Point de presse de M. Pierre Paradis, porte-parole de l'opposition officielle en matière d'énergie, M. Jean D'Amour, porte-parole de l'opposition officielle en matière de mines, et de M. Ghislain Bolduc, porte-parole de l’opposition officielle en matière de forêt, faune et parcs
Version finale
Friday, May 17, 2013, 12 h 13
Salle Bernard-Lalonde (1.131),
hôtel du Parlement
(Douze heures treize minutes)
M. Paradis: Merci. L'Assemblée nationale était saisie, ce matin, d'une question de l'opposition, ce qu'on appelle communément une interpellation. Le sujet: le fiasco de la gouvernance péquiste en matière de ressources naturelles. La ministre des Ressources naturelles était présente. La dernière fois, elle s'était défilée, mais le président l'avait légèrement rappelée à l'ordre. Moi, j'étais accompagné, du côté de l'opposition officielle, par le député de Mégantic-Compton et par le député de Rivière-du-Loup-Témiscouata. La CAQ était représentée par le député de Granby.
Le débat a été un peu un dialogue de sourds parce que l'ensemble des députés ont apporté des cas de fiasco, et la ministre refuse de le voir, comme tel, bien que son collègue des Finances en est conscient, là. C'est 700 millions de moins en investissements depuis le début de l'année, c'est 30 000 pertes d'emploi, comme tel. Même le ministre des Finances a dû réduire la croissance prévue - économique - qui était à 1,5 %, il l'a réduite à 1,3 %. Dans toutes les régions périphériques, là, l'élan que le Plan Nord avait connu est en train d'être complètement brisé, et on assiste à des remises de projets, à des désinvestissements.
Un peu plus grave encore, ce sont les infrastructures qui ne seront pas là pour accueillir les projets miniers. Quand le CN a mis fin à son projet qui était financé en grande partie par la Caisse de dépôt et de placement, quand Gaz Métro a mis fin à son projet d'oléoduc... Ce sont des infrastructures qui aident le développement de la prospection minière et qui aident également le développement de la transformation minière.
Sur le plan du ministère, comme tel, le bilan est très dur. La ministre, depuis qu'elle est là, a commis des erreurs graves. La première erreur: lorsque le budget a été déposé, c'est le ministère à vocation économique qui a subit la plus importante compression budgétaire, plus de 20 %. C'est tout un choc pour le moteur économique des régions du Québec. C'est avec ce moteur-là qu'on crée la richesse dans nos régions, puis la capitale en profite, puis Montréal en profite parce que les sièges sociaux, etc...
Le deuxième élément, c'est que son cabinet, à travers le temps, s'est complètement vidé. On l'avait entourée, au début, de gens compétents. Son directeur de cabinet était l'ancien directeur de cabinet de Bernard Landry; son sous-ministre avait une feuille de route exceptionnelle, il est allé, par la suite, avec des promotions.... son attachée de presse est rendue chez sa collègue de Joliette. Donc, il s'agissait de personnes importantes, et elle a réussi à faire le vide autour d'elle.
Troisième élément, c'est que la première ministre s'en rend compte. La première ministre l'a déresponsabilisée de dossiers majeurs. Le premier dossier, c'est le pipeline, comme tel, en provenance de l'Alberta. Ce n'est plus la ministre des Ressources naturelles qui s'en occupe.
Le deuxième dossier, c'est les redevances minières. Je pense qu'elle a vécu des moments difficiles dans ce dossier-là. Elle avait combattu pendant deux ans dans l'opposition en faisant de l'obstruction systématique. Elle avait toutes les solutions quand elle était dans l'opposition: la méthode australienne, etc. Et c'est le ministre des Finances qui, finalement, s'est accaparé du dossier.
Le troisième dossier, c'est Hydro-Québec. Il n'y a plus de contact entre le ministère et Hydro-Québec, comme tel. Pierre Karl Péladeau est entré en fonction il y a deux jours. Ce n'est pas dans sa personnalité, là - vous pouvez vérifier - de négocier avec une ancienne employée d'Hydro-Québec. C'est Mme Marois avec qui il a fait affaire. Il va continuer à faire affaire avec le bureau de la première ministre.
Et le dernier dossier - parce qu'elle n'a rien fait pendant qu'elle était là - c'est toute l'électrification des véhicules électriques. La première ministre, à la veille du Conseil national du Parti québécois, donne ça au ministre démissionnaire de l'Environnement, Daniel Breton. Puis de la façon dont elle nous a parlé ce matin, elle ne semblait même pas être au courant que la première ministre l'avait dépossédée de ce dossier-là.
Ça fait en sorte qu'on est obligés de constater un fiasco. Et on a tenté d'être constructifs, lui dire: Si vous avez besoin de l'opposition pour vous accompagner auprès du ministère des Finances, du Trésor pour que la compression de 20 quelques pour cent, là, soit diminuée et ramenée à des proportions vivables pour les régions, on va le faire.
Le deuxième point est plus difficile à régler, là, lui trouver du personnel avec qui elle va s'entendre. On laisse ça à sa discrétion.
