(Quatorze heures trente et une minutes)
Mme
St-Pierre : Alors,
bonjour, mesdames et messieurs les journalistes. Alors, nous faisons ce pont de
presse aujourd’hui évidemment dans la foulée de ce qui s’est passé la semaine
dernière au Conseil du statut de la femme. Mme Kathleen Weil will address questions
in English.
Alors, la semaine dernière, la présidente
du Conseil du statut de la femme a affirmé, à la suite de quatre nominations au
sein de son organisme, que le gouvernement Marois l’avait noyauté afin de
s’assurer qu’il donnerait sa bénédiction à la charte des valeurs. Cette sortie
publique est troublante. La présidente a aussi dit avoir reçu des pressions. Je
vous cite les propos de Mme Miville-Dechêne lors d’une entrevue à Radio-Canada :
«Est-ce qu’on a voulu me dicter un message? Certainement. Et le message était :
"Ce qu’il faut défendre, c’est notre avis; affirmer la laïcité telle
quelle, voici la voie".»
Ce geste du gouvernement a été décrié non
seulement par l’opposition, mais aussi par des organismes comme la Fédération
des femmes du Québec et la CSN. Le choc est brutal. Il s’agit là bel et bien de
nominations idéologiques. L’indépendance du Conseil du statut de la femme est
en jeu. Le ministre Drainville a admis n’avoir aucune étude en sa possession,
et le ministre de la Justice refuse de rendre publics ces avis juridiques. Le
conseil voulait participer au débat et apporter son éclairage sur les impacts
de la charte auprès des femmes qui agissent et qui travaillent dans la fonction
publique. Je vous rappelle qu’on parle ici d’égalité hommes-femmes. Le geste
méprisant et purement idéologique qu’a posé le Conseil des ministres en
acceptant la proposition de Mme Maltais discrédite l’ensemble de ce
gouvernement.
Nous, députées de l’opposition officielle,
nous nous devons d’agir. Ainsi, une lettre sera envoyée à toutes les députées
de l’Assemblée nationale, la première ministre en tête, pour annoncer le dépôt
d’une motion mardi, qui sera débattue mercredi puis suivie d’un vote. Nous
voulons débattre afin que l’Assemblée nationale réitère l’indépendance du
Conseil du statut de la femme. Rappelons que la semaine dernière, nous avons
demandé, en vain, que le gouvernement suspende ces nominations. L’ingérence et
les cachotteries sont rendues un modus operandi au sein de ce gouvernement. En d’autres
mots, si vous partagez mon opinion, ça vous vaut une nomination.
Alors, merci. Nous allons répondre à vos
questions.
Le Modérateur : Martine Biron,
Radio-Canada.
Mme Biron (Martine) : Bonjour.
Est-ce que vous avez eu des discussions avec la CAQ concernant cette motion que
vous voulez déposer?
Mme
St-Pierre : Non,
mais la lettre, évidemment, sera envoyée, comme je l’ai dit, à toutes les
députées, alors les représentantes de la CAQ vont recevoir aussi cette lettre.
Cependant, si vous vous souvenez, la semaine dernière, les déclarations de la
CAQ — c’est Mme St-Laurent qui a commenté — Mme St-Laurent
a, elle aussi, parlé de nominations idéologiques. Alors, on s’imagine que la
CAQ sera en faveur de la motion. Vous comprendrez qu’on ne peut pas vous donner
le texte, le libellé de la nomination… de la motion. Ce texte doit être rendu
public au moment du dépôt en Chambre. Nous sommes ici pour vous parler de cette
lettre que nous envoyons puis vous annoncer que nous déposerons une motion.
Mme Biron (Martine) : Est-ce
que vous avez l’intention d’attendre le débat sur la motion ou si vous allez
contacter la CAQ pour voir si vous allez pouvoir faire front commun avec eux
là-dessus?
Mme
St-Pierre : Nous
allons, évidemment une fois que la lettre sera rendue, nous allons parler à
toutes les députées, tenter de rejoindre toutes les députées, incluant les
députées du gouvernement. Nous voulons que toutes les députées, quel que soit
le parti, comprennent l’importance du Conseil du statut de la femme,
comprennent l’importance de l’indépendance de cette institution. Et nous allons
aussi également réitérer notre intention de vraiment débattre, de vouloir
débattre, notre volonté de débattre de cette question à l’Assemblée nationale,
cette question qui est si importante.
