(Quinze heures vingt-cinq minutes)
M. St-Pierre Plamondon : Alors,
bonjour, tout le monde. Comme vous le savez, le Parti québécois est le parti
qui, en termes de popularité, présentement, est bon deuxième, un parti qui a
également une présence très forte dans chacune des régions du Québec. Et, pour
autant, aujourd'hui, nous n'avions pas de question. Donc, en ces journées où,
suite à la négociation entre les partis de l'Assemblée nationale, on ne nous a
même pas donné une seule question pour s'exprimer, bien, on va venir en point
de presse pour dire notre question ou plutôt dire comment on aurait abordé
certaines des questions qui n'ont pas été abordées.
Et évidemment je veux aborder la question
des déclarations de François Legault en matière de transferts en santé. Juste
avant de rentrer en Chambre, il a déclaré qu'après avoir obtenu 90 députés
et avoir rallié toutes les provinces canadiennes, dont il est le président, là,
du conseil de la Confédération, après avoir fait tout ça, il a échoué. Il l'a
dit, que c'était nettement insatisfaisant et insuffisant pour la pérennité de
notre système de santé. Et, à la question toute simple : Quel est votre
plan de match à ce stade-ci?, il répond : On va en faire une priorité.
Donc, à moi de pousser un peu le raisonnement avec François Legault, à savoir :
Comment n'avez-vous pas fait de cet enjeu-là une priorité et pourquoi ne pas
simplement avouer aux Québécoises et aux Québécois que le mécanisme que vous
proposiez ne fonctionne absolument pas? Et comment expliquez-vous aux
Québécoises et aux Québécois votre amitié avec Doug Ford, votre amitié avec
Justin Trudeau qui étaient censées nous rapporter ces milliards-là?
Et, là-dessus, ma seconde question aurait
été, en complémentaire, de corriger quelque chose que François Legault vient de
répéter, il y a quelques instants, et qui est absolument de la démagogie.
Lorsqu'il affirme qu'on reçoit 10 milliards de plus que ce qu'on envoie à
Ottawa, c'est absolument faux. Lorsque vous regardez la quantité d'impôts payés
au Québec qui sont envoyés à Ottawa, c'est absolument faux de dire que le 10 milliards
au net qu'on obtient en péréquation est plus grand que l'ensemble de ce qui est
envoyé. Et la raison pour laquelle il dit ça, c'est qu'il veut mettre de côté,
occulter tous les dédoublements qui nous coûtent une fortune, tous les
programmes qu'on ne choisirait pas et qui nous coûtent beaucoup, les choix,
finalement, qui nous manquent, les investissements directs dans l'économie
québécoise qui ne sont pas faits au profit de d'autres provinces canadiennes.
Simplement, affirmer qu'on ne peut pas dire qu'on reçoit 10 milliards de
plus que ce qu'on envoie en impôts au fédéral.
Et il y aura donc un exercice, on aura des
annonces à faire à notre congrès, on détaillera ces questions-là, mais il ne
faut pas faire de démagogie et faire croire aux Québécois qu'il revient un
chèque de 10 milliards de plus que le chèque qu'on envoie collectivement à
Ottawa sur une base annuelle.
M. Bérubé : Alors, à mon
tour, j'aimerais vous parler de la nécessité, pour le Québec, de travailler
pour le Québec et parler de l'amitié du premier ministre du Québec pour le
premier ministre de l'Ontario. Ils se sont partagé une bière, ils se sont
partagé un chandail de hockey, ils se sont partagé des textos, et l'ami
ontarien, finalement, ne travaille que pour l'Ontario. Et on a compris qu'avec
un seul cigare il a établi une amitié avec Dominic LeBlanc, dont ce dernier se
revendique, ce qui lui permet de se dissocier du front commun et de négocier
seulement pour l'Ontario.
