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Point de presse de M. Amir Khadir, député de Mercier

Version finale

Le mercredi 6 juin 2012, 9 h 46

Salle Bernard-Lalonde (1.131), hôtel du Parlement

(Neuf heures quarante-six minutes)

M. Khadir: Bonjour, tout le monde, bon matin. Merci d'être là. D'abord, je dois préciser que je regrette un peu qu'il y ait autant de bruit alentour de mon arrestation. Je rappelle qu'on était quand même 65, hier soir, parmi lesquels un couple de retraités, de travailleurs retraités qui venaient accompagner leur fille, une autre dame qui accompagnait sa fillette de 17 ans qui est au secondaire. Je vous rappelle qu'à Québec, au cours des derniers mois, il y a eu plus de 500 arrestations. Donc, ce qui est regrettable, c'est qu'en fait toutes ces arrestations, à Québec comme dans la plupart des villes du Québec où ça s'est produit, les 2 000 manifestations, dans la très, très grande majorité des cas, ces arrestations massives sont assez abusives et se passent à peu près dans les mêmes circonstances, c'est-à-dire on arrête des gens en souricière parce qu'ils manifestent, parce qu'ils exercent leur droit démocratique.
Hier soir, moi, je suis sorti de l'Assemblée nationale vers 8 h 30, en bicyclette, vers la maison. J'ai entendu des bruits de casseroles, alors je suis allé faire un tour pour exprimer ma solidarité, comme on le fait, d'ailleurs, Françoise, moi, plusieurs centaines sinon des milliers de membres de Québec solidaire partout au Québec. Donc, je suis allé, en solidarité, marcher avec eux dans les rues de Québec et, malheureusement... une manifestation qui était vraiment, franchement, tout à fait joyeuse. Il y avait comme une atmosphère belle nuit d'été qui faisait en sorte que même des touristes nous envoyaient des mains de salutation. Ça ajoutait comme un peu de sel à ce mardi soir dans les rues du Vieux-Québec, et il n'y avait pas grand-circulation, comme vous pouvez deviner, sur la côte de la Montagne. Malheureusement, on a été pris en souricière et, malgré l'insistance de plusieurs manifestants et de moi-même de nous permettre de nous en aller, de nous disperser, ça n'a pas été possible. Alors, dans...

Mme Richer (Jocelyne): Vous savez que c'était illégal?

M. Khadir: Pardon?

Mme Richer (Jocelyne): Vous savez que c'était illégal?

M. Khadir: Je vais y revenir. Ce que je voudrais rappeler, c'est que je trouve quand même assez déplorable... J'ai entendu des gens qui pensent que ca peut être quelque chose de plaisant, que les manifestants qui se font arrêter ou moi-même prennent plaisir à le faire. Il n'y a rien de plaisant, il n'y a rien de réjouissant pour quiconque, se faire arrêter, se faire menotter, subir une situation qui, en fait, est assez humiliante.
Je vous rappelle que nous aimerions, dans notre société, qu'il n'y ait pas deux poids, deux mesures, qu'au lieu qu'on arrête des gens, qu'on les menotte pour une infraction au Code de la sécurité routière, puisque c'est de ça qu'il s'agit. On m'a dit... la police m'a dit que c'était en vertu de l'article 500.1 du Code de la sécurité routière, pas en vertu de la loi n° 78, soit dit en passant. Qu'on arrête et qu'on menotte des gens pour ça, alors qu'il y a des ministres qui rencontrent la mafia pour amasser de l'argent pour leur parti, qu'il y a d'autres ministres qui utilisent les cartes d'une firme qui cherche des permis et fraude l'Assemblée nationale, ceux-là courent toujours, alors qu'il a fallu deux ans pour assigner à comparaître et accuser finalement Tony Accurso, puis qui est sorti du palais de justice sans menottes aux mains. C'est assez regrettable qu'on subisse une telle situation d'injustice.
Et je ne jette pas le blâme sur la police. J'ai vu, dans l'autobus, des policiers excessivement courtois, avec plein d'égards envers les personnes arrêtées. J'ai vu des policiers clairement mal à l'aise avec ce qui s'était passé. Mais je regrette quand même qu'il y ait des ordres, il y a des commandes en haut de ces policiers qui se laissent instrumentaliser par un gouvernement que tout le monde reconnaît comme étant un gouvernement corrompu et illégitime. Merci de votre attention.

