(Onze heures trente-six minutes)
La Modératrice : Bonjour et
bienvenue à ce point de presse de la porte-parole de l'opposition officielle
pour la famille et députée de Westmount—Saint-Louis, Jennifer Maccarone,
accompagnée pour l'occasion, aujourd'hui, d'Amélie Duranleau, directrice
générale de la Société québécoise de la déficience intellectuelle, également
Lili Plourde, directrice générale de la Fédération québécoise de l'autisme,
Bianca Nugent, présidente de la Coalition de parents d'enfants à besoins
particuliers du Québec. Donc, la parole est à vous.
Mme Maccarone : Merci
beaucoup. C'est un plaisir pour moi d'être parmi des alliées en ce qui concerne
les droits des enfants avec des besoins particuliers et leurs familles. Et
bienvenue chez vous, on a plusieurs gens qui nous écoutent, aujourd'hui, pour
ce point de presse, qui est fort important, essentiel quand on parle des
enfants en situation de vulnérabilité.
Alors, aujourd'hui, on souhaite revenir un
peu sur le communiqué de presse qui a été émis par la Fédération québécoise de
l'autisme, de la Société québécoise de déficience intellectuelle puis de la coalition
des enfants avec des besoins particuliers. Pourquoi? Pour revenir sur le sujet
des salles de retrait, des salles de retrait que, nous savons, sont souvent
utilisées comme mesure de punition, c'est des salles d'isolement.
Et je félicite... et je reviens sur le
mandat d'initiative qui a été déposé par mes collègues, Elisabeth Prass,
députée de D'Arcy-McGee, et Marwah Rizqy, la députée de Saint-Laurent, qui ont
demandé au gouvernement de mettre en place une petite commission remplie des
experts pour étudier la question des salles de retrait, pour avoir un portrait
de qu'est-ce qui se passe sur le terrain, chose qui est toujours manquante à
travers tout notre réseau scolaire. C'est...
On a un besoin de rassurer les parents. Et
je dois remercier tous les gens qui m'accompagnent, aujourd'hui, pour ce point
de presse, pour leur militantisme, de toujours porter la voix des personnes
puis des enfants avec des besoins particuliers, que ça soit les enfants, ou
leurs familles, ou bien pour les membres du réseau. C'est un message fort essentiel,
et je dois les remercier fondamentalement pour ce que vous faites, c'est
vraiment, vraiment important.
On va aussi parler aujourd'hui pour les
gens qui ont des questions en ce qui concerne le nombre croissant des élèves
qui sont renvoyés à la maison, alors le manque de scolarisation des enfants
avec des besoins particuliers. Pourquoi? Parce que nous constatons qu'il y a un
manque vraiment important de personnel qualifié. Encore une fois, Marwah Rizqy
l'a soulevé en période de questions, aujourd'hui, elle a questionné le ministre
de l'Éducation. Ça prend des gens avec des brevets dans l'adaptation scolaire
pour être en mesure d'accompagner ces enfants ainsi que le réseau. Parce qu'un
droit, c'est un droit, les élèves avec des besoins particuliers ont aussi,
également, le droit à l'éducation.
Et c'est pour ça que je reviens aussi...
je demande au gouvernement d'appeler le projet de loi n° 398,
dont je suis très fière d'avoir déposé ici, à l'Assemblée nationale, qui parle
de recevoir des services pédagogiques, peu importe le statut. Ça fait que, si
un élève n'est même pas dans la classe mais qui est renvoyé à la maison...
chose qu'on veut éviter à tout prix, on espère avoir un réseau de l'éducation
qui est inclusif, qui est diversifié, parce que c'est à l'image de notre belle
province, mais, si les enfants sont renvoyés à la maison, bien, ils ont droit à
avoir autant, autant de scolarisation, peu importe où ils sont assis. On parle
de la fragilisation de beaucoup de nos familles, la pauvreté, parce qu'il y a
beaucoup de familles qui souffrent de problèmes psychologiques, qui souffrent
de problèmes financiers quand on envoie un enfant à la maison.
Alors, plus important que les paroles que
je vous partage aujourd'hui, c'est les paroles des gens qui m'accompagnent
aujourd'hui. Alors, je vais céder la parole à toutes les femmes, dans le fond,
qui m'accompagnent aujourd'hui pour ce message fort important. Merci beaucoup.
