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Conférence de presse de M. Sylvain Pagé, député de Labelle

Manifeste pour une nouvelle culture politique

Version finale

Le jeudi 8 septembre 2011, 11 h

Salle Evelyn-Dumas (1.30), édifice Pamphile-Le May

(Onze heures quatre minutes)

M. Pagé: Bonjour à tous et à toutes. Merci de votre présence ce matin. Compte tenu que ce que je vous présente est plutôt élaboré, je vous avise qu'on va prendre quand même un certain moment pour que je puisse présenter ces propositions à la presse nationale et aux gens qui nous écoutent.
Sans appuyer le comportement des parlementaires qui stimulent le cynisme, je ne l'ai pas vraiment dénoncé depuis cet article du Soleil, paru en septembre 2003, avec Stéphane Paquet, sous le titre Le député qui n'applaudit pas, sauf par mon obstination justement à ne plus applaudir à la période de questions depuis cette période. J'ai toujours tenté de pratiquer cette politique autrement dans ma circonscription, mais, sur la scène nationale, je n'ai rien fait pour faire la promotion, outre certaines interventions au caucus de ma formation politique et par mon attitude de non-collaboration à ce que je qualifie de «spectacle».
Comme un grand nombre de Québécois, je constate que l'état de notre démocratie se détériore peu à peu. Vous comprendrez donc que le manifeste que je présente aujourd'hui, ce n'est pas la réaction aux événements du printemps dernier, mais plutôt le fruit d'une longue réflexion et des 150 soirées publiques effectuées dans la circonscription de Labelle depuis 10 ans. Par ce manifeste, je m'oppose à la partisanerie, à la ligne de pensée unique, à une culture dépassée et déconnectée de notre population. Nous somme mûrs pour changer notre culture de politique d'opposition à une de collaboration. Ma démarche est inhabituelle, je le sais, car elle ne passe pas par le filtre du parti dont je suis membre. Je la désire totalement non partisane. J'espère toutefois que les propositions de ce manifeste seront reprises par le plus grand nombre d'acteurs politiques, et j'applaudirai à chaque fois qu'une formation politique, qu'un individu présentera la volonté d'améliorer cette culture politique.
Certains me diront qu'il faut plutôt parler des vraies affaires: décrochage scolaire, entente en santé, les infrastructures déficientes, de grands projets de société. Je suis d'accord avec eux, ils ont raison. Cela doit être la première préoccupation des élus. Par contre, je demeure convaincu que, pour prendre de grandes décisions, des virages difficiles, audacieux, il faut que la population soit disposée à écouter ceux qui proposent. Pour un grand nombre de concitoyens, ce n'est plus le cas, la communication ne passe plus. Il est temps et nécessaire de rétablir ce contact, de rebâtir cette confiance, de tout mettre en place pour briser ce cynisme. Ce n'est pas la classe politique qui y gagnera, mais bien tous les Québécois.
Voici donc une vision pour une approche nouvelle de la politique. Vous y découvrirez des propositions audacieuses qui trouveront écho chez ceux qui espèrent une politique inspirante. Je souhaite que nous en débattions car je crois qu'il est temps de changer notre culture politique.
Je veux, au départ, saluer et remercier très sincèrement les gens qui ont accepté... ils ont tous accepté de participer aux entrevues que nous avons faites. Quand je parle de nous, je pense aussi à mon ami et complice, le recherchiste Pierre Lessard-Blais. J'ai nommé Louise Beaudoin, Claude Béland, Stéphane Bergeron, Claire Bolduc, Gérard Deltell, Bernard Généreux, Raymond Gravel, Marie Grégoire, Amir Khadir, Lisette Lapointe, Christine Normandin, Pierre Paradis, Benoît Pelletier, Daniel Turp, et certains autres, malheureusement, que je ne peux nommer. Un merci bien particulier aux six présidents de l'Assemblée nationale que j'ai connus depuis 2001: Michel Bissonnet, Jacques Chagnon, Jean-Pierre Chabonneau, François Gendron, Louise Harel et Yvon Vallières.
Il est important de spécifier que les gens qui ont été consultés ne sont pas nécessairement en accord avec les idées de ce manifeste et que ces propositions ne représentent pas non plus la position du parti que je représente. Pour tous ceux qui souhaiteraient prendre connaissance de ces propositions et les commenter, j'annonce qu'un site Web est en fonction depuis ce matin, et vous le trouverez en tapant nouvelleculturepolitique.org.
J'annonce également que je vais demander au président de l'Assemblée nationale de se saisir de ce manifeste et de regarder avec les parlementaires de quelle façon on pourrait y donner suite, soit via une commission parlementaire, un mandat d'initiative ou autre. Ce manifeste fait un constat de la situation politique et il propose trois grands enjeux: premièrement, une plus grande implication des citoyens, ce qui veut dire que les citoyens doivent obtenir un réel pouvoir sur la gouvernance; deuxièmement, un renforcement du rôle des députés, ce qui veut dire que la confiance entre le citoyen et son élu ne peut se renforcer que si ce dernier peut jouir d'une liberté d'action et de pensée; troisièmement, la promotion d'une véritable culture de collaboration entre tous les élus.
Constater le triste état de notre démocratie parlementaire et énoncer des nouvelles valeurs ne suffiront pas à imposer une nouvelle culture politique. Plus d'une vingtaine de propositions vous sont donc présentées ce matin. Elles sont divisées en quatre sections.
La première section est La relation avec les citoyens. Ce qu'il faut comprendre, c'est que les citoyens ne veulent plus vivre leur démocratie aux quatre ans mais pendant quatre ans. Voici donc, dans la première section, cinq propositions.
La première, le référendum d'initiative populaire. Il ne devrait pas affecter les droits fondamentaux des citoyens ni remettre en cause des éléments reconnus dans la Constitution québécoise et ne pas avoir d'incidence financière sur le budget de l'État. Il y aurait deux périodes, soit à la mi-mandat et lors des élections générales.
Deuxièmement, la révocation des députés pour trois cas seulement: pour un verdict de culpabilité, une absence prolongée injustifiée à l'Assemblée nationale ou encore pour son adhésion à une autre formation politique. Seuls les électeurs ayant voté à la dernière élection dans cette circonscription pourraient demander la révocation et participer à ce vote.
Troisièmement, les assemblées de comté. Elles devraient être obligatoires deux fois par année. Elles auraient lieu simultanément dans les 125 circonscriptions.
Et, quatrièmement, la création du comité permanent des réformes démocratiques. C'est le comité qui recevrait les différentes propositions de modification. Il serait composé autant d'élus que de non-élus. Il aurait, entre autres, à déterminer les conditions pour enclencher un processus de révocation ou encore un référendum d'initiative populaire.
Cinquièmement, l'éducation civique devrait être amenée dans nos écoles le plus tôt possible et que toutes les écoles du Québec participent au Parlement étudiant.
Deuxième section, soit l'élection et le financement des partis politiques. Le premier geste à poser dans le cadre de cette nouvelle culture politique est certainement les élections à date fixe pour enclencher effectivement cette nouvelle culture politique.
