Conférence de presse de M. Mario Dumont, chef de l'Action démocratique du Québec
Dévoilement des priorités de l'Action démocratique du Québec en vue du Sommet de la jeunesse
Version finale
Thursday, February 17, 2000, 14 h 04
Salle Evelyn-Dumas (1.30),
édifice Pamphile-Le May
(Quatorze heures quatre minutes)
M. Dumont: Bon après-midi à tous. Je vous présente d'abord Marie-Ève Bonneville, la présidente de la Commission des jeunes de l'Action démocratique du Québec qui m'accompagne aujourd'hui pour parler des priorités qu'on a en vue du Sommet du Québec et de la jeunesse, pour vous dire aussi de quelle façon, nous, on approche l'événement, de quelle façon on a l'intention d'y apporter notre contribution.
D'entrée de jeu, je vais passer la parole à Marie-Ève qui, avec la Commission des jeunes, avec son groupe, a travaillé à préparer, disons, rencontrer des groupes de jeunes, qui va parler un peu de quelle façon on approche le Sommet.
Mme Bonneville (Marie-Ève): Bonjour. D'abord, si on se reporte aux dernières élections en 1998, on se souviendra que le PQ, dans les dernières semaines, a senti un peu le vote des jeunes glisser peut-être vers notre parti, peut-être vers le PLQ, mais le vote glissait. Donc, ils se sont sentis un peu pressés. Ils nous ont élaboré des belles promesses qui concernaient les jeunes pour essayer de rattraper ça.
Parmi les promesses, il y avait évidemment un sommet. Un sommet, on le sait, c'est souvent une bonne raison, une belle justification pour le gouvernement de cacher son inaction parce que, avant le sommet, on s'en sert pour reporter les problèmes, pour reporter les questions à un sommet qui va être ultérieur. Puis, après le sommet, on s'en sert pour dire qu'il y a eu une action qui a été prise, qu'il y a quelque chose qui a été fait, alors que, souvent, il n'y a rien de concret vraiment qui en sort.
Bon, dans les derniers mois, nous, on a entendu certains reproches, que ce soit au niveau de l'organisation dans les régions, les travaux qui ont été faits, que ce soit aussi le fait que le Sommet soit organisé en pleine semaine alors qu'on sait que, la dernière semaine de février, c'est une semaine d'examens pour la majorité des étudiants. Ça ne sera pas facile de rassembler les principaux intéressés, mais on va faire notre possible, on va participer quand même.
Il y a aussi le fait que beaucoup de jeunes se sont sentis laissés un peu de côté à cause des invitations qui ont été faites. Malgré ça, depuis le début, nous, ce qu'on dit, à la Commission des jeunes de l'ADQ, c'est qu'on invitait les jeunes à participer, à ne pas boycotter. La politique de la chaise vide, ça n'a jamais servi personne, d'après nous. On a envoyé nos jeunes dans les régions qui ont participé aux différents ateliers. On est revenu avec ça en réunion. On a travaillé des priorités. Mario va en parler bientôt.
La réflexion qui va être faite pendant le Sommet, même si ça ne nous revient pas sous forme d'un document concret ou sous des actions
concrètes, nous, à l'ADQ, on a l'intention de les prendre, de les analyser, puis de travailler ces politiques-là, de travailler les demandes des jeunes. Donc, ça ne sera pas une réflexion qui va être perdue. Les rencontres qui vont avoir été faites dans les régions et dans les associations de jeunes, ça va être des réflexions qui vont toujours demeurer.
L'ADQ, la façon dont on entend approcher le Sommet, c'est qu'on va être là puis on va apporter des propositions qui sont constructives. Bien sûr, on va apporter des propositions pour régler des problèmes à court terme, c'est essentiel, mais on entend aussi aborder le Sommet de la jeunesse en fonction de donner de l'espoir aux jeunes, mais de le donner à long terme. C'est sûr que la question de la dette va être abordée. Bon, c'est sûr, il faut réinvestir dans l'éducation, il faut faire toutes sortes de petites choses comme ça dans la santé, sauf que, pour nous, la dette, ça demeure une priorité.
