Conférence de presse de M. Jean-Marc Fournier, ministre de la Justice, et de M. Yves Bolduc, ministre de la Santé et des Services sociaux
Démarches juridiques prévues en vertu de la Loi sur le recouvrement du coût des soins de santé et des dommages-intérêts liés au tabac
Version finale
Le vendredi 8 juin 2012, 11 h 30
Salle Evelyn-Dumas (1.30),
édifice Pamphile-Le May
(Onze heures vingt-neuf minutes)
M. Fournier: Mesdames messieurs, bon matin et merci de votre présence. Alors, évidemment, quand vous voyez le Procureur général avec le ministre de la Santé, alors que vous savez qu'il y a une loi qui a déjà été adoptée pour prendre action contre les fabricants du produit du tabac, c'est aujourd'hui que l'annonce se fait. Et je remercie le ministre de la Santé d'être avec nous pour commenter cette annonce.
Donc, aujourd'hui, nous avons lancé le recours, justement, qui fait suite à cette loi. La somme réclamée, j'y vais dès maintenant, est d'un peu plus de 60 milliards de dollars. Elle couvre les frais que le gouvernement du Québec a encourus depuis l'entrée en vigueur du régime québécois d'assurance maladie en 1970. Comme la loi le prévoit, notre réclamation comprend également des dépenses que le gouvernement prévoit faire dans l'avenir; ceci s'explique par le fait que les fumeurs continuent d'éprouver des problèmes de santé importants tout au long de leur vie. Nous avons donc estimé le coût des soins de santé liés au tabagisme jusqu'en 2030, période au cours de laquelle le gouvernement devra assumer des coûts de soins de santé considérables.
Notre poursuite s'appuie sur la loi adoptée à l'unanimité en 2009, la Loi sur le recouvrement du coût des soins de santé et des dommages-intérêts liés au tabac. Mon collègue le ministre de la Santé et des Services sociaux, le Dr Bolduc, abordera dans quelques instants les aspects touchant les méfaits du tabagisme au Québec. Dans notre requête, nous soutenons que les fabricants de tabac ont fait de fausses représentations au sujet de la dangerosité et de l'effet addictif des produits du tabac. Notre poursuite n'inclut pas seulement les fabricants canadiens de tabac, mais aussi des compagnies étrangères, de même que le Conseil canadien des fabricants des produits du tabac. Nous soutenons également que ces fabricants ont omis d'informer les consommateurs - parmi lesquels on retrouve de nombreux enfants et adolescents - sur les caractéristiques véritables de leurs produits et qu'ils les ont induits en erreur sur les effets nocifs. Nous croyons que ces agissements ont été faits volontairement et de façon concertée.
Nous déposons aujourd'hui une requête des plus élaborées. Voici la requête dans son état quantitatif, si vous me le permettez, l'état des pièces... pas les pièces, seulement la liste des pièces qui sont invoquées. Juste pour vous donner un exemple, dans les autres provinces, la requête introductive fait à peu près cette épaisseur; celle du Québec est d'une autre nature. Nous déposons aujourd'hui une requête des plus élaborées, qui cite notamment plus de 1 300 documents émanant des compagnies elles-mêmes et sur une évaluation rigoureuse du coût des soins de santé liés au tabac. À la différence des provinces de common law, les allégations de notre requête introductive d'instance sont soutenues par des références précises à des documents que nous entendons mettre en preuve. Certaines allégations contiennent même des extraits pertinents de ces documents; cette sélection a nécessité un imposant travail d'analyse.
Il faut savoir que la documentation concernant les compagnies de tabac est colossale. Un seul exemple: le site Internet Legacy de l'Université de Californie comprend plus de 13 millions de documents, plus ou moins 70 millions de pages concernant les compagnies de tabac, dont plusieurs millions issus de leurs propres archives. Quant à l'évaluation du coût des soins de santé liés au tabac, elle repose sur l'analyse des données provenant de plusieurs enquêtes auprès de la population ainsi que des données de consommation de services de santé et de services sociaux. Une description précise des différents éléments considérés aux fins du calcul des coûts de même que les périodes de référence sont indiquées dans la requête. Cette évaluation en tout début des procédures nous distingue et nous permet aujourd'hui de présenter une réclamation, bien qu'impressionnante par son montant, réaliste quant à son évaluation.
Lorsque l'on aborde la question des coûts de la santé en général, il s'agit inévitablement de dépenses considérables pour l'État. Mais il faut aussi savoir que la fabrication des produits du tabac engendre des profits importants. Un regard rapide sur l'année 2011 nous indique que les multinationales auxquelles appartiennent les compagnies défenderesses ont fait des profits totalisant environ 20 milliards de dollars canadiens pour cette seule année. Ajoutons que cette industrie a aussi fait d'énormes profits au cours des 60 dernières années.
L'équipe du Procureur général et celles d'autres ministères et organismes ont déployé des efforts considérables et ont pris les meilleurs moyens pour bien préparer et pour assurer la pleine réussite de cette démarche judiciaire sans précédent pour le Québec. Et - permettez-moi cet aparté dans ce lieu peu commun pour le faire - je tiens à remercier tous ceux qui se sont investis, au cours des dernières années, pour préparer cette requête colossale et documentée comme jamais.
