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(Douze heures dix-neuf minutes)
La Modératrice : Donc.
Bonjour et bienvenue à ce point de presse de Québec solidaire. Prendront la
parole, Mme Manon Massé, députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques et responsable
solidaire en matière de relations avec les Premières Nations et les Inuit, M.
Ghislain Picard, chef de l'Assemblée des Prairies du Québec et du Labrador de
1992 à 2025, et chef Francis Verreault-Paul, chef de l'Assemblée des Premières
Nations du Québec et du Labrador. Mme Massé.
Mme Massé : Oui, bien, merci.
Bonjour, tout le monde! Comme vous le savez peut-être, ce matin, l'Assemblée
nationale du Québec vient d'adopter une motion pour, je dirais, reconnaître et
honorer le travail qui a été fait par M. Ghislain Picard pendant ses 33 ans
comme chef de l'Assemblée des Premières Nations au Labrador et au... au Québec
et au Labrador, et j'étais très heureuse de pouvoir amener cette motion-là, qui
a été adoptée à l'unanimité, et je voulais donner l'opportunité à chef Picard — vous
comprendrez que je l'appelle encore chef Picard, mais ça n'enlève rien à chef
Verreault-Paul, j'ai fait le deal avec lui. Donc, je souhaitais pour, je vous
dirais peut-être une dernière fois, peut-être pas, on verra, à vous donner
l'opportunité de pouvoir entendre et surtout questionner le chef Picard ici même,
dans l'ensemble de... dans l'enceinte de l'Assemblée nationale du Québec.
Alors, chef Picard, à vous la parole.
M. Picard
(Ghislain) :Merci. Merci beaucoup, Manon.
(S'exprime dans une langue autochtone)
Bonjour à toutes et à tous, ça me fait
extrêmement plaisir d'avoir cette opportunité que je n'espère pas la dernière,
peut-être sous un autre chapeau éventuellement, mais de participer avec les
parlementaires de l'Assemblée nationale et répondre à cette initiative de
Québec solidaire et de Manon Massé, que je veux remercier très, très profondément,
pour une nouvelle... c'est-à-dire une intention dont elle m'avait fait part, je
pense, tard dans l'année 2024, et à laquelle je me suis permis de
réfléchir un peu parce que ce n'est pas quelque chose de très, très habituel
chez nous de... de se voir reconnaître ou de faire en sorte de reconnaître
notre travail par une autre institution. Mais j'ai dit que l'opportunité était
sans doute bien saisie, là, pour relever ou ramener à la surface un certain
nombre de questions qui... qui demeurent, je pense, qui font partie des défis
qui se présentent au gouvernement, mais à nous également comme Premières
Nations.
Je veux remercie évidemment les élus
autour de moi qui sont principalement innus. On avait une question de
restriction de capacité au niveau des présences, mais je veux remercier les
quelques chefs qui... qui ont suivi mon parcours, qui ont été là lorsque
demandé et en support à mes démarches des 33 dernières années. Donc, je
considère que les élus qui sont avec moi et les élues qui sont avec moi aujourd'hui
représentent cette diversité de l'Assemblée des Premières Nations à travers les
années. Et souligner également la présence de mon ami, collaborateur étroit
lors des... des deux dernières années, Francis Verreault-Paul que je veux, en
mon nom personnel, remercier et féliciter pour ses nouvelles fonctions qui font
suite aux miennes. Et je pense que l'intention aujourd'hui, c'est vraiment de
faciliter également cette transition-là, d'indiquer aussi que l'ordre du jour
ne change pas pour autant même si l'Assemblée des Premières Nations change en
quelque sorte de gouvernail. Les défis demeurent pour l'ensemble des Premières
Nations, et je suis extrêmement confiant que Francis, comme chef régional, sera
au rendez-vous.
