Point de presse de M. Jean Charest, premier ministre
Version finale
Friday, September 30, 2011, 13 h
Hall principal de l'hôtel du Parlement,
hôtel du Parlement
(Treize heures onze minutes)
M. Charest: Alors, mesdames et messieurs, bonjour. Je veux d'abord souhaiter la bienvenue, à l'Assemblée nationale du Québec, au premier ministre du Canada, Stephen Harper, et lui dire... vous dire, Stephen, nous sommes très heureux de vous accueillir ici, à Québec, que c'est aujourd'hui une journée très importante pour nous et qui, je le sais déjà, va beaucoup marquer votre passage, comme premier ministre du Québec, puisque nous allons aujourd'hui faire et annoncer une conclusion de négociation très heureuse à la fois pour le Québec et le Canada.
Vous avez remarqué que M. le premier ministre est accompagné aujourd'hui par M. Christian Paradis, qui est également ministre des Ressources naturelles, député...
Une voix: L'Industrie.
M. Charest: L'Industrie, excusez. Vous étiez aux Ressources naturelles. J'en garde un excellent souvenir, parce que M. Paradis fait une deuxième visite, après avoir négocié l'affaire de Old Harry, l'affaire de Old Harry, qui est un deuxième dossier qui a été réglé entre nos gouvernements, un dossier extrêmement important également pour le développement à la fois du Québec et du Canada. Et, M. le ministre Paradis, vous êtes chez vous ici également, comme le premier ministre, et je veux vous souhaiter la bienvenue.
Et je suis accompagné évidemment de Raymond Bachand, ministre des Finances, qui a été, du côté du gouvernement du Québec, l'acteur clé dans la négociation de l'entente que nous annonçons aujourd'hui.
Alors, mesdames et messieurs, vous avez aujourd'hui devant les yeux une entente qui a été négociée par les deux gouvernements, et c'est une entente que le Québec souhaitait déjà depuis plusieurs années. Pour vous situer dans le temps, c'est en 1992 que le gouvernement de Robert Bourassa et le gouvernement de M. Mulroney concluaient une entente d'harmonisation de la taxe de vente. Tout ça se faisait dans la foulée des débats sur le libre-échange. L'ALENA, évidemment, était en négociation à ce moment-là. Mais l'entente de libre-échange avait fait l'objet d'un intense débat lors de l'élection fédérale de 1988, et les Québécois, vous vous rappellerez, Stephen, avaient appuyé massivement... pas massivement, majoritairement, devrais-je dire, cette idée d'un accord de libre-échange avec les États-Unis.
Il en a suivi une réforme qui était très importante, il faut le dire, peut-être pas très populaire non plus, de la fiscalité canadienne, incluant la taxe de vente. Et le gouvernement Bourassa avait été courageux à l'époque en travaillant avec le gouvernement fédéral dans le but d'harmoniser notre approche sur la question des taxes de vente pour que nous puissions être plus compétitifs. Il en a résulté, donc, une entente unique et qui a été unique jusqu'en 1997, alors que le gouvernement fédéral de l'époque concluait des ententes avec trois provinces de l'Atlantique avec une compensation. C'était au mois de mai 1997. J'en garde un souvenir parce qu'à l'époque j'étais dans un autre rôle. J'avais eu l'occasion de me prononcer là-dessus et de dire, alors que j'étais chef d'un parti politique fédéral, que le Québec devait également, en toute équité, être compensé.
Ce dossier-là est revenu à la surface au moment où votre gouvernement a initié des projets d'harmonisation avec d'autres provinces, et la Chambre des communes a voté sur une motion pour que le Québec puisse être également compensé, et vous avez adhéré à cette motion. Ça, c'est la partie, nous le reconnaissons aujourd'hui, qui est peut-être un peu plus facile. Reconnaître le principe, ça va de soi, mais la négociation qui suit, elle, exige un travail colossal. Et, ce travail, nous l'avons entrepris ensemble. Elle a été menée du côté québécois par Raymond Bachand, qui a fait ça avec beaucoup de détermination, de patience parce que le sujet l'exige. Ce n'est pas un caprice. Et votre gouvernement avait pris un engagement, M. le premier ministre, que vous respectez aujourd'hui. D'emblée, je veux vous remercier au nom de tous les Québécois d'avoir respecté cet engagement que vous avez pris pour que nous puissions aujourd'hui conclure une entente.
L'entente que nous vous présentons aujourd'hui nous permet de continuer sur le chemin de cette harmonisation pour des fins de compétitivité. Elle est importante sur le plan économique et sur le plan de l'emploi parce qu'elle nous permet, au Québec, d'être compétitifs dans la création de richesse... plus compétitifs dans la création de richesse et la création d'emplois.
