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(Onze heures quarante et une minutes)
La Modératrice : Bienvenue a
ce point de presse de Québec solidaire. Prendra la parole, tout d'abord, Ruba Ghazal,
porte-parole de Québec solidaire, suivi de Joanie Chahine, de Dre Élise
Girouard-Chantal, et puis d'Amaili Jetté. Merci beaucoup.
Mme Ghazal : Merci beaucoup,
Simone. Donc, notre voix, j'espère qu'elle va porter, parce qu'il y a beaucoup
de bruit. Écoutez, je suis vraiment très, très heureuse et très fière d'être
ici aujourd'hui, après avoir déposé le projet de loi pour rendre la
contraception gratuite au Québec. Et je suis très heureuse d'être avec des
professionnelles du système de santé qui appuient ce projet de loi.
Donc, c'est un projet de loi important
pour les femmes et pour la santé des femmes et aussi pour le portefeuille des
femmes, parce qu'on sait que la contraception, encore aujourd'hui, repose
beaucoup sur les épaules des femmes. Puis, malheureusement, le Québec, on aime
ça dire et se targuer qu'on est à l'avance, mais sur la question de la
contraception, on a du retard, beaucoup de retard, surtout quand on voit que la
Colombie-Britannique, le Manitoba, Île-du-Prince-Édouard sont allés de l'avant
pour rendre la contraception gratuite dans les dernières années. Donc, au
Québec, on a du rattrapage à faire. Si le premier ministre aime tant dire que
l'égalité entre les femmes et les hommes, c'est une valeur importante pour lui,
bien, il doit emboîter le pas pour rendre la contraception gratuite.
En novembre dernier, j'ai déposé une
pétition qui a été virale, près de 100 000 signatures. Le contexte
politique, quand je l'ai déposé, était particulier. Donald Trump venait d'être
élu. On voit aussi une montée du discours masculiniste ici aussi, au Québec.
Donc, dans le contexte actuel où on voit des reculs pour les droits des femmes
ailleurs dans le monde, notamment chez nos voisins du Sud, on ne peut pas juste
se contenter du statu quo, on a besoin de bonnes nouvelles et d'avancées pour
les droits des femmes. Donc, la contraception gratuite permettrait ça au
Québec.
Les études sont claires, le coût est la
principale barrière à l'accès à la contraception. La semaine passée, si vous
avez suivi ça, j'étais... j'avais une discussion avec le premier ministre et
j'ai senti qu'il était ouvert pendant les crédits. Il est temps vraiment qu'on
élimine toutes les barrières pour la contraception au nom de la santé des
femmes, c'est aussi une mesure à coût nulle pour l'État. On cherche... le
gouvernement cherche des moyens pour réduire le déficit, sauver des grossesses,
prévenir des grossesses non désirées permet aussi à l'État de faire des
économies et ça permet aussi de changer la vie des femmes. Donc, je m'arrête
ici et je passe la parole à Dre Joanie Chahine.
Mme Chahine (Joanie) : Merci.
Je suis médecin de famille depuis 12 ans à Montréal. Je travaille à la
salle d'accouchement. Je travaille aussi en avortement notamment, et c'était
important pour moi de faire la route jusqu'ici, parce que ce projet de loi là,
sur la gratuité de la contraception, ça va changer la vie de mes patientes. Je
vous donne un exemple.
La semaine passée, je suis en clinique
d'avortement puis je voyais une jeune femme qui avait son deuxième avortement
en autant de mois. Puis on jasait de contraception, puis, à ce moment-là, elle
m'a dit : Ah, je vous arrête docteure, là, je sais déjà qu'est-ce que je
veux, moi, je mets mon stérilet hormonal, je l'ai, je l'ai ma prescription, je
ne peux juste pas me la payer parce que mon budget, il est serré, je ramasse
mes sous, mais dès que je vais pouvoir me le payer, je vais prendre rendez-vous
avec vous. Des femmes comme elles qui vivent des grossesses non planifiées,
j'en vois quotidiennement dans ma pratique, comme toutes les infirmières, comme
toutes les médecins qui travaillent comme moi avec des femmes en âge de
procréer. Parce que la contraception, ça coûte cher, ça coûte cher à chaque
mois, mois après mois, année après année, de l'adolescence à la ménopause,
pendant 30 à 40 ans dans la vie d'une personne parce qu'elle est née avec
un utérus. Parce qu'on va se le dire, là, le fardeau de la contraception, il
repose sur les épaules des femmes depuis toujours.
Alors, ce que je demande humblement à nos
élus aujourd'hui, c'est de rétablir l'iniquité reproductive, qui est, à mon
sens, assez évidente dans notre système actuel. C'est avoir le contrôle sur sa
propre fertilité, puis, par extension sur sa vie entière, que ça ne devienne
pas juste un privilège des femmes qui sont les mieux nanties, c'est que ça
devienne un réel droit pour toutes les Québécoises.