M. Plouffe (Robert): M. Khadir, si vous me permettez... M. Khadir...

Des voix: ...

M. Khadir: Je m'excuse, il y a une question à laquelle je vais répondre. Oui?

M. Plouffe (Robert): Bien, c'était la même...

Mme Biron (Martine): Bien, c'est la même...

M. Khadir: Oui. Très bien...

Mme Biron (Martine): ...manifestation, le saviez-vous, qu'elle était illégale?

M. Khadir: Ça vous préoccupe, n'est-ce pas...

Mme Biron (Martine): Bien sûr.

M. Khadir: ...que ça soit illégal? Ça vous préoccupe. Je comprends...

M. Plouffe (Robert): ...bien, on veut connaître...

M. Khadir: Je comprends. Je comprends que ça vous préoccupe. Mais, ce qui préoccupe le peuple du Québec aujourd'hui, c'est l'injustice de la loi n° 78 qui, en plus, n'est pas appliquée et applicable. Je vous rappelle que, oui, la manifestation était déclarée illégale. En vertu de quoi, vous pensez? En vertu de la loi n° 78. Mais nous n'avons pas été arrêtés en vertu de la loi n° 78. Comment expliquer cette contradiction? Moi, je n'ai pas de réponse.

Mme Biron (Martine):

...est-ce que vous allez contester, M. Khadir, à ce moment-là?

M. Khadir: Oui, bien sûr. Bien sûr. D'ailleurs, j'ai reçu plusieurs appels ce matin de gens qui m'appelaient, dont un médecin de Montréal, pour offrir de l'argent, 1 000 $, je crois, en appui au fonds de soutien à tous ces gens qui ont été arrêtés.

Mme Biron (Martine): C'est pour cette raison-là que vous allez contester? Parce que vous estimez qu'elle a été déclarée en vertu de la loi n° 78 et que vous n'avez pas...

M. Khadir: Bien, nous, on va simplement contester ces amendes abusives, 494 $ pour avoir marché sur la rue et avoir, j'imagine, bloqué la circulation. Parce que là, regardez, on ne parle pas de la loi n° 78, là, on parle de l'article du Code la sécurité routière. Puis là on impose à des jeunes gens de 17 ans, à des retraités, travailleurs, 494 $ d'amende.

Des voix: ...

M. Khadir: Et pendant ce temps-là... Et pendant ce temps-là, des compagnies, des firmes de génie-conseil continuent à financer les caisses du Parti libéral du Québec.

M. Duboyce (Tim): C'est combien votre constat d'infraction?

M. Khadir: Je ne l'ai pas reçu encore, mais on m'a dit que ça serait 494 $.

M. Plouffe (Robert): M. Khadir, les gens n'ont pas été arrêtés parce qu'ils exerçaient leur droit démocratique, comme vous dites, de manifester.

M. Khadir: Je pense que oui.

M. Plouffe (Robert): Ils ont été arrêtés parce qu'ils ont enfreint la loi n° 78, dans un premier temps, parce qu'ils n'ont pas donné leur trajet. Est-ce que, M. Khadir, en tant que député...

M. Khadir: Je ne pense pas, parce que, regardez, j'aurais reçu 5 000 $ d'amende, je crois.

M. Plouffe (Robert): ... en tant que député, M. Khadir, qui avez voté des lois... La semaine dernière, Mme Maltais a décidé de se retirer d'une manifestation, parce qu'elle a appris qu'elle était illégale. En tant que député de l'Assemblée nationale, vous votez des lois. N'auriez-vous pas dû, vous aussi, vous retirer, sachant que la manifestation était illégale? Et, si vous ne l'avez pas fait, pourquoi?