Deuxièmement, la réforme du mode de scrutin. Il est possible de présenter des dizaines de propositions de réforme électorale. Il m'apparaît nécessaire d'entendre cette volonté de changement. Je propose la démarche suivante en y attachant une obligation de résultat: l'annonce de la création d'états généraux sur le mode de scrutin, avec un échéancier précis; mise sur pied du comité directeur sur les réformes des institutions démocratiques composé majoritairement de non-élus; promesse d'un référendum national sur la question proposée par le comité directeur des états généraux; adoption de la date du référendum, des règles, des procédures dès le lancement des états généraux; et finalement l'engagement de toutes les formations politiques tant de respecter la démarche que la volonté exprimée par la population lors de ces référendums à la majorité simple.
Troisièmement, le financement des partis politiques doit être public, et on doit interdire à tout député de solliciter des sommes d'argent autres que pour l'adhésion à une formation politique.
Troisième section, la plus importante, soit l'Assemblée nationale et la gouvernance. Il faut changer la dynamique de confrontation. Je propose: que les députés à l'Assemblée nationale... que la disposition actuelle des sièges soit changée en faveur d'une forme se rapprochant à celle de l'hémicycle; que les députés soient assis par ordre alphabétique de leur circonscription, sauf évidemment pour les chefs, les whips et les leaders.
Changer le nom des oppositions, qui est un héritage de notre parlementarisme britannique, et que les partis qui obtiennent le deuxième, troisième quart s'appellent deuxième parti, deuxième ou troisième parti, ou un autre nom.
Troisièmement, réduire la ligne de parti. Le temps est venu d'inverser le système - on veut responsabiliser les députés. Que la ligne... que le vote libre devienne la norme. Seulement deux conditions pourraient... permettrait d'imposer la position aux députés, soit le vote sur le budget ou encore une motion de censure.
Le vote électronique. Je crois qu'il faut mettre à la disponibilité des citoyens de la transparence et de l'efficacité pour l'ensemble des Québécois, donc les votes devraient être possibles... d'offrir les résultats rapidement grâce au vote électronique, qui pourrait être inséré à l'Assemblée nationale.
La réforme de la période des questions. Je propose que les questions principales seulement soient envoyées par écrit au ministre visé par la question deux heures avant le début de la période de questions et que le président en juge de sa recevabilité.
Les appels au règlement doivent être retardés après la période de questions. Toute forme de manifestation, comme les applaudissements - vous ne serez pas étonnés d'apprendre ça - devrait cesser.
Sixièmement, la période de questions citoyennes, qui risque de changer considérablement la façon de faire à la période de questions. Grâce aux nouvelles technologies, il devrait y avoir une période de questions citoyennes de 15 minutes, trois questions à chaque jour venant de citoyens de partout à travers le Québec, soit via vidéoconférence, soit encore en personne, à l'Assemblée nationale.
Septièmement, le rôle du président de l'Assemblée nationale. Je propose que le comité permanent se penche sur le resserrement des règlements. Je pense qu'il doit donner plus de mordant. Je pense qu'il n'est pas normal d'attendre un troisième appel avant d'expulser un député et que les conséquences ne soient pas suffisantes.
Huitièmement, les élections du président et du vice-président. Le processus, notre processus doit être exemplaire. Il est regrettable qu'un candidat obtienne l'appui public de sa formation politique car cela tend à biaiser le processus de l'élection du président. J'invite le comité permanent à réfléchir à la question et particulièrement à ce qui se fait à la Chambre des communes à Ottawa parce qu'il semblerait que, de ce côté, on obtient les résultats souhaités.
Neuvièmement, limiter le nombre de ministres. Il faut que le nombre maximal de ministres passe... 21 à 24, et cela pourrait très bien se faire par une loi au Conseil législatif, afin qu'il n'y ait plus d'abus de nominations partisanes.
Dixièmement, partager le Conseil des ministres. Advenant l'échec de la réforme référendaire sur le nouveau mode de scrutin - j'ai bien dit «advenant l'échec de la démarche référendaire sur le nouveau mode de scrutin» - je proposerais alors qu'un certain nombre de ministres puissent siéger, de l'opposition, au Conseil des ministres du gouvernement en place. Les ministres seraient élus par l'ensemble des parlementaires, et cela, à partir d'une proposition des chefs de parti.
Onzièmement, pour les bâillons et les filibusters, il faudrait mettre sur pied un comité des présidents - vous verrez la composition. On y négocierait d'avance les nombres d'heures dédiées à l'étude de chaque projet de loi afin d'éviter les filibusters et les bâillons.
Douzièmement, les caméras au salon bleu. Il faut laisser les caméras avoir un champ plus large pour voir l'ensemble de l'attitude des parlementaires. Nous ne sommes pas à huis clos à l'Assemblée nationale. La principale caméra devrait être située au-dessus du siège du président, ce qui forcerait les parlementaires, en tout temps, quand ils s'adressent au président, à regarder vers le président de l'Assemblée nationale.
Et, finalement, treizième proposition: vers une plus grande décentralisation. Je crois qu'il faut lancer les états généraux sur la gouvernance locale et régionale, c'est une démocratie directe vers l'ensemble des citoyens du Québec, et qu'il y ait l'adoption d'une loi-cadre et que toutes les formations politiques, toutes les formations s'engagent à donner suite aux recommandations des états généraux.
Finalement, quatrième et dernière section, qui est celui du comportement des députés. Une démission de député... celui qui ne souhaite pas attendre à la prochaine élection pour joindre une autre formation politique devrait s'exposer aux risques de la révocation. Un député qui souhaite quitter avant d'avoir complété la moitié de son mandat devrait être privé de son indemnisation de départ. Il n'est pas normal que des gens quittent trois, quatre à six mois après l'élection générale. Un député ayant quitté son poste ne devrait pas non plus avoir accès une seconde fois à son allocation de transition s'il redevient député. Et finalement, la dernière proposition, c'est évidemment la relation entre les partis et les propos partisans. Seule la bonne volonté des élus pourra corriger cette dernière proposition. Aucune adoption de loi ou de règlement ne pourra se substituer à l'éthique et à la noblesse de chaque député.
En conclusion, changer notre culture politique ne doit surtout pas devenir une bataille pour l'obtention de votes. Il reste plusieurs injustices à combattre et de nombreux projets à rêver. La politique doit être le point de rencontre de toutes les volontés de réforme nationale, d'où l'importance cruciale de rebâtir la confiance entre la population et ses élus. Pour cela, j'ai la profonde conviction que nous devons adopter une nouvelle culture politique. Merci. Je prendrai les questions.