Le troisième point, comme tel, il faut récupérer ou rapatrier au ministère ces grands pans là parce qu'il y a une dynamique qui se crée dans ce ministère-là. Et ce qui est davantage inquiétant, on lui a recommandé aussi de faire appel à ses fonctionnaires. Trois ou quatre études qu'elle a commandées pour définir la nouvelle politique énergétique, elle les a commandées à l'extérieur. Ça envoie un drôle de message aux gens qui l'entourent puis qui sont supposés de travailler pour le bien-être, là, de la population québécoise.
Mon collègue de Mégantic-Compton a attiré l'attention sur l'aspect des taxes foncières pour les producteurs forestiers. C'est un problème qui croît à chaque année. Le prix du bois est stable, quand il n'a pas baissé, mais les taxes foncières, comme tel, ont augmenté de façon drastique, là. Il y a 130 000 Québécois et Québécoises qui sont touchés par cette problématique-là.
Et du côté des mines, bien, Jean D'Amour a fait le tour. S'il avait eu plus de temps, il aurait pu compléter un plus grand tour de jardin.
Mais elle a vraiment, par son attitude, méprisé les minières et créé un climat de non-confiance qui fait en sorte qu'aujourd'hui, là, au lieu de se retrouver, huit mois après un nouveau gouvernement, avec un registre de lobbyistes bien plein puis du monde plein de projets qui s'en vont puis qui disent «Donne-moi l'élan» au gouvernement, on se retrouve avec sept municipalités qui contestent l'abandon des minicentrales, des projets d'énergie communautaires, on se retrouve avec des poursuites devant les tribunaux. Les gens sont au palais de justice, plutôt que dans les bureaux en train de tenter de vendre des projets au gouvernement. Ce n'est pas prometteur pour l'avenir. Je ne sais pas quelle va être la décision de la première ministre, mais elle va avoir des décisions à prendre si on ne veut pas que le secteur de l'énergie s'effoire complètement.
M. Caron (Régys): Demandez-vous la démission de la ministre, M. Paradis?
M. Paradis: Moi, j'ai... l'expérience...
M. Caron (Régys): Vous dites «presque»?
M. Paradis: Non, mais l'expérience politique m'enseigne que c'est dangereux de demander la démission parce qu'il y a une espèce d'orgueil dans l'appareil gouvernemental qui fait qu'à partir du moment où tu l'as demandée, ils la refusent strictement pour ne pas avoir l'air de reculer. Ça fait que j'hésite à la demander mais, si quelqu'un d'autre le fait, là, je ne le critiquerai pas.
M. Caron (Régys): Les décisions, les désinvestissements que vous dénoncez ce matin, vous attribuez ça à la ministre, mais n'y a-t-il pas une conjoncture? Les prix des métaux ont diminué considérablement.
M. Paradis: Pas depuis...
M. Caron (Régys): Est-ce que ça n'a pas refroidi les ardeurs des minières pour dire: On va attendre un petit peu?
M. Paradis: Pas depuis un an. Les spécialistes vont vous dire que, lorsque le gouvernement du Parti québécois a pris ses engagements sur les redevances, le 400 millions, etc., c'est sensiblement le même prix des métaux. Il avait déjà baissé quand les engagements ont été pris en septembre l'an passé. Ça peut avoir un effet, mais ce que les gens de l'industrie vont vous dire... Ce qui a beaucoup d'effet, c'est le niveau d'incertitude, comme tel, qui a régné pendant tout ce temps-là. On leur a parlé d'un modèle australien. Ils ont été obligés de faire des pressions à un point tel au niveau de la première ministre pour qu'elle enlève le dossier à la ministre des Ressources naturelles dans le domaine des redevances - ça, c'est du jamais vu - puis le donner aux Finances. À un moment donné, le message est gros, là.
M. Lafille (Julien): M. D'Amour, une question pour vous concernant le projet de loi, qui sera déposé bientôt, sur les mines. Il y avait, dans l'ancien projet de loi, l'article 91, qui prévoyait le droit de veto pour les municipalités. Est-ce que c'est... À quel point c'est important pour vous que cet aspect-là se retrouve dans le nouveau projet de loi?
M. D'Amour: Bien, c'est un élément qui se retrouvait aussi dans notre projet de loi à nous, qu'on a proposé à l'Assemblée nationale en novembre dernier, le projet de loi n° 197. Et le prochain projet de loi, il faudra le voir - parce qu'on ne l'a pas encore vu - on n'en connaît pas la couleur. Il n'y a rien qui a transpiré de ça, et on nous l'apprend ce matin, là, que ça va être déposé au cours des prochains jours. Ça fait quand même un certain temps qu'on nous dit ça. Moi, je questionne la ministre là-dessus, à la période de questions, de façon assez régulière, et on n'en a pas vu la couleur encore.
Alors, on attend la toute fin de la session encore une fois. Puis vous voyez, hein, le contexte de l'incertitude. On arrive à la fin de la session. Là, on va se retrouver, à l'automne, dans un contexte de gouvernement minoritaire, avec tout ce qui peut arriver. C'est un gouvernement en sursis. Alors, moi, si j'étais à la place de l'Union des municipalités, de la Fédération québécoise des municipalités, sincèrement, là, je commencerais un petit peu à m'inquiéter.
(Fin à 12 h 22)