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Conférence de presse de Mme Sonia Bélanger, ministre déléguée à la Santé et aux Aînés, et Mme Nancy Guillemette, députée de Roberval

Version finale

Le jeudi 16 février 2023, 12 h 15

Salle Evelyn-Dumas (1.30), édifice Pamphile-Le May

(Douze heures dix-huit minutes)

Le Modérateur : Alors, bonjour à tous et bienvenue à ce point de presse de la ministre déléguée à la Santé et aux Aînés, Mme Sonia Bélanger, sur le dépôt du projet de loi concernant les soins de fin de vie. Mme Bélanger est accompagnée aujourd'hui de la députée de Roberval, Nancy Guillemette, qui a présidé les travaux de la Commission spéciale sur l'évolution de la Loi concernant les soins de vie. Mesdames, à vous la parole.

Mme Bélanger : Alors, bonjour à toutes et tous. Alors, aujourd'hui, c'est une journée vraiment très importante pour moi. C'est la première fois que je dépose un projet de loi puis c'est une journée importante pour l'ensemble de la société. Je suis très contente d'être accompagnée, d'ailleurs, pour l'occasion, de Nancy Guilmette, qui est ma collègue députée de Roberval, qui a présidé la Commission spéciale sur les soins de fin de vie. Merci beaucoup, Nancy, pour ton travail. Nancy a fait un travail extraordinaire, et j'étais soucieuse d'examiner ce projet de loi, de le conduire en tenant compte des travaux qui ont été faits précédemment.

Alors, tout d'abord, permettez-moi de souligner l'important travail que mon collègue Christian Dubé a fait en mai dernier. Dans un contexte, qui était vraiment un contexte de fin de session parlementaire, Christian Dubé avait déposé la première mouture du projet de loi. Alors, aujourd'hui, je suis fière d'avoir déposé, un peu plus tôt ce matin, une mise à jour du projet de loi modifiant la Loi modifiant la Loi concernant les soins de fin de vie et d'autres dispositions législatives, donc projet de loi n° 11.

Alors, d'entrée de jeu, l'aide médicale à mourir, c'est un soin de fin de vie, et j'insiste sur le mot «soin». C'est un soin qui permet de vivre ses derniers moments comme on le souhaite, entouré de nos proches, dans la plus grande sérénité et dignité. Vous le savez, j'ai eu l'occasion de le mentionner à plusieurs reprises, je suis infirmière de profession, je suis encore aujourd'hui infirmière, d'ailleurs, et j'ai toujours été guidée par le désir d'offrir les meilleurs soins avec beaucoup d'empathie et de respect. Le processus d'aide médicale à mourir, c'est justement cela, de l'empathie et du respect.

En 2021, la commission spéciale présidée par Nancy a entamé une démarche transpartisane et collaborative. Et, je dois le souligner, il s'agit d'un travail admirable qui a été fait en pleine pandémie, où ils ont passé un nombre d'heures important à examiner, à rencontrer différentes personnes. Les recommandations qui ont été formulées dans le rapport ont guidé l'élaboration du projet de loi que je dépose aujourd'hui, notamment concernant les demandes anticipées d'aide médicale à mourir.

Vous vous souvenez sans doute qu'une précédente mouture du projet de loi avait été déposée en mai dernier. Et, en raison de la fin de la session parlementaire, le projet de loi n'a pu être adopté. Je suis donc fière aujourd'hui de reprendre ce travail, et de vous présenter aujourd'hui une mise à jour de la loi, et d'avoir l'occasion d'en discuter avec mes collègues députés de toutes les formations politiques dans les prochaines semaines.

Avec le dossier d'aide médicale à mourir, il y a de l'histoire, mais ce qu'il faut se rappeler, c'est qu'il n'y a jamais eu de partisanerie dans ce dossier, et je n'ai pas l'intention de commencer à faire de la partisanerie avec ce dossier qui est tellement important. Je souhaite donc offrir ma plus sincère collaboration à toutes les formations politiques dans l'étude de ce projet de loi.

Alors, allons-y. Qu'est-ce qu'il y a dans ce projet de loi? Premier élément, la possibilité de faire une demande anticipée d'aide médicale à mourir suite à un diagnostic de maladie grave et incurable menant à l'inaptitude. Peut-être un exemple, si moi, je reçois aujourd'hui un diagnostic d'Alzheimer, je pourrais, avec ce projet de loi, faire une demande pour préciser mes attentes et mes volontés lorsque ma situation sera détériorée. Prenons l'exemple de la maladie d'Alzheimer, qui mène ultimement à l'inaptitude, ce n'était pas possible de faire la demande une fois qu'on avait franchi un certain stade de la maladie. Alors, la demande anticipée permet de faire cela. On souhaite que les gens puissent avoir un droit de regard sur le type de fin de vie qu'ils souhaitent.

Deuxième élément, on ajoute la possibilité de faire une demande d'aide médicale à mourir pour les personnes vivant avec un handicap neuromoteur grave et incurable, ces deux mots-là sont très importants, à condition, bien sûr, de remplir les autres critères. J'y reviendrai tantôt, là, les critères qui sont dans la loi actuelle. On aura assurément l'occasion d'en discuter avec les groupes, lors des consultations, et avec mes collègues députés et on prendra le temps de bien le faire. C'est une question délicate, sensible et qui doit être abordée avec humanisme, mais aussi en considérant l'évolution de notre société et l'évolution de la science.

Troisième élément du projet de loi, les maisons de soins palliatifs et les hôpitaux privés ne pourront pas exclure l'aide médicale à mourir dans leur offre de soins. Or, comme société, on a voulu donner l'accès à l'aide médicale à mourir. Les gens qui veulent en bénéficier doivent pouvoir le demander, peu importe l'endroit où ils reçoivent ces soins. Et les maisons de soins palliatifs font partie d'un lieu, d'un endroit où les personnes pourraient demander l'aide médicale à mourir.

J'ai malheureusement entendu plusieurs histoires, dans les derniers mois, de Québécois qui ont dû se déplacer en ambulance pour recevoir l'aide médicale à mourir alors qu'ils étaient dans des situations de douleur et d'inconfort importants, comme vous pouvez l'imaginer, lorsqu'on arrive à la fin de vie et que, malheureusement, la sédation ne fonctionne pas. Alors, pour moi, c'est important que les maisons de soins palliatifs, qui font, ceci étant dit, un travail extraordinaire, puissent offrir le soin de l'aide médicale à mourir.

