Journal des débats de la Commission des finances publiques
Version préliminaire
42e législature, 1re session
(27 novembre 2018 au 13 octobre 2021)
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Le
mardi 27 octobre 2020
-
Vol. 45 N° 78
Consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 66, Loi concernant l’accélération de certains projets d’infrastructure
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10 h (version non révisée)
(Dix heures six minutes)
Le Président (M. Simard) :
Bien, chers collègues, à l'ordre, s'il vous plaît! Je constate que nous avons
quorum. Je vous souhaite un bon matin, un bon début de semaine. Heureux de vous
retrouver.
Donc, nous sommes réunis afin de poursuivre
les auditions publiques sur le projet de loi n° 66, Loi concernant
l'accélération de certains projets d'infrastructure.
Mme la secrétaire, bonjour. Dites-moi, y
a-t-il des remplacements ce matin?
La Secrétaire
:
...Alors, M. Asselin (Vanier-Les Rivières) est remplacé par M. Lamothe
(Ungava); M. Chassin (Saint-Jérôme) est remplacé par M. Girard
(Lac-Saint-Jean); Monsieur... Mme Melançon — pardon — (Verdun)
est remplacée par M. Arcand (Mont-Royal—Outremont) et M. Ouellet
(René-Lévesque) est remplacé par M. Gaudreault (Jonquière).
Le Président (M. Simard) :
Alors, bienvenue à ces nouveaux collègues. Y a-t-il également des votes par
procuration que vous voulez nous signifier?
La Secrétaire
: Oui.
Alors, M. le député... M. Thouin
(Rousseau) — pardon — dispose d'un vote... d'un droit de
vote par procuration au nom de M. Reid (Beauharnois) et M. Barrette
(La Pinière) dispose d'un vote... d'un droit de vote par procuration pour M. Fortin
(Pontiac).
Le Président (M. Simard) :
Très bien. Merci. Alors, nous débutons nos travaux par l'audition de la Corporation
des entrepreneurs généraux du Québec. Alors, Mme Robitaille et
M. Côté, soyez les bienvenus parmi nous. Vous savez que vous disposez
d'une période de 10 minutes pour faire votre présentation, mais
auriez-vous d'abord l'amabilité de vous présenter, s'il vous plaît?
Mme Robitaille (Mélissa) :
Bonjour. Mélissa Robitaille, je suis présidente du conseil d'administration de
la Corporation des entrepreneurs généraux. Je suis aussi coprésidente et directrice
générale de l'entreprise Syscomax.
M. Côté (Eric) : Et Éric Côté,
je suis président-directeur général de la Corporation des entrepreneurs
généraux du Québec.
Le Président (M. Simard) :
Alors, nous vous écoutons.
Mme Robitaille (Mélissa) : Donc,
merci beaucoup, M. le Président. La Corporation des entrepreneurs généraux a
été fondée en 1996. Elle représente maintenant plus de 85 % des
entrepreneurs généraux du Québec. C'est le seul organisme voué exclusivement à
la promotion des intérêts collectifs et des droits des entrepreneurs généraux
oeuvrant principalement dans le secteur ICI, institutionnel, commercial et
industriel. À la fois lieu de rencontre et d'échange pour les entrepreneurs, la
CEGQ se distingue par sa vision patronale éclairée, son approche proactive, de
même que par son discours entièrement ciblé sur les problématiques affectant
directement les intérêts... de ses membres. La mission de la CEGQ consiste
également à promouvoir activement le rôle déterminant que joue l'entrepreneur
général dans l'industrie de la construction. La CEGQ est très près de ses
membres. Elle a fait plus une vingtaine de rencontres consultatives auprès de
ces derniers au cours des six derniers mois. Ces rencontres ont largement
contribué à...
Mme Robitaille (Mélissa) : …la
misson de la CEGQ consiste également à promouvoir activement le rôle
déterminant que joue l'entrepreneur général dans l'industrie de la
construction. La CEGQ est très près de ses membres, elle a fait une vingtaine
de rencontres consultatives auprès de ces derniers au cours des six derniers
mois. Ces rencontres ont largement contribué à l'élaboration des présentes
recommandations. Au total, plus de 500 entrepreneurs généraux y ont
participé.
Je laisse maintenant le soin à
M. Côté de poursuivre la présentation.
• (10 h 10) •
M. Côté (Eric) : Merci, Mme
Robitaille. M. le Président, le 10 avril dernier, la CEGQ était invitée, à
l'instar de d'autres acteurs de l'industrie de la construction, à participer au
comité interministériel pour la relance afin de partager ses observations
concernant la relance de l'économie du Québec. Nous avons alors identifié des
pistes de solution qui sont à mettre en place et qui se retrouvent dans notre
mémoire en détail.
Plusieurs de nos propositions ont trouvé
leur place dans les décrets ministériels, dans les communiqués, les annonces
gouvernementales et enfin, très heureusement, dans le projet de loi n° 66.
La CEGQ salue les efforts du gouvernement visant à relancer l'économie du
Québec et les moyens utilisés pour y arriver. Et la corporation accueille donc
favorablement le projet de loi n° 66. Toutefois, cette reprise a apporté
son lot d'incertitude sur lequel le gouvernement, nous considérons, doit
s'attarder. La CEGQ souhaite aussi faire part de ses observations à l'égard de
certains éléments contenus dans le projet de loi n° 66 qui touchent
spécifiquement les entrepreneurs généraux qui sont les soumissionnaires en
matière de contrats publics.
Le CEGQ estime que le projet de loi
n° 66 est une opportunité pour le gouvernement de terminer la mise en
application de certaines recommandations de la commission Charbonneau,
notamment la recommandation n° 15 portant sur les délais de paiement. La CEGQ,
peut-être que vous ne le savez pas, a eu le privilège d'accompagner les entrepreneurs
généraux qui participaient au projet pilote par l'entremise d'un comité de
suivi, qui s'est réuni mensuellement depuis maintenant 22 mois. C'est plus
de 15 entreprises du secteur, dans le secteur du bâtiment, qui ont fait un
rapport mensuellement de l'évolution des projets soumis à l'arrêté ministériel.
Les commentaires reçus des entrepreneurs…
au projet pilote sont très positifs. Le calendrier de paiement est bien
respecté et fort apprécié. Au cours de la dernière semaine, la CEGQ a même
effectué un sondage à la toute dernière minute pour vérifier cela, et la
majorité d'entre eux se sont dits satisfaits du calendrier de paiement. De
plus, toujours selon ce sondage, l'ensemble des entrepreneurs souhaitent
ardemment une loi contre les retards de paiement qui serait applicable… à
l'ensemble des contrats publics.
Nous nous permettons de mentionner que la
CEGQ a aussi… un autre sondage durant la pandémie, au mois de mai, en pleine
pandémie donc. Et, à ce moment-là, sur l'ensemble de tous nos membres,
54 % des entrepreneurs nous ont indiqué qu'ils avaient subi des retards de
paiement à cause de la pandémie. Toutefois, fait à noter, les entrepreneurs qui
participaient au projet pilote, eux, n'ont subi aucun retard de paiement durant
cette période. C'est donc dire que le projet pilote fonctionne même en
situation de pandémie.
La CEGQ appuie donc sans réserve les
recommandations qu'elle a contribué directement… la Coalition contre les
retards de paiement dont nous sommes un des membres fondateurs. Par ailleurs,
considérant, dans le cadre du projet de loi n° 66, que le gouvernement
octroie des pouvoirs de surveillance à l'Autorité des marchés publics en
matière de contrats publics, la CEGQ souhaiterait que le gouvernement surveille
ses sous-contrats dans leur ensemble et, par la même occasion, termine…
M. Côté (Eric) : …qu'elle a
contribué directement, la Coalition contre les retards de paiement dont nous
sommes un des membres fondateurs. Par ailleurs, considérant dans le cadre du projet
de loi n° 66, le gouvernement octroie des pouvoirs de surveillance à l'Autorité
des marchés publics en matière de sous-contrats publics. La CEGQ souhaiterait
que le gouvernement surveille ces sous-contrats dans leur ensemble et, par la même
occasion, termine la mise en oeuvre de la recommandation n° 1.2
de la commission Charbonneau, portant sur l'encadrement du Bureau des
soumissions déposées du Québec par l'Autorité des marchés publics.
À cet égard de cette
recommandation, la commission Charbonneau a indiqué, à la page 98 de son
rapport : «De même, en ce qui a trait aux entrepreneurs spécialisés, la
commission estime que l'AMP devrait pouvoir imposer des règles de
fonctionnement au BSDQ et assurer une vigie continue des échanges entre les
diverses parties prenantes.»
Je continue de citer le
rapport : «Un certain nombre de phénomènes de collusion ont été
effectivement constatés dans ces domaines, et sans affirmer qu'ils sont plus
importants qu'ailleurs, il importe pour la commission qu'ils puissent être
opérés et combattus.» Fin de la citation.
Ces phénomènes de collusion sont malheureusement
toujours présents en 2020, tel qu'en témoigne une décision de la Cour d'appel
rendue le 17 mars dernier, Maçonnerie Rocherfort c. Pomerleau, une décision qui
a été rendue donc en mars dernier, qui évoque une situation très claire, je
vous invite à en prendre connaissance du jugement… dans notre mémoire.
À l'automne 2016, et dans un contexte pour
expliquer un peu la situation, à l'automne 2016, le gouvernement a déposé le projet
de loi n° 108 créant l'Autorité des marchés publics. Toutefois, le parti
sur le BSDQ avait été écarté à ce moment-là. Le gouvernement avait plutôt
choisi de confier à un comité de suivi composé de quatre ministères, le Conseil
du trésor, le ministère du Travail, le ministère des Affaires municipales et la
Société québécoise des infrastructures, de lui faire des recommandations quant
à l'encadrement du Bureau des soumissions déposées du Québec.
Quatre ans plus tard, malheureusement, le
fruit du travail de ce comité, qui s'est réuni à plus de 16 occasions, n'a
toujours pas été rendu public, malgré le fait que la problématique soulevée par
la commission Charbonneau demeure en 2020. Le rapport, dont le ministère des
Affaires municipales nous a quand même remis copie, et que vous allez… et que
nous avons joint à notre mémoire, pour que vous puissiez en prendre
connaissance, indique qu'il faut exercer un encadrement au Bureau des
soumissions déposées et qu'il faut… je vous laisse prendre connaissance des
nombreuses et des neuf recommandations qui sont à cet effet-là.
Le rapport recommande notamment que les
activités et la gouvernance du BSDQ doivent faire l'objet d'une amélioration de
manière à rapprocher le système du BSDQ des principes et des cadres normatifs
des contrats publics avec… pour le rendre plus équitable à l'égard de toutes
les parties d'impliquées. Bientôt cinq ans se sont écoulés depuis le rapport de
la commission Charbonneau sans que rien n'ait eu de développement dans ce
dossier.
Nous croyons qu'il est indispensable
d'abolir la collusion au sein de notre industrie et nous avons pris la liberté
de joindre le rapport, vous pourrez en prendre connaissance. Il y a donc une
volonté de la part du gouvernement de légiférer en matière de sous-contrats
publics. La CEGQ souhaite que le gouvernement saisisse l'opportunité et
complète la mise en oeuvre de cette recommandation de la commission
Charbonneau, en soumettant l'entièreté de l'encadrement du BSDQ à l'AMP. Dans
une autre perspective plus globale, nous souhaitons que le gouvernement… nous
aurions apprécié que le gouvernement ait une réflexion un peu plus large sur la
Loi sur les contrats et organismes publics qui a, bientôt, son…
M. Côté (Eric) : …l'entièreté
de l'encadrement du BSDQ à l'AMP.
Dans une autre perspective plus globale,
nous souhaitons que le gouvernement… nous aurions apprécié que le gouvernement
ait une réflexion un peu plus large sur la Loi sur les contrats des organismes
publics, qui a bientôt son 12e anniversaire. Une réflexion devrait avoir
lieu sur la LCOP et ses règlements, qui ont pris, malgré tout, beaucoup d'âge,
si on peut dire ainsi.
La CEGQ tient à manifester son intérêt
dans cette question. Nous avons d'ailleurs soumis plusieurs cas à l'Autorité
des marchés publics à cet effet, des situations où, notamment, l'annexe VI
du règlement, tous les changements qui étaient apportés aux contrats ont
apporté des situations où les donneurs d'ouvrage faisaient une interprétation
abusive du règlement en des faveurs des entrepreneurs, et cette situation a été
clairement déposée il y a maintenant 18 mois à l'Autorité des marchés
publics. Depuis, rien n'a été fait.
Nous avons une préoccupation aussi au
niveau du développement régional. La CEGQ est favorable, évidemment, à
l'accélération des investissements. Toutefois, nous avons une certaine
préoccupation quant au regroupement de plusieurs projets. Nous avons
l'impression que ce regroupement va défavoriser des entreprises de taille
moyenne, qui pourraient normalement réaliser ces projets s'ils n'étaient pas
regroupés. Et cela entre en contradiction avec la politique de Passeport
Entreprises, qui a été… déposée dans le passé, et nous souhaitons donc de
s'assurer que si on fait la relance économique avec ces projets-là, qu'elle
puisse contribuer à la plus grande majorité d'entrepreneurs, pas seulement un
petit nombre.
En conclusion, la CEGQ souhaite que ses
propositions trouvent donc place dans le projet de loi n° 66 et nous
espérons aussi que nous allons profiter de cette occasion pour enfin appliquer
deux dernières recommandations de la commission Charbonneau qui n'ont toujours
pas trouvé leur place au sein de la législation québécoise. Merci.
Le Président (M. Simard) :
Merci à vous, M. Côté. Nous débutons par une intervention de la présidente
du Conseil du trésor. Madame, vous disposez de 16 minutes.
Mme LeBel : Merci, M. le
Président. Merci, M. Côté, pour cette présentation, c'est fort apprécié.
Il y a beaucoup de vos recommandations, je vais le dire d'entrée de jeu, qui
sont en dehors de la portée du projet de loi n° 66, mais qui sont
extrêmement intéressantes et pertinentes pour une réflexion beaucoup plus
globale, là, dont celles sur la révision de la loi sur les contrats publics,
qui est… cette réflexion-là qui est en cours, je vous le dis, et qui est très
importante pour moi, là, vous vous en douterez.
Il y a, donc, il y a… J'aurais peut-être
quelques petites questions par rapport à la question du BSDQ, puis après ça, on
pourrait peut-être aborder le projet pilote sur les retards de paiement, qui
sont peut-être plus au coeur de ce qu'on propose dans le projet de loi n° 66,
compte tenu qu'il y a une mesure pour appliquer, là, et je mettrai peut-être
quelques faits en place pour bien cadrer notre discussion, si vous le
permettez.
Au niveau du BSDQ, c'est… bon,
naturellement le Bureau des soumissions déposées du Québec est sous la
responsabilité du MAMH, vous l'avez souligné. Vous avez joint le rapport.
Est-ce que… J'ai cherché, rapidement, puis peut-être qu'il m'a échappé. Ce
rapport-là a été…
Mme LeBel : ...et je mettrai peut-être
quelques faits en place pour bien cadrer notre discussion, si vous le permettez.
Au niveau du BSDQ, c'est... bon, naturellement
le Bureau des soumissions déposées du Québec est sous la responsabilité du
MAMH, vous l'avez souligné. Vous avez joint le rapport. Est-ce que... J'ai
cherché, rapidement, puis peut-être qu'il m'a échappé. Ce rapport-là a été
mis... a été commandé par le gouvernement précédent lors de la mise en place de
l'AMP? Juste me redonner un petit peu l'historique de ce rapport-là de ce
comité-là.
M. Côté (Eric) : Oui. Lors de l'étude
détaillée du projet de loi n° 108, le gouvernement,
en 2016, avait annoncé le projet de loi et avait évité le... enlevé le BSDQ... projet
de loi n° 108, et on avait déféré à un comité, justement,
qui était composé... donc, en 2016. Ce rapport-là, selon nos estimations,
aurait été déposé, remis au gouvernement à l'automne 2017 et aurait été remis,
donc, à ce moment-là, à la ministre responsable de la Régie du bâtiment. Et malheureusement
on nous a confirmé que ce rapport-là avait été déposé, mais ce n'est qu'au mois
de janvier... au mois de décembre dernier, donc, avec le nouveau gouvernement,
qu'on a eu copie du rapport, mais qu'on nous a promis sa mise en application.
Malheureusement, depuis ce temps-là, rien ne semble avoir été fait de ce
côté-là. On nous a promis une place au comité de suivi, malheureusement, nous
attendons toujours la convocation de ce comité permanent.
Donc, on voit d'une bonne chose que le
gouvernement s'intéresse au contrat, parce que c'est exactement là où le bât
blesse, à notre avis.
Mme LeBel : Oui,
effectivement, vous l'avez mentionné, ça faisait également l'objet d'une
recommandation, là. Donc, ce que je comprends bien, c'est que vous avez...
selon vos informations, ce rapport-là, ce serait... aurait été, bon, déposé ou
terminé en 2017, vous en avez eu copie en décembre 2019, si je comprends bien.
Et depuis ce temps-là, est-ce que vous savez si le comité s'est réuni? Écoutez,
je m'excuse, ce n'est pas dans mes responsabilités immédiates, donc je ne suis
pas informée, mais vous ne savez pas si le comité s'est réuni? Il y a eu la
pandémie, depuis, là.
• (10 h 20) •
M. Côté (Eric) : Oui. Bien, le
comité devait débuter ses travaux en février et il devait y avoir des
représentants du Conseil du trésor, des Affaires municipales, de la société
québécoise... et du travail. Malheureusement, ce comité-là, peut-être à cause
de la pandémie, n'a pas été convoqué. Mais on fait des demandes aux Affaires
municipales à savoir qu'est-ce qui arrive de ce côté-là, et on semble
comprendre que les parties ne sont pas intéressées à débuter les travaux. Ça
fait quand même bientôt un an qu'on attend que ça débute, ces travaux-là, pour
qu'on puisse voir à la chose.
Le rapport explique quand même que les
entrepreneurs généraux ne sont pas bien représentés dans les instances
actuelles du BSDQ. Donc, nous, on souhaite ardemment d'être mieux représentés
et de pouvoir, à l'CEGQ... de participer à ces travaux-là de cet organisme, qui
est privé mais qui a un impact important sur les contrats publics.
Mme LeBel : O.K. Bien, merci.
Je vais faire, de mon côté, les vérifications, parce que... vu que le Trésor
devait être impliqué dans cette démarche-là, et faire le suivi approprié, puis
je vais prendre connaissance du rapport. Je ne vous cacherai pas que je ne
l'avais pas lu, là. Donc, je vais prendre la portion du rapport par rapport au
BSDQ, donc, je vais en prendre connaissance. Et c'est fort intéressant, vos
commentaires.
Je vais peut-être aller peut-être plus
précisément maintenant sur le projet pilote, entre autres sur les retards de
paiement, parce qu'on a effectivement, dans le cadre du projet de loi n° 66, élargi le projet pilote. Je vais tout de suite vous
rassurer, on a... un groupe précédent nous a fait le même...
Mme LeBel : ...donc je
vais en prendre connaissance. Et c'est fort intéressant, vos commentaires. Je
vais peut-être aller peut-être plus précisément maintenant sur le projet pilote,
entre autres sur les retards de paiement parce qu'on a effectivement, dans le
cadre du projet de loi n° 66, élargi le projet
pilote. Je vais tout de suite vous rassurer, on a... un groupe précédent nous a
fait le même commentaire. Ce n'est pas l'intention. Je ne vois pas, dans la
rédaction de l'article 66 — c'est un peu mêlant, là,
l'article 66 du projet de loi n° 66 — mais le fait qu'on
prolonge le projet pilote. Ce n'est pas l'objectif.
Le projet pilote, c'est 52 projets,
je pense, à l'origine — je m'excuse — 52 projets à
l'origine. Ces 52 projets là se poursuivent selon le projet pilote de
trois ans qui doit se terminer l'année prochaine, l'été prochain. Et suite aux
résultats et conclusions de ce projet pilote là, les démarches pour la mise en
oeuvre de façon permanente, si on veut, de ces processus, je pense que c'est un
calendrier de paiements et un système de règlement des différends.
M. Côté (Eric) :
Exactement.
Mme LeBel : C'est ça.
M. Côté (Eric) : Oui.
Mme LeBel : Sera
enclenché. Ce que fait le projet de loi par contre, c'est qu'il vient étendre
la portée du projet pilote pour quelques projets de la liste des 181, et ces
projets-là qui ont le droit... qui peuvent utiliser pendant cinq ans, là. Donc,
c'est tout simplement pour remettre... un peu recadrer. Je comprends... et je
comprenais la réaction de votre collègue précédent qui a témoigné, disant qu'on
avait l'air d'étendre par la bande un projet pilote qui devait se terminer.
Mais ce n'est pas le cas, je vous rassure. Et on va s'assurer que, dans la
rédaction de l'article... je pense qu'il est correct comme il est là, mais on va
quand même refaire un tour de piste pour s'assurer que la rédaction de
l'article tel que proposé ne pose pas cette ambiguïté-là et ne vient pas
affecter le projet pilote d'origine. Donc, je voulais simplement recadrer.
Ceci étant dit, vous faites partie de la
Coalition sur les retards de paiement, vous nous l'avez dit.
M. Côté (Eric) : Oui.
Mme LeBel : D'ailleurs,
c'est la coalition qui nous avait mentionné ce fait-là pour les cinq ans. Donc,
est-ce que vous avez participé un peu... sans participer à l'élaboration, mais
est-ce que vous avez participé à la consultation qui a mené à la mise en place
du projet pilote en 2018?
M. Côté (Eric) : On a
participé, la CEGQ, à la rédaction de l'arrêté ministériel.
Mme LeBel : O.K.
M. Côté (Eric) : Avec le
ministre d'alors, on a rédigé ça. Oon était dans... on l'avait même nous-mêmes recommandé
dans notre mémoire à la commission Charbonneau. Et la Corporation des
entrepreneurs généraux. On est aussi impliqué au niveau canadien avec l'ensemble
des provinces avec l'Alliance des entrepreneurs généraux du Canada. Donc, on
fait une vigie de toutes les législations sur les retards de paiement qui ont
lieu au Canada. Donc, on a participé au comité du gouvernement du Canada qui
est en train d'adopter sa propre loi. Donc, on y voit... on y voit clairement
un avantage de faire cette chose-là. Notre préoccupation, c'est qu'alors
l'Alberta a déposé une loi la semaine passée et que la Colombie-Britannique
vient d'annoncer qu'elle allait le faire, on s'inquiète que le gouvernement du
Québec soit dans la tête... pas dans la tête du peloton, mais plutôt dans la
queue du peloton par rapport à ça et ça nous préoccupe parce que les gens qui
ont fait les projets pilotes, on leur a parlé à tous les mois.
Contrairement à d'autres organismes, là,
nous, on a mis en place quelque chose pour leur parler, pour vérifier avec eux
la situation, et tous les gens ont apprécié. Donc, à notre avis, il y a moins
de conflits, la relation avec le donneur d'ouvrage est simplifiée. Les
relations avec les sous-traitants sont plus claires, donc il y a une meilleure
collaboration sur les chantiers...
M. Côté (Eric) : ...on leur a
parlé à tous les mois. Contrairement à d'autres organismes, là, nous, on a mis
en place quelque chose pour leur parler, pour vérifier avec eux la situation,
et tous les gens ont apprécié. Donc, à notre avis, il y a moins de conflits, la
relation avec le donneur d'ouvrage est simplifiée, les relations avec les
sous-traitants sont plus claires. Donc, il y a une meilleure collaboration sur
les chantiers. À notre avis, c'est quelque chose qui serait souhaitable à l'ensemble...
Et les donneurs d'ouvrage à qui on a parlé
qui n'ont pas de projet pilote, notamment des commissions scolaires, pour ne
pas les nommer, nous ont dit : Je pense que nous, on aimerait ça aussi
pouvoir avoir des projets pilotes. Donc, on a incité ces gens-là à consulter le
Conseil du trésor pour ajouter des projets pilotes, parce que ça demande très
peu d'efforts pour le Conseil du trésor, à cet effet-là, de surveiller ça.
Et l'organisme qui... intervenant
décideur... et lui aussi, je pense qu'il y a quand même des bonnes retombées,
là. Il y aurait une préoccupation, à savoir, si les intervenants décideurs
étaient sollicités ou pas. Quand on regarde l'Ontario, c'est 27 interventions
qui ont été enclenchées, trois qui ont été conclues. Au Québec, on parle de
cinq ou six, mais cinq ou six pour 52 projets. Donc, ce mécanisme-là a été
utilisé au Québec en prorata, par rapport à l'Ontario, où c'est des dizaines de
milliers de projets qui ont été assujettis.
Mme LeBel : Vous parlez du
mécanisme de règlement des différends?
M. Côté (Eric) : Oui,
exactement.
Mme LeBel : Et selon vos
informations, c'est concluant comme processus? Est-ce que c'est à la
satisfaction de vos membres? Parce que ça peut être à la satisfaction de
l'autre partie, là, mais il faut que les deux soient... adhèrent au processus,
là.
M. Côté (Eric) : Bien, les
recours juridiques des entreprises et du donneur d'ouvrage ne sont pas perdus
avec cet élément-là. Donc, les gens peuvent toujours poursuivre s'ils veulent,
par la suite, ou à utiliser leurs recours juridiques. Mais la plupart des gens
ont été satisfaits, puis ça a permis de ne pas retarder l'exécution du projet,
puis ça permet une décision rapide.
Donc, l'exemple de l'Angleterre nous dit
que les décisions qui ont été renversées dans les tribunaux pour les questions
de paiements rapides, c'est moins de 2 % des requêtes qui ont été... qui
ont renversé la décision de l'intervenant décideur. À notre avis, c'est une
nouvelle manière de travailler, de collaborer qui serait envisageable. Ça
existe depuis 20 ans en Angleterre. Pourquoi on s'en priverait, de notre côté,
ici, là? Ça a même responsabilisé les professionnels dans le processus, à notre
avis.
Donc, c'est souhaitable que ce soit en
place, pas juste pour les 181. Puis malheureusement, sur les 181, il y en a peu
qui semblent être de moins de 20 millions. Je pense qu'il faut le
souhaiter pour l'ensemble des projets, puis le reste, le Canada va le faire.
Donc, c'est souhaitable qu'on le fasse.
Mme LeBel : Bien,
naturellement, je pense que vous... Bien, vous avez donc procédé à
l'élaboration du projet pilote, à la rédaction de l'arrêté qui a été le point
de départ, donc je pense que vous êtes au fait du... que... à la conclusion de
ce projet pilote là. Sil est concluant, naturellement, et si ça semble l'être,
selon les conversations que j'ai, là, dans le cadre de ce projet de loi ci,
l'objectif est d'élargir à très grande portée, naturellement, ce projet pilote
là, et d'en faire une mesure beaucoup plus, je dirais, régulière, plutôt que
d'un projet pilote.
Est-ce que vous avez... Est-ce qu'il y
avait... Est-ce qu'il y a... Est-ce qu'il est prévu, pardon, à la fin de ce
projet-là, qui se termine, d'ailleurs, d'ici un an... c'est quand même très
tôt, là, dans le cas... il y a deux années de faites... est-ce qu'il est prévu
que vous donniez le point de vue de vos membres sur les conclusions? Parce
qu'il faut documenter le projet pilote pour faire, par la suite, un projet de
loi qui sera mieux senti, là. Donc, est-ce qu'il est prévu que vous donniez vos
impressions ou... Je comprends que vous allez le faire de toute façon, mais
est-ce que c'est prévu dans la mécanique?...
Mme LeBel : ...un an, c'est quand
même très tôt, là, dans le cas... il y a deux années de faites. Est-ce qu'il
est prévu que vous donniez le point de vue de vos membres sur les conclusions?
Parce qu'il faut documenter le projet pilote pour faire par la suite un projet
de loi qui sera mieux senti, là. Donc, est-ce qu'il est prévu que vous donniez
vos impressions ou... Je comprends que vous allez le faire de toute façon, mais
est-ce que c'est prévu dans la mécanique?
M. Côté (Eric) : C'est prévu
dans la mécanique et d'ailleurs... bien, dans l'arrêté ministériel, il y a un
sondage qui doit être rempli par les participants à la fin du projet. Et en
vérifiant en ce moment dans le secteur du bâtiment, il n'y a aucun projet qui
est terminé. Donc, si les sondages ne sont pas rentrés, c'est tout simplement
parce que l'exécution des travaux n'est pas terminée. Mais nous, on a pris sur
nous de consulter les gens tout de suite pour leur demander, et il y a quand
même des éléments techniques qui peuvent être corrigés dans l'arrêté
ministériel. Donc, ce n'est pas parfait, je ne peux pas vous dire : On l'a
écrit puis on est très fiers. Il y a des choses qui ne fonctionnent pas qu'il
faut arranger, qu'il faut s'enligner. Il y a des exemples en Ontario qu'on
aurait dû prendre, peut-être, qu'on aurait pu intégrer, mais à notre avis, le
projet a atteint une maturité qui pourrait être réalisée à... l'étendre dès
maintenant. D'ailleurs, je pense que même vous avez le pouvoir ministériel
d'ajouter... sur les 52 projets, d'en ajouter d'autres. Moi, je pense que
ce serait souhaitable qu'on puisse permettre à d'autres projets de se réaliser
avec cette formule-là.
Mme LeBel : Est-ce que vous
avez... Je pense que c'est souhaitable aussi d'avoir toutes les informations.
Vous l'avez dit, un arrêté ministériel, c'est comme un projet de loi, c'est
perfectible. L'idée du projet pilote, c'est exactement de tester le... de faire
un «road test», quelqu'un m'en a parlé un moment donné, faire un «road test»
sur ces mesures-là puis voir qu'elles sont perfectibles. C'est sûr, dans
l'application, là, souvent, c'est le cas. Est-ce que vous avez à peu près... je
ne demande pas nécessairement des chiffres précis, mais un ordre de grandeur
sur... par rapport aux 52 projets naturellement ou d'autres projets
similaires qui sont à l'extérieur du projet pilote? Combien de temps ça prend
dans le projet pilote versus combien de temps ça prend à l'extérieur du projet
pilote? Je pense à la commission Charbonneau, on parlait de retards de quatre à
six mois, si je ne me trompe pas, et les rapports à ce moment-là. Qu'est-ce que
ça donne dans le cadre du projet pilote selon vos informations, là?
M. Côté (René) : En termes
d'exécution du projet, vous dites?
Mme LeBel : Oui, bien, en
termes de paiement.
M. Côté (Eric) : Oui. Bien,
écoutez, nous, tout le monde nous a dit qu'ils ont été payés dans les délais
depuis 22 mois. Donc, c'est chose qui n'existe pas. Il y a des gens qui,
notamment, travaillent avec la Société québécoise des infrastructures, qui ont
des projets, des projets qui sont d'ailleurs au coût de 20 millions, et
ces projets-là se font... selon les délais. Donc, il n'y a pas de retard. Outre
les éléments techniques auxquels un chantier de construction doit faire face,
il n'y a pas de retards qui sont observés, tout le monde est payé en
30 jours, les sous-traitants aussi et les sous sous-traitants aussi.
Mme LeBel : O.K., peut-être
rapidement en terminant, j'aimerais que vous me parliez un peu de l'avantage
que le gouvernement devance les investissements dans le milieu de la
construction, surtout dans le milieu institutionnel, commercial et
résidentiel... pas résidentiel, mais industriel. Est-ce que vous voyez
présentement un désengagement des fonds privés? C'est ce qui a été noté par
quelques-uns, là, qu'au niveau... que c'est peut-être une bonne chose que le
gouvernement devance pour la relance économique, là, devance des investissements
en matière d'infrastructure.
• (10 h 30) •
M. Côté (Eric) : Je laisserais
la parole à Mme Robitaille, qui évolue dans le secteur privé
essentiellement, qui pourrait vous expliquer la nature du marché dans le
secteur privé, si ça se passe bien ou pas, si elle observe des rassemblements.
Alors, je laisserais la parole à Mélissa de ce côté-là...
10 h 30 (version non révisée)
Mme LeBel : ...que le gouvernement
devance pour la relance économique, là, devance des investissements en matière
d'infrastructure.
M. Côté (Eric) : Je laisserais
la parole à Mme Robitaille, qui évolue dans le secteur privé
essentiellement, qui pourrait vous expliquer la nature du marché dans le
secteur privé, si ça se passe bien ou pas, si elle observe des ... Je
laisserais la parole à Mélissa de ce côté-là.
Mme Robitaille (Mélissa) :
Merci, Eric. Donc, oui, c'est souhaitable que le gouvernement accélère ce type
de projet. De mon côté, je parle ... pour moi, la pandémie a mis sur la glace
cinq projets dont... plus trois projets qui ont été reportés dans une date non
définie considérant le climat économique actuel, des projets qui initialement
devaient être revus pour 2021 qui seront probablement reportés en 2022
dépendamment de comment va évoluer la situation actuelle. Donc, c'est
souhaitable que le gouvernement mette à l'avant des projets.
Mme LeBel : Mais merci
beaucoup. Merci pour votre présentation. C'est tout pour moi, M. le Président.
Le Président (M. Simard) :
Merci, Mme la ministre. M. le député de La Pinière.
M. Barrette : Merci, M. le
Président. Madame, monsieur, merci d'être ici aujourd'hui avec nous pour nous
faire part de vos observations que je considère évidemment très pertinentes.
Écoutez, d'entrée de jeu, je vais vous
poser une question de curiosité qui n'est pas en lien avec le projet de loi
n° 66, mais qui est en lien avec l'actualité. Qui a la meilleure lecture
de la situation en termes de pénurie de main-d'oeuvre, la CCQ ou les
entrepreneurs? Si vous avez suivi les travaux, vous avez entendu, la semaine
dernière, des gens nous dire qu'il n'y avait pas de pénurie. Puis on a vu, dans
les médias, que, selon la CCQ, il y a une pénurie de travailleurs. Alors,
quelle est votre lecture aujourd'hui, vous, entrepreneurs dans deux différents
secteurs, comme vous l'avez dit?
M. Côté (Eric) : Écoutez, je
pense que la question à savoir s'il y a une pénurie ou pas, la question n'est
pas là, c'est... Il y a des manques à certains moments, il y a des manques
ponctuels, il y a des manques à long terme, il y a des manques à court terme.
Il y a... Le système des relations de travail, il est bâti d'une certaine
manière que des travailleurs ne peuvent pas se déplacer d'une région à l'autre,
il y a différentes contraintes, et ça, ça fait l'objet de nombreuses
discussions depuis de nombreuses années. Et d'ailleurs nous avons consulté...
nous avons été consultés par la Commission de la construction du Québec à cet
égard-là. Il y a des moyens de faciliter la mobilité des personnes pour qu'on
puisse ne pas vivre de situation de pénurie.
Je voudrais juste vous dire une chose. Les
bassins de main-d'oeuvre qui sont en cours en ce moment sont ouverts. Ça veut
dire que, dans certaines régions, on manque de travailleurs. Ça, c'est
incontestable. S'il n'y a plus personne de disponible pour faire les ouvrages,
il y a donc, à notre avis, une pénurie.
Donc, il y a l'opinion des syndicats, il y
a l'opinion des entrepreneurs, il y a l'opinion de la CCQ. Mais je peux vous
dire que, du côté des entrepreneurs, il y a des situations où on manque de travailleurs,
où on manque de certaines spécialités. Et c'est variable selon les projets,
selon les régions. Mais on sent qu'il y a une pression plus forte, en effet.
M. Barrette : Donc, est-ce que
je suis correct, là, si j'interprète votre réponse en disant ceci : Quand
j'additionne tous les bassins, là... on tire une ligne, là, le résultat, c'est
qu'il y a une pénurie...
M. Côté (Eric) : ...et
c'est variable selon les projets, selon les régions, mais on sent qu'il y a une
pression plus forte en effet.
M. Barrette : Donc, est-ce
que je suis correct, là, si j'interprète votre réponse en disant ceci. Quand
j'additionne tous les bassins, là, et qu'on tire une ligne, là, le résultat,
c'est qu'il y a une pénurie. Ce n'est pas... Peu importe la hauteur, là, mais
vous êtes au moins un peu en pénurie de travailleurs au Québec en moyenne.
M. Côté (Eric) : Bien, ce
n'est pas un peu ou pas de pénurie. C'est que, oui, il y a une pénurie à notre
avis.
M. Barrette : Bon,
parfait. Ça me va très bien comme réponse. Bon, je postule que vous avez suivi
les travaux. Alors, vous avez constaté que je prenais votre position sur la question
de l'élargissement du projet pilote aux contrats de plus de 20 millions de
dollars. Vous avez dit il y a quelques minutes, et ça, je l'ai vraiment retenu,
que, pour vous, il y a très peu de projets dans les 181 qui sont en bas de
20 millions. J'ai bien compris ça?
M. Côté (Eric) : Bien,
c'est notre interprétation basée sur les rapports qui sont produits par la
Société québécoise des infrastructures. On n'a pas cette donnée-là. On
s'attendrait à ce que la commission, peut-être, fournisse l'information, mais
je peux vous dire en ce moment que, dans les projets pilotes, sur les 52, il y
en a quand même plusieurs qui sont, eux, de plus de 20 millions. Donc,
c'est possible de faire un projet pilote en tenant compte des retards de
paiement avec un projet d'au-dessus de 20 millions. Donc, c'est possible.
On en a la preuve vivante. Il y en a trois en ce moment qui s'exécutent dans le
secteur du bâtiment.
M. Barrette : Oui, mais
ma question ce n'est pas le projet pilote comme tel. Ma question, c'est :
Votre lecture de la liste, c'est que la majorité de ces projets-là sont
au-dessus de 20 millions, en tout cas, moi, ma lecture, c'est celle-là, et
que vous souhaiteriez que le projet pilote soit étendu à plus de
20 millions, puis vous n'y voyez pas de problème, vous, administratif,
conceptuel ou autre, à faire ce pas-là. Est-ce que ma lecture est correcte de
votre position?
M. Côté (Eric) : Je vous
dirais qu'il y a certains modes de réalisation qui sont plus difficiles à
concilier avec le mode de retard... les modalités contre les retards de
paiement. E on souhaiterait qu'il y en ait plus en effet et qu'on plus
l'étendre au plus de projets possibles.
M. Barrette : Quel mode
de réalisation est moins apte à bénéficier du projet pilote?
M. Côté (Eric) : Bien,
quand on est en conception/construction, il y a les ententes qui sont faites,
et il peut avoir des modalités qui sont faites, mais dans ce cas-ci, quand
l'architecte et l'entrepreneur travaillent ensemble dans un consortium qui est
un projet, et les sous-traitants sont engagés par la suite, les modalités
contractuelles font qu'elles appartiennent à l'entrepreneur qu'au donneur
d'ouvrage. Donc, il est possible à ce moment-là qu'il y ait des difficultés qui
soient faites, mais je pense que tout est fait en son possible pour que les
paiements se fassent le plus rapidement possible.
M. Barrette : Oui.
M. Côté (Eric) : C'est
beaucoup plus... La question des délais de paiement, on l'observe beaucoup plus
de la part du donneur d'ouvrage qui retient des paiements avec les
professionnels que dans les modes en conception/construction de toute façon.
M. Barrette : O.K.
Parfait. De toute façon, les projets qui sont là, là, c'est des projets qui
sont assez circonscrits en termes de précision des devis et ainsi de suite, là.
On n'est pas dans un projet voici le concept et puis faites-nous ça. Là, c'est
plus voici ce que ça va avoir l'air, puis vous le livrez...
M. Barrette : ...O.K. Parfait. De
toute façon, les projets qui sont là, là, c'est des projets qui sont assez
circonscrits, en termes de précision des devis, et ainsi de suite, là. On n'est
pas dans un projet... voici le concept, et puis faites ça. Là, c'est plus voici
ce que ça va avoir de l'air, puis vous livrez. C'est plus comme... pour ces
projets-là, là, j'entends, là. O.K. Ça va.
Là, dans votre... Vous en avez parlé,
vous-même et, dans votre mémoire, vous allez dans le sens de ce que l'on a dit,
nous, en tout cas, pour notre formation politique, à plusieurs reprises, pour
ce qui est des pouvoirs de l'AMP, et ainsi de suite, aussi, comme je viens de
le dire, pour les contrats. Là, vous avez parlé assez clairement de problèmes
de collusion persistants. Vous avez entendu l'association des camionneurs, qui
dit que c'est monnaie courante. Votre lecture, c'est quoi? En fait, j'ai envie
de vous demander, là : Nous glissons sur la pente glissante ou les choses
sont sous contrôle?
M. Côté (Eric) : Bien, écoutez,
avant de conclure qu'il n'y a plus de collusion dans notre industrie... je
m'attendrais à ce qu'on applique l'ensemble des recommandations de la commission
Charbonneau avant de placer un constat de décider ou pas, c'est ça, dans ce
cas-ci.
Dans le cas du Bureau des soumissions
déposées, c'est clairement indiqué d'un jugement qui date de 2020, je pense qu'il
y a des choses qui font... il y a des éléments qui sont mis en place qui
augmentent les risques. Je pense que le comité de suivi de la commission
permanente... le comité de suivi de la commission Charbonneau, il y a des
éléments qui sont à risque. Est-ce que veut dire que c'est constamment un
risque qui s'avère? Pas nécessairement, mais on est à risque, et il faut
éliminer ces risques-là, à notre avis, pour faciliter l'exécution dans les
travaux dans les chantiers de construction. Donc, il faut limiter les risques
ou les mitiger, donc il faut un encadrement de ce côté-là. Ça inclut le BSDQ,
ça inclut aussi d'autres systèmes où on expose, dans le fond, des donneurs
d'ouvrage qui sont mal expérimentés, à mal gérer les projets. Donc, à notre
avis, il faut faire quelque chose de ce côté-là pour limiter ces risques-là.
