Journal des débats (Hansard) of the Committee on Citizen Relations
Version préliminaire
43rd Legislature, 2nd Session
(début : September 30, 2025)
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Thursday, October 23, 2025
-
Vol. 48 N° 8
General consultation and public hearings on the consultation document entitled “Planning of Immigration to Québec for the 2026-2029 Period”
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11 h (version non révisée)
(Onze heures quinze minutes)
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je
déclare la séance de la Commission des relations avec les citoyens ouverte.
La commission est réunie afin de
poursuivre les auditions publiques dans le cadre de la consultation générale
sur le cahier de consultation intitulé La planification de l'immigration au
Québec pour la période 2026-2029.
M. le secrétaire, y a-t-il des
remplacements?
Le Secrétaire : Oui, Mme la
Présidente. M. Cliche-Rivard (Saint-Henri—Sainte-Anne) remplace M. Leduc
(Hochelaga-Maisonneuve); M. Boissonneault (Arthabaska) remplace M. Bérubé
(Matane-Matapédia).
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Alors, messieurs, je vous salue. Donc, ce matin, nous
allons entendre les groupes suivants, la Table régionale des élu-e-s municipaux
du Bas-Saint-Laurent, qui est représentée par M. Gérald Beaulieu, qui est le
maire de Baie-des-Sables et préfet de la MRC de La Matanie, ainsi que Drummond
économique un petit peu plus tard.
Donc, commençons donc dès maintenant avec
M. Gérard Beaulieu. M. Beaulieu, bienvenue à la Commission des relations avec
les citoyens. Donc, vous allez avoir 10 minutes pour votre présentation et
par la suite on va discuter de toutes vos propositions avec les parlementaires.
Alors, pour l'heure... bien, pour les 10 prochaines minutes, le micro est
à vous.
M. Beaulieu (Gérald) : Merci,
Mme la Présidente. M. le ministre, Messieurs, mesdames les députés, c'est avec
plaisir que je suis ici aujourd'hui pour représenter la Table régionale des
élu-e-s municipaux du Bas-Saint-Laurent, pour vous donner notre perspective
régionale concernant l'immigration. Est-ce que vous m'entendez bien?
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Bien, on vous entend bien.
M. Beaulieu (Gérald) : Très
bien. Donc, premièrement, permettez-moi un peu de vous définir qu'est-ce que la
Table régionale des élu-e-s municipaux du Bas-Saint-Laurent. Cette table-là
regroupe les huit préfets, préfètes des MRC du Bas-Saint-Laurent et également
les huit maires des villes de centralité. Cette organisation a pour mission
de... une mission de concertation autour des enjeux de développement de notre
région, de l'ensemble de nos territoires. Et, une fois que cette
concertation-là est faite, la Table régionale des élu-e-s municipaux est la
plateforme que nous utilisons pour faire valoir nos points de vue...
M. Beaulieu (Gérald) : ...aux
différents ordres gouvernementaux, dont, principalement, bien entendu, le
gouvernement du Québec.
Donc, c'est quoi, l'immigration au
Canada... au Québec, c'est-à-dire, ou dans l'Est du Québec, au
Bas-Saint-Laurent? 4 000 personnes, environ, sont issues de l'immigration
sur notre territoire, donc, c'est un vaste territoire, donc, environ 1 000
étudiants internationaux qui fréquentent nos collèges et la seule université
qui a pignon sur rue à Rimouski, 2 000 travailleurs temporaires, donc, ce
qu'on appelle communément les TET, et également, donc, un 1 000
travailleurs immigrants, donc des immigrants qui sont... qui se sont installés
dans notre région.
Donc, l'immigration permanente, c'est
important de comprendre que, dans le Bas-Saint-Laurent, c'est 0,3 % de
l'ensemble de l'immigration au Québec. Ça fait que vous comprendrez que le fait
français... je vais tout de suite évacuer que le fait français n'est pas
menacé, ni à Rimouski, ni à Rivière-du-Loup, ni à Matane, ni à Kamouraska.
Donc, nous avons 0,3 % de cette immigration. Donc, ça démontre également
que, malgré toutes les stratégies... l'attractivité dont on essaie de faire
preuve dans notre territoire, on n'a pas réussi à régionaliser l'immigration,
ce qui fait en sorte qu'on comprend aujourd'hui qu'il peut y avoir des
problèmes dans les grands centres mais ce n'est pas des problèmes que nous
rencontrons sur nos territoires.
Maintenant, pourquoi nous avons décidé de
déposer un mémoire? C'est suite à des consultations puis à une meilleure
compréhension du... des problématiques liées aux modifications de... des règles
de l'immigration, tant du côté du gouvernement fédéral que celles du
gouvernement provincial, qui a entraîné des difficultés au niveau de nos
établissements d'enseignement, au niveau de nos... de nos entreprises
manufacturières, et également, de nos organisations sociocommunautaires, qui,
parfois, vont aller... qui s'occupent également de nos personnes aînées ou qui
prennent soin, également, de nos enfants.
Donc, parlons tout de suite de
l'immigration temporaire, les travailleurs étrangers temporaires. On a... en
août 2024, le gouvernement fédéral a ramené le taux de 20 % de la... de
la... du nombre de travailleurs à 10 %. Donc, ça, ça crée beaucoup
d'instabilité au niveau de nos entreprises et de plusieurs organisations, qui
comptent sur cette main-d'œuvre temporaire pour être en mesure de faire
fonctionner leurs activités. Il faut aussi reconnaître que le Bas-Saint-Laurent
est une région où le taux de vieillissement de la population s'est accéléré
beaucoup dans les prochaines... dans les dernières années, et que c'est quelque
chose qui va s'empirer également, selon le dernier rapport du ministère de
l'Économie et de l'Innovation, de... se trouve à encore s'empirer beaucoup
d'ici 2035. Donc, les gens, chez nous, étaient inquiets. C'est pour ça que les
maires, les préfets, on s'est réuni et on a décidé de bâtir ce mémoire.
• (11 h 20) •
Les travailleurs étrangers temporaires, on
a appris également que le secteur de la construction, que le secteur agricole,
et d'autres secteurs bénéficiaient d'exclusions qui permettaient de maintenir
le taux à 20 %, plutôt que d'être réduit à 10 %. Alors, je vous donne
un exemple, un peu, d'incohérence, et je viens d'un... du milieu agricole.
Donc, la personne qui trait la vache, l'entrepreneur qui trait des vaches, lui,
il a le droit de maintenir un 20 %, mais la personne qui transforme le
lait en fromage pour les marchés d'exportation ou les marchés domestiques doit
limiter à 10 % sa quantité de travailleurs. Un autre exemple probant, également,
l'entrepreneur qui construit des maisons ou des unités de logement, dont on a
un besoin criant au Québec, lui, il n'est pas tenu de respecter le 10 %,
il peut aller jusqu'à 20 %, mais l'entreprise qui fabrique des fermes de
toit, des poutrelles et des murs pour alimenter cette filière, lui, il doit
réduire sa main-d'œuvre à 10 %. Donc, il y a des incohérences au niveau de
ces règles gouvernementales. Et vous allez me dire : C'est du côté fédéral
que ça se passe. Oui, on le reconnaît, mais moi, j'interpelle le gouvernement
du Québec, au nom des gens de notre région, pour que vous interveniez également
auprès du gouvernement fédéral pour corriger ces incohérences, qui nuisent
beaucoup ou qui créent énormément d'instabilité dont nos entreprises n'ont pas
besoin par les temps qui courent, donc.
Et on sait très bien, également, que les
travailleurs étrangers temporaires dans notre région, qui sont peu nombreux —
je vous ai donné les... le nombre tout à l'heure — contribuent de
façon très importante au maintien d'activités manufacturières, et également,
dans toutes les organisations que je vous ai nommées tout à l'heure. Donc, le
fait de perdre ces travailleurs-là va faire en sorte que des entreprises vont
devoir réduire leur cadence de travail, leur cadence de production, et on veut
qu'elles se diversifient. Donc, il y a des enjeux très importants au niveau de
la productivité de ces entreprises.
Les MRC dont je suis préfet, on est très
inquiets, parce qu'on a bâti des structures d'accueil avec la collaboration des
gouvernements, pour être en mesure d'accompagner les immigrants, d'être en
mesure de faciliter leur intégration, et on se rend compte aujourd'hui que
tout...
M. Beaulieu (Gérald) : ...tissu-là
est quand même menacé par une modification de règles en cours de route. Donc,
vous comprendrez que l'immigration est très importante. Je vous ai parlé d'une
population vieillissante. Ce n'est pas quelque chose qui va se ralentir. Demain
matin, on envoie nos travailleurs étrangers temporaires et on restreint
l'immigration, notre population ne rajeunira pas. Donc, c'est très important de
maintenir une immigration qui contribue à la vitalité et au développement
économique de notre territoire.
Donc, ce qu'on souhaite, nous, dans le
fond, pour revenir à ce que nous demandons... Puis, lorsqu'on a déposé notre
mémoire, on s'est beaucoup intéressé à ce que les autres pensaient également.
Par la suite, on a consulté, mais on s'est rendu compte que nos propositions ou
nos recommandations trouvaient écho vis-à-vis plusieurs intervenants et non pas
les moindres, donc les chambres de commerce provinciales, le Conseil du
patronat, les associations des recteurs d'université. Donc, il y a quelques
recommandations, parce qu'on n'a pas voulu s'étendre, on a voulu focaliser sur
quatre recommandations principales. Et, vous en avez entendu parler beaucoup
pendant les audiences, c'est la question d'une clause grand-père ou des droits
acquis pour les travailleurs qui sont sur le territoire et de maintenir les
conditions actuelles pour les travailleurs qui sont déjà sur notre territoire.
La deuxième... la deuxième recommandation
que nous faisons, Mme la Présidente, c'est de créer une passerelle qui
permettrait d'alimenter l'immigration permanente avec les travailleurs
étrangers temporaires que nous avons de présents sur notre territoire, qui sont
pour la plupart francisés, qui sont intégrés et dont certains leurs familles
les accompagnent.
Le point qui nous fait très mal également
en région. Vous savez, on a des petites institutions d'enseignement
comparativement aux grands centres, donc on parle de collèges et cégeps, on
parle d'universités. Déjà, cette année, certains instituts ont vu leur nombre
d'étudiants étrangers être réduit de façon très importante à cause de l'incertitude
liée aux changements des mesures en cours de route, mais liée aussi aux
restrictions concernant l'obtention d'un emploi post-diplôme. Donc, nous on
prétend, et les études le démontrent, que ce soient des travailleurs étrangers
temporaires, des gens qui travaillent sous contrat ou les étudiants qui font un
diplôme dans notre région... vont avoir... qui font des stages vont avoir
beaucoup plus la capacité de s'installer dans la région si on leur offre la
chance de le faire après leur diplomation.
On vous rappelle également, puis on vous
offre notre collaboration, au niveau des MRC, on a mis en place des processus
d'attractivité, des processus de rétention. On est branchés sur notre tissu
socioéconomique et puis on est en mesure de collaborer également au moment de
faire des modifications importantes à des mesures d'immigration qui touchent
vraiment nos milieux de façon très importante. On est très disponibles, on est
très volontaires pour collaborer et établir un dialogue avec les ministères
concernés pour être en mesure de mieux comprendre les impacts régionaux et
comment on peut aussi... mieux définir les programmes en fonction des
nécessités et des priorités régionales.
Donc, c'étaient les points... les points
qui nous apparaissaient très importants à souligner. Je pourrais vous parler
aussi des normes administratives et le financement du programme PAC et le PASI,
donc, pour nous permettre, encore là, de... de faire un meilleur accompagnement
des gens qui arrivent dans notre région. Mais le Bas-Saint-Laurent est
intéressé à recevoir plus d'immigrants. Nous en avons besoin. Ça fait partie de
nos objectifs pour revitaliser nos communautés et faire en sorte de poursuivre
la livraison de services efficaces à nos communautés et à nos populations.
Merci, Mme le Président.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, M. le maire. Vous avez pleinement rempli
vos 10 minutes. On va commencer donc la période d'échange avec les
parlementaires et on va commencer d'ores et déjà avec M. le ministre. Et vous
avez, avec votre banquette, 16 minutes 30 secondes.
M. Roberge : Merci beaucoup,
Mme la Présidente. Merci pour votre présentation. C'est intéressant d'avoir
votre point de vue. On a eu beaucoup d'organisations nationales qui sont venues
nous voir, mais on a eu moins de gens des régions, quoi qu'hier on avait la
table des cégeps de régions, qui sont venus présenter un point de vue peut-être
similaire au vôtre, d'une certaine manière, en parlant au nom des mêmes
personnes. On est vraiment très sensibles, très engagés au gouvernement à
continuer de recevoir l'immigration économique et à vraiment favoriser
l'installation de ces personnes-là dans les régions. Très, très conscient que
la vitalité économique des régions dépend en grande partie de l'installation et
de la rétention d'une force de main-d'œuvre en région. Ce n'est pas une
question juste de pénurie de main-d'œuvre, parce que des économistes sont venus
nous le dire, en réalité, penser qu'en faisant... quand t'as 100 000 postes
vacants, tu peux entrer...
M. Roberge : ...100 000
migrants, l'année d'après, encore 100 000 postes vacants parce que
l'arrivée de nouvelles personnes crée de nouveaux besoins. Puis c'est prouvé
que c'est une espèce de fuite en avant. Ça ne fonctionne pas de manière
globale, ça peut fonctionner, par contre, de manière très, très ciblée lorsque
réellement il y a un pairage entre le recrutement de travailleurs
internationaux, soit travailleurs étrangers temporaires ou permanents, et
réellement des postes ciblés en région. Donc, je pense qu'il faut y aller de
manière très précise, très efficace. Il ne faut pas penser qu'en refaisant dans
les 10 prochaines années ce qu'on a fait dans les 10 dernières, on
aurait des résultats différents, ça ne fonctionnerait pas.
Il y a chez vous beaucoup de travailleurs
étrangers temporaires qui occupent des postes qui sont très importants, dans le
manufacturier notamment, pas seulement, mais beaucoup. Et on a été très
surpris, il y a quoi, 13, 14 mois, de voir le gouvernement fédéral, sans
crier gare, apporter des changements soudains sans que ce soit demandé par le
gouvernement du Québec, des mesures, là, de 10 % puis de 20 % à la
grandeur du Québec, mur à mur, puis une hausse du salaire qu'on qualifie
ensuite de bas salaire, puis ça cause depuis ce temps-là une déperdition de
travailleurs étrangers temporaires en région.
Votre recommandation, la première, là,
prévoir une clause de droits acquis permettant de maintenir les conditions
actuelles du programme des travailleurs étrangers temporaires, PTET, pour les
employeurs et travailleuses et travailleurs déjà engagés, et ce, jusqu'à
l'adoption d'une approche régionalisée de ce programme. J'y souscris
parfaitement. D'ailleurs, je vais déposer en commission ce matin, pour que tout
le monde puisse y avoir accès, une lettre que j'ai fait parvenir au printemps
dernier, le 20 juin, à la fois à la ministre de l'Immigration, réfugiés et
citoyenneté, mais aussi à la ministre de l'Emploi, Développement Social Canada.
Et, à la deuxième page, la demande très claire du gouvernement québécois, je
lis l'extrait de la lettre : « Le maintien du niveau de TET dans
certaines régions est crucial pour de nombreuses entreprises confrontées à
d'importants enjeux de main-d'œuvre. Dans cette perspective, je vous demande
d'appliquer rapidement une mesure qui permettrait aux entreprises de maintenir
le nombre de TET qui contribuent présentement à la vitalité des régions du
Québec. Une telle mesure de type clause grand-père permettrait le
renouvellement des permis de travail des TET déjà au Québec, hors des régions
de Montréal et de Laval. Mes équipes se rendront disponibles afin de convenir
très rapidement d'une entente permettant l'atteinte des objectifs que partagent
nos deux gouvernements relative aux modalités d'application applicables au
PTET.» Donc...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : M. le ministre, je vais vous arrêter, 30 secondes.
M. Roberge : Oui.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Le dépôt, est-ce que vous le souhaitez, qu'il soit public
ou qu'il soit pour les membres de la commission?
M. Roberge : Public, plus de
personnes en prendront connaissance, mieux ce sera.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Public. Parfait. Donc, il faut l'envoyer au secrétaire de
la commission. Merci.
M. Roberge : Oui, ce sera
fait. On va l'envoyer.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Poursuivez.
• (11 h 30) •
M. Roberge : Et ce que je
voulais démontrer, M. le préfet, c'est que le gouvernement du Québec est
pleinement d'accord avec votre recommandation 1. On la fait nôtre. Et Je
l'ai dit dans les médias, mais pas seulement. C'est ce que je voulais montrer
puis partager à tout le monde, cette prise de position ferme et forte. On a eu
quelques conversations avec le fédéral qui nous disent étudier et analyser, ils
nous disent : Oui, mais bon, à la grandeur du Canada... Moi, je pense qu'il
faut prendre soin de nos régions, là. Et je suis conscient que lorsque des
travailleurs étrangers temporaires ne voient pas leur permis être renouvelé,
bien, il n'y a pas un employé juste à côté qui attend pour prendre la place,
là. C'est ce que je comprends. Vous, vous y allez aussi sur un programme
passerelle. Pouvez-vous élaborer ou vous pouvez réagir à ce que je viens de
dire aussi? Ma question, ce serait de savoir à quoi vous pensez quand vous
parlez d'un programme passerelle pour des gens qui seraient... soient immigrés
en région, soit les travailleurs étrangers temporaires ou d'autres.
M. Beaulieu (Gérald) :
Écoutez, premièrement, merci, M. le ministre, pour reconnaitre le besoin de
développement en région puis de la présence de travailleurs étrangers
temporaires, de votre requête que vous faites au fédéral. On aimerait ça que le
message soit répété et s'accentue de façon très importante. Plusieurs
travailleurs devront quitter, et vous avez tout à fait raison quand je parle,
moi, à Lepage Millwork à Rivière-du-Loup, s'il y a quelqu'un qui virerait sur
la rue de Lafontaine, moi, si vous connaissez la ville de Rivière-du-Loup, puis
qui applique, il va l'engager s'il est capable de faire la job, vous comprenez?
Mais il n'y en a pas. Donc, c'est excessivement important de régler ce
problème-là pour les... toutes les régions du Québec. Je ne parlerai pas pour
le reste du Canada, mais pour toutes les régions du Québec qui ont des
problèmes au niveau manufacturier.
Quand on vous parle de passerelle.
Écoutez, moi, je n'ai pas les termes techniques, mais ce qu'on a réfléchi,
nous, on a déjà des gens qui habitent notre territoire, qui y sont installés,
qui contribuent, qui ont la capacité...
11 h 30 (version non révisée)
M. Beaulieu (Gérald) : ...financière
de s'installer de façon permanente, dans certains cas, de faire venir leur
famille. Pourquoi on ne leur permettrait pas, au terme ou en cours de leur
contrat comme travailleurs étrangers temporaires, de s'inscrire dans le
processus d'immigration permanent, donc d'avoir un statut permanent? Je ne suis
pas un expert, au niveau des étudiants, par rapport au Programme de l'expérience
québécoise, mais je sais qu'avant, dans les anciennes règles c'était permis aux
étudiants qui terminaient un bac ou qui terminaient un DEC dans une spécialité
d'avoir un emploi en région puis d'être capables de s'inscrire dans un parcours
qui facilitait la reconnaissance de la résidence permanente.
Donc, on est persuadés que nous avons les outils
en place qui permettraient cette facilité-là, pour ne pas fragiliser, et venir
renforcer le développement économique de nos régions. Quand vous avez parlé
tout à l'heure des économistes qui disaient que c'était une fuite par en avant...
Vous savez, chez nous, il manque des gens dans toute la... dans toutes les
filières, que ce soit au niveau des services de proximité. Là, bien, on a une
coopérative qui possède un dépanneur ici. On court après la main-d'œuvre, vous
savez, pour donner un service à nos communautés, parce qu'on a une population
vieillissante.
Donc, c'est très important d'avoir ce coup
d'oeil économique là, ne pas l'avoir seulement pour les grands centres, mais
d'être capables d'avoir une longue-vue, qui va permettre d'aller focaliser
aussi sur les régions, pour comprendre c'est quoi, nos réalités, en matière de
développement, et en quoi l'immigration pourrait contribuer de façon active. Et
c'est des gens qui travaillent, ce n'est pas des gens qui consomment de l'aide
sociale. C'est des gens qui travaillent, et qui contribuent au développement
économique du Québec, et qui installent leur famille, qui permettent de peupler
nos écoles également.
M. Roberge : Très sensible à
ça, garder les écoles ouvertes. Vous savez, je suis enseignant de formation, de
profession puis, comme ministre de l'Éducation, j'ai travaillé aussi, des fois,
pour empêcher des fermetures d'écoles.
Je pense qu'il ne faut pas... On est à un
moment de changement de paradigme. Vous dites : Il faut regarder ce qui se
passe dans les régions de manière précise, puis moi, je vais dire, même, par
secteur. Techniquement, il pourrait y avoir 10 000 nouveaux arrivants qui
arriveraient dans votre région dans les deux prochaines années, et vous
pourriez encore être en pénurie de main-d'oeuvre, alors, des entreprises qui
ferment, s'il n'y a pas un bon pairage entre les compétences et les désirs de
ces personnes-là puis les besoins des régions. Et c'est là où je suis d'accord
avec vous, aussi, quand vous parlez d'emploi. Vous dites : Ce n'est pas
des gens qui arrivent qui sont sur l'aide sociale. Bien, c'est ça qu'il faut
s'assurer.
C'est là où on doit migrer vers ce nouveau
programme, qui est très intéressant, le Programme de sélection des travailleurs
qualifiés, le PSTQ, qui nous permet, justement, de sélectionner des
travailleurs, sur le territoire québécois, qui sont en emploi, qui répondent à
des besoins en ce moment. Donc, on n'arrive pas avec des gens qui arrivent et
qui n'ont pas la compétence, n'ont pas le désir de s'installer, de travailler,
de combler un besoin. On est dans une espèce de transfert, la passerelle — c'est
le mot que vous avez utilisé — entre des travailleurs déjà chez vous
et une forme de... en fait, pas «une forme de»... la résidence permanente. Ça
devient non plus des nouveaux arrivants, mais des nouveaux Québécois. Et le
nouveau PSTQ a plusieurs volets, mais ce n'est pas limité nécessairement à des...
à des chercheurs. On veut des chercheurs, mais il y a des gens qui sont des
diplômés du Québec. Le volet 1, hautes qualifications et compétences spécialisées,
on a commencé cette année... cet été, là, les premières invitations, c'était le
début du commencement, là, quelques centaines de postes. Mais, dans les
prochaines années, on veut y aller à coups de milliers, de dizaines de milliers,
et ça a été à 100 % des diplômés du Québec hors de Montréal.
Donc, on peut penser à l'université la
plus près de chez vous, ce serait Rimouski, mais ça pourrait être aussi des
diplômés du collège. Mais vous dites : Oui, mais c'est très bien, on n'a
pas que besoin d'ingénieurs et de gens qui ont toujours des bacs, des
maîtrises, des docs, des postdocs, 100 % d'accord avec vous. Il faut
garder aussi notre secteur manufacturier, nos commerces ouverts. Puis c'est là
qui arrive le volet II, Compétences intermédiaires et manuelles, donc, des
gens qui n'ont peut-être pas le diplôme, mais qui ont une contribution
essentielle, intéressante, une forme de savoir-faire. Volet III, Professions
réglementées, par exemple, je vais donner l'exemple des infirmières, des gens
qui ont un ordre professionnel, puis quatre talents d'exception, mais là ce
serait, par exemple, un chercheur, une sommité en océanographie qui viendrait à
l'UQAR. Voyez-vous qu'avec ces quatre volets-là, on est capable d'y aller puis
de répondre à des besoins et de pas créer, par l'arrivée de nouvelles
personnes, de nouvelles demandes pour que, dans deux ans, on dit : Voyons
donc comment ça se fait qu'on est encore en pénurie de main-d'oeuvre? On a
accueilli beaucoup de monde, on a plus de problèmes de logement qu'avant...
M. Roberge : ...puis on a
autant de problèmes de pénurie de main-d'oeuvre. Ce serait un peu malhabile. Et
c'est là où on... on migre, nous, vers quelque chose qui est... qui est plus
précis. Donc, il ne faut pas juste s'arrêter au nombre. Dans le cahier de
consultation, on dit qu'on aimerait passer de 72 000 TET à environ 65 000. Ça
pourrait effrayer des gens, dire : Voyons donc, une réduction de
travailleurs étrangers temporaires, nos besoins sont tellement grands. Mais il
faut creuser un peu pour voir que c'est une réduction de 7 000 sur quatre ans à
Montréal et à Laval, oups, là, on vient de changer de discours, puis qu'à côté,
dans nos migrants économiques, on a ce programme de sélection pour des diplômés
de votre région puis des travailleurs étrangers qui deviennent des permanents.
Donc... Et c'est là où on voit que, dans le détail, on se rejoint
définitivement.
Est-ce que vous avez d'autres... d'autres
demandes? En fait, est-ce que vous pouvez préciser ce que vous vouliez dire? Je
voyais des... dans votre mémoire, des... des commentaires sur le programme PAC
et le programme PASI. Il nous reste peut-être deux, trois minutes. Est-ce que
vous pouvez nous exposer quels sont les enjeux ou vos demandes à cet égard-là?
M. Beaulieu (Gérald) : Écoutez,
je n'aurais pas des précisions au niveau des normes. Mais je suis préfet de la
MRC, on gère ces programmes-là parce qu'on accompagne entre autres, chez nous,
La Matanie... on accompagne le SANAM. Donc, il y a des problématiques au niveau
budgétaire, c'est clair, parce qu'il y a un effort très important à déployer.
On a vu les cours de francisation au cours des... de la dernière année où il y
a eu une limitation au niveau des budgets, ce qui a fait en sorte que certaines
personnes n'ont pas pu être francisées. Mais pour nous, c'est... quand on parle
d'amélioration de ces programmes-là dans... dans l'ensemble, c'est de ça qu'on
veut dire, donc de... de prendre soin de bonifier ces programmes-là et de venir
nous consulter, comme instance régionale également pour savoir en... dans
quelle mesure on pourrait faire en sorte que ces programmes-là soient plus
efficaces pour aider la communauté immigrante, faciliter l'intégration et
faciliter la francisation.
M. Roberge : Et en ce moment,
le programme PAC chez vous, il est apprécié?
• (11 h 40) •
M. Beaulieu (Gérald) : Bien
oui. Tous les programmes qui nous permettent de... d'accompagner les... les
immigrants de notre région, c'est des programmes qui sont importants.
D'ailleurs, on... la MRC... comme je vous disais, le programme du SANAM, il
supporte ces programmes-là. J'ai eu la chance de participer à de nombreuses
activités où nous... on voyait l'intégration des gens dans leur milieu
socioéconomique dans les communautés qui ne sont pas seulement des villes, mais
aussi des communautés rurales. Et c'est des organismes qui sont excessivement
importants pour accompagner ces gens-là.
M. Roberge : Je vous
remercie. Je termine avec peut-être une petite note d'espoir. Parce qu'avec
l'ancien modèle, mais une nouvelle volonté politique, on a réussi de faire
passer de 19 % à 34 % en quelques années seulement le pourcentage
d'immigrants permanents qui s'installent à l'extérieur du Grand Montréal.
Pendant des années, cette aiguille-là ne bougeait pas, puis on l'a presque
augmenté de, quoi, 40 % en quelques années. Avec de meilleurs programmes,
je pense qu'on va être capables de faire encore mieux au bénéfice de nos
régions. Je vous remercie beaucoup pour votre intervention, pour l'appel très
concret du terrain que vous avez fait entendre à l'Assemblée nationale
aujourd'hui.
M. Beaulieu (Gérald) : Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci, M. le ministre. Alors, on va poursuivre la
discussion avec le député d'Acadie pour 9 min 54 s.
M. Morin : Merci, Mme la
Présidente. Alors. Bonjour, M. Beaulieu. Très heureux de vous parler ce matin.
Merci également pour le document que vous avez produit. Il y a des éléments qui
ont attiré mon attention, entre autres, à la page 4, vous parlez d'une
approche régionalisée de l'immigration. Donc, est-ce que j'ai raison de penser
qu'une décentralisation et des forums régionaux avec les forces vives des
différentes régions du Québec permettraient d'avoir une meilleure planification
en immigration?
M. Beaulieu (Gérald) :
Définitivement, définitivement, de donner voix au chapitre, d'établir les
espaces de consultation et de concertation avec les intervenants régionaux
comme les MRC. Et notre collectif régional de développement nous permettrait
d'avoir une meilleure prévisibilité au niveau de nos besoins et des mécanismes
d'intégration des nouveaux arrivants.
M. Morin : Et je comprends
que ce n'est pas la réalité que vous vivez avec le gouvernement actuel.
M. Beaulieu (Gérald) : Je ne
peux pas, je ne peux pas critiquer le gouvernement actuel, nous disons que, présentement,
les efforts de décentralisation qui ont été mis de l'avant n'ont pas donné les
résultats pour notre...
M. Beaulieu (Gérald) : ...notre
région. M. le ministre nous a dit qu'on était passé de 19 % à 34 % au
cours des dernières années, mais chez nous, ça ne dépasse pas point 3 %.
Donc, il y a... Ce qu'on dit, c'est qu'il y a encore de l'effort à faire. Et
puis moi, je suis préfet de la Martanie depuis deux ans et je n'ai pas encore
eu de rencontre pour discuter des besoins d'immigration de mon territoire.
Donc, pour nous, l'occasion de déposer un mémoire, c'était une occasion
importante de se faire entendre, de faire entendre notre voix et de dire qu'on
est prêts à participer à ce dialogue-là. Nous avons compétence au niveau de la
compréhension des enjeux de développement de notre territoire lié à notre
situation démographique et on est prêts à contribuer à toute forme
d'amélioration au niveau de la régionalisation et de la décentralisation de ce
programme-là. Le mur-à-mur, autant du côté de baisser de 20 % à 10 %,
n'a pas démontré que c'était poussé et le mur-à-mur par rapport à notre région
n'a pas démontré, OK, que c'était favorable à augmenter le taux d'immigration
dans notre région.
M. Morin : En fait, je
comprends que vous plaidez pour du sur mesure et non pas du mur-à-mur.
M. Beaulieu (Gérald) : Nous
plaidons sur du sur mesure. C'est qu'on comprend qu'il y a besoin d'une vision
nationale au niveau du Québec, mais, cette vision nationale là, on devrait la
construire en venant des régions vers le haut et non pas de prendre une vision
nationale et de dire : Maintenant, on va essayer de pousser ça dans nos
régions. Nous, on vous dit : On est prêts à amorcer la pompe, à amorcer le
dialogue, à discuter ensemble, travailler sur des besoins régionaux. On connaît
les besoins de qualification de main- d'oeuvre. Puis j'ai apprécié beaucoup le
commentaire de M. le ministre en disant qu'on pouvait avoir une meilleure...
une meilleure approche avec nos diplômés, OK, qu'on a dans nos collèges et à
l'université pour les intégrer en région. On applaudit ça, mais on pourrait
aller beaucoup plus loin que ça si on avait une meilleure concertation et une
meilleure communication par rapport aux besoins régionaux.
M. Morin : Donc, en fait, ce que
vous dites, c'est : Partons de la base et faisons remonter ça pour,
évidemment, que la planification soit... soit juste et soit aussi bien ciblée
pour votre région. Et donc ça, c'est un élément, en tout cas, pour moi, qui
est... qui est important. Puis je vous remercie. Puis je comprends que vous
n'avez pas eu de rencontre depuis deux ans, mais là, au moins, grâce à votre
mémoire, vous avez accès aux décideurs et au gouvernement. Félicitations!
Il y a un élément que j'aimerais revenir
avec vous, M. le ministre en a parlé, et c'est votre concept de passerelle
claire. Parce que je comprends que vous avez un nombre de travailleurs
temporaires étrangers, et votre souhait, c'est que ces gens-là puissent devenir
des permanents. Et donc, quand vous... Bien, d'abord, quand vous regardez la
législation, il est toujours possible pour le ministre de délivrer ce qu'on
appelle une CSQ puis permettre aux gens d'aller vers la résidence permanente.
Ça, le Québec a tous ces pouvoirs-là. Cependant, quand on regarde les scénarios
projetés dans le cahier d'immigration au niveau de l'immigration économique, le
scénario... le premier scénario de 2a, pour les travailleurs qualifiés, on
parle de 15 000 personnes. C'est ça qui est prévu par le gouvernement en termes
de permanents, 15 000 personnes. Ça, c'est pour l'ensemble du Québec, là. Pour
vous, est-ce que ça correspond à vos besoins?
M. Beaulieu (Gérald) : Écoutez...
M. Morin : Parce que vous...
15 000, là, vous allez en avoir quelques-uns là-dedans, là.
M. Beaulieu (Gérald) : C'est
ça. Donc, ça ne correspond pas à nos besoins. Je me prononce... Je n'ai pas le
mandat aujourd'hui de me prononcer sur les cibles au niveau national. J'ai le
mandat de parler de nos préoccupations au niveau régional. Quand je vous ai
parlé de passerelles, nous avons des travailleurs qui sont ici, qui
participent, qui sont intégrés et qui travaillent, ils gagnent leur vie, et qui
ont de l'intérêt à demeurer chez nous. On n'a pas besoin de les retenir. Ils
sont prêts à rester chez nous. Ils ont un travail, ils sont logés, ils ont une
voiture, ils contribuent. Est-ce qu'on ne pourrait pas les aider à continuer
d'opérer dans ce rôle-là de travailleur chez nous, mais avec un statut de
résidence permanente? C'est ce qu'on préconise. Si vous me demandez comment on
fait tout ça, tous les détails, non, je ne suis pas un expert là-dedans, moi.
Moi, je vous parle des préoccupations de nos gens sur le terrain, et je me
dis : Le gouvernement est assez intelligent pour intégrer dans ses programmes
des passerelles comme ça puis qu'il va mettre les mécanismes en place pour que
ce soit possible, en nous parlant.
M. Morin : OK. Puis,
comprenez-moi bien, ce que ce que vous dites dans votre mémoire, c'est
excessivement important et intéressant parce que, d'abord, vous souhaitez une
régionalisation, vous souhaitez être à l'écoute de votre région. On a plein de
régions au Québec qui ont des besoins différents. Cependant, on entend ici, à
la commission, depuis...
M. Morin : ...plusieurs
semaines déjà qu'il y a des besoins criants en termes de travailleurs. Est-ce
que vous savez... peut-être, vous ne le savez pas, mais est-ce que vous savez
combien vous avez de travailleurs temporaires présentement dans votre région,
dans votre MRC?
M. Beaulieu (Gérald) : Dans
la MRC, non, mais, à l'échelle de la région, je vous... dans mon... en
introduction, je vous ai mentionné que l'immigration, chez nous, ça
correspondait à 4 000 personnes. L'immigration permanente, c'est
0,3 % de l'immigration au Québec. Et c'est 2 000 travailleurs
étrangers temporaires qui sont présentement sur notre territoire depuis...
depuis trois ans.
M. Morin : Depuis trois ans,
OK.
M. Beaulieu (Gérald) : Ça,
c'est des données très précises que je peux partager avec vous. Et on a
1 000 personnes issues de l'immigration qui sont installées sur le
territoire, avec différents statuts.
M. Morin : Mais je comprends
aussi de vous que 15 275 travailleurs qualifiés pour l'ensemble du Québec,
pour votre région, là, ça ne va pas faire nécessairement beaucoup. Il y a un
deuxième scénario, où on parle de 21 300 pour l'ensemble du Québec, puis
finalement le dernier scénario, 26 175. Mais je retiens de votre
témoignage ce matin que vous, vous souhaitez véritablement être capable de
stabiliser votre immigration et faire de ces travailleurs temporaires des
travailleurs permanents.
M. Beaulieu (Gérald) : Oui,
tout à fait.
M. Morin : Parfait. Je vous
remercie.
M. Beaulieu (Gérald) : Pour
ceux qui le veulent.
M. Morin : Oui, oui, bien sûr.
M. Beaulieu (Gérald) : On ne
prend pas de places. Pour ceux qui le veulent, et avec une collaboration avec
nos entreprises et nos organisations, parce qu'il n'y a pas seulement des
entreprises. Je vous ai parlé de commerces tout à l'heure. On parle aussi
d'organisations qui s'occupent de soigner nos enfants, qui s'occupent de donner
des soins à nos aînés, là. C'est des gens qui sont très importants dans notre
circuit ici.
M. Morin : Absolument. Il y
avait jusqu'à récemment un programme du gouvernement du Québec qui s'appelle le
PEQ, le Programme de l'expérience québécoise. Ça a été suspendu. Je comprends
qu'il n'y a pas eu de consultation avant la suspension, on a demandé à
plusieurs groupes. Quel est... Quel a été l'impact chez vous de ça? Est-ce que
vous en avez entendu parler? Est-ce que ça crée des inquiétudes? Puis est-ce
que vous souhaiteriez que ce programme-là soit réouvert?
M. Beaulieu (Gérald) : La
réponse, c'est oui aux deux questions. Oui, ça crée de l'inquiétude. Et oui,
nous souhaitons que le Programme d'expérience québécoise soit renouvelé et
maintenu.
M. Morin : Très bien. Je vous
remercie. M. le ministre a parlé aussi, je pense, d'un programme... d'un autre
programme, qui s'appelle le Programme de sélection des travailleurs qualifiés,
le PSTQ, qui est un nouveau programme. Est-ce qu'on vous a parlé de ce
programme-là? Puis est-ce que ça correspond à vos besoins dans votre région?
M. Beaulieu (Gérald) : Nous
avons pris connaissance de ce programme. Effectivement, c'est un programme qui
correspond mais pour une certaine partie de la main-d'oeuvre que nous avons
besoin, parce qu'on parle de personnes hautement qualifiées. Mais, comme M. le
ministre reconnaissait lui-même, on n'a pas besoin seulement d'ingénieurs ou de
gens qui ont des maîtrises ou doctorats, on a aussi besoin de travailleurs qui
sont en mesure de contribuer au développement de... manufacturier puis de nos
organisations dans la région.
M. Morin : Et je comprends de
vous que, finalement, le PEQ était un programme qui était mieux adapté à votre
réalité régionale.
M. Beaulieu (Gérald) : Bien,
qui permettait aux gens qui avaient une expérience régionale...
• (11 h 50) •
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : En terminant.
M. Beaulieu (Gérald) : ...de
pouvoir avoir une chance d'immigrer au... et de rester au Québec.
M. Morin : Parfait. Je vous
remercie beaucoup.
M. Beaulieu (Gérald) : Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) :
Merci, M. le député. On poursuit la discussion avec le député de Saint-Henri—Sainte-Anne
pour trois minutes 18 secondes.
M. Cliche-Rivard : Merci
beaucoup. Merci beaucoup pour votre présentation. Écoutez, je veux vous faire
part de situations qu'on... qui viennent souvent dans nos bureaux de comté, là.
Il y a un article du 19 septembre du Devoir dans lequel il y a une
entreprise, là, qui s'appelle Newrest, à Dorval, qui a dû licencier une
centaine de travailleurs étrangers temporaires. Puis ces gens-là étaient sur
des permis de travail fermés et se retrouvent finalement contraints de rentrer
dans leurs pays, alors qu'ils veulent rester ici travailler. Il y en a
plusieurs, là, des cas comme ça, de gens qui sont licenciés.
Est-ce qu'on devrait permettre une
facilitation, ou une voie d'accès, ou une voie simplifiée pour que ces
travailleurs-là puissent venir vous donner un coup de main, vous, en région,
plutôt que les condamner à rentrer, là, s'ils veulent rester au Québec pour
nous aider?
M. Beaulieu (Gérald) : Toute
formule qui va nous permettre de retenir des gens qui ont choisi le Québec pour
revenir en région, la réponse, c'est oui. Toute formule va être analysée, toute
formule va être appréciée pour faire en sorte qu'on conserve ces gens-là en
région. Le professeur Fortin, il faisait quatre recommandations, dont
une : il faut s'assurer qu'on respecte notre parole avec les gens avec qui
on s'est engagés, qui se sont engagés à venir vivre chez nous. Donc, il faut le
faire. Et nous, on pense que c'est plus qu'un devoir éthique, c'est aussi un
devoir moral. Et ça n'a rien à voir avec le légal, ça a à voir avec notre
capacité d'accueil, et on a besoin de cette main-d'œuvre-là. S'il n'y en a pas
besoin dans la région de Montréal, il y a d'autres régions qui vont être à bras
ouverts, prêtes...
M. Beaulieu (Gérald) : ...à
discuter pour accueillir ces gens-là, et on devrait faire tout ce qui est dans
notre possible pour réaliser ça.
M. Cliche-Rivard : Mais donc
je suis très content de voir la réponse. Là, je vous invite à les contacter
peut-être, ou on pourra faire le lien. Peut-être qu'il y a des procédures
qu'ils peuvent s'entreprendre pour que vous puissiez avoir accès à ces
travailleurs-là. Ils veulent rester ici puis ils sont contraints, avec leur
permis de travail fermé, de rentrer. Il y a d'autres discussions, justement,
puis j'aimerais ça vous entendre sur le permis de travail fermé notamment. Puis
il y a des régions qui nous ont parlé de permis de travail ouverts régionaux pour
qu'ils puissent avoir une facilitation, justement, en région, de changement
d'entreprise. Est-ce que vous avez déjà réfléchi ou discuté de ça de votre
côté?
M. Beaulieu (Gérald) : Nous
avons réfléchi, nous avons discuté avec les entreprises de notre région
concernant les permis de travail fermés. Certains y voient des avantages autant
pour le travailleur que pour les entreprises. On n'a pas encore de position
claire là-dessus. On est beaucoup plus inquiets présentement par rapport à la
réduction du seuil de 20 % à 10 % que sur la nature des contrats.
Donc, on va régler l'histoire du 20 % et, après ça, on verra comment on
peut discuter entre nous pour trouver la meilleure formule...
M. Cliche-Rivard : Parfait.
M. Beaulieu (Gérald) :
...faire en sorte que les deux formules puissent exister.
M. Cliche-Rivard : Dernière
question pour vous. La réduction du 20 à 10, est-ce que vous avez chiffré,
quantifié, c'était combien de travailleurs que vous allez perdre dans la
prochaine année?
