(Neuf heures trente-trois minutes)
M. Lisée
: Alors,
bienvenue à tous et à toutes. On est contents d'être avec vous aujourd'hui parce
qu'il se passe des choses qui fragilisent l'industrie agricole du Québec, qui
est un pilier de l'économie du Québec, de toutes nos régions.
D'abord, juste un petit mot, puisqu'on est
le 11 novembre, pour le jour du Souvenir. Partout au Québec aujourd'hui...
Tout à l'heure, avec le premier ministre et les membres des autres partis, on
va rendre hommage à nos vétérans, à nos militaires, à ceux qui sont tombés, à
ceux qui ne sont pas tombés, aux familles aussi qui soutiennent nos militaires
qui prennent la décision de mettre leur vie en danger pour le bien de notre
pays, le bien de nos valeurs et dont la bravoure fait partie de notre histoire
nationale et de notre fierté nationale. On a tous, dans notre famille, des gens
qui sont allés, ont pu aller ou qui ont péri dans ces conflits. Alors, c'est la
moindre des choses qu'une fois par année on se recueille, on leur dise merci et
qu'on s'occupe des vétérans correctement aussi pour la suite.
Alors, écoutez, en ce moment, on est dans
une tempête parfaite pour l'agriculture québécoise. D'une part, il y a une
réforme de la stabilisation et des remboursements des taxes foncières par le gouvernement
du Québec qui fait en sorte que 80 % des entreprises agricoles vont avoir
un fardeau augmenté, en certains cas doublé. Ce n'est pas acceptable. André va
vous en parler.
Deuxièmement, dans la négociation de
libre-échange avec l'Europe, lorsque j'étais ministre du Commerce extérieur,
notre position était claire, il ne fallait pas que l'agriculture québécoise
paie le prix d'une entente avec l'Europe. Le gouvernement canadien a décidé à
la 11e heure de sacrifier l'industrie laitière et fromagère québécoise au
profit du boeuf de l'Ouest. C'est une décision qui est injuste, qui est
inacceptable. Et, lorsque j'étais ministre du Commerce extérieur, la position
que nous avions prise, c'est qu'on est pour l'accord, parce que, je pense, ça
va être très bon pour les exportations de nos entreprises, de nos PME dans
toutes les régions, mais pas au prix de ce coût imposé de 300 millions de
dollars par année à notre industrie laitière et fromagère.
Et donc notre position, c'était de dire :
Bien, très bien, les Européens, on a négocié avec eux, maintenant on se tourne
vers Ottawa et on leur dit : Si vous voulez qu'on adopte le décret d'application
de l'accord pour le Québec, qui est essentiel, bien, vous devrez compenser à sa
juste valeur le tort que vous avez posé aux agriculteurs québécois. Et c'était
ça, notre levier de négociation, notre rapport de force face à Ottawa, pas face
à l'Europe, face à Ottawa. C'était de dire : On va signer le décret au
moment où on sera satisfaits.
Est arrivée une mauvaise nouvelle : les
libéraux ont pris le pouvoir et ont décidé d'abandonner notre rapport de force,
et M. Couillard a dit : On va signer de toute façon. Alors, comment
pensez-vous qu'Ottawa a réagi? Il s'est dit : Bon, bien, je n'aurai pas
besoin de compenser à sa juste valeur. Et là on a eu les chiffres hier. Alors,
sur cinq ans, on estime à 1,5 milliard la perte pour l'industrie laitière
et fromagère et, sur cinq ans, le fédéral offre 350 millions. Alors, on
perd 1,5, ils en offrent 350. Alors, on voit, c'est là que nous a amenés
l'incompétence de négociateur du gouvernement libéral québécois et du ministre
Pierre Paradis qui entérinent cette position de faiblesse face à Ottawa.