On pense aussi qu'on peut se donner la mission de représenter certains jeunes qui ne seront pas là, comme les travailleurs autonomes, les jeunes chômeurs, les jeunes travailleurs qui sont non syndiqués. Nous, on va parler en leur nom ou, du moins, on va essayer de les représenter du mieux possible.
M. Dumont: Merci, Marie-Ève. Donc, essentiellement, trois grands axes prioritaires qui sont, pour nous, à retenir au Sommet. Des axes prioritaires donc qui doivent, dans notre oeil, non pas déboucher sur une politique jeunesse, chose avec laquelle on est très mal à l'aise... Parce qu'une politique jeunesse qui serait une courte liste d'épicerie où on dirait aux jeunes: On va vous donner 200 stages puis 100 places à moitié prix dans la fonction publique, pour nous, ce n'est pas ça, un sommet. Si on fait un sommet de la jeunesse, ce n'est pas pour arriver à une petite liste d'épicerie comme celle-là. C'est pour arriver à ce que le gouvernement, dans l'ensemble de ses orientations subséquentes, dans son budget, dans ses prises de décisions majeures qui influenceront ses politiques pour les prochaines années, que l'angle jeunesse, au sens large, que l'angle d'avenir, que l'angle d'espoir s'y retrouvent. Ça, pour nous, c'est le vrai défi du Sommet.
Donc, des priorités évidemment: toute la question économique, la question du marché du travail – la condition économique des jeunes s'est détériorée, les chiffres sur la baisse du pouvoir d'achat sont implacables. Donc, il y a plusieurs actions qui doivent être entreprises. La nouvelle économie au Québec, c'est au ralenti. On a un ministère qui commence, des balbutiements, mais c'est très au ralenti. Les travailleurs autonomes, ça fait quelques années que l'ADQ parle de ça. Ça commence à être dans le discours d'un peu tout le monde, mais ce n'est toujours pas dans l'action.Le gouvernement employeur, donc le gouvernement comme employeur, qui a de la difficulté à faire de la place aux jeunes, que, quand il les intègre – On a vu des jeunes se plaindre de ça, les jeunes stagiaires de la fonction publique – il les intègre à moitié ou à moitié prix, les lois du travail qui sont à revoir, qui ne reflètent plus le marché du travail actuel; les rigidités énormes qui existent dans nos lois du travail, rigidités qui sont dans certains cas des protections abusives pour les uns et qui signifient la fermeture totale des portes pour les autres.
Donc, toute la question économique du marché de l'emploi, de la réorganisation du marché de l'emploi, fait partie incontestablement de l'espoir qu'il y a à redonner aux jeunes, de faire sentir que les portes sont ouvertes, que les portes sont débarrées pour ceux qui veulent y accéder.
Évidemment, on ne peut donner à une jeunesse une porte d'entrée sur les plus grands espoirs sans avoir un système d'éducation qui est à la hauteur, encore moins quand on se dirige vers une société qui est la société du savoir et du savoir-faire. C'est ça, l'économie de demain, c'est une économie qui va être de moins en moins basée sur les ressources naturelles, qui va être de moins en moins basée sur les sources d'énergie, malgré que ça ne paraît pas ces jours-ci avec l'excitation que crée le prix de l'essence mais, la tendance à long terme, c'est que c'est le savoir et le savoir-faire qui vont être les assises de l'économie. Ça ne fait pas l'ombre d'un doute.
Alors, ouvrir des portes à des jeunes, ça veut dire les outiller sur le plan du système d'éducation de la meilleure façon possible. Et, contrairement à la croyance populaire, ce n'est pas la santé qui a le plus souffert. La santé a beaucoup souffert des coupures gouvernementales, mais c'est l'éducation, particulièrement l'éducation supérieure, qui a été le plus durement touchée par les restrictions budgétaires dans le déficit zéro, et ça, c'est un désinvestissement dans l'avenir qui est senti.
