Conférence de presse de M. Renaud Lachance, vérificateur général et de M. Jean Cinq-Mars, commissaire au développement durable
Rapport du commissaire au développement durable
Version finale
Le mercredi 28 avril 2010, 11 h 15
Salle Evelyn-Dumas (1.30),
édifice Pamphile-Le May
(Onze heures seize minutes)
M. Lachance (Renaud): Mesdames messieurs, la Loi sur le Vérificateur général a été modifiée, en 2006, en vue d'ajouter un nouveau volet à mon mandat en matière de vérification, soit la mise en oeuvre du développement durable. Cette loi prévoit notamment la nomination d'un commissaire au développement durable afin de m'assister à cet égard dans l'exercice de mes fonctions. J'ai nommé M. Jean Cinq-Mars à ce poste en août 2009. Je lui cède immédiatement la parole pour qu'il vous présente le contenu de son premier rapport, qui constitue le tome II de mon rapport à l'Assemblée nationale, déposé aujourd'hui. M. Cinq-Mars.
M. Cinq-Mars (Jean): Merci, M. Lachance. Mmes et MM. les journalistes, chers collègues, j'occupe le poste, depuis fin août, début septembre, de Commissaire au développement durable, mais, bien entendu, mon équipe était à pied d'oeuvre au cours de l'année budgétaire qui a débuté le 1er avril. Alors, il y a des rapports fort intéressants qui ont été préparés. C'est la première chance que j'ai de vous présenter le résultat de ces rapports.
Alors, comme disait M. Lachance, le Québec a adopté une loi, en 2006, concernant l'adoption de la Loi sur le développement durable. En décembre 2007, une stratégie sur le développement durable a été adoptée. Et je vous rappelle que cette loi vise à mettre en place un cadre de gouvernance renouvelé dans l'administration publique. Donc, c'est une loi qui est adoptée dans la foulée, si on peut dire, de la Loi de l'administration publique, qui a été adoptée en l'an 2000.
Au cours de l'année budgétaire qui se termine, l'équipe que je dirige a effectué trois vérifications et un suivi de vérification qui avait été fait en 2005. J'ai également, comme commissaire, l'opportunité de vous présenter mes observations et mes recommandations générales sur l'implantation du développement durable au Québec. C'est ce qu'on appelle chez nous, dans notre jargon, le chapitre I. Je vais terminer avec le chapitre I. Je commence avec le chapitre II parce que le chapitre I, ni plus ni moins, est une conclusion par rapport aux travaux qu'on a faits.
Alors, le chapitre II, le premier chapitre que je vous présente, traite de la question de l'enjeu des changements démographiques. Au Québec, vous avez entendu parler fréquemment de la démographie, l'hiver dernier, l'automne dernier, particulièrement en relation avec les questions budgétaires. Alors, vous savez très bien que le développement durable entraîne des modifications de gouvernance à l'Administration. Et la façon dont notre société répondra aux différents enjeux économiques, sociaux, environnementaux associés aux changements démographiques façonnera, pour les décennies à venir, le type de société qu'on aura.
Nos travaux concernant les changements démographiques visaient principalement les activités réalisées par le ministère du Conseil exécutif. Nous voulions travailler principalement sur les points suivants: tout d'abord, sur la structure de coordination et sur les objectifs globaux reliés à cet enjeu.
Ce que nous avons constaté dans nos travaux de vérification, c'est qu'une structure de coordination qui permettrait de gérer efficacement les changements démographiques au sein de l'appareil administratif n'avait pas été instaurée. Ainsi, aucun responsable du dossier n'avait été désigné. On note également l'absence d'objectifs de portée horizontale compris et partagés par les différents ministères et organismes qui s'occupent des questions reliées aux changements démographiques dans l'administration publique.
