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(Onze heures cinquante-cinq minutes)
La Modératrice : Bonjour et
bienvenue à ce point de presse de Québec solidaire. Prendront la parole M.
Alexandre Leduc, député d'Hochelaga-Maisonneuve et responsable solidaire en
matière d'enseignement supérieur, suivi de représentantes d'associations
étudiantes, Élodie Gauthier, Marie-Estelle Quenneville, Louann Poirier Bergeron,
Cloé Jacques, Cléo St-Martin, Savannah Hamaoui et Véronique Loubier. Merci.
M. Leduc : Merci. Bonjour,
tout le monde. Très content d'être avec vous aujourd'hui. Le dossier des
bourses Perspective est un dossier important que je mène depuis plus de deux
ans maintenant. Je veux, en plus de toutes les personnes qui prendront la
parole tantôt, saluer la présence d'Etienne Paré, de l'Union étudiante du
Québec, Étienne Langlois, de la Fédération étudiante collégiale du Québec, et
de Méganne Joyal, de la FAÉCUM, la fédération étudiante de l'Université de
Montréal.
On a envoyé plusieurs réclamations à la
CAQ sur ce dossier-là, d'abord à la ministre McCann, l'ancienne ministre de l'Enseignement
supérieur, il y a plus de deux ans maintenant, pour qu'elle rectifie la
situation, qu'elle ajoute les programmes qui avaient laissé... qu'elle avait
laissé de côté parce qu'ils avaient travaillé trop vite. Un peu brouillons, ils
avaient laissé de côté des programmes. Mme Déry, dès qu'elle est entrée en
poste, je lui ai parlé de ce dossier-là. Elle nous a dit qu'elle était en train
d'y travailler, qu'elle était en train de regarder ça, mais, malheureusement,
ce n'est pas réglé.
Pendant qu'elle est en train de regarder
ça, bien, c'est des rentrées qui s'accumulent, où on laisse des étudiants, des
étudiantes beaucoup, évidemment, dans la précarité, et ça affecte, évidemment,
la question du coût de la vie. On vit une crise du coût de la vie en ce moment,
donc, si on pouvait intervenir rapidement sur les bourses Perspective, ça
serait utile.
Et je termine en disant que ce qui
m'inquiète pour la suite, c'est que là, on... la ministre nous dit : Oui,
oui, ça s'en vient, ça s'en vient, l'automne — on a même étudié une
pétition ce matin — l'automne, l'automne. Bon, l'automne, c'est-tu
dans les prochaines semaines? Est-ce qu'eux considèrent que décembre c'est
encore l'automne? Et surtout, l'annonce d'une nouvelle réforme, de nouveaux
programmes, c'est une chose, mais est-ce que l'application, elle, va être
immédiate dès la rentrée de l'hiver pour une cohorte qui pourrait commencer cet
hiver?
Donc, c'est les demandes qu'on lui fait.
Et on veut surtout qu'elle se dépêche et qu'elle mette en application la
réforme et en ajoute, de nouveaux programmes, aux bourses Perspective.
Et, sans plus tarder, je donne la parole à
Élodie Gauthier.
Mme Gauthier (Élodie) : Bonjour.
Nous sommes étudiantes en psychoéducation à l'Université de Montréal et membres
du comité de rémunération des stages en psychoéducation de l'Université de
Montréal.
Aujourd'hui, nous prenons la parole pour
demander que notre programme soit ajouté à la liste des bénéficiaires de la
bourse Perspective Québec. Ce soutien financier est important, considérant que,
pour avoir accès à l'Ordre des psychoéducateurs et psychoéducatrices du Québec,
il faut compléter un baccalauréat et une maîtrise en psychoéducation. À la
maîtrise, nous effectuons un deuxième stage qui exige 560 heures de
travail dans notre milieu, soit quatre jours par semaine pendant sept mois, et
ce, de façon non rémunérée. Malgré ça, nous n'avons pas accès à la bourse
Perspective d'avenir.
Suivant nos revendications, à
l'hiver 2023, le ministre de l'Enseignement supérieur nous a répondu que
nous avons accès à la bourse de soutien à la persévérance des stagiaires. Il
faut savoir que cette bourse offerte pour un stage de maîtrise est d'un montant
de 2 700 $. En termes d'heures de travail sur le terrain, la bourse
octroie un montant symbolique de 4,80 $ par heure aux stagiaires. Ce
calcul ne tient pas compte des heures de planification des interventions ni des
heures de recherche sur les meilleures pratiques et des heures de rédaction de
nos rapports d'évaluation. Ces tâches doivent être effectuées à l'extérieur de
nos heures travaillées dans le milieu, bien qu'elles fassent partie intégrante
de la pratique des psychoéducateurs.