Il faut juste faire le tour du jardin. Évidemment, c'est moins spectaculaire au premier coup d'oeil que des urgences qui débordent, là, mais l'Université de Montréal, dans un département précis, qui perd 10 de ses meilleurs chercheurs sur un an et demi, deux ans, c'est un cataclysme, hein, c'est un effondrement de notre savoir, de notre capital humain, de notre capacité de transmettre la connaissance à la génération qui s'en vient. Les problèmes budgétaires dans l'éducation supérieure sont très, très, très sentis.
Donc, il y a quelque chose à faire de ce côté-là. Il y a aussi un changement de mentalités dans le système d'éducation et, nous, on n'a pas peur de nommer les choses là-dessus, il faut mettre fin à l'approche du nivellement par le bas. Les jeunes attendent un système d'éducation qui valorise la performance, qui valorise la qualité de l'enseignement, qui valorise l'évaluation de la qualité de l'enseignement, et ça, nous, on est prêts pour ça, la diminution, disons, de la vision égalitariste qui a fait du nivellement par le bas une espèce de discipline mur à mur et un système d'éducation qui encourage la réussite.Finalement, au plan du remboursement de la dette, là-dessus, on tient à être très précis. Parce que j'ai lu toutes sortes de choses sur le remboursement de la dette.
Je pense que tous les groupes-jeunes, les jeunes de l'ADQ, d'autres groupes de la société qui ont manifesté un intérêt pour que la question de la dette soit abordée, je pense qu'aucun n'a dit qu'on voulait que ça soit le «sommet de la dette». Et, nous, en tout cas, en ce qui nous concerne, ce qu'on souhaite, c'est que cette question-là soit à l'ordre du jour.
Ce qu'on souhaite, c'est que les réflexions sur la pyramide des âges fasse partie des réflexions du Sommet et que, idéalement, dans le budget qui va suivre – on est bien conscient que le gouvernement ne mettra pas tous ses surplus demain matin dans le remboursement de la dette avec les besoins qu'il a dans l'éducation puis les impôts trop élevés – on aimerait voir, par exemple, dans le prochain budget – je lance l'idée – une espèce de projet de loi qui amène un plan de réduction de la dette sur un certain nombre d'années. Peut-être que la première année, on pourra avoir un mécanisme dans le projet de loi qui fasse qu'effectivement, la première année, c'est le début des premiers surplus, qu'on puisse y aller modérément, mais que, progressivement, au fur et à mesure qu'on dégage des surplus structurels, on puisse...
Alors, pour nous, c'est ça. L'idée n'est pas de dire: On occulte toutes les priorités de la société et tous les besoins actuels. Non. L'idée, c'est de garder à l'esprit un problème de déséquilibre de la pyramide des âges qui, combiné à un problème d'endettement important, les deux mis ensemble, c'est un petit peu épeurant pour l'avenir, puis ça nous amène à nous poser la question: De quelle façon on va financer les soins de santé dans 10, 15, 20 ans? Alors, qu'on garde cette priorité-là bien à l'esprit.
Nous, c'est comme ça qu'on envisage les priorités du Sommet tout en vous disant – et là-dessus je vais être relativement dur – que, dans notre oeil, en matière de politique jeunesse, le Parti québécois est très suspect. C'est un parti qui a un bilan noir en matière jeunesse essentiellement. C'est le parti qui a recommencé à encourager les clauses orphelin puis, finalement, a voté une loi une couple d'années plus tard pour faire semblant de les abolir, mais c'est le parti qui a relancé les clauses orphelin.
C'est le parti qui, encore, a manqué à sa parole complètement. Juste avant les Fêtes, en campagne électorale, Lucien Bouchard avait dit aux jeunes enseignants: Le gel des échelons, c'est fini. Il a toujours laissé entendre qu'il n'était plus question de ça. Puis, quand la Commission des droits de la personne leur a tapé sur les doigts pour leur dire: Ça ne peut pas marcher, le gouvernement est retourné devant les tribunaux pour défendre son gel des échelons. Puis là, je pourrais vous parler du programme de stages dans la fonction publique, des jeunes payés à moitié prix. Le Parti québécois, sa façon d'envisager les questions-jeunes a été extrêmement négative.