Nous avons également fait des travaux concernant le soutien à la prise de décision. Les mécanismes qui sont mis en place au ministère du Conseil exécutif, d'après nous et d'après nos travaux, sont insuffisants pour faire une évaluation complète des risques et des possibilités associées aux changements démographiques. De même, les travaux du ministère ne permettent pas de faire une bonne évaluation de l'efficacité des actions accomplies par les ministères et organismes impliqués dans les questions reliées aux changements démographiques.
Nous avons aussi constaté que la synthèse à évaluer... effectuée par le ministère du Conseil exécutif concernant les changements démographiques n'ont pas été produites en temps opportun, c'est-à-dire que, lorsque des décisions importantes devaient être prises, les synthèses n'étaient pas disponibles pour les décideurs. Donc, il y a une question qui nous a tracassé sur ce point de vue. On a également regardé d'autres mécanismes de cohérence qui avaient été mis en place.
Enfin, le ministère, à ce sujet, ce qu'on a constaté... on a constaté que le ministère ne profitait pas pleinement des mécanismes et des outils à sa disposition pour favoriser la cohérence de l'action gouvernementale en matière de changements démographiques.
La deuxième vérification sur laquelle on s'est penché au cours de l'année qui vient de se terminer concerne le sujet de la biodiversité. Vous savez très bien que la biodiversité est un élément clé du développement durable. Alors, nos travaux ont porté plus particulièrement sur les stratégies élaborées depuis 1996 afin de mettre en oeuvre la convention sur la biodiversité au Québec. Nos travaux ont principalement été menés auprès du ministère du Développement durable, de l'Environnement et des Parcs et portaient sur les points suivants:
Tout d'abord, sur la question des espèces menacées et des aires protégées. En 2009, nous tenons à le signaler, le gouvernement a atteint son objectif d'augmenter à 8 % du territoire québécois la superficie du réseau d'aires protégées. C'est quand même une performance à souligner. Les travaux visaient à augmenter la... visent maintenant à augmenter la superficie à 12 % pour 2015. Alors, pour nous, ça sera l'occasion de cibler les provinces naturelles, c'est-à-dire les éléments du territoire qui sont sous-représentés.
Le deuxième point sur lequel on s'est attardés concerne la question des stratégies québécoises sur la biodiversité. Alors que deux stratégies sur la diversité biologique ont contribué à la sensibilisation des ministères et des organismes en matière de biodiversité, on a constaté que ces stratégies n'avaient pas véritablement influencé les actions des ministères malgré les interventions gouvernementales... les intentions gouvernementales à cet effet. Par ailleurs, nous avons noté plusieurs lacunes quant à la suffisance et la fiabilité des informations inscrites dans les rapports annuels, de même que des problèmes concernant les délais de publication de ces rapports. À notre avis, il revenait au MDDEP de se doter de moyens nécessaires afin d'influencer les acteurs quant aux actions à poser en matière de biodiversité. Les résultats sont plutôt limités à ce chapitre. Il est donc important que ce ministère renforce la façon dont il remplit son rôle de coordination à l'égard de la biodiversité dans l'ensemble de l'appareil du gouvernement.
Notre troisième vérification, le chapitre IV dans le tome, traite de l'application du développement durable dans l'ensemble de l'administration publique. Notre vérification a porté sur le processus d'élaboration de la première liste d'indicateurs ainsi que sur les plans d'action de développement durable. Au niveau des indicateurs de développement durable, une première liste a été adoptée, mais, à notre avis, la première liste ne permet pas de faire la relation entre les indicateurs et les principaux enjeux de la société. De même, l'élaboration de la stratégie gouvernementale de développement durable pour la période 2008-2013 et la confection des listes et indicateurs sont des exercices qui n'ont pas été suffisamment arrimés. Je ne suis pas convaincu que ces indicateurs sont les plus appropriés pour apprécier l'évolution de la société au fil des ans.
