(Neuf heures trente-six minutes)
M. Cloutier
: Bonjour à
vous. Merci d’être avec nous ce matin. D’abord, ce que je souhaite faire, c’est
le point sur la situation de la nomination du juge Nadon à la Cour suprême. Il
n’y a pas d’autres mots que cafouillage, improvisation, amateurisme et manque
de respect pour le Québec.
Il faut comprendre que la nomination d’un
juge du Québec à la Cour suprême, que c’est une des décisions les plus
importantes, parce que la Cour suprême a à juger et à interpréter, entre autres,
la Charte des droits et libertés; c’est là que se prennent d’importantes
décisions, dont prochainement celle du processus constitutionnel d’amendement nécessaire
pour pouvoir procéder à la fameuse réforme du sénat. C’est assez incroyable que
le gouvernement fédéral se soit enlisé dans un processus contradictoire, y
allant de sa propre interprétation de la Loi sur la Cour suprême, se rendant
compte de son erreur, se rendant compte de l’absurdité de la situation, parce
que, là, les Québécois, au lieu d’avoir deux juges, se... au lieu d’avoir trois
juges, pardon, en ont juste deux parce que le juge Nadon a dû se récuser.
Alors, voyant son erreur, le gouvernement
fédéral, ce qu’il a décidé de faire, c’est de modifier, dans la loi sur la mise
en oeuvre du budget, dans un document de 376 pages, le dernier article en bas,
on a décidé de modifier la Loi sur la Cour suprême pour venir justifier la
compréhension qu’ils avaient de la loi pour permettre la nomination du juge Nadon.
Cet amendement à la loi n’est pas banal parce qu’il vient permettre à quiconque
aura accumulé 10 années de Barreau au Québec de se qualifier pour le poste de
juge à la Cour suprême.
Je veux juste vous faire remarquer, là,
que ce que ça veut dire concrètement, c’est que n’importe qui qui va avoir eu
son 10 ans de Barreau, qui déciderait, par exemple, ensuite d’aller s’installer
à Toronto, et d’avoir une carrière à Toronto, et d’y vivre depuis plusieurs
années, bien, cette même personne là pourrait devenir le représentant du Québec,
d’un des trois juges qui doit mettre en oeuvre le droit civil, alors même qu’il
n’habite plus le Québec. Ce n’est pas l’interprétation qu’a le gouvernement, ce
n’est pas l’interprétation que n’a jamais eu le gouvernement de la Loi sur la
Cour suprême. Il a toujours été clair, au Québec, que, pour être nommé juge, il
fallait soit être membre du Barreau, hein, donc actuellement du Barreau du
Québec ou d’être juge à la Cour d’appel ou à la Cour supérieure. Mais je n’ai
pas besoin de vous dire que, si on est juge à la Cour d’appel ou si on est juge
à la Cour supérieure, par définition, on habite le territoire québécois.
Alors là, on vient procéder à un
amendement, alors qu’il s’agit d’une loi fort importante, sans même informer le
gouvernement du Québec. Alors, le gouvernement fédéral s’enlise dans les
mauvaises décisions, fait preuve d’un amateurisme déconcertant et maintenant
nous place dans une situation où le gouvernement du Québec devra intervenir en
Cour suprême pour contester l’interprétation que fait le gouvernement fédéral.
M. Dutrisac (Robert)
:
Est-ce que le gouvernement fédéral peut,,, et vous l’indiquez dans votre
communiqué qu’il ne peut pas changer… il ne peut pas légiférer unilatéralement
en la matière. Quelles sont vos prétentions à cet égard?
M. Cloutier
: Bien,
vous aurez compris qu’on a fait connaître… D’abord, on a procédé par voie législative,
puis, ça, c’est l’autre absurdité. Écoutez bien l’affaire, l’ordre dans lequel
ils font les choses. Ils nomment un juge du Québec avec une nouvelle
interprétation. C’est évidemment contesté en cour. Le juge Nadon doit se
retirer.