Alors là, nous, on embarque dans le Sommet, on va y participer. Mais là, ils ne nous feront pas oublier trois ans en trois jours. Le Parti québécois ne pourra pas faire oublier trois années en trois jours, mais si c'est à l'intérieur d'un mandat où il y a un ensemble d'actions, c'est trois jours où on espère que les jeunes de la société québécoise avec d'autres partenaires vont définir un programme d'action pour le gouvernement. Puis on espère que ça va en faire faire un peu plus.
L'autre élément, ça aussi j'ai peur de ça, parce que, nous, on a commencé déjà. Un an après l'élection, on avait rendu publique une espèce de bulletin du gouvernement sur ses engagements en matière jeunesse puis, une des choses qu'on constatait, c'est que le gouvernement a fait des promesses en campagne électorale aux jeunes puis, sur plusieurs volets, il disait: On reverra ça au Sommet, comme si le Sommet pouvait servir à se dédouaner de ses engagements électoraux. Il n'en est pas question. Pour nous, il y a des engagements d'élections puis, ça, c'est bien plus fort qu'un Sommet. Ça a été dit au peuple avant de voter. Le monde a écouté ça puis il a voté. Ça, ça doit être réalisé, les engagements électoraux. On ne se dédouane pas de ses promesses électorales parce qu'on fait un Sommet un an et demi après. Ça, ça demeure.
En surplus de leurs engagements électoraux, ils auront peut-être d'autres engagements du Sommet. Les deux devront être suivis de façon parallèle. Mais ce n'est pas parce que, au Sommet, on prendrait un engagement sur une chose que ça viendrait effacer ce pourquoi on s'est engagé en campagne électorale devant toute la population. Or, de ce point de vue là, on va jouer un rôle de chien de garde du gouvernement pendant, mais surtout après le Sommet.
On va répondre à vos questions.
Une voix: Est-ce que ne n'est pas quand même ce que le gouvernement s'apprête à faire finalement, concrétiser ses engagements électoraux pendant le Sommet? Est-ce que ce n'est pas ça finalement, le but de l'exercice?
M. Dumont: Je ne le sais pas. Je ne le sais pas exactement. J'espère que, eux, en ont une idée, parce qu'on n'est pas toujours sûr. Regardez le niveau d'improvisation qui entoure le Sommet depuis les premières phases.
Mais, en ce qui nous concerne, il faudrait que ça amène plus que des engagements électoraux. Si c'est seulement pour répéter les engagements électoraux, c'est une perte de temps pour moi. Il y a des engagements qui ont été pris dans le cadre de la campagne électorale. On convoque les acteurs à un Sommet. Ça devrait être pour se redonner un autre programme d'action encore plus ambitieux.
Une voix: Ce n'est pas le premier sommet que vous faites. Est-ce que vous pensez que l'exercice va aboutir justement à aider la jeunesse vraiment? L'exercice est vain ou constructif ou il faut y faire confiance?
M. Dumont: Bien, personnellement, moi, je pense que c'est un processus qui, à sa base même, est la démocratie à l'envers. Si vous me demandez ce que je pense des sommets en général, moi, ce que je pense, là, c'est qu'il y a un moment pour dire au monde ce qu'on veut faire comme parti politique. Ça s'appelle les campagnes électorales.
Là, on dit au monde ce qu'on va faire puis, là, le monde vote. Celui qui a le plus de votes, il est élu, il est supposé faire ce qu'il a dit. C'est comme ça que ça devrait marcher. Nous, c'est comme ça qu'on l'a abordé.
