(Dix heures trente-six minutes)
Mme Ghazal : Alors,
bonjour, tout le monde. Très heureuse d'être ici avec vous, avec Gabriel.
Pour le projet de loi no 96, la CAQ a
manqué une autre occasion de rassembler les Québécois et Québécoises autour de
notre langue commune, la langue française. Le délai arbitraire qui interdit à
des agents de l'État de s'adresser dans une autre langue que le français, six
mois après l'arrivée des immigrants, des réfugiés, est totalement arbitraire,
inacceptable, et ça inquiète beaucoup, beaucoup de gens, pour aucune raison.
À Québec solidaire, on s'engage de façon
très claire à rendre inopérant le délai de six mois. C'est la chose la plus
raisonnable à faire. Moi-même, quand je suis arrivée au Québec, j'avais dix
ans, je ne parlais pas le français. J'ai été dans une classe d'accueil. Je me
rappelle très bien, six mois après notre arrivée, cette rencontre, plusieurs
rencontres avec mon prof de classe d'accueil qui parlait avec mes parents, leur
recommandait comment améliorer mon français, comment être meilleure à l'école,
et tout ça. Et cette rencontre s'est passée en anglais, parce que mes parents,
bien, ne parlaient pas français à l'époque. Et c'est cette expérience de
bienveillance qui a fait que j'ai eu une belle expérience avec l'apprentissage
de la langue française et qui fait qu'aujourd'hui, ma vie se passe, comme
beaucoup, beaucoup d'enfants de la loi 101, en français. Et c'est comme ça
qu'on va protéger le français au Québec.
Vous savez, je suis très fière du travail
que j'aie fait en commission parlementaire. J'ai travaillé très, très fort pour
améliorer le projet de loi no 96, avec rigueur, avec collaboration, aussi,
avec le ministre pour améliorer la protection du français. Puis il y a des
avancées qui sont intéressantes. Par exemple, on va avoir un commissaire à la
langue française nommé aux deux tiers de l'Assemblée nationale, la Charte de la
langue française va s'appliquer à des entreprises à charte fédérale, etc. Et c'est
ce qui fait qu'aujourd'hui on va voter pour le projet de loi no 96.
Donc, deux éléments majeurs : le six
mois, nous allons le rendre inopérant avec la politique linguistique du Québec,
et la deuxième chose, une autre occasion manquée par la CAQ, bien, c'est de
répondre aux demandes des nations autochtones qui sont venues ici, qui ont
parlé, même lors des consultations particulières sur le projet de loi no 96,
et aucune demande n'a été entendue. Le projet de loi no 96 ne change rien
pour les langues autochtones. Nous, à Québec solidaire, un gouvernement
solidaire travaillerait de nation avec nation avec les autochtones pour
mettre... rédiger un projet de loi sur les langues autochtones. Merci beaucoup.
Une voix : Donc, vous allez
appuyer...
M. Nadeau-Dubois : Je
vais juste faire mon intervention, puis ensuite on va prendre vos questions
avec plaisir. Ce n'est pas tous les jours qu'on modernise, qu'on réforme la loi 101
au Québec. Puis, à Québec solidaire, on a toujours cru, on a toujours pensé, et
Ruba a travaillé en ce sens-là, que c'était une occasion de rassembler les
Québécois et les Québécoises autour d'un projet en français. De toute évidence,
la CAQ a raté cette occasion-là.
Il faut dire que les deux partis
traditionnels au Québec n'ont pas beaucoup aidé tout au long de ce débat-là. Du
côté du Parti libéral, le débat autour du projet de loi no 96 a fait la
démonstration définitive de leur désorientation totale. On a un parti qui, au
départ du dépôt du projet de loi, trouvait que le projet de loi n'allait pas
assez loin et a fait des amendements pour le durcir. Ce même parti, cette même
cheffe, aujourd'hui, va voter contre le projet de loi. Du côté du Parti
québécois, bien, depuis le premier jour, ils ont tenté d'interdire... de faire
inclure dans la loi l'interdiction pour des jeunes francophones de choisir leur
cégep, d'aller dans un cégep en anglais. À Québec solidaire, on a toujours
pensé que ce n'était pas comme ça qu'on allait faire s'épanouir le français au
Québec.
