L'utilisation du calendrier requiert que Javascript soit activé dans votre navigateur.
Pour plus de renseignements

Accueil > Actualités et salle de presse > Conférences et points de presse > Conférence de presse de M. Mario Dumont, député de Rivière-du-Loup

Recherche avancée dans la section Actualités et salle de presse

La date de début doit précéder la date de fin.

Conférence de presse de M. Mario Dumont, député de Rivière-du-Loup

Scandale de la Gaspésia

Version finale

Le jeudi 18 novembre 2004, 13 h 31

Salle Evelyn-Dumas (1.30), édifice Pamphile-Le May

(Treize heures trente et une minutes)

M. Dumont: Alors, bonjour. Je suis accompagné aujourd'hui de MM. Lessard, Lépine et Tremblay, qui sont des entrepreneurs, qui font partie de cette liste de 33 entrepreneurs, qui ont des créances en souffrance dans le désastreux dossier de l'usine Gaspésia. La situation est extrêmement malheureuse au moment même où notre premier ministre est au Mexique, que notre premier ministre fait la promotion du Québec comme un endroit où il faut investir, on a ici des entrepreneurs qui ont travaillé dans un projet où le gouvernement était non seulement un actionnaire important, mais un joueur important puis un promoteur majeur du projet, sinon l'initiateur du projet, et pour lesquels des gens ont fait des travaux.
Et qu'à une certaine période, même en sachant que la probabilité, c'était que plus personne n'allait remettre de l'argent dans le projet, on a continué à lancer des appels d'offres, donner des travaux à faire, même demander des accélérations, et donc, plaçant de cette façon-là des entrepreneurs dans une situation extrêmement précaire sur le plan financier.
Alors, sans plus tarder, je vais permettre de donner quelques instants aux entrepreneurs pour résumer des situations extrêmement précises, extrêmement concrètes, qui se sont produites et pour lesquelles, en ce qui me concerne, le gouvernement en place a une lourde responsabilité.

M. Lépine (Martin): Mon nom est Martin Lépine. Je suis vice-président du groupe industriel AMI, notre siège social est à Jonquière. Je suis ici pour dénoncer de toutes mes forces les pratiques commerciales qui ont été utilisées par le gouvernement du Québec et ses actionnaires dans le projet de Gaspésia. Je suis ici pour dénoncer l'abus de confiance qu'on a fait à notre égard. J'ai la profonde conviction qu'on a utilisé la notoriété et la grande solvabilité du gouvernement pour nous forcer à travailler pendant quatre mois sans être payés. On a agi de mauvaise foi, selon moi, en nous forçant à travailler, en nous convainquant de travailler, en nous montrant, entre autres, des preuves par lesquelles on allait se faire payer. J'ai reçu, entre autres, un chèque de 1,5 million de dollars par fax, en fait une copie de chèque, dont je n'ai jamais vu la couleur. Pour ça, ce que je dis, je le répète: Payez-nous pour les travaux qu'on a faits. C'est uniquement ça qu'on demande. On a fait confiance au gouvernement, on a pris nos responsabilités, que le gouvernement prenne ses responsabilités aussi.

M. Lessard (Pierre): Bonjour. Mon nom est Pierre Lessard. Je suis président d'Électricité du Saint-Laurent ltée, entrepreneur en électricité spécialisé en industriel. On est allés travailler à Gaspésia à partir, nous, de la mi-octobre 2003. Et sur les paiements qu'on m'a faits, j'ai des factures qui datent d'octobre 2003 qui ne sont pas encore payées, plus tous les autres, tous les autres de décembre et plus. Cependant, j'aimerais dire aussi qu'étant donné que les commanditaires savaient qu'ils se dirigeaient tout droit vers un mur, et ce, dès le début de l'automne 2003, nous, au contraire, au chantier, on nous poussait, on nous poussait, on nous accélérait à travailler de façon plus vite. Moi, dans mon cas, en janvier, on m'a demandé de mettre une deuxième équipe de travail. J'ai refusé. Je leur ai dit: Régularisez votre situation vis-à-vis de vos paiements, vis-à-vis de notre entreprise, et après on en discutera. Ils m'ont toujours dit: Accélère. Accélère. Même encore, en date du 28 janvier, ils me le demandaient encore d'accélérer et, deux jours plus tard, ils fermaient le chantier. Donc, ce qu'on demande, c'est tout simplement qu'on soit respectés, qu'on nous paie les travaux qui ont été effectués, que le gouvernement se porte en citoyen honnête et loyal.