Écoutez, je... j'écoutais ce matin les commentaires,
les éloges en quelque sorte des membres du Parlement qui se sont... qui ont
pris la parole et je veux les remercier autant le gouvernement en présence que
les autres partis de l'opposition qui ont voulu, à leur façon, souligner le
travail... le travail accompli au cours des 30 dernières années et plus et
peut-être en même temps me permettre de réinsister sur l'importance du défi qui
se présente à nous. À nous, quand je dis à nous, bien, je parle collectivement,
autant le gouvernement que les Premières Nations. Je ne veux revenir sur des
détails, là, qui... qui ont peut-être un peu miné la relation politique entre
les Premières Nations que j'ai représentées à l'époque et les gouvernements en
présence. Aujourd'hui, c'est la Coalition avenir Québec. Il y a à peine
quelques années, c'était le Parti québécois. Avant ça, bien, c'était un
gouvernement libéral et, heureusement, à travers des... des opportunités, je
dirais, manquées, bien, on a toujours pu compter sur au moins un parti parmi
les partis qui était à l'écoute et qui était jour... qui était toujours prêt à
nous ouvrir les portes lorsque nécessaire. Je parle évidemment de Québec
solidaire qui a été au rendez-vous beaucoup plus souvent et sans doute beaucoup
plus... beaucoup plus de fois que d'autres partis l'ont fait.
Donc, c'est là-dessus que je... moi, je
laisse le terrain en quelque sorte vacant à la nouvelle génération et je veux
de toute évidence, là, remercier, Francis, pour son courage, mais également son
engagement, là, au départ de prendre un peu le relais, là, après... après mon
départ. Et je sais que, pour avoir travaillé à... quelques mois avec lui, là,
qu'il est à la hauteur de la tâche qui se présente à lui aujourd'hui et surtout
qu'il va continuer à ramer dans la même direction que je l'ai fait moi-même par
rapport aux enjeux fondamentaux qui représentent l'ensemble de nos nations et
de nos communautés.
Je pense qu'il appartiendra maintenant
aussi à nos interlocuteurs en face de nous, là, d'être à l'écoute, mais surtout
de s'assurer qu'on puisse aller au-delà de la motion qui a été adoptée à
l'unanimité ce matin et qui, en terminant, reprend une intention exprimée
unanimement en octobre 2019, qui était de mettre en œuvre la Déclaration de
l'ONU sur les droits des peuples autochtones. Donc, on est presque cinq ans
plus tard, aujourd'hui, à peu près cinq ans plus tard, et toujours pas de
résultat concret. Je pense que c'est un rappel important également que nous
sert cette motion-là ce matin.
Mais, en terminant, je veux remercier l'ensemble
des élus de l'Assemblée nationale. Et je serai toujours pas loin, là, je
suis... politiquement, là, je suis marqué à vie. C'est comme cela que je vais
conclure l'opportunité aujourd'hui. Merci. Francis.
M. Verreault-Paul (Francis) : «Kwe»,
merci. Merci, Ghislain (S'exprime dans une langue autochtone). Je veux tout
d'abord remercier Mme Manon Massé pour l'initiative, ainsi que son équipe, de
l'initiative qui nous amène ici aujourd'hui à l'Assemblée nationale, et
aujourd'hui extrêmement honoré de joindre ma voix aujourd'hui à celle de Manon,
ainsi qu'à tous les parlementaires pour l'hommage à Ghislain Picard, qui,
d'ailleurs, je... définitivement que je remercie et que les chefs... les chefs
m'ont donné le mandat de cette continuité. Ghislain en a fait mention,
définitivement que j'assurerai cette continuité dans la suite des choses.
Ghislain, c'est une grosse page d'histoire
qui s'est tournée pour nous le 25 février dernier, une grosse page qui va
prendre une tournure différente, dans son cas personnel, et il l'a mentionné,
il restera impliqué, définitivement, mais pour nous, pour nos nations, je tiens
à lever mon chapeau puis à avoir cette gratitude en mon nom personnel, mais
aussi au nom de l'ensemble de nos nations, de nos élus, une gratitude infinie
envers Ghislain pour son leadership, cette façon de rassembler, de nous
rassembler, pour ces 33 dernières années au sein de l'APNQL, a su faire
face définitivement à des vents de face, à des vents de tous les côtés parfois,
a toujours su garder le cap malgré tout, a toujours su garder le cap sur ses
principes, sur la défense de nos droits. Donc, définitivement, dans cette même
optique, j'entends travailler et honorer, encore une fois, le travail de
Ghislain, mais le travail de l'ensemble de nos leaders qui m'ont précédé et qui
continueront aussi, qui viendront après moi et après nous. Donc, je tiens à...
