Point de presse de M. Yves Bolduc, porte-parole de l'opposition officielle en matière de santé
Version finale
Le jeudi 13 décembre 2012, 14 h
Salle Bernard-Lalonde (1.131),
hôtel du Parlement
(Quatorze heures quatre minutes)
M. Bolduc (Jean-Talon): Merci d'être ici juste avant la période des fêtes. On vous a convoqués tout simplement parce qu'on a pris connaissance de l'article dans La Presse aujourd'hui sur le risque de coupures à Montréal.
Hier, moi, j'ai rencontré plusieurs dirigeants d'hôpitaux - il y avait une activité à Montréal - et puis il y a beaucoup d'inquiétude. Et puis ce qu'on a dans l'article aujourd'hui, là, ça confirme ce qu'on entendait depuis longtemps, c'est-à-dire que, dans le réseau de la santé, il y a des coupures qui s'en venaient.
Et ce qui nous inquiète encore plus, c'est qu'on parle de rétroactivité, ce qui veut dire que, des patients qui ont été opérés à partir d'avril, il y aurait des coupures par rapport aux montants qui vont être versés. Ça, ce que ça veut dire, c'est que c'est impossible de récupérer, d'ici le 31 mars 2013, ces montants-là, et les coupures vont devoir être appliquées ailleurs, dans d'autres services.
L'autre élément qui nous inquiète, c'est qu'actuellement, si les gens ne reçoivent pas les montants nécessaires pour faire les chirurgies, il va y avoir une diminution du nombre de chirurgies puis une augmentation des délais d'attente.
L'année dernière, nous avons opéré 15 000 patients de plus que l'année précédente. Cette année, on s'en allait vers une année record, mais ce qui est inquiétant, c'est qu'à ce moment-là les listes d'attente vont commencer à augmenter, et on va retomber dans les mêmes scénarios que dans les années 1995, où, lorsqu'il y a eu des coupures, les gens ont tout simplement cessé d'opéré, les listes d'attente ont augmenté, et par la suite ça a été difficile de récupérer. Surtout qu'on a le personnel actuellement et les salles pour faire les chirurgies.
Donc, pour nous, là, c'est l'élément qui est très, très important. C'est-à-dire les coupures risquent d'amener des problèmes... elles vont amener des problèmes, mais elles n'amèneront pas des problèmes seulement qu'en chirurgie; également dans les autres secteurs. Et également la rétroactivité qui a été appliquée dans d'autres domaines que la santé, c'est quelque chose qui ne se fait pas. Et surtout on ne pourra pas désopérer les patients. Ils ont été opérés, donc on s'attendrait à ce que les montants qui avaient été prévus dans les budgets soient donnés aux établissements. Mais surtout - ce qui est difficile à comprendre - comment peut-on faire 50 millions de coupures sur une période de trois mois, ce qui veut dire qu'annuellement ça équivaudrait à 200 millions de dollars?
Donc, pour moi, c'est une commande qui est impossible, et le ministre devra nous expliquer qu'est-ce qu'il va faire pour être capable d'atteindre son objectif sans couper dans les services.
Mme Tremblay (Marie-Hélène): Au-delà du fait que justement, là, le problème, c'est que c'est le nombre de chirurgies qui va écoper, est-ce qu'il y aurait une façon de procéder autrement que si, par exemple, on disait: O.K., on y va pour les chirurgies? Mais est-ce qu'on pourrait procéder autrement, selon vous, pour justement faire ces compressions de 50 millions?
M. Bolduc (Jean-Talon): Bien, les compressions de 50 millions, quand il ne vous reste seulement que trois mois dans l'année financière... Pour le réseau de la santé, 80 %, c'est du salaire, et c'est des gens qui ont la sécurité d'emploi, ce qui veut dire que ce sont des services qui doivent être cessés presque immédiatement. Mais ça veut dire qu'il y a des patients qui, au lieu d'avoir leurs services maintenant, ça va être reporté à l'année prochaine. Mais comme ils annoncent ça, c'est que l'année prochaine il va y avoir encore des coupures qui vont être annualisées, ce qui veut dire qu'on fait juste augmenter nos listes d'attente.