Alors, nous, on dit que la compensation
doit être égale aux torts causés parce que, dans l'Ouest, là, le boeuf de l'Ouest,
ça va bien leurs affaires. Ça va aller bien, leurs affaires, on ne leur
enlèvera rien à eux, alors pourquoi, nous, on paie là-dessus? Et notre
position, André et moi, on en a discuté ce matin, on dit : C'est sûr que
l'UPA donne une évaluation de perte par année, on peut penser que l'UPA donne
le maximum. Le gouvernement canadien donne son évaluation qui est risible, et
donc, notre proposition, c'est qu'on trouve un forum des économistes, respecté
de tous, c'est-à-dire de l'UPA, du gouvernement du Québec et du gouvernement
fédéral, qui va nous donner une formule réelle de compensation totale sur toute
la période. Si on voulait vraiment rendre justice, c'est ce qu'on ferait et
c'est la proposition qu'on fait aujourd'hui au gouvernement du Québec, et on
lui dit de changer sa position sur l'adoption du décret tant qu'il ne sera pas
satisfait.
Et puis, dans cette tempête parfaite,
bien, il y a en plus les 120 millions par année qui sont perdus par notre
industrie laitière à cause du refus du fédéral d'empêcher l'entrée de lait
diafiltré sur notre marché. Et maintenant, c'est un refus. Au début, ils nous
disaient : Ah! on s'en occupe, on va voir ce qu'on va faire, mais, les
mois passant, on voit bien qu'il y a des intérêts qui ont l'oreille du premier
ministre Trudeau et de son Conseil des ministres, et ils refusent d'agir, et
donc on a cette perte de 120 millions par année qui semble récurrente.
Alors, ce serait la moindre des choses que
le gouvernement québécois n'en rajoute pas avec une réforme malavisée du remboursement
des taxes foncières. Et je vais laisser, pour le reste, André Villeneuve
prendre la parole. André.
M. Villeneuve
: Merci. Merci
beaucoup, Jean-François. D'abord, je veux saluer M. Pierre Lemieux,
vice-président de l'UPA; M. Paul Doyon, président de l'UPA Chaudière-Appalaches;
M. Guy St-Pierre, maire de Manseau, administrateur de la Fédération québécoise
des municipalités. Je tiens à dire aussi que présentement, à Cowansville, il y
a plus de 400 agriculteurs qui sont devant les bureaux du ministre Paradis, et
notre collègue Alain Therrien est sur place aussi pour donner notre appui,
finalement, au combat que les agriculteurs mènent présentement.
D'abord, évidemment, vous comprendrez que,
si on arrive ici aujourd'hui avec une interpellation, il y a eu beaucoup
d'étapes, hein, qui ont précédé cette interpellation-là. Juste dire que, dans
le budget 2016‑2017, là, on a annoncé une réforme de programme, c'était censé
être un simple transfert du MAPAQ, donc, à l'Agence du revenu, un simple
transfert. Aux crédits, on était un peu sceptiques, on a posé des questions. On
a présenté des chiffres au ministre, des chiffres d'ailleurs qui avaient été
rendus publics par l'UPA, et le ministre, devant ces chiffres-là, n'a pas trop
semblé savoir de quoi on parlait. Mais ce qu'on lui disait, dans le fond, c'est
que la réforme qu'il est en train de mettre en place, ce n'est pas un simple transfert,
c'est carrément qu'il joue dans les paramètres, hein, il fait une
télétransportation du programme, mais, pendant la télétransportation, il joue
dans les paramètres, et ce que ça donne, ça donne que 83 % des fermes au
Québec vont devoir mettre la main dans leurs poches.
Le 7 juillet, d'ailleurs, on a eu la
réponse du MAPAQ à la question de crédit, qui venait confirmer finalement nos
craintes. Le 15 juillet, il y a eu une rencontre technique avec le
ministre des Finances, le MAPAQ et l'UPA. Si on est ici aujourd'hui, c'est
parce que ça n'a pas donné de résultat, vous comprendrez. Évidemment, il y a eu
beaucoup d'autres mesures qu'on a prises et que les gens, les agriculteurs,
agricultrices du Québec ont fait aussi, que ce soient les communiqués ou toutes
autres façons finalement d'interpeller le gouvernement.