Quatrième élément du projet de loi, on souhaite que les infirmières praticiennes spécialisées puissent réaliser l'ensemble du processus à l'aide médicale à mourir, au même titre que les médecins. Ça s'inscrit dans notre désir de décloisonner les professions, et pour permettre un meilleur accès aux soins. Aussi, nous voulons permettre aux infirmières de constater officiellement le décès, pas juste au moment ou dans le processus de l'aide médicale à mourir, mais dans les différents soins de santé. Alors, pendant la pandémie, étant donné l'urgence sociosanitaire, les infirmières avaient eu, entre guillemets, le droit de constater les décès. Et, en lien avec la fin de l'urgence sanitaire, ce droit, dans le fond, a été retiré. Alors, nous souhaitons, dans ce projet de loi, réexaminer cette intervention que les infirmières pourraient faire.

Cinquième élément du projet de loi, nous avons indiqué, dans le projet de loi, qu'un trouble de santé mentale n'est pas considéré comme une maladie grave et que cet unique diagnostic ne permet pas de demander l'aide médicale à mourir. On l'a vu, dans les dernières semaines, il n'y a pas de consensus sur cette question, tant au sein des professionnels qu'au sein des différents groupes représentant les intérêts des usagers ou des personnes.

Alors, en conclusion, les mesures proposées dans ce projet de loi sont réfléchies et s'appuient sur des avis exprimés tant par des citoyens que des experts. Et nous aurons l'occasion de poursuivre notre réflexion accompagnés des différents groupes qui viendront nous présenter leur position.

Les travaux et l'élaboration de ce projet de loi ont été réalisés avec une grande rigueur et délicatesse, et je remercie tous ceux et celles qui ont participé à cette démarche si importante. Je tiens d'ailleurs à saluer l'ouverture de l'ensemble des collègues de l'Assemblée nationale et à les remercier pour leur collaboration et leur appui. J'ai d'ailleurs eu l'occasion d'en discuter, là, avec eux dans les deux derniers mois avant la période des Fêtes et également pas plus tard que cette semaine, mardi. Je souhaite grandement poursuivre cette collaboration et je souhaite que l'on travaille comme une seule et même équipe, pour les Québécois et les Québécoises, dans cet important projet de loi.

Mes dernières phrases iront aux personnes qui nous écoutent aujourd'hui. Alors, ce projet de loi, il est pour vous, pour permettre à notre société d'avoir accès aux meilleurs soins de fin de vie. Pour plusieurs Québécois et Québécoises, je sais que c'est un projet de loi attendu. Soyez assurés que je vais y mettre tout mon cœur jusqu'à son adoption. Et je passe maintenant la parole à ma collègue Nancy. Nancy.

Mme Guillemette : Bonjour, tout le monde. Merci, Mme la ministre et félicitations pour le dépôt de ce projet de loi n° 11 qui est tant attendu. Donc, je suis très heureuse de vous accompagner aujourd'hui pour cette conférence de presse. Il s'agit d'une étape importante qui est franchie aujourd'hui, une étape qui nous mènera, je le souhaite ardemment, à l'adoption d'un projet de loi. Les modifications proposées représentent une avancée significative à plusieurs égards. Quelles que soient nos valeurs, les enjeux entourant les soins de fin de vie nous interpellent toutes et tous.

Je suis très fière du travail accompli par la commission et j'en profite pour remercier tous les collègues de toutes les oppositions, les partenaires, on a été des partenaires. Donc, merci beaucoup d'avoir relevé ce défi. Il faut le redire, on a entendu, pendant 200 heures en visio, une pléiade de groupes. Donc, c'est un mandat qu'on a pris très, très au sérieux, et les recommandations que nous avons formulées font état de l'évolution de la société québécoise en ce qui concerne l'aide médicale à mourir. Je suis satisfaite de voir que le projet de loi y fait écho. Merci.

Comme mentionné dans le rapport de la commission spéciale, nos recommandations sur la mise en place d'une demande anticipée d'aide médicale à mourir se sont appuyées sur les contributions de nombreux intervenants et intervenantes qui ont nourri nos réflexions. Par ailleurs, nous, les membres de la commission, on a considéré que le principe de précaution s'imposait quant à l'admissibilité de l'aide médicale à mourir pour les personnes qui ont, comme seul diagnostic, un trouble mental.

Les nombreux avis d'experts, les mémoires reçus, les témoignages émouvants entendus nous ont grandement guidés pendant les travaux de la commission. Nous avons privilégié une approche de collaboration, sans partisanerie, guidée par la dignité, l'autodétermination, mais aussi la protection des personnes les plus vulnérables. C'est ainsi qu'on a pu dégager un consensus sur des enjeux très délicats et complexes. Je tiens à remercier sincèrement, à nouveau, l'ensemble des membres de la commission qui ont participé à cette démarche, mais aussi tous les gens qui sont venus témoigner, les organismes qui sont venus témoigner de leur vécu.

Et je tiens à vous remercier, Mme la ministre, d'avoir déposé le projet de loi, ce matin, et de reprendre le flambeau de ce projet de loi avec tellement de bienveillance. Je suis très honorée de pouvoir être à vos côtés. Et ce qu'il faut dire aujourd'hui, c'est que ce n'est pas le projet de loi des parlementaires, ce n'est pas le projet de loi du gouvernement, mais c'est bien le projet de loi des Québécoises et des Québécois. Merci, Mme la ministre.

Mme Bélanger : Merci.

Le Modérateur : Merci beaucoup. Nous en sommes maintenant à la période de questions. Et nous allons commencer aujourd'hui avec Louis Lacroix de Cogeco.

M. Lacroix (Louis) : Bonjour, mesdames. Sur les maladies mentales, j'essaie de comprendre pourquoi. C'est comme si… on dirait que vous faites un «statement» pour dire que la maladie mentale n'est pas une maladie grave. Si vous ne vouliez pas que ce soit inclus dans les soins de fin de vie, vous aviez juste à ne pas le mettre dans le projet de loi, mais là on dirait que vous allez un rang plus loin en prenant la peine de dire que c'est exclu. Pourquoi?

Mme Bélanger : Bien, en fait, pourquoi on le mentionne clairement, c'est que ça a quand même été discuté, si je ne me trompe pas, lors de la commission spéciale sur les soins de fin de vie, le trouble mental était à votre agenda, et c'est pour ça qu'on prend la peine de mentionner qu'on ne le mettra pas. Puis je vais laisser Nancy… puis je vais vous revenir après pour préciser ma réponse.