M. Beaulieu (Gérald) : On ne
peut pas le quantifier pour l'instant, parce que les contrats ne se terminent
pas au même endroit, au même moment. Mais je peux vous parler d'une industrie
que je connais bien, l'industrie du secteur manufacturier de la construction,
qui fait des... de toits et de poutrelles, on parle de centaines de
travailleurs au moment où on vit une crise dans l'habitation. Donc, on parle de
plus de 200 travailleurs qui devront quitter le Québec, au cours des
prochains mois, si on ne réussit pas à rétablir le seuil à 20 %.
M. Cliche-Rivard : Merci
beaucoup.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, M. le député. Alors, M. le maire, on
poursuit avec le député d'Arthabaska, qui va être le dernier échange... aujourd'hui,
pardon, pour 3 min 18 s.
M. Boissonneault : Merci
beaucoup. Merci, M. Beaulieu, pour votre présentation. Juste pour revenir un
peu sur ce que vous avez dit à mon collègue, lorsque vous parlez de la
nécessité de respecter notre parole, qu'est-ce que vous voulez dire exactement,
est-ce que vous dites que ces gens-là qui se sont retrouvés dans la région se
sont fait promettre une résidence permanente?
M. Beaulieu (Gérald) : Non, ce
n'est pas ça que je vous dis. Je vous dis qu'on a entretenu un processus
d'immigration. Ces gens-là, on les a sélectionnés. Ils sont venus comme
travailleurs temporaires ou sous une autre formule, d'accord. Et, aujourd'hui,
on a... on continue d'avoir besoin de ces gens-là, d'accord. On leur a fait une
promesse : Venez vous installer chez nous. OK. Puis vous avez un contrat
de deux ans, chez nous, puis on va faire tout notre possible, nous, comme
région, pour vous garder. C'est clair que c'est ça qu'on veut. On veut que ces
gens-là restent, parce qu'on en a besoin. Ils sont formés. On a dépensé
beaucoup d'énergie et de sommes d'argent pour les faire venir, les installer,
les installer comme il faut, pour qu'ils vivent de façon décente. On voudrait
qu'ils restent, mais il n'y a pas eu de promesse de dire : On vous promet
la résidence. Ce n'est pas ça, mais on dit que, de façon morale et éthique, on
devrait trouver le maximum de solutions pour permettre aux gens qui veulent
rester dont on a besoin de rester.
M. Boissonneault : Mais c'est
juste parce que vous avez dit : Respectez notre parole. De quelle façon on
manque à notre parole, si ces gens-là qui avaient un contrat puis s'étaient dit
quand même que c'étaient des travailleurs temporaires? Juste pour être bien
clair, est-ce qu'il y a une fausse représentation? Est-ce qu'on leur a fait
croire quelque chose qui n'était pas vrai?
M. Beaulieu (Gérald) : Je me
suis trompé quand j'ai parlé de parole. OK. Donc, je m'excuse, mon expression
n'était pas bonne.
M. Boissonneault : Très bien.
Il n'y a pas d'enjeu.
M. Beaulieu (Gérald) : Ce
n'est pas ça que je voulais vous exprimer. Je ne pense pas qu'on manque à notre
parole... il faut être très conscient qu'il y a des conséquences importantes de
retourner ces gens-là quand nous en avons encore besoin.
M. Boissonneault : Dans votre
document, en page 7, vous parlez du Programme d'appui aux collectivités,
puis vous dites qu'il y a des actions proposées par les partenaires locaux qui
sont régulièrement refusées. Vous parlez, entre autres, de mesures pour
renforcer la cohérence territoriale. Qu'est-ce que vous voulez dire?
M. Beaulieu (Gérald) : Mais,
écoutez, danse tous... Vous savez, il n'y a pas une région qui est pareille.
Donc, ça vient encore avec toutes la discussion entourant la régionalisation et
les consultations avec nos organismes qui livrent ces programmes-là sur le
terrain. C'est nous qui connaissons nos territoires, c'est nous qui connaissons
nos besoins. Est-ce qu'on pourrait avoir, à l'intérieur de ces programmes-là,
une certaine latitude pour livrer ces programmes-là avec le maximum de
bénéfices pour les communautés et les gens qui en font partie?
M. Boissonneault : Donc,
trouvez-vous que vous avez manqué de soutien en matière d'immigration, en
général, soutien financier, accompagnement?
M. Beaulieu (Gérald) : Mais,
écoutez, ce n'est pas un secret pour personne qu'il manque de soutien. Pour
soutenir l'immigration, on a besoin d'investir davantage si on veut faire le
travail correctement. Je ne viens pas critiquer ce qu'on a eu dans le passé, je
me dis que, si on veut le faire correctement, il faut investir davantage, effectivement...
M. Boissonneault : Peut-être,
en terminant...
M. Beaulieu (Gérald) :
...maintenir la structure que nous avons, au moins, maintenir la structure que
nous avons puis, présentement, est un statut très précaire.
M. Boissonneault : Peut-être
rapidement, en terminant. Donc, si vous allez bien me résumer les obligations
des villes et MRC, en matière...
M. Boissonneault : ...en
matière d'accueil, de soutien de l'immigration.
M. Beaulieu (Gérald) : Écoutez,
moi, je vais vous parler de ce que je connais. Nous avons mis en place une
organisation qui s'appelle chez nous le SANAM et qui est supervisé par la MRC,
en collaboration avec le MIFI, qui fait en sorte de développer des programmes
d'accueil...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci.
M. Beaulieu (Gérald) : ...et
de francisation de nos immigrants.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci.
M. Boissonneault : Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, M. Beaulieu. Alors, c'est ce qui conclut
cette première audition. Permettez-moi, au nom des parlementaires, de vous
souhaiter une bonne journée.
Et, pour justement mes collègues, je vais
suspendre quelques instants, le temps de recevoir le prochain groupe.
(Suspension de la séance à 11 h 58)
(Reprise à 12 h 02)
La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) :
À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. Donc,
pour... comme seconde audition aujourd'hui, nous avons Drummond électrique qui
est représenté par M. Gerry Gagnon, directeur général, bienvenue, Mme Julie
Biron, directrice, Attraction et développement de talents. Nous avons également
M. Philippe Proulx, avocat en droit de l'immigration, ainsi que Mme Cindy
Virasack...
12 h (version non révisée)
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : ...Virasack, est-ce que j'ai bien prononcé votre nom, oui,
directrice, Ressources humaines, gestion de projets et communication, Métalus
inc. Alors, mesdames, messieurs, bienvenue à la commission. Vous allez avoir
une dizaine de minutes pour présenter l'essentiel de votre... votre mémoire,
vos recommandations. Puis, par la suite, on va en discuter avec les
parlementaires. Alors, le temps commence maintenant pour vous.
M. Gagnon (Gerry) : Alors,
bonjour, tout le monde? Gerry Gagnon, comme vous le disiez, directeur général
de Drummond économique. Je suis accompagné de Mme Julie Biron, de Maître Proulx
et également de Mme Virasack, qui... qui est directrice du développement
opérationnel et copropriétaire de l'entreprise Métalus à Drummondville, une
entreprise qui a été fondée en 1995, qui a 180... employés, donc une entreprise
de... de format intermédiaire qui travaille dans des assemblages mécanosoudés
de grandes dimensions, de petites dimensions, avec une différente complexité,
notamment dans des parties arrières d'autobus, d'ambulances. Donc, c'est ce qu'ils
fabriquent pour des manufacturiers québécois, donc un sous-traitant bien
reconnu.
Le secteur manufacturier génère un peu
plus de 13 % de l'économie du Québec. Selon la méthode de calcul, entre 45
et 65 milliards de dollars sont générés par le... par le secteur
manufacturier, et on peut dire qu'environ... pour chaque 10 emplois créés
en manufacturier se créent environ six emplois dans le domaine des services.
Donc, le secteur manufacturier est assurément un secteur moteur pour notre
économie. Et, en région, cette réalité-là est encore plus vraie. C'est le cas
de Drummondville, qui un... et le Centre-du-Québec, en fait, qui est une de ces
régions-là par excellence du secteur manufacturier, où le PIB manufacturier est
non seulement très élevé, mais le double de la moyenne nationale et où
30 % de nos emplois directs sont liés à ce secteur spécifique.
Donc, en région, nos entreprises font face
bien entendu aux pénuries de main-d'œuvre, les... les postes spécialisés, que
ce soient les machinistes, les électromécaniciens, les soudeurs, les tôliers.
Et, à Drummondville, l'économie tourne rond, il faut se le dire, là. Et, quand
on fait le bilan démographique, qui est positif au net depuis une décennie, on
accueille, et il y a des gens qui choisissent Drummondville annuellement.
Depuis les cinq dernières années, on parle de 2 250... personnes qui
choisissent Drummondville et qui arrivent et qui s'installent. Et ça, bien
entendu, nos entreprises, ils s'organisent pour accueillir, loger, franciser
leurs employés. La ville comprend bien également les enjeux que ça... ça cause
et la pression que ça met sur le système. Et d'ailleurs, la croissance...
engendre des défis au niveau des services, particulièrement sur le logement,
les soins de santé. Vous savez qu'on... on milite pour un hôpital régional.
Mais, sur les... sur le... le logement, c'est particulièrement important. La
SCHL rapporte d'ailleurs que le taux d'inoccupation en 2023 était à 0,5, c'est
dire à quel point c'est tendu au niveau du logement, mais malgré tout, en 2024,
par le dynamisme de la ville et la rapidité avec laquelle les permis ont été
présentés, on a eu une croissance et on... maintenant, le taux d'inoccupation
est à 1.5, donc... donc on a fait des gains.
Aussi, ce qui n'apparaît pas dans les
statistiques, c'est bien entendu les investissements que font nos entreprises
manufacturières pour pouvoir assurer leur... leur croissance. Je vous invite d'ailleurs
à questionner Mme Virasack sur ces... ces éléments-là qui... qui sont mis en
œuvre pour s'assurer de la croissance. Mais on a aussi considéré les coûts... d'opportunité
pour une entreprise. Et, encore là, l'entreprise a du potentiel d'affaires encore
plus, mais elle est un peu freinée par les... la situation dans le... laquelle
on se trouve.
Une des causes profondes de la pénurie, c'est
qu'au Québec on n'a pas arrivé à valoriser à sa juste valeur les métiers et la
formation professionnelle. Nos écoles professionnelles, les cégeps peinent à
recruter dans certains programmes qui servent à augmenter la productivité de
nos entreprises et qui servent à... à fournir l'automatisation de nos... de nos
usines. Les... Les étudiants également permettent de remplir des programmes et
des classes. On a des plateaux pour pouvoir former ces étudiants-là, mais dans
certains cas, on est obligés de former... de fermer des programmes qui
constituent la base des... des entreprises puis de l'économie du futur. Et là j'ai
été témoin, quand j'étais membre du CA du cégep de Drummondville, du moment où
on a dû fermer le programme d'électromécanicien. Donc, c'est eux qui branchent
les contrôleurs de nos machines, c'est eux qui branchent nos robots pour
permettre l'automatisation. Avec un taux de... de fécondité qui est bas, l'actuel,
l'immigration demeure le seul moteur exclusif à la croissance de la population
active du Québec. On a... Donc, on associe souvent les travailleurs temporaires
à une béquille...
M. Gagnon (Gerry) : ...permettant
d'éviter des investissements requis pour accroître la productivité. Mais la
majorité de nos entreprises investissent en automatisation d'une façon
importante et soutenue. Mme Virasack pourra vous en faire part un peu plus
tard. Toutefois, la main-d'œuvre qualifiée reste indispensable parce que tout
n'est pas automatisable et le savoir de nos travailleurs permet
l'automatisation de nos usines. Fermer le robinet dans le secteur de... dans
ces secteurs spécialisés ne crée pas le miracle, je vais appeler... ce que je
vais appeler le miracle de la productivité, il cause une spirale de
décroissance, à tout le moins, de décroissance pour nos économies régionales.
Nous savons qu'à terme le Québec... au Québec, l'amélioration de la productivité
restera notre cheval de bataille numéro un. Et on ne veut pas détourner le
regard par rapport à la productivité, mais détrompez-vous, si vous croyez que
l'immigration économique agit contre l'atteinte de cet objectif, en fait, elle
contribue à l'objectif. Plusieurs mémoires vous ont été déposés. Et, pour nos
entreprises, ce qui est nécessaire, c'est la prévisibilité dans les directives
provinciales et fédérales. Les changements fréquents et en apparence parfois
non concertés nuisent à la planification et la mise en place des projets. Donc,
on est dans une situation où ça ne bouge pas à la vitesse où ça devrait.
Nous demandons donc un meilleur arrimage
terrain avec les partenaires comme Drummond économique pour évaluer l'impact
réel des mesures sur les PME avant leur application. Rappelons-nous que nos PME
doivent composer avec des facteurs hors de leur contrôle, pandémie,
protectionnisme, mesures tarifaires, transition technologique accélérée,
intelligence artificielle 4.0, vieillissement démographique, et j'en passe. Ces
éléments rendent l'immigration économique encore plus critique et cruciale pour
nos entreprises. Jouer avec ce levier, c'est de mettre encore des bâtons dans
les roues, Métalus et à d'autres comme elle.
Donc, nous recommandons une clause de
droit acquis pour les TET déjà présents chez nous et dans les entreprises comme
Métalus. Une liste... Nous demandons également une liste des postes pour le
traitement simplifié pour les régions, la reconnaissance des professions en
pénurie selon les réalités régionales et une planification régionale des
cohortes étudiantes. Nous soutenons le seuil de 70 000 admissions permanentes
par année pour plus de 60 % d'immigrants économiques. Ces cibles sont
réalistes et nécessaires pour maintenir la vitalité économique et démographique
de nos régions.
Avant de passer la parole à Mme Biron, je
vous invite à approfondir, lors de la période d'échange, la réalité terrain
avec Mme Virasack et Me Proulx, qui, au quotidien, sur le terrain, répondent à
nos entreprises et gèrent nos travailleurs. On comprend que le gouvernement du
Canada a un impact majeur sur l'immigration, mais le MIFI joue un rôle
critique. Et nous vous demandons d'appuyer ces entreprises pour la prospérité
du Québec. Les politiques actuelles qui... bien que cohérentes au point de vue
théorique, ne tiennent pas compte de l'ensemble des impacts sur nos
entreprises, j'y ai fait allusion un peu plus tôt, les coûts d'opportunité,
mais également les coûts qui sont défrayés par les entreprises. Et donc ils ne
tiennent pas compte de l'ensemble des impacts sur nos entreprises qui se
sentent lésés par les décisions de nos deux paliers de gouvernement. Je passe
maintenant la parole à Mme Biron.
• (12 h 10) •
Mme Biron (Julie) : Merci
beaucoup. Bonjour à tous. Alors, moi, je vais vous faire un bref survol, en
fait, de nos actions puis de la réalité terrain, qu'est-ce qu'on entend, là,
quotidiennement de la part de nos entreprises. Parce que Drummond économique,
on est un organisme de développement économique d'abord, donc on ne travaille
pas, à la base, en immigration, mais on l'est devenu rapidement, parce qu'il y
a plusieurs années nos entreprises étaient tout simplement au désespoir, en
fait, puis... pour trouver des travailleurs qualifiés. Donc, il y a 10, 15 ans,
on a vraiment commencé à faire des initiatives. Puis, au début, c'était
vraiment au niveau emploi dans son sens large, on ne savait pas que ça allait
être l'immigration économique qui allait fonctionner pour nos entreprises,
mais, rapidement, c'est ce qu'on a constaté. Donc, des entreprises se sont
tournées vers des gens qui sont qualifiés. Et nous, comme on en faisait
mention, c'est très, très, très manufacturier, donc, c'était beaucoup axé sur
les métiers. Je me permets un parallèle en disant : l'électromécanicien
pour l'industrie manufacturière est le pendant de l'infirmière pour le secteur
de la santé. Donc, ce sont vraiment des postes névralgiques qu'on n'arrive pas
à trouver en région et l'immigration économique a vraiment réglé cette
situation-là. Donc, on est un organisme à but non lucratif. On a fait le choix
d'avoir un service complètement intégré qui va de l'organisation d'initiative
ou de recrutement à l'international autant pour les travailleurs que pour les
étudiants. On soutient aussi nos PME avec un service au niveau de
l'immigration...
Mme Biron (Julie) : ...et on
accompagne nos gens, les nouveaux travailleurs aussi à leur arrivée.
Quelques chiffres : On a accompagné
plus de 1 000 entreprises dans nos différentes initiatives au fil des
ans, on a contribué à 5 000 recrutements et on a... de ces 5 000
là, on en a accueilli quand même 1 000 dans notre région pour trouver des
logements, pour faire tout le support nécessaire pour leur intégration. Alors,
on a énormément d'expérience terrain puis ça nous donne une perspective
vraiment intéressante, autant du côté des entreprises que du côté des
candidats. Et, malgré le contexte actuel, on a décidé de poursuivre nos actions
à la demande des entreprises. Donc, on a construit un modèle, je pense, qui a
fait la différence dans la région.
À la question sur la régionalisation, on
se fait souvent demander : Bon, bien, on a des gens à Montréal et tout, et
je veux vous rassurer en vous disant qu'on continue de faire des initiatives de
régionalisation. On sait que c'est important. Mais pour être très honnête avec
vous, ce n'est pas là qu'on trouve des électromécaniciens puis ce n'est pas là
qu'on trouve des machinistes. Donc, on fait énormément d'efforts. Mais au
niveau des résultats, malheureusement, ils ne sont pas là pour les métiers plus
spécialisés. Donc, ça répond à une certaine clientèle, mais ça ne règle pas
tout le problème. Honnêtement, présentement on ne voit pas d'autre issue que
l'immigration économique. C'est un terme que je vais répéter souvent.
Donc, ce qu'on entend quotidiennement,
bien, moi, ce que je vois terrain, c'est vraiment des entreprises qui ont pris
leurs responsabilités. À la question sur la pression sur les services, je peux
vous dire que nos entreprises, c'est du bon monde. Ils ont fait leurs devoirs
en automatisation, ils intègrent leurs gens, ils trouvent des logements, ils
paient les épiceries. Même les syndicats font des grandes... ont réouvert des
fois des conventions pour permettre, là, vraiment une meilleure flexibilité
pour l'intégration des candidats. Donc, les devoirs sont faits à ce niveau-là.
L'impact pour les restrictions des PME en
région, c'est majeur. Ce qu'on entend quotidiennement, c'est des entreprises
frustrées, honnêtement, qui...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : ...vous arrêtez parce que vous avez...
Mme Biron (Julie) : J'arrive
dans mon meilleur moment.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Oui, mais ce n'est pas grave, on va... on va commencer les
échanges. Le ministre a pris de son temps pour vous laisser terminer, là, mais
on est rendu à pas loin de 12... 15, 12... 14 minutes, là.
Mme Biron (Julie) : C'est bon.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Alors, on va commencer les échanges avec le ministre. Il
vous reste 14 h 49.
M. Roberge : OK, très bien.
Merci. Oui, c'est ça... bien, je faisais signe à la présidente: On va la
laisser continuer sur le temps, mais, à un moment donné, je veux dire, je vais
manquer de temps, je ne pourrai plus échanger avec vous autres. Mais vous allez
avoir le temps, certainement, dans notre échange, de compléter avec ce que vous
voulez dire, on est là pour vous entendre essentiellement.
Je vais juste reprendre quelques points
que vous avez exposés, soit dans votre présentation ou dans le mémoire. Je ne
sais pas si vous étiez... vous avez eu connaissance de la première rencontre
qu'on a eue ce matin avec M. le préfet de la MRC de la Matanie qui nous parlait
un peu de la même réalité que vous, son désir de voir le gouvernement du Québec
bouger encore plus vers la régionalisation, de sa perspective de voir
l'immigration comme rafraîchissante, nécessaire dans la région, à la fois pour
la main-d'oeuvre, pour la vitalité de la région, pour la démographie de la
région. Et on va dans ce sens-là. Il nous a parlé particulièrement des
travailleurs étrangers temporaires puis de la demande quasi généralisée des
acteurs économiques et municipaux pour la clause grand-père pour que le fédéral
revoie sa politique.
J'ai déposé tout à l'heure, en commission,
la lettre que j'ai envoyée en juin aux deux ministres fédéraux, la ministre de
l'Immigration et la ministre de l'Emploi. Puis je me permets de ne pas refaire
la lecture au complet, mais la demande du gouvernement québécois au
gouvernement d'Ottawa, aux deux ministres depuis maintenant juin, juillet,
août, ça fait plusieurs mois, est très, très claire, là : Je vous demande
d'appliquer rapidement une mesure qui permettrait aux entreprises de maintenir
le nombre de TET qui contribuent présentement à la vitalité des régions du
Québec. Une telle mesure de type clause grand-père permettrait le
renouvellement des permis de travail des TET déjà au Québec, hors des régions
de Montréal et Laval. Je pense que c'est assez clair. Ce n'est pas nouveau.
Pour l'instant, ils n'ont pas donné suite.
Puis ça ne veut pas dire qu'on n'est pas déterminés à ramener la chose. Des
fois, moi, je dis : Ceux qui doutent de l'efficacité des demandes
répétées, pour moi, c'est comme de l'érosion. Regardez le rocher percé, puis
vous allez voir que, quand on frappe toujours au même endroit, on finit par
passer à travers même des murailles qui semblent résister au temps. Donc
j'espère qu'Ottawa, à un moment donné, va entendre raison puis on va arrêter
l'espèce de déperdition des travailleurs étrangers temporaires hors Montréal et
Laval.
Donc, dans notre cahier de propositions,
effectivement, hein, ce qui est proposé, pas décidé, mais proposé, c'est une
réduction du nombre de TET à l'échelle...
M. Roberge : ...québécoise.
C'est environ 10 %, là, de 72 000 à 65 000 sur quatre ans. Donc,
on est... On n'est pas, là, dans une mesure extrême, mais on précise que cette
réduction, pour nous, ne devrait s'opérer qu'à Montréal et à Laval. Et on
n'embarque pas dans la logique du gouvernement fédéral d'y aller avec la
fonction du taux de chômage. Pour nous, c'est régional, Montréal, Laval versus
toutes la... toutes les régions. On a hâte qu'ils embarquent avec nous
là-dedans. Je pense que ça serait vu comme une bouffée d'air frais dans votre
région. Mais est-ce que votre posture, c'est celle que je présente en ce moment
parce que vous ai entendu parler de clause grand-père ou si c'est une hausse
généralisée du nombre de TET sur le territoire québécois ou dans votre région.
M. Proulx (Philippe) :
...la réponse au niveau de la... Ce n'est pas nécessairement une hausse qu'on
propose du niveau de résidence temporaire ou de TET globalement, c'est plus un
maintien, quitte à mieux cibler les besoins puis envoyer les résidents
temporaires ou les accueillir là où ils sont vraiment nécessaires. Donc, comme
vous l'avez mentionné davantage en région, en particulier dans notre coin, au
Centre-du-Québec. Donc, ça ne représenterait pas une hausse, mais plus un
maintien. Et au niveau de la clause grand-père, oui, c'est sensiblement ce
qu'on propose et ce qui nous est demandé aussi par l'écrasante majorité des
entreprises avec lesquelles on communique au quotidien. Le seul autre aspect
que j'apporterais, c'est que oui, évidemment, par rapport à l'ensemble de
l'enjeu de la clause des droits acquis, le gouvernement fédéral a le plus gros
des leviers, disons-le comme ça, mais il y a quand même la procédure de
traitement simplifiée avec la fameuse liste des postes qui sont admissibles à
un traitement simplifié sur lequel le gouvernement du Québec a pratiquement
l'entièreté du contrôle. Et c'est une liste à partir de cette année qui est
passée de 250 postes à environ une cinquantaine de postes. Et ça a un
impact quand même pour le renouvellement des permis de travail des travailleurs
qui sont déjà installés en région. Ça a un impact et ce serait une façon
simple, efficace et rapide de donner un coup de main et de bonifier cette
liste-là selon les besoins en région.
• (12 h 20) •
M. Roberge : Effectivement
cette liste existe toujours. Vous avez raison de dire qu'on est revenu à des
niveaux, je dirais, je veux dire plus raisonnables parce qu'on regarde au fil
des années, on avait à peu près le niveau qu'on a en ce moment, mais il y a eu
un moment où, en réaction à une espèce de rebond postpandémique, il y a eu, je
vous dirais, une augmentation soudaine et temporaire. Et là on est revenus sur
une liste qui est sur ce qu'on dit, là, neuf mois, là, l'opération
main-d'œuvre, où il y a des secteurs qui sont ciblés parce qu'il faut le dire,
là, à la grandeur du Québec. Puis je sais que c'est différent d'une ville à
l'autre, d'une région à l'autre. Là, je regarde de manière macro, on a
l'impression que, selon les réalités régionales, ça peut s'appliquer ou pas.
Mais de manière générale, notre capacité d'accueil, elle est dépassée, c'est-à-dire
qu'on n'est pas capables d'avoir assez d'enseignants qualifiés dans notre
réseau scolaire à la grandeur du Québec. On a un taux de chômage chez les
jeunes qui est en forte croissance. Les gens vont nous dire : Oui, le taux
de chômage chez les jeunes est plus élevé, on va dire, à 20 ans qu'à
45 ans, ça a toujours été vrai. Mais la hausse de la dernière année... des
deux dernières années, est plus soudaine et plus forte. Et l'écart entre le
taux de chômage chez les jeunes et pour la population adulte est plus grand que
d'habitude. Donc, on n'est pas dans une situation normale. Donc quand on dit
qu'on n'a plus suffisamment d'enseignants dans nos classes, qu'on n'a plus
suffisamment de locaux pour les élèves, que le taux de chômage chez les jeunes
est très élevé, que le taux de logements disponibles est très bas et que ceux
qui sont disponibles sont très chers, bien, il faut qu'on dise : On va y
aller avec parcimonie, avec l'arrivée de nouvelles personnes. Donc, on n'est
pas fermé à l'immigration. La question c'est combien de plus, qui et où on veut
les installer, ces immigrants francophones? Puis la bonne nouvelle, c'est que
c'est beaucoup, notamment chez vous, qu'on veut qu'ils s'installent. Par
contre, la question, ça peut être combien vous suggérez
70 000 permanents? Est-ce que, dans ces 70 000, vous comptez
l'arrivée de demandeurs d'asile qui restent ici eux aussi?
M. Proulx (Philippe) : Bien,
c'est certain que dans le 70 000, évidemment, il va y avoir une
proportion, naturellement, comme ça a toujours été le cas, d'immigration
humanitaire, là, afin que le Québec puis la diversité...
M. Proulx (Philippe) : ...ses
engagements à ce niveau-là. Par contre, avec le seuil à 70 000, ce qu'on
considère, c'est que ça permettrait au gouvernement de remplir ses engagements,
oui, au niveau humanitaire, mais aussi de maintenir une immigration économique
forte puis de concilier aussi d'autres objectifs gouvernementaux en matière
d'immigration, comme la réduction des résidents temporaires qui permettrait aux
gens de passer d'un statut temporaire à un statut permanent, le maintien de
l'immigration économique forte, je l'ai mentionné, de se donner aussi une marge
de manœuvre pour aller sélectionner des talents particuliers à l'extérieur du
Canada, ce qu'on n'aurait pas nécessairement avec un seuil à 25, 35 ou 45 000,
à notre avis.
M. Gagnon (Gerry) : ...
M. Roberge : Le... Allez-y,
bien sûr.
M. Gagnon (Gerry) : ...On
avait aussi mentionné qu'on voulait au moins, au moins 60 % qui était
dédié à l'immigration économique dans le 70 000. Donc, ça donne une proportion
entre les deux.
M. Roberge : D'accord. Bien,
dans nos orientations, on a, c'est-à-dire dans les immigrants permanents que
nous choisissons, un seuil minimum de 60 % en économique. Donc, pour nous,
c'est un plancher. Si on peut faire mieux, on va le faire à chaque année,
comptez sur nous. Puis on a l'orientation que vous avez aussi de dire...
d'avoir un maximum de personnes qui sont déjà sur le territoire, qui parlent
français, qui occupent un emploi, qui sont... des très, très grands centres.
Donc, on a une espèce de transfert de statut vers permanent. Donc, ça, c'est
des orientations sur lesquelles on s'entend.
Mais je veux revenir sur le 70 000. Parce
que planifier en termes d'immigration, c'est beaucoup de la démographie. Puis
je sais que, derrière chaque chiffre, il y a des milliers de personnes, c'est
des visages, c'est du vrai monde, mais, quand on fait une planification sur
trois, quatre, cinq ans, il faut regarder les grands chiffres. C'est ça
planifier en termes démographiques. Vous revenez à 70 000, mais, toutes choses
étant égales par ailleurs, je ne vois pas comment le fédéral... en tout cas, il
n'est pas enligné pour changer, là. Cette année, il va nous arriver à peu près
40 000 demandeurs d'asile, par-dessus nos 60 quelque 1
000 permanents. Ça fait que 2025, là, nous, là, on... cette année, c'est
une année exceptionnelle, parce qu'il y avait le PEQ, hors seuil. On va finir
autour de 64 000 avec plus 60 % d'économique, mais, par-dessus ça, il va
nous arriver 40 000 demandeurs d'asile. Ça fait qu'au net c'est 100
000 personnes qui arrivent sur le territoire québécois dans un contexte où
on n'a pas de prof, pas de logement, de la difficulté à soigner tout le monde
puis un problème d'accessibilité au logement. Si vous me demandez : Ça
vous tente-tu de continuer, M. le ministre?, je vais dire «no way», pour être
bien sûr que tout le monde le comprenne à Ottawa, non. Quand on est en
dérapage, qu'est-ce qu'on fait, on applique sur les freins, on revient sur la
route. Si je vous écoute, avec 70 000 permanents l'an prochain, puis qu'Ottawa
nous ramène encore 40 000 ou 50 000 temporaires, ça veut dire quoi, 110 000,
120 000 personnes de plus, encore, ne pensez-vous pas que vos membres et même
vos enfants, qui sont peut-être dans la vingtaine, vont dire : Là, c'est
parce que je n'ai pas accès à un logement, je n'ai pas accès à la propriété, ne
pensez-vous pas qu'on crée un problème ou qu'on l'aggrave?
Mme Biron (Julie) : Bien, en
fait, nous, on n'est pas là pour juger de l'humanité. Ce qu'on constate sur le
terrain, c'est qu'il va en manquer, des économiques. Donc, le chiffre global,
pour nous, c'est vraiment difficile, vraiment, de l'évaluer. Mais on s'est basé
vraiment sur une étude pour le volet plus économique, puis ce qu'on sait, c'est
que, si, justement, la proportion d'humanitaire est ce que vous dites, bien, on
va avoir un sérieux problème dans l'économique. Donc, nous, on reste vraiment
avec notre chapeau développeur économique puis on va militer pour. Le reste,
après ça, bien, c'est correct, mais on n'a pas à juger de ça. Je...
M. Roberge : Non, mais
c'est... mais c'est correct. Vous arrivez, vous parlez au ton de vos membres,
vous militez pour quelque chose, mais vous comprenez que nous, on doit avoir
une vision 360, la vitalité économique, l'enrichissement du Québec, la
production, oui, mais je veux dire plus la productivité que la production, puis
le PIB, oui, mais plus le PIB par habitant que le PIB national. Moi, je veux
dire, j'aime mieux qu'on soit 9 millions suffisamment riches pour se payer
des soins de santé que 12 millions sans être capables de se payer des
soins de santé, je veux dire... «Think big», là, c'était la devise de quelqu'un
qui n'est pas mon modèle.
M. Gagnon (Gerry) : Bien,
c'est sûr que... Bien, c'est sûr que, pour payer ces services-là et accueillir,
une des solutions, c'est effectivement l'immigration, aller chercher les
professeurs, les médecins, les infirmières, les préposés. Et, présentement, une
entreprise comme Métalus serait en mesure de contribuer encore plus au
financement de nos services et de nos infrastructures. Ils laissent des sommes
sur la table.
Mme Virasack (Cindy) : Oui.
Bien, en fait, si je peux me permettre, là, effectivement, là, je vais...
Mme Virasack (Cindy) : ...vous
expliquer. Puis je laisse vraiment les chiffres puis les données à mes
collègues qui sont vraiment très, très bons là-dedans. Je vais vous expliquer
ce que... ce qui se passe directement sur le terrain. Parce que, oui,
probablement qu'il y a des gens qui sont disponibles, la seule chose, c'est
qu'ils n'ont pas nécessairement les compétences requises pour venir travailler
chez nous. Nous... Métalus, on fait du recrutement international depuis 2017.
Je me suis impliquée personnellement dans des programmes de formation dans les
écoles. Ce qu'on veut, c'est valoriser, en fait, tous les métiers, les métiers
DEP, là, donc les métiers... qui sont essentiels aux manufacturiers. Donc, on
est dans les programmes COUD. Ça nous coûte quand même, là, plus de
60 000 $ à accueillir quelqu'un qui fait du programme COUD chez nous.
Puis on le fait, mais les écoles sont vides. Donc là, un moment donné, je fais
partie des entreprises qui sont allées voir Julie et qui a dit : Là... Mme
Biron, pardon, donc : Mme Biron, je lui ai dit, je manque de monde, je ne
peux pas produire, je ne peux pas croître l'entreprise, on n'est pas capables
de... d'ouvrir nos... nos quarts de travail pour avoir des... pour... pour
pouvoir servir, en fait, nos clients. Donc... Puis, tu sais, je veux juste dire
que nous, là, on met beaucoup d'effort quand on accueille les gens, là. Donc,
non seulement c'est de l'administratif, c'est beaucoup d'administratif, là.
C'est un jeu de cartes assez mêlées qu'on doit... qu'on doit s'y
retrouver : les lois changent, c'est flou, on pose des questions, on n'a
pas de réponse, on appelle. Tu sais, même les agents, malheureusement, ne
peuvent même pas nous répondre, là. Ensuite, de ça, bien évidemment, vient le
temps de les accueillir. Donc, vous comprenez qu'on a accueilli quand même
beaucoup de gens. On a eu des bons coups, on a eu des moins bons coups. On
essaie de vraiment les supporter directement dans leur pays. Donc, on fait de
la formation vraiment à long terme, bien avant qu'ils arrivent au Québec. On
s'occupe de leur famille. On s'occupe, en fait, de la formation, des écoles,
les épiceries, les pharmacies. Tu sais, ça nous prend beaucoup, beaucoup de
temps, là.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : En terminant.
Mme Virasack (Cindy) : Oui.
M. Roberge : Bien, je...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : En terminant.
M. Roberge : Merci. Je veux
juste dire que je trouve ça intéressant parce que ce que j'entends c'est que
dans votre cas, c'est vraiment une solution de dernier recours. Puis on est
précisément sur... répondre à un besoin très précis. Je veux dire, on ne
s'oppose pas à ça. Merci beaucoup pour votre présentation à tous les quatre.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci. Merci, M. le ministre. Avant de poursuivre, je vous
annonce le dépôt dans le... dans Greffier, là, de... du document de la lettre
du ministre à son homologue au fédéral. Donc, elle va être disponible pour
publication dès maintenant. Alors, on poursuit avec le député de l'opposition
officielle pour neuf minutes 54 secondes.
M. Morin : Merci, Mme la
Présidente. M. Gagnon, Mme Biron, Maître Proulx, Mme Virasack, bonjour. Merci
d'être là. Merci pour votre... votre mémoire. Les régions, c'est... c'est
fondamental, c'est... c'est important pour... pour le Québec, pour notre
développement. Qu'est-ce que vous pensez d'une... de l'idée d'une planification
régionale ou de forums régionaux avec les... les forces vives d'une région pour
mieux planifier l'immigration?
• (12 h 30) •
M. Gagnon (Gerry) : Je vais
me permettre de dire en... Puis les... les collègues vont pouvoir compléter,
là. Mais on... on le mentionne dans la présentation initiale, qu'on voulait
être inclus dans la... la validation des... des propositions pour essayer de
mitiger un peu l'impact économique, c'est notre... notre mandat à nous, et...
et voir à quel point on est en mesure... d'atterrir les... lesdites mesures.
Donc, c'est pour ça qu'on le voit positivement, cette idée-là de participer à
cette réflexion-là sur une base régulière, en fait, juste pour parler de prévisibilité.
Ça nous aiderait également à relayer le message à nos entreprises.
M. Morin : Donc, je comprends
que si l'immigration était planifiée régionalement avec une décentralisation,
et qu'on vous a invité à participer à ces tables-là, c'est quelque chose que
vous recevriez avec beaucoup d'intérêt. C'est ce que je comprends?
M. Gagnon (Gerry) : C'est sûr
que lorsque le gouvernement nous sollicite pour des consultations, on est tout
le temps les premiers à dire oui, parce qu'on pense qu'on... qu'on possède un
des morceaux ou une des facettes de... de l'immigration économique.
M. Morin : Très bien. Je
vous... Je vous remercie. M. le ministre parle beaucoup du gouvernement
fédéral, moi, je vais me concentrer sur le gouvernement du Québec, si vous
permettez. Parce que je comprends que vous avez des temporaires, vous en avez
besoin, mais il y a aussi des permanents. Le Québec a un rôle important à jouer
là-dedans. Vous avez parlé, Me Proulx, de la liste de simplifier du
gouvernement du Québec, pouvez-vous nous en dire davantage? Comment le Québec
pourrait vous aider dans la situation actuelle?
M. Proulx (Philippe) : Bien,
en fait, juste à titre de rappel, la liste des postes en traitement simplifié,
c'est une liste qui est établie par le MIFI puis fournie ensuite...
12 h 30 (version non révisée)
M. Proulx (Philippe) : ...Services
Canada pour identifier des postes qui sont en pénurie de main-d'oeuvre
chronique finalement. Puis, ce que ça a pour effet quand les postes sont inclus
sur cette liste-là, c'est que ça vient faciliter, en quelque sorte, le
processus de recrutement puis d'obtention d'un permis de travail pour les
travailleurs étrangers qui vont occuper des postes sur cette liste-là.
Donc, comme je le mentionnais, c'est une
liste qui est passée de 250 à 50 postes cette année puis on a vu l'impact
sur le terrain. C'est beaucoup plus compliqué pour les entreprises, non
seulement de recruter, mais de maintenir le personnel en poste, alors que c'est
du personnel qui est déjà installé en région, qui est francisé, qui sont
intégrés aussi dans nos villes en région. Alors, c'est quelque chose qui
complique la situation, alors que ce serait simple puis rapide, efficace de
bonifier cette liste-là puis peut être pas, comme M. le ministre le
mentionnait, de la ramener à 250. Peut-être que c'était trop élevé puis il y a un
rééquilibrage à faire, mais peut-être de trouver une solution quelque part
entre les deux. Puis, d'inclure certains postes, je pense entre autres à des
postes d'opérateurs qui sont en pénurie chronique, mais qui ne se retrouvent
plus sur cette liste-là, aux yeux de plusieurs entreprises à qui on parle au
quotidien, c'est un non-sens, là.
M. Morin : Puis ma
compréhension, c'est que c'est le gouvernement du Québec qui a réduit la liste...
M. Proulx (Philippe) : Oui,
ils ont la liste.
M. Morin : ...ce n'est pas le
gouvernement fédéral, là.
M. Proulx (Philippe) : Non,
non, non, tout à fait.
M. Morin : Puis, demain
matin, le gouvernement du Québec pourrait la réouvrir, ce n'est pas le
gouvernement fédéral.
M. Proulx (Philippe) : Exactement.
M. Morin : Puis, est-ce que
ça vous aiderait?
M. Proulx (Philippe) : Ça
nous aiderait, puis on comprend en même temps, là... on comprend les défis qui
sont posés par l'augmentation rapide du nombre de résidents temporaires puis l'ensemble
des enjeux avec lesquels le gouvernement doit jongler. Une solution à ça, ce
serait peut-être d'avoir certaines exemptions ou pas nécessairement plusieurs
listes, mais certains postes qui pourraient être en traitements simplifiés en
région, c'est-à-dire à l'extérieur, essentiellement, de Montréal et Laval, puis
qui ne seraient pas dans ces territoires-là. Ça, c'est quelque chose qui
pourrait nous aider, ou tout simplement à bonifier, à l'échelle du Québec, le nombre
de postes qui sont inclus sur la liste. Oui, clairement, ça nous aiderait.
M. Morin : Ça, je comprends
que le gouvernement du Québec peut le faire demain matin, là.
M. Proulx (Philippe) : Oui.
M. Morin : Ils n'ont pas
besoin de personne pour ça, là.
M. Proulx (Philippe) : Non.
M. Morin : Puis ça vous
aiderait puis ça aiderait l'ensemble des régions du Québec.
M. Proulx (Philippe) : Tout à
fait.
M. Morin : Mais particulièrement
la vôtre. Je vous remercie. Je vous remercie beaucoup.
Autre élément. Dans votre mémoire, puis M.
le ministre y a fait référence, à la page 16, vous êtes d'accord avec l'approche
suggérée par la Chaire de recherche Jacques Parizeau pour l'établissement d'un
seuil d'immigration permanente à 70 000 par année. Quand on regarde le
cahier de consultation du gouvernement, le scénario 2A, et on verra... on
verra le scénario qui sera, en fait, retenu, mais mon collègue de Saint-Henri—Sainte-Anne
a déjà fait quelques interventions à l'effet que c'est peut-être celui-là qui
va être retenu, mais on verra, on verra, la cible, c'est 25 000 pour l'ensemble
de l'immigration, puis, dans le domaine économique, on parle de 15 000. Si
c'est le scénario qui est retenu, c'est quoi, l'impact chez vous?
M. Proulx (Philippe) : Bien,
un des impacts majeurs, c'est que les entreprises de chez nous vont perdre des
travailleurs qui sont déjà installés, comme je le mentionnais tantôt, qui sont
francisés, qui sont bien intégrés socialement, économiquement, qui sont là, là.
Puis, tu sais, de leur permettre de passer d'un statut temporaire à un statut
permanent, ça n'entraînerait pas un impact supplémentaire sur les services
sociaux parce qu'ils sont déjà là, ils sont déjà intégrés puis ils contribuent
également au financement de ces services-là. Donc, ce serait un peu bête de
perdre ces gens-là, tout simplement parce qu'on maintient un seuil à 25 000
puis à 15 000 d'immigrants économiques.
M. Morin : Oui, parce qu'il y
a un scénario à 35 000 aussi, qui, je pense, est aussi le positionnement
dans son document du Parti québécois. Donc, je comprends que ça aura un impact
néfaste. Mme Biron, vous voulez rajouter quelque chose?
