(Neuf heures quarante minutes)
M.
D’Amour
:
Alors, bon matin, bienvenue. Alors, si on vous a convoqués ce matin, c’est pour
vous informer de notre position relativement au projet de loi n° 43, qui,
semble-t-il, sera appelé aujourd’hui par le gouvernement. Nous allons… Notre
caucus va s’opposer au projet de loi n° 43. Ce n’est pas de gaieté de cœur
qu’on le fait, cependant. À mon humble avis, il serait irresponsable d’agir
autrement, à ce moment-ci. Vous avez été témoins de ce qu’on a vécu au cours des
dernières semaines. On a fait notre travail avec beaucoup de rigueur, avec
beaucoup de sérieux. On a, dès le début du mois d’octobre, soumis quatre
conditions. Sur 308 articles, là, on a sorti quatre conditions, qui touchaient
notamment la transformation, les droits de veto, les consultations autochtones.
On a demandé à la ministre de déposer ses amendements pour qu’on puisse les
étudier avant, pour gagner du temps. On voulait collaborer, on lui a offert
notre collaboration, et la ministre a refusé notre main tendue.
Nous n’avons aucune confiance en cette
ministre. Alors, pour nous, il n’est pas question de s’en aller dans l’étude
article par article, l’étude détaillée sans qu’on ait un minimum d’assurance.
Et qui nous le demande? Ce sont les régions qui nous le demandent, les
minières. Il y a certains groupes écologistes également qui sont venus nous
rencontrer, qui nous ont dit : Soyons prudents. Alors, à ce moment-ci, on
ne peut pas procéder.
Quelle sera la position de la CAQ à cet
égard-là? Un peu difficile à suivre, vous en conviendrez. On se rappelle, au
moment du dépôt du projet de loi en mai, François Legault disait : Bien,
il faut l’adopter avant la fin de la session. Il restait trois semaines à la
session, à ce moment-là. Un, deux, trois, on adopte la loi, et c’est fini. Ça
aurait été vraiment irresponsable de faire ça. Et aujourd’hui, là, après qu’on
ait vécu avec beaucoup de sérieux les consultations particulières, nous, on en
arrive à cette conclusion-là. Alors, c’est bien triste, mais c’est ainsi, nous
allons voter contre le principe du projet de loi n° 43.
M. Journet (Paul)
:
Est-ce que vous avez des informations pour savoir si la CAQ aussi s’objectera,
et donc si votre vote fera en sorte que ce sera la mort du projet de loi?
M.
D’Amour
: On
n’a pas d’information précise quant à la CAQ. On sait qu’à la CAQ c’est
toujours un peu à géométrie variable, là. Alors, c’est tantôt qu’on va avoir la
réponse. Si jamais la CAQ appuie le gouvernement, bien, on va s’en aller dans
l’étude article par article.
M. Journet (Paul)
:
Puis, si ça meurt, ce sera une bonne nouvelle.
M.
D’Amour
: Ce
sera la faute de la ministre, elle n’aura qu’à s’en prendre qu’à elle-même.
Elle a agi, à mon sens, avec arrogance. Elle n’a pas écouté ce que les gens lui
disaient en commission parlementaire. Elle a parlé parfois d’amendements. On a
juste voulu les voir, les amendements. Alors, c’est triste. J’aurais voulu que
ce soit vraiment autre chose.
Puis il y a une chose qui… un élément qui
m’interpelle beaucoup. Les députés du Parti québécois qui sont concernés dans
ces régions-là, que ce soit en Abitibi, au Saguenay—Lac-Saint-Jean, dans le
Nord-du-Québec… Moi, je voudrais savoir ce que pense le vice-premier ministre
de cette situation-là. Qu’est-ce que François Gendron pense de ce projet de loi
là? Je ne le sais pas. Qu’est-ce que Marjolain Dufour, lui qui est éprouvé
beaucoup, là, par les temps qui courent avec, notamment, les annonces à Alcoa…
Alors, c’est quand même particulier. On ne les a jamais entendus. Moi, je
trouve ça déplorable.
M. Journet (Paul)
:
Mais, sur le fond, par rapport aux objections, vous trouviez que les études de
faisabilité étaient trop contraignantes. La ministre a ouvert là-dessus, elle a
dit : Ce ne sera pas les études techniques, et ça, ça a rassuré
l’industrie. Pour son fameux droit de regard ou droit de veto, elle a dit :
Bien, en ce qui concerne les plans d’aménagement avec les municipalités, je
suis prête à faire des concessions, on va regarder ça. Elle a quand même
accepté de… ou elle a quand même indiqué qu’elle accepterait de faire des
amendements en ce sens-là. En quoi est-ce que c’est une fermeture de sa part?