Mme Guillemette : Si je peux me permettre, en fait, en enlevant la clause de mort imminente, il faut venir encadrer les troubles mentaux, sinon on aura là une porte ouverte, là. Et les experts et les gens en commission sont venus nous dire que, bon, c'est difficile, là, de dire que c'est irréversible. Donc, je pense que ce sujet-là, à lui seul, est très sensible, et, à cause qu'on a enlevé le soin de fin de vie, il faut venir encadrer le trouble mental.

Mme Bélanger : Oui. Peut-être si je peux préciser, on a clairement ressenti que le trouble mental et l'aide médicale à mourir ne font pas consensus parmi les différents groupes d'experts. J'ai eu l'occasion de rencontrer des médecins et, à mon avis, je n'ai pas eu de démonstration claire que ce sujet avait été discuté avec les usagers, avec les proches.

Et puis rien n'empêche que la discussion pourra se faire éventuellement. L'idée n'est pas de retirer un droit, je veux quand même être claire ici, parce que, si on va de l'avant avec le projet de loi, et c'est ce que je souhaite, ce sera un droit de demander l'aide médicale à mourir, en respectant tous les critères que j'ai énoncés, puis on ne veut pas retirer ce droit aux personnes ayant un trouble mental. Mais je pense que c'est vraiment important que le débat puisse se faire et puis qu'on puisse entendre aussi les principales personnes intéressées à ce niveau-là, donc des personnes qui ont un diagnostic de trouble mental. Et puis ça nous semblait vraiment précipité de faire ça aujourd'hui. Et je pense qu'il faut prendre le temps, c'est une question qui est extrêmement délicate. On l'a vu, au niveau fédéral, ils l'ont intégrée dans le Code criminel, ils ont mis la notion de handicap et la notion de trouble mental. On n'était pas rendus là ici, au Québec.

M. Lacroix (Louis) : Justement, sur la notion de handicap neuromoteur grave, vous le réintroduisez. Avez-vous confiance que ça va être adopté ou c'est pour susciter un débat, justement, que vous le ramenez dans le projet de loi?

Mme Bélanger : Bien, c'est les deux. En fait, oui, j'ai confiance. Si on l'a mis là, c'est qu'on voit qu'il y a une évolution dans la société, on voit qu'il y a de...

M. Lacroix (Louis) : Vous croyez qu'on est rendus là?

Mme Bélanger : Écoutez, on a de plus en plus de situations où des usagers, des personnes, des patients veulent avoir la conversation avec leur médecin, avec leur professionnel, avec leurs proches. Et il y a de plus en plus de situations... Je ne veux pas revenir sur le détail de la situation de fin de vie de M. Truchon, ça a été médiatisé. Mais je pense que c'est important. Puis je nomme M. Truchon parce que ça a été médiatisé, en tout respect, mais il y a d'autres situations cliniques de plus en plus, puis je pense que c'est important qu'on puisse prendre le temps, et c'est pour ça qu'on le met dans le projet de loi. Parce que, oui, on va prendre le temps d'examiner correctement la situation, d'entendre les experts, d'entendre... moi, je le dis toujours, entendre les personnes aussi. Et donc c'est important de le mettre dans le projet de loi.

Puis, oui, je suis confiante qu'on est rendus à un autre niveau pour les personnes présentant un handicap neuromoteur. Mais je veux quand même terminer ma phrase, là. C'est vraiment en fonction d'un handicap neuromoteur grave, irréversible, avec des souffrances physiques, psychologiques non apaisantes. Prenons l'image de quelqu'un qui est prisonnier de son corps. C'est de ça qu'on parle. Alors donc, c'est vraiment important. Et ces gens-là, on le sait, très souvent, ne sont pas dans une fin de vie imminente, c'est-à-dire ne décéderont pas dans les jours qui suivent, mais ils vivent avec des souffrances atroces puis ils ont fait un parcours de vie. Et il ne faut pas oublier une chose, là, c'est que la décision, la première décision de l'aide médicale à mourir, là, c'est la personne.

M. Lacroix (Louis) : ...oui, je comprends, mais...

Mme Bélanger : C'est la personne qui fait ce cheminement-là et qui demande de l'aide, qui demande le soin.

M. Lacroix (Louis) : Mais, puisque M. Truchon, parce que vous le citez, a été obligé d'avoir recours aux tribunaux pour avoir son droit reconnu, est-ce que ça ne démontre pas, en fait, qu'il y a un enjeu social, là, de reconnaissance de ce droit-là à inclure dans une loi? Je ne sais pas si vous comprenez ce que je veux dire?

Mme Bélanger : Bien, en fait, c'est que, dans la loi actuelle, il y avait le critère de fin de vie imminente, et, dans certaines situations... là, je ne veux pas revenir sur cette situation-là en particulier, mais on le voit, qu'il y a certaines personnes qui ne sont pas en fin de vie imminente. D'ailleurs, le jugement Beaudoin-Truchon-Gladu a fait en sorte de retirer le critère de fin de vie de la loi actuelle. Alors là, dans le fond, ce qu'on vient faire, on va le retirer dans le cadre de ce projet de loi là, puis ça nous... donc, ça nous demande d'analyser ça d'une autre façon. Si on retire le critère de soins de fin de vie, il faut vraiment l'analyser dans un contexte.

Puis actuellement, juste pour faire figure, là, bien, les personnes qui ont un cancer, qui arrivent en fin de vie peuvent demander l'aide médicale à mourir puis, s'ils répondent aux critères, après évaluation, ils vont l'avoir. Mais quelqu'un qui est dans des souffrances atroces, qui n'a pas un diagnostic de cancer, mettons — je le mentionne aujourd'hui, là, juste pour qu'on puisse bien comprendre — n'aurait pas le droit même de le demander, là, je veux dire, alors... Et je pense que ça, c'est vraiment important qu'on puisse l'examiner. Moi, je suis confiante, parce qu'il est... ce que je suis confiante aujourd'hui, là, c'est qu'il est écrit noir sur blanc, puis qu'on va pouvoir en discuter. Puis on va écouter.

Le Modérateur : Maxime Denis, TVA.

M. Denis (Maxime) : Bonjour, madame. Justement, au point de vue fédéral, on a repoussé à l'an prochain la discussion ou l'adoption de la loi, mais ne craignez-vous pas, justement, qu'il y ait comme deux vitesses au pays et qu'on se retrouve devant les tribunaux, qu'il y ait des enjeux?