à souligner aussi derrière moi les chefs, les élus de l'ensemble des nations
qui sont avec nous aujourd'hui.
Et, en terminant, le message que j'aimerais
également transmettre, on fait souvent référence au principe de la main tendue,
définitivement que j'arrive avec cette main tendue, mais les manches relevées,
je suis prêt à entamer le travail dès demain matin. Nous sommes prêts à entamer
le travail avec les chefs, avec les élus, vers la poursuite, bien sûr, la
continuité du travail qui a été fait des dernières années, mais également de
poursuivre cette réconciliation à tous les niveaux. Je pense, c'est un legs
important que Ghislain nous laisse, cet... ce legs de, notamment,
réconciliation économique, mais cette réconciliation législative également qui
doit être mise de l'avant de façon prioritaire. Donc, encore une fois,
Ghislain, en mon nom et en nom de tous (s'exprime dans sa langue), totalement, à
l'infini, de façon... une gratitude infinie, comme je l'ai dit, totalement
reconnaissant pour tout le travail. Et merci également à l'ensemble des chefs
pour ce vote de confiance qui m'a été laissé, le 25 février dernier. (S'exprime
dans une langue autochtone).
La Modératrice : Merci, chef
Verreault-Paul. On va maintenant passer à la période de questions. Une
question, une sous-question, s'il vous plaît. Puis nommez votre média, s'il
vous plaît.
Journaliste : «Kwe.» Shushan
Bacon, Espaces autochtones, Radio-Canada. (S'exprime dans une langue
autochtone).
M. Picard
(Ghislain) :(S'exprime dans une langue
autochtone).
Journaliste
: (S'exprime
dans une langue autochtone). Manon, j'aurais une question pour toi.
Mme Massé : Oui.
Journaliste
: Le
premier ministre François Legault a sorti lors de l'hommage ou la motion qui a
été... qui a été faite. Et ma question est qu'est-ce que vous, vous en pensez,
de ce que le premier ministre a fait?
Mme Massé : Bien,
premièrement, il faut nuancer les choses. C'est régulier que le premier
ministre sorte tout de suite après la période de questions. Je pense que ce
n'était pas nécessairement dirigé vers Ghislain. Ceci étant dit, je pense
qu'effectivement il a eu un manque de délicatesse. Je pense qu'il n'a fort
probablement pas été bien conseillé à mon sens, parce que de remercier
quelqu'un qui a joué le rôle de porte-parole pendant 33 ans des nations,
des premiers... des Premières Nations du Québec, ce n'est pas banal. Et moi,
j'aurais suggéré à ma porte-parole de rester sur place.
Journaliste
: Bonjour,
M. Picard. Une ou deux questions pour vous. Là, vous avez dit je vais
rester impliqué. Moi j'aimerais savoir comment, puis est-ce que ça va vous
permettre d'enlever un filtre? Je ne veux pas dire jeter les gants parce que ce
n'est pas la bonne expression, mais d'avoir plus de liberté dans vos
commentaires puis votre analyse de la chose?
M. Picard
(Ghislain) : Bien, d'abord, je pense que ce sera tout à fait
compréhensible si je vous dis que je vais me permettre de respecter la
responsabilité du chef régional Verreault-Paul. Je veux dire, j'ai entretenu le
même respect pour la fonction que moi j'occupais pendant plus de 30 ans.
J'ai toujours insisté sur le fait qu'on se devait de respecter nos institutions,
même si elles sont à la base, je veux dire, avec un esprit, cet esprit
colonial, disons-le comme ça, même en dépit, par exemple, d'une organisation
nationale qui n'a peut-être pas les considérations requises pour nous
reconnaître comme région avec notre spécificité. Il n'en demeure pas moins
qu'on a toujours respecté le bureau du ou de la cheffe nationale au niveau de
l'Assemblée des Premières Nations.