Les contraintes financières liées à la
réalisation du stage de maîtrise sont un frein énorme à l'accès à la profession.
La conciliation emploi-études-stage amène les étudiants et les étudiantes à de
l'épuisement avant même la fin de leur formation.
Mme Quenneville (Marie-Estelle) :
Après une réponse très claire du ministère de l'Enseignement supérieur
explicitant le désir de former des agents et des agentes de relations humaines
ou ARH par l'entremise de la bourse Perspective, les étudiantes de
psychoéducation se sont senties réduites et non reconnues par rapport à leur
future profession.
Pour ceux et celles qui ne savent pas, la
psychoéducation est une discipline qui est née ici même, au Québec, et qui
cherche encore à faire sa place dans les sphères des services sociaux, de
l'éducation, du communautaire, et j'en passe. Que ce soit par nos multiples
actes réservés, par nos évaluations psychoéducatives, notre position de rôle conseil,
notre approche positive et écosystémique unique, nous jouons un rôle clé dans
la crise de la santé mentale actuelle.
Nous sommes également une solution
supplémentaire à la pénurie de main-d'oeuvre dans le secteur du public car nous
oeuvrons dans tous les milieux avec toutes les clientèles. Notre versatilité
est donc une plus-value considérable qui ne peut être minimisée. Mais pour
pouvoir réaliser tout ça, il nous faut du soutien, dont du soutien financier.
Malheureusement, l'endettement pousse trop
souvent les étudiantes vers le domaine du privé ou tout simplement vers
l'abandon de leurs études. Avec l'essoufflement actuel dans le réseau, on ne peut
se permettre de perdre des membres de la relève étudiante pour combler les
postes vacants dans les différents milieux. On se doit de travailler ensemble
si on désire voir un réel changement dans les services qu'on offre à la
communauté.
Nous demandons donc de bénéficier de la
bourse Perspective Québec à la maîtrise car elle octroie une compensation
financière qui répondrait davantage aux besoins financiers des étudiantes et
stagiaires.
M. Leduc : Merci
beaucoup. J'ai oublié de la présenter, c'était Marie-Estelle Quenneville. Et,
la prochaine, c'est Mme Louann Poirier Bergeron.
Mme Poirier
Bergeron (Louann) :Bonjour.
Moi, je suis étudiante sage-femme. Je vais vous partager un peu mon expérience
de stagiaire en pratique sage-femme, qui est tout à fait typique, là, pour un
stage.
Dans le fond, j'ai commencé ma première
année entière de stage cet été. Déjà, j'ai su mon placement de stage un mois à
l'avance, donc ça veut dire que j'ai eu un mois pour me trouver un logement à
moins de 30 minutes de la maison de naissance, ce que j'ai fait. Mais je
ne sais toujours pas c'est quoi, mon stage cet hiver, alors j'aurai
probablement un deuxième loyer à payer.
Sincèrement, j'adore mon travail et je ne
minimise pas la joie d'accueillir des bébés, mais ça me prend un revenu minimum
pour le faire. Je suis ma préceptrice dans toutes ces activités et toutes ces
gardes. Et mes gardes à moi sont continuellement augmentées pour satisfaire mes
exigences de mon programme. En plus de ça, j'ai un cours à distance et les
études qui vont avec ça, donc, non, c'est impossible pour moi d'avoir un emploi
étudiant avec ça.
Si je n'ai pas de revenus, j'ai des
dépenses, par exemple, liées à mon stage. J'ai dû m'acheter une voiture, je
dois payer mon essence pour me rendre un peu partout chez les usagères, pour me
rendre au point de service, qui est à Donnacona, pour me rendre à
Trois-Rivières, continuellement, pour des cours, des examens.
Ça ne peut pas continuer comme ça, là.
Être stagiaire, être étudiante en pratique sage-femme, ça représente
2 352 heures de stage non rémunérées. Ça, c'est dans le meilleur des
mondes, parce qu'on fait souvent, là, voire 1 000 heures de plus au
cours de notre cursus. C'est des frais ahurissants de déplacement, de
déménagement, c'est des gardes continues sur plusieurs jours, et ce, pendant
quatre ans et demi.
On est à peu près 90 étudiantes
sages-femmes au Québec, ce serait une poignée de personnes à rentrer dans la
bourse Perspective. Et ça aurait des impacts considérables sur les services en
périnatalité, il manque cruellement de sages-femmes. Et il y a à peu près
25 % des étudiantes qui quittent le programme en raison des difficultés
financières, sans parler des jeunes sages-femmes qui quittent la profession
parce qu'elles sont essoufflées du bac. Ça serait facile de juste... On peut
pallier à ça.
M. Leduc : Merci
beaucoup. J'inviterais maintenant Cloé Jacques et Cléo St-Martin.