Pendant ce temps-là, bien, pendant ce
temps-là, Ruba et Québec solidaire, on a été, tout au long de ce débat, la voix
de l'équilibre. À Québec solidaire, depuis notre fondation, on défend l'idée
selon laquelle défendre le droit des travailleurs, des travailleuses de travailler
en français, c'est une question de justice sociale, et c'est pour ça qu'on va
voter en faveur de ce projet de loi là.
Par contre, je sais qu'il y a des
Québécois qui sont inquiets de ce projet de loi là et qui trouvent qu'il y a
des flous qui sont inadmissibles. Puis ce que je veux dire à ces Québécois et
ces Québécoises-là, aujourd'hui, c'est qu'à Québec solidaire, on va garder ce
qu'il y a de bon dans le projet de loi n° 96 et on va réparer les erreurs
de Simon Jolin-Barrette, de François Legault dans cette loi-là.
D'abord, comme Ruba le disait, on va
désamorcer cette clause de six mois qui s'applique aux nouveaux arrivants.
C'est une clause qui manque de compassion, et, franchement, c'est une clause
qui est, sur le terrain, absolument inapplicable. Il n'y a pas de raison de
faire preuve d'aussi peu de discernement. Nous allons désamorcer cette
clause-là en adoptant une politique linguistique qui s'assure que les services
aux citoyens vont être rendus à tout le monde, même s'il y a des barrières
linguistiques.
Deuxième erreur que Québec solidaire
s'engage à corriger, ce matin, c'est le manque de considération de ce projet de
loi pour les peuples autochtones. On est en 2022. Bien sûr, le français sera
toujours menacé, mais les langues des autochtones le sont également, et elles
le sont même bien davantage. C'est une occasion ratée, François Legault aurait
dû s'asseoir avec les représentants des peuples autochtones pour trouver une
manière de reconnaître ces lois-là et leur statut particulier. C'est
l'engagement qu'on réitère ce matin : Québec solidaire va, de nation à
nation, dans un dialogue en amont, travailler à un projet de loi pour
reconnaître un statut particulier, et protéger, et permettre aux langues
autochtones, donc, de s'épanouir.
En terminant, je veux féliciter ma
collègue, mon amie Ruba, qui a travaillé plus de 125 heures, si nos
calculs sont bons, sur ce projet de loi là et qui a vraiment fait la
démonstration de ce qu'on est capables de faire, au Québec, si on protège le français
avec compassion, intelligence et bienveillance. On est capables de prendre des
gens qui arrivent ici dans des circonstances difficiles, rocambolesques,
parfois de détresse et en faire des citoyens, des citoyennes qui contribuent de
manière exemplaire à notre vie publique puis à l'avenir du Québec. Ruba est
arrivée ici comme enfant de réfugiés. Elle siège maintenant comme députée à
l'Assemblée nationale du Québec, et tout son engagement sur ce projet de loi
là, là, c'est la démonstration de ce qu'on est capables de réussir si on agit
avec bienveillance en défendant le français. Puis c'est l'engagement
fondamental que je prends, aujourd'hui, au nom de Québec solidaire, que, nous,
c'est comme ça qu'on va continuer à intervenir dans le débat sur le français au
Québec.
Mme Lajoie (Geneviève) : Malgré
vos nombreuses réserves, là, vous les avez toutes énumérées, vous votez quand
même pour le projet de loi. Qu'est-ce qui est payant pour Québec solidaire
là-dedans?