Selon le gouvernement du Québec, l'industrie du tabac a agi de façon à rendre la consommation de tabac attrayante et à amoindrir la portée des messages de prévention exigés par les autorités de santé publique. Mon collègue le ministre de la Santé et des Services sociaux aura l'occasion d'aborder avec vous leur stratégie de marketing aux effets dévastateurs, en particulier chez les jeunes, une clientèle que les fabricants ont recrutée et qu'ils ont tenté de fidéliser par tous les moyens, en toute connaissance de cause. Ces jeunes d'hier, ce sont les hommes et les femmes d'âge mûr d'aujourd'hui, et les aînés aux prises avec des maladies chroniques pouvant entraîner la mort. Nous sommes très préoccupés par les effets du tabagisme auprès de la population du Québec et des coûts qu'ils engendrent dans notre système de santé. Pour nous, il est temps que les fabricants des produits du tabac assument leurs responsabilités.
Vous n'êtes pas sans savoir qu'il y a également deux recours collectifs intentés actuellement contre les fabricants des produits du tabac. Je vous précise que le Procureur général n'est pas impliqué dans ces poursuites. La démarche entreprise par les membres des recours collectifs est différente de celle du gouvernement. L'objet des réclamations n'est pas le même. Essentiellement, les recours collectifs concernent les dommages liés au tabagisme subis par les membres des groupes, alors que la poursuite du gouvernement concerne les frais qu'il a lui-même encourus pour soigner les citoyens et les citoyennes aux prises avec des maladies liées au tabac. Conséquemment, ces deux recours peuvent cheminer en parallèle.
Une première vague de provinces canadiennes, si je puis dire, a déjà intenté des poursuites. C'est le cas de la Colombie-Britannique, de l'Ontario, du Nouveau-Brunswick et de Terre-Neuve-Labrador. Le Québec s'inscrit dans la deuxième vague de poursuites des provinces qui viennent d'intenter des recours ou qui ont annoncé leur intention de le faire: le Manitoba, l'Alberta, la Saskatchewan, la Nouvelle-Écosse et l'Île-du-Prince-Édouard.
Le Québec investit depuis longtemps dans la lutte au tabagisme. Le Québec a légiféré, réglementé sur plusieurs de ses aspects, dont l'interdiction de fumer dans les lieux publics, l'interdiction des commandites par l'industrie du tabac, etc. Nous avons par ailleurs suivi les contestations judiciaires des compagnies relatives aux avertissements de santé sur les paquets de cigarettes, qui se sont rendues deux fois en Cour suprême. Nous avons également été impliqués dans le règlement national du dossier de la contrebande du tabac. Nous avons parallèlement suivi le dossier de la Colombie-Britannique, qui a été la première province canadienne à adopter une loi permettant le recouvrement du coût des soins de santé. Cette loi a fait l'objet de deux examens en Cour suprême. Une fois validés par celle-ci, nous avons adopté, en 2009, à l'unanimité à l'Assemblée nationale, une loi inspirée de celle de la Colombie-Britannique et nous voilà donc aujourd'hui. Nous n'avons rien laissé au hasard. Nous avons pris le temps qu'il fallait, vous le constaterez, j'en suis persuadé, en consultant la requête.
En conclusion, le débat porte sur la connaissance des dangers des produits du tabac sur la santé, connaissance qu'avaient les fabricants, et leurs actions pour cacher cette information pour ne pas nuire à leurs ventes. Cet état de fait a rendu plusieurs générations dépendantes des produits du tabac en plus d'entraîner des coûts importants pour notre système de santé. C'est de leur omission à informer les Québécoises et les Québécois dont il est question.
Par le dépôt de cette procédure, nous franchissons une étape importante. Nous sommes résolus à mener à bien notre démarche dans l'intérêt de nos concitoyens, qui assument les coûts de notre système de santé à même leurs taxes et leurs impôts. Nous le faisons aussi, bien sûr, avec des objectifs avoués en matière de santé publique.
A ce stade des procédures, dont les significations ont commencé ce matin, vous comprendrez que je réserverai mes commentaires pour la suite et que je laisserai les plaideurs présenter la preuve et faire état des arguments du gouvernement du Québec devant la cour. Me suivra le Dr Bolduc. Un échange pourra intervenir sur les sujets. J'annonce à l'avance que les sujets pointus pourront être répondus dans la même réserve que je me suis donnée moi-même, c'est-à-dire de ne pas plaider ici ce qui devra être plaidé devant les tribunaux. Mais des juristes d'expérience sont avec nous au cas où vous auriez des questions un peu plus précises, et, à ce moment-ci, je laisse la parole à mon collègue.
M. Bolduc: Merci, Jean-Marc. Bien, vous savez que le tabagisme, c'est une maladie qui cause une grande dépendance. Également, c'est une maladie qui a beaucoup d'impact sur la santé des gens, à plusieurs niveaux et ce sont des maladies fréquentes et très dispendieuses. On parle des maladies cardiovasculaires, on parle de la maladie périphérique vasculaire, les gens qui ont des blocages au niveau des artères qui souvent nécessitent des amputations, on parle du cancer du poumon et de plusieurs autres types de cancers, parce que la nicotine est considérée comme un produit cancérigène à plusieurs niveaux, et vous savez que, dans la cigarette, il y a plusieurs produits qui sont cancérigènes. Donc, on parle même du cancer de la vessie qui est augmenté, également, les maladies pulmonaires obstructives chroniques. Les maladies que je viens de vous décrire, ce sont nos principales causes d'hospitalisation. Ce sont nos principales causes, également, qui nécessitent des traitements extrêmement dispendieux. Donc, les coûts reliés à ces maladies-là, qui se font sur plusieurs années, bien, ça a amené des coûts extrêmement importants pour le réseau de la santé et des services sociaux.
