(Treize heures trente-deux minutes)
M. Couillard (Philippe) :
Merci. Bonjour, tout le monde. Je suis avec vous aujourd’hui en compagnie de Mme
Stéphanie Vallée, députée de Gatineau, et on voudrait vous communiquer
certaines informations concernant l’étape législative importante d’aujourd’hui
dans l’adoption éventuelle du projet de loi sur les soins de fin de vie.
Aujourd’hui, on vote pour le principe du projet de loi.
Alors, j’ai deux choses à vous communiquer
personnellement là-dessus, puis, par la suite, Mme Vallée va faire de même,
parce qu’il s’agit essentiellement d’une situation nouvelle à l’Assemblée
nationale, et je pense que vous ne devez pas sous-estimer l’aspect significatif
de ces expériences-là, où on demande à chaque député de s’exprimer clairement,
selon sa conviction, également selon son impression du terrain dans lequel elle
agit ou il agit politiquement et des personnes qu’elle représente. Il s’agit
donc d’un vote personnel, sur une question qui nous touche tous et toutes, bien
sûr, de près dans nos familles maintenant, certainement, puis, un jour, chacun
d’entre nous, dans cet endroit, aura à faire le passage, et c’est de ça dont on
parle aujourd’hui.
Sur cette question, de façon à me mettre à
niveau avec mes collègues, j’ai communiqué tantôt la façon dont je me
comporterais aujourd’hui, si j’étais à l’Assemblée nationale, de façon à être à
niveau complètement avec eux et elles et surtout de ne pas tenter, par ma
communication, de tenter de les convaincre que mon opinion était la bonne et
qu’il fallait qu’ensemble nous suivions la même règle, parce qu’un vote
personnel doit être un vote véritablement personnel et ne doit pas répondre à
ce type d’influence là.
Alors, aujourd’hui, si je siégeais à l’Assemblée
nationale, je voterais en faveur du principe du projet de loi. Pourquoi? Parce
que je crois que, sur une question aussi délicate, il est légitime de laisser
le débat parlementaire se poursuivre. Il y a plusieurs questions importantes
qui doivent être clarifiées, il y a des choses à préciser, il y a des gens à
entendre. Il y a nos députés à entendre également à chacune des fois où il y aura
un vote à prendre, parce que, si le principe est adopté aujourd’hui, par la
suite, c’est l’étude détaillée article par article, et, sur chaque article, les
députés auront l’occasion de se prononcer. Je l’ai expliqué à mes collègues également
récemment, le discours qu’ils ont fait, qu’elles ont fait, chacun et chacune,
en préparation du vote d’aujourd’hui est un discours très important de leur
carrière politique, puisqu’ils ont l’occasion de présenter à leurs électeurs, à
la population et à eux-mêmes l’essence de leur position personnelle sur cette
question.
Plus largement, je dirais qu’on peut
diviser ce projet de loi, selon moi, en trois parties, hein? Il y a une partie
sur les soins de fin de vie, l’accès aux soins palliatifs, sur lequel je crois qu’il
n’y aura jamais du désaccord. On veut tous qu’il y ait davantage d’accès aux
soins de fin de vie. Il y a quelque chose également sur ce qu’on appelle la
sédation terminale, qui, à mon avis, doit être largement précisé et approfondi
dans le projet de loi, de quoi on parle. Et enfin la dernière section, qui,
pour moi, me cause problème, je peux vous dire un problème important compte
tenu de mon histoire de vie, compte tenu de ma formation médicale, des années
que j’ai passées à m’occuper de patients gravement malades, où j’ai moi-même
vécu ces situations de fin de vie avec eux et elles de façon répétée, c’est la
partie de ce qu’on appelle véritablement l’aide médicale à mourir, qui est un
geste actif causant la mort, avec lequel je suis profondément mal à l’aise. Alors,
si aujourd’hui on me demandait de voter sur les articles correspondants à cette
section-là, dans la forme actuelle, je ne pourrais pas soutenir cette partie du
projet de loi. Mais, justement, l’importance du processus législatif, c’est de
préciser des choses, les rendre plus compréhensibles et puis de savoir de quoi
on parle, de qui on parle et de quels types d’actes on parle.
Alors, voilà ce que je voulais vous
communiquer sur mon attitude personnelle sur ce projet de loi là. Stéphanie,
veux-tu t’exprimer également?