M. Nadeau-Dubois : Nous, on
n'est pas... je ne suis pas dans le calcul de ce qui est payant ou pas payant,
là. Il y a néanmoins des avancées dans ce projet de loi là. Le programme de
Québec solidaire est clair qu'on souhaite et qu'on défend depuis longtemps
l'application de la loi 101 aux chartes... aux entreprises à charte
fédérale. C'est présent dans le projet de loi. On souhaite, nous, appliquer la
loi 101 aux entreprises de 10 employés et plus. C'est dans notre
programme. Ce projet de loi là va jusqu'à 25. En ce sens-là, c'est un pas dans
la bonne direction. Donc, il y a des avancées, et on va voter en faveur, ce qui
ne nous empêche pas de prendre des engagements, parce qu'il y a des erreurs
dans ce projet de loi là, puis on s'engage à les corriger.
M. Lacroix (Louis) : Mais
vous avez dit : La CAQ a raté. Vous dites : La CAQ a raté, puis vous
décrivez quand même des points avec lesquels vous êtes foncièrement en
désaccord, mais vous allez voter pour pareil. Vous allez voter comment, en vous
bouchant le nez? Comment vous pouvez...
M. Nadeau-Dubois : C'est un
projet de loi de la CAQ, hein, ce n'est pas un projet de loi de Québec
solidaire. Puis la CAQ est majoritaire, donc ce projet de loi là va être
adopté. Nous, l'engagement qu'on prend, c'est de corriger les erreurs dans ce
projet de loi là. Et on est tout à fait capables de reconnaître qu'il y a
également des avancées, puis c'est sur la base de ces avancées-là qu'on va
voter pour.
M. Laforest (Alain) : Qu'est-ce
que vous dites au PQ qui questionne votre nationalisme en disant que vous
couchez avec la CAQ? Oui, vous avez beau pousser de la main, là...
M. Nadeau-Dubois : Je n'ai
pas envie de me lancer dans une joute verbale avec le Parti québécois.
M. Laforest (Alain) : ...vous
allé jouer là-dessus, là.
M. Nadeau-Dubois : Vous savez
quoi? On fera la campagne électorale quand ce sera la campagne électorale. Dans
le dossier du français, nous n'avons jamais fait de la politique spectacle à
Québec solidaire. Je ne commencerai pas ce matin.
M. Bellerose (Patrick) : ...
M. Nadeau-Dubois : Pardon?
M. Bellerose (Patrick) : ...projet
de loi qui n'est pas assez rassembleur?
M. Nadeau-Dubois : Suffisamment
rassembleur, en effet.
M. Bellerose (Patrick) : Qu'est-ce
que vous auriez souhaité? Parce que, dans le fond, j'entends que vous trouvez
que le projet de loi va trop loin, s'il divise, s'il déplaît aux communautés
anglophones?
M. Nadeau-Dubois : Ce n'est
pas une question de trop loin ou pas assez loin, il y a eu des occasions
ratées. Simon Jolin-Barrette, et même François Legault lui-même, aurait dû
répondre très rapidement à la demande des représentants des peuples autochtones
du Québec de s'asseoir avec eux pour trouver une manière de reconnaître le
statut particulier de ces lois-là, de les protéger, puis de s'assurer de leur
épanouissement. Nous, on a fait, Ruba a fait la bataille en commission
parlementaire pour déposer ces amendements-là, qui avaient été initialement
formulés par l'APNQL. Ça, c'est une occasion ratée.
L'autre occasion ratée, c'est d'avoir
refusé les amendements de ma collègue Ruba quand est venu le temps d'au moins
étendre le fameux délai de six mois, qui n'est pas juste un manque de
compassion, hein, qui est également inapplicable. La vérité, là, c'est que, sur
le terrain, là, il va y avoir plein des circonstances où des agents de l'État
vont être obligés de passer à une autre langue ou de faire appel à un
interprète, par exemple, dans une classe, à Montréal, dans une classe
d'accueil, pour s'assurer d'être capables de parler aux parents. Dans les
faits, cette clause-là, elle est inapplicable, et c'est triste que Simon
Jolin-Barrette ait maintenu le flou là-dessus. Nous, on va clarifier ce
flou-là, puis on va réparer cette erreur-là.