Mme Duranleau (Amélie) : Bonjour,
tout le monde. Je m'appelle Amélie Duranleau, je suis la directrice générale de
la Société québécoise de la déficience intellectuelle. Donc, si on est
rassemblées ici, aujourd'hui, c'est pour vous présenter notre rapport sur l'utilisation
abusive des salles de retrait dans les milieux scolaires au Québec. Donc, nous
souhaitons vous présenter des résultats qui sont alarmants et aussi, mais
surtout, vous présenter des recommandations.
Donc, nos trois organisations, la
Coalition de parents d'enfants à besoins particuliers, la Fédération québécoise
de l'autisme et la Société québécoise de la déficience intellectuelle, nos
trois organisations, provincialement, ont produit ce rapport-là, et on a tissé
une alliance également. Nos trois organisations mises ensemble représentent des
milliers de personnes, au Québec, qui sont impactées par le manque de services
en milieu scolaire et aussi impactées par l'utilisation abusive des salles de
retrait au Québec. Donc, nous souhaitons, aujourd'hui, parler en une voix. Nous
sommes unanimes, le gouvernement se doit d'encadrer l'utilisation des salles de
retrait dans les écoles au Québec.
Donc, une petite mise en contexte. En
fait, depuis plusieurs mois, nos organisations ont mené plusieurs actions, comme
Mme Maccarone l'a présenté. En fait, on a aussi appuyé la demande
d'initiative à la Commission de la culture et de l'éducation déposée par le
parti de l'opposition officielle. Malheureusement, cette demande a été refusée,
et ça aurait pu mener à une commission parlementaire.
Donc, nous nous sommes retroussé les
manches et nous avons décidé, nos trois organisations, d'agir rapidement. Donc,
on a mené un sondage auprès de parents d'enfants à besoins particuliers, et les
résultats sont frappants. Ce n'est pas un phénomène anecdotique, c'est beaucoup
plus une problématique qui existe sur l'ensemble du territoire au Québec, donc
un phénomène qui existe.
Il y a 338 parents qui ont répondu au
sondage. Donc, pour plusieurs parents qui ont répondu que leurs enfants étaient
placés, les parents estiment que ce n'était pas justifié, et c'est une mesure
qui est répétitive, qui est abusive. Les enfants sont mis dans des salles de
retrait plusieurs fois par semaine et même plusieurs fois par jour. Donc,
imaginez-vous, si les parents, à la maison, employaient ce type de mesure, ce
type de recours, qu'est-ce qui pourrait arriver.
Maintenant, je souhaite passer la parole à
Lili Plourde, qui va exposer quelques recommandations importantes. Merci.
Mme Plourde (Lili) : Bonjour.
Notre rapport démontre un manque de communication et de sensibilisation aux
besoins des élèves à besoins particuliers de la part du personnel scolaire et
d'une absence de mesure... de méthode positive d'intervention. Nous avançons
des recommandations qui sont cruciales concernant la sensibilisation, la
formation et la collaboration entre les écoles et les familles.
Le personnel scolaire doit être mieux
renseigné sur les réalités et les droits des enfants ayant des besoins de
soutien particuliers et suivre des formations régulières pour développer une
meilleure compréhension de leur fonctionnement. Il est impératif d'écouter et
de répondre aux besoins de manière adaptée pour favoriser le potentiel des
enfants et leur apprentissage. Le milieu scolaire doit réaliser que
l'utilisation des salles de retrait engendre un trauma chez les enfants, ce qui
aura des conséquences graves sur leur développement.
La communication entre l'école et les
parents doit être renforcée avec des canaux clairs et réguliers d'information
sur tous les aspects de la vie scolaire de leurs enfants. Nous prônons une
communication bilatérale et des rencontres régulières entre tous les
intervenants pour une meilleure coordination en faveur de l'enfant. Les équipes
multidisciplinaires sont essentielles pour élaborer des plans d'intervention.
Ultimement, nous insistons afin que le cadre d'intervention et les conditions
nécessaires soient mis en place pour s'assurer que le droit à l'égalité des
chances des enfants soit respecté.
