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Conférence de presse de M. Denis Lazure, président du Comité d'appui aux orphelins de Duplessis

Requête à l'effet d'indemniser individuellement les victimes

Version finale

Tuesday, May 30, 2000, 12 h 23

Salle Evelyn-Dumas (1.30), édifice Pamphile-Le May

(Douze heures vingt-trois minutes)

M. Lazure (Denis): Je tiens à vous préciser qu'il s'agit de la conférence de presse du Comité d'appui aux orphelins de Duplessis, lequel comité d'appui a été formé en novembre dernier. Je vous présente tout de suite, à ma gauche, M. Jacques Hébert, ex-sénateur, qui est le vice-président du comité d'appui, avec M. Germain, Jean-Claude, membre du comité d'appui, M. Yves Beauchemin, membre du comité d'appui et M. Bruno Roy qui est au comité d'appui pour faire le lien entre le Comité des orphelins et le comité d'appui, et M. André Paradis, directeur de la Ligue des droits et libertés. Je souligne aussi qu'il y a dans la salle M. Guy MacDonald du Protecteur du citoyen et je souligne les excuses du Dr Dominique Bédard, membre de notre comité d'appui, qui, pour des raisons de santé, ne peut être ici ainsi que l'absence du professeur Léo-Paul Lauzon et du professeur Jean Gaudreau de l'Université de Montréal.

Alors, je vais dire quelques mots, ensuite chacune des personnes en avant va parler deux minutes et, après ça, on essaiera de répondre à vos questions. M. Paquin s'excuse, il devait être ici, il avait accepté d'être à la conférence mais il est pris en commission parlementaire sur le projet de loi n° 99.

Alors, le comité d'appui, un de ses objectifs, c'est pédagogique, c'est de mieux expliquer ce qu'ont vécu ceux qu'on appelle les orphelins de Duplessis. Ce qu'ils ont vécu, d'abord, en moyenne ces jeunes ont été internés dans des hôpitaux psychiatriques 12 ans, à partir de l'enfance jusqu'au début de l'âge adulte, et ces jeunes-là, très largement, la très grande majorité étaient des enfants illégitimes qui étaient passés par les crèches, les orphelinats et qui, à un moment donné, pouvaient montrer des problèmes de comportement légers ou quoi que ce soit et étaient transférés à l'hôpital psychiatrique. La principale raison pour laquelle ils étaient transférés dans un hôpital psychiatrique, c'est que les allocations gouvernementales étaient trois fois plus élevées dans un hôpital psychiatrique que dans un orphelinat.

Ce dont on parle quand le comité d'appui dit que le gouvernement devrait répondre favorablement à la sixième recommandation de la commission parlementaire sur les institutions – je crois que vous avez eu ce document de deux pages qui est la lettre du mois de mai 1997 au ministre Bégin qui était responsable du dossier – cette lettre-là, elle disait textuellement qu'«après avoir étudié le rapport du Protecteur du citoyen, cette commission parlementaire, à l'unanimité, recommandait au gouvernement, en 1997, six recommandations.

En gros, les cinq premières ne posent pas de problème au gouvernement, c'est la sixième et je vous la lis: «Qu'une aide graduée, matérielle et financière puisse être octroyée aux orphelins institutionnalisés présentement dans le besoin qui peuvent raisonnablement démontrer qu'ils ont subi des sévices physiques ou sexuels ou qu'ils ont été victimes de mesures abusives ou d'internement illégal.»

Il y a eu de la confusion dans le passé, des sévices physiques, sévices sexuels, internement, et notre comité d'appui, de concert avec le Comité des orphelins, a décidé, il y a déjà pas mal de mois, de se concentrer sur cette recommandation n° 6 à savoir que le gouvernement devrait reconnaître une fois pour toutes que les personnes peuvent être dédommagées individuellement. Jusqu'ici, le gouvernement n'a pas envisagé cette possibilité-là, mais il a créé un petit fonds, et le député Paquin, dans les médias, samedi dernier, proposait une formule qui nous paraît intéressante: un fonds de compassion initié par le gouvernement, beaucoup plus gros que le 3 millions cependant, auquel pourraient se joindre d'autres partenaires dans la société, que ce soit l'Église, les médecins, la curatelle publique qui existait, et même, des philanthropes privés, parce que c'est un problème de société.

Lorsqu'une personne, à l'âge de l'enfance et de l'adolescence, passe 12 ans internée avec un faux diagnostic, ça cause un désastre psychosocial individuel considérable, et c'est de ça dont on n'a pas suffisamment parlé quand on nous fait des réponses. On parle du dévouement des religieuses. Tout le monde reconnaît le dévouement des religieuses, mais arrêtons-nous pour dire: Ça a été un désastre épouvantable pour ces 1 000 ou 1 500 jeunes qui sont devenus des adultes aujourd'hui en haut de 50 ans, en haut de 60 ans.

