela facilitera l'épuration des registres à l'arrivée du terme fixé dans la réquisition.

En raison de cet amendement, l'article 3051 se lirait comme suit: "La radiation de l'inscription d'un droit principal autorise la radiation de l'inscription des droits accessoires et de toutes les mentions relatives à ces inscriptions."

Le Président (M. Lafrance): Je vous remercie, M. le député de Chapleau. Est-ce qu'il y aurait des commentaires touchant ces articles du chapitre troisième, soit 3049 à 3052 inclusivement? Oui, Me Frenette?

M. Frenette: Merci, M. le Président. Pourrait-on avoir quelques précisions sur la notion de réduction d'une inscription?

M. Kehoe: Mme Longtin?

Le Président (M. Lafrance): Me Longtin.

Mme Longtin: Oui, M. le Président. La notion de réduction... En fait, il s'agit de la réduction du montant qui est initialement inscrit au registre et on peut, donc, dans certains cas, présenter une réquisition pour demander que cette inscription-là, le montant de cette inscription-là, soit réduit, ce qui peut se faire avec le consentement des parties et, dans certaines circonstances comme à 2662, à la suite des offres et consignations que le tribunal a acceptées.

M. Frenette: Est-ce qu'il s'agit vraiment d'une réduction d'une inscription comme de certains effets de l'inscription?

Mme Longtin: J'aurais peine à qualifier que le montant qui est initialement inscrit, ça fait évidemment partie de l'inscription comme telle... une façon de passer par le biais de l'effet de l'inscription pour arriver à cette notion-là sans faire un détour inutile.

M. Frenette: De par les exemples donnés, l'inscription était celle d'une hypothèque?

Mme Longtin: Ça demeure l'inscription d'une hypothèque.

M. Frenette: Alors, ce qui est réduit, dans ce cas-là, c'est le montant de la sûreté?

Mme Longtin: Le montant initialement inscrit en regard du droit d'hypothèque.

M. Frenette: Alors, ce n'est pas vraiment l'inscription?

Mme Longtin: C'est toujours l'inscription. Tout est une inscription sur le registre.

M. Frenette: Oui, mais...

Mme Longtin: En fait, évidemment, on doit parler par des termes. On s'est un peu aligné sur les notions qui apparaissaient en droit français sur cette question-là et qui utilisent cette même expression pour viser cette réduction du montant initialement inscrit.

M. Holden: Et s'il y avait une augmentation?

Le Président (M. Lafrance): Oui, M. le député de Westmount. Si vous voulez reprendre...

M. Holden: Est-ce qu'on note les augmentations aussi dans les changements d'inscription?

Mme Longtin: On peut toujours par... À ce moment-là, ça serait une autre réquisition qui modifierait la portée dans ce cas-là, eu égard au tiers, de certains effets.

Le Président (M. Lafrance): Oui, Me Frenette.

M. Frenette: Le député de Westmount ne vient pas d'offrir une piste qui consisterait à parler de réquisition qui vise à la modification d'une inscription d'une façon générale.

Mme Longtin: Dans certains cas, je crois que cette expression a été introduite dans certains articles précédents pour des modifications sur les inscriptions, je crois, à l'article 2971, entre autres, et à l'article 2974. C'est une chose qui peut être vérifiée, effectivement.

M. Frenette: Puisque l'article 2974 est justement en suspens, peut-être pourrions-nous, aux fins de reformulation...

Mme Longtin: L'article 2974 est adopté.

M. Frenette: 2974?

Mme Longtin: Oui.

Une voix: On l'a adopté hier.

Mme Harel: C'est vrai, on l'a adopté hier.

M. Frenette: Peut-être qu'il serait préférable, étant donné que c'est une chose facile à régler, qu'on suspende avec un petit s encore simplement pour voir si la formule ne pourrait pas être peaufinée.

M. Kehoe: Ce serait quel article? Est-ce que c'est...

Mme Harel: L'article 3049.

M. Frenette: Les articles 3049 et 3050.

M. Kehoe: L'article 3051 aussi?

M. Frenette: L'article 3051, je ne sais pas si...

M. Kehoe: M. le Président, il n'y a pas de problème à suspendre les articles 2049 et 2050, avec un petit s.

Une voix: 30.

M. Kehoe: 30. Je veux reculer.

M. Holden: Tu ne veux absolument pas finir cette histoire, hein?

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Lafrance): Alors, s'il n'y a pas d'autres commentaires, les articles 3049 et 3050 sont donc laissés en suspens tels qu'amendés. L'article 3051 est adopté tel qu'amendé et l'article 3052 est adopté tel quel. Ceci termine donc le livre neuvième de la publicité des droits.

Avant de passer au livre dixième, j'aimerais remercier les experts qui nous ont aidés tout au long de ses longues heures d'étude. À moins qu'il n'y ait d'autres membres qui voudraient ajouter quelque chose... Oui, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Harel: Alors, M. le Président, je veux, au nom de l'Opposition, remercier également les personnes qui sont venues nous faire part de ces projets sur lesquels elles travaillent depuis très longtemps et également souligner la présence parmi nous des membres des équipes, je crois, de la Direction de l'enregistrement qui ont suivi avec beaucoup beaucoup d'attention nos travaux. J'ai vu en quelque part une carte passer. Avant leur départ, je voudrais au moins qu'on puisse la regarder, peut-être pendant l'intermission, et on aura peut-être l'occasion, au moment où on reverra tous ces articles suspendus de se revoir à nouveau. Je vous remercie.

Le Président (M. Lafrance): Merci, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve. Oui, M. le député de Chapleau.

M. Kehoe: Au nom du ministre et de ma part aussi, je veux remercier tout le monde qui a participé. Je peux garantir à l'Opposition que le personnel, tout le monde qui sont ici présents aujourd'hui sont disponibles. On a certains articles qui sont suspendus. Si on avait besoin, on pourrait les faire revenir.

Aussi, je veux remercier Me Frenette pour sa coopération, sa connaissance et toutes les précisions qu'il a apportées à différents articles. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le député de Chapleau. Alors, afin de permettre la distribution du livre dixième, je vais suspendre les travaux pour dix minutes.

(Suspension de la séance à 10 h 45)

(Reprise à 11 h 14)

Le Président (M. Lafrance): À l'ordre, s'il vous plaît!

Nous allons reprendre nos travaux. Alors, merci. Je déclare donc notre séance de travail rouverte. J'aimerais officiellement accepter le dépôt du livre dixième et des commentaires détaillés sur les dispositions du projet de loi 125, livre dixième, qui touche la question du droit international privé et des dispositions finales. Ce document portera le code numérique 45d.

Ou droit international privé

Alors, nous en arrivons donc au droit international privé. Je demanderais peut-être à

Mme la députée de Kamouraska-Témiscouata de bien vouloir nous lire les propos d'introduction à ce livre dixième.

Mme Dionne: Oui, M. le Président. Le livre dixième: Du droit international privé. Les relations qu'entretiennent actuellement les Québécois avec des citoyens d'autres États, aussi bien à l'échelon interprovincial qu'à l'échelon international, sont de plus en plus importantes et les problèmes qui en résultent ne trouvent pas toujours de solution satisfaisante en raison du caractère souvent incertain et fragmentaire des règles de droit international privé. En effet, ces règles sont au Code civil et au Code de procédure civile peu nombreuses et ni la doctrine ni

la jurisprudence, qui ont pourtant, à partir de ces bases minimes, donné un certain essor à cette branche du droit civil, ne permettent d'assurer la sécurité juridique des parties impliquées.

Il s'imposait, par conséquent, de réunir les règles de droit international privé contenues dans les codes, dans un seul livre consacré à cette matière et de leur adjoindre les solutions juris-prudentielles et doctrinales en les codifiant.

Il fallait également examiner ces règles à la lumière du droit conventionnel et des codifications élaborées au cours de ces dernières années dans certains pays étrangers.

Le livre dixième introduit donc au Code civil un ensemble de règles portant sur le droit international privé. Il comprend quatre titres. Le titre premier réunit les dispositions générales énonçant les principes fondamentaux.

Le titre deuxième établit les règles de conflits de lois qui indiquent le système juridique compétent pour résoudre les situations comportant des éléments d'extranéité. Il est divisé en quatre chapitres qui correspondent aux grandes divisions du droit civil: le statut personnel, le statut réel, le statut des obligations et celui de la procédure. Chacun de ces chapitres compte deux sections, l'une édictant des dispositions générales, l'autre des dispositions particulières, sauf le chapitre sur le statut de la procédure qui ne comprend que deux articles.

Le titre troisième traite de la compétence internationale des autorités du Québec, tribunaux judiciaires ou administratifs et autorités administratives diverses. Il est divisé en deux chapitres: l'un comportant des dispositions générales et l'autre des dispositions particulières aux matières personnelles à caractère extrapatrimonial et patrimonial ainsi qu'aux matières réelles.

Le titre quatrième énonce les règles applicables à la reconnaissance et à l'exécution des décisions étrangères, de même que les règles relatives à la compétence des autorités étrangères. Il est divisé en deux chapitres qui correspondent à ces deux matières.

Titre premier: Dispositions générales, articles 3053 à 3058. Le titre premier comporte certaines dispositions d'ordre général sur le champ d'application des lois, la qualification et l'ordre public. Il introduit également un article qui permettra exceptionnellement d'appliquer une autre loi que celle désignée par les règles de conflits, ainsi que des dispositions visant à permettre la prise en considération des lois d'application immédiate ou nécessaire du droit québécois ou étranger.

Le renvoi n'a pas fait l'objet d'une règle particulière, contrairement à la solution retenue par l'Office de révision du Code civil qui l'interdisait (article 4). La doctrine québécoise a généralement exprimé des regrets face au caractère absolu de cette interdiction. La possibilité d'appliquer le renvoi est donc maintenue.

La disposition relative à la fraude à la loi proposée par l'Office (article 6), n'a pas non plus été retenue. La doctrine québécoise met en doute l'utilité de cette théorie et la jurisprudence moderne n'en fait plus usage. Voilà, M. le Président.

Dispositions générales

Le Président (M. Lafrance): Merci, Mme la députée. J'appelle donc les articles contenus à ce titre premier qui touche les dispositions générales, soit les articles 3053 à 3058 inclusivement. M. le député de Sherbrooke.

M. Hamel: M. le Président, nous avons quatre amendements à proposer. D'abord, dans l'article 3054: 1° aux deuxième et troisième lignes du premier alinéa, les mots "ou plusieurs systèmes juridiques applicables à différentes catégories de personnes" sont supprimés; 2° à la quatrième ligne du premier alinéa, les mots "ou chaque système juridique" sont supprimés; 3° à la quatrième ligne du premier alinéa, le mot "considéré" est remplacé par le mot "considérée" - au féminin; 4° Le deuxième alinéa est remplacé par le suivant: "Lorsqu'un État comprend plusieurs systèmes juridiques applicables à différentes catégories de personnes, toute référence à la loi de cet État vise le système juridique déterminé par les règles en vigueur dans cet État. À défaut de telles règles, la référence vise le système juridique ayant les liens les plus étroits avec la situation."

M. le Président, l'amendement proposé vise à mieux distinguer l'une de l'autre les deux situations couvertes par l'article soit, d'une part, les unités territoriales ayant des compétences législatives distinctes et, d'autre part, les systèmes juridiques applicables à des catégories de personnes. Chacune de ces situations est visée par un alinéa distinct.

En raison de cet amendement, l'article 3054 se lirait comme suit: "Lorsqu'un État comprend plusieurs unités territoriales ayant des compétences législatives distinctes, chaque unité territoriale est considérée comme un État. "Lorsqu'un État comprend plusieurs systèmes juridiques applicables à différentes catégories de personnes, toute référence à la loi de cet État vise le système juridique déterminé par les règles en vigueur dans cet État. À défaut de telles règles, la référence vise le système juridique ayant les liens les plus étroits avec la situation."

Un amendement est proposé à l'article 3055: 1° à la deuxième ligne, les mots "la qualification des biens, comme meubles ou immeubles, est demandée à la loi du lieu de leur situation" sont ajoutés après le mot "toutefois". 2° l'article est scindé en deux alinéas dont

le deuxième commence par les mots "Lorsque le tribunal".

M. le Président, l'article 6, alinéa 2 du Code civil du Bas Canada fait régir la distinction des biens comme meuble ou immeuble par la loi québécoise sans préciser si c'est à titre de loi du tribunal saisi ou à titre de la situation du bien. C'est cette dernière solution que favorise la doctrine. L'amendement proposé reprend cette solution.

En raison de ces amendements, l'article se lirait comme suit: "La qualification est demandée au système juridique du tribunal saisi; toutefois, la qualification des biens, comme meubles ou immeubles, est demandée à la loi du lieu de leur situation. "Lorsque le tribunal ignore une institution juridique ou qu'il ne la connaît que sous une désignation ou avec un contenu distincts, la loi étrangère peut être prise en considération."

Un amendement est proposé à l'article 3056: 1° à la deuxième ligne du premier alinéa et aux deuxième et troisième lignes du deuxième alinéa, les mots "au regard de la conception québécoise du droit" sont supprimés; 2° à la troisième ligne du premier alinéa, les mots "il peut être donné effet à" sont insérés après les mots "l'exigent"; 3° à la fin du premier alinéa, les mots "peut être prise en considération" sont supprimés.

M. le Président, les amendements proposés suppriment les mots "au regard de la conception québécoise du droit" et remplacent l'expression "peut être prise en considération" par "il peut être donné effet" afin de rendre l'article davantage conforme aux conventions internationales qui l'ont inspiré.

En raison de ces amendements, l'article 3056 se lirait comme suit: "Lorsque des intérêts légitimes et manifestement prépondérants l'exigent, il peut être donné effet à une disposition imperative de la loi d'un autre État avec lequel la situation présente un lien étroit. "Pour en décider, il est tenu compte du but de la disposition, ainsi que des conséquences qui découleraient de son application."

Il y a un dernier amendement à l'article 3056.1. L'article 3056.1 suivant est inséré à la suite de l'article 3056: "3056.1 Lorsque, en vertu des règles du présent livre, la loi d'un État étranger s'applique, il s'agit des règles du droit interne de cet État, à l'exclusion de ses règles de conflits de lois."

M. le Président, l'amendement proposé vise à exclure le renvoi du droit International privé québécois compte tenu de la complexité de cette technique, laquelle jouerait au détriment des justiciables.

En raison de cet amendement, l'article 3056.1 se lirait comme suit: "Lorsque, en vertu des règles du présent livre, la loi d'un État étranger s'applique, il s'agit des règles du droit interne de cet État, à l'exclusion de ses règles de conflits de lois." Voilà, M. le Président.

Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le député de Sherbrooke. Est-ce qu'il y aurait des commentaires touchant ces articles 3053 à 3058 inclusivement? Oui, Mme la députée de Hochela-ga-Maisonneuve.

Mme Harel: M. le Président, nous entamons donc à ce stade-ci l'examen du dixième livre qui porte sur le droit international privé. Vous avez, lors de la lecture des commentaires, indiqué que l'objectif était d'assurer la sécurité juridique la plus grande possible aux parties impliquées. Alors, si vous me le permettez, étant donné que le titre premier porte sur les principes fondamentaux, je souhaiterais que nous puissions les examiner article par article.

D'abord à l'article 3053. C'est un article de droit nouveau. On nous dit dans le commentaire qui accompagne cet article qu'il s'agit d'un article inspiré de la loi fédérale suisse sur le droit international privé de 1989. Il consacre législativement la théorie des lois d'application immédiate. Alors, j'aimerais, pour (es fins de nos travaux, que nous puissions obtenir, en fait toutes les explications qui nous permettent de voir dans quelle voie on s'engage avec ce nouveau chapitre.

Le Président (M. Lafrance): M. le ministre.

M. Rémillard: M. le Président, me permettez-vous de me référer à M. le professeur Pineau pour nous faire ces précisions?

Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Me Pineau.

M. Pineau (Jean): Merci, M. le Président. L'article 3053 vient nous dire que les règles qui désormais feront partie du Code civil du Québec et qui sont destinées à gouverner les conflits de lois s'appliquent sous réserve de certaines dispositions en vigueur au Québec et qui sont dites lois d'application immédiate ou encore lois de police et qui, compte tenu de leur gravité, de leur importance, doivent s'appliquer de façon imperative. Si je peux donner un exemple, tel que la Loi sur la protection de la jeunesse, ou la Loi sur les services de santé et les services sociaux, ce sont des lois extrêmement importantes qui doivent s'appliquer impérieusement. Alors, voilà ce que cette disposition vise. Donc, même si une règle étrangère était en vertu des règles du projet et devait être appliquée, la loi d'application immédiate du Québec s'appliquerait néanmoins compte tenu du but particulier de cette loi.

Le Président (M. Lafrance): Oui, Mme la députée de Terrebonne.

Mme Caron: En fait, il faut s'assurer qu'il y ait protection à partir de toutes nos lois québécoises, autant au niveau de la jeunesse, des travailleurs, des consommateurs, des familles, des droits des personnes, aussi, la protection des personnes.

M. Pineau: Pour les consommateurs, il y a des lois particulières que nous verrons un petit peu plus loin, qui s'appliquent à ces questions-là. Mais ce sont des... Cela vise des lois dont ne fait pas état le projet. Le projet ne fait pas état des droits particuliers, entre autres.

Mme Harel: Alors, merci pour cette explication à l'article 3053. Alors, à l'article 3054, je comprends qu'il y a un amendement qui est introduit. L'article 3054 était également de droit nouveau. Je comprends qu'au deuxième alinéa de l'article 3054, la formulation qu'on y retrouve a été souhaitée, je pense, par le Barreau. Alors, peut-on nous indiquer, d'abord, ce que l'article 3054 introduit et puis ce que va modifier le deuxième alinéa?