Et de dire qu'on va remettre ça ailleurs... Vous savez, c'est un réseau qui est déjà sous pression. Je ne connais pas un établissement au Québec qui a trop d'argent. Ça fait que, dès que vous leur enlevez de l'argent, quel que soit le secteur dans lequel vous l'enlevez, ça va avoir des impacts directement sur les services.
M. Lacroix (Louis): Il a aussi été mentionné qu'en fait on n'a pas le droit de faire davantage de chirurgies, et, si on en fait davantage, il faut aller chercher l'argent à même les budgets des hôpitaux. Est-ce que, ça, vous pensez que ça pourrait enlever d'autres services, outre les chirurgies? Parce qu'à un moment donné, l'argent, on ne le multiplie pas, là.
M. Bolduc (Jean-Talon): Bien oui. C'est que, vous savez, c'est le même argent. Si vous continuez à faire le même nombre de chirurgies comme il était prévu pour réussir à répondre aux besoins de la population, ça veut dire que, l'argent qui ne sera pas donné en chirurgie, il va falloir le prendre ailleurs. C'est le principe. Ce sont tous des vases communicants.
Et, quand le ministre, il dit: Ils vont couper 50 millions dans des frais administratifs, c'est de l'air, ça. Il n'y a pas de 50 millions de coupures administratives. Le personnel est déjà là. Ça fait longtemps que les gens se sont fait serrer au niveau des montants d'argent. Donc, à ce moment-ci, si les hôpitaux veulent récupérer 50 millions de dollars, et surtout dans la région de Montréal, ça veut dire qu'il y a d'autres services qui devront ne pas être donnés ou des services qui étaient prévus qui vont être cessés.
Mme Tremblay (Marie-Hélène): Vous dites, hier, avoir rencontré les dirigeants d'hôpitaux à Montréal, qui sont inquiets. Est-ce qu'il y a une mobilisation qui se prépare? Est-ce qu'il y a des actions communes qui se préparent auxquelles vous allez prendre part ou...
M. Bolduc (Jean-Talon): Non, je ne pense pas que... Vous savez, c'est d'abord un réseau de cadres, dans lequel les gens sont responsables, et je ne pense pas qu'à ce stade-ci il va y avoir des démonstrations, des manifestations de la part des dirigeants d'hôpitaux pour contester. Par contre, les gens savent que, s'ils font le travail qui est demandé, ça va avoir de l'atteinte au niveau des services, puis il va y avoir des coupures dans certains services.
Ce que j'ai compris également, c'est que, les salles d'opération, de toute façon, à ce temps-ci, les patients sont cédulés, ils ne pourront pas les canceller. Le personnel est déjà là, donc, si vous n'utilisez pas votre salle d'opération, vous avez un 60 % à 70 % du montant qui, de toute façon, va être dépensé. Donc, pour eux autres, c'est illogique de diminuer le nombre de chirurgies, sauf qu'ils vont regarder ailleurs, dans d'autres types de services. Ça peut être dans le maintien à domicile, ça peut être dans l'utilisation de certains services, ou de créer des listes d'attente dans certains secteurs, des listes d'attente qui sont déjà présentes, ou s'il y avait du personnel qui était supposé d'être embauché au niveau des services cliniques.
Je vais vous donner un exemple. Vous étiez prévu d'embaucher une orthophoniste pour donner des services. Bien, à ce moment-là, ils peuvent retarder l'embauche ou tout simplement annuler l'embauche d'une orthophoniste, et le service ne sera pas donné, ce qui n'est pas un signe de qualité dans notre réseau de la santé.
M. Lacroix (Louis): Mais, M. Bolduc, le problème, c'est qu'il faut couper dans les budgets parce qu'on s'en allait vers un déficit record. On vous aurait probablement demandé de couper aussi, M. Bolduc.
M. Bolduc (Jean-Talon): Je n'aurais jamais accepté de faire ces coupures-là parce qu'au niveau des urgences, au niveau des listes d'attente, au niveau des services cliniques, il n'y avait pas de coupure. Et je vous rappellerai que, s'ils font des coupures actuellement, c'est aussi le fait qu'ils ont mis de l'argent dans d'autres secteurs, et la santé a toujours été protégée jusqu'à un certain point par rapport aux services.