D'ailleurs, nous reconnaissons aujourd'hui - et les économistes reconnaissent - que la réforme fiscale entreprise par le fédéral à l'époque, où le Québec s'est fait complice, nous a permis de générer davantage d'emplois, parce que l'ancienne taxe de vente fédérale, on se le rappelle, était débilitante dans la mesure où elle taxait la création d'emplois au Canada, au détriment des exportations. Alors, la réforme des années quatre-vingt-dix nous a permis d'être plus prospères.
Nous continuons sur cette voie aujourd'hui. L'annonce que nous faisons aujourd'hui, c'est que le gouvernement fédéral fait une compensation de l'ordre de 2,2 milliards de dollars qui sera remise au gouvernement du Québec dans la mise en oeuvre de l'entente que nous annonçons aujourd'hui. Nous allons, évidemment, au niveau de la taxe de vente, la TVQ, faire des ajustements, puisque nous ne taxerons plus la TPS, comme c'était le cas autrefois, mais nous allons avoir... et je tiens à le dire d'emblée à tous les consommateurs québécois, que le niveau de taxe de vente sera le même dans son effet. Il n'y a pas plus, il n'y a pas moins. C'est exactement le plan que nous avions que nous gardons.
Au niveau des entreprises, nous poursuivons également dans l'harmonisation. Il y a des ajustements qui se font pour les grandes entreprises et pour les institutions financières. C'est toujours le même objectif. Nous, on ne vit pas dans une bulle, au Québec. Nous vivons dans un environnement où nous devons nous assurer de la compétitivité de nos entreprises. Des ajustements seront faits également en ce sens, mais tout ça, à nouveau, au bénéfice de l'investissement et de la création d'emplois.
Nous avons voulu le respect de deux grands principes dans la négo. La première, c'est la reconnaissance du pouvoir de l'Assemblée nationale de légiférer sur ces questions et, la deuxième, c'était l'administration de cette taxe, M. le premier ministre. Et, sur ces deux grands principes, le Québec est aujourd'hui satisfait de l'entente que nous avons négociée avec vous.
En conclusion, j'aimerais remercier M. le ministre Paradis du rôle qu'il a joué dans cette négociation, et de l'aide, et de l'assistance qu'il nous a prêtées pour que nous puissions être devant vous aujourd'hui. M. Paradis, vous avez fait un travail remarquable. J'aimerais également vous remercier, M. le premier ministre. Je l'ai déjà fait, mais je réitère à nouveau que nous sommes très heureux d'être avec vous aujourd'hui pour cette annonce. Et je veux réserver mes commentaires de la fin pour Raymond Bachand et rendre hommage à Raymond pour le travail exceptionnel qu'il a fait, la persévérance dont il a fait preuve, parce que c'est une négociation qui est lourde, c'est compliqué, ces choses-là, pas parce qu'on le souhaite, mais parce que c'est la nature même du sujet. Mais, n'eût été du travail de Raymond Bachand, aujourd'hui, je ne pense pas qu'on serait ici aujourd'hui pour faire cette annonce. C'est certainement un sentiment partagé par tous vos collègues au Conseil des ministres et dans notre caucus, parce qu'on a été témoins, nous, de ce travail patient, persévérant qu'a fait Raymond Bachand au nom de tous les Québécois, et je voulais, Raymond, te remercier personnellement.
Alors, mesdames et messieurs, merci beaucoup, et j'invite maintenant notre invité, M. le premier ministre Harper, à dire quelques mots.
M. Harper (Stephen): Merci. Bonjour, tout le monde. Good afternoon, everyone. Et merci, M. le premier ministre, de m'accueillir dans la belle capitale de la nation québécoise. J'ai souvent vu les escaliers qui sont derrière nous à la télévision et je suis bien content d'être ici en personne à vos côtés aujourd'hui.
Tu sais, Jean, certains vont dire qu'il était minuit moins cinq, d'autres vont dire qu'il était minuit et cinq, mais l'important, c'est que tout le monde va dire: Enfin, ils se sont entendus. Et je tiens à remercier aussi nos ministres, les ministres Jim Flaherty et Christian Paradis, ainsi que le ministre des Finances du Québec, M. Raymond Bachand, pour leur travail acharné. Grâce à leurs efforts, le gouvernement du Québec a obtenu ce qu'il demandait: les taxes de vente provinciale et fédérale seront pleinement harmonisées.