Le 20 septembre, une lettre envoyée à
M. Leitão, donc ministre des Finances, Agence du revenu, de la part de la
Fédération québécoise des municipalités, signée par M. Lehoux, donc le
président, dans laquelle la Fédération québécoise des municipalités, qui collecte
les taxes — je pense, c'est important de le dire, et les agriculteurs
paient les taxes, et la FQM collecte les taxes, bien, en tout cas, les
municipalités collectent les taxes — et la Fédération québécoise des
municipalités et l'UPA sont d'accord, il faut reporter le programme. Il faut le
reporter, et ça ne causera aucun préjudice au Trésor du Québec, parce que, dans
le budget, c'était à coût nul. Donc, il n'y a pas de problème à ce niveau-là.
Puis quant à la fonctionnalité du programme, il fonctionne très bien. Il est là
depuis un certain nombre d'années, et ça fonctionne très bien, et on doute que
ça va fonctionner aussi bien avec l'Agence du revenu, mais ça, on verra si on
se rend jusque là.
Donc, aussi peut-être vous dire qu'entre
autres efforts que nous avons faits pour pouvoir permettre au monde agricole de
se faire entendre, on a demandé un mandat d'initiative. Les députés libéraux
ont refusé d'entendre, ont refusé à ce qu'on mette en place un mandat
d'initiative où on aurait pu entendre justement le monde agricole.
Écoutez, je pense que... M. Lisée vient de
le dire, il l'a très bien dit, c'est une tempête parfaite. Les agriculteurs
sont pressés comme des citrons, c'est le cas de le dire, il faut que ça arrête.
Il faut que ça arrête, et je pense que le message, ils auront l'occasion de
vous le dire eux-mêmes, mais je pense que le message de l'UPA et de la
Fédération québécoise des municipalités, c'est qu'ils ne sont pas contre une
réforme. Tout ce qu'ils veulent, c'est s'asseoir avec le gouvernement et faire
ça correctement. Voilà.
M. Lisée
: M. Lemieux.
M. Lemieux (Pierre) : Bien,
bonjour, tout le monde. Dans un premier temps, je voudrais remercier le Parti
québécois d'au moins avoir mis en évidence aujourd'hui, par un questionnement à
l'Assemblée nationale sur le programme de remboursement de taxes...
La première chose que je veux affirmer,
c'est qu'au niveau des agriculteurs, les entreprises agricoles, le programme
s'applique seulement à l'activité agricole. Nos résidences sont traitées comme tout
le monde, puis on paie nos taxes sur la valeur de nos résidences comme tout le
monde, comme tout citoyen. C'est vraiment l'activité agricole qu'on parle. Et
cette mesure-là, ce qu'on veut, nous, dénoncer, là, c'est la façon de
travailler de M. Paradis. Encore une fois, ça a été décidé, annoncé sans avoir
fait d'analyse d'impact économique, sans avoir consulté les gens du milieu, et
il va par, je dirais, là, populisme général en ce qui concerne la façon qu'il
mène le ministère de l'Agriculture actuellement.
Et ce qu'on veut dénoncer en même temps de
M. Paradis, en ce qui concerne sa façon de travailler, c'est qu'aujourd'hui il
n'écoute pas le milieu. La Fédération québécoise des municipalités est à la
même place que l'Union des producteurs agricoles pour demander un report. Les fédérations
québécoises de motoneige et de quad ont envoyé une lettre pour faire la même
demande cette semaine. Il y a aujourd'hui une fin de non-recevoir de la part du
ministre Paradis et une non-reconnaissance de la problématique de la ruralité québécoise
et des régions au Québec actuellement de la part du ministère de l'Agriculture
et surtout du gouvernement du Québec, parce que normalement le gouvernement est
là pour le ramener à l'ordre. Le Parti libéral serait là pour le ramener à
l'ordre, et il ne le fait pas, et c'est ce qu'on veut dénoncer aujourd'hui,
cette façon de travailler là. Merci.
M. Lisée
: M.
St-Pierre.