M. Pineau: M. le Président, quant au contenu, l'amendement n'apporte rien de nouveau, mais c'est une reformulation qui se veut plus claire, de sorte que... Quant au premier alinéa, on nous indique que lorsqu'un État comprend plusieurs unités territoriales ayant des compétences législatives distinctes - eh bien, pensons au Canada - chaque unité territoriale, c'est-à-dire chaque province, est alors considérée comme un État. (11 h 30)

Quant au deuxième alinéa, il vise l'État qui comprend plusieurs systèmes juridiques applicables à différentes catégories de personnes. On pourrait songer à cette catégorie de personnes que sont les autochtones, par exemple, dans l'hypothèse où ils auraient... dans la mesure où ils ont leurs propres lois, dans ce contexte-là, toute référence à la loi de cet État vise le système juridique déterminé par les règles en vigueur dans cet État. Donc, ce serait la loi autochtone qui serait, à ce moment-là, visée.

Mme Harel: Donc, le premier alinéa porte plus sur la loi d'un État fédéral?

M. Pineau: Dans le premier alinéa de 3054, tel qu'il était proposé à l'origine, on avait mis dans un premier alinéa à la fois l'État qui comprend plusieurs unités territoriales et l'État qui comporte plusieurs systèmes juridiques applicables à différentes catégories de personnes. Alors, cela risquait peut-être de créer certaines ambiguïtés, de sorte qu'on a préféré, à la demande de certains groupes, scinder cette proposition en deux alinéas nettement plus clairs.

Mme Harel: D'accord. Donc, au premier alinéa, ça concerne plus la loi d'un État fédéral...

M. Pineau: Plusieurs unités territoriales.

Mme Harel: ...plusieurs unités, tandis que dans le deuxième alinéa...

M. Pineau: Deuxième alinéa, différentes catégories, systèmes juridiques applicables à différentes catégories.

Mme Harel: ...chaque système juridique est considéré comme un État aux fins...

M. Pineau: Aux fins d'application.

Mme Harel: ...d'application de la règle du conflit.

M. Pineau: C'est ça. Exactement.

Mme Harel: Donc, à 3055, il s'agit également d'un article qui est nouveau. L'amendement vient préciser la qualification des biens lorsqu'il s'agit de meubles ou d'immeubles, c'est ça? Alors, qu'introduit donc, de nouveau, si vous voulez, la disposition telle qu'amendée?

M. Pineau: II faut peut-être dire, M. le Président, que l'ensemble de ce livre dixième est une véritable nouveauté au Québec.

Mme Harel: C'est ça.

M. Pineau: II y a trois ou quatre ou cinq dispositions dans le Code civil du Bas Canada sur le droit international privé. Le droit international privé au Québec est extrêmement flottant - je crois qu'on pourrait utiliser ce terme. Donc, on vient codifier, en définitive, ce droit.

Mme Harel: Presque pour la première fois, en fait?

M. Pineau: Ici, pour la première fois. Tout l'ensemble de cette législation s'est fortement inspiré de la législation suisse et des conventions internationales.

Mme Harel: Ça illustre bien qu'on est devenu des citoyens du monde, en quelque sorte, hein?

M. Pineau: Probablement. Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Harel: Et du bon monde aussi, évidemment.

M. Pineau: Quant à la qualification, elle est demandée au système juridique du tribunal qui

est saisi, la loi du fort, mais l'amendement vient apporter une précision quant à la qualification des biens, soit en tant que meubles, soit en tant qu'immeubles. Cette qualification réfère à la loi du lieu, de la situation des biens en tant que tels.

Mme Harel: Je crois comprendre que la Chambre des notaires ne souhaitait pas une telle formulation. Est-ce que je me trompe de croire que la Chambre des notaires préférait que ce soit le tribunal qui apprécie, dans chacune des circonstances, ce qui devait être considéré comme la loi du lieu?

M. Pineau: Effectivement, elle recommande soit de la supprimer, soit de l'améliorer. Mais je pense, M. le Président, que si on supprimait, cela risquerait d'être complexe. L'amendement reprend la proposition qui avait été faite par l'ORCC dans son article 3, alinéa 2.

Mme Harel: Je crois comprendre que l'amendement vient en partie, en tout cas du moins, peut-être satisfaire la préoccupation de la Chambre des notaires.

M. Pineau: Elle vient... Quant à la première phrase, il n'y a pas de problème. La Chambre des notaires, vu ce qui vient de m'être présenté, est d'accord avec cela, me semble-t-il.

Mme Harel: À l'article 3056.1 ou... On pourrait peut-être voir 3056 d'abord. Oui, à l'article 3056, l'amendement qui est introduit vient, semble-t-il, satisfaire la préoccupation qu'exprimait la Chambre des notaires, c'est bien le cas?

M. Pineau: C'est ce qui avait été demandé, effectivement, la suppression de la référence à la conception québécoise du droit. Cela avait été copié, si j'ose dire, sur la loi suisse, qui utilisait la même terminologie, mais au regard, bien sûr, de la conception suisse.

Mme Harel: C'est donc le tribunal qui va apprécier, à ce moment-là. C'est bien ça?

M. Pineau: C'est cela. Si vous voulez, je peux vous donner un exemple. Supposons le cas de sculptures. C'est un problème qui s'est posé devant les tribunaux d'Angleterre. Il y a des sculptures qui sont sorties illégalement de Nouvelle-Zélande et qui ont été achetées en Grande-Bretagne. Les tribunaux anglais ont été saisis, et la Grande-Bretagne a appliqué cette disposition 3056. Elle s'est référée, effectivement, à la loi de la Nouvelle-Zélande alors même que les règles de conflits indiquaient qu'elle devait se référer à sa propre loi. Elle a considéré qu'il s'agissait d'intérêts légitimes et manifestement prépondérants, les sculptures en question, selon la loi de la Nouvelle-Zélande, ne pouvant pas sortir de la Nouvelle-Zélande, parce que patrimoine culturel.

Mme Harel: Alors, pour apprécier s'il s'agit d'intérêts légitimes et manifestement prépondérants.

M. Pineau: Deuxième alinéa, il est tenu compte du but de la disposition ainsi que des conséquences qui découleraient de son application. Ce sont les critères auxquels le tribunal doit se référer pour prendre, effectivement, une décision sur la question de savoir si le tribunal applique la loi étrangère, la règle imperative de l'autre État.

Mme Harel: Pour évaluer les intérêts légitimes et manifestement prépondérants des personnes intéressées à voir appliquer la disposition de la loi d'un autre État.

M. Pineau: C'est ça.

Mme Harel: C'est ça. À l'article 3056.1, je crois comprendre que l'amendement introduit, qui se lit comme suit: "Lorsque, en vertu des règles du présent livre, la loi d'un État étranger s'applique, il s'agit des règles du droit interne de cet État, à l'exclusion de ses règles de conflits de lois." C'est ce qu'on appelle la règle du renvoi, ça, je crois, hein? C'est pour éviter qu'un tribunal québécois décide de ne pas avoir compétence, et que le tribunal étranger décide de ne pas avoir compétence et que...

M. Pineau: C'est cela. C'est la partie de ping-pong entre les deux États, n'est-ce pas? Ce qui fait que 3056.1 vient stabiliser la situation, dans la mesure où la règle de conflits indique que c'est la loi de l'État étranger qui s'applique. Cette loi étrangère se limite aux règles du droit interne, et ne comprend pas les règles de conflits de lois de ce pays. Ce qui évite...

M. Holden: M. le Président, si la... M. Pineau: ...la partie de ping-pong.

M. Holden: ...députée de Hochelaga-Maison-neuve me permet, juste... Il faudrait peut-être corriger les commentaires sur la question de renvoi parce qu'on dit que la doctrine québécoise a exprimé des regrets, etc. Là, on a pas mal changé l'approche avec l'amendement. Alors, il faudrait peut-être corriger le paragraphe dans les commentaires, dans le livre de commentaires.

M. Pineau: Au...

M. Holden: Au titre premier, le troisième paragraphe.

M. Pineau: Bien sûr.

M. Holden: Le renvoi n'a pas fait l'objet d'une règle particulière, etc., mais on l'a changé.

M. Rémillard: Je répète, M. le Président, que nous allons revoir tous les commentaires parce que c'est très juste ce que le député de Westmount nous souligne. C'est une autre démonstration éloquente que nous devrons revoir tous les commentaires. Moi, je prévois trois à quatre mois de travail avec nos experts pour revoir tous les commentaires à la satisfaction de tous les intervenants.

Mme Harel: L'avant-projet de loi contenait cette règle du renvoi.

M. Pineau: L'article 3056.1, c'est cela. Elle avait été supprimée dans le projet de loi 125 et elle est rétablie.

Mme Harel: Les motifs qui justifient ce rétablissement sont liés à l'intérêt des personnes concernées?

M. Pineau: C'est cela. Le motif essentiel, c'est de permettre au justiciable de savoir, en définitive, quelle est la règle qui va lui être appliquée, car il est évident que s'il est soumis à une partie de ping-pong entre deux États, il doit attendre de savoir à quelle sauce il va être mangé.

M. Rémillard: C'est un petit peu cannibales-que, vos propos, mais en tout cas.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Pineau: Oui, c'est vrai. J'aurais dû mettre la main devant.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Harel: Alors, l'article 3057 dit clairement: "L'application des dispositions de la loi d'un État étranger est exclue lorsqu'elle conduit à un résultat manifestement incompatible avec l'ordre public tel qu'il est entendu dans les relations internationales." C'est ce dernier membre de phrase que je voudrais me faire expliquer. Par exemple - vous allez me dire que ça ne concerne pas... Le droit de correction, par exemple, appliqué aux femmes dans certains États étrangers pourrait-il être...

Des voix: Ha, ha, ha! Mme Harel: ...repris ici?

M. Pineau: Je crois que ça pourrait être un très bon exemple...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Pineau: ...dans l'autre sens.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Harel: Mais qu'est-ce que signifie "tel qu'il est entendu dans les relations internationales"?

M. Pineau: M. le Président, j'ai sous les yeux le commentaire de l'Office de révision du Code civil qui traite de l'ordre public sous l'article 5 du projet de l'Office. Le commentaire commence par la phrase suivante: "L'ordre public est l'enfant terrible, l'élément perturbateur du droit international privé". Alors, il est évident qu'il n'est pas facile de dire ce que c'est que l'ordre public international. Il n'y a pas de définition de cela, sans doute fort heureusement, de la même façon qu'il n'y a pas de définition de l'ordre public interne, car c'est essentiellement mouvant. Cette notion est essentiellement mouvante.

Mais, si vous me le permettez, je pourrais simplement dire que l'ordre public du Québec ne doit pas faire obstacle à l'effet d'un droit qui a été acquis sans fraude à l'étranger, sauf si c'est manifestement incompatible, n'est-ce pas, avec les principes fondamentaux du droit ou de la morale du Québec. C'est cela, essentiellement, que veut dire l'article 3057. (11 h 45)

M. Rémillard: Si vous me le permettez, M. le Président, le concept d'ordre public en matière de relations internationales, sur le plan du droit international, maintenant se réfère au respect des conventions et pactes internationaux sur le respect des droits de l'homme. Ça fait partie du respect de l'ordre public de même qu'au niveau québécois, lorsque nous parlons de l'ordre public, on doit se référer maintenant aussi au respect des droits et libertés de la personne...

M. Holden: Ça inclut le...

M. Rémillard: ...et toutes les autres lois concernant les francophones partout au Canada.

Mme Harel: À 3057, l'effet d'une telle disposition c'est lors de l'application d'une disposition de la loi d'un État étranger. Si cette disposition est incompatible avec l'ordre public au regard de la conception québécoise, cette disposition va s'appliquer quand même. C'est ça que je dois comprendre?

M. Pineau: Pas exactement, non. Ce que l'on veut dire par là, c'est que ce n'est pas dès lors qu'une loi étrangère doit s'appliquer. Elle doit être appliquée au Québec. Il ne suffit pas de dire: Cette règle étrangère va à rencontre de l'ordre public québécois. En d'autres termes,

l'ordre public qui peut être invoqué par un tribunal du Québec, à rencontre de l'application d'une règle étrangère, doit être un ordre public beaucoup plus fort, qui dépasse l'ordre public québécois, d'une certaine manière.

Sinon, si on ne pouvait invoquer l'ordre public québécois toutes les fois que la règle étrangère vient contrarier une règle québécoise d'ordre public, on n'appliquerait, compte tenu de la multitude de règles d'ordre public que nous avons aujourd'hui dans notre droit, que la règle québécoise et non plus les règles étrangères.

Mme Harel: C'est donc dire que la loi étrangère pourrait...

M. Pineau: Exact.

Mme Harel: ...s'appliquer à rencontre de l'ordre public québécois.

M. Pineau: De l'ordre public québécois, voilà.

Mme Harel: Elle pourrait s'appliquer à rencontre de l'ordre public québécois en autant qu'elle est conforme à l'ordre public dans les relations internationales.

M. Pineau: C'est ça.

Mme Harel: On dit: "dans les relations internationales".

M. Pineau: Tel qu'il est entendu dans les relations internationales". On réfère à la notion dite d'ordre public international.

Mme Harel: Pour moi, le seul ordre qu'il y a dans les relations internationales, c'est l'ordre du plus fort. À part ça, je ne vois pas tellement d'autre ordre, disons, connu dans les relations internationales.

M. Rémillard: Ici, entre autres, on se réfère, bien sûr, à tout le droit international issu des Nations Unies, qui est là et qui établit l'ordre des relations internationales. C'est tout d'abord manifesté par les Nations Unies et tous les pactes internationaux, les conventions qui lient les parties signataires, que ce soit dans tous les domaines, que ce soit en fonction de l'UNESCO, ou que ce soit en fonction de la convention de ses réfugiés, peu importe.

M. Pineau: Si vous voulez prendre l'exemple suivant: À l'époque où le divorce n'était pas admis au Québec, un divorce prononcé à l'étranger aurait été néanmoins reconnu au Québec, n'est-ce pas? Ça n'allait pas... La règle sur le divorce de l'État étranger ne conduisait pas à un résultat manifestement incompatible avec l'ordre public.

Mme Harel: Est-ce que l'inverse pourrait être possible maintenant?

M. Pineau: L'inverse?

Mme Harel: Le divorce qui est maintenant reconnu au Québec et qui ne le serait pas à l'étranger, et qui pourrait donc ne pas être prononcé ici.

M. Pineau: Je pense que oui.

Le Président (M. Lafrance): M. le député de Westmount.

M. Holden: J'ai compris qu'un divorce prononcé ici...

Mme Harel: Non, ici le divorce peut être prononcé. Si tant est que la loi étrangère émanait d'un pays...

M. Holden: Ah, la loi étrangère s'applique contre un divorce accordé ici? Est-ce que c'est ça que le professeur veut dire?

M. Pineau: Non.

Mme Harel: Non.

M. Holden: J'ai mal compris.

M. Pineau: J'ai dit, M. le Président, qu'à l'époque où le divorce n'était pas admis au Canada...

M. Holden: On les faisait au Sénat. On les faisait passer au Sénat.

M. Pineau: Oui, mais enfin...

M. Holden: Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve a soulevé une question et j'ai mal compris votre réponse.

M. Pineau: J'ai répondu affirmativement à sa question, car la notion d'ordre public international est admise communément.

Mme Harel: Je prends un exemple. En Inde, il y a une partie de la population de religion musulmane et malgré que l'État soit laïque, il y a une sorte d'exception à la règle qui permet le mariage avec de très très jeunes filles. Je crois que les mariages sont consommés avec des jeunes filles de 11, 12, 13 ans. Dans la mesure, par exemple, où un couple ainsi marié selon les formalités prescrites viendrait résider au Québec, qu'en est-il en regard du droit qui les régit?

M. Pineau: C'est aussi le cas au Québec, l'âge.

Mme Harel: Oui, mais l'âge c'est quand même 14 ans, je pense, pour une fille.

M. Holden: Pour les garçons...

Mme Harel: Pour les garçons, puis les filles c'est 12 ans? D'accord.

M. Pineau: Je ne pense pas que ça crée... Ha, ha, ha!

Mme Harel: Mettons, pour les fins de mon exemple, après la mise en vigueur de notre nouveau Code.

M. Pineau: Nous avons une disposition particulière en matière de mariage et si les conditions de célébration sont celles de l'Inde, il n'y a pas de problème, mais si les conditions de fond vont à rencontre de l'ordre public d'ici, alors là, le mariage ne sera pas admis.

Mme Harel: Donc, ça signifie que même à 16 ou 17 ans, une fois la mise en vigueur du nouveau Code qui prévoit l'âge du mariage à 18 ans, une considération de fond ne serait pas admise. C'est ça qu'il faut comprendre?

M. Pineau: C'est ça, c'est l'article 3064. "Le mariage est régi, quant à ses conditions de fond, par la loi applicable à l'État de chacun des futurs époux; il est régi quant à ses conditions de forme, par la loi du lieu de sa célébration." Alors, dans ce cas-là, s'agissant de la loi applicable à l'État de chacun des futurs époux, s'il s'agit d'époux indiens, alors le mariage, quant à ses conditions de fond, serait régi par la loi indienne.

Mme Harel: C'est donc dire qu'à ce moment-là il pourrait être reconnu ici un mariage, par exemple, où ça s'est présenté... qui ne serait pas permis ici.

M. Pineau: Oui, c'est ça. L'exemple que je vous donnais tout à l'heure, je le reprends. Cette règle que j'ai énoncée s'appliquerait à des Québécois qui iraient se marier à l'étranger.

Mme Harel: Oui, c'est ça. Exactement. Bon. Écoutez, ce n'est pas une pratique qui est courante. De toute façon, le mariage n'est pas courant au Québec, mais en Inde, malheureusement, c'est une pratique assez courante qui consiste à vendre - le terme est peut-être excessif - à obtenir une dot pour le mariage d'une de ses filles avec, de préférence, un riche Arabe des émirats.

Une voix: Un richard.

Mme Harel: Un richard? Alors, à l'article 3058, il s'agit également de droit nouveau. Peut- on nous donner un exemple qui permettrait de mieux comprendre l'application de l'article 3058?