M. Khadir: Je le regrette pour Mme Maltais. Ce sont quand même des manifestants de son quartier, de sa circonscription. Je regrette que Mme Maltais ou les députés du PQ ne puissent pas avoir le courage d'accompagner leur peuple, d'accompagner les Québécois qui en ont ras le bol du Parti libéral. Je crois qu'une loi qui est injuste, qui a été posée... qui a été imposée pour faire avaler aux 99 % les privilèges du 1 %, hein, parce que c'est de ça qu'il s'agit, reconnaissons-le.
Il y a un gouvernement - Mme Biron, donnez-moi deux secondes - il y a un gouvernement qui est corrompu, un gouvernement qui est sous l'influence d'une élite d'affaires et qui veut absolument protéger les intérêts des banquiers, qui a aboli... pour qui il a aboli le 1 % de taxe sur le capital des entreprises financières, qui serait quand même largement suffisant. Je ne comprends pas qu'on ne le souligne pas autant dans les médias. 1 %, c'était la taxe sur le capital des entreprises, c'est 800 millions de dollars, c'est la gratuité de l'université. Ce gouvernement-là préfère protéger ces intérêts des banques, taper sur la tête de son monde et, quand ça ne suffit pas, promulguer une loi injuste, que personne n'accepte, que les observateurs internationaux disent que c'est clairement abusif. Alors, je crois que, pour un peuple, pour un député, c'est l'honneur que de se tenir debout, de ne pas accepter l'injustice et d'accepter les conséquences.

M. Salvet (Jean-Marc): M. Khadir, considérez-vous que c'est un geste de désobéissance civile que vous avez exercé hier?

M. Khadir: Effectivement, depuis le 18 mai, depuis vendredi où ça a été promulgué, des centaines de milliers de Québécois, notamment le 22 mai, rappelez-vous, des centaines de milliers de Québécois défient, font de la désobéissance civile massive, effectivement.

M. Salvet (Jean-Marc): ...vous hier?

M. Khadir: Je pense que oui. Moi, Françoise David, même M. Drainville, quand il a participé à une manifestation de casseroles, on est maintenant plusieurs personnes, des scientifiques, des professeurs, des parents, des... même, on pourrait dire, des juristes, bien sûr qui ont annoncé leur parcours, mais clairement ils remettaient en cause la légitimité de la loi n° 78.
Je pense que, collectivement, il faut le reconnaître, on ne peut plus se cacher la tête dans le sable, des centaines de milliers de Québécois, depuis trois semaines, pratiquent une désobéissance civile pacifique, massive. C'est de ça qu'il s'agit. Quand j'ai lu le texte de Gabriel Nadeau-Dubois, la chose qui a été dite puis qui lui a valu une accusation d'outrage au tribunal, c'est le genre de geste de désobéissance civile dont on parle. Aujourd'hui, là, taper du casserole et marcher dans les rues de Montréal, en vertu de la loi n° 78, c'est une faute, et des centaines de milliers de Québécois de Lachute à Saint-Lambert, Victoriaville, ici, à Québec...

Mme Biron (Martine): Ce n'est pas marcher dans la rue avec une casserole qui est la faute. C'est ne pas donner son trajet. Parce qu'il y en a qui ont marché avec des casseroles dans la rue et qui n'ont pas été incommodés par les policiers, ont même été accompagnés.
La question qui se pose, c'est: Vous avez défié la loi et vous le saviez...

M. Khadir: Je fais comme tous les citoyens, j'accompagne mon peuple. Notre peuple a décidé...

Mme Biron (Martine): Ce n'est pas tout le peuple qui marche.

M. Khadir: Oui, mais une bonne partie quand même. Je pense il y a une bonne partie de la population...

Mme Biron (Martine): Vous encouragez à ce que les citoyens défient la loi?

M. Khadir: Je fais ce que Martin Luther King aurait fait, ce que Gandhi aurait fait, ce que...

M. Plouffe (Robert): M. Khadir, n'exagérez pas, là. Comparez-vous pas à Martin Luther King, M. Khadir.

M. Khadir: Bien, oui, absolument. Ce que Marcel Pepin a fait... Non, mais je ne me compare pas, mais ce sont nos modèles. Non, non, je ne me compare pas du tout, mais c'est mon modèle, c'est-à-dire qu'à l'échelle du Québec, pour une question de droits de scolarité, un gouvernement qui impose ce genre de restrictions aux libertés fondamentales, c'est aussi grave. On est en...

M. Plouffe (Robert): Cherchez-vous à vous faire arrêter, M. Khadir?

Des voix: ...