M.
D’Amour
: On
n’a vu aucun texte. Et moi, là, il n’est pas question…
M. Journet (Paul)
: …vous
doutez de sa parole.
M.
D’Amour
: Il
n’est pas question que je fasse confiance à cette ministre-là. Sincèrement, là,
on n’a pas confiance. Elle est indigne de la confiance. Les amendements, on
demandait simplement de les voir avant. Je sais que c’est gros, ce que je dis,
là, mais il y a une crise de confiance. Il n’y a personne qui a confiance en
elle.
Vous savez, les gens, que ce soit dans les
régions ou dans l’industrie, viennent se confier à nous. Alors, le message
qu’on nous a passé, c’est un message de prudence. Et, si j’avais fait ça à la
dernière seconde de la dernière minute, je comprendrais son attitude. Mais on
l’a fait il y a déjà trois semaines. On est revenus… Il y a eu un congé
parlementaire, on a été une semaine dans nos comtés. On s’est dit : Bien,
ça va lui permettre de réfléchir. Et elle est revenue avec la même position.
Alors, elle nous a placés dans une
situation où on n’a pas le choix d’agir comme on va agir aujourd’hui, là,
c’est-à-dire de voter contre.
M. Caron (Régys)
: M.
D’Amour, est-ce que… N’avez-vous pas le devoir de parler avec une ministre qui
a une légitimité? Parce qu’elle a été élue pour ça.
M.
D’Amour
:
Oui.
M. Caron (Régys)
:
Alors, pourquoi ne lui parlez-vous pas?
M.
D’Amour
: On
s’est parlé en commission parlementaire. Pendant des semaines, on a été
ensemble. Entre le mois d’août et récemment, on était ensemble. Et parler à
cette ministre… Vous savez, c’est la même personne, là, qui, pendant 200
heures, a bloqué systématiquement l’adoption du projet de loi n° 14. Et,
sincèrement, on lui a donné toutes les chances. Elle a dit en commission
parlementaire qu’elle était très ouverte puis qu’elle était parlable. Elle ne
nous a jamais parlé, là. Tu sais, ça peut se faire, ça aurait pu se faire, mais
c’est une décision qu’elle a prise.
Ça ne s’est pas vu souvent, hein, dans
l’histoire où l’opposition arrive puis dit… tend la main, dit : Écoutez,
là, il y a 308 articles, c’est beaucoup, mais, pour faciliter le travail puis
s’assurer qu’on ait une loi d’ici Noël, bien, voici les quatre conditions, puis
on vous demande simplement de déposer les amendements dont elle-même a parlé.
Alors, si on prend ça du début, là, il y a eu 79, il y a eu 200 heures de
travaux de commission parlementaire sur le projet de loi n° 14 qui, finalement,
est mort au feuilleton, puis on se retrouve dans la même situation.
M. Caron (Régys)
: M.
D’Amour, vous évoquez le projet de loi n° 14. Vous étiez majoritaires à
l’époque. N’auriez-vous pas dû l’adopter puisque vous étiez majoritaires?
M.
D’Amour
: On
a voulu collaborer, à ce moment-là, avec l’opposition. On se disait que l’opposition
allait finir par débloquer, mais ça a été un blocage systématique pendant 200
heures, puis on s’est retrouvés en campagne électorale, et il y a eu… Ça a pris
aussi beaucoup, beaucoup de temps, là, pas loin d’un an avant qu’elle dépose un
projet de loi.
Moi, ma conclusion, là, pour avoir vécu
tout ça, pour avoir vécu la totalité ou presque de 14 puis 43 depuis le début,
j’en viens à la conclusion que la ministre actuelle ne veut pas de l’industrie
minière, que le gouvernement ne veut pas de l’industrie minière, parce que,
s’il voulait, là, il aurait pu bouger pas mal plus vite, puis entendre les
messages, et collaborer avec nous, ce qui n’a pas été le cas.
M. Corbeil (Michel)
: M.
D’Amour, on a l’impression que ce n’est pas le projet de loi qui est mauvais,
que c’est la ministre qui est mauvaise.
M.
D’Amour
:
Sincèrement, vous posez une bonne question, et, je l’ai dit tantôt, on n’a pas
confiance. Et je pense que, la meilleure phrase qui a été dite ces derniers
temps, je vais la citer, puis ça répond clairement à votre question. C’était
dans le journal Les Affaires : «Qui voudra investir ici en sachant
que chaque étape importante du développement d’un projet minier est tributaire
de l’humeur de la ministre?»