Et, bien, quand... La collusion, écoutez,
il n'y a personne qui nous appelle pour dire qu'ils font de la collusion, c'est
quelque chose qui s'avère comme ça. Donc, nous, on doit, dans le fond, comme association,
s'assurer que la saine concurrence puisse être possible. Et c'est ce qu'on
souhaite, parce qu'on ne veut pas avantager un membre face à un autre. Donc, on
souhaite la saine concurrence pour toute l'industrie de la construction, évidemment.
Le Président (M. Simard) :
Merci.
M. Barrette : En l'absence de
la ligne 1 800 collusion, je vais passer la parole.
Le Président (M. Simard) : M.
le député de Mont-Royal—Outremont.
M.
Arcand
:
Merci beaucoup. La question, c'est sur les donneurs d'ouvrage. Vous avez parlé
de pratiques abusives de la part des donneurs d'ouvrage. Bon, le retard au
niveau du paiement est certainement une pratique qu'ils peuvent faire, mais est-ce
qu'il y a autre chose que vous considérez être des pratiques abusives de la
part des donneurs d'ouvrage?
M. Côté (Eric) : Le grand
défi, dans l'industrie de la construction, c'est d'avoir des plans et devis
complets, là. Je pense que votre collègue l'a bien illustré, là. Si les plans
et devis...
M.
Arcand
:
…qu'ils peuvent faire. Est-ce qu'il y a autre chose que vous considérez être
des pratiques abusives de la part des donneurs d'ouvrage?
M. Côté (Eric) : Le grand
défi, dans l'industrie de la construction, c'est d'avoir des plans et devis
complets, là. Je pense que votre collègue l'a bien illustré, là. Si les plans
et devis sont incomplets, on se retrouve dans des situations où les
instructions à l'entrepreneur ou la soumission n'est pas… ne peut pas préciser,
sont pris à faire les travaux. Donc, souvent, on découvre ces imprécisions-là
en cours d'exécution des projets et ça occasionne ce qu'on appelle des
changements dans les projets.
Donc, ce que les gens ont condamné comme
les fameux extras, là, qui sont en fait des besoins qui changent de la part du
donneur d'ouvrage ou des imprécisions dans les plans et devis, ces éléments-là
sont des éléments qui sont très difficiles à élaborer, puis quand on est en
exécution de chantier, cette pression-là est immense. Donc, l'entrepreneur,
lui, doit ne pas ralentir son chantier, répondre aux besoins de… du donneur
d'ouvrage, et doit en plus estimer le coût de ces projets-là et se commettre,
légalement, pour réaliser ça. C'est là que la négociation avec le donneur
d'ouvrage devient difficile.
• (10 h 40) •
Donc, l'entrepreneur n'a pas demandé les
extras, c'est le projet qui n'était pas clair et dans ces cas-là, le donneur
d'ouvrage abuse de sa position pour décider ou déterminer le prix d'un
changement, alors que l'entrepreneur, lui, doit l'exécuter et doit… avec ses
sous-traitants, aussi, qui eux, ont estimé les prix. Donc, il y a une espèce de
joute et ces situations-là, qu'on appelle… tout ça touche à l'annexe VI du
règlement des travaux de construction de la Loi des contrats des organismes
publics. Et c'est là qu'il y a de l'abus et qu'il y a des choses qui ne sont
pas claires, malheureusement.
M.
Arcand
: Et
pour corriger ça, ça prendrait quoi, à ce moment-là? C'est… il faut que les
devis soient mieux faits? Il faut que…
M. Côté (Eric) : Bien, on
devrait avoir, donc, des plans et devis de meilleure qualité. On devrait aussi
avoir des modalités de paiement claires. Ça faciliterait beaucoup l'exécution
des projets parce que, souvent, si quelque chose est mal conçu, bien, quand on
vient pour l'exécuter, c'est très difficile et il y a des imprévus qu'on doit…
que peu de gens n'ont pu estimer, donc, et quand… la collaboration n'est plus
là quand vient le temps des conflits, alors un entrepreneur va estimer qu'un
travail va… additionnel va coûter 150 000 $. Pour le donneur d'ouvrage
qui a un budget à gérer…
Le Président (M. Simard) : En
conclusion.
M. Côté (Eric) : …possible de
mettre des… Donc, il y a un conflit entre ces éléments-là, et on a rapporté ces
cas-là — je pourrais vous les déposer à la commission — à
l'Autorité des marchés publics, trois cas qui ont été anonymisés de situations
abusives des donneurs d'ouvrage…
Le Président (M. Simard) :
Très bien, merci, M. Côté. Sur ce, je cède la parole au député de
Rosemont. Vous disposez, cher collègue, de 2 min 40 s.
M. Marissal : Merci, M. le
Président. M. Côté, Mme Robitaille, bonjour, bienvenue. Merci d'être
là. On ne vous a pas beaucoup entendus, ou en fait, pas du tout, à moins que je
n'aie zappé… des mesures d'accélération, notamment par les analyses
environnementales, là. Avez-vous une position là-dessus, puisque c'est quand
même un gros morceau du projet de loi qui est devant nous?
M. Côté (Eric) : Je pourrais…
je pense qu'on a fait part notamment au comité sur l'allègement réglementaire
qu'il devenait parfois difficile d'exécuter certains projets, notamment…
M. Marissal : …avez-vous une
position là-dessus puisque c'est quand même un gros morceau du projet de loi
qui est devant nous?
M. Côté (Eric) : Je pourrais…
je pense qu'on a fait part, notamment au comité sur l'allègement réglementaire,
qu'il devenait parfois difficile d'exécuter certains projets, notamment parce
que la municipalité ou le ministère de l'Environnement se lançaient la balle,
puis ça retardait les processus. On a plaidé notamment, pour qu'il y ait une
linéarisation plus claire, plus simple des processus. À notre avis, la solution
de rechange que propose le projet de loi n° 66 est une solution
temporaire, mais il faut avoir un processus plus clair et plus simple, pas
nécessairement plus expéditif, mais simplement qui va permettre de ne pas se
perdre dans les dédales administratifs, en ce moment, comme il peut arriver.
Donc, souvent on a des projets qui nous ont été rapportés que la ville attend
après le ministère de l'Environnement, l'Environnement attend après la ville. À
un moment donné, on ne sait plus qui… où est rendu le projet. Donc… et je pense
que c'est ce qu'on essaie… avec le projet de loi n° 66, et c'est pour ça
qu'on est d'accord avec cette procédure-là.
M. Marissal : D'accord. Le
problème, c'est l'analyse environnementale ou c'est le fait que deux ou trois
joueurs jouent au Ping-Pong et se renvoient la balle?
M. Côté (Eric) : Bien, je
pense que l'exemple sportif que vous utilisez est le bon. Je pense qu'à un
moment donné on ne sait plus dans quel côté la balle est, et souvent c'est ça qui
va occasionner des problématiques. Le projet de loi n° 66 tient la bride,
si on veut, par rapport à ça, mais ça ne règle pas le problème pour l'ensemble
des projets, là, par rapport à ça.
M. Marissal : Ma question
était à l'effet qu'un règlement peut exister, et il est tout simplement mal
appliqué ou il peut y avoir toutes sortes de phénomènes, là, de bureaucratie.
Mais le règlement comme tel… vous, là, de votre côté, et votre industrie, les
analyses environnementales sont nécessaires ou on pourrait, dans certains cas,
passer par-dessus?
Mme Robitaille (Mélissa) : …si
je peux me permettre, Eric, les analyses environnementales sont nécessaires, le
processus est nécessaire, l'enjeu est au niveau du traitement des dossiers puis
dans la mécanique du traitement des dossiers.
Le Président (M. Simard) : En
conclusion.
M. Marissal : Tout simplement
améliorer ça par une meilleure communication puisqu'on doit faire les analyses
environnementales, selon ce que vous dites?
Mme Robitaille (Mélissa) : Une
meilleure communication puis plus d'effectifs aux gens attitrés à l'étude de
ces dossiers-là.
Le Président (M. Simard) :
Très bien.
M. Marissal : Je vous
remercie.
Le Président (M. Simard) :
Merci. M. le député de Jonquière.
M. Gaudreault : Oui. Merci.
Moi, M. le Président, je suis assez étonné de constater que c'est une
organisation sans but lucratif, qui s'appelle laCorporation des entrepreneurs
généraux du Québec, qui rend public un rapport interministériel, parce que ça
traîne, et c'est pour ça qu'ils le font. Moi, c'est ainsi que je l'interprète.
On a un comité interministériel qui a été créé pour faire le suivi d'une
recommandation de la commission Charbonneau, quand même. Un comité
interministériel dont le rapport, selon ce que M. Côté nous a dit, a été
déposé à l'automne 2017, donc ça fait trois ans. On a eu deux
gouvernements depuis ce temps-là, le gouvernement libéral, et on a un
gouvernement qui est…
M. Gaudreault : ...d'une recommandation
de la commission Charbonneau, quand même. Un comité interministériel dont le
rapport, selon ce que M. Côté nous a dit, a été déposé à
l'automne 2017, donc ça fait trois ans. On a eu deux gouvernements depuis
ce temps-là, le gouvernement libéral et on a un gouvernement qui est en place
depuis deux ans, et il faut avoir une commission parlementaire sur un projet de
loi qui découle de la pandémie pour obtenir le dépôt public d'un rapport sur la
réforme du Bureau des soumissions déposées du Québec.
Alors, moi, je trouve ça assez fascinant
d'être obligé de s'en remettre à une organisation sans but lucratif de bonne
foi, que je salue, pour obtenir un rapport de cette envergure-là et qui... En
plus, on constate que sur le fond des choses ni par le gouvernement précédent
ni par le gouvernement actuel, il n'y a eu aucun suivi, aucun suivi, et c'est
quand même des recommandations importantes.
Alors, moi, j'aimerais savoir de la part
de nos invités s'ils trouvent ça normal qu'ils soient obligés de faire oeuvre
de transparence en lieu et place du gouvernement.
M. Côté (Eric) : Ce n'est pas
de gaieté de coeur qu'on doit rendre public un tel document, mais c'est parce
que la dernière fois qu'on était en commission parlementaire il y a quatre ans,
c'était exactement pour cette question-là du Bureau des soumissions déposées du
Québec. Alors, nous, on se pose la question : Qu'est-ce qui arrive dans ce
document-là? Ça fait... C'est quelque chose qui a été parlé à la commission
Charbonneau, on a eu un rapport, il y a de multiples étapes. On sent qu'il y a
quelque chose à faire de ce côté-là et ça traîne. Et, vous savez, c'est des
deniers publics qui sont... ça coûte de l'argent, ce qui se passe au BSDQ, au
trésor public. Et comment ça se fait qu'on n'en adresse pas la question? Moi,
c'est ça qui me surprend et c'est pour ça qu'on a rendu public le rapport, pour
que les choses avancent, pour qu'on puisse réformer cet organisme-là et que
l'AMP s'en mêle et jette un coup d'oeil là-dessus.
M. Gaudreault : Bien, je veux vous
en remercier parce que... oeuvre utile, parce que visiblement, que ce soit le Parti
libéral ou la CAQ, c'est même réalité à cet égard, encore une fois.
Le Président (M. Simard) :
Merci.
M. Gaudreault : Est-ce que
vous êtes capable de nous...
Le Président (M. Simard) :
Non, c'est terminé, vous avez déjà...
M. Gaudreault : C'est terminé?
Bon. C'est bon.
Le Président (M. Simard) : On
a déjà malheureusement défoncé le temps qui nous était imparti. Alors, merci à
tous. Mme Robitaille, M. Côté, à nouveau merci pour votre
contribution à nos travaux.
Sur ce, nous allons suspendre
momentanément le temps de faire place à nos prochains invités.
(Suspension de la séance à 10 h 48)
(Reprise à 10 h 52)
Le Président (M. Simard) :
Merci à vous. Chers collègues, nous allons reprendre nos travaux. Nous sommes
en compagnie de représentants de l'Ordre des ingénieurs du Québec. Madame,
monsieur, bonjour.
Mme Baig (Kathy) : Bonjour.
Le Président (M. Simard) :
Bienvenue parmi nous. Auriez-vous d'abord l'amabilité de vous présenter, s'il
vous plaît?
Mme Baig (Kathy) : Bien sûr.
Donc, Kathy Baig, présidente de l'Ordre des ingénieurs du Québec et je suis
accompagnée de Me François-Xavier Robert, avocat au secrétariat et affaires
juridiques de l'ordre.
Le Président (M. Simard) :
Nous vous écoutons.
Mme Baig (Kathy) : Excellent,
Donc, merci, M. le Président. Mme la ministre, membres de la commission, je
représente l'Ordre des ingénieurs du Québec. Notre mission, c'est d'assurer la
protection du public, de près de 65 000 ingénieurs et de 3 600
candidats à la profession, donc futurs ingénieurs. L'ordre encadre l'exercice
de la profession par différents moyens, soit par l'admission, l'inspection
professionnelle, la discipline et le développement professionnel.
D'entrée de jeu, je veux commencer en
disant que l'ordre comprend le besoin d'accélération des projets de
construction ou de réflexion pour assurer la relance économique. Toutefois, je
pense que vous le savez, la réalisation simultanée de nombreux projets peut
entraîner des risques accrus que nous avons collectivement le devoir
d'atténuer.
Notre mémoire contient donc des
recommandations à ce sujet que je vais vous résumer ce matin. Mais avant, je
tiens à féliciter le gouvernement quant à l'évolution de ce projet de loi. Le gouvernement
a tenu compte des principales préoccupations exprimées en juin dernier et je
veux en souligner deux en particulier, soit, la première, les mesures de reddition
de comptes permettront aux parlementaires et au public de bien évaluer la
portée des mesures d'accélération dont les projets d'infrastructure
bénéficieront.
La deuxième, c'est ce qui touche la
limitation des projets. Donc, les ouvrages pouvant bénéficier des mesures
d'accélération sont maintenant limités à la liste qui se trouve dans le projet
de loi. Le mémoire qu'on a déposé, en fait, regroupe deux grands volets. Le
premier volet, c'est tout ce qui touche la qualité des ouvrages et la
prévention de la collusion et le deuxième volet, c'est ce qui touche le
développement durable...
Mme Baig (Kathy) : ...les
ouvrages pouvant bénéficier des mesures d'accélération sont maintenant limités
à la liste qui se trouve dans le projet de loi. Le mémoire qu'on a déposé, en
fait, regroupe deux grands volets. Le premier volet, c'est tout ce qui touche
la qualité des ouvrages et la prévention de la collusion. Et le deuxième volet,
c'est ce qui touche le développement durable et la qualité de l'environnement.
Donc, je vais d'abord aborder le premier
volet. La réalisation de nombreux projets en simultané en mode accéléré
pourrait susciter des préoccupations sur la qualité et sur les éventuels
risques de collusion. Pour pallier à ces risques-là, l'ordre fait donc cinq
recommandations qu'on suggère qui soient mises en oeuvre.
La première recommandation, c'est ce qui
touche les pouvoirs de l'AMP. Donc, de les étendre à l'ensemble des contrats et
sous-contrats publics, les pouvoirs confiés à l'Autorité des marchés publics
par le projet de loi. On pense en effet que les nouveaux pouvoirs de l'AMP ne
devraient pas seulement s'appliquer aux projets visés par le projet de loi.
Notre deuxième recommandation touche les
lanceurs d'alerte. En fait, on dit qu'il faut mieux protéger, adéquatement, les
lanceurs d'alerte, notamment ceux qui vont transmettre de l'information à
l'AMP.
Notre troisième recommandation touche
l'expertise interne. Il faut doter les organismes publics d'une expertise
interne suffisante en génie, en approvisionnement, au niveau légal. À ce sujet,
j'en profite aussi pour souligner qu'au ministère des Transports un donneur
d'ouvrage qui a la responsabilité d'environ une cinquantaine de projets dans le
projet de loi... il y a eu un rapport de la Vérificatrice générale, en juin
dernier, qui évaluait qu'il manquait toujours 225 ingénieurs et technologues
professionnels. Vous comprendrez que, dans un contexte d'accélération des
projets, ces lacunes sont quelque peu préoccupantes. Maintenant, une expertise
interne formée de professionnels d'expérience permet de détecter plus
facilement des anomalies d'une soumission truquée ou encore elle permet aussi à
l'organisme public de bien cerner ses besoins et ses exigences quant à la
qualité de l'ouvrage. Maintenant, si jamais il n'est pas possible de compter
sur une expertise interne, l'organisme public devrait retenir les services du
secteur privé, en privilégiant évidemment la qualité des services rendus plutôt
que des considérations de prix et de temps.
Maintenant, la quatrième recommandation
que l'on fait, c'est de revoir le mode d'adjudication des contrats pour
délaisser la règle du plus bas soumissionnaire. Je pense que vous le savez,
plusieurs intervenants ont fait la recommandation depuis le début de cette
consultation. Et nous saluons également l'ouverture de la ministre à cet effet.
On recommande de fixer des critères multiples et de s'assurer de pondérer ces critères,
adéquatement. En effet, l'élaboration de critères multiples et leur pondération
adéquate rendent plus difficiles les stratagèmes de collusion. Cette façon de
faire permet également à l'organisme public de s'assurer que la conception et
la réalisation de l'ouvrage répondent aux besoins réels.
J'en arrive à la cinquième...
recommandation, désolée. C'est de maximiser la participation potentielle de
soumissionnaires...
Mme Baig (Kathy) : …les
stratagèmes de collusion. Cette façon de faire permet également à l'organisme
public de s'assurer que la conception et la réalisation de l'ouvrage répond aux
besoins réels. J'en arrive à la cinquième recommandation — désolée — c'est
de maximiser la participation potentielle de soumissionnaires. Le projet pilote
vise à faciliter le paiement aux entreprises qui se sont inscrites dans cette
optique. Son application pourrait ouvrir la porte à une plus grande
participation aux appels d'offres par l'apport de d'autres entreprises qui sont
de taille plus modeste.
Par ailleurs, les travaux de réalisation
d'infrastructures publiques font généralement l'objet d'une surveillance.
Toutefois, comme une réalisation en mode accéléré pourrait affecter la qualité
des ouvrages, l'ordre recommandation aux organismes publics de procéder à une
évaluation pour déterminer si, dans un contexte d'accélération, les ressources
consacrées à la surveillance des travaux sont suffisantes. Celles-ci
constituent notre cinquième moyen.
De plus, dans le contexte où des projets
privés ainsi que des projets publics de moindre envergure que ceux prévus au
projet de loi contribueront également à la relance, nous invitons les
parlementaires à continuer la réflexion qui a été entamée lors des travaux sur
le projet de loi n° 29 et à considérer sérieusement la possibilité de
rendre obligatoire la surveillance des travaux. Le contrôle de la qualité,
c'est important. Nous poursuivons actuellement des discussions avec la ministre
des Affaires municipales et de l'Habitation et la Régie du bâtiment et on espère
grandement qu'elles vont mener à des changements.
J'en arrive maintenant à mon deuxième
thème de notre mémoire, c'est ce qui touche le développement durable et la
qualité de l'environnement. Hier, lors d'un événement, je suis fière d'avoir
rendu publics les engagements de l'ordre en matière de développement durable.
C'est important de mentionner que c'est la première fois de notre histoire que
nous nous engageons de façon aussi officielle, et on le fait sur la base du
savoir-faire de nos ingénieurs. Pour réduire l'impact de l'activité humaine sur
l'environnement et pour être collectivement plus résilients, les ingénieurs
font définitivement partie de la solution. Comme ordre professionnel, nous
voudrons contribuer à faire évoluer les lois, les règlements et les normes
pertinentes.
Maintenant, si je reviens au projet de loi
n° 66, on est d'avis que c'est en privilégiant l'amélioration de la
dotation et des processus de travail au sein du ministère de l'Environnement
que nous recommandons d'accélérer la réalisation des projets. Ces améliorations
devraient viser la réduction du temps de traitement des demandes
d'autorisation. En 2019, le délai moyen était de 180 jours. Une réduction
de ces délais représentera un gain pour les projets publics visés au projet de
loi mais également pour l'ensemble des projets d'infrastructure publics ou
privés.
Par ailleurs, vu le caractère sensible des
milieux humides ou hydriques, nous recommandons par prudence que les travaux
devant se dérouler dans ces milieux continuent de requérir une autorisation.
L'article 23 du projet de loi devrait être modifié en conséquence.
• (11 heures) •
De plus, nous recommandons que le ministre
de l'Environnement fasse preuve d'une grande prudence...
11 h (version non révisée)
Mme Baig (Kathy) : ...milieux
humides ou hydriques. Nous recommandons par prudence que les travaux devant se
dérouler dans ces milieux continuent de requérir une autorisation. L'article 23
du projet de loi devrait être modifié en conséquence.
De plus, nous recommandons que le ministre
de l'Environnement fasse preuve d'une grande prudence avant de limiter les consultations
publiques puisque ces consultations servent à assurer la participation citoyenne
au développement économique.
Avant de conclure, je voudrais aborder rapidement
la demande de services professionnels d'ingénierie, tant pour les activités de
conception, de surveillance ou de soutien à l'exploitation d'un ouvrage. Nous
réitérons que la création d'un permis restrictif permanent, comme nos
homologues en délivrent dans d'autres provinces, pourrait permettre de bonifier
l'offre de main-d'oeuvre et contribuer à l'atteinte des objectifs du gouvernement.
Ces permis permettent à des professionnels d'effectuer des activités
spécialisées même si ces professionnels ne possèdent pas toutes les compétences
requises. À ce sujet, je vous réfère au rapport d'analyse détaillée que nous
avons transmis à la commission en complément à notre mémoire.
Ceci conclut donc ma présentation. Je
remercie la commission d'avoir invité l'Ordre des ingénieurs du Québec à cette consultation.
Et nous sommes maintenant heureux de répondre à vos questions.
Le Président (M. Simard) :
Merci à vous, Mme Baig. Alors, je cède maintenant la parole à la présidente
du Conseil du trésor. Vous disposez de 16 minutes, chère collègue.
Mme LeBel : Bon, j'allais
remettre mon masque, mais ce n'est pas nécessaire. Bonjour, Mme Baig.
Enchantée de vous revoir. Effectivement, on a eu des belles discussions dans le
cadre du projet 29 qui a été terminé par ma collègue. Donc, on a commencé
plusieurs discussions, vous avez tout à fait raison, puis on va poursuivre sûrement
dans d'autres instances également.
J'ai peut-être quelques petits points, là.
Votre mémoire est très... est quand même assez clair, comme d'habitude d'ailleurs,
sur vos recommandations. Peut-être quelques petits points à aborder avec vous.
Quand vous parlez de discussions qui sont en cours avec le MAMH présentement,
c'est-tu par rapport à la surveillance des travaux? J'ai peut-être manqué un
bout de votre phrase, là.
Mme Baig (Kathy) : Oui, tout à
fait, tout à fait. Donc, c'est par rapport à la surveillance des tableaux...
des travaux, je m'excuse, pour voir s'il y a une possibilité de les rendre
obligatoires. Donc, évidemment, moduler en fonction de la complexité, de
l'envergure des projets, que la surveillance soit adoptée, mais que ce ne soit
plus à la discrétion des donneurs d'ouvrage, mais bien qu'il y ait un standard.
Donc, oui, on est en discussion avec la ministre à cet effet.
Mme LeBel : O.K. Donc, il y a
des conversations sur ce point précis là qui ont lieu présentement, point que
vous aviez fait valoir également dans le cadre du projet de loi n° 29, là,
je m'en souviens très bien, où là on était en train de vouloir modifier le Code
des professions pour plusieurs raisons, là, mais...
Donc, je vais aller dans votre conclusion peut-être
pour m'expliquer un de vos points, vous avez terminé d'ailleurs avec ça. Bon,
vous dites : «L'Ordre des ingénieurs souscrit à la nécessité
d'investissements importants dans des projets d'infrastructure publique et, à
ce titre, est en accord avec le principe du projet de loi. Il croit que
certaines mesures d'accélération, particulièrement celles qui portent sur
l'expropriation ou le paiement accéléré, pourront servir de base à une
amélioration des pratiques actuelles.» Vous faites également référence aux
milieux hydriques et humides, donc, parce qu'il y a des mesures d'accélération
en matière environnementale. Je comprends très bien votre...
Mme LeBel : …que certaines
mesures d'accélération, particulièrement celles qui portent sur l'expropriation
ou le paiement accéléré, pourront servir de base à une amélioration des
pratiques actuelles.»
Vous faites également référence aux
milieux hydriques et humides. Donc, parce qu'il y a des mesures d'accélération
en matière environnementale. Je comprends très bien votre recommandation n° 4, à la page 12, qui n'a pas besoin d'explications,
là. Quand on parle d'augmenter la dotation au sein du ministère de
l'Environnement, je pense que ça, c'est assez clair et on peut y travailler…
mon collègue peut y travailler.
Mais nous, dans le cadre du projet de loi
n° 66, on a également travaillé sur l'accélération de certains processus
qui ont besoin d'une intervention législative, disons-le comme ça. Il y a le
REAFIE, là, qui va entrer en vigueur à sa pleine force à la fin décembre, je
crois, il y a le p.l. n° 44 qui donne plus de
pouvoirs au ministre de l'Environnement, donc il y a un ensemble de mesures au
niveau de l'environnement.
Mais on croit, au niveau… on croit qu'à ce
stade-ci, compte tenu de la pandémie que nous vivons, qui… Dans votre mémoire,
vous dites qu'on va peut-être en avoir un dans un autre futur. J'espère que
vous n'avez pas des dons de prédiction, on espère que ce sera l'unique pandémie
pour plusieurs années à venir. Mais vous avez raison, on ne sait jamais. Ça,
c'est ce qu'on peut dire aujourd'hui.
Mais on établit quand même plusieurs
processus environnementaux. Notre prétention est de ne pas vouloir affecter les
normes environnementales — désolée, des fois… affecter les normes
environnementales, mais plutôt venir raccourcir certains processus. Il y a
plusieurs façons de le faire, on l'a dit : accompagner, mieux doter
d'effectifs, ça a été des conclusions qui ont été apportées ici. Mais est-ce
que vous pensez qu'on peut quand même… les processus qui ont été mis en
place — et on parlera des milieux humides par la suite,
là — sont quand même de nature à pouvoir accélérer les processus,
selon votre connaissance?
Mme Baig (Kathy) : Nous, ce
qu'on a compris… il faut comprendre, en fait, qu'on a aussi consulté des
ingénieurs, donc, nos membres, pour établir ce mémoire-là. J'entends que, oui,
peut-être que cela peut accélérer les processus pour certains projets qui sont
présentés, néanmoins, ce qu'on tente d'expliquer dans le mémoire et ce que nos
membres nous ont expliqué sur le terrain, c'est que ça serait mieux d'avoir une
solution qui vient aider pas juste les projets dans le projet de loi en tant
que tel, mais qui vient aider tous les projets, autant du secteur public et
privé. Et donc, en augmentant les ressources au niveau du ministère, ça vient
répondre à tout le monde et pas juste au projet de loi.
Et donc, nous, on s'est permis aussi de
faire un parallèle avec ce qu'on a vécu à l'Ordre des ingénieurs du Québec, je
pense que vous êtes au courant. On avait eu des enjeux avec le nombre
d'enquêtes et ce qu'on a fait, c'est qu'on a même augmenté nos standards au
niveau de nos normes et on a optimisé nos processus, si je peux dire, et on a
ajouté des ressources supplémentaires au sein de nos organisations, ce qui a
fait en sorte qu'on a pu réduire les délais d'attente, traiter tous les
dossiers qui étaient en attente, et augmenter nos standards de qualité.
Donc, j'entends ce que vous dites, oui,
probablement que ça peut venir accélérer, mais on aurait préféré, puis c'est
aussi ce qu'on entend de nos membres, une approche peut-être plus systémique
qui va venir régler l'ensemble des problèmes sur le terrain, plus que juste
dans le projet de loi. Je ne sais pas si ça répond à votre question, mais c'est
un peu l'angle qu'on a pris dans le cadre de notre…
Mme Baig (Kathy) : ...et
augmenter nos standards de qualité. Donc, j'entends ce que vous dites, oui,
probablement que ça peut venir accélérer, mais on aurait préféré, puis c'est
aussi ce qu'on entend de nos membres, une approche peut-être plus systémique
qui va venir régler l'ensemble des problèmes sur le terrain, plus que juste
dans le projet de loi. Je ne sais pas si ça répond à votre question, mais c'est
un peu l'angle qu'on a pris dans le cadre de notre mémoire.
Mme LeBel : O.K. Mais là, je
comprends... oui, je comprends. Effectivement, ça répond à ma question. Effectivement,
l'angle dans le projet de loi n° 66 est simplement pour les... bien,
simplement, je ne veux pas simplifier quelque chose, mais est ciblé sur les
181 projets. D'ailleurs, on a entendu les commentaires qui avaient été
faits à l'effet que la liste devrait être fermée. On est dans une mesure et
dans un processus exceptionnel, donc on l'a fait pour 181 projets.
Effectivement, je sais que mon collègue
travaille aussi pour améliorer l'efficacité du ministère de l'Environnement,
disons-le comme ça, de façon beaucoup plus globale. Je pense que c'est une
remarque qui est tout à fait pertinente parce qu'on l'entend beaucoup. Est-ce
que c'est l'ajout d'effectifs? Est-ce que c'est le REAFIE? Est-ce que c'est le
p.l. n° 44? Est-ce que c'est toutes ces réponses?
Probablement, un ensemble de toutes ces réponses. Mais il y a le projet de loi
n° 66 qui est particulier pour 181 projets et qui se veut
exceptionnel, disons-le, dans sa façon de faire.
Je vais revenir d'ailleurs, donc, aux
milieux humides, parce que là, on parle plus particulièrement...
Mme Baig (Kathy) : Oui.
Mme LeBel : ...de
l'article 22 et 23 du projet de loi. Vous mentionnez que pour les travaux
de construction et des interventions qui sont réalisées dans des milieux
humides et hydriques, on devrait... on ne devrait pas dispenser de
l'autorisation ministérielle et on ne devrait pas donc prendre le chemin de la
déclaration de projet qui est créé par l'article 22, je crois, du projet de
loi. Et c'est ce qu'on dit, à ma connaissance, dans le projet de loi... dans
l'article 23 et je veux m'assurer qu'on a la même compréhension parce que
l'objectif est de maintenir les principes dans les milieux hydriques et
humides, là, d'éviter, minimiser et de compenser. Aïe! je vais finir par
l'apprendre. Je regarde toujours mon collègue.
Mme Baig (Kathy) : Éviter,
réduire, compenser.
Mme LeBel : Et voilà. Donc, et
zéro perte nette. Donc, ces principes-là ne se veulent pas, dans les objectifs,
être affectés par les processus du projet de loi n° 66. Donc, l'idée,
c'est qu'on dit effectivement... on dit, bon : «Un organisme public qui
réalise une activité visée à l'article 22 ou 30 — et ça, c'est
l'article 22 et 30 de la Loi sur la qualité de l'environnement, ça peut devenir
mêlant parce que c'est 22, 23 du projet n° 66 — n'a
pas à obtenir l'autorisation en application.» Donc, ça, c'est le chemin de la
déclaration de projet qu'on a créé dans le projet de loi. «Toutefois, une telle
autorisation demeure requise pour les activités, les travaux, les
constructions, toute intervention réalisée dans des milieux humides et
hydriques.» Donc, est-ce qu'il y a quelque chose dans cette rédaction-là qui
vous fait penser qu'on contourne les principes en matière de milieux hydriques
et humides? Et quelle est la clé, pour vous, qui vous fait penser ça, pour
qu'on puisse y réfléchir correctement, là?
Mme Baig (Kathy) : Bon, la
compréhension que l'on en a, c'est que, pour les milieux humides, si on peut
remettre en état à l'intérieur d'un an, il n'y a pas nécessité d'aller chercher
de certificat d'autorisation. C'est ce qu'on en a compris.
Maintenant, je ne doute pas du tout de
l'intention du gouvernement de répondre à zéro perte nette, avec éviter,
réduire, compenser. Maintenant, même si l'intention est telle, en ayant
consulté des gens, une des préoccupations, et c'est ce qu'on expose dans le
mémoire, c'est que, s'il n'y a pas d'études qui sont faites dès le départ, si
on ne sait pas exactement d'où on part, on fait des travaux, comment on peut
s'assurer qu'un an après c'est...
Mme Baig (Kathy) : ...de
répondre à zéro perte nette avec éviter, réduire, compenser. Maintenant, même
si l'intention est telle, en ayant consulté des gens, une des préoccupations,
et c'est ce qu'on expose dans le mémoire, c'est que, s'il n'y a pas d'études
qui sont faites dès le départ, si on ne sait pas exactement d'où on part, on
fait des travaux, comment on peut s'assurer qu'un an après c'est revenu
conforme à ce que c'était. Donc, dans le cadre du chantier, les mesures qui
peuvent être prises, les travaux qui peuvent être faits, on sait que c'est des
milieux qui sont sensibles et donc comment s'en assurer? C'est là où on a des
préoccupations.
J'ai écouté d'autres personnes qui sont
venues également à la commission. Je pense que c'est le comité sur les droits
de l'environnement ou le groupe et d'autres. Donc, je pense qu'on est
quelques-uns à partager, je veux réitérer, on ne doute pas des intentions du
gouvernement, c'est juste que, parfois avec des processus comme ça, est-ce
qu'on va être capable de réellement atteindre objectifs pendant les travaux si
on ne contrôle pas exactement ce que l'on fait s'il n'y a pas eu de certificat
d'autorisation dès le départ? On n'est pas convaincu que ça va être zéro perte
nette à la fin du projet même si telle était l'intention. Donc, je ne sais pas,
peut-être que ce n'est pas le certificat d'autorisation, la bonne approche.
C'est peut-être une autre approche pour s'assurer qu'à la fin du projet on
vraiment atteint le zéro perte nette. C'est vraiment ça, nous, qui est derrière
la préoccupation qui est exposée dans le mémoire.
• (11 h 10) •
Mme LeBel : O.K. Donc, c'est
vraiment la particularité quand on dit : «lorsque le projet ne prévoit pas
la remise en état, dans l'année suivant la fin des travaux, des milieux
affectés de sorte que ceux-ci retrouvent...», bon. Donc, c'est de s'assurer de
la remise en état. Et quelle est cette remise en état là? Pour faire en remise
en état, il faut toujours bien savoir quel état préalable. O.K. Donc, c'est par
rapport à... vraiment par rapport à ce qui touche les milieux hydriques et
humides, parce que, naturellement, ce processus-là de déclaration de projet est
fait aussi d'autres dossiers qui ne touchent pas des milieux humides et
hydriques, il peut y avoir d'autres enjeux environnementaux. Parfait. C'est
bien noté, puis on va y réfléchir. Merci beaucoup, Mme Baig.
Mme Baig (Kathy) : Excellent.
Merci beaucoup.
Mme LeBel : Je n'ai pas
d'autre question pour ma part, M. le Président.
Le Président (M. Simard) :
Merci, Mme la présidente du Conseil du trésor. Je cède maintenant la parole au
député de La Pinière. Vous disposez de 10 min 40 s, cher
collègue.
M. Barrette : Merci, M. le Président.
Mme Baig, bienvenue. Je suis content d'entendre de votre bouche avec des
mots différemment... différents, pardon, que, lorsque le bulldozer a écrasé la
grenouille, c'est difficile de sauver la grenouille à la fin et de la ramener
après son état initial. Merci de l'avoir dit, je vais reprendre vos paroles,
qui sont plus élégantes que les miennes mais qui disent la même chose.
Regardez, je souscris à la quasi-totalité
de votre mémoire et je ne veux pas le reprendre parce qu'à un moment donné ça
fait une certaine répétition. Je veux aborder des éléments qui n'ont pas
souvent été abordés. Je veux en aborder un en particulier en prenant un ou deux
exemples, O.K.?
Dans le merveilleux monde de la santé,
j'ai été personnellement, puis je l'ai déjà dit, à plusieurs reprises témoin
d'un certain nombre de choses, je vous donne des exemples. Je visite un
chantier. Je vois à l'oeil nu, parce que j'ai une certaine connaissance de ça,
que le gypse qui est installé, c'est du demi-pouce au lieu du trois quarts. Le
code du bâtiment dans les endroits publics, c'est du trois quarts. Bon, on
regarde derrière le gypse, c'est des tuyaux de cuivre d'un demi-pouce, et le
devis était du trois quarts de pouce. Je visite...
M. Barrette : ...visite un
chantier. Je vois à l'oeil nu, parce que j'ai une certaine connaissance de ça,
que le gypse qui est installé, c'est du demi-pouce au lieu du trois quarts. Le code
du bâtiment dans les endroits publics, c'est du trois quarts. Bon, on regarde
derrière le gypse, c'est des tuyaux de cuivre d'un demi-pouce, et le devis
était du trois quarts de pouce.
Je visite comme ministre un grand chantier
hospitalier qu'on a eu dans le passé, puis on a été obligé sur une partie du
bâtiment substantielle, genre 5 millions de dollars, de refaire tout
le filage électrique parce que le filage n'était pas de bonne... de qualité
requise.
Vous avez entendu comme moi les
entrepreneurs venir, ici, demander... Puis vous l'entendez, là, à répétition,
vous en avez parlé vous-mêmes sur l'enjeu de changer les critères
d'adjudication. Alors, je vais vous poser une question bien simple.
Trouvez-vous qu'au Québec, au moment où on se parle, si la qualité n'est pas au
rendez-vous, c'est un problème de devis qui ne vise pas la qualité en étant
assez précis, ou bien un problème de surveillance si le devis a été bien fait,
ou bien les deux?
Mme Baig (Kathy) : Bien,
moi, je pense que lorsqu'on parle de qualité, ça ne peut pas être seulement une
variable. Puis si on veut augmenter la qualité des infrastructures, des
bâtiments au Québec, il faut regarder là où on peut améliorer. Donc, pour
répondre à votre question, je vous dirais que c'est les deux. Je pense qu'au
niveau des appels d'offres il y a une opportunité d'amélioration pour s'assurer
que les soumissionnaires choisis sont ceux qui vont livrer la qualité choisie.
Je pense que ça en fait état dans notre mémoire. Et sur le chantier, je pense
que la présence des surveillants de chantier sont une valeur ajoutée pour
augmenter la qualité. Donc, pour répondre à votre question, et je pense que
notre mémoire en fait état, ce serait, entre autres, les deux pour augmenter la
qualité et bien d'autres paramètres également.
M. Barrette : Alors, je
vais prendre un exemple qui est donné là, puis je ne veux pas vous mettre sur
la sellette, là, mais je prends un exemple que tout le monde connaît, la chique
qualité des travaux d'asphalte au Québec, je le dis de façon ironique.
Mme Baig (Kathy) : Oui.
M. Barrette : C'est
possible que la qualité de l'asphalte qu'on a mis dans le devis ne soit pas
suffisante, c'est possible que, sur certaines routes, on choisisse de
construire en asphalte plutôt qu'en ciment et c'est possible que la
surveillance de l'application de ces produits-là ne soit pas optimale. Est-ce
qu'on peut dire ça?
Mme Baig (Kathy) : Si
l'asphalte est de mauvaise qualité, ce sont tous des éléments tout à fait qui
peuvent être des causes à une mauvaise qualité de l'asphalte.
M. Barrette : Moi, je
vous dis... Je veux tout simplement l'entendre de votre bouche, là. Quand on
construit quelque chose, il y a la qualité des matériaux utilisés et il y a
l'installation, l'exécution des travaux qui est une deuxième chose. S'il n'est
pas spécifiquement identifié au devis la qualité des travaux et que la
surveillance n'est pas là, bien, ça donne des roulières dans l'asphalte un an
après, ce que l'on voit. D'accord, j'ai vu ça hier, là. En s'en venant à
Québec, là, il y avait beaucoup d'aquaplaning parce que, dans les roulières,
quand il y a de la pluie comme hier puis un peu de la neige mouillée, ça fait
ça. Maintenant, vous, la solution pour ça, là... Parce que la ministre nous
dit, elle-même, qu'elle veut regarder ça...
M. Barrette : ...ce que l'on voit...
D'ailleurs, j'ai vu ça hier, là, en s'en venant à Québec, là, il y avait
beaucoup d'aquaplaning, parce que dans les roulières, quand il y a de la pluie
comme hier puis un peu de la neige mouillée, ça fait ça.
Maintenant, vous, la solution pour ça,
là... Parce que la ministre nous dit elle-même qu'elle veut regarder ça,
l'enjeu de l'adjudication des contrats. Je suis d'accord avec vous qu'il peut y
avoir et qu'il y a plusieurs critères à mettre en place, mais si le premier
critère de tous, qui est la qualité des produits utilisés, n'est pas au
rendez-vous, et que le deuxième élément est celui de la surveillance des
travaux, bien, qu'on nous ramène, là, des patentes comme l'innovation, le côté
durable, et ainsi de suite, ça ne sert à rien. Tous ces éléments-là viennent
après dans la séquence des évaluations. Puis je ne dis pas qu'il ne faut pas
les avoir. Je dis que ça vient après la certitude que, dans le devis, on a
demandé des produits de qualité x, appliquée avec une surveillance y.
Est-ce que là-dessus, là, comme
ingénieure... là, vous avez une pensée, normalement, cartésienne... est-ce que
vous êtes d'accord avec moi?
Mme Baig (Kathy) : Oui, je
suis d'accord avec vous. J'ajouterais peut-être deux choses. Au niveau de la
qualité, moi, je suis d'avis que l'innovation... (panne de son) ...et les
recherches qui sont faites actuellement en amont pour innover ces produits-là,
pour avoir une meilleure qualité, par exemple, dans... (panne de son) ...devis.
Donc, l'innovation, selon moi, peut être faite également en amont pour
développer des produits de meilleure qualité.
Et l'autre élément que j'ajouterais, la
qualité aussi est fonction du mandat qui est donné par le donneur d'ouvrage.
Donc, l'ingénieur est tributaire du mandat qui est donné par le donneur
d'ouvrage au sens large. Donc, parfois, l'ingénieur est pris dans le système
dans lequel... puis je dis «pris», ce n'est peut-être pas le bon mot... doit
naviguer dans les paramètres qu'on lui donne pour développer le devis et le
produit demandé. Donc, la qualité, c'est vraiment la responsabilité de
plusieurs pour obtenir ce qu'on cherche.