Mme Biron (Martine) : Est-ce
que vous pensez qu’il y a des femmes du gouvernement qui pourraient appuyer
votre démarche?
Mme
St-Pierre : Nous le
souhaitons. Et les femmes… En fait, tout le monde devra voter, alors nous
souhaitons que tout le monde, les députés de l’Assemblée
nationale — députés, députées — appuient cette motion.
Le Modérateur : Jean-Luc
Lavallée, Journal de Québec.
M. Lavallée (Jean-Luc) :
Bonjour, Mme St-Pierre. À l’époque, quand Mme Pelchat était présidente du
Conseil du statut de la femme, elle a été dégommée avant la fin de son mandat.
Pourquoi, quelques mois seulement après la diffusion de l’avis dont on parle?
Mme
St-Pierre : Je ne
veux pas rentrer dans certaines considérations, mais vous comprenez que Mme
Pelchat avait fait un travail vraiment important au Conseil du statut de la
femme et elle a été nommée déléguée générale du Québec à Mexico. Alors, nous
avons, à ce moment-là, lorsque Mme Pelchat a été nommée déléguée du Québec à
Mexico, nous avons cherché à la remplacer, et c’est moi qui ai soumis à M. le
premier ministre Charest le nom de Mme Miville-Dechêne, qui arrivait à la fin
de son mandat comme ombudsman.
M. Lavallée (Jean-Luc) : Qui
était votre ancienne collègue à Radio-Canada, votre amie. Est-ce que, avant de
nommer Mme Miville-Dechêne, vous lui avez demandé ce qu’elle pensait de l’avis
de sa prédécesseure?
Mme
St-Pierre : Nous
avons eu des discussions, non pas sur l’avis… les avis, parce qu’il y a eu avis
en 2008, avis en 2011, nous avons eu des discussions sur ces questions-là et
surtout sur le projet de loi n° 94 qui avait été… qui a été piloté par ma
collègue, alors ministre de la Justice, Mme Kathleen Weil. Nous avons expliqué…
J’ai expliqué à Mme Miville-Dechêne pourquoi nous avions décidé d’y aller avec
le projet de loi n° 94. Et je vous rappelle que Mme Christiane Pelchat
avait d’ailleurs salué le projet de loi n° 94. J’ai ici le communiqué :
«Avec ce projet de loi, le gouvernement affirme on ne peut plus clairement
qu’il prend en charge le dossier des accommodements de façon responsable. Les
valeurs d’égalité entre les sexes et de neutralité sont affirmées sans
compromis.»
Alors, les discussions qu’il y avait,
c’était que nous avions la conviction profonde que les avis… en fait,
l’interdiction des signes religieux ostentatoires ne respectait pas les chartes
canadiennes et la charte québécoise des droits et libertés, que nous avions
fait le choix de déposer le projet de loi n° 94.
M. Lavallée (Jean-Luc) : Je
repose ma question différemment, si vous le permettez. Est-ce qu’à l’époque Mme
Pelchat a été tassée pour sa prise de position sur le port des signes
religieux?
Mme
St-Pierre : Non,
pas du tout.
Le Modérateur : Michel Pépin,
Radio-Canada.
M. Pépin (Michel) : Bonjour,
mesdames. Mme St-Pierre, juste une question de… Quand même, il y a eu deux avis
du Conseil du statut de la femme. Normalement, ces avis-là aident le
gouvernement… c’est un rôle conseil auprès du gouvernement. Et là le
gouvernement va de l’avant avec quelque chose qui ressemble pas mal, hein, aux
avis. Est-ce qu’il n’y a pas un problème, là, quand même que... Voilà que le
gouvernement va de l’avant. Je comprends qu’il y a la question des nominations,
mais une réaction à cet égard-là, c’est conforme aux avis du conseil.
Mme
St-Pierre :
C’est-à-dire…
M. Pépin (Michel) : Le conseil
a le droit de changer d’avis? Je ne sais pas trop. J’essaie de bien voir qu’est-ce
qui est intéressant, l’impact de tout ça, là. Un conseil fournit un avis au
gouvernement, le gouvernement va de l’avant, puis finalement, hop, il y a
problème de ce côté-là. Qu’est-ce que vous pensez de tout ça, vous?