Dans la dernière campagne électorale, si l'ADQ avait été élue, il n'y aurait pas eu besoin d'un Sommet de la jeunesse. On avait là-dessus un programme bien précis, des mesures à prendre. Là, il me semble que c'est comme ça que ça fonctionne puis, tant que le gouvernement du PQ est élu, eux, ils marchent par sommets.
Parce que, moi, je suis pour ça, un sommet. Moi, je pense qu'un parti qui aurait un vigoureux programme en matière jeunesse, puis qui voudrait changer les lois du travail, puis faire plein de choses, aurait à convoquer les acteurs de la société en sommet pour dire: Voici! Nous, comme gouvernement, on a été élus pour réformer le système d'éducation, pour revoir les lois du travail, puis on n'est pas capables de faire ça tout seuls. Ça fait qu'on vous convoque pour nous aider à le faire. Ça, c'est démocratique: tu t'es fait élire, tu avais un mandat, tu veux le faire, tu demandes aux acteurs de la société de t'aider dans la réalisation de tes objectifs. Là, ce n'est pas ça! Là, c'est: On s'est fait élire, on avait promis un sommet. On ne sait pas quoi faire, on est perdus en matière jeunesse. On vous donne une feuille blanche. Promenez-vous dans les régions, dites-nous quoi faire. Moi, je pense que c'est la démocratie à l'envers.
Mais, cela étant dit, c'est comme ça que c'est organisé, donc on y participe. Les gens de la commission des jeunes y ont participé, puis ont envoyé des gens dans les régions, puis ont amené des points de vue, puis ont travaillé avec d'autres groupes jeunes. Le Sommet est organisé, du point de vue institutionnel, par le gouvernement en place, donc on est respectueux de ça. Mais, si vous me demandez à moi si je pense que ça, c'est la démocratie à l'endroit, pas du tout.
Une voix: M. Dumont...
M. Dumont: Il y avait M. Roy, je pense, qui avait levé la main.
Une voix: De quels engagements électoraux vous parliez, là, précisément?
M. Dumont: Dans le cas du gouvernement?
Une voix: Oui.
M. Dumont: Ah, mon Dieu! Le gouvernement avait pris des engagements électoraux sur, entre autres, le gel des frais de scolarité, des engagements électoraux sur l'entrée de jeunes à l'intérieur du secteur public, le gouvernement avait pris des... J'écoutais le premier ministre hier. Il avait pris des engagements au Sommet, qui ont été un petit peu ramenés en campagne électorale, sur des stages pour des jeunes en entreprise puis, là, c'était une promesse non réalisée du dernier Sommet, qui est une promesse non réalisée de la dernière campagne électorale puis, là, on va nous la ramener.
Donc, c'est ça que je veux dire. Ce n'est pas parce que, là, on définirait une nouvelle priorité – exemple, en éducation – que le gouvernement serait dédouané de son engagement sur les frais de scolarité. Pour moi, un engagement de campagne électorale, c'est beaucoup plus sacré qu'un engagement de sommet. Tu sais, c'est un contrat avec la population dans son ensemble alors que,l'autre, c'est un contrat avec un nombre limité de partenaires.
Mme Ouellet (Suzanne): Est-ce que la dynamique d'un sommet ne change pas la dynamique entre les partis politiques? Je pense en particulier à la mentalité de consensus. Est-ce que ça ne se fait pas au détriment des partis d'opposition, par exemple, quand le gouvernement cherche à atteindre un consensus avec l'ensemble des acteurs publics?
M. Dumont: Oui. Oui et non. Il faut faire confiance au gros bon sens de la population. Dans ces affaires-là, ça trompe rarement. Mais les gens voient ce qui se passe. Il faut s'entendre aussi sur ce que c'est que des consensus. Les stages dont on parlait, les programmes d'apprentissage pour les jeunes, là, il y avait un consensus là-dessus au Sommet. La première rencontre des partenaires après le Sommet, où est-ce qu'il n'y avait plus de caméras puis, là, on est venus, le temps de dire: O.K., il faut faire le programme d'apprentissage, les syndicats ont dit: O.K., sauf dans les domaines de l'électricité, la plomberie, la construction... Puis il y en avait, je pense, 52 domaines qui ont été exclus, quelque chose comme ça. Finalement, il n'en restait plus, là. Ça fait que, des programmes d'apprentissage, il n'y en a jamais eu. Quatre ans plus tard, je pense qu'il y en a eu une centaine de faits. Les gens sont capables de voir à travers tout ça.
