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Point de presse de Mme Sonia LeBel, ministre responsable des Relations canadiennes et de la Francophonie canadienne

Version finale

Le mardi 26 février 2019, 11 h 45

Hall principal de l'hôtel du Parlement, hôtel du Parlement

(Onze heures quarante-six minutes)

Mme LeBel : Alors, merci beaucoup. Merci, tout le monde, d'être présents. Donc, maintenant, c'est à titre de ministre responsable du Secrétariat à l'accès à l'information et à la réforme des institutions que je vous adresse la parole, et je suis heureuse d'annoncer une entente de financement avec le Mouvement pour une démocratie nouvelle, communément appelé le MDN, qui s'inscrit naturellement dans la volonté du gouvernement d'améliorer la démocratie québécoise.

Vous le savez, l'instauration d'un mode de scrutin mixte compensatoire régional, il faut bien le dire, est l'un des principaux engagements du gouvernement. C'est un engagement qu'avait pris notre gouvernement avant les dernières élections, conjointement, entre autres, avec le Parti québécois, Québec solidaire et le Parti vert du Québec. Nous entendons aller de l'avant avec cette réforme et présenter un projet de loi avant le 1er octobre 2019, tel qu'on s'est engagés de le faire. En ce sens, nous sommes à l'écoute des Québécois et des Québécoises qui souhaitent un changement de culture politique, moins de partisanerie et plus de collaboration. La réforme du mode de scrutin est un effort en ce sens.

Le nouveau mode de scrutin que nous souhaitons mettre de l'avant saura mieux refléter le vote exprimé tout en préservant la représentation des régions et en tenant compte de la stabilité des futurs gouvernements. Nous nous assurerons également qu'il tient compte des principes que sont notamment la proportionnalité des voix, le pluralisme politique et la proximité des élus.

Dans les derniers mois, nous avons rencontré de nombreux acteurs de la société civile ainsi que les partis d'opposition pour discuter de leurs attentes. Lors de ces rencontres, de nombreux acteurs nous ont fait part du rôle important qu'a joué le MDN dans leurs démarches visant la réforme du mode de scrutin. Même si nous constatons qu'un consensus se dessine autour de la nécessité de réformer nos institutions politiques, nous cherchons tout de même à construire le plus large consensus possible.

Ceci dit, un vaste consensus requiert des efforts d'information et d'éducation auprès de la population et des acteurs civils de la société. Le Mouvement pour une démocratie nouvelle a d'ailleurs joué un rôle important qui date de plusieurs années et qui nous a menés jusqu'ici aujourd'hui. Au cours des 20 dernières années, le MDN a développé une expertise en matière de mode de scrutin. Il possède une grande expérience pour rendre accessibles au public les effets des différents modes de scrutin. Pour notre gouvernement, il est important de pouvoir compter sur des partenaires compétents et crédibles pour contribuer à la réforme de ce mode de scrutin. Nous sommes donc heureux de pouvoir compter sur la participation du MDN.

Je suis donc fière d'annoncer un appui financier du gouvernement à la hauteur de 225 000 $ pour deux ans, qui servira à mieux outiller le MDN afin qu'il poursuive son travail d'éducation auprès de la population et des acteurs de la société civile. Cette campagne du MDN aura pour objectif de mieux faire comprendre les différentes modalités du mode de scrutin envisagé ainsi que les tenants et aboutissants de la réforme. Elle permettra aux citoyennes et aux citoyens de se faire une idée plus claire de la réforme proposée.

Le MDN est un organisme qui a fait ses preuves. À notre sens, c'est le meilleur acteur pour informer la population sur le nouveau mode de scrutin. Il participe activement, depuis maintenant une vingtaine d'années, au débat public sur ce sujet. Avec cette annonce, notre gouvernement met de l'avant des mesures afin d'engager les citoyens et les citoyennes dans la réforme du mode de scrutin. Je suis convaincue que cette participation active du MDN contribuera à la réussite du projet de réforme.

Sur une dernière note, je me réjouis également de collaborer de manière constructive avec mes collègues parlementaires et tous les acteurs de la société civile qui sont concernés. Je souhaite au MDN le meilleur des succès dans l'accomplissement de cette réforme, et je vous passe maintenant la parole.

M. Charbonneau (Jean-Pierre) : Bien, merci beaucoup, Mme la ministre. Vous avez remarqué que je suis accompagné d'une autre vétérante de l'Assemblée nationale, jeune fille ici, à mes côtés, Françoise David, qui est vice-présidente du Mouvement démocratie nouvelle. Alors, tous les deux, on est au conseil d'administration depuis deux ans, mais on a travaillé... moi, disons, d'une façon un peu particulière, comme ancien ministre au dossier, et puis comme étant le premier à avoir financé le MDN, jadis, quand j'étais président de l'Assemblée nationale.

Et, pour ceux qui se disent : Qu'est-ce que c'est, le 20 ans? C'est qu'en 1998 il y a eu une élection où le parti auquel j'appartenais a pris le pouvoir avec moins d'appuis populaires que l'autre parti et qui a formé finalement, malgré ça, le gouvernement de façon très majoritaire. Et, à partir de ce moment-là, pour la première fois dans l'histoire, parce que le dossier de la réforme du mode de scrutin date de 1900, mais, pour la première fois, un groupe de citoyennes et de citoyens se sont mobilisés, organisés pour faire en sorte que, maintenant, à l'agenda politique, ça devienne un élément majeur. Ça a pris beaucoup de temps, mais finalement on est arrivés à une étape où non seulement des parties ont accepté de s'asseoir ensemble, ce qui n'a pas toujours été le cas, mais éventuellement de signer une entente et de s'engager électoralement dans le même sens avec la même proposition de base, c'est ce dont la ministre faisait allusion il y a quelques instants.

