(Onze heures quinze minutes)
Mme Leclerc (Guylaine) : Alors,
mesdames, messieurs, bonjour. C'est avec plaisir que je m'adresse aux membres
de la Tribune de la presse pour la première fois depuis mon entrée en fonction,
le 16 mars dernier. Ce matin, l'Assemblée nationale a remis aux députés le
premier tome de mon rapport pour l'année 2015‑2016. Ce tome contient les
résultats des travaux réalisés dans la dernière année. Dans le chapitre 1, je
remercie Michel Samson pour le travail accompli pendant les trois années à
titre de Vérificateur général par intérim. Merci, Michel.
D'autre part, la loi confiant au ministre
des Finances la préparation du rapport préélectoral a été sanctionnée le
21 avril 2015. En vertu de cette loi, je serai appelée à formuler une
opinion sur la plausibilité des prévisions et des hypothèses présentées dans ce
rapport.
Dans le chapitre 2, j'examine si
Loto-Québec administre son processus d'approvisionnement de manière économique,
conformément à la réglementation en vigueur et aux saines pratiques de gestion.
Loto-Québec s'est dotée d'un encadrement qui favorise une bonne gestion
contractuelle. Cependant, mes travaux soulèvent certains questionnements.
Ainsi, la sollicitation des fournisseurs ne permet pas d'atteindre pleinement
l'objectif du libre jeu de la concurrence. À cet égard, le nombre moyen de
soumissions jugées conformes et acceptables qui ont été reçues à la suite
d'appels d'offres est peu élevé, soit 1,9 pour les 13 dossiers examinés. La
composition des comités de sélection pourrait aussi être améliorée, ce qui
permettrait d'assurer la neutralité des évaluations.
Dans le chapitre 3, je fais état des
conclusions de la vérification menée à l'Université du Québec à Trois-Rivières,
l'UQTR. La gestion que l'UQTR fait du projet de campus à Drummondville présente
des déficiences.
Premièrement, celle-ci n'a pas justifié
adéquatement le besoin d'un campus de cette envergure. De plus, elle n'a pas
suffisamment pris en compte certains risques importants liés à la situation
financière, aux délais de réalisation du projet et à l'attribution de contrats.
Deuxièmement, ses prévisions financières
pour démontrer l'équilibre financier du projet ne s'appuient pas sur des bases
solides. Par ailleurs, l'UQTR n'a pas toujours respecté la réglementation et
les saines pratiques de gestion lors de l'attribution de certains contrats de
services professionnels. Par exemple, elle a fractionné ses besoins en
accordant simultanément à la même firme six contrats de gré à gré totalisant
266 000 $. Enfin, le conseil d'administration et la haute direction
de l'UQTR n'ont pas assumé pleinement leur rôle en matière de gouvernance. De
plus, les interventions de l'UQTR et du du ministère de l'Éducation et de l'Enseignement
supérieur et de la Recherche n'ont pas permis de pallier les manquements
observés.
Le chapitre 4 porte sur les activités
liées à l'indemnisation et à la réadaptation des travailleurs victimes de
lésions professionnelles menées par la Commission de la santé et de la sécurité
du travail, la CSST. En matière de gouvernance, la commission ne joue pas
suffisamment le rôle attendu d'agent de changement quant à l'actualisation du
régime par rapport aux enjeux du marché du travail moderne.
Deux causes principales rendent difficile
la prise de décision efficace et en temps opportun, soit des éléments de sa
structure de gouvernance et l'organisation des travaux de son conseil
d'administration.
Pour les activités liées à l'indemnisation
et à la réadaptation, des pratiques d'intervention relatives au retour à
l'emploi doivent être améliorées. Notons celles associées à la mise en place de
solutions provisoires au plan de retour au travail et à la détermination de
l'emploi convenable. En outre, le délai moyen de traitement des évaluations
médicales faites par le Bureau d'évaluation médicale s'élevait à 88 jours
en 2013‑2014, soit une hausse de 29 % depuis 2007‑2008. Cela contribue à
accroître les risques de chronicité pour le travailleur et les coûts du régime.
Pour sa part, le chapitre 5 concerne les
groupes de médecine de famille, soit les GMF, et les cliniques-réseaux. D'abord,
le mécanisme d'orientation privilégié pour obtenir un médecin de famille, soit
le guichet d'accès, n'est ni transparent ni équitable. Certains patients, pour
qui la prise en charge devrait se faire à l'intérieur de six mois, peuvent
attendre pendant des années.
De plus, les exigences ministérielles
liées au soutien financier que les agences de la santé et des services sociaux versent
aux GMF ont peu favorisé la prise en charge additionnelle de patients par les
médecins, particulièrement de patients plus vulnérables. Au cours des cinq
dernières années, le nombre moyen de patients inscrits auprès de médecins
pratiquant dans un GMF est passé de 821 à 869, soit une augmentation de
seulement 5,9 %.