M. Plouffe (Robert): M. Pagé, vous ne faites pas ça pour sauver le parti... du Parti québécois comme votre collègue Bernard Drainville l'avait indiqué, là, dans ses propres propositions. Par contre, certaines de vos propositions rejoignent les siennes. Pourquoi vous adresser plus justement à l'ensemble des partis politiques et non pas faire en sorte que ce soit le Parti québécois qui initie tout ça?

M. Pagé: Bien, je pense que le Parti québécois, comme toutes les formations politiques, doit se saisir des propositions. Je les invite à le faire. M. Deltell, d'ailleurs, m'avait dit que je serais le bienvenu dans son caucus pour aller présenter ces propositions. Alors, je vais accepter volontiers. Si d'autres formations le souhaitent, j'irai.
Vous avez compris depuis le départ que je suis le député qui n'applaudit pas depuis 2001. J'ai souvent critiqué la façon dont on faisait de la politique. Ce manifeste, huit sur 10 ou neuf sur 10 des propositions étaient déjà écrites il y a un an. Donc, ce n'est pas la réflexion du contexte politique actuel, d'aucune façon.

M. Plouffe (Robert): Est-ce que vous pourriez me dire laquelle justement, dans les propositions... mettons, les trois, quatre premières que vous pensez importantes d'appliquer le plus tôt possible pour changer la dynamique?

M. Pagé: Bien, écoutez, on s'entend qu'il y a des propositions qui sont nettement plus importantes que d'autres, là. Le vote libre avec seulement deux restrictions, c'est majeur. Par contre, cette nouvelle culture politique, là, je le dis dans le début du manifeste, là, c'est plusieurs briques qu'il faut mettre les unes sur les autres pour arriver à avoir un mur solide. Et je pense que ça, cette nouvelle culture politique, n'arrivera pas si on ne met pas en place une série de mesures, et ce qui est le plus important, c'est si l'ensemble des élus et des parlementaires n'ont pas envie d'avoir une attitude totalement différente. C'est clair.

M. Plouffe (Robert): Et vous ne pouvez pas nous en indiquer trois, quatre, là, les plus importantes à vos yeux, les premières briques à la base?

