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Conférence de presse de M. Guy Julien, ministre du Revenu

Présentation du projet de loi modifiant la Loi sur le ministère du Revenu et d'autres dispositions législatives relativement à la protection des renseignements confidentiels

Version finale

Le mardi 15 mai 2001, 16 h 49

Salle Evelyn-Dumas (1.30), édifice Pamphile-Le May

(Seize heures quarante-neuf minutes)

M. Julien: Alors, si vous voulez, on va commencer parce que... je sais que vous avez un horaire qui n'est pas trop chargé mais, quand même, on va accélérer. Ha, ha, ha!

Alors, la conférence de presse va porter sur la loi que j'ai déposée cet après-midi, qui modifie la Loi sur le ministère du Revenu et autres dispositions législatives relativement à la protection des renseignements confidentiels.

Alors, il faut se rappeler que le 29 décembre 1999 il y avait eu un rapport de l'honorable Jean Moisan qui avait été déposé auprès du gouvernement, qui était intitulé Rapport de la commission d'enquêtes sur des allégations relatives à la divulgation des renseignements fiscaux et de nature confidentielle. Ce rapport énonçait neuf recommandations et, dès la mi-janvier 2000, mon prédécesseur et collègue Paul Bégin souscrivait à chacune d'elles.

On se souviendra aussi que la recommandation n° 8 concernait la nécessité de réviser les dispositions législatives portant sur la confidentialité des renseignements fiscaux pour faire en sorte que ces dispositions soient rendues plus claires et non équivoques par rapport à celles prévues à la Loi sur l'accès à l'information. Et une autre recommandation, la recommandation n° 3, voulait que la consultation non autorisée de renseignements fiscaux devienne une infraction spécifique à la Loi sur le ministère du Revenu. C'est dans cette foulée que j'ai déposé ce projet de loi cet après-midi.

Par ailleurs, à l'occasion du discours inaugural du 22 mars dernier, le premier ministre faisait état de la volonté du gouvernement d'accroître la lutte au crime organisé. Sur ce point, M. Landry indiquait: les ministère de la Justice, du Revenu, de la Sécurité publique seront appelés à poursuivre leurs efforts et à améliorer les moyens juridiques mis à notre disposition dans cette lutte sans merci contre le crime organisé.» Alors, le projet de loi comporte aussi ce volet, donc deux volets.

Alors, comme vous le savez, la protection des renseignements personnels est une des valeurs fondamentales de nos sociétés. En matière fiscale, j'oserais dire qu'elle est encore plus nécessaire qu'en d'autres domaines, en ce que le secret fiscal est le fondement même des régimes fiscaux comme le nôtre, lesquels reposent sur l'autocotisation. Puis en passant, c'est à peu près 94 % des gens qui font de l'autocotisation. En étant des citoyennes et citoyens, comme les entreprises, ils doivent déclarer au fisc un nombre important de renseignements nécessaires au calcul de leurs impôts et taxes. Des renseignements aussi sensibles que la situation familiale, leur état de santé, leur situation financière, leur projets de recherche scientifique sont tous des renseignements requis du fisc et nécessaires, tantôt pour le calcul d'un impôt, tantôt pour celui d'une déduction ou encore pour le calcul d'un crédit ou d'un remboursement.

Les citoyens et les entreprises doivent donc avoir confiance que les renseignements qu'ils doivent fournir seront utilisés par le ministère du Revenu à bon escient et qu'ils demeureront protégés des indiscrétions. Le rapport Moisan soulignait que les dispositions législatives, qui assurent le secret fiscal et qui n'ont pas été reformulées depuis 1972, créent des difficultés d'interprétation et sont source d'ambiguïté, en particulier depuis l'avènement en 1982 de la Loi sur l'accès à l'information et sur la protection des renseignements personnels. Sur ce point, le projet de loi proposé constitue une refonte des règles gouvernant la confidentialité des renseignements fiscaux. Je pourrais résumer cette refonte en énonçant quelques grands principes qui la gouvernent.D'abord, la Loi sur l'accès à l'information et sur la protection des renseignements personnels constituera le régime de base gouvernant la confidentialité des renseignements fiscaux. Par ailleurs, les dispositions particulières de la Loi sur le ministère du Revenu portant sur la confidentialité seront prépondérantes dans la mesure où la protection accordée aux renseignements fiscaux sera plus grande que celle prévue à la Loi sur l'accès à l'information. Donc, ce qui est clair, c'est que la loi... l'accès à l'information, c'est ce qui a prépondérance, sauf dans les cas fiscaux où notre loi est encore plus sévère, mieux balisée, mieux organisée en conséquence.