Un autre point qui a retenu notre attention dans le domaine de l'application de la loi, ce sont les plans d'action de développement durable. Alors, premier point, c'est que, sur une base individuelle, les entités, les ministères ont respecté les exigences gouvernementales quant au contenu de leur plan d'action. Cependant, nous nous interrogeons sur la valeur ajoutée de l'ensemble des plans d'action pour la mise en oeuvre de la stratégie gouvernementale. Par ailleurs, les principaux points d'amélioration notés portent sur la capacité des entités à définir des objectifs et des actions sur la base d'une analyse préalable et documentée dans la stratégie gouvernementale, de même que sur leur capacité à prendre compte des principes du développement durable dans leurs principales activités.
Le dernier chapitre, c'est un suivi de vérification qui avait été fait en 2005. C'est le chapitre V du tome. C'est un suivi de vérification de l'optimisation des ressources menée en 2004-2005 qui porte sur les services d'eau et la pérennité des ressources. Alors, nous avons fait le suivi de sept recommandations qui avaient été formulées au ministère des Affaires municipales, des Régions et de l'Occupation du territoire. Alors, à notre avis, des progrès satisfaisants ont été réalisés pour cinq des recommandations, cinq sur sept, alors que deux autres recommandations... des actions demeurent à accomplir afin d'établir les indicateurs clés qui vont permettre d'apprécier la qualité de la gestion municipale des infrastructures liées à l'eau et, pour préciser, dans un plan d'action, les priorités, les indicateurs, les échéances et les ressources par rapport aux engagements de la Politique nationale de l'eau dont le ministère est responsable. Enfin, le chapitre I, le chapitre dont je vous mentionnais plus tôt qui sert à... me donne l'opportunité de présenter des conclusions ou des recommandations au gouvernement par rapport à la mise en oeuvre du développement durable. Ça me permet de faire les observations suivantes.
Alors, mon équipe a assisté des entités gouvernementales dans la mise en place des exigences de la Loi sur le développement durable. Ces travaux ont permis de constater que les entités sont disposées à s'engager sérieusement dans une démarche de développement durable lorsque des atteintes claires leur sont signifiées. Plusieurs bonnes pratiques ont été observées dans les organisations. Celles-ci vont de la détermination des priorités à la mise en place de mécanismes de suivi et de reddition de comptes, en passant par le développement d'une culture organisationnelle qui favorise la reconnaissance des initiatives du personnel dans le domaine du développement durable.
D'un autre côté, les entités ont des difficultés par rapport à la modification de leur cadre de gestion afin de tendre à un développement plus durable. Par exemple, les activités habituelles ou traditionnelles des ministères guident encore le contenu des stratégies et des plans d'action y afférents, alors qu'un changement de direction et de mode de gestion nécessite plutôt l'inverse. L'un des défis de l'administration québécoise dans la mise en oeuvre du développement durable est l'adoption d'une démarche de gestion horizontale impliquant plus d'un ministère ou un organisme. Une meilleure coordination interministérielle est incontournable pour toute Administration qui fait face à des enjeux aussi vastes et complexes que les changements démographiques, le maintien de la biodiversité ou les changements climatiques.
À mon avis, la Suède fournit un modèle intéressant d'intégration du développement durable dans les différents niveaux de son Administration. Sa situation actuelle indique qu'il est possible de mettre en oeuvre des structures en place pour concrétiser une démarche du développement durable tout en développant une économie vigoureuse au bénéfice de la population et des générations à venir.
Je termine en vous rappelant que le cadre de gestion de développement durable adopté par le gouvernement en 2006 mérite une attention particulière et un effort soutenu de tous les acteurs de l'appareil gouvernemental et de la société afin de pouvoir contribuer au bénéfice de notre société.
Je vous remercie de votre attention et je suis maintenant disponible pour répondre à vos questions.
Le Modérateur (M. Pierre Duchesne): Alors, première question, Alexandre Robillard, Presse canadienne.
M. Robillard (Alexandre): Donc, globalement, est-ce que le gouvernement fait assez d'efforts pour faire preuve de cohérence dans ses intentions... dans sa stratégie de mise en oeuvre de... sa stratégie de développement durable?