M. Pagé: Bien, écoutez, quand on parle de la confrontation à l'Assemblée nationale, imaginez que... comme en Suède d'ailleurs, et d'ailleurs, dans les entrevues, ce que j'ai toujours trouvé un peu drôle, c'est que les propositions devenaient intéressantes à partir du moment où on trouvait un exemple ailleurs dans le monde où ça se fait. Mais, dans certains cas, pourquoi ne pas être les premiers si on veut réinventer notre démocratie puis être innovateurs? Alors, moi, je souhaite qu'on soit les premiers dans certains cas. Être assis par ordre alphabétique, effectivement, ça changerait la dynamique énormément. Imaginez que, présentement, dans la situation, si j'ai envie... je ne le dis pas méchamment, mais d'envoyer promener nos amis d'en face, c'est un peu facile quand j'ai ma série de collègues de mon parti à côté de moi. À partir du moment où je siège avec un adéquiste et un libéral à côté de moi, je ne suis pas certain que je vais avoir la même attitude ou la même agressivité envers mes amis d'en face parce que mes amis d'en face vont être à côté de moi.

M. Chouinard (Tommy): Dans quelle mesure est-ce que vos propositions, c'est... Si Mme Marois n'adhère pas à vos propositions, qu'est-ce que vous allez faire quant à votre adhésion au Parti québécois?

M. Pagé: Bien, écoutez, moi, je souhaite proposer au président de l'Assemblée nationale qu'il se saisisse du dossier. Je pense que, là, on a une opportunité intéressante. Le contexte également, il est là. Je vous rappellerai que tous les gens de toutes les formations politiques que j'ai joint - il y a deux chefs de parti également là-dedans - ont tous, non seulement accepté de participer, mais ils ont été très généreux de leurs commentaires et de leur temps. Dans tous les cas, on avait une heure, puis tout le monde en aurait pris une heure et demie ou deux. Et je constate que ce n'est pas l'affaire d'une formation politique. Ce que je propose ici, le renouvellement de la démocratie, ça ne passe pas par un parti politique. Je suis membre du Parti québécois, je suis fier de l'être, je défendrai les positions du Parti québécois, mais ce dont je discute ici, c'est de l'ensemble de la démocratie, ce n'est pas de l'avenir du Parti québécois.

M. Chouinard (Tommy): Oui, je comprends, mais il faut que ce soit tous les partis, donc, dont le Parti québécois.

M. Pagé: Absolument.

M. Chouinard (Tommy): Quel a été l'accueil, jusqu'à maintenant, de Mme Marois? Est-ce que vous êtes satisfait de ça? Et est-ce que vous menacez de quitter si jamais elle ne fait pas en sorte que ça avance?

M. Pagé: Non, absolument pas. Écoutez, ça fait 10 ans que je suis député, ça fait 10 ans que je suis un peu rebelle. Je suis obstiné et déterminé. Je pense... je ne m'attends pas à ce que, cet automne, toutes ces propositions soient adoptées, mais je pense que le contexte actuel va nous permettre de cheminer dans ce sens-là. Je sens une belle ouverture de la part de plusieurs collègues. Mais ce que je veux, ce n'est pas une ouverture seulement de mes collègues du Parti québécois qui l'ont manifesté lors du dernier caucus, c'est une ouverture de l'ensemble des parlementaires. Et c'est ce qui va permettre de changer cette culture politique.

M. Plouffe (Robert): ...

M. Robitaille (Antoine): Avez-vous des appuis dans votre parti, M. Pagé?

M. Pagé: Oui, oui, absolument.

M. Robitaille (Antoine): Pourquoi vous êtes seul aujourd'hui?

M. Pagé: Bien, parce que je ne voulais pas que ce soit une démarche péquiste. La démarche, depuis le départ, là, elle a été non partisane. Ce que normalement nous aurions dû faire ce matin, finalement, bon, pour différentes raisons, on ne l'a pas fait. Il devait y avoir, dans la salle, des gens de la société civile et des gens d'autres formations politiques. C'est la façon dont on avait imaginé pour présenter le manifeste ce matin. Mais finalement j'ai préféré me présenter seul, et ce n'est pas parce que je n'ai pas l'appui de collègues de mon parti et de d'autres formations politiques.

M. Salvet (Jean-Marc): Si vous me permettez, sur Mme Marois, est-ce que vous avez eu l'occasion, au cours des dernières heures ou des derniers jours, de lui fournir une copie de ce manifeste, à Mme Marois?

M. Pagé: Oui, lundi dernier.

M. Salvet (Jean-Marc): Comment? Lundi dernier?

M. Pagé: Pardon?

M. Salvet (Jean-Marc): Lundi dernier?

M. Pagé: Oui.

M. Salvet (Jean-Marc): Et quelle a été sa réaction?

M. Pagé: Oui, parce que le document n'était pas encore imprimé, puis il y avait encore des corrections à faire.

M. Salvet (Jean-Marc): Très bien. Et quelle a été sa réaction précise?

M. Pagé: Écoutez, j'ai été en contact à quelques occasions depuis et je vais lui laisser le soin de réagir elle-même. Je pense qu'elle a déjà manifesté des ouvertures intéressantes, notamment en nous disant, la semaine dernière, qu'elle était ouverte à un vote libre. C'est une révolution, là, hein, au Québec, là. Bien sûr, il y a des tiers partis - puis je ne le dis pas de façon péjorative - qui le préconisent déjà, et tant mieux, et ça, ça démontre une autre belle ouverture. Mais que le Parti québécois, qui compte 46 députés... et que sa chef nous dise déjà qu'elle a cette ouverture, on n'aurait pas pensé cela il y a à peine quelques mois, là. Alors, c'est une magnifique ouverture.