Mme Vallée
: Bien, en
fait, je pense que certains d’entre vous avez pris connaissance des
déclarations qui ont été faites la semaine dernière. Lorsque je me suis
exprimée à titre de porte-parole pendant une heure, j’ai élaboré un peu sur
l’absence de définitions, dans le projet de loi, qui, en soi, constitue un
malaise et qui constitue un questionnement. J’ai aussi précisé l’existence,
dans la société, de plusieurs points de vue sur la question, sur la nécessité
d’aller de l’avant avec l’aide médicale à mourir. Pour certains, l’aide
médicale à mourir est requise parce que la liberté individuelle, le désir de ne
pas souffrir le commanderaient. Pour d’autres personnes, elle ne devrait pas
être mise en place, pour des motifs religieux, des motifs éthiques, des motifs
juridiques et aussi, pour certains qui oeuvrent dans les soins palliatifs,
l’acceptation du principe qu’à un certain moment donné on ne peut plus rien
faire et il n’y a pas d’autre geste à faire. Donc, c’est ces deux éléments-là
qui viennent un petit peu en contradiction.
Comme M. Couillard, et puis c’est ce que
j’ai indiqué la semaine dernière, moi aussi, je suis en faveur du principe du
projet de loi parce que je crois qu’il n’y a pas de meilleure enceinte que
l’Assemblée nationale pour poursuivre ce débat-là. Et puis, même si, d’une
façon ou d’une autre, le principe n’était pas adopté, c’est un débat qui
referait surface. C’est un débat qui a mobilisé l’ensemble de la population et
donc qui doit se faire à ce moment-ci, et l’Assemblée nationale, vous conviendrez,
est le meilleur forum.
Donc, c’est la raison pour laquelle je
voterai en faveur du principe, mais, lors du processus de l’étude article par
article du projet de loi, j’entends, ainsi que mes collègues, déposer des
amendements au projet de loi, qui est incomplet dans sa forme actuelle puis qui
soulève des questionnements sérieux. Et c’est la beauté aussi du vote que nous
aurons cet après-midi. Je pense que les collègues… la démonstration du vote des
collègues va être aussi démonstratif de ce qui se passe dans la société. C’est
faux de prétendre qu’il y a unanimité de points de vue dans la société. J’ai
fait des consultations dans ma circonscription, et il n’y a pas d’unanimité,
les gens sont tiraillés. Il est normal que les parlementaires soient tiraillés
sur une question aussi importante que d’introduire… de permettre de donner la
mort.
Le Modérateur
: On va
passer à la période de questions. Je vous demanderais de vous identifier ainsi
que le média que vous représentez, pour les fins de transcription. On va
commencer avec le micro de droite.
M. Lafille (Julien)
:
Bonjour, M. Couillard. Julien Lafille, de Radio-Canada. Il y a plusieurs de vos
députés qui disent que, l’aide médicale à mourir, c’est de l’euthanasie
purement et simplement. Est-ce que vous partagez ce point de vue?
M. Couillard (Philippe) :
Oui. De la façon dont c’est écrit actuellement, c’est ça. Appelons les choses
par leurs noms. Et c’est la raison pour laquelle cette partie du projet de loi
m’indispose sérieusement. Vous savez, j’ai fait plusieurs rencontres, dans ma
carrière, mais récemment également, dans le cadre de mon activité politique… et
très récemment j’ai visité une maison de soins palliatifs puis, chaque fois que
je vais dans un milieu de ce domaine-là, je demande aux gens leur opinion.
Et une personne de ce milieu, qui est très
expérimentée, m’a dit : Vous savez, M. Couillard, ce que les gens… ce qui
se produit quand les gens arrivent chez nous, c’est qu’ils ont peur. On va tous
avoir peur, le jour où la mort arrive, mais ils ont peur de souffrir, d’être
inconfortable, la perte de dignité qui peut se produire à la fin de la vie. À
partir du moment où on réussit à les rassurer, à leur montrer que les soins d’aujourd’hui
permettent d’éloigner la souffrance et de les rendre confortables, la peur
disparaît, et ils deviennent très sereins. Et c’est ce qu’on appelle véritablement
mourir dans la dignité, à ce moment-là, sans qu’on ait eu besoin de poser un
geste actif. Alors, je comprends le besoin que les gens expriment autour de ça,
mais je pense que ça doit être précisé de façon très importante.