La ministre nous a toujours donné
l’impression qu’elle ne voulait pas de l’industrie minière au Québec. Elle n’a
pas agi de façon à développer l’industrie, elle a agi de façon à éteindre
l’industrie. On n’a pas confiance, et ce n’est pas la bonne personne à la bonne
place, si vous voulez mon avis.
M. Ouellet (Martin)
:
Le combat que vous menez, là, ou enfin… Je dirais le combat, mais, en fait,
votre animosité envers la ministre, est-ce que c’est… Vous n’êtes pas un outil
de blocage vous aussi?
M.
D’Amour
:
Non, pas du tout.
M. Ouellet (Martin)
:
Vous vous trouvez à faire du blocage de l’industrie aussi.
M.
D’Amour
: Je
vais vous dire, regardez, là, les commissions parlementaires… La commission
parlementaire, on a siégé une grosse partie de l’automne et on l’a fait avec
ouverture. J’ai fait des propositions, notamment sur la transformation, là,
j’ai fait des propositions. J’ai ouvert des portes comme jamais, là. Alors, il
n’y a pas d’animosité.
On a un devoir de parlementaire d’adopter
une loi qui soit la meilleure. On ne l’adopte pas pour les six prochains mois,
là, on l’adopte pour longtemps, cette loi-là. Alors, nous, je pense que, sur le
plan de de la collaboration, là, on a tout fait ce qu’on pouvait faire, et la
porte s’est refermée. Bon, bien, tirons-en des conclusions. On vote contre, la ministre
n’a qu’à s’en prendre qu’à elle-même.
M. Journet (Paul)
:
Est-ce qu’il va falloir un bâillon pour avoir un jour une réforme de la loi
minière?
M.
D’Amour
:
Bien, je pense qu’on n’est pas dans une situation de bâillon avec un
gouvernement minoritaire, hein?
M. Journet (Paul)
:
Non, je ne parle pas de ce gouvernement-ci, je
parle...
M.
D’Amour
: Il
y a une chose qui est certaine...
M. Journet (Paul)
: ...
parce que, là, la loi risque de mourir, là.
M.
D’Amour
: Il
y a une chose qui est certaine, c’est qu’il faudra une loi, mais pas n’importe
laquelle. Il y a quelqu’un qui m’a dit, la semaine dernière, dans mon bureau :
Vaut mieux encore l’incertitude que la certitude qu’il n’y aura pas de développement
minier au cours des prochaines années. Vous voyez les conséquences de ça, là,
puis ce n’est pas moi qui le dis, c’est l’Institut de la statistique, ce matin,
qui dit que c’est 28 % de baisse, depuis 2012, au niveau de l’exploration,
puis 46 % comparativement à 2011. C’est des chiffres qui parlent. Et ça, c’est
directement l’économie des régions qui est affectée, qui est touchée. Puis moi,
ce que j’entends, là, c’est le silence, le silence des députés du Parti
québécois, comme si l’emploi, ce n’était pas important dans les régions du
Québec.
Moi, je viens d’un comté qui s’appelle
Rivière-du-Loup—Témiscouata. C’est important pour nous. Chaque emploi compte.
J’arrive de la Gaspésie, j’étais là, le taux de chômage de la Gaspésie est à
peu près à 15 %. C’est inacceptable, là. Alors, à un moment donné, on
peut-u agir avec ouverture?
M. Corbeil (Michel)
:
... qu’est-ce qu’il y a d’inacceptable, dans ce projet de loi?
M.
D’Amour
:
Bien, les quatre éléments, là, les quatre...
M. Corbeil (Michel)
:
Non, mais sur... précisément, comme pour la transformation, ça...
M.
D’Amour
: Je
pense que, prioritairement, là, la question des droits de veto, là, partout, ça
veut dire que la ministre peut, à tout moment de l’évolution d’un projet, à
partir de son dépôt, là, elle peut tout bloquer. C’est inacceptable.
Pensez-vous que des gens vont venir ici investir — puis là on ne
parle pas de quelques millions de dollars, on parle de sommes
importantes — sur la foi des droits de veto de la ministre? Oubliez
ça. Oubliez ça. Adopter cette loi-là telle qu’elle est, là, c’est de mettre à
mort littéralement l’industrie minière, comme le Plan Nord est mort maintenant
avec encore cette ministre-là, tu sais.
Mme Montgomery (Angelica)
:
Sur Alcoa, puis-je avoir juste quelque chose très bref sur Alcoa, le fait qu’ils
menacent de fermer trois usines, à l’instant, qu’est-ce que ça vous donne?
M.