M. Barrette : Mais on
s'entend, Mme Baig, là... mais l'innovation, et ce genre de chose là, là, ça ne
doit pas être des mots creux. Ça doit obligatoirement se traduire par quelque
chose de précis dans le devis. C'est ce que je pense.
Maintenant, vu...
Mme Baig (Kathy) : Oui.
M. Barrette : Bien, vous dites
oui. Là, c'est parfait.
Autre question. Vous avez abordé la
question, l'enjeu... puis vous n'avez pas élaboré, je vous demanderais
d'élaborer là-dessus. À date, là, dans la commission, là, on parle
d'environnement, d'environnement, d'environnement, là. Vous êtes la première à
nous parler d'expropriation. Pouvez-vous nous en parler, des enjeux que vous
voyez dans ce... dans n° 66, et ailleurs?
Mme Baig (Kathy) : Bien, au
niveau de l'expropriation, on a été très brefs dans notre mémoire.
M. Barrette : J'ai vu.
Mme Baig (Kathy) : Ce n'est
pas un des volets qu'on a explorés dans le détail. À cet effet-là, je peux
peut-être demander à mon collègue, Me Robert, s'il a des éléments. Parce que
nous, on s'est vraiment concentrés plus sur les pouvoirs de l'AMP, la partie
environnementale.
Donc, je ne sais pas, Me Robert... si je
mets sur «mute»... si tu as des éléments que tu veux ajouter?
M. Robert (François-Xavier) :
Oui. Je ne sais pas si vous m'entendez bien... député?
M. Barrette : Très bien.
M. Robert (François-Xavier) :
Bien, en fait, sur l'expropriation, c'est sûr que les ingénieurs ne sont pas
les...
Mme Baig (Kathy) :
...concentrer plus sur les pouvoirs de l'AMP, la portée environnementale. Donc,
je ne sais pas, Me Robert, si — je mets sur «mute» — si tu
as des éléments que tu veux ajouter.
M. Robert (François-Xavier) :
Oui. Je ne sais pas si vous m'entendez bien, député...
M. Barrette : Très bien.
M. Robert (François-Xavier) :
Bien, en fait, sur l'expropriation, c'est sûr que les ingénieurs ne sont pas
les principales personnes, évidemment, ce sont surtout des évaluateurs agréés,
mais ils travaillent quand même sur des projets qui nécessitent des
expropriations, donc on a un petit peu de familiarité.
Je vous dirais que les deux éléments qu'on
trouvait positifs... le premier, c'est le fait que la plus-value qui est due à
l'annonce du projet n'est pas considérée pour établir la valeur, dans le fond,
de l'indemnité de l'expropriation. Souvent, c'est quelque chose qu'on a vu dans
le milieu municipal, où des promoteurs avaient, par contre, par exemple, de l'information
confidentielle qu'ils n'étaient pas supposés avoir à l'effet qu'un projet qui
allait se réaliser, ça... Ils achètent un terrain pour une bouchée de pain
parce que le terrain ne vaut rien, en ce moment, puis la journée après où le
projet est annoncé, bien, le terrain peut doubler de valeur. C'est un beau
profit. C'est quelque chose qui, pour nous, cause toujours des... peut-être un
certain malaise, surtout par rapport à la perception que le public peut avoir, à
ce moment-là, des projets d'infrastructure publics, justement.
Et l'autre élément, c'est pour des
projets, je dirais, qui sont particulièrement essentiels, voire vitaux pour la société.
Le fait qu'on ne puisse pas contester l'expropriation, dans ces cas-là, je ne
parle pas de tous les projets, mais je parle de ces projets-là, par exemple, le
REM, on l'a vu, bien, pour nous, ça pourrait être quand même positif, parce que
c'est des projets qui effectivement peuvent créer des inconvénients pour
certaines personnes mais que pour... l'ensemble de la collectivité, ils vont
grandement en bénéficier. Donc, c'est des choses, au niveau de l'expropriation,
qu'on... de façon quand même relativement positive puis qui pourraient peut-être
servir plus tard pour une éventuelle révision de la loi.
Le Président (M. Simard) : ...
M. le député d'Outremont... Mont-Royal—Outremont, pardon.
• (11 h 20) •
M.
Arcand
:
Merci. Je suis en train de regarder un peu votre mémoire, et c'est un... Vous
dites : On est d'accord avec le principe du projet de loi, c'est-à-dire
l'accélération ou, enfin, la réalisation d'infrastructures publiques. Vous êtes
d'accord avec ça.
La seule chose, c'est que quand je lis un
peu tout le reste, vous le faites avec beaucoup de suspicion, si vous me
permettez l'expression, dans le sens où vous dites, par exemple : Bien, premièrement,
il manque de monde au ministère des Transports, il manque de monde au ministère
de l'Environnemet. Vous dites : «La volonté d'accélérer la réalisation d'infrastructures
ne doit pas se traduire en une réduction du temps consacré à la conception de
l'ouvrage.» Puis vous dites, en plus : «Bâcler la phase de conception par
désir d'aller rapidement entraîne généralement des retards de construction et
une diminution de la qualité de l'ouvrage.» On ne peut pas dire que vous
l'appuyez avec un enthousiasme très débordant, c'est le moins que je puisse
dire.
Mme Baig (Kathy) : Donc, on
appuie le projet de loi, je pense qu'on le mentionne clairement, qu'on comprend
la nécessité de faire de l'accélération, mais, en même temps, on connaît la
réalité sur le terrain et on est là pour appeler à la prudence. Donc, déjà, il
y a des projets qui ne sont pas en mode accéléré, et on voit...
Mme Baig (Kathy) : Donc, on
appuie le projet de loi. Je pense qu'on le mentionne clairement qu'on comprend
la nécessité de faire de l'accélération, mais en même temps on connaît la
réalité sur le terrain et on est là pour appeler à la prudence. Donc, déjà, il
y a des projets qui ne sont pas en mode accéléré, et on voit toutefois la
conception, elle se passe trop rapidement. Puis, les études le montrent, ce
n'est pas juste nous qui le disons, c'est que lorsque la partie conception, on
ne prend pas le temps de bien la faire, c'est tout le cycle de vie de l'ouvrage
par la suite qui va en payer le prix, c'est la mise en oeuvre sur le chantier
qui va être difficile. Donc, oui à l'accélération, mais là où on est certain qu'il
n'y aura pas trop d'impact, et non à bâcler la conception, parce que les
impacts peuvent être trop grands. Ça fait que je ne sais pas si ça répond à
votre question, mais c'est cette nuance-là qu'on vient apporter dans le
mémoire, parce qu'«accélération» au sens large, dépendamment d'où on le fait...
Le Président (M. Simard) :
Merci, Mme Baig, merci.
Mme Baig (Kathy) : Merci.
Le Président (M. Simard) :
Alors, M. le député de Rosemont.
M. Marissal : Merci, M. le
Président. Bonjour, madame, bonjour, monsieur, merci d'être là. Je vous
lis : «L'ordre estime que le recours à des mesures d'accélération en
matière d'environnement de la nature de celles prévues au projet de loi n'est
pas nécessairement la meilleure solution pour favoriser la réalisation rapide
de projets de qualité.» Parlant de qualité, je voudrais souligner la qualité de
votre mémoire, et en particulier de ce paragraphe, que je vais certainement
imprimer en caractères 42 pour l'afficher dans mon bureau, parce que je trouve
que ça résume assez bien un problème majeur du projet de loi n° 66,
qui est d'aller trop vite en passant par-dessus certaines évaluations
environnementales. Vous continuez en disant : «En ce sens-là, il croit
qu'il pourrait être plus efficace, particulièrement à long terme, d'apporter
des améliorations à la dotation.» Ça a été dit, vous n'êtes pas la première à
le dire. Vous citiez des lacunes relevées par la Vérificatrice générale en juin
dernier. Ça a été dit et redit ici, là, ça semble être comme une évidence dont
on ne s'occupe plus, mais que c'est une vérité de La Palice qu'il manque plein
de monde à des postes clés, notamment en Environnement et en Transports.
Là où
j'accroche, et je veux vous entendre là-dessus, c'est que vous dites qu'«En ce
sens, l'ordre croit qu'il pourrait être plus efficace, particulièrement à long
terme.» Là, le problème, c'est que 66, c'est du très court terme, là, c'est là,
là, là, demain, là, on commence demain. Alors, dans les circonstances,
vaudrait-il mieux biffer certains articles de loi pour éviter ça?
Mme Baig (Kathy) : Écoutez,
ça, je pense, je vais laisser vous les élus, les parlementaires en décider
suite à toutes ces consultations. Est-ce que ça vaut la peine de biffer
certains articles de loi? Je ne suis pas sûre que je peux vraiment répondre à
la question. Nous, ce qu'on a dit, c'est qu'on veut rajouter des ressources
pour répondre aux besoins à long terme. Maintenant, le temps d'ajouter ces
ressources-là, est-ce que cette dotation-là va venir, être prête pour le projet
de loi n° 66, pour les projets qui sont là? Je ne le
sais pas. Je pense que ça prend une analyse plus détaillée pour voir si c'est
possible de le faire. Donc, malheureusement, je ne peux pas vous répondre, en
clair, qu'on devrait biffer ces articles de loi là totalement. Nous, on
dit : Il faudrait peut-être évaluer en parallèle la dotation du...
Mme Baig (Kathy) : ...façon-là
va venir... être prête pour le projet de loi n° 66,
pour les projets qui sont là? Je ne sais pas, je pense que ça prend une analyse
plus détaillée pour voir si c'est possible de le faire. Donc, malheureusement,
je ne peux pas vous répondre en clair si on devrait biffer ces articles de loi
là totalement. Nous, on dit : Il faudrait peut-être évaluer en parallèle
la dotation du ministère.
Le Président (M. Simard) :
...en conclusion.
M. Marissal : Vous faites un
grand bout de chemin, là, dans votre mémoire, mais vous ne me semblez pas
franchir la dernière ligne, qui est celle de dire : Dans les circonstances,
avec les pénuries de main-d'oeuvre qu'on connaît, dans l'expertise à l'interne,
on serait peut-être mieux de ne pas aller là. Je ne veux pas vous mettre des
mots dans la bouche, là, mais il me semble que vous êtes à la... en termes
footballistiques, vous êtes à la ligne de 1 puis vous ne vous étirez pas le
bras pour passer le ballon, là.
Mme Baig (Kathy) : Désolée, ma
connaissance au football... Mais, en fait, non, je ne pense pas que c'est ça
qu'on dit, je ne pense pas que c'est ça qu'on dit...
M. Marissal : Il s'agit de
compter un but, essentiellement.
Mme Baig (Kathy) : J'ai
compris, mais pour de vrai, je ne pense pas que c'est ça qu'on dit dans le
mémoire, parce que, d'entrée de jeu, on reconnaît le besoin de faire de
l'accélération sur des projets d'infrastructure dans une situation comme celle
qui est la suivante. Je pense qu'on l'a reconnu, là, dans le mémoire. Donc, je
ne suis pas certaine que c'est là qu'on va dans le mémoire. On dit : Oui,
on comprend, il y a peut-être des alternatives, prudence à la collusion, aux
sonneurs d'alerte. Donc, c'est plus de la prudence qu'on amène.
Le Président (M. Simard) :
Merci, Mme Baig. M. le député de Jonquière.
M. Gaudreault : Oui, merci.
Merci de votre mémoire. Comme ingénieurs, vous êtes sûrement habitués à
travailler avec les règlements d'application en fonction des impacts sur
l'environnement. Plusieurs groupes dont entre autres un autre ordre
professionnel, celui des urbanistes, nous ont dit : Bien, le REAFIE vient
juste d'être adopté, il va entrer en vigueur fin décembre. Est-ce que vous êtes
d'avis que ça vaudrait le coup de tester le REAFIE avant de sortir le bulldozer
en matière environnementale avec le projet de loi n° 66?
Parce que le REAFIE vise justement à réduire entre autres les délais.
Mme Baig (Kathy) : Donc, ça,
c'est une excellente question. Je pense qu'on en parle également un peu dans le
mémoire. Effectivement, on s'est questionné à savoir pourquoi le gouvernement
n'a pas souhaité utiliser le REAFIE au lieu d'utiliser des mesures
d'accélération dans le projet de loi n° 66. Je n'ai
pas de réponse à cette question-là. On est arrivé à la conclusion que peut-être
que le temps que le REAFIE soit mis en place, qu'on optimise le REAFIE, que les
processus soient mis en place, ce serait trop long pour les projets qui sont
dans le projet de loi n° 66. Mais, honnêtement, on
n'a pas de réponse et on s'est questionné un peu à cet effet-là.
M. Gaudreault : Bon, on est à
la même place, on se questionne beaucoup aussi, d'autant plus que le REAFIE,
c'est quand même entre les mains du gouvernement, on n'a pas besoin de passer
par les parlementaires. Alors, c'est bien.
Maintenant, quand vous dites, à la recommandation
n° 6, faire preuve de prudence dans le traitement des
demandes de consultation de médiation, faire preuve de prudence, c'est jusqu'où
qu'on va dans la prudence?
Mme Baig (Kathy) : Bien,
jusqu'où on va, on va laisser aux décideurs le soin d'exercer cette
prudence-là, il va falloir qu'ils regardent chacun des projets, qu'ils
déterminent lesquels nécessitent vraiment une consultation, lesquels
nécessitent une médiation, mais on rappelle que la consultation, c'est un des
processus par lequel l'acceptation sociale aide aux projets...
Mme Baig (Kathy) :
...bien, jusqu'où on va... On va laisser aux décideurs le soin d'exercer cette
prudence-là. Il va falloir qu'ils regardent chacun des projets, qu'ils
déterminent lesquels nécessitent vraiment une consultation, lesquels
nécessitent une médiation. Mais on rappelle que la consultation, c'est un des processus
par lesquels l'acceptation sociale aide au projet. C'est une participation
citoyenne aussi au développement économique.
Donc, on n'a pas de problème que, certains
projets, il n'y ait pas de consultation, mais peut-être que d'autres en
nécessiteraient. Je n'ai pas fait l'analyse des 181 projets. Je n'ai pas
fait l'analyse de quels devraient le faire ou non, mais on invite le décideur à
se doter, là, d'une certaine prudence puis de garder en tête le rôle du citoyen
dans ces processus-là.
M. Gaudreault : C'est
bien. Donc, est-ce que vous seriez d'avis qu'au fond, en matière
d'environnement, dans un contexte unique comme celui que nous vivons
présentement, avec une crise sans précédent, c'est une occasion ratée au fond?
Le gouvernement aurait pu vraiment changer les façons de faire et aller
davantage dans des projets de relance favorables à l'environnement comme, par
exemple, les traitements des eaux usées ou d'autres.
Mme Baig (Kathy) : Oui.
J'ai vu une commission où des intervenants étaient venus proposer d'autres
projets. Moi, ce que j'ai compris de l'intention du gouvernement actuellement,
c'est que, ça, c'est un des moyens pour la relance, qu'ils en ont d'autres
qu'ils vont proposer. Quels seront-ils? Je ne le sais pas. Mais effectivement,
dans notre optique de vision de développement durable qu'on a pris à l'ordre,
on invite le gouvernement à avoir...
Le Président (M. Simard) :
Merci.
Mme Baig (Kathy) :
...d'autres projets dans ce sens-là. Merci.
Le Président (M. Simard) :
Alors, merci. Merci beaucoup, Mme Baig. C'est là le temps dont nous
disposions pour votre présentation. À nouveau merci, donc, pour votre précieuse
contribution à nos travaux. Alors, chers collègues... Chers collègues, compte
tenu de l'heure, nous allons suspendre. Et on se retrouve quelque part après
les affaires courantes. Donc, n'allez pas trop loin. À bientôt.
(Suspension de la séance à 11 h 29)
15 h 30 (version non révisée)
(Reprise à 15 h 40)
Le Président (M. Simard) :
Alors, chers collègues, à l'ordre! Je constate que nous avons quorum, nous
pouvons reprendre nos travaux. Comme vous le savez, la commission est réunie
afin de poursuivre les auditions publiques sur le projet de loi n° 66,
Loi concernant l'accélération de certains projets d'infrastructure.
Et nous reprenons, cet
après-midi, avec des représentants de l'Association des constructeurs de routes
et grands travaux du Québec. Nous avons un petit problème technique qui nous
empêche de voir, comme tel, Mme Bourque, mais qui est bien présente parmi nous.
Bonjour, Mme Bourque.
Mme Bourque
(Gisèle) : Oui. Bonjour.
Le Président (M.
Simard) : Ainsi que M. Marcoux, qui est le président du conseil
d'administration. Donc, à vous deux, merci d'être avec nous. Et, Mme Bourque,
donc, nous vous écoutons, j'allais dire, religieusement.
Mme Bourque (Gisèle) : Merci.
Alors, M. le Président, Mme la ministre, Mmes et MM. les députés, nous vous
remercions de l'occasion qui nous est offerte aujourd'hui de vous présenter le point
de vue de l'Association des constructeurs et grands travaux du Québec à l'égard
du projet de loi n° 66. Je me présente, Gisèle
Bourque, avocate, directrice générale de l'ACRGTQ. Pour cette présentation, je
suis accompagnée de M. Sébastien Marcoux, président du conseil d'administration
de l'association.
Nous nous permettons de vous rappeler que
l'ACRGTQ, incorporée en 1944, représente la majorité des principaux entrepreneurs
et fournisseurs oeuvrant dans la construction de routes, d'ouvrages de génie
civil et de grands travaux. Elle est la seule représentante attitrée du secteur
génie civil et voirie de l'industrie de la construction. À ce titre, elle
représente près de...
Mme Bourque (Gisèle) :
...représente la majorité des principaux entrepreneurs et fournisseurs oeuvrant
dans la construction de routes, d'ouvrages de génie civil et de grands travaux.
Elle est la seule représentante attitrée du secteur génie civil et voirie de l'industrie
de la construction. À ce titre, elle représente près de 2 500 entreprises
actives au sein de l'industrie de la construction de routes, d'ouvrages de
génie civil et de grands travaux, lesquelles emploient plus de 40 000
salariés, ayant travaillé 34,9 millions d'heures en 2019.
L'ACRGTQ est en accord avec l'objectif du
projet de loi, soit l'accélération de certains projets d'infrastructure, dans
un but de relance économique, à la suite de la pandémie liée au virus de
COVID-19. Nous croyons que cette relance économique peut et doit se réaliser en
respect des règles d'intégrité des contrats publics.
Les propositions de l'ACRGTQ au regard du
projet de loi concernent essentiellement l'accès aux liquidités pour les
entreprises du secteur de la construction, le règlement des différends en
chantier, les nombres d'octrois de contrats plus collaboratifs et les nouveaux
pouvoirs de l'Autorité des marchés publics. D'entrée de jeu, nous vous
soumettons que ce projet de loi constitue une opportunité d'introduire un mode
de règlement des différends et de mettre fin aux délais de paiement abusifs dans
l'industrie de la construction.
Dans une perspective de favoriser la
relance de l'économie du Québec, le gouvernement se doit de favoriser l'accès
aux liquidités pour les entrepreneurs. Des mesures similaires à celles prévues
au projet pilote du Conseil du trésor concernant le calendrier de paiement et
l'intervenant expert doivent s'appliquer non seulement pour les 181 projets de
l'annexe I, mais aussi à l'ensemble des contrats publics de la construction. Le
projet de loi n° 66 est le véhicule législatif
approprié pour apporter de tels changements afin de régler définitivement les
retards de paiement injustifiés de donneurs d'ouvrage, lesquels ont un effet
multiplicateur sur l'ensemble des cocontractants, petits, moyens, grands
entrepreneurs et fournisseurs.
Le projet pilote est particulièrement
important pour le domaine du génie civil et de la voirie, puisqu'il résout les
problématiques liées aux délais lors de l'acceptation du décompte progressif,
au final, par le donneur d'ouvrage. Il permet aussi de solutionner rapidement,
dans le cadre de l'exécution des travaux, les différends qui concernent
notamment le paiement des avenants, des réclamations et des retenues. Ce
faisant, l'ACRGTQ ne trouve aucune justification valable pour limiter ces
mesures aux contrats de moins de 20 millions de dollars, puisque les
délais de paiement sont tout autant présents pour les projets de grande
envergure et compromettent la sécurité financière d'une longue chaîne
d'entrepreneurs.
De plus, l'ACRGTQ craint que la
prolongation de cinq ans du projet pilote, telle que prévue au projet de loi,
retarde l'émission du rapport du Conseil du trésor et l'adoption d'un cadre
réglementaire ou législatif permanent, qui est grandement attendu par
l'industrie. L'Ontario a, pour sa part, intégré de telles mesures dans sa loi
sur la construction le 1er octobre 2019. Ainsi, nous recommandons de retirer
l'alinéa 2 de l'article 66 du projet de loi.
En outre, voici certaines recommandations
de l'ACRGTQ visant à permettre l'accès aux...
Mme Bourque (Gisèle) : ...réglementaire
ou législatif ou permanent qui est grandement attendu par l'industrie. L'Ontario
a, pour sa part, intégré de telles mesures dans sa loi sur la construction le
1er octobre 2019. Ainsi, nous recommandons de retirer l'alinéa 2 de l'article
66 du projet de loi.
En outre, voici certaines recommandations
de l'ACRGTQ visant à permettre l'accès aux liquidités aux entrepreneurs :
appliquer le projet pilote aux 181 projets d'infrastructure de l'annexe I du
projet de loi sans égard à la valeur du contrat; rendre permanentes des mesures
similaires à celles prévues au projet pilote pour tout contrat public de
construction; retirer de la formation actuelle de l'article 66 du projet de loi
l'exception «à moins que le mode de réalisation du contrat ou du sous-contrat
ne permette pas l'application d'un calendrier mensuel de paiement. Également,
afin de contribuer à l'accélération des chantiers, et sans remettre en doute le
cadre législatif propre à l'octroi des contrats publics, nous croyons que des
changements quant aux règles d'adjudication des contrats seraient de nature à
accélérer les mises en chantier, favoriseraient l'innovation et amélioreraient
la collaboration entre les donneurs d'ouvrage et les entrepreneurs, tout en
s'assurant du juste prix.
La règle du plus bas soumissionnaire
conforme restreint la possibilité pour les organismes publics d'avoir recours à
des modes d'attribution de contrat mieux adaptés pour les travaux à effectuer
en accordant une trop grande importance au prix. Elle restreint aussi la capacité
pour les entrepreneurs, pour certains contrats, de proposer des alternatives
parfois moins coûteuses et plus durables. Le gouvernement se prive ainsi d'une
importante source d'innovation.
Tel que démontré sur de nombreux chantiers au
Québec, au Canada et dans d'autres pays, l'adoption de modes d'adjudication
adaptés à la nature des projets à réaliser, au lieu de privilégier
systématiquement le plus bas soumissionnaire en mode traditionnel, réduirait le
temps de conception et de réalisation des projets, tout en réduisant le coût de
réalisation de ceux-ci, sans porter atteinte à la probité des marchés publics.
Qui plus est, le recours à des modes d'adjudication qui ne priorisent pas
uniquement le prix le plus bas, mais l'offre de meilleure qualité n'ouvre pas
la porte à la corruption ou à la collusion. En effet, le recours à ces modes
permet de respecter les principes importants que sont l'intégrité du processus,
l'égalité des soumissionnaires ou l'intérêt des contribuables.
Ainsi, l'ACRGTQ propose de permettre
l'adjudication de certains projets de l'annexe I selon des modes mieux adaptés
aux projets à réaliser. Également, l'ACRGTQ est favorable à l'adoption de
mesures propres à accroître les pouvoirs de surveillance des marchés publics de
l'AMP pour les projets de l'annexe I. Néanmoins, de tels pouvoirs incitent à la
prudence, puisqu'ils visent certains documents considérés comme confidentiels
par l'entrepreneur ou le sous-traitant, notamment lorsqu'ils visent des secrets
commerciaux ou lorsqu'ils sont protégés par le secret professionnel.
En terminant, le comité d'experts
indépendants sur la programmation 2019‑2021 du MTQ faisait toujours état d'une
détérioration du réseau, avec un déficit de maintien d'actifs de
16,4 milliards de dollars en 2019. Ce faisant, nous proposons d'ajouter
plus de travaux de réfection des infrastructures routières à la liste des
projets de l'annexe I. En somme, bien que l'ACRGTQ anticipe favorablement les
effets de ce projet de loi sur le secteur du génie civil et voirie, les parlementaires
ont aussi l'occasion d'aller beaucoup plus loin, notamment pour favoriser
l'accès à des liquidités pour corriger plusieurs problématiques qui
ralentissent l'exécution des chantiers.
En terminant, tout comme le gouvernement,
l'ACRGTQ reconnaît que la préoccupation constante doit demeurer le maintien de
l'intégrité de l'industrie ainsi que la...
Mme Bourque (Gisèle) : ...les
effets de ce projet de loi sur le secteur du génie civil et voirie, les
parlementaires ont aussi l'occasion d'aller beaucoup plus loin, notamment pour
favoriser l'accès à des liquidités pour corriger plusieurs problématiques qui
ralentissent l'exécution des chantiers.
En terminant, tout comme le gouvernement,
l'ACRGTQ reconnaît que la préoccupation constante doit demeurer le maintien de
l'intégrité de l'industrie ainsi que la protection des entrepreneurs honnêtes
et respectueux des lois et des règlements en vigueur qui représentent
majoritairement l'industrie de la construction. Nous vous remercions de votre
attention.
Le Président (M. Simard) :
Alors, merci à vous, Mme Bourque. Avant d'entreprendre notre période
d'échange, j'aurais une toute petite question d'intendance à régler avec vous. Étant
donné nos problèmes techniques de branchement tout à l'heure, on a pris
10 minutes de retard. Je pense que nous serons en mesure de pouvoir les
récupérer comme on le fait d'habitude. Mais, quand même, ayons la bretelle et
la ceinture. Y aurait-il consentement afin, éventuellement, au besoin, d'aller
légèrement au-delà du temps prévu cet après-midi? Il y a consentement. Très
bien, merci.
Mme la ministre, conséquemment, vous
disposez de 16 minutes.
Mme LeBel : Merci, M. le
Président. Merci, Mme Bourque, de votre présentation. Peut-être quelques petits
points que j'aimerais aborder avec vous. Mais je vais peut-être terminer...
commencer par la fin de votre présentation.
Les pouvoirs qui ont été élargis et
attribués à l'AMP dans le cadre du projet de loi n° 66 pour permettre la
surveillance... une surveillance plus accrue, si on veut, des 181 projets
qui sont à l'annexe du projet de loi. Vous dites que vous êtes «favorables à l'adoption
des mesures susceptibles d'accroître le pouvoir de surveillance de l'Autorité
des marchés publics», naturellement. Mais vous avez un bémol par rapport au
pouvoir d'enquête qui est donné à l'AMP, pouvoir qui n'existe pas par rapport, présentement,
aux contractants ou aux sous-contractants d'aller chercher de la documentation,
justement, dans le cadre de son pouvoir d'enquête de surveillance non seulement
de l'adjudication des contrats, mais de la gestion du contrat.
• (15 h 50) •
Vous dites qu'effectivement, «dans le
cadre des nouveaux pouvoirs, l'AMP pourra imposer à tout contractant ou
sous-contractant et à toute autre personne ou société de personnes la communication
de renseignements concernant un contrat public.» Et vous dites que ça «incite à
la prudence considérant les documents considérés comme confidentiels par
l'entrepreneur» ou liés par un secret quelconque. Dans le cadre d'une enquête,
il y a quand même une confidentialité au niveau de l'enquête, puis il faut
quand même donner à l'AMP le loisir d'aller faire les vérifications qu'elle
doit faire dans les circonstances.
Alors, vous nous... Est-ce que vous...
Comment vous nous proposez, là, par rapport à cette prudence-là, par rapport à
ça? Parce qu'il faut aller chercher la documentation. Dans le cadre d'une
enquête, ça demeure confidentiel. On peut protéger cette documentation-là,
comme vous le savez, devant les tribunaux s'il y a lieu. On peut protéger cette
documentation-là aussi... elle n'est pas nécessairement publique si l'AMP en a
besoin pour son enquête. Donc, quel est cet appel à la prudence?
Puis je suis intéressée parce
qu'effectivement c'est un nouveau pouvoir qu'on veut... on va voir aussi
comment elle va l'exercer. Mais je sais que le Bureau de l'inspecteur général a
déjà un pouvoir similaire. Alors, quand vous travaillez sur l'île de Montréal,
comment ça se passe?
Mme Bourque (Gisèle) : Bien,
écoutez, ce que je veux vous dire là-dessus, nous, en fait, c'était une mise en
garde, c'était une préoccupation que nous avions, que nous voulions tout
simplement vous adresser. On sait que, bien sûr, ces documents-là...
Mme LeBel : ...on va voir
aussi comment elle va l'exercer, mais je sais que le bureau de l'inspecteur
général a déjà un pouvoir similaire. Alors, quand vous travaillez sur l'île de
Montréal, comment ça se passe?
Mme Bourque (Gisèle) : Bien,
écoutez, ce que je veux vous dire là-dessus, nous, en fait, c'était une mise en
garde, c'était une préoccupation que nous avions, que nous voulions tout
simplement vous adresser. On sait que, bien sûr, ces documents-là demeurent
confidentiels ou peuvent le demeurer. Mais lorsqu'il s'agit, bien sûr, de
secrets commerciaux ou de secrets professionnels, on veut juste s'assurer que
ces secrets-là vont bien demeurer des secrets. C'était juste une préoccupation
qu'on voulait vous adresser. C'était en ce sens-là puisqu'il s'agit d'un nouveau
pouvoir. Alors, c'est très important. Alors, on n'a rien à cacher. Les
entrepreneurs n'ont rien à cacher. Il s'agit tout simplement que ces secrets-là
demeurent des secrets.
Mme LeBel : Donc, c'est
un petit drapeau que vous levez, là, en direction de l'AMP sur l'application...
Mme Bourque (Gisèle) :
Oui.
Mme LeBel : ...sur
l'application de ce pouvoir-là.
Mme Bourque (Gisèle) :
Exactement.
Mme LeBel : O.K. Beaucoup
de commentaires dans votre… à bon droit, d'ailleurs, là, mais qui dépassent
peut-être la portée du projet de loi n° 66. J'ai beaucoup d'intentions et
peut-être d'ambition concernant la loi sur les contrats publics que je suis… je
ne dirais pas avec l'entièreté, là, mais en… la grande majorité de vos propos
de revoir les modes d'adjudication des contrats, de donner des modes
alternatifs d'adjudication et de peut-être se détacher, compte tenu de la
nature du projet… se détacher à tout prix et en toute circonstance de la règle
du plus bas soumissionnaire qui, quant à moi, peut donner… est appropriée quand
on parle de projets très simples, mais qui peut devenir peut-être moins
pertinente quand on a des projets avec des aspects techniques plus complexes,
disons-le.
Donc, je vais lire avec beaucoup
d'attention votre impression là-dessus, mais je vous dirais que j'en partage la
grande majorité des constats, et effectivement je veux qu'on entreprenne un
chantier pour revoir les modes d'adjudication des contrats, les modes
d'adjudication pour les services professionnels, effectivement, puis donner
peut-être plus de souplesse. Alors, sans vous donner toute la substance, je
vous rassure à l'effet que ça fait partie… c'est sur mon écran radar, en tout
cas, c'est dans la vitre d'en avant, là, ce n'est certainement pas sur le côté
de la route.
Donc, dans ce sens-là, je vais peut-être
vous amener un peu plus sur l'accélération du mode de paiement, parce qu'il y
en a une portion, effectivement, dans le projet de loi n° 66. J'ai bien
noté votre questionnement sur la limite du 20 millions de dollars. Ce que
j'aimerais peut-être discuter avec vous… on a eu d'ailleurs la Corporation des
entrepreneurs généraux du Québec qui est venue nous parler ce matin, qui est
également membre de la coalition sur les retards de paiement. Je comprends que
l'ACRGTQ également est membre de la coalition sur les retards de paiement,
c'est exact?
Mme Bourque (Gisèle) : Tout à
fait, oui, depuis le début, oui.
Mme LeBel : Oui. Est-ce que
vous avez eu l'occasion de participer à l'élaboration du projet de loi pilote…
le projet de loi… le projet de loi… le projet pilote, en 2018, sur les retards
de paiement?
Mme Bourque (Gisèle) : Oui,
tout à fait. On est impliqués depuis le tout début de l'existence de la
coalition.
Mme LeBel : O.K. Et donc,
depuis le début, quand on a mis en place, en 2018, le projet pilote, je pense,
c'est pour 52 projets, si je ne me trompe pas, qu'il a été mis en place.
Je veux commencer par vous rassurer,
Mme Bourque, que le projet de loi n° 66 n'a pas
pour effet... en tout cas, l'objectif... et je dis toujours : On va aller
vérifier la rédaction de l'article en question, mais l'objectif du projet de
loi n° 66…
Mme LeBel : ...donc,
depuis le début, quand on a mis en place en 2018 le projet pilote, je pense,
c'est pour 52 projets, si je ne me trompe pas, qu'il a été mis en place...
Je veux commencer par vous rassurer,
Mme Bourque, que le projet de loi n° 66 n'a pas
pour effet... en tout cas, l'objectif... et je dis toujours : On va aller
vérifier la rédaction de l'article en question, mais l'objectif du projet de
loi n° 66 n'a certainement pas pour effet de
prolonger le projet pilote de cinq ans, là. Il se termine et il se terminera
pour les 52 projets visés comme convenu en août 2021.
Et ce qu'on dit dans le projet de loi n° 66, c'est que pour... avec la limite de
20 millions, là, mais pour les projets concernés sur la liste des 181, ces
projets-là pourront bénéficier de mesures équivalentes au projet pilote pendant
les cinq prochaines années à partir de l'adoption du projet de loi, s'il est
adopté. Donc, je veux simplement cadrer ça. Je l'ai fait, mais on va vérifier
pour être sûr qu'il n'y a pas d'ambiguïtés parce que vous n'êtes pas la
première qui nous soulève ce questionnement-là. Mais je le dis, là, haut et
fort, ce n'est pas l'objectif d'étendre de façon subreptice le projet pilote de
cinq années supplémentaires.
Mais ce que je voulais vous demander,
jusqu'à présent, quels sont vos constats par rapport à vos membres sur le
projet pilote actuel, sur les deux aspects, là, soit le calendrier de paiement
ou la règle de... pour le règlement des différends, pardon? Quels sont jusqu'à
présent vos constats par rapport... Quels constats vous donnent vos membres? Je
m'excuse, là, je... dans mes propres mots.
Mme Bourque (Gisèle) :
Bien, écoutez, je vais peut-être... Peut-être, M. Marcoux, vous voulez
répondre à cette question?
Le Président (M. Simard) :
M. Marcoux.
M. Marcoux (Sébastien) :
Bien oui, Gisèle, merci beaucoup. Bien, ce qu'on constate, là, dans le domaine
du génie civil, on parle d'une vingtaine de projets sur les 52. On pense qu'il
y en a à peu près 42 qui sont comptabilisés présentement. Finalement, les
travaux ne sont pas encore terminés, puis ceux qui... à faire... nos informations,
là, qui ont affaire à un intervenant expert, c'est à peu près cinq. Et, dans la
majorité de ces cas-là, il y a... évidemment, comme j'ai mentionné, les travaux
ne sont pas terminés, mais il y a vraiment une satisfaction au niveau du
processus de la part de tous ceux qui ont participé au... dans les
23 projets et ceux aussi qui ont participé, là, dans les cinq éléments ou
les cinq... on a dû faire intervenir l'intervenant expert.
Mme LeBel : O.K. La
corporation des entrepreneurs généraux du Québec nous a entretenus aussi sur
cet aspect-là ce matin. Bon, l'objectif d'un projet pilote, c'est de mettre en
place des mesures puis, naturellement, les mettre à l'épreuve, là, pour voir
dans le quotidien comment elles passent le test de la réalité, si je peux dire.
Est-ce que vous avez, à votre connaissance,
bien que... je comprends que la satisfaction générale semble être là. Et-ce que
vous avez connaissance de choses qui pourraient être améliorées dans le processus?
Est-ce que vous avez... Parce que, bon, la perfection, surtout pas du premier
coup, n'existe pas, là. Donc est-ce que vous avez des choses que vous pensez
qu'on pourrait améliorer ou des suggestions qu'à la fin du projet pilote vous
pensez pouvoir être en mesure de faire, là? J'imagine que, dans le cadre du projet
pilote, on doit vous consulter à la fin de tout ça également, là.
M. Marcoux (Sébastien) :
Absolument. Il y a certaines améliorations qui pourraient être apportées. Lorsqu'on
regarde, par exemple...
Mme LeBel : …surtout pas du
premier coup, n'existe pas, là. Donc, est-ce que vous avez des choses que vous
pensez qu'on pourrait améliorer ou des suggestions qui, à la fin du projet
pilote, vous pensez être en mesure de faire, là? J'imagine que, dans le cadre
du projet pilote, on doit vous consulter à la fin de tout ça également, là.
M. Marcoux (Sébastien) : Absolument,
il y a certaines améliorations qui pourraient être apportées. Lorsqu'on
regarde, par exemple, juste en exemple, le coût de l'intervenant expert, par
rapport à la somme qui pourrait être litigieuse, hein, alors c'est peut-être
une adaptation qu'il faudrait avoir à ce moment-là. C'est juste un exemple,
mais il y en a peut-être d'autres.
Mme LeBel : O.K. Et puis je me
suis peut-être avancée tantôt, mais j'imagine que vous êtes… vous allez certainement
nous faire part de votre opinion, le cas échéant, mais vous êtes… est-ce que
dans le processus officiel, là, à la fin du projet pilote, il est convenu que
vous donniez vos impressions pour qu'on puisse voir de quelle façon on peut
rendre pérennes ces mesures, par la suite, en les améliorant mais naturellement?
M. Marcoux (Sébastien) :
Bien, à ma connaissance, la réponse, c'est oui, là.
Mme Bourque (Gisèle) : Absolument,
on va donner tous nos commentaires.
Mme LeBel : Super! Ça va être…
je vais attendre ça avec beaucoup d'intérêt. Mais peut-être une dernière petite
remarque par rapport à ça, dans le retrait… vous parlez, entre autres, dans
votre mémoire, sur ce qu'on a mis dans le projet de loi n° 66 pour
permettre d'étendre, si on veut, la portée du projet pilote à quelques projets,
là, ceux qui sont de 20 millions et moins, sur la liste des 181. Vous
parlez que ce serait bien de retirer la formule actuelle de l'article 66 du
projet qui dit «à moins que le mode de réalisation du contrat ou du
sous-contrat ne permette pas l'application d'un calendrier mensuel de
paiement». Alors que la CEGQ, ce matin, nous a bien dit qu'effectivement il y
avait des types de projets, entre autres les CCF, conception, construction,
financement, pour lesquels un calendrier de paiement et le projet pilote ne
s'appliqueraient pas de toute façon, là, parce que ce n'est pas… les enjeux ne
sont pas les mêmes.
Alors, pourquoi vous nous proposez de
retirer cette appellation-là, alors que, selon la CEGQ, c'est pertinent de le
faire, parce que, justement, il y a des projets de construction pour lesquels
ce n'est pas approprié, ce genre de projet pilote? Je veux juste comprendre à
quoi vous faites référence, pourquoi.
Mme Bourque (Gisèle) : Nous,
dans notre secteur génie civil, voirie, on croit que ça ne devrait pas, cette disposition-là,
qui est restrictive, en fait, ne devrait pas s'appliquer, parce qu'on n'a certainement
pas les mêmes problématiques et les mêmes situations que celles de la CEGQ, là,
par exemple, alors… ou de d'autres organisations. Alors, dans notre secteur à
nous, on considère que ça ne devrait pas s'appliquer parce que ça devient une
restriction.
Mme LeBel : Juste pour bien
comprendre, Mme Bourque, vous considérez que, dans votre secteur, il n'y a
aucun type de projets pour lesquels le mode de réalisation… pour lesquels l'application
d'un calendrier mensuel de paiement ne serait pas praticable, c'est ça?
Mme Bourque (Gisèle) : Exactement.
Mme LeBel : Donc, en principe,
cette disposition-là ne devrait pas vous affecter, mais vous craignez qu'elle
soit utilisée pour restreindre.
Mme Bourque (Gisèle) : Oui, exactement.
• (16 heures) •
Mme LeBel : Parfait. Je veux
juste être sûre de bien comprendre votre pensée, là, parce qu'il y a
effectivement des modes de réalisation pour lesquels un calendrier de paiement
mensuel n'est pas applicable, mais on pourrait voir si on ne peut pas la
clarifier à ce moment-là…
16 h (version non révisée)
Mme LeBel : …en principe, cette
disposition-là ne devrait pas vous affecter, mais vous craignez qu'elle soit
utilisée pour restreindre.
Mme Bourque (Gisèle) : Oui,
exactement.
Mme LeBel : O.K., parfait. Je
veux juste être sûre de bien comprendre votre pensée, là, parce qu'il y a
effectivement des modes de réalisation pour lesquels un calendrier de paiement
mensuel n'est pas applicable, mais on pourrait voir si on ne peut pas la
clarifier à ce moment-là.
Écoutez, pour moi, M. le Président, ça
fait le tour des questions que j'avais parce que le mémoire était… Merci,
Mme Bourque, de votre… je n'aurai pas l'occasion de vous remercier à la
fin, là, merci de votre collaboration, votre participation. Merci beaucoup.
Mme Bourque (Gisèle) : Merci.
Le Président (M. Simard) :
Merci à vous, Mme la ministre. M. le député de La Pinière.
M. Barrette : Merci, M. le
Président. Alors, Me Bourque, M. Marcoux, bienvenue, évidemment.
Alors, je vais aller directement à mon point préféré. Vous êtes l'Association
des constructeurs de routes et des grands travaux du Québec, je ne peux pas
avoir un groupe plus mieux placé pour répondre à ma question. Ça ne se dit pas,
là, «plus mieux», là, on s'entend, mais je vais le dire pareil. Ça fait
référence à des choses plus humoristiques qu'on ne citera pas.