Ce qu'on entend faire avec les fonds qui nous sont accordés, c'est essentiellement deux choses, comme la ministre le dit, d'abord, de continuer de faire ce qu'on fait depuis un certain nombre d'années, et particulièrement depuis 2016, c'est-à-dire des facilitateurs avec les partis politiques et les acteurs politiques dans ce dossier-là pour faire en sorte que le dialogue se poursuive, que la collaboration s'intensifie et que le consensus qui est recherché, qui existe déjà... parce que n'oublions pas que 75 % des citoyens, aux dernières élections, ont voté pour des partis qui appuyaient l'entente intervenue dont on a fait allusion. Ça, c'est la première action qu'on va continuer de faire. Et la deuxième, bien, c'est aussi effectivement une action d'éducation, d'information des citoyens, des citoyennes et des organisations de la société civile pour que les gens s'approprient le dossier, le comprennent mieux et l'appuient. Plus les citoyens s'approprieront le dossier de la réforme du mode de scrutin, plus le mode de scrutin sera réformé dans les délais que tout le monde espère. Alors, essentiellement, c'est ce qu'on voudrait vous dire aujourd'hui.

Alors, ce matin, on nous a présentés comme un groupe de pression. Oui, on est un groupe de pression, dans le sens où ça fait 20 ans qu'on fait des pressions pour que la classe politique au Québec mette ça à son agenda, et je crois que nos pressions ont eu gain de cause. Maintenant, le travail n'est pas terminé, on voit poindre la lumière au bout du tunnel. On n'est pas naïfs, personne, et on sait encore qu'il y a beaucoup de travail, beaucoup de résistance et beaucoup de récifs devant nous, mais on est confiants, on est confiants que le gouvernement a confié le dossier à une ministre senior, une ministre qui a une approche consensuelle, qui a déjà fait ses preuves dans un autre dossier, qui a ébahi tout le monde, alors, pour nous, c'est des éléments qui, finalement, nous rassurent et nous confortent. Son équipe travaille avec nous, et nous, on a un dialogue constant avec les gens de son équipe autant qu'avec les gens des autres partis politiques.

Alors, essentiellement, ce matin, c'est ce qu'on voulait vous dire, et on est très contents. Pour la première fois depuis 20 ans, on va peut-être pouvoir payer nos factures et faire en sorte qu'on puisse avoir une action à la hauteur du professionnalisme qu'on a réussi à développer uniquement avec de l'action bénévole depuis 20 ans. Merci beaucoup.

La Modératrice : On va passer aux questions sur le sujet du jour.

M. Bélair-Cirino (Marco) : Oui. Une question pour la ministre de la Justice. Le nouveau mode de scrutin que vous proposez sera-t-il en vigueur le 1er octobre 2022?

Mme LeBel : L'objectif est celui-là, hein, si vous regardez... je vais toujours vous ramener à la base de la lettre d'entente qui a été signée par les quatre partis politiques, là, que j'ai mentionnés plus tôt, et l'objectif est de déposer, donc, un projet de loi pour 2019, effectivement. Mais, quand on regarde les attendus de la lettre, l'objectif est de faire la 43e législature, donc... étant dans la 42e, présentement, donc la prochaine législature, sous le nouveau mode de scrutin. C'est un objectif qu'on partage, et on travaille de bonne foi dans ce sens-là. Maintenant, c'est pour cette raison-là, comme vous avez vu, qu'on est en action également avec le DGEQ. Un décret a été passé par le Conseil des ministres pour me permettre d'avoir un dialogue. Le DGEQ étant indépendant, on veut respecter naturellement son indépendance, mais il est important de travailler de concert également avec lui, parce qu'il aura à mettre en place — une fois le projet de loi adopté, je l'espère — il aura à mettre en place les nouvelles modalités et à dessiner une nouvelle carte, donc ça lui prend quand même un certain temps d'action, et on veut s'assurer de lui laisser l'espace nécessaire pour travailler. Mais c'est l'objectif que l'on vise, effectivement.

M. Bélair-Cirino (Marco) : Plusieurs ne voient pas, dans ce projet de loi là, un projet de loi comme les autres. M. Legault a laissé entendre que l'adoption par, à la fois la Coalition avenir Québec, le Parti québécois et Québec solidaire, serait suffisante pour mettre en place un nouveau mode de scrutin. Vous nous parlez aujourd'hui de la nécessité ou du souhait que vous avez que ce nouveau mode de scrutin là bénéficie d'un vaste consensus. Vous, quel est, dans le fond, le seuil minimal d'adhésion à ce nouveau mode de scrutin là, pour qu'il voie le jour et qu'il ait une certaine légitimité?

Mme LeBel : Bon, vous avez bien fait de faire la distinction entre la nécessité et le souhait que je recherche. C'est sûr que, plus on aura un vaste consensus, mieux ça va aller pour la société, parce que c'est quand même une transformation de nos façons de faire pour les prochaines années, un nouveau paradigme de politique au Québec vers lequel on se dirige. Mais je pense que, présentement, nous bénéficions du consensus nécessaire pour aller de l'avant, surtout avec l'adhésion de deux partis politiques. Avec le gouvernement, la CAQ, je pense que ça nous fait autour de 95 députés. Donc, je pense qu'on a présentement le consensus nécessaire pour aller de l'avant et être légitimés dans notre démarche.

Maintenant, ça ne veut pas dire qu'il faut s'abriter de ça, s'enrober de ça et ne pas essayer de voir avec les acteurs de la société civile. On a rencontré d'ailleurs plusieurs groupes. On a vu, je pense, qu'il y a une lettre ouverte qui a été signée par quelques syndicats ce matin qui nous donnaient un certain appui. Ils mentionnaient, dans la lettre — donc, c'est pour cette raison-là que je me permets de le mentionner — qu'on avait eu effectivement une rencontre constructive. Donc, on rencontre les gens, on fait nos devoirs, on essaie de rallier le plus de gens possible, on essaie de comprendre aussi quelles sont les craintes, quelles sont les incertitudes, les zones grises. Souvent, c'est une question d'incompréhension de ce vers quoi on s'en va.

Donc, je souhaite le plus large consensus possible, mais je crois que nous avons le consensus nécessaire, au moment où on se parle, pour avancer.

La Modératrice : Juste vous présenter pour le bénéfice de tous.

M. Bergeron (Patrice) : Patrice Bergeron, LaPresse canadienne. Bonjour à vous tous. Je pense qu'on voit l'éléphant dans la pièce, là, actuellement. Il y a un enjeu, c'est la position de l'opposition officielle, qui avait manifesté son opposition assez catégorique et claire. Est-ce qu'il y a des pourparlers qui se poursuivent avec l'opposition officielle? Est-ce qu'il y a des contacts? Est-ce qu'il y a des... Est-ce que vous remarquez, par exemple, que la position a pu évoluer depuis?