M. Khadir: Est-ce que vous voulez... Est-ce que vous voulez qu'on parle... Est-ce que vous voulez qu'on...

M. Boivin (Mathieu): Êtes-vous en train d'essayer de ranimer un mouvement qui peut sembler être en train de s'essouffler? Avez-vous fait sciemment exprès de vous faire arrêter pour médiatiser, pour ranimer un mouvement qui peut sembler s'essouffler?
M. Khadir: Franchement, ça peut... c'est une hypothèse à laquelle je n'avais pas pensé. Honnêtement, non. Non.

Mme Dufresne (Julie): M. Khadir, est-ce que vous voulez servir d'exemple? Est-ce que...

M. Khadir: Pas du tout, parce que, si c'était le cas, je l'aurais fait bien tôt.

M. Caron (Régys): Mais quel cas faites-vous de l'autorité morale de l'institution que vous occupez, M. Khadir?

M. Khadir: Quel cas fait-on quand, collectivement, on admet qu'un gouvernement corrompu puisse promulguer une loi aussi injuste puis qu'on ne résiste pas. Moi, je suis fier de mon peuple, je suis fier des Québécois.

Mme Richer (Jocelyne): Mais vous êtes membre de ce parlement.

M. Khadir: Je suis fier des Québécois et je suis fier d'être membre d'un parlement et être capable quand même d'exercer ma liberté et mon indépendance d'esprit.

Mme Richer (Jocelyne): ...votre place au parlement.

M. Khadir: Nous avons besoin, dans nos sociétés démocratiques qui sont en déficit, où il y a une minorité qui règne avec notre indulgence trop grande, à tout le monde, moi compris, nous autres, collectivement, on a une responsabilité. On a laissé une petite poignée, 1 %, prendre le contrôle de toutes les institutions démocratiques. Et là il y a des gens qui disent: C'est assez. Parce que les casseroles, là, ce n'est pas juste le mouvement étudiant maintenant, c'est la révolte du 99 %, de ces gens qui disent: Il y en a assez, on en a marre d'une petite poignée de gens privilégiés qui veulent nous imposer leurs lois.
Et ça, on pense que c'est une responsabilité collective. C'est le temps, pour tout le monde, les médias, les parlementaires... J'appelle le PQ aussi, j'appelle Mme Agnès Maltais, Mme Marois à un peu plus de courage. Il est temps qu'on soit capables de se tenir debout, à côté de notre peuple, devant des lois injustes.

M. Robitaille (Antoine): Pensez-vous que ça va nuire à Québec à l'étranger, ça, qu'un député ait été arrêté comme ça?

M. Khadir: Ce qui nuit au Québec, c'est surtout la situation de pourrissement dans laquelle laisse le gouvernement Charest, la situation. Ce qui nuit au Québec, à sa réputation, c'est, en fait, l'image d'une république de bananes qu'on laisse un peu partout à travers le monde quand on leur offre le Grand Nord pour des miettes. Ce qui nuit au Québec, c'est un gouvernement qui trempe dans la corruption, qui a mis deux ans avant de déclencher une enquête sur la corruption dans l'industrie. C'est ça qui nuit au gouvernement du Québec.

M. Journet (Paul): M. Khadir, vous refusez d'obéir à une loi parce que vous estimez qu'elle est injuste. À partir du moment où on a ce raisonnement-là, où ça s'arrête? Est-ce que ça ne constitue pas une pente glissante? Est-ce que, là, on va commencer à désobéir à toutes les lois qu'on juge...

M. Khadir: Non. Il y a des pratiques de désobéissance civile qui sont bien comprises. Quand une désobéissance civile est pratiquée massivement par des gens de manière pacifique, non violente, puis qu'elle cible quelque chose de très précis, comme la loi n° 78, une loi excessivement injuste, c'est en vertu de toutes les expériences démocratiques des trois derniers siècles, à commencer par des parlementaires américains du temps où on combattait l'esclavage. C'est un moyen de lutte qui est légitime, qui était légitime à la disposition des peuples. Il y a...

M. Robitaille (Antoine): Est-ce que vous n'êtes pas en train de magnifier un peu votre combat, là, en faisant... en citant des exemples comme ça?

M. Khadir: Non, non. C'est... Bien, je vais vous en citer un autre: Un premier ministre d'une province australienne qui a demandé à son propre peuple de désobéir aux lois de sa propre province parce qu'une branche du Parti travailliste ne le laissait pas, dans les années soixante-dix, changer les lois antigais de sa province. Alors, de guerre lasse, il a demandé aux gens de désobéir simplement à la loi. Alors, quand...