M. Tremblay (Éric): Éric Tremblay, de CEGERCO, Chicoutimi. Quelle image le gouvernement donne à ce qui s'en vient? Quelle image le gouvernement donne pour les PPP qui s'en viennent? Pas payés pantoute? On a travaillé, à la demande du gouvernement et de ses deux partenaires, on a exécuté ce que le gouvernement puis ses deux partenaires nous demandaient, puis on veut être payés pour ce qu'on a fait. Les trois commanditaires, les trois partenaires, le gouvernement, sont encore solvables. On est au Mexique, aujourd'hui, pour faire la représentation. On est encore solvable, le gouvernement, Tembec est encore solvable, puis le Fonds de solidarité est encore solvable. Nous autres, on veut être payés pour ce qu'on nous a demandé de faire. Reste à savoir qu'est-ce que le gouvernement actuel va faire, parce qu'il est là depuis un an, un an on a été là, nous autres, un an on a travaillé pour eux autres, maintenant on veut juste et simplement être payés.

M. Dumont: Alors, en conclusion, évidemment les pratiques commerciales du gouvernement, vous comprendrez qu'il n'y a aucune... Les gens me racontaient tout à l'heure, ce n'est pas inédit qu'un chantier puisse être fermé, qu'en cours de route dans un chantier, on le ferme. Ce qui est inédit, c'est que d'habitude quand on ferme un chantier, si on est rendu à 42 % d'évolution ou à... je veux dire on règle les factures jusqu'à ce point-là, hein, on s'assure que tout le monde est payé et on peut interrompre d'une façon temporaire ou définitive un chantier. Ce qui est sans précédent dans l'histoire de la construction, c'est qu'avec cette société en commandite, on arrête un chantier, on ne paie pas le monde, tout le monde se sauve en courant, incluant le gouvernement, incluant le gouvernement, par ses agences, pour refuser de payer les gens.
Ce que ça veut dire aujourd'hui c'est qu'on met en péril des entreprises, évidemment on met en péril des entreprises de la Gaspésie, parce qu'il y a un certain nombre de ces entrepreneurs-là qui sont en Gaspésie, la région qu'on prétendait aider, on y a fragilisé un certain nombre d'entreprises, mais aussi on a fragilisé des entreprises au Saguenay, en Mauricie, à Québec, à Montréal, ailleurs au Québec.
Et la gravité du geste gouvernemental, au-delà de la simple pratique commerciale de ne pas payer ses factures, le geste le plus grave, le plus répréhensible et pour lequel des réponses doivent être données, c'est comment on a pu demander à des gens de continuer des travaux, de leur donner des mandats alors que la décision était largement prise déjà qu'on ne rajouterait pas d'argent dans la caisse, hein. On votait mois après mois pour remettre des fonds dans la caisse. On sait maintenant que le 19 - je l'ai déposé cette semaine à l'Assemblée - dès le 19 novembre, la SGF regardait sérieusement la possibilité que le chantier soit fermé après les Fêtes. Comment on a pu... la suite du mois de novembre, le mois de décembre, le mois de janvier, donner de l'ouvrage à des gens, leur faire... de l'ouvrage qui, soit dit en passant, ces entrepreneurs-là, c'est largement de la main-d'oeuvre, donc ils doivent être payés tous les deux jeudis, vous connaissez les règles du gouvernement, les déductions à la source, elles sont payées. Même la TPS et la TVQ sont versées au gouvernement sur des contrats sur lesquels ils n'ont pas été payés. Alors, eux ont tout, tout, tout déboursé, à tout le monde, évidemment, aux employés, là, parce que des employés, de la main-d'oeuvre, ça reçoit sa paie, mais aussi aux instances gouvernementales. Alors, il ne peut pas y avoir de compromis.
Vous avez vu un programme de prêt, finalement on dit aux gens: Pour chaque dollar de travail fait qu'on ne vous a pas payé, on va vous prêter 0,50 $. Il n'y a pas de compromis comme ça qui peuvent fonctionner. D'ailleurs, ce programme de prêt là, les prêts, ils vont être remboursable à partir du 1er janvier, puis il n'y a rien de réglé. Mais, il n'y a pas de compromis qui sont possibles, il n'y a pas de compromis qui sont acceptables là-dedans. Le gouvernement a une responsabilité, un, face aux entrepreneurs et, deux, face au public d'expliquer comment il a pu avoir un comportement aussi irresponsable dans le suivi du chantier.