Nous étions dans une situation très particulière, unique en fait. Le gouvernement de Robert Bourassa, comme Jean vient de mentionner, a été le premier des provinces à créer une taxe sur la valeur ajoutée, il y a maintenant plus de 20 ans. C'était bien avant l'harmonisation. Québec administre donc depuis un accord commun de perception avec Ottawa. Dans les autres provinces, les taxes sur la valeur ajoutée ont été créées plus tard, et seulement après que certaines provinces eurent décidé de pleinement s'harmoniser avec la TPS.
Une quinzaine d'années après la création de la TVQ, votre gouvernement, M. le premier ministre, a demandé au gouvernement fédéral s'il pouvait harmoniser sa taxe avec la taxe fédérale, la TPS. Mais vous vouliez aussi garder certains aspects découlant de votre situation unique. En même temps, nos ententes avec d'autres provinces font en sorte que nous devons offrir les mêmes conditions générales à toutes les provinces qui décident d'harmoniser leurs taxes, ce qui nous amène à l'entente d'aujourd'hui. Elle respecte donc des conditions générales des ententes signées avec d'autres provinces et elle respecte aussi la situation unique dans laquelle le Québec se trouvait. Avec cette entente, le gouvernement du Québec va harmoniser la base d'imposition, ce qu'on appelle aussi l'assiette fiscale. Cela veut dire que les mêmes biens et services seront assujettis à la nouvelle taxe harmonisée et, à quelques exceptions près, comme prévu dans les ententes avec les autres provinces.
L'entente d'aujourd'hui met fin aussi, comme Jean vient de le mentionner, à ce qu'on appelle la taxe sur la taxe. Sur l'ancien régime, on applique la taxe fédérale, la TPS, sur le montant d'un achat, et, ensuite, la taxe de vente provinciale vient s'ajouter au montant déjà taxé. Ce phénomène découlait du fait que les taxes n'étaient pas harmonisées. Cette entente va donc mettre fin à la taxe sur la taxe. Le gouvernement du Québec sera aussi compensé comme l'ont été les autres provinces. Il recevra exactement le montant réclamé. Le gouvernement du Québec va aussi continuer d'administrer la taxe, et nous allons passer en revue l'accord de perception afin de s'assurer que nous payons un prix juste pour cette administration. En tant que conservateurs, nous croyons que le fédéral doit être juste et équitable envers toutes les provinces.
The Government, I want to be clear on this, as Conservatives, we believe the federal Government must be fair to all provinces. The Government of Québec has agreed to the terms and conditions signed by other provinces for harmonizing its tax. It is, in essence, the same agreement at the same cost. Where there are differences, and there are, where there are differences, other provinces can adopt the same terms as Québec if they so choose. Of course, the decision on whether to harmonize its tax or not rests with each province, and we will be fair to every province.
Cette entente est une preuve de plus que, lorsqu'on pratique un fédéralisme d'ouverture, on peut relever tous les défis auxquels est confrontée une fédération comme la nôtre, et nous avons relevé beaucoup de défis au cours des dernières années. M. le premier ministre, votre gouvernement nous a interpellés sur plusieurs enjeux, et nous avons fait des engagements à cet égard. Le Québec... Le gouvernement du Québec voulait un siège à l'UNESCO, c'est réglé. Il voulait qu'on lui rétrocède les terrains de l'Assemblée nationale, c'est réglé. Il voulait que l'on règle le déséquilibre fiscal, c'est réglé aussi. Le gouvernement du Québec voulait une entente sur le gisement Old Harry, comme Jean vient de mentionner, c'est réglé. Il voulait une entente sur l'harmonisation des taxes, et c'est finalement réglé aussi. Et, bien sûr, l'avenir nous amènera sans doute d'autres défis, et, comme le passé est garant de l'avenir, nous allons continuer de les relever un à un. Merci beaucoup. Merci, Jean.
M. Charest: Merci, Stephen, merci. Alors, j'apprends qu'il n'y a pas de question et je vous remercie d'être venus aujourd'hui.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Modérateur: On va débuter avec Taïeb Moalla, Journal de Québec.
M. Moalla (Taïeb): Bonjour, M. Harper. Bienvenue à l'Assemblée nationale. Ça faisait quelque temps qu'on ne vous avait pas vu ici. J'ai deux questions. La première, depuis 2006, presque six ans, vous êtes le premier ministre. Votre gouvernement a dépensé des milliards en programmes d'infrastructures à travers le pays, évidemment, y compris le Québec. Donc, tout ce qui se passe actuellement au Québec de... les questions de collusion sur la construction, est-ce que ce sont des choses qui vous inquiètent? Est-ce que vous en avez parlé à M. Charest, de ça?