Alors, vous… dans votre mémoire, là, que
j'ai devant moi, là, vous avez beaucoup d'emphase en termes de partie, là, dans
le mémoire, il y a une grande partie très significative, qui va sur la question
du projet pilote. On s'entend là-dessus, je pense qu'il n'y a personne qui ne
s'entend pas là-dessus. On va voir ce que ça va donner au projet de loi. Mais
vous avez aussi une très grande partie sur l'adjudication des contrats.
Bon, ça, c'est un petit peu en dehors du
projet de loi n° 66, mais je vous ai, je vais vous garder. Alors… Et vous
le dites, là, dans votre mémoire : Il faut changer ça parce qu'on aurait — selon
ce que vous mettez de l'avant — on aurait la possibilité d'avoir plus
de qualité, plus de durabilité. Alors, là, écoutez, moi, je vais vous poser la
question que j'ai posée ce matin et précédemment : Voulez-vous bien me
dire comment ça se fait qu'on n'est pas capable d'avoir ça avec le mode de
fonctionnement actuel? En français, là, clairement, là, le plus bas prix… le
prix au plus bas soumissionnaire dans l'adjudication dépend directement et
totalement de ce qu'on écrit dans le devis. Si ce qu'on écrit dans le devis
n'est pas respecté à l'exécution, ça ne marche pas. Alors, il y a deux
paramètres, là, ici, là, il y a : un, ce qu'on écrit dans le devis; deux,
comment on exécute les travaux. Le prix, c'est une chose, mais en quoi
l'adjudication changerait les choses? Vous nous dites : Bien, là, la
durabilité… Bien oui, mais qu'on prenne des matériaux plus durables, qu'on
construise nos autoroutes et nos routes en béton, ça va durer plus longtemps!
En quoi, là, le plus bas soumissionnaire, dans
le cas de la construction, pas des services, là, la construction, c'est
matériel, c'est un devis avec des éléments clairs, un devis qui est censé avoir
été écrit par des ingénieurs qui ont la compétence, et ainsi de suite…
M. Barrette : ...le plus bas
soumissionnaire, dans le cas de la construction, pas dans les services, là, la
construction, c'est matériel, c'est un devis avec des éléments clairs, un devis
qui est censé avoir été écrit par des ingénieurs qui ont la compétence et ainsi
de suite fait en sorte que c'est un mauvais mode d'adjudication. Et comment ça
se fait que ça serait meilleur en qualité, en durabilité et je ne sais quoi de
le changer? Expliquez-moi ça.
Mme Bourque (Gisèle) : Alors,
Sébastien, est-ce que tu veux répondre?
M. Marcoux (Sébastien) : Oui,
Gisèle, je peux peut-être aider. Je ne pense pas qu'on dise que le plus bas
soumissionnaire, c'est un mauvais mode. Ce qu'on dit, c'est que ce n'est pas le
mode le plus approprié pour tous les types de contrats. Maintenant, je peux
vous donner un exemple. Si on fait un devis de performance, vous avez fait
référence à des ornières, alors ce qu'on dit, sur une certaine durée, bien, on
veut qu'il y ait un indice de roulement, que l'usager soit confortable. Bien,
lorsqu'on a un devis de performance, on peut modifier les épaisseurs
d'asphaltes, par exemple, pour être capables de rencontrer ce devis de
performance là qui va peut-être faire en sorte que l'entretien, au lieu de la
faire dans l'année numéro cinq, bien, on va la faire dans l'année numéro sept.
Alors, c'est un ensemble de coûts, pas uniquement sur les coûts de
constructions, mais on prend en considération aussi les coûts d'entretien sur
certains contrats. Alors, on regarde sur une certaine période qu'est-ce qui
revient le moins cher. C'est un exemple.
M. Barrette : Alors, si je
reprends votre exemple, là, M. Marcoux, vous me dites que si le devis
était bien écrit, le devis dans l'exemple que vous venez de prendre allant
affecter le prix, bien, il n'y aurait pas les problèmes qu'on a. C'est ça que
vous venez de nous dire, là. Si, dans le devis qui comprenait la qualité de
l'asphalte et l'entretien et ce que vous venez... ce dont vous venez de parler
avait été écrit dans le devis initial, on aurait moins d'ornières. C'est ça que
vous avez dit, là.
M. Marcoux (Sébastien) : On
parle, dans ce cas-ci, d'un devis de performance. Au départ, le devis... il
faut que le devis soit adéquat, il faut que les matériaux soient conformes, il
faut que les travaux soient exécutés de manière conforme.
M. Barrette : Bon.
M. Marcoux (Sébastien) :
Après ça, c'est une question d'entretien. Alors, lorsqu'on se retrouve avec un
problème d'orniérage comme vous avez mentionné, ça peut être différentes
raisons.
M. Barrette : Oui, différentes
raisons qui nous ramènent toujours à la conception du devis et à l'exécution
des travaux. J'ai bien de la misère à vous le faire dire, mais vous me le dites
par le biais de vos exemples. Si, dans le devis, les choses sont bien écrites
pour ce qui est de la spécificité de la qualité des matériaux à utiliser, de
l'exécution des travaux, de la... de l'inclusion dans le devis de la
performance qui amène... tous les éléments que je viens de dire, vous allez
être d'accord, ont une influence sur les prix, mais, si tout ça est bien écrit,
bien, tout le...
M. Barrette : ...matériaux
à utiliser, de l'exécution des travaux, de l'inclusion, dans le devis, de la
performance qui amènent tous les éléments que je viens de dire, vous allez être
d'accord, ont une influence sur le prix. Mais, si tout ça est bien écrit, bien,
tout le monde va faire face au même appel d'offres et le plus bas prix... le
prix du plus bas soumissionnaire va être obligatoirement plus élevé que ce que
l'on voit aujourd'hui, et le citoyen va être mieux servi. Qu'en pensez-vous?
M. Marcoux (Sébastien) :
Bien, écoutez, vous l'avez dit, là, je suis d'accord avec vous. Les bons
matériaux, le bon devis, puis la bonne exécution...
M. Barrette : Et la bonne
maintenance.
M. Marcoux (Sébastien) :
...pour avoir un ouvrage qui répond aux normes. À la base, il faut les trois.
M. Barrette : Ce qui
signifie... Parfait. Et quand on constate, au Québec, que deux trois ans plus
tard, après avoir fait une réfection de 5 kilomètres, 10 kilomètres
d'autoroute, on a encore des ornières, c'est qu'il y a eu problème. Quel gendre
de problème à votre avis?
M. Marcoux (Sébastien) :
Ça peut être un des trois.
M. Barrette : Parfait.
M. Marcoux (Sébastien) :
Ça peut être un problème d'entretien après sur la route.
M. Barrette : Parfait.
Donc, il y a un problème au devis. À la naissance du projet, il y a un problème.
Très bien, je retiens ça.
M. le Président, mon collègue aurait une question.
Le Président (M. Simard) :
Bien sûr. M. le député de Mont-Royal—Outremont, vous
disposez de 3 min 45 s.
M.
Arcand
:
Merci, M. le Président. Il y a quelque chose qui m'a intrigué dans un des
commentaires que vous avez faits, c'est que vous avez dit, dans votre mémoire
entre autres, qu'une stabilité dans les contrats publics en étalant certains
travaux, etc., encouragerait les entrepreneurs à diminuer leurs prix. Et
évidemment un projet de loi comme celui qu'on a devant nous aujourd'hui, malgré
l'intervention plus massive de l'Autorité des marchés publics, malgré certaines
modifications qui ont été apportées à certaines lois, il n'en demeure pas moins
que le fait d'accélérer les travaux, en principe, peut faire augmenter les prix
qu'on le veuille ou qu'on ne le veuille pas. Je voudrais juste que vous
m'abordiez cette question-là en disant qu'est-ce que vous entendez par
«stabilité». Vous voulez avoir des contrats sur plusieurs années et sur...
comment vous voyez ça?
M. Marcoux (Sébastien) :
Bien, je peux peut-être répondre, la première chose, c'est d'avoir une
prévisibilité. Alors, lorsqu'on fait des... les entrepreneurs font des
investissements, par exemple, dans les équipements, si on comprend ce qui s'en
vient en termes d'ouvrage, c'est bien évident que ça facilite la planification
et ça facilite les investissements. Ça, c'est une chose.
Dans le projet de loi actuel, si on
regarde en génie civil, on parle de 52 projets qui sont dans toutes les
régions du Québec. Alors, on parle de quatre projets en Abitibi, deux en
Mauricie, deux dans le Bas-Saint-Laurent, alors on ne pense pas, dans notre
cas, que le... de ces projets-là en autant que ce soit à travers le Québec,
dans les différentes régions qui vont donne la chance aux différents entrepreneurs
de soumissionner...
M. Marcoux (Sébastien) :
...projets qui sont dans toutes les régions du Québec. Alors, on parle de
quatre projets en Abitibi, deux en Mauricie, deux dans le Bas-Saint-Laurent.
Alors, on ne pense pas, dans notre cas, que... de ces projets-là... en autant
que ça soit à travers le Québec, dans les différentes régions, qui vont donner
la chance aux différents entrepreneurs de soumissionner sur les différents
projets, que ça va causer une surchauffe, mais ça va permettre de planifier
mieux les travaux à venir sur une période un petit peu plus longue.
M.
Arcand
:
O.K. Et, si j'avais à vous demander, là... parce que vous avez fait part de vos
recommandations, de vos propositions. Si on avait à vous demander quelle est la
proposition pour améliorer ce projet de loi là, quelle serait-elle? La première
proposition pour vous.
• (16 h 10) •
Mme Bourque (Gisèle) :
Bien, dans un premier temps, je pourrais répondre en disant que le projet de
loi ne s'applique, là, qu'aux contrats de 20 millions et moins, là. D'abord,
on ne comprend pas pourquoi... limite. Ça permettrait d'aller beaucoup plus
loin au niveau de la relance économique. Alors, ce serait d'enlever cette
balise du 20 millions maximum. Parce qu'on parle bien d'un projet qui va
aider la relance économique, alors on a beaucoup de grands projets au Québec
qui devraient être faits et avec... qui dépassent de beaucoup ce 20 millions
là.
M.
Arcand
:
Donc, pour vous, ce serait l'élément premier, là, c'est de... c'est la question
du 20 millions.
Mme Bourque (Gisèle) :
Bien, ça serait un élément, je vous dirais, un élément qui nous frappe d'entrée
de jeu, là, qui nous a frappés. On s'est posé la question : Pourquoi 20 millions?
Alors, toujours dans la perspective de la relance économique, donc des travaux
de construction qui nous concernent, notamment génie civil, voirie.
Le deuxième point, en ce qui concerne
génie civil, voirie, nous n'avons que 52 projets sur 181. Alors, encore
là, c'est très restrictif. Parlons pour notre domaine à nous, pourquoi
52 projets? Alors, c'est un deuxième point qui devrait être aussi...
Le Président (M. Simard) :
En conclusion. Oui, je vous en prie, Mme Bourque, veuillez finir, s'il
vous plaît.
Mme Bourque (Gisèle) :
Bien, voilà. Alors, c'étaient les deux premiers points qui attiraient notre
attention.
M.
Arcand
:
O.K. Merci.
Le Président (M. Simard) :
Désolé, Mme Bourque. Alors, je cède maintenant la parole au député de Rosemont.
Cher collègue, vous disposez de 2 min 40 s.
M. Marissal : Merci, M.
le Président. Bonjour. Merci d'être là.
Je vais vous poser une question que j'ai
posée ce matin à vos collègues, là, de la Corporation des entrepreneurs
généraux du Québec. Je comprends les plaidoyers qui sont faits, là, pour vos
membres, là. Ça, ça va de soi, notamment sur le problème de liquidité, le fait
d'être payé à temps. Tout ça est parfaitement légitime. Vous faites aussi un
plaidoyer en fin de mémoire pour ajouter plusieurs projets de réfection ou
d'entretien des routes. Ça correspond aussi au mandat que vous défendez, je
comprends bien. Sauf qu'on nous dit que la liste est fermée, donc, en principe,
on fonctionnera avec...
M. Marissal : …aussi un plaidoyer
en fin de mémoire pour ajouter plusieurs projets de réfection ou d'entretien
des routes, ça correspond aussi au mandat que vous défendez, je comprends bien,
sauf qu'on nous dit que la liste est fermée, donc, en principe, on fonctionnera
avec les projets qui sont en annexe I. Et, de deux, il y a beaucoup d'éléments
qui touchent l'environnement, le BAPE, les évaluations environnementales, dont
vous ne parlez à peu près pas ou, en fait, très peu.
Ce matin, juste avant la pause du dîner,
peut-être avez-vous entendu l'Ordre des ingénieurs qui était ici, qui ont quand
même insisté beaucoup sur l'importance des évaluations environnementales en
disant notamment que les consultations publiques sont partie intégrante de
l'acceptabilité sociale des grands projets. Êtes-vous… partagez-vous ce point
de vue défendu par l'Ordre des ingénieurs ce matin?
Mme Bourque (Gisèle) : En
fait, moi, je vous dirais que l'association pense fermement que le processus
d'approbation au niveau de l'environnement pour les différents projets doit
demeurer, c'est évident. Toutefois, avec le projet de loi n° 66, ici on
parle de délais sensiblement raccourcis. Par la force des choses, ça doit être
ainsi. Alors, on considère que nous, à partir du moment où les approbations
environnementales sont données, que le processus est suivi, de respect de
l'environnement, que le délai peut être raccourci sans affecter les problèmes
environnementaux qui pourraient s'y rattacher.
M. Marissal : Pourquoi
dites-vous que par la force des choses, cela doit être ainsi? J'ai
peut-être mal capté votre phrase, là.
Mme Bourque (Gisèle) : …bien,
c'est… en fait, c'est qu'on parle d'un projet sur la relance économique, donc
des projets qui vont se faire plus rapidement, c'est dans ce sens-là.
Le Président (M. Simard) : En
conclusion.
M. Marissal : Donc, pour vous,
il est naturel, donc, de diminuer les évaluations environnementales dans le
temps puisqu'on est devant un projet de relance?
Mme Bourque (Gisèle) : De
diminuer les délais s'y rattachant.
Le Président (M. Simard) :
Merci beaucoup. Je cède maintenant la parole au député de Jonquière.
M. Gaudreault : Oui, merci de
votre présence. On va rester dans les délais. À la page 12 de votre
mémoire, vous faites référence au lancement des appels d'offres, et à
l'adjudication des contrats, et le fait que les donneurs d'ouvrages attendent
parfois jusqu'à la dernière journée de validité des soumissions avant de savoir
si un donneur d'ouvrages va attribuer le contrat. Donc, ça repousse l'ensemble
de la machine. Pouvez-vous nous donner des exemples concrets, là, où ce type de
délai s'applique malheureusement, selon vous?
M. Marcoux (Sébastien) :
Gisèle, je peux peut-être y aller, juste donner un exemple, si on dépose une
soumission au mois de mars d'une certaine année, on va demander, par exemple,
que le prix soit bon pour six mois. L'entrepreneur qui soumissionne ne
saura pas, dans certains cas, et ça arrive fréquemment, par exemple, avant le
mois de septembre, que le contrat va lui être octroyé…
M. Marcoux (Sébastien) : …si
on dépose une soumission au mois de mars une certaine année, on va demander, par
exemple, que le prix soit bon pour six mois. L'entrepreneur qui
soumissionne ne saura pas, dans certains cas, et ça arrive fréquemment, par
exemple, avant le mois de septembre, que le contrat va lui être octroyé, et le
contrat ne sera pas signé avant deux mois plus tard. Alors, dans certains cas,
les conditions ont changé, alors on se retrouve à faire exécuter des travaux
beaucoup trop tard dans l'année, en conditions… différentes de ce qui avait été
prévu.
Alors, c'est certain que quand les
entrepreneurs sont au courant de ces pratiques-là, bien, le prix initial est en
conséquence parce qu'il y a une incertitude du moment auquel on va débuter les
travaux.
M. Gaudreault : O.K. Et est-ce
que vous trouvez que le projet de loi n° 66 vient solutionner ou régler ce
problème-là?
M. Marcoux (Sébastien) : Le
projet de loi ne l'adresse pas du tout, présentement. Je pense que ce qu'on dit
dans notre mémoire, c'est important pour tous les projets, incluant ceux-là qui
sont listés dans l'annexe du projet de loi ici, de prendre cet élément-là en
considération parce que ça a un impact sur les prix des projets.
M. Gaudreault : Donc, on
pourrait agir là sans avoir besoin du projet de loi puis on accélèrerait les
chantiers?
M. Marcoux (Sébastien) :
C'est une mesure. C'est une mesure qui devrait être appliquée à tous les
projets que l'on fait, tout simplement. C'est une mesure.
M. Gaudreault : Et ça se
règlerait par mesures de gestion interne ou par règlement.
M. Marcoux (Sébastien) : Je
présume, que ce soit à travers les contrats gouvernementaux, même au niveau
municipal, aussi. Les problématiques aussi sont au niveau municipal.
M. Gaudreault : O.K., merci.
Ça va aller.
Le Président (M. Simard) :
Très bien. Alors, Mme Bourque, M. Marcoux de l'Association des
constructeurs de routes et grands travaux du Québec, merci beaucoup pour la
qualité de votre contribution à nos travaux. Sur ce, nous allons suspendre
brièvement.
(Suspension de la séance à 16 h 17)
(Reprise à 16 h 20)
Le Président (M. Simard) :
Chers collègues, nous allons reprendre nos travaux. Nous sommes maintenant en
compagnie de Me Nikolas Blanchette, associé chez Fasken Martineau DuMoulin.
Maître, soyez le bienvenu parmi nous.
M. Blanchette (Nikolas) :
Bonjour. Merci.
Le Président (M. Simard) :
Vous savez que vous disposez d'une période de 10 minutes pour faire votre
présentation.
(Visioconférence)
M. Blanchette (Nikolas) :
Parfait. Alors, bonjour à tous. Je tiens d'abord à remercier la commission de
m'avoir invité à participer ce jour. Je salue M. le Président, Mme la
secrétaire, Mme la ministre, ainsi que tous les membres de la commission. Je me
présente, Me Nikolas Blanchette. J'exerce comme avocat, au sein du cabinet
Fasken Martineau DuMoulin, à titre d'associé principal et leader du groupe de
pratique en litige immobilier.
J'ai développé une expertise dans le
domaine de l'expropriation depuis maintenant plus d'une dizaine d'années. J'ai
oeuvré dans plusieurs causes d'expropriation et je suis présentement impliqué
dans une vingtaine de dossiers, que ce soit dans des contextes usuels ou dans
le cadre de projets spécifiques que nous connaissons comme REM ou le
prolongement de la ligne bleue. J'ai été amené à plaider devant toutes les
instances, que ce soit devant le Tribunal administratif du Québec, la Cour
supérieure…
M. Blanchette (Nikolas) :
...impliqué dans plus d'une vingtaine de dossiers, que ça soit dans des
contextes plus usuels ou dans le cadre de projets spécifiques que nous
connaissons comme le REM ou le prolongement de la ligne bleue. J'ai été amené à
plaider devant toutes les instances, que ça soit devant le Tribunal
administratif du Québec, la Cour supérieure, la Cour d'appel du Québec ou
encore la Cour suprême du Canada. Je publie et je donne régulièrement des
conférences en droit d'expropriation. J'ai inauguré et je préside les colloques
du Barreau du Québec en droit d'expropriation.
Ça me fait donc plaisir d'être ici avec
vous cet après-midi pour vous faire part de certains commentaires sur les
dispositions du projet de loi n° 66 qui concernent l'expropriation. Je
parle ici plus spécifiquement des articles 14 à 18 et 69 à 73 de la loi...
du projet de loi. J'ai préparé un mémoire qui a été transmis à la commission
plus tôt, ce jour. Tout le détail de mon propos se trouve plus amplement décrit
dans le mémoire. Je vais donc m'attarder à quelques éléments qui me semblent
particulièrement d'intérêt dans le cadre de l'étude des dispositions du projet
de loi.
Ma présentation initiale portera donc sur
quatre points que j'aimerais soumettre à l'attention de la commission :
premièrement, les dispositions visant à interdire les recours en contestation
du droit d'exproprier, alors, je parle ici de l'article 17 du projet de
loi; deuxièmement, les dispositions visant à donner un effet rétroactif à ces
règles qui visent l'interdiction des recours en contestation, je parle ici de
l'article 69 du projet de loi; troisièmement, la nécessité de favoriser un
dialogue entre les parties impliquées au projet d'expropriation pour assurer la
réussite et l'accélération des projets d'infrastructure qui sont priorisés par
le gouvernement dans le projet de loi n° 66; enfin, je ferai un
commentaire sur la nécessité, selon moi, de moderniser la Loi sur l'expropriation
et les difficultés que posent l'adoption d'une loi spéciale comme celle qui est
présentée devant vous.
Alors, d'abord, j'aimerais attitrer votre
attention sur l'article 17 du projet de loi. On peut constater au
troisième alinéa la mention d'une interdiction au recours en contestation du
droit d'exproprier. Je cite le paragraphe en question : «Le droit de
l'expropriant à l'expropriation ne peut être contesté et, en conséquence, les
articles 44 à 44.3 de la Loi sur l'expropriation ne s'appliquent pas».
Alors, ce paragraphe soulève une problématique sérieuse selon moi.
L'interdiction de contester le droit d'exproprier est rédigée en termes larges
et il est donc susceptible d'avoir comme conséquence de priver la partie
expropriée de tout pouvoir de contestation possible, et ce, peu importe le
véhicule procédural choisi.
Alors, quel est l'objectif poursuivi par
le législateur? Est-ce de retirer le droit au recours prévu à l'article 44
de la Loi sur l'expropriation...
M. Blanchette (Nikoslas) :
...priver la partie expropriée de tout pouvoir de constatation possible, et ce,
peu importe le véhicule procédural choisi.
Alors, quel est l'objectif poursuivi par
le législateur? Est-ce de retirer le droit au recours prévu à l'article 44
de la Loi sur l'expropriation ou plutôt de limiter plus largement tout type de
contrôle judiciaire devant la Cour supérieure? C'est une question qu'il faut se
poser. Il faut se rappeler, je pense que c'est important de le rappeler, que la
Cour supérieure a un pouvoir inhérent de contrôler les lois et les actes
publics du Québec. Ce pouvoir est constitutionnel. Il est prévu à l'article 96
de la Loi constitutionnelle de 1867. Vouloir empêcher tout contrôle serait
alors hautement problématique selon moi et susceptible d'occasionner des débats
judiciaires importants.
Par ailleurs, vouloir empêcher seulement
le contrôle judiciaire en vertu de l'article 44 de la Loi sur
l'expropriation n'atteindra pas la cible de vouloir accélérer les travaux d'infrastructures
nécessitant des expropriations car cela n'aura pas l'effet d'empêcher le
contrôle judiciaire en vertu des pouvoirs inhérents de la Cour supérieure.
Donc, on risque non pas d'accélérer, mais plutôt de compliquer les procédures
et recours en contestation, ce qui aura l'effet contraire à ce qui est
recherché par le législateur. Ma recommandation pour ce premier point est donc
de suggérer à la commission de revoir le choix du législateur de retirer le
pouvoir de contester un droit d'expropriation dans le cadre des projets d'infrastructures
identifiés dans le projet de loi.
Dans un deuxième temps, j'attire votre
attention sur l'article 69 du projet de loi. Le deuxième alinéa de
l'article 69 prévoit que l'interdiction prévue à
l'article 17 que nous venons d'examiner ensemble serait applicable
aux procédures de contestation en cours devant la Cour supérieure dans le cadre
du projet de prolongement de la ligne bleue. On comprend ici que la
problématique initiale que je viens d'expliquer demeure. Mais, au surplus,
l'objectif poursuivi serait alors de vouloir interrompre des débats qui ont
présentement lieu devant la Cour supérieure, de dessaisir la Cour supérieure de
son contrôle judiciaire qu'elle exerce en vertu de l'article 44 de la Loi
sur l'expropriation. Une telle proposition est tout à fait préoccupante selon
moi d'un point de vue de la séparation des pouvoirs et de l'indépendance du
pouvoir judiciaire dans un État de droit comme le nôtre. Cela pourrait à
nouveau compliquer les débats judiciaires plutôt qu'atteindre l'objectif par le
législateur d'accélérer les projets d'infrastructures. Ma recommandation pour
ce deuxième point est qu'à tout événement, toute mesure touchant le droit de
contestation demeure prospective et non rétroactive.
En conséquence des deux premiers points
que je viens de vous soumettre, il importe de remarquer que le projet de loi,
dans son libellé actuel, ne prévoit pas de mécanisme...
M. Blanchette (Nikolas) : …et
qu'à tout événement, toute mesure touchant le droit de contestation demeure
prospectif et non rétroactif. En conséquence des deux premiers points que je
viens de vous soumettre, il importe de remarquer que le projet de loi, dans son
libellé actuel, ne prévoit pas de mécanisme qui permettrait d'accélérer ou
d'améliorer la coordination des projets qui nécessitent des expropriations.
Le projet de loi semble ainsi vouloir
favoriser une approche centrée sur l'interdiction de la sanction, alors que je
pense que la réussite des projets annoncés devrait plutôt reposer sur des
efforts supplémentaires de planification et de coordination des différentes
parties impliquées, commençant par les ministères impliqués, les villes, les municipalités,
les professionnels retenus, les parties expropriées, le secteur avoisinant, les
marchands, les citoyens, etc.
Dans la pratique, il est clair qu'une
gestion et une coordination complète, incluant les parties expropriées et leurs
professionnels, favorisent souvent une meilleure gestion des dossiers
d'expropriation et, à mon avis, permet d'éviter des contestations judiciaires
qui portent sur la légalité des procédures. C'est là que l'on pourrait
constater, selon moi, une plus grande célérité des processus administratifs et
judiciaires en situation d'expropriation. En revanche, lorsque les parties
expropriées sont placées devant un fait accompli et que les planifications… que
la planification s'avère déficiente, par exemple, lorsque les effets
d'expropriation ont été mal compris par la partie expropriante ou ses
professionnels, on constate alors souvent des complications et des délais. Ma
recommandation sur ce troisième point serait de mettre de côté les mesures
visant à empêcher et/ou arrêter les contestations judiciaires en cours et
concentrer les efforts sur un dialogue ouvert et constructif qui impliquent les
parties prenantes ou d'un projet d'infrastructure incluant les parties
expropriées.
Enfin, je me permets d'apporter à votre
attention le fait suivant, l'adoption récente de lois spéciales, comme celles
du REM et du tramway à Québec, démontre clairement la difficulté de travailler
avec la Loi sur l'expropriation. Celle-ci nécessite une réforme complète, il
serait important que cette réforme puisse avoir lieu, ce qui permettrait
d'éviter de multiplier les lois spéciales qui sont susceptibles de venir
court-circuiter les droits qui sont en jeu en droit d'expropriation.
Il faut se rappeler que le droit de
l'expropriation est un droit exorbitant qui affecte sérieusement le droit de
propriété des parties expropriées qui sont visées par de telles procédures. Les
projets de construction et d'infrastructures, l'annonce d'expropriation sont de
plus en plus complexes et les superficies expropriées sont de plus en plus importantes.
La problématique des lois spéciales est de ne pas faire un travail de fond avec
les nuances nécessaires pour s'assurer d'atteindre les objectifs poursuivis,
tout en respectant les droits qui sont sérieusement compromis en pareilles
circonstances.
Ma recommandation serait donc de prendre
les présentes circonstances pour entamer une révision de fond sur la Loi sur
l'expropriation. Je vous remercie.
Le Président (M. Simard) : En
conclusion, cher maître.
M. Blanchette (Nikolas) :
Alors, c'était ma conclusion. Merci beaucoup.
• (16 h 30) •
Le Président (M. Simard) :
Merci à vous. Vous avez lu dans mes pensées. Je vais…
16 h 30 (version non révisée)
M. Blanchette (Nikolas) :
…compromis en pareilles circonstances. Dans… il serait donc de prendre les
présentes circonstances pour entamer une révision de fond sur la Loi sur
l'expropriation. Je vous remercie de votre attention…
Le Président (M. Simard) : En
conclusion, cher maître.
M. Blanchette (Nikolas) :
Alors, c'était ma conclusion. Merci beaucoup.
Le Président (M. Simard) :
Merci à vous. Vous avez lu dans mes pensées. Je laisse maintenant la parole à
la présidente du Conseil du trésor. Madame, vous disposez de 16 minutes.
Mme LeBel : Merci, M. le
Président. Merci, Me Blanchette, pour ce… je ne vous cacherai pas que je
n'ai pas eu le temps et l'occasion de lire votre mémoire avec toute l'attention
nécessaire qu'il requiert, là, pour bien comprendre toutes les nuances
juridiques, puis ça va peut-être me ramener à des anciennes amours, qui ne sont
pas si lointaines, d'ailleurs. Ça fait que je vais le faire… je vais le lire
avec beaucoup d'attention parce que, naturellement, l'objectif n'est pas de
faire le contraire… d'avoir les effets contraires de l'objectif visé,
naturellement.
Ceci étant dit, peut-être que je vais me
permettre de vous poser deux, trois questions. Je n'entrerai pas nécessairement
dans les détails parce que votre mémoire est quand même, vous l'avez dit, très
bien étoffé puis ça va… il va y avoir beaucoup de choses qui vont me donner
matière à réflexion, mais il y a deux, trois petits points que j'aimerais peut-être
que vous soyez capable de nous expliquer de façon un peu plus… avec plus de
détails, peut-être, ou avec des exemples concrets parce qu'on parlé beaucoup de
la théorie, là, puis du projet de loi.
Il y a… vous avez bien dit : Il y a
deux sections dans le projet de loi en matière d'expropriation. Puis je vais
simplifier ça à sa plus simple expression, là, naturellement, là. Il y a la
section où on agit en amont des dossiers, donc tout ce qui concerne les
181 projets, c'est-à-dire qu'on agit en amont avant que le droit de
contester soit exercé ou ait commencé à être exercé, donc avant que les
expropriations aient commencé. Vous l'avez bien mentionné, je pense, c'est
l'article 17 qui le prévoit. Et il y a toute la section sur la ligne bleue
où, présentement, on agit de façon rétroactive, selon vos propos, parce qu'il y
a des contestations devant la Cour supérieure, des contestations qui sont déjà
en cours dans le cas de la ligne bleue. Donc, il y a deux choses, pour moi, là,
deux sections sur l'expropriation, si je peux le dire de cette façon-là. La
section où on agit en amont est… je ne dirai pas calquée, mais est très
fortement inspirée des projets de loi spéciaux qui ont eu lieu… dans le cadre
du REM, vous l'avez dit.
L'objectif de tout ça est de faire en
sorte que les projets ne soient pas stoppés. Vous avez raison, là, moi, j'en suis,
il faut se parler. Une bonne entente vaut mieux qu'un mauvais jugement, un
mauvais… en tout cas, peu importe, vous connaissez le dicton autant que moi.
Donc, il vaut mieux s'entendre, des fois, qu'aller devant les tribunaux, j'en
suis, mais le fait brut et le fait est qu'il existe des situations où, quand
c'est l'indemnité qui est contestée, on conteste quand même l'expropriation à
sa base et on stoppe le projet de construction. Et souvent, je ne dis pas que
c'est le cas de tout le monde, mais ça peut servir de levier de négociation et
le projet est, à toutes fins pratiques, stoppé.
Ce qu'on cherche à… je n'ai pas la
prétention de vouloir réformer la Loi sur l'expropriation, là, c'est mon
collègue du ministère des Transports qui devra se pencher sur l'opportunité de
le faire ou non, mais ce qu'on cherche à faire, donc, on ne s'en cache pas,
c'est de faire en sorte de pouvoir permettre les négociations sur…
Mme LeBel : ...je n'ai pas la
prétention de vouloir réformer la Loi sur l'expropriation, là, c'est mon collègue
du ministère des Transports qui devra se pencher sur l'opportunité de le faire
ou non. Mais, ce qu'on cherche à faire, donc, on ne s'en cache pas, c'est de
faire en sorte de pouvoir permettre les négociations sur l'indemnité, et éventuellement,
les contestations ou qu'un tribunal, une cour puisse trancher sur la juste
valeur marchande de la propriété expropriée, mais ne pas faire en sorte que
tout ce processus-là vienne stopper indûment et mette un frein indûment au
projet. Donc, j'en suis dans la première section, on pourra voir par la suite
pour la section de la ligne bleue.
Je comprends les mises en garde que vous
nous faites au niveau juridique, mais de quelle façon peut-on atteindre cet
objectif-là? À moins que vous me disiez qu'on est condamnés à ne pas... à
jamais pouvoir le faire. Mais comment on peut atteindre l'objectif de permettre
la contestation de l'indemnité qui, quant à moi, je n'ai pas votre... ce n'est
pas ma spécialité le droit de l'expropriation et je ne le prétendrai pas non
plus, donc j'ai beaucoup de respect pour votre expertise, mais ce que j'en
sais, c'est que la très grande majorité des cas, c'est l'indemnité qui est au
coeur du litige, là, donc, comment on peut faire pour continuer à avoir cette
conversation-là, disons-le, qu'elle soit à l'amiable ou judiciaire, pour
l'indemnité sans faire en sorte de stopper des projets majeurs de construction
et que ça ne devienne pas un levier de négociations ou qu'on pervertit un peu
le système d'expropriation et le droit d'exproprier pour en faire un levier de
négociations et de permettre d'avoir une surenchère sur la valeur du terrain,
là? Et c'est ces cas-là qu'on veut éviter, là, comment on fait ça? Avez-vous
une suggestion? Peut-être qu'elle est dans votre mémoire, là, puis je m'en
excuse à l'avance.
Le Président (M. Simard) :
Me Blanchette.
M. Blanchette (Nikolas) : Oui.
Alors, merci. Merci pour les questions posées. Je répondrais en deux temps.
D'ailleurs, je fais un rappel. Sur la question du droit contesté, la difficulté
qu'on peut avoir, ici, dans un projet de loi comme celui-là, c'est que ce
droit-là de contestation, c'est un contrôle qui est nécessaire. On est dans une
séparation des pouvoirs, le judiciaire doit être en mesure de vérifier, de
contrôler les lois du Québec, ça inclut les actes publics comme un avis
d'expropriation. Alors, on a cette difficulté-là parce que c'est un garde-fou
important dans notre système de droit, et donc de vouloir empêcher un tel
contrôle avant même de discuter des raisons pratiques, on a un problème
juridique que je dirais même constitutionnel.
Si vous prenez l'exemple de la loi sur le
REM, ça a été fait en amont. On avait une disposition qui permettait une
certaine limitation sur le contrôle judiciaire. Les tribunaux se sont penchés
sur cette limitation-là, et vous l'avez dans le mémoire, on a conclu que le
pouvoir... le contrôle judiciaire qui était inhérent à la Cour supérieure était
maintenu. Alors, on ne pourra pas éliminer... selon moi, de façon juridique, on
ne peut pas empêcher la Cour supérieure de faire un contrôle sur la légalité.
Il faut se rappeler que les cas sur la légalité sont des cas limites. Alors,
qu'est-ce qu'on peut faire pour essayer d'accélérer ce contrôle-là? Vous prenez
l'article 44 de la
Loi sur l'expropriation, c'est dit que les
procédures doivent être... d'urgence…
M. Blanchette (Nikolas) : …de
façon juridique, on ne peut pas empêcher la Cour supérieure de faire un
contrôle sur la légalité. Il faut se rappeler que les cas sur la légalité sont
des cas limites, alors qu'est-ce qu'on peut faire pour essayer d'accélérer ce
contrôle-là? Si vous prenez l'article 44 de la Loi sur l'expropriation,
c'est dit que les procédures doivent être d'urgence. Alors, moi, ma façon de
voir… c'est que c'est, dans les faits, les procureurs doivent agir de la façon
la plus… possible pour aller faire trancher les questions, aller saisir le
tribunal de façon urgente, faire trancher de façon préliminaire les questions.
Et je vous dirais que si les cas sont dits… vous parlez de levier, lorsque le
droit de contestation n'est pas sérieux, les tribunaux ont tous les pouvoirs pour
casser, pour arrêter des procédures de façon préliminaire, ça s'est vu, ça
s'est fait. Et donc la manière, à mon avis, c'est d'aborder la question avec
les procédures judiciaires de façon la plus accélérée possible. Il y a une
façon de le faire, les tribunaux sont sensibles à ça, de vouloir juste arrêter
le processus me semble être une embûche supplémentaire parce qu'on va se
retrouver avec des problèmes constitutionnels ou des problèmes sur la légalité.
Donc, pour moi, c'est de la bonne gestion, de la bonne pratique des dossiers.
Ce n'est pas vrai qu'il faut attendre deux
ans avant de voir un juge de la Cour supérieure, si c'est dit jugé d'urgence,
on peut faire des requêtes en irrecevabilité, il y a des moyens préliminaires
qui peuvent s'entendre sur des semaines, sur quelques mois, et où, normalement,
on obtient des jugements, et les cas les plus farfelus seront écartés par les
tribunaux. À défaut de quoi il faut aller au mérite, et, encore là, on peut
demander une bonne gestion au juge de la Cour supérieure pour qu'il tranche le
questionnement. Ça serait ma façon pour moi de vous répondre dans les faits.
Rappelez-vous que les cas de légalité sont
des cas exceptionnels. On ne peut pas soulever, par exemple, des motifs…
n'importe lesquels motifs, tout est balisé dans la jurisprudence. Alors,
l'objectif, c'est de s'assurer que les procureurs, les parties expropriantes
appliquent avec sévérité et avec… en exigeant le plus possible d'agir
rapidement devant les tribunaux.
Le Président (M. Simard) : Mme
la ministre.
Mme LeBel : Oui, bien,
écoutez, on ne fera pas un débat juridique, mais je prends bonne note de vos
commentaires, mais effectivement il y a une très… il y a une nuance très forte
à apporter entre la révision ou l'évaluation de la légalité d'un geste et la
pertinence du geste en fonction des critères qui sont établis par la loi donc.
Et vous l'avez bien dit, là, à ce niveau-là, je pense que la Cour supérieure
peut garder son pouvoir inhérent sur la légalité, mais l'objectif du projet de
loi, c'est d'écarter les contestations quand on est dans… à l'intérieur du
cadre de la pertinence. Mais, comme je vous dis, je vais prendre le temps de
lire votre mémoire, parce qu'effectivement je n'ai eu le temps, là,
naturellement, de le lire dans les détails.
L'autre aspect, peut-être rapidement, qui
m'intéresse, c'est… je vais vous dire bien franchement, c'est une notion qui
était assez difficile à comprendre rapidement, la notion entre la
rétroactivité… un effet rétrospectif et rétroactif, on est plus dans la cadre
de la ligne bleue, à ce moment-là, et du retrait du droit de contester, tel que
vous le mentionnez. Moi, ma pratique est en droit criminel, hein? L'effet
rétroactif en droit criminel n'est pas un effet qu'on voit très souvent, pour
ne pas dire jamais, compte tenu des conséquences, là, l'effet punitif de nos
lois, puis des conséquences majeures, là, sur la sécurité et la liberté des
citoyens. Donc, on n'est pas en matière rétroactive, mais c'est plus facile de
comprendre la rétroactivité. Mais qu'est-ce que vous dites, vous faites…
Mme LeBel : ...moi, ma
pratique est en droit criminel, hein? L'effet rétroactif en droit criminel
n'est pas un effet qu'on voit très souvent, pour ne pas dire jamais, compte
tenu des conséquences, là, l'effet punitif de nos lois puis des conséquences
majeures, là, sur la sécurité et la liberté des citoyens. Donc, on n'est pas en
matière rétroactive, mais c'est plus facile de comprendre la rétroactivité.
Mais qu'est-ce que vous dites, vous faites
la suggestion... là, je vais revenir parce que je ne veux pas me tromper. Et là
on est vraiment dans la partie du projet de loi qui concerne la ligne bleue.
Ligne bleue, effectivement, il y a des contestations devant les tribunaux, donc
on a une section particulière parce qu'il y a... on n'est pas en amont présentement
de potentielles contestations, vous l'avez dit, on est en cours, pour
certaines, plus ou moins avancé, là, mais il y a des niveaux d'avancement
différents. Mais on est en cours de processus, si on peut dire comme ça.
• (16 h 40) •
Et vous nous dites à la page 16, 16
de votre mémoire, la recommandation, puis je veux vraiment avoir la nuance, parce
que c'est assez difficile à comprendre : «L'application rétroactive des
dispositions du projet de loi n° 66 applicables au projet de prolongement
de la ligne bleue du métro de Montréal a pour effet de mettre un terme à des
contestations judiciaires dont la Cour supérieure a déjà saisi — bon,
ça, c'est la partie que je comprends — et pour lesquels aucun
jugement sur le fond n'a encore été rendu.»
Et c'est cette portion-là que je veux que
vous nous expliquiez, la différence, là : «Dans la mesure où le
législateur maintient son choix de retirer le droit de contestation prévu à
l'article 44 de la loi, le législateur devrait plutôt consacrer un
caractère rétrospectif à cette disposition, si tant est qu'elle subisse...»
Donc, rétrospectif plutôt que rétroactif. Donc, vous en faites la nuance.
Juste peut-être m'expliquer. Comme l'effet
est d'effectivement stopper les contestations, mais surtout ne pas stopper le
projet pendant qu'on discute des contestations d'indemnité, c'est plutôt
l'effet recherché, quelle est la nuance entre un effet rétrospectif et
rétroactif dans le cadre des objectifs du projet de loi n° 66, et
particulièrement la section sur la ligne bleue?