Mme Biron (Martine): Allez-vous le refaire, monsieur... Allez-vous le refaire?

M. Khadir: Vous ne me laissez pas terminer, je m'excuse...

M. Robitaille (Antoine): Est-ce qu'il y a d'autres lois auxquels vous voudriez désobéir?

M. Khadir: Vous ne me laissez pas terminer. Parce que ce sont des exemples excessivement importants. Je ne comprends pas que vous passiez aussi vite par-dessus ces exemples. Je vous parle d'un premier ministre qui appelle sa propre population à désobéir aux lois d'une province qu'il gouverne. Là, je ne vous parle pas de Martin Luther King...

M. Plouffe (Robert): ... parce que la loi ne vous empêche pas de manifester, M. Khadir.

M. Khadir: ...puis je ne parle pas... je ne parle pas...

M. Plouffe (Robert): Vous comparez des pommes et des oranges. C'est énorme, ce que vous faites.

M. Khadir: Un instant. Bien, non. C'est une loi antigais, c'est une loi antigais... Je comprends... Bien, je...

Mme Biron (Martine): Bien, les tribunaux se sont penchés sur la question des droits des homosexuels...

M. Khadir: Oui. Mme Biron...

Mme Biron (Martine): Dans ce cas-ci, dans le cas de la loi n° 78, elle est contestée par les tribunaux.

M. Khadir: C'est votre opinion, je comprends. Mais...

Mme Biron (Martine): Non, ce n'est pas une question d'opinion. Elle est contestée par les droits...

M. Khadir: Mais il y a plus que les lois. Quand une loi est immorale, quand une loi est injuste, il y a une loi de la conscience à laquelle on doit obéir et qui est une pratique courante, depuis trois siècles, dans les démocraties et qui vous garantit, à vous et à moi, nos droits pour lesquels des gens se sont combattus.

M. Journet (Paul): Est-ce que vous allez le refaire?

M. Khadir: Je trouve assez regrettable que vous ne mettiez pas plus d'efforts pour déterrer un peu ces exemples et faire les bonnes comparaisons. Moi, je vous en offre une.

M. Plouffe (Robert): Il faut comparer des pommes avec des pommes, M. Khadir.

M. Khadir: Bien non, mais regardez, des lois antigais...

M. Plouffe (Robert): Non, non, mais... Est-ce que vous avez le droit de manifester? Oui, vous avez le droit de manifester, donner votre ordre, tu sais. Puis là vous comparez ça avec Martin Luther King, la lutte des races...

M. Khadir: C'est parce que ce n'est pas moi qui décide de l'orientation...

M. Plouffe (Robert): ...avec la lutte des homosexuels. M. Khadir, soyez proportionnel un peu aussi à vos... avec vos affirmations, là.

M. Khadir: Très bien. M. Plouffe, c'est votre opinion. Moi, je crois que c'est très comparable.

Mme Biron (Martine): La question, c'est: Allez-vous le refaire? Allez-vous le refaire?

M. Khadir: Moi, je vais participer à toutes les manifestations pacifiques, mais...

Mme Biron (Martine): Illégales ou légales?

M. Khadir: Bien, regardez, ce n'est pas moi qui décide de l'orientation du parcours des manifestations. J'encourage les manifestants, parce que ça ne dérange rien, à donner leur parcours quand c'est possible. Mais je crois qu'il est abusif pour le gouvernement d'arrêter des dizaines et des dizaines de personnes juste parce qu'ils ne donnent pas le trajet, juste parce que le gouvernement doit avoir le dessus sur le mouvement étudiant. On gaspille des millions de dollars. On gaspille une opportunité politique de déboucher sur quelque chose de plus positif. Puis on laisse surtout un gouvernement corrompu... on laisse surtout un gouvernement corrompu y échapper.

Mme Plante (Caroline): Mr. Khadir, you are an MNA, you work at the National Assembly. Don't you think that it's even more important that an MNA respect the law?

M. Khadir: No. No. The clear answer to you...

Mme Plante (Caroline): Why?

M. Khadir: No, because when a law is unjust, when a law is clearly, outrageously unlawful by the fact that it puts... it violates our fundamental rights to associate, to express our opinion - because, under the Law 78, even expressing your opinion could be unlawful - so, when a law is so unjust, it's morally just to defy it.