Enfin, le ministère de la Santé et des
Services sociaux et les agences vérifiées continuent généralement à financer
les GMF, même si ces derniers ne respectent pas les exigences établies, dont le
nombre de patients inscrits et les heures d'ouverture. Cela occasionne une
iniquité quant à la répartition des ressources entre les GMF.
Je me suis intéressée, dans le chapitre 6,
à la gestion des contrats présentant des situations à risque au ministère de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, le MAPAQ. Plusieurs constats
préoccupants découlent de cette vérification. Le ministère manque de rigueur
dans l'évaluation qu'il fait pour déterminer si une personne physique exploite
ou non une entreprise individuelle. De plus, contrairement à sa directive, il a
attribué des contrats à cet égard, de gré à gré. Il a aussi eu recours au
fractionnement pour éviter de procéder par appel d'offres public ou sur
invitation.
Dans le domaine des technologies de
l'information, j'ai relevé des lacunes dans le processus suivi par le MAPAQ
pour trois des quatre fournisseurs dont nous avons vérifié les contrats. Celles-ci
portent notamment sur le traitement intègre et équitable des concurrents et la
bonne utilisation des fonds. Par exemple, environ 3,8 millions de dollars
ont été versés au principal fournisseur pour un système informatique abandonné
au début de son développement. Cela représente plus de 50 % des
7,2 millions accordés à ce fournisseur pour la réalisation du projet.
Je conclus ce tome par une vérification
menée auprès d'Hydro-Québec concernant la valorisation des actifs de la
centrale nucléaire de Gentilly-2, plus particulièrement la vente d'équipements
sur le marché du recyclage des capitaux. Mes travaux découlent d'une motion
adoptée par l'Assemblée nationale en décembre 2014. Hydro-Québec devait
vendre les équipements neufs de la turbine sur le marché du recyclage des
métaux pour une valeur estimée à 75 000 $, alors qu'ils avaient été
acquis au coût de 79 000 $. Les travaux que j'ai réalisés mettent en
lumière plusieurs déficiences entourant cette opération.
D'abord, Hydro-Québec n'a pas précisé les
critères retenus pour appuyer la décision de cesser la recherche d'acquéreurs
potentiels. D'ailleurs, elle n'a pas entièrement mis en oeuvre les
recommandations qui lui avaient été adressées par une firme d'experts
indépendants lors de l'examen de son processus de vente d'équipements neufs de
la turbine. De plus, Hydro-Québec a fait un appel de propositions restreint
pour la vente des équipements sur marché du recyclage des métaux sur la base
d'une évaluation peu rigoureuse de la valeur marchande des biens. En outre, la
sélection des acquéreurs potentiels a été réalisée de façon discrétionnaire sans
une révision de la pertinence et du respect des critères établis par les
responsables concernés.
Je vous remercie de votre attention.
Le Modérateur : On va
maintenant passer à la période de questions. Je vous invite à me signaler si
vous avez des questions à poser. On va commencer immédiatement avec
Alain Laforest.
M. Laforest (Alain)
:
Bonjour, Mme Leclerc.
Mme Leclerc (Guylaine) :
Bonjour.
M. Laforest (Alain)
:
Je veux revenir sur Hydro-Québec. Qu'est-ce que vous leur reprochez au juste? C'est
d'avoir choisi la voie de la facilité, de ne pas avoir été diligents? Comment
vous qualifieriez le travail qui a été fait pour la vente de ces turbines-là?
Mme Leclerc (Guylaine) : Ce
que nous avons constaté, c'est qu'il y avait deux processus dans la disposition
de l'actif qui avait été acquis au coût 79 millions de dollars. Le premier
processus consistait en la mise à… à trouver un marché pour cet équipement-là.
Ce que nous avons constaté, c'est que la documentation n'était pas présente, la
documentation qui aurait faire en sorte que nos… pour que nous concluions sur
est-ce qu'ils ont tout mis en place pour que la disposition du bien soit faite
de façon à le valoriser de façon optimale n'a pas été mise en place.
Ce qu'on a fait, c'est qu'on est allé avec
une manifestation d'intérêt. Donc, on a présenté à des clients potentiels une
manifestation d'intérêt en exigeant… en ne leur disant pas que, si on allait en
proposition ultérieurement, ils se devaient de manifester un intérêt. Donc, il
y avait une manifestation d'intérêt, et les clients potentiels n'étaient pas
obligés de répondre de leur intérêt. Par la suite, on n'est pas allé en appel
d'offres public. Ce qu'on a fait, on a eu quelques réponses aux manifestations
d'intérêt, mais il y en a une qui était particulièrement intéressante, et
c'était celle liée à... le constructeur de la turbine a manifesté l'intérêt de
la racheter. Donc, on a négocié avec le constructeur de la turbine
originalement.