Mme
St-Pierre : Bien,
ce qu’on pense de tout ça, c’est que la question est de savoir quelle est
l’indépendance du conseil. Le conseil est un organisme qui conseille le
gouvernement. Les avis, en 2008 et en 2011....
Parlons de celui de
2008. Je ne veux pas faire des réponses trop longues, mais vous avez vraiment
besoin de comprendre. En 2008, le Conseil du statut de la femme arrive avec son
avis et le Conseil du statut de la femme recommande essentiellement deux
choses. Je pense qu’il y avait six recommandations, mais les deux plus
importantes, c’était de placer l’égalité entre les hommes et les femmes dans la
charte québécoise des droits et libertés. L’égalité entre les hommes et les
femmes, dans la charte — je pense qu’elle datait de
1974 — on ne retrouvait nulle part le mot «égalité entre les hommes
et les femmes». Alors, on s’entend pour dire que c’était assez essentiel, pour
envoyer vraiment un message des valeurs de notre société, d’indiquer l’égalité
entre les hommes et les femmes dans la Charte des droits et libertés, projet de
loi n° 63.
On discute de la
question des signes religieux ostentatoires. Nous avons fait des
recherches… J’étais responsable de la Condition féminine et responsable du
Secrétariat à la condition féminine. Nous avons fait des recherches à
savoir : Est-ce que c’est faisable? Est-ce que cela respecterait nos
chartes? La réponse est non. M. le ministre de la Justice a des avis juridiques
en ce sens. On lui demande de les rendre publics, et demandez-lui de rendre
publics ces avis juridiques.
Alors, nous arrivons
avec 94. Ma collègue, qui est ministre de la Justice, et moi, puis on est un
certain nombre de ministres à travailler sur le comité ministériel pour se
pencher sur cette question-là, et on arrive avec 94 qui est une loi qui était,
je vous rappelle, selon les sondages, appuyée par 95 % de la population,
c’est-à-dire : Vous donnez des services? Vous allez le faire à visage
découvert. Vous voulez recevoir des services? Vous allez le faire à visage
découvert. Et c’est pour des raisons de communication, d’identification et de
sécurité.
Le Conseil du statut de
la femme, la journée où notre projet de loi est déposé — on parle du
24 mars 2010 — Mme Pelchat… Je recite encore, parce que, je
pense, c’est bien important : «Avec ce projet de loi, le gouvernement
affirme on ne peut plus clairement qu’il prend en charge le dossier des
accommodements de façon responsable. Les valeurs d’égalité entre les sexes et
de neutralité sont affirmées sans compromis.» Alors, voilà. Donc, après, le
Conseil du statut de la femme décide de poursuivre encore sa recherche. Je ne
sais pas ce qui s’est passé au conseil, mais Mme Pelchat est retournée avec
cette déclaration-là au sein de son conseil, et là Mme Weil commence ses
audiences, et le conseil arrive avec un autre avis nous disant qu’il faut
interdire les signes ostentatoires dans la fonction publique. Ça ne passe pas
le test des chartes. Faites-le comme vous voulez, de toutes les manières,
regardez la pierre de tous les côtés, ça ne passe pas le test. Puis peut-être
que Mme Weil pourra en ajouter parce qu’elle est avocate, mais on l’a regardé,
ça ne passe pas le test. On veut voir les avis juridiques.
M. Pépin (Michel) :…ajoute
davantage de questions sur la crédibilité du Conseil du statut de la femme, si
vous me permettez. Parce que là vous dites…
Mme
St-Pierre : Bon,
voilà. Maintenant, on arrive à… ce que Mme Miville-Dechêne nous a dit en
conférence de presse, c’est-à-dire en entrevue et dans les médias, c’est
qu’elle a dit : Bon, maintenant, il y a quelque chose de concret, on parle
d’une charte des valeurs. On veut aller tout simplement vérifier… Il n’y a pas
d’étude. M. Drainville, hier, à Tout le monde en parle, après plusieurs questions
de M. Bouchard, n’a jamais été capable de nommer une seule étude en sa
possession qui dit combien il y en a de femmes, dans la fonction publique, qui
seront touchées par cette mesure. Il est incapable. Tout ça est basé sur un
malaise et sur des gens qu’il rencontre dans la rue. Bien, moi aussi, j’en
rencontre du monde dans la rue, puis, mes collègues, on en rencontre tous et
toutes du monde dans la rue qui viennent nous dire que ça n’a pas de bon sens.
