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Conférence de presse de Mme Maïté Blanchette Vézina, ministre des Ressources naturelles et des Forêts

Version finale

Cette transcription a été réalisée à l’aide d’un logiciel de reconnaissance vocale. Elle pourrait donc contenir des erreurs.

Wednesday, April 23, 2025, 15 h

Salle Evelyn-Dumas (1.30), édifice Pamphile-Le May

(Quinze heures trois minutes)

Le Modérateur : Bonjour. Bienvenue à cette conférence de presse de la ministre des Ressources naturelles et des Forêts, Maïté Blanchette Vézina, concernant le projet de loi n° 97, visant principalement à moderniser le régime forestier. Elle est accompagnée d'Anne Racine, sous-ministre aux Ressources naturelles et aux Forêts, et de Jean-François Béland, sous-ministre associé aux Forêts. Mme Blanchette Vézina, je vous laisse la parole, ensuite on prendra les questions.

Mme Blanchette Vézina : Merci. Bonjour à tous et à toutes. C'est avec une grande fierté que je dépose... j'ai déposé ce matin le projet de loi visant principalement à moderniser le régime forestier. Ce régime forestier, il a un objectif primordial de protéger nos communautés forestières du contexte économique incertain. Actuellement, les communautés ont besoin que la filière forestière reprenne son dynamisme pour qu'elle puisse faire face aux nombreux défis auxquels elles sont confrontées. Il existe un consensus à l'échelle du Québec, c'est que le statu quo n'est plus une option. J'aimerais tout d'abord rappeler quelques chiffres élémentaires sur les communautés forestières au Québec.

Alors, la filière forestière, c'est 6,4 milliards de dollars du produit intérieur brut québécois, générant des retombées dans plus de 900 municipalités pour plus de 57 000 emplois directs. Et moi, j'en sais quelque chose. Je viens d'un monde où la forêt, c'est beaucoup plus qu'un décor ou une ressource. Je viens d'une famille d'ingénieurs forestiers, de producteurs forestiers, de biologistes, d'ébénistes, de chasseurs, d'acériculteurs, des gens qui vivent avec la... avec la forêt et pas à ses dépens, des gens qui l'aiment profondément. Chez nous, la santé de la forêt, ce n'est pas une idée abstraite, c'est une réalité concrète, une condition essentielle à la survie de nos métiers, de nos villages, de notre mode de vie. Avec le conflit du bois d'œuvre qui devrait imposer des droits compensateurs supplémentaires de 34 % l'automne prochain, en plus des potentiels tarifs supplémentaires de Donald Trump et de façon générale les conditions de marché qui ne sont pas à la hauteur, nos communautés forestières traversent une période extrêmement difficile. Je le répète donc, le statu quo n'est plus une option.

On voit, avec la situation aux États-Unis, à quel point l'imprévisibilité est la chose la plus difficile pour des entreprises qui souhaitent investir et créer des emplois payants. Avec notre nouveau régime forestier, on vient renverser cette tendance. On vient redonner à la filière forestière un environnement d'affaires qui va enfin leur fournir de l'oxygène nécessaire pour avoir des communautés forestières qui sont dynamiques et des emplois payants dans nos régions, partout au Québec. On fait ça en mettant de l'avant trois choses qui peuvent paraître simples, mais qui sont pourtant aux antipodes de la réalité du terrain en ce moment. Ces trois choses sont la prévisibilité, l'efficacité, la souplesse et une tarification dynamique qui s'adapte aux conditions de marché.

Comment on va faire ça? Premièrement, avec un zonage forestier et un horizon de planification de 10 ans. Pendant trop longtemps, on a aménagé le territoire en tentant de faire tout, partout. Désormais, le territoire public sera divisé en trois zones distinctes, soit une zone d'aménagement forestier prioritaire, une zone de conservation et une zone multiusage. C'est le principe de la triade qu'on vient insérer ici. On a l'ambition... d'ambitieux objectifs en matière de conservation, mais on a aussi besoin d'assurer une filière forestière forte avec un approvisionnement qui est stable. La zone d'aménagement forestier prioritaire permettra d'offrir de la prévisibilité à l'industrie en plus de lui confier la responsabilité quant aux travaux de reboisement. Ça va permettre d'augmenter le rendement par hectare pour éventuellement concentrer l'impact des activités forestières.

De plus, en augmentant la planification sur 10 ans, on évite de toujours recommencer le calendrier à zéro presque chaque année. Ainsi, les communautés forestières pourront désormais voir venir les choses bien en avance et réellement planifiées sur le long terme. Avec le zonage forestier, l'horizon de planification de 10 ans, on vient donner des conditions gagnantes pour réduire les coûts d'opération des entreprises et protéger les emplois.