M. Harper (Stephen): Et vous avez une autre question?
M. Moalla (Taïeb): Oui. J'ai une autre question, oui. Donc, depuis le 2 mai, vous êtes à la tête d'un gouvernement majoritaire. Félicitations! Par contre, au Québec, votre députation a fondu de moitié. Du coup, certains prétendent que vous n'avez plus besoin du Québec pour gouverner vraiment. Donc, quelle est votre réponse à ça? Pas de troisième question, c'est beau.
M. Harper (Stephen): Oui, pour la première question, certainement, je... de l'Assemblée nationale, et, évidemment, je ne m'ingérerai pas dans ces débats politiques ici. Pour la deuxième, évidemment, comme j'ai exprimé le lendemain des résultats de l'élection, je suis déçu avec nos résultats au Québec, mais ça ne change pas que le Québec fait une partie très importante de notre pays. En effet, c'est ici, à Québec, que notre pays est vraiment fondé il y a 400 ans, en français, et ça reste notre héritage et notre avenir. Et toujours, même avec une députation plus petite, je reste déterminé de gouverner pour tous les Canadiens, y compris les Québécois.
Le Modérateur: Alain Laforest, TVA.
M. Laforest (Alain): M. Harper, M. Charest, bonjour. M. Charest, est-ce que ce montant-là - on remarque entre autres que le gros du chèque va arriver en 2014 - va vous permettre de réduire le déficit, de le placer dans le Fonds des générations ou d'atteindre l'équilibre budgétaire plus rapidement?
M. Charest: D'abord, le montant d'argent arrive, vous avez dû remarquer, avec la mise en oeuvre de l'entente, ce qui est exactement le cas ailleurs et c'est la façon de le faire. Deuxièmement, l'argent va servir à la réduction du déficit et de la dette en conséquence. Alors, il ne s'agit pas, pour nous, de prendre l'argent puis de le dépenser à gauche et à droite, là. Nous sommes dans une période où l'économie mondiale vit des turbulences. Ça change à la semaine. Cela nous amène à vouloir être prudents. Notre gouvernement a géré avec beaucoup de rigueur. L'économie canadienne et québécoise s'en tire mieux que partout ailleurs sur la planète. J'en profite, j'ai eu l'occasion de le dire au premier ministre Harper, à Stephen, j'ai fait une mission à l'étranger. Je peux vous dire que la réputation du Canada à l'étranger sur les questions économiques, elle n'a jamais été aussi forte qu'elle l'est actuellement. Mais il y a des turbulences dans l'économie. On le voit en Europe, on le voit aux États-Unis.
Alors, le gouvernement a fait de l'économie la priorité. C'est vrai aujourd'hui, puis on va gérer ces fonds-là avec beaucoup, beaucoup de prudence, mais on va l'appliquer au déficit et à la dette, en poursuivant notre objectif de l'équilibre budgétaire en 2013-2014 et en faisant en sorte qu'on contrôle rigoureusement nos dépenses.
M. Laforest (Alain): Autre question. Dans un quotidien ce matin, M. Duchesneau attaque directement votre fleuron, l'UPAC, en disant que l'UPAC pense trop police. Et il dit qu'on devrait avoir une approche un peu plus administrative, bref, que le juge Gomery serait mieux placé que M. Lafrenière pour diriger l'UPAC.
M. Charest: J'ai confiance en l'UPAC, j'ai confiance en M. Lafrenière qui est un homme d'expérience avec une équipe nombreuse. Ils ont des ressources très importantes pour faire leur travail. Et M. Duchesneau a eu l'occasion de déposer un rapport. Il n'est pas fait référence à ça dans son témoignage à l'Assemblée, vous l'avez entendu également. Donc, je peux aujourd'hui vous réitérer ma confiance dans le travail qui est fait par l'UPAC et le travail fait par M. Lafrenière. Et, rappelons-nous, on a fait souvent référence à l'opération Carcajou qui visait les motards criminalisés. C'est un travail qui est difficile, le niveau de difficulté est élevé, comme c'est le cas de l'UPAC. Et il faut donner la chance à ces gens-là de faire le travail, puis ils le font.
Le Modérateur: Gilbert Lavoie, Le Soleil.
M. Lavoie (Gilbert): M. Harper, peut-être que M. Charest va vouloir commenter là-dessus, mais ma question s'adresse à vous. Quand vous avez... Quand M. Paradis, c'est-à-dire, nous a annoncé cette bonne nouvelle concernant cette promesse du 2,2 milliards, vous avez fait une promesse la même journée à Terre-Neuve pour aider, contribuer au développement de Lower Churchill, promesse qui a été décriée par M. Charest, qui a été dénoncée.