Mme Bélanger : Bien, il faut quand même se rappeler, là, qu'au Québec on a été les premiers à adopter le projet de... la loi sur les soins de fin de vie. C'est arrivé après que le fédéral est venu amener des modifications au Code criminel, mais on a quand même été les premiers à le faire. Puis on va continuer à faire les discussions correctement, et de baliser ce soin, et, je veux dire, on n'attendra pas, là, que le fédéral puisse compléter ses discussions. De toute façon, là, je vais vous dire, quand on regarde un peu le fédéral, ce qu'ils ont écrit dans le Code criminel, c'est la notion de handicap, handicap. Nous, on vient préciser. Ils ont parlé de troubles mentaux, mais là ils l'ont repoussé on ne sait pas quand. Alors, il faut qu'ils finissent leurs discussions, puis on n'attendra pas, là, à ce niveau-là, là, on va entreprendre nos discussions.

M. Denis (Maxime) : Mais c'est quand même pour 2024, ça s'en vient vite. Puis la Cour suprême a reconnu... il y a des médecins... le Collège des médecins reconnaît troubles mentaux, maladies. Pourquoi on ne le reconnaît pas?

Mme Guillemette : Bien, en fait, Mme la ministre, si je peux me permettre, on l'a étudié, parce que c'est une recommandation aussi de la commission que d'aller vers le principe de précaution. Ce qu'on a entendu, en commission, nous demandait d'aller vers le principe de précaution, et c'est ce qu'on a fait. Et là, bon, on l'a vu au fédéral, ils ont sursis jusqu'en 2023, ils sont passés de 2023 à 2024, donc on verra leur posture en 2024. Mais nous, la commission, avons jugé que... ce qu'on entendait, on devait encore se pencher là-dessus en tant que société. Parce que...

M. Denis (Maxime) : Qu'est-ce qui accrochait?

Mme Guillemette : Bien, en fait, c'est l'irréversibilité. On a eu plein de témoignages, et il n'y a pas consensus, et on ne sentait pas le consensus sur cet aspect-là non plus, donc le projet de loi reflète ça présentement. Donc, on verra la posture qu'aura le fédéral en 2024, mais présentement, nous, Mme la ministre, avons jugé, là, qu'on respectait le principe de précaution pour ce qui était des troubles mentaux.

Mme Bélanger : Oui. Puis, l'autre chose, revenons sur les critères de base. On l'a dit tantôt, le critère de fin de vie, qui est dans la loi actuelle, ce critère-là, il est rendu inopérant avec le jugement, notamment, là, qui a eu lieu pour Beaudouin-Gladu. Mais un critère important, c'est la maladie grave et incurable. Et, quand on pose la question par rapport au trouble mental, certainement que c'est grave, mais est-ce que c'est incurable? Ça fait que, tu sais... Alors donc, je pense que, quand Nancy mentionne le principe de précaution, bien, je pense que c'est vraiment important, puis il faut prendre le temps de faire les discussions, de...

Et le Collège des médecins, oui, se positionne, puis il y a d'autres groupes aussi, O.K. Alors, bien sûr qu'on travaille en étroite collaboration, dans notre société, avec les ordres professionnels, notamment le Collège des médecins, mais les autres ordres professionnels aussi. Ça fait qu'on veut entendre tout le monde, et puis je pense que c'est ça qui est important. À mon avis, il aurait été vraiment prématuré de mettre la notion de trouble mental dans le projet de loi et de retarder, je dirais, l'adoption d'un projet de loi parce qu'on aurait pris... Il faut prendre le temps nécessaire, puis ça prendra les mois nécessaires pour discuter du volet trouble mental. Puis un projet de loi, ça se réouvre, ça se réouvre. Mais on n'est pas là aujourd'hui.

Le Modérateur : Véronique Prince, Radio-Canada.

Mme Prince (Véronique) : Bonjour à vous deux. Corrigez-moi si je me trompe, mais je veux revenir sur les handicaps neuromoteurs, là. Une personne qui en souffre ne peut pas faire, cependant, une demande anticipée. Parce que, tu sais, vous avez dit tout à l'heure : Si on est prisonnier de notre corps, bien, on peut vouloir faire la demande. Je veux dire, n'importe qui qui est dans la salle, ici, si, un jour, se retrouve dans cette situation-là, voudrait peut-être demander l'aide médicale à mourir, mais il n'y a pas de possibilité de le faire de manière anticipée. Est-ce que vous pourriez vous pencher là-dessus ou...

Mme Bélanger : Bien, en fait, peut-être que vous faites référence à la directive médicale. En fait, aujourd'hui... Prenons un exemple, je vais prendre un exemple de moi-même, là, j'ai un accident, je me retrouve quadriplégique, je suis en réhabilitation, en réadaptation, puis, bon, je passe à travers toutes ces étapes-là, et je ne veux pas... puis, disons, là, que... Là, je dis : Quadriplégique, là, mais imaginons une atteinte générale du système nerveux central, O.K. Donc, c'est grave, incurable, certainement, parce qu'il n'y a pas rien, actuellement, qui est offert comme traitement pour renverser la situation des personnes qui ont des atteintes graves au niveau du système nerveux.

Alors, est-ce que moi, aujourd'hui, je pourrais faire une demande? Non, je ne peux pas faire une demande. Là, on parle de directives médicales. Je pourrais peut-être... pas peut-être, mais je pourrais, dans le fond, exprimer mes souhaits, mais ce n'est pas une demande médicale, ce n'est pas une demande en vertu de la loi sur les soins de fin de vie, de demande médicale anticipée. C'est une directive que je pourrais donner de dire : Bien, moi, un jour, si ça m'arrive... La même chose si j'ai un arrêt cardiaque, je suis inconsciente, il m'arrive telle affaire, bien, je ne veux pas avoir de respirateur, je ne veux pas de manœuvre. Bon, vous voyez un peu? Là, ce n'est pas une demande, ça, ce n'est pas la demande anticipée, là, c'est plus une directive médicale.

Mme Prince (Véronique) : O.K.Je comprends, merci.

Mme Guillemette : Puis quelqu'un qui a un trouble neurologique, il va rester jusqu'à la fin. Donc, on ne parle pas ici de consentement anticipé, mais il sera bien admissible en ayant tous les autres critères. Et là il faut que l'équipe de soins, et, bon, le processus... Mais il sera admissible sur l'autre base, là, mais on ne parle pas ici d'anticiper, parce qu'il sera apte jusqu'à la fin.