Donc, ça, c'est la première étape. On
n'est pas allé en manifestation d'intérêt. On n'a pas documenté pourquoi on n'y
est pas allé, on n'a pas justifié, on n'a pas fait des... nous n'avons pas vu
d'analyse économique qui pouvait justifier de ne pas aller en appel d'offres
public. Ça, c'est la première étape.
Finalement, ils ne sont pas allés en appel
d'offres public. Le temps pressait pour différents éléments que vous pourrez
lire dans le rapport, et là ils se sont tournés vers des fournisseurs ou des
intervenants avec qui ils faisaient affaire habituellement, soit des recycleurs
de métaux. Donc, ils ont rencontré... ils ont proposé sur invitation à des
recycleurs de métaux, à des organismes de démolition entre autres, leur ont
demandé de faire des propositions. Alors, c'est... et ils ont reçu diverses propositions,
et la meilleure proposition conforme totalisait 68 000 $.
M. Laforest (Alain)
:
Mais plus simplement, qu'est-ce que vous reprochez à Hydro-Québec?
Mme Leclerc (Guylaine) : Ce
que nous reprochons, c'est de ne pas avoir documenté le processus, pourquoi ils
n'ont pas été en appel d'offres. Ils n'ont pas documenté non plus pourquoi ils
ont été vers des fournisseurs avec lesquels ils faisaient déjà affaire, entre
autres.
M. Laforest (Alain)
:
Donc, on l'envoyait à la ferraille plutôt que de tenter de le revendre puis
d'avoir plus d'argent. C'est ça que vous dites, là.
Mme Leclerc (Guylaine) : Ce
que nous disons, c'est que nous n'avons pas évidence qu'ils ont fait tous les
efforts pour valoriser l'équipement et le vendre sur un marché qui aurait été
plus approprié.
M. Laforest (Alain)
: Une
petite dernière, là, concernant Loto-Québec. Est-ce que vous considérez que les
pratiques de Loto-Québec actuellement, on pourrait dire qu'ils sont installés
dans un fauteuil confortable et qu'on ne se casse pas trop la tête puis qu'on
fait affaire avec les gens avec lesquels on est habitués, là? Entre autres,
dans le rapport, je pense que vous faites référence à des contrats qui sont
renouvelés sur plusieurs années, là.
Mme Leclerc (Guylaine) :
Concernant Loto-Québec, nous avons examiné 13 contrats d'une valeur de
plusieurs dizaines de millions de dollars chacun. Ce que nous avons constaté,
c'est que, pour chacun de ces... dans ces dossiers-là, la moyenne de réception
de soumissions conformes est environ 1,9 million.
Une voix
: …
Mme Leclerc (Guylaine) :
Pardon? Excusez-moi, 1,9 soumissionnaire, effectivement, pour chacun de ces
dossiers-là examinés.
Alors, pourquoi est-ce ainsi? Bon, il y a
plusieurs critères. Il y a le fait… Est-ce que les critères de qualification
sont trop élevés? Est-ce que c'est parce que c'est très spécialisé? On comprend
que Loto-Québec, c'est très spécialisé. Alors, les différents critères, on ne
peut pas juger pourquoi ils considèrent que 1,9… pourquoi il y en a si peu,
mais ce qu'on dit, c'est qu'on leur recommande de revoir leurs critères pour
voir dans quelle mesure il serait possible d'augmenter le nombre de
soumissionnaires conformes et ainsi de voir dans quelle mesure on pourrait
peut-être améliorer les prix et élargir la compétition.
Le Modérateur
: Pascal
Poinlane.
M. Poinlane (Pascal)
:
Oui. Concernant Gentilly, là, on voit que… bien, en tout cas, Hydro-Québec dit
qu'ils ont fait d'importants… ils ont déployé d'importants efforts pour vendre
les équipements avant d'aller à la ferraille. Dans votre rapport, on constate
qu'en fait ils ont passé seulement trois mois à chercher des acheteurs
potentiels. Alors, est-ce que trois mois, d'après votre analyse, c'est des
efforts suffisants? Est-ce que la durée est importante ici?
Mme Leclerc (Guylaine) : Bon,
dans un premier temps, ils sont allés en appel en manifestation d'intérêt, et,
dans cette manifestation d'intérêt, on ne mentionnait pas que le fait de
manifester son intérêt nous amenait nécessairement un appel d'offres. Un des
éléments que nous reprochons est le fait qu'ils ne documentent pas pourquoi
qu'ils ne sont pas allés en appels d'offres immédiatement bien qu'ils
négociaient avec une autre entité.