Alors, pour moi, je pense que c'est important. Je suis d'accord avec Marie-Ève, la politique de la chaise vide, les gens n'aiment pas ça. Les gens aiment... Tu as été élu. Dans notre cas, en toute humilité, je pense qu'on a une certaine forme de mandat. On a beaucoup parlé de ces questions-là en campagne électorale, certains nous ont même dit trop. Il y a du monde qui a voté pour nous autres. Donc, de ce point de vue là, je pense que c'est légitime qu'on ramène ces points-là et qu'on les défende dans le cadre du Sommet. Puis, c'est surtout notre devoir comme parti d'opposition aussi. On a un devoir de s'assurer que, ce que le gouvernement promet, il le fasse. Qu'on le talonne pour qu'il le réalise au maximum.
M. Théberge (Sylvain): J'aimerais revenir sur le remboursement de la dette. En tenant compte du fait que la santé et l'éducation vont s'accaparer une large partie des surplus qui vont se pointer, ça va nécessiter des réinvestissements majeurs. Où tracez-vous la ligne, le choix, par la suite, entre ce qui va rester: Baisser les impôts ou s'attaquer à la dette? On n'est pas dans les milliards de surplus, contrairement à certains.
M. Dumont: C'est parce que, moi, j'ai une vision un peu différente. D'abord, moi, je pense – j'ai la conviction, n'est-ce pas? – que le ménage n'est pas fini à l'intérieur de l'appareil public. Donc, il y aurait encore une certaine marge de manoeuvre là. Effectivement, on a beaucoup frappé les services gouvernementaux, mais, dans la machine, le ménage n'a jamais été fait vraiment. Donc, il y aurait probablement de l'espace pour en faire encore un peu plus. Cela étant dit, moi, je ne m'attends pas, par exemple, dans un prochain budget, là, je ne pense pas qu'il serait raisonnable de penser que le gouvernement va faire un paiement considérable sur la dette. Mais c'est quand même pour moi une différence entre un gouvernement qui... Comme l'année passée dans le budget Landry, le mot n'apparaissait même pas. Ça n'existait pas. Il y avait «déficit zéro», il y avait «priorités», «réinvestissements». Le mot n'existait pas. Et un budget qui viendrait dire....qui s'accompagnerait, par exemple, d'un petit fascicule, comme M. Landry aime les faire, d'un petit fascicule sur la dette et d'un projet de loi là-dessus et, nous, on est conscients, là, on sent, si on pousse là-dessus, on sent que le gouvernement bouge là-dessus. Sur leur site Internet, l'été passé, ils se moquaient de l'ADQ qui parlait de la dette. En commission parlementaire, au mois de novembre, quand nos représentants de l'ADQ sont venus devant la commission, devant M. Landry, devant le ministre des Finances, pour parler de la dette, il s'est mis à parler d'hypothèses: Si on faisait ci, si on faisait ça, si on commençait à en parler. Oups! Il y a un changement de discours.
Donc, nous, on serait bien heureux de voir le gouvernement inclure cette priorité-là et, potentiellement, un projet de loi. Je pense qu'il y a des mécanismes pour s'assurer que les surplus structurels, si on n'a pas de malchance, ils vont aller en s'accroissant. Là, c'est la première année et, l'année passée, le déficit zéro a été atteint quasiment accidentellement avec le chèque du fédéral.