Est-ce que, dans un monde idéal... On n'est pas dans un monde idéal, mais est-ce que, dans un monde idéal, le gouvernement fédéral ne devrait pas plutôt chercher à aider ces deux provinces, Terre-Neuve et le Québec, à optimiser leurs ressources hydroélectriques au lieu de contribuer ici à créer une forme de concurrence entre deux provinces?
M. Harper (Stephen): Nous avons fait une promesse électorale, et c'est toujours notre intention de respecter nos engagements. Je peux mentionner, pour ce dossier, les autres partis fédéraux ont fait les mêmes engagements. Mais nous sommes en discussion avec des provinces à cet égard, mais je suis clair, depuis le début, pour n'importe quelle politique qui découle de cette promesse, nous traiterons toutes les provinces, toutes les régions d'une manière juste et équitable.
M. Lavoie (Gilbert): Puis en suggestion, concernant le 2,2 milliards, on a fait grand état ici tout à l'heure du nombre d'années qu'il a fallu pour y parvenir, est-ce que ce n'est pas le genre de situation où on devrait payer des intérêts sur les montants qui sont annoncés aujourd'hui?
M. Charest: Ah, mais tiens! C'est une bonne idée, ça!
M. Harper (Stephen): Comme je l'ai déjà expliqué, nous cherchions une entente avec le Québec. Je sais que, depuis longtemps, le Québec avait sa propre taxe sur la valeur ajoutée. Mais, en même temps, le fédéral avait aussi des ententes différentes avec les autres provinces. Et la difficulté ici est d'arriver à un point où nous avons une entente avec le Québec qui respecte les besoins du Québec, mais qui respecte aussi nos engagements déjà pris aux autres provinces dans d'autres ententes. Et nous avons «squared this circle» aujourd'hui. Je suis très heureux avec ça.
M. Charest: Je suis tout à fait d'accord.
Le Modérateur: Pierre Duchesne, Radio-Canada.
M. Duchesne (Pierre): Messieurs les premiers ministres, bonjour. M. Harper, vous avez parlé avec beaucoup de fierté de la nation québécoise. Est-ce que, donc, vous pouvez garantir aux Québécois que la proportion de sièges venant du Québec au Parlement canadien ne diminuera pas?
M. Harper (Stephen): Le gouvernement, le Parti conservateur, le gouvernement du Canada a fait des engagements électoraux à cet égard, très clairs, dans notre plateforme. Et, dans un proche avenir, nous déposerons un projet de loi, et je peux dire seulement que nous garderons nos engagements.
M. Duchesne (Pierre): M. Charest, des maires hier vous ont demandé une enquête publique. Hier soir, une mairesse, Mme Rouleau - vous avez peut-être entendu son cri du cœur - parle d'un sentiment d'impuissance, de contrats qui sont donnés à des gens qui sont près de la mafia. On parle de Construction Mirabeau, un des actionnaires est un proche de la mafia. Qu'est-ce que vous répondez maintenant à ces cris du coeur venant de mairesses et de maires?
M. Charest: La première chose, c'est que ces gens-là... Je ne l'ai pas entendu, le cas que vous me citez, là, parce que nous étions occupés à, malheureusement, autre chose - mais la première chose, c'est d'aller vers les autorités qui sont responsables de ces choses-là. Les maires, ceux qui sont dans des positions où ils ont une information, ont la responsabilité de transmettre cette information-là à l'UPAC, à ceux qui ont le devoir d'enquêter là-dessus pour qu'ils puissent agir. Puis c'est ce que nous voulons. Nous voulons que les gens agissent, et ça a été fait pour cette raison-là.
Maintenant, j'ai entendu également ce que les maires et ce que la population exprime, ce que les gens expriment là-dessus. Le témoignage de M. Duchesneau, pour nous, c'est un... et son rapport, que nous avons, nous, le gouvernement du Québec, commandé, soit dit en passant, nous amène justement à faire un examen des mesures qu'on a mises de l'avant. On va prendre le temps de regarder ça comme il faut. On va le faire en fonction d'un certain nombre de critères que j'ai eu l'occasion d'exprimer: protéger la preuve, protéger le pouvoir de déposer des plaintes, protéger les victimes. Alors, c'est comme ça que nous allons travailler. Mais on va y arriver, ça, on va y arriver. On va faire ça comme il faut, puis le gouvernement est en train de faire l'examen de ce qui doit être fait pour que nous puissions tous arriver au bon endroit.