M. St-Pierre (Guy) : Alors,
bonjour. Oui, effectivement, au niveau de la Fédération québécoise des
municipalités, on demande aussi le report de cette politique qui est mise en
place parce qu'on ne connaît pas l'impact au niveau des municipalités dans la façon
de traiter ce dossier-là. Présentement, ça allait très bien, les demandes s'en
allaient au ministère de l'Agriculture, le ministère de l'Agriculture nous
retournait les données, le chèque arrivait le 30 avril.
Là, ce qui change dans la façon de faire,
c'est que le ministère de l'Agriculture va fonctionner exactement de la même
façon, et la municipalité devra faire une demande au ministère du Revenu pour
être remboursée de ce montant-là, et, en plus, la demande devra être faite par
la poste. On est en 2016, il y a des... Est-ce qu'on vit le retour du pigeon
voyageur? Peut-être que ça sera la nouvelle méthode de communication avec les
municipalités. Mais, au niveau des municipalités aussi, il faut se souvenir que
le premier ministre, les deux derniers congrès qu'il a assisté, il parle des
municipalités, qu'on n'est plus des créatures du gouvernement, mais qu'on est
des partenaires, et, quand on est des partenaires, bien, on veut discuter de la
façon dont fonctionne le ministère dans ses relations avec les municipalités,
et présentement, bien... Il y a eu aussi, il faut le noter, le plan d'action
gouvernemental suite au dépôt du rapport Perrault sur la reddition de comptes,
et, dans ça, on parle de consulter les municipalités au moment où elles sont
touchées, et, dans ce programme-là, il n'y a rien qui a été fait.
Alors, ce qu'on demande au gouvernement,
au ministre de l'Agriculture, c'est de reporter cette modification au programme,
et on appuie l'UPA dans leurs démarches pour en arriver à ce résultat. Merci
beaucoup.
La Modératrice
: Merci
beaucoup. On va passer à la période de questions, sur le sujet du jour, s'il
vous plaît, par respect pour nos invités et aussi parce que MM. Villeneuve et
Lisée devront quitter à 10 heures.
M. Bégin (Pierre-Yvon) :
Question à M. St-Pierre. Pour quelle raison vous n'avez pas fait plus de
publicité puis encouragé vos municipalités à adopter un taux de taxes distinct?
Parce qu'il est aussi là, le problème, là. Vos municipalités vont taxer les
agriculteurs, vont chercher l'argent là. Alors, pourquoi est-ce que vous n'avez
encouragé davantage un taux distinct de taxes?
M. St-Pierre (Guy) : Il faut
bien comprendre que ça, ça relève... Oui, on pourrait les encourager. La
décision relève des municipalités. Il faut bien comprendre aussi qu'on est
d'accord avec le fait que, quand l'UPA nous présente que le fardeau fiscal se
déplace des résidences ou des citoyens vers l'agriculture, parce que la valeur
foncière de l'agriculture augmente beaucoup, on est conscients de ça, mais on
est aussi d'accord, si le ministère des Affaires municipales veut retravailler
la Loi sur la fiscalité municipale, on va y participer. Si c'est pour créer
une... si ça crée présentement une distorsion, travaillons à le réparer.
Est-ce qu'on pourrait inciter les
municipalités à le faire? Oui, mais les municipalités sont aussi maîtres de
leurs décisions et de leur taux de taxes qu'elles chargent aux producteurs et à
leurs citoyens.
M. Villeneuve
: Si je
peux me permettre un complément de réponse, parce que présentement le problème
qui se pose, ça devait être un transfert à coût nul, juste un transfert, mais
là on joue dans les paramètres puis on a les résultats qu'on a là. Vous dire
que, lors du budget, lors du huis clos du budget, des questions ont été posées,
à savoir : Est-ce qu'il y aurait des conséquences? Et les réponses ont été :
Il n'y en a pas de conséquence.
Alors, comment voulez-vous que le monde
municipal bouge si effectivement on leur dit que tout va bien? Juste à la
décharge, là... Je voulais préciser cela.
M. Patelli (Yannick) :
Question pour M. Lisée. M. Paradis vient d'annoncer, en point de presse, à
9 h 15, qu'il y avait une augmentation des compensations de 22 point quelques
millions et que ça allait permettre à 2 500 fermes qui vont être
couvertes... au lieu de 27 000, 30 000.