Mme Prince (Véronique) : Je comprends. Puis mon autre question, toujours en lien avec ce sujet-là, là, vous avez décidé de le ramener dans le projet de loi : Est-ce que c'est parce que vous vous aperceviez qu'il fallait faire une harmonisation avec la loi fédérale? Parce que les médecins vous l'ont dit à plusieurs reprises que, dans leur cabinet, ils ne savaient pas : Il faut-u suivre la loi fédérale ou la loi provinciale à ce niveau-là? Puis est-ce que vous avez entendu parler de patients qui allaient dans d'autres provinces, justement, pour recevoir l'aide médicale?

Mme Bélanger : Oui, bien, en fait, c'est sûr qu'il y a un souci d'harmoniser, mais ce n'est pas le but ultime non plus, O.K.? Là, je veux quand même le mentionner. Bien oui, là, on veut éviter que nos médecins puis les professionnels, les IPS, éventuellement, puissent travailler dans leur champ d'exercice en n'ayant pas toujours une menace, là, d'être poursuivi. Ça, c'est clair qu'on veut harmoniser, là, par rapport au Code criminel, mais, oui, la volonté d'harmoniser, mais ce n'est pas pour ça qu'on le fait, mais ça va permettre cela.

Mais on veut quand même, à la lumière de ce qu'on a vécu, il faut quand même se rappeler, là, que c'est depuis 2010 qu'on parle de mourir dans la dignité, alors depuis 2010, en 2015, il y a eu la loi, et puis là on est rendus en 2022. Ça fait qu'on a tout un historique, au Québec, là, il y a eu beaucoup de personnes avant nous qui ont porté le flambeau de ça. Et je pense que c'est… Puis on le voit, et tantôt vous avez peut-être vu que j'ai eu une certaine émotion, parce qu'on a tous des personnes ou des situations autour de nous de personnes qui ont demandé l'aide médicale à mourir. Ça se fait, actuellement, là.

Et donc je pense que c'est important qu'on puisse bien baliser les choses. Pour moi, la question de baliser... j'ai eu de l'émotion tantôt, là, mais, au-delà des émotions, je pense que ce qui va être bien important, c'est que ce soit très clair, qu'il y ait des règles de soins, qu'il y ait des procédures, des protocoles, bon, vous savez, et tout ce qu'il faut, là. Et d'ailleurs nous avons une Commission sur les soins de fin de vie, et c'est un modèle par rapport à d'autres pays, on a vraiment... Dr Michel Bureau, qui est le président de la commission des soins de fin de vie, avec plus d'une dizaine d'experts, et toutes les situations de demande d'aide médicale à mourir sont analysées par ce comité d'experts.

Et j'ai d'ailleurs déposé, en décembre dernier, le rapport annuel sur la Commission sur les soins de fin de vie, qu'ils doivent déposer à l'Assemblée nationale, leur rapport annuel, alors. Et on suit, naturellement, là, de façon périodique, et donc c'est vraiment avec eux. Et donc on s'est dotés d'une balise puis d'un mécanisme, là, qui est vraiment extrêmement important, en termes de vigilance, d'examen des situations, de recommandations aussi.

Le Modérateur : Geneviève Lajoie, Le Journal de Québec.

Mme Lajoie (Geneviève) : Bonjour, je voudrais encore parler des handicaps. Vous avez dit, tout à l'heure : Oui, je souhaite que ce soit adopté, je souhaite aussi qu'il y ait un débat. Mais est-ce qu'on comprend, donc, que vous êtes ouverte aussi à peut-être ne pas aller jusque-là, c'est-à-dire de... Parce que ça avait été retiré, quand même, du projet de loi au printemps dernier. Donc, est-ce que vous êtes quand même ouverte à ce que les oppositions disent non, par exemple? Parce qu'elles avaient été assez... ça avait été froidement accueilli, là, le printemps dernier. Est-ce que vous êtes donc ouverte à ce que ce soit retiré du projet de loi à nouveau?

Mme Bélanger : Bien, c'est une excellente question. Je vous dirais, quand on dépose un projet de loi, on souhaite que le projet de loi soit adopté. Ça fait que c'est clair que, ce que je souhaite...

Mme Lajoie (Geneviève) : Vous êtes négociable, là-dessus? C'est ça que...

Mme Bélanger : Oui. Bien, ce que je souhaite, c'est que les éléments qui sont là... Parce qu'il y a eu beaucoup de travail. Ça a été examiné, ça a été débattu. Il y a eu quand même, là, une commission spéciale. Puis on l'a oubliée, là, avec le temps, mais c'est quand même pendant plusieurs mois, qu'ils ont travaillés, plusieurs députés ensemble. Ils ont fait des recommandations. Donc, on récupère le travail qui a été fait, ça, c'est important, puis on va poursuivre aussi. Moi, je vous dirais qu'aujourd'hui, là, dans le fond, ce que je souhaite, c'est qu'on travaille ce dossier-là de façon transpartisane. C'est une décision que je ne veux pas porter uniquement sur mes épaules. Je suis responsable, comme ministre, de porter ce projet de loi, je vais le faire avec toute la rigueur, tout le professionnalisme, l'empathie, mais ce que je souhaite, c'est que le projet de loi passe. J'y crois, puisque je le dépose. Mais on va travailler consciencieusement, tout le monde, puis on va écouter ce que les gens ont à nous dire.

Mme Guillemette : Ce qu'il y a de différent avec la première mouture qu'on a eue en mai dernier, c'est qu'il y aura des consultations. Parce que nous, en commission spéciale, il y a des gens qui venaient nous témoigner puis nous dire : Il faut ajouter le handicap neuromoteur, il faut aller là. Par contre, ce n'était pas dans le mandat de notre commission. Nous, notre mandat, c'était est-ce qu'on y va pour la santé mentale, est-ce qu'on y va pour l'inaptitude. Donc, on n'en a pas débattu et on n'a pas eu de discussion, mais on trouvait pertinent, et, lorsqu'il y a eu le dépôt du projet de loi, bien... Ce qu'il y a de différent, cette mouture-là, c'est qu'on aura des consultations sur ce sujet-là et on pourra en discuter tout le monde ensemble. Donc, c'est ce qui nous fait croire, dans nos discussions, on le souhaite, là, Mme la ministre le souhaite aussi, qu'on puisse ajouter cet aspect-là.