M. Salvet (Jean-Marc): Plusieurs de vos propositions trouvent un accueil favorable probablement chez vos collègues dans le contexte actuel. Mais, au fil des ans, vous étiez déjà porteur de plusieurs de ces idées-là. Je pense que vous étiez tout de même vu comme une bête étrange au sein de votre caucus. Qu'est-ce que vous disaient vos collègues souvent à l'interne? D'abord, le fait que vous n'applaudissiez jamais, mais il y a d'autres choses également. Comment ça se passait? Et qu'est-ce qu'ils vous disaient?

M. Pagé: Bien, écoutez, j'ai toujours eu un profond respect de la part de mes collègues parce qu'ils connaissaient ma position. Cela a peut-être fait que j'étais assis un peu plus à l'écart à l'Assemblée. Ce n'est pas grave, je ne suis pas ici pour me donner en spectacle. Et le momentum, je dirais, pour cette proposition-là n'était pas, il y a à peine quelques mois, ce qu'il est maintenant, et je suis convaincu qu'il y a plusieurs députés... avec tous les débats que nous avons présentement sur la réforme des institutions démocratiques, que ces propositions-là vont pouvoir cheminer beaucoup plus rapidement qu'elles l'auraient pu il y a à peine un an, c'est clair.

Mme Tremblay (Marie-Hélène): Vous dites que vous l'avez présenté à Mme Marois. L'avez-vous présenté aussi aux autres collègues du caucus? Est-ce qu'ils en ont eu copie?

M. Pagé: La semaine dernière, le document n'était pas... n'étant pas encore imprimé et étant très restreint dans le temps, j'ai pu présenter la démarche, présenter très rapidement quelques propositions, mais on comprendra qu'en quelques minutes ce que j'ai essayé de vous ramasser et de vous résumer à peu près en 20, 25... c'était impossible pour moi de faire un débat de fond. Il y a quand même des collègues qui ont été rencontrés ce matin, et la réaction est quand même, dans l'ensemble, positive.

M. Robitaille (Antoine): Est-ce que le... Sur le vote libre, là... Sur le vote libre...

M. Plouffe (Robert): M. Pagé, si vous le permettez, est-ce que monsieur...

M. Robitaille (Antoine): On m'a pointé...

M. Plouffe (Robert): Oui?

M. Robitaille (Antoine): Sur le...

M. Plouffe (Robert): Je vais vous laisser, collègue.

M. Robitaille (Antoine): Oui, vous êtes mieux. Sur le vote libre...

M. Plouffe (Robert): On va montrer l'exemple, alors...

M. Robitaille (Antoine): J'en appelle à une nouvelle culture journalistique.

M. Plouffe (Robert): On va montrer l'exemple.

M. Pagé: ...

M. Robitaille (Antoine): Bien, sur le vote libre, si c'est trop encadré, est-ce que vous pourriez être tenté de voter librement de toute façon?

M. Pagé: Écoutez, voter librement, on s'est beaucoup posé la question. Lors des rencontres que nous avons eues, il y avait beaucoup de gens qui disaient: On ne doit pas avoir de vote libre lors du budget, motions de censure et également sur des éléments qui sont dans le programme du parti. Mon complice et moi, on y a réfléchi beaucoup et on a décidé de ne pas mettre le programme du parti pour la raison suivante... deux raisons.
La première, c'est qu'à partir du moment où le député devient responsable et qu'il doit répondre de chacun de ses votes je trouverais énormément incohérent qu'un député, à tout bout de champ, se mette à voter contre le programme de sa formation politique, avec laquelle il s'est fait élire. Il y aurait un non-sens là-dedans. D'être responsable, c'est aussi d'être cohérent, d'une part.
Et, d'autre part, il faut se dire que le Parti québécois a adopté son programme en 2011. S'il était élu en 2013... un projet de loi en 2016 qui a un lien avec un programme voté cinq ans plus tôt, il se peut que la donne ait changé au fil des ans. Alors, il serait normal à ce moment-là qu'un député puisse dire: Bien, écoutez, ça, ce n'est plus la réalité d'il y a cinq ans, et, moi, je veux exercer mon vote libre parce que ce projet de loi ne correspond plus à la réalité. Et vous savez que les choses évoluent très, très rapidement. On a juste à penser aux gaz de schiste: personne n'en parlait il y a à peine deux ans. M. Plouffe, oui.

M. Plouffe (Robert): ...si vous me permettez, si mon collègue, mon aimable collègue me le permet.

M. Robitaille (Antoine): ...

M. Plouffe (Robert): Merci beaucoup, Antoine. Mais ça donne quand même... Vous savez très bien comment se passe la dynamique... Puis, ne serait-ce qu'entre nous-mêmes, là, vous savez comment ça se passe, la dynamique à l'Assemblée nationale. Juste sur le vote libre, les libéraux considèrent... M. Fournier a dit hier qu'il considérait que chacun des députés libéraux votait libre de toute façon, votait librement. Donc, est-ce que ce n'est pas surtout du côté libéral que vous devriez aller chercher vos appuis? Est-ce que ce n'est pas là que ça risque de bloquer le plus?