En même temps, bien, comme je le disais
plus tôt en conclusion, je veux dire, je ne peux pas sortir de la politique,
là, je suis marqué à vie, là, je suis fait, là, complètement. Donc, ça ne
m'enlève pas le droit d'exprimer des opinions que je considère important
d'exprimer, mais toujours dans le respect de la réalité qui est représentée par
mes collègues, par mon chef régional. Et je pense que, ça, c'est important dans
une démocratie, c'est-à-dire qu'on puisse avoir le temps et l'espace pour
exprimer les opinions qui sont les nôtres essentiellement. Donc, ma prise de
parole, par exemple, aujourd'hui, est faite uniquement en mon nom personnel,
qui n'implique en rien ni l'Assemblée des Premières Nations ni les chefs qui y
sont représentés. Donc, je pense que c'est important d'insister là-dessus.
Donc, oui, j'ai une opinion et j'en aurai sans doute d'autres. Et si je trouve
approprié de les exprimer sur la place publique, bien, je le ferais, je le
ferai en considération des éléments que je viens de vous partager un peu plus
tôt.
Journaliste
: Je vais
poser une question peut-être qui va vous sembler, là... Vous allez y réfléchir.
Après 33 ans, là, qu'est-ce que, parmi tout ce que vous avez vu et vécu,
encore là, aujourd'hui, qui vous insurge, ou vient vous chercher au plus
profond de vous-même, M. Picard?
M. Picard
(Ghislain) : Bien, il y a deux événements, là, qui m'ont... qui
ont mis mes émotions vraiment au test dans les 10 dernières années :
dénonciations par les femmes autochtones des agissements de la Sûreté du
Québec, en 2015, violences physiques et sexuelles, et, plus récemment,
évidemment, je pense que ça ne surprendra personne, le décès tragique de Joyce
Echaquan en septembre 2020. Et vraiment une triste coïncidence parce que nous,
on avait travaillé tout l'été qui précédait septembre, dans cette même année,
sur un plan pour... un plan de lutte contre le racisme et la discrimination, et
on avait ciblé le lendemain du décès de Joyce Echaquan pour le rendre public.
Donc, on ne pouvait définitivement pas, je pense... malgré la triste coïncidence,
on ne pouvait pas mettre ça de côté, là, c'était vraiment à propos qu'on le
sorte à ce moment-là.
Donc, ça, c'est venu me chercher
personnellement, là, je veux dire, ça a été... mes tripes ont été chamboulées
et ça a été très, très viscéral, et, notamment, là, le fait d'essayer de faire
valoir, toute l'année 2016, au gouvernement de l'époque qu'il nous faut
une commission d'enquête.
J'écoutais les travaux ce matin de
l'Assemblée nationale. Ça a été une commission d'enquête, là, qui parle d'une façon
de gérer un dossier de la part du gouvernement. Je veux dire, oui, humainement,
là, il y a des impacts, des impacts sur les électeurs, l'électorat, mais, en
même temps, pas la même intensité que ce qu'on a vu en 2015. Pourtant, ça nous
a pris un an avant que le gouvernement de l'époque, finalement, accède à notre
demande d'instituer une commission, qui est devenue la commission Viens, et qui
a même été, je dirais, dirigée selon les conditions exprimées par le
gouvernement de l'époque.
Mais ceci étant dit, je pourrais, vous
résumer, là, en quelques mots à peine, les cinq, six dernières années où on a
passé sans doute beaucoup plus de temps qu'on ne l'aurait souhaité devant les
tribunaux. J'ai toujours insisté sur l'action politique qui rassemble les Premières
Nations parce que je jugeais qu'en tout respect de la profession que le dossier
des enjeux, les enjeux autochtones, ce n'était pas le rôle des avocats de les
régler, et, en plus, parce que ça prend du temps puis ça prend de l'argent
qu'on n'a pas en trop. Donc... mais je n'ai jamais pensé autant de temps devant
les tribunaux que dans les six dernières années. Et je pense que ça indique
quelque part un peu l'espèce de statu quo politique dans lequel nous nous
retrouvons aujourd'hui.
Journaliste : Merci.
M. Picard
(Ghislain) :Merci.
Journaliste : Bien, ma
question s'adresse à vous, M. Picard. Vous parlez d'un statu quo
politique. Avez-vous quand même espoir que l'arrivée de M. Verreault-Paul,
peut-être, brasse les choses, qu'il y ait un changement à ce niveau-là?
