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Point de presse de M. Jean-Martin Aussant, député de Nicolet-Yamaska, Mme Lisette Lapointe, députée de Crémazie, et de M. Pierre Curzi, député de Borduas

Version finale

Le jeudi 17 mai 2012, 22 h 10

Salle Bernard-Lalonde (1.131), hôtel du Parlement

(Vingt-deux heures dix minutes)

M. Aussant: Bien, tout d'abord, l'aspect qui saute aux yeux, un des aspects qui saute aux yeux dans ce projet de loi là, c'est la limitation assez sévère du droit de manifester. Et c'est d'autant plus contradictoire, pardon, avec une motion qui a été déposée ici, par moi-même, en fait, au mois de mars, il n'y a pas si longtemps que ça, qui avait été adoptée à l'unanimité par tous les parlementaires ici, et qui disait, et je cite: «Que l'Assemblée nationale réaffirme le droit inaliénable des citoyens du Québec de manifester publiquement dans le respect des lois.» Et ce que ce projet de loi là vient faire ici, c'est de restreindre très sévèrement ce droit-là. Ça n'a aucun sens.
Et j'avoue que je m'attendais à un projet de loi assez strict, mais c'est pire que ce que je pensais. Et ça nous rappelle quand même que M. Charest vient du rang conservateur, et on semble voir ici, même, quelques indices de Stephen Harper là-dedans, dans l'État de droit, de l'ordre et la loi. Et, en fait, c'est presque surréaliste comme projet de loi dans sa limitation du droit de manifester. Je vais laisser Pierre et Mme Lapointe aussi parler de ce qui les a frappés dans ce projet de loi là.

M. Curzi: On peut y aller. Bien, en fait, tout est frappant dans ce projet de loi là. Ça limite le droit de se réunir dans tout lieu public. Les amendes sont invraisemblablement élevées. Ça attaque aussi le corps professoral, parce que les professeurs sont tenus rigidement d'obéir et de ne surtout pas, en aucune façon, soutenir leurs associations, les associations d'étudiants, les associations de professeurs, toute personne qui contribue à organiser une manifestation ou à déroger...

M. Aussant: Et même par omission.

M. Curzi: Et même par omission. Là, ça ressemble à... tu sais, ça nous rappelle la Loi des mesures de guerre. Dans ce temps-là, c'était trois personnes. Là, c'est si tu es plus que 10 personnes, 11 personnes, tu subis aussi les foudres. Le montant des amendes, visiblement, a pour but d'éliminer carrément le droit d'association ou de mettre en péril les associations qui auraient le malheur de déroger. Il y a même une clause qui semble être très typiquement orientée vers Gabriel Nadeau-Dubois puisqu'on dit que ce projet de loi suspend les injonctions. Mais il dit aussi que ce qui découle des injonctions, comme un outrage au tribunal, ça, ça demeure possible. Donc là on vise carrément le cas typique de M. Nadeau.
Alors là... Et c'est... J'avoue que les bras nous en tombent. Là, on est rendus très, très loin. Et le montant des amendes est démesuré. La réaction à ça ne peut être qu'une réaction négative. Là, on est rendus dans une judiciarisation qui ressemble à ce qu'on a connu de plus totalitaire au Québec. J'avoue que les mots sont faibles pour traduire la honte que ça soulève.

Mme Lapointe: Oui. Bien, en tout cas, l'esprit de cette loi-là est quelque chose d'inacceptable. Effectivement, c'est carrément dire: Écoutez, vous nous avez emmerdés pendant trois mois, ça ne se reproduira plus, on va faire en sorte de vous couper les vivres. Les amendes sont tellement sévères, ce n'est pas sévère, c'est démesuré. Quand on pense qu'une journée de grève, là, par exemple, là, une journée où il y aurait une manifestation non approuvée pourrait coûter un trimestre de cotisation à une association étudiante. Regardez, là, c'est aussi bien dire: On ne veut plus d'associations étudiantes au Québec puis on ne veut plus discuter avec vous, là. Et, en même temps, je pense qu'on en veut beaucoup aux professeurs, parce que Charest ne le dit jamais, mais, quand il dit que les étudiants avaient quitté la table en 2010, alors qu'ils avaient fait ce sommet, bien, ce n'est pas juste les étudiants qui avaient quitté la table, c'est les professeurs aussi.
Et ça fait trois ans que tout ça fomente. Ce n'est pas spontané, là, toute cette colère chez les étudiants. Et qu'est-ce que ça va faire, ça, un projet de loi comme ça? Bien, moi, je suis bien inquiète de la réaction des gens. Je suis très inquiète de la réaction des étudiants et de plusieurs groupes, dans notre société, qui n'accepteront pas qu'un gouvernement change les règles du jeu comme ça. Parce que, là, c'est ça qu'on fait, on dit: Bien, regarde, on ne peut plus manifester, on ne peut plus s'exprimer. C'est très grave.