M. Pagé: Je vais vous avouer que j'ai eu des beaux échanges avec Jean-Marc Fournier et j'ai aimé sa réaction. C'est sûr que la culture présentement ne nous amène pas jusque-là. S'il souhaitait que je fasse une présentation au Parti libéral, j'irai volontiers, absolument, et je le dis de façon très, très sérieuse parce que je souhaiterais qu'on arrive à ce qu'on ait des votes libres, et, pour que ces mesures soient sérieuses, il faut que ce soient toutes les formations politiques qui y adhèrent, c'est clair.

M. Bergeron (Patrice): Mais votre collègue M. Bergeron, Stéphane Bergeron, disait la semaine dernière au caucus que c'est bien beau, toute cette mécanique qu'on met en place, mais qu'au bout du compte, malgré tout, le parti... bon, le parti de M. Charest est au pouvoir, c'est lui qui a le... actuellement, dans les sondages, ne figure pas trop mal, alors ce n'est pas avec ça nécessairement qu'on gagne des élections.

M. Pagé: ...la question?

M. Bergeron (Patrice): Bien, je veux dire, en ce sens qu'il dit: Il faudrait revenir à un certain réalisme politique, et puis ce n'est pas avec ça que vous allez nécessairement gagner des élections, en présentant des propositions comme celle-là.

M. Pagé: Écoutez, c'est bien clair, là, que ce que je propose aujourd'hui, là, ce n'est pas un programme du Parti québécois, là, d'accord? Ce n'est pas un programme pour que, demain matin, le Parti québécois augmente de 4 % dans les sondages. Si jamais ça s'était fait, bien, tant mieux, je suis membre de cette formation politique, je ne serais pas contre, hein, on s'entend là-dessus. Mais je n'ai pas fait cette démarche pour ça. Et c'est pour cette raison que je l'ai faite de façon non partisane et en consultant des gens de toutes les formations politiques. Et vous seriez... Vous auriez été impressionnés d'entendre ce que j'ai entendu de collègues d'autres formations politiques. Évidemment, je vais me taire sur les commentaires qu'ils m'ont faits.

M. Chouinard (Tommy): Vous savez, au cours des dernières années, il y a eu tout un processus de réforme parlementaire.

M. Pagé: Oui, absolument.

M. Chouinard (Tommy): Ça a tout pris pour que ça soit adopté, puis on ne peut pas dire qu'il y avait de mesures, disons, révolutionnaires. Souvent, l'opération risquait de tomber dans des exercices partisans où chacun tirait de son côté. Mais est-ce que... Reconnaissez-vous que vous risquez fortement de frapper un mur avec ça?

M. Pagé: Peut-être. Par contre, il faut avoir un idéal, il faut faire des propositions. Je le fais ce matin, d'une part. Et vous remarquerez, dans une des propositions, il y a ce fameux comité permanent des réformes démocratiques qui serait composé d'élus et de non-élus. Alors, moi, je crois beaucoup que, si ce comité est mis sur pied - c'est une proposition également que je veux faire au président de l'Assemblée nationale - et que, s'il y avait, exemple, un mandat d'initiative qui serait donné, une tournée pour parler aux citoyens puis leur demander... je pense que la pression populaire va faire en sorte que les choses risquent de changer. On s'entend, là: en politique, là, souvent, le changement vient quand la population le souhaite. Et ce que je souhaite aujourd'hui, c'est de diffuser cette information et que la population appuie cette démarche.

Journaliste: ...

M. Pagé: Peut-être, mais je pense que ça en prend.

Journaliste: Vous avez dit que vous avez donc glané des modèles qui viennent d'autres pays, mais, dans ces autres pays là aussi, on vit une certaine désillusion de la politique. Alors, vous ne pensez pas que ce sont... on voudrait appliquer des remèdes miracles pour quelque chose qui ne réglerait pas nécessairement le cynisme envers la politique?

M. Pagé: Il n'y a pas de mesure parfaite, je pense que ce qu'il y a d'imparfait, c'est de ne pas essayer.

Mme White (Marianne): Est-ce que vous parlez anglais?

M. Pagé: Pardon? Non. Désolé. J'aimerais pouvoir m'adresser en anglais mais, malheureusement, je...

Mme White (Marianne): Je vais y aller en français alors.

M. Pagé: Oui, c'est gentil, merci.

Mme White (Marianne): Qu'est-ce que vous... Quel serait l'intérêt d'avoir des ministres qui viennent de l'opposition et que ces ministres-là soient élus par l'Assemblée nationale?

M. Pagé: Oui. Premièrement, cette proposition viendrait seulement s'il n'y a pas de référendum gagnant sur un nouveau mode de scrutin. Parce qu'un nouveau mode de scrutin où il y aurait la proportionnelle, risquerait - «risquerait», je dis bien, là - d'amener des ministres d'autres formations politiques au Conseil des ministres. Donc, la question vient de se vider. Par contre, si jamais le référendum ne passait pas et qu'on revient au système actuel, effectivement, je pense qu'il y aura une proposition très audacieuse. Certains même nous ont... m'ont dit: Ça devrait être obligatoire dans des gouvernements minoritaires. Mais pourquoi ne pas le faire dans des gouvernements majoritaires? En France, Sarkozy a des ministres issus d'autres formations politiques. Je sais que ça ne fait pas partie de notre culture, mais une culture de collaboration pourrait évidemment prendre forme avec ce genre de proposition. C'est audacieux, c'est nouveau, c'est clair que ça ne sera pas la première démarche que l'on va faire demain matin. M. Charest ne m'a pas appelé pour être ministre hier.