Mme Bélanger : Puis, Nancy, je pense qu'à la dernière session mon collègue Christian Dubé a déposé le projet de loi avec à peu près les mêmes éléments, à peu près les mêmes, mais l'agenda législatif était extrêmement fourni, et il manquait de temps pour faire une discussion, je dirais. Et puis c'est ça que je propose, là, actuellement, c'est que, là, on est dans un contexte différent puis on va prendre le temps de faire les discussions nécessaires.

Mme Lajoie (Geneviève) : Merci. Je voudrais vous entendre sur l'élargissement aux enfants. Je ne sais pas s'il en a été un peu question dans votre commission spéciale, mais j'aimerais vous entendre là-dessus. Il y a des pays qui réfléchissent déjà à ça. Donc, je voudrais vous entendre là-dessus.

Mme Bélanger : Actuellement, dans la loi, et notre intention n'est pas de le modifier, il faut que les personnes soient majeures et aptes à consentir aux soins, donc, majeures. On ne l'a pas mis, là, parce que, pour les enfants, c'est une autre approche de soins palliatifs. J'ai travaillé, au cours de ma carrière, au CHU mère-enfant Sainte-Justine, et puis j'avais, donc, travaillé à organiser le premier congrès mondial de la francophonie au niveau des soins palliatifs pédiatriques. Puis il y a un médecin qui m'avait dit : Vous savez, les enfants, ce ne sont pas des adultes en miniature. Ça fait qu'il faut réfléchir les choses différemment quand on parle de soins palliatifs aux enfants. Alors donc...

Et on n'a pas eu de demande, je dirais, là. Je ne sais pas si vous... Je ne pense pas que vous l'avez examiné, en tout cas, ce n'est pas une recommandation, ça, c'est sûr, mais il n'y a pas eu de demande. Je ne dis pas qu'éventuellement il ne faudra pas le regarder, mais je laisse le soin, en fait, aux pédiatres, aux équipes interdisciplinaires, là, qui travaillent auprès des enfants de prendre les meilleures approches de fin de vie avec les enfants. Mais, honnêtement, je ne pense pas que ça passe par un projet de loi aujourd'hui.

Mme Lajoie (Geneviève) : Donc, le Québec n'est pas du tout rendu là?

Mme Bélanger : Non.

Mme Lajoie (Geneviève) : Merci.

Le Modérateur : Florence Morin-Martel, Le Devoir.

Mme Morin-Martel (Florence) : Je me demandais... Dans le projet de loi, en fait, les maisons de soins palliatifs vont être obligées d'inclure ce soin-là. Qu'est-ce qu'on prévoit pour qu'elles le respectent, en fait?

Mme Bélanger : Bien, à partir du moment où on dit que c'est un soin... Parce que, dans le fond, les maisons de soins palliatifs au Québec, là, ils font un excellent travail, et puis je pense qu'ils sont présents dans plusieurs villes, dans plusieurs communautés. Puis, depuis 2015, il y a eu, je dirais, une grande évolution de leurs programmes de soins. Aujourd'hui, il y a près d'une dizaine de maisons de soins palliatifs qui n'offrent pas l'aide médicale à mourir. Ils sont plus dans une perspective de, bien, soulagement de la douleur, bien sûr, d'une approche globale et de sédation palliative continue, et ils n'offrent pas l'ultime soin. Puis c'est un soin de dernier recours, là, je veux quand même le mentionner aussi, parce que je ne veux pas banaliser. C'est quand même un geste important de faire ce soin.

Et, pour moi, c'est très clair, j'ai vu des situations, j'ai des gens qui m'ont appelée, des familles, qui ont vécu des choses extrêmement difficiles, qui voulaient aller en maison de soins palliatifs, parce que l'environnement, parce que l'approche... bon, etc., mais qui voulaient être certains qu'en cours de route si leur souffrance n'est pas apaisée, qu'ils pourraient demander l'aide médicale à mourir. Et, dans certaines situations, ça leur a été refusé. Il y a même des situations... comme je vous l'ai dit tantôt, des gens qui ont été mis dans des ambulances pour être amenés vers l'hôpital. Pour moi, ça, c'est inadmissible.

Mme Morin-Martel (Florence) : Mais, si elles sont récalcitrantes, est-ce que vous allez leur imposer des amendes ou... Comment ça va fonctionner?

Mme Bélanger : Bien, on est dans une loi, on va accompagner les gens pour qu'ils puissent développer leur expertise. Mais c'est clair que, pour moi, c'est une attente. Donc, ça, c'est vraiment important.

Le Modérateur : Simon Bourassa, Noovo.

M. Bourassa (Simon) : Bonjour, mesdames. J'aimerais clarifier la notion, peut-être, de tiers de confiance. Le rôle, exactement, du tiers de confiance, quel est-il? Puis quel est l'encadrement que la loi apporte pour s'assurer que ce tiers-là est de confiance et reste de confiance, aussi, tout au long du processus, là?

Mme Bélanger : Bien, en fait, là, on rentre beaucoup, beaucoup dans le processus. Je vais répondre à votre question, mais de façon quand même assez large, parce que, là, il y a des balises, puis, avec ça, il devrait y avoir des règles de soins pour expliquer vraiment le rôle des tiers de confiance. Mais, en fait, quand une personne prend une décision comme ça par rapport à sa vie, c'est important qu'elle puisse le faire en toute connaissance de cause puis, je vous dirais, avec des gens de son entourage.

Ça fait que le tiers de confiance, c'est une personne, ça le dit, qui a la confiance de la personne qui est en processus pour demander l'aide médicale à mourir, et ce tiers de confiance va avoir un rôle, va avoir un rôle au niveau de l'équipe de soins, un rôle d'accompagnement, de défense, d'une certaine façon, d'intérêt. Et le tiers de confiance, c'est vraiment... ce n'est pas nécessairement un proche. Ça peut être... Ce n'est pas nécessairement un membre de la famille. C'est une personne en qui on a confiance, puis on a confiance qu'elle va défendre nos intérêts. Puis je pense que ça, c'est très important, puis, notamment, dans un contexte... Prenons l'exemple de la maladie d'Alzheimer, où la personne signifie — tantôt, je vous ai donné l'exemple — que, le jour où elle sera dans un déclin avancé, il faudra procéder à l'aide médicale à mourir. Bien, le tiers de confiance arrive là en jeu, naturellement, avec l'équipe de soins, et ça, ce sera... Donc, on aura l'occasion d'en discuter beaucoup, mais le rôle sera précisé, là, naturellement.