Ensuite, avec les aménagistes forestiers régionaux, on vient s'assurer que la planification forestière et la conciliation avec tous les utilisateurs du territoire se feront en tenant mieux compte des réalités locales et régionales. Il y a beaucoup d'utilisateurs en forêt publique, je pense aux acériculteurs, aux pourvoyeurs, je pense aussi aux chasseurs, aux pêcheurs et, bien évidemment, les entreprises forestières, et tout ça entraîne inévitablement des enjeux au niveau de la conciliation de tous ces acteurs-là en forêt. Et ça, c'est tout à fait normal. Ce qui n'est pas normal, c'est que la conciliation entre ces différences utilisateurs, pour un hectare de forêt dans le nord de l'Abitibi ou au Lac-Saint-Jean, bien, se fasse à Québec. Alors, maintenant, ça va se faire sur le terrain, dans les régions, avec l'aménagiste forestier régional, avec les gens qui connaissent la forêt locale et régionale, qui la connaissent comme le fond de leur poche. Alors, on vient briser le statu quo, on vient réellement régionaliser les décisions. Avec ça, on va aussi amener beaucoup plus de prévisibilité et de souplesse pour les communautés forestières.

Avec ce projet de loi, on veut aussi repenser le réseau de chemins multiusages pour le rendre plus sécuritaire et assurer un meilleur partage des coûts de réfection et d'entretien entre les différents utilisateurs du réseau.

Enfin, avec une nouvelle tarification des bois qui va être plus dynamique, qui va mieux refléter les conditions de marché, on va permettre aux entreprises de préserver leurs liquidités et de mieux encaisser les chocs économiques. Encore une fois, on parle ici de prévisibilité, de souplesse.

Maintenant, un autre élément qui génère beaucoup d'incertitude pour les communautés forestières, on l'a bien vu avec les feux de forêt historiques de 2023, ce sont les changements climatiques. Ici aussi, le statu quo n'est plus une option. Avec le nouveau régime forestier, on viendra mettre en place un nouvel aménagement forestier qui va tenir compte, pour la première fois, des changements climatiques. Ce nouvel aménagement forestier permettra d'avoir des forêts qui sont plus adaptées, plus résilientes, qui, au final, vont permettre de maximiser les retombées économiques pour les communautés. Une forêt vulnérable, une forêt qui est assaillie par les feux ou des épidémies, ce n'est pas une forêt qui est productive. Une forêt adaptée aux changements climatiques, c'est également une forêt qui peut faire vivre des dizaines de milliers de personnes pour les décennies à venir. Une forêt plus résiliente, c'est également une forêt qui offre plus de prévisibilité.

En conclusion, la forêt québécoise peut continuer d'être une grande source de fierté, mais, pour ce faire, il faut avoir le courage de refuser le statu quo. Pour ce faire, il faut des communautés forestières qui sont en santé au même titre que l'est notre forêt publique grâce à sa gestion responsable et durable. Dans un contexte économique qui est difficile, marqué non seulement par la fluctuation des tarifs américains, mais aussi par un conflit du bois d'œuvre qui perdure depuis trop longtemps, notre solidarité envers ces communautés n'est plus un luxe, c'est une nécessité. Et c'est pourquoi j'ai déposé aujourd'hui ce projet de loi qui vient moderniser le régime forestier. Merci, tout le monde.

Le Modérateur : Merci, Mme Blanchette Vézina. On va maintenant passer à la période des questions en commençant avec Pierre-Alexandre Bolduc, Radio-Canada.

Journaliste : Bonjour, Mme la ministre. J'aimerais savoir, sur les zones d'aménagement forestier prioritaires, comment vous allez les définir, selon quels critères, puis elles vont occuper quel pourcentage de la forêt québécoise?

Mme Blanchette Vézina : En fait, certains volets... là, je vais prendre le premier volet à votre question. L'aménagiste forestier régional, ce sera son rôle de s'assurer de déterminer, avec les parties prenantes du milieu, les zones d'aménagement forestier prioritaires, ce sera fait, donc, en tenant compte du contexte régional. En termes de pourcentage, à ce moment-ci, je n'ai pas les pourcentages devant moi, il y aura des objectifs qui vont être transmis à l'aménagiste forestier régional, mais, pour l'instant, ce sera connu, là, au moment où on enverra les orientations. Je n'ai pas ces pourcentages.

Journaliste : O.K. Le projet de loi vous donne quand même plus de pouvoirs. Pourquoi est-ce que ce sera... c'est le ministre ou la ministre qui va attribuer les licences d'aménagement forestier durable et pas les fonctionnaires du ministère? Je fais référence à l'article 88. Est-ce qu'il n'y a pas, Mme la ministre, un risque de copinage et de corruption dans ce cas?