M. Aussant: Et quand Mme Courchesne dit que les lignes de discussion vont rester ouvertes après un projet de loi comme celui-là, je ne sais pas ce qu'elle considère ouvert encore, mais c'est douteux comme bonne foi.

M. Curzi: Puis là, là, l'esprit qui prévaut depuis le début, c'est-à-dire le combat extrême entre un droit collectif, c'est-à-dire le droit d'être en association, le droit de manifester, le droit de s'opposer à une mesure qu'on croit injuste, vient d'être, là, complètement bafoué par une exacerbation du droit individuel qui va jusqu'à l'encontre de manifester en groupes. Là, on est rendus à un point extrême, là, d'une... Là, c'est une valeur qui n'est pas admise, qui n'a jamais été admise dans notre société, au Québec.
Il faut regarder les amendes qui sont, pour un individu, de 1 000 $ à 5 000 $. S'il s'agit d'un dirigeant, là on tombe de 7 000 $ à 35 000 $. S'il s'agit d'une association, c'est de 25 000 $ à 125 000 $. C'est totalement démesuré. Tout ça est...

Mme Lapointe: Bien, moi, j'espère que quelqu'un va réussir à contester puis à gagner, contester la légalité de cette loi-là puis à gagner. J'espère. Très sérieusement.

M. Pépin (Michel): Le problème, c'est le temps. Mais je veux vous poser peut-être une question, reprendre un peu ce que Mme Lapointe a dit. Elle a exprimé... vous avez exprimé votre inquiétude, Mme Lapointe, dans la foulée, là, de l'adoption probable de ce projet de loi. J'aimerais savoir comment, M. Aussant, M. Curzi, comment vous envisagez la réaction à ce projet de loi.

M. Aussant: Bien, c'est certain que ceux qui étaient déjà irrités par l'attitude du gouvernement ne vont certainement pas s'adoucir avec un projet de loi comme celui-ci. Ceci dit, j'ai invité tout le monde depuis les tous débuts évidemment, et tous ceux qui sont, je dirais, sympathisants d'Option nationale savent très bien que, notre ligne, c'est qu'il faut tout faire dans le civisme. J'invite tout le monde à demeurer dans le civisme parce qu'il faut s'élever au-dessus des tactiques qu'on déplore de ce gouvernement-là, et une des façons de le faire, c'est de réagir pacifiquement à des tactiques de provocation. Donc, c'est le même message qu'on... c'est juste le même message qu'on peut envoyer, qu'il faut que les gens se fassent entendre, mais dans des manifestations pacifiques.

M. Curzi: En fait, c'est un appel direct à une mobilisation très générale, mais très pacifique. Moi, j'espère beaucoup que le 22 va arriver et qu'on verra l'ensemble des syndiqués, l'ensemble des professeurs, l'ensemble de tous ceux qui se rendent compte que ça n'a aucun sens, ce projet de loi là. J'espère fortement qu'il va y avoir une mobilisation tellement large que le gouvernement devra reculer. J'en doute, mais je pense que là on est rendu à ce point-là. Et, pour ceux qui réclamaient une élection, bien, moi, je dis maintenant ça me semble inévitable, là.

Mme Lapointe: C'est le temps, là. Ils ne sont pas capables de gérer cette crise-là. Vivement des élections. Vivement des élections.

M. Curzi: On ne peut pas faire appel à ce point-là aux forces de l'ordre et à la loi pour s'imaginer que toute une population, consensuellement, va accepter de vivre sous le coup d'une loi comme celle-là.

Des voix: Merci.

(Fin à 22 h 17)