Donc, on vous a énuméré les efforts qui
ont été faits par Hydro-Québec, donc manifestation d'intérêt, négociation avec
un seul acheteur, publication dans certaines revues spécialisées. Est-ce que ce
sont des efforts suffisants? Nous, ce que nous disons, c'est que ces efforts-là
n'ont… ça n'a pas été documenté, s'ils considèrent que ça a été suffisant.
M. Poinlane (Pascal)
:
Qu'est-ce que vous pouvez nous dire sur les interactions entre le fabricant et
Hydro-Québec? Est-ce que le fabricant était intéressé à acheter la turbine? C'est
le lien que je ne comprends pas très bien, là?
Mme Leclerc (Guylaine) : Oui,
le fabricant a manifesté son intérêt à l'acheter et c'est ce pourquoi…
Hydro-Québec a donc négocié jusqu'en septembre 2014 avec ce fabricant-là, et il
faut savoir qu'en juin 2014 Hydro-Québec a raccourci le bail où était entreposé
cet équipement-là. Il a raccourci le bail de quatre mois et demi pour l'année
au 31 décembre 2014, ce qui fait que, lorsqu'on a cessé la négociation en septembre 2014,
il restait peu de temps maintenant pour repartir sur un appel d'offres. Mais
les motifs qui justifient d'aller vers les ferrailleurs plutôt que d'aller vers
un appel d'offres n'ont pas été documentés.
M. Poinlane (Pascal)
: Est-ce
que je comprends qu'à partir de septembre 2014, finalement, le fabricant
n'était plus intéressé à la turbine? Est-ce que c'est ça?
Mme Leclerc (Guylaine) : Exactement.
En septembre 2014, le fabricant s'est désisté.
M. Poinlane (Pascal)
: O.K.
Donc, si j'ai… juste pour bien comprendre, que j'aie le calendrier en tête, de
mars à mai, on cherchait des acheteurs sur le marché international?
Mme Leclerc (Guylaine) : On
avait fait une manifestation… on avait présenté une manifestation d'intérêt, ce
qui n'est pas un appel d'offres.
M. Poinlane (Pascal)
: D'accord.
Donc, ça, ça a été de mars à mai. Ensuite, à partir de mai, il y avait le
fabricant qui était intéressé potentiellement…
Mme Leclerc (Guylaine) : Exactement,
oui.
M. Poinlane (Pascal)
:
Donc là, il y a eu des négociations jusqu'en septembre.
Mme Leclerc (Guylaine) : Oui,
mais, en juin, on a avisé qu'on raccourcirait la période du bail où était
entreposé l'équipement.
M. Poinlane (Pascal)
:
Avez-vous le coût d'entreposage de l'équipement? Savez-vous combien ça coûtait?
Mme Leclerc (Guylaine) : En économie
totale, dû au fait qu'ils l'ont ramené de quatre mois et demi, c'est 40 000 $,
je crois.
Le Modérateur
: Martine
Biron.
Mme Biron (Martine)
:
Bonjour, messieurs, Mme Leclerc. Bienvenue dans notre monde.
Mme Leclerc (Guylaine) :
Merci.
Mme Biron (Martine)
:
C'est votre premier rapport. Est-ce qu'il y a un gros marché pour la turbine?
Est-ce qu'il y a beaucoup de gens qui peuvent être intéressés?
Mme Leclerc (Guylaine) : On
peut présager qu'il n'y en a pas, un gros marché. C'est quand même… C'était une
pièce qui avait été faite sur mesure pour Hydro-Québec, dans le cadre d'un projet
nucléaire. Alors, on peut présager que le marché n'était pas très large.
Mme Biron (Martine)
:
Dans le calendrier que vous nous avez présenté, est-ce que vous avez
l'impression qu'Hydro-Québec s'est un peu peinturé dans le coin, c'est-à-dire
qu'il s'est retrouvé dans une situation où son bail arrivait à échéance, le
fabricant se désistait, ça fait que finalement il s'est retrouvé un peu mal
pris puis finalement est-ce qu'il pouvait renouveler son bail? Est-ce qu'il se
trouvait coincé?
Mme Leclerc (Guylaine) : C'est
un des défis de ce dossier-là. C'est qu'on ne peut pas conclure parce qu'on n'a
pas l'information des décisions qui ont été prises. Pourquoi les décisions ont
été prises de telle et telle façon? On n'a pas l'information, ça n'a pas été
documenté.
Mme Biron (Martine)
:
O.K. J'aurais une dernière petite question. Dans votre présentation, vous avez
dit : Finalement, la vente s'est faite de façon discrétionnaire. Qu'est-ce
que vous voulez dire par discrétionnaire?