Est-ce que c'est une bonne nouvelle ou une
mauvaise nouvelle?
M. Lisée
: Bien, ma compréhension,
c'est qu'avec la spéculation sur la valeur foncière des terres agricoles, il y
a une augmentation du budget, mais ça ne donne pas un sou de plus ou de moins
aux agriculteurs. En fait, ils sont victimes d'une augmentation exagérée de la
valeur des terres agricoles, ce qui pose le problème pour la relève aussi.
Alors, le ministre joue avec les chiffres,
hein? Les deux chiffres coexistent. Il y a une augmentation de la valeur et il
y a une augmentation du paiement imposé à 82 % des agriculteurs.
M. Lemieux (Pierre) :
Là, offrir un programme de remboursement de taxes à des entreprises, ce n'était
pas admissible avant. Ce n'est pas une nouveauté, c'est une demande de l'union
depuis plusieurs années. Le problème, c'est que le budget n'a pas suivi. C'est
les producteurs existants qui en assument la facture. Puis, dans les chiffres
qui sont annoncés par M. Paradis avec une prévision de cinq ans, ça veut
dire que, dans le temps, si l'augmentation de la valeur des terres est plus
grande que ce que c'est qui a été annoncé en pourcentage d'augmentation du
budget, c'est encore des coûts additionnels pour les entreprises agricoles.
M. Patelli (Yannick) :
J'ai une sous-question. En fait, on a demandé à M. Paradis ce matin, en
fait... parce que, là, il a annoncé qu'il fallait maintenant être en zone verte
et être inscrit au MAPAQ. Il n'y a plus nécessité d'être membre de l'UPA pour
recevoir ce remboursement de taxes. Est-ce que c'est une crainte pour l'UPA de
perdre du membership?
M. Lemieux (Pierre) : Il
faut comprendre qu'il existe deux lois. Les producteurs ont
l'obligation... il y a une loi au niveau du statut de producteur agricole.
L'Union des producteurs agricoles est l'association accréditée. Elle est
reconnue en vertu de la loi, et ça fait en sorte que les producteurs devront
quand même adhérer et payer... c'est-à-dire payer leurs cotisations à l'Union
des producteurs agricoles, la même chose.
Pour nous, ce n'est pas l'enjeu, là. On
tente de dévier l'enjeu. C'est pour ça que je vous ai dit que M. Paradis,
c'est un populiste. Il tend à diviser au lieu d'essayer d'unir les gens ensemble.
Et le milieu rural, je vous ai parlé tantôt, les régions ont compris cet
élément-là, et ils veulent un milieu... il y ait un dialogue qui est
respectueux des partenaires de la ruralité.
La Modératrice
: Je
pense que, M. Bégin, vous vouliez poser une question supplémentaire?
M. Bégin (Pierre-Yvon) : Oui,
s'il vous plaît. Est-ce que chez les agriculteurs, M. Lemieux, on dit...
on parle, là, de l'importation des fromages fins, le lait diafiltré. Est-ce que
vous êtes d'accord que ça va être une vraie tempête chez les agriculteurs, le
programme de remboursement de taxes?
M. Lemieux (Pierre) :
Bien, regardez, au niveau du remboursement de taxes, ce qu'il faut comprendre,
ce n'est pas un investissement productif. C'est toujours sur le revenu net des
entreprises agricoles qu'on va le chercher. Ce n'est pas un investissement que j'espère
réaliser des gains puis améliorer ma rentabilité, c'est un investissement non
productif.
Et ce qu'il faut comprendre, c'est que
partout dans les autres zones de production qui nous entourent, ce n'est pas le
même programme, ce n'était pas des programmes qui sont beaucoup plus généreux
que ce que c'est qui existe au Québec. Et nous, on nous demande, par des
ententes de libre commerce qu'on signe d'être plus compétitifs et on nous
alourdit note tâche dans des investissements non productifs.
