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(Onze heures trente-sept minutes)
M. Derraji : Bonjour, tout le
monde. Très heureux aujourd'hui d'être accompagné par M. Morneau. Tout à l'heure,
dans les tribunes, lors du dépôt de la pétition, il y avait aussi Mme Nadine
Guilbault, qui représentait Transport Guilbault.
Aujourd'hui, c'est une pétition
extrêmement importante en lien avec le phénomène «Chauffeur inc.». C'est un
phénomène extrêmement préoccupant. Selon l'Association du camionnage du Québec,
ce phénomène est en croissance au Québec, et il touche entre 8 000 et 10 000
chauffeurs. La pratique a de graves, très graves conséquences sur la sécurité
routière. Plusieurs chauffeurs qui nous viennent de l'Ontario ne sont pas
habitués à la conduite hivernale au Québec et peuvent se retrouver au cœur d'accidents
de la route.
C'est pour cela... aujourd'hui j'ai déposé
cette pétition. La suite, c'est qu'on va demander au gouvernement la saisie de
cette pétition. Mais, depuis le lancement de cette pétition, nous avons deux
objectifs. Premièrement : sensibiliser le gouvernement, qui n'a rien fait
malgré les relances de l'industrie, malgré les nombreuses rencontres des
partenaires sur le terrain, y compris les contrôleurs routiers... les
représentants de l'Association du camionnage. C'est silence radio, je dirais
même du laxisme et de l'incompétence caquiste. On ne sait plus quelle porte
taper. Le ministère de l'Emploi et du Travail, le ministère du Revenu, le
ministère de l'Immigration ou bien le ministère des Transports et de la
Mobilité durable? Au bout de la ligne, les gens sont perdus. Aucun
interlocuteur, aucun leadership à l'intérieur du gouvernement du Québec.
C'est pour cela, nous, au Parti libéral,
aujourd'hui, nous sommes convaincus qu'avec le dépôt de cette pétition et les
prochaines actions que nous... qu'on va mener on va mettre la pression sur le
gouvernement pour qu'il bouge. Et c'est dans ce sens... Ce qu'on a demandé au
gouvernement, c'est apporter rapidement les modifications législatives pour
contrer cette pratique du chauffeur inc. S'ils ne veulent pas le faire, nous, nous
sommes prêts à le faire et à déposer un projet de loi dans ce sens.
Maintenant, je cède la parole à M. David
Morneau qui va vous entretenir quelques instants.
M. Morneau (David) : Merci,
Monsef, c'est gentil. Il est grand temps d'agir, et ce, plus rapidement qu'on
pense. Je vais parler aujourd'hui en tant que président du conseil
d'administration de l'Association du camionnage, en tant que représentant de
tous les camionneurs de la province de Québec. L'industrie du camionnage
souffre actuellement. Beaucoup d'entrepreneurs perdent des contrats, perdent
leurs entreprises, actuellement, et font faillite due au fait de la concurrence
déloyale. L'industrie du camionnage, au Québec, elle est belle, elle est fière
et elle est légale et sécuritaire, mais malheureusement, actuellement,
concurrencée par une concurrence complètement déloyale.
Puis, aussi, je vais vous parler en tant
que citoyen, en tant que père de famille qui a des enfants, qu'il y a...
Actuellement, sur la sécurité routière, il y a une grosse lacune. Les
entreprises de transport routier, notre chauffeur incorporé sont souvent mal
formés. C'est des gens qui manquent d'expérience. Il y a des accidents routiers
graves, il y a eu la 440, la 30, à Vallée-Jonction dernièrement — mes
pensées vont pour la famille aujourd'hui — mais aussi il va y en
avoir d'autres et ils seront de plus en plus graves. Il faut agir avant que ça
atteigne vos enfants, vos familles et que... pourrait peut-être être un autobus
d'école, éventuellement, qui pourrait être attaqué par un accident, dans le
fond, des chauffeurs incorporés. On doit agir avant que ce soit trop tard.
M. Derraji : Merci, M.
Morneau. Donc, nous sommes prêts à prendre vos questions.
Journaliste : Pourquoi le
fait de passer par un entrepreneur plutôt qu'un chauffeur inc. assurerait une
plus grande sécurité routière?
M. Derraji : Bien, c'est...
La question?
Journaliste : En quoi... En
quoi le fait d'avoir un chauffeur qui... avec l'entrepreneur plutôt qu'être un
chauffeur inc. assurerait une plus grande sécurité routière?
M. Derraji : Aujourd'hui? Ah!
O.K. Vous voulez...