M. Bellerose (Patrick) : Je vous
entends là-dessus, mais pour la principale opposition, c'est les communautés
anglophones. Est-ce que vous considérez qu'on va trop loin de ce côté-là?
Est-ce que leurs critiques sont légitimes?
M. Nadeau-Dubois : Bien, moi,
je constate que François Legault a pris beaucoup de temps, beaucoup, beaucoup
de temps avant de clarifier ce qui était une des principales inquiétudes de la
communauté anglophone, à savoir le droit de recevoir des soins de santé, peu
importe la langue. Ma collègue Ruba a tenté à des dizaines de reprises de
convaincre le gouvernement de la CAQ de clarifier cette question-là puis de
rassurer les gens. Ils ont refusé de le faire. Je ne comprends pas pourquoi,
parce que, quand on regarde le texte du projet de loi, c'est très clair, c'est
très clair que le droit de recevoir des soins de santé, là, peu importe la
langue, il n'est pas atteint par le projet de loi. Pourquoi la CAQ n'a pas
rassuré les gens? Ils auraient pu le faire. Nous, on a tenté de le faire.
Mme Prince (Véronique) : Mais
j'essaie de comprendre aussi la stratégie, parce que la CAQ étant majoritaire,
vous auriez pu voter contre, symboliquement, là, pour dire : Il y a trop
de choses là-dedans qui nous dérangent. Tu sais, de toute façon, ça passe là.
Mme Ghazal : Dans le projet
de loi, j'ai énuméré deux exemples. Des avancées, il y en a plusieurs, je veux
dire. Il n'y a pas... il n'y a rien qui, foncièrement, on est contre, sauf le
fameux délai de six mois. Puis, même, je suis arrivée avec un compromis pour
dire : Au lieu de ne mettre aucun délai, augmentons ça à trois ans. Une
autre fois, à une autre occasion : Augmentez à deux ans. Et, à chaque
fois, ça a été un refus. Puis, comme le disait aussi Gabriel, il y a beaucoup,
beaucoup d'éléments où je prenais sur moi pour expliquer aux gens ce qui est
écrit dans le projet de loi. Il y a 201 articles. C'est normal que M., Mme
Tout-le-Monde, même vous, les journalistes, vous n'ayez pas lu les
201 articles. Moi, j'ai posé des questions au ministre pour comprendre :
Est-ce que, pour la santé, c'est vrai que les gens vont pouvoir parler la
langue qu'ils veulent, et tout ça? Il a fallu que je pose beaucoup, beaucoup de
questions. Les gens me posaient des questions, je leur répondais. Ils
disaient : Mais ce n'est pas ça qu'il dit, M. le premier ministre, ce
n'est pas ça qu'il a dit, Simon Jolin-Barrette, il dit que tout se passe en
français. Finalement, jusqu'à ce que monsieur François Legault soit acculé au
pied du mur, à Laval, où il a dit : Regardez, c'est vrai, là, dans
l'article, là, c'est écrit que tout est protégé. Il y a aussi le discours,
aussi, qui n'est pas rassembleur et qui divise, plus les deux éléments que je
vous ai mentionnés, et c'est possible de les changer sans changer la loi,
uniquement avec la politique linguistique.
Mme Lajoie (Geneviève) : Mais
pourquoi ce serait une erreur de voter contre?
Mme Ghazal : Tout le monde a...
c'est tout à fait légitime de voter contre, de s'abstenir, de voter pour. Ça,
c'est légitime. Moi, je ne veux pas parler des autres.
Mme Lajoie (Geneviève) : Pourquoi
ça serait une erreur pour QS de voter contre?