M. Blanchette (Nikolas) :
En fait...excusez-moi... Ça va, je peux répondre? O.K. Alors, je... En fait,
c'est littéralement, ce que 69 prévoit, c'est effectivement d'interrompre des
procédures en cours devant la Cour supérieure. Nous avons recensé deux
procédures de contestation. Évidemment, ce n'est pas un exercice qui... Je n'ai
pas regardé tous les plumitifs, mais, vraisemblablement, peu de recours sont en
contestation. Alors, il faut le dire, il y a peut-être 250 procédures
d'expropriation. Il y en a peut-être deux qui sont en contestation. Alors, ce
n'est pas vrai que tous les dossiers mènent à des contestations. Alors, c'est
plutôt rarissime.
Or, dans ces deux dossiers-là, il y a des
dossiers qui sont sous la gestion d'une instance. Dans un certain cas, on est
rendus au mérite. Dans l'autre cas, il y a des recours préliminaires qui ont
été tranchés, et le recours continue au mérite. Alors, ce que... l'effet de 69
aurait un effet rétrospectif d'empêcher rétroactivement le recours ou le
recours en contestation qui est présentement devant les tribunaux. Si vous
lisez comme il faut 69, 70, l'effet recherché, c'est d'arrêter les procédures
en Cour supérieure. Donc, non seulement on veut empêcher la contestation en
amont d'éventuels projets, mais on vient interrompre un processus en cours. Et
donc, à mon avis, on touche encore plus à la difficulté de ne pas respecter la
séparation des pouvoirs, d'empêcher la Cour supérieure d'exercer son pouvoir
de...
M. Blanchette (Nikolas) :
...supérieure. Donc, non seulement on veut empêcher la contestation en amont
d'éventuels projets, on vient interrompre un processus en cours. Et donc, à mon
avis, on touche encore plus à la difficulté de ne pas respecter la séparation
des pouvoirs, d'empêcher, là, la Cour supérieure d'exercer son pouvoir de
surveillance qu'elle est en train d'exercer à travers une instance où on suit
des procédures, notamment des recours préliminaires et tout ça, donc, qui ont
été déjà entendus par les tribunaux.
Alors, pour moi, ça devient encore plus
sensible et encore plus incompatible avec notre constitution et les grands
principes de droit, que de venir intercepter, interrompre, court-circuiter,
appelez-le comme on veut, ces procédures-là qui sont légitimement sous un
contrôle de la Cour supérieure. C'est en ce sens-là qu'il faudrait à mon avis
éliminer l'effet rétroactif, s'en venir, à tout le moins au minimum, avec les
réserves que j'ai pour l'article 17, à regarder vers l'avant pour les
prochains, les futurs projets où, là, on est en amont où, là, la planification
n'est peut-être pas encore faite. Ça touchait mon troisième point où, là, on
peut peut-être mettre beaucoup d'effort sur la planification et la coordination
pour éviter que les expropriés se sentent ou pensent que leurs droits ont été
lésés au niveau de la légalité. Alors, se concentrer sur le futur plutôt que
retourner en arrière puis interrompre des processus en cours qui sont
légitimement devant les tribunaux.
Mme LeBel : Moi, je
considère que ce n'est pas mutuellement exclusif, là. On peut mettre des
mesures en place, mais continuer de rechercher l'entente plutôt que
l'application des mesures. Mais j'avoue que je n'ai pas bien compris,
Me Blanchette, puis je m'en excuse, parce que ce n'est pas un but caché,
là, dans les sections sur la ligne bleue, le but effectivement de mettre fin
aux contestations dans le sens... et de pouvoir reprendre. Parce que je n'ai
pas le nombre exact de contestations, mais il en suffit d'une présentement pour
bloquer le projet, là, donc, et ralentir de façon très substantielle. Mais,
vous dites, «dans la mesure où le législateur maintient son choix de retirer le
droit de contestation». Donc, si on décide d'aller de l'avant et de retirer le
droit de contestation, «il devrait plutôt consacrer un caractère rétrospectif».
Je comprends que vous recommandez de ne pas le faire, mais dans la mesure où on
maintient le cap sur cet objectif de retirer, qu'est-ce que vous voulez dire
par «consacrer un caractère rétrospectif»? Je veux dire...
M. Blanchette (Nikolas) :
En fait, littéralement de soustraire l'article 69 qui, lui, vise à
interrompre des processus qui sont déjà entamés devant la Cour supérieure.
Mme LeBel : Que le
législateur maintient son choix d'interrompre le processus, il ne devrait pas
le faire. C'est ça que ça dit dans le fond.
M. Blanchette (Nikolas) :
C'est-à-dire qu'il pourrait... Vous pourriez avoir la disposition de l'article 17.
Vous avez 181 projets d'infrastructure priorisés dans le projet de loi...
Mme LeBel : Mais si on
parle de la ligne bleue, là.
M. Blanchette (Nikolas) :
La ligne bleue?
Mme LeBel : Ce que vous
nous dites, c'est de ne pas le faire.
M. Blanchette (Nikolas) :
La difficulté, et c'est là que, moi, j'estime que, là, on vient... Ce qu'on
vient faire, c'est, à rebours, faire un contrôle sur un projet qui a été entamé
suivant les procédures usuelles prévues à la Loi sur l'expropriation. Les avis
d'expropriation ont été émis il y a quelques années déjà. On suit le processus
normal. Et là on viendrait court-circuiter à rebours des processus qui sont déjà
entamés devant les tribunaux, ce qui, pour moi, ajoute à une possible contradiction
avec notre constitution et au pouvoir de surveillance de la Cour supérieure. Et
c'est en ce sens-là que si, à tout le moins, on veut maintenir ce qu'on prévoit
à 17, 69 me semble aller un pas en avant plus loin encore et...
M. Blanchette (Nikolas) :
...des processus qui sont déjà entamés devant les tribunaux, ce qui, pour moi,
ajoute à une possible contradiction avec notre Constitution et aux pouvoirs de
surveillance de la Cour supérieure. Et c'est en ce sens-là que si, à tout le
moins, on veut maintenir ce qu'on prévoit à 17, 69 me semble aller un pas en
avant, plus loin encore, et risquer d'être encore plus conflictuel. Et, Mme la
ministre, ça peut amener des complications judiciaires qui va avoir l'effet
contraire de ce qui est recherché, soit d'accélérer les processus et des
projets d'infrastructure.
Mme LeBel : Peut-être, pour
résumer, là, votre pensée, pour être sûre que je la comprends bien, bémol sur
le fait d'agir en amont, mais recommandation de ne pas faire, par rapport à la
ligne bleue, pour les dossiers en cours. C'est à peu près, là...
M. Blanchette (Nikolas) : Ça
résumerait bien, oui.
Mme LeBel : O.K. Merci
beaucoup, puis je vais lire ça avec beaucoup d'attention, je vous le promets.
Merci. C'est tout pour moi, M. le Président.
Le Président (M. Simard) :
Merci à vous, Mme la ministre. M. le député de La Pinière.
M. Barrette : Merci, M. le
Président. Bonjour et bienvenue, Me Blanchette. Alors, moi, je vais traduire ça
en langage commun. Ce que vous nous annoncez, si le projet de loi est adopté,
c'est une quasi-garantie de contestations judiciaires, qui vont non seulement
ne pas ralentir les travaux, mais les ralentir un peu plus pour cause
juridique.
M. Blanchette (Nikolas) : Oui,
en effet. Il y a quelques options qui s'offrent à l'article 17. Donc, je vous
rappelle que le langage est très large. Il faudrait voir comment le langage est
interprété, mais de deux choses l'une : ou bien ça interdit complètement
un contrôle judiciaire, auquel cas vous avez un débat sur la constitutionnalité
de la loi où la Cour supérieure serait saisie de la constitutionnalité,
possiblement, on pourrait se poser la question, sérieusement. Ou bien on vient
empêcher seulement le recours, le contrôle, si vous voulez, prévu à l'article
44, auquel cas les contribuables vont pouvoir faire un contrôle judiciaire en
vertu des pouvoirs inhérents, ce qui sera aussi long, ou pas plus rapide, parce
qu'il devra y avoir un contrôle judiciaire, de toute manière. Et je vous dirais
même que si on fait un contrôle judiciaire en vertu des pouvoirs inhérents,
bien là, on n'a plus les mêmes balises. Je vous donne l'exemple concret à
l'article 44, si vous lisez l'article 44, qui est marqué «urgent». Si je vais
voir un juge, demain, je lui dis : Ceci est une procédure urgente, c'est
écrit dans la loi, si je suis en vertu des pouvoirs inhérents à la Cour
supérieure n'a pas d'urgence. Il y a une certaine priorité pour les pourvois
judiciaires, mais le mot «urgent» n'existe pas dans le code de procédure, alors
je me retrouverais peut-être, paradoxalement, à faire un pourvoi judiciaire,
peut-être plus long même que celui qui est déjà aménagé en vertu de l'article
44.
M. Barrette : Est-ce qu'un
pouvoir... une urgence politique, ça existe, en droit?
M. Blanchette (Nikolas) : Une
urgence politique. C'est-à-dire que le droit, à mon avis, doit respecter des
règles de base, et j'aurais tendance à vous dire qu'on ne peut pas bafouer des
règles de droit au prétexte de... pour des prétextes politiques.
M. Barrette : Très bien. Le
jour où une partie va devant la cour pour contester la constitutionnalité,
techniquement, ça arrête tout aussi. Est-ce que je comprends bien le monde du
droit?
M. Blanchette (Nikolas) :
C'est susceptible d'être assorti avec des effets suspensifs. Tout cela va être
déterminé devant les tribunaux.
M. Barrette : Alors, puis là,
je ne dis pas ça méchamment...
M. Barrette : ...une partie va
devant la cour pour contester la constitutionnalité, techniquement, ça arrête
tout aussi. Est-ce que je comprends bien le monde du droit?
M. Blanchette (Nikolas) :
C'est susceptible d'être assorti avec des effets suspensifs. Tout cela va être
déterminé devant les tribunaux.
M. Barrette : Alors, puis là,
je ne dis pas ça méchamment, je caricature, les lunettes roses de 66 pourraient
changer de couleur s'il est adopté pour les raisons que vous venez d'invoquer en
termes de délai de travaux, là.
M. Blanchette (Nikolas) : Ce
qui m'amène... En effet, si on mise sur des sanctions et des interdictions
comme je le vois à l'article 17 et 66, on risque non pas d'accélérer mais
de compliquer les procédures judiciaires et les débats. Alors, pour moi, ça
revient au point sur le fait de travailler sur la coordination à la
planification des travaux en amont.
M. Barrette : Je vais poser
une question, parce que, sur la rue... bien, entre guillemets, là, on pose
souvent la question : Oui, mais coudon, là, est-ce qu'on peut contester
après? Est-ce qu'on empêche la contestation au moment des travaux puis on
contestera après? Ou on ne peut plus, point final, contester si 66 est adopté,
là, évidemment?
M. Blanchette (Nikolas) :
Normalement, en vertu de 44 de la Loi sur l'expropriation, on a 30 jours
de l'avis d'expropriation pour contester. Alors, ce n'est pas vrai qu'on peut
contester en tout temps. Puis il y aurait une fin de non-recevoir si on ne
conteste pas en temps utile. Et normalement, lorsque les travaux
d'expropriation sont en cours, on est bien après l'émission d'avis
d'expropriation, donc ce n'est pas vrai qu'on peut, à ce moment-là, subitement
contester la légalité.
• (16 h 50) •
Évidemment, on peut toujours débattre de
l'indemnité, ce qui n'empêchera jamais d'avancer sur les travaux
d'expropriation. Il y a 252 procédures d'expropriation, il y en a deux en
contestation qui ont un effet suspensif, et ce n'est pas tout le projet mais
seulement certains segments du projet qui seraient arrêtés sur cette base-là.
Le reste des dossiers, il va y avoir des prises de possession, des travaux
d'expropriation, tout cela suit son cours, et en parallèle on débat de
l'indemnité d'expropriation.
M. Barrette : Une question que
je ne veux pas que ce soit une réponse trop longue parce que moi, j'ai moins de
temps. Mais de façon concise, là, on nous rappelle toujours que, bien, oui,
c'est la même affaire que le REM. Mais, dans les faits, sur le terrain, est-ce
que c'est différent du REM? Moi, je comprends de votre présentation que 66 va
plus loin que 61 sur les sujets traitants de l'expropriation. À 61, on nous
disait déjà que c'était pareil au REM. Moi, 66 allant plus loin que 61, bien
coudon, je me pose la question qui est simple : Est-ce que c'est vraiment
copié-collé circonstanciellement, juridiquement du REM?
M. Blanchette (Nikolas) : Non,
il y a des éléments distincts. Le REM est une loi spéciale qui a été adoptée en
amont des procédures d'expropriation, donc il y a eu des consultations qui ont
permis de préciser la planification. Deuxièmement, le texte prévu dans la loi
sur le REM était plus spécifique que ce que propose l'article 17
aujourd'hui.
Et les tribunaux ont d'ailleurs interprété
que ça n'empêchait pas un contrôle judiciaire en vertu des pouvoirs inhérents,
alors que le texte, tel que suggéré, selon moi, pourrait mener à penser qu'on
veut interdire tout recours devant la Cour supérieure, ce qui serait
inconstitutionnel. Alors, pour moi, je vois des distinctions...
M. Blanchette (Nikolas) :
...était plus spécifique que ce que propose l'article 17 aujourd'hui. Et les
tribunaux ont d'ailleurs interprété que ça n'empêchait pas un contrôle
judiciaire, en vertu des pouvoirs inhérents, alors que le texte, tel que
suggéré, selon moi, pourrait mener à penser qu'on veut interdire tout recours
devant la Cour supérieure, ce qui serait inconstitutionnel. Alors, pour moi, je
vois des distinctions en ce sens-là.
M. Barrette : ...le projet de
loi actuel, qui manifestement, va plus loin que le précédent, peut mener à des
abus. Auriez-vous des exemples concrets, potentiels, peut-être, là, mais...
M. Blanchette (Nikolas) : Mais
il faut savoir que la légalité, le contrat, la légalité, il y a encore
fréquemment... les tribunaux sanctionnent fréquemment encore... Si vous avez
regardé la jurisprudence, c'est d'actualité. Vous avez encore plusieurs
jugements où des expropriations sont jugées illégales. Des fins impropres, par
exemple. J'ai une résolution, un décret qui prévoit une fin poursuivie, mais
dans les faits, l'objectif est autre. On voit ça encore fréquemment,
malheureusement.
Et c'est là où la Cour supérieure va
intervenir pour casser la... pour annuler, si vous voulez, l'avis
d'expropriation. Alors, par exemple, je veux faire un projet spécifique dans
une ville, mais finalement, je me... j'exproprie pour une autre fin, une fin
d'avoué, qui, suivant les interrogatoires, apparaît. Alors, à ce moment-là, je
pourrais casser le... Et comme je vous dis, c'est encore fréquent. On a... Ce
n'est pas quelque chose qui est exceptionnel.
M. Barrette : Dans le cadre
des 181 projets, est-ce que vous voyez des situations, sans nommer un projet,
où il pourrait y avoir un abus.
M. Blanchette (Nikolas) : Tous
les sujets... Tous les projets sont sujets, dans certaines circonstances, à
mener à des abus. On est... Il faut toujours s'assurer d'un contrôle pour être
sûrs, par exemple, qu'on peut avoir la bonne fin poursuivie, mais pas la bonne
assise ou exproprier beaucoup plus grand que ce qui est prévu, pour des fins
autres. À chaque cas d'espèce, il faut s'assurer que la planification et les
fins poursuivies sont propres, sont légales. C'est pour ça qu'on a la Cour
supérieure, qui vient assurer le rôle de contrôle de ces actes-là.
M. Barrette : La voie de
sortie, là... Parce que vous m'avez beaucoup impressionné, puis je pense que
vous avez impressionné tout le monde, là, quand vous avez dit qu'il y a
probablement... disons, à votre connaissance, vous n'avez pas fait, vous l'avez
dit, une recension de tous les avis d'expropriation. Admettons, là, pour la
discussion, qu'il y en a juste deux, ça veut dire qu'on fait une loi, là,
essentiellement pour deux projets. Les deux projets, il y en a un qui est
évidemment celui du terminus de la STM, là. L'autre, je ne sais pas c'est
lequel. C'est probablement le boulevard, peut-être, je ne sais pas. Maintenant,
on s'en sort comment, là ? Est-ce qu'il y a un chemin qu'on peut pratiquer qui
va faire en sorte que la ligne bleue, là, ça va avancer, nonobstant tout ce
dont on discute ici actuellement, là?
M. Blanchette (Nikolas) : Je
ne peux que réitérer... Effectivement, ce n'est que deux contestations sur 200
dossiers d'expropriation de la ligne bleue seulement, prenons l'exemple de la
ligne bleue. Je ne peux que réitérer que c'est par un dialogue et une bonne
planification avec tous les professionnels. Je vis ça, j'ai une vingtaine de
dossiers, une vingtaine de dossiers avec le Procureur général du Québec, et
lorsqu'on collabore étroitement, les choses s'accélèrent. C'est vraiment dans
la pratique et la coordination, dans les faits, qu'on va pouvoir s'assurer...
Alors, si on veut prioriser ces 181 projets, il faut s'assurer d'avoir des
bonnes ressources...
M. Blanchette (Nikolas) :
...par un dialogue et une bonne planification avec tous les professionnels. Je
vis ça, j'ai une vingtaine de dossiers, une vingtaine de dossiers avec le Procureur
général du Québec, et lorsqu'on collabore étroitement, les choses s'accélèrent.
C'est vraiment dans la pratique et la coordination, dans les faits, qu'on va
pouvoir... Alors, si on veut prioriser ces 180 projets, il faut s'assurer
d'avoir des bonnes ressources, des bons professionnels, d'aller voir rapidement
les parties expropriées. Souvent, les parties expropriées sont prises par
surprise par les avis d'expropriation et, souvent, la planification est
déficiente, avec égard, mais elle n'est pas celle qu'on pourrait penser, et là
ça amène une série de complications, notamment les contestations devant la Cour
supérieure qui ont un effet suspensif des travaux d'expropriation.
M. Barrette : Quand vous
dites : La planification est essentiellement déficiente dans certains cas,
là, vous parlez de la planification du projet en soi, de la partie légale qui
revient au gouvernement? Vous parlez de quelle planification exactement?
M. Blanchette (Nikolas) : Je
peux vous donner un exemple...
M. Barrette : Mais la raison
pour laquelle je vous pose la question, c'est parce que, quand on regarde
toutes les questions environnementales, là, on sait que le gouvernement a
choisi de ne pas embaucher de professionnels. Tout le monde vient nous
dire : S'il y avait des professionnels, ça irait vite. Ça ne va pas vite
parce que les gens ne sont pas en suffisamment grand nombre. Est-ce que, là, il
y a un corollaire? Est-ce que ça se traduit? C'est à quel niveau de la
planification que ça ne marche pas?
M. Blanchette (Nikolas) :
Souvent, il peut y avoir des déficiences techniques sur l'évaluation du site.
Souvent, je peux voir aussi qu'on sous-estime, voire qu'on ignore complètement
les effets de l'expropriation sur la partie résiduelle d'un site, ce qui peut
amener une hécatombe, ou la fin d'une entreprise, ou des difficultés qui ne
sont pas considérées dans la planification et qui amènent non seulement des
réclamations qui sont à puissance 10 de ce qu'on anticipait, mais des
complications sur les commerces, sur le voisinage, sur la circulation, ça créé
des impossibilités techniques, alors que, quand on s'assoit puis on regarde la
planification avec tout le monde, parfois les solutions sont assez faciles à
trouver ou sont réalisables. Et c'est en ce sens-là que je vous dirais que...
c'est en ce sens-là que je vous dirais que la planification a tout son rôle.
Moi, je le vis sur le terrain. C'est dans ce sens-là que je vous présente ma
vision, c'est que ça se passe vraiment avec la coordination avec les avocats,
la partie expropriante, leurs ingénieurs, leurs agents de planification, pour
être sûr qu'on a bien fait notre travail...
Le Président (M. Simard) : En
conclusion.
M. Barrette :
Me Blanchette, merci beaucoup. Je regarde le président qui me regarde avec
des yeux grands comme des chronomètres. Alors, je sens que ma fin est arrivée.
Merci beaucoup.
Le Président (M. Simard) :
Merci à vous, très cher collègue, hein? Fort apprécié. Je laisse maintenant la
parole au député de Rosemont.
M. Marissal : Merci, M. le
Président. Bonjour, Me Blanchette. Alors, on va faire vite parce que moi,
j'ai encore moins de temps que mon collègue qui vient de parler.
Il y a des témoins qui ont effectivement
soulevé à maintes reprises le manque d'effectifs, environnement, notamment, en
transport. Ça, c'est une chose connue. On a très brièvement entendu l'Ordre des
ingénieurs ce matin aussi puis ce n'est pas la première fois que j'entends ça,
dire aussi qu'il manque sur le terrain d'évaluateurs agréés qui travaillent pour
le compte du gouvernement. Ça, ça participe, je présume... je ne veux pas vous
mettre les mots dans la bouche, là, mais est-ce que ça participe aux délais
déraisonnables parfois qu'on peut voir, s'il n'y a pas suffisamment de staff
sur le terrain pour évaluer?
M. Blanchette (Nikolas) : Tout
à fait. En fait, je le vois parce que les délais peuvent être occasionnés pour
faire des évaluations préliminaires...
M. Marissal : …pour le compte
du gouvernement. Ça, ça participe, je présume… et je ne veux pas vous mettre
les mots dans la bouche, là, mais est-ce que ça participe aux délais
déraisonnables, parfois qu'on peut voir, s'il n'y a pas suffisamment de staff
sur le terrain pour évaluer?
M. Blanchette (Nikolas) : Tout
à fait. En fait, je le vois parce que les délais peuvent être occasionnés pour
faire des évaluations préliminaires. Il faut aussi avoir des experts
comptables. Vous le savez, les dossiers d'expropriation, ce n'est pas juste les
valeurs immobilières, c'est tout le préjudice causé aux commerces. Franchement,
depuis cinq, 10 ans, tout ce qui est exproprié, souvent, c'est déjà bien
occupé, il y a des commerces, il y a des affaires importantes qui sont… des
opérations importantes, donc… Moi, je vois dans la pratique, malgré les bons
efforts des gens qui sont en place, un manque de ressources.
Les procureurs… les avocats du Procureur
général sont également à bout de souffle, souvent, dans les dossiers. Je veux
dire, avec égard, là, mais ils ont des dossiers énormes à gérer, donc
s'accumulent des délais administratifs qui, à mon avis, causent la longueur de
ce qu'on voit, là, dans la pratique. Donc, si toute cette coordination-là passe
par des ressources… peut-être plus de ressources et une mise en commun de ces
ressources-là, parce que les parties expropriées veulent aussi… moi, je vous
dirais, la plupart du temps, elles veulent très bien collaborer quand c'est
fait intelligemment, en amont, avec des discussions, une communication.
M. Marissal : Vous avez pris,
évidemment, une posture académique dans votre mémoire, là, qui est bien fait
puis qui est assez convaincant. Et votre plaidoyer est valable, là, c'est vrai
que se faire exproprier, ce n'est pas le fun, puis il faudrait avoir un droit
de contester, je comprends tout ça.
Par contre, vous, c'est un peu votre pain
et votre beurre aussi, je présume que vous seriez touché par des mesures telles
que celles prévues par 66 si, par ailleurs, vos clients n'avaient plus de
recours possible?
M. Blanchette (Nikolas) : En
fait…
M. Marissal : Je vous pose la
question pour qu'on soit en toute transparence parce que c'est votre champ de
pratique.
M. Blanchette (Nikolas) : Non,
mais en fait, je vais vous dire, paradoxalement… je l'ai dit très clairement,
ça peut… des procédures qu'au contraire, je pense que ce que ça peut faire,
c'est faire d'autres recours, faire d'autres débats sur la légalité de la loi,
et là, on se ramasse avec des dossiers d'avocats devant la cour, plusieurs
avocats qui débattent de la constitutionnalité de la loi. Est-ce qu'on fait un
pourvoi judiciaire en vertu des pouvoirs inhérents? Quelles sont les règles
applicables? Je vous dirais que, paradoxalement, ça peut peut-être occuper plus
que moi et les avocats dans les dossiers parce qu'on s'éloigne de la…
Le Président (M. Simard) : En
conclusion.
M. Blanchette (Nikolas) : …qui
est d'exproprier et de passer… de faire les travaux puis de s'assurer qu'on
indemnise adéquatement l'exproprié.
M. Marissal : Je vous remercie.
Le Président (M. Simard) :
Merci à vous. M. le député de Jonquière.
M. Gaudreault : Oui, merci
beaucoup pour votre présence. Avez-vous lu les commentaires que nous a transmis
le Barreau du Québec?
M. Blanchette (Nikolas) : Non,
je n'ai malheureusement pas eu l'occasion de… je n'ai pas pris connaissance,
pas de ce qui se passe présentement pour la loi n° 66,
non.
• (17 heures) •
M. Gaudreault : O.K. Le
Barreau nous a envoyé un genre de mini mémoire, là, sur le projet de loi
n° 66, ils parlent beaucoup de l'expropriation. Alors, j'apprécierais
beaucoup, si vous pouvez en prendre connaissance, de peut-être faire suivre à
la commission vos commentaires, le cas échéant.
Mais moi, je retiens trois choses. Je
ne suis pas un spécialiste en droit de l'expropriation, là, mais ils nous
disent qu'avec le… si la loi n° 66… si le projet de
loi devient une loi, l'application de l'article 44 de la Loi sur
l'expropriation sera quand même maintenue, entre autres par des recours sui
generis que pourront entreprendre les justiciables. Ils nous suggèrent de
maintenir le droit de fixer les indemnités provisionnelles qui sont prévues par
le paragraphe 5313…
17 h (version non révisée)
M. Gaudreault : …l'application
de l'article 44 de la Loi sur l'expropriation sera quand même maintenue, entre
autres par des recours sui generis que pourront entreprendre les justiciables.
Ils nous suggèrent de maintenir le droit de fixer les indemnités
provisionnelles qui sont prévues par le paragraphe 5313 de la Loi sur
l'expropriation. Ils nous disent également que ce serait préférable d'appliquer
la même chose que pour le REM et le tramway pour les délais de prise de
possession, 12 mois dans les résidences et de 18 mois dans le commercial. À
première vue comme ça, est-ce que vous trouvez que c'est des bonnes suggestions?
M. Blanchette (Nikolas) : Sur
le premier point, le Barreau, je suis d'avis qu'effectivement… je vous ai parlé
de l'impasse, ou bien on empêche 44 et le pouvoir sui generis, le pouvoir
inhérent de la Cour supérieure s'applique encore. Donc, je suis d'accord avec
eux, si on fait une lecture étroite du texte, il y avait encore un contrôle
judiciaire, en vertu des pouvoirs sui generis, ou bien on empêche tout et on a
un problème constitutionnel. Alors, je pense que, là-dessus, on est sur la même
longueur d'onde.
Pour les deux, trois… les autres modalités
qui sont discutées par le Barreau, effectivement, c'est des mesures
d'accélération. Dans mon mémoire, j'ai une certaine critique à l'égard de ces
mesures-là qu'on voyait avec le REM. Je pense qu'ultimement on devrait réformer
la Loi sur l'expropriation pour être plus nuancé avec ces mesures-là. Mais ce
sont des mesures qui peuvent avoir un effet pratique effectivement, par
exemple, si c'est le ministre qui fixe une indemnité provisionnelle, c'est toujours
dangereux que la fixation soit inadéquate. Mais disons que ce sont des mesures
de modalités qui sont plus discutables que celles de saisir la contestation ou
d'empêcher la contestation devant la Cour supérieure.
M. Gaudreault : Alors, si vous
voulez aller jeter un oeil sur ce mémoire et nous faire des commentaires et les
envoyer à la commission, je pense que ce serait très, très apprécié.
M. Blanchette (Nikolas) : Ça
me fera plaisir.
Le Président (M. Simard) : Je
crois comprendre que le mémoire n'est pas encore officiellement déposé…
M. Gaudreault : Ah! Bon.
Excusez.
Le Président (M. Simard) : …et
qu'il le sera à la fin des auditions.
M. Gaudreault : J'ai-tu fait
un outrage, moi, là?
Le Président (M. Simard) : Absolument
pas, absolument pas, mais c'était simplement…
M. Gaudreault : C'est beau.
Le Président (M. Simard) :
…pour prévenir notre invité de ne pas chercher inutilement dans…
M. Gaudreault : Ah bon! O.K.
Le Président (M. Simard) :
…nos documents…
M. Gaudreault : Je vous
l'enverrai par texto. C'est bon.
Le Président (M. Simard) :
C'est super! Merci à vous. Alors, sur ce, chers collègues, merci beaucoup. Me
Blanchette, merci pour votre précieuse contribution à nos travaux. Cela a été
fort apprécié. Nous allons donc suspendre quelques instants notre commission
afin de faire place à nos prochains invités. À nouveau, merci, Me Blanchette.
M. Blanchette (Nikolas) :
Merci.
(Suspension de la séance à 17 h 2)
(Reprise à 17 h 5)
(Visioconférence)
Le Président
(M. Simard) : Alors, jamais deux sans trois, nous reprenons.
Chers collègues, nous sommes en mesure de reprendre nos travaux. Nous avons
l'honneur, cet après-midi, de recevoir deux groupes simultanément. Donc, Assemblée
des premières nations du Québec et du Labrador ainsi que l'Institut de
développement durable des premières nations du Québec et du Labrador.
Mme Noémie Després Tassé, bienvenue.
Mme Després
Tassé (Noémie) : Bonjour.
Le Président
(M. Simard) : Chef Picard, également bienvenue. C'est vraiment
un honneur que de vous recevoir tous les deux. Merci d'avoir accepté notre
invitation.
Alors, vous êtes quand
même des gens habitués par nos procédures. Vous savez qu e vous disposez d'une dizaine de minutes. Nous vous écoutons.
M. Picard
(Ghislain) : Merci beaucoup, M. le Président. (S'exprime dans
sa langue)...
Le Président (M. Simard) :
...que de vous recevoir tous deux. Merci d'avoir accepté notre invitation.
Alors, vous êtes quand même des gens habitués par nos procédures, vous savez
que vous disposez d'une dizaine de minutes. Nous vous écoutons.
M. Picard
(Ghislain) :Merci beaucoup, M. le
Président.
(S'exprime dans sa langue)
Donc, M. le Président, Mme la ministre, membres de
la Commission parlementaire des finances publiques... extrêmement plaisir
d'avoir cette opportunité aujourd'hui, en compagnie de l'Institut de
développement durable des premières nations Québec-Labrador, Noémie Després
Tassé, de vous présenter un peu nos commentaires, nos observations par rapport
au projet de loi n° 66, et en fait, une répétition presque de notre
passage en juin dernier lorsque votre commission étudiait le projet de loi
n° 61. Donc, je désire vous remercier de l'opportunité qui nous est donnée
aujourd'hui de partager nos observations sur le contenu du projet de loi
n° 66 et comment celui-ci, comme sa première version, le projet de loi
n° 61, continue de fermer les yeux sur les principes fondamentaux qui
devraient guider... entre le Québec et les Premières Nations.
D'entrée de jeu, je vais me permettre une
mise au point que je considère importante afin de bien situer le rôle et la
responsabilité de l'organisation que je représente dans le contexte de vos
travaux sur le projet de loi n° 66. En fait, cette responsabilité s'exerce
devant toutes les décisions, législatives ou autres, de votre gouvernement qui
pourraient avoir un impact sur les intérêts et les droits des Premières
Nations. Nous avons un devoir de veille pour tout geste poser par votre
gouvernement et devons informer les dirigeants de nos communautés et autres
nations représentées à notre table qui jugent en tout temps des réponses
appropriées.
Dans le contexte du projet de loi
n° 66 sur la relance économique du Québec et l'accélération de certains
projets d'infrastructure en période de pandémie, les principes fondamentaux
auxquels je réfère plus hait font l'objet d'un consensus très clair. Nous avons
d'ailleurs eu l'occasion de vous les partager lors de notre passage en juin
dernier aux fins des travaux sur le projet de loi n° 61. Nous avons eu
l'occasion de les réitérer dans une lettre transmise au premier ministre le 7
août dernier.
Puisque nous sommes devant une nouvelle
version du projet législatif, je me permets de vous soumettre à nouveau que le
libellé que nous sommes appelés à commenter ne peut être appuyé puisqu'il ne
tient pas compte des droits ancestraux et issus de traités et des manquements
de votre gouvernement en matière de consultations et d'accommodements. Je dois
vous avouer un haut niveau de scepticisme quant a l'influence que je pourrais
avoir à ce stade-ci de votre démarche, sachant que nos représentations en
marge...
M. Picard
(Ghislain) : ...ce qui ne tient pas compte des droits ancestraux
et issus de traités et des manquements de votre gouvernement en matière de consultations
et d'accommodements. Je dois vous avouer un haut niveau de scepticisme quant à
l'influence que je pourrais avoir à ce stade-ci de votre démarche, sachant que
nos représentations en marge du projet de loi n° 61,
en juin dernier, sont, somme toute, passées inaperçues. Pourtant, le ministre
Dubé, qui était alors porteur du projet de loi n° 61,
nous avait indiqué avoir été très clair dans nos représentations, qu'il en
prenait acte et qu'il y aurait des suivis. En juin dernier, plus d'une douzaine
de communautés ont transmis par écrit leurs commentaires sur les ratés du
projet de loi n° 61. Force est de croire que leurs
commentaires pourraient facilement être réitérés dans le cadre de l'étude du
projet de loi n° 66, puisque le présent libellé est
presque en tous points conforme à celui que nous avons été appelés à commenter
en juin.
• (17 h 10) •
Je me réjouis, et je tiens à vous en
remercier, que votre commission ait accepté d'entendre au moins deux
communautés de deux nations différentes dans le cadre de vos présents travaux.
Il va de soi que nous appuyons les positions qui vous ont été soumises par le
Conseil des Mohawks de Kahnawake et celles qui vous seront partagées par les
Innus de Uashat mak Mani-Utenam. Bien que ces deux mémoires reflètent des
considérations qui peuvent être particulières selon des contextes économiques
qui leur sont propres, ils arrivent tout de même aux mêmes conclusions quant au
respect des droits ancestraux issus de traités et aux obligations de votre
gouvernement en matière de consultation. Je n'ai pas de doute que les
communautés qui ont pris la peine de vous transmettre par écrit leurs
commentaires en juin dernier en viendraient aux mêmes conclusions encore
aujourd'hui.
Donc, à ce stade-ci, je passerais la
parole à Mme Després Tassé pour la partie qui touche plus particulièrement
l'institut de développement durable. Merci beaucoup... (S'exprime dans une
langue autochtone)
Le Président (M. Simard) :
Merci à vous.
Mme Després Tassé (Noémie) :
Bonjour à tous. Alors, pour ma part, je vais entrer tout de suite dans le vif
du sujet. Le projet de loi n° 66 laisse présager une
augmentation de la pression sur les Premières Nations, que ce soit par rapport
au resserrement des délais réservés à la consultation ou encore quant à la
multiplication des projets et de leurs impacts cumulatifs au nom de la relance économique.
Le retrait de l'obligation d'obtenir une
autorisation environnementale dans une multitude de circonstances sème aussi
d'importantes inquiétudes quant à la protection de l'environnement, mais
également quant à l'obligation de consulter et d'accommoder les Premières
Nations, une obligation qui risque d'être errodée par ce projet de loi.
Soulignons également qu'aucune consultation n'a eu lieu en amont de la
présentation de ce projet de loi, écartant ainsi d'emblée toute coordination
avec les Premières Nations dans la relance économique du Québec. Dans la
version... du projet de loi n° 61, tout comme dans sa version précédente,
aucun projet d'infrastructure communautaire n'est prévu dans une communauté
autochtone, même si nous connaissons l'ampleur des besoins...
Mme Després Tassé
(Noémie) : ...en amont de la présentation de ce projet de loi écartant
ainsi d'emblée toute coordination avec les Premières Nations dans la relance économique
du Québec. Dans la version ... du projet de loi n° 66, tout comme dans sa
version précédente, aucun projet d'infrastructure communautaire n'est prévu
dans une communauté autochtone même si nous connaissons l'ampleur des besoins.
Bien que le concept même que des projets puissent contourner les exigences environnementales
soit problématique, le fait que les Premières Nations soient encore une fois
écartées de la relance économique est d'autant plus dérangeant. Le projet de
loi est donc susceptible de faire porter les conséquences négatives de la
dégradation de l'environnement en premier plan aux Premières Nations tout en
les écartant de la possibilité de pouvoir bénéficier de retombées économiques.
Par ailleurs, le projet de loi n° 66
octroie la possibilité au ministre de permettre temporairement le début des
travaux sur les terres du domaine de l'État avant que les autorisations nécessaires
n'aient été délivrées. Par rapport au projet de loi n° 61, cette
disposition a été modifiée afin de préciser une condition. Afin de bénéficier
de cette mesure d'accélération, les travaux envisagés ne doivent pas, je cite,
être «incompatibles avec un droit précédemment octroyé ou avec une autre
contrainte qui s'y rattache». Cette formulation est pour le moins ambiguë. Nous
nous questionnons ici à savoir si les droits ancestraux sont ainsi ... comme
une contrainte se rattachant aux terres du domaine de l'État. Si oui, il aurait
été fort pertinent de le mentionner explicitement. On peut également saisir
l'opportunité aujourd'hui de poser la question directement à la ministre :
Est-ce que l'obligation de consulter et d'accommoder les Premières Nations sera
respectée dans le cadre des travaux prévus sur les terres du domaine de l'État?
Nous tenons à souligner que, par cette
disposition, le gouvernement ... un peu le concept colonialiste de ... et agir
comme s'il n'y avait personne qui occupait et qui vivait en corrélation directe
avec ces territoires. De plus, ces terres du domaine d'État sont en très
grandes parties des territoires non cédés et font l'objet de revendications et
de négociations territoriales depuis de trop nombreuses années. Alors que la
reconnaissance concrète du concept de nation à nation est, pour sa part,
constamment repoussée, le gouvernement semble maintenant s'empresser de
permettre la mise en oeuvre de projets majeurs sur ces territoires sans
autorisation et sans impliquer les Premières Nations.
Nous recommandons donc d'insérer au
minimum, dans le projet de loi n° 66, la mention spécifique qu'en aucun
cas un projet visé ne peut être soustrait à l'obligation constitutionnelle de
consulter et d'accommoder les Premières Nations. Encore une fois, il s'agit
d'un minimum. Merci.
Le Président (M. Simard) :
Merci à vous, chère dame. Alors, nous pouvons donc entreprendre notre période
d'échange. Je cède la parole à la présidente du Conseil du trésor.
Mme LeBel : Merci, M. le
Président. Merci, Mme Després Tassé, merci, chef Picard, pour vos
présentations. Je vais poser mes questions, puis celui d'entre vous qui pensera
qui est le plus approprié d'y répondre ou les deux, là, ça va me faire plaisir,
là, je vais la poser de façon générale.
Les 181 projets qui sont en annexe du
projet de loi n° 66 sont des projets déjà existants. Ce sont des projets
qui sont à différents niveaux d'avancement, ce n'est pas... ils n'ont pas tous
le même niveau d'avancement, mais à différents niveaux d'avancement...
Mme LeBel : ...ça va me
faire plaisir, là, je vais la poser de façon générale. Les 181 projets qui
sont en annexe du projet de loi n° 66 sont des projets déjà existants. Ce
sont des projets qui sont à différents niveaux d'avancement, ce n'est pas...
ils n'ont pas tous le même niveau d'avancement, mais à différents niveaux
d'avancement. Et le but, là, c'est de bien comprendre votre position, là.
Donc, le projet de loi n° 66 vient
agir sur des processus déjà existants, processus qui ne s'appliquent pas nécessairement
aux 181 projets... non, dans le sens où qu'ils ne sont pas nécessairement
pertinents pour les 181 projets. À titre d'exemple, le processus
d'expropriation, quand c'est nécessaire pour un projet, le domaine de l'État,
comme vous y faites référence, les autorisations en matière d'urbanisme et
de... bien, d'urbanisme et les autorisations environnementales. Donc, quatre processus
distincts, mais qui peuvent s'appliquer à un ou plusieurs projets de loi...
projets d'infrastructure. Rien dans le projet de loi n° 66, à ma connaissance,
selon mon point de vue, en tout respect, et je veux comprendre le vôtre, ne
vient faire autre chose qu'accélérer des processus déjà existants. Je comprends
votre bémol sur l'environnement, on pourra y revenir, là.
En quoi... Donc, ma question, elle ne
porte pas sur ce processus particulier, mais sur la généralité du projet de loi
n° 66. En quoi le projet de loi n° 66, dans ses
objectifs d'accélération de processus déjà existants, sur des projets de
construction déjà existants, vient selon vous écarter cette obligation
constitutionnelle que vous nous décrivez de consulter les groupes autochtones? Moi,
à mon sens à moi, cette obligation constitutionnelle là demeure applicable, le
cas échéant, et le projet de loi n° 66 ne vient pas faire en sorte de
l'écarter, en tout cas, pas nommément. Mais je veux bien comprendre, sur cet
aspect-là, en quoi le projet de loi n° 66 vient écarter cette obligation
constitutionnelle là.
Le Président (M. Simard) :
Mme Després.
Mme Després Tassé (Noémie) :
Chef Picard...
M. Picard
(Ghislain) : Oui. Bien, je... peut-être tenter une première
réponse, et Noémie pourra très certainement compléter. Mais, pour moi, c'est
très clair que le projet de loi n° 66 doit être pris, je vais dire, dans
son entièreté. Je comprends qu'il y a déjà en annexe un certain nombre de
projets. D'ailleurs, si je ne me trompe pas, Kahnawake a déjà exprimé certaines
réserves par rapport à certains projets qui pourraient affecter... les affecter
peut-être de façon un peu plus précise. Et je comprends ici que, dans la liste
des projets, des 181 projets, bon, il y a peut-être des projets qui
peuvent avoir un impact direct, selon certaines communautés ou certaines...
Donc, nous, ce qu'on avance, la position se veut la plus générale possible,
mais toujours...