Mme Biron (Julie) : L'impact,
là, je vais vous donner un exemple concret d'une entreprise ici que tout le
monde connaît, je ne la nommerai pas là, mais avec les restrictions qui sont en
vigueur actuellement, donc il y a des entreprises sont obligées de licencier,
en fait, du personnel qualifié à leur grand désarroi. Tout le monde est
heureux, le travailleur est heureux, l'entreprise est heureuse et on doit
malheureusement mettre fin parce qu'ils ne peuvent pas renouveler. Cette
entreprise-là me racontait qu'elle a dû licencier 10 personnes, et elle a
vérifié avec son agence de voyages, ils ont payé les billets d'avion, et
combien ont vraiment embarqué dans l'avion? La réponse, c'est zéro. Donc, une
des réponses que je vais vous donner aujourd'hui, c'est que ça va créer une
pression énorme sur le système...
Mme Biron (Julie) : ...puis
des drames humains puis, tu sais, c'est vers ça qu'on s'en va. Donc, la logique
en arrière, on est comme... les gens... les entreprises intègrent l'argent, les
gens travaillent, tout le monde est consentant, tout le monde est heureux, ça
fonctionne bien. Pourquoi, pourquoi on doit mettre fin à cette relation-là qui
fonctionne bien et on va se créer d'autres problèmes sociaux par la suite?
Mme Virasack (Cindy) : Si je
peux me permettre...
M. Morin : Oui, bien sûr.
Mme Virasack (Cindy) : ...en
fait, nous, dans notre entreprise, on a des... évidemment, puis on calcule, en
fait, le coût de départ des employés. Ça fait que chaque employé, en fait, qui
quitterait, qui devrait quitter, ça coûterait 120 000 $ à
l'entreprise pour chacune, puis sans compter le coût d'opportunité, en fait, le
prix, les pertes d'opportunité de plus ou moins, là, entre 280 000,
300 000 qu'on perdrait, en fait, comme entreprise. Donc, tu sais, pour
nous, en fait, former une personne, c'est entre un an et deux ans, donc, même
les permis, c'est ça que j'expliquais, même les permis, c'est assez court.
Donc, quand ils sont vraiment bons, ça va bien, comme Mme Biron dit, on est
heureux, on est content, on veut les conserver, et là on est dans l'obligation
qu'ils quittent parce que ça nous coûte de l'argent. Sans compter que là on est
obligé de stopper la croissance, on réduit même les commandes des... de nos
clients. Donc, tu sais, actuellement, on est en train de réduire les commandes,
on est... Oui.
M. Morin : Non, mais ça,
c'est très important ce que vous dites. Donc, ça, je comprends la réduction de
vos commandes, ça, vous le vivez. Maintenant, ce n'est pas hypothétique, c'est
l'impact de ce que vous avez maintenant.
Mme Virasack (Cindy) : Déjà.
En fait, effectivement, puis, tu sais, si je peux me permettre, je suis quand
même retournée en mission de recrutement, parce que malgré toutes les réformes,
malgré toutes les lois qui changent si, demain matin, j'ai des tauliers, des
soudeurs qui quittent, les écoles sont vides, donc, je n'ai pas personne pour
les remplacer. Puis, tu sais, on parle des tauliers, des soudeurs, mais, honnêtement,
même des journaliers, il en manque. Donc, tu sais, je vous mets au défi de
recruter des gens sur un plancher de production. Là, c'est extrêmement
difficile. Des gens qui sont compétents, qui sont à l'heure, qui sont
ponctuels, assidus, etc., ce n'est vraiment pas facile.
M. Morin : Je vous comprends,
là, vous parlez à un convaincu. Ça fait que ça, ce n'est pas un problème.
Mme Virasack (Cindy) :
Excusez.
M. Morin : Non, non, mais je
vous en prie, parce que j'ai fait les régions...
La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) :
En terminant.
M. Morin : ...puis c'est ce
que c'est ce que j'entends. Ça vous coûte combien, le recrutement?
Mme Virasack (Cindy) : Bien,
en fait, je l'ai calculé en termes d'heures, là, pour un TET... Bien, en
fait....
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Je dois vous arrêter...
M. Morin : 180 heures.
Mme Virasack (Cindy) :
180 heures...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : ...je dois vous arrêter. On est rendus à... au deuxième
groupe de l'opposition, 3 min 18 s. Allez-y.
M. Cliche-Rivard : Merci
beaucoup pour votre présentation. Je lisais vos recommandations. Vous parlez du
PSTQ, mais je n'ai pas lu de recommandation sur le PEQ, le Programme de
l'expérience québécoise. Puis, nous, on avait mis au jeu, notamment, il y a
deux ans, je pense, un PEQ régionalisation où on pourrait faciliter justement
la résidence permanente en région, peut-être de faire 12 mois au lieu de
24, par exemple, pour la qualification de travail, puis élargir à d'autres
CNP... aujourd'hui. Est-ce que vous seriez ouvert à une proposition comme ça
qui permettrait l'attractivité de nos travailleurs étrangers en région?
M. Proulx (Philippe) : Tout à
fait. C'est quelque chose qui pourrait aider aussi à maintenir le personnel qui
est déjà intégré en région. Puis on avait mentionné, au niveau du PSTQ, un
12 mois en région versus un 24 mois, mais le même principe, au niveau
du PEQ, serait excellent.
• (12 h 40) •
M. Cliche-Rivard : Excellent.
Merci beaucoup. Les nouveaux chiffres, c'est qu'il y a
145 000 personnes déjà sélectionnées en inventaire, dans les
catégories, de manière cumulée. Si on choisissait le programme ou le scénario à
25 000 du ministre, qu'est-ce que ça ferait, ça, avec 145 000 personnes
déjà dans la file d'attente?
M. Proulx (Philippe) : Bien,
c'est ça, c'est que ça crée, finalement, un goulot d'étranglement qui empêche
les gens qui sont dans un statut temporaire de devenir résident permanent, ce
qui peut entraîner des pertes d'emploi. Puis ça nuit aussi à l'accomplissement
des différents objectifs du gouvernement qui sont de réduire, oui, l'immigration
temporaire, mais de recruter des talents spécialisés à l'extérieur. Ça enlève
de la marge de manœuvre, finalement, il y a les obligations aussi au niveau
humanitaire.
M. Cliche-Rivard : Dans ce
temps-là, c'est aussi plus de renouvellement de permis de votre part, c'est
plus d'obligations illustratives, c'est plus de complexité sur le terrain.
M. Proulx (Philippe) : Oui,
oui, en particulier dans un contexte où les permis doivent être renouvelés à
chaque année, c'est énorme. C'est un problème administratif très, très
important pour la très grande majorité des entreprises qu'on côtoie au
quotidien.
M. Cliche-Rivard : J'ai parlé
tantôt de l'exemple de l'entreprise Newrest à Dorval, qui a dû licencier
500 travailleurs, puis il y en a 100 là-dedans qui sont issus de
l'immigration, qui veulent rester, qui veulent travailler, qui ont des
compétences. Est-ce qu'on ne devrait pas faciliter le transfert de travailleurs
qui sont disposés à rester puis qui sont déjà qualifiés dans des cas comme ça?
M. Proulx (Philippe) : Bien,
comme Mme Biron le disait tantôt, oui, la réponse courte à votre question,
clairement, puis il y a des efforts qui ont été faits, en ce sens-là, pour
avoir une migration interrégionale, j'ai envie de dire...
M. Proulx (Philippe) :
...malheureusement, de notre côté, ces efforts-là n'ont pas porté fruit ou pas
encore. Parce qu'on dirait qu'une fois que les gens sont déjà installés dans
une région, dans un secteur au Québec, ils n'ont pas tendance à bouger. Donc,
c'est ça le défi pour nous en région.
M. Cliche-Rivard : Parce
qu'il y a des experts spécialistes, puis il y a des articles de Radio-Canada, notamment,
là, sur le recrutement d'étrangers qui nous disaient : On en a des gens
ici qui combleraient les pénuries, notamment de soudeurs, là, dans l'article...
qui sont disponibles ici, mais à qui on refuse de renouveler le permis. Puis là
après ça, on fait des entreprises ou des missions de recrutement à l'étranger.
C'est comme un non-sens finalement, alors que ces gens-là sont déjà ici, qui
répondent à un besoin puis ils ne sont pas capables de renouveler leur permis,
on s'entend?
Mme Biron (Julie) : J'étais
avec des entreprises au moment où on a lu l'article en question et les
entreprises, spontanément ont dit : Ah oui? On aimerait ça qu'ils nous
trouvent juste cinq électromécaniciens. Tu sais, ça a été comme...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : En terminant.
Mme Biron (Julie) : C'est un
peu utopique pour certaines catégories de métiers... de métiers.
M. Cliche-Rivard : Bien, je
pense qu'il y a peut-être un meilleur arrimage quand même à essayer de faire.
Une voix : Tout à fait.
Mme Biron (Julie) : Oui, puis
on va continuer de le faire ici. Oui.
M. Cliche-Rivard : Parfait.
Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci, merci beaucoup. On termine avec le député
d'Arthabaska. Trois minutes, 18 secondes.
M. Boissonneault : Merci, Mme
la Présidente. Merci pour votre présentation. Moi, je prends un pas de recul,
puis j'essaie juste de réconcilier deux choses, là. Parce que j'essaie de
m'expliquer en quoi les choix du Canada en matière d'immigration, qui ont quand
même été particuliers, a permis d'aider les entreprises ici, d'aider notre
productivité, d'améliorer les choses. On comprend que, depuis 2015, voire
depuis 2019, même dans le cas du Québec, il y a eu une augmentation importante
des seuils d'immigration permanents et de l'immigration temporaire. En fait,
une augmentation de 500 % pour l'immigration temporaire entre 2019 et
2024. Puis, pour ce qui est des seuils d'immigration permanents, c'est à peu
près le plus haut niveau en Occident, c'est 10 fois celui de la France,
c'est beaucoup plus élevé que les États-Unis. Et pourtant on est dans une
situation où, on en parlait tout à l'heure, il y a des bris de service, pénurie
de logements et surtout, surtout, la croissance du PIB du Canada par habitant
est à peu près nulle, la plus basse du G7 et on n'a pas réglé la pénurie de
main-d'œuvre. Donc, je ne sais pas comment vous expliquez ça. On a fait... on a
fait au Canada le choix de l'immigration depuis 2015 et de façon assez radicale
si on regarde ce qui s'est passé dans le monde et ce n'est pas assez, en
Ontario... puis en termes d'immigration, ils ont augmenté aussi les seuils
énormément depuis encore plus longtemps. Puis ça n'a pas amélioré non plus.
Donc, comment... est-ce qu'il y a une réflexion à y avoir sur nos... notre
économie, nos entreprises?
M. Gagnon (Gerry) : La
pression vient de toutes parts. De toute évidence, elle vient des demandeurs
d'asile également. Bien, l'immigration économique reste malgré tout le seul levier
de croissance économique qu'on juge raisonnable. Si on n'est pas en mesure de
maintenir nos entreprises à leur plein potentiel, et lorsqu'on parle de
fonds... de postes spécialisés, si on n'est pas capable d'augmenter notre
productivité, qui passe notamment par ces emplois techniques, on n'y arrivera
tout simplement pas, de mettre un frein, encore une fois, ça va nous emmener
dans une spirale qui descend au point de vue économique. Et ça, ça ne sert
personne, ça ne sert pas le Québec.
M. Boissonneault : Bien, en
même temps, on a les économistes qui sont venus ici, qui nous ont dit qu'on ne
peut pas croire que l'immigration est la solution à la pénurie de main-d'œuvre.
Parce qu'essentiellement, quand des gens viennent ici, ils vont venir avec leur
famille, ils vont venir avec des... avec, bon, des... leurs grands-parents, les
enfants, ils vont consommer des biens et des services, même, en termes... même
dans l'entreprise, souvent avec plus d'employés, bien, ça va générer des
revenus, ce qui est très bien, mais aussi un réinvestissement qui peut faire
qu'on emploie d'autres personnes. Donc, ça pourrait même être un leurre, en
fait, c'est ce remède-là qui serait... ça a même été le titre d'un livre, un
remède imaginaire. J'essaie juste de comprendre pourquoi les choix qu'on a
faits ici, au Canada, en matière de croissance économique par rapport à
l'immigration, pour aider nos entreprises, ce n'est pas le choix qu'ont fait
les autres pays d'Occident et leur croissance a été encore plus importante.
M. Gagnon (Gerry) : Bien, je
vais me permettre de dire : En fait, il est certain que, si on n'arrive
pas à combler les déficits, on ne sera pas en mesure de solutionner le
problème.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : En terminant.
M. Gagnon (Gerry) : Il y a
quand même une latence entre l'idée d'être capable de transformer notre façon
de faire et puis d'utiliser juste les ressources ici et la capacité d'avoir un
impact direct rapide avec l'immigration.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci, merci beaucoup. Alors, c'est ce qui met fin à cette
audience. Merci beaucoup pour l'apport à nos travaux. Nous en sommes
vraiment... Nous vous en remercions. Alors, pour les parlementaires, je
suspends jusqu'à... les travaux jusqu'à 14 heures.
(Suspension de la séance à 12 h 47)
13 h 30 (version non révisée)
(Reprise à 14 heures)
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! La Commission des
relations avec les citoyens reprend ses travaux.
Nous poursuivons les auditions publiques
dans le cadre de la consultation générale sur le cahier de consultation
intitulé La planification de l'immigration au Québec pour la période 2026-2029.
Cet après-midi, un après-midi fort occupé, nous allons entendre les organismes
suivants : la communauté maritime des Îles-de-la-Madeleine, qui sont déjà
assis devant nous, nous allons poursuivre avec le Centre des travailleurs et
travailleuses immigrants, par la suite, Manufacturiers et Exportateurs du
Québec, ensuite le Conseil d'intervention pour l'accès des femmes au travail,
et nous terminerons avec Québec Réunifié.
Donc, pour les 45 prochaines minutes,
recevons, je l'ai donc dit tantôt, communauté maritime des
Îles-de-la-Madeleine, représentée par M. Alexandre Bessette, directeur de l'attractivité,
des communications et de l'expérience citoyenne, ainsi que M. François-Olivier
Picard, chercheur de la Chaire de recherche du Québec sur l'intelligence
artificielle et le numérique francophone. Alors, messieurs, bienvenue à la
commission. Vous allez avoir 10 minutes pour présenter l'essentiel de
votre mémoire ainsi que les recommandations et, par la suite, nous allons en
discuter avec les parlementaires. Alors, le temps est à vous.
M. Bessette (Alexandre) : Merci.
M. le ministre, Mme la Présidente, chers députés, François-Olivier, coauteur
du... corédacteur du mémoire, et moi-même, Alexandre Bessette, directeur de l'attractivité,
des communications et de l'expérience citoyenne pour la municipalité des Îles,
sommes honorés de vous présenter notre mémoire concernant la planification
pluriannuelle de l'immigration au Québec.
Nous tenons en premier lieu à souligner
que le maire des Îles-de-la-Madeleine et président de la communauté maritime,
M. Antonin Valiquette, aurait souhaité être présent parmi nous. Toutefois,
étant donné les élections en cours, il ne lui était pas possible de se
déplacer. Il vous offre tout de même ses sincères salutations.
En premier lieu, nous désirons mentionner
que François-Olivier et moi ne sommes pas des experts juridiques en
immigration. Notre but aujourd'hui n'est pas de débattre de façon précise de
tous les changements de règlements ayant eu lieu au cours des dernières années.
Au cours de ces 45 minutes passées ensemble, nous désirons vous faire
découvrir notre réalité madelinienne, acadienne et insulaire.
Cette réalité démographique, culturelle et
économique propre au territoire est d'ailleurs reconnue par le gouvernement du
Québec au sein du décret 354-2016 concernant le statut particulier lié au
caractère insulaire des Îles-de-la-Madeleine...
14 h (version non révisée)
M. Bessette (Alexandre) :
...l'établissement de réfugiés acadiens sur le territoire madelinot au cours
des derniers siècles est un exemple que nous sommes tous en quelque sorte issus
de l'immigration. La venue de citoyens issus de programmes migratoires sur le
territoire de l'archipel peut toutefois être considérée comme un phénomène
assez récent. La première entreprise ayant eu recours au programme des
travailleurs étrangers temporaires et saisonniers est une usine de
transformation des produits de la mer qui a embauché 30 travailleurs
saisonniers en 2017. Les raisons pour le recours à ces différents programmes
sont fort simples. En 2024, on a connu une baisse de population de 21 personnes
à grand solde migratoire positif. C'est une première baisse en sept ans. L'indice
de remplacement de la main-d'œuvre, qui constitue un rapport entre les 20-29 ans
et les 55-64 ans est deux fois moins élevé dans l'ensemble du Québec, on
parle de 43 pour les Îles cotre une moyenne de 86 pour le reste du Québec. On
détient la plus forte proportion de 65 ans et plus et la plus faible
proportion de jeunes du Québec.
Il est également nécessaire de souligner
que la communauté maritime inclut une proportion anglophone minoritaire, située
principalement Grosse-Île, qui fait face à des enjeux démographiques importants
tout en étant en situation linguistique minoritaire. Devant ce constat
alarmant, je crois qu'il est raisonnable d'affirmer que la municipalité fut
très proactive dans la mise en place d'une stratégie d'attraction qui touche à
la fois l'immigration et la mobilité interprovinciale. À ce sujet, on s'est
donné comme objectif d'attirer 100 nouveaux résidents travailleurs
supplémentaires par année depuis 2018. Aux Îles-de-la-Madeleine, c'est tout un
tissu humain qui s'active en ce sens, citoyens, organismes, entreprises et
nouveaux arrivants. C'est cette mobilisation collective qui est notre plus
grande force. D'ailleurs, notre municipalité a été finaliste pour l'obtention
du prix Ulrick Chérubin cette année, prix qui est remis par le ministère de l'Immigration
à un organisme municipal pour la mise en œuvre de bonnes pratiques en matière d'accueil
et d'intégration. On a également reçu il y a quelques semaines le prix du
leadership municipal FQM pour la mise en œuvre d'un projet structurant en
immigration pour la communauté.
Ce n'est pas compliqué, on connaît les
nouveaux arrivants par leur nom aux Îles-de-la-Madeleine. On pense humblement
que nous représentons tout ce que vous souhaitez d'un processus migratoire
régional réussi. Pêche aux palourdes, organisation de showers pour les
nouvelles mamans, parties de poker, et on en passe, nos employés sont
sincèrement dévoués et offrent un accompagnement personnalisé qui n'a aucun
autre pareil. On se met beaucoup de pression. On met beaucoup de pression aux
nouveaux arrivants. Le MIFI parle d'ailleurs des six dimensions liées à l'intégration.
C'est beaucoup d'apprentissage dans un milieu comme le nôtre. On le fait et on
croit qu'on le fait bien.
Notre mission de recrutement en Tunisie
est un excellent exemple, entre autres. Sept nouvelles éducatrices et leur
famille ont été recrutées. C'est important de souligner qu'il y a des familles
qui ont été recrutées parce que... parce qu'aujourd'hui ce n'est plus vraiment
possible. Il en était encore question à la radio il y a quelques jours. On peut
vraiment affirmer que leur intégration est un succès sur toute la ligne. On
rappelle que 40 % des jeunes Madelinots qui arriveront en maternelle
quatre ans n'auront pas eu accès à un service de garde reconnu et que nos CPE
qui ont des installations pratiquement neuves ont encore de la place pour
accueillir des dizaines de jeunes supplémentaires. Mais faute de personnel, on
ne peut pas le faire.
M. Picard
(François-Olivier) : Ceci n'est qu'un bref exemple de l'ampleur des
enjeux démographiques propres à l'archipel, qui touche bien évidemment le
secteur des pêches, mais aussi de la santé et des services sociaux, de l'administration
et du secteur agroalimentaire. Ce qu'on demande de votre part, c'est de la
prévisibilité, de la cohérence et la reconnaissance de notre leadership
municipal dans l'intégration de ces nouveaux arrivants. À ce sujet, on ne peut
pas être plus en accord avec le paragraphe 10.9° du cahier de consultation et
je cite : «La régionalisation de l'immigration permet d'assurer un
établissement durable et une intégration réussie en français de personnes
immigrantes sur tout le territoire québécois». Le problème actuellement, c'est
que l'établissement durable de ces personnes dans le contexte est pratiquement
impossible. Pour illustrer nos propos, les employeurs madelinots investissent
énormément de temps et d'argent pour recruter de la main-d'œuvre qualifiée à l'international
et intégrer cette main-d'œuvre et leurs familles au sein de la société madelinienne.
Les entreprises, tout comme ces nouveaux arrivants ont toujours eu en tête l'établissement
durable de ces nouveaux travailleurs sur le territoire. C'est l'objectif même
du Programme d'appui aux collectivités, du PAC, qui appuie notre communauté à
cette fin. Ces travailleurs s'intègrent. Leurs enfants vont à l'école. Après un
an ou deux ici, ils appliquent à la seule porte d'entrée disponible
présentement qui est le PSTQ, et ils n'ont pas de nouvelles. Malheureusement,
ils doivent renouveler leur permis de travail, renouvellement qui ne sera pas
nécessairement accepté et qui est maintenant d'une durée d'une année seulement.
C'est un énorme stress pour toute notre communauté qui dépend de ces
travailleurs pour fournir des services essentiels aux Madelinots. Notre crainte
réside dans le fait qu'une certaine partie de ces travailleurs repartent
malheureusement et que nous devrons refinancer une mission à l'étranger dans
quelques années. La nouvelle règle ajoute à cet effet beaucoup de pression sur
notre municipalité. Il n'y a maintenant plus de programmes ouverts pour les
conjointes, plus de réunification familiale possible...
M. Picard (François-Olivier) : ...d'embauche
pour les travailleurs étrangers temporaires est passé de 2 à 1 an, ce qui
complique bien entendu le processus d'intégration et d'établissement durable de
ces personnes. Nous avons inséré plusieurs témoignages au sein de... du mémoire
qui détaillent de certaines de ces inquiétudes. D'ailleurs, tous les travailleurs
que nous avons rencontrés qui sont présentement en attente du PSTQ n'ont
toujours pas eu de nouvelles. On parle de 13 préposés aux bénéficiaires,
pour nous, aux Îles, c'est... c'est énorme, d'éducatrices en services de garde,
de mécaniciens. Donc, pour une municipalité insulaire de
13 000 habitants où il n'y a pas nécessairement de... de mobilité
interrégionale, comme entre Lévis et la Beauce, par exemple, c'est énorme. Puis
il y a réellement urgence d'agir pour que ces êtres humains demeurent sur notre
territoire. On... On vous l'a détaillé, les enjeux démographiques sont
existentiels pour nous, aux Îles-de-la-Madeleine.
M. Bessette (Alexandre) : De
plus, on a discuté récemment avec votre équipe, M. Roberge, puis on nous a
expliqué que dans les calculs de pointage du ministère, dans le programme
actuel, on ne cote pas nécessairement assez fort pour avoir accès à la
résidence permanente, même si on est une région éloignée. Donc actuellement,
les programmes ne sont pas nécessairement adaptés pour favoriser...
l'établissement durable aux Îles-de-la-Madeleine. Donc, il serait pertinent...
pertinent d'ajuster ce système de pointage pour favoriser concrètement la
régionalisation de l'immigration pour un territoire comme le nôtre.
On demande aussi une certaine forme
d'harmonisation et de cohérence avec les programmes fédéraux. En effet, au
cours de nos consultations avec la communauté, l'idée d'avoir accès pour les
travailleurs à un permis relié à un secteur spécifique a été abordée à de
maintes reprises. D'ailleurs, un nouveau programme de main-d'œuvre étrangère
pour l'agriculture et la transformation du poisson a été annoncé dans le budget
fédéral 2022. On a proposé de faire l'objet d'un projet pilote à ce sujet
dans le mémoire précédent que nous avons déposé, et revenons avec cette même
idée dans ce mémoire. Cette mobilité accrue pour les travailleurs saisonniers
ou temporaires permettrait de réduire la main-d'œuvre requise sur le
territoire, d'atténuer la pénurie de logements et le fardeau administratif pour
les entreprises. Les entreprises, aux îles, ce sont très souvent des très
petites entreprises qui n'ont pas nécessairement de département de ressources
humaines. Donc, par exemple, il serait logique de permettre à une personne de
travailler dans le secteur des pêches au printemps puis ensuite dans le secteur
agricole l'été.
Par contre, pour les îles, on... on ne
désire pas nécessairement se limiter uniquement aux entreprises agricoles,
parce qu'il y a plusieurs secteurs dans le besoin, comme les secteurs touristique
et agroalimentaire. En 2025, c'est 250 travailleurs temporaires
saisonniers qui sont... qui sont venus soutenir le secteur des pêches aux
Îles-de-la-Madeleine. C'est un secteur névralgique pour notre archipel, dont
l'âge moyen des travailleurs au sein des usines de transformation des produits
de la mer est supérieur à 65 ans.
Enfin, on espère que le ministère
continuera de financer les programmes d'intégration des nouveaux arrivants et
reconnaisse notre rôle essentiel à leur intégration.
En bref, la nouvelle réalité démographique
du XXIe siècle force la communauté madelinienne à avoir recours aux
programmes migratoires mis en place par les deux paliers de gouvernement. Les
Madelinots sont accueillants, curieux puis ils se sont constamment adaptés au
cours des derniers siècles. Les prochaines années ne feront pas exception,
alors que s'amorcera une période où la venue de ces nouveaux arrivants sera
essentielle au développement durable de la société madelinienne. Nous croyons
que nos propositions sont réalistes, alignées aux plus récentes priorités
gouvernementales et fondées sur notre expérience terrain. Nous espérons avoir
des échanges constructifs à ce sujet avec vous et espérons vous accueillir, M.
Roberge ainsi que tous les députés présents, aux Îles-de-la-Madeleine
prochainement. Merci.
• (14 h 10) •
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, M. Bessette et M. Picard. J'avais
pratiquement un vent de mer en vous écoutant, au tout début, dans votre
présentation. Merci pour cette présentation. On va donc entamer la période de
discussion avec M. le... le ministre pour 16 minutes 30 secondes.
M. Roberge : Merci beaucoup.
Merci pour votre présentation. Merci pour cette invitation en finale. C'est
extrêmement intéressant. Vous avez parlé de... de travailleurs étrangers
temporaires. Vous avez parlé de permis flexibles ou qui permettraient à des
gens de changer d'employeur mais aussi de secteur. Pouvez-vous me préciser un
peu plus ce que vous souhaiteriez, là, comme... comme modalités de permis puis
combien de personnes ça pourrait toucher chez vous?
M. Bessette (Alexandre) : Oui.
Avec plaisir. Merci pour la question. En fait... En fait, on avait essayé de le
faire par nous-mêmes avec la... la Chambre de commerce comme... comme
partenaire puis avec des entreprises du milieu il y a quelques années, mais on
a été confrontés à des démarches administratives supercompliquées qui
demandaient aux entreprises de déposer deux EIMT différentes puis de quand même
faire le processus pour essayer d'arrimer les dates selon la fin des différents
contrats.
Ce qui arrive, par exemple, pour le
secteur des pêches aux îles, la pêche est à plein régime, disons, de... de mars
environ à aller jusqu'à juillet puis après ça, au mois d'août, bien, il y a une
baisse. Puis il y a beaucoup de travailleurs qui... qui requittent vers leur
pays pour revenir après ça pour la pêche d'automne. Puis, à ce moment-là, on
est au plus fort du secteur touristique, le mois d'août, c'est le plus gros
mois aux Îles-de-la-Madeleine, puis il y a des besoins dans ce secteur-là qu'on
a mis comme...
M. Bessette (Alexandre) :
...longue. L'idée, ça ne serait pas nécessairement de commencer avec les
250 travailleurs étrangers temporaires saisonniers, comme on l'a mentionné
en introduction, mais de commencer tranquillement, avec peut-être quatre ou
cinq employeurs. Comme on le disait, on connaît pratiquement tous les travailleurs
étrangers temporaires sur le territoire. Puis l'idée, ce serait d'encadrer un
peu ce partage-là, puis d'arrimer les dates des différents permis pour que,
pour qu'un travailleur puisse, par exemple, au mois d'août, aller travailler
dans le secteur touristique, puis après ça puisse retourner travailler dans le
secteur des pêches, ce qui n'est pas vraiment possible de faire actuellement.
On a aussi sondé les travailleurs qui reviennent. Généralement, c'est à peu
près 50 % des travailleurs qui reviennent d'année en année sur le
territoire, puis via le programme fédéral Immigrant Québec, on a une région sur
le territoire qui travaille sur leur intégration. Puis ça fait deux ans qu'on
fait un sondage auprès de ces gens-là pour savoir comment a été leur expérience.
Puis l'année passée, on les a sondés pour savoir si ce genre de projet là
pourrait les intéresser. Puis ça a été unanime, là, je pense, c'est 98 %
des répondants ont démontré leur intérêt de pouvoir travailler au mois d'août
au lieu de retourner dans leur pays. Donc, on voudrait commencer tranquillement
pour voir comment ça se passe, en collaboration avec différents partenaires,
puis certaines entreprises ciblées qui ont déjà une certaine expérience avec...
avec ces travailleurs-là. Mais je dirais que c'est ça, c'est d'y aller
tranquillement au début.
M. Roberge : Donc, un
projet pilote spécifique aux Îles, commencer avec un petit nombre, mais pour
vérifier les... vérifier les possibles, puis rajouter des petites cases au
formulaire, comme on dit. Mais pour des travailleurs étrangers temporaires,
donc on garde le terme de temporaire, mais vous avez aussi parlé d'opportunité
de faire basculer des gens du statut de temporaire au statut de permanent pour
que ça devienne de vrais Québécois, de vrais Madelinots. Et là vous avez dit...
Bon, il y en a qui... Ça, c'est les mesures du fédéral, puis j'en ai parlé tout
à l'heure, on demande la clause grand-père, on veut qu'ils arrêtent d'enlever
les travailleurs étrangers temporaires en région. J'espère que ça va bouger
bientôt. Ceci dit, en attendant, vous dites : Bien, on pourrait, nous,
régulariser leur statut. En fait, il va passer via le programme PSTQ, programme
de sélection, mais vous dites : On n'a pas assez de points. On n'a pas
assez de points. Pouvez-vous m'expliquer ce que vous voulez dire, selon quels
critères? Bien, je pense que ça serait le volet 2 du PSTQ. Mais
expliquez-moi ce que vous voulez dire puis qu'est ce qu'on devrait faire pour
vous accommoder?
M. Bessette (Alexandre) :
Bien, en fait, actuellement, si je comprends bien, il y a des points quand on
est en région, mais ce n'est pas significatif. Puis, nous, les premiers
travailleurs qui sont arrivés aux Îles, il y a peut-être deux ou trois ans, il
y en a qui leur contrat vient à échéance maintenant. L'exemple que j'ai,
c'est... c'est en restauration. Puis actuellement, bien, ce secteur-là ne cote
pas beaucoup. Puis le fait qu'on soit en région aussi, bien, ça ne donne pas
nécessairement beaucoup plus de points. Donc, actuellement... Et puis on a
sondé, on a sondé ces gens-là avant de venir faire la présentation aujourd'hui,
la grande majorité des travailleurs qui sont sur le territoire actuellement ont
fait leur demande de participer à ce tirage au sort là, puis il n'y en a aucun
qui a eu de nouvelles. Donc, nous, l'idée, en fait, ce n'est pas nécessairement
d'accueillir beaucoup plus de monde, mais c'est de s'assurer que ces gens-là
qui sont déjà sur le territoire puissent rester. Mais actuellement, j'ai
l'impression qu'on a de la misère à sortir du lot malgré les défis qu'on a en
région, en région très éloignée. Donc, c'est ça, j'ai l'impression actuellement
que le système de pointage ne favorise pas nécessairement les régions les plus
éloignées.
M. Picard
(François-Olivier) : Si je peux me permettre aussi, ce sont... ce ne
sont pas des emplois ultra hautement qualifiés. Ce sont, par exemple, des
éducatrices en CPE, des mécaniciens, des préposés aux bénéficiaires qui
apportent énormément à la communauté, mais évidemment, qui n'ont pas de
doctorat. Ce ne sont pas des ingénieurs. Donc, c'est notre réalité proprement
madelinienne. Et juste pour vous donner un contexte, il y a 0,8 % des
personnes qui habitent aux Îles qui sont nées à l'étranger selon Statistique
Canada. Au Québec, c'est 15 % et au Canada, c'est 25 %. Donc, il est
évident qu'on a une certaine capacité d'accueil, là.
M. Roberge :
Définitivement. Et donc d'intégration aussi. Puis il y a un chercheur, je pense
que c'est le Pr Daoust de l'Université de Sherbrooke, qui est venu nous parler
de la capacité d'accueil, qui nous disait qu'évidemment il y a, bon, la place
dans les écoles, les garderies, la place pour loger les gens, donc l'habitation.
Puis il nous disait aussi, bien, l'acceptabilité sociale, c'est-à-dire le désir
de la population locale d'accueillir ces personnes-là dans tous les sens du
terme. Donc, ce que vous me dites, c'est que, de votre point de vue, il y a
cette acceptabilité-là puis qu'il y a donc une capacité d'accueil qui est là,
que vous avez mentionnée tout à l'heure, CPE, école. Logement, je n'ai pas
d'information ici. On parlerait de combien de personnes qui sont en ce moment
sur la fin de leur permis de travail...
M. Roberge : ...étrangers
temporaires et qui craignent qu'avec les mesures du gouvernement fédéral ils
devraient retourner chez eux.
M. Bessette (Alexandre) : Bien,
en date d'aujourd'hui, on parle d'environ une vingtaine de personnes. Il y a
des familles là-dedans aussi. Ça fait que je dirais entre 20 et 30 au cours des
prochaines semaines, qui auront des contrats qui vont se terminer. Au cours des
trois ou quatre dernières années, on a attiré un total de... 110 personnes, si
je ne me trompe pas, issues de l'immigration sur le territoire. Donc, c'est
près du tiers de ces personnes-là que leur contrat vient à échéance au cours
des prochaines semaines.
M. Roberge : Merci beaucoup
pour cet échange. J'ai des collègues qui veulent poursuivre les discussions
avec vous.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Alors, la députée de Soulanges, il reste
encore 9 min 25 s.
Mme Picard : Merci beaucoup,
Mme la Présidente. Bonsoir. Bonjour, bonsoir. Il est quand même presque le
soir. Dans le cadre des récentes discussions gouvernementales, la cause
grand-père... la clause grand-père est proposée comme un levier essentiel pour
permettre aux employeurs en région, notamment dans la vôtre, de conserver leurs
travailleurs étrangers temporaires déjà en poste. Malgré les nouvelles
restrictions fédérales, est-ce que vous considérez que cette clause grand-père
comme un appui pertinent est nécessaire pour assurer la stabilité de la
main-d'oeuvre dans votre région? Et quel bénéfice spécifique attendez-vous de
la mise en œuvre et quels impacts prévoyez-vous à défaut d'une telle mesure?
M. Bessette (Alexandre) : Merci
pour la question. J'ai l'impression que oui, ce serait... ce serait une bonne
avenue. C'est certain que nous, ce qu'on aimerait prioriser avec ces gens-là
qui sont déjà aux Îles, ce serait de migrer vers la permanence. Donc, oui, oui
de renouveler si vraiment c'est la seule option qu'on a, oui de renouveler leur
contrat de travail sur plusieurs années, mais c'est certain qu'on prioriserait
la permanence pour que ces gens-là restent sur le territoire.
Après ça, au niveau de la clause
grand-père, je ne connais pas exactement les formalités, tu sais. Est-ce qu'on
parle du ratio travailleurs étrangers temporaires par entreprise? Est-ce que
c'est vraiment de leur permettre de rester indéfiniment sur le territoire? Mais
c'est certain que si ça leur permet d'obtenir leur résidence permanente, bien,
pour nous, ce serait... ce serait vraiment une belle victoire, là.
M. Picard (François-Olivier) : Et
si cette clause grand-père là permet d'aller dans les anciennes normes qui
permettaient d'avoir un permis de travail ouvert pour le conjoint ou la
conjointe, c'est sûr que ça aiderait beaucoup. Parce qu'il y a, par exemple,
Martin de chez Jean Coutu, qui a fait la mission à l'étranger en Tunisie, et
qu'il a les... il y a des personnes qui prévoyaient venir travailler chez Jean
Coutu, bien, étant donné qu'ils ne pouvaient pas venir avec leur famille et
leurs enfants, c'est sûr que, là, ils ont décidé de... certaines personnes ont
décidé de décliner l'invitation de venir travailler chez Jean Coutu, étant
donné ces règles-là, là. Donc, on aimerait que la clause grand-père inclue le
deux ans pour le... pour le Programme de travailleurs étrangers temporaires,
qu'on permette également, comme il était le cas auparavant, là, la venue des
conjoints et des familles.
Mme Picard : J'aurais une
autre question, Mme la Présidente, une petite dernière, en fait, vos
entreprises, comme vous êtes sur une île, quand ils ont un besoin de
main-d'œuvre, est-ce que le premier réflexe, c'est de recruter à
l'international ou vous allez tout d'abord voir au Québec s'il y a des gens qui
seraient intéressés à aller chez vous? On sait que depuis la pandémie, vous
êtes très populaire. J'ai plein d'amis, moi, qui aimeraient ça aller chez vous,
mais je ne sais pas s'ils sont au courant que vous avez des besoins de
main-d'oeuvre. Est-ce que vous faites en premier un recrutement ici, au Québec,
ou bien, pour vous, c'est peut-être plus facile d'aller à l'international?
• (14 h 20) •
M. Bessette (Alexandre) : Merci
pour la question. À la base, quand on a... quand la communauté maritime, avec
plusieurs partenaires du milieu, a créé la stratégie d'attraction qui est une
marque territoriale à part de la marque touristique qu'on a aux Îles-de-la-Madeleine,
l'objectif, c'était d'attirer des gens d'ailleurs au Québec aux Îles-de-la-Madeleine.
Donc, c'est certain que la première étape, c'est de se tourner, bien, aux Îles,
premièrement, puis, après ça, quand ça ne fonctionne pas aux Îles, ailleurs au
Québec.
On a un solde migratoire, depuis 2018, de
près de 922 de plus de population. Donc, tu sais, ce n'est pas... ce n'est
peut-être pas énorme pour d'autres régions du Québec, mais, pour les Îles, ça
représente un village au complet. Donc, c'est très positif, on a eu beaucoup de
monde puis, parmi ces 922 personnes là, bien, il y a une centaine de personnes
issues de l'immigration.
Donc, c'est certain qu'on se tourne vers
le Québec en premier lieu, puis, après ça, bien, quand ça ne fonctionne pas,
comme dans des secteurs névralgiques comme l'éducation à la petite enfance,
santé et services sociaux, en administration aussi, bien là, on se tourne vers
l'international. Mais comme je le mentionnais aussi, les entreprises aux Îles
n'ont pas nécessairement de département de ressources humaines, donc c'est très
prenant pour eux de se tourner vers l'international, et d'où le rôle de notre
équipe aussi en attractivité de les accompagner dans ce processus-là.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci. Alors, on poursuit avec le député de Jonquière.
5 min 25 s.
M. Gagnon : Bonjour. C'est un
plaisir de vous accueillir. J'étais sur l'archipel cet été, puis là je viens de
ravoir une autre invitation. Alors, je vais dire à ma blonde que je peux
retourner l'été prochain, on a eu une invitation des jeunes. Merci...
M. Gagnon : ...blague à part,
il me reste cinq minutes, j'aimerais peut-être vous laisser quelque temps. Vous
sembliez avoir insisté dans votre présentation sur les deux prix dans lesquels
vous étiez en nomination. Si jamais vous jugez bon que ça a un lien avec...
avec les travaux de la commission en ce moment, ça me ferait plaisir de... de
voir dans quoi vous avez été finalistes.
M. Bessette (Alexandre) : Merci.
Bien oui, effectivement, le prix... Prix Ulrick-Chérubin, bien, c'est pour...
c'est pour tout ce qu'on fait au niveau de l'accueil puis de l'intégration.
Donc, c'était vraiment un honneur pour nous d'être finalistes. J'ai
l'impression que quand on pense aux Îles-de-la-Madeleine, on ne fait pas
nécessairement référence à tout ce qui touche l'attractivité. On... On les
connaît beaucoup pour tout ce qui touche le tourisme, mais on a des gros
besoins de main-d'œuvre à l'année. Puis, comme... comme on le mentionnait en
introduction, bien, on a une population qui est... qui est vieillissante, qui
est âgée, donc on... on a besoin de gens à l'année pour venir, pour venir
travailler en éducation, en santé et services sociaux. Donc, le Prix
Ulrick-Chérubin, c'était vraiment pour... en fait, on l'a vu comme étant une
belle reconnaissance de tout ce qu'on a... tout ce qu'on a fait depuis trois
ans en accueil, en intégration. Puis je parle de nous, mais c'est... c'est tous
les partenaires, mais c'est aussi toute la communauté des îles, parce que le
processus d'accueil, d'intégration puis d'attractivité, ça... ça ne repose pas
que sur les épaules de... de mon équipe.
Puis au niveau de... du Prix Leadership de
la FQM, bien, c'est pour le projet de recrutement en Tunisie, donc les sept
éducatrices et leurs familles qu'on est allés recruter avec... avec les CPE.
Puis on est allés là-bas avec... avec une équipe de tournage, donc, pour aller à
la rencontre de ces gens-là avant même qu'ils arrivent au Québec pour apprendre
à les connaître, pas juste d'un œil... pas juste d'un œil sur la... sur la
main-d'oeuvre, là, tu sais, pas juste pour... pour connaître leur parcours
scolaire ou leur parcours professionnel, mais vraiment pour... pour voir
c'était quoi leurs valeurs, apprendre à les connaître. Puis c'était pour créer
un premier lien entre ces familles-là puis les gens des îles. Puis la... la
vidéo est incroyable. Puis... Puis j'ose croire que c'est ce qui nous a fait...
ce qui nous a fait gagner ce prix-là parce que c'était très innovant. Puis on
est vraiment fiers de... de ce projet-là.