Mme LeBel : Bien qu'il ne soit pas de façon officielle en accord avec le projet de loi, nous, la porte est toujours ouverte, les canaux de communication sont toujours présents. J'ai rencontré le leader de l'opposition officielle pour en discuter. On est toujours prêts. On leur a dit que, s'ils avaient des questions, on leur donne le plus d'information possible. Donc, oui, les canaux de communication sont toujours ouverts. Maintenant, je ne suis pas tributaire de leur position, je vais les laisser faire leurs devoirs et faire ce qu'ils ont à faire. Mais, ceci étant dit, il n'y a personne qui est exclu de la table, il n'y a personne qui sont exclus des discussions. S'ils le souhaitent, on les rencontre au besoin. Quand ils ont des questions, on leur répond. Donc, ça fait... ils font partie des discussions, mais effectivement leur position officielle présentement est ce qu'elle est. Mais je pense qu'on a le consensus nécessaire pour avancer. Oui, peut-être le MDN...

M. Charbonneau (Jean-Pierre) : Bien, comme vous avez utilisé l'expression «l'opposition officielle», il y a une thèse qui a été développée par certains qui fait que... qui laisse entendre que l'opposition officielle devrait être partie prenante de l'adoption du projet de loi. Et la réplique qu'on a faite, nous, au MDN, c'est que ce n'est pas exact. Et d'ailleurs Louis Massicotte, qui est probablement le plus grand spécialiste au Québec de cette question-là, a fait une démonstration assez éclatante, il y a quelques années, dans un texte. Rappelons-nous une chose : S'il y a un élément majeur dans le système électoral, c'est le droit de vote. Et le droit de vote des femmes, en 1944, a été accordé et voté à l'Assemblée nationale malgré l'opposition de l'opposition officielle de l'époque, qui était l'Union nationale.

Mme David (Françoise) : 1940.

M. Charbonneau (Jean-Pierre) : 1940. Voilà, alors, quelqu'un qui connaît encore mieux le dossier que moi. Donc, évidemment, tout le monde souhaite... Nous, on a des contacts avec les gens du Parti libéral. On a même des membres du MDN sur le conseil d'administration. L'an dernier, il y avait des anciens députés du Parti libéral, comme il y avait aussi... Et on est en contact avec des anciens députés de la CAQ. Il y en a moins, mais on avait Hélène Daneault, entre autres, qui était sur notre conseil. Donc, on a des gens de tous les partis politiques, mais... Et on a eu encore récemment des contacts avec des députés libéraux. Mais, je veux dire, on n'est pas... Tu sais, on essaie de les amener... Et incidemment, peut-être que vous l'ignoriez, mais l'avant-projet de loi... en fait, pas l'avant-projet de loi, mais le texte de l'entente, les grands paramètres de l'entente, quand les gens ont discuté des principes qui sont arrivés à ça, ils se sont rendu compte qu'essentiellement c'était à peu près ce que l'avant-projet de loi du Parti libéral, du gouvernement Charest avait proposé en 2004. Alors, finalement, on reprend la balle au bond.

Et, d'une certaine façon, peut-être que les gens du Parti libéral pourraient reconsidérer le fait qu'en bout de piste... Ils avaient fait une promesse en 2003, ils sont allés jusqu'à faire un avant-projet de loi puis une commission parlementaire, et nous, on poursuit le chemin à partir, non pas de réinventer les boutons à quatre trous, mais à partir du texte même qu'ils ont présenté et qui avait été, à ce moment-là, étudié, et qu'il y a eu une... en fait, un avis positif du Directeur général des élections en 2007.

Mme LeBel : J'aimerais avoir cette mémoire-là.

M. Bergeron (Patrice) : Si vous me permettez une petite complémentaire, Mme LeBel? Donc, on a parlé, donc, que c'était l'objectif du gouvernement de faire adopter le projet de loi. Et on a compris que le gouvernement avait une grande détermination à faire adopter certains de ses projets de loi. Est-ce que vous allez afficher la même détermination à faire adopter ce projet de loi là que, par exemple, d'autres projets de loi, que je ne nommerai pas actuellement, mais donc qui semblent être vraiment déterminants pour vous, là?

Mme LeBel : Il y a beaucoup de «déterminants» puis de «détermination» dans votre phrase. Oui, bien, écoutez, moi, je vais parler de mon projet de loi, si vous voulez, puis je vais parler du mandat qu'on m'a donné, effectivement, et je travaille dans ce sens-là, pour faire adopter. Je pense que, quand on dépose un projet de loi, l'objectif, habituellement, est de le faire adopter. En tout cas, je vais parler pour moi. Donc, oui. Donc, c'est pour cette raison-là qu'on travaille en amont le plus possible, pour avoir un projet de loi qui va avoir un consensus le plus large possible. Puis on pourra voir par la suite, en commission parlementaire, comment on peut l'améliorer. Mais, oui, effectivement, si je dépose un projet de loi, mon objectif est de le faire adopter.

M. Lacroix (Louis) : Bonjour, Mme Lebel, M. Charbonneau, Mme David. Je comprends le consensus, en termes de députés, ici, à l'Assemblée nationale, qui sont dans des formations qui sont plutôt favorables. Est-ce que, pour une réforme aussi importante que le mode de scrutin, qui est la base de la démocratie, est-ce qu'on ne devrait pas aller, par exemple, en référendum une fois que le projet de loi pourrait être adopté? La Colombie-Britannique a opté pour cette option-là considérant justement que c'était suffisamment important. Et l'Île-du-Prince-Édouard également, oui. Est-ce que vous, vous ne pensez pas qu'on devrait soumettre à la population, par voie de référendum, une décision aussi importante?

Mme LeBel : Cette décision-là est suffisamment importante pour qu'on consulte la population. Maintenant, ce n'est pas par le biais d'un référendum, et ce n'est pas l'outil unique pour consulter la population. Puis je pense que, d'entrée de jeu, nous avons écarté l'option du référendum au sens classique du terme.