M. Pineau: Peut-être un contrat qui serait passé entre un Québécois et un Ontarien, mais qui aurait été conclu en Chine, par exemple, alors qu'ils n'ont aucun point d'attache. C'est peut-être un accident, entre guillemets, qui aurait pu faire se rencontrer les deux parties contractantes. Pourvu qu'ils n'aient pas, dans leur convention, désigné la loi applicable. Supposons qu'ils aient passé le contrat là-bas sans indiquer qu'ils entendent se soumettre à telle loi, la loi de tel État. Ils n'ont aucun point de rattachement avec la Chine...

Mme Harel: Donc, c'est le "consensualisme" qui va prévaloir.

M. Pineau: ...dans l'hypothèse où la règle de conflit désignerait la loi chinoise comme la loi applicable.

Mme Harel: Alors, si c'est la Chine qui est désignée, à ce moment-là, entre les parties, c'est...

M. Pineau: Alors, à ce moment-là, à titre exceptionnel... Oui, exact.

Mme Harel: ...la loi chinoise qui va s'appliquer.

Le Président (M. Lafrance): Alors, s'il n'y a pas d'autres commentaires, l'article 3053 est adopté tel quel. Les articles 3054, 3055 et 3056 sont adoptés tels qu'amendés. Le nouvel article 3056.1 est adopté tel que proposé et les articles 3057 et 3058 sont adoptés tels quels.

Des conflits de lois Du statut personnel

Nous en arrivons maintenant au titre deuxième qui traite des conflits de lois et qui touche les articles 3059 à 3110. Permettez-moi de vous lire le texte d'introduction. Le titre deuxième est consacré aux conflits de lois. Les dispositions qui le composent indiquent le système juridique compétent pour résoudre différentes situations comportant un élément d'extranéité. Il est divisé en quatre chapitres qui correspondent aux grandes divisions du droit civil soit le statut personnel, le statut réel, le statut des obligations et celui de la procédure. Chacun de ces chapitres compte deux sections, l'une établissant des dispositions générales, l'autre des dispositions particulières, sauf le chapitre sur le statut de la procédure qui ne comprend que deux articles.

Ainsi, le titre deuxième indique notamment la loi applicable au mariage, à la filiation, à l'obligation alimentaire, aux biens meubles et

immeubles, aux successions, aux sûretés, à la fiducie, aux contrats de vente, de travail, d'assurance, de consommation, à la preuve, à la prescription et à la procédure.

Le chapitre premier traite du statut personnel et touche les articles 3059 à 3072 inclusivement. Permettez-moi de vous lire le texte d'introduction à ce chapitre premier. Les dispositions qui composent le chapitre premier indiquent le système juridique compétent pour résoudre les situations comportant un élément d'extranéité dans les matières qui relèvent du statut personnel. Il compte deux sections, l'une établissant des dispositions générales, l'autre, des dispositions particulières sur l'état et la capacité des personnes physiques et morales, les incapacités, le mariage, la séparation de corps, la filiation et l'adoption ainsi que sur l'obligation alimentaire.

La loi du domicile de la personne concernée constitue le facteur de rattachement le plus généralement utilisé, conformément au quatrième alinéa de l'article 6 du Code civil du Bas Canada. Le domicie doit s'entendre en conformité avec les nouvelles dispositions du Code civil, article 75 et suivants, en vertu desquelles le domicile d'une personne coïncidera généralement avec le lieu de sa résidence habituelle.

J'appelle les articles contenus à la section I, qui traite des dispositions générales, soit les articles 3059 et 3060.

M. Kehoe: II n'y a pas d'amendement, M. le Président.

Le Président (M. Lafrance): Aucun amendement. Alors, est-ce qu'il y aurait des commentaires touchant ces deux articles? Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve. (12 heures)

Mme Harel: Oui, M. le Président. Je m'étonne un peu du commentaire du chapitre premier qui fait état que le domicile doit s'entendre en conformité avec les nouvelles dispositions du Code civil en vertu desquelles le domicile d'une personne coïncidera généralement avec le lieu de sa résidence habituelle. Faut-il comprendre qu'à l'article 3059 la loi du domicile est définie comme étant la résidence habituelle?

M. Kehoe: M. Pineau.

Le Président (M. Lafrance): Alors, Me Pineau.

M. Pineau: M. le Président, quand on parle de domicile, à l'article 3059, il faut se référer à la notion de domicile telle qu'énoncée à l'article 75. L'article 75 ne modifie pas le droit actuel. Donc, le domicile d'une personne, quant à l'exercice de ses droits, est au lieu de son principal établissement et l'article 76 nous indique bien que le principal établissement réfère non seulement à l'élément factuel, l'élément matériel, mais aussi à l'intention, n'est-ce pas, de maintenir, de faire de ce lieu son principal établissement.

Mme Harel: Est-ce qu'il ne vaudrait pas mieux modifier le commentaire, à ce moment-là?

M. Pineau: Peut-être. Ce que l'on veut dire simplement, c'est qu'il y a une définition un petit peu plus loin de la résidence, 77 n'est-ce pas? C'est le lieu où elle demeure, effectivement, de façon habituelle. Alors, on a inséré cette définition de la résidence dans le but d'éviter certains problèmes car, contrairement à l'Office de révision qui retenait comme notion de domicile la simple résidence habituelle, le seul élément matériel faisant abstraction de l'intention, on a maintenu le droit actuel, mais en droit international privé, la notion de résidence habituelle va être invoquée dans certains cas. La notion de domicile sera invoquée dans certains cas.

Dans d'autres cas, la notion de résidence habituelle sera aussi invoquée. Quelquefois, dans certains cas, il n'y aura pas de rattachement à la notion de domicile, mais simplement un rattachement à la notion de résidence habituelle et, parfois, un rattachement simplement à la notion de domicile et non point de résidence habituelle, d'où l'existence de 77 et la définition de résidence habituelle.

Mme Harel: Dans le commentaire... Excusez-moi!

M. Pineau: Oui, on peut modifier le commentaire, effectivement, pour éviter...

Mme Harel: Oui, dans le commentaire général sur le chapitre premier.

M. Kehoe: Ce sera revu, et on en prend bonne note. Ce sera revu, le commentaire.

Mme Harel: Dans le commentaire de 3059, on y lit ceci: Quant au premier alinéa, l'article reprend, en la simplifiant, la formulation actuelle. En fait, c'est ce qu'il faut comprendre? C'est...

M. Pineau: Du quatrième alinéa de l'article 6, Bas Canada. L'état et la capacité d'une personne physique sont régis par la loi de son domicile. C'est le droit actuel. Ce qui est un-* ajout au droit d'aujourd'hui, c'est le deuxième alinéa qui vise l'état et la capacité d'une personne morale qui, eux, sont régis par la loi de l'état en vertu de laquelle cette personne morale est constituée, avec la réserve qui suit.

Mme Harel: Je crois comprendre que la

Chambre des notaires aurait, dans son commentaire, préféré que le domicile soit défini comme étant le lieu de la résidence habituelle.

M. Pineau: C'est ça.

Mme Harel: C'est un peu le même commentaire que lors même de l'examen des articles portant...

M. Pineau: Exactement, sur le domicile.

Mme Harel: ...sur le domicile et la résidence.

M. Pineau: C'est ça. Il me paraît difficile de définir, dans le code de demain, une notion de domicile dans le livre sur les conflits de lois sur le droit international privé qui ne corresponde pas à la notion de domicile du Code. Car il ne faut quand même pas oublier que ces règles de conflits sont des règles du Code civil du Québec. Ce sont des règles locales.

Mme Harel: L'article 3060 est de droit nouveau. Pouvez-vous nous en préciser la portée?

M. Pineau: "En cas d'urgence ou d'inconvénients sérieux, la loi du tribunal saisi peut être appliquée à titre provisoire, en vue d'assurer la protection d'une personne ou de ses biens." Alors là, dans l'hypothèse où, effectivement, nous avons affaire à un mineur dont la loi personnelle est une loi étrangère, dans l'hypothèse où il y aurait lieu, pour le tribunal, d'agir promptement, compte tenu de l'urgence et du caractère sérieux des inconvénients que cela pourra entraîner s'il n'intervenait pas, il a la possibilité d'intervenir.

Mme Harel: Par exemple, ça pourrait être... M. Pineau: Et d'appliquer sa loi.

Mme Harel: Ça pourrait être la DPJ qui intervient, par exemple, à l'égard d'une enfant de 13 ans...

M. Pineau: Quant à son état et sa capacité.

Mme Harel: ...qui a contracté mariage, c'est ça. D'accord.

M. Pineau: C'est ça.

Le Président (M. Lafrance): Donc, les articles 3059 et 3060 sont adoptés tels quels.

Des incapacités

Nous en arrivons maintenant à la section II, qui touche aux dispositions particulières et, de façon plus précise, des incapacités. Et j'aimerais appeler les articles 3061, 3062 et 3063.

M. Kehoe: Encore une fois dans cette section, M. le Président, il n'y a pas d'amendement.

Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le député de Chapleau. Est-ce qu'il y a des commentaires, donc, touchant ces trois articles?

Mme Harel: Sur cette question des incapacités, peut-on nous indiquer, en ce qui concerne 3062, 3063, en particulier, qui sont de droit nouveau... Je comprends que 3061 reprend une règle déjà en vigueur. Alors, peut-on nous indiquer quelle est la nouveauté?

M. Pineau: 3062: "La partie à un acte juridique qui est incapable selon la loi de l'État de son domicile - prenons le cas d'un mineur étranger - ne peut pas invoquer cette incapacité si elle était capable selon la loi de l'État du domicile de l'autre partie lorsque l'acte à été passé dans cet État, à moins que cette autre partie n'ait connu ou dû connaître cette incapacité."

À supposer que le mineur étranger passe un contrat avec un Québécois, dans l'hypothèse où cet étranger aurait été majeur, en vertu de la loi québécoise, il ne peut pas invoquer son incapacité lorsque la loi a été passée dans cet État, sauf si notre Québécois a eu connaissance ou aurait dû avoir connaissance de l'incapacité de cet étranger. On évite ainsi l'effet de surprise.

Mme Harel: II peut y avoir une sorte d'ignorance excusable de la loi étrangère. C'est ça?

M. Pineau: C'est ça. Exactement. Mme Harel: Et à 3063?

M. Pineau: C'est le même principe, mais relatif à la personne morale.

Mme Harel: Vous faites le même sort aux personnes morales.

M. Pineau: C'est ça.

Mme Harel: Mais est-ce qu'elles ne seraient pas plus en mesure de voir, savoir?

M. Pineau: Le tribunal va pouvoir apprécier, à moins que cette autre partie n'ait connu ou dû connaître ces restrictions. Donc, il y a là une réserve qui permet au tribunal d'apprécier la situation.

M. le Président, une précision. L'autre partie dont il est fait état dans l'article 3063 peut fort bien être une personne morale ou une personne physique, n'est-ce pas? Donc, il est

normal qu'il y ait un parallélisme entre les deux articles, 3062 et 3063.

Mme Harel: En fait, à 3063, il s'agit plutôt non pas d'incapacité, mais de restriction au pouvoir de représentation. C'est ça?

M. Pineau: C'est ça, oui, c'est ça. Ou mariage

Le Président (M. Lafrance): Or, les articles 3061, 3062 et 3063 sont donc adoptés tels quels. J'appelle maintenant les articles 3064 et 3065 qui touchent la question du mariage.

M. Rémillard: II y a un amendement, M. le Président. À 3064, les mots "ou par la loi de l'État du domicile ou de la nationalité de l'un des époux" sont ajoutés après le mot "célébration". M. le Président, l'amendement proposé vise à favoriser la validité du mariage célébré, conformément aux conditions de forme de la loi de l'État du domicile ou de la nationalité de l'un des époux. En raison de cet amendement, l'article 3064 se lirait comme suit: "Le mariage est régi, quant à ses conditions de fond, par la loi applicable à l'état de chacun des futurs époux; il est régi, quant à ses conditions de forme, par la loi du lieu de sa célébration ou par la loi de l'État du domicile ou de la nationalité de l'un des époux."

Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Est-ce qu'il y aurait des commentaires, donc, touchant cet article 3064 tel qu'amendé, ou encore 3065?

Mme Harel: J'adopte 3064, M. le Président. Le Président (M. Lafrance): Tel qu'amendé?

Mme Harel: Tel qu'amendé. Alors, on en a parlé tantôt. C'est donc une des recommandations que le Barreau faisait, je crois?

M. Pineau: La Chambre des notaires. Mme Harel: Ah! La Chambre des notaires!

M. Rémillard: Le Barreau probablement aussi.

Mme Harel: Alors, cet amendement, qu'est-ce qu'il introduit de nouveau?

M. Pineau: Ce mariage sera valable si les conditions de forme, les conditions de célébration ont été conformes à la loi, sort du lieu de célébration, soit la loi de l'État du domicile, soit la loi de la nationalité de l'un des époux. C'est donc cette deuxième et cette troisième possibilité qui ont été ajoutées.

Mme Harel: Comment le choix va-t-il se faire?

M. Pineau: Ce sont les époux qui auront choisi de célébrer le mariage, soit sous la forme du lieu où il a été célébré, soit sous la forme de l'État du domicile ou de la nationalité des époux. On peut imaginer peut-être une situation où des époux, deux personnes décideraient de se marier dans un pays étranger, mais sous la forme de la loi de l'État de leur... soit domicile, soit nationalité. Un couple français, par exemple, pourrait fort bien se marier à l'étranger dans l'ambassade de leur pays. (12 h 15)

Mme Harel: Je viens de prendre connaissance, ici, du commentaire que le Barreau apporte à ce second... Ce n'est pas un second alinéa. En fait, c'est un second membre de phrase, c'est le dernier membre de phrase... Le commentaire du Barreau vaut toujours, même compte tenu que l'amendement est introduit au premier alinéa. Le commentaire est le suivant: Cela aura pour effet de reconnaître ici des mariages célébrés ailleurs, dans des ambassades, par exemple, alors que d'autres États ne reconnaîtront pas nécessairement leur validité. Nous assisterons donc à des mariages boiteux. Enfin, un retour aux critères de la loi personnelle de l'un des époux permettra à ceux-ci de contourner facilement les conditions de forme reliées au mariage et qui sont celles du lieu de sa célébration.

M. Pineau: II y a des étrangers, M. le Président, qui peuvent se marier valablement ailleurs que dans leur pays. Doit-on pour autant ne pas reconnaître ces mariages? Cette règle ne vise qu'à favoriser la validité du mariage.

Mme Harel: Alors, Us se marient, par exemple, aux Barbades, n'est-ce pas? Par exemple, ils se marient non pas selon les conditions de forme du lieu de la célébration, selon les conditions de forme de la loi de leur domicile, par exemple...

M. Pineau: Ou de leur nationalité. Mme Harel: ...ou de leur nationalité.

M. Pineau: Et ce mariage serait valable. Ce sont les conditions de forme. Ce ne sont pas les conditions de fond.

Mme Harel: Comme on peut même avoir la double nationalité. Alors, c'est donc dire que les conditions de forme... Ce ne sera pas nécessaire de le faire dans une ambassade, la. Ça pourrait même se faire au Québec, par exemple. Conditions de forme de la nationalité de l'un des époux... De toute façon, les conditions de fond, elles, sont toujours régies par la loi...

M. Pineau: Je suppose qu'un couple français pourrait se marier peut-être dans l'ambassade de France au Canada selon les formes françaises, la loi française permettant, le cas échéant - je n'ai pas vérifié - de tels mariages.

Mme Harel: Quand on dit: "Le mariage est régi, quant à ses conditions de fond, par la loi applicable à l'État de chacun des futurs époux..."

M. Pineau: La loi personnelle, c'est-à-dire celle de leur domicile.

Mme Harel: D'accord. C'est-à-dire que pourraient venir se marier ici, par exemple - je reprends mon exemple - deux personnes de nationalité indienne et qui seraient régies par les conditions de fond à leur État.

M. Pineau: C'est ça.

Mme Harel: Donc, aux conditions de fond de l'Inde. Alors, pourraient venir se marier ici, par exemple, un monsieur de 60 ans avec une jeune épousée de 11 ou 12 ans, étant donné que c'est les conditions de fond de la loi applicable à leur État. Ils pourraient venir se marier ici avec les conditions de forme de là-bas et les conditions de fond de là-bas, et tout ça, ici.

M. Pineau: Si, cependant, ils trouvent la possibilité de voir un mariage se célébrer selon les formes indiennes ici...

Mme Harel: Avec un officiant dans les communautés. Et je vous pose une question. Dans ce contexte-là, par exemple, si un État - je pense à la Californie, n'est-ce pas, qui est une des parties d'un État fédéral - introduisait, n'est-ce pas, la possibilité de mariage entre personnes d'un même sexe quant aux conditions de fond, des Californiens pourraient venir se marier ici, des personnes de même sexe pourraient venir se marier ici en faisant appliquer les conditions de fond de la loi applicable à l'État d'où ils viennent, avec les conditions de fond de la Californie, et le mariage pourrait avoir lieu ici, finalement?

M. Pineau: S'ils trouvent un célébrant compétent, autorisé, dois-je dire.

Mme Harel: Un célébrant autorisé en conformité avec les conditions de fond de leur

État. C'est-à-dire, par exemple, un pasteur d'une des églises qui reconnaît le mariage entre personnes de même sexe.

Le Président (M. Lafrance): Alors, s'il n'y a pas d'autres questions... Donc, oui?

Mme Harel: J'en ai à 3065, M. le Président.

Le Président (M. Lafrance): 3065, d'accord.

Mme Harel: Et à l'article 3064, vous allez me permettre d'y réfléchir peut-être encore un peu. Je ne sais pas qu'est-ce que le ministre en pense.

M. Rémillard: Pourquoi vous faites ça, réfléchir?

Mme Harel: Moi, je pense à l'Inde.

M. Rémillard: C'est ça. J'ai vu votre geste.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Rémillard: L'influence de certains voyages.

Mme Harel: Et vous, vous étiez en Belgique, je crois? Vous n'avez pas pris de poids, pourtant.

M. Rémillard: Qu'est-ce que je devrais faire comme signe, moi?

Mme Harel: Vous n'avez pas pris de poids. C'est étonnant.