Ainsi, le principe voulant que la confidentialité des renseignements ne s'applique pas seulement aux personnes physiques mais aussi aux entreprises est-il réaffirmé. Parce que, si je ne me trompe pas, la loi au niveau de l'accès à l'information, c'est sur les personnes physiques. Au niveau du revenu, avec la nouvelle loi, c'est physique, moral ou autre qui utilise... nous fournit des informations au niveau de la fiscalité. De même, la loi introduit la notion de dossier fiscal, elle réaffirme que tous les renseignements obtenus sont confidentiels et qu'ils ne peuvent être utilisés que lorsque nécessaire et aux seules fins prévues à la loi. Elle établit également qu'ils ne peuvent être communiqués que dans les seuls cas expressément mentionnés et qu'aux strictes conditions qui y sont prévues.

Enfin, des sanctions pénales sévères sont introduites pour une consultation et utilisation ou communication de renseignements fiscaux qui serait contraire à la loi. Ça, c'était d'ailleurs une recommandation très précise du rapport Moisan, qu'il y ait des sanctions pénales beaucoup plus sévères.

J'en viens maintenant aux moyens juridiques propres à lutter contre le crime organisé. Sur ce point, le gouvernement est venu à la conclusion que le principe du secret fiscal devait subir, dans l'intérêt public, une exception qu'on dit mesurée en matière de crime organisé. La paix publique nécessaire à une vie paisible et sécuritaire à laquelle nos concitoyens et concitoyennes aspirent fait partie de ces valeurs fondamentales que le gouvernement entend protéger, en particulier lorsque cette paix se retrouve menacée et entravée par les organisations criminelles.

Ainsi, lorsque le projet aura été adopté, le ministère du Revenu sera autorisé à transmettre aux agents de la sécurité publique les renseignements qu'il possède à l'égard d'une personne si cette personne est membre d'une organisation criminelle et que la communication du renseignement peut servir à prévenir ou à réprimer un acte criminel grave, c'est-à-dire passible d'une peine d'emprisonnement de cinq ans ou plus. Le ministère du Revenu sera aussi en mesure de communiquer aux agents de la paix un renseignement, si cela est nécessaire, pour prévenir ou réprimer un crime commis à l'encontre du ministère du Revenu ou à l'égard de l'application d'une loi fiscale.

Donc, en terminant, ce qu'il faut retenir, c'est que le ministère du Revenu continue de déployer tous les efforts possibles pour assurer non seulement la confidentialité des renseignements fiscaux, mais aussi un usage rigoureux répondant aux plus hauts standards de l'éthique. Tous les moyens techniques, administratifs et maintenant juridiques se trouvent améliorés et continueront de s'améliorer.

Donc, deux volets. Dans le fond, c'est qu'on répond aux recommandations pour finaliser le rapport Moisan. L'autre volet fait suite au discours inaugural du premier ministre concernant la lutte du crime organisé.

Mme Poirier (Dominique): Est-ce qu'il y a des questions en français? François Bourque.

M. Bourque (François): Oui. En quoi un renseignement fiscal peut-il ou pourrait-il servir à prévenir un crime?

M. Julien: En fait, lorsqu'on fait des vérifications... ou toute la connaissance qu'on a d'un dossier fiscal lorsque, par exemple, il y a une enquête policière, et qui pourrait... dont l'information pourrait les aider à bien mener leur enquête ou à conclure leur enquête. D'abord, un, il faut qu'ils nous démontrent que cette personne-là est bien liée au crime organisé. Il y aura quelques fonctionnaires seulement, parce que ça va être très balisé évidemment, et qui peuvent donner une information qui permettrait au corps policier de, je pourrais dire, finaliser leur enquête pour s'assurer que cette personne-là soit pénalisée comme elle devrait l'être.

M. Bourque (François): Vous pensez qu'il y a des informations de cette nature-là dans un dossier fiscal?

M. Julien: Peuvent l'aider.

Mme Poirier (Dominique): Questions en anglais? Kevin Dougherty.

M. Dougherty (Kevin): En français ou en anglais. Mais j'ai un peu de misère à comprendre. C'est-à-dire que c'est... Peut-être qu'on a besoin d'un meilleur exemple, peut-être comme blanchiment d'argent. J'essaie de saisir le lien entre le record fiscal de quelqu'un, d'un individu et le crime organisé. On ne va pas dire que j'ai fait le commerce de la drogue, par exemple. J'imagine qu'il ne va pas dire ça. Mais est-ce que c'est ça? Il s'agit de blanchiment d'argent?

M. Julien: Je vais demander à mon sous-ministre adjoint aux affaires juridiques qu'il vous donne un exemple plus clair, parce que c'est dans la technicalité plus précise.