M. Morneau (David) : Les
entreprises, dans le fond, de camionnage, de chauffeurs inc., souvent, sont des
entreprises qui n'offrent pas la formation complète à leurs chauffeurs. C'est
des formations très courtes, dont les... dont les entrepreneurs n'ont pas
l'expérience, et les chauffeurs sont lancés sur la route... sur les routes du
Québec, en particulier ici, l'hiver, ou sur la 389, puis on... je l'ai vu
dernièrement, pour monter dans le Grand Nord québécois. C'est des accidents
graves qui peuvent se produire. Les chauffeurs manquent d'expérience, par les
heures de conduite, par leur expérience sur la route, et ça, ça crée des
accidents très graves, comme on a pu le voir plusieurs fois au Québec.
Journaliste : ...c'est des
gens qui viennent de l'extérieur, par exemple, par exemple, je sais qu'il y a
une filière indienne, par exemple... des gens beaucoup... donc, c'est des gens
qui ne sont pas habitués, comme vous disiez, M. Derraji, à conduire au Québec
sur les routes hivernales.
M. Derraji : En fait, ce que
nous avons constaté, avec l'ensemble des partenaires du milieu, c'est que, un,
il y a de la concurrence déloyale. Ça, là, ça nuit...
Journaliste : ...je ne suis
pas au fait, là, mais c'est quoi, la concurrence déloyale?
M. Derraji : C'est parce que
c'est plus avantageux pour certaines personnes de travailler avec des
chauffeurs inc. qu'avec des gens organisés qui paient leurs dus, qui paient les
choses correctes à payer, là. Il peut...
Journaliste : ...
M. Morneau (David) : Les
entreprises de chauffeurs incorporés, souvent, ne paieront pas leur DAS. À pas
grand pas. Les entreprises ne paient pas les assurances et souvent vont arriver
avec 25 à 30 % moins cher qu'une entreprise légale qui fait tout ce qu'il
y a à faire.
M. Derraji : À l'époque, on
parlait du «cheap labor», on peut parler du «cheap chauffeur», maintenant, si
on peut le dire.
Journaliste
: Est-ce
qu'il y en a au Québec ou ils proviennent juste de l'Ontario?
M. Morneau (David) : En
particulier, ça provient de l'Ontario.
M. Derraji : En fait, ce
qu'ils ont constaté, la plupart, c'est qu'il y a une concurrence, déjà, dans le
marché du camionnage, hein, nos entreprises québécoises souffrent. Donc, avant
de parler de ces enjeux, moi, aujourd'hui, là, ma préoccupation, c'est comment
on peut sauvegarder cette industrie. Elle est très importante. Quand on voit ce
qui se passe avec Trump, les échanges interprovinciaux, on doit sauvegarder une
économie locale avec ces chauffeurs.
Quand on voit ce qui se passe en Ontario
avec des vagues et des vagues de chauffeurs, là, c'est ce qu'on m'a confirmé,
donc, ça exerce une pression sur ce marché, et, au bout de la ligne, ce sont
nos entreprises québécoises qui paient les frais. Mais n'oubliez pas, nos
routes sont partagées. M. Morneau vient de le dire, il y a des risques
d'accident, ce n'est pas tout le monde qui est habilité à conduire l'hiver,
chez nous, là.
Journaliste : Excusez-moi, je
ne veux pas avoir l'air de ne pas comprendre, mais c'est... Le problème, c'est
vraiment les chauffeurs inc., c'est-à-dire qu'une entreprise ontarienne de
transport qui a ses cartes comme il faut, elle, elle peut concurrencer, puis il
n'y a pas de problème à vos yeux, là?
M. Morneau (David) : Oui,
puis il y a des très, très belles et solides entreprises ontariennes qui
suivent les lois depuis des dizaines d'années.
Journaliste : ...ce que vous
appelez le «chauffeur inc.», c'est ça, le problème. Puis il n'y en a pas au
Québec, ça provient surtout de...
M. Morneau (David) : Il y en
a... il y en a un léger pourcentage, mais le... la manne, au Canada, a démarré
à partir de l'Ontario. C'est maintenant un problème qui est pancanadien, mais
qui s'incruste au Québec de plus en plus, et qui affecte, actuellement, les
entrepreneurs en transport routier. Puis ce n'est pas juste les grosses
entreprises de transport, c'est les artisans qui ont un, trois, cinq, 10
camions, qui se demandent comment ils vont faire pour avoir du pain sur leur table
pour leur famille, parce qu'ils perdent les contrats, et des familles aussi qui
sont décimées par les accidents de chauffeurs qui n'ont pas l'expérience pour
être au Québec sur les routes.
Journaliste : M. Derraji,
vous faites cette sortie-là dans un contexte où le gouvernement du Québec puis
votre parti politique, vous voulez enlever des frontières, des... des entraves
économiques entre les provinces. Donc, est-ce que ça, ce ne serait pas plutôt
ajouter une entrave économique entre les provinces, ce que vous demandez?