M. Cinq-Mars (Jean): Il y a des grands efforts qui ont été faits. On a noté des efforts au niveau de l'élaboration de la liste des indicateurs. On a également souligné que 150 ministères et organismes ont préparé des plans d'action sur le développement durable. C'est une première étape. Ils devaient les préparer en 2009, ça a été fait. Donc, également, c'est une performance à souligner.
Mais c'est un défi ambitieux de mettre en place une gouvernance basée sur le développement durable. Il reste encore beaucoup d'efforts à faire pour perfectionner la démarche. Et on appuiera certainement le gouvernement à cet effet.
M. Robillard (Alexandre): Et vous êtes quand même assez sévères, là, sur le choix des indicateurs. Quand on lit que les indicateurs ne semblent pas vraiment avoir de lien avec la stratégie, ça veut dire que le gouvernement n'a pas les moyens de s'assurer qu'il met les bonnes politiques en oeuvre, finalement? C'est...
M. Cinq-Mars (Jean): Bien, le choix d'indicateurs, c'est un exercice qui est fort complexe. Parfois, des Administrations adoptent des indicateurs qui sont testés, et puis, par après, on revient pour modifier ou améliorer les indicateurs. Nous, notre opinion, c'est que les indicateurs actuels ne sont pas les indicateurs qui vous nous donner une meilleure information sur les progrès qu'on fait par rapport à la mise en oeuvre du développement durable. Alors, il y a un exercice de perfection d'indicateurs qui est à continuer, mais il y a quand même un effort qui se fait actuellement au sein du gouvernement, puis on ose espérer que ça donnera des résultats positifs.
M. Robillard (Alexandre): ...plus concrètement, là, compte tenu de vos observations puis de vos connaissances aussi, quand vous observez, par exemple, que le gouvernement fait la promotion active de l'exportation d'un produit cancérigène, comme l'amiante, dans des pays en développement, où il n'y a pas vraiment de moyens de garantir que c'est utilisé de façon sécuritaire, est-ce que ça, ça vous apparaît comme cohérent avec la stratégie de développement durable du gouvernement?
M. Cinq-Mars (Jean): C'est une bonne question, mais ce n'est pas un dossier sur lequel on s'est penchés. Et on n'a pas analysé cette question actuellement. Donc, je ne suis pas en mesure de vous répondre.
M. Robillard (Alexandre): C'est-u quelque chose qui vous intéresserait d'examiner éventuellement ou...
M. Cinq-Mars (Jean): Peut-être éventuellement, mais il y a certainement une panoplie de sujets fort intéressants dans le domaine du développement durable. Alors, je ne peux pas vous garantir que ce sera une de nos priorités.
Le Modérateur (M. Pierre Duchesne): Je me permettrais, sur le même sujet, de façon plus claire: Est-ce que vous pourriez évaluer, dans le cadre de gestion, là, de la Loi sur le développement durable, si la politique d'utilisation maximale et sécuritaire de l'amiante convient à ce cadre de gestion? Parce qu'il y a de plus en plus de questions qui sont soulevées là-dessus.
M. Cinq-Mars (Jean):Bien, c'est certain qu'il y a des avantages économiques, des avantages sociaux à utiliser les ressources qu'on a sur notre territoire, mais il y a quand même une loi avec 16 principes qu'il faut tenir en compte lorsqu'on fait ces évaluations. Et, lorsqu'on fait une évaluation sur l'utilisation d'une ressource, c'est une analyse qui est quand même assez complexe. Il y a une analyse sociale, économique et environnementale à faire. Alors, comme je vous disais, c'est une question qui mériterait probablement d'être étudiée éventuellement, mais pour le moment on n'a pas fait d'étude. Donc, je n'ose pas me prononcer sur quelque chose d'aussi complexe avec le peu d'analyses qu'on a fait là-dessus.