M. Gagnon : Bravo! Et une
question de... Je suis un député qui a été en vacances. J'entends bel et bien...
j'ai lu votre mémoire. C'est une perception, je ne demande pas mieux d'être
corrigé, j'ai... j'ai tendance à penser, puis quand on écoute les Madelinots
puis quand on va sur l'archipel, que la saison estivale, qui... qui, je
comprends, est quand même assez longue, on me dit qu'il y a encore du tourisme
jusqu'en octobre, mais en saison estivale, on semble dire que c'est un... c'est
endroit magnifique, c'est un boom et, en hiver, c'est... c'est... les gens...
c'est... il faut être fait dur pour rester aux Îles-de-la-Madeleine, il faut
être fort. Alors, quand... quand vous parlez du projet pilote dans lequel on
pourrait conserver les gens, ou du moins qu'ils pourraient s'impliquer à
l'année, ma perception, c'est qu'en saison estivale on a un immense besoin de
main-d'œuvre, durant l'hiver, c'est vraiment, respect à nos Madelinots,
c'est... c'est un hiver rude. Alors, est-ce... il y aurait du travail pour
l'ensemble de... des ces personnes-là, des travailleurs étrangers que vous
proposez? Puis... Puis c'est vraiment une... Vraiment, je le connais comme
touriste, les Îles-de-la-Madeleine.
M. Bessette (Alexandre) : Merci
pour... pour la question. Effectivement, c'est le genre de question, travailler
en attractivité... bien, c'est le genre de questions qu'on se fait poser très
souvent, là, qu'est-ce qu'on fait aux îles en hiver, ce à quoi je réponds
puis... tu sais, la seule chose qu'on n'a pas aux îles, c'est... c'est une
montagne de ski alpin, tu sais. Pour les gens qui veulent faire de la raquette,
du ski de fond, bien, il y a possibilité de le faire. C'est vrai que c'est
plus... c'est plus tranquille, mais c'est un rythme de vie qui plaît à beaucoup
de monde. Tu sais, c'est... ce n'est pas fait pour... ce n'est pas fait pour
tout le monde, vivre sur des îles, on s'entend. Mais on a quand même
13 000 de population à l'année, donc, oui, il y a des besoins à l'année.
On avait fait... en fait, Services Québec avait fait, en 2019, une gestion
prévisionnelle de la main-d'oeuvre, puis on parlait de près de... de 2 500 postes
à combler au cours des prochaines années, avec tous les départs à la retraite à
venir, la création de nouveaux postes. Puis ça, on parle de... de postes à
l'année. Le secteur des pêches n'était pas inclus dans ce... dans ce sondage-là.
Donc, il y a des gros besoins à l'année, puis c'est... c'est l'objectif
primaire de... de la démarche en attractivité, tu sais. Oui, oui, le secteur
touristique, c'est un secteur primaire, mais ce qu'on cherche à attirer
principalement, c'est des gens qui vont venir prêter main-forte à l'année.
M. Gagnon : Est-ce qu'il nous
reste du temps?
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Une minute 11 s... 10 s.
M. Gagnon : 1 min 11 s.
M. Picard (François-Olivier) : ...
M. Gagnon : Oui, je vais vous
laisser.
M. Picard (François-Olivier) : ...en
complément. Lorsqu'on faisait des entrevues pour écrire le mémoire, il y a...
il y a des employés qui... qui s'occupent de l'attractivité, qui mentionnaient
qu'il y a des immigrants, il y a des réfugiés que les grandes villes comme
Montréal ou comme Québec, ce n'est pas fait pour eux. Et d'être capables de
voir le lever du soleil sur le bord de la mer et d'aller marcher et se baigner
à l'année en eau froide, ça fait du bien. Puis il y a des personnes qui ont
vécu des traumatismes, et d'avoir cette sécurité de ne pas barrer les portes de
leur voiture ni de leur maison, pour eux, c'est... c'est... c'est important et
ce cadre de vie paisible là peut... peut convenir à... à certains immigrants, bien
que l'hiver soit effectivement parfois rude.
M. Gagnon : Difficile pour
moi de poursuivre après de telles belles images... Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Mais pas l'eau froide. Merci beaucoup! Alors on...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : ...poursuivre avec le député d'Acadie pour neuf minutes 54.
M. Morin : Merci, Mme la
Présidente. Alors, messieurs Bessette, Picard, bienvenue. Merci d'être là.
Merci pour votre mémoire. À la fin de votre mémoire, dans les annexes, vous
avez inclus une copie du décret, d'un décret du gouvernement du Québec. Le
356-2016, qui reconnaît les contraintes structurelles de l'agglomération des Îles-de-la-Madeleine
et dans le décret, il y a un attendu et qui souligne qu'il « est opportun
que chaque ministère, organisme et entreprise compris dans l'administration
module ses interventions afin de tenir compte des enjeux et des contraintes
particulières de l'agglomération des Îles-de-la-Madeleine, ainsi que de son
caractère unique en raison de son insularité et de son isolement liés à sa
position géographique au centre du golfe du Saint-Laurent ». Est-ce que ça
fonctionne? Est-ce que l'administration en tient compte? Est-ce qu'au niveau de
l'immigration, on fait en sorte qu'il y a une attention particulière qui est
accordée conformément au décret?
M. Bessette (Alexandre) :
Merci pour la question. C'est difficile à dire. C'est difficile à dire. Tu
sais, je vais vous donner l'exemple. Quand on se tourne vers l'international,
les entreprises des îles, comme on parle de bas salaires, pour la grande
majorité, c'est les entreprises des villes qui sont responsables de payer les
déplacements de ces gens-là, par exemple de la Tunisie vers les îles, puis pour
participer par exemple aussi à ce genre de missions là, bien, les entreprises
doivent payer un vol des îles vers Montréal, puis après ça de Montréal vers la
Tunisie. Bien, souvent, le vol de Montréal vers les îles coûte plus cher que de
Montréal vers la Tunisie. Donc c'est certain que de se tourner vers
l'international, ça coûte plus cher. Donc, à ce niveau-là, non, je n'ai pas
l'impression que c'est adapté. Mais sinon, je dirais qu'on a quand même...
qu'on a quand même une très bonne collaboration avec notre direction... notre
direction régionale qui est très sensible à nos défis particuliers, aux Îles-de-la-Madeleine,
mais je dirais qu'au niveau... au niveau des coûts, ce que ça peut engendrer,
bien, c'est certain que... c'est certain qu'on n'est pas... ce n'est pas
nécessairement reconnu via ce décret-là pour ce qui touche l'immigration.
M. Morin : Et je comprends
que pour les entreprises chez vous qui... et vous l'avez bien expliqué, là, qui
doivent recourir à de la... à de la main-d'œuvre à l'international, ce n'est
pas évident et ça coûte cher.
• (14 h 30) •
M. Bessette (Alexandre) :
Exactement. Oui, ça coûte... ça coûte très cher. Puis c'est certain qu'une
entreprise qui s'embarque dans ce genre de démarche là, son objectif ultime,
c'est que ces gens-là restent sur le territoire, tu sais, s'établissent de
manière durable. Puis en ce moment, bien, on se rend compte que ce n'est pas
toujours possible. Ce n'est pas nécessairement le cas, donc...
M. Picard (François-Olivier) :
...
M. Morin : Et donc là... oui,
oui, allez-y. Je vous en prie.
M. Picard (François-Olivier) :
Si je peux me permettre...
M. Morin : Oui, oui, bien
sûr.
M. Picard (François-Olivier) :
...les entreprises sont tellement impliquées dans l'accueil qu'ils achètent des
maisons pour loger. Même Jean Coutu, qui a bâti une garderie pour les employés
qui viennent avec leur famille pour que leurs employés aient accès à un CPE.
Donc, c'est vraiment... la particularité madelinienne fait en sorte que c'est
vraiment toute la communauté qui est impliquée dans cet accueil-là.
M. Morin : Et qui se
mobilise, en fait. Justement, au niveau du logement, au niveau des écoles, au
niveau des CPE, est-ce que ça représente un enjeu chez vous, de la part de
travailleurs ou d'immigrants?
M. Bessette (Alexandre) :
Bien, en fait, c'est certain que pour nous, de s'être tournés vers
l'immigration pour recruter 7 éducatrices, c'est une différence qui est
très positive. On a... on a créé le réseau des partenaires en immigration des
îles, sur lequel siègent plusieurs partenaires du milieu, dont le centre de
services scolaire. Donc, je dirais que ça fait à peu près un an qu'on travaille
sur l'accueil puis 'intégration des enfants issus de l'immigration dans nos
milieux scolaires. Donc, il y a de l'adaptation qui se fait, mais je dirais que
c'est des histoires qui sont très, très positives. Au niveau du logement, il y
a eu énormément de développement depuis 2021. On avait fait une enquête externe
pour savoir le nombre de logements qu'on aurait besoin au cours des prochaines
années sur le territoire. Puis si je ne me trompe pas, d'ici 2025, on avait
chiffré à à peu près 200 logements puis je regardais les chiffres hier
avant d'arriver, puis excluant en 2025, sur 200, on en avait à peu près 168 nouveaux
sur le territoire. Donc, je dirais que le principal enjeu au niveau du logement
sur le territoire, c'est l'accès au logement abordable, comme partout ailleurs
au Québec, là.
M. Picard (François-Olivier) :
Et si je peux me permettre...
M. Morin : Oui, bien sûr.
M. Picard (François-Olivier) :
On ne veut surtout pas que les Madelinots et le reste du Québec mettent la
faute à la hausse du coût du logement aux Îles-de-la-Madeleine aux immigrants.
Ce qui n'est pas le cas du tout. C'est... C'est les... Les Québécois provenant
du continent majoritairement tombent en amour avec les îles et s'achètent des
maisons...
14 h 30 (version non révisée)
M. Picard (François-Olivier) : ...et
ça, ça, ça crée, évidemment, des enjeux d'abordabilité.
M. Morin : Je comprends. Vous
mentionnez : renforcer la régionalisation de l'immigration. Moi, j'ai le
goût de vous demander : Est-ce que ce serait avantageux pour vous de
renforcer la planification régionale de l'immigration, chez vous, à l'aide des
forces vives des Îles, avoir des forums régionaux qui aideraient ou qui
travailleraient avec la base et le terrain pour bien identifier vos besoins?
Est-ce que ce serait une idée ou une option qui serait aidante pour vous?
M. Bessette (Alexandre) : C'est
certain que ce serait intéressant. Je sais qu'il existe plusieurs organismes en
régionalisation de l'immigration qui sont très sollicités. Nous, le défi qu'on
a souvent, c'est de bien connaître le territoire, pour être en mesure de bien
le vendre. Tu sais, on a ce genre de défi là aussi au niveau de la promotion. Même
quand on se tourne vers l'international pour participer à des missions, par
exemple, les gens, à l'international, ne connaissent pas nos régions. Donc, il
y a quand même un travail au niveau de la promotion, aussi, de nos régions,
puis de ne pas juste se tourner vers Montréal ou Québec, puis je pense que c'est
l'objectif du ministère aussi, là, de faire connaître davantage les autres
régions. Mais c'est certain que, si on pouvait démontrer un peu plus les
bienfaits ou les avantages de vivre sur un territoire comme le nôtre, d'avoir
une planification un peu plus définie, bien, c'est certain que ce serait
positif, là.
M. Morin : Vous avez parlé un
peu plus tôt de la situation de 13 préposés aux bénéficiaires. Est-ce que, chez
vous, ils sont tous à l'hôpital? Est-ce qu'ils travaillent tous à l'hôpital ou
ils sont dans différents secteurs, au CLSC ou...
M. Bessette (Alexandre) : Bien,
c'était dans un... dans un CLSC, pour ces personnes-là, qui étaient... qui
étaient affiliées à la Résidence Plaisance, des Îles. Donc, ce n'était pas
directement au CISSS qu'on a... qu'on a aux Îles-de-la-Madeleine.
M. Morin : D'accord.
M. Bessette (Alexandre) : Mais
il y a eu des changements au cours des derniers mois, puis, maintenant, si je ne
me trompe pas, ça a été racheté par le CISSS, mais...
M. Morin : OK. Puis ces préposés-là,
est-ce qu'il sont toujours en attente d'une décision?
M. Bessette (Alexandre) : Oui.
M. Morin : Puis là, savez-vous
quand leur permis va se terminer?
M. Bessette (Alexandre) : Si
je ne me trompe pas, c'est dans environ un an, ou, en tout cas, au cours des
prochains mois. Eux sont arrivés sur des contrats de travail de trois ans.
M. Morin : Puis ce serait
quoi, l'impact, s'ils devaient repartir?
M. Bessette (Alexandre) : Bien,
ce serait... ce serait un risque au niveau de... des services offerts à la
population. J'ai l'impression qu'on ne serait pas en mesure d'offrir... d'offrir
à plein potentiel les services à la population. Donc, c'est certain que ce
serait... ce serait grave, là, surtout avec la fin des agences dans le secteur
de la santé au cours des prochains mois. Je ne sais vraiment pas comment on
pourrait arriver à recruter tout le personnel dont on aurait besoin dans le
secteur de la santé, là.
M. Morin : Je vous remercie.
Vous savez probablement que le programme PEQ a été suspendu. Ça a été quoi l'impact,
chez vous, de la suspension du PEQ?
M. Bessette (Alexandre) : Bonne
question. Bien, c'est certain qu'en ce moment il y a une seule voie de passage,
donc, pour laquelle on n'est vraiment pas certains d'avoir un retour positif. Comme
on le disait d'entrée de jeu, tous ceux qui ont fait une demande, jusqu'à
maintenant, dans le seul... dans le seul programme qui est encore ouvert n'ont
pas eu de réponse encore, donc c'est certain que, pour nous, ça ajoute une
pression énorme sur les entreprises, sur des humains issus de l'immigration qui
ont fait le choix de s'établir aux Îles-de-la-Madeleine. Il y a même des
entreprises qui nous ont parlé de fermeture potentielle si ces gens là étaient
amenés à quitter.
Pendant la pandémie, on s'est habitués,
des fois, à avoir des heures de service moins grandes. Sauf que là,
tranquillement, on sentait... on sentait que ça revenait à la normale. Mais là,
si, vraiment, il y avait... il y avait des départs à venir au cours des
prochains mois, bien, on reviendrait à soit des services très limités, ou même,
des fermetures, puis ça, bien, l'impact serait directement sur la population
des Îles, là.
M. Morin : Puis je comprends,
quand vous faites référence à l'autre programme, vous faites référence au PSTQ?
M. Bessette (Alexandre) : Oui.
M. Morin : OK. Et là vous n'avez
pas de réponse, vous ne savez pas?
M. Bessette (Alexandre) : On n'a
pas de réponse, non.
M. Morin : D'accord. Très
bien, je vous remercie. Dans les... dans les scénarios qui sont établis ou
prévus par le gouvernement du Québec dans le cahier de consultation... Parce
que vous avez parlé du regroupement familial. Présentement, c'est à peu près 10 600
qui sont traités puis qui sont envoyés à Ottawa pour que d'autres permis soient
émis. Dans le scénario A, le regroupement familial, ça tomberait à 5 800.
Ce serait quoi l'impact, chez vous?
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Rapidement.
M. Bessette (Alexandre) : Bien,
c'est certain que ce ne serait pas nécessairement une bonne nouvelle. On a...
avec les programmes actuels, on a déjà de la difficulté à avoir des retours, donc,
si on limitait encore plus, j'aurais du mal à voir comment est-ce qu'on
pourrait sortir du lot puis s'assurer que... s'assurer qu'il y ait un
regroupement familial aux Îles-de-la-Madeleine. Donc, c'est certain que ce ne
serait pas positif, pour les Îles, de limiter davantage...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci, c'est...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : ...c'est tout le temps qu'on avait pour le temps de
l'opposition officielle, mais on poursuit les discussions avec le deuxième
groupe d'opposition pour 3 min 18 s.
M. Cliche-Rivard : Merci
beaucoup. Je vais rester là-dessus parce que dans les défis rencontrés, vous en
parlez dans votre mémoire, là, à la page 13 de la réunification familiale.
Par ailleurs, il y a un article aujourd'hui qui nous provient d'une discussion
avec l'organisme Québec Réunifié qu'on va entendre un peu plus tard, qui parle
d'un délai d'attente qui pourrait s'étirer jusqu'à cinq ans. Donc, vous, vous
en parlez, là, de la contrainte par la... Dans vos défis rencontrés, vous dites
que l'immigration par la réunification familiale ne sera plus possible au
Québec jusqu'en juin 2028. Comment ça vous impacte, ça?
M. Picard
(François-Olivier) : Si je peux me permettre, arriver aux Îles-de-la-Madeleine,
c'est... c'est complexe. C'est une culture madelinienne, c'est une culture
acadienne. L'hiver est... L'hiver est rude. Et quand on arrive en famille,
notre réseau s'élargit. Donc, nos enfants vont à l'école. On s'intègre beaucoup
plus facilement, on participe aux activités des enfants également, que ce soit
dans la bibliothèque ou autres. Donc, quand on parle d'intégration durable,
venir en famille, évidemment que c'est... c'est beaucoup plus souple, c'est
beaucoup plus facile que venir seul s'ennuyer de sa famille. Et c'est sûr que
si on n'est pas capable de la faire venir, on va redéménager par la suite.
Donc, pour nous, là, une intégration durable sur un territoire signifie la
venue avec en famille.
M. Cliche-Rivard : Excellent.
Tout à fait. Ce sont des valeurs familiales qui sont très chères aux Québécois
et aux Québécoises. Vous parlez aussi de la fermeture du Bureau d'aide
juridique de Québec comme étant problématique. Puis dans les défis que vous
avez rencontrés, pouvez-vous nous en dire davantage?
M. Picard (François-Olivier) :
Bien, c'est... c'est le fait que, et tu me corrigeras, il n'y a pas,
évidemment, pas de bureau du ministère de l'Immigration du Québec aux Îles-de-la-Madeleine.
Alors, quand on a des questions ou quoi que ce soit, c'est sûr qu'on doit se
référer souvent au continent. Et à ce bureau là, de mémoire, était situé à
Québec. Donc, quand on ferme encore plus de services étant donné qu'on est...
qu'on est loin souvent, pas de transports en commun, pas de... Tout se fait en
ligne. C'est sûr que quand on a des services, aussi humbles soient-ils, c'est
bien de les garder.
M. Cliche-Rivard :
Tantôt, vous avez dit que vous avez évalué la possibilité du permis de travail
pour les villes régionales, avec les communautés d'affaires, avec la communauté
d'affaires, que finalement c'était plutôt compliqué au niveau des... de l'IMT
qu'avec le changement saisonnier. Mais la communauté d'affaires a embarqué,
elle n'était pas réfractaire à la proposition.
M. Bessette (Alexandre) :
Oui, absolument.
M. Cliche-Rivard : Ce
qui est quand même... Parce qu'on le sait que dans d'autres contextes, on nous
dit d'autres choses. Là, les partenaires du marché du travail, au niveau
québécois, ont dit d'autres choses, mais pour les Îles, ça serait applicable.
M. Bessette (Alexandre) :
Oui, absolument. On avait l'intérêt de plusieurs entreprises. C'est certain
qu'on ne voulait pas... On ne voulait pas partir en grande pompe puis avec
plusieurs entreprises, on voulait commencer tranquillement pour voir comment ça
se déroulait. Mais on a beaucoup d'entreprises qui avaient levé la main. Puis
ça fait, ça fait deux ou trois ans qu'on se fait relancer chaque été pour nous
demander si ce genre de projets là va avoir lieu ou non. Puis, bien, c'est ça
malheureusement, on a eu un retour de notre direction régionale il y a quelques
mois pour nous dire que ce n'était pas possible actuellement d'avoir ce genre
de projet là. Mais la communauté d'affaires était partante. Et puis les
travailleurs aussi étaient partants.
• (14 h 40) •
M. Cliche-Rivard : Les
gens qui, justement, repartent pour du saisonnier, est ce qu'ils sont capables
d'accumuler assez de mois de travail pendant leur permis de travail pour avoir
un statut permanent?
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : En terminant.
M. Bessette (Alexandre) :
Non, c'est ça qui arrive. C'est exactement ça. Pour ceux qui travaillent dans
les usines de transformation des produits de la mer restent cinq, six mois,
puis l'expérience n'est pas reconnue, même s'ils viennent depuis cinq, six ans
sur le territoire des Îles qui ont une conjointe des Îles-de-la-Madeleine,
maintenant.
M. Cliche-Rivard : Merci
beaucoup.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci. Le temps file vite. On termine avec le député
d'Arthabaska, 3 min 18 s.
M. Boissonneault : Merci,
Mme la Présidente. Merci pour votre présentation. Si je comprends bien, pour
les Îles-de-la-Madeleine, en ce moment, ça va comme il faut, là. Vous avez une
bonne intégration, il y a des gens qui viennent chez vous, il n'y a pas une
pression indue sur les services. Sur le logement, ça se passe bien aussi. Pour
l'apprentissage du français, ça ne semble pas être un enjeu. Si on pense pont
qu'on veut créer de l'immigration temporaire dans l'immigration permanente aux Îles-de-la-Madeleine,
il y a peut-être... Un enjeu qu'il pourrait y avoir, c'est la rétention. Est ce
qu'il y a... Est-ce qu'il y a des garanties? Est-ce que vous voyez des façons
de vous assurer que les familles restent aux Îles-de-la-Madeleine, mais vous
avez toujours quand même une crainte que peut être des gens, en obtenant la
résidence permanente et donc la possibilité de se déplacer partout parce que,
là, on pense même à des permis fermés, donc quittent les Îles-de-la-Madeleine.
M. Bessette (Alexandre) :
Ça fait partie de la vie, je dirais. Effectivement, c'est un risque, mais au
même titre que moi qui vient du Grand Montréal, a décidé d'aller aux Îles il y
a cinq ans, il y a un risque que je décide demain matin de quitter, donc, au
même titre que n'importe quelle autre région. Puis au niveau, oui, ça va somme
toute quand même bien. On s'est... On s'est responsabilisés au niveau de la
francisation, il y a le groupe collégial qui offre des cours de français
maintenant sur le territoire. On peut... On peut passer son examen aussi de
français sur le territoire maintenant. Donc oui, c'est quelques bons coups.
Mais effectivement, le défi qu'on a aux Îles, c'est... c'est la rétention puis
ce n'est pas...
M. Bessette (Alexandre) : ...au
niveau de l'immigration, là.
M. Boissonneault : Est-ce que
les personnes qui arrivent, là je parle des nouveaux arrivants, qu'ils soient
temporaires ou permanents, qui arrivent chez vous parlent français d'abord
surtout ou ce sont des gens qui doivent être francisés?
M. Bessette (Alexandre) : La
grande majorité parle français. Je dirais, dans le secteur des pêches, c'est
principalement des gens qui parlent... qui parlent espagnol. Par contre, avec
le comité sectoriel de main-d'oeuvre des pêches, il y a eu des projets pilotes
dans les dernières années pour donner des cours de français à ces gens-là puis
ça fonctionne super bien. Mais pour les gens sinon qui viennent comme
immigrants temporaires sur des contrats d'un, deux ou trois ans, les missions
auxquelles on a participé, bien, c'était... c'était dans des régions
francophones.
M. Boissonneault : Donc, pour
les entreprises, par exemple, parce qu'on a parlé du nombre de travailleurs
temporaires dans les entreprises qui devaient être... à une époque, c'était
20 %, ça a été ramené à 10 %. Est-ce que c'était un enjeu qui vous
touchait, ça? Est-ce que... Est-ce qu'il arrive parfois qu'on est à 10 %
ou 20 %, dans les entreprises, de travailleurs étrangers?
M. Bessette (Alexandre) : Actuellement,
oui, il y en a eu une entreprise en restauration que ça affecte puis qui... qui
est à risque de... de fermer ou de réduire ses heures de service parce qu'il y
a plusieurs contrats de travail qui viennent à échéance au cours des prochaines
semaines. Donc, il ne sait pas quoi faire pour retenir ces gens-là, qui sont
déménagés avec... avec leur famille au cours des... des deux dernières années,
là.
M. Boissonneault : J'aimerais
ça vous entendre aussi, vous en avez parlé en introduction, de la situation de
Grosse-Île, c'est ça, je pense, avec la communauté anglophone. Il y a un enjeu
démographique là aussi. Comment ça se vit, ça, lorsqu'on parle de...
d'immigration, d'intégration?
M. Bessette (Alexandre) : Bonne
question. Bien, effectivement, c'est une communauté... c'est une communauté
importante pour les îles, qui sont confrontées exactement à ce même genre de...
de défis là. Donc, c'est... je dirais que c'est... c'est encore plus amplifié.
Eux aussi ont une entreprise dans le secteur des pêches qui accueille des
travailleurs étrangers temporaires saisonniers. Donc, on... on essaie de
collaborer du mieux qu'on peut avec eux pour... pour essayer de... de combler
les besoins de main-d'oeuvre.
M. Boissonneault : Donc, ils s'intègrent
en anglais dans la communauté?
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : En terminant.
M. Bessette (Alexandre) : J'aurais
tendance à dire que oui. Par contre, ils n'ont pas le choix de suivre des cours
de français pour... pour éventuellement avoir accès à la permanence, là.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, messieurs. C'est... C'est tout le temps que
nous avions. Merci pour l'apport à nos travaux. Je vais suspendre quelques
instants, le temps de recevoir nos prochains invités.
(Suspension de la séance à 14 h 45)
(Reprise à 14 h 49)
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses
travaux. Donc, nos... notre second groupe d'invités de l'après-midi est le
Centre de... des travailleurs et travailleuses immigrants qui sont ici devant
nous. Alors, vous allez avoir une dizaine de minutes pour vous présenter ainsi
que présenter l'essentiel de votre mémoire. J'ai trop de respect pour vos noms
de famille pour essayer de les lire, je vais vous laisser vous présenter
vous-mêmes. Et, après ça, on va discuter avec les parlementaires de... de votre
mémoire ainsi que des recommandations que vous allez nous formuler. Le temps
est à vous.
M. Yoon (Cheolki) : OK. Merci
beaucoup. Merci de nous avoir invités. Donc, moi, c'est Cheolki Yoon, du Centre
des travailleurs, travailleuses... travailleuses immigrants et aussi un
chercheur universitaire. Donc, le Centre des travailleurs, travailleuses
immigrants, donc, je vais l'appeler CTI, donc le CTI est un organisme de
défense des travailleurs, travailleuses migrants, immigrants et racisés. Et je
voulais souligner, notre mémoire et nos analyses sont fondées sur les
expériences concrètes des travailleurs, travailleuses qu'on a accompagnés et
les membres actuels.
Donc, avant de passer le micro, donc, je
vais souligner seulement deux aspects.
Tout d'abord, la responsabilité vis-à-vis
de la croissance rapide des travailleurs étrangers temporaires au Québec.
D'abord, le Programme de travailleurs étrangers temporaires, donc, qui est en
partie sous le contrôle du Québec, le nombre a été accru plus rapidement au
Québec que les autres provinces. Et, depuis 2023, le plus grand nombre de
permis dans ce programme ont été délivrés au Québec, plus que l'Ontario.
Et ensuite, en ce qui concerne le
Programme de mobilité internationale, oui, ça, c'est sous le contrôle du
fédéral, mais, en fait, la grande partie est composée par les titulaires de
permis postdiplôme et permis conjoint, donc qui sont liés aux conjoints,
conjointes, aux diplômés... d'un titulaire de... de permis d'étude ou permis de
travail. Donc, pour cette raison aussi, pour la croissance des programmes de
mobilité internationale au Québec, le gouvernement du Québec est aussi...
responsable. Donc, en effet, le gouvernement du Québec est... doublement
responsable vis-à-vis de ces populations, parce que, d'un côté, donc, le
gouvernement doit protéger toutes les personnes sur son territoire, et aussi
c'est le gouvernement qui a causé la croissance rapide.
• (14 h 50) •
Et ensuite, le recours au concept de
capacité d'accueil, donc, en fait, déjà critiquait largement son fondement
scientifique. De plus, dans les discours qui mobilisent ce concept, souvent on
dissimule la contribution de ces personnes parce qu'on... on considère la
personne migrante temporaire comme un facteur négatif de la capacité
d'intégration. Mais, en effet, donc, ces personnes contribuent à la maintien de
la capacité d'existence de... notre société québécoise. Sans eux, donc, notre
système de santé ne serait pas maintenu et aussi notre production agricole va
s'écrouler. Donc, pour cette raison, il faut contribuer leur... il faut
reconnaître leur contribution et aussi arrêter d'utiliser le concept non fondé.
Donc, je vais passer la parole à ma
collègue Paule Fontep.
Mme Fontep (Paule) : Bonjour.
Merci beaucoup de me passer la parole. Et puis, en fait, je m'appelle Paule et
puis je suis infirmière dans mon pays d'origine. Je suis immigrante et... comme
vous pouvez le constater. Donc, je suis arrivée avec un permis de travail fermé
et...
Mme Fontep (Paule) : ...j'ai
subi plusieurs traumatismes dans... de par mon employeur et la société de
recrutement. Donc, j'ai été abusé psychologiquement, mentalement et même
physiquement dans mon lieu de travail. Et je pense que j'ai fait comme 10 mois
dans ce lieu de travail et, grâce au CTI, j'ai pu sortir de là avec un permis
de travail ouvert pour travailleurs vulnérables, qui était comme une forme de sortie
de cauchemar, mais qui n'était pas tout à fait une libération, parce qu'après
il fallait se replonger dans un permis de travail fermé. Et puis c'était tout
un traumatisme aussi pour retrouver un employeur, parce que les employeurs,
déjà, pour retrouver un contrat de travail, ce n'est pas du tout facile, parce
qu'il faut retourner dans le permis de travail fermé après avoir obtenu un
permis de travail ouvert pour travailleurs vulnérables.
Donc, après toutes ces violations, mon
parcours était très long, et une grande bataille, et j'ai donc pu sortir de là
avec toute la complexité. Et la.... en fait, ma situation est une situation...
elle ne peut pas être... ce n'est pas une situation que... je veux dire, elle
n'est pas... elle n'est pas... je tiens à préciser que ce n'est pas la seule
situation. Il y a beaucoup d'autres travailleurs temporaires qui vivent les
mêmes cas d'abus, les mêmes cas de persécution dans le lieu de travail, à cause
des permis de travail fermés, et à cause des employeurs abusifs, et à cause
aussi du manque de connaissances par rapport à leurs droits.
Donc, devant vous, aujourd'hui, j'aimerais
demander l'abolition des permis du travail fermés, déjà, j'aimerais demander
aussi de simplifier les démarches pour l'obtention d'un permis de travail
ouvert. Et aussi, nous sommes des milliers à contribuer à la croissance du
Québec, nous voulons bien que cela marche. Nos enfants sont là, ils travaillent
ici. Nous travaillons là. Nos enfants vont à l'école ici. Et puis nous
aimerions bien que nous... qu'on puisse revoir la situation de régularisation
de ceux qui sont déjà là, les travailleurs temporaires qui sont présents sur le
territoire. Merci.
M. Martinez (Yader Francisco) : Bonjour,
je m'appelle Yader Martinez, je suis travailleur étranger temporaire. Je suis
venu au Québec, en 2018, comme travailleur étranger temporaire. J'ai...
employeurs parmi d'autres... de travail différents, ce qui est inscrit dans mon
permis de travail, et le niveau de salaire inférieur au salaire minimum. J'ai
ensuite obtenu un permis de travail ouvert pour les travailleurs vulnérables,
et je suis retourné au permis fermé. Je travaille toujours avec un permis de
travail fermé. J'ai été invité à venir... à travailler au Québec pour remplir
les besoins d'entreprises québécoises et du marché du travail du Québec. Ce
sont surtout des emplois avec des conditions misérables, que ne rempliraient
pas les travailleurs locaux, et que font... les travailleurs immigrants comme
moi, et nos droits ne sont pas respectés et protégés. Depuis les changements du
programme d'immigration temporaire... même trop fréquent de concrétiser notre
démarche. L'immigration est un long processus... la préparation...
l'adaptation...
Quelques changements... de programme pour
quelqu'un... de programme... briser le projet de vie, le rêve de vie d'un grand
nombre de personnes immigrantes... les bonnes conditions de travail, et mettre
en place des politiques d'immigration prévisibles sont nécessaires pour
protéger les droits des personnes et pour assurer le bon fonctionnement de
notre système. Par ailleurs, dans ces conditions de travail et de vie...
précaires, il est difficile d'améliorer le français. C'est surtout
incompatible... linguistiques pour le renouvellement du permis de travail,
alors... chance de s'installer de manière permanente, elle est extrêmement
limitée. Pour protéger le français, au lieu de... irréaliste, il faut... la
francisation. Pour cela, toujours, des bonnes conditions de travail et de vie
sont indispensables, et l'autre, de... le résident permanent, améliorer
radicalement les conditions permanentes d'améliorer réellement les compétences
en français.
M. Laflamme (Raphaël) : Bonjour.
Moi, c'est Raphaël Laflamme, je suis organisateur au CTI. Donc, pour conclure,
je vais souligner quelques éléments qu'on a dans notre mémoire. Et donc un des
éléments importants, c'est la demande de pouvoir accéder à la résidence
permanente pour les travailleurs, travailleuses qui sont déjà ici. Ça fait que
ces gens-là, on le rappelle, le Québec les a invités, par le biais d'agences de
recrutement qui agissent pour le Québec à l'international, par le biais, même,
de missions du gouvernement, puis on a fait ça en leur promettant des
perspectives d'immigration permanente au pays. Et eux, ils ont fait leur part
de l'engagement, ils ont fait...
M. Laflamme (Raphaël) : ...ce
qu'on attendait d'eux, ils ont appris le français, ils ont travaillé, se sont
intégrés, mais le gouvernement, à partir de l'automne 2024, il a commencé à
changer les règles en cours de route. Donc, le gouvernement, de son côté, il
n'a pas respecté les règles de l'engagement. On coupe non seulement les
possibilités d'accès à la résidence permanente, mais même, dans bien des cas,
la possibilité de renouveler les permis de travail temporaire. Donc, dans les
faits, on force ces gens-là à quitter le pays. Donc, ce qu'on veut,
c'est : quand on parle de cibles d'immigration, quand on parle de cibles
temporaires ou permanentes, on ne peut pas mettre sur un pied d'égalité, donc
inclure dans les mêmes prévisions, les mêmes chiffres, les immigrants
hypothétiques qui viendraient un jour, peut-être, de l'extérieur puis les
personnes réelles qui sont déjà ici, des personnes qui font partie de notre
société autant que vous et moi. Donc, ils doivent pouvoir rester. Pour ça, on
doit leur permettre de renouveler leurs permis de travail puis, deux, d'accéder
à la résidence permanente.
Ensuite, on souhaite que les personnes qui
sont tombées dans les failles de notre système de migration aient des options.
Ce n'est pas normal que quelqu'un qui fuit son employeur puis qui, des suites
de ça, perd son statut d'immigration n'ait aucun recours. Pour ça, ça nous
prend un programme de régularisation des personnes sans statut migratoire.
Finalement, on souhaite qu'on ne sacrifie
pas non plus les catégories du regroupement familial puis de l'immigration
humanitaire puis nos obligations en matière de droits humains. Donc, réduire
les délais pour l'immigration humanitaire, qui sont habituellement de plus de
10 ans, on a vu, dans les journaux, à matin, 40 ans, pour certaines personnes,
permettre le regroupement familial pour arrêter de diviser des familles,
finalement arrêter de faire des économies de bouts de chandelle en coupant dans
des programmes qui ne coûtent pas si cher puis qui créent des situations
ultradangereuses et précaires, comme les coupes dans l'aide sociale pour les
demandeurs d'asile puis les coupes dans les services de santé pour les
personnes immigrantes et réfugiées. Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup pour ces témoignages et cette présentation.
On va donc commencer les discussions avec les parlementaires. M. le ministre,
la parole est à vous.
M. Roberge : Merci, Mme la
Présidente. Vous avez parlé de témoignages. Effectivement, on a eu messages, je
vous dirais, d'experts, échos d'un organisme et témoignages. Merci d'être venus
témoigner. C'était dur d'entendre, mais ça devait être plus dur de le vivre, ce
que vous avez vécu. J'ai entendu des gens dénoncer des abus. C'est certainement
déplorable. Nous, notre cadre légal ne permet pas ça. La CNESST s'applique à
tout le monde sur le territoire québécois, y compris nos travailleurs étrangers
temporaires, y compris les étudiants étrangers. En fait, peu importe le statut,
le cadre légal s'applique à tous. Malheureusement, il y aura toujours des gens
qui profitent de d'autres personnes, comme il y a toujours des criminels, même
si la police est là pour faire le ménage, même si... comme il y aura toujours
des fraudeurs, même s'il y aura toujours des enquêteurs pour empêcher la
fraude. Ça... Il ne faut d'aucune manière banaliser des abus que vous auriez pu
subir. Ce n'est vraiment pas ce que je veux faire. Simplement dire que ce n'est
pas le simple l'apanage de travailleurs étrangers temporaires. Maintenant, je
comprends qu'en ce moment vous n'êtes plus dans cette situation. Je m'en
réjouis.
• (15 heures) •
Je vais maintenant me concentrer sur vos
propositions. Vous avez dit, bon, on parle dans la planification d'immigration
permanente et temporaire. C'est la première fois qu'on le fait. Si vous aviez
participé à d'autres exercices semblables, au fil des années, on n'aurait parlé
que des permanents, que des personnes qui deviennent de nouveaux Québécois, de
nouveaux Canadiens. C'est la première fois que... cette année, qu'on diffuse
les chiffres, qu'on diffuse les données, qu'on entend les groupes là-dessus
puis qu'on prend le pouls de la population et de tous les groupes sur comment
on devrait permettre le transfert d'un statut à l'autre, comment on devrait
planifier l'arrivée, l'accueil, la rétention et parfois le départ de certaines
personnes qui sont des résidents temporaires, des fois on dit RNP, résidents
non permanents, ou temporaires. Et c'est là où j'ai peut-être un désaccord,
mais c'est correct. Du choc des idées naît la lumière. Pour moi, quand il y a
des gens qui viennent ici pour deux ans ou trois ans, des fois ils sont là
depuis huit ans, mais deux ans, deux ans, deux ans... mais ça reste un statut
qui était temporaire. Des passeurs, des organismes auraient pu dire :
C'est sûr, tu vas devenir permanent, mais ça... il avait quand même le statut
temporaire. Et il est possible qu'à terme, bien, ça se termine. C'est l'essence
même du mot «temporaire». J'ai l'impression que vous avez un désaccord
fondamental là-dessus. Vous dites : Vous avez une responsabilité, si vous
avez accepté de faire venir dans vos programmes, soit provincial, québécois, ou
fédéral, des gens, vous avez l'obligation de les garder sur le territoire
québécois. Si c'est le cas, on a un...
15 h (version non révisée)
M. Roberge : ...désaccord.
Mais est-ce qu'on se comprend bien? Est-ce que vous dites : Toute personne
sur le territoire québécois, en vertu d'un programme, même temporaire, devrait
être ici de manière permanente. Est-ce que c'est ce que vous dites?
M. Yoon (Cheolki) : Peut-être,
je pourrais donner une réponse. Donc, tout d'abord, puis, quand je dis... ce
que j'ai dit, c'était d'abord la responsabilité de la protection de ces
personnes. Et aussi donc, vous avez mentionné, donc, la possibilité de l'intervention
de l'autorité publique, mais le statut temporaire ne permet pas de réclamer
leurs droits, malgré la présence de les lois et le règlement. Donc, ces
personnes sont exposées à la violence, à la merci de l'exploitation et toutes
sortes de violences. Et ça, c'est une chose. Donc, malgré la présence de la
loi, ces personnes ne sont pas protégées.
Et une des principales raisons, ça, c'est
la précarité de leur statut migratoire. Donc, d'abord, pour accéder... pour
retenir leur statut, comme... maintenir leur statut comme travailleur étranger
temporaire, le renouvellement de permis de travail, ça, c'est tellement
difficile et malgré l'obtention d'un permis ouvert pour les travailleurs
vulnérables, ils doivent retourner aux permis fermés. Juste pour donner un
exemple, pendant une période... une année de période de permis ouvert, ce qu'on
fait souvent les employeurs : OK, donc on fait la promesse : Je vais
vous embaucher tout d'abord et ensuite je vais embaucher avec un permis fermé. Et
à la fin, juste quelques jours avant l'expiration, donc, bye bye, c'est fini,
donc. Et ensuite on a vu tellement de personnes qui deviennent sans statut
après une année, protégé comme un travailleur vulnérable. Donc, ça, c'est inacceptable.
Et ensuite on parle de faciliter l'accès à la résidence permanente. Donc,
évidemment, donc, idéalement, si on peut donner la résidence permanente à toutes
ces personnes qui veulent et qui peuvent rester ici, ce serait idéal. Mais
minimalement, donc, il faut ouvrir l'accès à la résidence permanente. Parce que
pour sortir de la précarité permanente, donc, ça, c'est la seule façon de les vraiment
protéger. Et donc la prolongation de leur statut temporaire ne leur permet pas
de sortir de cette précarité. Donc, peut-être nos collègues pourraient donner d'exemples
plus concrets.
Mme Fontep (Paule) : Bien oui,
comme vous l'avez dit, est-ce que tous ceux qui sont venus comme temporaires...
est-ce qu'ils sont... ils ont l'obligation de rester? Est-ce que le
gouvernement a l'obligation de les retenir? Pas l'obligation, mais immigration,
c'est un projet de vie. Donc, quand on vient, c'est comme on a abandonné tout
ce qu'on avait, on a laissé les familles, on vient pour s'installer, on ne
vient pas pour partir. C'est vrai que c'est temporaire, entre guillemets. Mais
tenez... rendez-vous compte qu'il y a toujours les enjeux d'emploi sur le
terrain? Pourquoi donc ne pas retenir ceux qui sont déjà là et qui sont
capables de travailler au lieu d'aller encore en chercher? Donc, c'est un peu
ça la... pour vous répondre, c'est un peu dans ce sens que...
M. Roberge : Mais on se
rejoint à 100 %. Parmi les orientations qui sont dans le cahier de
consultation. Je pense que c'est maintenant... On propose à 60... On souhaite
avoir au moins un minimum de plus de 63 % à 66 % puis c'est un
plancher. Je veux dire, si on se rend à 100 %, ce n'est pas mauvais d'avoir
parmi maintenant les immigrants permanents des gens qui sont déjà sur le
territoire québécois. Donc, je suis d'accord avec vous, surtout des gens qui
parlent français, qui s'intègrent, qui ont un emploi, avec un statut
temporaire, peuvent voir... peut-être auront le désir de rentrer dans leur pays
d'origine, ça se peut, peuvent voir leur permis arriver au bout... ne pas être
renouvelé et doivent quitter. Ça se peut, mais peuvent aussi vouloir rester et
arriver, comme je vous dis, à un arrimage parfait. C'est-à-dire que le Québec
dit : On veut surtout vous garder plutôt que de vous retourner chez vous,
puis de faire venir un autre temporaire qui fera exactement le même travail.