M. Tremblay (François T.): On parle ici d'enquêtes de police. Alors, quels sont les éléments factuels qui peuvent ramener à d'autres éléments factuels qui leur sont nécessaires pour mener leur enquête? Ça leur appartient. Alors, ce que l'on dit ici... Vous donnez l'exemple du blanchiment d'argent. Ça pourrait être cela, en ce sens que, s'ils font des enquêtes dans ce domaine-là, il n'y a pas de doute que, par exemple, dans les dossiers fiscaux, on voit, ou dans les vérifications fiscales qui se font, on ne voit pas, je ne dirais pas, de l'argent blanc ou de l'argent noir, mais on voit des transactions, des volumes de transactions, des personnes avec lesquelles les transactions se font. Alors, si ces éléments factuels là peuvent être utiles dans une enquête qui concerne un membre d'une organisation criminelle, le projet de loi va permettre de fournir l'information aux conditions, évidemment, que la loi stipule ou stipulera, devrais-je dire.

M. Dougherty (Kevin): Si je peux penser à un exemple aux États-Unis, Al Capone n'a jamais été condamné pour des crimes conventionnels, mais pour évasion fiscale. C'est-à-dire que – on a donné l'exemple du blanchiment d'argent – peut-être une absence, c'est-à-dire qu'un individu a un revenu d'à peu près 1 000 et une grosse maison... C'est ça? Est-ce que c'est quelque chose comme ça aussi?

M. Julien: Exact.

M. Tremblay (François T.): Il y a cet élément-là également. C'est un autre aspect. Quand on parle de donner des renseignements aux policiers pour les aider dans le cadre de leur enquête, il faut dire: Pour réprimer des crimes graves. Je ne dis pas que la fiscalité ou la fraude fiscale, ce n'est pas un crime grave, mais on parle d'enquêtes qui seraient aussi d'autres natures. Autrement dit, ils peuvent avoir une enquête dans le domaine du trafic de drogues, par exemple, et certains éléments fiscaux pourraient les amener peut-être à réprimer de tels crimes.

Pour l'application des lois fiscales, ça, c'est toujours la responsabilité du ministère du Revenu. Les corps policiers peuvent et vont pouvoir encore davantage avec cette législation-là y contribuer en acheminant au ministère du Revenu un certain nombre d'informations. Alors, si vous revenez avec l'exemple d'Al Capone, le ministère du Revenu est en mesure de cotiser un criminel, lorsqu'il voit... Et n'importe qui, et peu importe qu'il soit membre d'une organisation criminelle ou non, qui a des actifs démesurés par rapport aux revenus qu'il déclare.

M. Julien: C'est un exemple que moi-même je donnais, d'Al Capone, je trouvais que c'était un bel exemple qui cadrait bien, entre autres. C'est une particularité, il y en a d'autres, mais ça, ça en est une.

M. Bourque (François): Vous dites donc que le ministère du Revenu pourra transmettre certaines informations aux forces policières. Est-ce que l'inverse est vrai aussi? Est-ce que la police pourra vous dire...

M. Bourque (François): Vous dites, donc, que le ministère du Revenu pourra transmettre certaines informations aux forces policières. Est-ce que l'inverse est vrai aussi? Est-ce que la police pourra vous dire: Voici, on a identifié tel, tel, tel individu, on pense qu'il appartient à un groupe criminalisé. Pouvez-vous vérifier si on ne peut pas le coincer par la fiscalité? Autrement, est-ce que l'échange va dans les deux directions?

M. Tremblay (François T.): C'est-à-dire que, dès à l'heure actuelle, il faut savoir que les policiers, dans le cadre de la Loi de police, donc des lois existantes, peuvent – en particulier la Sûreté du Québec, qui a un pouvoir sur l'ensemble du territoire, sur l'ensemble des lois – donner des informations à n'importe quel ministère, qu'on pense à des domaines d'environnement, des domaines de faune, etc., il y a toujours un certain nombre d'informations qui viennent pareil. En plus de ça, le ministère du Revenu n'est pas à l'abri du Code criminel, par exemple, et les policiers peuvent... exercer des mandats de perquisition auprès du ministère du Revenu. Sur ordre de la cour, donc, ils peuvent donc obtenir déjà des renseignements précis. Le projet de loi, ce qu'il fait, c'est que de son initiative le ministère du Revenu puisse également, dans les circonstances mentionnées, en transmettre.

M. Julien: Pour accélérer, dans le fond, être plus efficace, plus efficient, sauf qu'il faut bien comprendre aussi que ça va être très balisé. Ça, j'insiste là-dessus, il n'y a pas beaucoup de fonctionnaires qui auront, je dirais, à travailler dans ce type de dossiers-là, il va y en avoir trois, quatre, pour s'assurer que, effectivement, toute la confidentialité soit protégée, avec des avis et avec... au sous-ministériat, au niveau de la législation, aux affaires juridiques du ministère, parce que c'est quand même quelque chose qui... Ce ne sera pas ouvert à tout, ça va être très contrôlé, très, très contrôlé.

Mme Poirier (Dominique): Merci beaucoup, monsieur. Je vous demanderais votre nom, s'il vous plaît.

M. Julien: M. François Tremblay.

Mme Poirier (Dominique): Tremblay. Très bien. Merci beaucoup. Il n'y a pas d'autres questions.

(Fin à 17 h 2)

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