M. Lafille (Julien)
:
Et donc est-ce que vous pensez que c’est ce terme d’aide médicale à mourir qui,
peut-être…
M. Couillard (Philippe) :
C’est un euphémisme actuellement.
M. Lafille (Julien)
:
Est-ce que vous pensez que c’est ça qui est à l’origine, peut-être, du malaise
qu’il y a au sein de votre caucus?
M. Couillard (Philippe) : Le
malaise, il existe dans toute la société. De dire que c’est… je trouve… Ça me
fait sourire quand je vois les articles qui disent qu’il y a un désaccord dans
le caucus libéral sur cette question-là. J’espère bien qu’il y en a un. J’espère
bien qu’il y en a un. Une députation doit être le reflet de la société. Un
groupe parlementaire qui me dirait qu’ils vont procéder à un vote personnel sur
cette question-là, et dont le résultat du vote serait unanime, m’amènerait à me
poser des sérieuses questions sur la réalité du vote personnel qui a été pris,
là. Alors, on doit s’attendre à ce que les désaccords dans la société se
reflètent dans la députation.
Le Modérateur
: On va
passer au micro de gauche.
M. Salvet (Jean-Marc)
:
Bonjour. Jean-Marc Salvet, Le Soleil. Vous dites : L’aide
médicale à mourir, c’est un euphémisme, il faudrait parler d’euthanasie. Est-ce
qu’on comprend que, sur le fond, de toute façon, vous êtes contre, malgré votre
vote… Si vous seriez là aujourd’hui, vous voteriez pour le principe. C’est une
technicalité pour aller plus loin. Mais, sur le fond, vous semblez être, de
toute façon, opposé. Il n’y a pas d’amendement qui pourrait vous satisfaire sur
l’aide médicale à mourir?
M. Couillard (Philippe) :
Remarquez que je n’ai pas utilisé la même façon de vous parler de ça que je
l’ai fait pour les libertés dans le cas de la charte des valeurs, où ma
position est tranchée et ne bougera pas. Je me laisse une zone, là,
d’information. Moi, comme personne, comme citoyen, j’ai besoin d’entendre plus.
On me dit : C’est exceptionnel. Vraiment? Mais alors précisez comment
c’est exceptionnel, précisez comment ça va être véritablement exceptionnel, parce
que… L’anecdote que je vous ai contée tantôt sur la peur de la souffrance… Je
comprends qu’il peut arriver, dans la réalité, que, parfois, malheureusement,
les gens ne réussissent pas à être soulagés. Donc, je comprends qu’il peut y
avoir des situations véritablement exceptionnelles, mais j’aimerais qu’on me
précise davantage quelles sont ces situations-là. C’est la différence que je
fais entre les deux.
M. Salvet (Jean-Marc)
:
J’entends bien. Et, pour la journée d’aujourd’hui, est-ce qu’une majorité
d’élus libéraux voteront en faveur de l’adoption du principe ou une majorité
d’élus libéraux voteront contre l’adoption de principe?
M. Couillard (Philippe) : Je
pense que c’est à peu près égal actuellement, voyons voir… Puis les gens
évoluent rapidement, ça peut changer d’ici le vote, là. Et vous verrez, mais je
crois que c’est à peu près 50-50 dans la députation.
Le Modérateur
: Micro
de droite.
M. Dutrisac (Robert)
:
Bonjour, M. Couillard. Robert Dutrisac, du Devoir. Si on a pensé,
justement, à… Si on a pensé à avoir une loi pour encadrer toute cette
pratique-là, les soins palliatifs, etc., c’est que, dans la pratique, comme
vous le savez très bien, il arrive qu’un médecin abrège la vie de ses patients
en phase terminale. Et c’est pourquoi on avait besoin probablement, ou c’est
une des raisons, en tout cas, pour avoir un cadre légal qui soit... qui balise
ces pratiques-là.
Alors, comment concilier la pratique où, effectivement,
un médecin doit poser... on dit un geste actif, mais, enfin, doit poser
certains gestes qui, lui, il sait que ça va abréger la vie du patient?
M. Couillard (Philippe) :
Alors, je vais vous expliquer la distinction que, moi, je fais entre les deux.
Puis, moi, j’ai pratiqué la neurochirurgie pendant de nombreuses années, près
de 20 ans, toujours avec du monde très malade, malheureusement, souvent, avec
des gens qui avaient des maladies mortelles puis qui étaient dans une situation
de fin de vie. Ce que j’ai vu souvent pratiqué et ce qui se pratique
quotidiennement dans les hôpitaux, c’est ce qui est appelé, dans le projet de
loi, la sédation terminale.