Ça fait que, quand vous regardez ça en perspective, ces gens-là ne sont pas seulement malades dans le passé, mais également vont continuer d'être malades jusqu'en facilement 2030, pour ceux qui vont survivre jusque-là, d'où l'intention d'aller refaire des recours pour les méfaits qui ont été causés dans le passé jusqu'à la conséquence, c'est-à-dire jusqu'à la fin de la vie des gens. Donc, ce n'est pas exclusif à 2030. On peut estimer que, vers 2030, l'ensemble des coûts importants vont avoir été évalués.
Egalement, on oublie souvent les mères qui fument, ont des bébés qui sont de plus petit poids, qui amènent des plus grandes complications. Donc, dans la poursuite, il y a également cet élément-là qu'on a tenu compte, c'est-à-dire des conséquences sur le fœtus, et, par la suite, chez l'enfant, et également les problématiques qui surviennent à la naissance.
On sait que l'objet de la poursuite, c'est qu'à un moment donné, les compagnies de tabac savaient les torts que ça a causés, ne l'ont pas laissé savoir, et les gens ont continué, de bonne foi, à continuer à fumer avec le principe que ces gens-là disaient qu'il n'y avait pas de problème. Donc, c'est la base de la poursuite, mais on va laisser nos juristes plaides.
Ça fait que, pour nous, moi, je suis très content parce qu'un des principaux coûts du réseau de la santé a été causé par les produits du tabac. Donc, ça va nous permettre de récupérer un montant, et je tiens également à réitérer la lutte qu'on fait contre le tabagisme à tous les niveaux. On est passés d'un niveau de 40 % de fumeurs dans les années soixante-dix à aujourd'hui, autour de 23 %. Il y a eu de la prévention qui a été faite, il y a eu des programmes qui ont été mis en place, et, moi, je m'attends à ce qu'avec la poursuite qu'on fait aujourd'hui, c'est juste justice pour le citoyen, le contribuable qui a dû assumer des coûts causés par un produit dans lequel nous aurions pu faire de la prévention.
Et, là-dessus, moi aussi, je voudrais féliciter les équipes qui ont travaillé, parce qu'il y a eu une évaluation extrêmement extensive des coûts. On est allés de façon quand même assez précise. Il y a eu des experts qui ont été embauchés pour, justement, nous justifier les coûts que l'on présente aujourd'hui. Donc, je pense que c'est un dossier qui va être très intéressant à suivre, et le Québec... également une très bonne cause à défendre. Merci beaucoup.
Le Modérateur (M. Alexandre Robillard): Donc, on va passer aux questions. On nous a informés que M. Bolduc va devoir nous quitter, il a un engagement à midi. Donc, s'il y a des questions spécifiques à lui, là, il va peut-être falloir, donc, lui poser rapidement. Donc, on va commencer avec les questions en français. Josée Thibeault.
Mme Thibeault (Josée): Je pense que c'est M. Fournier qui peut répondre à ça. Il y a eu d'autres poursuites déposées non seulement au Canada, mais également aux États-Unis. Est-ce qu'il y a déjà eu des poursuites de ce type-là pour recouvrer des coûts de santé qui se sont rendues à la fin et qui ont été gagnantes pour le poursuivant? Est-ce que ça existe?
M. Fournier: Dans le cas des États-Unis, il y a eu des poursuites qui ont connu une fin par règlement qui a valu que... je pense que c'est quelque chose qui était autour de 250 milliards, je crois, dans le cas des États-Unis. En ce moment, au Canada, dans la foulée des lois, on parlait de la loi de la Colombie-Britannique, et on parlait des vagues qui ont été lancées. Donc, plusieurs provinces se sont déjà inscrites. L'Ontario a inscrit une demande à hauteur de 50 milliards, l'Alberta à hauteur de 10 milliards. Pour les autres, ils ont des... ils introduisent des procédures mais n'ont pas, à ce moment-ci, encore fait l'évaluation des dommages qu'ils demanderont au fur et à mesure de leurs procédures.
Nous, au Québec, selon nos règles, d'une part, mais aussi selon le choix qu'on a fait, c'était d'étayer au maximum, d'où une requête d'une ampleur - juste dans la quantité du nombre de pages - considérable, autant pour étayer les éléments qui concernent la responsabilité des défendeurs que ce qui concerne le quantum.
Dr Bolduc disait tantôt, à juste titre, j'avais omis de le signaler, tantôt, j'ai pensé beaucoup à l'équipe des juristes qui avaient travaillé sur le dossier, mais en coordination avec les gens de la santé pour établir aussi le meilleur quantum. On assiste donc, au Canada, à la requête la plus complète, requête introductive la plus complète, la plus étayée, où on retrouve la référence au plus grand nombre de pièces justifiant et la responsabilité et le quantum des dommages.
Mme Thibeault (Josée): J'aurais une question pour le Dr Bolduc. Aux États-Unis, savez-vous combien de temps ça a pris pour obtenir le règlement à l'amiable?
M. Fournier: Je crois qu'aux États-Unis ça doit être au moins une dizaine d'années probablement. Et là, je regarde en arrière pour voir s'il y a des hochements de tête, et il y a des... oui, des... à peu près une dizaine d'années. Alors, on pourra vous préciser tantôt.
Mme Thibeault (Josée): M. Bolduc, est-ce qu'on ne devrait pas penser à déclarer la cigarette comme étant une drogue et l'interdire, tout simplement, compte tenu des coûts que ça impose au système de santé, non seulement au Québec, là?