Allons-y vers l'offre de la résidence
permanente, puis le statut complet de Québécois, de Canadien envers ces
personnes-là qui sont ici, qui sont intégrées, qui ont pris racine. C'est
définitivement ce qu'on souhaite. C'est le virage qu'on souhaite prendre avec
cette planification pluriannuelle. Donc, le regard critique sur le passé, mais
même sur la situation actuelle tant que les nouvelles règles ne sont pas là. Je
le fais avec vous. Si je trouvais que tout est parfait, vous retrouveriez dans
le cahier de propositions, le statu quo, ça dirait : Bien, continuons, ce
qui est déjà là, ne changeons rien... Il y a des changements majeurs qui sont
proposés dans le cahier de consultation. On peut avoir des désaccords quand
même. Puis on est justement là pour prendre acte de ça. Ce qui a été mis au jeu
va être amélioré par les consultations qu'on fait aujourd'hui. J'ai un petit
élément où je me questionne...
M. Roberge : ...vous voulez
qu'on retire des exigences par rapport à la langue française. J'ai vu que vous
parlez tous français. Vous êtes en apprentissage de le faire, dans certains
cas. Je vous félicite. Mais pourquoi réduire les exigences de langue française
quand on arrive dans la seule nation francophone d'Amérique du Nord avec une
langue, je vous dirais, qui est en déclin, disons-le, malheureusement? Pourquoi
on donnerait suite à votre proposition à cet égard-là?
M. Laflamme (Raphaël) : ...je
vais les laisser répondre à cette question. Je voulais revenir juste à des
points qui avaient été mentionnés avant. Rapidement, là, sur la question
de : la CNESST s'applique à tout le monde, on va peut-être avoir un drôle
de point de convergence là-dessus sur le fait que notre système à deux paliers
crée un problème à ce niveau-là. C'est-à-dire que l'application des règles de
la CNESST est rendue difficile par le fait qu'il y a un partage des
compétences. Qu'est-ce que je veux dire par là? Pour avoir le permis de
travail, il faut une étude d'impact du marché du travail au fédéral. Donc,
c'est l'employeur qui est responsable d'aller chercher les démarches pour faire
le renouvellement du permis de travail.
Donc, par exemple, un employeur qui est
congédié... je l'ai vu, par exemple, le cas, une travailleuse est congédiée
parce qu'elle tombe enceinte : Je ne veux pas ça, une travailleuse
enceinte, congédiée. On n'a pas le droit de faire ça au Québec. Elle va faire
la plainte à la CNESST. Trois mois, six mois, son permis de travail expire. La
CNESST dit : On ordonne que vous retournez au travail. Elle n'a même plus
le droit d'être au Canada. Il est là, le problème. Pour la question de la
planification, je pense que c'est aussi la question de changement des
règlements, c'est-à-dire que... est-ce que ça serait envisageable de voir, par
exemple, une espèce de clause grand-père, tous les changements sur la durée des
permis, sur la restriction du 10 %, par exemple? Est-ce qu'on n'aurait pas
pu laisser les travailleurs qui sont déjà ici continuer avec les règles telles
qu'ils les connaissaient quand ils se sont engagés à venir au pays, plutôt que
de... une fois qu'ils arrivent ici : Ah! finalement, ça ne sera pas
renouvelable, finalement, tout ça? Mais, tu sais, ils ont peut-être abandonné
leur carrière, ils ont vendu leur maison, ils ont... tu sais... énormes
démarches, puis là après, ici, on arrive : Ah! finalement, ce n'est plus
comme on pense que... comme on vous l'a présenté.
Je vais laisser répondre sur la question
du français.
M. Yoon (Cheolki) : ...français,
donc, on est tout à fait d'accord avec l'idée de la protection du français,
surtout dans le contexte nord-américain. Et j'ai rencontré des milliers et
milliers de personnes avec un statut temporaire ou même sans statut et je n'ai
jamais rencontré une seule personne qui s'oppose à cette idée. Donc, ce qui est
important, ça, c'est plutôt les conditions d'apprentissage. Leur précarité avec
un statut temporaire ne leur permet pas d'améliorer réellement leur niveau de
français, donc leurs conditions de travail, longues heures de travail
irrégulières, épuisés financièrement, tout le temps précaires, donc les
conditions ne leur permet pas de réellement améliorer leur français. Ce qu'on a
constaté dans nos expériences, c'est après, une fois... la vie est stabilisée,
qu'on peut améliorer réellement leur français. Donc, surtout, un exemple
éloquent, c'étaient plutôt les travailleuses domestiques, travaillant dans des
foyers privés, donc isolées, pendant deux ans, trois ans, quatre ans. Donc, il
y a une stagnation. Il n'y a pas d'amélioration. Mais, une fois obtenue la
résidence permanente, une fois qu'elles travaillent dans un milieu harmonieux,
collaborent avec des travailleurs, travailleuses, des collègues francophones,
leur amélioration du français, ça, c'est substantiel. Donc, c'est plutôt dans
ce sens-là. Donc, les conditions d'apprentissage avec un statut actuel, surtout
pour les travailleurs étrangers temporaires ou d'autres personnes avec un
statut temporaire et précaire, ne leur permet pas d'améliorer le français.
Donc, pour cette raison, une fois... stabiliser la vie, stabiliser la condition
et leur permettre d'améliorer réellement leur français.
• (15 h 10) •
M. Roberge : Merci pour vos
réponses et ces témoignages. J'ai des collègues qui veulent poursuivre les
échanges avec vous.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Alors, je vais reconnaître le député de
Jonquière. Oui, parfait. Il vous reste quatre minutes 22.
M. Gagnon : Merci, Mme la Présidente.
Bonjour. C'est un plaisir de vous accueillir à l'Assemblée nationale. Je
regardais, là, le déploiement. Je vais vous appeler le CTI. Est-ce que ça va?
CTTI. Je regardais un peu, dans le fond, vous êtes implantés dans le
Bas-Saint-Laurent, dans la Capitale-Nationale puis dans ma région, le
Saguenay-Lac-Saint-Jean. Est-ce que vous êtes en mesure de dire, là, si on
prend une journée typique, là, d'ouverture du centre... est-ce que c'est pas
mal des similitudes dans l'ensemble du territoire dans lequel vous oeuvrez, les
réalités?
M. Yoon (Cheolki) : Donc,
non, c'est pas mal différent.
M. Gagnon : C'est différent?
M. Yoon (Cheolki) : Aussi,
donc, l'ouverture de nos sections régionales, ça, c'est pas mal récent.
Saguenay-Lac-Saint-Jean, ça, c'est plus ancien. Mais, dans les autres régions,
c'était plutôt dans le contexte de la pandémie. Donc, c'était au cours de six,
sept dernières années une explosion des travailleurs étrangers temporaires dans
des régions...
M. Yoon (Cheolki) : ...avant
évidemment dans le secteur agricole, oui, mais dans d'autres secteurs, la
présence accrue des travailleurs... temporaires, c'était très récent. Et, en
fait, le paysage est pas mal différent. Donc, dans les régions, ils sont plus
isolés d'abord et moins de chances de trouver un autre emploi par exemple. Et
aussi, donc si ça se déroule bien, ça va, mais une fois il y a un conflit avec
l'employeur, les habits des employeurs, ça, c'est plus difficile d'en sortir
parce que tout le monde connaît tous, donc ils sont isolés de ce réseau et ne
peuvent pas vraiment éviter le regard des employeurs. Peut-être, nos collègues
pourraient ajouter des...
Mme Fontep (Paule) : Oui. Et
effectivement, donc... dans les... dans ces régions, ça permet à ce que...
parce qu'il y a plusieurs abus, comme disait mon collègue tout à l'heure, dont
il y a des recruteurs qui profitent de cette occasion, de l'absence des... des
organismes comme le nôtre pour abuser des travailleurs temporaires qui ne
connaissent pas leur droit, déjà qu'ils sont dans les territoires étrangers.
Donc, la présence d'un organisme comme le nôtre, ça permet à ce que, quand les
travailleurs temporaires sont victimes d'abus, ils ont des recours. Et ce n'est
pas toujours facile parce qu'il y a quand comme des intimidations, il y a des
frustrations, donc c'est un gros travail de les convaincre, de leur dire que
vous avez le droit, comme on parlait des droits tout à l'heure, mais c'est
toujours les conceptions locales et les conceptions qui sont parfois différentes
de... de droits sont différents.
M. Gagnon : Parfait. Je vous
pose une question, mais si vous ne l'avez pas vu, là, ce n'est pas grave,
j'enchaînerai avec une autre question. Tout à l'heure, ce matin, le ministre a
rendu publique une lettre au fédéral en lien avec la clause grand-père dans les
régions. Est-ce que vous avez eu le temps de le voir? Sinon... sinon, je vais
passer à une autre question, là, ce n'est pas grave. Non, vous ne l'avez pas...
M. Yoon (Cheolki) : Donc, pas
ce matin, mais on a vu la médiatisation il y a quelques jours. Donc, en fait,
d'abord d'un côté, oui, mais l'autre côté, donc ce n'est pas toujours, comment,
proliféré les titulaires de permis temporaire, donc la réponse du ministre
fédéral de l'Emploi et des... donc, en fait, donner l'accès à la résidence
permanente, ça, c'est la meilleure façon de les protéger. Donc, dans
l'ensemble, on croit que le système d'immigration doit être basé plutôt un
système permanent, donc, et temporaire, ça devrait être plutôt un cas exceptionnel.
M. Gagnon : Alors, la clause
grand-père présentée, là, puis on va dire publiquement par le ministre de
conserver les travailleurs étrangers en poste, vous êtes... vous êtes
favorables à cette demande-là, assurément?
M. Yoon (Cheolki) : Donc...
donc, la clause de grand-père en tant que tel, oui, mais en assurant aussi,
donc l'accès à la résidence permanente. Donc, cela ne peut pas être un prétexte
de réduire l'accès à la résidence permanente et rester plus longtemps toujours
dans la précarité. Donc, ça, c'est inacceptable. Mais donc, différencier à la
condition pour la personne qui trouve le deuxième, troisième a un permis de
travail, donc cette idée, donc, on peut l'accepter, oui.
M. Gagnon : Parfait. Il me
reste... Non, il ne me reste plus de temps. C'est un plaisir.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : 15 secondes.
M. Gagnon : Je vous laisse le
mot de la fin.
M. Laflamme (Raphaël) : ...je
pense qu'aussi où j'en voulais venir, c'est clause grand-père pour le maintien
des permis mais aussi pour les programmes d'immigration permanente.
C'est-à-dire quelqu'un qui a fait ces deux années pour avoir l'admissibilité au
PEQ puis que deux semaines avant son... ça a été annoncé que ça a été coupé. On
comprend la frustration de la situation. Donc, quelqu'un qui a lu les
programmes de résidence permanente... Donc, je pense que je suis coupé.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Bien, on continue, on continue. On va continuer avec l'opposition
officielle pour 9 min 54 s.
M. Morin : Merci, Mme la
Présidente. Alors, M. Yoon, M. Laflamme, Mme Fontep,
M. Martinez Martinez, bonjour, bienvenue, bon après-midi. Merci d'être là.
Merci pour votre mémoire.
M. Laflamme pour ce que vous avez
commencé à dire avec le PEQ, là, que gardez-le, ne l'oubliez pas, on va y
revenir, vous allez avoir la chance d'en parler, ça m'intéresse.
Merci pour votre mémoire. Il y a des
éléments qui ont littéralement piqué ma curiosité vous apporter un éclairage,
je trouve, différent de ce qu'on a entendu de plusieurs groupes jusqu'à
maintenant en commission pour évidemment ce travail de planification de
l'immigration.
Une des questions que j'aimerais vous
poser. Quand on prend le cahier de consultation publique, particulièrement la
page 25 du cahier, et qu'on regarde le graphique 4, ça tient compte
des étudiants, des travailleurs étrangers mais aussi du PMI, du plan de
mobilité international qui est un plan fédéral, on s'entend là-dessus. Et là, à
partir de 20...
M. Morin : ...22, vous voyez
que la courbe augmente, mais d'une façon vraiment importante. J'essayais de
comprendre comment se fait-il que soudainement... c'est comme si le fédéral
avait, woups! oublié toutes les règles. Je ne sais pas. Mais tu sais, il y
avait quand même un manque de contrôle total du fédéral. Mais quand je lis
votre mémoire, il y a peut-être une explication, mais je ne suis pas certain de
bien comprendre. Ça fait que je vais avoir besoin de vous. Vous semblez dire
qu'au fond, le gouvernement du Québec est responsable en grande partie de cette
augmentation-là. Donc, ce ne serait pas juste le fédéral. Le Québec aurait son
mot à dire, particulièrement à cause des permis délivrés dans le cadre du PMI,
mais compte tenu des permis que le Québec a déjà délivrés. Et si on regarde par
exemple les CSQ, donc pour les travailleurs, les résidents, les étudiants qui
sont en voie d'obtenir la résidence permanente au Québec, là, il y en a 142 000 en attente. C'est ce que
je comprends, là, donc. Alors, ces gens-là, entre-temps, s'ils veulent
travailler, là, parce qu'ils sont sur le territoire, est-ce que je comprends
qu'ils obtiennent un PMI?
M. Yoon (Cheolki) : Donc,
est-ce que je peux répondre?
M. Morin : Oui, oui.
Absolument.
M. Yoon (Cheolki) : Oui. Donc,
les personnes qui attendent la résidence permanente, donc, oui, donc PMI, mais
PMI, donc, est très complexe. Il y a plein de sous-programmes inclus là-bas.
Donc, pour cette période d'attente, souvent on pense au permis de travail
ouvert, transitoire, mais ça, c'est admissible au dernier moment. Donc, avant
cela, donc, on adopte... donc, on obtient plutôt un permis fermé, donc à 93,
95, donc. Et ça, c'est aussi considéré comme PMI.
Et en ce qui concerne la responsabilité
dans la croissance de PMI, donc d'abord, c'est vrai, donc, ça, c'est le
gouvernement fédéral qui est premier responsable de la croissance de cette
portion, mais si on regarde attentivement, dans le programme de... programme de
mobilité internationale, une grande part est composée par les personnes
titulaires de permis postdiplôme. Et pour obtenir un permis postdiplôme, ce
sont les personnes qui sont venues avec un permis d'études, donc qui ont obtenu
d'abord certificat d'acceptation du Québec, permis d'études, et terminé leurs
études, ensuite, accédé au permis postdiplôme, et aussi un permis conjoint,
soit un conjoint des étudiants internationaux ou au... des travailleurs
étrangers temporaires. D'abord, ça, c'est PMI sans intervention directe du
gouvernement du Québec, mais parce qu'il y a un grand nombre des personnes
titulaires d'un permis d'études, ils peuvent faire venir leur conjoint avec un
permis ouvert, Pareil pour les travailleurs étrangers temporaires qui peuvent
accompagner leur conjoint, conjointe avec un permis conjoint considéré comme un
PMI. Donc, indirectement, donc ces deux grandes catégories sont reliées avec
compétence québécoise, soit délivrance de CAQ pour accéder à des permis
d'études et permis de... permis de travail. C'est dans ce sens-là.
• (15 h 20) •
M. Morin : Merci. Merci
beaucoup. Quand on regarde les scénarios qui sont projetés par le gouvernement
au niveau des... de l'ensemble de l'immigration, mais pour les admissions
permanentes et comme je disais précédemment, ceux qui sont en attente de la
permanence, là, il y en a à peu près 140 000, là. Quand on regarde le tableau
scénario A puis qu'on dit que le Québec pourrait en admettre 25 000 par année,
ça va prendre combien de temps pour régulariser la situation de tous ces travailleurs,
qui sont en passant sur le territoire? Et ça crée une espèce de goulot
d'étranglement. Ces gens-là, s'il faut qu'ils travaillent entre-temps, ils vont
demander des permis, mais ça génère une machine bureaucratique incroyable. Oui,
allez-y, M. Laflamme.
M. Laflamme (Raphaël) : Bien,
le goulot d'étranglement, je pense que c'est le mot. Quand on regarde les
comparaisons de migrants temporaires en attente de la résidence permanente
versus le nombre, si on va avec le scénario de 25 000, on parle des années,
puis c'est un peu... C'est un peu ça notre point justement, que ces gens-là,
ils veulent la résidence permanente, ils sont ici. Puis là, je comprends que le
désaccord, tantôt : Bien, c'est des temporaires, ils pourraient retourner,
oui, mais des fois ils ont des familles, ils ont des enfants qui vont à
l'école, ils sont... ils sont déjà ici, ils participent déjà à la société. Il
n'y a pas de raison qu'on ne les laisse pas rester...
M. Laflamme (Raphaël) : ...et
davantage ici.
M. Morin : Sauf que ma
compréhension, c'est que, quand ils ont un CSQ, ils sont en voie d'obtenir la
permanence, donc éventuellement de devenir citoyen canadien. Donc là, ce n'est
juste des temporaires temporaires. Ils ont franchi une autre étape. Alors, qu'est-ce
qu'on va faire avec tous ces gens-là? Puis le scénario...
M. Laflamme (Raphaël) : Bien,
le CSQ ne permet pas en soi de... de demeurer sur le territoire, en fait, même
si on a une demande. Il y a... Il y a demande de permis ouvert pour...
transitoire, mais qui est... qui est très limité. Parce qu'il faut... C'est une
demande en soi qu'on fait, une fois qu'on a l'exhaustivité de notre demande de
résidence permanente. Donc, il y a quand même un moment où on peut avoir le CSQ
et ne pas avoir de... de droit de rester au... sur le territoire.
M. Morin : Bien. On va
reparler du PEQ. Vous aviez commencé à en parler tantôt, M. Laflamme. Là,
le PEQ a été suspendu. Moi, ma compréhension, c'est qu'il y a des gens qui
avaient... qui ont été invités au Québec, qui sont restés au Québec alors que
le programme était ouvert. Quand ils ont... j'imagine, évalué la possibilité de
venir au Québec, ce programme-là était ouvert. Donc, ça a créé des attentes. Il
y en a qui étaient même dans le programme, et là, du jour au lendemain, le
gouvernement suspend le programme. Là, je comprends que c'est suspendu pour un
bout de temps. On ne sait pas quand ça va revenir, si ça revient. Qu'est-ce
qu'on fait avec ces gens-là?
M. Laflamme (Raphaël) : Bien,
nous, notre suggestion, en fait, c'est... c'est de réouvrir le PEQ, justement,
puis de leur permettre d'appliquer pour la résidence permanente... bien, de
continuer leur application.
M. Morin : Parce que le
Québec n'avait pas un contrat moral avec ces gens-là, à tout le moins?
M. Laflamme (Raphaël) : C'est
tout à fait notre point. C'est-à-dire qu'ils sont venus selon certaines règles,
selon certaines attentes qu'on leur a expliquées, puis on a changé ces
règles-là une fois qu'ils étaient ici. Donc, pourquoi ne pas leur laisser... Tu
sais, l'immigration, c'est un projet de vie, là. Je pense que les collègues
pourraient en parler plus longuement que moi, là. Mais, tu sais, des fois, on
planifie ça pendant 10 ans, il y en a qui ont... qui ont dépensé énormément
d'argent dans cette démarche-là, qui ont abandonné leur carrière, donc ce n'est
pas... ce n'est pas quelque chose qu'on peut se revirer sur un 10 cents, comme
on dit, après un an ici, ah, finalement, ça ne marchera pas, je vais retourner.
Donc, effectivement, il y avait... il y avait un engagement qui... qui semblait
être là qui n'a pas été respecté dans le...
M. Morin : Puis,
dernière chose. À la page 20 de votre mémoire, vous parlez du regroupement
familial. Les délais sont anormalement longs au Québec. Avec les différents
scénarios, ça risque d'être pire. Est-ce qu'on est d'accord pour dire qu'il y a
là un engagement humanitaire incontournable puis que le fait de laisser des
gens en attente quatre, cinq, six, sept ans, c'est totalement inhumain?
M. Laflamme (Raphaël) : Oui.
Tout à fait. Puis je pense que, tu sais, ce qu'il y a à... aussi à souligner
dans ces questions-là, c'est les questions des... des familles qui sont déjà
ici en famille, puis que là, qui vont devoir se reséparer à cause de l'enchevêtrement
des... des différents parcours puis des... des différentes démarches. Puis, tu
sais, regroupement familial, il y a un... un engagement humanitaire, mais
aussi, là, il y a un avantage que ces gens-là, ils... leurs familles, ils
dépensent ici, ils vont à l'école ici, je veux dire, la... plutôt que de
renvoyer l'argent dans le pays d'origine, même si on veut faire l'argument
économique qui va peut-être parler à certains partis davantage aujourd'hui, là.
M. Morin : Parfait. Je
vous remercie. Merci, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Alors, on poursuit avec le député du
deuxième groupe d'opposition pour trois minutes 18 secondes.
M. Cliche-Rivard : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Merci beaucoup, CTI, de votre excellente
présentation. On vous sait toujours à la bonne place avec toujours des
excellentes propositions. Merci pour votre travail.
Tantôt, vous avez parlé d'aide sociale.
J'aimerais ça qu'on revienne là-dessus parce qu'il y a eu un article qui est
sorti il y a quelques jours sur d'éventuelles coupes étudiées par le
gouvernement, notamment les aides financières touchant les familles avec les
enfants et les mineurs non accompagnés. J'aimerais ça connaître la position du
CTI sur cette proposition du gouvernement.
M. Yoon (Cheolki) : Ça,
c'est sûrement contre, donc, en fait, demander plus de subventions pour
accueillir les demandeurs d'asile sur le territoire québécoise. Donc, demander
plus de subventions vis-à-vis du gouvernement fédéral, ça, c'est tout à fait
juste. Mais, en attendant la réponse, donc, couper la subvention, couper le
soutien à ces personnes, ça, c'est inhumain et ça, c'est inacceptable.
M. Cliche-Rivard : Inhumain
et inacceptable. Je vous entends et je partage votre opinion. Vous avez parlé
aussi puis vous faites beaucoup campagne sur la fin du permis de travail fermé.
Vous avez rendu des témoignages assez éloquents, en fait, à la dernière
planification. Suivant vos... vos témoignages, il y avait la ministre de
l'époque qui s'était engagée à ouvrir un mandat avec la CPMT. Malheureusement,
la CPMT n'a pas été capable d'obtenir un... un mandat consensuel. Mais, depuis
ce temps-là, on a eu en même temps le rapport des Nations Unies qui a dit que
le Québec et le Canada étaient responsables de conditions propices à
l'esclavagisme moderne. Pourquoi on en est là...
M. Cliche-Rivard : ...là,
encore aujourd'hui, une planification plus tard?
M. Yoon (Cheolki) : Donc, en
fait, je me rappelle très bien ce moment-là. Donc, en fait, cette travailleuse
qui a témoigné ses expériences est toujours dans un permis fermé et elle
souffre toujours. Donc, j'aimerais souligner cet aspect, donc. Et, ensuite,
depuis le virage radical de la part du fédéral l'an dernier, et qui concorde
avec l'orientation du gouvernement du Québec, de plus en plus de personnes
immigrantes souffrent. Donc, surtout...
Tout à l'heure, donc, précédemment, donc,
vous avez posé la question sur les personnes qui sont affectées par la suspension
de PEQ. En fait, malheureusement, donc, au cours des dernières années, nos organisateurs,
nos organisatrices ont passé beaucoup de temps pour aider les gens de demander
un permis de travail ouvert pour les travailleurs vulnérables. Depuis quelques
mois, donc, on dépense beaucoup de temps pour le faire, et de demander de...
permis de séjour temporaire, qui est une sorte d'exception. Donc, s'il n'y a
pas d'autre recours pour rester au Canada, et si cette personne ne peut pas
retourner dans leur pays d'origine, on peut demander cette... ce statut, donc,
qui est décidé de manière discrétionnaire par IRCC. On dépense beaucoup de
temps, parce qu'il n'y a pas d'autre solution. Les gens souffrent, égarés. Et
surtout, depuis novembre dernier, donc leur permis de travail pour PTET... bas
salaires, ça, c'est juste un an, ça prend, tu sais, donc, cinq mois, au moins,
pour obtenir un nouveau permis de travail, et, pour y arriver, il faut trouver
d'abord une offre d'emploi, qui prend deux, trois mois, au moins, ça veut dire
qu'il faut commencer des démarches deux, trois mois après leur arrivée, ce qui
est impossible.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, c'est ce qui met fin à cette portion. Mais
on termine encore avec le député d'Arthabaska, 3 min 18 s.
M. Boissonneault : Merci,
Mme la Présidente. Merci, Mme, merci, messieurs. J'aurais aimé ça parler d'une
de vos recommandations : en collaboration avec le gouvernement fédéral,
mettre en place un programme de régularisation des personnes sans statut
migratoire. Qu'est-ce que vous voulez dire par là? Si vous voulez juste
préciser ce que ça voudrait dire. Est-ce que ce sont pour les personnes, par
exemple, qui n'auraient pas été reconnues par le gouvernement fédéral comme
personnes protégées, donc personnes réfugiées? Est-ce que ça va au-delà de ça?
• (15 h 30) •
Mme Fontep (Paule) : Je
dirais que c'est comme pour les travailleurs temporaires, déjà, pour les
travailleurs temporaires en général, pour les travailleurs temporaires victimes
d'abus, de par leur emploi, parce qu'on a mentionné le permis de travail ouvert
pour travailleurs vulnérables, qui a juste une durée d'un an et qui, tout à
fait, ne protège pas, effectivement, l'employé, parce que le... après, il faut
retourner dans le permis de travail fermé. Et puis il y a cette complexité
d'obtenir un contrat de travail, cette complexité, et puis cette frustration,
aussi, de retourner peut-être vers un autre abuseur, entre guillemets, parce
que, si on demande un permis de travail ouvert pour travailleurs vulnérables,
c'est parce qu'on a été abusé par l'employeur. Donc, il y a ces séquelles
encore qui restent dans les coeurs des travailleurs temporaires, donc c'est
comme pour les travailleurs temporaires, et pour tous ceux qui sont... qui ont
perdu leur statut, parce qu'en fait on ne vient... on vient avec un statut, on
ne désire pas de perdre son statut, mais pendant son parcours, on peut perdre
son statut. Donc, pour ceux qui veulent rester...
M. Yoon (Cheolki) : Donc,
plus précisément, donc, toutes ces personnes qui ont perdu leur statut, soit
anciens titulaires de permis d'études ou permis de travail, mais qui ont
perdu... le délai de 90 jours est passé, il n'y a aucune façon de rétablir leur
statut. Et aussi, les demandeurs d'asile dont la demande a été déboutée, et
aussi, on a épuisé tout le processus de rappel, donc, ensuite, qui n'ont pas
d'autres moyens. Donc, ce sont les personnes qui ont perdu leur statut, donc
sans statut.
M. Boissonneault : Est ce
que... donc, est-ce que c'est juste de dire que toute personne qui veut
demeurer au Canada devrait avoir un statut?
M. Yoon (Cheolki) : Donc, qui
ont... qui n'ont pas d'autre moyen d'accéder au statut migratoire au Québec...
au Canada, et aussi, qui ne peuvent pas retourner dans leur pays d'origine,
pour différentes raisons. Donc, en fait, si cette personne reste, pendant des
années, sans statut au Canada, ça a déjà signifié... il y a une vraie raison de
ne pas retourner, parce que vivre sans statut au Canada, c'est vraiment un
enfer. Juste un petit exemple. Lorsqu'il y a une violence faite par quelqu'un,
et la police arrive, ce sont ces victimes qui se cachent, malgré la violence
sexuelle, physique, c'est cette personne, et vivre cette situation pendant des
années, ça signifie déjà quelque chose.
M. Boissonneault : En
terminant, parce que je n'ai pas beaucoup de temps...
15 h 30 (version non révisée)
M. Boissonneault : ...est-ce
que vous avez une inspiration d'un autre modèle ailleurs dans le monde où ça s'est
fait comme ça?
M. Yoon (Cheolki) : Donc, en
fait, surtout, dans plusieurs pays européens, donc, il y a des programmes de régularisation
quelquefois, exceptionnellement, quelquefois récurrents... par exemple le
modèle d'Irlande ou Portugal. Donc, on ne peut pas discuter en détail, mais il
y a des modèles existants.
M. Boissonneault : Où on a
régularisé, comme ça, la...
M. Yoon (Cheolki) : C'est ça.
M. Boissonneault : ...les
personnes...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup.
M. Boissonneault : Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Alors, c'est ce qui met fin à cette audience. Je vous
remercie au nom des parlementaires pour ce que vous nous avez amené, la couleur
de vos témoignages et de vos recommandations.
Et je vais suspendre les travaux quelques
instants, le temps de recevoir le prochain groupe.
(Suspension de la séance à 15 h 33)
(Reprise à 15 h 37)
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses
travaux. Donc, nos prochains invités sont les représentants des Manufacturiers
et Exportateurs du Québec, qui sont représentés par Mme Julie White,
présidente-directrice générale, bienvenue, ainsi que Mme Jolyanne Gagné,
conseillère principale aux affaires publiques et aux relations
gouvernementales.
Alors, mesdames, bienvenue à la Commission
des relations avec les citoyens. Donc, vous connaissez fort probablement le
processus, vous avez 10 minutes pour exposer l'essentiel de votre mémoire
et surtout de vos recommandations, et par la suite on va discuter avec les
parlementaires. Alors, votre 10 minutes débute maintenant.
Mme White (Julie) : Merci
beaucoup. Merci, Mme la Présidente. M. le ministre. Messieurs les députés, c'est
un plaisir d'être avec vous. Je tiens à vous remercier de nous donner l'occasion
de présenter la voix des manufacturiers du Québec dans un dossier aussi
important que l'immigration.
Le secteur manufacturier, c'est l'un des
piliers de notre économie. Il emploie plus de 500 000 personnes...
Mme White (Julie) : ...il
contribue à 12.3 % du PIB. C'est le secteur le plus important en termes de
PIB dans notre économie. Il représente plus de 86 % de nos exportations.
Il représente 13 600 entreprises.
Selon une analyse du gouvernement, nous
sommes les secteurs présentant le ratio de valeur ajoutée le plus élevé, soit
0,69, ce qui signifie que pour chaque dollar de valeur ajoutée dans le
manufacturier, 0,69 $ de valeur est ajouté... sont... est généré chez les
fournisseurs. Le secteur affiche également le plus haut ratio de main-d'œuvre
par dollar de production. On dit aussi que pour chaque nouveau 10 emplois
manufacturiers, on en crée six dans les secteurs des services.
Nous sommes au cœur des secteurs
stratégiques pour le Québec — l'aéronautique, la défense, l'aluminium —
mais aussi au cœur de nos régions. Souvent, sans usine, dans certaines
municipalités, il n'y aurait pas d'école, pas de dépanneur, pas de CPE, pas de
restaurant, ni d'hôtel.
Parler d'immigration, ce n'est jamais
simple. Nous souhaitons le faire avec rationalité et sur un ton constructif
aujourd'hui. Trop souvent, ce débat devient un terrain d'affrontement entre
Québec et Ottawa ou un lieu de surenchère politique. Ce n'est pas ce que nous
désirons faire ici aujourd'hui. D'entrée de jeu, c'est important de vous
souligner que chez MEQ, nous reconnaissons que le poids qu'une immigration mal
contrôlée peut avoir sur les services publics et la capacité d'accueil, mais il
faut aussi reconnaître les enjeux importants que nos entreprises,
particulièrement en région, vivent. C'est ce que nous souhaitons
aujourd'hui : vous portez la voix d'entrepreneurs qui peinent à arriver
aujourd'hui faute de main-d'œuvre suffisante.
Les données démographiques parlent
d'elles-mêmes. Le taux de fécondité est tombé à un creux historique, la
proportion de travailleurs de 55 ans et plus a triplé depuis
l'an 2000 dans notre secteur, ce qui va causer une vague de départs
massifs à la retraite dans les prochaines années. Pendant cette même période,
la proportion des jeunes de 15 à 24 ans dans nos usines a été divisée par
deux. Résultat, aujourd'hui, on a plus de 11 000 postes vacants dans
le secteur manufacturier uniquement et selon les estimations gouvernementales,
vous le savez, il faudra pourvoir plus de 1,4 million de postes d'ici la
prochaine décennie, simplement pour atteindre un équilibre sur le marché du
travail. Nous ne sommes donc pas face à une problématique conjoncturelle ou
ponctuelle, mais bien structurelle.
Faire venir des travailleurs de l'étranger
n'est pas un choix, mais une nécessité pour plusieurs entreprises,
particulièrement en région. Mais ce n'est pas le seul élément qui doit être
considéré. Il est important de reconnaître le travail que nos entreprises
manufacturières ont fait au cours des dernières années. Entre 2019 et 2024, les
salaires moyens dans notre secteur ont augmenté de plus de 25 %. Les
entreprises ont investi massivement dans l'automatisation, la robotisation et la
modernisation de leurs équipements, bien qu'on puisse continuer à en faire
plus. Elles ont mis sur pied des programmes de formation, de requalification
interne pour attirer et retenir la main-d'œuvre. Elles ont multiplié les
partenariats avec les établissements d'enseignement pour faire connaître les
métiers manufacturiers aux jeunes. Ça démontre la volonté réelle d'adaptation,
d'innovation et de responsabilité sociale de nos entreprises. Mais, malgré tout
cela, la pénurie de main-d'œuvre demeure le frein numéro un à la compétitivité
de nos entreprises. Face à ce portrait, évidemment que l'immigration n'est pas
une option secondaire, elle est indispensable pour maintenir l'activité
manufacturière.
• (15 h 40) •
Il faut voir que nos entreprises ont des
réalités très différentes d'autres secteurs. Puisqu'elles fonctionnent par
chaîne de production, avoir quelques personnes manquantes peut paralyser
complètement une chaîne, stopper des quarts de travail et affecter ainsi
l'ensemble des travailleurs, qu'ils soient immigrants permanents, temporaires
ou Québécois d'origine. Les conséquences sont donc immédiates : retards,
contrats reportés, perte de clients, opportunités d'affaires ratées. En ce
sens, réduire simultanément l'immigration temporaire et l'immigration permanente,
comme certains scénarios le suggèrent, entraînerait des conséquences graves et
irréversibles.
Il est important aussi de rappeler que le
Québec n'est pas une entité homogène. Les taux de chômage, les salaires moyens
et médians ainsi que les secteurs d'activité varient d'une région à l'autre.
Montréal ne vit pas les mêmes enjeux que Chaudière-Appalaches, tout comme la
Montérégie et le Saguenay ont des défis différents. Il faut le reconnaître et
prendre cette situation en compte dans le cadre de la planification dont nous
discutons aujourd'hui.
Dans notre mémoire, nous avons fait une
série de recommandations. Je vais vous résumer les principales. Premièrement,
on souhaite que le gouvernement maintienne les niveaux actuels dans le cadre du
Programme des travailleurs étrangers temporaires, mais en priorisant ceux du
secteur manufacturier. Dans le... dans le cahier de consultations, on nous
demandait si une approche par secteur était... était une voie à regarder. Pour
nous, c'est une voie à regarder. On est conscients...
Mme White (Julie) : ...qu'il
faut être prudent sur les volumes. Donc, il faut y aller de façon stratégique,
compte tenu des impacts économiques, mais aussi du fait que le secteur
manufacturier, les emplois du secteur manufacturier nécessitent de la
formation, de la qualification. C'est important de l'avoir en tête.
Deuxièmement, adapter le PTET aux réalités
régionales. On souhaiterait que, dans le secteur manufacturier, on puisse
retourner à 20 % de postes à bas salaires et que les seuils salariaux
soient établis en fonction des salaires moyens de chaque MRC.
On souhaite, en troisième lieu, fixer les
seuils d'immigration permanente à quelque part entre 65 000 et 75 000
personnes par année pour être capable de permettre un transfert des résidents
temporaires à la résidence permanente, ce qui ferait un volume de gens qui
n'ajouteraient pas de poids sur les services publics parce qu'ils sont déjà
ici, mais tout en répondant aux besoins du marché travail d'avoir un certain
volume de nouveaux travailleurs. Quatrièmement, il faut revoir les
paramètres du PSTQ. Quand on a écrit le mémoire, on était encore avant les
premiers appels ou on commençait les premiers appels, et on souhaite accélérer
le passage des TET vers l'immigration permanente.
Sur le sujet des TET, je souhaite
souligner l'urgence que le gouvernement fédéral accorde la clause grand-père.
Hein, merci, d'ailleurs, au gouvernement pour son appui là-dedans. Mais il y a
aussi certains moyens, notamment via le PSTQ, pour favoriser un transfert plus
rapide. Donc, on croit qu'il faut regarder comme il faut ce programme-là pour
s'assurer de permettre... peut-être éviter certaines hémorragies de... des
travailleurs et en conserver plus au Québec.
Et finalement il faut investir davantage dans
la francisation en milieu de travail, avec des cours adaptés à nos travailleurs
qui travaillent par quarts et accessibles avant même l'arrivée au Québec,
lorsque le processus est avancé. Je veux insister sur la francisation. Nos
entreprises sont déjà les premières à utiliser les programmes gouvernementaux
en la matière. On le voyait dans le recueil des statistiques. Nous croyons
fermement à l'importance du français comme langue commune, mais, pour réussir,
il faut quand même, selon nous, une certaine souplesse sur certaines exigences.
Pensons premièrement à distinguer entre l'oral et l'écrit en fonction des
différents métiers, s'assurer d'avoir des examens de français qui sont adaptés
au fait qu'on a un français québécois, c'est quelque chose qui nous revient
beaucoup, et financer adéquatement la francisation. Les coupures, là, des... ou
les révisions, je vais le dire comme ça, M. le ministre, des dernières... des
dernières années ont causé beaucoup de problèmes sur le terrain. Oui, il faut
favoriser le français, il faut être réaliste aussi, mais il faut... il ne faut
pas non plus compromettre la capacité des entreprises à fonctionner.
Permettez-moi d'être claire : Si nous
ne faisons rien, si nous réduisons drastiquement l'immigration dans son
ensemble sans prévoir de mesures adéquates, nous aurons des conséquences
rapidement. Les entreprises perdront des opportunités d'affaires, leur
croissance sera freinée. Les entreprises ralentiront leurs lignes de
production, fermeront des quarts de travail. On le voit déjà d'ailleurs en ce
moment. Des emplois occupés par des Québécois seront menacés parce que chaque
maillon de la chaîne dépend des autres. Nos régions perdront des leviers de
développement, affaiblissant la vitalité économique et démographique du Québec.
Ces impacts, une fois enclenchés, seront irréversibles compte tenu de la courbe
démographique.
Nos entreprises ont fait leur part.
Aujourd'hui, elles frappent à la porte du gouvernement en disant : S'il
vous plaît, aidez-nous, on a besoin que vous nous souteniez dans cette
situation. Il ne s'agit pas d'opposer économie et intégration. Au contraire, il
s'agit de trouver un équilibre, et nous tendons la main pour continuer à
travailler ensemble.
Nous avons le choix d'adopter une
planification de l'immigration qui soit à la fois respectueuse de notre langue
et de notre culture, mais aussi réaliste face à nos besoins économiques. Nous
avons le choix de soutenir nos entreprises, nos travailleurs, nos régions ou de
laisser les choses se détériorer. Je le dis avec fermeté, mais aussi avec
respect, le temps n'est plus aux demi-mesures. Il faut s'assurer de soutenir
notre secteur manufacturier, qui vit actuellement des... une vague importante
de difficultés compte tenu du contexte actuel.
On vous tend la main. On a toujours été un
partenaire. On va continuer à l'être. Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup pour cette présentation. Alors, on débute
les... la période de... bien, pas la période de questions, on débute les échanges,
hein? Bien sûr, ce sont des questions, mais surtout des échanges avec le
ministre et la banquette gouvernementale pour 16 minutes 30 secondes.
M. Roberge : Merci beaucoup.
Merci pour votre présentation. On a déjà eu l'occasion de discuter à quelques
reprises de la langue française, de l'immigration, des différents programmes,
des enjeux, puis on se retrouve en commission. Je suis content que le
malentendu qui a subsisté non pas avec vos membres, mais, je dirais, dans le
milieu économique, par rapport à la clause grand-père que le gouvernement
d'Ottawa...
M. Roberge : ...ne nous
accorde toujours pas pour les régions entre... pour les travailleurs étrangers
temporaires et semble-t-il dissiper, là. Je pense que les gens comprennent bien
maintenant que le gouvernement québécois prend le parti de nos entreprises, je
le mentionne, à l'extérieur de Montréal et Laval. Pourquoi qu'à Montréal, à
Laval on a des exceptions, hein, pour la construction, pour l'éducation, pour
la santé? Mais ça, ça semble clair. Donc, très bien, merci de l'avoir souligné.
Je constate aussi qu'il y a un... je
pense, une convergence de point de vue par rapport à l'orientation quatre du
cahier de propositions, c'est-à-dire, accroître la personne... des personnes
immigrantes permanentes qui sont déjà au Québec autour de 65 %. Nous, on
aimerait même plus que ça. On se fixe des objectifs. Même chose pour la
proportion économique. On se dit un plancher de 60 % pour l'immigration
permanente. Bon, si on peut faire mieux et encore plus, tant mieux, là-dessus,
on se rejoint. Pour ce qui est du PSTQ, le programme de sélection des
travailleurs québécois, vous avez dit : Il y a peut-être une voie de
passage là pour permettre à des travailleurs étrangers temporaires de basculer
du côté des permanents, du côté des nouveaux Québécois, donc qu'ils fassent
leur vie ici, qu'ils restent ici, je suis d'accord avec vous. Le PSTQ a quatre
volets. Le volet deux, je pense, répond à plusieurs... Volet un?
Mme White (Julie) : Volet 1
aussi. Les soudeurs, les FEER 2 sont dans le volet 1. Donc, le
volet 1 est aussi important. Et c'est là qu'il y a peut-être des
améliorations à faire, notamment pour permettre à... pour faciliter
l'accélération du passage de statut permanent de ces travailleurs-là.
M. Roberge : OK. Bien, sauf
erreur, là, le volet 1, c'est haute qualification, on est plus dans les
diplômés du Québec, volet 2, compétences intermédiaires, manuelles, mais,
peu importe, tous les FEER, les fameux FEER s'y retrouvent à un ou à l'autre.