Alors, on ne fait pas des projets de loi
sur des malaises puis des rencontres dans la rue. Je m’excuse, il faut que ce
soit plus sérieux que ça, il faut que ce soit documenté. Ce que le Conseil du
statut de la femme a dit : On voudrait documenter davantage. On ne vous
dit pas qu’on est pour, on ne vous dit pas qu’on est contre, on vous dit qu’on
veut documenter davantage. On veut un autre éclairage pour voir comment on peut
voir si cela est faisable, ça touche combien de femmes. Puis je vous rappelle
que la meilleure intégration d’une immigrante, là, c’est son autonomie
économique, c’est de lui permettre d’avoir une carrière puis de pouvoir avoir
son autonomie économique. C’est la meilleure intégration qu’on puisse donner à
une immigrante, puis on ne sait même pas combien il y en a dans la fonction
publique.
M. Pépin (Michel) : Charles, est-ce
que tu permets que je pose une question à Mme Vallières? Cela est possible?
Vous allez devoir vous approcher du micro. C’est concernant la pétition que
vous avez mise en ligne, hein, pétition de l’Assemblée nationale concernant, justement,
ce projet de charte des valeurs québécoises. J’aimerais, en gros — je
me doute bien, là, pourquoi vous faites ça — mais, en gros, que vous
me disiez pourquoi vous avez décidé de passer par ce canal-là d’une pétition.
Voilà. Commençons par ça.
Mme
Vallières : En
fait, ce n’est pas moi qui ai décidé de passer par ce canal-là, hein? Donc, le
procédé, c’est qu’on rencontre des gens dans nos bureaux. Je rencontre gens
autant des gens qui sont en faveur ou en défaveur, et il y a un citoyen du
comté de Sherbrooke qui m’a approchée pour demander tout simplement de
parrainer cette pétition-là.
M. Pépin (Michel) : Vous
n’êtes pas obligée cependant.
Mme
Vallières : Non, on
n’est pas obligés, mais, en fait, c’est mon travail et mon devoir de le faire,
qu’on soit pour ou qu’on soit contre. Et on le voit à tous les jours quand on
siège, hein, qu’on soit au gouvernement ou dans l’opposition, on peut déposer
des choses pour lesquelles on est en faveur ou pas.
M. Pépin (Michel) : Le fait
que ce soient des orientations sur un projet de charte des valeurs québécoises
et que vous ne le spécifiez pas dans cette pétition, est-ce que c’est un problème,
à votre avis?
Mme
Vallières : Encore
là, je vous le répète, ce n’est pas moi qui ai libellé cette pétition-là. Les
gens nous arrivent avec la pétition. La procédure veut qu’on la dépose à l’Assemblée
nationale. Les gens la vérifient, nous mentionnent si c’est légal ou pas, si on
peut la déposer en ligne. Et tout ce que je fais, moi, c’est de dire :
J’accepte, comme députée, de représenter le citoyen à l’Assemblée nationale, tout
simplement.
M. Pépin (Michel) : Merci, Mme
Vallières.
Le Modérateur : Véronique
Prince
Mme Prince (Véronique) :
...l’ont signée jusqu’à maintenant?
Mme
Vallières : Je
crois qu’on me disait ce matin autour de 2 000, là, pour l’instant, oui.
Une voix : 2 200.
Mme
Vallières :
2 200.
Mme Prince (Véronique) :
Parfait. Est-ce que vous avez parlé à Mme Miville-Dechêne depuis la semaine
passée? Est-ce qu’il y a quelqu’un du Parti libéral qui lui a parlé, qui est
entré en contact avec elle?
Mme
St-Pierre : Pas à
ma connaissance.
Mme Prince (Véronique) : Donc,
aucun contact, à ce sujet-là, de votre part?
Mme
St-Pierre : Il y a
eu, en toute transparence, un seul contact, qui est un message texte. C’est
tout.
Mme Prince (Véronique) :
Est-ce qu’on peut savoir le sujet?
Mme
St-Pierre : Bien, c’était
au sujet de ça.
Journaliste : Vous avez piqué
ma curiosité. Que disait votre message?
Mme
St-Pierre : C’est
privé.
Journaliste : Mais c’est un
message de soutien à l’endroit de Mme Dechêne?
Mme
St-Pierre : C’est
un court, très, très court message d’inquiétude.