M. Picard
(Ghislain) : …et je comprends ici que, dans la liste des
projets, des 181 projets, bon, il y a peut-être des projets qui peuvent
avoir un impact direct, selon certaines communautés ou certaines nations. Donc,
nous, ce qu'on avance, la position se veut la plus générale possible, mais
toujours en considération que le projet de loi n° 66 constitue quand même
un tout. Et d'ailleurs Noémie l'a précisé davantage un peu plus tôt en
disant : Bon, ce qui nous intéresse, nous, c'est peut-être là où le projet
de loi mériterait d'être un peu plus précis, notamment sur la question des
terres du domaine de l'État. Et c'est davantage là que nos préoccupations
s'affichent, parce qu'on sait très bien qu'il y a des nations qui sont en
processus de revendication territoriale, d'autres nations qui pourraient
facilement l'être aussi au travers des 10 nations représentées au Québec,
des Premières Nations. Donc, c'est beaucoup plus là-dessus que nous en avons
par rapport au libellé du projet de loi. Quant aux projets que… dont… auxquels
vous faites référence, c'est très clair qu'il y aura sans doute des communautés
ou des nations qui seront davantage affectées par l'un ou l'autre de ces
projets qui sont parmi les 181 projets.
Mme LeBel : Peut-être vous
l'avez… Oui, je m'excuse, vous aviez une réponse pour compléter, je vais vous
laisser aller.
Mme Després Tassé (Noémie) :
Oui, en fait, moi, j'aurais trois éléments de réponse. En fait, par rapport à
l'obligation de consultation, il y a trois aspects qui sont inquiétants.
Premièrement, c'est par rapport à… bien, en fait, au début des travaux, avant
même qu'il y ait une autorisation sur les terres du domaine de l'État, ça, ça
crée une inquiétude que le fait que les travaux puissent commencer directement,
ça écarte l'obligation de consulter.
Ensuite, bien, peut-être que vous pouvez
répondre directement à cet aspect-là ou je peux aller avec mes deux autres
points?
Mme LeBel : Allez-y.
• (17 h 20) •
Mme Després Tassé (Noémie) :
Oui, en fait… puis, après ça, le deuxième point, c'est par rapport au fait de…
il y a plusieurs groupes environnementaux qui sont venus vous dire, dans les
derniers jours, que le projet de loi avait pour effet de déclasser, hein,
certaines activités par rapport à la Loi sur la qualité de l'environnement, ce
qui fait en sorte que certaines activités ne nécessitent plus d'autorisation,
comme ils devraient l'avoir, sauf que ces activités-là… ce projet de loi là a
pour effet de créer une sorte de fiction, hein, parce que l'activité en
question conserve le même niveau de risque, sauf qu'elle ne nécessite plus
l'autorisation. Dans la pratique, au moment de l'autorisation, c'est souvent
dans ce contexte-là, en fait, que la consultation a lieu, donc on a peur que si
certaines activités ne nécessitent plus d'autorisation, en fait, que
l'obligation de consulter soit écartée par la bande.
Puis, le troisième aspect, en fait, c'est
aussi… on comprend, là, le contexte actuel de devoir accélérer l'ensemble des
projets, mais c'est sûr que ça crée une pression immense sur parfois des tout
petits bureaux de consultation, parfois dans des conseils qui n'ont tout
simplement pas de bureau de consultation, où l'accélération des… les délais,
c'est déjà un enjeu, donc l'accélération des délais, c'est aussi un enjeu.
Mme LeBel : O.K. Je comprends
très bien votre…
Mme Després Tassé (Noémie) :
...des projets. Mais c'est sûr que ça crée une pression immense sur, parfois,
des tout petits bureaux de consultation, parfois dans des conseils qui n'ont tout
simplement pas de bureau de consultation, où l'accélération des... les délais,
c'est déjà un enjeu, donc l'accélération des délais, c'est aussi un enjeu.
Mme LeBel : O.K. Je comprends très
bien votre point sur l'autorisation environnementale, là. Je l'ai dit à
plusieurs reprises, avec plusieurs groupes, que ma prétention à moi, c'est que l'objectif
n'est pas de rabaisser les normes, mais d'accélérer un processus. Mais je
comprends votre point sur cet aspect-là, par rapport au risque modéré, là, qui
va être traité, selon votre interprétation, comme un risque faible. Et c'est
vraiment sur la notion de consultation.
Allons-y, d'ailleurs, sur l'article 19 sur
le domaine de l'État. Comment ça se passe dans la situation actuelle, là, si on
enlève le projet de loi n° 66 de la table, les
mesures qui concernent les terres du domaine de l'État, l'article 19 en
particulier? Présentement, ça se passe comment, là, en général? Est-ce qu'il y
a une consultation? Et elle se passe à quel moment, puis par qui?
Mme Després Tassé (Noémie) :
Bien, en fait... Chef Picard, est-ce que vous voulez commencer?
M. Picard
(Ghislain) : Vas-y, Noémie, je compléterai.
Mme Després Tassé (Noémie) :
En fait, dans l'ensemble des consultations qui ont lieu en ce moment au
gouvernement... par le gouvernement du Québec, il n'y a pas malheureusement pas
de procédé, en fait, qui est tout le temps le même. Il faut dire aussi que
chaque communauté peut détenir un protocole de consultation qui lui est propre
et qui choisit un peu de quelle façon elle veut échanger avec le gouvernement,
premièrement.
Ensuite, quand il y a... Vous savez, la
jurisprudence est quand même assez claire, là, par rapport à quel moment
l'obligation de consulter doit naître. Puis on rappelle que c'est à partir du
moment où le gouvernement a connaissance de l'existence potentielle d'un droit
et qu'il envisage des mesures susceptibles d'avoir un effet préjudiciable sur
ce droit. Donc, à partir du moment où il y a un projet qui est envisagé, qui va
être, en quelque sorte, autorisé par le gouvernement, l'autorisation sert un
peu, souvent, de déclencheur, dans la pratique, puis c'est à ce moment-là où la
consultation a lieu.
C'est pour ça qu'on pense que, s'il n'y a
plus ce... si les travaux peuvent commencer avant même que le gouvernement se soit
penché sur les activités envisagées, bien, on a peur qu'il n'y ait pas de
processus de consultation et d'accommodement adéquat en amont du début des
travaux.
Mme LeBel : Je comprends très
bien votre position. Par contre, je réitère que les 181 projets sur la liste
sont des projets existants. Je pourrais comprendre... J'aurais peut-être...
Puis ce n'est pas une... Je ne suis pas... Ce n'est pas obtus de ma part, là,
ce n'est parce que je ne veux pas comprendre, mais je comprends que... Si on
mettait cette mesure-là en place pour de futurs projets, puis si je me remets
dans le cadre du projet de loi n° 61, où on se donnait la possibilité, par
le biais de décrets et un autre mécanisme, de rajouter des projets qui ne sont
peut-être même pas encore existants, je vais le dire comme ça, je peux
comprendre. Mais là...
Mme LeBel : ...cette
mesure-là en place pour de futurs projets. Puis si je me remets dans le cadre
du projet de loi n° 61, où on se donnait la possibilité par le biais de
décrets et un autre mécanisme de rajouter des projets qui ne sont peut-être
même pas encore existants, je vais le dire comme ça, je peux comprendre. Mais
là présentement on est dans 181 projets nommés, ciblés, identifiés et
existants.
Le processus d'autorisation actuel sur le
domaine de l'État ou environnemental, à moins que je me trompe, n'inclut pas de
façon formelle un processus de consultation. Ce processus-là se fait,
j'imagine, à divers niveaux puis à diverses maturités du projet. Est-ce que,
dans les 181 projets qui sont là, présentement, le processus de consultation
n'a pas été encore fait, devrait être fait? Et, encore une fois, je réitère, l'objectif
du projet de loi n° 66, ce n'est pas d'écarter des obligations constitutionnelles
du gouvernement, mais d'accélérer des processus existants.
Donc, je veux vraiment être capable de
voir. Moi, pour moi, un peut aller avec l'autre, c'est-à-dire qu'on peut
accélérer des processus tout en maintenant des objectifs de consultation. Mais
le projet de loi n° 66, à mon sens, n'a pas pour effet d'écarter cette obligation-là,
le cas échéant, là, quand elle est existante, là, pour les projets. Donc, je
voulais simplement être sûre. Bien, je vais regarder ça avec beaucoup
d'attention effectivement.
Au niveau des normes environnementales,
donc, on l'a mentionné. Là, maintenant, si on ne va pas sur le processus de consultation,
mais sur votre préoccupation du fait qu'on affecte les normes environnementales,
quels sont les aspects particuliers du projet de loi n° 66,
d'ailleurs, sur ce qu'on appelle, nous, la déclaration de projet? Je pense que
c'est l'article 22 du projet de loi n° 66, et ça joue dans les articles 22
aussi de la Loi sur la qualité de l'environnement, là, ce qui est un hasard. En
quoi vous considérez, vous, qu'on baisse les normes environnementales par une
accélération de processus, alors que ce n'est même pas l'objectif? Mais
j'aimerais avoir votre point de vue, là. On sort du domaine de la consultation,
plus dans les processus précis de protection de l'environnement, là. Si vous
alliez pouvoir me donner un peu votre éclairage là-dessus.
Une voix
: Chef Picard.
Mme Després Tassé (Noémie) :
Oui. En fait, vous avez posé la question à pratiquement tous les groupes environnementaux
qui se sont présentés devant vous. Et pratiquement tous les groupes ont répondu
la même chose. C'est que, comme je l'ai dit plus tôt, le projet de loi a pour
effet... Premièrement, le projet de loi contient une multitude de dispositions environnementales
qui servent à comme remplacer un peu ce qui est déjà prévu dans le cadre législatif.
Donc, à la base, pourquoi prévoir des dispositions si, en fait, le but ce n'est
pas de défaire un peu qu'est-ce qui est déjà présent dans le cadre législatif?
Ensuite, l'ensemble des groupes environnementaux
et moi-même, je vais vous dire que ce projet de loi là a pour effet de
déclasser un peu le niveau de risque des activités et, par la même occasion,
déclasser un peu les obligations qu'aurait la cible ou le niveau de suivi, les
exigences par rapport à une activité qui devrait être à risque...
Mme Després Tassé (Noémie) :
...a pour effet de déclasser un peu le niveau de risque des activités et, par
la même occasion, déclasser un peu les obligations corrélatives ou le niveau de
suivi, les exigences par rapport à une activité qui devrait être à risque
modéré ou faible. Donc, c'est à ce niveau-là que... sans aller dans les
détails, là, mais c'est par rapport au suivi, aux informations à partager. C'est
ça qui fait en sorte de déclasser, de réduire en fait, par déclasser, je veux
dire réduire les exigences.
Mme LeBel : Merci beaucoup. Merci
beaucoup, Mme Després Tassé. Je ne sais pas, chef Picard, si vous avez quelque
chose à ajouter, il reste un peu de temps dans mon temps.
M. Picard
(Ghislain) : Oui, bien, je voudrais juste revenir sur votre commentaire
précédent en ajoutant que c'est un peu ce qu'on était disposés à proposer,
finalement, un processus par lequel... Encore une fois, sur les 181 projets, il
y a peut-être des communautés qui ne sont aucunement affectées par aucun de ces
projets-là. Mais, par contre, il y a des communautés qui pourraient l'être,
potentiellement l'être. Et c'est dans ce sens-là qu'on avait proposé, bon, est-ce
qu'on peut s'asseoir, se créer un espace commun pour faire l'analyse de tous
les projets e de quelle façon ça peut impacter un certain nombre de communautés.
Je pense au projet du pont Mercier, par exemple, où c'est très clair que... et d'ailleurs
ça vous a été soumis la semaine dernière, hein, il y a une préoccupation énorme
du côté du conseil mohawk par rapport au projet du pont Mercier. Donc, il y a peut-être
d'autres projets dans la liste ou dans l'annexe, là, qui pourraient avoir
potentiellement des impacts sur un certain nombre de communautés. D'où l'importance
d'avoir un processus qui soit ouvert, transparent, qui permettra aux communautés,
en tout cas, à certaines de celles-ci, là, de peut-être faire un peu le tri de
ces projets-là et de pouvoir les commenter si l'opportunité leur était donnée.
Mme LeBel : Merci. Merci, M.
le Président.
Le Président (M. Simard) :
Merci à vous. M. le député de La Pinière.
M. Barrette : Merci, M. le
Président. Alors, chef Picard, Mme Després Tassé, bienvenue, à mon tour de vous
souhaiter la bienvenue. Alors, je pense qu'évidemment votre intervention est
plus qu'à propos puisque vous êtes la deuxième organisation qui représente des premières
nations qui s'est fait dire... que ce n'est pas consulté... qui n'a pas été
consultée. Je vais vous avouer que quand chef Montour est venu nous dire ça,
j'ai trouvé ça impressionnant, d'autant plus qu'évidemment le pont Mercier
atterrit exactement chez eux et qu'à 61 il n'avait pas été consulté non plus.
J'imagine que c'est la même chose pour vous.
Le Président (M. Simard) :
Chef Picard.
M. Picard
(Ghislain) : Tout à fait, oui.
• (17 h 30) •
M. Barrette : Alors, il y a là
un enjeu qui est très problématique, puis je dirais douloureux, là, parce qu'à quelque
part c'est un peu de la négligence, là, on néglige de vous consulter.
J'aimerais bien savoir pourquoi. J'imagine qu'on n'aura jamais de réponse à
ça...
17 h 30 (version non révisée)
M. Barrette : ...un enjeu qui
est très problématique puis je dirais douloureux parce qu'en quelque part,
c'est un peu de la négligence, là, on néglige de vous consulter. J'aimerais
bien savoir pourquoi. J'imagine qu'on n'aura jamais de réponse à ça.
Mme LeBel : Donnez-moi deux
secondes.
M. Barrette : Je peux vous
donner deux secondes.
M. Picard
(Ghislain) : Oui, bien...
M. LeBel : Bien, c'est parce
qu'on...
M. Barrette : ...pourquoi vous
n'avez pas été consulté.
Mme LeBel : Bien, on devait se
rencontrer, avec le chef Picard, le 14 septembre, mais, malheureusement,
la rencontre a été annulée, M. Picard, mais ça m'aurait fait plaisir de
pouvoir vous en parler.
Le Président (M. Simard) :
Très bien. Alors, s'il vous plaît, on va poursuivre, donc, nos auditions.
M. Barrette : ...le projet de
loi n° 61, c'était au mois de juin puis vous n'avez
pas été consulté. Alors, rien à voir avec le 14 septembre. Ça fait que,
c'est de même. Ceci dit, j'aimerais ça que vous me donniez quelques précisions.
Vous n'avez pas été consulté, mais vous êtes bien placé, là, pour me donner
cette réponse-là. À part Mercier, est-ce qu'il y a beaucoup de projets qui
impactent les Premières Nations? Chef Montour nous a parlé de tous les projets
de Montérégie, là. Puis on le comprend, là, parce que, pour ceux qui
connaissent la géographie de Montérégie... Ailleurs, il y en a-tu beaucoup?
M. Picard?
M. Picard
(Ghislain) : Là, je ne sais pas si Noémie aurait des précisions à
apporter là-dessus, mais je sais que le processus qui avait été suggéré et
proposé... je comprends le commentaire de la ministre sur la question d'une
rencontre qui a été annulée le 14 septembre. Écoutez, je n'en ferai pas
une histoire, là, c'est peut-être juste une situation où il y a eu de part et
d'autre trop d'intermédiaires. Je pense que les messages n'ont pas été transmis
aux bonnes personnes, mais la rencontre, finalement, avait été organisée un peu
en parallèle avec une autre rencontre qui était seule avec le premier ministre.
Mais je ne reviendrai pas là-dessus. Ce qui est important ici, c'est qu'il y a
un processus qui avait été suggéré, et je vous ramène au 7 août dernier.
Après un peu le silence entre juin et
août, on s'est permis de... au premier ministre en disant : Bon, voici le
processus que nous suggérons au gouvernement du Québec, qui était la mise sur
pied d'une table de discussion qui nous permettrait justement de faire ce
tri-là que vous suggérez, M. Barrette, par rapport au projet qui était
dans l'annexe. Et je suis sûr que le pont Mercier, c'est sans doute l'exemple
le plus évident, mais il y aurait d'autres projets, comme l'a souligné
d'ailleurs le chef Montour la semaine dernière.
M. Barrette : Merci. Je vais
vous avouer, là, que je suis un peu de votre bord, là, dans une certaine
mesure, en fait, dans pas mal de mesures, là, je dirais. Quand la ministre nous
dit que sa prétention est d'abord et avant tout... en fait, même exclusivement
d'accélérer les processus et de ne pas diminuer la qualité ou la finalité des
évaluations environnementales...
M. Barrette : ...de votre
bord, là, dans une certaine mesure, en fait dans pas mal de mesures, là, je
dirais.
Quand la ministre nous dit que sa
prétention est d'abord et avant tout, en fait même exclusivement, d'accélérer
les processus et de ne pas diminuer la qualité ou la finalité des évaluations environnementales,
je ne sais pas lequel de vous deux va vouloir répondre à ça, là. Mais, moi,
j'ai de la misère à m'expliquer comment on ne touche pas à la valeur de l'évaluation
environnementale quand on fait passer — j'aime bien votre mot,
Mme Després Tassé — quand on déclasse un projet en le
faisant passer de modéré à faible. Moi, j'ai bien de la misère. Je ne sais pas,
vous, vous pouvez imaginer une situation où un projet va bénéficier de ça, de
passer de modéré à faible sans qu'il n'y ait d'impact sur l'évaluation
environnementale. J'imagine que vous avez peut-être des exemples du contraire.
M. Picard
(Ghislain) : Noémie.
Mme Després Tassé (Noémie) :
Du contraire, vous voulez dire?
M. Barrette : Dire que
des projets qui vont être lésés dans la qualité de l'évaluation
environnementale parce que ce n'est pas la même analyse. Quand on est à risque
modéré, ce n'est pas le même niveau d'analyse qu'à risque faible. Faible,
c'est... je n'exagère quasiment pas en disant que c'est du «rubber-stamping»,
là, alors que, modéré, il y a un petit peu plus... un petit peu plus de
substance dans l'analyse, là. Donc, il y a des projets où... qui en étant
«faible» verraient des impacts occultés parce qu'on les a mis dans «faible».
Mme Després Tassé (Noémie) :
Exactement. En fait, vous avez un peu répondu à votre propre question. Quand on
parle d'une activité qui est considérée... en fait qui demeure avec un risque
élevé, mais qui, par ce projet de loi là, va être considérée comme à risque
faible, on parle de beaucoup moins de suivi, beaucoup moins d'informations qui
doivent être divulguées alors que pourtant, en fait, le ministère de
l'Environnement vient de faire un travail assez monumental de classifier en
fait chacune des activités selon son risque pour l'environnement et d'élaborer
en fait une forme de suivi et des exigences environnementales en fonction de ce
risque-là. Alors, le projet de loi n° 66 vient vraiment comme écarter
cette considération en fonction du niveau de risque avant même que le règlement
REAFIE, comme plusieurs ont parlé, entre en vigueur. Donc, je n'ai pas
d'exemple concret de qu'est-ce que ça fait dans les activités concrètes de la
liste de projets, mais je suis certaine que l'exercice a probablement été fait,
au sein du gouvernement, de savoir exactement quelles activités vont pouvoir
être un peu déclassées par ce projet de loi là.
M. Barrette : J'allais
vous poser la question. Là, quand vous parlez à la classification qui est assez
exhaustive, là, vous faisiez référence au REAFIE évidemment, là. Ce n'est pas
tout le monde qui suit ça, hein, la question de l'environnement. Le REAFIE, je
vais vous avouer que ce n'est pas mon sujet premier et je ne suis pas
porte-parole de ça. Mais, quand je suis allé voir ça, c'est vrai que c'est
assez exhaustif, là, comme classification d'activités humaines. Et c'est clair
que 66, j'imagine que vous allez être d'accord...
M. Barrette : ...pas tout le
monde qui suit ça, hein, la question d'environnement. Le REAFIE, je vais vous
avouer que ce n'est pas mon sujet premier, je ne suis pas porte-parole de ça.
Mais, quand je suis allé voir ça, c'est vrai que c'est assez exhaustif, là,
comme classification d'activités humaines. Et c'est clair que 66, j'imagine que
vous allez être d'accord, c'est une sursimplification. En fait, ça vient...
c'est une tentative de remplacement du REAFIE en sursimplifiant et de penser
qu'en sursimplifiant ça a le même impact, du moins regarder sous l'angle du
REAFIE, c'est assez difficile de conclure ça.
Là, je vais vous poser une question... Écoutez,
là, je vais vous demander votre compréhension, là, puis je vais le citer au
texte dans votre mémoire, là. Alors, pour les milieux humides, là, vous parlez
de la situation où on peut passer à côté des mesures d'accélération... on peut
ne pas bénéficier des mesures, à moins que... donc passer à côté, «le projet ne
prévoie la remise en état dans l'année suivant la fin des travaux, de sorte que
ceux-ci retrouvent leurs caractéristiques initiales ou qu'ils ne
représentent... ne présentent — pardon — des
caractéristiques s'en rapprochant».
Juste de même, là, c'est-u vraiment
faisable, ça, après des travaux, de revenir à ce point-là à l'état initial?
Mme Després Tassé (Noémie) :
Bien, premièrement, moi, je ne suis pas biologiste, mais je pense que c'est quand
même assez identifié dans la science que c'est très difficile sinon impossible
de revenir aux caractéristiques initiales d'un milieu humide.
Puis, en fait, ce qui est particulièrement
inquiétant dans cette disposition-là aussi, c'est le passage que vous avez
mentionné : «ou qu'ils ne présentent des caractéristiques s'en
rapprochant». Ça, ça ouvre la porte à un immense pouvoir discrétionnaire. Qu'est-ce
que c'est, des caractéristiques s'en rapprochant? Qui va juger de ça? Puis en
fonction de quels critères? C'est extrêmement inquiétant. Puis, en fait, c'est
très incertain aussi que ces dispositions-là vont permettre de se conformer à
l'objectif de zéro perte nette.
M. Barrette : Écoutez, je suis
d'accord avec vous, là. Moi, je tourne ça de tout bord, tout côté, là. J'ai
retenu ça, c'était d'ailleurs la question qui suivait. «S'en rapprochant», ça
m'apparaît éminemment arbitraire, non défini. Rapproché, ça veut dire quoi?
Il y a un principe en science qui fait en
sorte qu'à partir du moment où même qu'on observe un système, c'est le principe
d'incertitude, là, même en observant un système on le perturbe. Alors, c'est
sûr que des travaux, ce n'est pas de l'observation, là. Alors, c'est assez
difficile de ne pas perturber un système environnemental donné géographiquement
puis de penser, là, refaire revenir à l'initial. Je ne le vois pas, là. Ça fait
qu'on est, je pense, sur la même page là-dessus.
Est-ce que... Essentiellement, ce que vous
souhaitez, est-ce que je peux conclure que, si vous aviez une magique, que je
n'ai pas, moi non plus, vous souhaiteriez simplement que le REAFIE soit
appliqué puis qu'on abandonne ces parties-là du... ces éléments-là du projet de
loi?
Mme Després Tassé (Noémie) :
Bien, je tiens à préciser que le REAFIE n'est pas parfait non plus parce qu'il
avait aussi pour effet de possiblement avoir un impact sur la portée de
l'obligation de consultation, et c'est quelque chose qu'on a soulevé lors des
consultations sur le REAFIE...
M. Barrette : …vous
souhaiteriez simplement que le REAFIE soit appliqué puis qu'on abandonne ces
éléments-là du projet de loi.
Mme Després Tassé (Noémie) :
Bien, je tiens à préciser que le REAFIE n'est pas parfait non plus, parce qu'il
avait aussi pour effet de possiblement avoir un impact sur la portée de
l'obligation de consultation, et c'est quelque chose qu'on a soulevé lors des
consultations sur le REAFIE. Mais pour répondre à votre question, oui, c'est
clair que le REAFIE prévoit un cadre qui a fait l'objet quand même de
consultations approfondies puis d'une réflexion approfondie aussi.
Donc, pourquoi ne pas simplement le
laisser entrer en vigueur? En fait, aussi, il a été adopté dans l'objectif
avoué de simplifier et d'accélérer le régime d'autorisation, là. Donc, c'est
ça, l'objectif du REAFIE.
• (17 h 40) •
M. Barrette : Parfait. Je
pense que je n'ai plus de temps.
Le Président (M. Simard) :
Merci beaucoup.
M. Barrette : Merci beaucoup.
Le Président (M. Simard) : M.
le député de Rosemont.
M. Marissal : Chef Picard,
bonjour. Rebienvenue. Mme Després Tassé, merci pour l'exposé. C'est toujours un
grand plaisir, chef Picard, en particulier, parce que ça fait des années et des
années que je vous connais, que je vous côtoie, soit comme parlementaire ou
comme journaliste, mais il y a néanmoins toujours comme un embarras croissant
chez moi de constater qu'on entend toujours le même discours de votre part,
parce que nous avons… et nous, ici, étant de l'Assemblée nationale, les élus,
j'avais un peu peu moins de pouvoirs quand j'étais journaliste dans ce genre de
chose, sinon que je pouvais les dénoncer, mais nous avons toujours les mêmes
comportements, c'est-à-dire qu'essentiellement «we idle indeed», alors que vous
nous demandez d'«idle no more», mais on continue dans nos travers. Et vous en
avez fait la démonstration, encore une fois, de façon claire et nette, quant
aux négociations qui n'ont pas eu lieu, les consultations qui n'ont pas eu
lieu.
Je crois donc comprendre qu'après 61 vous
aviez quand même le modeste espoir de pouvoir être entendu. Vous étiez venu ici
pour 61, nous dire, dans cette salle-ci d'ailleurs, et il y a eu donc des
contacts autour du mois d'août avec le bureau du premier ministre, mais qui
sont restés essentiellement unidirectionnels. Est-ce que je comprends bien?
M. Picard
(Ghislain) :Tout à fait, oui.
M. Marissal : O.K. Vous
n'aviez pas reçu non plus, pour 61, si je me souviens bien de votre témoignage,
de réception réelle et de contre-proposition à votre demande de négociation, je
suis toujours à la bonne place.
M. Picard
(Ghislain) :Tout à fait, bien, c'est un
peu ce qui m'a incité finalement à envoyer cette missive au début du mois
d'août.
M. Marissal : O.K. Le chef
Montour du Conseil mohawk de Kahnawake est venu ici, la semaine dernière, nous
dire que, selon lui, dans un geste de bonne foi «a good faith gesture», ce
serait de retirer carrément le projet de la réfection du pont Mercier, ce qui
sera fait éventuellement, de toute façon, on ne laissera pas tomber le pont,
là, mais que dans un geste de bonne foi, nous retirions le projet de l'annexe
I, pour reprendre sur des bases plus raisonnables de négociation…
M. Marissal : …de retirer,
carrément, le projet du… la réfection du pont Mercier, ce qui sera fait
éventuellement de toute façon, on ne laissera pas tomber le pont, là, mais que
dans un geste de bonne foi, nous retirions le projet de l'annexe I pour
reprendre sur des bases plus raisonnables de négociation. Est-ce que vous
approuvez? Est-ce que vous faites vôtre aussi cette recommandation?
M. Picard
(Ghislain) : Ah! tout à fait. Comme on le disait plus tôt, on
appuie les positions tant du Conseil Mohawk de Kahnawake que celles des Innus
de Uashat mak Mani-Utenam. En fait, je pense que ce qu'il faut comprendre ici,
c'est que je pense qu'on vit la même situation que tout le monde, hein, la
pandémie nous affecte de la même façon, et de façon sans doute encore plus
marquée pour nos communautés que… Et c'était ça un peu l'esprit de ce qui est
de vouloir s'engager dans une discussion, trouver un espace commun pour
discuter d'un besoin évident de relancer l'économie. Mais on ne voulait pas que
les Premières Nations soient, comme ça arrive trop souvent, à la remorque d'un
processus qui ne les incluait pas. Donc, c'était ça, aussi, l'esprit de la
démarche de nos représentations, finalement, en juin dernier, en passant par
les commentaires qui vous ont été transmis, partagés sur 61.
Le Président (M. Simard) :
Merci, chef. Je cède la parole au député de Jonquière.
M. Gaudreault : Oui, merci
beaucoup pour votre présence. En ce qui me concerne, j'ai la désagréable
impression de me retrouver dans le jour de la marmotte, parce que je me
souviens très bien de votre présence pour le projet de loi n° 61 et vous
aviez très clairement dit : On n'a pas été consultés. Alors, je constate,
comme les autres collègues l'ont dit avant moi, que vous n'avez pas été plus
mis dans le coup en amont en vue du projet de loi n° 66.
M. Picard (Ghislain) :Tout à fait. Bien, écoutez, c'est que dans un monde idéal, là…
et c'est un peu notre rôle à nous de trouver toujours les bonnes conditions de
pouvoir engager le gouvernement du jour, c'est de pouvoir s'asseoir et de
prévoir les coups plutôt que de les subir. Et c'est toujours ce principe-là qui
nous habite, nous, comme Assemblée des Premières Nations, au nom des
communautés qui siègent à notre table, c'est de pouvoir prévoir ce qui va
arriver dans six mois, dans un an, dans trois mois, et… plutôt que de devoir
réagir, comme on fait trop souvent, pourquoi ne pas trouver un espace commun de
discussion plutôt que d'être pris à réagir publiquement souvent, ce qu'on
souhaite être notre dernier recours?
M. Gaudreault : Merci. Votre
troisième recommandation : «Retirer les dispositions visant à permettre
d'alléger ou de restreindre les exigences environnementales». Parce que je
comprends qu'essentiellement sur l'environnement, vous êtes d'accord avec les
autres groupes qui sont venus nous voir, notamment sur la question du REAFIE.
Vous dites : On pourrait laisser la chance au règlement de s'appliquer.
Alors, ce que…
M. Gaudreault : ...votre
troisième recommandation : «Retirer les dispositions visant à permettre
d'alléger ou de restreindre les exigences environnementales.» Parce que je
comprends qu'essentiellement sur l'environnement, vous êtes d'accord avec les
autres groupes qui sont venus nous voir, notamment sur la question du REAFIE,
vous dites : On pourrait laisser la chance au règlement de s'appliquer.
Alors, ce que vous proposez, au fond, dans
votre recommandation trois, c'est carrément de faire comme deux blocs, de
mettre de côté tout ce qui concerne l'environnement dans le projet de loi
n° 66 puis de traiter le reste à part. Est-ce que je comprends bien?
Mme Després Tassé (Noémie) :
Effectivement, on est d'accord avec la plupart des commentaires qui ont été
formulés par les autres groupes environnementaux par rapport à la diminution
des exigences environnementales. Par contre, Ghislain a précisé que le retrait
de ces aspects-là du projet de loi ne le rendrait pas encore adéquat à nos
yeux.
M. Gaudreault : Ça ne
rendrait pas plus adéquat le reste pour les raisons que vous avez évoquées, qui
sont les manques de consultation, etc. là. Mais, si on fait quand même comme
deux bulles, là, celle de l'environnement, pour vous, est quand même quelque
chose à part aussi.
Mme Després Tassé (Noémie) :
Oui.
M. Gaudreault : C'est
bien. Merci.
Le Président (M. Simard) :
Merci à vous, chers collègues. Alors, Me Després Tassé, chef Picard, merci beaucoup
pour votre présentation. Merci d'avoir répondu à notre invitation.
Sur ce, nous allons suspendre quelques
instants nos travaux. Et au plaisir de vous revoir.
(Suspension de la séance à 17 h 46)
19 h 30 (version non révisée)
(Reprise à 19 h 32)
Le Président (M. Simard) :
Alors, chers collègues, à l'ordre, s'il vous plaît! Je constate que nous avons
quorum, nous pouvons donc reprendre nos travaux. Et nous sommes en compagnie,
ce soir, de représentants de l'organisme Vivre en ville. Messieurs, bienvenue
parmi nous, et merci d'avoir répondu à notre invitation. Je vous laisse d'abord
le soin de vous présenter, s'il vous plaît.
M. Savard (Christian) :
Bonsoir à tous. Mon nom est Christian Savard, directeur général du Vivre en
ville. Je suis accompagné de Samuel Pagé-Plouffe, coordonnateur affaires
publiques chez Vivre en ville.
M. Pagé-Plouffe (Samuel) :
Bonsoir.
Le Président (M. Simard) :
Nous vous écoutons.
M. Savard (Christian) :
D'abord, merci à la commission pour l'invitation pour commenter et présenter
sur cet important projet de loi là. Fait spécial, pour vous, c'est votre
quotidien, les commissions parlementaires, pour moi, c'est ma deuxième,
aujourd'hui, ça ne m'était jamais arrivé. J'étais au p.l. n 67 ce
matin. Il y a une certaine, d'ailleurs, continuité dans certains aspects entre
les projets de loi.
Donc, d'entrée de jeu, d'entrée de jeu,
j'aimerais souligner que Vivre en ville souscrit aux objectifs généraux du
projet de loi, qui sont d'investir dans les infrastructures québécoises afin de
stimuler l'économie, mais également de doter la population du Québec d'un
certain nombre d'infrastructures...
M. Savard (Christian) :
...souscrit aux objectifs généraux du projet de loi, qui sont d'investir dans
les infrastructures québécoises afin de stimuler l'économie, mais également de
doter la population du Québec d'un certain nombre d'infrastructures qui vont
pouvoir leur offrir des services. Je pense notamment aux maisons des aînés. Toutefois,
à notre avis, le projet de loi va trop loin, va inutilement trop loin sur
certains de ses aspects, constitue un dangereux précédent et des brèches
importantes dans la protection de l'environnement, protection du territoire,
protection du droit au public à participer, et donc on pense qu'avec des ajustements
que nous allons vous proposer, le projet de loi pourrait être... justement
remplir ses objectifs sans faire face à ces écueils-là.
Les infrastructures, c'est beaucoup plus
que de l'acier et du béton. Ça s'inscrit dans nos milieux de vie, dans nos communautés.
Elles ont un impact important sur le territoire, important sur l'environnement,
important sur la vie des gens. On pense que ça vaut la peine d'investir sur la
qualité des projets et ne pas aller trop vite, investir pour investir. Et donc
c'est une de nos préoccupations.
D'abord, en matière... Sur les questions
d'aménagement du territoire, il y a des mesures contenues à l'article 53
et aux suivants qui nous inquiètent. Dans la même ligne que l'Ordre des
urbanistes qui est venu vous présenter lors de séances précédentes, on pense
qu'il y a un dangereux précédent à faire en sorte que les lois sur
l'aménagement et l'urbanisme qui viennent défendre le public, qui viennent
défendre une cohésion dans le développement de notre territoire soient mises de
côté. Je pense particulièrement à l'article 53 qui met complètement de
côté toute la planification régionale au niveau des MRC.
Selon nous, cet article, ces aspects-là
règlent un non-problème. Dans la plupart du temps, les villes vont vous
accorder les autorisations très rapidement. On fait la suggestion de peut-être
réduire certains délais qui sont dans la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme
actuellement pour aller plus vite, mais on pense que, s'il y a des MRC ou des
communautés métropolitaines qui vous font des avis de non-conformité, c'est
parce qu'un projet va avoir un vrai problème et que ça ne vaut pas la peine de
l'accélérer. Donc, ces articles-là nous semblent aller trop loin inutilement et
ne constituent pas, donc ne constituent pas un véritable problème.
Autre aspect pour nous qui est important,
c'est la liste des projets. On pense que les projets d'entretien, par exemple,
du réseau routier sont importants, sont faciles à faire, ont très peu d'impact
sur le territoire ou est l'environnement. Donc, c'est correct d'aller de
l'avant. Certains projets qui ont besoin d'un coup de main au niveau des
expropriations, puis on va en parler un petit peu plus, parce que la loi est
désuète à certains égards... Donc, nous, on...
M. Savard (Christian) : ...que
les projets d'entretien, par exemple, du réseau routier sont importants, sont
faciles à faire, ont très peu d'impacts sur le territoire où est
l'environnement, donc c'est correct d'aller de l'avant.
Certains projets qui ont besoin d'un coup
de main au niveau des expropriations, puis on va en parler un petit peu plus
loin, parce que la loi est désuète à certains égards, donc, nous, on propose de
revoir la liste de projets pour retirer notamment les projets qui ont un impact
élevé sur l'environnement qui seraient assujettis justement à cette partie-là
de la Loi sur la qualité de l'environnement, particulièrement tous les projets
routiers, d'augmentation de la capacité routière autour des grandes villes. Ces
projets-là s'inscrivent dans des milieux naturels, parfois dans des territoires
agricoles, ont des conséquences sur l'étalement urbain et méritent des études
d'impacts soignées afin de pallier à différents enjeux et ne méritent pas
d'être accélérés en raison des impacts.
D'ailleurs, de manière générale, sur
l'ensemble des projets, on fait, dans notre mémoire, une proposition d'une
grille d'analyse pour passer au tamis les projets puis voir, bien... les
projets qui méritent d'être acceptés, bien, ils vont tous se faire
cocher : oui, c'est correct, oui, il n'y a pas d'enjeu, oui, il n'y a pas
d'impact sur les milieux humides, pas d'impact sur les milieux agricoles, vont
renforcer la communauté, vont être localisés au bon endroit. On pense que ça
vaut la peine de prendre notre temps, peut-être faire un peu moins de projets,
mais bien les faire en ne prenant pas de raccourci inutile. Donc... Et on pense
également que cette grille d'analyse là pourrait servir à la reddition de
comptes, c'est des aspects intéressants du projet de loi, sur la reddition de
comptes, qui est proposé, donc, qui viendrait bonifier cette reddition de
comptes là.
Je passerais maintenant la parole à mon collègue.
M. Pagé-Plouffe (Samuel) :
Oui. Merci, Christian. À propos des normes environnementales, comme on l'avait
souligné, là, pour le projet de loi n° 61, Vivre en ville partage les
inquiétudes qui ont été formulées par plusieurs intervenants. On s'inquiète
notamment pour la qualité des études d'impacts environnementaux, en particulier
pour les activités, là, à risque modéré et élevé. L'article 40 semble
indiqué, là, dans le projet de loi n° 66, que le contrôle du ministre de
l'Environnement sur les études d'impact serait réduit. Il y a une inquiétude
là.
En matière de protection des milieux
humides et hydriques, j'ai écouté, là, le passage de la Vérificatrice générale
et du Commissaire au développement durable la semaine dernière. On a noté avec
intérêt l'engagement qui a été pris par Mme la ministre à l'effet d'amender le projet
de loi pour clarifier la notion d'évitement qui doit demeurer l'étape
prioritaire. On espère d'ailleurs que la possibilité de tenir un BAPE plus
ciblé qui se trouve à l'article 41 ne se traduira pas par une prise en
compte uniquement des impacts immédiats des projets. Par exemple, là, pour le
prolongement de l'autoroute 25 dont il a beaucoup été de discussions, là,
en troisième couronne de Montréal, il faudrait réfléchir aux effets de
l'étalement urbain, notamment en termes de pression sur le territoire agricole,
la congestion, tous ces éléments-là.
Enfin, contrairement au projet de loi
n° 61, le projet de loi n° 66 prévoit la soustraction de la procédure
d'évaluation et d'examen des impacts sur l'environnement pour deux projets
routiers...
M. Pagé-Plouffe (Samuel) :
...de Montréal. Il faudrait réfléchir aux effets de l'étalement urbain, notamment
en termes de pression sur le territoire agricole, la congestion, tous ces
éléments-là. Enfin, contrairement au projet de loi n° 61, le projet de loi
n° 66 prévoit la soustraction de la procédure d'évaluation et d'examen des
impacts sur l'environnement pour deux projets routiers. Je dois dire que ces articles
nous ont un peu surpris. On comprend que le gouvernement juge ces projets
prioritaires, mais il me semble qu'il pourrait les accélérer sans toutefois se
soustraire complètement à la procédure d'évaluation, comme il le fait en ce
moment. Vivre en ville s'intéresse en particulier au dossier de
l'autoroute 30. Et on aurait certainement des recommandations à exprimer, à
formuler s'il y avait un BAPE sur le projet.
• (19 h 40) •
Par ailleurs, Vivre en ville reconnaît
qu'il existe un vrai problème au Québec en matière d'expropriation, un élément
important du projet de loi. L'UMQ vous l'a exprimé la semaine passée, l'interprétation
jurisprudentielle de cette loi cause à la fois des délais qui sont indus et des
coûts disproportionnés pour des projets qui sont d'intérêt public. C'est une
doléance, là, qu'on entend souvent à Vivre en ville, par exemple, par les
sociétés de transport, mais aussi par des élus municipaux qui souhaitent
acheter un terrain pour y construire un équipement public ou protéger un milieu
naturel. On recommande donc l'adoption des articles sur la procédure
d'expropriation accélérée et de procéder à une réforme de la Loi sur
l'expropriation d'ici la fin du mandat.
Pour les projets dans l'annexe, là, le
projet de loi n° 66 a l'effet d'un pansement, mais si le gouvernement
s'engageait à réformer en profondeur la Loi sur l'expropriation d'ici la fin du
mandat, bien, ça, ça permettrait d'avoir une contribution importante à
l'efficacité de la réalisation des projets d'infrastructure au Québec.
Enfin, dernier élément de mon côté, je
pense que plusieurs intervenants l'ont souligné, concernant la durée d'application
du projet de loi, la possibilité de commencer une mesure d'accélération dans
cinq ans nous semble assez exagérée, là. C'est quand même l'idée de la relance
économique qui a mené au projet de loi n° 66. Or, ça nous mènerait à la
fin de 2025 pour le début de l'utilisation d'une mesure d'accélération. Mais,
comme on l'a dit dans notre mémoire, on a bon espoir que l'économie québécoise
aura pris du mieux avant 2025. On vous recommande donc de réduire, là, à deux
ans la date limite pour le début du recours à une demande d'accélération de
projet... à une mesure d'accélération de projet. C'est une proposition qui d'ailleurs
est en cohérence, là, avec l'idée de réformer la Loi sur l'expropriation avant
la fin du mandat. Donc, voilà, Christian, je te repasse la parole.