Mme Blanchette Vézina : C'est déjà la ministre qui attribue les garanties d'approvisionnement. Le rôle demeure, ça demeure un rôle qu'il est important de garder d'un point de vue politique puisqu'il y a une sensibilité régionale, une dynamique régionale également. Donc, on conserve le tout au sein de... un rôle au sein de la... du ministre ou de la ministre.

Journaliste : Mais, O.K., pourquoi vous abolissez aussi le bureau... le bureau de mise en marché des bois? C'est quoi, l'idée derrière ça? Comment le gouvernement, la ministre va pouvoir mieux faire pour fixer... encadrer les enchères puis fixer les bons taux? 

Mme Blanchette Vézina : En fait, les tarifs ne seront plus liés aux enchères. Ça fait que ça, c'est une chose qui était décriée. Ça amenait des difficultés dans l'agilité puis la réactivité des tarifs en lien avec le marché. Ça fait qu'on vient vraiment détacher la tarification de la mise aux enchères. Par contre, puis c'étaient des éléments qui étaient nommés dans l'étape de réflexion sur l'avenir de la forêt, les grands constats qui ont été faits par l'ensemble des parties prenantes, c'est que le seuil de 25 %, la mise en marché obligatoire, amenait beaucoup de difficultés dans la prévisibilité d'attribution des superficies récoltables, amenait beaucoup de difficultés, mais, dans certaines régions, ça fonctionne bien. Donc, c'est pour ça qu'on garde un pouvoir, un point de vue ministériel de venir déterminer des enchères. Donc, la ministre aura ce pouvoir. Parce que, dans certaines régions, je pense par exemple à la Côte-Nord, ça peut être utile, mais, dans d'autres, ça venait créer plus de problèmes et ça amenait un environnement d'affaires qui était beaucoup moins compétitif que dans d'autres régions du Canada, par exemple.

Journaliste : ...une petite dernière. J'ai fait un contrôle F, puis je ne vois pas nulle part le mot «caribou» dans le projet de loi. Est-ce que c'est normal?

Mme Blanchette Vézina : Bien, c'est la Loi sur l'aménagement durable du territoire forestier, donc, le caribou, vous voyez des zones de conservation, par contre. Donc, l'objectif de la triade... donc la détermination des différentes zones, il y a des zones de conservation qui vont être déterminées. C'était recommandé par le forestier en chef de s'assurer de faire ce zonage-là, lors... dans son avis de 2023, qu'il m'a transmis, pour justement se permettre d'atteindre nos cibles de protection de biodiversité. Donc, la... le principe de zonage va venir nous permettre d'avoir un rendement plus efficace par hectare dans les zones d'aménagement forestier puis prioritaire, pour se permettre aussi de dégager des territoires en conservation, notamment pour le caribou.

Le Modérateur : Merci. Charles Lecavalier, La Presse.

Journaliste : Je veux revenir sur la superficie, là. Là, vous déposez un projet de loi, il va y avoir une discussion publique sur votre projet de loi, et vous n'êtes pas capable de donner une idée... Je comprends que vous ne pouvez pas dire, dans chaque région, ça va être quoi le pourcentage, là, de zones intensives, mais vous ne pouvez même pas donner une idée de ce que ça va représenter?

Mme Blanchette Vézina : En fait, on va demander régionalement à ce que ce travail soit fait. Et, oui, éventuellement, on va pouvoir y arriver, mais, si j'arrivais aujourd'hui avec des pourcentages, on me dirait que je ne régionalise pas et je ne tiens pas compte des réalités contextuelles, puis je ne consulte pas la population régionale. Donc, un des éléments forts de ce projet de loi là, c'est l'introduction du concept d'aménagiste forestier régional, et son rôle va être, justement, de pouvoir déterminer ces zones.

Journaliste : Ça fait qu'une région comme le Saguenay pourrait dire : Nous, ça va juste être 4 %?

Mme Blanchette Vézina : À ce moment-ci, je ne suis pas en mesure de vous donner des pourcentages.

Journaliste : Non, mais, vous savez, c'est parce que j'ai l'impression que vous devez avoir une idée générale de ce que ça va représenter sur le territoire, là. Est-ce qu'on peut vraiment... est-ce que les Québécois peuvent se faire une opinion sur votre projet de loi si on ne sait pas, tu sais, ça va-tu être marginal ou ça va être 30 ou 40 % des forêts du Québec qui vont être dans cette situation-là?

Mme Blanchette Vézina : Le principe de triade pourrait être un tiers, un tiers, un tiers, mais, par région, ça peut être différent.