M. Plouffe (Robert): Vous faites partie, les trois entrepreneurs, là, du recours en justice. Avez-vous entrepris des recours en justice? Oui?

Une voix: Oui.

M. Plouffe (Robert): Vous faites partie du même groupe, tout le monde ensemble. Pourquoi vous n'avez pas frappé à la porte du Fonds de solidarité puis de Tembec, plutôt que de venir frapper à la porte du gouvernement?

M. Lépine (Martin): Je veux noter que le Fonds de solidarité a pris ses responsabilités en partie en nous payant 25 % de notre créance. C'est un geste qui démontre, à mon avis, que les partenaires voient une responsabilité certaine dans les pratiques commerciales qui ont eu lieu, et puis, ce qu'on demande au gouvernement, simplement, c'est de nous payer le restant de la facture.
On ne passera pas... On est des entrepreneurs, on est des créateurs d'emplois, on ne passera pas notre vie à... On ne commencera pas à dépenser des centaines de milliers de dollars en frais d'avocats pour poursuivre des gens impoursuivables. Vous savez, des structures légales maintenant nous protègent, les actionnaires, dans cette situation-là, en tout cas, de façon très hermétique. Ce qu'on demande, c'est: S'il vous plaît, le gouvernement, prenez votre responsabilité, payez-nous. Et puis s'il y a des gens à poursuivre, faites-le.

M. Corbeil (Michel): Juste pour préciser, le 25 %, est-ce que c'est l'ensemble de ce que vous devait le Fonds de solidarité?

M. Lépine (Martin): Non.

M. Corbeil (Michel): 25 % de sa part?

M. Lépine (Martin): De sa part.

M. Corbeil (Michel): O.K.

M. Lépine (Martin): Non, non, non, ce n'est pas vrai. Excusez-moi.

M. Dumont: ...du total, donc la moitié de sa part.

M. Lépine (Martin): Du total, exactement, la moitié de sa part.

M. Dutrisac (Robert): La moitié de sa part. Parce que, lui, il avait 25 %, dans l'ensemble?

M. Lépine (Martin): Il avait 50 % des parts, le Fonds de solidarité, puis ils nous ont payé 25 %. On l'a accepté. On l'avait à la gorge, celle-là, on ne pouvait pas négocier, c'était une question de survie pour nos entreprises. Il fallait accepter tous les sous qui nous arrivaient dans une situation comme celle-là. Imaginez, dans mon cas, une PME, j'ai une centaine d'emplois, on me doit 4 millions de dollars; c'est une question de vie ou de mort.

M. Dutrisac (Robert): Oui, c'est ça. Vous, c'est 4 millions, et puis, pour les deux autres entreprises, c'est?

M. Lessard (Pierre): Dans mon cas à moi, c'est 900 000 $.

M. Tremblay (Éric): Dans le cas de CEGERCO, c'est 5 millions, près de 5 millions.

M. Nadeau (Rémi): Mais dans le recours, vous êtes combien au total d'entreprises?

Une voix: Nous sommes 33.