Mme Ghazal : Bien, il n'y a
pas de... ce n'est pas une erreur ou pas une erreur. Moi, ce que je fais, je
travaille de façon très rigoureuse. Vous en parlerez avec Simon Jolin-Barrette
comment j'ai travaillé pendant la commission. J'aimerais ça vous lui posiez des
questions. Il va vous le dire. Et je l'ai regardé, et tous les éléments, à part
ceux... les deux que je viens de vous nommer... Par exemple, pour les langues
autochtones, il n'y a juste rien, il y a une absence sur la reconnaissance des
lois autochtones. Donc, une fois qu'on termine avec le projet de loi
n° 96, ce n'est pas terminé pour les langues autochtones. Il est tout à
fait possible d'avoir une loi.
M. Lacroix (Louis) : Je pense
que ce n'est pas ça, la question. Ce que j'ai compris de la question,
c'est : Pourquoi c'est une erreur de voter contre?
Mme Ghazal : Je ne veux pas
qualifier le fait de voter contre. Est-ce que c'est une bonne chose? Est-ce que
c'est une erreur? Moi, en mon âme et conscience, et avec le caucus de Québec
solidaire, quand je regarde le projet de loi n° 96, tous les éléments, à
part les deux que je viens de vous nommer, c'est une avancée, par exemple, pour
la langue de travail. Je vous donne un exemple, pour la langue de travail, si
c'est moi qui tenais le crayon, puis que j'écrivais qu'est-ce qu'il faut faire
pour s'assurer que, dans le monde du travail, ça se passe en français, on
aurait été beaucoup plus loin, beaucoup plus loin.
M. Bellerose (Patrick) : Vous
auriez été jusqu'où?
Mme Ghazal : Bien, par
exemple, comme le disait Gabriel, par exemple, que la Charte de la langue
française s'applique à des entreprises de dix employés et plus. Il y a beaucoup
d'immigrants qui, quand ils viennent travailler, ils n'ont pas le temps
nécessairement d'aller suivre des cours de français. Il faut qu'ils mettent du
pain sur la table de la famille. Ils vont travailler dans des petites
entreprises où ça se passe en anglais, où ça se passe même, dans des
entreprises familiales, dans leur langue maternelle. Quand est-ce qu'ils vont
l'apprendre, le français? Bien, dans ces entreprises-là, en les accompagnant,
en faisant de la francisation, pas les soirs et les fins de semaine pour les
familles qui n'y arrivent pas, là, pendant le milieu du travail, sur les heures
payées du travail, avoir des cours de français. Ça, ça n'existe pas. Je
voulais... c'est des amendements que j'ai amenés qui ont été refusés. Il y a eu
une avancée dans le projet de loi, il y a ces deux éléments qu'on vient de vous
nommer, et c'est pour ça qu'on vote pour. C'est la chose la plus raisonnable et
la plus responsable à faire.
M. Robillard (Alexandre) : ...projet
de loi no 96? C'est une bonne chose?
Mme Ghazal : Bien, pour
Québec solidaire, oui, c'est une bonne chose.
Des voix : ...
M. Nadeau-Dubois : Juste
préciser, là, quand on est un parti d'opposition à l'Assemblée nationale du
Québec, on ne rédige pas les projets de loi. Des fois, on aurait envie de le
faire, mais ce n'est pas ce qu'on fait. On les prend, on essaie de les
améliorer le plus possible. Puis à la fin de ce processus-là, on se pose une
question, ces projets de loi là ne sont jamais parfaits, c'est extrêmement rare
qu'on est d'accord avec l'ensemble d'un projet de loi déposé par le
gouvernement, mais on se pose la question : C'est quoi, la proportion
d'avancées qu'il y a par rapport à la proportion d'imperfections ou d'erreurs?