Mais, en pratique, ça veut dire quoi? Ça
veut dire qu’un jour l’équipe médicale — puis ça, c’est capital, hein — rencontre
la personne et/ou sa famille et selon le niveau de compétence pour décider puis
dit : Écoutez, la science médicale ne peut plus rien pour votre maladie. On
peut faire beaucoup pour soulager votre souffrance, mais il faut que vous
compreniez que ça peut diminuer votre état de conscience. C’est dit de façon
très directe à la personne et c’est accepté. Puis, là encore, ça doit être
précisé : de combien de jours parle-t-on? Qu’est-ce que ça veut dire… le
mot «terminal», il veut dire quoi?
Si, vous, vous avez — j’espère
que ça ne se produira jamais, M. Dutrisac — mais une maladie qui,
vous le savez, peut abréger vos jours dans six mois, vous apprenez ça aujourd’hui,
est-ce qu’aujourd’hui vous pouvez demander la sédation terminale? Vous n’êtes
pas à la veille du décès, là. Tandis que l’autre, qui est appelé l’aide médicale
à mourir, c’est un acte actif… un geste actif — pardon du pléonasme,
là — un geste actif où je vais chercher, dans une armoire, une
solution quelconque que j’injecte à la personne, puis elle décède là, devant
moi.
On est dans deux niveaux différents, puis,
là encore, les précisions sont très faibles. Qu’est-ce que ça veut dire la fin
de vie? À partir de quand on est en fin de vie? Si, moi, j’ai une maladie
chronique qui peut me faire souffrir pendant des années et des années, est-ce
que je suis déjà en fin de vie? Est-ce que je peux dire, un bon matin :
J’en ai assez puis je veux que quelqu’un m’injecte quelque chose pour mourir?
Je n’aime pas cette affaire-là. Alors, pour moi, il y a une différence entre
les deux.
M. Dutrisac (Robert)
:
Mais juste une précision pour préciser... pour que je comprenne mieux. En
adoptant le principe, on est ouverts à certains amendements. Est-ce qu’il y a
une possibilité d’amendement, justement, sur cette disposition-là du droit à
mourir?
M. Couillard (Philippe) :
Bien, voilà ce que je disais à votre collègue tantôt. Si, moi, j’étais en
Chambre aujourd’hui… on ne sait pas, il y a des rumeurs qu’un jour j’y sois,
là, mais, si j’étais en Chambre aujourd’hui, je me poserais la question
suivante : Prouvez... Je poserais la question au législateur, la question
suivante : Prouvez-moi que c’est véritablement exceptionnel.
Je vous ai dit tantôt qu’en 20 ans de
pratique je n’ai pas vu souvent de situations où la souffrance et l’inconfort
ne pouvaient pas être soulagés de façon très, très, très correcte. Prouvez-moi
qu’il existe effectivement des cas exceptionnels, ce que j’accepte, qui sont
véritablement exceptionnels. Définissez l’exceptionnalité, si vous me permettez
le long mot, là, et puis je vais être ouvert à considérer la question.
Donc, mon attitude n’est pas complètement
fermée. Je comprends qu’on ne peut pas tout prévoir et tout assumer dans ce
genre de situation là, mais il y a une ouverture, justement, pour accueillir
les ajustements, mais il faut qu’ils soient vraiment très précis. Ce serait le
test que j’imposerais au législateur ici.
Le Modérateur
: On va
passer au micro de gauche.
Mme Prince (Véronique)
:
Véronique Prince, TVA. À part ce que vous venez de nous dire là, pouvez-vous
nous redire clairement les amendements que vous pourriez demander?
M. Couillard (Philippe) :
Bien, je ne vous parlerai pas des amendements détaillés, je vous parle des questions
que je poserais, parce que l’étude article par article, ça se fait beaucoup par
échanges entre le législateur puis l’opposition. Je dirais : Qu’est-ce que
vous voulez dire par fin de vie? À partir de quand ça commence, la fin de vie? Est-ce
qu’on parle d’une catégorie de maladies? Est-ce qu’on parle d’un nombre de
jours? Est-ce qu’on parle d’un nombre de semaines? Est-ce qu’on parle d’un
essai préalable qui prouve que, définitivement, d’après les meilleures
autorités, là, que tout a été essayé et rien ne fonctionne? Montrez-moi toutes
ces barrières à traverser, et là je peux me laisser convaincre qu’effectivement,
dans un cas exceptionnel, on pourrait accepter d’avoir recours à une mesure
exceptionnelle comme celle-là. C’est le genre de questions que je poserais.