Le Modérateur (M. Pierre Duchesne): Alors, question suivante, Mathieu Boivin, Rue Frontenac.
M. Boivin (Mathieu): Je m'en voudrais de vous amener sur un dossier que vous n'avez pas étudié, alors je vais plutôt à m'adresser à M. Lachance. Il y a à peu près un an, vous déposiez un rapport pour souligner que, dans l'industrie minière, il y avait des problèmes importants, notamment au niveau de l'environnement et au niveau des redevances. Depuis un an, le gouvernement a agi en déposant un projet de loi qui vient resserrer de certaines façons les garanties environnementales et, dans le dernier budget, augmenter les redevances. M. Lachance, est-ce que c'est des mesures qui répondent de façon satisfaisante aux préoccupations que vous émettiez il y a un an?
M. Lachance (Renaud): Dans ce rapport-là, il y avait plusieurs recommandations, et on voit des gestes concrets qui sont posés par le gouvernement. Il est dans nos pratiques de faire le suivi de nos recommandations deux à trois ans après le dépôt du rapport. Donc, on n'a pas commencé ce suivi. Éventuellement, on fera le suivi des recommandations puis on aura, là, à ce moment-là, l'occasion d'évaluer les gestes posés par le gouvernement. Mais, à l'heure actuelle, on n'a pas commencé les suivis des recommandations.
M. Boivin (Mathieu): Dans un autre ordre d'idées, vous avez probablement suivi le débat politique des dernières semaines par lequel le parti d'opposition, le PQ, demande que vous vous attaquiez de près au système d'octroi de places en garderie. Je sais que vous avez un pouvoir d'initiative. Est-ce que c'est un pouvoir d'initiative que vous avez l'intention d'exercer dans ce dossier précis là?
M. Lachance (Renaud): J'ai fait parvenir, il y a deux semaines, une lettre au ministère, une lettre qui est un procédé habituel, annonçant que nous allons faire les travaux habituels d'analyse de potentiel de vérification. Donc, j'ai envoyé cette lettre pour deux raisons. La première raison, c'est que c'est un ministère au budget important, plus de 2 milliards de dollars, et ça fait plus de 10 ans qu'on n'a pas conduit de vérification dans leur ministère. Donc, c'est à travers nos stratégies habituelles que cette lettre-là est parvenue au ministère il y a environ deux semaines.
M. Boivin (Mathieu): Est-ce que c'est une lettre qui aurait été soumise de la même façon si le sujet ne s'était pas révélé politiquement chaud dans les dernières semaines?
M. Lachance (Renaud): Exactement, oui. C'est nos procédés habituels, c'est le même type de lettre, c'est une lettre qui annonce que nous avons l'intention de faire des travaux préliminaires pour évaluer s'il y a un potentiel de vérification et qu'est-ce qu'on va vérifier précisément si on décide d'en faire une.
M. Boivin (Mathieu): Sur le processus d'octroi de places?
M. Lachance (Renaud): Non. Sur tout le ministère. C'est vraiment tout le programme au complet. Donc, il n'y a pas de... C'est vraiment, là, la démarche habituelle que l'on fait dans tous les ministères. Lorsqu'on va dans un ministère, on envoie une lettre annonçant les travaux préliminaires. Dans cette lettre-là, on regarde l'ensemble des activités. Donc, dans ce ministère, il y a d'autres activités. Après l'examen préliminaire, si on juge qu'il y a des projets de vérification, ces projets seront analysés, puis ensuite la décision est prise de les lancer ou non. C'est des procédures vraiment standard.
Le Modérateur (M. Pierre Duchesne): Je vais me permettre une question. Je vais vous demander de vous adresser à l'auditoire toujours, d'éviter de me regarder, pour des raisons médiatiques, là.
Compte tenu des allégations qui portent sur toute la question de l'octroi de places en garderie, est-ce qu'il serait juste de penser qu'il semble assez inévitable, si vous allez fouiller dans ce ministère-là, de ne pas aller voir dans ce champ-là, de ne pas poser de regard sur cet aspect des choses?