Alors, en conclusion, nous, on a rencontré, hier après-midi, le ministre Perreault qui a montré une ouverture beaucoup plus considérable qu'il ne l'a fait dans le passé. Nous savons qu'un certain nombre de députés sont favorables à un règlement. Nous pensons que le fruit est mûr. Les circonstances sont propices à un règlement qui ne coûterait pas une fortune au gouvernement et qui redonnerait un peu de dignité à ces personnes qui ont tant souffert.

Alors, je passe la parole à M. Hébert et ensuite, à tour de rôle, quelques minutes.

M. Hébert (Jacques): Bon. C'est ici même, dans la Chambre du Conseil exécutif, le 2 août 1954, que Maurice LeNoblet Duplessis signa l'arrêté en conseil n° 816. Cette simple signature du premier ministre du temps tranchait le sort de Mont-Providence. Institution conçue pour accueillir des orphelins encore éducables, elle devenait, du jour au lendemain, un hôpital psychiatrique pour enfants, seul moyen de profiter des subventions fédérales réservées aux hôpitaux. Il ne restait plus qu'à évacuer en hâte vers des orphelinats conventionnels les orphelins dits légitimes. Quant aux centaines d'enfants dits illégitimes de Mont-Providence, ils deviennent les premiers clients du nouvel hôpital. On les déclare illico débiles ou déficients mentaux grâce à l'indigne complicité des psychiatres qui signent de faux certificats médicaux à tour de bras.

Ces enfants normaux furent illégalement internés en moyenne pendant 10 ans de leur jeune vie, privés de toute éducation contrairement à la loi de l'époque. Des milliers de vies furent brisées à jamais. Il y a des exceptions, comme Bruno Roy qui est assis avec nous, écrivain et professeur et longtemps président de l'Union des écrivains québécois, devenu porte-parole des orphelins de Duplessis. Dans son livre Mémoire d'asile , il écrit, et je le cite: «Les enfants de Duplessis sont une version condensée de la grande noirceur. Physiquement et mentalement, ils ont fait les frais d'une tyrannie sociale dont les maîtres d'oeuvre, l'Église et l'État avec la complicité des médecins, tiraient profit. Aucun système de valeurs de quelque époque que ce soit ne peut justifier l'exploitation d'enfants comme ce fut le cas avec les orphelins de Duplessis.» Fin de la citation.

Cette évidence explique la formation d'un comité d'appui pour la justice aux orphelins de Duplessis, comité donc pour aider le Comité des orphelins composé de 80 personnalités venues des milieux les plus divers: les anciens députés ou ministres, éminents médecins, gros avocats, comme on dit, sénateurs, professeurs, syndicalistes, romanciers, artistes, poètes, etc.: des consciences. La liste est longue et impressionnante. À titre d'exemple, je mentionnerais quelques noms: le cinéaste Gilles Carle, les comédiens Rita Lafontaine et Guy A. Lepage, les avocats Irwin Cotler et Julius Grey, le Dr Dominique Bédard, le journaliste et ancien membre de l'Assemblée nationale, Pierre de Bellefeuille, le syndicaliste Michel Chartrand, les écrivains Arlette Cousture, Antonine Maillet, Michel Tremblay et j'en passe, une cinquantaine, dont ceux qui sont ici à mes côtés.

Tous les partis donc représentés, genre, tendance, gauche, droite, gauche, des Oui, des Non: l'union sacrée, les haches enterrées. Ça ne se voit pas souvent de nos jours. Merci Duplessis. Cette sorte de comité ne lâchera jamais. C'est ça qui est important. C'est le genre de comité et j'en ai vu des comités dans ma vie. Ce genre de comité-là ne lâche jamais. Puisse le gouvernement, l'Église et le Collège des médecins s'en rendre compte avant que leur manque élémentaire de compassion ne fasse scandale à l'échelle du monde.

M. Lazure (Denis): Merci, M. Hébert. M. Germain.

M. Germain (Jean-Claude): Alors, vous savez actuellement ce qui est inquiétant ce matin, c'est que le premier ministre continue dans une confusion réelle lorsqu'il parle des orphelins de Duplessis et encourage à cette confusion-là encore. Je pense que le moment est venu de clarifier, et c'est pour ça qu'on revient avec ça et qu'on va revenir sur ce point-là, pour clarifier exactement la situation.

Lorsqu'on parle des orphelins de Duplessis et lorsque M. Bouchard parle des orphelins de Duplessis, il parle de l'ensemble du système des orphelinats, des crèches qui existaient à cette époque-là, alors que le groupe dont on parle plus spécifiquement, ce sont les bâtards de Duplessis. Parce que la question véritable, c'est le problème de la naissance illégitime. Et tous ceux d'entre nous qui ont vécu dans les années cinquante, il n'y a personne à ce moment-là qui n'est pas au courant que la fille-mère est rejetée, mise de côté. Et si on a les moyens pour faire disparaître le fruit du péché, on le trouve. Et un des moyens qui va être trouvé, ça va être, effectivement, pour des raisons, là, vraiment... peut-être pas commerciales, mais des raisons vraiment financières, tout à coup, de les institutionnaliser. Donc, crée un déni de justice et qui transforme la vie de ces gens-là vraiment en une inexistence sociale, ce qui était le but recherché.