Journaliste : O.K., donc on... bon... O.K. bon, déjà...

Mme Blanchette Vézina : La triade, le principe, c'est un tiers, un tiers, un tiers. Je ne veux pas m'enfermer, puis je pense qu'il est important de tenir compte du contexte régional. Je ne veux pas m'enfermer dans ce pourcentage-là, parce que chaque réalité, chaque région a sa réalité distincte, puis qu'il est important d'en tenir compte. Dans certaines régions, j'ai déjà de la conservation qui est faite à un plus haut niveau que ça. Donc, comment on répartit les pourcentages, ça va être vraiment fait de manière régionale par l'entremise de l'aménagiste forestier régional.

Journaliste : Pour ce qui est des revenus, là, je comprends que vous venez... vous abolissez le bureau de mise en marché, j'ai posé tantôt la question au breffage technique, mais il n'y a pas un risque, disons, si le marché n'est pas bon, qu'il y ait une baisse des redevances forestières?

Mme Blanchette Vézina : On a fait les simulations. Je m'inspire beaucoup de l'autre volet de mon ministère, qui est celui du secteur minier, pour lequel il y a une tarification dynamique. Donc, plus le marché est bon, plus les revenus de l'État sont grands, plus le marché ralentit, moins les revenus sont bons. C'est un partage de risques. Mais on a fait des simulations et on sait qu'à terme les revenus vont être similaires. Mais ça permet de soutenir la filière forestière dans ses difficultés, quand elle a des difficultés, puis que l'État reçoive plus de revenus lorsque c'est plus rentable.

Journaliste : Si les revenus baissent, là, est-ce que vous allez baisser les investissements en sylviculture? Est-ce que vous vous arrangez pour que ça balance, ou on peut se retrouver dans une situation où l'État québécois va payer plus pour aménager la forêt que ce qu'il reçoit en redevances?

Mme Blanchette Vézina : Bien, en ce moment, on va quand même chercher des crédits supplémentaires pour faire le reboisement. Là, je vous dirais qu'au moment où le règlement sera publié on pourra discuter du règlement, mais l'objectif, c'est que les revenus soient similaires pour l'État sur le moyen terme, là.

Journaliste : Si je peux me permettre quelques questions, Mme Blanchette Vézina, sur ce sujet-là. François Carabin, Le Devoir. Vous dites que vous avez fait des simulations. Or, on est quand même dans un contexte d'incertitude important dans le milieu du... en fait, dans le milieu économique, mais dans le milieu de l'industrie... forestier. En quoi est-ce que les tarifs sur le bois d'œuvre et les éventuels tarifs supplémentaires imposés par le gouvernement américain influent dans vos simulations?

Mme Blanchette Vézina : Mais on sait que, si on ne faisait rien, il y a des fermetures. J'en ai déjà eu des fermetures. Ça aussi, ça a un impact économique important sur le Québec. On parle de 57 000 emplois dans des régions qui, parfois, sont mono industrielles, donc avec seule activité économique que l'activité forestière. Et ça, ça a des impacts qu'on souhaite éviter, des impacts qui sont d'autant plus dommageables. Alors, on est tous gagnants collectivement lorsque la filière forestière va bien, parce que ce sont des emplois dans nos régions qui viennent employer des Québécois, des Québécoises qui vivent dans nos villages. Donc, c'est ça qu'on vient protéger aujourd'hui. Et quand on fait les simulations, on regarde les différentes tendances, mais on regarde aussi si on ne faisait rien aujourd'hui, quel serait le problème? Puis le problème serait d'autant plus grave parce que certaines régions... C'est un écosystème, la filière forestière. Parfois, la scierie va tomber, ça va amener des entrepreneurs à fermer, ça peut avoir des effets dominos qui sont grands. Alors, c'est ce qu'on souhaite éviter. On en voit, avec le nouveau régime forestier, de meilleures conditions pour avoir une filière forestière qui est plus compétitive.

Journaliste : Donc, vous avez quand même pris en considération la situation à la frontière dans l'élaboration de votre projet de loi.

Mme Blanchette Vézina : Tout à fait.

Journaliste : O.K. Pour revenir au volume de bois récolté, bon, je comprends que le pourcentage, vous n'êtes pas encore capable de le nommer avec certitude, mais si je vous demande... Parce que, dans votre communiqué, vous dites... vous parlez de prévisibilité pour l'industrie. Mais, au final, est-ce que l'objectif de ce projet de loi là ce n'est pas d'augmenter les volumes de bois récoltés?