Alors, le premier ministre se trouva fort
dépourvu quand l'affaire fut sue, et ça démontre que le Québec devrait
travailler pour le Québec uniquement... et de tirer des conclusions de ça. Doug
Ford, si ça, c'est un ami du Québec, je ne sais pas ce que ça nous rapporte. Le
Québec doit composer seul face au Canada. Le Canada ne travaille pas pour le
Québec puis l'Ontario ne travaille pas pour le Québec. L'Ontario travaille pour
l'Ontario. Il serait temps que le Québec s'en rende compte. Et Paul St-Pierre
Plamondon l'a indiqué, avec raison, le mandat fort, finalement, ça a servi à
quoi? Nourrir la vanité de la CAQ. Ça ne donne absolument rien. Donc, il n'y a
pas de rapport de force, il y en a encore moins versus les États-Unis, et c'est
une triste constatation.
Alors, dans le cas de ce qui s'est passé
en matière de santé, ce n'est pas le verre qui est à moitié plein, il est au
sixième plein. Et qui va écoper? Bien, c'est les patients du Québec. Et ça,
c'est franchement scandaleux. Il y a un impact considérable qui est lié à ça.
Alors, voilà, retenons que l'amitié entre
Doug Ford et François Legault ou le café entre Justin Trudeau et François
Legault, finalement, n'auront servi absolument à rien, sinon à faire des images
qui seront des tristes rappels du fait qu'on est isolés et qu'on doit compter
que sur nous-mêmes pour notre avenir.
M. Arseneau : Et je
rajouterais, puisqu'il est question des soins de santé, qu'avec cette entente,
qui n'est pas une entente, donc l'imposition du règlement par Ottawa, acceptée
par Legault et ses homologues des provinces, bien, ça fait passer la
contribution fédérale de 22 % à 24 % dans un contexte où, évidemment,
on n'a pas les fonds nécessaires pour investir dans l'Hôpital
Maisonneuve-Rosemont, dans un contexte où on n'a pas les fonds nécessaires pour
améliorer, aussi, les services dans la région des Laurentides, dans un contexte
où les soins de santé dans les régions sont souvent à la charge des gens
eux-mêmes, là, qui doivent se déplacer vers les grands centres, dans un contexte
où les employés de la santé demandent d'être valorisés et d'avoir des
conditions humaines pour travailler et avoir des conditions de travail qui sont
l'équivalent de ce qu'on retrouve, actuellement, dans les agences de placement,
qui reçoivent 3 milliards de dollars sur six ans.
On pourrait parler, également, des soins à
domicile, les soins pour les aînés dans les CHSLD, qui ne sont pas dignes de...
justement, actuellement, dans le confort qui est offert et du programme des maisons
des aînés, qui est ruineux. Alors, on pourrait continuer longtemps, les soins
préhospitaliers d'urgence, également, qui manquent cruellement de fonds pour
pouvoir se débarrasser des horaires de faction, et ainsi de suite. Et ça, on
aura un choix à faire, budgétaire, soit qu'on coupe ou qu'on restreint les
services, soit qu'on pige une deuxième fois dans les poches des Québécois,
parce que l'argent à Ottawa ne nous reviendra pas.
M. St-Pierre Plamondon : Est-ce
qu'il y a des questions?
M. Robillard (Alexandre) : Bien,
M. Legault, il a, en quelque sorte, admis son impuissance face à Ottawa
concernant la négociation sur les transferts. Puis, selon lui, c'est parce que
c'est un sujet qui est difficile à expliquer à la population québécoise. Ça
fait que je me demandais juste : Est-ce que vous partagez son point de vue
sur la difficulté à mobiliser la population sur cet enjeu-là?
M. St-Pierre Plamondon : Il
disait qu'il avait besoin d'un mandat fort, et il a obtenu 90 députés, et
là il dit : Bien, peut-être que c'est parce que je l'ai mal expliqué à la
population québécoise. Demandez à n'importe qui, au Québec, s'ils veulent
5 milliards de plus par année dans le système de santé, ce ne sera pas
long à mobiliser, là, tout le monde a compris que c'est dans notre intérêt.
Donc, François Legault en est rendu là
dans la recherche d'explications pour ne pas nommer la seule explication
possible, à savoir que, pour le Québec, la Confédération canadienne ne
fonctionne pas, elle ne fonctionne pas dans nos intérêts. Et plus notre poids
démographique dans le Canada va diminuer, plus le mépris et l'absence de
considération pour nos intérêts va augmenter.