Si vous me dites que la bâtardise, c'est curieux, bien, je vous ferai remarquer que le personnage le plus important des années 1930, c'était Fridolin, un bâtard. Que le personnage le plus important des années quarante, c'était Tit-Coq, un bâtard. Et que, dans les années cinquante, c'était encore avec Bousille. Donc, dans notre société, la conscience était très claire là-dessus, sauf que l'oubli était volontaire. Et actuellement, ce n'est pas une responsabilité uniquement gouvernementale. C'est une responsabilité sociétale. C'est-à-dire, c'est que nous, comme société, tout le monde a participé à cette occultation-là. Alors donc, ce n'est pas plus les soeurs, les médecins, le gouvernement. Tout le monde est responsable. Nous sommes tous responsables. Et, à ce titre-là, on demande au gouvernement d'assumer notre responsabilité collective. C'est-à-dire, donc, ce n'est pas une question de partisanerie de savoir qui est responsable ou pas. Ce n'est pas une question de découvrir telle institution ou telle autre. C'est que face à ce déni de justice profond, à ce déni d'existence, on a une responsabilité collective, et notre comité est là pour rappeler au gouvernement, et on va lui rappeler, d'ailleurs, encore.

Je veux bien préciser la chose, c'est-à-dire, c'est qu'on doit assumer cette responsabilité-là au nom de tous les Québécois. Et je mets au défi qui que ce soit, dans toutes les familles, de dire qu'il n'y a jamais eu un problème de filles-mères dans les, disons, deux, trois générations qui nous ont précédés. Alors, c'est quelque chose qui est très profond et il y a toute une société qui a réagi d'une manière pendant une époque. Et on parle toujours de réécrire l'histoire. Il faut tout simplement, comme on dit, l'assumer, l'histoire, parce que la réécrire, c'est ce qu'on a fait. Les orphelins de Duplessis, c'est un moyen de réécrire l'histoire. On réécrivait l'histoire en disant: Ces gens-là n'existent pas. Bien, ils ont existé. Ils sont présents aujourd'hui, puis c'est ça qu'il faut assumer. Merci.

M. Lazure (Denis): Merci, M. Germain. M. Beauchemin.

M. Beauchemin (Yves): Que tout ça est bien dit. Qu'est-ce que je pourrais ajouter? Écoutez. Il y a deux questions en fait, c'est premièrement de savoir de qui on parle puis qu'est-ce qu'ont subi ces personnes. De qui on parle? Bien, ce n'est pas de tous les orphelins du Québec, parce qu'un orphelin, c'est quelqu'un qui avait des parents légitimes dont il avait été privé pour une raison ou pour une autre soit que les parents étaient morts soit qu'ils ne pouvaient pas vivre avec, mais dans ce cas-ci, ce sont des enfants qui n'avaient pas de parents, qui étaient illégitimes et qui n'avaient pas de liens légaux avec leurs procréateurs. Et c'est une tranche parmi les orphelins, une tranche toute petite qui représente actuellement à peu près 1 500 personnes. N'est-ce as Bruno? Et qu'ont-ils subi? Bien, c'est affreux ce qu'ils ont subi. Ils ont subi des carences affectives graves. Une carence affective, c'est le mot technique pour dire qu'ils ont été presque totalement privés d'amour et d'affection, ce qui a influencé négativement leur développement individuel. On leur a imposé l'ignorance, on les a empêchés de s'instruire, d'apprendre à écrire.

Il y a 80 % des orphelins de Duplessis qui sont analphabètes. Dans notre société, c'est épouvantable, c'est un désastre. En plus, on les a privés de liberté, on les a internés d'une façon illégale. On a créé des faux dossiers médicaux pour pouvoir les interner d'une façon illégale. Et finalement, bien ça donne quoi? Ça donne des destins gâchés et ce que le gouvernement offre actuellement, 3 millions divisés par 1 500, c'est 2 000 $ par personne. Il me semble que pour panser des plaies, pour essayer d'apporter un mieux-être à toute cette souffrance qui s'est échelonnée dans un temps si long, ce n'est pas beaucoup. Et nous, le Comité de soutien, on demande au gouvernement de réfléchir un petit peu plus à la question. C'est un dossier complexe dont tout le monde, y compris le premier ministre, ne comprend peut-être pas tous les aboutissants pour l'instant, mais le premier ministre étant un homme intelligent, il va finir par se rendre aux mêmes conclusions qu'on s'est rendu, je suppose, et qu'on puisse fournir une fin de destinée un peu plus douce à ces gens-là qui n'ont vraiment pas été gâtés. Voilà.