Mme Blanchette Vézina : En fait, l'objectif, c'est de faire mieux avec chaque hectare qui sera priorisé pour la foresterie, la filière forestière. Mais ce n'est pas la ministre des Forêts qui la calcule, la possibilité forestière, mais l'objectif, oui, c'est qu'on ait un rendement à l'hectare qui soit plus grand pour se permettre d'avoir d'autres activités sur le territoire, notamment de la conservation.

Journaliste : O.K. Merci. Thomas Laberge, La Presse canadienne.

Journaliste : De ce que je comprends du projet de loi, les zones d'aménagement forestier prioritaires, c'est donc l'aspect le plus important. Concrètement, comment ces zones-là vont permettre aux industries forestières de remplir l'objectif, c'est-à-dire ce que vous avez dit, là, c'est-à-dire de rendre les hectares plus productifs, c'est ça?

Mme Blanchette Vézina : Oui.

Journaliste : Concrètement, comment ça va fonctionner?

Mme Blanchette Vézina : En fait, il existe déjà, au Bas-Saint-Laurent notamment, des zones d'intensification qu'on appelle, donc déjà des zones d'aménagement qui sont intensives, qui sont réservées ou priorisées pour la filière forestière. Le rendement est des fois, parfois, quatre fois plus grand. Ça fait que c'est de la sylviculture d'intensification qui peut être faite en amenant aussi l'aménagement forestier de façon distincte... distinguer en fonction des zones, ça peut nous permettre d'avoir un plus grand rendement par hectare pour se permettre d'avoir, parfois, quatre fois plus de mètres cubes par hectare, donc d'éviter d'autres secteurs si on le souhaite, ou d'avoir une plus grande quantité de bois éventuellement qui soit récoltée de la forêt publique. Mais ça existe déjà, ça se fait dans certaines régions du Québec, notamment le Bas-Saint-Laurent. Donc, c'est de la sylviculture intensive qui se fait.

Journaliste : O.K. Excusez. Je n'ai pas compris. Je m'excuse, là. Je le sais que... On me reprochait de venir du Saguenay puis de ne pas connaître le bois, je m'en confesse, mais...

Mme Blanchette Vézina : Bien, je le sais que c'est quand même un secteur qui est complexe.

Journaliste : Non, mais concrètement qu'est ce qui va permettre que... à l'industrie forestière que... si cette zone-là est délimitée ainsi, de sortir plus de bois?

Mme Blanchette Vézina : En fait, ça pourrait être... puis là j'extrapole, mais on peut faire de la sylviculture avec des essences qui ne sont pas nécessairement les essences qui sont écosystémiques, qui permettraient d'avoir un rendement plus rapide, donc une croissance plus grande sur du plus court terme. Ça peut être le type de... le type d'aménagement forestier qui permet d'avoir un plus grand rendement par hectare, peut-être d'aller faire certaines coupes qui sont partielles pour permettre d'avoir un plus grand... un plus grand volume par... pour un arbre, par exemple, tu sais, pour vous donner des images, là. Donc, il existe de la recherche. La science fait beaucoup de recherche. Le ministère, on en fait également. Donc, il existe des techniques de sylviculture qui permettent d'augmenter le rendement à l'hectare. Les ingénieurs forestiers connaissent ce jargon, là, mais... Mais l'idée, c'est donc d'améliorer nos façons de faire en fonction du zonage, d'aménager de manière distincte en fonction du zonage pour se permettre d'avoir un plus grand rendement. Puis encore une fois aussi d'avoir des zones... pardon, qui sont plus vouées à la conservation, notamment.

Journaliste : Mais ça veut dire faire un peu des études de... de forêt, c'est-à-dire prendre une essence et juste planter de l'épinette.

Mme Blanchette Vézina : Ce n'est pas nécessairement ça, non. Ce n'est pas de la monoculture. C'est déjà ce que la science vient nous dire dans certaines régions, là, ce qui se fait déjà, c'est parfois d'avoir des essences qui sont communes, qui permettent une croissance rapide ou avoir une meilleure... un meilleur effet de lumière pour la croissance. Ça peut être un type de... un type d'essence aussi, là. La Suède le fait déjà. On vient jardiner la forêt pour s'assurer d'augmenter l'efficacité par hectare. Donc, c'est déjà des techniques qui sont existantes, qui sont connues des gens sur le terrain puis c'est... C'est aussi pourquoi on souhaite rapprocher les décisions du terrain. Chaque forêt québécoise, chaque région a sa forêt particulière. Ce n'est pas la même forêt qui est en Estrie que celle qui est sur la Côte-Nord. Puis je sais que ça a l'air simple, mais c'est pour ça aussi qu'on souhaite régionaliser ces décisions-là, parce que chaque région a ses particularités.

Le Modérateur : Merci. Nicolas Lachance, le Journal de Québec.