Journaliste : Face à...
Mme
St-Pierre : Elle
est inquiète pour... Elle a tout simplement dit : Je suis inquiète pour la
suite des choses.
Journaliste : Donc, c’est elle
qui vous a envoyé le message texte?
Mme
St-Pierre : Moi, j’ai
envoyé un message pour savoir si je pouvais lui parler, à quelqu’un, puis elle
m’a répondu qu’elle ne pouvait... voulait pas me parler et qu’elle est
inquiète.
Journaliste : Fin de
l’histoire.
Mme
St-Pierre : Oui. Il
n’y a pas d’autres histoires.
Le Modérateur : Tommy
Chouinard.
M. Chouinard (Tommy) :
Mme St-Pierre, dans la mesure où vous êtes personnellement et directement
impliquée dans ce dossier-là — vous avez vous-même nommé Mme
Miville-Dechêne — vous n’êtes pas porte-parole du dossier de la Condition
féminine, c’est une autre députée, qui d’ailleurs n’est pas présente ici, est-ce
que ce serait... Pourquoi la personne qui porte ce dossier-là, c’est vous aujourd’hui
et non Mme Gaudreault?
Mme
St-Pierre : C’est
que Mme Gaudreault ne pouvait pas être ici aujourd’hui. C’est elle qui
devait faire la conférence de presse, elle ne pouvait pas être ici aujourd’hui.
Et ce qu’on s’est dit, c’est que j’ai... comme j’ai porté le dossier,
justement, comme ministre de la Condition féminine, j’étais tout à fait capable
de répondre aux questions et de faire cette déclaration-là.
Alors, je pense que c’est évidemment dommage
que Mme Gaudreault ne soit pas là, mais c’est vraiment hors de son contrôle,
elle ne peut pas être ici aujourd’hui. Les autres collègues qui se sont
déplacées, il y en a qui ont été appelées à la dernière minute, c’est-à-dire
vendredi, pour que tout le monde s’organise. Mais on a nos vies de comté, on a
des rencontres à faire. Puis celles qui pouvaient venir, bien, je les remercie,
elles sont venues aujourd’hui, mais celles qui sont absentes, ce n’est pas
parce qu’elles ne veulent pas être ici.
M. Chouinard (Tommy) : Vous
parlez beaucoup de l’indépendance du Conseil du statut de la femme, mais est-ce
que vous êtes indépendante, dans la mesure où vous dites, vous avez échangé
même un message texte avec Mme Miville-Dechêne dans ce dossier-là. Est-ce que…
Mme
St-Pierre : Bien,
j’aurais pu vous dire que je n’avais rien…
M. Chouinard (Tommy) : …une
proximité qui est un petit peu…
Mme
St-Pierre :
J’aurais pu vous dire que je n’avais rien échangé puis là je vous aurais menti.
J’ai passé un message, j’ai demandé si je pouvais lui parler, en fin de journée
vendredi, et le message est revenu en me disant : Je ne peux pas te
parler, ce n’est pas le moment. Et je voulais avoir, évidemment, des informations
sur ce qui s’était passé de jeudi soir à samedi… à vendredi matin, alors que
toutes les entrevues ont été annulées. Je n’ai pas insisté puis je n’insisterai
pas non plus.
M. Chouinard (Tommy) :
Maintenant, j’aimerais savoir… Ça fait des années qu’on parle des nominations.
On parle ici, je reprends votre expression, une nomination… des nominations
idéologiques. On a aussi parlé beaucoup de nominations partisanes.
Croyez-vous qu’il
serait opportun d’élargir l’éventail des nominations qui peuvent être faites
par l’Assemblée, un comité de députés au lieu que ce soit vraiment des
décisions qui relèvent, des nominations qui relèvent de l’Exécutif, du Conseil
des ministres? Est-ce que ce serait opportun, selon vous, d’avoir…
Mme
St-Pierre : Bien,
c’est-à-dire, moi, j’ai été à la tête de plusieurs… à la tête, c’est-à-dire,
j’ai été… il y a eu plusieurs organismes sous mon autorité. J’ai été ministre
de la Culture, des Communications, de la Condition féminine, porte-parole de la
Charte de la langue française. Alors, j’en avais, je pense, 14 ou 15 sous ma responsabilité.