M. Ouellet (Martin): Puis pour une créance totale de combien?

M. Lépine (Martin): Environ 40 millions.

M. Dumont: À la question précédente, sur pourquoi frapper à la porte du gouvernement, je pense qu'il faut quand même... Évidemment, le gouvernement a une autre responsabilité en matière de bonne conduite, de bonne pratique commerciale. Il faut aussi rappeler qu'en cours de projet - et ils vont tous vous le dire - quand ces gens-là regimbaient en disant: Là, là on ne veut plus aller sur le chantier parce qu'on n'est pas payé; puis, si vous ne réglez pas vos factures, on va se retirer du chantier, comment on les gardait sur le chantier? Quel était l'argument des gestionnaires pour les garder sur le chantier? Vous vous énervez pour rien, on est peut-être un mois, deux mois, trois mois en retard dans nos paiements, mais voyons, c'est le gouvernement. Hein, c'est ça, l'argument qu'on leur a fait valoir. On leur disait: Eh, arrêtez de vous énerver...

M. Plouffe (Robert): ...problème, pourquoi ça a coûté aussi cher que ça, M. Dumont? Bien, voyons, c'est le gouvernement. «The sky is the limit».

M. Dumont: Ah! Ça...

M. Plouffe (Robert): Est-ce que vous n'avez pas vu des gens partir avec des matériaux? Est-ce que ça n'a pas ressemblé un peu au chantier du Stade olympique, ce chantier de la Gaspésia, là? Est-ce qu'il n'y a pas eu de la perte de temps? Puis est-ce que les travailleurs ne sont pas aussi en partie responsables? On met toute la faute sur le gouvernement. Bien, oui, c'est le gouvernement, mais est-ce que ça n'a pas été un argument pour justement que ça coûte plus cher?

M. Dumont: On veut partager. On peut partager des fautes. Mais le gouvernement a été l'initiateur, il a lancé le projet pas de plan d'affaires, il doit prendre sa responsabilité. Pour ce qui est de la productivité sur le chantier, je vais laisser parler les entrepreneurs, mais c'est assez intéressant parce qu'il reste qu'un chantier comme celui-là, ça marche par appel d'offres. Exemple: Si on dit, là, ça va coûter 10 millions pour faire telle phase du projet... Monsieur, ici, dit: Moi, je vais faire ça pour 10 millions. Puis si les travailleurs sont improductifs, ils dorment au gaz, il ne se passe rien, puis ça en coûte 12, c'est lui qui perd. Les gens, là, c'est des enveloppes fermées, ils promettent... Il faut faire attention... Je veux te laisser expliquer.

M. Lépine (Martin): Au niveau de la productivité, il n'y a personne qui peut se cacher qu'il y a des problèmes à régler dans l'industrie de la construction, mais dans le cas actuel, dans le fiasco de la Gaspésia, s'il y avait eu un problème de productivité, ce serait moi qui l'aurais absorbé. Il y a un contrat fermé, je suis allé par appel d'offres, j'ai gagné ma soumission, je suis le plus bas soumissionnaire, j'ai signé un contrat. Si ça avait coûté 12 millions sur un contrat de 10 millions, ça aurait été moi qui l'aurais absorbé, cette perte-là. Mais, moi, en autant que je suis concerné, ce que je me plains, ce n'est pas d'avoir dépassé mes budgets, c'est de ne pas m'avoir fait payer pour des travaux que j'ai exécutés à la demande expresse du gouvernement.

M. Dumont: Factures approuvées.

M. Lépine (Martin): Factures approuvées, décomptes approuvés, c'est-à-dire qu'on travaille, on travaille, on fait des décomptes progressifs qui sont approuvés par le donneur d'ouvrage, on produit ensuite une facture. Quand j'entends... Je veux juste faire une anecdote. Quand j'entendais le ministre Audet, en avril 2004, dénoncer sa frustration à l'égard des entrepreneurs, puis il y avait une citation - je lisais, je pense que c'est dans le Journal de Québec - qui disait: Ça n'a pas de bon sens, les entrepreneurs nous facturent... nous offrent des factures bien trop élevées. Bien, voyons donc! Quand on facture, c'est en fonction des travaux qu'on a exécutés, en fonction d'un contrat qu'on a contracté, qui a été signé par les deux parties. Drôle de réaction.