M. Lazure (Denis): Merci, M. Beauchemin. M. le directeur de la Ligue des droits et libertés, M. André Paradis.

M. Paradis (André): Je voulais juste ajouter peut-être que, malgré les propos qu'il a tenus ce matin, il y a des signes qui montrent que M. Bouchard ne peut plus ignorer le consensus de plus en plus large qui se développe pour accorder une réparation véritable aux orphelins de Duplessis. Les orphelins de Duplessis se sont mis à l'oeuvre, si on peut dire, pour obtenir cette réparation-là en 1992. Ça fait presque sept ans et demi, maintenant. Mais, dans la dernière année, ils ont réussi à développer un appui beaucoup plus large que ce qu'ils avaient réussi à faire dans les six années précédentes. M. Hébert a mentionné les noms des personnalités qui font partie du comité d'appui, mais on pourrait ajouter à ça qu'à peu près tous les grands médias au Québec ont pris position en éditorial en faveur d'une réparation pur les orphelins de Duplessis.

On pourrait ajouter que les sondages de la population montrent un appui d'à peu près 66 %, les sondages qui ont été faits. On pourrait parler de la presse internationale qui a parlé et qui parle encore il y a une numéro du Nouvel observateur qui va sortir avec un article sur les orphelins de Duplessis dans la semaine qui vient. On pourrait rappeler les députés du Parti québécois, même, qui se sont manifestés en faveur des orphelins de Duplessis. Alors, il y a un consensus de plus en plus large et le premier ministre ne peut plus l'ignorer. Mais le temps presse parce que les orphelins de Duplessis, la majorité maintenant, ils ont autour de 65 ans. Alors, si on veut leur permettre de finir leur vie dans des conditions décentes, la dernière partie de leur vie, qu'ils puissent la vivre dans la dignité, je pense que le temps presse, et c'est sûr que le comité va activer son travail de représentation auprès du gouvernement. Mais il va falloir qu'en haut lieu, on se mette à réfléchir assez sérieusement, puis rapidement aussi, pour ne pas que l'histoire règle la question des orphelins de Duplessis par, finalement, l'oubli.

Dans quelques semaines, le gouvernement du Québec va célébrer en grande pompe le 25e anniversaire de la Charte québécoise des droits et libertés qui a été adoptée en 1975. Le premier droit, le droit le plus fondamental dans la Charte qui est la base de tous les autres droits, c'est le droit à la dignité. Les orphelins de Duplessis ont droit à la dignité, ils ont droit de finir leur vie dans la dignité.

M. Lazure (Denis): Merci beaucoup. M. Bruno Roy, le président du Comité des orphelins. M. Roy (Bruno): Pour faire suite, je dirais, logiquement à la phrase précédente, une des grandes inquiétudes de ceux qu'on appelle les enfants de Duplessis, c'est de ne pas retourner en institution, sous quelque forme que ce soit. Et lorsqu'ils demandent réparation, une réparation individuelle financière, c'est précisément pour se donner une autonomie matérielle et financière. Et, dans ce sens-là, c'est cette manière de retrouver la dignité, et je trouve tout à fait pertinent le rappel de ce 25e, d'une part.

D'autre part, on pourrait peut-être penser qu'aujourd'hui le Comité pourrait être découragé. Moi, je dis que c'est tout à fait le contraire. Parce que, d'abord, nous avons eu une rencontre, hier, extrêmement stimulante avec le ministre Perreault. À moins qu'on se soit trompé, et je ne pense pas qu'on se soit trompé, il y a eu compréhension de part et d'autre. Il y a une compréhension, on parle de la même chose. Ce matin, ce qu'on a entendu à l'Assemblée nationale, c'est autre chose, on ne parle plus de la même chose. Et je suis certain que, le jour où M. Bouchard va comprendre de quoi il est question, il ne pourra pas ne pas maintenir la position. Il ne pourra pas. De ce point de vue là, l'espoir existe parce qu'on sait que, du côté des appuis, ne serait-ce que 81 % au dernier sondage, 81 % des gens disent: Vous avez raison, continuez votre combat.

Donc, les appuis, ils sont là. Je pense qu'il s'agit de faire comprendre au gouvernement la nature spécifique de ce dossier-là, d'une part; d'autre part, de ne pas confondre, parce que, parfois – et je ne dis pas que ça se fait volontairement, mais parfois – la mauvaise compréhension du dossier influence les perceptions dans la population lorsqu'on parle des orphelins en général, lorsqu'on parle du dévouement. Je dois, personnellement, à une religieuse de m'en être sorti et d'être ce que je suis, et je n'ai cesse de le répéter. Et pourtant, on entend: Oui, mais ils sont contre les... Mais absolument pas! Donc, il y a des préjugés qui circulent, et je pense que c'est important de le comprendre, d'une part.