À chaque fois qu’on faisait des nominations, on demandait des commentaires des
différents organismes touchés par ces organismes-là.
Dans le cas du Conseil
du statut de la femme, on donnait environ 30 jours pour avoir des commentaires,
s’ils avaient des suggestions à faire. Ça ne veut pas dire que le gouvernement
va retenir la suggestion, mais on demande : Est-ce que vous avez des noms,
des personnes à nous proposer pour siéger sur le conseil d’administration? On
l’a fait pour les organismes, Télé-Québec, Place des Arts, Grand Théâtre, tous
les organismes, puis mes autres collègues aussi qui ont été ministres, qui avaient
des organismes sous leur responsabilité, c’est normal.
Dans ce cas-ci, ce que
le Fédération des femmes du Québec dit, c’est qu’ils ont reçu l’information
jeudi qu’ils devaient remettre des noms pour lundi ou mardi. Ce n’est pas long,
là, pour soumettre des noms. Alors, ça donne aussi… Si vous regardez le film
des événements, on répète un peu ce qu’on a dit vendredi, mais, si vous
regardez le film des événements, ces postes-là pouvaient… devaient être comblés
depuis un an. Il me semble qu’on arrive à la dernière minute, on nomme quatre
personnes. Tout le monde s’entend sur les C.V., que les C.V. sont impeccables.
On nomme quatre personnes qui se sont prononcées en faveur de la charte, et on
a la présidente du Conseil du statut de la femme qui affirme, avoue avoir eu
des… affirme avoir eu des pressions.
Journaliste : …l’idée qu’on
retire certaines nominations du pouvoir de l’Exécutif pour revoir un peu ces
procédures-là, est-ce que vous êtes ouvertes à cette idée-là ou vous croyez que
ça doit rester comme ça et que les consultations avec d’autres groupes
suffisent pour régler la question?
Mme
St-Pierre : Bien,
écoutez, moi, je pense que, pour avoir… avec l’expérience que j’ai, je pense
que ces nominations-là peuvent être faites par le Conseil des ministres. Il
faut que le Conseil des ministres ait aussi une certaine autonomie, là, quand
même. Mais, dans ce cas-ci, la question, c’est de savoir et de voir à quel
point ce gouvernement-là voulait avoir des personnes en faveur de la charte
pour siéger au Conseil du statut de la femme et ainsi faire en sorte que le Conseil
du statut de la femme — appelons ça par son nom — soit
noyauté. Le gouvernement a noyauté le Conseil du statut de la femme. Et il y a
un modus operandi qui semble s’installer, là. Regardons M. Breton qui débarque
au BAPE pour aller leur dire : Si vous ne faites pas ce que je vous dis,
je ne serai pas content; Jean-François Lisée, le ministre Jean-François Lisée
qui intervient pour empêcher une nomination au 375e anniversaire de la Ville de
Montréal, sans compter toutes les nominations qui sont faites en cachette. Je
veux dire, il y a quelque chose qui est un peu troublant dans le modus
operandi.
Le Modérateur : Michel
Corbeil, Le Soleil. Une dernière en français.
M. Corbeil (Michel) : Si je ne
me trompe pas, Mme St-Pierre — bonjour — Mme Pelchat avait
été nommée déléguée avant la fin de son mandat.
Mme
St-Pierre : Oui.
M. Corbeil (Michel) : Pourquoi
ne pas tout simplement avoir laissé aller le mandat, ceux qui sont courts? On a
l’impression que vous attachez ainsi, là, le gouvernement suivant avec une…
Mme
St-Pierre : Bien,
regardez, il y a des choses, évidemment, qui se décident au moment où il peut y
avoir une ouverture. Il y a un poste qui s’est ouvert à la Délégation du Québec
à Mexico. Mme Gagnon-Tremblay, responsable des relations internationales, a
fait la suggestion que ce soit Mme Christiane Pelchat. Peut-être que Mme
Pelchat, une personne que j’apprécie énormément, là, j’ai eu de bons… puis,
évidemment, elle est assez sanguine, là, on a des bons échanges avec elle, mais
Mme Pelchat avait peut-être besoin d’avoir une promotion, avait peut-être
besoin d’aller à l’extérieur pour aller œuvrer dans sa carrière. Et elle fait
un excellent travail à la Délégation du Québec à Mexico. J’ai eu affaire à
elle, à un moment donné, lors d’une mission, ça a été impeccable. Alors, des
fois, on veut relever de nouveaux défis pour toutes sortes de raisons, puis je
pense que vous êtes capable de lire entre les lignes. Alors, pour toutes sortes
de raisons, on veut relever de nouveaux défis, puis c’est une femme en qui nous
avions confiance.