M. Ouellet (Martin): ...juste techniquement, là, pour régler l'affaire, il faut... Vous demandez que le gouvernement vous rembourse 40 millions, c'est ça? Les 33, là.

M. Lépine (Martin): Absolument.

M. Ouellet (Martin): Mais la part de Tembec, là-dedans, elle se situe où?

M. Lépine (Martin): Comme je vous dis... Je répète. Mon point de vue là-dessus est essentiel. Il y a eu un promoteur premier, qui est le gouvernement. Sans l'invitation du gouvernement dans ce projet de relance économique là, il n'y a pas un entrepreneur qui se serait donné rendez-vous sans la présence et la notoriété et la solvabilité du gouvernement en place. Jamais on n'aurait accepté de travailler pendant quatre mois sans être payés. Voyons donc.
Tembec, bien, écoutez, moi, je vous répète: Je ne suis pas avocat, je n'ai pas des centaines de milliers de dollars. J'ai déjà perdu assez d'argent pour entamer des poursuites que comme vous le savez ça ne finit plus. Moi, je suis ici pour me faire payer.
Je vais vous donner un... Moi, la première réaction que j'ai par rapport à ça, c'est la Société d'assurance automobile du Québec, est-ce qu'elle attend de déterminer ou de trouver le coupable d'un accident avant de compenser la victime? Non. On compense la victime puis après ça on fait nos enquêtes.
Moi, ce que je demande au gouvernement: Payez-nous. Parce que c'est trop flagrant, c'est trop... C'est abusif. Après ça, vous ferez vos enquêtes, après ça, vous ferez vos poursuites, vous ferez... vous laverez votre linge sale entre actionnaires. Mais pour l'instant, s'il vous plaît, vous avez des entreprises qui ont cru en vous, qui ont pris leurs responsabilités, qui ont payé leurs taxes, qui ont payé leurs cotisations syndicales. Payez-nous. Après ça, vous penserez à faire des PPP puis des projets public-privé.

M. Dutrisac (Robert): ...n'eût été de la présence, évidemment, de la SGF et du gouvernement derrière, vous n'auriez pas allongé de quatre mois, par exemple, travailler pendant quatre mois?

M. Lépine (Martin): Contractuellement, je... c'est mon cas, et je pense que c'est le cas de tous les entrepreneurs, on avait exigé de se faire payer à toutes les deux semaines. Imaginez. Question de cash-flow, c'est des gros montants pour des PME, c'est des gros contrats, il faut accélérer le cash-flow, il faut être très compréhensif et dans les grands projets industriels, normalement, il n'arrive pas ces choses-là.
Et puis de toute façon, dans des grands projets industriels, il y a toujours une grande confiance au donneur d'ouvrage. Imaginez-vous, je vous donne un exemple, si la société Alcan ou une grande aluminerie au Québec aurait fait un projet d'investissement de cette ampleur-là puis aurait décidé du jour au lendemain de ne pas respecter ses obligations contractuelles, à mon avis, je le pense, le gouvernement aurait été le premier aux barricades pour sommer cette grande multinationale là de respecter leur contrat devant ces pauvres PME là qui ont fait confiance... Quelle sorte de message on passe aux grands donneurs d'ouvrage qui vont venir investir 1 million chez nous?

M. Dutrisac (Robert): ...peut arriver, vous dites que bon, si ça avait été Alcan ou... d'autres grands donneurs d'ouvrage peuvent retarder des paiements, des fois. Ça peut arriver. Il y a des projets aussi qui sont... des chantiers qui sont...

M. Lépine (Martin): Non, ça n'arrive pas. Il y a toujours des raisons. Mais des raisons comme «le chèque est dans malle» ou «le chèque est dans le fax» ou «le chèque est dans une boîte puis il est dans le coffre de voiture du directeur de construction puis il s'en va à Montréal mais il est deux jours en arrêtant à Québec parce qu'il a un meeting, puis après ça, va se faire signer, puis après ça tu vas l'avoir», ça, j'ai jamais vu ça. C'est pas sérieux, ça.