Maintenant, est-ce qu'on va consulter la population? Oui, et on le fait déjà. On ne le fait pas juste à travers les partis politiques, qui ont quand même des députés sur le terrain, qui ont quand même l'oreille des citoyens, on le fait à travers les syndicats, on le fait à travers l'Union des municipalités du Québec, on le fait à travers les MRC, on le fait à travers... Je pourrais vous nommer la liste des gens qu'on rencontre et qui sont pertinents d'être rencontrés. Donc, on consulte, oui, la population à travers tous ces gens-là qui ont l'écoute et le pouls du terrain.

Maintenant, une fois ceci étant dit, de consulter la population de façon plus large, le MDN est là également pour consulter, éduquer, avoir le pouls du terrain. Donc, oui, c'est suffisamment important pour qu'on consulte la population, mais je ne pense pas et nous ne croyons pas, à ce stade-ci, que le référendum est la façon de consulter la population.

M. Lacroix (Louis) : Est-ce que vous pourriez...

Mme LeBel : Oui. Excusez. Mme David.

Mme David (Françoise) : Juste un petit instant.

M. Lacroix (Louis) : Oui, allez-y, Mme David.

Mme David (Françoise) : J'ajouterais que le MDN a la même position, mais il faut comprendre que... Moi, j'y suis arrivée il y a un an, mais il y a des gens qui y travaillent depuis plusieurs années et qui ont constamment fait du travail avec des groupes terrain, des groupes de la base. Le MDN, bénévolement, a parcouru le Québec, discuté avec des gens, il y a eu des tournées qui ont été organisées. Là, maintenant, avec les moyens dont nous allons disposer, c'est assez unique dans l'histoire du MDN, on va pouvoir construire... bâtir des instruments, se donner des outils. On en a déjà, mais on va multiplier nos outils d'animation, d'éducation, etc. On va utiliser tous les moyens technologiques qui sont à notre disposition, mais on n'exclut pas du tout non plus de repartir dans l'ensemble des régions, de refaire une tournée nationale. On va continuer de rencontrer, en fait, des organismes un peu comme ceux que la ministre a mentionnés, on a rencontré les mêmes et davantage. Donc, il y a tout un travail terrain qui va se faire par le MDN dans les prochains mois, je dirais même dans les prochaines années, donc je ne voudrais pas qu'on sous-estime non plus ce travail-là — je sais que vous ne le sous-estimez pas — et moi, je crois que c'est de cette façon-là que ce consensus, on va le sentir de plus en plus.

Et je rappelle ce que mon collègue a dit tout à l'heure. Il y a d'autres réformes très importantes qui se sont faites au Québec, entre autres, finalement, l'obtention — et il était temps — du droit de vote par les femmes, en 1940, sans qu'il y ait de référendum, et, depuis ce temps-là, il y a eu beaucoup d'autres questions qui ont été discutées à l'Assemblée nationale, adoptées souvent de façon assez consensuelle, je dirais, par les députés, et des questions qui touchaient les Québécois et les Québécoises au coeur, hein, des questions qui venaient toucher les gens, par exemple, dans leurs valeurs. Je pense, entre autres, à l'aide médicale à mourir, je pense au mariage gai, et tout ça, ça s'est fait sans référendum.

Donc, je pense qu'on est des gens très démocratiques, c'est pour ça qu'on veut améliorer le mode de scrutin, en fait, et qu'étant des gens démocratiques on veut vraiment travailler à l'obtention de consensus.

M. Lacroix (Louis) : Dans, entre autres, la proposition que faisait la Colombie-Britannique, il y avait ce qu'on appelle un «way out», dans la proposition de réforme du mode de scrutin, en ce sens qu'eux disaient, par exemple : On pourrait changer le mode de scrutin, adopter la proportionnelle, et si, au bout, par exemple, de deux mandats, on se rend compte que ça ne sert pas la démocratie comme on le pensait, on pourrait revenir en arrière et revenir au mode de scrutin précédent. Est-ce que ça, c'est une possibilité?

Mme LeBel : Bon, naturellement, je ne m'engagerai pas ou je ne m'attacherai pas à une option particulière aujourd'hui parce que justement on est en train de faire des... de discuter, de parler, de voir toutes les options. Donc, je ne veux pas attacher quoi que ce soit, mais on connaît l'option que la Colombie-Britannique a mise de l'avant, on connaît les options qu'il y a eues aussi en Écosse, on connaît les options qu'il y a eues dans d'autres pays...

M. Charbonneau (Jean-Pierre) : En Nouvelle-Zélande.

Mme LeBel : En Nouvelle-Zélande, également. Donc, oui, ça fait partie de tout ce qui est sur la table de discussion, effectivement. Maintenant, est-ce que ça va faire partie du projet de loi? Je ne m'engagerai pas aujourd'hui à le faire, mais est-ce que ça fait partie des options qu'on évalue? Toutes les options sont sur la table.

M. Charbonneau (Jean-Pierre) : Incidemment, en Nouvelle-Zélande, non seulement c'était dans la loi, mais ça a été mis en application, et les citoyens, après quatre élections générales, ont décidé qu'ils maintenaient la réforme.

M. Lecavalier (Charles) : Bonjour. Charles Lecavalier. François Legault, pendant la campagne électorale, a beaucoup placé la CAQ en opposition face aux vieux partis, a dit qu'il fallait mettre fin au cynisme. Mais il y en a eu beaucoup, de promesses sur la réforme du mode de scrutin, puis on sent beaucoup de cynisme, dans la population, les gens disent : Bien, voyons donc, tu sais, ça n'arrivera pas, on a vu ce qui est arrivé, au fédéral, avec Justin Trudeau. Est-ce que vous êtes consciente de ce cynisme-là? Est-ce que vous avez l'impression que vous ne pouvez pas l'échapper, là, celle-là, là?

Mme LeBel : Bien, je suis très consciente de ce cynisme-là. D'ailleurs, l'effet du vote des citoyens dans le mode de scrutin actuel fait partie aussi du cynisme, hein? Pourquoi les gens se désengagent, pourquoi les gens ne vont plus voter? On entend souvent : Bien, c'est parce que ça ne donne rien. Donc, pour moi, ça fait partie de ma façon de combattre le cynisme. Oui, j'en suis consciente. Je suis consciente de ce fait-là, mais j'avance, moi, avec le mandat qu'on m'a donné puis avec une intention sincère d'aller jusqu'au bout.