Maintenant, le poste du
Conseil du statut de la femme, c’est moi qui ai suggéré Mme Miville-Dechêne
parce qu’elle achevait son poste d’ombudsman à Radio-Canada. C’était la
première femme qui avait été nommée ombudsman à Radio-Canada. Je connaissais
ses décisions parce que je les ai lues pour… elle prenait des décisions
souvent. Il est arrivé quelquefois que la direction de Radio-Canada n’aimait
pas beaucoup ses décisions, puis elle avait son indépendance, comme ombudsman.
C’est pour ses qualités
d’ombudsman puis ses qualités d’ancienne reporter diplômée de Columbia, la
meilleure école de journalisme au monde… Alors, je pense qu’elle avait les
qualités… puis ce n’est pas une histoire d’amies, c’est une histoire de
qualité, c’est une histoire de compétence, elle avait les compétences pour…
elle a les compétences pour être présidente du Conseil du statut de la femme,
ça, je pense que personne ne peut remettre ça en question. Et c’est une femme aussi
de terrain et elle est allée chercher ses vieux réflexes de vieille journaliste
puis elle a dit : Moi, je vais aller voir, sur le terrain, comment ça se
passe cette affaire-là, qu’est-ce que qui se passe.
Drainville n’a aucune étude à l’appui, à
part M. et Mme Tout-le-monde dans la rue, que je respecte énormément, mais il
faut avoir des études pour savoir comment ça va se passer. On parle d’égalité
entre les hommes et les femmes, puis on veut que les immigrantes s’intègrent,
puis on leur dit : Venez ici, on a les bras ouverts puis on veut
absolument que vous veniez travailler avec nous, puis vous… Quand une femme est
docteure en mathématiques, ce qu’on lui demande d’être docteure en
mathématiques puis de faire une bonne job de mathématicienne et non pas de nous
parler de sa religion. Puis allons plus loin. Moi, dans ma circonscription,
j’ai un CHSLD, il y a une médecin qui porte le voile, le foulard. On va faire
quoi avec cette médecin-là? Je pense qu’on a besoin de médecins au Québec puis
je pense qu’on a besoin de médecins qui soignent des personnes âgées puis des
personnes en perte d’autonomie dans des CHSLD.
M. Corbeil (Michel) : Vous
annoncez le dépôt d’une motion. Québec solidaire l’avait déjà fait. En quoi ça
va être différent? Ça va être…
Mme
St-Pierre : Bien,
c’est que la nôtre, elle va être soumise à un vote. C’est la motion du
mercredi. Alors, notre motion à nous va être soumise à un vote, donc il va
falloir que tous les députés de l’Assemblée nationale, présents à l’Assemblée
nationale, se prononcent sur notre motion. Puis il va y avoir un débat aussi.
Le Modérateur :
En anglais. Shawn Lyons, CBC.
M. Lyons (Shawn) :
So we’ll start, I guess Mrs. Weil will be taking… with something very basic and
tell me about this motion that has to be presented tomorrow. What do you want?
1235 33 Mme Weil :
Essentially, for the Government to roll back these nominations, and we want to
vote on this motion and we are going to be calling all of the women from the
other parties to seek their support. Of course, at the outset, we’re dealing, I
think, it’s important to say, with a very, very sensitive issue. We’re dealing
with an issue that is shaking, I think, Québec’s society to its core. We all
meet women who are very worried about the impact of the government’s policy,
decision, orientation.
So,
we object, of course, vigorously to the Government’s intervention into an
independent organization whose mission is to protect women and to seek the equality
of women. And our concern, of course, and all those who have a concern about
the Drainville charter — we’ll call it Drainville charter or the PQ
charter — is that it will lead to discrimination. Not only is it a
breach of freedom of religion, freedom of expression, but it will lead to
discrimination.