Journaliste : Oui, bonjour. Vous avez donné... Vous avez expliqué dès le départ que c'était en raison de ce qui se passait aux États-Unis principalement qu'il y a ce projet de loi, et c'est les mots que vous avez utilisés, pour mettre de l'avant ce projet de loi là. Je doute que le projet de loi ait été préparé depuis l'arrivée de Trump au pouvoir. On s'entend que vous devez travailler depuis beaucoup plus longtemps sur ce projet de loi là. Qui vous... Qui a poussé dans cette direction-là? Qui vous demandait ces changements-là?

Mme Blanchette Vézina : L'ensemble de la société civile. Puis en fait, c'est... vous l'avez dit, c'est avant Trump.

Journaliste : ...suggestions venaient principalement de l'industrie?

Mme Blanchette Vézina : Bien, l'ensemble des régions du Québec, tous les partenaires nommés qui avaient besoin de s'asseoir pour améliorer... En fait, avoir une vision commune du développement de notre forêt, avoir une sécurisation des hectares qui permettent d'avoir des rentabilités d'un point de vue économique pour protéger les emplois dans les régions. Mais vous avez posé la question est ce que c'est Trump? La relation avec les États-Unis en termes de bois d'oeuvre, ça date de plus longtemps, les difficultés, que l'arrivée de Trump. Le conflit du bois d'oeuvre est là depuis de nombreuses années, plus récemment à partir de 2015, 2017. Donc, c'est déjà des difficultés. Les tarifs sont existants pour l'industrie forestière à 14.4 % en dehors de ce que Trump a pris comme décision. Ça fait que quand je vous parle de la situation économique, c'est aussi ce contexte-là où on doit revoir nos façons de faire, l'environnement d'affaires, ici, au Québec, améliorer aussi la façon dont on cohabite en forêt pour avoir une plus grande prévisibilité pour tous les usagers. Et ça, quand je vous dis que c'était demandé par tous, on a fait l'étape de réflexion sur l'avenir de la forêt suite aux feux de forêt. J'ai invité l'ensemble des parties prenantes à venir dialoguer, tout le monde. Et le constat, vous pouvez aller voir le rapport des tables de réflexion sur l'avenir de la forêt, tout le monde mentionnait que le constat, c'est qu'on ne peut plus continuer comme ça. Il faut revoir nos façons de faire. C'est pour ça qu'on le fait.

Journaliste : ...je vais changer de mot, l'aspect prévisible de tout ça.

Mme Blanchette Vézina : Oui, la prévisibilité.

Journaliste : Oui, est principalement pour l'industrie. Parce qu'on comprend que le multiusage, l'industrie peut continuer à y aller et aller piger là. Donc, l'aspect positif, il est pour eux beaucoup plus que pour les autres secteurs d'activités.

Mme Blanchette Vézina : Pour l'ensemble des usagers, cette prévisibilité-là, elle est demandée. Mais c'est vrai que ça va amener une plus... plus grande prévisibilité pour la filière forestière. Puis ça, c'est souhaité par les communautés forestières. C'est souhaité par les régions du Québec qui demandent... aussi les MRC, qui demandent d'avoir une meilleure vision de ce qui peut se faire sur le territoire, où et quand. Et ça, quand je vous dis que c'est un consensus, c'est un consensus. Moi, si je suis devant vous aujourd'hui, je fais un projet de loi pour les Québécois et les Québécoises, les régions du Québec, les communautés forestières, pas pour la filière forestière uniquement pour la vitalité de nos... économique des régions du Québec.

Journaliste : Mais ça reste que, durant le breffage technique, là, ils ont... on nous a expliqué que c'est... quand même l'objectif, c'était d'augmenter les volumes, donc d'augmenter les coupes. Ça reste... ça fait partie de vos objectifs, là, avoir un volume accru.

Mme Blanchette Vézina : En fait, l'objectif, c'est de sécuriser notamment des investissements du gouvernement, mais aussi sécuriser des emplois dans nos régions. C'est important la filière forestière pour les régions du Québec, pour l'économie du Québec et comme gouvernement, on se doit d'agir pour sécuriser ce secteur-là, puis, oui, avoir un meilleur rendement par hectare, ce qui va nous permettre de dégager des superficies aussi pour faire de la conservation. On a des objectifs, mon collègue de l'Environnement des objectifs, on les a tous comme gouvernement, mais des objectifs ambitieux de conservation qu'on souhaite atteindre, et c'est par ce zonage-là qu'on va pouvoir y arriver en sécurisant des investissements, avoir un meilleur rendement par hectare dans les zones d'aménagement forestier prioritaires, puis avoir aussi des zones de conservation puis des zones également multiusages qui vont permettre de continuer de faire de la chasse, de la pêche, des pourvoiries, les usages que l'ensemble des Québécois souhaitent avoir en forêt publique.