Voyant cela, hier, le gouvernement fédéral
nous annonce qu’ils vont demander l’avis à la Cour suprême. Là, ils demandent
l’avis de la cour, mais ils n’attendent pas l’avis de la cour pour venir
modifier la loi alors qu’ils seront en train de plaider les arguments. Je veux
dire, tout le processus, dans sa totalité, il est vicié, plus que surprenant. Et,
la moindre des choses, si on y va d’une nouvelle interprétation, ça aurait été
d’avoir des consultations avec le Québec, parce que l’article 6 porte sur les
juges du Québec, là, hein? Je veux être clair, l’article 6… et le juge Nadon, c’est
un de nos trois juges qui, en principe, doit appliquer le droit civil, là. C’est
pour ça qu’on a une garantie de trois juges à la Cour suprême.
M. Dutrisac (Robert)
:
Voulez-vous changer la Loi sur la Cour suprême?
M. Cloutier
: Il y aura
un débat important qui sera fait à la Cour suprême, et nous aurons l’occasion
de répondre très clairement sur l’enjeu constitutionnel très prochainement.
Mme Prince (Véronique)
:
C’est quoi l’intérêt du fédéral, à votre avis, de faire ça?
M. Cloutier
: Écoutez,
ils s’enlisent dans les mauvaises décisions et dans des processus viciés puis,
pour se sortir du trouble, ils en ajoutent une couche. Là, ils nous annoncent
qu’ils vont procéder par un amendement dans une loi sur la mise en oeuvre du budget.
Honnêtement, là, je peux vous dire que nos fonctionnaires, nous, ici, à Québec,
là, n’en reviennent pas. C’est du jamais-vu.
Et puis pourquoi ils le font? Parce qu’ils
essaient de se sortir du trouble dans lequel ils ont placé le Québec. Parce
qu’en bout de course c’est le Québec, là, qui est pénalisé. Au lieu de trois
juges, on en a deux puis on a vu, la semaine dernière, la cour qui a siégé à
huit, alors qu’ils ont toujours siégé, comme vous le savez, sur les causes
importantes…
M. Corbeil (Michel)
: M.
Cloutier, sur le lieu…
M. Cloutier
: …juste
terminer — soit à neuf ou avec un nombre impair, et là, récemment, on
a vu une cour qui a siégé à huit. C’est assez surprenant.
M. Corbeil (Michel)
: Mais
sur le lieu de résidence de M. Nadon, vos fonctionnaires ont posé la question à
qui? Est-ce que c’est au ministre de la Justice, M. MacKay?
M. Cloutier
: On est
toujours en train de chercher cette fameuse… de vouloir répondre à cette
fameuse question : Le juge Nadon habite en Ontario depuis quand? Parce
qu’il faut comprendre que, si le juge Nadon habite depuis plus de 20 ans en
Ontario, qu’il paie ses impôts en Ontario, qu’il côtoie évidemment… que son
milieu à lui, c’est l’Ontario, et qu’il devient un des trois juges du Québec,
qu’il doit mettre en oeuvre et protéger le droit civil, vous aurez compris que
ça nous apparaît plus que surprenant. Mais je n’ai toujours pas de réponse sur
le nombre d’années que M. Nadon habite en Ontario et je ne peux donc pas
confirmer cette information.
M. Journet (Paul)
:
Mais c’est une information assez simple à obtenir. Il me semble… Est-ce que vous
avez fait la… Est-ce que vous avez fait, indirectement ou directement, la
demande au juge pour qu’il la dévoile, là? Ce n’est pas si compliqué que ça à
savoir.
M. Cloutier
: Je l’ai
fait à de nombreuses reprises sur la place publique. Je l’ai fait auprès de
notre bureau du Québec à Ottawa, et nous n’avons toujours pas cette information.
Alors…
M. Journet (Paul)
: Il
n’est pas tenu de la donner lors du processus normal d’audience à Ottawa.
M. Cloutier
: Bien, c’est
ce qui est le plus fascinant, c’est qu’il n’y a pas de processus officiel pour
la nomination d’un juge. C’est assez incroyable, là. Prenons…
Une voix
: Non, mais il
y a…
M. Cloutier
: Je veux
juste terminer là-dessus.
Une voix
: …
M. Cloutier
: Oui, mais,
la commission, ce n’est pas un processus formel. C’est au bon vouloir du premier
ministre, qui a décidé d’instaurer ça récemment, mais ce n’est pas un processus
qui est institutionnalisé. C’est ça que je veux dire. Voilà. J’ai perdu l’autre
idée que je voulais dire, mais ce n’est pas grave. Je reviendrai.