Mme Leclerc (Guylaine) : Bon,
alors on aurait pu aller en appel d'offres. Même si on disait : Bon, on
oublie la marché du nucléaire, on aurait pu dire : Bien là, maintenant
qu'on décide de disposer en morceaux de cette pièce-là, on aurait pu aller en
appel d'offres. Ce qu'on…
Mme Biron (Martine)
:
…par morceau?
Mme Leclerc (Guylaine) :
Pardon?
Mme Biron (Martine)
:
Morceau par morceau, c'est ça que vous voulez dire?
Mme Leclerc (Guylaine) : Non,
non, non. La grande pièce, comme on l'a fait. Ce qu'on a fait, c'est… on est
allés sur un appel de propositions sur invitation. Donc, c'est pour ça que je
dis que c'est discrétionnaire. On y est allés avec des entreprises avec
lesquelles Hydro-Québec faisait déjà affaire plutôt que d'avoir décidé d'aller
en appel d'offres public.
Mme Biron (Martine)
: Est-ce
qu'ils ont finalement choisi la facilité, selon vous?
Mme Leclerc (Guylaine) : On
ne peut pas savoir si c'est la facilité. Le motif pourquoi ils sont allés en
proposition sur invitation n'est pas documenté.
Le Modérateur
: Charles
Lecavalier.
M. Lecavalier (Charles)
:
Bonjour. Hydro-Québec dit que, finalement, il aurait peut-être été capable
d'aller chercher un peu plus d'argent en vendant le métal à d'autres
ferrailleurs, mais que, dans les faits, le prix du loyer puis le coût des
employés qui auraient travaillé là-dessus auraient été plus élevés. Donc, eux
autres, ils estiment que, finalement, ils n'auraient pas pu aller chercher plus
d'argent. Est-ce que vous êtes d'accord avec leur analyse ou si, justement, ce n'était
pas documenté?
Mme Leclerc (Guylaine) :
Bien, moi, je n'ai pas cette analyse-là, alors je ne suis pas en mesure de
répondre.
M. Lecavalier (Charles)
:
Comment pourriez-vous qualifier la relation que vous avez eue avec
Hydro-Québec? Je sais que votre prédécesseur a déjà eu des difficultés avec
Hydro-Québec, ils ne voulaient pas remettre les documents, etc. Est-ce que ça s'est
bien passé avec eux?
Mme Leclerc (Guylaine) : Le
déroulement a été adéquat.
Le Modérateur
: Marco
Cirino-Bélair.
Une voix
: C'est un peu
laconique.
Une voix
: Adéquat?
M. Bélair-Cirino (Marco) : Bien,
justement, parlant d'expliquer l'absence de documentation sur un dossier aussi
sensible que la vente des actifs de Gentilly-2…
Mme Leclerc (Guylaine) : C'est
le commentaire que nous portons dans notre rapport. Nous disons justement que
le fait que c'est un actif acquis à 79 millions, qu'il... bon, qu'on n'a
pas trouvé d'acheteur, qu'on a dû en disposer à la ferraille, bien, on
considère ça comme... et le fait qu'au niveau du public il y avait beaucoup
d'interventions au niveau du public...
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Comment vous expliquez qu'il n'y ait pas de documentation?
Mme Leclerc (Guylaine) :
...on disait que c'était une situation exceptionnelle, et nous nous serions
attendus à ce qu'Hydro-Québec ait travaillé avec beaucoup de transparence dans
ce dossier-là.
Mais la déficience au niveau de la
documentation fait en sorte que ça a été plus difficile au niveau de la
transparence des motivations pour chacune des décisions.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Donc, la documentation n'a jamais existé ou elle ne vous a pas été transmise?
Mme Leclerc (Guylaine) : Bien,
à notre avis, elle n'était pas présente, mais on ne peut jamais confirmer ou
infirmer si elle est là, mais, à notre avis, les décisions étaient peu
documentées.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Est-il vrai qu'Hydro-Québec aurait dû défrayer un montant allant jusqu'à
444 000 $ pour se débarrasser des actifs?
Mme Leclerc (Guylaine) : Bien,
dans les soumissions que nous avons reçues, il y en a eu, je crois, c'est sept
soumissions, et les quatre premières, c'étaient des compagnies de ferrailleurs,
dont les trois premières étaient non conformes. Après ça, il y avait des
compagnies de démolition. Il y en a une qui a proposé à 33 000 $ et,
après ça, il y avait une autre compagnie de démolition qui, elle, chargeait une
centaine de milliers de dollars. Et, enfin, il y avait une dernière compagnie,
dont je ne me souviens plus c'était quoi son corps de métier, mais elle
exigeait de se faire payer 440 000 $ pour démolir la pièce.