Mme Plante (Caroline): Are you encouraging people to defy the law, to break the law?

M. Khadir: We don't encourage people. People, hundreds of thousands of people, since three weeks, are defying the law in all the streets of Québec.

Mme Plante (Caroline): But you're a politician, you're an MNA...

M. Khadir: Of course. I'm an MNA. I respect my people's will. I don't respect an unjust law. I want to accompany my people. I am a popular MNA. I'm not at the service of institutions. I'm, first, at the service of my people. If, to serve my people, we have to change institutions and laws, that's what I'm going to work for. That's the true nature of democracy. The nature of democracy is not to protect the privileges, it's not to protect the law for the law; it's to protect the law to protect people.

Mme Montgomery (Angelica): Police has been doing these kinds of practices before Bill 78; they did it at least three times before this bill was even introduced. So do you have a problem against the Traffic Code?

M. Khadir: No, no, no. The police, when it did it, it did it in an unlawful manner. Because it happened to me in 2003, we went to court and I won, so what was done by the police was illegal. Actually, what was done by the police yesterday was illegal too.

M. Duboyce (Tim): What is your endgame when you choose to take part in a demonstration that authorities are going to consider illegal? What is the goal that you have?

M. Khadir: The name of my party is Québec solidaire. We work in solidarity and in close connection with people, with social movements, with civil right movements, with civil society. My loyalty is not to institutions, to the status quo, to the actual powers in place; my loyalty is to my people. So, if, for protecting people's rights, I have to defy the law or change the law... Actually, everybody, in every country, democratic countries, before changing very bad laws, they had to defy it first. So it's the true nature of democracy, to bring changes, sometimes by even defying laws. Don't put that in question. We have to do our history, we have to go back to see the American Revolution, we have to go to see... back the fight for civil rights in the United States, we have to go back to see the struggles we made in Québec for union rights, OK? Today, these are rights that protect our people, but, in those times, people... 4 million people defied these laws, even Tommy Douglas defied laws.

Mme Montgomery (Angelica): And others, a lot of Anglophones in Québec that have defied Bill 101 because they find the sign law unjust. I guess you support them.

M. Khadir: You know, I might not agree on that point, but I support the idea that when people find a law really unjust and can have popular support - because civil disobedience is only legitimate when it's massive and practiced by large portions of population - if they have a good fundamental right issue, it's their right. Even if Québec solidaire was in power, I recognize the right of the opposition, of people, when they judge that we have abused of our power, to defy it.

Mme Plante (Caroline): Essentially, what you are telling Quebeckers today is: When you find a law unjust or immoral, go out and break it.

M. Khadir: Is that what I said to you?

Mme Plante (Caroline): Well, that's what I understand that you are saying.

M. Khadir: Well, I'm sorry because you insist by saying that it could be to any law. No, there are criteria. You cannot defy a law just because of your own personal interest; it's only when you do something for the common good, for the common well-being. That's when, for example, you defend fundamental rights for people. If a person wants to defy law just to not pay its due to tax, OK? Not pay its tax on revenues, that's completely immoral, and nobody can support that. If somebody wants to defy that, just to go faster than the traffic because, you know, he has a big car and wants to... No! that's unjust. If somebody defies the law on lobbyism, like engineering firms do it everyday, and even the Commissioner cannot do anything, that's very morally unjust. So...

Mme Plante (Caroline): But, it's very subjective. Why...

M. Khadir: You want to...

Mme Plante (Caroline): ...it could be... No, but... no, but...

M. Khadir: You ask me a question, «What...»

Mme Plante (Caroline): It could be very subjective.

Mme Montgomery (Angelica): What about abortion?

M. Khadir: I'm sorry, no, it's not subjective at all. There are criteria. I can send you the criteria, there are very definite criteria. And the... you know, the main point in that criterion, is that it's morally just to defy laws, to do civil disobedience if it's non violent and if it is to protect common good. Common good. To have contracts, unlawful contracts or contracts without bid for the Government for your own business interest, to defy law for that, that's immoral. OK?

M. Robitaille (Antoine): Avouez que vous êtes sur une pente glissante, quand même, non?

M. Khadir: Not at all. Civil disobedience is a very important tool in the hands of people since three centuries at least to improve democracy.