Et oui, ça va être une tempête, et oui les
agriculteurs ne lâcheront pas. C'est un début qui est commencé, et on
n'arrêtera pas. Ce n'est pas vrai qu'on va se laisser, comme agriculteurs,
porter l'odieux de ce que c'est que M. Paradis amène comme réforme en faisant accroire
à la population des éléments qui sont faux, qui ne reflètent pas des éléments
réels, prévisibles pour les entreprises agricoles.
M. Lisée
: Et
j'ajouterais que ce qui empire la chose, c'est que nos compétiteurs ont des
gouvernements qui sont beaucoup plus interventionnistes pour appuyer leur
agriculture. C'est vrai en Europe en ce moment, c'est vrai en Ontario. On a
appris qu'au Nouveau-Brunswick cette semaine les acériculteurs ont reçu un
financement fédéral qui va leur donner un avantage compétitif. Alors, c'est
encore pire si notre compétitivité est relativement fragilisée par rapport aux
investissements que nos compétiteurs font dans leurs agricultures.
Journaliste
: Pour
l'annonce... pour ce qu'a dit M. Paradis, juste pour clarifier, c'est une
augmentation de 22 millions sur cinq ans. En quoi, clairement, ça ne
répond pas aux attentes, à vos attentes, puis en quoi ça ne règle pas le
problème? Juste nous clarifier, là.
M. Villeneuve
: Oui.
D'abord, il faut comprendre que personne ne remet en question, je dirais,
l'objectif du programme. Il existe depuis 1964 puis il était là aussi avant
1964. Il y avait des paramètres qui existaient pour justement venir corriger
ces distorsions-là au niveau du monde agricole. M. Paradis, là, il n'était pas
là, le programme était là puis il fonctionnait. M. Paradis est là, le
programme, il est là puis il fonctionne très bien. Puis, même si M. Paradis
quittait, là, le programme, en principe, il est encore là puis il va encore
fonctionner très bien.
Alors, M. Paradis, il n'est pas en train
de dire aux agriculteurs : Je vous fais un cadeau. Les agriculteurs, ils
ne touchent pas de sous de ça. Dans le fond, c'est l'augmentation, entre
autres, entre autres, surtout l'augmentation fulgurante des terres. En tout
près de 10 ans, là, on parle de 800 % d'augmentation de la valeur des terres
agricoles au Québec. Alors là, il y a vraiment un sérieux problème, et les
agriculteurs sont pris avec cela. Mais le programme, personne ne le remet en
question.
Alors, ce que le ministre nous annonce ce
matin, l'annonce qu'il a faite, dans le fond, c'est une non-annonce, parce que
c'est la même chose qui était au budget, c'est la même chose qu'on a eue comme
réponse aux crédits. Alors, il n'y a rien de nouveau, rien de nouveau sous le
soleil, à matin, de l'annonce du ministre Paradis.
Journaliste
: Mais ça
prendrait combien, s'il devait y avoir des argents supplémentaires?
M. Villeneuve
: Bien, écoutez,
si, demain matin, le prix des terres agricoles, le prix des terres au Québec,
la valeur foncière chute, bien, le programme va avoir moins à débourser. C'est
ça, la dynamique, là. Tout dépendamment, si les valeurs des terres augmentent,
bien, le programme doit... on doit ajouter de l'argent pour le programme. Mais
c'est la seule raison, là.
Et, comme vient de le dire M. Lisée, les
États limitrophes au Québec, tout comme l'Europe, les Américains... les
Américains, c'est des dizaines de milliards qu'ils investissent dans le
monde agricole. En Europe, ils ont mis 500 millions l'an passé pour
soutenir le lait, entre autres, 500 millions d'euros, puis ils viennent de
remettre, au printemps dernier, 500 millions d'euros supplémentaires.
Alors là, là, il y a des États qui ont
compris, là, à travers le monde, là, que soutenir notre agriculture, là, c'était
essentiel et nécessaire. Il faudrait peut-être que M. Paradis finisse par
comprendre cela, et moi, je… Si le ministre Paradis ne recule pas, eh bien, on
a eu la taxe bienvenue, mais là on va avoir la taxe Paradis.
La Modératrice
: Merci
beaucoup. Ceci met fin à notre point de presse.
(Fin à 9 h 54)