M. Lachance (Renaud): Je ne pourrais pas vous répondre. On est en... la démarche où on fait seulement, il y a deux semaines, envoyer une lettre disant que nous allons entrer en contact avec eux prochainement pour entreprendre les travaux habituels, qui s'appellent les travaux d'analyse préliminaire.
Donc, on va regarder l'ensemble des activités du ministère et puis voir si un projet de vérification est nécessaire. Et c'est uniquement après que ces travaux aient été terminés qu'on voit si on en fait une vérification - on peut ne pas en faire - puis, après ça, quelle genre de vérification que l'on fait et sur quoi.
Le Modérateur (M. Pierre Duchesne): Prochaine question. Monsieur derrière, pouvez-vous vous présenter et nous dire pour quel média?
M. Cliche (Jean-François): Jean-François Cliche, journal Le Soleil. Au sujet du chapitre III sur la biodiversité, en particulier l'absence que vous reprochez au gouvernement de portrait de la biodiversité qui donnerait un but, un but à atteindre, qui est une vision d'ensemble. Mais pourtant, sur cette absence-là, il y a toutes sortes d'inventaires qui ont été faits dans à peu près tous les écosystèmes possibles et imaginables au Québec. On a un atlas de la biodiversité. Il y a deux listes, même, d'espèces vulnérables et/ou menacées. Quel genre d'inventaire, quel genre de portrait que ça prendrait, à votre avis, là, qu'on n'a pas encore, pour avoir un meilleur but, là?
M. Cinq-Mars (Jean): Bien, tout d'abord, il y a une grande différence entre l'information et la connaissance. On peut avoir des atlas, on peut avoir des inventaires, des données d'inventaires, mais avant d'avoir vraiment un portrait de la biodiversité, une connaissance sur la biodiversité, il faut mettre en relation différentes données. Il faut mettre également les pressions qui sont occasionnées par le développement économique ou social, par exemple, sur la biodiversité pour pouvoir déterminer quel est l'état, vraiment, de la biodiversité, quelles sont les menaces de la biodiversité et quelles sont les mesures les plus appropriées qu'on devrait prendre.
Alors, on a beaucoup d'inventaires, on a beaucoup de données. Mais une analyse qui prend en compte, finalement, les éléments de stress sur la biodiversité, les facteurs limitants, ça n'a pas été fait. Alors, c'est finalement une lacune, à notre avis, importante puisque, si on développe une stratégie, la stratégie doit tenir compte d'un portrait précis de la biodiversité, de façon à ce qu'on puisse choisir les outils qui vont nous donner des meilleurs résultats avec les meilleurs retours sur nos investissements.
M. Cliche (Jean-François): Dans le même chapitre, il est question d'informations dans des rapports annuels sur la biodiversité, informations qui ne sont pas fiables. Pouvez-vous me donner des exemples?
M. Cinq-Mars (Jean): Bien, c'est que les rapports qu'on a consultés... on trouvait que les rapports finalement contenaient peu d'informations et contenaient souvent des données qui étaient plus ou moins précises. Ce qu'on a également reproché, c'est que les rapports ont été faits de façon très tardive. Par exemple, on avait noté que le premier rapport avait été produit 24 mois après la période requise, le deuxième rapport a été publié 30 mois après et, le troisième rapport, on a su que le rapport ne serait pas publié. Donc, à notre avis, ça prend des données, ça prend de l'information en temps opportun pour pouvoir guider les décideurs. Alors, en l'absence d'un portrait précis, en l'absence également de la disponibilité d'un rapport en temps opportun, on estime que les décideurs ne sont pas tellement bien équipés pour vraiment assurer la conservation de la biodiversité.