Ce que Ruba vous dit, aujourd'hui, puis ce que je vous dis, aujourd'hui, c'est
que, quand on regarde l'équilibre général de ce projet de loi là et qu'on va
au-delà de certaines déclarations qui sont exagérées à l'égard du projet de
loi, bien, ce qu'on constate, c'est que les avancées valent la peine d'être
appuyées si on les accompagne d'un engagement ferme de notre part à corriger
les erreurs. C'est ce qu'on fait ce matin.
M. Bellerose (Patrick) : ...il
demande : Est-ce que le projet de loi va réussir à renverser le déclin du
français au Québec?
M. Nadeau-Dubois : Il y
a des avancées dans ce projet de loi là, mais il y a des choses qui auraient dû
être faites autrement pour qu'il protège davantage le français, notamment, en
milieu de travail, hein? C'est Gérald Godin qui disait : On passe pas
mal... je le paraphrase de manière honteusement déformée, là, mais : On
passe pas mal plus de temps dans notre vie au travail qu'à l'école. Alors, le
lieu privilégié pour s'assurer de la sauvegarde du français, ce n'est pas le
cégep où on est là deux ans, là, c'est le travail, c'est le travail, c'est sur
les milieux de travail. Puis la francisation, elle va fonctionner sur les
milieux de travail, c'est ce qui est inscrit en toutes lettres dans le
programme de Québec solidaire depuis quinze ans, depuis notre fondation. Ça a
toujours été notre position, et nous, on serait allés plus loin sur cette
question-là spécifiquement. Ceci étant dit, appliquer la Charte de la langue
française aux entreprises de 25 employés et plus, c'est un pas dans la
bonne direction, l'appliquer aux entreprises à charte fédérale, c'est un pas
dans la bonne direction.
M. Bellerose (Patrick) : On
va le renverser un petit peu, mais pas suffisamment, pas complètement?
M. Nadeau-Dubois : Ça
va... Il y a des avancées. Nous, on aurait travaillé différemment.
M. Robillard (Alexandre) : Mme
Ghazal, dans le dossier Polycor, est-ce que vous avez l'impression qu'il y a
une apparence de favoritisme, compte tenu des versions contradictoires des
dirigeants d'Investissement Québec puis de Polycor des dons qui auraient été
faits du banquier d'affaires de Polycor à une équipe dont faisait partie
M. Fitzgibbon puis M. Leblanc? Donc, est-ce qu'il y a une apparence
de favoritisme dans ce dossier-là?
Mme Ghazal : Dans ce
dossier-là, il y a beaucoup, beaucoup, beaucoup de questions qui restent en
suspend, et c'est très important qu'on les clarifie. Malheureusement, quand on
pose des questions à M. Fitzgibbon, qui s'est totalement foutu de nos
règles, des règles qui nous régissent, des règles d'éthique, des règles de
lobbyisme, pour lui, il n'y a pas de problème. Donc, c'est pour ça que j'ai
demandé au Commissaire au lobbyisme de faire une enquête et de faire la lumière
sur cette affaire-là. Est-ce qu'il y a eu du favoritisme? C'est des vraies
questions, des questions qui nous inquiètent. Il y a même eu des entreprises
québécoises, locales, concurrentes à Polycor qui ont dit : Comment ça se
fait que, nous, on ne nous a pas appelés? Donc, beaucoup de questions, et j'ai
très hâte de voir ce que le Commissaire au lobbyisme va dire. Et comment ça se
fait que M. le premier ministre tolère que son ministre de l'Économie entache
la fonction d'un ministre, comme M. Fitzgibbon? Il a une charge publique
et il n'arrive pas à comprendre qu'il y a des règles qui nous régissent. On ne
peut pas fonctionner comme il fonctionnait dans l'entreprise privée avec son
argent personnel.
M. Robillard (Alexandre) : Est-ce
que la Commissaire à l'éthique peut répondre aux questions
que vous vous posez dans ce dossier-là?