M. Picard
(Ghislain) :Bien, écoutez, c'est
vraiment... je pense que le défi appartient beaucoup plus au gouvernement qu'il
appartient au nouveau chef régional. Je pense que Francis se présente un peu
comme relève avec des positions qui sont très, très bien ancrées au niveau de
la diversité que nous représentons. Je pense que ça, il n'y a pas... on n'a pas
à revenir là-dessus. Mais, en même temps, l'exemple que je pourrais vous
donner, qui est très, très clair, très vif dans mon esprit, on se souviendra
qu'en octobre 2019 le premier ministre actuel avait prononcé des excuses.
D'ailleurs, il y avait moi et d'autres chefs. On était à ce moment-là assis
devant le gouvernement, contrairement à aujourd'hui où on était assis en face
de l'opposition. Donc, est-ce qu'il n'y a pas là une image qui dit
1 000 mots? Peut-être, mais en octobre 2019, le premier ministre
Legault, je vais le reconnaître, a livré vraiment la première... le premier
appel à l'action, qui était de prononcer des excuses aux Premières Nations
inuites au nom du gouvernement. La même journée, on était devant la Cour
fédérale à nous opposer à une position du Procureur général du Québec qui,
finalement, niait notre capacité de gouvernance comme première nation.
Donc, il n'y a pas de contradiction
flagrante ici et, pour moi, bien, c'est l'exemple que je donne pour dire que...
Je pourrais ajouter à cela. Bien, à peine quelques semaines plus tard, on était
devant trois ministres de l'actuel gouvernement, trois ministres qui nous
disaient : Bon, M. Picard en passant, là, la loi fédérale C-92,
qui permet à vos communautés de développer et d'appliquer leurs propres lois en
matière de bien-être à l'enfance, bien, on va la contester, cette loi-là. Donc,
je pense que ça a donné le ton, là, pour la suite. Et malheureusement, là, il y
aura encore des éléments comme ça, je pense, qui vont certainement occuper le
bureau de Francis. Et je me permets d'ajouter à cela, bien, le paragraphe de
l'actuelle motion qui revient sur une motion d'octobre 2019, finalement, où il
n'y a pas eu livraison, là. La motion d'octobre 2019, là, reste intacte, elle a
peut-être même accumulé de la poussière un peu, parce qu'il n'y a pas vraiment
grand-chose qui s'est passé depuis.
Journaliste : Merci. J'aurais
peut-être une question pour M. Verreault-Paul, si possible. Vous avez
parlé d'une réconciliation législative qui doit être mise en place de façon
prioritaire. Concrètement, comment comptez-vous... tu sais, je comprends, là,
qu'il y a aussi le gouvernement du Québec qui est à travers ça, mais vous,
comment comptez-vous mettre ça en place?
M. Verreault-Paul (Francis) : Oui.
Merci pour la question. En fait, je pense que j'ai la responsabilité d'arriver
avec cet espoir, cet espoir puis regarder vers l'avant. Je reconnais
définitivement les défis du passé, je ne les oublie pas, mais j'arrive avec ce
message d'espoir. Et ce qui a trait à cette réconciliation, bien, d'abord et
avant tout, c'est une question de relation. Je l'ai partagé au chef et à
l'ensemble et j'entends développer ces relations durables, pérennes et de
respect mutuel. Je pense, c'est définitivement extrêmement important. Et, dans
un second temps, c'est ma première fois à l'Assemblée nationale dans mon
nouveau rôle aujourd'hui et j'arrive avec une motion qui est adoptée à
l'unanimité par tous les partis, où est-ce que chacune des parties ont rendu
hommage à Ghislain Picard et à son travail, donc j'entends construire sur ceci,
sur ce vent. Je pense que c'est important, et regarder vers l'avant, et travailler,
comme je l'ai mentionné tantôt, main tendue, mais les manches relevées
également. Et c'est le message que je tiens à partager.
Journaliste : Merci.