M. Cliche (Jean-François): Dernière question. Est-ce qu'on peut résumer, entre guillemets, ou de façon extrêmement, extrêmement, extrêmement succincte votre rapport en disant que, sur le développement durable, le MDDEP prêche un peu dans le désert, au sens où les autres ministères puis les organismes gouvernementaux ne l'écoutent pas vraiment?
M. Cinq-Mars (Jean): Je n'irais pas dire que les autres ministères ne l'écoutent pas vraiment. Je dirais que, finalement, au niveau du développement durable, c'est un objectif qui est très ambitieux. Les ministères ont commencé à travailler. La preuve, c'est que 150 ministères et organismes ont déposé leurs plans d'action. C'est quand même quelque chose de remarquable. On a une liste d'indicateurs qui est perfectible, comme je l'ai mentionné plus tôt, mais il reste quand même un rôle plus important de coordination, de leadership assumé par le ministère auprès de ses collègues.
Le Modérateur (M. Pierre Duchesne): Antoine Robitaille, Le Devoir.
M. Robitaille (Antoine): Le budget du Commissaire au développement durable, quel est-il?
M. Cinq-Mars (Jean): On a une vingtaine d'années-personnes sur un budget d'environ 2 millions de dollars.
Le Modérateur (M. Pierre Duchesne): Questions en anglais maintenant.
M. Boivin (Mathieu): Une dernière?
Le Modérateur (M. Pierre Duchesne): Oui, pardon, Mathieu Boivin.
M. Boivin (Mathieu): Je regarde dans votre... le cinquième chapitre, le suivi de la vérification de l'optimisation des ressources d'eau. Est-ce que la population devrait s'inquiéter de la qualité de l'eau?
M. Cinq-Mars (Jean): Non. Je crois qu'on a quand même une qualité d'eau acceptable. La vérification ne portait pas là-dessus.
M. Boivin (Mathieu): C'est acceptable?
M. Cinq-Mars (Jean): Bien, c'est une bonne qualité d'eau. Mais notre vérification n'a pas porté sur l'analyse de la qualité de l'eau. Il y a d'autres ministères, le ministère et les organismes de santé publique, qui s'occupent de ça, alors, c'est à eux vraiment à poser des questions.
M. Boivin (Mathieu): Et poser des questions sur la qualité de l'eau à d'autres entités que la vôtre?
M. Cinq-Mars (Jean): Notre vérification n'a pas touché la question de la qualité de l'eau. Comme je vous dis, on a fait un suivi sur les recommandations qu'on a faites en 2005, et cette question devrait plutôt être adressée au ministère de la santé publique.
M. Robillard (Alexandre): Maintenant, vous avez dit: Il y a plusieurs plans d'action d'organismes, tout ça, puis, dans votre rapport, vous dites qu'il n'y a pas nécessairement une valeur ajoutée à la multiplication de ces plans-là. Est-ce que... je ne sais, pas, mais on dirait que ça manque de cohérence, là, que votre constat, ce qui se dégage de votre constat, c'est que la politique gouvernementale s'applique de manière incohérente.
M. Cinq-Mars (Jean): La politique ne s'applique pas de manière incohérente. C'est qu'il y a 150 plans qui ont été faits par les ministères et organismes actuellement, avec quand même des... sur une base d'utilisation de guides qui ont été développés par le ministère du Développement durable, de l'Environnement. Mais il faut penser que finalement c'est la première version des plans. Donc, ce n'est pas surprenant qu'on dénote finalement une certaine incohérence ou bien qu'il n'y a pas finalement une synergie optimale entre tous les plans. C'est un travail qui est perfectible. Je pense qu'avec le temps la cohérence et la synergie entre les plans vont s'améliorer. On est quand même aux premières étapes de la mise en place d'un développement durable et des plans d'action au Québec. Alors, je pense qu'il faut quand même laisser la chance au système. Alors, nos observations et nos recommandations visent à améliorer la mise en place d'un système efficace en termes de développement durable. C'est comme ça que je pense qu'il faut interpréter nos recommandations.