M. Robitaille (Antoine): Est-ce que ceux qui sont pour l'avortement, par exemple, pourraient... Ah Maya, excusez-moi.

Mme Johnson (Maya): M. Khadir...

M. Khadir: Ceux qui sont pour l'avortement... Ils commettent des actes criminels. Ceux qui sont contre l'avortement commettent des actes criminels, exercent de la violence contre des médecins, les tuent même. Ce n'est pas la même chose.

M. Boivin (Simon): S'ils jugent que c'est pour le bien commun?

Journaliste: Oui. S'ils jugent que c'est pour le bien commun?

M. Khadir: Bien, ils peuvent défier des lois, j'imagine, mais ça, moi, je ne participerais pas à celle-là. Regardez, ce n'est pas un choix qu'on fait en vertu uniquement de ses opinions. On reconnaît la légitimité d'une approche qui consisterait à évoquer des droits fondamentaux ou des droits de base pour une population. Quand c'est le cas, moi, je ne vois pas d'objection morale à ça.
Je trouve tout à fait immoral, par contre, pour un gouvernement de tolérer qu'on brise ses lois constamment comme la mafia le fait dans le financement du Parti libéral, comme les firmes de génie-conseil le font dans le financement du Parti libéral, comme des ministres le font en violant les règles de l'Assemblée nationale. Ça, c'est immoral.

Journaliste: Peut-être une dernière... Ah, vas-y, Maya, excuse-moi.

Mme Johnson (Maya): OK. Quite frankly, Mr. Khadir, some people would, at best, find your comparison to what Martin Luther King would have done a stretch, at worst, just downright insulting. How can you justify that kind of a comment in this context?

M. Khadir: Martin Luther King or Mohandes Ghandi are figures of respect from which - comment on dit ça, nous... - inspire us. When we reflect about an issue in society, we name them because we want to see what would they do in these circumstances. That's why I named them. I don't say the situation is comparable. You don't need even them; just think about Quebec, forty years ago: prominent union figures defied the law, went into prison. Defied the law. They disobeyed a law. They went into prison because they thought the rights of workers, the minimum wage that they requested was more important than an unjust law that wanted just to bring them back to work, that they had the right to go on strike.
So, sometimes, important... And we have examples just all around us. In New Zealand... not in New Zealand, in Australia, the Prime Minister in the seventies even asked his own people to defy his own law, because he wasn't able to convince his own party to change antigay laws. So he asked his people: «Don't obey to my own law». And it's not very, you know... it's not like the civil rights movement, it's not, you know, very - how do you say it - it was just concerning a minority in his country, OK? It was the right of just a minority, but he found it sufficiently important, because it was a conscience issue that he thought he had to defy his own law.
So I think it's very acceptable that people in the streets defy the law and don't accept to obey to Bill 78, because they think the government doesn't have the right to deprive them from their fundamental rights of expression, of freedom of speech.

Mme Johnson (Maya): Have we lost sight...

M. Khadir: Is that more clear? Is that more clear?

Mme Johnson (Maya): I listen what you are saying, but have we lost sight...

M. Khadir: Because, you know, I understand that you want to make me say that what happens here in Quebec is the same thing as... that what I have said, that what happens here is the same thing as in South Africa or in the United States. No, it's not the same, but, by our own standards, by the expectations of the 21st century, in a democratic society like ours, which is not the backward, you know, society of the United States in the sixties, which was considering Blacks as, you know, second-class citizens; we are in 21st century in Quebec. We should have more... higher democratic expectations. By these expectations, Law 78 is very bad, is very unacceptable, as unacceptable as the segregation of Blacks was in the sixties in the United States. You understand me? So, everything is relative, but we have to inspire from inspiring figures. So, I think it's right for now, for you, for me to clarify our situation by taking example with Martin Luther King, with Gandhi, with Nelson Mandela, with Marcel Pepin.

Le Modérateur: Une dernière, non? Paul Journet.