Le Modérateur: Michel Pépin, Radio-Canada.
M. Pépin (Michel): Bonjour, messieurs. M. Charest, qu'est-ce qui pourrait vous convaincre que vous avez peut-être tort de ne pas déclencher de commission d'enquête?
M. Charest: Il faut laisser au gouvernement le temps de faire l'examen des mesures que nous avons actuellement, et c'est ce que nous faisons activement. Dans la foulée du rapport qu'a déposé M. Duchesneau, que nous avons commandé, du témoignage qu'il a offert à l'Assemblée nationale devant la commission parlementaire, j'ai annoncé que le gouvernement est à faire l'examen des mesures que nous pouvons prendre, alors il faut nous donner le temps de le faire. On ne cherche pas à créer de délai, là. On s'entend tous sur le fait qu'il faut aller avec beaucoup de détermination, avec célérité. Alors là, on fait l'examen des mesures et nous allons, au moment où nous aurons fait cet examen-là et que nous aurons consulté... on aura l'occasion de vous informer des décisions qu'on aura prises.
Le Modérateur: Antoine Robitaille, Le Devoir.
M. Robitaille (Antoine): Oui. Bonjour, M. Harper, M. Charest. M. Charest, est-ce qu'il se pourrait qu'une partie de ce qui va être payé, là, pour la compensation aille au Fonds des générations? On sait que le président de la commission politique du PLQ souhaite ça et l'ancien président aussi, Christian Ouellet, donc...
M. Charest: D'abord, le Fonds des générations est relevé systématiquement par les maisons de cotation de crédit qui font l'évaluation à la fois de l'état des finances publiques au Québec et de l'économie québécoise. Et c'est un des gestes posés par notre gouvernement qui aura été fondateur dans cette volonté de réduire la taille de la dette. Alors, le Fonds des générations est très important.
Maintenant, le contexte économique est tel que le gouvernement va agir avec beaucoup de prudence, beaucoup, beaucoup de prudence. Alors, premièrement, on ne prendra pas cet argent-là pour le dépenser dans les programmes, il n'est pas question de ça. Mais nous allons d'abord faire en sorte que la première chose à faire, c'est de respecter le programme qu'on s'est donné, nous, à notre premier budget, suite à l'élection de 2008, pour arriver à l'équilibre budgétaire en 2013-2014. On est là-dessus d'abord. Sur le reste, on s'entend tous sur le fait que nous devons utiliser le Fonds des générations autant que possible pour justement réduire la taille de la dette au Québec.
M. Robitaille (Antoine): M. Harper, vous avez repris l'expression «fédéralisme d'ouverture», qu'on n'avait pas entendue depuis un bout de temps. Est-ce qu'il va y avoir un jour une charte du fédéralisme d'ouverture dont vous aviez parlé? Et qu'est-ce que vous allez faire sur le pouvoir fédéral de dépenser? Ça, c'est deux éléments de votre discours de 2005 ici, à Québec, en campagne électorale.
M. Harper (Stephen): Je pense que j'ai utilisé ce terme régulièrement et même dans la campagne électorale. Mais, en tout cas, évidemment, j'ai mentionné plusieurs choses que nous avons réglées depuis notre arrivée en fonction.
Il reste certains autres dossiers. Vous en avez mentionné deux. Ce n'est pas des... Il n'y a pas des solutions faciles ou, franchement, des demandes d'urgence de la population à cet égard, mais nous continuons à examiner nos options et nous continuons notre dialogue à cet égard avec le gouvernement du Québec.
Le Modérateur: Martin Ouellet, Presse canadienne.
M. Ouellet (Martin): MM. les premiers ministres, pour revenir au débat sur la taxe, durant justement le débat et les négociations, il y avait plusieurs scénarios qui étaient évoqués. Il était question d'une seule taxe, par exemple. Mais là, ce que je comprends, c'est que les consommateurs vont continuer à acquitter deux taxes. C'est bien ça? Ou ils vont...
M. Charest: Elles sont harmonisées. L'administration des deux taxes sera harmonisée également, comme c'était fait en partie, puisqu'il y avait une administration dont se chargeait le gouvernement du Québec. Le gouvernement fédéral payait la partie qui lui revenait. Et là, nous, on ne taxe plus la TPS comme on la taxait autrefois. Et les Québécois, en conséquence, vont payer exactement le même niveau qu'ils payaient autrefois, sauf, ajoutez ceci, ils vont payer un petit moins qu'ils payaient en 2005. Parce qu'en 2005 le gouvernement fédéral n'avait pas le même niveau de taxation qu'il avait. Alors, ça va être un petit peu plus bas que ce que les Québécois payaient en 2005 en termes de taxes de vente combinées, TPS, TVQ.