M. Derraji : Ah! non, du
tout. Ah! non, du tout, du tout. Écoutez, moi là, c'est tolérance zéro aux
enjeux de sécurité routière. Parce que là, on parle... M. Morneau vient de
parler de quelqu'un. Il y a un cas qui a été médiatisé pas mal. Moi, je veux
qu'on continue à avoir des échanges interprovinciaux. Les contrôleurs routiers,
par exemple, peuvent jouer ce rôle. Parce qu'on ne parle que des agents
interprovinciaux, mais il y a aussi des matières dangereuses. Il y a le
fentanyl, et il y a beaucoup de choses que même l'Association des contrôleurs
routiers n'a pas arrêté de dénoncer, mais, malheureusement, il n'y a personne
qui écoute dans ce gouvernement.
Nous, ce qu'on dit aujourd'hui, là, il y a
une pratique illégale, une concurrence qui n'est pas bonne ni saine pour les
entreprises québécoises, et, deux, il y a des choses que ces gens ne paient
pas. Quand je dis : le régime des rentes, la CNESST et les autres... les
autres prélèvements par rapport aux assurances... assurances collectives, ça,
là, tout le monde le paie. Pourquoi on va avoir deux personnes, deux
catégories, une qui paie tout, qui suit les règles, une autre qui ne paie rien?
Et surtout, ça a été démontré, une bonne majorité est utilisée par des réseaux.
Ce n'est pas des gens... qui ont grandi au Québec, c'est des gens qui venaient
d'ailleurs. Et je n'ai rien contre les gens qui viennent d'ailleurs, mais le
plus important, c'est qu'ils n'ont pas l'habilité de conduire l'hiver, ils
n'ont pas l'habilité de respecter les règles et ça crée une certaine pression
et concurrence déloyale sur des entreprises comme Morneau, comme Guilbault,
qui, eux, suivent les règles au Québec. C'est ça que je déplore aujourd'hui.
Mais l'autre problème que je déplore,
c'est que ce n'est pas la première fois que ces associations font des
représentations au gouvernement. Ça fait plusieurs mois et années qu'ils font
des représentations, mais malheureusement, le gouvernement ne les écoute pas.
Donc, c'est pour cela que nous, aujourd'hui... La pétition, c'est juste un
premier pas. Il faut déclarer... il faut régler le problème, il faut que les
ministères s'entendent, et il faut que Mme Guilbault, encore une fois, puisse
jouer son rôle.
Journaliste : M. Morneau,
comment vous expliquez l'inaction du gouvernement dans ce dossier-ci?
M. Morneau (David) : C'est un
dossier qui est très complexe, on en est très conscients. C'est un dossier
qui... qui affecte le domaine des finances. Vous savez, c'est au-dessus de
2 milliards de dollars qui ne sont pas perçus par le
gouvernement québécois dans les dernières années, dû au fait que les gens ne
paient pas... les entreprises ne paient pas ce qu'elles ont à payer au
gouvernement. C'est un dossier qui a aussi rapport avec l'immigration, ça a
rapport avec le ministère du Travail, ça a rapport avec le ministère du
Transport, des Finances. Le gouvernement doit s'allier, tous ensemble, et tous
les députés et ministres doivent trouver une solution solidaire, ensemble, pour
arrêter le processus.
Les contrôleurs routiers ont un très... un
très grand rôle à jouer là-dessus. Ils le voient, les contrôleurs routiers, et
ils le savent que c'est dangereux. Mais, souvent, il y a une inaction qui est
faite, et on laisse les camions sur la route jusqu'à tant qu'il arrive un
accident grave. Humboldt... décimé une équipe de hockey au complet. Est-ce que
ça va arriver au Québec prochainement? Mon... mon point est que, oui, ça va
arriver, et il va être trop tard, éventuellement.
M. Derraji : Et c'est là, le
laxisme, parce que Mme Guilbault, là, c'est sous sa responsabilité, les
contrôleurs routiers. Je lui lance un défi. C'est quoi, la dernière fois
qu'elle a rencontré les contrôleurs routiers? Est-ce qu'elle est consciente des
enjeux que ces personnes vivent sur la route? Ils sont en négociation
maintenant avec le Conseil du trésor. Est-ce qu'elle est au courant de ce qui
se passe? Donc, c'est là où je vous dis qu'encore une fois le... le «pas dans
ma cour», marque de commerce de ce gouvernement. M. Morneau vient de le dire,
il y a plusieurs ministères impliqués, mais qui va prendre le lead? Est-ce
qu'on va le prendre le jour où il va y avoir des décès? On va dire : On
aurait dû? Moi, là, aujourd'hui, je suis là parce que je ne veux pas que ce
soit : On aurait dû le faire. Non, non, non, il faut le faire. Merci à
vous, merci.
(Fin à 11 h 47)