Donc, il va arriver des vrais surplus structurels. Donc, quand on va arriver vers ça, qu'on évite la tentation du gouvernement fédéral. Le gouvernement fédéral fait quoi, là? Il a de l'argent. Laissez-moi jouir de mes surplus. Et la tentation de réinvestir dans toutes sortes de programmes, l'argent s'en va dans les firmes de consultants, tu l'entends tomber dans les tirelires des firmes de consultants. Bon. On peut-u empêcher ça ici et s'assurer que, oui, aux priorités essentielles, il retournera des fonds? Vous en avez nommé: l'éducation, peut-être un peu la santé. Puis, qu'on puisse ramener progressivement les impôts à des niveaux un petit peu plus raisonnables, mais que, après ça, on inscrive comme priorité que, là, il faudrait commencer aussi à rembourser la dette et que, au fur et à mesure qu'on aura des surplus, on le fera avec plus d'agressivité.
Une voix: M. Dumont, comme vous savez, il va y avoir, en même temps que le Sommet, un contre-sommet. Je me demandais quelle était la perception de l'ADQ, votre perception, à l'égard du contre-sommet et si l'ADQ avait des liens avec certains des acteurs qui seront présents dans ce contre-sommet là.
M. Dumont: C'est à dire qu'on regarde ça avec un certain intérêt. Dans le fond, on n'est pas surpris, hein! Il y a énormément de frustrations. Écoutez, des contre-sommets...
Il y a eu des assemblées. Il y a plein de choses qu'ils n'ont pas rendues publiques. Moi, dans mon comté, il y a une couple de semaines, il y avait une espèce de contre-sommet régional parce que les jeunes, à un moment donné, ont découvert qu'ils n'avaient pas de voix. La voix des régions, dans le Sommet, c'était noyé, quasiment des spectateurs.
Donc, il y a beaucoup, beaucoup de problèmes, des soubresauts qui ne sont peut-être pas tous aussi organisés et visibles qu'une espèce de sommet parallèle, mais il y a beaucoup de soubresauts du fait, à mon avis, qu'ils sont tous reliés au fait que finalement les jeunes ne sont même pas majoritaires.
D'abord, c'est parti ça, c'est le Sommet de la jeunesse. Ou bien, moi, je ne comprends rien, ou bien, en campagne électorale, là, c'était le Sommet de la jeunesse, puis c'était le sommet pour les jeunes, c'était clair comme de l'eau de roche. C'était ça qui était dit dans les discours. C'est ça, en tout cas, qu'on laissait entendre pour le moins.
Quelque part, dans l'hiver, le printemps, c'est devenu le Sommet du Québec et de la jeunesse. Puis là, c'est le Québec. Ah! il va y avoir des partenaires aussi. Ah! On amène d'autres gens à la table. Puis là, tout à coup, si vous vous souvenez, fin de l'été, ce n'était même plus sûr que les jeunes étaient majoritaires. Puis finalement, de fil en aiguille, on s'est aperçu que c'était de moins en moins le Sommet de la jeunesse. Alors, ça, ça a créé des frustrations.
Je vais vous en nommer, là. Pensez à l'Association de défense des jeunes enseignants du Québec, une gang de jeunes enseignants qui sont allés devant Commission des droits de la personne. Là, ce monde-là, ils paient une cotisation à leur syndicat, ils paient 800 $ ou 900 $, je ne sais pas combien, par année; ils paient ça. Le syndicat dit: On ne vous défend pas. Vous pensez que vous êtes victimes d'une injustice.
Alors, ils se recotisent eux-mêmes pour se donner un droit supplémentaire, une association volontaire à l'intérieur du syndicat. On pourrait dire que c'est illégitime mais ils ont gagné devant la Commission des droits de la personne. Ça commence à être légitime un petit peu. Ils ont battu le gouvernement puis la CEQ. Ils sont allés contre leur employeur et leur syndicat puis ils ont gagné.