M. Plouffe (Robert): Pour finalement jamais l'avoir.

M. Lépine (Martin): Pour jamais... Pour finalement jamais l'avoir.

M. Plouffe (Robert): C'est ça que vous avez vécu dans la Gaspésia.

M. Lépine (Martin): C'est ça que j'ai vécu. Je veux dire, on est démunis face à ça. Tu as 100 hommes sur le chantier. Tu es lié avec un contrat rempli de contraintes contractuelles, qui dit: Si tu arrêtes, tu es dans le pétrin; rempli de phrases comme: Écoutez, le propriétaire est le gouvernement, juste ça, c'est garant de paiement. Pourquoi on parle ici? Écoutez...

M. Plouffe (Robert): Mais alors, expliquez-moi le fiasco. Pourquoi vous avez continué à partir? Dès quel moment vous avez senti, vous, que ça ne marchait plus et que vous alliez rentrer dans le mur vous aussi?

M. Tremblay (Éric): Si vous voulez, je peux essayer de répondre à ces questions-là. Vous savez, la Wayagamac, c'est un projet qui a réussi 100 %; la Gaspésia, c'est un projet qui a échoué 100 %. C'est les mêmes travailleurs. C'est les mêmes entrepreneurs ou presque qui ont travaillé sur les deux projets. C'est le même type d'investissement qui s'est fait. Les gestionnaires, il y a les gestionnaires de Tembec qu'il y avait, il y avait les gestionnaires du gouvernement puis il y avait les gestionnaires du Fonds aussi. Quand tu estimes mal ton projet de construction résidentielle, ta maison, tu dis: Tant qu'à y être, je vais faire ci puis tant qu'à y être, je vais faire ça. O.K.? Le travailleur, il va faire tes tant-qu'à-y-être, lui. Il va tout faire tes «tant-qu'à-y-être. À la place d'avoir un bain, tu vas avoir un bain tourbillon; à la place d'avoir une fenêtre, tu vas avoir une fenêtre-serre; à la place d'avoir une entrée en asphalte, tu vas avoir une entrée en pavés unis. Mais tes tant-qu'à-y-être, tu l'as fait travailler, le monsieur. Toi, en tant que propriétaire de ta nouvelle maison, tu es content. Tu avais budgété 100 000 $; elle t'en coûte 150 000 $. Tu vas juste avoir un prêt hypothécaire plus haut, mais tu vas l'avoir ta maison.

À Wayagamac, ils l'ont, leur usine. Ils ont payé leur entrepreneur puis l'usine fonctionne. Ils avaient un budget qui allait avec ça, puis il y avait du monde qui gérait le budget. Ça fait qu'à Gaspésia, un: Le budget était-il bien estimé? Puis, deux: Est-ce que ce qu'ils avaient estimé bon ou mauvais, on peut supposer aujourd'hui mauvais, est-ce qu'il était bien géré? Évidemment qu'il était mal géré. Le personnage que tu fais travailler dans ta maison pour faire ton pavé uni au lieu de faire ton asphalte, c'est le personnage et propriétaire de la maison qui paie. Il gère son budget, hein. Il sait... Il va aller voir la banque, il va revenir: O.K., j'ai de l'argent, je fais mon pavé uni finalement. Bien l'usine de Gaspésia, c'est la même affaire. Il n'y en a pas, de différence. Mauvais budget, mauvaise gestion, un projet qui échoue, puis Wayagamac, un projet qui réussit.

M. Plouffe (Robert): Êtes-vous en train de dire que c'est un projet doré?

M. Tremblay (Éric): Je ne comprends pas la question.

M. Plouffe (Robert): Un bain tourbillon plutôt qu'un bain?

M. Tremblay (Éric): Ça n'a pas de lien, je veux dire...

M. Plouffe (Robert): Bien, c'est ça que vous nous dites aujourd'hui. C'est ça que vous nous dites aujourd'hui. Vous nous dites...

M. Tremblay (Éric): Dans un bain tourbillon ou dans un bain ordinaire, tu prends ton bain aussi.

M. Plouffe (Robert): Vous nous dites: On a fait du tant-qu'à-y-être, là-bas.

Une voix: Bien non, ce n'est pas ça.