M. Bolduc: Bon, dans un premier temps, c'est une dépendance, hein? Quand on parle de drogue, c'est un produit qui donne de la dépendance avec des sevrages, d'où la difficulté d'arrêter, et, qu'une fois que les gens ont commencé c'est... il y a une grande difficulté à arrêter. Je pense que le recours qui est fait, ce n'est pas sur le principe que ça cause un danger, c'est qu'il y a des gens qui en faisaient la promotion et qui, eux autres, ont caché la vérité aux gens qui utilisaient leurs produits. C'est ça, le «basement» du jugement.
Pour ce qui s'agit de l'interdire complètement, c'est une décision de société, et, là-dessus, je pense que c'est une société qui est évolutive. De plus en plus, on a limité l'accès au tabagisme, entre autres, l'interdiction de fumer dans les endroits publics, toutes les interdictions également par rapport à la publicité, l'affichage sur les produits. Donc, il y a un contrôle qui se fait progressivement, mais, actuellement, il n'est pas question de l'interdire complètement. Mais il faut dire que le but de la poursuite, c'est de dire: Vous savez, il y a des gens qui vendaient des produits qui savaient qu'ils étaient dangereux. Ils en faisaient la négation qui a amené un effet délétère, là, chez les usagers du produit.
Le Modérateur (M. Alexandre Robillard): Alain Laforest.
M. Laforest (Alain): M. Fournier, on se souviendra, à la fin des années quatre-vingt-dix, qu'Allan Rock, ancien ministre fédéral de la Justice, avait embauché Jeffrey Wigand, qui était «l'Initié», qui avait sorti énormément de dossiers concernant les compagnies de tabac. Est-ce que vous vous êtes inspirés de ce qui s'est passé dans les années... fin des années quatre-vingt-dix, début 2000, pour initier votre poursuite?
M. Fournier: Je vous réfère - et je suis sûr que vous allez avoir beaucoup de plaisir - à regarder l'ensemble de la documentation que nous avons, à l'ensemble des pièces qui sont identifiées. Je pense qu'on a fait une revue beaucoup plus large qu'à une seule référence. À peu près tout a été regardé, utilisant les meilleurs documents de référence. Comme je le disais tantôt, il s'agit de la requête introductive la plus étayée, la plus appuyée parmi toutes celles qui ont pu être déposées au Canada, et les références sont des références qui viennent de tous les coins du monde où on pouvait les trouver, là.
M. Laforest (Alain): Dr Bolduc, dans la poursuite, vous laissez entendre que les compagnies de tabac ciblent directement des clientèles encore. Quelles clientèles sont les plus visées actuellement par les compagnies de tabac?
M. Bolduc: Ce sont définitivement les jeunes. Les jeunes sont la proie des compagnies de tabac. Il y a eu de la promotion qui a été faite, et puis je pense que les compagnies... Ça a été d'ailleurs étayé, les stratégies marketing qu'elles avaient au niveau des jeunes. Parce que, quand les jeunes commencent, un, ils sont un peu plus vulnérables. Deuxièmement, c'est un produit que, si vous commencez jeune, c'est très difficile d'arrêter. Plus longtemps vous avez fumé, plus c'est difficile d'arrêter. Donc, il y a toujours eu cette stratégie-là des jeunes. Puis également, ce n'est pas concerné dans cette poursuite, mais les pays en voie de développement, entre autres, où les compagnies de tabac ont la réputation, en Chine, en Inde, d'encourager les jeunes à commencer à fumer, et faire fi, justement, du danger du tabac et des complications que ça va avoir sur plusieurs années.
M. Laforest (Alain): Est-ce que vous avez un pourcentage de jeunes qui fument actuellement au Québec qui est disponible?
M. Bolduc: On pourrait vous le rendre disponible pour vous donner le chiffre exact. Ça aussi, également, c'est en décroissance par rapport aux années passées, mais il y a un nombre significatif de jeunes qui commencent à fumer, et on parle de l'âge de 12 ou 13 ans.
Le Modérateur (M. Alexandre Robillard): Julie Dufresne.
Mme Dufresne (Julie): M. Fournier, considérant le nombre de provinces qui semblent avoir le même intérêt à poursuivre l'industrie du tabac, est-ce qu'il n'y avait pas lieu de faire un front commun ou une poursuite commune?
M. Fournier: Chacun a sa loi, chacun fait ses poursuites, chacun étaye ses demandes. Il est évident que nous faisons les demandes au nom des Québécois et Québécoises qui, par leurs taxes et impôts, ont soutenu les soins de santé.
Vous avez le tableau qui est devant vous, vous voyez les dépenses et les coûts qui sont affectés sont les coûts du gouvernement du Québec, des Québécois. Cela ne veut pas nécessairement dire que nos juristes et ceux qui travaillent sur le dossier ferment les yeux sur ce qui se passe ailleurs. J'ai dit tantôt que nous nous sommes... Et nous étions attentifs notamment à la loi initiée en Colombie-Britannique et au jugement de la Cour suprême qui a reconnu la validité - je le dis parce que nous avons notre propre loi inspirée de celle-ci, donc assez confiants de s'appuyer sur la jurisprudence déjà existante - reconnaissait la validité d'une loi comme la nôtre. Donc, on ne ferme pas les yeux, comme les autres ne ferment pas les yeux sur nos démarches. Lorsqu'il y a des éléments de preuve que, nous, on utilise pour étayer la responsabilité des défenderesses, il est possible que d'autres souhaitent utiliser les mêmes éléments, mais ça, il reviendra à eux de se guider en conséquence. Mais on n'est jamais ignorants de ce que font les autres, mais le recours est fait au nom des Québécois.