M. Savard (Christian) :
Donc, merci, Samuel. Pour conclure, on pense que le gouvernement, à travers ce
projet de loi là, en faisant les ajustements qu'on propose, retirerait les
principaux irritants, diminuerait le niveau de méfiance que certains peuvent
avoir par rapport au projet de loi qui effectivement fait en sorte qu'il y a
des raccourcis par rapport au processus et au procédé de protection de
l'environnement, de la participation du public et de la protection du
territoire. Tous ces processus-là ont souvent comme impact d'améliorer les
projets. On peut parfois les simplifier, on peut parfois les raccourcir, mais
les éliminer nous semble ne pas aller dans la bonne direction.
On pense que ce projet de loi là doit être
la première pierre d'une relance verte juste pour le Québec...
M. Savard (Christian) :
...ont souvent comme impact d'améliorer les projets. On peut parfois les
simplifier, on peut parfois les raccourcir, mais les éliminer ne nous semble
pas aller dans la bonne direction. On pense que ce projet de loi là doit être
la première pierre d'une relance verte. Juste pour le Québec, on a besoin des
ajustements qu'on propose. Je vous remercie.
Le Président (M. Simard) :
Merci à vous, M. Savard. Je cède maintenant la parole à Mme la présidente
du Conseil du trésor.
Mme LeBel : Merci, M. le
Président. Merci, messieurs, pour votre présentation. Beaucoup d'éléments, dans
votre mémoire, en matière environnementale surtout. Ce que je vais... je vais
résumer peut-être votre position en vous disant que vous avez la même position
essentiellement que les autres groupes qui sont venus nous parler des mesures
environnementales au niveau de votre prétention que les processus qui ont été
mis en place affaiblissent les normes et non pas juste accélérer les processus.
Donc, je pense que ce n'est pas parce que votre opinion ne m'intéresse pas,
mais je pense qu'elle est très bien comprise. Puis, vous l'avez dit, à toutes
fins pratiques, l'essentiel, ce sont les mêmes commentaires, là, dont on a eu à
débattre avec d'autres groupes. Donc, je vais y aller peut-être sur des aspects
qui sont plus... qui sont plus nouveaux de votre part pour pouvoir vous
permettre peut-être de... nouveaux par rapport à d'autres intervenants
naturellement, là, pas par rapport à vos positions plus traditionnelles.
Donc, si je comprends bien, si on parle,
premièrement, des projets comme tels qui sont à la liste des 181 projets,
de façon générale, là, donc vous reconnaissez la pertinence d'accélérer
certains projets. J'imagine que vous avez... est-ce que vous avez des problèmes
avec cet objectif-là par rapport aux maisons des aînés, par rapport aux écoles,
par rapport aux projets de transport en commun, projets routiers de transport
en commun? Quand on parle a de la réfection aussi des routes actuelles qui ont
besoin d'entretien, il y a plusieurs projets, et je ne veux pas raccrocher un
chiffre, mais il me semble que c'est une cinquantaine de projets sur les 181
qui sont des projets de type MTQ, je vais le dire comme ça, et il y en a
là-dedans que ce sont des projets pour favoriser le transport en commun. Il y
en a que ce sont des projets de maintien et de réfection des structures
actuelles et il y en a une dizaine à peu près qui sont des nouveaux projets
routiers.
Donc, je fais naturellement un portrait
très général, là, des catégories de projets. Est-ce que je comprends que, dans
tous ces projets-là, ce qui vous pose problème, c'est les nouveaux projets
routiers? Pour les autres... on peut moduler, là, mais, pour les autres en
général, la pertinence d'accélérer, je pense qu'elle est quand même là. La
pertinence de se doter de ces infrastructures-là et de les entretenir, pour
celles qui en ont besoin.
M. Savard (Christian) :
Oui, vous avez tout à fait raison qu'en ce qui concerne les projets d'entretien
on n'a pas de problème majeur. Donc, oui, effectivement, peut-être une dizaine.
On les avait listés dans notre mémoire, je ne m'en souviens plus par coeur, de
projets où est-ce qu'on parle d'élargissement et de prolongation de projets
routiers qui mériteraient de ne pas avoir des voies accélérées dans la plupart
des cas, qui mériteraient qu'on garde de manière intacte ou quasi intacte les
processus actuels. Vous avez...
M. Savard (Christian) : …on les
avait listés dans notre mémoire, je ne me souviens plus par coeur, de projets
où est-ce qu'on parle d'élargissement et de prolongation de projets routiers
qui mériteraient de ne pas avoir des voies accélérées dans la plupart des cas,
qui mériteraient qu'on garde de manière intacte ou quasi intacte les processus
actuels. Vous avez tout à fait bien compris notre propos par rapport à ça.
Donc, si on retirait ces projets-là, le projet de loi nous semblerait aller
beaucoup… on a dit, notre titre, c'est «va trop loin», mais il irait moins loin
et il serait davantage acceptable en matière de protection de l'environnement.
Il faut quand même faire attention aussi
de ne pas aller trop rapidement sur certains projets, par exemple, de maisons
des aînés. Il faut bien les faire, on les construit pour toujours. Parfois,
pour aller vite, on prend un terrain rapidement, O.K., on l'installe là, puis
ce n'est pas toujours le meilleur endroit, et ça ne peut pas toujours être
conforme à la planification territoriale locale. Donc, ça, c'est quelque chose
aussi à valider, mais, de manière générale, sur l'idée… par exemple, sur les
maisons des aînés, on peut être d'accord sur une accélération, mais pas à
n'importe quel prix, pas au prix, justement, de faire tomber certains pans de
la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme.
Mme LeBel : O.K. Peut-être
juste pour comprendre par rapport aux nouveaux projets routiers ou aux projets
d'élargissement, souvent les projets d'élargissement nous permettent d'avoir
une voie réservée ou, en tout cas, de favoriser le transport en commun sur ces
projets-là. Mais j'aimerais juste comprendre, là, juste pour être… bien camper
votre position, est-ce que c'est le fait brut de faire de nouveau projet routier
avec lequel vous êtes en désaccord? Ça, c'est une chose. Je respecte votre
point de vue, mais c'est une chose, c'est une position.
Parce que je… outre les aspects
environnementaux que vous avez mentionnés, et, pour ça, je vous le dis, ce
n'est pas parce que je les écarte et je les discarte de la conversation, mais
je les ai bien compris. Mais mis à part les aspects environnementaux dont vous
nous avez fait part dans le mémoire, quel est le problème avec les nouveaux
projets routiers? Est-ce que c'est le fait brut d'avoir… de développer des
nouvelles routes? Parce que là, à ce moment-là, les accélérer ou ne pas les
accélérer, on va les faire, ces projets routiers là, mais en mode régulier… je
vais dire, en mode régulier, disons-le comme ça juste pour se comprendre.
J'aimerais juste comprendre votre position, là.
M. Savard (Christian) : Je
vais donner l'exemple de la 30 ou des exemples que j'ai eus dans le passé. Il y
a certains… ça peut arriver qu'effectivement Vivre en ville… on soit carrément
contre une nouvelle route ou une autoroute, parfois non, parfois… À titre
d'exemple, on a déjà appuyé, dans un passé, maintenant, il commence à être
lointain, la 30, parce que c'est un aspect de contournement important.
On pense toutefois que le processus
environnemental réussit souvent à améliorer des projets. Dans le passé, il y a
eu des projets autoroutiers sur lesquels je me suis opposé, je vais dire au je
parce que c'était dans une autre organisation, et où les débats autour… dans le
cadre du processus d'évaluation d'impact, autour du BAPE, a fait en sort qu'on
est arrivés avec des meilleurs projets, parfois sur la protection de la faune,
je pense à la 175, parfois avec l'ajout de voies réservées ou de transport
collectif dans certains cas, je pense à Robert-Bourassa à Québec, même s'il y a
là encore des écueils. Donc, on croit, nous, au processus pour améliorer les
projets. Les faire trop rapidement fait en sorte…
M. Savard (Christian) :
...avec des meilleurs projets, parfois sur la protection de la faune, je pense
à la 175, parfois avec l'ajout de voies réservées ou de transport collectif
dans certains cas, je pense à Robert-Bourassa à Québec, même s'il y a là encore
des écueils.
Donc, on croit, nous, au processus pour
améliorer les projets. Les faire trop rapidement fait en sorte qu'on ne veut
pas les améliorer. Et peut-être que dans certains cas, oui, on va pouvoir
remettre en question la pertinence et on pourrait... ça pourrait être remis en
cause.
Donc, je crois que ces débats-là et ces processus-là
sont importants pour des projets à impact élevé. Il ne faut pas oublier, hein, qu'il
y a la Loi sur la qualité de l'environnement qui les identifie comme des
projets à impact... à risque élevé. Donc, on pense que ces projets-là ne
devraient pas être, finalement... qu'ils soient enlevés, là, du processus
habituel.
Mme LeBel : Deux projets,
uniquement deux projets... Je pense à l'article 52, là, mais deux projets uniquement
dans le projet de loi sont complètement enlevés du BAPE, où le BAPE a été écarté,
là, de façon très spécifique, la 117 et la 30.
Je ne me souviens plus qui est le groupe
qui est venu nous en parler spécifiquement. Ma mémoire me fait défaut, mais un
groupe plus axé sur, surtout, les mesures environnementales est venu nous dire
que... Bon, de façon générale, naturellement, je peux comprendre votre position
de dire que ce n'est pas recommandé de soustraire des dossiers au BAPE, là. Ça,
je peux comprendre ce postulat de base là. Mais ce groupe-là est venu nous
parler de risque... de haut risque de sécurité, en matière de sécurité, et
qu'il jugeait, malgré le fait que, bon, de façon générale, on ne peut pas nécessairement
être plein d'enthousiasme quand on prend cette démarche-là... mais que, entre
autres pour la 117, était... pouvait penser comprendre pourquoi on faisait ce processus-là
dans le but de l'accélérer. On pourra sauver peut-être jusqu'à deux ans, deux
ans et demi, là, dans ce processus-là, si on le fait.
Est-ce que vous avez la même position ou
vous, c'est jamais qu'on devrait procéder à ça? Parce que vous parlez de l'article 52.
• (19 h 50) •
M. Savard (Christian) :
Bien, vous n'aimerez pas ma réponse, Mme la ministre, mais il y a quelque chose
en dedans de moi qui me dit : Bien, on aurait pu aussi débuter il y a deux
ans les études d'impact pour faire bien, bien les choses, puis on aurait déjà
gagné des ans si on avait commencé il y a deux ans ou ... commencé il y a cinq
ans.
Effectivement, le dossier qui nous
inquiète plus dans ce cas-ci, c'est celui de la 30. Vous... On pense que les
impacts sur les milieux naturels qu'il peut y avoir dans l'emprise... Et qu'est-ce
que ça veut dire aussi pour la région métropolitaine? Ça vaut la peine de faire
le processus et de faire les études d'impact.
Mme LeBel : O.K. Donc, je
comprends que, bon, vous ne m'accorderez pas cette grâce-là de me dire que ça
va aller pour la 117. Là, je le comprends. Puis je n'ai pas à aimer, à
apprécier votre réponse ou non. C'est la vôtre, puis on va travailler en
conséquence de ça.
Mais la 30, écoutez, la 30... je ne suis
pas la spécialiste du détail du projet, mais on parle d'un élargissement sur
quelques kilomètres. Et l'objectif de... et dans une emprise de la 30 qui est déjà
connue, dont les impacts environnementaux ont été étudiés, et c'est pour des
projets...
Mme LeBel : …en conséquence de
ça, mais la 30, écoutez, la 30, je ne suis pas la spécialiste du détail du
projet, mais on parle d'un élargissement sur quelques kilomètres et l'objectif
de ça… et dans une emprise de la 30 qui est déjà connue, dont les impacts
environnementaux ont été étudiés, et c'est pour des projets de… aider au
désengorgement de la 30. Je pense que c'est assez connu qu'elle est engorgée,
mais entre autres pour des projets de transport en commun pour permettre à
cette voie-là, réservée… peut-être réservée, là, je… ne lisez pas dans mes
propos le projet parce que ce n'est pas moi qui l'a, mais l'idée générale,
c'est un élargissement sur peu de kilomètres, dans l'emprise de la 30, les
endroits qu'on connaît bien où le ministère des Transports connaît les impacts
environnementaux, le ministère de l'Environnement connaît les impacts
environnementaux. On est à même de surveiller les étapes d'élargissement, et le
tout, c'est pour avoir plus de transport en commun. Je veux dire, il y a quelque
chose aussi dans le désengorgement de nos routes actuelles, je peux… Puis je
comprends, là, vos objectifs de transport en commun, des développements
durables, et j'en suis, mais il y a quand même quelque chose qui s'appelle
l'immédiat, là, et présentement, on fait du stationnement, à toutes fins
pratiques, sur la 30, là. Donc, est-ce que ça aussi, ça vous pose problème, cet
élargissement-là? Puis on ne parle pas d'un prolongement, là, dans d'autres
endroits, là. Le petit bout, là, qui est exclu, parce qu'il y a une partie du
projet très ciblée qui est exclue du BAPE.
M. Savard (Christian) : De
manière générale, on défend tout de même le principe que lorsqu'un projet,
selon la Loi sur la qualité de l'environnement et les règlements relatifs, est
assujetti aux études d'impact, on pense qu'il faut les faire. Ce n'est pas pour
rien que la législation est faite comme ceux-là. Donc, sur le principe, on
croit qu'on ne devrait pas décider, comme ça, que : Ah! bien, celui-là, on
pense que c'est correct. On n'est pas à l'aise avec cette position-là.
Et en ce qui concerne l'élargissement de
la 30, on pense qu'il y a des débats à avoir. S'il y a un élargissement, quel
type d'élargissement pour quel type de véhicule? Pour le transport collectif
uniquement — ce qui n'est pas encore fait, vous l'avez dit, il y a
des choses qui ne sont peut-être pas encore décidées — on serait plus
favorable. Mais même si c'était pour ça, on pense qu'il faudrait un BAPE pour
avoir ces débats-là, sinon, il y a des enjeux qui ne seront pas abordés. Et je
répète, les BAPE que j'ai faits sur les autoroutes, même des autoroutes qui
semblaient être des évidences, ont souvent contribué à améliorer les projets et
à avoir des débats.
On ne peut pas éternellement élargir nos
autoroutes pour les désengorger, c'est une solution qui ne fonctionne pas d'un
point de vue environnemental. À chaque fois qu'on… et on le sait, j'ai fait
Robert-Bourassa dans la région de Québec, à une certaine époque, et
Robert-Bourassa est maintenant bouchée parce qu'il y a le phénomène d'étalement
urbain, de demandes induites, amenées avec la nouvelle autoroute, et on pense
que ces débats-là devraient avoir lieu dans une étude d'impact en bonne et due
forme. Et… mais à la fin, probablement que si on fait le bon processus, on
arriverait peut-être à des solutions plus intéressantes. Et on sait que même
autour de la 30, il y a peut-être même des enjeux sur des milieux naturels
limitrophes qui sont à étudier.
Mme LeBel : Bien, je vous
remercie, merci d'avoir éclairci votre position sur ces deux points-là. Comme
je vous disais, ce n'est pas parce que le reste n'est pas important ni
intéressant, là, mais je voulais voir de façon plus ciblée, puis on va prendre
connaissance du reste. Alors, merci de votre participation.
M. Savard (Christian) : Merci,
Mme la ministre.
Le Président (M. Simard) : M.
le député de La Pinière.
M. Barrette : Bon…
Mme LeBel : …je vous remercie.
Merci d'avoir éclairci votre position sur ces deux points-là. Comme je vous
disais, ce n'est pas parce que le reste n'est pas important ni intéressant,
mais je voulais voir de façon plus ciblée, puis on va prendre connaissance du
reste. Alors, merci de votre participation.
Une voix
: Merci, Mme
la ministre.
Le Président (M. Simard) : M.
le député de La Pinière.
M. Barrette : Bon. Vous n'êtes
pas seul, la personne qui est avec vous, j'ai oublié son nom. Bon. Bienvenue.
Une voix
: Bonjour.
M. Barrette : Bonjour.
Excusez-moi. M. Pagé. Bon. Regardez, je pense que je ne vais pas vous offusquer
si je vous dis qu'en fin de consultations particulières vous venez nous dire
des choses qui sont dans le même ordre de ce que l'on a entendu à date. Ma question
est simple : Est-ce qu'il y a des éléments additionnels? Vous savez, vous
vous parlez, vous autres, là, et puis vous écoutez les travaux, là, il y a beaucoup
de recoupements des deux côtés de la médaille. Et est-ce qu'il y a des choses
spécifiques, que vous voulez nous dire, qui sont nouvelles? Et puis, après ça,
bien, je vais jaser avec vous.
M. Savard (Christian) : Bien,
si je peux me permettre, je ne crois pas qu'il y a tant de monde que ça qui ont
abordé la question de l'abrogation de certains éléments de la Loi sur l'aménagement
et l'urbanisme. Il y a l'Ordre des urbanistes, je pense, qui est venu en début
de consultation, mais sinon, ça, c'est un aspect qui nous apparaît très important.
On pense que les articles qui vont dans ce sens, qui font en sorte que, par
exemple, on n'a pas à vérifier la conformité avec les schémas d'aménagement des
MRC, vont trop loin.
Et c'est quelque chose qui serait
facilement… qui pourrait être facilement amélioré dans le projet de loi, en
faisant, par exemple, la proposition que les délais qui sont inclus dans la Loi
sur l'aménagement et l'urbanisme actuellement soient réduits de moitié. Par
exemple, au lieu de prendre 180 jours pour une MRC à revenir, elle pourrait
revenir au maximum à 90 jours. Mais je répète ce que j'ai dit un petit peu tantôt,
on pense que, si les villes veulent absolument un projet, si les MRC veulent absolument
un projet, ils vont revenir très rapidement.
Donc, c'est un aspect qui nous semble peut-être
à réitérer. Sinon, Samuel, je ne sais pas s'il y a quelque chose que tu as
pensé?
M. Pagé-Plouffe (Samuel) :
Bien, là-dessus, pour spécifier sur la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme,
pour rendre ça un petit peu concret, des éléments qui peuvent être, dont on
peut réfléchir, il y a notamment… il n'est plus possible, il est plus probable
qu'une maison des aînés, par exemple, soit construite sur un boisé s'il n'y a
pas à avoir la conformité avec le schéma d'aménagement. Donc, ça, c'est
concret, là, si on veut donner un exemple concret.
Puis ensuite, bien, peut-être un autre
élément d'originalité de nos propositions, c'est la grille d'évaluation et de
suivi des projets. M. Dubé, qui était, bon, qui était le porteur du projet de
loi n° 61, avait noté ça avec intérêt. Et là-dessus, bon, Christian en a
parlé un petit peu, mais je trouve que c'est une des originalités de notre
mémoire.
M. Barrette : Je ne dis pas
que votre mémoire n'est pas original, là, c'est juste que je veux qu'on aille
directement sur le point qui est différent de ce que l'on a entendu avant. Je
comprends votre angle sur l'urbanisme, je n'ai pas la même inquiétude que vous,
par exemple…
M. Pagé-Plouffe (Samuel) :
...et là-dessus, bon, Christian en a parlé un petit peu, mais je trouve que
c'est une des originalités de notre mémoire.
M. Barrette : Je ne dis pas
que votre mémoire n'est pas original, là, c'est juste que je veux qu'on aille directement
sur le point qui est différent de ce qu'on a entendu avant. Je comprends votre
angle sur l'urbanisme. Je n'ai pas la même inquiétude que vous, par exemple,
pour un certain nombre de raisons. Je vais prendre l'exemple que vous venez de
prendre.
Une maison des aînés près ou en partie sur
un boisé, s'il y a un projet qui arrive comme ça, il va être applaudi. Puis je
vous dis ça par expérience, parce que tout ce qui est CHSLD et compagnie, la
chose dont se plaignent le plus les résidents, ceux qui peuvent encore
s'exprimer, c'est qu'ils veulent voir la nature, ce genre de chose là. Une
nouvelle construction dans un boisé pour des personnes âgées, c'est, et pour
les personnes, les résidents, et pour leur famille et le public en général,
c'est «winner», là. Vous n'avez pas d'idée comment c'est «winner». Ça fait que,
là, si ce que la population veut est un enjeu. Ce n'est peut-être pas l'exemple
parfait. Je vais y aller sur d'autres exemples qui, pour vous, est un enjeu,
là. Puis là je vais vous poser les questions plus directement, là.
On arrive en fin de consultations, vous
contestez ou vous êtes inconfortable, par exemple, avec le réaménagement de la
30 aux approches de la 10 puis de la 20 pour du transport en commun. Moi, je
vous soumets que ces réaménagements sont faits principalement pour amener du
monde au terminus du REM, ce qui normalement est une chose que vous souhaitez.
Et là je vais vous poser une question environnementale précise, O.K.? La 30,
telle qu'elle est actuellement, incluant sa jonction avec les deux autres
autoroutes, ce sont des terres qui ont déjà été altérées. Elles sont altérées.
Vous savez, une route, là, c'est comme un chemin de fer, c'est un gros talus de
roches et une membrane géotextile, du sable, de l'asphalte, ou du ciment
dépendamment du matériel qu'on prend. Et ça a déjà été tout perturbé, là, ça,
là. Alors, quand vous nous dites que, sur la 30, il y aurait des enjeux environnementaux,
là, genre biologiques, honnêtement, là, j'aimerais bien ça que vous me donniez
un éclairage plus biologique de ça parce que je ne le vois pas.
M. Savard (Christian) : Vous
avez tout à fait raison de dire que c'est altéré et ça va altérer un peu plus
loin. Donc, il peut y avoir des enjeux d'ordre environnementaux.
En ce qui concerne aussi également la
question du transport collectif, on pense que, justement, il y a des questions
à avoir. Est-ce que cette voie réservée là va être juste réservée au transport
collectif? Est-ce qu'elle va être réservée au transport collectif et au
covoiturage à deux plus aux véhicules électriques? Du coup, ça devient une voie
un peu moins réservée et ça fait en sorte que ça élargit l'autoroute. Donc, on
pense que ces débats-là méritent d'avoir lieu sur qu'est-ce qu'on veut comme
infrastructure pour améliorer la 30 dans ce secteur-là.
• (20 heures) •
Et on en revient au principe, M. le député...
20 h (version non révisée)
M. Savard (Christian) : ...une
voie un peu moins de réservée, et ça fait en sorte que ça élargit l'autoroute.
Donc, on pense que ce débat-là mérite d'avoir lieu sur qu'est-ce qu'on veut
comme infrastructure pour améliorer la 30 dans ce secteur-là.
Et on en revient au principe, M. le député,
sur le fait que, si un projet est assujetti, on pense qu'il mérite de continuer
à être assujetti, et ne pas prendre des décisions à la pièce pour ce genre de
projet là. Ça ne doit pas devenir le nouveau régime de... en environnement au Québec.
C'est une de nos inquiétudes.
M. Barrette : Là-dessus, je
dirais... Puis là on échange, là. Ce n'est pas un procès, là, je fais juste
échanger, là. Disons que vous nous amenez à la frontière de ce qui est l'environnement
et de ce qui est la politique. C'est volontaire, je pense, puis c'est correct,
c'est un vrai débat. Mais est-ce qu'il y a lieu, dans le cadre de n° 66, de faire ce débat-là? Je ne vous demande même pas de
répondre à cette question-là, là, mais c'est une question qui est quand même
légitime.
On n'est plus nécessairement dans l'environnement,
à un moment donné, là. Là, on est dans la réflexion philosophique de la
société, là, alors... Puis pour prendre une image très caricaturale, mais qui
est très parlante, là, c'est comme le Réseau express vélo, à Montréal. C'est
philosophique. C'est une volonté philosophique de changer des quartiers
historiques, si le monde accepte ça. Mais on est loin de l'environnement, là.
M. Pagé-Plouffe (Samuel) :
Peut-être, à cet égard-là, M. Barrette, je vous entendais à quelques reprises
avec les invités, la semaine dernière, noter votre inquiétude, et je pense,
avec raison, quant au signal qu'on envoie, parce qu'on prétend que le projet de
loi n° 66 est peut-être un laboratoire, à certains
égards.
M. Barrette : C'est sûr que
c'en est un.
M. Pagé-Plouffe (Samuel) : Et
donc le signal que l'on envoie, si c'est effectivement un laboratoire, c'est
une possibilité d'abaisser les normes environnementales et les bonnes pratiques
d'aménagement du territoire. C'est le risque de ce laboratoire-là. Et donc il y
a une préoccupation, puis je pense que c'est réel.
M. Barrette : Écoutez,
là-dessus, on se rejoint, là. Je suis convaincu... Et je ne prête pas
d'intention parce que, comme je le dis souvent, si une hirondelle ne fait pas
le printemps, un ministre ne fait pas un gouvernement. Alors, je ne prête pas
d'intention à la présidente du Conseil du trésor. J'en prête au gouvernement,
par exemple. Ça, j'ai le droit de le faire. Au gouvernement, parce que je pense
qu'il y a ici un chemin qu'on prend.
Là, je vais vous poser une question... Je
ne sais pas si vous êtes capables de répondre à cette question-là. Je vois que
vous avez réfléchi. Évidemment, c'est normal, là. Vous ne venez pas comme ça, à
pied levé, nous entretenir, là. Ce n'est pas un salon de thé. Vous avez regardé
les 181 projets, là. Est-ce qu'il y en a là-dedans, particulièrement dans les
routiers, qui ne sont pas, selon vous, assujettis à un BAPE?
M. Savard (Christian) : Bien,
il y en a beaucoup. Beaucoup de projets de réfection...
M. Barrette : Il y en a
beaucoup? C'est quoi, la proportion de...
M. Savard (Christian) : Bien,
madame...
M. Barrette : Vous avez
sûrement fait la réflexion, là. Sur les 52 projets routiers, il en reste
combien, là, pour lesquels, dans nos règles, il faut faire un BAPE?
M. Savard (Christian) : Bien,
on pense qu'on en a... Nous, on n'est pas à l'aise avec, effectivement... et
Mme la ministre était dans une bonne...
M. Savard (Christian) :
...beaucoup, beaucoup de projets de réfection.
M. Barrette : Il y en a beaucoup.
C'est quoi la proportion? Vous avez sûrement fait la réflexion, là. Sur les 52
projets routiers, il y en a combien là, pour lesquels, dans nos règles, il faut
faire un BAPE?
M. Savard (Christian) : Bien,
on pense qu'on en a... Nous, on n'est pas à l'aise avec... effectivement — et
Mme la ministre était dans une bonne proportion, et on l'a dans notre mémoire — on
n'était pas à l'aise avec une dizaine de projets qui justement induisent... et
là-dessus, je ne suis pas d'accord avec vous, c'est de l'environnement...
M. Barrette : Ce n'est pas
grave. Je m'excuse de vous interrompre parce que... Excusez-moi, je vous
interromps parce qu'il me reste juste 1 min 20 s. Moi, c'est
bien important d'avoir votre opinion, là, sur la question : Combien, dans
nos lois actuelles, ne sont pas, par définition, assujettis à un BAPE?
M. Savard (Christian) :
Combien des projets routiers? Je... Et même, dans certains cas, ils ne sont pas
tous assujettis à un BAPE, mais ils sont assujettis à certaines règles liées à
la Loi sur la qualité de l'environnement.
M. Barrette : Oui, oui, oui.
Ça va, ça.
M. Savard (Christian) : Ils
sont tous assujettis. Mais à un BAPE, je ne pourrais pas vous le dire, comme
ça. Mais on l'a dit : On n'est pas contre les projets d'entretien du
réseau routier. Donc, il y en a beaucoup, dans le projet, et on les appuie.
Donc, c'est pour ça que ce n'est pas l'ensemble du projet de loi qu'on est
contre. Mais il y en a quelques-uns qui seraient assujettis à des mesures
d'étude d'impact puis qui vont plus loin, et eux on pense qu'on ne devrait pas
faire de... on ne devrait pas justement faire en sorte... être moins exigeant.
M. Barrette : Ça, essentiellement,
c'est la dizaine, là de prolongements d'autoroutes, si on veut résumer ça.
M. Savard (Christian) : Exact.
M. Barrette : Essentiellement,
là.
M. Pagé-Plouffe (Samuel) :
Mais même, sur la 25, rapidement, sur la 25, si on a un BAPE qui est expéditif,
très ciblé, qui n'étudie pas les questions d'étalement urbain, là, la menace
sur le territoire agricole, parce que c'est possible dans la formulation
actuelle du projet de loi, il y a un risque qui est important.
M. Barrette : Ah! Je peux vous
dire que toutes les manoeuvres qui ont été faites dans la dernière année pour
la 25 sont des menaces aux terres agricoles par définition. Et on n'est pas
sorti de ce champ-là — parce que ce n'est pas du bois.
M. Pagé-Plouffe (Samuel) : C'est
ce que permettent les articles 40 et suivants, notamment, d'avoir un BAPE
ciblé.
M. Barrette : Vous avez
raison. Mon temps est expiré. Merci beaucoup.
Le Président (M. Simard) :
Merci à vous. M. le député de Rosemont.
M. Marissal : Merci, M. le
Président. Bonsoir, messieurs. Rebelote, on s'est vus il n'y a pas si longtemps,
en juin. Le projet de loi n'est pas tout à fait le même, mais il y a des choses
qui demeurent. Vous parlez notamment de l'article 53. Je ne sais pas on a fait
combien de groupes et de témoins, là, ici, depuis la semaine dernière, on doit
approcher la quinzaine, si ce n'est pas plus, ça fait que je commence à avoir
une assez bonne idée de ce que vous dites, d'autant u'on a fait ça déjà en
juin. Mais j'aimerais quand même que vous explicitiez davantage votre opposition
à 53 et ce que ça pourrait faire, selon vous.
M. Savard (Christian) : 53,
c'est le fait que le gouvernement, lorsqu'il arrive avec un nouveau projet, essentiellement,
un équipement qui pourrait être public, de type école, de type maison des aînés
ou de ce type-là, doit faire un avis de projet à la MRC pour lui dire :
Bien, moi, je voudrais construire une nouvelle école à cet endroit-là. Et la...
M. Savard (Christian) :
...lorsqu'il arrive avec un nouveau projet, essentiellement un équipement qui
pourrait être public de type école, de type maison des aînées ou de ces
types-là, doit faire un avis de projet à la MRC pour lui dire : Bien, moi,
je voudrais construire une nouvelle école à cet endroit-là. Et la MRC doit lui
dire si c'est conforme ou non à sa planification. Et donc ça pourrait arriver
dans des cas, et c'est pour ça qu'on trouve l'article 53 trop fort. Ça
n'arrivera pas souvent, mais ça pourrait arriver qu'une MRC dise : Bien
non, c'est en dehors de notre périmètre d'urbanisation, on pense que c'est dans
un milieu naturel qui n'est pas officiellement protégé mais qu'on ne veut pas
développer à court terme. Disons qu'on pense que votre école secondaire, il ne
faut pas la mettre à tel endroit, donc la MRC dit au gouvernement : Ce
n'est pas conforme à notre qualification. Et là, après ça, le gouvernement peut
prendre différentes choses, peut décider de changer son projet, peut décider de
demander à la MRC de changer son schéma ou peut décider, après un certain
nombre de procédures, passer en force et faire ... projet.
Donc, il existe des manières de faire ce
genre de projet là. Et nous, on pense que, justement, ça n'arrivera tellement
pas souvent que... l'utilisation de ce précédent-là, de mettre complètement de
côté — et là, ce n'est pas une accélération, là, c'est qu'on met complètement
de côté la procédure de conformité au schéma d'aménagement — nous
semble vraiment... excusez-moi, je vais le dire en anglais parce qu'on est un
peu fatigués, «overkill». On pourrait tout simplement réduire les délais des
procédures normales qui sont compris à la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme
et arriver à un résultat où les projets peuvent être accélérés en conformité
avec qu'est-ce qui se passe sur le terrain. Mais ça va arriver. C'est comme
utiliser... c'est comme un article... S'il y a un problème avec une MRC, ça
veut peut-être juste dire qu'il ne faut pas faire le projet et qu'il ne mérite
pas d'être accéléré.
Donc, une réduction des délais de
certaines conformités, des fois que la bureaucratie se traîne les pieds, peut
être intéressante, mais pas plus que ça. C'est pour ça qu'on propose de garder
53 avec un ajustement au délai de la LAU.
M. Pagé-Plouffe (Samuel) :
Peut-être un tout petit élément rapide.
Le Président (M. Simard) :
Très rapidement, très rapidement, s'il vous plaît.
M. Pagé-Plouffe
(Samuel) : La politique de mobilité durable du gouvernement du Québec
reconnaît que la localisation des bâtiments publics est souvent loin d'être
exemplaire. Donc, c'est effectivement ça, c'est une question de localisation
des bâtiments publics, et là on enlève un rempart supplémentaire.
Le Président (M. Simard) :
Merci, merci beaucoup. M. le député Jonquière.
M. Gaudreault : Oui. Alors,
merci beaucoup pour votre présence toujours éclairante. J'aime beaucoup le
début de votre mémoire avec vos propositions pour une véritable relance verte,
solidaire et durable. Je remarque, comme vous avez dit, M. Pagé-Plouffe, que
l'élément distinctif de votre mémoire par rapport à tous ceux qu'on a entendus
jusqu'à maintenant, c'est la grille que vous proposez, la grille d'analyse
multicritères. Alors, j'aimerais ça vous donner du temps pour vous permettre de
nous l'expliquer et de convaincre la ministre de l'inclure dans son projet de
loi.
M. Pagé-Plouffe (Samuel) :
Christian, veux-tu que j'y aille ou tu veux y aller?
M. Savard (Christian) : Tu me
sembles...
M. Pagé-Plouffe (Samuel) :
Bien, à l'article 53 du projet de loi, on prévoit une reddition...
M. Gaudreault : ...alors,
j'aimerais ça vous donner du temps pour vous permettre de nous l'expliquer et
de convaincre la ministre de l'inclure dans son projet de loi.
M. Pagé-Plouffe (Samuel) :
Christian, veux-tu que j'y aille ou tu veux y aller?
M. Savard (Christian) : Tu me
sembles...
M. Pagé-Plouffe (Samuel) :
Bien, à l'article 53 du projet de loi, on prévoit une reddition de comptes
semestrielle qui doit être faite par le ministre responsable d'un projet, mais
on ne parle pas dans cette reddition de comptes là des impacts
environnementaux, sociaux, même territoriaux des projets. 64 touche un peu aux
impacts environnements, mais quand même, tous les projets qui sont là n'ont pas
passé le filtre qui vient, finalement, justifier la pertinence de les
accélérer, la plus-value qu'ils ont ces projets-là. Et à notre avis, cette
grille-là, qui est d'ailleurs proposée... on ne l'a pas sorti de notre chapeau,
là, c'est proposé un peu partout à travers le monde par des institutions
environnementales, ça ressemble un peu aussi à ce que propose le G15+,
permettrait d'avoir... garantirait, en fait, des bons projets, tout simplement.
• (20 h 10) •
M. Gaudreault : Ça viendrait amoindrir
un peu les contournements des lois environnementales d'une certaine manière. Au
moins, ça nous donnerait un certain nombre de balises.
M. Savard (Christian) : Bien,
si les projets passaient à travers cette grille-là, ça deviendrait très évident
quel projet cause problème et ne mériterait pas d'être accéléré et quel projet
mériterait d'être accéléré. C'est pour rentrer un petit peu de rationnel
derrière le choix des projets afin que les immenses investissements que le Québec
va faire dans les prochaines années en matière d'infrastructures soient les
meilleurs, pas juste faire de la quantité de projets pour de la quantité de
projets, mais faire les meilleurs projets possibles et éviter les moins bons.
M. Gaudreault : J'aimerais ça
vous entendre sur le REAFIE, donc le fameux règlement en environnement. Je
comprends que pour vous, son adoption, sa mise en vigueur dans quelques
semaines à peine devrait faire en sorte qu'on le laisse s'appliquer et
d'éviter, là, d'avoir un genre de régime parallèle créé par le projet de loi
n° 66. Donc, vous souhaitez d'abord laisser le REAFIE entrer en vigueur et
s'appliquer pour ce qu'il est avant de procéder à une voie parallèle.
M. Pagé-Plouffe (Samuel) :
Oui. Bien, c'est... en fait, c'est de s'assurer du succès de ce nouveau règlement-là
d'application, dont un des objectifs, c'est effectivement l'efficacité de la
réalisation des projets publics. Donc, si on crée un régime parallèle, ça peut
créer de la confusion. Et on pourrait dire, à cet égard-là, si on veut vraiment
réussir à travailler sur l'efficacité des projets, bien, travaillons sur la
question de l'expropriation qui, elle, est prioritaire et qui cause
véritablement des problèmes au Québec, tant en termes de délais que de coûts
des projets.
Le Président (M. Simard) : Très
bien. Alors, M. Pagé-Plouffe, M. Savard, merci beaucoup pour votre
présence parmi nous ce soir. M. Savard, vous nous disiez que plus tôt en
journée, vous étiez passé devant la Commission d'aménagement du territoire?
M. Savard (Christian) : Oui.
Le Président (M. Simard) : Je
suis persuadé que vous avez trouvé ça beaucoup plus agréable d'être avec nous
ce soir.
M. Savard (Christian) : Ah!
tout à fait. Et c'est ce que je vais leur dire à eux aussi.
Le Président (M. Simard) :
Alors, merci à nouveau...
Le Président (M. Simard) :
...M. Savard, merci beaucoup pour votre présence parmi nous ce soir.
M. Savard, vous nous disiez que plus tôt en journée vous étiez passé
devant la Commission de l'aménagement et du territoire.
M. Savard (Christian) :
Oui.
Le Président (M. Simard) :
Je suis persuadé que vous avez trouvé ça beaucoup plus agréable d'être avec
nous ce soir.
M. Savard (Christian) :
Ah! tout à fait, et c'est ce que je vais leur dire...
Le Président (M. Simard) :
Alors, merci à nouveau et à très bientôt j'espère. Au revoir. On va suspendre
quelques instants.
(Suspension de la séance à 20 h 12)
(Reprise à 20 h 16)
Le Président (M. Simard) :
Alors, chers collègues, nous sommes de retour et nous avons l'honneur, ce soir…
c'est un très grand honneur de finir, donc, ces auditions publiques en recevant
les représentants du Conseil innu — alors, je m'efforce de bien
prononcer — Takuaikan Uashat mak Mani-Utenam. J'espère de ne pas
avoir trop mal prononcé. Donc, chef Mike McKenzie, merci infiniment de nous
faire l'honneur d'être avec nous, chef.
M. McKenzie (Mike) : Kwe, bonjour,
bonsoir.
Le Président (M. Simard) : Kwe
à vous. Ainsi que Me Marie-Claude André-Grégoire. Merci d'être avec nous,
madame. Donc, nous vous écoutons.
M. McKenzie (Mike) : O.K., je vais
débuter. Merci. (S'exprime dans une langue autochtone) projet de loi n° 66.
Je suis extrêmement content d'être ici avec vous, chers… tous ceux qui
travaillent pour la commission puis les députés qui sont là, ça fait que… aussi
les ministres qui sont autour de la table.
Je veux premièrement saluer les membres de
la commission, je vous remercie pour le temps qui nous est accordé pour vous
partager notre réflexion politique quant au projet de loi n° 66, afin que
ce projet soit adopté en incluant les peuples autochtones au Québec et en
respectant leurs droits. Également, nous souhaitons que notre réflexion permette
d'amener des perspectives nouvelles pour renouveler nos relations et
reconstruire nos alliances.
Les Innus de Uashat mak Mani-Utenam, que
je représente, détenons le titre ancestral, ainsi que les autres droits
ancestraux et des droits issus de traités sur un vaste territoire de la
péninsule Québec-Labrador, notre Nitassinan, notre territoire. Nous n'avons
jamais cédé, vendu ou abandonné ces droits. Ce territoire est la source de
notre identité millénaire, de notre langue, de notre spiritualité et de nos traditions.
Il n'est pas un territoire vierge ni des terres du domaine de l'État. Notre
Nitassinan est débordant, entre autres, de toponymes innus qui ont chacun leur
histoire, de lieux de naissance, de sépultures, de lieux de portage, de
campements, de remèdes traditionnels, ainsi que d'autres ressources naturelles
d'importance pour nous. L'Innu et son territoire ne font qu'un…
M. McKenzie (Mike) : …de toponymes
innus qui ont chacun leur histoire de lieux de naissance, de sépultures, de
lieux de portage, de campements, de remèdes traditionnels, ainsi que d'autres
ressources naturelles d'importance pour nous. L'Innu et son territoire ne font
qu'un.
Nous sommes une nation distincte, et nous
exerçons notre propre autonomie gouvernementale, et nous affirmons nos droits
en dépit de la non-reconnaissance de ceux-ci par le gouvernement à travers ses
positions historiques. Depuis plusieurs années, le gouvernement du Québec fait
des représentations auprès des nations autochtones à l'effet qu'il souhaite
créer des nouvelles relations de nation à nation, dont avec Uashat mak
Mani-Utenam. Une relation de nation à nation sous-entend un rapport d'égalité,
d'équité, de respect mutuel et de collaboration. Ce n'est surtout pas une
relation d'autorité ou de subordonné. Or, les démarches prises par le
gouvernement du Québec à ce jour pour créer des relations de nation à nation ne
respectent pas toutes les caractéristiques qui permettraient un rapport
constructif à l'avantage de tous. D'ailleurs, la lenteur des démarches entreprises
par le gouvernement, notamment en ce qui a trait à la mise en oeuvre des
recommandations de la commission Viens ou de la Déclaration des Nations unies
sur les droits des peuples autochtones, démontre que ce discours public du
gouvernement n'est pas accompagné d'actions concrètes pour le moment.