Mais moi, je n'aurais jamais accepté. Et, vous l'avez vu au cours des quatre dernières années, à chaque année ça aura toujours été des années difficiles. Ce n'est pas pire cette année que les autres années. Et nous autres, on n'a jamais coupé au niveau de la chirurgie, on a toujours maintenu des salles d'urgence, puis on n'a jamais coupé dans les services cliniques.
M. Lacroix (Louis): Mais, si on vous avait demandé de couper, M. Bolduc, à quel endroit... Si on était arrivé en disant: Regardez, il faut trouver 50 millions d'ici le mois de mars, vous auriez fait quoi?
M. Bolduc (Jean-Talon): La solution, c'est que le ministre de la Santé est là pour défendre les patients. Et, lorsqu'il a des discussions avec le Conseil du trésor, et j'en ai eu au cours des quatre dernières années, à chaque fois il n'y a jamais eu d'atteinte aux services des patients. C'est à la première ministre de protéger les services aux patients et c'est la première ministre qui doit donner ses commandes claires. Et la première commande qui m'a toujours été donnée, c'est: Vous ne touchez pas aux services aux patients.
M. Lacroix (Louis): Donc, vous auriez refusé, M. Bolduc?
M. Bolduc (Jean-Talon): C'est que je l'ai fait au cours des quatre dernières années, lorsqu'on avait des difficultés financières, parce qu'à chaque année c'était serré. On a toujours maintenu des services au niveau des patients.
M. Lacroix (Louis): Alors, est-ce que vous considérez que... Comment vous qualifiez le travail de M. Hébert?
M. Bolduc (Jean-Talon): Bien, je pense que c'est à la population de juger. Mais, quand ils nous disent que ça n'atteindra pas les services... Parce que c'est un déni qu'ils font actuellement. Ils disent qu'il n'y aura pas d'atteinte au niveau des services. La réponse provenant du réseau de la santé et selon moi, comme ancien ministre de la Santé: Les coupures qu'ils demandent actuellement dans le réseau de la santé ne peuvent se faire qu'en diminuant l'offre de services.
M. Lacroix (Louis): C'est complet là-dessus. Juste avant de passer en anglais, on a beaucoup parlé de double rémunération de Bolduc au cours des derniers jours de la dernière semaine. Vous, vous avez deux emplois. Qu'est-ce que pensez de ça, la double rémunération?
M. Bolduc (Jean-Talon): Bien, un, premièrement, c'est que je n'ai aucune rémunération qui va de la double rémunération sur le style retraite ou des plans comme celui-là. Et puis, comme ministre, j'ai toujours respecté les règles strictes, c'est-à-dire c'est des tâches exclusives. Et, comme député, naturellement, un peu comme j'ai dit, comme Dr Khadir et la représentante de la CAQ font, on fait un peu de pratique. Moi, entre autres, je fais un peu de pratique les fins de semaine. Mais, pour ce qu'il s'agit de la double rémunération par rapport à la situation comme M. Lisée, moi, je n'ai aucune situation similaire.
M. Lacroix (Louis): Donc, vous ne voyez rien de mal à ce que vous pratiquiez un deuxième emploi en plus de votre travail de représentant de vos...
M. Bolduc (Jean-Talon): C'est un choix. Plutôt que d'aller faire du ski la fin de semaine, moi, je fais de la médecine. Puis je pense que ça a été publicisé. Et puis, jusqu'à date, là, je suis même un de ceux qui est le plus présent au niveau du Parlement. Aujourd'hui, je suis avec vous, alors que les gens... il y en a d'autres qui font des activités de comté. Mais moi, jusqu'à date, vérifiez, je n'ai manqué aucune activité de député puis je suis très présent ici, sauf que je travaille à peu près trois fins de semaine sur quatre à la clinique. Puis ça, ça a été connu, puis je ne suis pas gêné de le dire. Ça aide la population.
Et d'ailleurs vous avez une grande gratification à le faire parce que les gens sont très contents d'avoir un médecin de famille. Et puis mon intention est de continuer sur la même lignée mais jamais, puis je l'ai toujours dit, aux dépens de la tâche de député.
M. Lacroix (Louis): Est-ce que vous avez calculé combien ça va vous donner de plus dans l'année?
M. Bolduc (Jean-Talon): Je n'ai pas calculé. Je n'ai pas calculé. Je veux dire, si on fait...
M. Lacroix (Louis): Bien, c'est quoi, c'est une demi-tâche de médecin que vous faites? Un tiers de tâche? Un quart de tâche?