Là, ces gens-là se retrouvent au Sommet de la jeunesse pour discuter des priorités pour la jeunesse, des discriminations dont les jeunes sont victimes, de la place des jeunes sur la marché du travail. Eux ne sont pas à la table, mais la CEQ est à la table. Ils se sentent comment, là-dedans? Ha, ha, ha! Ils disent: Nous autres, on est allé au front, on s'est organisé, on s'est débrouillé, on s'est autocotisés, on a monté toute une patente puis, là, on n'a pas un mot à dire là-dessus parce que, quand vient le temps de parler au nom des jeunes enseignants au Sommet, c'est la CEQ. Je pourrais continuer des exemples comme ça.
Puis, en même temps, je comprends la position du gouvernement. Ce n'est pas évident, c'est des partenaires traditionnels. Le gouvernement fait preuve de zéro courage là-dedans. Il y est allé, là, comme on dirait en anglais, «by the book». Il a pris ses lobbyistes habituels puis il a joué ça bien prudent. Mais là, il ne faut pas se surprendre que, partout, il y ait des zones de frustration à l'intérieur des gens qui, concrètement, ont travaillé dans les dernières années pour faire améliorer le sort des jeunes.
M. Kalb (Richard): M. Dumont, the Government... this morning that people who will be participating at the Québec and its youth Summit, out of the participants and the associates of which there are 95, 44 are classified as youth – whatever the classification the Government uses. Why are you even going to this Summit? It doesn't appear to be even about the youth, if less than half of the people there are youth delegates.
M. Dumont: We could have a lot of critics to make about the Sommet. Actually, we are relatively dissatisfied with what the table is, with how it is organized. But at the end of the day, if you are not there, I mean, nobody really knows what you think. And from the very beginning, that's the approach that the Youth Committee of l'Action démocratique du Québec had thought, that they encourage the youth of Québec to participate, to get involved, based on the assumption that, if there is some common vision that comes out of that, maybe the Government won't use it, maybe in the conclusions of the Summit we'll be disappointed, but that does have a value in itself. I mean, if we have a vision that's the vision of the youth of Québec, I mean, someone will carry that at some point, and that could be us.
M. Kalb (Richard): So, you're not going to participate in the ultimate Summit?
M. Dumont: I mean, we didn't receive a formal invitation yet. Up from the point, when you think that the youth organizations are in a minority position at the Summit, that many groups who defended the situation of the youth in the recent years have been left out of the Summit, nobody can be surprised that these people will get together and say: O.K. We want to have a voice too. Suddenly, in our mission, and Marie-Ève said that earlier, within the Summit, we want to give a voice to the non-union workers, to the unemployed young people of Québec, to the self-employed workers, people who are not around the table but are people who live with the problems that are being discussed every day.
M. Kalb (Richard): Why are you so insistent at the debt be on the table? Some of the youth groups have said that it should not even be discussed.
M. Dumont: Certainly, we don't believe that the Summit should all focus on the debt, and I think nobody says that. However, we think that if you combine two social facts, the decline of the birth rate and the way the age pyramid is inverted, combined with the very high debt that we have, there is a need to think about our financial future and to not pay the whole debt this year, put all the surpluses this year on that, but inscribe that among priorities that have to be thought about in the budget, for instance.
M. Kalb (Richard): I'd like to ask about two other things. What do you think about the proposal that the Government lower its fuel taxes to give truckers, homeowners and just ordinary people, to fill up their vehicles, a break?
M. Dumont: Personally, I made a stand on that last Friday. I was sure that the Government was about to do that on this Friday special cabinet meeting. I thought it was the aim of the meeting and I was pretty confident that the Government would come out and say: O.K. We realize how much a harm it is to the economy, and we'll give the people a break on taxes.
Now, the decision that they made is that the burden would all be transferred to the consumers, and I don't think it's a good decision and I don't think this Government does realize the sensibility of the whole economy: transportation, tourism, name it, the sensitivity of many economic sectors to the price of fuel.
M. Kalb (Richard): So should they lower the gas taxes?
M. Dumont: I thought they were to do that, and I was quite disappointed that they didn't, and I think the Government should make a clear stand on lowering the taxes.
M. Kalb (Richard): Thanks.
M. Dumont: It was a pleasure. Bye, bye!
(Fin à 14 h 33)