Mme Girouard-Chantal (Élise) : Bonjour.
Dre Girouard-Chantal, je suis médecin de famille également, spécialisée en
santé de la femme et ce projet de loi touche un droit fondamental qui fait
partie de notre réalité quotidienne en tant que médecin qui pratique en santé
sexuelle et reproductive. En fait, c'est bien démontré dans la littérature
scientifique que la couverture universelle de la contraception permet de
diminuer les grossesses non désirées et le taux de complication beaucoup plus
élevé des grossesses non désirées comparativement aux grossesses qui sont
désirées, planifiées. Ça permet aussi de diminuer globalement les coûts au
système de santé et ça permet de traiter une panoplie d'autres conditions
médicales, on parle d'anémie causée par les saignements abondants,
d'endométriose, d'acné et autres.
L'amélioration de l'accès à la
contraception, ça passe également par l'augmentation du nombre de
professionnels pouvant prescrire, prodiguer et offrir de la contraception. Ce
projet de loi là adresse non seulement la barrière importante financière, mais
également la barrière d'accès à la contraception. La contraception, ce n'est
pas un luxe, c'est un soin de santé essentiel et c'est pour ça que j'appuie
sans équivoque ce projet de loi.
Mme Ghazal : Merci. Merci
beaucoup.
Mme Jetté (Amaili) : Bonjour.
Alors, je m'adresse à vous aujourd'hui à titre de sage-femme. Je suis Amaili
Jetté et je suis aussi présidente du Regroupement des sages-femmes du Québec.
Donc, je suis très fière de pouvoir appuyer ce projet de loi qui est essentiel,
justement, à la santé, à l'autonomie puis à l'équité. Comme le rappelle le
collectif SisterSong, qui parle de justice reproductive, la justice
reproductive, c'est justement un droit fondamental de... de disposer de son
corps, de pouvoir avoir des enfants, de choisir de ne pas en avoir ou de
choisir quand en avoir, ainsi que de pouvoir élever les enfants qu'on a, que
nous avons au sein des collectivités qui sont sûres, viables et durables.
C'est... Ainsi, l'accès à la contraception, l'accès gratuit à la contraception
est un pilier fondamental de cette vision.
Ce projet de loi s'inscrit en continuité
avec différents autres plans d'action, etc., qui ont été adoptés dans les
dernières années. Puis ça répond principalement à un besoin, c'est d'assurer un
accès concret, partout au Québec, à des services de santé sexuelle et
reproductive. Puis, particulièrement par rapport à ça, nous saluons fortement
l'inclusion des sages-femmes à travers cette vision-là. On pourra... on
pourrait désormais prescrire, administrer et délivrer la contraception dans...
Et la particularité, c'est que, dans plusieurs régions au Québec et dans
certains contextes, on se retrouve à être parfois les seuls professionnels qui
sont en contact, qui sont en... qui sont accessibles, justement, à certaines
personnes. Donc, justement, de pouvoir offrir des soins complets en lien avec
la santé sexuelle et reproductive permet justement de faire en sorte que les
gens, les personnes, les femmes et... elles puissent avoir l'autonomie de... et
avoir leur projet complet et les soins qui sont affiliés à ça.
Ça fait que ce projet de loi, c'est sûr
qu'il reconnaît les sages-femmes à titre de professionnelles de première ligne,
aux côtés des pharmaciens, des infirmières et des médecins. C'est ce qui est
très important. C'est un pas important, commensurable, je dirais même, vers un
réseau de la santé plus inclusif, plus humain, aussi, et plus efficace par le
fait d'être en collaboration comme ça. Et, impliquer à divers endroits, on peut
justement s'assurer qu'on mise sur les forces du terrain, mise sur les forces
existantes, d'ailleurs, du terrain.
Ça fait que c'est une mesure logique,
efficace, juste, tout à fait. Elle améliore l'accessibilité, mais elle renforce
aussi la continuité des soins, particulièrement pour les sages-femmes. Puis il
reconnaît aussi les compétences de ces professionnelles-là, des sages-femmes,
qui peuvent justement... qui font des... qui sont déjà en train de se préparer
en ce moment pour pouvoir offrir ces soins-là. En ce moment, les sages-femmes
peuvent prescrire un stérilet, mais la personne ne peut pas... elle ne peut pas
l'installer. Donc, ce qui fait en sorte qu'elle se promène avec son stérilet à
cogner à la porte de médecins, qui sont parfois difficiles d'accès dans
certains contextes. Alors, on vous invite ensemble, haut et fort, à pouvoir
dire que, justement, la contraception, c'est un droit et non pas un privilège.