M. Rémillard: Parler flamand, si vous voulez.

Mme Harel: Ce ne serait pas d'ordre public. La France a sa tour Eiffel, Montréal, son Stade, et les Belges... la Manneken-Pis.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Harel: Bon, revenons aux choses sérieuses. À 3065, on y lit, au premier alinéa: "Les effets du mariage, notamment ceux qui s'imposent à tous les époux quel que soit leur régime matrimonial, sont soumis à la loi de leur domicile."

Est-ce que le patrimoine familial fait partie des effets du mariage?

M. Rémillard: Bonne question. Me Pineau.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Lafrance): Me Pineau.

M. Pineau: C'est ce que semblent dire, M. le Président, les dispositions sur le patrimoine familial.

M. Rémillard: ...répondre très objectivement. Mme Harel: J'aimerais entendre la réponse.

M. Pineau: M. le Président, nous avons un chapitre quatrième intitulé Des effets du mariage. Aux articles 390 et suivants, la section première

est consacrée aux droits et devoirs des époux. La section seconde est consacrée à la résidence familiale. La section troisième est consacrée au patrimoine familial et la section quatrième est consacrée à la prestation compensatoire.

Mme Harel: Ça veut donc dire que, à moins qu'ils n'aient résidé ensemble avant le mariage... C'est ce qu'il faut comprendre avec le deuxième alinéa, puisque avant... Non?

M. Pineau: Le deuxième alinéa concerne les époux qui sont domiciliés dans des États différents.

Mme Harel: Ah oui. Très bien.

M. Pineau: Car il est possible à des époux d'avoir deux domiciles ou d'avoir un domicile distinct. Pardon, pas d'avoir deux domiciles, mais avoir un domicile distinct. Donc, il fallait prévoir l'hypothèse où les époux étaient domiciliés dans des États différents. Dans ce cas-là, c'est la loi du lieu de la résidence commune qui s'applique. Si on n'arrive pas à déterminer une résidence commune, ça sera la loi de leur dernière résidence commune. Si on n'arrive pas à déterminer la loi de leur dernière résidence commune, ça sera la loi du lieu de célébration du mariage.

Mme Harel: Ça, c'était aux fins de quoi? De régler quel conflit? Pour le deuxième alinéa?

M. Pineau: Et pour savoir de... pour appliquer le premier alinéa de l'article 3065. Donc...

Mme Harel: Donc, pour appliquer...

M. Pineau: ...les effets du mariage sont soumis à la foi de leur domicile. Cependant, s'ils ont deux domiciles, il faut bien en choisir un.

Deux domiciles distincts dans des États différents.

Mme Harel: Est-ce qu'il suffirait, par exemple, à l'un des époux d'être domicilié au Nouveau-Brunswlck ou en Ontario pour échapper à un des effets du mariage qui serait le patrimoine familial?

M. Pineau: On chercherait d'abord la loi du lieu de leur résidence commune. S'ils ont une résidence commune, ça serait la loi de cette résidence commune. Mais par hypothèse, si j'ai bien compris, ils n'ont pas une résidence commune. Donc, dans ce cas-là, on chercherait à savoir où se situait leur dernière résidence commune. Si on réussissait à trouver le lieu de leur dernière résidence commune, on leur appliquerait la loi de ce dernier lieu et si on ne parvient pas à trouver le lieu de cette dernière résidence commune, à ce moment-là, on appliquera - c'est la dernière possibilité - la loi du lieu de célébration du mariage. On suppose qu'ils auront été réunis au moins le jour de la célébration du mariage.

Mme Harel: On a vu souvent - en fait, souvent, je ne sais pas si ça l'est si fréquemment - on a vu beaucoup de films très connus porter à l'écran cette question de mariages en blanc, mariages qui, souvent, sont contractés pour pouvoir faciliter l'obtention de la citoyenneté.

M. Pineau: C'est une tout autre question.

Mme Harel: Oui, c'est une tout autre question. Mais dans un cas où ces mariages-là, en quelque sorte, sont maintenant soumis, justement, à l'effet du patrimoine familial, ça peut désinciter, d'une certaine façon, à les contracter, puisque là, il y a des effets - cer tains diront plus accablants ou d'autres diront plus engageants - que ceux qui existaient auparavant. Quoi qu'il en soit, il suffirait d'aller contracter mariage à l'extérieur du Québec, dans la mesure où il n'y a pas de résidence commune, pour pouvoir se soustraire à un des effets du mariage. Est-ce que c'est ce qu'il faut comprendre par l'application du deuxième alinéa?

M. Pineau: Mais il s'agit de savoir, à ce moment-là, M. le Président, si leur nouvelle résidence à l'étranger est une simple résidence ou s'ils y ont établi leur domicile. Il faudrait qu'ils puissent prouver que... Votre exemple porte sur des personnes qui vivent ensemble.

Mme Harel: Qui contractent mariage.

M. Pineau: Mais ce qui est important, c'est de savoir où est leur domicile.

Mme Harel: C'est ça. Leur résidence, en fait.

M. Pineau: Non, leur domicile. Mme Harel: Oui, d'accord.

M. Pineau: C'est à défaut de pouvoir établir un domicile commun qu'on aura recours à la loi de deux de leurs résidences ou de leur dernière résidence commune.

Mme Harel: M. le Président, pourquoi l'utilisation du mot "notamment"? Y a-t-il d'autres effets du mariage que ceux qui s'imposent à tous les époux, quel que soit leur régime matrimonial? Quels sont les autres effets du mariage, outre ceux qui s'imposent à tous les époux, quel que soit leur régime matrimonial?

M. Pineau: Dans certains cas, les effets du...

Le Président (M. Lafrance): Alors, vous désirez compléter, Me Pineau, en vous rappelant qu'il nous reste quelques minutes seulement et que je devrai...

M. Pineau: Oui.

Le Président (M. Lafrance): ...terminer notre séance pour ce matin. Me Pineau.

M. Pineau: Oui, M. le Président, les effets du mariage sont soit à caractère extrapatrimonial, soit à caractère patrimonial. Les effets, dis-je, peuvent être soit à caractère extrapatrimonial: l'obligation de fidélité, l'obligation de mener vie commune; soit à caractère patrimonial: l'obligation alimentaire ou l'obligation de contribution. Alors, c'est indépendant, effectivement, du régime matrimonial.

Mme Harel: Par exemple, cette obligation alimentaire, si tant est que les personnes qui ont contracté mariage au Québec allaient vivre en Ontario et qu'elles... Il y a là, notamment, non pas en matière d'obligation alimentaire, mais en matière de partage, en fait, du patrimoine... Est-ce qu'ils appellent ça un patrimoine familial? Je pense que oui. Oui, c'est ça. Est-ce qu'il faut comprendre que ce serait les effets du mariage de la loi de leur domicile en Ontario qui prévaudraient?

M. Pineau: Dans l'hypothèse où ils auraient un domicile...

Mme Harel: En Ontario. M. Pineau: ...en Ontario, si...

Mme Harel: Les fonctionnaires du Québec qui habitent à Ottawa, par exemple.

M. Pineau: ...mon souvenir est exact, M. le Président, l'Ontario... Nous avons une décision de la Cour d'appel du Québec qui nous indique que la loi ontarienne sur les... ce qu'on a appelé auparavant les "familia sets", cette loi de 1978, mais qui a été modifiée en 1987, si mon souvenir est exact, il a déjà été jugé par la Cour d'appel du Québec que cela ne constituait pas un effet des effets du mariage, mais constituait un régime matrimonial.

Mme Harel: Ça vaudrait pour l'Ontario puis ça ne vaudrait pas pour le Québec.

M. Pineau: La différence, c'est que si on se réfère à la loi québécoise sur le patrimoine familial et qu'on saurait considérer comme des effets du mariage, alors que la législation correspondante...

Mme Harel: C'est un paradoxe.

M. Pineau: ...en Ontario est considérée comme un régime matrimonial. En tout cas, c'est ce qu'a dit la Cour d'appel du Québec.

Mme Harel: On reviendra sur ça. On va continuer...

Le Président (M. Lafrance): Vous auriez encore des commentaires, oui? Alors, je vais devoir suspendre nos travaux en vous rappelant que nous avons prévu de nous réunir cet après-midi, sujet à confirmation en Chambre, il va de soi. Si c'est le cas, nous nous réunirons de nouveau après les affaires courantes, soit à compter de 15 h 30 environ, et ce sera dans la salle Louis-Joseph-Papineau. Est-ce qu'il y aurait des commentaires de fin de séance?

M. Rémillard: À15 h 30, M. le Président.

Le Président (M. Lafrance): C'est ça. Alors, notre séance de travail est donc suspendue pour ce matin. Merci.

(Suspension de la séance à 12 h 35)

(Reprise à 15 h 40)

Le Président (M. Lafrance): Veuillez prendre vos places, s'il vous plaît. Nous allons reprendre nos travaux en vous rappelant que nous avons convenu de nous réunir jusqu'à 18 h 30 ce soir et que nous avons également été avisés que nous reprendrons une séance mardi prochain, soit le 3 décembre, à 10 heures du matin, ici même dans cette salle. Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire: Oui, il y a un remplacement pour cette partie de séance. Mme Bleau (Groulx) est remplacée par M. Forget (Prévost).

Le Président (M. Lafrance): Merci. Alors, bienvenue à M. le député de Prévost. Alors, nous en étions donc aux articles 3064 et 3065 que j'avais appelés en vous soulignant le fait que 3064 avait été amendé. Ce sont donc deux articles qui touchent la question du mariage, toujours dans ce livre dixième qui traite du droit international privé et des dispositions finales.

Alors, Mme la députée de Hochelaga-Mai-sonneuve, je pense, nous avait fait part que, sur l'article 3065, elle avait des commentaires additionnels à formuler.

Mme Harel: J'ai bien compris, M. le Président, aux questions que j'ai posées ce matin, que le patrimoine familial était un effet du mariage et non un régime matrimonial. Est-ce que c'est le cas, M. le ministre? Le patrimoine est-il un effet du mariage ou un régime matrimonial?

M. Rémillard: Alors, nos experts ont étudié la question avec beaucoup d'objectivité, beaucoup de sensibilité...

Mme Harel: Ha, ha, ha!

M. Rémillard: ...et ce matin, nous avons eu une réponse. Le professeur Pineau nous a répondu que c'était en fonction d'un effet du mariage. Je reprends donc ses propos. Par conséquent, je lui demanderais de compléter mes propos.

Mme Harel: Et vous les partagez.

Le Président (M. Lafrance): Je remercie M. le ministre. Alors, Me Pineau.

M. Pineau: Alors, M. le Président, puisque la question est posée, je peux peut-être répondre qu'il y a actuellement un débat sur cette question, certains disant que ça relève des effets du mariage et d'autres disant que ça relève des régimes matrimoniaux. Mais il y a sans aucun doute un argument de textes dans le droit d'aujourd'hui et dans le droit proposé du projet, un argument de textes qui consiste à dire que ces dispositions sont situées dans le chapitre des effets du mariage et qu'en conséquence, l'intention du législateur est bien celle de faire de ces dispositions sur le patrimoine familial des effets du mariage. Voilà.

M. Rémillard: Je me demande, M. le Président, lorsqu'on reverra les commentaires, si on ne pourra pas revoir aussi ce commentaire, le resserrer peut-être un petit peu.

Mme Harel: En convenant que - est-ce qu'on peut dire? - la localisation, en fait, de cette disposition renforce le caractère de l'effet de mariage que l'on veut y donner.

M. Rémillard: C'est ça.

Mme Harel: D'accord. Très bien.

De la séparation de corps

Le Président (M. Lafrance): Ça va? Donc, l'article 3064 est adopté tel qu'amendé et l'article 3065 est adopté tel quel. J'aimerais maintenant appeler l'article 3066 qui parle de la séparation de corps.

M. Rémillard: II n'y a pas d'amendement, M. le Président.

Mme Harel: Je prenais connaissance du commentaire que la Commission des services juridiques portait à l'article 3066. La Commission signalait que, selon elle, en matière de séparation de corps, une solution plus simple devait s'appli- quer, qu'à l'égard des effets du mariage et qu'en matière de séparation de corps, la loi du tribunal saisi devait s'appliquer.

Le Président (M. Lafrance): Me Pineau.

M. Rémillard: Peut-être que Me Pineau fera des commentaires, M. le Président.

M. Pineau: M. le Président, la règle de principe, c'est la loi du domicile des époux. Cela veut dire la loi du domicile commun des époux, mais le deuxième alinéa vient prévoir l'hypothèse où chacun des époux a son propre domicile, comme nous l'avons indiqué ce matin, dans la mesure où des époux peuvent avoir un domicile distinct, malgré l'existence du devoir de cohabitation. En conséquence, le deuxième alinéa de l'article 3066 vient prévoir cette hypothèse. Dans ce cas-là, c'est la loi de la résidence commune qui s'applique et si on ne réussit pas à déterminer cette résidence commune, ce sera la loi de leur dernière résidence commune. Si on ne parvient pas à déterminer qu'elle est leur dernière résidence commune, ce sera la loi du tribunal saisi. Donc, l'article 3066 vient proposer plusieurs solutions et non point seulement la loi du domicile commun des époux, à défaut de quoi ce serait la loi du tribunal saisi. Il y a donc plus de souplesse.

Mme Harel: Ce que la Commission des services juridiques faisait valoir, c'est que tout cela peut quand même supposer un rattachement à une loi qui n'est qu'académique souvent, si la dernière résidence commune se trouve dans un État avec lequel les époux n'ont aucun lien. Par exemple, il a pu y avoir séparation de corps dans un Etat où les époux n'ont plus de lien, peut-être aux États-Unis, par exemple, et les époux se sont séparés lors de leur départ de cette dernière résidence commune, l'un pour l'Europe, l'autre pour le Québec et on fera donc référence à la loi de leur dernière résidence commune dans un État où il ne pourrait n'avoir aucun rattachement, finalement.

M. Pineau: M. le Président, il faut quand même voir que ce ne sont pas nécessairement les cas les plus fréquents et qu'il y a tout lieu de croire qu'à un certain moment, ils ont eu une résidence commune qui n'est pas dans un pays lointain, au bout du monde. Ce ne sont que des solutions de rechange, n'est-ce pas? Il ne faut tout de même pas perdre de vue le principe: la loi du domicile des époux. Et quand on parle de résidence commune, M. le Président...

Mme Harel: Quand on dit "à défaut", c'est dans un ordre chronologique. Il faut d'abord que l'on puisse...

M. Pineau: Oui, absolument. D'abord, c'est

la loi du domicile, et c'est à défaut de domicile commun qu'on fait appel à la loi de la résidence commune, car...

Mme Harel: Ensuite de leur résidence commune, de leur dernière résidence commune. C'est ça?

M. Pineau: À défaut de cela, la loi de la dernière résidence commune.

Mme Harel: Et à défaut de tout cela, la loi du tribunal saisi?

M. Pineau: C'est ça.

Mme Harel: Parce que certains... bien, la Commission des services juridiques, elle, considère que ça devrait être d'abord la loi du tribunal saisi. Ce serait plus simple. Je ne vois pas, en fait, les motifs qui peuvent nous amener à vouloir rendre des choses semblables à celles concernant les effets du mariage.

M. Pineau: Oui, ce qui est recherché dans ce contexte-là, c'est le point commun qui relie les deux époux, n'est-ce pas? Le fait qu'ils soient situés au même endroit, dans le même pays.

De la filiation par le sang et adoptive

Le Président (M. Lafrance): Alors, l'article 3066 est donc adopté tel quel. J'appelle maintenant les articles suivants qui touchent la question...

Mme Harel: Je vais devoir vous quitter pour intervenir au salon bleu. Alors, ma collègue, Mme la députée de Terrebonne, va poursuivre, et je rentre dès la fin de cette intervention.

Le Président (M. Lafrance): C'est bien. Merci, Mme la députée de Hochelaga-Maison-neuve. Alors, j'appelle les articles suivants: 3067, 3068 et 3069 qui touchent la question de la filiation par le sang et de la filiation adoptive.

M. Rémillard: II n'y a pas d'amendement, M. le Président.

Le Président (M. Lafrance): Aucun amendement. Merci, M. le ministre. Alors, est-ce qu'il y aurait des membres qui auraient des commentaires touchant ces trois articles? Oui, Mme la députée de Terrebonne?

Mme Caron: Oui, M. le Président. Dans le mémoire déposé par la Chambre des notaires sur cet article, surtout le 3068, les articles touchant l'adoption, on nous disait qu'il fallait intégrer toutes les règles d'adoption internationale dans le livre du droit international privé. Est-ce qu'on a étudié cette recommandation?

Le Président (M. Lafrance): Alors, Me Pineau?

M. Pineau: M. le Président, ce que je puis dire jusqu'à présent, c'est que ces règles sont actuellement centralisées dans le chapitre sur adoption, n'est-ce pas? On sait que la question de l'adoption internationale est un domaine extrêmement sensible et on n'a pas voulu déranger l'ordonnance de ces dispositions dans le projet de code. C'est la raison essentielle qui peut être donnée à cet égard. Je ne puis pas en dire davantage sur cette question-là qui est extrêmement épineuse, en fait. Car la question est très reliée au problème de l'adoption lui-même, n'est-ce pas, et c'est plus un problème d'adoption en tant que tel qu'un problème de droit international privé, si je puis ainsi m'exprimer. D'où la scission qui est faite, l'adoption internationale étant traitée dans le chapitre sur l'adoption.

Mme Caron: Dans le mémoire déposé par le Barreau, on suggérait, à l'article 3069 concernant la garde de l'enfant... À l'article 3069, on dit: "La garde de l'enfant est régie par la loi de son domicile."

Le Barreau souhaitait ajouter: "ou, le cas échéant, par celle du tribunal saisi si elle est plus avantageuse pour l'enfant".