Mme Dufresne (Julie): Et, M. Bolduc, les coûts de la santé ont été évalués en fonction de quoi? Pouvez-vous me donner quelques exemples? Vous parlez du tabagisme, évidemment, des traitements, les soins mais...
M. Bolduc: Oui, un exemple, c'est qu'il y a eu des experts qui étaient capables d'évaluer des coûts d'épisodes de soins. Un cancer du poumon, en moyenne, lors du traitement, va coûter un certain montant, par la suite ils ont fait une évaluation du nombre de personnes qui ont été atteintes dans notre réseau de la santé. Ça fait que, pour chacune des maladies, il y a eu des évaluations similaires: des infarctus, les maladies vasculaires périphériques. On est capables d'évaluer un coût moyen par épisode de soins et, par la suite, on a des bases de données pour être capables d'évaluer le nombre de personnes qui ont été atteintes. Donc, ça a été un travail très ardu. Des experts ont été embauchés du côté médical, qui ont travaillé avec des gens de comptabilité puis des actuaires pour essayer de cibler le plus près possible le montant total des coûts encourus par le système de santé. Et, comme disait mon collègue, c'est la requête qui est avec le plus d'informations qui a été déposée, tant au niveau de l'histoire du tabagisme avec les compagnies de tabac que du côté médical où, nous autres, on a vraiment pris la peine de chiffrer de façon assez précise les coûts réels, les coûts de santé. Et on est capables par la suite de faire des projections dans le futur sur les coûts qui vont être engendrés, parce que ces gens-là qui ont fumé dans les années soixante-dix, quatre-vingt, vont aussi avoir des complications qui vont facilement s'échelonner jusqu'à 2030 pour ceux qui ont survécu au tabac.
Le Modérateur (M. Alexandre Robillard): Michel Corbeil.
M. Corbeil (Michel): M. Bolduc, selon la poursuite, là, vous allez réclamer, pour les 20 prochaines années, à peu près 750 millions par année. Ce n'est pas une évaluations des coûts de santé qui remontent au début de l'année... en 2000 ou fin des années quatre-vingt-dix. Ce n'est pas... Vous ne voulez pas récupérer l'ensemble? Au cours des 20 prochaines années, ça va être plus que 750 millions par année.
M. Bolduc: Bien, là... Là, il faut laisser les experts. Eux autres, en cour, ils feront la démonstration des coûts et pourquoi nous sommes arrivés à ces montants-là. Mais on sait que c'est approximativement autour de 1 milliard par année, les coûts engendrés. Bon. Les experts, possiblement que, s'il y a des gens qui décèdent et ont peu de coûts pour le système de santé, ça fait qu'il y a une attrition qui va se faire sur une... sur plusieurs années. Mais je vous dirais que, dans la requête, ça a été fait de façon très professionnelle, et on peut se fier aux chiffres qui ont été mis dans la requête.
M. Corbeil (Michel): Mais c'est 750 millions, là, pour...
M. Bolduc: C'est ça. C'est approximativement autour de 750 millions de dollars.
M. Corbeil (Michel): Il y a plusieurs recours qui sont entrepris en même temps par les provinces, par les recours collectifs. C'est toujours... c'est des dizaines de milliards à chaque fois, vous pensez que vous allez récupérer votre argent? Vous n'arrivez pas trop tard avec votre poursuite?
M. Fournier: Comme j'ai dit un peu plus tôt, nous avons... nous sommes en mesure de regarder les rentrées de fonds, les profits que font ces entreprises. J'ai mentionné tantôt quelques chiffres à l'égard de ces profits. Notre procédure est signifiée, je pense qu'on peut dire à l'heure qu'il est, je pense que la signification est à peu près complète pour ce qui concerne les places d'affaires au Québec. Elle sera complétée, en termes de signification, pour les places d'affaires à l'étranger. Vous verrez qu'elle est non seulement très étayée sur la preuve de la responsabilité et le dommage, mais aussi sur ceux qui sont, selon nous, responsables, et donc responsables aussi du dédommagement, qui ont leur place d'affaires au Québec ou ailleurs dans le monde.
Le Modérateur (M. Alexandre Robillard): Régys Caron.
Mme Plante (Caroline):...M. Bolduc avant qu'il quitte.
Le Modérateur (M. Alexandre Robillard): Oui, oui, oui, certainement.
M. Bolduc: So, I will have to practice my English.
Mme Plante (Caroline): Mr. Bolduc, what was your department implication in preparing for this lawsuit?
M. Bolduc: First, in the... for the Ministry of Health, we know that there is a lot of inconvenients with the people who smoke. We have a lot of complications and there is a lot of costs in the health system that were caused by tobacco. And what we did, we did the collaboration with the Ministry of Justice, and also we had the experts in the health system who helped the Ministry of Justice to calculate the «amende» that was supposed to be paid by the companies with the cases that have problems with their health.
Mme Plante (Caroline): How did you calculate the amount?
M. Bolduc: You know, the experts, what they did, they looked at one disease. I'm going to give the example of the lung cancer. We know that an episode of lung cancer is going to have a cost between... it's going to cost such an amount. And after that we can calculate the number of cases that we're going to have in the future, but also cases that we had in the past, and, at this moment, they're going to do, with the accountants, the «calcul» to give the amount that it will cost for the «demandes». «Demandes», en anglais, c'est...