Mme Montgomery (Angelica): M. Pagé, êtes-vous certain... J'ai appelé votre bureau, ils m'ont dit que vous parlez un petit peu d'anglais. Vous ne pourriez pas répondre à quelques... Non?

M. Pagé: Vous allez être tellement déçue, madame. Je suis vraiment désolé, et ce n'est pas de la mauvaise foi, là, je vous assure, là. Je le souhaiterais vraiment.

Mme Montgomery (Angelica): À propos le référendum, est-ce qu'on parle d'un référendum sur la souveraineté du Québec ou on parle d'un référendum d'initiative population?

M. Pagé: Non. Dans ce document-là, étant donné qu'un référendum sur l'avenir du Québec, c'est l'affaire du Parti québécois et de Québec solidaire également, je... à mon avis, c'est un autre dossier dont je ne traite pas dans ce document-là. Est-ce que j'ai mon opinion là-dessus? Est-ce qu'un jour on pourra la partager? Peut-être, mais pas ce matin.

Mme Montgomery (Angelica): Mais, quand on parle d'un référendum d'initiative populaire, un, les balises ne seraient pas sur la souveraineté?

M. Pagé: Non. À mon avis, le référendum d'initiative populaire ne devrait pas porter sur la souveraineté du Québec. Écoutez, j'ai précisé, on pourrait, dans chacun des points, trouver des arguments et poser la question: Pourquoi vous n'êtes pas allé jusque-là? On est allés, je pense, déjà assez loin. On a mis, je pense, passablement de balises. Je pense qu'il y a déjà là beaucoup de propositions et il y a là-dedans une vision globale qui se tient. Effectivement, on aurait pu, dans certains cas, aller encore plus loin, mais la conférence de presse, elle aurait été encore plus longue.

M. Salvet (Jean-Marc): Mais, d'abord, pourquoi croyez-vous que l'option souverainiste ne doit pas faire partie d'un référendum d'initiative populaire?

M. Pagé: Écoutez, c'est instinctivement que je vous ai répondu ça ce matin. Par contre, je pense que c'est un débat, effectivement, qui mérite d'être fait, et j'invite ma formation politique à laquelle je fais partie à y réfléchir, à en discuter, mais ça sera une décision du Parti québécois. Ça ne sera pas la mienne. Spontanément, je vous dis non, mais peut-être que, quand j'aurai entendu mes collègues, je changerai d'avis. C'est la réaction ce matin, au moment où je vous parle, là. Et toutes ces propositions-là, elles pourront bouger également, là, hein? Ce n'est pas une fin en soi. Je pense que c'est une mise au jeu, mais on commence la partie, là. Alors, le score final, je ne le connais pas.

M. Lavallée (Jean-Luc): Avez-vous dit que ça fait un an que vous l'avez rédigé, votre manifeste?

M. Pagé: Oui. L'année dernière, à l'été 2010, il y avait déjà... 80 % du document était écrit, presque toutes les propositions étaient sur la table. Les consultations de cet été nous ont permis d'aller beaucoup plus loin, de les peaufiner, d'articuler un peu mieux les propositions. Mais 80 % de ce qui est ici était déjà écrit il y a un an, là.

M. Lavallée (Jean-Luc): Donc, êtes-vous convaincu que c'est le meilleur timing pour votre sortie publique aujourd'hui? Est-ce que vous ne pensez pas que ça risque de créer un peu de confusion avec tout ce qui se passe au parti?

M. Pagé: Bien, c'est pour ça que j'insiste sur le fait que ce n'est pas une démarche péquiste: je vise l'ensemble de la démocratie québécoise et je vise l'ensemble des formations politiques. Je ne vise aucune formation politique, ce matin, précise, pas celle du Parti québécois et les autres; je vise tout le monde.

Mme Montgomery (Angelica): Mais, M. Pagé, vous n'avez pas un souci que ça pourrait refléter un peu mal sur votre parti? Parce qu'il y a beaucoup de... il y avait des démissionnements, il y avait du monde qui sont sortis avec des critiques. Vous n'avez pas peur que vous serez considéré comme un autre qui sort avec des critiques de comment les choses sont faites? Dans tout le politique autant que votre parti?

M. Pagé: Mais, écoutez, c'est pour ça que j'essaie de le faire très correctement, comme je l'ai fait ce matin. Si j'avais eu l'occasion, je l'aurais fait plus tôt. D'ailleurs, je vous rappellerai que, le 8 juin dernier, dans la crise que nous avons connue, ce projet de loi n° 204, il y a une lettre que j'ai diffusée dans le journal Le Devoir, et, cette lettre-là, elle était écrite depuis un mois. Ce n'était pas une lettre, le fruit de la conjoncture et de la crise que nous avons connue. Alors, cette démarche, elle est là depuis longtemps. Alors, je ne souhaite surtout pas que ça soit interprété, ce matin, une démarche qui est en réaction à ce qu'on a vécu dans les derniers mois. Je serais très triste si c'était la perception que les gens avaient de la démarche de ce matin parce que ce n'est absolument pas ça.

Mme Montgomery (Angelica): Mais, quand vous...

Une voix: ...