Il faut comprendre qu'on exigeait de la
pièce qu'elle soit démolie de telle sorte que chacune des pièces ne puisse plus
être réutilisée dans le domaine pour lequel elle avait été construite, et qu'il
y avait un délai, que ça devait être détruit avant le 31 décembre et que
ça se devait d'être détruit sur place, où était l'entrepôt.
M. Bélair-Cirino (Marco) : Très
bien. Concernant le dossier de l'UQTR, est-ce que… en fait, du campus à Drummondville,
est-ce que l'UQTR doit renoncer à ce projet-là à la lumière de votre vérification?
Mme Leclerc (Guylaine) : On n'est
pas en mesure de pouvoir statuer là-dessus. C'est à la gouvernance de l'UQTR,
et de l'Université du Québec, et des ministères à prendre cette décision.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Mais quelle décision s'impose aujourd'hui pour la direction de l'établissement
d'enseignement et le ministère?
Mme Leclerc (Guylaine) : Je
ne suis pas en mesure de répondre.
Le Modérateur
: Émilie
Vallée, c'est bien ça?
Mme Vallée (Émilie) : Oui.
Bonjour. Toujours dans le dossier de l'UQTR, là, concernant la gouvernance,
vous parlez entre autres d'un problème, là, avec le président du conseil
d'administration. Pouvez-vous m'éclairer ce point-là un petit peu?
Mme Leclerc (Guylaine) : C'est
que le président du conseil d'administration, étant une personne en charge
publique, ne peut pas, en même temps, être un élu dans une municipalité. Alors,
c'est ça, le problème qu'on a identifié.
Mme Vallée (Émilie) : Donc, il
aurait dû démissionner.
Mme Leclerc (Guylaine) : Soit
démissionner comme président, mais il aurait pu siéger comme membre du conseil.
Mme Vallée (Émilie) : Et vous
voyez aussi des problèmes au sujet de la rectrice dans un dossier éthique qui
la concernait. Vous avez... Pouvez-vous élaborer un peu là-dessus?
Mme Leclerc (Guylaine) : Il
s'agissait d'un dossier où la rectrice détenait une... à l'université
précédemment où elle était, détenait une chaire de recherche et a souhaité transférer
la chaire de recherche à l'Université du Québec à Trois-Rivières. La fondation
de recherche avait des préoccupations et a exigé d'avoir une certaine forme de
garantie et des recommandations, qui ont été écrites par la vice-rectrice à la
recherche, et ces recommandations-là ont été modifiées par la rectrice sans en
aviser la vice-rectrice, et ces recommandations-là corrigées ont été envoyées à
la fondation.
Le Modérateur
: Tommy
Chouinard.
M. Chouinard (Tommy)
:
Bonjour. Mme la Vérificatrice générale, est-ce que les citoyens du Québec
peuvent avoir confiance dans la haute direction actuelle de l'UQTR?
Mme Leclerc (Guylaine) : Je
ne suis pas en mesure de répondre à cette question. Je crois que c'est au
Conseil exécutif de répondre à cette question.
M. Chouinard (Tommy)
: Il
y a des problèmes importants, donc?
Mme Leclerc (Guylaine) : Il y
a des problèmes. Nous avons identifié plusieurs déficiences dans notre rapport,
effectivement.
M. Chouinard (Tommy)
:
Puis vous n'êtes pas en mesure de dire que vous avez confiance dans cette
équipe de direction là, là, pour la bonne marche de la gestion universitaire?
Mme Leclerc (Guylaine) : Ce
n'est pas mon mandat de répondre à cette question.
M. Chouinard (Tommy)
: Est-ce
que vos recommandations... Bien, je comprends, mais est-ce que c'est dans votre
mandat de dire qu'une rectrice n'est pas en mesure d'exercer les fonctions...
Mme Leclerc (Guylaine) : Ce
n'est pas notre mandat.
M. Chouinard (Tommy)
:
Ce n'est pas votre mandat. Bon. Maintenant, est-ce que, parmi les
administrateurs d'organismes publics que vous êtes appelée à juger,
considérez-vous que ce qui est relevé au sujet de la rectrice de l'Université
du Québec à Trois-Rivières, c'est particulièrement préoccupant?
Mme Leclerc (Guylaine) : Bien,
c'est certain que c'est préoccupant. Nous en faisons part, des déficiences.
Mais pour ce qui est des sanctions et des conséquences, on ne peut pas répondre
à ça.
Le Modérateur
: S'il
n'y a pas d'autres questions en français... Monsieur.
M. Papillon (Mathieu) :
Toujours sur l'UQTR, vous parlez beaucoup du projet de campus à Drummondville.
Est-ce que ce projet-là s'est vite imposé? Est-ce que ça a été clair pour vous
dès le départ que ça méritait votre attention, ce projet-là? Et, si oui,
pourquoi?