D'autre part, les orphelins dont on parle étaient sous la gérance juridique de la famille, alors que nous – ce que Jean-Claude appelait les «bâtards de Duplessis» – nous étions sous la gérance juridique de l'État par le biais de la curatelle publique. Et on pourrait se poser la question, à propos de la curatelle publique: A-t-elle fait sa job de surveillance? Ils étaient responsables de nous. Nous avions perdu tous nos droits, on n'avait plus le droit de sortir. Je pense qu'il faut effectivement... et on n'a peut-être pas suffisamment questionné ça.

Tout ça pour dire que ce dossier, à mesure qu'on avance, nous apprend des choses. Le sociologue Gilles Bourque a défini, dans un article... Et là, de plus en plus d'intervenants – j'allais dire – scientifiques, des compétences, des sociologues, des historiens interviennent dans notre dossier et s'approprient notre dossier, et ils s'aperçoivent de la pertinence de notre propos, et, plus que ça, Gilles Bourque, dans son texte, parle d'un groupe cible. Ce n'est pas tous les groupes-cibles du Québec qui ont été internés dans des asiles. Il faut rappeler que nous étions des enfants, et ça, on l'oublie, parce qu'on voit le témoignage des adultes d'aujourd'hui, puis on n'aime pas ça, les entendre, parce que ce n'est pas beau. Mais, en réalité, leur vérité est une vérité... c'est du vécu. Mais il ne faut opposer l'histoire vécue à ce qu'on appelle l'«histoire institutionnelle», parce que, très souvent, elle, elle est réécrite, et, quand on veut faire disparaître un groupe comme le nôtre, c'est qu'on veut réécrire l'histoire.

Or, pour nous, il ne s'agit pas de réécrire l'histoire, parce qu'elle continue, l'histoire. Dans ce sens-là, le Comité d'appui non seulement est extrêmement important, il est vital, parce qu'il aide à faire comprendre aux autres ce qu'est le véritable drame collectif des orphelins de Duplessis, et, en cela, je ne veux que les remercier.

M. Lazure (Denis): Merci, M. Roy. M. MacDonald, vous... Le Protecteur du citoyen.

M. MacDonald (Guy): Très, très brièvement, ce que je veux dire, c'est qu'il y a maintenant près de deux ans et demi que le Protecteur du citoyen a présenté son rapport, qui s'appelait Les enfants de Duplessis à l'heure de la solidarité . Il y avait là-dedans une série de recommandations. Depuis ce temps, il s'est dit beaucoup de choses, il s'est écrit beaucoup de choses, il y a eu beaucoup de débats. Avec tout ce qu'on a entendu, tout ce qu'on a lu et tout ce qui s'est écrit, le Protecteur du citoyen en est arrivé à la conclusion, après avoir vu tout ça, qu'il n'y a pas de raison de modifier en quoi que ce soit les recommandations qu'il faisait il y a maintenant près de deux ans et demi, en janvier 1997.

Deuxième chose. Bien que le dossier des enfants de Duplessis soit unique, en ce sens de l'institutionnalisation forcée en milieu psychiatrique, il y a eu, au Canada, des situations qu'on peut appeler similaires, c'est-à-dire des abus qui ont été commis à l'égard d'enfants dans diverses institutions, et il y en a eu dans presque toutes les provinces canadiennes. La Commission canadienne du droit vient de publier un imposant document, il y a environ un mois ou deux, qui s'appelle La dignité retrouvée ou la réparation des sévices infligés aux enfants dans des établissements canadiens . Ça peut être St. Vincent Terre-Neuve, ça peut être les «Residential Schools», pour les Indiens, en Ontario, et autres situations du même genre.

C'est un bilan assez complet, et, ce qu'on constate, c'est que la réparation individuelle a eu lieu presque partout, dans des situations similaires. Reste le Québec, reste le cas des enfants institutionnalisés de Duplessis. Alors, on espère que, comme ça s'est fait ailleurs, des réparations puissent être apportées dans un laps de temps raisonnable, puisque ça fait quand même pas mal longtemps que la situation est connue des autorités. Je vous remercie.

M. Lazure (Denis): Merci, M. MacDonald. Je voudrais, en terminant, souligner la contribution de mes collègues puis les autres, parmi les 82 signataires, membres du comité d'appui, et aussi souligner le travail de ceux et celles qui sont allés faire signer les 22 000 personnes. C'est un travail considérable, et une bonne partie a été faite par les orphelins de Duplessis eux-mêmes.

Alors, voilà. Des questions?

Le Modérateur: Bernard Plante.

M. Plante (Bernard): Deux questions. D'abord, quand le premier ministre dit: On ne peut pas réécrire l'histoire, est-ce que ça ne vous donne pas un peu l'impression que le premier ministre refuse finalement que l'histoire finisse par s'écrire comme elle devrait être écrite?