M. Bourassa (Simon) : D'accord. Puis vous avez parlé tout à l'heure de ne pas banaliser, là, cette démarche-là, ce soin-là. Il y avait des statistiques quand même assez surprenantes ce matin, là, par rapport au nombre de demandes. Le Québec est une des législations où c'est permis où il y en a le plus. Bon, le terme est un peu bizarre, mais pourquoi, selon vous, c'est aussi populaire au Québec, l'aide médicale à mourir?

Mme Bélanger : Ma compréhension, c'est que l'aide médicale à mourir au Québec, on l'a vraiment conçue dans une perspective de soins de fin de vie. On n'est pas dans le suicide assisté, loin de là, puis on est plus dans une perspective de soins. Puis je pense que cet élément-là fait en sorte... puis parce qu'on s'est donné des balises aussi très importantes, c'est transparent. Je vous disais, tantôt, là, rapport annuel déposé à l'Assemblée nationale, vous pourrez le consulter aussi, mais on s'est donné des balises, on est transparents.

La qualité de vie est quelque chose d'extrêmement important. Le fait de ne pas vivre dans des souffrances physiques et psychologiques qui ne sont pas apaisantes. Je pense que ça fait une différence et que les gens disent : Bien, moi... Et je le répète, là, c'est un soin ultime, ce n'est pas un soin de premier recours, c'est le soin ultime. Puis on parle, je le rappelle, des critères maladie grave et incurable, puis là on ajoute le handicap neuromoteur. On précise aussi par rapport à ce qui est écrit au fédéral.

Ça fait que, donc, on vient vraiment circonscrire. Je pense que la notion de mourir dans la dignité est quelque chose d'extrêmement important. Plusieurs personnes nous disent : Bien, j'ai vu ma mère, mon père dans cette situation-là puis je ne veux pas être comme ça, je ne veux pas. Ça fait que ça, pour moi, c'est mourir dans la dignité aussi. Puis je pense qu'il y a du travail qui est fait au Québec depuis… On a pris le temps de faire les choses correctement, ça a commencé en 2010, là, la discussion autour de ça, puis c'est en 2015 qu'il y a eu...

Mme Guillemette : La pensée des gens a évolué, la société... Il y a des gens qui sont venus nous dire, en commission spéciale, qu'ils étaient contre, en 2010, puis là ils sont venus témoigner pour. Donc, on le voit, en général, là, que ça fait partie maintenant d'un soin.

Le Modérateur : Fanny Lévesque, La Presse.

Mme Lévesque (Fanny) : Oui, bonjour à vous deux. Je voudrais savoir si vous avez quand même l'intention de définir handicap neuromoteur, parce que ça peut parfois ne pas être une maladie, un état. Qui va déterminer que la souffrance est grave? Donc, est-ce que vous avez cette intention-là de, en fait, bien le définir, évidemment, mais de le lister, là, de façon précise?

Mme Bélanger : Oui, bien, aujourd'hui, je ne peux pas en faire une, liste, ce serait très malhabile de ma part de faire ça, là, mais, durant les consultations, on va voir, bien, je dirais, avec les usagers. Je reviens toujours à ça parce que c'est important de connaître l'histoire de la personne aussi. Puis n'oublions pas une chose, là, c'est la personne qui va le demander. Donc, ça, c'est important. Puis après ça il y a la question de la science. On va vraiment le discuter, l'examiner aussi avec les experts, mais, oui, je pense que ça devra être balisé davantage.

Mme Lévesque (Fanny) : Je voudrais vous entendre, on voyait, ce matin, qu'il y a beaucoup de femmes migrantes qui arrivent au Québec puis qu'elles veulent... qu'elles sont enceintes ou qu'elles tombent enceintes par la suite. Est-ce que le Québec devrait en faire plus pour offrir une couverture des soins à ces femmes-là?

Mme Bélanger : Bien, je pense que le Québec fait déjà beaucoup. On reçoit beaucoup de personnes, entre autres, là, du chemin Roxham, et le Québec fait énormément pour les accompagner. Si je regarde, au niveau de nos professionnels de la santé, les médecins sont des gens de cœur qui n'abandonnent pas les personnes. J'étais surprise moi-même, ce matin, de voir les milliers de femmes enceintes, là. Je pense qu'il faut examiner ces situations-là, mais la question... Je pense que les valeurs qu'on partage au Québec, elles sont importantes, puis on ne veut pas abandonner les gens, mais je pense que le Québec fait énormément, actuellement, pour les personnes qui arrivent par centaines par jour.

Mme Lévesque (Fanny) : Est-ce que leurs soins devraient être couverts par la RAMQ?

Mme Bélanger : Bien, je vous dirais : Les soins d'urgence, certainement, c'est ce qui est fait aussi. Et, par rapport à d'autres conditions cliniques, je pense qu'il y a lieu de réexaminer ça, là, bien sûr.

Le Modérateur : Alexandre Duval, Radio-Canada.

M. Duval (Alexandre) : Bonjour, mesdames. Peut-être une petite précision, pour ce qui est, par exemple, d'une condition comme la sclérose en plaques, qui peut mener à une dégradation des capacités cognitives, est-ce que les personnes qui sont atteintes de cette maladie-là, de cette condition-là pourraient, dès aujourd'hui... bien, dès aujourd'hui, dès l'adoption du projet de loi, faire une demande anticipée?

Mme Bélanger : Je ne peux pas vous répondre aujourd'hui à votre question. J'anticipais d'avoir une question avec un diagnostic, là, parce que je ne voudrais pas laisser le message, là, que les personnes avec tel diagnostic, oui, et non... On va faire la discussion, puis c'est des critères, que je reviens toujours, donc, maladie grave qui est vraiment incurable, avec des souffrances importantes. Donc, si certaines personnes ont ces manifestations-là, bien, la réponse est oui, ils pourraient éventuellement recevoir l'aide médicale à mourir, en autant de répondre à tous les critères. Mais je ne voudrais pas créer de préjudice puis identifier des diagnostics, parce que, je vous dirais, même un diagnostic, ce qui va être le plus important, c'est l'évaluation qu'on va faire avec l'équipe interdisciplinaire. Chaque situation est unique. Chaque situation est unique. On ne peut pas généraliser, mais certainement qu'on va baliser. Mais on ne peut pas généraliser. C'est vraiment trop tôt pour moi de m'avancer aujourd'hui.

M. Duval (Alexandre) : ...mais je fais référence aussi au fait que vous avez lu l'ouvrage de Sandra Demontigny. Vous avez fait un tweet là-dessus cette semaine.

Mme Bélanger : Tout à fait.