Mme Leclerc (Guylaine) :
Bien, c'est certain que c'était un projet qui était important, pour lequel on a
constaté qu'il y avait des lacunes au niveau de la gouvernance de ce projet-là.
Alors, oui.
M. Papillon (Mathieu) : Ça
s'est vite imposé?
Mme Leclerc (Guylaine) : Oui.
M. Papillon (Mathieu) : Et
autre question, là : Comment, à la lumière de vos observations, comment
vous qualifieriez l'administration, la gestion qui est faite de l'UQTR
présentement?
Mme Leclerc (Guylaine) : Présentement,
je ne peux pas juger, mais ce que je peux juger, c'est la période pendant
laquelle nous avons fait nos travaux. Alors, on a identifié plusieurs
déficiences au niveau de la gouvernance, tant au niveau du conseil d'administration,
de la haute direction, comme vous avez pu le voir, de l'Université du Québec et
du ministère.
Le Modérateur
: Je vais
permettre une dernière question en français à Pascal Poinlane, une dernière.
M. Poinlane (Pascal)
:
Juste une petite précision, parce que tantôt je vous demandais combien ça... en
fait, vous m'avez dit combien ils ont économisé, Hydro-Québec, en
raccourcissant le bail, là. Vous avez dit 40 000 $ d'économie, mais
ce que je voulais savoir, c'est combien ça coûtait par mois pour entreposer la
turbine, si vous le savez.
Mme Leclerc (Guylaine) : Combien
par mois? On ne le dit pas dans le rapport.
M. Poinlane (Pascal)
:
Mais est-ce que vous le savez?
Mme Leclerc (Guylaine) : On
me dit que l'entrepôt coûtait 250 000 $ pour l'année.
M. Poinlane (Pascal)
:
Pour l'année.
Mme Leclerc (Guylaine) : Oui.
Et, compte tenu qu'il y a eu des pénalités et qu'on a économisé sur quatre mois
et demi, là, l'économie totale, c'est 40 000 $.
Le Modérateur
: On va
passer aux questions en anglais. On va commencer avec Max Harrold.
M. Harrold (Max) :
Yes. Hello, Mme Leclerc. So I wondered if you could talk a little bit about the
CSST missing out on its role. It seems pretty fundamental that it's supposed to
adapt to changing workplaces and get the cases treated quickly enough so that…
You know, what was the result of that? What happened to the people who waited
for weeks for their cases to be treated?
Mme Leclerc
(Guylaine) : Well, your question is very
large, and it seems that my answer should be the entire chapter, but I will try
to synthetize that.
First of all, we found
that the governance had a kind of challenge, you know, the fact that there is
seven workers who are represented and the employer represented for seven
people, and the president has to decide which… it goes. So we have identified a
few problems related to the governance. We identified that some practice should
be improved, regarding the... to facilitate the return to… the workers at the
workplace. And we have determined that the processing of time for medical
assessment should be… has increased, so it takes… in my work, it takes lot more
time for an employee to be assessed in the medical BEM, bureau d'examen
médical, so that increases the risk of chronicity for the employees.
M. Harrold (Max) :
But, you know, there is people, there is real people behind these numbers,
right? So are you saying that people are suffering as a result of the lack of a
proper action on the CSST behalf or…
Mme Leclerc (Guylaine) :
Of course, there are some risks. Just for example… I just don't know how we say
that in English, but, for example, the criteria to determine if an employee who
has been injured get the proper salary when he can go work in another place at
a lower salary, there are five criteria, and those five criterias are not
applied properly from one place to another. So that could have an impact on the
employee, on the worker.
M. Harrold (Max) :
In terms of the turbine at Hydro-Québec,
can you sum up what you think is the problem there, the main critic of
Hydro-Québec's handling of this situation?
Mme Leclerc
(Guylaine) : In my view, there is two big
problems. The first one is about the public tender for the turbine itself, to
be able to valorize the turbine at the higher price, to try to find a nuclear
plan that would have accept it, or buy it, or use it. So that is the first
thing, OK. We have not the evidence that Hydro-Québec did everything to get the
best value for this asset.
The second thing is, once
that they decided to not go that way, to not go on a proposal, public proposal,
they decided to sell it to a scrap dealer. We have identified some
deficiencies. Some of them are the choice of the scrap dealer. They haven't
gone into public… tending offer… standing offer…
Journaliste
:
…
Mme Leclerc
(Guylaine) : Public tender. Sorry. Thank you.
And finally they haven't applied the contract properly. So they found some
supplier who would… they made the choice for one scrap dealer. After that, they
haven't applied the contract properly for that scrap dealer.
Le Modérateur
:
Caroline Plante.