Puis la bonne nouvelle, c'est qu'avec ce programme-là on est capable maintenant
de microcibler, je vais dire, par secteur, par région aussi pour être capable
d'inviter vraiment... je ne dirais pas les bonnes personnes, c'est une mauvaise
manière de le dire, je dirais les personnes qui ont un profil qui répond le
mieux aux besoins du Québec. Il y a des gens qui se disent : Ah! voyons
donc, quelle vision utilitariste! Bien, oui, du côté de l'immigration
économique, oui, on ne s'excuse pas de sélectionner les personnes qui ont le
meilleur profil pour répondre aux besoins du marché du travail et donc pour
répondre aux besoins des Québécois d'avoir une plus grande prospérité. Il y a
d'autres volets, la réunification familiale, le volet des réfugiés, le volet
humanitaire. On va continuer de faire notre part pour accueillir des gens qui
fuient la guerre, la misère, la famine, la persécution, mais, pour ce qui est
des migrations économiques, on ne s'excusera pas de sélectionner des gens qui
viennent combler des postes qu'on n'est pas capables de combler nous-mêmes, ça,
là-dessus... puis je pense que le PSTQ nous permet de le faire.
• (15 h 50) •
Là où j'ai peut-être des divergences
d'opinions ou, en tout cas, peut-être pas, à moins que je me trompe, c'est sur
les seuils d'immigration permanente, parce que, pour la première fois, puis
c'est intéressant, on parle des temporaires et des permanents puis on peut
dire : Ah! on peut s'entendre sur les seuils de temporaires, mais on ne
s'entend peut-être pas sur les permanents. Or, il faut avoir une vision
d'ensemble... Ce que je dis, c'est... Quand on fait de la planification à long
terme d'immigration, on parle de personnes, de parcours, de vie, certainement,
mais c'est une question de démographie. Au bout du compte, à un moment donné,
c'est : Combien de personnes on accueille? Peu importe leur statut, il y a
combien de personnes sur le territoire du Québec cette année ou combien il y en
aura l'an prochain? Peu importe leur statut, ils sont là, ils occupent un
emploi, un logement, etc. Vous suggérez entre 65 000 et 75 000 à partir de
l'an prochain. Permanents, vous êtes d'accord avec nous d'en sélectionner une
bonne part qui sont déjà sur le territoire, donc ce ne sont pas nécessairement
des nouveaux arrivants, ce seraient des gens qui changeraient de statut, fort
bien. Ma question : Est-ce que ça, ça compte l'arrivée de demandeurs
d'asile qui arrivent aussi et qui s'ajoutent? Comme, cette année, on devrait en
avoir à peu près 40 000. Donc, l'an prochain, admettons que le gouvernement
fédéral ne reprend pas le contrôle des frontières canadiennes, qu'il en arrive
encore entre 40 000 et 50 000, est-ce que ça, c'est par-dessus...
65 000 ou 75 000, on va dire que vous proposez 70 000. Est-ce que, l'an
prochain, on devrait prendre 70 000 migrants permanents et recevoir par-dessus
ça un 40 000 à 50 000 demandeurs d'asile? C'est ça que vous proposez?
Mme White (Julie) : Merci.
Puis il y a... il y a plusieurs choses que vous avez dites, peut-être revenir
sur le PSTQ. Vous avez parlé de microcibler. Je pense, c'est ça, la solution.
Là, les premiers appels n'ont pas été très concluants, il n'y a pas eu beaucoup
de demandes. C'est très dur pour certains types, là, de travailleurs de se
qualifier, même avec des pointages qui peuvent passer...
Mme White (Julie) : ...pour
des raisons comme on prend en considération les diplômes, est-ce qu'ils ont
été... ici ou ailleurs, mais nos TET, c'est rare qu'ils ont un diplôme d'ici,
les points sur le français, etc. Ça fait qu'il y a... tu sais, c'est sûr qu'on
peut se dire : On fait une liste d'ajustements, là, au PSTQ. Peut-être,
peut-être pas. Mais vous êtes capables d'arriver puis de faire des appels très
ciblés pour régler des situations spécifiques dans des régions. Et je pense
qu'il faut que vous ayez cette latitude-là pour être capable de régler des
problèmes. Évidemment qu'on souhaite qu'Ottawa nous donne la clause grand-père
le plus rapidement possible, là, c'est... J'en parle à tous les jours. Ils sont
tannés de m'entendre, inquiétez-vous pas, mais vous pourriez quand même sauver
le sort de certains travailleurs et de certains employés si on était capables
de faire un appel très ciblé dans certaines régions manufacturiers pour
permettre de garder ces travailleurs-là. Donc, il y a une voie à explorer de
votre côté... de votre côté aussi, là. Maintenant...
M. Roberge : Excusez-moi.
Mme White (Julie) : Oui.
M. Roberge : Avant que vous...
parce que c'est vrai que j'avais deux interventions dans une. Puis c'est vrai
que j'ai amené deux sujets. J'aimerais ça conclure là-dessus. Puis après ça, on
ira sur les permanents. C'est moi qui ai amené des sujets, ça fait que je veux
me permettre de ramener sur à la fois.
C'est vrai qu'il y a eu peu... beaucoup
d'appelés, peu d'élus. Cet été, on vient de lancer le programme PSTQ, quelques
centaines de personnes. Je suis conscient que ce n'est pas beaucoup, mais il
faut savoir que dans le processus d'immigration, c'est assez long quand même.
Et les gens qui font partie des immigrants 2025, puis ils vont être autour
de 64 000 cette année, c'est beaucoup, beaucoup, à très fort pourcentage, des
gens qui ont commencé le processus en 2024 alors que le PSTQ n'existait pas.
Donc là, on a fait quand même quelques invitations cette année, tout de suite,
il fallait tester l'affaire, même d'un point de vue technologies de
l'information, puis ça va très bien en informatique, ça va bien, ça fonctionne.
Mais bientôt ça va être par milliers et par dizaines de milliers qu'on va utiliser
le PSTQ. Donc, on peut... Il ne faudrait pas dire que le programme ne
fonctionne pas bien, parce que des gens qui ont des très bons profils n'ont pas
été sélectionnés dans les premiers appels. Ils étaient tout petits à cause, je
vous dirais, de la mécanique. Mais dans les prochains mois, les prochaines
années, on va être capables, je pense, de le faire, mais je voulais clarifier
ceci avant qu'on poursuive.
Mme White (Julie) : Non, c'est
correct puis on salue d'ailleurs l'intention que le PSTQ permette d'un... tu
sais, de favoriser les personnes qui sont déjà ici. Pour nous, c'est vraiment
ça qui est important. On va commencer par eux, on les a ici, ils travaillent
déjà dans nos usines, ils sont déjà en région, implantés, ils ont leur
logement, leurs enfants sont à l'école. Ce n'est pas un poids de plus sur la
vie publique de les transférer au permanent.
Maintenant, les premiers... Tu sais, on a
beaucoup d'entreprises qui ont fait des simulations avec les pointages, tout
ça, il y a quand même certains aménagements potentiels, mais on ne jette pas le
bébé avec l'eau du bain, là. On pense que c'est quand même un élément qui peut
être très pertinent, surtout que vous avez le pouvoir d'aller regarder de façon
plus ciblée, de façon plus... Je vais te dire le mot
« discrétionnaire », qui n'est peut-être pas le bon, mais sur des
critères différents pour être capable de répondre à des besoins. Puis on vous
invite à le faire et rapidement pour éviter le départ massif, là, on commence à
en perdre beaucoup, de travailleurs. Est-ce que tous les TET passent la rampe?
Peut-être pas. Mais si on est capable d'en sauver via des appels, un appel
rapide de TET dans les régions manufacturières, ça pourrait nous aider.
Maintenant, est-ce que c'est correct pour
revenir à votre autre question?
M. Roberge : Absolument.
Mme White (Julie) : Juste
préciser que dans notre mémoire, on dit : oui, on demande de maintenir les
niveaux de... dans le PTET. On ne s'oppose pas votre demande non plus, là, avec
Ottawa, de diminuer le nombre de PMI, le nombre de demandeurs d'asile. On est
conscients que c'est un enjeu, on s'en fait parler aussi dans les régions.
Donc, est-ce que ça s'ajoute? Moi, ce que je dirais, c'est qu'il faut surtout
trouver une entente rapidement avec Ottawa sur ce dossier-là. C'est important
qu'on le règle.
Maintenant, les demandeurs d'asile, on en
a ici et on peut peut-être les mettre plus à profit dans notre économie. On en
parle dans notre mémoire, mais il y a eu des programmes pilotes pour des
demandeurs d'asile dans certains secteurs comme l'hôtellerie, il n'y en a pas
eu dans le manufacturier. On a des besoins de main-d'œuvre importants. On est
un des secteurs les plus stratégiques. À Montréal, à Laval, on comprend que
vous n'allez pas... tu sais, on ne va pas nécessairement bouger de votre côté
puis du côté d'Ottawa sur les TET, mais pourquoi on ne les met pas plus à
profit de ce côté-là? Pourquoi on ne s'assure pas de les mettre sur le milieu
du travail un petit peu plus facilement? On l'a fait dans d'autres secteurs,
pourquoi ne pas le faire avec nous dans le secteur manufacturier? Ça peut être
des bonnes histoires puis ça peut être des gages de succès pour des entreprises
et pour des travailleurs aussi.
M. Roberge : Bien, encore une
fois, je pense qu'on a quelque chose de porteur là. On a vu des organismes,
d'ailleurs, qui sont des partenaires du ministère, le « I »,
« N », « C », « I », l'INCI, qui a fait... là,
puis ça a été médiatisé dans Le Devoir. Tant mieux, tant mieux, des parcours
d'intégration...
M. Roberge : ...des... on
disait des autobus, mais, dans le fond, il y avait... c'était un peu
spectaculaire, là, ils n'allaient pas là en autobus, ils revenaient avec un
emploi tout de suite. Il y avait beaucoup du travail qui avait été fait en
amont. Mais il reste que c'est des personnes qui sont ici, qui sont demandeurs
d'asile. Certains, une bonne partie, vont rester ici pour la vie, là... ne
seront pas refoulés par Ottawa. Oui, ce sont des demandeurs d'asile, mais
au-delà d'être des demandeurs d'asile, ce sont des personnes avec une capacité
de travailler, une capacité de contribuer, qui faisaient quelque chose dans
leur pays d'origine, qui ont des compétences, des habiletés, des diplômes, qui
peuvent très bien combler des postes par dizaines de milliers. Et... Et ce que
je dis, c'est qu'il faut peut-être faire moins de... de missions de recrutement
partout à travers le monde puis en faire plus à Montréal, à Côte-Saint-Luc, à
Montréal-Nord, à Laval, parce qu'il y a là un bassin de talents puis de
personnes qui peuvent s'enraciner, s'actualiser, prendre leur place au Québec
en contribuant dans le manufacturier ou dans le milieu... tourisme ou dans le
milieu de la restauration. Mais il y a comme... il y a comme un gisement là de
plein de personnes. Et c'est là où je me dis : Si on est capables de
permettre à ces gens-là de prendre leur place, plus et mieux, bien, on va
peut-être réduire le nombre de 70 000, que vous voulez aller chercher.
Parce que ces personnes-là sont là. Il va en arriver... en tout cas, sauf
erreur, à moins que le fédéral arrive à contrôler un peu mieux ses frontières,
il va en arriver encore 40 000, puis 50 000 l'an prochain. Puis c'est
là où notre capacité d'accueil, à un moment donné, est... est dépassée. On ne
peut pas faire... travailler en silo, dire : OK, là, bien, pendant
10 minutes, on va faire la planif pluriannuelle des temporaires, puis
après ça, pendant 10 minutes, on va faire la planif pluriannuelle des
permanents puis on va dire : C'est donc merveilleux, cette année, on fait
les deux. En fait, c'est une planif pluriannuelle, parce qu'il y a juste un
Québec. Et, oui, il y a des gens de... de divers statuts, mais il y a juste un
Québec puis il y a juste une capacité d'accueil.
Mme White (Julie) : Je
comprends bien. Il y a une... quand même une nuance importante à faire avec le
secteur manufacturier versus d'autres secteurs. C'est des emplois... Les
emplois qu'on a besoin, c'est souvent des emplois avec de la formation. Ce
n'est pas nécessairement une formation universitaire, c'est beaucoup de DEP,
des DEC, des formations à différents niveaux. Mais on ne peut pas donner une
boîte de «rods» à souder à un... à quelqu'un qui sort d'un... d'une... une...
d'un doctorat puis qui est demandeur d'asile, puis penser que ça va
fonctionner, puis que ça va faire une adéquation facile. Il y a des compétences
techniques à avoir. Il y a des... Il y a des exigences de santé et sécurité
importantes dans nos milieux. On ne peut pas non plus prendre... puis on parle
beaucoup du chômage des jeunes, mais un jeune qui sort de l'école comme ça,
rapidement, le faire travailler l'été dans une entreprise manufacturière de la
même façon qu'on peut le faire dans d'autres secteurs. Donc, oui, la question
des demandeurs d'asile qui peut contribuer à... à ça, la réponse, c'est oui,
mais en... de façon limitée.
• (16 heures) •
L'autre élément qu'il faut, je pense,
faire attention, c'est faire attention de ne pas prendre des chiffres globaux
et de penser que ça s'applique directement à l'ensemble des régions qu'on a. Il
y a quand même des difficultés qui sont particulières dans chacune des régions.
On a encore des très, très bas taux de chômage dans certaines régions, comme
dans Chaudière-Appalaches, en Montérégie. Il y a... Il y a deux mondes complets
en Montérégie, là, si on... Il y a... oui, il y a le bord du fleuve, mais quand
on descend plus bas, c'est totalement différent. Dans le coin de
Saint-Jean-sur-Richelieu notamment. Donc, l'adéquation entre le chiffre global
de demandeurs d'asile qui... qui est là puis la... le réalisme de les amener où
sont les emplois dans les réalités et dans ces éléments-là, je pense qu'il faut
être quand même prudents.
Maintenant, dans notre chiffre qu'on vous
met sur la table, c'est plus de dire : Gardons une espèce de statu quo sur
le chiffre global, mais là-dedans, il y a une grosse proportion qu'on veut que
ce soient des... des TET ou des étudiants, donc des gens qui sont déjà ici. Ça
fait que, quand on parle de capacité d'accueil, si on en accueille... s'il y en
a 2 000 là-dessus que c'est des TET qui passent à l'immigration
permanente, bien, ce n'est pas du poids supplémentaire sur la capacité
d'accueil. Puis c'est peut-être là la différence où qu'on peut trouver à un
certain équilibre. Ce ne sont pas des nouveaux travailleurs, ce ne sont pas des
nouvelles familles qui débarquent au Québec, elles sont déjà ici. Donc, c'est
un peu comme ça qu'on le voyait de notre côté, de dire : Oui, c'est un
chiffre plus gros que vous avez dans votre cahier, je le... j'en conviens, mais
qui prend en compte les travailleurs qui sont déjà ici qu'on veut transférer
vers l'immigration permanente. Si on a 35 000... immigrants permanents en
2026 puis que, là-dessus, il y en a 20 000 qui... qui sont déjà ici, notre
nouveau bassin de travailleurs, bien, il est très limité. Puis il y a des
besoins quand même, on a la courbe démographique, j'en parlais plutôt dans ma
présentation. Ça fait qu'il faut juste être...
16 h (version non révisée)
Mme White (Julie) : ...être...
voir le pour et le contre puis essayer d'avoir un équilibre entre tout ça. Mais
si on veut favoriser réellement le transfert de nos immigrants temporaires vers
l'immigration permanente, il faut le prendre en considération dans le chiffre
global d'immigration permanente pour nous.
M. Roberge : ...secondes.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : 40 secondes.
M. Roberge : Très bien. Merci
pour ces éclaircissements-là. Je vous sens très pragmatique, j'aime ça. Dans
votre mémoire, vous nous dites : Oui, mais il faut quand même prioriser les
manufacturiers. Vous l'avez dit au départ. Vous me dites oui, évidemment. Mais
il faut juste être conscient que, comme gouvernement, comme parlementaires, on
a vu sur cette chaise-là... les restaurateurs, nous a dit qu'il fallait
préserver la restauration, les gens du tourisme nous ont dit que l'industrie
touristique, c'était ça qui avait nos régions à vie, les institutions
montréalaises qui ont dit : Montréal, c'est le coeur de tout, il faut
prioriser ça. Donc, à un moment donné, prioriser tout le monde, c'est ne
prioriser personne. On va devoir faire des choix.
Mme White (Julie) : Puis si
ça ne vous dérange pas, je peux répondre?
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Mais en fait on va... on va poursuivre le temps. Le temps
du gouvernement vient de se terminer. Vous allez avoir amplement le temps de
passer aussi toutes... tous vos messages. On arrive avec le... voyons, le
représentant de l'opposition officielle pour 9 min 54 s.
M. Morin : Merci. Merci, Mme
la Présidente. Alors, Mme White, Mme Gagné, bonjour. Oui, Mme White,
vous pouvez répondre.
Mme White (Julie) : Mais
pourquoi il faut qu'on priorise le secteur manufacturier... puis c'est vrai que
c'est facile, tout le monde vient ici puis vient dire «je suis la priorité»,
puis j'en conviens, mais si on regarde les chiffres, tu sais, je suis
pragmatique d'après le ministre, je vais le prendre positivement, si on regarde
les chiffres, le nombre d'emplois qui dépendent du manufacturier, c'est 500 000 emplois,
le poids dans le PIB, on est le plus grand secteur en fonction de notre PIB. On
a une situation très régionalisée aussi dans notre secteur. Et la réalité, puis
ça ne vient pas de moi, là, je ne veux pas... je... puis ce n'est pas pour
déplaire aux autres secteurs, mais sans les usines, dans beaucoup, beaucoup d'endroits,
il n'y en a pas d'autres services. Puis ce n'est pas... je ne le dis pas parce
que je veux tirer sur la couverte pour mon secteur, mais c'est une réalité. Si
on va... J'étais à Saint-Georges de Beauce, à Thetford Mines, on était à
Saint-Lambert-de-Lauzon, ces villes-là se sont créées parce qu'il y a eu des
entreprises manufacturières. C'est notre tissu économique historique. Et oui,
on comprend qu'il y aura des choix, mais un choix rationnel et pragmatique, ce
serait de prioriser le manufacturier.
Mme Gagné (Jolyanne) : Si je
peux rajouter également, on ne peut pas faire des annonces au quotidien sur... On
va prendre un exemple, M. le ministre, là, puis les parlementaires, le plan d'Hydro-Québec,
comment voulez-vous déployer le plan d'Hydro-Québec si on n'a pas de
travailleurs dans nos usines? Parce que ça prend de la manufacture, ça prend
des pièces, ça prend... C'est quand même notre secteur qui va fournir ce qui va
monter dans les tours, là. Tu sais, c'est ça, la réalité. On ne peut pas
annoncer un TGV entre Québec et Toronto en pensant qu'on n'a pas besoin du
secteur manufacturier.
Donc, on ne peut pas faire des annonces au
quotidien sur des grands plans d'infrastructures puis penser que le secteur
manufacturier n'est pas stratégique. Puis je vais vous épargner la défense, le
nouveau mot du jour. Donc, juste vous... Voilà. Merci.
M. Morin : En fait, c'est
très important, ce que vous dites, Mme Gagné, parce qu'on en a parlé,
entre autres, cette semaine, Hydro-Québec a un plan de développement de
milliards de dollars. C'est énorme. Mais effectivement ils vont avoir besoin de
gens pour travailler. Puis avec des groupes hier, on... plus de la région
Appalaches, on parlait de chantiers navals, là aussi, j'imagine, qu'ils vont
avoir besoin de beaucoup de travailleurs spécialisés, notamment des soudeurs,
pour être capables de remplir des demandes du gouvernement ou des gouvernements
puis de ce que la société a besoin. Alors, merci, merci pour cet ajout, pour
cet élément.
Dans votre mémoire à la page 13,
parce que M. le ministre en a parlé, quand vous proposez une fourchette. Moi, je
vais prendre ça un peu différemment. Dans le cahier de consultation, il y a
trois scénarios. Le premier, ce serait 25 000 pour l'immigration
permanente. Le deuxième, c'est 35 000. Ce qui correspond aussi, je crois,
au montant ou au seuil, à la fourchette avancée par le Parti québécois. Puis
finalement le dernier scénario à 43 700. Si jamais le gouvernement s'arrêtait
sur le scénario a, 25 000, qu'est-ce que ça fait chez vous?
Mme White (Julie) : Pour
nous, on ne peut pas baisser à la fois l'immigration permanente et l'immigration
temporaire sans avoir des conséquences économiques très graves. Il faut l'avoir
en tête. Donc, c'est sûr que pour nous, le scénario de 25 000, c'est le
pire scénario qu'il y a sur la table en ce moment...
Mme White (Julie) : ...et ce
n'est pas juste basé sur notre intuition, ce qu'on parle à nos membres. Il y a
aussi des économistes qui se sont basés sur la situation, notamment Pierre-Carl
Michaud. Tu sais, quand on parle de 70 000, c'est aussi parce que ça
permettrait une certaine stabilité en termes de PIB par habitant, de s'assurer
de maintenir un niveau économique global qui est bénéfique pour le reste de nos
éléments. Il y a d'autres économistes aussi qui se sont penchés sur des
fourchettes, là. Vous avez rencontré, je pense, l'institut du Québec aussi.
Donc, pour nous, c'est sûr que d'avoir un très, très, très bas taux
d'immigration permanente, comme ce qui... comme le 25 000, ce serait très
néfaste.
On a, oui, des gens qui... beaucoup de
gens qui rentrent par le Programme des travailleurs étrangers temporaires, mais
on a aussi, dans le secteur manufacturier... puis j'en ai moins parlé, mais
beaucoup de recherche et développement avancés, hein? On a quand même des
entreprises qui font beaucoup d'innovation. On a des experts qui viennent de
partout dans le monde, notamment dans l'aéronautique, mais dans plein d'autres
domaines, faire de la recherche, d'autres voies d'entrée, pour ces
travailleurs-là, qu'uniquement la question des... du PTET.
Donc, c'est sûr qu'on a une crainte sur
l'économie, plus globalement. Si notre PIB par habitant chute, ça a un impact
aussi sur l'économie plus globale. Donc, c'est important pour nous de garder un
certain niveau. On est déjà en situation économique difficile en ce moment,
hein, on vit une période qui n'est pas simple, on a beaucoup d'instabilité. On
en a, des manufacturiers qui s'en tirent très bien malgré tout, mais de se
tirer dans le pied nous-mêmes, ce n'est pas la chose à faire actuellement.
M. Morin : Puis je comprends
que le 35 000, ça ne va pas vous aider... bien, un peu plus que le
25 000, évidemment, mais... Puis, concrètement, est-ce qu'il y a des
entreprises qui vont fermer? Est-ce qu'il y a des contrats qui ne pourront pas
être rencontrés? Est-ce qu'il y a des entreprises qui ne pourront pas
soumissionner? Parce qu'évidemment, tu sais, oui, on va avoir des choix à
faire, éventuellement, puis je voudrais que ces choix-là soient basés sur
des... sur des données probantes ou des situations qui sont... qui sont
réelles. Donc on a... on a besoin de votre expertise pour ça.
Mme Gagné (Jolyanne) : En
fait, si je peux répondre rapidement à la question, actuellement, on a de
multiples facteurs économiques qui font en sorte que... que ce soient les
tarifs, que ce soient aussi les entreprises qui y font face, oui, mais que les
liquidités sont... Chaque ligne de production qui est fermée, pour divers
facteurs, ne sera pas une ligne qui va être facilement... on ne peut pas... ce
n'est pas une friteuse, là, tu sais, je vais vous donner ça un peu en image,
désolée, je suis un peu colorée... ce n'est pas une friteuse. C'est plus
difficile de repartir une chaîne de production que de décoller une friteuse.
Puis avec le monde globalisé dans lequel on vit, chaque fermeture peut poser
une question sur est-ce qu'on ferme ou pas une installation, est-ce qu'on
délocalise ou pas l'entreprise. Ce n'est pas juste une question d'immigration.
Actuellement, il y a beaucoup de facteurs qui viennent influencer la prise
décisionnelle de nos entreprises.
Mme White (Julie) : Si je
complétais la... il y a plein d'exemples, là. On le vit déjà, parce qu'on a
déjà des TET qui quittent. Donc, on est déjà dans cette situation-là. J'ai
plein d'entreprises que j'ai visitées... Je vais être prudente, parce que ce
n'est pas toutes les entreprises qui veulent leur situation étalée sur la place
publique. Mais j'ai rencontré une entreprise la semaine passée, deux usines au
Québec, un siège social, d'ailleurs, ils étaient prêts, il y a quelques
semaines, à faire des acquisitions ici, mais ils ont de la misère avec la
main-d'oeuvre, pas sûr qu'on va garder les deux autres... les deux usines
ouvertes au Québec déjà. Le siège social dit : Pas d'acquisitions, on ne
grandit plus au Québec tant qu'on n'a pas réglé les projets de main-d'oeuvre,
de la main-d'oeuvre, on ne fera plus... on n'investira plus dans nos
entreprises au Québec.
• (16 h 10) •
J'ai aussi des entreprises dont la
propriété est québécoise puis qui font ce choix-là en ce moment, c'est trop
dur, on n'est pas capables d'aller chercher de la main-d'oeuvre, on a des
postes vacants depuis... Tu sais, 11 000 postes vacants, là, ce n'est pas
nécessairement seulement les besoins de main-d'oeuvre, là, c'est les besoins...
c'est les postes qui sont ouverts, là. À un moment donné, il y a de la
croissance dans nos entreprises. Ça fait qu'on peut penser qu'il y en a plein
qui ne partent pas de projets mais que, s'ils voulaient partir ces projets-là,
c'est des personnes supplémentaires qui s'ajoutent.
Est-ce que l'immigration, c'est la seule
solution? Puis là c'est là que je peux faire le point : ce n'est pas la
seule solution, mais c'est une solution indispensable. Oui, il faut travailler
à amener nos jeunes à être sensibilisés aux métiers manufacturiers. Ça fait des
années qu'on dit aux jeunes : Il faut absolument que tu ailles à
l'université, si tu ne vas pas à l'université, tu n'as pas une carrière qui
vaut la peine. Il faut être prudents dans la façon dont on parle de ça. Il y a
des opportunités, des emplois stimulants, des jobs payantes qui sont très
intéressantes. Il faut les intéresser. Oui, il faut travailler sur la
requalification des travailleurs, la formation interne, mais sans
l'immigration, avec la courbe démographique qu'on a on n'y arrivera tout
simplement pas.
M. Morin : Et si vous
permettez... il reste... il reste peu de temps... dans vos recommandations,
vous parlez aussi du PEQ. Le PEQ a été suspendu...
M. Morin : ...ça a été quoi,
l'impact? Puis est-ce que vous souhaitez qu'il soit réouvert? Est-ce que c'est
un programme qui aidait les entreprises que vous représentez?
Mme White (Julie) : Le PEQ
est un programme qui amenait beaucoup de prévisibilité, plus de prévisibilité
que la situation actuelle pour les travailleurs. Donc, c'est sûr que les gens
aimaient bien travailler via le PEQ, il y avait une certaine facilité de ce
côté-là. On savait dans quoi on s'embarquait lorsqu'on avait un travailleur qui
rentrait par le PEQ.
Maintenant, est ce que le... est ce qu'on
peut faire des appels mieux planifiés, d'avoir un calendrier, qu'on le sache un
petit peu plus à l'avance via le PSTQ puis que ça donne des résultats
similaires? Il faudra voir. Mais le PEQ était quelque chose de très, très
apprécié par nos entreprises.
M. Morin : Donc, je comprends
de vous que prévisibilité, stabilité, c'est fondamental.
Mme White (Julie) : C'est le
nerf de la guerre pour nos entreprises. Sans prévisibilité, tu sais, un... une
usine manufacturière, là, ça a des carnets de commandes sur des années, on
planifie la production, ce n'est pas quelque chose qu'on se retourne de bord en
deux minutes.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : En terminant.
Mme White (Julie) : Donc,
c'est très, très important, la prévisibilité.
M. Morin : Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Alors, on est rendus au deuxième groupe
d'opposition. 3 min 18 s, M. le député.
M. Cliche-Rivard : Merci
beaucoup. Merci pour votre excellente présentation puis votre mémoire également.
Les chiffres, là, du jour, c'est 145 000 personnes déjà sélectionnées
qui ont une hécatombe dans la liste d'attente. Donc, ça, c'est des gens à qui
on a déjà dit oui, qui ont réussi les qualifications puis qui ont un certificat
de sélection du Québec, mais qui sont pris dans les seuils. Si on devait passer
à 25 000 comme chiffre d'admission, vous avez dit que vous étiez quelqu'un
de pragmatique, là, à quel point c'est pragmatique ça, 25 000 avec
145 000 dans la file d'attente?
Mme White (Julie) : Je pense
que ce qu'on propose de notre côté chez MEQ est assez pragmatique,
effectivement. Je ne pense pas que c'est soutenable pour notre économie plus
globalement. Oui, pour le secteur manufacturier, ça aurait des impacts très
importants. Mais on n'est pas un secteur qui vit non plus en dehors de tous les
autres secteurs et comment notre économie se comporte globalement a des impacts
sur nous aussi, vu qu'on est, et je vais le répéter, le plus gros secteur en
taille et en termes de P.I.B. Donc, c'est important pour nous de maintenir ça.
Donc, non, pour nous ce n'est pas très pragmatique.
M. Cliche-Rivard : Est ce que
l'industrie est ouverte à investir ou participer davantage dans les charges
sociales qui incombent l'arrivée de nouveaux arrivants? J'aimerais ça vous
entendre là-dessus.
Mme White (Julie) : Je suis
contente que vous me parliez de ça parce que c'est... je trouve souvent que
c'est quelque chose qui est... dont on parle comme si les entreprises ne
faisaient pas leur part. Puis moi, je suis passée... J'ai visité depuis le mois
de mai, je pense, 17 ou 18 usines. On parle à des membres à tous les
jours. Les entreprises, là, manufacturières, puis je ne peux pas parler pour
tout le monde, puis je peux parler de celles que j'ai visitées, mais ils
investissent fortement. On calcule que c'est entre 15 000 $ et
20 000 $ par travailleurs étrangers temporaires qu'ils font venir que
ça leur coûte, pas juste de billet d'avion, là. Souvent, ils les logent quand
ils arrivent, ils s'occupent... ils ont des personnes dédiées à leur
intégration, ils font des cours de français dans les usines. Si vous voyez le
travail qui est fait. Je pense qu'il faut être prudent. Est-ce qu'il y a des...
Est-ce que tout le monde est parfait? Tu sais, je ferai... je veux quand même
être prudente, mais généralement, dans le secteur manufacturier, ce que je peux
vous dire, c'est que les employeurs se sont responsabilisés, je dirais même que
ce sont substitués parfois à ce qu'on aurait pu faire au gouvernement pour
s'assurer... construire des logements, montrer le chemin vers l'école,
s'assurer que les services soient connus. Ça se fait beaucoup à l'intérieur des
entreprises. Les entreprises se sont dotées de personnes qui sont capables de
faire ça pour les aider puis pas juste dans les très grandes, en passant, hein?
Tu sais, quand je dis ça, là, on pense... tu sais, l'industrie manufacturière,
on parle souvent de grandes entreprises, c'est beaucoup de la PME, là. Dans les
PME qu'on visite, c'est ça, ils ont des personnes dédiées beaucoup à ça.
Donc, est-ce qu'elles peuvent en faire
plus? Elles vont faire ce qu'ils ont besoin de faire pour garder leurs
travailleurs. Ça, je peux vous le dire tout de suite. Et elles le font. Puis
elles aimeraient beaucoup ça qu'on puisse régler rapidement ce sort.
M. Cliche-Rivard : Puis vous
avez raison de le dire, il y a plusieurs entreprises qui sont des modèles
là-dedans. J'en ai visité également. Il y en a d'autres, peut-être, qu'il
faudrait justement exiger davantage de leur part. Je pense qu'il y a des très
bons joueurs. Vous l'avez mentionné vous-même, il y a peut-être des joueurs qui
mériteraient d'en faire davantage.
Mme White (Julie) : Mais
peut-être, mais, en même temps, on a aussi une responsabilité collective, hein,
de... Le gouvernement a aussi ses responsabilités. On a besoin... Tu sais, de
la francisation qui se fait, qui est payée par les entreprises, sans soutien
gouvernemental, ça se fait, là, régulièrement.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : En terminant.
Mme White (Julie) : Donc,
c'est important de le prendre en considération aussi.
M. Cliche-Rivard : Merci
beaucoup.
Mme White (Julie) : Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci. Alors, notre dernier intervenant, le député
d'Arthabaska, pour 3 min 18 s
M. Boissonneault : Merci, Mme
la Présidente. Merci, Mme White, Mme Gagné, pour votre présentation.
C'est fort intéressant. J'apprécie, entre autres, le fait que vous avez
commencé en reconnaissant qu'il y a une pression quand même sur les services,
sur le logement.
J'ai posé la question tout à l'heure puis
je voulais vous poser une question qui ressemble aussi à ce que j'avais
demandé, parce que je serais curieux que vous entendre là-dessus. Le Canada a
fait des choix en immigration, le Québec aussi, évidemment, par la même
occasion, a fait des choix d'immigration qui sont quand même particuliers à
l'échelle de la planète...
M. Boissonneault : ...en ce
sens que nous, on a fait le choix de l'immigration plus que partout... partout
ailleurs en occident. C'est au Canada que les seuils sont les plus élevés en
occident. Il y a eu une augmentation du nombre de travailleurs temporaires
entre 2019 et 2024. On parle d'un... le nombre a quintuplé essentiellement. En
Ontario, l'immigration est très importante depuis... depuis des années et même
avant ces choix-là qui ont été... qui ont commencé, là, particulièrement avec
Justin Trudeau en 2015. Et pourtant, on a observé une pression sur les
logements et sur les services, mais on n'a pas vu vraiment de croissance du PIB
au Canada. En fait, c'est la moins... la croissance la plus faible du G7. On
n'a pas vu non plus se résorber la pénurie de main-d'oeuvre. Vous l'avez dit
vous-même, là, ça ne s'améliore pas, là, on a encore beaucoup de besoins en
main-d'œuvre. Parallèlement, il y a une augmentation du chômage chez les
jeunes. Là, je comprends, vous avez dit que ce n'est pas tout à fait... bon,
pour la réalité du secteur manufacturier, on pourrait reparler de ça, mais il y
a un écart quand même avec le taux de chômage pour les personnes d'un certain
âge qui s'est... qui s'est exacerbé. Donc, est-ce qu'il y a une réflexion du
côté des manufacturiers sur notre... je ne sais pas si c'est notre dépendance à
la main-d'œuvre étrangère, mais s'il n'y a pas un questionnement qu'on doit
avoir chez les entreprises aussi à savoir pourquoi, au Canada, on fait ce choix
de l'immigration là puis on se retrouve dans une situation qui ne semble pas
s'améliorer, avec les conséquences que ça peut avoir sur notre capacité
d'accueil?
Mme White (Julie) : Merci
beaucoup. Toujours bon dans les questions, pas perdu cette habitude-là. Juste
peut-être remettre en place des choses. Dans le secteur manufacturier, autour
de 2020, 2021, on avait 32 000 postes vacants. Ça fait que la
situation s'est quand même résorbée, notamment à cause de l'arrivée des
travailleurs étrangers temporaires. C'est quelque chose qui a réglé une
situation qui a aidé nos entreprises. Est-ce que ça l'a... Est-ce que toute
l'économie vit la même situation? Moi, je ne peux pas... je parle du secteur
manufacturier aujourd'hui, puis je pense que c'est important de le rappeler,
mais on a vécu une situation différente.
Maintenant, Québec-Ottawa, Canada-Québec,
je l'ai dit d'entrée de jeu, c'est souvent une place, hein, le dossier de
l'immigration, où qu'on se relance la balle. J'aime beaucoup regarder le
tennis, mais je n'aime pas beaucoup jouer au tennis. Je vais être prudente
là-dessus. Je pense que, de part et d'autre, chaque gouvernement, des deux
côtés, a ses responsabilités. On est aussi dans un pays qui est très
vieillissant. Notre courbe démographique, elle est... elle est ce qu'elle est.
Il faut le prendre en considération. Il y a des décisions à Ottawa qui ont été
douteuses, il y a des décisions à Québec qui ont été douteuses, mais on aurait
peut-être besoin d'un petit peu moins de travailleurs étrangers temporaires, si
on avait une voie d'accès facilité à l'immigration permanente pour nos
travailleurs. Dans le manufacturier, ce n'est pas des travailleurs saisonniers,
on s'entend, c'est du monde qui viennent travailler parce qu'ils veulent
s'installer pour le futur et il faut le prendre en considération.
M. Boissonneault : Bien,
là-dessus, sur les travailleurs étrangers temporaires...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : En terminant.
M. Boissonneault : ...est-ce
que ce serait possible d'envisager un gel de la part des travailleurs étrangers
temporaires pour pouvoir en finir avec les arrérages qu'on a en utilisant la
résidence permanente?
Mme White (Julie) : Avec les
exigences de français, actuellement, ça serait très difficile parce qu'on
aurait de la difficulté à attirer dans les métiers manufacturiers.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : C'est terminé. Merci beaucoup, mesdames, pour cette
présentation.
M. Boissonneault : Merci
beaucoup. Bonne réponse.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Je vous souhaite une bonne fin de journée.
Et je vais suspendre quelques instants le
temps de recevoir notre prochain groupe.
(Suspension de la séance à 16 h 21)
(Reprise à 16 h 25)
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend
ses travaux. Donc, pour cet autre groupe que nous recevons aujourd'hui, il
s'agit des représentantes de la... du Conseil d'intervention pour l'accès des
femmes au travail. Mesdames, bienvenue à la Commission des relations avec les
citoyens. Donc, vous allez avoir 10 minutes d'abord pour vous présenter,
j'aime bien, là, quand vous êtes beaucoup, que vous puissiez vous présenter à
tour de rôle, et par la suite, on va entamer la période de discussion avec les
parlementaires. Alors, votre 10 minutes commence maintenant.
(Visioconférence)
Mme Gilker Létourneau (Valérie) :
Bonjour, Mme la Présidente. Mon nom est Valérie Gilker Létourneau. Bonjour
aussi aux ministres, Mesdames les ministres ou aux monsieurs les ministres dans
la salle, toute la députation. On est très heureuses d'être avec vous
aujourd'hui à distance. Merci de nous recevoir via Teams. Je suis Valérie
Gilker Létourneau pour le CIAFT, le Conseil d'intervention... pour l'accès des
femmes au travail, plus particulièrement, ce soir, le comité Femmes Employabilité,
qui est une... qui est un comité national qui réunit les 15 organismes
spécialisés dans le développement de la main-d'œuvre féminine. Donc, je suis
avec deux directrices générales de ces groupes, mais aussi avec la directrice
générale du CIAFT, aujourd'hui, Marie-Laure Labadie, Céline Montesinos et
Colette Cummings, qui prendront la parole aussi tantôt.
Donc, les organismes spécialisés dans le
développement de la main-d'oeuvre accompagnent chaque année... féminine. C'est
ça. On va vous amener dans le milieu de l'économie des femmes les plus
éloignées du marché du travail, les femmes immigrantes. Donc, les... les
groupes spécialisés dans le développement de la main-d'œuvre travaillent avec
des milliers de femmes chaque année. Et leur objectif est vraiment de faciliter
leur intégration. Et on ne parle pas là de francisation. On parle de tout... de
tout le reste, n'est-ce pas.
Donc, la... Vous savez que l'intégration
durable au marché du travail, c'est un travail laborieux en soi. Nos
organismes, c'est à ça qu'ils travaillent quotidiennement. On veut aujourd'hui
vous rappeler l'importance que la politique migratoire du Québec soit féministe
et intersectionnelle, donc qu'elle soit cohérente avec les engagements du
Québec en matière d'égalité et de justice sociale.
Quand on a pris connaissance du cahier de
consultation, on a posé quelques constats, et donc ils sont visibles dans notre
mémoire. Je vous en fais part.
Premier constat, c'est qu'on a...
Mme Gilker Létourneau (Valérie) :
...une approche utilitariste de l'immigration. On a l'impression que les
personnes immigrantes sont perçues comme des moyens de s'ajuster au marché du
travail et non pas comme des personnes globales, complexes, avec des
trajectoires de vie, comme des citoyennes ou citoyens à part entière. On trouve
ça déplorable.
Une autre chose qu'on a observée, c'est
que les femmes comme groupe social sont invisibilisées, aucune prise en compte
réelle des rapports sociaux de sexe ni des discriminations croisées, qui, vous
le savez sans doute, limitent pourtant leur inclusion à la fois économique et
sociale. Donc, on veut vous inviter à intégrer ces perspectives dans vos
travaux futurs.
Et, en dernier lieu, l'absence de
reconnaissance de l'expertise communautaire. Donc, les organismes féministes
comme les nôtres, qu'ils soient spécialisés en immigration ou encore qu'ils
travaillent à l'accueil et l'intégration des femmes éloignées du marché du
travail, devraient être partie prenante de tout ce travail d'accueil,
d'intégration et soutenus adéquatement à cette fin. L'immigration ne doit pas
être pensée comme un réservoir de main-d'œuvre, ça doit être pensé comme un
projet de société, un projet collectif où l'inclusion est fondée sur une
égalité réelle.
Pour continuer avec des exemples concrets,
je vous passe ma collègue Céline Montesinos.
Mme Montesinos (Céline) : Bonjour.
Alors, moi, je vais vous présenter dans un premier temps les trois
recommandations qui sont peut-être les plus fondamentales qu'on aurait à vous
faire. Premièrement, reconnaître les compétences, les acquis professionnels des
femmes immigrantes à travers des mécanismes simplifiés et équitables. En
deuxième temps, soutenir les parcours intégrés vers l'emploi décent... vers des
emplois décents combinant formation, francisation actualisée, accompagnement
psychosocial et reconnaissance des acquis. Enfin, financer à la mission les
organismes communautaires féministes spécialisés en employabilité comme acteurs
essentiels de l'intégration économique.
J'aimerais maintenant vous présenter trois
histoires très concrètes de femmes immigrantes en appui de nos recommandations.