Je vous remercie.
Mme Ghazal : Merci. Merci
beaucoup.
La Modératrice : On va passer
à la période de questions. Juste prendre le temps de vous présenter puis
d'adresser vos questions.
Journaliste : Bonjour, Mme
Ghazal. François Carabin, Le Devoir. Bon, vous avez déposé ce projet de
loi comme vous l'aviez promis, mais évidemment tout... l'avancement ou le
cheminement de ce projet de loi là en Chambre va dépendre beaucoup du
gouvernement. Qu'est-ce que vous avez entendu dans les propos du premier
ministre, la semaine dernière, qui vous donne espoir que le projet de loi
puisse cheminer à l'Assemblée?
Mme Ghazal : Oui. Bien, le
premier ministre, j'ai senti de l'intérêt face aux arguments que je lui
donnais, pourquoi c'était important de le rendre gratuit, mais il n'y a pas eu
d'engagement de sa part. Le seul engagement qu'il a donné, pendant l'étude des
crédits, c'est d'en parler une autre fois, parce qu'il me dit qu'il en avait
déjà parlé avec le ministre de la Santé, pour voir ce qu'il est possible de
faire. Et il a reconnu que la prévention en santé, c'est important et que la
contraception est une mesure de prévention. Tout ça, il l'a reconnu, il est
d'accord. Il est... il a reconnu que ça permet aussi de faire des économies,
mais il ne s'est pas engagé à aller plus loin. Cela dit, pour le nombre de fois
que j'ai eu des conversations puis des discussions avec le premier ministre,
d'habitude, quand il n'est pas d'accord avec quelque chose, il ferme la porte
assez vite, ce qui n'a pas été le cas, ce qui me donne espoir que peut-être
aussi, avec les arguments qui sont donnés, pas juste par moi, qui est une élue
de l'opposition, mais aussi par des professionnels de la santé, des médecins,
des sages-femmes, peut-être qu'en entendant les arguments, ça va lui permettre
d'avoir encore plus d'arguments pour aller de l'avant, comme ça a été fait par
d'autres provinces.
Journaliste : En gros, vous
lui dites on a déjà un projet de loi déposé, préparé, faites-le avancer...
Mme Ghazal : Oui, exact. Moi,
j'ai fait le travail pour l'aider face à l'ouverture. Moi, ce n'est pas la
première fois que je parle de contraception avec François Legault. Ma première
question, c'était là-dessus. J'ai senti une ouverture, ça fait que, là, j'ai
dit : Bien, tiens, je vais faire une partie du travail en déposant le
projet de loi.
Journaliste : J'aurais une
question pour les deux médecins qui nous ont parlé, là, excusez-moi, je ne me
souviens plus de vos noms, mais Québec solidaire calcule que cette mesure-là
économiserait 80 millions de dollars par année à l'État québécois en
raison, effectivement, de l'arrêt de certains soins, de grossesses interrompues
d'avance, bon. Est-ce que ce que vous constatez sur le terrain est en droite
ligne avec ce que vous entendez sur ces économies-là, de 80 millions de
dollars?
Mme Chahine (Joanie) : Oui,
bien, moi, je suis médecin de famille, je ne suis pas économiste, mais,
certainement. Moi, ce que je vois à la salle d'accouchement... en suivi de
grossesse puis, quelques mois plus tard, à la salle d'accouchement puis en
clinique d'avortement, ce sont des femmes qui, si elles avaient eu leur
stérilet hormonal, qui même après... même après couverture d'assurance, leur
coûte 100 $... C'est sûr qu'un avortement ça coûte beaucoup moins cher que
100 $ étalé sur huit ans. Un suivi de grossesse, un accouchement, élever
un enfant, ça coûte pas mal plus cher que pouvoir planifier sa fertilité avec
un implant qui coûte... qui va coûter à l'État 280 $ mais qui va durer
quatre ans. Je veux dire, le calcul est assez simple. Pas besoin d'être
économiste pour ça.
Mme Girouard-Chantal (Élise) : Je
rajouterais également qu'au Canada 40 % des grossesses sont non planifiées
et puis que les grossesses non planifiées ont des taux de complication beaucoup
plus élevés. On parle de prématurité, de saignements post-partum, donc, et
autres. Donc, ce sont des grossesses beaucoup plus à risque lorsqu'elles sont
non planifiées. Donc, c'est d'offrir aux femmes le droit, en fait, de planifier
quand elles le veulent, si elles le veulent, une grossesse.
Journaliste : Merci.
Journaliste : Deux questions,
minimum, pour Mme Gazhal. Une question, en fait, concernant... Je reprends...