M. Ouellet (Martin): Vous disiez aussi que cette harmonisation complète là va permettre de créer de la richesse, créer des emplois. En quelques mots, là, comment ça peut se faire?
M. Charest: Votre question me fait plaisir. Je vais vous raconter ce que... une anecdote. Ce matin, j'écoutais CNBC, on va dire... CNBC qui avait un prix Nobel de l'économie. Je pense, son nom était Michael Spence, qui vient d'écrire un livre sur la mondialisation. Il s'est fait poser une question par les panélistes: Vous feriez quoi, vous, aux États-Unis, pour aider l'économie à reprendre et à rendre l'économie plus compétitive? Sa réponse: Je ferais une taxe sur la valeur ajoutée. Pourquoi? Parce que c'est une taxe qui est plus équitable. Équitable pourquoi? Parce qu'on taxe la consommation. Tu achètes, tu as de l'argent, tu paies. Tu n'as pas d'argent, tu n'achètes pas, tu ne paies pas. Et, si tu es à bas revenus, il y a même un crédit d'impôt qui revient à ceux qui sont à bas revenus. Puis, au Québec, il y a le crédit d'impôt solidarité, que Raymond Bachand a mis en place, qui touche 2,1 millions de Québécois puis qui est encore plus généreux qu'il l'était autrefois. Alors, c'est une taxe qui est plus juste.
Maintenant, ça nous permet aussi d'éviter de taxer des choses qui nuisent à la croissance économique. Je pense à l'investissement, par exemple, qui est précurseur de création d'emplois. Alors, nous, notre devoir, c'est de faire en sorte qu'on puisse, dans une économie très ouverte comme celle du Québec, avoir les taxes qui sont les plus compétitives possibles. Il n'y a jamais de bonnes taxes, là, entendons-nous. Je ne connais personne qui applaudit parce qu'il y a une taxe, mais il faut essayer, il faut prendre les décisions qui nous rendent les plus compétitifs possibles. C'est ce que les gouvernements précédents avaient fait, MM. Mulroney et Bourassa, avec des bénéfices très réels pour le Québec.
Mais j'ai trouvé l'épisode des États-Unis, ce matin... franchement, j'ai trouvé ça fascinant. On demande à ce prix Nobel d'économie: Vous feriez quoi pour les États-Unis? Il ferait ce que, nous, on a décidé de faire depuis déjà un bon moment.
M. Harper (Stephen): Jean vient de mentionner les avantages de cette taxe. C'est important de reconnaître que le Québec a fait vraiment des grands changements nécessaires, il y a longtemps, avant les autres provinces, et c'est une des raisons pour les frustrations à cet égard envers l'harmonisation.
Mais, maintenant, nous avons l'harmonisation, et je dois mentionner, je dois mentionner franchement que c'est vrai que, pour les consommateurs, on doit continuer à montrer les deux taxes, même que les taxes sont harmonisées. Mais je suis heureux avec ça parce que la taxe fédérale reste plus basse.
Le Modérateur: On va prendre une toute dernière question en français. Marie-Andrée Brassard, Radio-Canada.
Mme Brassard (Marie-Andrée): M. Harper, j'aimerais savoir ce que vous pensez de la décision de la Cour suprême qui autorise les centres d'inspection... d'injection supervisée. Et j'aimerais savoir également pour quelle raison vous ne versez pas le 2,2 milliards maintenant, puisque c'est inscrit dans votre budget de cette année.
M. Harper (Stephen): Pour la première, évidemment, j'ai entendu la décision aujourd'hui, nous sommes déçus avec cette décision. Nous lirons la décision, mais évidemment nous allons respecter la décision de la Cour suprême.
Pour l'autre question, nous avons une entente. Il y a un horaire pour assurer la mise en application de ce nouvel arrangement, et, évidemment, le Québec va recevoir le montant réclamé.
M. Charest: Il faut vous dire là-dessus, sur les échéanciers, que nous, c'est parfaitement en accord avec ce que nous attendions de la négociation. Dans les ententes qui ont été conclues ailleurs, c'est comme ça, et l'argent arrive au moment de la mise en oeuvre. Dans la mécanique des ententes, ça fonctionne... c'est la bonne façon de fonctionner.
Le Modérateur: In English now. Rhéal Séguin, Globe and Mail.