So
the president, Julie Miville-Dechêne, had this concern and she wanted some time
to study the impact of this future charter and the disposition s. And, as you know, as you heard,
last Thursday, there was an intervention, very high-placed intervention on the
PQ Government… attempting to strong-arm the president to essentially follow the
advice or follow the opinion and the policy orientation of the Government . She said she needed more time,
that the «conseil», the board, that they were concerned, there was going to be
a vote. And then, of course, on the Monday or just, you know, within a matter
of days, I don’t know how many days between the time she got this pressure,
there were four new nominations, all of the new nominees, of course, supporting
the Government ’s position on a
very sort of closed secularism.
M. Lyons (Shawn) : But you mentioned the legal opinions that have been given to the
Justice Department, that you want Mr. St-Arnaud to release those. Is that part
of you motion as well?
Mme Weil : No, it’s not in this motion, but we have publicly asked them, as
have many people asked them to render his opinions public. We know that he went
outside to get an opinion, but it’s a sort of an opinion that’s a very
cautionary opinion, it’s not an all-out support of the Government’s position.
M. Lyons (Shawn) : Now, given all of the accusations of ideology and partisanship that
have been flying one side to the other, you want this motion to be widely
supported by women and others in the other parties as well. So, why not have
some of them with you on this news conference right now to show people that
this is not a partisan...
Mme Weil : Well, we have time to get their support, they’ve all expressed it. Québec solidaire has expressed opposition to
the Government’s actions and actually outraged. Honestly, let’s put ourselves
back to last Thursday. I was watching RDI. We were frankly outraged. I had
dealings with the Conseil du statut de la femme . It wasn’t always easy. Sometimes publicly, the president would
come out with opinions. Did I ever think to pick up the phone? Did I ever think
to… Never.
If you
have an independent organization, the best thing for a government to do is to
listen to the advice of that independent organization. That’s why they exist,
to illuminate you on some of the risks that are involved. They weren’t
interested in the risks, they wanted the answer that they wanted and they said :
You give us the answer we want or we’re going to pack the house. And,
essentially, that’s why we’re so outraged. So we will make the cause that we
have to make. It’s Friday that we all decided to come up with this, of course
this motion. We have time to get the support of the other «députés», hopefully
male and female, to support this motion.
M. Lyons (Shawn) : Je vais demander une question boni, parce
que je pense que je suis le seul en anglais, s’il n’y a personne d’autre.
Just
want to know, as people watch this unfold, what are your concerns and what will
you do so that Quebecker s won’t
watch this argument going on here, at the National Assembly, and think this is
just politics as usual, one party yelling at another political party; this has
nothing to do with me anymore, this is about the Liberals versus the PQ?
Mme Weil : It’s a motion. We’ve done… We present many motions, it’s a motion
that people vote on. I think it’s a very rational way to proceed. This is the
National Assembly, this is where we have these debates. In fact, I would tell
you this is what makes people feel a little more secure. When I have women who
tell me they’re very worried, they’re upset, they have their stomachs in knots.
Their children are upset, their children are worried that their mothers are
going to lose their jobs. Literally, we have phone calls of people who are
telling us this. I tell them we live in a democracy. We have freedom of the
press, we have the National Assembly, we have strong Opposition , we have the courts. And I tell them not to worry, that we’re in Québec, it’s a democracy.
So I think, if anything,
these are vigorous debates. They’re not fights, they’re vigorous debates with
different opinions on a very important matter. And it requires transparency on
the part of the Government and it requires governments to listen to the advice
and not politically interfere with an independent organization.
Le Modérateur :
Alors, exceptionnellement, on va en prendre une dernière en français. Martin
Ouellet.
M. Ouellet (Martin) : Merci.
Mme St-Pierre, mesdames. Pensez-vous vraiment, Mme St-Pierre, que les députés
péquistes vont rompre la ligne de parti? On a vu qu’est-ce qui s’est passé avec
Mme Mourani, là. C’est dangereux, là, de rompre la ligne de parti au PQ, mais
dans tous les partis, là, généralement. Mais pensez-vous que des femmes…
vraiment, des femmes péquistes vont se joindre à vous?
Mme
St-Pierre : On va
voir mercredi, mais je l’espère et je le souhaite, la première ministre en
tête. Je pense que, là, nous sommes dans une situation où il faut absolument
dire à quel point le Conseil du statut de la femme est un organisme qui doit
avoir son indépendance. Alors, on va voir mercredi. Il y aura un débat de deux
heures, alors on va mesurer tout ça. Vous serez en mesure de mesurer tout ça
mercredi.
(Fin à 15 h 2)