M. Lecavalier (Charles) : Il y a un argument, qu'on entend souvent qui dit que les députés ne vont jamais voter pour une réforme qui risque de leur faire perdre leur travail, parce que, bon, il y a des circonscriptions qui vont disparaître. Est-ce que, ça, est-ce que vous en entendez parler? Est-ce que vos collègues, là, dans le caucus, est-ce qu'il y a des gens qui sont inquiets de ça, de changer le mode de scrutin, et de risquer de perdre son emploi?

Mme LeBel : Bien, cette inquiétude-là est partagée également par les citoyens hein? Le lien avec le député, l'identité que les citoyens ont, la circonscription, les régions... Donc, ça fait partie de tout ce qu'on a à regarder et ça fait partie aussi de l'éducation qu'on a à faire chacun de notre côté, dans nos partis respectifs — là, je m'adresse à mes collègues des autres partis — que le MDN a à faire aussi dans la société civile, dans la population. Oui, ça fait partie des craintes, mais je pense qu'on est au-delà de ça. Il faut avancer.

M. Lecavalier (Charles) : Spécifiquement, sur les élus, est-ce qu'il y a des élus qui vous ont fait part de ces craintes-là?

Mme LeBel : De tous les partis confondus, c'est une crainte qui peut circuler, oui.

M. Croteau (Martin) : Bonjour, tout le monde. Martin Croteau, de La Presse. Mme David, M. Charbonneau, ma question est pour vous. Vous vous êtes décrits comme un groupe de pression, je reprends vos mots. Vous avez dit que vous menez depuis...

M. Charbonneau (Jean-Pierre) : On nous a décrits ce matin — nuance.

M. Croteau (Martin) : Vous êtes un groupe de pression, vous menez une campagne depuis des années auprès de décideurs, vous avez parlé des MRC, des décideurs. Pourquoi avez-vous peur de poser la question directement à la population?

M. Charbonneau (Jean-Pierre) : Nous, on n'est pas a priori contre. La seule chose, c'est que j'entends bien ce que la ministre dit, et ce qu'on constate par ailleurs, c'est que dans la plupart des endroits, en particulier au Canada, où on a voulu faire un changement, les partisans du statu quo étaient des partisans du référendum. Et le processus qu'on a choisi de faire au Québec, après deux échecs, d'abord du gouvernement Lévesque, puis, après ça, du gouvernement Charest, c'est de dire : On va faire ce qui n'a été fait nulle part ailleurs, c'est d'asseoir les partis politiques ensemble. Et, au début de cette démarche-là, même des libéraux étaient avec nous. On a discuté sur d'abord des principes; les gens se sont entendus sur ces principes-là, si je peux vous lire... on peut vous les reciter aujourd'hui, et, à partir de ça, finalement, ils ont élagué, ils ont choisi un modèle qui allait de soi en fonction des principes qu'ils ont adoptés ni en Colombie-Britannique, ni en Ontario, ni dans l'est du... dans les Maritimes, je pense que c'était...

Mme David (Françoise) : L'Île-du-Prince-Édouard.

M. Charbonneau (Jean-Pierre) : ...l'Île-du-Prince-Édouard, on a utilisé cette approche-là, ni ailleurs.

Nous, on a dit : Il y a eu deux échecs de deux gouvernements qui, pour toutes sortes de raisons, n'ont pas fonctionné, y compris pour la raison qui a été mentionnée tantôt, la résistance de certains députés et l'incompréhension aussi. Les gens, souvent, je veux dire, se faisaient des peurs inutiles, mais, je veux dire, la peur est un sentiment très puissant.

M. Croteau (Martin) : Alors, pourquoi vous ne voulez pas de référendum?

M. Charbonneau (Jean-Pierre) :Parce que les gens qui... Pour le moment, on a pris une autre approche, et l'autre approche qu'on suggère, c'est une approche où les partis à l'Assemblée nationale, qui sont allés chercher une très grosse majorité de l'appui populaire, vont pouvoir procéder; autrement, on va se retrouver comme en Colombie-Britannique. Et je ne sais pas si vous vous rappelez, en Colombie-Britannique...

M. Croteau (Martin) : Vous avez peur de vous faire dire non, vous avez peur de perdre.

M. Charbonneau (Jean-Pierre) : Non, non, parce qu'en Colombie-Britannique, savez-vous, la première fois, ce qui est arrivé? C'est que les citoyens ont dit oui.

M. Croteau (Martin) : À 57 %.

M. Charbonneau (Jean-Pierre) : À 57 %.

M. Croteau (Martin) : ...le gouvernement a renoncé au résultat parce que le taux de participation n'était pas élevé.

M. Charbonneau (Jean-Pierre) : Oui, mais, moi, je pense qu'au Québec, là, les gens qui, actuellement, demandent un référendum, c'est ceux qui sont pour...

Journaliste : ...

M. Charbonneau (Jean-Pierre) : ... — laissez-moi terminer, là — pour le statu quo. Est-ce que le gouvernement, éventuellement, décidera de donner, par exemple, gain de cause à l'approche qui a été suggérée tantôt? On ne le sait pas. Nous, au départ, on trouve qu'il y a une légitimité, et ça fait 20 ans que notre organisation puis les citoyens se battent pour un changement. Et là on voit la lumière au bout du tunnel, et des gens prétendent qu'on n'a pas la légitimité d'agir?

M. Croteau (Martin) : Vous êtes des observateurs aguerris, vous avez un oeil entraîné pour la politique. Quelle place a occupé la réforme du mode de scrutin dans la dernière élection? Diriez-vous que ça a été un thème dominant, important, majeur? Comment qualifieriez-vous la place qu'a occupée le débat sur la réforme du mode de scrutin dans la dernière élection?