Mme Massé : Je m'excuse, si
tu permets, je rajouterais juste une petite chose, Francis. Moi, je suis du
parlement non autochtone. La responsabilité de la réconciliation législative,
là, elle est de notre bord, elle est vraiment de notre bord. Et ça fait des
mois. Et on a, à plusieurs moments à Québec solidaire, dans la dernière année,
dans les deux dernières années, signifié aux décideurs qu'on se devait, au nom
de la motion adoptée à l'unanimité, qu'on se devait de rentrer en mode de
réconciliation législative. Malheureusement, de l'autre côté, ça ne résonne
pas, ça ne percole pas. Alors, vous pouvez être assuré, chef Verreault-Paul,
que je vais continuer avec vous ce travail-là, parce que, je le réitère, c'est
la responsabilité qui relève du gouvernement du Québec de faire ces pas-là.
Journaliste : Bonjour. Je
suis désolée, je suis arrivé un peu en retard. M. Picard, je ne le sais
pas si on vous a entendu là-dessus, mais vous aimeriez qu'on garde quoi de
votre passage à l'APNQL?
M. Picard
(Ghislain) :Ça va être difficile de
rester humble avec la question, là, mais je vais quand même tenter. Et, pour
moi, je pense que la meilleure démonstration, je pense que... Pas uniquement
moi, mais en partie moi, parce que moi, j'ai... C'est un privilège d'ailleurs
de pouvoir écouter le leadership qui est représenté en minorité derrière moi aujourd'hui,
mais c'est quand même une grande diversité, là, 43 communautés,
10 nations, différentes cultures, différentes langues, l'anglais et le
français, c'est notre réalité. Et ce qu'on a réussi, à mon sens, à accomplir au
cours des récentes années... J'aime bien le fait que Manon nous rappelle qu'il
y a également une responsabilité de leur côté de la Chambre, en fait, de
l'autre côté. C'est qu'on a été, en quelque sorte, sans doute une heureuse
coïncidence ou un heureux hasard... c'est qu'on a été appelé à créer des
alliances sur tout le territoire et on a constaté à travers les cinq, six, sept
dernières années qu'il y avait une écoute importante, un désir d'en savoir plus
et surtout, je pense, un désir de contribuer à ce que j'appelle, moi, la mise à
niveau sur le plan économique et social. Donc, pour moi, c'est extrêmement
tangible pour les communautés que nous représentons.
Malheureusement, la chose, la seule chose
qui va manquer, c'est un gouvernement qui constate tout ça et qui contribue
enfin... et qui est prêt à en faire plus. Et c'est pour ça que je reviens un
peu sur cette partie de la motion ce matin, qui un peu... je ne dirais pas que
c'est sournois, mais je pense une motion qui devait nous rappeler qu'il y a des
engagements qui n'ont pas été livrés, notamment cette table de discussion avec
les Premières Nations et les Inuit sur la mise en œuvre de la Déclaration de
l'ONU sur les droits des peuples autochtones, et ça, je trouve ça important, et
ça fait la démonstration que, tu sais, on se retrouve toujours, constamment,
trop souvent dans un contexte où une partie impose ses conditions par rapport à
l'autre, et c'est ça que je trouve injuste.
Et il n'y a pas moyen... C'est comme si
les Premières Nations, après trois, quatre siècles de compromis, se
retrouvaient encore une fois avec le fardeau de la bonne foi et le fardeau
d'une position de compromis. C'est comme si, tu sais, on arrivait à la table de
négociations un peu à genoux. C'est ça que je trouve injuste et c'est ça qu'il
nous faut changer. Est-ce que... est-ce qu'on doit parler en quelque sorte d'un
pouvoir parallèle en quelque sorte, c'est-à-dire le pouvoir que nous
représentons, même si ce n'est pas tout le monde qui est à l'aise avec le
terme, et finalement le pouvoir représenté par les élus... de tous les élus et
toutes les élues de l'Assemblée nationale, pas uniquement le gouvernement.
Donc, il y aura sûrement une réflexion importante à faire de ce point de vue
là. Je pense à d'autres, d'autres pays, d'autres continents où il y a des pratiques
qui se sont révélées très fructueuses en matière de relations entre les peuples
autochtones et les différents États.
Journaliste : Est-ce que vous
estimez être parvenus à faire des gains pendant vos... votre long mandat auprès
du gouvernement? Est-ce que... Et vous l'avez fait bouger sur certains éléments
précis, évidemment le gouvernement Legault, là, et si oui, lesquels?