Pour conclure, nous appelons à la
collaboration pour créer un système éducatif où tous les enfants, dans leur
diversité, peuvent s'épanouir. Il est impératif de favoriser des solutions en
amont afin de promouvoir l'inclusion de chaque élève. Je vous invite à vous
mettre dans la peau d'un enfant de sept ans qui vit chaque jour avec la peur
d'être enfermé et qui, par le fait même... et à qui, par le fait même, on
refuse l'opportunité de faire des apprentissages. Il est crucial de revoir nos
façons d'intervenir pour le bien-être de tous les enfants concernés.
Je passe maintenant la parole à Bianca
Nugent, présidente de la Coalition des parents d'enfants à besoins
particuliers, qui nous interpelle sur l'urgent besoin d'encadrer les mesures de
contrôle en milieu scolaire.
Mme Nugent (Bianca) : Alors,
nous sommes ici, aujourd'hui, pour souligner l'urgent besoin d'encadrer
l'utilisation des salles de retrait dans nos écoles. Ce manque d'encadrement
est tout à fait inacceptable, préjudiciable et surtout peut mener à des
comportements de maltraitance envers des enfants déjà vulnérabilisés, et ce, à
l'insu de leurs parents.
L'approche actuelle a également un poids
deux mesures lorsqu'on le compare aux encadrements prévus dans le réseau de la
santé et des services sociaux. Les protocoles entourant l'utilisation
exceptionnelle des mesures de contrôle, telles que les salles de retrait, par
exemple, dans les salles de jeunesse, sont très rigoureux. Leur utilisation est
un acte de dernier recours réservé aux professionnels de l'intervention en
contexte de crise qualifiés et formés comme les éducateurs spécialisés.
Pourquoi cette même rigueur-là ne s'applique-t-elle pas à l'école?
Tous les enfants, peu importe le milieu
qu'ils fréquentent, ont les mêmes droits et méritent donc d'avoir les mêmes
protections. On parle de droit à la sécurité, au respect de leur intégrité, au
respect de leur dignité, le droit d'accéder à des services éducatifs et
complémentaires de qualité dispensés par des professionnels qualifiés et
formés, le tout dans un environnement scolaire bienveillant.
À nous trois, nos associations portent la
voix de centaines de milliers de parents d'enfants ayant besoin d'un soutien
particulier, qui sont très préoccupés par le sort qui leur sont réservés quand
ça va moins bien. Nous appelons donc à une révision en profondeur des pratiques
et des politiques existantes en collaboration avec nos associations de défense
de droits des enfants ayant besoin d'un soutien particulier pour instaurer des
balises claires et restrictives autour de ces pratiques de dernier recours.
Un simple guide de pratique sur les
mesures de contrôle est clairement insuffisant, d'autant plus s'il est appliqué
de manière inégale et incohérente. Les principes d'inclusion et de respect de
droits des enfants doivent être à la base de l'encadrement de ces mesures.
L'utilisation exceptionnelle des salles de retrait, si elles s'avèrent
justifiées, devrait être scrupuleusement documentée, par exemple dans un plan
d'intervention, et faire l'objet de suivis et d'une évaluation rigoureuse
justement pour éviter d'y avoir recours à répétition. Ce n'est pas ce que les
parents nous ont témoigné dans nos rapports.
Alors, nous invitons le gouvernement à
travailler avec nous pour reconstruire un système éducatif inclusif où chaque
enfant peut s'épanouir, s'instruire, développer son plein potentiel en toute
sécurité et équité de droit, peu importe sa situation. Repenser les pratiques
en matière d'inclusion en privilégiant d'autres solutions que l'utilisation des
salles de retrait comme des stratégies d'intervention positives mises en amont
s'avère une voie beaucoup plus équitable et juste.
En cette Semaine pour l'école publique, le
Québec doit redevenir un leader en matière d'inclusion scolaire, ayant été la
première province à avoir instauré l'instruction obligatoire en 1943, une
politique d'adaptation scolaire en 1978, et une loi-cadre sur l'instruction
publique en 2004, et plus récemment une politique de réussite éducative pour
tous les enfants. Nos enfants aussi comptent. Merci.
La Modératrice : C'est ce qui
met fin au point de presse. Merci.
(Fin à 11 h 48)