M. Lazure (Denis): Écoutez, M. Germain...

M. Germain (Jean-Claude): C'est-à-dire que j'ai l'impression que, dans cette phrase-là – parce qu'on réfléchit un peu dessus nécessairement – ce n'est pas exactement la situation: On ne peut pas réécrire l'histoire, c'est-à-dire qu'il dit: Bon, bien, il a été une époque où il y avait des préjugés, puis on ne peut pas réécrire l'histoire, en disant que ces préjugés-là n'ont pas été présents dans notre société. C'est ça qu'il dit constamment. Bon. Tout ce qu'on dit, nous, c'est que les préjugés étaient là, ces préjugés-là ont été, vraiment, terriblement dangereux par rapport à un groupe particulier, et on doit assumer l'histoire, c'est-à-dire apporter réparation à ce groupe cible là, parce que, même si le préjugé était partagé par tout le monde... Parce qu'on a parlé de l'unanimité à cette époque-là. Lorsque le duplessisme est disparu, on a dit: Feu l'unanimité. Bon, bien, disons que tout le monde était responsable, et tout ce qu'on lui dit à ce moment-là, c'est: Assumons une partie de notre héritage historique.

M. Plante (Bernard): Seconde question d'ordre un peu plus technique. Je ne sais pas si, à la suite de la recommandation du Protecteur du citoyen, il y avait... je pense qu'il y avait des chiffres qui avaient circulé sur le montant du fonds. Le fonds auquel vous pensez, auquel pourraient contribuer le gouvernement, les médecins, le clergé, etc., quel ordre de grandeur?

M. Lazure (Denis): L'ordre de grandeur qui était suggéré par le Protecteur, c'était entre 60 et 100 millions de dollars pour environ 2 000 sujets. Or, nous constations que le 2 000 doit être à la baisse. Nous estimons à environ 1 500 le nombre de ceux qui correspondraient aux deux critères bien précis dont on a parlé tantôt: l'internement illégal, le faux diagnostic. Ce 1 500 là, vous faites la proportion – enlevez 25 % du 60 à 100 millions – ça devient 40 millions à 75 millions, autour de 50, 60 millions.

M. Roy (Patrice): M. Lazure, ou d'autres peut-être, j'ai de la difficulté à comprendre une chose. Il y a eu, donc, une commission parlementaire, il y a eu un rapport du Protecteur du citoyen, il y a eu des articles dans des grands journaux dans le monde entier, et vous nous dites que votre espoir aujourd'hui se fonde sur une incompréhension du dossier de la part du premier ministre. Est-ce que vraiment vous pensez que le refus jusqu'ici du premier ministre se justifie par une incompréhension du dossier, parce qu'il me semble qu'on peut faire le tour rapidement?

M. Lazure (Denis): Non, notre espoir, il n'est pas basé sur la réponse du premier ministre d'aujourd'hui. Notre espoir, il est basé sur tout ce qui s'est fait depuis quelques années, et notamment depuis peut-être un an. Le ralliement de toutes les personnes... ce n'est quand même pas des écervelés, les gens qui nous appuient, à part de ceux qui sont ici...

Une voix: Merci.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Germain (Jean-Claude): Ceux-là le sont complètement. Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lazure (Denis): Mais c'est des gens qui sont très responsables. Antonine Maillet, je l'entendais encore récemment parler pendant cinq minutes des orphelins de Duplessis. Bon. Nous, notre espoir, c'est qu'il y a plusieurs personnes qui ont compris quand on leur a expliqué. Si on se donne la peine de faire de la pédagogie, ce qu'on essaie de faire de plus en plus au comité d'appui avec le Comité des orphelins... on constate que les gens comprennent si on leur explique bien, et ils trouvent que c'est raisonnable, la demande.

Et là on a vu des députés se prononcer ouvertement pour un règlement, on a vu le ministre chargé du dossier hier, M. Perreault, montrer beaucoup d'ouverture, beaucoup, et on espère que M. Perreault va en discuter avec le premier ministre et d'autres qui sont favorables.