Journaliste : Puis est-ce que... Une petite dernière, après ça, je te laisse. Est-ce que vous avez l'impression que vous allez être capable de convaincre la communauté scientifique qui s'inquiète depuis plusieurs années que finalement la forêt soit principalement centrée sur la récolte du bois au lieu de l'aménagement en réalité? Parce que là, on vient solidifier des zones qui vont être axées là-dessus, tout en laissant l'opportunité d'avoir accès aux zones multiusages

Mme Blanchette Vézina : Bien, mes décisions, elles sont basées sur des orientations qui sont émises par des scientifiques également. Le Forestier en chef qui nous a également proposé de faire ces... ces changements-là. Donc, pour moi, il est important de tenir compte de ce que les scientifiques nous disent aussi pour arriver à atteindre nos objectifs, notamment de conservation, mais aussi de... de soutenir l'économie du Québec.

Le Modérateur : Charles Lecavalier.

Journaliste : J'avais une autre question que je n'ai pas pu poser sur l'article 17.6, et je suis quand même surpris, là, c'est que ça vient interdire au gouvernement, dans une zone, bon, intensive, de faire un paquet de choses comme créer... faire une aire protégée, mais même, tu sais, dresser le plan d'un habitat d'espèces floristiques menacées. Donc, je suis un peu surpris. Pourquoi c'est nécessaire? Puis là, bien, on a expliqué au breffage, là, qu'avec 17.4, ça vient quand même permettre au gouvernement de... de venir délimiter et bon de changer... de changer la donne si l'intérêt public le justifie. Mais ça ajoute quand même la notion de compenser, puis là je... Mais actuellement, quand le gouvernement du Québec puis le ministère de l'Environnement décident de créer une aire protégée, là, il n'y a pas une obligation de redonner un volume équivalent à l'industrie forestière? Puis là... mais là, vous, c'est ce que vous venez de faire, c'est-à-dire qu'à partir d'aujourd'hui, dans ces zones-là, si le gouvernement du Québec décide d'en retirer une partie pour un intérêt public, il va devoir compenser ces volumes de bois là. C'est ce que je comprends?

Mme Blanchette Vézina : En fait, il n'y a pas de compensation obligatoire. Ce n'est pas obligatoire, là. Mais...

Journaliste : Ce n'est pas obligatoire?

Mme Blanchette Vézina : Non, ce n'est pas obligatoire, c'est un peu, là, si je me souviens bien, là. Je n'ai pas l'article exact, là, je ne l'ai pas lu rapidement comme ça, mais... puis, oui, il y a un mécanisme. Donc, si on trouvait, par exemple, un intérêt écologique à vouloir conserver sur une partie du territoire, ça pourrait être fait. Mais c'est une des options. L'idée derrière ça, c'est de dire on vient sécuriser du territoire en fonction des investissements que le gouvernement met également, là, pour la rentabilité économique, hein, entre les différentes fonctions associées à chacune des zones. Ça permet de... d'être cohérent d'un point de vue gouvernemental.

Journaliste : Mais vous ne voulez même pas qu'il y ait, là, on, des plans d'habitats d'espèces menacées, donc ça veut-tu dire qu'on... que le ministère de l'Environnement ne pourra pas, dans ces zones-là, aller vérifier s'il y a des espèces menacées?

Mme Blanchette Vézina :  Mais en fait, ça pourrait... ça pourrait se faire, l'idée... Puis on n'est pas fermés, là. L'idée, c'est qu'on ait une possibilité avec un moyen d'exception si on découvrait quelque chose. Ceci étant, l'objectif, c'est de s'assurer d'avoir des zones qui permettent d'avoir la vocation économique, et c'est ce qu'on vient... c'est ce qu'on vient sécuriser avec... avec les articles dans le projet de loi.

Journaliste : Juste pour préciser, Mme Blanchette Vézina, donc 17.4, il est écrit clairement que le gouvernement doit, si sa décision a pour effet de diminuer la superficie totale des zones d'aménagement forestier prioritaire au Québec ou les possibilités forestières sur le territoire forestier du domaine de l'État, prendre toute mesure propre à compenser cette diminution. Donc, moi, je ne vois pas...

Mme Blanchette Vézina : Mais ce n'est pas une compensation nécessairement qui est économique, mais l'idée c'est de regarder.

Journaliste : Compensation de territoire, mais tout ça pour dire que...

Mme Blanchette Vézina : Notamment par la délimitation de territoire de remplacement ou le financement de traitements sylvicoles. Donc, il y a d'autres possibilités que de simplement dire : On vient remplacer du territoire.