M. Pineau: Oui. M. le Président, on a maintenu simplement la loi du domicile, car on craint qu'il y ait éventuellement ce que l'on appelle communément un "forum shopping" quant à la recherche de la loi qui affecterait la garde de l'enfant. On souhaite qu'il y ait un point de rattachement extrêmement solide et le point de rattachement le plus solide, c'est incontestablement le domicile de l'enfant.

Mme Caron: Donnez-moi donc des exemples précis concernant vos craintes, là.

M. Pineau: Dans l'hypothèse où l'enfant serait domicilié avec sa mère dans un pays étranger, le père étant ici... Nous avons eu une ordonnance, nous avons... La garde de cet enfant, le problème entre les père et mère relativement à la garde de cet enfant va être réglé par la loi étrangère. Si l'on parle de résidence, lorsque l'enfant viendrait au Québec, par exemple, il pourrait être considéré comme ayant sa résidence au Québec avec éventuellement son père pendant qu'il réside ici. On veut éviter que dans le cas du père, qui se trouve au Québec, il puisse, par une action, revenir vers le tribunal québécois et remettre en cause la garde de cet enfant. C'est une question de stabilité, de stabilité de législation.

Mme Caron: Mais quand on dit: selon la solution la plus avantageuse pour un enfant, ça m'apparait davantage une garantie que simplement la garde... Si c'est régi par la loi de son domicile, ce n'est pas évident que c'est ce qui est favorable pour l'enfant. (16 heures)

M. Pineau: S'il est domicilié à tel endroit, c'est que, vraisemblablement, c'est cet endroit qui est son principal établissement. S'il est un enfant et s'il est mineur, il ne fait aucun doute qu'il a son domicile là où celui ou celle qui a la garde a son principal établissement. La résidence n'est qu'un point de passage, en définitive, n'est qu'un lieu de passage, par opposition au domicile qui, lui, est beaucoup plus fixe et stable.

Mme Caron: La règle est plus serrée, afin de protéger dans les cas d'enlèvements, par exemple. C'est ce qu'on était en train de me souligner tantôt.

M. Pineau: Entre autres choses, effectivement. C'est pour rendre la garde plus stable qu'elle ne pourrait l'être si on permettait à plusieurs lois de traiter de ce même sujet. Si je fais un parallèle avec le domicile des enfants, dans le cadre du chapitre sur le domicile du projet, je me réfère à l'article 80 où il est bien dit que le mineur non émancipé a son domicile chez son tuteur, c'est-à-dire son père et sa mère, et lorsque les père et mère exercent la tutelle et n'ont pas de domicile commun, le mineur est présumé domicilié chez celui de ses parents avec lequel il réside habituellement. Alors, c'est bien là qu'il a son domicile et c'est la loi de ce pays qui doit régir les problèmes de garde, qui doit gouverner les problèmes de garde.

Mme Caron: À cet article 80, on ajoute aussi, après: "à moins que le tribunal n'ait autrement fixé".

M. Pineau: À moins que le tribunal en décide autrement.

Mme Caron: Les articles 75 à 83 sont toujours suspendus, par exemple.

Le Président (M. Lafrance): Merci, Me Pineau.

Mme Caron: Je vous remercie beaucoup. De l'obligation alimentaire

Le Président (M. Lafrance): Les articles 3067, 3068 et 3069 sont donc adoptés tels quels. J'appelle maintenant les articles qui touchent la question de l'obligation alimentaire, soit les articles 3070, 3071 et 3072.

M. Kehoe: Encore une fois, M. le Président, il n'y a pas d'amendement.

Le Président (M. Lafrance): Aucun amendement. Merci, M. le député de Chapleau. Est-ce qu'il y a des membres de la commission qui aimeraient soulever des commentaires touchant ces trois articles?

Mme Caron: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Lafrance): Oui, Mme la députée de Terrebonne.

Mme Caron: Est-ce qu'on pourrait avoir quelques explications sur l'article 3071, puisqu'on me dit que ce serait une exception à la règle générale qui est définie à 3070?

M. Pineau: "La créance alimentaire d'un collatéral ou d'un allié est irrecevable si, selon la loi de son domicile, il n'existe pour le débiteur aucune obligation alimentaire à l'égard du demandeur." Je prendrai un exemple, si vous le voulez bien, M. le Président. En droit français, des beaux-parents ont droit à une pension de leur gendre ou bru, alors qu'en droit québécois, depuis 1982, cette obligation alimentaire a disparu. Donc, des beaux-parents français qui demanderaient à leur gendre ou bru domicilié ici une pension alimentaire se la verraient refuser, étant donné que dans le droit québécois, le débiteur alimentaire n'a pas l'obligation alimentaire à l'égard de ses beaux-parents.

Mme Caron: Comme c'est clair avec un exemple, hein? C'est toujours plus précis.

M. Pineau: Tout dépend de l'exemple.

Mme Caron: J'apprécie beaucoup vos explications.

Le Président (M. Lafrance): Oui, Mme la députée de Terrebonne.

Mme Caron: Oui. À l'article 3070, c'est, en fait, une règle de protection. Mais si on regarde la réalité actuelle, ça n'apporte pas d'amélioration. C'est un droit reconnu mais, au niveau de la pratique, ça ne donne pas un meilleur mode de fonctionnement pour aller récupérer l'obligation alimentaire. On reconnaît le droit. On sait tous les problèmes qui existent à l'heure actuelle concernant l'obligation alimentaire. Je sais qu'on n'est pas dans les règles d'application, mais le principe est reconnu. C'est donc une protection.

M. Pineau: On protège le créancier. C'est ça.

Mme Caron: Et à partir de cette protection-là, est-ce que ça pourrait inspirer certaine

législation qui serait plus adaptée?

M. Pineau: Est-ce que ça aurait pour but de...

Mme Caron: Est-ce que ça pourrait être suivi par certaine législation qui apporterait une amélioration au niveau du système de l'obligation alimentaire?

M. Pineau: Je ne puis répondre, M. le Président, des vertus de la législation québécoise à l'égard des futures législations étrangères.

Le Président (M. Lafrance): Oui, Me Ouel-lette.

Mme Ouellette (Monique): Merci, M. le Président. Je crois comprendre qu'à l'article 3070, c'est une mesure de protection, dans la mesure où on reconnaît le droit d'aller poursuivre le débiteur en vertu de sa loi qui serait plus favorable au créancier. Mais ça ne garantit pas nécessairement l'exécution de cette pension.

M. Pineau: Ça, c'est certain.

Mme Ouellette: Donc, le problème, en fin de compte, resterait entier tant et aussi longtemps que des provisions alimentaires sont accordées, mais qu'on n'arrive pas à les exécuter à l'intérieur du Québec ou outre frontières.

M. Pineau: C'est exact.

Le Président (M. Lafrance): Je vous remercie, Me Pineau. Les articles 3070, 3071 et 3072 sont donc adoptés tels quels.

Du statut réel

Nous en arrivons maintenant au chapitre deuxième qui touche la question Du statut réel et qui comprend les articles 3073 à 3084, inclusivement. Permettez-moi de vous lire le court texte d'introduction à ce chapitre deuxième.

Les dispositions qui composent le chapitre deuxième indiquent le système juridique compétent à résoudre les situations comportant un élément d'extranéité dans les matières qui relèvent du statut réel, soit celles qui concernent la création, la préservation et l'extinction des droits réels. Il compte deux sections, l'une établissant une disposition générale, l'autre des dispositions particulières sur les successions, les sûretés mobilières et la fiducie. Cette deuxième section s'inspire de conventions internationales récentes ainsi que de lois uniformes canadiennes qui viennent modifier la compétence de principe de la loi de la situation du bien.

J'appelle donc l'article 3073, à la section I qui traite des dispositions générales.

M. Kehoe: M. le Président, il y a un amendement à l'article 3073. À l'article 3073, l'alinéa suivant est ajouté: "Cependant, les droits réels sur les biens en transit sont régis par la loi de l'État du lieu de leur destination."

M. le Président, l'amendement proposé clarifie l'insécurité juridique quant à la loi applicable aux biens en transit. Il permet d'apporter une solution au conflit mobile en matière de droits réels et il établit une concordance avec l'article 3079. En raison de cet amendement, l'article 3073 se lirait comme suit: "Les droits réels ainsi que leur publicité sont régis par la loi du lieu de la situation du bien qui en fait l'objet. "Cependant, les droits réels sur les biens en transit sont régis par la loi de l'État du lieu de leur destination."

Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le député de Chapleau. Oui, Mme la députée de Terrebonne.

Mme Caron: Je pense que l'amendement qui est proposé vient répondre à une recommandation de la Chambre des notaires qui souhaitait une règle qui clarifiait l'insécurité. Donc, je pense que ça vient répondre à sa demande.

M. Kehoe: Une suggestion très positive par le Barreau, une autre suggestion qu'on a décidé...

Mme Caron: La Chambre des notaires.

M. Kehoe: De la Chambre des notaires, excusez-moi.

Mme Caron: De toute façon, les deux corporations présentent d'excellentes suggestions.

M. Kehoe: Voilà!

Des successions

Le Président (M. Lafrance): Merci. Donc, l'article 3073 est adopté tel qu'amendé. J'appelle maintenant les articles contenus dans la section II, les dispositions particulières et, de façon spécifique, qui touchent les successions, soit les articles 3074 à 3077.

M. Kehoe: Nous demandons la suspension de l'article 3076, M. le Président. Il y a un amendement à l'article 3077. L'article 3077 est remplacé par le suivant: "Lorsque la loi régissant la succession du défunt ne pourvoit pas à ce qu'il y ait un administrateur ou un liquidateur capable d'agir au Québec, mais que les héritiers ont des droits à y exercer ou que certains biens de la succession s'y trouvent, il peut lui en être nommé un suivant la loi du Québec."

M. le Président, l'amendement proposé vise

à supprimer la référence au domicile du défunt à l'étranger. C'est, en effet, la loi successorale qui justifie la nomination et non pas la situation du domicile du défunt. En raison de cet amendement, l'article 3077 se lirait comme suit: "Lorsque la loi régissant la succession du défunt ne prévoit pas...

Une voix: Ne pourvoit pas.

M. Kehoe: ...ne pourvoit pas à ce qu'il y ait un administrateur ou un liquidateur capable d'agir au Québec, mais que les héritiers ont des droits à y exercer et que certains biens de la succession...

Une voix: Ou que.

M. Kehoe: ...ou que certains biens de la succession s'y trouvent, il peut lui en être nommé un suivant la loi du Québec."

Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le député de Chapfeau. Est-ce qu'if y aurait des commentaires touchant ces articles 3074 à 3077 inclusivement? En vous rappelant que l'article 3076 a été laissé en suspens. Oui, Mme la députée de Terrebonne.

Mme Caron: Oui, M. le Président. Je sais qu'il existe, la Chambre des notaires l'avait soulevé et il y a plusieurs personnes qui partagent cette théorie à l'effet que, par rapport au principe de l'unité par rapport à la succession - et je sais que ce principe existe - alors, j'aimerais peut-être vous entendre sur ce sujet qui est extrêmement important.

M. Kehoe: Encore une fois, professeur Pineau, s'il vous plaît. (16 h 15)

Le Président (M. Lafrance): Oui, Me Pineau.

M. Pineau: Merci, M. le Président. L'article 3074 propose le droit actuel, mais le principe de l'unité de succession est prôné par certains et dans certains États, et il semblerait que les conventions internationales ont tendance à aller dans ce sens. Effectivement, la Convention de La Haye de 1989 sur la loi applicable aux successions à cause de mort va dans le sens de l'unité. Cependant, cette convention n'est pas en vigueur. Elle a été signée seulement par deux Etats, la Suisse et l'Argentine, et elle est le résultat d'abondantes discussions au sein de la conférence internationale.

Chacun des systèmes, le système actuel et le système proposé, ont leurs avantages et leurs inconvénients. Nous ne sommes peut-être pas encore en mesure de percevoir très nettement tous les avantages du principe de l'unité de la succession, mais nous sommes en mesure, en revanche, d'en voir certains inconvénients. Je vais, si vous permettez, M. le Président, donner un exemple. Une personne décède ici, a des biens ici, mais a aussi des biens à l'étranger, et notamment des immeubles à l'étranger. Selon l'article proposé, les successions portant sur les meubles sont régies par la loi du dernier domicile du défunt, donc, ce serait, quant aux meubles, la loi québécoise, et celles portant sur des immeubles sont régies par la loi du lieu de la situation, en espèce, la loi étrangère.

Dans l'hypothèse où il y aurait unité de succession et, donc, application de la loi québécoise, il y aurait sans aucun doute des difficultés lorsqu'il s'agirait d'appliquer la loi québécoise à des biens immobiliers situés à l'étranger. J'imagine difficilement, si, par exemple, je suis copropriétaire indivis d'un immeuble à l'étranger, que mes copropriétaires acceptent l'application de la loi québécoise et, de toute façon, j'aurais sans aucun doute des difficultés à faire exécuter le jugement que je pourrais obtenir du tribunal québécois. J'aurais de la difficulté à le faire exécuter en France, car sans aucun doute le tribunal français appliquerait la foi de la situation des immeubles.

Alors, voilà un exemple de difficultés auxquelles nous pouvons nous heurter en adoptant le principe de l'unité de la succession.

Mme Caron: Ceux qui défendent ce principe disent qu'il apporte plus de protection. Comment peut-on dire qu'il apporterait plus de protection?

M. Pineau: M. le Président, véritablement, je ne vois pas comment il peut apporter plus de protection. À qui? Peut-être plus de protection aux créanciers qui se trouvent ici. Mais là encore, ils risquent d'avoir des problèmes d'exécution à l'étranger. Je ne vois pas très bien. Il y a sans doute des avantages. Il est sans doute, a priori, plus facile de régler une succession en appliquant une seule loi plutôt qu'en appliquant plusieurs lois. Mais des mesures de protection d'ordre familial, comme cela était avancé, je ne vois véritablement pas comment on peut tirer du principe de l'unité de succession de pareilles conséquences, car les mesures d'ordre familial, il y en a maintenant dans la plupart des pays étrangers, n'est-ce pas, et notamment en Europe, et je ne vois pas comment ça pourrait jouer dans ce contexte-là par le biais de l'adoption du principe de l'unité de succession.

Le Président (M. Lafrance): Me OueJlette.

Mme Ouellette: Merci, M. le Président. Je crois comprendre que, quand on essaie d'imaginer des exemples sur le principe de l'unité relativement à la protection de la famille, par hypothèse, on se rend compte que dans certaines circonstances, peut-être qu'effectivement la famille ou le conjoint pourrait être protégé, mais on peut trouver tout autant d'exemples qui

illustrent que la loi de l'unité de succession désavantagerait aussi le conjoint ou la famille. J'ai compris ça, je crois.

Le Président (M. Lafrance): Mme la députée de Terrebonne?

Mme Caron: Oui, toujours sur le même sujet. Lorsque vous avez mentionné tantôt qu'il y a une convention internationale, finalement, qui n'est pas en application, mais qui a été signée par la Suisse concernant ce principe de l'unité de succession, et puisque, en début d'étude de ce dixième livre, on nous a mentionné qu'on s'était inspiré beaucoup de la Suisse, pourquoi n'a-t-on pas été jusqu'à suivre cette inspiration sur un principe aussi fondamental?

M. Pineau: On peut répondre à cela, M. le Président, qu'on s'est inspiré de la loi suisse, mais on n'a pas copié entièrement la loi suisse. Et ce n'est pas le seul point sur lequel le projet n'a pas suivi la loi suisse. Il y a cependant, dans l'alinéa 2 de 3074, une ouverture: Une personne peut désigner, par testament, la loi applicable à sa succession. Et donc, une loi unique, n'est-ce pas, que sa succession soit mobilière ou immobilière. Cette possibilité, cependant, est assortie de certaines conditions, à condition que cette loi soit celle de l'État de sa nationalité ou de son domicile au moment où il a désigné cette loi, ou la loi de son domicile au moment de son décès, ou encore la loi de la situation d'un immeuble qu'elle possède, mais uniquement relativement à cet immeuble. Donc, c'est une ouverture sur la possibilité d'avoir une loi unique régissant l'entière succession. Je crois que nous pouvons dire que, dans l'article 3074, on fait preuve d'une certaine prudence à l'égard de ce principe qui est en voie d'adoption mais qui a de la difficulté à se faire adopter, en définitive.

Le Président (M. Lafrance): Me Ouellette?

Mme Ouellette: M. le Président, en définitive, si jamais cette convention internationale ralliait énormément de pays, le Québec pourrait toujours changer ses dispositions et admettre le principe de l'unité, j'imagine?

M. Rémillard: Ça devient la règle internationale, oui.

M. Pineau: Ces textes ne sont pas figés, n'est-ce pas? Et, effectivement, peut-être est-il plus prudent de voir ce que donneront ces textes internationaux lorsqu'ils seront appliqués avant de prendre la décision de les adopter. Peut-être un autre élément, M. le Président, je l'ai dit ce matin, au Québec, on n'a pas une tradition de droit international privé très ancienne, de sorte qu'il est peut-être extrêmement prudent de ne pas être trop avant-gardiste et ne pas aller de l'avant avant même l'application des conventions internationales.

Le Président (M. Lafrance): Alors, si j'ai bien compris, le nouvel Institut québécois de réforme du droit en serait saisi?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Rémillard: Et voilà, M. le Président. Je souligne, M. le Président, en cette occasion, que la semaine prochaine, nous serons à la deuxième lecture, la discussion du principe de ce projet de loi.

Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Il y avait un commentaire supplémentaire, Me Ouellette?

Mme Ouellette: Oui, M. le Président. Je me posais la question à l'effet de savoir si une protection de la famille, comme le principe de l'unité semble vouloir l'établir, n'amènerait pas un amendement au chapitre des successions plutôt qu'au chapitre du D.I.P.?

M. Rémillard: On pourra voir à ce moment-là, je pense bien, M. le Président. Peut-être qu'il faudrait l'évaluer à ce moment-là, peut-être sur une succession.

Mme Caron: L'article 3075, M. le Président.

Le Président (M. Lafrance): Oui, Mme la députée de Terrebonne.