M. Journet (Paul): Bien, moi, j'en ai une dernière. En vertu des critères que vous nous avez donnés, M. Khadir, vous dites qu'il faut... la désobéissance civile, il faut que ce soit pour le bien commun, pas pour des intérêts individuels, aussi une action sans violence. Je vais vous soumettre un cas de figure, là, qui peut peut-être, là - corrigez-moi si je me trompe - illustrer les difficultés d'encadrer ça, par exemple, l'affichage en anglais... unilingue anglophone. La communauté anglophone pourrait dire, à Montréal, qu'elle défend sa liberté d'expression et de vivre dans sa propre langue et désobéir à la Loi 101. Est-ce que, donc, on n'ouvre pas une porte... Est-ce qu'on n'entre pas sur une pente glissante avec ce genre de critères là?

M. Khadir: Je comprends qu'on ait peur des pentes glissantes, mais je pense qu'on glisse déjà beaucoup dans d'autres pentes qui sont très, très graves puis pour lesquelles on n'a pas de réponse. Je pense...

M. Robitaille (Antoine): Pourquoi s'en ajouter une?

M. Khadir: Mais, non... Mais, ça, c'est parce que celle-là est vraiment un peu inventée, là, hein? Les gens ne sont pas dans la rue, là, il n'y a pas... Le drame que vit le Québec, c'est le mouvement étudiant, là, hein? La situation dramatique que vit le Québec, c'est que des étudiants disent: On veut qu'on reconnaisse notre droit d'association, notre droit de faire la grève, nos droits démocratiques, puis le gouvernement, par une loi spéciale, veut nous les enlever. Ça, ce sont des droits fondamentaux.
Pour ce qui est de ce que vous dites, c'est plutôt de l'ordre d'un droit commercial, ils veulent afficher. On ne veut pas empêcher, au Québec, personne de parler, ce n'est pas un droit fondamental que ça, d'afficher, à ma connaissance, dans les sociétés démocratiques, c'est un droit commercial. C'est de l'ordre de l'intérêt des commerces, hein? C'est, je ne sais pas, moi, la «big business» qui veut garder son nom, Pier 1 Imports, ou Home Depot, d'accord? Ça, je trouve que c'est une... c'est la pente glissante, je dirais, de nos comparaisons, ce n'est pas la pente glissante de la réalité. La réalité est qu'il y a des droits fondamentaux puis il y a des droits qui sont commerciaux, des droits très, très, très secondaires.

M. Robitaille (Antoine): La Cour suprême a déterminé, dans l'arrêt Ford, que c'était un droit fondamental, l'affichage commercial en anglais. C'est pour ça qu'elle a considéré comme ultra vires certaines parties de la Loi 101.

M. Khadir: Oui. Bien, il y a des opinions variées là-dessus. Mais, je reviens là-dessus, là, quand, dans une société, globalement, vous aurez, sur ce sujet-là, le même, je dirais, le même unanimisme, quant au caractère abusif, mettons, de la langue... des lois de l'affichage, je serai d'accord avec vous. On n'a pas ça. Par contre, sur la loi n° 78, on a une unanimité - les juristes, des experts internationaux, des gens de la société civile, des historiens, des intellectuels - que cette loi-là n'a juste pas d'allure. Alors, ce n'est pas la même chose. On se comprend que ce n'est pas la même chose.

M. Robitaille (Antoine): Prévoyez-vous que les tribunaux vont considérer que... inique?

M. Khadir: Je ne parle pas des sondages, je parle d'une opinion très forte. Les sondages, ils ne sont pas fiables, là-dessus, là, hein? Les sondages vont utiliser un événement très violent, comme la manifestation qui est arrivée le soir de la loi, puis là, en plein milieu de ça, on demande aux gens: Voulez-vous l'ordre ou voulez-vous le chaos? Tu sais. Bon, alors, s'il vous plaît, là, on passera sur les sondages.
Par contre, quand les gens réfléchissent puis écrivent leurs idées sur des papiers, puis on soumet ça, on voit une unanimité se dégager en société à l'effet que la loi n° 78 est abusive et entrave des libertés fondamentales.

M. Robitaille (Antoine): Donc, les tribunaux vont dire comme vous, selon vous?

M. Khadir: Je pense que oui.

M. Robitaille (Antoine): Parce qu'il y a... la requête en sursis, là, c'est mercredi prochain?

M. Khadir: Je pense que oui. Je pense... Mon intuition, c'est: oui, je l'espère. Évidemment, je ne peux pas juger à la place des tribunaux.

Une voix: C'est un intéressant débat.

(Fin à 10 h 16)

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