Une voix: What they're asking.
M. Bolduc: What they're asking.
Mme Plante (Caroline): You made the point that people have been sick in the past, and they will continue to be sick.
M. Bolduc: Yes, yes. Yes, you know, people who have smoked in the 1980s, 1990s, are going to have complications in the future. They're going to have lung cancers or diseases, vascular diseases, and this is the amount that we're going to have to calculate and to put in the asking.
Mme Montgomery (Angelica): Mais... J'ai des questions en anglais mais je vais attendre pour la fin, les poser à M. Fournier.
M. Fournier: I'll stay for you.
Mme Montgomery (Angelica): Pardon?
M. Fournier: I'll stay for you.
Mme Montgomery (Angelica): Mais on a juste... on va continuer en français.
Le Modérateur (M. Alexandre Robillard): Oui. O.K. C'est beau.
Mme Montgomery (Angelica): Merci.
Le Modérateur (M. Alexandre Robillard): Régys.
M. Caron (Régys): Alors, j'allais demander, messieurs, comment considérer maintenant le fait qu'il y a encore un grand nombre de fumeurs, mais, ces gens-là, on comprend qu'ils savent à quoi ils s'exposent en s'adonnant au tabagisme. Cette admission-là est, de facto, dans votre poursuite ou ça ne couvre pas les maladies que ces personnes-là vont encourir plus tard dans leur vie?
M. Bolduc: Non, parce qu'il y a une reconnaissance qu'il y a un danger par rapport au tabac. Le but de la poursuite, c'est de dire, à un moment donné, les compagnies de tabac ne reconnaissaient pas ça, même ont caché de l'information, même sont allées à l'encontre de l'information qu'ils disposaient pour encourager les gens à fumer. Mais on sait que, le tabagisme, c'est une très, très grande dépendance. Et même si des gens veulent arrêter, c'est très difficile, d'où aujourd'hui la problématique que nous avons. C'est qu'il y a des gens qui continuent à fumer, savent les complications, mais, par contre, ont de la difficulté à arrêter. On leur fournit de l'aide, on travaille avec eux autres. Il y a de l'aide également qui peut leur être donnée, mais je pense que c'est important, puis les gens le savent que ça représente un risque.
M. Fournier: Sous réserve toujours des possibles cas où les gens ne le savent pas et qu'il y a néanmoins des techniques qui peuvent être prises, et notre conférence de presse se fait sous la réserve qu'il y aura des suites devant les tribunaux, et on va laisser à nos plaideurs le soin de faire leurs preuves, d'amender, s'ils doivent les amender, les demandes pour inclure d'autres personnes s'il y a lieu. Il n'y a aucune admission de notre part, par cette conférence de presse, d'une limitation, quelle qu'elle soit, à l'égard de la demande que nous faisons. Elle est appuyée néanmoins, à 60 milliards, comme nous le faisons, sur la preuve que j'ai...
M. Caron (Régys): Est-ce qu'on n'est pas en train de faire mourir une industrie à petit feu, compte tenu de l'importance des poursuites qui s'accumulent sur le dos de cette industrie-là?
M. Fournier: La poursuite qui est prise aujourd'hui est au nom d'une loi adoptée à l'unanimité par l'Assemblée nationale, qui visait à faire rembourser les sommes payées par les Québécois pour les risques qui étaient associés et les dommages qui étaient associés à cette industrie et qui étaient cachés aux Québécois. Ce sera la seule réponse à votre question, à cette présente conférence de presse.
M. Robillard (Alexandre): Donc, moi, je vais me permettre quelques questions. Justement, la capacité de payer des compagnies de tabac, vous dites: On a évalué qu'ils font des profits. Vous avez cité, là, je pense, c'était 20 milliards, tout à l'heure. Mais, le nombre de poursuites, quand même, il s'additionne au Canada. On est déjà à 120 milliards.
M. Fournier: Votre question est tout à fait légitime parce que, quand on regarde des montants comme ceux-là...
M. Robillard (Alexandre): Je veux savoir si c'est réaliste de penser que vous allez avoir 60 milliards?
M. Fournier: Oui. Je crois même qu'à 60 milliards c'est peut être la plus grande poursuite au Québec, en tout cas, prise par le Procureur général, là. Vérification à faire, mais je crois.
Ceci étant, il y a déjà eu, dans le passé, par exemple, aux États-Unis, un règlement pour 250 milliards, et ça, c'est en ce qui concerne les coûts de santé. Je ne parle pas ici des affaires de contrebande où il y a d'autres milliards qui s'ajoutent ici, en Europe et ailleurs.
Le fait est que la loi que nous avons nous demande de préparer, en termes de responsabilité et en termes d'évaluation des coûts, une procédure pour aller chercher le dédommagement. C'est ce que nous faisons. Lorsqu'on regarde les profits annuels de ces entreprises, lorsqu'on regarde le fait que notre procédure ne se limite pas qu'aux places d'affaires québécoises, mais internationales, tout nous porte à croire qu'appuyés de la preuve que nous avons, que nous obtiendrons gain de cause et que nous serons en mesure de réaliser le jugement qui sera rendu.
M. Robillard (Alexandre): Je pense c'est en novembre 2010, la Cour supérieure, elle avait autorisé un recours des compagnies de tabac qui souhaitaient contester la loi, là. Est-ce que c'est encore un obstacle, ça?