Mme Caron: Je regardais les commentaires du Barreau sur cet article. On nous dit: Un droit de nature successorale ne vise certainement pas les nouvelles dispositions sur le patrimoine familial, mais vise certains régimes tels que la réserve héréditaire. Les dispositions de la loi 146 pourraient-elles toutefois être comprises dans l'expression "régimes successoraux particuliers" auxquels certains biens sont soumis par la loi? Qu'arriverait-il si la loi du domicile était, par exemple, la loi française, qui comporte une réserve héréditaire en faveur des enfants, et que le testateur désignait la loi belge qui en comporte une, mais à l'égard du conjoint uniquement?

M. Rémillard: M. Pineau va répondre.

Le Président (M. Lafrance): Oui. Merci, M. le ministre. Alors, Me Pineau.

M. Pineau: M. le Président, je peux tout d'abord répondre que le patrimoine familial ne relève absolument pas du droit successoral. C'est clair, nous l'avons dit ce matin et répété cet après-midi, ce serait une question d'effet du mariage. Donc, ça n'a rien à voir avec la succès-

sion, c'est à la dissolution du mariage que se pose le problème. Ça n'a rien à voir avec la succession, même si le mariage est rompu par le décès de l'une des parties. Alors ça, c'est une question.

Qu'arriverait-il si la loi du domicile était la loi française qui comporte une réserve héréditaire en faveur des enfants, et que le testateur désignait la loi belge qui comporte une réserve, mais favorable uniquement au conjoint? Alors, dans ce cas-là, cette désignation serait sans effet puisqu'elle porterait atteinte à la réserve héréditaire qui est prévue par la loi française. C'est véritablement l'exemple qui est donné. La question posée est véritablement un exemple de la situation que règle le deuxième alinéa de 3075.

La désignation de la loi belge, qui porte atteinte, par exemple, à la réserve héréditaire, pourrait être mise de côté dans ce contexte-là si on considère qu'en raison de la destination économique, familiale ou sociale, elle ne doit pas être appliquée.

Mme Caron: Qui priverait-on? Le conjoint ou les enfants? (16 h 30)

M. Pineau: Alors, si cela vient devant un tribunal français, j'imagine que le tribunal français préférera la réserve héréditaire à la réserve destinée au conjoint. Si ça vient devant un tribunal belge, vraisemblablement, ce sera l'inverse.

Le Président (M. Lafrance): Donc, s'il n'y a pas de commentaire additionnel touchant cette section des successions, l'article 3074 est adopté tel quel. L'article 3075 est adopté tel quel. L'article 3076 est laissé en suspens et l'article 3077est adopté tel qu'amendé.

Des sûreté» mobilières

J'aimerais maintenant appeler les articles contenus à la sous-section qui traite des sûretés mobilières, soit les articles 3078 à 3082 inclusivement. Oui, alors, on m'indique qu'il y aurait des amendements touchant ces articles et que M. le député de Prévost serait disposé à nous lire ces amendements.

M. Rémillard: II y a quatre amendements, M. le Président.

Le Président (M. Lafrance): M. le député de Prévost, ou de Chapleau.

M. Forget: Voici, l'article 3077 est remplacé par le suivant.

Le Président (M. Lafrance): Pardon, non, 3078 à 3082. Moi, j'ai ici trois amendements: 3080, 3081 et 3082. Vous aviez dit trois ou quatre amendements, M. le ministre?

M. Rémillard: J'ai dit quatre, M. le Président. C'est ce qu'on m'a indiqué. On va faire les vérifications.

M. Forget: M. le Président, M. le député de Chapleau a les documents.

Le Président (M. Lafrance): Oui, ça va. M. le député de Chapleau, est-ce que c'est trois ou quatre amendements?

M. Kehoe: C'est ça qu'on est en train de vérifier.

M. Rémillard: Alors, M. le Président, il y a eu erreur. C'est trois amendements.

M. Kehoe: Le premier amendement, à l'article 3080: 1° aux deuxième et troisième lignes du premier alinéa, les mots "lieu de sa nouvelle situation" sont remplacés par le mot "Québec"; 2° aux troisième et quatrième lignes du premier alinéa, les mots "la publication en ce lieu est effectuée" sont remplacés par les mots "elle est publiée au Québec"; 3° à la fin du 2°, les mots "lieu de sa nouvelle destination" sont remplacés par le mot "Québec"; 4° à la fin du 3°, les mots "du lieu de la nouvelle situation du bien" sont remplacés par les mots "que le bien est parvenu au Québec".

M. le Président, les amendements proposés visent à unilatéraliser l'article de façon, d'une part, à le rendre plus conforme aux sources qui l'ont inspiré et, d'autre part, à limiter le champ d'application de l'exception que cet article établit à la règle de l'article 3078, deuxième paragraphe. En raison de ces amendements, l'article 3080 se lirait comme suit: "La sûreté qui a été publiée selon la loi de l'État où le bien était situé au moment de sa constitution sera réputée publiée au Québec, à compter de la première publication, si elle est publiée au Québec avant que se réalise la première des éventualités suivantes: "1° La publicité dans l'État où était situé le bien lors de la constitution de la sûreté cesse d'avoir effet; "2° Un délai de trente jours s'est écoulé depuis le moment où le bien est parvenu au Québec, "3° Un délai de quinze jours s'est écoulé depuis le moment où le créancier a été avisé que le bien est parvenu au Québec;

Toutefois, la sûreté n'est pas opposable à l'acheteur qui a acquis le bien dans le cours des activités du constituant."

M. Rémillard: M. le Président, dans l'article 3081, nous proposons les amendements suivants: 1° au début du premier alinéa, les mots "La sûreté" sont remplacés par les mots "La validité

d'une sûreté"; 2° après le premier alinéa, l'alinéa suivant est inséré: "La publicité et ses effets sont régis par la loi de l'État du domicile du constituant au moment où elle est effectuée."

M. le Président, les amendements proposés visent à distinguer la validité de la sûreté de sa publicité et de ses effets, conformément à l'article 3078 et aux sources qui l'ont inspiré. En raison de ces amendements, l'article 3081 se lirait comme suit: "La validité d'une sûreté grevant un meuble corporel ordinairement utilisé dans plus d'un État ou celle grevant un meuble incorporel est régie par la loi de l'État où est domicilié le constituant au moment de sa constitution. "La publicité et ses effets sont régis par la loi de l'État du domicile du constituant au moment où elle est effectuée. "La présente disposition ne s'applique ni à la sûreté grevant une créance ou un meuble incorporel constaté par un titre au porteur ni à celle publiée par la détention du titre qu'exerce le créancier."

Dans l'article 3082, nous proposons les amendements suivants: 1° à la troisième ligne du premier alinéa, les mots "lieu du nouveau domicile du constituant" sont remplacés par le mot "Québec"; 2° à la quatrième ligne du premier alinéa, les mots "au Québec" sont insérés avant les mots "avant que se réalise"; 3° au 2°, les mots "au Québec" sont insérés après le mot "domicile"; 4° au 3°, les mots "au Québec" sont insérés après le mot "constituant".

L'amendement proposé vise à unilatéraliser l'article de façon, d'une part, à le rendre plus conforme aux sources qui l'ont inspiré et, d'autre part, à limiter le champ d'application de l'exemption que cet article établit à la règle de l'article 3081. J'ai dit "l'exemption", M. le Président, et c'est "l'exception". Alors, le champ d'application de l'exception que cet article établit à la règle de l'article 3081. En raison de ces amendements, l'article 3082 se lirait comme suit: "La sûreté régie, au moment de sa constitution, par la loi de l'État du domicile du constituant et qui a été publiée, sera réputée publiée au Québec, à compter de la première publication, si elle est publiée au Québec avant que se réalise la première des éventualités suivantes: "1° La publicité dans l'État de l'ancien domicile du constituant cesse d'avoir effet; "2° Un délai de trente jours s'est écoulé depuis le moment où le constituant a établi son nouveau domicile au Québec; "3° Un délai de quinze jours s'est écoulé depuis que le créancier a été avisé du nouveau domicile du constituant au Québec. 'Toutefois, la sûreté n'est pas opposable à l'acheteur qui a acquis le bien dans le cours des activités du constituant."

Le Président (M. Lafrance): Alors, merci, M. le ministre. Alors, est-ce qu'il y aurait des commentaires touchant ces articles 3078 à 3082 inclusivement?

Mme Harel: M. le Président.

Le Président (M. Lafrance): Oui, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Harel: Concernant 3081 et 3082, je crois que - en fait, c'est la même chose pour 3080 - c'est présumer de ce qui va résulter de l'échange que nous n'avons pas encore eu sur l'hypothèque mobilière.

Le Président (M. Lafrance): M. le ministre.

M. Rémillard: M. le Président, évidemment, ces articles ne touchent pas seulement l'hypothèque mobilière. Ça touche d'autres sûretés aussi. Maintenant, il se peut qu'il y ait, de fait, des incidences sur l'hypothèque mobilière. Alors, ce qu'on peut faire, on peut suspendre ou bien, si on veut les adopter et revenir ensuite sur ces articles selon la décision qu'on aura prise, les deux techniques, pour moi, sont acceptables.

Mme Harel: Voyons voir, d'abord, alors, 3080. Ça dépend. Si on les suspend, on reviendra au moment où nous ferons l'échange sur l'hypothèque mobilière. Il faudrait revenir là-dessus. Ou, là, on peut le faire tout de suite, mais c'est que Me Frenette n'est pas là, alors il faudrait voir les effets que ça a, 3080, les effets que ça peut avoir sur l'hypothèque mobilière.

M. Rémillard: Et si on les fait maintenant, on peut en prendre note et, quand on va faire l'hypothèque mobilière, il faudra vérifier ensuite, selon la décision que nous allons prendre en fonction de tous les articles. On peut prendre note de ces trois articles, ce qui nous permettrait de faire ces articles et de ne pas les mettre en suspens officiellement.

Mme Harel: C'est donc dire qu'on va devoir, à ce moment-là, interroger le ministre sur l'effet de ces dispositions. Alors, peut-être pouvons-nous commencer par 3078 quant au principe de la validité d'une sûreté mobilière. Alors, c'est de droit nouveau. Tout ça est de droit nouveau. Peut-être que le professeur Pineau pourrait, quant à cette section sur les sûretés mobilières, nous introduire, finalement, les dispositions de droit nouveau.

Le Président (M. Lafrance): Me Pineau.

M. Pineau: Merci, M. le Président. Quant à 3078, le premier alinéa traite de la validité de la sûreté et, à cet égard, cette question est régie par la loi de l'État où se situe le bien au

moment même de la constitution de cette sûreté. Et le deuxième alinéa vise la loi applicable quant à la publicité et aux effets de cette publicité. Quant à cette publicité, aux effets de la publicité, c'est la loi de l'État de la situation actuelle du bien grevé qui s'applique.

Mme Harel: La validité, c'est donc la loi de...

M. Pineau: De L'État où se trouve le bien...

Mme Harel: Au moment de la création de la sûreté.

M. Pineau: ...au moment de la création de la sûreté. Mais la publicité et les effets de la publicité, c'est la loi de l'État où est situé le bien grevé. Si, donc, le bien se déplace...

Mme Harel: Est-ce que ça veut signifier par là qu'une sûreté mobilière serait valide, d'après la loi, dépendamment de la situation du bien au moment où la sûreté est créée?

M. Pineau: Si une sûreté est consentie en Ontario, elle est constituée en Ontario; quant à sa validité, c'est la loi ontarienne qui s'applique. Mais si ce bien se déplace et que la publicité est faite, quant à cette sûreté, au Québec, c'est la loi québécoise qui s'appliquera quant à la publicité et aux effets que produit la publicité.

Mme Harel: Clairement, par exemple, si le Québec ne retenait pas l'hypothèse d'une hypothèque mobilière, elle pourrait être, donc, validement constituée en Ontario. Serait-elle, à ce moment-là, enregistrée au Québec?

M. Pineau: Non, pas nécessairement. Mme Harel: Dépendamment du... Non? M. Pineau: Elle serait...

M. Rémillard: Me permettez-vous simplement une remarque? Lorsqu'on parle d'une hypothèque mobilière, évidemment, ce qui existe présentement va continuer, c'est-à-dire que tout ce qui regarde les marchandises...

Mme Harel: Les cessions, les biens en stock.

M. Rémillard: ..les cessions, le nantissement commercial, etc. Là, évidemment, quand on parle d'hypothèque mobilière, il faut bien comprendre que ça existe aussi du côté commercial.

Mme Harel: Actuellement, ce sont simplement les entreprises qui peuvent y avoir accès.

M. Rémillard: Voilà. Et du côté du consommateur, il y a le gage, mais ce n'est pas vrai- ment une hypothèque mobilière parce qu'on est dépossédé. Alors, c'est de cette question-là qu'on aura à discuter, mais il reste que tous ces articles s'appliquent aussi pour l'aspect commercial.

Mme Harel: C'est pour l'aspect commercial. On va les regarder dans cette optique-là, parce que pour l'entreprise, de toute façon, il y aura cette hypothèque mobilière. Alors, dans ces circonstances-là, il y aura des sûretés mobilières au droit international privé.

Le Président (M. Lafrance): Merci. Donc, l'article 3078 et l'article 3079, ces deux articles, sont adoptés tel quels. Les articles...

Mme Harel: Attendez, M. le Président.

Le Président (M. Lafrance): Oui.

(16 h 45)

Mme Harel: On en était à 3078. À 3080, un amendement avait été apporté.

Le Président (M. Lafrance): C'est exact, oui.

Mme Harel: Cet amendement, peut-on nous en expliquer la portée? J'ai beau lire le commentaire, on dit que les amendements proposés visent à unilatéraliser l'article - ça ne m'appa-raît pas évident - de façon, d'une part, à le rendre plus conforme aux sources qui l'ont inspiré. Ce sont des sources, je crois, de la Conférence sur l'uniformisation des droits au Canada. C'est bien ça?

M. Pineau: L'article 3080, tel qu'il était proposé, était - comment dirais-je - neutre, en ce sens qu'il y avait bilatéralisation. La sûreté qui a été publiée selon la loi de l'État où le bien était situé, etc. sera publiée au lieu de sa nouvelle situation. Donc, la règle était...

Mme Harel: La réciprocité.

M. Pineau: La réciprocité. La règle de la réciprocité - merci - était admise, tandis que l'amendement vient resserrer cela et enlève précisément cette bilatéralisation pour retenir uniquement l'aspect, le côté unilatéral de la règle. D'où l'amendement: sera réputée publiée au Québec si elle est publiée au Québec, etc.

Mme Harel: On me fait valoir que cet amendement viendrait répondre, en partie, aux commentaires publiés par la Chambre des notaires?

M. Pineau: Oui, c'est cela.

Mme Harel: Et le Barreau également? Sous réserve. À 3081, doit-on comprendre que c'est un amendement de clarification, simplement?

M. Pineau: 3081 veut distinguer clairement la question de la validité d'une sûreté et la question de la publicité dans l'hypothèse où il s'agit d'un meuble corporel qui est utilisé dans plus d'un État ou dans l'hypothèse où nous avons une sûreté qui grève un meuble incorporel.

Mme Harel: Est-ce que ce serait possible de nous donner un exemple?

Le Président (M. Lafrance): Me Longtin.

Mme Longtin: Au premier alinéa, évidemment, on a précisé que l'on visait la validité de la sûreté, et le second alinéa est nouveau et vise, finalement, à le compléter. Et il se trouve à être en accord avec l'article 3078, tel qu'il a été précédemment présenté.

Mme Harel: Ah oui! Il y a des exemples dans le commentaire. Machinerie ou véhicules constituant de l'équipement commercial, agricole ou industriel. Étant donné la difficulté de déterminer le lieu de la situation de ces biens, il paraît plus commode de soumettre les sûretés qui les grèvent à la loi du domicile du constituant. Il faut donc comprendre que 3081, c'est comme une exception à la règle de 3078, mais qui est régie par les mêmes formalités. C'est ça? Et puis à 3082, l'effet de l'amendement est le même qu'à l'article 3080. C'est ce qu'il faut comprendre?

M. Pineau: Unilatéralisé.

Mme Harel: Unilatéralisé. Et à l'article 3083?

Le Président (M. Lafrance): Non, on n'est pas rendu là.

Mme Harel: Non, c'est vrai. Vous voyez, on veut aller trop vite.

De la fiducie

Le Président (M. Lafrance): Donc, les articles 3080, 3081 et 3082 sont adoptés tels qu'amendés. Nous en arrivons effectivement aux articles 3083 et 3084 qui traitent de la fiducie.

M. Rémillard: M. le Président, il y a deux amendements. À l'article 3083, le troisième...

Mme Harel: Ha, ha, ha! Deux articles, deux amendements, habituellement. Parfois, il y a deux articles, trois amendements. Ça prouve qu'il y a du bon travail qui se fait en séance de travail.

M. Rémillard: Nous visons la perfection, et nous l'aurons.

Mme Harel: Ha, ha, ha!

M. Rémillard: À l'article 3083, le troisième alinéa suivant est ajouté après le second: "Un élément de la fiducie susceptible d'être isolé, notamment son administration, peut être régi par une loi distincte."

M. le Président, l'amendement proposé vise à déplacer le premier alinéa de l'article 3084 à l'article 3083, de manière à regrouper plus adéquatement les différentes règles contenues dans ces dispositions. En raison de cet amendement, l'article 3083 se lirait comme suit: "À défaut d'une loi désignée expressément dans l'acte ou dont la désignation résulte d'une façon certaine des dispositions de cet acte, ou si la loi désignée n'admet pas ce choix, la loi applicable à la fiducie créée par acte juridique est celle qui présente avec la fiducie les liens les plus étroits. "Afin de déterminer la loi applicable, il est tenu compte, notamment, du lieu où la fiducie est administrée, de la situation des biens, de la résidence ou de l'établissement du fiduciaire, de la finalité de la fiducie et des lieux où celle-ci s'accomplit. "Un élément de la fiducie susceptible d'être isolé, notamment son administration, peut être régi par une loi distincte."