M. Germain (Jean-Claude): L'incompréhension qu'on souligne est très, très claire. Vous avez remarqué, l'intervention du premier ministre a commencé par une adresse aux soeurs. Ce n'est pas le problème. Je veux dire... Et c'est ça qui justifie. En sortant de là, on s'est dit: Il n'a pas compris, franchement, il faut revenir. Parce que là, il parle d'autre chose, il parle d'abord du problème des soeurs, de l'abnégation et tout ça. Personne ne nie l'abnégation, mais une abnégation peut être abusive, aussi, à l'occasion, hein, ce n'est pas une justification. Mais c'est qu'il répond d'abord aux Soeurs. À ce que je sache, la pétition n'avait aucun rapport avec ça précisément. Alors, il faudrait peut-être qu'on parle vraiment du problème. Et ce n'est pas parce qu'on l'imagine, c'est qu'on a toujours l'impression qu'il répond à quelqu'un d'autre. Alors, je pense qu'on voudrait avoir une réponse. Et, si c'était un non, que ça soit un non au moins à cette pétition-là, et non pas à une vision de la réalité qui n'est pas celle qui est en cause. M. Hébert (Jacques): Le premier ministre a au moins aussi répété, avec raison, je crois, les excuses qu'il avait prononcées au nom du gouvernement, il y a quelque temps. Et ça, il faut lui en rendre hommage, il a quand même eu le courage de s'excuser au nom du gouvernement et de ses prédécesseurs. Mais seulement, quand on s'excuse d'une faute commise par quelqu'un d'autre et puis qu'on est en position d'apporter des compensations, il me semble que ça découle de ces excuses qu'on doit voir comment corriger le mal qui a été causé. Et ça, je pense que ça lui échappe un peu, cette partie-là.

Mais il faut quand même reconnaître qu'il s'est excusé, ce qui n'est pas le fait du cardinal qui ne répond même pas à nos lettres, ce n'est pas le fait du Collège des médecins qui ne répond pas non plus à nos lettres. Alors, il faut reconnaître ça, du premier ministre. Donc, il a un pas dans la bonne direction, et je pense que là, il s'agit qu'il comprenne que c'est moins énorme qu'il ne pense, que c'est quand même limité à des cas particuliers et bien précis, comme ça a été précisé plus tôt.

M. Paradis (André): Je voulais juste ajuster, peut-être... Le fait qu'il y a des députés dans son parti et même des ministres qui montrent une ouverture, c'est quelque chose de très récent. Alors, c'est sûrement quelque chose qui est appelé à se développer. De la même façon qu'il y a une brèche au sein des forces religieuses, à l'heure actuelle, il y a des religieuses et des religieux qui ont signé une lettre ouverte et qui est en train de recueillir d'autres appuis. Ce qui va aussi faire pression sur les évêques, à terme, pour revoir leurs positions. Alors tout ça peut aussi s'enclencher dans une certaine dynamique positive.

M. Roy (Patrice): On sait qu'il y a un document en préparation, américain, il y a eu des articles dans le monde, vous avez parlé du Nouvel Observateur , est-ce que ça, c'est un facteur, vous pensez, qui va faire en sorte que le gouvernement va réfléchir à nouveau à tout ça?

M. Lazure (Denis): Non, je pense qu'il n'y a aucun gouvernement qui aime que les presses étrangères prestigieuses tapent sur les doigts de son gouvernement qui tarde trop à réparer une injustice passée. Alors, que ce soit le Nouvel Observateur ou un journal américain, ce n'est jamais intéressant pour un gouvernement, qu'il soit libéral ou péquiste.

M. Beauchemin (Yves): Tous les hommes politiques sont sensibles aux pressions.

Mme Thompson (Elizabeth): Mr. Lazure, you know politics very well, you know the Parti québécois particularly well, you have the support ...(?) of Mr Perreault, you have the support – we saw in the corridor – understanding on the part Mr Landry, several deputies, what's missing for the Government to decide to compensate, where is it blocked?

M. Lazure (Denis): Well I think the missing link is the insufficient discussion amongst the cabinet and the Government. Evidently Mr Perreault did not have time to discuss with the Prime Minister since our meeting yesterday afternoon with Mr Perreault in Montréal, and we are confident that he will of course in the coming days have serious discussion with him and with the members of the National Assembly who are favorable. And we feel that governments in the past have often said: No, we will not do this for sure, and that they have change their minds. The government is there to take the pulse of the public opinion and the justice of the case, the value of the case. And obviously, it is a case, the case of the Orphans of Duplessis, the Duplessis' Orphans which has very important value because the public has realized that, we have realized that. And we are not going to give up, we will come back, as Mr Germain said, and come back until there is a settlement.

Mme Thompson (Elizabeth): Mr Lazure, in the past the Orphans' Committee, one of the factors they've raised to possibly explain the Government refusal to compensate or to listen was the start of Mr Bouchard's law career which was working very much for the religious communities, does the committee still believe that that might be a factor in the Government continued refusal to compensate?

M. Lazure (Denis): I'm speaking for the Support Committee not for the Orphans' Committee and I know Mr Bouchard enough to evaluate that in due time, he will not confuse his past interest with the religious orders with the interest of the society. I know him enough that... he will not confuse those two aspects.

Mme Thompson (Elizabeth): Do you think that up until now he has confused?