Mme David (Françoise) : Le mode de scrutin a occupé la même place que tant d'autres questions fondamentales, c'est-à-dire pas 100 % tous les jours, parce qu'on sait ce que c'est, une campagne électorale, il y a des thèmes qui ressortent constamment et d'autres, parce qu'on pourrait, tant à ça, se parler d'environnement, qui ressortent un peu moins. Ça n'en fait pas moins des thèmes extrêmement importants.

J'ajouterais ceci : je suis impliquée donc au MDN depuis un an, et j'ai eu l'occasion de participer à des événements publics où M. Legault, lui-même, en personne, était présent. Je me rappelle d'un événement autour du 8 mars, l'année dernière, 300 femmes d'affaires dans la salle, et M. Legault de dire devant tout le monde et à côté de moi : Je ne ferai pas un Justin Trudeau de moi-même. Je vais faire la réforme du mode de scrutin, je veux qu'on ait un mode de scrutin plus proportionnel et je veux changer la culture politique au Québec, je veux une culture de collaboration.

Donc, si des personnes n'ont jamais entendu parler du mode de scrutin, n'ont jamais entendu M. Legault, depuis un an, prendre toutes les tribunes possibles et imaginables pour dire : Je veux le faire, bien, je pense que là, honnêtement, ce sont des personnes qui ne suivent pas du tout la vie politique.

Mais moi, je veux y répondre carré à votre question : Est-ce qu'on a peur de perdre? Non. Dans les années 80, quand le Parti libéral est allé de l'avant avec un avant-projet de loi, il y a eu une énorme commission parlementaire, une des plus longues qu'on a pu connaître au Québec; 80 % des mémoires allaient dans le sens d'une réforme du mode de scrutin, tous milieux confondus. Il y a un appétit pour un mode de scrutin proportionnel dans la population québécoise. Moi, j'en suis certaine, ayant été, dans un passé récent, dans un parti politique qui en faisait la promotion. J'en ai parlé dans toutes les régions du Québec. Ça ne prenait pas 10 minutes d'explications et tout le monde disait : Oui, qu'est-ce qu'on attend pour le faire?

Alors, ce sur quoi on mise au MDN, c'est la consultation, l'éducation, l'information. Puis regardez, là, on n'est pas complètement fous. Si, au terme de tout ça, dans un an, un an et demi, on se rendait tous compte, vous, nous, les partis politiques, la société civile, qu'il y a un mouvement de résistance extraordinaire contre le mode de scrutin, je pense qu'on réfléchirait. Mais moi, je fais un pari avec vous, là, ça n'arrivera pas, parce que l'appétit pour plus de démocratie, il est grand au Québec, très grand.

M. Croteau (Martin) : Mme la ministre, permettez-moi, je m'excuse de monopoliser le micro, mais quelle légitimité a une réforme de cette importance qui n'est pas approuvée directement par la population, alors que, comme le disent les promoteurs de cette réforme, ça a été finalement un enjeu secondaire dans les élections?

Mme LeBel : Pouvez-vous reprendre juste le début de votre question, parce que je l'ai échappé, je l'avoue.

M. Croteau (Martin) : Quelle légitimité a une réforme qui ne serait pas approuvée directement par la population, alors que les promoteurs de cette réforme admettent eux-mêmes que ça a été un enjeu somme toute secondaire dans l'élection?

Mme LeBel : Bon, je n'aime pas la prémisse de base de votre question, alors je vais y répondre à la façon suivante, effectivement.

M. Croteau (Martin) : Corrigez-moi, je vous encourage à le faire.

Mme LeBel : Non, je n'ai pas l'intention de vous corriger, mais je vous dire ce que j'en pense. Je pense que cette option-là de la réforme du mode de scrutin n'a pas été un enjeu caché des élections. Maintenant, si elle n'a pas pris la première place, bon, on peut s'en réjouir ou non, on peut le commenter ou non, mais je pense que ça n'a pas été un enjeu caché. Cet engagement-là qui a été pris par quatre partis politiques a été clair. M. Legault, effectivement, l'a dit sur toutes les tribunes. Et on a eu l'adhésion, avec l'ensemble des députés qui ont signé, de 95 députés sur 125 à l'Assemblée nationale. Ceci étant dit, je pense que ça nous donne la légitimité nécessaire pour aller de l'avant tel que nous le faisons présentement et de déposer un projet de loi. Et je tiens à le réitérer : De penser qu'un référendum n'est pas nécessaire ou n'est pas la meilleure façon d'avancer ne veut pas dire qu'on n'est pas à l'écoute de la population et qu'on ne consulte pas. Et je veux que ça soit très clair dans ce sens-là. Merci.

M. Dion (Mathieu) : Mme Lebel, ce serait quoi l'obstacle principal à la mise en place de la réforme d'ici 2022?

Mme LeBel : Je ne suis pas sûre de comprendre votre question, honnêtement.

M. Dion (Mathieu) : Ce serait quoi l'obstacle principal à la mise en place de la réforme d'ici 2022? Qu'est-ce qui pourrait faire en sorte qu'on n'y arriverait pas, on ne pourrait pas le faire?

Mme LeBel : Mon Dieu, c'est une question qui est assez compliquée à répondre, parce que je pense qu'on a tous un bout de chemin à parcourir là-dedans. Donc, mon bout de chemin à moi est de faire en sorte d'obtenir le consensus et de travailler sur un projet de loi qui va être adopté.

M. Dion (Mathieu) : Mais, vous voyez quoi à l'horizon qui pourrait bloquer?

Mme LeBel : Bien, j'essaie de répondre à votre question. Parce que j'essaie de voir les étapes puis qui sont les acteurs de tout ça. Donc, le seul... Je n'y vois pas d'obstacle particulier. Ce que j'ai mentionné d'entrée de jeu, c'est qu'il faut donner l'espace nécessaire au DGEQ de travailler. Mais là je ne peux pas travailler pour lui, je ne peux pas répondre pour lui. Il s'est déjà engagé publiquement dans une certaine évaluation du temps qu'il lui serait nécessaire pour mettre en place une réforme; il a parlé d'environ deux ans. Par contre, les discussions que nous devons avoir avec le DGEQ sur le sujet sont justement pour être capable de dégager le plus d'espace possible.

Maintenant, ma responsabilité est de déposer un projet de loi dans les paramètres. Notre responsabilité de parlementaires est de travailler de bonne foi, main dans la main, pour le faire adopter le plus rapidement possible. Et par la suite, bien, on pourra... on aura fait ce qu'on a à faire.