M. Duval (Alexandre) : On est devant un cas, en tout cas, je ne sais pas si vous êtes en mesure de le dire, mais de personne qui pourrait demander l'aide médicale à mourir de manière anticipée, n'est-ce pas?

Mme Bélanger : J'ai donné l'exemple tantôt. Je l'ai donné par rapport à moi-même, Alzheimer. Mme Demontigny, son histoire, c'est aussi autour de ça. Alors, je ne veux pas lui prêter des intentions, mais elle fait des interventions actuellement dans ce sens-là pour mobiliser les personnes par rapport à sa propre histoire. Elle a son propre positionnement par rapport à ça, et, je pense, c'est quelqu'un qui fait une très grande réflexion par rapport à ce qu'elle vit avec le diagnostic de maladie d'Alzheimer.

M. Duval (Alexandre) : Puis, rapidement, sur la santé mentale, je comprends que le fédéral repousse à 2024. Ça, tout le monde l'a bien compris, mais le fait est que, normalement, ça devait être accessible à partir du mois prochain au niveau fédéral. Là, on repousse à l'an prochain. L'an prochain, étant donné que la question n'aura visiblement pas été tranchée au Québec, est-ce que vous pouvez écarter que des gens atteints de troubles de santé mentale n'iront pas dans d'autres provinces pour obtenir l'aide médicale à mourir?

Mme Bélanger : Bien, la première réponse que je vous ferais, c'est : Est-ce qu'en 2024 le fédéral sera rendu là? Ça, c'est la première question. Parce qu'ils avaient quand même indiqué que ça devait être en application en 2023. Ils ont repoussé. Alors, on va suivre l'évolution des travaux. Et je vous dirais aussi que, concernant le trouble mental, pour avoir parlé avec certains médecins au Québec, certains suivent l'évolution des travaux, là, naturellement, au niveau fédéral, là, mais il n'y a pas, là, en tout cas, à ma connaissance, là, de comité particulier annoncé sur le trouble mental. Alors, on va suivre l'évolution. Puis nos médecins, habituellement, participent aux différents forums. On suivra. On verra quand on sera rendu là. Mais, pour le moment, là, ils ont repoussé. Ça, c'est quand même un signal important, là.

Le Modérateur : Nous allons maintenant passer aux questions des collègues anglophones. Et on débute aujourd'hui avec Franca Mignacca, de CBC.

Mme Mignacca (Franca G.) : Good afternoon. I want to touch a bit on the section on palliative care homes. Why was it so important to specify this in the bill? And how much of an issue is it right now in terms of palliative care homes not offering the service?

Mme Bélanger : OK. So, good afternoon. I'm very sorry for my English. I will read my paper, OK?

So, I'm very proud of the bill introduced today. This is a bill important for the society, to introduce the expansion of medical assistance in dying, to improve access to end-of-life care and to add new rigorous standards. We follow up on a large majority of the recommendations of the special commission on the evolution of the law concerning end-of-life care. The new bill takes up most of the p.l.38 proposed in May 2022, and includes the discussions and work carried out by colleagues in the Spring of 2022.

This is a long-awaited bill. I will put all my heart into it until it's adopted. With the issue of medical assistance in dying, we have never been partisan. We won't start doing that today. I wish to offer my most sincere cooperation to all political parties in the study of this bill.

Le Modérateur : Est-ce que d'autres collègues anglophones ont des questions? Est-ce que vous pouvez répondre en anglais ou en français, peut-être?

Mme Bélanger : Je pourrais peut-être répondre en français, oui.

Le Modérateur : Oui, vous pouvez poser vos questions, et la ministre va répondre en français, si c'est possible pour vous. Franca?

Mme Mignacca (Franca G.) : Je pense que tout est répondu déjà.

Le Modérateur : Parfait. Gloria Henriquez, Global.

Mme Henriquez (Gloria) : I just want to try, you know, and you can speak from your heart, because I saw that it was a very important issue for you. Why does it make you so emotional when you speak about... You know, you spoke about people who had to be hauled in ambulances when they were very sick, and it just seemed very touching to you. Why is it so touching to you?

Mme Bélanger : O.K. Je vais répondre en français parce que... Je vais améliorer mon anglais au fil des quatre prochaines années, mais avec l'émotion c'est encore plus difficile de parler anglais. Bien, en fait, on a tous des situations, dans nos vies personnelles, de gens qu'on aime, qu'on connaît, qui ont demandé l'aide médicale à mourir. Puis on a des personnes dans nos vies qui sont malades actuellement. C'est certain que, bien, ça vient nous chercher personnellement. J'ai eu l'occasion de parler de ces situations-là avec différents collègues à l'Assemblée nationale puis les députés de notre parti, et puis chacun a une histoire autour de ça, que ce soit une grand-maman, une mère, un père, des belles puis des mauvaises histoires aussi. Ça fait que j'ai moi-même, personnellement, des histoires autour de ça, tout près de moi, et puis, bien, ça remonte quand on parle de ça.

Mme Henriquez (Gloria) : J'ai une autre question en anglais. Ottawa dit que les personnes mineures devraient... Le comité parlementaire à Ottawa a dit que les mineurs devraient être éligibles pour l'aide médicale à mourir. Ici, au Québec, c'est un non?

Mme Bélanger : En fait, le rapport final du comité parlementaire va recommander... d'ailleurs, c'est sorti, je pense, aujourd'hui, là...

Mme Guillemette : Hier.

Mme Bélanger : ...c'est hier, va recommander à la Chambre de communes de permettre la demande anticipée. Ça, je veux juste, quand même, le mentionner, parce qu'actuellement, là, ce n'était pas prévu au fédéral. Donc, le comité parlementaire en question va faire cette recommandation-là par rapport aussi aux jeunes.

Mais, comme je vous dis, là, ils ont une approche différente, au niveau fédéral, de travailler les soins de fin de vie. Et puis tant mieux, là, pour la demande anticipée, parce que, nous, c'est ce qu'on veut faire au niveau provincial, dans notre projet de loi, mais, pour les jeunes, ça n'a pas été discuté dans la commission des soins de fin de vie pour lesquels... on a déjà, nous, eu beaucoup de discussions sur les soins de fin de vie. Et je vais lire leur rapport attentivement, mais ce n'est pas dans notre projet de loi.

Le Modérateur : Est ce qu'il y a d'autres questions en anglais? Non? Merci, c'est ce qui met fin au point de presse.

Mme Bélanger : Merci. Merci beaucoup.

(Fin à 13 h 14)

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