M. Bolduc (Jean-Talon): Peut-être un tiers ou un quart, là. C'est à peu près l'équivalent, là. C'est difficile à dire parce que les médecins, ils ont des pratiques qui sont diversifiées, qui sont dans plusieurs secteurs. Ça fait que c'est à peu près cet équivalent-là. Je travaille les fins de semaine puis un peu la semaine.
Mme Montgomery (Angelica): On this health care standing. «Dans les crédits», in the spending estimates, the Parti québécois says that it will give the health care system $130 million less this year than the Liberals had given them, so it's written that they will cut by $130 million this year. What is your understanding of what's going to happen?
M. Bolduc (Jean-Talon): You know, if they cut $130 million this year, there is no way to do it that is going to be an easy way. They have to cut in the services. And the hospitals will have the choice to decrease the number of surgeries, but you know that we have people who work in the surgery department, and often 80 % of the expenses are salaries. It's very difficult to decrease that. Or they're going to cut in other services, like in homecare or other services like orthophonists, or audiologists, or physiotherapists. And I think they won't have the choice, and it's not acceptable.
You know, in my last four years, I always discussed with the Conseil du trésor and I told them that there is no way that we're going to touch the services, and we respected that. And, with $130 million less, I think the health system has a problem.
Mme Montgomery (Angelica): Just like in the universities, the hospitals are experiencing a very short period of time where they're going to have to find quite a bit of money. Do you think that this is possible? Why do you think that this would even be...
M. Bolduc (Jean-Talon): I know it's not possible. You know, on the 31rst of March, it's going to be the last day of the administration here. It means that he has three months to cut $50 million, which is a lot of money. And they won't be able because, if you take the decision at this moment, you have to send information to the patients, information to the employees and you're going to be in February, and, at this moment, it's not possible to cut $50 million if you don't touch the services.
Mme Montgomery (Angelica): And a lot of people say: Yes, the hospitals will have... or the health care system will have a $130 million cut this year. But next year there's an increase. Next year, there's about... more than 4 % increase in health care. So, does the increase next year compensate for this year's cut?
M. Bolduc (Jean-Talon): Can you repeat?
Mme Montgomery (Angelica): Je vais le répéter en français, là, pour que ça soit plus facile.
M. Bolduc (Jean-Talon): In English, in English.
Mme Montgomery (Angelica): C'est parce que le monde disent: Oui, il y aurait une coupure de 130 millions cette année-ci, 2012-2013, mais, en 2013-2014, il y aurait quand même une augmentation de 4 %... un peu plus, je crois. Et le monde dit: Est-ce que c'est assez pour compenser la...
M. Bolduc (Jean-Talon): No, no, no. You know, the problem is that the hospitals won't have the 4,8 % increase in the health system. And, at this moment, even if you have the 4,8 % increase, the cut that you're doing this year will be the same next year, and it's going to be difficult to try to compensate that.
Mme Verville (Marie): Moi, j'aurais deux questions. I have two questions: There's a clinic in Montréal where they're charging fees, extra fees. For example, eye drops, they're charging $40. What's your position on that?
M. Bolduc (Jean-Talon): My position? You know, they have some acts that are paid by the RAMQ, but you have other acts who are not paid by the RAMQ, and they have the possibility to charge for that, like an ultrasound. You know, if you go to a clinic and you have an X-ray of the arm, it's going to be paid by the Government. If you have an ultrasound, at this moment you're going to have to pay if you're in a clinic. For the ultrasound, we have a project that it's going to be paid for the Government. For the accessory fee that you speak about, it's something that we have to discuss with the specialists to see how we can compensate for that.
Mme Verville (Marie): M. Turcotte is being released today and he's obviously going to live in society under certain conditions for a while. He's mentioned that he'd eventually maybe like to practice medicine again. Do you think that's acceptable?
M. Bolduc (Jean-Talon): You know, I don't want to have a judgement for that, but I don't think he would be able because the College won't accept that. He did something very important. But I don't want to do the job of the College to decide. And it's a case for the judicial system. But, you know, if you look at it, I think it's going to be very difficult for him to practice again.
Des voix : Merci.
M. Bolduc (Jean-Talon): C'est beau? Merci beaucoup.
(Fin à 14 h 18)