M. Tremblay (Éric): Il y a eu des ajouts, un ajout. C'est correct, un ajout. C'est bien correct, faire un ajout. Il n'y a pas de problème à faire un ajout dans une construction. C'est parfait, ça. O.K. parce que tu vas avoir une meilleure usine. C'est bien correct. C'est quand tu gères mal ton ajout que c'est un problème. Il n'est pas question de dorer là-dedans.

M. Ouellet (Martin): La question, c'est: Quand vous avez commencé à sentir que les carottes étaient cuites, là, puis que vous avez continué à travailler? C'est à partir de quel moment?

M. Tremblay (Éric): Septembre, octobre.

M. Ouellet (Martin): 2003.

M. Dumont: En fait, le moment où les entrepreneurs ont commencé à devenir nerveux, là, il est pas mal correspondant au moment, dans les rapports que j'ai déposés mardi, où les signaux, en haut, au niveau de l'administration, allaient dans le sens que ça n'allait pas bien là. Évidemment, bien eux, ils avaient...

M. Ouellet (Martin): Là, vous avez continué à travailler. C'est quoi, la période où vous avez travaillé pas payés, là?

M. Tremblay (Éric): Quatre mois.

M. Ouellet (Martin): Mais c'est quoi? C'est entre septembre...

M. Tremblay (Éric): Octobre et la fin de janvier, pour la plupart.

M. Dumont: Les derniers chèques sont entrés en octobre.

M. Tremblay (Éric): Bien, certains étaient payés. D'autres n'étaient pas payés mais la plupart ne l'étaient pas.

M. Ouellet (Martin): ...à l'automne, continué jusqu'en janvier.

M. Tremblay (Éric): C'est ça. On nous disait n'importe quoi.

M. Dumont: Puis la fermeture est arrivée le 29 janvier?

M. Lessard (Pierre): Le 30 janvier.

M. Dumont: Le 30 janvier.

Une voix: C'est ça.

M. Plouffe (Robert): Vous avez dit tout à l'heure quel message on envoie... Je vous pose la question: Quel message ça envoie maintenant aux entrepreneurs?

M. Lépine (Martin): Ma première réaction par rapport à des partenariats public-privé, c'est quelle confiance on doit avoir, quelle garantie? Si le gouvernement lui-même ne peut pas être en soi une garantie de paiement, comment l'avenir va nous garantir, nous, de se faire payer? On fait une boutade entre nous, les entrepreneurs, PPP maintenant, ça veut dire pas payés pantoute. C'est la réaction qu'on a. C'est qu'on est craintif, ça crée un... c'est une situation sans précédent qui déstabilise toute l'économie québécoise, en autant que je suis concerné parce que, n'oubliez pas une chose, c'est que les entrepreneurs, c'est la première maille d'une chaîne. Mais quand l'entrepreneur n'est pas payé, il ne paie pas ses fournisseurs, mais par contre, il paie ses taxes, il est forcé, il paie ses DAS, il paie ses cotisations à la FTQ, ça, c'est sûr.

M. Dutrisac (Robert): ...le gouvernement vous dit là, à l'heure actuelle: Adressez-vous aux tribunaux?

M. Lessard (Pierre): Il se cache derrière la LAC actuellement. Il se cache derrière la Loi sur les arrangements avec les créanciers. C'est ce qu'on nous dit.

M. Lépine (Martin): La meilleure façon, je pense que c'est de leur poser la question.

M. Nadeau (Rémi): Une question sur un autre sujet. M. Dumont, vous avez, à la dernière élection, obtenu 18 % des voix, ce qui vous avait énormément déçu à ce moment-là. Malgré votre virage autonomiste, malgré l'insatisfaction des gens à l'endroit du gouvernement, il y a un récent sondage qui vous donnait 19 % des voix, donc, à peu près pas de gains. Comment vous expliquez ça?

M. Dumont: Ah bien, si je ne me trompe pas, vous parlez de celui de la même firme, là, qui disait que ça allait jouer en dedans de 1 % dans Vanier, là. Je fais les écarts, ce n'est pas si pire quand même. Je fais une règle de trois là puis c'est même trop optimiste, à mon avis. Il faudrait tempérer ça.