Le Modérateur (M. Pierre Duchesne): Bon. Maintenant, les questions en anglais. Tim Duboyce, CBC.
M. Duboyce (Tim): M. Cinq-Mars, vous êtes à l'aise pour répondre à une couple de questions en anglais? Parfait.
I think, for the average person, this is going to seem like a mountain of sort of bureaucratic structural, you know, stuff. What insure... When you talk about the 150 Government departments and agencies with their plans that aren't necessarily being implemented, what does that mean? What are they not doing that you would like to see them doing?
M. Cinq-Mars (Jean): Well, the plans are there. I think, you have to recognize the effort, you have to recognize that they made a very good contribution. You have also to recognize that they're still learning as they're going. I think that the next versions of plans will be probably much better.
I think that what's missing at the moment is that some plans are not fully integrating the 16 principles of the Act. Some plans forgot or ignored certain objectives. Some organizations have not totally integrated the principles in their operation. I mean, departments and organizations have been going on or conducting their own business for decades, for example. So, when you come in with a new philosophy or a new management approach such as the one underpinned by sustainable development, you have to recognize that this is going to take time before organizations fully implement the philosophies in their actions. So, some actions are still going on, although we have a strategy. So, I think that's the message, I think it's going to take some time. There's been a good effort but there are still some shortcomings in the implementation of sustainable development.
M. Duboyce (Tim): Like what? What are some other things that...
M. Cinq-Mars (Jean): Well, for example, some objectives are not extremely precise, for example. The accountability or the reporting is not fully implemented. People report on certain activities or people continue to manage activities in a way to produce, for example, report as opposed to really examine what is the impact of their actions on the ground. So, I think that there is a mentality to change. People have to recognize that sustainable development is a new approach of management. And I think it's going to happen but it's going to take a little while for people to learn all the ins and outs of sustainable development.
M. Duboyce (Tim): Forgive me for pushing the point, I mean, are people in these ministries and departments, you know, continuing to photocopy too much and use too much paper? Are they using fleet vehicles in ways that aren't necessary? I mean, I'm looking for something concrete to kind of illustrate what you're talking about.
M. Cinq-Mars (Jean): We haven't examined the quantity of paper or the mileage in each department. But I think that sustainable development at the moment is aiming more at the strategic level, ensuring that new laws or new programs that are being developed include the... follow the principles of sustainable development. And, eventually, it's going to translate in all kinds of activities. And, we know for sure that, in many, many departments... people recycling paper, double-sided photocopying, people turning off their computers at night. There are all kinds of activities going on. Some of them are really remarkable, so... And we have conducted an analysis in six organizations, ministries and organizations, and they have done some very good work. I mean, they're not achieving... on everything, but they are certainly moving in the right direction and I think that some of those departments are doing very concrete things in supporting sustainable development.
M. Duboyce (Tim): Lastly, just to finish, can you then... you brought up Sweden as sort of the example to hold up as a success story. What has the Public Administration in Sweden done that, so far, here, we have not done?
M. Cinq-Mars (Jean): Well, I used Sweden because Sweden is a Nordic country, Québec is a northern territory. Population is very similar. The structure of the economy is very similar as well. And I used it because they have implemented sustainable development in 2002, they enacted the Act in 2002. They had developed, prior to this, 16 very ambitious environmental objectives. So, it was already in their mentality to achieve an environmental state of conservation.
And one of the principles on pinning the strategy over there is that the country wants to resolve all the major environmental problems for the next generations. So, they're giving themselves about 15 years to solve all these major issues. And they have implemented sustainable development in a way that... not only at the national level, but it's really across the first levels of Government. So, you'll find it at the townships level but also at the municipal level as well. So, it has really cut across the different levels of the Administration. So, I think, that's one of the major points. And also they have developed means of managing programs on horizontal basis that is quite effective.
Le Modérateur (M. Pierre Duchesne): Merci, messieurs. La période... la conférence de presse est terminée.
(Fin à 11 h 45)