Mme Ghazal : Tout à
fait. Là, il y a une enquête du Commissaire au lobbyisme. Je lui ai demandé, le
Commissaire au lobbyisme était déjà en train de faire enquête. Pour la Commissaire à l'éthique, à Québec solidaire, on a déjà fait
plusieurs demandes. On en a fait une, et la Commissaire à
l'éthique, elle a blâmé M. Fitzgibbon. Ce n'est quand même pas rien. Il
y aurait lieu poser...
M. Robillard (Alexandre) : Est-ce
qu'elle doit se pencher sur...
Mme Ghazal : Il y aurait
lieu, oui, que la Commissaire à l'éthiquese
penche sur ça elle aussi puis qu'elle fasse enquête pour répondre à ces
questions.
M. Robillard (Alexandre) : Allez-vous
faire la demande?
Mme Ghazal : Écoutez, je
n'y avais pas... bien, ça serait une bonne chose. Oui, je vais faire la
demande. C'est important parce qu'on ne peut pas ne ménager aucun effort face
aux manquements à l'éthique de M. Fitzgibbon, et c'est important de faire la
demande.
Mme Lajoie (Geneviève) : Une
petite de question sur le manque de personnel dans les cours de justice au
Québec. On a vu plusieurs reportages à l'effet qu'il manque de personnel. La
juge en chef, ce matin, disait qu'ils sont vraiment... ça va vraiment mal de ce
côté-là. Je voulais savoir qu'est-ce qu'on doit faire. Qu'est-ce qu'il faut... Est-ce
qu'il faut s'inquiéter de ça?
M. Nadeau-Dubois : C'est
très inquiétant. L'accès à la justice, c'est un service public. On l'oublie
souvent, c'est un droit pour les citoyens et citoyennes d'avoir accès aux
services de justice du Québec dans un délai raisonnable. Et le délai, il est...
Le délai avec lequel on accède à la justice, c'est une composante de l'accès à
la justice, ce n'est pas un détail. Donc, quand François Legault nous
dit : La pénurie de main-d'œuvre, c'est à peu près une bonne nouvelle, c'est
là qu'on voit à quel point il est à côté de la plaque, là. C'est nos services
de santé, c'est nos services d'éducation et là nos services de justice, les
fonctions élémentaires de l'État québécois qui sont ébranlées par la pénurie de
main-d'œuvre. C'est très inquiétant.
Mme
Sioui (Marie-Michèle) : Là-dessus, là, est-ce que vous partagez l'inquiétude
du ministre de la Justice qui demande à la Cour du Québec de revoir sa décision
de faire siéger les juges une journée sur deux au lieu de deux jours sur trois?
M. Nadeau-Dubois : Je
vais être bien honnête avec vous, je ne suis pas assez familier avec les
détails de l'attribution des rôles dans les cours pour vous répondre,
malheureusement.
Mme Senay
(Cathy) : In English if you don't mind. If you
would have not said: We'll vote in favor, I would have thought that… with all
your arguments, with the six-month delay for newcomers and the lack of
consideration for the Indigenous communities and their own languages in
Bill 96, I was sure you changed your mind and you would vote against it.
What pushes you to vote in favor of Bill 96?
M. Nadeau-Dubois :
When you are an opposition party at the
National Assembly, you have to
do what is good in the bill and what are the mistakes. And there are mistakes
in the bill, and we are saying to Quebeckers that we are going to correct those mistakes. But the good things
are still there. And we think it's responsible and a good thing to do to say
that we're going to vote for a bill which has some good things in it in terms
of protecting French in Québec.
Mme Senay
(Cathy) :
Businesses,
small businesses, the fact that, now, 25 to 49...
M. Nadeau-Dubois :
That's part of the step forward, yes.
Mme Senay
(Cathy) : Just that, for you, Ruba, Mrs.
Ghazal, your parents arrived from Lebanon. They learned French. They had
pressure. They had even pressure even though they didn't have the six-month
delay. And you tried to improve the situation to make that delay longer. You didn't succeed. But, with your own
family history, you feel comfortable to vote in favor of Bill 96 even
though newcomers will have to speak French and get most of their services in
French six months after their arrival?