Mme St-Martin (Cléo) : Alors,
bonjour. Nous sommes Cléo St-Martin et Cloé Jacques, étudiantes à la maîtrise
professionnelle en orthophonie à l'Université de Montréal. Comme nos collègues
présents ici aujourd'hui, nous demandons à ce que les étudiantes et étudiants
en orthophonie puissent bénéficier des bourses Perspective Québec. C'est d'ailleurs
pourquoi nous avons déposé, le 31 mai dernier, à l'Assemblée nationale,
une pétition pour laquelle nous attendons encore une réponse.
Nous aimerions commencer par vous décrire
notre réalité. Notre maîtrise compte 80 crédits, soit 35 crédits de
plus que les autres maîtrises professionnelles comparables. Je pense qu'il est
difficile pour plusieurs de réaliser l'ampleur de la charge de travail qui est
liée à une maîtrise de 80 crédits.
Pendant deux ans, 11 mois par année,
nous sommes à l'école en moyenne 30 heures par semaine pour des cours et
des stages non rémunérés. Dans ces conditions, la direction du programme à l'Université
de Montréal nous demande de ne pas travailler durant nos études. Notre santé
mentale est incontestablement mise à l'épreuve entre le stress financier, l'anxiété
et la démotivation que plusieurs peuvent vivre. Résultat : certains d'entre
nous quittent la profession ou se dirigent vers le privé une fois rendus sur le
marché du travail.
Mme Jacques (Cloé) : Pour
développer davantage au sujet de nos stages, notre ordre professionnel demande
le cumul de 560 heures de stages au cours de notre parcours, et notre
parcours se termine avec un externat de 50 jours dans lequel on occupe le
rôle d'un orthophoniste à temps plein de manière autonome et, encore une fois,
sans rémunération.
Nous sommes reconnaissants que le
gouvernement nous accorde la bourse à la persévérance... pardon, la bourse de
soutien à la persévérance et à la réussite des stagiaires. Malheureusement,
celle-ci couvre tout juste les frais de scolarité qui sont associés à la session
de notre externat.
Visiblement, le soutien financier apporté
par les bourses Perspective Québec serait significatif pour notre communauté
étudiante et permettrait de former les professionnels qui entreront sur le
marché du travail en étant disposés à offrir des services de qualité à leurs
usagers. Cette bourse d'études témoignerait de l'ampleur des efforts que nous
mettons, que nous investissons dans notre parcours.
En terminant, nous tenons à souligner le
travail de nos collègues étudiants en audiologie, qui, eux, se battent encore
pour faire valoir leur programme aux yeux du gouvernement et pour pouvoir
bénéficier de la bourse de soutien à la persévérance et à la réussite des
stagiaires. Donc, merci beaucoup.
M. Leduc : Merci. J'inviterais
maintenant Mme Savannah Hamaoui.
Mme Hamaoui (Savannah) : Bonjour
à toutes et à tous. Je suis présidente de l'association étudiante en
enseignement au secondaire de l'Université de Montréal, l'enseignement étant un
des autres nombreux domaines d'études pour lesquels les stages ne sont pas
rémunérés.
Tout d'abord, il est important de savoir
que les personnes qui poursuivent des études à temps partiel sont d'emblée
exclues du programme Perspective. Cela engendre des situations d'autant plus
problématiques puisque, pour beaucoup d'entre elles, avoir un cheminement
atypique est le résultat de contraintes externes, par exemple, pour les parents
étudiants. Cela constitue un sérieux frein à l'accès à la profession
enseignante pour toute personne dont le cheminement sort de la norme.
Ensuite on sait que, pour une session, une
personne étudiante peut recevoir 2 500 $. Or, on réalise que cela
équivaut à un montant d'environ 62,50 $ par jour de stage, alors que le
salaire versé en suppléance est de près de 230 $ par jour.
Le programme Perspective a été mis en
place afin d'améliorer l'attractivité des formations menant à des professions
où il y a pénurie. Cela n'est en aucun cas l'équivalent d'une rémunération et n'est
pas une solution pérenne à la rétention des personnes étudiantes dans les
programmes de formation initiale des maîtres. Alors que plus de 900 postes
sont encore vacants dans les écoles de la province et que les études montrent
que le quart des enseignants et enseignantes quitte la profession dans les cinq
premières années, on continue d'évincer la rémunération des stages des
solutions pour valoriser notre profession.
En terminant, nous aimerions rappeler au
gouvernement que les personnes étudiantes ont des travaux, des séminaires et
surtout des emplois à conserver, en parallèle de leurs stages, pour pouvoir
joindre les deux bouts. Cela représente une charge de travail immense, ce qui
détériore leur santé mentale et les amène, au final, à abandonner leur
parcours. Pour toutes ces raisons, il est plus que temps que le gouvernement
reconnaisse la tâche des stagiaires à sa juste valeur, et cela passe d'abord et
avant tout par la rémunération des stages. Merci.