• (16 h 30) •
Première histoire : Zania, une
ingénieure en informatique, c'est sa formation. Elle vient de Tunisie. Elle a
un permis de travail temporaire. Elle est parrainée par son conjoint, qui
travaille depuis une année en informatique. Elle a deux jeunes enfants. Peu de
temps après son arrivée au Québec, une agente de Services Québec l'a orientée
vers un cours de préposée, une formation rapide et en demande. Elle ne se
reconnaît pas dans ce parcours, mais elle n'ose pas questionner cette
proposition qui vient d'une représentante du gouvernement. Elle nous est
référée pour confirmer ce retour en formation. Elle aimerait plutôt travailler
dans un domaine, mais elle craint de remettre en question ce choix. Elle se
sent perdue et craint d'être expulsée.
En fait, une autre immigrante, Asma. Elle
vient du Sénégal. Elle est parrainée par son conjoint. Elle est trilingue et
elle est diplômée en gestion du tourisme. Elle est mère de trois enfants. À la
suite de son arrivée, après deux ans de séparation de son conjoint, qui
travaille déjà au Québec, des tensions importantes ont pris naissance dans le
couple pour déboucher sur des épisodes de violence de la part du conjoint. Elle
vient nous voir sans que son conjoint soit au courant. Elle veut trouver un
travail et pouvoir se séparer, mais elle craint de... qu'il la dénonce à
l'immigration et elle craint aussi de perdre la garde de ses enfants. Elle ne
connaît pas ses droits et ses craintes sont entretenues par son conjoint. Ce
sont toutes des histoires réelles que je vous raconte là.
Enfin, Maria, Mexicaine. Elle est réfugié
politique reconnue. Elle travaille comme préposée à l'entretien ménager. Grâce
à notre accompagnement, elle a pu obtenir une équivalence du niveau doctorat en
médecine et aussi un emploi plus... mieux rémunéré de commis aux services en
ligne dans un grand magasin. Elle décrit son milieu de travail comme
accueillant et conciliant. Elle doit mettre de l'argent de côté, car elle
prévoit reprendre des cours, des cours pratiques, théoriques, et son
inscription dans une université, en plus des coûts de traduction de ses
diplômes par un traducteur accrédité du Conseil des médecins.
Comme vous pouvez le constater, Maria,
Zania ou Asma sont des femmes courageuses. Elles occupent maintenant des
emplois qu'elles aiment. Je dois cependant vous signaler que, malheureusement,
si ces femmes avaient frappé à nos portes...
16 h 30 (version non révisée)
Mme Montesinos (Céline) : ...aujourd'hui,
elles n'auraient pas obtenu notre aide car elles ne sont plus admissibles à nos
services d'employabilité actuellement, en raison de leur statut. Ces femmes,
comme bien d'autres, ne veulent pourtant qu'intégrer la société québécoise.
Actuellement, ces situations de
non-reconnaissance de diplômes, de compétences, d'isolement, de violence
conjugale, même les... même les femmes immigrantes, à l'épuisement, la pauvreté
et l'exclusion car elles ne sont pas soutenues et accompagnées adéquatement.
Est-ce que c'est ce que nous souhaitons pour bâtir le Québec de demain?
Je vais céder maintenant la parole à Mme
Cummings, qui est directrice du CIAFT. Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : ...pas. Il faut juste ouvrir votre micro.
Mme Cummings (Colette) : Le
Québec a pris des engagements clairs en matière d'égalité, notamment à travers
la politique gouvernementale pour l'égalité entre les femmes et les hommes, qui
date de 2016, la Convention sur l'élimination de toutes les formes...
discrimination à l'égard des femmes, la stratégie gouvernementale contre le
racisme et la Charte des droits et libertés. Ces engagements doivent se
traduire concrètement par des politiques publiques.
Pour être à la hauteur de ces principes,
il est essentiel de mettre en place une politique migratoire féministe et
intersectionnelle fondée sur la dignité, la reconnaissance et la justice
sociale. Les femmes immigrantes jouent un rôle clé dans le développement du Québec.
Elles sont porteuses de savoirs, de compétences et de résilience. Mais pour qu'elles
puissent pleinement contribuer à la société, il faut leur offrir des conditions
nécessaires pour exercer leur pouvoir transformateur.
Les femmes immigrantes ne demandent pas la
charité. Elles demandent la cohérence. Et c'est cette cohérence qui passe par
un financement durable des organismes spécialisés en développement de main-d'œuvre
féminine qui les accompagnent et par une politique migratoire qui mise sur l'égalité
réelle.
Pour nous, l'enjeu ne porte pas sur les
seuils, ce n'est pas une question de nombres. C'est une question de conditions
d'accueil, de soutien et d'intégration offerte aux femmes. Les organismes
communautaires spécialisés en développement de la main-d'œuvre féminine sont
des expertes de première ligne. Leur reconnaissance est une urgence. La société
québécoise s'est construite entourant les principes d'égalité, et on devrait
accompagner toutes les femmes nouvellement arrivées pour qu'elles puissent
adopter et incarner ces valeurs-là, l'accessibilité aux services publics d'emploi
pour toutes les femmes qui en ont besoin sans égard pour leur statut
migratoire.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Alors, est-ce que votre présentation est terminée? Oui.
Parfait. C'est bon. Alors, merci beaucoup. On va pouvoir poursuivre avec la
période de questions. On... la «période de questions»... je suis encore... ça
va être des questions quand même, mais ça va être surtout un bon dialogue. On
poursuit avec le ministre. Il vous reste 16 minutes sept secondes.
M. Roberge : Merci beaucoup, Mme
la Présidente. Merci pour votre présentation. Vous amenez un angle différent de
d'autres, donc c'est... c'est toujours quelque chose que... que j'apprécie.
Lorsque des groupes arrivent avec une perspective différente, c'est
complémentaire.
Il y a quelque chose qui m'a chatouillé l'oreille.
Vous... Vous dites que le cahier de consultation, avec les propositions, aurait
une approche que... vous... vous utilisez le terme «utilitariste», c'est-à-dire
qu'on voit l'immigration, dans le cahier, dites-vous, d'une manière purement
économique. J'ai le goût de vous dire c'est vrai en partie, d'une certaine
manière. Mais je veux quand même souligner que, de tout temps, le Québec a... a
quand même fait de la réunification familiale, de l'accueil de réfugiés et de l'accueil
de conjoints, conjointes des immigrants économiques. Et que d'aucune manière,
dans les propositions qui sont soumises au débat pour discussion en ce moment,
on ne veut nier ça. On veut continuer de faire de la réunification familiale.
Je ne pense pas que ce soit, selon vous, une immigration qui serait
utilitariste dans ce cas-là, de l'accueil de réfugiés. Et, lorsqu'on accueille
par exemple quelqu'un dans le... dans la catégorie immigrants économiques,
souvent cette personne arrive avec conjoint ou conjointe et enfants et, enfin,
je ne pense pas que ce soit utilitariste. Et... Et quand c'est utilitariste,
pour moi, ce n'est pas nécessairement négatif parce...
M. Roberge : ...parce que,
considérant qu'on a une capacité d'accueil qui est somme toute limitée, on ne
peut pas accueillir 100 000, 200 000, 300 000 400 000 personnes par année de
manière durable. Quand on y pense, c'est comme une évidence. Donc, il faut
choisir un certain nombre. Mais, si notre capacité d'accueil est limitée, qu'on
doit choisir un nombre X, 25 000, 35 000, 45 000 personnes, et qu'on a une
pénurie de main-d'œuvre dans des secteurs clés, il me semble, ça serait particulier
d'accueillir des gens ici qui ne seront pas capables de se trouver un emploi ou
qui ne combleront pas des secteurs porteurs qui sont en déficit de
main-d'œuvre, alors qu'il y a d'autres personnes pour qui on aurait un pairage
parfait. Il me semble que c'est juste normal. Considérant qu'il y a beaucoup de
gens qui veulent venir ici, qu'on a des besoins précis, qu'on a des gens qui
viendraient répondre à des besoins précis, bien, nous, on ne les choisirait
pas, on ignorerait ça parce que ce serait utilitariste? Bien, il me semble, ce
serait un drôle de choix de gouvernement. Ceci dit, on ne peut pas faire que
ça. On ne prévoit pas que faire de l'immigration économique, on va continuer de
faire les autres. Est-ce qu'on se rejoint avec ce que je dis ou vous avez
toujours ce désaccord par rapport à une vision de l'immigration?
Mme Montesinos (Céline) : Je
peux peut-être répondre. En fait, c'est que, pour plusieurs femmes que nous
rencontrons quotidiennement, mais que nous ne pouvons plus rencontrer actuellement,
le loisir, c'est effectivement des réunifications familiales, sauf que le
permis de travail de ces femmes-là ne leur permet pas d'avoir des services
d'employabilité. C'est une problématique actuelle importante qui avait été
corrigée il y a quelques années du côté du Québec, où on nous permettait de
recevoir ces conjointes-là. Parce qu'une chose importante, c'est que, dans
plusieurs cas, les femmes ne sont pas les premières à qui... pour qui on évalue
le diplôme et qu'on évalue la formation, elles sont... elles accompagnent.
Donc, au départ, on n'a pas tellement évalué ce qu'elles avaient comme
diplômes, leurs possibilités de formation, leurs possibilités d'intégration,
c'est plutôt la... le dossier de M. qui a été analysé et c'est ce qui pose
problème. Pour nous, c'est important que ces femmes-là... Parce que ça permet
aussi à ces familles-là de rester en place, si la famille peut travailler. Et
souvent, c'est ce qui se passe, c'est que les femmes demeurent isolées, ne
peuvent pas obtenir de travail, parce qu'elles n'ont pas d'accompagnement pour
le faire, puis ça cause des problèmes dans les familles, ça aussi.
Mme Gilker Létourneau (Valérie) :
Bien, si je peux compléter.
Mme Montesinos (Céline) : ...si
je réponds bien, mais je... c'est la nuance que j'apporte.
Mme Gilker Létourneau (Valérie) :
J'aimerais ça compléter...
M. Roberge : Vous répondez...
très bien. Je vais vous laisser, collègue, continuer, mais vous répondez
merveilleusement bien. Oui.
• (16 h 40) •
Mme Gilker Létourneau (Valérie) :
Bien, je voudrais juste, donc, compléter en disant, donc, pour faire suite
à votre question sur l'aspect utilitariste, c'est... Je ne pense pas que notre
intention était de critiquer l'analyse des besoins économiques puis je pense
qu'on reconnaît ça comme important. Nous-mêmes, on travaille à l'autonomisation
économique des femmes. Notre propos, c'est vraiment de dire qu'il faut aller
plus loin dans l'analyse. Il ne faut pas que considérer ça, il y a les autres
dimensions qui doivent être considérées, notamment, l'intégration de la femme
aussi et du reste de la famille parce que ces personnes-là font aussi partie
prenante de notre société. Puis l'intégration, comme le disait Céline, compte
aussi là-dessus.
M. Roberge : Bien, merci pour
ces précisions-là. J'entends que vous parlez, je pense, de conjoints,
conjointes de travailleurs étrangers temporaires, peut-être, parce que,
lorsqu'on est dans l'immigration économique, il y a le requérant principal puis
il y a le ou la conjoint conjointe, peu importe, et peut-être qu'on devrait
mieux tenir compte des deux profils puis s'assurer de l'accueil des deux
personnes dans ces cas-là, des fois des trois, des quatre, quand il y a des
enfants, dans la perspective de l'intégration de chacune des personnes là.
Quand on dit «intégration nationale»... Puis je sais que vous aviez soumis au
mémoire l'an passé, en fait, la session précédente, quand on parlait de notre
modèle d'intégration, puis je pense qu'il y a des éléments puis des
modifications des amendements qu'on a faits pendant l'étude article par article
qui vont dans le sens de ce que vous souhaitiez parce que, dans notre nouveau
modèle d'accueil, d'intégration, d'enracinement des nouveaux Québécois, on a
inscrit davantage la perspective féministe puis on a inscrit davantage la
perspective de l'intégration économique de tous et de toutes les nouveaux et
nouvelles...
M. Roberge : ...immigrants,
immigrantes, pas seulement du requérant principal. Donc, il y a eu des
bonifications qui ont été faites lors de l'étude article par article.
On a aussi plusieurs programmes qui font
peut-être partie de solutions par rapport à vos préoccupations. Par exemple, on
a le programme d'aide financière pour la formation d'appoint en reconnaissance
des compétences. Et ça s'adresse autant aux hommes qu'aux femmes, là. Ça permet
l'octroi d'allocations hebdomadaires pour les personnes qui suivent une
formation d'appoint prescrite par un organisme. Il y a évidemment la
bonification du service Accompagnement Québec, une espèce de service
d'accompagnement 360, là, ce n'est pas seulement «bienvenue, on te trouve
un emploi», mais il y a aussi l'accueil, la connaissance des us et coutumes,
notre manière de vivre, le logement, etc.
Il y a maintenant des services de francisation
dès l'étranger qui peuvent être extrêmement intéressants aussi, parce que
peut-être que le requérant principal parle français, mais que la conjointe ne
le parle pas. Si la personne arrive puis que... Je vais faire un exemple
fictif, là, le conjoint arrive, parle français, a un emploi, la conjointe
arrive, ne parle pas du tout français et reste à la maison. Il y a danger
d'isolement important parce qu'elle ne peut pas communiquer. Alors qu'avec ce
qu'on est en train d'implanter avec de la francisation de l'étranger, bien, on
autonomise davantage cette personne-là. Lorsqu'elle arrive ici, elle est moins
dans une situation de vulnérabilité puis de dépendance.
Ceci dit, même si on fait des... je pense,
des efforts comme jamais, on peut toujours faire mieux. Puis, en ce sens-là,
votre mémoire nous soutient.
Je pense qu'il y a des collègues qui
voudraient poursuivre l'échange avec vous. Je vous remercie pour votre
présentation.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci, M. le ministre. Alors, je crois avoir reconnu la
main de la députée d'Anjou—Louis-Riel. Il vous reste 7 min 52 s.
Mme Boivin Roy : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Et puis merci à vous, mesdames, pour la
présentation d'aujourd'hui. Vous comprendrez que j'y apporte une oreille bien
attentive puisque je suis l'adjointe parlementaire à la Condition féminine. Et
j'aimerais vous rassurer, vous avez énuméré certains documents, que ce soit des
plans d'action, que ce soit des stratégies, que ce soit des orientations gouvernementales,
effectivement, nous avons une stratégie gouvernementale pour l'égalité entre
les hommes et les femmes qui... il est encore en vigueur jusqu'en 2027. Et vous
savez que l'objectif de cette stratégie est de promouvoir l'égalité en luttant
contre les stéréotypes, en favorisant l'égalité professionnelle et économique.
Aussi, on regarde le partage des responsabilités familiales, également la santé
des femmes, entre autres. Donc, il y a plusieurs éléments.
Vous avez aussi parlé de la violence.
Donc, vous savez qu'on a une stratégie intégrée en violence qui a donné suite
au rapport Rebâtir la confiance, rapport qui avait été déposé en décembre 2020,
dans lequel il y avait 190 recommandations. Au moment où on se parle, on a
169 des 190 recommandations qui ont été répondues, soit partiellement,
soit entièrement. Donc, c'est près de 90 % des recommandations qui sont
mises en œuvre présentement.
Alors, avec cette prémisse qui vient en
accord avec ce que vous nous avez dit au niveau du travail qui est fait au
niveau gouvernemental, on comprend évidemment que c'est un effort qui est
transversal. Différents ministères sont à l'œuvre, on a le secrétariat à la
Condition féminine, la Santé, la Sécurité publique, l'Habitation, la Justice
et, bien sûr, l'Immigration.
Alors, dans cette foulée, si je vous amène
à votre rapport, à la page 7 de votre mémoire, vous nous dites que l'État
québécois contribue activement, par ses pratiques institutionnelles, à la
déqualification et la relégation des femmes immigrantes dans des emplois à bas
salaires, éloignés de leur formation, éloignés de leur expertise, et vous
recommandez donc d'adapter les parcours de reconnaissance des acquis. Est-ce
que vous pouvez nous donner des exemples plus précis? Et, selon vous, est-ce
qu'il y a des secteurs ou des professions qui présentent des plus grands défis
pour reconnaître ces acquis?
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Votre micro. Oui.
Mme Labadie (Marie-Laure) :.
Je peux... je peux prendre la parole?
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Allez-y.
Mme Labadie (Marie-Laure) :
Oui, il y a différents secteurs qui... qui ont des enjeux. Je vous dirais, il y
a tout le secteur de l'enseignement. Moi, j'ai moi-même parlé avec une de nos
participantes hier, qui n'a pas de reconnaissance de diplôme parce qu'il lui
manque deux notes dans son pays d'origine actuellement en mauvaise situation
politique. Donc, elle n'arrive pas à obtenir ses deux notes pour avoir sa
reconnaissance pour être enseignante ici, alors qu'on sait qu'il y a des postes
à pourvoir. Donc, il y a le secteur d'enseignement, le secteur de la santé,
effectivement, mais les secteurs de l'ingénierie, nous avons aussi beaucoup
de...
Mme Labadie (Marie-Laure) : ...qui
arrivent avec des diplômes en ingénierie qui, malheureusement, doivent faire
partie d'ordres, auquel cas, là, ils doivent faire des ajustements, reprendre
des cours, donc payer des montants, et, en général, ces personnes-là, quand
elles arrivent, souvent, elles arrivent avec de l'argent pour vivre, pour
subvenir à leurs besoins, mais pas obligatoirement pour reprendre des études,
des études qui peuvent être coûteuses. Une de mes collègues de travail,
actuellement, immigrante, qui est... qui est originaire du Bénin, ici, elle
doit dépenser 8 000 $ pour sa session universitaire en maîtrise,
d'orientation, pour pouvoir faire un cours pour être reconnue, alors que, dans
son pays d'origine, elle était directrice d'école secondaire pendant 10 années
et conseillère d'orientation. Donc, elle a des années d'expertise, mais ici,
elle doit redépenser de l'argent et faire deux ou trois emplois en même temps
pour arriver à subvenir à ses besoins quotidiens plus universitaires.
Donc, il y a des secteurs, effectivement,
mais des secteurs où il y a des ordres de métiers. Puis je n'ai rien contre les
ordres, parce que je sais bien que ça encadre, et c'est important, mais c'est
peut-être un peu rigide et compliqué d'avoir la bonne information, et surtout,
c'est des grosses dépenses.
Mme Boivin Roy : ...pour
l'exemple que vous nous donnez. Est-ce que vous pensez que l'amélioration de la
reconnaissance des compétences peut réellement se faire sans ajuster ni la
planification ni les volumes d'immigration?
Mme Montesinos (Céline) : Bien,
en fait, nous, de notre point de vue, le problème n'est pas la question du
volume, c'est la question de comment on fait l'accueil, puis, effectivement...
ça devrait pouvoir se faire, effectivement, je pense, et ça... je pense que ça
permettrait à plus de femmes d'entrer rapidement sur le marché du travail,
clairement.
Mme Gilker Létourneau (Valérie) :
Mais plus précisément sur la question des seuils, où... on a, bien sûr,
réfléchi à la question et on vous invite, par rapport à cette question-là, à
prendre en considération les avis de nos collègues qui sont spécialisés dans
les enjeux d'immigration. Nous, les groupes en employabilité de la main-d'œuvre
féminine, on est spécialisés, vraiment, dans les enjeux d'employabilité puis
d'intégration au marché du travail, et c'est ça, notre perspective. Je
comprends la question puis je comprends qu'il faut effectivement, planifier les
ressources nécessaires pour accueillir les personnes et faire les transferts de
diplômes. Nous n'avons pas les données, malheureusement, pour établir des
chiffres, et on vous invite à vous appuyer sur les recommandations de nos...
des groupes communautaires, qui ont une expertise en immigration, dont c'est
le... dont c'est la mission principale, en fait.
Mme Boivin Roy : Très bien.
Puisque nous sommes dans un échange, et vous parlez d'accompagnement, je peux
vous en donner, quelques données, entre autres, les données sur le programme
d'aide et d'accompagnement en intégration. Donc, du 1er juillet 2024
au 30 juin 2025, il y a 120 593 personnes immigrantes uniques
qui ont bénéficié d'un accompagnement dans les volumes 1 à... dans les volets 1
à 4 du PASI. Donc, je ne sais pas si vous aviez connaissance de cette
information-là. Il y a 155 intervenants communautaires interculturels qui ont
été déployés dans plusieurs domaines, dont 15, ici, femmes, pour venir en aide
aux femmes qui ont été victimes de violence conjugale. Donc, je me disais,
peut-être, si vous n'aviez pas ces données-là dans vos analyses.
• (16 h 50) •
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Est-ce que... est-ce que vous voulez répondre? Est-ce
que... Non, c'est beau? Est-ce que vous avez d'autres questions?
Mme Boivin Roy : Est-ce qu'il
reste le temps pour encore une dernière petite...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Il reste 52 secondes.
Mme Boivin Roy : Parfait.
Alors, une dernière question. À la page 8 de votre mémoire, vous demandez un
financement de manière récurrente pour des projets passerelles qui
combineraient francisation, formation et employabilité, en reconnaissant le
rôle structurant pour l'intégration des femmes immigrantes. Est-ce que vous pouvez
nous en parler davantage? Et puis est-ce que vous avez un projet en tête?
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : En 30 secondes.
Mme Gilker Létourneau (Valérie) :
En 30 secondes? Peut-être qu'on devrait s'asseoir pour en discuter. Les
groupes spécialisés en développement de la main-d'œuvre féminine ont des
financements très particuliers, donc c'est un montage financier assez complexe.
Alors, oui, on s'est... on se penche sur cette question-là, on a des chiffres,
on a des propositions, mais il faudrait prendre le temps de s'en parler, je
pense, parce que c'est un travail en cours, ce n'est pas simple comme réponse.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci, Mme la députée. On va poursuivre les discussions,
cette fois, avec l'opposition officielle...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : ...votre temps est de 12 minutes 23 s.
M. Morin : Merci, Mme la
Présidente. Alors, mesdames, bon après-midi. Merci.
J'avais la même... la même question que la
collègue députée d'Anjou-Louis-Riel. Alors là vous avez plus que
30 secondes, donc si vous pouvez élaborer là-dessus, j'apprécierais.
Mme Gilker Létourneau (Valérie) :
Bien, je vais mettre la table puis ensuite je vais inviter mes collègues à
compléter l'information.
Donc, de façon globale, ce que je veux
dire, c'est que malheureusement, les organismes spécialisés dans le
développement de la main-d'œuvre féminine n'ont pas de financement de base à la
mission. Je ne sais pas si vous êtes familier à ce type de financement là dans
les groupes communautaires? Oui. Bon. Très bien. Donc, ces groupes-là n'en ont
pas. Et, par conséquent, ils ont d'une part un financement aux services, des
ententes de services avec Services Québec, qui est très, très limitatif, puis
d'autre part, on a une enveloppe aussi qu'on a négociée, grâce au soutien du
CIAFT, avec le Secrétariat à la condition féminine, qui vient soutenir
certaines actions de ces groupes-là en matière d'empowerment, d'autonomisation
économique, de reprise de pouvoir des femmes. Cependant, tout ce qui relève
vraiment de l'infrastructure puis tout ce qui est le travail de
préemployabilité notamment, qui est si important dans l'accueil et
l'intégration des femmes immigrantes, lui n'est pas soutenu financièrement. Et
donc les groupes doivent trouver toutes sortes de façons de soutenir ces
femmes-là. Mais donc c'est extrêmement compliqué à financer. Et elles le
font.... elles le faisaient, néanmoins, et maintenant ce n'est plus possible.
N'est-ce pas, chères collègues?
Mme Montesinos (Céline) : Non,
effectivement, ce n'est plus possible de... d'aider certaines de ces femmes-là.
Projet Passerelle, c'est... c'est un concept très intéressant parce que ça nous
permet de travailler autant en employabilité qu'en formation. Mais
actuellement, nos ententes de services qu'on négocie ne nous permettent pas de
travailler de cette façon globale là. On ne doit travailler que dans un
secteur, on ne peut faire que de l'employabilité. S'associer avec des centres
de formation, ce serait le ministère de l'Éducation, il y aurait... je pense
qu'il y aurait des choses intéressantes à... à penser et à se projeter, mais il
faudrait vraiment que... que ces deux ministères là se parlent. Ce n'est pas le
cas tout à fait, hein? Ça fait que donc on est chacun dans nos silos et donc
des projets qui seraient plus rassembleurs, qui seraient plus, pour les
personnes... plus utiles et plus complets, bien, ça n'existe pas. Nous, on
envoie les gens vers de la formation, on fait un processus d'orientation avec
elles, mais on les pilote vers des formations, puis après on n'a pas... on n'a
plus de lien avec elles, là. Donc, ce n'est pas... ce n'est pas... nous, ce
n'est vraiment pas comme ça qu'on voit l'intégration des personnes. On voit ça
d'une façon beaucoup plus globale. On aimerait travailler de cette façon-là.
Mais, pour l'instant, le type d'ententes qui nous est accordé ne nous permet
pas ça.
M. Morin : Je vous... Je vous
remercie. C'est très éclairant.
À la page huit de votre mémoire, vous
indiquez : «Intégrer une véritable analyse différenciée selon les sexes et
les autres facteurs identitaires.» Il existe une politique au Secrétariat de la
condition féminine sur l'analyse intersectorielle. Ma compréhension de cette
politique, c'est que le MIFI y est mentionné, donc il pourrait l'utiliser...
ou, en fait, devrait l'utiliser.
Maintenant, j'ai essayé de... de voir,
dans le... le cahier de consultation, s'il y avait une référence à la politique
ou s'il y avait des éléments qui nous démontraient que la politique avait été
utilisée. Je n'ai rien trouvé. J'ai lu également la portion publique du mémoire
qui a été déposé au Conseil des ministres, mais dans la portion publique, il
n'y a aucune référence à la politique. Compte tenu de votre travail, compte
tenu aussi de l'importance de l'égalité entre les sexes dans notre société,
c'est un droit reconnu par la Charte québécoise des droits et libertés, ça ne
devrait pas être une obligation pour le gouvernement? Ça ne devrait pas être
utile dans le cadre d'analyses qu'on fait? Parce qu'éventuellement, nous, les
parlementaires, on va avoir à poser des choix suite à toutes les
consultations...
M. Morin : ...j'aimerais vous
entendre là-dessus, sur l'importance d'une obligation ou d'un devoir de la part
du ministère de le faire puis qu'est-ce que ça pourrait changer ou qu'est-ce
que vous suggérez, parce que je présume que vous avez une expertise dans ce
domaine.
Mme Gilker Létourneau (Valérie) :
Bien, une analyse différenciée selon le genre qui serait intersectionnelle
nous permettrait justement de s'assurer que les enjeux qui ne sont pas abordés
en ce moment dans le document de consultation le seraient, parce que, quand tu
utilises ce cadre d'analyse là puis que c'est un choix politique, comme vous
l'avez mentionné, justement, le MIFI, par exemple, pourrait l'appliquer
systématiquement ou... de cette façon, on pourrait s'assurer d'éviter d'avoir
des angles morts et donc d'échapper les enjeux d'égalité pour les personnes les
plus vulnérables, parce que, quand on utilise une analyse différenciée selon
les sexes, on se prémunit contre nos propres biais inconscients, c'est-à-dire
qu'on se donne des outils méthodologiques, des outils de travail qui nous
protègent contre nos propres réflexes... pas malveillants, mais juste parce
que. Puis ça a été démontré, vous en avez sûrement entendu parler, le seul fait
d'être, par exemple, une personne blanche puis d'avoir évolué dans le système
dans lequel on évolue, ça a fait en sorte qu'il y a des choses qu'on ne sait
pas et qu'on ne connaît pas, parce qu'ils appartiennent aux réalités du groupe
social des personnes qui sont racisées, à titre d'exemple. C'est la même chose
avec les femmes. Et donc on ne peut pas... on ne peut pas perdre de vue
l'importance d'intégrer cette perspective dans nos analyses des politiques
publiques, c'est superimportant, parce que, comme l'ont dit mes collègues, ces
femmes-là, sinon, ne s'intègrent pas à la société québécoise. Et vous le savez
comme moi, souvent les femmes sont les piliers de la famille, elles vont
transmettre leurs valeurs à leurs enfants. Si on veut une intégration qui soit
réussie, si on veut une intégration qui soit enrichissante pour la communauté,
il faut prendre soin de bien accueillir et d'offrir tous les services
nécessaires aux personnes les plus vulnérables qu'on accueille. Et donc c'est
une... c'est une façon d'être bienveillant et de s'assurer que l'égalité de
fait soit une réalité au Québec pour toutes et tous.
M. Morin : Et, à la lecture
du document produit par le gouvernement, avez-vous des... est-ce qu'il y a des
angles morts que vous avez découverts, des choses dont on devrait tenir compte?
• (17 heures) •
Mme Gilker Létourneau (Valérie) :
Bien oui, il y en a, des angles morts. Le mot «femme» est-il mentionné une
seule fois? Peut-être l'ai-je vu une fois, en fait, de mémoire, peut-être que
je l'ai vu une seule fois, mais c'est peu de choses. Et ça ne... ça n'évoquait
pas les réalités que nous, les groupes communautaires qui ont cette expertise-là
avec les femmes les plus éloignées du marché du travail... ça ne reflétait pas
ce que nous, on vit sur le terrain. Ces femmes-là, on les côtoie, on travaille
avec elles, on sait quels sont leurs besoins, leurs réalités. Il faut que ça
soit pris en considération. Si on réfléchit... Si on veut revoir nos politiques
migratoires, il faut que nous soyons partie prenante de cette réflexion-là. On
serait très heureuses de le faire d'ailleurs. Mais, dans le cadre d'une
consultation comme ça... C'est le fun, on est très heureuses d'être ici,
d'ailleurs, ce soir. On vous en remercie. Et je vous remercie, monsieur, pour
vos questions, M. le député. C'est très apprécié de nous donner l'occasion de
nous exprimer ainsi sur ces enjeux importants, mais encore faudrait-il pouvoir
aussi mettre l'épaule à la roue puis avoir les moyens de le faire, de pouvoir
offrir aux femmes ce dont elles ont besoin pour s'intégrer adéquatement à notre
société.
M. Morin : Bien. Je vous
remercie. Vous parlez également de l'importance, évidemment, de reconnaître des
acquis et des diplômes pour assurer l'accès des femmes à des emplois
correspondant à leurs formations. D'après vous, quand on invite des gens à
venir ici, est-ce que c'est indiqué clairement? Est-ce que les gens s'attendent
vraiment, finalement, à... quand ils arrivent ici, à se faire dire : Bien,
écoutez, c'est... votre diplôme, ce n'est peut-être pas véritablement ici que
vous allez avoir une passerelle...
17 h (version non révisée)
M. Morin : ...on a des ordres
professionnels. Ils sont là pour protéger le public. Je le comprends. Mais est-ce
qu'on pourrait être plus explicite, plus clair pour que les gens comprennent
mieux ce dans quoi elles vont s'engager?
Mme Montesinos (Céline) :
...je vais peut-être répondre. Je vais...
Mme Labadie (Marie-Laure) : J'hésitais,
Céline, je te laisse aller répondre.
Mme Montesinos (Céline) : Tu
compléteras, Marie-Laure. En fait, c'est quand elles arrivent ici, souvent,
elles ont un diplôme de leur pays qui dit quelque chose et quand elles le font
évoluer ou quand elles... quand... ça dit autre chose. Parce que souvent ce qu'on
va évaluer, c'est le nombre d'années de scolarité. Elles, elles ont des... bon,
l'exemple classique, le bac, le bac, ce n'est pas toujours la même chose pour
le Québec que pour ailleurs. Il y a... il y a plein de formations qui ont des
noms, des... ce serait très... c'est très complexe, la reconnaissance des diplômes,
mais c'est très important de le faire. Mais souvent, c'est ça. C'est le...
complexe pour elle de bien évaluer : Est-ce que mon diplôme, ma formation
va être reconnu au Québec? Très complexe avant qu'elle soit arrivée, puis que
là, qu'on s'assoit avec elle, puis on regarde exactement quel diplôme elle a
eu. En tout cas, peut-être que c'est quelque chose qui est possible en externe,
mais je pense que c'est quelque chose qui est vraiment difficile.
Puis il y a toute la traduction des
diplômes, il y a vraiment... il y a des enjeux majeurs autour de la
diplomation. Puis souvent les femmes, le choix qu'elles vont faire... parce que
ça devient tellement complexe et tellement long, c'est qu'elles refont une
formation, c'est beaucoup plus simple, en disant : Bon, bien là, écoute,
je vais arrêter de me compliquer la tête, je vais aller faire... ça fait que c'est
souvent le choix qui est fait, mais ce n'est pas un choix qui est... Et puis
souvent elles ont l'impression un peu de perdre leur temps en formation parce
qu'il y a beaucoup de choses qu'elles se rendent compte que dans le fond, elles
l'avaient acquis. Mais elles vont le refaire pour avoir un diplôme québécois.
Ça fait que ça, c'est le classique, là.
M. Morin : Bien, je vous
remercie. Merci, M. le Président. Merci beaucoup, mesdames.
Le Président (M. Gagnon) : Merci,
M. le député. On poursuit l'échange avec le député de Saint-Henri—Sainte-Anne pour
une durée de quatre minutes huit. M. le député.
M. Cliche-Rivard : Merci
beaucoup, M. le Président. Merci beaucoup à votre groupe et vos interventions.
Merci. C'était super intéressant. J'aimerais ça vous entendre sur un sujet qu'on
n'a pas nécessairement abordé ce soir, mais la question des permis de travail,
des permis de travail fermés, particulièrement son impact chez les femmes. J'aimerais
ça vous entendre sur la vulnérabilisation puis la précarisation dans lesquelles
ces types de permis sont susceptibles de laisser les femmes spécifiquement.
Mme Labadie (Marie-Laure) : Céline,
je vais y aller si tu... Ce que nous vivons ça au quotidien, Céline et moi-même.
Donc, oui, effectivement, les permis de travail rendent les femmes très vulnérables
socialement et professionnellement. En fait, tout récemment également, depuis
je pense l'hiver, si je ne me trompe pas, Céline, nous n'avons, nous, en tant
qu'organisme spécialisé en main-d'œuvre féminine, plus le droit d'accompagner
les femmes avec des statuts de permis de travail temporaire. Donc, ces
personnes-là ne sont plus accompagnées dans leur intégration, recherche,
maintien en emploi. Donc, elles vont aller souvent sur des emplois sous-qualifiés.
Ces personnes-là n'ont souvent pas de place en garderie, donc sont également
isolés socialement, puisqu'elles restent avec leurs enfants en bas âge. Donc,
on a vraiment une grosse problématique, effectivement. C'est pour ça qu'une de
nos revendications, c'est que les femmes devraient avoir accès aux services
publics d'emplois, quel que soit leur permis de travail, quel que soit leur
statut. Parce que de toute façon, ces personnes-là sont là pour s'intégrer et
pour travailler et pour vivre au milieu de la société québécoise. Donc, sommes-nous
là pour les délaisser sur le bord de la route en leur disant : Vous pouvez
venir, mais vous n'avez pas le droit de participer? Je ne pense pas. Puis c'est
vraiment quelque chose pour lequel on travaillait.
M. Cliche-Rivard : Pouvez-vous
juste... pouvez-vous juste nous dire pourquoi vous n'avez plus droit de les
accompagner? Je trouve ça particulier.
Mme Labadie (Marie-Laure) : C'est
une directive que nous avons eue de Service Québec.
M. Cliche-Rivard : Que vous n'aviez
plus le droit d'accompagner des femmes, peut-être juste nous expliquer...
Mme Labadie (Marie-Laure) : Travailleuses
temporaires.
M. Cliche-Rivard : Est-ce
qu'on connaît l'explication, la raison de ça? Ça me semble très particulier.
Mme Labadie (Marie-Laure) : Céline,
tu avais-tu une... Moi, on n'a pas eu plus de détails que ça.
Mme Montesinos (Céline) :
L'explication, on n'en a pas. C'est qu'ils ont simplement...
Mme Gilker Létourneau (Valérie) :
Juste, à ce sujet, peut-être, on pourrait avoir des éclaircissements dans la
salle aujourd'hui, parce que je ne sais pas. Peut-être le savez-vous? Ça a été
aussi appuyé par le Secrétariat à la Condition féminine.
M. Cliche-Rivard : Bien,
écoutez, moi, je...
Mme Gilker Létourneau (Valérie) :
...en solidarité avec leurs collègues de Service Québec. Ça fait que, de tous
côtés, on ne peut rien...
Mme Gilker Létourneau (Valérie) : ...en
fait.
M. Cliche-Rivard : Je suis
particulièrement troublé, là, de ce que j'entends. Donc, moi, je... je suis
dans l'opposition, là, mais je vais poser des questions puis je vais... je vais
revenir vers vous pour avoir l'explication, à savoir pourquoi les femmes ne
peuvent plus être accompagnées, là. Ça me semble... Ça me semble particulier.
Donc, je vais vous écrire un petit peu plus tard, là. Je pense que c'est
quelque chose qu'il va falloir éclaircir.
Dans le même ordre d'idée, le caractère
temporaire qui se prolonge dans le temps, là, avec, on a vu,
145 000 personnes déjà sélectionnées dans le goulot d'étranglement,
suivant les cibles d'immigration permanente, fait en sorte que les femmes vont
maintenir des statuts temporaires de plus en plus longs avant d'accéder à la
résidence permanente. J'imagine que, ça aussi, c'est un critère de
vulnérabilisation que vous dénoncez?
Mme Montesinos (Céline) : Oui,
exactement, oui...
Mme Labadie (Marie-Laure) : Oui.
Effectivement. Effectivement. Puis on a... on a... je veux dire, hier, je
discutais avec une personne qui est demandeuses d'asile, puis ça fait deux ans
qu'elle attend son... son statut. Donc, elle est demandeuse d'asile depuis deux
ans. Puis on est... on est toujours vraiment dans un système précaire.
Malheureusement, on parle de... de... quand on... des personnes ont ces
statuts-là, c'est également... on ne peut pas faire de projets d'avenir. On ne
peut pas...
M. Cliche-Rivard : Hier, on a
appris que les cibles pouvaient monter, les délais allaient pour monter jusqu'à
18 ans dans cette catégorie-là. Donc, je passerai l'information puis
j'espère que le ministre va choisir un plan différent.
Le Président (M. Gagnon) : Je
vous remercie pour votre contribution aux travaux de la commission.
Pour les collègues, je suspends les
travaux quelques instants afin de permettre au prochain groupe, Québec
Réunifié, de prendre place. Merci.
(Suspension de la séance à 17 h 09)
(Reprise à 17 h 12)
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses
travaux. Donc, pour notre dernier groupe aujourd'hui, il s'agit de Québec
Réunifié qui est représenté par M. Jean-Sébastien Gervais, responsable des
opérations, Mme Marie-Gervaise Pilon, coordonnatrice de campagne, ainsi que M.
William Frédéric Blewitt, j'espère que j'ai bien dit votre nom, oui, membre
honoraire. Alors, Mme et Messieurs, bienvenue à la commission. Donc, vous allez
avoir 10 minutes pour vous... pour... pour présenter votre... votre
mémoire, l'essentiel de votre mémoire, vos recommandations, et par la suite, on
va procéder à la période de discussion avec les parlementaires. Alors, les
10 prochaines minutes sont les vôtres.
Mme Pilon (Marie-Gervaise) : Parfait.
Merci beaucoup. Donc, bonjour, Mesdames et Messieurs les parlementaires. Mon
nom est Marie-Gervaise Pilon. Je suis professeure au collégial, donc employée
des services publics, et coordonnatrice de la campagne de Québec Réunifié.
Et... mon mari, William Blewitt, qui est à côté de moi, depuis... qui est
professeur d'informatique, ici présent, donc depuis bientôt deux ans. Nous
sommes accompagnés de... responsable...
Mme Pilon (Marie-Gervaise) : ...responsable
des opérations de notre OBNL, M. Jean-Sébastien Gervais, que je vais
laisser se présenter.
M. Gervais (Jean-Sébastien) : Bonjour,
je m'appelle Jean-Sébastien Gervais, je suis développeur senior chez Sherweb et
ancien chargé de cours universitaire à l'ETS. Je parlerai mon mari, Paolo,
pharmacien aux Philippines. Comme de milliers de... et des... d'autres
Québécois et Québécoises, j'attends toujours la réunification familiale, une
attente qui, pour nous, dure plus de deux ans et semble se prolonger.
Pour débuter, j'aimerais vous présenter
brièvement Québec Réunifié. Québec Réunifié est tout d'abord un organisme à but
non lucratif, entièrement bénévole, non partisan et indépendant, fondé par des
Québécois et des Québécoises qui... directement touchés par les délais et les
obstacles administratifs du regroupement familial. Notre comité
multimultidisciplinaire participe à la consultation, à mener des études sur les
impacts humains, et économiques, et psychologiques de l'immigration, collabore
avec des instances universitaires et d'autres organisations de la société
civile.
Notre mémoire déposé dans le cadre de la
consultation contient sept recommandations. Ces recommandations sont
fondées sur une analyse comparative des pratiques en France, en Allemagne, au
Danemark, aux Pays-Bas et dans le reste du Canada.
L'objectif de Québec Réunifié est que les
familles puissent vivre ensemble sans attendre des années et que les familles
puissent contribuer pleinement à la société québécoise en français grâce à une
immigration juste et prévisible. Avant de présenter les recommandations,
j'aimerais soulever quelques constats probants sur le regroupement familial. Je
ne suis pas sans vous apprendre grand-chose que les normes... que les délais
atteignent maintenant 40 à 41 mois au Québec, contre 13 mois ailleurs
au Canada, là, au moment du dépôt du mémoire, en fait, soit environ trois fois
la norme canadienne. Selon des études menées auprès de nos membres, plus de
92 % des conjoints parrainés sont aptes à travailler et contribuer
pleinement à la société québécoise. 81 % comprennent le français. Les
délais prolongés entraînent des conséquences bien réelles, tant sur le plan
économique que psychologique. Sur ce, on parle en moyenne de 55 000 $
de dépenses attribuables à la prolongation des délais du regroupement, alors
que 97 % des symptômes... présentent des symptômes de dépression et
73 % de l'anxiété. Selon un sondage Léger en février dernier, 67 %
des Québécoises et des Québécois souhaitent que les délais de traitement
respectent la norme canadienne de 12 mois et 64 % d'entre eux
estiment que faciliter le regroupement familial devrait être une priorité
importante du gouvernement. Un dernier constat au niveau de l'immigration,
l'intégration constitue un pilier du vivre ensemble québécois est très
important, et on se doit de reconnaître que la famille joue ce rôle central
dans le processus d'accueil, de francisation et d'intégration des immigrants.