Journaliste : Mais est-ce que vous n'empêchez pas... Est-ce que vous ne créez pas une barrière pour que le gouvernement du Québec, à l'avenir, crée par exemple des aires protégées? S'il devait y avoir... Bon, là, on disait que le caribou, le mot «caribou» n'apparaissait pas dans le texte du projet de loi, mais s'il devait y avoir une perte de bêtes, là, de caribous dans un territoire donné puis que c'est dans une zone de prioritaire, là, excusez-moi, il y a beaucoup de mots, est-ce qu'on ne se crée pas une barrière à créer des aires protégées ou des aires de conservation de la faune?

Mme Blanchette Vézina : On a prévu justement des... une exception pour se permettre d'avoir de l'agilité au besoin. Pour les zones de conservation, dans la délimitation des zones de conservation versus les zones d'aménagement forestier prioritaires, on veut travailler et on va travailler conjointement avec le ministère de l'Environnement pour établir ces zones-là. Avec les Premières Nations, puis j'en ai peu parlé, là, mais il y a également des discussions qui vont avoir lieu avec les Premières Nations. L'idée étant de s'assurer d'avoir en parallèle des délimitations de conservation en fonction de l'établissement aussi des zones d'aménagement forestier prioritaires.

Journaliste : Merci. Pierre-Alexandre Bolduc.

Journaliste : ...l'industrie, moi, m'avait dit, m'avait parlé de cette fameuse question de la prévisibilité, là, puis qu'aller bûcher c'était de plus en plus loin puis ça coûte cher faire les... construire les chemins, et tout ça. Est-ce qu'on peut dire ou on peut s'imaginer que les nouvelles zones d'aménagement vont être moins loin, vont être plus proches des communautés en question?

Mme Blanchette Vézina : Mais ça peut être un des éléments des critères de détermination, là, qui pourrait être utilisé, mais ce n'est pas automatique que ce sera uniquement rapproché, mais il y a une logique certaine à se dire de rapprocher des usines, des zones, des zones d'aménagement forestier prioritaires. Mais il reste qu'il y a d'autres vocations qui pourraient être pertinentes, ça fait que je ne veux pas vous dire aujourd'hui que ce sera uniquement ce qui est près des usines. La chose qui est intéressante aussi dans le projet de loi, c'est qu'on vient faire un plan de gestion des chemins multiusages pour, justement, éviter de dédoubler des chemins. C'est des choses qui étaient reprochées, notamment par la communauté scientifique, en lien avec la protection de la biodiversité. Donc, avec ces plans de gestion là et la possibilité aussi d'avoir une tarification qui est plus représentative des usagers de ces chemins, mais ça va vraiment venir aider à la conservation puis aux investissements également, aux coûts d'approvisionnement.

Journaliste : ...expropriation d'une usine si elle perdait son certificat, là, dans le préambule du projet de loi. Oui. Pouvez-vous nous expliquer pourquoi? Qu'est-ce que ça veut dire?

Mme Blanchette Vézina : Mais en fait c'est des... une situation qui serait d'exception, là. L'idée... J'ai mentionné qu'il y avait le reboisement qui reviendrait à l'industrie. On veut s'assurer qu'il y ait... s'il y avait une révocation de licence, qu'on puisse avoir certains recours. Ça en est un. Donc, on veut aussi éviter des éléphants blancs dans certaines municipalités. On ne sait pas ce qui peut arriver dans le contexte économique actuel et on veut s'assurer qu'on garde des forêts... des économies forestières qui sont dynamiques. Alors, c'est une possibilité, mais c'est une gradation, là, bien sûr, de sanctions.

Journaliste : Une entreprise ne fait pas sa job de replanter, bien, ça, ce serait la menace, là.

Mme Blanchette Vézina : On a d'autres mécanismes avant ça, mais s'il y avait une licence qui était révoquée, là, ça, c'est un des critères, mais c'est une des possibilités.

Journaliste : ...une usine qui est fermée à long terme, mais que l'entreprise ne veut pas vendre parce qu'elle ne veut pas de plus de compétition, mais là vous pourriez dire : Non, mais là, nous, on la veut, là.

Mme Blanchette Vézina : Exactement. Pour éviter d'être à la merci de certaines entreprises qui, parfois, prennent en otage certaines régions. Donc, on vient, oui, baliser mieux, disons, les mécanismes qui viennent balancer, là, disons, certaines responsabilités qu'on envoie à l'industrie pour avoir un équilibre puis certaines poignes, si je peux me permettre l'expression.

Le Modérateur : Merci. C'est ce qui met fin à cette conférence de presse.

Mme Blanchette Vézina : Merci.

(Fin à 15 h 35)

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