Comment ça se traduit dans un amendement, là, vous comprendrez que c’est un peu
tôt aujourd’hui pour le dire. Mais c’est ça, ma préoccupation.
Mme Prince (Véronique)
:
Puis pour revenir sur la question de mon collègue Jean-Marc, au fond, si vous
voteriez pour, puis la raison pour laquelle il y a des libéraux également qui
votent pour, c’est pour laisser une chance au projet de passer à l’autre étape.
M. Couillard (Philippe) :
Moi, oui.
Mme Prince (Véronique)
:
C’est simplement ça.
M. Couillard (Philippe) :
Oui. Mais il y en a, puis il faut respecter cette opinion-là, Mme Prince, il y
en a qui sont tellement profondément opposés à l’esprit même du projet de loi
qu’ils veulent s’exprimer pour faire en sorte d’arrêter le processus
aujourd’hui, et c’est légitime. Ce n’est pas pas correct de dire ça, c’est
légitime, les gens ont tout à fait le droit d’avoir ce genre de réflexion.
Le Modérateur
: Est-ce
qu’il y a d’autres questions en français? On va aller au micro de gauche.
Journaliste
: Bonjour,
M. Couillard.
M. Couillard (Philippe) :
Bonjour.
Journaliste
: Vous
disiez tout à l’heure que c’est normal que les avis soient partagés au sein de
votre caucus, c’est le reflet de la société. On nous dit que le PQ va également
permettre le vote libre à ses députés. Est-ce à dire que, s’il y a unanimité au
PQ, vous doutez de leur liberté de voter?
M. Couillard (Philippe) :
J’ai tellement parlé aux gens, j’ai tellement vécu ces situations-là, tout ce
que je dis, je ne veux pas faire de procès d’intention à personne, là, je
trouverais surprenant que dans n’importe quel groupe humain, incluant, tiens,
le groupe de journalistes de la tribune, si on me disait : On est unanimes
là-dessus, ça marche 100 milles à l’heure, on n’a pas de problème, il faut que
ça rentre, j’aurais beaucoup de doutes quant à la véracité du processus de
réflexion autour de ça. Il me semblerait quand même douteux qu’un vote
véritablement personnel sur cette question, surtout si on a un groupe aussi
grand que le groupe majoritaire ou presque majoritaire à l’Assemblée, soit
unanime. C’est ce que je voulais exprimer.
Journaliste
:
Rapidement, j’aimerais vous entendre sur un autre sujet. M. Boisclair n’a
toujours pas été réaffecté dans une nouvelle tâche. Il est payé, évidemment.
Pensez-vous qu’il devrait retourner à New York? Qu’est-ce qu’on devrait faire
avec…
M. Couillard (Philippe) :
Bien, il doit surtout être utilisé… M. Boisclair a des compétences qui sont
certaines et reconnues. Il est rémunéré par les fonds publics, par l’État. Il
faut que ces compétences-là soient utilisées le plus rapidement possible pour
qu’on lui trouve quelque chose à faire pour son salaire, parce qu’en même temps
il y a un intérim qui est rémunéré également au poste de New York.
Alors, que la décision se prenne,
d’ailleurs, pour la permanence du poste de New York, un, puis, deuxièmement,
que M. Boisclair, rapidement, soit affecté à une tâche précise qui correspond à
son niveau de rémunération. C’est la demande que j’ai.
Le Modérateur
: On va
encore passer au micro de gauche.
Journaliste
: M.
Couillard, bonjour. Est-ce que vous estimez que la situation actuelle, le statu
quo, pose problème pour le dossier de l’aide médicale à mourir et mourir dans
la dignité?
M. Couillard (Philippe) :
Moi, je n’ai jamais vu de geste posé, dans ma carrière médicale, correspondant
à ce qu’on appelle l’aide médicale à mourir, ou l’euthanasie, ou quoi que ce
soit. Par contre, j’ai vu régulièrement, régulièrement ce qu’on appelle la
sédation terminale. Et je peux comprendre qu’il y a besoin de clarifier
certains éléments, certainement, premièrement.