M. Picard
(Ghislain) :Bien, écoutez, parce que...
parce que nos opinions portent très rarement, je vais vous référer au rapport
du Protecteur du citoyen à l'automne 2023. Et, dans sa conclusion, le
Protecteur du citoyen disait : Il n'y a pas de plan, ça prend un plan. Et
encore plus récemment, il y avait la Vérificatrice générale qui disait à peu
près la même chose au niveau de l'éducation de nos étudiants de Premières
Nations et Inuit. Donc, je pense que des institutions qui sont supposées être
neutres, objectives ont déjà fait une conclusion que nous-mêmes on a déjà
faite. Donc, je reviendrais là-dessus, et c'est comme si on faisait un pas,
deux pas en avant, trois ou quatre pas en arrière. C'est malheureusement le
constat que je... dans le fond, partage.
Je ne veux pas être totalement négatif,
là, parce que je regarde le... d'ailleurs, Manon y participe activement, les
suites de la loi 79 concernant les membres de nos communautés qui ont été
admis dans des institutions de santé. Et je crois comprendre que cela donne
quand même des résultats. Donc, il y a certains gains, mais il faut
éventuellement faire la comparaison entre les gains et là où finalement on
accuse du retard parce qu'ultimement on a des défis énormes qui seraient... qui
seraient des opportunités dans la mesure où les conditions sont réunies. Une
démographie qui est vraiment l'inverse de tout ce que connaît le Québec. Est-ce
que... est-ce qu'avec ça les opportunités sont au rendez-vous? C'est peut-être
une bonne question à se poser. Donc, je pense que les concessions économiques,
on a fait beaucoup de chemin, là, avec la société civile, milieu des affaires,
des secteurs économiques sont à l'écoute. Je demeure quand même très, très
optimiste. Mais, encore une fois, là, le... sur le plan de la relation
politique, c'est peut-être là qu'on... qu'on accuse... qu'on accuse des...
Journaliste : Juste une
dernière pour M. Verrault-Paul. Justement, vous, quels sont vos dossiers
prioritaires avec le gouvernement Legault?
M. Verreault-Paul (Francis) : Bien,
d'abord et avant tout, vous l'avez mentionné, cette relation de gouvernement à
gouvernement, je pense que c'est définitivement prioritaire. Par la suite, ces
priorités-là doivent être définies par nous, les Premières Nations, et non
l'inverse. Je pense que c'est... c'est un concept qui se doit d'être partagé et
dans lequel j'aurai des discussions éventuelles avec notamment le premier
ministre et le ministre Lafrenière. Donc, c'est définitivement dans les
priorités, mais je viens d'arriver, je pense que je veux établir ces relations
d'abord et avant tout pour ensuite créer des opportunités. Et je pense que
Ghislain parle d'opportunités, c'est exactement le rôle que je vois en tant
qu'APNQL, d'être un vecteur d'opportunités pour notamment cette jeunesse qui
est extrêmement... qui est une main-d'œuvre, qui est une... qui sont nos
cerveaux, nos savoirs, nos cultures, nos langues qui s'en viennent. C'est
extrêmement important de leur offrir ces opportunités-là afin d'atteindre leur
plein potentiel.
Journaliste : Parce qu'il y a
quand même eu certaines frictions entre le gouvernement Legault et
M. Picard au fil des ans, même récemment, à un moment donné, on parlait
même plus de négocier en bilatéral et non avec l'APNQL, on sentait qu'on les
avait mis un peu à l'écart. Est-ce que, là, vous, vous effacez l'ardoise, et
puis vous reprenez un peu à zéro ou vous gardez ce passif-là?
M. Verreault-Paul (Francis) : Encore
une fois, je reconnais les défis, les défis qui sont devant nous et qui sont
encore là, mais je vais avoir ces discussions-là dans un premier temps avec les
parties concernées. Je pense que c'est important et c'est la manière d'établir
des relations également.
Journaliste : Il y a-tu une
rencontre de prévue avec M. Legault?
M. Verreault-Paul (Francis) : Elle
n'est pas fixée définitivement encore, mais j'espère pouvoir le rencontrer
rapidement.
La Modératrice : Merci
beaucoup. C'est ce qui met fin à ce point de presse.
Mme Massé : Merci beaucoup.
(Fin à 12 h 53)