M. Fournier: Évidemment, cette contestation-là est toujours devant les tribunaux, mais, comme je l'ai dit peut-être, je ne sais pas si c'était une réponse ou dans l'allocution initiale, notre loi s'inspire de façon... avec une proximité très grande de la Colombie-Britannique qui a débuté avant nous et qui a déjà passé le test de la Cour suprême. Donc, que les gens aient le droit de contester, ça va de soi dans notre système, mais, l'expectative que nous avons, c'est que le jugement de la Cour suprême ne sera pas modifié par la Cour suprême et qu'il tiendra aussi pour notre loi qui est similaire à celle de la Colombie-Britannique.
M. Robillard (Alexandre): Puis, dernière précision, le 60 milliards, c'est en dollars d'aujourd'hui? On sait que vous allez embarquer quand même dans une odyssée judiciaire, là. Est-ce que c'est prévu que ça va être indexé?
M. Fournier: L'évaluation qui est faite est l'évaluation la plus réaliste possible, tenant compte des coûts qu'on est capables de prouver. Si tant est qu'il doit y avoir des amendements, des modifications à apporter à la procédure pour qu'elle se colle au chiffre le plus exact, et là on verra à quel moment on sera dans le temps, là - je comprends votre question - on le fera.
Juste pour vous donner un cas de figure, dans plusieurs provinces, le montant de la réclamation n'est pas indiqué. Selon leurs procédures, ils pourront y arriver au fur et à mesure. Nous, nous y allons avec une évaluation initiale très importante, très fouillée, ce qui ne nous empêche pas d'apporter des ajustements selon le moment, par exemple, où la cause va procéder.
M. Robillard (Alexandre): D'accord. Donc...
M. Fournier: Nous libérons M. Bolduc? Non, pas encore?
Mme Plante (Caroline): M. Bolduc, dernière question en anglais sur les jeunes. Young people continue to be targeted by tobacco...
M. Bolduc: Yes, absolutely. Actually, young people are targeted by the tobacco companies, and you know also that the patients who are... poor countries also are targeted by the tobacco companies. But here, in Québec, there is a strategy to... that they try to have more young people to start smoking. Merci.
Le Modérateur (M. Alexandre Robillard): Kevin Dougherty.
M. Dougherty (Kevin): Yes. I'm just...
M. Fournier: Merci, M. Bolduc. Merci beaucoup. Bon travail!
M. Dougherty (Kevin): Mr. Fournier, that's a lot of money. I'm just wondering that what Alex is saying, you know... you know what happened to the asbestos companies in the United States when they were sued, so Johns-Manville went bankrupt. You know, if... Can the companies realistically pay this? And, on the other hand, if you think that they can pay, you have an interest in them continuing to operate so that they can continue to generate profits so that they can pay you, no?
M. Fournier: Well, the law that was unanimously adopted by the Assembly was to ask for the cost of our health department since the beginning of this department related to tobacco products because of the fact that they knew that there were dangers associated with the products and they didn't tell. And that bill asked us to... made a demand for the amount of money that you see on that post. So that is what we are doing. We believe, when we look at similar situations like in the United States, where a demand like this one was tabled, that they were able to make an agreement to up to the amount of $250 billion. There are other cases, not in the... looking in the area of health costs but in taxation, when they were avoid... using strategy to avoid taxation in Europe, in United States, where many billion dollars were in consideration.
The fact is, every year, those companies made big profits. And when we look at our demand, that if you look at the size of it, you'll find that it is structured with many, many details, but you will see at just the first page that we are signifying this procedure not just in Québec, but in all companies all over the world who are in relation with those companies who have those... sale of products in Québec during that period.
Le Modérateur (M. Alexandre Robillard): Tim Duboyce.
M. Duboyce (Tim): Minister, Québec, I think, is the sixth Canadian province to launch a lawsuit of this nature. There are others saying that they're going to do so. So these tobacco companies are going to end up facing litigation well over $100 billion in all, likely. But do they have $100 billion to pay out? What's the likelihood you're ever going to see this money?
M. Fournier: As I was saying, the first step is to follow what the Assembly adopted. We can go back: why did the assembly adopt that? Well, because there were people who were mislead starting to smoke. Their life was changed and affected, and there were costs to our health system because of that and because of... those companies didn't tell the risk associated with tobacco products. So we start this procedure because there's a consensus that we've got to ask those who are responsible to pay for it.
When we look at their every year funding, we see that they earn billions and billions of dollars every year. When we look at procedures like this one, that was used elsewhere, like in the United States, they were able to have an agreement, a settlement of those cases for more than $200 billion. So, of course, those are big numbers, but, if you look at... going back since 1970 and you look at the amount of money that every Quebeckers put in the system to fight against the danger of tobacco products, well, it's just a normal amount to ask for because we did pay for. So it's... that demand that we are tabling today is normal because they've got to assume their responsibility, is realistic because we've got the proof of the amount that we've paid. And we think that we will be able to have our amount of money back because they are, every year, having billions of profits.
Le Modérateur (M. Alexandre Robillard): Caroline Plante.
Mme Plante (Caroline): What will be the cost of this lawsuit if we're expecting it to last several years, maybe a decade? Just in terms of, you know, the lawyers and the people who will work for this lawsuit, what's the estimated cost?