Deuxièmement, si on se rend à mes demandes
et qu’on m’explique à quel point le caractère exceptionnel est délimité,
précisé, et que j’en viens à accepter que, dans des cas exceptionnels, c’est
une mesure possible, bien là, à ce moment-là, il faut qu’on me le montre de
façon très, très crédible.
Journaliste
: Mais vous
voulez quand même qu’il y ait des balises, là. Malgré toutes vos préoccupations,
il faut…
M. Couillard (Philippe) :
Bien oui. Là, c’est clair que ça prend des balises…
Journaliste
: …qu’il y
ait quelque chose de nouveau à ce qui existe déjà actuellement, là.
M. Couillard (Philippe) :
Oui, oui, oui. Absolument.
Journaliste
: À tout le
moins, vous êtes d’accord là-dessus.
M. Couillard (Philippe) :
Bien, il y a trop de flou là-dedans. Il y a des mots qui sont mentionnés qui ne
sont pas définis, exemple «fin de vie». C’est quoi, «fin de vie»? Un esprit
cynique dirait que la fin de vie commence à la naissance, là, mais je ne veux
pas exagérer non plus, là. Mais la définition peut varier d’une personne à
l’autre, selon la condition pathologique qu’on a, la maladie qu’on a ou qu’on
n’a pas, maladie chronique, maladie aiguë, cancer; cancer, c’est 400 maladies
différentes.
Alors, on parle de quoi, on parle de quel
intervalle, on parle de quelle situation et on parle de quel cheminement
préalable? Parce que, là, on parle beaucoup du consentement, etc., c’est très
bien, mais je voudrais qu’on m’assure que tout est mis en place pour garantir
le caractère exceptionnel de la situation.
Le Modérateur
: On va
passer en anglais, à votre droite, M. Couillard.
Mme Plante (Caroline)
: Hello, Mr. Couillard.
M. Couillard (Philippe) : Sorry, there’s a lot of background noise.
Mme Plante (Caroline)
: OK, I’ll try to talk loudly. Caroline Plante, Global News.
You talked about the importance of the passage and principle. Were you not able
to convince your MNAs to vote for the… Can you hear me?
M. Couillard
(Philippe) : Yes. I’m sorry, there’s a lot of
noise. I didn’t try my colleagues to think like… to convince them that they had
to think like me, not at all.
Mme Plante (Caroline)
: No, but you said that it’s important. The passage and principles would have been…
M. Couillard
(Philippe) : For me, but I would understand
someone telling me : You know, this law is so wrong in my eyes that even
the principle is not acceptable. I think that there’s something also to realize :
it’s wrong to transfer the unanimity of the commission to the public. You
cannot say the population,
which was in its own world during many weeks working together, hearing a lot of
situations, came to that unanimous conclusion, it’s wrong to believe that because
of that, then therefore, the public and the population will be unanimous as well. There’s a big disconnect, here. I think
it has to be reconciled.
Mme Plante (Caroline)
: You talked about the three parts of this bill. At the heart of the
issue, what bothers you the most about this bill?
M. Couillard
(Philippe) : The third part, and it’s not the
longest part, by the way, in
the bill, because the longest part, Stéphanie, I think, is the part dealing
with end of life care.
Mme Vallée
: Yes.
M. Couillard
(Philippe) : It’s active «aide médicale» or active
action at the end of life, that’s what bothers me. My whole medical training,
my whole medical experience makes me really fearful about that type of things.
I can accept though that there could be very, very, very exceptional situations
where that could be justified. But, therefore it has to be shown by the legislator that all steps are being taken to demonstrate the
exceptional character of that situation, which is not the case in the current
formulation of the bill.
Journaliste
:
You’ve talked about the vague wording in the bill. Well, so, there was a
commission, and I’m told that were many hours of debate and discussion, and
they came up with this wonderful document. Are you surprized, now, here we are
in the second reading, and there’s still all the stuff that hasn’t been worked
out?
M. Couillard
(Philippe) : It had to be that way because of
the nature of the issue. When you start, first, you start a commission, then
you write a report. There is a huge step between the report and a piece of
legislation, and now we see the difference between the two.
What I also see in this
situation, it’s that a lot of people believe that it’s OK, that’s fine, and
they don’t really have to justify that much why they say that. Whereas the
people who are fearful in some way fear that they could not voice their opinion
because it’s not as popular, let’s say, in the general public. This has to be
appreciated, and people have to be respected for what they believe in.