D’Amour
:
Vous savez, le dénominateur commun de toutes ces histoires-là, c’est Martine
Ouellet, encore une fois, elle qui, depuis deux, trois ans, là, parle, à tous
les jours, de transformation. On a un exemple, là. On parle de 3 000 jobs
à matin, là, de la transformation. Elle n’a pas fait son travail, de toute
évidence, parce qu’avant d’en arriver là, là, ils ont dû se parler de temps en
temps, jamais je ne croirai, là. L’entreprise ne s’est pas levée hier matin en
disant : Bien, bon, on va larguer ça dans l’actualité aujourd’hui. Ils ont
dû se parler. C’est encore une fois un échec. C’est lamentable comme situation.
Si vous voulez mon avis, là, c’est ça, et moi, je ne suis pas heureux de ça.
M. Ouellet (Martin)
: C’est
du chantage? Est-ce que vous voyez quand même une forme de chantage, là,
marchand?
M.
D’Amour
:
Non. Je vous le dis, là, dans un dossier comme celui-là, c’est impossible que l’entreprise
n’ait pas déjà parlé au gouvernement et à quelques reprises. À un moment donné,
il faut que tu prennes des décisions qui vont dans le sens des intérêts, puis,
si ça n’a pas été fait, bien, l’entreprise sort aujourd’hui. Je ne pense pas…
M. Ouellet (Martin)
: Est-ce
que vous le prenez au sérieux, ça…
M.
D’Amour
:
Oui. Ce n’est quand même pas une entreprise… Ce n’est pas une entreprise
quelconque sur un coin de rue. C’est Alcoa, là. Alors, Alcoa qui se manifeste,
qui dit : Écoutez, là, nous, là, on s’interroge grandement. Puis ils se
sont prévalus d’une clause puis ils disent : Écoutez, s’il n’y a pas de
changement, nous autres, bien, on ferme. Moi, ça m’inquiète. Puis encore une fois,
là, c’est dans les régions, puis encore une fois, c’est dans des comtés, Puis
je n’entends pas les députés. Ça, c’est inquiétant.
M. Pépin (Michel)
:
Bien, M. Marceau dit : C’est le budget de 2011, là, qui a fait ça.
M.
D’Amour
: Ah!
Bien oui, bien, M. Marceau, s’il pleut demain matin, ça va être la faute des
libéraux. S’il neige la semaine prochaine, ça va être encore la faute des
libéraux. Aujourd’hui, il y a une décision à prendre, là. Puis depuis quelque
temps, là, ces gens-là se sont parlés, je le répète, il y a une décision après
à prendre. Ils forment le gouvernement depuis 13 ou 14 mois, là, alors qu’ils
prennent la décision puis vite, là, puis vite parce qu’on va perdre des emplois
encore. Puis ce n’est pas des emplois payés au salaire minimum, là.
M. Corbeil (Michel)
:
Donc, ce serait de baisser les tarifs…
M.
D’Amour
:
Bien, qu’ils prennent une décision. Moi, je ne veux pas parler au nom du
gouvernement, je suis l’opposition. Mais il y a une chose qui est claire, mon
message, là, c’est : Assoyez-vous puis parlez-vous, là.
M. Caron (Régys)
: Les
autres conditions qui font problème avec le projet de loi sur les mines, vous
avez dit le pouvoir de blocage de la ministre… Et quoi d’autre?
M.
D’Amour
:
Bien, il y avait la question des consultations autochtones. Les autochtones
sont venus ici, vers la fin des travaux en commission parlementaire, nous dire
unanimement : Il faudrait que nous, là, on soit consultés dès le départ
dans les projets, et c’est important pour nous. Alors, on sait que c’est
toujours fragile, ces questions de relations là. Alors, ce qu’on dit :
Clarifiez ça pour les autochtones. Ce n’est pas des citoyens de deuxième zone,
les autochtones, ils se sont manifestés. Est-ce qu’on peut connaître les
orientations, là-dessus, du gouvernement?
Même chose au niveau des zones compatibles
ou incompatibles. On nous demande aujourd’hui de voter sur un principe, sur une
loi sans qu’on connaisse les orientations gouvernementales sur les zones
compatibles et incompatibles. Qu’est-ce qui l’est, qu’est-ce qui ne l’est pas?
Moi, je veux dire, ce n’est pas… je ne veux pas donner un chèque en blanc à la
ministre.
Et, sur la question de la transformation,
si l’étude ne fait pas l’affaire de la ministre, parce que c’est ce que dit le
projet de loi, bien, elle peut mettre fin à un bail minier en tout temps. Moi,
je vous demande d’investir 100 millions sur la foi de ça demain matin,
qu’est-ce que vous allez faire? Vous allez quitter le Québec. C’est aussi
simple que ça.
Le Modérateur
: Ça va
pour tous? Merci.
M.
D’Amour
: Il
y a une période de questions, hein? Merci.
(Fin à 9 h 53)