M. Dion (Mathieu) : Parce que vous avez évoqué tantôt qu'il y a une crainte qui peut être là chez certains députés de perdre un peu leur rôle, leur position avec la réforme du mode de scrutin. Puis c'est bien connu que, nécessairement, avec les listes régionales, etc., ça se peut qu'il y ait des députés dans votre formation politique qui ne pourront pas être élus quand on va regarder les chiffres factuellement. Allez-vous être prêts à sacrifier des députés au nom de cette réforme-là?

Mme LeBel : Ah, je n'aime pas la façon dont vous... Encore une fois...

M. Dion (Mathieu) : Bien, peut-être pas sacrifier...

Mme LeBel : Non.

M. Dion (Mathieu) : ...mais allez-vous être prêts à quand même dire à un député : C'est vrai qu'il va falloir travailler fort pour toi parce que ça se peut que ça ne fonctionne pas?

Mme LeBel : Moi, quand je me suis engagée en politique, c'est pour travailler dans l'intérêt public. Alors, je suis prête à travailler pour faire en sorte que le vote des citoyens compte un peu plus.

M. Dion (Mathieu) : Donc, vous allez être prêts à laisser de côté un des vôtres pour la réforme?

Mme LeBel : Je suis prête à travailler dans l'intérêt public et de faire en sorte que le vote des citoyens compte, ait un impact. Et je travaille...

M. Dion (Mathieu) : Répondez à ma question, là.

Mme LeBel : Bien, je réponds à votre question : c'est ça, mon objectif. Mon objectif n'est pas de bafouer des collègues, de laisser tomber des collègues ou de... Mon objectif est de travailler dans l'intérêt public et d'avancer dans ce sens-là. Et c'est le mandat qu'on m'a donné.

M. Charbonneau (Jean-Pierre) : Mais la proposition, là... Il y a actuellement 125 députés à l'Assemblée nationale. Quand on aura un système mixte compensatoire, il va avoir…

Mme LeBel : Il va y avoir 125 députés.

M. Charbonneau (Jean-Pierre) : Il va avoir encore 125 députés. Il y aura des députés de circonscriptions locales, mais il y aura aussi des députés de liste. Le total à l'Assemblée nationale sera 125 malgré tout.

M. Dion (Mathieu) : Mme David, peut-être juste vous entendre là-dessus, vu que vous avez été dans une formation politique récente de l'autre côté du spectre, est-ce que vous croyez que, si une formation politique réalise qu'elle perd des députés, que ça pourrait faire tout dérailler?

Mme David (Françoise) : Bien, c'est drôle, hein, mais je ne le pense pas. Évidemment, je ne peux pas me prononcer pour les gens de la Coalition avenir Québec. Je veux juste rappeler ce que je disais tout à l'heure. Ça va me permettre d'ailleurs de revenir sur une affirmation récente, là, d'un de vos collègues. Ça n'est pas parce qu'un enjeu n'est pas le principal en campagne électorale que ça n'est pas un enjeu connu de l'immense majorité des citoyens. M. Legault, depuis un an, répète à qui veut bien l'entendre que, pour lui, c'est une question cruciale. Je présume que les candidates et candidats qui se sont présentés pour la Coalition avenir Québec avaient pris connaissance de la plateforme de leur chef et savaient que leur chef allait donc mettre en place une réforme du mode de scrutin. Je pense que ça n'est pas trop présumer, quand même.

Maintenant, est-ce qu'humainement il peut y avoir, non seulement à la Coalition avenir Québec, mais dans l'ensemble des partis, des craintes, tu sais, un petit tremblement intérieur qui fait qu'on est obligé de sortir de sa zone de confort? Bien, c'est évident, et ça va arriver à Québec solidaire aussi, je suppose, mais je pense qu'honnêtement, je pense, pour avoir justement vécu ici pendant quelques années et rencontré tellement de collègues de tous les partis, l'immense majorité, là, l'immense majorité, on ne peut jamais dire tout le monde, mais l'immense, immense majorité des collègues sont des gens qui ont à coeur le bien commun, quelles que soient, après, les idées différentes, etc. Est-ce que ça veut dire que c'est facile de se dire : Bon, alors, moi, mon comté est en train de changer, il faudrait peut-être que je pense à me présenter au niveau du scrutin de liste? Bien non, ce n'est pas facile, mais ce n'est pas facile, non plus, ou ça n'a pas dû être facile, à une certaine époque, de retourner dans son comté puis de dire à ses concitoyens : Bon, bien, là, désormais, on va célébrer des mariages gais.

Vous savez, être dans la vie politique, être député, c'est être capable d'affronter l'adversité, être capable d'affronter les préjugés, être capable de faire un travail terrain. Sinon, on est mieux de ne pas devenir député. L'aide médicale à mourir, ça ne devait pas être simple tout le temps, quand les gens faisaient des tournées puis que tout le monde s'exprimait d'un côté, de l'autre. C'est ça, être député, c'est d'assumer son rôle de défenseur du bien commun, puis des fois, bien, ça veut dire... ouf! prendre un peu sur soi puis, oui, accepter parfois d'y perdre un petit peu comme personne, mais d'y gagner comme société. Moi, j'ai encore la naïveté de penser que ça puisse être possible.

M. Charbonneau (Jean-Pierre) : Et un de vos collègues, tantôt, parlait du cynisme des citoyens, de l'impression qu'ils ont qu'on en parle régulièrement, depuis longtemps, et que ça ne se fera pas. Mais, si ça se faisait, est-ce que les citoyens et les députés qui auraient fait l'histoire en faisant ça n'auraient pas fait en sorte que la politique, au Québec, changerait de niveau, et que les gens auraient une confiance renouvelée et améliorée sur le comportement des élus par rapport à leurs engagements politiques et à la façon dont la représentation politique se fait à notre Assemblée nationale?

La Modératrice : On va y aller pour...

M. Bélair-Cirino (Marco) : Juste une question en français, Mme David, juste pour bien vous comprendre : Est-ce que le projet de loi qui est devant nous, en fait, qui sera déposé avant le 1er octobre 2019...