Vous évoquez l'analyse des crédits avec M. Legault. Il y a eu aussi la période
avec Mme Biron. On voit qu'elle a parlé, là, d'un ménage à faire dans
plusieurs... bon, certaines femmes qui ont accès, 18 ans et moins, celles
qui habitent chez leurs parents, l'aide sociale. Donc, on dirait que... on
avait l'impression que c'était complexe, à ses yeux, à qui véritablement
s'adresserait cette nouvelle mesure.
Mme Ghazal : Oui. Bien, en
fait, je ne m'explique pas pourquoi est-ce qu'elle trouve ça compliqué. Elle a
déposé un plan pour rendre l'avortement plus accessible, et ça a été salué,
notamment par la Fédération des femmes du Québec, qui aurait voulu être ici,
mais, pour des enjeux d'horaire, n'ont pas pu être ici. Donc, ça a été salué.
Nous-mêmes, on l'a salué, mais il manquait un gros, gros, gros morceau, c'était
de rendre la contraception gratuite.
Et ce que j'ai senti de la part de la
ministre, c'est qu'elle voulait aider les femmes qui en ont vraiment besoin.
Mais il y a aussi des études qui démontrent que, quand tu essaies de trop y
aller de façon chirurgicale, ça amène... ça engendre des coûts administratifs
pour vérifier qui a droit, qui n'a pas droit. Parce que, même si on a des
assurances, ça a été mentionné tantôt, il y a quand même une franchise qu'il
faut payer, ce n'est pas tous les frais, ce n'est pas 100 % des frais qui
sont payés. Donc, ça reste, même quand on a une assurance... ça reste une
barrière à l'accès à la contraception. Puis moi, je lui donnais l'exemple de la
Colombie-Britannique, qui l'a fait depuis 2023, et eux, ce n'est pas un estimé,
ce n'est pas une étude de combien, dans le futur, on va faire des économies,
c'est déjà à coût nul depuis la deuxième année, puis on estime, pour la
quatrième année, à 27 millions de dollars d'économies. Je veux dire,
n'importe quel projet économique, d'investissement ne rapporterait pas aussi
rapidement de l'argent. Évidemment, l'objectif, ce n'est pas juste ça, mais si
la barrière pour la ministre puis pour le gouvernement, de mettre la
contraception gratuite, c'est le coût pour l'État, bien là, les chiffres le
démontrent, que ce n'est pas une barrière du tout, au contraire, l'avortement
et les conséquences de pas avoir la contraception gratuite coûtent cher à
l'État. Donc, s'ils veulent faire des économies, ils devraient rendre la
contraception gratuite.
Journaliste : Et je rebondis
sur... vous avez évoqué la Colombie-Britannique. Je vous entends, dans votre
discours, beaucoup... insister un peu sur cette... On aime ça, être les
premiers, dans ce cas-ci, on ne l'est pas...
Mme Ghazal : Non, on a du
retard...
Journaliste
: ...auquel
pourrait être sensible le gouvernement de la CAQ.
Mme Ghazal : Bien là, malheureusement,
il est trop tard parce qu'on est déjà en retard, il y a déjà trois autres
provinces qui le font. Mais c'est même le premier ministre qui l'a évoqué. Je
ne l'ai même pas dit puis j'ai senti que c'est venu comme le chercher. On est
en retard au Québec, bien, on est d'accord. Qu'est-ce qu'on attend? Il ne faut
pas... Si on est en retard, bien, il faut le faire rapidement. Maintenant, tout
est là. Les professionnels de la santé le disent, économiquement, c'est bon. Le
projet de loi est prêt, il n'attend que l'aval du gouvernement.
Journaliste : Et mon collègue
a évoqué 80 millions. Je vous ai déjà entendu parler de 70. On a une
fourchette un peu... Aujourd'hui, là, si je vous demande l'évaluation de ce...
Mme Ghazal : Bien, nous, l'évaluation
qu'on a faite, c'était en prévision, parce que ce n'est pas la première fois
qu'on parle de ça à Québec Solidaire, c'était en prévision de notre plateforme
électorale en 2022. Donc, c'est sûr qu'il va falloir faire une mise à jour.
Nous, l'économie, c'est 70 par année, avec un coût de 50 millions, pardon,
70 millions, 50 millions. Donc, on ferait des économies. Cela dit, il
faudrait mettre ces chiffres-là à jour. C'est quelque chose qu'on va faire si
le gouvernement ne va pas de l'avant pour la prochaine campagne électorale,
c'est sûr.
Journaliste : Merci.
Mme Ghazal : Merci.
La Modératrice : Est ce qu'il
y a d'autres questions? Merci beaucoup.
Mme Ghazal : Merci. Merci
beaucoup.
(Fin à 11 h 59)