Mme Ghazal : Well, that's why, at Québec solidaire, we have this engagement: if we are the Government, we will make this six months not operable.
Mme Senay
(Cathy) : Operational.
Mme Ghazal : Operational, yes.
Mme Senay
(Cathy) : You will basically get rid of this
six-month delay?
Mme Ghazal : Yes, in the linguistic politic.
Mme Senay
(Cathy) : You will scrap it.
Mme Ghazal :
Yes. Because, right now, right now, there is a lot of exceptions,
there is a «flou» about this six months, because, right now, the six months in
the bill, in the reality, it's not going to be operational anyway. So, what
we're going to do, as a responsible government should do, is to make it inoperable, that nobody will say: OK,
after six months, it's forbidden to speak any other language with the new
arrivals in Québec. And this is
possible to do it in the linguistic politic, which is... that will be adopted
by the Government after
Bill 96 is adopted.
Mme Senay
(Cathy) :
OK.
The bill, as it is written, is vague for the six months, with the exceptions on
health, public safety, and I think there is another criterion. But you're still
stuck with the six months, Mrs. Ghazal.
Mme Ghazal :
For the other public services, this is
what you're saying. It's because...
Mme Senay
(Cathy) : Yes. There are exceptions, but they
are not clear, so you're still stuck with the six months.
Mme Ghazal : It's possible to correct it. It's possible. How? Because, after
Bill 96 is adopted, in the law, it is written that there is a policy, a
linguistic policy of the state of Quebec and after this… to say how this is
going to be operational, all that bill. And after that, in all the ministers
and all public organisms, there will be «des directives» to say how this is
going to be operational. And it's possible to say: Well, in this situation, the
six months is not operational. So, right now, right now, there's a «flou»,
you're right, and this is the only one thing that we are against it. And we
have this engagement to correct it, and it's possible to correct it. But there is
201 articles. All the other things are a step forward. For the workplace, we
will go much more forward. Because it's important for the French language to
make everybody to be… a social cohesion around the French language, and this is
not what the Government is
doing. But, at Québec solidaire,
we think it's a too much important thing, and I'm pretty sure that the
immigrants and their children will protect the future of the French. So, it's
important that they hear people like me talking in a positive way of the French
language, and saying that it's possible for them to integrate in the French: Don't
go to the English, stay in the French, it's important. And do your life in
French, because this is the way we all can gather together around this
language. So, that's why it's possible to correct it, we're going to correct it,
and we will vote for it.
Mme Senay
(Cathy) :
And
one last thing, Mrs. Nadeau-Dubois… Mr. Nadeau-Dubois, sorry, so concentrated, it's
regarding Indigenous communities. You recognize the lack of consideration with
Bill 96, but you're still going to vote in favor of Bill 96. Indigenous
communities are not… there is not even a mention of Indigenous communities
saying: Well, we recognize the importance of your own languages. But no, and
some indigenous communities will have to learn French on top of English and on
top of their own languages. So, you're… basically, you might just lose ground
with Indigenous communities when they are going to see that you will vote in
favor of Bill 96.
M.
Nadeau-Dubois : This bill does not... is not
up to the situation in terms of what are the responsibilities of the Québec state
towards First Nations languages. We have been fighting this fight long before
Bill 96 was tabled by the Government, and Bill 96 is not the end of that fight
for Québec solidaire. We will continue to be the most credible party in terms
of engaging in an egalitarian nation to nation relationship with First Nations.
We will continue to be there to put forward their demands in terms of
protecting their languages. And we are taking, once again, the formal
engagement that, as a Government, we will work with them to give a particular
status and particular institutions to protect First Nations languages and make
them flourish.
La Modératrice :
Merci.
M.
Nadeau-Dubois :
Merci beaucoup.
(Fin à 11 h 3)