Mme LeBel : Éventuellement, oui, avant le 1er, là.

M. Bélair-Cirino (Marco) : ...est-ce que ça fait partie de ces projets de loi qui, comme par exemple, celui qui autorisait le mariage gai au fédéral, celui qui accordait l'aide médicale à mourir au Québec, ou des grands projets de loi sociaux comme ceux qui ont octroyé le droit de vote aux femmes n'auraient pas nécessairement passé un référendum, mais que c'était simplement le projet de loi nécessaire, peut-être un peu avant-gardiste, puis que les élus ont eu le courage politique de prendre la décision au nom de la population, de la population qu'ils représentent?

Mme David (Françoise) : Si je comprends bien le sens de votre question, c'est, sur un certain nombre de sujets, les députés ont décidé d'aller de l'avant sans référendum, estimant qu'il était de leur devoir soit de protéger des minorités et, dans certains cas, c'est absolument vrai, ou soit, parce que les femmes ne sont pas une minorité, d'accorder le droit de vote aux femmes sans référendum parce que la sous-question, je pense, qui a été d'ailleurs posée tout à l'heure, c'est : Ils l'auraient peut-être perdu. Il y a une sous-question là-dedans, hein?

Dans ce cas-ci, je souscris tout à fait aux arguments de la ministre et de mon collègue pour dire : On n'est pas dans ce genre de débat, là. On n'est pas dans un débat où les gens sont confrontés à leurs propres valeurs, à leurs propres schémas émotifs ou même spirituels. On n'est pas là-dedans, là. On est en train de discuter d'une meilleure façon de vivre la démocratie. Il n'y a pas grand monde qui est en désaccord avec ça. Et dans ce cas-là, quand les trois quarts de l'Assemblée nationale se sont présentés, lors d'une campagne électorale, en disant que c'est ça qu'ils allaient faire et qu'après c'est ça qu'ils font, appuyés par la société civile, des grands, grands pans de la société civile, en fait, ce qu'on est en train de dire, Jean-Pierre et moi, pour le MDN, c'est : Le référendum n'est pas nécessaire. Il y a beaucoup d'autres façons de consulter la population, de s'assurer que le projet de loi soit bien compris, d'aller chercher l'adhésion populaire. Le référendum, c'est une chose intéressante, là. En soi, personne n'est contre les référendums, c'est un moyen, et nous estimons pour l'instant qu'il n'est pas nécessaire, qu'il n'est pas indispensable.

La Modératrice : On va y aller pour une dernière question, je pense, en anglais.

Mme Fletcher (Raquel): .Yes. As just a start in English, can you simply explain what you are doing here today and what you're announcing?

Mme LeBel: OK, what I am doing here today: I am announcing that we are going a… some financial aid to the Mouvement démocratique national, the MDN, which has been working towards the electoral reform for 20 years now. This is something that François Legault engaged himself into. He gave me the mandate to go forward with that reform and the fact that we are according an amount of money today to the MDN goes into the same objective of succeeding in that reform and make sure that society understands well why and where we are going with that.

Mme Fletcher (Raquel): …spoken on a number of issues, one being you don't see a need for there to be a referendum on this issue in the future? I am wondering if you can comment on that, but also explain… you said you wanted to have the largest consensus possible?

Mme LeBel: Yes.

Mme Fletcher (Raquel): I'm wondering if you have any measure that you can tell us, how many… you know, what the populationactually feels about the MMP system… sorry, MPP system, you know. Do 60% of Quebeckers agree? Do 20% of Quebeckers agree? How do you know that you have their support without a referendum?

Mme LeBel: Well, the MDN is a great actor in that sense and gives us a sense of what is going on. But I can tell you that every time I talk to some people or any actor of the civil society on that matter, sometimes it's more a matter of not… of comprehending well where we're going and not being against or for. Because when you talk to people and you say… you talk to the population and tell them: Do you want your vote to count? Yes. The answer is yes. So, we're working towards that. It's just a matter of explaining that. And we think that we have… we're legitimate in going forward right now. It's not something that was hidden in the last electoral campaign, it's not something that we didn't discuss, it's not something that wasn't well known, that if we were elected, this was something that we intended to do and to go forward with. So, it's just a matter of educating the population, make them understand and explaining what are the objectives behind the MPP reform.

Mme Fletcher (Raquel): Why rule out a referendum?

Mme LeBel: Because… it's not that we rule out the fact that we have to consult, we rule out this way of consulting. We think that this is something that has to be explained, discussed, exchanged with the population. It's not a matter of having a vote and being behind a little box and say yes or no. It's something that we have to discuss, we have to understand. If they're not comfortable with it, we have to understand why, and there is a lot of ways in the MPP reform to address those issues. So, I don't think that a referendum will… going to give you the enlightenment necessary to address those issues properly, and this is what we want to do, have a discussion with the population.

Mme Fletcher (Raquel): Mme David, can you comment on that same question, about why, you said in French, a referendum isn't necessary?

Mme David: Simply because I think when people… First, Mr. Legault said many times he will do this reform, and Québec solidaire and the Parti québécois also. So, people knew that it is a project. The Government will do the project and two other parties agree with that. And that means 95 Members of Parliament. It's big, big, big majority.

As MDN, we will do our job to… we do it since 20 years, but we will do it more, with more tools, to explain exactly what is the new «réforme du mode de scrutin, là.»

Une voix: Electoral reform.

Mme David (Françoise): Electoral reform. And we will try strongly to have consensus in the population. So it will not… a work, you know, of 30days with the campaign of the yes, the campaign of the no. It will be a work during one year, two years. It's very different, but, at the end, I think it's very interesting as a way to work because all people will be able to understand, to agree finally. Because what I saw as a Member of Parliament, when I made many, many trips around Québec, you know, in many regions, people want that. They don't know exactly the «modalités», the, you know, the…

Une voix : Mechanics.

Mme David (Françoise): Pardon?

Une voix: «La mécanique», mechanics.

Mme David (Françoise): …the mechanics, but they want, they really want to have a new electoral reform. They are not satisfied with the way it is now.

Une voix : Merci.

Mme David (Françoise) : Merci beaucoup.

(Fin à 12 h 32)

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