Mme Plante (Caroline)
:
Hello, Mrs. Leclerc. In your report, you talk about family medicine groups. You
say that the waiting lists are not transparent enough, they're unfair, that
these groups are not taking charge of patients, especially the most vulnerable
patients, and that the Ministry continues to fund these groups even though
they're not complying with criterias such as number of patients and opening
hours. Do you have faith that this Government's Bill 20 will fix all of
these problems?
Mme Leclerc
(Guylaine) : Well, I don't know if it's the
Bill 20, but I can tell you that maybe that the agreement that they had
yesterday and the day before yesterday, it implies a few of our
recommendations. OK? So, if it works like they say it should work, some of our
recommendations should be applied.
Mme Plante (Caroline)
:
Some, but not all?
Mme Leclerc
(Guylaine) : We will see later. For now, we
have identified a few of them, but we don't know if all of them will be
correctly applied.
Mme Plante (Caroline)
:
So is this case closed or will you be following up?
Mme Leclerc
(Guylaine) : That's for sure, we will follow
it very closely.
Mme Plante (Caroline)
:
On what precisely?
Mme Leclerc (Guylaine) : On every recommendation we did in our report.
Mme Plante (Caroline)
:OK. And
transparency seems to be the main issue in many of your recommendations when you talk about Loto-Québec, when you talk about Hydro-Québec, doctors, you know, clinics.
Can Quebeckers really have confidence in their institutions, that they're
transparent enough?
Mme Leclerc
(Guylaine) : Well, it is our work to find
deficiencies, so maybe, if you just see the deficiencies, you can have a lack
of faith, but I cannot ensure that the people should not believe in our
institutions. That is not what we say, but our role is to audit and to present
to you and to the public what are the deficiencies, so…
Mme Plante (Caroline)
: Are these institutions transparent enough?
Mme Leclerc
(Guylaine) : It depends. It depends on what?
If we examine some contracts, well, sometimes it's not sufficiently transparent
for us. We present recommendations, then we do some
follow-up and we hope that they improve their transparency, eventually.
Mme Plante (Caroline)
:
Why is it important that they are transparent?
Mme Leclerc
(Guylaine) : Well, it's… For example, for
suppliers, it contributes to have faith from suppliers to the fact that they
could have a contract into one organization. If it is not transparent and the
organization goes «gré-à-gré», well, some suppliers could be very good but they
don't know that they could do the job. Same thing for the public. They are sure,
if it is a public tender, for example, they can be more ensure that the price
they pay are less than if they go on «gré-à-gré».
Le Modérateur
:
Phil Authier.
M. Authier (Philip)
:
Excusez-moi, j'ai oublié de vous poser cette question-là. Vous avez reçu un mandat…
C'est votre première année. Vous avez reçu un mandat pour préparer le document
préélectoral. C'est un rôle, c'est nouveau pour le Vérificateur général. Pouvez-vous
nous éclairer un peu sur comment vous allez procéder et est-ce qu'il y a dans
tout ça un danger ou un… je sais que ce n'est pas la tradition de jouer un rôle
politique dans votre bureau, mais est-ce que ça peut devenir ça, au cas où…
quand vous vous lancez dans cette opération-là? Comment allez-vous gérer cette
neutralité?
Mme Leclerc (Guylaine) : Il
faut être prudent, je vous dirais. Si le Vérificateur général a accepté de
jouer ce rôle, c'est parce qu'il sait qu'il est en mesure de le jouer. Il y a
moyen de le jouer en toute indépendance, transparence et de ne pas… puis ce
n'est pas notre rôle d'embarquer dans le rôle politique. Donc, il s'agit pour
nous de mettre des critères, lesquels on va vérifier, et, que ce soit quelque
gouvernement que soit, d'un rapport préélectoral à l'autre, ces critères-là
seront appliqués, et, basés sur ces critères-là, nous pourrons émettre une
opinion sur la plausibilité des hypothèses qui sont présentées.
M. Authier (Philip)
:
Parce que, quand on a vu ce genre d'opération dans le passé, le vérificateur a
été accusé de ne pas être assez neutre. Il y a déjà eu des… Ce n'est pas facile
à faire, de présenter un document indépendant sur ce sujet-là sans vous faire attaquer.
Avez-vous peur de ça?
Mme Leclerc (Guylaine) : Non.
M. Authier (Philip)
:
Comment allez-vous gérer ça?
Mme Leclerc (Guylaine) : On
va le gérer adéquatement, comme on gère tous nos dossiers…
M. Authier (Philip)
: …patate
chaude, non?
Mme Leclerc (Guylaine) :
Plusieurs dossiers sont des patates chaudes.
M. Authier (Philip)
:
Merci.
Le Modérateur
: Alors,
s'il n'y a pas d'autre question, ça met fin à la conférence de presse. Merci
d'être venus.
(Fin à 11 h 52)