Les Québécois et résidents permanents qui
parrainent un ou une conjointe ou un enfant agissent donc comme les premiers
vecteurs de l'intégration. L'immersion linguistique et culturelle, elle sera
davantage présente dans l'unité familiale qu'ailleurs en société. De plus, le
regroupement familial permet d'exercer une pression moins importante sur les
services publics et sur le logement, car pour le tiers d'entre eux, ils sont
déjà présents et le parrain est responsable de la... de la personne parrainée
pendant trois ans suivant son arrivée au Québec.
Je laisse maintenant la parole à Marie qui
présentera les recommandations sur le mémoire.
Mme Pilon (Marie-Gervaise) : Merci,
Jean-Sébastien. Donc, nous avons beaucoup de recommandations. Nous avons fait
une sélection afin de ne pas excéder le temps qui nous est alloué. Donc, dans
un premier temps, j'attirais votre attention sur la recommandation n° 2,
qui est de fixer un délai légal maximal de 12 mois. Dans les pays
européens que nous avons étudiés, le regroupement familial s'effectue selon des
délais qui sont clairs et encadrés. Par exemple, au Danemark et aux Pays-Bas,
le délai légal est de 90 jours pour traiter une demande de regroupement
familial. En France, le visa est obtenu, le titre de séjour est obtenu
généralement dans l'année qui suit le mariage. En Allemagne, les délais varient
entre six et 12 mois. Au Canada, le délai cible dans la norme de
traitement est de 12 mois également. C'est un objectif que les partis se
sont engagés à respecter selon l'Accord Canada-Québec. Et ce sont des exemples
qui montrent que c'est possible d'avoir un traitement rapide sans nuire aux
objectifs d'intégration de la famille. Donc, pour rappel, notre première
recommandation, c'est d'adopter un délai légal de 12 mois, incluant les
étapes fédérales et provinciales.
J'attire également votre attention sur la
recommandation n° 3, de prévoir des seuils pour la période 2026-2029
qui seraient alignés sur la capacité réelle de traitement. Aucun des pays que
nous avons étudiés n'impose de plafond annuel de regroupement familial. Le
traitement dépend en fait des ressources qui sont disponibles au niveau de
l'administration et non d'une décision prise en commission, par exemple. Dans
les pays qui sont à l'étude, les autorités ajustent leurs moyens selon...
Mme Pilon (Marie-Gervaise) : ...la
demande des citoyens qui parrainent de leurs conjoints. Au Québec, le répondant
doit déjà démontrer sa capacité à subvenir aux besoins de la personne qu'il
parraine, généralement c'est un adulte en âge de travailler, et ces personnes
vont solliciter très peu les services publics, et ils vont déjà occuper un
logement existant puisqu'ils vont vivre avec la personne qui les parraine.
L'impact sur la capacité d'accueil est donc limité, ce qui ne justifie pas
l'imposition d'un plafond. Donc, pour rappel, ma deuxième recommandation,
c'était la numéro trois : fixer des seuils réalistes et ajustés à la
capacité de traitement pour 2026 à 2029.
Également, nous allons regarder la
recommandation numéro cinq, qui est de supprimer les quotas sur le regroupement
familial. Dans les pays européens que nous avons étudiés, encore une fois, le
regroupement familial n'est pas soumis à un quota. En France, le visa familial
découle directement du lien juridique établi entre les époux ou entre les
personnes pacsées. Au Danemark, il y a des conditions strictes, mais, dès
qu'elles sont remplies, il n'y a pas de contingent annuel. En Allemagne, dès
que les conditions légales sont remplies, l'âge, des ressources, un certificat
linguistique A1, le droit au visa familial s'applique aussi sans
contingentement. Aux Pays-Bas, c'est la même chose, les conjoints qui sont
parrainés par des personnes qui détiennent la citoyenneté obtiennent un titre
de séjour de cinq ans sans restriction annuelle. Donc, c'est des modèles qui
montrent que c'est parfaitement possible d'encadrer l'intégration des personnes
parrainées sans recourir, encore une fois, à des limites ou à des plafonds.
Donc, pour rappel, on demande d'exclure le regroupement familial des seuils du
Québec en ligne avec des pays comparables, donc à l'image de la catégorie des
gens d'affaires, entre autres, ce qui a été fait dans la dernière planification
pluriannuelle.
Enfin, on vous demandera de reconnaître
juridiquement le droit à la vie familiale. La France, l'Allemagne, les Pays-Bas
et le Danemark inscrivent la protection de la vie familiale dans leurs lois et
dans leurs constitutions, en conformité avec les traités européens. Au Canada,
c'est un droit qui a été reconnu par la Cour suprême. Il fait partie intégrante
de la liberté et de la sécurité de la personne. De plus, l'article 3 1 d de la
Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés consacre le regroupement
familial comme objectif fondamental, au même titre que les objectifs
économiques et humanitaires. Donc, nous recommandons d'inscrire officiellement
le droit à la vie familiale dans la Loi sur l'immigration du Québec en
cohérence avec les obligations du Québec.
En terminant, nous aimerions aussi aborder
l'importante question de la francisation. Contrairement à une idée reçue, les
personnes parrainées ne ralentissent pas l'intégration linguistique, elles la
renforcent. Des données colligées auprès de nos membres montrent que 32 %
des personnes parrainées ont le français comme langue maternelle et celles qui
ne l'ont pas ont entamé leur apprentissage avant même d'arriver au Québec dans
une proportion de 92 %. 81 % des personnes qui sont parrainées le
comprennent et 75 % le parlent.
Pour en témoigner, je vous invite à
rencontrer mon mari, William Blewitt, qui va
rapidement partager son expérience personnelle linguistique.
• (17 h 20) •
M. Blewitt (William) : Alors,
bonjour. Je m'appelle William Blewitt. Je suis Britannique. Avant mon
installation au Québec en novembre dernier, j'avais déjà atteint le niveau
quatre en français. J'étais venu plusieurs étés de suite pour des séjours
d'immersion avec ma femme francophone, Marie, ce qui m'a permis d'arriver avec
beaucoup d'autonomie dans la vie quotidienne. Depuis mon arrivée, mon français
s'est énormément amélioré grâce à l'immersion complète dans le cercle social de
ma conjointe, notamment avec ma belle-mère francophone unilingue, avec qui je
parle presque chaque jour. Cette immersion a été le meilleur des cours. Elle
m'a permis de progresser beaucoup plus vite que dans n'importe quelle salle de
classe. Je fais partie de cette majorité de personnes non francophones qui
arrivent déjà autonomes et motivées à progresser.
Mme Pilon (Marie-Gervaise) : Merci.
Merci, William, et merci à tous pour votre attention aujourd'hui.
En terminant, Mme la Présidente, nous
aimerions remercier le ministre d'avoir mentionné que l'immigration n'était pas
Voldemort. Aujourd'hui...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci.
Mme Pilon (Marie-Gervaise) :
Aujourd'hui, nous lui demandons d'être le Dumbledore pour le regroupement
familial.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : C'est bon.Merci beaucoup. Alors, bon, belle
présentation. Maintenant, nous allons entamer la période de discussion, avec le
ministre dans un premier temps. Seize minutes 30 secondes, M. le ministre.
M. Roberge : Merci beaucoup.
Merci pour votre présentation, pour votre témoignage, pour votre manière
d'aborder les choses...
M. Roberge : ...un sujet très
sérieux, très sensible. Vous l'avez fait d'une belle manière, avec une petite
touche d'humour. Vous êtes beaux à voir. Et puis je vous félicite pour votre
français. Je salue la belle-mère. Au Québec, on n'apprécie pas toujours toutes
les belles-mères en tout temps. C'est une blague, d'accord? Mais,
manifestement, votre désir d'intégration et probablement son désir d'avoir son
gendre près d'elle font des merveilles. Donc, je voulais préciser ça.
Petite information. Je suis certain que
vous avez cette information-là, mais je sais qu'il y a beaucoup de gens qui
nous écoutent, je veux clarifier les choses. Quand on parle de regroupement
familial qui demande un certain délai, on ne parle pas des enfants mineurs. Je
le dis pour les gens qui nous écoutent. Parfois, des gens se disent :
Bien, voyons donc, ça veut dire que ton enfant de quelques années reste dans le
pays étranger. Ce n'est pas le cas. On continue de recevoir en tout temps les
demandes d'engagement qui visent un enfant à charge de moins de 18 ans. Il
n'y a pas de délai, ça se fait tout le temps. Un enfant mineur en processus
d'adoption aussi, un enfant orphelin qui est le frère, la sœur, le neveu, la
nièce, le petit-fils ou la petite-fille de la personne déjà au Québec, toutes
ces personnes-là sont aussi admises sans le délai hors des seuils ou un enfant
à charge qui serait majeur mais qui serait dépendant d'un de ses parents en
raison d'un état physique ou mental, donc, même s'il est majeur, s'il y a un
critère de dépendance, il n'y a pas les délais dont on parle. Je ne veux pas
minimiser les délais, je veux juste préciser les choses pour les gens qui nous
écoutent. Vous êtes en quelque sorte des experts de ce domaine-là, vous le
savez, mais tout le monde n'est pas au courant de ça.
Dans votre recommandation six, vous
proposez de mettre en place un parcours ou un contrat d'intégration structuré
et accessible à la catégorie de regroupement familial. Je veux juste porter à
l'attention de la commission qu'on a déjà mis en place une mesure en ce sens-là
en novembre 2023. Depuis novembre 2023, toute personne qui présente une demande
d'engagement en faveur d'une personne de 18 à 55 ans doit remplir et
signer un plan d'accueil et d'intégration. Je pense, c'est dans le sens de ce
que vous souhaitez. Dans ce plan, la personne garante doit indiquer les actions
qu'elle s'engage à poser pour soutenir l'intégration et la francisation de la
personne parrainée. Je pense que ça ressemble au contrat d'intégration que vous
semblez proposer. Est-ce qu'il y a des choses à améliorer à ce qui existe dans
ce sens-là?
Mme Pilon (Marie-Gervaise) : Je
vais commencer par vous remercier pour cette excellente question. J'avais hâte
de vous en parler. Et, oui, il y a des choses qui doivent être effectivement
améliorées. Dans un premier temps, l'accès entre autres aux services peut être
un peu long pour... par exemple, pour avoir accès à la francisation. En ce
moment, on parle de six mois d'attente à peu près. C'était ou... du moins,
c'était la dernière fois qu'on a vérifié les délais. Donc, ça, c'est une
première chose, accélérer l'accès à la francisation pour ceux qui en ont besoin
évidemment. On vient de vous faire une démonstration assez efficace. Je crois
que la francisation n'est pas toujours nécessaire ou peut se faire dans
d'autres façons, entre autres dans le milieu familial, mais, pour ceux pour qui
ce n'est pas possible, c'est quelque chose qui est nécessaire. L'autre chose,
et... Bon, vous avez remarqué qu'on avait écouté d'autres présentations avant
nous. Donc, on a bien noté que vous aviez mentionné la francisation possible de
l'étranger, mais présentement c'est très difficile pour un débutant d'avoir
accès à la francisation de l'étranger, alors que ce serait essentiel pour un
débutant d'avoir accès à des cours pour une personne à l'étranger qui n'est pas
encore en situation débutante. On sait aussi qu'évidemment en situation
d'apprentissage linguistique, quand on commence, qu'on a... qu'on part de zéro
ou de, excusez mon anglais, «yes, no, toaster», à ce moment-là, on a besoin de
beaucoup... de beaucoup d'appuis, de beaucoup de contacts aussi, là, avec
l'enseignant. Vous n'êtes pas sans savoir à quel point c'est important, et
donc, bien sûr avoir, par exemple, des cours en ligne, ce n'est pas idéal.
Donc, il faut trouver des façons alternatives. Je sais qu'il y a des
possibilités de le faire avec l'Alliance française. Malheureusement, l'Alliance
française, ce n'est pas toujours l'idéal. Il n'y a pas beaucoup de centres qui
sont disponibles. Il y a des personnes qui sont dans des endroits plus reculés,
plus loin, où, vraiment, le transport serait impossible pour se rendre à des
cours de l'Alliance française. Donc, l'appétit est là, l'appétit pour la
francisation, pour l'intégration. Et là ce sont des personnes qui ont choisi le
Québec et qui ont choisi des Québécois. C'est des personnes qui sont
francophiles, qui veulent s'intégrer, qui veulent vivre ici. Je vous...
William, ici présent, est un excellent exemple, il a quitté sa carrière universitaire
pour me rejoindre ici, au Québec. Donc, c'est des gens qui, vraiment,
choisissent le Québec par amour pour le Québec et pour un Québécois ou une
Québécoise. Il faut qu'on les accompagne aussi dans cette intégration-là
lorsqu'ils en ont besoin, plus que ceux qui peuvent se franciser par le milieu
familial. Ça, c'est une première chose.
L'autre chose, c'est qu'on apprécie
beaucoup...
Mme Pilon (Marie-Gervaise) :
...l'accompagnement Québec. C'est un service qui est extrêmement utile et les
personnes qui le donnent sont extrêmement compétentes. Par contre, parfois, il
serait intéressant de considérer la possibilité que le parrain puisse avoir
accès à Accompagnement Québec dans l'hypothèse où la personne parrainée serait
dans une... dans un fuseau horaire pas pratique, ne serait pas encore en mesure
d'être... d'interagir en français avec le conseiller d'Accompagnement Québec.
Si on commence les mesures... les mesures à l'avance, parce qu'il y a un
problème de communication aussi au niveau des services où, des fois, les gens
ne sont pas au courant. Donc, nous, on travaille beaucoup pour annoncer à nos
membres qu'Accompagnement Québec, entre autres, existe parce que c'est un
extraordinaire service, mais il n'est pas assez connu encore, en tout cas, de
mon point de vue. Donc, il faut... il faut non seulement le publiciser plus,
mais aussi intégrer le parrain dans cette procédure-là, dans ce processus-là.
Finalement, au niveau de la...
excusez-moi, de l'évaluation comparative, encore une fois, c'est très long. Ça
retarde l'intégration de la personne quand elle doit attendre l'évaluation
comparative pour faire du travail dans les services publics, entre autres. Par
exemple, enseigner dans un cégep. On ne peut pas enseigner au cégep sans
évaluation comparative. Donc, quand on a des conjoints très instruits, ça
retarde leur intégration. Il faudrait trouver des façons d'accélérer, autre que
la lettre, parce que la lettre qui demande l'accélération demande une promesse
d'embauche. Et malheureusement, très souvent, on ne se rend même pas l'entrevue
sans l'évaluation comparative.
M. Gervais (Jean-Sébastien) :
La première question parlait aussi d'enfants mineurs qui avaient des...
Mme Pilon (Marie-Gervaise) :
Oui. Merci. Merci de me le rappeler, Jean-Sébastien. Au niveau des enfants
mineurs, c'est important aussi de rappeler qu'il y a des enfants mineurs
accompagnants. Et si le parent accompagnant n'a pas de CSQ, on ne peut pas...
Il y a un problème au niveau de l'enfant mineur qui peut, lui, recevoir son
CSQ, mais le parent accompagnant, lui, ne l'a pas. Donc, si on revient sur la
question des CSQ, c'est une des raisons pour lesquelles c'est très important de
continuer les missions des CSQ, qui de toute façon sont essentielles à
l'intégration. Puis c'est ça qu'on vise, c'est ça qu'on veut, c'est ça qu'on
souhaite pour nos conjoints. Merci.
M. Roberge : Merci pour votre
réponse étoffée. Vous avez parlé de comparables, de politiques migratoires pour
les réunifications familiales comparables en Europe. À vous écouter, c'est
comme si... C'est comme si tout le monde faisait mieux que nous. Vous avez
mentionné le Danemark, il me semble, mais d'après ce que je comprends, ils ont
des conditions strictes au Danemark, ils n'ont pas... un nombre, mais vous-même
vous dites : Des conditions strictes. Puis ce que je comprends, c'est que
contrairement à nous en Allemagne et au Danemark, il y a des exigences
linguistiques pour la réunification familiale, ça fait que même si on ne met
pas le critère du nombre, si d'emblée les gens ne peuvent pas parler la langue,
ils ne pourraient pas venir au Danemark, tandis qu'au Québec, on n'a pas ce
critère-là. Donc, dans votre analyse sévère envers nous, je pense que vous
devez quand même nous donner quelques points là-dessus.
Mme Pilon (Marie-Gervaise) :
J'aimerais ça... Est-ce que c'est mon tour?
M. Roberge : Bien sûr.
Mme Pilon (Marie-Gervaise) :
J'aimerais ça juste rappeler qu'on est quand même en ce moment à 41 mois.
C'est extraordinaire. Je connais une famille qui ont attendu cinq ans pour
l'arrivée du papa. Lorsque... lorsque le processus a commencé, la jeune... un
des enfants avait cinq ans. Elle a fini à 10 ans. C'est très, très long.
Donc, je pense qu'on doit rester sévère, séparer des enfants d'un beau-père
parce qu'un beau-père peut être très important dans la vie d'un enfant, c'est
très grave. On ne peut pas prendre ça à la légère. Nous sommes l'endroit dans
le monde en ce moment où c'est le plus long, réunir une famille pour un citoyen
qui a épousé un étranger. Nous avons battu le record mondial d'attente. Donc,
je dois être sévère parce que c'est la réalité. Je ne peux pas mentir à la
commission aujourd'hui, c'est la réalité. Nous sommes ceux pour qui ça prend le
plus de temps dans le monde en ce moment. Et ça crée des situations
épouvantables.
• (17 h 30) •
J'écoutais le... le groupe qui était avant
nous aujourd'hui, qui parlait, là, des personnes qui vivent de la violence.
Être en situation temporaire pendant des années, ça peut mener à des choses
comme ça aussi parce que ça précarise la personne. Donc, on doit être sévère
parce que ça met des familles en danger, ça met des gens en danger au niveau de
leur santé mentale, leur santé économique et au niveau de la santé des enfants.
M. Roberge : Il n'y a personne
qui vous demande de mentir ici en commission, hein?
Mme Pilon (Marie-Gervaise) :
Je m'excuse, je m'excuse. J'ai oublié aussi de vous mentionner que... merci,
c'est un autre rappel, que les critères linguistiques sont souvent exigés pour
la citoyenneté, spécifiquement pour le Danemark, et que pour l'Allemagne, c'est
un niveau A1 qui est demandé, donc vraiment yes, no, toaster.
M. Roberge : Mais en Allemand.
Mme Pilon (Marie-Gervaise) :
Ya...
M. Roberge : C'est bon, je
vais vous laisser... Je ne suis pas capable de dire ça, honnêtement. OK. Par
rapport à la langue, on n'a pas ces critères-là. Vous avez raison de dire que
les délais sont longs en ce moment. On n'a pas les critères de langue. Le
commissaire à la langue française, lui, nous suggère par contre d'y aller, là.
Il recommande, je le cite, là, que le MIFI doit...
17 h 30 (version non révisée)
M. Roberge : ...d'IRCC, donc
fédéral, une connaissance minimale du français à l'admission des personnes
parrainées, et des engagements supplémentaires du parrain en matière de
francisation, tout en renforçant les mesures de soutien. Donc, vous ne seriez
pas d'accord à ce qu'on impose des critères de maîtrise de la langue?
Mme Pilon (Marie-Gervaise) : Écoutez,
on est... moi, je n'ai pas le mandat de mes membres pour vous répondre
directement, mais je peux vous dire que c'est une question qui soulève des gros
enjeux d'équité, à cause de l'accès à la francisation dans les pays de
certaines personnes parrainées. Prenons, par exemple, le parrainé cubain. L'Internet
est très mauvais à Cuba, ça devient extrêmement difficile pour cette personne-là
de même suivre un cours à distance, sur Zoom, Duolingo, ou quoi que ce soit d'autre.
M. Gervais (Jean-Sébastien) : Je
voudrais rajouter qu'effectivement, c'est la même chose aux Philippines, l'Internet
est vraiment terrible aux Philippines, le courant... il y a souvent des pannes
de courant. Donc, d'organiser des cours en ligne aux Philippines par l'Alliance
française... Ce n'est pas nécessairement toujours facile ou collaboratif, pour
eux, de suivre les cours, d'autant plus que le MIFI n'a pas de cours de base
pour l'introduction au français. Les... mon conjoint, entre autres, est relégué
à apprendre le français par... via Duolingo, et avec... un peu avec moi, par
mon parcours de deux ans où est-ce que j'ai vécu avec lui, à lui apprendre les
bases du français. Mais toujours, après deux ans, c'est difficile pour lui de
tenir une conversation. Oui, il va comprendre des mots, à peu près le même
niveau que William, mais d'avoir le courage de parler et de tenir une
conversation, ce n'est pas encore possible, parce que... c'est impossible d'avoir
une forme d'immersion dans la langue, qu'on aurait au niveau du français.
Et, pour continuer sur le sujet de la
langue, est-ce que ça devrait être un critère, potentiellement, ça peut être
intéressant, oui, de pouvoir choisir les candidats qui vont parler français,
mais, à mon avis, ça devrait être uniquement un critère pour l'obtention de la
citoyenneté, et non pas pour tenir séparées les familles.
M. Roberge : Bien, ce n'est
pas... ce n'est pas dans le cahier de propositions, bien, la recommandation. Je
voulais simplement vous entendre là-dessus parce que les pays que vous avez
suggérés, parfois, ont des critères de langue. Mais ce n'est pas une
recommandation du cahier de planification.
Mme Pilon (Marie-Gervaise) :
Oui, vas-y.
M. Blewitt (William) : Je m'excuse.
C'est une question de... des oeufs et des poules...
M. Roberge : Je comprends. Donc,
est-ce qu'on arrive et on apprend la langue ou est-ce qu'on prend la langue avant
d'arriver?
M. Blewitt (William) : Parce
que, pour moi, particulièrement, le français québécois, c'est plus facile pour
comprendre après, chaque jour, une heure de dîner avec mes collègues des études,
dans le subway... dans le métro, ou dans le centre-ville de Montréal... L'opportunité
pour entendre le français du Québec, c'est essentiel.
M. Roberge : Oui, l'immersion,
c'est dur à battre pour apprendre la langue. Donc, cette année, et les années
passées, depuis un certain temps, on est toujours autour de 10 000
réunifications familiales par année. Ce n'est pas nouveau de notre
gouvernement, là. 2014, c'était 11 000; 2015, 10 000; 2016, 11 000.
On était là-dedans, sous le précédent gouvernement libéral, avant qu'on arrive,
et c'est pour ça que j'étais surpris de voir, ce matin, mon collègue de l'Acadie
faire une sortie, puis, dans le communiqué de l'opposition officielle, ils
disaient : L'entêtement idéologique de la CAQ de ne traiter qu'une dizaine
de milliers de dossiers de réunification familiale par année ne fait qu'empirer
la situation. Particulier que la formation politique qui, lorsqu'ils étaient au
gouvernement, admettaient 10 000 personnes par année fasse un point de
presse pour dire que c'est terrible de n'admettre que 10 000 personnes par
année. La cheffe de l'opposition officielle est déjà sortie pour dénoncer le
gouvernement avant qu'elle arrive. Je ne sais pas si mon collègue de l'Acadie
va faire la même chose. Mais nous n'avons que continué le nombre que nous
avions précédemment.
Vous nous demandez de changer les choses.
Fort bien. En consultations, on entend tout le monde, on va tenir compte de
tous les points de vue. Je sais que mon collègue de la deuxième opposition
plaide pour ça depuis le début. On va tenir compte de tout ça puis on verra où
est-ce qu'on atterrit en prenant en compte la capacité d'accueil complète.
Je vous remercie beaucoup pour les
informations — vous êtes vraiment des experts dans votre domaine — mais
aussi pour le témoignage. Votre apport à la commission est très différent des
autres, très complémentaire. Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. On poursuit les discussions avec l'opposition
officielle. 12 min 23 s, M. le député.
M. Morin : Merci, Mme la
Présidente. Alors, Mme Pilon, M. Blewitt et M. Gervais, merci d'être là, merci
d'être avec nous, merci pour votre mémoire. Le délai, présentement, pour le
regroupement familial, vous l'avez mentionné, au Québec, c'est environ 41 mois.
C'est un record mondial...
M. Morin : ...c'est
notamment ce que j'ai dénoncé ce matin. Alors, je ne vais pas changer ma
position là-dessus. Ça, c'est très clair, M. le ministre. 15 mois à peu près
au... dans le reste du Canada.
Quand on regarde ce qui est proposé par le
gouvernement, dans son cahier de consultation, notamment le scénario A... parce
que, présentement, là, c'est à peu près 10 600 dossiers, là, qui est
envoyé pour les seuils à Ottawa, dans le scénario A, on parle de 5 800. On
ne sait pas ce qui va arriver, mais mon collègue de Saint-Henri-Sainte-Anne
soulignait, en période de questions, que c'est peut-être le scénario qui va
être retenu. Quel va être l'impact sur les délais en regroupement familial si
ce scénario-là est retenu?
Mme Pilon (Marie-Gervaise) : Donc...
M. Gervais (Jean-Sébastien) :
Je peux répondre.
Mme Pilon (Marie-Gervaise) :
Vas-y, puis je compléterai.
M. Gervais (Jean-Sébastien) : Selon
lesdifférents scénarios proposés, on a... on a calculé, on a projeté,
un peu, l'arrérage qu'on a versus le nombre de demandes qui a été reçu, ou du
moins les demandes, même s'ils sont suspendus, qui vont s'accumuler lors de la
réouverture du programme, on parle d'une attente qui va... qui va devenir de 6
à 10 ans, dépendamment du scénario choisi.
Mme Pilon (Marie-Gervaise) : Donc,
je pense que, si on est présentement en train de battre un record d'attente, on
va devenir les champions galactiques de l'attente pour les familles, là. On ne
peut pas... On ne peut pas faire ça.
M. Gervais (Jean-Sébastien) : Et
j'aimerais aussi rajouter que, contrairement aux... précédents gouvernements,
il n'y a jamais eu de plafond en termes de réunification familiale. L'arrérage
s'est vraiment créé au cours des dernières années.
M. Morin : Ah bon? Depuis
quand exactement? Avez-vous une idée de quelle année ça s'est... ça s'est mis à
augmenter?
M. Gervais (Jean-Sébastien) : Depuis
le... Depuis le... entre autres, le... depuis 2020, depuis la COVID, mais...
• (17 h 40) •
Mme Pilon (Marie-Gervaise) : En
fait, c'est... excuse-moi, Jean-Sébastien, c'est difficile à dire parce qu'on
n'avait pas de données spécifiques au Québec jusqu'à 2023. Donc, en 2023... Il
y a toujours eu dans les milieux de parrainage conjugal un peu une impression
que le Québec était différent. Il y a toujours eu une impression que, ah! oui,
mais, au Québec, ce n'est pas pareil, ne vous fiez pas... ne vous fiez pas au
délai affiché. Il y avait toujours un peu une rumeur qui circulait, mais
c'était impossible à quantifier. On n'avait pas l'information. L'information
n'était pas divulguée par le gouvernement du Canada. Vous savez comme nous que
ça a été le choc, là, à l'été 2023, quand ça a été finalement affiché
séparément, quand ils ont commencé à distinguer les deux... les deux types de
délais de traitement. Donc, c'est là qu'on l'a su. Est-ce qu'il y a
présentement un arrérage qui va au-delà de 2022? Probablement, mais on n'est
pas en mesure de vous donner des chiffres parce que les chiffres ne sont pas
disponibles. Donc là, ce qu'on vous donne, c'est de l'information qu'on glane
en voyant ce qui se dit dans le milieu, malheureusement.
M. Gervais (Jean-Sébastien) : Et
j'aimerais rappeler aussi ce que j'ai dit durant la conférence de ce matin,
lorsque nous, nous avons déposé notre demande de parrainage, les délais étaient
autour de 13 mois, et c'est maintenant rendu 25 mois, ce n'est toujours pas
réglé. Et, avec les délais maintenant, 39 à 41 mois, on ne sait pas quand
est-ce on voir venir la fin.
M. Morin : Et quand avez-vous
déposé votre demande de parrainage?
M. Gervais (Jean-Sébastien) : En
fin octobre 2023.
M. Morin : 2023. Et donc, en
2023, c'était à peu près 13 mois, est-ce que je vous ai bien compris?
M. Gervais (Jean-Sébastien) : C'était
autour de 13 mois, oui.
M. Morin : Puis là,
aujourd'hui, en 2025, c'est combien?
M. Gervais (Jean-Sébastien) : Le
mois dernier, c'était 41 mois. En date d'aujourd'hui, on a... j'ai regardé,
c'était... c'était 39 mois.
M. Morin : Donc, l'explosion,
là, se produit entre, bien, avec ce que vous dites, grosso modo, 2023 et
aujourd'hui.
M. Gervais (Jean-Sébastien) : Qu'il
y a eu de... plus de... plus de délais. Je ne sais pas pourquoi que les délais
ont changé alors que c'était... ça devait être les mêmes que le Canada. Il y
avait un arrérage, mais ce n'était pas comptabilisé au niveau du Canada. Ça, je
ne pourrais pas vous répondre pourquoi que c'est plus long maintenant, deux ans
plus tard. Et d'ailleurs j'aimerais comprendre pourquoi c'est plus long,
pourquoi... distinction entre le Canada et le Québec.
M. Morin : Mais il y a une
chose qui est sûre, en 2023, c'est le gouvernement de la CAQ qui était au
pouvoir. Voilà.
Alors, on va continuer. Dans votre
mémoire, à la page 21, vous parlez de reprendre immédiatement l'émission des
CSQ pour le regroupement familial. Et là vous dites : «À l'inverse, la
suspension de la réception des demandes de CSQ pour le regroupement familial
des personnes citoyennes qui parrainent, annoncée en 2025, constitue une
rupture sans précédent.» Pouvez-vous nous éclairer davantage là-dessus?
Mme Pilon (Marie-Gervaise) : Bien,
c'est... très rapidement, ça ne s'est jamais fait à notre connaissance, et
c'est un... dans une certaine mesure, c'est un bris de confiance envers les...
Mme Pilon (Marie-Gervaise) : ...les
citoyens, des citoyens canadiens, des citoyennes... des citoyens québécois. Tu
vis ici, tu paies des taxes, tu votes pour des gens qui te représentent ici, à
l'Assemblée nationale, tu es en droit... On est en droit de s'attendre à ce que
nos choix de vie personnelle soient respectés. Il y a des personnes,
présentement, qui se marient à l'étranger, parce qu'ils ont trouvé l'amour à
l'étranger, c'est comme ça que ça s'est passé pour eux, qui ne savent pas
comment va se passer leur processus de parrainage parce que ces gens-là ne sont
pas en mesure de déposer une demande de CSQ. Il y a aussi des personnes qui
sont déjà en processus, qui ont un dossier complet accepté par le IRCC qui
n'ont pas reçu l'approbation du parrain, qui ne sont pas en mesure donc de
demander leur CSQ. Et, pour ces gens-là, ça crée une incertitude administrative
immense. Ils ne savent pas à quoi s'attendre. On ne sait pas ce qui va se
passer lorsque les vannes seront réouvertes en 2026 non plus. Et c'est un bris
de confiance pour les Québécois qui parrainent, définitivement.
M. Morin : Et ça, on comprend
que ça a été annoncé en 2025, donc c'est très récent comme mesure. Très bien.
Autre élément, parce que vous vous y
faites référence dans votre mémoire, les délais allongent. Avec le scénario de
2a, ils vont allonger davantage, si c'est celui-là. Parlez-moi donc de l'impact
humain et psychologique sur les gens qui ont à attendre aussi longtemps avant
d'être regroupés.
Mme Pilon (Marie-Gervaise) : Écoutez,
on a des groupes de soutien, on a des groupes de soutien psychologique. On
entend des choses très dures. Je vis avec l'angoisse quotidienne d'apprendre
qu'un de nos membres se serait enlevé la vie. C'est la réalité. Parce que, pour
ces gens-là, pour pour les gens qui parrainent... Et je me compte
extraordinairement privilégiée parce que William est avec moi aujourd'hui,
mais, si je devais l'attendre encore 41 mois, je vous garantis que je ne
serais pas aussi composée que je le suis présentement. C'est extraordinairement
difficile pour les personnes qui parrainent. On a vu des gens avoir des crises
psychotiques, on a vu des personnes menacées de s'enlever la vie. On a entendu
des choses extraordinairement dures, des enfants pleurer pour voir un parent
qu'ils n'ont pas vu très depuis très longtemps. J'ai une maman qui attend de
pouvoir revoir ses filles depuis des années maintenant, pour des raisons très
particulières. Ce sont des drames humains absolument intolérables qui sont
cachés, et les personnes qui les vivent le plus et qui les vivent les plus
intensément sont les plus vulnérables et ont peur de s'exprimer. C'est pour ça
qu'aujourd'hui c'est nous qui sommes là parce que, pour ces gens-là qui
souffrent, il n'y a pas de voie d'expression publique. C'est extrêmement
difficile.
On a fait une étude sur la santé mentale.
C'est une étude qui a été menée par le Dr David Poon, c'était la deuxième étude
qu'il faisait sur la séparation des familles. Il en avait mené une en 2020,
pendant la pandémie, à l'époque où les séparations des familles étaient
comprises par la... en raison de la pandémie, et on a observé une augmentation
extraordinaire, là, de l'anxiété et de la dépression chez les personnes. Que ce
soient, d'ailleurs, en passant, des personnes qui sont sur le territoire ou des
personnes qui attendent à l'étranger, dans les deux cas, il y avait quand même
une hausse importante des effets sur leur santé mentale. Donc, on... moi, j'ai
une très grande inquiétude pour les personnes qui parrainent au Québec en ce
moment.
M. Gervais (Jean-Sébastien) : Il
y a également aussi un impact. Une étude économique qui a été réalisée, assez
représentative, on avait quoi, 200... 200 quelques réponses. Donc,
statistiquement, c'est quand même assez important puis varié comme réponses,
mais on arrive à des conclusions que c'était en moyenne... parce que les délais
sont prolongés sur plus d'un an, il y a des impacts financiers d'au-delà de
55 000 $ par personne parrainée. Et ça s'explique par le fait que les gens
doivent voyager à chaque année deux, trois fois par année pour se revoir, pour
maintenir en relation leur couple et voir leurs enfants. C'est des assurances,
c'est des loyers parfois qui sont... vécus en double. Ça a été mon cas. J'ai
vécu 25 mois aux Philippines dans l'espoir de revenir avec Paolo. Ça n'a
pas été le cas, j'ai dû revenir pour des raisons professionnelles. Des frais de
visa, ou des pertes de salaire, ou de quitter des emplois, ou de changer
d'emploi à plus bas salaire pour pouvoir travailler à distance, c'est un autre
exemple, et il y a plein d'autres exemples aussi qui... On peut considérer les
impacts économiques, dont le fait que le conjoint qui pourrait être ici à
l'intérieur d'un an pourrait commencer dès son arrivée, mais malheureusement ce
n'est pas le cas, à contribuer au RQAP, les autres programmes du gouvernement
que nous, Québécois, payons pour la retraite et tous les autres programmes.
M. Morin : Et je comprends,
M. Gervais, que votre conjoint, vous...
M. Morin : ...attendez
toujours?
M. Gervais (Jean-Sébastien) : Oui,
depuis 25 mois que ça a été déposé, en plus d'attendre neuf mois après le
directeur de l'état civil pour faire reconnaître le mariage qu'il a eu à
l'étranger. Ça a pris neuf mois, qui étaient vraiment très longs, avant de
pouvoir déposer le... le certificat. Avoir fait les mêmes démarches en Ontario,
je... on... je ne serais même pas ici aujourd'hui.
M. Morin : Non parce que
votre conjointe serait arrivée.
M. Gervais (Jean-Sébastien) : Serait...
serait déjà arrivée l'année passée.
M. Morin : Et, d'après vos
recommandations, le gouvernement actuel pourrait changer ça, ce délai
d'attente?
M. Gervais (Jean-Sébastien) : Il
y a... Ça lui prend la... la volonté politique de le faire. Parce qu'on l'a
démontré, au travers de notre mémoire, il n'y a pas d'impact significatif. Sur
le logement, pour la plupart des couples qui ont des enfants, même que les...
au niveau des enfants, c'est 6 % des demandes des demandeurs de
regroupement familial, ce n'est même pas 600 personnes par année de...
pour libérer l'entièreté du... des personnes que ça fait plus qu'un an. Donc,
c'est 6 % d'à peu près 600... 600 enfants pour les classes régulières.
C'est très peu, sur une population de, quoi, 100 000, 150 000, bien,
peut-être même un peu plus. J'ai... Je n'ai aucune idée sur ces chiffres-là,
mais c'est vraiment très peu, à... à mon sens à moi, en termes d'impacts
scolaires.
Mme Pilon (Marie-Gervaise) : En...
En complément...
M. Morin : Oui.
Mme Pilon (Marie-Gervaise) : En
complément, on a... une de nos recommandations était de... donc de traiter... de
mettre hors... de mettre hors... hors quota les personnes qui ont attendu
pendant 12 mois et qui ont déjà le CSQ. Nos... Nous estimons que ces
personnes-là représentent à peu près 18 000 demandeurs, dont le tiers
sont déjà ici, au Québec, donc sont déjà logés, peut-être travaillent déjà,
sont déjà francisés, etc., etc. Donc, on parle au final de... donc de
12 000, là, nouvelles personnes qui arriverait, si on faisait... si on
suivait cette recommandation-là.
La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) :
En terminant.
Mme Pilon (Marie-Gervaise) : Pour
12 000 personnes, vraiment, pourquoi pas.
M. Morin : Donc, c'est une
question de volonté politique?
Une voix : Oui.
M. Morin : Voilà. Je vous
remercie.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci, M. le député. Alors, on termine avec le député de
Saint-Henri-Sainte-Anne pour quatre minutes huit secondes.
• (17 h 50) •
M. Cliche-Rivard : Merci
beaucoup pour votre présentation.
Écoutez, tantôt, on disait... le ministre
disait : On continue avec les mineurs, mais vous l'avez bien précisé quand
même, là, oui, on continue le traitement des mineurs, mais si le mineur, il est
par exemple à Cuba, avec sa mère, bien, il ne viendra pas sans sa mère, le mineur.
Il va rester à Cuba avec sa mère puis il ne verra pas son père québécois. Puis,
si l'enfant canadien, il est ici avec sa mère, par exemple, puis que son père
se retrouve au Mexique, ou au Gabon, ou ailleurs, bien, son père ne pourra pas
venir, lui. Lui, il est sujet à la suspension. Ça fait que, oui, les délais
séparent des enfants de leurs parents. C'est ça qui se passe actuellement. Ça
fait que, de le dire, c'est un fait.
Il y a 42 000 personnes qui
attendent actuellement dans l'arriéré. S'il y avait 5 800, là, le premier
scénario de choisi, ça, c'est huit ans de délai de traitement. Puis, si c'est
10 400, ça, c'est quatre ans. Quatre ans, là, Mme la Présidente, c'est
l'âge de mon garçon. Ça voudrait dire que je ne l'aurais pas vu, mon garçon. Je
n'aurais pas vécu avec lui pendant quatre ans. Ça voudrait dire que je serais
encore à attendre le jour où il va débarquer de l'avion avec sa mère.
Puis, des dossiers comme ça au bureau de
circonscription, on en a plein, on en a plein. Puis on a des dossiers de femmes
qui accouchent seules aussi, parce que leur conjoint, leur mari, bien, il ne
peut pas venir avec... avec elles. Puis, dans les premiers jours de vie de
l'enfant, bien, le père, il n'est pas là. Puis, dans les premiers mois, bien,
elle a besoin d'aide, mais il n'est pas là. Puis, dans la première année ou à
la fête d'un an, bien, il n'est pas là. Puis, au moment où l'enfant marche pour
la première fois, où il dit ses premiers mots, bien, le parent, il n'est encore
pas là.
Donc, c'est des vraies histoires, des
vrais drames qu'on entend. Puis, moi, je veux vous remercier pour votre courage
aujourd'hui. Puis c'est un dossier qui me touche particulièrement.
Moi, M. le ministre, je prends un
engagement, l'engagement de...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : ...devez vous adresser...
M. Cliche-Rivard : Bien, Mme
la Présidente, je prends un engagement pour le ministre : s'il fait un
bout de chemin pour la réunification familiale, je vais le féliciter haut et
fort puis je vais le remercier. Je pense que les Québécois et les Québécoises
s'attendent à ce que la famille soit au cœur de nos valeurs. Puis c'est ça
qu'on partage lui et moi, je suis certain, comme Québécois. Puis je... je vais
le dire sans partisanerie. Puis, si je me suis trompé sur son plan, je vais le
dire. Mais je... je nous invite sincèrement à ne pas augmenter les délais.
Quatre ans, c'est déjà abominable. J'espère vraiment qu'on va être capables de
réduire ça.
Puis je vous laisse le mot de la fin.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : ...
M. Gervais (Jean-Sébastien) : ...c'est
une enfance qui est volée.
Mme Pilon (Marie-Gervaise) : Merci
beaucoup pour ce rappel aux propos des... des enfants et particulièrement des
grossesses vécues seules. C'est important de mentionner qu'il y a aussi des
femmes qui souhaitent concevoir. Attendre quatre ans pour pouvoir concevoir, ça
veut dire qu'on ne peut plus concevoir, si on est passées un certain âge. Je
fais partie de cette catégorie de femmes qui, si elles devaient attendre encore
trois ans, ne pourraient pas concevoir. J'ajouterais que, tant que mon mari n'a
pas sa résidence permanente, nous ne pouvons pas non plus offrir un toit à un
enfant de la DPJ puisque les deux parents doivent avoir un statut permanent. Donc,
c'est aussi une opportunité manquée pour les...
Mme Pilon (Marie-Gervaise) : ...couple
plus âgé comme nous qui souhaiterait peut-être offrir un toit à un enfant.
Alors, la perche est tendue.
Je pense, Mme la Présidente, que nous
avons fait une démonstration claire qu'il y a des choses à faire pour montrer
au Québec qu'on est encore une terre non pas seulement d'accueil, parce qu'on
n'est pas en train d'accueillir des étrangers, on est en train d'accueillir des
membres de notre famille. Et quand ce sont des membres de notre famille, ils
sont déjà Québécois. Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Alors, c'est ce qui termine nos audiences
aujourd'hui. Je vous remercie pour l'apport à nos travaux. Je vous souhaite une
bonne fin de journée. On est déjà presque en début de soirée.
Alors, sur ce, je... j'ajourne jusqu'au
mardi... mardi 28, après les affaires courantes. Merci.
(Fin de la séance à 17 h 54)