M. Fournier: Impossible to tell because we don't know when this case will finish and, because of that, we don't know. We don't know what kind of procedure will have to be taken. We've got rights in our society. That's another subject that sometimes we talk in our National Assembly. People have rights. They could... They have the right to ask the judge many things. We don't know what will be the next step for those who are in defence and for us. But, still, we think that it's the right place to invest our money because it's just normal to have the money back that we had to pay because of their responsibility. And that's the first point.
Second point, we can never decide not to invest in the execution of our rights, because, what will be the next step of others if they discover that, as a State, we decide that we don't pursue, we don't take the action that we have to take? That would bring people to take liberty with their responsibility avoiding any case of paying back and reimbursing the responsibility they've got. So we think that it's the right place to put our money to ask them to pay back.
Mme Plante (Caroline): OK. If the law was adopted, the bill was adopted - Bill 43, I think it was - in 2009, why wait all this time to actually launch the suit? And why is Québec in the second wave of provinces to launch a suit?
M. Fournier: That's a very good question. I think this is the answer, if you just take a look at it. The difference between our procedure and procedure taken by other provinces is the evaluation that we made of the cost. With experts in many fields, with also the analysis of many... all the proofs that we can have about the responsibility of those companies, that had taken a certain moment to do that.
In other procedure, they make the demand and, along with the time to bring the procedure in front of the Court, make their study, and make their proof, and have to present that. We start... And I think that we can say that this is a first in Canada, with a state of readiness to go in front of the Court that is really different of others.
So the first point, as I was saying, is that BC adopted a law, that law was tested in... up to the Supreme Court and recognized as valid. Our law is similar to that one. So, even for those who contest that Bill, that law, we are certainly in a position to be confident that our law will be confirmed as valid. At the same time, after doing that, knowing what was the juridical environment, we are able to present a demand that is so big that the only thing we can say is that those who have worked on it are certainly very proud today and have all the reasons to be proud of the work they have done. Still, they have so work to do before we've got a judgement.
Mme Plante (Caroline): Will this state of readiness help your case?
M. Fournier: Well, if we did that, it's because we think it's going to help us. In any factor, you've got to make your proof, you've got to be sure where you go, and certainly that's adding to the confidence of a Procureur général to be in front of journalists to say that, today, it's really a big day for justice in health, in the tobacco industry relations. It's certainly a very big day and it's not the end of the walk. But, as you see the procedure, you can see that you can discover how much investment of energy was put to prepare that.
M. Dougherty (Kevin): Just one little question. How long do you think this will take? How long do you think this will take to get through the courts?
M. Fournier: It's always impossible to... I'm sorry, I would like to tell you a certain amount of months or years, but we don't know what will be the answer of the other party, and there's all factors in justice field that we don't control and we don't have to control. That's up to the justice matter to take care.
M. Corbeil (Michel): Combien avez-vous investi jusqu'à maintenant?
M. Fournier: Je ne pourrais pas vous donner l'évaluation des coûts et je ne suis même pas sûr que je vous la donnerais si je l'avais, parce que, pour faire la préparation de tout ça et pour la suite des recours, il y a un certain nombre d'informations qu'on mettra sur la place publique une fois que tout sera terminé.
Mme Montgomery (Angelica): Mr. Fournier, has any Canadian province won a lawsuit like this?
M. Fournier: At this moment, they are all in the... following, let's say... The first law was B.C., and they are... for those who have started their demand, they are... didn't receive any judgement at this right moment, so there's no judgement yet that we can see in Canada. If we look at United States, they didn't have the conclusion by a judgement but by a settlement defined between the parties.
Mme Montgomery (Angelica): And has any other province asked for this much?
M. Fournier: Well, as I was saying, for Ontario, in their demand, it's $50 billion; for Alberta, it's $10 billion and, for the other provinces, at the beginning of the... with their demand at the beginning, when they tabled their demand, they didn't put, at the beginning, the amount of money they will ask for. That will be established along the procedure in front of the court. That is one of the differences that we've got with our procedure. Even in Ontario, with $50 billion, it's not an evaluation that was made as the way we did our because it was... our evaluation was looking very specifically to our budget, our every year budget and the cost of every health episode that was given to real citizens.
Mme Montgomery (Angelica): So how do you explain that Québec is asking for more than Ontario, and they have a larger population?
M. Fournier: As I was saying, for Ontario, their evaluation at the beginning of their demand, and they've got... they have the possibility to modify it, they will have to prove it, and with the factor of proof they will bring in front of the court that their numbers might change, but just to know that it's $50 billion at the beginning. Our demand is based on many, many factors. I suppose that you can see some aspect of it, and we are pretty sure that we can prove those costs, no problem with that. Still, we reserve our rights to raise that amount, taking into consideration the time it will take before having the judgment and taking into consideration other factors that could happen and that we'll keep as a possibility for us.
Mme Montgomery (Angelica): And just... I need to ask: Québec also makes money off of taxing tobacco. So doesn't this create a contradiction when we claim for damages but, at the same time, are making money off of the product?
M. Fournier: No, we don't see any contradiction with that. The only thing that we see is the fact that tobacco products were sell without having the right information given by the producer. The effect of that was that people were sick, the effect of that is that we had to pay, by our tax and by our taxation, our health system. That is what we are asking for, that is what the law that was adopted in 2009 asked us to do, that is what we are doing. And we are pretty happy with the procedure that we've got because it is very detailed, well based and we think that, if it's a first as the amount of $60 billion for Québec, certainly a first also as a kind of demand with so many proofs at the beginning of the case.
Merci beaucoup, thank you very much.
(Fin à 12 h 14)