M. Séguin (Rhéal): Prime Minister, the decision today on the supervised injection sites, you said you were disappointed earlier. Does your Government plan on taking any actions in order to perhaps bring back the position you defended earlier?
M. Harper (Stephen): As I said, we will read the decision first, and obviously I've just heard about it in the news because I've been travelling. And, as you rightly say, we're disappointed, we have a different policy. We'll take a look at the decision, but we will clearly act in respect and within the constraints of the decision.
M. Séguin (Rhéal): And you mentioned as well Québec was quite courageous in striking this deal back in 1992. What has taken so long to meet the compensation demands of Québec? It was so easy to do with Ontario, British Columbia, Atlantic Provinces. Why did it take so long for Québec?
M. Harper (Stephen): Well, first of all, I would quarrel a bit with the preamble. I'm not sure that any of these deals have been easy with anybody, and, as you know, the British Columbia deal has remained an ongoing political saga in that particular province. So, these are not easy deals for... They are not easy decisions for provincial governments in the first place.
As I said earlier in French, but I'll repeat in English, you know, we had a very different history here, which is that the Québec Government moved very early on. In fact, I think, even technically before the GST existed, the Government of Québec had created a value-added sales tax, very similar, but not harmonized with the new federal GST, or at least what was new in the early 1990s. Québec arranged, at that time or shortly after that, a joint administration agreement with the federal Government. Later, under our predecessors, three Atlantic Provinces created new value-added sales taxes in their provinces through a harmonization agreement, a full harmonization agreement with the federal Government.
And then, of course, we signed deals later ourselves, particularly with Ontario, under very similar terms to what occurred in Atlantic Canada that reopened this issue. And the problem we've had all along is, quite frankly, there was a circle to square here: Québec felt and, look, with justification, that - some frustration that I understand - they had a tax very similar, and, you know, why shouldn't they get the same compensation? Difficulty was they did not have a harmonization deal that was essentially the same as the other provinces, and those harmonization deals we had with the other provinces oblige us just to extend the terms of any new deals to ones who have already signed. And there were certain elements of Québec's arrangement that we were not being prepare to extend to other provinces. So, we had to find, in the past couple of years, through very intensive discussions, an arrangement that would satisfy Québec's needs, but one that we felt comfortable potentially extending to other provinces, and that's the deal we have today. It is, as I say, essentially the same in terms of harmonization of the two taxes, full harmonization. As any deal with the other provinces, there are some unique elements that Québec has but which I would not frankly expect other provinces would be interested.
Le Modérateur: Elysia Bryan-Baynes, Global.
Mme Bryan-Baynes (Elysia): What does today's decision on safe injection sites mean for other jurisdictions like Québec that are thinking about having them?
M. Harper (Stephen): Well, I think it would be premature for me to speculate on what consequences of the decision are. I'm going to have to look at the decision in some detail, and we will respect it. I think obviously it's going to lead to some change in federal policy in order to respect the decision. But, beyond that, it would be premature for me to speculate on what other jurisdictions may or may not do.
Mme Bryan-Baynes (Elysia): What does it do for your «tough on crime» image and in your plans for being tough on crime...
M. Harper (Stephen): Well, that's something that we'll take a look at. I'll just say this, I mean, obviously, the preference of this Government in dealing with a drug crime is obviously to prosecute those who sell drugs and create drug addiction in our population and in our youth, and, when it comes to treating drug addiction, to try to do so through programs of prevention and treatment rather then through the issues that were in front of this court in terms of so called harm reduction. As I said, we will look at the decision, we'll respect the decision and work within that decision.
Le Modérateur: We will take a last question. Marianne White, Postmedia.
Mme White (Marianne): Mr. Harper, some people in other provinces are complaining because the deal that Québec signed with you today is not exactly the same as other provinces have signed, especially considering that Québec would be managing in collecting the sales tax. Is that a fair deal for other provinces like Ontario, for instance?
M. Harper (Stephen): As we said, we would only sign a deal that were prepared to extend other provinces. Québec has had a unique joint administration collection agreement with the federal Government for a very long time, predating this agreement. But, as I said, any elements of these agreements, including the one that you mentioned, other provinces can look at those and can adopt those if they want. I would not expect that, but, if some province wanted to do that, the federal Government would be prepared to deal with them on the same terms. You know, take British Columbia. The issue in British Columbia has not been the particulars of the administration of the tax. The issue in British Columbia was that the population has decided to reject a value-added sales tax in its entirety, and so that's a very different situation.
Le Modérateur: MM. les premiers ministres, merci beaucoup
M. Charest: Merci.
(Fin à 13 h 48)