M. Pagé: Oui, allez-y.

Mme Montgomery (Angelica): Quand vous dites que, pendant la période des questions, des fois, on présente des demi-vérités, qu'on vise à mettre en cause la réputation des gouvernements ou même créer des scandales au lieu de trouver des réponses à les questions, on ne parle pas de le Parti québécois, là?

M. Pagé: Bien, écoutez, je suis ici depuis 2001, alors, j'ai eu l'occasion de siéger du côté gouvernemental. Et, je peux vous dire, de ne pas se lever pour applaudir un ministre ou le premier ministre quand on fait partie de cette formation politique et que ça fait juste deux semaines qu'on est assis à l'Assemblée nationale, c'est tough un peu. Mais, avec le temps, on fait notre réputation.
Et je vous assure que ces comportements, je les ai vécus des deux côtés de la Chambre. Alors, c'est pour ça que j'ai écrit le document en ne visant aucune formation politique parce que c'est cette culture qui s'est installée au fil des ans et qui, à mon avis, contribue au cynisme de la population et qui, je pense, dans les derniers mois ou les dernières années, a peut-être été accentuée à cause de certains événements que j'ai expliqués dans les constats que j'ai présentés dans le manifeste.

M. Robitaille (Antoine): Il y a de vos collègues qui ont quitté le caucus du Parti québécois. Dans votre texte, vous ne condamnez pas directement ces élus-là, mais vous dites que ça soulève des questions éthiques que de quitter un caucus comme celui-là. Et vous allez jusqu'à dire, dans votre document, que quelqu'un qui changerait même d'allégeance politique pourrait être soumis à la procédure de la révocation.

M. Pagé: Absolument. Absolument.

M. Robitaille (Antoine): Donc, les Curzi, Beaudoin et compagnie, selon vous, ils ont quand même fait quelque chose de questionnable?

M. Pagé: Les trois seuls cas où je présente la possibilité de révocation, c'est soit reconnaissance d'un crime pour un député, l'absence prolongée injustifiée et pour un député qui se range du côté d'une autre formation politique. Que des députés, six mois avant une campagne électorale, traversent la chambre pour aller vers le parti qui risque de gagner les prochaines élections, cela n'a absolument aucun sens.
Alors, il faut, à un moment donné, que les gens soient plus responsables. À partir du moment où tu te fais élire sous une bannière, tu dois respecter cette bannière. Si tu veux aller siéger comme député indépendant, à la limite, je n'ai pas trop de troubles là-dessus parce que ces choses-là peuvent arriver. D'ailleurs, je pense qu'avec le vote libre ça risque d'arriver beaucoup moins. Alors, le processus de révocation, c'est essentiellement pour les gens qui veulent aller siéger avec une autre formation politique parce que ça ne respecte absolument pas la volonté des citoyens qui ont voté pour cette personne, et une formation politique, et un programme de parti et un chef de parti. Parce qu'on le sait, là, un bon candidat ou un bon député n'influence qu'un petit pourcentage du vote. Quand les gens votent, avant tout, ils votent pour une formation et le chef, hein? On ne se fera pas de cachettes.

M. Robitaille (Antoine): Mais vous écrivez clairement: «Les citoyens votent en réalité en grande partie pour une bannière politique et nous ne pouvons exclure cet aspect de notre réflexion.»

M. Pagé: Tout à fait.

M. Robitaille (Antoine): Donc, Mme Lapointe, M. Curzi, Mme Beaudoin, ils ont quitté et ils sont devenus indépendants...

M. Pagé: Par contre...

M. Robitaille (Antoine): ...donc ça soulève une question.

M. Pagé: Oui. Par contre, ces gens... Oui, peut-être. Par contre, ces gens n'ont pas traversé la Chambre pour aller du côté des libéraux et un parti fédéraliste, alors on s'entend. C'est pour ça que le processus de révocation, à mon avis, pourrait être mis en vigueur pour les gens vraiment qui ne vont dans une formation politique que par opportunisme politique. Et ce n'est pas le cas des gens que vous avez mentionné, là, on s'entend là-dessus, hein?

M. Robitaille (Antoine): Mais «nous ne pouvons exclure cet aspect de notre réflexion», moi, je considère que vous dites qu'il y a quand même...

M. Pagé: Oui, mais quand je dis cela...

M. Robitaille (Antoine): Ça pose quand même des questions. Nonobstant la révocation, là.

M. Pagé: Oui. Oui. Mais, quand je dis cela...

M. Robitaille (Antoine): Je ne parle pas de la révocation, là, je dis que, vous-même, vous vous dites: Ça pose un problème, au fond.

M. Pagé: Oui, tout à fait. Écoutez, moi, je suis élu, ça fait quatre fois que je suis élu, et je sais très bien que, si je me présentais demain matin comme candidat indépendant, je ne serais pas élu. C'est clair, ça. Un député, quand il est élu, il est élu parce qu'il y a aussi une organisation, un programme, un chef. Et on le sait, que les campagnes électorales sont faites sur les chefs et les formations politiques, alors on ne peut nier cela. Sauf que ce qui est, à mon avis, inadmissible, c'est les gens qui se font élire sous une bannière et qui passent carrément vers une autre bannière. Ça, à mon avis, c'est vraiment inacceptable, là.
Est-ce qu'il y a d'autres questions? Ça va? Je vous remercie. Bonne fin de journée.

(Fin à 11 h 42)

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