Toutefois, nous demeurons optimistes. Les
derniers changements au niveau des interlocuteurs du gouvernement du Québec
doivent représenter une réelle occasion de moderniser et reconstruire nos
relations. Notre dernière avancée pour le projet Apuiat démontre que nous
pouvons faire autrement. Toutefois, à titre d'exemple, concernant nos relations
sur les questions territoriales, les mécanismes de consultation mis en place
consistent à l'envoi de lettres par le gouvernement et ses ministères aux
nations autochtones pour les aviser de nouveaux développements ou de projets
sur leur territoire traditionnel. Les communautés sont ensuite invitées à
exprimer leurs préoccupations dans un délai précis, et ce, sans aucune garantie
quant à la prise en compte de ces préoccupations dans le processus décisionnel
et sans possibilité pour celles-ci de collaborer aux projets d'une quelconque
façon. Nous avons l'impression que le Québec effectue le minimum afin de
pouvoir répondre à ses obligations constitutionnelles de consultation, mais
sans plus. Je qualifierais notre relation actuelle de monologue et non de
dialogue.
• (20 h 20) •
Le meilleur exemple pour les Innus de
Uashat mak Mani-Utenam est l'avis du projet de la ligne Hydro-Québec entre le
poste Arnaud et l'Aluminerie Alouette en 2014. L'avis nous a été communiqué à
peine trois jours avant le début des travaux de déboisement de la ligne. Nous,
les Innus, nous n'avons donc eu d'autre choix que d'entreprendre des procédures
judiciaires longues et coûteuses afin de faire valoir nos droits. Il s'agit
d'une démonstration claire d'une relation inégale qui n'a rien d'une relation
de nation à nation avec le gouvernement du Québec et qui a entraîné un nouveau
conflit. Pour passer de la méfiance actuelle vers une relation de
confiance, le Québec devra être ouvert à se renouveller dans son attitude, ses
politiques et de s'engager réellement à permettre aux Premières Nations d'avoir
toutes les opportunités nécessaires pour répondre aux aspirations de ces
populations…
M. McKenzie (Mike) : ...de
nation à nation avec le gouvernement du Québec et qui entraînait un nouveau
conflit. Pour passer de la méfiance actuelle vers une relation de confiance, le
Québec devra être ouvert à se renouveler dans son attitude, ses politiques et
de s'engager réellement à permettre aux Premières Nations d'avoir toutes les
opportunités nécessaires pour répondre aux aspirations de ces populations.
Vous devez le savoir, nous avons des défis
énormes à relever pour nos enfants et nos familles. Il faut mettre tout en
oeuvre pour réduire les écarts socioéconomiques. Lutter contre les inégalités
sociales doit être un ingrédient de la réconciliation tant recherchée.
Encore une fois, le projet de loi n° 66
a été présenté sans tenir compte des préoccupations et recommandations déjà
soulevées par ITUM, par la nation innue, et sans prévoir l'inclusion des
projets bénéficiant aux nations autochtones. Malgré la main tendue d'ITUM et de
la nation innue, le gouvernement n'a même pas pris la peine de dialoguer avec
nous avant de rédiger la seconde monture du projet de loi n° 61. Il s'agit
encore une fois d'une entorse à l'établissement d'une relation de nation à
nation. Nous sommes toujours mis devant le fait accompli et nous portons toujours
l'odieux d'être en réaction à vos positions.
En effet, malgré des besoins criants en
matière d'infrastructures et de services de santé et de services sociaux bien
connus dans les nations autochtones au Québec, il est inacceptable qu'aucun des
181 projets prévus à l'annexe I ne bénéficie aux autochtones.
Plus particulièrement en ce qui a trait à
ITUM, à Innu Takuaikan Uashat mak Mani-Utenam, le rapport du coroner Bernard
Lefrançois déposé en 2017 émettait des recommandations précises et urgentes au
gouvernement du Québec afin d'améliorer les conditions de vie des Innus de Uashat
mak Mani-Utenam.
Mais, à plusieurs reprises, ITUM a proposé
et demandé l'appui du gouvernement du Québec pour la mise en oeuvre de plusieurs
projets pour pallier aux inégalités sociales qui affligent les Innus de ma communauté.
Par exemple, le 2 juillet 2020, j'ai moi-même remis aux ministres Bonnardel et
Julien un document de synthèse résumant certains de ces projets, notamment pour
la construction d'un centre de santé à Mani-Utenam, d'un centre de crise, d'un
centre de pédiatrie sociale.
L'environnement social et économique sont
des déterminants de la santé qui doivent être pris en compte pour le bien-être
individuel et communautaire de la population. L'approche du gouvernement en
matière d'amélioration des services de santé et services sociaux devrait être
globale afin d'inclure des projets à l'annexe I qui visent à l'amélioration des
conditions de vie des nations autochtones au Québec, exclues depuis trop
longtemps.
Je ne peux pas passer sous silence que le
fait que c'est l'ensemble de la Côte-Nord qui semble être complètement évacué
dans la tentative de la relance économique. Si l'économie régionale de la
Côte-Nord se porte mieux, eh bien, cela favorisera aussi nos économies locales
par le développement de partenariats gagnant-gagnant avec les industries, les
entreprises et les municipalités d'une autre région.
Les récents événements et le racisme
systémique qui sévit au Québec ont également mis en lumière l'approche du
développement séparé, qui ne fait qu'amplifier la dégradation et le maintien
des conditions de vie inacceptables aux niveaux social et communautaire au sein
des nations autochtones au Québec. Le gouvernement du Québec devrait profiter
de son plan de relance économique pour faire face à ces problématiques et
investir dans la santé...
M. McKenzie (Mike) : ...systémique
qui sévit au Québec ont également mis en lumière l'approche du développement
séparé, qui ne fait qu'amplifier la dégradation et le maintien des conditions
de vie inacceptables aux niveaux social et communautaire au sein des nations
autochtones au Québec. Le gouvernement du Québec devrait profiter de son plan
de relance économique pour faire face à ces problématiques et investir dans la
santé globale des nations autochtones, soit la santé mentale, la santé
physique, la santé économique et communautaire. Investir maintenant pour le
mieux-être de nos populations représente un investissement nécessaire qui
générera des économies d'échelle dans quelques années. Un dollar bien investi
aujourd'hui, c'est d'économiser plusieurs dollars demain. Nous devons
travailler ensemble maintenant pour un futur gagnant pour l'ensemble de la
société, mais particulièrement celui de nos populations plus vulnérables.
Il est difficile pour nous de prétendre
qu'il faut relancer nos économies. Comment relancer quelque chose qui n'existe
pas? Commençons ensemble à bâtir cette économie inclusive. De plus, je vous
invite à lire notre réflexion politique. Elle contient également une analyse
juridique et politique de plusieurs dispositions particulières du projet de loi
n° 66 et de nos préoccupations, notamment en matière
environnementale, dans la mesure où des projets d'envergure dans le Nitassinan,
nos territoires, sont ajoutés à la liste de l'annexe I.
Finalement, il est temps pour le Québec de
créer une véritable relation de nation à nation avec les autochtones et de nous
reconnaître comme des égaux en nous permettant d'améliorer nos conditions de
vie. Des investissements seront bénéfiques ,autant pour les autochtones que
pour le Québec, qui pourrait ainsi compter sur notre participation active à la
relance et au lancement d'une économie inclusive et équitable pour tous, non
seulement pour ceux qui ont perdu des opportunités économiques avec cette
pandémie qui perdure, mais pour tous ceux qui ont été exclus depuis toujours.
Merci beaucoup.
Le Président (M. Simard) :
Merci à vous, chef. Nous allons donc immédiatement laisser la parole à la
présidente du Conseil du trésor. Madame.
Mme LeBel : Merci, M. le
Président. Merci. Merci, chef McKenzie, pour cette présentation-là, je vais...
On a également reçu votre mémoire, là, qui comporte beaucoup plus de détails
sur ce que vous venez de vous décrire, là, dans votre présentation de
10 minutes. Et je comprends très bien, là, votre plaidoyer que vous venez
de faire, là, sur vos droits ancestraux et l'importance de vous consulter, de
s'entendre avec vous. Alors, votre message a été clairement énoncé, puis je
vous remercie pour cette présentation.
Si on va peut-être plus particulièrement
sur le projet de loi n° 66, si vous me permettez...
Vous avez parlé de façon très large et de façon très globale, donc, sur la
nécessité de vous consulter adéquatement. Et vous avez d'ailleurs cité des
exemples de consultations qui ne remplissaient peut-être pas les objectifs d'une
consultation de par la façon dont ça a été fait, effectivement. Donc,
j'aimerais peut-être que vous nous donniez... Est-ce que, dans le projet de loi
n° 66, de façon particulière, les 181 projets en
annexe, il y a des projets qui vous touchent plus particulièrement? Je
comprends que, de façon générale, vos commentaires s'appliquent, là, et je le
comprends très bien. Je vais donner l'exemple de la communauté de Kahnawake,
qui est venue nous parler plus particulièrement du pont Mercier, où leur
communauté était...
Mme LeBel : …de façon
particulière, les 181 projets en annexe, il y a des projets qui vous
touchent plus particulièrement? Je comprends que, de façon générale, vos commentaires
s'appliquent, là, et je le comprends très bien. Je vais faire... Je vais donner
l'exemple de la communauté de Kahnawake qui est venue nous parler particulièrement
du pont Mercier, où leur communauté était… Outre leur désir, comme vous l'avez
présenté, comme l'APNQL l'a présenté également, de consultation, là, il y avait...
il y a ce projet qui les touchait plus particulièrement. Est-ce que, dans le projet
de loi n° 66, il y a des projets qui vous touchent plus particulièrement?
M. McKenzie (Mike) : Mais
moi, j'étais comme très surpris de ne pas voir aucun projet au niveau des
Premières Nations, tu sais… J'ai parlé tantôt dans mon introduction, c'est
d'avoir des centres de santé, qu'on va annexer, avec les aînés, dans le même
bâtiment pour donner des services. Parce que, quand même, au niveau… On a eu
plein de recommandations depuis quelques années. Dans l'ensemble, au Québec,
les centres hospitaliers, on a entendu plein d'histoires au niveau des préjugés
envers les Premières Nations. Mais, pour nous aussi, on devrait avoir des
centres de santé qui sont adaptés à nos valeurs, à nos coutumes... en rapport
avec nos aînés puis en rapport avec nos interventions médicales. On a des
infirmières, on a des médecins qui proviennent de ma communauté de Uashat mak
Mani-Utenam.
On a un projet actuellement qu'on est en
train d'élaborer, je vous dirais, depuis quand même un an, qu'on discute et on
va présenter un nouveau projet de centre de santé ici, à Mani-Utenam, puis
qu'on... intégrer des aînés dans le même bâtiment pour donner un peu plus de
services, là, auprès de nos aînés, puis les intervenants pourraient aller directement
soigner nos aînés, puis les médecins aussi. C'est un projet...
Mme LeBel : Donc, c'est
plutôt... C'est plus l'absence de certains projets plutôt que la présence de
d'autres qui vous préoccupe. Parce que je voulais savoir par rapport... Puis là
je comprends que vous déplorez l'absence... C'est un exemple de projet dont
vous déplorez l'absence sur l'annexe du projet de loi n° 66.
Mais, dans ceux qui sont présentement dans
le projet de loi n° 66... parce que vous parlez de l'importance de la consultation.
Vous avez, je pense, aussi, brièvement, peut-être que ce n'est pas vous, mais il
me semble que j'ai vu... j'ai cru voir en feuilletant rapidement votre mémoire qu'il
y avait aussi des préoccupations environnementales, là, sur les évaluations environnementales
puis le processus de consultation qui, selon vous, allait être escamoté, si on
veut, par les projets d'accélération.
Mais est-ce qu'il y a des projets sur le
projet de... sur les 181 projets qui touchent plus précisément votre communauté?
Pas que... Et j'ai bien compris votre intérêt sur l'ensemble, là, et je ne veux
pas dénigrer ce positionnement-là, ce n'est pas mon objectif, mais c'est de
voir s'il y en a, de façon plus pointue, qui touchent votre communauté, pour
lesquels vous auriez besoin d'une consultation plus élaborée, d'un mécanisme
plus précis, là.
Le Président (M. Simard) :
Me André-Grégoire.
• (20 h 30) •
Mme André-Grégoire
(Marie-Claude) : ...que le chef Mike McKenzie a dit. Donc, premièrement,
comme il disait, c'est qu'ITUM et, en général, les Premières Nations ont été complètement
exclues de tous les projets qui sont... autant au niveau santé, éducation,
dans... ou autant les communautés...
20 h 30 (version non révisée)
Mme André-Grégoire
(Marie-Claude) : ...que Mike Mackenzie a dit. Donc, premièrement,
comme il disait, c'est que ITUM et en général les Premières Nations ont été complètement
exclus de tous les projets qui sont autant au niveau santé, éducation dans...
où autant les communautés autochtones ont besoin de ce type de projets là dans
leurs communautés qui ont justement... qui sont déjà sous-financés. Mais la
préoccupation qui a été soulevée, dans notre mémoire, par rapport aux
181 projets, dans le fond, fait écho à vos commentaires, lors du
23 septembre, concernant le fait que, les 181 projets, la liste
n'était pas fermée avant l'adoption du projet de loi. Vous parliez, plus tôt dans
la journée, que justement les 181 projets on parle de projets... de
projets existants. La préoccupation majeure des Innus d'Uashat mak Mani-Utenam,
c'est justement dans l'ajout de projets d'envergure qui seraient dans le
territoire traditionnel qu'on appelle le Nitassinan en innu, donc le territoire
traditionnel d'Uashat mak Mani-Utenam. Donc, on parle des projets qui auraient
possiblement une plus grande envergure qui pourraient se rajouter dans votre
analyse du projet de loi.
Mme LeBel : O.K. Je vais
peut-être résumer ce que vous venez de me dire pour voir si j'ai bien compris.
Là, c'est plus... la préoccupation, c'est plus qu'on ajoute un projet, sur la
liste, qui serait d'envergure qui pourrait impacter votre communauté plutôt que
les 180 projets actuels, là. Donc, est-ce que je comprends bien?
Mme André-Grégoire
(Marie-Claude) : Exact.
Mme LeBel : O.K.
Mme André-Grégoire
(Marie-Claude) : Exact.
Mme LeBel : Mais je vais
vous rassurer.
Mme André-Grégoire
(Marie-Claude) : ...
Mme LeBel : Je vais vous
rassurer. Dans un sens, effectivement, je ne peux pas déclarer une liste fermée
tant que le projet de loi n'est pas adopté. Il y a la commission parlementaire
et des consultations. Mais je pense que j'ai eu l'occasion de dire, autrement à
plusieurs reprises, que pour moi il n'y avait pas d'intérêt à en ajouter. Mais
je comprends votre préoccupation. Donc, c'est plus le potentiel d'un ajout de
quelque chose qu'on ne connaît pas présentement, que les 181 projets. Puis la raison
de ma question n'est pas de vous demander si vous approuvez les 181 projets,
là, c'est plutôt de voir est-ce qu'il y en a.
Et je reviens avec l'exemple de la
communauté de Kahnawake où le projet du pont Mercier est sur la liste des 181,
et ça posait, pour eux, plusieurs enjeux au niveau de la consultation. Ils ont
déjà un protocole, un mémorandum d'action qui a été mis en place avec le
gouvernement depuis quelques années. Et ce que la communauté de Kahnawake, en
résumé, nous disait, vous le savez probablement, vous avez suivi les travaux,
c'est que, pour eux, la notion d'accélération du projet de loi n° 66 du
pont Mercier entrait en conflit avec les ententes qu'ils ont eues avec le
gouvernement et les discussions déjà en cours sur divers sujets touchant, de
près ou de loin, le projet de loi du pont Mercier. Donc, pour eux, c'était
incompatible de faire marcher les deux choses en même temps, mais il y avait un
projet de loi… pas un projet de loi, pardon, un projet d'infrastructure précis
sur la liste qui les préoccupait, mais j'ai bien compris, là, vos
préoccupations à ce niveau-là.
Quand vous parlez, pour vous, d'une
meilleure façon de consulter les Premières Nations, vous avez donné des
exemples de ce qu'il ne faut pas faire. Donc, j'aimerais peut-être voir avec
vous comment vous voyez cette notion-là, dans le cadre de développement des
projets de consultation, mais comment on peut…
Mme LeBel : ...j'ai bien
compris, là, vos préoccupations à ce niveau-là.
Quand vous parlez, pour vous, d'une
meilleure façon de consulter les Premières Nations, vous avez donné des exemples
de ce qu'il ne faut pas faire. Donc, j'aimerais peut-être voir avec vous
comment vous voyez cette notion-là dans le cadre de développement des projets
de consultation, mais comment on peut l'intégrer de façon efficace aussi. Parce
que je suis tout à fait d'accord avec vous que, pour consulter, c'est quand
même prendre le temps d'échanger, mais, à un moment donné, il faut qu'on
avance, que ce soit dans une direction ou dans une autre, donc... mais il faut
dégager l'espace. Donc, comment vous voyez ça, cette consultation-là pour
qu'elle soit efficace sur les projets, pertinente, surtout, efficace, et
qu'elle ne donne pas nécessairement... qu'elle n'ait pas d'impact trop grand
sur le délai qu'un projet peut prendre pour se réaliser ou non, là, mais
surtout se réaliser, là?
M. McKenzie (Mike) :
Mais il ne faut peut-être pas oublier, Mme LeBel, là, on a toujours un
titre ancestral... vous êtes avocate, je pense, de formation, on a un titre
ancestral sur les territoires de revendication qu'on a au Québec, puis il y a
toutes sortes de modèles, là, qui existent, là, quand on regarde la Loi sur la
qualité de l'environnement. Je regarde les comités d'évaluation comme le COMEX.
Tu sais, il existe entre l'évaluation qu'on a environnementale, là, quand on
regarde au niveau des examens des projets qui sont situés sur les territoires
des Cris. Bien, pourquoi ne pas le faire au niveau d'autres nations quand qu'il
y a des projets qui sont situés sur leur territoire? Mais c'est des exemples
qu'on peut avoir.
J'ai regardé récemment aussi, vous savez,
l'office d'évaluation environnementale socioéconomique au Yukon. Il existe
d'autres sortes de modèles, là, dans d'autres provinces que parfois... que le
Québec, il pourrait peut-être changer le modèle qu'on discute depuis tantôt des
relations de nation à nation ou bien quand on a des droits un peu partout des
droits au Québec, bien, il faut quand même l'obligation constitutionnelle, là,
on la regarde au niveau du jugement d'Haïda. Le Québec devra quand même... il a
une obligation de consulter puis d'accommoder les Premières Nations quand il y
a des projets d'infrastructures, ou peu importe le projet de développement, qui
sont situés sur les territoires traditionnels des Premières Nations.
Mme LeBel : Merci,
M. McKenzie. Peut-être en terminant, peut-être me donner un peu plus de
détails sur ce qui... à la page 13 de votre mémoire, plusieurs y on fait
référence, mais je veux voir l'angle... votre angle à vous, là, et pourquoi
vous avez cette impression et cette prétention-là que le projet de loi
fragilise les milieux humides dont la protection est déjà déficiente. J'ai la
préoccupation de... bon, on pourrait parler de la protection actuelle que vous
considérez déficiente, mais j'ai à tout le moins comme préoccupation à tout le
moins de ne pas diminuer la protection actuelle. Là, ce n'est pas moi qui vais
l'augmenter, mais ne pas la diminuer. Donc, peut-être prendre quelques minutes
pour nous expliquer un peu votre position puis pourquoi vous avez cette
impression-là qui se dégage des mesures qui sont dans le projet de loi n° 66.
Mme André-Grégoire
(Marie-Claude) : Mais, en fait, l'article 33, là, du projet de
loi n° 66, qui, dans le fond, vient enlever les types
de caractérisation des sols et...
Mme LeBel : ...quelques minutes
pour nous expliquer un peu votre position puis pourquoi vous avez cette
impression-là qui se dégage des mesures qui sont dans le projet de loi n° 66.
Mme
André-Grégoire (Marie-Claude) : Bien, en fait, l'article 33,
là, du projet de loi n° 66, qui, dans le fond, vient
enlever les types de caractérisation des sols et vient remplacer, là, tout cet
aspect-là sur les modalités qui doivent être faites, là, lorsqu'il y a un
projet qui se fait dans les milieux humides... Donc, effectivement, là, il y a...
Du côté des Innus de Uashat mak Mani-Utenam, le territoire traditionnel est en
haut du 49e parallèle, donc ça, on en fait état, à la page 14, comme quoi ça
nous exclut complètement du Règlement sur la compensation pour l'atteinte aux
milieux humides et hydriques. Mais on considère que justement le fait que, dans
la LQE, on prévoit déjà une... pardon, une étude de caractérisation des sols,
ça devrait être maintenu et ne pas alléger ce processus-là. Parce qu'on sait
que le milieu humide est un milieu qui est très important pour l'ensemble du Québec
et devrait être protégé coûte que coûte.
Mme LeBel : Bien, merci. Merci
beaucoup pour votre présentation puis votre
mémoire. C'est tout pour moi, M. le Président. Merci.
Le Président
(M. Simard) : Très bien. Je cède la parole au député de La Pinière.
M.
Barrette : Alors, merci, M. le Président. Alors, chef McKenzie et
madame, merci d'être là, ici, aujourd'hui, c'est très intéressant.
Bon, vous êtes le troisième groupe des Premières
Nations qui n'a pas été consulté, alors je pense que le message est passé. Je
vais quand même vous poser la même question que j'ai posée aux deux autres :
Pour 61, vous n'aviez pas été plus consultés ou vous l'aviez été plus?
Mme
André-Grégoire (Marie-Claude) : Non, exact... Puis on tient à
réitérer aussi que nous avions déposé une réflexion politique lors de l'adoption...
la présentation du projet de loi n° 61, faisant état justement de nos préoccupations
majeures quant à ce projet de loi. Et on avait également demandé une rencontre,
là, du gouvernement avec les nations autochtones,
ainsi que... plus particulièrement avec les Innus de Uashat mak Mani-Utenam,
pour qu'on soit inclus dans les projets à l'annexe, dans des projets justement
de développement économique, pour participer, être partie prenante de la relance économique.
M.
Barrette : Je pense que, fondamentalement, là, honnêtement, vous avez
un point. Vous avez... Ce qui est, à quelque part, quasiment vexatoire pour
vous, c'est que, un, vous n'avez pas été consultés, évidemment, on comprend
pourquoi, là, dans le contexte historique des ententes, et tout, et tout, mais,
en plus, vous n'êtes pas considérés comme étant du développement économique.
M. McKenzie (Mike) : On voit, M.
Barrette, dans les 181 projets, je regarde sur la Côte-Nord, je pense qu'il n'y
a aucun projet qui a été visé. Moi, je regarde dans toutes les… je regarde… je
parlais tantôt, au niveau du rapport du coroner Lefrançois, par rapport à des
suicides qu'ils ont eus en 2015, ici, à Uashat mak Mani-Utenam, il y a plusieurs
recommandations…
M. McKenzie (Mike) : ...je regarde
sur la Côte-Nord, je pense qu'il n'y a aucun projet qui a été visé... tous les
besoins. Moi, je regarde dans tous les... je regarde le... je parlais tantôt au
niveau du rapport du coroner Lefrançois par rapport à des suicides qu'ils ont
eus en 2015 ici, à Uashat mak Mani-Utenam, il y a plusieurs recommandations. Je
regarde l'exemple, le centre de crise pour les membres de la population qui
sont en détresse psychologique dans ma communauté. On parle de la P-38 souvent
qui n'est pas appliquée dans le Centre hospitalier de Sept-Îles. On ramasse des
personnes qui sont en détresse puis qui sortent plus tôt à l'hôpital, puis par
la suite, il n'y a pas un service qui est adapté. Puis actuellement... un
centre de crise, actuellement, on en a un puis on est en train de l'implanter dans
la communauté pour avoir par la suite des services qui sont adaptés à nos
membres de la communauté.
• (20 h 40) •
M. Barrette : Je comprends très
bien votre point là-dessus, là. Ayant été dans ce domaine-la précédemment et
ayant été moi-même... j'ai pratiqué un petit bout de temps, là, en remplacement
à Sept-Îles et à Baie-Comeau, mais plus à Sept-Îles, je comprends ce que vous
dites.
Là, je vais poser une question qui va vous
apparaître bizarre, mais je vais la mettre en contexte. Vous m'avez entendu
dire, j'ai été le premier à la proposer comme ça, que ce projet de loi là
pouvait être considéré, sans prêter d'intention, comme étant un laboratoire,
une espèce de premier... là, un essai pour voir si ça va passer. Moi, j'imagine
déjà, là, qu'on va nous dire, là, dans deux ans, trois ans : Regardez
comment que ça va bien ces règles-là, il n'y a pas eu de problème. D'ailleurs,
les sujets... les projets qui ont été choisis sont des projets où justement il
risque de ne pas y avoir de grands drames. Je ne sais pas si vous m'avez
entendu avec le groupe qui vous a précédé. Moi, je ne pense pas, là, qu'il va y
avoir des grands drames environnementaux avec l'aménagement de la bretelle à la
jonction de la 30 puis de la 10 à la jonction... à l'arrivée du terminus du
REM. Bon.
Et là voici ma question : Si jamais
j'ai raison, là, si jamais, puis j'espère que j'ai tort, mais si jamais j'ai
raison, appliquer les règles de 66 pour un projet chez vous, sur le plan
environnemental, ça pourrait être assez laid. Qu'est-ce que vous en pensez?
Mme André-Grégoire
(Marie-Claude) : Effectivement — je vais prendre les devants
pour répondre — il y a plusieurs éléments dans le projet de loi, là,
qui diminuent tous les aspects de la LQE qui... pourtant, le principe fondamental
est de protéger l'environnement. Or, le projet de loi n° 66 change la loi
et change les règlements pour accélérer le processus, mais au détriment de
l'environnement. Un exemple est l'article 41.3 où il enlève la période
d'information publique dans l'évaluation et examen des impacts sur
l'environnement de certains projets. Donc, ça, c'est un des exemples, mais il y
en a d'autres aussi où ça diminue vraiment tout le principe de base.
Puis, au-delà de ça, je pense que c'est
important de soulever la question du principe de précaution. Je rappelle que ce
principe-là est le principe 15 de la Déclaration de Rio sur
l'environnement et le développement qui a été adoptée en 1992 et dont le Canada
est signataire. Et ce principe-là, de précaution, prévoit que justement, il n'y
a pas de certitude scientifique concernant...
Mme André-Grégoire
(Marie-Claude) : ...je pense que c'est important de soulever la question
du principe de précaution. Je rappelle que ce principe-là est le
principe 15 de la déclaration de Rio sur l'environnement et le développement
qui a été adoptée en 1992 et dont le Canada est signataire. Et ce principe-là
de précaution prévoit que, justement, il n'y a pas de certitude scientifique
concernant les impacts environnementaux d'un projet, et c'est au gouvernement
de prévoir, justement, le maximum de précautions dans leurs adoptions de lois
pour permettre, justement, la protection de l'environnement.
M. Barrette :
Me Grégoire, je vais vous en poser une autre, là, et je pense que vous
êtes tellement bien placée pour parler de ça parce que vous êtes sur un
territoire où il y a aussi des mines. Puis là, je ne veux pas aller dans les
mines, mais sur la question des zones humides, vous me voyez venir
probablement, là, est-il vraiment possible de ramener à l'original un milieu
humide altéré par une construction?
Mme André-Grégoire
(Marie-Claude) : Non, pas du tout. Puis pour le territoire
d'Uashat-Maliotenam, les milieux humides sont vraiment cruciaux pour la communauté
et leurs relations avec nous. Mais au-delà de ça, la faune a une relation particulière
avec nous. Si on parle juste des oiseaux migrateurs comme l'outarde qui vient
justement dans les plaines de milieux humides pour se reposer pendant leur
trajectoire, s'il y a un impact minier ou un impact de développement industriel
dans ce secteur-là, ça va faire changer la trajectoire des oiseaux migrateurs
comme l'outarde.
M. Barrette : Il y a
comme... Il y a quelque chose d'un petit peu utopique ou d'irréalisable, là, de
penser qu'on va pouvoir revenir en... alors, peu importe l'ampleur du projet,
là, petit ou grand, là, moi, peut-être parce que c'est mon héritage qui vient
d'une zone plus rurale, là, on va dire, là, mais je ne le vois pas. Vous avez,
Me Grégoire, parlé... Puis, écoutez, je vais vous dire... vous faire une
petite... une confidence, quand j'ai vu le projet de loi, un des premiers
articles qui m'accroché, c'est celui que vous avez cité, 33. C'est assez... Je
vais vous demander d'élaborer là-dessus, là, dans votre expérience :
Comment penser qu'on puisse faire une évaluation environnementale au niveau
biologique de la faune, là, un coup que les travaux ont commencé?
Mme André-Grégoire
(Marie-Claude) : ...
M. Barrette :
Me Grégoire, on ne vous entend plus.
Mme André-Grégoire
(Marie-Claude) : Là maintenant?
M. Barrette : Oui, c'est
bon.
Mme André-Grégoire
(Marie-Claude) : O.K. Donc, oui, c'est que l'article 33 amène la
soustraction à l'obligation de soumettre certains documents. Et donc, par
rapport à l'article 22 et l'article 30 de la loi sur la LQE, cela ça
a pour conséquence, dans le fond, de brimer, dans le fond, toute la protection
de l'environnement, plus particulièrement des milieux humides, en enlevant
justement l'étude de la caractérisation des sols.
Donc, ça, je pense que c'est important
aussi de le contextualiser parce que vous avez parlé...
Mme André-Grégoire (Marie-Claude) :
...conséquence, dans le fond, de brimer, dans le fond, toute la protection de
l'environnement, plus particulièrement des milieux humides, en enlevant
justement l'étude de la caractérisation des sols.
Donc, ça, je pense que c'est important
aussi de le contextualiser parce que vous avez parlé précédemment avec... où
vous demandiez des contextes, des projets qui pouvaient influencer justement
plus particulièrement ces aspects-là du milieu humide, et je voudrais vous
faire référence à tous les projets qui sont en vertu de la MTQ, donc des
projets de prolongement de route qui sont plus susceptibles, justement,
d'impacter les milieux humides.
M. Barrette : Et dans l'état
actuel des choses, bon, là, je comprends que vous avez vos raisons, qui sont tout
à fait légitimes d'être plus ou moins que plus en faveur de 66. Sur le plan des
évaluations environnementales, probablement que vous avez suivi aussi les
travaux qui ont mené au REAFIE. Votre lecture de REAFIE versus 66?
Mme André-Grégoire
(Marie-Claude) : Oui. Donc, dans le fond, la lecture du REAFIE permet
de caractériser certains projets selon leur évaluation des risques environnementaux
et de donner des modalités un peu plus difficiles, par exemple comme de donner
un... de faire un rapport... une évaluation et examen des impacts. Et le projet
de loi n° 66 vient enlever tout ce que le REAFIE
venait de définir en enlevant toute cette distinction entre les séparations des
projets, donc mettons un projet à peu de risques à un projet avec une
évaluation plus risquée. Donc, on se demande un peu à quoi sert le REAFIE si on
y va avec un processus qui est accéléré, comme c'est proposé dans le projet de
loi n° 66.
M. Barrette : Donc, pour vous,
votre lecture, c'est qu'un projet modérément risqué dans le REAFIE va tomber
peu risqué dans 66.
Mme André-Grégoire
(Marie-Claude) : Exact.
M. Barrette : Je pense que je
suis au bout de mon temps, là.
Le Président (M. Simard) :
Non, pas du tout. Il vous reste 50 secondes, cher collègue.
M. Barrette : Ah! il reste
50 secondes. Alors, je reviens au REAFIE. Le REAFIE... là, c'est une
question légale, votre lecture légale, là. Vous, votre lecture, est-ce que 66 a
préséance sur le REAFIE?
Mme André-Grégoire (Marie-Claude) :
Oui. D'après moi, le... Dans le fond, le projet de loi n° 66
te donne l'autorisation par une loi de modifier une autre loi, et donc certainement
un règlement.
M. Barrette : Là, j'ai
terminé.
Le Président (M. Simard) :
Merci à vous, cher collègue.
M. Barrette : Merci beaucoup,
chef McKenzie et Me Grégoire. Ça a été très éclairant.
Le Président (M. Simard) :
Alors, M. le député de Rosemont.
M. Marissal : Merci, M. le
Président. Chef McKenzie, Me André-Grégoire, merci d'être là. On va terminer
les consultations avec vous, avec la désagréable impression qu'en ce qui
concerne nos relations, encore une fois, avec les autochtones, on boucle la
boucle, mais on revient au même point de départ, c'est-à-dire un manque de
communication, un manque de consultations, une...
M. Marissal : …merci d'être là.
On va terminer les consultations avec vous, avec la désagréable impression
qu'en ce qui concerne nos relations, encore une fois, avec les autochtones, on
boucle la boucle, mais on revient au même point de départ, c'est-à-dire manque
de communication, manque de consultations, une énorme distance entre vous et
nous. Pas simplement en kilomètres, mais aussi en termes de respect et de
respect aussi de nos obligations constitutionnelles.
Votre mémoire, là, il fait 84 pages.
On tire dans toutes les directions, ça va beaucoup plus loin que juste 66, mais
je comprends l'idée derrière le mémoire, puis vous avez assurément saisi une
rare occasion de vous faire entendre ici, c'est très bien ainsi. Il faudra le
relire dans le détail parce qu'effectivement, ça va beaucoup plus loin que 66.
Peut-être une question rapide, pour
commencer, elle est plus politique… peut-être, chef Mckenzie : On a
eu un changement de ministre, à Québec, aux Affaires autochtones, les dernières
semaines. Votre évaluation de la relation avec ce nouveau ministre? Je
comprends qu'on ne peut pas avoir tout bouclé, là, mais on disait que c'était
assez difficile avant, sans personnaliser la chose. Comment ça va maintenant?
Voyez-vous une différence?
M. McKenzie (Mike) : Bien, c'est
sûr, comme dirigeant de la communauté de Uashat Mani-Utenam puis comme chef, je
donne toujours la chance au coureur de discuter, puis souvent, dans les
rencontres, moi, j'ai eu l'occasion de voir le nouveau ministre des Affaires
autochtones, dans les assemblées des Premières Nations, à l'APNQL, ça fait
qu'on a beaucoup parlé des services policiers qui sont en manque un peu par
tout. Sur la Côte-Nord, je pense qu'il y a cinq communautés qui n'ont pas
de services policiers au niveau de leur communauté, c'est la SQ qui dessert un
peu leur communauté.
Ça fait que, nous, on a beaucoup discuté
de reconnaître aussi les services essentiels des corps policiers avec lui, vu
que c'est un ancien policier. Ça fait que, nous, on préconise quand même de
faire reconnaître, au même titre de la SQ, nos services essentiels. Nos
policiers sont formés au même titre que des policiers de la SQ, ils vont à
Nicolet comme tous les autres corps policiers. Ça fait qu'on a besoin de… puis,
je pense, dans n'importe quel gouvernement, comme gouvernement innu, nous, on
a… la priorité numéro un, c'est la sécurité publique de nos membres. Ça fait
que, je pense, ça a été des discussions qu'on a eues avec M. Lafrenière.
Ça fait qu'il était très ouvert, ça fait que c'est des… moi, je… on lance un
peu le… on donne un peu la chance au coureur aussi du ministre qui vient
d'arriver, puis je pense qu'on devait aussi changer un peu la vision d'avoir
des relations avec les Premières Nations.
• (20 h 50) •
Le Président (M. Simard) :
Merci, chef. Je cède la parole au député de Jonquière.
M. Gaudreault : Ah! Merci
beaucoup, merci de votre présence. Moi, aussi, je constate encore une fois,
malheureusement, que le gouvernement fait défaut de consulter les Premières
Nations avant la rédaction du projet de loi n° 66, et
pourtant, il y avait eu un sévère avertissement avec le projet de loi n° 61. Enfin, on va souhaiter que ça s'améliore pour…
M. Gaudreault : ...merci beaucoup,
merci de votre présence. Moi aussi, je constate encore une fois,
malheureusement, que le gouvernement fait défaut de consulter les Premières
Nations avant la rédaction du projet de loi n° 66, et
pourtant, il y avait eu un sévère avertissement avec le projet de loi n° 61. Enfin, on va souhaiter que ça s'améliore pour le
futur.
Ce que j'aime de votre mémoire, c'est que
vous amenez quand même des alternatives, je dirais. Parce que, quand on regarde
la liste fermée des 181 projets, moi, j'en vois deux, là, sur la
Côte-Nord, une construction de maison des aînés à Baie-Comeau, puis une
construction de maison des aînés à Havre-Saint-Pierre. Mais j'aimerais que vous
me parliez davantage de votre projet de transport en commun entre Uashat et
Maliotenam, et ça fait partie, ce que je comprends bien, des projets qui ont
été déposés au ministre Bonnardel, le 2 juillet. Alors, je pense qu'il y a un
potentiel, là, de faire les choses différemment, si on veut relancer l'économie
tout en préservant l'environnement et en soutenant la qualité de vie dans vos
communautés.
M. McKenzie (Mike) : Oui,
évidemment. Je pense qu'on a eu quand même un financement par rapport au
transport en commun qu'on a quand même débuté à peu près, je vous dirais,
depuis deux, trois semaines, que ça va bien aussi, là. Parce qu'entre Uashat et
Maliotenam, il y a un 15 kilomètres, là. Les deux communautés ne sont pas
ensemble. Ça fait qu'avec un transport en commun les gens sont très satisfaits,
là. Quand ils viennent à Sept-Îles, que ce soit au centre commercial qu'on a à
Uashat, là, ils viennent faire leurs emplettes. Ils peuvent venir aussi au
conseil aller chercher des services. Donc, on a des programmes, à des prix
modiques, quand même, pour ces personnes qui sont quand même, là... C'est que
ça ne coûte pas cher pour venir à Sept-Îles. En moyenne, en taxi, juste
Sept-Îles—Maliotenam, ça coûte près de 40 $. Ça fait que ça, je pense que
c'est pas mal... c'est un beau petit projet qu'on a entamé depuis quelques
semaines. Ça fait que...
Puis, M. Gaudreault, moi, ce qui me
préoccupe, au-delà des partis politiques que j'ai vus... Ça fait quand même ma
13e année, là, que je travaille ici dans ma communauté. On a plein de
mémoires qu'on dépose. Ce n'est pas juste le gouvernement caquiste qui est là.
Il y a eu des libéraux. Puis on dépose des choses puis on dirait que ça... pour
nous, les Premières Nations, on pense qu'ils sont toujours... ils sont
tablettés par la suite. Là, tu regardes juste... J'ai parlé tantôt du rapport
Lefrançois, le coroner, on a déclenché, dans le temps... on a eu des suicides
en 2015. Il y a eu une série de recommandations. Après ça, par la suite, on a
eu la commission Viens. Puis je regarde juste l'exemple pourquoi, au
niveau de la nation attikamek, ils ont 200 kilomètres à parcourir pour
aller à centre hospitalier comme à Joliette. Puis pourquoi pas développer, avec
les 181 projets, d'avoir un centre de santé comme j'ai présenté à la
ministre LeBel, d'avoir nos propres instances vu que c'est important pour nous
aussi, là? Puis, regarde, les dialysés comme exemple, ici, à Uashat-Maliotenam,
dans le centre de santé, on prévoit d'avoir un service de dialysés plutôt que
d'envoyer...
M. McKenzie (Mike) :
...avec les 181 projets, d'avoir un centre de santé comme j'ai présenté à
la ministre LeBel, d'avoir nos propres instances vu que c'est important pour
nous aussi, là. Puis, regarde, les dialysés comme exemple, ici, à
Uashat-Maliotenam, dans le centre de santé, on prévoit d'avoir un service de
dialysés plutôt que d'envoyer des personnes, là, de la communauté à Québec que
c'est très dispendieux. Puis on pourrait peut-être desservir, au niveau
régional, ceux qui proviennent de Natashquan, La Romaine, que plutôt
d'aller à Québec. Ça fait que c'est des projets qu'on a, qu'on dépose., ça fait
que... puis pourquoi qu'on émet aussi nos recommandations, mais j'espère que le
gouvernement caquiste vont ouvrir un peu à ce qui se passe un peu depuis quelque
temps, là. Ça fait que, nous, ce n'est pas juste à Joliette qu'il se passe des
choses. Les centres hospitaliers sur la Côte-Nord, on a eu des histoires, là,
vous en avez entendu parler assez longtemps. Ça fait que, nous, on veut nos
propres institutions aussi à l'intérieur de nos communautés respectives.
Le Président (M. Simard) :
Bien. Alors, Me André-Grégoire, Me McKenzie... pardon, chef McKenzie,
merci infiniment de votre présence parmi nous.
Chef, si je ne m'abuse, en regardant mon
petit dictionnaire français-innu, je crois que le mot merci en innu se
dit : (S'exprime dans une langue étrangère).
M. McKenzie (Mike) :
Oui, (S'exprime dans sa langue).
Le Président (M. Simard) :
Alors, (S'exprime dans une langue étrangère), à vous deux, et belle fin de
soirée.
M. McKenzie (Mike) :
Merci beaucoup...
Le Président (M. Simard) :
Alors, sur ce, chers amis, nous terminons nos auditions. Nous allons d'abord
faire un dépôt officiel des mémoires qui nous ont été transmis des groupes que
nous n'avons pas pu recevoir ici. Et je vais vous féliciter. N'oublions pas que
nous avons auditionné 24 groupes... en fait 26 parce que certaines
présentations étaient conjointes.
On a reçu, en tout et partout, 43
mémoires. Les gens qui nous regardent doivent savoir que, moi, je vous ai vu,
là, tous et toutes avec des mémoires annotés, soulignés. Vous avez été très
studieux. Vous avez... vous vous êtes vraiment engagés dans cette commission
durant presque 20 heures, donc je tenais très sincèrement à vous lever mon
chapeau et vous dire merci.
Et je ne peux même pas ajourner sine die
parce que nous avons un autre mandat qui nous attend jeudi... oui, jeudi de
cette semaine. Alors, comme on le dit, ce n'est pas le temps de partir en
vacances. Belle fin de soirée et merci encore à nos amis innus. Bonsoir.
(Fin de la séance à 20 h 56)