M. Lazure (Denis): I have no basis to say that.

M. Germain (Jean-Claude): I think that what you're talking about is that fact that I think Mr Bouchard feels strongly about not doing an injustice to the religious orders which have worked in the fifties. And I think he is faced now with two injustices, one on one side and one on the other. And what I think we're trying to clear up is the fact that his understanding of the dossier leaves him to say no, specially compensation. I think that if he understood the dossier like it should be understood, he would be saying yes. So, in a way, he could say no today and yes tomorrow and not be in contradiction with himself. But realize that... What happens, he very, very strongly feels that we should not do any injustice to a whole way of doing things in the past. I think he feels strongly about that, I think he's right about that. But, at the same time, there is another injustice which was larger, which is the one we're dealing with and I think this one is a different injustice and this one should be addressed and he should have an answer to that one.

M. Greer (Stuart): Mr. Roy, what the meeting with Mr. Perreault yesterday and this prompt you discussion with Mr. Landry today, what sort of assurance is and what sort of movement have you seen by the Government in the last couple of days?

M. Roy (Bruno): Je pense que je vais demander à M. Germain de traduire parce que...

M. Germain (Jean-Claude): The feeling was that meeting with Perreault specially, I think that something was cleared up as a fact to limit the dossier to the orphans of Duplessis and illegitimate of that period. I think this is very clear with Mr. Perreault and he understood that. So, the compensation also, le Fonds de compensation, I think he understood the workings of it and this is what happened yesterday with your meeting. And I think that's what Bruno was talking about. So, this at least is cleared up because when you're talking about something and somebody always understands something else... Because I think one thing has been cleared up because in the last few years there has been a lot of talking about sexual sevices and all this type of things, and I think there is a big focus on that and I think it was not the main aspect. I thing it was cleared up with Perreault that it was not the first priority. The priority was...

Une voix: ...

M. Germain (Jean-Claude): O.K. He is going to answer...

M. Roy (Bruno): Je comprends l'esprit, parce qu'il y a des détails qui me manquent, mais essentiellement, c'est qu'effectivement la rencontre avec M. Perreault hier a été une excellente rencontre parce qu'on a, un, parlé de la même chose, on se comprenait. Et ensuite, il a vraiment laissé entendre qu'il n'était pas indifférent, il a même exprimé une sensibilité à cette réalité-là et il a compris qu'on ne parle pas de tous les orphelins du Québec. On ne parle pas de tous les orphelins du Québec, on parle d'un groupe-cible. Et, à partir de ce moment-là, la solution est envisageable dans la mesure où il y a, du point de vue du gouvernement, un contrôle de la situation.

M. Lazure (Denis): I think when Mr. Perreault has the opportunity – and it should be very, very soon – to have a discussion with Mr. Bouchard and to communicate to Mr. Bouchard the excellent understand that he showed yesterday and to communicate that to the Prime Minister, we feel the Prime Minister will say yes.

Mme Grossman (Cheryl): What assurances has Mr. Perreault given you, what assurances?

M. Lazure (Denis): He did not give assurances yesterday. We did not expect assurances yesterday. We accomplished our objective. Our goal was to speak on the same level and to speak on the same terms to approach the problem in the same way. And we have shared that and we do have the same wave length today with M. Perreault. That was our objective. He said he would consider this very seriously and we would hear from him in the near future. So, it was the first meeting of the Support Committee with M. Perreault and there will be other meetings, of course.

M. Greer (Stuart): There was an exchange with Mr. Landry in the hall way, I think. What was said in that little exchange?

M. Beauchemin (Yves): Il a dit qu'il fallait être borné pour ne pas continuer à réfléchir au problème. C'est un problème complexe. Ils ont beaucoup de dossiers dans une semaine sur lesquels réfléchir. M. Landry a dit: Je ne réagirai pas à ce dossier-là uniquement comme ministre des Finances et il faut être borné pour ne pas continuer d'y réfléchir. Et je pense que tout le monde réfléchit.

Mme Thompson (Elizabeth): Si je peux poser une petite question technique: Souvent les groupes demandent d'être entendus par le caucus d'une partie ou une autre. Est-ce que votre groupe a demandé une réunion avec le caucus du Parti québécois?

M. Lazure (Denis): Nous avons un travail à faire suite à cette conférence de presse, suite à la pétition, suite à la période de questions. Nous allons nous réunir très prochainement, d'ici une semaine, 10 jours, le Comité d'appui, et nous allons aviser à ce moment-là. Nous avons l'intention très ferme de continuer à nous battre vigoureusement pour que le gouvernement comprenne qu'il a tout intérêt à régler et qu'il a tous les instruments en main pour régler de façon raisonnable.

Mme Grossman (Cheryl): Why what's been given from the Government not good enough and how much money is needed? How much money?

M. Lazure (Denis): Well, the amounts were suggested by the Ombudsman on the basis of an average of 30 000 $ per each individual and they're calculated on the basis of 2 000 clients. We now realize that it's more like 1 500 rather than 2 000: so, 1 500 multiplied by 30 000 $, approximately $50 millions.

Le Modérateur: Merci beaucoup.

(Fin à 13 h 3)

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