L'article 3084 est modifié de la façon suivante: 1° le premier alinéa est supprimé; 2° au deuxième alinéa, le point-virgule ";" est remplacé par un point "."; 3° le deuxième alinéa est scindé en deux alinéas dont le premier se termine par les mots "son administration"; 4° à la fin du troisième alinéa, les mots ", par la loi d'un autre État" sont ajoutés après le mot "isolé".

M. le Président, l'amendement proposé vise à simplifier la formulation de l'article et à en faciliter la compréhension. En raison de ces amendements, l'article se lirait comme suit: "La loi qui régit la fiducie détermine si la question soumise concerne sa validité ou son administration. "Cette loi détermine également la possibilité et les conditions de remplacement par une autre loi, ainsi que du remplacement de la loi applicable à un élément de la fiducie susceptible d'être isolé, par la loi d'un autre État."

Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Est-ce qu'il y aurait des commentaires touchant ces deux articles, 3083 et 3084 tels qu'amendés? Oui, Mme la députée de Terrebonne.

Mme Caron: Peut-être juste au niveau de la forme, M. le Président. À l'article 3083, le dernier alinéa, dans le texte amendé, il faudrait peut-être enlever le féminin à "régi". On ne le retrouvait pas en haut.

M. Rémillard: Encore une fois, la députée

de Terrebonne nous ramène à la raison.

Mme Harel: À l'article 3083, le commentaire nous dit que cet article s'inspire de la Convention de La Haye. Dans le mémoire de la Chambre des notaires, on se demande s'il ne vaudrait pas mieux, comme le fait la Convention de La Haye, utiliser le concept de "trust" qui serait plus large que celui de "fiducie". J'imagine que ça a été apprécié. Alors, pouvons-nous connaître les raisons qui vous ont amenés à maintenir le concept de fiducie?

M. Pineau: M. le Président, le Livre sur le droit international privé est un ensemble de règles québécoises. Or, dans le projet de Code, il y a un chapitre sur la fiducie et non pas sur le trust. Donc, il est tout à fait légitime de traiter, dans les règles de droit international privé, de fiducie et non point de trust.

Mme Harel: Quant à cet autre commentaire que l'on retrouve dans le mémoire de la Chambre des notaires concernant 3084, en fait, 3084 réunit, dans un seul article, plusieurs dispositions de la Convention de La Haye. Je vais lire au mot, là, le mémoire: "Notamment le dépeçage - article 9 - qui correspond au premier alinéa de l'article 3084. Le champ d'application de la loi applicable - article 8 - et la substitution de la loi applicable - article 10 - que l'on retrouve au deuxième alinéa de l'article 3084, dans un jargon incompréhensible. Nous sommes d'avis que l'article 3084 devrait soit être remplacé par trois articles, soit contenir trois alinéas qui reproduiraient l'essence des articles 8, 9 et 10 de la Convention de La Haye." Est-ce que ça a été apprécié, ça aussi?

M. Pineau: M. le Président, le premier alinéa de 3084 a été déplacé.

Mme Harel: Oui, par amendement.

M. Pineau: II se trouve actuellement au troisième alinéa...

Mme Harel: C'est ça.

M. Pineau: ...de l'article 3083.

Mme Harel: D'accord. Le deuxième alinéa...

M. Pineau: Pour ce qui est du deuxième alinéa, la loi qui régit la fiducie détermine si la question soumise concerne sa validité ou son administration. Quelle est la question? Est-ce du jargon?

Mme Harel: Non. Est-ce que ça aurait été plus adéquat, si vous voulez, de le faire en deux alinéas, étant donné, déjà, que le premier est déplacé dans l'amendement? Finalement, quant aux dispositions que l'on retrouve au deuxième alinéa, les dispositions de la Convention de La Haye qui portent sur le champ d'application de la loi applicable et la substitution de la loi applicable, en fait, qui seraient les articles 8 et 10 que l'on retrouve au deuxième alinéa, est-ce qu'il ne serait pas souhaitable que la formulation les prévoie en deux alinéas plutôt qu'en un seul, pour la bonne compréhension?

Le Président (M. Lafrance): Me Pineau.

M. Pineau: M. le Président, nous avons essayé d'éviter les enumerations que l'on trouve dans la Convention. Si je me réfère à l'article 8 de la Convention, nous avons 10 paragraphes. Nous avons essayé d'en faire moins et de regrouper, parce qu'on parle déjà, ailleurs, de la validité et de l'administration de la fiducie.

Mme Harel: Donc, le premier alinéa de 3084 va devenir le troisième alinéa de 3083. À 3083, peut-on savoir ce que vous entendez par l'expression "si la loi désignée n'admet pas ce choix"? Au premier alinéa, on lit ceci: "À défaut d'une loi désignée expressément dans l'acte ou dont la désignation résulte d'une façon certaine des dispositions de cet acte, ou si la loi désignée n'admet pas ce choix...

M. Pineau: Dans le cas, M. le Président, où serait désignée comme loi applicable une loi, par exemple, la loi française qui ne connaît pas de fiducie. Alors, dans ce cas, on applique la règle générale; la loi applicable serait celle qui présenterait, avec la fiducie, les liens les plus étroits.

Mme Harel: Alors, si la loi désignée par les parties n'admet pas...

M. Pineau: Ne connaît pas la fiducie.

Mme Harel: N'admet pas ce choix, donc ça signifie une... Si la fiducie n'est pas applicable dans la loi désignée, c'est ça?

M. Pineau: C'est ça. Si la loi désignée ne connaît pas.

Mme Harel: D'accord.

Le Président (M. Lafrance): Ça va. Donc, les articles 3083 et 3084 sont adoptés tels qu'amendés.

À ce stade-ci, avec votre consentement, j'aimerais proposer une pause humanitaire d'une dizaine de minutes. Non?

Une voix: Mon Dieu, ce serait donc humanitaire!

Mme Harel: Oui, oui. Mais le jeudi, je considère que c'est le moment le plus difficile de

la semaine à cette heure-ci.

Le Président (M. Lafrance): Surtout quand il commence à faire noir.

Mme Harel: Ha, ha, ha! Après trois mois d'expérience, on peut se dire les pires ou les meilleurs moments.

M. Kehoe: Après une longue journée comme ça, c'est vrai, hein?

Mme Harel: C'est ça.

Le Président (M. Lafrance): Alors, je suspends nos travaux pour 10 minutes.

(Suspension de la séance à 17 h 2)

(Reprise à 17 h 17)

Le Président (M. Lafrance): Veuillez prendre vos places, s'il vous plaît! Nous allons reprendre nos travaux.

Du statut des obligations

Nous en étions donc au chapitre troisième qui traite du statut des obligations. Permettez-moi de vous lire le texte d'introduction, texte qui touche les articles 3085 à 3108.

Les dispositions qui composent le chapitre troisième indiquent le système juridique compétent à résoudre les situations comportant un élément d'extranéité dans les matières qui relèvent du statut des obligations. Il compte deux sections, l'une établissant des dispositions générales sur la forme et le fond des actes juridiques, l'autre, des dispositions particulières sur la vente, le mandat, les contrats de consommation, de travail et d'assurances, la cession de créance, la convention d'arbitrage, le régime matrimonial, les quasi-contrats, la responsabilité civile, la preuve et la prescription.

La loi de l'autonomie des parties est consacrée comme principe. En l'absence de désignation, la loi applicable est celle de l'État qui, compte tenu de la nature de l'acte et des circonstances, présente avec l'acte les liens les plus étroits. Ceux-ci sont présumés exister avec l'État dans lequel la partie qui doit fournir la prestation caractéristique de l'acte a sa résidence. Cette règle est inspirée du droit suisse. La prestation caractéristique est l'obligation qui caractérise le mieux l'ensemble des différentes opérations que suppose un acte juridique. Il s'agit là d'un changement d'orientation notable par rapport à l'article 8 du Code civil du Bas Canada qui, en l'absence de désignation, fait sans doute une place importante à la volonté présumée des parties découlant de la nature de l'acte ou des autres circonstances, mais retient, en principe, la loi du lieu où l'acte est passé comme critère de détermination de la loi applicable.

De la forme des actes juridiques

J'aimerais appeler les articles contenus à la section I, Dispositions générales, en particulier De la forme des actes juridiques, les articles 3085, 3086 et 3087.

M. Kehoe: II n'y a pas d'amendement, M. le Président, dans cette section.

Le Président (M. Lafrance): Aucun amendement. Merci, M. le député de Chapleau. Est-ce qu'il y aurait des commentaires touchant ces trois articles?

Mme Caron: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Lafrance): Mme la députée de Terrebonne.

Mme Caron: Peut-être une question pour clarifier, si je comprends bien l'article 3085. Par exemple, un Québécois est propriétaire d'un condo en Floride. Il loue son condo à un autre Québécois. L'acte étant passé aux États-Unis, c'est cette loi-là qui s'applique. C'est bien ça?

M. Pineau: La loi américaine, car c'est une loi qui touche de très près l'immeuble en question. Quant à l'article 3085, la forme d'un acte juridique est régie par la loi du lieu où il est passé. Il s'agit, à ce moment-là, de la forme solennelle ou consensuelle, n'est-ce pas, qui est régie par la loi du lieu où la convention est faite. C'est cela que vient dire l'article 3085.

Mme Caron: Donc, indépendamment de la nationalité des deux personnes concernées par l'acte?

M. Pineau: Oui. Des Québécois qui iront louer un condo, enfin un appartement, je pense qu'ils seront soumis, quant à la forme, aux lois, à la loi du lieu où cet acte est passé. S'il est passé aux États-Unis, il sera soumis, me sem- ble-t-il, à la... Tout contrat ayant pour objet un immeuble... Un instant, M. le Président.

M. Kehoe: M. le Président...

Le Président (M. Lafrance): M. le député de Chapleau.

M. Kehoe:... pendant qu'ils réfléchissent sur cette question-là, nous désirons suspendre l'article 3086 - petit s.

Le Président (M. Lafrance): 3086? M. Kehoe: Oui.

Le Président (M. Lafrance): D'accord. Me Pineau.

M. Pineau: S'il s'agit, M. le Président, d'acheter un immeuble à l'étranger, c'est le dernier alinéa qui s'appliquera, mais s'il s'agit de louer, il s'agit d'un acte juridique qui crée des droits personnels, c'est régi par la loi du lieu où il est passé, le premier alinéa.

Mme Caron: Oui, mais si un Québécois achète un immeuble aux États-Unis...

M. Pineau: Oui.

Mme Caron: ...c'est possible qu'il loue cet immeuble...

M. Pineau: Oui.

Mme Caron: ...à d'autres Québécois?

M. Pineau: Oui. J'aurais tendance à dire, M. le Président, que le contrat de louage est lié trop étroitement avec l'immeuble pour qu'il soit soumis à la loi québécoise. C'est, je pense, là, l'objet de votre question.

Mme Caron: Oui.

M. Pineau: Est-ce que ce bail pourrait être soumis à la loi de location, à la loi du Québec? Sous réserve de l'hypothèse où les parties ont désigné la loi américaine. N'est-ce pas?

Mme Caron: Au Barreau, on suggérait, si le législateur voulait garder cet article, de limiter l'application aux seuls contrats translatifs de propriété. Est-ce qu'on a examiné cette hypothèse?

M. Pineau: Oui, M. le Président. Effectivement, la question a été posée, mais il semblait que c'était tellement lié à l'immeuble lui-même qu'il y a eu des hésitations à cet égard-là. Peut-être pourrait-on...

M. Kehoe: Peut-être que ce serait mieux encore...

Mme Caron: II y aurait peut-être lieu de suspendre...

M. Kehoe: ...de suspendre aussi l'article 3085, 3085 et 3086.

Mme Caron: ...3085. Et peut-être ajouter dans les réflexions... Toujours à 3085, on nous faisait part aussi, dans le mémoire de la Chambre des notaires, de la possibilité de reconnaître le testament international, qui est maintenant reconnu; il est en vigueur en Italie, en Hongrie, aux États-Unis et dans deux provinces canadien- nes. Alors, peut-être dans les réflexions qui seront faites...

M. Kehoe: On va continuer notre réflexion, mais, à première vue, ça a été étudié et la décision a été prise, négative. L'article est suspendu, sujet à vérification.

M. le professeur Pineau, dans le même exemple de la députée de Terrebonne, admettons que deux Québécois, deux personnes du Québec louent un immeuble en Floride et que l'acte est passé ici au Québec, à ce moment-là, la loi, la forme de l'acte juridique, est-ce que c'est suivant l'endroit où est situé l'immeuble ou le fait que les deux sont du Québec?

Une voix: C'est ça qu'on devra vérifier.

M. Kehoe: Si je comprends bien, ces questions-là seront vérifiées. D'accord.

Le Président (M. Lafrance): Je vous remercie, M. le député de Chapleau.

Mme Harel: 3085 est suspendu. Mme Caron: Oui. M. Kehoe: Et 3086. Mme Harel: Et 3086.

Le Président (M. Lafrance): Est-ce qu'il y aurait des questions touchant l'article 3087? Ça va. Donc, l'article 3085 est laissé en suspens, l'article 3086...

Mme Harel: 3087, oui...

Le Président (M. Lafrance): ...est laissé en suspens et l'article 3087...

Mme Harel: 3087, M. le Président, c'est du droit actuel, ce n'est pas du droit nouveau, ça, je crois, hein?

M. Pineau: 1208, Bas Canada. Mme Harel: C'est ça.

Du fond des actes juridiques

Le Président (M. Lafrance): Donc, l'article 3087 est adopté tel quel. J'appelle maintenant les articles 3088, 3089 et 3090 qui traitent Du fond des actes juridiques.

M. Kehoe: M. le Président, il y a un amendement. À la fin du deuxième alinéa de l'article 2088, les mots...

Le Président (M. Lafrance): 3088

M. Kehoe: ...3088, "où se retrouvent tous les éléments de la situation" sont remplacés par les mots "qui s'appliquerait en l'absence de désignation".

M. le Président, l'amendement proposé vise à uniformiser la formulation de l'article avec celle de l'article 2089.

Une voix: 3089. Des voix: Ha, ha, ha!

M. Kehoe: J'ai un "bloc mental". 3089. En raison de cet amendement, l'article 3088 se lirait comme suit: "L'acte juridique, qu'il présente ou non un élément d'extranéité, est régi par la loi désignée expressément dans l'acte ou dont la désignation résulte d'une façon certaine des dispositions de cet acte. "Néanmoins, s'il ne présente aucun élément d'extranéité, il demeure soumis aux dispositions imperatives de la loi de l'État qui s'appliquerait en l'absence de désignation. "On peut désigner expressément la loi applicable à la totalité ou à une partie seulement d'un acte juridique."

Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le député de Chapleau. Je dois mentionner que vous affectez notre moral en persistant à vouloir nous reculer de 1000 articles.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Kehoe: Je vais corriger mes erreurs, M. le Président. (17 h 30)

Le Président (M. Lafrance): Alors, est-ce qu'il y aurait des commentaires touchant ces trois articles Du fond des actes juridiques?

Mme Harel: M. le Président, à l'article 3090, à la fois la Commission des services juridiques, dans son mémoire, la Chambre des notaires, le Barreau également dans son mémoire, s'interrogent sur le concept de prestation caractéristique que l'on retrouve à 3090. Par exemple, la Commission des services juridiques demande quelle partie fournit la prestation caractéristique, le locataire en payant son loyer ou le locateur en procurant la jouissance du bien loué? En l'absence de définition en droit québécois, la détermination de la prestation caractéristique donnera lieu à une insécurité juridique quant à la loi régissant les actes juridiques. Étant donné que tout ce livre Du droit international privé réfère au droit québécois, vous l'avez mentionné au moment où on examinait les questions relatives au domicile, aux successions et autres, comment peut-on expliquer qu'on introduise comme ça un concept qui n'a pas de définition?

Le Président (M. Lafrance): Oui, Me Pineau.

M. Pineau: M. le Président, cette notion de prestation caractéristique vient de la législation suisse et je dirais que c'est l'actuelle traduction de ce qu'on a connu un petit peu dans le passé dans la doctrine du centre de gravité. Jadis nous avions une règle de conflit qui était apparemment simple: on appliquait au contrat la loi du lieu de formation du contrat, et, maintenant, on est beaucoup plus nuancés et on recherche... On a recherché, selon le droit américain, le centre de gravité du contrat qui peut être situé soit au lieu de formation, soit au lieu d'exécution ou peut-être ailleurs, ailleurs encore. Et c'est cette idée de recherche du centre de gravité qui se traduit de façon peut-être plus précise ou moins imprécise par la notion de prestation caractéristique.

Alors, il est des cas où il sera relativement facile, dis-je, de déterminer quelle est la prestation caractéristique. Ce ne sera pas nécessairement toujours aussi facile. Dans le cas de la vente d'un bien, par exemple, on peut présumer que la prestation caractéristique est celle du vendeur puisqu'il a une chose, dont il était propriétaire, à livrer, n'est-ce pas? Dans le cadre d'un contrat de louage, il y a tout lieu de penser que c'est l'obligation du locateur de fournir, de procurer la jouissance paisible de la chose ou des lieux. Dans le cadre d'un contrat de donation, c'est évidemment l'obligation du donateur. Alors, c'est cela, le principe, qui permet effectivement de donner au juge une certaine latitude. Il n'y a rien de nouveau quant à la substance du droit, j'aurais tendance à dire, mais il y a ce vocabulaire qui est nouveau pour nous, mais qui n'est pas nouveau pour les internationalistes.

Mme Harel: Vous mentionniez tantôt que cette disposition s'inspirait de l'article 117, deuxième paragraphe, de la Loi fédérale suisse sur le droit international privé. C'est ce qu'il faut comprendre. C'est ça?

M. Pineau: C'est ça.

Mme Harel: Et vous nous disiez... Dans le commentaire, on retrouve des exemples qui nous amènent à préciser ce que pourrait être la prestation caractéristique des principaux contrats.

M. Pineau: C'est ça. Le contrat d'aliénation...

Mme Harel: Alors, vous avez cinq exemples. M. Pineau: C'est ça. Mme Harel: C'est ça.