Mme Prince (Véronique)
:
Moi, j’aurais une question avant sur un autre sujet. Il y a certains de vos
collègues qui disent qu’ils ont énormément de travail encore à faire et que ce
n’est pas nécessairement le bon moment pour des élections. Est-ce que c’est
votre cas?
M. Cloutier
: Bien, vous
aurez compris que le gouvernement fédéral, avant, il prenait une mauvaise
décision par semaine. Là, c’est une mauvaise décision par jour. Alors là, c’est
pratiquement jour et nuit que, nous, nous travaillons pour défendre les
intérêts du Québec, et, effectivement, je fais partie de ceux à qui les
responsabilités sont plutôt intenses, au moment où on se parle, et je le fais
avec beaucoup de plaisir, je dois vous avouer, à défendre les intérêts du
Québec.
Le Modérateur
:
Questions en anglais.
M. Dougherty (Kevin)
: Yes. Mr. Cloutier, can you
plead that before the Supreme Court on this case that we may review whether Judge
Nadon can be a member of the Supreme Court?
M. Cloutier
: Alors, je
veux juste vous… Vous me rappelez mon idée. Je veux juste vous
faire réaliser… Excusez-moi, M. Dougherty, je vais répondre à votre
question sans problème, mais vous me permettez de me rappeler ce que je
souhaitais répondre.
Je veux juste que vous que vous réalisiez,
là, si on était aux États-Unis, là, ce qui est en train de se passer ici, là,
serait la risée nationale. Le processus de nomination des juges à la cour a
été, par le passé, un peu mystique, hein? C’est un processus qu’on a tenu à
l’écart, qu’on a gardé entre les mains du bureau du premier ministre. C’est
important de s’y intéresser, considérant l’importance des causes qui sont
entendues là-bas, et tout ce processus de nomination n’est pas banal. Et, quand
on vient le modifier par la porte d’en arrière, comme on est en train de faire,
c’est majeur, là, pour la suite des choses. Pardon,
excusez-moi, M. Dougherty.
M. Dougherty (Kevin)
: No, you know the question now. Yes, can you plead… can Québec plead before the Supreme Court when
they look into this question of whether Judge Nadon can be a judge at the
Supreme Court?
M. Cloutier
: Well, we will definitely intervene in the Supreme Court, and the interpretation
that the federal Government has given to the Supreme Court Act is not the
interpretation that we are living in Québec. So we will have the chance to give you further details on the
argument that will be… One of the questions is the constitutional one, hein?
You might have seen the «procureur», the lawyer from Ontario contesting the law in front of this court
of appeal, saying that it is a constitutional question. We will have to address that very soon and we will come back. But,
for sure, Québec will
intervene, do not share the interpretation of the federal
Government and condemn the way that Ottawa is doing things now. I mean, we can’t
believe it that they have decided to proceed on such an important matter on a law that has to
implement the budget.
M. Dougherty (Kevin)
: And just… What happened to Bill 99?
M. Cloutier
: Oh! Bill 99. I’ll be doing a declaration… a minister declaration at 10 :00 o’clock, and the motion
should be tabled anytime soon.
M. Harrold (Max) :
You said before that…
Des voix
:
…
Le Modérateur
: Max
Harrold.
M. Harrold (Max) : You said in French that Ottawa screwing up every day is a reason to
delay going to an election. You’re so busy that you want to keep working
without going to an election right now?
M. Cloutier
:
I mean, what I am saying, well, I have no responsibility and I have not to
decide whether or not Québec is going to election. What I am saying is that the
federal Government is taking new initiative that we can not just believe in
Québec that there is such bad things for Quebeckers, that we have to address
those arguments, and this is why we will intervene at the Supreme Court with Justice Nadon, which is just another example on
very important issue where the Conservative Government just screw up.
Mme Montgomery
(Angelica)
: Could we please get your
thinking on what’s happening in the Senate right now, with...
M. Cloutier
: Sorry, I will let… Of course, we are all surprised by the
declaration of Mr. Duffy, and I let Premier Harper ask… and respond to his own problem.
Le Modérateur
:
Merci.
(Fin à 9 h 47)