M. Leduc : Merci
beaucoup. Et, en terminant, Mme Véronique Loubier.
Mme Loubier (Véronique) : Donc,
bonjour. Véronique Loubier, enseignante en techniques de travail social et
membre du Regroupement des enseignants et enseignantes en techniques de travail
social du Québec.
Donc, depuis décembre 2021 déjà, dès la
sortie du programme de bourses, notre réseau s'est mobilisé afin de dénoncer
l'exclusion de notre programme technique à cette bourse offerte. Nous
considérons toujours aujourd'hui, deux ans plus tard, la situation injuste et
incohérente, compte tenu des besoins de nos différents milieux qui accueillent
nos stagiaires, nos étudiantes en cours de formation et nos finissantes.
Je me permets de féminiser les mots ici,
parce que, dans nos programmes d'études tout comme dans la majeure partie des
programmes derrière moi, j'en suis persuadée, on est, plus de 80 %, des
femmes. Donc, le programme de bourses Perspective, si on regarde,
malheureusement, les programmes qui ont été accrédités, c'est des programmes
qui, traditionnellement, sont davantage portés par les hommes. Il y aurait peut-être
lieu ici de faire une belle réflexion et de réduire l'écart salarial et
financier entre les sexes.
Du côté de notre technique, nous, c'est
trois ans à temps plein, donc plus de 30 heures de cours par semaine.
Notre technique comporte 41 cours, deux stages, nous aussi, non rémunérés,
dont un stage terminal à temps plein de plus de 700 heures. Donc, on
commence à 96 étudiants, on en gradue une cinquantaine par année, et, tout
comme derrière, il a été mentionné, on les voit travailler très fort en dehors
de l'école pour assumer leurs différents besoins financiers, qui ne cessent de
grandir.
Depuis deux ans, depuis qu'on a commencé
la mobilisation sur ce dossier, le contexte d'emploi et socioéconomique s'est
grandement transformé. Les crises se succèdent — logement, inflation,
itinérance, santé mentale — et ça exerce une grande pression sur nos
étudiants, étudiantes et sur les milieux qui les accueillent, également. Dur de
joindre les deux bouts à la fin du mois, dur de combiner travail, famille,
études. Nos étudiantes ont besoin de toute leur énergie pour assurer leur
réussite scolaire tout en répondant aux différentes attentes et besoins des
clientèles, des milieux et de leur vie.
On les sollicite maintenant, même dès leur
première année, à intégrer rapidement le marché du travail car il y a une
énorme pression due à la pénurie de main-d'œuvre grandissante. On a besoin
d'elles plus que jamais, et de chacune d'entre elles. Leur réussite est
extrêmement importante pour assurer l'équilibre des services dans notre
communauté.
Malheureusement, elles ont besoin
également de tout le soutien que l'on peut leur offrir durant leurs études pour
préserver à la fois leur intégrité, leur réussite et préserver leur énergie
physique et mentale pour bien s'insérer dans ce marché du travail qui va
extrêmement les solliciter à tous les points de vue. Elles sont des alliées
pour soutenir les milieux qui sont souvent à bout de souffle, on ne veut
surtout pas qu'elles arrivent elles-mêmes à bout de souffle au bout de leurs
trois ans d'études. Donc, on croit que la bourse de 1 500 $ par
session n'est surtout pas un luxe ni trop demandé, mais des conditions
minimales pour assurer la réussite de ces belles jeunes femmes.
Nous avons cogné à plusieurs portes depuis
deux ans, et même constat : aucune réponse satisfaisante ni cohérente pour
justifier l'exclusion de la technique en travail social au programme des
bourses Perspective. On continue de travailler et collaborer avec les élus, les
ministres. On souhaite vraiment un dénouement heureux sur ce dossier, mais il
ne faudrait surtout pas attendre qu'il y ait une baisse significative des
demandes d'admission dans nos programmes, baisse qui s'est déjà fait sentir
dans quelques cégeps partenaires, parce qu'on est 16 à offrir la technique à
l'intérieur de la province de Québec.
Donc, mon sourire et notre patience, du
regroupement, a ses limites. On espère vraiment qu'on va trouver des solutions
et qu'on va pouvoir soutenir davantage la réussite de nos étudiantes.
M. Leduc : Merci, tout
le monde. Vous le voyez, en conclusion, elles sont tannées d'attendre, je suis
tanné d'attendre. La balle est dans le camp de la ministre. On verra pour la
suite. Merci.
La Modératrice : Merci, tout
le monde.
M. Leduc : Bonne
journée.
(Fin à 12 h 10)