M. Robillard (Alexandre) : Mais
là, quand même, on n'est pas sur un enjeu qui est spécifique au Québec, là, toutes
les provinces canadiennes, aussi, ont eu la même réponse d'Ottawa.Donc,
est-ce que vous vous considérez que c'est un raisonnement qui se tient, que de
dire : Mon rapport de force dépend de l'appui de l'opinion publique, or,
c'est un sujet qui est difficile à expliquer, M. Trudeau profite de ça
pour ne pas nous donner tout l'argent qu'on demande?
M. St-Pierre Plamondon : Ça
ne tient pas du tout.Croyez-moi, les gens savent et comprennent très
facilement qu'un manque à gagner de 5 milliards par année… puis le fait
que d'autres provinces sont dans la même situation confirme aussi que ce n'est
pas une exagération ou une demande complètement déraisonnable. Croyez-moi que
100 % de la population comprend qu'un manque à gagner de 5 milliards
dans le système de santé va avoir un impact. Et, à preuve que ce n'est pas
compliqué, c'est qu'on vient de passer une motion unanime de l'Assemblée
nationale comme quoi, finalement, le manque d'égard du Canada envers la
question des transferts de santé est un désengagement, mais aussi aura un
impact sur la santé des Québécoises et des Québécois.
Donc, tout le monde comprend, là. Il n'y a
absolument rien de difficile. Il y a de l'argent qui vient de nos poches, qui
part à Ottawa et qui ne revient pas de manière équitable pour le système de
santé. Il va manquer 5 milliards de dollars, et ça aura un impact, tout
le monde comprend ça.
M. Robillard (Alexandre) : Mais
M. Legault dit que, malgré tout, comme il l'avait dit aussi l'automne dernier,
le Québec reçoit 10 milliards de plus que ce qu'il envoie comme argent
chaque année.
M. St-Pierre Plamondon : C'est
faux, c'est faux, c'est de la démagogie. Prenez la totalité des impôts payés
par les Québécoises et les Québécois, puis ce qui est envoyé, donc, à Ottawa au
total, et c'est une somme bien plus grande que le 10 milliards pour la
péréquation seulement. Mais on ne peut pas que considérer la péréquation, il y
a le dédoublement des programmes, il y a les investissements directs dans
l'économie québécoise par rapport aux autres provinces canadiennes, il y a tous
ces choix politiques, à nos yeux, là, absolument inutiles, que nous ne ferions
pas.
Donc, on va arriver, puis on aura des
annonces à faire, là, au Congrès, avec le détail de ces calculs-là, mais c'est
certain, à ce stade-ci, qu'on ne peut pas dire avec sérieux, sans faire de
démagogie, là, on ne peut pas affirmer qu'on reçoit 10 milliards de plus
que la totalité des sommes qu'on envoie en impôts à Ottawa. C'est absolument
faux.
Journaliste : Est-ce que vous
pensez, en fait, que c'est une façon de... comme un peu, bien, mettre le blâme
un peu sur la population québécoise comme quoi on n'aurait pas... on ne réagit
pas, justement, aux transferts?
M. St-Pierre Plamondon : Bien,
c'est ça, comme si les Québécoises et les Québécois n'écoutaient pas, ne
suivaient pas la politique et comme si c'est vraiment de leur faute, ils ne
comprennent pas que c'est une bonne idée d'avoir 5 milliards dans le
système de santé. Ils en parlent depuis des années, mais, tout le long, personne
n'a compris. Un instant, là.
Donc, adressons-nous à l'intelligence des
gens. Il a échoué, ça découle du fonctionnement du Canada, puis il ne veut pas
nommer le concept de Québécoises et de Québécois qui décident par eux-mêmes de
leurs impôts. Puis moi puis les trois personnes ici existent en politique pour
ça, puis nous, on s'adresse à l'intelligence des gens en disant : Est-ce
que ça vous tenterait de décider ensemble de ces impôts-là au lieu de quémander
à Justin Trudeau sur tous les sujets? Est-ce que ça vous tente? Croyez-moi que
les gens, ils comprennent. Merci.
(Fin à 15 h 36
)