Une voix: Sur la synthèse d'opération, vous...

M. Dumont: Oui, bien, sur la synthèse des opérations, ce que je constate sur la synthèse des opérations, c'est qu'il y a vraiment un constat d'échec du gouvernement sur deux fronts, échec de sa politique fiscale parce que, alors qu'ils ont augmenté tous les tarifs, hein, il devrait y avoir une hausse des revenus du gouvernement marquée. Tout a augmenté, mais pourtant on se rend que, quand on va chercher de l'argent des poches des contribuables, là, garderies, électricité, sous tous les fronts, finalement on crée un effet de ralentissement sur l'économie qui fait que les revenus du gouvernement ont baissé. Même si tout a augmenté sur le total, les revenus autonomes du gouvernement ont diminué.
L'autre élément, bien, évidemment, on apprend, je ne sais pas combien de jours plus tard, que la péréquation, c'est 279 millions, bien en deçà de ce que... tu sais, les hypothèses pessimistes, c'étaient 400 millions jusque-là. Et là-dessus aussi, la deuxième politique du gouvernement qui est mise en question, c'est son approche par rapport au gouvernement fédéral, une approche que, moi, j'avais à qualifier de décevante depuis le début et depuis le Conseil de la fédération. Et soudainement sur la santé, ils ont eu une entente qui était honorable, qui n'était pas historique, qui était honorable, qui était dans l'ordre de ce que M. Landry avait obtenu avant et ils en ont fait une telle esclandre, un tel party qu'ils ont comme perdu le contact avec la réalité qu'il y a d'autres négociations qui s'en venaient.
Et sur la péréquation, c'est un échec vraiment lamentable, et là, là-dessus, si le gouvernement... parce que l'écart évidemment, les transferts totaux du gouvernement fédéral sont inférieurs à ce qu'ils ont été même sur les dernières années du gouvernement péquiste, mais sont largement inférieurs à ce que... il faut se souvenir que dans le cadre financier que les libéraux avaient déposé en campagne électorale, ce qu'ils prévoyaient, c'est des augmentations considérables de transfert, mais qui n'arriveront jamais. Alors, politique fiscale, échec, politique de relations fédérales-provinciales, échec, et c'est ça qu'elle dit, la synthèse des opérations financières.

M. Plouffe (Robert): Donc, qu'est-ce qu'une politique autonomiste ferait? Vous feriez quoi, vous, on irait, on empêcherait de, je ne sais pas, moi, on prendrait la TVQ, la TPS?

M. Dumont: Bien, en bout de ligne, dans notre vision autonomiste on pense qu'il faut avoir les éléments de correction à long terme de ces éléments-là. L'idéal serait d'avoir un jour un seul rapport d'impôt au Québec, mais en attendant, la bataille sur le déséquilibre fiscal, il faut la continuer, la bataille sur le déséquilibre fiscal, il faut la maintenir musclée. Il ne faut pas célébrer, là, parce qu'on ne peut pas célébrer au hockey à la fin de la période, hein, il faut attendre que ce soit fini avant de célébrer. Et l'erreur de M. Charest, là, tu sais, il est retourné dans la chambre des joueurs entre la première puis la deuxième période en fêtant puis, en deuxième période, il a perdu.
L'autre élément qui est important, bien, évidemment, à chaque fois que je parle de péréquation, je rappelle toujours que péréquation, c'est de l'argent qu'on obtient, puis qu'on a le devoir de se battre pour l'obtenir dans le contexte d'une redistribution des provinces riches vers les provinces pauvres. Je rêverais évidemment un jour que le Québec fasse partie des provinces riches, et pour ça, il va falloir créer de la richesse au Québec autant par le développement économique, l'investissement dans le haut savoir que par le redéploiement massif des grands projets hydroélectriques. Et ça, c'est ma vision.
Merci bien. Bonne fin de journée.

(Fin à 13 h 57)

Participants


Document(s) associé(s)