Mme Vallée
:
And if I may.
Journaliste
: Did you make…
M. Couillard
(Philippe) : And, Stéphanie… Sorry.
Mme Vallée
:
I’d like to add something. But, in the commission report, definitions are there,
and they’re clear, and they don’t appear, they don’t show up in the bill. So
that’s a big difference.
Journaliste
:
You’ve talked about making it more precise. Is there a risk, if you’re so
precise, that it’s become inflexible and can’t apply to, as you say, the
mystery that the way nature works in terms of end of life care?
M. Couillard
(Philippe) : This is why I’m referring to the
exceptional character of the situation, one is trying to address with this
piece of legislation. Exceptional means exceptional, so show me how do you
define exceptional, show me all the steps that have to be taken before the
decision is made to ensure that we are indeed dealing with
an exceptional situation.
That’s the type of precision we’d like to see in the bill.
And I’m not saying it’s
not possible to do that. I’m just telling you that today, myself, and I’m not
trying to convince anyone here, I would vote in favor of the principle of the
bill so that the debate can… goes on. But, if it was unchanged until… between
now and the final vote, I would not be able to support the bill at the end,
today.
Le Modérateur
:
On va prendre une question au micro de droite.
M. Lyons
(Shawn) : Shawn Lyons, CBC. First, to Mme
Vallée, one quick question for
you. You don’t seem to share the concerns that your leader has about the end of
life care. Why do you support the bill as it is now?
Mme Vallée
:Actually, I do have concerns about end of
life care. I’ve clearly stated it last week, during the different hearings on
the issue. Right now, end of life care is not being defined. Medical aid in dying
is not defined in the bill, which is, if you want to have… if you want to take a decision, and it’s free, and it’s a decision that is with all
the information, you need to know what you’re going to decide upon, and, at
the... aid in dying is not being defined, for one thing.
And then, as I mentioned,
I’m for the principle because I think this place, this place here is the best
place to have the debate. But, at the same time, personally, I’m still
struggling between the... some of the people requesting to be able to end their
suffering and the idea that, sometimes in life, you can’t control everything.
And that’s an issue, but that’s my personal reflection on the issue.
But I believe that, this
afternoon, it will be important for me, for myself, to bring the debate to
another stage, which is the studying of the bill article by article.
M. Lyons (Shawn) : And, Mr. Couillard, just very briefly for you, two very
quickly things. The first, are you surprised, given the range of opinion in
your own party, that the PQ seems strangely unanimous in their support of
the...
M. Couillard
(Philippe) : Well, either it’s a party line or
it’s a personal vote. When a group tells me that they’re going to vote on a
personal level on that, I’m, by definition, surprised that the vote is
unanimous. I haven’t seen yet a group of human beings having the same opinion
on that issue. So I’d be surprised that this would apply in a larger group like
the majority party here, the relative majority party here, at the Assembly. I’m
not inferring anything, it would be just surprising.
M. Lyons (Shawn) : And finally, if this bill... as we move forward, if this bill does become
a law at some point, do you think it would... it’s going to withstand any legal
challenge? We know Ottawa is going to be against it, the Government insists that it’s perfectly fine.
M. Couillard
(Philippe) : Well, it’s hard to tell, because
you have to see the final shape of the bill. That’s why, maybe, some words were
chosen instead of other words, not to make it open to criticism from the Criminal
Code point of view. I would reserve these comments until the end of the
process.
Journaliste
: Can we just get, briefly… You said in French that medical aid to
dying amounts to euthanasia. Can you explain that a bit?
M. Couillard
(Philippe) : Well, the way it’s phrased today
in the bill, I frankly don’t see the difference between medical aid to die — I don’t know if I have the
right terms in English — and what’s called active euthanasia. I don’t see a lot of difference
there. I would accept though that there are exceptional circumstances that one
can not control, because, as Stéphanie very rightly said, it’s not true that,
in life, you can control everything.
My opinion, because of my
professional career and my experience, is that, in the vast majority of cases,
pain is being relieved. People have dignity and they end their days in peace,
and it’s fear that they have when they enter this last phase of their life.
Once fear dissipates, I will not say death because easy, it would be wrong to
say that, but it comes easier to accept. So that’s the difference I would make
between the two. Merci beaucoup.
Mme Vallée
: Merci.
(Fin à 13
h 57)