M. Pineau: ...le contrat qui confère l'usage dans le louage...

Mme Harel: La prestation de service.

M. Pineau: ...la prestation de service dans le mandat, le contrat d'entreprise et...

Mme Harel: Dans le commentaire officiel qui va être déposé en mars, comme le ministre nous le signalait, en fait, qui va être déposé le printemps prochain, envisagez-vous de pouvoir, puisque ces commentaires vont avoir un caractère officiel qui leur serait conféré par le dépôt à l'Assemblée, envisagez-vous de pouvoir donner d'autres exemples pour préciser la prestation caractéristique des principaux contrats?

M. Kehoe: Oui, certainement, Mme la députée, qu'on va essayer d'être le plus complet et le plus clair possible dans les explications parce que ça va faire partie de... Les juristes, dans le futur, vont lire ces notes explicatives là. Bien sûr, on va tout faire pour les faire le plus clair possible.

Mme Harel: Clair, ça veut dire, donc, d'autres...

M. Kehoe: Clair et complet.

Mme Harel: ...des exemples portant sur d'autres contrats que les cinq contrats que l'on retrouve actuellement dans les commentaires?

M. Kehoe: Oui, si ça peut aider à clarifier et à compléter l'explication, définitivement.

Le Président (M. Lafrance): Merci pour ces clarifications.

M. Kehoe: C'est clair. Mme Harel: M. le Président...

Le Président (M. Lafrance): Oui, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Harel: ...toujours sur la même question là, l'article 3090. Dans le cas où il y aurait de nombreux débiteurs, à ce moment-là, comment l'article 3090 trouve-t-il matière à application?

M. Pineau: M. le Président, ce sont les circonstances de l'espèce qui vont dicter au juge sa décision. Il va effectivement rechercher quelle est la loi qui a le lien le plus étroit avec le problème qui lui est soumis.

Mme Harel: Ça va être laissé à l'appréciation des tribunaux.

M. Pineau: C'est ce qui existe aujourd'hui.

Le Président (M. Lafrance): Oui, Mme la députée de Terrebonne.

Mme Caron: Oui, M. le Président. J'aurais quelques questions concernant l'article 3088.

Le Président (M. Lafrance): Tel qu'amendé?

Mme Caron: Tel qu'amendé, oui. Je peux peut-être dire, en passant, que l'amendement répond à une demande de la Chambre des notaires, précisément. Mais le premier alinéa de l'article 3088 permet, selon les commentaires que je lis de la Chambre des notaires, d'internationaliser un contrat à volonté. On précise que cet alinéa consacre aussi la méthode du choix implicite qui résulte, d'une façon certaine, des dispositions de cet acte. Alors, la question qui se pose: Si les parties incorporent seulement les dispositions d'une loi étrangère dans leur contrat, est-ce qu'il s'agit, à ce moment-là, d'un choix implicite de la loi étrangère dans son ensemble, qui aboutirait à l'internationalisation du contrat, ou si le contrat reste soumis à la loi locale?

M. Pineau: M. le Président, je crois qu'on peut répondre que dans ce cas-là, effectivement, la désignation résulterait des dispositions de cet acte. Si je prends un exemple dans les régimes matrimoniaux, indépendamment de ce que nous avons dit tout à l'heure sur le patrimoine familial, dans la mesure où des époux inséreraient dans leur contrat les dispositions, par exemple, de la loi française sans se référer à la loi française, il y aurait lieu de se demander si, effectivement, ils entendent se référer à cette loi française. Je crois que l'on pourrait déduire de cette désignation qui est faite qu'ils ont entendu effectivement se référer à la loi française. Ils ont désigné leur loi.

Mme Caron: Vous croyez ou... Ha, ha, ha!

M. Pineau: M. le Président, en droit international privé, il est extrêmement difficile de dire: Je suis sûr. Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Caron: C'est ce que je m'aperçois depuis le début de notre étude. Ha, ha, ha!

M. Pineau: C'est un petit peu, c'est un peu comme...

M. Kehoe: ...droit.

M. Pineau: ...en droit constitutionnel.

M. Kehoe: ...sont des avocats.

Mme Caron: Alors, là, il n'y a que des incertitudes. Donc, on conclurait que la personne souhaitait se soumettre à...

M. Pineau: À la loi qu'elle a... Mme Caron: ...la loi étrangère. M. Pineau: ...oui, à la loi étrangère. De la vente

Le Président (M. Lafrance): Alors, s'il n'y a pas d'autres commentaires, l'article 3088 est donc adopté tel qu'amendé et les articles 3089 et 3090 sont adoptés tels quels. Nous en arrivons à la section II qui traite des dispositions particulières, en commençant avec les dispositions qui touchent la vente. J'aimerais appeler les articles 3091 ainsi que 3092.

M. Kehoe: Encore une fois, il n'y a pas d'amendement.

Mme Caron: À l'article 3091, M. le Président, la Commission des services juridiques nous mentionnait qu'il manquait de clarté dans le deuxième alinéa du premier paragraphe et qu'on devrait le modifier pour plus de clarté. Est-ce qu'on a examiné les propositions, les recommandations de la Commission?

Le Président (M. Lafrance): M. le député de Chapleau.

M. Kehoe: Je pense que M. le professeur les a examinées beaucoup plus en profondeur que moi et il serait en mesure de répondre à la question plus en détail.

Le Président (M. Lafrance): Merci. Me Pineau.

M. Pineau: M. le Président, la Commission des services juridiques demande effectivement que ce soit remplacé par les termes suivants: "La délivrance est effectuée dans cet État", et que soit ajouté un quatrième paragraphe: "Sous réserve des dispositions de la présente section, le contrat est conclu par une personne physique à des fins personnelles, familiales, domestiques ou artisanales."

Ce qui est proposé dans le deuxième paragraphe de 3091, c'est la prévision expresse que l'obligation de délivrance doit être exécutée, tandis que la Commission suggère qu'il suffirait que la délivrance, le seul fait de la délivrance soit effectué dans cet État. L'exigence est évidemment plus grande dans l'article proposé que dans le... C'est un article qui s'inspire, là encore, des Conventions de La Haye et d'autres.

Mme Caron: Pourquoi n'a-t-on pas jugé bon d'ajouter le quatrième paragraphe qui était proposé et qui se lisait: Sous réserve des dispositions de la présente section, le contrat est conclu par une personne physique à des fins personnelles, familiales, domestiques ou artisanales?

M. Pineau: Cela réfère au contrat de consommation qui est régi par un article particulier.

Mme Caron: 3094. (17 h 45)

Du mandat et de l'administration du bien d'autrui

Le Président (M. Lafrance): S'il n'y a pas d'autres commentaires, les articles 3091 et 3092 sont donc adoptés tels quels. J'appelle maintenant l'article 3093 qui traite du mandat et de l'administration du bien d'autrui.

M. Kehoe: M. le Président, il y a deux amendements. L'intitulé du paragraphe 2 de la section II du chapitre troisième du titre deuxième du Livre X est remplacé par le suivant: "De la représentation conventionnelle".

M. le Président, l'amendement proposé est de concordance avec celui proposé à l'article 3093. En raison de cet amendement, l'intitulé du paragraphe 2 de la section II du chapitre troisième du titre deuxième se lirait comme suit: "2.-De la représentation conventionnelle".

Deuxième amendement proposé. L'article 3093 est remplacé par le suivant: "L'existence et l'étendue des pouvoirs du représentant dans ses relations avec un tiers, ainsi que les conditions auxquelles sa responsabilité ou celle du représenté peut être engagée, sont régies par la loi désignée expressément par le représentant et le tiers ou, à défaut, par la loi de l'État où le représentant a agi si le représenté ou le tiers a son domicile ou sa résidence dans cet État."

M. le Président, l'amendement proposé vise, d'une part, à restreindre le champ d'application de l'article à la représentation conventionnelle et, d'autre part, à permettre aux parties de choisir la loi applicable. Ce faisant, l'article est rendu davantage conforme aux sources qui l'ont inspiré. En raison de cet amendement, l'article 3093 se lirait comme suit: "L'existence et l'étendue des pouvoirs du représentant dans ses relations avec un tiers, ainsi que les conditions auxquelles sa responsabilité ou celle du représenté peut être engagée, sont régies par la loi désignée expressément par le représentant et le tiers ou, à défaut, par la loi de l'État où le représentant a agi si le représenté ou le tiers a son domicile ou sa résidence dans cet État."

Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le député de Chapleau. Est-ce qu'il y a des commentaires touchant cet article tel qu'amendé? Mme la députée de Terrebonne.

Mme Caron: M. le Président. L'amendement qui propose la modification de l'intitulé du paragraphe 2 répond à une demande de la Chambre des notaires qui souhaitait qu'on l'appelle "De la représentation conventionnelle".

J'aurais une question sur l'article 3093 tel que modifié. Est-ce que cet article vient protéger la personne faible, puisque son état peut avoir demandé des mesures de protection? Est-ce que la modification assure cette protection-là?

Le Président (M. Lafrance): Me Pineau.

M. Pineau: M. le Président, la question posée, si j'ai bien compris, concerne les pouvoirs de représentation qu'aurait un tuteur ou un curateur, mais ces pouvoirs sont déterminés par la loi, ils ne sont pas déterminés par la convention des parties.

Mme Caron: Lorsqu'on parle de l'existence et de l'étendue des pouvoirs du représentant...

M. Pineau: Est-ce que ça s'applique?

Mme Caron: ...est-ce que ça protège davantage la personne faible?

M. Kehoe: M. le Président, juste avant que vous continuiez avec la question. Il y a une erreur qui s'est glissée et peut-être que la correction va clarifier les affaires. Dans l'amendement où "l'article 3093 est remplacé par le suivant:", à la quatrième ligne, le premier mot, c'est indiqué "représentant" et ça devrait être "représenté". Puis, "en raison de cet amendement, l'article 3093 se lirait comme suit:", à la quatrième ligne, le quatrième mot, "représentant" devrait se lire "représenté" aussi.

Le Président (M. Lafrance): Alors, permettez-moi de relire l'article tel qu'amendé, l'article 3093: "L'existence et l'étendue des pouvoirs du représentant dans ses relations avec un tiers, ainsi que les conditions auxquelles sa responsabilité ou celle du représenté peut être engagée, sont régies par la loi désignée expressément par le représenté et le tiers ou, à défaut, par la loi de l'État où le représentant a agi si le représenté ou le tiers a son domicile ou sa résidence dans cet État."

Bien. Ça va? Je vous remercie, M. le député de Chapleau, d'avoir porté à notre attention ce correctif. Mme la députée de Terrebonne, vous aviez un commentaire supplémentaire? Vous avez posé votre question? Alors, Me Pineau.

M. Pineau: Mme la députée de Terrebonne attend la réponse.

Mme Caron: C'est ça. C'est exactement ça.

M. Pineau: M. le Président, je pense que la question ne se pose pas dans ce contexte. Il s'agit de déterminer l'existence et l'étendue des pouvoirs d'un représentant dans ses relations avec un tiers et les conditions de la responsabilité de ce représentant ou de ce représenté. Je ne vois pas comment un représentant qui serait un tuteur ou un curateur pourrait désigner la loi à laquelle il est soumis, car ce sont des lois qui s'imposent, n'est-ce pas? Les régimes de tutelle et de curatelle sont organisés par la loi. Donc, cette disposition en tant que telle ne vient pas diminuer ou augmenter la protection des incapables, n'est-ce pas? Ça ne les touche pas en tant que tel. Simplement, l'article 3093 vient nous dire que cette existence et cette étendue des pouvoirs sont régies par la loi désignée expressément par le représenté lorsque la loi lui permet de choisir une loi. Donc, ça ne touche pas les questions de tutelle et de curatelle.

Je me permettrai d'ajouter, s'il vous plaît, que l'article 3061 à cet égard-là vise le régime juridique des majeurs protégés et le régime juridique du mineur, et on réfère à la loi du domicile de ces personnes.

Mme Caron: Merci.

Du contrat de consommation

Le Président (M. Lafrance): Alors, le nouvel intitulé d'un paragraphe est donc adopté tel que proposé et l'article 3093 est adopté tel qu'amendé. J'aimerais maintenant appeler l'article 3094 qui touche la question du contrat de consommation.

M. Kehoe: II n'y a pas d'amendement, M. le Président.

Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le député de Chapleau. Est-ce qu'il y aurait des commentaires touchant cet article 3094? Oui, Mme la députée de Terrebonne.

Mme Caron: Je regarde les commentaires de la Commission des services juridiques qui semblait en profond désaccord avec la modification qui a été apportée à l'article depuis l'avant-projet. On nous disait même qu'il s'agit d'un net recul en regard de la protection du consommateur. J'aimerais peut-être vous entendre sur les changements... Qu'est-ce qui a motivé les changements par rapport à l'avant-projet de loi?

M. Kehoe: Professeur Pineau.

Mme Caron: Je remarque les mêmes commentaires de la Chambre des notaires.

M. Pineau: M. le Président.

Le Président (M. Lafrance): Oui, Me Pineau.

M. Pineau: Dans l'avant-projet, on ne permettait pas le choix par les parties de la loi applicable. Ici, on le permet. Cependant, ce choix ne peut pas avoir pour résultat d'amoindrir les droits du consommateur. On a ouvert cet article de cette manière, l'article 3094, car on pourrait songer à une loi étrangère applicable à un contrat, ce contrat de consommation, qui pourrait être, éventuellement, plus avantageuse pour le consommateur que la loi québécoise, par exemple. Donc, on a voulu protéger le consommateur en ne diminuant pas les droits qu'il pourrait avoir résultant de sa propre loi, mais en lui réservant aussi la possibilité de bénéficier des avantages que pourrait lui procurer la loi étrangère.

Le Président (M. Lafrance): Est-ce que ça satisfait votre interrogation, Mme la députée de Terrebonne?

Mme Caron: Pas vraiment puisque - je relis les commentaires de la Commission des services juridiques qui maintient que, malgré qu'on prévoie que ça doit assurer la protection - les Services juridiques nous disent bien: Bien que cet article prévoie certaines conditions, qu'un tel choix ne peut avoir pour résultat de mettre de côté les dispositions imperatives de la loi de l'État où le consommateur a sa résidence, nous ne croyons pas que cette restriction soit suffisante. On retrouve la même chose du côté de la Chambre des notaires.

M. Kehoe: M. le Président, peut-être que pour simplifier les affaires on pourrait suspendre cet article-là, et les juristes des deux côtés... Je pense que l'article n'a pas été étudié sur cet aspect-là. Ça pourrait être étudié. À la reprise des travaux mardi, on pourrait voir quelle décision on va prendre.

Mme Caron: Ça me convient.

M. Kehoe: Je suggérerais de suspendre l'article 3094.

Du contrat de travail

Le Président (M. Lafrance): Alors, l'article 3094 est laissé en suspens. J'aimerais maintenant appeler l'article 3095 qui traite du contrat de travail.

M. Kehoe: II n'y a pas d'amendement.

Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le député de Chapleau. Est-ce qu'il y a des commentaires?

Mme Caron: On nous présente exactement les mêmes arguments, à la Commission des services juridiques, concernant le contrat de travail.

M. Kehoe: Encore une fois, M. le Président, je pense que les juristes des deux côtés n'ont pas eu le temps d'examiner à fond ces deux articles-là. Encore, on aura l'opportunité de suspendre... M. le professeur.

M. Pineau: M. le Président, il m'apparaît clair qu'on ne prive pas le consommateur des faveurs que lui accorde la loi, pas plus qu'on ne prive le travailleur, dans l'article 3095, des avantages que lui procure sa loi. "Ne peut avoir pour résultat de priver le consommateur de la protection que lui assurent les dispositions imperatives de la loi de l'État où il a sa résidence", je crois que cela est clair. Mais on lui offre en revanche la possibilité de profiter éventuellement des avantages que pourrait lui procurer la loi étrangère. Donc, ce n'est pas une fermeture, c'est davantage une ouverture.

Mme Caron: Je pense que l'argument qu'on fait valoir dans les deux cas, c'est le déséquilibre des forces en présence. C'est-à-dire qu'il pourrait probablement y avoir des pressions exercées autant sur le travailleur que sur le consommateur, peut-être pour l'obliger à faire un choix autre. Je pense que c'est dans ce sens-là qu'on nous parle de déséquilibre des forces.

M. Pineau: Mais si le choix que fait le consommateur lui est préjudiciable, l'article 3094 vient dire que la loi en question qui lui est défavorable ne s'appliquera pas. Et c'est la même chose dans l'article 3095 pour le travailleur. Je pense que ce n'est pas lui nuire que de lui permettre éventuellement de prendre au passage les avantages d'une loi étrangère, le bénéfice d'une loi étrangère.

Mme Caron: M. le Président, on pourrait peut-être, mardi, reprendre à l'article 3094, finalement, tout simplement.

M. Kehoe: M. le Président, tel que convenu, je fais une proposition d'ajourner les travaux. Je pense qu'il y a déjà un ordre de la Chambre pour mardi matin. Donc, ce serait d'ajourner jusqu'à mardi, 10 heures, si je ne me trompe pas.

Le Président (M. Lafrance): D'accord. Est-ce qu'il y a consentement?

Mme Caron: Oui, on pourrait reprendre à l'article 3094 tout simplement.

M. Kehoe: C'est ça.

Le Président (M. Lafrance): D'accord. Avant d'ajourner, j'aimerais vous rappeler que nous avons reçu avis de nous réunir de nouveau mardi prochain, 3 décembre, de 10 heures à 12 h 30,

ici, à la salle Louis-Joseph-Papineau. Alors, s'il n'y a pas de commentaire de fin de séance...

Une voix: Avez-vous dit "de 10 heures à 10 h 30"?

Le Président (M. Lafrance): J'ai bien dit "de 10 heures à 12 h 30"...

Une voix: O. K.

Le Président (M. Lafrance):... le mardi 3 décembre. Sur ce, j'aimerais donc ajourner nos travaux pour aujourd'hui.

(Fin de la séance à 18 h 4)

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